ISSN 1725-2563

doi:10.3000/17252563.L_2009.225.fra

Journal officiel

de l'Union européenne

L 225

European flag  

Édition de langue française

Législation

52e année
27 août 2009


Sommaire

 

II   Actes pris en application des traités CE/Euratom dont la publication n’est pas obligatoire

page

 

 

DÉCISIONS

 

 

Commission

 

 

2009/608/CE

 

*

Décision de la Commission du 24 avril 2007 concernant la mesure d’aide mise à exécution par la Belgique en faveur d’InterFerryBoats [C 46/05 (ex NN 9/04 et ex N 55/05)] [notifiée sous le numéro C(2007) 1180]  ( 1 )

1

 

 

2009/609/CE

 

*

Décision de la Commission du 4 juin 2008 concernant les aides d’État C 41/05 accordées par la Hongrie dans le cadre d’accords d’achat d’électricité [notifiée sous le numéro C(2008) 2223]  ( 1 )

53

 

 

2009/610/CE

 

*

Décision de la Commission du 2 juillet 2008 concernant les aides C 16/04 (ex NN 29/04, CP 71/02 et CP 133/05) octroyées par la Grèce à l’entreprise Hellenic Shipyards SA [notifiée sous le numéro C(2008) 3118]  ( 1 )

104

 

 

2009/611/CE

 

*

Décision de la Commission du 8 juillet 2008 concernant les mesures C 58/02 (ex N 118/02) que la France a mises à execution en faveur de la Société Nationale Maritime Corse-Méditerranée (SNCM) [notifiée sous le numéro C(2008) 3182]  ( 1 )

180

 


 

(1)   Texte présentant de l'intérêt pour l'EEE

FR

Les actes dont les titres sont imprimés en caractères maigres sont des actes de gestion courante pris dans le cadre de la politique agricole et ayant généralement une durée de validité limitée.

Les actes dont les titres sont imprimés en caractères gras et précédés d'un astérisque sont tous les autres actes.


II Actes pris en application des traités CE/Euratom dont la publication n’est pas obligatoire

DÉCISIONS

Commission

27.8.2009   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

L 225/1


DÉCISION DE LA COMMISSION

du 24 avril 2007

concernant la mesure d’aide mise à exécution par la Belgique en faveur d’InterFerryBoats [C 46/05 (ex NN 9/04 et ex N 55/05)]

[notifiée sous le numéro C(2007) 1180]

(Les textes en langues française et néerlandaise sont les seuls faisant foi.)

(Texte présentant de l'intérêt pour l'EEE)

(2009/608/CE)

LA COMMISSION DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES,

vu le traité instituant la Communauté européenne, et notamment son article 88, paragraphe 2, premier alinéa,

vu l’accord sur l’Espace économique européen, et notamment son article 62, paragraphe 1, point a),

après avoir invité les intéressés à présenter leurs observations conformément aux dits articles,

considérant ce qui suit:

1.   PROCEDURE

1.1.   Cas NN 9/04 et N 55/05

(1)

Par lettre du 12 août 2003, enregistrée à la Commission européenne le 20 août 2003 (TREN/A(03)27718), les autorités belges ont notifié des mesures de sauvetage et de restructuration, accordées par la Société Nationale des Chemins de Fer Belges (SNCB) à sa filiale Inter Ferry Boats (IFB) par un contrat cadre conclu le 7 avril 2003, au titre de l’article 88, paragraphe 3, du traité.

(2)

Le 13 octobre 2003 (D(03)17546), la Commission a invité les autorités belges à fournir à la Commission des renseignements complémentaires. Une réunion bilatérale à ce sujet avec les autorités belges a eu lieu le 12 décembre 2003. Lors de cette réunion, le plan de restructuration pour IFB a été remis à la Commission.

(3)

Les autorités belges ont répondu à la lettre de la Commission par courrier du 7 janvier 2004, enregistré à la Commission le 13 janvier 2004 (TREN/A(04)10708). De ce courrier, il ressort que les mesures notifiées ont été octroyées. Par conséquent, le cas a été enregistré sous le numéro NN 9/04. Une deuxième réunion a eu lieu le 30 avril 2004. Les autorités belges ont envoyé des documents supplémentaires, demandés par la Commission lors de cette réunion, par lettre du 15 juin 2004, enregistrée à la Commission le 21 juin 2004 (TREN/A(04)23691).

(4)

Par lettre du 26 janvier 2005 (D(05)100339), la Commission a invité les autorités belges à fournir des renseignements complémentaires, qui ont été transmis par lettre du 25 mars 2005, enregistrée à la Commission le 30 mars 2005 (TREN/A(05)7712).

(5)

Par lettre du 28 janvier 2005 (SG(2005)A1133), les autorités belges ont fait part à la Commission de l’intention de la SNCB de procéder à une augmentation de capital supplémentaire d'IFB, non prévue dans les accords notifiés le 12 août 2003. La Commission a enregistré ce cas comme notification sous le numéro N 55/2005.

(6)

Par lettre du 29 mars 2005 (D(05)106199), la Commission a invité les autorités belges à fournir des renseignements complémentaires, qui ont été transmis par lettre du 28 avril 2005, enregistrée à la Commission le 3 mai 2005 (SG(2005)A(05)4155).

(7)

Par lettre du 31 mai 2005 (D(05)111096), la Commission a invité les autorités belges à fournir des renseignements complémentaires, qui ont été transmis par lettre du 30 juin 2005, enregistrée à la Commission le 1 juillet 2005 (TREN/A(05)16598).

(8)

Le 16 septembre 2005, une réunion de travail a eu lieu entre la Commission et les autorités belges. Lors de cette réunion, la Commission a demandé aux autorités belges de transmettre des informations complémentaires, qui ont été transmises par courriel du 21 octobre 2005, enregistré à la Commission le 24 octobre 2005 (TREN/A(05)27067).

1.2.   Cas C 46/05

(9)

Par lettre du 7 décembre 2005, la Commission a informé la Belgique de sa décision d’ouvrir la procédure prévue à l’article 88, paragraphe 2, du traité à l’encontre des mesures en objet.

(10)

La décision de la Commission d’ouvrir la procédure a été publiée au Journal officiel de l’Union européenne  (1). La Commission a invité les parties intéressées à présenter leurs observations sur la mesure en cause. La Commission n’a pas reçu d’observations à ce sujet de la part des tiers intéressés.

(11)

La Belgique a répondu à la lettre d'ouverture de procédure par lettre du 14 février 2006, enregistrée à la Commission le 15 février 2006 sous le numéro TREN/A/13934. Par la même lettre du 14 février 2006, elle a retiré sa notification du 28 janvier 2005.

(12)

Des réunions de travail entre les services de la Commission et les autorités belges ont eu lieu le 1er juin 2006 et le 25 juillet 2006. Les autorités belges ont transmis des informations complémentaires à la Commission par lettre du 29 juin 2006, enregistrée par la Commission le même jour sous le numéro TREN/A/25806, par lettre du 20 septembre 2006, enregistrée le même jour sous le numéro TREN/A/32665, et par courriels du 16 et 21 novembre 2006, enregistrés sous les numéros TREN/A/37638 et TREN/A/37981.

(13)

Par lettre du 30 novembre 2006, reçue à la Commission le 5 décembre 2006 et enregistrée sous le numéro TREN/A/39219, les autorités belges ont transmis une lettre de Monsieur Karel Vinck qui concerne le présent dossier. Les autorités belges ont envoyé cette lettre pour étayer leur thèse d'après laquelle les décisions de la SNCB dans le présent dossier n'étaient pas imputables à la Belgique, mais uniquement à la SNCB.

(14)

Par lettre du 5 février 2007 (D(07)302095), la Commission a invité les autorités belges à fournir des informations complémentaires. La Belgique a transmis ces informations par lettre du 6 février 2007, enregistrée à la Commission le 7 février 2007 (A(07)24246), par lettre du 8 février 2007, enregistrée à la Commission le 9 février 2007 (A(07)23613), par lettre du 13 février 2007, enregistrée à la Commission le 15 février 2007 (A(07)24201), et par lettre du 15 février 2007, enregistrée à la Commission le 16 février 2007 (A(07)24362).

(15)

Par lettre du 15 mars 2007 (D(07)306248), et pendant une réunion de travail qui s'est tenue le 16 mars 2007, la Commission a invité les autorités belges à fournir des informations complémentaires. La Belgique a transmis ces informations par lettre du 30 mars 2007, enregistrée à la Commission le même jour (A(07)28411).

2.   DESCRIPTION DETAILLEE DES MESURES DE SAUVETAGE ET DE RESTRUCTURATION

2.1.   Les parties du contrat cadre concernant le sauvetage et la restructuration d’IFB

2.1.1.   IFB

2.1.1.1.   Description de la société

(16)

IFB est une société anonyme de droit belge. La SNCB détient 89,03 % du capital social. Les autres actionnaires sont CNC Transports, une filiale à 93,8 % de la SNCF (7,41 %), ICF (2,08 %), et EWS (English Welsh and Scottish Railway – 1,22 %).

(17)

IFB a été créée le 1er Avril 1998 par la fusion des trois sociétés suivantes: Ferry Boats SA, Interferry SA et le département «rail» de Edmond Depaire Ltd. Comme la Belgique l'a démontré par un extrait du registre des sociétés, cette fusion était une fusion par absorption, au cours de laquelle Ferry Boats SA a absorbé Interferry SA; par la suite, le département rail d'Edmond Depaire SA a été apporté à l'entité fusionnée. IFB continue donc la personnalité juridique de Ferry Boats, qui a été créée en 1923.

(18)

IFB poursuit surtout deux types d’activités, la logistique pour le transport rail et le transport combiné (IFB Logistics) et l’exploitation des terminaux continentaux pour le transport combiné (IFB Terminals). Les activités de l'entreprise ont été décrites en détail dans la lettre d'ouverture de la procédure formelle d'examen, points 16 à 29.

(19)

À ces activités, il faut ajouter les participations et filiales qu’IFB détient ou détenait en Belgique et à l’étranger dans des sociétés exploitant des terminaux maritimes et continentaux ainsi que dans des sociétés de transport. Ces participations et filiales ont été décrites en détail dans les points 30 et suivants de la lettre d’ouverture de la procédure formelle d’examen. La Belgique a informé la Commission que certaines informations factuelles contenues dans la lettre d'ouverture n'étaient soit pas entièrement correctes, soit ont évolué depuis. Les changements factuels intervenus depuis la lettre d'ouverture de la procédure sont décrits aux points suivants. Pour le reste; il est renvoyé à la décision d'ouverture (points 30 à 49).

(20)

Participations d'IFB dans des terminaux en Belgique. IFB s'est retirée du terminal de Zeebrugge. Dans le point 39 de la lettre d'ouverture, il est écrit qu'ellea vendu ses parts au groupement d'intérêt OCHZ. En réalité, IFB a vendu ses parts à Hesse-Noord Natie, avec qui elle exploitait conjointement ce terminal.

(21)

Au point 41 de la lettre d'ouverture, il est écrit qu'IFB détient 16,76 % de la société Dry Port Mouscron-Lille. La Belgique a informé la Commission que, suite à une augmentation de capital de la société le 29 juin 2006, à laquelle IFB n'a pas participé, ainsi qu'à l'entrée d'un investisseur privé, DELCATRANS, dans le capital de la société, sa participation à été réduite à 11,07 %.

(22)

Participation d'IFB dans des terminaux en France. IFB a vendu sa participation de 30 % dans la société Nord France Terminal International OU (ci-après NFTI-ou) en automne 2006 à CMA-CGM. Suite à cette transaction, IFB ne détient plus en France qu'une participation de 2 % dans la société CNC transports, rebaptisée depuis lors Naviland Cargo.

2.1.1.2.   Marchés concernés et parts de marchés d’IFB

(23)

La Commission a établi dans la décision d'ouverture (points 50 à 54) que pour les activités d'IFB Logistique, il fallait distinguer deux marchés de produit différents, à savoir les activités d'expédition et les activités de logistique. Ces marchés ont été définis comme des marchés nationaux, et la part de marché d’IFB Logistics a été calculée comme étant entre 2 % et 5 %.

(24)

En ce qui concerne le marché des terminaux, la décision d'ouverture (points 55 à 59) a procédé à une distinction entre les terminaux continentaux et les terminaux maritimes. IFB a entre-temps désinvesti toutes ses participations dans les terminaux maritimes. Ni les parties intéressés, ni la Belgique n'ont contesté la définition contenue dans la décision d'ouverture.

(25)

Le marché du fret ferroviaire est un marché annexe de ces deux marchés. Depuis 2003, il a été ouvert pour le transport de fret international à partir de la Belgique et à destination de la Belgique, comme prévu par la directive 91/440/CEE du Conseil du 29 juillet 1991 relative au développement de chemins de fer communautaires (2). Cette ouverture du fret international a été complétée par l'ouverture du marché de fret national le 1er janvier 2007, qui est prévue par la directive 91/440/CEE, et qui a été mise en œuvre en Belgique par un décret royal du 13 décembre 2005.

2.1.2.   La SNCB

(26)

La SNCB a été créée par la loi belge du 23 juillet 1926 créant la Société Nationale des Chemins de Fer Belges (3). Depuis le 14 octobre 1992 (4), elle est une entreprise publique autonome et une société anonyme de droit public (5).

(27)

L’État belge a réformé la structure de la SNCB au 1er janvier 2005. Celle-ci a été divisée en trois sociétés distinctes, à savoir:

la SNCB Holding, une société «holding» qui détient des participations a 100 % dans les deux autres sociétés, qui sont:

Infrabel, le gestionnaire de l’infrastructure ferroviaire, et

la nouvelle SNCB, l’entreprise ferroviaire en charge des services de transport.

L'État belge détient 100 % des parts sociales de la SNCB Holding.

(28)

Les organes de gestion de la SNCB sont le Conseil d’administration, le Comité de direction et l’Administrateur délégué. Le Conseil d’administration est composé de 10 membres, y compris l’Administrateur délégué. Les administrateurs sont nommés par le Roi, par arrêté délibéré en Conseil des Ministres.

(29)

Le gouvernement belge est représenté dans le Conseil d'administration par un Commissaire du Gouvernement. Le Commissaire du Gouvernement peut saisir les autorités belges aux fins d’annuler une décision du conseil d’administration portant sur un sujet étranger à l’accomplissement des missions de service public si cette décision «porte […] préjudice à la mise en œuvre des tâches de service public» (article 23, alinéa 2 de la loi).

2.2.   Les difficultés financières rencontrées par IFB en 2001 et 2002

(30)

Il y a lieu d’analyser d’abord les raisons à l'origine des difficultés financières, et de décrire ensuite la réaction des dirigeants d’IFB et de la SNCB.

2.2.1.   Les difficultés financières

(31)

La principale raison des difficultés d’IFB réside dans les difficultés financières rencontrées par ses participations en France, toutes situées dans le port de Dunkerque, en 2001 et 2002. Les difficultés financières concernaient aussi les activités «IFB Logistics» et «IFB Terminals», qui réalisaient des pertes en 2002.

(32)

Comme l'indique le schéma 1, le montant total des pertes d'IFB de l'exercice 2002 s’élevait à 110 millions d'EUR. 12,2 millions d'EUR concernaient des pertes d’exploitation avant adaptation des comptes au niveau d’IFB Logistics (4,7 millions d'EUR) et d’IFB Terminals (7,5 millions d'EUR). À cela s'ajoute une perte d’exploitation de 1,2 million d'EUR au niveau de la participation dans OCHZ. Ces pertes, d’un montant total de 13,4 millions d'EUR, constituaient 12 % du total des pertes. Le solde des pertes en 2002, soit 96,6 millions d'EUR, provenait de réductions de valeur et provisions dans le cadre de l'adaptation des comptes nécessaires suite aux problèmes que la société avait rencontrés en France et en Belgique. 75 % de ces réductions de valeur et provisions proviennent des participations d’IFB. Sur cette fraction, 76 % concernent les participations en France.

Schéma 1

Ventilation des pertes en 2002

(Millions d'EUR)

Image

2.2.2.   La réaction de l’encadrement d’IFB et de la SNCB

(33)

Depuis fin 2000, IFB n’a plus payé les factures que la SNCB lui avait envoyées pour ses prestations de service de train. En 2001 et surtout en 2002, IFB a continué cette pratique, que la SNCB a tolérée. Ainsi, IFB se trouvait fin janvier 2003 avec des factures impayées de la SNCB d’une valeur totale de 63 millions d'EUR. Le non-paiement de ces factures explique pourquoi IFB pouvait survivre malgré les graves difficultés financières.

(34)

Le 21 mai 2002, le conseil d'administration d'IFB a constaté que suite aux pertes subies depuis fin 2000, les fonds propres ont diminué pour atteindre un montant inférieur à la moitié du capital social. Comme le prévoit l'article 633 du Code des Sociétés belge, IFB a convoqué une assemblée générale extraordinaire des actionnaires d'IFB.

(35)

Au cours de cette assemblée, la SNCB, en tant qu'actionnaire majoritaire, a présenté son engagement à soutenir IFB pour les dépenses opérationnelles au moyen d'une avance de trésorerie de 2,5 millions d'EUR. Cet engagement de la SNCB a été approuvé par le conseil d'administration de la SNCB Sur base de cet engagement, les actionnaires ont décidé de poursuivre provisoirement les activités d'IFB, et ont demandé au conseil d'administration d'IFB d'élaborer un plan de restructuration complet incluant les filiales et la gestion des terminaux.

(36)

Le conseil d'administration de la SNCB a, lors de sa réunion du 19 juillet 2002, fait le point sur la situation de sa filiale IFB. L'administrateur délégué d'IFB a présenté la situation du groupe; ensuite, le conseil d'administration a pris la décision suivante: «Le Conseil marque son accord sur un apport en espèces de EUR 2,5 millions nécessaire pour assurer les besoins de trésorerie et garantir la continuité d’IFB jusqu’à fin octobre 2002 (ce montant constituerait une avance sur une probable augmentation du capital)».

(37)

Au cours du deuxième semestre 2002, suite à l'approbation par le conseil d'administration, l'avance de trésorerie de 2 500 000 d'EUR a été versée par la SNCB à IFB, selon le calendrier suivant:

6.8.2002: versement d'un montant de 1 000 000 EUR,

17.9.2002: versement d'un montant de 1 000 000 EUR,

30.9.2002: versement d'un montant de 500 000 EUR.

(38)

Cette avance était porteuse d'intérêts à hauteur de 3,1 %; elle a été remboursée intégralement en juillet 2003. Ce remboursement a eu lieu en deux étapes:

le 15 juillet 2003, IFB a remboursé un montant de 1 500 000 EUR sur cette somme, majoré d'intérêts pour un montant de 40 422,04 EUR,

le 23 juillet 2003, le solde de 1 000 000 EUR, majoré d'intérêts pour un montant de 26 883,35 EUR, a été remboursé par IFB à la SNCB.

(39)

Le 19 septembre 2002, l’administrateur délégué d’IFB a chargé deux réviseurs de rédiger un rapport spécial afin d’évaluer la situation financière de l’entreprise. Au vu des conclusions de ce rapport, remis à IFB le 4 décembre 2002 et à la SNCB par la suite, le Conseil d’administration de la SNCB a donné son accord de principe, le 20 décembre 2002, de souscrire une augmentation de capital d'IFB. Le 24 décembre 2002, l’Assemblée Générale extraordinaire des Actionnaires («AGE») d'IFB a également accepté cette proposition.

(40)

La direction d'IFB a élaboré, avec le soutien du consultant McKinsey, un plan de restructuration pour IFB. Ce plan de restructuration, qui est décrit en détail aux points 73 à 86 de la présente décision, a été approuvé par le conseil d'administration d'IFB le 23 mars 2003.

(41)

Par la suite, l’encadrement des deux sociétés (IFB et SNCB) a fixé les détails du sauvetage et de la restructuration d’IFB dans un «contrat cadre concernant la restructuration d’IFB», qui a été signé entre les deux sociétés le 7 avril 2003. Lors d'une deuxième AGE, les actionnaires d’IFB ont marqué leur accord avec la poursuite des activités d’IFB sur la base de ce contrat cadre.

2.3.   Les mesures de sauvetage et de restructuration du «contrat cadre entre la SNCB et IFB concernant la restructuration d’IFB» du 7 avril 2003

(42)

L'article 2 du contrat cadre stipule que l’exécution des mesures agréées entre les parties se fera en deux phases, à savoir une période de sauvetage et une période de restructuration.

2.3.1.   Modalités et conditions d’octroi des mesures de sauvetage

(43)

L'article 3 du contrat cadre prévoit les mesures de sauvetage suivantes:

l’octroi d’une avance récupérable de 5 millions d'EUR,

l’octroi d’une facilité de crédit d’un maximum de 15 millions, et

l’octroi d’un délai de paiement provisoire portant sur les dettes de 63 millions d'EUR d’IFB vis-à-vis de la SNCB

(44)

La durée de ces mesures a été limitée à 12 mois; cependant, elles ont été tacitement prolongées par commun accord des parties jusqu'à la date de l'augmentation de capital.

(45)

Le taux d’intérêt sur l’avance récupérable et les sommes prélevées sur la facilité de crédit est égal au taux d’intérêt de référence appliqué par la Commission pour l’aide d’État. Les intérêts seront capitalisés, et leur paiement aura lieu au même moment que le paiement des créances dues.

(46)

Les dettes de 63 millions d'EUR font l’objet d’un intérêt de retard conventionnel de 5,4 %. Les intérêts seront capitalisés et payé au moment du paiement de la créance principale.

(47)

Les intérêts dus par IFB à la SNCB pour les dettes et la facilité de crédit étaient de 2,2 millions d'EUR en 2002, de 3,9 millions d'EUR en 2003, de 4,7 millions d'EUR en 2004, de 5,2 millions d'EUR en 2005, et seraient de 4,4 millions d'EUR en 2006.

(48)

L'article 7 du contrat prévoit qu'IFB renonce, vis-à-vis de la SNCB, à la prescription de ses dettes.

(49)

L’ensemble de ces mesures a été mis en œuvre dès la signature du contrat cadre, à savoir le 7 avril 2003. IFB n’a cependant pas fait usage de l’avance récupérable.

2.3.2.   Modalités et conditions d’octroi des mesures de restructuration

(50)

L’article 4 du contrat cadre, intitulé «modalités d’octroi du volet“mesures de restructuration”», est rédigé comme suit:

«Les Parties confirment leur intention de mettre à exécution les mesures suivantes pour autant qu’elles soient conformes à un plan de restructuration approuvé par leurs deux Conseils d’administration, par l’État belge et si nécessaire par la CE, et sous réserve d’approbation par les actionnaires d’IFB:

La conversion en capital de l’avance récupérable d’un montant de 5 Mio EUR,

La conversion en capital de la partie de facilité de crédit prélevée pour un montant maximum de 15 Mio EUR […],

La conversion en capital des dettes de […] 63 Mio EUR,

Éventuellement et à condition que les deux parties soient d’accord à ce sujet, une augmentation de capital supplémentaire […]».

(51)

La mise en œuvre de cette augmentation de capital est soumise à une condition suspensive, prévue à l'article 5 du contrat cadre, à savoir son approbation par la Commission au regard des règles en matière d'aides d'État. L'article 5 est rédigé comme suit:

«Les engagements contractés par la SNCB […] sont soumis à la condition suspensive suivante. Les Parties demanderont à l'État belge de procéder au plus vite à la communication du présent contrat cadre à la CE. Les parties demanderont également à l'État belge, si la CE devait estimer à juste titre dans le cadre de cette communication que [le contrat cadre] comprend l'octroi d'une aide d'État (telle que visée à l'article 87 du Traité CE), de notifier le [contrat cadre] en application de l'article 88 alinéa 3 du Traité CE. Afin de permettre à la CE d'adopter une position, [le contrat cadre] ne sera de toute façon pas mis à exécution dans un délai de 15 jours ouvrables à compter du jour de la notification à la CE. Si [le contrat cadre] devait à juste titre être qualifié d'aide d'État globale par la CE, il ne sera pas mis à exécution avant que la CE ait approuvé explicitement ou implicitement l'aide concernée et, le cas échéant, dans les limites et aux conditions exposées dans la disposition d'approbation.

Si la CE devait qualifier partiellement ou totalement [le contrat cadre] d'aide d'État et dans l'hypothèse et pour autant que cette aide soit déclarée incompatible avec le marché commun, alors les Parties discuteront en toute bonne foi de la faisabilité des éventuelles mesures supplémentaires demandées vis-à-vis d'IFB, mais sans obligation de mettre ces mesures supplémentaires ou adaptées à exécution si les circonstances dans lesquelles l'aide doit être apportée sont considérées comme absolument injustifiées.»

(52)

Le droit civil belge prévoit que, une fois la condition suspensive réalisée, le contrat est valable de manière rétroactive.

(53)

Dans leur réponse à la lettre d'ouverture, les autorités belges ont informé la Commission que l'augmentation de capital se réalisera exactement comme convenu entre les parties dans le contrat cadre, si la Commission l'approuve. Elle sera de 95,3 millions d'EUR, somme qui est composée comme suit:

(EUR)

Conversion en capital de la facilité de crédit

15 millions

Conversion en capital des dettes d'IFB vis-à-vis de la SNCB

63 millions

Conversion en capital des intérêts accumulés pour la facilité de crédit et les dettes dans les années 2002 à 2006 (pour 2006 uniquement en partie)

17,3 millions

Total

95,3 millions

(54)

Les autorités belges ont informé la Commission que l'augmentation ne porterait pas sur la totalité des intérêts accumulés en 2006, afin d'assurer que le ratio dettes/fond propres d'IFB corresponde au taux moyen de ses concurrents, et ne soit pas supérieur. Elle ne comporte pas non plus l'avance récupérable, car IFB n'a pas fait usage de cette facilité.

(55)

Dans leur réponse à la lettre d'ouverture, les autorités belges ont également informé la Commission qu'elles retirent la notification du 28 janvier 2005, par laquelle elles avaient informé la Commission de l'intention de la SNCB et d'IFB de procéder, en plus de ce qui a été prévu dans l'article 4 du contrat cadre, à une augmentation de capital additionnelle de 5 millions d'EUR par l’apport en nature de la participation à 47 % de la SNCB dans la société TRW (6).

(56)

Le plan de restructuration prévu à l'article 4 a été transmis à la Commission lors d'une réunion avec les autorités belges le 12 décembre 2003. Sa mise en œuvre a commencé dès 2003, et s'est achevée en début 2005.

(57)

Le plan de restructuration se compose de deux parties, qui correspondent à deux stratégies différentes concernant d'un côté les filiales françaises du groupe et de l'autre côté les activités belges d'IFB. La stratégie choisie pour la France est le désinvestissement complet des participations, tandis que la stratégie choisie pour la Belgique est la restructuration de la société en vue de la continuation de son exploitation.

2.3.2.1.   Le désinvestissement des filiales exploitant des terminaux en France

(58)

Comme expliqué dans la présente décision et, plus en détail, aux points 30 et suivants de la lettre d'ouverture, IFB a poursuivi une stratégie de désinvestissement pour ses filiales françaises. Cette politique a été achevée par la vente de la participation dans NFTI-OU en novembre 2006.

(59)

Le coût total du désinvestissement des filiales d'IFB en France s'est élevé à 39,1 millions d'EUR. Le tableau suivant reprend la répartition de ce coût par rapport aux cinq filiales. Aux points suivants, le besoin de financement et les chiffres concernant les différentes sociétés sont expliquées plus en détail.

Desinvestissement des participations francaises: sommaire des couts encourus

(en M EUR)

 

ACIMAR

NFTI-ou

IFB FRANCE

DPD

ENSEMBLE DES PARTICIPATIONS

Moins value sur créances

3,9

 

0,8

2,8

7,5

Moins value sur participation

 

16,7

0,1

5,1

22,0

Augmentation du capital

 

1,7

 

 

1,7

Coû total

3,9

19,5

0,8

7,9

31,1

Intérêts échus au 30.6.2006

+7,7

Fluctuation compte courant 09.2002-12.2002

+0,5

Plus-value sur vente SSTD

–0,2

Total du coût du désinvestissement des participations françaises

39,1

a)    Besoin en financement

(60)

Le tableau a été établi sur la base des états comptables du 27 septembre 2002. Il distingue les montants suivants:

un montant de 31,1 millions d'EUR correspondant à des moins-values sur créances, des moins-values sur participations ainsi que l’augmentation de capital de NFTI-ou à concurrence d’un montant de 1,7 million d'EUR,

un montant de 7,7 millions d'EUR d’intérêts échus correspondant au montant d’intérêts accumulés entre fin 2002 et le 30 juin 2006 sur les parts de l'avance récupérable et le délai de paiement qui servaient à financer le désinvestissement,

un montant de – 0,2 million d'EUR correspondant à la plus-value sur la vente de SSTD,

un montant de 0,5 million d'EUR correspondant à la différence des états comptables au 27 septembre 2002 d'une part et le montant des moins-values réelles comptables au 31 décembre 2002 d'autre part.

(61)

Ce dernier montant de 0,5 million d'EUR correspond au flux de fonds entre les participations françaises d’IFB et IFB entre le 27 septembre 2002 et fin 2002 et devait être repris au tableau afin de pouvoir réconcilier les moins-values réelles comptables à la fin de 2002 avec le besoin total calculé sur la base de la situation au 27 septembre 2002. Pour ce qui concerne le besoin de financement d'IFB, il n'y a pas lieu de prendre en compte ce montant; le besoin de financement d'IFB relatif au désinvestissement des participations françaises est donc de 38,6 millions d'EUR.

(62)

Le besoin de financement pour le désinvestissement des participations d'IFB en France a été financé par la SNCB. En effet, IFB a utilisé 30,9 millions d'EUR de sa marge de manœuvre obtenue par l'octroi de la facilité de crédit provisoire de 15 millions d'EUR et par le non-recouvrement provisoire des créances existantes de l'ordre de 63 millions d'EUR pour financer le désinvestissement. 7,7 millions d'EUR du financement correspondent aux intérêts dus pour cette somme en vertu du contrat cadre du 7 avril 2003, qui prévoit que les intérêts ne sont payés qu'au moment du paiement de la créance principale (ou convertis en capital en même temps que la créance principale).

b)    Acimar

(63)

La société Acimar réalisait la totalité de son chiffre d’affaires par un contrat de transport pour la société Arcelor. Ce contrat expirait le 31 décembre 2005 ; au moment de l’audit d’IFB dans la deuxième moitié de l’année 2002, le contrat générait des pertes annuelles […] (7). Puisque des tentatives de renégociation de ce contrat avec Arcelor avaient échoué, la SNCB a décidé de mettre en faillite Acimar, et de demander un redressement judiciaire. IFB avait des créances vis-à-vis d’Acimar d’une valeur de 3,9 millions d'EUR non récupérables, qui constituent le coût du désinvestissement.

c)    NFTI-ou

(64)

En ce qui concerne NFTI-ou, qui était une société contrôlée conjointement par IFB et le Port Autonome de Dunkerque, exploitant des terminaux dans le port de Dunkerque, la SNCB a opté pour le désinvestissement par la vente de sa participation.

(65)

La participation d’IFB dans NFTI-ou entraînait l'obligation, pour IFB, par une lettre de confort, de financer une quote-part des pertes correspondant à sa participation dans la société. De plus, IFB s’était portée caution pour un emprunt bancaire de la société auprès d' […], qui avait une valeur de 2,9 millions d'EUR.

(66)

Afin de désinvestir sa participation dans la société. IFB a négocié avec le Port autonome de Dunkerque la levée des engagements issus de la lettre de confort. En contrepartie, IFB a participé à une augmentation de capital de NFTI-ou, devenue nécessaire pour permettre la continuation des activités de la société, à hauteur de 1,7 million d'EUR, et il a cédé une partie de ses parts sociales au Port Autonome de Dunkerque pour un prix symbolique d’un euro. Suite à cette opération, IFB ne détenait plus que 30 % des parts sociales.

(67)

IFB et le Port Autonome de Dunkerque ont ensuite cherché et trouvé un repreneur, CMA-CGM, pour les parts d’IFB. […]. Prenant en considération le prix de vente, le coût total du désinvestissement pour IFB était de 18,5 millions d'EUR, dont 1,7 million d'EUR pour l’augmentation de capital et 16,7 millions d'EUR pour les moins-values réalisées sur la participation.

d)    IFB France

(68)

IFB France, devenu par la suite AGEP, a été cédé à NFTI-ou […] ce qui représentait une moins-value de 0,1 million d'EUR. Puisque IFB a désinvesti en même temps NFTI-ou, la cession à NFTI-ou a pour résultat le désinvestissement par vente d’IFB France. Avant la vente, IFB était obligé d’abandonner ses créances sur IFB France d’une valeur de 0,8 million d'EUR. Le coût total du désinvestissement d'IFB France a donc été de 0,9 million d'EUR.

e)    Dry Port Dunkerque

(69)

La participation d’IFB dans le Dry Port Dunkerque présentait la même particularité que sa participation dans NFTI-ou : une lettre de confort obligeait IFB à combler les pertes opérationnelles de la société.

(70)

IFB a désinvesti cette participation par une liquidation, combinée avec la vente d’une partie des actifs, à savoir la participation de 8,6 % dans NFTI-ou détenue par Dry Port Dunkerque. Ici, contrairement à la situation dans NFTI-ou, les partenaires d’IFB ne pouvaient pas exiger la continuation de la société.

(71)

IFB ne pouvait pas réaliser ses créances sur Dry Port Dunkerque (2,8 millions d'EUR), et devait accepter des moins-values sur sa participation (5,1 millions d'EUR). Le coût total de la liquidation était donc de 7,9 millions d'EUR.

f)    SSTD

(72)

La société SSTD est une société rentable. Suite à la perte de son client principal et en vue de la décision stratégique de quitter le marché français, IFB a décidé de la vendre début 2005, ce qui a généré un léger bénéfice.

2.3.2.2.   Le plan de restructuration pour la continuation des activités belges

(73)

IFB a élaboré avec le consultant McKinsey un plan de restructuration pour les activités belges d'IFB. Ce plan de restructuration prévoit deux parties :

restructuration de l’activité «IFB Logistics»,

restructuration de l’activité «IFB Terminals».

L'idée essentielle de ce plan est de limiter les activités d'IFB à son core business, à savoir les activités de logistique et d'exploitation de terminaux en Belgique, et de désinvestir et vendre les activités qui ne sont pas nécessaires pour la viabilité économique du core business. Il y a lieu de décrire les résultats financiers de la restructuration, ainsi que les différentes mesures prises pour aboutir à ces résultats (mesures générales, mesures par rapport à l'activité logistique, mesures par rapport à l'activité terminal, investissements).

a)    Résultats financiers de la restructuration

(74)

Après corrections pour amortissements, réductions de valeur et provisions pour risques et charges («cash flow opérationnel»), le plan de restructuration prévoyait les résultats financiers suivants, qui ont largement été confirmés par les résultats obtenus:

(en M EUR)

 

2004

2005

2006 (1er semestre)

Total pendant la période de restructuration

Prévision cash flow opérationnel

3,9

4,3

2,35

10,550

Résultat cash flow opérationnel

4,875

3,079

2,475

10,429

(75)

Les prévisions pour les résultats financiers d'IFB étaient basées essentiellement sur les éléments suivants, dont IFB avait connaissance au moment de l'adoption du plan de restructuration:

centralisation du trafic «Railbarge» sur un terminal, et augmentation sensible des volumes. La centralisation du trafic «Railbarge» permettait une optimalisation du modèle opérationnel, et une augmentation des revenus, car des manutentions effectuées jusque-là par des tiers ont pu être intégrées dans le groupe. De plus, IFB avait pu gagner un nouveau client important, CSAV, qui envisageait de passer des commandes pour un volume de 50 000 EVP dès 2004,

réduction significative du personnel, ainsi que des coûts d'entretien. Ces mesures sont décrites de manière plus détaillée aux points 78 à 83 de la présente décision,

un nouvel accord concernant l'exploitation du terminal ferroviaire de Cirkeldyck, qui permettait de prévoir des synergies importantes avec le terminal limitrophe MSC Home Terminal,

une croissance du volume du terminal de Muizen, suite à un nouveau contrat passé avec Unilog,

des prévisions générales très positives pour le marché du transport intermodal, qui a connu une croissance spectaculaire depuis le début des années 2000.

b)    Mesures prises pour la restructuration

(76)

La conclusion d’une nouvelle convention collective de travail au niveau de l’entreprise et la modification du règlement de travail ont permis d’atteindre un taux d’activité plus élevé (le nombre de jours à prester par an a été augmenté de 13 jours à partir du 1er janvier 2004) et à des coûts inférieurs (la rémunération pour le travail de week-end et le travail d’équipe a été réduite à partir du 1er octobre 2003).

(77)

Les services administratifs et commerciaux ont été centralisés à Berchem, ce qui a permis de fermer l’établissement de Gand et de réduire la capacité de celui de Zeebrugge.

(78)

Ces mesures ont contribué à limiter le personnel nécessaire pour réduire les frais généraux d'IFB d’environ 2,55 millions d'EUR par an (8) au total. En effet, IFB a réduit son personnel de 210 ETP (9) en septembre 2002 à 175 ETP au début de 2006, ce qui représente une diminution de 17 %. Le détail de ces réductions peut être présenté comme suit:

pour les terminaux exploités directement (hors filiales), le personnel a diminué de 110 ETP en septembre 2002 à 96 ETP au début de 2006, représentant une diminution de 13 %,

en ce qui concerne l'activité logistique d'IFB, le personnel a diminué de 60 ETP en septembre 2002 à 49 ETP au début de 2006, soit une diminution de 19 %,

le personnel affecté à des fonctions «marketing et vente» et aux autres fonctions de support centrales (finance, ressources humaines, etc.) a diminué de 40 ETP en septembre 2002 à 31 ETP au début de 2006, soit une diminution de 23 %.

(79)

Le plan de restructuration prévoyait les neuf mesures suivantes, qui devaient permettre une amélioration de 5,7 millions d'EUR.

Mesures

Bénéfice

1.

Effet de la réduction de la charge salariale

[…]

2.

Consultance et outsourcing

[…]

3.

Réductions de valeur et amortissement exceptionnel

[…]

4.

Cessation des branches non rentables du North European Network

[…]

5.

Perte de volume de trafic conventionnel

[…]

6.

Reprise de provisions entretien wagons

[…]

7.

Croissance de l’intermodal

[…]

8.

Révision du contrat Railbarge (augmentation des prix et reengineering produit)

[…]

9.

Augmentation des commissions des représentations (agent)

[…]

10.

Réduction des frais généraux

[…]

(80)

Dans la réalisation du plan de restructuration, qui a été terminé fin 2004, deux mesures supplémentaires ont été prises:

pour le terminal de Cirkeldijck, le prix de manutention a été revu à la hausse,

en général, les trafics ont été analysés et, par la suite, réorientés en concertation avec les clients.

(81)

La restructuration de l’activité «IFB Terminal», qui s'est achevée en 2005, devait comporter 7 mesures, qui sont décrites de manière plus détaillée aux points 103 à 107 de la décision d'ouverture

(82)

En plus des mesures prévues initialement, IFB Logistics a réalisé une analyse approfondie de ses produits ferroviaires, qui a révélé l’existence de produits non rentables, qu’IFB a arrêté de produire depuis.

(83)

Pour d’autres produits, cette analyse a démontré la nécessité d’améliorations sur le plan technique. Ces améliorations ont été faites, notamment pour le secteur du transport intermodal des conteneurs.

(84)

La restructuration de Mainhub ainsi que la restructuration de Zomerweg impliquent la nécessité de nouveaux investissements […], essentiellement pour des investissements de remplacements […] ainsi que des investissements divers, […].

2.4.   Description des raisons ayant conduit à l’ouverture de la procédure le 7 décembre 2005

(85)

La Belgique, dans sa notification, considérait que les mesures en objet ne constituaient pas des aides d'État, car elles n'étaient pas imputables à la Belgique, et, en tout état de cause, car la SNCB avait agi comme un investisseur privé en économie de marché.

(86)

La Commission avait des doutes sur le point de savoir si l’octroi d’un délai de paiement pour les dettes existantes de 63 millions d’EUR et leur conversion, ainsi que la conversion des intérêts y afférents de 11 millions d’EUR, en capital social constituaient une aide d’État. Ses doutes portaient sur l'imputabilité du comportement de la SNCB à son propriétaire, l'État belge, et sur la question de savoir si la SNCB avait agi comme l’aurait fait un investisseur privé en économie de marché.

(87)

De même, la Commission avait des doutes sur le point de savoir si l’octroi d’une avance récupérable de 5 millions d’EUR et l’octroi d’une facilité de crédit de 15 millions d’EUR, la conversion de la facilité de crédit de 15 millions et des intérêts y afférents de 2,5 millions d’EUR en capital social, ainsi que l’apport en nature, consistant en la participation de la SNCB dans TRW, de 5 millions d’EUR de nouveau capital social constituaient des aides d’État.

(88)

Dans la mesure où ces aides constituaient des aides de trésorerie, la Commission doutait qu'elles puissent être déclarées compatibles avec le marché commun en tant qu’aides au sauvetage, car elles ont été octroyées pour une période supérieure à 12 mois.

(89)

La Commission avait des doutes sur la question de savoir si l’ensemble des aides pouvait être déclaré compatible avec le marché commun en tant qu’aides à la restructuration.

(90)

Ses doutes portaient sur l'applicabilité respective dans le temps des lignes directrices communautaires pour les aides d'État au sauvetage et à la restructuration d'entreprises en difficulté de 1999 (10) (ci-après «les lignes directrices de 1999») et des lignes directrices communautaires concernant les aides d'État au sauvetage et à la restructuration d'entreprises en difficulté de 2004 (11) (ci-après «les lignes directrices de 2004»), le caractère suffisant des mesures prises pour atténuer, autant que possible, les conséquences défavorables de l’aide pour les concurrents, ainsi que sur la limitation de l’aide au strict minimum et sur le caractère suffisant de la contribution propre de l’entreprise IFB aux aides à la restructuration.

(91)

La Belgique a transmis ses commentaires par lettre du 14 février 2006, qui a été complémentée par lettres du 29 juin, 20 septembre 2006, 16 novembre 2006 et 21 novembre 2006.

(92)

Dans sa réponse, la Belgique réitère sa position selon laquelle les mesures en objet ne constituent pas des aides, car elles ne sont pas imputables à l'État belge, et parce que la SNCB a agi comme l'aurait fait un investisseur privé en économie de marché.

(93)

La Belgique considère ensuite que si les mesures en objet constituaient des aides d'Etat, elles devraient être analysées sur la base des lignes directrices pour les aides au sauvetage et à la restructuration de 1999, et non sur la base de celles de 2004. Ensuite, la Belgique considère que les mesures sont compatibles avec le marché commun en tant qu'aides au sauvetage et aides à la restructuration.

3.   COMMENTAIRES DE LA BELGIQUE

(94)

La position de la Belgique peut être résumée comme suit.

3.1.   Observations de la Belgique concernant la procédure

(95)

Les autorités belges informent la Commission dans leur lettre de réponse qu'elles émettent des réserves quant à la durée de l’instruction. Elles estiment avoir une confiance légitime quant à la légalité du maintien provisoire des mesures de sauvetage jusqu'à la décision finale de la Commission concernant le plan de restructuration.

(96)

Les communications des 12 août 2003 (enregistrée par la Commission sous le numéro NN 9/04) et 28 janvier 2005 (enregistrée par la Commission sous le numéro N 55/05) avaient, d'après les autorités belges, pour but de fournir à la Commission l'ensemble des éléments permettant de vérifier si les mesures de la part de la SNCB en faveur d'IFB comportaient ou non une aide d'État au sens de l'article 87, paragraphe 1, du traité. D'après les autorités belges, ce n'est qu'au cas où les mesures concernées seraient qualifiées d'aides d'État, que la Commission aurait été (et serait) invitée à considérer les communications en tant que notifications au titre de l'article 88, paragraphe 3, du traité.

(97)

Les autorités belges considèrent que plus particulièrement, la communication du 12 août 2003 n'admettait pas que les mesures de sauvetage et de restructuration en faveur d'IFB constituent des aides d'État ni, partant, que les mesures de sauvetage puissent être qualifiées d’aides d'État non notifiées. Les autorités belges considèrent que ces mesures n’étaient pas soumises à l'obligation de notification préalable et à l'obligation de non-exécution au sens de l'article 88, paragraphe 3, du traité.

(98)

Les autorités belges formulent un constat analogue quant à la communication du 28 janvier 2005, par laquelle la Belgique a informé la Commission d'une augmentation de capital supplémentaire de 5 millions d'EUR.

3.2.   Absence d'«aide d'État» au sens de l'article 87, paragraphe 1, du traité

3.2.1.   Absence de ressources d'État.

(99)

La Belgique considère que ni les mesures de sauvetage, ni les mesures de restructuration octroyées à IFB n'ont été financées par des ressources étatiques. La SNCB aurait financé ces mesures exclusivement au moyen de ses ressources propres, sans mobiliser d'une quelconque manière des ressources étatiques.

(100)

D'après la Belgique, le fait que la SNCB soit une entreprise publique au sens de l'article 2 de la directive 80/723/CEE de la Commission du 25 juin 1980 relative à la transparence des relations financières entre les États membres et les entreprises publiques ainsi qu'à la transparence financière dans certaines entreprises (12) ne suffit pas pour établir que les mesures en objet, qui ont été financées par la SNCB, aient été financées par des ressources étatiques. La Belgique considère qu'il faut distinguer entre, d'une part, les ressources propres de la SNCB, qui proviennent des revenues générés par ses activités et, d'autre part, les dotations de l’État pour les missions de service public de la SNCB. Puisque les dotations de l'État n'étaient pas suffisantes pour financer l’entièreté des dépenses encourues pour lesdites missions, la Belgique conclut qu'il est exclu que des ressources de l’État aient été utilisées par la SNCB pour le financement des mesures en faveur d’IFB.

(101)

La Belgique considère que le patrimoine de la SNCB n'est pas à la disposition des autorités belges, mais affecté à l'objet social de la SNCB. Par conséquent, la Belgique considère qu'il n'est pas «à la disposition des autorités publiques», comme l'exige l'arrêt Stardust Marine  (13).

(102)

La Belgique considère enfin qu'une quelconque diminution des fonds propres de la SNCB en raison des mesures octroyées à IFB n’aurait entraîné aucune «perte» pour l’État (14), puisqu'il ne s’agit en aucun cas de ressources qui sinon auraient dû être versées au budget de l’État.

3.2.2.   Non-imputabilité à l'État belge

(103)

En ce qui concerne l'octroi d'une avance de trésorerie de 2,5 millions d'EUR au deuxième semestre 2002, les autorités belges considèrent que la décision de la SNCB d'octroyer cette avance n'est pas imputable à l'État belge.

(104)

La Belgique avance les arguments suivants pour démontrer la non-imputabilité:

La décision stratégique de la SNCB de restructurer l'entreprise IFB, plutôt que de la mettre en faillite, a été prise de manière autonome par le comité de direction de la SNCB. Notamment, l'avenir de la société IFB n'a pas fait l'objet des études commandées fin 2001 par le gouvernement belge pour la société ABX, ni des décisions que le conseil des ministres belge a adoptées concernant ABX en 2002.

L'octroi de l'avance à IFB avait été décidé par le comité de direction de la SNCB. La Belgique admet que le comité de direction a décidé de soumettre cette mesure au conseil d'administration de la SNCB, mais considère que l'octroi de l'avance de caisse ne nécessitait pas une approbation du Conseil d'administration de la SNCB, puisque, en vertu de la délégation de pouvoirs du conseil d'administration au comité de direction, ce dernier comité était habilité à engager la SNCB pour des montants allant jusqu’à 2.5 millions d'euros

Cette avance ne faisait pas partie d'un plan de restructuration ou d'un autre plan ou d'une mesure qui a été soumis à l'État belge ou au sujet duquel une consultation quelconque avec l'État belge a eu lieu.

D'autres facteurs tels que l'importance relativement faible de l'avance et son caractère provisoire confirment également la conclusion que l'octroi de cette avance ne peut être imputé à l'État belge.

(105)

En ce qui concerne le non paiement des factures de la SNCB par IFB, les autorités belges considèrent que le Conseil d'administration de la SNCB n'a pas été informé du fait qu'IFB ne payait plus ses factures à la SNCB avant décembre 2002, donc au moment où il a décidé le principe de l'augmentation de capital d'IFB.

(106)

Les autorités belges considèrent en outre que l'action ou l'absence d'action du Conseil d'administration, du comité de direction ou de l'administrateur délégué ne sont pas imputables à l'État belge, que cela soit avant ou après la conclusion du contrat cadre. Elles arguent qu'il y a une absence totale d'implication de l’État belge (au sens de la jurisprudence «Stardust Marine») dans le processus décisionnel de la SNCB concernant l’octroi des mesures à IFB.

(107)

En effet, d'après les autorités belges, les mesures octroyées par la SNCB à IFB sont des mesures relatives à une filiale de la SNCB qui n’exerce pas elle-même de missions de service public et qui n’est pas non plus associée à l’exécution de missions de service public de la SNCB. Les activités d’IFB seront donc des activités exclusivement commerciales, en dehors de toute mission de service public. Ainsi, toujours selon les autorités belges, elles échappent au contrôle de l’Etat, car, pour ce qui ne relève pas d’une mission de service public, les autorités belges sont tenues de respecter l’autonomie de la SNCB.

(108)

En ce qui concerne le rôle du Commissaire du Gouvernement, les autorités belges disent qu'elles n'ont jamais été saisies du dossier IFB et, partant, étaient incompétentes pour intervenir, vu que le Commissaire du Gouvernement n’a à aucun moment formulé de remarques sur les mesures prises vis-à-vis d’IFB et qu'il n’a pas intenté non plus quelque recours que ce soit. De plus, elles prétendent qu'elles ne sont en aucune manière intervenues dans le processus décisionnel de la SNCB concernant IFB, ni au cours de la période précédant la conclusion du contrat cadre, ni au cours de la période ultérieure.

(109)

En ce qui concerne les trois indices identifiés par la Commission dans la lettre d'ouverture (points 143 à 150), à savoir la soumission du plan de restructuration à l’approbation par l’État belge, les articles de presse démontrant une forte influence du gouvernement belge sur la SNCB pendant l’année 2003, et l’ampleur, le contenu et les conditions du contrat cadre, les autorités belges considèrent que ces indices ne sont pas suffisants pour établir l'imputabilité au sens de la jurisprudence Stardust Marine.

(110)

En ce qui concerne l'approbation du plan de restructuration par l'État belge, les autorités belges considèrent que cette disposition du contrat cadre ne visait nullement à octroyer aux autorités belges une quelconque compétence pour juger du contenu du plan de restructuration, mais était inspirée par le fait que la SNCB souhaitait que le plan de restructuration, tout comme le contrat cadre, soit communiqué à la Commission.

(111)

En ce qui concerne les articles de presse, le gouvernement belge considère que ceux-ci ne contiennent aucun indice d'une intervention du gouvernement belge dans la présente affaire, pour les raisons suivantes:

dans l’article paru dans La Libre Belgique du 19 mai 2003, la cellule de presse de la SNCB explique que le feu vert pour le dossier IFB n’a pas encore été demandé auprès de la Commission, du fait que «le pouvoir fédéral a son mot à dire». D'après le gouvernement belge, ces commentaires portent exclusivement sur la «communication» des mesures en faveur d’IFB par l’État belge à la Commission,

dans l’article paru dans La Libre Belgique du 18 décembre 2002 (dans la version publiée sur le site www.cheminots.be), Monsieur Karel Vinck est mentionné comme suit: «Il réclame une marge de manœuvre suffisante pour le management de la société». D'après les autorités belges, il s’agirait ici d’une déclaration qui concerne exclusivement l'exécution des missions de service public de la SNCB, et qui exprimerait l'idée que les autorités belges sont compétentes pour convenir avec la SNCB des objectifs à réaliser pour l'exécution des missions de service public par le biais de l'instrument prévu par la loi qu'est le contrat de gestion, mais que la réalisation de ces objectifs est du ressort et de la compétence du conseil d'administration de la SNCB.

(112)

Finalement, les autorités belges ont transmis à la Commission une déclaration écrite de Monsieur Karel Vinck, Administrateur-Délégué de la SNCB à l’époque des faits, confirmant l'absence de toute implication des autorités belges quant à l'octroi, par la SNCB à IFB, des mesures de sauvetage et de restructuration qui font l'objet du présent dossier. Une telle lettre, signée par Monsieur Vinck le 17 novembre 2006, a été reçue par la Commission le 5 décembre 2006.

(113)

En ce qui concerne l’ampleur, le contenu et les conditions du contrat cadre, les autorités belges réitèrent leur position d'après laquelle, même s’il s’agit de mesures de restructuration importantes pour l'avenir d’IFB, les autorités belges ne disposaient ni d’un pouvoir d’approbation, ni d'un pouvoir de contrôle du fond, ni du droit d’être consultées dans la présente affaire.

3.2.3.   Principe de l'investisseur privé en économie de marché

(114)

La Belgique considère que, suivant le raisonnement développé par la Commission dans la décision ABX Logistics  (15), la Commission doit analyser séparément, d'une part, les fonds que la SNCB a accordés à IFB pour financer le désinvestissement des filiales françaises et, d'autre part, les fonds que la SNCB a octroyés à IFB pour financer la poursuite de ses activités en Belgique.

3.2.3.1.   Désinvestissement des participations françaises

(115)

Dans la décision ABX Logistics, la Commission aurait confirmé que, ABX France n'étant pas en mesure de supporter elle-même les coûts du désengagement, la SNCB se serait comportée comme l'aurait fait un «investisseur privé avisé en économie de marché» en prenant en charge ces coûts.

(116)

La Belgique considère que la même conclusion s'impose pour ce qui concerne le coût du désinvestissement, par IFB, de ses participations françaises. Elle tente de démontrer que pour chacune de ces sociétés, IFB a opté pour la formule la moins onéreuse.

(117)

En ce qui concerne Acimar, la Belgique a fourni le tableau suivant:

Acimar — Redressement judiciaire suivi de sa liquidation

Situation financière en 2002

(en M EUR)

 

2001

2002

Chiffre d'affaires

 

 

EBT

 

 

Total du bilan (31.12.)

 

 

Capitaux propres (31.12.)

 

 


Coût des alternatives

(en M EUR)

 

Exécution du contrat

Redressement judiciaire

Cash drain 1.1.2003-31.12.2005

 

 

Moins value créances 31.12.2002

 

 

Total

–14,7

–3,9

Commentaires

Les tentatives entreprises durant l’année 2002 afin d’obtenir une révision des conditions contractuelles ont é chouées; le contrat avait une durée jusqu’au 31.12.2005

L’exécution du contrat impliquait un cash drain annuel important

Dans ces circonstances, une demande de redressement judiciaire représentait la formule la moins onéreuse.

Pendant la période de redressement, les pertes d’exploitation ont été financées par le client

Les activités d’Acimar ont été arrêtées au 1.9.2003

(118)

En ce qui concerne NFTI-ou, la Belgique a fourni le tableau suivant:

NFTI-ou — Cession

Situation financière en 2002

(en M EUR)

 

2001 (16)

2002

Chiffre d'affaires

 

 

EBT

 

 

Total du bilan (31.12.)

 

 

Capitaux propres (31.12.)

 

 


Coût des alternatives

(en M EUR)

 

Continuer

Vente partielle

Augmentation de capital + remboursement crédit ING

 

 

Plan de redressement

 

 

Cash drain actualisé (CH annuel de – 3,7 MEUR) (100 % lettre de confort)

 

 

Moins-value participation

 

 

Moins-value créances 31.12.2002

 

 

Prix de vente (1 EUR) — participation de 30 %

 

 

Total

–36,2

–18,5

Commentaires

Sur la base d’une «lettre de confort», IFB a été obligée d’effectuer des apports en compte courant

IFB s’était portée caution pour un emprunt bancaire de NFTIou dont le remboursement avait été demandé par ING

Dans ces circonstances, IFB a négocié avec l’autre actionnaire, le Port Autonome de Dunkerque («PAD»):

Une augmentation de capital de NFTIou dont une partie a été souscrit par IFB;

La libération d’IFB de ses engagements issus de la lettre de confort, et l’engagement de PAD de chercher un acquéreur pour le solde de la participation d’IFB dans NFTIou, moyennant la cession à un prix symbolique à PAD d’une partie de la participation d’IFB dans NFTIou pour la ramener à 30 % (y inclus la participation détenue à travers DPD)

La vente de la participation restante de 30 % est actuellement en cours

(119)

La Belgique a informé la Commission qu'une mise en faillite de NFTI-ou n’a jamais été envisagée, étant donné que la poursuite des activités de NFTI-ou offrait des perspectives de rentabilité. D'après la Belgique, la vente de la participation d’IFB de 30 % à CMA-CGM le 2 novembre 2006 […] et la récupération intégrale des crédits accordés sous forme d'avances en compte courant démontrent la viabilité de cette société.

(120)

En ce qui concerne, IFB France, devenu par la suite AGEP, la Belgique a fourni le tableau suivant:

IFB France (AGEP) — Cession a NFTI-ou

Situation financière en 2002

(en M EUR)

 

2001

2002

Chiffre d’affaires

 

 

EBT

 

 

Total du bilan (31.12.)

 

 

Capitaux propres (31.12.)

 

 


Coût des alternatives

(en M EUR)

 

Liquidation

Transfert NFTIou

Abandon de créances

 

 

Moins-value sur participation

 

 

Plus-value sur réalisation transfert des actions

 

 

Passif social (14 ETP)

 

 

Total

–1,7

–0,8

Commentaires

Face au risque d’une liquidation forcée ou d’un dépôt de bilan, IFB a négocié avec PAD la cession des titres d’IFB France à NFTIou mais moyennant un abandon de créance par IFB

La liquidation de la société aurait occasionné des coûts beaucoup plus élevés (moins-value sur participation, risque de comblement du passif en tant que fondateur et/ou seul dirigeant de fait)

(121)

En ce qui concerne Dry Port Dunkerque, la Belgique a fourni le tableau suivant:

Dry Port Dunkerque (DPD) — Liquidation avec vente partielle

Situation financière en 2002

(en M EUR)

 

2001

2002

Chiffre d’affaires

 

 

EBT

 

 

Total du bilan (31.12.)

 

 

Capitaux propres (31.12.)

 

 


Coût des alternatives

(en M EUR)

 

Continuer

Liquidation avec vente partielle d’actifs

Cash drain actualisé (CH annuel de – 0,5 MEUR) (100 % lettre de confort)

 

 

Moins-value créances

 

 

Moins-value participation

 

 

Total

–10,4

–7,9

Commentaires

Une lettre de confort obligeait IFB à effectuer des apports en compte courant afin de combler les pertes opérationnelles de DPD

Après le désinvestissement dans NFTIou, un acheteur pour la participation dans DPD a été recherché mais n’a pas pu être trouvé

IFB a négocié la liquidation amiable de DPD, moyennant la cession à un prix symbolique de la participation de 8,6 % dans NFTIou

(122)

En ce qui concerne SSTD, la Belgique a fourni le tableau suivant:

SSTD: CESSION

Contexte:

IFB détenait une participation de 50 %

SSTD avait une activité rentable qui a été continuée jusque début 2005

Fin 2004, SSTD a perdu son client principal (représentant 40 % de son chiffre d’affaires)

Cette perte a suscité la décision de vendre la participation SSTD

La vente de la participation est intervenue début 2005 et a été r éalisée avec une plus-value négligeable (impact positif mais négligeable sur les besoins de financement)

(123)

Les autorités belges en concluent que la solution la moins chère a été choisie par IFB en ce qui concerne les filiales françaises.

3.2.3.2.   Restructuration et continuation des activités d'IFB en Belgique

(124)

En ce qui concerne le financement de la restructuration et de la continuation des activités d'IFB en Belgique, la Belgique considère que la SNCB a également agi comme l'aurait fait un créancier/investisseur privé avisé en économie de marché, car le résultat financier de l'alternative — l'arrêt des activités en Belgique — aurait été, pour la SNCB, beaucoup moins attrayant, car plus coûteux.

(125)

La Belgique a présenté les calculs suivants pour illustrer le coût allégué de la liquidation des activités d'IFB en Belgique et le coût allégué de la poursuite des activités, moyennant l'augmentation de capital.

a)    Coût net pour la SNCB dans l'hypothèse d’une faillite d'IFB en 2003

(126)

La Belgique a déterminé la valeur actualisée nette d'IFB à partir du bilan d'IFB au 31 décembre 2002. D'après les autorités belges, la valeur des immobilisations d'IFB qui auraient pu être réalisées dans l'hypothèse d'un dépôt de bilan par IFB en janvier 2003 comprendraient d’une part les immobilisations corporelles et de l'autre part les immobilisations financières (participations).

(127)

Pour les immobilisations corporelles, la Belgique retient un montant de 6,9 millions d'EUR. Pour justifier ce calcul, la Belgique se réfère à l'étude «Bankruptcy auctions: costs, debt recovery, and firm survival» (17), qui conclut que le taux de recouvrement de l'ensemble des créances dans un scénario de faillite est de 33 % en moyenne. Dans le calcul des actifs récupérés, la Belgique a appliqué ce taux aux immobilisations corporelles qui figuraient au bilan d'IFB pour un total de 20,9 millions d'EUR (à l’exclusion des immobilisations en chantier de 1,9 million d'EUR, pour lesquelles un taux de recouvrement nul a été pris).

(128)

Pour les immobilisations financières (participations), la Belgique est parti d'une valeur de 1,9 million d'EUR, ce qui correspond à l’intégralité de leur valeur comptable au bilan d’IFB au 31 décembre 2002.

(129)

Pour les actifs circulants, la Belgique propose les estimations de valeur suivantes:

créances commerciales d'IFB: il s'agissait d'un total de 25,6 millions d'EUR dont 18 millions sont censés être récupérés, ce qui correspond à un taux de recouvrement de 70 % pour des créances à court terme; Ce taux est basé sur la moyenne déterminée dans l'étude «Liquidation of Ormet Corporation» (18),

autres créances d'IFB: il s'agissait d'un total de 7 millions d'EUR dont 4,5 millions sont censés être récupérés. Le montant de 7 millions d'EUR peut être subdivisé en 2,5 millions de créances sur les filiales DPD et OCHZ, et 4,5 millions de TVA. Un taux de recouvrement de 100 % est supposé pour la créance TVA, et un taux de recouvrement de 0 % sur les deux filiales,

liquidités et comptes de régularisation: il s'agissait d'un total de 6,4 millions d'EUR dont la totalité est censée être récupérée.

(130)

L'application de l'ensemble de ces taux de récupération donne lieu à un recouvrement total de 37,5 millions d'EUR dans une hypothèse de faillite/liquidation d'IFB, comme l'indique le schéma 2.

Schéma 2

Recouvrement d’actifs

(Millions d'EUR)

Image

(131)

Ensuite, les autorités belges déduisent du montant dont la récupération peut être espérée les passifs d'IFB. Ces passifs s’élèveraient à un total de 76,9 millions d'EUR, sans compter les dettes de 63 millions d'EUR envers la SNCB en vertu des factures impayés de la période 2000-2002. Ils sont détaillés ci-dessous:

a)

passif social: un total estimé de 2,9 millions d'EUR pour l'ensemble des employés IFB, après soustraction du personnel SNCB détaché auprès d'IFB;

b)

impôts, salaires et sécurité sociale: un total de 1,4 million d'EUR échu mais non payé (tiré du bilan au 1er janvier 2003);

c)

provisions et impôts différés: un montant de 34,7 millions d'EUR a été retenu, sur un total de 40,8 millions d'EUR repris au passif du bilan au 31 décembre 2002. Cet écart s’explique par les postes suivants, qui n’auraient pas dû être engagés en cas de liquidation d’IFB:

entretien des terminaux: 3,3 millions d'EUR;

entretien pour l’activité logistique: 0,9 million d'EUR;

provisions pour restructuration du personnel: 1,9 million d'EUR;

d)

la dette financière d'IFB, pour un montant total de 15 millions d'EUR. La dette financière de 15 millions d'EUR, contractée auprès des institutions de crédit […], était garantie par les créances commerciales d’IFB. Pour cette raison, et eu égard à la préservation du crédit de la SNCB dans le marché bancaire, il est clair que cette dette aurait également été remboursée aux institutions de crédit avant le remboursement éventuel des créances de la SNCB;

e)

la dette commerciale envers des entités autres que la SNCB, pour un total de 22,9 millions d'EUR.

Il résulterait des calculs qui précèdent que la valeur de l'actif net d'IFB pour la SNCB se serait élevée, hors dettes envers la SNCB, à – 39,4 millions d'EUR, soit la valeur de l’actif récupéré (37,5 millions d'EUR) duquel est soustrait le montant total des engagements du passif à honorer (76,9 millions d'EUR), hors dettes envers la SNCB.

(132)

Les autorités belges considèrent que, en cas de liquidation, pour éviter un préjudice très important à sa réputation commerciale, la SNCB aurait assumé le coût de l'actif net négatif d'IFB. À cet égard, elles soulignent que la majeure partie des créanciers d’IFB sont également clients, fournisseurs, créanciers, débiteurs ou partenaires de la SNCB.

(133)

De surcroît, l’arrêt des activités d'IFB, aurait, toujours selon le gouvernement belge, engendré un passif social important à la SNCB, qui peut être estimé à 530 ETP (équivalents-temps-plein) (19). Ces 530 ETP se décomposent comme suit:

d’une part, les quelques 50 membres du personnel de la SNCB détachés auprès d'IFB et qui auraient dû être réintégrés au sein de la SNCB en cas de faillite,

d’autre part, environ 480 ETP de la SNCB dont l’activité dépendait de la poursuite des activités d’IFB. Cette estimation provient du calcul suivant. La part d’IFB dans le chiffre d’affaires total de la division Marchandises de la SNCB s’élève à 8,1 %. Ce rapport, appliqué au total du personnel de la SNCB employé directement et indirectement par la division Marchandises au 31.12.2002, indique qu’environ 609 ETP dépendaient de l’activité d’IFB. De ces 609 ETP, il a été supposé que 129, soit 21 %, pourraient conserver une activité en dépit de la faillite d'IFB, suite à des initiatives spécifiques de la SNCB pour récupérer une partie de trafic généré auparavant par IFB. Ce ratio de 21 % correspond à la proportion d’emplois de la Sabena qui ont pu être sauvés par le lancement de SN Brussels Airlines dans la foulée de la faillite de la Sabena.

(134)

Le gouvernement belge considère que, puisqu'à l’époque, la SNCB finalisait la préparation de son plan d’entreprise «MOVE 2007», qui prévoyait la disparition de 10 000 postes de travail, soit presque un quart de son personnel, entre 2003 et 2007, les opportunités de reclassement du personnel rendu excédentaire par la cessation des activités d’IFB étaient pratiquement nulles, qu’il s’agisse du personnel détaché revenu à la SNCB ou du personnel lié à l’activité Marchandises resté à la SNCB.

(135)

Par conséquent, le gouvernement belge propose de rajouter au coût direct de l'actif net négatif d'IFB le coût de l’excédent d’effectifs ainsi généré à la SNCB pendant au moins la période de cinq ans s’étalant de 2003 à 2007. À un coût salarial complet moyen de 46 200 EUR par ETP et par an […], le coût total de ce passif social se serait donc élevé à 122,4 millions d'EUR.

(136)

Pour justifier ce calcul, la Belgique explique d'abord que le personnel de la SNCB devenu excédentaire par la cessation des activités d'IFB ne pouvait pas être licencié, étant donné que ce personnel avait le statut d'«employé statutaire» (20).

(137)

Suite à la réunion de travail du 1er juin 2006, les autorités belges ont transmis à la Commission un scénario moins pessimiste pour le calcul de l'actif net et du passif social qui aurait été supporté par la SNCB en cas de liquidation d'IFB. Ce scénario propose les deux changements suivants:

la SNCB n’aurait pas payé l’ensemble des dettes, mais seulement celles des créanciers qui étaient des clients […], fournisseurs […] ou partenaires […] de la SNCB; dans une telle hypothèse, le montant du passif d'IFB qui aurait été payé par la SNCB se serait élevé à 13 millions d'EUR […],

le repreneur des activités d'IFB aurait continué d'utiliser en grande partie les services de la SNCB; dans une telle hypothèse 79 % des 609 ETP employés par la SNCB et affectés en tant que support indirect aux activités d'IFB, auraient pu garder leur emploi; dans une telle hypothèse, le surcoût social à charge de la SNCB aurait été limité à 41,1 millions d'EUR (ce dernier montant correspond au coût salarial des 50 ETP détachés par la SNCB chez IFB ainsi que 21 % des 609 ETP précités).

(138)

Le coût total supporté par la SNCB en cas de liquidation d'IFB dans ces deux scénarios, tel qu'estimé par les autorités belges, est repris dans le tableau suivant:

 

Coût net — montants retenus dans la réponse

Différence dans les hypothèses «optimistes»

Coût net — montants adaptés

Total de l'actif comptable

64,6

 

64,6

Actif non recouvert

–27,1

 

–27,1

Coûts sociaux

–2,9

 

–2,9

Impôts, rémunérations et sécurité sociale

–1,4

 

–1,4

Provisions et impôts différés

–34,7

 

–34,7

Créance prioritaire & autre dette financière

–15

 

–15

Dette commerciale non-SNCB

–22,9

9,9

–13

Valeur de récupération

–39,4

 

–29,5

Passif social à la SNCB

– 122,4

81,3

–41,1

Coût net pour la SNCB d'un dépôt de bilan par IFB

– 161,8

 

–70,6

b)    Valorisation d'IFB dans un scénario de poursuite de l’activité

(139)

La Belgique propose de calculer la valeur d'IFB dans l'hypothèse «poursuite d'activité» selon la méthode des cash-flows libres actualisés («discounted cash flows» ou «DCF»). Les paramètres retenus pour cette analyse sont les suivants:

(140)

L'analyse DCF sur 10 ans est fondée sur le bilan d'IFB au 31 décembre 2002, ainsi que sur le plan de restructuration élaboré en février-mars 2003, comprenant des projections jusqu’à fin 2005. Pour l'année 2006, moment où la restructuration d'IFB réalise la stabilisation de l'entreprise, le résultat d’exploitation a été fixé à un niveau de 3,2 % du chiffre d’affaires. A partir de 2006, l'hypothèse de travail est d'une croissance annuelle de 3 % du chiffre d'affaires ce qui, à marge constante, mène à un taux de croissance du résultat avant impôts de 3 %. Les cash flows libres qui en résultent sont actualisés à un coût moyen pondéré du capital (WACC) de 8 %. La valeur des terminaux a été calculée dans l'hypothèse d'une croissance perpétuelle de 3 %.

(141)

Ces calculs mènent à une valorisation de l'entreprise d'environ 29,1 millions d'EUR (hors participations et provisions), comme le schéma 4 le démontre.

Schéma 4

Valeur d’IFB sur la base des cash-flows actualises — hypotheses et resultats

(Millions d'EUR)

Image

(142)

D'après le gouvernement belge, une analyse fondée sur des multiples (en fonction des résultats obtenus en 2005) confirme la valorisation obtenue sur base de la méthode DCF. En effet, la valorisation «multiples» (avec des multiples plus prudents que les moyennes du secteur) indique une valeur d'entreprise d'environ 28,7 millions d'EUR, comme le schéma 5 le démontre.

Schéma 5

Valeur d’entreprise d’IFB

(Millions d'EUR)

Image

(143)

Le gouvernement belge considère que les résultats réels obtenus par IFB dans les années 2003, 2004 et 2005 confirment aussi que la valorisation DCF, et les hypothèses sur lesquelles elle reposait, était réaliste.

(144)

Le gouvernement belge considère qu'il convient d’ajouter à la valeur d'IFB calculée hors participations et provisions les participations détenues par IFB, soit 1,9 million d'EUR, ainsi que comptabilisé à l’actif du bilan d’IFB au 31 décembre 2002.

(145)

Le total de la valeur d’entreprise d’IFB, y compris les participations, s’élèverait donc à 31 millions d'EUR à la date du 31 décembre 2002.

(146)

De cette valeur d’entreprise, il convient, toujours selon le gouvernement belge, de décompter la valeur des provisions, estimée à 34,2 millions d'EUR (21), ainsi que la dette financière s’élevant à 15 millions d'EUR.

(147)

Il en résulterait une valeur nette de – 18,2 millions d'EUR pour la participation de la SNCB dans IFB dans le scénario de poursuite de l’activité. Ce calcul est illustré au schéma 6.

(148)

Comme dans l'estimation précédente du coût supporté par la SNCB en cas de liquidation d'IFB, les calculs qui précèdent ne prennent pas en compte les dettes de 63 millions d'EUR résultant des factures non-payées au cours de la période comprise entre 2000 et 2002.

Schéma 6

Evaluation de l’option investissement, jan 2003

(Millions d'EUR)

Image

c)    Comparaison entre les deux scénarios et conclusion

(149)

Suivant l'analyse faite par le gouvernement belge, les deux scénarios donneraient donc les résultats suivants:

le coût net pour la SNCB de la faillite et de la liquidation d'IFB serait une perte nette de 161,8 millions d'EUR (ramenée à 70,6 millions d'EUR dans l'estimation révisée),

la décision d’investir 15 millions d'EUR pour permettre à IFB de poursuivre son activité, menait à une réduction considérable de la destruction de valeur pour la SNCB, qui ne représentait plus alors que 18,2 millions d'EUR, ce qui représente un gain de 143,6 millions d'EUR par rapport au scénario de faillite et de liquidation (52,4 millions d'EUR par rapport à l'estimation révisée).

(150)

Par conséquent, le gouvernement belge considère que la SNCB, en accordant les mesures en objet, avait agi comme l'aurait fait un investisseur privé en économie de marché.

3.2.4.   Absence de distorsion de concurrence

(151)

Finalement, la Belgique considère, en ce qui concerne la partie des mesures qui sert à financer le désinvestissement des filiales françaises, qu'une assistance dont le montant est strictement limité aux coûts réellement encourus à la suite de l'arrêt d'une activité ne peut pas être considérée comme entraînant une distorsion de la concurrence. Ainsi, cette partie du financement échapperait au champ d'application de l'article 87, paragraphe 1, aussi pour cette raison.

3.3.   Compatibilité des mesures de sauvetage avec les lignes directrices

3.3.1.   IFB n'est pas une entreprise nouvellement créée

(152)

La Belgique considère que puisqu'IFB a été constituée en 1923 et a acquis, par voie de fusion par absorption, une société ainsi qu'une branche d'activités en 1998 (cf. description dans la partie 2 de la présente décision), il serait incontestable qu'IFB jouit de la personnalité juridique depuis plus de 80 ans et ne peut donc pas être considérée comme une «entreprise nouvellement créée».

3.3.2.   Les mesures de sauvetage sont compatibles avec les lignes directrices de 1999

(153)

D'après le gouvernement belge, la durée de plus de douze mois des mesures de sauvetage n'aurait pas pour conséquence d'exclure leur compatibilité avec le marché commun sur la base des lignes directrices de 1999. La Belgique considère que la SNCB a maintenu les mesures de sauvetage dans le seul but de couvrir la période nécessaire à la Commission pour prendre une décision finale dans le présent dossier.

(154)

Puisque le point 24 des lignes directrices de 1999 prévoit qu'une autorisation des mesures de sauvetage reste valable jusqu'à ce que la Commission statue sur le plan de restructuration, les autorités belges demandent à la Commission de ne pas invoquer la durée de sa propre procédure d'approbation des mesures de sauvetage pour contester la durée du maintien de ces mesures, et d'approuver, sur la base du point 24 des lignes directrices de 1999, les mesures de sauvetage.

(155)

Les autorités belges considèrent que la suspension de l'augmentation de capital pendant l'instruction de la Commission supposait nécessairement le maintien, à titre provisoire et précaire, du délai de paiement accordé à IFB dans le cadre des mesures de sauvetage, car la seule alternative aurait été le dépôt de bilan. Finalement, d'après les autorités belges, au cours de son instruction, la Commission n'aurait jamais émis de réserve sur le maintien provisoire des mesures de sauvetage.

3.3.3.   Les mesures de restructuration sont compatibles avec les lignes directrices de 1999

3.3.3.1.   Applicabilité des lignes directrices de 1999

(156)

La Belgique considère que l'engagement de la SNCB de souscrire à l'augmentation du capital d'IFB est à analyser dans le cadre des lignes directrices de 1999 et non de 2004.

(157)

Pour justifier ce point de vue, la Belgique soutient que les deux conditions établies par la Commission au point 240 de la décision d'ouverture pour l'applicabilité des lignes directrices de 1999 sont remplies. Pour rappel, au point 240 de la décision d'ouverture, la Commission a conclu, en ce qui concerne l'interprétation des points 102 à 104 des lignes directrices de 2004 pour le présent dossier, que «si la SNCB décide de ne pas accorder de nouveau avantage à IFB, et si la preuve était apportée que la SNCB s’était engagée à convertir ses créances en capital avant la publication des lignes directrices de 2004, la Commission devrait examiner dans sa décision finale les aides accordées par la SNCB à IFB sur la base des lignes directrices de 1999».

(158)

En ce qui concerne la première condition, la Belgique observe qu'elle a retiré, par sa réponse à la lettre d'ouverture, l'augmentation de capital additionnelle notifiée le 28 janvier 2005, et que par conséquent, la première condition était remplie.

(159)

En ce qui concerne la deuxième condition, la Belgique considère qu'il ne peut pas être contesté que l'augmentation de capital d'IFB actuellement proposée serait effectuée comme convenu par les parties, sous la condition suspensive de l'accord de la Commission, dans le contrat cadre du 7 avril 2003.

(160)

Pour souligner ce point, les autorités belges attirent l'attention de la Commission sur:

le point 4 du préambule du contrat cadre du 7 avril 2003, qui confirme que le conseil d'administration de la SNCB a déjà approuvé la souscription d'une augmentation de capital d'IFB,

l'article 4 du même contrat, qui confirme l'intention réciproque des parties de procéder à une augmentation de capital d'IFB.

(161)

En ce qui concerne le deuxième point, les autorités belges rappellent qu’en droit belge (le droit applicable au contrat cadre), un contrat naît de la seule volonté des parties contractantes, et qu'en l'espèce, l'article 4 du contrat cadre confirmerait expressément et sans aucune ambiguïté l'accord de volontés de la SNCB et de l'IFB de procéder à une augmentation de capital d'IFB par la voie de conversion en capital des créances de la SNCB sur IFB rétroactivement au 7 avril 2003.

(162)

Les autorités belges rappellent que, en droit belge, les obligations soumises à une condition suspensive restent pleinement contraignantes, et la réalisation de la condition suspensive a un effet rétroactif sur le contrat qui prend effet à la date de la signature.

3.3.3.2.   Mesures atténuant autant que possible les distorsions de concurrence

(163)

Les autorités belges font valoir à titre général que les parts de marché d'IFB sont bien en dessous de 10 % sur les marchés concernés par le présent cas. Par conséquent, elles considèrent que les effets anticoncurrentiels résultant des aides étatiques en cause ne peuvent pas être considérés comme significatifs. Elles rappellent notamment qu'en vertu du point 36 des lignes directrices de 1999, «si la ou les parts [du] marché [en cause] détenues par l'entreprise [bénéficiaire de l'aide] sont négligeables, il doit être estimé qu'il n'y a pas de distorsion indue de la concurrence» (22), et que, pour l'application de l'article 81, paragraphe 1, du traité, la Commission considère les effets anticoncurrentiels des accords conclus par des entreprises ayant des parts de marché inférieures à 10 % comme insignifiants (23).

(164)

En ce qui concerne plus particulièrement les activités d'IFB Logistics et d'IFB Terminal, les autorités belges font les observations suivantes:

(165)

Les mesures atténuantes sur le marché du transbordement de fret. Le gouvernement belge observe que la part d'IFB dans le marché des terminaux de la région d'Anvers est inférieure à 7 %, et que le marché des terminaux dans cette région a connu, pendant la période 2002-2005, un taux de croissance de 10,7 % par an en moyenne, tandis que les volumes transportés par IFB ont augmenté de seulement 4,1 % par an en moyenne.

(166)

Le gouvernement belge rajoute que par la mise en œuvre du plan de restructuration, IFB a réduit sa capacité de transbordement de manière considérable, comme décrit dans la partie 2 de la lettre d'ouverture (points 25 à 29). Eu égard à la circonstance qu’à l'exception du terminal DPD, l'ensemble des actifs vendus sont toujours en exploitation à ce jour, les autorités belges considèrent que les cessions sont à considérer comme des mesures compensatoires réelles et substantielles. D'après le gouvernement belge, l'ensemble des cessions représenterait une diminution de la capacité d'IFB de 1,5 million EVP en 2002 à 1,1 million EVP à la fin de 2005, soit une diminution de 27 %.

(167)

Les autorités belges ajoutent que la mise en œuvre du plan de restructuration par IFB n'a pas été accompagnée de mesures de prix qui avaient pour objet ou effet d'augmenter la part de marché d'IFB. Elles observent qu'IFB a augmenté ses prix en moyenne de 4,2 % (24), tandis que le taux annuel moyen de l'inflation industrielle était de 1,9 %.

(168)

Les mesures atténuantes sur le marché de la logistique. La lettre d'ouverture considère (paragraphes 258-260) que les mesures «proposées» ne concerneraient pas le marché de la logistique, et qu‘IFB aurait pu augmenter son volume sur ce marché. Les autorités belges avancent cinq arguments pour démontrer que des mesures atténuantes suffisantes ont été prises sur le marché de la logistique.

(169)

En premier lieu, IFB aurait pris des mesures qui ont entraîné une diminution de sa capacité dans le marché de la logistique. En effet, le nombre total de wagons dont IFB est propriétaire ou qui font l'objet d’une location à long terme, a diminué de 744 unités en 2002 (25) à 377 unités au début de 2006 (26). Il s'agirait donc d'une diminution de 49 %.

(170)

La réduction de la capacité logistique d'IFB résulterait également du fait que la participation d'IFB dans la société CNC (actuellement Naviland Cargo) s’est diluée, pour passer de 10 % en 2002 à 2 % actuellement.

(171)

En deuxième lieu, les autorités belges considèrent que la part de marché d'IFB sur le marché de la logistique est bien en dessous de 5 %, si l'on devait limiter l'étendue géographique de ce marché au territoire belge. Il conviendrait dès lors, en vertu du point 36 des lignes directrices, de poser la question de savoir si les effets anticoncurrentiels résultant des aides étatiques en cause peuvent être considérés comme sensibles. D'après les autorités belges, IFB ne peut nullement être considérée comme capable d'exercer une influence sensible sur le jeu de la concurrence sur le marché de la logistique. Pour la même raison, les distorsions de concurrence résultant de l'aide dont bénéficie IFB pourraient, d'après le gouvernement belge, difficilement être considérées comme sensibles, de sorte que seules des mesures très limitées semblent nécessaires afin d'atténuer les conséquences défavorables pour les concurrents d'IFB.

(172)

En troisième lieu, les autorités belges proposent de mettre en perspective l’évolution de l’activité logistique d'IFB afin de nuancer radicalement l’affirmation de la Commission selon laquelle IFB aurait «su augmenter son volume sur ce marché de manière importante» pendant la période en question. En effet, d'après les autorités belges, il faudra tenir compte des faits suivants:

pour le segment du transport combiné (intermodal), les volumes transportés par IFB ont connu une croissance annuelle de l'ordre de 9,9 % pendant la période 2002-2005, ce qui est inférieur à la croissance annuelle moyenne de 12 % observée dans la région ARA pour la même période,

dans le segment du transport conventionnel, IFB est un acteur tout à fait marginal, même à supposer que le marché soit restreint à la Belgique. En effet, la part d’IFB, tant en volume qu’en valeur y est inférieure à 1 %.

(173)

Par ailleurs, la croissance du chiffre d'affaires d'IFB dans son activité logistique trouverait, d'après le gouvernement belge, pour partie, son origine dans la croissance du sous-segment «bulk» (transport en vrac). En 2003, le chiffre d'affaires réalisé par IFB par le transport en vrac ne représentait que 3,3 millions d'EUR. Or, en 2004, IFB a obtenu deux contrats de transport en vrac d'un volume important. En premier lieu, un contrat de transport de charbon […] qui a généré un chiffre d'affaires […] en 2004 et […] en 2005. En deuxième lieu, un contrat de transport en vrac de granulats qui a rapporté une augmentation du chiffre d'affaires […] en 2004 et […] en 2005. IFB réaliserait une marge bénéficiaire sur ces deux contrats, ce qui confirme bien l’absence de pratiques anticoncurrentielles dans le chef d’IFB.

(174)

En quatrième lieu, le gouvernement belge considère que l'ouverture par IFB de ses terminaux à des concurrents dans le marché de la logistique est également à considérer comme une mesure atténuante importante.

(175)

En cinquième lieu, le gouvernent belge considère que les distorsions limitées de la concurrence qui pourraient être considérées comme résultant de l'aide à la restructuration d'IFB sont encore réduites par les facteurs suivants:

la libéralisation du transport de marchandises par voie ferroviaire en Belgique. En effet, les autorités belges, en conformité avec les règles européennes applicables, ont ouvert ce marché à la concurrence (à partir de mars 2003 pour les transports internationaux, suivi d'une libéralisation totale le 1er janvier 2007) (27). Cette ouverture n'aurait pas manqué de produire des effets, comme le démontreraient les activités des sociétés DLC et, plus récemment, Fret SNCF. Dans sa décision N 386/2004, Fret SNCF, la Commission aurait considéré une telle libéralisation comme une mesure compensatoire pour les concurrents,

plusieurs autres concurrents de la SNCB/IFB (parmi lesquels figurent Rail4Chem, Railion Nederland, TrainSport, DFG, EWS, Connex et ACTS) ont déjà reçu ou recevront en toute probabilité sous peu, leurs licences d'exploitation,

la SNCB (B-Cargo) fournit déjà à l'heure actuelle des services de traction à des concurrents d'IFB, qu’il s’agisse de fournisseurs de transport combiné (intermodal) tels que HUPAC, CNC (Naviland Cargo), Conliner, Danzas / DHL Express Cargo et ICF, ou de fournisseurs de services de «forwarding» tels que Transfesa, K+N, Nauta, NTR, Panalpina, Rail&Sea, Railog, Chemfreight, Rhenania, TMF, Gondrand, RME Chem, RME fret et East Rail Expedition,

comme la Commission l'aurait relevé dans sa décision dans l'affaire N 386/2004, Fret SNCF, les conditions entre rail et route ne sont pas identiques, au détriment du rail.

(176)

D'après le gouvernement belge, les mesures de libéralisation ont mené à des accroissements substantiels de capacité sur le marché de la logistique, comme le démontrerait l’activité des concurrents d’IFB au cours de la période 2003-2005. D'après le gouvernement belge, la concurrence se concentrerait sur le segment intermodal, où cinq concurrents d'IFB ont lancé un total de 12 nouvelles liaisons dans cette période.

3.3.3.3.   Limitation de l'augmentation de capital au minimum

(177)

D'après le gouvernement belge, SNCB et IFB ont procédé à une analyse approfondie des besoins d'IFB en capital sur la base des résultats au 31 décembre 2005 et des prévisions pour l'année 2006. L'objectif a été de permettre à IFB de poursuivre ces activités dans les marchés de transbordement de fret et de la logistique avec un taux de solvabilité comparable à ses concurrents dans ces marchés.

(178)

Par rapport aux informations transmises avant la décision d'ouverture (voir points 265 à 269), la SNCB et IFB ont rassemblé des données supplémentaires sur les taux moyens de solvabilité pour, d'une part, des concurrents d'IFB exploitant des terminaux et, d'autre part, des sociétés de transport qui sont en concurrence avec IFB. Les taux de solvabilité (devant être compris comme le rapport entre fonds propres et total bilantaire) des sociétés en question sont présentés dans le schéma 16.

Schéma 16

Taux de solvabilité — Échantillon de sociétés comparables, 2004 (*)

Image

(179)

Il résulterait du schéma 16 que la médiane des taux de solvabilité des opérateurs de terminaux est de 56,6 %, tandis que la médiane des taux de solvabilité des sociétés de transport est de 20,4 %. Dès lors qu'IFB est active dans les deux secteurs, le taux de solvabilité d'IFB, en fonction des «benchmarks» précités, devrait être d'au moins 35,6 %. Ce dernier pourcentage a été calculé en pondérant les actifs immobilisés opérationnels d'IFB de la manière suivante:

42 % des actifs immobilisés opérationnels d'IFB (mesurés à leur valeur comptable nette, c'est-à-dire. après amortissements et réductions de valeur) sont affectés à l'activité terminaux,

58 % des actifs immobilisés opérationnels d'IFB sont affectés à l'activité de transport («logistics»).

(180)

Les autorités belges font observer que le taux de solvabilité cible d'IFB est aussi en ligne avec le taux de solvabilité réel de sociétés comme Gosselin (38,9 %) et Hupac (34,9 %), qui, comme IFB, combinent l'exploitation de terminaux avec des activités de logistique.

(181)

Sur la base du taux de solvabilité cible d'IFB de 35,6 % et d'une dette totale de 128,1 millions d'EUR (estimation au 30 juin 2006), l'augmentation de capital d'IFB devrait donc, d'après les calculs des autorités belges, comporter une conversion de dette en capital d'au moins 95,3 millions d'EUR.

3.3.3.4.   La contribution propre d'IFB

(182)

D'après les autorités belges, la contribution totale de la SNCB à la restructuration d’IFB s’élève à 95,3 millions d'EUR, soit le montant de l’augmentation de capital prévue. De ce montant, il conviendrait de soustraire les sommes qui ont été consacrées à la partie française du groupe, soit 39,1 millions d'EUR. Le solde, soit 56,2 millions d'EUR, représenterait donc la contribution de la SNCB à la restructuration des activités non françaises du groupe.

(183)

Ensuite, les autorités belges précisent que les besoins de financement pour les activités non françaises d’IFB pour la période de restructuration (du 1er janvier 2003 jusqu'au 30 juin 2006), étaient de 106,3 millions d'EUR. De ces besoins, 56,2 millions seront couverts par la SNCB et EUR 50,1 millions au moyen des ressources propres d’IFB. La contribution par IFB au coût total de la restructuration des activités en Belgique serait de 47,1 %.

(184)

Le tableau suivant montre les détails du financement:

Besoins et sources de financement

(hypothèse où la conversion de la créance de 63 MEUR constitue un «coût» de la restructuration

(EUR 1000)

 

Partie restructurée

Désinvestissements France

Total

Période: 1.1.2003-30.6.2006

 

 

 

 

 

 

 

A

BESOINS DE FINANCEMENT

 

 

 

A.1

Coûts de la restructuration

 

 

 

A.1.1

Perte brute d'exploitation («cash drain») hors effet des gains de productivité

–27 916

 

–27 916

 

(équivaut à la perte brute d'exploitation de 2002; prorata de 6 mois pour 2006)

 

 

 

A.1.2

Charges exceptionnelles

–32

 

–32

A.2.

Besoins de capital pendant la restructuration

 

 

 

A.2.1

Variation du besoin en fonds de roulement (augmentation)

–7 685

–8 000

–16 559

A.2.2

Investissements de remplacement dans des immobilisations non-financières

–6 611

 

–8 611

A.2.3

Investissements dans des immobilisations financières (participations)

– 782

–1 700

–2 482

A.3

Remboursements de dettes et intérêts

 

 

 

A.3.1

En faveur des créanciers (financiers) autres que la SNCB

 

 

 

A.3.1.1

Paiement des intérêts

–2 351

 

–2 351

A.3.1.2

Remboursement de la dette financière

–16 559

 

–16 559

A.3.2

En faveur de la SNCB

 

 

 

A.3.2.1

Remboursement de la dette antérieure à 2003

–33 200

–29 900

–53 000

A.3.2.2

Paiement des intérêts accumulés au 30.6.2006 sur la dette antérieure à 2003

–5 800

–5 200

–11 000

A.3.2.3

Paiement des intérêts accumulés au 30.6.2006 sur la facilité de crédit

–2 200

– 300

–2 500

A.3.2.4

Paiement des intérêts second semestre 2005 et premier semestre 2006

–3 100

–2 100

–6 200

A.4

Impôts (régularisation exercice d'imposition 1999)

–77

 

–77

 

 

 

 

 

 

Total des besoins (A.1 + A.2 + A.3 + A.4)

– 106 313

–47 100

– 153 413

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

B

SOURCES DE FINANCEMENT

 

 

 

B.1.

Financement par la SNCB:

 

 

 

B.1.1

Facilità de crédit (à convertir en capital par la suite)

13 300

1 700

15 000

B.1.2

Augmentation de capital (en plus de la conversion de la facilité de crédit)

42 920

37 380

90 300

 

Contribution totale de la SNCB (Sous-total B.1)

56 220

39 080

95 300

 

 

 

 

 

B.2

Financement par les moyens propres d'IFB

 

 

 

B.2.1

Gains de productivité:

 

 

 

B.2.1.1

Disparition partielle ou totale de la perte brute d'exploitation dans la rubrique A.1.1

26 167

 

26 167

B.2.1.2

Excédent brut d'exploitation en 2004, 2005 et 2006

10 429

 

10 429

B.2.2

Recettes financières

1 368

 

1 368

B.2.3

Variation du besoin en fonds de roulement (diminution)

2 687

 

2 687

B.2.4

Ventes d'immobilisations non-financières (essentiellement le terminal OCHZ en 2004)

4 771

 

4 771

B.2.5

Ventes d'immobilisations financières (participations)

1 267

8 020

9 287

B.2.6

Dette financière contractée auprès d'institutions de crédit

3 300

 

3 300

B.2.7

Recettes exceptionnelles

1 105

 

1 105

 

Contribution totale d'IFB (Sous-total B.2)

50 093

8 020

58 113

 

 

 

 

 

 

Total des sources (B.1 + B.2)

106 313

47 100

153 413

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Financement par la SNCB en % du total

52,9 %

 

 

 

Financement par IFB en % du total

47,1 %

 

 

 

 

CONTRIBUTION PROPRE

INVESTISSEUR PRIVÉ

 

(185)

La Belgique apporte les précisions suivantes à ce tableau.

(186)

Les besoins en financement reprennent les catégories suivantes:

coûts directs de la restructuration (section A.1): ces coûts comprennent principalement la perte brute d’exploitation («cash drain») cumulée, sans tenir compte des gains de productivité. Si on ne tient pas compte des gains de productivité qu'IFB a réalisés au cours de la réalisation de son plan de restructuration, la perte brute d’exploitation en 2003, 2004 et 2005 serait restée la même qu'en 2002, c'est-à-dire un montant annuel à financer de EUR 8 millions d'EUR, comme montré dans le tableau ci-dessous. Le besoin en financement pour 2006 a été limité à la moitié de ce montant, dans l'hypothèse d'une augmentation de capital au 30 juin 2006. Totalisée sur l'ensemble de la période de restructuration, la perte brute d’exploitation qu'aurait encourue IFB en l'absence des gains en productivité s’élève à 27,9 millions d'EUR,

(milliers d'EUR)

 

2002

2003

2004

2005

Prévision

2006

Budget

(jusqu'au 30.6)

Période 2003 au 30.6.2006

cumulatif

Résultat d'exploitation

(47 357)

(2 960)

5 740

3 007

1 213

 

+ Amortissements et réductions de valeur sur immobilisés

6 286

5 139

2 585

1 605

802

 

+ Réductions de valeur sur actifs circulants

6 433

(258)

(1 851)

(554)

0

 

+ Provisions

26 662

(4 670)

(1 599)

(980)

460

 

Résultat brut d'exploitation

(7 976)

(2 749)

4 875

3 079

2 475

7 680

Perte brute d'exploitation («cash drain») hors effet des gains de productivité

 

(7 976)

(7 976)

(7 976)

(3 988)

(27 916)

besoins en capital pendant la restructuration (variations du besoin en fonds de roulement et investissements au cours de la restructuration, section A.2): ces coûts consistent en des investissements nécessaires pendant la période de restructuration. Un accroissement du fonds de roulement a été nécessaire afin de financer les travaux en cours, absorber la différence entre créances et dettes commerciales et maintenir des liquidités suffisantes. Les investissements de remplacement dans des immobilisations corporelles ont été nécessaires pour pouvoir continuer les activités d'IFB pendant la réalisation du plan de restructuration. Ils ne visaient pas une expansion de la capacité d'IFB mais plutôt des investissements de remplacements d'actifs arrivés en fin de cycle de vie et entièrement amortis, ainsi que des investissements divers, comme des voitures, ordinateurs, petites rénovations de bâtiments, etc. L’investissement de 0,6 million d'EUR en immobilisations financières en 2004 était lié à la restructuration de la filiale IFB Maritime Germany: IFB Maritime Germany a été absorbée par Haeger & Schmidt International et la participation dans RKE détenue par Haeger & Schmidt International, a été transférée à IFB,

remboursement des dettes et intérêts (section A.3): à part les intérêts et remboursements des dettes financières à des institutions de crédit, la présente catégorie représente les intérêts et les remboursements sur les dettes vis-à-vis de la SNCB. La dette de 33,2 millions d'EUR est la partie de la dette de 63 millions d'EUR qui n’est pas relative aux filiales françaises. Les intérêts de 1,4 million d'EUR payables en 2006 sont les intérêts qui ne feront pas partie de l’augmentation de capital (pour limiter l’augmentation de capital au minimum). Les autres intérêts (pour un total de 9,7 millions d'EUR feront partie de l’augmentation de capital. Tous ces intérêts sont des intérêts sur les dettes liées aux activités non-françaises d’IFB,

impôts (section A.4): les impôts payés en 2004 sont une régularisation de l’exercice d’imposition 1999.

(187)

D'après la Belgique, ces besoins en financement ont été couverts en partie par IFB et en partie par la SNCB. En ce qui concerne la contribution d'IFB (section B.2), la Belgique apporte les informations complémentaires suivantes:

pendant la période de restructuration, IFB a réalisé d'importants gains de productivité (voir la section B.2.1). Ces réalisations ont amélioré le résultat brut d’exploitation, de sorte que la perte de 2002 a disparu partiellement en 2003 et entièrement en 2004, 2005 et 2006. En outre, un excédent a été dégagé en 2004 et 2005, ce qui devrait également être le cas en 2006. Ces réalisations confirment les prévisions faites sur la base des éléments dont la société IFB avait connaissance lors du développement du plan de restructuration (voir point 74 et 75 de la présente décision),

revenus financiers divers (section B.2.2): ils représentent 1,4 million d'EUR. Ces revenus financiers proviennent des intérêts qu'IFB a pu accumuler sur ses comptes bancaires. Ces revenus étaient prévisibles au moment du plan de restructuration, car ils correspondent aux intérêts «EURIBOR» pour les montants auxquels IFB pouvait raisonnablement s'attendre sur ses comptes en vue des prévisions de son plan de restructuration,

revenus extraordinaires (section B.2.8): ils représentent 1,1 million d'EUR. Ces revenus extraordinaires proviennent des plus-values qu'IFB a pu réaliser lors de la vente de 263 wagons EAOS […]. En 2003, lors de la préparation du plan de restructuration, ces plus-values étaient prévisibles, car le marché pour les wagons EAOS connaissait une demande importante à cause de la demande accrue pour ce genre de wagon en Europe de l'est,

en 2004 et 2005, IFB a libéré environ 2,7 millions d'EUR par la baisse de son besoin en fonds de roulement (section B.2.3),

IFB a financé les coûts de restructuration en partie par la vente d'actifs (sections B.2.4 et B.2.5). Hormis la vente d'actifs divers d'une importance relativement limitée, cette partie de la contribution est constituée principalement du désinvestissement en 2004 des actifs utilisés au terminal OCHZ. Les droits de copropriété (50 %) sur ces actifs utilisés par OCHZ ont été cédés […] (voir la ligne B.2.4 en 2004) et IFB a récupéré un montant supplémentaire de 0,9 million d'EUR en fonds de roulement d'OCHZ (voir la ligne B.2.5 pour 2004),

en 2003, IFB a obtenu un emprunt bancaire d'un montant de 2 millions d'EUR de l'ING Bank (voir la ligne B.2.6). En 2006, IFB a financé l’achat de «reach stackers» par le biais d’un emprunt externe de 1,3 million d'EUR.

(188)

La Belgique considère avoir contribué au plan de restructuration sur ses propres ressources; comme l'exigent les lignes directrices de 1999.

4.   APPRECIATION

4.1.   Evaluation du caractère d’aide des mesures de sauvetage et de restructuration

(189)

Selon l’article 87, paragraphe 1, du traité, «sont incompatibles avec le marché commun, dans la mesure où elles affectent les échanges entre États membres, les aides accordées par les États ou au moyen de ressources de l’État sous quelque forme que ce soit qui faussent ou menacent de fausser la concurrence en favorisant certaines entreprises ou certaines productions».

4.1.1.   Aide accordée par l’État ou au moyen de ressources de l’État

(190)

Se pose d’abord la question de savoir si le soutien financier de la SNCB à IFB a été «accordé par les États ou au moyen de ressources de l’État». Selon la jurisprudence Stardust Marine de la Cour de justice des Communautés européennes (28), ce critère est rempli si, d’une part, il s’agit de ressources d’État et si, d’autre part, leur octroi est imputable à l’État, à savoir la Belgique.

4.1.1.1.   Ressources d'État

(191)

La Commission constate que la SNCB est une entreprise publique au sens de l’article 2 de la directive 80/723/CEE: l’État belge détient 100 % du capital souscrit de la SNCB, et le Conseil d’administration, ainsi que l’administrateur délégué, sont nommés par le Roi, par arrêté délibéré en Conseil des Ministres. Ainsi, les critères de l’article 2, paragraphe 2, points a) et c), de ladite directive sont remplis.

(192)

Dans ce contexte, «… il convient de rappeler qu'il découle déjà de la jurisprudence de la Cour que l'article 87, paragraphe 1, CE englobe tous les moyens pécuniaires que les autorités publiques peuvent effectivement utiliser pour soutenir des entreprises […]. En conséquence, même si les sommes correspondant à la mesure en cause ne sont pas de façon permanente en possession du Trésor public, le fait qu'elles restent constamment sous contrôle public, et donc à la disposition des autorités nationales compétentes, suffit pour qu'elles soient qualifiées de ressources d'État.» (29).

(193)

En conséquence, la Commission a estimé dans la lettre d'ouverture (point 136 à 138) que les sommes mises à la disposition d’IFB devaient être qualifiées de ressources d’État.

(194)

La Belgique conteste le fait que toutes les ressources dont dispose la SNCB constituent des ressources d'État. La Commission répond aux trois arguments présentés par la Belgique comme suit:

(195)

La distinction proposée entre les ressources de la SNCB affectées aux missions de service public et les ressources affectées aux activités commerciales n'est pas pertinente à la lumière de l'arrêt Stardust Marine. En effet, cet arrêt concernait les ressources d'une banque publique, ce qui démontre bien que les ressources d'une entreprise publique affectées aux activités commerciales peuvent constituer aussi des ressources d'État.

(196)

L'argument selon lequel le patrimoine de la SNCB n'est pas à la disposition de la Belgique, mais serait affecté à l'objet social de la SNCB ne peut pas être accepté non plus. En effet, le fait que la Belgique détient 100 % du capital de la SNCB, que celui-ci reste constamment sous contrôle public et que l'État puisse à tout moment décider de privatiser la SNCB démontre que le patrimoine de celle-ci est à la disposition de l'État belge. En outre, la Commission note que l'État belge nomme les administrateurs du conseil de surveillance, ainsi que l'administrateur délégué, ce qui lui confère un certain contrôle sur l'entreprise.

(197)

L'argument d'après lequel les mesures accordées par la SNCB à IFB n'entraîneraient pas de perte pour le patrimoine de l'État belge est faux dans les faits: la Belgique étant le propriétaire de la SNCB, tout mauvais investissement qui diminue la valeur de la SNCB diminue aussi le patrimoine de l'État belge.

(198)

La Commission conclut donc que les mesures examinées ont été financées par des ressources d'Etat.

4.1.1.2.   Imputabilité

(199)

En ce qui concerne la nécessité de l’imputabilité des mesures à l’État concerné, l’arrêt Stardust Marine précise que «… le seul fait qu'une entreprise publique soit sous contrôle étatique ne suffit pas pour imputer des mesures prises par celle-ci, telles que les mesures de soutien financier en cause, à l'État. Il est encore nécessaire d'examiner si les autorités publiques doivent être considérées comme ayant été impliquées, d'une manière ou d'une autre, dans l'adoption de ces mesures. …» (30).

(200)

Il ressort donc de la jurisprudence de la Cour de justice que le critère de l’imputabilité à l’État doit faire l’objet d’un examen au cas par cas par la Commission. La Cour de justice admet qu’en règle générale, «… il sera très difficile pour un tiers, précisément à cause des relations privilégiées existant entre l’État et une entreprise publique, de démontrer dans un cas concret que des mesures d’aide prises par une telle entreprise ont effectivement été adoptées sur instruction des autorités publiques.». Selon la même jurisprudence, «…il y a lieu d’admettre que l’imputabilité à l’État d’une mesure d’aide prise par une entreprise peut être déduite d’un ensemble d’indices résultant des circonstances de l’espèce et du contexte dans lequel cette mesure est intervenue.» (31).

(201)

La Cour de justice clarifie ensuite quels critères pourraient être utilisés pour démontrer l'imputabilité:

«L'imputabilité à l'État d'une mesure d'aide prise par une entreprise publique peut être déduite d'un ensemble d'indices résultant des circonstances de l'espèce et du contexte dans lequel cette mesure est intervenue. À cet égard, la Cour a déjà pris en considération le fait que l'organisme en question ne pouvait pas prendre la décision contestée sans tenir compte des exigences des pouvoirs publics (voir, notamment, arrêt Van der Kooy e.a./Commission, précité, point 37) ou que, outre des éléments de nature organique qui liaient les entreprises publiques à l'État, celles-ci, par l'intermédiaire desquelles les aides avaient été accordées, devaient tenir compte des directives émanant d'un comitato interministeriale per la programmazione economica (CIPE) (arrêts précités du 21 mars 1991, Italie/Commission, C-303/88, points 11 et 12, ainsi que Italie/Commission, C-305/89, points 13 et 14).

D'autres indices pourraient, le cas échéant, être pertinents pour conclure à l'imputabilité à l'État d'une mesure d'aide prise par une entreprise publique, tels que, notamment, son intégration dans les structures de l'administration publique, la nature de ses activités et l'exercice de celles-ci sur le marché dans des conditions normales de concurrence avec des opérateurs privés, le statut juridique de l'entreprise, celle-ci relevant du droit public ou du droit commun des sociétés, l'intensité de la tutelle exercée par les autorités publiques sur la gestion de l'entreprise ou tout autre indice indiquant, dans le cas concret, une implication des autorités publiques ou l'improbabilité d'une absence d'implication dans l'adoption d'une mesure, eu égard également à l'ampleur de celle-ci, à son contenu ou aux conditions qu'elle comporte.» (32).

(202)

Dans la lettre d'ouverture (points 140 à 150), la Commission a distingué, en ce qui concerne l'imputabilité de la mesure, entre la période antérieure à la conclusion du contrat cadre le 7 avril 2003 et la période postérieure à ce contrat. Au vu des observations de la Belgique, il paraît plus approprié de distinguer entre trois périodes différentes:

la période antérieure au 19 juillet 2002 (date de la décision du Conseil d'administration de la SNCB d'approuver l'octroi d'une avance de trésorerie et d'accepter qu'une augmentation de capital pour IFB était «probable»),

la période comprise entre le 19 juillet 2002 et le 20 décembre 2002 (date de la décision du conseil d'administration de la SNCB d'approuver le principe d'une augmentation de capital d'IFB et autorisant le comité de direction de négocier le contrat cadre du 7 avril 2003),

la période postérieure au 20 décembre 2002.

(203)

En ce qui concerne la période antérieure à cette décision du conseil d'administration, se pose la question de savoir si la tolérance dont a fait preuve l'encadrement (comité de direction) de la SNCB en n'exigeant pas d'IFB le paiement des prestations de service de transport à partir de 2000 est imputable à l’État belge. Dans sa lettre d'ouverture (points 141 à 142), la Commission a émis des doutes sur le point de savoir si la décision d'accepter le non paiement systématique des factures pendant la période allant de fin 2000 à début 2003 avait été prise sans intervention des autorités belges.

(204)

D'après la réponse du gouvernement belge, le Conseil d'administration de la SNCB n'a été informé de cette pratique que le 19 juillet 2002; le Commissaire du gouvernement a été informé en même temps. La Commission n'a pas reçu d'observation de la part des parties tierces.

(205)

La Commission a trouvé dans les comptes rendus des débats à la Chambre et au Sénat du 6 mars 2002, du 24 janvier 2002 et du 28 février 2002 des remarques sur IFB, dans le contexte du débat plus large des députés et des sénateurs sur l'ouverture du marché du rail et du dossier ABX. Elle a par conséquent demandé au gouvernement belge de lui transmettre les études de Boston Consulting Group et de Team Consult, mentionnées lors de ces débats, ainsi que la décision du gouvernement belge du 22 février 2002, qui a également fait l'objet des débats.

(206)

Une analyse de ces documents n'a pas permis de révéler d'indices d'une prise d'influence de la part du gouvernement belge sur les décisions de la SNCB concernant l'avenir d'IFB.

(207)

Dès lors, se pose la question de savoir si la tolérance de l'encadrement d'une entreprise publique, telle que décrite au point 203 de la présente décision, peut être imputée à l'État belge, lorsqu'il n'y a pas d'indice d'une intervention spécifique de la part de l'administration dans l'émergence de la situation.

(208)

En effet, d'après la loi de 1993 qui établit la SNCB comme société par actions de droit public, l'encadrement de la SNCB, c'est-à-dire l'administrateur délégué et les membres du comité de direction, gèrent l'entreprise de manière autonome, sans intervention de la part des autorités publiques. Dès lors, en l'absence d'indices concrets d'une intervention de l'État dans la gestion du dossier IFB, la Commission doit conclure que la décision de l'encadrement de la SNCB de tolérer le non-paiement des factures d'IFB pendant la période allant de fin 2000 à juillet 2002 n'est pas imputable à l'État belge.

(209)

Dès le 19 juillet 2002, le conseil d'administration de la SNCB, et en son sein le commissaire du gouvernement qui représente les intérêts de la Belgique au conseil d'administration de la SNCB, a su qu'IFB ne payait plus ses factures depuis fin 2000, et a approuvé l'octroi à IFB d'une avance de 2,5 millions d'EUR au cours du deuxième semestre de 2002.

(210)

La Commission doit à cet égard vérifier si les critères établis par la jurisprudence Stardust Marine permettent d'imputer cette décision du conseil d'administration de la SNCB à la Belgique. En d'autres termes, il s'agit de vérifier en l'espèce si la présence du commissaire du gouvernement au conseil d'administration, en dépit de son absence d'intervention concrète sur la mesure en cause, permet néanmoins d'imputer la décision à l'État belge. Or il ressort des éléments dont dispose la Commission que ni l'instruction du dossier, ni les commentaires des parties tierces n'ont fait apparaître des indices suggérant que le gouvernement belge a cherché à influencer la décision du conseil d'administration du 19 juillet 2002. La SNCB étant une entreprise publique autonome, qui a le statut d'une société anonyme de droit public, elle jouit vis-à-vis de l'État belge d'une autonomie de gestion. En ce qui concerne la présence du commissaire du gouvernement au conseil d'administration de la SNCB, la Commission note que le rôle du commissaire était limité (voir également le rapport de la Cour des comptes à ce sujet (33): le commissaire du gouvernement ne pouvait intervenir à l'égard de la décision du 19 juillet 2002 que si elle risquait de porter préjudice à la mise en œuvre des tâches de service public de la SNCB. Vu le montant de l'aide (2,5 millions d'EUR) et la forme de l'aide (avance de trésorerie, avec intérêts), force est de constater que la décision n'était pas d'une nature à porter préjudice à la mise en œuvre des tâches de service public de la SNCB.

(211)

La Commission conclut que, au vu de ces éléments, l'octroi par la SNCB de l'avance de 2,5 millions d'EUR à IFB pour maintenir une activité commerciale sans aucun lien avec le service public n'est pas imputable à l'État belge.

(212)

La Commission conclut que le cas d'espèce ne comporte pas d'indices concernant l'intégration dans l'administration publique, la nature des activités et le statut qui pourraient permettre d'établir l'imputabilité à l'État belge de la décision du conseil d'administration du 19 juillet 2002 d'octroyer une avance de 2,5 millions d'EUR à IFB.

(213)

Le 20 décembre 2002, le conseil d'administration a décidé de conclure un contrat cadre avec IFB, qui devait inclure des mesures de sauvetage ainsi que des mesures de restructuration, et aboutir à une augmentation de capital d'IFB.

(214)

L’analyse du dossier par la Commission dans sa lettre d'ouverture (points 143 à 150) a relevé trois indices concrets en faveur d'une imputabilité à l’État belge de ces mesures de sauvetage et de restructuration en faveur d’IFB. Ces indices étaient :

la soumission du plan de restructuration à l’État belge pour approbation;

les articles de presse démontrant une forte influence du gouvernement belge sur la SNCB pendant l’année 2003,

l’ampleur, le contenu et les conditions du contrat cadre du 7 avril 2003.

(215)

Dans leur réponse à la lettre d'ouverture, les autorités belges contestent que ces trois indices soient suffisants pour établir l'imputabilité à l'État des mesures au sens de la jurisprudence Stardust Marine. La Commission réitère ci-après le contenu des indices, et explique pourquoi les arguments du gouvernement belge ne sauraient être accueillis.

a)   L’approbation par les autorités publiques (point 56 de l'arrêt Stardust Marine)

(216)

Dans ses arrêts Van der Kooy  (34), Italie/Commission  (35) et Commission/France  (36), la Cour de justice a déduit l’imputabilité de l’aide du fait que l’octroi de l’aide avait été soumis à l’approbation des autorités publiques. Dans l’arrêt Van der Kooy, cet élément suffit à lui seul pour établir l’imputabilité ; dans les arrêts Italie/Commission et Commission/France, l’approbation est combinée avec d’autres éléments qui montrent l’influence des pouvoirs publics (37). La décision Space Park Development GmbH, qui a été la première décision de la Commission appliquant l’arrêt Stardust Marine, a déduit l’imputabilité d’une aide également du fait que le prêt en question devait recevoir l’agrément des autorités du Land de Brême (38). Par conséquent, la soumission d’une mesure à l’État membre pour approbation constitue un indice d’imputabilité.

(217)

Or, dans le cas d'espèce, l’article 2 du contrat cadre oblige les Conseils d’administration de la SNCB et d’IFB à soumettre le plan de restructuration pour approbation à l’État belge (39). Cela constitue donc un premier indice de l’imputabilité à l’État belge de la décision de la SNCB de restructurer IFB.

(218)

Le gouvernement belge fait valoir que, à la différence de ce qui était prévu dans le contrat cadre, la SNCB et IFB n’ont finalement pas soumis le plan de restructuration à l’approbation du gouvernement belge, car cela aurait violé l’autonomie commerciale de la SNCB.

(219)

Comme déjà expliqué dans la lettre d'ouverture (points 146 et 147), cette situation de fait n’a pas pour conséquence de rendre cet indice d’imputabilité inopérant : il paraît exclu que les deux parties au contrat, la SNCB et IFB, aient inclus une telle clause dans le contrat, s’il n’y avait pas une influence du gouvernement belge en ce sens.

(220)

Le fait que le gouvernement belge prétend qu'il n’ait pas été formellement consulté sur la restructuration ne suffit pas pour exclure une influence informelle de la part du gouvernement belge lors de la préparation du contrat cadre du 7 avril 2003, ni pour exclure qu'une approbation ait eu lieu. En effet, comme la Cour de justice l'a constaté dans l'arrêt Stardust Marine, «… il sera très difficile pour un tiers, précisément à cause des relations privilégiées existant entre l’État et une entreprise publique, de démontrer dans un cas concret que des mesures d’aide prises par une telle entreprise ont effectivement été adoptées sur instruction des autorités publiques.». Dès lors, le simple fait que le contrat conclu entre les parties prévoit l'approbation par l'État belge constitue un indice fort pour une implication du gouvernement belge.

(221)

Dans sa réponse à la lettre d'ouverture, le gouvernement belge explique que la clause contenue dans l'article 2 du contrat cadre ne concernait pas le plan de restructuration lui-même, mais la communication par laquelle la Belgique allait notifier le contrat cadre à la Commission.

(222)

La Commission considère que cet argument n'est pas convaincant: si les parties au contrat cadre avaient eu à l'esprit sa seule notification par la Belgique à la Commission, elles l'auraient écrit de manière expresse dans l'article 2 du contrat. L'interprétation proposée par le gouvernement belge est contraire à la lettre du contrat.

(223)

Par conséquent, la Commission conclut que l'article 2 du contrat implique l'approbation des mesures par les autorités belges et constitue un indice d'imputabilité des mesures en objet à l'État belge.

b)   Articles de presse

(224)

Des indices supplémentaires en faveur d'une intervention du gouvernement belge dans la présente affaire se trouvent aussi dans des articles de presse (40) Ainsi, un article paru dans La libre Belgique du 19 Mai 2003 (41) cite la cellule presse de la SNCB, qui explique que la Belgique n’avait pas encore notifié les mesures de sauvetage à la Commission le 19 mai 2003, tandis que le contrat cadre avait été signé le 7 avril 2003, par le fait que «le pouvoir fédéral a[vait] son mot à dire». Dans un article paru en mars 2003 sur le site www.cheminots.be, Karel Vinck, à l’époque administrateur délégué de la SNCB, est cité à propos des dossiers ABX et IFB comme suit : «Il réclame une marge de manœuvre suffisante pour le management de la société». Cela laisse sous-entendre que l’encadrement de la SNCB considérait que l’État intervenait trop dans ces affaires.

(225)

La Belgique réfute cet indice. En ce qui concerne l'article de La libre Belgique, elle fait valoir, à l'instar de l'article 2 du contrat cadre, que le pouvoir fédéral n'avait son mot à dire que sur la communication du gouvernement belge à la Commission, par laquelle le contrat cadre serait notifié. Or, le texte de l'article de presse et du communiqué de presse de la SNCB est clair. Si la cellule de presse de la SNCB avait voulu dire que le gouvernement belge devait seulement approuver un texte de transmission à la Commission, elle aurait indiqué que le problème à résoudre était un pur problème de forme, et non pas de substance.

(226)

En ce qui concerne les propos tenus par Karel Vinck, les autorités belges considèrent qu'ils se sont limités à la gestion des missions de service public. Cela paraît peu crédible, car il a été interviewé notamment au sujet des dossiers ABX et IFB, qui, comme le gouvernement belge le reconnaît lui-même, concernent des activités commerciales de la SNCB, et non pas des missions de service public.

c)   Ampleur, contenu, conditions du contrat cadre

(227)

De manière plus générale, la Commission rappelle que le point 56 de l’arrêt Stardust Marine, précité, selon lequel «tout autre indice indiquant, dans le cas concret, une implication des autorités publiques ou l'improbabilité d'une absence d'implication dans l'adoption d'une mesure, eu égard également à l'ampleur de celle-ci, à son contenu ou aux conditions qu'elle comporte» doit être pris en compte pour établir l’imputabilité d’une mesure à l’État membre, a pour résultat que l’ampleur, le contenu et les conditions du contrat cadre constituent des indices supplémentaires d’imputabilité.

(228)

La Belgique réfute ce troisième indice, en répétant que la SNCB serait complètement autonome pour prendre toutes ses décisions, à l'exception de la gestion des services publics.

(229)

La Commission considère que la loi de 1993 qui régule le statut de la SNCB comme société par actions de droit public donne certes une autonomie à la SNCB pour ses activités commerciales. Cependant, la Commission rappelle que le commissaire du gouvernement est présent lors de chaque réunion du Comité d'Administration, et peut saisir les autorités belges par recours aux fins d'annuler une décision du conseil d'administration portant sur un sujet étranger à l’accomplissement des missions de service public si cette décision «porte […] préjudice à la mise en œuvre des tâches de service public.»

(230)

Comme déjà expliqué , la Commission considère que la décision d'octroyer une avance de trésorerie de 2,5 millions d'EUR ne pouvait pas faire l'objet d'un recours du commissaire du gouvernement, car à cause de son montant et de sa forme, elle ne pouvait pas porter préjudice à la mise en œuvre des tâches de service public.

(231)

L'appréciation doit être différente pour la décision d'investir presque 100 millions d'EUR dans une société au bord de la faillite. Cette décision devait amener le commissaire du gouvernement à intervenir, ou tout le moins à informer les autorités belges, pour qu'elles interviennent de manière formelle ou informelle, comme il l'a fait par exemple en 2000 pour les investissements dans ABX, branche italienne.

(232)

Par conséquent, la Commission considère que l'ampleur, le contenu et les conditions du contrat cadre constituent aussi, pris ensemble avec la présence et les pouvoirs du commissaire du gouvernement, un indice de l'imputabilité.

d)   Conclusion

(233)

Par conséquent, la Commission conclut que les mesures en objet sont imputables à l’État belge en ce qui concerne la période postérieure à la décision du Conseil d'administration de la SNCB du 20 décembre 2002.

(234)

Il faut donc analyser si les mesures prises par la SNCB concernant IFB à partir du 20 décembre 2002 ont conféré un avantage au bénéficiaire, ou si, au contraire, la SNCB a agi comme l’aurait fait un investisseur avisé en économie de marché.

4.1.2.   Avantage au bénéficiaire de l'aide en application du principe de l'investisseur avisé en économie de marché

(235)

Il faut analyser si la décision du Conseil d'administration de la SNCB du 20 décembre 2002 d'augmenter le capital d'IFB par une conversion des créances échues, et d'accorder des mesures de sauvetage, qui a amené la SNCB à signer, le 7 avril 2003, le contrat cadre avec IFB, a créé un avantage économique pour IFB, ou si cette décision relève de l'appréciation d'un investisseur privé en économie de marché.

(236)

Puisque la décision de la SNCB de ne plus demander le paiement de ses factures à IFB à partir de fin 2000 jusqu'en décembre 2002, ainsi que la décision de la SNCB d'accorder une avance de 2,5 millions d'EUR ne sont pas imputables à la Belgique, il n'y a plus lieu d'analyser ces décisions dans leurs détails.

(237)

Pour rappel, les mesures de sauvetage consistaient en:

l’octroi d’un délai de paiement pour des dettes de 63 millions d'EUR,

l’octroi d’une facilité de crédit de 15 millions d'EUR,

l’octroi d’une avance récupérable de 5 millions d'EUR.

(238)

Les mesures de restructuration comprenaient le désinvestissement des filiales en France et la restructuration et la continuation des activités en Belgique. Le financement de ces mesures était assuré d'abord par les mesures de sauvetage, le plan de restructuration prévoyant que ce financement serait pérennisé par la conversion des créances suivantes en capital social:

la conversion des dettes de 63 millions d'EUR pour lesquelles un délai de paiement a été octroyé en capital social,

la conversion de la facilité de crédit de 15 millions d'EUR en capital social,

la conversion des intérêts sur le délai de paiement et sur la facilité de crédit capitalisés en capital social.

(239)

Pour établir si la SNCB a agi comme l'aurait fait un investisseur privé en économie de marché, il y a lieu d'apprécier si, dans des circonstances similaires, un investisseur privé d'une taille qui puisse être comparée à celle de la SNCB et se trouvant dans une situation comparable à celle de la SNCB aurait pu être amené à procéder de la même manière (42).

(240)

La Cour de justice a précisé que si le comportement de l' investisseur privé n'est pas nécessairement celui de l'investisseur ordinaire plaçant des capitaux en vue de leur rentabilisation à plus ou moins court terme, il doit, au moins, être celui d' un holding privé ou d'un groupe privé d'entreprises poursuivant une politique structurelle, globale ou sectorielle, et guidé par des perspectives de rentabilité à plus long terme (43). Le Tribunal a précisé que la Commission est obligée «de faire une analyse complète de tous les éléments pertinents de l’opération litigieuse et de son contexte» afin de savoir si l’État a agi comme l’aurait fait un investisseur avisé en économie de marché (44).

(241)

La Belgique, dans sa réponse à la lettre d'ouverture, considère que la décision de la SNCB de demander à IFB de désinvestir les filiales françaises du groupe, et aussi la décision de la SNCB de demander à IFB de restructurer et continuer ses activités en Belgique, correspondent à des décisions qu'un investisseur privé en économie de marché aurait prises.

(242)

La Commission considère cependant que la question pertinente n'est pas de savoir si IFB, en désinvestissant ses filiales en France et restructurant et continuant ses activités en Belgique, s'est comportée comme un investisseur en économie de marché, mais de savoir si la décision de la SNCB de financer ces deux mesures est une décision qu'un investisseur privé aurait prise.

(243)

En 2002/2003, la SNCB devait donc décider si, dans l'ensemble, il était moins cher de financer la restructuration d'IFB (qui impliquait le désinvestissement des filiales en France et la continuation des activités en Belgique) ou s'il était moins cher de mettre IFB en faillite. La Commission a pour pratique constante de considérer qu'un investisseur privé aurait continué l'activité d'une filiale, si une comparaison entre les coûts de liquidation de la filiale et les coûts de restructuration de la filiale montre que les coûts de liquidation dépassent les coûts de restructuration (45).

(244)

Il convient donc d'établir d'abord le coût, pour la SNCB de chacun de ces deux scénarios, la restructuration et la liquidation d'IFB.

4.1.2.1.   Coût de la restructuration d'IFB

(245)

Dans le premier scénario, la SNCB consacre 95,3 millions d'EUR au financement de la restructuration d'IFB, sous forme de renoncement à la récupération de créances qui sont converties en capital. A l'issue de la restructuration, elle détient 100 % d'une entreprise dont la valeur est estimée à 31 millions d'EUR, mais ayant 34,2 millions d'EUR de provisions, et 15 millions d'EUR de dettes financières (hors dettes envers la SNCB), et donc ayant une valeur d'entreprise nette de – 18 millions d'EUR. La Commission considère ces estimations, fondées sur des méthodes reconnues, comme réalistes.

(246)

La Commission constate que par conséquent, dans l'hypothèse d'une vente d'IFB, la SNCB n'aurait pu obtenir qu'un prix de vente négatif.

4.1.2.2.   Coût hypothétique d'une liquidation d'IFB

(247)

Dans le second scénario, la SNCB renonce également à la récupération de ses 95 millions d'EUR de créances. La Belgique estime que, en outre, sur la base des éléments disponibles au moment de la conclusion du contrat cadre le 7 avril 2003, la liquidation des activités belges d'IFB aurait obligé la SNCB à supporter un coût supplémentaire compris entre 70,6 et 161,8 millions d'EUR. Ce montant correspondrait aux sommes qui auraient normalement pu être récupérées par la liquidation des actifs (37,5 millions d'EUR), desquelles sont soustraits les coûts occasionnés par la liquidation du passif d'IFB (67 à 76,9 millions d'EUR) et le coût du personnel SNCB devenu excédentaire (41,1 à 122,4 millions d'EUR) suite à l'arrêt des activités d'IFB.

(248)

La Commission ne partage pas cette analyse. D'abord, elle conteste que la SNCB ait dû payer la totalité des passifs d'IFB. Ensuite, elle conteste le montant du surcoût social calculé par la Belgique.

(249)

Contrairement à ce que prétend la Belgique, le fait qu'IFB avait un actif net (valeur de récupération de l'actif diminué de la valeur des passifs exigibles) négatif ne veut pas dire qu'en cas de faillite, la SNCB aurait dû supporter l'excédent de passif correspondant. En effet, La Commission rappelle que, en principe, une société comme IFB répond de ses obligations avec son propre patrimoine social. La responsabilité des actionnaires pour les obligations de la société ne va normalement pas au delà du capital social de celle-ci et n’affecte donc pas les patrimoines propres des différents actionnaires. Ce n’est que dans des cas exceptionnels et dans des conditions très strictes que certaines législations nationales prévoient la possibilité pour des tiers de se retourner vers des actionnaires (46).

(250)

Dans l'hypothèse d'une faillite d'IFB, la SNCB aurait donc perdu son capital social, mais elle n'aurait pas dû rembourser les autres créanciers d'IFB. A priori, le coût de la faillite d'IFB pour la SNCB agissant en tant qu'actionnaire aurait donc été de zéro, et non de 29,5 à 39,4 millions d'EUR comme le soutiennent les autorités belges.

(251)

Dans sa pratique décisionnelle, la Commission reconnaît cependant qu'une entreprise placée dans la situation de la SNCB aurait pu être obligée de supporter des coûts à d'autres titres qu'à titre d'actionnaire (47). Dans le présent cas, ces coûts sont notamment les suivants:

en tant que créancier, la SNCB perdra ses créances sur IFB, au moins à proportion de sa part dans les passifs d'IFB non couverts par l'actif; la Commission peut accepter que, compte tenu du rôle de la SNCB dans la liquidation d'IFB ce risque puisse être évalué jusqu'à concurrence du montant total des créances que la SCNB détient sur IFB, soit 95 millions d'EUR,

en tant que maison mère, la Commission pourrait accepter que, pour sauver sa réputation, il aurait été avisé pour la SNCB de reprendre une partie des dettes non payées aux fournisseurs d'IFB qui sont aussi fournisseurs de la SNCB.

(252)

Il convient donc d'estimer le montant maximum que la SNCB aurait pu être amenée à supporter à ce titre. A cet égard, la Belgique estime elle-même que les surcoûts supportés par la SNCB à ce titre ne devraient pas dépasser les 13 millions d'EUR. En réalité, les surcoûts réels auraient pu être inférieurs, car les créanciers d'IFB auraient d'abord récupéré une partie de leurs créances de la liquidation d'IFB, et n'auraient été défrayés par la SNCB qu'à hauteur du solde. Ce montant de 13 millions d'EUR est donc à considérer comme une limite maximale.

(253)

La Commission considère qu'en principe, un investisseur privé en économie de marché, qui doit décider entre le financement de la restructuration de sa filiale et sa mise en faillite, peut être amené à prendre en compte le coût pour la réduction de son personnel, si cette réduction de personnel était une conséquence directe et inévitable de la mise en faillite de la filiale.

(254)

La Belgique arrive à la conclusion que la mise en faillite d'IFB aurait laissé la SNCB avec un sureffectif de 530 employés, dont 50 étaient détachés auprès d'IFB, et dont 480 étaient employés au sein de la SNCB pour des activités dont la poursuite dépendaient des activités d'IFB. La réduction du personnel de la SNCB de 530 employés aurait engendré des coûts de 122,4 million EUR, soit 230 000 EUR par employé. Les détails de ce calcul sont expliqués dans la partie 3 de la présente décision.

(255)

La Commission considère qu'il n'est pas réaliste de considérer que la SNCB aurait seulement pu récupérer 21 % du trafic généré auparavant par IFB. Tout d'abord, comme la Belgique le reconnaît dans sa réponse à la décision d'ouverture, les marchés sur lesquels IFB est actif sont en plein essor (croissance de 11 % pour le transbordement de fret, croissance de 12 % pour le transport combiné). Dès lors, il paraît probable que des concurrents d'IFB auraient acheté les actifs d'IFB, afin de continuer ses activités.

(256)

Dans cette hypothèse, l'acheteur d'IFB aurait eu besoin de services de transport de fret ferroviaire. Vu la position très forte de la SNCB sur le marché du transport international des marchandises à partir de la Belgique, et son monopole (jusqu'au 1er janvier 2007) sur le marché du transport national des marchandises en Belgique, la Commission considère que l'acquéreur d'IFB aurait choisi, au moins pour une partie importante de ses besoins, la SNCB comme transporteur ferroviaire. Dès lors, même dans l'hypothèse d'une faillite d'IFB, la SNCB aurait pu récupérer une très grande partie de son trafic ferroviaire généré par IFB.

(257)

De plus, la Commission observe que les marchés de transport ferroviaire sont en croissance. Par conséquent, il paraît raisonnable d'assumer que la SNCB aurait pu grandir à la même vitesse que le marché, ce qui lui aurait permis de réintégrer au fur et à mesure les 50 employés détachés à IFB.

(258)

En conclusion, la Commission considère que la Belgique n'a pas su démontrer de manière convaincante que la SNCB aurait eu un sureffectif de 480 employés dans l'hypothèse d'une faillite d'IFB, et qu'elle n'aurait pas pu réintégrer les 50 employés détachés à IFB.

(259)

Sur la base des informations transmises par la Belgique, la Commission considère que, dans le second scénario, la SNCB renonce également (comme dans le premier scénario) à la récupération de ses créances à hauteur maximale de 95,3 millions d'EUR et supporte au-delà un coût maximal de 13 millions d'EUR.

4.1.2.3.   Conclusion

(260)

La SNCB renonçant dans les deux scénarios à ses créances sur IFB à hauteur de 95,3 millions d'EUR, la Belgique n'a pas démontré qu'en choisissant le premier scénario (financement de la restructuration), conduisant la SNCB à détenir une entreprise dont la valeur est négative et estimée à - 18 millions d'EUR, la SNCB a fait un choix économiquement avisé par rapport au second scénario de liquidation, dans lequel les seuls surcoûts prouvés dans le cadre de la présente procédure sont évalués à un maximum de 13 millions d'EUR.

(261)

La Commission conclut que la Belgique n'a pas démontré que la SNCB a agi comme un investisseur privé en économie de marché en prenant la décision, imputable à l'État belge, de financer la restructuration et la continuation des activités d'IFB en Belgique et le désinvestissement des activités d'IFB en France.

4.1.3.   Distorsion de concurrence et affectation des échanges entre les États membres

(262)

La Commission doit analyser la situation du marché concerné et les parts de marché des bénéficiaires sur ce marché, ainsi que l’impact que le soutien financier aura sur la situation de concurrence (48).

(263)

En l’espèce, le soutien financier a été accordé à une entreprise active sur des marchés ouverts à la concurrence, qui est en situation de concurrence avec d’autres acteurs de plusieurs Etats membres, comme démontré dans la partie 2 de la présente décision. Le soutien financier fausse ou menace de fausser donc la concurrence, et menace d’affecter ou affecte les échanges entre les Etats membres.

(264)

Le gouvernement belge, dans sa lettre de réponse à l'ouverture de procédure, conteste que ces deux critères de l'article 87, paragraphe 1, soient remplis, car la Commission n'aurait présenté aucune preuve établissant de telles distorsions de concurrence.

(265)

La Commission attire l'attention des autorités belges sur le fait que l'article 87, paragraphe 1, fait référence à une menace de distorsion. Par conséquent, la Commission ne doit pas apporter la preuve d'une distorsion de concurrence, mais doit expliquer de manière convaincante le risque de telles distorsions, ce qu'elle a fait dans la lettre d'ouverture (points 212 et 213) ainsi que dans la présente décision.

4.1.4.   Conclusion: présence d’une aide d’État

(266)

En conclusion, la Commission considère que le financement par la SNCB de la restructuration d'IFB (en Belgique) et de la cessation de ses activités en France, sous forme de la conversion en capital des dettes à hauteur de 95,3 millions d'EUR, est constitutif d'une aide d'État.

4.2.   Compatibilité de l’aide

(267)

L’article 87, paragraphe 3, point c), du traité prévoit que «peuvent être considérés comme compatibles avec le marché commun les aides destinées à faciliter le développement de certaines activités ou de certaines régions économiques, quand elles n’altèrent pas les conditions des échanges dans une mesure contraire à l’intérêt commun.».

(268)

L’aide accordée par la Belgique à travers la SNCB pourrait être compatible avec le marché commun en vertu de l’article 87, paragraphe 3, point c), tel qu’interprété par la Commission dans ses lignes directrices de 1999 et de 2004.

4.2.1.   Compatibilité en tant qu’aides au sauvetage

(269)

Seules les mesures consistant en une aide de trésorerie pourraient être compatibles en tant qu’aides au sauvetage. Dans le présent cas, les aides de trésorerie sont l’octroi du délai de paiement, de la facilité de crédit et de l’avance récupérable.

(270)

Au préalable, se pose la question de savoir quelle version des lignes directrices est applicable. La dernière version de ces lignes directrices est entrée en vigueur le 10 octobre 2004. Elle indique dans son point 7 «date d’application et durée»:

«(102)

La Commission appliquera les présentes lignes directrices à partir du 10 octobre 2004 et jusqu'au 9 octobre 2009.

(103)

Les notifications enregistrées par la Commission avant le 10 octobre 2004 seront examinées au regard des critères en vigueur au moment de la notification.

(104)

La Commission examinera la compatibilité avec le marché commun de toute aide au sauvetage ou à la restructuration octroyée sans son autorisation et donc en violation de l'article 88, paragraphe 3, du traité sur la base des présentes lignes directrices si l'aide, ou une partie de celle-ci, a été octroyée après leur publication au Journal officiel de l'Union européenne. Dans tous les autres cas elle fera l'examen sur la base des lignes directrices applicables au moment de l'octroi de l'aide.».

(271)

Les aides de trésorerie ont été octroyées le 7 avril 2003, par la conclusion d'un contrat cadre entre IFB et la SNCB. Leur octroi a eu lieu sans notification préalable à la Commission et donc en violation de l’article 88, paragraphe 3, du traité. L‘appréciation de leur compatibilité en tant qu’aides au sauvetage se fera donc sur base des lignes directrices de 1999.

