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de l'Union européenne

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Séries C


C/2024/2101

26.3.2024

Avis du Comité économique et social européen sur la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil concernant la lutte contre le retard de paiement dans les transactions commerciales

[COM(2023) 533 final — 2023/0323 (COD)]

(C/2024/2101)

Rapporteurs:

Panagiotis GKOFAS

Alena MASTANTUONO

Angelo PAGLIARA

Consultation

Conseil de l’Union européenne, 6.10.2023

Parlement européen, 2.10.2023

Base juridique

Articles 114 et 304 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne

Compétence

Section «Marché unique, production et consommation»

Adoption en section

20.12.2023

Adoption en session plénière

17.1.2024

Session plénière no

584

Résultat du vote

(pour/contre/abstentions)

215/14/8

1.   Conclusions et recommandations

1.1.

Le Comité économique et social européen (CESE) accueille favorablement la communication de la Commission européenne relative au train de mesures de soutien aux PME. Il se félicite également de l’intention que celle-ci manifeste de continuer à lutter contre les retards de paiement. Le respect des délais de paiement contribue à un environnement économique plus sain et sert l’objectif stratégique consistant à approfondir le marché unique. Dans le même temps, le Comité craint que la transformation de la directive actuelle en règlement ne limite la marge de manœuvre des États membres et la souplesse qui caractérise l’environnement des entreprises, à un moment où de multiples turbulences secouent l’Union. Il demande que les mesures proposées fassent l’objet d’une évaluation plus approfondie et d’une mise en œuvre qui soit proportionnée et adaptée à chaque cas.

1.2.

Le CESE constate que le caractère systématique des retards de paiement varie grandement selon les secteurs et les États membres. Le Comité cible aussi deux grands problèmes généraux en la matière, en ce qui concerne, d’une part, l’application des règles existantes et, d’autre part, les retards de paiement de la part des pouvoirs publics, malgré le plafond de 60 jours que prévoit la directive en vigueur. Les paiements effectués par le secteur public ont, en moyenne, un retard supérieur de 13 jours par rapport à ceux observés chez les entreprises, dont les délais de paiement ne sont pas plafonnés. Aussi le CESE invite-t-il celui-ci à montrer l’exemple en se conformant aux règles en vigueur.

1.3.

Dans certains États membres, la lenteur et le coût des procédures judiciaires, de même que la crainte de nuire aux relations commerciales, dissuadent les créanciers de faire appel aux tribunaux pour recouvrer les sommes dues. Il importe de mieux utiliser les outils numériques ainsi que d’encourager l’éducation financière et le recours à d’autres moyens de garantie (par exemple, les garanties bancaires, le paiement du prix d’achat comme nantissement ou le droit de rétention) et à des modes différents de résolution des litiges.

1.4.

Si le CESE reconnaît les avantages qu’il peut y avoir à introduire des organismes nationaux chargés de l’application, il souligne néanmoins que ces instances devront opérer avec objectivité et garantir une confidentialité maximale dans le traitement des informations sensibles sur le plan commercial, que celles-ci concernent les entreprises ou les administrations publiques, sans imposer de nouvelles obligations de déclarations.

1.5.

Le CESE soutient l’élaboration de programmes d’éducation financière proposés en collaboration avec les administrations publiques nationales, le secteur bancaire, les agences et institutions européennes (par exemple, l’Alliance européenne des petites entreprises ou la Banque centrale européenne), ainsi que les organisations professionnelles. Les services publics ou les agences, aux côtés des partenaires sociaux et des chambres de commerce, pourraient offrir des services d’éducation financière et de conseil en matière de retard de paiement sans que cette action relève de la réglementation sur les aides d’État.

1.6.

Il faudrait accorder une attention particulière aux retards de paiement dans le cas de transactions commerciales entre des entreprises européennes et des entités de pays tiers.

1.7.

Le rapport sur la mise en œuvre du règlement devrait tenir compte des évaluations et rapports émanant du CESE, des partenaires sociaux et des chambres de commerce, en collaboration avec les autres colégislateurs.

2.   Informations contextuelles

2.1.