(272)

Le point 23 des lignes directrices de 1999 définit les cinq conditions suivantes pour qu’une aide au sauvetage puisse être compatible avec le marché commun:

«Les aides au sauvetage doivent:

a)

consister en des aides de trésorerie prenant la forme de garanties de crédits ou de crédits. Dans les deux cas de figures, le crédit doit être soumis à un taux au moins comparable aux taux observés pour des prêts à des entreprises saines et notamment aux taux de référence adoptés par la Commission;

b)

être liées à des crédits dont la durée de remboursement qui suit le dernier versement à l'entreprise des sommes prêtées ne dépasse pas douze mois ; le remboursement du prêt lié à l’aide au sauvetage peut éventuellement être couvert par l’aide à la restructuration qui serait autorisée ultérieurement par la Commission;

c)

être justifiées par des raisons sociales aiguës et ne pas avoir des effets graves de débordement (“spillover”) négatif dans d'autres États membres;

d)

être accompagnées, lors de leur notification, d'un engagement de l'État membre de transmettre à la Commission, dans un délai de six mois à compter de l'autorisation de l'aide au sauvetage, soit un plan de restructuration, soit un plan de liquidation, soit la preuve que le prêt a été intégralement remboursé et/ou qu'il a été mis fin à la garantie;

e)

se borner dans leur montant à ce qui est nécessaire pour l'exploitation de l'entreprise (par exemple, la couverture des charges salariales ou des approvisionnements courants) pendant la période pour laquelle l'aide est autorisée».

(273)

La durée de remboursement prévue par le contrat cadre est de douze mois. Cependant, le gouvernement belge a informé la Commission que la durée a été tacitement prolongée entre les parties jusqu’au moment de l’augmentation de capital.

(274)

Au vu de cet élément, la Commission a considéré dans sa décision d'ouverture (points 232 et 233) que le critère du point 23 b) n’était pas rempli, et que les aides de trésorerie ne pouvaient pas être autorisées comme des aides au sauvetage.

(275)

La Belgique conteste cette appréciation juridique, avec trois arguments. Elle considère d'abord que la SNCB a maintenu les mesures de sauvetage dans le seul but de permettre à la Commission de conclure l'examen de l'affaire NN 9/2004. Elle se prévaut du point 24 des lignes directrices, qui prévoit qu'une autorisation des mesures de sauvetage reste valable jusqu'à ce que la Commission statue sur le plan de restructuration. Par conséquence, les autorités belges demandent à la Commission de ne pas invoquer la durée de sa propre procédure d'approbation des mesures de sauvetage pour contester la durée du maintien de ces mesures, et d'approuver, sur la base du point 24 des lignes directrices de 1999, les mesures de sauvetage jusqu'à ce que la Commission statue sur le plan de restructuration.

(276)

La Commission considère que cet argument n'est pas pertinent. En effet, le point 24 des lignes directrices de 1999 indique que «L'autorisation initiale de l'aide au sauvetage couvre une période d'un maximum de six mois ou, si l'État membre a soumis un plan de restructuration dans ce délai, jusqu'à ce que la Commission statue sur ce plan. Suite à l'autorisation initiale, et dans des cas exceptionnels dûment justifiés, la Commission pourra autoriser une prolongation du délai initial de six mois à la demande de l'État membre.»

(277)

La Commission note que la Belgique a mis en œuvre les aides de restructuration le 7 avril 2003. Le délai de six mois pour la soumission d'un plan de restructuration expirait donc le 6 octobre 2003. Les autorités belges ayant transmis le plan de restructuration à la Commission lors d'une réunion le 12 décembre 2003, elles n'ont pas respecté le délai prévu par le point 24 des lignes directrices.

(278)

Le deuxième argument des autorités belges, selon lequel ils auraient fourni tout élément nécessaire pour statuer sur les aides au sauvetage à la Commission par leur communication du 12 août 2003, n'est pas pertinent non plus. En effet, le fait que la Commission ait demandé des informations supplémentaires à plusieurs reprises par la suite montre que les informations fournies par la Belgique n'étaient pas complètes.

(279)

Quant à l'argument des autorités belges selon lequel la Commission n'aurait jamais émis de réserve sur le maintien provisoire des mesures de sauvetage, il suffit de rappeler que la Commission, dans ses lettres du 13 octobre 2003 et du 26 janvier 2005, a inclus la mise en garde suivante: la Commission attire «l'attention des autorités belges sur la clause de suspension de mise en œuvre de l'article 88, paragraphe 3, du Traité CE, prévue à l'article 3 du Règlement (CE) no 659/1999 du Conseil, laquelle interdit la mise à exécution de toute aide nouvelle avant que la Commission ait pris, ou soit réputée avoir pris, une décision l'autorisant. En outre, je me permets de rappeler aux autorités belges que la récupération de toute aide mise à exécution en contravention de cette clause pourrait être exigée auprès de son bénéficiaire aux termes de l'article 14 dudit règlement.»

(280)

La Commission conclut donc que les aides de trésorerie accordées par la SNCB à IFB ont dépassé le délai de 12 mois prévu au point 23 b) des lignes directrices de 1999, et que les autorités belges n'ont pas soumis à la Commission le plan de restructuration dans un délai de six mois, comme prévu au point 24 des Llignes directrices de 1999. Les aides accordées par la SNCB ne peuvent donc pas être autorisées en tant qu'aides au sauvetage. Elles pourraient néanmoins être compatibles avec le marché commun en tant qu’aides à la restructuration.

4.2.2.   Compatibilité des aides à la restructuration

(281)

Se pose de nouveau la question de savoir quelle version des lignes directrices est applicable. Dans sa décision d'ouverture (point 240), la Commission a considéré que si la SNCB décide de ne pas accorder de nouvel avantage à IFB, et si la preuve est apportée que la SNCB s’était engagée à convertir ses créances en capital avant la publication des lignes directrices de 2004, la Commission devrait examiner dans sa décision finale les aides accordées par la SNCB à IFB sur la base des lignes directrices de 1999.

(282)

Les autorités belges, dans leur réponse à la lettre d'ouverture, avaient informé la Commission que la SNCB renonçait à l'apport en nature de sa participation dans la société TRW à IFB, et retire sa notification du 28 février 2005. Dès lors, la Commission constate que la SNCB a décidé de ne pas accorder de nouvel avantage à IFB, mais de se limiter à convertir ses créances en capital.

(283)

Il convient de déterminer si la SNCB s'est engagée à convertir ses créances en capital avant la publication des lignes directrices de 2004. Les autorités belges, dans leur réponse à la lettre d'ouverture, ont démontré qu'en droit belge, l'engagement de la SNCB à convertir ses créances en capital était ferme dès le 7 avril 2003, le moment de la conclusion du contrat cadre, et le fait que cet engagement a été soumis à une condition suspensive, à savoir la notification à la Commission et l'approbation par la Commission, n'avait pas pour conséquence d'enlever à cet engagement son caractère ferme et définitif. En effet, comme il a été démontré par les autorités belges, si cette condition suspensive est remplie, cela a un effet rétroactif. L'engagement de la SNCB de convertir ses créances en capital est donc ferme depuis le 7 avril 2003.

(284)

Les deux conditions étant remplies, la Commission conclut qu'il y a lieu d'appliquer les lignes directrices de 1999 au présent cas. Cette conclusion est d'ailleurs conforme à l'analyse présentée dans la décision d'ouverture (point 240), où la Commission a conclu:

«[…] si la SNCB décide de ne pas accorder de nouveau avantage à IFB, et si la preuve était apportée que la SNCB s’était engagée à convertir ses créances en capital avant la publication des lignes directrices de 2004, la Commission devrait examiner dans sa décision finale les aides accordées par la SNCB à IFB sur la base des lignes directrices de 1999» (49).

(285)

Afin de pouvoir bénéficier d’aides à la restructuration, une entreprise doit d’abord être éligible pour l’application des lignes directrices. Pour être éligible, une entreprise doit être une entreprise en difficulté. Les lignes directrices de 1999 indiquent à ce propos (points 4 et 5):

«(4)

[…] La Commission considère […] qu'une entreprise est en difficulté au sens des présentes lignes directrices lorsqu'elle est incapable, avec ses propres ressources financières ou avec les ressources que sont prêts à lui apporter ses propriétaires/actionnaires et ses créanciers, d'enrayer des pertes qui la conduisent, en l'absence d'une intervention extérieure des pouvoirs publics, vers une mort économique quasi certaine à court ou moyen terme.

(5)

En particulier, une entreprise est en tous cas, et quelle que soit sa taille, considérée comme en difficulté aux fins des présentes lignes directrices:

a)

s'il s'agit d'une société dont les associés ont une responsabilité limitée, lorsque plus de la moitié de son capital souscrit a disparu et que plus du quart de ce capital a été perdu au cours des douze derniers mois.»

(286)

Comme il a déjà été démontré dans la décision d'ouverture (point 225), les comptes annuels d'IFB de 2002 montrent un capital souscrit de 48 millions d'EUR et des pertes courantes avant impôts de 50 millions d'EUR. Par conséquent, le capital social avait disparu quand la SNCB a décidé en avril 2003 d’accorder des aides. Plus de la moitié du capital souscrit ayant disparu à ce moment, dont plus d’un quart au cours des douze derniers mois, IFB est une entreprise en difficulté au sens des points 4 et 5 des lignes directrices.

(287)

De plus, l'entreprise ne doit pas être une entreprise nouvellement créée. Les lignes directrices de 1999 indiquent à ce propos (point 7).

«(7)

Aux fins des présentes lignes directrices une entreprise nouvellement créée n'est pas éligible aux aides au sauvetage et à la restructuration, même si sa position financière initiale est précaire. C'est notamment le cas lorsque l'entreprise nouvelle est issue de la liquidation d'une entreprise préexistante, ou de la reprise de ses seuls actifs.»

(288)

Comme décrit dans la partie 2 de la présente décision, IFB a été créée le 1er avril 1998, par la fusion de la société FerryBoats SA avec la société InterFerry SA, et l'apport du département «rail» de la société Edmond Depaire SA à l'entité fusionnée. Dans la lettre d'ouverture (points 218 à 223), la Commission a émis des doutes sur le point de savoir si la nouvelle entreprise IFB continuait la personnalité juridique d'une de ces trois sociétés, ou si elle avait été nouvellement créée en 1998.

(289)

Dans leur réponse à la lettre d'ouverture, les autorités belges ont établi qu'IFB continue la personnalité juridique de FerryBoats SA, qui a été enregistrée en 1923. La Commission conclut donc qu'IFB n'est pas une entreprise nouvellement créée au sens du point 7 des lignes directrices de 1999.

(290)

Le point 3.2.2 des lignes directrices de 1999 énonce les conditions pour l’autorisation d’une aide à la restructuration. Les conditions sont les suivantes:

le plan de restructuration doit permettre de rétablir dans un délai raisonnable la viabilité à long terme de l’entreprise;

des mesures doivent être prises pour atténuer, autant que possible, les conséquences défavorables de l’aide pour les concurrents;

l’aide doit être limitée au strict minimum nécessaire pour permettre la restructuration;

la Commission doit être mise en mesure de s’assurer du bon déroulement du plan de restructuration, au travers de rapports réguliers et détaillés;

les aides à la restructuration ne doivent être accordées qu’une seule fois.

4.2.2.1.   Plan de restructuration restaurant la viabilité économique de l'entreprise

(291)

En ce qui concerne le plan de restructuration restaurant la viabilité économique de l'entreprise, les lignes directrices de 1999 indiquent:

«(31)

L'octroi de l'aide est conditionné à la mise en œuvre du plan de restructuration qui aura été, pour toutes les aides individuelles, validé par la Commission.

(32)

Le plan de restructuration, dont la durée doit être aussi limitée que possible, doit permettre de rétablir dans un délai raisonnable la viabilité à long terme de l'entreprise, sur la base d'hypothèses réalistes concernant les conditions d'exploitation future. L'aide à la restructuration doit donc être liée à un plan viable de restructuration, sur lequel l'État membre s'engage. Ce plan doit être présenté à la Commission avec toutes les précisions nécessaires, dont notamment une étude de marché. L'amélioration de la viabilité doit résulter principalement de mesures internes prévues par le plan de restructuration. Elle ne pourrait être basée sur des facteurs externes, sur lesquels l'entreprise ne peut guère influer, tels que des variations de prix ou de la demande, que si les hypothèses avancées sur l'évolution du marché sont largement acceptées. Une restructuration doit impliquer l'abandon des activités, qui, même après restructuration, resteraient structurellement déficitaires.

(33)

Le plan de restructuration décrit les circonstances ayant entraîné les difficultés de l'entreprise, ce qui permet d'évaluer si les mesures proposées sont adaptées. Il tient compte notamment de la situation et de l'évolution prévisible de l'offre et de la demande sur le marché des produits concernés, avec des scénarios traduisant des hypothèses optimistes, pessimistes et médianes ainsi que des forces et faiblesses spécifiques de l'entreprise. Il permet pour l'entreprise une transition vers une nouvelle structure qui lui donne des perspectives de viabilité à long terme et la possibilité de fonctionner avec ses propres ressources.

(34)

Le plan de restructuration doit proposer une mutation de l'entreprise telle que cette dernière puisse couvrir, une fois la restructuration achevée, tous ses coûts, y compris les coûts d'amortissement et les charges financières. La rentabilité escomptée des capitaux propres de l'entreprise restructurée devra être suffisante pour lui permettre d'affronter la concurrence en ne comptant plus que sur ses seules forces.»

(292)

La Commission a conclu dans sa décision d'ouverture (points 242 à 247) que la Belgique avait fourni un plan de restructuration qui remplissait les critères énoncés aux lignes directrices, et n'a donc pas émis de doutes quant à ce critère. Suite à l'ouverture de la procédure, la Commission n'a pas reçu de commentaires des parties intéressés qui contesteraient cette conclusion.

(293)

La Commission observe que l’entreprise IFB a su démontrer sa viabilité économique à la fois dans son plan de restructuration, présenté en 2003, et dans ses résultats réalisés depuis lors. Par conséquent, la Commission conclut, comme dans la décision d'ouverture (points 271), que le critère «plan de restructuration restaurant la viabilité économique de l'entreprise» est rempli.

(294)

Toutefois, comme cela ressort du point 290 de la présente décision, le plan de restructuration établissant la viabilité économique de l'entreprise n'est pas une condition suffisante; il faut également établir que l'aide n'amène pas à des distorsions de concurrence indues.

4.2.2.2.   Prévention de distorsions de concurrence indues

(295)

En ce qui concerne la prévention de distorsions de concurrence indues, les lignes directrices de 1999 indiquent (points 35 à 39):

«(35)

Des mesures doivent être prises pour atténuer, autant que possible, les conséquences défavorables de l'aide pour les concurrents. À défaut, l'aide devrait être considérée comme “contraire à l'intérêt commun” et donc incompatible avec le marché commun.

(36)

Cette condition se traduit, le plus souvent, par une limitation de la présence que l'entreprise peut assumer sur son ou ses marchés à l'issue de la période de restructuration. Si le marché en cause est négligeable du point de vue communautaire et de l'EEE, ou si la ou les parts de ce marché détenues par l'entreprise sont négligeables, il doit être estimé qu'il n'y a pas de distorsion indue de la concurrence. De ce fait, il doit être considéré que cette condition ne s'applique en principe pas aux petites et moyennes entreprises, sauf si des dispositions sectorielles dans les règles de concurrence en matière d'aides d'État stipulent le contraire.

(37)

La limitation ou la réduction forcée de la présence sur le ou les marchés en cause sur lesquels l'entreprise opère représente une contrepartie pour les concurrents. Cette contrepartie doit être en rapport avec les effets de distorsion causés par l'aide, et notamment en rapport avec le poids relatif de l'entreprise sur son ou ses marchés. La Commission détermine son ampleur sur la base de l'étude de marché jointe au plan de restructuration et, lorsque la procédure a été ouverte, sur la base des éléments d'information fournis par les intervenants. La réduction de présence de l'entreprise est mise en œuvre par le plan de restructuration et les conditions qui peuvent y être attachées.

(38)

Un assouplissement de la nécessité de contreparties peut être envisagé si cette réduction ou limitation risque de conduire à une détérioration manifeste de la structure du marché, par exemple en ayant pour effet indirect de créer un monopole ou une situation d'oligopole étroit.

(39)

Les contreparties pourront prendre des formes différentes, selon que l'entreprise opère ou non dans un marché surcapacitaire. […]»

(296)

Avant la décision d'ouverture, les autorités belges avaient expliqué que, afin d’atténuer, autant que possible, les conséquences défavorables de l’aide pour les concurrents, IFB avait pris deux mesures:

le retrait de ses activités de transbordement en France

la fermeture du terminal de Bressoux en Belgique et la vente des participations dans les terminaux à Bruxelles et à Zeebrugge en Belgique

(297)

La Commission, dans sa décision d'ouverture (points 252 à 265), a émis des doutes quant à la question de savoir si ces mesures étaient suffisantes pour atténuer, autant que possible, les conséquences défavorables de l'aide pour les concurrents. Ces doutes concernaient les deux secteurs dans lesquels IFB continuait son activité, à savoir le marché du transbordement de fret belge et le marché de la logistique belge.

a)    Le marché du transbordement de fret belge

(298)

Les deux mesures mentionnées dans la lettre d'ouverture (point 260) concernaient le marché du transbordement de fret belge. Dans la lettre d'ouverture (point 262 à 264), la Commission a émis des doutes sur le point de savoir si ces mesures étaient suffisantes, notamment vu le fait que la société TRW, dont il était envisagé que la SNCB apporterait sa participation à IFB, détenait des participations importantes dans les terminaux de Bruxelles et de Zeebrugge, et qu’IFB possède des participations minoritaires dans un nombre important de terminaux belges.

(299)

Le gouvernement belge, dans sa réponse à la lettre d'ouverture, présente plusieurs arguments pour réfuter les doutes de la Commission. Il souligne d'abord qu'IFB a connu une croissance moins importante que le marché (4,1 % de croissance pour IFB, 10,7 % de croissance pour les terminaux dans le port d'Anvers, 12 % de croissance pour les terminaux dans la région ARA). La Commission considère que cette information supplémentaire permet de conclure que le poids d'IFB sur le marché a été réduit suite à la mise en œuvre du plan de restructuration.

(300)

Ensuite, la Belgique a montré que IFB avait diminué sa capacité sur le marché du transbordement de fret de 1,5 million EVP en 2002 à 1,1 million EVP à la fin de 2005. La Commission considère que cette diminution de capacité constitue une mesure atténuante importante.

(301)

Finalement, la Belgique a informé la Commission que l'apport de TRW à IFB ne sera pas réalisé. La Commission considère que ce dernier changement est important, puisqu'il a pour conséquence que la fermeture de Bressout et la vente des participations à Bruxelles et Zeebrugge mènent à une réduction véritable de la présence d'IFB sur le marché belge du transbordement du fret.

(302)

Au vu de ces arguments, et vu le fait que le part de marché d'IFB est réduite, la Commission considère que la Belgique a apporté la preuve que des mesures suffisantes pour atténuer, autant que possible, les conséquences défavorables de l’aide pour les concurrents ont été prises dans le secteur du transbordement du fret.

b)    Le marché de la logistique belge

(303)

Dans sa lettre d'ouverture (points 257 à 259), la Commission a noté que les mesures proposées ne concernent pas le marché de la logistique. La Commission a considéré dès lors que l’absence de mesures proposées pour le marché de la logistique, ainsi que le fait que le marché est en pleine mutation et le fait qu’IFB a pu augmenter son volume de manière importante, créaient des doutes sur la question de savoir si la Belgique avait limité, autant que possible, les conséquences défavorables pour la concurrence en ce qui concerne les activités de logistique d’IFB.

(304)

Le gouvernement belge, dans sa réponse à la lettre d'ouverture, a présenté cinq arguments qui visent à démontrer qu'IFB avait, contrairement à ce que prétendait la Commission dans sa décision d'ouverture, pris des mesures suffisantes pour limiter les distorsions de concurrence (pour les détails, voir description dans la partie 3 de la présente décision, points 177 à 187). Ces arguments peuvent être résumés comme suit:

diminution de 49 % de la capacité des wagons exploités par IFB,

part de marché d'IFB inférieure à 5 %,

croissance plus lente que le marché (9,9 % pour IFB, contre 12 % en moyenne pour le marché),

croissance surtout due au transport en vrac, sous-segment du marché sur lequel IFB n'était que très peu présente avant 2002,

la libéralisation du marché de fret ferroviaire à partir de 2007 augmentera encore la pression concurrentielle.

(305)

La Commission constate que les cinq arguments présentés par le gouvernement belge sont convaincants. Quant au premier argument, elle considère que le gouvernement belge a démontré qu'IFB a réduit sa capacité logistique, en réduisant le nombre des wagons exploités de 49 %, ce qui permet de limiter les distorsions de concurrence entraînées par les mesures en objet. Quant au deuxième argument, la Commission est d'accord avec le gouvernement belge que les parts de marché d'IFB sont réduites sur le marché de la logistique au sens du point 36 des lignes directrices de 1999. Quant au troisième argument, la Commission considère que les explications apportées par la Belgique pour nuancer l'augmentation du chiffre d'affaires d'IFB démontrent qu'IFB Logistics a grandi moins vite que ses concurrents, et que la croissance la plus importante concernait un sous-secteur où IFB n'est présente que de manière marginale. Quant au quatrième argument, la Commission considère que, même si la décision d'ouvrir ses terminaux aux concurrents devrait probablement aussi être due à des considérations économiques, elle a néanmoins pour conséquence de renforcer l'ouverture des marchés sur lesquels IFB est active, et peut ainsi limiter les effets négatifs de l'aide. Quant au cinquième argument, la Commission reconnaît que la situation d'IFB présente des similitudes avec la situation de SNCF fret, dans la mesure où IFB, comme SNCF fret, est active dans les sous-secteurs «transport ferroviaire» et «transport combiné», qui sont complètement libéralisés depuis le 1er janvier 2007 (50).

(306)

La Commission conclut que la Belgique a apporté la preuve que des mesures suffisantes pour atténuer, autant que possible, les conséquences défavorables de l’aide pour les concurrents ont été prises dans le secteur de la logistique.

c)    Conclusion

(307)

La Commission conclut que les autorités belges ont apporté la preuve qu'elles ont pris des mesures suffisantes pour atténuer, autant que possible, les conséquences défavorables de l’aide pour les concurrents sur les deux marchés en question.

4.2.2.3.   Aide limitée au minimum

(308)

En ce qui concerne la limitation de l'aide au minimum, les lignes directrices de 1999 indiquent (points 40 et 41):

«(40)

Le montant et l'intensité de l'aide doivent être limités au strict minimum nécessaire pour permettre la restructuration en fonction des disponibilités financières de l'entreprise, de ses actionnaires ou du groupe commercial dont elle fait partie. Les bénéficiaires de l'aide doivent contribuer de manière importante au plan de restructuration sur leurs propres ressources, y compris par la vente d'actifs, lorsque ceux-ci ne sont pas indispensables à la survie de l'entreprise, ou par un financement extérieur obtenu aux conditions du marché. Pour limiter les distorsions de concurrence, il convient d'éviter que l'aide ne soit accordée sous une forme ou dans un montant qui amène l'entreprise à disposer de liquidités excédentaires qu'elle pourrait consacrer à des activités agressives susceptibles de provoquer des distorsions sur le marché et qui ne seraient pas liées au processus de restructuration. À cet effet, la Commission examine le niveau du passif de l'entreprise après sa restructuration, y compris après tout report ou réduction des créances, notamment dans le cadre de sa continuation suite à une procédure collective de droit national fondée sur son insolvabilité. L'aide ne doit pas servir non plus à financer de nouveaux investissements qui ne sont pas indispensables au retour à la viabilité.

(41)

Dans tous les cas, il doit être démontré à la Commission que l'aide ne servira qu'au rétablissement de la viabilité de l'entreprise et qu'elle ne permettra pas à son bénéficiaire, durant la mise en œuvre du plan de restructuration, de développer sa capacité de production, sauf si cela est nécessaire pour rétablir la viabilité de l'entreprise sans pour autant fausser la concurrence.»

(309)

Il y a donc lieu de vérifier d'abord si l'aide est limitée au minimum, et ensuite si IFB a fait une contribution propre adéquate.

a)   Limitation de l'aide au minimum

(310)

Afin de démontrer que l’aide est limitée au strict minimum, le gouvernement belge explique que l’augmentation du capital se limite à restaurer le capital social d’IFB, qui était devenu négatif suite aux pertes enregistrées en 2001 et 2002, à une hauteur qui lui permet de retrouver la viabilité économique. Comme expliqué dans la partie 2 de la présente décision, le taux de solvabilité, c'est-à-dire le ratio fonds propres/passif, d’IFB sera de 35,6 % après l’augmentation de capital.

(311)

Dans sa décision d'ouverture (point 268), la Commission a constaté que l’augmentation du capital était inférieure de 20 millions d'EUR à ce que le consultant McKinsey avait préconisé dans le plan de restructuration; de plus, la Commission a noté (point 268) que le taux de solvabilité envisagé pour IFB était inférieur à celui des sociétés de terminaux et aussi, bien que dans une moindre mesure, à celui des sociétés ayant des activités mixtes.

(312)

Cependant, elle a constaté que ce taux était supérieur à la moyenne des taux enregistrés dans les sociétés de transport. En vue de cela, elle en a conclu qu'elle ne disposait pas d’éléments suffisants pour considérer de manière définitive que l’aide avait été limitée au strict minimum.

(313)

La Commission considère que, pour établir que l'aide est limitée au minimum, il convient de vérifier d'abord si le taux de solvabilité d'IFB, qui conservera des activités en Belgique, ne dépasse pas la moyenne de ses concurrents, et ensuite si IFB a désinvesti ses participations en France au moindre coût possible.

i)   Taux de solvabilité ne dépassant pas la moyenne des concurrents

(314)

La Belgique, dans sa réponse à la lettre d'ouverture, a apporté des informations supplémentaires. Elle a d'abord calculé le taux de solvabilité des six sociétés de terminaux les plus comparables à IFB et le taux de solvabilité des six sociétés de logistique les plus comparables à IFB. Ensuite, elle a calculé une moyenne, en pondérant les taux moyens des sociétés de terminal et des sociétés de logistique en fonction du poids relatif de ces deux activités au sein d'IFB. Il en résulte un taux de solvabilité moyen de 35,6 %, ce qui correspond au taux de solvabilité d'IFB après l'augmentation de capital prévue.

(315)

De plus, la Belgique a démontré que les deux concurrents les plus directs d'IFB, à savoir les sociétés Gosselin et Hupac, ont des taux de solvabilité très proches (38,9 % et 34,9 % respectivement).

(316)

Au vu des informations supplémentaires apportées par la Belgique, et du fait que l'augmentation de capital a été réduite, par rapport à la recommandation initiale de 120 millions d'EUR contenue dans le plan McKinsey de décembre 2003, à 95,3 millions d'EUR, la Commission considère que l'augmentation de capital est limitée à ce qui est strictement nécessaire.

ii)   Désinvestissement des participations en France au moindre coût

(317)

En ce qui concerne le désinvestissement des filiales d'IFB en France, la Commission a en plus vérifié que, dans son désengagement, IFB a toujours choisi l'option la moins chère, afin de limiter les coûts de désengagement, et donc l'aide, au minimum.

a)    Acimar

(318)

Le désinvestissement judiciaire d'Acimar par redressement judiciaire a coûté 3,9 millions d'EUR (voir partie 2 de la présente décision). La Commission constate que la Belgique a démontré que l'alternative, à savoir la continuation de ses activités, aurait nécessité le financement du cash-drain annuel jusqu’à fin 2005 par IFB, lequel aurait représenté une perte de 10,8 millions d'EUR au total, sans aucune certitude de pouvoir récupérer les créances de 3,9 millions d'EUR qui ont dû être abandonnées dans le redressement judiciaire.

(319)

La Commission conclut par conséquent qu'IFB a choisi l'option la moins chère pour Acimar.

b)    NFTI-ou

(320)

En ce qui concerne NFTI-ou, qui était une société contrôlée conjointement par IFB et le Port Autonome de Dunkerque, exploitant des terminaux dans le port de Dunkerque, IFB a exploré deux possibilités : la poursuite des activités, ou le désinvestissent par la vente de sa participation. Le désinvestissement entrainait des coûts de 18,5 millions d'EUR (voir description détaillée dans la partie 2 de la présente décision).

(321)

En ce qui concerne l'alternative, c'est-à-dire la poursuite des activités, la Belgique a démontré dans sa réponse que cela aurait généré des pertes de 36,2 millions d'EUR (voir description détaillée dans la partie 3 de la présente décision).

(322)

En vue du coût des deux options, la Commission considère qu'IFB a choisie l'option la moins onéreuse.

c)    IFB France

(323)

La cession d'IFB France, devenu par la suite AGEP, à NFTI-ou a coûté 0,9 million d'EUR (voir description détaillée dans la partie 2 de la présente décision). Se pose alors la question de savoir si la mise en faillite d’IFB France n’aurait pas été moins coûteuse pour IFB.

(324)

Comme dans l'hypothèse de la vente, IFB aurait dû abandonner ses créances sur IFB France d’une valeur de 0,8 million d'EUR. La Belgique prétend cependant que la mise en faillite aurait généré des coûts supplémentaires: IFB n’aurait pas pu réaliser le prix de vente de 0,1 million d'EUR, ce qui aurait généré des moins-values sur sa participation, et IFB aurait dû payer un total de 0,8 million d'EUR aux 14 employés, qui auraient perdu leur travail suite à la mise en faillite, en vertu du droit social français.

(325)

La Commission considère que la Belgique n'a pas apporté la preuve de ce risque de comblement de passif. Dès lors, la Commission doit rejeter cet argument. (51) La Commission conclut donc que la cession d'IFB France a coûté au moins le même prix que sa continuation.

(326)

La Commission conclut donc qu'IFB a choisi une des deux options les moins onéreuses.

d)    Dry Port Dunkerque

(327)

Pour le Dry Port de Dunkerque, il a été décidé de liquider la société, avec la vente, au préalable, d’une partie des actifs, à savoir la participation de 8,6 % dans NFTI-ou. Cela a coûté 7,9 millions d'EUR (voir description détaillée dans la partie 2 de la présente décision).

(328)

Dans le scénario alternatif, c'est-à-dire la poursuite des activités, IFB aurait du financer le cash drain annuel généré par les pertes de la société, ce qui aurait présenté une charge additionnelle de 2,6 millions d'EUR.

(329)

Par conséquent, la liquidation était l'option la moins coûteuse.

e)    SSTD

(330)

En vue de la décision stratégique de quitter le marché français, la décision de vendre SSTD pour 0,2 million d'EUR (voir description détaillée ci-dessus dans la partie 2) correspondait à l'option la plus avantageuse pour IFB.

f)    Conclusion

(331)

La Commission conclut qu'IFB a désinvesti ses participations en France au moindre coût possible, et qu'en conséquence le financement attribué par la SNCB pour financer ce désinvestissement nécessaire à la viabilité de la partie restant d'IFB a été limité au minimum possible.

b)   Contribution propre du bénéficiaire

(332)

Le point 40 des lignes directrices de 1999 indique que :

«Les bénéficiaires de l'aide doivent contribuer de manière importante au plan de restructuration sur leurs propres ressources, y compris par la vente d'actifs, lorsque ceux-ci ne sont pas indispensables à la survie de l'entreprise, ou par un financement extérieur obtenu aux conditions du marché.»

(333)

Dans la lettre d'ouverture (point 270), la Commission a noté que d’après le plan de restructuration, IFB ne semblait pas faire de contribution propre importante à sa restructuration, et que dès lors, la Commission avait des doutes sur le point de savoir si IFB contribuait à sa restructuration de manière suffisante.

(334)

La Belgique, dans sa réponse à la lettre d'ouverture, a expliqué de manière détaillée ce qu'elle considère être des contributions propres d'IFB à sa restructuration (voir description dans la partie 3 de la présente décision, points 194 à 201).

(335)

La Commission porte l'appréciation suivante sur les explications de la Belgique:

i)   Coûts de la restructuration

(336)

La Commission commence par déterminer le coût total de la restructuration, net des gains de productivité et des réductions du besoin en fonds de roulement.

Coûts nets de la restructuration

 

Perte nette d'exploitation

2,749

Charges exceptionnelles

0,032

Augmentation du besoin de fonds de roulement

12,998

Investissements de remplacements dans des immobilisations non financières

6,611

Investissements dans les immobilisations financières

1,882

Payement des intérêts à des entreprises autres que la SNCB

2,351

Remboursement de la dette financière

16,599

Remboursement partiel de la dette et des intérêts auprès de la SNCB

81,7

Dettes d'impôt

0,077

Total

125,56

(337)

À cet égard, la Commission considère qu’il est justifié, conformément à sa pratique décisionnelle (52), de retenir les coûts figurant dans le tableau ci-dessus, plutôt que les coûts tels que présentés par la Belgique (voir tableau figurant au point 184), notamment pour les raisons suivantes:

la perte d'exploitation (le «cash drain»). La Belgique avait inclus 27,916 millions d'EUR comme «perte brute d'exploitation» dans les coûts de restructuration. La Commission considère que, suivant sa pratique décisionnelle (53), il ne faut inclure que la perte nette d'exploitation dans les coûts de restructuration. Ces coûts peuvent être obtenus en déduisant de la perte brute d'exploitation au cours de la période de restructuration (27,916 millions d'EUR) les gains de productivité dans la période de restructuration (25,167 millions d'EUR). Par conséquent, la perte nette d'exploitation est de 2,749 millions d'EUR,

variations du besoin de fonds de roulement. La Belgique mentionne dans la partie «coûts», et dans la partie «contribution propre», des variations du besoin de fonds de roulement (54). Selon la pratique décisionnelle de la Commission (55), il ne faut prendre en compte pour les coûts de la restructuration que l'augmentation nette du besoin de fonds de roulement, qui est de 12,998 millions d'euros (56),

transferts intra-groupe. La Belgique inclut dans les coûts de restructuration, dans la rubrique «investissements dans les immobilisations financières», des transferts intra-groupes liés à la centralisation des participations belges du groupe. Ces transferts ont été les suivants: les actions de RKE (une entreprise belge, décrite en détail dans la partie 2, point 47, de la lettre d'ouverture), détenues par Haeger & Schmidt International (une filiale à 100 % d'IFB en Allemagne, décrite en détail également dans la partie 2, point 47, de la lettre d'ouverture) ont été transférées à IFB, qui les détient maintenant directement, et non plus indirectement à travers Haeger & Schmidt International. Le prix de cette transaction s’élevait à 1,6 million d'EUR et a été réglé par un paiement en liquide de 0,6 million d'EUR et par une diminution des créances (compte courant) d'IFB sur Haeger & Schmidt International de 1 million d'EUR.

La Commission considère que cette transaction, qui constitue un transfert au sein du groupe IFB, ne peut pas être prise en considération à titre de coût de restructuration, car elle est financièrement neutre au niveau du groupe. En effet, au coût de 0,6 million d'EUR pour IFB correspond un résultat amélioré de 0,6 million d'EUR de Haeger & Schmidt International, qui apparaît dans les comptes consolidés du groupe comme une augmentation de profit.

ii)   Financement par la SNCB et participation propre d'IFB

(338)

La SNCB finance la restructuration à hauteur de 95,3 millions d'EUR. Comme démontré aux points 199 à 237, ce financement est imputable à la Belgique. Il se fera par une conversion en capital de la facilité de crédit et des créances pour lesquels un délai de paiement a été accordé, ainsi que des intérêts y afférents.

(339)

Contrairement au point 43 des lignes directrices de 2004, les lignes directrices de 1999 n'excluent pas que la contribution propre de l'entreprise consiste en des bénéfices futurs. La Commission considère que, dans le cadre des lignes directrices de 1999, des bénéfices futurs peuvent constituer une contribution propre, si ces bénéfices futurs étaient prévisibles au moment de la préparation du plan de restructuration.

(340)

IFB contribuera à sa propre restructuration tout d'abord par ses bénéfices prévus pour les années 2004, 2005 et 2006, qui devaient s'élever au total à 10,5 millions d'EUR. Comme déjà expliqué, la prévision de ces bénéfices était basée sur des éléments factuels connus d'IFB au moment du développement du plan de restructuration, tels que la conclusion de nouveaux contrats importants, une réduction du coût salarial suite à une réduction de la main d'œuvre, et des synergies prévues dans le plan de restructuration. Par conséquent, la Commission conclut que ces bénéfices futurs étaient prévisibles au moment de la préparation du plan de restructuration.

(341)

Ensuite, IFB contribuera par ses recettes financières, qui résultent d'intérêts accumulés sur les comptes bancaires d'IFB, et qui s'élèvent au total à 1,4 million d'EUR. Comme décrit au point 187, ces recettes futures étaient prévisibles au moment de la préparation du plan de restructuration.

(342)

Par la vente d'immobilisations «non financières» à des entreprises privées, IFB contribuera à hauteur de 4,771 millions d'EUR. Hormis la vente d'actifs divers d'une importance relativement limitée, qui totalisent 0,271 million d'EUR, cette partie de la contribution est constituée principalement par le désinvestissement en 2004 des actifs utilisés au terminal OCHZ. Les droits de copropriété (50 %) sur ces actifs utilisés par OCHZ ont été cédés pour un prix de 4,5 millions d'EUR.

(343)

Par la vente d'immobilisations «financières», c'est-à-dire par la vente de participations minoritaires à des entreprises privées, IFB mobilisera 9,287 millions d'EUR. Ces revenus ont été générés par le désinvestissement de

Autocare Europe et IFB France en 2003,

GIE OCHZ, Brussels Port Invest SA et Brussels Terminal Intermodal SA en 2004, et

CNC Ferry Boats Intermodal en 2005.

Comme décrit au point 187, ces recettes futures étaient prévisibles au moment de la préparation du plan de restructuration.

(344)

La Commission considère que la Belgique a démontré qu'IFB a réduit, par les ventes à des entreprises privées qui viennent d'être décrites , ses activités à son core business.

(345)

Par des crédits contractés auprès d'institutions de crédit privés IFB a pu mobiliser 3,3 millions d'EUR en 2003 et 2006. Ces crédits ont été décrits en détail dans les points 75 à 79 de la décision d'ouverture. Ils ont été obtenus à conditions de marché, et sans garantie de la SNCB ou de l'État belge vis-à-vis des établissements bancaires.

(346)

Finalement, IFB contribue à hauteur de 1,105 million d'EUR, qui proviennent de recettes exceptionnelles. Ces recettes exceptionnelles correspondent aux plus-values réalisées sur la vente d’immobilisations non financières (principalement des EAOS-wagons et du matériel roulant sur terminaux).

(347)

La Commission conclut que la participation propre d'IFB aux coûts de sa restructuration s'élève à 24,927 millions d'EUR. Le tableau suivant reprend toutes les contributions d'IFB:

Bénéfices 2004 à 2006

10,429

Recettes financières

1,368

Ventes d'immobilisations non financières

4,771

Ventes d'immobilisations financières

9,287

Crédits contractés auprès de banques privées

3,300

Recettes exceptionnelles

1,105

Total

30,26

(348)

En résumé, les coûts totaux pour la restructuration d'IFB, qui s'élèvent à 125,56 millions d'EUR, sont payés à 95,3 millions d'EUR, ou 76 %, par la SNCB. Ce financement est imputable à l'État belge. A 30,26 millions d'EUR, ou 24 %, ces coûts sont supportés par IFB lui-même.

(349)

Dans le présent cas, la Commission rappelle que les lignes directrices de 1999 n'imposent pas de niveau minimum de contribution propre, mais seulement une contribution importante. Toutefois, dans la mesure où les nouvelles lignes directrices de 2004, qui ne sont pas applicables en l'espèce, exigent une contribution propre supérieure à 50 %, la Commission croit utile de rappeler les difficultés particulières du contexte de la restructuration (dont dépendent directement 250 emplois en Belgique); l'importance des réductions de capacités (réduction de 49 % du volume des wagons ferroviaires; cession de plusieurs terminaux); et l'importance du transport combiné, marché sur lequel IFB est active principalement, dans la politique de transport de l'Union européenne.

(350)

La Commission conclut qu'une participation de 24 % constitue dans ces circonstances une participation importante, vu aussi la taille de l'entreprise IFB et sa situation financière désastreuse avant la restructuration.

4.2.2.4.   Rapport annuel et «one time, last time»

(351)

Les lignes directrices de 1999 indiquent aux points 45 et 48:

«(45)

La Commission doit être mise en mesure de s'assurer du bon déroulement du plan de restructuration, au travers de rapports réguliers et détaillés, qui lui sont communiqués par l'État membre.

(48)

Afin d'éviter tout soutien abusif, les aides à la restructuration ne doivent être accordées qu'une seule fois. Lorsque la Commission est saisie d'un projet d'aide à la restructuration, l'État membre doit préciser si l'entreprise a déjà bénéficié dans le passé d'une aide d'État à la restructuration, y compris une aide octroyée avant l'entrée en vigueur des présentes lignes directrices et y compris une aide non notifiée. Si tel est le cas et si la période de restructuration s'est achevée, ou si le plan a cessé d'être mis en exécution, depuis moins de dix ans, alors la Commission n'autorisera normalement pas l'octroi d'une nouvelle aide à la restructuration sauf circonstances exceptionnelles, imprévisibles et non-imputables à l'entreprise. La circonstance imprévisible est celle qui ne pouvait être aucunement anticipée au moment où le plan de restructuration a été élaboré.»

(352)

Comme déjà constaté dans la décision d'ouverture (point 271), le gouvernement belge a accepté de fournir à la Commission un rapport annuel pour permettre à la Commission d'évaluer si le plan de restructuration est mis en œuvre selon les engagements pris par les autorités belges.

(353)

Comme également constaté dans la décision d'ouverture (point 271), le critère «one time, last time» a été respecté.

5.   CONCLUSIONS

(354)

La Commission constate que la Belgique a illégalement mis à exécution une partie des mesures en question en violation de l’article 88, paragraphe 3, du traité. Cependant, l'examen des mesures a démontré qu'en partie, elles ne constituent pas une aide, et que pour le reste, elles sont compatibles avec le marché commun,

A ARRÊTÉ LA PRÉSENTE DÉCISION:

Article 1

Le financement de la restructuration des activités d'InterFerryBoats SA en Belgique et le financement du désinvestissement des activités d'InterFerryBoats SA en France à hauteur de 95,3 millions d'EUR par la Société nationale des chemins de fer belges, imputables à la Belgique et mis à exécution par celle-ci, constituent une aide d'État à la restructuration, qui est compatible avec le marché commun.

Article 2

Le Royaume de Belgique est destinataire de la présente décision.

Fait à Bruxelles, le 24 avril 2007.

Par la Commission

Jacques BARROT

Vice-président


(1)  JO C 159 du 8.7.2006, p. 2.

(2)  JO L 237 du 24.8.1991, p. 25.

(3)  Moniteur Belge du 24 juillet 1926.

(4)  Date de l’entrée en vigueur de l’arrêté royal du 30 septembre 1992 portant approbation du premier contrat de gestion de la Société nationale des chemins de fer belges et fixant les mesures relatives à cette société, Moniteur Belge du 14 octobre 1992.

(5)  Telles que définies dans la loi du 21 mars 1991 portant réforme de certaines entreprises publiques économiques, Moniteur belge du 27 mars 1991.

(6)  IFB détient déjà une participation de 0,9 % dans cette société, qui exploite des terminaux à Anvers, Zeebrugge, Oostende, Charleroi, Liège, Bruxelles, Etge, Genk et Muizen, et offre des trains de fret pour 11 États membres.

(7)  Données confidentielles.

(8)  L'augmentation du nombre de jours à prester par an a entraîné une réduction des frais d'environ 0,6 million d'EUR par an; la centralisation des services administratifs et commerciaux à Berchem a entraîné une réduction des frais d'environ EUR 0,2 million par an, et la réduction du personnel à concurrence de 35 ETP a entrainé une réduction des frais de 1,75 million d'EUR par an.

(9)  Équivalents-temps-plein.

(10)  JO C 288 du 9.10.1999, p. 2.

(11)  JO C 244 du 1.10.2004, p. 2.

(12)  JO L 195 du 29.7.1980, p. 35.

(13)  Arrêt de la Cour du 16 mai 2002, France/Commission (C-482/99, Rec. 2002, p. I-4397), arrêt dit «Stardust Marine».

(14)  Arrêt du Tribunal de première instance du 27 janvier 1998 dans l'affaire T-67/94, Ladbroke Racing, Rec. 1998, I-1, point 109, confirmé par l'arrêt de la Cour de justice du 16 mai 2000 dans l'affaire C-83/98 P, Ladbroke Racing, Rec. 2000, I-3271, point 48.

(15)  Décision du 7 décembre 2005, affaire C(2005) 4447 (JO L 383 du 28.12.2006, p. 21).

(16)  du 1.5.2001 au 31.12.2001.

(17)  Karin S. Thorburn, Tuck School of Business Administration of Dartmouth College, publiée au Journal of Financial Economics (#58, 2000), et réalisé sur la base d'une analyse de 263 entreprises en Suède.

(18)  (Ormet Corporation a déposé son bilan le 30 janvier 2004 et a soumis un plan de réorganisation aux tribunaux compétents en septembre 2004). Les autorités belges font remarquer que ce taux est sensiblement plus élevé que le taux de 33 % utilisé par le professeur Thorburn dans son étude précitée.

(19)  L'estimation du passif social ne tient pas compte de la répercussion qu'aurait eue la faillite d'IFB sur le GIE OCHZ pour le passif social d’IFB. En effet, la faillite d'un membre d'un GIE entraîne de plein droit la dissolution du GIE en question.

(20)  En effet, les règles statutaires de la SNCB ne prévoient pas la possibilité de licencier son personnel statutaire, sauf durant la période de stage ou dans le cadre d’une procédure disciplinaire.

(21)  Cette valeur provient de l’actualisation des cash-flows liés aux provisions de 40,8 millions d'EUR prévues au bilan au 31.12.2002.

(22)  Voir les lignes directrices de 1999, point 36.

(23)  Voir notamment les lignes directrices concernant l'application de l'article 81, paragraphe 3, du traité JO C 101 du 27.4.2004, p. 97, en particulier le point 24.

(24)  La moyenne des augmentations des prix a été obtenue en pondérant les terminaux en fonction de leur chiffre d'affaires.

(25)  IFB était propriétaire de 368 wagons et avait conclu des locations de longue durée pour 376 autres wagons.

(26)  Au début de 2006 IFB était propriétaire de 204 wagons et avait conclu des contrats de location de longue durée pour 173 autres wagons.

(27)  Cette ouverture complète des marchés, qui est prévue par la directive 91/440/CE, a été mise en œuvre par un décret royal du 13 décembre 2005.

(28)  Arrêt de la Cour du 16 mai 2002, France/Commission, précité à la note 12 de bas de page, point 37.

(29)  Arrêt de la Cour du 16 mai 2002, France/Commission, précité à la note 12 de bas de page, point 37.

(30)  Arrêt de la Cour du 16 mai 2002, France/Commission, précité à la note 12 de bas de page, points 52 et 55.

(31)  Arrêt de la Cour du 16 mai 2002, France/Commission, précité à la note 12 de bas de page, points 53 et 54.

(32)  Arrêt de la Cour du 16 mai 2002, France/Commission, précité à la note 12 de bas de page, points 55 à 57.

(33)  Cour des comptes: Le bon emploi des deniers publics par la S.N.C.B.; audit effectué en exécution de la résolution de la Chambre des représentants du 11 mai 2000; Bruxelles, mai 2001.

(34)  Arrêt de la Cour du 2 février 1988, Kwekerij Gebroeders van der Kooy BV e.a./Commission (C-67/85, C-68/85 et 70/85, Rec. 1988, p. 219).

(35)  Arrêts de la Cour du 21 mars 1991, Italie/Commission (C-303/88, Rec. 1991, p. I-1433, et C-305/89, Rec. 1991, p. I-1603).

(36)  Arrêt de la Cour du 30 janvier 1985, Commission/France (290/83, Rec. 1985, p. 439).

(37)  À savoir la nomination des dirigeants par l’État pour les arrêts Commission/Italie; le financement par un établissement public, les modalités d’octroi qui correspondent à celles d’une aide étatique ordinaire, la présentation par le gouvernement de l’aide comme faisant partie d’un ensemble de mesures étatiques pour l’arrêt Commission/France.

(38)  Décision de la Commission du 17 septembre 2003 relative à l’aide d’État accordée par l’Allemagne en faveur de Space Park Development GmbH, JO L 61 du 27.2.2004, p. 66, considérant 30.

(39)  Pour rappel, l'article 4 est rédigé comme suit: Les Parties confirment leur intention de mettre à exécution les mesures suivantes pour autant qu’elles soient conformes à un plan de restructuration approuvé par leurs deux Conseils d’administration, par l’État belge et si nécessaire par la CE, et sous réserve d’approbation par les actionnaires d’IFB.

(40)  Des articles de presse peuvent constituer un indice d’imputabilité, voir décisions ABX Logistics, JO C 9 du 14.1.2004, p. 12; Sniace SA, JO L 108 du 30.4.2003, p. 35.

(41)  «Inter Ferry Boats coupée en 2 branches», mise en ligne le 19 mai 2003 sur le site www.lalibre.be

(42)  Arrêt du 21 mars 1991, Italie/Commission, C-305/89, points 19 et 20.

(43)  Arrêt du 21 mars 1991, Italie/Commission, C-305/89, points 19 et 20.

(44)  Arrêt du 6 mars 2003, WestLB Girozentrale/Commission (T-228/99 et T-233/99, Rec. 2003, p. II-435), point 2251.

(45)  Voir décision de la Commission du 7 décembre 2005, cas C 53/03, Belgique, Restructuration de la société ABX Logistics, point 196 et suivants.

(46)  Voir décision d'étendre la procédure C 53/03, Belgique, ABX Logistics, point 61.

(47)  Voir décision de la Commission du 7 décembre 2005, cas C 53/03, Belgique, Restructuration de la société ABX Logistics, point 204 et suivants.

(48)  Arrêt de la Cour du 13 mars 1985, Royaume des Pays-Bas et Leeuwarder Papierwarenfabriek/Commissio, (affaires jointes 296/82 et 318/82, Rec. 1985, p. 809), point 24.

(49)  Décision d'ouvrir la procédure formelle d'examen — Aide d'État C 46/05, point 240.

(50)  Cette ouverture complète des marchés, qui est prévue par la directive 91/440/CE, a été mise en œuvre par un décret royal du 13 décembre 2005.

(51)  Voir arrêt .de la Cour du 14 septembre 1994, Espagne/Commission, arrêt dit «Hytasa» (C-278/92, C-279/92 et C 208/92, Rec. 1999, p. I-4103), point 22, et décision de la Commission du 22 juillet 1998 dans l'affaire SDBO.

(52)  Voir décision de la Commission du 5 décembre 2005, ABX Logistics, dossier C 53/03, point 247.

(53)  Voir décision de la Commission du 5 décembre 2005, ABX Logistics, dossier C 53/03, point 247.

(54)  Les variations vers le haut s'expliquent par le besoin de financer les travaux en cours et d'absorber la différence entre créances et dettes commerciales et maintenir des liquidités suffisantes au début de la période de restructuration. Les variations vers le bas ont eu lieu au milieu et à la fin de la période de restructuration: ainsi, en 2004 et 2005, IFB a libéré environ 2,7 millions d'EUR par la baisse de son besoin en fonds de roulement. Cela a été rendu possible grâce à la récupération d'un montant de 0,9 million d'EUR en fonds de roulement d'OCHZ au moment de la vente de la participation de 50 % dans cette société, ainsi que suite à une diminution du délai de paiement accordé aux clients à partir de 2004 par rapport à 2003, en combinaison avec une politique de paiement de fournisseurs inchangée.

(55)  Voir décision de la Commission du 5 décembre 2005, ABX Logistics, dossier C 53/03, point 247.

(56)  Ce résultat est obtenu comme suit: 7,685 millions d'EUR (augmentation en Belgique) + 8,000 (augmentation en France) – 2,687 millions d'EUR (réduction), voir tableau figurant à la partie 3, point 184.


27.8.2009   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

L 225/53


DÉCISION DE LA COMMISSION

du 4 juin 2008

concernant les aides d’État C 41/05 accordées par la Hongrie dans le cadre d’accords d’achat d’électricité

[notifiée sous le numéro C(2008) 2223]

(Le texte en langue hongroise est le seul faisant foi.)

(Texte présentant de l'intérêt pour l'EEE)

(2009/609/CE)

LA COMMISSION DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES,

vu le traité instituant la Communauté européenne, et notamment son article 88, paragraphe 2, premier alinéa,

vu l’accord sur l’Espace économique européen, et notamment son article 62, paragraphe 1, point a),

après avoir invité les parties intéressées à présenter leurs observations, conformément aux dispositions précitées (1), et vu ces observations,

1.   PROCÉDURE

(1)

Par lettre datée du 31 mars 2004 et enregistrée le même jour, la Commission a reçu des autorités hongroises une notification concernant le décret gouvernemental 183/2002. (VIII.23.) (2), conformément à la procédure («procédure du mécanisme provisoire») visée à l’annexe IV, paragraphe 3, point 1, c) du traité d’adhésion à l’Union européenne de la République tchèque, de la République d’Estonie, de la République de Chypre, de la République de Lettonie, de la République de Lituanie, de la République de Hongrie, de la République de Malte, de la République de Pologne, de la République de Slovénie et de la République de Slovaquie. Le décret gouvernemental notifié régit le système de compensation des coûts supportés par le grossiste en électricité Magyar Villamos Művek Zrt. (Electricité de Hongrie S.A. – ci-après dénommé: MVM), détenu par l’État. La Commission a enregistré la notification sous le numéro d’aide d’État HU 1/2004.

(2)

Les autorités hongroises et la Commission ont échangé un certain nombre de lettres officielles (3) concernant la mesure. La Commission a aussi reçu des observations de tiers (4). Au cours de la procédure du mécanisme provisoire, la Commission a découvert que le marché de gros hongrois de l’électricité repose en fait sur des accords d’achat d’électricité à long terme (ci-après dénommés «AAE») conclus entre MVM et certains producteurs d’électricité. Sur la base des informations disponibles à l’époque, la Commission suspectait les AAE de contenir des éléments d’aides d’État illicites.

(3)

Par lettre datée du 13 avril 2005 et enregistrée le 15 avril 2005, les autorités hongroises ont retiré la notification concernant le décret gouvernemental 183/2002. Le 4 mai 2005, conformément au règlement (CE) no 659/1999 du Conseil du 22 mars 1999 portant modalités d’application de l’article 93 du traité CE (5) (ci-après dénommé «le règlement d’application»), la Commission a, d’initiative, enregistré un dossier d’aide d’État concernant les AAE (affaire numéro NN 49/05).

(4)

Par lettre datée du 24 mai 2005 (D/54013), la Commission a adressé une demande d’informations complémentaires aux autorités hongroises. La réponse datée du 20 juillet 2005 des autorités hongroises a été enregistrée par la Commission le 25 juillet 2005. Par lettre du 28 septembre 2005, enregistrée le 30 septembre 2005, les autorités hongroises ont fourni des informations complémentaires.

(5)

Par lettre du 9 novembre 2005, la Commission a informé la Hongrie de sa décision d’ouvrir la procédure prévue par l’article 88, paragraphe 2, du traité CE (ci-après dénommée «la décision d’ouverture de la procédure») concernant les AAE. Cette décision a été publiée au Journal officiel de l'Union européenne  (6).

(6)

Dans la décision d’ouverture de la procédure, la Commission a émis des doutes quant à la compatibilité des AAE avec le marché commun et invité les parties intéressées à communiquer leurs observations.

(7)

À la suite de la demande de prolongation du délai fixé pour présenter des observations, approuvée par la Commission (7), la Hongrie a présenté ses observations relatives à la décision d’ouverture de la procédure le 31 janvier 2006, observations que la Commission a enregistrés le 1er février 2006.

(8)

À la suite de un certain nombre de demandes de prolongation du délai fixé pour présenter des observations approuvées par la Commission (8), la Commission a enregistré comme suit les observations présentées par des tiers: observations présentées par MVM le 11 janvier 2006, observations d’un tiers qui souhaite conserver l’anonymat le 20 janvier 2006, observations présentées par Mátrai Erőmű Rt. (Centrale électrique Mátrai S.A.) les 20 janvier et 6 mars 2006, observations présentées par […] le 10 février 2006, observations présentées par AES-Tisza Erőmű Kft. (Centrale électrique AES-Tisza S.A.R.L.) les 13 et 14 février 2006, observations présentées par […] le 13 février 2006, observations présentées par Electrabel S.A. et sa filiale, Dunamenti Erőmű Kft. (Centrale électrique Dunamenti S.A.R.L.) le 14 février 2006, observations présentées par Budapesti Erőmű Rt. (Centrale électrique Budapesti S.A.) le 21 février 2006 et observations présentées par Csepeli Áramtermelő Kft. (Centrale électrique Csepeli S.A.R.L.) le 21 février 2006.

(9)

Les autorités hongroises ayant confirmé qu’elles respecteraient la confidentialité des informations fournies par des tiers dans le cadre de la présente procédure (10), la Commission a transmis les observations ci-dessus par lettre datée du 25 avril 2006.

(10)

Les autorités hongroises ont présenté la première partie de leurs commentaires concernant les observations de tiers par lettre datée du 28 juin 2006 et enregistrée le 29 juin 2006; la deuxième partie de ces commentaires a été présentée par lettre datée du 24 juillet 2006 et enregistrée le 25 juillet 2006.

(11)

Ayant connaissance des modifications prévues de la législation dans le secteur énergétique hongrois, par lettre du 17 octobre 2006 adressée au ministre Kóka, la commissaire Kroes a demandé instamment au gouvernement hongrois de régler, dans la nouvelle législation, la question des AAE et des mesures compensatoires potentielles et de les aligner sur le droit de l’Union européenne.

(12)

Le 19 décembre 2006, la société AES-Tisza a présenté de nouvelles observations contestant plusieurs éléments de la procédure de la Commission.

(13)

Par lettre datée du 21 novembre 2006 et enregistrée le 23 novembre 2006, par lettre datée du 15 janvier 2007 et enregistrée le même jour, ainsi que lors des rencontres avec la Commission – qui ont eu lieu les 18 décembre 2006 et 8 mars 2007 – les autorités hongroises ont confirmé leur volonté de modifier les dispositions législatives dans le contexte de la libéralisation du secteur énergétique, et de modifier par la même occasion la situation existante sur le marché de gros de l’électricité.

(14)

La Commission a demandé des informations complémentaires le 23 avril 2007. La Hongrie y a répondu le 5 juin 2007, et a transmis de nouvelles informations le 6 août 2007.

(15)

Le 4 mai 2007, les autorités hongroises ont informé la Commission de ce qu’elles étaient en train de constituer un groupe de travail pour mener des négociations avec tous les producteurs concernés sur une résiliation ou une modification substantielle des AAE. Dans le prolongement, le gouvernement a adopté, le 11 mai 2007, la décision No 2080/2007. (V.11.) concernant la régularisation des accords à long terme conclus dans le secteur de l’électricité (11), portant création du groupe de travail susmentionné (piloté par les servies du Premier ministre), pour régler sans délai la situation des AAE en conformité avec les règles européennes sur les aides d’État, et ordonnant que des négociations officielles soient engagées à ce sujet avec les producteurs d’électricité concernés. Par lettre datée du 3 juillet 2007, les autorités hongroises ont notifié les résultats des premières négociations qui se sont déroulées en juin 2007.

(16)

La nouvelle loi sur l’énergie électrique (12), qui s’inscrit dans le cadre du processus de libéralisation, a été promulguée le 2 juillet 2007 et est entrée en vigueur en deux étapes: le 15 octobre 2007 et le 1er janvier 2008. Par lettre datée du 25 juillet 2007, les autorités hongroises ont notifié à la Commission les résultats de la nouvelle loi en ce qui concerne l’ouverture du marché hongrois de l’électricité. La nouvelle loi n’a cependant pas modifié les AAE conclus entre MVM et les producteurs d’électricité énumérés dans la décision d’ouverture de la procédure, qui sont restés en vigueur tels quels.

(17)

Par lettre du 26 juillet 2007 la Commission a adressé une série de questions supplémentaires aux autorités hongroises.

(18)

Le 7 septembre 2007, la Commission a enregistré une lettre des autorités hongroises lui demandant un délai supplémentaire pour mener à bien les négociations avec les producteurs.

(19)

La Commission a enregistré la réponse de la Hongrie à ses questions du 26 juillet 2007 les 24 septembre et 31 octobre 2007.

(20)

Le 14 décembre 2007 la Commission a, conformément à l’article 5, paragraphe 2, du règlement (CE) no 659/1999, adressé aux autorités hongroises une lettre de rappel énumérant les questions pour lesquelles les informations fournies restaient incomplètes. Les autorités hongroises y ont répondu par lettre du 16 janvier 2008.

(21)

Les centrales Dunamenti Erőmű et AES-Tisza Erőmű n’ayant pas fourni les informations demandées, les autorités hongroises ont fait valoir qu’elles n’étaient pas en mesure de répondre de manière exhaustive aux questions de la Commission.

(22)

Le 15 février 2008, la Commission a dès lors adopté une décision d’injonction d’information demandant à la Hongrie de fournir dans les 15 jours les informations énumérées dans la décision.

(23)

Le 27 février, la centrale Dunamenti Erőmű a envoyé à la Commission une copie de sa réponse aux questions posées par les autorités hongroises et expliqué les raisons pour lesquelles elle n’était pas en mesure de répondre aux questions qui lui avaient été adressées. Les autorités hongroises ont envoyé leusr réponses les 4 et 13 mars 2008. À la demande expresse de la centrale Dunamenti Erőmű, les autorités hongroises ont joint à leur réponse les lettres datées du 14 mai 2007, du 21 août 2007, du 13 septembre 2007, du 7 décembre 2007, du 14 janvier 2008 et du 20 février 2008 de la centrale Dunamenti Erőmű adressées au Ministère des finances et à l’Office hongrois de l’énergie. Les autorités hongroises n’avaient préalablement pas transmis à la Commission une copie de ces lettres (13); toutefois elles ont inclus les informations jugées pertinentes dans leurs réponses aux questions de la Commission tout au long de la procédure.

(24)

Il apparaît à la lumière des réponses des autorités hongroises que la centrale AES-Tisza Erőmű ne leur a transmis aucune réponse. Le 10 mars 2008, la centrale AES-Tisza Erőmű a envoyé une lettre par télécopie à Mme Kroes, commissaire européenne, dans laquelle elle prétend que les autorités hongroises disposaient déjà de toutes les informations demandées par la Commission.

(25)

Par lettre datée du 13 mai 2008, les autorités hongroises ont transmis à la Commission, sur la base des informations dont elles disposaient, les informations concernant les questions posées au chapitre III, paragraphe 1, points a) à d) de la décision d’injonction d’information. Elles n’ont cependant pas fourni d’informations complémentaires en réponse à la question posée au chapitre III, paragraphe 1, point e) concernant les investissements des deux producteurs d’électricité mentionnés ci-dessus.

(26)

Depuis l’enregistrement de l’affaire HU1/2004, une partie considérable des échanges d’informations a porté sur l’interprétation et l’application concrète de la communication de la Commission relative à la méthodologie d’analyse (ci-après: la «méthodologie») des aides d’État liées aux coûts échoués (14). Il semblait à la lumière des documents soumis dans le cadre de la procédure que les autorités hongroises souhaitaient instaurer un système d’aides d’État pour compenser les coûts échoués, dont l’évaluation aurait pu figurer dans la présente décision. En conséquence, la Commission et les autorités hongroises ont mené, tout au long de la procédure, des négociations approfondies sur les modalités précises d’un système compensatoire que la Hongrie pourrait adopter et qui satisferait aux critères de la méthodologie.

(27)

Malgré les discussions techniques menées sur un éventuel mécanisme compensatoire, – à la date de la présente décision – les autorités hongroises n’ont toujours pas soumis à la Commission un mécanisme compensatoire global confirmé par le gouvernement hongrois. Par lettre datée du 13 mars 2008, les autorités hongroises ont expressément confirmé ne pas souhaiter, dans l’état actuel des choses, accorder aux producteurs d’électricité une compensation des coûts échoués. Elles se sont cependant réservé le droit d’accorder plus tard une telle compensation aux producteurs d’électricité.

(28)

Par lettre datée du 7 avril 2008, la Commission a demandé aux autorités hongroises de confirmer certaines informations. Par lettre enregistrée le 22 avril 2008, les autorités hongroises ont fourni les informations demandées.

(29)

Par lettre datée du 20 mai 2008, les autorités hongroises ont notifié à la Commission que le 31 mars 2008 les parties ont résilié l’AAE de Paksi Atomerőmű (Centrale nucléaire de Paks). Bien que les centrales Csepeli Áramtermelő Kft. et Pannonpower Holding Rt. (Pannonpower Holding S.A.) aient signé l’accord de résiliation de leur AAE en avril 2008, l’entrée en vigueur de ces accords doit, à la date de la présente décision, encore être approuvée par les actionnaires et les établissements bancaires.

(30)

La centrale Budapesti Erőmű Rt. a attaqué la décision d’ouvrir la procédure par une demande introduite le 3 mars 2006 et enregistrée sous le numéro de dossier T-80/06 auprès du Tribunal de première instance. Le 6 juin 2006, la centrale Csepeli Áramtermelő Kft. a demandé de pouvoir intervenir dans la procédure en soutien de la requête de la centrale Budapesti Erőmű, ce que le Tribunal a autorisé par une ordonnance du 11 mars 2008.

(31)

En outre, deux procédures d’arbitrage internationales contre la République de Hongrie ont été engagées auprès du Centre international de règlement des différends relatifs aux investissements (International Centre for Settlement of Investment Disputes, ICSID) par les producteurs d’électricité […] et […], actionnaires de centrales électriques hongroises liées par un AAE. Ces procédures se fondent sur les dispositions du traité sur la charte de l’énergie relatives à la protection de l’investissement.

2.   DESCRIPTION DE LA MESURE

(32)

Du 31 décembre 1991 au 31 décembre 2002, le marché hongrois de l’électricité s’articulait autour d’un acheteur unique, la compagnie Magyar Villamos Művek (Electricité de Hongrie – MVM). MVM est une société détenue à 99,9 % par l’État, active dans la production d’électricité, le commerce de gros, la transmission et la revente. Dans le cadre du modèle d’«acheteur unique», les producteurs d’électricité ne pouvaient vendre directement l’énergie qu’à MVM (sauf annulation par MVM des contrats conclus avec les compagnies de distribution régionale), et seule MVM était en droit de fournir de l’électricité aux distributeurs régionaux. Conformément à la loi XLVIII de 1994 sur l’énergie électrique (ci-après dénommée «première loi sur l’énergie électrique»), MVM était tenue d’assurer la sécurité de l’approvisionnement énergétique de la Hongrie en observant le principe du moindre coût.

(33)

La loi CX de 2001 sur l’énergie électrique (qui a remplacé la première loi sur l’énergie électrique), ci-après dénommée «la deuxième loi sur l’énergie électrique», est entrée en vigueur le 1er janvier 2003. Le double modèle hongrois est resté en vigueur jusqu’au 1er janvier 2008, date de l’entrée en vigueur de la loi LXXXVI de 2007 sur l’énergie électrique (ci-après dénommée «la troisième loi sur l’énergie électrique»), qui a remplacé la deuxième loi). Dans ce régime, un secteur de service public coexistait avec un secteur concurrentiel, et les clients éligibles (de plus en plus nombreux) étaient autorisés à basculer vers le secteur concurrentiel. Dans le secteur public, MVM devenait le seul grossiste, mais dans le secteur du marché libre, d’autres opérateurs ont fait leur apparition. La troisième loi sur l’énergie électrique, si elle a aboli le secteur de service public, a cependant maintenu l’obligation de service universel pour les clients résidentiels et quelques clients commerciaux – comme le permet la deuxième directive Électricité (15).

(34)

La première loi sur l’énergie électrique a contraint MVM d’analyser les besoins globaux de la Hongrie en électricité et d’élaborer tous les deux ans un Plan national de construction de centrales électriques. Ce plan doit être soumis au gouvernement hongrois et au Parlement pour approbation.

(35)

Il apparaît à la lumière de la première loi sur l’énergie électrique, ainsi que des observations du gouvernement hongrois (16), qu’au milieu des années 90, les objectifs les plus urgents fixés au marché hongrois de l’énergie étaient les suivants: garantir la sécurité d’approvisionnement au coût le plus bas possible, moderniser l’infrastructure dans le respect des normes de protection environnementale en vigueur et réaliser la nécessaire restructuration du secteur de la distribution d’électricité. Pour atteindre ces objectifs généraux, des accords d’achat d’électricité à long terme ont été proposés aux investisseurs étrangers qui s’engageaient à investir dans la construction et la modernisation des centrales électriques en Hongrie. Les différents AAE ont été signés d’une part par les centrales électriques et d’autre part par MVM.

(36)

Les AAE conclus par MVM et les différentes centrales électriques (17) ont permis à MVM de constituer un portefeuille de production équilibré et de respecter aussi son obligation de garantir la sécurité d’approvisionnement. Ils permettent à MVM de répondre aux besoins de charge de base (centrales à charbon et centrales nucléaires) tout comme aux besoins de charge maximum (centrales au gaz).

(37)

Les AAE imposent aux producteurs d’électricité de dûment entretenir et exploiter leurs unités de production. Ils réservent à MVM la totalité ou la majeure partie de la capacité de production (MW) des centrales électriques. Cette attribution de la capacité est indépendante du taux d’utilisation réelle de la centrale électrique. Outre la capacité réservée, MVM est tenue d’acheter auprès de chaque centrale électrique exploitée dans le cadre d’un AAE une quantité d’électricité minimale déterminée (MWh).

(38)

Certains AAE comprennent des services dits de réseau (18) lorsque les centrales sont techniquement en mesure de les assurer. MVM offre ces services à l’opérateur de réseau MAVIR.

(39)

Les AAE conclus en 1995-1996 (sept sur les dix AAE examinés) l’ont été dans le cadre de la préparation de la privatisation des centrales électriques. Ces AAE suivaient un même modèle de contrat préparé par un cabinet d’avocats international à la demande du gouvernement hongrois. Ces AAE n’ont pas fait l’objet d’une procédure d’adjudication, contrairement à la privatisation des centrales électriques. Les AAE (signés avant la privatisation) faisaient partie intégrante de l’ensemble des mesures de privatisation. Après la privatisation, ces accords (notamment ceux conclus avec les centrales Mátrai Erőmű, Tiszai Erőmű et Dunamenti Erőmű) ont été partiellement modifiés par les parties.

(40)

L’AAE signé en 1997 avec la centrale Csepeli Áramtermelő Kft. s’inspirait d’un modèle de contrat quelque peu différent. Cet accord, qui n’a pas non plus fait l’objet d’une procédure d’adjudication, était lui aussi lié à la privatisation de la centrale électrique.

(41)

L’AAE conclu dans le cadre de la centrale Újpesti Erőmű (une des trois unités de la centrale Budapesti Erőmű) avec la centrale Budapesti Erőmű a été signé en 1997, et n’a pas non plus fait l’objet d’une procédure d’adjudication.

(42)

Seul l’AAE conclu en 2001 dans le cadre de la centrale Kispesti Erőmű (une autre centrale électrique – vieillissante – de la centrale Budapesti Erőmű, qui a été en fait reconstruite à cette époque) l’a été à l’issue d’une procédure d’adjudication ouverte.

(43)

Durant la période 2000-2004, les capacités réservées par les AAE représentaient environ 80 % de la demande totale d’électricité (MW) de la Hongrie. Entre 2005 et la date de la présente décision, cette part a oscillé autour des 60-70 %. Entre 2011 et 2024 (19), elle devrait continuer à diminuer progressivement.

(44)

À la date d’adhésion de la Hongrie à l’Union européenne (1er mai 2004), dix AAE sur la petite vingtaine d’accords signés entre 1995 et 2001 étaient encore en vigueur.

(45)

La présente décision ne concerne que les AAE en vigueur au 1er mai 2004. Elle ne concerne donc pas les AAE expirés avant cette date. Même si les parties ont résilié de leur propre initiative certains AAE au cours du mois d’avril 2008 (voir le considérant 29 ci-dessus), la présente décision couvre également ces AAE et évalue leur nature d’aide d’État ainsi que leur compatibilité avec le marché commun durant la période allant du 1er mai 2004 à la date de leur expiration (avril 2008).

(46)

Le tableau ci-dessous énumère les centrales électriques exploitées dans le cadre d’un AAE et couvertes par la présente décision. La durée des AAE mentionnée dans ce tableau renvoie à la date d’expiration initialement fixée dans ces AAE.

Tableau 1

Aperçu des producteurs d’électricité liés par un AAE, des actionnaires majoritaires et de la durée des AAE

Producteurs

Groupe actionnaire majoritaire

Centrale électrique exploitée dans le cadre de l’AAE

Durée de l’AAE

Budapesti Erőmű Rt.

EDF

centrale Kelenföldi

1996-2011

centrale Újpesti

1997-2021

centrale Kispesti

2001-2024

Dunamenti Erőmű Rt.

Electrabel

centrale Dunamenti blocs F

1995-2010

(signé en 1995, et entré en vigueur en 1996)

centrale Dunamenti bloc G2

1995-2015

(signé en 1995, et entré en vigueur en 1996)

Mátrai Erőmű Rt.

RWE

centrale Mátrai

1995-2022

(durée initiale: jusqu’en 2015, prolongée en 2005 jusqu’en 2022)

AES-Tisza Erőmű Kft.

AES

centrale Tisza II

1995-2016

(signé en 1995, et entré en vigueur en 1996)

[…]

Csepeli Áramtermelő Kft.

ATEL

centrale Csepel II

1997-2020

(signé en 1997, et entré en vigueur en 2000)

Paksi Atomerőmű Rt.

MVM

centrale nucléaire Paksi

1995-2017 (20)

(signé en 1995, et entré en vigueur en 1996)

Pannonpower Holding Rt.

Dalkia

centrale Pécsi

1995-2010

(signé en 1995, et entré en vigueur en 1996)

(47)

Dans le décret gouvernemental 1074/1995 (VIII.4.) sur la réglementation des prix de l’électricité, le gouvernement s’est engagé à ce que, à partir du 1er janvier 1997 (début du premier cycle de réglementation des prix) «les prix de gros et de détail garantissent, outre la couverture des coûts d’exploitation justifiés, un rendement sur capitaux engagés de 8 %». Le gouvernement garantissait aussi un retour sur capital de 8 % pour les centrales électriques exploitées dans le cadre d’un AAE.

(48)

À partir du 1er janvier 2001 (début du second cycle de réglementation des prix), les prix administrés prévoyaient un rendement de l’actif de 9,8 % pour les centrales électriques. L’augmentation du taux de rendement n’impliquait pas forcément une modification des montants effectivement perçus, les bases de calcul retenues pour les deux taux de rendement (la base de calcul du premier est le capital engagé, tandis que celle du second est la valeur des actifs) étant différentes. Les prix reflétaient l’évolution de l’inflation.

(49)

Les prix administrés sont restés en vigueur pour les centrales électriques jusqu’au 31 décembre 2003.

(50)

Pendant cette période de réglementation des prix, l’Office hongrois de l'énergie a analysé la structure des coûts de chaque centrale électrique et fixé le prix de l’électricité à un niveau assurant à MVM une marge bénéficiaire garantie.

(51)

Les principaux éléments de coût pris en compte dans le mécanisme de fixation des prix (21) étaient les suivants:

—   coûts fixes: amortissement, assurance, certains coûts fixes de maintenance et d’exploitation, intérêts créditeurs, mise à l’arrêt des centrales, impôts, frais de personnel, dépenses liées à la protection de l’environnement, versements en faveur du Fonds nucléaire central pour la centrale nucléaire et charges exceptionnelles,

—   coûts variables: coûts des combustibles.

(52)

L’Office hongrois de l’énergie avait pour mission de vérifier si les coûts couverts étaient bien des dépenses effectivement encourues et nécessaires.

(53)

Les prix administrés ont remplacé les prix fixés dans les AAE.

(54)

À partir du 1er janvier 2004, les prix ont été fixés en appliquant les formules de prix des AAE. Le champ couvert par ces formules de prix a été précisé lors des négociations annuelles de prix entre MVM et les producteurs d’électricité.

(55)

Les formules de prix des AAE sont particulièrement complexes, mais suivent les mêmes principes que la méthodologie appliquée par l’Office hongrois de l’énergie avant 2004. Selon la notification des autorités hongroises (22), l’annexe des AAE concernant la fixation des prix a été rédigée en appliquant les formules et les définitions du décret gouvernemental 1074/1995 sur la réglementation des prix de l’électricité. (Selon la notification «les contrats ont repris telles quelles les formules et les définitions figurant dans le décret gouvernemental».) À l’instar du mécanisme de fixation des prix administrés, les principes de tarification des AAE sont basés sur les catégories de coûts justifiés.

(56)

Chaque AAE comprend deux types de redevances: la redevance de capacité (redevance à payer pour la mise à disposition de la capacité) pour les capacités réservées (MW), qui couvre les coûts fixes et le bénéfice (coût du capital), et la redevance d’électricité, qui couvre les coûts variables. Les AAE prévoient en outre différents suppléments. En fonction de l’AAE, ces suppléments peuvent être des primes bonus/malus qui incitent les producteurs d’électricité à opérer suivant le principe du moindre coût, ainsi que des suppléments pour le maintien de réserves de production, de révision du calendrier d’entretien à la demande de MVM, d’augmentation de la charge en période de pointe ou de diminution en deçà des volumes contractuels en période creuse, etc. La révision périodique (annuelle, trimestrielle, mensuelle) des redevances dépend d’un certain nombre de facteurs: activation de projets de rénovation mis en œuvre, variabilité des taux d’intérêt, des cours de change, des taux d’inflation, etc. Les redevances de capacité et les suppléments couvrent aussi les services de réseau (relevant de l’AAE). Les redevances d’électricité couvrent pour l’essentiel le coût des combustibles et la production de chaleur des combustibles, et sont basés sur le principe de répercussion (pass-through) des coûts variables.

(57)

Il faut noter que la définition des catégories de coûts couverts arrêtée dans la réglementation des prix en vigueur avant le 1er janvier 2004 et dans les AAE ne correspondait pas forcément. À la lumière des observations formulées par la Hongrie (23), il semble notamment que la redevance de capacité de […] et de la centrale Dunamenti Erőmű était plus élevée dans le cadre de l’AAE que dans celui de la réglementation des prix. Ceci est dû au fait que les AAE ont tenu compte des coûts de modernisation qui ont entraîné des coûts fixes plus élevés. Ces coûts fixes plus élevés se sont peu à peu traduits (au fur et à mesure des travaux de modernisation) par des niveaux de redevance de capacité plus élevés dans les AAE que dans le cadre de la réglementation des prix. Suite aux négociations bilatérales menées entre MVM et les producteurs, d’autres différences ont aussi pu être constatées entre les prix réglementés et les prix fixés dans le cadre des AAE.

(58)

Malgré ces différences, toutes les centrales électriques de la Hongrie exploitées dans le cadre d’un AAE ont confirmé dans les notifications du 20 octobre 2004 et du 20 juillet 2005 que la méthode de calcul des prix ainsi que les catégories de coûts appliquées après la fin de la période de réglementation des prix étaient largement analogues à celles appliquées précédemment par l’Office hongrois de l’énergie.

(59)

Les prix appliqués dans le cadre des AAE — après le 1er janvier 2004 — étaient donc toujours fondés sur les coûts (constants et variables) justifiés + le bénéfice.

(60)

En conséquence, et bien que la réglementation des prix ait cessé le 31 décembre 2003, les prix n’ont pas été réellement libéralisés, étant donné que les prix de gros de l’électricité ont continué à obéir au principe du retour sur investissement inscrit dans les AAE. (24)

(61)

Le 6 février 2006, le Parlement hongrois a adopté la loi XXXV 2006 (25) et a ainsi rétabli le principe des prix administrés pour l’électricité vendue à MVM dans le cadre des AAE. Le premier nouveau décret sur les prix est entré en vigueur le 9 décembre 2006. À partir de cette date, la réglementation des prix par le gouvernement allait à nouveau replacer, pendant un an environ (jusqu’au 31 décembre 2007), les formules de calcul des prix instaurées dans le cadre des AAE.

(62)

À partir du 1er janvier 2008, la IIIème loi sur l’énergie, qui s’inscrivait dans le cadre de la libéralisation du marché, a aboli les prix de production administrés et le système dual constitué d’un secteur public et d’un marché libre.

(63)

Depuis le 1er janvier 2008, le prix de l’électricité vendue à MVM par les producteurs d’électricité est donc de nouveau fixé sur la base de la formule de prix des AAE. Les principes de base de ces formules de prix n’ont pas changé depuis leur dernière application et se fondent sur les mêmes principes que durant la période du 1er janvier 2004 au 8 décembre 2006 (voir les considérants 54 à 59 ci-dessus).

(64)

En conséquence, la tarification appliquée dans le cadre des AAE obéit toujours au principe du retour sur investissement.

(65)

Les AAE réservent à MVM la totalité ou une partie considérable de la capacité des unités de production exploitées dans le cadre de ces AAE.

Tableau 2

Capacité de production nationale de la Hongrie  (26)

(MW)

Capacité

2004

2005

2006

2007

Capacité totale installée (27)

8 777

8 595

8 691

8 986

Capacité brute disponible (28)

8 117

8 189

8 097

8 391

Capacité nette disponible (29)

7 252

7 792

7 186

7 945

Charge maximum du réseau électrique hongrois

6 356

6 409

6 432

6 605

Tableau 3

Capacité de production des centrales électriques exploitées dans le cadre des AAE  (30)

(MW)

Centrale électrique

Capacité

2004

2005

2006

2007

Kelenföld

Capacité nette disponible

90,1

97,6

97,2

78,0

Capacité contractée (31)

83,3

89,8

89,4

71,9

Újpest

Capacité nette disponible

106,3

106,1

106,2

106,0

Capacité contractée

99

98,8

98,9

98,7

Kispest

Capacité nette disponible

46,1

110,2

110,2

109,6

Capacité contractée

43

102,6

102,6

102,3

Dunamenti F

Capacité nette disponible

1 020

1 020

1 020

1 020

Capacité contractée

928,2

923,1

923,1

923,1

Dunamenti G2

Capacité nette disponible

187,6

223,1

223,1

223,7

Capacité contractée

178,4

212,4

212,4

213

AES-Tisza

Capacité nette disponible

638,0

824,7

824,7

824,7

Capacité contractée

[…] (32)

[…] (33)

[…] (33)

[…] (33)

Csepeli

Capacité nette disponible

348,9

331

355

349,5

Capacité contractée

323

307

329

324

Pannon

Capacité nette disponible

25,9

25,9

25,9

25,9

Capacité contractée

20,1

20,1

20,1

20,1

Mátrai

Capacité nette disponible

593

552

552

552

Capacité contractée

496

460

460

460

Paks

Capacité nette disponible

1 597

1 596

1 596

1 596

Capacité contractée

1 486

1 486

1 485

1 485

Capacité nette totale disponible des centrales électriques exploitées dans le cadre d’un AAE

 

4 652

4 886,6

4 910,3

4 885,4

Capacité totale contractée

 

[…] (34)

[…] (35)

[…] (36)

[…] (37)

(66)

Les données ci-dessus montrent que durant la période considérée, quelque 60 % de la capacité nette disponible est contractée par MVM dans le cadre d’AAE. Si on prend en considération la capacité effectivement disponible, déduction faite de la consommation propre, cette part est en fait supérieure.

(67)

Il ressort aussi des tableaux ci-dessus que les capacités réservées à MVM couvrent la totalité ou une partie considérable de la capacité disponible des différentes centrales.

(68)

MVM acquitte une redevance de capacité pour ces réservations de capacité (voir le considérant 56 ci-dessus), indépendamment de l’utilisation effective de la centrale électrique.

(69)

La capacité d’importation de la Hongrie est de 1 000-1 300 MW, dont environ 600 MW sont réservés à MVM dans le cadre d’autres accords à long terme.

(70)

Quand MVM utilise réellement la capacité réservée et achète de l’électricité auprès de la centrale électrique, elle paie une redevance pour l’électricité prélevée (voir le considérant 56 ci-dessus).

(71)

Les AAE garantissent un niveau de prélèvement minimum pour chaque centrale électrique.

(72)

En Hongrie, la production nationale d’électricité varie entre 32-36 TWh (32-36 000 000 GWh) par an.

Tableau 4

Électricité produite dans le cadre des AAE  (38)

(GWh)

Centrale électrique

Electricité produite

2004

2005

2006

2007

Budapesti

(y compris les centrales Kelenföldi, Újpesti et Kispesti)

Production totale

1 228

1 510

1 643

1 742

Consommation propre

87

89

91

84

Prélèvement minimum garanti

Kelenföld:

[…]

Újpest:

[…]

Kispest:

[…]

Kelenföld:

[…]

Újpest:

[…]

Kispest:

[…]

Kelenföld:

[…]

Újpest:

[…]

Kispest:

[…]

Kelenföld:

[…]

Újpest:

[…]

Kispest:

[…]

Prélèvement effectif

939

1 302

1 451

1 538

Dunamenti (39) (F + G2)

Production totale

4 622

3 842

3 450

4 300

Consommation propre

174

148

147

188

Prélèvement minimum garanti

F: […]

G2: […]

F: […]

G2: […]

F: […]

G2: […]

F: […]

G2: […]

Prélèvement effectif

4 232

2 888

2 495

3 296

AES-Tisza

Production totale

1 621

1 504

1 913

2 100

Consommation propre

96

97

117

116

Prélèvement minimum garanti

[…]

[…]

[…]

[…]

Prélèvement effectif

1 525

1 407

1 796

1 984

Csepeli

Production totale

1 711

1 764

1 710

2 220

Consommation propre

48

49

48

53

Reprise garantie

[…]

[…]

[…]

[…]

Prélèvement effectif

1 662

1 715

1 661

2 166

Pannon (39)

Production totale

673

266

237

232

Consommation propre

116

52

34

29

Prélèvement minimum garanti

[…]

[…]

[…]

[…]

Prélèvement effectif

361

206

203

203

Mátrai (39)

Production totale

5 688

5 698

5 621

6 170

Consommation propre

675

670

667

710

Prélèvement minimum garanti

[…]

[…]

[…]

[…]

Prélèvement effectif

3 730

3 762

3 587

4 082

Paksi

Production totale

11 915

13 833

13 460

14 677

Consomma-tion propre

750

821

800

848

Prélèvement minimum garanti

[…]

[…]

[…]

[…]

Prélèvement effectif

11 112

13 012

12 661

13 828

(73)

Le prélèvement minimum gartanti est la quantité que MVM est tenue d’acheter chaque année, indépendamment de la demande du marché. Lorsque MVM n’achète pas la quantité minimum fixée, elle est tenue de payer les coûts de combustibles (Dunamenti Erőmű, Kelenföld Erőmű, Pécs Erőmű et […]), tous les coûts ou montants compensatoires acquittés par le producteur en vertu du contrat de livraison de combustibles (Csepeli Áramtermelő Kft.), ainsi que tous les coûts justifiés (Kispesti Erőmű et Újpesti Erőmű).

3.   MOTIFS JUSTIFIANT L’OUVERTURE DE LA PROCÉDURE

3.1.   Les AAE

(74)

Dans sa décision d’ouverture de la procédure, la Commission avait provisoirement conclu que les AAE constituaient une aide d’État au sens de l’article 87, paragraphe 1, du traité CE.

(75)

La Commission a estimé que les AAE étaient toujours applicables après l’adhésion, au sens de l’annexe IV, paragraphe 3, point 1 (c), de l’acte d’adhésion (40) et ne constituaient pas des aides existantes, étant donné qu’elles relevaient des catégories d’aides considérées, à la date de l’adhésion, comme des aides existantes au sens de l’article 88, paragraphe (1), du traité CE.

(76)

Premièrement, aucun des AAE n’est entré en vigueur avant le 10 décembre 1994. Deuxièmement, aucun des AAE n’est mentionné dans la liste des aides existantes jointe à l’annexe IV de l’acte d’adhésion. Troisièmement, les AAE n’ont pas été notifiés à la Commission dans le cadre du «mécanisme transitoire».

(77)

La Commission a estimé que le retour garanti sur investissement et les prix d’achat élevés garantis par les AAE placent les producteurs ayant conclu un AAE dans une situation économique avantageuse par rapport aux producteurs d’électricité non concernés par les AAE, notamment d’éventuels nouveaux entrants, et à d’autres secteurs d’activité comparables où de tels accords à long terme n’ont pas été proposés aux acteurs du marché. La Commission a donc provisoirement conclu que la mesure conférait un avantage sélectif aux producteurs d’électricité concernés.

(78)

La Commission a par ailleurs noté que les marchés de l’électricité se sont ouverts à la concurrence et que l’électricité fait l’objet d’échanges commerciaux entre États membres, à tout le moins depuis l’entrée en vigueur de la directive 96/92/CE du Parlement européen et du Conseil du 19 décembre 1996 concernant des règles communes pour le marché intérieur de l’électricité (41). Par conséquent, les mesures favorisant certaines entreprises du secteur de l’énergie dans un État membre peuvent porter atteinte à la capacité qu’ont les entreprises d’autres États membres à exporter de l’électricité vers l’État membre en question ou favoriser les exportations d’électricité de cet État membre vers d’autres États membres.

(79)

La Commission a de même estimé que cet avantage est accordé au moyen de ressources d’État dans la mesure où la décision de conclure des AAE résultait d’une politique publique mise en œuvre par l’entremise du grossiste MVM, détenu par l’État. Conformément à la jurisprudence de la Cour de justice des Communautés européennes (ci-après dénommée «Cour de justice»), lorsqu’une entreprise publique utilise ses moyens d’une manière qui laisse supposer qu’il s’agit d’une action de l’État, ceux-ci doivent être considérés comme des ressources d’État au sens de l’article 87, paragraphe 1, du traité CE (42).

(80)

La Commission a donc provisoirement conclu que les AAE constituent des aides d’État en faveur des producteurs d’électricité au sens de l’article 87, paragraphe 1, du traité CE, ces aides étant «toujours applicables après la date de l’adhésion» au sens de l’annexe IV, paragraphe 3, point 1 c), de l’acte d’adhésion.

(81)

La Commission a par ailleurs estimé qu’il fallait appliquer la méthodologie des coûts échoués à l’analyse des aides d’État accordées aux producteurs d’électricité. Se fondant sur les documents à sa disposition au moment de la décision d’ouvrir la procédure, la Commission a émis des doutes quant à la comptabilité des AAE avec les critères établis dans la méthodologie.

(82)

Premièrement, la Commission a émis des doutes sur la compatibilité des AAE – qui font obstacle à la concurrence libre – avec l’objectif fondamental de la méthodologie, qui consiste à favoriser, par l’octroi d’aides d’État, la libéralisation du secteur en accordant des compensations adéquates aux opérateurs historiques confrontés à de nouvelles conditions de concurrence.

(83)

Deuxièmement, la Commission a émis des doutes sur la compatibilité de l’élément d’aide d’État contenu dans les AAE avec les critères détaillés établis par la méthodologie en ce qui concerne le calcul des coûts échoués éligibles et la fixation des compensations appropriées.

3.2.   Décret gouvernemental no 183/2002 (VIII.23) sur les coûts échoués

(84)

Afin que MVM puisse honorer ses AAE et que le niveau des prix de revente sur le segment public reste plus ou moins identique au niveau des prix pratiqués sur le marché libre, le décret gouvernemental 183/2002 (VIII.23) prévoit que, dans certaines circonstances, l’État verse une compensation à MVM.

(85)

Dans leur notification initiale (HU1/2004, retirée le 13 avril 2005), les autorités hongroises ont considéré que cette compensation était une aide d’État accordée à MVM.

(86)

Dans sa décision d’ouverture de la procédure, la Commission a conclu que les paiements compensatoires ne constituaient pas une aide d’État en faveur de MVM, mais que la somme reçue en vertu du décret gouvernemental 183/2002 (VIII.23) faisait partie du prix d’achat payé par MVM aux centrales électriques relevant des AAE et, de ce fait même, de l’avantage dont les producteurs bénéficiaient dans le cadre des AAE.

(87)

La décision d’ouvrir la procédure concerne donc une procédure formelle engagée uniquement à l’égard des AAE et non du décret gouvernemental 183/2002 (VIII.23).

4.   OBSERVATIONS DE LA HONGRIE CONCERNANT LA DÉCISION D’OUVRIR LA PROCÉDURE

(88)

La Hongrie estime qu’une évaluation distincte des AAE serait justifiée étant donné leurs spécificités propres sur le plan des conditions et des modalités.

(89)

En ce qui concerne la libéralisation du marché hongrois de l’électricité, la Hongrie considère que l’ouverture du marché a été couronnée de succès (c’est-à-dire conforme à la moyenne européenne) au regard du nombre de consommateurs ayant basculé vers le marché libre. La Hongrie conclut que les AAE n’ont pas empêché les consommateurs de passer au marché libre et que, si entrave il y avait eu, elle se serait davantage située au niveau de la capacité transfrontaliére limitée de la Hongrie ainsi que des prix élevés qui en découlent.

(90)

D’autre part, la Hongrie estime que la longue durée des AAE ne saurait en soi conférer un avantage concurrentiel aux producteurs, car les accords à long terme sont largement pratiqués dans le secteur de l’électricité en Europe comme sur les autres continents.

(91)

En ce qui concerne le prix de référence mentionné dans la décision d’ouverture de la procédure, les autorités hongroises suggèrent que pour fixer un prix de référence, la Commission tienne compte des caractéristiques régionales de la Hongrie ainsi que de la hausse récente du prix des combustibles.

(92)

En ce qui concerne les nouveaux entrants sur le marché de l’électricité, la Hongrie a informé la Commission que, depuis le 1er mai 2004 (date de l’adhésion de la Hongrie et de la libéralisation du marché de l’énergie), il n’y a pas eu de nouvel entrant. Les autorités hongroises soulignent que les investissements de ce type sont des opérations de longue durée et que, par conséquent, il est très improbable que l’un quelconque de ces investissements puisse aboutir à une exploitation effective avant 2011.

(93)

Enfin, en réponse aux doutes de la Commission concernant la compatibilité des AAE avec le point 4.6 de la méthodologie, la Hongrie confirme qu’elle n’accordera pas d’aide au sauvetage et à la restructuration des entreprises bénéficiant des AAE évalués.

5.   OBSERVATIONS DES PARTIES INTÉRESSÉES

(94)

Après la publication de la décision d’ouverture de la procédure (21 décembre 2005) les parties suivantes ont transmis des observations à la Commission dans le délai prévu (dans la plupart des cas après la prolongation de ce délai demandée par les intéressés et acceptée par la Commission):

les producteurs d’électricité: AES-Tisza Erőmű Kft., Budapesti Erőmű Rt., Csepeli Áramtermelő Kft., Dunamenti Erőmű Rt. et son principal actionnaire, Electrabel S.A., et Mátrai Erőmű Rt.,

les banques suivantes qui ont financé les producteurs d’électricité: la banque […], le chef de file représentant les douze banques créditrices de la société Csepeli Áramtermelő Kft., ainsi que la banque […], chef de file des neuf banques créditrices de la société AES-Tisza Erőmű Kft,

MVM; et

un tiers ayant souhaité garder l’anonymat.

(95)

La plupart des observations communiquées à la Commission par les parties suivent un raisonnement similaire. De ce fait, au lieu de présenter distinctement les observations présentées par les différentes parties intéressées, la Commission les a réunies en catégories générales (voir les points 5.1-5.7 ci-dessous).

5.1.   Observations concernant l’évaluation distincte des AAE

(96)

La centrale Mátrai Erőmű ainsi qu’une autre partie ayant souhaité garder l’anonymat ont estimé que les AAE devaient être évalués au cas par cas étant donné les différences qu’ils présentent sur le plan du contenu. D’autres producteurs d’électricité, en fournissant à la Commission des informations détaillées concernant les conditions spécifiques de leur propre AAE, ont implicitement demandé une évaluation distincte de cet AAE.

5.2.   Observations concernant l’existence d’une aide d’État

(97)

Les centrales AES-Tisza Erőmű, Budapesti Erőmű, Csepeli Áramtermelő Kft. et Dunamenti Erőmű font valoir que les critères permettant de conclure à l’existence d’une aide d’État devraient être examinés à la lumière des conditions de marché qui prévalaient à l’époque. Certains mentionnent expressément cette exigence tandis que d’autres en font état implicitement dans leur évaluation en se référant aux circonstances qui ont entouré la signature des AAE. À cet égard, les parties intéressées renvoient à la jurisprudence de la Cour de justice (43).

i)   Prix de référence erroné/absence de prix conférant un avantage

(98)

Tous les producteurs d’électricité font valoir que les AAE ne leur confèrent pas d’avantage économique.

(99)

Ils critiquent les conclusions provisoires de la Commission selon lesquelles les prix fixés dans le cadre des AAE sont supérieurs aux prix du marché.

(100)

Selon eux, le tarif de 36 EUR/MWh appliqué dans d’autres décisions auquel il est fait référence dans la décision d’ouverture de la procédure n’est pas le prix de référence adéquat dans la présente procédure, car il est issu d’un contexte géographique et temporel tout à fait différent. Ils estiment que l’évaluation doit prendre en considération les circonstances existant au moment de la signature des AAE. Ils soulignent aussi que les prix fixés dans le cadre d’accords à long terme sont toujours inférieurs aux prix du marché spot. En outre, les producteurs qui fournissent à MVM surtout de l’électricité destinée à couvrir la charge de pointe font aussi valoir que leurs prix ne peuvent pas être comparés aux prix pratiqués pour la charge de base. La plupart d’entre eux suggèrent à la Commission de tenir compte de la hausse considérable du prix des combustibles au cours des années écoulées.

(101)

De nombreux producteurs affirment que leur taux de rentabilité effectif était inférieur aux pourcentages mentionnés dans la décision d’ouverture de la procédure.

(102)

Ils soulignent aussi que (contrairement à ce qu’il est suggéré dans la décision d’ouverture de la procédure) les producteurs assument des risques considérables, en particulier liés à la construction, à la réglementation, à l’environnement, à la maintenance et à la fiscalité/aux aspects financiers. La réglementation des prix a été mentionnée comme une catégorie importante de risques liés à la réglementation. Les producteurs estiment par ailleurs que la réservation d’une partie considérable de leur capacité par MVM constitue un handicap qui les empêche d’utiliser des capacités pour produire de l’électricité pour d’autres clients potentiels. De plus, les AAE imposent des obligations précises aux producteurs qui, s’ils ne les respectent pas, se voient confrontés à une diminution des paiements qui leur sont dus ou à des actions en dommages et intérêts.

(103)

[…] prétend qu’un des avantages des AAE pour la Hongrie était de pouvoir bénéficier de services d’équilibrage fiables que seul lui-même et la centrale Dunamenti Erőmű ont été en mesure de fournir. Selon l’argumentation de ce producteur, il ne serait pas entré sur le marché et n’aurait pas proposé de tels services en l’absence d’AAE.

(104)

Selon la centrale Mátrai Erőmű, ses prix sont compétitifs parce qu’elle possède sa propre mine de charbon et que ses coûts d’extraction sont ainsi peu élevés.

ii)   Prix de privatisation

(105)

La centrale Dunamenti Erőmű affirme n’avoir tiré aucun avantage de son AAE car elle a payé le prix du marché pour la privatisation des centrales électriques, le prix d’achat ayant d’autre part tenu compte de ses droits et obligations dans le cadre de l’AAE. La «valeur» de l’AAE (et l’avantage éventuel en découlant) étaient dès lors compris dans le prix payé pour la privatisation.

iii)   Principe de l’investisseur de marché

(106)

Selon les centrales Budapesti Erőmű, AES-Tisza Erőmű, Mátrai Erőmű et Csepeli Áramtermelő Kft, les AAE reflètent les conditions existantes du marché au moment de leur signature tant pour MVM que pour les producteurs. En ce qui concerne MVM, elles estiment que tout opérateur qui se serait trouvé dans la situation de MVM (obligation juridique à assurer la sécurité d’approvisionnement en tant qu’acheteur unique) aurait pris la décision de conclure les AAE. En ce qui concerne les producteurs eux-mêmes, ils sont d’avis que «l’avantage» que les AAE confère aux producteurs ne dépasse pas ce qui devrait être considéré comme un avantage économique normal pour toute partie à un accord commercial. Au moment de leur signature, les AAE correspondaient aux conditions normales du marché dans le secteur concerné. De plus, les AAE reflètent une pratique commerciale normale et une forme habituelle de répartition et de gestion des risques.

(107)

Les AAE étaient le seul moyen d’assurer des investissements conformes aux exigences du secteur hongrois de l’électricité (modernisation de l’ensemble du réseau, protection de l’environnement et sécurité de l’approvisionnement notamment). L’application du principe de l’investisseur privé devrait conduire à la prise en considération de ces exigences-là, et ces exigences ne peuvent être remplies que par le biais des AAE. Les parties intéressées notent que les AAE imposent aux producteurs d’électricité des obligations en termes d’investissement et de disponibilité.

iv)   Service d’intérêt économique général

(108)

Les centrales Budapesti Erőmű et Csepeli Áramtermelő Kft. estiment que les producteurs qui sont parties à un AAE assurent un service d’intérêt économique général. Selon eux, les AAE permettent à MVM de remplir son obligation relative à la sécurité d’approvisionnement. Les AAE contribueraient donc à l’accomplissement de ce service public. Selon l’argumentation de la centrale Budapesti Erőmű, on pourrait considérer que c’est en fait la centrale Budapesti Erőmű qui s’acquitte de l’obligation de service public qui lui est imposée par l’AAE. Les deux parties intéressées se réfèrent à la décision de la Commission du 16 décembre 2003 dans l’affaire N 475/03 — Aide d’État (Irlande) (44), dans laquelle la Commission a reconnu que la construction de nouvelles capacités de production afin de garantir la sécurité d’approvisionnement pouvait être considérée comme un service d’intérêt économique général.

(109)

Les parties intéressées estiment qu’à l’instar de l’affaire relative à l’Irlande, les aides d’État éventuellement octroyées dans le cadre des AAE remplissent les quatre conditions cumulatives arrêtées par la Cour de Justice dans l’affaire C-280/00 (ci-après: «l’arrêt Altmark») (45).

(110)

Premièrement, les lois hongroises sur l’énergie électrique ont imposé à MVM de nombreuses obligations de service public, telles que la sécurité d’approvisionnement au moindre coût, la protection de l’environnement et l’efficience. La loi définit donc clairement les obligations de service public de MVM, et il appartient aux producteurs d’électricité parties aux AAE de fournir ces services d’intérêt économique général.

(111)

Deuxièmement, les décrets gouvernementaux sur les prix et les formules de prix des AAE ont fixé à l’avance les compensations. Celles-ci pouvaient donc être calculées sur la base de paramètres objectifs et transparents.

(112)

Troisièmement, la compensation versée sur la base des AAE n’excède pas le coût des services d’intérêt économique général fournis. Les AAE sont strictement basés sur les coûts, et la marge bénéficiaire ne dépasse pas les marges bénéficiaires habituelles du marché. Ceci est garanti par le fait que les AAE ont été conclus à l’issue d’une procédure d’adjudication ouverte et, comme le fait valoir la centrale Budapesti Erőmű, transparente (voir ci-après). Les centrales électriques ont été vendues au soumissionnaire le plus offrant et présentant le meilleur plan commercial. Il découle de la procédure d’adjudication que la compensation accordée sur la base des AAE ne peut pas dépasser les coûts générés pour s’acquitter de l’obligation de service public et une marge bénéficiaire raisonnable.

(113)

Quatrièmement, selon l’argumentation de la centrale Budapesti Erőmű, tous les AAE signés par elle l’ont été à l’issue d’une procédure d’adjudication ouverte et transparente faisant partie intégrante d’un «paquet de privatisation» ou d’une procédure distincte. Selon la centrale Csepeli Áramtermelő Kft., bien qu’elle n’ait pas été retenue dans le cadre d’une adjudication ouverte, la compensation qu’elle reçoit se limite à la couverture des coûts et à une marge bénéficiaire raisonnable. Le mécanisme de tarification évite toute surcompensation.

(114)

Compte tenu des éléments qui précèdent, les parties intéressées constatent que les AAE remplissent les quatre conditions cumulatives énoncées dans l’arrêt Altmark et qu’ils ne constituent pas une aide au sens de l’article 87, paragraphe 1, du traité CE.

(115)

La centrale Budapesti Erőmű souligne par ailleurs que même si les AAE étaient considérés comme ne remplissant pas les quatre conditions cumulatives de l’arrêt Altmark, ils pourraient malgré tout être considérés comme compatibles avec le marché commun au sens de l’article 86, paragraphe 2, du traité CE. La partie intéressée est d’avis que ses AAE ont une incidence négligeable sur le verrouillage allégué du marché hongrois de l’électricité, dès lors qu’ils ne couvrent que 3 % de la consommation électrique de la Hongrie. De plus, pour des raisons techniques, une augmentation des importations d’électricité n’était pas possible au moment de la signature des AAE. De ce fait, ses AAE ne sauraient avoir une incidence négative sur le commerce. La partie intéressée souligne aussi dans ses observations l’importance du chauffage central par cogénération, qui correspond aux objectifs de la politique énergétique et environnementale de l’Union européenne.

(116)

Selon la centrale Mátrai Erőmű, elle était obligée de réserver une capacité minimale déterminée à MVM afin de garantir, grâce aux ressources de houille indigène, la sécurité d’approvisionnement sur le marché hongrois. Elle estime que, conformément à l’article 11, paragraphe 4, de la directive Électricité (46), les aides d’État doivent être considérées comme compatibles avec le marché commun lorsqu’elles financent, pour des raisons de sécurité d’approvisionnement, une production d’électricité à partir de houille indigène.

v)   Absence d’avantages provenant de la durée

(117)

Selon les centrales Csepeli Áramtermelő Kft., Mátrai Erőmű et Budapesti Erőmű, la longue durée du contrat ne doit pas être considérée comme un avantage en soi. Selon la centrale Csepeli Áramtermelő Kft., dans un accord à long terme chacune des parties paye le prix de la sécurité qu’offre le long terme. Les producteurs d’électricité acceptent de proposer des prix inférieurs au prix du marché spot et d’être liés par le prix convenu. Ils acceptent aussi de réserverleur capacité pour une seule entreprise pour la durée complète de l’accord. Ils soutiennent dès lors que les accords à long terme équilibrent pour chacune des parties les risques et les potentiels économiques, et ne peuvent pas être considérés clairement comme un avantage.

(118)

Eu égard aux arguments développés ci-dessus, tous les producteurs d’électricité concluent que les AAE ne leur confèrent pas un avantage économique et qu’ils ne constituent donc pas une aide d’État au sens de l’article 87, paragraphe 1, du traité CE.

(119)

Selon la centrale AES-Tisza Erőmű, les AAE ne confèrent pas d’avantage sélectif. La partie intéressée indique que des accords à long terme ont été conclus dans l’ensemble du secteur de l’électricité, non seulement entre les producteurs et MVM, mais aussi entre MVM et les distributeurs et entre les fournisseurs de combustibles et les producteurs d’électricité, ainsi que pour l’importation d’électricité. En ce qui concerne les producteurs, la Ière loi sur l’électricité (1994) ainsi que le décret gouvernemental 34/1995 imposaient expressément aux producteurs de conclure avec MVM un accord d’achat d’électricité à long terme pour pouvoir obtenir le permis de construire et le permis d’exploitation. De ce fait, tous les producteurs ont conclu un accord avec MVM, et seules les centrales électriques à énergie renouvelable et à cogénération pouvaient conclure des accords à plus court terme vu que ces producteurs étaient tenus par d’autres garanties légales (achat obligatoire notamment).

(120)

Selon la centrale Mátrai Erőmű, dans les AAE seul le prix peut être considéré comme une aide d’État. La durée des AAE et les volumes de vente garantis ne peuvent pas être considérés comme des aides d’État, car quand bien même ils confèrent un avantage, ils n’impliquent pas le transfert de ressources d’État. Cette tierce partie conclut qu’en raison des prix particulièrement compétitifs qu’elle pratique (voir le point (i) ci-dessus), son AAE ne contient aucun élément d’aide.

(121)

Selon l’argumentation de la société AES-Tisza, les prix fixés dans le cadre de l’AAE ne le sont pas par l’État mais par les parties aux AAE. La centrale AES-Tisza Erőmű conteste l’évaluation, dans la décision d’ouverture, de l’imputabilité à l’État, eu égard au fait que la décision analyse l’imputabilité à l’État essentiellement au regard de la signature des AAE et non de la tarification, alors que la Commission fait valoir que l’avantage concurrentiel est conféré par les prix avantageux. Après la période de fixation centrale des prix (après janvier 2004, sauf durant l’année 2007), les prix ont été négociés entre MVM et les producteurs d’électricité, la tarification n’étant dès lors pas imputable à l’État.

(122)

Les centrales AES-Tisza Erőmű, Budapesti Erőmű et Csepeli Erőmű contestent les effets de distorsion des AAE et leur incidence éventuelle sur les échanges entre les États membres.

(123)

Ces parties affirment premièrement que ce critère devrait être analysé en tenant compte de l’époque à laquelle les AAE ont été signés. La Hongrie n’était pas membre de l’Union européenne et le marché de l’électricité n’était pas encore libéralisé. Par conséquent, ils estiment que les AAE ne pouvaient pas, par définition, fausser la concurrence dans le marché commun.

(124)

Deuxièmement, elles estiment que la concurrence et les échanges entre les États membres sont influencés par d’autres facteurs que les AAE. Selon elles, les capacités transfrontalières de la Hongrie seraient le principal facteur qui influencerait les échanges entre la Hongrie et d’autres pays. Ces capacités transfrontalières sont utilisées au maximum. Les échanges d’électricité sont donc clairement limités par les capacités transfrontalières limitées de la Hongrie et non pas par les AAE. Selon ces mêmes parties, la législation serait l’autre facteur qui influencerait les échanges entre les États membres. En tout état de cause, la législation hongroise interdisait aux producteurs de vendre directement de l’électricité à l’étranger.

(125)

Selon la centrale Csepeli Erőmű, son AAE ne saurait avoir une incidence réelle sur les échanges étant donné qu’elle ne vend de l’électricité qu’en Hongrie.

(126)

Cette même centrale affirme que le marché hongrois de l’électricité s’est progressivement ouvert à la concurrence conformément aux obligations imposées par l’Union européenne. Une partie considérable des consommateurs a rapidement basculé vers le segment du marché libre. Ce serait l’imprévisibilité de la rentabilité, et non pas l’existence des AAE, qui dissuaderait de nouveaux acteurs d’entrer sur le marché de l’électricité hongrois. Selon l’argumentation de la centrale Csepeli Erőmű, ces dernières années, des centrales électriques n’ont été construites en Hongrie que lorsque l’État a assuré une certaine stabilité ou prévisibilité du retour sur investissement par des accords à long terme ou des achats obligatoires, ou lorsque l’utilisation des nouvelles capacités était garantie par une demande issue d’une activité de distribution verticalement intégrée. En tout état de cause, les AAE ne constituaient pas un facteur dissuasif pour les nouveaux entrants.

(127)

D’autre part, il n’existerait pas non plus en Hongrie de demande du marché justifiant des capacités nouvelles, ce dont attesterait le fait qu’une part très considérable des capacités mises en vente par MVM lors d’enchères publiques n’ait pas trouvé preneur.

5.3.   Applicabilité après l’adhésion

(128)

Ce commentaire a été formulé par la centrale Budapesti Erőmű.

(129)

Selon l’argumentation de cette centrale, les AAE ne peuvent pas être considérés comme des mesures «toujours applicables» après l’adhésion au sens de l’annexe IV, paragraphe 3, point 1(c), de l’acte d’adhésion.

(130)

La partie intéressée fait valoir que, conformément au principe de non-rétroactivité, les mesures instituées en vertu de la loi avant l’adhésion ne devraient pas être examinées par la Commission après l’adhésion. Dans la mesure où les règles communautaires sur les aides d’État ne sont applicables qu’après l’adhésion, seules les mesures d’aides conférant un avantage supplémentaire après l’adhésion peuvent être considérées comme des mesures applicables après l’adhésion. Selon elle, les AAE ne confèrent pas d’avantages supplémentaires après l’adhésion étant donné que leurs formules de prix ont été définies avant l’adhésion et que, de ce fait, l’engagement financier de l’État était parfaitement connu avant l’adhésion.

5.4.   Aides existantes

(131)

Cet argument a été présenté par les centrales Budapesti Erőmű, Csepeli Erőmű, AES-Tisza Erőmű et Mátrai Erőmű, ainsi que par la Banque […].

(132)

Les parties intéressées soutiennent que même s’il était acquis que les AAE constituent une aide d’État au sens de l’article 87, paragraphe 1 du traité CE, cette aide devait être considérée comme une aide existante au sens de l’annexe IV, paragraphe 3, point 1 (c), de l’acte d’adhésion. Elles estiment que la Commission n’a pas contesté la mesure dans le délai de 3 mois stipulé à l’acte d’adhésion. Les autorités hongroises ont notifié la mesure le 31 mars 2004. Après un échange d’informations, la Commission n’avait pas réagi dans un délai de 3 mois à la lettre de la Hongrie du 19 octobre 2004, excluant de ce fait même toute classification de la mesure comme «aide nouvelle».

(133)

La centrale Budapesti Erőmű considère par ailleurs qu’une décision sur la mesure dans laquelle une aide octroyée avant l’adhésion, mais qui se poursuit après l’adhésion, peut être considérée comme une «aide nouvelle». Selon cette centrale, si une aide ne peut pas être qualifiée d’aide existante au sens de l’annexe IV de l’acte d’adhésion, il faut néanmoins l’examiner à la lumière de l’article 1er, paragraphe b), points ii-v, du règlement (CE) no 659/1999.

(134)

Elle souligne par ailleurs que les AAE sont régis par l’article 1er, paragraphe b), point v, du règlement (CE) no 659/1999 et qu’ils constituent dès lors une «aide existante». Selon la centrale, la dernière phrase de l’article 1er, paragraphe b), point v du règlement (CE) no 659/1999 ne s’applique pas aux AAE, et ce pour trois raisons.

(135)

Premièrement, dans l’affaire Alzetta Mauro  (47), la Commission a estimé que l’aide octroyée sur un marché initialement fermé à la concurrence doit être considérée comme une aide existante au moment de la libéralisation. Selon la partie intéressée, cet arrêt se fonde directement sur une interprétation de l’article 88, paragraphe 1, du traité CE, et prime donc sur les dispositions du règlement (CE) no 659/1999.

(136)

Deuxièmement, étant donné que le règlement (CE) no 659/1999 n’était en tout état de cause pas encore entré en vigueur au moment de la libéralisation du marché de l’électricité conformément à la directive 96/92/CE et de la signature des AAE, ce sont les règles énoncées dans l’arrêt Alzetta Mauro qui étaient applicables, et non le règlement (CE) no 659/1999.

(137)

Troisièmement, il ressort de la comparaison du libellé des différentes catégories d’aides visées à l’article 1er, paragraphe b), du règlement (CE) no 659/1999 que l’article 1er, paragraphe b), point v ne concerne que les régimes d’aides d’État, les aides individuelles n’étant pas mentionnées expressément.

(138)

La centrale AES-Tisza Erőmű soutient en revanche que, dès lors que les AAE seraient considérés comme des aides nouvelles, c’est l’article 1er, paragraphe b), point v, du règlement (CE) no 659/1999 qui devrait en constituer la base juridique.

5.5.   La Commission ne peut pas mettre fin à des accords de droit privé valablement conclus («pacta sunt servanda») – insécurité juridique

(139)

Les arguments suivants ont été présentés par les centrales Budapesti Erőmű et AES-Tisza Erőmű, ainsi que par la Banque […].

(140)

Les parties soulignent avoir signé, de bonne foi, les AAE dans le contexte du marché existant au moment de la signature des AAE. Elles ont pris d’importants engagements en matière d’investissement, que des établissements de crédit ont soutenu par le biais d’accords de financement. Selon elles, l’examen de la Commission crée une insécurité juridique considérable qu’il serait bon d’éviter. La centrale AES-Tisza Erőmű Kft. conteste le droit de la Commission de mettre fin, sur la base des règles relatives aux aides d’État, et, plus généralement, des règles de concurrence du traité CE, à des accords commerciaux valablement conclus (48).

5.6.   Proportionnalité

(141)

La centrale AES-Tisza Erőmű Kft. exprime des inquiétudes quant à la proportionnalité de la demande de la Commission visant à mettre fin aux AAE et souligne la possibilité de renégocier les accords.

5.7.   Observations concernant la compatibilité des AAE avec le marché commun

(142)

Les centrales Csepeli Erőmű et AES-Tisza Erőmű font valoir que les AAE n’avaient pas vocation à être des mécanismes compensatoires, et il n’est donc pas approprié de les comparer à la méthodologie des coûts échoués. Au moment de leur signature, les AAE ne pouvaient pas être conçus dans le but de compenser les coûts échoués car la méthodologie n’existait même pas encore à cette époque-là. Les centrales estiment que la méthodologie ne peut être appliquée que dans les cas où les AAE ont préalablement pris fin.

(143)

La Banque […] soutient en revanche pour ce qui est de l’AAE Csepel que la contrepartie payée dans le cadre de l’AAE se limite en fait à la couverture des coûts éligibles selon la méthodologie (soit les coûts fixes, les coûts variables et une marge bénéficiaire raisonnable). Selon elle, l’AAE Csepel ne prévoit pas de compensation supérieure aux coûts échoués éligibles.

(144)

La centrale Csepeli Erőmű affirme par ailleurs que les AAE correspondent aux critères arrêtés à l’article 87, paragraphe 3, du traité CE car ils contribuent dans une mesure considérable à la sécurité de l’approvisionnement électrique de la Hongrie et, plus généralement, au développement de l’économie hongroise.

(145)

La centrale AES Tisza Erőmű suggère (sans motivation détaillée) que les AAE soient considérés comme des garanties pour les investissements réalisés dans une région relevant de l’article 87, paragraphe 3, point (a).

(146)

De plus, la centrale AES Tisza Erőmű note que la décision d’ouverture de la procédure manque de clarté en ce qui concerne les prix de référence du marché, la notion d’«investissement inefficient» et les hypothèses économiques et les dates retenues par la Commission pour apprécier la compatibilité avec le marché commun.

6.   REPONSE DE LA HONGRIE AUX OBSERVATIONS DES PARTIES INTERESSEES

(147)

En ce qui concerne les observations formulées par la centrale Csepeli Erőmű, la Hongrie note que contrairement à ce qui pourrait être inféré de ces observations, l’AAE conclu avec cette centrale prévoit aussi des volumes minimums d’achats garantis.

(148)

En ce qui concerne les arguments présentés par la centrale Dunamenti Erőmű, selon lesquels la centrale Dunamenti Erőmű ne peut pas refuser de produire selon les conditions imposées par MVM, même lorsque cela agit au détriment de ses ventes sur le marché libre, les autorités hongroises soulignent que MVM a entamé en 2006 le retrait des 4 blocs F des AAE, lesquels auraient pu par conséquent concourir directement sur le marché des services de réseau. La centrale Dunamenti Erőmű n’a cependant pas souhaité tirer parti de cette possibilité.

(149)

En ce qui concerne les observations présentées par la centrale AES-Tisza Erőmű, selon lesquelles les producteurs privés d’AAE ont surtout investi lorsqu’ils bénéficiaient d’une garantie d’achat, les autorités hongroises indiquent que des centrales électriques et des blocs de centrale électrique importants vendent de l’électricité sur le marché libre sans AAE et sans garantie d’achat (tels que le bloc G1 de la centrale Dunamenti Erőmű, la centrale Vértesi Erőmű, les blocs I-II de la centrale Mátrai Eerőmű).

(150)

La Hongrie souligne par ailleurs que, contrairement à ce que suggère la centrale AES-Tisza Erőmű, la position de négociation limitée de MVM est elle aussi limitée par les AAE eux-mêmes (formules de calcul des prix et volumes d’achat garantis).

7.   ÉVALUATION PAR LA COMMISSION

7.1.   Aide illégale

(151)

Les autorités hongroises n’ont pas notifié à la Commission conformément aux règles de procédure des aides d’État les éléments d’aides contenus dans les AAE. Cette aide constitue donc une aide illégale.

7.2.   Observations générales en ce qui concerne l’évaluation individuelle des AAE

(152)

Dans leurs observations, certaines parties intéressées et les autorités hongroises ont proposé d’évaluer individuellement les AAE compte tenu des différences constatées au niveau de leurs modalités concrètes.

(153)

La présente décision couvre tous les AAE conclus entre MVM et les centrales électriques et qui étaient en vigueur au moment de l’adhésion de la Hongrie à l’Union européenne (voir les considérants 44 et 45). La Commission estime que les principes directeurs des AAE présentent des similitudes qui justifient leur évaluation conjointe dans une procédure relative à des aides d’État. Comme elle l’expose ci-après, la Commission considère que le principal avantage conféré par les AAE est commun à tous les AAE examinés et que durant la période 1995-2001, ce sont des objectifs politiques identiques qui ont été à la base de la décision de les conclure et que cette décision présente des solutions analogues. Concrètement, chaque AAE impose à MVM, pour une durée couvrant une partie considérable de la durée de vie des actifs, une obligation d’achat en ce qui concerne les capacités réservées et un volume d’achat garanti, le tout assorti d’un mécanisme de calcul des prix permettant aux producteurs de couvrir leurs frais fixes et variables. De plus, les autres critères relatifs à l’existence d’une aide d’État présentent aussi des similitudes qui justifient leur appréciation conjointe. Leur sélectivité repose sur les mêmes principes de base; pour répondre à la question de savoir si les AAE conduisent ou non un transfert de ressources d’État, il faut procéder à une évaluation largement semblable. Quant à leur incidence sur la concurrence et le commerce, elle fait l’objet d’une évaluation économique largement analogue, prenant en considération l’existence des AAE sur le marché hongrois. Par conséquent, la Commission estime que pour refléter fidèlement la réalité du marché hongrois de la production d’énergie électrique, la présente décision en matière d’aides d’État doit évaluer les AAE dans leur ensemble et qu’une décision unique doit clore la procédure.

(154)

Cette approche globale n’empêche cependant pas la Commission de tenir compte des divergences existant effectivement entre les AAE en question. La présente décision identifie les divergences entre les AAE dès lors qu’elles sont pertinentes aux fins de la décision.

7.3.   Existence d’une aide d’État au sens de l’article 87, paragraphe 1, du traité CE

(155)

La Commission examine ci-après les quatre conditions cumulatives de l’existence d’une aide d’État au sens de l’article 87, paragraphe 1, du traité CE: le recours à des ressources d’État, l’existence d’un avantage économique, le caractère sélectif de l’avantage et l’incidence sur le commerce.

(156)

Dans leurs observations, les parties intéressées ont fait valoir (en ce qui concerne plusieurs critères d’évaluation) que la Commission devait tenir compte exclusivement de la situation existant au moment de la signature des AAE et étendre les conclusions de cette analyse à la durée totale des AAE. À cet égard, la centrale Budapesti Erőmű fait référence à la communication de la Commission sur la détermination des règles applicables à l’appréciation des aides illégales (49).

(157)

Pour déterminer le moment approprié de l’évaluation, la Commission doit d’abord prendre en compte l’acte d’adhésion de la Hongrie, le règlement de procédure ainsi que la jurisprudence de la Cour de justice.

(158)

La partie pertinente de l’annexe IV de l’acte d’adhésion est libellée comme suit:

«ANNEXE IV

Liste visée à l’article 22 de l’acte d’adhésion

[…]

3)   Politique de la concurrence

1)

Les régimes d’aides et aides individuelles ci-après, mis à exécution dans un nouvel État membre avant la date de l’adhésion et toujours applicables après cette date, sont considérés lors de l’adhésion comme aide existante au sens de l’article 88, paragraphe (1), du traité CE:

a)

aides mises à exécution avant le 10 décembre 1994;

b)

aides énumérées dans l’appendice de la présente annexe;

c)

aides examinées par l’autorité chargée de la surveillance des aides publiques du nouvel État membre avant la date de l’adhésion et jugées compatibles avec l’acquis, et à l’égard desquelles la Commission n’a pas soulevé d’objections en raison de doutes sérieux quant à la compatibilité des mesures avec le marché commun, en vertu de la procédure visée au paragraphe 2.

Toutes les mesures encore applicables après la date d’adhésion qui constituent une aide publique et ne satisfont pas aux conditions susvisées sont considérées comme une aide nouvelle à la date de l’adhésion aux fins de l’application de l’article 88, paragraphe 3, du traité CE.

Les dispositions ci-dessus ne s’appliquent ni aux aides octroyées au secteur des transports ni aux activités liées à la production, à la transformation et à la mise sur le marché des produits qui figurent à l’annexe I du traité CE, à l’exception des produits de la pêche et des produits dérivés de la pêche.

Elles sont par ailleurs sans préjudice des mesures transitoires relatives à la politique de la concurrence qui figurent dans le présent instrument.»

(159)

La partie pertinente de l’article 1er du règlement de procédure est libellée comme suit:

«b)

“aide existante”

i-iv)

[…]

v)

toute aide qui est réputée existante parce qu’il peut être établi qu’elle ne constituait pas une aide au moment de sa mise en vigueur, mais qui est devenue une aide par la suite en raison de l’évolution du marché commun et sans avoir été modifiée par l’État membre. Les mesures qui deviennent une aide à la suite de la libéralisation d’une activité par le droit communautaire ne sont pas considérées comme une aide existante après la date fixée pour la libéralisation;

c)

“aide nouvelle” toute aide, c’est-à-dire tout régime d’aides ou toute aide individuelle, qui n’est pas une aide existante, y compris toute modification d’une aide existante».

(160)

Il résulte des dispositions ci-dessus que les mesures qui ne constituaient pas des aides d’État au moment où elles ont été accordées peuvent, dans certaines conditions, devenir des aides d’État, au sens de l’article 87 du traité CE, et ce sans préjudice de la classification en tant qu’aide existante ou aide nouvelle de la mesure devenant une aide d’État.

(161)

S’il est vrai qu’en examinant l’existence d’une aide d’État dans un cas spécifique la Commission doit évaluer la situation au moment de l’entrée en vigueur de la mesure, ceci ne signifie cependant pas que l’appréciation des quatre critères figurant dans la définition d’une aide d’État doit, en toutes circonstances, se limiter exclusivement à la période au cours de laquelle l’aide a été octroyée.

(162)

Il apparaît clairement à la lumière de l’article 1, paragraphe b, point v, du règlement de procédure que dans des circonstances exceptionnelles, telles que l’évolution du marché commun ou la libéralisation d’un secteur, d’importants changements économiques et juridiques peuvent survenir dans un ou plusieurs secteurs de l’économie et que, à la suite de ces changements, des mesures qui initialement ne relevaient pas de l’article 87 du traité CE peuvent se trouver soumises au contrôle des aides d’État. Lors de la libéralisation d’un secteur de l’économie, le maintien de toutes les mesures qui n’étaient pas considérées comme des aides d’État au moment où elles ont été accordées, en raison de conditions de marché fondamentalement différentes, mais qui, dès la libéralisation, remplissent tous les critères pour être considérés comme des aides d’État, perpétuerait de facto une large part des conditions du marché qui prévalaient avant l’instauration de la concurrence. Cela irait à l’encontre de l’objectif précisément poursuivi consistant à mettre un terme à l’absence de concurrence sur un marché, et donc de la décision des États membres de libéraliser le secteur en question. Les dispositions spéciales en vertu desquelles une mesure peut devenir une aide d’État ont pour objectif d’éviter que des mesures qui ne constituaient pas une aide d’État dans un contexte économique et juridique puissent léser les intérêts des acteurs dans les nouvelles conditions du marché (50).

(163)

La Commission doit évaluer de manière distincte la question de savoir si l’aide d’État constitue une aide existante ou une aide nouvelle, c’est-à-dire après avoir constaté l’existence éventuelle de l’aide d’État.

(164)

L’économie de la Hongrie a connu des changements profonds au cours des années 90. Le pays a opté pour l’adhésion à l’Union européenne et en est devenu membre à part entière le 1er mai 2004. La Hongrie était parfaitement consciente de son obligation d’aligner ses mesures sur les règles de concurrence du marché commun auquel elle souhaitait adhérer, étant donné que l’accord d’association CEE-Hongrie (51) signé par elle en 1991 mentionnait expressément cette obligation.

(165)

En adhérant à l’Union européenne, la Hongrie a aussi adhéré au marché intérieur libéralisé de l’énergie. L’Acte d’adhésion ne prévoit aucune exception aux règles de concurrence concernant le marché hongrois de l’énergie. Contrairement aux observations des parties intéressées, la Commission considère donc que les AAE qui ont été conclus (comme les parties intéressées le reconnaissent) dans des circonstances économiques considérablement différentes avant l’adhésion au marché intérieur libéralisé de l’énergie, peuvent devenir des aides d’État dans le nouveau contexte économique et juridique. Pour apprécier l’existence de cette aide, il faut évaluer l’existence des quatre critères d’aides d’État à la lumière de ces nouvelles circonstances économiques et juridiques.

(166)

La question du moment pertinent de l’évaluation doit par ailleurs être examinée au regard de l’acte d’adhésion. Contrairement aux adhésions antérieures, les États membres ont accepté d’introduire dans l’acte d’adhésion des dispositions spécifiques en vertu desquelles toutes les mesures d’aide applicables après l’adhésion et conclues après le 10 décembre 1994 devaient être notifiées à la Commission avant l’adhésion et examinées par elle sur la base de l’acquis communautaire.

(167)

Dans la plupart des pays qui ont adhéré à l’Union européenne le 1er mai 2004, l’intervention de l’État reposait, pour des raisons historiques, sur une tradition particulièrement forte. Certaines mesures pouvaient ne pas satisfaire aux quatre critères des aides d’État en raison des circonstances de marché considérablement différentes qui prévalaient à l’époque. Or, dans les nouvelles circonstances économiques juridiques apparues après l’adhésion, ces critères pourraient être bel et bien remplis.

(168)

Les articles pertinents de l’acte d’adhésion visent à garantir une concurrence non faussée sur le marché intérieur après l’entrée en vigueur du traité. Par conséquent, les articles pertinents de l’acte d’adhésion visent à garantir que des mesures d'aides d’État incompatibles ne faussent pas la concurrence sur le marché commun après l’adhésion. À cet égard, le fait que pendant les années 90, au moment de l’adoption de la mesure, celle-ci remplissait ou non les critères des aides d’État, n’est pas pertinent. En conséquence, la période pertinente pour l’évaluation des critères de l’existence d’aides d’État est la période postérieure à l’adhésion de la Hongrie à l’Union européenne et au marché intérieur libéralisé de l’énergie.

(169)

Toute autre approche créerait une situation dans laquelle les circonstances économiques prévalant avant l’adhésion et la libéralisation (période qui, pour la plupart des nouveaux adhérants, correspond à une période de transition postcommuniste) pourraient persister bien au-delà de l’adhésion du pays à l’Union européenne. L’État membre pourrait ainsi conserver, voire prolonger à sa guise les mesures qui n’étaient pas considérées comme une aide d’État avant l’adhésion, même si celles-ci le devenaient dans les circonstances prévalant après l’adhésion, vu que ces mesures n’entraient pas dans le champ des pouvoirs de contôle de la Commission au titre des règles sur les aides d’État.

(170)

Tel est précisément l’objectif poursuivi par les parties intéressées. Tous les arguments des parties intéressées en ce qui concerne le moment pertinent de l’évaluation visent à démontrer que, dans le cadre de la présente procédure, l’évaluation économique et juridique des AAE doit se baser exclusivement sur les circonstances existant au moment de la signature des AAE (soit entre 1995 et 2001) et, qu’en raison de ces circonstances économiques et juridiques, il convient de conclure que les AAE ne constituent pas une aide d’État. Les parties intéressées soutiennent que le critère de l’opérateur en économie de marché ainsi que les critères relatifs à la distorsion de concurrence et l’incidence sur le commerce doivent être analysés en fonction du contexte économique qui prévalait au milieu des années 90, que la Commission doit tenir compte des obligations de MVM à cette époque-là (sécurité d’approvisionnement) ainsi que de la structure du secteur de l’énergie prévalant à cette époque (modèle d’«acheteur unique», etc.). Selon elles, le résultat de l’évaluation effectuée en l’espèce doit prévaloir jusqu’à la date d’expiration des AAE (2024 pour le contrat le plus long).

(171)

La Commission ne partage pas cette argumentation. La Commission estime que les articles pertinents de l’acte d’adhésion, en imposant l’application immédiate des règles relatives aux aides d’État aux acteurs économiques, visent justement à éviter de telles situations. L’Acte d’adhésion prévoit des exceptions pour certains secteurs économiques (voir les dispositions relatives au transport), mais ne prévoit aucune exception pour les acteurs du marché de l’électricité. De ce fait, l’acquis communautaire, y compris la directive 96/92/CE, est immédiatement applicable, à partir de la date de l’adhésion, à toutes les conditions contractuelles du marché hongrois de l’électricité.

(172)

Dans son évaluation des AAE, la Commission estime donc qu’en adhérant au marché intérieur libéralisé de l’énergie de l’Union européenne, la Hongrie a accepté d’appliquer les principes de cette économie de marché à tous les acteurs du secteur hongrois de l’énergie, y compris à toutes les relations commerciales existantes.

(173)

La Commission doit dès lors examiner la question de savoir si la mesure remplissait ou non tous les critères de l’existence d’une aide d’État au jour de l’adhésion de la Hongrie à l’Union européenne.

(174)

En guise d’introduction à l’examen de l’existence d’un avantage, il est utile de noter que la plupart des producteurs d’électricité ont reconnu dans leurs observations que sans les garanties offertes par les AAE, ils n’auraient pas investi dans ces centrales électriques. La centrale […] soutient, dans ses observations, que «les AAE sont un élément important pour que les banques acceptent de financer l’investissement et de préfinancer, en continu, les coûts d’exploitation. Le […], la […] a demandé l’avis du consortium [soit les banques] sur un amendement éventuel des AAE, mais les banques ont refusé une réduction des capacités réservées et des volumes d’achat garantis» (52).

(175)

À cet égard, […] (en tant que chef de file des douze banques ayant accordé un prêt de près de […] à la centrale Csepel) affirme que «pour les banques, l’AAE fait partie d’un ensemble d’accords commerciaux étroitement liés qui ont servi et qui servent encore de nos jours de garantie au contrat de prêt servant à financer le projet aux conditions du marché. Toute modification des AAE toucherait donc aussi automatiquement les banques, et comme ces dernières disposent de mécanismes contractuels appropriés pour défendre leurs intérêts financiers, ceci mettrait par conséquent en danger l’ensemble du projet Csepel II.»

(176)

[…] (en tant que chef de file des neuf banques ayant accordé un prêt de près de […] à la centrale AES Tisza Erőmű Kft.) affirme que «le financement se base essentiellement sur l’existence de l’AAE et des autres documents relatifs au projet (par exemple: l’accord d’approvisionnement en combustibles). […] Les AAE garantissent une stabilité face aux risques liés à la demande (quantité et calcul des prix de l’électricité vendue.)»«C’est la stabilité de la demande qui, par les garanties qu’elle offre, est le facteur décisif […] qui permet aux banques d’accorder un financement à long terme sur un marché immature.»

(177)

Pour examiner l’existence d’un avantage, la Commission a préliminairement analysé le raisonnement qu’elle doit suivre au cours de cet examen. À la suite de l’analyse préliminaire exposée aux considérants 180 à 190, la Commission a conclu que pour évaluer l’existence de l’avantage il faut examiner si, dans les circonstances existant au moment de l’adhésion de la Hongrie à l’Union européenne, un opérateur de marché aurait ou non accordé aux producteurs une garantie similaire à celle prévue par les AAE, à savoir une obligation, pour MVM, d’acheter les capacités réservées dans les AAE (qui correspond à la totalité ou à la majeure partie de la capacité dont dispose la centrale électrique) ainsi qu’une quantité minimum garantie d’électricité produite, au prix couvrant les coûts fixes et variables (y compris les coûts des combustibles) pendant une période de 15 à 27 ans, correspondant à la période d’exploitation ou d’amortissement normalement prévisible des équipements concernés (53).

(178)

Dans un second temps, la Commission a analysé la réponse à cette question à la lumière des pratiques commerciales courantes sur les marchés européens de l’électricité.

(179)

Enfin, la Commission a brièvement analysé l’incidence des AAE sur le marché au cours de la période postérieure à l’adhésion de la Hongrie à l’Union européenne. Bien que cette analyse ne soit pas indispensable pour évaluer la mesure dans laquelle les AAE offrent un avantage économique ou non, elle est utile pour examiner de façon appropriée les différentes observations présentées par les parties intéressées.

1)   Analyse préliminaire: raisonnement à suivre pour évaluer l’existence de l’avantage

(180)

Dans leurs observations présentées au cours de la procédure, les parties intéressées ont analysé l’existence éventuelle de l’avantage à la lumière des circonstances dans lesquelles les AAE ont été signés au milieu des années 90. Ils en ont essentiellement conclu que durant la période mentionnée, ainsi que dans le cadre de la privatisation des producteurs d’électricité, un opérateur de marché moyen aurait accordé aux producteurs une garantie similaire à celle prévue par les AAE afin d’attirer les investisseurs et garantir ainsi la sécurité d’approvisionnement de la Hongrie.

(181)

La Commission a examiné le bien fondé de cette approche et a conclu que celle-ci n’est pas adéquate, et ce pour deux raisons. Premièrement, elle ne prend pas en considération les véritables bénéficiaires de la mesure examinée. Deuxièmement, la période retenue n’est pas pertinente pour évaluer l’existence d’un avantage.

(182)

La centrale Dunamenti Erőmű Rt. affirme ne pas avoir bénéficié d’avantages dans le cadre de son AAE car elle a payé le prix du marché lors de la privatisation de ses centrales électriques, et le prix d’achat tenait compte de ses droits et obligations en vertu de l’AAE. Même si l’AAE lui a conféré un avantage, elle en a payé la contrepartie par le prix acquitté pour la privatisation.

(183)

La Commission estime que ces arguments ne sont pas recevables dans le cas présent. Les bénéficiaires de l’aide sont les centrales électriques privatisées (à tout le moins celles qui l’ont effectivement été) et non pas les actionnaires de celles-ci. La privatisation des centrales électriques a été réalisée par rachat d’actions.

(184)

La Cour de justice a examiné dans quelle mesure un changement d’actionnariat par rachat d’actions influait sur l’existence d’une aide illégalement octroyée à la société et à son bénéficiaire. Selon l’arrêt de la Cour de justice, l’aide illégalement octroyée reste rattachée à la société bénéficiaire initiale, indépendamment du changement d’actionnariat (54). La cession des participations au prix du marché signifie simplement que l’acheteur acquérant une participation ne bénéficie pas d’aide d’État. Ceci ne diminue cependant en rien l’existence d’un avantage pour l’activité de la centrale électrique bénéficiaire.

(185)

Les bénéficiaires de l’aide examinée dans la présente procédure sont les sociétés hongroises qui exploitent les centrales électriques et qui ont signé les AAE, et non pas les actionnaires de ces centrales électriques. De plus, le changement d’actionnariat s’est opéré avant la date à partir de laquelle doit être examinée l’existence de l’aide d’État et est dénué de pertinence dès lors qu’il s’agit d’évaluer l’existence d’aides d’État en faveur des sociétés exploitant les centrales électriques. Les sociétés signataires des AAE ont donc bénéficié des avantages découlant des AAE, indépendamment de la structure de leur actionnariat.

(186)

La Commission est consciente du fait que dans les conditions de marché prévalant en Hongrie au milieu des années 90, c’est le principe directeur des AAE, soit la garantie de retour sur investissement, qui était la condition fondamentale à la réalisation des investissements nécessaires.

(187)

Le fait qu’en raison des caractéristiques du secteur de production d’électricité et de la situation politique et économique de la Hongrie en ce temps-là, l’intervention de l’État était nécessaire au regard de l’intérêt public, et que la meilleure des solutions était l’octroi d’AAE à plusieurs producteurs ne contredit pas le fait que les AAE confèrent un avantage aux producteurs.

(188)

La plupart des producteurs affirment n’avoir pas bénéficié d’avantages découlant des AAE car ils correspondent au comportement normal de tout opérateur en économie de marché se trouvant dans la situation de MVM ou des producteurs. Ils soutiennent que tout acteur privé se trouvant dans la situation de MVM (soit l’acheteur unique légalement tenu de garantir la sécurité de l’approvisionnement) aurait conclu les AAE, et que l’avantage économique en découlant ne dépassait pas le niveau auquel les parties pouvaient normalement prétendre dans les circonstances du marché hongrois des années 90, qui était un marché immature. De plus, pour obtenir le permis d’exploitation, les producteurs étaient légalement tenus de conclure un accord avec MVM. Les producteurs soulignent qu’en appliquant le principe de l’investisseur privé, la Commission devrait prendre en compte les exigences juridiques et la réalité économique au moment de la signature des AAE.

(189)

En ce qui concerne l’argumentation des parties intéressées relative au principe de l’investisseur privé, la Commission se réfère aux considérants de la présente décision concernant la période pertinente à retenir pour l’évaluation de l’existence éventuelle d’une d’aide d’État dans le cadre des AAE. La Commission souhaite à nouveau souligner qu’elle n’entend pas mettre en doute le fait que dans les conditions existant au moment de la signature des AAE, il était nécessaire de conclure ces accords. Mais, comme exposé ci-dessus, ceci ne signifie pas que les AAE ne confèrent pas un avantage aux producteurs. Les parties intéressées ne font essentiellement qu’affirmer que ces accords correspondaient aux circonstances du marché prévalant au moment de leur signature. Aucune partie intéressée ne soutient que ces accords correspondent aux circonstances actuelles du marché intérieur.

(190)

La Commission conclut que lors de l’examen de l’existence d’un avantage découlant des AAE, elle doit s’assurer que, dans les conditions existant au moment de l’adhésion de la Hongrie à l’Union européenne, un opérateur de marché aurait offert aux producteurs une garantie similaire à celle prévue par les AAE, telle que décrite au considérant 177.

2)   Analyse de l’existence d’un avantage accordé aux producteurs d’électricité au moment de l’adhésion de la Hongrie à l’Union européenne

(191)

Afin de répondre à la question posée au considérant précédent, la Commission a identifié, aux fins de la présente analyse, les principales pratiques des acteurs commerciaux sur les marchés européens de l’électricité, et a évalué si les AAE étaient conformes à ces pratiques ou bien s’ils offraient aux producteurs des garanties qu’un acheteur agissant sur une base exclusivement commerciale n’accepterait pas.

(192)

Il est utile de mentionner à titre préliminaire que le marché de l’électricité se divise traditionnellement en quatre sous-marchés: i) production/importation et commerce de gros; ii) transmission/distribution; iii) vente au détatil; iv) services d’équilibrage. Comme MVM achète de l’électricité auprès de producteurs domestiques, importe de l’électricité, puis la vend à des distributeurs régionaux d’électricité et à des prestataires commerciaux (vente au détail), du point de vue de l’évaluation des AAE, ce sont les sous-marchés de la première et de la quatrième catégorie qui sont pertinents. MVM fournit en outre aussi des capacités réservées au gestionnaire du réseau de transport d’électricité afin d’assurer l’équilibrage du réseau.

(193)

Durant la période examinée, le marché hongrois de la vente au détail se subdivise en deux secteurs: i) le segment du service public, où les opérateurs régionaux d’électricité fournissent de l’électricité aux prix réglementés aux consommateurs non éligibles ou ne faisant pas jouer leur éligibilité; ii) le secteur du marché libre, où les opérateurs commerciaux fournissent de l’électricité aux consommateurs éligibles aux prix résultant des mécanismes de marché. Le système instauré par la IIIe loi sur l’énergie électrique a limité le secteur du service public aux ménages et aux consommateurs commerciaux relevant de l’obligation de prestation du service universel.

(194)

Durant la période examinée, MVM fournissait de l’énergie aux distributeurs régionaux d’électricité (les opérateurs du segment de service public) tout comme aux opérateurs du secteur du marché libre. Toutefois, comme indiqué aux considérants 221 à 231, les ventes de MVM aux opérateurs du marché libre avaient pour seul objectif d’écouler les quantités excédentaires achetées dans le cadre des AAE et non demandées par le secteur du service public. Ces ventes ne s’inscrivaient pas dans le cadre d’une activité commerciale autonome mais découlaient plutôt des AAE. De ce fait, l’existence de l’aide doit être évaluée au regard de l’objectif premier assigné à MVM, soit la fourniture d’électricité aux distributeurs régionaux d’électricité en quantité suffisante pour répondre à la demande du secteur de service public. Il faut donc examiner dans quelle mesure en l’absence d’AAE, un opérateur de marché agissant uniquement sur une base commerciale et chargé de fournir aux opérateurs régionaux une quantité d’électricité suffisante aurait offert ou non des garanties similaires à celles prévues par les AAE. Cette évaluation doit être faite sous l’angle de marchés de gros concurrentiels. Les considérants ci-après donnent d’abord un aperçu des pratiques commerciales pertinentes au regard de l’évaluation, puis comparent les AAE avec ces pratiques. Enfin, à la lumière de cette comparaison, la Commission a examiné les conséquences des AAE auxquelles les autorités pouvaient s’attendre lors de l’adhésion de la Hongrie à l’Union européenne, et la mesure dans laquelle elles pouvaient s’attendre à un meilleur équilibre entre les conséquences favorables et défavorables qui auraient découlé d’autres types d’accords que les AAE.

2.a)   Brève description des pratiques commerciales pertinentes pour l’évaluation de l’existence d’un avantage offert par les AAE

(195)

Dans son enquête sectorielle sur le secteur de l’électricité en Europe (55), la Commission a examiné en détail les conditions dans lesqulles l’électricité est négociée sur les marchés de gros européens.

(196)

Le commerce de gros d’électricité a lieu sur les marchés spot ou sur les marchés à terme, en fonction du délai de livraison. Sur les marchés spot, ce sont généralement des contrats relatifs au jour suivant qui sont conclus le jour qui précède la livraison effective. Les échanges d’électricité sur les marchés spot s’effectuent toujours sur la base de prix marginaux, qui garantissent exclusivement la couverture des coûts marginaux à court terme (56).

(197)

Sur les marchés à terme, l’électricité est vendue avec des dates de livraison plus lointaines. Les produits à terme peuvent être hebdomadaires, mensuels, trimestriels et annuels. La vente des produits spot et à terme peut se dérouler sur les bourses d’échange d’énergie ou sous forme de contrats négociés de gré à gré par le biais d’une chambre de compensation. Les arbitrages incessants font que les prix de produits identiques tendent à se rapprocher sur les bourses d’échange d’énergie et sur les marchés de gré à gré. Les bourses d’échange d’énergie déterminent donc de plus en plus les prix de référence de tous les produits spot et à terme, soit pour l’ensemble du marché de gros.

(198)

Les prix des produits à terme évoluent en outre en fonction des attentes des acteurs du marché en ce qui concerne l’évolution future des prix sur les marchés spot. Étant donné que les acteurs du marché concluent des contrats à terme parce qu’ils privilégient la sécurité des prix à l’incertitude des prix spot futurs, les prix d’achat à terme comprennent aussi un élément de risque. En pratique, les prix des produits à terme comprennent un élément central qui reflète les attentes des acteurs du marché en ce qui concerne l’évolution des prix d’achat spot et, en fonction de l’importance que les acteurs du marché accordent à la sécurité, une prime de risque dans la plupart des cas ou une décote. Les prix d’achat spot constituent de ce fait la référence pour tous les prix de l’électricité. S’il existe un marché spot sur la bourse, les prix qui y sont pratiqués servent de référence à l’ensemble du marché. Sur de nombreux marchés de gros, les acheteurs — afin d’avoir une meilleure visibilité sur leurs coûts — tentent de couvrir la majeure partie de leurs besoins par des contrats à terme, les besoins additionnels étant couverts par des achats réalisés sur les marchés spot.

(199)

L’enquête sur le secteur de l’électricité a montré qu’outre les transactions standardisées et les échanges effectués sur les marchés des contrats de gré à gré, il existe aussi des «contrats bilatéraux sur mesure». En ce qui concerne les produits ou les services fournis, ces contrats peuvent être bien différents les uns des autres, et en général aucune information ne filtre sur les prix des transactions. Mais dans des conditions de marché concurrentielles, les transactions standardisées à la bourse d’échange et celles réalisées par le biais du marché des contrats de gré à gré ont nécessairement une incidence sur ces contrats, car un producteur ou un importateur n’accepterait pas de conclure un contrat bilatéral sur mesure qui offrirait des conditions clairement moins favorables que les contrats standardisés sur les marchés spot ou à terme. Ces contrats standardisés réalisés sur les marchés de gros européens constituent donc une base de comparaison adéquate pour examiner si les AAE confèrent ou non un avantage aux producteurs.

(200)

Sur les marchés à terme, la période de livraison la plus longue est d’un an. Et les délais les plus longs entre la signature du contrat et le début de la période de livraison effective sont les suivants: 4 ans — NordPool (pays scandinaves), 3 ans Powernext (France), 5 ans — UKPX (Grande-Bretagne) et 6 ans — EEX (Allemagne). Sur certaines bourses, telles que l’OMEL en Espagne, les contrats à terme n’existent pas. Les contrats à terme standardisés obligent le prestataire à fournir à un prix déterminé à l’avance une quantité d’électricité définie pendant une période d’un an débutant au maximum 6 ans après la signature du contrat. Ces échéances restent largement en deçà des périodes d’amortissement et de la durée de vie de toute centrale électrique. De ce fait, dans les conditions de marché normales, même si les producteurs commercialisent la majeure partie de l’électricité qu’ils produisent au moyen de contrats à terme, ils n’ont aucune visibilité sur les prix et les volumes de vente pendant la période d’amortissement ou d’exploitation des équipements. De plus, comme les prix sont arrêtés à l’avance, les producteurs doivent faire face au risque que leurs coûts dépassent les prix arrêtés. Ce risque est non négligeable, surtout en raison de la fluctuation des prix des combustibles qui, pour la plupart des technologies de production, constituent l’élément le plus important des coûts variables. Les producteurs doivent aussi faire face à la pression de la concurrence étant donné qu’ils doivent renouveler à plusieurs reprises leurs contrats à terme au cours de la période d’exploitation de leurs équipements et qu’ils doivent adapter leur offre à l’évolution des conditions de concurrence.

(201)

Sur les marchés de gros on peut également trouver des contrats avec réservation de capacités de production sous forme de «droits de tirage» (drawing rights) qu’il est pertinent de ce fait de comparer aux AAE. Acquérir des droits de tirage signifie qu’une partie des capacités de production est réservée, en général pour la durée d’exploitation prévisible de la centrale électrique, et qu’une «redevance de capacité» calculée en fonction des coûts de capital et des coûts fixes, est payée à l’exploitant. L’exploitant de la centrale électrique supporte les risques techniques. Le titulaire des droits de tirage peut déterminer le taux d’utilisation des capacités réservées, et il paye à l’exploitant de la centrale un prix correspondant aux coûts variables encourus pour la production d’énergie électrique à partir des capacités réservées.

(202)

Pour compléter l’évaluation de l’avantage éventuel conféré dans le cadre des AAE, il est utile de prendre en considération la situation des grands utilisateurs commerciaux ou industriels finals, même s’ils n’opèrent pas sur les marchés de gros mais sur les marchés de détail (en aval). Comme il arrive que les producteurs approvisionnent directement les grands utilisateurs commerciaux ou industriels, la comparaison avec les AAE est pertinente.

(203)

L’enquête sectorielle sur le secteur de l’électricité a montré que les opérateurs d’électricité concluent souvent des contrats à prix fixes avec les grands utilisateurs commerciaux ou industriels. La durée de ces contrats se limite généralement à un ou deux ans. Un calendrier de livraison est en général établi sur la base de la consommation antérieure. Les prix sont inférés des prix de gros sur les marchés à terme et comportent d’autres éléments de coût, tels que les coûts attendus d’équilibrage du réseau ainsi que la marge bénéficiaire de l’opérateur. En cas de non-respect du calendrier de livraison, une clause «take or pay» s’applique, qui oblige l’acheteur de payer, soit l’électricité dont il n’a pas besoin, soit un supplément. Sous cet angle, on peut considérer que ces contrats sont fondés sur, d’une part, une garantie d’achat minimum et, d’autre part, une réservation de capacité (57).

(204)

Pour évaluer l’avantage offert dans le cadre des AAE, il faut aussi prendre en considération un autre type d’accord, c’est-à-dire les contrats conclus pour les services d’équilibrage assurés par les gestionnaires du réseau (GRT). Comme l’électricité ne peut pas être stockée, il faut que la demande corresponde à chaque moment à l’offre. Si la demande ou l’offre s’écartent des prévisions et nécessitent un surplus de production d’électricité, il relève de la compétence du gestionnaire du réseau de solliciter certains producteurs pour augmenter leur production à bref délai. Pour assurer qu’on dispose des capacités de production nécessaires à la gestion de telles situations, les gestionnaires du réseau réservent une partie des capacités des unités de production qui sont en mesure de modifier leur niveau de production à bref délai. Vu que la Hongrie ne dispose pas de centrale hydraulique avec des unités de stockage, ce sont les centrales à gaz qui disposent des paramètres techniques les plus appropriés pour la fourniture de ces services.

(205)

L’examen du secteur de l’électricité a donné un aperçu de la pratique des gestionnaires de réseau européens relative aux contrats de réservation des capacités concernant la fourniture de services d’équilibrage. Il apparaît à la lumière de cet aperçu que les capacités sont réservées par le biais d’appel d’offres. La période habituelle pouvant être considérée comme une durée assurant aux GRT une flexibilité appropriée pour adapter la quantité des capacités réservées aux besoins effectifs est d’une année. Les contrats précisent en général les paramètres techniques du service demandé, la capacité réservée ainsi le prix de l’énergie seule ou bien le prix de l’énergie et de la capacité.

2.b)   Comparaison des AAE avec la pratique commerciale habituelle

(206)

La Commission a comparé l’obligation d’achat stipulée dans les AAE avec les principales caractéristiques des contrats à terme et spot, des contrats comprenant des «droits de tirage», des contrats à long terme conclus avec les grands utilisateurs finals ainsi que des contrats conclus par les producteurs et les gestionnaires du réseau concernant la fourniture de services d’équilibrage.

(207)

Il résulte de la description présentée aux considérants 195 à 200 que la combinaison «réservation de capacités d’électricité à long terme, garantie d’achat minimum et mécanisme de fixation des prix couvrant les coûts fixes et de capital» ne correspond pas aux contrats habituels conclus sur les marchés de gros européens et protège mieux les producteurs contre les risques que les contrats standard à terme et spot.

(208)

Les échanges d’électricité sur les marchés spot se fondent toujours sur des prix marginaux qui garantissent uniquement la couverture des coûts à court terme, et non pas celle de tous les coûts fixes et de capital. De plus, sur les marchés spot, les entreprises de production d’électricité ne disposent pas de garantie en ce qui concerne le taux d’utilisation de leurs capacités de production. L’impossibilité de stocker de façon rentable l’électricité — une caractéristique spécifique à ce secteur — augmente considérablement ce risque par rapport à la plupart des secteurs de production. Si, à un moment donné, il y a une offre suffisante pour répondre à la demande à un prix inférieur à celui des unités de production d’un producteur donné, les unités en question ne seront pas mises sur le marché, ce qui signifie que pour la période en question, la capacité de cette unité de production sera perdue.

(209)

De ce fait, la commercialisation sur le marché spot comporte un élément d’incertitude majeur pour ce qui est de la rémunération des coûts fixes et de capital, ainsi que du taux d’utilisation des capacités de production.

(210)

Les marchés à terme — dont les prix sont dérivés des prix d’achat spot — ne garantissent pas non plus aux producteurs une couverture de tous les coûts fixes et de capital par le produit de leurs ventes car les prix sont fixés à l’avance. Si, au cours de la période de livraison, les coûts des combustibles augmentent au-delà des attentes, les coûts de la production d’électricité peuvent être supérieurs au prix fixé à l’avance. Sur les marchés à terme, grâce à la durée plus longue des contrats, l’incertitude en ce qui concerne le taux d’utilisation des capacités de production est moindre que sur les marchés spot. Cependant, même si le producteur est capable de vendre la majeure partie de sa production d’électricité par le biais de contrats à terme, la visibilité sur les taux d’utilisation de ses unités de production ne concernera qu’une période limitée par rapport à leur durée de vie.

(211)

Les parties intéressées soulignent que les producteurs supportent dans le cadre des AAE des risques considérables liés notamment à la réalisation, à la réglementation, à l’écologie, à l’entretien et à la fiscalité/aux finances. La Commission reconnaît que les AAE n’éliminent pas tous les risques liés à l’exploitation d’une centrale électrique. En effet, les risques énumérés par les producteurs sont certainement supportés par eux. Ces risques correspondent cependant aux risques habituels que tout acteur du marché de l’électricité doit supporter lui-même, même s’il vend sa production sur les marchés spot et à terme standardisés. Or dans le cas des AAE, les risques commerciaux liés à la fluctuation des coûts de production de l’électricité — surtout des coûts des combustibles —, à l’évolution du prix de l’électricité à payer par les utilisateurs finals, ainsi qu’aux fluctuations de la demande d’électricité des utilisateurs finals sont supportés par MVM tout au long ou durant une longue période du cycle de vie des équipements exploités dans le cadre des AAE.

(212)

Les parties intéressées ont aussi soutenu dans leurs observations que la réservation de capacités à MVM leur a été désavantageuse, car outre la vente à MVM, ils ne peuvent pas utiliser ces capacités à d’autres fins. Le système de garantie d’achat minimum peut être considéré comme une garantie pour les producteurs car même si MVM n’utilise pas ces capacités réservées, cela n’empêchera pas l’utilisation de ces capacités à des fins de production et de vente d’électricité. Comme le tableau ci-après l’indique, la garantie minimum d’achat signifiait en fait que le taux d’utilisation de la capacité réservée était supérieur au taux d’utilisation moyen de la capacité totale disponible en Hongrie.

Tableau 5

Garantie minimum d’achat et capacités réservées

 

2004

2005

2006

Garantie d’achat (GWh)

23 234

23 528

23 516

Capacités réservées (MW)

4 242

4 460

4 481

Ratio garantie d’achat/capacités réservées (heures d’exploitation par an)

5 477

5 275

5 248

Ratio production hongroise d’électricité/capacités de production disponibles (heures d’exploitation par an)

4 272

4 225

4 601

(213)

Les contrats spot et à terme comportent dès lors beaucoup plus de risques pour les producteurs que les AAE, qui offrent une sécurité du point de vue de la rémunération des coûts fixes et de capital et du taux d’utilisation des capacités de production.

(214)

En ce qui concerne les droits de tirage, la différence essentielle entre cette forme d’accord et les AAE réside dans le fait que les droits de tirage ne sont généralement assortis d’aucune obligation d’achat minimum garantie. Le titulaire de droits de tirage supporte les risques commerciaux liés à la vente d’électricité produite à partir des capacités réservées. Il est toutefois assuré de vendre toute cette production à un prix couvrant au moins les coûts variables, car il peut décider de ne pas produire d’électricité si les prix deviennent inférieurs aux coûts variables. Les AAE conclus avec MVM ne fournissent aucune assurance de ce type en raison des obligations d’achat minimum imposées à MVM au bénéfice des producteurs.

(215)

Il est évident que les contrats d’achat à long terme conclus par les grands utilisateurs sont beaucoup plus avantageux pour l’acheteur que les AAE ne le sont pour MVM, car le prix fixé dans ces contrats, généralement pour toute leur durée, n’est normalement pas indexé sur des paramètres tels que les coûts des combustibles, dont l’évolution sur la durée du contrat est imprévisible, et il n’est pas fixé de manière à couvrir les coûts fixes et de capital, étant donné qu’il dépend des cours sur les marchés de gros. De fait, l’acheteur n’a intérêt à conclure des contrats à long terme que si ceux-ci lui assurent une certaine protection contre la fluctuation des prix sur le marché de l’électricité, et en particulier contre la fluctuation des prix des combustibles. Ainsi, sur le plan économique, un acheteur n’aurait intérêt à conclure un contrat à long terme de ce type que si le vendeur offrait de prendre en charge une partie des risques liés à la fluctuation des prix des combustibles ou si la technologie de production de l’électricité garantit des coûts de combustible stables – c’est le cas par exemple des centrales hydrauliques et, sous certaines conditions, des centrales nucléaires. Ces contrats sont en outre conclus pour une durée nettement inférieure à celle des AAE, ce qui permet à l’acheteur de changer de fournisseur si un concurrent propose des prix plus intéressants. Pour obtenir les prix les moins élevés possibles, les acheteurs ont souvent recours à des appels d’offres.

(216)

Les contrats portant sur des services d’équilibrage sont utiles à l’appréciation d’un avantage entre les AAE, car une partie minoritaire des capacités réservées dans le cadre des AAE est destinée à la fourniture de services d’équilibrage au gestionnaire du réseau de transport (58). En pratique, MVM vend des capacités au gestionnaire du réseau de transport sur une base annuelle et forfaitaire et, pour ce faire, elle utilise une partie des capacités réservées dans le cadre des AAE. Concrètement, cela signifie que les producteurs ne supportent pas les risques liés aux appels d’offres annuels (59) et à l’incertitude relative à la quantité d’électricité qu’ils devront fournir. Du point de vue des producteurs, les conditions contractuelles régissant la fourniture de services d’équilibrage sont celles des AAE. Toutefois, ainsi qu’il a été exposé au considérant 204, les modalités des AAE (notamment leur longue durée et l’existence du prélèvement minimum garanti) ne sont pas justifiées d’un point de vue commercial, même pour la fourniture de services d’équilibrage. La Commission reconnaît qu’en Hongrie, peu d’unités de production d’électricité sont en mesure d’assurer les services d’équilibrage nécessaires au gestionnaire du réseau de transport, ainsi que l’affirment les parties intéressées, mais elle est parvenue à la conclusion que même dans ce cas, les conditions offertes par les AAE dépassent ce qu’un gestionnaire de réseau de transport pourrait juger acceptable sur le plan commercial.

(217)

Cette comparaison montre que les AAE — en raison de leur structure — offrent davantage de garanties aux producteurs que les contrats commerciaux habituels. Les producteurs se trouvent donc dans une situation plus avantageuse que celle qu’ils connaîtraient sur le marché libre s’ils ne bénéficiaient pas d’un AAE. Afin de compléter l’appréciation de l’existence d’un avantage, il convient d’évaluer les effets positifs et négatifs que les autorités hongroises pouvaient escompter à la date de l’adhésion de la Hongrie à l’Union européenne et de vérifier si celles-ci auraient pu escompter un meilleur équilibre entre ces effets en adoptant d’autres approches basées sur les pratiques commerciales habituelles.

2.c)   Conséquences prévisibles des AAE pour les autorités publiques, à la lumière de la comparaison avec les pratiques commerciales habituelles des acheteurs sur les marchés européens de l’électricité

(218)

Les autorités publiques pouvaient attendre des AAE que MVM serait en mesure de s’approvisionner en électricité en des quantités suffisantes pour satisfaire la demande du marché du service public sur une longue durée.

(219)

Cependant, les autorités publiques ne disposaient d’aucune garantie sur le niveau du prix qui devrait être payé par MVM au cours de cette période, dans la mesure où les AAE ne protègent pas contre la fluctuation des prix, qui résulte principalement de la fluctuation des prix des combustibles.

(220)

De plus, la réservation de capacités à long terme et le prélèvement minimum garanti dont elle s’accompagne privent les autorités publiques de la possibilité de bénéficier de prix plus attractifs proposés par d’autres producteurs ou importateurs. Les capacités réservées et l’achat minimum garanti inscrits dans les AAE, les contrats d’importation à long terme conclus par MVM et les quantités achetées dans le cadre du système d’achat obligatoire (60) suffisaient à couvrir les besoins de MVM. MVM ne pouvait donc pas diversifier son portefeuille de fournisseurs malgré l’existence de capacités de production alternatives disponibles. En 2004, il existait plusieurs producteurs d’électricité qui n’étaient pas engagés dans un accord d’achat d’électricité à long terme. Les AAE de deux centrales représentant une capacité installée d’une puissance de 470 MW ont expiré à la fin de 2003, ce qui a considérablement augmenté les capacités d’approvisionnement hors AAE. Des capacités d’importation d’un volume d’environ 700 MW ne sont pas couvertes par des AAE et auraient pu être utilisées par MVM pour importer de l’électricité si MVM n’avait pas été tenue par le système des capacités réservées et du prélèvement minimum garanti.

(221)

Ainsi qu’il est exposé aux considérants ci-après, il était clair, lors de l’adhésion de la Hongrie à l’Union européenne en 2003 et en 2004, que le système des capacités réservées et du prélèvement minimum garanti élaboré dans le cadre d’un modèle à acheteur unique, dans lequel toute l’électricité consommée en Hongrie transitait par MVM, comportait des risques considérables que les AAE obligent MVM à acheter de l’électricité au-delà de ses besoins.

(222)

À cet égard, un élément important à prendre en considération est l’ouverture partielle du marché de l’électricité en 2003. Le 18 décembre 2001, le Parlement hongrois a adopté la loi sur l’énergie électrique II, qui permet aux gros consommateurs, définis comme ceux dont la consommation annuelle est supérieure à 6,5 GW, de devenir des «clients éligibles» et donc de pouvoir choisir leur fournisseur d’électricité. Cette loi, entrée en vigueur le 1er janvier 2003, a conduit à la création, aux côtés du segment du service public préexistant, d’un marché libre sur lequel les prix évoluent en fonction de l’offre et de la demande. Cette mesure a eu pour effet prévisible de diminuer les quantités requises par MVM pour approvisionner les compagnies de distribution régionales en vue de satisfaire la demande du segment du service public. Le tableau ci-dessous montre qu’entre 2003 et 2006, les quantités effectivement vendues sur le marché libre ont régulièrement augmenté, tandis que celles vendues par les compagnies de distribution régionales au secteur du service public diminuaient proportionnellement.

Tableau 6

Vente sur le marché de détail (segment réglementé et marché libre)

(GWh)

 

2003

2004

2005

2006

Consommation globale

33 584

33 836

34 596

35 223

Vente sur le marché libre

3 883

7 212

11 685

13 057

Vente sur le segment réglementé

29 701

26 624

22 911

22 166

Source: données statistiques du système d’électricité hongrois pour 2006 ().

(223)

Entre 2003 et 2006, les quantités vendues sur le segment du service public, qui correspondent aux besoins d’achat réels de MVM, ont diminué de 25 %. La diminution des besoins de MVM était largement prévisible lorsque la Hongrie a rejoint l’Union européenne, en particulier à la lumière de l’écart important entre les prix officiels sur le segment du service public (prix payés par les consommateurs aux compagnies de distribution régionales) et les prix observés sur le marché libre en 2003 et 2004.

Tableau 7

Écarts entre les prix pratiqués sur le segment du service public et ceux pratiqués sur le segment libre du marché de détail en 2003 et en 2004

(HUF/kWh)

 

2003

2004

Prix moyen sur le marché libre

11,1

12,7

Prix moyen sur le segment du service public (62)

19

21,1

Source: données statistiques du système d’électricité hongrois pour 2006.

(224)

Les prix pratiqués sur le marché libre ont nettement incité les clients éligibles à faire usage de leurs droits à l’éligibilité. Il était aussi évident, en 2003 et 2004, que l’adhésion prochaine de la Hongrie à l’Union européenne aurait pour conséquence l’entrée en vigueur de la deuxième directive sur l’énergie électrique (63) en Hongrie et que, de ce fait, tout consommateur pourrait devenir client éligible à partir du 1er juillet 2007, ce qui entraînerait une nouvelle réduction des besoins de MVM dans un délai bien plus court que l’échéance prévue pour l’AAE.

(225)

En conséquence, il apparaissait clairement, en 2003 et 2004, que les AAE élaborés dans le contexte d’un modèle à acheteur unique, dans lequel toute l’électricité consommée en Hongrie transitait par MVM, auraient pour conséquence non seulement d’empêcher MVM de diversifier son portefeuille de fournisseurs et d’obtenir des prix plus avantageux en stimulant la concurrence entre ses fournisseurs, mais aussi de risquer de contraindre MVM à acheter une quantité d’électricité supérieure à ses besoins réels.

(226)

Les autorités avaient effectivement prévu ce risque. En 2002, le gouvernement hongrois a publié une ordonnance (64) contraignant MVM à renégocier les AAE avec l’ensemble des producteurs en vue de réajuster le niveau des capacités réservées. Bien que cette ordonnance ne prévoie pas la résiliation des AAE, elle atteste à elle seule que, dans une optique de libéralisation progressive du marché de l’électricité, les capacités réservées (et par conséquent le prélèvement minimum garanti) dans les AAE étaient trop élevées. Cette ordonnance permettait également à MVM, au cas où les négociations avec les producteurs n’aboutiraient pas, de vendre les capacités et l’électricité excédant ses besoins effectifs pour approvisionner le segment réglementé au moyen de trois «mécanismes de cession»: la mise aux enchères de capacités, des appels d’offres portant sur les capacités et la vente via une plateforme d’échanges virtuelle sur Internet, appelée «Bourse» («Piactér»). Bien que la forme de ces trois mécanismes soit différente, ils consistent tous globalement à ce que MVM revende sur le marché libre, sous la forme de différents produits à terme, le surplus d’électricité dont elle n’a pas besoin pour approvisionner le segment du service public mais qu’elle est tenue d’acheter conformément aux modalités des AAE.

(227)

Le tableau suivant présente des données sur les trois premières ventes aux enchères réalisées par MVM. Celles-ci montrent que les prix perçus par MVM pour l’électricité vendue par le biais des mécanismes de cession ont été largement inférieurs aux prix payés pour acheter cette électricité dans le cadre des AAE.

Tableau 8

Trois premières ventes aux enchères réalisées par MVM

 

Première enchère (juin 2003)

Deuxième enchère (décembre 2003)

Troisième enchère (juin 2004)

Produits Base

Quantité d’électricité vendue (GWh)

375

240

133

Prix de vente aux enchères (HUF/KWh)

8,02

9,5

8,4

Produits Charge minimale

Quantité d’électricité vendue (GWh)

 

259

421

Prix de vente aux enchères

 

5,6

3,5

Prix moyens annuels dans les AAE

 

2003

2004

 

11,3

11,7

(228)

Le législateur hongrois avait effectivement anticipé cet effet et avait prévu le versement d’une compensation à MVM par l’État hongrois pour les pertes subies par MVM du fait de l’écart entre le prix payé pour les quantités cédées dans le cadre d’enchères et le prix de vente obtenu sur le marché. Cette compensation s’est élevée à 3,8 milliards HUF en 2003 (65). Selon le rapport annuel 2004 de MVM, elle a augmenté de 2,4 milliards HUF en 2004.

(229)

Du point de vue des autorités publiques, il est clair qu’un tel système ne peut se justifier sur le plan commercial, car il équivaut à subventionner les ventes des producteurs pour alimenter le marché libre.

(230)

Le tableau suivant présente, sur la base des informations fournies par la Hongrie le 24 septembre 2007 et le 21 avril 2008, la quantité totale d’électricité vendue par le biais des mécanismes de cession entre 2003 et 2004.

Tableau 9

Quantités vendues par MVM dans le cadre des mécanismes de cession

(TWh)

Année

2003

2004

2005

2006

Ventes totales de MVM dans le cadre des mécanismes de cession (66)

0,6

1,9

6,5

6,5

(231)

Il est évident que, dans des conditions de marché normales, aucun acheteur ne conclurait de contrat qui comporte un risque grave qu’il soit obligé d’acheter plus d’électricité qu’il n’en a besoin et de supporter des pertes considérables lors de la revente. Théoriquement, ce risque existe dans les contrats à terme et les accords à long terme conclus par les grands utilisateurs finals, mais dans une bien moindre mesure.

(232)

La durée des contrats à terme est nettement inférieure à celle des AAE. Sur cette durée plus courte, l’acheteur dispose d’un meilleur aperçu de ses besoins que sur une durée comprise entre 15 ans et 27 ans. De plus, les acheteurs ont tendance à recourir à des contrats à terme qui ne couvrent qu’une partie seulement de leurs besoins escomptés et à acheter les quantités supplémentaires éventuellement nécessaires sur les marchés spot.

(233)

Les accords à long terme conclus par les grands utilisateurs finals ne comportent aussi qu’un risque réduit de se trouver obligé d’acheter des quantités superflues, étant donné que la durée de ces contrats est limitée et que la consommation des grands utilisateurs finals (entreprises industrielles ou de services) ayant recours à ces contrats est généralement stable et prévisible, ce qui n’est pas le cas de MVM pour les raisons précédemment exposées.

(234)

Par ailleurs, il est utile de rappeler que, dans un contrat à terme ou un accord d’achat à long terme conclu par un consommateur final, l’acheteur s’engage certes à acquérir une certaine quantité d’électricité plusieurs mois ou années avant sa livraison effective, mais ce contrat ou accord le protège contre la fluctuation des prix. Cet avantage n’existe pas dans les AAE, dans lesquels le prix couvre des coûts variables qui sont susceptibles d’augmenter dans des proportions imprévisibles en fonction de l’évolution des prix des combustibles.

(235)

La Commission conclut que les avantages dont les autorités publiques bénéficient par le biais des AAE n’incluent pas la protection contre une hausse des prix des combustibles, que tout opérateur de marché attendrait d’un accord à long terme, et que les AAE comportent des risques considérables que MVM se voie contrainte d’acheter plus d’électricité qu’elle n’en a effectivement besoin et enregistre des pertes lors de la revente de ces quantités excédentaires. Ces risques étaient bien connus des autorités hongroises lorsque la Hongrie a adhéré à l’Union européenne. La comparaison entre les AAE et les pratiques commerciales habituelles sur les marchés européens de l’électricité montre qu’un acheteur mû par des considérations purement commerciales n’aurait pas accepté de tels effets préjudiciables et aurait adopté d’autres stratégies d’achat et conclu d’autres types d’accords conformes à la pratique commerciale habituelle.

(236)

Compte tenu de ce qui précède, la Commission conclut que les principes fondamentaux qui sous-tendent les AAE confèrent aux producteurs d’électricité un avantage qui va au-delà d’un avantage commercial normal. À cet égard, il importe de souligner que les principes fondamentaux des AAE (réservation de capacités longtemps à l’avance, prélèvement minimum garanti et mécanismes de fixation des prix fondés sur une redevance de capacité et une redevance d’électricité couvrant les coûts fixes, variables et de capital) ne peuvent être isolés et appréciés individuellement. L’existence d’un avantage découle de la combinaison de ces éléments. Ainsi qu’il a été précédemment démontré, la longue durée des AAE contribue en grande mesure à l’existence de cet avantage.

3)   Effets des AAE sur le marché après l’adhésion de la Hongrie à l’Union européenne

(237)

Dans leurs observations, les parties intéressées affirment que les prix pratiqués dans le cadre des AAE ne sont pas supérieurs à ceux du marché de gros. La centrale de Mátra souligne notamment que ses prix sont compétitifs car elle dispose de sa propre mine de charbon, ce qui réduit ses coûts d’extraction. Les parties intéressées considèrent par conséquent qu’elles ne bénéficient d’aucun avantage.

(238)

La Commission ne saurait accepter cet argument.

(239)

Tout d’abord, ainsi qu’il a été exposé en détail ci-dessus, le prix effectivement payé dans le cadre des AAE est une des conséquences de ces accords, mais il ne constitue pas l’essentiel de l’avantage conféré par les AAE. Les observations formulées par les établissements bancaires susmentionnés (voir en particulier les considérants 175 et 176) confirment également que ce sont tous les éléments des AAE qui, en garantissant le retour sur investissement dans les unités de production et en protégeant les producteurs des risques commerciaux, constituent l’essentiel de l’avantage conféré par les AAE.

(240)

Ensuite, l’écart de prix par rapport aux prix du marché dépend d’un grand nombre de facteurs liés à l’évolution du marché, qui sont indépendants des AAE et ne peuvent être appréciés qu’a posteriori. Les prix des AAE sont des prix unitaires à un instant donné; ils ne tiennent pas compte de l’avantage découlant de tous les autres éléments de l’AAE, tels que les capacités et quantités que les producteurs auraient pu vendre si leurs ventes dépendaient de la demande sur le marché. Ainsi qu’il a été précédemment exposé, la Commission est d’avis que tous les AAE examinés confèrent un avantage économique aux producteurs, qu’ils aient ou non donné lieu, à un moment donné, à des prix supérieurs à ceux du marché.

(241)

Afin de répondre de manière exhaustive aux observations qui lui ont été présentées et de mieux comprendre les conséquences des AAE, la Commission a néanmoins comparé les prix effectivement pratiqués dans les AAE avec ceux prix pratiqués sur le segment du marché de gros non couvert par les AAE.

(242)

Aux fins de cette comparaison, la Commission ne tient pas compte des prix de 2007, étant donné que cette année-là (plus précisément entre le 9 décembre 2006 et le 31 décembre 2007), les prix réglementés ont été supérieurs aux prix des AAE. En conséquence, les prix pratiqués ne reflètaient pas nécessairement les prix exacts auxquels l’application des formules de fixation des prix des AAE aurait conduit.

(243)

La Commission a donc comparé les prix pratiqués dans le cadre des AAE avec ceux du marché libre entre 2004 et 2006.

Tableau 10

Prix moyen de l’électricité vendue à MVM dans le cadre des AAE  (67)

(HUF/kWh)

Centrale

2004

2005

2006

Dunament (Bloc F)

[…]

[…]

[…]

Dunament (Bloc G2)

[…]

[…]

[…]

Tisza II

[…]

[…]

[…]

Pécs

[…]

[…]

[…]

Csepel II

[…]

[…]

[…]

Kelenföld

[…]

[…]

[…]

Újpest

[…]

[…]

[…]

Kispest

[…]

[…]

[…]

Mátra

[…]

[…]

[…]

Centrale nucléaire de Paks

[…]

[…]

[…]

Tableau 11

Quantité et prix moyen de l’électricité vendue par les producteurs nationaux, hors AAE, sur le marché libre  (68)

Centrale

2004

2005

2006

Quantité

(MWh)

Prix

(HUF/kWh)

Quantité

(MWh)

Prix

(HUF/kWh)

Quantité

(MWh)

Prix

(HUF/kWh)

Mátra ([…] bloc)

989 097

8,15

972 813

8,33

1 082 699

9,26

Vértes

157 701

8,02

942 999

8,79

1 213 622

10,51

Dunament […] bloc

215 647

8,57

805 381

9,85

814 702

13,29

EMA

133 439

11,07

129 252

11,83

101 607

12,92

AES Borsod

[…]

[…]

18 301

11,25

n.a. (69)

 

AES Tiszapalkonyai Erőmű

364 869

12,76

86 673

9,87

119 218

14,27

Tableau 12

Quantité et prix moyen de l’électricité importée par MVM  (70)

Importation

2004

2005

2006

Quantité

(MWh)

Prix

(HUF/kWh)

Quantité

(MWh)

Prix

(HUF/kWh)

Quantité

(MWh)

Prix

(HUF/kWh)

D’Ukraine, via la Slovaquie ([…] (71))

1 715 200

[…] (72)

1 525 600

[…] (72)

1 311 400

[…] (72)

De Suisse, via la Slovaquie ([…] (71))

1 768 100

[…] (72)

1 761 700

[…] (72)

1 709 200

[…] (72)

De Suisse ([…] (71))

631 700

[…] (72)

629 500

[…] (72)

626 200

[…] (72)

(244)

Depuis 2003, conformément à la loi sur l’énergie électrique II (73), MVM cède son électricité superflue (excédant ses besoins pour approvisionner le segment du service public) sur le marché concurrentiel au moyen de trois mécanismes: i) la mise aux enchères de capacités de production du secteur public, ii) des appels d’offres portant sur les capacités et iii) la vente via une plateforme d’échange en ligne («Bourse MVM»). Le tableau suivant montre les prix moyens atteints au cours de ces ventes.

Tableau 13

Prix moyens atteints dans le cadre des enchères et des appels d’offres portant sur les capacités et à la Bourse MVM  (74)

Année de livraison du produit vendu aux enchères (75)

Prix moyen pondéré des enchères portant sur les capacités

(HUF/kWh)

Année des ventes par appel d’offres et des ventes à la Bourse MVM

Prix moyen obtenu lors des ventes par appel d’offres et des ventes à la Bourse MVM

(HUF/kWh)

2004

4,7

2004

6,5

Enchères du 17 juin 2004

Minimale: 3,48

Base: 8,4

 

 

2005

5,4

2005

8,1

Enchères du 9 décembre 2004

Minimale: 4,54

Base: 8,32

 

 

Enchères du 10 juin 2005

Minimale: 4,6

Base: 8,5

 

 

Enchères du 21 juillet 2005

Base: 9,3

Pointe: 10,42

 

 

2006

9,9

2006

9,1

Enchères du 9 novembre 2005

Minimale: 6,02

Base: 9,74

Pointe: 11,76

 

 

Enchères du 31 mai 2006

Base: 11,33

 

 

(245)

Les données chiffrées ci-dessus permettent de constater que les prix moyens auxquels l’électricité était vendue en Hongrie sur le marché concurrentiel en 2004, au niveau du marché de gros, ont varié entre 4,7 et 12,76 HUF/kWh. Parmi les producteurs couverts par un AAE, la centrale nucléaire de Paks et la centrale de Mátra ont vendu de l’électricité à MVM dans cette fourchette de prix. Dunament […] a vendu son électricité dans le cadre de son AAE à […] HUF/kWh, ce qui correspond au prix le plus élevé obtenu hors AAE ([…]). Tous les autres producteurs ont facturé à MVM un prix moyen situé entre 13,86 et 25,46 HUF/kWh, soit 10 à 100 % plus cher que le prix le plus élevé pratiqué sur le marché libre.

(246)

En 2005, les prix de vente en dehors des AAE examinés ont été compris entre 5,4 et 12,91 HUF/kWh. Parmi les producteurs couverts par un AAE, seules les centrales de Paks et de Mátra ont vendu leur électricité à MVM dans cette fourchette de prix. Tous les autres producteurs ont facturé à MVM un prix moyen situé entre 13,99 et 25,64 HUF/kWh, soit 10 à 100 % plus cher que le prix le plus élevé pratiqué sur le marché libre.

(247)

En 2006, les prix de vente en dehors des AAE examinés ont été compris entre 9,1 et 14,27 HUF/kWh. Parmi les producteurs couverts par un AAE, seules les centrales de Paks et de Mátra ont vendu leur électricité à MVM dans cette fourchette de prix (dans le cas de Paks, le prix a même été inférieur au prix du marché libre le plus bas). Tous les autres producteurs ont facturé à MVM un prix moyen situé entre 16,67 et 33,49 HUF/kWh, soit 15 à 135 % plus cher que le prix le plus élevé pratiqué sur le marché libre.

(248)

Les calculs ci-dessus sont basés sur les données relatives aux prix moyens c’est-à-dire qu’ils ne distinguent pas les prix des produits Charge minimale, Base ou Pointe. Les producteurs qui vendraient essentiellement des produits Pointe en l’absence d’AAE (76) affirment que leurs prix ne devraient pas être comparés aux prix des produits Base. La Commission reconnaît que le prix de l’électricité en période de pointe est normalement plus élevé que celui des produits Base. Lors de la comparaison de ces prix avec ceux pratiqués lors de ventes sur le marché libre (par exemple, lors des ventes aux enchères de capacités par MVM), il apparaît que les produits Pointe sont en moyenne 10 à 30 % plus chers que les produits Base.

(249)

Toutefois, si l’on compare les prix pratiqués par les centrales de Csepel, de Dunament F et de […] avec les prix les plus élevés obtenus lors des ventes aux enchères de capacités, on constate que les premiers sont supérieurs au prix de n’importe quel produit Pointe obtenu à l’issue d’enchères au cours de ces années. De plus, parmi les producteurs qui vendent de l’électricité hors AAE sur le marché libre et qui figurent dans le tableau 11 ci-dessus, certains (notamment la centrale d’EMA) ont aussi vendu principalement des produits Pointe.

(250)

La comparaison ci-dessus fait apparaître qu’entre 2004 et 2006, les prix pratiqués dans le cadre d’AAE par les producteurs couverts par ces accords (à l’exception des centrales de Paks et de Mátra) étaient effectivement supérieurs aux prix les plus élevés constatés sur le marché libre.

(251)

En conséquence, la Commission s’oppose aux arguments avancés par les parties concernées, qui affirment que les prix pratiqués dans le cadre des AAE n’étaient pas supérieurs à ceux du marché libre.

(252)

En ce qui concerne les centrales de Paks et de Mátra, les tableaux ci-dessus montrent que leurs prix étaient inférieurs au prix le plus élevé constaté sur le marché libre. Les prix pratiqués par la centrale de Mátra se situaient dans le haut de la fourchette de prix du marché libre. Bien que ces prix soient en effet susceptibles d’être plus concurrentiels que ceux pratiqués dans la majorité des autres AAE, la Commission ne peut exclure que la centrale n’aurait pas pu obtenir au moins les mêmes prix sans son AAE. La Commission note que les prix de vente de l’électricité produite par les unités de la centrale de Mátra non couvertes par l’AAE étaient nettement inférieurs aux prix pratiqués dans le cadre de l’AAE.

(253)

La Commission est consciente du fait que les prix établis sur le marché libre (hors AAE) ne peuvent pas être considérés comme correspondant au prix du marché exact que les producteurs auraient obtenu sans AAE si les AAE n’avaient pas existé au cours de la période considérée. Dans la mesure où les AAE couvrent environ 60 % du marché de la production, ils influencent indiscutablement les prix sur le reste du marché. La comparaison fournit toutefois une indication sur l’ordre de grandeur de l’écart entre les prix pratiqués dans le cadre des AAE et ceux effectivement observés lors de ventes hors AAE.

(254)

Les centrales de Budapest et de Csepel ont fait valoir que les AAE devraient néanmoins être considérés comme relevant d’un service d’intérêt économique général visant à garantir la sécurité de l’approvisionnement en électricité. Elles considèrent que les AAE remplissent les critères mentionnés dans l’arrêt Altmark, ce qui signifie qu’ils ne peuvent être considérés comme une aide d’État au sens de l’article 87, paragraphe 1, du traité CE.

(255)

La Commission a examiné ces arguments et est parvenue à la conclusion qu’elle ne saurait les accepter pour les raisons suivantes.

(256)

La réglementation communautaire confère aux États membres une certaine marge de manœuvre pour définir les services qu’ils considèrent comme des SIEG. Définir la portée des SIEG dans un État membre est, dans les limites prévues par la législation communautaire, une prérogative de l’État concerné et ce n’est pas aux bénéficiaires d’aides qu’il incombe de qualifier leurs propres services de service public.

(257)

Au cours de la présente procédure, les autorités hongroises n’ont toutefois jamais fait valoir qu’un des producteurs assurait un SIEG, ni défendu les affirmations des producteurs en ce sens.

(258)

La Commission considère donc que les AAE ne satisfont pas l’ensemble des critères énoncés dans l’arrêt Altmark.

(259)

Premièrement, selon l’arrêt Altmark, la société bénéficiaire doit être effectivement chargée d’assumer un service public et les obligations qui y sont liées doivent avoir été clairement définies par l’État membre.

(260)

Au cours de la période considérée, la législation hongroise imposait certes à MVM une obligation d’assurer la sécurité de l’approvisionnement, mais cette obligation était une obligation générale en vertu de laquelle l’acheteur unique de l’époque devait garantir l’approvisionnement en électricité nécessaire pour couvrir l’ensemble des besoins; aucun producteur individuel n’était visé par un SIEG bien défini.

(261)

L’objectif de sécurité d’approvisionnement en électricité est de portée très générale. Dans une certaine mesure, on pourrait dire que tout producteur d’électricité y contribue. Les parties intéressées n’ont présenté aucun document officiel de l’État hongrois définissant clairement un SIEG et confiant à un ou plusieurs producteurs spécifiques la mission de l’assumer.

(262)

Les AAE sont similaires à cet égard: ils fixent les obligations des parties, mais ne définissent aucune obligation de service public particulière. Le fait que les dix centrales couvertes par un AAE doivent réserver des capacités pour MVM ne signifie pas en soi qu’elles sont expressément chargées d’une mission de service public. Là encore, une telle approche pourrait aboutir à la conclusion que l’ensemble du secteur de la production d’électricité remplit les critères de service d’intérêt économique général, ce qui serait clairement contraire à l’interprétation que la réglementation et les pratiques communautaires veulent donner à cette notion.

(263)

En l’espèce, les prétendues obligations de service public ne sont pas clairement définies et aucun producteur n’est chargé de l’exécution d’une telle obligation.

(264)

Les parties intéressées font valoir que les AAE sont des documents qui chargent les producteurs d’un SIEG. Pourtant, les AAE ne comportent aucune définition concrète de SIEG, ni ne mentionnent ces obligations ou des dispositions juridiques qui constitueraient une base permettant à l’État de confier des SIEG à d’autres entités.

(265)

Dans les décisions qu’elle a adoptées à ce jour (77), la Commission a considéré que la sécurité d’approvisionnement pouvait constituer un service d’intérêt économique général sous réserve des restrictions prévues à l’article 8, paragraphe 4, de la directive 96/92/CE (correspondant aux dispositions de l’article 11, paragraphe 4, de la directive 2003/54/CE), à savoir que les producteurs concernés utilisent des sources combustibles indigènes d’énergie primaire pour produire l’électricité et que le volume total d’électricité n’excède pas, au cours d’une année civile, 15 % de la quantité totale d’énergie primaire nécessaire pour produire l’électricité consommée dans l’État membre concerné.

(266)

Le seul producteur qui a affirmé qu’il utilisait des combustibles indigènes d’énergie primaire était la centrale de Mátra. Toutefois, elle n’a présenté aucun document officiel montrant que l’État hongrois l’avait expressément chargée d’une mission de service public d’intérêt général clairement définie.

(267)

Compte tenu de ce qui précède, la Commission doit rejeter l’argument selon lequel les AAE accompliraient une mission de service public visant la sécurité d’approvisionnement.

(268)

Par ailleurs, les paramètres sur la base desquels est calculée la compensation auraient dû être préalablement établis de façon objective et transparente et la compensation ne saurait dépasser ce qui est nécessaire pour couvrir tout ou partie des coûts occasionnés par l’exécution des obligations de service public, en tenant compte des recettes y relatives ainsi que d’un bénéfice raisonnable pour l’exécution de ces obligations (78).

(269)

Faute d’une définition claire des services d’intérêt économique général à assumer, notamment d’une distinction claire entre les services à accomplir et les opérations d’exploitation normales des centrales, il est impossible d’établir des paramètres aux fins d’une compensation et/ou de déterminer si la compensation excède ce qui est nécessaire pour couvrir les coûts occasionnés par l’exécution de ces obligations. Il n’est même pas possible de définir exactement à quoi correspond la compensation.

(270)

L’existence de certains paramètres permettant d’établir les prix des AAE n’équivaut pas à celle de paramètres précis qui permettrait de calculer une compensation au titre de SIEG, dans la mesure où le prix n’est pas égal à la compensation. En outre, le fait que le prix ne couvre que les coûts liés à la production d’électricité, majorés d’une marge bénéficiaire, ne signifie pas qu’il n’inclut pas une compensation excessive, car de nombreux coûts liés à la production d’électricité peuvent être les coûts normalement supportés par un producteur, et non des coûts supplémentaires associés à l’exécution de SIEG.

(271)

Par ailleurs, lorsque le choix de l’entreprise à charger de l’exécution d’obligations de service public n’est pas effectué dans le cadre d’une procédure de marché public, le niveau de la compensation nécessaire doit être déterminé sur la base d’une analyse des coûts qu’une entreprise moyenne, bien gérée et adéquatement équipée en moyens de production afin de pouvoir satisfaire aux exigences de service public requises, aurait encourus pour exécuter ces obligations, en tenant compte des recettes y relatives ainsi que d’un bénéfice raisonnable pour l’exécution de ces obligations.

(272)

Neuf des dix AAE ont été signés sans appel d’offres préalable. Même dans le cas de la seule procédure d’appel d’offres qui a été lancée, qui a abouti à la sélection de la centrale de Kispest, aucun objectif particulier de SIEG n’a été défini. Il est donc difficile d’apprécier quelle part exacte des activités de la centrale correspondrait à l’exécution d’un SIEG et, par conséquent, quel niveau de compensation ne dépasserait pas ce qui est nécessaire pour couvrir les coûts occasionnés par l’exécution de l’obligation de service public.

(273)

En outre, ni les autorités hongroises, ni les parties intéressées n’ont présenté d’analyse des coûts des producteurs en question à l’appui de leur affirmation qu’ils correspondraient aux coûts supportés par une entreprise moyenne.

(274)

Enfin, la Commission observe qu’à l’exception de l’AAE conclu avec la centrale de Kispest, les AAE en question ont été signés sans appel d’offres préalable.

(275)

Les AAE ne remplissent donc pas les critères énoncés dans l’arrêt Altmark.

(276)

Les parties intéressées allèguent que l’article 86, paragraphe 2, du traité CE pourrait s’appliquer aux AAE même lorsque ces derniers ne remplissent pas les critères énoncés dans l’arrêt Altmark. La compatibilité de la mesure avec l’article 86, paragraphe 2, du traité CE est appréciée à la section 7.7 de la présente décision.

(277)

Les AAE ont été conclus avec quelques entreprises d’un secteur économique donné. Le tableau 1 ci-dessus fournit la liste des entreprises couvertes par un des AAE en cause.

(278)

L’entreprise AES-Tisza avance que les AAE ne sont pas sélectifs, puisque des accords à long terme existent dans l’ensemble du secteur de l’électricité: entre MVM et les producteurs, entre MVM et les compagnies de distribution, ainsi que pour les importations. Elle fait valoir qu’en raison de la réglementation hongroise de l’époque, tous les producteurs avaient conclu un accord avec MVM et seules les centrales opérant sur la base d’énergies renouvelables ou en cogénération disposaient d’accords de plus courte durée.

(279)

Les autorités hongroises font remarquer, en réponse aux observations des parties intéressées, que des centrales et unités de production d’électricité importantes vendent de l’électricité sur le marché libre en dehors de tout AAE ou accord de prélèvement minimum garanti (Dunament G1, centrale de Vértes, unités I-II de la centrale de Mátra).

(280)

Il existe en effet des centrales et unités de production importantes qui opèrent en dehors de tout AAE (voir les exemples fournis par les autorités hongroises). L’entreprise AES-Tisza elle-même dispose de deux centrales non couvertes par un AAE.

(281)

La Commission note que le fait que l’aide ne vise pas un ou plusieurs bénéficiaires particuliers préalablement définis, mais qu’elle soit soumise à une série de critères objectifs en application desquels elle pourra être octroyée ne signifie pas que la mesure ne confère pas un avantage sélectif à ses bénéficiaires. La procédure de sélection des bénéficiaires n’affecte pas le caractère d’aide d’État de la mesure (79).

(282)

En outre, selon la jurisprudence de la Cour de justice, même une mesure favorisant l’ensemble d’un secteur par rapport à d’autres secteurs se trouvant dans une situation économique comparable doit être considérée comme conférant un avantage sélectif à ce secteur (80).

(283)

À la lumière des considérations qui précèdent, la Commission conclut que les AAE constituent une mesure sélective.

(284)

La Commission doit examiner si les AAE impliquent le transfert de ressources d’État.

(285)

Le principe fondamental de tous les AAE examinés est l’obligation d’achat par MVM, pour une période allant de 15 à 27 ans, d’une capacité de production déterminée ainsi que de quantités minimales fixes d’électricité produite à un prix couvrant les coûts fixes et variables de la centrale. Du point de vue économique, cette obligation d’achat génère une obligation permanente, pour MVM, de payer aux centrales, pendant toute la durée du contrat, un certain prix pour une certaine capacité (redevance de capacité) et une certaine quantité d’énergie (redevance sur la fourniture d’énergie). Ainsi que décrit au chapitre 2 ci-dessus, des obligations financières supplémentaires de MVM sont définies dans certains AAE. Ce transfert en cours de ressources financières aux producteurs et le paiement des redevances mentionnées ci-dessus font partie intégrante de tous les AAE et s’effectuent pendant toute la durée des contrats. Bien entendu, plus la durée de l’AAE est longue, plus la valeur des ressources transférées est élevée.

(286)

Afin de déterminer si les ressources transférées aux producteurs par MVM sont ou non des ressources d’État, la Commission a examiné la mesure au regard des considérations suivantes:

(287)

Dans son arrêt rendu dans l’affaire PreussenElektra, la Cour de justice a examiné un mécanisme dans lequel l’État avait obligé des sociétés privées à acheter de l’électricité à des producteurs spécifiques à un prix fixé par l’État et supérieur au prix du marché. La Cour a jugé que, dans un tel cas, il n’y avait pas de transfert de ressources publiques et donc pas d’aide d’État.

(288)

La Commission considère que le système hongrois est fort différent du système examiné par la Cour dans l’arrêt susmentionné, en particulier à cause des différences dans la structure de propriété des sociétés soumises à une obligation d’achat.

(289)

Dans l’affaire PreussenElektra, la société à laquelle l’État a imposé l’obligation d’achat était une société privée, alors que MVM est une entreprise publique à part entière. Il s’ensuit que les ressources utilisées sont des ressources appartenent à et contrôlées par une entreprise publique.

(290)

Dans l’affaire PreussenElektra, lorsque l’on a reconstitué le parcours des fonds à partir du bénéficiaire jusqu’à son origine, il apparaissait qu’ils n’avaient jamais été contrôlés, directement ou indirectement, par l’État. En l’espèce, toutefois, ils sont bel et bien contrôlés par l’État, puisqu’en remontant leur parcours jusqu’à leur origine, on constate qu’ils échoient à une entreprise publique.

(291)

La Commission considère également que le comportement de MVM est imputable à l’État hongrois. Il faut ajouter que les autorités hongroises n’ont jamais affirmé, au cours de la procédure en cours, que les AAE n’étaient pas imputables à l’État et n’impliquaient donc pas le transfert de ressources d’État.

(292)

Le principe sous-jacent de l’obligation d’achat imposée à MVM pour garantir la viabilité des centrales concernées est imputable à l’État hongrois. Ce principe de base régissant les AAE tout au long de leur durée ayant été fixé au moment de leur conclusion, la Commission doit étudier les conditions de leur signature (c’est-à-dire les circonstances de l’établissement de ce principe de base) afin de déterminer si ce principe est imputable ou non à l’État hongrois.

(293)

Lors de son appréciation de la question de l’imputabilité, la Commission a tenu compte en particulier des circonstances suivantes:

(294)

Au moment de la conclusion des AAE, conformément à la loi no I sur l’électricité, MVM avait l’obligation légale de garantir la sécurité de l’approvisionnement en Hongrie au prix le plus bas possible.

(295)

La même loi imposait à MVM d’évaluer les besoins en électricité et de lancer l’extension des capacités de production sur la base des prévisions découlant de cette estimation. MVM devait élaborer un plan national de construction de centrales (Országos Erőműépítési Terv) et devait ensuite le soumettre à l’approbation du gouvernement et du parlement.

(296)

Dans leurs observations respectives, le gouvernement hongrois et toutes les parties intéressées s’accordaient à dire qu’au moment de leur conclusion, les AAE constituaient l’instrument choisi par le gouvernement hongrois pour garantir la sécurité d’approvisionnement et la réalisation d’autres objectifs gouvernementaux, comme la modernisation du secteur de l’électricité avec une attention particulière pour les normes de protection de l’environnement, ainsi que la restructuration indispensable du secteur (83). Comme l’indique la centrale de Csepel dans ses observations, «l’AAE doit être évalué en fonction de ce qu’il est: une composante à part entière des efforts déployés par l’État hongrois pour constituer, par le biais de MVM, un portefeuille diversifié deproduction à un moment où l’État ne disposait pas des moyens financiers nécessaires pour réaliser cet objectif par lui-même» (84).

(297)

Les autorités hongroises ont informé la Commission (85) que la préparation de la signature des AAE avait commencé, sur la base du décret gouvernemental no 1114/1994 (XII.7.), dans le cadre de la procédure de privatisation des centrales. Toute la procédure d’élaboration des AAE et de privatisation a été caractérisée par une coopération étroite entre l’office hongrois de l’énergie (l’autorité de régulation), le ministère de l’industrie et du commerce, le ministère des finances, l’Allami Vagyonügynökség R, c.-à-d. l’organisme public chargé des privatisations, MVM et un certain nombre de conseillers internationaux.

(298)

Une commission de travail a été créée dans le cadre de cette procédure, réunissant des représentants des organes visés ci-dessus. Cette commission a adopté des lignes directrices pour l’élaboration, entre autres, des AAE et des méthodes de fixation des prix.

(299)

À la demande du gouvernement hongrois, un cabinet d’avocats international a élaboré un AAE standard. Les autorités hongroises ont confirmé que les AAE respectaient ce modèle. Elles ont également confirmé que les mécanismes de fixation des prix des AAE avaient été élaborés sur la base de la décision gouvernementale no 1074/1995 (III.4.) concernant la réglementation des prix de l’électricité, laquelle contenait des règles détaillées pour le calcul des prix réglementés de l’électricité. Les AAE ont repris les formules et les définitions figurant dans la décision gouvernementale (86).

(300)

La décision relative à la signature des AAE a été prise par le comité de direction de MVM, tant dans le cadre de la privatisation qu’ultérieurement. Les membres du comité de direction sont élus par l’assemblée générale. Selon les informations reçues des autorités hongroises (87), «MVM étant détenu à plus de 99 % par l’État, les membres du comité de direction sont nommés, élus et révoqués à la meilleure appréciation de l’État».

(301)

Conformément au décret gouvernemental 34/1995 (IV.5.) portant application de la loi no I sur l’électricité, MVM était chargé d’organiser un appel d’offres dans un délai de quatre-vingt-dix jours à compter de l’adoption du plan de construction de centrales.

(302)

L’AAE concernant la centrale de Kispest a été signé à la suite d'une procédure d’appel d’offres, selon la procédure juridique suivante:

(303)

Le ministère de tutelle et l’office hongrois de l’énergie ont adopté, en 1997, des lignes directrices conjointes portant sur la procédure d’autorisation de la construction de centrales et sur les règles générales en matière d’appels d’offre.

(304)

Les lignes directrices conjointes exposent les motifs soutenant la nécessité d’une transformation de la structure de propriété et de la constitution de nouvelles capacités de production d’électricité. Elles précisent clairement les objectifs poursuivis: la sécurité de l’approvisionnement au moindre coût, la modernisation visant à respecter les normes en matière de protection de l’environnement, la diversification des sources énergétiques primaires, la création d’un parc de centrales plus souple possédant les réserves nécessaires et capable de coopérer avec le réseau d’électricité d’Europe occidentale. Elles soulignent également que le fonctionnement du futur parc de centrales «doit permettre une exploitation et une maintenance rentables, à des prix conformes aux dispositions légales» (88).

(305)

Le point 2 des lignes directrices conjointes du ministère et de l’office hongrois de l’énergie indique également que la réalisation des objectifs définis ci-dessus doit déboucher sur la mise en place d’«un réseau d’électricité moderne, conforme aux normes en matière de protection de l’environnement, garantissant la coopération européenne, le retour sur investissement et les coûts supportés par les détenteurs d’une licence opérant efficacement, ainsi que des prix contenant un bénéfice nécessaire au fonctionnement à long terme. Tous les objectifs ci-dessus seront atteints d’une manière garantissant … la sécurité de l’approvisionnement énergétique primaire, la capacité, pour ceux qui ont l’intention d’investir dans ce domaine, de réaliser leurs investissements, le retour sur investissement dans la sécurité, …, la concrétisation des intentions déclarées du gouvernement en matière de sécurité.».

(306)

Les lignes directrices conjointes réglementent la procédure d’appel d’offres portant sur la création de capacités des centrales.

(307)

Une commission principale d’évaluation (Értékelő Főbizottság) a fait la proposition finale au lauréat de l’appel d’offres. Les membres de cette commission étaient des représentants du ministère de l’économie, du ministère de l’environnement, de l’office hongrois de l’énergie, de MVM et de la banque ERSTE. La décision finale a été prise par le comité de direction de MVM. Selon les lignes directrices conjointes, le résultat officiel de l’appel d’offres devait être publié (exclusivement) au journal officiel du ministère.

(308)

La loi no II sur l’électricité a été élaborée dans l’hypothèse de l’existence des AAE. Cette loi, qui constitue le principal cadre juridique du fonctionnement du marché hongrois de l’électricité au cours de la période analysée, se réfère à maintes reprises aux obligations d’achat à long terme de MVM.

(309)

L’article 5, paragraphe 2, du décret gouvernemental 183/2002 (VIII.23.) portant sur les coûts échoués fixe l’obligation, pour MVM, de lancer la renégociation des AAE en vue de réduire les capacités achetées. Le décret oblige ainsi MVM à proposer une modification des AAE.

(310)

Dans ses observations, AES-Tisza faisait valoir qu’après la période de réglementation des prix (c’est-à-dire après le 1er janvier 2004, à l’exception de la nouvelle réglementation en matière de prix en 2007), les prix fixés sous le régime des AAE n’étaient pas imputables à l’État, mais étaient le résultat de négociations entre la centrale et MVM.

(311)

La Commission reconnaît que le montant exact des ressources transférées aux bénéficiaires ne dépend pas uniquement des clauses figurant dans les AAE, lesquelles sont imputables à l’État, mais également des négociations bilatérales périodiques entre MVM et les producteurs. En fait, les AAE offrent aux parties une certaine liberté pour négocier les quantités d’électricité effectivement achetées par MVM, ainsi que certaines composantes du prix, notamment en ce qui concerne le calcul des redevances de capacité, qui, ainsi qu’indiqué au point 356, dépendent de nombreux facteurs et nécessitent des ajustements périodiques. Toutefois, les négociations sur les quantités achetées ne peuvent jamais conduire à des quantités inférieures au niveau d’achat minimum garanti fixé dans les AAE. De même, les négociations sur les prix ne peuvent se dérouler que dans le cadre des mécanismes de fixation des prix prévus par les AAE, qui sont imputables à l’État. Les négociations portant sur les prix n’ont donc pas remis en cause le principe de l’obligation d’achat couvrant les coûts justifiés et un niveau de profit nécessaire au fonctionnement de la centrale.

(312)

De plus, le fait que les AAE prévoient la mise en réserve de l’essentiel des capacités des centrales concernées par ces accords et le paiement d’une contrepartie pour ces capacités implique en lui-même un transfert de ressources d’État aux bénéficiaires, indépendamment des négociations périodiques entre MVM et les producteurs.

(313)

Dans leurs observations (89), les parties intéressées s’accordaient toutes à dire que les principales formules et définitions appliquées sur la base des AAE à partir du 1er janvier 2004 suivaient les principales règles en matière de réglementation des prix. […] (90) explique elle-même, tant dans ses observations mentionnées ci-dessus que dans ses observations concernant la décision d’ouverture de la procédure, que les négociations sur les prix ont «clarifié» l’application des formules de fixation des prix et ont «interprété» leurs contenus (91). Elle reconnaît que les prix appliqués dans les AAE ont toujours été basés sur les coûts, couvrant les coûts justifiés, et qu’ils ont, dès le début, largement pris en compte la méthode de calcul des prix appliquée par les décrets relatifs aux prix.

(314)

[…] explique en outre que les formules de fixation des prix figurant dans la modification […] de son AAE sont aussi basées sur des décrets gouvernementaux: «la formule figurant dans la modification […] (tableau […] de l’annexe […]) pour le calcul de la commission de mise à disposition est identique à celle contenue dans les décrets en vigueur (note de bas de page renvoyant au décret 55/1996 du ministre de l’industrie, du commerce et du tourisme et décret 46/2000 du ministre des affaires économiques, le dernier décret applicable (producteurs) avant le 1er janvier 2004 étant le décret 60/2002 du ministre des affaires économiques et des transports) fixant la commission de mise à disposition (= capacité) et la redevance pour la fourniture d’électricité maximales pour les producteurs qui y sont cités.»

(315)

Il ressort de ce qui précède que, lorsque les AAE ont été signés, ni les négociations sur les prix ni les modifications de ces accords n’ont affecté leur principe de base fixé dans les circonstances décrites ci-dessus. C’est le même principe de l’obligation d’achat visant à garantir le retour sur investissement qui régit actuellement les AAE.

(316)

Il ressort clairement de ce qui précède que l’existence de l’obligation d’achat de MVM à l’égard des producteurs d’électricité, assortie du principe de couverture des coûts fixes et variables justifiés, est imputable à l’État hongrois.

(317)

De surcroît, selon une jurisprudence constante, une mesure ne constitue pas uniquement une aide d’État lorsqu’un avantage est accordé à des entreprises par une mobilisation immédiate et certaine de ressources étatiques, mais aussi lorsque l’octroi de l’avantage est susceptible, pour autant que certaines conditions soient remplies dans le futur, d’impliquer, pour les pouvoirs publics, une charge financière supplémentaire qu’ils n’auraient pas eu à supporter si l’avantage n’avait pas été conféré (92). En 2004, il est apparu clairement que MVM supporterait une telle charge supplémentaire dans le cas probable où les producteurs et importateurs d’électricité non engagés dans les AAE offriraient des prix inférieurs à ceux fixés dans les AAE, étant donné que ces offres inciteraient MVM à modifier son portefeuille d’approvisionnement et à réduire par conséquent les quantités achetées aux producteurs d’électricité soumis aux AAE et à obtenir d’eux des réductions de prix. Toutefois, en raison de ses obligations découlant des AAE, MVM n’est pas en mesure d’abaisser les quantités achetées aux producteurs soumis aux AAE sous un niveau minimum (la quantité d’achat garantie) et ne peut négocier les prix sur la base d’offres alternatives fournies par des producteurs concurrents, mais uniquement dans les limites du mécanisme de formation des prix fondée sur les coûts prévu par les AAE. Ce fait, associé à la conclusion tirée aux considérants 315-316, amène la Commission à conclure que la condition du transfert de ressources d’État était présente dans les AAE depuis le 1er mai 2004 et le restera pendant toute la durée de validité des AAE, indépendamment des conditions réelles du marché, puisque les AAE empêchent MVM de procéder aux arbitrages qui pourraient s’avérer appropriés pour réduire au minimum le montant des ressources consacrées à l’achat d’électricité indispensable pour couvrir ses besoins.

(318)

Il résulte des considérations ci-dessus que les AAE génèrent le transfert de ressources d’État.

(319)

Les marchés de l’électricité ont été ouverts à la concurrence et des échanges d’électricité existent entre États membres, en particulier depuis l’entrée en vigueur de la directive 96/92/CE du Parlement européen et du Conseil du 19 décembre 1996 concernant des règles communes pour le marché intérieur de l’électricité (93).

(320)

Par conséquent, les mesures favorisant des entreprises du secteur de l’énergie dans un État membre peuvent dès lors porter atteinte à la capacité qu’ont les entreprises d’autres États membres à exporter de l’électricité vers celui-ci, ou favoriser les exportations d’électricité vers ces derniers. Cela est particulièrement vrai dans le cas de la Hongrie puisque, étant donné son positionnement géographique au centre de l’Europe, elle est reliée ou peut facilement se connecter aux réseaux de nombreux États membres actuels ou futurs.

(321)

Cela est particulièrement vrai dans le cas de la Hongrie, située au centre de l’Europe et comptant, parmi ses sept pays voisins, quatre États membres de l’Union européenne. C’est ainsi qu’elle dispose d’une connexion avec les systèmes slovaques, autrichiens et roumains. En 2004, la Hongrie a importé près de 14 000 GWh et a exporté 6 300 GWh. À partir de 2005, ses importations ont dépassé les 15 000 GWh et ses exportations se sont situées entre 8 000 et 10 000 GWh.

(322)

Au cours des années qui ont suivi l’adhésion de la Hongrie à l’Union européenne, environ 60 % des capacités de production hongroises ont été contractés par MVM dans le cadre d’AAE. Les AAE arriveront à échéance entre la fin 2010 et la fin 2014. Les conditions de l’obligation d’achat de MVM susmentionnées resteront inchangées jusqu’à l’échéance des accords.

(323)

Le premier pas vers l’ouverture du marché en Hongrie a été effectué le 1er juillet 2004, date à partir de laquelle tous les consommateurs industriels sont devenus éligibles au passage sur le marché libre. Le 1er janvier 2008, le segment du service public a cessé d’exister, de sorte que tous les clients sont devenus «éligibles».

(324)

Malgré l’ouverture du marché, en 2004, une partie importante des clients éligibles a renoncé à opter pour le segment du marché libre. Le rapport de l’office hongrois de la concurrence sur l’enquête sectorielle sur le marché hongrois de l’électricité concluait explicitement que le manque de capacités disponibles sur le marché libre dû à l’importance des capacités mises en réserve dans le cadre des AAE constituait un sérieux obstacle au choix en faveur du marché libre (94). Près de 60 % des capacités productives hongroises sont liées, par le biais des AAE, au segment du secteur public, en l’occurrence uniquement à MVM; seules les capacités résiduelles pourraient, en réalité, être ouvertes à la concurrence pour la conquête de nouveaux clients.

(325)

Les capacités mises en réserve, c’est-à-dire les quantités garanties à long terme, constituent aussi une entrave à l’entrée de nouveaux producteurs sur le marché de gros, étant donné que 60 % des capacités totales sont liés à une seule entreprise (détenue par l’État) avec une garantie d’achat.

(326)

Sur ce point, la Commission a également tenu compte des résultats de l’enquête sectorielle réalisée par l’office hongrois de la concurrence, qui concluait sans équivoque que les AAE conduisaient à l’élimination de la concurrence en restreignant la capacité des clients éligibles à passer sur le marché libre et en empêchant les grossistes potentiels d’entrer sur le marché (95).

(327)

La pénurie de capacités disponibles en dehors des AAE conduit de surcroît à une augmentation des prix sur le marché compétitif. L’important volume de capacités et de quantités d’électricité mises en réserve dans le cadre des AAE influence également les prix sur le marché libre.

(328)

Selon une étude quantitative réalisée par le centre régional de recherches sur l’énergie relative à l’impact des AAE sur les prix de gros de l’électricité en Hongrie (96), les AAE génèrent des prix de gros plus élevés que ceux qui pourraient être atteints en l’absence d’AAE. De manière plus générale, cette étude relève également que les AAE représentent l’un des principaux facteurs conduisant à une structure de marché «incompatible avec les principes du fonctionnement d’un marché concurrentiel libre» (97). Cette même étude propose d’ailleurs la dissolution des AAE, considérant qu’il s’agit d’une solution permettant la pratique de la libre concurrence sur le marché de gros hongrois de l’électricité.

(329)

Dans son étude sectorielle concernant le marché de l’électricité (98), la Commission analyse également les effets des AAE sur la concurrence et le commerce. Elle conclut, aux considérants 467 à 473, que «les accords d’achat à long terme d’électricité (AAE) sont un autre facteur susceptible d’influencer les volumes régulièrement échangés sur le marché de gros». En ce qui concerne les AAE conclus en Pologne, elle fait valoir qu’«ils peuvent représenter un obstacle important sur la voie du développement du marché de gros polonais». Elle poursuit en précisant que «La situation est la même en Hongrie, où la société Magyar Villamos Művek (MVM) est le grossiste de service public et achète l’électricité par le biais d’AAE à long terme qu’elle vend par la suite aux revendeurs locaux. Les AAE hongrois couvrent la plus grande partie des besoins en électricité de cet État membre, ce qui peut avoir, sur la vente en gros, un impact similaire, voire supérieur à celui décrit ci-dessus à propos du marché de gros de la Pologne».

(330)

Les différentes études visées ci-dessus concluent donc toutes que les AAE faussent ou menacent de fausser la concurrence et peuvent affecter les échanges entre les États membres.

(331)

Les parties intéressées affirment également qu’il est faux de prétendre que la pénurie de capacités disponibles conduit à une distorsion de concurrence, étant donné que les ventes aux enchères de capacités de MVM prouvent que l’entreprise n’a même pas été capable de vendre tous les produits d’électricité qu’elle proposait.

(332)

Une comparaison entre les quantités proposées et les produits vendus aux enchères avec succès (99) montre toutefois que MVM a vendu tous les produits proposés à presque chaque enchère. En effet, dans la majorité des cas, elle a même dû utiliser les 10 % maximum de produits supplémentaires qu’elle pouvait légalement proposer.

(333)

Dans leurs observations, les parties intéressées ont également souligné que de nombreux autres facteurs avaient affecté les échanges et influencé le développement de la libre concurrence sur le marché hongrois de la vente d’électricité en gros. La Commission est évidemment d’accord avec le fait que les AAE ne constituent pas le seul facteur influençant la concurrence et les échanges. Toutes les études évoquées ci-dessus reconnaissent également qu’un grand nombre d’autres facteurs (législation, accès limité aux capacités transfrontières, influence importante de l’évolution des prix sur les marchés internationaux de l’énergie, etc.) exercent également une influence sur le succès global de l’ouverture du marché ainsi que sur les niveaux effectifs des prix. Toutefois, toutes les études communiquées à la Commission au cours de l’actuelle procédure et autrement disponibles, à l’exception de celle commandée et transmise par AES-Tisza (100), reconnaissent clairement que les AAE affectent sensiblement la concurrence et les échanges.

(334)

Les capacités mises en réserve, les achats garantis et le mécanisme de fixation des prix prévus par les AAE protègent les centrales couvertes par l’AAE, pendant toute la durée de ce dernier, des risques commerciaux liés à leur exploitation. Ainsi qu’indiqué au considérant 211 ci-dessus, ce risque comprend le risque lié aux fluctuations des coûts de production de l’électricité, en particulier les coûts des combustibles, le risque lié aux fluctuations des prix de l’électricité à payer par l’utilisateur final et le risque lié à la fluctuation de la demande d’électricité de l’utilisateur final. Ces risques étant les risques typiques que les producteurs d’électricité non couverts par AAE devraient supporter, les AAE empêchent le développement de conditions identiques de concurrence dans le secteur de la production d’électricité et faussent la concurrence basée sur le mérite.

(335)

La Commission constate également que la plupart des producteurs bénéficiant des AAE font partie des principaux groupes internationaux présents dans plusieurs États membres. Le fait de conférer un avantage concurrentiel à ces groupes affecte sans aucun doute les échanges et est susceptible d’entraîner une distorsion de la concurrence sur le marché commun.

(336)

La majorité des analyses, par les parties intéressées, des critères d’évaluation de l’impact sur les échanges et la distorsion de la concurrence se réfèrent à la situation du marché au moment de la conclusion des AAE et, en toute état de cause, à la situation du marché avant l’adhésion de la Hongrie à l’Union européenne. La Commission ne peut accepter une telle approche et renvoie, à cet égard, aux considérants 156 à 172 ci-dessus.

(337)

Certaines parties intéressées font aussi valoir que leur AAE, considéré individuellement, n’affecte pas les échanges puisque la capacité de production de leur centrale est minime par rapport aux capacités de production globales du pays. Le principe de base des AAE étant le même pour tous (obligation d’achat d’une quantité minimale d’électricité produite, mise en réserve de capacités de production, prix couvrant les coûts fixes et variables justifiés sur une durée de 15 à 27 ans), chaque AAE exerce un impact sur le marché. L’ampleur de l’impact est toutefois multipliée, par définition, par la coexistence des dix AAE sur le marché hongrois. Plus les capacités couvertes par les AAE sont importantes, plus les effets décrits ci-dessus sont importants.

(338)

À la lumière de ce qui précède, la Commission conclut que les dispositions des AAE, présentées ci-dessus, affectent les échanges et sont susceptibles d’entraîner une distorsion de la concurrence.

(339)

Au point 3.1. de sa décision d’ouverture, la Commission a exprimé ses doutes au sujet du caractère d’aide d’État de la centrale de Paks en raison des différences qui peuvent exister entre l’AAE de cette centrale et les autres AAE en ce qui concerne les principes directeurs. La Commission conclut toutefois, à l’issue de son enquête, que l’appréciation, ci-dessus, des critères d’évaluation d’une aide d’État s’applique également à l’AAE de Paks, étant donné qu’il suit les mêmes principes tout en présentant les caractéristiques spécifiques exposées au regard des critères pertinents.

(340)

Sur la base de l’analyse ci-dessus, la Commission considère que les principales conditions de l’obligation d’achat figurant dans les AAE, à savoir les mises en réserve de capacités et les achats garantis par MVM dans des conditions telles qu’elles garantissent le retour sur investissement des centrales en les protégeant des risques commerciaux liés à leur exploitation constituent une aide d’État au sens de l’article 87, paragraphe 1, du Trait CE. Ce caractère d’aide d’État est le résultat de la combinaison des mises en réserve de capacités, de l’achat minimal garanti, du mécanisme de fixation des prix fondé sur une redevance de capacité et une redevance sur la fourniture d’énergie destiné à couvrir les coûts fixes, variables et de capitaux, sur une longue durée allant au-delà de la pratique habituelle du marché.

7.4.   Applicabilité des AAE après l’adhésion

(341)

Les parties intéressées prétendent que les mesures prises conformément à la loi avant l’adhésion à l’Union européenne ne pourraient pas être révisées par la Commission. Cela serait conforme au principe général d’interdiction des lois rétroactives.

(342)

La Commission n’est pas d’accord avec cette argumentation. À partir de la date d’adhésion, l’acquis communautaire doit s’appliquer pour toute mesure indépendamment du fait qu’elle était ou non préalablement prise en conformité avec les dispositions légales nationales. L’annexe IV de l’acte d’adhésion prescrit l’application des règles particulières pour les mesures d’aides même si elles avaient été prises conformément aux dispositions légales nationales en vigueur avant l’adhésion.

(343)

L’article (1) du Chapitre 3 de l’annexe IV de l’acte d’adhésion considère exclusivement les trois catégories de mesures suivantes d’aides existantes: i. les aides mises à exécution avant le 10 décembre 1994, ii. les aides énumérées, après l’étude de la Commission, dans l’appendice de l’Annexe IV de l’acte d’adhésion, et iii. les aides ayant été approuvées par la Commission dans le cadre dudit «mécanisme transitoire». Toute mesure applicable, au-delà de la date d’adhésion, qualifiée d’aide d’État et ne relevant d’aucune catégorie susmentionnée, doit être considérée comme une aide nouvelle après l’adhésion. La Commission a donc entière compétence pour interdire ces mesures lorsqu’elles sont incompatibles avec le marché commun. L’application des règles en matière d’aide d’État aux effets futurs des mesures applicables après l’adhésion ne signifie aucunement une application rétroactive des règles UE en matière d’aides d’État, et, dans tous les cas, cette intervention a lieu au titre du mandat conféré par l’acte d’adhésion lui-même.

(344)

Le point (2) du Chapitre 3 de l’Annexe IV de l’acte d’adhésion définit le «mécanisme transitoire». Cet article dispose du cadre juridique relatif à l’étude des programmes d’aides et d’aides individuelles entrés en vigueur avant l’adhésion et applicables après celle-ci dans les nouveaux États membres.

(345)

Les parties intéressées soutiennent qu’étant donné que les règles communautaires en matière d’aides d’État ne sont applicables qu’à partir de la date d’adhésion, les mesures assurant des avantages supplémentaires après cette date peuvent seules être également réputées applicables après l’adhésion. Selon leurs prétentions, les AAE n’ont pas créés d’avantages supplémentaires après l’adhésion car leurs formules de fixation des prix avaient été définies avant l’adhésion et, par conséquent, l’engagement financier de l’État était entièrement connu avant l’adhésion.

(346)

La Commission conclut aux observations suivantes. Les AAE arrivent à terme au cours de la période 2010-2024, donc après l’adhésion. La Commission n’a considéré que dans certaines circonstances très exceptionnelles qu’une mesure d’aide, restée en vigueur après la date de l’adhésion, ne devait pas être qualifiée de mesure applicable après l’adhésion suivant les termes de l’acte d’adhésion. Cette pratique exceptionnelle doit cependant, selon les principes générale de l’interprétation des exceptions, être interprétée dans un sens restrictif afin d’empêcher que des aides d’État sur lesquelles cette compétence de contrôle doit s’exercer conformément la volonté des signataires de l’acte d’adhésion, ne puissent échapper au contrôle de la Commission sur les aides d’État.

(347)

De ce point de vue, La Commission a, dans sa pratique décisionnelle jusqu’à ce jour (101), effectivement jugée que conformément à l’Annexe IV de l’acte d’adhésion, ne sont pas réputées applicables après l’adhésion les mesures à l’égard desquelles le niveau exact de l’engagement financier de l’État était déjà bien connu avant l’adhésion.

(348)

Les AAE ne définissent pas le niveau maximal de l’engagement financier de l’État et, avant l’adhésion, le niveau précis de cet engagement financier ne pouvait être connu pour toute la durée des AAE.

(349)

Au contraire, le niveau de l’engagement financier de l’État selon les AAE dépend d’indicateurs dont l’évolution future était encore inconnue le jour de l’adhésion. Les AAE protègent également les producteurs contre les fluctuations des coûts non pas liés à des opérations ou des événements se produisant avant l’adhésion mais encore inconnus à la date de l’adhésion.

(350)

Plus particulièrement, les circonstances ci-dessus appuient le fait qu’à la date de l’adhésion le niveau d’engagement de l’État dans le cadre des AAE était inconnu et que ceux-ci imputaient après l’adhésion des engagements ultérieurs à l’État.

(351)

En premier lieu, les AAE ne précisent pas le prix exact auquel les producteurs vendent leur énergie à MVM. Le calcul des prix est le résultat de calculs basés sur des formules constituées de nombreux indicateurs fluctuants d’une façon imprévisible.

(352)

La formule des AAE inclut un tarif de mise à disposition (un tarif capacité), un tarif énergie, auquel s’ajoutent encore des différents autres tarifs en fonction des producteurs.

(353)

La formule ne détermine que les coûts et les tarifs acceptables pour les différentes catégories de tarifs ainsi que l’importance que revêt la catégorie de tarif donnée dans le prix.

(354)

Dans leurs observations, les producteurs eux-mêmes et MVM ont reconnu que le contenu précis de certaines catégories de tarifs devait être clarifié davantage dans le cadre des négociations menées avec MVM.

(355)

Parmi les catégories de coûts reconnues dans les AAE plusieurs sont variables et ne pouvaient être connues avec précision avant l’adhésion. Ainsi par exemple:

(356)

Tarif capacité

Cette catégorie de tarif tient compte des capacités garanties ainsi que des capacités effectivement engagées par MVM. Cela dépend, entre autres, de la planification annuelle, mensuelle et hebdomadaire. Chaque AAE se réfère aux règles de planification périodique et le prix définitif précis dépend pour chaque AAE des plans annuels, mensuels et hebdomadaires. Il va de soi qu’il est impossible de définir préalablement ces catégories de coûts. Les parties peuvent par exemple prévoir dans leurs plans des capacités supplémentaires pour une certaine période. Le prix total à payer par MVM dépendra inévitablement aussi de facteurs influençant la demande en énergie électrique comme, par exemple, les conditions météorologiques.

Le cours de la devise nationale hongroise, le Forint, peut aussi influencer cette catégorie de coûts.

(357)

Tarif énergie

Cette catégorie de coûts est primordialement déterminée par le coût des combustibles. La fluctuation de ces coûts suit des règles du marché incontrôlables par les Parties. Les AAE ne définissent aucune limite supérieure portant sur l’évolution future du prix des combustibles.

Le montant précis du tarif de l’énergie à payer est bien entendu également influencé par la quantité d’énergie exacte vendue par MVM. Or, celle-ci ne peut être calculée qu’ultérieurement.

(358)

Tarifs complémentaires (si applicables)

Certaines AAE prescrivent un tarif complémentaire pour les capacités mises à disposition mais non exploitées. Bien entendu, leurs montants exacts ne peuvent être préalablement définis.

(359)

Dans la majorité des AAE, il y a un système de bonus/malus selon lequel un supplément de prix est facturé par les producteurs si, par exemple, pendant les périodes de charge de pointe, ils exploitent des capacités supplémentaires ou produisent plus d’énergie. À contrario, une diminution des prix est prévue lorsque le producteur offre, dans le cadre de l’AAE, une capacité inférieure à celle prévue dans le plan annuel ou mensuel.

(360)

Similairement aux énumérations ci-dessus, ces calculs se réfèrent à des plans d’exploitation périodiques, et dépendent aussi du comportement du producteur lui- même. Ils ne peuvent dans aucun cas être établis au préalable.

(361)

Il apparaît clairement de ce qui précède que dans le cas de contrats d’une durée de 15 à 27 ans il est techniquement impossible de fixer le prix d’achat final exact de l’énergie. Le prix exact dépend du plan de production périodique, et est par la suite influencé par l’évolution de la demande d’énergie, le comportement des parties contractantes, le prix des combustibles, etc.

(362)

Bien que tous les points mentionnés ne concernent pas tous les AAE (étant donné que la catégorie des coûts acceptables varie dans une certaine mesure en fonction des divers accords) chaque AAE inclut des éléments de prix ne pouvant être préalablement établis.

(363)

De ce fait, la Commission considère que l’existence de formules de fixation de prix ne délimite pas de manière précise l’engagement financier de l’État. Le fait que la formule soit composée de nombreux indicateurs variables ne permet pas de déterminer le niveau exact futur de l’engagement futur de l’État.

(364)

Il faut également observer que l’engagement financier de MVM provenant des AAE dépend en grande mesure des conditions de la demande. Cet engagement financier correspond notamment à la différence entre le prix d’achat sous le régime des AAE et le produit issu de la vente d’énergie par MVM. Cependant le prix auquel MVM vend l’énergie ne peut être prévu au préalable. Ce gain est influencé par les recettes que MVM réalise grâce aux ventes effectuées dans le cadre des accords conclus avec les distributeurs régionaux, au résultat des appels d’offres, des enchères et des ventes réalisées sur la «Place de marché». Ces prix sont aussi influencés par la régulation des prix par les autorités et la fluctuation de la demande sur le marché. Cette situation augmente encore davantage le caractère imprévisible de l’engament financier de l’État préexistant à raison des AAE. Il peut arriver de surcroît que les quantités d’achats garantis inclues dans les AAE dépassent de plus en plus les besoins réels de MVM, en conséquence, surtout, de la libération totale du marché de l’énergie dès janvier 2008. La surabondance d’énergie peut accroître davantage les coûts inconnus et rendre, en conséquence, le niveau exact de l’engagement de l’État, dans le cadre des AAE, imprévisible.

(365)

Suivant ce qui précède, les paiements acquittés par MVM aux producteurs d’énergie électrique après l’adhésion ne signifient pas un simple virement des échéances du montant précis des aides établies avant l’adhésion.

(366)

Par conséquent, les AAE étudiés dans la présente décision, aux termes du Chapitre 3 de l’Annexe IV de l’acte d’adhésion, sont des mesures réputées applicables après l’adhésion

7.5.   L’AAE en tant qu’«aide nouvelle» par opposition à une «aide existante»

(367)

Conformément aux dispositions du Chapitre 3 de l’Annexe IV de l’acte d’adhésion: «Si la Commission ne soulève pas d’objections à l’égard de l’aide existante en raison de doutes sérieux quant à la compatibilité de la mesure avec le marché commun dans les trois mois suivant la réception d’informations exhaustives à son sujet ou de la réception d’une communication du nouvel État membre dans laquelle il informe la Commission qu’il considère que l’information fournie est complète du fait que l’information supplémentaire qui a été requise n’est pas disponible ou a déjà été fournie, la Commission est réputée ne pas avoir soulevé d’objections».

(368)

Au vu de l’article susmentionné, certaines parties intéressées considèrent que la Commission a dépassé le délai de trois mois après la notification du 31 mars 2004 de la Hongrie et par là même elle aurait tacitement approuvé la mesure dans le cadre du mécanisme provisoire.

(369)

À cet égard la Commission remarque que dans le cadre de la procédure provisoire l’objet de la notification du 31 mars 2004 était le décret sur la compensation fournie à MVM et non les AAE. La Hongrie a révoqué cette notification et la Commission a ouvert par la suite une nouvelle procédure concernant les AAE (conf. Chapitre 1) sous le numéro d’enregistrement «NN».

(370)

Nonobstant, il faut observer que, comme il apparaît dans le tableau suivant, la Commission n’a pas dépassé le délai de trois mois mentionnés par les parties intéressées:

Action

Date

Durée écoulée entre la réception de l’information et la prise de la mesure

Notification introduite par la Hongrie

31.3.2004

 

Questions de la Commission

29.4.2004

29 jours

Réponses de la Hongrie

4.6.2004

 

Questions de la Commission

10.8.2004

2 mois et 6 jours

Réponses de la Hongrie

21.10.2004

 

Questions de la Commission

17.1.2005

2 mois et 27 jours

Réponses de la Hongrie

7.4.2005

 

Retrait de sa notification par la Hongrie

15.4.2005

8 jours

(371)

Mis à part la communication par écrit ci-dessus, des rencontres ont eu lieux entre la Commission et les autorités hongroises le 15 juillet 2004, le 30 novembre 2004 et le 12 janvier 2005.

(372)

En ce qui concerne la procédure faisant l’objet de la présente décision, la Commission examine ci-après, si les AAE constituent des aides existantes ou des aides nouvelles selon les dispositions de l’acte d’adhésion et du règlement de Procédure.

(373)

Selon le Chapitre 3 de l’Annexe IV de l’acte d’adhésion, toute mesure qualifiée d’aide d’État en vigueur avant l’adhésion et également applicable après l’adhésion qui ne correspond pas à l’une des catégories d’aides existantes énumérées ci-dessus, doit être considérée, à partir de l’adhésion, et en application de l’article 88(3) du traité CE, comme une aide nouvelle.

(374)

Les AAE traités dans la présente décision sont entrés en vigueur entre 1995 et 2001 c’est à dire après l’adhésion de la Hongrie à l’Union européenne (1er mai 2004). Cette décision ne s’étend que sur les AAE lesquels étaient en vigueur à la date de l’adhésion. Elle ne s’étend pas aux AAE ayant dissous avant la datte évoquée. La mesure est applicable pour toute autre raison ultérieure mentionnée au point 7.4. ci-dessus dans le cadre de l’application de l’acte d’adhésion.

(375)

Les trois catégories d’aides existantes mentionnées dans l’acte d’adhésion sont les aides suivantes:

1)

les aides entrées en vigueur avant le 10. décembre 1994.

Chacun des AAE a été signé et entré en vigueur après le 10 décembre 1994.

2)

les mesures d’aides figurant à l’appendice annexé à l’acte d’adhésion,

Ni les AAE en général ni les AAE séparément ne figurent à l’appendice selon le sous-point b) du point 1 du chapitre 3 de l’annexe IV de l’acte d’adhésion lequel appendice contient la liste des mesures d’aides.

3)

Les aides ayant été étudiées par l’autorité de contrôle des aides de l’État du nouveau État membre avant l’adhésion et avaient été considérées être compatibles avec l’acquis communautaires et par rapport auxquelles la Commission avait, au cours de la procédure, ladite procédure provisoire définie par l’acte d’adhésion (voir point (2) du chapitre 3 de l’Annexe IV de l’acte d’adhésion, constaté que celles-ci ne soulevaient pas de doutes sérieux quant à la compatibilité de l’aide avec le marché commun.

Aucun des AAE n’avait été soumis à la Commission dans le cadre de la procédure dite provisoire.

(376)

Compte tenu du fait que les AAE ne font partie d’aucune des catégories d’aides existantes énumérées dans l’acte d’adhésion, celles-ci sont qualifiées de nouvelles mesures dès la date de l’adhésion.

(377)

La Commission souligne également que la qualification des AAE coïncide avec les consignes contenues à l’article 1 b) in fine du règlement de Procédure. Ce règlement prévoit que dans le cas où les mesures données sont requalifiées d’aides d’État selon le droit communautaire après la libéralisation (en l’espèce après l’entrée en vigueur de la directive 96/92/CE sur la libéralisation du marché de l’énergie qui a eu lieu en Hongrie à la date d’adhésion à l’Union européenne), ces mesures ne doivent plus être considérées comme des aides existantes, à compter de la date de la libéralisation mais elles doivent être traitées comme des aides nouvelles.

(378)

Selon l’argument de Budapesti Erőmű l’article 1.b) in fine du règlement de Procédure n’est pas applicable. Il se réfère à l’arrêt rendu dans l’affaire Alzetta Mauro  (102) alléguant que l’aide octroyée sur un marché isolé de la concurrence avant la libéralisation, est qualifiée, à partir de la date de la libéralisation, d’aide existante.

(379)

La Commission réfute cet argument. Comme il a déjà été développé ci-dessus, selon la position de la Commission, les dispositions relatives aux aides d’État dans l’acte d’adhésion avaient justement comme objectifs que la Commission révise toutes les mesures qui auraient menacé de fausser la concurrence entre les États membres, au moment de l’adhésion. Contrairement aux Traités d’adhésion conclus avant le 1er mai 2004, l’acte d’adhésion, entré en vigueur le 1er mai 2004, s’était efforcé à limiter les catégories de mesures qualifiées d’aides existantes aux trois cas susmentionnés. L’arrêt rendu dans l’affaire Alzeta Mauro ne touche pas les mesures concernées par l’acte d’adhésion et ne peut donc être applicable aux AAE faisant objet de l’enquête. De surcroît, l’arrêt rendu dans l’affaire Alzetta Mauro concerne une situation de fait ayant précédé l’entrée en vigueur du règlement (CE) no 659/1999/.

(380)

Budapesti Erőmű affirme que l’article 1. b) ne peut pas être appliqué aux mesures d’aides individuelles «étant donné qu’il ne fait pas mention des mesures individuelles en matière d’aide». La Commission a rejeté cet argument. Il n’existe aucune raison pour que la référence à «l’aide» ou à «certaines mesures» ne puisse faire également référence à des aides individuelles et même à des programmes d’aides. L’article 4 du règlement (CE) no 659/1999 se réfère à des «mesures» régulièrement déclarées, la Commission suppose néanmoins que, selon la partie intéressée, l’article 4 serait uniquement applicable aux enquêtes préalables des programmes d’aides notifiés.

(381)

En conséquence, la Commission considère qu’à la base de l’acte d’adhésion et du règlement de Procédure, les AAE constituent d’aides nouvelles.

7.6.   La Commission ne peut pas abroger les accords de droit privé valablement conclus («pacta sunt servanda») — incertitude juridique — proportionnalité

(382)

À cet égard, la commission souhaite prendre position concernant les observations soumises par les parties intéressées selon lesquelles la Commission ne peut abroger les contrats de droit privé, étant donné que cela serait, selon les parties intéressées, contraires aux dispositions du traité CE régissant les aides d’État et porterait également atteinte aux principes de sécurité juridique et de proportionnalité.

(383)

La Commission rejette cet argument. Du point de vue des aides d’État, la forme de l’aide (ainsi le contrat de droit privé dans le cas des AAE) n’a aucune incidence étant donné que du point de vue de l’examen effectué par la Commission, c’est exclusivement l’impact d’une mesure donnée qui est importante. Dans le cas où en raison de conditions contractuelles de droit privé, une aide d’État illégale et incompatible serait octroyé chez l’une des parties, l’État membre concerné devrait abroger de telles conditions. La Commission doit ordonner la suppression d’une mesure d’aide d’État irrégulière et incompatible même dans le cas où l’aide d’État constituerait un élément essentiel de l’accord et que sa suppression toucherait aussi la validité de l’accord en question.

(384)

En matière de sécurité juridique la Commission fait les observations suivantes. L’Accord européen préparant l’adhésion et établissant une association entre les Communautés européennes et leurs États membres, d’une part, et la République Hongroise, d’autre part, a été signé le 16 décembre 1991 et est entré en vigueur le 1er février 1994, donc avant que la signature des AAE ait eu lieu. La Hongrie a officiellement soumis sa demande d’adhésion le 31 mars 1994. À l’époque où les parties ont signé les AAE (entre 1995 et 2001) la Hongrie devait déjà, conformément à l’article 62 de l’accord européen, harmoniser ses règles de concurrence avec les dispositions du traité CE. Il était alors clair que les AAE allaient être signés pour une longue durée qui n’arriverait pas à terme avant l’adhésion de la Hongrie à l’Union européenne.

(385)

Le 16 avril 2003 la République de Hongrie a signé le traité d’adhésion (103). Le traité d’adhésion est entré en vigueur le 1er mai 2004. À partir de la date de l’Adhésion, les dispositions des Traités et la législation secondaire sont devenues obligatoires pour la Hongrie, conformément à l’article 2 de l’acte d’adhésion. En conséquence il faut appliquer l’acquis communautaire pour tout lien contractuel dans les nouveaux États membres et quelconque dérogation à cette règle ne peut provenir que de l’acte d’adhésion. L’Acte d’adhésion et ses Annexes ne peuvent inclurent de dérogations aux règles portant sur l’aides d’État qui excluraient les AAE ou en général excluraient le secteur énergétique de l’application directe des dispositions légales de l’Union en matière d’aides d’État.

(386)

Similairement aux autres pays membres, la Commission doit ainsi appliquer à l’égard de la Hongrie les règles de la concurrence de l’Union à l’égard du secteur énergétique. En opposition avec l’argumentaire des parties intéressées, la Commission est d’avis que ce qui conduirait plutôt à l’insécurité juridique sur le marché de l’énergie serait des règles en matière d’aides d’État qui seraient inappliquées aux AAE. L’adhésion d’un État à l’Union européenne peut effectivement produire une situation où une mesure qui n’a pas contrevenu aux dispositions légales nationales avant l’adhésion, ait été qualifiée d’aide d’État du moment de l’adhésion, et, soit, de ce fait, tombée sous le contrôle de la Commission en matière d’aides d’État.

(387)

La Commission n’a pas trouvé, dans les observations soumises par les parties intéressées, d’arguments de bien-fondé expliquant en quoi la procédure en l’espèce serait incompatible avec le principe de la sécurité juridique.

7.7.   Étude de compatibilité

(388)

L’article 87(1) du traité CE fixe le principe général d’interdiction des aides d’État au sein de la Communauté.

(389)

L’article 87(2) et (3) du traité CE comportent les dérogations à la règle générale de l’article 87(1) du traité CE selon laquelle ces aides sont incompatibles avec le marché commun.

(390)

Les dérogations contenues à l’article 87(2) du traité CE ne sont pas applicables dans le cas d’espèce, puisque cette mesure n’a pas un caractère social, elle n’a pas été attribuée à un consommateur privé, n’est pas une aide destinée à remédier aux dommages causés par les calamités naturelles ou par d’autres événements extraordinaires, n’est pas une aide octroyée à l’économie de certaines régions de la République fédérale d’Allemagne affectées par la division de l’Allemagne.

(391)

Les autres dérogations sont contenues à l’article 87(3) du traité CE.

(392)

L’article 87(3) a) du traité CE dispose que peuvent être considérées compatibles avec le marché commun «les aides destinées à favoriser le développement économique de régions dans lesquelles le niveau de vie est anormalement bas ou dans lesquelles sévit un grave sous-emploi». Lors de l’adhésion de la Hongrie, l’ensemble de son territoire pouvait être considéré comme une telle région et la majorité des régions du pays peut continuer à bénéficier de cette aide (104).

(393)

La Commission a adopté une ligne directrice portant sur l’évaluation de telles aides. En Hongrie, au moment de l’Adhésion, la ligne directrice portant sur les aides régionales nationales était applicable (105) (ci-après: ancienne ligne directrice en matière d’aides régionales). Cette ligne directrice a réglementé l’évaluation des aides régionales à l’égard de l’article 87(3) c) du traité CE. La Commission a adopté une nouvelle ligne directrice concernant les aides d’État à finalité régionale pour la période postérieure au 1er janvier 2007 (ci-après: nouvelle ligne directrice sur les aides régionales) (106).

(394)

La règle générale est qu’exclusivement des aides d’État accordées pour la couverture des coûts d’investissement peuvent être autorisées selon chacune des deux lignes directrices en matière d’aides à finalité régionale (107). Selon le texte des deux lignes directrices:

(395)

«L’aide régionale portant sur la réduction des dépenses courantes d’une entreprise (aide de fonctionnement) n’est en général pas autorisée. Dans des cas exceptionnels cependant, dans les régions citées à l’article 87(3) a) une telle aide peut être accordée à condition que: i) elle soit justifiée du point de vue de la contribution au développement régional et de sa nature; et ii) elle soit proportionnelle au préjudice destiné à être réduit par l’octroi de l’aide. Il revient à l’État membre de prouver l’existence et la dimension du préjudice (108)

(396)

L’aide ne peut être considérée comme une aide à l’investissement. Les aides à l’investissement sont définies par les deux lignes directrices en matière d’aides à finalité régionale par recours à une liste des coûts éligibles à une aide. Les paiements réalisés à la base des AAE couvrent certainement d’autres coûts aussi. L’exemple le plus spectaculaire est la garantie donnée pour la couverture des coûts des combustibles nécessaire à l’exploitation des centrales. Les AAE peuvent aussi couvrir des coûts de la main d’œuvre. Bien entendu, ces coûts ne sont pas éligibles à une aide à l’investissement. Au contraire, ceux-ci correspondent à des dépenses courantes, effectuées par l’exploitant, ils doivent donc figurer parmi les coûts de fonctionnement indiqués dans la ligne directrice en matière d’aides à finalité régionale.

(397)

À l’égard des aides de fonctionnement, ni l’autorité hongroise ni les parties intéressées n’ont certifié des préjudices régionaux liés à des régions concrètes dont l’atténuation pourrait être visée par les AAE, et elles n’on pas non plus prouvé que l’aide serait proportionnelle à ces préjudices.

(398)

De surcroît, chacune des deux lignes directrices en matière d’aides à finalité régionale prescrit que les aides de fonctionnement doivent être de nature à se réduire progressivement et d’une durée limitée dans le temps. L’aide octroyée dans le cadre des AAE ne diminue pas progressivement et la durée de 15-27 ans est largement supérieure au niveau autorisé par les deux lignes directrices. Les AAE ne correspondent à aucune des dérogations particulières autorisées dans le cadre des lignes directrices des aides à destination régionale ce que ni les autorités hongroises ni les parties intéressées n’ont jamais affirmé.

(399)

Compte tenu de ceux-ci la Commission établi que l’aide ne peut bénéficier de la dérogation prévue à l’article 87(3) a) du traité CE.

(400)

L’article 87(3) b) du traité CE précise que peuvent être considérées comme compatibles avec le marché commun: «les aides destinées à promouvoir la réalisation d’un projet important d’intérêt européen commun ou à remédier à une perturbation grave de l’économie d’un État membre».

(401)

La Commission constate que l’aide en question ne vise pas la promotion de la mise en œuvre d’un important projet commun européen.

(402)

La Commission n’a non plus trouvé de preuve à ce que l’aide serve à supprimer une perturbation grave intervenue dans l’économie hongroise. La Commission reconnaît le fait que l’énergie électrique est un produit important pour chacune des économies des pays membres ainsi qu’au cours des années 1990 il était indispensable de moderniser en Hongrie ce secteur.

(403)

En même temps cependant, selon le jugement de la Commission, «la perturbation grave dans un État membre» fait allusion à des cas bien plus graves et notamment ne peut être appliquée aux accords habituels concernant l’approvisionnement énergétique. De surcroît, la Commission souligne que la formulation ci-dessus suppose un certain degré d’urgence ce qui est pourtant incompatible avec les AAE.

(404)

Ni les autorités hongroises, ni les parties intéressées n’ont affirmé que les AAE seraient compatibles avec l’article 87(3) b) du traité CE.

(405)

Selon ci-dessus, la Commission établi que l’aide ne corresponde pas aux conditions de la dérogation indiquée à l’article 87(3) b) du traité CE.

(406)

L’article 87(3) d) du traité CE prévoit que peut être considérées compatible avec le traité CE les aides destinées à promouvoir la culture et la conservation du patrimoine, quand elles n’altèrent pas les conditions des échanges et de la concurrence dans la Communauté dans une mesure contraire à l’intérêt commun. Ce point est évidemment non applicable aux AAE.

(407)

L’article 87(3) c) du traité CE permet l’autorisation des aides destinées à faciliter le développement de certaines activités ou de certaines régions économiques, quand elles n’altèrent pas les conditions des échanges dans une mesure contraire à l’intérêt commun. La Commission a élaboré de nombreuses lignes directrices et communications dans lesquelles elle précise comment appliquer la dérogation inclue dans l’article mentionné.

(408)

Les considérants 393 à 398 ont démontré que les AAE sont incompatibles tant avec les anciennes lignes directrices concernant les aides à finalité régionale qu’avec les nouvelles.

(409)

En ce qui concerne l’Encadrement communautaire des aides d’État pour la protection de l’environnement (109) lors de l’adhésion de la Hongrie à l’Union européenne, la Commission attire l’attention sur le fait que similairement aux lignes directrices en matière d’aide à finalité régionale elle autorise surtout les aides à l’investissement. L’aide de fonctionnement se limite à l’aide d’objectifs individuels. Parmi celles-ci la première catégorie d’aides concerne les aides de fonctionnement en faveur de la gestion des déchets et en faveur des économies d’énergie (E 3.1) qui sont limitées à une période de 5 ans. La seconde catégorie est constituée d’aides portant sur les réductions ou exonérations de taxes (E. 3.2.). La troisième concerne les ressources énergétiques renouvelables (E 3.3). Bien entendu, aucune de ces dispositions ne peut être appliquée au cas d’espèce.

(410)

La quatrième et dernière catégorie autorisée des aides au fonctionnement est l’aide en faveur de la production combinée d’électricité et de chaleur (E 3.4. ci-après la production combinée d’énergie). Certains producteurs concernés produisent de la chaleur et de l’énergie. Cependant les AAE ne correspondent pas aux conditions inclues au point 66 de la directive sur la protection de l’environnement ainsi qu’à aucune des options selon les point 58-65 de celle-ci. L’une des conditions indiquées au point 66 concerne l’avantage de la mesure d’aide en matière de protection de l’environnement soit parce que l’efficience de la conversion est particulièrement élevée, étant donné que la mesure permet la réduction de la consommation énergétique soit parce que le procédé de production est moins nuisible à l’environnement.

(411)

En plus les États membres peuvent choisir ente les trois options en matière des aides à la production d’énergie en cogénération:

option 1. une aide compensatoire de l’écart entre les coûts de production de la centrale en cogénération et le prix de marché de l’énergie produite,

option 2. l’introduction de mécanismes de marché telles les attestions vertes et les concours,

option 3. l’aide compensatoire des coûts externes évités, c’est-à-dire, une aide compensant les coûts environnementaux que la société prendrait en charge si cette même énergie serait produite non pas par une production d’énergie combinée,

option 4. aide octroyée pour une durée maximale de cinq ans dont le montant soit est dégressif ou ne s’élève pas au delà des 50 % des coûts supplémentaires.

(412)

Il est évident que les AAE ne correspondent pas aux conditions des options 2 et 3. Les conditions de l’option 1 ne sont non plus remplies étant donné que lors du calcul du montant de l’aide on n’a pas appliqué le prix du marché de l’énergie électrique. Le montant d’une aide octroyée dans le cadre d’un AAE ne dépend pas du prix offert par les autres producteurs d’énergie électrique mais exclusivement des coûts d’investissement et d’exploitation pris en charge par le producteur en question.

(413)

De surcroît en effet ni la Hongrie ni les producteurs concernés n’ont pas argumenté pour la compatibilité basée sur ces articles et n’ont jamais démontré que les centrales correspondaient aux critères relatifs à l’aide de fonctionnement octroyée à la production d’énergie combinée.

(414)

Le 23 janvier 2008 la commission a adopté les nouvelles lignes directrices concernant les aides d’État à la protection de l’environnement (110). Cette nouvelle ligne directrice autorise aussi uniquement l’aide de fonctionnement à l’économie d’énergie, à l’emploi de ressources énergétiques renouvelables ainsi qu’aux réduction ou exemption de taxe. Comme nous l’avions mentionné précédemment aucune de ces dispositions sont applicables aux AAE.

(415)

En ce qui concerne la production combinée de chaleur et d’énergie, les États-membres ont le choix parmi les trois options ci-après énumérées en matière d’octroi d’aide:

option 1. Une aide compensant la différence des coûts de production de la cogénération et du prix du marché du produit énergétique fabriqué,

option 2. L’introduction de mécanismes de marché tels que les certificats verts. et les concours,

option 3. Une aide octroyée au maximum pour une durée de 3 ans dont le montant est soit dégressif soit ne peut être supérieur aux 50 % des coûts supplémentaires.

Les AAE ne satisfont à aucune des options ci-dessus. Ni les autorités hongroises ni les producteurs d’énergie électriques n’ont fournit quelconque preuve sur l’accomplissement des critères mentionnés dans les lignes directrices nouvelles.

(416)

Dans le cas de la présente affaire seule la Méthodologie des coûts échoués (Voir alinéa (26) ci-dessus) peut être appliquée aux lignes directrices et aux communications élaborées par la Commission en vue d’expliquer la modalité d’application exacte des dérogations figurant au point c), alinéa (3), article 87.

(417)

La Méthodologie concerne les aides octroyées aux entreprises titulaires (incunbent) ayant réalisé leurs investissements dans les centrales avant la libéralisation et sur le marché déjà libéralisé peuvent se heurter à des difficultés en matière de retour de l’investissement. Si la Méthodologie doit être considérée comme base adéquate pour une étude sur la compatibilité des AAE, c’est parce que ces derniers ont une caractéristique fondamentale de permettre à certaines entreprises, ayant réalisé des investissements dans les équipements de production d’énergie électrique avant la libéralisation, de continuer à percevoir des recettes garanties leur assurant le retour de leur investissement.

(418)

La Commission observe que ni les autorités hongroises ni les producteurs concernés n’ont affirmé dans leurs observations que les AAE n’étaient pas compatibles avec les critères de la Méthodologie. En effet, la majorité des producteurs considère que les AAE sont des accords commerciaux ayant été conclus bien avant la Méthodologie et que tout simplement les critères du mécanisme de compensation ne sont pas adaptés à l’évaluation des accords mentionnés.

(419)

L’objectif principal de la Méthodologie est de promouvoir la transition du secteur énergétique sur le marché libéralisé, pour offrir une possibilité aux entreprises titulaires (incunbent) de l’industrie de l’énergie électrique de s’adapter à l’introduction d’un environnement concurrentiel (111).

(420)

Dans le cadre de l’analyse des mesures d’aides vouées à la compensation des coûts liés aux obligations et garanties non accomplies en raison de la libéralisation du marché énergétique, la Méthodologie esquisse les principes appliqués par la Commission. La Commission se réfère à ces obligations et garanties en tant que «Coûts échoués» lesquels peuvent apparaître sous de nombreuses formes ainsi particulièrement sous la formes d’investissements réalisés avec des garanties de vente masquées ou ouvertes.

(421)

Étant donné que les AAE sont eux- même expressément qualifiés de garanties de vente octroyées avant la date de la privatisation, les centrales opérant dans le régime des AAE font partie du champ d’application de la Méthodologie.

(422)

Cependant la Commission constate que plusieurs des éléments des principes les plus importants des AAE ne correspondent pas aux conditions précisées à l’alinéa (4) de la Méthodologie. Premièrement, ils ne satisfont pas la condition indiquée à l’alinéa 4.2. prescrivant la nécessité de tenir compte du développement de la concurrence dans les dispositions relatives au paiement des aides. Le mécanisme de formation des prix des AAE a été élaboré de la sorte que seuls les indicateurs particuliers de la centrale concernée ont été retenus. Il ne faut pas tenir compte des prix offerts par les producteurs concurrents ainsi que leurs capacités de production.

(423)

Selon le point 4.9 de a Méthodologie, la Commission a émis ses doutes les plus sérieux à l’égard d’une aide dont le montant ne tient pas compte des différences entre les hypothèses économiques et marchandes retenues lors de l’évaluation originale et les changements effectifs intervenus au cours du temps. Les AAE sont qualifiés constituer une telle aide compte tenu du fait que pour l’élaboration de l’aide on n’a pas utilisé des hypothèses sur le marché. De surcroît le fait que malgré l’ouverture progressive du marché énergétique les dispositions principales des AAE demeuraient inchangées et des achats d’énergie supérieurs à ses besoins sont prescrits à MVM, en conséquence de quoi la société vend le surplus sur le marché libre, ce qui prouve entièrement que les AAE ne tiennent pas compte de l’évolution réelle du marché.

(424)

Ensuite, comme il l’a été démontré au chapitre 3 ci-dessus, l’un des avantages principaux des AAE pour les producteurs d’énergie électrique consiste à ce que MVM doit acheter une quantité garantie à un prix couvrant les coûts fixes, variables et de capital pendant la période correspondant approximativement à la durée d’exploitation ou d’amortissement des équipements concernés. En conséquence, les AAE exercent un impact selon lequel l’une des parties est obligée à acheter de l’énergie électrique de l’autre partie en négligeant l’évolution effective de l’offre des concurrents.

(425)

Plusieurs États membres ont constitué des mécanismes de compensation avec l’aide desquels, à la base de l’analyse de l’évolution future du marché concurrentiel et particulièrement des prix du marché future provenant de l’évolution de l’offre et de la demande, ils définissent le plafond du montant des aides. Dans le cas où les recettes effectives s’avèrent être supérieures aux prévisions, ils recalculent l’aide et définissent le montant de celle-ci à une valeur inférieur au maximum. L’impact de la compensation exercée sur le marché se réduira donc au minimum surtout parce qu’elle ne garanti pas aux bénéficiaires un niveau de production et de vente minimale.

(426)

De ce point de vue, au lieu de promouvoir le passage vers le marché concurrentiel, les AAE représentent plutôt une entrave au développement d’une concurrence effective sur une partie considérable du marché de la production de l’énergie électrique. Donc les dispositions portent sur le paiement de l’aide ne permettent pas la prise en considération de l’évolution future de la concurrence et le montant de l’aide ne dépend pas de l’évolution de la concurrence effective.

(427)

En conséquence, les dispositions mentionnées contredisent aux principes constatés à l’alinéa 5 de la Méthodologie, selon lesquels les méthodes de financement ne peuvent être opposées aux intérêts communautaires et particulièrement à la concurrence. Selon l’alinéa 5 les méthodes de financement ne peuvent avoir pour effet de dissuader l’entrée dans certains marchés nationaux ou régionaux d’entreprises extérieures à ces marchés ou de nouveaux acteurs. Cependant comme il est souligné, entre outres, au considérant 220, le système d l’engagement des capacités et du tarif de capacités peut voir pour effet de dissuader MVM c’est à dire d’influencer le plus grand acheteur du marché de gros de conclure des contrats non avec des producteurs intégrés aux AAE mais avec d’autres. De surcroît les conditions prescrites par l’ouverture du marché et précisées par les AAE obligent MVM d’acheter de l’énergie au delà de ses besoins et la contraignent à revendre l’énergie électrique ainsi achetée sur le marché libre par des mécanismes d’émission. Cela empêche en soi l’apparition de nouveaux acteurs sur le marché de gros. Finalement la Commission considère que la transition vers le marché concurrentiel des AAE perturbent la concurrence sur le marché hongrois de gros de l’énergie électrique pendant une période beaucoup plus longue que nécessaire.

(428)

Les règles constituant les AAE ne correspondent pas aux critères inclus au point 4.5 de la Méthodologie étant donné que ceux-ci ne définissent pas d’avance le montant plafond du montant d’aides à payer aux producteurs entre le 1er mai 2004 et l’échéance des AAE.

(429)

En plus, selon le point 4.8 de la Méthodologie, la Commission a émis des doutes sérieuses concernant les aides dont l’objectif est la sauvegarde de l’ensemble ou d’une partie des recettes constituées avant l’entrée en vigueur (112) de la directive 96/92/CE sans tenir rigoureusement compte des coûts échoués émergeant en cas donné en conséquence de l’ouverture de marché et pouvant bénéficier d’aides.

(430)

Le maintien des AAE après l’adhésion de la Hongrie à l’Union européenne a comme conséquence que ceux-ci assurent, avant l’entrée en vigueur de la directive 96/92/CE, la partie la plus grande des recettes réalisées par les producteurs d’énergie électrique concernés. De surcroît, les centrales intégrées aux AAE représentent une partie décisive du marché ainsi que ceux-ci sont d’une durée considérablement supérieure à la durée raisonnée indispensable à l’adaptation aux conditions marchandes.

(431)

Ensuite, la Commission ne peut, parmi les dispositions principales constituant les AAE, séparer des éléments lesquels pourraient être considérés comme compatibles avec le marché commun selon la Méthodologie. C’est particulièrement la réduction de la durée des AAE qui serait insuffisante pour garantir leur compatibilité étant donné que le mécanisme de financement basé sur les capacités engagées et les quantités d’achats garantis continuerait à freiner le développement d’une concurrence véritable. Le mécanisme de formation de prix demeure en contradiction avec l’objectif de promouvoir le développement d’un marché véritablement concurrentiel sur lequel la formation des prix serait le résultat de l’évolution du rapport entre l’offre et la demande.

(432)

À la base des considérations ci-dessus, les AAE sont incompatibles avec les critères définis par la Méthodologie.

(433)

Certaines parties intéressées avaient aussi argumenté avec le fait que l’alinéa (2), de l’article 86 du traité CE peut être applicable aussi aux AAE dans le cas où ceux-ci correspondraient aux critères développés dans l’arrêt rendu dans l’affaire Altmark.

(434)

La Commission considère que les observations développées dans les considérants 255-275 relatives aux critères de l’arrêt dans l’affaire Altmark permettent de conclure que l’alinéa (2) de l’article 86 ne peut être appliqué aux AAE.

(435)

L’article 86(2) n’est applicable que dans le cas où la société bénéficiaire est tenue de rendre des services d’intérêts économique général expressément convenus, cette condition cependant n’est pas accomplie, compte tenu de ce qui est développé aux considérants 256-267. Ensuite, la compensation due pour service d’intérêt économique général doit être proportionnel aux coûts supplémentaires, ceci signifie qu’il faut que la catégorie des services mentionnés soit exactement définie pour pouvoir constater les coûts afférents au service. Comme les considérants 268-270 le montrent, dans le cas présent, cette condition n’est pas remplie.

(436)

L’aide constituant l’objet de la présente décision est donc qualifiée d’aide d’État incompatible.

7.8.   Remboursement

(437)

Selon le traité CE et la jurisprudence bien établie de la Cour de Justice, une fois qu’elle établit qu’une aide est incompatible avec le marché commun, la Commission est compétente pour décider d’obligation l’État concerné à supprimer ou à modifier l’aide (113). Aussi à la base de la jurisprudence constante de la Cour, pour le cas des aides qualifiées par la Commission d’incompatibles avec le marché commun, l’objectif de l’obligation imposée à l’État est de rétablir la situation antérieure (114). À l’égard de cette question la Cour considère que l’objectif est atteint quand les bénéficiaires ont remboursé les montants octroyés illégalement à titre d’aide en perdant ainsi l’avantage dont ils bénéficiaient à l’égard des concurrents et que la situation antérieure à l’attribution de l’aide a été rétablie (115).

(438)

En suivant la pratique de la jurisprudence susmentionnée, l’article 14 du règlement (CE) no 659/99 stipule: «En cas de décision négative concernant une aide illégale, la Commission décide que l’État membre concerné prend toutes les mesures nécessaires pour récupérer l’aide auprès de son bénéficiaire (ci-après dénommée “décision de récupération”). La Commission n’exige pas la récupération de l’aide si, ce faisant, elle allait à l’encontre d’un principe général de droit communautaire».

(439)

Certaines parties intéressées ont, dans leurs requêtes, argumenté de la sorte que la suppression par décision de la Commission des contrats de droit privé serait contradictoire avec le principe de la sécurité juridique par ce que les AAE sont des contrats de droit privé signés de bonne foi par les producteurs, dans des conditions de marché correspondant à celles de la date de leur conclusion. Elles affirment qu’une telle décision léserait le principe de la proportionnalité. La Commission rejette cet argument pour les raisons développées dans les considérants 382-387.

(440)

Au sujet de la proportionnalité la Cour a déclaré que la récupération de l’aide illégale en vue du rétablissement de la situation antérieure ne peut être considérée comme disproportionnée par rapport aux objectifs des dispositions portant sur les aides d’État du traité (116).

(441)

La Commission considère qu’il y ait suffisamment de raisons pour qu’en vue du rétablissement des conditions de concurrence, l’aide octroyée dans le cadre des AAE soit remboursée.

(442)

Aux considérants 176-223 il a été prouvé que les avantages provenant des AAE sont de loin supérieurs à l’éventuel écart positif entre les prix des AAE et prix pouvant être atteints sur le marché en absence d’AAE.

(443)

La Commission considère cependant qu’il n’est pas possible de calculer exactement la valeur globale de l’ensemble des conditions rattachées aux obligations d’achat à long terme de MVM telles que décrites aux considérants 174-236 pour la période allant du 1er mai 2004 jusqu’à la fin des AAE. En conséquence, quant la Commission limitera son ordre de récupération à l’écart éventuel entre les recettes des centrales opérant dans le régime des AAE et les recettes auxquelles les centrales auraient pu accéder pendant la période susmentionnée en absence d’AAE.

(444)

À l’égard du montant à rembourser, la Commission est consciente du fait que le calcul exact de l’aide d’État accordée aux bénéficiaire est très compliqué étant donné qu’il dépend du prix et de la quantité de l’énergie qui aurait été produite et vendue sur le marché de gros entre le 1er mai 2004 et la date d’expiration des AAE dans la situation où pendant la période en question, aucun AAE n’aurait été en vigueur. Étant donné que les AAE couvrent la partie la plus importante des capacités hongroises de production, l’évolution du marché dans ce «scénario alternatif»(counterfactual scenario)  (117) sans AAE aurait été très différent de celle ayant eu lieu dans la réalité.

(445)

L’une des caractéristiques de l’énergie électrique est qu’après sa production elle ne peut être stockée rentablement. Pour assurer la stabilité du réseau il est toujours nécessaire d’avoir une demande et une offre équilibrées. En conséquence ce n’est pas de la quantité globale de la demande des consommateurs mais de la quantité d’énergie électrique demandée à chaque instant que dépend la quantité d’énergie électrique que les producteurs et importateurs peuvent vendre et le prix qu’ils vont pouvoir atteindre sur le marché de gros à ce moment (118). Le besoin d’énergie électrique fluctue aussi pendant la journée et en fonction des saisons, en conséquence de quoi les capacités de production et d’importations nécessaires pour satisfaire la demande varient aussi d’un moment à l’autre. Ainsi, certaines unités de production d’énergie électrique ne fournissent de l’énergie que lorsque que la demande est grande (119). En conséquence, les données sur la consommation, la production annuelle et le prix dont disposent la Commission ne permettent pas d’évaluer avec exactitude le fonctionnement du marché dans le scénario alternatif.

(446)

Selon la jurisprudence de la Cour il n’existe cependant aucune disposition communautaire prescrivant que lors de l’ordonnance du remboursement d’une aide incompatible avec le marché commun, le montant exact de l’aide à rembourser doit être déterminé avec précision, si la décision de la Commission inclut les informations permettant au destinataire de calculer sans grande difficulté le montant (120).

(447)

Ainsi, la Commission fournit dans la présente décision des lignes directrices permettant de calculer le montant de l’aide à récupérer. Comme il l’a été mentionné précédemment, les AAE couvrent une partie si importante du marché hongrois de la production qu’en leur absence les prix auraient certainement évolué différemment que les prix effectivement observés sur le marché dans la réalité. Le prix que les producteurs auraient pu atteindre sans les AAE peut être calculé sur le fondement d’une simulation du marché consistant à analyser le fonctionnement du marché de gros de l’énergie électrique dans le «scénario alternatif». Une telle simulation a pour objectif d’évaluer quel volume de vente aurait été réalisée et quel prix aurait été atteint dans le scénario alternatif. C’est sur cette base que des estimations fiables peuvent être données sur l’énergie achetée dans le scénario alternatif et sur ce qu’aurait été les montants que MVM aurait dû payer aux producteurs concernés. La simulation doit correspondre aux conditions indiquées aux considérants ci-après.

(448)

Tout d’abord, étant donné que pour l’électricité, l’élasticité de la demande par rapport aux prix est faible, la simulation doit être réalisée sur la base de l’hypothèse selon laquelle la charge du système selon le scénario alternatif est à chaque moment identique à la charge effectivement mesurée dans le passé.

(449)

Deuxièmement, comme le considérant 196 l’avait souligné, l’énergie électrique est commercialisée dans le cadre d’opérations spot ou d’opérations à termes. L’étude sur le secteur de l’énergie électrique a montré que les prix à termes sont définis par les attendes individuelles concernant l’évolution du marché spot. À la différence des marchés spot, — où selon la théorie économique, en cas de concurrence parfaite, le prix est identique à tout moment au plus élevé (121) des coûts marginaux à court terme de l’ensemble des unités de production nécessaires à satisfaire la demande, — sur les marchés à termes il n’y a pas de niveau de prix qui pourrait être facilement simulé à partir de la théorie économique. De plus il n’est pas possible de simuler la répercussion des stratégies appliquée par les acheteurs et vendeurs en termes de choix des opérations spot ou à termes. Sur les différents marchés de gros européens, des situations très diverses sont observées. L’étude sectorielle du secteur énergétique a montré qu’il y a entre les États membre une grande variation du ratio entre la quantité de produits spot vendue et la consommation domestique d’énergie électrique (122).

(450)

Selon le considérant 198 les prix spot et particulièrement ceux observables sur les bourses d’énergie, servent de référence à l’ensemble du marché du commerce en gros y compris les produits à termes. C’est la raison pour laquelle la Commission considère qu’en vue d’établir le montant du remboursement, la simulation du marché de gros doit partir de l’hypothèse selon laquelle, à l’exception des cas particuliers mentionnés au considérant 453-456, toute vente d’énergie électrique se réalise dans le cadre d’opérations spot.

(451)

La simulation doit être réalisée à partir des coûts marginaux à court terme des différentes unités de production. En conséquence la simulation doit tenir compte de toutes les données pertinentes concernant les unités de production fonctionnant en Hongrie (123) dans la période située entre le 1er mai 2004 et la suppression effective des AAE, particulièrement la puissance installée, le rendement thermique, les coûts d’achat de combustibles et les autres composantes importantes des coûts variables ainsi que les données concernant les périodes d’arrêt planifiées ou non. Ensuite il faut réaliser la simulation en considérant qu’il n’existe sur le marché spot simulé — à chaque instant — qu’un seul prix résultant de la confrontation de la demande et de l’offre. Cet unique prix évolue au cours du temps en fonction de l’évolution de la demande et des coûts variables.

(452)

Dans le cadre de la simulation il faut également tenir compte du fait que selon le scénario alternatif, MVM ne devrait pas acheter d’avantage d’énergie que les besoins du secteur du service public (124). En conséquence dans le scénario alternatif les mécanismes de vente mentionnés au considérant 226 ne figurent pas et les besoins de MVM se limitent à la quantité nécessaire pour la satisfaction des besoins du secteur public.

(453)

La simulation doit tenir compte de situations particulières dûment justifiées, qui peuvent conduire à déroger au principe général de formation des prix à partir des coûts marginaux qui est à la base de toute la simulation. Les unités de production combinée d’énergie et de chaleur peuvent entrer dans le cadre de telles situations particulières. En fonction des obligations contractuelles ou prévues par des disposions légales il peut arriver que ces unités vendent de l’énergie électrique à un prix inférieur à leurs coûts marginaux à court terme.

(454)

Les unités de productions bénéficiant de programmes d’aides publiques en raison de leurs technologies respectueuses de l’environnement, peuvent également entrer dans le cadre de telles situations particulières. En Hongrie, la législation attribue à MVM et aux distributeurs régionaux une obligation d’achat d’énergie électrique produite par les centrales de production combinée d’électricité et de chaleur ou d’énergie produite à partir des déchets ménagers ou des ressources énergétiques renouvelables, à des prix réglementés par les autorités, prix en générale plus élevés en général plus élevés que les prix du secteur concurrentiel. Dans le cadre de la simulation, il faut considérer que le système d’achat obligatoire existe aussi dans le scénario alternatif. Ainsi faut-il considérer que la quantité achetée par MVM dans le cadre du système d’achat obligatoire et le prix payé pour cette quantité sont identiques à ceux observés dans le «scénario réel» (125).

(455)

Dans le cadre de la simulation il faut aussi considérer qu’une certaine quantité de capacité de production disponible physiquement ne peut être utilisée pour l’approvisionnement en énergie électrique sue le marché de gros étant donné qu’elle a été réservée pour la fourniture de services d’équilibrage du système électrique. Dans le scénario réel ce sont et les producteurs opérant dans le cadre des AAE et les autres producteurs qui ont fourni ces services. La simulation doit être réalisée sur la base de l’hypothèse selon laquelle dans le scénario alternatif la capacité réservée pour les services d’équilibrage fournis au gestionnaire du réseau de transmission, l’énergie électrique fournie sur cette base et les prix correspondants sont identiques à ceux observés dans le scénario réel.

(456)

Dans le scénario alternatif, la quantité ainsi que le prix de l’énergie électrique importée et exportée pourraient être différents de ceux observés dans le scénario réel. Cependant il n’est pas possible de mesurer exactement cet impact sans étendre la simulation aux pays exportateurs et importateurs étant donné que les décisions des acteurs économiques ej ce qui concerne l’exportation à partir d’un pays ou l’importation en provenance de ce pays sont guidées par la situation du marché dans ces pays. Vu que la quantité d’énergie électrique importée en Hongrie et exportée à partir de ce pays est limitée par rapport à la production et la consommation domestique, compte tenu aussi du fait qu’un tiers de l’importation est régie par des contrats à long termes (126), la Commission considère que l’extension de la simulation aux marchés des pays voisins impliquerait des efforts disproportionnés. Ainsi, la Hongrie pourra considérer que les volumes importés et exportés ainsi que les prix correspondants dans le scénario alternatif sont identiques à ceux correspondant au scénario réel.

(457)

La Commission est consciente du fait que certains producteurs — lesquels n’ont pas signé des AAE avec MVM — ont conclu avec d’autres clients des contrats de fourniture à long ou à moyen terme. La Commission est cependant d’avis que si les AAE, conformément à l’hypothèse de base du scénario alternatif, avaient été supprimés le 1er mai 2004 ou à une date antérieure, compte tenu de la part importante de la puissance installée engagée dans le cadre des AAE, chacun des producteurs aurait modifié sa stratégie commerciale. Ainsi comme il est développé au considérant 449, il est impossible d’évaluer la part de l’énergie électrique vendue sous forme de produit spot ou sur le marché à terme. C’est pour cela qu’il est justifié de supposer que chacun des producteurs aurait l’ensemble de sa production sous forme de produit spot, sauf s’il est concerné par l’une des situations évoquées aux considérants 453-456.

(458)

La simulation du marché en gros pourrait être réalisée avec la plus grande exactitude en faisant les calculs sur une base horaire, c’est-à-dire en utilisant des paramètres spécifiques à chacune des heures de la période simulée. Toutefois, la Commission accepte que la simulation se limite à un échantillon composé d’heures représentatives, et que la simulation réalisée à ces heures soit extrapolée à l’ensemble de la période observée.

(459)

La simulation doit pouvoir donner une estimation fiable de la quantité d’énergie électrique vendue et du prix atteint par chacune des unités de productions dans le scénario alternatif. À partir des données historiques concernant la consommation des consommateurs finaux et celle de l’ensemble des consommateurs finaux du secteur public, il faut procéder à une estimation du ratio que représenterait, dans le scénario alternatif, la quantité d’énergie électrique dont aurait besoin MVM (127) pour satisfaire les besoins du secteur public divisée par la quantité globale d’énergie électrique fournie sur le marché de gros de l’énergie électrique, à chaque instant.

(460)

En exploitant ce ratio, il faut élaborer à une estimation sur la quantité d’énergie électrique que les différents producteurs auraient vendue à chaque instant à MVM dans le scénario alternatif. À partir de ces estimations il faudrait évaluer le montant que MVM aurait payé aux différents producteurs dans le scénario alternatif pour l’énergie achetée en vue de satisfaire les besoins du secteur public (128).