En septembre 2023, la Commission a publié le train de mesures de soutien aux PME, qui comprend une proposition de règlement sur les retards de paiement, une proposition de directive sur la simplification de la fiscalité pour les PME, ainsi qu’un ensemble de mesures visant à améliorer les performances de ces dernières, en veillant avant tout à perfectionner le programme d’amélioration de la réglementation, à accroître l’accès au financement, à renforcer les compétences de la main-d’œuvre et à recourir à d’autres mécanismes de soutien.

2.2.

Ce train de mesures prévoit aussi que soit révisé le cadre juridique associé à la directive sur les retards de paiement, afin de remédier aux lacunes inhérentes à la législation actuelle de l’Union. Plus précisément, les mesures de la Commission visent à pallier le manque de dispositions préventives et l’absence de délai de paiement maximal, à assurer une mise en œuvre efficace du mécanisme de retard de paiement et à faciliter l’accès des PME aux mécanismes de recours.

2.3.

Le rapport sur les paiements publié en 2023 par Intrum indique que le délai de paiement moyen est de 41 jours dans les relations interentreprises, tandis que le délai effectif s’établit en moyenne à 56 jours. Le secteur public, quant à lui, offre en moyenne des délais de paiement de 52 jours, sachant qu’en réalité les paiements sont généralement effectués sous 69 jours.

2.4.

Avec des variations d’un État membre à l’autre (1), l’accès au financement continue de peser lourdement sur les économies et les entreprises qui accusent des défaillances structurelles ou sont plus exposées aux crises économiques.

2.5.

La hausse mondiale des taux d’intérêt du secteur bancaire a eu un effet d’entraînement sur les contraintes en matière de liquidités pour les entreprises et les PME, en particulier celles qui suivent un programme d’investissement. Par ailleurs, au-delà de l’augmentation nominale des taux d’intérêt, ce sont aussi les différentiels de taux qui perturbent les performances des entreprises, en particulier celles des PME.

3.   Observations générales sur la proposition de règlement concernant la lutte contre le retard de paiement

3.1.

Les coûts élevés de l’énergie et des matières premières, conjugués au remboursement des prêts destinés à maintenir les activités économiques pendant la pandémie de COVID-19, ont eu pour effet de renforcer considérablement l’importance que revêt le respect des délais de paiement, en particulier pour les PME européennes. Si les administrations publiques et les grandes entreprises parviennent à diversifier leurs portefeuilles de clients et de fournisseurs, les PME ne peuvent compter que sur un nombre limité de clients et sur des volumes et réserves de financement restreints, et elles opèrent principalement aux niveaux régional et local. Toutefois, la différence de pouvoir de négociation entre les parties n’explique pas totalement les retards de paiement: le caractère inefficace de la force exécutoire représente un obstacle majeur pour les créanciers, lesquels ont tendance à ne pas exercer leurs droits dans le souci de préserver leurs relations commerciales avec un débiteur.

3.2.

La situation se voit encore aggravée par l’inflation exceptionnellement élevée et les hausses de taux d’intérêt correspondantes, soit autant de facteurs qui sapent les investissements. Les conditions de paiement se dégradent pendant les périodes de turbulences économiques, car les entreprises ont alors besoin de préserver leurs flux de liquidités et leurs réserves. Contrairement aux grandes entreprises, les PME n’ont qu’un accès limité aux prêts bancaires (2), de sorte que certaines d’entre elles trouvent dans les retards de paiement une source de financement temporaire, qui les aide à faire face aux pénuries de liquidités. Aussi le CESE soutient-il la volonté de la Commission de rendre les flux de trésorerie plus prévisibles, mais émet des réserves quant à la solution qu’elle propose.

3.3.

Le CESE note que la réaction en chaîne qu’entraînent les retards de paiement ne se limite pas à perturber le bon déroulement des activités des entreprises au quotidien. Le caractère systématique de ces retards, qui varie selon les pays et selon les secteurs, gêne aussi les entreprises dans la planification de leurs investissements à long terme.

3.4.