(461)

La dernière étape du calcul du montant à rembourser doit tenir compte du fait que dans le scénario réel, les producteurs n’ont pas nécessairement vendu à MVM l’ensemble de l’énergie électrique produite par les blocs de centrales opérant dans le régime des AAE, mais ils ont pu utiliser les capacités non réservées dans le cadre des AAE pour produire de l’énergie électrique destinée à être vendue à d’autres acheteurs. Pour chacun des blocs de centrale concernés, il faut calculer, sur une base annuelle, le montant de l’aide à rembourser à partir de la différence entre la recette provenant de l’énergie vendue à MVM (129) dans le cadre des AAE et le montant que MVM aurait payé dans le scénario alternatif tel que découlant des principes développés ci-dessus.

(462)

La Commission reconnaît cependant que dans le scénario alternatif, il est possible que les producteurs auraient obtenu des recettes plus élevées que celles obtenus dans le scénario en vendant de l’électricité à d’autres acheteurs que MVM. Cela est surtout dû au fait que dans le scénario alternatif, il n’y a pas de capacités réservées au profit de MVM ce qui permet aux producteurs de vendre leurs productions d’énergie électriques à des consommateurs autres que MVM. Ainsi la Hongrie peut déduire des montants calculés conformément au considérant 461 la différence entre les recettes provenant de la vente aux consommateurs autres que MVM et celles engendrées, selon le scénario réel, par de telles ventes, dans le cas où la différence est positive.

(463)

Selon alinéa (2), article 14 du règlement (CE) no 659/1999, l’intérêt du remboursement doit être calculé sur une base annuelle.

(464)

Pour que la Commission puisse étudier l’exactitude et la fiabilité de la simulation, les autorités hongroises doivent donner une description détaillée de la méthodologie utilisée pour le calcul et des données introduites dans la simulation.

(465)

La Commission a connaissance d’outils adaptés permettant de réaliser les simulations. La Commission a eu recours à de tels outils afin d’étudier la structure du marché de gros de six États européens dans le cadre de son enquête sectorielle sur les marchés de l’énergie. De nombreux producteurs et négociants en énergie électrique utilisent de tels outils en vue d’élaborer des prévisions à long terme, des études de programmation des ressources ainsi que pour optimaliser leur production (130). De plus, la Commission est prête à accepter, selon ce qui a été indiqué ci-dessus, certaines simplifications, notamment le recours à des échantillons temporels représentatifs à la place d’une simulation heure par heure. En conformité avec le principe de la coopération de bonne foi établie à l’article 10 du traité CE, la Hongrie doit donc effectuer dans des délais raisonnables et conformément aux principes ci-dessus la simulation et calculer, à partir de cette simulation, le montant de l’aide à rembourser.

(466)

Conformément à la position exprimée par la Cour de Justice, dans le cas où un État-membre se heurte à des difficultés imprévisibles ou à des circonstances qui n’avaient pas été envisagées par la Commission, ces problèmes peuvent être portés à la connaissance de la Commission, ainsi que des propositions portant sur les amendements adéquats, afin que la Commission les évalue. Dans ce cas, la Commission et l’État membre coopèrent de bonne fois en vue de trouver une solution à ces difficultés, en respectant intégralement les dispositions (131) du traité CEE.

(467)

La Commission demande ainsi à la Hongrie de lui soumettre tout problème auquel elle devait faire face en exécutant cette décision.

8.   CONCLUSIONS

(468)

La Commission constate que les AAE fournissent une aide d’État illégale selon l’article 87 (1) du traité CE aux producteurs d’énergie électrique, et que cette aide d’État est incompatible avec le marché commun.

(469)

Comme il a été indiqué au point 7.3., l’élément aide d’État des AAE est constitué par l’obligation d’achat imposée à MVM, aux termes de laquelle elle doit acheter une certaine capacité et une certaine quantité minimale garantie d’énergie électrique à un prix couvrant les coûts fixes, variables et de capital pendant un partie importante de la durée de vie des unités de production et garantissant un retour sur investissement aux producteurs.

(470)

Étant donné que l’aide d’État n’est pas compatible avec le traité CE, il faut la supprimer.

A ARRÊTÉ LA PRÉSENTE DÉCISION

Article premier

1.   L’obligation d’achat établie par les accords d’achat d’énergie électrique à long terme conclus entre (132) Magyar Villamos Művek Rt ainsi que Budapesti Erőmű Rt., Dunamenti Erőmű Rt., Mátrai Erőmű Rt., AES-Tisza Erőmű Kft, Csepeli Áramtermelő Kft., Paksi Atomerőmű Rt. et Pécsi Erőmű Rt. (le signataire du AAE originel et le prédécesseur juridique de Pannon Hőerőmű Rt) contient une aide d’État en faveur des producteurs d’énergie électrique selon l’article 87 (1) du traité CE.

2.   L’aide d’État évoquée à l’article 1 (1) est incompatible avec le marché commun.

3.   La Hongrie supprime l’attribution de l’aide d’État mentionnée à l’alinéa (1) dans un délai de six mois à compter de la réception de la présente décision.

Article 2

1.   La Hongrie doit faire rembourser par les bénéficiaires l’aide mentionnée à l’article 1.

2.   Les montants d’aides à rembourser doivent inclure les intérêts comptés à partir de la mise à disposition de l’aide aux bénéficiaires jusqu’à la date du remboursement effectif.

3.   Les intérêts doivent être calculés sur une base composée conformément au chapitre V du règlement (CE) no 794/2004 de la Commission (133) modifié par le règlement (CE) no 271/2008 de la Commission (134).

Article 3

1.   Dans un délai de deux mois suivant la notification de cette décision, la République de Hongrie informe la Commission des mesures déjà réalisées et prévues en vue de se conformer à cette décision. Elle l’informe en particulier des progrès réalisés en vue de la réalisation de la simulation de marché nécessaire aux finds d’établir le montant à rembourser, des détails de la méthodologie employée. Elle fournit également une description détaillée des données vouées à être utilisées dans cette simulation.

2.   La République de Hongrie informe régulièrement la Commission de toutes les mesures nationales prises en vue de l’application de la présente décision jusqu'à ce que le remboursement de l’aide mentionnée à l’article 1 soit effectuée. Sur demande de la Commission elle soumet à celle-ci les informations sur les mesures prévues ou déjà prises indispensables à la mise en œuvre des dispositions de la présente décision. Elle fournit des informations détaillées sur le montant d’aide déjà remboursé par les bénéficiaires ainsi que sur les intérêts remboursés.

Article 4

1.   La Hongrie calcule le montant précis de l’aide à rembourser sur la base d’une simulation appropriée du marché de gros de l’énergie électrique tel que celui-ci aurait fonctionné si aucun des accords d’achat d’énergie électrique de long terme mentionné à l’article 1 (1) n’avait été en vigueur après le 1er mai 2004.

2.   Dans un délai de six mois à compter de la notification de la présente décision, la Hongrie calcule selon la méthode mentionnée à l’alinéa (1) les montants à rembourser et soumet à la Commission les informations pertinentes concernant cette simulation, notamment les résultats de la simulation et une description détaillée des méthodes et données utilisées pour exécuter cette simulation.

Article 5

La Hongrie fait en sorte que l’aide mentionnée à l’article 1 soit remboursée dans un délai de dix mois à compter de la notification de la présente décision.

Article 6

Le destinataire de cette décision est la République de Hongrie.

Fait à Bruxelles, le 4 juin 2008.

Par la Commission

Neelie KROES

Membre de la Commission


(1)  JO C 324 du 21.12.2005, p. 12.

(2)  Décret gouvernemental 183/2002. (VIII.23.) fixant les modalités relatives à la définition et à la gestion des «coûts échoués».

(3)  Lettres des autorités hongroises du 4 juin 2004, enregistrée le même jour et du 20 octobre 2004, enregistrée le 21 octobre 2004.

(4)  Lettre du 21 décembre 2004 d'AES-Tisza Erőmű Kft. (centrale électrique AES-Tisza SARL).

(5)  JO L 83 du 27.3.1999, p. 1.

(6)  JO C 324 du 21.12.2005, p. 12.

(7)  Demande du 14 décembre 2005, acceptée par la Commission le 20 décembre 2005.

(8)  Demandes enregistrées le 9 janvier 2006 (centrale Budapesti Erőmű), le 16 janvier 2006 (centrale AES-Tisza, […] ()), le 17 janvier 2006 (Electrabel), le 19 janvier 2006 […], ainsi que le 20 janvier 2006 (centrale Csepeli Erőmű), acceptées par la Commission par ses lettres respectives du 13, 18, 20, 24 janvier et du 27 février 2006.

(9)  Les informations couvertes par le secret professionnel sont indiquées par le signe […].

(10)  Lettre enregistrée le 3 avril 2006.

(11)  2080/2007. (V.11.) Korm. Határozat a villamos energia iparban kötött hosszú távú szerződések rendezéséről.

(12)  Loi LXXXVI de 2007.

(13)  Excepté les lettres du 7 décembre 2007 et du 14 janvier 2008.

(14)  Adoptée par la Commission le 26 juillet 2001. Disponible sur le site web de la Commission: http://ec.europa.eu/comm/competition/state_aid/legislation/specific_rules.html

(15)  Directive 2003/54/CE du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2003 concernant des règles communes pour le marché intérieur de l’électricité et abrogeant la directive 96/92/CE (JO L 176 du 15.7.2003, p. 37).

(16)  Notification du 20 juillet 2005, enregistrée le 25 juillet 2005.

(17)  Dans certains cas, des AAE distincts ont été conclus pour les différents blocs de production des centrales électriques (centrales Mátrai Erőmű et Dunamenti Erőmű p. ex.).

(18)  Énergie d’équilibrage, réserves tertiaires, capacité black-start, etc.

(19)  Ces pourcentages sont fondés sur le calcul des capacités de production (MW) réservées et non pas sur le volume des ventes d’électricité (MWh). Les autorités hongroises les ont notifiés à la Commission par lettre du 4 juin 2004. Ces mêmes valeurs apparaissent dans le rapport sur l’examen sectoriel du marché hongrois de l’électricité effectué par l’Office hongrois de la concurrence (15 mai 2006).

(20)  Résilié d’un commun accord en mars 2008.

(21)  Liste fondée sur les informations fournies, le 20 octobre 2004, par les autorités hongroises, ainsi que sur les lignes directrices de l’Office hongrois de l’énergie pour la mise en œuvre d’une étude de coûts en vue de la tarification de janvier 2001 (A Magyar Energia Hivatal irányelve a 2001. januári ármegállapítás előkészítését célzó költség-felülvizsgálat végzéséhez).

(22)  Lettre du 20 juillet 2005, enregistrée le 25 juillet 2005.

(23)  Lettre du 28 juin 2006, enregistrée le 29 juin 2006.

(24)  Voir aussi le rapport sur l’examen du marché hongrois de l’électricité effectué par l’Office hongrois de la concurrence (15 mai 2006).

(25)  Loi XXXV de 2006 modifiant la réglementation des prix de l’électricité.

(26)  Les valeurs figurant au tableau sont fondées sur les statistiques publiées dans l’Annuaire statistique de l’électricité. Voir aussi la lettre des autorités hongroises du 21 avril 2008.

(27)  La capacité totale installée correspond à la capacité nominale des unités centrales électriques hongroises exprimée en MW (constante, sauf extension ou démantèlement).

(28)  La capacité brute disponible correspond à la capacité que la centrale électrique peut fournir compte tenu des surcharges durablement acceptables et des ruptures permanentes dans le cycle de production. Capacité installée après déductions pour des raisons permanentes et ajout des surcharges admissibles.

(29)  La capacité nette disponible utilisée correspond à la capacité effectivement disponible après déduction des capacités indisponibles pour cause de maintenance.

(30)  Les valeurs figurant au tableau sont fondées sur les AAE transmis à la Commission par les autorités hongroises. Voir aussi la lettre des autorités hongroises enregistrée le 21 avril 2008.

(31)  Capacité moyenne disponible contractée.

(32)  De 400 à 700 MW (les notes de bas de page à numérotation en minuscules ne figurent pas dans la version faisant foi de la décision, mais ont cependant été incluses dans la version publique pour donner l’ordre de grandeur de certaines données couvertes par le secret professionnel).

(33)  De 600 à 900 MW.

(34)  De 4 057 à 4 357 MW.

(35)  De 4 725,9 à 5 025,9 MW.

(36)  De 4 749,6 à 5 049,6 MW.

(37)  De 4 724,7 à 5 024,7 MW.

(38)  Chiffres fondés sur les AAE soumis par les autorités hongroises, sur les statistiques publiées sur le site web de l’Office hongrois de l’énergie (www.eh.gov.hu) ainsi que sur la lettre des autorités hongroises datée du 21 avril 2008. Le volume des prélèvements garantis arrêté dans les accords commerciaux annuels peut légèrement différer des quantités prévues par les AAE. Les données relatives aux prélèvements effectivement réalisés couvrent toutes les ventes de la centrale concernée à MVM.

(39)  Les données concernant la production totale d’électricité et la consommation propre couvrent aussi les blocs de ces centrales qui ne relèvent pas des AAE.

(40)  Acte relatif aux conditions d’adhésion à l’Union européenne de la République tchèque, de la République d’Estonie, de la République de Chypre, de la République de Lettonie, de la République de Lituanie, de la République de Hongrie, de la République de Malte, de la République de Pologne, de la République de Slovénie et de la République slovaque, et aux adaptations des traités sur lesquels est fondée l’Union européenne (JO L 236 du 23.9.2003).

(41)  JO L 27 du 30.1.1997, p. 20.

(42)  Arrêt de la Cour de justice du 16 mai 2002 dans l’affaire C-482/1999, République française/Commission des Communautés européennes, Recueil 2002, p. I-04397.

(43)  Référence à l’affaire T-366/00, Scott SA.

(44)  JO C 34 du 7.2.2004, p. 8.

(45)  Arrêt de la Cour de justice dans l’affaire C-280/00, Altmark trans Gmbh, et Regierungsprasidium Magdeburg Nahverkehrsgesellschaft Altmark GmbH et Oberbundesanwalt beim Bundesverwaltungsgericht (Recueil 2003, p. I-07747).

(46)  Directive 2003/54/CE.

(47)  Arrêt du Tribunal de première instance du 15 juin 2000, dans les affaires jointes T-298/97, T-312/97, T-313/97, T-315/97, T-600/97–T-607/97, T-1/98, T-3/98–T-6/98 et T-23/98.

(48)  Lettre enregistrée le 19 décembre 2006.

(49)  JO C 119 du 22.5.2002, p. 22.

(50)  L’arrêt du Tribunal de première instance du 15 juin 2000 dans l’affaire Alzetta Mauro, à laquelle la centrale Budapesti Erőmű se réfère, confirme également que la mesure doit être évaluée en tenant compte des nouvelles conditions du marché après la libéralisation, pour déterminer si la mesure qui ne constituait pas nécessairement une aide d’État avant la libéralisation devient une aide d’État (existante ou nouvelle).

(51)  Accord d’association signé le 16 décembre 1991 entre les Communautés européennes et leurs États membres, d’une part, et la République de Hongrie, d’autre part.

(52)  Citation du point 3 des observations du producteur.

(53)  Que le prix résulte de la formule de prix du PPA ou de règlements de fixation administrative des prix qui l’emportent sur ce mécanisme mais sont fondés sur des principes analogues.

(54)  Arrêt de la Cour dans les affaires jointes C-328/1999 et C-399/00, République Italienne et SIM 2 Multimédia SpA/Commission des Communautés européennes (Rec. 2003, p. I-4035, point 83).

(55)  En juin 2005, la Commission a lancé une enquête sur le fonctionnement des marchés européens du gaz et de l’électricité. La présente décision utilise le rapport final publié le 10 janvier 2007 sur l’examen du secteur de l’électricité comme source d’informations sur les tendances et les pratiques commerciales observées sur le marché européen de l’électricité et qui existaient déjà le 1er mai 2004, soit au moment de l’adhésion de la Hongrie à l’Union européenne. Le rapport peut être consulté sur: http://ec.europa.eu/comm/competition/antitrust/others/sector_inquiries/energy/

(56)  Les coûts marginaux à court terme sont les coûts que le producteur peut éviter en arrêtant la production d’électricité à court terme. Ces coûts correspondent plus ou moins aux coûts variables, car ces deux types de coûts sont principalement mus par les coûts de combustibles.

(57)  Le fait que l’opérateur s’engage à livrer la quantité fixée dans le contrat peut être assimilé à une réservation de capacité.

(58)  15 % des capacités couvertes par des AAE en 2005.

(59)  En raison des appels d’offres annuels, la quantité de capacités susceptibles d’être proposées au gestionnaire du réseau de transport ainsi que le prix payé changent tous les ans et sont même susceptibles de diminuer si les besoins du gestionnaire diminuent et/ou si d’autres fournisseurs proposent des prix inférieurs ou des quantités plus importantes.

(60)  La législation hongroise impose à MVM et aux compagnies de distribution régionales d’acheter l’électricité produite par cogénération ou à partir de déchets ou d’énergies renouvelables à des prix réglementés.

(61)  Voir, entre autres, le site suivant: http://www.mvm.hu

(62)  Sur la base des prix administrés, qui dépendent du niveau de consommation.

(63)  Directive 2003/54/CE.

(64)  Décret gouvernemental 183/2002.

(65)  Voir la lettre des autorités hongroises du 4 juin 2004.

(66)  Mises aux enchères de capacités, appels d’offres portant sur des capacités et ventes sur la «Bourse MVM».

(67)  Les données chiffrées figurant dans le tableau sont celles communiquées par les autorités hongroises par lettres enregistrées le 24 septembre 2007 et le 16 janvier 2008. Des écarts minimes (moins de 5 %) existent entre les données communiquées dans les deux lettres en ce qui concerne les prix de l’année 2006. La décision se fonde sur les données les plus récentes (lettre du 16 janvier 2008).

(68)  Informations tirées de la lettre des autorités hongroises enregistrées le 24 septembre 2007. En 2005 et 2006, la société E.ON DKCE a aussi vendu de l’électricité sur le marché libre. Cependant, selon les informations communiquées par les autorités hongroises par lettre enregistrée le 22 avril 2008, les quantités concernées était faibles, aussi les autorités hongroises ne disposent-elles pas de données sur les prix les concernant.

(69)  Les quantités vendues sont inférieures à 1 000 MWh. La Commission considère que les prix correspondant à de si petites quantités ne constituent pas un élément de comparaison adéquat.

(70)  Informations tirées des lettres des autorités hongroises enregistrées le 24 septembre 2007 et le 16 janvier 2008. Des écarts minimes (moins de 2 %) existent entre les données communiquées dans les deux lettres en ce qui concerne les prix de l’année 2006. La décision se fonde sur les données les plus récentes (lettre du 16 janvier 2008). Les importations de MVM sont également fondées sur des accords à long terme; ceux-ci ne sont pas concernés par la présente procédure.

(71)  Nom de la compagnie d’importation partenaire.

(72)  Prix moyen pondéré de toutes les importations figurant dans ce tableau: 9,14 HUF/kWh en 2004, 10,41 HUF/kWh en 2005 et 11,49 HUF/kWh en 2006.

(73)  Voir considérant 32.

(74)  Les prix moyens représentent les prix indicatifs pondérés.

(75)  Les quantités vendues sont comprises entre 25 000 et 2 000 000 MWh par type de produits (charge minimale/base/pointe).

(76)  Selon les estimations des autorités hongroises, en absence d’AAE, les différents producteurs actuellement couverts par un AAE réaliseraient des bénéfices maximaux comme suit: les centrales de Paks et de Pécs vendraient la totalité de leur production sous la forme de produits Base, les centrales de Mátra, de Dunament G2, de Kelenföld, d’Újpest et de Kispest vendraient environ 50 % de leur électricité sous la forme de produits Base et 50 % sous la forme de produits Pointe, tandis que les centrales de Csepel, de Dunament F et de Tisza II vendraient principalement des produits Pointe (environ 70 % de leur production).

(77)  Voir les décisions de la Commission concernant l’affaire no N 34/1999 (JO C 5 du 8.1.2002, p. 2), l’affaire no NN 49/1999 (JO C 268 du 22.9.2001, p. 7) l’affaire no N 6/A/2001 (JO C 77 du 28.3.2002, p. 25) et l’affaire no C 7/2005 (non encore publiée au JO).

(78)  Deuxième et troisième critères de l’arrêt Altmark.

(79)  Arrêt du 29 septembre 2000 dans l’affaire T-55/1999, CETM/Commission, points 40 et 52.

(80)  Arrêt du 14 juillet 1983 dans l’affaire 203/82, Commission/République italienne, point 4.

Le point 18 de l’arrêt rendu le 2 juillet 1973 par la Cour dans l’affaire 173/73 République d’Italie contre Commission des Communautés européennes.

(81)  Arrêt rendu par la Cour le 13 mars 2001 dans l’affaire C-379/98.

(82)  Arrêt rendu le 16 mars 2002 par la Cour de justice dans l’affaire C-482/1999.

(83)  Voir, par exemple, le courrier des autorités hongroises enregistré le 25 juillet 2005.

(84)  Page 5 des observations.

(85)  Courrier enregistré le 25 juillet 2005.

(86)  «A szerződés mintegy átemelte a Kormányhatározatban szereplő képleteket, meghatározásokat.». Courrier des autorités hongroises enregistré le 25 juillet 2005.

(87)  Courrier du 20 juillet 2005 enregistré le 25 juillet 2005.

(88)  Le texte des lignes directrices conjointes a été communiqué à la Commission en anglais uniquement.

(89)  Courrier envoyé par les autorités hongroises à la Commission, le 20 octobre 2004, ainsi que, dans le cas de Dunament, courrier expédié le 25 juillet 2005.

(90)  Annexe 3 des requêtes soumises par […].

(91)  Nom du producteur d’électricité.

(92)  Voir en particulier l’arrêt rendu par le TPI le 13 juin 2000, dans les affaires jointes T-204/97 et T-270/97, EPAC/Commission, Rec. 2000, p. II-02267.

(93)  JO L 27 du 30.1.1997, p. 20.

(94)  Publié le 15 mai 2006.

(95)  Point 24 des conclusions (Összefoglalás) du rapport.

(96)  Publié en novembre 2006. Titre original: «A hosszú távú áramvásárlási szerződések megszűnésének hatása a villamos energia nagykereskedelmi árára».

(97)  Citation extraite du point 2 de l’étude: «összeegyeztethetetlen a versenypiaci működés elveivel.»

(98)  10 janvier 2007, http://ec.europa.eu/comm/competition/antitrust/others/sector_inquiries/energy/

(99)  Les informations sont disponibles sur le site internet de l’Office hongrois de l’énergie: www.eh.gov.hu

(100)  Étude du Dr. Theon van Dijk, mars 2006.

(101)  Voir, par exemple, la décision de la Commission du 28 janvier 2004 CZ 14/2003 — République Tchèque «Česka spořitelna, a.s.».

(102)  Voir la note 32 de bas de page.

(103)  JO L 236 du 23.9.2003.

(104)  La Commission a adopté le 13 septembre 2006 et a publié la carte des aides d’État à finalité régionale de la Hongrie au JO C 256 du 24.10.2006, p. 7.

(105)  JO C 74 du 10.3.1998, p. 9.

(106)  JO C 54 du 4.3.2006, p. 13.

(107)  Point 4.15 des lignes directrices précédentes en matière d’aides régionales et le point 5 des nouvelles lignes directrices.

(108)  Citation provenant du point 5 des nouvelles lignes directrices en matière d’aides régionales.

(109)  Communication de la Commission – Encadrement communautaire des aides d’État pour la protection de l’environnement (JO C 37 du 3.2.2001, p. 3.

(110)  JO C 82 du 1.4.2008, p. 1.

(111)  Voir les dispositions d’introduction de la méthodologie.

(112)  En effet, à partir de la date de la libéralisation du marché de l’énergie, ce qui correspond pour la Hongrie au 1er mai 2004.

(113)  Arrêt rendu dans l’affaire C-70/72 Commission contre l’Allemagne (EBHT 1973, p. 00813, point 13).

(114)  Arrêt rendu dans les affaires jointes No C-278/92, C-279/92 et C-280/92 le Royaume de l’Espagne contre la Commission des Communauté européennes (EBHT 1994, I-4103 o. point 75).

(115)  L’arrêt C-75/97 rendu dans l’affaire Royaume de Belgique contre la Commission des Communauté européennes (EBHT 1999, I-03671 o. points 64-65).

(116)  L’arrêt rendu dans l’affaire no C-75/97 Le Royaume de Belgique contre la Commission des Communautés européennes (EBHT 1999, I-030671 o. point 68), l’arrêt rendu dans l’affaire no C-142/87. Royaume de Belgique contre la Commission des Communautés européennes (EBHT 1990, I-00959 o. point 66), ainsi que l’arrêt rendu dans les affaires consolidées no C-278/92–C-280/92. Le Royaume d’Espagne contre la Commission des Communautés européennes (EBHT 1994, I-04103 o. point 75).

(117)  C’est-à-dire dans le cas imaginaire où, entre le 1er mai 2004 et la dissolution des AAE, aucun AAE n’aurait été en vigueur, toutes choses égales par ailleurs. «Le scénario réel» — étant donné l’existence des AAE — est celui qui s’est déroulé dans la réalité.

(118)  Cette caractéristique est exprimée en MW et est habituellement appelée «charge du système».

(119)  Sont appelées habituellement «charge à pointe» les périodes où la demande est grande, à l’encontre de la période à «charge continue».

(120)  Voir particulièrement l’arrêt no C-480/98 rendu dans l’affaire Royaume d’Espagne contre la Commission des Communauté européenne. (EBHT 2000, I-8717 o. point 25) ainsi que l’arrêt rendu dans l’affaire no C-415/03 La Commission des Communautés européennes contre la République Grèce (EBHT 2005, I-03875 o. point 39).

(121)  Dans des conditions de concurrence parfaite, la demande est satisfaite par les unités de productions dont les coûts marginaux sont les plus faibles et sont capables d’approvisionner le réseau de toute l’énergie électrique nécessaire à la demande. Les unités des centrales peuvent être classifiées en fonction de leurs coûts marginaux. Leur arrivée sur le marché dépend à tout moment de la place qu’elles occupent dans cet «ordre de mérite», de la charge du système ainsi que de la quantité d’énergie électrique fournie par les unités de production les précédant dans le classement.

(122)  Ce taux est en France de 5 %, au Royaume Uni de 11 %, en Italie de 44 %, en Espagne de 84 %.

(123)  Que celle-ci fonctionne ou non dans le cadre d’AAE.

(124)  En tenant compte d’une façon adéquate des pertes se produisant dans le système de transmission et de distribution.

(125)  Le «scénario réel» correspond à la situation observée dans la réalité à partir du 1er mai 2004, compte tenu de l’existence des AAE.

(126)  Lesquels seraient demeurés en vigueur dans le scénario alternatif

(127)  Cette quantité correspond à la quantité totale d’énergie électrique effectivement consommée par le secteur de service public ainsi que la quantité requise à cause des pertes se produisant dans le système de transmission et de distribution.

(128)  Entre le 1er mai 2004 et la suppression effective des AAE.

(129)  Ces recettes doivent être calculées à la base des prix effectivement payés par MVM. Au cours de ces calculs, il faut tenir compte du prix administré pour la période pendant laquelle les autorités ont modifié la formule de calcul de prix incluse dans les AAE (entre le 9 décembre 2006 et le 31 décembre 2007).

(130)  Les États membres concernés sont la Belgique, la France, l'Allemagne, l'Italie, les Pays-Bas, l'Espagne ainsi que le Royaume Uni. Les marchés de gros de ces pays sont parmi les plus grands en Europe.

(131)  Voir l’arrêt no C-94/87 rendu dans l’affaire Commission des Communautés européennes contre la République fédérale d’Allemagne (EBHT 1989, p. 175, point 9) ainsi que l’arrêt no C-348/93 rendu dans l’affaire Commission des Communautés européennes contre la République d’Italie (EBHT 1995, p. 673, point 17).

(132)  Les formes de sociétés indiquées correspondent aux appellations utilisées lors de la signature des AAE.

(133)  JO L 140 du 30.4.2004, p. 1.

(134)  JO L 82 du 25.3.2008, p. 1.


27.8.2009   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

L 225/104


DÉCISION DE LA COMMISSION

du 2 juillet 2008

concernant les aides C 16/04 (ex NN 29/04, CP 71/02 et CP 133/05) octroyées par la Grèce à l’entreprise Hellenic Shipyards SA

[notifiée sous le numéro C(2008) 3118]

(Le texte en langue grecque est le seul faisant foi.)

(Texte présentant de l'intérêt pour l'EEE)

(2009/610/CE)

LA COMMISSION DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES,

vu le traité instituant la Communauté européenne, et notamment son article 88, paragraphe 2, premier alinéa,

vu l’accord sur l’Espace économique européen, et notamment son article 62, paragraphe 1, point a),

après avoir invité les parties intéressées à présenter leurs observations conformément aux dispositions citées ci-dessus (1) et vu ces observations,

considérant ce qui suit:

1.   PROCÉDURE

(1)

Par lettre du 9 septembre 2003, les autorités grecques ont soumis à la Commission une demande d’Hellenic Shipyards SA (ci-après «HSY») concernant des modifications au plan d’investissement relatif à sa restructuration, en faveur duquel la Commission avait autorisé des aides par sa décision du 15 juillet 1997 dans l’affaire N 401/97 (2) (ci-après la «décision N 401/97»). Selon le plan modifié daté de novembre 2002, HSY a soumis une demande, à laquelle les autorités grecques ont donné une suite favorable, concernant l’achèvement de la mise en œuvre du plan d’investissement d’ici le 30 juin 2004. En outre, selon le plan modifié, l’aide que la Commission avait autorisée en 1997 n’avait pas encore été versée à HSY.

(2)

Par lettre du 31 octobre 2003, les autorités grecques ont expliqué que le plan modifié avait été communiqué à la Commission «pour information» et que cette communication n’était pas censée être une notification.

(3)

Par lettre du 18 novembre 2003, la Commission a demandé aux autorités grecques de préciser si elles avaient l’intention d’accorder ou de verser des aides à HSY aux fins du plan d’investissement modifié. Dans le même courrier, la Commission a également rappelé aux autorités grecques que si tel était le cas et conformément au règlement (CE) no 659/1999 du Conseil du 22 mars 1999 portant modalités d’application de l’article 93 du traité CE (3) [ci-après le «règlement (CE) no 659/1999»], l’aide devait être notifiée à la Commission et ne pouvait être mise à exécution avant d’avoir été autorisée par la Commission.

(4)

Par lettre du 16 janvier 2004, les autorités grecques ont répondu que l’aide qu’elles avaient l’intention d’accorder constituait une «aide existante» couverte par la décision de la Commission de 1997 et qu’elles avaient compétence pour autoriser des modifications au plan de restructuration, y compris celles apportées au calendrier de la mise en œuvre de celui-ci.

(5)

Par lettre du 20 février 2004, la Commission a notifié aux autorités grecques ses doutes quant à la validité des déclarations précitées.

(6)

Par lettre du 27 février 2004, les autorités grecques ont informé la Commission qu’aucune aide n’avait été accordée à HSY à cette même date.

(7)

Avec la décision C(2004) 1359 du 20 avril 2004 (4), (ci-après la «décision d’ouverture de la procédure»), la Commission a ouvert la procédure prévue à l’article 88, paragraphe 2, du traité CE concernant les modifications au plan d’investissement de HSY qui était en partie financé au moyen de l’aide à l’investissement autorisée en vertu de la décision N 401/97. La décision d’ouvrir la procédure indique également que la Banque hellénique du développement industriel (ci-après «ETVA»), appartenant à l’État grec, a octroyé divers prêts et garanties à HSY et que les autorités grecques n’avaient pas soumis de rapports annuels, alors qu’elles y étaient tenues.

(8)

Après avoir sollicité et obtenu des prorogations du délai fixé en vue de présenter ses observations, par son courrier daté du 20 octobre 2004, la Grèce a soumis des observations concernant la décision d’ouvrir la procédure.

(9)

La décision de la Commission d’ouvrir la procédure est parue au Journal officiel de l’Union européenne  (5). Dans ce contexte, la Commission a demandé aux parties intéressées de soumettre leurs observations concernant les mesures.

(10)

Après avoir sollicité et obtenu des prorogations du délai de soumission des observations, HSY a soumis des observations concernant la décision d’ouvrir la procédure par sa lettre du 18 octobre 2004. Ces observations sont les mêmes que celles soumises par la Grèce le 20 octobre 2004. Elefsis Shipyards, société concurrente de HSY, a soumis des observations par sa lettre du 10 septembre 2004. Ces observations ont été communiquées à la Grèce par les courriers datés du 16 décembre 2004 et du 23 décembre 2004. La Grèce a répondu par ses lettres du 20 janvier 2005 et du 26 janvier 2005, respectivement. Par sa lettre du 29 mars 2005, la Commission a communiqué à la Grèce des observations supplémentaires formulées par Elefsis Shipyards, auxquelles la Grèce a répondu par sa lettre du 23 mai 2005.

(11)

Depuis 2002, la Commission recevait des lettres de réclamation de Elefsis Shipyards, qui mettaient en avant l’argument selon lequel HSY avait bénéficié de différentes mesures d’aide illégales et incompatibles et qu’elle avait abusivement appliqué des aides qui avaient été autorisées par la Commission. Ces lettres portaient les dates suivantes: 23 mai 2002, 28 mai 2002, 14 août 2002, 24 avril 2003, 3 février 2004, 4 mars 2004, 30 juin 2004, 8 avril 2005, 27 avril 2005, 24 mai 2005, 10 juin 2005, 15 juillet 2005, 28 juillet 2005, 13 septembre 2005, 16 septembre 2005, 21 octobre 2005, 12 décembre 2005, 23 décembre 2005, 6 janvier 2006, 10 janvier 2006, 12 janvier 2006, 18 janvier 2006, 23 janvier 2006, 3 février 2006, 9 février 2006, 23 mars 2006, 28 mars 2006, 6 avril 2006, 20 avril 2006, 24 mai 2006 et 2 juin 2006. La Commission a transmis des lettres au plaignant les 27 juin 2002, 22 juillet 2004 et 12 août 2005.

(12)

Les plaintes en question ont été enregistrées sous les numéros CP 71/02 et CP 133/05.

(13)

La Commission a demandé des informations auprès de la Grèce par les courriers des 30 janvier 2003, 30 juillet 2004, 2 mai 2005, 24 mai 2005, 24 mars 2006, 24 mai 2006 et 29 mai 2006. La Grèce a répondu par ses lettres des 31 mars 2003, 21 octobre 2004, 17 décembre 2004, 20 juin 2005, 25 avril 2006, 30 mai 2006 et 1er juin 2006.

(14)

Le 22 mars 2006, la Commission a rencontré les autorités grecques qui étaient accompagnées de délégués de HSY et de la Banque du Pirée qui ont soumis à la Commission certains documents complémentaires. Les 10 janvier 2003, 14 janvier 2005, 10 mars 2005, 20 mai 2005, 19 octobre 2005, 8 novembre 2005 et 23 mars 2006, la Commission s’est entretenue avec le plaignant et, le 21 mars 2006, avec Thyssen Krupp Marine Systems AG (ci-après, «TKMS»).

(15)

Par la décision C(2006) 2983 du 4 juillet 2006 (6) (ci-après la «décision d’extension de la procédure»), la Commission a étendu la procédure prévue à l’article 88, paragraphe 2 du traité afin d’inclure diverses mesures supplémentaires en faveur de HSY. La décision concernée conclut également que différentes mesures qui n’ont pas été notifiées relèvent du champ d’application de l’article 296 du traité ou bien ne constituent pas une aide au sens de l’article 87, paragraphe 1, du traité.

(16)

L’extension de la procédure dans l’affaire C 16/04 a eu lieu sans préjudice de toute autre procédure d’aide d’État existante ou future qui concerne HSY, notamment la procédure C 40/02.

(17)

Après avoir sollicité et obtenu une prorogation du délai de réponse, la Grèce a répondu à la décision d’extension de la procédure par lettre du 5 octobre 2006.

(18)

La décision de la Commission concernant l’extension de la procédure a été publiée au Journal officiel de l’Union européenne  (7). Dans ce contexte, la Commission a demandé aux parties intéressées de présenter leurs observations sur les mesures.

(19)

Les parties intéressées suivantes ont présenté leurs observations à la Commission: HSY a présenté ses observations par sa lettre du 30 octobre 2006. La holding Elliniki Nafpigoepiskevastiki AE (ci-après, «ENAEX») et TKMS ont présenté leurs observations en commun, par lettre du 30 octobre 2006. La Banque du Pirée a présenté des observations par lettre du 27 octobre 2006 et – après une réunion avec la Commission qui s’est tenue le 15 novembre 2006 – par lettre du 27 décembre 2006. Après avoir sollicité et obtenu une prorogation du délai de réponse, Elefsis Shipyards a présenté des observations par lettre du 17 novembre 2006.

(20)

Par lettre du 22 février 2007, la Commission a communiqué les observations en question à la Grèce qui les a commentées par ses lettres des 7 mars 2007 et 19 mars 2007. Par lettre du 27 avril 2007, la Commission a transmis à la Grèce des annexes portant sur les observations de tierces parties qu’elle avait omises dans la lettre du 22 février. Dans sa lettre du 27 avril 2007, la Commission posait également à la Grèce certaines questions auxquelles la Grèce a répondu par lettre du 29 juin 2007. Par lettre du 23 août 2007, la Commission a posé des questions à HSY qui a répondu par sa lettre du 9 octobre 2007. Par lettre du 13 novembre 2007, la Commission a demandé à la Grèce des informations supplémentaires et a transmis les réponses que HSY avait soumises en date du 9 octobre 2007. La Grèce a répondu par lettres du 4 décembre 2007 et du 14 décembre 2007. La Commission et les autorités grecques se sont réunies les 16 octobre 2007 et 21 janvier 2008. Le 12 février 2008, la Commission a soumis des questions supplémentaires à la Grèce qui a répondu par lettre du 3 mars 2008.

(21)

Le 8 mai 2007, une réunion s’est déroulée en présence de la Commission, de TKMS/ENAEX et de l’avocat de HSY. TKMS/ENAEX a présenté des observations par lettre du 21 juin 2007. La Commission a transmis la lettre en question à la Grèce le 11 septembre 2007. La Grèce a présenté des observations par lettre du 11 octobre 2007. À la suite d’une seconde réunion, qui s’est tenue le 9 janvier 2008, entre la Commission et les mêmes personnes, TKMS/ENAEX a présenté des observations supplémentaires par lettre du 18 janvier 2008 qui ont été transmises aux autorités grecques par lettre du 12 février 2008.

(22)

La Commission a organisé des réunions avec des délégués de Elefsis Shipyards, le 15 mars 2007 et le 7 août 2007. À la suite de la dernière réunion, Elefsis Shipyards a présenté des observations supplémentaires par lettre du 8 novembre 2007 qui ont été transmises à la Grèce par lettre du 17 janvier 2008. La Grèce a présenté ses observations par lettre du 15 février 2008.

(23)

La Banque du Pirée a présenté des observations supplémentaires par lettre du 22 octobre 2007, qui ont été communiquées à la Grèce par lettre du 13 novembre 2007. Le 12 février 2008, la Banque du Pirée a sollicité une nouvelle réunion avec la Commission. Cette réunion a eu lieu le 5 mars 2008.

(24)

En vertu de l’article 6 du règlement (CE) no 659/1999, l’État membre concerné et les autres parties intéressées disposent d’un délai d’un mois afin de présenter leurs observations et «dans certains cas dûment justifiés, la Commission peut proroger ce délai.» En l’occurrence, les parties ont continué de présenter des observations (et de demander des réunions avec la Commission) après l’expiration du délai concerné. Initialement, la Commission transmettait ces observations à la Grèce pour commentaire, laissant ainsi entendre à la Grèce que la Commission avait accepté les observations concernées qui avaient été présentées après l’expiration du délai d’un mois. Au départ, la Commission donnait également une suite favorable aux demandes de réunions des parties intéressées et, lorsqu’au cours desdites réunions, une partie intéressée demandait l’autorisation de présenter des observations complémentaires sur les questions qui avaient été abordées durant les réunions, la Commission accordait cette autorisation. Cependant, la Commission n’a jamais indiqué aux parties intéressées qu’elle accepterait les autres observations présentées après l’expiration du délai d’un mois. Plus précisément, la Commission n’a jamais indiqué aux parties intéressées qu’elles pourraient présenter indéfiniment des observations ni qu’elle les informerait sur le moment où elle n’accepterait plus d’observations.

(25)

La Commission estime que la prorogation du délai déterminé au-delà d’un mois était justifiée en l’occurrence, car la décision d’extension de la procédure couvre un nombre élevé de mesures. En outre, l’évaluation de bon nombre des mesures en question exige une analyse juridique complexe et la clarification de faits relatifs qui se sont produits il y a parfois dix ans.

(26)

Toutefois, certaines parties intéressées ont continué à présenter des observations à la Commission, même un an après la publication de la décision d’extension de la procédure. Si la Commission n’avait pas décidé d’ignorer les observations présentées après une date déterminée, la poursuite de la présentation d’observations l’aurait empêché d’aboutir à une décision finale dans un délai raisonnable (8). En outre, dans certains cas, les parties commentaient à nouveau des questions à propos desquelles elles avaient déjà présenté des observations, sans présenter de faits relatifs véritablement nouveaux. Ceci ne peut pas constituer l’objectif de la prorogation du délai de présentation d’observations.

(27)

De ce fait, la Commission a décidé que les observations reçues à partir du 5 mars 2008 (date à laquelle la Commission a reçu la lettre de quatre pages datée du 3 mars 2008, par laquelle la Grèce a répondu à la lettre du 12 février 2008 de la Commission) seraient réputées reçues après l’expiration du délai de présentation d’observations. Cette décision porte sur les observations présentées par Elefsis Shipyards le 7 mars 2008, le 24 avril 2008 et le 2 juin 2008 (9), ainsi que les observations présentées par ΕΝΑΕΧ/TKMS le 2 avril 2008. Ceci signifie que les observations en question n’ont pas été transmises à la Grèce pour commentaire et qu’elles n’ont pas été prises en compte dans la décision présente.

2.   DÉCISIONS ANTÉRIEURES DE LA COMMISSION ET DU CONSEIL

(28)

HSY est un des plus importants chantiers navals de l’est de la Méditerranée. Les chantiers navals se trouvent dans la région de Skaramanga, à l’ouest d’Athènes, dans l’Attique. HSY a été établie en 1939 par la Marine de guerre hellénique et achetée en 1957 par le groupe des sociétés Niarchos. La crise durable qui a affecté le secteur maritime après la première crise pétrolière a eu un impact négatif sur le taux d’activité de HSY. En avril 1985, la situation était tellement critique que la société a cessé ses activités et est entrée en liquidation. En septembre 1985, la banque ETVA, qui appartient à l’État, a acquis la société. Après la vente, la société a repris ses activités. Cependant, ses activités étaient insuffisantes par rapport à la taille des installations et au nombre élevé de travailleurs dont elle disposait (10).

(29)

En 1990, le Conseil a arrêté une disposition spéciale en faveur de la Grèce, dans la directive 90/684/CEE du Conseil du 21 décembre 1990 concernant les aides à la construction navale (ci-après la «directive 90/684/CEE») (11), qui autorisait l’octroi d’aides de fonctionnement en vue de la restructuration dans le contexte de la privatisation de différents chantiers navals.

(30)

En 1992, à la suite de ses obligations financières et aux pertes qu’elle avait accumulées, HSY est entrée en liquidation. En novembre 1993, après deux tentatives infructueuses de vendre HSY, la procédure de liquidation a été révoquée. Sur la base des engagements pris par le gouvernement grec concernant la privatisation de ses chantiers navals publics avant le 31 mars 1993, la Commission a autorisé le 23 décembre 1992 (12) l’annulation de dettes en faveur de HSY. Le gouvernement grec n’a pas respecté le délai expirant en mars 1993 et la Commission a ouvert le 10 mars 1994 une procédure (C 10/94) concernant l’application abusive de l’aide autorisée (13). Le 26 juillet 1995, la Commission a décidé (14) de clore la procédure sur une décision négative en ce qui concerne l’aide en faveur de HSY. Toutefois, à la suite d'une demande du gouvernement grec qui a invoqué le fait que la vente des chantiers navals était imminente, la Commission a décidé de suspendre la notification de la décision concernée. Enfin, les autorités grecques ont informé la Commission que 49 % des actions de HSY avaient été vendues à ses salariés et que la Grèce avait profité de l’opportunité afin de conserver la majorité des actions dans un des chantiers navals, dans l’intérêt de la défense, ainsi qu’il est prévu à l’article 10, paragraphe 3, de la directive 90/684/CEE. Le 31 octobre 1995, la Commission a révoqué la décision finale négative concernant HSY (15). Entre-temps, les dettes se sont accumulées et la restructuration n’a pas été réalisée. De ce fait, le 8 janvier 1997, la Commission a étendu la procédure qu’elle avait ouverte dans l’affaire C 10/94 (16). Ensuite, le règlement (CE) no 1013/97 du Conseil du 2 juin 1997 concernant les aides en faveur de certains chantiers navals en cours de reconstruction (17) (ci-après, le «règlement (CE) no 1013/97»), qui incluait HSY, a été publié.

(31)

Le 15 juillet 1997, la Commission a approuvé des aides en faveur de HSY par deux décisions séparées:

par la première décision (18) (ci-après, la «décision C 10/94»), la Commission a clos la procédure dans l’affaire C 10/94 en autorisant l’annulation de dettes d’un montant de 54,5 milliards GRD (160 millions EUR) en vertu du règlement no 1013/97,

par la décision N 401/97, après notification des autorités grecques le 20 juin 1997, la Commission a approuvé une subvention de l’ordre de 7,8 milliards GRD (22,9 millions EUR) pour un plan d’investissement d’une valeur de 15,6 milliards GRD (45,9 millions EUR) dans le but de restructurer les chantiers navals.

(32)

En 2001, le gouvernement a décidé de privatiser HSY dans sa totalité. L’État grec a publié un avis d’appel d’offres ouvert pour lequel un dossier d’appel d’offres a été établi. Le 31 mai 2002, les salariés d’ETVA et de HSY ont vendu les actions de HSY qui étaient en leur possession à un consortium constitué par HDW et Ferrostaal (19) (ci-après, «HDW/Ferrostaal»). Le consortium en question a créé ENAEX dans le but de gérer la participation dans HSY. HDW et Ferrostaal détenaient des parts égales d’ENAEX. ThyssenKrupp a racheté HDW en janvier 2005 (20) et a acquis les actions d’ENAEX que possédait Ferrostaal, en novembre 2005 (21). Par conséquent, depuis fin 2005, ThyssenKrupp est le seul propriétaire et a le contrôle de HSY. ENAEX et HSY sont intégrées à TKMS, dans la division de ThyssenKrupp spécialisée dans les systèmes de navires militaires et les navires marchands spécialisés.

(33)

En août 2001, durant la procédure de soumission des offres en vue de la vente de HSY, l’État grec a adopté la loi 2941/2001 qui inclut différentes mesures visant à faciliter la vente de HSY. En premier lieu, la loi prévoit des incitations au départ volontaire des salariés de l’entreprise. En second lieu, l’État grec prend en charge certaines des obligations forfaitaires au titre des pensions de HSY. En troisième lieu, la loi donne la possibilité à HSY de bénéficier de différentes réserves exonérées d’impôt, si elles sont utilisées de manière à compenser les pertes d’exercices précédents. En quatrième lieu, la loi inclut une disposition relative à l’indemnisation des salariés qui étaient actionnaires de HSY avant sa privatisation. Notamment, l’État grec rembourserait aux salariés les montants qu’ils avaient investis dans HSY dans le contexte des augmentations de capital de la société durant les années précédentes. Le 5 juin 2002, la Commission a adopté une double décision (ci-après, la «décision N 513/01») (22) relative à certaines mesures incluses dans la loi 2941/2001 que la Grèce avait notifiées en 2001 (notification no N 513/01). La Commission a décidé d’autoriser des aides à la fermeture d’installations pour un montant de 29,5 millions EUR en faveur de HSY et d’ouvrir (sous le numéro d’affaire C 40/02) la procédure officielle d’enquête prévue à l’article 88, paragraphe 2, du traité concernant les points suivants: (1) la prise en charge par l’État de certaines des obligations forfaitaires au titre des pensions de salariés de HSY; (2) la capitalisation de certaines réserves du bilan sans versement de l’impôt de 10 % prévu par la loi. La décision finale rendue le 20 octobre 2004 (23) (ci-après, la «décision C 40/02») concluait que ces deux mesures constituaient des aides d’État incompatibles qui devaient être récupérées.

3.   APPRÉCIATION DES QUESTIONS HORIZONTALES

(34)

La présente décision porte sur seize mesures. Avant de les examiner individuellement, la Commission doit clarifier certaines questions fondamentales ayant trait à l’appréciation de plusieurs des mesures concernées.

3.1.   Question horizontale 1: solvabilité et accès au marché des capitaux entre 1997 et 2002

(35)

Dans le but d’apprécier la majorité des mesures faisant l’objet de la présente décision, il est nécessaire de déterminer quelle était la situation économique et financière de HSY entre 1997 et 2002 et dans quelle mesure il était possible de s’attendre raisonnablement à ce que l’entreprise redevienne viable à long terme. En outre, il convient d’établir si, dans ces conditions, un investisseur de l’économie de marché aurait accepté d’accorder à HSY des prêts et des garanties similaires à ceux qui ont été accordés par l’État et par l’ETVA qui appartenait à ce dernier. L’ETVA est le seul organisme à avoir accordé un financement à HSY durant la période considérée.

(36)

La Commission commencera par analyser la situation en 1997 avant de procéder à l’analyse des évolutions jusqu’en 2002.

3.1.1.   La situation en 1997

(37)

Afin de procéder à cette analyse, il convient de vérifier si la Commission a déjà exprimé son avis sur la question dans des décisions antérieures. Premièrement, la Commission rappelle que, dans les décisions N 401/97 et C 10/94, qui ont été adoptées par la Commission le 15 juillet 1997, celle-ci n’avait pas contesté la validité du plan d’entreprise que la Grèce avait soumis. Par conséquent, la Commission avait tacitement admis que la mise en œuvre du plan en question était en mesure de restaurer la viabilité de HSY. Deuxièmement, la partie descriptive de la décision N 401/97 fait apparaître que le chantier naval financerait une partie du plan de restructuration au moyen de prêts bancaires d’un montant de 4,67 milliards GRD qu’il contracterait selon les conditions du marché et sans garanties de l’État. Ne contestant pas la faisabilité de ce financement, la Commission a reconnu que l’entreprise était en mesure d’avoir accès au marché des prêts, du moins pour le montant concerné. En effet, si la Commission était d’avis que les chantiers navals n’étaient pas en mesure de contracter de prêts pour un montant d’au moins 4,67 milliards GRD, elle aurait dû déclarer que le plan de restructuration n’était pas réalisable et ne pas autoriser les montants élevés d’aide à la restructuration (y compris les aides à l’investissement). Par conséquent, la Commission ne peut pas contester ces deux appréciations antérieures à la présente décision.

(38)

Cependant, sans les contester, la Commission rappelle combien la situation du chantier naval était douteuse durant la période 1996-1997.

(39)

Premièrement, en ce qui concerne l’infrastructure matérielle, la décision N 401/97 cite que l’équipement du chantier naval était ancien et dépassé et que le plan d’investissement était le premier depuis la construction du chantier (24). La décision C 10/94 cite également que la modernisation de ces infrastructures était nécessaire afin de rétablir la compétitivité et la viabilité de l’entreprise. De ce fait, il est possible de déduire que le retour à la viabilité dépendait de la mise en œuvre rapide du plan d’investissement.

(40)

Deuxièmement, en ce qui concerne les activités commerciales de HSY et le volume des commandes, les autorités grecques admettent que «durant la période à laquelle le plan d’investissement a été soumis, la société n’avait pas signé de contrats précis portant sur des constructions, l’activité du chantier naval était caractérisée par une incertitude marquée quant à son avenir, elle était dépourvue de stratégie d’entreprise claire et manquait d’investissements. La seule activité sérieuse qu’elle menait était l’achèvement des frégates MEKO pour le compte de la marine militaire. (25)» Étant donné qu’il n’y avait aucune commande de construction de navires en cours et que le chantier avait besoin d’un taux suffisant d’activité de construction pour être viable dans les années à venir, la Commission considère que le retour à la viabilité dépendait de la conclusion rapide de contrats rentables de constructions militaires et civiles.

(41)

Troisièmement, en ce qui concerne la situation économique de HSY, le tableau 1 présente les données comptables fondamentales. En ce qui concerne la solvabilité de la société en 1997, il est clair que la société disposait de capitaux propres élevés (26). Toutefois, cette situation positive était exclusivement due aux annulations massives de dettes consenties par l’État en 1996. En effet, l’État a annulé des dettes d’un montant de 54,52 milliards GRD (160 millions EUR) portant sur des activités civiles – radiation qui a été autorisée par la décision C10/94 – et des dettes d’un montant de 46,35 milliards GRD (136 millions EUR), concernant des activités militaires. Le bilan apparemment sain au 31 décembre 1996 était quelque peu «artificiel» et, plus particulièrement, ne constituait aucunement une preuve que le chantier naval avait récupéré sa compétitivité et que les causes des sérieuses difficultés rencontrées au cours des vingt dernières années avaient été résolues. Si le plan de restructuration n’avait pas été appliqué dans son intégralité, le chantier naval aurait, selon toute probabilité, accusé des pertes qui auraient rapidement épuisé les ressources propres (les capitaux propres) en question. Il convient de tenir compte du fait que HSY avait été mise en liquidation deux fois au cours des douze années antérieures. En conclusion, les capitaux propres positifs ne suffiraient pas à convaincre une banque de prêter à HSY des capitaux au taux régulier, c’est-à-dire à celui auquel elle prêterait des capitaux à des entreprises saines.

Tableau 1

Données chiffrées concernant le chiffre d’affaires, les bénéfices et les capitaux propres de HSY durant la période 1997-2005

(en millions EUR)

 

1997

1998

1999

2000

2001

2002

2003 (27)

2004

2005

Capital social

86

91

92

95

65

106

106

121

121

Capitaux propres

82

88

54

17

–4

–78

–83

– 111

– 182

Chiffre d’affaires

74

83

30

59

55

89

112

130

198

Bénéfices

7

1

–36

–42

–21

– 115

–1

–45

–71

(42)

En conclusion, la Commission considère que, en 1997, le chantier naval posait toujours problème et n’était toujours pas compétitif. Cependant, il était possible d’en rétablir la viabilité si le plan d’investissement était mis en œuvre dans son intégralité et en temps utile et si le chantier naval arrivait à conclure rapidement des contrats de construction navale rentables. Étant donné que le rétablissement de la viabilité dépendait de ces deux développements incertains, l’octroi de prêts à HSY, en 1997 et lors des années suivantes, présentait un «risque particulier.» Une banque privée accepterait d’octroyer des prêts ou des garanties à HSY, mais à un prix qui reflèterait le risque important. Dans une situation qui présente un «risque particulier», la communication de la Commission concernant la méthode de fixation des taux d’intérêt de référence et d’actualisation (28) indique que le point de référence afin de déterminer l’existence et le montant d’une aide d’État est le taux d’intérêt de référence pour la Grèce (à savoir, ATHIBOR plus 300 points de base, jusqu’au 31 décembre 2000, et le taux d’intérêt interbancaire à 5 ans en EUR plus 75 points de base, à partir du 1er janvier 2001) majoré d’au moins 400 points de base (à savoir, ATHIBOR plus, au moins, 700 points de base jusqu’au 31 décembre 2000 et le taux d’intérêt interbancaire à 5 ans, en EUR, plus au moins 475 points de base, à partir du 1er janvier 2001). En ce qui concerne les garanties sur prêts, la Commission appréciera l’existence d’une aide sur la base de la méthode, c’est-à-dire en comparant le coût total du prêt garanti (à savoir le taux d’intérêt qui a été appliqué à HSY par la banque, majoré de la commission de garantie versée par HSY au garant) au coût qu’assumerait HSY si elle avait contracté un prêt aux conditions du marché (c’est-à-dire, taux de référence pour la Grèce, plus au moins 400 points de base).

3.1.2.   L’évolution depuis 1997

(43)

Comme il est précisé ci-dessous, la Commission ne peut pas exclure que, jusqu’au 30 juin 1999, HSY était éventuellement encore en mesure de contracter des prêts sur le marché au taux d’intérêt déterminé au chapitre précédent (29).

(44)

ΕΝΑΕ a enregistré quelques bénéfices nets limités, en 1997 et en 1998 (30). Cependant, durant ces deux années, elle n’est pas parvenue à conclure les contrats de construction navale (31) - militaire ou civile - nécessaires pour assurer un taux d’activité suffisant durant les années suivantes et pour éviter les pertes. Le premier contrat de construction navale que le chantier est parvenu à conclure portait sur la construction de deux ferry-boats pour Strintzis Lines, signé début 1999 seulement (32). En outre, il était dès le départ connu que le prix de vente était très bas pour couvrir le coût et que, par conséquent, le contrat concerné se conclurait par des pertes (33). En juillet 1999, la marine militaire grecque a chargé HSY et HDW de la construction de trois sous-marins. Le programme de construction des trois sous-marins portait sur presque dix ans et le contrat total s’élevait à environ 350 milliards GRD (1 milliard EUR), dont les trois quarts, approximativement, revenaient à HDW qui devait fournir les moteurs, les pièces de pression et des systèmes électroniques sensibles. En outre, le premier sous-marin devait être construit au chantier naval de HDW, à Kiel (34). Par conséquent, ce contrat ne serait pas source d’activités ni de recettes importantes pour HSY, au cours des premières années (35).

(45)

Compte tenu du fait qu’il n’avait pas été possible de réunir un nombre important et rentable de commandes en 1997, en 1998 et au cours des premiers mois de 1999, après analyse de la situation du chantier naval, l’administration ainsi que n’importe quel investisseur se serait rendu compte, au plus tard dans les premiers mois de 1999, que le chantier naval ne présenterait pas un taux d’activité suffisant en 1999 et en 2000 pour couvrir son coût et que ces années-là l’entreprise enregistrerait des pertes significatives qui réduiraient ses capitaux propres à un montant très limité (36). Dans ces conditions, on ne pouvait plus s’attendre à ce que la viabilité de l’entreprise soit restaurée (37). À titre auxiliaire, la Commission souligne que le premier rapport dressé par les autorités grecques concernant la mise en œuvre du plan d’investissement indiquait que, au 30 juin 1999, seule une partie limitée du plan était achevée. Par conséquent, outre les échecs commerciaux, la modernisation des installations était, elle aussi, en retard (38). Enfin, la Commission signale que les difficultés économiques prévues ont résulté en un conflit entre l’administration indépendante du chantier naval (équipe de cadres de Brown & Root, nommée en septembre 1996) et les salariés/actionnaires. En effet, l’administration insistait sur le fait qu’il était nécessaire de réduire ultérieurement la main-d’œuvre, étant donné les faibles taux d’activité. Les dirigeants des organisations syndicales se sont opposés à ce type de réforme et ont obtenu l’éloignement de l’équipe qui avait entrepris d’administrer l’entreprise (39). Cet évènement, qui a créé un vide administratif et augmenté la difficulté de mise en œuvre de réformes suffisantes du chantier naval, constituait un élément supplémentaire qui aurait découragé tout investisseur se trouvant dans des conditions d’économie de marché de prêter des capitaux à HSY.

(46)

De ces éléments, la Commission déduit que dès le 30 juin 1999 l’on ne pouvait raisonnablement plus s’attendre à ce que la viabilité de l’entreprise soit restaurée. Par conséquent, la Commission estime que, depuis cette date, aucune banque n’aurait accepté de prêter des capitaux au chantier naval, même à un taux d’intérêt élevé, et qu’aucune banque n’aurait encore accepté d’offrir des garanties, même contre une commission élevée. Étant donné que HSY n’aurait pas obtenu de prêts ou de garanties sur le marché, les prêts ou les garanties octroyés après le 30 juin 1999 constituent, automatiquement, une aide. Si ces mesures sont jugées incompatibles et continuent d’exister, d’une part, les garanties doivent être annulées et, d’autre part, les prêts doivent être immédiatement remboursés. Toutefois, le remboursement des prêts octroyés après le 30 juin 1999 — sur la base du calendrier régulier prévu au contrat de prêt ainsi que sur la base de la présente décision — ne suffit pas à la restitutio in integrum, étant donné que jusqu’à la date de remboursement, HSY disposait d’un financement que, dans des conditions normales, elle n’aurait pas obtenu auprès du marché. Pour qu’il y ait restitutio in integrum, il conviendra de récupérer également l’avantage en question, dont le volume ne peut être calculé que par approximation sur la base du taux d’intérêt en vigueur pour des prêts à risque très élevé. De ce fait, pour la période s’écoulant entre le versement du prêt à HSY et son remboursement par elle, il convient que la Commission ordonne le recouvrement du montant qui correspond à la différence entre le taux effectivement appliqué au prêt octroyé à HSY et le taux d’intérêt qui correspondrait, théoriquement, à un prêt à risque très élevé. Afin de déterminer ce deuxième taux, la Commission signale que la communication de la Commission concernant la méthode de fixation des taux d’intérêt de référence et d’actualisation indique que le taux de référence peut être relevé de 400 points de base et même davantage «au cas où aucune banque privée n’accepterait d’accorder le crédit considéré», ce qui est le cas, en l’occurrence. Dans différentes décisions, la Commission a estimé qu’une majoration de 600 points de base au-delà du taux d’intérêt de référence constituait la majoration minimale adéquate correspondant à une situation de risque particulier (40). La Commission estime que cela constitue la majoration minimale pour des prêts, en l’occurrence. En ce qui concerne les garanties d’État qui ont été octroyées après le 30 juin 1999, la Commission appliquera la même approche: pour la période depuis le versement du prêt garanti jusqu’à l’annulation de la garantie — que ce soit sur la base du calendrier prévu au contrat de garantie ou sur la base de la présente décision — la Commission ordonnera le recouvrement du montant qui correspond à la différence entre le coût du prêt garanti (taux d’intérêt appliqué majoré de la commission de garantie versée) et le taux d’intérêt de référence pour la Grèce majoré de 600 points de base.

(47)

À l’appui de l’argument selon lequel les prêts et les garanties de l’État et d’ETVA auraient pu avoir été accordés aux mêmes conditions par une banque privée, HSY a soumis le premier rapport Deloitte (41). Au chapitre 5 du rapport concerné, Deloitte analyse la solvabilité de HSY en 1999 et lors des années suivantes. Elle conclut que l’entreprise aurait pu, en alternative, avoir emprunté ou avoir obtenu des lettres de crédit auprès d’un autre établissement de crédit indépendant (c’est-à-dire, n’entretenant aucun autre rapport au-delà de la collaboration commerciale) durant la période considérée (42). La Commission note que le rapport n’explique pas comment cette conclusion est compatible avec l’échec des tentatives de HSY de réunir des capitaux auprès d’autres établissements de crédit (43). En outre, la Commission signale que l’analyse inclut plusieurs erreurs (44) qui influencent significativement la conclusion.

3.1.3.   Analyse des relations au sein du groupe

(48)

Tous les prêts et les garanties couverts par la procédure en cours ont été octroyés par l’ETVA ou par l’État. Les autorités grecques prétendent que l’ETVA et l’État grec (par l’intermédiaire de l’ETVA) étant actionnaires de HSY, les prêts et les garanties peuvent être considérés comme des transactions internes au groupe. Dans ce contexte, la Grèce met en avant deux allégations:

Premièrement, il est naturel pour une société mère d’octroyer à sa filiale des prêts à des conditions favorables. En effet, l’avantage accordé à la filiale augmente la valeur des actions détenues par la société mère. Par conséquent, et même si la Commission considère que l’ETVA et l’État ont octroyé des prêts et des garanties à un prix inférieur à celui du marché, cette situation serait acceptable pour un investisseur agissant dans des conditions d’économie de marché et se trouvant dans une position similaire. Par conséquent, les prêts et les garanties en question ne constitueraient pas une aide,

Deuxièmement, il est naturel pour une société mère d’octroyer des prêts à sa filiale qui est dans une situation difficile. En effet, ce type de prêt vise à préserver la valeur des actions détenues par la société mère. Par conséquent, et même si la Commission considère qu’aucune banque privée n’aurait octroyé de prêts à HSY pour une période donnée en raison de la très mauvaise situation du chantier naval, il convient toutefois de considérer que les prêts et les garanties octroyés par l’ETVA et l’État sont admissibles pour un investisseur se trouvant dans des conditions d’économie de marché et dans une position similaire. Par conséquent, les prêts et les garanties en question ne constitueraient pas une aide.

(49)

La Commission estime que les conclusions de la Grèce ne sont pas correctes.

(50)

En premier lieu, la Commission signale les deux points suivants: Premièrement, aucun investisseur se trouvant dans des conditions d’économie de marché ne se serait placé dans la situation dans laquelle l’ETVA s’est trouvée. En effet, il est par exemple rappelé que quand l’ETVA a racheté HSY, en 1985, il s’agissait d’une banque pour le développement qui agissait sur ordre du gouvernement afin d’éviter la fermeture d’une société revêtant une importance capitale pour l’économie grecque (45). Afin de maintenir HSY en vie, l’ETVA a avancé en 1986 un apport en capital considéré par la Commission comme constituant une aide (46). En 1995, l’ETVA détenait «la majorité de 51 %» de HSY, alléguant que «cela se justifie par des raisons de défense», conformément à l’article 10 de la directive 90/684/CEE. Deuxièmement, la Commission note que, si on tient compte de toutes les mesures prises par l’État en faveur de HSY (y compris les mesures prises par l’ETVA, étant donné que, comme il sera démontré ultérieurement dans la présente décision, elles sont imputables à l’État) et notamment les importantes aides octroyées par l’État à HSY durant la période allant jusqu’en 2002, il devient clair que, durant ladite période, l’État n’a pas agi en tant qu’investisseur se trouvant dans des conditions d’économie de marché. Il accordait continuellement le soutien économique important qui était nécessaire pour maintenir HSY en vie, attitude particulièrement coûteuse. Dès lors, du fait que l’État (par le biais de l’ETVA) se trouvait être actionnaire de HSY rien que parce qu’il a agi en tant qu’autorité publique disposée à préserver les activités de HSY à tout prix, et étant donné qu’il n’a jamais agi en investisseur se trouvant dans des conditions d’économie de marché en quête de bénéfice par le biais de la possession d’actions de HSY, l’allégation selon laquelle l’ETVA et l’État ont agi de façon acceptable pour un investisseur se trouvant dans des conditions d’économie de marché, parce que les taux d’intérêt (ou les commissions de garantie) très bas appliqués pour le financement (prêts et garanties) octroyé à HSY ont été compensés par l’augmentation de la valeur des actions de HSY, est dépourvue de crédibilité. Étant donné que l’État (y compris l’ETVA) n’a jamais agi en tant qu’investisseur recherchant le profit mais, au contraire, qu’il a accepté de maintenir HSY en vie à un coût élevé, la Grèce et HSY devaient, à tout le moins, fonder leur allégation sur une analyse détaillée démontrant que, en tant qu’actionnaires de HSY, l’État et l’ETVA pouvaient véritablement attendre une plus-value en capital (c’est-à-dire, une augmentation de la valeur des actions de la société) supérieure aux «recettes sacrifiées» (c’est-à-dire, le taux d’intérêt insuffisant ou la commission de garantie insuffisante). Étant donné qu’aucune analyse de ce type n’a été soumise et que HSY et la Grèce ont mis en avant cette allégation douteuse et hypothétique sans aucune documentation, la Commission rejette sans analyse ultérieure l’allégation selon laquelle l’État (y compris l’ETVA) a agi en tant qu’investisseur se trouvant dans des conditions d’économie de marché parce que le financement accordé par ces derniers à des conditions favorables a augmenté la valeur des actions de HSY pouvant compenser les «recettes sacrifiées.»

(51)

Deuxièmement, même si le considérant ci-dessus était rejeté et si on réalisait l’analyse des aspects portant sur les relations au sein du groupe (c’est-à-dire, l’augmentation potentielle de la valeur des actions de HSY), il existe de nombreuses preuves démontrant que les actions entreprises par l’ETVA n’auraient pas été acceptables pour un investisseur se trouvant dans des conditions d’économie de marché et détenant 51 % des actions de HSY.

(52)

Fin 1995, 49 % des actions de HSY ont été cédées aux salariés de l’entreprise. Le prix que les salariés devaient payer pour acquérir ces actions a été décidé à ce moment. Dès lors, au cours des années suivantes où l’ETVA et l’État accordaient un financement à HSY à un prix inférieur à celui qu’aurait fixé une banque privée (non liée), 49 % de l’augmentation de la valeur de HSY résultant de l’économie réalisée (du fait des taux d’intérêt inférieurs) bénéficiaient aux autres actionnaires de HSY. Seuls 51 % de l’avantage (taux d’intérêt et commissions de garantie réduits imputés à la société) que l’ETVA et l’État accordaient à HSY leur revenaient sous forme d’augmentation de la valeur de HSY. Aucun investisseur se trouvant dans des conditions d’économie de marché n’aurait accepté de faire pareil cadeau aux autres actionnaires de HSY. Pour ne pas perdre d’argent au bénéfice de ces autres actionnaires, un investisseur se trouvant dans des conditions d’économie de marché aurait appliqué un taux d’intérêt correspondant à celui appliqué par les banques privées (non liées). De ce fait, la première allégation des autorités grecques n’est pas fondée.

(53)

Le même considérant est valable en ce qui concerne la période postérieure au 30 juin 1999, époque à laquelle aucune banque privée n’aurait accordé de financement à HSY du fait du risque très élevé de faillite de la société. En particulier, un investisseur rationnel ne détenant que 51 % d’une société aurait à tout le moins demandé aux autres actionnaires d’accorder un financement proportionnel à leur part d’actions dans HSY. Si les autres actionnaires ne disposaient pas des moyens de ce financement, un investisseur rationnel aurait à tout le moins négocié l’octroi d’un financement à HSY contre une augmentation de sa participation dans la société. L’octroi de capitaux de financement significatifs à HSY sans cofinancement ou sans contrepartie des autres actionnaires équivalait à mettre son argent en grand danger afin de sauver la valeur des actions de quelqu’un d’autre. Aucun investisseur se trouvant dans des conditions d’économie de marché n’aurait accepté de faire pareil cadeau aux autres actionnaires de HSY (47). Dès lors, il convient de rejeter la seconde allégation de la Grèce.

3.2.   Question horizontale 2: possibilité d’imputer le comportement d’ETVA à l’État

(54)

Certaines des seize aides qui sont analysées dans la présente décision n’ont pas été octroyées directement par l’État, mais par l’ETVA qui appartient à l’État. Étant donné que, d’une part, la Grèce, HSY et TKMS/ENAEX rejettent la possibilité d’imputer les aides concernées à l’État et que, d’autre part, Elefsis Shipyards et la Banque du Pirée la confirment, l’analyse de ce point s’impose.

(55)

Les aides en cause ont été accordées par l’ETVA entre 1996 et 2002. Conformément à la jurisprudence, les aides en cause peuvent être qualifiées d’aides d’État en vertu de l’article 87, paragraphe 1, du traité, uniquement si l’État était en mesure de contrôler l’ETVA et si les autorités publiques «étaient impliquées, d’une manière ou d’une autre, dans l’adoption de ces mesures.» (48)

(56)

L’ETVA, dont le titre complet est Banque hellénique de développement industriel SA, a été établie en 1964, à la suite de la fusion de trois organismes (Organisme du développement industriel, Organisme pour le financement du développement économique et Organisme du crédit touristique). Elle a été transformée en société anonyme en vertu de la loi 1369/1973. Dès lors, depuis 1973, elle opère en tant que banque appartenant à l’État. Selon les arguments avancés par la Grèce (49), «L’ETVA, en tant que banque pour le développement, avait pour principal objet, selon ses statuts, la promotion du développement du pays par le biais du financement d’activités de production de l’économie grecque (tourisme, production industrielle, etc.)» L’ETVA était la seule banque de développement de la Grèce. De ce fait, elle avait entrepris de jouer un rôle décisif dans le développement économique et régional du pays, en finançant des entreprises, en développant l’infrastructure régionale du pays, en accordant des capitaux-investissements et en participant à des entreprises d’importance stratégique pour l’économie grecque. En 1995, à la suite de des difficultés financières dues aux activités précitées, la recapitalisation, la restructuration et la modernisation de la banque sont devenues des priorités majeures pour le gouvernement grec. Tel était l’objectif d’un plan quinquennal établi dans le contexte de la loi 2359/95. Outre l’apport d’un capital s’élevant à 427 milliards GRD par le gouvernement, l’objectif de la restructuration était de mettre en œuvre une nouvelle orientation stratégique, de modifier la structure organisationnelle et de mettre en place des processus d’entreprise modernes répondant aux conditions actuelles de la concurrence. Dès lors, «au-delà de son activité d’aide au développement, l’ETVA a également déployé, notamment depuis 1997, des services de banque commerciale» (50).

(57)

En 1999, l’État, qui détenait 100 % des actions d’ETVA, a décidé d’introduire la banque à la Bourse d’Athènes, offrant 24 % de son capital social au public. L’État a décidé de poursuivre la privatisation de la banque et de réduire sa participation à un taux inférieur à 50 %. Un appel d’offres a été lancé et la Banque du Pirée a été retenue. Le 20 mars 2002, des actions représentant 57,7 % d’ETVA ont été transférées à la Banque du Pirée (51).

(58)

En ce qui concerne la possibilité pour l’État de contrôler l’ETVA, la Commission signale que, jusque fin 1999, l’ETVA appartenait dans son intégralité à l’État. Celui-ci a conservé la participation majoritaire jusqu’au transfert de la majorité des actions d’ETVA à la Banque du Pirée, le 20 mars 2002. De ce fait, l’État était en mesure de contrôler l’ETVA, à tout le moins, jusqu’au 20 mars 2002. Cela montre également que des fonds publics étaient inclus dans les mesures adoptées par l’ETVA.

(59)

En ce qui concerne l’implication de l’État dans l’adoption des différentes mesures d’aide, la Commission note les éléments suivants:

Premièrement, la Commission note que les trois décisions les plus importantes portant sur la participation d’ETVA à HSY n’ont pas été prises dans des conditions d’indépendance par l’administration d’ETVA: ces décisions ont été prises par le gouvernement et mises en œuvre par l’ETVA. En effet, lorsque l’ETVA a acquis HSY qui avait fait faillite, en 1985, il s’agissait d’une décision prise par le gouvernement (52). L’ETVA a simplement mis en œuvre cette décision gouvernementale et a avancé un apport précipité de capital important à HSY, que la Commission a considéré comme étant une aide d’État (53). Cela montre que la relation entre l’ETVA et HSY était, dès le départ, un rapport de soutien public d’une société qui revêtait de l’importance pour le gouvernement grec, des points de vue de l’emploi et des activités. La seconde décision majeure était celle de la vente de 49 % du capital social de HSY, par l’ETVA, aux salariés de HSY, pour laquelle la loi 2367/1995 a été adoptée (54). En outre, la loi en cause impose à HSY (55) d’importantes mesures de restructuration (et accorde des aides très conséquentes au chantier naval). Le troisième évènement majeur était la privatisation de HSY en 2001-2002 (c’est-à-dire que l’ETVA a été obligée de vendre le reste de sa participation dans HSY (51 %)]. Cette privatisation a été réalisée en vertu de l’arrêté no 14/3-1-2001 de la Commission interministérielle compétente pour les désétatisations et dans le cadre de la loi grecque 2000/91 relative aux désétatisations. Ce fait apparaît dans les documents du concours qu’Alpha Finance a transmis aux candidats investisseurs intéressés, Alpha Finance étant la banque qui avait entrepris d’organiser la vente de HSY au nom de l’État et des vendeurs (l’ETVA et les salariés). Les documents du concours du 2 avril 2001 indiquent également que l’État sélectionnera en commun avec les vendeurs le candidat dominant. Dès lors, les trois décisions critiques concernant la participation de l’ETVA dans HSY ont été prises par l’État,

Outre son implication directe dans ces trois cas, l’État a accordé des aides très importantes durant la période 1995-2002. Plus précisément, il a annulé des dettes d’un montant de 54,52 milliards GRD (160 millions EUR) qui concernaient des activités civiles — annulation qui a été autorisée par la décision C 10/94 — ainsi que des dettes pour un montant de 46,35 milliards GRD (136 millions EUR) qui concernaient des activités militaires. Comme indiqué dans la décision N 401/97, l’État avait l’intention d’accorder également des aides à l’investissement s’élevant à 7,8 milliards GRD (22,9 millions EUR). Au cours de la procédure de soumission d’offres, en 2001, la loi 2941/2001 a été publiée. Cette loi prévoyait un appui financier important afin de faciliter la privatisation de HSY (voir considérant 33 de la présente décision). Comme indiqué par la Commission dans la décision N 513/01, l’État s’est, par exemple, engagé à verser 118 millions EUR comme incitation au départ volontaire de salariés de l’entreprise. En accordant de façon répétée des aides importantes, le gouvernement a clairement fait savoir qu’il considérait la survie de HSY comme une question majeure, du point de vue politique (56),

Enfin, la Commission signale que, durant cette période, l’État a attribué à HSY des marchés défensifs stratégiques, tels que la construction des sous-marins. De ce fait, l’État avait un intérêt immédiat à suivre les activités de HSY et à assurer la poursuite des activités du chantier naval.

(60)

En déterminant le taux de participation d’ETVA dans HSY, en accordant continuellement des aides importantes à HSY et en lui attribuant des marchés militaires de prime importance pour la sécurité de la Grèce, le gouvernement grec a très clairement indiqué qu’il accordait une importance majeure aux activités de HSY et qu’il suivait de très près la situation du chantier naval. Dans ce contexte, la Commission estime que jusqu’à la privatisation d’ETVA en mars 2002, il est impossible de ne pas imputer à l’État le comportement d’ETVA. En effet, dans ces conditions, il était impossible pour l’ETVA de pratiquer à l’égard de HSY une politique de crédit ne cadrant pas avec la politique d’appui constant adoptée par le gouvernement. En particulier, il aurait été impossible pour l’ETVA de prendre une décision qui aurait créé des problèmes financiers à HSY. Par exemple, l’ETVA n’aurait pas pu imposer de taux d’intérêt élevé (c’est-à-dire, présentant une différence significative supérieure au taux d’intérêt interbancaire) aux prêts qu’elle accordait à HSY, car cela aurait aggravé la situation financière de HSY, ce qui aurait été politiquement inadmissible pour le gouvernement. De même, l’ETVA ne pouvait pas refuser d’octroyer les prêts demandés par HSY pour financer ses activités (57). En d’autres termes, l’ETVA ne disposait pas d’autre choix que celui de suivre la politique d’appui important et continu de HSY que l’État avait adoptée. Par conséquent, la Commission estime que toutes les mesures adoptées par l’ETVA à l’égard de HSY (prêts, garanties, apports de capitaux, etc.) étaient automatiquement imputables à l’État et qu’il n’est pas nécessaire d’apporter des preuves supplémentaires quant à l’implication de l’État au moment de l’adoption par l’ETVA de chacune des mesures considérées. Dès lors, la Commission estime que les différentes mesures adoptées par l’ETVA sont imputables à l’État.

(61)

À titre auxiliaire, la Commission invoque également les éléments suivants qui confirment la possibilité d’imputer à l’État le comportement d’ETVA.

(62)

Premièrement, en 1995, l’ETVA n’a vendu que 49 % — et, de ce fait, pas 100 % — des actions de HSY aux salariés de la société. «Afin de conserver 51 % des actions du chantier naval, comme autorisé par l’article 10 de la directive, la Grèce a invoqué ses intérêts militaires dans la construction navale.» L’article 10, paragraphe 3, de la directive 90/684/CEE du Conseil prévoit que «en dépit de l’obligation, visée au paragraphe 2, d’aliéner les chantiers en les vendant, le gouvernement grec est autorisé à maintenir une participation majoritaire de 51 % dans l’un des chantiers, si cette décision est justifiée dans l’intérêt de la défense. (58)» Cela montre que la participation d’ETVA à concurrence de 51 % dans HSY avait pour but de permettre à l’État de contrôler HSY afin de protéger les intérêts de la défense de la Grèce. Il est évident que, dans ce contexte, l’administration d’ETVA ne pouvait pas développer avec HSY de rapport fondé sur une base commerciale. Aucune décision concernant l’octroi d’un financement à HSY, et les conditions de celui-ci, ne pouvaient s’opposer aux intérêts de la défense de la Grèce. Plus précisément, la Commission ne comprend pas comment l’administration d’ETVA aurait pu refuser de financer HSY ou comment elle aurait pu imposer un taux d’intérêt élevé à chacun des financements accordés. En outre, si le but de la Grèce était de protéger ses intérêts de défense, il est possible de considérer que le gouvernement exerçait en pratique une surveillance directe sur toutes les décisions significatives de l’administration de HSY et sur toutes les décisions d’ETVA qui concernaient le financement de HSY.

(63)

Deuxièmement, du fait que la mission d’ETVA, en tant que «banque de développement», avait été déterminée par l’État, il est possible de conclure que toutes les activités d’ETVA au titre de cette mission étaient imputables à l’État. De même, il résulte de la jurisprudence que, pour analyser l’imputation des mesures prises par une entreprise, «la nature de ses activités et l’exercice de celles-ci sur le marché dans des conditions normales de concurrence avec des opérateurs privés» (59) sont susceptibles d’être cruciaux. Dans ce contexte, les autorités grecques admettent que «depuis sa constitution, ETVA n’a pas fonctionné comme une banque commerciale habituelle mais comme un établissement de crédit spécial et elle a surtout exercé ses activités dans le domaine du crédit à long terme, jouant un rôle déterminant dans le développement économique et régional du pays.» (60). Dans ce contexte, la Commission rappelle qu’ETVA a acquis HSY en 1985. Dès lors, l’implication d’ETVA dans HSY s’est située dans le cadre de sa mission de «banque de développement» et non dans celui de ses activités commerciales qu’elle n’a pas commencé à exercer avant 1997. Étant donné que, jusqu’alors, l’ETVA était tenue de soutenir HSY dans le cadre de sa mission de «banque de développement», elle ne pouvait soudain, à partir de 1997, arrêter d’octroyer les prêts et les garanties que HSY demandait et laisser le chantier naval faire faillite. Dans ce contexte, la Commission rappelle que, durant la seconde moitié de 1990, l’ETVA a reçu l’autorisation d’exercer des activités commerciales parallèlement à ses activités liées au développement et non en remplacement desdites activités qu’elle devait poursuivre.

(64)

Troisièmement, conformément à la jurisprudence, «le statut juridique de l’entreprise, celle-ci relevant du droit public ou du droit commun des sociétés» (61) est susceptible d’être crucial afin de démontrer l’imputation. De ce point de vue, du fait que le principal objet d’ETVA, en tant que banque de développement appartenant à l’État, était de promouvoir le développement du pays en finançant l’économie grecque, elle ne relevait pas des dispositions des directives bancaires (62). Ce n’est qu’au moment où les actions d’ETVA ont été introduites à la Bourse d’Athènes, le 12 janvier 2000, qu’ETVA a relevé des règles normales de surveillance qui sont en vigueur pour les banques commerciales.

(65)

Quatrièmement, la Commission souligne que, durant la période 1996-2002, l’État suivait de très près les activités d’ETVA. En effet, l’État a adopté la loi 2359/95 afin de procéder à la restructuration d’ETVA et a effectué des apports de capitaux d’une valeur de plusieurs centaines de milliards GRD, dans ce contexte. En 1999, il a pris la décision d’introduire une partie du capital à la Bourse d’Athènes. Un an plus tard, il a décidé de privatiser la majeure partie du capital d’ETVA. Cette privatisation était achevée en 2002. Cela montre que, durant la période 1996-2002, l’État s’intéressait de très près aux activités d’ETVA. Les prêts et les garanties qu’elle octroyait à HSY étaient tellement élevés (63) qu’il n’aurait pas été possible que les décisions de crédit relatives soient prises par l’administration d’ETVA sans le consentement ou l’ordre direct émanant de son seul actionnaire.

(66)

Aux paragraphes précédents, la Commission a démontré que, durant la période qui a précédé la vente d’ETVA à la Banque du Pirée, en mars 2002, des fonds publics étaient impliqués dans toutes les mesures mises en œuvre par ETVA et que toutes les mesures que celle-ci a appliquées à l’égard de HSY pouvaient être imputées à l’État. De ce fait, lors de l’appréciation des mesures individuelles mises en œuvre par ETVA, la Commission ne procédera plus à la démonstration des deux points en cause.

(67)

La Commission abordera à nouveau ces deux points uniquement dans le contexte de l’appréciation de la mesure E18c, car certaines parties prétendent que cette mesure a été accordée par ETVA en mai 2002, c’est-à-dire, après l’acquisition d’ETVA par la Banque du Pirée.

3.3.   Question horizontale 3: les mesures d’aide qui financent en partie les activités militaires de HSY

(68)

Dans sa réponse concernant la décision d’extension de la procédure, la Grèce soutient que parmi les mesures ayant fait l’objet d’un examen de la part de la Commission, plusieurs visaient à soutenir les activités militaires du chantier naval. De ce fait, la Grèce fait valoir qu’elles relèvent des dispositions de l’article 296 du traité et qu’elles ne peuvent être appréciées — et, encore moins, recouvrées — sur la base des règles relatives aux aides d’État.

(69)

Pour ce motif, il convient que la Commission apprécie si certaines mesures relèvent en tout ou en partie du champ d’application de l’article 296 du traité.

(70)

Aucune des parties à la présente procédure ne conteste le fait que HSY a des activités tant civiles que militaires. Au cours des quinze dernières années, la principale activité civile du chantier naval était la réparation de navires marchands. HSY a également construit du matériel ferroviaire roulant ainsi que des coques de navires marchands. Les activités militaires de HSY consistaient en la construction et la réparation de navires et de sous-marins de la marine militaire grecque.

(71)

La Commission rappelle que la décision d’extension de la procédure a déjà repéré quelles étaient les mesures visant exclusivement à soutenir les activités militaires du chantier naval. La décision d’extension de la procédure conclut que les mesures en cause relèvent en totalité des dispositions de l’article 296 du traité et ne sont pas soumises aux règles relatives aux aides d’État. La décision d’extension de la procédure n’a pas été attaquée au Tribunal.

(72)

Certaines des aides d’État couvertes par la présente décision ne portent pas sur une activité précise, c’est-à-dire qu’elles n’ont pas été accordées pour financer un plan précis. De ce fait, il convient que la Commission détermine dans quelle mesure les aides d’État en cause ont bénéficié aux activités miliaires et dans quelle mesure elles ont bénéficié aux activités civiles. Ce calcul se complique du fait que HSY ne tenait pas de comptes séparés pour ses activités militaires et civiles. Dans ces conditions, la Commission fondera son examen sur le volume relatif des deux activités. De ce fait, il convient d’estimer le poids relatif de chacune des activités. La Commission signale que toutes les aides d’État (financement, apport en capital, etc.) octroyées à HSY (qui ne portaient pas sur le financement d’activités précises) couvraient des pertes d’années antérieures (c’est-à-dire, des pertes de marchés antérieurs) tout en permettant, en même temps, au chantier naval de financer des activités futures. Afin d’établir dans quelle mesure une aide d’État a bénéficié aux activités civiles ou aux activités militaires, la Commission estime que l’examen ne doit pas se limiter à la répartition entre activités militaires et civiles (c’est-à-dire, au poids relatif de chacune des activités) par année d’octroi de l’aide concernée, mais qu’il convient de calculer la répartition moyenne de ces deux activités sur une période suffisamment longue. Le fait que le poids relatif des deux activités varie fortement d’année en année justifie également l’utilisation d’une moyenne sur plusieurs années. En effet, une année précise peut ne pas être représentative de la répartition moyenne des deux types d’activités, à moyen et à long terme.

(73)

Dans le contexte de la procédure de recouvrement des aides qui, par la décision C 40/02, ont été jugées illégales et non compatibles avec le marché commun, la Grèce a soutenu que les activités civiles correspondent à 25 % des activités de HSY et que les activités militaires correspondent à 75 % des activités de l’entreprise. Afin de fonder cette allégation, la Grèce a transmis des informations concernant les hommes-heures et le chiffre d’affaires (valeur de ventes) pour les deux activités durant la période 1997 - 2005 (64). Dans le contexte de la présente procédure, la Grèce n’a pas contesté ces informations. En outre, la Commission avait déjà accepté la répartition 25 % d’activités civiles/75 % d’activités militaires dans la décision N 513/01 qui n’a pas été attaquée au Tribunal. À la lumière des considérations qui précèdent, la Commission considèrera que les activités civiles correspondaient à 25 % des activités de HSY et que les activités militaires correspondaient aux 75 % restants.

(74)

Pour ce qui est des activités militaires de HSY, la Commission a toujours accepté dans les décisions antérieures que le soutien de celles-ci ne relève pas du champ d’application des règles relatives aux aides d’État (65). La Commission a réitéré cette appréciation aux paragraphes 86 à 90 de la décision d’extension de la procédure. Compte tenu du fait que les mesures faisant l’objet de la présente décision ont été prises en faveur de HSY (c’est-à-dire, de l’ensemble de HSY) durant la même période que celle examinée dans les décisions antérieures en question, il est par la force des choses déduit que la partie des mesures ayant soutenu des activités militaires de HSY relève du champ d’application de l’article 296 du traité et est exclue de l’application des règles relatives aux aides d’État.

(75)

Dans l’appréciation de chacune des mesures isolées, la Commission établira si elle portait exclusivement sur les activités civiles de HSY ou si elle lui a été accordée sans être destinée à une utilisation précise (66):

Si seules les activités civiles étaient soutenues, la Commission estime que l’article 296 du traité n’est pas applicable et l’intégralité de la mesure peut être appréciée au titre de l’article 87 du traité,

Si HSY recevait des aides de manière globale, la Commission estime que, étant donné que 75 % des activités du chantier naval portent sur la production militaire, 75 % de l’aide d’État ont bénéficié à des activités militaires et relèvent des dispositions de l’article 296 du traité. Les 25 % restants de l’aide d’État peuvent être appréciés au titre des règles relatives aux aides d’État.

4.   LES MESURES: DESCRIPTION, MOTIFS D’OUVERTURE DE LA PROCÉDURE, OBSERVATIONS REÇUES, APPRÉCIATION ET CONCLUSION

(76)

En ce qui concerne les observations présentées par la Grèce et les tiers intéressés, la Commission souligne qu’elles couvrent une large gamme d’arguments. Par exemple, dans ses nombreuses observations présentées à la Commission, Elefsis Shipyards a allégué qu’il existait plusieurs raisons pour lesquelles il conviendrait de considérer les mesures comme des aides non compatibles avec le marché commun. De même, la Grèce, HSY et TKMS/ENAEX ont soutenu dans les observations qu’elles ont successivement présentées à la Commission, qu’il existait plusieurs raisons pour lesquelles les mesures pourraient être considérées comme étant compatibles avec le marché commun.

(77)

En vertu de l’article 253 du traité, les décisions de la Commission doivent être justifiées. Cependant, la Commission n’est pas tenue de répondre à chacun des arguments présentés par les parties. Dès lors, la présente décision ne traitera expressément que des questions majeures ayant été abordées par les parties. En particulier, la décision n’examinera pas certaines raisons invoquées par les parties et qui sont manifestement incompatibles avec les circonstances réelles, qui contredisent des arguments présentés par la même partie dans d’autres observations qu’elle a soumises, ou s’il est clair qu’elles peuvent être rejetées sur la base des circonstances réelles et de l’appréciation incluse dans la présente décision.

(78)

Compte tenu du fait que la présente investigation porte sur un nombre élevé de mesures, il convient de leur attribuer un numéro afin de faciliter la lecture et d’éviter la confusion. À la suite de quoi, les quatre mesures sur lesquelles porte la décision d’ouverture de la procédure sont numérotées D1 à D4. Les douze mesures concernées par la décision d’extension de la procédure maintiendront la numérotation qu’elles ont reçue dans la décision concernée, avec l’adjonction d’un «E».

4.1.   Application abusive de l’aide à l’investissement autorisée en 1997 (mesure D1)

4.1.1.   Description de la mesure

(79)

Par la décision N 401/97, la Commission a autorisé une aide à l’investissement d’un montant de 7,8 milliards GRD (22,9 millions EUR), que la Grèce avait notifiée le 20 juin 1997. Dans la décision en question, l’aide a été appréciée au titre de l’article 6 («Aides aux investissements») du chapitre III («Aides à la restructuration») de la directive 90/684/CEE qui stipule que: Les aides aux investissements […] ne peuvent être octroyées […] à moins qu’elles ne soient liées à un plan de restructuration qui n’entraîne aucun accroissement de la capacité de construction navale de ce chantier […]. «De telles aides ne peuvent être octroyées aux chantiers de réparation navale, à moins qu’elles ne soient liées à un plan de restructuration qui aboutit à une réduction de la capacité globale de réparation navale de l’État membre concerné.» La décision N 401/97 indique qu’un plan d’entreprise qui vise à restaurer la compétitivité du chantier naval par le biais de l’augmentation de sa productivité et de sa modernisation est établi. Le premier pilier du plan en question inclut une réorganisation et une réduction significatives de la main-d’œuvre. Il est notamment prévu de réduire le nombre de salariés à 2 000 personnes, d’ici fin 1997, et d’introduire des méthodes de travail plus flexibles. La décision N 401/97 indique que le nombre de salariés a déjà été réduit en grande partie au moment de son adoption, ce qui devait contribuer à l’augmentation de la productivité. Le second pilier du plan de restructuration est un plan d’investissement visant à remplacer l’équipement ancien et dépassé par un équipement de technologie nouvelle. La décision indique que le plan prévoit de rétablir la viabilité du chantier naval à la fin de la mise en œuvre du plan d’entreprise, en 2000. Le coût total du plan d’investissement était estimé à 15,62 milliards GRD (45,9 millions EUR). La partie descriptive de la décision indique que le plan sera financé comme suit: 7,81 milliards GRD (22,9 millions EUR) par une aide d’État, 3,13 milliards GRD (9,2 millions EUR) par une augmentation du capital social, et 4,67 milliards GRD (13,7 millions EUR) par des prêts bancaires. Le capital social devait augmenter suivant les mêmes proportions que la répartition initiale du capital, à savoir, à concurrence de 51 % par l’ETVA et de 49 % par les salariés du chantier naval. La décision prévoit également que les prêts bancaires seront contractés aux conditions normales du marché, sans garantie publique. Dans son appréciation, la Commission note que, selon le plan de restructuration, la capacité de construction navale n’augmente pas tandis que la capacité de réparation diminue. La Commission note également que la part d’aide (50 %) demeure dans les limites autorisées concernant la part des aides régionales à la Grèce. La proportion de l’aide est également justifiée par l’étendue de la restructuration.

4.1.2.   Motifs d’ouverture de la procédure

(80)

L’échange de lettres entre la Grèce et la Commission qui a précédé l’ouverture de la procédure est décrit au chapitre I («Procédure») de la présente décision.

(81)

Dans la décision d’ouverture de la procédure, la Commission a exprimé des doutes quant au fait qu’il pouvait y avoir eu une application abusive de l’aide à l’investissement qui avait été autorisée par la décision N 401/97. Premièrement, la Commission a noté que le plan d’investissement n’a été réalisé qu’en partie et avec des retards significatifs. Les autorités grecques ont plusieurs fois prorogé le délai d’exécution du plan d’investissement après le 31 décembre 1999, sans consulter la Commission à ce propos. Deuxièmement, alors que la décision N 401/97 stipule que le plan d’investissement sera financé par des prêts bancaires contractés aux conditions normales du marché et sans garantie publique, l’entreprise semble avoir obtenu des prêts auprès d’une banque appartenant à l’État, à des taux d’intérêt qui ne correspondaient pas à ceux en vigueur sur le marché. Il semble, en outre, qu’un des prêts en question était couvert par une garantie publique. Troisièmement, les autorités grecques n’ont pas soumis les rapports annuels sur la mise en œuvre du plan, comme l’exige la décision N 401/97. Il semble, en raison de ces trois violations de la décision N 401/97, qu’il y ait eu une application abusive de l’aide à l’investissement.

4.1.3.   Observations des parties intéressées

(82)

Elefsis Shipyards souligne que le séisme qui est invoqué afin de justifier le retard a eu lieu en septembre 1999, c’est-à-dire quatre mois avant l’expiration du délai de mise en œuvre du plan d’investissement, le 31 décembre 1999. À la fin de 1999, HSY n’avait réalisé qu’une petite partie du plan d’investissement. Cela montre que HSY avait déjà accusé une série de retards significatifs dans la mise en œuvre du plan, avant même que le séisme n’ait lieu, et qu’elle n’aurait pas pu avoir achevé en temps utile le plan d’investissement, même si le séisme ne s’était pas produit. De même, la privatisation de HSY, qui est citée afin de justifier un retard, a eu lieu beaucoup plus tard que fin 1999 et, de ce fait, ne peut pas justifier le fait que HSY n’ait pas respecté la décision N 401/97. Enfin, Elefsis Shipyards soutient que HSY, ayant obtenu un prêt garanti par l’État, ainsi que des prêts à des conditions différentes des conditions normales sur le marché, a violé les conditions prévues dans la décision N 401/97. Dès lors, cette aide supplémentaire, de même que l’aide à l’investissement, doit être recouvrée.

(83)

HSY a présenté les mêmes observations que la Grèce qui sont résumées au chapitre suivant.

4.1.4.   Observations présentées par la Grèce

(84)

Dans leur lettre du 20 octobre 2004, les autorités grecques confirment avoir initialement fixé le 31 décembre 1999 comme délai de mise en œuvre du plan d’investissement. En décembre 1999, elles ont mené le premier contrôle concernant la mise en œuvre du plan qui couvrait les dépenses réalisées par HSY jusqu’au 30 juin 1999. Il a été constaté que les dépenses en question s’élevaient à 2,7 milliards GRD (8,1 millions EUR), ce qui représente 17,7 % du total des dépenses du plan d’investissement. Le 27 juillet 2001, les autorités grecques ont accordé une prorogation jusqu’au 31 décembre 2001 afin d’achever le plan d’investissement, en raison des dégâts occasionnés aux installations du chantier naval par le séisme du 7 septembre 1999 qui ont retardé la mise en œuvre du plan d’investissement. Par décision du 28 décembre 2001, les autorités grecques ont accordé une seconde prorogation, portant l’échéance au 30 juin 2002, parce que la procédure de privatisation, qui avait été ouverte en janvier 2001 (et qui s’est finalement achevée le 31 mai 2002) exigeait le gel du plan d’investissement. Lorsque les autorités grecques ont procédé au second contrôle, en mai 2002, elles ont constaté que les dépenses que HSY avait réalisées jusqu’au 31 décembre 2001 s’élevaient à 9,8 milliards GRD (28,9 millions EUR), représentant 63 % du total des dépenses d’investissement. Par décision du 14 juin 2002, une nouvelle prorogation a été accordée jusqu’au 30 juin 2004. Par décision du 23 juillet 2003, les autorités ont adopté une modification du plan d’investissement. Dans ce contexte, la société a demandé que certaines dépenses d’investissement qui avaient été certifiées lors du second contrôle soient effacées. Ces dépenses portaient sur des avances pour des investissements que l’entreprise avait décidé de ne pas intégrer dans le plan d’investissement. De ce fait, le montant total des dépenses certifié à la fin du second contrôle est passé à 23,3 millions EUR, soit 50,75 % du total. Par lettre du 30 juin 2004, le chantier naval a sollicité une nouvelle prorogation jusqu’au 31 décembre 2004. Jusqu’à ce jour, l’aide à l’investissement n’a pas été versée au chantier naval.

(85)

Les autorités grecques avancent que, lorsqu’elles octroyaient les prorogations, elles estimaient de bonne foi agir dans les limites de la décision d’autorisation de la Commission et qu’il s’agissait d’une aide existante qu’elles n’étaient pas tenues de notifier. Elles estimaient que, en pratique, il est inconcevable que la possibilité d’accorder des prorogations ne soit pas prévue pour un plan d’investissement de cette taille et de cette portée, compte tenu, qui plus est, du manque d’expérience du chantier naval pour ce qui est de la mise en œuvre de plans de cette nature, comme la Commission l’avait elle-même admis dans sa décision d’autorisation. Elles prétendent également avoir informé la Commission de la prorogation en novembre 2002. Concernant la modification du plan d’investissement adoptée en 2003, celle-ci ne modifiait pas la nature, l’essence et la destination de l’aide autorisée. Elle visait simplement à adapter le contenu du plan à la nouvelle situation: la privatisation du chantier naval, les nouveaux contrats de nature imprévisible (sous-marins), le séisme de 1999 et le progrès technologique. Les autorités grecques, en outre, ne voient pas pourquoi les prorogations pourraient influencer la nature de l’aide, et par conséquent, son caractère compatible avec le marché commun. Enfin, elles soutiennent que la Commission devrait apprécier le caractère compatible de la prorogation du plan d’investissement sur la base du point 52 des lignes directrices communautaires pour les aides d’État au sauvetage et à la restructuration d’entreprises en difficulté (67) (ci-après, les «lignes directrices sur les aides au sauvetage et à la restructuration de 1999»). En l’occurrence, il convient de considérer l’aide compatible, compte tenu du fait que le plan modifié prévoit le rétablissement de la viabilité dans un délai raisonnable, c’est-à-dire avant le 30 juin 2004. Les autorités grecques prétendent notamment que l’entreprise n’est pas responsable du retard mais que celui-ci est dû à un cas de force majeure (séisme de 1999 et privatisation de l’entreprise). Enfin, il n’y aurait pas violation du principe de l’«aide unique» car l’aide aurait été accordée dans le cadre de l’adaptation d’un plan de restructuration existant.

(86)

En ce qui concerne la non-soumission de rapports annuels concernant la mise en œuvre du plan d’investissement, la Grèce considère que cette raison n’est pas suffisamment importante pour empêcher la modification du plan.

4.1.5.   Appréciation

4.1.5.1.   Article 296 du traité

(87)

Avant d’apprécier le caractère compatible au regard des articles 87 et 88 du traité, il convient d’examiner la possibilité d’appliquer l’article 296 du traité. Relativement à ce point, la Commission note que: Premièrement, le plan d’investissement avait été notifié par la Grèce en 1997, conformément à la procédure prévue à l’article 88, paragraphe 3, du traité. En notifiant l’aide, la Grèce a admis que le plan d’investissement portait principalement sur les activités civiles de HSY (à savoir, des activités de réparation et de construction). En effet, si le plan portait sur des activités militaires et revêtait de l’importance du point de vue de la sécurité nationale, la Grèce aurait pu à l’époque invoquer l’article 296 du traité et n’aurait pas été tenue de notifier l’aide à l’investissement en cause (68). En outre, la Grèce n’a pas contesté la décision d’autorisation par laquelle la Commission a apprécié l’aide notifiée sur la base des règles sur les aides d’État. Enfin, la Grèce n’a pas invoqué l’article 296 dans sa réponse relative à la décision d’ouverture de la procédure. Les éléments précités sont suffisants pour déduire que le plan d’investissement n’influençait pas les intérêts de sécurité nationale de la Grèce et que chacune des aides au financement du plan d’investissement pouvait être examinée au regard des règles sur les aides d’État établies par les articles 87 et 88 du traité.

4.1.5.2.   Existence d’une application abusive de l’aide

(88)

Les trois réserves émises dans la décision d’ouverture de la procédure seront successivement examinées.

(89)

En ce qui concerne le non-respect de la condition stipulant que les prêts devaient être contractés aux conditions du marché et sans garanties publiques, la Commission estime que ce non-respect affecte le caractère compatible des secondes mesures et non celui de l’aide à l’investissement. En effet, une telle condition vise à éviter l’octroi d’aides en faveur du plan d’investissement (c’est-à-dire, à éviter l’accumulation d’aides qui aboutirait au dépassement de l’intensité de l’aide qui est définie dans la décision N 401/97). Dans tous les cas, comme il est ultérieurement exposé dans la présente décision, la Commission estime sur la base d’autres motifs juridiques que la garantie publique qui a été octroyée à HSY constitue une aide non compatible avec le marché commun et doit être récupérée. En ce qui concerne les prêts, la Commission estime également que la partie d’aide doit être récupérée. La récupération des éléments d’aide garantira la restitutio in integrum et le coût de financement de HSY ne sera pas inférieur à celui du marché. En d’autres termes, la récupération de ces sommes permettra de réaliser l’objectif visé par la condition prévue dans la décision N 401/97, à savoir, d’éviter l’octroi d’aides supplémentaires par le biais du financement de HSY à un coût inférieur à celui du marché. De ce fait, la Commission rejette l’allégation précitée d'Elefsis Shipyards selon laquelle il convient de récupérer tant l’élément d’aide inclus aux prêts et à la garantie que l’aide à l’investissement autorisée par la décision N 401/97.

(90)

En ce qui concerne la non-soumission de rapports annuels qui est citée dans la décision d’ouverture de la procédure, la Commission estime que la non-soumission des rapports annuels ne constitue pas, en soi, une application abusive de l’aide. En effet, elle ne modifie pas les caractéristiques de l’aide, ni son résultat, ni les caractéristiques du plan d’investissement. Toutefois, compte tenu du fait que la Grèce n’a pas transmis ces informations en temps utile et, de ce fait, n’a pas informé la Commission des retards, quand ceux-ci se sont produits, elle n’a pas permis à la Commission de prendre une décision sur ces questions au moment opportun. Par conséquent, l’absence de rapports laisse sous-entendre qu’il incombe à la Grèce de prouver que la Commission aurait approuvé les prorogations successives du délai de mise en œuvre du plan d’investissement.

(91)

Pour ce qui est du retard dans la mise en œuvre du plan d’investissement, qui constituait la principale réserve émise dans la décision d’ouverture de la procédure, la Commission est parvenue à la conclusion suivante. Par la décision N 401/97, la Commission a autorisé une aide aux investissements «liés au plan de restructuration», comme l’exige le chapitre III («aides à la restructuration») de la directive 90/684/CEE. Comme il est indiqué dans la description du plan d’entreprise dans la décision N 401/97, en pratique le plan d’investissement n’était pas simplement lié à la restructuration. Il constituait lui-même un des deux piliers de la restructuration, car le chantier naval n’avait pas réalisé d’investissements dans les années antérieures et devait remplacer «l’équipement ancien et dépassé par un équipement de technologie nouvelle», pour que sa compétitivité soit rétablie. Au paragraphe 2.1 de leur lettre du 20 octobre 2004, les autorités grecques confirment que le plan d’investissement visait à rétablir la compétitivité de HSY grâce à la productivité améliorée et à sa modernisation, pour la rendre compétitive tant sur le plan national qu’international. La Grèce confirme, par ailleurs, que l’objectif était de remplacer l’équipement ancien et non utilisé par un équipement de technologie moderne. Dès lors, de la même décision N 401/97 ainsi que des lettres de la Grèce, il résulte que le plan d’investissement jouait un rôle déterminant dans le plan de restructuration et dans le rétablissement de la viabilité de l’entreprise (69). Compte tenu du fait qu’il «était lié au plan de restructuration» et qu’il était d’une importance déterminante pour le rétablissement de la viabilité, il est évident que la mise en œuvre du plan d’investissement ne pouvait pas connaître de retard significatif. Qui plus est, il devait être mis en œuvre d’urgence pour que la viabilité de l’entreprise puisse être rétablie au plus tôt. Dès lors, la Commission a autorisé une aide dans le but de soutenir un plan d’investissement qui devait être mis en œuvre sur une période donnée et non pour soutenir n’importe quel plan d’investissement mis en œuvre à l’avenir.

(92)

En ce qui concerne la durée exacte de mise en œuvre du plan d’investissement en cause, la décision N 401/97 n’inclut pas le calendrier prévu. La décision N 401/97 indique uniquement que «la viabilité du chantier naval sera rétablie à la fin de la mise en œuvre du plan d’entreprise, en 2000.» Dans leur lettre du 20 octobre 2004, les autorités grecques indiquent que, conformément à l’arrêté ministériel de décembre 2007 qui accorde la subvention, le plan d’investissement devait être achevé au 31 décembre 1999 (70). Toutefois, cette date n’apparaît pas dans la décision N 401/97. La Commission en déduit que selon les termes de la décision N 401/97, le plan d’investissement devait être achevé au plus tard à la fin de l’an 2000.

(93)

À la lumière de ce qui précède, la Commission aboutit à la conclusion qu’il était important de respecter le délai du 31 décembre 2000 pour assurer le succès du plan de restructuration. En outre, tout investissement mis en œuvre bien après 2000 ne pourrait pas être considéré comme lié au plan de restructuration décrit dans la décision N 401/97, comme l’exige la directive 90/684/CEE.

(94)

À la suite de la présente analyse de la décision N 401/97, la Commission doit apprécier dans quelle mesure elle aurait accordé une prorogation du délai d’exécution des investissements, si la Grèce avait soumis une demande relative et si elle avait dûment informé la Commission des retards. Le séisme qui a occasionné des dégâts aux installations du chantier naval s’est produit en septembre 1999: maçonnerie, toits, vitres, les structures de trois bâtiments ont été endommagées, de même que des tuyauteries, des réseaux électriques, des quais et des rails de grues. La Grèce prétend que le séisme a obligé le chantier naval à interrompre la mise en œuvre du plan d’investissement et à se concentrer sur la réparation de ces dégâts.

(95)

Attribuant le retard au séisme, le chantier naval a sollicité en novembre 2000 un premier report de la date d’achèvement du plan d’investissement au 31 décembre 2001. La question est de savoir si la Commission aurait répondu à cette demande, si elle lui avait été soumise. La Commission note que si elle avait appliqué le point 52 des lignes directrices sur les aides au sauvetage et à la restructuration de 1999, elle n’aurait pas approuvé la première prorogation, compte tenu du fait qu’il était dorénavant clair que le plan de restructuration qui avait été adopté en 1997 était insuffisant pour rétablir la viabilité de l’entreprise au regard de la situation en novembre 2000 et compte tenu du fait qu’il n’existait pas à l’époque d’autre plan de restructuration qui permette de rétablir la viabilité. La Commission doute qu’elle aurait appliqué le point 52 des lignes directrices sur les aides au sauvetage et à la restructuration de 1999, étant donné que l’aide n’était pas autorisée au titre des lignes directrices en question, qu’il n’y avait pas eu de «modification» du contenu du plan mais uniquement une prorogation du délai d’achèvement des investissements et qu’il n’existait pas de dispositions claires en ce qui concerne la modification de la date d’achèvement des investissements conformément à la décision N 401/97 et à la directive 90/684/CEE. En outre, étant donné qu’un séisme important constitue un évènement dont ni le chantier naval, ni les autorités grecques ne sont responsables, un évènement exceptionnel qui n’est pas lié à l’économie ni à l’activité économique, la Commission aurait, selon toute probabilité, estimé qu’il justifiait un retard de quelques mois. Par ailleurs, la mise en œuvre d’un plan d’investissement est une entreprise difficile qui peut exiger quelques mois supplémentaires. Dès lors, même si la prorogation d’un an est longue, il est raisonnable d’estimer que la Commission l’aurait éventuellement acceptée.

(96)

Pour ce qui est de la seconde prorogation accordée par les autorités grecques, la Grèce et HSY l’ont justifiée par la privatisation du chantier naval au cours de laquelle le plan d’investissement était gelé (71). En d’autres termes, le retard dans la mise en œuvre du plan d’investissement était dû à une décision sciemment prise d’en suspendre la mise en œuvre. La Commission ne peut en aucun cas autoriser la prorogation de la période de mise en œuvre d’un plan d’investissement lorsqu’il est sciemment décidé d’en suspendre la mise en œuvre pendant plus d’un trimestre. Conformément à la conclusion ci-dessus, le respect du calendrier de mise en œuvre du plan de restructuration était d’une importance déterminante. La Commission a autorisé des aides au soutien d’un plan de restructuration précis qui devait être mis en œuvre à un moment donné précis. À titre auxiliaire, la Commission fait remarquer que si les prorogations au-delà du 31 décembre avaient été acceptées, la période de restructuration aurait été tellement prolongée que les investissements réalisés après cette date ne seraient plus considérés «liés» — au sens de la directive 90/684/CEE — à la restructuration qui était déjà entamée en 1996. Le plan de restructuration adopté en 1997 était insuffisant pour faire face à la situation économique difficile du chantier naval depuis 2001. En outre, durant la période 2001-2002, de nouvelles mesures de restructuration importantes qui n’étaient pas comprises dans le plan de restructuration décrit à la décision N 401/97 ont été mises en œuvre (par exemple, une réduction supplémentaire de la main-d’œuvre). À la lumière de ce qui précède, la Commission estime qu’elle n’aurait pas approuvé la prorogation de la période des investissements au-delà du 31 décembre 2001.

(97)

Dès lors, la Commission estime que toutes les aides de soutien aux dépenses d’investissement réalisées après le 31 décembre 2001 ne relèvent pas du champ d’application de la décision N 401/97.

(98)

La Grèce prétend que, même si la Commission estime que les aides en faveur de certaines dépenses d’investissement ne relèvent pas du champ d’application de la décision N 401/97, il convient, néanmoins, de considérer que les aides en cause sont compatibles en tant qu’aides à la restructuration aux termes des lignes directrices sur les aides au sauvetage et à la restructuration de 1999. De ce fait, la Commission doit déterminer si les aides aux dépenses d’investissement réalisées par HSY après le 31 décembre 2001 peuvent être considérées compatibles avec le marché commun. La Commission note qu’il n’existe pas de doute quant au fait que HSY était une entreprise en difficulté après le 31 décembre 2001. Par exemple, les pertes accumulées durant les années antérieures étaient tellement importantes que ses capitaux propres étaient négatifs. Dès lors, toute aide à l’entreprise et, en particulier, toute aide à la modernisation de l’équipement dépassé, devrait être considérée comme une aide à la restructuration. Cependant, la Commission estime que l’entreprise n’a pas respecté les conditions de réception des aides définies par les lignes directrices sur les aides au sauvetage et à la restructuration de 1999. Par exemple, la condition de l’«aide unique», établie au point 48 des lignes directrices, n’a pas été respectée parce que la Grèce avait déjà octroyé à HSY une aide à la restructuration en vertu de l’arrêté ministériel de décembre 1997. En effet, l’aide à l’investissement autorisée par la décision N 401/97 était une aide à la restructuration, aux termes de la directive 90/684/CEE et conformément à la décision N 401/97, elle-même. Le point 48 des lignes directrices sur les aides au sauvetage et à la restructuration de 1999 autorise une exception à la condition de l’«aide unique» pour «circonstances exceptionnelles, imprévisibles et non-imputables à l’entreprise.» La Commission ne constate pas de circonstances exceptionnelles, imprévisibles, non-imputables à l’entreprise qui auraient pu justifier l’octroi d’une aide à la restructuration pour des dépenses d’investissement réalisées après le 31 décembre 2001. Plus précisément, conformément à la conclusion tirée ci-dessus, le séisme de septembre 1999 peut justifier un retard limité dans l’exécution du plan d’investissement. Toutefois, il ne constitue pas le motif du retard de la mise en œuvre du plan d’investissement après le 31 décembre 2001. Pour ce qui est du gel du plan durant la procédure de privatisation, il ne correspond pas à la définition des «circonstances exceptionnelles, imprévisibles et non-imputables à l’entreprise.» La Grèce prétend qu’il n’y avait pas de violation du principe de l’«aide unique» car l’aide serait accordée dans le contexte de l’adaptation d’un plan de restructuration existant. Selon les précisions détaillées qui ont été fournies, la Commission estime que les investissements réalisés après le 31 décembre 2001 ne font pas partie du plan d’investissement décrit dans la décision N 401/97. En outre, le point 52 des lignes directrices sur les aides au sauvetage et à la restructuration de 1999 indique que «le plan révisé doit toujours prévoir un retour à la viabilité dans un délai raisonnable.» Aux termes du plan initial, la viabilité du chantier naval devait être rétablie en 2000. Dès lors, la Commission considère que le rétablissement de la viabilité prévu pour juin 2004 représentait un retard très important par rapport au plan initial et ne s’intégrait plus dans un délai raisonnable. Enfin, la Commission fait remarquer qu’accepter une prorogation aussi importante de la période de restructuration constituerait une déviation de la condition de l’«aide unique.»

(99)

Dès lors, la Commission estime que l’aide en faveur des dépenses d’investissement réalisées jusqu’au 31 décembre 2001 et qui portaient sur le plan d’investissement décrit à la décision N 401/97 peuvent être considérées comme étant couvertes par la décision en question. Toutes les autres aides ne relèvent pas du champ d’application de la décision N 401/97. En outre, toute autre aide en faveur des autres dépenses d’investissement réalisées par HSY n’est pas compatible avec le marché commun. Compte tenu que la Grèce a déclaré que l’aide à l’investissement n’a pas encore été versée à HSY, il n’est pas nécessaire de récupérer l’aide auprès de HSY.

4.2.   Prêt de 4,67 milliards GRD (13,72 millions EUR) octroyé en 1999 et couvert par une garantie publique (mesure D2)

4.2.1.   Description de la mesure

(100)

La Grèce indique que ce prêt échelonné sur huit ans de 4,67 milliards GRD (13,72 millions EUR) a été octroyé par l’ETVA pour financer le plan d’investissement (72). Par décision du 8 décembre 1999, le gouvernement a octroyé une garantie dont la commission annuelle de garantie était de 100 points de base. Le prêt a été contracté le 29 décembre 1999 et versé à HSY par tranches successives depuis cette date jusqu’au 26 octobre 2000 à concurrence de la somme totale des 12,76 millions EUR (73) au taux d’intérêt ATHIBOR (EURIBOR depuis le 1er janvier 2001) majoré de 25 points de base. Le 31 mai 2002, la garantie publique et le prêt ont été prorogés jusqu’au 30 juin 2009, tandis que le taux d’intérêt a été augmenté de 100 points de base. Le premier paiement en vue du remboursement du capital a été effectué en décembre 2003.

4.2.2.   Motifs d’ouverture de la procédure

(101)

La décision d’ouverture de la procédure indique que la garantie publique pourrait constituer une aide d’État dont la compatibilité est douteuse. En outre, au-delà de la qualification de la garantie comme aide compatible ou non, la décision N 401/97 indiquait que, pour le financement du plan d’investissement, des prêts bancaires devaient être contractés aux conditions normales du marché, sans garanties publiques. Il semble, de ce fait, que la décision en question n’autorisait pas l’octroi de garanties publiques en tant que telles.

4.2.3.   Observations des parties intéressées

(102)

Elefsis Shipyards a présenté les observations suivantes concernant les mesures D2, D3 et D4. Elle rappelle que, en vertu de la décision N 401/97, les prêts bancaires destinés au financement de HSY devaient être assurés aux conditions normales du marché, sans garanties publiques. Il est possible de prouver qu’aucun des trois prêts n’a été octroyé aux conditions normales du marché. En premier lieu, les prêts en cause ont été octroyés à partir de fin 1999, au moment où la situation économique de HSY était désastreuse et où elle risquait de voir révoquer sa licence d’exploitation. En second lieu, les prêts ont été octroyés alors qu’il était clair que HSY n’avait pas même réussi à mettre en œuvre le plan de restructuration et d’investissement ni à respecter les conditions de la décision N 401/97. Troisièmement, compte tenu, d’une part, de la situation économique désastreuse dans laquelle se trouvait l’entreprise et, d’autre part, du fait qu’il n’existait pas de garantie des prêts aux conditions normales du marché, HSY n’aurait pas réussi à obtenir les prêts en cause auprès d’établissements du secteur privé.

4.2.4.   Observations de la Grèce

(103)

Les autorités grecques (de même que HSY) font valoir que la garantie publique ne constitue pas une aide d’État et a été octroyée dans les conditions normales du marché. Elles fondent leur analyse sur les éléments suivants:

Le chantier naval aurait pu contracter un prêt similaire auprès de toute autre banque en offrant des types de sûretés autres que la garantie publique. Plus précisément, il aurait pu fournir comme sûretés la cession de créances de contrats importants ou des hypothèques sur des éléments de l’actif,

La commission annuelle de 1 % est le prix en vigueur sur le marché. En outre, elle n’est pas sélective, compte tenu du fait que l’État grec a octroyé différentes garanties durant la période concernée et, qui plus est, dans certains cas, à une commission nettement inférieure,

De plus, même si la Commission estime que la commission de garantie était inférieure au taux d’intérêt en vigueur sur le marché, l’État grec a agi en tant qu’investisseur privé dans des conditions normales de marché, étant donné qu’il était actionnaire de HSY (par le biais d’ETVA) et qu’il aurait bénéficié du rétablissement des bénéfices de l’entreprise à la suite de la mise en œuvre du plan d’investissement,

Le fait que le prêt a été contracté pour financer le plan d’investissement qui avait été approuvé par la Commission devrait constituer un motif suffisamment solide pour que la banque prêteuse et le garant considèrent que HSY serait en mesure de rembourser le prêt,

Le prêt est régulièrement remboursé et la commission de garantie est versée.

4.2.5.   Appréciation

4.2.5.1.   Article 296 du traité

(104)

Avant d’apprécier le caractère compatible de l’aide aux termes de l’article 87 du traité, il convient d’examiner dans quelle mesure l’article 296 du traité est applicable. La Commission fait remarquer que, en vertu de la décision d’octroi de l’aide, HSY était tenue d’utiliser le prêt garanti de même que les deux autres prêts couverts par la décision d’ouvrir la procédure (c’est-à-dire, les mesures D3 et D4), afin de financer le plan d’investissement (74). Comme indiqué dans les conclusions de l’appréciation de la mesure D1, le plan d’investissement ne relève pas du champ d’application de l’article 296 du traité. De ce fait, la Commission estime que ces trois prêts, qui étaient destinés au financement du plan d’investissement, relèvent des règles sur les aides d’État et ne relèvent pas du champ d’application de l’article 296 du traité.

4.2.5.2.   Existence d’une aide

(105)

Il convient de vérifier, en premier lieu, si la garantie d’État remplit les conditions de l’aide d’État au sens de l’article 87, paragraphe 1, du traité.

(106)

Afin d’apprécier l’existence d’une aide dans les différentes garanties considérées dans la présente décision, la Commission se rapportera à la communication de la Commission sur l’application des articles 87 et 88 du traité CE aux aides d’État sous forme de garanties (75) (ci-après, la «communication sur les garanties»), publiée en mars 2000. Toutefois, comme indiqué au point 1.4. de la communication, celle-ci ne constitue pas un changement de politique. Son objectif est de donner des précisions sur les principes dont la Commission s’inspirait jusqu’alors dans l’appréciation des garanties. De ce fait, les principes définis dans la communication sur les garanties peuvent également être appliqués à l’appréciation des garanties qui ont été octroyées avant mars 2000. Selon cette conclusion, dans la décision d’ouverture de la procédure, la Commission a utilisé la communication sur les garanties pour apprécier la mesure D2. La Grèce n’a pas soulevé d’objection à l’application de ce principe. Au contraire, la Grèce l’a également appliqué dans l’appréciation de la mesure D2 (76).

(107)

Premièrement, pour qu’une mesure relève de l’article 87, paragraphe 1, une mesure doit inclure des fonds publics. C’est le cas de la mesure D2, étant donné que, en octroyant la garantie en cause, l’État grec risquait des fonds publics.

(108)

Deuxièmement, il convient de constater si la mesure est sélective. La Grèce fait valoir que l’État grec a octroyé plusieurs garanties à d’autres entreprises dont la commission était également de 1 %. La Grèce a produit une liste de ces entreprises. La Commission estime que ce fait ne prouve pas que la mesure était de nature générale. Pour qu’une mesure soit de nature générale, elle doit être appliquée à tous les opérateurs économiques actifs dans un État membre. Elle doit être appliquée de façon égale à toutes les entreprises et son champ ne peut être limité de fait, par exemple, par le biais du pouvoir discrétionnaire de l’État quant à son application ou par le biais d’autres éléments qui en limitent le résultat pratique. Par conséquent, la mesure examinée ne peut pas être considérée comme étant de nature générale. Plus précisément, le fait que certaines entreprises aient reçu des garanties publiques n’implique pas que toute entreprise aurait pu recevoir des garanties similaires. La Grèce n’a pas démontré que l’octroi de garanties publiques est appliqué à tous les opérateurs économiques de façon égale. En outre, plusieurs entreprises reprises sur la liste produite par la Grèce sont des entreprises publiques ou déploient des activités militaires. Il apparaît, dès lors, que les entreprises privées n’auraient pas pu obtenir pareille garantie pour financer leurs activités régulières. Qui plus est, la Grèce ne cite pas le fondement juridique conformément auquel le Ministre des finances a décidé d’octroyer la garantie, le 8 décembre 1999. Il est possible que la base juridique ait été la loi 2322/1995, qui est une mesure sélective, comme il sera expliqué lors de l’appréciation de la mesure E12b.

(109)

Troisièmement, il convient de démontrer l’existence d’un avantage. Selon le point 2.2.2 de la communication sur les garanties, compte tenu du fait que la garantie a été octroyée avant l’octroi du prêt, et non après, il n’existe pas de présomption d’aide à l’emprunteur. Dès lors, il convient d’examiner l’aide à l’emprunteur, telle qu’elle est définie au point 2.1.1 de la communication sur les garanties. La Grèce fait valoir qu’il n’existe pas d’avantage, compte tenu du fait que HSY aurait pu obtenir un prêt similaire en offrant à la banque des garanties autres que la garantie publique. La Commission estime qu’il n’est pas nécessaire d’examiner si, en proposant d’autres garanties, HSY aurait pu obtenir le prêt en cause. En effet, la Commission doit apprécier si l’acte considéré appliqué par l’État grec, c’est-à-dire, l’octroi d’une garantie sur prêt sans sûreté, aurait été accepté par un investisseur privé aux conditions normales du marché. Une garantie sur prêt qui est assurée par un droit de rétention sur des éléments de l’actif ou par la cession de créances constitue une transaction différente. Comme indiqué au point 2.1.1 de la communication sur les garanties, un des avantages potentiels de la garantie publique est que l’emprunteur peut «offrir une sûreté moins élevée» au créancier. En outre, même s’il convenait d’apprécier la possibilité d’obtenir un financement en offrant plus de sûretés, la Commission a déjà conclu, au point 3.1 de la présente décision, que, après le 30 juin 1999, HSY n’aurait pas obtenu de prêts ou de garanties auprès d’une banque privée, même si elle avait offert quelque sûreté à la banque. La Commission conclut que, compte tenu du fait que la garantie publique a été octroyée en décembre 1999, elle constituait un avantage pour HSY, étant donné qu’elle lui offrait le financement que l’entreprise n’aurait pas pu obtenir sur le marché.

(110)

La Grèce fait également valoir que la commission de garantie de 1 % était le prix en vigueur sur le marché et que, de ce fait, aucun avantage n’est accordé. La Commission fait remarquer que la Grèce n’a pas soumis de données du marché prouvant que les banques étaient disposées à octroyer une garantie assortie de cette commission. La Grèce a simplement présenté une liste des garanties octroyées par l’État grec durant la même période avec la même commission de garantie. La Commission n’est pas en mesure de comprendre comment la liste de garanties publiques en question peut prouver que la commission de garantie appliquée à HSY correspond aux conditions du marché et ne constitue pas une aide d’État. Plus précisément, la liste en cause ne peut être considérée comme «régime public de garanties qui ne constitue pas une aide d’État au sens de l’article 87, paragraphe 1», compte tenu du fait que, comme le démontre la garantie en faveur de HSY, elle ne remplit pas bon nombre des conditions prévues au point 4.3 de la communication sur les garanties. En outre, même si la commission de garantie de 1 % était, le cas échéant, conforme aux conditions du marché pour d’autres sociétés (saines), elle ne serait pas automatiquement conforme aux conditions du marché pour une entreprise en difficulté telle que HSY.

(111)

Pour ce qui est de l’argument selon lequel une commission de garantie inférieure au prix du marché aurait pu être acceptée par un investisseur privé dans des circonstances similaires parce que l’État grec était actionnaire de HSY, la Commission a déjà rejeté cet argument au point 3.1 de la présente décision.

(112)

Au point 3.1., il est également expliqué que, depuis le 30 juin 1999, il existait suffisamment d’informations pour déduire que HSY n’était pas arrivée à conclure un nombre suffisant de contrats de construction pour rétablir sa viabilité et qu’elle ferait face à des pertes significatives en 1999 et en 2000. Par conséquent, en dépit du fait que le prêt destiné à financer le plan d’investissement qui avait été approuvé par la Commission en 1997 aurait pu tranquilliser un créancier potentiel en 1997 et en 1998, en décembre 1999 il n’aurait pas pu tranquilliser une banque, en raison de l’échec évident du plan d’entreprise. Il convient, dès lors, de rejeter l’argument de la Grèce à ce sujet.

(113)

Enfin, en ce qui concerne le fait cité par la Grèce que le prêt est remboursé conformément aux termes du contrat, la Commission n’est pas en mesure de comprendre comment ce fait peut prouver qu’une banque privée aurait accordé le prêt en cause. En effet, l’élément essentiel est la situation de l’entreprise et les informations disponibles au moment où la garantie a été octroyée (77). À titre auxiliaire, la Commission fait remarquer que selon les informations disponibles au moment où la garantie a été octroyée, sur la base desquelles il était possible de s’attendre à ce que le chantier naval subisse des pertes importantes durant les années à venir, le chantier naval a effectivement enregistré des pertes significatives durant les années suivantes avec pour résultat la diminution des capitaux propres de l’entreprise ayant atteint des niveaux très négatifs. En outre, HSY a survécu (et, dès lors, est en mesure de rembourser le prêt) exclusivement et uniquement grâce au soutien permanent des aides d’État.

(114)

Pour ces motifs, la Commission estime que la mesure accorde un avantage à HSY.

(115)

Cet avantage sélectif fausse la concurrence car il accorde à HSY un financement à un moment auquel l’entreprise, d’une part, n’aurait pas trouvé de financement sur les marchés financiers et, d’autre part, était en difficulté. Dès lors, la mesure a contribué à maintenir HSY en vie et à financer ses activités. Compte tenu du fait que certains des concurrents de HSY étaient établis dans d’autres États membres (78), cette concurrence faussée a une influence sur les échanges entre les États membres (79).

(116)

Étant donné qu’elle remplit toutes les conditions prévues à l’article 87, paragraphe 1, du traité, la garantie constitue une aide d’État. En outre, puisque, en violation de la disposition prévue à l’article 88, paragraphe 3, du traité, elle a été octroyée sans avoir été préalablement notifiée, elle constitue une aide illégale.

(117)

Compte tenu du fait que la Commission vient de prouver que l’avantage sélectif octroyé à HSY fausse la concurrence et les échanges, la Commission ne réitèrera pas, ci-après, lors de l’appréciation des autres mesures, l’analyse de l’existence d’une distorsion de la concurrence et des échanges.

4.2.5.3.   Compatibilité de l’aide

(118)

Pour ce qui est de la compatibilité au regard de l’article 87, paragraphes 2 et 3, du traité, la Commission souligne qu’aucune des dispositions de l’article 87, paragraphe 2 et paragraphe 3, points b) et d), n’est appliquée. Pour ce qui est de la compatibilité au regard de l’article 87, paragraphe 3, points a), c) et e), depuis le 1er janvier 1999, les aides à la construction navale sont régies par le règlement (CE) no 1540/98 du Conseil du 29 juin 1998 concernant les aides à la construction navale (80) (ci-après, le «règlement (CE) no 1540/98»). Compte tenu du fait que le prêt garanti était destiné à financer un plan d’investissement qui faisait partie d’un plan de restructuration et, en outre, compte tenu du fait que HSY était une entreprise en difficulté, il convient d’apprécier la garantie d’État au regard de l’article 5 du règlement (CE) no 1540/98. Il est clair que la mesure ne remplit pas les conditions prévues à cet article. Plus précisément, l’article 5 indique que les aides à la restructuration «peuvent exceptionnellement être jugées compatibles avec le marché commun, à condition de respecter les lignes directrices communautaires pour les aides d’État au sauvetage et à la restructuration des entreprises en difficulté.» Les lignes directrices en vigueur au moment où l’aide a été octroyée étaient les lignes directrices sur le sauvetage et la restructuration de 1999, publiées au Journal officiel de l’Union européenne le 9 octobre 1999 (81) et en vigueur depuis la même date. Bon nombre des conditions pour approuver une aide prévues au point 3.2.2 des lignes directrices en question ne sont pas remplies. Par exemple, en ce qui concerne la condition b) «Retour à la viabilité», la Commission fait remarquer que la garantie d’État avait été utilisée pour financer un plan d’investissement qui faisait partie d’un plan de restructuration qui, en décembre 1999, était dorénavant absolument insuffisant pour rétablir la viabilité de HSY à long terme. En ce qui concerne la condition d) «Aide limitée au minimum», la Commission avait déjà statué, dans la décision N 401/97, qu’une aide d’État pouvait s’élever, au maximum, à 50 % du coût d’investissement, tandis que le solde de 50 % devait être financé par des fonds provenant des actionnaires et de prêts bancaires accordés aux conditions du marché. Ainsi, il n’était pas possible d’octroyer d’aide supplémentaire en faveur du plan car, dans ce cas, il y aurait eu dépassement de l’intensité maximale de 50 % de l’aide. La garantie de l’État a également été accordée en violation du principe de «l’aide unique» prévu au point 3.2.3 des lignes directrices sur les aides au sauvetage et à la restructuration de 1999, étant donné que par la décision N 401/97, la Commission avait autorisé l’octroi d’une aide à l’investissement qui, conformément à la directive 90/684/CEE, était une sorte d’aide à la restructuration. Cette aide avait été octroyée à HSY en vertu de l’arrêté ministériel de décembre 1997 (mais, comme décrit au considérant 84 de la présente décision, la Grèce déclare qu’elle n’avait pas encore été versée à HSY).

(119)

Pour ces motifs, la Commission estime que l’aide d’État constitue une aide illégale et non compatible qu’il convient de récupérer. Si elle n’est pas encore versée au moment de la publication de la présente décision, il convient que l’aide d’État soit immédiatement suspendue. Toutefois, cela ne suffira pas pour assurer le retour à la situation qui aurait existé sans la garantie publique, compte tenu du fait que HSY a bénéficié durant plusieurs années d’un prêt qu’elle n’aurait pas pu obtenir sans l’intervention de l’État grec. Afin de récupérer cet avantage, la Commission estime que, conformément à la conclusion à laquelle elle a abouti au point 3.1 de la présente décision, la différence entre le coût total du prêt garanti (taux d’intérêt plus commission de garantie) et le taux de référence pour la Grèce majoré de 600 points de base doit être récupéré pour les années durant lesquelles la garantie était en vigueur.

(120)

La Commission estime que, de cette façon, la situation qui aurait existé sans la garantie publique sera rétablie. De cette façon, est éliminée la violation de l’interdiction d’octroyer des aides d’État et de financer à un taux d’intérêt inférieur à celui du marché qu’impose la décision N 401/97.

4.3.   Prêt de 1,56 milliard GRD (4,58 millions EUR) octroyé en 1999 (mesure D3)

4.3.1.   Description de la mesure

(121)

En 1999, HSY a obtenu un prêt pour un montant de 1,56 milliard GRD (4,58 millions EUR) auprès d’ETVA qui, en sûreté, a obtenu le droit sur le versement de la première tranche de l’aide à l’investissement qui avait été approuvé par la décision N 401/97. Le prêt a été contracté le 28 juillet 1999 et versé à HSY le lendemain, dans son intégralité. Initialement, sa durée s’étendait jusqu’au 31 mars 2001. À la suite de des prorogations successives, il a été remboursé le 2 août 2004. Le taux d’intérêt du prêt était ATHIBOR (EURIBOR depuis le 1er janvier 2001) plus 100 points de base (82).

4.3.2.   Motifs d’ouverture de la procédure

(122)

Dans la décision d’ouverture de la procédure, la Commission indique que le prêt pourrait constituer une aide dont la compatibilité est douteuse. En outre, s’il était prouvé que le prêt en cause était couvert par une garantie publique, il y aurait violation de la décision N 401/97 qui prévoyait que, pour financer le plan d’investissement, des prêts bancaires devaient être contractés aux conditions normales du marché, sans garanties publiques.

4.3.3.   Observations des parties intéressées

(123)

Au-delà des observations qu’elle a antérieurement présentées concernant la mesure D2, Elefsis Shipyards fait valoir que, si les mesures D3 et D4 ont été octroyées à un moment où il était clair que HSY n’avait ni mis en œuvre le plan de restructuration/plan d’investissement ni respecté les conditions de la décision N 401/97, il existait un risque élevé que la sûreté qui avait été offerte pour ces prêts, c’est-à-dire, le versement de l’aide à l’investissement approuvée, fût illégale et, de ce fait, nulle et non applicable.

4.3.4.   Les observations présentées par la Grèce

(124)

Les autorités grecques (et HSY) font valoir que le prêt en cause a été octroyé aux conditions du marché. Plus précisément, le taux d’intérêt était similaire à celui en vigueur pour certains prêts octroyés par l’ETVA à d’autres entreprises, durant la même période. HSY aurait pu obtenir un prêt auprès de toute autre banque mais il était raisonnable qu’elle préfère l’ETVA, qui était son actionnaire. En outre, la sûreté qu’elle proposait sous la forme de cession de créances sur la première tranche de l’aide à l’investissement, constituait une sûreté acceptable par toute autre banque. Enfin, la Grèce fait remarquer que le prêt a été remboursé dans son intégralité.

4.3.5.   Appréciation

4.3.5.1.   Article 296 du traité

(125)

Dans son appréciation de la mesure D2, la Commission a déjà conclu que la mesure D3 ne relevait pas du champ d’application de l’article 296 du traité. De ce fait, il convient de l’apprécier au regard des règles relatives aux aides d’État.

4.3.5.2.   Existence d’une aide

(126)

En premier lieu, la Commission fait remarquer que le prêt avait été octroyé par l’ETVA sans être assorti d’une garantie publique.

(127)

En ce qui concerne le caractère sélectif de la mesure, la Grèce fait valoir que d’autres entreprises avaient également obtenu des prêts d’ETVA, à des taux d’intérêt similaires. Néanmoins, comme il a déjà été expliqué à l’appréciation de la mesure D2, une mesure revêt un caractère général uniquement si elle remplit des conditions strictes qui, de toute évidence, ne sont pas remplies dans le cas en l’espèce. Par exemple, la mesure n’est pas appliquée à toutes les entreprises de façon égale, compte tenu du fait que des taux d’intérêt différents sont appliqués aux différents emprunteurs, en fonction de la décision d’ETVA d’octroyer ou de ne pas octroyer le prêt concerné et des conditions que celle-ci pose. De ce fait, la mesure est sélective.

(128)

Pour ce qui est de l’existence d’un avantage, la Commission souligne que le prêt en cause a été octroyé après le 30 juin 1999, au moment où l’entreprise n’avait plus accès au marché du crédit, comme expliqué au point 3.1 de la présente décision. Le fait qu’ETVA a appliqué un taux d’intérêt similaire à certains prêts qu’elle a octroyés à d’autres entreprises durant la même période ne prouve pas que le taux d’intérêt en cause aurait été acceptable pour une banque privée, dans des circonstances similaires. En premier lieu, le taux d’intérêt demandé par une banque privée pour un prêt précis dépend de la solvabilité de l’emprunteur. La Grèce n’a pas prouvé que les autres emprunteurs cités sur la liste encouraient le risque de défaut de paiement au même degré que HSY. La Commission rappelle que la situation de HSY était très défavorable à ce moment-là. Il est probable, dès lors, que, pour octroyer le prêt à HSY, un investisseur privé dans des conditions d’économie de marché aurait demandé un taux d’intérêt plus élevé par rapport aux prêts accordés à des entreprises saines. Deuxièmement, même si les autres emprunteurs présentaient le même risque de défaut de paiement que HSY, la liste soumise par la Grèce ne serait toujours pas suffisante pour permettre de conclure que le taux d’intérêt appliqué était celui du marché. En effet, la liste soumise par la Grèce inclut uniquement des prêts accordés par l’ETVA qui était une banque appartenant à l’État (et, qui plus est, une banque de développement), fait qui indique que les autres prêts pourraient également comporter un élément d’aide. Il en résulte que la liste ne prouve pas que ces prêts auraient été acceptés par une banque privée.

(129)

Les autorités grecques font également valoir que la sûreté offerte sous la forme de cession de créances sur la première tranche de l’aide à l’investissement constituait une sûreté rendant le prêt acceptable par toute banque privée. La Commission souligne que, conformément à la décision du gouvernement grec au titre de laquelle l’aide à l’investissement a été approuvée, le versement de la première tranche de l’aide devait avoir lieu dès que l’autorité de contrôle compétente notait que les dépenses d’investissement atteignaient la somme de 2,73 milliards GRD. En outre, le paiement devait être effectué avant le 31 décembre 1999. Or, comme l’a révélé l’audit mené par les autorités grecques début décembre 1999 (voir observations de la Grèce à propos de la mesure D1), la somme des 2,73 milliards GRD avait à peine été atteinte au 30 juin 1999. Par conséquent, compte tenu du fait que le prêt a été octroyé en juillet 1999 et que, à ce moment-là, il était possible d’estimer que la limite des 2,73 milliards GRD avait ou pouvait bientôt être atteinte, la probabilité de recouvrer la première tranche de l’aide pouvait, à première vue, être considérée comme étant particulièrement élevée. Toutefois, divers problèmes empêchant le versement de l’aide pouvaient encore se présenter. Premièrement, en cas de faillite de HSY, il n’était pas certain que les autorités grecques auraient accepté de verser l’aide à l’investissement à une entreprise dont les activités avaient cessé (83). Dans ce cas, la banque se trouverait dans l’obligation d’introduire des moyens de recours coûteux et longs pour récupérer le prêt. Deuxièmement, il n’est pas certain que les autorités de contrôle compétentes auraient accepté de certifier les dépenses d’investissement réalisées, en attestant par exemple que la limite posée allait être atteinte en temps utile. Troisièmement, d’autres problèmes, d’ordre administratif, auraient pu se présenter. C’est précisément ce qui s’est produit, en réalité (84), puisque, pendant plusieurs années, les autorités grecques n’ont pas versé la première tranche de l’aide. Comme indiqué au chapitre 1, «Procédure», de la présente décision, lorsque la Commission fut, plus tard, informée du retard dans la mise en œuvre du plan d’investissement, elle a demandé la suspension du versement de l’aide qui n’avait pas encore été versée à HSY. La Commission conclut que le versement de la première tranche de l’aide à l’investissement par l’État grec était probable mais pas certain. Compte tenu des difficultés rencontrées par HSY, une banque privée aurait demandé des garanties pouvant être exécutées rapidement et avec certitude, et n’aurait pas estimé suffisante une sûreté qui, dans certaines conditions, n’aurait aucune valeur. Pour ces motifs, la Commission conclut qu’une banque privée n’aurait pas accepté d’octroyer ce prêt. Comme cité antérieurement, cette conclusion est confirmée par les tentatives infructueuses de HSY de demander un financement auprès d’investisseurs dans des conditions d’économie de marché.

(130)

La Grèce fait également valoir que, puisqu’ETVA était actionnaire de HSY, il était dans son intérêt d’octroyer ce prêt à HSY. Au point 3.1.3 de la présente décision, la Commission a déjà rejeté cet argument.

(131)

Enfin, en ce qui concerne le fait que ce prêt est remboursé, la Commission a déjà expliqué, dans l’appréciation de la mesure D2, qu’il ne prouve pas qu’une banque privée aurait accepté d’octroyer le financement en cause à HSY, à l’époque.

(132)

Pour les motifs précités, la Commission conclut que le prêt offre un avantage à HSY, compte tenu du fait que l’entreprise ne l’aurait pas obtenu sur le marché.

(133)

La Commission conclut que la mesure D3 constitue une aide au sens de l’article 87, paragraphe 1, du traité. Étant donné que, en dépit de l’exigence prévue à l’article 88, paragraphe 3, du traité, la mesure a été octroyée sans avoir été préalablement notifiée, elle constitue une aide illégale.

4.3.5.3.   Compatibilité de l’aide

(134)

En tant que mesure D2, il convient d’apprécier la compatibilité de la mesure considérée sur la base du règlement (CE) no 1540/98. Compte tenu du fait que, en tant que mesure D2, le prêt était destiné à financer un plan d’investissement qui faisait partie d’un plan de restructuration et, compte tenu du fait qu’il a été octroyé à une entreprise en difficulté, il convient de la considérer comme une aide à la restructuration couverte par l’article 5 du règlement (CE) no 1540/98. Il est clair que la mesure ne remplit pas les conditions prévues à cet article. Plus précisément, l’article 5 prévoit que les aides à la restructuration «peuvent exceptionnellement être jugées compatibles avec le marché commun, à condition de respecter les lignes directrices communautaires pour les aides d’État au sauvetage et à la restructuration des entreprises en difficulté.» Les lignes directrices en vigueur au moment où l’aide a été octroyée étaient celles publiées au Journal officiel de l’Union européenne le 23 décembre 1994 (85) et en vigueur depuis la même date (ci-après, les «lignes directrices sur les aides au sauvetage et à la restructuration de 1994»). Bon nombre des conditions pour approuver l’aide prévues au point 3.3.2 des lignes directrices concernées ne sont pas remplies. Par exemple, en ce qui concerne la condition (i) «Retour à la viabilité», la Commission fait remarquer que la garantie publique a été utilisée pour financer un plan d’investissement qui faisait partie d’un plan de restructuration qui, en juin 1999, était dorénavant insuffisant pour rétablir la viabilité de HSY à long terme. En ce qui concerne la condition (iii) «Aides proportionnelles aux coûts et aux bénéfices de la restructuration», la Commission avait déjà statué, dans la décision N 401/97, qu’une aide d’État pouvait s’élever, au maximum, à 50 % du coût d’investissement, tandis que le solde de 50 % devait être financé par des fonds provenant des actionnaires et de prêts bancaires accordés aux conditions du marché. Il en résulte qu’il ne pouvait pas être octroyé d’aide supplémentaire en faveur du plan d’investissement, car, dans ce cas, il y aurait eu dépassement du taux précité de 50 % et la Commission ne pourrait pas juger l’aide comme étant proportionnelle aux «coûts et aux bénéfices de la restructuration.»

(135)

Pour les motifs précités, la Commission estime que l’aide d’État constitue une aide illégale et non compatible qu’il convient de récupérer. Compte tenu du fait que, après le 30 juin 1999, HSY n’aurait pas pu obtenir de prêt sur le marché, il convient que l’intégralité du prêt soit récupérée. Toutefois, cela ne suffit pas pour revenir à la situation qui existerait sans l’aide, compte tenu du fait que pendant plusieurs années HSY a bénéficié d’un prêt qu’elle n’aurait pas obtenu sans intervention de l’État. Afin de récupérer cet avantage, la Commission estime que, conformément à la conclusion à laquelle elle a abouti au point 3.1 de la présente décision, la différence (86) entre le taux d’intérêt du prêt et le taux de référence pour la Grèce majoré de 600 points de base doit être récupéré pour chacune des années à compter de la date de versement du prêt à HSY jusqu’à celle de son remboursement.

(136)

La Commission fait remarquer que, en mars 2002, l’État grec a procédé à la vente de la part majoritaire des actions d’ETVA à la Banque du Pirée. Par conséquent, l’ETVA n’appartenait plus à l’État grec au cours des deux dernières années du prêt qui a été remboursé en 2004. Par conséquent, la question pourrait se poser (tant concernant le prêt considéré que concernant les autres prêts et garanties octroyés par l’ETVA avant mars 2002 et ayant une durée s’étendant au-delà de mars 2002) de savoir s’il convient que la partie d’aide concernant la période après mars 2002 soit remboursée par l’ETVA et non par l’État grec. Afin de répondre à cette question, la Commission rappelle que quand l’État grec octroie un prêt au taux d’intérêt inférieur à celui du marché, l’aide est octroyée au moment où le prêt est contracté, même si l’avantage n’est réalisé que chaque fois que l’intérêt est payé, quand un taux d’intérêt inférieur est appliqué à l’emprunteur (87). De même, la valeur marchande du prêt auquel est appliqué un taux d’intérêt qui ne reflète pas adéquatement les difficultés face auxquelles se trouve l’emprunteur diminue dès (88) la signature du contrat de prêt (c’est-à-dire, pas à des dates ultérieures, quand l’emprunteur paie des intérêts à un taux inférieur à celui du marché.) La valeur d’une banque, à son tour, dépend de la valeur des éléments patrimoniaux qu’elle possède, notamment du portefeuille des prêts non remboursés. Dès lors, l’octroi de prêts à des conditions qui ne sont pas celles du marché a réduit la valeur d’ETVA et, de ce fait, a réduit le prix que l’État grec a ultérieurement encaissé quand il a procédé à la vente des actions d’ETVA (89), fait qui prouve que l’État grec a assumé le coût de ces mesures d’aide, y compris pour la période après mars 2002.

4.4.   Prêt de 13,75 millions EUR octroyé en 2002 (mesure D4)

4.4.1.   Description de la mesure

(137)

Le contrat de prêt entre l’ETVA et HSY a été signé le 31 mai 2002. Le prêt portait sur un montant de 13,75 millions EUR, sa durée était de deux ans et il a été octroyé au taux d’intérêt EURIBOR plus 125 points de base. Le prêt était destiné à servir d’avance sur la seconde et la troisième tranche de l’aide à l’investissement. Le prêt était garanti par le biais de la cession de créances sur le paiement de la seconde et de la troisième tranche de l’aide à l’investissement (90).

4.4.2.   Motifs d’ouverture de la procédure

(138)

Dans la décision d’ouverture de la procédure, la Commission indique que le prêt pourrait constituer une aide d’État dont la compatibilité est douteuse. En outre, s’il était prouvé que, pour le prêt en cause, une aide d’État avait été octroyée, il semble que le prêt ne respecte pas la décision N 401/97 qui prévoit que des prêts bancaires seraient contractés aux conditions du marché et sans garanties publiques pour financer le plan d’investissement.

4.4.3.   Observations des parties intéressées

(139)

Les observations présentées par Elefsis Shipyards sur la mesure sont similaires à celles qu’elle a présentées concernant la mesure D3.

4.4.4.   Les observations présentées par la Grèce

(140)

Les autorités grecques font valoir que le prêt en cause a été octroyé aux conditions du marché. Plus précisément, le taux d’intérêt est similaire à celui en vigueur pour certains prêts octroyés par l’ETVA à d’autres entreprises, durant la même période. HSY aurait pu obtenir un prêt auprès de toute autre banque mais il était raisonnable qu’elle préfère l’ETVA, qui était son actionnaire. En outre, la sûreté qu’elle proposait sous la forme de cession de créances sur la seconde et la troisième tranche de l’aide à l’investissement, constituait une sûreté acceptable par toute autre banque. Enfin, le prêt n’a jamais été versé à HSY et, par conséquent, il ne peut être considéré comme constituant une aide en faveur de HSY. Qui plus est, le fait qu’ETVA ait refusé de verser le prêt quand elle a constaté que le paiement de l’aide à l’investissement était «gelé» pour des raisons procédurales et que le paiement de l’aide n’était pas certain, prouve qu’ETVA a agi comme l’aurait fait toute autre banque.

4.4.5.   Appréciation

4.4.5.1.   Article 296 du traité

(141)

Dans son appréciation de la mesure D2, la Commission a conclu que la mesure D4 ne relevait pas du champ d’application de l’article 296 du traité. De ce fait, il convient de l’apprécier au regard des règles relatives aux aides d’État.

4.4.5.2.   Existence d’une aide

(142)

En premier lieu, la Commission fait remarquer que le prêt avait été octroyé par l’ETVA sans être assorti d’une garantie publique.

(143)

La Commission note que, compte tenu du fait qu’ETVA a refusé de payer le prêt à HSY, HSY n’a jamais reçu de financement au titre du contrat de prêt en cause. Dès lors, il n’a pas été accordé d’avantage à HSY et la Commission peut immédiatement conclure que la mesure ne constitue pas une aide.

(144)

Les deux éléments suivants concernant la mesure D4, tout en n’étant pas critiques pour l’appréciation de la mesure, peuvent soulever des doutes quant à la validité de l’appréciation d’autres mesures. C’est pourquoi la Commission les analysera.

(145)

Premièrement, la Grèce fait valoir que le fait qu’ETVA, compte tenu du risque existant de non-versement de l’aide à l’investissement, ait décidé de ne pas procéder au versement du prêt à HSY prouve qu’ETVA a agi en créancier privé normal, sans réserver de traitement favorable à HSY. La Commission fait remarquer que l’argument de la Grèce ne tient pas compte du fait que, quand l’ETVA a refusé de verser le prêt, elle n’était plus sous le contrôle de l’État mais sous celui de la Banque du Pirée. Dès lors, le refus de verser le prêt ne peut être considéré comme reflétant le mode selon lequel l’ETVA agissait quand elle était sous le contrôle de l’État. Par conséquent, le point de vue selon lequel une banque privée aurait évité d’octroyer un prêt à HSY est confirmé.

(146)

Deuxièmement, la Commission fait remarquer que la mesure D4 inclut le même type de garanties que la mesure D3. La mesure D4 a été signée alors que la Banque du Pirée avait déjà acquis le contrôle d’ETVA. Toutefois, ce fait ne prouve pas que la mesure D3 était effectivement acceptable pour une banque privée. En effet, les deux situations ne sont pas comparables, pour plusieurs raisons. La Commission souligne, par exemple, que lorsque le contrat de prêt a été signé, le 31 mai 2002, il était déjà connu (et l’ETVA le savait certainement, étant elle-même actionnaire de HSY jusqu’à cette date) que le versement de l’aide à l’investissement était «gelé» pour des raisons administratives (91). Dès lors, lorsque l’ETVA a signé le contrat, le 31 mai 2002, elle était déjà en mesure de refuser de verser le prêt en cause (92). Elle savait qu’elle avait cette possibilité. Il s’agit d’une situation différente de celle dans laquelle l’ETVA se trouvait quand elle a signé le contrat du prêt, en juillet 1999. Une autre différence par rapport à la mesure D3 réside dans le fait que, quand le contrat de prêt a été signé le 31 mai 2002, deux entreprises internationales avaient finalisé le rachat de HSY et allaient y réaliser des investissements. Le rachat a augmenté les probabilités de survie de l’entreprise. Pareil rachat n’aurait pas pu être prévu en juillet 1999.

4.5.   Application abusive de l’aide de 54 milliards GRD (160 millions EUR) autorisée en 1997 (mesure E7)

4.5.1.   Description de la mesure

(147)

Le 15 juillet 1997, outre la décision N 401/97 qui autorisait l’aide à l’investissement, la Commission a publié la décision C 10/94. Par cette décision, elle a clos la procédure prévue à l’article 88, paragraphe 2, en autorisant, en vertu du règlement (CE) no 1013/97, la radiation de dettes d’un montant de 54 milliards GRD (160 millions EUR), qui correspondaient aux dettes liées aux activités civiles du chantier naval. La radiation de dettes pour activités militaires du chantier naval, qui a eu lieu en même temps, n’a pas été appréciée sur la base des règles relatives aux aides d’État.

4.5.2.   Motifs d’ouverture de la procédure

(148)

Dans la décision d’extension de la procédure, la Commission doutait que les deux conditions prévues à la décision C 10/94 aient été respectées. Premièrement, la radiation de dettes avait été autorisée à condition que le plan de restructuration soit mis en œuvre, le plan d’investissement constituant un des deux piliers de ce dernier. Ainsi que la Commission l’a expliqué dans la décision d’ouverture de la procédure (voir description de la mesure D1), elle doute que le plan d’investissement ait été correctement mis en œuvre. Deuxièmement, la décision C 10/94 interdit l’octroi d’une aide supplémentaire au fonctionnement en vue de la restructuration. La Commission fait remarquer que les différentes mesures qui sont incluses dans la décision d’extension de la procédure semblent constituer une aide supplémentaire à la restructuration. Il semble, dès lors, que cette condition n’ait pas été respectée.

4.5.3.   Observations des parties intéressées

(149)

Elefsis Shipyards fait valoir que le non respect des deux conditions stipulées dans la décision d’ouverture de la procédure constitue un motif fondé pour considérer qu’il y a eu application abusive de l’aide. En outre, Elefsis Shipyards fait valoir que la privatisation de 1995 n’a jamais été une véritable privatisation, notamment parce que, d’une part, les salariés de l’entreprise n’ont jamais assumé de risque financier en tant qu’actionnaires étant donné qu’ils n’ont payé qu’une petite partie de la somme qu’ils auraient dû payer, et, d’autre part, les contributions qu’ils ont effectivement versées ont été intégralement remboursées par l’État grec lors de la privatisation de 2001-2002. Il convient que la Commission considère l’absence de privatisation véritable, qui constituait un préalable à la radiation de dettes, comme une violation supplémentaire de la décision C 10/94.

4.5.4.   Les observations présentées par la Grèce

(150)

Dans les observations présentées concernant la décision d’extension de la procédure, la Grèce et HSY (93) font valoir que l’interdiction d’aide à la restructuration supplémentaire rend simplement illégale toute nouvelle aide. Cette interdiction, si elle n’est pas respectée, n’a pas pour effet de rendre non compatible l’aide qui a été autorisée par la décision C 10/94. En outre, la Grèce fait remarquer que la décision interdit qu’une «aide supplémentaire au fonctionnement» (telle que visée à l’article 5 de la directive 90/684/CEE du Conseil) soit octroyée aux fins de restructuration. Pour ce motif, elle conteste qu’après 1997 elle n’ait pas été autorisée à octroyer une aide à la restructuration à HSY.

(151)

En ce qui concerne le plan d’investissement, la Grèce et HSY font valoir que la décision C 10/94 n’incluait pas de condition quant à la mise en œuvre d’un plan de restructuration. En outre, elle ne pouvait pas inclure de condition de ce type, compte tenu du fait que ni la directive 90/684/CEE ni le règlement (CE) no 1013/97, qui constituent la base juridique de la décision, n’incluaient de condition similaire. La seule condition qui avait été stipulée était la privatisation partielle de HSY et la soumission (et non la mise en œuvre) d’un plan d’investissement.

4.5.5.   Appréciation

4.5.5.1.   Article 296 du traité

(152)

L’article 296 n’est pas applicable à la présente mesure, étant donné qu’elle concerne la radiation de dettes exclusivement liées aux activités civiles (commerciales) du chantier naval. En outre, la décision C 10/94 s’appuyait sur les règles relatives aux aides d’État et non sur l’article 296 du traité.

4.5.5.2.   Mise en œuvre du plan d’investissement

(153)

En ce qui concerne la mise en œuvre du plan d’investissement, la Commission estime qu’elle constituait une condition stipulée dans la décision C 10/94. En effet, deux paragraphes avant la conclusion de la décision, il est cité que «Le plan d’investissement n’a pas encore commencé […]. Dès que le plan en question sera réalisé, la restructuration en cours sera achevée et la viabilité des chantiers navals sera rétablie.» À l’avant-dernier paragraphe, la Commission rappelle l’interdiction d’accorder des aides ultérieures à la restructuration. Enfin, le dernier paragraphe cite: «À la lumière des éléments précités, la Commission a décidé de clore la procédure de l’article 93, paragraphe 2, en autorisant l’aide aux conditions décrites dans la présente lettre. Si la Commission estime qu’une de ces conditions n’est pas respectée, elle peut exiger la suspension et/ou le remboursement de l’aide.» Le fait que la Commission ait utilisé le terme «conditions» au pluriel signifie qu’il existait au moins encore une condition au-delà de l’interdiction d’octroyer des aides ultérieures à la restructuration. Sur la base de la structure et du contenu de la décision, il est possible de conclure que la mise en œuvre du plan d’investissement était une condition. La Commission a déjà apprécié dans le détail la mise en œuvre de l’aide à l’investissement dans son analyse de la mesure D1. La Commission a conclu que HSY n’avait pas mis en œuvre le plan d’investissement dans un délai raisonnable. Le 31 décembre 2001 — après prorogation du délai d’achèvement du plan d’investissement — HSY avait exécuté 63 % à peine du plan. De ce fait, la Commission aboutit à la conclusion que cette condition n’a pas été respectée.

(154)

La Grèce fait valoir que la mise en œuvre du plan d’investissement n’est pas stipulée en tant que condition au règlement (CE) no 1013/97 qui constitue la base juridique de la décision C 10/94. La Commission rappelle que l’aide a été autorisée par la décision C 10/94. Dès lors, il convient de respecter les conditions prévues à la décision en cause. Si la Grèce estimait que les conditions stipulées dans la décision C 10/94 n’étaient pas conformes aux conditions stipulées au règlement (CE) no 1013/97, elle aurait dû attaquer la décision C 10/94. Toutefois, elle ne l’a pas fait dans le délai prévu à l’article 230 du traité. À titre auxiliaire, la Commission rappelle que le règlement (CE) no 1013/97 constitue simplement une modification de la directive 90/684/CEE du Conseil dans le but d’augmenter le montant de l’aide pouvant être accordée à trois groupes navals. En ce qui concerne HSY, au règlement (CE) no 1013/97 il est indiqué: «Toutes les autres dispositions de la directive 90/684/CEE sont applicables à ces chantiers.» La Commission rappelle que le règlement 90/684/CEE autorise l’octroi d’aides aux chantiers navals grecs si elles sont «accordées en vue de la restructuration financière des chantiers dans le cadre d’un programme de restructuration systématique et spécifique lié à l’aliénation des chantiers par la vente.» Cela signifie que le Conseil n’aurait pas pu être satisfait par la simple soumission d’un plan de restructuration mais qu’il estimait que sa mise en œuvre était véritablement nécessaire. En effet, comment une aide pourrait-elle être accordée «dans le cadre d’un programme de restructuration systématique et spécifique», si ce programme ne devait pas être mis en œuvre?

(155)

La condition n’ayant pas été respectée, il y a eu application abusive de l’aide et, conformément au dernier paragraphe de la décision C 10/94, l’aide doit être récupérée.

4.5.5.3.   Interdiction d’accorder «de nouvelles aides au fonctionnement accompagnant la restructuration»

(156)

À l’avant-dernier paragraphe de la décision C 10/94, il est indiqué que «la Commission fait remarquer que le règlement (CE) no 1013/97 a été publié par le Conseil à condition qu’il ne soit pas accordé de nouvelles aides au fonctionnement en vue de la restructuration aux chantiers navals relevant du présent règlement. De ce fait, il ne peut être octroyé à l’avenir pareille aide à la restructuration à ce chantier naval.» Les parties à la présente procédure sont en désaccord quant à l’interprétation de la condition concernée. La Grèce et HSY estiment que, sur la base de cette condition, toute aide au fonctionnement en vue de la restructuration octroyée après la publication de la décision serait automatiquement non compatible et devrait être récupérée. Selon Elefsis Shipyards, sur la base de cette condition, toute aide au fonctionnement en vue de la restructuration accordée après la publication de la décision constituerait une application abusive de l’aide autorisée par la décision C 10/94 et devrait, par conséquent, amener au recouvrement de l’aide autorisée par la décision C 10/94, au-delà du recouvrement de la nouvelle aide au fonctionnement pour restructuration.

(157)

La Commission fait remarquer que l’objectif de l’interdiction d’accorder de nouvelles aides au fonctionnement en vue de la restructuration est d’éviter l’accumulation d’aides au-delà du taux prévu à la décision. La Commission estime que cet objectif est atteint avec la récupération de toute aide au fonctionnement supplémentaire ayant été accordée après la publication de la décision C 10/94. En effet, en récupérant l’aide supplémentaire, il y a restitutio in integrum et l’accumulation d’aides au-delà du taux prévu à la décision C 10/94 est évitée. Pour ce motif, la Commission conclut que l’octroi d’une nouvelle aide au fonctionnement pour restructuration après la publication de la décision C 10/94 n’implique pas une obligation de récupérer l’aide autorisée par la décision C 10/94, si l’aide supplémentaire est effectivement récupérée.

(158)

La Commission fait remarquer que, afin de constater s’il convient de récupérer l’aide autorisée par la décision C 10/94, il n’est pas nécessaire de déterminer laquelle des mesures d’aide illégalement mises en œuvre après la publication de la décision C 10/94 constitue une «aide au fonctionnement en vue de la restructuration.» En effet, dans la présente décision, la Commission aboutira à la conclusion qu’il convient de récupérer toutes les mesures d’aide qui ont été mises en œuvre illégalement après la publication de la décision C 10/94. Par conséquent, chacune des mesures pouvant le cas échéant être qualifiée d’aide nouvelle au fonctionnement en vue de la restructuration doit être récupérée. Avec la récupération, il y aura restitutio in integrum et de ce fait une éventuelle accumulation d’aides à la restructuration sera évitée. De cette façon, la condition prévue à la décision C 10/94 sera respectée.

4.5.5.4.   Non paiement du prix d’acquisition

(159)

Au cours de l’examen approfondi de l’affaire réalisé dans le cadre de la procédure d’enquête, la Commission a repéré une violation supplémentaire de la décision C 10/94: durant toute la période où les salariés — en tant que détenteurs de 49 % des actions de HSY — ont participé à la gestion de HSY, ils n’ont jamais payé le prix d’acquisition qu’ils s’étaient engagés à payer au titre du contrat de privatisation partielle de septembre 1995.

(160)

Afin de comprendre cette violation de la décision C 10/94, il convient préalablement d’analyser le texte et la base juridique de la décision en question.

(161)

Les considérants de la directive 90/684/CEE stipulent «qu’une restructuration financière à court terme de l’industrie grecque de la construction navale est nécessaire pour permettre aux organismes publics qui en sont les propriétaires de lui rendre sa compétitivité en la cédant à de nouveaux propriétaires». Dans ce contexte, l’article 10 de la directive prévoit: «2. Au cours de l’année 1991, les aides de fonctionnement à la construction navale, à la transformation et à la réparation navales non liées à de nouveaux contrats peuvent être considérées comme compatibles avec le marché commun si elles sont accordées en vue de la restructuration financière des chantiers dans le cadre d’un programme de restructuration systématique et spécifique lié à l’aliénation des chantiers par la vente. 3. En dépit de l’obligation, visée au paragraphe 2, d’aliéner les chantiers en les vendant, le gouvernement grec est autorisé à maintenir une participation majoritaire de 51 % dans l’un des chantiers, si cette décision est justifiée dans l’intérêt de la défense.» La Commission fait remarquer que la directive utilise l’expression «en la cédant à de nouveaux propriétaires» et non «en la donnant» à de nouveaux propriétaires. Ceci signifie que les nouveaux propriétaires devaient payer un prix en échange de la propriété du chantier naval. La propriété n’est pas accordée à titre gratuit. La phrase «[afin de] lui rendre sa compétitivité en la cédant à de nouveaux propriétaires» explique le but de ce terme. Aussi longtemps que les chantiers étaient la propriété de l’État, ils n’ont pas pris les mesures nécessaires pour en rétablir la compétitivité. Ainsi, ils avaient constamment besoin d’aides d’État. Afin de faire face à cette situation, qui est inadmissible au regard de l’article 87 du traité, le Conseil a autorisé l’octroi d’une dernière aide (c’est-à-dire qu’il était possible d’octroyer une aide en 1991) mais il a posé comme condition la cession des chantiers navals à de nouveaux propriétaires considérant que ceux-ci prendraient les mesures requises pour rétablir la compétitivité, afin que les chantiers navals n’aient plus besoin d’aide au fonctionnement en vue de la restructuration (94).

(162)

Comme indiqué au chapitre 2 intitulé «Décisions antérieures de la Commission et du Conseil» de la présente décision, en juin 1995, la Commission a publié une décision négative dans la procédure C 10/94 car HSY n’avait pas été aliénée, comme l’exigeait la directive 90/684/CEE. La Grèce a sollicité le sursis à l’exécution de la décision en faisant valoir que l’aliénation devait avoir lieu sous peu. La Grèce a elle-même présenté le contrat de septembre 1995 comme portant sur l’aliénation du chantier naval. Sur cette base, la Commission a révoqué sa décision négative.

(163)

Les considérants du règlement (CE) no 1013/97 citent: «considérant que, malgré les efforts déployés par le gouvernement grec pour privatiser tous ses chantiers publics avant mars 1993, les chantiers helléniques n’ont été vendus qu’en septembre 1995 à une coopérative ouvrière constituée par leurs salariés, l’État ayant conservé une participation majoritaire de 51 % dans le capital de ces chantiers en raison de leur importance stratégique; considérant que la viabilité financière et la restructuration des chantiers helléniques exigent des aides permettant à l’entreprise d’annuler les dettes accumulées avant sa privatisation tardive.» L’article 1, paragraphe 3, du règlement (CE) no 1013/97 cite: «Les aides envisagées en faveur des chantiers navals helléniques, sous forme d’annulation de dettes à concurrence de 54 525 millions de drachmes grecques, correspondant aux dettes liées aux travaux civils de ces chantiers au 31 décembre 1991 ainsi qu’aux intérêts et pénalités courus jusqu’au 31 janvier 1996, peuvent être considérées comme compatibles avec le marché commun. Toutes les autres dispositions de la directive 90/684/CEE sont applicables à ces chantiers.» Le règlement (CE) no 1013/97 a été publié, dès lors, parce que, pour devenir viable, HSY avait besoin d’une aide plus importante que celle qui avait été autorisée en vertu de l’article 10 de la directive 90/684/CEE. Plus précisément, le règlement (CE) no 1013/97 a autorisé l’annulation des intérêts et des pénalités relatifs aux dettes au 31 décembre 1991 qui avaient augmenté depuis. Le règlement (CE) no 1013/97 a été appliqué jusqu’au 31 décembre 1998. La Commission fait remarquer que le Conseil a utilisé, dans ce cas également, les termes «vendus» et «privatisation» en ce qui concerne HSY. Le Conseil a approuvé l’aide ayant estimé qu’en septembre 1995 un contrat valide de vente avait été conclu, conformément au terme stipulé par la directive 90/684/CEE. En d’autres termes, l’aliénation des chantiers navals ne devait pas être stipulée comme condition, compte tenu du fait qu’il existait déjà un contrat valide de vente.

(164)

Au préambule de la décision C 10/94, il est rappelé que l’article 10 de la directive 90/684/CEE exige l’aliénation des chantiers navals. Ensuite, la décision C 10/94 indique que cette condition a été respectée «avec la cession, le 18 septembre 1995, de 49 % des actions du chantier à une coopérative des salariés du chantier.» Toutefois, compte tenu du fait que le montant de l’aide est supérieur à celui autorisé par la directive 90/684/CEE, «la Commission ne pouvait pas donner son approbation au titre des dispositions de la 7e directive» qui, pour ce motif, a été modifiée par le règlement (CE) no 1013/97, afin d’augmenter le montant de l’aide qui pouvait être octroyé à HSY. Compte tenu des conditions prévues au règlement (CE) no 1013/97 et à la directive 90/684/CEE, la décision C 10/94 a autorisé l’aide. La Commission fait remarquer que la décision C 10/94 utilise à nouveau le terme de «vente» et elle a estimé que le contrat conclu entre l’ETVA et les salariés en vue de la cession de 49 % des actions de HSY constituait une vente valide. La Commission souligne qu’elle avait reçu une copie du contrat de vente avant de publier la décision C 10/94 et, de ce fait, en connaissait le contenu. La Commission aboutit à la conclusion que, lorsqu’elle a publié la décision C 10/94, elle n’avait aucune raison de demander la cession de HSY (c’est-à-dire, de la stipuler expressément en tant que condition à respecter à l’avenir), étant donné qu’un contrat valide de vente avait déjà été signé en septembre 1995.

(165)

Cependant, la Commission rappelle que le contrat signé en septembre 1995 incluait des dispositions inhabituelles concernant le versement du prix de la vente: le prix de la vente, s’élevant à 8,1 milliards GRD (24 millions EUR) ne serait pas immédiatement payé par les salariés mais en 13 tranches annuelles, après une période de grâce de deux ans, c’est-à-dire, de 1998 à 2010. En dépit de ces conditions, la propriété des actions serait immédiatement cédée aux salariés. Jusqu’à l’acquittement du prix de vente par les salariés, l’ETVA conserverait les actions en gage. Afin de financer le paiement des tranches annuelles à l’ETVA, HSY prélèverait une partie du salaire et des allocations des salariés. Quelques mois après septembre 1995, le contrat est signé entre l’ETVA, HSY, la coopérative des salariés et chacun des salariés de HSY individuellement (le contrat de septembre 1995 avait été conclu entre l’ETVA et la coopérative des salariés). En vertu de ce contrat, chacun des salariés convenait d’acheter un nombre précis d’actions conformément aux dispositions prévues au contrat de septembre 1995. Ces contrats réitèrent également que HSY prélèverait une partie du salaire et de la prime de Noël et de Pâques afin de financer le paiement des tranches annuelles.

(166)

La Commission a désormais vérifié que les salariés n’ont jamais versé les tranches annuelles, c’est-à-dire, qu’ils ne les ont pas payées alors qu’ils participaient à la gestion du chantier naval en tant que détenteurs de 49 % des actions. Les trois premières tranches prévues au contrat de septembre 1995 — celles qui devaient être versées en 1998, 1999 et 2000 — n’ont pas été payées. En 2001, dans le cadre de la privatisation de HSY, les salariés et l’ETVA ont conclu un contrat en vertu duquel les salariés renonçaient à leur droit sur les 49 % du produit de la vente des actions de HSY à HDW/Ferrostaal. En échange, l’ETVA a renoncé à sa créance à l’égard des salariés au titre du versement du prix pour l’acquisition de 49 % des actions de HSY que les salariés devaient verser conformément au contrat de septembre 1995. De cette façon, en tant que propriétaires, les salariés n’ont jamais pris de risque financier quant au succès ou à l’échec de la restructuration.

(167)

La Commission a indiqué à la Grèce et à HSY que le non paiement du prix de vente par les salariés semble constituer une application abusive de la décision C 10/94, étant donné que, en raison de ce non paiement, la privatisation partielle dans le but de rétablir la compétitivité du chantier n’a jamais eu lieu.

(168)

La Grèce et HSY contestent ces conclusions. Entre autres, elles font valoir les trois motifs suivants pour rejeter les doutes exprimés par la Commission.

(169)

Premièrement, la Grèce invoque le fait que la privatisation est «réelle» et «authentique». Plus précisément, le gouvernement grec souligne que: «Les salariés ont acquis la qualité d’actionnaire conformément aux dispositions de la législation grecque. Ils ont été enregistrés au livre des actionnaires de la société et ont acquis tous les droits afférents en tant qu’actionnaires, y compris le droit de participation et de vote aux assemblées générales exerçant, ainsi, un contrôle et une influence sur l’administration quotidienne du chantier. En outre, l’acquisition des actions comportait le risque de la perte de leur valeur.»«Les salariés ont exercé le droit de préemption, prévu à la législation en vigueur, et participaient à l’augmentation du capital social proportionnellement à la part qu’ils détenaient sur le capital social et, de ce fait, des capitaux privés ont été investis dans le chantier» (95).

(170)

En deuxième motif, la Grèce invoque le fait que le paiement du prix de la vente n’avait pas été stipulé comme condition à la décision C 10/94, mais même s’il l’avait été, la Commission a estimé que cette condition avait déjà été respectée. Plus précisément, la Grèce rappelle que «La Commission a indiqué dans la décision du 31 octobre 1995 que, dans le cadre de la procédure ouverte, elle poursuivra l’examen de toutes les actions entreprises par le gouvernement grec en vue de la mise en œuvre de l’accord de transfert de 49 % des actions à la coopérative des salariés ainsi que celui de son contenu, avant de prendre une décision finale quant à l’autorisation d’une annulation de dettes. C’est ce qu’elle a fait, aboutissant en 1997 à approuver l’annulation, en prenant une décision finale, sans poser la condition de la privatisation. Ainsi, en 1997, la Commission avait déjà examiné le contenu de l’accord et avait conclu qu’il s’agissait d’une privatisation, avant d’approuver l’annulation de dettes.» (96)

(171)

En troisième motif, la Grèce invoque le fait qu’ETVA avait correctement mis en œuvre le contrat de vente. En effet, étant donné qu’ils avaient dû participer à trois augmentations de capital afin de financer le plan d’investissement (97), les salariés «se sont trouvés dans l’impossibilité de remplir l’obligation de paiement du prix d’acquisition des actions. L’ETVA n’a pas poursuivi le recouvrement du prix auprès de chacun des 2 000 salariés par le biais de mesures coercitives, étant donné que, du point de vue réaliste, ces actions ne présentaient pas de probabilité d’aboutir […]. Au lieu de se lancer dans une poursuite judiciaire labyrinthique, prenant beaucoup de temps, qui serait particulièrement coûteuse et, en fin de compte, infructueuse […], se fondant sur le gage de ces actions vendues et non acquittées, l’ETVA a poursuivi et est arrivée à recouvrer sa créance du produit de la vente de ces actions en gage appartenant aux salariés, dans la mesure où ce produit couvrait la dette afférente (98).» En d’autres termes, la Grèce soutient que, compte tenu du fait que, dans le cadre de la privatisation de HSY en 2001-2002, l’ETVA a recouvré auprès de HDW/Ferrostaal 100 % du prix de vente — et pas uniquement 51 % — «enfin, comme il apparaît, le prix a été encaissé. Il est évident que l’acquittement du prix des actions des salariés par le biais de la vente a satisfait la prétention d’ETVA de recouvrer le prix […]. […] la question du non-paiement du prix du rachat ne se pose pas. (99)» En outre, il ne peut être contesté que la vente du chantier naval à HDW/Ferrostaal constitue une véritable privatisation.

(172)

La Commission a abouti aux conclusions suivantes. Comme précité, la décision C 10/94 et le règlement (CE) no 1013/97 aboutissent à la conclusion que si les actions de HSY avaient été vendues aux salariés en vertu du contrat de 1995, la condition d’aliénation des chantiers navals prévue à l’article 10 de la directive 90/684/CEE était respectée. Comme précité, cette condition visait au transfert de la propriété à des acteurs privés qui, compte tenu du fait qu’ils poursuivraient la maximisation de la valeur de leur investissement, prendraient les mesures nécessaires au rétablissement de la compétitivité des chantiers navals. Dans ce cadre, la Commission a reçu le contrat de septembre 1995 en tant que vente valide car il posait comme obligation conventionnelle aux salariés le versement de 24 millions EUR en tant que prix de l’acquisition de 49 % des actions de HSY. Suite au prix qu’ils devaient payer, en participant à la gestion des chantiers navals, les salariés veilleraient à préserver et à augmenter la valeur de leur investissement (100). Il semble, à présent, qu’ETVA qui était contrôlée par l’État grec, n’a jamais sérieusement entrepris de recouvrer ce paiement de la partie du prix de la vente que, conformément au contrat de septembre 1995, les salariés devaient avoir versé en 1998, 1999 et 2000. L’ETVA disposait de suffisamment de moyens pour assurer le versement du prix de la vente. L’ETVA contrôlait HSY, l’encaissement de ce montant sur les salaires et les allocations des salariés était donc un droit légitime (101). En outre, HSY et la coopérative des salariés avaient également contracté l’obligation conventionnelle à l’égard d’ETVA, par le biais des accords individuels signés avec chacun des salariés après septembre 1995. Dès lors, l’ETVA pouvait introduire des voies de recours contre HSY et la coopérative des salariés et il ne lui fallait pas le faire contre chacun des salariés individuellement, contrairement à ce que les autorités grecques ont fait valoir. De ce fait, la Commission conclut que c’est à dessein que les autorités grecques n’ont pas demandé le paiement des tranches annuelles auprès des salariés. En adoptant cette attitude, la Grèce a montré qu’elle n’avait pas l’intention de garantir le paiement du prix de la vente par les salariés, ce qui a radicalement modifié la situation des salariés: au lieu d’être contraints à payer le prix de l’acquisition, les salariés n’ont pas été obligés d’investir cette somme de leur argent; il en résulte que, participant à la gestion des chantiers navals, ils accordaient moins d’importance à la préservation et à l’augmentation de la valeur des actions et au rétablissement de la viabilité économique (et ils s’intéressaient plutôt à préserver l’emploi et les conditions de travail). En outre, étant donné que les salariés n’ont pas payé le prix d’acquisition, il était attendu que, à moyen ou à long terme, l’ETVA procéderait à une exécution forcée au titre de son nantissement sur les actions et que, par conséquent, les salariés ne disposeraient plus de parts sociales dans les chantiers navals. Dans ce cadre, la Commission est dans l’impossibilité de comprendre comment les salariés pouvaient s’intéresser à la préservation et à l’augmentation de la valeur de HSY et prendre les mesures nécessaires au rétablissement de sa compétitivité. Dès lors, la Commission estime que le fait que l’État grec n’a pas entrepris de garantir le paiement du prix de vente par les salariés, comme prévu au contrat de septembre 1995, a radicalement modifié la situation des salariés. Par conséquent, étant donné qu’ETVA n’a pas demandé le paiement du prix de vente auprès des travailleurs, le transfert de propriété réalisé en septembre 1995 ne constituait pas une véritable «aliénation», visant à rétablir la compétitivité des chantiers navals, comme exigé par la directive 90/684/CEE. En conclusion, puisqu’elle n’a pas demandé le paiement du prix de vente auprès des salariés, la Grèce a abusé de la décision C 10/94. En effet, la décision en cause a été publiée par la Commission qui a raisonnablement supposé que le contrat de septembre 1995 serait exécuté par la banque ETVA appartenant à l’État, et notamment, qu’ETVA recouvrerait le prix de vente auprès des salariés de HSY, ainsi que le stipulaient formellement les dispositions du contrat, garantissant ainsi que les nouveaux propriétaires auraient un intérêt financier à prendre les mesures nécessaires au rétablissement de la compétitivité et de la viabilité des chantiers navals. La Commission ne pouvait pas prévoir que, ayant elle-même présenté le contrat de septembre 1995 comme un contrat de vente de HSY, la Grèce ne procéderait pas intentionnellement au recouvrement du prix de la vente auprès de l’acheteur, en dépit de l’existence de nombreuses dispositions contractuelles et juridiques autorisant le recouvrement du prix. La Commission estime que ce comportement est similaire à celui consistant à soumettre à la Commission des informations inexactes et à la mise en œuvre abusive d’une aide. De ce fait, il convient que l’aide autorisée par la décision C 10/94 soit récupérée auprès de HSY.

(173)

La Commission a conclu qu’il convient de rejeter les trois motifs invoqués par la Grèce et HSY, brièvement exposés ci-dessus.

(174)

En ce qui concerne le premier motif – «la privatisation était authentique et réelle car les salariés sont devenus propriétaires des actions et ont entrepris le contrôle correspondant sur HSY» - la Commission fait remarquer que le transfert de la propriété constituait une condition nécessaire mais pas suffisante. En effet, la décision C 10/94 et le règlement (CE) no 1013/97 se fondent sur le fait de la «vente» des actions aux salariés en septembre 1995. En d’autres termes, ils se fondent sur l’assomption selon laquelle les salariés paieraient le prix d’acquisition conformément aux termes du contrat de septembre 1995. Ils ne se fondent pas sur le fait que les actions aient été «transférées» ou «données» aux salariés. Ainsi qu’il a été précédemment expliqué, il est raisonnable que la Commission et le Conseil considèrent le paiement du prix de vente comme revêtant une importance déterminante, étant donné qu’il a incité les salariés à gérer les chantiers navals avec comme critère la valeur des actions. Comme précité, compte tenu du fait qu’il ne leur a pas été nécessaire de payer ce prix, leur situation était différente de celle d’un propriétaire dans des conditions d’économie de marché libre. En ce qui concerne l’argument de la Grèce selon lequel «l’acquisition des actions comportait le risque de la perte de leur valeur», la Commission fait remarquer que, bien que le fait qu’ils deviennent officiellement propriétaires des actions ne soit pas contesté, les salariés étaient nettement moins préoccupés par l’évolution de la valeur des actions en raison du fait qu’ils n’ont pas été obligés de payer un prix élevé (c’est-à-dire, une réduction des salaires et des allocations durant 12 ans) pour les acquérir. En outre, étant donné que les salariés n’ont pas payé le prix d’acquisition, ils devaient s’attendre à ce qu’ETVA procède à une exécution forcée au titre de son nantissement sur les actions et que, par conséquent, les salariés perdent la propriété des actions en question. Enfin, en ce qui concerne l’argument de la Grèce selon lequel «les salariés ont […] participé à l’augmentation du capital social proportionnellement à la part qu’ils détenaient sur le capital social et, de ce fait, des capitaux privés ont été investis dans le chantier», la Commission ne conteste pas le fait que les salariés ont participé à l’augmentation du capital social (ce sera décrit dans la description et l’appréciation de la mesure E10). Cependant, la Commission rappelle que, conformément au contrat de septembre 1995, la participation à l’augmentation du capital social n’accordait pas aux salariés le droit d’acquérir de nouvelles actions dans HSY. La Commission ne comprend pas, dès lors, comment la participation pouvait, en elle-même, amener les salariés à gérer les chantiers navals de façon à assurer la préservation ou l’augmentation de la valeur des actions, compte tenu du fait que cette participation ne leur accordait pas de nouvelles actions (102). La Commission ne comprend pas non plus comment cette participation pouvait constituer une «aliénation» de HSY, compte tenu du fait que les salariés n’ont pas reçu d’actions supplémentaires au titre de leurs investissements. Par ailleurs, la Commission rappelle que la somme totale investie par les salariés lors desdites augmentations du capital social était de loin inférieure à celle qu’ils auraient dû investir s’ils avaient participé à ces augmentations de capital social et s’ils avaient payé le prix d’acquisition conformément aux termes du contrat de septembre 1995. Il est rappelé que la décision C 10/94 et le règlement (CE) no 1013/97 s’appuyaient sur l’hypothèse selon laquelle le contrat de septembre 1995 serait exécuté, c’est-à-dire que les salariés verseraient le prix d’acquisition et leur participation aux augmentations du capital social. Compte tenu du fait que la somme que les salariés devaient investir était de loin inférieure à celle raisonnablement escomptée par la Commission quand elle a publié la décision C 10/94 (et de celle escomptée par le Conseil quand il a publié le règlement (CE) no 1013/97), la Commission estime que cette somme ne constituait pas une incitation suffisante pour que les salariés accordent l’importance requise à la valeur des actions et au rétablissement de la compétitivité de HSY.

(175)

En ce qui concerne le deuxième motif invoqué par la Grèce — «le paiement du prix de la vente n’avait pas été stipulé comme condition à la décision C 10/94, mais même s’il l’avait été, après avoir examiné le contrat de septembre 1995, la Commission a estimé que cette condition avait déjà été respectée» — la Commission a auparavant rappelé que l’aliénation du chantier naval avait été stipulée comme condition à la directive 90/684/CEE et elle a expliqué la raison pour laquelle cette condition avait été stipulée. La Commission a également déjà expliqué avoir pris une décision négative en juillet 1995 parce que le chantier naval n’avait pas été vendu. Dès lors, il était évident pour la Grèce que la Commission n’était pas satisfaite par un simple transfert de propriété aux salariés et, enfin, la Commission a reçu le contrat de septembre 1995 uniquement parce qu’il constituait une véritable vente, c’est-à-dire, que les salariés paieraient un prix d’acquisition élevé et, de ce fait, ils auraient un véritable intérêt à ce que la compétitivité soit rétablie. La Commission rappelle également que le règlement (CE) no 1013/97, a modifié la directive 90/684/CEE uniquement quant à l’intensité de l’aide au fonctionnement en vue de la restructuration qui pouvait être octroyée à HSY. Compte tenu du fait que le contrat de septembre 1995 avait déjà été soumis à la Commission et au Conseil lors de la publication du règlement (CE) no 1013/97 et de la décision C 10/94, il n’était pas nécessaire que les actes juridiques en question réitèrent la condition relative à l’aliénation des chantiers navals. Ils rappellent simplement que les actions de HSY ont été «vendues.» Sur cette base, la décision C 10/94 conclut que «les conditions stipulées à l’article 10 de la directive ont été respectées […].» En d’autres termes, l’appréciation effectuée par la Commission dans la décision C 10/94 (ainsi que l’appréciation du Conseil dans le règlement (CE) no 1013/97) prend en compte l’existence du contrat de septembre 1995 que la Grèce a présenté en tant qu’aliénation et qui, surtout, impose aux salariés l’obligation contractuelle de payer 24 millions EUR à l’ETVA pour l’acquisition de 49 % des actions de HSY et prévoit exactement les modalités de recouvrement du prix d’acquisition auprès des salariés et de paiement à l’ETVA. Compte tenu du fait que les obligations et les droits des parties ont été précisément définis par contrat, que la Grèce a elle-même présenté le contrat en tant qu’aliénation de HSY, et que le gouvernement grec a lui-même arrêté une loi obligeant les salariés à verser le prix d’acquisition à l’ETVA (voir note 100 de bas de page), la Commission n’avait aucune raison de douter que l’État grec exécuterait dûment le contrat. En particulier, la Commission ne pouvait pas s’attendre à ce que l’État lui-même omette sciemment de recouvrer le prix d’acquisition auprès de l’acheteur. La Commission avait toutes les raisons de penser que HSY avait été aliénée et elle n’avait pas besoin de réitérer que HSY devait être aliénée.

(176)

En ce qui concerne le troisième motif invoqué par la Grèce pour dissiper les doutes émis par la Commission — «le contrat de septembre 1995 était dûment exécuté» —, la Commission fait remarquer que le contrat de septembre 1995 prévoyait clairement que le prix d’acquisition serait payé. Le paiement des tranches annuelles commencerait en 1998 et leur financement serait réalisé par le biais du prélèvement d’une partie des salaires et des primes de Noël et de Pâques. Compte tenu du fait que les salariés avaient accepté une réduction de leurs salaires et allocations futures, il n’était pas nécessaire pour l’ETVA de recouvrer le prix d’acquisition auprès de chacun des salariés individuellement: HSY était en mesure de prélever directement une partie de leur salaire. Les choses étant ainsi, la Commission ne comprend pas comment le non paiement des tranches annuelles peut être justifié par le fait que «les travailleurs se sont trouvés dans l’impossibilité de remplir leur obligation de verser le prix d’acquisition des actions.» L’ETVA devait simplement s’assurer que le prélèvement des montants correspondants sur les salaires et les allocations était effectué par HSY. En tant qu’actionnaire majoritaire, l’ETVA contrôlait HSY. En outre, HSY était tenue de prélever les sommes en cause conformément aux conditions des accords conclus entre l’ETVA, HSY, la coopérative des salariés et chacun des salariés individuellement. Dès lors, l’ETVA pouvait introduire une action contre HSY au motif que celle-ci ne respectait pas les conditions du contrat (103). Dès lors, la Commission conclut qu’ETVA, qui était contrôlée par l’État grec, n’a pas entrepris, comme elle y était tenue conformément aux dispositions du contrat de vente de septembre 1995, d’assurer le paiement du prix de la vente. Comme expliqué ci-dessus, ce fait constitue une application abusive de la décision C 10/94, compte tenu du fait que, de façon fondée, cette décision supposait que le contrat en cause était dûment exécuté. À titre auxiliaire, la Commission souligne que, même si l’argument de la Grèce selon lequel l’ETVA n’était pas en mesure de recouvrer le prix d’acquisition auprès des salariés était fondé, il n’en resterait pas moins que l’aide approuvée par la décision C 10/94 devrait être récupérée. En effet, si l’argument en cause est fondé, cela implique que la Grèce a notifié à la Commission un contrat de vente qui, dès le départ, ne pouvait pas être exécuté (c’est-à-dire que l’État grec ne peut pas recouvrer le prix d’acquisition auprès de l’acheteur) (104). Dans ce cas, la Commission est tenue d’estimer que la décision C 10/94 s’appuyait sur des informations trompeuses soumises par la Grèce et, par conséquent, il convient qu’elle la révoque.

(177)

En ce qui concerne le troisième motif invoqué par la Grèce, la Commission rejette également l’argument selon lequel l’exécution forcée au titre du nantissement sur les actions non payées et la vente de celles-ci dans le cadre de la privatisation de 2001-2002 est similaire au recouvrement auprès des salariés du paiement qu’ils étaient tenus d’effectuer conformément au contrat de septembre 1995. Premièrement, compte tenu du fait qu’ETVA n’a pas poursuivi le recouvrement du prix de vente auprès des salariés, ceux-ci ne s’attendaient pas réellement à devoir investir la somme correspondante et, par conséquent, ils ne risquaient pas de subir de pertes en cas de dépréciation des actions. Comme expliqué plus haut, ce fait s’oppose à la décision C 10/94 qui supposait que HSY avait été «aliénée», c’est-à-dire, un investisseur privé avait risqué une somme précise et importante de son argent en achetant des actions de HSY et, pour cette raison, aurait intérêt à gérer les chantiers navals de façon à maximiser la valeur de son portefeuille. Deuxièmement, les sommes encaissées par l’ETVA — et, dès lors, par l’État grec — sont totalement différentes. Avec l’exécution forcée au titre du nantissement sur les actions, l’ETVA a assumé 100 % du risque relatif à la valeur de HSY (renversant ainsi la privatisation partielle). En outre, l’ETVA n’a encaissé que 6,1 millions EUR lorsqu’elle a vendu 100 % des actions de HSY à HDW/Ferrostaal, c’est-à-dire que l’ETVA n’a encaissé que 3 millions de la vente de 49 % des actions. Cette somme est de loin inférieure à celle qu’ETVA aurait dû recouvrer auprès des salariés, conformément aux dispositions du contrat de septembre 1995, c’est-à-dire 24 millions EUR payables en tranches annuelles de décembre 1998 à décembre 2010.

(178)

Enfin, la Commission ne conteste pas l’argument selon lequel une véritable privatisation a eu lieu lorsque HDW/Ferrostaal a acquis 100 % des actions de HSY. Elle rappelle toutefois que l’article 10 de la directive 90/684/CEE n’autorisait que l’octroi d’une aide liée à l’aliénation des chantiers navals. De même, ce règlement (CE) no 1013/97 et la décision C 10/94 ont autorisé l’aide parce que les chantiers navals avaient été «aliénés.» Dès lors, il convenait d’octroyer l’aide dans le cadre de la vente des chantiers navals. Elle ne pouvait être octroyée au titre d’une vente qui allait être réalisée après plusieurs années. Par conséquent, le fait que HSY ait été réellement privatisée lors de sa vente à HDW/Ferrostaal ne change en rien la conclusion selon laquelle il y eu application abusive de la décision C 10/94. Il est également rappelé que, au moment de la vente à HDW/Ferrostaal, plusieurs années s’étaient déjà écoulées depuis l’expiration tant de la directive 90/684/CEE que du règlement (CE) no 1013/97. Dès lors, HSY n’aurait pas été en mesure de recevoir l’aide autorisée par la décision C 10/94 dans le cadre de la privatisation de 2001-2002.

(179)

La Commission conclut qu’aucun des motifs invoqués par la Grèce ne peut modifier la conclusion précédente, à savoir qu’en refusant d’assurer le paiement du prix de vente par les salariés, l’ETVA appartenant à l’État, a appliqué de façon abusive la décision C 10/94. Ce fait constitue, dès lors, un second abus – au-delà de l’absence de mise en œuvre du plan d’investissement –de la décision C 10/94 et un second motif justifiant la récupération de l’aide autorisée par la décision en cause.

4.5.5.5.   Justification de la procédure choisie par la Commission

(180)

Dans la décision d’extension de la procédure, la Commission exprimait des doutes quant au fait que les salariés n’avaient pas payé le prix d’acquisition de 49 % de HSY. Cependant, ces doutes ont été exprimés dans le cadre de l’appréciation de la mesure E10 (qui, dans la décision d’extension de la procédure, est appelée «mesure 10»). Pareils doutes n’ont pas été exprimés lors de l’appréciation de la mesure E7 (qui, dans la décision d’extension de la procédure, est appelée «mesure 7»). Dès lors, la décision d’extension de la procédure n’indique pas que le non paiement du prix d’acquisition pourrait constituer une application abusive de la décision C 10/94. On pouvait dès lors se demander si, conformément à l’article 6 du règlement (CE) no 659/1999, la Commission aurait dû publier une nouvelle décision en vertu de laquelle elle étendrait pour une seconde fois la procédure officielle d’enquête afin d’exprimer des doutes sur le point concerné. La Grèce prétend que c’est précisément ce qui se produit (105).

(181)

La Commission n’estime pas qu’elle était tenue d’étendre pour une seconde fois la procédure d’examen dans l’affaire concernée. Premièrement, comme précité, les doutes concernant le fait précis (c’est-à-dire, le paiement ou le non paiement du prix d’acquisition par les salariés) ont été exprimés dans la décision d’extension de la procédure et, par conséquent, les parties intéressées avaient la possibilité de présenter leurs observations sur ce point. Deuxièmement, en ce qui concerne le motif juridique que ce fait aurait pu constituer une application abusive de la mesure E7, la Commission a abouti à cette conclusion dans le cadre de l’examen approfondi de tous les faits réels et des lois, examen qu’elle a mené dans le cadre de la procédure officielle d’examen. Dans une affaire aussi étendue et complexe, qui porte même sur des mesures qui ont été appliquées il y a dix ans, parce qu’elle conduit à une meilleure connaissance des circonstances réelles et des aspects juridiques de l’affaire, la procédure d’examen permettra quasi-automatiquement à la Commission d’effectuer une analyse plus détaillée. Troisièmement, pendant longtemps, la Grèce a soumis des informations confuses quant au paiement du prix de vente par les salariés. Récemment, encore, dans leur réponse à la décision d’extension de la procédure, la Grèce et HSY ont soutenu que les salariés avaient commencé à payer le prix d’acquisition en 1998, comme prévu au contrat de septembre 1995 (106). Cependant, dans le cadre de la procédure d’examen, la Commission a réuni des preuves du contraire. Pour ce motif, elle a demandé à la Grèce et à HSY de présenter des documents incontestables pour appuyer leurs positions (107). Enfin, HSY et la Grèce ont admis que les salariés n’ont pas payé les tranches annuelles comme le prévoyait le contrat de septembre 1995. Après avoir clarifié les circonstances réelles de l’affaire, la Commission était désormais à même d’apprécier s’il y avait eu abus de décisions antérieures.

(182)

La Commission souligne également que, afin de permettre à la Grèce et à HSY de participer sur le fond de la procédure et afin de garantir le respect du droit de défense, elle a proposé à la Grèce et HSY (c’est-à-dire aux seules parties qui avaient présenté des observations sur la mesure E10, outre Elefsis Shipyards qui, dans ses observations avait déjà indiqué qu’elle considérait que, le prix d’acquisition n’ayant pas été payé, la Commission devait ordonner la recouvrement de l’aide autorisée par la décision C 10/94) de commenter son appréciation selon laquelle le non paiement pouvait être considéré comme une application abusive de la décision C10/94 (108). Tant la Grèce que HSY ont présenté des observations détaillées (109).

4.6.   Application abusive de l’aide à la fermeture d’installations d’un montant de 29,5 millions EUR qui avait été autorisée en 2002 (mesure E8)

4.6.1.   Description de la mesure

(183)

Le 5 juin 2002, la décision N 513/01 autorisait une aide d’un montant de 29,5 millions EUR destinée à encourager les salariés à quitter volontairement les chantiers navals de HSY. La Commission estimait que l’aide de 29,5 millions EUR constituait une aide compatible à la fermeture d’installations au sens de l’article 4 du règlement (CE) no 1540/98 et a accepté comme réduction suffisante de la capacité la réduction de la capacité annuelle de réparation de navires à 420 000 hommes-heures (salariés directs et main-d’œuvre louée).

4.6.2.   Motifs d’ouverture de la procédure

(184)

Dans la décision d’extension de la procédure, la Commission exprimait des doutes quant à l’application de la limitation de la capacité de production. L’obligation de soumettre des rapports semestriels n’avait pas été respectée. En outre, les autorités grecques ont transmis des données confuses quand elles ont été invitées à présenter les informations concernées.

4.6.3.   Observations des parties intéressées

(185)

Selon Elefsis Shipyards, le chiffre d’affaires de HSY et le nombre de navires faisant annuellement l’objet de réparations dans les chantiers navals sont tellement élevés qu’ils rendent impossible l’application de la limitation de la productivité à 420 000 hommes-heures.

4.6.4.   Observations de la Grèce

(186)

Selon la Grèce et HSY, les chantiers navals ont souvent recours aux services de sous-traitants qui se distinguent en deux catégories. Premièrement, les «sous-traitants de HSY», qui sont sélectionnés et rémunérés par HSY. Deuxièmement, les «sous-traitants de tiers» qui sont sélectionnés par les propriétaires des navires et négocient le prix directement avec eux. Les sous-traitants de tiers versent un montant à HSY, pour l’utilisation de ses installations. Selon la Grèce, seule la première catégorie de sous-traitants est tenue de respecter l’obligation de limitation de la productivité prévue à la décision N 513/01. Cependant, HSY ne sait pas combien d’heures ces «sous-traitants de HSY» travaillent, car leur rémunération est forfaitaire. Pour cette raison, la Grèce propose une méthode afin d’estimer approximativement le nombre d’heures travaillées par eux: en premier lieu, de la somme de la valeur des contrats qui leur a été payée, il est déduit un pourcentage de 15 % qui représente une marge bénéficiaire, ainsi qu’un pourcentage de 20 % (110), qui représente les hommes-heures indirectement productives. Le montant qui en résulte est ensuite divisé «par le coefficient annuel de coût de l’homme-heure, tel qu’il découle pour HSY des livres officiels qu’elle tient» (111). En appliquant cette méthode, la Grèce aboutit à un nombre total d’hommes-heures inférieur à 420 000 pour chaque année, de 2002 à 2006. La Grèce parvient, dès lors, à la conclusion que l’obligation de réduction de la capacité a été respectée. La méthode est brièvement présentée au tableau suivant.

 

1.1.2002-31.12.2002

1.1.2003-30.9.2003

1.10.2003-30.9.2004

1.10.2004-30.9.2005

1.10.2005-31.8.2006

A.

Hommes-heures directement productives des salariés de HSY

51 995

42 155

[…] (112)

[…]

[…]

B.

Rémunération sous-traitants de HSY (en EUR)

3 798 728

16 471 322

[…]

[…]

[…] (jusqu’au 30.6.2006)

C.

= B moins le bénéfice commercial (15 %) et les hommes-heures indirectement productives (20 %)

2 469 173

10 179 134

[…]

[…]

[…]

D.

Taux horaire (en EUR) des salariés de HSY

25,97

27,49

[…]

[…]

[…]

E.

Calcul des hommes-heures directement productives réalisées par les salariés des sous-traitants de HSY (= C/D)

95 077

370 284

[…]

[…]

[…]

F.

Total des heures directement productives qui relèvent de la décision N 513/01 (= A + E)

147 073

412 440

[…]

[…]

[…]

4.6.5.   Appréciation

4.6.5.1.   Article 296 du traité

(187)

Quant à la question de savoir si l’article 296 est applicable ou non à la présente mesure, la Commission rappelle que la répartition entre activités militaires et civiles est déjà effectuée dans la décision N 513/01 qui estime que la partie de l’aide d’État qui relève des règles relatives aux aides d’État s’élève à 25 %. L’aide d’un montant de 29,5 millions EUR portait, dès lors, exclusivement sur les activités civiles de HSY et peut être appréciée sur la base des règles relatives aux aides d’État.

4.6.5.2.   Existence d’une application abusive de l’aide

(188)

La Commission a conclu que chacun des éléments suivants peut, à lui seul, constituer un motif suffisant pour déduire que la réduction prévue à la décision d’autorisation n’a pas été respectée et que, de ce fait, il y a eu application abusive de l’aide.

(189)

Premièrement, étant donné qu’une limitation du nombre des hommes-heures lui avait été imposée, HSY était tenue de mettre en œuvre un dispositif permettant de calculer avec précision les hommes-heures concernées. En ne mettant pas en œuvre de dispositif pour calculer avec précision les hommes-heures effectuées par les sous-traitants et en empêchant ainsi le calcul précis des hommes-heures effectuées sur le chantier naval, HSY est accusée d’application abusive de la décision N 513/01, d’autant plus que la Grèce avait elle-même suggéré que les «hommes-heures» soient utilisées comme indicateur pour prouver que HSY réduisait sa capacité.

(190)

Deuxièmement, la Commission émet des doutes quant à l’argument de la Grèce selon lequel les «sous-traitants de tiers» ne sont pas couverts par la limitation de la capacité. La Grèce fait valoir qu’il n’existait pas de relation contractuelle avec eux, au-delà de la location des installations. Premièrement, la Commission estime qu’accepter ce raisonnement serait une façon aisée de détourner la limitation: HSY, au lieu de signer des contrats avec des sous-traitants, demanderait aux propriétaires des navires de les signer, avec pour résultat l’absence de contrat entre HSY et les sous-traitants. Deuxièmement, l’objectif de cette réduction était de réduire les activités au sein du chantier naval. Il est, par conséquent, raisonnable de conclure que, lorsque la décision N 513/01 prévoit que la limitation de la capacité des chantiers navals inclut les «travailleurs sur base de contrats de sous-traitance», cette disposition couvre tant les sous-traitants de HSY que les sous-traitants des propriétaires des navires qui travaillaient sur les chantiers. Troisièmement, à la suite de des questions détaillées qui lui ont été posées par la Commission (113), la Grèce a admis que HSY gère les paiements pour certains «sous-traitants de tiers»: ceux-ci concluent des contrats avec les propriétaires des navires portant sur les travaux à réaliser et la rémunération mais, ensuite, les propriétaires informent HSY qui, à son tour, transfère cette somme aux sous-traitants. Dans ces cas, il existe un rapport contractuel entre HSY et les sous-traitants, et les sommes versées par les propriétaires des navires pour le travail des sous-traitants sont reprises dans l’état des recettes et dépenses de HSY en tant que recettes (c’est-à-dire qu’elles sont incluses dans les ventes/chiffre d’affaires de HSY). Dès lors, il n’existe aucun doute quant au fait que, à tout le moins, ces contrats avec les «sous-traitants de tiers» relèvent de la réduction. La Grèce n’a ni calculé ni notifié à la Commission le nombre d’hommes-heures effectuées par ces «sous-traitants de tiers», ce qui constitue une violation supplémentaire de la décision N 513/01. En outre, la Commission fait remarquer que le chiffre d’affaires des activités de réparation de HSY a présenté une croissance rapide depuis 2002. Néanmoins, ce développement ne se reflète nullement dans le nombre total des hommes-heures notifié par la Grèce. Il est, dès lors, probable que le nombre d’hommes-heures effectuées par les sous-traitants de tiers rémunérés par HSY ait significativement augmenté. Étant donné que, conformément aux informations soumises par la Grèce, HSY se situait légèrement en-deçà du seuil des 420 000 heures, en 2003, la Commission conclut que, si les sous-traitants de tiers rémunérés par HSY sont inclus dans le nombre total d’hommes-heures effectuées par HSY, il est raisonnablement possible de supposer que la condition relative à la réduction n’a pas été respectée durant les années suivantes.

(191)

Troisièmement, même s’il était accepté que les «sous-traitants de tiers» n’étaient pas soumis à la réduction des hommes-heures prévue à la décision N 513/01 (ce qui n’est pas le cas) et que les hommes-heures effectuées par les «sous-traitants des tiers» pouvaient être calculées par approximation en divisant leur rémunération par le coût horaire de la main-d’œuvre, l’obligation de la réduction n’est pas respectée. En effet, le «coefficient annuel de coût de l’homme-heure, tel qu’il découle pour HSY des livres officiels qu’elle tient», qui est appliqué par la Grèce, est une méthode qui ne convient pas au calcul approximatif du coût de l’homme-heure des personnes travaillant pour le compte de sous-traitants. En effet, les variations significatives des chiffres concernés (p.ex., de 27 EUR, ils passent à […] EUR l’année suivante) prouvent que le coefficient annuel de coût de l’homme-heure, tel qu’il découle pour HSY des livres officiels qu’elle tient, n’indique pas le coût du travailleur par heure (114). En effet, le salaire horaire brut en vigueur dans un secteur n’évolue en aucun cas de cette façon. Il peut présenter une augmentation constante au fil du temps, mais il ne peut pas doubler en un an. En outre, les chantiers navals ont recours à des sous-traitants précisément parce qu’ils leurs coûtent moins que s’ils recrutaient eux-mêmes du personnel. Par conséquent, en utilisant le coefficient annuel de coût de l’homme-heure, tel qu’il découle pour HSY des livres officiels qu’elle tient, le coût de l’homme-heure des travailleurs employés par les sous-traitants est surestimé. Ce fait a été confirmé par le conseiller auquel la Commission s’est adressée. Si des estimations plus raisonnables du coût horaire sont prises en compte, le nombre d’hommes-heures effectuées par les sous-traitants présente une augmentation significative (115), ce qui se traduit par le non respect de la réduction des 420 000 heures en 2003 et 2005.

(192)

Quatrièmement, dans la méthode proposée par la Grèce, l’exercice social de 2003 était de 9 mois seulement, c’est-à-dire qu’il s’étendait jusqu’à septembre 2003. La Grèce fait valoir que, depuis, l’exercice social a commencé à être calculé d’octobre à octobre. Il n’est pas possible d’admettre l’application d’un plafond annuel sur des activités de 9 mois. La Commission a invité la Grèce à présenter des données détaillées concernant les activités durant les trois derniers mois de 2003, cependant la Grèce n’a pas présenté les informations demandées (116). Si les activités des trois derniers mois de l’année civile 2003 sont calculées par approximation comme étant le quart des activités de l’exercice social de 2004, il est clair qu’il y a eu violation de l’obligation de réduire les hommes-heures.

(193)

Du fait de l’existence de différentes raisons, indépendantes entre elles, dont il est possible de déduire qu’il y a eu abus, la Commission conclut que l’aide doit être récupérée.

4.7.   Apport d’un capital de 8,72 milliards de drachmes grecques (25,6 millions EUR) par l’État grec ou l’ETVA en 1996-1997 (mesure E9)

4.7.1.   Description de la mesure

(194)

En 1996-1997, l’ETVA a réalisé un apport en capital pour un montant de 8,72 milliards GRD (25,6 millions EUR) à HSY.

4.7.2.   Motifs d’ouverture de la procédure

(195)

Dans la décision d’extension de la procédure, des doutes sont exprimés quant à la question de savoir si l’apport en capital en cause correspond au comportement d’un investisseur agissant dans des conditions d’économie de marché. En premier lieu, la Commission souligne que la Grèce a fait valoir des arguments contradictoires sur la question, indiquant d’abord que le montant en cause avait été octroyé par l’État pour compenser le coût de la réduction du personnel de 1 000 personnes, alors que, ultérieurement, elle contredit cette explication en faisant valoir que l’apport en capital en cause avait été effectué par l’ETVA. En second lieu, la Commission souligne que les salariés de la société, qui détenaient 49 % des actions, ne participaient à l’apport en capital en cause. Par ailleurs, il est surprenant que l’apport en capital en cause réalisé par l’ETVA n’ait pas résulté en une augmentation de son taux de participation dans HSY.

(196)

La Commission a également souligné que, s’il était constaté que la mesure en cause constitue une aide d’État, on peut douter qu’elle puisse constituer une aide compatible avec le marché commun.

4.7.3.   Observations des parties intéressées

(197)

Elefsis Shipyards indique que, en 1996, 49 % des actions de HSY appartenaient aux salariés. Si l’ETVA réalisait un apport en capital sans participation au prorata des salariés, sa participation au capital devait augmenter et être supérieure au taux de 51 %, ce qui était interdit par la loi et ce qui ne s’est pas produit. Il est, de ce fait, déduit qu’ETVA n’a pas acquis de nouvelles actions en échange de l’apport en capital concerné. Pareil scénario ne pourrait pas être accepté par un investisseur privé.

4.7.4.   Observations de la Grèce

(198)

La Grèce confirme qu’en 1996-1997, l’ETVA a réalisé un apport en capital pour un montant de 8,72 milliards GRD (25,6 millions EUR) et qu’elle a recouvré une somme correspondante auprès de l’État. La Grèce fait valoir que l’État a agi en tant qu’investisseur dans des conditions d’économie de marché, parce que la réduction de la main-d’œuvre qui avait été financée par l’apport en capital a significativement amélioré l’efficacité du chantier naval et ses bénéfices futurs. HSY explique que les sommes injectées dans la société n’ont pas résulté en l’émission de nouvelles actions et que, d’un point de vue formel, elles ne constituaient pas un apport en capital. Ceci explique pourquoi la participation de l’État n’a pas augmenté pour ne pas dépasser 51 %. Mais, si, en dépit de cela, la Commission estime que la mesure examinée constitue une aide d’État, la Grèce estime qu’il s’agit d’une aide compatible avec le marché commun destinée à la fermeture d’une entreprise, au sens de l’article 7 de la directive 90/684/CEE.

4.7.5.   Appréciation

4.7.5.1.   Article 296 du traité

(199)

La mesure examinée a servi à financer l’ensemble des activités du chantier naval et n’était pas exclusivement destinée à soutenir les activités civiles. S’il est pris en compte que, comme il est conclu au point 3.3 de la présente décision, 75 % des activités du chantier sont des activités militaires et que la Grèce invoque l’article 296 du traité, seulement 25 % de la mesure, c’est-à-dire 2,18 milliards GRD (6,4 millions EUR), peuvent être appréciés au regard de la législation relative aux aides d’État.

4.7.5.2.   Existence d’une aide

(200)

La Commission fait remarquer que l’État, par le biais d’ETVA, a accordé des fonds à HSY sans obtenir de nouvelles actions, alors qu’il ne détenait que 51 % de HSY. Un investisseur dans des conditions d’économie de marché n’aurait pas fait pareil cadeau aux autres actionnaires. Il aurait demandé de nouvelles actions ou aurait exigé un apport en capital au pro rata de la part des autres actionnaires. Par conséquent, un investisseur privé, dans des circonstances similaires, n’aurait pas réalisé l’apport en capital considéré.

(201)

Étant donné que l’État a accordé à HSY des fonds que celle-ci n’aurait pas pu obtenir sur le marché, la mesure a accordé un avantage sélectif à HSY. Par conséquent, la mesure constitue une aide au sens de l’article 87, paragraphe 1, du traité. Vu que, en outre, en violation de la condition prévue à l’article 88, paragraphe 3, du traité, elle a été accordée sans notification préalable, elle constitue une aide illégale.

4.7.5.3.   Compatibilité avec le marché commun

(202)

En ce qui concerne le caractère compatible de l’aide considérée avec le marché commun, la Commission fait remarquer qu’il n’est pas contesté que la main-d’œuvre de HSY a été réduite et est passée de 3 022 personnes, en 1995, à 1 977 personnes, en 1997. Cette réduction de la main-d’œuvre était également signalée dans les deux décisions du 15 juillet (décisions C 10/94 et N 401/97), puisqu’elle constituait un des piliers du plan de restructuration. Par la décision N 401/97, l’octroi d’une aide à l’investissement a été autorisé. Cette aide, conformément à la directive 90/684/CEE, peut être considérée compatible uniquement si elle est «liée à un plan de restructuration qui aboutit à une réduction de la capacité globale de réparation navale» et «n’entraîne aucun accroissement de la capacité de construction navale du chantier.» La décision N 401/97 considère qu’il y a «réduction de la capacité de réparation du chantier naval qui équivaut à la réduction du nombre de salariés qui ne peut pas être compensée par l’augmentation de la productivité programmée et par la réduction de la mise sur cale pour des navires marchands.» La décision souligne également qu’il existe une légère réduction de la capacité de construction navale. Attendu que la Commission a elle-même reconnu, dans la décision N 401/97, que la réduction de la main-d’œuvre, associée aux autres mesures proposées par les autorités grecques, devait conduire à une réduction de la capacité tant de construction que de réparation navales, la Commission estime qu’il y a effectivement eu réduction de la capacité, comme le stipule l’article 7 de la directive 90/684/CEE. En ce qui concerne le montant et l’intensité de l’aide, la Commission souligne que l’aide s’élevait à 25,6 millions EUR en vue de réduire la main-d’œuvre de 1 000 personnes. En 2002, c’est-à-dire à peine six ans plus tard, la Commission a considérée compatible une aide quatre fois supérieure pour une réduction moins étendue de la main-d’œuvre. Dès lors, la Commission estime que le montant et l’intensité de l’aide sont justifiés. En conclusion, la Commission estime que les conditions prévues à l’article 7 de la directive 90/684/CEE ont été respectées et, de ce fait, conclut que l’aide est compatible avec le marché commun.

4.8.   Augmentation du capital social durant la période 1998-2000 en vue du financement du plan d’investissement (mesure E10)

4.8.1.   Description de la mesure

(203)

Conformément aux prévisions de la décision N 401/07, en 1998, 1999 et 2000, trois augmentations de capital ont été réalisées, pour un montant total de 2,98 milliards GRD (8,7 millions EUR), afin de financer une partie du plan d’investissement de HSY. Ces augmentations ont été financées par l’ETVA et par les salariés de HSY au pro rata des actions de HSY qu’ils détenaient.

[en millions GRD (en millions EUR)]

 

Total

Contribution d’ETVA (51 %)

Contribution des salariés (49 %)

20 mai 1998

1 569 (4,6)

800 (2,3)

769 (2,3)

24 juin 1999

630 (1,8)

321 (0,9)

309 (0,9)

22 mai 2000

780 (2,3)

397 (1,2)

382 (1,1)

(204)

En 2001, l’État grec a payé aux salariés un montant égal à leur contribution aux trois augmentations de capital social (voir considérant 33, description de la loi 2941/2001).

4.8.2.   Motifs d’ouverture de la procédure

(205)

Dans la décision d’extension de la procédure, la Commission exprimait ses doutes quant au fait que la participation d’ETVA aux augmentations de capital constituait une aide non compatible avec le marché commun. En dépit du fait que la décision N 401/97, publiée le 15 juillet 1997, aboutit à la conclusion selon laquelle la participation future d’ETVA aux augmentations de capital social peut en principe être considérée comme ne contenant pas d’élément d’aide dans le cadre de la mise en œuvre du plan de restructuration, la participation en cause pourrait, cependant, avoir constitué une aide lors de sa mise en œuvre en 1998, 1999 et 2000. En particulier, la situation de HSY s’est aggravée au cours de la période précitée. La décision d’extension de la procédure indique également que le fait que les salariés ont participé à l’augmentation du capital social au pro rata de leur participation au capital social de HSY n’exclut pas l’existence d’une aide. Premièrement, il n’est pas certain qu’ils aient effectivement payé à l’ETVA le prix de l’acquisition de 49 % de la propriété de HSY, comme il était prévu à l’accord de privatisation partielle de septembre 1995. Deuxièmement, il n’est pas exclu que l’État se soit secrètement engagé à rembourser aux salariés tout montant qu’ils contribueraient au capital de HSY. Pareil engagement signifierait que les salariés n’ont pris aucun risque, en l’occurrence.

4.8.3.   Observations des parties intéressées

(206)

Elefsis Shipyards exprime son accord avec les réserves émises dans la décision d’ouverture de la procédure, rappelle la jurisprudence Alitalia (117) relative à la participation des salariés à l’augmentation du capital de leur entreprise et conclut que la participation d’ETVA aux augmentations de capital constituait une aide non compatible avec le marché commun.

4.8.4.   Observations de la Grèce

(207)

Les autorités grecques rappellent que la participation d’ETVA et des salariés à l’augmentation de capital était contractuellement régie par l’accord de privatisation partielle de septembre 1995. La décision N 401/97 indiquait également que les augmentations de capital concernées allaient avoir lieu avec la participation d’ETVA et des salariés de HSY à concurrence de 51 % et 49 %, respectivement, sans que la décision n’aboutisse à la conclusion que la participation d’ETVA constituerait une aide. Enfin, les autorités grecques et HSY réfutent tant l’hypothèse selon laquelle les salariés n’ont pas, en fin de compte, payé le prix d’acquisition à l’ETVA, que celle selon laquelle il existerait un accord secret dans le cadre duquel l’État aurait promis aux salariés de leur rembourser la somme qu’ils paieraient afin de financer le plan d’investissement. HSY fait valoir que, si la Commission estime que la mesure en cause est une aide, il s’agirait d’une aide à la restructuration compatible avec le marché commun.

4.8.5.   Appréciation

4.8.5.1.   Article 296 du traité

(208)

En ce qui concerne la possibilité d’appliquer l’article 296 du traité, la Commission fait remarquer que les augmentations de capital avaient pour but de financer le plan d’investissement. Comme il a été déduit dans le cadre de l’appréciation des mesures D1, D2, D3 et D4, le plan d’investissement en question et l’aide d’État destinée à son financement peuvent être appréciés au regard de la législation relative aux aides d’État.

4.8.5.2.   Existence d’une aide

(209)

La Commission a abouti aux conclusions suivantes. Au titre de l’accord de septembre 1995 portant sur la privatisation partielle de l’entreprise, l’ETVA était tenue de participer à hauteur de 51 % à l’augmentation future du capital social de HSY, tandis que les 49 % restants seraient garantis par les salariés. L’augmentation du capital social était nécessaire au financement en partie du plan d’investissement. Selon la décision N 401/97 concernant l’aide à l’investissement, la Commission a tacitement estimé que la participation en cause d’ETVA à l’augmentation future du capital de HSY ne constituerait pas une aide d’État. Il s’agissait d’une conclusion également conforme à la décision C 10/94, publiée le même jour, et avec laquelle la Commission jugeait que la vente de 49 % des actions de HSY aux salariés constituait une privatisation partielle valide et qu’elle pouvait s’attendre à un rétablissement de la viabilité de l’entreprise.

(210)

En ce qui concerne la participation d’ETVA aux augmentations du capital du 20 mai 1998, la Commission estime qu’il n’existe pas suffisamment de motifs pour déroger à l’estimation tacite quant à la non-existence d’une aide qui existait dans la décision N 401/97. En particulier, les circonstances en vigueur en mai 1998 n’étaient pas suffisamment différentes de celles prévues au moment de la publication de la décision. En outre, la Commission n’a découvert aucune preuve quant à l’existence d’un engagement (secret) de l’État de rembourser aux salariés tout montant qu’ils paieraient dans le cadre des augmentations de capital.

(211)

En revanche, au moment de la réalisation de l’augmentation de capital du 24 juin 1999 et du 22 mai 2000, certains éléments d’importance fondamentale sur lesquels se fondait la conclusion du 15 juillet 1997 quant à la non existence d’une aide n’existaient plus:

Premièrement, ainsi qu’il a été expliqué précédemment, les deux décisions publiées le 15 juillet 1997 s’appuyaient sur le fait que la Grèce exécuterait l’accord de privatisation partielle de septembre 1995 ainsi que, en particulier, sur le fait que les salariés paieraient le prix d’acquisition à l’ETVA, comme prévu au contrat concerné, assumant ainsi un risque financier qui les motiverait à soutenir les mesures qui étaient nécessaires au rétablissement de la compétitivité de l’entreprise. Malgré le fait que les salariés étaient tenus de verser à l’ETVA la première tranche du prix d’acquisition avant le 31 décembre 1998, aucun paiement n’a été effectué. Quant à l’État, il n’a pas entrepris de l’obtenir. Comme indiqué à l’appréciation de la mesure E7, ce fait impliquait que les salariés ne se sont pas trouvés dans la position d’investisseurs qui sont tenus de payer au total 8,17 milliards GRD (24 millions EUR) échelonnés sur les douze années à venir et, ce, contrairement aux attentes de la Commission en juillet 1997, quand les deux décisions ont été publiées. Cette absence de paiement signifiait en outre que les salariés n’avaient pas respecté l’obligation qui était la leur au titre du contrat de privatisation partielle de septembre 1995. L’ETVA n’était plus contractuellement engagée par l’accord de privatisation partielle (118), étant donné que les salariés n’avaient pas respecté celui-ci. En conclusion, contrairement à ce à quoi on pouvait de façon fondée s’attendre au moment de la publication de la décision N 401/97 sur la base des contrats existants, en pratique, il n’y a pas eu de privatisation partielle et le contrat avait cessé d’être contraignant pour l’ETVA. La Commission estime qu’il existe des différences majeures par rapport à ses attentes au moment de la publication de la décision N 401/97 sur la base du contrat de septembre 1995. Cet élément constitue un motif suffisant pour revoir la conclusion de non existence d’aide à laquelle la Commission avait, alors, abouti,

Deuxièmement, ainsi qu’il est expliqué en détail au point 3.1 de la présente décision, le succès commercial et financier escompté au moment de la publication de la décision N 401/97 ne s’est pas confirmé. L’entreprise n’est pas arrivée à réunir un volume de commandes important et rentable en 1997 et 1998. Par conséquent, dès la fin 1998, il devenait de plus en plus certain que le chantier naval subirait des pertes au cours des années suivantes. La Commission a fixé le 30 juin 1999 comme date à compter de laquelle il n’était plus raisonnablement possible de s’attendre à ce que la viabilité de l’entreprise soit rétablie. Il est certain que début juin 1999, la majorité des mauvaises nouvelles étaient déjà connues et que le retour à la viabilité était très incertain, sur la base du plan de restructuration existant.

(212)

Sur la base des éléments exposés ci-dessus, la Commission estime que si un investisseur agissant dans des conditions d’économie de marché se trouvait dans la même situation qu’ETVA, il n’aurait pas à nouveau investi dans HSY (119).

(213)

Compte tenu du fait que l’apport en capital accorde un avantage sélectif à HSY, la Commission conclut que la participation d’ETVA à la deuxième et à la troisième augmentation de capital constitue une aide d’État au bénéfice de HSY. En ce qui concerne la conformité à l’article 88, paragraphe 3, du traité, la Commission tient à souligner qu’elle n’a jamais publié de décision où elle apprécie et autorise expressément la participation d’ETVA aux augmentations de capital de HSY. Pour ce motif, la Commission estime que l’aide a été mise en œuvre en violation de l’article 88, paragraphe 3, du traité.

(214)

La Commission souligne que, même s’il était accepté que la mesure examinée était autorisée par la décision N 401/97 (dans la décision N 401/97, il est expliqué qu’ETVA participera aux augmentations de capital de HSY et, du fait qu’aucun doute n’était exprimé quant à la conformité à la législation relative aux aides d’État, il est entendu que cette participation ne constituerait pas une aide d’État), cela ne modifierait pas la conclusion suivante selon laquelle la récupération de l’aide concernée s’impose. En particulier, dans pareil cas, il convient d’admettre que la banque ETVA appartenant à l’État a mis en œuvre la décision concernée de façon abusive, compte tenu du fait qu’elle n’a pas reçu le prix d’acquisition de la part des salariés, comme il était prévu au contrat de septembre 1995. En effet, la conclusion selon laquelle la participation d’ETVA aux futures augmentations de capital ne constituait pas une aide était fondée sur le paiement escompté du prix d’acquisition par les salariés, ainsi qu’il était prévu au contrat de septembre 1995. Il convient, dès lors, de conclure qu’il y a eu mise en œuvre abusive de la partie de la décision N 401/97 portant autorisation de la participation d’ETVA et que, par conséquent, il convient de récupérer auprès de HSY la participation d’ETVA.

4.8.5.3.   Compatibilité avec le marché commun

(215)

Les autorités grecques font valoir que la mesure faisant l’objet de l’examen constitue, le cas échéant, une aide à la restructuration compatible avec le marché commun. La Commission rappelle que les augmentations de capital avaient pour but de financer le plan d’investissement. Dans le cadre de l’appréciation des mesures D2 et D3, la Commission a déjà expliqué pourquoi il n’est pas possible de considérer que l’octroi de nouvelles aides à la restructuration pour financer le plan d’investissement est compatible avec le marché commun.

(216)

Attendu que les deux augmentations de capital constituent une aide non compatible, il convient de les récupérer auprès de HSY.

4.9.   Contre-garanties par l’État relatives aux contrats conclus entre HSY et OSE et ISAP (mesure E12b)

4.9.1.   Description de la mesure

(217)

Dans le cadre des contrats conclus entre HSY et la Compagnie des Chemins de Fer de Grèce (OSE) et avec les Chemins de Fer électriques d’Athènes et du Pirée (ISAP) portant sur la fourniture de matériel roulant, l’ETVA a fourni des garanties de restitution d’acomptes et des garanties de bonne exécution des contrats (ci-après: «garanties de restitution d’acomptes»). L’ETVA a fourni les garanties concernées pour des avances concernant le contrat avec ISAP en février 1998 et en janvier 1999. Elle a fourni les garanties concernant le contrat avec OSE en août 1999. À son tour, l’ETVA a reçu de l’État des contre-garanties correspondantes. Les garanties octroyées dans le cadre des contrats conclus avec OSE et ISAP s’élevaient à 29,4 millions EUR et 9,4 millions EUR, respectivement.

4.9.2.   Motifs d’ouverture de la procédure

(218)

Dans la décision d’extension de la procédure, la Commission exprimait des doutes quant à la question de savoir si une banque privée aurait fourni les contre-garanties concernées aux mêmes conditions. Du fait des difficultés auxquelles HSY était confrontée, on peut raisonnablement se demander si une banque aurait même fourni les contre-garanties concernées.

4.9.3.   Observations des parties intéressées

(219)

Elefsis Shipyards partage les réserves émises par la Commission. En particulier, en l’occurrence, l’État n’a pas agi en investisseur privé dans des conditions d’économie de marché étant donné qu’il a pris un risque multiple, dans le sens où, outre le fait d’être l’actionnaire majoritaire de HSY, il en était également l’unique créancier et garant et assumait la quasi-totalité du risque lié à son fonctionnement.

4.9.4.   Observations de la Grèce

(220)

Les autorités grecques et HSY font valoir que, bien que les contre-garanties par l’État aient été formellement octroyées en décembre 1999, elles étaient déjà promises à l’ETVA quand celle-ci avait fourni des garanties pour les avances portant sur le contrat avec ISAP, en février 1998 et en janvier 1999, ainsi que les garanties concernant le contrat avec OSE, en août 1999. Les autorités grecques prétendent que les contre-garanties concernées ne constituaient pas des mesures à caractère sélectif. En particulier, elles ont été octroyées en vertu de la loi 2322/1995 (120), au titre de laquelle des garanties de l’État ont été octroyées à plusieurs entreprises. En outre, les autorités grecques font valoir que la commission annuelle de 0,05 % était une rémunération appropriée pour le risque pris. En ce qui concerne le comportement d’ETVA, il était acceptable pour une banque privée, compte tenu du fait qu’elle avait assuré une contre-garantie par l’État contre une commission de 0,4 % (121). HSY avait soumis un rapport d’un cabinet de conseil (il s’agit du premier rapport de Deloitte) qui confirme l’argument précité. Le même rapport prétend également que, sans la contre-garantie par l’État, HSY aurait tout de même pu obtenir auprès d’une banque privée une garantie analogue à celle qu’ETVA lui a accordée, en offrant une sûreté réelle («lien») sur certains éléments de ses actifs, en garantie. Enfin, la Grèce fait valoir que le bénéficiaire des contre-garanties de l’État sont OSE et ISAP et pas HSY.

4.9.5.   Appréciation

4.9.5.1.   Article 296 du traité

(221)

La mesure examinée ne relève pas du champ d’application de l’article 296 du traité du fait qu’elle porte sur le soutien direct d’une activité civile.

4.9.5.2.   Existence d’une aide

(222)

En premier lieu, il est nécessaire de préciser lequel des deux types de mesures, c’est-à-dire, les garanties de restitution d’acomptes octroyées par l’ETVA ou les contre-garanties octroyées par l’État à ETVA, pourrait constituer une aide d’État. Compte tenu du fait que les autorités grecques font valoir qu’ETVA avait déjà reçu la promesse formelle qu’elle obtiendrait les contre-garanties par l’État quand elle a octroyé les garanties de restitution d’acomptes, il convient de conclure que, lorsque l’ETVA octroyait les garanties, elle était intégralement couverte par les garanties d’État. Il en résulte que, si l’on tient compte du fait qu’ETVA n’assumait aucun risque (grâce aux contre-garanties octroyées par l’État) et, en même temps, elle touchait une commission de 0,4 % par trimestre, la mesure sous examen serait acceptable, dans des circonstances similaires, pour un investisseur dans l’économie de marché. En revanche, l’État a octroyé des contre-garanties qui n’étaient couvertes par aucune espèce de sûreté et pour lesquelles il touchait une commission pour garantie atteignant à peine 0,05 %. Cette seconde mesure ne serait certainement pas acceptable pour un investisseur agissant dans des conditions d’économie de marché. Il s’ensuit que c’est la seconde mesure concernée qui constitue une aide d’État. La Commission tient toutefois à souligner que, l’ETVA appartenant à 100 % à l’État et toutes les mesures mises en œuvre par la banque en question pouvant être imputées à l’État, la distinction entre les deux mesures (c’est-à-dire, entre garanties et contre-garanties) est, d’une certaine façon, artificielle.

(223)

Attendu que les autorités grecques font valoir que les bénéficiaires de la mesure étaient OSE et ISAP, il convient de préciser qui est, en l’occurrence, le bénéficiaire. La Commission souligne que, dans le cadre de marchés ayant pour objet la fourniture de matériel roulant, le vendeur est habituellement invité à fournir à l’acquéreur des garanties bancaires pour les avances de celui-ci. En particulier, l’acquéreur souhaite être certain de récupérer les sommes concernées si le vendeur ne lui livre pas le matériel, par exemple, en cas de faillite. Par conséquent, c’est au vendeur qu’il incombe d’obtenir les garanties nécessaires auprès d’une banque et d’assumer le coût relatif. Cela signifie qu’il s’agit d’une dépense habituelle qui est à la charge du fournisseur de matériel roulant. Dans l’affaire présente, la contre-garantie de l’État a permis à HSY d’obtenir auprès d’ETVA des garanties contre un prix qui ne serait pas supérieur à 0,4 % par trimestre. Ainsi qu’il sera démontré par la suite, sans contre-garantie par l’État, une banque privée aurait appliqué à tout le moins 480 points de base par an pour des garanties octroyées avant le 30 juin 1999. Après la date en question, aucune banque privée n’aurait accordé pareilles garanties. Il est, dès lors, clair que durant la période avant le 30 juin 1999, les contre-garanties octroyées par l’État ont permis à HSY d’obtenir des garanties contre un prix moins élevé. Durant la période postérieure au 30 juin 1999, les contre-garanties octroyées par l’État ont permis à HSY d’obtenir des garanties qu’elle n’aurait même pas pu obtenir sur le marché. Le bénéficiaire de l’aide est donc HSY.

(224)

Pour ce qui est de l’argument mis en avant par la Grèce et selon lequel la mesure ne présente pas de caractère sélectif, la Commission tient à rappeler que, pour qu’une mesure soit de nature générale, il faut que tous les opérateurs actifs dans un État membre y aient accès véritablement et dans des conditions d’égalité. Il faut également que le champ d’application de la mesure concernée ne soit pas restreint de fait, par exemple, par l’exercice du pouvoir discrétionnaire de l’État ou s’il existe d’autres facteurs qui en limitent le résultat pratique. La Commission estime que la loi 2322/1995 ne répond pas, loin de là, à la définition précitée. Premièrement, l’article 1 de la loi prévoit que les garanties sont octroyées par le Ministre des finances, sur avis conforme d’une commission interministérielle composée de trois membres. Par conséquent, l’octroi de la garantie est soumis au pouvoir discrétionnaire des autorités. Deuxièmement, en vertu de la loi considérée, une garantie publique peut être accordée à une entreprise privée uniquement si son siège social se trouve dans une région périphérique et dans le but de promouvoir le développement économique de la région en question et non celui de l’entreprise concernée (article 1bb) ou si elle a été affectée par une catastrophe naturelle (article 1cc). D’autre part, les entreprises qui appartiennent à l’État à 100 % ou à la majorité absolue peuvent obtenir une garantie publique pour des motifs généraux, par exemple, pour couvrir leurs obligations (article 1b). Il est dès lors clair que les entreprises appartenant à l’État ont plus largement accès aux garanties publiques, par comparaison aux entreprises privées. Cette conclusion est confirmée par l’analyse de la série des emprunts pour lesquels une garantie a été accordée et qui est citée au premier rapport de Deloitte (122). Troisièmement, les garanties ne sont pas octroyées de façon égale. En particulier, l’article 1, paragraphe 4, de la loi prévoit que lors de l’octroi d’une garantie, l’État peut demander des sûretés suffisantes (constitution d’une sûreté réelle sur des immobilisations de l’actif de l’entreprise). La demande d’une sûreté est soumise au pouvoir discrétionnaire du Ministre des finances. Dans la présente affaire, l’État n’a pas exigé de sûreté lors de l’octroi de la mesure E12b. En ce qui concerne l’absence d’accès égal à la mesure, la Commission note que la commission de garantie n’est pas la même pour tous les prêts. Par exemple, la commission de garantie était d’à peine 0,05 % dans le cas considéré. Dans le cas de la mesure E14, également octroyée au titre de la loi 2322/1995, la commission était de 1 %. Dans les prêts à garantie énumérés au premier rapport Deloitte, la commission pour certains prêts était également de 0,1 % et de 0,5 %. En conclusion, la Commission rejette l’argument de la Grèce selon lequel la loi 2322/1995 est une mesure générale.

(225)

En ce qui concerne l’argument formulé au premier rapport Deloitte et selon lequel HSY aurait pu obtenir les garanties de restitution d’acomptes litigieuses auprès d’une banque privée en offrant à celle-ci une sûreté réelle sur certains éléments de son actif au lieu de fournir la contre-garantie par l’État, la Commission estime que l’argument considéré n’est pas opportun pour l’analyse de la mesure. Plus précisément, la Commission doit examiner dans quelle mesure les conditions des mesures effectivement mises en œuvre par l’État constituaient une aide au chantier naval. La Commission n’est pas tenue de vérifier dans quelle mesure le chantier naval aurait pu obtenir la même garantie sur le marché en offrant une sûreté plus importante. Comme indiqué au point 2.1.1 de la communication relative aux aides d’État sous forme de garanties, un des avantages possibles qui découlent d’une garantie publique est la possibilité pour l’emprunteur «d’offrir une sûreté moins élevée.» Dans l’affaire présente, aucune des contre-garanties de l’État n’était assurée par constitution d’une sûreté réelle sur des éléments de l’actif du chantier naval. Dès lors, la contre-garantie avec offre de sûreté sur un élément de l’actif constitue un acte différent qui ne nécessite pas d’être apprécié. À titre auxiliaire, la Commission souligne que, même si l’argument formulé au premier rapport Deloitte devait être examiné, HSY n’aurait pas été en mesure de convaincre une banque privée, en lui offrant des sûretés, de lui octroyer des garanties de restitution d’acomptes similaires. En effet, l’actif de l’entreprise était déjà grevé de sûretés et présentait une faible valeur de liquidation (voir deuxième et troisième cas analysés à la note no 44). Dès lors, même l’offre d’une sûreté sous forme de sûreté réelle sur certains éléments de l’actif de HSY ne suffirait pas pour convaincre un investisseur dans des conditions d’économie de marché à accorder un prêt à HSY.

(226)

À un point antérieur de la présente décision, la Commission a déterminé le taux d’intérêt qu’une banque privée aurait appliqué pour accorder un prêt à HSY. Pour la période jusqu’au 30 juin 1999, il a été estimé que, HSY présentant un risque élevé, il était nécessaire d’ajouter une surprime de risque égale à 300 points de base, au moins, en plus du taux d’intérêt qui serait appliqué au prêt accordé à une entreprise saine. Afin d’appliquer le même principe en ce qui concerne les garanties de restitution d’acomptes, il est nécessaire de déterminer la commission qu’un investisseur dans des conditions d’économie de marché appliquerait pour fournir une garantie de restitution d’acompte à une entreprise saine. Aucune des parties à la présente procédure n’a indiqué de prix du marché fiable pour des garanties de cette espèce. Dans différents régimes de garanties publiques dans le secteur de la construction navale qui ont été examinés et autorisés par la Commission comme ne comportant pas d’élément d’aide (123), la commission annuelle de garantie pour l’emprunteur présentant le risque de crédit le moins élevé a été fixée à 0,8 %, c’est-à-dire, à 80 points de base. Étant donné qu’il n’existe pas d’autres indicateurs fiables disponibles, la Commission utilisera ce taux pour apprécier la commission annuelle minimale de garantie versée durant la période critique par les entreprises navales saines, en Grèce. En dépit du fait que les contrats avec OSE et ISAP ne portent pas sur la construction navale mais sur la construction de matériel roulant, la Commission utilisera comme mesure de comparaison le pourcentage de 0,8 % étant donné que la construction de matériel roulant demeurait une activité d’importance particulièrement restreinte pour HSY alors que le principal volume de ses activités et, dès lors, le principal risque que représentait la société en cause portait sur la construction et la réparation navales. Par conséquent, en ce qui concerne les garanties de restitution d’acomptes fournies à HSY avant le 30 juin 1999, l’existence et le montant de l’aide seront appréciés en comparant la commission annuelle effectivement versée par HSY (y compris la commission de contre-garantie versée à l’État) à une commission égale à 480 points de base (c’est-à-dire, 80 points de base majorés de 400 points de base). En ce qui concerne la période après le 30 juin 1999, la Commission a conclu à un point précédent de la présente décision que le chantier naval n’avait plus accès au marché financier et que l’élément d’aide à récupérer dans le contexte d’un prêt est égal à la différence entre le taux d’intérêt effectivement versé par HSY et le taux de référence majoré de 600 points de base. Dans le cas des garanties de restitution d’acomptes, l’aide à récupérer sera donc calculée en comparant la commission effectivement versée par HSY (y compris la commission de contre-garantie versée à l’État) avec une commission de 680 points de base (c’est-à-dire, 80 points de base majorés de 600 points de base).

(227)

La Commission tient à souligner que les autorités grecques font valoir que lorsque l’ETVA a accordé des garanties de restitution d’acomptes, elle avait déjà obtenu la promesse de l’octroi des contre-garanties. Dès lors, les contre-garanties concernant les acomptes d’ISAP ont été octroyées avant fin juin 1999. Le coût total annuel des garanties en cause (c’est-à-dire la somme de la commission de garantie versée à l’ETVA et de la commission de contre-garantie versée à l’État) était de loin inférieur à 480 points de base. De ce fait, les garanties en cause comportent une aide d’État qui est égale à la différence entre cette dernière commission et le coût total des garanties pour HSY (commission versée à l’ETVA (124) plus commission versée à l’État). Vu que, en violation de la condition prévue à l’article 88, paragraphe 3, du traité, la garantie en cause été accordée sans notification préalable, elle constitue une aide illégale.

(228)

Les contre-garanties pour les acomptes d’OSE ont été accordées après juin 1999, à un moment où aucune banque n’aurait accepté d’accorder de nouvelle garantie. Dès lors, toutes ces contre-garanties constituent une aide. Vu que, en violation de la condition prévue à l’article 88, paragraphe 3, du traité, l’aide en cause a été octroyée sans notification préalable, elle constitue une aide illégale. S’il est constaté que les mesures d’aide concernées constituent une aide non compatible et si elles sont encore en vigueur, elles devront être immédiatement abolies. Cependant, cela ne suffirait pas pour la restitutio in integrum, compte tenu du fait que HSY a bénéficié durant plusieurs années d’une garantie qu’elle n’était pas en mesure d’obtenir sur le marché libre. Pour la période allant jusqu’à la suppression de la garantie, il conviendra également de récupérer une aide égale à la différence entre 680 points de base et les commissions effectivement versées par HSY.

4.9.5.3.   Compatibilité avec le marché commun

(229)

La Commission souligne que l’aide faisant l’objet de l’examen constitue une aide au fonctionnement, étant donné qu’elle réduit les dépenses que, dans des circonstances normales, HSY aurait dû assumer dans le cadre de contrats sur le marché libre. Vu qu’il n’était pas autorisé d’octroyer des aides au fonctionnement au secteur de la production de matériel roulant, l’aide ne peut pas être considérée compatible avec le marché commun et, dès lors, il convient de la récupérer.

4.10.   Report/rééchelonnement d’obligations et annulation d’amendes dues à OSE et ISAP (mesure E12c)

4.10.1.   Description de la mesure

(230)

HSY n’était pas en mesure d’honorer ses engagements en vertu des dispositions des contrats de fourniture de matériel roulant qu’elle avait conclus avec OSE et ISAP. En particulier, HSY n’était pas arrivée à construire le matériel roulant en respectant le calendrier convenu. Pour cette raison, pendant la période 2002-2003, certains de ces contrats ont fait l’objet de nouvelles négociations et un nouveau calendrier de livraisons a été convenu. En outre, il existe des indications portant à croire que l’application des clauses pénales et des intérêts de retard prévus aux contrats initiaux a été annulée ou reportée.

4.10.2.   Motifs d’ouverture de la procédure

(231)

Dans la décision d’extension de la procédure, la Commission émet des doutes quant au fait que le comportement d’OSE et d’ISAP, c’est-à-dire deux entreprises détenues par l’État, dans le cadre des négociations menées en 2002-2003 serait acceptable, dans des circonstances similaires, pour une entreprise privée. Il est possible que l’exécution et/ou la nouvelle négociation des contrats, de leur part, ait été favorable à HSY, ce qui équivaudrait à l’octroi d’une aide d’État à HSY.

4.10.3.   Observations des parties intéressées

(232)

Elefsis Shipyards fait valoir qu’OSE et ISAP n’ont pas poursuivi l’encaissement de l’intégralité des clauses pénales et des intérêts de retard résultant des retards, et elles n’ont pas non plus activé les garanties qui avaient été offertes au nom de HSY pour la bonne exécution de ses engagements contractuels.

4.10.4.   Observations de la Grèce

(233)

Les autorités grecques prétendent que HSY a payé l’intégralité des amendes ainsi que les intérêts de retard, conformément à ses engagements contractuels, et que toute nouvelle négociation a eu lieu conformément à l’usage du commerce. OSE et ISAP n’ont jamais annulé d’amende ni d’intérêts de retard.

(234)

En ce qui concerne les contrats conclus entre OSE et HSY, à la fin de 1997, les six accords de programme suivants ont été signés (ci-après: «CAD»): CAD 33 SD 33, CAD 33 SD 33a, CAD 35 SD 35, CAD 37 SD 37a, CAD 39 SD 39 et CAD 41 SD 41a. Les accords de programme sont entrés en vigueur en août et septembre 1999 avec le versement, de la part d’OSE, des acomptes convenus aux contrats de 1997. OSE a exigé que les accords conclus à partir de 2000 soient exécutés dans les délais, après les premiers retards notés dans l’année concernée dans la livraison du matériel commandé. Les coentreprises auxquelles HSY participait ont proposé la modification des six contrats aux conditions suivantes:

Paiement par les coentreprises des clauses pénales arrivées à échéance et des intérêts de retard, en espèces ou en nature, au choix d’OSE,

Évolution du mode de réajustement du prix sur la base des calendriers contractuels de livraison des contrats pour la durée et non sur la base des nouveaux calendriers de livraison proposés par les coentreprises, pour que ces derniers calendriers soient acceptés,

Fourniture à OSE, pour usage, sans contrepartie, de matériel roulant équivalent afin que, d’une part, les nouveaux calendriers de livraison soient acceptés et, d’autre part, pour le développement ultérieur des clauses pénales et des intérêts de retard; Le CAD 39 (locomotives électriques) était exempt de l’octroi de matériel roulant équivalent, OSE n’ayant pas achevé le réseau électrifié de l’axe Patras – Athènes – Thessalonique; le CAD 35 était excepté car la coentreprise souhaitait que le développement des clauses pénales et des intérêts de retard prévus au contrat soit poursuivi,

En cas de non fourniture de matériel roulant équivalent, ainsi qu’en cas de livraison retardée (du matériel prévu au contrat), les clauses pénales et les intérêts de retard continueraient à évoluer, à compter du moment où ils avaient été suspendus, à savoir, le 31.12.2002.

(235)

Le 7.1.2003, le conseil d’administration d’OSE a adopté les modifications proposées. Trois CAD (les contrats 33a, 35 et 39) ont été modifiés au cours du premier trimestre 2003 et les avenants aux contrats ont été signés les 28.2.2003, 17.4.2003 et 28.2.2003, respectivement (125).

(236)

Face au dilemme consistant à choisir entre la résiliation et la modification des CAD et compte tenu de ses besoins en vue des Jeux Olympiques de 2004, OSE a estimé que son intérêt commercial était mieux servi en acceptant la proposition des coentreprises modifiant les accords, plutôt que de résilier ceux-ci. L’éventuelle résiliation aurait eu pour effet de priver OSE de la réception de matériel roulant neuf, étant donné qu’il aurait fallu, à tout le moins, 3 ou 4 ans pour finaliser d’éventuelles nouvelles procédures de fourniture de matériel roulant. Les avenants aux contrats étaient légaux et conformes aux contrats initiaux.

(237)

De l’avis des autorités grecques, les informations précitées montrent que les coentreprises et, par extension, HSY n’ont jamais joui d’un traitement privilégié par rapport à d’autres fournisseurs d’OSE et que les clauses pénales et les intérêts de retard ont été réclamés et recouvrés dans tous les cas, sans exception (126). Le contrat ne prévoyait pas d’intérêts de retard ou de clauses pénales, mais OSE a exigé les intérêts concernés et les a imputés aux coentreprises.

(238)

La situation analogue vaut également concernant les montants relatifs à ISAP qui correspondent à des paiements effectivement réalisés par HSY et non à des provisions. Il est en outre souligné qu’il n’y a pas eu de nouvelle négociation ni de modification de l’accord de programme 1/97 (127). Cet accord prévoyait l’étude, la construction, la livraison et la mise en opération de 40 demi-trains comportant chacun trois voitures. Les trains ont été livrés en retard et c’est pourquoi les clauses pénales et les intérêts prévus à l’accord de programme ont été imposés et retenus (128).

4.10.5.   Appréciation

4.10.5.1.   Article 296 du traité

(239)

La mesure examinée ne relève pas du champ d’application de l’article 296 du traité du fait qu’elle porte exclusivement et uniquement sur des activités civiles.

4.10.5.2.   Existence d’une aide

(240)

La Commission fait remarquer que les autorités grecques ont présenté des informations détaillées sur les contrats faisant l’objet de l’examen, comme l’exigeait la décision d’extension de la procédure. Sur la base de ces informations, la Commission ne maintient plus les réserves qu’elle avait émises. Plus précisément, HSY a payé les amendes et les montants correspondant aux intérêts, en respectant ses engagements contractuels. D’ailleurs, pour ce qui est des cas de nouvelles négociations de contrats, la Commission n’a pas constaté l’existence d’éléments démontrant que cette nouvelle négociation n’a pas été menée conformément à l’usage du commerce. Comme l’admet également Elefsis Shipyards, les retards dans l’exécution des contrats ont coûté à HSY des dizaines de millions EUR à cause, précisément, du fait qu’OSE et ISAP ont exigé le paiement des clauses pénales et des intérêts de retard relatifs ou bien la fourniture de matériel roulant équivalent. En ce qui concerne l’argument de Elefsis Shipyards selon lequel, si OSE et ISAP avaient été des entreprises privées, elles auraient rejeté toutes les modifications proposées par les coentreprises et, dès lors, auraient exigé le paiement de l’intégralité des clauses pénales et intérêts de retard relatifs et auraient exigé le paiement rapide en espèces au lieu des paiements échelonnés sur une période plus longue, il est possible de soutenir que pareille chose semble particulièrement improbable. En effet, si OSE et ISAP avaient adopté une attitude aussi rigide avant l’achèvement de la vente de HSY, cela aurait, selon toute probabilité, dissuadé le nouveau propriétaire d’acquérir le chantier naval. Sans l’acquisition en question, comme expliqué dans l’analyse de la mesure E18c, le chantier naval aurait très probablement fait faillite. Même après son acquisition par HDW/Ferrostaal, la situation économique du chantier naval ne s’est pas améliorée. Dès lors, si OSE et ISAP avaient adopté une attitude parfaitement rigide, il existait un véritable risque de faillite pour HSY. Cette attitude aurait conduit à l’interruption de l’exécution des contrats existants. À la suite de quoi, OSE et ISAP auraient été obligées de lancer un nouvel appel d’offres, les marchés auraient été attribués à un nouveau fournisseur et la livraison aurait été retardée pour plusieurs années. Dans ces circonstances, la Commission estime qu’un acquéreur dans des conditions d’économie de marché aurait probablement accepté une renégociation partielle qui garantirait l’achèvement de l’exécution du contrat existant dans un délai raisonnable, de façon à ce que l’acquéreur réceptionne le matériel roulant commandé avec un retard, en fin de compte, limité. Sur ce point, la Commission souligne que la probabilité d’achèvement de l’exécution des contrats relatifs dans un délai raisonnable a augmenté quant HSY a été privatisée et, ce, parce que le nouveau propriétaire privé disposait d’expérience dans le domaine de la gestion de projets complexes et était une entreprise privée cherchant à faire des bénéfices et, de ce fait, disposée à limiter le retard afin de limiter les conséquences défavorables de celui-ci.

(241)

En conclusion, la Commission estime qu’il n’existe pas d’éléments convaincants qui prouvent que le comportement d’OSE et d’ISAP n’aurait pas été admissible, dans des circonstances similaires, pour une entreprise privée. Pour ce motif, la Commission conclut que le mode d’exécution des contrats passés avec OSE et ISAP et les modifications à portée limitée de ces contrats acceptées par OSE en 2002-2003 ne comportent pas d’éléments d’aide d’État.

4.11.   Prêt d’ETVA visant à financer le contrat Strintzis (mesure E13a)

4.11.1.   Description de la mesure

(242)

Le 29 octobre 1999, l’ETVA a accordé à HSY un prêt de 16,9 milliards GRD (49,7 millions EUR) dans le but de financer la construction de deux navires de marchandises et de voyageurs qui avaient été commandés par la société Strintzis. Le taux d’intérêt relatif était égal à LIBOR (129) plus 100 points de base. En juin 2001, une hypothèque maritime a été inscrite sur les deux navires en construction. Le prêt a été remboursé dans son intégralité à la banque prêteuse le 8 octobre 2004.

4.11.2.   Motifs d’ouverture de la procédure

(243)

Dans la décision d’extension de la procédure, des doutes sont exprimés quant à la question de savoir si l’hypothèque sur les navires et l’octroi d’indemnités d’assurances relatives constituaient une sûreté suffisante. En outre, il est déduit que le prêt a été versé directement à HSY, alors qu’il aurait dû être versé par tranches et parallèlement aux frais de construction. Par ailleurs, le taux d’intérêt relatif est jugé insuffisant sur la base du critère des difficultés auxquelles le chantier naval faisait face. Enfin, la combinaison du prêt en question et de la mesure suivante (mesure E13b) permet de conclure que HSY a assumé une partie importante du financement des deux bateaux qui avaient été commandés par Strintzis.

4.11.3.   Observations des parties intéressées

(244)

Elefsis Shipyards fait valoir qu’aucune banque privée n’aurait accordé le prêt en cause. En premier lieu, l’ETVA ne disposait d’aucune garantie au moment de la conclusion du prêt, compte tenu du fait que l’hypothèque maritime sur les bateaux a été constituée beaucoup plus tard. En outre, Elefsis Shipyards convient que le prix de marché de la coque d’un bateau en construction est peu élevé.

4.11.4.   Observations de la Grèce

(245)

Les autorités grecques et HSY soulignent que les conditions auxquelles le prêt considéré a été accordé étaient habituelles à la période donnée. Le rapport Deloitte confirme que, tant la banque considérée (ETVA) que, plus généralement, les banques grecques accordaient des prêts aux entreprises à un taux d’intérêt analogue. HSY présente des informations détaillées sur les sûretés fournies à l’ETVA au moment où le prêt a été contracté (cession du prix des deux navires, des indemnités d’assurances et de toute créance contre tiers qui découlerait de l’affrètement ou, en général, de l’exploitation des navires) mais aussi ultérieurement (constitution d’une hypothèque maritime sur les navires), et aboutit à la conclusion que ces sûretés étaient suffisantes. La Grèce précise que le calendrier suivant lequel le prêt a été versé par l’ETVA à HSY montre que les retraits de sommes du prêt ont été effectués en fonction de la progression des travaux de construction.

4.11.5.   Appréciation

4.11.5.1.   Article 296 du traité

(246)

La mesure examinée ne relève pas du champ d’application de l’article 296 du traité du fait qu’elle porte sur le soutien direct à une activité civile.

4.11.5.2.   Existence d’une aide

(247)

La Commission a abouti aux conclusions suivantes. Le prêt faisant l’objet de l’examen a été contracté après juin 1999, c’est-à-dire, à un moment où aucune banque n’aurait accepté d’octroyer de prêt à HSY. Les autorités grecques font valoir que les sûretés accompagnant le prêt limitaient le risque relatif à un degré tel qu’un investisseur privé aurait accepté d’octroyer le prêt. Cet argument n’est pas recevable. La cession du prix de marché des bateaux constitue une sûreté fiable uniquement si le chantier naval achève avec succès la construction des bateaux, ce qui est incertain. Si le chantier naval fait faillite au cours de la construction du navire, la sûreté considérée perd sa valeur, compte tenu du fait qu’il ne sera pas possible d’exiger auprès de Strintzis de payer le prix, puisque les bateaux commandés ne lui auront pas été livrés (130). Ceci signifie que la sûreté serait sans valeur dans le cas précis où elle aurait été nécessaire. En ce qui concerne la constitution d’une hypothèque sur chacun des navires en construction, il est noté qu’elle a été concédée à l’ETVA en juin 2001, à peine, c’est-à-dire, assez longtemps après le versement du prêt à HSY. En outre, la Commission souligne que la valeur d’un bateau en construction est relativement faible et qu’il est difficile de vendre pareils bateaux. Ceci est prouvé par l’affaire présente. Plus précisément, HSY n’est pas arrivée à achever la construction des deux bateaux, ce qui a abouti à la résiliation du contrat conclu avec Strintzis, en juillet 2002. Il a fallu deux ans supplémentaires, voire plus à HSY, pour pouvoir vendre les bateaux en construction, alors que le prix qu’elle a obtenu pour la vente était d’à peine 14 millions EUR, somme qui ne correspond qu’au tiers de la somme qu’elle avait empruntée auprès d’ETVA pour en financer la construction.

(248)

Pour ce qui est de l’argument des autorités grecques, de HSY et de Deloitte selon lequel le taux d’intérêt du prêt accordé à HSY était similaire à celui de plusieurs autres prêts accordés durant la même période par l’ETVA et par d’autres banques grecques, il ne prouve pas que le prêt accordé à HSY ne constitue pas une aide. Plus précisément, les autorités grecques, HSY et Deloitte n’ont pas réalisé d’analyse relative et n’ont pas montré que la situation économique des autres emprunteurs qui, en l’occurrence, ont servi de mesure de comparaison était similaire à celle de HSY, c’est-à-dire, que leur situation économique était aussi mauvaise que celle de HSY. Dès lors, elles n’ont pas prouvé que les banques privées étaient disposées à accorder des prêts à des entreprises en difficulté contre un taux d’intérêt analogue à celui qui a été appliqué au prêt considéré. Il est peu concluant et inutile de comparer le taux d’intérêt de prêts accordés à des entreprises différentes sans vérifier si le risque entrepris, en l’occurrence, par les banques prêteuses était analogue. Par conséquent, la Commission conclut qu’aucun investisseur dans des conditions d’économie de marché n’aurait accordé, dans des conditions similaires, le prêt litigieux à HSY et que, de ce fait, le prêt constitue une aide. Vu que, en violation de la condition prévue à l’article 88, paragraphe 3, du traité, l’aide en cause a été octroyée sans notification préalable, elle constitue une aide illégale.

4.11.5.3.   Compatibilité avec le marché commun

(249)

La Commission souligne que l’aide faisant l’objet de l’examen constitue une aide au fonctionnement, étant donné qu’elle réduit les dépenses que, dans des circonstances normales, HSY aurait dû assumer dans le cadre de contrats commerciaux. Ainsi qu’il a été conclu précédemment, le prêt faisant l’objet de l’examen a de fait permis à HSY d’entreprendre le contrat commercial considéré qu’elle n’aurait pas été en mesure de financer en puisant des capitaux sur le marché libre. La Commission souligne que, conformément à l’article 3 du règlement d’application (CE) no 1540/98, était autorisé l’octroi d’aides au fonctionnement pour l’exécution de contrats de construction qui seraient conclus jusqu’au 31 décembre 2000. Néanmoins, HSY n’était pas en droit de recevoir d’aide pour le contrat conclu avec Strintzis, car elle n’a jamais achevé la construction des bateaux, qui n’ont donc jamais été livrés, en conséquence de quoi le contrat concerné a été résilié (131). En outre, les bateaux en construction n’ont été vendus à un nouvel acquéreur qu’en 2004, c’est-à-dire, plusieurs années après le 31 décembre 2000.

(250)

Attendu que l’aide est illégale et incompatible, elle doit être récupérée. Compte tenu du fait que le prêt est remboursé, une partie de l’avantage que HSY a pu en tirer est déjà supprimée. Toutefois, grâce au prêt concerné d’ETVA, HSY avait à sa disposition durant plusieurs années la somme du prêt, une somme que, dans d’autres circonstances, elle n’aurait pas eu à sa disposition durant la période concernée. L’avantage en cause doit, de même, être récupéré. Par conséquent, la Commission estime qu’il convient de récupérer une aide correspondant à la différence entre le taux d’intérêt versé à ETVA et le taux de référence pour la Grèce (132) majoré de 600 points de base pour la période s’étendant depuis le versement du prêt à HSY jusqu’à la date de la constitution de l’hypothèque sur les bateaux en construction afin d’assurer le prêt. Pour la période ultérieure et jusqu’au remboursement du prêt, l’aide à récupérer est égale à la différence entre le taux d’intérêt versé à l’ETVA et le taux de référence pour la Grèce majoré de 400 points de base. La réduction d’un tiers de la surprime de risque en cause reflète le fait que l’hypothèque sur les bateaux en construction aurait en partie limité les pertes du prêteur en cas de retard de HSY, ce qui signifie qu’elle limitait également le risque que le prêt représentait pour l’ETVA. Plus précisément, ainsi qu’il a été signalé ci-dessus, HSY est arrivée à vendre les bateaux en construction contre un prix approximativement égal au tiers de la somme qu’elle avait empruntée auprès d’ETVA.

4.12.   Garantie d’ETVA dans le cadre du contrat passé avec Strintzis (mesure E13b)

4.12.1.   Description de la mesure

(251)

En 1999, HSY a fait usage de deux garanties d’ETVA qui avaient été fournies pour assurer des acomptes de Strintzis d’un montant de 6,6 millions EUR. Les garanties en cause ont été amorties en juillet 2002, lors de la résiliation du contrat de construction qui avait été conclu avec Strintzis.

4.12.2.   Motifs d’ouverture de la procédure

(252)

La décision d’extension de la procédure estime que les deux garanties, dont les conditions n’étaient pas connues au moment de la publication de la décision, pourraient constituer une aide.

4.12.3.   Observations des parties intéressées

(253)

Elefsis Shipyards souligne le fait que l’État/l’ETVA ont en même temps assumé les rôles de garant, prêteur, actionnaire et client le plus important de HSY. De cette façon, l’État a choisi d’assumer un risque financier important. En assumant ce rôle multiple, l’État accordait dans les faits un financement sans aucune sûreté, puisqu’en cas de retard et/ou d’insolvabilité de l’entreprise, l’État n’aurait à sa disposition aucun moyen de faire valoir ses intérêts et subirait une perte définitive, puisque la valeur de l’actif du chantier naval serait considérée insuffisante pour satisfaire tous ses engagements.

4.12.4.   Observations de la Grèce

(254)

Les autorités grecques signalent que la première garantie a été accordée le 4 mars 1999 et, la deuxième, le 17 juin 1999. Selon le premier rapport Deloitte que HSY a présenté, les garanties en cause s’élevaient à 3,26 millions EUR et 3,38 millions EUR, respectivement. La Grèce rappelle qu’ETVA n’a versé aucune somme dans le cadre des garanties en cause après la résiliation du contrat conclu avec Strintzis en 2002. Ce fait démontre que HSY n’était pas un emprunteur présentant un risque élevé de retard. En outre, les autorités grecques et HSY indiquent qu’ETVA a obtenu en sûreté au titre des garanties précitées de 6,6 millions EUR la cession des recettes de HSY qui résulteraient du contrat no 39 qu’elle avait conclu avec OSE et dont le prix contractuel pour HSY était de 8,5 millions EUR. Le cabinet de conseil précité confirme que HSY aurait pu obtenir les deux garanties auprès d’une banque privée.

4.12.5.   Appréciation

4.12.5.1.   Article 296 du traité

(255)

La mesure examinée ne relève pas du champ d’application de l’article 296 du traité du fait qu’elle porte sur le soutien direct à une activité civile.

4.12.5.2.   Existence d’une aide

(256)

La Commission souligne que les deux garanties ont été fournies avant le 30 juin 1999. Ainsi qu’il a été expliqué précédemment, la Commission estime qu’à l’époque HSY avait toujours accès au marché du crédit mais moyennant un prix correspondant à sa situation économique très douteuse.

(257)

Les autorités grecques et HSY indiquent que la cession des recettes de HSY qui résulteraient du contrat no 39 conclu avec OSE constituait une sûreté suffisante, en mesure de rendre l’octroi d’une garantie admissible pour un investisseur privé. La Commission souligne que, en cas de faillite de HSY, la sûreté en question n’aurait pas permis à une banque de récupérer de l’argent. Plus précisément, si HSY avait fait faillite, la construction du matériel roulant aurait été interrompue, aucun matériel n’aurait été livré à OSE et il n’aurait pas été possible de demander de paiement à OSE, en vertu de l’accord précité (133). Il en résulte que la Commission est dans l’impossibilité de comprendre comment la sûreté considérée aurait pu réduire fortement le risque lié à l’octroi d’un prêt à HSY.

(258)

HSY n’a pas pu expliquer clairement, ni pour la Commission, ni pour son propre cabinet de conseil (voir premier rapport Deloitte, p. 4-9) dans quelle mesure elle était contractuellement tenue de verser une commission de garantie à l’ETVA et quel était le montant de cette commission. Ainsi qu’expliqué dans l’appréciation de la mesure E12b, HSY aurait normalement dû verser une commission annuelle d’au moins 480 points de base pour une telle garantie. Prenant comme critère le montant des autres commissions de garantie payées à l’ETVA, il est particulièrement improbable que HSY ait effectivement payé à l’ETVA une commission de garantie de l’ordre de 480 points de base. Dès lors, la Commission conclut que la garantie fournie par l’ETVA constitue une aide d’État égale à la différence entre la commission annuelle de garantie effectivement payée à l’ETVA et la commission de garantie de 480 points de base. Vu que, en violation de la condition prévue à l’article 88, paragraphe 3, du traité, l’aide en cause a été octroyée sans notification préalable, elle constitue une aide illégale.

4.12.5.3.   Compatibilité avec le marché commun

(259)

Ainsi qu’il est souligné dans l’appréciation de la mesure E13a, la Commission estime que les aides de ce type constituent des aides au fonctionnement qui ne peuvent pas être considérées compatibles en vertu du règlement (CE) no 1540/98. Dès lors, il s’agit d’une aide illégale et non compatible, dont la récupération s’impose.

4.13.   Garantie d’État couvrant un prêt de 10 milliards GRD (29,3 millions EUR) (mesure E14)

4.13.1.   Description de la mesure

(260)

Après le séisme de septembre 1999 et, plus précisément, le 13 janvier 2000, l’ETVA a accordé à HSY un prêt de 10 milliards GRD (29,3 millions EUR), qui était assuré par garantie de l’État accordée par arrêté du 8 décembre 1999 du Ministre de l’économie et des finances. En l’occurrence, l’ETVA a appliqué comme taux d’intérêt EURIBOR majoré de 125 points de base (134), tandis que l’État a appliqué une commission de garantie égale à 100 points de base.

4.13.2.   Motifs d’ouverture de la procédure

(261)

Compte tenu de la situation économique de HSY durant la période critique, il est peu probable qu’un investisseur dans des conditions d’économie de marché aurait accepté les termes de la garantie. En ce qui concerne la compatibilité de la mesure avec l’article 87, paragraphe 2, point b), la Grèce n’a pas démontré que l’importance de la mesure était analogue à la perte que HSY avait subie.

4.13.3.   Observations des parties intéressées

(262)

Elefsis Shipyards estime qu’aucune banque n’aurait accordé de prêt à HSY à la période donnée et, ce, à cause de sa situation économique. Il convient de considérer la garantie compatible uniquement si elle se limite aux sommes qui étaient absolument nécessaires à la réparation des dommages causés par le sinistre concerné.

4.13.4.   Observations de la Grèce

(263)

Les autorités grecques et HSY contestent que la mesure faisant l’objet de l’examen présente un caractère sélectif étant donné que la garantie a été octroyée conformément aux dispositions de la loi 2322/1995 qui établit les conditions d’octroi de garantie par l’État grec aux entreprises qui en soumettent la demande. En outre, elles font valoir que la commission de garantie de 1 % aurait été acceptée par un investisseur privé. Par ailleurs, HSY aurait pu obtenir un prêt sur le marché libre sans garantie de l’État, en utilisant des sûretés d’un autre type, par exemple, avec la cession de créances de contrats de valeur élevée et avec la constitution d’une sûreté réelle sur des éléments de son actif. Même dans l’hypothèse où la mesure constitue effectivement une aide, elle est en partie compatible sur la base de l’article 87, paragraphe 2, point b), étant donné que les capitaux concernés ont été accordés en réparation des dommages subis par HSY à cause du séisme. En outre, la mesure relève en partie de l’article 296 du traité, dans la mesure où elle est directement liée à la partie des activités militaires de HSY.

4.13.5.   Appréciation

4.13.5.1.   Article 296 du traité

(264)

En ce qui concerne la question de savoir dans quelle mesure l’article 296 est applicable, le texte de la décision par laquelle l’ETVA a décidé d’octroyer le prêt couvert par la garantie prouve qu’ETVA était entre autres intéressée par la poursuite des activités militaires de HSY. En dépit de cela, il n’existe pas de disposition contractuelle engageant HSY à utiliser le prêt garanti dans le but de financer ses activités militaires. Dès lors, l’ETVA avait pour but de garder HSY en vie pour assurer la poursuite des activités militaires mais elle n’a pas posé comme condition que le prêt garanti soit utilisé pour financer l’activité en question. HSY était libre d’utiliser les fonds comme elle le souhaitait. Ainsi qu’il a déjà été expliqué, pour ce qui concerne les mesures octroyées à l’ensemble du chantier naval, la Commission estime que 25 % du prêt garanti a été utilisé pour les activités commerciales et 75 % pour les activités militaires. Dès lors, il convient d’apprécier au regard de la législation relative aux aides d’État les 25 % seulement de la garantie de l’État (c’est-à-dire, une somme de 2,5 milliards GRD (7,34 millions EUR) et, le cas échéant, de la récupérer si elle est jugée comme étant une aide incompatible. Les 75 % de la garantie de l’État ne relèvent pas du champ d’application de l’article 296 du traité et ne sont pas soumis à la législation relative aux aides d’État.

4.13.5.2.   Existence d’une aide

(265)

En ce qui concerne le caractère sélectif de la mesure, la Commission a déjà démontré dans le cadre de l’appréciation de la mesure E12b que la loi 2322/1995 n’est pas une mesure à caractère général.

(266)

Pour ce qui est de la question de l’existence d’un avantage, la Commission rappelle que le prêt garanti a été accordé en janvier 2000, c’est-à-dire à un moment où aucun investisseur se trouvant dans des conditions d’économie de marché n’aurait accepté d’octroyer de prêt ou de garantie à HSY, ainsi qu’il a été précédemment conclu. Dès lors, sans garantie de l’État, aucune banque n’aurait octroyé de prêt à HSY. Il en résulte que la garantie de l’État litigieuse a conféré un avantage incontestable à HSY.

(267)

En conclusion, la partie de la garantie de l’État qui ne relève pas de l’article 296 du traité constitue une aide. Vu que, en violation de la condition prévue à l’article 88, paragraphe 3, du traité, l’aide en cause a été octroyée sans notification préalable, elle constitue une aide illégale.

4.13.5.3.   Compatibilité avec le marché commun

(268)

En ce qui concerne le caractère compatible de l’aide considérée sur la base de l’article 87, paragraphe 2, point b) du traité, aucune des parties ne conteste que le séisme de septembre 1999 était une «catastrophe naturelle.» Bien que le contrat relatif à l’octroi du prêt ait été signé le 13 janvier 2000, HSY avait demandé à l’ETVA de mettre à sa disposition les fonds relatifs dès les premières semaines suivant le séisme. Selon les autorités grecques, le dommage subi par le chantier consistait, en premier lieu, dans le coût de réparation des installations matérielles et, en second lieu, dans les dépenses qu’impliquait l’exécution retardée des contrats. En dépit de cela, la Grèce n’a pas présenté de calcul estimé de ce second type de dommage. Si les autorités grecques souhaitaient indemniser HSY pour ce second type de dépenses précité, elles auraient dû, à tout le moins, s’efforcer de calculer leur montant et, ce, qui plus est, en appliquant à ce titre une méthode calcul vérifiable. Attendu qu’elles ne l’ont pas fait et attendu qu’une aide peut être considérée compatible au titre de l’article 87, paragraphe 2, point b) uniquement si elle est strictement limitée à la réparation du dommage occasionné, la Commission estime que ces dépenses hypothétiques ne constituent pas de motif valide rendant l’aide compatible (135). En ce qui concerne le premier type de dépenses, c’est-à-dire, la réparation de l’infrastructure matérielle, la Commission souligne qu’aucun dispositif n’a été constitué assurant que le montant de la garantie de l’État diminuerait dès le moment où l’étendue des dommages subis par l’entreprise serait déterminée avec précision et que les indemnisations concernées seraient versées à HSY par les compagnies d’assurances. Dans leur lettre du 20 octobre 2004 (136), les autorités grecques estimaient que les dommages subis par l’infrastructure matérielle de HSY s’élevaient à 3 milliards de drachmes (8,8 millions EUR), approximativement. Par conséquent, la Commission estime que la somme au-delà de ces chiffres, à savoir, 20,5 millions EUR n’était pas liée aux dommages occasionnés par le séisme. En revanche, il peut être admis que la somme des 8,8 millions EUR correspond aux dommages occasionnés mais, uniquement jusqu’au premier trimestre de 2002, c’est-à-dire, jusqu’au moment où l’indemnisation de 3,52 millions EUR a été versée par les compagnies d’assurances (137). À compter de cette date, la garantie de l’État aurait dû diminuer à concurrence du montant correspondant. Dès lors, à compter de la date en question, seul le solde (8,8 millions EUR moins 3,5 millions EUR = 5,3 millions EUR) pourrait être considéré comme correspondant aux pertes subies par l’entreprise (à savoir, pertes occasionnées moins les indemnisations versées à HSY par les compagnies d’assurances).