Dans son analyse d’impact, la Commission reconnaît qu’il est impossible de mesurer les répercussions sociales des retards de paiement (3). Néanmoins, cette pratique déloyale pénalise les patrons de petites entreprises, leur famille et leurs salariés, entraînant de lourdes conséquences sur le règlement des services publics, des loyers et des emprunts, ainsi que sur le moral et la productivité des intéressés. En outre, en 2022, 47 % des entreprises interrogées par Intrum déclaraient qu’un paiement plus rapide les aiderait à embaucher davantage (4).

3.5.

Depuis l’adoption de la directive sur les retards de paiement (directive 2000/35/CE) en 2000 et sa première révision par la directive 2011/7/UE, les pratiques de paiement déloyales sont devenues de plus en plus flagrantes chez tous les acteurs concernés (autorités publiques, grandes entreprises et PME), tout particulièrement dans le cas des paiements versés par des administrations publiques à des entreprises (5).

3.6.

Le CESE relève que l’actuelle directive 2011/7/UE a globalement fait ses preuves au fil des ans. Elle a fortement contribué à améliorer l’éthique de paiement, à mieux faire connaître le sujet et à garantir un environnement plus équitable pour les entreprises. Pour autant, les retards de paiement ont toujours cours, et le CESE reconnaît la nécessité d’agir avec efficacité. Le CESE estime donc qu’il faut explorer les pistes qui permettraient de renforcer la mise en œuvre et amélioreraient la culture du paiement. Cependant, comme pour toute autre modification de la réglementation, il convient de procéder avec discernement, notamment pour ce qui est des règles de droit privé.

3.7.

Cette année, le délai de paiement moyen pratiqué dans les relations interentreprises est de 41 jours, contre 52 jours dans le secteur public. Quant au délai de paiement effectif, il s’établit à 56 jours pour les opérations interentreprises, soit trois de plus que l’année dernière, ce qui reste nettement inférieur aux 69 jours observés pour le secteur public. Ces chiffres montrent clairement que le problème réside dans le respect des délais de paiement convenus, plutôt que dans leur durée. Le CESE estime dès lors que la Commission, par sa proposition, s’efforce de traiter la question des longs délais de paiement, sans remédier au problème des retards, en introduisant des mesures excessivement restrictives plutôt que d’améliorer le cadre de mise en œuvre existant par des règles plus efficaces.

3.8.

Le CESE souligne que l’importance des retards de paiement varie considérablement d’un État membre à l’autre (6) et d’un secteur à l’autre. En conséquence, la Commission aurait dû évaluer plus avant la possibilité de modifier la directive existante et opter pour une directive révisée («refonte») si des ajustements significatifs s’imposaient, pour éviter que toutes les entités ne soient concernées, sans tenir compte de leur dimension ni des rapports de force. Les PME ont besoin d’être soutenues, et les nouvelles règles devraient viser à leur offrir un environnement plus équitable. Toutefois, en pratique, la série de règles proposées privera les PME de la flexibilité dont elles ont besoin de la part de leurs partenaires commerciaux et leur imposera des conditions inutilement strictes.

3.9.

Les mesures prévues par la Commission pour parvenir au respect des délais de paiement ne devraient pas empêcher les parties engagées dans des négociations de contrats de s’entendre sur des délais de paiement plus longs. Le CESE souligne donc à quel point il importe de prévoir une certaine souplesse dans les négociations visant à fixer les délais de paiement, et fait part de ses vives préoccupations concernant la proposition de la Commission. En effet, le plafond de 30 jours envisagé supprimera la liberté contractuelle qui prévaut entre entreprises. Même si elles disposent aujourd’hui d’une certaine souplesse qui leur permet de négocier librement les délais de paiement, les entreprises s’acquittent de leurs créances bien plus rapidement que le secteur public, soumis pour sa part à un plafond de 60 jours. En l’espèce, il ne semble pas justifié de porter atteinte à la liberté contractuelle, et toute mesure en ce sens serait disproportionnée au regard des avantages auxquels on peut raisonnablement s’attendre.

3.10.

Le CESE renvoie à cet égard aux résultats de la consultation publique ouverte menée par la Commission (7), dont il ressort clairement que la préférence des répondants (pour 29 % d’entre eux) va au maintien des règles actuelles en matière de délais de paiement. Par ailleurs, plusieurs parties prenantes ont marqué leur opposition à une limitation de la liberté contractuelle en cochant la case «Autres options». Enfin, en signalant le caractère crucial de la question soulevée, le CESE renvoie à la résolution du Parlement européen sur l’état de l’Union des PME, publiée en juillet 2023, dans laquelle il insiste sur la nécessité de «faire face aux retards de paiement […] tout en garantissant une solution équilibrée qui préserve la liberté contractuelle» (8).