(269)

Ainsi qu’il a déjà été signalé, attendu que 75 % du prêt garanti sont considérés comme ayant servi à financer la partie des activités militaires de HSY, seuls 25 % de la garantie sont soumis à l’examen sur la base de la législation relative aux aides d’État et ont été jugés comme constituant une aide d’État. Cependant, il est également raisonnable de supposer que seulement 25 % du dommage subi par HSY concernaient sa partie civile, puisque le séisme a occasionné des dommages à l’infrastructure de HSY sans établir de distinction entre partie militaire, partie civileet partie à caractère mixte (militaire et civile). Dès lors, il n’y a aucune raison de considérer que 100 % du dommage subi par HSY auraient dû être financés avec 25 % de la garantie de l’État qui constituent une aide d’État. Par conséquent, uniquement 25 % du dommage peuvent être pris en compte pour constater dans quelle mesure l’aide d’État est proportionnelle au dommage subi par l’entreprise. En conclusion, sur le total de l’aide d’État, une somme égale à 25 % de la partie de la garantie de l’État considérée comme correspondant aux dommages subis par l’entreprise (comme déterminée au paragraphe précédent) constitue une aide compatible sur la base de l’article 87, paragraphe 2, point b). Dès lors, de la partie de la garantie d’État qui constitue une aide, les 750 millions GRD (2,20 millions EUR), c’est-à-dire 25 % des 3 milliards GRD (8,8 millions EUR), sont jugés compatibles jusqu’au moment où les indemnisations ont été versées par les compagnies d’assurances, au premier trimestre 2002. Mais, après ce moment, seule la somme de 1,32 million EUR, c’est-à-dire 25 % des 3 milliards GRD (8,8 millions EUR) moins 3,52 millions EUR, est jugée compatible. Le reste de l’aide n’est pas compatible avec le marché commun.

(270)

Si la garantie de l’État est toujours en vigueur, il convient d’abolir immédiatement la partie de la garantie qui constitue une aide non compatible (c’est-à-dire 25 % de la garantie qui continuent à être en vigueur moins la somme de 1,32 million EUR, qui est jugée compatible). L’abolition de la garantie non compatible ne suffit pas pour la restitutio in integrum. En effet, grâce à la garantie de l’État non compatible, HSY avait à sa disposition, durant plusieurs années, un prêt qu’elle n’aurait pas obtenu dans d’autres circonstances. Afin de récupérer l’aide nouvelle non compatible en question, la Commission estime que, pour la période s’étendant de l’octroi du prêt garanti jusqu’à la suppression de l’aide d’État non compatible, il convient de récupérer une aide égale à la différence entre le coût total du prêt garanti (taux d’intérêt plus commission de garantie versés par HSY) et le taux de référence en vigueur pour la Grèce, majorée de 600 points de base. Il convient de calculer ce montant par rapport à la partie de la garantie de l’État qui constituait une aide non compatible.

4.14.   Prêts accordés par ETVA en 1997 et 1998 (mesure E16)

4.14.1.   Description de la mesure

(271)

La mesure faisant l’objet de l’examen consiste en trois prêts accordés par l’ETVA à HSY en 1997 et 1998.

(272)

Premièrement, le 25 juillet 1997, l’ETVA a accordé une ligne de crédit de 1,99 milliard GRD (5,9 millions EUR) dont la date d’expiration avait été fixée au 31 octobre 1997. Le taux d’intérêt concerné était ATHIBOR plus 200 points de base et la ligne de crédit avait été accordée pour couvrir les besoins de HSY en fonds de roulement. Des créances à l’égard de la marine militaire grecque ont été cédées, en sûreté.

(273)

Deuxièmement, le 15 octobre 1997, l’ETVA a accordé une ligne de crédit de 10 millions USD, également dans le but de couvrir les besoins de HSY en fonds de roulement (138). Le taux d’intérêt du prêt considéré était LIBOR plus 130 points de base et pour le garantir, les créances du contrat conclu avec la marine militaire ont été cédées. Le 19 mai 1999, l’ETVA a reçu une sûreté supplémentaire pour le prêt avec la cession à la banque de toute créance relative à l’accord de programme 1/97 que HSY avait conclu avec ISAP et ayant pour objet la construction et la fourniture de 125 automotrices. Ce prêt a été remboursé en janvier 2000.

(274)

Troisièmement, le 27 janvier 1998, l’ETVA a accordé une ligne de crédit de 5 millions USD, également au taux d’intérêt égal LIBOR plus 130 points de base. Le but en était à nouveau de couvrir les besoins de HSY en fonds de roulement. Aucune sûreté n’a été fournie pour garantir cette troisième ligne de crédit.

4.14.2.   Motifs d’ouverture de la procédure

(275)

Dans la décision d’extension de la procédure il est indiqué que les prêts considérés semblent constituer une aide d’État dont la compatibilité n’est pas certaine. En outre, le fait que les deux premiers prêts étaient garantis par des créances de la marine militaire grecque ne signifie pas nécessairement qu’ils relèvent de l’article 196 du traité.

4.14.3.   Observations des parties intéressées

(276)

Elefsis Shipyards fait valoir que, en raison de la situation économique du chantier naval à la période considérée, aucune banque privée n’aurait accordé à HSY les prêts en question.

4.14.4.   Observations de la Grèce

(277)

Les autorités grecques et HSY prétendent qu’ETVA a obtenu des sûretés suffisantes sous la forme de cession de créances de la marine militaire grecque. Les autorités grecques soulignent que les trois prêts ont été remboursés dans leur intégralité à la banque prêteuse et font valoir que, de ce fait, toute aide d’État illégale, quod non, a été récupérée par le biais du remboursement du prêt. Enfin, les autorités grecques soutiennent que, en raison du type de sûretés cédées à la banque prêteuse et du fait que les activités de HSY portent principalement sur le secteur militaire, la Commission n’est pas habilitée à examiner les mesures en question sur la base de l’article 88 du traité mais elle est tenue de suivre la procédure de l’article 298 du traité.

4.14.5.   Appréciation

4.14.5.1.   Article 296 du traité

(278)

Pour ce qui concerne l’application des articles 296 et 298 du traité, la Commission souligne que les deux facilités de crédit accordées en 1997 ont été couvertes par des créances découlant d’un contrat ayant pour objet un équipement militaire. En dépit de cela, ce seul fait ne prouve pas que les facilités ont été accordées dans le but de financer l’exécution des contrats militaires concernés. Les autorités grecques n’ont pas présenté d’informations prouvant qu’il existait un engagement contractuel au titre duquel les fonds concernés devaient obligatoirement être utilisés exclusivement pour financer l’exécution de contrats militaires. Au contraire, les autorités grecques soulignent que les deux prêts ont été accordés dans le but de couvrir les besoins de HSY en fonds de roulement. Le premier rapport Deloitte confirme que les prêts ont été accordés dans le but de couvrir les besoins de HSY en fonds de roulement et n’indique pas qu’ils étaient destinés spécialement à financer une activité précise. Ceci est également attesté par le fait que, pour la facilité de crédit de 10 millions USD une sûreté supplémentaire a été accordée sur un contrat non militaire (il s’agit du contrat conclu avec ISAP). Par conséquent, la Commission estime que les trois prêts considérés ont financé le chantier naval dans son ensemble et n’ont pas exclusivement financé sa partie liée aux activités militaires. Comme souligné au point 3.3, la Commission estime que, en l’occurrence, 25 % des prêts qui ont financé la partie non militaire de HSY, ne sont pas couverts par l’article 296 du traité et peuvent, dès lors, être appréciés au regard de la législation relative aux aides d’État.

4.14.5.2.   Existence d’une aide

(279)

En ce qui concerne les sûretés accordées, c’est-à-dire, la cession de créances qui seraient rendues recouvrables dans le cadre des contrats conclus avec la marine militaire et ISAP, la Commission estime qu’elles n’offraient pas une couverture complète contre les pertes qui résulteraient en cas de faillite de HSY. Plus précisément, dans pareil cas, HSY interromprait son fonctionnement et l’exécution des contrats existants avec la marine militaire et ISAP serait, elle aussi, interrompue. En l’absence de livraisons d’articles à la marine militaire et à ISAP, les contreparties de HSY ne seraient nullement tenues de lui payer le prix de marché (139). Pour ce qui est de l’existence de créances pour des articles ayant déjà été livrés à la marine militaire et à ISAP, les autorités grecques n’ont pas prouvé, premièrement, qu’il existait effectivement de telles créances ni, deuxièmement, qu’elles étaient recouvrables ni, troisièmement, qu’elles représentaient —constamment, pendant toute la période couverte par le prêt- une somme suffisamment élevée que pour réduire le risque de pertes en cas de faillite de HSY.

(280)

Ainsi qu’il est conclu au point 3.1, en 1997 et 1998, une banque privée aurait appliqué un taux d’intérêt égal au taux de référence majoré de 400 points de base, c’est-à-dire, ATHIBOR plus 700 points de base. Il n’existe pas de taux de référence en dollars. Néanmoins, attendu que le taux de référence pour les monnaies puissantes était déterminé en majorant le taux interbancaire de 75 points de base (140) et prenant en compte qu’un taux variable était appliqué aux deux prêts en dollars en fonction de LIBOR, la Commission estime qu’il est raisonnable de calculer sur la base de la méthode précitée le montant de l’aide sur la base d’US LIBOR plus 475 points de base (c’est-à-dire, US LIBOR plus 75 points de base, calcul d’où découle le taux de référence, majoré d’une surprime de risque égale à 400 points de base, correspondant au risque spécifique de l’octroi de prêts à HSY). Sur la base des éléments qui précèdent, il résulte que la commission appliquée aux trois prêts considérés est inférieure au prix qu’un investisseur dans des conditions d’économie de marché aurait appliqué.

(281)

La Commission en conclut que la part des trois prêts en cause qui ne relève pas de l’article 296, c’est-à-dire, 25 % du montant des prêts, comporte une aide d’État. L’aide correspond à la différence entre le taux d’intérêt appliqué par l’ETVA et celui qu’aurait appliqué un investisseur dans des conditions d’économie de marché, tel qu’il a été précédemment établi. Attendu que, en violation de la condition prévue à l’article 88, paragraphe 3, du traité, l’aide en cause a été octroyée sans notification préalable, elle constitue une aide illégale.

4.14.5.3.   Compatibilité avec le marché commun

(282)

Les trois prêts considérés ont été accordés dans le but de couvrir les besoins de HSY en fonds de roulement. Dès lors, ils constituent une aide au fonctionnement, c’est-à-dire, une aide octroyée dans le but de financer le fonctionnement du chantier naval en général et non pour financer un projet spécifique. Les prêts ont été accordés à une époque où les aides à la construction navale étaient toujours régies par les dispositions de la directive 90/684/CEE. Les articles 4 et 5 de la directive en question prévoient que les aides au fonctionnement peuvent être octroyées pour des activités de construction et de transformation navales qui sont toutes les deux définies à l’article 1 de la directive. Toutefois, au cours des années pendant lesquelles les prêts ont été octroyés, c’est-à-dire, en 1997 et 1998, HSY n’exerçait pas ce type d’activités. La directive 90/684/CEE interdisait les aides à la réparation de bateaux, activité qui constituait la principale activité civile exercée par HSY en 1997 et 1998. Pour ce motif, l’aide considérée ne peut pas être considérée compatible avec le marché commun et, puisqu’elle a été illégalement octroyée, il convient de la récupérer.

(283)

Comme les autorités grecques l’ont souligné, les prêts sont remboursés. Dès lors, il convient de récupérer l’aide déterminée précédemment, pour la période depuis le versement des prêts à HSY jusqu’à leur remboursement.

4.15.   Subventionnement croisé entre les activités militaires et civiles de HSY jusqu’à 2001 (mesure E17)

4.15.1.   Description de la mesure

(284)

Dans la décision d’extension de la procédure, il est mentionné qu’il existe des indications selon lesquelles il y aurait subventionnement croisé entre les activités militaires et civiles. Plus précisément, il y est décrit deux cas où, dans le cadre de contrats militaires, HSY a reçu des acomptes importants supérieurs à ses besoins à court terme liés à l’exécution des contrats concernés, fait qui a permis à HSY d’utiliser les liquidités disponibles en question pour financer d’autres activités. Premièrement, le rapport de HSY pour 2001 cite que «le montant à concurrence de 81,3 millions EUR a été reçu en acompte pour activités militaires, mais a été principalement utilisé dans d’autres activités et coûts liés au fonctionnement de la société.» Deuxièmement, parmi les informations qu’elle a présentées dans le cadre de son action introduite devant une juridiction grecque, la coentreprise HDW/Ferrostaal indique qu’au moins une partie (estimée par Elefsis Shipyards comme étant supérieure à 40 millions EUR) des fonds octroyés à HSY pour la construction de vedettes rapides d’attaque (le contrat concerné a été signé le 21 décembre 1999) a été utilisée à d’autres fins.

4.15.2.   Motifs d’ouverture de la procédure

(285)

Dans la décision d’extension de la procédure il est soutenu que lorsque certains documents citent expressément l’utilisation dans «d’autres activités» de capitaux reçus pour l’exécution de contrats militaires, la Commission peut légitimement douter que ces capitaux relèvent de l’article 296 et ne constituent pas une aide d’État au sens de l’article 87, paragraphe 1. Dans la décision d’extension de la procédure il est également recommandé d’instaurer l’utilisation de comptes séparés dans les états financiers pour les activités militaires et les activités civiles, afin d’éviter le financement d’activités commerciales par des fonds publics octroyés pour des activités militaires.

4.15.3.   Observations des parties intéressées

(286)

Elefsis Shipyards fait valoir que la détection d’un éventuel subventionnement croisé est difficile du fait qu’il n’existe pas de séparation comptable entre les activités militaires et civiles de HSY. Toutefois, l’analyse des travaux exécutés par le chantier naval en 2001 permet de constater que les travaux de type militaire étaient limités. Il est, par conséquent, clair que les «autres activités» qui ont été financées selon le rapport de gestion étaient en majorité des activités commerciales.

(287)

TKMS/ENAEX, qui a présenté des observations portant uniquement sur la mesure examinée ici et pour la mesure suivante (mesure E18c), fait valoir que l’article 296, paragraphe 1, point a) du traité reconnaît que certaines restrictions quant à la notification d’informations peuvent être justifiées. Dès lors, la Commission ne peut pas exiger de la Grèce de révéler des informations liées, par exemple, aux montants exacts dépensés pour divers projets militaires. Deuxièmement, TKMS/ENAEX fait valoir qu’il n’existe pas de fondement juridique permettant de soutenir l’exigence de séparer les états comptables des activités civiles et des activités militaires de l’entreprise.

4.15.4.   Observations de la Grèce

(288)

Les autorités grecques font valoir que, dans la mesure où les sommes dont il est question dans la plainte sont liées à la partie des activités militaires du chantier naval, la procédure ouverte par la Commission au titre de l’article 88, paragraphe 2, du traité est erronée et ultra vires. Si la Commission estime que les mesures concernées ont faussé la concurrence, elle est tenue de suivre la procédure de l’article 298 du traité. HSY ajoute qu’il n’existe pas d’exigence de la loi l’obligeant à tenir des états comptables séparés. Dès lors, selon elle, la demande de la Commission est dépourvue de fondement juridique.

4.15.5.   Appréciation

4.15.5.1.   Article 296 du traité

(289)

Afin de déterminer dans quelle mesure en l’occurrence les articles 296 et 298 du traité sont applicables, il convient d’établir les circonstances réelles. Sur la base des documents cités dans la décision d’ouverture de la procédure, durant plusieurs trimestres au moins les acomptes litigieux n’ont pas été utilisés dans le but d’exécuter le contrat militaire concerné. Ni les autorités grecques ni HSY n’ont contesté les extraits de documents cités dans la décision d’ouverture de la procédure. En outre, les états comptables de HSY confirment que, durant les années 2000 et 2001, la société en cause a touché des acomptes de la marine militaire dont le montant était de loin supérieur aux capitaux requis à court terme pour financer l’exécution des contrats militaires correspondants. Par exemple, il ressort du bilan au 31 décembre 2000 (141) que les acomptes touchés par HSY pour le contrat portant sur les vedettes rapides d’attaque et pour celui portant sur les sous-marins s’élevaient à 49,1 millions EUR et à 33,1 millions EUR, respectivement. À la même date, la somme des réserves, des travaux en cours, des acomptes pour acquisition de réserves et des débiteurs commerciaux (en comptabilité, les éléments précités sont appelés «actif circulant») liés aux contrats conclus avec la marine militaire s’élevait à 14,8 millions EUR. Ceci signifie que les acomptes dépassaient de 67,4 millions EUR l’actif circulant qui devait être financé. Étant donné que les sommes citées dans la décision d’extension de la procédure n’ont pas été contestées et puisque, d’une source différente, il ressort que ces sommes semblent refléter par approximation raisonnable la réalité, la Commission conclut que, durant au moins un an, les acomptes litigieux n’ont pas été utilisés dans le but d’exécuter les contrats militaires concernés.

(290)

En ce qui concerne l’application des articles 296 et 298 du traité, la Commission rejette l’argument de la Grèce selon lequel chacun des acomptes versés dans le cadre d’un contrat militaire est de plein droit couvert par l’article 296. En particulier, dans l’affaire examinée, l’administration de HSY a admis elle-même que certains acomptes étaient de loin supérieurs aux sommes exigées à court terme pour l’exécution des contrats concernés et que, dès lors, ils étaient provisoirement utilisés à d’autres fins. Une mesure relève du champ d’application de l’article 296 uniquement si la Grèce estime que la mesure concernée est «nécessaire à la protection d’intérêts essentiels à sa sécurité qui portent sur la production ou la commercialisation d’armes, de munitions et de matériel de guerre.» La Commission tient à souligner que la Grèce n’a pas expliqué pourquoi la partie des acomptes qui était supérieure aux capitaux requis pour l’exécution des programmes de défense concernés contribuerait à la «protection d’intérêts essentiels à sa sécurité.» La Commission elle-même est dans l’impossibilité de comprendre pourquoi pareil argument pourrait être valide, compte tenu du fait que le chantier naval n’avait pas besoin des capitaux litigieux pour la production du matériel de guerre concerné et ne les a pas utilisés à cette fin. Dans pareil cas où les circonstances réelles indiquent que, en l’occurrence, l’article 296 n’est pas applicable, la Grèce aurait dû expliquer les raisons pour lesquelles, en dépit de cela, les acomptes démesurés litigieux ont contribué à sa sécurité nationale. Attendu que ce ne fut pas le cas, la Commission conclut que les acomptes en cause, durant la période à laquelle ils n’étaient pas nécessaires à l’exécution des contrats de travaux de défense concernés, ne relèvent pas du champ d’application de l’article 296 du traité.

(291)

Attendu que les acomptes ont été utilisés, dans un premier temps, pour financer l’ensemble des activités du chantier naval, la Commission estime que 75 % des acomptes en cause ont servi à financer des activités militaires et que 25 % ont servi à financer des activités commerciales. Dès lors, durant au moins un an, 25 % des 81,3 millions EUR et 25 % des 40 millions EUR relevaient de la législation relative aux aides d’État.

4.15.5.2.   Existence d’une aide

(292)

Les acomptes démesurés précités constituent des prêts gratuits accordés par l’État. Dans ce sens, ils confèrent à HSY un avantage sélectif. Il serait possible de prétendre que, si l’État achète des articles à des conditions qui seraient acceptables pour une entreprise privée, le contrat d’acquisition relatif, y compris l’acompte et ses autres conditions, ne pourrait pas conférer d’avantage sélectif au producteur. Cependant, dans le contexte des contrats de travaux militaires attribués à HSY, l’État ne s’est en aucun cas comporté de façon acceptable pour une entreprise privée qui s’intéresse à l’acquisition des marchandises. Plus précisément, une entreprise privée s’efforcerait de payer le prix le moins élevé possible, en comparant tous les fournisseurs potentiels, sur le plan mondial. Au contraire, la Grèce limite depuis toujours ses choix à des fournisseurs menant leurs activités en Grèce (ou à des coentreprises dont un membre mène ses activités en Grèce) et, ce, afin de soutenir l’emploi en Grèce et de préserver la capacité de production d’équipement militaire en Grèce (142). Dès lors, une entreprise privée n’aurait pas conclu les contrats d’achat litigieux. Par ailleurs, une entreprise privée n’aurait pas accepté de payer d’acomptes supérieurs au montant requis pour l’exécution de ses commandes; elle se serait efforcée de les limiter au montant le moins élevé possible.

(293)

Dans ces conditions, la Commission estime que les acomptes démesurés examinés constituent un prêt gratuit. Les documents précités prouvent que, durant à tout le moins un an, les capitaux concernés ont été utilisés pour d’autres activités et non pas pour exécuter les contrats concernés (143). Dès lors, la Commission considère qu’ils sont équivalents à un prêt gratuit d’un an. Sur la base de l’analyse du degré de solvabilité de HSY qui est développée au point 3.1, le montant de l’aide que comportent les prêts en question octroyés après le 30 juin 1999 est égal au taux de référence pour la Grèce majoré de 600 points de base. Attendu que, en violation de la condition prévue à l’article 88, paragraphe 3, du traité, l’aide en cause a été octroyée sans notification préalable, elle constitue une aide illégale.

4.15.5.3.   Compatibilité avec le marché commun

(294)

La Commission n’a pas trouvé de fondement sur la base duquel l’aide concernée pourrait être considérée compatible. Attendu que cette aide finance le fonctionnement du chantier naval dans son ensemble, elle semble constituer une aide au fonctionnement, mais, ainsi qu’il a déjà été expliqué dans le contexte de l’appréciation antérieure d’autres mesures, le chantier naval concerné n’était pas en droit de recevoir d’aides au fonctionnement durant les années 1999, 2000 et 2001.

(295)

Attendu que l’aide est illégale et incompatible, il convient de la récupérer.

(296)

En ce qui concerne la séparation des états comptables, la Commission traitera de cette question à la fin de la présente décision.

4.16.   Clause d’indemnisation accordée par l’État grec à HDW/Ferrostaal en contrepartie de l’obligation de rembourser des aides illégales obtenues par HSY (mesure E18c)

4.16.1.   Description de la mesure

(297)

Dans la décision d’extension de la procédure, il est mentionné que l’État grec a promis d’indemniser l’acquéreur de HSY (c’est-à-dire, HDW/Ferrostaal) si d’éventuelles aides illégales accordées avant et durant la privatisation de l’entreprise devaient être récupérées. Du point de vue juridique, cette garantie a été accordée via un dispositif comprenant deux étapes:

D’une part, l’ETVA a fourni une garantie à l’acquéreur de HSY (c’est-à-dire, HDW/Ferrostaal). Conformément à la garantie d’indemnisation en cause, l’ETVA indemniserait HDW/Ferrostaal pour les éventuelles aides qui seraient récupérées auprès de HSY. Dans la décision d’extension de la procédure, il est souligné que dans l’accord de vente des actions de HSY (ci-après, «AVA de HSY») conclu entre l’ETVA et HDW/Ferrostaal le 11 octobre 2001, l’ETVA qui, à l’époque, était encore contrôlée par l’État, avait déjà promis de fournir cette garantie à HDW/Ferrostaal. Dès lors, la garantie fournie par l’ETVA semble devoir être imputée à l’État,

D’autre part, l’État a fourni une garantie à l’acquéreur de 57,7 % des actions d’ETVA (c’est-à-dire, à la Banque du Pirée). Conformément à la garantie d’indemnisation en cause, l’État verserait à la Banque du Pirée 100 % de tout montant qu’ETVA serait amenée à payer à l’acquéreur de HSY du fait de la garantie d’indemnisation fournie par l’ETVA à l’acquéreur de HSY.

(298)

Le graphique suivant représente le dispositif de cette garantie en deux étapes, tel que décrit dans la décision d’extension de la procédure (les lignes continues montrent les flux d’indemnisation dans chacune des deux étapes de la garantie, tandis que la ligne en pointillé montre la propriété après la finalisation de la vente de HSY et de 57,7 % des actions d’ETVA).

Image

4.16.2.   Motifs d’ouverture de la procédure

(299)

Dans la décision d’extension de la procédure, il est indiqué qu’un acquéreur privé n’aurait pas fourni pareille garantie, compte tenu du fait qu’elle est illimitée des points de vue temporel et quantitatif. En outre, un actionnaire dans des conditions d’économie de marché aurait préféré laisser HSY faire faillite et être liquidée plutôt que de la vendre dans ces conditions. En effet, le prix de vente que l’État a obtenu n’était que de 6 millions EUR, alors que les sommes des indemnisations qu’il était attendu de verser en vertu de la garantie étaient de loin supérieures.

(300)

Alors que le bénéficiaire légal de cette garantie en deux étapes est HDW/Ferrostaal, dans la décision d’extension de la procédure il est souligné que le bénéficiaire effectif du dispositif dans son ensemble est HSY. Sans la clause concernée d’indemnisation accordée par l’État, aucun investisseur n’aurait été disposé à acheter HSY. L’État grec a formellement reconnu ce fait. Dès lors, il est probable que, sans la garantie en cause, HSY n’aurait pas été vendue et n’aurait pas été en mesure de faire face à ses difficultés financières et aurait fait faillite.

(301)

Dans la décision d’extension de la procédure il est également indiqué que la garantie en cause est jugée non compatible per se, compte tenu du fait qu’elle réduit l’effet utile de toute décision de récupération.

4.16.3.   Observations des parties intéressées

(302)

Elefsis Shipyards fait valoir, selon également l’appréciation initiale de la Commission, qu’aucun vendeur privé n’aurait accordé de garantie aussi illimitée. En ce qui concerne l’argument de la Commission selon lequel aucun investisseur n’aurait été disposé à acquérir le chantier naval en l’absence de la clause concernée, Elefsis Shipyards le conteste, compte tenu du fait qu’elle-même, ayant participé à la procédure du marché concernée et souhaitant acquérir HSY, n’a pas posé cette condition dans son offre pour HSY et était disposée à l’acquérir sans la garantie en cause. Selon Elefsis Shipyards, la garantie a été accordée exclusivement à HDW/Ferrostaal. Cette dernière et HSY sont, par conséquent, celles qui bénéficient de la garantie.

(303)

La Banque du Pirée, qui a présenté des observations concernant uniquement cette mesure, parce qu’il s’agit de la mesure dans laquelle elle est directement impliquée, a produit divers documents dont il ressort qu’ETVA venait d’imposer la clause d’indemnisation à HDW/Ferrostaal au moment déjà de la conclusion de l’AVA de HSY, en octobre 2001, alors qu’ETVA appartenait encore à l’État. La Banque du Pirée a présenté des contrats, des documents et des articles de presse dont il ressort que c’était l’État qui avait géré le processus de privatisation de HSY. L’accord entre l’État grec et la Banque du Pirée, daté du 20 mars 2002, prévoit que, bien que la Banque du Pirée soit devenue actionnaire majoritaire d’ETVA, l’État continue de gérer le processus de privatisation de HSY. Enfin, la Banque du Pirée révèle que, dans l’appel à manifestation d’intérêt envoyé aux candidats en juillet 2001, il était formellement précisé que, s’il était imposé à HSY la récupération d’aides d’État pour violation éventuelle de la législation communautaire relative, l’adjudicataire ne serait pas responsable du paiement des sommes concernées.

(304)

TKMS/ENAEX indique que, au cours des négociations avec l’ETVA pour l’acquisition de HSY, il était clair que celle-ci avait reçu un soutien financier de l’État grec. Toutefois, les candidats-acquéreurs ne connaissaient ni l’étendue de ces mesures ni les conditions exactes dans lesquelles elles avaient été reçues. Au cours de la procédure de soumission des offres, les candidats-acquéreurs étaient très peu informés sur les différentes mesures qui constituent l’objet de la présente procédure. Ceci signifie que les candidats-acquéreurs n’étaient pas en mesure de quantifier les éventuelles conséquences des aides d’État sur HSY. Afin d’éviter d’être exposée à quelque risque lié à des aides passées ou présentes, HDW/Ferrostaal a insisté pour que la Commission accorde son autorisation ou une lettre administrative de compatibilité/attestation négative concernant les aides plus anciennes. Si ce n’était pas possible, l’acquéreur proposerait au vendeur une forme acceptable de garantie. Suite aux contacts avec la Commission, il est apparu que cette dernière n’était pas disposée à transmettre la lettre/attestation négative en cause. Dans la décision par laquelle elle autorise le rachat de HSY par HDW/Ferrostaal, la Commission reconnaît elle-même que l’étendue des subventions n’était pas connue. Dans ces conditions, le 31 mai 2002, il a été convenu et joint à l’AVA de HSY la clause d’indemnisation par laquelle l’ETVA, en tant que vendeur de HSY, a garanti la couverture de toute perte financière que subirait l’acquéreur en cas de récupération d’aides auprès de HSY. TKMS/ENAEX déduit qu’aucun investisseur n’aurait accepté d’acheter HSY sans la garantie en cause. Cet argument est également confirmé par le second rapport Deloitte présenté par TKMS/ENAEX en juin 2007.

(305)

TKMS/ENAEX estime que la mesure ne peut pas être imputée à l’État, compte tenu du fait que la garantie a été accordée par l’ETVA alors qu’elle n’appartenait plus à l’État. En effet, au titre de l’AVA de HSY, conclu en octobre 2001, l’ETVA n’était pas contractuellement tenue d’indemniser ENAEX. L’ETVA n’a pas décidé d’accorder la garantie avant mai 2002. TKMS/ENAEX prétend également qu’ETVA et l’État ont agi en vendeurs privés. La probabilité de se voir obligés de payer la garantie était relativement faible. En revanche, si le chantier naval était liquidé, les pertes dues aux prêts et aux garanties octroyés à HSY représenteraient des sommes nettement plus importantes. (Le calcul documentant cet argument est compris dans le second rapport Deloitte présenté par TKMS/ENAEX.) En outre, TKMS/ENAEX estime que la garantie accordée par l’État à la Banque du Pirée le 20 mars 2002 prévoit que l’État versera à la Banque du Pirée une indemnisation à concurrence uniquement de 57,7 % de toute somme qu’ETVA payera à l’acquéreur de HSY (c’est-à-dire, HDW/Ferrostaal). En revanche, la garantie accordée par l’ETVA à HDW/Ferrostaal le 31 mai 2002 prévoit qu’ETVA payera à HDW/Ferrostaal une indemnisation à concurrence de 100 % du montant des aides éventuellement récupérées auprès de HSY. TKMS/ENAEX conclut que la garantie accordée par l’ETVA le 31 mai 2002 est plus étendue que celle que la Banque du Pirée a obtenue le 20 mars 2002. Dès lors, il n’est pas possible qu’elles constituent un dispositif de garantie unique et le fait qu’ETVA ait accordé une garantie plus étendue prouve qu’elle a agi en vendeur privé.

(306)

TKMS/ENAEX n’est pas en mesure de comprendre pour quelle raison une telle clause d’indemnisation peut constituer un contournement de la récupération des aides. En effet, si les aides sont récupérées auprès de HSY, l’État n’indemnisera pas HSY mais son acquéreur (c’est-à-dire, TKMS/ENAEX qui est le successeur de HDW/Ferrostaal).

(307)

TKMS/ΕΝΑΕΧ (144) estime également que la garantie accordée par l’État à la Banque du Pirée pourrait constituer une aide à la Banque du Pirée et à l’ETVA.

4.16.4.   Observations de la Grèce

(308)

Selon la Grèce et HSY, la clause d’indemnisation ne constitue pas une aide. Premièrement, elle ne peut pas être imputée à l’État, compte tenu du fait que la garantie a été accordée par l’ETVA alors qu’elle n’appartenait plus à l’État. Deuxièmement, la Grèce et HSY font valoir que l’État grec a agi en investisseur privé lors de la vente de sa participation dans HSY, en sa qualité d’actionnaire principal d’ETVA. La garantie accordée à l’acquéreur par les vendeurs de HSY constitue une condition standard et habituelle dans des accords commerciaux. En effet, la Grèce rappelle qu’elle n’a pas accordé de garantie contre la responsabilité de rembourser des aides d’État illégales à HSY, mais à son acquéreur. L’indemnisation en cause est à charge du vendeur, indépendamment de la question de savoir si elle est incluse ou pas dans l’accord commercial en tant que clause. La remarque formulée par la Commission et selon laquelle l’État grec savait ou devait savoir qu’il existait un nombre important d’autres aides d’État potentiellement illégales et incompatibles et qu’il aurait éventuellement été requis de récupérer les sommes concernées en activant ainsi la clause d’indemnisation, n’est pas fondée. Au moment où la clause d’indemnisation a été accordée, il n’existait aucune décision de la Commission jugeant illégales les aides d’État à HSY. En outre, la fermeture et la liquidation de HSY aurait représenté un coût plus important pour l’État, compte tenu du coût social.

(309)

En outre, HSY ne comprend pas comment elle aurait pu tirer quelque bénéfice financier d’une garantie qui a été convenue entre l’ETVA et HDW/Ferrostaal ou d’une garantie convenue entre l’État grec et la Banque du Pirée. Même si HDW/Ferrostaal était indemnisée, la coentreprise n’était nullement tenue de reverser cette somme à HSY. Dès lors, la Commission ne peut pas non plus prouver pourquoi la clause d’indemnisation aurait neutralisé une décision de récupération. Conformément à la jurisprudence de la Cour, avec le remboursement de l’aide, la bénéficiaire perd l’avantage relatif et il peut y avoir retour à la situation précédant l’octroi de l’aide.

(310)

Enfin, si la Commission estime que la clause d’indemnisation est une aide d’État, la Grèce fait valoir que les articles 296 à 298 du traité seraient applicables. Dans ce contexte, HSY souligne que, puisque la marine militaire grecque a toujours été le client le plus important du chantier naval, il conviendrait que la procédure et les conditions de privatisation, y compris l’entrée en vigueur de la loi 2941/2001, soient examinées à la lumière de l’État-client qui, pour des raisons de défense nationale, est intéressé par la poursuite du fonctionnement et la viabilité du chantier naval. En l’occurrence, l’État grec a pris les mesures qu’aurait prises toute entreprise privée dont les intérêts dépendent de la viabilité d’une autre entreprise. En outre, cette appréciation est encore plus importante dans le cas où l’État est tenu d’assumer les charges et les pertes résultant de la dissolution et de la liquidation de la société, qui aurait coûté plus cher et, dès lors, n’apporterait pas de bénéfice.

4.16.5.   Appréciation

4.16.5.1.   Article 296 du traité

(311)

La Commission estime que la mesure ne relève pas du champ d’application de l’article 296 du traité. En effet, le dispositif d’indemnisation est appliqué en cas de récupération d’aides d’État auprès de HSY. Ainsi que la Grèce l’a fait valoir, et que la Commission en a de façon systématique convenu (145), les activités militaires de HSY sont importantes pour la sécurité nationale de la Grèce, elles relèvent de l’article 296 et, dès lors, les règles relatives aux aides d’État ne sont pas applicables à leur égard. Compte tenu du fait que les aides d’État octroyées aux activités militaires de HSY sont exemptées de l’application des règles relatives aux aides d’État, la récupération d’aides d’État ne peut concerner que celles octroyées pour les activités civiles de HSY. Dès lors, la présente garantie porte directement et exclusivement sur les activités civiles de HSY.

(312)

Certaines parties font valoir que, sans cette garantie, aucun investisseur n’aurait acheté HSY et le chantier naval aurait, selon toute probabilité, fait faillite. Dès lors, même si elle porte exclusivement sur les activités civiles de HSY, cette mesure était néanmoins nécessaire pour assurer la survie des activités militaires de HSY et, par conséquent, elle relève de l’article 296. La Commission ne peut pas accepter cet argument. Au titre de l’article 296, la Grèce aurait pu accorder le soutien financier requis aux activités militaires pour en assurer la poursuite. Il en résulte que la Grèce aurait pu éviter l’interruption des activités militaires. À tire alternatif, la Grèce aurait pu accorder le soutien financier requis pour rendre les activités militaires attrayantes pour un investisseur potentiel de façon à ce qu’elles soient achetées et que leur poursuite soit ainsi assurée. L’investisseur qui aurait acheté les activités militaires n’aurait pas eu besoin de garantie telle que celle en cause, compte tenu du fait que, ainsi qu’il a été expliqué, il n’aurait pas été possible de récupérer des aides destinées aux activités militaires de HSY. Dès lors, la présente mesure était requise uniquement et exclusivement afin qu’un acquéreur soit trouvé pour la totalité de HSY, y compris les activités civiles. La présente mesure avait ainsi pour effet de permettre de trouver un acquéreur pour les activités civiles de HSY et, dès lors, d’assurer la poursuite de ces activités. Elle n’était pas nécessaire à la poursuite des activités militaires. Dès lors, elle ne relève pas du champ d’application de l’article 296 du traité.

4.16.5.2.   Existence d’une aide

(313)

Compte tenu du fait que certaines des parties contestent que les deux garanties — celle accordée par l’État à la Banque du Pirée et celle accordée par l’ETVA à HDW/Ferrostaal — constituent un dispositif de garanties unique et que HSY bénéficie des deux garanties, la Commission appréciera séparément d’abord la garantie accordée par l’ETVA à HDW/Ferrostaal et prouvera qu’elle constitue une aide d’État au sens de l’article 87, paragraphe 1, du traité.

(314)

Pour constituer une aide d’État au sens de l’article 87, paragraphe 1, du traité, la mesure doit pouvoir être imputée à l’État. Certaines parties contestent que la garantie fournie par l’ETVA à HDW/Ferrostaal puisse être imputée à l’État. Elles font valoir que la décision d’accorder la garantie en cause a été prise indépendamment et librement par l’ETVA. Elles font valoir, en particulier, que l’aide a été accordée le 31 mai 2002 par annexe relative à l’AVA de HSY, alors qu’ETVA n’était plus détenue par l’État mais par la Banque du Pirée. La Commission rejette cet argument et estime qu’il existe des preuves abondantes montrant que la mesure peut être imputée à l’État.

Premièrement, au cours de la procédure de privatisation de HSY, cette garantie était mentionnée dans les documents soumis aux candidats-acquéreurs (146). Ceci signifie qu’au cours de la procédure de privatisation, déjà, la promesse était donnée que l’acquéreur de HSY serait indemnisé pour l’éventuelle récupération d’aides d’État auprès de celle-ci. En outre, le 14 septembre 2001, l’ETVA s’est formellement et sans réserve engagée à accorder cette garantie à HDW/Ferrostaal, si l’Union européenne n’approuvait pas les aides présentes et plus anciennes accordées à HSY (147). La clause 1.2.3 de l’AVA de HSY, qui a été signé le 11 octobre 2001, renvoie formellement au document signé le 14 septembre 2001. Les discussions concernant la formulation précise de la garantie se sont poursuivies les mois suivants (148). Compte tenu du fait que la Commission n’a pas adressé de lettre administrative de compatibilité/d’attestation négative concernant les aides plus anciennes et présentes à HSY, l’ETVA était tenue le 31 mai 2002 d’accorder une garantie à HDW/Ferrostaal, comme il avait été convenu entre les parties contractantes le 14 septembre 2001 et comme prévu à la clause 1.2.3 de l’AVA de HSY. À la lumière des éléments qui précèdent, il est clair que, bien que l’annexe contenant la garantie à HDW/Ferrostaal ait été signée le 31 mai 2002, l’ETVA s’était engagée depuis l’époque où elle appartenait à l’État à accorder cette garantie si l’Union européenne n’approuvait pas les aides plus anciennes et présentes. Ceci signifie que l’annexe du 31 mai 2002 constitue l’exécution d’un contrat conclu par l’ETVA quand elle était encore sous le contrôle de l’État. Ainsi que prouvé au point 3.2 de la présente décision, toutes les mesures prises par l’ETVA à l’égard de HSY quand elle appartenait à l’État peuvent être imputées à ce dernier (149). Toutes ces données sont confirmées par la Grèce dans sa lettre du 23 mai 2005 (150),

Deuxièmement, même s’il était considéré que, au titre des actes précités conclus par l’ETVA alors qu’elle appartenait à l’État (c’est-à-dire, jusqu’à fin mars 2002), il n’existait aucune obligation contractuelle pour sa part d’accorder cette garantie à HDW/Ferrostaal, la mesure devrait encore être imputée à l’État. En effet, la Commission fait remarquer que la Grèce a continué à gérer la vente de HSY même après la vente d’ETVA à la Banque du Pirée. L’article 8.2.2 de l’accord du 20 mars 2002 entre l’État et la Banque du Pirée prévoit qu’ETVA ne serait pas chargée de la procédure de vente de HSY que l’État continuerait à gérer. L’article 8.2.2.(b), par exemple, prévoit que l’État «assume le contrôle, le soin et la responsabilité des actions et des consultations avec le tiers acquéreur de la participation à HSY.» Conformément à l’article 8.2.2 de l’accord du 20 mars 2002, la Banque du Pirée a demandé par courrier du 28 mai 2002 le consentement de l’État concernant la garantie qu’ETVA allait accorder à HDW/Ferrostaal. L’État a donné son consentement par lettre du 31 mai 2002. Il ressort de tous ces éléments que l’octroi de la garantie est imputé à l’État,

Troisièmement, même si les deux points précités étaient rejetés, il conviendrait toujours d’imputer la garantie à l’État. La Commission fait, en effet, remarquer que l’État a décidé de privatiser HSY (151). Quand la Banque du Pirée a pris le contrôle d’ETVA, elle a également entrepris l’obligation juridique de privatiser HSY. Ainsi que TKMS/ENAEX l’a elle-même reconnu, HDW/Ferrostaal n’aurait pas acquis HSY si elle n’avait pas obtenu la garantie en cause. Compte tenu du fait que l’État estimait que HSY devait être vendue et puisque l’octroi de la garantie était nécessaire à cette vente, il est possible de conclure que l’État a amené l’ETVA dans une position telle que celle-ci était obligée de fournir la garantie. Il en résulte que, même s’il était déduit qu’ETVA a décidé d’accorder la garantie en mars 2002 sans implication directe de l’État, la mesure serait toujours imputée à l’État,

Quatrièmement, même si les points précédents étaient rejetés, il conviendrait de conclure qu’ETVA a accepté d’accorder la garantie le 31 mai 2002 pour la seule raison que son actionnaire majoritaire (c’est-à-dire, la Banque du Pirée) avait reçu de l’État une garantie qui le protégeait contre toute perte financière résultant de cette garantie. En effet, ainsi qu’il sera prouvé, un investisseur privé dans des conditions d’économie de marché n’aurait jamais accordé la garantie en cause sans avoir obtenu de contre-garantie de l’État. L’octroi de la garantie a eu lieu uniquement parce que l’État avait protégé l’unité économique (c’est-à-dire, le groupe) en lui fournissant une garantie contre d’éventuelles retombées négatives (en accordant une contre-garantie). Dans pareil cas, où une entreprise ne fait que transférer l’aide à une seconde entreprise, l’établissement de la mesure est imputé à l’État.

(315)

Pour constituer une aide d’État au sens de l’article 87, paragraphe 1, du traité, une mesure doit pouvoir être financée par des fonds publics. La communication relative aux aides d’État sous forme de garanties souligne que «L’aide est accordée au moment où la garantie est offerte, et non au moment où elle est mobilisée ou à celui où elle entraîne des paiements.»«C’est au moment où la garantie est donnée qu’il y a lieu de déterminer si elle constitue ou non une aide d’État.» Comme précité, la Commission estime qu’ETVA a entrepris l’obligation contractuelle d’accorder la garantie en cause à HDW/Ferrostaal à un moment où l’État détenait toujours la grande majorité des actions d’ETVA. Compte tenu du fait que la communication relative aux garanties publiques indique qu’il y a lieu de déterminer l’existence de l’aide au moment où la garantie est donnée et non plus tard, quand la garantie est mobilisée, il peut être déduit que, s’engageant à accorder la garantie, l’État a mis en péril des fonds publics et, dès lors, la garantie inclut des fonds publics. Le fait qu’ETVA était bientôt vendue à la Banque du Pirée n’affecte pas cette conclusion. En effet, si l’État a bien informé les candidats-acquéreurs sur les obligations contractuelles d’ETVA — notamment, sur son engagement à accorder une garantie à HDW/Ferrostaal si la Commission ne transmettait pas de lettre administrative de compatibilité — les candidats doivent avoir pris en compte cet engagement d’ETVA. Ils doivent, dès lors, avoir revu à la baisse le prix qu’ils étaient disposés à payer pour acquérir l’ETVA. Cela implique que l’État a vendu l’ETVA à un prix inférieur et, par conséquent, a perdu des fonds. Comme précité, même s’il était déduit qu’ETVA, quand elle appartenait encore à l’État, ne s’est pas contractuellement engagée à fournir la garantie, la Commission estime qu’en décidant de privatiser HSY en janvier 2001 — alors qu’ETVA était toujours sa propriété — l’État a amené l’ETVA dans une position où elle était obligée d’accorder la garantie en cause, compte tenu du fait que celle-ci était nécessaire pour trouver un acquéreur pour HSY. Ceci signifie que, quand les candidats-acquéreurs ont soumis leur offre concernant l’ETVA, ils doivent avoir pris en compte le fait que celle-ci serait obligée de fournir la garantie en cause. Il en résulte qu’ils ont proposé un prix inférieur pour acquérir l’ETVA, ce qui amène également à la conclusion qu’il y a eu perte de fonds publics.

(316)

Même s’il était déduit que, au moment de la vente d’ETVA par l’État il n’existait pas d’obligation (contractuelle ou de fait) de fournir la garantie en cause, il est encore possible de prouver que la garantie accordée par l’ETVA comporte des fonds publics. En effet, l’État a offert à l’acquéreur d’ETVA (la Banque du Pirée) une garantie par laquelle l’État promet de rembourser à la Banque du Pirée l’intégralité (100 %) du montant qu’ETVA pourrait être obligée de payer en vertu de la garantie que celle-ci accorderait à HDW/Ferrostaal. Cette contre-garantie a été accordée par l’intermédiaire de contrats successifs. L’accord du 18 décembre 2001 conclu entre l’État et la Banque du Pirée pour la vente de 57,7 % d’ETVA prévoit que l’État s’engage à payer à la Banque du Pirée 57,7 % de toute somme qu’ETVA serait amenée à payer à l’acquéreur de HSY. L’accord du 20 mars 2002 conclu entre les mêmes parties qui modifiait l’accord du 18 décembre 2001, prévoit que l’État s’engage à payer à la Banque du Pirée 100 % de toute somme qu’ETVA serait amenée à payer à l’acquéreur de HSY (152). Par lettre du 31 mai 2002 adressée à la Banque du Pirée, l’État a confirmé à celle-ci qu’il verserait 100 % de tout montant payé par ETVA à l’acquéreur de HSY (153). Ceci signifie que, lorsque l’ETVA a signé le 31 mai 2002 l’annexe de l’AVA de HSY, la Banque du Pirée avait obtenu de l’État la garantie qu’elle serait intégralement (100 %) indemnisée pour toute somme qu’ETVA serait obligée de payer en vertu de la garantie que celle-ci allait accorder à HDW/Ferrostaal (154). Ceci prouve que chaque somme qu’ETVA paierait serait en fin de compte financée par le budget de l’État et que la garantie comporte des fonds publics.

(317)

Afin de prouver l’existence d’une aide d’État au sens de l’article 87, paragraphe 1, du traité, il y a lieu de prouver que l’État n’a pas agi en investisseur privé dans des conditions d’économie de marché se trouvant dans des circonstances similaires. À ce propos, la Grèce, HSY et TKMS/ENAEX font valoir que, dans des circonstances similaires, un investisseur privé aurait accepté d’accorder la garantie en cause à HDW/Ferrostaal. Elles font valoir qu’il y a lieu d’appliquer le critère de l’investisseur privé dans des conditions d’économie de marché à l’ETVA qui était la personne morale à laquelle HSY a été vendue, et au gouvernement grec, qui était le vendeur d’ETVA.

(318)

La Commission rappelle que, comme indiqué au point 3.2, lorsque l’ETVA a acquis HSY et a immédiatement réalisé un apport de capital pour que HSY demeure viable, elle n’a pas agi en investisseur privé mais en autorité publique qui octroie une aide pour maintenir en vie une entreprise considérée importante pour l’économie grecque. Il en résulte qu’aucun investisseur privé dans des conditions d’économie de marché ne se serait trouvé à la place d’ETVA. Aucun investisseur privé dans des conditions d’économie de marché ne se serait trouvé dans la position de vendre les actions de HSY. Dès lors, la Commission estime que le critère de l’investisseur privé ne peut pas être appliqué à la présente affaire pour justifier le fait que l’État a mis en péril des fonds publics supplémentaires (avec l’octroi de la garantie).

(319)

Même si, en dépit de tout cela, il était considéré que le critère de l’investisseur privé dans des conditions d’économie de marché devait être appliqué, la Commission estime que, si l’État était une entreprise privée coopérant dans des conditions habituelles d’économie de marché, il n’aurait pas accepté d’accorder la garantie. Pour prouver ceci, il suffit qu’un des trois arguments suivants soit accepté.

(320)

Premièrement, la Commission fait remarquer que, en dépit du fait que la participation d’ETVA (et, par son biais, celle de l’État) n’était que de 51 % (les 49 % restants étaient détenu par les salariés (155), la banque a promis de payer à l’acquéreur de HSY (c’est à dire, à HDW/Ferrostaal) 100 % de toute aide qui serait récupérée auprès de HSY. Un investisseur privé n’aurait pas accepté de couvrir l’intégralité (100 %) des pertes de l’entreprise en vente. Dans des circonstances habituelles, un investisseur privé peut accepter d’assumer certaines des obligations de l’entreprise en vente, mais uniquement à concurrence d’un taux égal à sa participation qui, en l’occurrence, était de 51 %. Un investisseur privé aurait demandé aux autres actionnaires d’assumer la responsabilité des 49 % restants des obligations considérées. En acceptant de couvrir à 100 % les éventuelles énormes obligations (il est rappelé que le contrat ne fixe pas de plafond au paiement d’indemnisation) de l’entreprise en vente, l’ETVA a fait une donation aux autres actionnaires de HSY (c’est-à-dire, les salariés). Un investisseur privé n’aurait pas accepté de faire une donation pareille en assumant des obligations énormes probables de l’entreprise en vente à un taux qui est de loin supérieur à sa participation. Dès lors, du seul fait que la garantie d’indemnisation accordée par l’ETVA à HDW/Ferrostaal s’élève à 100 % (et non à 51 %) des aides qui pouvaient être récupérées auprès de HSY, il est possible de déduire qu’aucun investisseur privé n’aurait accordé la garantie en cause.

(321)

Deuxièmement, la Grèce, HSY et TKMS/ENAEX font valoir que, dans le cas de HSY, le produit net de sa vente (c’est-à-dire, les recettes moins le coût) était plus élevé — y compris les paiements attendus en vertu de la garantie — que si elle avait été liquidée. TKMS/ENAEX soutient son argument en invoquant le second rapport Deloitte. Le rapport en question compare le coût net sur la base de deux scénarios. Cette analyse est effectuée pour ce qui concerne l’ETVA et, ensuite, pour ce qui concerne l’État. La Commission estime que l’application du critère à l’égard d’ETVA a lieu de façon abusive. En effet, ainsi qu’analysée au point 3.2, la privatisation a été décidée et financièrement appuyée — voir, par exemple, les aides d’État prévues à la loi 2941/2001 (156) — par le gouvernement et l’ETVA n’a jamais joué le rôle d’une unité économique indépendante libre de planifier la vente de HSY de façon à maximiser ses recettes et à réduire ses pertes au minimum. Dès lors, il convient d’examiner de façon approfondie l’intervention de l’État dans son ensemble, et non le comportement d’une de ses parties.

(322)

Si, en dépit de cela, le critère est appliqué à l’ETVA, il convient de comparer le produit net (c’est-à-dire, les recettes moins le coût) pour l’ETVA en cas de liquidation et en cas de vente de HSY. En cas de liquidation de HSY, il y a lieu de déterminer quel serait le coût pour l’ETVA. TKMS/ENAEX fait valoir que les pertes équivaudraient, à tout le moins, aux prêts et aux garanties accordés par l’ETVA à HSY et pour lesquels l’État n’avait pas accordé de garantie. La Commission fait cependant remarquer qu’aucun de ces prêts et garanties ne constitue une dépense habituelle lors de la dissolution et de la liquidation d’une entreprise (157). En effet, tous ces prêts et garanties ont été accordés par l’ETVA en sa qualité d’autorité publique, soit parce qu’ils constituaient des aides d’État aux activités civiles ou parce qu’ils constituaient des mesures pour la protection de la sécurité nationale de la Grèce, conformément à l’article 296 du traité (158). Les prêts et garanties en cause ne peuvent pas, de ce fait, être pris en compte dans l’application du critère de l’investisseur privé dans des conditions d’économie de marché. Dès lors, il est prouvé qu’ETVA en tant qu’entité dans une économie de marché n’aurait pas dû entreprendre de dépenses importantes en cas de liquidation de HSY. En cas de vente de celle-ci, l’ETVA encaisserait le prix de la vente s’élevant à 6 millions EUR. Pour ce qui est des dépenses qu’impliquait la vente de HSY, l’ETVA devait accorder la garantie considérée, qui était illimitée quant à son montant, et, dès lors, impliquait le paiement probable de dizaines, voire, de centaines de millions EUR. La comparaison de ces deux scénarios prouve qu’un investisseur privé aurait préféré que le chantier naval soit liquidé (159). Dès lors, l’ETVA n’a pas agi en investisseur privé dans des conditions d’économie de marché. Si la comparaison entre la vente de HSY et sa liquidation est effectuée sur le plan de l’État, on parvient à la même conclusion. La liquidation de HSY ne représenterait pas un coût important pour l’État en sa qualité d’entrepreneur/propriétaire, compte tenu du fait que tous les prêts et les garanties de l’État (directs ou par l’intermédiaire d’ETVA) accordés à HSY l’ont été par l’État en tant qu’autorité publique, parce qu’ils constituent soit des aides d’État aux activités commerciales soit des mesures pour la protection de la sécurité nationale de la Grèce conformément à l’article 296 du traité. En cas de vente de HSY, l’État encaisserait simplement quelques millions EUR alors que, à cause de la garantie qu’il avait accordée, il courait le risque d’être obligé de payer des dizaines ou de centaines de millions EUR. En conclusion, l’État n’a pas agi de façon acceptable pour une entreprise privée se trouvant dans des conditions analogues.

(323)

La Grèce, HSY et TKMS/ENAEX font valoir que le risque que HSY soit obligée de rembourser des aides d’État était très limité, compte tenu du fait que, à l’époque, la Commission n’avait pas ouvert de procédures d’enquête. Elles prétendent, de ce fait, que le risque qu’ETVA et l’État soient obligés de verser une indemnisation en vertu de la garantie était faible. La Commission ne peut pas accepter cet argument. Cela reviendrait à prétendre que l’octroi de la garantie était admissible étant donné que, au cours de toutes les années antérieures, la Grèce était arrivée à dissimuler l’octroi à HSY d’aides d’État illégales et incompatibles et la mise en œuvre abusive des aides que la Commission avait préalablement autorisées. À titre auxiliaire, la Commission fait remarquer que HDW/Ferrostaal avait insisté afin d’obtenir la garantie en cause et n’était pas disposée à signer et à finaliser la vente de HSY avant d’avoir assuré la garantie. L’importance que HDW/Ferrostaal accorde à la garantie prouve que cet investisseur privé jugeait que la probabilité de voir HSY obligée de rembourser des aides d’État n’était pas faible. Le fait que, depuis le début de la procédure de privatisation, la Grèce se soit engagée à accorder la garantie au plus offrant prouve également que la Grèce estimait que la garantie en cause serait jugée très importante par un investisseur privé (terme critique – sine qua non-, selon la lettre de la Grèce du 23 mai 2005, citée à la note 148 de bas de page de la présente décision et selon le second rapport Deloitte), ce qui ne peut être le cas que si l’investisseur privé estime que la probabilité de la récupération d’aides n’est pas très faible.

(324)

La Commission fait également remarquer que, dans ce contexte, où il était difficile d’estimer le montant des aides qui pouvaient être récupérées auprès de HSY, une entreprise dans des conditions d’économie de marché qui vend HSY aurait à tout le moins intégré au contrat de vente un plafond pour la somme qui serait payée, le cas échéant, à l’acquéreur. Pareille entreprise n’aurait pas accepté le risque de se voir obligée de payer des centaines de millions EUR, même s’il était accepté que la probabilité de devoir verser une somme aussi élevée était très faible. Dès lors, le fait qu’aucun plafond n’a été fixé pour la garantie constitue une preuve supplémentaire qu’ETVA et l’État n’ont pas agi de façon acceptable pour une entreprise dans des conditions d’économie de marché.

(325)

Troisièmement, afin d’apprécier la mesure dans laquelle l’État a agi en investisseur dans des conditions d’économie de marché, il y a lieu de prendre en compte le total de l’intervention publique. Dans la présente affaire, l’État a accordé de nombreuses aides importantes afin de faciliter la privatisation de HSY (et, notamment, celles prévues à la loi 2941/2001 (160). Notamment, il a remboursé aux salariés de HSY la somme de 4,3 millions EUR qu’ils avaient investie dans le cadre des trois augmentations de capital social de HSY. Cette mesure, dont le but était que la vente de HSY ne soit pas empêchée par les salariés, ne serait pas acceptable pour un investisseur dans des conditions d’économie de marché, entre autres, parce qu’il n’existait pas d’obligation contractuelle relative et, en outre, parce que les salariés devaient toujours à l’ETVA 24 millions EUR, correspondant au prix d’acquisition des actions. Enfin, l’État a demandé aux candidats-acquéreurs de payer une partie du prix de HSY sous forme d’augmentation du capital (161). Tous ces éléments prouvent que, au cours de la vente de HSY, l’État n’a pas agi en vue de maximiser ses recettes et de réduire son coût au minimum, mais il s’est efforcé de faciliter la vente de HSY et de maintenir le chantier naval en activité. Dès lors, au cours de la vente en cause, l’État grec n’a pas agi en investisseur privé dans des conditions d’économie de marché.

(326)

En s’appuyant sur chacune des trois appréciations précitées, la Commission déduit qu’un investisseur dans des conditions d’économie de marché n’aurait pas accordé la garantie.

(327)

Pour ce qui est de l’existence d’un avantage et du bénéficiaire de cet avantage, la Commission estime qu’aucun investisseur n’aurait acheté l’intégralité de HSY (c’est-à-dire, ses activités civiles incluses) sans la garantie. Le second rapport Deloitte confirme cette conclusion: «Sur la base de notre expérience et à la lumière de l’analyse précédente, nous tendons à considérer qu’aucun investisseur raisonnable n’aurait été disposé à acheter HSY et, en même temps, à assumer tout risque supplémentaire lié à des aides d’État (qui, à l’époque, n’était ni certain ni déterminé du point de vue quantitatif par la CE) pour la société qui a) durant plusieurs années appartenait et était gérée par une société appartenant à l’État (ETVA) et, en même temps, b) présentait des capitaux propres négatifs élevés, entre autres problèmes fonctionnels (tels que la productivité faible, les coûts d’exploitation élevés, le personnel excédentaire, etc.)» Cette conclusion est également confirmée par le fait que la Grèce, prévoyant que la garantie en cause serait nécessaire pour attirer des investisseurs privés, a promis dans les documents de l’appel d’offres que le plus-offrant recevrait une garantie relative (162). Il est raisonnable de conclure que la garantie était nécessaire pour trouver un acquéreur de HSY, compte tenu du fait qu’un investisseur examinant avec la diligence due la situation concernant HSY constaterait que celle-ci avait bénéficié de plusieurs mesures qui constituaient des aides potentielles et dont la Commission pouvait demander qu’elles soient récupérées (163). Contrairement à cette conclusion, Elefsis Shipyards fait valoir que cette garantie n’était pas nécessaire et que, précisément, elle aurait été disposée à acquérir HSY sans la garantie, ce qui est prouvé par le fait que dans son offre de rachat de HSY elle ne posait pas la garantie comme préalable à l’acquisition en question. La Commission estime que cet argument de Elefsis Shipyards n’est pas fondé. La Commission rappelle que, premièrement, même s’il est vrai que Elefsis Shipyards n’a pas demandé la garantie en cause dans son offre, cela ne prouve pas que, si elle avait été retenue comme le candidat-acquéreur préféré, elle n’aurait pas demandé la garantie à un stade ultérieur des négociations avec le vendeur (164). Il est très probable qu'Elefsis Shipyards l’aurait demandée. En effet, dès que HSY a été vendue à HDW/Ferrostaal, la Commission a été saisie de plaintes émanant d’Elefsis Shipyards qui faisait valoir que HSY avait reçu des aides nombreuses et importantes qu’il y avait lieu pour la Commission de récupérer. Un investisseur convaincu qu’une entreprise a reçu des dizaines de millions EUR d’aides illégales n’entreprend pas lui-même le risque de l’acquérir, à moins qu’une garantie relative lui soit fournie. Dès lors, la Commission rejette l’argument d'Elefsis Shipyards et estime que, sans cette garantie, aucun investisseur dans des conditions d’économie de marché n’aurait acquis l’intégralité de HSY, c’est-à-dire, les activités civiles incluses. Comme précité, si HSY n’avait pas été vendue, la Grèce aurait continué à soutenir les activités militaires au titre de l’article 296 du traité. Au contraire, en vertu de l’article 87 du traité, la Grèce n’aurait pas été autorisée à fournir un soutien financier aux activités civiles. La Commission observe que la situation économique de HSY a présenté une dégradation spectaculaire entre 1998 et 2002. Même si HSY ne publie pas de comptes séparés pour les activités civiles, il peut raisonnablement être supposé que les activités en cause étaient source de pertes exceptionnelles durant toutes ces années. Outre l’activité de construction et de réparation navales, les trois principaux contrats à objet civil exécutés au cours de ces années étaient les contrats conclus avec ISAP, OSE et Strintzis. Ainsi qu’il a été expliqué dans la présente décision (voir description et appréciation de la mesure E12c), les contrats avec ISAP et OSE ont été exécutés avec des retards significatifs, obligeant HSY à payer des amendes importantes et à fournir gratuitement du matériel roulant, ce qui représentait un coût élevé pour elle. Il est, dès lors, clair que ces contrats ont occasionné des pertes significatives. Ainsi qu’il a également été expliqué dans la présente décision, le contrat conclu avec Strintzis début 1999 s’est soldé par un échec pour HSY. Le contrat a été résilié en 2002, HSY a été obligée de payer l’indemnisation contractuelle à Strintzis et a vendu les bateaux, en 2004, à un prix correspondant à une fraction des dizaines de millions EUR que leur construction avait coûtés à HSY. Dès lors, ce contrat était également une source de pertes significatives. Enfin, la dernière activité commerciale était la construction et la réparation navales. Il s’agit d’une activité présentant des marges bénéficiaires limitées, compte tenu du fait que la concurrence entre chantiers navals est très intense dans ce domaine. Il en résulte que la Commission doute que cette activité était rentable et, en aucun cas, elle n’était en mesure de compenser les pertes importantes liées aux contrats avec ISAP, OSE et Strintzis. Il est, dès lors, raisonnable de supposer que les activités civiles étaient sources de pertes significatives jusqu’à 2002. Ainsi qu’il a été prouvé dans la présente décision, ces activités étaient constamment soutenues par le biais d’aides dont il y a lieu, à présent, de récupérer une partie. Et, principalement, l’impossibilité de bonne exécution des contrats avec ISAP, OSE et Strintzis prouve que les activités commerciales auraient continué à créer des pertes si elles n’avaient pas été rachetées par une grande entreprise et si elles n’avaient pas bénéficié des compétences techniques et de gestion de celle-ci. Le second rapport Deloitte confirme que HSY présentait des problèmes fonctionnels (faible productivité, coût d’exploitation élevé, personnel excédentaire, etc.). Par conséquent, si les activités civiles n’avaient pas été vendues, elles auraient rapidement cessé (à moins que la Grèce n’eût poursuivi l’octroi d’aides illégales et incompatibles à ces activités). En bref, la Commission a prouvé sur ce point que, sans la garantie, aucun investisseur n’aurait acheté les activités civiles de HSY qui, si elles n’avaient pas été rachetées, auraient bientôt cessé. La Commission conclut que HSY était la bénéficiaire de la garantie et que l’avantage consistait en ce qu’elle rendait possible la poursuite des activités civiles.

(328)

Elefsis Shipyards marque son désaccord avec la conclusion précédente, pour ce qui est du bénéficiaire de la mesure. Elle fait valoir que, outre HSY, HDW/Ferrostaal a également bénéficié de la garantie accordée par l’ETVA. La Commission conteste cette appréciation. Comme prouvé dans les documents de l’appel d’offres transmis aux candidats-acquéreurs il était déjà indiqué qu’ils seraient indemnisés en cas de récupération d’aides d’État auprès de HSY. Dès lors, quand HDW/Ferrostaal a soumis son offre pour acquérir HSY, elle considérait qu’il était certain que, en cas de récupération d’aides auprès de HSY, elle serait indemnisée par l’ETVA (165). Ceci signifie que dans le prix d’acquisition proposé par HDW/Ferrostaal, celle-ci avait déjà pris en compte la garantie d’indemnisation. Dès lors, la garantie ne bénéficiait pas à HDW/Ferrostaal.

(329)

La Commission conclut que la garantie octroyée par l’ETVA à HDW/Ferrostaal constitue une aide d’État au sens de l’article 87, paragraphe 1, du traité et que le bénéficiaire de cette aide est HSY. Étant donné que, contrairement à la condition prévue à l’article 88, paragraphe 3, du traité, la mesure a été octroyée sans avoir été préalablement notifiée, elle constitue une aide illégale.

(330)

Pour ce qui est de la garantie accordée par l’État à la Banque du Pirée, elle constitue également une aide. Il s’agit d’une mesure sélective, financée par des fonds publics. Un investisseur vendant l’ETVA dans des conditions d’économie de marché n’aurait jamais accordé la garantie en cause. En effet, la seule raison de l’octroi de la garantie était la garantie d’ETVA à HDW/Ferrostaal. Si celle-ci n’avait pas été fournie, il n’aurait pas été nécessaire de fournir de garantie à la Banque du Pirée. Puisque, ainsi qu’il a été expliqué, aucun investisseur dans des conditions d’économie de marché n’aurait octroyé la garantie qu’ETVA a octroyée et qui constitue une aide d’État, aucun investisseur dans des conditions d’économie de marché n’aurait non plus octroyé la garantie à la Banque du Pirée (étant donné que cette dernière garantie n’aurait pas été nécessaire, c’est-à-dire qu’elle n’aurait pas été critique). En ce qui concerne la question de savoir qui est le bénéficiaire de la garantie accordée par l’État à la Banque du Pirée, la Commission rappelle que la présente procédure porte sur les aides d’État potentielles à HSY. La décision d’extension de la procédure ne cite aucun autre bénéficiaire potentiel. Dès lors, dans le contexte de la présente procédure, ne sont examinées que les aides à HSY. S’il est estimé que la garantie accordée par l’État à la Banque du Pirée constitue une aide à HSY, elle ne constituerait pas une nouvelle aide d’État s’ajoutant à celle contenue dans la garantie accordée par ETVA à HDW/Ferrostaal. En effet, précisément grâce à cette dernière garantie, un investisseur privé a accepté d’acquérir HSY dont, ainsi, les activités civiles ont été sauvées. Ceci signifie que la garantie accordée par l’État à la Banque du Pirée ne confère par d’avantage supplémentaire à HSY et, dès lors, ne peut pas être considérée comme étant une nouvelle aide à celle-ci: tous les avantages conférés à HSY sont inclus dans la garantie accordée par l’ETVA à HDW/Ferrostaal. Dans la présente procédure, qui porte sur les aides d’État potentielles à HSY, la Commission n’a pas, dès lors, besoin de former un avis définitif quant à la question de savoir qui bénéficie de la garantie accordée par l’État grec à la Banque du Pirée ni d’examiner ultérieurement cette dernière garantie. Il suffit d’examiner la première garantie — d’ETVA à HDW/Ferrostaal — et de l’annuler, si elle constitue une aide incompatible à HSY.

4.16.5.3.   Compatibilité avec le marché commun

(331)

En ce qui concerne la garantie accordée par l’ETVA à HDW/Ferrostaal, la Commission ne comprend pas comment cette aide pourrait être jugée compatible au regard de l’article 87, paragraphes 2 et 3, du traité. En ce qui concerne l’article 87, paragraphe 3, point c) du traité, la Commission observe que HSY était une entreprise en difficulté. Comme la Commission l’a déjà signalé, depuis le 1erjanvier 1999, les aides à la construction navale sont régies par le règlement (CE) no 1540/98 du Conseil. L’article 5 du règlement stipule que les aides à la restructuration «peuvent exceptionnellement être jugées compatibles avec le marché commun, à condition de respecter les lignes directrices communautaires pour les aides d’État au sauvetage et à la restructuration des entreprises en difficulté.» Les lignes directrices qui étaient alors en vigueur pour l’octroi de garanties étaient les lignes directrices pour les aides au sauvetage et à la restructuration de 1999. Il est clair que la garantie ne respectait pas toutes les conditions prévues au point 3.2.2 des lignes directrices pour que l’aide soit autorisée. Par exemple, conformément à la condition b) «Retour à la viabilité», l’octroi de l’aide est «conditionné à la mise en œuvre du plan de restructuration qui aura été, pour toutes les aides individuelles, validé par la Commission.» La Commission observe que l’octroi de la garantie n’était pas conditionné à la mise en œuvre d’un plan de restructuration. En outre, n’ayant pas été présenté à la Commission, elle n’avait pas validé ce plan. Les lignes directrices stipulent également que «le plan doit être présenté à la Commission avec toutes les précisions nécessaires.» La précédente consultation avec la Commission était particulièrement nécessaire dans la présente affaire, étant donné que la Commission avait déjà validé un plan de restructuration en 1997 qui n’est pas arrivé à rétablir la viabilité de HSY. La garantie a également violé le principe de l’«aide unique» («one time, last time»), prévu au point 3.2.3 des lignes directrices relatives aux aides au sauvetage et à la restructuration de 1999. En effet, par la décision N 401/97, la Commission avait autorisé, au titre de la directive 90/684/CEE du Conseil, l’octroi d’aides à l’investissement qui constituaient une espèce d’aide à la restructuration (166) Comme signalé dans l’analyse de la mesure D1, l’État a octroyé cette aide en décembre 1997 (mais ne l’a pas versée). Comme il est prouvé dans la présente décision, l’entreprise a également reçu de nombreuses aides non notifiées et incompatibles dans les années ayant précédé la privatisation de 2001-2002. Les aides à la restructuration autorisées par la décision C 10/94 ont été octroyées au chantier naval, mais les conditions dont l’autorisation en question était assortie n’ont pas été respectées.

(332)

Compte tenu du fait que la garantie octroyée par l’ETVA à HDW/Ferrostaal constitue une aide incompatible en faveur de HSY, la Commission estime qu’elle doit être immédiatement abolie.

4.16.5.4.   Interdiction de la garantie en tant que telle (per se)

(333)

Comme indiqué dans la décision d’extension de la procédure, il existe une seconde raison pour laquelle la garantie accordée à HDW/Ferrostaal n’est pas compatible avec le marché commun. La Commission estime qu’elle n’est pas compatible en tant que telle (per se), compte tenu du fait qu’en empêchant l’effet utile de toute récupération d’aide auprès de HSY, elle ne permet l’application des règles relatives aux aides d’État.

(334)

TKMS/ENAEX et HSY contestent cet avis. Plus précisément, elles rappellent qu’en cas de paiement d’indemnisation, celle-ci ne sera pas encaissée par HSY. En effet, la garantie accordée par l’ETVA assure HDW/Ferrostaal et non HSY. Dès lors, si la Commission ordonne le remboursement d’une aide, il convient que HSY la rembourse, pour qu’il y ait restitutio in integrum. TKMS/ENAEX ne comprennent pas pour quelle raison son indemnisation (en tant que successeur de HDW/Ferrostaal) annulerait cette décision. En effet, TKMS/ENAEX n’est nullement tenu de réinvestir dans HSY l’indemnité qu’elle recevra.

(335)

La Commission observe que 100 % des actions de HSY ont été achetées par HDW/Ferrostaal et que, à présent, elles appartiennent à TKMS/ENAEX. Ceci signifie que, même si HSY et son actionnaire sont deux entités juridiques différentes, elles constituent une unité économique unique. Grâce à la garantie, cette unité économique sera intégralement (100 %) indemnisée pour toute aide qu’elle sera obligée de rembourser à l’État. Dès lors, la Commission estime que, de cette façon, l’effet utile de toute décision de récupération est annulé.

(336)

En ce qui concerne l’absence de disposition juridique obligeant TKMS/ENAEX à reverser à HSY toute indemnisation perçue, la Commission ne peut pas comprendre comment ce fait annule la conclusion précédente. En outre, la Commission observe que, s’il n’existe pas d’obligation, il n’existe pas non plus d’interdiction s’opposant à cette action. Il s’ensuit que TKMS/ENAEX pourrait reverser à HSY l’indemnité qu’elle percevra. En outre, il est possible d’estimer raisonnablement que, si TKMS constitue un groupe privé d’entreprises florissantes, ses ressources financières sont utilisées de la meilleure façon possible dans les différentes entités juridiques du groupe. Il s’ensuit qu’il est raisonnable de penser que, si une entité juridique du groupe est tenue de payer une amende et qu’une autre perçoit une indemnité pour cette amende, l’administration du groupe décidera de transférer la somme concernée à la première entité, rétablissant ainsi la meilleure répartition des ressources entre les différentes entités juridiques du groupe. Ceci signifie que, même si TKMS/ENAEX n’est pas tenue de réinjecter les fonds dans HSY, il semble probable que l’administration en décide ainsi.

(337)

La Commission conclut que l’aide octroyée par l’ETVA à HDW/Ferrostaal est en tant que telle (per se) incompatible avec les règles relatives aux aides d’État.

5.   CONCLUSION

(338)

La Commission a constaté que, parmi les seize mesures sur lesquelles portait la procédure officielle d’examen, certaines ne constituent pas une aide d’État au sens de l’article 87, paragraphe 1, d’autres constituent une aide compatible, plusieurs constituent des aides non compatibles tandis que bon nombre d’aides ayant été autorisées par la Commission dans le passé ont été appliquées de façon abusive. Pour ce qui concerne les aides non compatibles octroyées en violation des dispositions de l’article 88, paragraphe 3, du traité, et pour ce qui concerne les cas d’application abusive d’aides, la Commission a jugé que les aides en cause doivent être récupérées.

(339)

La Commission estime que le problème exposé par la suite pourrait empêcher la récupération efficace des aides concernées et qu’il convient d’imposer des conditions supplémentaires afin d’éviter cette possibilité. Ce point sera analysé aux paragraphes suivants.

5.1.   Besoin de garantir que le remboursement des aides octroyées aux activités civiles de HSY ne sera pas en partie financé par les activités militaires

(340)

Ainsi qu’il est expliqué au point 3.3 et qui est valable pour les mesures correspondantes, la Commission a accepté que si des aides d’État sont octroyées au chantier naval sans être destinées à financer une activité précise, il peut être estimé que les activités militaires ont bénéficié de 75 % de ces aides et que les activités civiles ont bénéficié de 25 % de ces dernières. Cette conclusion s’appuie sur le fait que HSY ne tient pas de comptes séparés et, dès lors, il n’est pas possible de vérifier le mode d’utilisation des fonds concernés.

(341)

Dans tous les cas, si la Commission accepte que, pour toute entrée de fonds publics, 75 % de ces derniers financent les activités militaires du chantier naval, il y a également lieu de conclure que 75 % de toute sortie d’argent du chantier naval grèvera la partie des activités de défense de HSY. Ceci signifie que 75 centimes de chaque euro récupéré auprès du chantier naval grèveront la partie des activités militaires de HSY. Exiger le remboursement par HSY des aides octroyées aux activités civiles du chantier naval débouchera sur la restitutio in integrum uniquement si la Grèce présente à la Commission des éléments de preuve fondés montrant que le remboursement en question a été financé exclusivement par la partie non militaire du chantier naval.

(342)

Puisque la majorité des activités de HSY sont à caractère militaire et que HSY ne tient pas de comptes séparés pour ses activités civiles, il est clair qu’il existe un risque que le remboursement des aides octroyées aux activités civiles soit principalement financé par des fonds qui, autrement, financeraient les activités militaires. La récupération, qui devrait grever pour sa totalité la partie des activités civiles du chantier naval, grèvera principalement la partie des activités militaires. Compte tenu du fait que l’État a, de façon importante et répétée, accordé un soutien financier et un financement aux activités militaires de HSY (167), l’utilisation de fonds — qui, autrement financeraient les activités militaires — pour les activités civiles équivaut à un transfert des aides d’État aux activités civiles du chantier naval. Ceci signifie qu’une partie de l’aide financière accordée par l’État aux activités militaires soutiendra, en réalité, les activités civiles de HSY (et, dès lors, ne relève pas du champ d’application de l’article 296 du traité. En effet, ces fonds ne peuvent pas être considérés nécessaires au financement des activités militaires, puisqu’ils ne sont pas utilisés à cette fin). Dès lors, il n’y aura pas de restitutio in integrum des marchés des activités civiles et, en outre, de nouvelles aides incompatibles seront automatiquement octroyées aux activités civiles de HSY.

(343)

Dès lors, pour revenir à la situation qui existerait sans l’aide d’État et pour éviter l’octroi de nouvelles aides aux activités commerciales, il convient que la Grèce s’assure que l’aide soit récupérée exclusivement auprès de la partie commerciale du chantier naval (168),

A ARRÊTÉ LA PRÉSENTE DÉCISION:

Article premier

Les aides aux dépenses d’investissement réalisées par HSY avant le 31 décembre 2001 dans le cadre du plan d’investissement décrit dans la décision du 15 juillet 1997 de la Commission concernant l’affaire N 401/97 (cette mesure est appelée mesure D1 au préambule de la présente décision) relèvent du champ d’application de la décision de la Commission du 15 juillet 1997.

Toute aide aux autres dépenses d’investissement réalisées par HSY — et, en particulier, les dépenses d’investissement réalisées après le 31 décembre 2001 — ne relève pas du champ d’application de la décision du 15 juillet 1997 et n’est pas compatible avec le marché commun.

Article 2

La garantie accordée par la Grèce à l’ETVA par décision du 8 décembre 1999 et qui couvre un prêt de 4,67 milliards GRD (13,72 millions EUR) accordé par l’ETVA à HSY (cette mesure est appelée mesure D2 au préambule de la présente décision) constitue une aide mise en œuvre en violation de l’article 88, paragraphe 3, du traité et n’est pas compatible avec le marché commun.

Si la garantie continue d’être en vigueur à la date de publication de la présente décision, il convient que la garantie publique soit immédiatement abolie. En outre, il convient de récupérer les aides pour la période depuis le remboursement intégral du prêt garanti à HSY jusqu’à la suppression de la garantie.

Le montant de la garantie à récupérer correspond à la différence entre le taux de référence en vigueur pour la Grèce majoré de 600 points de base et le coût total du prêt garanti (taux d’intérêt plus commission de garantie payés par HSY).

Article 3

Le prêt de 1,56 milliard GRD (4,58 millions EUR) octroyé en juillet 1999 par l’ETVA à HSY et remboursé en 2004 (cette mesure est appelée mesure D3 au préambule de la présente décision) constitue une aide mise en œuvre en violation de l’article 88, paragraphe 3, du traité CE et n’est pas compatible avec le marché commun.

Pour la période depuis le versement de l’intégralité du prêt à HSY jusqu’à son remboursement, le montant de la garantie à récupérer correspond à la différence entre le taux de référence en vigueur pour la Grèce majoré de 600 points de base et le taux d’intérêt du prêt.

Article 4

Le prêt de deux ans d’un montant de 13,75 millions EUR, contracté le 31 mai 2002 entre l’ETVA et HSY et qui n’a jamais été versé à HSY (cette mesure est appelée mesure D4 au préambule de la présente décision) ne constitue pas une aide.

Article 5

L’aide de 54 milliards GRD (160 millions EUR) autorisée par la décision du 15 juillet 1997 de la Commission concernant l’affaire relative à l’aide d’État C 10/94 (cette mesure est appelée mesure E7 au préambule de la présente décision) a été appliquée de façon abusive et il convient de la récupérer.

Article 6

L’aide de 29,5 millions EUR autorisée par la décision du 5 juin 2002 de la Commission relative à l’affaire N 513/01 (cette mesure est appelée mesure E8 au préambule de la présente décision) a été appliquée de façon abusive et il convient de la récupérer.

Article 7

75 % de l’apport en capital d’un montant de 8,72 milliards GRD (25,6 millions EUR) fourni par l’ETVA à HSY au cours des années 1996 et 1997 (cette mesure est appelée mesure E9 au préambule de la présente décision) sont couverts par l’article 296 du traité. Les 25 % restants constituent une aide mise en œuvre en violation de l’article 88, paragraphe 3, du traité et compatible avec le marché commun.

Article 8

L’apport en capital de 800 millions GRD (2,3 millions EUR) fourni par l’ETVA à HSY le 20 mai 1998 (cette augmentation de capital, ainsi que les deux augmentations suivantes, sont appelées mesure E10 au préambule de la présente décision) ne constitue pas une aide.

Les apports en capital d’un montant de 321 millions GRD (0,9 million EUR) et de 397 millions GRD (1,2 million EUR) fournis par l’ETVA à HSY, le 24 juin 1999 et le 22 mai 2000, respectivement, constituent une aide mise en œuvre en violation de l’article 88, paragraphe 3, du traité et non compatible avec le marché commun. Il convient de récupérer cette aide.

Article 9

Les contre-garanties fournies par l’État à l’ETVA pour assurer les garanties fournies par l’ETVA dans le cadre des contrats conclus entre HSY et la Compagnie des Chemins de Fer de Grèce (OSE) et avec les Chemins de Fer électriques d’Athènes et du Pirée (ISAP) (ces mesures sont appelées mesure E12b au préambule de la présente décision) constituent une aide mise en œuvre en violation de l’article 88, paragraphe 3, du traité CE et incompatible avec le marché commun.

Dans le cas des contre-garanties concernant les contrats conclus avec ISAP, l’aide correspond à la différence entre une commission annuelle de 480 points de base (c’est-à-dire, 4,8 %) et les commissions effectivement payées par HSY (c’est-à-dire, la commission de garantie payée à l’ETVA plus la commission de garantie payée à l’État). Il convient de récupérer cette aide pour la période jusqu’à la suppression des contre-garanties de l’État.

Pour ce qui est des contre-garanties concernant les contrats conclus avec OSE, si elles sont toujours en vigueur, il convient de les abolir immédiatement. En outre, il convient de récupérer les aides pour la période depuis l’entrée en vigueur des contre-garanties. Les garanties à récupérer correspondent à la différence entre une commission annuelle de 680 points de base (c’est-à-dire, 6,8 %) et les commissions effectivement payées par HSY (c’est-à-dire, la commission de garantie payée à l’ETVA plus la commission de garantie payée à l’État).

Article 10

L’exécution des contrats conclus entre HSY, d’une part, et OSE et ISAP, d’autre part, ainsi que les modifications aux contrats qui ont été acceptées par OSE durant la période 2002-2003 (ces mesures sont appelées mesure E12c au préambule de la présente décision) ne constituent pas une aide.

Article 11

Le prêt de 16,9 milliards GRD (49,7 millions EUR) octroyé le 29 octobre 1999 par l’ETVA à HSY et remboursé en 2004 (cette mesure est appelée mesure E13a au préambule de la présente décision) constitue une aide mise en œuvre en violation de l’article 88, paragraphe 3, du traité et n’est pas compatible avec le marché commun.

L’aide à récupérer pour la période allant jusqu’à juin 2001 correspond à la différence entre le taux de référence en vigueur pour la Grèce majoré de 600 points de base et le taux d’intérêt effectivement payé par HSY à l’ETVA.

Pour la période suivante jusqu’au remboursement du prêt, l’aide à récupérer correspond à la différence entre le taux de référence en vigueur pour la Grèce majoré de 400 points de base et le taux d’intérêt effectivement payé par HSY à l’ETVA.

Article 12

Les garanties d’un montant de 3,26 millions EUR et de 3,38 millions EUR fournies par l’ETVA le 4 mars 1999 et le 17 juin 1999, respectivement, et qui ont été abolies en 2002 (ces mesures sont appelées mesure E13b au préambule de la présente décision), constituent une aide mise en œuvre en violation de l’article 88, paragraphe 3, du traité et incompatible avec le marché commun.

L’aide à récupérer pour la période allant jusqu’à l’abolition des garanties correspond à la différence entre une commission annuelle de garanties de 480 points de base (4,8 %) et la commission de garanties effectivement payée par HSY.

Article 13

Les 75 % de la garantie de l’État accordée le 8 décembre 1999 pour assurer un prêt d’un montant de 10 milliards GRD (29,3 millions EUR) octroyé par ETVA à HSY (cette mesure est appelée mesure E14 au préambule de la présente décision) relèvent du champ d’application de l’article 296 du traité.

Les 25 % restants de la garantie de l’État ne relèvent pas du champ de l’article 296 du traité et constituent une aide mise en œuvre en violation de l’article 88, paragraphe 3, du traité. Une somme de 750 millions GRD (2,20 millions EUR) de cette aide était compatible avec le marché commun jusqu’au 31 mars 2002. Après cette date, seule une somme de 1,32 million EUR était compatible avec le marché commun. Le solde de l’aide n’est pas compatible.

Si la garantie de l’État est toujours en vigueur, il convient d’abolir immédiatement la partie de cette garantie qui constitue une aide non compatible (c’est-à-dire, 25 % de la garantie qui continue à être en vigueur moins la somme de 1,32 million EUR, qui est compatible).

En outre, pour la période allant du versement du prêt garanti à HSY jusqu’à l’expiration de la garantie de l’État compatible, il convient de récupérer une aide dont le montant correspond à la différence entre le taux de référence en vigueur pour la Grèce majoré de 600 points de base et le coût total du prêt garanti (taux d’intérêt plus commission de garantie payés par HSY).

Cette aide est calculée par rapport à la partie de la garantie de l’État qui constituait une aide non compatible.

Article 14

75 % des prêts de 1,99 milliard GRD (5,9 millions EUR), 10 millions de dollars US et 5 millions de dollars US octroyés par l’ETVA à HSY les 25 juillet 1997, 15 octobre 1997 et 27 janvier 1998, respectivement (ces mesures sont appelées mesure E16 au préambule de la présente décision) relèvent du champ d’application de l’article 296 du traité.

Les 25 % restants des prêts en cause constituent une aide.

L’aide comprise dans le premier prêt, qui était exprimé en drachmes grecques, correspond à la différence entre le taux de référence en vigueur pour la Grèce majoré de 400 points de base et le taux d’intérêt effectivement payé par HSY. L’aide comprise dans le second et le troisième prêt, exprimés en dollars US, correspond à la différence entre LIBOR pour transactions en dollar US, majoré de 475 points de base et le taux payé par HSY.

Dans les trois cas, l’aide a été mise en œuvre en violation de l’article 88, paragraphe 3, du traité et n’est pas compatible avec le marché commun.

Dès lors, il convient que ces aides soient récupérées.

Article 15

25 % des 81,3 millions EUR et des 40 millions EUR, qui constituent des estimations approximatives des acomptes versés par la marine militaire grecque en 2000 et 2001 en excédent aux dépenses de HSY pour l’exécution des contrats correspondants durant la même période (ces mesures sont appelées mesure E17 au préambule de la présente décision) constituent une aide pendant une période d’un an.

Cette aide a été mise en œuvre en violation de l’article 88, paragraphe 3, du traité et n’est pas compatible avec le marché commun. L’aide à récupérer correspond au taux de référence en vigueur pour la Grèce majoré de 600 points de base, qui doit être calculé sur la durée d’un an.

Article 16

La garantie d’indemnisation fournie par l’ETVA à HDW/Ferrostaal et qui prévoit qu’ETVA indemnisera HDW/Ferrostaal pour toute aide d’État qui sera récupérée auprès de HSY (cette mesure est appelée mesure E18c au préambule de la présente décision) constitue une aide mise en œuvre en violation de l’article 88, paragraphe 3, du traité et n’est pas compatible avec le marché commun. En outre, la garantie n’est pas compatible en tant que telle avec le marché commun et, dès lors, il convient de l’abolir immédiatement.

Article 17

Compte tenu du fait que l’aide à récupérer, comme stipulé aux articles 2, 3, 5, 6, 8, 9 et 11 à 15, a bénéficié seulement et exclusivement aux activités civiles de HSY, il convient que l’aide soit récupérée auprès de la partie des activités civiles de HSY. Concernant cette question, la Grèce est tenue de présenter des données détaillées — y compris une attestation délivrée par la société d’audit indépendante qui vérifie ses comptes — prouvant que le remboursement a été financé exclusivement par la partie des activités civiles de HSY.

Article 18

1.   La Grèce récupérera auprès de HSY les aides à récupérer, telles qu’elles sont définies aux articles 2, 3, 5, 6, 8, 9 et 11 à 15.

2.   Les sommes à récupérer comprennent des intérêts qui courent à compter de la date à laquelle elles ont été mises à la disposition de HSY jusqu’à celle de leur récupération effective.

3.   Les intérêts sont calculés selon la méthode de l’intérêt composé, conformément au chapitre V du règlement (CE) no 794/2004 de la Commission (169).

4.   La récupération de l’aide est immédiate et réelle.

5.   La Grèce prend les mesures nécessaires à l’exécution de la présente décision dans un délai de quatre mois à compter de la date de sa notification.

Article 19

1.   Dans un délai de deux mois à compter de la notification de la présente décision, la Grèce présente à la Commission les informations suivantes:

a)

Le montant (principal et intérêts au titre de la récupération) à récupérer auprès du bénéficiaire;

b)

une description détaillée des mesures déjà prises et prévues pour se conformer à la présente décision;

c)

des documents prouvant qu’ordre a été donné au bénéficiaire de rembourser l’aide.

2.   La Grèce informe la Commission des progrès de la procédure nationale d’exécution de la présente décision jusqu’à son achèvement. Elle soumet immédiatement, sur simple demande de la Commission, des informations sur les mesures déjà prises et prévues pour se conformer à la présente décision. Elle soumet également des informations détaillées sur les montants de l’aide et les intérêts au titre de la récupération qui ont déjà été récupérés auprès du bénéficiaire.

Article 20

La République hellénique est destinataire de la présente décision.

Fait à Bruxelles, le 2 juillet 2008.

Par la Commission

Neelie KROES

Membre de la Commission


(1)  L’ouverture de la procédure est communiquée au JO C 202 du 10.8.2004, p. 3. L’extension de la procédure est communiquée au JO C 236 du 30.9.2006, p. 40.

(2)  JO C 47 du 12.2.1998, p. 3. La décision a été communiquée à la Grèce le 1er août 1997 [lettre SG(97)D 6556].

(3)  JO L 83 du 27.3.1999, p. 1.

(4)  JO C 202 du 10.8.2004, p. 3.

(5)  Voir note 1 de bas de page.

(6)  Voir note 1 de bas de page.

(7)  Voir note 1 de bas de page.

(8)  En effet, il est rappelé que les observations des parties intéressées doivent être transmises à la Grèce pour commentaire. La Grèce dispose d’un mois pour répondre. Dans les cas d’observations étendues, la Grèce pourrait solliciter une extension du délai pour répondre. Si certaines allégations ne sont pas suffisamment documentées, les services de la Commission peuvent demander des documents supplémentaires à leur appui. Les services de la Commission peuvent également soumettre des questions détaillées à la Grèce concernant de nouveaux points abordés dans les observations de la partie intéressée.

(9)  La lettre en question compte 65 pages, plus 290 pages d’annexes. La lettre du 24 avril compte 35 pages, plus 900 pages d’annexes et la lettre du 2 juin compte 63 pages, plus 1 750 pages d’annexes.

(10)  Les informations fournies au présent chapitre proviennent en grande partie du document: «Hellenic Shipyards SA — Confidential Information Memorandum — Alpha Finance/Commercial Bank of Greece/KPMG/Elias SP. Paraskevas» de mars 2001, qui a été distribué aux candidats-acquéreurs intéressés. Une copie du rapport concerné a été transmise par TKMS/ENAEX avec sa lettre du 21 juin 2007.

(11)  JO L 380 du 31.12.1990, p. 27. Les dispositions spéciales concernant la Grèce sont prévues à l’article 10.

(12)  JO C 88 du 30.3.1993, p. 6.

(13)  JO C 138 du 20.5.1994, p. 2.

(14)  PV(95) 1258 du 26.7.1995, SEC(95) 1322/2 du 24.7.1995.

(15)  JO C 68 du 6.3.1996, p. 4.

(16)  JO C 80 du 13.3.1997, p. 8.

(17)  JO L 148 du 6.6.1997, p. 1.

(18)  JO C 306 du 8.10.1997, p. 5.

(19)  La concentration a été autorisée par la Commission en vertu de la décision M.2772 du 25.4.2002 (JO C 143 du 15.6.2002, p. 7).

(20)  La concentration a été autorisée par la Commission en vertu de la décision M.3596 du 10.12.2004 (JO C 103 du 29.4.2006, p. 30).

(21)  La concentration a été autorisée par la Commission en vertu de la décision M.3932 du 10.11.2005 (JO C 287 du 18.11.2005, p. 5).

(22)  JO C 186 du 6.8.2002, p. 5.

(23)  JO L 75 du 22.3.2005, p. 44.

(24)  Les autorités grecques ont confirmé cette appréciation dans leur lettre du 20 octobre 2004.

(25)  Point 2.1 de la lettre du 20 octobre 2004.

(26)  Afin d’évaluer les fonds propres de la société, les capitaux propres sont beaucoup plus importants que le capital social. En effet, les capitaux propres prennent en compte les bénéfices et les pertes des années antérieures, qui augmentent ou réduisent respectivement les fonds propres de l’entreprise.

(27)  L’exercice 2003 a duré du 1.1.2003 au 30.9.2003.

(28)  JO C 273 du 9.9.1997, p. 3.

(29)  La Commission souligne que HSY a essayé sans succès d’emprunter des capitaux sur le marché à un taux d’intérêt inférieur. Cela ressort des procès-verbaux du conseil d’administration de HSY datés du 1er décembre 1998 et du 27 janvier 1999, dont des copies ont été fournies par TKMS/ΕΝΑΕΧ avec la lettre du 21 juin 2007. La tentative d’emprunt sur le marché a également été citée dans la presse («Τα Ελληνικά Ναυπηγεία ζητούν το πρώτο δάνειο στην αγορά του ευρώ» («Hellenic Shipyards set first euromarket loan») Reuters News, 19 mars 1999).

(30)  Grâce à l’annulation de dettes par l’État, HSY était quasiment libre de dettes, résultant du fait que les dépenses pour intérêts (c’est-à-dire, intérêts payés aux banques qui lui avaient accordé des prêts) étaient très peu élevées en 1997 et en 1998 (elles ont présenté une augmentation spectaculaire au cours des années suivantes). Si, en 1997 et en 1998, les dépenses pour intérêts s’étaient trouvées à des niveaux plus normaux, les résultats économiques auraient été moins favorables et, selon toute probabilité, il n’y aurait pas eu de bénéfices enregistrés en 1998.

(31)  Le plan de restructuration prévoyait également une augmentation spectaculaire des activités de transformation navale après 1998. HSY n’est pas arrivée à réaliser cet objectif.

(32)  Il s’agissait en pratique du premier contrat de construction navale conclu avec une entreprise privée sur quasiment deux décennies.

(33)  Dès la première année, les comptes de HSY incluaient une provision pour pertes prévues à la suite de l’exécution du contrat concerné. Au cours des années suivantes, la somme de cette provision augmentait chaque année. En outre, il semble que ces provisions étaient insuffisantes, TKMS/ENAEX ayant eu recours contre le vendeur de HSY, sur cette question. En ce qui concerne les raisons de conclusion d’un contrat qui, en tant que tel, n’était pas porteur de bénéfices, la Commission souligne que, en concluant ce contrat, l’administration de l’entreprise espérait probablement couvrir une partie des coûts fixes du chantier naval (le livre des commandes de travaux de construction navale était vide, à l’époque) et, de ce fait, réduire les pertes escomptées du chantier naval.

(34)  Ce contrat a été cité dans la presse. Voir, par exemple, l’article «Τα Ελληνικά Ναυπηγεία κερδίζουν κρίσιμη σύμβαση για υποβρύχια» («Hellenic lands crucial submarine contract»), Lloyd’s List International, 30 juillet 1999.

(35)  Selon la page 5-12 du rapport de Deloitte Financial Advisory Services (ci-après le «premier rapport Deloitte»), soumis par HSY pour appuyer ses observations concernant la décision d’extension, la construction des sous-marins ne devait pas commencer avant 2003.

(36)  Selon les articles publiés dans la presse, l’administration de HSY avait déjà prévenu les actionnaires, en octobre 1998, des problèmes attendus (voir article cité à la note 38 de bas de page). Selon le procès-verbal du conseil d’administration de HSY du 1er décembre 1998, des pertes étaient attendues en 1999. L’administration de HSY a publiquement admis, début décembre 1999, que le chantier naval enregistrerait des pertes de 10 milliards GRD (29 millions EUR) pour 1999 et 2000 («Ο επικεφαλής των Ελληνικών Ναυπηγείων αναμένει κέρδη το 2001» («Hellenic boss expects profit in 2001», Lloyd’s List, 6 décembre 1999). La probabilité de pertes aussi élevées pour 1999 avait déjà été citée dans la presse en novembre 1999 («Αποπομπή της ομάδας της Brown & Root από τα Ελληνικά Ναυπηγεία» («Brown & Root team ousted from Hellenic»), Lloyd’s List, 19 novembre 1999).

(37)  À moins que l’État n’octroie des aides nouvelles (non compatibles) pour soutenir les activités civiles du chantier naval et n’accorde un soutien important aux activités militaires.

(38)  Il en résulte que le chantier naval courait le risque de ne pas recevoir les aides à l’investissement promises par les autorités grecques, qui avaient posé comme délai pour l’achèvement du plan le 31 décembre 1999. Conformément à la législation grecque, afin de proroger ce délai, il fallait qu’au moins 50 % des dépenses aient été réalisées.

(39)  Dans le document «Ελληνικά Ναυπηγεία Α.Ε. — Υπόμνημα με εμπιστευτικές πληροφορίες — Alpha Finance/Εμπορική Τράπεζα της Ελλάδας/KPMG/Ηλίας Σπ. Παρασκευάς» («Hellenic Shipyards SA — Confidential Information Memorandum — Alpha Finance/Commercial Bank of Greece/KPMG/Elias SP. Paraskevas») de mars 2001, qui a été mis à la disposition des candidats-acquéreurs intéressés (une copie du document a été transmise par TKMS/ΕΝΑΕΧ avec sa lettre du 21 juin 2007), la description suivante apparaît: «Toutefois, en 1999, les résultats économiques de l’entreprise sont à nouveau devenus négatifs. Brown & Root a insisté pour que des changements structuraux concernant le personnel soient réalisés. Ces changements n’ont pas été acceptés par les actionnaires (ΕΤVΑ et salariés) et le contrat avec Brown & Root a été résilié.» (p. 15). Les articles parus dans la presse sont plus clairs: «On pense que l’administration a informé les propriétaires de HSY depuis octobre passé que l’année en cours serait mauvaise, à moins que des mesures de rationalisation concernant le personnel ne soient prises, personnel qui est copropriétaire du chantier naval, avec une banque appartenant à l’État. À la suite du fait que, après de nombreuses années, beaucoup d’argent a été dépensé pour la modernisation de HSY, le nouvel équipement a rendu le problème du personnel excédentaire encore plus important, mais les actionnaires ont jusqu’à présent rejeté des propositions portant sur la suppression d’au moins 250 postes, principalement de personnel employé. En même temps, l’administration a demandé plus de flexibilité dans les méthodes de travail du chantier naval. Cependant, le principal résultat semble avoir été le conflit avec les dirigeants des organisations syndicales, qui ont demandé l’éloignement des huit membres de l’équipe d’administration, dirigée par M. Groves, qui était là en détachement de l’équipe britannique Brown & Root.»

(40)  Point 68 de la décision de la Commission du 16 juin 2004 relative aux mesures mises en œuvre par l’Espagne en faveur de Siderúrgica Añón SA (JO L 311 du 26.11.2005, p. 22); Considérant 42 de la décision de la Commission du 11 décembre 2002 relative à l’aide d’État octroyée par l’Espagne à Sniace SA (JO L 108 du 30.4.2003, p. 35).

(41)  Voir note 34 de bas de page.

(42)  Pages 5-19 du rapport.

(43)  Voir note 28 de bas de page.

(44)  La Commission décrit ici une série d’erreurs apparaissant au chapitre 5.0 du premier rapport Deloitte «Φερεγγυότητα της Ελληνικά Ναυπηγεία Α.Ε.» («Credit Worthiness of Hellenic Shipyards SA»).

Premièrement, en ce qui concerne la «mise en œuvre du plan d’investissement (situation courante et évolution)» [«Implementation of the Investment Plan (Status and Évolution)»], le premier rapport Deloitte contient, à la page 5-4, l’allégation selon laquelle, au 30 juin 1999, «le montant certifié a dépassé 50 % de l’investissement total». Néanmoins, en réalité, le montant certifié au 30 juin 1999 correspondait à 18 % du total du plan d’investissement. Ceci montre que la mise en œuvre du plan d’investissement était lente. La «situation courante et évolution» («Status and Evolution») du plan étaient, de ce fait, un facteur plutôt «négatif» au tableau de la page 5-2 du rapport.

Deuxièmement, en ce qui concerne les critères «Disponibilité d’avoirs sur lesquels des sûretés pourraient être constituées» («Availability of property that could be encumbered») (pages 5-5 et 5-6), la Commission estime que cet élément n’entre pas dans l’appréciation de la question de savoir si une banque privée aurait pu avoir accordé les prêts et les garanties qu’ETVA et l’État avaient accordés. En effet, les prêts et garanties en cause n’avaient pas été assurés par des sûretés réelles. Dans l’appréciation de la question de savoir si un prêt ou une garantie de l’État constitue une aide, il convient de déterminer si cette transaction serait acceptable pour un investisseur privé. La Commission ne doit pas apprécier si HSY, en concluant un contrat d’un autre type, accordant plus de droits au prêteur, aurait été en mesure d’obtenir les prêts et les garanties. Même si l’existence d’avoirs sur lesquels des sûretés pourraient être constituées était critique, la Commission observe que les avoirs existants étaient déjà grevés de sûretés pour un montant de 199 millions EUR jusqu’en 1998 et pour un montant de 51 millions EUR jusqu’en 2003. Dès lors, un prêteur potentiel aurait été en mesure d’acquérir un privilège de premier rang uniquement sur une partie limitée des avoirs. En outre, les avoirs de HSY étaient d’une faible valeur de liquidation. Ceci est confirmé par Deloitte Financial Advisory Services, aux pages 8-8 et 8-9 du second rapport, établi le 18 juin 2007 (ci-après, le «second rapport Deloitte») et soumis par TKMS/ΕΝΑΕΧ à l’appui de sa lettre adressée à la Commission le 21 juin 2007. En conclusion, la Commission estime que la «disponibilité d’avoirs sur lesquels des sûretés pourraient être constituées» n’a pas de place dans l’appréciation des mesures et que, même si elle avait une place, un prêteur potentiel n’aurait pas pris en compte cet élément de façon aussi positive que citée au premier rapport Deloitte.

Troisièmement, la «disponibilité de constructions liées aux travaux en cours et sur lesquels des sûretés pourraient être constituées» («Availability of construction relating to work in progress that could be encumbered») (page 5-7) n’offre pas de protection complète aux créanciers en cas d’impossibilité pour HSY d’honorer ses engagements et en cas de cessation de ses activités. En effet, la valeur du marché d’une construction en cours est habituellement faible, comparée aux capitaux que l’entreprise avait empruntés pour leur construction et comparée à la valeur contractuelle. Ceci est démontré dans le cas des deux ferry-boats commandés par Strintzis lines, qui ont été vendus à un prix bas et, ce, uniquement (c’est-à-dire, pas avant) deux ans après l’annulation du contrat de construction navale. En ce qui concerne la cession de créances de HSY à une banque prêteuse, à nouveau, il ne s’agit pas d’une protection complète car, si le chantier naval cesse ses activités, l’acquéreur ne recevra pas le produit faisant l’objet de la commande et, dès lors, il ne sera pas tenu de payer le prix de marché. Ceci signifie que dans le cas précis où elle serait nécessaire, la sûreté n’aurait aucune valeur. Dès lors, la cession de créances de contrats ne permet pas à la banque prêteuse de récupérer une partie importante de l’argent en cas de faillite de HSY (voir, p.ex., les notes 128 et 131 de bas de page de la présente décision). Il en résulte qu’un prêteur potentiel ne prendrait pas en compte cet élément de façon aussi positive que le cite le premier rapport Deloitte.

Quatrièmement, en ce qui concerne «l’indicateur du total des prêts bancaires par rapport au capital social et aux engagements pendants», «les commandes signées de clients (le volume de commandes de HSY)» et «l’évolution des bénéfices» («Total bank loans to shareholder’s Equity ratio & debt obligations outstanding at the time», «Signed Client Contracts (HS’s orderbook)», «Evolution of revenue generation» and «Evolution of profitability»), la Commission renvoie aux observations exposées précédemment dans la présente décision. Entre autres, la Commission rappelle que dès le dernier trimestre de 1998, déjà, il était possible de prévoir que HSY enregistrerait des pertes en 1999. Dans les mois qui ont suivi, il est devenu clair que l’importance des pertes serait grande et que des pertes significatives devaient être également attendues en 2000 et, qui plus est, des pertes telles qu’elles épuiseraient les capitaux propres de HSY. En résumé, la Commission estime que le premier rapport Deloitte ne prend pas en compte le fait que les résultats négatifs des années 1999 et 2000 étaient déjà prévisibles au début de chacune de ces années.

En cinquième et dernier lieu, comme il a déjà été expliqué, tout prêteur potentiel aurait considéré les circonstances et les motifs de renvoi de l’administration existante de HSY comme un facteur négatif. Il en résulte que la classification en tant qu'«indéterminé» à la page 5-2 ne peut pas être acceptée par la Commission.

(45)  Ce point est développé à l’unité suivante (unité 3.2), où la Commission analyse la possibilité d’imputer le comportement d’ETVA à l’État. Sa seule mission, à l’époque, était d’agir en tant que banque de développement. Les autorités grecques citent, à la note 63 de leur réponse, la décision d’extension de la procédure: «ETVA était la seule banque de développement en Grèce et, par conséquent, en ce qui concerne les activités de développement, il n’existe pas de critère de comparaison avec d’autres établissements de crédit»

(46)  Voir note 52 de bas de page.

(47)  En ce qui concerne la période après le 30 juin 1999, la Commission est également dans l’impossibilité de comprendre quelle était la «valeur» de l’action de HSY et, par extension, quelle était la «valeur» qu’ETVA s’efforçait de préserver. En effet, la situation économique était à ce point mauvaise qu’il est impossible de comprendre dans quelle mesure les actions pouvaient avoir quelque valeur importante.

(48)  CJCE, affaire C-482/1999, France contre Commission («Stardust»), Recueil 2002, p. I-4397, point 52.

(49)  Lettre du 5 octobre 2006, paragraphe 156.

(50)  Lettre du 5 octobre 2006, paragraphe 156.

(51)  L’accord d’acquisition d’actions a été signé le 18 décembre 2001 et modifié le 20 mars 2002, date à laquelle la vente a été réalisée (conclue).

(52)  Il existe plusieurs articles parus dans la presse traitant de l’implication du gouvernement dans la décision concernée. Voir, p.ex., «Προθεσμία για ελληνικό ναυπηγείο/Η κυβέρνηση πρόκειται να λάβει απόφαση για την αγορά των Ελληνικών Ναυπηγείων» («Deadline for Greek shipyard/Government to decide on purchase of Hellenic Shipyards»), Financial Times, 19 avril 1985, «Σύμφωνα με τον Υπουργό Εθνικής Οικονομίας και Ναυτιλίας της Ελλάδας, κ. Γ. Αρσένη, ασκούνται πιέσεις στην κυβέρνηση να αγοράσει τα Ελληνικά Ναυπηγεία εξαιτίας της διάρθρωσης της ελληνικής βιομηχανίας» («According to the Greek minister of national economy and shipping, M. G Arsenis, the government is under pressure to buy the Hellenic Shipyards because of the structure of Greek industry»), Lloyd’s List International, 29 juin 1985, «Αγορά των προβληματικών Ελληνικών Ναυπηγείων από την κυβέρνηση» («Government to buy ailing Greek shipyard»), Financial Times, 17 juillet 1985, «Ο κ. Α. Δροσογιάννης, Υπουργός Εθνικής Άμυνας της Ελλάδα ανακοίνωσε ότι όλες οι μελλοντικές παραγγελίες για νέα πλοία του πολεμικού ναυτικού θα ανατεθούν στα Ελληνικά Ναυπηγεία» («M. A Drossoyannnis, the Greek Minister for National Defence, has announced that all future naval newbuilding orders will be placed with Hellenic Shipyards»), Lloyd’s List International, 26 juillet 1985, «Άνεργοι εργάτες ναυπηγείων πραγματοποιούν πορεία στην Αθήνα» («Jobless shipyard workers march in Athens»), The Wall Street Journal, 12 juillet 1985.

(53)  Par lettre du 25 novembre 1986, la Grèce a notifié à la Commission un apport en capital à HSY d’un montant de 58,3 millions USD provenant d’ETVA. L’affaire a été enregistrée sous le numéro Ν 230/86. Par lettre du 20 mars 1987 [no de réf. SG (87) D/3738], la Commission a informé la Grèce qu’elle avait jugé que l’apport en capital de la part d’ETVA constituait une aide d’État qui est, néanmoins, compatible avec le marché commun.

(54)  Chapitre Ε (articles 12-15) de la loi 2367/1995.

(55)  Par exemple, l’article 13 de la loi 2367/1995 prévoit une réduction de la main-d’œuvre de la société de 600 personnes et prévoit de façon détaillée les incitations relatives. En outre, conformément à l’article 14 de la même loi, 99 % des dettes de HSY existant à l’époque sont effacées.

(56)  Comme précité, en effet, l’État a commencé à octroyer des aides importantes à HSY dès qu’il en a fait l’acquisition.

(57)  Ainsi qu’il a été constaté précédemment, HSY n’avait plus accès aux banques depuis le 30 juin 1999. Compte tenu du fait que HSY ne pouvait pas emprunter de capitaux sur le marché et qu’elle était en situation économique douteuse, si l’ETVA refusait de lui octroyer les prêts ou si elle avait exigé des taux d’intérêt plus élevés, cela aurait augmenté les difficultés de HSY (et pouvait même amener à sa faillite), chose inadmissible pour l’État. Dès lors, en raison de l’influence de l’État, l’ETVA n’avait pas d’autre choix que d’octroyer les prêts demandés par HSY.

(58)  Communication de la Commission sur la base de l’article 93, paragraphe 2, du traité CE aux autres États membres et aux autres parties intéressées concernant l’aide que le gouvernement grec prévoyait d’accorder à HSY SA (JO C 80 du 13.3.1997, p. 8).

(59)  CJCE, affaire C-482/1999, France contre Commission («Stardust»), Recueil 2002, p. I-4397, point 56.

(60)  Lettre des autorités grecques du 18 septembre 2002 (enregistrée par la Commission le 23 septembre 2002 sous le numéro A/36895), envoyée dans le cadre de l’affaire CP 101/02.

(61)  CJCE, C-482/1999, France contre Commission («Stardust»), Recueil 2002, p. I-4397, point 56.

(62)  Lettre des autorités grecques du 20 novembre 2003, envoyée dans le cadre de l’affaire CP 101/02.

(63)  En outre, ils ont été accordés en plus de l’implication déjà existante d’ETVA à HSY, de façon à ce que l’ouverture totale d’ETVA envers HSY soit importante. Une preuve de l’importance de cette ouverture est que le rapport annuel d’ETVA pour 2000 reconnaît les pertes de la banque liées à son implication dans HSY (p. 42-43).

(64)  Lettre de la Grèce du 15 juin 2006 (numéro de la procédure de récupération: CR 40/02).

(65)  Dans la décision C 10/94, la Commission n’examine pas l’annulation des dettes liées à «la construction de navires de guerre» car il s’agit d’une «activité qui ne relève pas du champ d’application du traité CE». De même, dans la décision Ν 513/01, la Commission n’examine pas les 75 % des aides d’État d’un montant de 118 millions EUR, car elles concernent des activités de construction navale militaire.

(66)  Il est rappelé que HSY ne tenait pas de comptes séparés pour ses activités militaires et civiles durant les années examinées. Dès lors, une mesure peut être considérée comme finançant une activité précise uniquement si la décision relative à son octroi cite précisément l’activité financée.

(67)  JO C 288 du 9.10.1999, p. 2.

(68)  La même année, l’annulation de dettes pour les activités militaires du chantier naval n’a pas été appréciée par la Commission sur la base des règles relatives aux aides d’État.

(69)  Ceci est également rendu clair par la formulation de la décision C 10/1994.

(70)  C’était également l’information donnée aux candidats intéressés lors de la procédure de privatisation de 2001, comme il ressort du rapport sur la «gestion en bon père de famille» («Due Diligence») du 19 juin 2001 établi par Arthur Andersen pour HDW et Ferrostaal, p. 23 (transmis en annexe C du rapport présenté par TKMS et ΕΝΑΕΧ dans leur lettre du 21 juin 2007).

(71)  La Commission rappelle qu’elle n’avait pas demandé la privatisation de 2001-2002, et encore moins le gel du plan d’investissement au cours de cette procédure.

(72)  Partie 1. 3. b. de la lettre du 20 octobre 2004.

(73)  Somme déclarée en euros par les autorités grecques.

(74)  Ces informations sont incluses à l’unité 1.3 et aux annexes 4, 5 et 6 de la lettre de la Grèce du 20 octobre 2004.

(75)  JO C 71 du 11.3.2000, p. 14.

(76)  Voir note 14 de bas de page de la lettre de la Grèce du 20 octobre 2004.

(77)  Au point 2.1.2 de la communication relative aux garanties publiques il est stipulé que «même si l’État n’est pas amené à faire des paiements au titre de la garantie accordée, il y a aide au sens de l’article 87, paragraphe 1. L’aide est accordée au moment où la garantie est offerte, et non au moment où elle est mobilisée ou à celui où elle entraîne des paiements. C’est donc au moment où la garantie est donnée qu’il y a lieu de déterminer si elle constitue ou non une aide d’État et, dans l’affirmative, de calculer le montant de cette aide.»

(78)  Par exemple, «Portugal shipyards» est citée comme concurrent de HSY à la page 10 du document intitulé «Hellenic Shipyards SA — Confidential Information Memorandum — Alpha Finance/Commercial Bank of Greece/KPMG/Elias SP. Paraskevas» de mars 2001, distribué aux candidats-acquéreurs. Une copie de ce rapport a été soumise par TKMS/GNS dans sa lettre du 21 juin 2007.

La Commission observe également que sous le titre «Ορισμός της γεωγραφικής αγοράς» (Définition du marché géographique) de la décision publiée dans l’affaire de concentration no COMP/M.2772 — HDW/FERROSTAAL/ELLINIKA NAFPIGEIA, il est indiqué: «Les parties font valoir que le marché de la construction, de la réparation et de la transformation de tous les types de navires commerciaux est mondial quant à son territoire géographique, compte tenu du fait que le coût du transport maritime est relativement faible et qu’il n’existe pas d’obstacles importants aux échanges.»

(79)  La Commission note également que des décisions antérieures de la Commission et du Conseil relatives à des aides d’État octroyées à HSY étaient fondées sur l’existence d’une distorsion de la concurrence et des échanges. Ces décisions n’ont jamais été contestées. Dès lors, dans l’appréciation des mesures mises en œuvre à la même époque, il n’est pas nécessaire de procéder à une vérification approfondie de la question de savoir dans quelle mesure ces deux critères sont remplis.

(80)  JO L 202 du 18.7.1998, p. 1.

(81)  JO C 288 du 9.10.1999, p. 2.

(82)  Ces informations ont été présentées par la Grèce à l’unité 1.3.a et à l’annexe 4 de sa lettre du 20 octobre 2004.

(83)  Si les chantiers navals cessaient leurs activités, les autorités de contrôle compétentes pourraient décider de n’effectuer aucun contrôle quant à la mise en œuvre du plan, auquel cas la première condition du versement de la première tranche n’aurait pas été respectée.

(84)  À l’unité 1.2.2 intitulée «Διενέργεια Α' ελέγχου από τα αρμόδια όργανα» (1er contrôle effectué par les organes compétents) de leur lettre du 20 octobre 2004, les autorités grecques expliquent que le ministère de l’économie a tardé à rédiger le bulletin de contrôle avec, pour conséquence, l’expiration du délai fixé au 31 décembre 1999 déterminé par la décision grecque portant approbation. Afin de payer l’aide après cette date, il était nécessaire que les autorités grecques prorogent le délai fixé pour la mise en œuvre du plan d’investissement. La publication de la décision de prorogation du plan d’investissement exigeait, à son tour, la prorogation accordée par le comité consultatif, fait rendu difficile à la suite de des changements législatifs.

(85)  JO C 368 du 23.12.1994, p. 12.

(86)  La différence entre les deux taux doit être multipliée par le capital dû du prêt (c’est-à-dire, par la partie non remboursée du capital) à l’année considérée.

(87)  De même, dans la communication relative aux aides sous forme de garanties, il est stipulé que l’aide est accordée au moment où la garantie est accordée et non à une date ultérieure (Voir note 76 de bas de page).

(88)  En effet, la valeur de marché d’un prêt dépend de la valeur courante des flux financiers futurs qui sont réduits à la valeur courante en utilisant un taux d’intérêt proportionnel au risque du prêt. Si le taux d’intérêt prévu au contrat de prêt est inférieur à ce taux d’intérêt, la valeur de marché est immédiatement diminuée à un niveau inférieur à la valeur nominale du prêt.

(89)  Si le nouveau propriétaire d’ETVA décidait, après la privatisation, de proroger un prêt non garanti par l’État grec au-delà de la date initiale d’expiration du prêt, il n’existe pas d’aide durant la période au-delà du délai initial d’expiration du prêt, étant donné que des fonds publics ne sont pas impliqués, selon ce raisonnement.

(90)  Ces informations ont été soumises par la Grèce à l’unité 1.3 et à l’annexe 6 de sa lettre du 20 octobre 2004.

(91)  Voir note 83 de bas de page.

(92)  On peut se demander pourquoi l’ETVA a signé le contrat de prêt, le 31 mai 2002, si elle n’avait pas l’intention de payer la somme correspondante à HSY. La Commission remarque que la date de signature du contrat coïncide parfaitement avec la date de finalisation de la vente de HSY. Il est dès lors probable que les acquéreurs de HSY aient fait pression sur l’ETVA pour qu’elle accorde un financement plus important à HSY en la menaçant, dans le cas contraire, de refuser que la vente soit finalisée. Dans ce cas, l’ETVA a probablement accepté d’accorder ce prêt mais a inclus au contrat des dispositions lui permettant de refuser de verser le montant du prêt quand HSY demanderait de le percevoir. Comme il sera expliqué à l’appréciation de la mesure E18c, sur la base du chapitre 8.2.2 du contrat du 20 mars 2002, la Banque du Pirée était supposée devoir aider l’État grec à finaliser la vente de HSY. Sur cette base, l’État grec a probablement également fait pression sur l’ETVA pour qu’elle signe le contrat de prêt afin de faciliter la finalisation de la vente de HSY.

(93)  ΗSY a présenté des observations concernant la décision d’extension de la procédure par lettre du 30 octobre 2006. Au paragraphe 4 de la lettre, il est indiqué: «Compte tenu du fait que HSY a étroitement collaboré avec l’État grec à la rédaction de la réponse qu’elle a présentée à la Commission européenne, l’entreprise n’estime pas nécessaire de soumettre à nouveau des informations déjà soumises par l’État grec, ni de présenter les mêmes arguments, dont elle soutient pleinement le contenu, mais, pour que la réponse soit complète et pour aider le travail de la Commission, elle résumera les arguments qu’elle a déjà mis en avant et soumettra tous les nouveaux éléments de preuve qu’elle a réunis au cours de la période écoulée, depuis la réponse de la Grèce jusqu’à la date de la présente réponse, et présentera tous les arguments nouveaux ou complémentaires.» De ce fait, pour ne pas répéter les mêmes arguments, dans la décision présente, les observations de HSY et de la Grèce concernant la décision d’extension de la procédure seront fusionnées.

(94)  Conformément à la directive 90/684/CEE, les aides à la restructuration (chapitre III) sont réparties en aides aux investissements (article 6), en aides à la fermeture d’entreprises (article 7), en aides à la recherche et au développement (article 8) et en aides au fonctionnement accordées en vue de la restructuration (articles 9 et 10).

(95)  Lettre des autorités grecques du 15 février 2008, paragraphe 26.

(96)  Lettre des autorités grecques du 19 mars 2007. Repris dans une lettre du 29 juin 2007, paragraphes 62 et 63.

(97)  Les détails concernant cette participation seront fournis dans l’appréciation de la mesure E10.

(98)  Lettre des autorités grecques du 31 mars 2003, extrait de la réponse à la question 5.

(99)  Lettre des autorités grecques du 29 juin 2007, extrait des paragraphes 49, 50 et 51.

(100)  La Commission ne pouvait pas omettre — et n’a pas omis — le fait que les salariés ont des objectifs tels que la préservation des emplois et s’efforcent, pour cette raison, de préserver ces objectifs quand ils gèrent l’entreprise qui leur appartient. Toutefois, étant donné le prix d’acquisition élevé, préserver la valeur de l’action est également devenu un objectif important pour les salariés.

(101)  Il est rappelé que le paiement du prix d’acquisition par les salariés par le biais du prélèvement d’une partie de leurs salaires et allocations n’était pas uniquement prévu au contrat de septembre 1995, mais aussi à l’article 12 de la loi 2367/1995.

(102)  Il est rappelé qu’ETVA pouvait procéder à une exécution forcée sur la base de son nantissement sur les actions si les salariés ne payaient pas le prix d’acquisition, comme prévu au contrat du 15 septembre 1995.

(103)  Il est rappelé que le paiement du prix d’acquisition par les salariés par le biais du prélèvement d’une partie de leurs salaires et allocations n’était pas uniquement prévu au contrat de septembre 1995, mais aussi à l’article 12 de la loi 2367/1995.

(104)  Le contrat de septembre 1995 prévoit clairement que les salariés étaient tenus de payer en même temps le prix d’acquisition et leur contribution à l’augmentation du capital social. Ce double paiement n’était pas, dès lors, une surprise. Il est une partie essentielle du contrat de 1995. La Grèce devait vérifier si les dispositions fondamentales d’un contrat étaient réalisables avant de le présenter à la Commission comme étant une privatisation. Si des dispositions essentielles d’un contrat que la Grèce a elle-même présenté à la Commission se révèlent être inapplicables, il y aura lieu de conclure que la décision C 10/94 avait été fondée sur des informations trompeuses fournies par la Grèce, et il convient de révoquer cette décision.

(105)  Paragraphes 59 et 60 de la lettre des autorités grecques du 29 juin 2007.

(106)  Au paragraphe 191 de la lettre de la Grèce datée du 5 octobre 2006 il est indiqué: «Depuis le 31 décembre 1998, jusqu’à la vente des actions de HSY à la coentreprise HDW/FS (11 octobre 2001), il était prélevé une partie du salaire des salariés-actionnaires, en vue du paiement à l’ETVA du prix d’acquisition de 49 % des actions». HSY a fait une déclaration similaire aux paragraphes 35 et 36 de sa lettre du 31 octobre 2006. Avant la décision d’extension de la procédure, les autorités grecques avaient fait des déclarations similaires au huitième chapitre de leur lettre du 26 mai 2005. En outre, dans une série de lettres, la Grèce mentionnait que les salariés détenaient 49 % des actions. De cette façon, la Grèce a donné l’impression que le contrat de septembre 1995 avait été exécuté. Ce n’est qu’après l’ouverture de la procédure que la Commission a constaté que la Grèce n’avait pas appliqué sa propre législation (c’est-à-dire, la loi 2367/1995), étant donné qu’elle avait transféré la propriété de 49 % de HSY aux salariés, mais elle n’avait pas mis en œuvre le reste du contrat et, notamment, elle n’avait pas exigé le paiement du prix de vente par les salariés. Au contraire, dans leur lettre du 31 mars 2003, les autorités grecques avaient laissé entendre que les salariés (ou une partie d’entre eux) n’avaient pas payé les tranches annuelles prévues (ou partie d’entre elles).

(107)  Lettre de la Commission du 27 avril 2007 à la Grèce (question 3) et lettre de la Commission du 23 août 2007 à HSY.

(108)  Lettre de la Commission du 27 avril 2007 à la Grèce (question 4) et lettre de la Commission du 23 août 2007 à HSY. La dernière lettre a été envoyée à la Grèce pour observations le 13 novembre 2007, offrant à la Grèce la possibilité de présenter ses observations une seconde fois.

(109)  Points 2.3.c et 2.4 de la lettre de la Grèce du 29 juin 2007, lettre de HSY du 9 octobre 2007, et lettres de la Grèce du 14 décembre 2007 et du 15 février 2008.

(110)  En ce qui concerne la réparation du bateau KEYMAR pendant les premiers mois de 2003, la Grèce fait valoir, étant donné que, en l’occurrence, la réparation était plus complexe et spécialisée que dans d’autres cas, qu’il était raisonnable d’estimer que le taux des hommes-heures serait de 25 % et non de 20 %.

(111)  Paragraphe 144 de la lettre de la Grèce du 5 octobre 2006.

(112)  Données couvertes par le secret professionnel.

(113)  Lettre de la Commission du 27 avril 2004 (question 2.2), à laquelle la Grèce a répondu par sa lettre du 29 juin 2007.

(114)  Selon toute probabilité, ce chiffre indique le coût d’une heure de production des salariés de HSY pour l’entreprise à un exercice donné. Le nombre d’heures de production effectuées par un salarié fait partie uniquement du nombre d’heures pour lesquelles il est rémunéré par HSY. Ce nombre dépend de plusieurs facteurs et, notamment, de la structure et de l’efficacité des chantiers navals. Par conséquent, les sous-traitants sont en concurrence entre eux. Pour cette raison, ils doivent être compétitifs et flexibles. Ils ont un coût fixe limité (c’est-à-dire des salariés permanents) et doivent maintenir un coût faible. Les chantiers navals ont recours à des sous-traitants précisément parce qu’ils leur coûtent moins cher qu’engager eux-mêmes du personnel.

(115)  Le conseiller note:

 

«Le nombre d’hommes-heures des sous-traitants peut être calculé à partir du coût, en utilisant le coût moyen par homme-heure, coût qui est comparable entre sous-traitants du même secteur et du même pays.

 

Sur la base du rapport intitulé “Évolution des salaires en 2006” publié par la Fondation européenne pour l’amélioration des conditions de vie et de travail, le salaire mensuel brut inférieur s’élève à 625,97 EUR, en Grèce, et à 1 254,28 EUR, en France.

 

Le prix de marché moyen de l’homme-heure dans le secteur de la construction et de la réparation navales en France varie entre 40 et 50 EUR. En appliquant le coefficient 2 qui est en vigueur entre la Grèce et la France pour les salaires minimaux, l’on pourrait s’attendre à ce que le prix par homme-heure dans le secteur de la construction et de la réparation navales, en Grèce, varie entre 20 et 25 EUR.

 

À la suite des enquêtes que nous avons menées, il semble que ces prix variaient entre 30 et 36 EUR, au début de 2007. Il s’agit du prix facturé pour chaque homme-heure directe et il inclut toutes les dépenses relatives: hommes-heures indirectes, heures de gestion, frais généraux et frais fixes.

 

Étant donné que nous n’avons pas pu constater comment sont formés les salaires moyens du secteur de la construction et de la réparation navales par rapport aux salaires minimaux dans les deux pays, nous avons préféré utiliser une estimation conservatrice dans nos calculs sur la base de prix d’homme-heure variant entre 30 et 36 EUR/heure.

 

Les prix de l’homme-heure des sous-traitants, comme indiqués à l’annexe 6 des observations présentées par la Grèce à la Commission, sont comme suit:

(en EUR)

Années

Directes

Incluant le bénéfice commercial (15 %) et le coût indirect (20 %), sur la base de la méthode citée à l’annexe 6 des observations de la Grèce

2002

25,97

40

2003

27,49

42,3

2004

[…]

[…]

2005

[…]

[…]

2006

[…]

[…]

 

En calculant le nombre d’hommes-heures des sous-traitants sur la base d’un coût de l’homme-heure variant entre 30 et 36 ΕUR en 2006 et, pour les années antérieures, en appliquant à ces prix l’indicateur d’augmentation du coût d’Eurostat, il résulte les valeurs suivantes:

INDICATEUR: Im-Ici-tot

2002

2003

(9 mois)

2004

2005

2006

Indicateur UΕ-27

108,9

112,8

116,5

119,7

121,6

Indicateur Grèce

113,5

116,6

127,0

127,7

133,9

Total coût personnel sous-traitant

3 804 891

16 471 323

[…]

[…]

[…]

Estimation conseiller

Coût homme-heure (prix inférieur)

25,4

26,1

28,5

28,6

30

Hommes-heures directes sous-traitant (estimation sup.)

149 598

630 388

[…]

[…]

[…]

Estimation conseiller

Coût homme-heure (prix sup.)

30,5

31,4

34,2

34,3

36

Hommes-heures directes sous-traitant (estim. Inf)

124 665

525 324

[…]

[…]

[…]

Données HSY

Coût homme-heure

25,97

27,49

[…]

[…]

[…]

Coût homme-heure + indirect + bénéfice

40,0

44,5

[…]

[…]

[…]

Hommes-heures directes sous-traitant

95 232

370 142

[…]

[…]

[…]»

(116)  Lettre de la Commission du 27 avril 2004 (question 2.2.d), à laquelle la Grèce a répondu par sa lettre du 29 juin 2007.

(117)  Affaire T-296/97 Alitalia contre Commission, Recueil 2000, p. II-3871, points 82 et 84.

(118)  En particulier, l’ETVA ne peut pas, d’une part, ne pas appliquer la partie du contrat de septembre 1995 relative au paiement du prix d’acquisition (c’est-à-dire, ne pas exiger les paiements annuels correspondants) et, d’autre part, prétendre que, sur la base de ce même contrat, elle était tenue de participer aux augmentations de capital. Dès lors, parce qu’ETVA et les autorités grecques avaient décidé de ne pas appliquer dûment des dispositions importantes du contrat, elles ne sont pas, au même moment, légitimées à invoquer de façon sélective d’autres dispositions du même contrat pour appuyer leur argument selon lequel l’ETVA était contractuellement tenue de prendre certaines mesures (c’est-à-dire, de participer aux augmentations de capital).

(119)  Les salariés de HSY participaient à l’augmentation de capital. En dépit de cela, leur situation n’était pas différente de celle d’ETVA. En effet, ils avaient déjà contrevenu au contrat de septembre 1995, dans le sens où ils ne payaient pas le prix d’acquisition à l’ETVA. En outre, leur situation différait de celle tant d’ETVA que d’un investisseur dans des conditions d’économie de marché. Plus précisément, ils s’intéressaient à préserver leurs emplois, ce qui constituait pour eux une motivation pour investir dans HSY, alors que le rendement financier attendu n’aurait pas suffi à convaincre un investisseur dans des conditions d’économie de marché à investir dans l’entreprise concernée.

(120)  La Grèce a produit une copie de la loi en cause en annexe 10 de sa lettre du 5 octobre 2006.

(121)  On ne parvient pas à savoir clairement, sur la base des informations fournies par les autorités grecques et HSY (y compris le premier rapport Deloitte), dans quelle mesure la commission s’élevait à 0,4 % par an, mais était payée tous les trimestres, ou si elle s’élevait à 0,4 % par trimestre. Bien que l’élément en cause soit important dans le contexte de la procédure de récupération, il ne modifie pas la conclusion de la présente décision.

(122)  L’énumération en question est présentée aux pages 3-11 et 3-12 du rapport, en tant que partie de l’analyse du prêt de 10 milliards GRD concernant lequel une garantie de l’État a été accordée en vertu de la loi 2322/1995 (mesure E14 de la présente décision).

(123)  La Commission a autorisé, dans le passé, certains régimes de garanties dans le secteur de la construction navale qui n’incluaient pas d’élément d’aide d’État, aux États membres suivants: Allemagne (JO C 62 du 11.3.2004, p. 3), Pays-Bas (JO C 228 du 17.9.2005, p. 10), France (JO C 259 du 27.10.2006, p. 14) et Finlande (JO C 152 du 6.7.2007, p. 6). Les deux derniers régimes incluent expressément des garanties de restitution d’acomptes.

(124)  Étant donné qu’ETVA appartenait à 100 % à l’État, quand la banque a accordé les garanties de restitution d’acomptes, la commission de garantie que HSY a payée à l’ETVA constituait une rémunération pour l’État.

(125)  Les modifications étaient les suivantes:

Accord de programme 33a – SDSD 33a (fourniture de vingt automotrices): les amendes jusqu’au 31 décembre 2002 ont été calculées et enregistrées dans les modifications en tant que sommes dues. Il a été convenu qu’elles seraient payées en dix tranches à compter de la livraison du premier véhicule, tandis que les neuf autres tranches seraient payées avec la livraison de chacune des neuf dernières automotrices. Il a été convenu que l’évolution des clauses pénales serait interrompue à compter du 1er janvier 2003, à condition que la coentreprise (Siemens AG, Siemens SA et HSY) fournisse à OSE le matériel roulant équivalent. La coentreprise n’a que partiellement respecté la condition en cause et, ainsi, les clauses pénales ont été calculées et imputés par OSE pour l’ensemble de la période.

Accord de programme 39 – SD 39 (fourniture de 24 automotrices): les amendes, jusqu’au 31 décembre 2002, ont été calculées et enregistrées dans les modifications en tant que sommes dues. Il a été convenu qu’elles seraient payées en dix tranches à compter de la livraison du premier véhicule, tandis que les neuf autres tranches seraient payées avec la livraison de chacune des neuf dernières automotrices. Il a été prévu une période pour la prorogation du délai de livraison, sans clause pénale. Il n’y a pas eu de provision de fourniture de matériel roulant équivalent dans le cas de l’accord de programme 39 SD 39, mais le calendrier de livraison a été modifié. OSE a exigé les sommes des amendes dues jusqu’au 31 décembre 2002 et les a effectivement perçues auprès de la coentreprise (Siemens AG, Siemens SA et HSY).

Accord de programme 35 – SD 35 (fourniture de 29 rail bus): il n’a pas été prévu de délai sans clause pénale et, par conséquent, OSE a exigé et perçu les sommes des amendes. Pour la période de retard de paiement des clauses pénales, des intérêts de retard ont été imputés et exigés.

(126)  Jusqu’à la date de la lettre des autorités grecques du 5 octobre 2006, la somme de 9 932 511,99 EUR avait déjà été prélevée, et il restait à prélever la somme de 826 556 EUR.

(127)  La coentreprise qui avait conclu l’accord de programme concerné était constituée de HSY, de Siemens AG et d'ABB Daimler-Benz Transportation (dont l’appellation a changé en Bombardier Transportation depuis le 1er mai 2001). Les taux de réalisation de l’accord en question étaient de 22,06 % du prix total final payé à HSY et de 77,94 % pour les autres sociétés.

(128)  L’accord en question prévoyait également la transformation et l’installation d’un système de protection et de reconnaissance automatique des rames, sur cinquante demi-trains. Le calendrier concerné prévoyait, comme délai d’achèvement des travaux, janvier 2004. Le conseil d’administration a décidé à l’unanimité, par sa décision no 578/4/4-9-2002 de proroger le délai de livraison jusqu’au 19 mai 2004, étant donné que le retard n’était pas dû à la coentreprise. En définitive, les travaux étaient achevés le 4 juin 2004. En vertu du paragraphe 14 de l’accord de programme, les sanctions pour non-respect des délais convenus prenaient effet quarante jours après la date contractuelle de livraison et uniquement si ces délais n’étaient pas respectés par faute du fournisseur. Par conséquent, il n’y avait pas lieu d’imposer d’amendes et d’intérêts à cause de ce retard.

(129)  Il n’est pas parfaitement clair, sur la base des données présentées par les autorités grecques et par HSY (y compris le premier rapport Deloitte) si le prêt était initialement exprimé en GRD ou en EUR. Dans la réponse de la Grèce à la décision d’ouverture de la procédure, seules des sommes en EUR sont citées, et le taux d’intérêt est déterminé sur la base d’Euribor trimestre. En revanche, au premier rapport Deloitte, il est mentionné que le prêt s’élevait à 16,92 milliards GRD et que le taux d’intérêt s’appuyait sur Libor. Cette question peut être précisée dans le contexte de la procédure de récupération.

(130)  Dans leur lettre du 21 juin 2007, TKMS et GNSH soumettent le second rapport Deloitte. L’annexe C du rapport en cause est intitulé «Rapport de gestion en bon père de famille concernant HSY SA — Copie pour présentation (“Έκθεση δέουσας επιμέλειας σχετικά με τα Ελληνικά Ναυπηγεία Α.Ε. — Αντίγραφο προς παρουσίαση”) et résumé établi par Arthur Andersen, le 19 juin 2001.» À la page 7 du rapport en cause, les créances de HSY sont analysées et il est signalé que la dette commerciale de Strintzis Lines «devient recouvrable dès la livraison des bateaux, en 2002.» Cette information confirme que, à l’exception des acomptes limités qui avaient d’une manière ou d’une autre déjà été payés et, par conséquent, n’étaient plus recouvrables, le solde du prix d’acquisition n’était pas recouvrable avant la livraison des bateaux.

(131)  Les autorités grecques, dans leurs lettres du 21 octobre 2004 et du 17 décembre 2004 relatives à l’affaire CP 71/02, confirmaient que HSY avait soumis une demande d’octroi d’une aide au fonctionnement de 9 % pour les deux bateaux et que cette demande avait été reçue par le ministère compétent. Toutefois, les autorités grecques confirmaient que, en fin de compte, l’aide n’a pas été versée, parce que HSY n’a pas achevé la construction des bateaux. Les décisions d’autorisation relatives ont été révoquées. La mesure 13(c) de la décision d’extension de la procédure porte sur la question concernée.

(132)  Voir note 127 de bas de page.