3.11.

Le CESE convient que la durée de la procédure de vérification ou d’acceptation de marchandises ou de services ne devrait pas dépasser 30 jours à compter de la date de réception des marchandises ou des services, mais souligne que cette mesure posera problème à certains entrepreneurs pour des raisons techniques propres à leurs marchandises. Il convient d’assurer un suivi attentif dans le cadre d’une approche sectorielle, en tenant compte du caractère asymétrique des risques pesant sur certains secteurs économiques.

3.12.

Le CESE reconnaît que l’une des principales lacunes de la directive actuelle réside dans l’absence de définition claire du concept d’«abus manifeste» et dans la nécessité pour les tribunaux d’en donner une interprétation. Cette disposition ambiguë s’est révélée problématique au fil du temps, car elle laisse aux entreprises une marge de manœuvre pour s’écarter de la «norme» de 30 jours, ce délai de paiement pouvant être porté à 60 jours civils pour les relations commerciales interentreprises. À cet égard, le CESE prend note de l’intention de la Commission de remplacer ce concept par une liste de pratiques nulles et non avenues, comme le prévoit l’article 9 de la proposition de règlement.

3.13.

Toutefois, d’un point de vue juridique, cet article ne saurait être appliqué. En effet, il est impossible de déclarer nulle et non avenue — au titre de l’article 9, paragraphe 1, point d) — une pratique qui consisterait à «retarder ou empêcher intentionnellement l’envoi de la facture». En outre, en cohérence avec le paragraphe 3.9 du présent avis, le CESE estime que la mention des délais de paiement dans les transactions interentreprises devrait disparaître de l’article 9, paragraphe 1, point a), car cette question devrait être convenue exclusivement par les parties au contrat.

3.14.

Si le CESE reconnaît les avantages qu’il y a à introduire des organismes nationaux chargés de l’application, il insiste néanmoins sur la nécessité absolue de veiller au bon fonctionnement et à l’efficacité de ces derniers. Ainsi, ces instances devront opérer de façon objective et indépendante, et garantir une confidentialité maximale lorsqu’elles traitent des informations sensibles sur le plan commercial, que celles-ci concernent les entreprises ou les administrations publiques. Jusqu’à présent, les pouvoirs publics nationaux n’ont pas réussi à garantir le bon fonctionnement des mécanismes de mise en œuvre, en particulier dans les transactions entre administrations publiques et entreprises. Compte tenu du caractère chronique et avéré des retards de paiement du secteur public aux entreprises, le CESE s’inquiète de la capacité des autorités publiques à faire respecter la réglementation par d’autres administrations appartenant à la même structure de gouvernance.

3.15.

On compte de nombreuses entreprises de l’économie sociale parmi les opérateurs économiques qui pâtissent lourdement des retards de paiement par des administrations. Le problème est d’autant plus lourd de conséquences que, bien souvent, pour la prestation de services d’assistance sociale, d’éducation et de formation, le secteur public est leur seul client. Il n’existe pas de marché privé pour ces entreprises, ce qui les rend particulièrement vulnérables, car elles n’ont d’autre choix que de se tourner vers les marchés publics.

3.16.

Par conséquent, les retards de paiement comptent parmi les facteurs qui dissuadent les PME de participer aux marchés publics. Les données fournies par la Commission attestent que les pouvoirs publics ne respectent pas les délais de paiement. Aussi le CESE se félicite-t-il de la proposition de fixer le délai de paiement à 30 jours pour les opérations entre administrations publiques et entreprises. Les pouvoirs publics, en tant que partenaire essentiel des entreprises, devraient montrer l’exemple. Le nouveau règlement propose en outre une meilleure protection des sous-traitants dans les travaux publics de construction, en exigeant que les contractants prouvent aux pouvoirs adjudicateurs (ou aux entités adjudicatrices) qu’ils ont payé leurs sous-traitants directs. Cette disposition aura une incidence massive sur les fournisseurs qui utilisent les paiements émanant du pouvoir adjudicateur pour régler leurs sous-traitants.

3.17.

Le CESE encourage les colégislateurs à envisager d’autres moyens que celui visé à l’article 4 pour garantir le respect des délais de paiement aux sous-traitants lors de l’attribution de marchés publics. Obliger le contractant à payer ses sous-traitants directs préalablement ou concomitamment à toute demande de paiement va à l’encontre de l’objectif qui vise à garantir que tous les acteurs de la chaîne de valeur soient payés dans des délais compatibles avec des flux de trésorerie sains. Comme l’indique la proposition de la Commission, le risque est grand de faire supporter au contractant le préfinancement des travaux. Pour garantir que les sous-traitants soient payés sans délai, le CESE recommande que le contractant principal fournisse une déclaration dans un délai d’un mois à compter de la réception du paiement émanant des pouvoirs publics. Cette déclaration doit certifier que le paiement des sous-traitants est effectué dans les 30 jours qui suivent la réception du paiement émanant des pouvoirs publics.

3.18.

Les nouvelles dispositions prévues aux articles 5 et 6, qui s’appuient sur les articles 3 et 4 de la directive actuelle, marquent une étape vers l’instauration d’une culture du paiement rapide. Les pratiques de paiement abusives se traduisent souvent par une renonciation injustifiée aux intérêts, tant que le montant sous-jacent est payé. Si le règlement des intérêts de retard devient automatiquement exigible, les débiteurs seront incités à respecter les échéances fixées dans le contrat. L’article 5, paragraphe 3, indique clairement que «[l]e créancier ne peut renoncer à son droit d’obtenir des intérêts de retard». Bien que le CESE comprenne l’objectif d’encourager les PME à exiger le paiement d’intérêts, il se déclare également inquiet que le refus de la possibilité de renoncer à ce droit puisse entraîner des difficultés pour les PME en tant que débiteurs.

3.19.

Le CESE estime que le nouveau montant forfaitaire de 50 EUR qui est proposé devrait respecter une certaine proportionnalité avec le montant de l’opération.

3.20.

Le CESE partage la position de la Commission lorsque celle-ci invite les États membres à encourager les PME à utiliser les outils numériques qui permettent de mieux respecter les délais de paiement et à faciliter leur accès à des formations sur la gestion du crédit. Les PME manquant souvent de culture financière et numérique, les États membres devraient intensifier la collaboration avec les partenaires sociaux, ainsi qu’avec les chambres de commerce et d’industrie, afin de répertorier les bonnes pratiques et de former les entreprises et leur personnel dans ces domaines. Compte tenu des limites des ressources financières disponibles pour ce type de formation, les organisations professionnelles devraient recevoir l’appui et les moyens nécessaires pour les former sur ces différents aspects, sans que cela ne soit considéré comme une aide d’État.

3.21.

Le CESE est tout à fait favorable à l’article 16 et souligne l’importance de réduire autant que possible les obstacles existants, tels que la complexité qui caractérise l’ouverture de procédures judiciaires à l’encontre des débiteurs. Au vu de la longueur et du coût de ces procédures, les États membres devraient encourager la médiation volontaire ainsi que d’autres formes de règlement extrajudiciaire des litiges pour résoudre rapidement les différends en matière de paiement.

4.   Observations particulières

4.1.

Le CESE reconnaît aussi que l’objectif de la Commission devrait viser la mise en œuvre systématique de processus volontaires pour la facturation et les virements électroniques, de manière à assurer plus de sécurité juridique grâce aux preuves électroniques. Néanmoins, compte tenu du cadre économique précaire dans lequel évoluent actuellement les PME, l’adoption de pratiques de paiement numérique devrait être soutenue et facilitée par la Commission et les États membres. En outre, leur introduction doit être à la portée de toutes les entreprises. Le CESE recommande de prévoir une mise en place progressive de ces outils, pour garantir que les PME aient le temps d’acquérir les connaissances et les moyens financiers nécessaires pour y accéder.

4.2.