(133)  En ce qui concerne la possibilité de percevoir des recettes en cours d’exécution du contrat (c’est-à-dire, avant la livraison), la Commission renvoie à nouveau au document dont il est question à la note 128 de bas de page de la présente décision, où il est souligné qu’au 31 décembre, la dette commerciale concernant les contrats avec OSE s’élevait à 0,5 million EUR, à peine. En outre, le même document cite que «ces créances seront compensées avec les acomptes correspondants encaissés». Cet élément prouve qu’au moment considéré, aucune somme n’était payable par OSE.

(134)  La marge initiale était de 25 points de base et a été portée à 125 points de base à partir du 1er avril 2000. La Commission fonde son considérant sur le premier rapport Deloitte.

(135)  L’article suivant paru dans la presse indique que l’activité de réparation navale n’était pas sérieusement affectée: «Contracts — Hellenic declares business as usual after Athens earthquake» («Contrats — HSY déclare que ses activités se poursuivent normalement après le séisme d’Athènes»), Lloyd’s List International, 14 septembre 1999.

(136)  Il s’agit de la lettre par laquelle les autorités grecques ont présenté leurs observations sur la décision d’ouverture de la procédure.

(137)  Cette somme est mentionnée dans la lettre de la Grèce du 29 juin 2007.

(138)  Le 19 mai 1999, la ligne de crédit en question est convertie d’USD en EUR.

(139)  En ce qui concerne la possibilité de percevoir de l’argent avant la livraison des produits, la Commission renvoie au document cité à la note 128 de bas de page, ainsi qu’à la note 123 de bas de page. Le rapport en question sur la gestion en bon père de famille traite d’une période après le remboursement des prêts examinés. En dépit de cela, il est utile de préciser que, avant la livraison d’un produit, il n’est possible d’encaisser quasiment aucune somme. Le rapport en cause prouve, en particulier, qu’au 31 décembre 2000 il n’existait pratiquement aucune créance recouvrable auprès de Strintzis, de la marine militaire grecque, d’OSE et d’ISAP.

(140)  Voir communication de la Commission concernant la méthode de fixation des taux de référence et d’actualisation (JO C 273 du 9.9.1997, p. 3).

(141)  Le bilan concerné est présenté dans les documents soumis par TKMS et GNSH, qui sont décrits à la note 128 de bas de page de la présente décision.

(142)  Dans le cas des sous-marins et en raison des conditions imposées par l’État grec, le premier sous-marin sera construit dans son intégralité à Kiel, Allemagne, tandis que les deux autres seront assemblés dans les installations de HSY (Voir considérant 44 de la présente décision). Il serait, selon toute probabilité, moins coûteux et plus efficace de produire les trois sous-marins en Allemagne. En outre, il serait plus raisonnable de ne pas intégrer HSY dans la coentreprise concernée, HSY étant une entreprise en difficulté qui, en outre, ne disposait pas d’expérience dans le domaine des sous-marins.

(143)  À un moment donné, les fonds litigieux devaient être nécessaires pour couvrir le coût d’exécution des contrats militaires en question. Mais, alors, les fonds n’étaient plus disponibles pour financer d’autres activités de HSY. En d’autres termes, au moment concerné, une partie de l’avantage conféré par l’État avait déjà été annulé. Le reste de l’avantage consiste dans le fait qu’au cours des trimestres antérieurs, le chantier naval disposait des fonds concernés gratuitement, alors qu’il n’aurait pas été en mesure de les obtenir auprès de banques sous forme de prêts.

(144)  Page 30 de la lettre du 30 octobre 2006.

(145)  Par exemple, l’annulation très importante de dettes d’activités militaires est citée dans la décision C 10/94, mais n’a pas été appréciée sur la base des règles relatives aux aides d’État; les dépenses d’interruption de fonctionnement liées aux activités militaires sont citées dans la décision N 513/01, mais n’ont pas été appréciées sur la base des règles relatives aux aides d’État, et ce fut de même le cas de plusieurs mesures dans la décision d’extension de la procédure.

(146)  Par exemple, dans l’appel à soumission d’offres contraignantes en vue de l’acquisition d’actions de HSY du 2 juillet 2001 il est cité: «Il est précisé que l’imposition d’éventuelles sanctions financières liées à d’éventuelles violations de dispositions de la législation communautaire relative aux aides d’État ne sera pas à charge du plus-offrant. Cette assurance précédera la finalisation de la cession des actions.»

(147)  Les procès-verbaux de la réunion qui a eu lieu le 14 septembre 2001, qui sont signés par les participants, citent: «Il est convenu que l’approbation de la part de la CE constituera un préalable à la finalisation du contrat après sa signature. À titre alternatif, si la décision relative de la CE était rendue en retard […] ou si elle n’était pas satisfaisante, les parties conviennent qu’ETVA entreprendra l’obligation de fournir à HDW-Ferrostaal une garantie portant sur toutes les questions en suspens relativement à la CE à propos d’aides d’État anciennes ou présentes accordées à HSY.»

(148)  Par exemple, dans une lettre du 6 décembre 2001 adressée à HDW avec copie notifiée à Ferrostaal, Alpha Finance, qui était le conseil de l’État et d’ETVA, mentionne: «Nous avons reçu du ministère du développement et d’ETVA l’instruction de vous soumettre en document joint la formulation proposée par l’ETVA concernant […] lettre de garantie qu’ETVA fournira à HDW/Ferrostaal en cas de non-respect de la clause 1.2.3 de l’accord.» Dans des messages transmis par HDW, par télécopie, à Alpha Finance, le 23 janvier 2002, le 31 janvier 2002 et le 8 mars 2002, elle présente des observations concernant la formulation exacte de la garantie.

(149)  La Banque du Pirée a soumis plusieurs articles parus dans la presse et traitant de la période entre octobre 2001 et mai 2002, dont il découle que le gouvernement était directement impliqué dans la procédure de privatisation de HSY.

(150)  Dans la lettre du 23 mai 2005, il est mentionné:

«La vente de HSY a été accomplie par la procédure de dénationalisation (loi 2001/1990). L’acte juridique du contrat du 11 octobre 2001 et, ensuite, l’acte de liquidation du 31 mai 2002 ont été précédés par la procédure d’appel d’offres qui contenait tous les termes essentiels du transfert ainsi que la livraison d’un mémoire détaillé (daté d’avril 2001) et de la soumission d’offres. À toutes ces étapes, au cours desquelles les parties intéressées (et, parmi elles, le plaignant) avaient accès aux informations, le terme de la garantie a été rédigé. Il s’agit, dès lors, ainsi que souligné dans la lettre du 17 décembre 2004, d’un terme qui, non seulement n’est pas légal ni conforme aux usages du commerce, mais aussi d’un terme qui est dès le départ intégré aux négociations relatives à la privatisation du chantier naval et, qui plus est, en tant que terme critique (sine qua non), sans lequel il ne serait pas possible de finaliser la vente des actions de HSY. Il est à noter que, comme précité, ce terme, formulé de façons différentes mais ayant toujours le même objet, c’est-à-dire la facilitation raisonnable de la transaction dans le contexte des règles du marché, apparaît dès le départ de la procédure de privatisation dans les documents suivants:

 

l’appel à manifestation d’intérêt du conseiller,

 

l’appel à soumission d’offres contraignantes,

 

l’offre de la coentreprise acquéreuse (incluse dans la déclaration de renoncement à ses termes),

 

des textes des négociations et, enfin,

 

le contrat de vente du 11 octobre 2001.

Dès lors, la déclaration de garantie incluse à l’avenant daté du 31 mai 2002 au contrat de garantie était adressée dès le départ au candidat le plus offrant et ne constitue pas une aide d’État à l’acquéreur final. Le même terme serait en vigueur pour tout plus-offrant puisque, selon ce qui précède, il était inclus à la procédure de dénationalisation. Il va, en outre, de soi que si la procédure de dénationalisation a commencé en février 2001 (à un moment où l’État était l’actionnaire majoritaire de la banque vendeuse ETVA SA), l’État, en tant que vendeur d’ETVA à la Banque du Pirée devait accorder et a accordé sa déclaration de garantie à l’acquéreuse des actions d’ETVA, la Banque du Pirée, en ce qui concernait l’avoir à vendre, c’est-à-dire, le chantier naval, car en tant que vendeur, il était tenu de fournir pareille déclaration. Ces déclarations de garantie qui, comme il a été souligné, sont incluses en toute transparence et clarté dans tous les textes contractuels de la dénationalisation et, surtout, à l’acte contractuel du 11 octobre 2001, conviennent au caractère de la transaction (vente d’un avoir déterminé), sont en vigueur pour tous les candidats les plus offrants et ne confèrent aucun bénéfice supplémentaire à personne. À la lumière des éléments précités, il est prouvé que la véritable nature de cette garantie (en tant que terme nécessaire à la transaction et habituel selon les règles du marché), et son caractère contraignant sur la base de toute la procédure précédant la privatisation, mais aussi la convention de vente des actions de HSY du 11 octobre 2001, qui a été suivie du contrat de vente des actions d’ETVA du 18 octobre 2001 entre l’ETVA et l’État grec. Cependant, l’élément fondamental, et cela est souligné, est que le terme relatif à la garantie est inclus dans toute la procédure de dénationalisation et n’est pas formulé pour la première fois après l’établissement du contrat. Il ne constitue donc pas, comme le plaignant souhaite le présenter, une “invention” in extremis visant à détourner les règles communautaires relatives à la légitimité des aides d’État.

L’État grec, en tant que vendeur des actions d’ETVA, était tenu, non seulement en vertu du contrat du 18 octobre 2001, mais aussi en vertu de la loi, de céder à la Banque du Pirée ses actions d’ETVA libres de toute charge et obligation. Étant donné que la Banque du Pirée n’était pas impliquée dans la procédure de dénationalisation de HSY, elle devait, conformément à la loi et aux usages du commerce, être assurée contre toute obligation résultant du contrat de cession de HSY auquel elle n’était pas partie. Et c’est cette assurance que confère la garantie de l’État grec du 18 mars 2002. Cette déclaration de garantie va de soi et est légale. L’État grec l’a accordée ainsi qu’il en était contractuellement tenu, agissant à l’égard de la Banque du Pirée acquéreuse en tant que contrepartie, c’est-à-dire, en tant que fiscus, et non en tant qu’entité porteuse d’autorité publique.»

La Commission rappelle que, au moment de cette lettre, la Grèce, commentant l’argument d'Elefsis Shipyards selon lequel la garantie constitue une aide à HDW/Ferrostaal, souhaitait prouver que cette garantie ne constitue pas un avantage conféré sélectivement à HDW/Ferrostaal, mais était proposée à tous les candidats-acquéreurs (y compris à elle-même) qui participaient à la procédure de privatisation de HSY. Aux observations ultérieurement présentées à la Commission, la Grèce, se rendant compte que la Commission pouvait estimer que cette garantie constituait une aide à HSY, s’est efforcée de contester la possibilité d’imputer la mesure à l’État en alléguant que la garantie n’avait été accordée qu’en mai 2002, ce qui contredit parfaitement les arguments formulés dans la lettre du 23 mai 2005.

(151)  Comme cité au considérant 59, la privatisation a été décidée par la décision no 14/3-1-2001 du comité interministériel compétent en matière de dénationalisations.

(152)  La Commission reconnaît que la formulation et l’articulation de l’accord du 20 mars 2002 prête à confusion. L’article 8.2.4 de l’accord en cause stipule que, en ce qui concerne l’aide prévue aux articles 3 à 6 de la loi 2941/2001 (Voir considérant 33 de la présente décision où la loi en cause est décrite), l’État est tenu de verser à la Banque du Pirée 100 % de toute somme qu’ETVA paierait à HDW/Ferrostaal. Cependant, en cas de récupération d’aides non prévues aux articles 3 à 6 de la loi 2941/2001, l’article 8.2.4 de l’accord du 20 mars n’est pas applicable. Par conséquent, l’article 8.2.1 s’applique. Cet article prévoit que l’État ne paiera à la Banque du Pirée que 57,7 % de la somme qu’ETVA verserait à HDW/Ferrostaal. Néanmoins, la Commission observe que l’article 8.2.2 de l’accord stipule que, en dépit de la vente de la majorité des actions d’ETVA à la Banque du Pirée, c’est l’État qui gérera la procédure de vente de HSY — et non la Banque du Pirée/ETVA. Cet article et, en particulier, le point 8.2.2(d), stipule que l’État s’engage à ce que l’acquéreur ne subisse aucune perte en rapport avec la privatisation de HSY. Étant donné que, comme il ressort de l’article 8.2.4 (et de l’article 7.4 de l’accord du 18 décembre 2001), l’accord s’appuie sur l’acception que la Banque du Pirée et ETVA seront bientôt fusionnées, l’engagement pris par l’État à l’article 8.2.2 ne sera pas respecté, s’il versait à la Banque du Pirée seulement 57,7 % de la somme qu’ETVA paierait à HDW/Ferrostaal. Ceci signifie que, pour que l’engagement pris au point 8.2.2 soit respecté — et, notamment, l’assurance que la Banque du Pirée ne subira pas de perte liée à la vente de HSY — le dispositif prévu à l’article 8.2.4 doit être mis en œuvre dans tous les cas de récupération d’aides et non seulement dans ceux découlant de la loi 2941/2001.

(153)  Par sa lettre du 28 mai 2002, la Banque du Pirée a demandé l’avis du gouvernement quant à la formulation de la garantie qu’ETVA allait fournir à HDW/Ferrostaal et a demandé l’assurance que, en cas de mobilisation de la garantie en cause, la disposition de l’article 8.2.4 de l’accord du 20 mars 2002 serait appliquée. Par lettre du 31 mai 2002, le gouvernement a marqué son consentement à l’ETVA quant à l’octroi de la garantie en cause et a assuré que, en cas de mobilisation de la garantie, la disposition de l’article 8.2.4 serait appliquée. Ceci signifie que, contrairement à la conclusion précitée, si l’État était obligé, sur la base de l’accord du 20 mars 2002, de verser à la Banque du Pirée uniquement 57,7 % de la somme qu’ETVA paierait à HDW/Ferrostaal, cette condition a été modifiée par la lettre du gouvernement datée du 31 mai 2002, qui déclare sans réserve que le dispositif prévu à l’article 8.2.4 de l’accord du 20 mars 2002 est applicable (à savoir une indemnisation à 100 %).

(154)  En réponse à une question précise de la Commission formulée par lettre du 12 février 2008, la Grèce a confirmé, dans sa lettre du 3 mars 2008, qu’elle serait tenue de payer à la Banque du Pirée l’intégralité (c’est-à-dire, 100 % et non 57,7 %) de la somme qu’ETVA paierait à HDW/Ferrostaal.

(155)  Comme cité à l’appréciation de la mesure E7, les salariés détenaient ces actions mais n’avaient pas payé le prix d’acquisition qu’ils auraient dû verser à l’ETVA.

(156)  Voir considérant 33 pour la description de la loi.

(157)  Affaire C-334/1999, République fédérale d’Allemagne contre Commission, points 133 à 141.

(158)  En outre, la Commission observe que, d’après ce qu’elle sait, aucun des prêts et des garanties relevant de l’article 296 n’est conforme aux termes mentionnés à l’unité 3.1 de la présente décision. Dès lors, ils n’auraient pas été acceptés par un investisseur dans des conditions d’économie de marché.

(159)  Prenant en compte l’aversion du risque de la part des entités économiques, la vente de HSY serait préférable à sa liquidation uniquement si les paiements statistiquement probables sur la base de la garantie étaient significativement inférieurs à 6 millions EUR.

(160)  Voir considérant 33 de la présente décision pour la description de la loi.

(161)  Ceci a déjà été analysé par la Commission dans la décision d’extension de la procédure et, plus précisément, dans la description et l’appréciation de la mesure 18a. La Commission souligne également qu’au second rapport Deloitte, il est indiqué ce qui suit: «La clause d) précitée relative à la répartition de l’échange entre la somme destinée à l’augmentation du capital social et le prix qui sera proposé en vue du rachat des actions existant selon la proportion 2:1, selon notre expérience portant sur des transactions similaires, ne constitue pas un terme particulièrement habituel. Dans tous les cas, compte tenu des importants problèmes fonctionnels et de la situation financière de la société se détériorant, nous estimons que la décision prise par les vendeurs (et leurs conseillers) de poser ces conditions était aussi raisonnable que logique.» (p. 9 - 2). Selon l’interprétation de la Commission, ce point confirme que ce mode d’affectation du prix constituait une exigence logique et raisonnable de l’État, s’il est estimé que son but était d’assurer la poursuite des activités de HSY à long terme (but d’une autorité publique), et non s’il est estimé que son but était de maximiser les recettes de la vente (but d’un investisseur dans des conditions d’économie de marché).

(162)  Voir note 148 de bas de page.

(163)  La Commission ne prétend pas qu’un contrôle de la situation en bon père de famille aurait permis de contester toutes les aides qui devaient être récupérées conformément à la présente décision, mais certaines d’entre elles. Dans la lettre du 21 juin 2007, TKMS/GNSH a présenté certains rapports d’audit juridique (de gestion en bon père de famille) effectués par Arthur Andersen pour le compte de HDW/Ferrostaal. Arthur Andersen souligne dans ces rapports qu’il n’est pas à exclure que HSY ait reçu des aides d’État qui devront être récupérées à l’avenir.

(164)  Plus précisément, étant donné qu’ETVA et la Grèce avaient promis, dans les documents de l’appel d’offres soumis aux candidats-acquéreurs, d’accorder la garantie en cause, le fait que la garantie n’ait pas été citée en tant que condition dans les documents des offres soumis par Elefsis Shipyards ne l’aurait pas empêchée de la demander ultérieurement, lors du processus des négociations.

(165)  Ce point est soutenu dans le second rapport Deloitte, où il est mentionné que, si HDW/Ferrostaal devait assumer le risque de se voir obligée de rembourser des aides d’État octroyées à HSY dans le passé, elle ne l’aurait pas achetée.

(166)  Ceci ressort clairement du texte de la septième directive relative aux aides à la construction navale ainsi que de sa structure, où les «aides aux investissements» relèvent du chapitre III relatif aux «aides à la restructuration.»

(167)  Voir l’annulation de dettes très importantes mentionnée à la décision C 10/94, couverture de dépenses pour la fermeture d’installations mentionnée à la décision N 513/01, et toutes les formes de soutien au financement accordé par l’État au titre de l’article 296 et mentionnées à la décision d’extension de la procédure.

(168)  Par exemple, en ce qui concerne le soutien au financement accordé à HSY sans être destiné au financement d’une activité précise, la Commission a estimé que les activités civiles n’avaient bénéficié que de 25 % des aides d’État. Cependant, si seulement 25 % des aides d’État sont récupérées, en réalité, seulement 6,25 % (c’est-à-dire, 25 % de 25 %) de ces dernières seront récupérées auprès des activités civiles. Ainsi, le retour des activités civiles de HSY à la situation antérieure ne sera pas assuré, puisqu’elles ont reçu 25 % de l’aide d’État et n’en rembourseront que 6,25 %.

(169)  JO L 140 du 30.4.2004, p. 1.


27.8.2009   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

L 225/180


DÉCISION DE LA COMMISSION

du 8 juillet 2008

concernant les mesures C 58/02 (ex N 118/02) que la France a mises à execution en faveur de la Société Nationale Maritime Corse-Méditerranée (SNCM)

[notifiée sous le numéro C(2008) 3182]

(Le texte en langue française est le seul faisant foi.)

(Texte présentant de l'intérêt pour l'EEE)

(2009/611/CE)

LA COMMISSION DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES,

vu le traité instituant la Communauté européenne, et notamment son article 88, paragraphe 2, premier alinéa,

vu l’accord sur l’Espace économique européen, et notamment son article 62, paragraphe 1, point a),

après avoir invité les intéressés à présenter leurs observations conformément auxdits articles (1) et vu ces observations,

considérant ce qui suit:

1.   PROCÉDURE

(1)

Le 18 février 2002, la République française a notifié à la Commission un projet d’aide à la restructuration en faveur de la Société Nationale Maritime Corse-Méditerranée (ci-après «la SNCM») (2), complété le 3 juillet 2002 (3). L’aide à la restructuration notifiée consistait à recapitaliser la SNCM par le biais de la Compagnie Générale Maritime et Financière (ci-après «la CGMF») (4) pour un montant de 76 millions d’euros.

(2)

Par lettre du 19 août 2002, la Commission a notifié aux autorités françaises la décision d’ouvrir la procédure formelle d’examen en application de l’article 88, paragraphe 2, CE prévue à l’article 6 du règlement (CE) no 659/1999 du Conseil du 22 mars 1999 portant modalités d’application de l’article 93 du traité CE (5).

(3)

Le 8 octobre 2002 (6), les autorités françaises ont communiqué à la Commission leurs observations sur la décision du 19 août 2002 (7).

(4)

À la demande des autorités françaises, des réunions de travail ont été organisées avec les services de la Commission le 24 octobre 2002, le 3 décembre 2002 et le 25 février 2003.

(5)

Dans le cadre de l’ouverture de procédure, la Commission a reçu des observations de la part de deux entreprises, à savoir Corsica Ferries France (ci-après «CFF») le 8 janvier 2003 (8) et le groupe Stef-TFE le 7 janvier 2003, ainsi que de différentes collectivités territoriales françaises le 18 décembre 2002 et les 9 et 10 janvier 2003. Elle a transmis ces observations à la France pour commentaires par lettres des 13 et 16 janvier et des 5 et 21 février 2003.

(6)

Les autorités françaises ont communiqué à la Commission leurs commentaires sur les observations de CFF et de Stef-TFE le 13 février 2003 (9) et le 27 mai 2003 (10).

(7)

Le 16 janvier 2003, les services de la Commission ont envoyé une demande de renseignements complémentaires à laquelle les autorités françaises ont répondu le 21 février 2003.

(8)

Par lettre du 10 février 2003 (11), les autorités françaises ont développé des arguments visant à démontrer que le projet d’aide respectait en tout point les lignes directrices communautaires pour les aides d’État au sauvetage et à la restructuration des entreprises (12) (ci-après dénommées «les lignes directrices de 1999»).

(9)

Le 25 février 2003 (13), les autorités françaises ont transmis copie du pacte d’actionnaires liant la SNCM et le groupe Stef-TFE, à la demande de la Commission.

(10)

Par décision 2004/166/CE du 9 juillet 2003 (ci-après «la décision de 2003») (14), la Commission a approuvé, sous certaines conditions, l’octroi de l’aide à la restructuration en faveur de la SNCM payable en deux tranches, l’une de 66 millions d’euros, l’autre d’un montant maximal de 10 millions d’euros qui sera à déterminer en fonction des produits nets issus des cessions d’actifs réalisées après l’adoption de la décision de 2003.

(11)

Le 13 octobre 2003, CFF a introduit un recours en annulation de la décision de 2003 devant le Tribunal de première instance des CE (ci-après «le Tribunal») (affaire T-349/03).

(12)

Le 8 septembre 2004, la Commission a décidé de considérer que les modifications demandées par la France le 23 juin 2004, à savoir la permutation du navire Aliso par le navire Asco dans la liste des navires que la SNCM était autorisée à utiliser à la suite de la décision de 2003 et la vente du navire Aliso à la place du navire Asco, n’étaient pas de nature à remettre en cause la compatibilité avec le marché commun de l’aide à la restructuration autorisée par la décision de 2003 (15).

(13)

Par décision du 16 mars 2005 (ci-après «la décision de 2005»), la Commission a approuvé le versement d’une seconde tranche de l’aide à la restructuration, d’un montant de 3,3 millions d’euros, ce qui a porté le montant total de l’aide à la restructuration autorisée à 69 292 400 euros.

(14)

Le 15 juin 2005, dans l’affaire T-349/03, le Tribunal a annulé la décision de 2003 en raison d’une appréciation erronée du caractère minimal de l’aide. Cet arrêt a eu pour conséquence de renvoyer la Commission au stade de la procédure formelle d’examen ouverte par décision du 19 août 2002 et de rendre caduques les décisions des 8 septembre 2004 et 16 mars 2005, lesquelles étaient fondées sur la décision annulée de 2003.

(15)

Le 25 octobre 2005 (16), les autorités françaises ont transmis à la Commission des informations relatives à la situation financière de la compagnie depuis la notification du plan d’aide à la restructuration du 18 février 2002.

(16)

Le 17 novembre 2005 (17), les autorités françaises ont fourni des éléments relatifs à l’actualisation du plan de restructuration de 2002 et à la reconstitution des capitaux propres de la SNCM (18).

(17)

Le 15 mars 2006, une note de synthèse sur le marché, le business plan (partie revenus) et le compte de résultats prévisionnels ont été transmis à la Commission par les autorités françaises (19). D’autres documents ont été remis aux services de la Commission le 28 mars 2006 et le 7 avril 2006 (20). Dans ce dernier courrier, les autorités françaises ont par ailleurs invité la Commission à considérer que, en raison de sa nature de «compensation de service public», une partie de l’aide à la restructuration de 2002, notamment le montant de 53,48 millions d’euros, ne soit pas qualifiée de mesure prise dans le cadre d’un plan de restructuration mais de non aide au titre de la jurisprudence Altmark  (21) ou comme mesure autonome et indépendante du plan de restructuration au titre de l’article 86, paragraphe 2, CE.

(18)

Le 21 avril 2006, un projet de concentration, par lequel les entreprises Veolia Transport (ci-après «VT») (22) et Butler Capital Partners (ci-après «BCP») acquièrent le contrôle en commun de la SNCM (23), a été notifié à la Commission au titre de l’article 4 du règlement (CE) no 139/2004 du Conseil (24). Une décision approuvant cette opération de concentration a été adoptée par la Commission le 29 mai 2006 (25).

(19)

Le 21 juin 2006 (26), les autorités françaises ont transmis à la Commission l’arrêté du 26 mai 2006 du ministère de l’économie, des finances et de l’industrie approuvant des opérations financières réalisées par la compagnie CGMF, le décret no 2006-606 du 26 mai 2006 portant transfert de la SNCM au secteur privé ainsi que l’arrêté du 26 mai 2006 portant approbation des opérations financières réalisées par la SNCF.

(20)

Des renseignements concernant la délégation de service public et les aides à caractère social relatifs à la desserte de la Corse ont été transmis à la Commission le 7 juin 2006 (27).

(21)

Le 13 septembre 2006, la Commission a décidé d’ouvrir la procédure prévue à l’article 88, paragraphe 2, CE concernant les nouvelles mesures mises en œuvre en faveur de la SNCM tout en intégrant le plan de restructuration notifié en 2002 (28) (ci-après la décision de 2006).

(22)

Le 16 novembre 2006, la France a fait parvenir à la Commission ses observations dans le cadre de la décision de 2006 (29).

(23)

Ayant été saisie par certaines parties intéressées d’une demande de proroger d’un mois le délai pour présenter leurs observations (30), la Commission a décidé d’accorder ce délai supplémentaire à toute partie intéressée (31).

(24)

La Commission a reçu de la part de CFF (32) et de STIM d’Orbigny (ci-après «STIM») (33) des observations qui ont été transmises aux autorités françaises par courrier du 20 février 2007. Un tiers intéressé a également fait parvenir des commentaires, également transmis aux autorités françaises, qu’il a retirés le 28 mai 2008.

(25)

Les autorités françaises ont communiqué leurs observations sur les commentaires des tiers intéressés le 30 avril 2007 (34).

(26)

Le 20 décembre 2007, CFF a déposé une plainte au titre des aides d’État à l’encontre de la SNCM qui complète les envois d’informations du 15 juin 2007 et du 30 novembre 2007. Cette plainte porte sur l’article 3 de la nouvelle convention de Délégation de Service Public signée en juin 2007 entre la Collectivité territoriale de Corse et le groupement Compagnie Méridionale de Navigation-SNCM pour 2007-2013. D’après CFF, la mise en œuvre de cette clause mobiliserait de nouvelles ressources financières pour la SNCM de l’ordre de 10 millions d’euros pour l’année 2007. En outre, la compensation versée à la SNCM au titre des obligations de service public serait une aide d’État, illégale de surcroît puisque non notifiée à la Commission.

(27)

Un certain nombre d’informations ayant été transmises à la Commission après l’expiration du délai fixé initialement au 13 février 2007 (35), la Commission a informé les parties intéressées de sa décision d’étendre le délai de présentation des observations des tiers au 14 mars 2008.

(28)

La Commission a transmis le 26 mars 2008 les observations des tiers intéressés à la France qui a communiqué ses commentaires le 28 mars 2008, le 10 avril 2008 et le 28 avril 2008.

2.   IDENTIFICATION DU BENEFICIAIRE DES MESURES COUVERTES PAR LA PRESENTE DECISION

(29)

Le bénéficiaire des mesures couvertes par la présente décision est la Société Nationale Maritime Corse-Méditerranée (SNCM) qui regroupe plusieurs filiales dans le secteur maritime et qui effectue du transport maritime de passagers, voitures et poids lourds sur les liaisons entre la France continentale et la Corse, l’Italie (Sardaigne) et le Maghreb (Algérie et Tunisie).

(30)

La SNCM est une société anonyme née en 1969 de la fusion de la Compagnie générale transatlantique et de la Compagnie de navigation mixte, toutes deux créées en 1850. Appelée à l’époque Compagnie générale transméditerranéenne, elle a été rebaptisée Société nationale maritime Corse-Méditerranée en 1976, après que la Société nationale des chemins de fer (SNCF) eût pris une participation à son capital. La compagnie avait été en effet choisie par le gouvernement français pour mettre en œuvre le principe de continuité territoriale avec la Corse, à savoir l’alignement des tarifs de transports maritimes sur les tarifs de la SNCF pour le transport ferroviaire, sur la base d’une convention conclue le 31 mars 1976 pour vingt-cinq ans. La Compagnie générale transatlantique avait déjà été chargée par le gouvernement français de la desserte de la Corse par une convention antérieure conclue le 23 décembre 1948.

(31)

Au moment de la notification de la recapitalisation en 2002, la SNCM était détenue à 20 % par la SNCF et à 80 % par la CGMF. À l’issue de l’ouverture du capital de la SNCM le 30 mai 2006 (voir point 18 de la présente décision), BCP et VT détiennent respectivement 38 % et 28 % du capital de la SNCM, la CGMF restant présente dans le capital à concurrence de 25 % (9 % du capital sont réservés aux salariés).

(32)

Les principales filiales de la SNCM sont la Compagnie Méridionale de Navigation (ci-après «CMN») (36), la Compagnie Générale de Tourisme et d’Hôtellerie (CGTH) (37), Aliso Voyage  (38), Sud-Cargos  (39), la Société Aubagnaise de Restauration et d’Approvisionnement (SARA) (40), Ferrytour  (41) et Les Comptoirs du Sud  (42).

(33)

À la suite de la cession des navires à grande vitesse Aliso en septembre 2004 et Asco  (43) en mai 2005, la flotte de la SNCM se compose de dix navires (cinq car-ferries (44), quatre navires mixtes (fret et passagers) (45) et un navire à grande vitesse (NGV) opérant principalement au départ de Nice (46) dont sept en détention propre (47).

(34)

Dans un souci d’exhaustivité, il y a lieu de rappeler que les services de transport maritime réguliers entre les ports de la France continentale et de la Corse ont été assurés depuis 1948 dans le cadre d’un service public dont la SNCM et la CMN étaient les concessionnaires entre 1976 et 2001 en vertu d’une convention cadre conclue initialement pour vingt-cinq ans. Conformément aux règles communautaires en vigueur (48) et à la suite de l’appel d’offres européen (49) organisé par la collectivité territoriale de Corse (50), la SNCM et la CMN ont remporté conjointement la Délégation de Service Public (ci-après «la DSP») portant sur la desserte de la Corse au départ de Marseille en échange de compensations financières pendant la période 2002-2006.

(35)

La DSP venant à échéance fin 2006, le service public maritime sus indiqué, ayant fait l’objet d’un nouvel appel d’offres au niveau européen (51), a été attribué au groupement SNCM — CMN à compter du 1er mai 2007 et jusqu’au 31 décembre 2013 pour une subvention d’environ 100 millions d’euros par an.

(36)

En parallèle, des obligations de fréquence de dessertes sont imposées à tous les opérateurs desservant l’île au départ de Toulon et de Nice. Sur ces lignes, les résidents corses ainsi que d’autres catégories de passagers bénéficient depuis 2002 et jusqu’en 2013 d’aides sociales mises en place en vertu des décisions de la Commission du 2 juillet 2002 (52) et du 24 avril 2007 (53).

3.   CONTEXTE CONCURRENTIEL

(37)

La SNCM opère principalement sur deux marchés distincts tant pour le trafic de passagers que pour le trafic de marchandises: d’une part, la desserte de la Corse et celle du Maghreb, à partir de la France, et d’autre part, à titre accessoire, la desserte de l’Italie et de l’Espagne.

3.1.   La desserte de la Corse

(38)

La desserte de la Corse pour le transport de passagers est un marché caractérisé par sa forte saisonnalité. Il se caractérise en effet par des pics de fréquentation saisonnière qui peuvent atteindre dix fois ceux du mois le plus creux, ce qui exige des opérateurs une flotte dimensionnée pour absorber ces pointes. La moitié du chiffre d’affaires est réalisé en juillet et en août. Il existe en outre un déséquilibre selon le sens du trajet, même en période de pointe: en juillet, par exemple, le départ s’effectue à plein du continent alors que le retour est presqu’à vide. Ce faisant, les taux de remplissage annuel moyen des navires sont relativement bas.

(39)

La SNCM est l’opérateur historique reliant la Corse au continent français. Schématiquement, les deux tiers de son activité sont réalisés entre Marseille et la Corse dans le cadre d’une délégation de service public; le dernier tiers de son activité est constitué de liaisons ayant d’autre points d’origine ou de destination (Nice-Corse, Toulon-Corse, liaisons internationales vers la Sardaigne ou le Maghreb).

(40)

La SNCM a longtemps vécu en situation de monopole sur son activité principale. Depuis 1996, cependant, elle est confrontée à une concurrence qui s’est développée très rapidement. Ainsi, la société Corsica Ferries France (CFF) est aujourd’hui l’acteur dominant des liaisons maritimes entre le continent et la Corse et sa part de marché ne cesse de progresser. Alors qu’elle n’est présente sur ce marché que depuis 1996, CFF a vu son trafic «passagers» augmenter de […] (54) par an entre 2000 et 2005 et cette croissance se poursuit. Ainsi, aujourd’hui, près de […] des passagers par mer entre le continent et la Corse prennent un bateau de CFF, tandis que seulement […] utilisent un navire de la SNCM, la CMN transportant le solde des passagers, soit […].

(41)

La position acquise depuis sept ans par CFF sur le marché considéré se manifeste également au regard du nombre de passagers transportés par saison entre la Corse et la France continentale. Il ressort du graphique ci-dessous que la part de marché de CFF est passée de 45 % en 2000 à […] % en 2007 et celle de la SNCM de 53 % à […] % pendant la même période, avec un écart supérieur à un million de voyageurs transportés.

Graphique 1

Nombre de passagers transportés par saison (mai-septembre) entre la France continentale et la Corse — Saisons 2000 à 2007

Image

(42)

Les autres concurrents mineurs de la SNCM sur la desserte de la Corse sont la Compagnie Méridionale de Navigation (CMN), Moby Lines, Happy Lines et TRIS.

(43)

Ces deux dernières années, l’offre de la SNCM et ses parts de marché pour les liaisons avec la Corse se sont réduites, avec une baisse de […] % de l’offre de places (– […] % pour les dessertes à partir de Nice et – […] % pour celles à partir de Marseille).

(44)

Toutefois, la poursuite de la baisse des parts de marché démontre que le retour de la confiance de la part des passagers, qui avait été très largement entamée par les grèves et les perturbations engendrées par les conflits sociaux de 2004 et 2005, notamment à l’occasion de la privatisation de l’entreprise, se fait très lentement. Il est une condition nécessaire pour enrayer la diminution de la part de marché de la SNCM constatée ces dernières années. La progression, dans ce contexte, du chiffre d’affaires en 2007 rassure sur la viabilité de l’entreprise bien qu’elle ait libéré des parts de marché considérables au profit de son seul concurrent dont la part de marché est aujourd’hui largement supérieure.

(45)

Le marché du transport maritime de passagers entre le continent et la Corse a crû en moyenne de 4 % sur les 15 dernières années; sa croissance devrait se poursuivre, avec une augmentation de […] % également prévue pour 2008 puis une croissance modérée sur les années suivantes. Pour autant, de nouveaux acteurs ne semblent pas chercher à se développer sur ce marché. À l’occasion de l’appel d’offres lancé par l’Office des Transports de Corse pour attribuer, sur la période 2007-2013, la délégation de service public de desserte maritime de certains ports de la Corse, aucune autre candidature que celles de CFF et de SNCM-CMN ne s’est manifestée, alors même que des réponses partielles sur une ligne donnée étaient possibles.

(46)

S’agissant du principal concurrent de la SNCM, CFF a augmenté fortement son offre de places de 500 000 à […] millions entre 1999 et 2007 (dont […] % d’augmentation entre 2006 et 2007), ce qui lui a permis d’augmenter ses trafics (de […] millions en 2005 à […] millions en 2007) et sa part de marché. Cette politique se traduit néanmoins par des taux de remplissage structurellement moins élevés pour CFF que pour la SNCM, avec un écart de l’ordre de […] points de pourcentage en 2007. Pour la SNCM, le taux de remplissage moyen sur l’année 2007 s’élevait à […] %, ce qui est normal compte tenu de la forte saisonnalité du marché (voir supra).

(47)

S’agissant du trafic de fret avec la Corse, la SNCM détenait en 2005 environ […] % du marché Marseille-Toulon vers la Corse.

(48)

Pour le trafic de marchandises générales (non accompagnées), la SNCM et la CMN disposent d’un quasi-monopole de fait. Dans le cadre du contrat de délégation de service public, les deux compagnies assurent des dessertes fréquentes depuis Marseille vers l’ensemble des ports de la Corse.

(49)

Pour les remorques accompagnées, chargées sur des ferries, qui représentent globalement 24 % du trafic de marchandises générales mesuré en mètres linéaires, il existe une concurrence entre l’ensemble des opérateurs passagers. La SNCM et la CMN détiennent également la majorité de ce trafic accompagné. Les autres opérateurs, en particulier CFF, en détiennent 10 %, soit 2 % du marché global.

(50)

Pour les automoteurs accompagnés (55), chargés sur des ferries (environ 24 % du trafic de marchandises générales en 2003), la SNCM et la CMN détiennent également la majorité du marché en cause. Toutefois, à partir de 2002, CFF a développé une offre et détient environ […] % du marché.

3.2.   La desserte du Maghreb

(51)

La Tunisie et l’Algérie présentent un marché important, d’environ 5 millions de passagers dominé par l’aérien. Dans ce contexte, le transport maritime représente environ 15 % des flux. Alors que l’Algérie représente un marché maritime significatif de l’ordre de 560 000 passagers, la Tunisie représente un marché moins important de l’ordre de 250 000 passagers.

(52)

Le marché du transport maritime de la France vers le Maghreb a connu une croissance soutenue au cours de ces dernières années, de l’ordre de 13 % entre 2001 et 2005. Compte tenu des perspectives de croissance du tourisme vers cette région, le transport maritime devrait connaître un taux de croissance annuel de l’ordre de 4 % à horizon 2010.

(53)

En Algérie, la SNCM se positionne comme le deuxième acteur du marché après l’Entreprise Nationale de Transport Maritime de Voyageurs (ENTMV), entreprise publique algérienne. La part de marché de la SNCM est passée de 24 % en 2001 à […] % en 2005.

(54)

La SNCM se positionne comme deuxième opérateur sur le marché vers la Tunisie derrière la Compagnie tunisienne de navigation (CTN). Bien que, depuis 2001, la SNCM ait perdu des parts de marché au profit de la CTN passant de 44 % à […] % en 2004, une amélioration est toutefois à enregistrer en 2005 ([…] %).

4.   DESCRIPTION DES MESURES COUVERTES PAR LA PRESENTE DECISION

4.1.   La recapitalisation de la SNCM de 2002

4.1.1.   Description

(55)

À la suite de la décision de la Commission du 17 juillet 2002 d’autoriser une aide au sauvetage à la SNCM (56), les autorités françaises ont notifié à la Commission le 18 février 2002 un projet d’aide à la restructuration en faveur de la SNCM. Cette mesure consistait à recapitaliser la SNCM, via sa société mère, la CGMF, pour un montant de 76 millions d’euros, dont 46 millions d’euros au titre de charges de restructuration (57). Cette augmentation de capital avait pour objectif de porter les capitaux propres de la SNCM de 30 millions d’euros à 106 millions d’euros.

(56)

Conformément aux lignes directrices de 1999, les autorités françaises ont soumis à la Commission un plan de restructuration (58) pour la SNCM portant sur cinq points:

i)

une baisse du nombre de traversées et le redéploiement de ses navires entre les différentes lignes (une baisse des dessertes vers la Corse et un renforcement sur la desserte du Maghreb) (59);

ii)

une réduction de quatre navires de sa flotte qui devait apporter 21 millions d’euros de liquidités;

iii)

la cession de certains actifs immobiliers;

iv)

une baisse des effectifs (60) d’environ 12 % qui, combinée à une politique salariale raisonnable, devaient permettre de réduire les charges d’équipage de 61,8 millions d’euros en 2001 à […] millions d’euros en moyenne de 2003 à 2006 et les charges à terre de 50,3 millions d’euros en 2001 à […] millions d’euros sur la même période;

v)

la suppression de deux de ses filiales, la Compagnie Maritime Toulonnaise et la société Corsica Marittima, dont les activités résiduelles seraient reprises par la SNCM.

(57)

À la suite des observations formulées par la Commission dans sa décision du 19 août 2002, les autorités françaises ont décrit, dans leur lettre du 31 janvier 2003, les améliorations apportées au plan de restructuration sur les points suivants:

des engagements et des précisions sur la politique salariale,

un plan de réduction des coûts dans les achats intermédiaires,

un engagement que la SNCM ne serait pas à l’origine d’une guerre tarifaire avec ses concurrents sur la Corse.

(58)

Sur ce dernier point, les autorités françaises précisent que «la SNCM prend cet engagement sans réserves, car elle considère qu’une guerre tarifaire de son fait ne serait conforme ni à son positionnement stratégique, ni à son intérêt, car elle conduirait à une baisse de ses recettes, ni à ses pratiques habituelles et à son savoir-faire».

(59)

Dans leur plan de restructuration, les autorités françaises ont présenté à la Commission une maquette financière détaillée pour la période 2002-2007 sur la base d’hypothèses médianes concernant une série de variables (61). Les projections financières indiquent, entre autres, un retour à des résultats courants positifs dès 2003.

Tableau 1

Maquette financière pour la période 2002-2007

(en Mio EUR)

 

2000

2001

2002

2002

2003

2004

2005

2006

2007

Réalisé

Réalisé

Plan

Réalisé

Plan

Plan

Plan

Plan

Plan

Chiffre d’affaires

204,9

204,1

178

205,8

[…]

[…]

[…]

[…]

[…]

Subventions d’exploitation

85,4

86,7

74,5

77,7

[…]

[…]

[…]

[…]

[…]

Résultat courant

–14,7

–5,1

1,2

–5,8

[…]

[…]

[…]

[…]

[…]

Résultat net

–6,2

–40,4

23

4,2

[…]

[…]

[…]

[…]

[…]

Fonds propres

67,5

29,7

119

33,8

[…]

[…]

[…]

[…]

[…]

Dettes financières nettes (hors crédit-bail)

135,8

134,5

67,7

144,8

[…]

[…]

[…]

[…]

[…]

Ratios financiers

 

 

 

 

[…]

[…]

[…]

[…]

[…]

Résultat courant/CA + subventions

–5 %

–2 %

0 %

–2 %

[…]

[…]

[…]

[…]

[…]

Fonds propres/endettement au bilan

50 %

22 %

176 %

23 %

[…]

[…]

[…]

[…]

[…]

Chiffres 2000, 2001 et 2002 extraits des rapports annuels 2001 et 2002 de la SNCM

(60)

L’apport en capital de 76 millions d’euros ainsi que le retour à la rentabilité de l’exploitation envisagé dès 2003, devaient permettre, selon les autorités françaises, de faire passer les capitaux propres de leur niveau d’environ 30 millions d’euros à la fin de l’année 2001 à 120 millions d’euros à court terme (2003), puis à […] millions d’euros à la fin du plan (2006-2007). Ceci devait permettre une réduction de l’endettement financier de 145 millions d’euros en 2002 à des niveaux de […] à […] millions d’euros de 2003 à 2005. Dans les dernières années du plan, une hausse de l’endettement était envisagée par la compagnie pour le renouvellement, en pleine propriété, d’un ou deux navires.

(61)

Les autorités françaises ont également fourni une étude de sensibilité des résultats escomptés par rapport aux hypothèses de travail relatives au trafic sur les différentes lignes. Sur cette base, les différentes simulations démontrent que la SNCM devrait retrouver la voie de la rentabilité dans les cas de figure envisagés.

4.1.2.   Détermination du montant de la recapitalisation

(62)

La méthode retenue par les autorités françaises (62) pour déterminer le montant de la recapitalisation consiste à calculer le besoin de financement sur la base du ratio moyen des fonds propres sur les dettes financières constaté en 2000 auprès de cinq compagnies maritimes européennes. En dépit des disparités des bilans de ces entreprises, la moyenne retenue par les autorités françaises s’établit à 79 %. Les autorités françaises soutiennent que les projections financières sur la période de 2002 à 2007 aboutissent à un ratio moyen de capitaux propres sur dettes financières de 77 % avec des capitaux propres qui atteindraient 169 millions d’euros en 2007. Un tel niveau de fonds propres devait être obtenu moyennant une recapitalisation de 76 millions d’euros ainsi que la réussite des actions prévues au plan de restructuration.

4.2.   Mesures postérieures à la recapitalisation de 2002

4.2.1.   Remarque préliminaire

(63)

La recapitalisation et le plan de restructuration de 2002 n’ont pas apporté les résultats escomptés et, à partir de 2004, la situation économique et financière de la SNCM s’est fortement dégradée. À cette dégradation ont contribué tant des facteurs internes (conflits sociaux, réalisation insuffisante et tardive des objectifs de productivité, perte de parts de marché) que des facteurs exogènes à la SNCM (moindre attractivité de la destination de la Corse, acquisition de parts de marché par CFF, fautes de gestion de la part de l’État) (63) ainsi que la hausse du coût des carburants.

(64)

Ainsi, le résultat courant de la SNCM s’est établi à – 32,6 millions d’euros en 2004 et – 25,8 millions d’euros en 2005. Le résultat net, quant à lui, était de – 29,7 millions d’euros en 2004 et de – 28,8 millions d’euros en 2005.

(65)

La dégradation de la situation économique et financière de la SNCM a conduit les autorités françaises à céder des actifs au-delà de ce qui était prévu par le plan de restructuration de 2002 et requis par la décision de 2003 ainsi qu’à lancer une procédure de recherche de partenaires privés.

Tableau 2

Liste des actifs cédés par la SNCM depuis 2002  (64)

 

Produit net de cessions

Date

Cessions proposées dans la notification de 2002 (en euros)

25 165 000

 

Aliso (en remplacement de l’Asco, conformément à la décision du 8 septembre 2004 de la Commission)

[…]

30.9.2004

Napoléon

[…]

6.5.2002

Monte Rotondo

[…]

31.7.2002

Liberté

[…]

27.1.2003

Ensemble immobilier Schuman

[…]

20.1.2003

Cessions supplémentaires imposées par la Commission dans sa décision du 9 juillet 2003 (en euros)

5 022 600

 

SCI Espace Schuman

[…]

24.6.2003

Southern Trader

[…]

22.7.2003

Someca

[…]

30.4.2004

Amadeus

[…]

12.10.2004

CCM

[…] (65)

Cessions supplémentaires intervenues depuis la décision de juillet 2003 (en millions d’euros)

12,6

 

Asco

[…]

24.5.2005

Sud Cargos

[…]

15.9.2005

Ventes d’appartements du parc immobilier de la SNCM

(autrefois occupés par du personnel SNCM)

[…]

Septembre 2003 à 2006

Total (en millions d’euros)

42,385

 

4.2.2.   Les mesures postérieures à la recapitalisation de 2002

(66)

À l’issue d’un processus de sélection ouvert, transparent et non discriminatoire (66), un accord a finalement été trouvé le 13 octobre 2005 entre l’État, BCP et VT dans un contexte social et financier très difficile. VT est ainsi l’opérateur industriel de la SNCM (participation à 28 %) tandis que BCP est l’actionnaire de référence avec une participation de 38 %. L’État s’est engagé, notamment à l’égard des salariés, à rester actionnaire de la compagnie à hauteur de 25 % (67). BCP et VT ont établi un plan d’affaires pour la SNCM qui a été communiqué le 7 avril 2006 à la Commission européenne.

(67)

Le protocole d’accord, aux termes duquel 75 % du capital de la SNCM est cédé aux repreneurs privés, a été signé le 16 mai 2006 entre les parties (BCP, VT et CGMF).

(68)

À la section II du protocole d’accord, il est prévu que la CGMF s’engage à approuver, souscrire et libérer entièrement une augmentation de capital de la SNCM d’un montant global de 142,5 millions d’euros.

(69)

À la suite de l’augmentation de capital, il est prévu que le capital social de la SNCM soit réduit par annulation d’actions pour être ramené au minimum légal pour une société anonyme ne faisant pas appel public à l’épargne.

(70)

En complément de l’augmentation de capital, la CGMF s’engage à mettre à disposition de la SNCM, sous la forme d’une avance en compte courant, la somme de 38,5 millions d’euros. Cette avance en compte courant, qui sera versée par la SNCM entre les mains d’un séquestre (la banque CIC), est destinée au financement de la fraction de coût dit de «sur générosité» qui viendrait en complément des sommes dues en application des dispositions légales et conventionnelles dans l’éventualité d’un plan de réduction des effectifs mis en œuvre par les repreneurs (68). Le versement des compensations venant en sus des indemnités perçues en application des dispositions légales et conventionnelles se fait sur une base individuelle et nominative correspondant à des salariés qui ont quitté l’entreprise et dont le contrat de travail a été rompu.

(71)

À la suite de ces opérations, la section III du protocole d’accord prévoit que la CGMF cède aux repreneurs privés ses actions représentant 75 % des actions composant le capital social de l’entreprise et le […] destiné à financer la partie du plan social allant au-delà des obligations conventionnelles et légales.

(72)

La section III du protocole d’accord prévoit également la souscription conjointe et concomitante par les repreneurs et la CGMF d’actions nouvelles pour un montant total de 35 millions d’euros et d’un apport en compte courant de 8,75 millions d’euros par BCP/VT, mis à disposition de la SNCM en fonction de ses besoins de trésorerie. Au paragraphe III.2.7 du protocole d’accord, il est prévu que la valeur des actions de la CGMF est égale, à tout instant, à leur valeur nominale initiale augmentée de […] % de sa valeur nominale libérée, multiplié par J/365, J étant le nombre de jours depuis la date de réalisation, sous déduction de toute somme perçue (par exemple dividendes). Ces modalités ne sont pas applicables en cas de redressement ou de liquidation judiciaire de la société.

(73)

Le protocole d’accord (section III.5) comporte une clause résolutoire de cession de la SNCM qui peut être exercée concomitamment par les repreneurs en cas de survenance de l’un des événements suivants dans la mesure où ces hypothèses auraient pour effet de remettre en cause la crédibilité de leur plan d’affaires et le retour à la viabilité de la société:

la non-attribution du contrat de délégation de service public de desserte maritime de la Corse pour la période débutant le 1er janvier 2007 […],

toute décision négative de la Commission européenne ou un arrêt du Tribunal ou de la Cour de Justice, tels qu’un refus de l’opération ou l’imposition de conditions ayant un impact substantiel sur la valeur de la société, […].

(74)

La section VII du protocole d’accord prévoit que la CGMF prenne à sa charge une partie des engagements sociaux de la SNCM au titre des frais de mutuelles de ses retraités pour un montant évalué à 15,5 millions d’euros à compter du jour du transfert de propriété de l’entreprise.

(75)

Les modalités de gouvernance de l’entreprise sont précisées dans la section IV du protocole d’accord. Il est prévu qu’il sera procédé à une modification du mode de gestion de la SNCM qui sera transformée en société anonyme à directoire et conseil de surveillance. Ce dernier sera composé de 10, puis de 14 membres. Sa présidence sera attribuée transitoirement à un représentant de l’État. Si la DSP est attribuée à la SNCM, le Président du conseil de surveillance sera remplacé par un représentant de BCP. Le directoire a quant à lui pour fonction d’assurer la gestion opérationnelle de la SNCM.

(76)

Le 26 mai 2006, le gouvernement français a entériné la cession de la SNCM de même que les mesures précitées.

(77)

À la lumière de ce qui précède, le protocole d’accord contient trois types de mesures étatiques justifiant un examen au regard du régime communautaire des aides d’État:

la cession de 100 % de la SNCM à un prix négatif de 158 millions d’euros (apport en capital de 142,5 millions d’euros et prise en charge des frais de mutuelle pour un montant de 15,5 millions d’euros),

l’avance en compte courant par la CGMF pour un montant de 38,5 millions d’euros en faveur des personnels licenciés de la SNCM,

l’augmentation de capital de 8,75 millions d’euros souscrite par la CGMF conjointement et concomitamment à l’apport de 26,25 millions d’euros réalisé par VT et BCP.

5.   PORTEE DE LA PRESENTE DECISION

(78)

La présente décision finale porte sur les mesures mises en œuvre par la France en faveur de la SNCM depuis le 18 février 2002, à savoir:

l’apport en capital de la CGMF à la SNCM pour un montant de 76 millions d’euros en 2002 (dont 53,48 millions d’euros au titre d’obligations de service public et le solde au titre des aides à la restructuration),

le prix de vente négatif de la SNCM par la CGMF pour un montant de 158 millions d’euros,

l’apport de la CGMF de 8,75 millions d’euros,

la prise en charge par la CGMF de certaines mesures sociales complémentaires pour un montant de 38,5 millions d’euros.

(79)

La présente décision ne porte pas sur l’examen des compensations financières perçues ou à percevoir par la SNCM au titre des obligations de service public pour la période 2007-2013, lesquelles font l’objet d’une procédure distincte.

6.   RAISONS AYANT CONDUIT A L’ADOPTION DES DECISIONS DE LA COMMISSION DE 2002 ET 2006

6.1.   L’ouverture de la procédure formelle d’examen de 2002

(80)

Dans sa décision d’ouverture de procédure du 19 août 2002, la Commission, tout en reconnaissant à la SNCM le caractère d’entreprise en difficulté, a exprimé ses doutes quant à la compatibilité de la mesure notifiée avec les critères exposés au point 3.2.2 des lignes directrices de 1999 en vigueur à l’époque.

(81)

La Commission a émis certains doutes sur le plan de restructuration compte tenu de l’absence d’analyse des causes des pertes de l’entreprise. En particulier, la Commission a posé des questions concernant les liens entre les pertes et les obligations de service public, l’impact de la politique d’achat de navires de la SNCM sur ses comptes de résultat et les mesures envisagées pour augmenter la productivité de l’entreprise.

(82)

La Commission a en outre souligné certaines lacunes du plan de restructuration, notamment l’absence de mesures concrètes pour réduire le montant des consommations intermédiaires et l’absence d’indication sur la future politique tarifaire de la SNCM.

(83)

La Commission s’est également interrogée sur la pertinence de la méthode de calcul retenue par les autorités françaises pour arrêter le montant de la recapitalisation et sur certaines des hypothèses retenues pour établir les simulations financières.

6.2.   L’extension de la procédure formelle d’examen de 2006

(84)

Par sa décision du 13 septembre 2006, la Commission a décidé d’étendre la procédure formelle d’examen de 2002 aux mesures prévues dans le cadre de la cession de la SNCM au secteur privé.

(85)

Tout d’abord, tenant compte de l’invitation des autorités françaises du 7 avril 2006 (voir point 17 de la présente décision) à examiner une partie du montant de l’apport en capital de 2002 à la lumière de la jurisprudence Altmark, la Commission a, à cet égard, soulevé des doutes quant au respect des conditions (en particulier la deuxième et la quatrième) posées par le juge communautaire dans ledit arrêt (69).

(86)

Dans l’hypothèse où ce montant serait qualifié d’aide compatible au titre de l’article 86, paragraphe 2, CE, la Commission a estimé, dans sa décision de 2006, que le nouveau montant d’aide à évaluer à la lumière des lignes directrices des aides à la restructuration serait de 15,81 millions d’euros. Dans la mesure où le montant d’aide à la restructuration serait sensiblement plus bas que celui notifié en 2002 et approuvé en 2003, la Commission a exprimé ses doutes sur l’opportunité de maintenir l’ensemble des contreparties imposées à la SNCM par la décision de 2003.

(87)

La Commission a également exprimé ses doutes sur le respect des conditions imposées par la décision de 2003, à savoir le principe de price leadership et le nombre de rotations sur la Corse.

(88)

S’agissant du prix de cession négatif de la SNCM, la Commission a émis des doutes au sujet de la conformité au principe de l’investisseur privé en économie de marché de la recapitalisation par l’État préalable à la cession de la SNCM. En particulier, la Commission a exprimé ses doutes sur la validité du calcul des coûts de liquidation que l’État actionnaire serait tenu à payer en cas de liquidation de la SNCM.

(89)

La Commission a mis en doute le fait que les mesures financières puissent se justifier au titre des lignes directrices sur les aides au sauvetage et à la restructuration.

(90)

Elle a par ailleurs exprimé ses doutes au sujet de la seconde recapitalisation de 8,75 millions d’euros pour ce qui est du respect des principes de concomitance entre l’investissement privé et public et l’identité des conditions de souscription au sens de la jurisprudence.

(91)

La Commission a enfin émis des doutes sur le fait que les mesures sociales complémentaires de 38,5 millions d’euros d’aide à la personne puissent constituer un avantage indirect à l’entreprise. Elle a également souligné le risque de contradiction avec la prise en compte des indemnités complémentaires de licenciement comme faisant partie des risques supportés par un investisseur avisé.

7.   POSITION DES AUTORITES FRANÇAISES

7.1.   Sur la recapitalisation de 2002

7.1.1.   Sur le montant de 53,48 millions d’euros à la lumière de la jurisprudence Altmark

7.1.1.1.   Le respect des quatre critères Altmark

(92)

Dans leur courrier du 7 avril 2006 ainsi que dans le cadre des commentaires présentés à la suite de la décision de 2006, les autorités françaises invitent la Commission à constater qu’en raison de sa nature de «compensation de service public» pour la période 1991-2001, une partie de l’augmentation de capital de 2002, à savoir 53,48 millions d’euros, ne constitue pas une aide d’État à la lumière de la jurisprudence Altmark, considérant en effet que les quatre conditions établies par ladite jurisprudence sont remplies dans le cas d’espèce.

(93)

S’agissant plus particulièrement de la deuxième condition Altmark, les autorités françaises soulignent qu’aux termes de l’arrêt Altmark, seuls les paramètres de calcul doivent être fixés préalablement de façon objective et transparente. Or, en l’espèce, elles précisent que le montant de 53,48 millions d’euros a été versé en novembre 2003 sur la base de paramètres de calcul fixés préalablement à la période en cause (1991-2001) (70).

(94)

Dès lors, d’après la France, le fait que le versement de la réévaluation pour sous-compensation intervienne a posteriori ne remet pas en cause sa conclusion selon laquelle les paramètres de calcul sur la base desquels est calculée la compensation de 53,48 millions d’euros étaient clairement établis de façon objective et transparente préalablement à l’exécution des missions de service public.

(95)

S’agissant de la quatrième condition Altmark, les autorités françaises considèrent que celle-ci vise les caractéristiques d’une entreprise chargée d’une mission de service public répondant à la qualification d’un bon gestionnaire moyen mais ne fait en revanche aucunement référence à une quelconque exigence de rentabilité minimale ou moyenne de l’entreprise en cause.

(96)

À cet égard, les autorités françaises considèrent que la SNCM peut bénéficier d’une «présomption de bonne gestion» sur la période de 1991 à 2001 et qu’aucune «présomption de mauvaise gestion» ne saurait être retenue à l’encontre de celle-ci du seul fait des pertes financières subies durant la période 1991-2001. D’après les autorités françaises, les pertes de la SNCM ne seraient pas à imputer à une mauvaise gestion mais à la rigidité des conventions souscrites en 1991 et 1996 ainsi qu’au bouleversement soudain du marché historique de cette compagnie dû au passage d’une situation de monopole à un environnement fortement concurrentiel. La SNCM se serait donc comportée comme une entreprise moyennement bien gérée.

(97)

La France souligne que l’opérateur public était la seule entreprise capable d’assumer ces obligations en termes de régularité annuelle et fréquence de service et cela, malgré l’arrivée en 1996 d’un opérateur privé, lequel n’exploitait que certaines lignes et uniquement pendant la haute saison. Il n’existerait d’ailleurs pas stricto sensu d’entreprise dont les coûts pourraient servir de référence pour déterminer si le niveau de la compensation octroyée à la SNCM dépasserait ou non les coûts nécessairement occasionnés par l’exécution des obligations de service public. Il serait donc délicat, d’après les autorités françaises, d’opérer une comparaison entre la structure de coûts de la SNCM et celle d’autres compagnies maritimes, compte tenu des spécificités de l’activité de cette dernière et du marché sur lequel elle opère.

(98)

Malgré l’impossibilité pratique de trouver une entreprise qui pourrait servir de point de référence pour cette période, la France estime s’être efforcée de fournir, au cours des échanges avec la Commission ayant eu lieu en 2005 et 2006, des éléments objectifs et justifiables permettant d’établir le caractère d’ «entreprise moyenne, bien gérée et adéquatement équipée» de la SNCM et de constater que le quatrième critère posé par l’arrêt Altmark est rempli (71).

(99)

La France considère en outre qu’une comparaison se fondant sur les éléments disponibles relatifs à la structure de coûts de CFF et à celle de la SNCM serait loin de contredire la présomption de bonne gestion de la SNCM, surtout parce qu’ils ne permettent nullement de prendre en considération une partie non négligeable des coûts de l’activité de service public qui concerne le transport de marchandises.

(100)

Par ailleurs, la France affirme que, dans un cas de figure comme celui-ci, il est permis de considérer que la jurisprudence qui a conduit à l’arrêt Altmark (et notamment l’arrêt Ferring) doit s’entendre comme une vérification de la seule absence de surcompensation. À cet égard, les autorités françaises exposent que les subventions octroyées n’ont pas excédé les coûts effectivement supportés par la SNCM en raison des obligations de service public mises à sa charge, comme la Commission l’a relevé dans sa décision du 30 octobre 2001 (72).

(101)

Enfin, les autorités françaises affirment que le fait que la jurisprudence Altmark s’applique à la convention de DSP de 2002-2006 devrait contribuer à lever les doutes sur l’applicabilité de cette jurisprudence aux compensations de charges de service public relatives à la période allant de 1991 à 2001. En effet, d’après la France, les compensations octroyées de 1991 à 2001 et de 2002 à 2006 auraient la même nature dans la mesure où les paramètres de leur définition, à savoir des exigences de service public lourdes, la présence d’une seule entreprise en mesure de les assumer et un schéma de prise en considération des coûts d’exploitation, sont identiques.

(102)

En conclusion, la France est d’avis que l’existence des obligations de service public, combinée à l’absence de surcompensation sur la période 1991-2001, confirme le respect des quatre conditions Altmark.

7.1.1.2.   La compatibilité du montant de 53,48 millions d’euros à la lumière de l’article 86, paragraphe 2, CE

(103)

Si la Commission devait conclure que cette intervention constitue une aide d’État au sens de l’article 87, paragraphe 1, CE, les autorités françaises estiment que cette mesure autonome et indépendante du plan de restructuration de 2002 est compatible au titre de l’article 86, paragraphe 2, CE, cette base de compatibilité n’ayant pas été contestée par le Tribunal dans son arrêt de 2005.

(104)

Les autorités françaises insistent sur le fait que, dans ce cas de figure, le montant en cause est une mesure qui ne devrait pas être appréciée à la lumière des lignes directrices sur les aides à la restructuration de 1999 ou de 2004 et, notamment, ne devrait pas être prise en considération au moment d’apprécier les conditions imposées au plan de 2002. En effet, d’après la France, les lignes directrices sur les aides à la restructuration de 2004 (point 68) ne sauraient justifier l’intégration des 53,48 millions d’euros dans les aides à la restructuration.

(105)

À cet égard, la France affirme que le montant de 53,48 millions d’euros couvrant des compensations de charges de service public pour la période de 1991 à 2001 n’est pas une mesure octroyée pendant la restructuration, qu’il s’agisse du plan de restructuration notifié en 2002 ou de son actualisation, mais bien une mesure qui précède les plans de restructuration en question. En outre, les autorités françaises font valoir qu’une mesure visant à compenser les charges pesant sur des entreprises du fait de leurs obligations de service public n’a pas la nature d’une aide à la restructuration telle que définie dans les lignes directrices.

(106)

Les autorités françaises estiment que, même si ce montant a été notifié dans le cadre d’une injection financière globale au titre d’aide à la restructuration, la Commission n’est pas liée par les qualifications adoptées par les États membres et qu’au contraire, il lui revient, le cas échéant, de requalifier une mesure comme n’étant pas une aide d’État ou au contraire de qualifier une mesure étatique d’aide alors même que l’État membre en question ne l’aurait pas présentée de la sorte.

7.1.2.   Sur le solde notifié au titre des aides à la restructuration

(107)

À la lumière de ce qui précède, la France estime que, si le montant de 53,48 millions d’euros est jugé exempt d’éléments d’aide ou s’il est qualifié d’aide compatible au titre de l’article 86, paragraphe 2, CE, le montant de l’aide à considérer comme aide à la restructuration au titre de la notification de 2002 s’élèverait, non plus à 76 millions d’euros, mais à 15,81 millions d’euros.

7.2.   Sur les mesures postérieures à la recapitalisation de 2002

(108)

La France rappelle, à titre liminaire, que la gravité des mouvements sociaux de 2004/2005 et la détérioration de la situation économique et financière de la SNCM ont conduit l’État actionnaire à lancer en janvier 2005 une procédure de sélection d’investisseurs privés et à mettre en œuvre des mesures d’urgence [notamment la cession de l’Asco et de la participation dans Sud Cargos (73)].

7.2.1.   Sur le prix de cession négatif de la SNCM

(109)

En application de la jurisprudence communautaire en la matière, les autorités françaises invitent la Commission à considérer que le prix de cession négatif de la SNCM de 158 millions d’euros ne contient aucune mesure qualifiable d’aide au sens de l’article 87, paragraphe 1, CE dans la mesure où l’État français se serait comporté comme un investisseur privé en économie de marché.

(110)

A titre liminaire, la France fait observer que le prix final de 158 millions d’euros, qui est inférieur au prix négatif que demandaient initialement les repreneurs au terme de leur audit de la SNCM, est le résultat d’une négociation de cession de contrôle menée dans le cadre d’une mise en concurrence ouverte, transparente et non discriminatoire, et, à ce titre, constitue bien un prix de marché.

(111)

La France considère que, dans la mesure où cette recherche d’un partenaire privé pour la SNCM a été opérée dans le cadre d’une procédure de mise en concurrence ouverte, transparente et non discriminatoire, à l’issue de laquelle la meilleure offre a été retenue, le prix de cession est un prix de marché.

(112)

D’après les autorités françaises, la cession au prix négatif de 158 millions d’euros aurait eu lieu dans les conditions les plus avantageuses pour l’État conformément à la jurisprudence communautaire et à la pratique décisionnelle de la Commission et ne contiendrait donc aucun élément d’aide. En effet, la France estime que ce prix négatif est inférieur au coût de liquidation que l’État aurait dû supporter en cas de liquidation de l’entreprise.

(113)

Cette conclusion s’imposerait tant en appliquant l’approche issue de la jurisprudence de la Cour de Justice des Communautés européennes (ci-après jurisprudence Gröditzer (74) qu’en appliquant l’approche reposant sur l’analyse des coûts de liquidation effectifs de la SNCM (décision ABX (75).

(114)

S’agissant de la première méthode se fondant sur la jurisprudence Gröditzer, la France expose que cet arrêt aurait confirmé l’appréciation de la Commission dans sa décision du 8 juillet 1999, selon laquelle «seule la valeur de liquidation […] des actifs, […], doit être prise en considération comme coût de la liquidation» (76).

(115)

À cet égard, les rapports de la CGMF (77) et Oddo-Hastings (78) estiment la valeur de liquidation des actifs à un minimum de […] millions d’euros au 30 septembre 2005 (79).

(116)

Par conséquent, dans la mesure où l’État en tant que propriétaire actionnaire d’une société n’est responsable de ses dettes qu’à concurrence de la valeur de liquidation de leurs actifs (jurisprudence «Hytasa» (80), la France affirme que la valeur de liquidation des actifs de la compagnie estimée au minimum à […] millions d’euros est nettement supérieure au prix négatif de cession de 158 millions d’euros.

(117)

Sur la seconde méthode, la France indique qu’elle découle de la décision de la Commission concernant l’aide d’État mise à exécution par la Belgique en faveur d’ABX Logistics, dans laquelle la Commission a examiné un prix de cession négatif, présentant, comme en l’espèce, le caractère d’un prix de marché, en le comparant aux coûts que l’État actionnaire aurait effectivement supportés dans le cadre d’une liquidation amiable ou judiciaire tels qu’expertisés par un tiers indépendant. D’après la France, la Commission reconnaît notamment dans cette décision la validité d’un certain nombre de coûts pouvant résulter d’une action en comblement de passif de la part des créanciers ou de la liquidation aux autres branches du groupe liquidant sa filiale.

(118)

Sur la base des rapports CGMF et Oddo-Hastings précités, les autorités françaises estiment que l’ensemble des coûts réels qu’aurait eu à supporter en tant qu’actionnaire la République française, s’élèverait entre […] et […] millions d’euros au 30 septembre 2005.

(119)

Cette méthode tient notamment compte du risque que l’État français eût été appelé en «comblement de passif» si un tribunal avait dû le considérer comme dirigeant de fait de la SNCM. Les autorités françaises estiment que le risque d’action en comblement de passif ne peut être écarté, particulièrement au regard d’un précédent jugé par la Cour de Cassation en France (81). Ainsi, dans plusieurs courriers à la Commission, les autorités françaises ont soutenu que l’hypothèse d’une condamnation de l’État par un juge national à combler le passif de l’entreprise qu’il dirige constituait un scénario plus que plausible et qu’elle se devait d’être retenue dans le calcul du coût effectif d’une éventuelle liquidation de la SNCM.

(120)

Au 30 septembre 2005, la valeur résiduelle de l’actif de la SNCM (soit […] millions d’euros) serait, après paiement des dettes privilégiées, de […] millions d’euros. Les autres éléments de coûts pris en compte au titre de l’action en comblement de passif envers l’État comprennent notamment les coûts de résiliation des principaux contrats d’exploitation, les coûts liés à la résiliation des conditions de crédit-bail des navires et le paiement des dettes chirographaires, ce qui conduirait à une insuffisance d’actifs à hauteur de […] millions d’euros. Les autorités françaises considèrent que l’État aurait été condamné à prendre en charge entre […] et […]% de ce montant.

(121)

En outre, les autorités françaises considèrent que, du fait de son lien de dépendance avec la SNCM, et selon une autre jurisprudence française (82), la liquidation de l’entreprise aurait pu conduire le juge à ordonner le versement de dommages et intérêts aux salariés. Selon cette jurisprudence, les autorités françaises estiment qu’il serait plus que probable qu’un juge aurait fixé le montant des indemnités complémentaires sur la base des indemnités qui auraient été versées dans le cadre d’un plan social présenté antérieurement à la liquidation.

(122)

Appliquant la jurisprudence Aspocomp au cas d’espèce, la France considère que l’État aurait été amené à payer des indemnités complémentaires de licenciement pour un coût total compris entre […] et […] millions d’euros, ce qui aurait conduit in fine à un coût total de liquidation à charge de l’État compris entre […] et […] millions d’euros.

(123)

Selon cette approche, l’analyse des coûts effectifs qui auraient été mis à la charge de l’État actionnaire démontre que le coût pour l’État de la vente de la SNCM à un prix négatif de 158 millions d’euros est inférieur au coût effectif qu’il aurait dû supporter en cas de liquidation judiciaire de l’entreprise.

(124)

En conclusion, les autorités françaises considèrent que ce montant ne saurait être qualifié d’aide d’État.

7.2.2.   Sur l’apport en capital conjoint des actionnaires

(125)

La France considère que, au travers de cette prise de participation, elle s’est comportée comme un investisseur avisé car, d’une part, elle est intervenue de manière concomitante et minoritaire aux côtés de BCP et VT et, d’autre part, cette participation bénéficie d’une rémunération en capital fixe de […]% par an, ce qui exonère l’État du risque d’exécution du plan d’affaires. En effet, la France expose que ce taux de rentabilité est très satisfaisant pour un investisseur privé (83). Elle précise toutefois qu’aucune rémunération ne serait due en cas de redressement ou liquidation judiciaire de la SNCM ou de l’exercice de la clause résolutoire par les repreneurs.

7.2.3.   Sur les mesures sociales complémentaires (aide à la personne)

(126)

La France considère, en invoquant la pratique décisionnelle de la Commission, notamment dans le dossier SFP - Société française de production  (84), que ce financement constitue une aide à la personne qui ne bénéficie pas à l’entreprise. Dès lors, la mise en œuvre grâce à des fonds publics de mesures sociales supplémentaires en faveur des personnes licenciées, sans que ces mesures allègent l’employeur de ses charges normales, relèverait de la politique sociale des États membres et ne constituerait pas une aide d’État.

7.2.4.   Conclusion

(127)

Si la Commission devait toutefois qualifier d’aide d’État tout ou partie des nouvelles mesures, la France attire l’attention de la Commission sur le fait que les nouvelles mesures, en assurant le retour à la viabilité de la SNCM, permettraient le maintien d’un jeu concurrentiel sur les marchés en cause, notamment sur le marché de la desserte de la Corse. Cet élément, d’après la France, est un des principes des lignes directrices dans le sauvetage d’une entreprise en difficulté comme rappelé, dans le dossier présent, par la Commission (paragraphe 283 de sa décision annulée) et par le Tribunal dans son arrêt du 15 juin 2005. En particulier, ce dernier aurait rappelé que la Commission pouvait estimer, dans l’exercice de son large pouvoir d’appréciation, que la présence d’une entreprise était nécessaire pour prévenir l’émergence d’une structure oligopolistique renforcée des marchés en cause.

(128)

S’agissant de la détermination des contreparties éventuelles à imposer à la SNCM, la France suggère que la Commission tienne compte de la structure de marché. Ainsi, une réduction des capacités de la SNCM serait de nature à renforcer la position désormais dominante de CFF sur le marché de la desserte de la Corse (85).

(129)

D’après les autorités françaises, le plan de restructuration, tel qu’actualisé, serait conforme aux critères de compatibilité énoncés par la Commission dans ses lignes directrices de 1999 et de 2004. L’ensemble des mesures exposées dans le contexte de la privatisation de la SNCM permettrait également de rétablir dès fin 2009 la viabilité à long terme de la SNCM et serait limité au minimum nécessaire à ce retour à la viabilité.

7.3.   Sur la levée des restrictions posées par la décision annulée de 2003

(130)

Les autorités françaises rappellent, d’une part, que les conditions imposées par décision de 2003 ont été toutes mises en œuvre et respectées sur la période 2003-2006. D’autre part, les autorités françaises considèrent que ces mesures ne sont plus nécessaires à prévenir une distorsion de la concurrence et que leur maintien serait contraire au principe de proportionnalité eu égard à la limitation du montant des aides à la restructuration, désormais réduit à 15,81 millions d’euros. En particulier, les autorités françaises considèrent qu’il y a lieu de lever les conditions qui pourraient encore trouver application, à savoir celles portant sur l’interdiction de moderniser la flotte de la SNCM, sur le respect de principe du price leadership en matière tarifaire et sur le maintien d’un certain nombre de fréquences.

8.   OBSERVATIONS DES PARTIES INTERESSEES

8.1.   Sur la décision d’ouverture de la procédure formelle d’examen de 2002

8.1.1.   Observations de Corsica Ferries (CFF)

(131)

Contestant d’abord que la SNCM soit une entreprise en difficulté au sens des lignes directrices (86), CFF s’interroge sur la capacité de la SNCM à devenir rentable sur ses lignes non-subventionnées. CFF constate par ailleurs que, contrairement à ce qui est annoncé dans le plan de restructuration (87), Livourne est toujours desservi.

(132)

Sur la question de la réduction des coûts, CFF regrette de ne pas avoir accès à certains éléments du plan de restructuration au sujet duquel ses représentants ont émis des critiques (88).

(133)

CFF est d’avis que le calcul des autorités françaises aboutissant à la somme de 76 millions d’euros est purement fictif (89) alors que le ratio des capitaux propres sur les dettes financières de 79 % arrêté par les autorités françaises lui paraît exagéré (90). Pour ce qui concerne les participations de la SNCM, CFF note que certaines des filiales ne sont pas utiles aux activités de la compagnie maritime (91).

(134)

En conclusion, selon CFF, le projet d’aide vise à contourner le règlement cabotage et à vider de sens l’appel d’offres lancé pour la desserte de la Corse à partir de Marseille. CFF insiste pour que l’aide projetée n’aboutisse pas à permettre une offre commerciale plus agressive de la part de la SNCM. Elle suggère qu’une aide à la restructuration ne soit octroyée qu’en 2007 et seulement dans le cas où la SNCM perdrait le prochain appel d’offres en 2006, seul scénario selon elle qui mettrait véritablement la compagnie maritime publique en difficulté.

8.1.2.   Observations du groupe Stef-TFE  (92)

(135)

Le groupe Stef-TFE fait valoir que les participations de la SNCM dans la CMN doivent être analysées comme des actifs purement financiers. Selon le groupe Stef-TFE, la CMN et la SNCM sont indépendantes et en concurrence pour les lignes autres que celles au départ de Marseille, même si elles sont toutes les deux cocontractantes dans le cadre du contrat de délégation de service public.

(136)

La lettre indique que le groupe Stef-TFE s’engagerait «à racheter, tout ou partie, et de préférence la totalité des participations de la SNCM dans la CMN», dont il estime la valeur entre 15 et 17 millions d’euros, si la Commission devait estimer, dans les conditions qu’elle pourrait imposer dans sa décision finale qu’«une telle cession est nécessaire au bon équilibre du plan de restructuration».

8.1.3.   Observations de représentants de collectivités locales

(137)

Le maire de la ville de Marseille, le président du conseil général des Bouches-du-Rhône et le président du conseil régional Provence-Alpes-Côte d’Azur soulignent l’importance économique que joue la SNCM dans l’économie régionale.

(138)

Le président du conseil régional Provence-Alpes-Côte d’Azur ajoute que les conditions pour que le plan de restructuration de la SNCM garantisse la viabilité de l’entreprise lui apparaissaient réunies.

(139)

Le président du conseil exécutif de l’Assemblée de Corse a transmis une délibération de ladite assemblée en date du 18 décembre 2002 au cours de laquelle l’assemblée de Corse émettait «un avis favorable» au projet de recapitalisation de la SNCM.

8.1.4.   Observations de l’Office des Transports de Corse

(140)

L’Office des Transports de Corse (OTC) (93) souligne que l’appel d’offres lancé pour le contrat de délégation de service public n’a fait l’objet que d’une seule offre, à savoir celle du groupement CMN et SNCM. Soucieuse de maintenir une desserte fiable de qualité, la collectivité territoriale de Corse a inclus dans son contrat des mécanismes financiers de compensation ou de correction en fonction de l’efficacité et de la fiabilité des services. Enfin, il est rappelé que la collectivité territoriale de Corse a tenu compte de l’évolution de l’offre depuis 1996 sur les dessertes à partir des ports de la France continentale pour ne limiter les obligations de service public qu’aux seules dessertes à partir de Marseille.

(141)

L’OTC indique également que, la SNCM étant aujourd’hui la seule compagnie capable de remplir les exigences du contrat en ce qui concerne le trafic de passagers, sa disparition «entraînerait immédiatement une diminution importante des services». Il rappelle en outre le poids de la SNCM dans l’économie de la Corse.

8.2.   Sur la décision d’extension de procédure de 2006

8.2.1.   Observations de Corsica Ferries (CFF)

(142)

CFF souligne l’importance des montants financiers en question, leur caractère disproportionné par rapport au chiffre d’affaires de la SNCM et le fait qu’ils ont été versés à la SNCM avant que la Commission ne se prononce sur la qualification au titre de l’article 87, paragraphe 1, CE.

(143)

CFF attire l’attention de la Commission sur le fait que le soutien de l’État français à la SNCM revêt un caractère stratégique pour le développement de CFF. Ces mesures non autorisées permettraient à la SNCM d’avoir une politique tarifaire très agressive sur les lignes où CFF est positionnée depuis 10 ans et, où, pour la première fois depuis son implantation, elle perdrait des parts de marché.

(144)

CFF considère qu’il existe des voies alternatives à la présence de la SNCM sur toutes les lignes en cause, DSP et hors DSP, qui présenteraient de nombreux avantages tant pour la SNCM que pour la concurrence en général. S’agissant de la DSP (94), CFF estime que la SNCM devrait réduire son offre sur les dessertes opérées dans la cadre de la DSP afin d’empêcher qu’elle abuse de sa position dominante sur ce marché, afin d’éviter de nouveaux investissements et afin de mettre en place un plan social limité à 120 postes de travail saisonnier sans devoir supprimer des contrats à durée indéterminée, plus coûteux. Pour ce qui concerne les lignes hors DSP, CFF suggère le retrait par la SNCM d’un navire saisonnier.

8.2.1.1.   Sur la recapitalisation de 2002

(145)

S’agissant du montant de 53,48 millions d’euros, CFF s’interroge sur un éventuel double comptage dans le calcul de la compensation de 787 millions d’euros autorisée par la décision de la Commission de 2001.

(146)

CFF considère que, malgré le fait que la jurisprudence Altmark soit postérieure à la signature de la DSP, les compensations versées dans le cadre de celle-ci doivent être examinées à la lumière des critères établis par ladite jurisprudence. À ce sujet, CFF considère que, à l’exception du premier, les critères Altmark ne sont pas remplis.

(147)

S’agissant en particulier du quatrième critère Altmark, CFF partage les doutes de la Commission sur le fait que la SNCM puisse être considérée comme ayant été une entreprise bien gérée et adéquatement équipée. À cet égard, CFF attire l’attention de la Commission sur le fait que près de 50 % des pertes de la SNCM se seraient concentrées sur les années 2000 et 2001, ce qui laisserait penser que les pertes de la SNCM ne seraient pas imputables exclusivement aux obligations de service public.

(148)

Quant à la possibilité d’apprécier ce montant à la lumière de l’article 86, paragraphe 2, CE, CFF considère que le Tribunal aurait invité la Commission à une appréciation qui se limiterait à la qualification de ce montant comme aide et non pas à sa justification au titre dudit article. La Commission serait tenue à vérifier que ce montant ne soit pas excessif par rapport aux surcoûts engendrés par les obligations de service public.

8.2.1.2.   Sur les mesures postérieures à la recapitalisation de 2002

(149)

S’agissant du processus de mise en concurrence pour la cession de la compagnie, CFF considère qu’il n’a pas été complètement transparent dans la mesure où l’entreprise sélectionnée, à savoir BCP, n’est plus aux commandes opérationnelles de la SNCM, ayant cédé sa place au groupe VT. En outre, les conditions financières ayant évolué pour devenir beaucoup plus favorables aux acquéreurs, CFF s’interroge sur le principe d’égalité de traitement des investisseurs qui aurait dû présider à l’ensemble de l’opération.

(150)

Concernant le prix de cession négatif de 158 millions d’euros, CFF doute de l’application au cas d’espèce du critère de l’investisseur avisé en économie de marché. D’une part, CFF se demande si l’on peut considérer que l’opération en cause a été menée par l’État parallèlement à une intervention significative et concomitante des opérateurs privés concernés dans des conditions comparables alors que l’État a recapitalisé la compagnie avant la recapitalisation conjointe des actionnaires et le nouveau plan de restructuration. D’autre part, CFF considère que, face aux conditions financières graves de la SNCM, un investisseur avisé serait intervenu plus tôt pour ne pas laisser déprécier son investissement (95).

(151)

CFF estime que la référence à l’affaire «ABX Logistics» n’est pas pertinente. Outre le fait que les circonstances de cette affaire ne sont pas transposables au cas d’espèce, CFF souligne une contribution significative du bénéficiaire des aides dans cette affaire, ce qui ne serait manifestement pas le cas de la SNCM. Par ailleurs, selon CFF, la décision de la Commission de 2006 n’aurait pas tenu compte des coûts liés au risque d’actions judiciaires dans le cadre d’une liquidation de l’entreprise concernée. À ce sujet, CFF estime que la jurisprudence nationale invoquée par la France afin de justifier les coûts qui seraient liés à la liquidation de la SNCM n’est pas applicable au cas d’espèce (96).

(152)

CFF considère que l’application de la jurisprudence communautaire «Gröditzer» et «Hytasa» au cas d’espèce ne peut qu’amener à conclure que l’État ne se serait pas comporté en investisseur privé dans la mesure où, conformément à ladite jurisprudence, l’apport en capital de l’État a été lié à la vente de 75 % de sa participation dans la SNCM diminuant d’autant les perspectives de bénéfice en retour.

(153)

Enfin, CFF considère que la comparaison entre les coûts de liquidation et les coûts d’une recapitalisation devraient prendre en compte la valeur des actifs, qui est, dans les deux cas, transférée à l’acquéreur. CFF estime que la valeur de l’actif cédé aux repreneurs oscillerait entre 640 millions d’euros et 755 millions d’euros (97), compte tenu de la valeur vénale de la flotte utilisée par la SNCM que CFF évalue entre 644 et 664 millions d’euros en août 2006.

(154)

S’agissant de l’appréciation des mesures postérieures à la recapitalisation de 2002 comme aides à la restructuration, CFF estime que, si la SNCM remplit les conditions d’entreprise en difficulté des lignes directrices de 2004 dans la période précédent la première recapitalisation de 142,5 millions d’euros, cette qualification devient très contestable pour la période qui précède la seconde augmentation de capital de 8,75 millions d’euros dans la mesure où les fonds propres de l’entreprise ont été reconstitués.

(155)

S’agissant de la viabilité de l’entreprise, CFF souligne que la cession de la SNCM n’est que partielle et n’est pas irrévocable compte tenu des clauses résolutoires négociées avec les repreneurs. Ces éléments représentent d’importants éléments d’incertitude sur la volonté et la capacité des repreneurs à redresser la SNCM et partant hypothèquent les perspectives de viabilité durable de l’entreprise. En outre, CFF indique que, contrairement à ce qui est exigé par les lignes directrices de 2004, les autorités françaises n’ont pas envisagé l’abandon des activités qui resteraient structurellement déficitaires même après la restructuration (98). De surcroît, CFF exprime son scepticisme quant au plan de réduction des coûts alors même que la flotte de la SNCM se serait agrandie (99) et du plan de réduction des effectifs notamment à la lumière de l’échec du plan social de 2002.

(156)

CFF exprime ses doutes quant au fait que les nouvelles aides soient limitées au minimum en raison, d’une part, d’un manque de clarté sur ce que recouvrent les coûts sociaux et, d’autre part, du contenu du procès-verbal de l’Assemblée de la SNCM du 28 avril 2006 dont il ressort qu’une partie de ces aides auraient servi à couvrir les pertes d’exploitation de la compagnie en 2006 et en 2007. CFF considère également que les repreneurs de la SNCM ne contribuent pas de manière substantielle à la restructuration de l’entreprise.

(157)

Afin de prévenir des distorsions indues de la concurrence, CFF estime nécessaire de reconduire et de préciser les contreparties imposées à la SNCM en 2003 ainsi que d’en ajouter de nouvelles portant sur la réduction de la présence de la SNCM sur le marché (100). CFF estime en outre qu’une partie des mesures imposées à la SNCM par la décision de 2003 n’ont pas été respectées (101).

(158)

Sur la nature de la seconde recapitalisation de 8,75 millions d’euros, CFF estime que, outre la concomitance de l’investissement public et privé, l’intervention privée doit être significative et réalisée dans des conditions comparables de sorte que soit validée l’intervention de l’État. Dans le cas d’espèce, ces deux conditions ne seraient pas satisfaites. D’une part, la participation des repreneurs, strictement liée à la première augmentation de capital de 142,5 millions d’euros, ne serait pas significative. D’autre part, l’intervention des repreneurs n’aurait pas été effectuée à des conditions comparables à celles de l’État notamment du fait des clauses résolutoires et de la rentabilité attendue de la participation minoritaire de la CGMF.

(159)

S’agissant des mesures sociales d’un montant de 38,5 millions d’euros, CFF conteste la qualification de ce montant comme aide à la personne. En effet, s’il est vrai que ce montant bénéficie directement aux employés de la SNCM, CFF souligne que cette mesure pourrait générer des effets positifs indirects pour la SNCM, notamment en termes d’apaisement du climat social.

8.2.2.   Observations de STIM d’Orbigny (Groupe Stef-TFE)

8.2.2.1.   Sur la recapitalisation de 2002

(160)

La STIM souligne qu’au travers du versement d’un montant de 53,48 millions d’euros au titre de compensations de service public l’État aurait compensé la SNCM deux fois pour les mêmes obligations de service public. En outre, la STIM estime que ce versement ne remplit pas les critères établis par la jurisprudence Altmark.

(161)

S’agissant plus particulièrement des deuxième et quatrième critères Altmark, la STIM conteste, d’une part, l’existence de paramètres préalablement établis de façon objective et transparente et, d’autre part, la comparabilité des ratios de la SNCM et de la CMN sur la période 1991-2001 (102) et prétend, à cet égard, que les données fournies à la Commission ont été manifestement biaisées. (103).

8.2.2.2.   Sur les mesures postérieures à la recapitalisation de 2002

(162)

S’agissant du prix de cession négatif de 158 millions d’euros, la STIM estime que ce prix ne constitue pas un prix de marché issu d’une procédure de mise en concurrence ouverte et non discriminatoire car la recapitalisation est intervenue dans des conditions différentes de celles qui doivent normalement guider un investisseur privé. La STIM considère en effet que l’actif net comptable réévalué permettrait, dans la pire des hypothèses, une liquidation sans coûts pour l’État, voire dégageant une plus-value de liquidation, que le prix de cession est dérisoire par rapport à la valeur de l’entreprise (estimée par la STIM à 350 millions d’euros) et que l’aide est disproportionnée par rapport aux besoins de l’entreprise.

(163)

La STIM attire également l’attention de la Commission sur le caractère exorbitant de la clause résolutoire du transfert au secteur privé.

(164)

La STIM conteste enfin la justification de la vente à un prix négatif reposant sur l’hypothèse d’une liquidation socialement difficile, qui semble peu réaliste.

(165)

Concernant la seconde recapitalisation de 8,75 millions, la STIM considère que cet apport en capital ne respecte pas le principe de l’investisseur privé en économie de marché compte tenu de l’insuffisance des garanties de retour sur investissement. La STIM conteste l’argument tiré de la concomitance de l’investissement privé et public pour dénier à cet apport la qualité d’aide d’État. Une telle concomitance, pour autant qu’elle soit établie, ne constitue qu’un indice et ne saurait être à elle seule un critère de qualification (104). La STIM affirme enfin que cet apport constituerait une garantie donnée aux repreneurs par le gouvernement français que la SNCM serait bien attributaire de la DSP pour la desserte de la Corse.

(166)

S’agissant des 38,5 millions d’euros d’aides à la personne, la STIM estime que ce montant vise en réalité à donner les moyens à la SNCM de respecter certains aspects essentiels du plan de redressement soumis à la Commission qui n’ont pas été mis en œuvre, notamment la réduction des effectifs.

8.2.2.3.   Sur la compatibilité avec les lignes directrices 2004

(167)

La STIM est d’avis que les aides reçues par la SNCM ne sont pas limitées au minimum. La contribution de la SNCM et des repreneurs au plan de restructuration serait insuffisante au regard des conditions imposées dans les lignes directrices 2004 et il ne serait pas démontré que la situation de la SNCM eût été exceptionnelle au point de justifier une contribution propre moins élevée. En outre, la STIM souligne le caractère disproportionné des aides octroyées en 2006 dans la mesure où elles ont permis à la SNCM de constituer des réserves pour couvrir des pertes futures. Enfin, le fait que la SNCM n’ait pas prévu de céder les actifs non indispensables à la survie de l’entreprise serait contraire aux exigences posées par les lignes directrices 2004.

(168)

La STIM estime que les sommes versées l’ont été en violation du principe d’unicité établi par les lignes directrices de 2004. La dégradation de la situation financière de l’entreprise ainsi que les conflits sociaux ne sauraient s’analyser comme des circonstances exceptionnelles, imprévisibles et non imputables à l’entreprise bénéficiaire.

(169)

Partant, la STIM exige des compensations supplémentaires à hauteur de la moitié des aides apportées, soit 98,25 millions d’euros au travers de la cession d’un navire supplémentaire ainsi que de ses participations directes et indirectes de la SNCM dans la CMN. À cet égard, la STIM affirme que ces participations ne sont pas stratégiques aux termes des lignes directrices sur les aides à la restructuration car elles ne seraient pas «indispensables à la survie de l’entreprise» ni ne revêtiraient le caractère d’actif inaliénable.

(170)

La STIM fait également valoir que les prétendues synergies entre la SNCM et la CMN n’existent pas dans la mesure où la SNCM n’a aucun rôle effectif dans la gestion et le développement de la CMN. La STIM souligne enfin que le pacte d’actionnaire reliant les deux entreprises n’existe plus depuis le 15 mars 2006, date à laquelle il a été dénoncé par la CMN, ainsi que l’a constaté la Cour d’Appel de Paris.

8.2.3.   Observations de la SNCM

(171)

La SNCM a communiqué à la Commission un dossier faisant le point sur sa situation économique et concurrentielle, accompagné d’une consultation juridique appréciant, dans le cadre d’une procédure de liquidation, le risque d’une qualification judiciaire de l’intervention de l’État en tant que gestionnaire de fait de la compagnie pour la période précédant la privatisation.

(172)

Consulté par la SNCM, le cabinet […] arrive à la conclusion que, sur la base des documents sociaux de la société complétés par les correspondances, les interventions et les comptes-rendus des organes de contrôle, l’État français a […] (105)  (106)  (107). Le rapport souligne en outre que […] (108). Enfin, le même rapport fait état de ce que […].

(173)

Sur cette base, l’expert de la SNCM conclut qu’il est très probable que la qualité de gérant de fait de l’État français aurait été retenue par le tribunal de commerce de Marseille.

(174)

En outre, il ressortirait des faits, notamment établis par des rapports de la Cour des Comptes, que des fautes de gestion imputables à l’État français (109), dirigeant de fait de la SNCM, ont contribué à l’insuffisance d’actifs constatée de la SNCM. Le préjudice résultant des fautes de gestion de l’État s’élèverait à […].

(175)

Dans ce contexte, selon l’expert de la SNCM, la condamnation de l’État français à supporter tout ou partie de l’insuffisance d’actif dans le cadre d’une action en comblement de passif ne ferait donc aucun doute, compte tenu de l’implication très forte de l’État dans la gestion de la SNCM, de ses fautes de gestion manifestes et de l’étendue de ses ressources financières.

(176)

Sur la base de la jurisprudence pertinente, l’expert de la SNCM conclut que, si la SNCM avait été liquidée, l’État aurait très certainement été condamné à prendre à sa charge l’intégralité des dettes sociales de la SNCM. Ceci aurait conduit à mettre à la charge de l’État actionnaire une part estimée entre […] et […]% de l’insuffisance d’actifs constatée (soit entre […] et […] millions d’euros). En conséquence, en décidant de privatiser la SNCM tout en renforçant préalablement ses fonds propres pour un montant de 158 millions d’euros, l’État français se serait comporté comme un investisseur avisé.

9.   COMMENTAIRES DE LA FRANCE SUR LES OBSERVATIONS DES PARTIES INTERESSEES

9.1.   Commentaires de la France sur les observations des parties intéressées relatives à la décision d’ouverture de la procédure formelle d’examen de 2002

9.1.1.   Sur les observations de Corsica Ferries

(177)

Les autorités françaises ont indiqué que certaines des données présentées par CFF concernant l’offre de la SNCM sont inexactes.

(178)

L’État français estime, contrairement aux affirmations de CFF, que le plan de restructuration a été bâti de façon à permettre le rétablissement de la SNCM dans les meilleurs délais et à créer les conditions de sa viabilité à moyen et long termes. Les autorités françaises rappellent qu’une part importante du programme de réduction des coûts a déjà été mise en œuvre (110). En outre, la SNCM a provisionné, en 2001, 21,3 millions d’euros destinés au financement de mesures de restructuration, et particulièrement du plan de sauvegarde des emplois.

(179)

Concernant la détermination du montant de l’aide, les autorités françaises confirment qu’un ratio de capitaux propres sur endettement global de 0,79 est bien caractéristique des bilans propres à la plupart des compagnies maritimes, sauf situation particulière (111).

9.1.2.   Sur les observations de Stef-TFE

(180)

Les autorités françaises considèrent que la description que fait Stef-TFE des relations entre la SNCM et la CMN dans le cadre de l’exécution du contrat de service public ne correspond pas à la réalité.

(181)

Selon les autorités françaises, le choix de la formule du groupement momentané d’entreprise, dans lequel la SNCM et la CMN sont co-délégataires conjoints et non solidaires, n’a en rien «été rendu obligatoire par le caractère global de la consultation», contrairement aux observations de Stef-TFE. Le choix de constituer un groupement SNCM-CMN est le résultat d’une analyse faite par les deux compagnies, selon laquelle la poursuite sous cette forme de leur partenariat historique et naturel leur conférait les meilleurs atouts - notamment en termes de compétitivité - dans le cadre de l’appel d’offres. L’entrée de la CMN dans ce groupement a donc résulté d’un choix délibéré de sa part, fondé sur l’appréciation de ses propres intérêts, et non d’une obligation née de la forme de l’appel d’offres.

(182)

Les autorités françaises précisent que, contrairement aux observations de Stef-TFE, les deux compagnies SNCM et CMN ne sont ni indépendantes, ni en concurrence directe. Une telle situation serait en contradiction avec le principe même du contrat de délégation de service public unique dont elles sont cosignataires.

(183)

Les autorités françaises maintiennent que la participation de la SNCM dans le capital de la CMN ne peut pas s’analyser comme un actif purement financier, ainsi que semble l’affirmer Stef–TFE. La France défend la position que les participations de la SNCM dans la CMN revêtent un caractère hautement stratégique. Leur cession constituerait selon elle en effet non seulement un contresens industriel mais également une erreur stratégique majeure.

9.1.3.   Commentaires de la France sur les observations de représentants de collectivité locales

(184)

Si la France approuve globalement le contenu de la lettre du président de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur, elle tient néanmoins à indiquer que, contrairement à ce qui est affirmé au point 2 de ladite lettre (112), l’offre sur la desserte entre la France continentale et la Corse n’est pas «surdimensionnée par rapport à la demande» et que la politique tarifaire de la SNCM est conforme aux engagements qu’elle a pris de ne pas être à l’origine d’une guerre tarifaire et de ne pas être «price leader».

9.2.   Commentaires de la France sur les observations des parties intéressées relatives à la décision de 2006

(185)

De manière générale, la France note que bon nombre des observations de STIM et CFF sont identiques aux commentaires que ces sociétés avaient déjà formulés devant la Commission en 2003. En particulier, elles soulignent que les commentaires de CFF ont été présentés devant le Tribunal de première instance dans le cadre du recours en annulation de la décision de la Commission du 9 juillet 2003 et ont déjà, pour la plupart, été rejetés tant par la Commission que par le Tribunal.

(186)

Sur la DSP concernant les liaisons Marseille-Corse, la France conteste tout argument visant à indiquer que la procédure de passation de la convention de la DSP aurait été irrégulière. En outre, d’après la France, l’existence de ces procédures nationales devant des juges nationaux compétents en tant que juge communautaire de droit commun implique qu’il n’existerait pas d’intérêt communautaire pour la Commission à examiner les questions relatives à la procédure de passation de la convention de DSP.

9.2.1.   Sur la mise en exécution anticipée des mesures prévues par le premier plan de restructuration et ses modifications

(187)

À la remarque générale concernant la mise en œuvre anticipée des mesures qualifiables d’aides par la France, les autorités françaises répondent que ladite mise en œuvre se justifie par la particularité de la procédure, à savoir l’annulation en 2005 de la décision d’autorisation de la Commission du 9 juillet 2003, et non par la volonté des autorités françaises de méconnaître leurs obligations issues du traité CE. D’ailleurs, la France précise avoir toujours tenu la Commission informée de l’évolution du dossier et des différentes mesures adoptées depuis janvier 2005, en vertu du principe de coopération loyale entre les États membres et la Commission.

(188)

Concernant ces dernières mesures, les autorités françaises considèrent que puisqu’aucune d’entre elles ne constituent des aides, l’article 88, paragraphe 3, CE in fine ne leur serait pas applicable, et que, dès lors, il n’y aurait aucune obligation pour que leur exécution soit suspendue.

9.2.2.   Sur la recapitalisation de 2002

(189)

En premier lieu, les autorités françaises précisent n’avoir pas mis en doute l’applicabilité de l’arrêt Altmark tout en relevant, en revanche, certaines difficultés de mise en œuvre du test posé par cet arrêt, dans la mesure où le montant en cause lui était antérieur et n’avait donc pas pu tenir compte de ces nouveaux critères.

(190)

La France précise que les 53,48 millions d’euros en question font partie des 69,3 millions d’euros déclarés compatibles par la Commission en 2003. Les doutes exprimés par la Commission dans sa décision d’ouverture de 2006 ne concernent donc pas la compatibilité de ces mesures, qui n’est pas remise en cause, comme semble l’affirmer la STIM dans ses observations, mais portent sur la nature d’aide de ce montant octroyé au titre de compensation pour charges de service public.

(191)

D’après la France, les observations de CFF et de la STIM ne remettent pas en cause l’applicabilité au cas d’espèce de la première et de la seconde condition Altmark.

(192)

S’agissant du troisième critère Altmark, les autorités françaises réfutent l’argument avancé par CFF et la STIM selon lequel le versement de cette somme conduirait nécessairement à une surcompensation du fait que la Commission a autorisé, par sa décision du 30 octobre 2001, le versement de 787 millions d’euros au titre de contreparties pour charges de service public. À cet égard, la France précise que la Commission, dans sa décision de 2003, a en effet constaté que ces obligations avaient été sous compensées et que le montant de 53,48 millions d’euros était justifié en tant que compensation de service public.

(193)

Sur la quatrième condition Altmark, les autorités françaises soulignent, que, en dépit de l’absence d’entreprise de référence et donc de l’impossibilité d’établir une comparaison globale entre la SNCM et d’autres entreprises, comme constaté également par CFF, elles se sont efforcées de fournir des éléments permettant de faire une comparaison la plus précise possible avec des entreprises similaires, à savoir principalement la CMN. La France conteste également l’argument avancé par la STIM et CFF, selon lequel les charges de structure de la SNCM seraient plus lourdes que celles de la CMN. Même si tel devait être le cas, les autorités françaises considèrent que les ratios de productivité de la SNCM sont très proches de ceux de la CMN. En conclusion, la SNCM était aussi bien gérée que la CMN que la STIM ne qualifie à aucun moment d’entreprise mal gérée.

(194)

La France précise que les pertes subies entre 1991 et 2001 n’étaient pas imputables qu’à la DSP, comme semble vouloir l’affirmer CFF, mais que les obligations de service public avaient empêché la SNCM de s’adapter au changement du paysage concurrentiel. Les autorités françaises précisent également que ces pertes ne se sont pas concentrées sur la période 2000-2001 mais se sont accélérées sur cette période en raison de l’augmentation des rotations effectuées par CFF.

(195)

Concernant la compatibilité des 53,48 millions d’euros versés au titre de compensations de charges de service public en application de l’article 86, paragraphe 2, CE, les autorités françaises rappellent que, d’une part, dans sa décision de 2003, la Commission avait déjà déclaré la compatibilité de ce montant avec ledit article et que, d’autre part, le Tribunal ne l’a pas remise en question dans son arrêt du 15 juin 2005.

9.2.3.   Sur les mesures postérieures à la recapitalisation de 2002

(196)

S’agissant du processus de cession, la France précise qu’elle prévoyait dès son origine des critères de sélection classiques se fondant principalement sur le prix proposé pour la valorisation des titres de la SNCM et, à titre secondaire, sur d’autres paramètres (projet industriel, projet social, etc.), parmi lesquels le montant que les candidats étaient prêts à investir dans la société au titre d’une recapitalisation. La France conteste fermement l’argument avancé par les tiers, selon lequel le processus de mise en vente n’aurait pas été transparent et rappelle que, dans le cas d’espèce, l’État est même allé au-delà de ses obligations légales et réglementaires, déjà fortes et contraignantes, prévues en cas de cession de participations publiques. La France rappelle que l’évolution faisant à la suite de l’offre de BCP de reprendre 100 % des titres de la SNCM s’est déroulée dans un contexte financier et social très difficile et que l’association de VT à l’offre de BCP n’a pas changé les termes commerciaux et financiers de l’opération (hors répartition du capital).

(197)

En ce qui concerne le prix négatif de 158 millions d’euros, les autorités françaises rappellent que, compte tenu de la situation financière de la SNCM au 30 septembre 2005, l’entreprise a été vendue à un prix de marché et que la vente a été économiquement plus avantageuse qu’une liquidation de l’entreprise. À cet égard, les autorités françaises précisent que l’application du critère de l’investisseur privé au cas d’une cession d’entreprise proche de la liquidation ne doit pas être considérée comme la recherche de la «rentabilité de l’intervention publique», mais comme la prévention de pertes plus importantes qu’aurait à subir l’actionnaire au travers d’une liquidation plus coûteuse.

(198)

S’agissant du prix payé, la France conteste l’argument selon lequel la SNCM aurait été cédée à un prix ne correspondant pas à sa valeur réelle (113).

(199)

Les autorités françaises réfutent également l’argument de CFF d’avoir sous-estimé la valeur vénale de la flotte de la SNCM, que CFF chiffrerait entre 406,5 millions d’euros et 426,5 millions d’euros. Les autorités françaises exposent que les navires pris en compte dans le calcul de CFF ne correspondent pas à ceux détenus en propre par la SNCM au 30 septembre 2005. L’absence de décotes appliquées à la valeur vénale des navires ne tiendrait pas compte du contexte dans lequel se serait déroulée une éventuelle liquidation judiciaire de ces actifs et enfin, la date retenue pour calculer cette valeur vénale, à savoir août 2006, n’est pas la date de liquidation potentielle de la SNCM à laquelle il convient de se référer, cette date étant celle du 30 septembre 2005. D’ailleurs, la France note que, si le calcul proposé par CFF devait être retenu, le prix négatif serait trois fois moins élevé que la valeur de liquidation des actifs requise par la jurisprudence Gröditzer, ce qui serait donc plus favorable que les hypothèses présentées à la Commission par les autorités françaises.

(200)

À l’argument avancé par CFF remettant en cause l’application de la jurisprudence Gröditzer en se référant au fait que l’apport en capital de l’État dans la SNCM a été lié à la vente de 75 % de sa participation, diminuant d’autant les perspectives de bénéfice en retour, les autorités françaises rappellent que le prix de cession négatif de 158 millions d’euros correspond bien à la cession de la totalité du capital de la SNCM, suivie d’un nouvel investissement par l’État à hauteur de 25 % bénéficiant d’un retour de […] % par an. Dès lors, la France considère que le retour sur l’investissement reste garanti du fait de sa participation dans l’actionnariat de la compagnie à hauteur de 25 % dans la mesure où cette participation bénéficie d’une garantie de retour très élevé.

(201)

La France conteste également l’argument avancé par CFF sur la non-applicabilité au cas d’espèce de l’approche ABX, reposant notamment sur l’analyse des coûts de liquidation effectifs de la SNCM et sur le risque que l’État aurait pu être considéré responsable du passif de l’entreprise au titre d’une action en comblement de passif telle que prévue par les procédures collectives françaises et confirmée par la jurisprudence nationale (arrêt de la Cour d’appel de Rouen du 22 mars 2005). Bien que les autorités françaises estiment que leur comportement en tant que gestionnaire de la SNCM ne saurait être qualifié de «fautif» au titre de cette action, elles insistent sur l’existence d’un risque très élevé de condamnation de l’État par un juge national pour l’insuffisance d’actifs de la SNCM en raison des critères souples de qualification de la faute de gestion au sens de l’article L.651-2 du code de commerce et en vertu de la jurisprudence précitée qui serait transposable au cas d’espèce.

(202)

S’agissant de la recapitalisation de 8,75 millions d’euros, la France rappelle que, contrairement aux affirmations de CFF et STIM, cet apport en capital ne constitue pas une aide d’État en raison de la concomitance de cet investissement, la similitude des conditions de sa souscription et la rémunération supérieure à la moyenne obtenue par l’État via la CGMF.

(203)

En particulier, les autorités françaises précisent que le principe d’égalité des investisseurs ne serait pas remis en cause par l’existence des clauses résolutoires dans la mesure où ces dernières ont été prévues dans le cadre de la cession de 100 % de la SNCM et non dans le cadre de la recapitalisation de 35 millions d’euros qui a suivi celle-ci.

(204)

En outre, la France rappelle que son investissement est bien inférieur à celui des repreneurs dans la mesure où ce n’est que le montant de 8,75 millions d’euros qui est à comparer avec l’investissement effectué par les repreneurs (26,25 millions d’euros). En effet, l’examen de la première recapitalisation de 142,5 millions d’euros ne devrait être fait que dans le cadre de la comparaison avec le prix de liquidation.

(205)

Enfin, la France conteste l’argument avancé par la STIM concernant le fait que cet apport constituerait une garantie donnée aux repreneurs privés que la SNCM serait bien attributaire de la DSP pour la desserte de la Corse. Les autorités françaises font valoir que cette augmentation de capital est avisée et indépendante de la performance de l’entreprise et que l’attribution de la DSP à la SNCM ne permettrait pas d’améliorer le rendement attendu de cet investissement.

(206)

Concernant les 38,5 millions d’euros de mesures sociales, la France réitère l’argument selon lequel ces mesures sont des aides à la personne et que leur prise en charge par l’État ne peut être considérée comme fournissant un avantage indirect à l’entreprise dans la mesure où celles-ci viennent en supplément des obligations légales et conventionnelles à la charge de la SNCM. En outre, la France rappelle que ces mesures ne permettraient pas le départ de salariés qui resteraient, en leur absence, à la charge de la SNCM.

(207)

Contrairement à l’argument avancé par CFF, les autorités françaises précisent que les 38,5 millions d’euros ne correspondent pas à la mise en œuvre des réductions d’effectifs prévues dans le cadre du plan social de 2003 car ces réductions ont, malgré le retard, déjà été mises en œuvre. Le nouveau plan social vient donc en complément des premières mesures sociales de 2003.

9.2.4.   Sur la compatibilité avec les lignes directrices

(208)

La France considère que, à la lumière de ce qui précède, le montant d’aide à apprécier à la lumière des lignes directrice est de 15,81 millions d’euros.

(209)

Contrairement aux affirmations de CFF, les autorités françaises considèrent que, eu égard au point 11 des lignes directrices de 2004, la première recapitalisation, tout en ayant permis à la SNCM de reconstituer ses fonds propres, ne lui a pas fait perdre son caractère d’entreprise en difficulté dans la mesure où cette recapitalisation a eu pour but d’assurer le maintien de l’activité de la société.

(210)

La France réfute les allégations de CFF selon lesquelles elle n’aurait pas dû effectuer de nouvelles injections financières dans l’entreprise étant donné que la SNCM aurait pu avoir recours au crédit bancaire. À cet égard, les autorités françaises rappellent que, le 24 août 2005, les banques avaient refusé l’octroi de nouvelles lignes de trésorerie en faveur de la SNCM et que, dès lors, les seules alternatives envisageables étaient la privatisation ou la liquidation de l’entreprise.

(211)

La France conteste les arguments avancés par CFF et STIM concernant l’échec du plan de restructuration de 2002 qui, malgré un certain retard, a été mis en œuvre et a permis d’atteindre les objectifs en 2005. La dégradation de la situation économique et financière de la SNCM due à des facteurs exogènes à l’entreprise même aurait ensuite rendu nécessaire le prolongement du plan notifié en 2002 et l’introduction de nouvelles mesures.

(212)

La France estime que la SNCM a de bonnes perspectives de redressement et que les mesures envisagées par les nouveaux actionnaires, notamment la mise en œuvre du plan social, le redressement des dessertes et le renouvellement de certains navires, permettront le retour à la viabilité de l’entreprise. À cet égard, la France observe qu’en raison des revenus tirés de la DSP (environ […] du chiffre d’affaires de la SNCM) et compte tenu de l’importance des coûts fixes et des difficultés de redéploiement des 6 navires utilisés sur la desserte Marseille-Corse, la DSP constitue un élément essentiel de la stratégie de l’entreprise et de sa viabilité.

(213)

Sur la limitation de l’aide au minimum, la France estime avoir limité au strict minimum les coûts de restructuration nécessaire pour permettre la réalisation de la restructuration. À cet effet, les autorités françaises rappellent que, comme la Commission l’a reconnu dans sa décision de 2003, l’entreprise a elle-même contribué suffisamment au plan de restructuration sur ses propres ressources en raison de la cession d’actifs pour un montant de 30,2 millions d’euros. De surcroît, compte tenu d’autres cessions réalisées par la SNCM pour un montant de 12,2 millions d’euros, le total de contributions propres de l’entreprise se chiffrerait à 42,4 millions d’euros. La France estime que ce montant est largement supérieur au montant de contributions propres nécessaires pour approuver des aides à la restructuration, qui se chiffreraient finalement à 15,81 millions d’euros dans la mesure où les autres mesures ne seraient pas des aides d’État.

9.2.5.   Sur les conditions imposées par décision de la Commission de 2003 et sur les éventuelles nouvelles contreparties

(214)

Contrairement aux allégations de la STIM et CFF, les autorités françaises affirment avoir respecté toutes les conditions imposées par la décision de 2003, auxquelles elles étaient tenues jusqu’à fin 2006, en particulier le maintien de la flotte à 11 navires et l’application de tarifs inférieurs à ceux de ses concurrents.

(215)

D’ailleurs, la France considère que, dans le cadre de la nouvelle décision finale, le niveau de contreparties à imposer à la SNCM devrait être adapté dans la mesure où le montant d’aides à la restructuration serait désormais de 15,81 millions d’euros au lieu de 69,3 millions d’euros.

(216)

À cet égard, la France conteste les observations de la STIM concernant la possibilité que la Commission impose à la SNCM comme contrepartie la cession de sa participation dans la CMN. La France conteste l’argument avancé par la STIM, selon lequel la définition d’actifs stratégiques aurait été remise en cause dans les lignes directrices de 2004 par rapport à celles de 1999.

(217)

S’agissant des mesures évoquées par CFF visant à réduire la présence de la SNCM sur le marché, les autorités françaises rappellent que, comme l’aurait relevé, par ailleurs, la Commission dans sa décision de 2003 (point 87), les marchés concernés (France — Corse- et Maghreb) ne sont pas en surcapacité et qu’une reconfiguration des lignes desservant la Corse sous et hors DSP remettrait en péril la viabilité de l’entreprise.

(218)

Quant à l’argument soulevé par CFF selon lequel la mise en œuvre au bénéfice de la SNCM des mesures décrites ci-dessus emporterait un risque sérieux de faire disparaître du marché France continentale-Corse son principal concurrent, à savoir CFF, les autorités françaises font valoir que, eu égard à la configuration actuelle de ce marché sur lequel CFF est désormais majoritaire, le maintien d’une structure concurrentielle dépend de l’autorisation du plan de restructuration de la SNCM et de la présence de cette dernière sur le marché en cause.

10.   APPRECIATION DES MESURES

(219)

L’article 87, paragraphe 1, CE prévoit que, «sauf dérogations prévues par le présent traité, sont incompatibles avec le marché commun, dans la mesure où elles affectent les échanges entre États membres, les aides accordées par les États ou au moyen de ressources d’État sous quelque forme que ce soit qui faussent ou qui menacent de fausser la concurrence en favorisant certaines entreprises ou certaines productions».

(220)

La qualification d’une mesure nationale en tant qu’aide d’État au sens de l’article 87, paragraphe 1, CE suppose que les conditions cumulatives suivantes soient remplies, à savoir que: 1) la mesure en cause confère un avantage économique sélectif; 2) cet avantage soit financé au moyen de ressources d’État; 3) cet avantage fausse ou menace de fausser la concurrence et, enfin; 4) cet avantage affecte les échanges entre États membres (114).

(221)

La Commission constate que la SNCM a reçu des ressources étatiques pour un montant total de 274,54 millions d’euros via la CGMF détenue à 100 % par l’État français.

(222)

La SNCM opérant dans le secteur du transport maritime, ouvert à la concurrence intra européenne, l’avantage économique potentiel qu’elle a perçu est susceptible de fausser la concurrence et d’affecter les échanges entre les États membres.

(223)

La circonstance que le marché du cabotage avec les îles de la Méditerranée était, jusqu’au 1er janvier 1999, temporairement exempté de l’application du règlement (CEE) no 3577/92 du Conseil du 7 décembre 1992 concernant l’application du principe de libre prestation des services aux transports maritimes à l’intérieur des États membres (cabotage maritime) (115) ne permet pas d’exclure a priori que les subventions versées pour la desserte des liaisons de cabotage avec les îles de la Méditerranée dans le cadre de la DSP aient pu affecter les échanges entre États membres et fausser la concurrence.

(224)

En tout état de cause, même si des subventions octroyées pour la desserte de lignes en cabotage pouvaient ne pas affecter les échanges et ne pas comporter de distorsions de concurrence avant le 1er janvier 1999, la situation a changé depuis cette date, puisque, conformément au règlement (CEE) no 3577/92, les activités de cabotage sont désormais ouvertes à l’ensemble des opérateurs communautaires. De surcroît, il est à souligner que la SNCM n’exerce pas uniquement du transport de cabotage mais opère également sur le marché du transport maritime international, qui a été libéralisé par le règlement (CEE) no 4055/86 du Conseil du 22 décembre 1986 portant application du principe de la libre prestation des services aux transport maritimes entre États membres et entre États membres et pays tiers (116).

(225)

Dès lors, la Commission considère qu’en l’espèce les trois derniers critères de l’article 87, paragraphe 1, CE cités au point 220 de la présente décision sont remplis. Les sections suivantes examinent successivement pour chaque mesure l’existence d’un avantage économique sélectif et, le cas échéant, la compatibilité avec le marché commun des mesures qualifiées d’aide d’État.

10.1.   L’apport en capital de 53,48 millions d’euros au titre de compensation de service public

(226)

Bien que, dans sa décision de 2003, la Commission ait reconnu la nature de compensation de service public d’une partie de ces 76 millions d’euros, à savoir 53,48 millions d’euros, pour la desserte de la Corse entre 1991 et 2001, la Commission avait apprécié l’entièreté de l’apport en capital, soit 76 millions d’euros, au titre des aides à la restructuration dans la mesure où ce montant avait été notifié par les autorités françaises à ce titre. Dans son arrêt du 15 juin 2005 qui a annulé la décision de la Commission de 2003, le juge communautaire a invité la Commission à examiner le montant de 53,48 millions d’euros à la lumière de l’arrêt de la Cour du 24 juillet 2003 dans l’affaire Altmark.

(227)

En outre, les autorités françaises ont prié la Commission de considérer que, en raison de sa nature de «compensation de service public», une partie de l’aide à la restructuration de 2002 soit considérée comme ne constituant pas une aide à la lumière de la jurisprudence Altmark.

(228)

Les autorités françaises ayant invoqué l’application à l’espèce de la jurisprudence Altmark et, le cas échéant, de la dérogation prévue par l’article 86, paragraphe 2, CE, la Commission est tenue de se prononcer à cet égard, ces arguments revêtant une importance essentielle dans l’argumentation de la France (117).

10.1.1.   Remarques préliminaires

(229)

À titre liminaire, la Commission rappelle qu’en dépit du fait que le prononcé de l’arrêt Altmark soit postérieur à la mise en œuvre de la mesure susmentionnée, les critères établis par le juge communautaire dans cet arrêt sont applicables au cas d’espèce.

(230)

En effet, comme l’a récemment rappelé le Tribunal (118), la Cour n’a pas limité, dans le temps, la portée des énonciations faites dans l’arrêt Altmark. En l’absence d’une telle limitation temporelle, ces énonciations résultant d’une interprétation de l’article 87, paragraphe 1, CE sont dès lors pleinement applicables à la situation factuelle et juridique de la présente affaire.

(231)

Il convient tout d’abord de noter que la SNCM a subi des déficits substantiels entre 1991 et 2001, pour l’ensemble des dessertes de la Corse soumises à obligation de service public, en dépit des subventions de l’État autorisées par la décision de la Commission de 2001 (119). La Commission a en effet constaté au point 105 de cette décision que la perte cumulée avant impôt pour la période 1991-1999 pour la desserte de la Corse (120), telle qu’elle est déterminée dans le rapport de l’expert mandaté par la Commission, et y compris les subventions reçues, s’élevait à 217 millions de francs français, soit 33,08 millions d’euros.

(232)

Pour ce qui concerne les années 2000 et 2001 (121), la Commission a suivi la même approche que le rapport d’expertise précité et a recalculé, à partir des comptes de résultat analytiques fournis, le résultat avant impôt en soustrayant les provisions pour restructuration qui sont déjà comptées dans les frais de restructuration tels que notifiés. Par ailleurs, la Commission a pu vérifier, d’après les comptes annuels de l’entreprise, qu’il n’y a pas eu de cession de matériel naval pendant ces deux années.

(233)

La Commission est d’avis que la perte de l’année 2002 sur la desserte Marseille-Corse ne saurait être retenue, compte tenu du fait que, depuis le 1er janvier 2002, les tarifs d’exploitation pour la desserte de la Corse à partir de Marseille et les montants de la compensation financière ont été définis entre les autorités publiques et la SNCM de manière contractuelle, contrairement à ce qui a prévalu pour les conventions de 1991 et 1996.

(234)

Dès lors, conformément à l’approche et à la motivation de la décision de 2001, la Commission arrive aux conclusions suivantes:

Tableau 3

Compte de résultat analytique sur la période 1991-2001

Réseau Corse

2001

2000

1991-1999 (122)

Total 1991-2001

Millions de FRF

Millions d’euros

Millions de FRF

Millions d’euros

Millions de FRF

Millions d’euros

Millions de FRF

Millions d’euros

Résultat avant impôt

– 302,575

–46,127

–40,256

–6,137

– 216,98

–33,078

– 559,811

–85,343

Dotations provisions/dépréciation Liamone (123)

96,895

14,771

0,000

0,000

0,000

0,000

96,895

14,771

Dotations provisions/Plan Social

112,110

17,091

0,000

0,000

0,000

0,000

112,110

17,091

Correction plus-value (PV) sur navires

0,000

0,000

0,000

0,000

182,100

27,761

182,100

27,761

Résultat avant impôt et hors PV et hors restructuration

–93,571

–14,265

–40,256

–6,137

– 216,980

–33,078

– 350,807

–53,480

(235)

Au total, la perte cumulée enregistrée par la SNCM sur la desserte Marseille-Corse en sus des subventions de l’État autorisées par la décision de 2001 et corrigée des plus-values sur navires vendus pendant cette période et des frais de restructuration, s’élève à 53,48 millions d’euros pour l’ensemble de la période 1991-2001.

(236)

À la lumière de ce qui précède, la Commission considère que, de l’apport en capital de 76 millions d’euros notifiée en 2002 (124), 53,48 millions d’euros peuvent être évalués en tant que compensation de service public.

10.1.2.   Existence d’un avantage économique à la lumière de la jurisprudence Altmark

(237)

Selon la Cour, dans la mesure où une intervention étatique doit être considérée comme une compensation représentant la contrepartie des prestations effectuées par l’entreprise bénéficiaire pour exécuter des obligations de service public, de sorte que cette entreprise ne profite pas, en réalité, d’un avantage financier et que ladite intervention n’a donc pas pour effet de mettre cette entreprise dans une position concurrentielle plus favorable par rapport aux entreprises qui lui font concurrence, une telle intervention ne tombe pas sous le coup de l’article 87, paragraphe 1, CE.

(238)

Cependant, pour qu’une telle compensation puisse échapper à la qualification d’aide d’État, un certain nombre de conditions cumulatives doivent être réunies (voir note de bas de page 68 de la présente décision).

(239)

S’agissant en particulier du quatrième critère dégagé par la Cour dans l’arrêt Altmark, il y a lieu de constater que la SNCM n’a pas été choisie à l’issue d’une procédure de marché public permettant de sélectionner le candidat capable de fournir ces services au moindre coût pour la collectivité.

(240)

En l’absence de procédure de marché public, la Commission considère qu’il incombe à l’État membre de démontrer que le niveau de la compensation versée à la SNCM ne dépasse pas les coûts encourus par une entreprise moyenne, bien gérée et adéquatement équipée, en tenant compte des recettes y relatives ainsi que d’un bénéfice raisonnable pour l’exécution de ces obligations, conformément aux exigences de la jurisprudence de la Cour.

(241)

En l’espèce, les autorités françaises reconnaissent elles-mêmes dans leur écritures du 16 novembre 2006 qu’il est en pratique impossible de trouver une entreprise qui pourrait servir de point de référence pour cette période 1991-2001 du fait des obligations de service public pesant sur la SNCM, cette dernière étant la seule entreprise capable d’assumer ces obligations. Dans ces circonstances, les autorités françaises se sont efforcées de fournir des éléments permettant de faire une comparaison la plus précise possible avec des entreprises similaires, notamment avec la CMN, en soulignant toutefois que ces entreprises ne se trouvaient pas dans les mêmes conditions d’exploitation que celles imposées à la SNCM par les conventions d’obligation de service public entre 1991 et 2001.

(242)

À cet égard, la Commission considère que, au vu de l’argumentation des autorités françaises, ces dernières n’ont pas démontré en quoi les entreprises jugées par elles-mêmes similaires constituaient le point de référence tel qu’exigé par la jurisprudence communautaire. Dans ce contexte, la Commission relève que les données transmises par la France concernant ces entreprises ne lui permettent pas d’évaluer le degré de similarité invoqué ni d’analyser l’impact des différences de conditions d’exploitation alléguées sur la comparaison qui devrait être effectuée aux fins de l’application du quatrième critère susmentionné.

(243)

Dans ces circonstances, la Commission considère que, sur la base des informations et des données transmises par les autorités françaises dans le cadre de la présente procédure, celles-ci restent à défaut d’établir que le quatrième critère Altmark est rempli.

(244)

Eu égard aux développements qui précèdent, la Commission estime que la mesure en cause a conféré un avantage économique à la SNCM. Étant donné que la mesure n’a bénéficié qu’à la SNCM, cet avantage économique est sélectif. Partant, la compensation accordée à la SNCM dans le cadre des conventions de 1991 et 1996 pour un montant de 53,48 millions d’euros constitue une aide d’État, au sens de l’article 87, paragraphe 1, CE.

10.1.3.   Compatibilité avec le marché commun de la mesure en cause au titre de l’article 86, paragraphe 2, CE

(245)

Les autorités françaises ayant invoqué la dérogation prévue à l’article 86, paragraphe 2, CE, la Commission utilisera la même approche et la même motivation que celles de la décision de 2001 pour évaluer la mesure en cause.

(246)

À l’aune de cet article, le versement d’une aide d’État est susceptible d’échapper à l’interdiction de l’article 87 du traité CE, à condition que l’aide en question ne vise qu’à compenser les surcoûts engendrés par l’accomplissement de la mission particulière incombant à l’entreprise chargée de la gestion d’un service d’intérêt économique général et que l’octroi de l’aide s’avère nécessaire pour que ladite entreprise puisse assurer ses obligations de service public dans des conditions d’équilibre économique.

(247)

Compte tenu de la jurisprudence applicable à la période 1991-2001 (125), la Commission doit, comme elle l’a fait dans sa décision de 2001:

vérifier que les services dont la gestion a été confiée à la SNCM rentrent dans la qualification de service d’intérêt économique général, et

examiner l’adéquation du montant des subventions octroyées à la SNCM dans le cadre des obligations de service public liées à la desserte maritime de la Corse aux surcoûts supportés par la SNCM pour satisfaire aux exigences fondamentales du contrat de service public.

(248)

Dans le cas d’espèce, s’agissant des compensations versées sur la période 1991-2001, comme la Commission l’a constaté dans sa décision de 2001, les obligations de service public imposées à la SNCM et à la CMN résultent de deux conventions quinquennales signées par ces dernières et l’Office de transport de la Corse (OTC). Ces conventions, dont la base juridique est la convention-cadre 1976-2001, ont précisé les modalités d’exécution du service public respectivement pour les périodes 1991-1996 et 1996-2001. Elles ont également défini les principes de versement de la subvention forfaitaire prélevée sur la dotation de continuité territoriale en contrepartie des obligations imposées.

(249)

Quant à la question de savoir si ces obligations répondent à un besoin réel de service public, la Commission a constaté dans sa décision de 2001 précitée que la convention-cadre et les conventions quinquennales répondent au principe de la continuité territoriale qui vise à limiter les désavantages que représente l’insularité et à assurer la desserte de la Corse selon des modalités aussi proches que possible de liaisons purement continentales. La Commission note également que cet objectif, qui relève d’un intérêt public légitime n’a pas été atteint historiquement par le simple jeu des forces du marché (126).

(250)

Partant, la Commission considère que le système de desserte prévu par la convention-cadre et les conventions quinquennales répondent à un besoin réel de service public.

(251)

Comme la Commission l’a constaté dans sa décision de 2001, la SNCM a reçu sur la période 1991-2001 en vertu du cadre légal décrit ci-dessus une subvention annuelle forfaitaire dont le montant était fixé pour cinq ans et révisé chaque année en fonction de l’évolution du produit intérieur brut marchand, ainsi que des informations et des comptes analytiques conventionnels présentés par la SNCM.

(252)

Au point 30 de sa décision de 2001, la Commission prend note du fait qu’«aux termes de l’article 4 de la convention de 1976 (127), le montant de la subvention annuelle est versé sous forme de douze acomptes mensuels égaux. Afin de permettre la liquidation définitive de la subvention, la SNCM doit présenter, le 1er juillet de chaque année au plus tard, ses résultats pour l’exercice précédent visés par le contrôleur d’État. Les reversements éventuels à la charge de la SNCM sont déduits du ou des acomptes de l’exercice en cours. Le dispositif pour la régularisation des acomptes prévoit aussi des compléments éventuels versés par l’État. Les conventions conclues par la suite prévoient également des pénalités si, au cours d’une année, le nombre de liaisons de base non réalisées par la SNCM dépasse 2 % du nombre de liaisons de base prévues dans la convention. L’autorité concédante peut aussi notifier à la SNCM une retenue sur la dotation forfaitaire de continuité territoriale dans le cas d’incidents significatifs entraînant l’interruption du service public».

(253)

Au point 82 de cette même décision, la Commission indique que la deuxième partie de ce point IV stipule que «dans l’hypothèse où les conditions économiques et en particulier, les charges d’exploitation et les niveaux de trafics ayant servi de base au calcul de la subvention, se dégraderaient de façon substantielle, la SNCM et l’OTC se rapprocheront pour étudier ensemble les mesures à mettre en œuvre en matière de desserte, de tarifs ou d’ajustement à la hausse du montant de la dotation en vue de rétablir l’équilibre financier de la compagnie».

(254)

À la lumière de ce qui précède, et comme elle l’a conclu dans sa décision de 2001, la Commission considère que la compensation de 53,48 millions d’euros versée par l’État n’est pas forfaitaire en raison du mécanisme permettant de combler le déséquilibre financier résultant de la discordance entre les charges d’exploitation réelles et les charges ayant servi de base au calcul de la subvention.

(255)

Comme la Commission l’a constaté dans sa décision de 2001 (128), les compensations financières reçues à l’époque en application des conventions quinquennales de 1991 et 1996 n’ont pas permis à la SNCM de combler complètement les pertes liées aux obligations de services publics. La Commission a estimé que cette sous-compensation s’élevait à 53,48 millions d’euros.

(256)

La Commission conclut que le montant de 53,48 millions d’euros versé par l’État est égal à la sous-compensation observée pour la période 1991-2001 et est par conséquent adéquat eu égard aux coûts nets engendrés par la mission de service public dont la SNCM fait l’objet.

10.1.4.   Conclusion

(257)

Sur la base de ce qui précède, la Commission estime que la mesure en cause constitue une aide d’État, compatible avec le marché commun au titre de l’article 86, paragraphe 2, CE. La mesure ayant été mise en œuvre le 14 novembre 2003, la Commission constate que cette aide d’État est illégale.

(258)

Dans ce contexte, le montant d’aide à considérer comme aide à la restructuration au titre de la notification de 2002 s’élève à 22,52 millions d’euros (129). Ce montant viendra s’ajouter aux mesures notifiées en 2006 dans la mesure où celles-ci comporteraient des aides à la restructuration (voir section 10.5 de la présente décision).

10.2.   La cession de la SNCM à un prix de vente négatif de 158 millions d’euros

(259)

En l’espèce, la Commission doit examiner si l’apport en capital de l’État de 158 millions d’euros préalable à la cession de la SNCM aux repreneurs privés, c’est-à-dire in fine le prix de vente négatif de l’entreprise pour un montant équivalent, est exempt d’éléments d’aide d’État.

(260)

Une procédure publique de sélection ouverte, transparente et non discriminatoire au terme de laquelle l’État cède l’entreprise après une recapitalisation préalable (pour un montant supérieur au prix de vente) ne permet pas nécessairement d’exclure la présence d’une aide, susceptible de bénéficier à la fois à l’entreprise privatisée et à son acheteur (130).

10.2.1.   Cadre juridique de référence

(261)

Afin de vérifier si une entreprise a bénéficié d’un avantage économique induit par un apport en capital de l’État, la Commission applique, en principe, le critère de l’ «investisseur privé opérant dans une économie de marché» (ci-après «le critère de l’investisseur privé»). Le critère de l’investisseur privé est une émanation du principe d’égalité de traitement entre les secteurs public et privé qui découle de l’article 295 du traité CE. Selon ce principe, les capitaux mis à la disposition d’une entreprise par l’État, directement ou indirectement, dans des circonstances qui correspondent aux conditions normales du marché, ne sauraient être qualifiés d’aides d’État (131).

(262)

À cette fin, la Commission peut notamment évaluer si le pourvoyeur des ressources s’est comporté comme un investisseur privé poursuivant une politique structurelle, globale ou sectorielle, et guidé par des perspectives de rentabilité à long terme des capitaux investis. La validité de cette approche a été reconnue par le juge communautaire dans le cadre de plusieurs affaires (132).

(263)

Selon une jurisprudence constante, un apport en capital réalisé par un investisseur public en l’absence de toute perspective de profit, même à long terme, constitue une aide d’État (133).

(264)

Le juge communautaire a également établi qu’un investisseur privé poursuivant une politique structurelle, globale ou sectorielle guidée par des perspectives de rentabilité à long terme ne saurait raisonnablement se permettre, après des années de pertes ininterrompues, de procéder à un apport en capital qui, en termes économiques, non seulement s’avère plus coûteux qu’une liquidation des actifs, mais est en outre lié à la vente de l’entreprise, ce qui lui enlève toute perspective de bénéfice, même à terme (134).

(265)

Plus précisément, dans son arrêt «Gröditzer», la Cour a jugé que, en vue de déterminer si la privatisation d’une entreprise pour un prix de vente négatif comportait des éléments d’aide d’État: «il y a lieu d’apprécier si, dans des circonstances similaires, un investisseur privé d’une taille qui puisse être comparée à celle des organismes gérant le secteur public aurait pu être amené à procéder à des apports de capitaux de cette importance dans le cadre de la vente de ladite entreprise ou aurait opté pour la liquidation de celle-ci»  (135).

10.2.2.   Application au cas d’espèce

(266)

À la lumière de ce qui précède, afin de déterminer la nature d’aide de la mesure en cause, la Commission doit «évaluer si la solution choisie par l’État est, dans l’absolu, et par rapport à toute autre solution y compris celle de la non-intervention, la moins coûteuse, ce qui conduirait, si tel était le cas, à la conclusion que l’État a agi comme un investisseur privé»  (136).

10.2.2.1.   Du respect du principe de l’actionnaire privé en économie de marché

(267)

Dans ce contexte, il y a lieu de noter que les grands groupes d’entreprises ne sauraient actuellement, lorsqu’ils procèdent à des fermetures de sites ou à des liquidations de filiales, se désintéresser des conséquences sociales que de telles fermetures ou liquidations impliquent.

(268)

Ainsi mettent-ils le plus souvent en œuvre des plans sociaux qui peuvent inclure des mesures de reconversion du personnel, des aides à la recherche d’emploi, des indemnités de licenciement, voire des actions sur le tissu économique local, qui vont au-delà de ce que la loi et les conventions collectives imposent.

(269)

En l’espèce, la Commission constate que la SNCM est une société contrôlée par l’État au travers du groupe CGMF (Compagnie Maritime Générale et Financière).

(270)

La Commission estime que, dans l’hypothèse d’une liquidation de la SNCM (137), de telles mesures auraient été mises en place en sus des obligations légales dans le but de ne pas ternir l’image de marque du holding d’appartenance et de son actionnaire ultime (138).