Le CESE salue la tentative de la Commission de remédier au manque de données officielles sur les retards de paiement en Europe. Il fait remarquer qu’il importe d’échanger les bonnes pratiques au niveau européen en renforçant le rôle de l’Observatoire européen des paiements, estimant par ailleurs qu’il appartient à celui-ci de recueillir des informations et données fournies périodiquement par les États membres, en collaboration avec les organismes nationaux chargés de l’application (ou d’autres autorités compétentes en la matière) ainsi qu’avec des centres de recherche privés indépendants, afin d’évaluer l’efficacité du règlement. En tout état de cause, cette démarche ne devrait pas entraîner de nouvelles obligations de déclaration pour les entreprises.

4.3.

Le CESE attire l’attention sur la dimension extérieure de la proposition: le durcissement des conditions en matière de délais de paiement risquerait de peser sur les transactions commerciales au sein du marché unique et de pousser les entreprises à opérer en dehors de l’Union. En effet, il deviendrait plus aisé de traiter avec des fournisseurs de pays tiers qui sont autorisés à accepter des délais de paiement plus longs. Cette éventualité pourrait représenter une menace potentielle pour la compétitivité de l’Europe et doit être évitée.

4.4.

Le CESE convient que les transactions commerciales dont le paiement doit intervenir après la date d’entrée en vigueur du présent règlement devraient être soumises à ses dispositions. Toutefois, cette mesure ne devra s’appliquer que si le contrat en question a été signé après la date d’application du règlement. Le CESE juge cette approche nécessaire pour garantir aux entreprises comme aux pouvoirs publics une transition stable entre le cadre juridique actuel et celui proposé dans le règlement.

4.5.

Il convient de surveiller, d’analyser et de réexaminer périodiquement les paiements versés par le secteur public aux contractants du secteur privé, non seulement dans le cadre des programmes et réformes nationaux, mais aussi en associant plus largement les partenaires sociaux et les représentants des chambres de commerce à l’analyse d’impact et au processus d’évaluation en amont et en aval.

4.6.

Les partenaires sociaux et les chambres de commerce, qui sont le mieux au fait des besoins et lacunes de leurs propres secteurs, pourraient jouer un rôle significatif dans la conception d’outils appropriés pour former et sensibiliser l’ensemble de la société aux questions financières, ainsi que d’instruments et d’autres procédures qui contribueront à promouvoir la culture en la matière.

Bruxelles, le 17 janvier 2024.

Le président du Comité économique et social européen

Oliver RÖPKE


(1)  Banque centrale européenne, Survey on the Access to Finance of Enterprises in the euro area — October 2022 to March 2023 («Enquête sur l’accès des entreprises au financement dans la zone euro d’octobre 2022 à mars 2023», en anglais).

(2)  Blog «Cogito» de l’OCDE, «Delay now, pay later — why SMEs must not put off investing in innovation and greening» («Reporter se paye plus tard — Pourquoi les PME ne doivent surtout pas repousser leurs investissements dans l’innovation et l’écologisation», en anglais).

(3)  Analyse d’impact, SWD(2023) 314 final, point 227, page 58.

(4)  Intrum 2022 — Annual and Sustainability Report 2022 — Long-term credit management for a sound economy («Rapport annuel et de viabilité 2022 — Gestion du crédit à long terme pour une économie saine»,en anglais).

(5)  Selon la Commission, dans certains États membres, les autorités publiques prennent 100 jours en moyenne pour régler leurs factures, avec des pics pouvant considérablement dépasser ce délai. Voir ici: «Retards de paiement: La Commission traduit l’Italie devant la Cour de justice pour ses retards de paiement envers ses fournisseurs».

(6)  Le rapport de la Commission consacré à l’examen des performances des PME fait état de profondes disparités entre les États membres quant à la mise en œuvre des règles de l’actuelle directive sur les retards de paiement, soulignant que ces derniers finissent par devenir une forme de financement à coût nul. Le document peut être consulté en anglais grâce au lien suivant: Rapport annuel 2022-2023 sur les PME européennes.

(7)  Retards de paiement — mise à jour des règles de l’UE.

(8)  TA(2023)0294.


ELI: http://data.europa.eu/eli/C/2024/2101/oj

ISSN 1977-0936 (electronic edition)