(271)

La Commission rappelle que le spectre de la liquidation de l’entreprise en 2004 a provoqué des troubles sociaux nombreux et importants. Le conflit social musclé de septembre 2004 a par exemple bloqué la flotte de la SNCM durant 16 jours. La Commission ajoute que les autorités françaises ont démontré sur base chiffrée que ces mouvements sociaux de 2004, en ternissant l’image de marque du holding d’appartenance auprès de la clientèle, ont porté un préjudice important au nombre de passagers transportés par la SNCM et, partant, au chiffre d’affaires de l’entreprise. La Commission souligne en outre qu’en conséquence du climat social délétère de l’été 2004 ayant porté préjudice à la situation financière de la SNCM, l’actionnaire de l’entreprise a mis en place au printemps 2005 un plan social, suspendu en avril 2005, en concertation avec les syndicats. Sur la base de ce qui précède, la Commission considère qu’il est avéré que, dans l’hypothèse d’une liquidation de la SNCM, l’absence de prise en charge, par le groupe CGMF, des indemnités complémentaires de licenciement aurait très certainement nui à l’image de marque du holding d’appartenance et de son actionnaire ultime.

(272)

Partant, la Commission estime que les coûts associés à ces mesures doivent être inclus dans le calcul des coûts d’une liquidation. Lesdits coûts auraient alors été imputés sur la valeur de liquidation de la SNCM pour autant que celle-ci eût été positive et/ou pris en charge directement par la CGMF/l’État en tant qu’actionnaire. La Commission considère que toute autre solution ignorerait la réalité sociale à laquelle les grands groupes d’entreprises sont aujourd’hui confrontés (139).

(273)

Afin de quantifier le coût d’une liquidation pour l’actionnaire, la Commission retient une hypothèse a minima correspondant aux seules indemnités complémentaires de licenciement.

(274)

À cet égard, les autorités françaises considèrent que, sur la base du plan social de 2005, fondé lui-même sur le plan social de 2002, la fourchette à retenir est de […] à […] euros par salarié, soit un montant total entre […] millions d’euros et […] millions d’euros. Les autorités françaises précisent que la borne basse de la fourchette pré-citée appréhende le fait que le coût du plan social de référence est majoré en raison de la proportion très importante de salariés approchant l’âge de la retraite et dont le départ s’effectue dans des conditions particulièrement avantageuses. Par ailleurs, il est également tenu compte du fait que le contexte de liquidation de la société et de licenciement de l’ensemble du personnel n’est pas comparable à celui d’un ajustement des effectifs permettant une poursuite des activités comme c’est le cas du plan social de référence.

(275)

L’expert de la Commission a procédé à une analyse comparée des chiffres avancés par les autorités françaises avec des plans sociaux mis en œuvre en France récemment. Le plan social de Hewlett Packard en 2003 a coûté 214 000 euros par personne et en 2005 entre 50 000 et 400 000 euros. En 2004, le plan social mis en place par Péchiney, après la fusion avec Alcan, a coûté 128 000 euros par personne. Lors du plan social de Giat Industries en 2004, le coût total par salarié était de l’ordre de 162 000 euros contre 71 000 euros pour Gemplus en 2002 et 69 000 euros pour Danone (activités biscuits) en 2001. En 2002, Yves Saint Laurent Haute Couture annonce un plan social à 115 000 euros par salarié. Le plan Power 8 annoncé par Airbus France en février 2007 prévoyait un coût par salarié de 68 000 euros (140). En 2008, le coût du plan social de Michelin s’élève à 157 400 euros par salarié.

(276)

S’agissant des dockers, la Commission précise que la Cour des Comptes, dans son rapport thématique public de juillet 2006 «Les ports français face aux mutations du transport maritime: l’urgence de l’action» rappelle le coût total par personne du plan social 2004, à savoir 145 000 euros par départ pour les ports autonomes et 209 000 euros par départ du port de Marseille.

(277)

La Commission rappelle que sa décision du 17 juillet 2002 relative à la Société Française de Production permet d’illustrer le coût de la générosité dans un cas de privatisation d’entreprise en difficulté. Ainsi, la générosité a eu un coût pour l’État de 43,1 millions d’euros (soit 151 000 euros par salarié, le plan prévoyant le départ de 285 salariés) qui s’ajoute au coût de 5,3 millions d’euros des obligations légales et conventionnelles (soit au total un coût de 169 000 euros par salarié).

(278)

À la lumière de cette analyse comparée, la Commission considère que l’hypothèse de […] euros versés à chaque employé au titre d’indemnités complémentaires de licenciement est cohérente avec le coût par employé licencié de plans sociaux mis en œuvre par des actionnaires privés à la même période.

(279)

Enfin, la Commission estime que l’hypothèse de licenciement de l’ensemble du personnel de la SNCM dans le cadre d’une liquidation de l’entreprise est l’hypothèse la plus probable, notamment parce que l’octroi de la DSP pour la période 2007-2013 n’avait pas encore fait l’objet d’un appel d’offres et, partant, d’une décision définitive. En outre, au vu de la situation financière préoccupante de la SNCM, il est en effet improbable qu’un plan de continuation de l’activité eût été élaboré de sorte que l’entreprise soit placée en redressement judiciaire et que des licenciements pussent être évités.

(280)

À la lumière des éléments ci-dessus, la Commission retient le montant total de […] millions d’euros que la CGMF (l’État) aurait dû consacrer aux indemnités complémentaires de licenciement.

(281)

À ce stade de l’analyse, la Commission doit déterminer la valeur de liquidation de la SNCM hors indemnités complémentaires de licenciement. C’est en effet la différence entre cette valeur de liquidation, pour autant qu’elle soit positive, et les indemnités complémentaires de licenciement qui doit être comparée au prix négatif résultant de la vente afin de vérifier si l’État s’est comporté comme un investisseur privé en économie de marché. Pour ce faire, la Commission se fonde sur le calcul de l’actif net réévalué. Selon la méthode l’actif net réévalué, l’insuffisance d’actifs est constatée lorsque la valeur économique des actifs réels (généralement supérieure à la valeur nette comptable) ne couvre pas la valeur économique des dettes réelles.

(282)

Aux fins de constater l’insuffisance d’actifs dans le cas d’espèce, la Commission, à l’aide de son expert (141), a vérifié comme expliqué ci-après qu’en date du 30 septembre 2005 la valeur de l’actif de la SNCM n’était pas suffisante pour désintéresser les créanciers privilégiés et les créanciers non privilégiés (en ce compris les salariés au titre des créances classiques).

(283)

La Commission estime que la valorisation de l’actif net est une méthode couramment utilisée pour valoriser des sociétés dans le secteur du transport maritime. Elle juge par ailleurs que cette méthode est particulièrement adaptée à la situation de la SNCM dans la mesure où son actionnaire de référence n’a comme choix alternatif à la cession que de déposer le bilan de la société qui serait mise en liquidation.

(284)

S’agissant d’autres méthodes de valorisation, en particulier de la méthode des cash flows libres opérationnels actualisés, la Commission estime que, compte tenu du fait qu’elle suppose la poursuite de l’activité de la société, ce qui n’est pas le cas de la SNCM, elle n’est pas pertinente pour le cas d’espèce.

(285)

La Commission retient la date du 30 septembre 2005 comme date de référence pour l’évaluation de la SNCM étant donné qu’il s’agit de la date à laquelle a été effectivement opéré le choix entre l’acceptation de l’offre de reprise ou la liquidation de la société, la sélection de BCP ayant été décidée le 27 septembre 2005.

(286)

La Commission observe en particulier que l’actionnaire de la SNCM a procédé, en collaboration avec le cabinet Ernst & Young, à une quantification du coût de liquidation de l’entreprise (le rapport CGMF précité) au 30 septembre 2005 qui a été contre-expertisée par Oddo Corporate Finance et le cabinet Paul Hastings. La Commission rappelle que le rapport Oddo-Hastings précité a valorisé l’actif de la SNCM à […] millions d’euros.

(287)

S’agissant de la valorisation de la flotte en détention propre (142), la valeur vénale brute des navires de la SNCM ayant été évaluée par le courtier spécialisé BRS à […] millions d’euros au 30 septembre 2005, la flotte de la SNCM a été valorisée par le rapport Oddo à […] millions d’euros après décote (143), commission de courtage (144) et aléa judiciaire (145).

Tableau 4

Scénarios de valorisation de l’actif de la SNCM au 30 septembre 2005

(en millions EUR)

 

Valeur de l’actif

rapport Oddo

Valeur de l’actif

expert Commission

Immobilisation incorporelle

Immobilisations corporelles

 

 

Flotte en détention propre

[…]

[…]

Immeubles (146)

[…]

[…]

Immobilisations financières (147)

[…]

[…]

Actif immobilisé

[…]

[…]

Stocks

Avances et acomptes

Créances clients

[…]

[…]

Autres créances (148)

[…]

[…]

Trésorerie nette

[…]

Comptes de régularisation

Autres actifs

[…]

[…]

Total actifs

[…]

[…]

Sources: rapport Oddo-Hastings, rapport de l’expert de la Commission

(288)

À la lecture du tableau ci-dessus, la Commission constate que la flotte de navires constitue l’élément principal de la valorisation de l’actif de l’entreprise. À cet égard, l’expert de la Commission a jugé, après avoir effectué lorsque cela était possible une analyse comparée, que la décote appliquée à la valeur vénale brute des navires et l’aléa judiciaire étaient cohérents. Sur cette base, il a conclu ne pas avoir d’arguments pour rejeter l’évaluation de la valeur de la flotte établie par l’État français.

(289)

S’agissant de la décote, la Commission estime que son niveau est cohérent avec les décotes observées lors de ventes de navires en cas de liquidation judiciaire. Selon l’expert de la Commission, la Régie des Transports Maritimes, société nationale belge exploitant la ligne Ostende-Ramsgate, a par exemple cédé deux car ferries en 1997 avec des décotes estimées à 35 % et 45 %. Plus récemment, la société Festival Cruises a cédé trois navires de croisière avec une décote moyenne de 20 %. Les décotes observées dans des cas similaires sont donc de l’ordre des décotes appliquées par les autorités françaises dans le cas d’espèce.

(290)

Sur l’aléa judiciaire, aucune transaction comparable n’ayant eu lieu sur le marché, la Commission considère que les arguments justifiant l’application de l’aléa judiciaire sont cohérents avec l’étroitesse du marché pour des navires typés, conçus pour une exploitation assez spécifique.

(291)

La Commission note par ailleurs que son expert indépendant a revu à la hausse la valorisation des immobilisations financières, en particulier celle de la participation de la SNCM dans la CMN (de […] millions d’euros à […] millions d’euros). À cet égard, compte tenu de l’offre de rachat de cette participation par Stef-TFE à […] millions d’euros transmise à la Commission dans le cadre de la présente instruction, la Commission considère que la valorisation de la participation de la SNCM dans la CMN à […] millions d’euros est raisonnable dans un contexte de liquidation de société.

(292)

S’agissant de la valorisation des autres postes de l’actif, l’expert de la Commission n’a pas émis d’objection particulière. Il n’a toutefois pas retenu le poste «trésorerie nette», celui-ci étant en déficit. La Commission estime qu’effectivement ce poste doit être reclassé au passif de la SNCM.

(293)

Compte tenu des ajustements opérés, la Commission valorise l’actif de la SNCM à […] millions d’euros au 30 septembre 2005.

(294)

La Commission constate que les autorités françaises quantifient le montant dû au titre des créances privilégiées à […] millions d’euros et à […] millions d’euros le montant dû au titre des créances non privilégiées (hors indemnités complémentaires de licenciement).

(295)

S’agissant en particulier du passif social, les autorités françaises évaluent le coût du plan social conventionnel à […] millions d’euros. Les coûts afférents au plan social conventionnel ont été établis sur une base individuelle tenant compte du type de contrat (contrat à durée indéterminée — CDI et contrat à durée déterminée — CDD), des statuts et conventions collectives applicables (personnel naviguant, sédentaire et État-major), de l’ancienneté, du classement et de la rémunération de chaque salarié. Ce montant couvre les indemnités de préavis ([…] millions d’euros), les indemnités de congés payés sur préavis ([…] millions d’euros), les indemnités conventionnelles de licenciement ([…] millions d’euros) et la contribution Delalande ([…] millions d’euros) (149).

(296)

Le coût du plan social extra-conventionnel est évalué par les autorités françaises à […] millions d’euros. Ce plan social regroupe l’ensemble des mesures d’accompagnement liées aux obligations légales et réglementaires de la SNCM en matière de licenciement (150) et des coûts indirects liés au plan social conventionnel (151).

(297)

Le coût de résiliation des principaux contrats d’exploitation porte essentiellement sur la mise en jeu de la caution bancaire d’un montant de […] millions d’euros donnée en garantie de la bonne exécution par la SNCM de ses obligations de service public, à laquelle s’ajouterait la pénalité prévue à ladite convention, égale à […] % de la compensation financière de référence d’un montant de […] millions d’euros pour l’année 2005, soit environ […] millions d’euros en cas de défaillance du délégataire.

(298)

En ce qui concerne le passif net lié à la cession des navires en crédit-bail (152), les autorités françaises soulignent que, sur la base de certaines hypothèses (153), le produit net de cession est évalué, par le courtier spécialisé BRS, à […] millions d’euros au 30 septembre 2005 après décote, commission de courtage et coût financier de portage. Les économies d’impôt et dettes bancaires s’élevant à […] millions d’euros, il subsiste un solde de dettes bancaires relatives aux navires en crédit-bail à rembourser de […] millions d’euros.

Tableau 5

Scénarios de valorisation du passif de la SNCM au 30 septembre 2005

(en millions EUR)

 

Valeur du passif

rapport Oddo

Valeur du passif

expert Commission

Dettes privilégiées dont:

 

 

Dettes sociales et fiscales

[…]

[…]

Dettes financières garanties par des actifs (154)

[…]

[…]

Coût du plan social conventionnel

[…]

[…]

Coût des mutuelles des retraités (155)

[…]

[…]

Coût du processus de liquidation

[…]

[…]

Pertes d’exploitation intercalaires (156)

[…]

[…]

Désintéressement des créanciers privilégiés

[…]

[…]

Dettes chirographaires (157)

[…]

[…]

Coût du plan social extra-conventionnel

[…]

[…]

Coût de résiliation des principaux contrats d’exploitation

[…]

[…]

Coût additionnel lié à la cession des navires en crédit-bail

[…]

[…]

Désintéressement des créanciers non privilégiés

[…]

[…]

Sources: rapport Oddo-Hastings, rapport de l’expert de la Commission

(299)

La Commission note que le passif social constitue l’élément principal du passif de la SNCM. S’agissant du passif social privilégié, c’est-à-dire le coût plan social conventionnel, l’expert de la Commission a vérifié les formules de calcul de toutes les composantes du plan sur la base de sondages et n’a constaté ni anomalie, ni erreur. Compte tenu de cette vérification, la Commission estime raisonnable le montant de […] millions d’euros avancés par les autorités françaises au titre du plan social conventionnel.

(300)

S’agissant des pertes d’exploitation intercalaires, la Commission estime que l’estimation est prudente au regard de la législation, en particulier les articles L.622-10 du Code du commerce et 119-2 du décret no 85-1388 du 27 décembre 1985 en vertu desquels la SNCM serait susceptible d’être obligée par le Tribunal de commerce compétent à poursuivre son exploitation pour une durée de deux mois renouvelable à la demande du ministère public en raison de ses obligations de service public.

(301)

Pour ce qui concerne les dettes chirographaires, l’expert de la Commission n’a pas émis d’objection particulière. Il a toutefois corrigé le montant de […] millions d’euros du montant de […] millions d’euros issu du retraitement du poste d’actif «Trésorerie nette». La Commission estime que ce retraitement est en ligne avec les modifications opérées dans la valorisation de l’actif de la SNCM.

(302)

S’agissant du coût du plan social extra-conventionnel (hors indemnités complémentaires de licenciement), l’expert de la Commission estime que le chiffrage du coût des contentieux juridiques devrait être ramené à […] millions d’euros au lieu des […] millions avancés par les autorités françaises. Sur ce point, si la Commission considère qu’il est certain que les organisations syndicales demanderaient une requalification des contrats CDD en contrats CDI (158), elle considère par contre que le chiffrage ne doit concerner que les salariés en CDD pour lesquels ce risque est quasiment certain (soit […] CDD). Considérant un salaire mensuel brut de […] euros avec une indemnité de 9 mois de salaire pour les […] premiers CDD et 6 mois pour les […] suivants, le montant s’établit à […] millions d’euros.

(303)

En ce qui concerne le passif net lié à la cession des navires en crédit-bail, la Commission considère que les hypothèses sous-jacentes au calcul sont justifiées notamment en raison du formalisme contractuel des GIE, qui limite toute substitution de tiers à la SNCM et conditionne les avantages fiscaux à l’exploitation des navires sous pavillon français. Il est par ailleurs également justifié que l’aléa judiciaire ne s’applique pas dans le cadre des navires exploités en crédit-bail car ces navires sont cédés par les banques créditrices des GIE. Dans ce contexte, la Commission estime qu’il est justifié qu’un coût financier de portage soit pris en compte entre le 30 septembre 2005 et la date de cession effective du navire.

(304)

Eu égard à ce qui précède, la Commission estime qu’au 30 septembre 2005 le passif privilégié de la SNCM s’élève à […] millions d’euros et le passif non privilégié de la SNCM à […] millions d’euros.

(305)

À la lumière de ce qui précède, la Commission estime qu’en date du 30 septembre 2005 la valeur de l’actif de la SNCM (soit […] millions d’euros) n’était pas suffisante pour désintéresser les créanciers privilégiés (soit […] millions d’euros) et les créanciers non privilégiés (soit […] millions d’euros).

(306)

Dans un tel contexte, en l’absence d’action en comblement de passif (voir infra), et compte tenu du point 273 de la présente décision et de l’insuffisance d’actifs, le coût d’une liquidation de la SNCM par la CGMF se limiterait aux coûts des indemnités complémentaires de licenciement, soit […] millions d’euros.

(307)

Il s’ensuit que le choix fait par les autorités françaises de céder la SNCM à un prix négatif de 158 millions d’euros à comparer au coût minimum de liquidation de […] millions d’euros peut être considéré comme conforme au choix qu’aurait fait un groupe privé d’entreprises en économie de marché.

10.2.2.2.   Des conséquences d’une liquidation judiciaire de la SNCM

(308)

La Commission a également examiné l’argument des autorités françaises selon lequel l’État, en tant qu’actionnaire majoritaire, pourrait être appelé en comblement de passif en cas de liquidation de l’entreprise (voir infra). Dans ce cas, selon les autorités françaises, le calcul du coût de liquidation pour l’État actionnaire doit tenir compte du droit national comme la Commission l’a admis dans sa décision ABX Logistics (159) et doit s’apprécier au cas par cas, en tenant compte des particularités du secteur (160) et des circonstances de l’espèce.

(309)

En l’espèce, la Commission prend note que les autorités françaises lui ont remis le 28 mars 2006 des documents attestant de ce que l’actionnaire de la SNCM avait procédé à la recherche de la solution la moins coûteuse pour lui en examinant en parallèle et dès le début deux pistes, à savoir la liquidation de l’entreprise et sa vente à un prix négatif.

(310)

Sur la base des expertises pré-citées transmises à la Commission, les autorités françaises estiment que l’ensemble des coûts réels qu’aurait eu à supporter en tant qu’actionnaire la République française, au travers de la CGMF, s’élèverait entre […] et […] millions d’euros au 30 septembre 2005. Cette estimation tient notamment compte du risque que l’État français eût été appelé en «comblement de passif» si un tribunal avait dû le considérer comme dirigeant de fait de la SNCM et du risque que l’État soit condamné à payer des indemnités complémentaires de licenciement au personnel licencié. Les autorités françaises estiment que ces risques se doivent d’être retenus dans le calcul du coût effectif d’une éventuelle liquidation de la SNCM.

(311)

Dès lors se pose la question de l’évaluation de l’ensemble des coûts réels qu’aurait probablement eu à supporter en tant qu’actionnaire la France en cas de liquidation judiciaire de la SNCM afin de déterminer si, au vu des possibilités d’être condamné à supporter ces coûts et au vu de l’ampleur de ceux-ci (161), un actionnaire privé avisé aurait préféré vendre immédiatement sa filiale à un prix négatif de 158 millions d’euros plutôt que de courir ce risque.

a)   D’une possible condamnation de l’État en comblement de passif

(312)

En droit français, le mandataire liquidateur d’une société en liquidation judiciaire a la faculté d’initier une action en responsabilité à l’encontre des anciens dirigeants de la société, dite «action en comblement de passif», en cas de résolution d’un plan de sauvegarde ou de redressement judiciaire ainsi qu’en cas de liquidation judiciaire (162).

(313)

L’introduction d’une action en comblement de passif à l’encontre des anciens dirigeants de la société en faillite est motivée par la nécessité de reconstituer le patrimoine de la société, qui est l’une des missions confiées au mandataire liquidateur.

(314)

Dans plusieurs courriers à la Commission, les autorités françaises ont soutenu que l’hypothèse d’une condamnation de l’État par un juge national à combler le passif de l’entreprise qu’il dirige constituait un scénario plus que plausible et qu’elle se devait d’être retenue dans le calcul du coût effectif d’une éventuelle liquidation de la SNCM.

(315)

Dans ses écritures du 28 février 2008, la SNCM a fourni un rapport d’experts évaluant les conséquences juridiques d’une action en comblement de passif opposable à l’État français. Ce rapport conclut qu’un tribunal de commerce saisi de cette affaire aurait retenu très probablement la responsabilité de l’État de ce chef et l’aurait condamné à prendre à sa charge l’intégralité des dettes sociales de la SNCM.

(316)

En l’espèce, la Commission est d’avis que, au vu de l’insuffisance d’actifs constatée à la SNCM (voir supra) et compte tenu de l’engagement possible de la responsabilité civile du mandataire liquidateur en cas d’inaction sous l’empire de la loi de 1985 et du droit d’action pour les créanciers depuis 2005, une action en comblement de passif aurait très probablement été engagée à l’encontre de l’État français dans l’hypothèse d’une liquidation judiciaire de la SNCM (163).

(317)

La législation pertinente prévoit que les dettes sociales de la société en liquidation peuvent être mises à la charge de ses anciens dirigeants de droit ou de fait sous réserve de la réunion cumulative de quatre conditions.

i)   La reconnaissance de l’État en tant que dirigeant de droit ou de fait de l’entreprise en liquidation judiciaire  (164)

(318)

En l’espèce, la Commission note que l’expert de la SNCM a fourni une analyse détaillée menant à la conclusion que l’État français aurait très probablement été qualifié de gestionnaire de fait de la SNCM. En substance, le rapport d’expertise susmentionné a démontré, conformément à la jurisprudence pertinente (165), que l’État avait commis des actes positifs de gestion et de direction qui ne relevaient manifestement pas des contrôles administratifs instaurés par la loi et ce sur une longue période. En particulier, selon le rapport de l’expert de la SNCM, l’État aurait pris des décisions dans le cadre de pouvoirs de contrôle qu’il avait lui-même instaurés, détournant ainsi ses pouvoirs de contrôle pour prendre des décisions pour le compte de l’entreprise en lieu et place des dirigeants auxquels revenait le pouvoir de prendre lesdites décisions. En outre, il apparaîtrait que les organes dirigeants de la SNCM ne disposaient dans les faits d’aucune indépendance vis-à-vis de l’État dans la gestion de l’entreprise. Enfin, l’État se serait substitué aux organes dirigeants de la SNCM en prenant seul des décisions stratégiques sans en informer lesdits dirigeants.

(319)

La Commission constate que les autorités françaises, dans leurs écritures du 28 mars 2008, n’ont pas émis de réserves quant à la qualification de l’État français de gestionnaire de fait de la SNCM. Dans leur courrier du 20 novembre 2006, les autorités françaises indiquent elles-mêmes que le juge ne manquerait pas de qualifier l’État actionnaire de la SNCM en tant que dirigeant de fait de l’entreprise. Toutefois, il est évident que une telle déclaration, rendue dans le cadre d’une procédure en matière d’aides d’État, ne peut pas en soi suffire pour établir à suffisance de droit si un juge aurait considéré les autorités nationales comme dirigeants de fait de l’entreprise bénéficiaire des mesures en question et, surtout, le degré de probabilité d’une telle éventualité.

(320)

Dans les circonstances de l’espèce, il n’est pas nécessaire pour la Commission de se prononcer davantage sur l’appréciation des éléments invoqués par les autorités françaises, compte tenu de la conclusion à laquelle la Commission est parvenue à la section 10.2.2.1 ci-dessus.

ii)   L’existence d’une ou de plusieurs fautes de gestion dans le chef de l’État français, dirigeant de fait de l’entreprise en liquidation judiciaire

(321)

En l’espèce, la Commission relève que le rapport de l’expert de la SNCM a, sur la base d’une liste non exhaustive d’éléments factuels, mentionné une série d’éléments afin de démontrer que l’État, dirigeant de fait de la SNCM, a commis des fautes de gestion.

(322)

En particulier, il est indiqué que l’État français aurait commis des fautes en matière d’investissements […]. L’État aurait également commis de nombreuses fautes de gestion en matière de […].

(323)

À cet égard, […] (166). Dans leur courrier du 30 avril 2007, les autorités françaises ont qualifié de très élevé le risque d’une condamnation de l’État en responsabilité compte tenu des critères […] de qualification de la faute de gestion au sens de l’article L. 651-2 du code de commerce. Toutefois, il est évident qu’une telle déclaration, faite dans le cadre d’une procédure en matière d’aides d’État, ne peut pas suffire en soi pour établir à suffisance de droit si un juge aurait considéré que les autorités nationales ont commis les fautes alléguées et, surtout, le degré de probabilité d’une telle éventualité.

iii)   La constatation d’une insuffisance d’actifs

(324)

Dans le cas d’espèce, la Commission constate que, dans leur courrier du 16 novembre 2006, les autorités françaises ont fourni une évaluation de l’insuffisance d’actifs de la SNCM sur la base des rapports d’experts de la CGMF et d’Oddo-Hastings précités. La Commission prend note que l’expertise de la SNCM sur l’action en comblement de passif transmise à la Commission en février 2008 repose sur ces mêmes rapports pour constater l’existence d’une insuffisance d’actifs en cas de liquidation judiciaire de l’entreprise. En particulier, le rapport Oddo-Hastings relève une insuffisance d’actifs à hauteur de […] millions d’euros au 30 septembre 2005, calculée comme la différence entre, d’une part, la valeur de l’actif de la SNCM ([…] millions d’euros) et, d’autre part, la valeur du passif de l’entreprise (dettes privilégiées et non privilégiées évaluées respectivement à […] millions d’euros et à […] millions d’euros).

(325)

La Commission relève qu’en vertu de la législation française précitée, une insuffisance d’actifs est constatée dès lors que le mandataire liquidateur de la société ne dispose pas d’actifs suffisants pour désintéresser les créanciers qu’ils soient privilégiés ou non. S’agissant plus particulièrement des créances sociales de l’entreprise, le passif social de l’entreprise est a minima constitué des créances salariales classiques, c’est-à-dire celles qui trouvent leur source directement dans le contrat de travail, la convention collective ou la loi et qui sont automatiquement inscrites par le mandataire liquidateur au passif de l’entreprise (167).

(326)

La Commission a précédemment estimé l’insuffisance d’actifs de la SNCM à […] millions d’euros au 30 septembre 2005.

iv)   L’existence d’un lien de causalité entre les fautes et l’insuffisance d’actif constatée

(327)

Selon les autorités françaises, en droit français, le demandeur à l’action en comblement de passif n’a pas à déterminer le montant de l’aggravation du passif générée par la faute de gestion du dirigeant. Le dirigeant d’une personne morale peut être déclaré responsable, sur le fondement de l’article L. 624-3 du Code de commerce, même si la faute de gestion qu’il a commise n’est que l’une des causes de l’insuffisance d’actifs et peut être condamné à supporter en totalité ou partie les dettes sociales, même si sa faute n’est à l’origine que d’une partie d’entre elles (168).

(328)

En l’espèce, la Commission prend note que l’expert de la SNCM qualifie de patent le lien entre les fautes de gestion et l’insuffisance d’actifs constatée. Sur la base des estimations présentées par ledit expert, le préjudice financier résultant de la liste non exhaustive des fautes de gestion de l’État relevées au point 322 de la présente décision s’élèverait à […] millions d’euros (169).

(329)

Les autorités françaises […] (170).

(330)

En outre, la Commission constate que les autorités françaises, dans leurs écritures du 16 novembre 2006, du 27 avril 2007 et du 28 mars 2008, […] (171). Les autorités françaises […] (172). Les autorités françaises ont elles-mêmes admis, dans leur courrier du 16 novembre 2005, qu’«il était clair que l’État actionnaire, que le juge ne manquerait pas de désigner dirigeant de fait de la SNCM, société à responsabilité limitée, serait probablement condamné en vertu de l’article L651-2 du Code de commerce à supporter l’intégralité de l’insuffisance d’actifs de la SNCM».

(331)

Dans les circonstances de l’espèce, il n’est pas nécessaire pour la Commission de se prononcer davantage sur l’appréciation des éléments invoqués par les autorités françaises, compte tenu de la conclusion à laquelle la Commission est parvenue à la section 10.2.2.1 ci-dessus.

b)   De l’estimation du coût total de liquidation judiciaire de la SNCM

(332)

À la lumière de ce qui précède, dans l’état actuel du dossier, la Commission n’a pas à établir le coût économique réel de la mise en jeu de la responsabilité de l’actionnaire.

(333)

À cet égard, la Commission relève que, sur la base de l’article L624-3 du Code du Commerce, le dirigeant de droit ou de fait de la société en liquidation est condamné, dans de telles circonstances, à payer tout ou partie de l’insuffisance d’actifs constatée.

(334)

La Commission constate que l’article susmentionné laisse aux magistrats l’entière liberté pour apprécier s’il y a lieu de condamner le dirigeant à supporter l’intégralité ou une partie des dettes sociales. À la lumière de la jurisprudence pertinente, il apparaît que les Cours et Tribunaux sont sensibles au comportement du dirigeant poursuivi et modulent les condamnations en fonction des constats qu’ils peuvent établir.

(335)

Comme indiqué supra, les autorités françaises estiment que l’État français serait amené à supporter une part estimée entre […] et […] % de l’insuffisance d’actifs constatée, soit une fourchette comprise entre […] millions d’euros et […] millions d’euros.

(336)

La Commission souligne que, dans un contexte proche de celui de la SNCM qui concernait la société Les Mines de Salsignes, sous-filiale du BRGM (un établissement public à caractère industriel et commercial), (173), la Chambre commerciale de la Cour de cassation a condamné le BRGM et ses filiales en qualité de dirigeant de fait solidairement avec les autres dirigeants de la société Les Mines de Salsignes au paiement de l’intégralité de l’insuffisance d’actifs. (174) La quote-part des dettes sociales mises à la charge de la société Coframines et du BRGM et donc in fine de l’État, s’est élevée à 73,6 %. Aux termes de cette décision, la Cour a relevé que le Conseil d’administration était placé dans un état de dépendance vis-à-vis des deux entités considérées.

(337)

Toutefois, la Commission estime que les autorités françaises n’ont pas démontré, à la lumière des règles en matière d’aides d’État, en quoi les fautes de gestion de l’État susmentionnées préjudiciables à l’entreprise sont des fautes que tout autre actionnaire privé en économie de marché aurait pu commettre. À cet égard, il faut en effet souligner que seules de telles fautes, dûment établies, peuvent être prises en compte afin de déterminer si, eu égard au risque d’être condamné à supporter ces coûts et à l’ampleur de ceux-ci (i.e. la valeur actualisée nette du risque d’une condamnation future), un opérateur privé avisé aurait préféré payer immédiatement un prix négatif de 158 millions d’euros plutôt que de courir ce risque. En effet, on ne saurait considérer qu’un investisseur privé aurait été amené à commettre des fautes motivées par des considérations non entrepreneuriales, mais de caractère général (par exemple à des fins sociales ou de développement régional).

(338)

La Commission ne nie pas que, dans certains cas exceptionnels, certaines législations nationales prévoient la possibilité pour des tiers de se retourner contre les actionnaires d’une société liquidée, notamment si ces actionnaires peuvent être considérés comme des dirigeants de droit ou de fait ayant commis des fautes de gestion préjudiciables à l’entreprise. Toutefois, bien qu’une telle possibilité existe en droit français, la Commission considère que les autorités françaises n’ont pas suffisamment levé les doutes de la Commission dans le cas d’espèce, concernant les arguments tirés du risque que, en cas de liquidation de la SNCM, l’État français aurait été condamné à combler le passif de cette société. Il n’est toutefois pas nécessaire de conclure sur cet aspect dans la présente décision compte tenu de la conclusion à laquelle la Commission est parvenue à la section 10.2.2.1 ci-dessus.

(339)

En sus de l’insuffisance d’actifs, selon les autorités françaises, compte tenu de la jurisprudence en la matière (175), un juge aurait certainement été amené à condamner l’État français à prendre à sa charge les indemnités complémentaires de licenciement (soit entre […] et […] millions d’euros). Selon les autorités françaises, l’ensemble des coûts réels qu’aurait eu à supporter en tant qu’actionnaire la République française s’élèverait à une fourchette comprise entre […] millions d’euros et […] millions d’euros.

(340)

Les autorités françaises précisent que, dans des jugements récents, des tribunaux français ont condamné le dirigeant de droit ou de fait à prendre en charge, en sus de l’insuffisance d’actifs, des indemnités complémentaires de licenciement calculées sur la base d’un plan social établi par l’entreprise avant sa mise en liquidation.

(341)

Les autorités françaises indiquent en particulier que, dans l’affaire Aspocomp, la société française Aspocomp SAS, filiale à 99 % de la société finlandaise Aspocomp Group Oyj, avait signé un accord d’entreprise le 18 janvier 2002 décrivant les conditions d’indemnisation d’un plan social concernant 210 salariés sur 550 au total. Cet accord décrivait notamment le montant des indemnités compensatrices et complémentaires ainsi que les aides au départ volontaire. Or, à la suite d’un changement de stratégie du groupe, la société mère Aspocomp Group Oyj a décidé le 21 février 2002 de ne plus financer sa filiale Aspocomp SAS et a ainsi provoqué le dépôt de bilan de cette dernière. Cette décision a empêché de facto la filiale d’honorer les engagements pris dans le cadre de l’accord d’entreprise et l’a conduit à licencier l’ensemble des autres salariés.

(342)

Dans ce contexte, l’arrêt de la Cour d’Appel de Rouen a confirmé le jugement du conseil des Prud’hommes d’Evreux et ainsi condamné la société Aspocomp Group Oyj, qui contrôlait à 99 % la gestion de sa filiale, à verser: (i) aux salariés concernés par l’accord d’entreprise, l’intégralité des indemnités compensatrices et complémentaires prévues dans ce seul accord d’entreprise, ainsi que des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et (ii) aux salariés licenciés dans le cadre du dépôt de bilan d’Aspocomp des indemnités équivalentes en considérant qu’en n’honorant pas les engagements pris, la société mère avait eu un comportement déloyal et une légèreté blâmable.

(343)

En l’espèce, la Commission observe qu’il ressort des pièces du dossier qu’un plan social négocié, fondé sur le plan social de 2002 et mis en place au printemps 2005, a été suspendu le 25 avril 2005 par l’actionnaire de la SNCM sans concertation avec la direction de l’entreprise. La Commission constate en outre que l’élaboration de ce plan social est antérieure à la décision de l’État de vendre la SNCM.

(344)

La Commission estime que, dans l’hypothèse où la SNCM aurait été liquidée, les salariés de l’entreprise n’auraient pas manqué de faire valoir les dispositions de ce plan social devant la justice.

(345)

Pour qu’une telle démarche puisse être pertinente dans un cas comme celui de l’espèce, la Commission devrait évaluer: i) si un juge aurait condamné l’État membre pour avoir suspendu, sans concertation avec la direction de l’entreprise le plan social en question; ii) le montant que l’État membre aurait pu être condamné à payer dans cette éventualité; et iii) le degré de probabilité d’une telle éventualité (176).

(346)

La Commission note qu’un arrêt de la Chambre commerciale de la Cour de cassation, dans lequel la Cour indique qu’elle serait prête à accueillir une action en responsabilité contre une société dominante dont les comportements fautifs ont entraîné la ruine de la filiale, et en conséquence, des licenciements collectifs (177), va dans le même sens que la jurisprudence Aspocomp.

(347)

À cet égard, la Commission constate toutefois que le principe dégagé par l’arrêt de la Cour d’Appel de Rouen n’a pas été à ce jour conforté par d’autres arrêts de même nature. Partant, la Commission considère que les autorités françaises n’ont pas suffisamment levé les doutes de la Commission sur le fait que l’actionnaire de la SNCM se serait trouvé exposé, d’une manière suffisamment certaine, à la mise en cause de sa responsabilité et au versement d’indemnités complémentaires de licenciement sur le fondement de cette jurisprudence. Il n’est toutefois pas nécessaire de conclure sur cet aspect dans la présente décision compte tenu de la conclusion à laquelle la Commission est parvenue à la section 10.2.2.1 ci-dessus.

10.2.2.3.   Conclusion

(348)

La Commission estime, sur la base de ce qui précède, que le choix de céder la SNCM à un prix négatif de 158 millions d’euros est conforme au choix qu’aurait fait un groupe privé en économie de marché compte tenu des coûts sociaux qu’une liquidation de l’entreprise impliquerait.

(349)

La Commission a fondé l’analyse qui précède sur les seules hypothèses qui lui semblaient raisonnables et suffisamment motivées. Ces estimations conduisent à considérer que l’écart entre le scénario choisi par les autorités françaises et la solution alternative serait d’au moins […] millions d’euros, ce qui devrait amplement couvrir une éventuelle erreur sur les estimations retenues après analyse.

(350)

En outre, la Commission estime que le prix négatif de 158 millions d’euros résulte d’une négociation commerciale entre l’État et les repreneurs privés à l’issue d’une procédure publique de sélection ouverte, transparente non discriminatoire et inconditionnelle. À cet égard, la Commission considère que ce prix, qui est le moins négatif possible, constitue un prix de marché.

(351)

En dépit des limites mentionnées au point 284 de la présente décision, la Commission indique que l’expert de la Commission a vérifié des scénarios de valorisation de la SNCM sur la base de la méthode des cash flows libres opérationnels actualisés issus d’un rapport de la Banque HSBC commandé par les autorités françaises. L’expert de la Commission estime que les calculs de HSBC ont été effectués correctement. Sur la base des résultats de ces simulations, il peut être conclu que le prix payé pour la SNCM est cohérent avec la valeur de l’entreprise estimée sur la base de la méthode des cash flows libres opérationnels actualisés au moment de l’opération.

(352)

Il résulte de la section 10.2.2.1 ci-dessus, sans qu’il ait eu besoin de conclure sur les éléments exposés à la section 10.2.2.2 ci-dessus, que ladite mesure ne confère d’avantage économique ni à la SNCM, ni aux repreneurs privés. Partant, l’apport en capital de l’État de 158 millions d’euros préalable à la cession de l’entreprise aux repreneurs privés, c’est-à-dire le prix de vente négatif de 158 millions d’euros, ne constitue pas une aide d’État au sens de l’article 87, paragraphe 1, CE.

10.3.   L’apport en capital de la CGMF pour un montant de 8,75 millions d’euros

10.3.1.   Cadre juridique de référence

(353)

Si l’intervention des pouvoirs publics en cause est réalisée concomitamment à une intervention significative d’opérateurs privés, effectuée dans des conditions comparables, l’existence d’un avantage économique peut être d’emblée écartée (178).

(354)

La pratique décisionnelle de la Commission, confirmée par le juge communautaire, exclut d’emblée la nature d’aide d’un apport en capital de l’État dans de telles circonstances pour autant que les trois conditions soient respectées:

l’intervention privée doit émaner d’opérateurs économiques. Tel n’est pas le cas d’une prise de participation des salariés dans le capital de l’entreprise concernée (179),

l’intervention privée doit être significative. Tel n’est pas le cas par exemple d’une intervention privée qui ne porte que sur 3,3 % du montant total en jeu (180),

l’intervention privée doit également être concomitante avec l’intervention publique. La Cour a ainsi confirmé l’analyse de la Commission selon laquelle des apports publics peuvent constituer une aide d’État lorsque des investissements privé dans la même entreprise ne sont effectués que postérieurement à l’allocation des apports publics (181). La Commission accepte toutefois de prendre parfois en considération une intervention privée qui a eu lieu peu de temps après une intervention publique, notamment quand l’investisseur privé a déjà signé une lettre d’intention au moment de l’intervention publique (182).

10.3.2.   Application au cas d’espèce

(355)

La Commission constate d’abord que les actions de la SNCM sont cédées à des opérateurs économiques, BCP et VT. À l’issue de l’opération de cession, l’État devait apporter à l’entreprise concomitamment un montant de 8,75 millions d’euros de sorte que sa participation de 25 % dans la SNCM soit maintenue conformément à son engagement notamment à l’égard des salariés.

(356)

Ensuite, l’apport de l’État français à hauteur de 8,75 millions d’euros est à comparer avec l’apport des repreneurs privés, soit 26,25 millions d’euros. Cette répartition découle, comme indiqué ci-avant, de l’engagement des autorités françaises de maintenir 25 % de participation dans l’entreprise concernée. L’intervention privée portant sur 75 % du montant total, la Commission estime qu’elle est significative. A titre superfétatoire, la Commission souligne en outre que les partenaires privés possèdent une structure financière solide, que l’acquisition de la SNCM s’intègre parfaitement dans leur stratégie entrepreneuriale et que le plan d’affaires desdits repreneurs prévoit un retour à la rentabilité pour la fin de l’année 2009.

(357)

S’agissant enfin de la concomitance des deux opérations d’apports en capital, l’expert de la Commission a contrôlé que lesdits capitaux ont été versés par tous les actionnaires de la SNCM, en ce compris la CGMF.

(358)

Il a été en effet vérifié que, le 31 mai 2006, le conseil d’administration de la SNCM a constaté que toutes les opérations précitées avaient été réalisées. En particulier, l’augmentation de capital conjointe et concomitante de tous actionnaires pour un montant de 35 millions d’euros a eu lieu le 31 mai 2006. Elle s’est déroulée en deux étapes concomitantes: (i) une première augmentation de capital de […] actions a été souscrite entièrement par les repreneurs, par numéraire et au nominal ([…] euros), et (ii) une seconde augmentation de capital de […] actions (libérées au quart) a été souscrite pour partie par les repreneurs ([…] actions, soit un montant de 26,25 millions d’euros) et par l’État français à travers la CGMF ([…] actions, soit un montant de 8,75 millions d’euros), aux mêmes conditions, à savoir souscription en numéraire pour un montant nominal de […] euros.

(359)

Les apports en capitaux public et privés sont dès lors strictement concomitants.

(360)

À la lumière de ce qui précède, la Commission considère que les critères établis par la jurisprudence pour exclure d’emblée la nature d’aide de la mesure en cause sont remplis. Partant, la Commission considère que l’apport en capital de l’État français à hauteur de 8,75 millions d’euros ne confère pas d’avantage économique à la SNCM en ce que cet apport a été réalisé parallèlement à un apport de capitaux privés dans des conditions comparables au sens de la jurisprudence communautaire.

(361)

En tout état de cause, la Commission est d’avis que le taux de rémunération de l’apport de l’État, soit […]% par an, constitue une rentabilité à long terme adéquate des capitaux investis pour un investisseur privé.

(362)

À ce sujet, la Commission constate en effet que le rendement fixe de l’investissement en capital de l’État dans la SNCM exonère ce dernier de tout risque d’exécution du plan d’affaire puisque ce rendement est totalement déconnecté de la performance (à la hausse ou à la baisse) de l’entreprise. Ainsi, l’attribution de la DSP à la SNCM ne permettra pas à l’État d’améliorer le rendement attendu de sa participation.

(363)

L’expert de la Commission en a conclu qu’en termes de risques l’apport en capital de l’État français s’apparentait plus à une obligation assortie d’un taux fixe qu’à un placement en actions. Il s’ensuit que le taux de rémunération de […] % est à comparer au taux des obligations du secteur privé français au moment de l’opération. D’après l’expert de la Commission, ce taux s’établissait à 4,15 % à la fin du mois de mai 2006.

(364)

La Commission considère enfin que l’existence de la clause résolutoire de cession de la SNCM n’est pas de nature à remettre en cause le principe d’égalité de traitement des investisseurs. Cette clause porte en effet sur la cession totale de la SNCM aux repreneurs privés et non sur l’investissement (35 millions d’euros) concomitant par les repreneurs privés (26,25 millions d’euros) et l’État (8,75 millions d’euros) dans la SNCM privatisée.

(365)

À la lumière de ce qui précède, la Commission constate que la mesure en cause ne constitue pas une aide d’État au sens de l’article 87, paragraphe 1, CE.

10.4.   Les mesures d’aides à la personne (38,5 millions d’euros)

10.4.1.   Cadre juridique de référence

(366)

Afin d’apprécier si une mesure confère un avantage économique à une entreprise, «il convient […] de déterminer si l’entreprise bénéficiaire reçoit un avantage économique qu’elle n’aurait pas obtenu dans des conditions normales de marché» (183) ou inversement si elle évite de «supporter des coûts qui auraient normalement dû grever les ressources financières propres de l’entreprise et ont ainsi empêché que les forces en présence sur le marché ne produisent leurs conséquences normales» (184).

(367)

Selon une jurisprudence constante, une charge normale est une charge qu’une entreprise doit normalement supporter dans le cadre de sa gestion courante ou de ses activités normales (185). Plus précisément, la Cour a indiqué que la réduction de charges sociales constitue une aide d’État si cette mesure est «destinée à exempter partiellement les entreprises d’un secteur industriel particulier des charges sociales pécuniaires découlant de l’application normale du système général de prévoyance sociale, sans que cette exemption se justifie par la nature ou l’économie de ce système» (186). Par ce jugement, la Cour indique clairement que l’existence d’un avantage économique doit être établie par rapport au système général de sécurité sociale, appliquant ainsi un raisonnement similaire à celui utilisé pour les affaires fiscales.

(368)

Le 20 septembre 2001, la Cour a confirmé cette approche: «une aide consiste en un allégement des charges qui pèsent normalement sur le budget des entreprises compte tenu de la nature ou de l’économie du système de charges en cause, tandis qu’une charge spéciale est au contraire une charge supplémentaire par rapport à ces charges normales» (187).

(369)

Par conséquent, pour identifier ce qui constitue un avantage, au sens de la jurisprudence relative à la notion d’aide d’État, il est impératif de déterminer la règle de référence ou le régime commun applicable, dans le cadre d’un régime juridique donné, à l’aune duquel cet avantage sera comparé (188). À cet égard, la Cour a d’ailleurs jugé que la détermination du cadre de référence revêt une importance accrue dans le cas de mesures fiscales puisque l’existence même d’un avantage ne peut être établie que par rapport à une imposition dite «normale», à savoir le taux d’imposition en vigueur dans la zone géographique de référence (189).

(370)

Par ailleurs, selon une jurisprudence constante, «aux fins de l’application de l’article 92 du traité, il est indifférent que la situation du bénéficiaire présumé de la mesure se soit améliorée ou aggravée par rapport à l’état du droit antérieur ou, au contraire, n’ait pas connu d’évolution dans le temps […]. Il convient uniquement de déterminer si, dans le cadre d’un régime juridique donné, une mesure étatique est de nature à favoriser «certaines entreprises ou certaines productions» au sens de l’article 92, paragraphe 1, du traité par rapport à d’autres entreprises se trouvant dans une situation factuelle et juridique comparable au regard de l’objectif poursuivi par la mesure concernée» (190).

10.4.2.   Application au cas d’espèce

(371)

Il découle de la jurisprudence et de la pratique décisionnelle (191) de la Commission que, pour exclure la nature d’aide de la mesure en cause, la Commission doit vérifier que la mesure n’allège pas la SNCM de charges relevant de sa gestion courante, c’est-à-dire en l’espèce de charges découlant de l’application normale de la législation sociale applicable au secteur dans le cadre de rupture de contrat de travail.

(372)

À cet égard, la Commission constate que, conformément au protocole d’accord signé entre les parties, le compte séquestre ne peut être actionné que pour financer des compensations versées à des individus dont le contrat de travail avec la SNCM aura été préalablement rompu. Ainsi, ces mesures n’ont ni pour objet, ni pour effet de rendre possible le départ de salariés qui, en l’absence de ces mesures, auraient pu rester à la charge de la SNCM.

(373)

La Commission remarque également que l’octroi de ces compensations aux personnels licenciés après la cession de la SNCM a été consenti par l’État puissance publique et non par l’entreprise.

(374)

En outre, la Commission note que ces mesures sociales complémentaires vont au-delà des indemnités prévues par la législation sociale et des conventions collectives applicables. Les coûts découlant de l’application de ces dernières restent ainsi dans leur totalité à la charge de la SNCM.

(375)

La Commission observe enfin que ces mesures sociales complémentaires seront mises en œuvre dans l’éventualité d’un plan de réduction des effectifs exécuté par les repreneurs une fois la SNCM vendue. En d’autres termes, ces compensations ne correspondent pas à l’exécution des plans de réduction d’effectifs prévus dans le contexte du plan de restructuration de 2002.

(376)

Partant, la Commission considère que le coût des indemnités sociales complémentaires ne coïncide ni avec le coût des plans sociaux antérieurs à la cession qui ont été pris en charge par l’État, ni au coût social estimé ci-avant dans le cadre d’une liquidation judiciaire de la SNCM.

(377)

Il s’ensuit que les mesures sociales complémentaires ne constituent pas des charges découlant de l’application normale de la législation sociale applicable dans le cadre de la rupture de contrat de travail.

(378)

À titre surabondant, la Commission constate que, même en rajoutant le montant de 38,5 millions d’euros à l’apport en capital de l’État d’un montant de 142,5 millions d’euros, le prix de vente négatif ajusté, soit 196,50 millions d’euros, reste largement inférieur au coût de liquidation judiciaire de la SNCM (voir point 3 de la présente décision).

(379)

À la lumière de ce qui précède et conformément à sa pratique décisionnelle (192), la Commission considère que la mise en œuvre grâce à des fonds publics de mesures sociales supplémentaires en faveur des personnes licenciées, sans que ces mesures allègent l’employeur de ses charges normales, relève de la politique sociale des États membres et ne constitue pas une aide directe, au sens de l’article 87, paragraphe 1, CE. La Commission estime qu’elle ne constitue pas davantage d’aide indirecte dans la mesure où elle ne bénéficie aux personnels que lorsqu’ils sont licenciés.

10.5.   Le solde de 22,52 millions d’euros notifié au titre des aides à la restructuration

(380)

Sur la base de ce qui précède, et conformément au point 258 de la présente décision, le montant de la subvention à apprécier au titre des aides d’État hors compensation de service public s’élève à 22,52 millions d’euros (193) et représente une partie de l’injection de capital notifiée par les autorités françaises en 2002.

(381)

La Commission considère que ce montant confère à la SNCM un avantage économique sélectif et, partant, que cette subvention constitue une aide d’État au titre de l’article 87, paragraphe 1, CE.

10.5.1.   Compatibilité de la mesure au titre des lignes directrices communautaires concernant les aides au sauvetage et à la restructuration

(382)

La mesure en cause a été notifiée en 2002 par les autorités françaises au titre des lignes directrices communautaires concernant les aides au sauvetage et à la restructuration de 1999 (194).

(383)

Les orientations communautaires sur les aides d’État au transport maritime (195) renvoient pour l’évaluation d’aides à la restructuration de compagnies maritimes aux lignes directrices susmentionnées. Selon le point 19 desdites lignes directrices, «la seule base de compatibilité pour les aides au sauvetage et à la restructuration octroyées à des entreprises en difficulté est l’article 87, paragraphe 3, point c)».

(384)

S’agissant de la compatibilité d’une aide d’État à la restructuration avec l’article 87, paragraphe 3, sous c), CE, il ressort de la jurisprudence que la décision de la Commission doit énoncer les motifs pour lesquels elle considère que les aides sont justifiées au regard des conditions prévues par les lignes directrices, notamment, l’existence d’un plan de restructuration, une démonstration satisfaisante quant à la viabilité à long terme et le caractère proportionné des aides au regard de la contribution de son bénéficiaire.

(385)

Pour être éligible à une aide à la restructuration, l’entreprise doit pouvoir être qualifiée d’entreprise en difficulté au sens des lignes directrices de 1999 (196).

(386)

En l’espèce, la Commission rappelle qu’elle a constaté que ce critère était respecté tant dans la décision de la Commission du 17 juillet 2002 concernant l’aide au sauvetage en faveur de la SNCM (197) que dans celle du 19 août 2002 ouvrant la procédure formelle d’investigation à l’encontre du projet de recapitalisation, sur la base des comptes annuels de la SNCM pour l’année 2001.

(387)

Aux fins de la présente décision, la Commission a vérifié que la SNCM remplissait cette condition sur la base des comptes annuels de l’entreprise pour l’année 2002. Ainsi, les capitaux propres hors provisions réglementées (198) restent toujours négatifs à – 26,5 millions d’euros en 2002, après – 30,7 millions d’euros en 2001. Un tel niveau traduit la disparition de plus de la moitié du capital social de l’entreprise, capital social dont plus d’un quart a disparu au cours des 12 derniers mois qui ont suivi la notification, vérifiant ainsi la condition suffisante et non nécessaire décrite au point 5 a) des lignes directrices.

(388)

Outre l’évolution du capital social, la Commission constate entre autres que:

entre 2001 et 2002, le résultat courant avant impôts est passé de – 5,1 millions d’euros en 2001 à – 5,8 millions d’euros en 2002, les pertes nettes en 2002 n’ayant pu être amoindries que grâce à la vente de certains navires,

la capacité d’autofinancement de la SNCM qui atteignait 39,2 millions d’euros fin 2001, est ramenée à 35,7 millions d’euros à fin 2002,

les dettes financières nettes hors crédits-baux sont passées de 135,8 millions d’euros à 144, 8 millions d’euros entre 2000 et 2002,

les charges financières (intérêts et charges assimilées) sont passées de 7,0 millions d’euros en 2000 à 9,503 millions d’euros en 2002.

(389)

Les autorités françaises ont confirmé par ailleurs à la Commission que les banques refusent désormais de lui prêter de l’argent en raison de son endettement, en dépit du fait que la SNCM ait proposé d’apporter en garantie ses derniers navires libres d’hypothèques ou d’autres servitudes similaires.

(390)

Enfin, le contrat de DSP ne modifie en rien cette analyse. Si ce contrat doit certes permettre à la SNCM, conjointement avec la réussite du plan de restructuration, d’atteindre à terme des résultats d’exploitation positifs, il n’en demeure pas moins que son manque aigu de fonds propres, son endettement croissant et le coût des mesures opérationnelles du plan de restructuration devraient conduire la compagnie, dans un certain laps de temps, à la cessation de paiement.

(391)

À la lumière de ce qui précède, la Commission estime que la SNCM remplit à la fois la condition prévue par le point 5, sous a), des lignes directrices de 1999 et celle prévue par son point 6. Partant, elle constate que, en 2002, la SNCM était une entreprise en difficulté au sens desdites lignes directrices.

(392)

Conformément aux lignes directrices de 1999, l’octroi de l’aide est conditionné à la mise en œuvre d’un plan de restructuration qui aura été validé par la Commission. Comme indiqué au point 79 de la décision d’extension de la procédure formelle d’examen de 2006 et, étant donné que la Commission a considéré que les mesures postérieures à la notification de 2002 ne constituaient pas des aides d’État, la Commission estime que la compatibilité de l’apport en capital pour un montant de 22,52 millions d’euros avec les lignes directrices de 1999 doit être examinée à l’aune du plan de restructuration de 2002. «Il y a lieu en effet de se replacer dans le contexte de l’époque au cours de laquelle les mesures de soutien financier ont été prises pour […] s’abstenir de toute appréciation fondée sur une situation postérieure» (199).

(393)

Sur la base des informations fournies par les autorités françaises, la Commission constate qu’en dépit du fait que le plan de restructuration de 2002 prévoit un retour à la rentabilité dès 2003 grâce à des actions qui s’échelonnent essentiellement sur les années 2002 et 2003, il n’en reste pas moins que la SNCM ne retrouve un niveau de fonds propres «suffisant» que vers 2005-2006. La Commission fixe ainsi la fin de la période de restructuration au 31 décembre 2006.

(394)

Le retour à la rentabilité de la desserte entre Marseille et la Corse est prévu à brève échéance et le Maghreb est déjà une activité profitable. Seule l’activité au départ de Nice reste plus incertaine mais son poids diminue et la dépréciation anticipée du Liamone en 2001 facilitera le retour à des résultats positifs sur cette ligne. La Commission accepte par ailleurs l’argument selon lequel une présence, même réduite, au départ de Nice reste nécessaire pour le positionnement de la compagnie sur l’ensemble du marché. Le redéploiement sur le Maghreb contribuera à diminuer la dépendance de la compagnie vis-à-vis de la desserte historique et devrait également contribuer au retour à la viabilité compte tenu des […].

(395)

S’agissant de la viabilité à long terme, c’est-à-dire au-delà de l’échéance de l’actuel contrat de DSP, la Commission estime que la mise en œuvre du plan doit permettre à l’entreprise d’affronter la concurrence de manière efficace lors du renouvellement des contrats. Elle note enfin que, même avec un scénario de perte partielle, soit un car-ferry, ce contrat devrait permettre à la compagnie de garder des résultats positifs. Si la perte de ce contrat devait provoquer une baisse de 40 % ou plus des revenus de la compagnie sur son marché historique, comme également envisagé dans un autre scénario, la Commission considère qu’on entrerait alors dans un cas de figure que peu de plans de restructuration, avec ou sans soutien public, seraient capables de juguler et qu’il est prématuré à ce stade de l’envisager.

(396)

S’agissant des «hypothèses réalistes concernant les conditions d’exploitation future», la Commission considère l’étude de marché comme sérieuse et estime qu’elle constitue une bonne base pour établir les scénarios d’évolution de l’entreprise.

(397)

La Commission constate qu’en vue d’assurer le retour à la viabilité de l’entreprise, le plan de restructuration prévoit que l’amélioration de la viabilité résulte principalement de mesures internes telles qu’un meilleur contrôle de ses coûts de production et une meilleure productivité. En outre, si l’amélioration de la situation financière de la SNCM passe par un redéploiement de ses activités sur la desserte du Maghreb eu égard aux perspectives de croissance de ce marché, le plan de restructuration de 2002 comporte également des mesures destinées à l’abandon de certaines activités, en particulier de sa filiale italienne, Corsica Marittima.

(398)

La Commission juge que l’effet des mesures contenues dans le plan notifié et son succès ne sont pas tributaires de l’évolution du marché, à l’exception de la progression sur le Maghreb qui correspond surtout à un retour à une position qu’avait la SNCM jusqu’au milieu des années 1990.

(399)

En outre, la Commission prend note du fait que le plan de restructuration tient compte de la situation et de l’évolution prévisible de l’offre et de la demande sur le marché des produits concernés, avec des scénarios traduisant des hypothèses optimistes, pessimistes et médianes ainsi que des forces et faiblesses spécifiques de la SNCM.

(400)

Enfin, la Commission estime que le plan de restructuration propose une mutation de la SNCM telle que cette dernière puisse couvrir, une fois la restructuration achevée, tous ses coûts, y compris les coûts d’amortissement et les charges financières.

(401)

Eu égard à ce qui précède, la Commission constate que, sur la base des informations disponibles à l’époque au cours de laquelle les mesures de soutien financier ont été prises, le critère relatif à la viabilité de l’entreprise est satisfait.

(402)

Selon le point 35 desdites lignes directrices, des mesures doivent être prises pour atténuer, autant que possible, les conséquences défavorables de l’aide pour les concurrents. À défaut, l’aide devrait être considérée comme contraire à l’intérêt commun et donc incompatible avec le marché commun.

(403)

Dans le cas d’espèce, cette condition doit se traduire par une limitation de la présence que l’entreprise peut assumer sur son marché historique, à savoir la desserte de la Corse, qui est également celui où elle fait face à une concurrence de compagnies établies dans la Communauté, ce qui n’est pas le cas sur la desserte du Maghreb.

(404)

La Commission est d’avis que le marché des dessertes maritimes vers la Corse n’est pas surcapacitaire, compte tenu de la forte saisonnalité et de la croissance importante du trafic. La Commission note également que le taux de remplissage moyen des navires du principal concurrent de la SNCM est plus faible que celui de la compagnie publique. Le marché n’étant pas surcapacitaire au sens des lignes directrices, il n’y a pas lieu de contribuer à son assainissement. La vente de navires — plutôt que leur destruction — représente donc une réduction de capacité recevable à la lumière des lignes directrices.

(405)

La limitation ou la réduction forcée de la présence sur le ou les marchés en cause sur lesquels l’entreprise opère représente en effet une contrepartie pour les concurrents, contrepartie dont l’ampleur doit être en rapport avec les effets de distorsion que causera ou sera susceptible de causer l’aide à la restructuration.

(406)

Le plan de restructuration contribue de manière significative à la réduction de la présence de l’entreprise sur son marché, au profit direct de ses concurrents, du fait de la mise en œuvre des éléments suivants:

la fermeture de la filiale Corsica Marittima (82 000 passagers en 2000), qui était chargée des liaisons entre l’Italie et la Corse, et donc le retrait du groupe SNCM du marché afférent aux dessertes entre l’Italie et la Corse,

le quasi-retrait de la SNCM des liaisons entre Toulon et la Corse, marché qui représentait en 2002 pas moins de 460 000 passagers,

la limitation du nombre total de places offertes et du nombre de rotations opérées chaque année à compter de 2003 par la SNCM, notamment sur la desserte entre Nice et la Corse,

la vente de quatre navires.

(407)

Sur l’ensemble du Golfe de Gênes et de Toulon, la SNCM baisse son offre de plus d’un million de places par an par rapport à 2001, soit une division par plus de 2, au profit immédiat de ses concurrents, alors même que ce sont ces dessertes qui connaissent les plus fortes croissances.

(408)

Bien que d’ampleur importante, ces mesures ont été complétées par l’obligation pour la SNCM de ne pas financer, pendant la période de restructuration, de nouveaux investissements, autres que les coûts de redéploiement de l’activité vers le Maghreb intégrés dans le plan de restructuration.

(409)

Eu égard à ce qui précède, la Commission considère que le critère relatif à la prévention de distorsions de concurrence indues est satisfait.

(410)

Le montant de l’aide doit être limité au strict minimum nécessaire pour permettre la restructuration en fonction des disponibilités financières de l’entreprise, de ses actionnaires ou du groupe commercial dont elle fait partie, sans pour autant obérer ses chances de retour à la viabilité.

(411)

Dans sa décision du 19 août 2002, la Commission avait émis des doutes quant à la méthode de calcul présentée par les autorités françaises pour déterminer le montant de l’aide. Malgré les explications complémentaires fournies par la France, la Commission a effectué sa propre évaluation.

(412)

En effet, s’agissant de l’approche retenue par les autorités françaises, à savoir celle basée sur le ratio des fonds propres sur endettement, la Commission estime que:

le panel de cinq entreprises retenu par les autorités françaises n’est pas suffisamment représentatif du secteur du transport maritime de cabotage,

le taux de 79 % issu de ce panel d’entreprises pour le ratio des fonds propres sur dettes financières n’est par ailleurs en aucune manière un indicateur fiable de la bonne santé d’une entreprise,

les autorités françaises n’ont pas expliqué ce que recouvre exactement le montant des dettes financières de ces cinq compagnies et n’ont pu donc garantir que ces données sont homogènes avec le montant d’endettement de la SNCM, tel que retenu dans le plan de restructuration,

les autorités françaises n’ont pas démontré que le taux de 79 % issu de ce panel d’entreprises pour le ratio des fonds propres sur dettes financières est effectivement respecté pour la période 2002-2007 dans la maquette financière incluse dans le plan de restructuration.

(413)

Concernant les autres approches qui ont été proposées par la France pour démontrer que l’apport en capital était limité au minimum, la Commission en critique la pertinence (200).

(414)

En effet, la Commission est d’avis que l’apport en capital doit avoir pour finalité première non pas d’augmenter les fonds propres de l’entreprise (simple restructuration financière) mais d’aider l’entreprise à passer de sa situation de monopole sous le régime de la convention de 1976 à une situation concurrentielle. C’est pourquoi la Commission a des réticences à dimensionner l’aide sur la base de la méthode retenue par les autorités françaises, compte tenu de la difficulté de définir le niveau approprié des fonds propres pour la SNCM. En effet, la Commission note qu’en rajoutant ou en enlevant certaines entreprises dans le panel choisi par les autorités françaises, le ratio moyen des fonds propres sur endettement peut varier de manière significative.

(415)

La Commission considère que l’aide à la restructuration peut couvrir les coûts des différentes actions prévues au plan de restructuration (restructuration opérationnelle) nécessitées par le changement du contexte juridique et concurrentiel de la compagnie. S’agissant des coûts liés aux mesures opérationnelles de restructuration, la Commission retient le chiffre de 46 millions d’euros (voir point 55 de la présente décision) (201).

(416)

S’agissant du calcul précis du besoin d’aide de la SNCM, la Commission rappelle qu’«il y a lieu de se replacer dans le contexte de l’époque au cours de laquelle les mesures de soutien financier ont été prises pour […] s’abstenir de toute appréciation fondée sur une situation postérieure» (202).

(417)

Dans le cas d’espèce, la Commission note, à la lumière du point 40 des lignes directrices, que des ventes significatives d’actifs essentiellement navals, à hauteur de 26,25 millions d’euros de produit net des dettes financières associées (203), ont été réalisées entre le 18 février 2002, date de la notification par les autorités françaises de l’aide à la restructuration, et le 9 juillet 2003, date à laquelle la Commission a rendu sa décision d’autorisation de l’aide à la restructuration.

(418)

Pourtant, ces ventes ne suffisent pas pour ramener à la viabilité la SNCM dont la situation financière reste marquée par des passifs significatifs (19,75 millions d’euros) à l’issue de cette opération. La SNCM n’étant pas en mesure de contracter d’emprunt bancaire, même en proposant en garantie hypothécaire ses derniers navires libres d’hypothèques ou d’autres servitudes, la Commission estime que l’entreprise n’est pas capable de trouver d’autres ressources propres pour financer sa restructuration.

(419)

Compte tenu de ce qui précède, la Commission arrive donc à la conclusion qu’une somme de 19,75 millions d’euros est justifiée afin de permettre à l’entreprise de trouver à brève échéance la voie de la viabilité.

(420)

La Commission estime donc que du solde initialement notifié au titre des aides à la restructuration, soit 22,52 millions d’euros, seulement 19,75 millions d’euros peuvent être justifiés sur la base des besoins de liquidités de la SNCM et des ventes d’actifs réalisées au 9 juillet 2003, sous réserve de la prise en compte du produit des cessions (voir infra) qui ont été imposées par la Commission dans sa décision de 2003 et qui sont venues en complément des cessions prévues au plan de restructuration.

(421)

Les lignes directrices (204) disposent qu’une compagnie ayant déjà bénéficié dans le passé d’une aide à la restructuration ne peut normalement pas en recevoir une seconde dans les dix années qui suivent la fin de la période de restructuration. Dans l’inventaire des aides dont a déjà bénéficié la SNCM, aucune aide à la restructuration ne figure. Il s’agit en effet de la première restructuration de la SNCM depuis sa création en 1976.

10.5.2.   Sur le maintien des mesures compensatoires

(422)

Comme suggéré par le Tribunal dans son arrêt de 2005 et indiqué au point 137 de la décision d’extension de 2006, étant donné la révision à la baisse du montant d’aide validé au titre des lignes directrices 1999, se pose la question du maintien des mesures compensatoires imposées par la Commission dans sa décision de 2003.

(423)

Pour rappel, par sa décision de 2003, la Commission avait approuvé une injection de capital à hauteur de 76 millions d’euros au titre des lignes directrices de 1999 tout en imposant les conditions suivantes (205):

i)

l’absence d’acquisition de nouveaux navires et l’interdiction de signer de contrats de construction, de commandes ou d’affrètement pour de nouveaux navires neufs ou remis à neuf jusqu’au 31 décembre 2006;

ii)

l’utilisation exclusive des onze navires que l’entreprise SNCM possédait déjà jusqu’au 31 décembre 2006;

iii)

la cession de l’ensemble de ses participations directes et indirectes dans Amadeus France, la Compagnie Corse Méditerranée, la Société Civile Immobilière (SCI) Schuman, la Société méditerranéenne d’investissements et de participations, la Someca;

iv)

l’absence de toute politique tarifaire pour les tarifs publiés, visant à offrir des prix plus bas que ceux de chacun de ses concurrents pour des destinations et des services équivalents et pour des dates identiques jusqu’au 31 décembre 2006;

v)

la limitation jusqu’au 31 décembre 2006 du nombre annuel de rotations de navires sur les différentes liaisons maritimes avec la Corse.

(424)

L’expert de la Commission a vérifié la mise en œuvre de l’ensemble des conditions imposées par la décision de la Commission de 2003.

(425)

Il a confirmé le respect des conditions relatives à l’absence d’acquisition de navires (condition i supra). À cet égard, il est à souligner que le navire Superfast rebaptisé Jean Nicoli a été acquis par la société VT et a fait l’objet d’une mise à disposition par location du navire à la SNCM, à compter du mois de février 2007, en l’occurrence après la fin de la période fixée par la décision de 2003 (206).

(426)

S’agissant de l’utilisation de la flotte existante de la SNCM (condition ii supra), l’expert de la Commission a confirmé que la SNCM avait maintenu sa flotte à 10 navires, soit une unité inférieure à la limite de 11 navires posée par la décision de 2003, à la suite du remplacement de l’Aliso par l’Asco en 2004 (207) et de la cession de l’Asco le 24 mai 2005.

(427)

En ce qui concerne le remplacement de l’Aliso par l’Asco, la Commission note tout d’abord que les navires Asco et Aliso sont deux «sisterships» c’est-à-dire deux navires jumeaux, construits à partir des mêmes plans par le même chantier naval. Ils ont exactement les mêmes dimensions, la même forme et la même capacité. La Commission estime que la permutation des deux navires n’a pas pour objet d’augmenter la capacité de la SNCM. Par ailleurs, la Commission rappelle que la possibilité de modifier la composition de la flotte autorisée de la SNCM ne peut se faire que pour des raisons indépendantes de la volonté de la SNCM. Dans le cas d’espèce, la Commission est d’avis que les problèmes qu’a rencontré la SNCM pour céder le navire Asco étaient indépendants de la volonté de la compagnie. La Commission estime également que si la SNCM a trouvé un acquéreur pour l’Aliso à la place de l’Asco, la vente de l’Aliso a été, dans ses effets sur la capacité de la SNCM, équivalente à celle de l’Asco et que les engagements des autorités françaises de se conformer au plan de restructuration ont été remplis pour ce qui concerne la vente des quatre navires de la flotte opérationnelle de la SNCM.

(428)

Par ailleurs, l’expert a constaté, sur la base des pièces comptables, que toutes les cessions d’actifs imposées par la décision de 2003 (condition iii supra) ont été effectuées. Les produits nets de cession s’élèvent à 5,02 millions d’euros (208). La Commission souligne qu’en sus des cessions prévues par le plan de restructuration de 2002 ou imposées par la décision de 2003, la SNCM a procédé à des cessions d’actifs (209), dont l’expert de la Commission a vérifié la matérialisation, pour un produit de cession net de 12,6 millions d’euros.

(429)

S’agissant de la condition de l’absence de «price leadership» (210), l’expert de la Commission a vérifié d’une part l’existence au sein de la SNCM d’une procédure destinée à vérifier le respect de ladite condition. D’autre part, il a examiné l’application de cette condition par la SNCM sur les différentes dessertes pour la période du 16 mars 2005 au 31 décembre 2006 (211). Sur la base de cette vérification, l’expert de la Commission conclut que, dans […] % des cas, les billets émis par la SNCM ont respecté la condition iv. La Commission note que, sur la base des informations fournies par les autorités françaises, la SNCM continue à ce jour d’appliquer les conditions iv et v alors même que la décision de 2003 mettait un terme à celles-ci aux 31 décembre 2006.

(430)

Sur la condition v, l’expert a constaté que la SNCM avait respecté le nombre de traversée pour les exercices 2005 et 2006. En revanche, elle aurait excédé les normes relatives au nombre maximum de places offertes sur les traversées de Marseille en 2005 et 2006 ainsi que, de manière très limitée, celles relatives au nombre maximum de mètres linéaires offerts, pour les traversées de Toulon en 2005 et 2006 et Marseille en 2006.

(431)

Sur ce dernier point, la Commission note toutefois que, pour les places, la notion d’exclusivité des cabines pour une seule famille rend délicate l’estimation précise du dépassement. Ce faisant, cette seule circonstance ne saurait permettre de considérer que la SNCM a échoué à satisfaire les conditions qui lui ont été imposées par la décision de 2003

(432)

Compte tenu de ce qui précède, la Commission conclut que la SNCM a mis en œuvre les mesures compensatoires imposées par la décision de 2003.

10.5.3.   Conclusion

(433)

La Commission observe que les mesures compensatoires de la décision de 2003 ont été respectées en quasi-totalité. Compte tenu de la baisse importante du montant d’aide approuvé au titre des lignes directrices 1999 par rapport au montant approuvé en 2003, lequel montant avait conduit la Commission à imposer lesdites conditions, la Commission ne juge pas nécessaire d’imposer des conditions et obligations supplémentaires pour que la concurrence ne soit pas faussée dans une mesure contraire à l’intérêt commun.

(434)

À la lumière de ce qui précède et compte tenu du montant exact du produit net des cessions déterminé au moment de l’adoption de la décision de 2005, la Commission considère que l’aide d’État sous la forme d’un apport en capital de 15,81 millions d’euros (212) est compatible au titre de l’article 87, paragraphe 3, sous c), CE.

11.   CONCLUSION

(435)

En conclusion, la Commission considère que les mesures dont la présente décision fait l’objet ne constituent pas des aides au titre de l’article 87, paragraphe 1, CE ou sont des aides compatibles avec le marché commun.

(436)

La Commission invite la France:

à préciser à la Commission dans les plus brefs délais et au plus tard dans les 15 jours ouvrables à compter de la date de réception de la présente décision, les éléments qu’elle considère comme devant être couverts par l’obligation du secret professionnel en vertu de l’article 25 du règlement (CE) no 659/1999,

à informer le bénéficiaire de l’aide de la présente décision dans les meilleurs délais en occultant le cas échéant certains des éléments qu’elle a jugés comme relevant du secret professionnel et dont la communication au bénéficiaire de l’aide pourrait nuire à certaines des parties intéressées et à lui indiquer dans la version transmise, le cas échéant, les autres éléments qu’elle a jugés comme relevant du secret professionnel et qu’elle n’a pas occultés.

(437)

La Commission rappelle à la France qu’en vertu des lignes directrices, une seconde aide à la restructuration ne pourra normalement pas, sauf circonstances exceptionnelles, imprévisibles et non imputables à l’entreprise, être envisagée pendant les dix années qui suivent la fin de la période de restructuration, c’est-à-dire dans le cas d’espèce, le 31 décembre 2006,

A ARRÊTÉ LA PRÉSENTE DÉCISION:

Article premier

La compensation versée par l’État français à la SNCM d’un montant de 53,48 millions d’euros au titre d’obligations de service public pour la période 1991-2001 constitue une aide d’État illégale au sens de l’article 88, paragraphe 3, du traité CE, mais compatible avec le marché commun au titre de l’article 86, paragraphe 2, dudit traité.

Le prix de vente négatif de la SNCM de 158 millions d’euros, la prise en charge par la CGMF de mesures sociales à l’égard des salariés pour un montant de 38,5 millions d’euros et la recapitalisation conjointe et concomitante de la SNCM par la CGMF pour un montant de 8,75 millions d’euros ne constituent pas des aides d’État au sens de l’article 87, paragraphe 1, du traité CE.

L’aide à la restructuration d’un montant de 15,81 millions d’euros que la France a mise à exécution en faveur de la Société Nationale Maritime Corse-Méditerranée (SNCM) constitue une aide d’État illégale au sens de l’article 88, paragraphe 3, du traité CE, mais compatible avec le marché commun au titre de l’article 86, paragraphe 2, dudit traité.

Article 2

La République française est destinataire de la présente décision.

Fait à Bruxelles, le 8 juillet 2008.

Par la Commission

Antonio TAJANI

Vice-président


(1)  JO C 308 du 11.12.2002, p. 29.

(2)  Ce plan de restructuration faisait à la suite de la notification par les autorités françaises le 20 décembre 2001 d’une avance de trésorerie consentie par la Compagnie Générale Maritime et Financière à la SNCM pour un montant de 22,5 millions d’euros au titre d’aide au sauvetage. Par décision du 17 juillet 2002 (JO C 148 du 25.6.2003, p. 7), ci-après «la décision de 2002», la Commission a autorisé l’aide au sauvetage en faveur de la SNCM dans le cadre de la procédure préliminaire d’examen des aides prévue par l’article 88, paragraphe 3, CE. Le 19 novembre 2002, les autorités françaises ont transmis à la Commission copie des conventions d’avance de trésorerie entre la SNCM et la CGMF ainsi que les preuves du remboursement de l’avance de la CGMF à la SNCM par deux virements en date des 13 mai et 14 juin 2002.

(3)  Enregistrée sous la référence TREN A/61846.

(4)  La CGMF est un holding financier détenu à 100 % par l’État français qui sert de relais à ce denier pour toute opération de transport maritime, d’armement et d’affrètement de navires en Méditerranée.

(5)  JO L 83 du 27.3.1999, p. 1. Les autorités françaises ayant demandé le 11 septembre 2002 la correction de quelques erreurs factuelles dans la décision du 19 août 2002, la Commission a adopté une décision le 27 novembre 2002 modifiant la décision du 19 août 2002 (publiée dans le JO C 308 du 11.12.2002, p. 29). Les parties intéressées ont été invitées à présenter leurs observations sur le projet d’aide à compter de cette date.

(6)  Le 11 septembre 2002, les autorités françaises ont demandé un délai supplémentaire pour apporter leurs commentaires à la décision du 19 août 2002, délai que les services de la Commission ont accepté le 17 septembre 2002.

(7)  Enregistrées sous la référence SG(2002) A/10050.

(8)  Enregistrées le 15 janvier 2003 sous la référence DG TREN A/10962.

(9)  Enregistrée sous la référence SG(2003) A/1691.

(10)  Enregistré sous la référence TREN A/21531.

(11)  Enregistrée sous la référence SG(2003) A/1546.

(12)  JO C 288 du 9.10.1999, p. 2.

(13)  Enregistré sous la référence TREN A/21701.

(14)  JO L 61 du 27.2.2004, p. 13. Par décision du 8 septembre 2004 (ci-après la décision de 2004), la Commission a apporté une modification marginale à la décision de 2003, permettant à la SNCM d’opérer le cas échéant une permutation entre les navires Aliso et Asco au moyen d’une modification de l’article 2 de la décision de 2003.

(15)  JO L 19 du 21.1.2005, p. 70.

(16)  Enregistré sous la référence TREN A/27546.

(17)  Enregistré sous la référence TREN A/30842.

(18)  Des compléments d’information ont été transmis par courrier du 30 novembre 2005 [SG(2005) A/10782], du 14 décembre 2005 [SG(2005)A/11122], du 30 décembre 2005 (TRENA/10016).

(19)  Enregistré sous la référence TREN A/16904.

(20)  Enregistré sous la référence TREN A/19105.

(21)  Arrêt de la Cour du 24 juillet 2003, Altmark Trans GmbH e. Nahverkehrsgesellschaft Altmark GmbH, (280/00, Rec. p. 7747).

(22)  Veolia Transport est une filiale à 100 % de Veolia Environnement. Elle exploite sous le nom de Connex des services de transport de voyageurs pour le compte de collectivités publiques (transports collectifs en agglomération, transports collectifs interurbains et régionaux) et gère à ce titre des réseaux routiers et ferroviaires et, dans une moindre mesure, des services de transport maritime.

(23)  JO C 103 du 29.4.2006, p. 28.

(24)  JO L 24 du 29.1.2004, p. 1.

(25)  JO C 148 du 24.6.2006, p. 42.

(26)  Enregistré sous la référence TREN A/25295.

(27)  Enregistré sous la référence TREN/A/24111.

(28)  JO C 303 du 13.12.2006, p. 53.

(29)  Enregistré sous la référence TREN/A/37907.

(30)  Par le groupe Stef-TFE le 28 décembre 2007 (A/20313) et par Corsica Ferries le 27 décembre 2006 (A/20056).

(31)  Lettres du 4 janvier 2007 (D 2007 300067) adressée au groupe Stef-TFE et (D 2007 300068) au groupe Corsica Ferries.

(32)  Les 11 janvier, 16 janvier et 9 février 2007 enregistrés respectivement sous les références TREN/A/21142, A/21669 et A/23798.

(33)  Le 13 février 2007 enregistrés sous les références TREN/A/24473 et TREN/A/23981.

(34)  Enregistré par les services de la Commission sous le no TREN/A/30979. Les autorités françaises ont demandé et obtenu deux délais supplémentaires d’un mois pour apporter leurs commentaires par courrier du 15 mars 2007 et 19 avril 2007 enregistrés sous la référence TREN/A/27002 et A/29928.

(35)  Ces informations ont été communiquées par CFF le 15 mars 2007 (TREN/A/27058), le 27 septembre 2007 (TREN/A/43510 du 1.10.2007), le 30 novembre 2007 (TREN/A/49918 du 6.12.2007), le 20 décembre 2007 (TREN/A/51600 du 26.12.2007), le 14 mars 2008 (TREN/A/87084), par Stim le 20 décembre 2007 (TREN/A/51391) et par la SNCM le 28 février 2008 (TREN/A/85681). La France également a transmis des informations le 21 décembre 2007 (TREN/A/51441), le 7 janvier 2008 (TREN/A/86344) et le 8 février 2008 (TREN/A/83661). D’autres documents ont été remis par les autorités françaises lors d’une réunion de travail le 29 février 2008.

(36)  La SNCM détient une participation non majoritaire directe à hauteur de 45 % dans la CMN et une participation non majoritaire indirecte via la Compagnie Générale de Tourisme et d’Hôtellerie (CGTH) de 24,1 %. Le contrôle effectif a été confié depuis 1992 au groupe Stef-TFE par le biais de sa participation à hauteur de 49 % dans la Compagnie Méridionale de Participations (CMP). La SNCM et la CMN étaient partenaires dans le cadre de la DSP sur la période 2001-2006 et ont remporté conjointement le nouveau contrat de délégation de service public pour la période 2007-2012/2013.

(37)  La CGTH est une société holding, détenue à 100 % par la SNCM.

(38)  Aliso Voyage constitue le canal de distribution en propre de la SNCM. Formée par 17 agences réparties par toute la France, cette société gère les ventes de billetterie maritime dont 49,9 % en billetterie SNCM.

(39)  À l’époque de l’adoption de la décision de 2003, la SNCM détenait, à parité avec le groupe de transport Delmas, une participation dans la compagnie maritime française de transport de marchandises Sud-Cargos, spécialisée dans la desserte du Maroc. Cette participation a été par la suite cédée fin 2005 pour un montant de […] millions d’euros (information couverte par le secret professionnel), comme il résulte du plan d’investissement 2005 transmis par les autorités françaises le 28 mars 2006.

(40)  La SNCM détient 100 % de cette société qui assure l’avitaillement des navires de la SNCM.

(41)  Société en nom collectif détenue à 100 % par la SNCM, Ferrytour exerce le métier d’organisateur de voyages. Elle offre des voyages par voie maritime sur la Corse, la Sardaigne et la Tunisie, mais également des vols sur un grand nombre de destinations. De manière accessoire, elle propose également des mini-croisières et des prestations pour le tourisme d’affaires.

(42)  Filiale créée en 1996 et détenue à 100 % par la SNCM, les Comptoirs du Sud gèrent l’ensemble des boutiques à bord des navires.

(43)  Voir note 12.

(44)  Le Napoléon Bonaparte (capacité de 2 150 passagers et de 708 voitures, puissance de 43 MW, vitesse de 23,8 nœuds), grand navire car-ferry de grand standing; le nouveau Danielle Casanova, livré en mai 2002 (capacité de 2 204 passagers et de 700 voitures, puissance de 37,8 MW, vitesse de 23,8 nœuds), également grand navire car-ferry de grand standing; l’Île de Beauté (capacité de 1 554 passagers et de 520 voitures, puissance de 37,8 MW, vitesse de 21,5 nœuds), mis en service en 1979 et réhabilité en 1989/1990; le Méditerranée (capacité de 2 254 passagers et de 800 voitures, puissance de 35,8 MW, vitesse de 24 nœuds) et le Corse (capacité de 2 150 passagers et de 600 voitures, puissance de 27,56 MW, vitesse de 23,5 nœuds).

(45)  Le Paglia Orba, (capacité de 500 passagers, de 2 000 mètres linéaires de fret et de 120 voitures, puissance de 19,7 MW, vitesse de 19 nœuds); le Monte d’Oro (capacité de 508 passagers, de 1 615 mètres de fret et de 130 voitures, puissance de 14,8 MW, vitesse de 19,5 nœuds); le Monte Cinto (capacité de 111 passagers, de 1 200 mètres de fret, puissance de 8,8 MW, vitesse de 18 nœuds); depuis mai 2003, le Pascal Paoli (capacité de 594 passagers, de 2 300 mètres de fret et de 130 voitures, puissance de 37,8 MW, vitesse de 23 nœuds).

(46)  Le NGV Liamone (capacité de 1 116 passagers et 250 voitures, puissance de 65 MW, vitesse de 42 nœuds) qui réalise également des traversées sur Toulon.

(47)  Tous, sauf Danielle Casanova, Pascal Paoli, Liamone en crédit bail.

(48)  Règlement (CEE) no 3577/92 du Conseil du 7 décembre 1992 concernant l’application du principe de la libre circulation des services aux transports maritimes à l’intérieur des États membres (règlement cabotage) (JO L 364 du 12.12.1992, p. 7).

(49)  JO S 2001/10 – 007-005.

(50)  Autorité concédante pour les obligations de service public depuis 1991 en vertu de ladite loi française no 91-428 du 13 mai 1991.

(51)  JO 2006/S 100-107350.

(52)  Aide d’État N 781/01 autorisée par décision de la Commission du 2.7.2002, JO C 186 du 6.8.2002, p. 3.

(53)  Aide d’État N 13/07 autorisée par décision de la Commission du 24 avril 2007, publiée sur le site internet de la Commission: http://ec.europa.eu/community_law/state_aids/transports_2007.htm

(54)  Information couverte par le secret professionnel.

(55)  Le conducteur accompagne l’ensemble routier au cours de la traversée. Dans certains cas, un conducteur charge le véhicule au départ et un autre le décharge à l’arrivée. Ceci est comptabilisé comme trafic accompagné, par opposition au trafic roulier pour lequel la remorque voyage sans tracteur.

(56)  JO C 148 du 25.6.2003, p. 7.

(57)  Ce montant étant détaillé comme suit: 20,4 millions d’euros en tant que plan de restructuration proprement dit, 1,8 million d’euros frais de désarmement de navires en vente, 14,8 millions d’euros dépréciation du Liamone et 9 millions d’euros coût de redéploiement de l’activité vers le Maghreb.

(58)  Ce plan a été adopté le 17 décembre 2001 par le conseil d’administration de la SNCM.

(59)  Le plan de restructuration prévoyait une baisse du nombre des traversées de 4 138 (3 835 pour la SNCM et 303 pour sa filiale Corsica Marittima) à 3 410 en 2003 avec les modifications suivantes des dessertes:

la modification des dessertes entre Marseille et la Corse conformément au cahier des charges du contrat de service public 2001-2006,

la quasi-suppression des liaisons entre Toulon et la Corse,

la réduction des dessertes entre Nice et la Corse,

la fermeture de la ligne Livourne-Bastia avec du matériel dédié, effectivement fermée en 2003,

le renforcement de la desserte de l’Algérie et de la Tunisie avec les navires le «Méditerranée», l’«Île de Beauté» et le «Corse» et la suspension de la desserte Gênes-Tunis.

(60)  Les réductions d’effectifs devaient s’opérer grâce à des départs naturels ou anticipés sur la base de critères d’âge (cessation anticipée d’activité), de congés de mobilité et du non-remplacement de contrats à durée déterminée. Elles devaient néanmoins représenter un coût estimé de 20,4 millions d’euros pour la SNCM.

(61)  Telles que le trafic, la croissance prévisionnelle du produit intérieur brut (1,5 %), le taux des emprunts (5,5 %), le taux de rendement des produits financiers (4,5 %) et le taux des dettes à court terme (5 %).

(62)  Les autorités françaises ont évoqué deux méthodes alternatives qu’elles ont écartées car trop coûteuses.

La première méthode d’évaluation consistait à additionner les coûts de l’ensemble des mesures de restructuration. Elle permettait d’aboutir à un besoin de financement de 90,9 millions d’euros, en retenant:

les pertes cumulées de 1991 à 2001, soit 41,7 millions d’euros (Soit 29 millions d’euros — chiffre validé par la décision 2002/149/CE du 30 octobre 2001 (JO L 50 du 21.2.2002, p. 66), 6,1 millions d’euros au titre de 2000 et 6,6 millions d’euros, avant frais de restructuration, au titre de 2001),

la baisse de la ressource constituée par les amortissements dérogatoires entre ces mêmes dates, soit 24 millions d’euros (le poste baisse de 86 à 62 millions d’euros au bilan sur la période, ce qui traduit l’allongement de douze à vingt ans de la période d’amortissement, le moindre recours à cette ressource et le recours au «leasing» pour les dernières unités livrées),

la plus-value de cession engendrée lors de cette restructuration, soit 21 millions d’euros, venant en réduction des besoins de financement, et

l’effet cumulé des charges de restructuration qui s’élève à 46,2 millions d’euros (voir note 56).

La seconde méthode d’évaluation consistait à déterminer quel serait le montant des capitaux propres requis par des établissements bancaires pour l’ensemble de la flotte, sachant que ces derniers réclament en général pour financer l’achat d’un navire des fonds propres correspondant de 20 à 25 % de la valeur du navire. Le calcul effectué par les autorités françaises, sur la base d’un coût d’acquisition historique de la flotte de 843 millions d’euros, amenait à des besoins en fonds propres de 157 à 196 millions d’euros. Déduction faite des capitaux propres existant à la fin de 2001, cette approche aboutissait à un besoin de recapitalisation de 101 à 140 millions d’euros.

(63)  Voir infra.

(64)  Dans son plan de restructuration de 2002, la SNCM prévoyait de désarmer et de vendre quatre de ses navires: le Napoléon, le Liberté, le Monte Rotondo et le NGV Asco, ce dernier ayant été interverti dans les faits par son navire sistership l’Aliso. Ces navires sont aujourd’hui tous vendus. Le produit net de cession constaté s’élève à 25 165 000 euros.

Conformément à la décision de 2003, la SNCM a cédé les participations dans SCI Espace Shuman, Southerna Trader, Someca, Amadeus et CCM pour un produit net de cession de 5,02 millions d’euros.

Depuis la décision de 2003, la SNCM a vendu sa participation dans Sud Cargos, le navire Asco et des appartements du parc immobilier de la SNCM pour un montant de 12,2 millions d’euros.

(65)  […]

(66)  Le processus de sélection des partenaires privés s’est déroulé du 26 janvier 2005 à fin septembre 2005.

Les 26 janvier et 17 février 2005, le Gouvernement français a annoncé qu’il allait engager la recherche d’un partenaire privé pour entrer au capital de la SNCM, en vue de renforcer sa structure financière et de l’accompagner dans les évolutions nécessaires à son développement.

Après avoir nommé une personnalité indépendante pour superviser le processus de recherche, l’Agence des Participation de l’État («APE») a donné mandat à une banque conseil («HSBC») pour contacter des repreneurs potentiels.

Dans ce cadre, soixante-douze investisseurs industriels et financiers ont été contactés, avec l’objectif de définir les conditions financières d’une offre visant à conforter le projet industriel de la compagnie et à préserver l’emploi et la bonne exécution du service public. […] d’entre eux ont exprimé des marques d’intérêt, […] accords de confidentialité ont été signés et […] mémorandums d’information envoyés. […] entreprises ont présenté des offres au premier tour le 5 avril 2005 et trois offres ([…], […] et […]) ont été reçues au deuxième tour le 17 juin 2005 ainsi qu’une marque d’intérêt pour une participation minoritaire ([…]). Trois offres ont été reçues pour le troisième tour le 28 juillet 2005.

Le 14 septembre 2005, chaque entreprise a été invitée à remettre son offre ferme et définitive avant le 15 septembre 2005. À cette date, la société […] s’étant désistée, les services de l’État ont reçu deux offres fermes d’apport en capital et de reprise de la totalité du capital émanant des groupes français Butler Capital Partners (BCP) et […].

Le 27 septembre 2005, la France a publié un communiqué de presse indiquant que, sur la base d’un examen approfondi des deux offres, l’offre déposée par le groupe BCP était retenue car, tout en étant la plus acceptable au point de vue financier, elle était la plus à même de répondre aux intérêts de la compagnie, du service public et de l’emploi. L’offre initiale de BCP proposait un prix négatif de […] millions d’euros et constituait l’estimation la plus faible du prix négatif.

Cette offre initiale des repreneurs potentiels prévoyait explicitement la possibilité d’ajuster leur offre initiale au terme des audits réalisés. Les autorités françaises ont indiqué que le prix initial a été revu à la hausse à la suite des audits remis le 16 décembre 2005 en raison d’éléments objectifs influant sur le contexte réglementaire et économique dans lequel opère la SNCM et survenu postérieurement à la remise de l’offre le 15 septembre 2005. Le prix négatif a ainsi été revu à […] millions d’euros.

Les négociations menées entre les autorités françaises et les futurs repreneurs ont permis de ramener ce chiffre à 142,5 millions d’euros, augmenté de la prise en charge d’une partie des dépenses relatives aux mutuelles des retraités de la SNCM (soit 15,5 millions d’euros).

(67)  Le processus interne à la SNCM relatif à la mise en œuvre des opérations de recapitalisation et de privatisation a démarré formellement le 12 avril 2006 pour se conclure le 31 mai 2006. Il est à souligner qu’au 27 novembre 2007, la mise en place de la participation des salariés au capital n’a pas été mise en œuvre.

(68)  Ce mécanisme est prévu à l’article II.2 du protocole de cession du 16 mai 2006 qui dispose que ce compte est destiné «au financement de la fraction du coût des éventuels départs volontaires ou ruptures de contrat de travail […] qui viendrait en complément de sommes de toute nature devant être payées par l’employeur en application des dispositions légales et conventionnelles». Le séquestre a «pour mission de libérer les fonds au fur et à mesure où les salariés concernés ne faisant pas l’objet d’un reclassement interne au groupe SNCM quitteront effectivement la société et de libérer le solde du montant séquestré à l’expiration de sa mission de séquestre». […].

(69)  Les quatre critères Altmark sont les suivants:

i)

l’entreprise bénéficiaire doit effectivement être chargée de l’exécution d’obligations de service public et ces obligations doivent être clairement définies;

ii)

les paramètres sur la base desquels est calculée la compensation doivent être préalablement établis de façon objective et transparente, afin d’éviter qu’elle comporte un avantage économique susceptible de favoriser l’entreprise bénéficiaire par rapport à des entreprises concurrentes;

iii)

la compensation ne saurait dépasser ce qui est nécessaire pour couvrir tout ou partie des coûts occasionnés par l’exécution des obligations de service public, en tenant compte des recettes y relatives ainsi que d’un bénéfice raisonnable pour l’exécution de ces obligations;

iv)

lorsque le choix de l’entreprise à charger de l’exécution d’obligations de service public, dans un cas concret, n’est pas effectué dans le cadre d’une procédure de marché public permettant de sélectionner le candidat capable de fournir ces services au moindre coût pour la collectivité, le niveau de la compensation nécessaire doit être déterminé sur la base d’une analyse des coûts qu’une entreprise moyenne, bien gérée et adéquatement équipée en moyens de transport afin de pouvoir satisfaire aux exigences de service public requises, aurait encourus pour exécuter ces obligations, en tenant compte des recettes y relatives ainsi que d’un bénéfice raisonnable pour l’exécution de ces obligations.

(70)  À cet égard, les autorités françaises rappellent également que les compensations ont été calculées sur la base précise d’obligations (nombre de traversées, places offertes, moyen de substitution, tarification maximale, etc.) et donc des paramètres figurant dans les conventions quinquennales de service public passées en 1991 et 1996 entre la SNCM et la collectivité publique compétente et que lesdites conventions prévoyaient également un ajustement de la compensation en fonction des recettes perçues.

(71)  En particulier, les autorités françaises ont fourni, dans leur courrier du 8 octobre 2002 (TREN/A/10050), des éléments qui seraient aptes à démontrer que la structure des coûts d’exploitation de la SNCM pour la période 1991 à 2001 était comparable à celle d’entreprises similaires de transport maritime de passagers, telles que Brittany Ferries, Seafrance et la CMN. S’agissant de cette dernière, les autorités françaises auraient jugé de l’efficacité de la SNCM en comparant l’activité de cargos mixtes. Ces deux compagnies opèreraient en effet dans un contexte similaire, avec des navires quasi équivalents (3 cargos mixtes pour la CMN et 4 cargos mixtes pour la SNCM) et vers des destinations équivalentes. Les données récoltées sur la période 1991-2001 auraient permis de vérifier que les ratios de productivité (Rapports entre les charges salariales d’une part et le chiffre d’affaires, les traversées et les navires d’autre part) pour l’activité de cargos mixtes qui diffèrent en 1993, se rapprochent sensiblement sur la période examinée. Ainsi, ces données montreraient qu’au cours de cette période, les ratios de productivité de la SNCM se seraient rapprochés de ceux d’une entreprise moyenne du secteur.

(72)  JO L 50 du 21.2.2002, p. 66. En effet, les autorités françaises rappellent que, à la suite du rapport de l’expert désigné par la Commission sur les données comptables et de gestion présentées par les autorités françaises, cette dernière à conclu au paragraphe 98 de sa décision du 30 octobre 2001«que les subventions de service public n’ont pas servi à compenser les coûts des activités concurrentielles de la SNCM. La séparation des comptes relatifs à la prestation dudit service et les audits effectués par les instances de contrôle régionales et nationales permettent également de garantir que les comptes annuels retraçant l’emploi de la subvention de continuité territoriale donnent une image fidèle du coût de la prestation du service public».

(73)  Les autorités françaises avaient défendu en 2002 le caractère stratégique de la participation de la SNCM dans Sud-Cargos. L’évolution du trafic de marchandises (développement du conteneur au détriment du trafic roro), le rachat de Delmas, autre actionnaire de Sud-Cargos, par CMA CGM et les difficultés économiques de Sud-Cargos sont autant de facteurs qui expliquent que cette participation n’a plus été considérée comme stratégique et a pu être cédée en 2005 par la SNCM.

(74)  Arrêt de la Cour du 28 janvier 2003, République fédérale d’Allemagne/Commission (334/1999, Rec., p. I -1139).

(75)  Décision de la Commission du 7 décembre 2005 concernant l’aide d’État mise à exécution par la Belgique en faveur d’ABX Logistics no C 53/2003 (ex NN 62/03) (JO L 383 du 28.12.2006, p. 21).

(76)  Décision de la Commission du 8 juillet 1999 concernant l’aide d’État mise à exécution par l’Allemagne en faveur de Gröditzer Stahlwerke GmbH et sa filiale Walzwrk Burg GmbH, JO L 292 du 13.11.1999.

(77)  Ce rapport a été transmis à la Commission en mars 2006 et a été établi par la CGMF avec l’appui de Ernst & Young, l’auditeur légal de la SNCM (ci-après «rapport CGMF»).

(78)  Le rapport établi le 29 mars 2006 par Oddo Corporate Finance et le cabinet Paul Hastings (rapport Oddo) a été transmis le 7 avril 2006 à la Commission. Il consiste en une revue critique, demandée par l’Agence des Participations de l’État (APE), des rapports CGMF et une approche des coûts de liquidation jugés acceptables au plan communautaire.

(79)  compte tenu d’immobilisations corporelles ([…] millions d’euros) et financières ([…] millions d’euros), des créances clients ([…] millions d’euros), d’autres créances ([…] millions d’euros) et d’un déficit de trésorerie de – […] millions d’euros. La France a précisé qu’une estimation plus réaliste, tenant compte d’éléments financiers ultérieurs, emmènerait cette valeur à […] millions d’euros.

(80)  Arrêt de la Cour du 14 septembre 1994, Espagne c/Commission, (278/92, 279/92 et 280/92, Rec. p. I-4103).

(81)  Arrêt no 98-15129 de la Cour de Cassation du 6 février 2001. Cette affaire concerne un établissement public, le BRGM (Bureau de Recherches Géologiques et Minières) condamné à payer l’intégralité de l’insuffisance de l’actif de sa filiale, les Mines de Salsignes, au motif que le dirigeant de fait, le BRGM, malgré sa connaissance des conditions de dégradation de l’activité et des alertes données, avait eu un comportement fautif en laissant l’activité se poursuivre.

(82)  Affaire Aspocomp Group Oyj; arrêt de la Cour d’Appel de Rouen du 22 mars 2005.

(83)  A titre de comparaison, le taux de rendement d’une OAT (Obligation Assimilable du Trésor, obligation émise par l’État français) de maturité 30 ans, 10 ans, 5 ans et 2 ans sont respectivement de 3,95 %, 3,82 %, 3,75 % et 3,72 % au 31 octobre 2006.

(84)  Décision de la Commission du 17 juillet 2002, Société Française de Production, C(2002) 2593 final (JO C 71 du 25.3.2003, p. 3).

(85)  En effet, selon une étude de marché indépendante transmise par la France à cet égard, CFF détient à présent près de […] % du marché passagers tandis que la SNCM est passée de 82 % de parts de marché en 2000 à […] % en 2005 et a connu une très forte croissance sur le marché de fret où la SNCM est encore le principal transporteur grâce à sa participation dans la CMN.

(86)  CFF rappelle que le contrat de délégation de service public assure à la compagnie une subvention publique de l’ordre de 64,3 millions d’euros en moyenne par an, soit au total 321,5 millions d’euros sur 5 ans. Selon elle, l’article 5 du contrat de délégation de service public garantit à la SNCM un cash-flow de 72,8 millions d’euros. Par ailleurs, Corsica Ferries souligne que des 40,6 millions d’euros de pertes enregistrées en 2001 par la SNCM, 15 millions d’euros proviennent d’une dépréciation de navire appliquée au NGV Liamone.

(87)  La décision d’ouverture de procédure indiquait que le plan de restructuration prévoyait, entre autres, «la fermeture de la ligne Bastia-Livourne avec du matériel dédié».

(88)  Les critiques émises par CFF portent sur les points suivants: pas de réelle diminution des effectifs, pas de mobilisation des participations de la SNCM pour l’effort de restructuration, pas de prise en compte des plus-values sur les navires.

(89)  La somme de 76 millions d’euros correspondrait selon CFF aux 500 millions de francs français (FRF) que la compagnie devrait perdre sur sa dotation de continuité territoriale sur la nouvelle période 2002-2006.

(90)  par rapport aux ratios qu’elle a elle-même relevés sur un panel de dix compagnies maritimes. Ces ratios varient de 23,69 % (pour Moby Lines) à 55,09 % (pour Grimaldi) en passant par 49,7 % pour la CMN.

(91)  CFF cite la participation de 50 % dans la compagnie maritime Sud-Cargos, la participation de 13 % dans Amadeus, entreprise spécialisée dans les systèmes de réservation dans le transport aérien, la participation dans la CMN et le patrimoine immobilier de la CGTH.

(92)  Actionnaire de référence de la CMN.

(93)  Pour mémoire, l’OTC est l’autorité concédante, conjointement avec la collectivité territoriale de Corse, du contrat de délégation de service public.

(94)  Sur la DSP concernant les liaisons Marseille-Corse, la plupart des observations de CFF portent sur la procédure d’attribution de la nouvelle DSP sur la période 2007-2012/2013 et les voies contentieuses à l’initiative de la CFF devant les tribunaux nationaux, qui ont été par la suite rejetées par les juridictions nationales.

(95)  À cet égard, CFF rappelle que, dans le second semestre 2005, une procédure d’alerte avait été entamée devant le Tribunal de commerce de Marseille et qu’un dépôt de bilan aurait pu être envisagé dès l’automne 2005 pour des pertes estimées en 2005 de 30 millions d’euros.

(96)  En effet, d’après CFF, la Cour de cassation, dans l’affaire des Mines et produits chimiques de Salsignes, n’évoque nullement la responsabilité directe de l’État actionnaire en cas de liquidation d’une entreprise dont il serait actionnaire mais plutôt la possibilité de diriger une action en payement de dettes sociales contre un établissement public à caractère industriel et commercial et l’impossibilité de leur dirigeants de se soustraire à leurs obligations en invoquant l’intervention des pouvoirs publics.

S’agissant de l’applicabilité au cas d’espèce de la jurisprudence de la Cour d’appel de Rouen dans l’affaire Aspocomp, CFF fait valoir que le cas objet de cette jurisprudence, portant sur la condamnation d’une société mère à verser aux salariés d’une filiale des indemnités sociales pour le «non respect d’un accord» validé par la première, est bien loin des circonstances du dossier SNCM. Il n’existe donc pas un risque certain de voir la CGMF ou l’État condamné à payer des indemnités de licenciement en cas de liquidation judiciaire. D’ailleurs, CFF doute de l’estimation chiffrée des autres coûts sociaux en raison du fait qu’ils semblent diverger selon les experts invités à les établir.

(97)  À cet effet, CFF estime que la valeur réelle des navires telle qu’indiquée par la SNCM lors de la présentation de son offre dans la cadre de la DSP aurait dû être prise en compte dans l’estimation des actifs de la SNCM effectuée par les rapports Oddo et CGMF.

(98)  D’après CFF, la France insiste sur le caractère essentiel de l’intégrité de la desserte de Nice, sur le maintien de la flotte au niveau actuel et sur le caractère supposé stratégique de la participation de la SNCM dans le groupe CMN.

(99)  Au 1er janvier 2007 avec l’arrivée du Superfast X.

(100)  CFF propose de limiter au niveau de 2005 les capacités offertes sur chacun des marchés concurrentiels (Nice, Tunisie et Algérie), de s’abstenir de l’ouverture de toute nouvelle ligne et de reconfigurer en cargo mixtes la desserte Marseille-Corse afin d’alléger les coûts.

(101)  La SNCM aurait procédé à l’acquisition de nouveaux navires en violation de l’article 2 de la décision de la Commission de 2003. Par ailleurs, la SNCM n’aurait pas cédé sa participation dans la CCM en violation de l’article 3 de la décision de la Commission. Enfin, la SNCM pratiquerait depuis 2003 une politique tarifaire agressive avec des prix inférieurs à ceux pratiqués par CFF en violation de l’article 4 de ladite décision (billets jusqu’à 30 % moins chers pour des services identiques ou comparables).

(102)  En raison, d’une part, du manque de connaissance des méthodes comptables et d’imputation analytique respectives des deux compagnies et, d’autre part, de l’absence de participation de la CMN à une telle étude.

(103)  D’après la STIM, la SNCM aurait sous-estimé volontairement ses résultats financiers. Selon l’audit d’un expert indépendant pour le compte de l’Office des Transports de Corse, le déficit cumulé du réseau corse de la SNCM s’élèverait à 125 millions de francs français (environ 19 millions d’euros) pour les années 1996-2001, en excluant le résultat exceptionnel de 2001.

(104)  Arrêt de la Cour du 8 mai 2003, Italie et SIM 2 Multimedia/Commission (328/1999 et 399/00, Rec., p. I – 4035).

(105)  Parmi les faits invoqués par ce rapport, il ressort que […].

(106)  À l’appui d’un rapport de la Cour des Comptes, le rapport mentionne par exemple que […].

(107)  Parmi les faits invoqués par ce rapport, il ressort que […].

(108)  L’État a par exemple […].

(109)  Le rapport épingle entre autres les fautes de gestion suivantes: […].

(110)  Les moyens nautiques ont été réduits et le programme de cessions d’actifs se déroule conformément au projet industriel. Les dessertes ont été redéployées et le plan d’action sur la réduction des consommations intermédiaires produit ses premiers résultats. Enfin, le volet emploi du projet industriel est progressivement mis en œuvre.

(111)  Quant au ratio de 0,497 annoncé par Corsica Ferries pour la CMN en 2001, il est inexact car il omet de prendre en compte les disponibilités à l’actif du bilan. Corrigé de ce manquement, le ratio de la CMN est de 0,557. Selon les autorités françaises, ce niveau demeure en tout état de cause insuffisant pour la CMN et la situation de trésorerie difficile rencontrée par la CMN en 2002 en est l’illustration. La CMN a dû en effet emprunter jusqu’à 8 millions d’euros auprès de Stef-TFE pour financer un déficit de trésorerie non couvert par ses banques.

(112)  Dans sa lettre du 9 janvier 2003, le conseil régional Provence-Alpes-Côte d’Azur citait en effet l’étude de marché qui avait été transmise à la Commission dans le cadre de la notification et dont il avait visiblement une copie en soulignant le constat suivant: «L’offre [sur la desserte entre la Corse et le continent français] est surdimensionnée par rapport à la demande. Le taux de remplissage des navires varie en moyenne, de 20 % en hiver à 50 % en été.»

(113)  En particulier, elle réfute l’estimation de la valeur de l’entreprise à près de 350 millions d’euros faite par la STIM qui ne prend en compte que les éléments du bilan qui améliorent la valorisation à partir des fonds propres comptables (amortissements dérogatoires, plus-values résiduelles des navires etc.) sans tenir compte des éléments de passif qui viendraient la réduire. Cette méthode de calcul de nature purement comptable ne correspondrait pas à la réalité économique d’une entreprise maritime, telle que la SNCM, dotée d’actifs de valeur figurant au bilan mais disposant également d’une rentabilité limitée et de passifs hors bilan importants.

(114)  Voir, par exemple, l’arrêt de la Cour du 10 janvier 2006, Ministero dell’Economia e delle Finanze/Cassa di Risparmio di Firenze (222/04, Rec. p. I-289, point 129).

(115)  JO L 364 du 12.12.1992, p. 7.

(116)  JO L 378 du 31.12.1986, p. 1.

(117)  La Commission n’est pas tenue de prendre position sur tous les arguments invoqués devant elle par les intéressés, mais il lui suffit d’exposer les faits et les considérations juridiques revêtant une importance essentielle dans l’économie de la décision [arrêts du Tribunal du 8 juin 1995, Siemens/Commission, (459/93, Rec. p. II-1675, point 31) et du 13 juin 2000, EPAC/Commission, (204/97 et 270/97, Rec. p. II-2267, point 35)].

(118)  Arrêt du Tribunal du 12 février 2008, BUPA e.a./Commission (289/03).

(119)  Voir à ce sujet décision de la Commission du 30 octobre 2001 concernant les aides d’État versées par la France à la SNCM (JO L 50 du 21.2.2002, p. 66).

(120)  Résultat diminué des plus-values de cessions sur navires.

(121)  Pour ces deux années qui correspondent aux deux dernières années de l’application de la convention de 1996, le rapport d’expertise de l’époque n’avait pas pu, faute de données disponibles à l’époque, calculer le résultat obtenu en comptabilité analytique pour ce qui concerne la desserte de la Corse.

(122)  Données issues de la décision 2002/149/CE.

(123)  Une provision de 14,8 millions d’euros a été constituée en 2001 au titre du NGV Liamone. Elle a pour objet de ramener la charge annuelle du navire au niveau de celui d’un navire adapté aux nouvelles contraintes imposées sur cette ligne et financé dans les mêmes conditions. Cette provision a été constituée en vertu des règles comptables sur la base desquelles une entreprise doit corriger son bilan en prenant acte d’une dépréciation exceptionnelle dès lors qu’elle constate que l’un de ses actifs a une valeur réelle ou vénale inférieure à sa valeur comptable.

(124)  Conformément à sa pratique décisionnelle, la Commission est indifférente au moyen de compensation utilisé par l’État membre pour autant qu’elle puisse vérifier l’absence de subvention croisée en faveur d’activités concurrentielles. Voir notamment la décision de la Commission du 12 mars 2002 relative aux aides d’État accordées par l’Italie en faveur de Poste Italiane SpA (JO L 282 du 19.10.2002, p. 29) et la décision de la Commission du 23 juillet 2003 relative à l’augmentation de capital de 297,5 millions d’euros en faveur de La Poste Belge/De Post (JO C 241 du 8.10.2003, p. 13).

(125)  Par ailleurs, il y a lieu de rappeler que la Commission a établi en 1997 les orientations communautaires sur les aides d’État au transport maritime, précisant les conditions dans lesquelles les aides d’État octroyées en contrepartie d’obligations de service public seront considérées comme compatibles avec le marché commun (JO C 205 du 5.7.1997, p. 5).

(126)  Voir décision 2002/149/CE de la Commission (JO L 50 du 21.2.2002, p. 66).

(127)  Conditions du règlement de la contribution financière de l’État, reprises sous le point IV de la convention quinquennale entre la SNCM et l’OTC pour la période 1996-2001.

(128)  En particulier, comme elle l’a indiqué en note de bas de page Error! Bookmark not defined. de la présente décision, la Commission a vérifié l’existence d’une séparation des comptes relatifs à la prestation desdits services pour la période à l’examen.

(129)  Ce montant résulte de la différence entre le montant initialement notifié (76 millions d’euros) et le montant versé au titre des obligations de service public (53,48 millions d’euros).

(130)  Arrêt de la Cour du 28 janvier 2003, Allemagne/Commission (334/1999, Rec., p. I-1139, paragraphe 142).

(131)  Communication de la Commission aux États membres: application des articles 92 et 93 du traité CE et de l’article 5 de la directive 80/723/CEE de la Commission aux entreprises publiques du secteur manufacturier, JO C 307 du 13.11.1993, p. 3, point 11. Cette communication traite du secteur manufacturier, mais s’applique par analogie de la même manière à tous les autres secteurs économiques.

(132)  Voir notamment l’arrêt du Tribunal du 6 mars 2003, Westdeutsche Landesbank Girozentrale/Commission (233/1999, Rec., p. II-435).

(133)  Arrêt du Tribunal du 21 janvier 1999, Neue Maxhütte Stahlwerke GmbH et Lech-Stahlwerke GmbH/Commission des Communautés européennes (2/96 et 129/95, Rec., p. II-17, paragraphe 116).

(134)  Arrêt de la Cour du 14 septembre 1994, Espagne c/Commission, (278/92, 279/92 et 280/92, Rec. p. I-4103).

(135)  Arrêt de la Cour du 28 janvier 2003, Allemagne/Commission (334/1999, Rec. 2003, p.I-1139).

(136)  Décision 98/204/CE de la Commission du 30 juillet 1997 portant approbation conditionnée des aides accordées par la France au groupe GAN (JO L 78 du 16.3.1998, p. 6).

(137)  Voir à cet égard la décision 2006/947/CE du 7 décembre 2005 concernant l’aide d’État mise à exécution par la Belgique en faveur d’ABX Logistics (JO L 383 du 28.12.2006, p. 21).

(138)  Voir en ce sens l’arrêt de la Cour du 21 mars 1991, Italie/Commission (Rec.1991, p.I-1433).

(139)  Voir par exemple la décision 92/266/CEE de la Commission du 27 novembre 1991 concernant les activités de reconversion des groupes industriels français hors sidérurgie, charbonnages et Compagnie générale maritime au regard des articles 92 à 94 du traité CEE (JO L 138 du 21.5.1992, p. 24). Voir également les plans sociaux auxquels il est fait référence ci-après.

(140)  Il convient toutefois de noter que la moitié des effectifs concernés étaient occupés par du personnel intérimaire ou sous traitant in situ. On peut donc supposer que le coût par salarié pour les 5 000 postes concernant le personnel Airbus permanent était nettement supérieur.

(141)  À l’issue d’une procédure d’appel d’offres, la Commission a mandaté un expert indépendant, Moore Stephens, Chartered Accountants, dont le rapport final a été remis le 25 janvier 2008.

(142)  Il s’agit des sept navires suivants: Corse, Île de Beauté, Méditerranée, Napoléon Bonaparte, Paglia Orba, Monte d’Oro, Monte Cino.

(143)  Cette décote, qui est de […] millions d’euros (soit en moyenne […] à […]% de la valeur vénale brute), est entre autres justifiée par la spécificité des navires de la SNCM qui sont adaptés aux dessertes assurées par l’entreprise, par l’état des navires et par le contexte d’une mise sur le marché de l’ensemble de la flotte (notamment la faiblesse de la position du vendeur). La valorisation de BRS repose notamment sur l’hypothèse d’une vente de navires complètement en ordre et à jour, en bon état d’entretien et de fonctionnement dans des conditions commerciales normales.

(144)  Estimée à […] millions d’euros.

(145)  L’aléa judiciaire est justifié par la probabilité que le mandataire liquidateur soit contraint à procéder très rapidement à la cession des navires et par un effet d’engorgement du marché en raison de sa capacité d’absorption limitée.

(146)  En ce qui concerne les immeubles (dont le siège social de la SNCM), les autorités françaises précisent que la valeur liquidative retenue repose sur l’évaluation d’un expert immobilier en date de novembre 2003 actualisée de + […] % afin de tenir compte de la hausse des prix.

(147)  Les immobilisations financières concernent essentiellement les titres de participation de la SNCM dans Sudcargos, Aliso, CGTH, CMN et Ferrytour.

(148)  Ce poste concerne essentiellement des créances sur l’État, notamment la compensation au titre des obligations de service public du mois de septembre 2005 et le remboursement des charges sociales patronales par les Assedic au titre de l’exercice 2004.

Sources: rapport Oddo-Hastings, rapport de l’expert de la Commission

(149)  Il s’agit d’une obligation instaurée par l’article L.321-13 du code du travail qui prévoit le versement par l’employeur d’une indemnité lors du licenciement d’un salarié d’au moins 50 ans.

(150)  Coût de revitalisation du bassin d’emploi ([…] millions d’euros), coût des conventions de reclassement ([…] millions d’euros), coût de la cellule d’accompagnement et d’aide au reclassement dite «mobilité» ([…] millions d’euros).

(151)  Coût du licenciement du personnel sous contrat SNCM détaché auprès de sociétés affiliées et du personnel des filiales liquidées ([…] million d’euros) et coût des contentieux afférents à la rupture des contrats de travail et aux demandes de requalification de contrat de travail ([…] millions d’euros).

(152)  Au 30 septembre 2005, la SNCM exploite trois navires en crédit-bail: le NGV Liamone (détenu par le GIE Véronique Bail), le Danielle Casanova (GIE Joliette Bail) et le Pascal Paoli (GIE Castellane Bail).

(153)  Les hypothèses sous-jacentes à cette évaluation sont les suivantes:

la SNCM met fin à ses contrats de crédit-bail au 30 septembre 2005, ce qui signifie que les navires sont restitués à leurs propriétaires respectifs (GIE) et qu’aucun loyer n’est payé,

les options d’achat ne peuvent pas être exercées,

les navires sont cédés par les banques créditrices des GIE au 30 septembre 2005; le produit net de la vente des navires est consacré en priorité au remboursement des dettes bancaires et fiscales.

(154)  Les navires Napoléon Bonaparte et Paglia Orba garantissent le montant des emprunts navals qui ont servi à leur financement.

(155)  Ce poste relève de l’usage au terme duquel la SNCM s’engage à prendre en charge une partie des coûts de mutuelle complémentaire en faveur de ses retraités.

(156)  Jusqu’à la clôture de la liquidation. Les pertes intercalaires prennent pour hypothèse sous-jacente le versement des salaires sur un seul mois. Elles incluent également le coût de désarmement des navires en détention propre, non décompté de la valeur des actifs. Ce coût correspond au coût d’immobilisation des navires à quai dans l’attente de leur cession.

(157)  Les dettes chirographaires sont ventilées comme suit: provisions pour risques et charges ([…] millions d’euros), dettes rattachées/participations ([…] million d’euros), fournisseurs d’exploitation ([…] millions d’euros), représentation générale ([…] millions d’euros), dettes groupe et associés ([…] millions d’euros), compte de régularisation passif ([…] millions d’euros).

Sources: rapport Oddo-Hastings, rapport de l’expert de la Commission

(158)  Compte tenu du recours intensif par la SNCM aux CDD à répétition.

(159)  Dans sa décision 2006/947/CE du 7 décembre 2005 concernant l’aide d’État mise à exécution par la Belgique en faveur d’ABX Logistics (JO L 383 du 28.12.2006, p. 21), la Commission indiquait: «La Commission ne nie pas que, dans certains cas exceptionnels, certaines législations nationales prévoient la possibilité pour des tiers de se retourner contre les actionnaires d’une société liquidée, notamment si ces actionnaires peuvent être considérés comme des […] et/ou ayant commis des fautes de gestion. Toutefois, en l’espèce, bien qu’une telle possibilité existe en droit français et que les autorités belges aient fourni un certain nombre d’indications quant à un tel risque, elles n’ont pas suffisamment levé les doutes exprimés, dans le cas d’espèce, lors de l’extension de procédure d’avril 2005 dans le présent dossier. La Commission en conclut qu’il n’est pas légitime, dans le cas présent, de retenir parmi les coûts de ce scénario les 58 millions d’euros liés, selon les autorités belges, au risque de […].»

(160)  Communication de la Commission concernant l’aide que la France a décidé d’accorder à la Société Marseillaise de crédit (JO C 49 du 19.2.1997, p. 2).

(161)  C'est-à-dire la valeur actualisée nette du risque d’une condamnation future, compte tenu du fait que les personnes accusées d’être responsables du passif se défendraient contre une telle allégation.

(162)  Loi no 85-98 du 25 janvier 1985 sur le redressement et la liquidation judiciaire des entreprises codifiée dans le Code de Commerce aux articles L620-1 et suivants; Loi no 2005-845 du 26 juillet 2005 portant sur la sauvegarde, le redressement et la liquidation des entreprises, codifiée aux articles 620-1 à 670-8 du Code de Commerce.

(163)  Le scénario de résolution d’un plan de sauvegarde n’est pas applicable au cas d’espèce en ce que la loi de 2005 susmentionnée est entrée en vigueur postérieurement alors que, sur la base des éléments dont dispose la Commission, rien ne permet de conclure qu’un redressement judiciaire éventuel de la SNCM aurait échoué.

(164)  Aux termes des lois pertinentes, les entreprises publiques dotées d’un statut de droit privé relèvent du champ d’application des lois susvisées règlementant la liquidation judiciaire. En outre, la législation permet l’engagement de la responsabilité des personnes morales de droit public en qualité de dirigeant dans le cadre d’une action en comblement de passif.

(165)  La jurisprudence française exige du dirigeant de fait qu’il ait commis des «actes positifs de gestion ou de direction de façon récurrente».

(166)  Réaction des autorités françaises à certaines observations transmises par la SNCM (voir point 172 de la présente décision).

(167)  Il est intéressant de noter qu’en sus des créances salariales classiques, il existe des créances salariales judiciaires qui trouvent leur source dans une décision émise par les juridictions prud’homales. Dans ce cas d’espèce, le salarié saisit la juridiction prud’homale pour faire juger du bien fondé de sa demande et lorsque cette demande est accueillie, celle-ci est inscrite sur l’état des créances de la société.

(168)  Arrêt de la Cour de Cassation, 30 novembre 1993, no 91-20 554, Bull. civ.IV, no 440, p. 319.

(169)  Cette évaluation a été effectuée par Sorgem Évaluation Conseiller en investissements financiers. L’auteur de l’évaluation, Maurice Nussenbaum, est expert financier près la Cour d’appel de Paris et agréé par la Cour de Cassation.

(170)  Réaction des autorités françaises à certaines observations transmises par la SNCM (voir point 174 de la présente décision).

(171)  Réaction des autorités françaises à certaines observations transmises par la SNCM (voir points 175 et 176 de la présente décision).

(172)  Réaction des autorités françaises à certaines observations transmises par la SNCM (voir points 175 et 176 de la présente décision).

(173)  Bureau de Recherches Géologiques et Minières (BRGM).

(174)  Voir par exemple l’arrêt de la Cour de Cassation du 6 février 2001 no 98-15129.

(175)  Voir notamment les deux arrêts rendus par la Cour d’Appel de Rouen le 22 mars 2005 — arrêt no RG 04/02549 Aspocomp Group Oyj et arrêt no RG 01/02667 — 04/02675.

(176)  Compte tenu du fait que les personnes accusées d’avoir fautivement suspendu ce plan se seraient probablement défendues vigoureusement pour ne pas engager leur propre responsabilité.

(177)  Cass. com., 19 avril 2005, Métaleurop.

(178)  Application des articles 92 and 93 du traité CE aux prises de participations des autorités publiques, Bulletin CE 9/1984, point 3.2. iii).

(179)  Arrêt du Tribunal du 12 décembre 2000, Alitalia/Commission (296/97, Rec., p. II-3871).

(180)  Voir par exemple l’arrêt du Tribunal du 12 décembre 1996, Air France/Commission (358/94, Rec. pp. II-2109, point 70).

(181)  Voir l’arrêt de la Cour du 14 février 1990, France/Commission (301/87, Rec., pp. I-307, point 40).

(182)  Voir la communication concernant une aide éventuelle contenue dans un projet d’apports de capitaux publics dans le capital de Klöckner Stahl, JO C 390, 31.12.1994, p. 1.

(183)  Arrêt de la Cour du 11 juillet 1996, SFEI (39/94, Rec., pp. I-3547, paragraphe 60).

(184)  Arrêt de la Cour du 14 février 1990, France/Commission (301/87, Rec., pp. I-307, paragraphe 41).

(185)  Arrêt du Tribunal du 29 septembre 2000, Confederación Española de Transporte de Mercancías (CETM)/Commission (55/1999, Rec., pp II-03207, paragraphe 82).

(186)  Arrêt de la Cour du 2 juillet 1974, Italie/Commission (173/73, Rec., 709, paragraphe 33).

(187)  Arrêt de la Cour du 20 septembre 2001, HJ Banks (390/98, Rec., p. I-6117, paragraphe 33).

(188)  Arrêt du Tribunal du 1er juillet 2004, Salzgitter/Commission (308/00, Rec. p. II-1933, paragraphe 79). Voir également communication de la Commission sur l’application des règles relatives aux aides d’État aux mesures relevant de la fiscalité directe des entreprises (JO C 384 du 10.12.1998, p. 3), point 16.

(189)  Arrêt de la Cour du 6 septembre 2006, Portugal/Commission (88/03, Rec., p. I-7115, paragraphe 56).

(190)  Arrêt de la Cour du 8 novembre 2001, Adria-Wien Pipeline GmbH (143/1999, Rec., p. I-8365, paragraphe 41).

(191)  Voir par exemple la décision de la Commission du 10 octobre 2007 concernant la réforme du financement des retraites dans le secteur bancaire en Grèce (JO C 308 du 19.12.2007, p. 9) et la décision de la Commission du 10 octobre 2007 concernant les aides d’État accordées par la France en ce qui concerne la réforme du mode de financement des retraites des fonctionnaires de l’État rattachés à La Poste (JO L 63 du 7.3.2008, p. 16).

(192)  Voir la décision de la Commission du 17 juillet 2002 concernant la Société française de production (JO C 71 du 25.3.2003, p. 3). «Le financement par l’État d’un plan de réduction des effectifs permettant à une entreprise de se libérer d’une partie de son personnel, sans en supporter pleinement le coût, est un avantage sélectif susceptible de tomber sous le coup de la prohibition des aides d’État. En revanche, la mise en œuvre grâce à des fonds publics de mesures sociales supplémentaires en faveur des personnes licenciées, sans que ces mesures allègent l’employeur de ses charges normales, relève de la politique sociale des États membres et ne constitue pas une aide au sens de l’article 87 (1) CE. […] La SFP assumera pleinement ce coût. Dès lors, les mesures sociales supplémentaires au profit du personnel licencié de la SFP qui seront mises en œuvre une fois que ce personnel aura quitté l’entreprise, ne libèrent nullement cette dernière de ses obligations et ne comportent pas d’aide d’État en faveur de la SFP.»

(193)  Ce montant résulte de la différence entre le montant effectivement notifié (76 millions d’euros) et le montant approuvé au titre de compensation de service public (53,48 millions d’euros).

(194)  JO C 288 du 9.10.1999, p. 2.

(195)  JO C 205 du 5.7.1997, p. 5.

(196)  Voir le point 30 des lignes directrices 2002.

(197)  Décision précitée.

(198)  Les provisions réglementées sont des charges passées en comptabilité en application de règles fiscales.

(199)  Arrêt de la Cour du 16 mai 2002, France/Commission (482/1999, Rec.2002, p. I-4397, paragraphe 71).

(200)  La première méthode alternative, basée sur les capitaux propres nécessaires pour assurer le financement de la flotte existante, apparaît inappropriée dans la mesure où les autorités françaises ont retenu dans ce calcul la valeur d’acquisition de la flotte et non sa valeur vénale en 2002. En effet, si une nouvelle société devait se constituer avec la même flotte que celle de la SNCM telle qu’elle est aujourd’hui, elle devrait trouver des capitaux propres proportionnels à la valeur d’achat de l’ensemble des navires et non à leur valeur de construction. Par ailleurs, une telle approche n’a pas tenu compte des autres actifs lourds comme le système informatique de réservation ou les immeubles du siège.

La seconde méthode alternative, basée sur les dépenses supportées par la SNCM, paraît plus appropriée à la Commission. La Commission souhaite pourtant revoir le chiffre de 41,7 millions d’euros relatif aux pertes antérieures, notamment pour tenir compte du résultat 2002 et des seules pertes liées à la desserte de la Corse avant 1999.

(201)  Il est à noter que l’expert indépendant de la Commission a quantifié à […] millions d’euros le coût réel du plan de restructuration de 2002 sur la base de la comptabilité de la SNCM.

(202)  Arrêt de la Cour du 16 mai 2002, France/Commission (482/1999, Rec.2002, p. I-4397, paragraphe 71).

(203)  Voir Tableau 2 de la présente décision. Ce montant inclut les cessions d’actifs réalisées au moment de la décision de 2003, à savoir les ventes des navires Napoléon, Monte Rotondo et Liberté ainsi que les cessions immobilières (ensemble immobilier Schuman et SCI Espace Schuman).

(204)  Voir le point 48 des lignes directrices.

(205)  Voir annexe 1.

(206)  Il est à noter que, le 11 décembre 2007, un compromis de vente concernant le Jean Nicoli a été signé entre VT et un tiers acquéreur pour un transfert de propriété qui s’est réalisé en avril 2008.

(207)  Notifié à la Commission par lettre du 23 juin 2004.

(208)  Ce montant tient compte de la vente de SCI Espace Schuman ([…] million d’euros) réalisée le 24 juin 2003, mais ne tient pas compte du produit net de cession négatif lié à la vente du navire Aliso ([…] million d’euros) réalisée le 30 septembre 2004.

(209)  Le navire Asco, la participation dans Sudcargos et le parc immobilier.

(210)  La Commission estime que, dans le cadre de l’appréciation du respect de l’article 4 de la décision de 2003, il faut tenir compte des prix affichés, c’est-à-dire des prix figurant sur tout support publicitaire ou dans toute communication de nature publique que la SNCM pourrait diffuser. Cette condition ne porte pas sur les prix issus du système de réservation informatique de la SNCM car ces tarifs sont, tant à la SNCM que chez ses concurrents, contingentés de façon dynamique par «yield management». Le paramétrage des systèmes ne permet pas de se rendre compte de la disponibilité des tarifs spéciaux des concurrents de la SNCM et, partant, de vérifier l’absence de price leadership dans le chef de la SNCM.

(211)  Il s’avère en effet que, sur la base des informations fournies par les autorités françaises, la SNCM n’a jamais affiché entre le 9 juillet 2003 et le 16 mars 2005 au travers de sa communication d’entreprise, de ses campagnes de publicité ou de tout document rendu public, des prix plus bas que ceux affichés par ses concurrents.

(212)  Ce montant est la différence entre le besoin net de trésorerie de la SNCM (soit 19,75 millions d’euros) et le produit net des cessions d’actifs résultant de la décision de 2003 (soit […] millions d’euros correspondant à la vente du navire Aliso et des participations dans Southern Trader, Someca et Amadeus). Il porte l’apport en capital total octroyé par l’État à la SNCM à 69,29 millions d’euros.


ANNEXE I

DISPOSITIF DE LA DÉCISION DE 2003

Article premier

L’aide à la restructuration que la France envisage de mettre à exécution en faveur de la Société Nationale Maritime Corse-Méditerranée (SNCM) est compatible avec le marché commun, aux conditions prévues aux articles 2 à 5.

Article 2

La SNCM s’abstient, à compter de la notification de la présente décision et jusqu’au 31 décembre 2006, d’acquérir de nouveaux navires et de signer des contrats de construction, de commandes ou d’affrètement pour de nouveaux navires neufs ou remis à neuf.

La SNCM ne peut, à compter de la notification de la présente décision et jusqu’au 31 décembre 2006, opérer que les 11 navires que l’entreprise SNCM possède déjà, à savoir: le Napoléon Bonaparte, le Danielle Casanova, l’Île de Beauté, le Corse, le Liamone, l’Aliso, le Méditerranée, le Pascal Paoli, le Paglia Orba, le Monte Cinto et le Monte d’Oro.

Si la SNCM doit remplacer, en raison d’évènements indépendants de sa volonté, un de ses navires avant le 31 décembre 2006, la Commission pourra autoriser un tel remplacement sur la base d’une notification dûment motivée par la France.

Article 3

Le groupe SNCM cède l’ensemble de ses participations directes et indirectes dans les sociétés suivantes:

Amadeus France,

la Compagnie Corse Méditerranée,

la société civile immobilière Schuman,

la Société Méditerranéenne d’Investissements et de Participations,

la Someca.

Au lieu de céder ses participations dans la Société Méditerranéenne d’Investissements et de Participations, la SNCM peut vendre l’actif unique de cette société, le Southern Trader, et fermer cette filiale.

Les cessions peuvent être faites, au choix des autorités françaises, soit par offre publique de vente, soit par appel à manifestation d’intérêt avec publicité préalable offrant un délai de réponse d’au moins deux mois.

La France communique à la Commission les preuves de l’ensemble des cessions. La faiblesse des offres que la SNCM recevra ne pourra pas être invoquée pour ne pas procéder aux cessions. En cas d’absence d’offre et si la France peut prouver que toutes les mesures de publicité nécessaires ont été prises, la condition visée au premier alinéa sera réputée remplie.

Article 4

Pour toutes les lignes à destination de la Corse, la SNCM s’abstient, à compter de la notification de la présente décision et jusqu’au 31 décembre 2006, de toute politique tarifaire pour les tarifs publiés, visant à offrir des prix plus bas que ceux de chacun de ses concurrents pour des destinations et des services équivalents et pour des dates identiques.

La Commission se réserve le droit d’ouvrir la procédure d’investigation pour tout manquement constaté aux conditions prévues par la présente décision, et notamment à la condition visée au premier alinéa.

La condition visée au premier alinéa est remplie si chaque jour, les prix les plus bas affichés par la SNCM sont supérieurs aux prix promotionnels les plus bas affichés par chacun de ses concurrents, pour des destinations et des services équivalents.

La condition visée au premier alinéa ne s’applique plus dès lors que les prix desdits concurrents deviennent supérieurs aux tarifs de la SNCM en vigueur lors de l’année de référence 1996, corrigés de l’inflation.

La France communique à la Commission, chaque année avant le 30 juin, tous les éléments nécessaires pour démontrer que cette condition a bien été remplie pour l’année civile précédente, pour l’ensemble des traversées à destination ou au départ de la Corse.

Article 5

Conformément aux engagements pris par les autorités françaises dans le plan de restructuration, les nombres annuels de rotations de navires sur les différentes liaisons maritimes avec la Corse sont limités jusqu’au 31 décembre 2006 aux seuils prévus au tableau 3 de la présente décision (1), sauf pour des raisons exceptionnelles et non imputables à la SNCM, qui l’obligeraient à reporter certaines rotations sur d’autres ports et sauf changement des obligations de service public pesant sur l’entreprise.

Article 6

La France est autorisée à recapitaliser la SNCM par un premier versement d’un montant de 66 millions d’euros à compter de la notification de la présente décision.

Jusqu’à la fin de la période de restructuration, c’est-à-dire jusqu’au 31 décembre 2006, la Commission pourra décider, sur demande des autorités françaises, d’autoriser ultérieurement un second versement à la SNCM qui correspondra à la différence entre les 10 millions d’euros restants et le produit des cessions exigées à l’article 3, selon les modalités visées audit article.

Une telle décision ne pourra être prise que si les actions exigées à l’article 3 ont été exécutées, que le produit des cessions ne dépasse pas 10 millions d’euros et pour autant que les conditions stipulées aux articles 2, 4 et 5 ont été respectées, sans préjudice du pouvoir de la Commission d’ouvrir le cas échéant la procédure formelle d’investigation à l’encontre du non-respect de l’une d’entre elles. À défaut, la seconde tranche d’aide ne sera pas versée.

Article 7

La France informe la Commission, dans un délai de six mois à compter de la notification de la présente décision, des mesures prises pour s’y conformer.

Article 8

La République française est destinataire de la présente décision.


(1)  Voir annexe II de la présente décision.


ANNEXE II

TABLEAU 3 DE LA DÉCISION DE 2003

Évolution de l’offre de la SNCM

 

Nombre de traversées

Places offertes

Mètres linéaires offerts

2001

> 2003

2001

> 2003

2001

> 2003

Marseille-Corse

1 881

[…]

1 723 050

[…]

1 469 000

[…]

Toulon-Corse

187

[…]

303 650

[…]

0

[…]

Golfe de Gênes

1 768

[…]

1 708 700

[…]

0

[…]

Sous-total Europe

3 836

3 067

3 735 400

2 357 500

1 469 000

[…]

Maghreb

302

372

444 000

635 000

0

0

Total

4 138

3 439

4 179 400

2 992 500

1 469 000

[…]