ISSN 1977-0936

Journal officiel

de l'Union européenne

C 487

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Édition de langue française

Communications et informations

59e année
28 décembre 2016


Numéro d'information

Sommaire

page

 

I   Résolutions, recommandations et avis

 

AVIS

 

Comité économique et social européen

 

519e session plénière du CESE des 21 et 22 septembre 2016

2016/C 487/01

Avis du Comité économique et social européen sur les Nouvelles mesures en faveur d’une gouvernance et d’une mise en œuvre axées sur le développement — Évaluation des Fonds structurels et d’investissement européens et recommandations y afférentes (Avis d’initiative)

1

2016/C 487/02

Avis du Comité économique et social européen sur Les droits des prestataires de services à la personne logés à domicile (avis d’initiative)

7

2016/C 487/03

Avis du Comité économique et social européen sur La politique de l’UE en matière de biodiversité (avis d’initiative)

14

2016/C 487/04

Avis du Comité économique et social européen sur L’après-Paris (avis d’initiative)

24

2016/C 487/05

Avis du Comité économique et social européen sur La position du CESE sur des questions clés spécifiques soulevées dans le cadre des négociations sur le partenariat transatlantique de commerce et d’investissement (PTCI) (avis d’initiative)

30

2016/C 487/06

Avis du Comité économique et social européen sur «Le développement durable — Recensement des politiques intérieures et extérieures de l’Union européenne (avis exploratoire)

41

2016/C 487/07

Avis du Comité économique et social européen sur Une législation à l’épreuve du temps (avis exploratoire)

51


 

III   Actes préparatoires

 

COMITÉ ÉCONOMIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN

 

519e session plénière du CESE des 21 et 22 septembre 2016

2016/C 487/08

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil sur le cadre juridique de l’Union régissant les infractions douanières et les sanctions qui y sont applicables[COM(2013) 884 final — 2013/0432 (COD)]

57

2016/C 487/09

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 2013/34/UE en ce qui concerne la communication, par certaines entreprises et succursales, d’informations relatives à l’impôt sur les bénéfices[COM(2016) 198 final — 2016/0107 (COD)]

62

2016/C 487/10

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (UE) 2016/399 en ce qui concerne l’utilisation du système d’entrée/sortie[COM(2016) 196 final — 2016/0105 (COD)] et sur la Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil portant création d’un système d’entrée/sortie pour enregistrer les données relatives aux entrées et aux sorties des ressortissants de pays tiers qui franchissent les frontières extérieures des États membres de l’Union européenne ainsi que les données relatives aux refus d’entrée les concernant, portant détermination des conditions d’accès à l’EES à des fins répressives et portant modification du règlement (CE) no 767/2008 et du règlement (UE) no 1077/2011[COM(2016) 194 final — 2016/0106 (COD)]

66

2016/C 487/11

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil concernant des mesures visant à garantir la sécurité de l’approvisionnement en gaz naturel et abrogeant le règlement (UE) no 994/2010[COM(2016) 52 final — 2016/0030 (COD)]

70

2016/C 487/12

Avis du Comité économique et social européen sur la Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — Une stratégie de l’Union pour le gaz naturel liquéfié et le stockage du gaz[COM(2016) 49 final]

75

2016/C 487/13

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de décision du Parlement européen et du Conseil établissant un mécanisme d’échange d’informations en ce qui concerne les accords intergouvernementaux et les instruments non contraignants conclus entre des États membres et des pays tiers dans le domaine de l’énergie, et abrogeant la décision no 994/2012/UE[COM(2016) 53 final]

81

2016/C 487/14

Avis du Comité économique et social européen sur la communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions intitulée Initiative européenne en faveur de l’informatique en nuage — Bâtir une économie compétitive des données et de la connaissance en Europe[COM(2016) 178 final]

86

2016/C 487/15

Avis du Comité économique et social européen sur la Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — Priorités pour la normalisation en matière de TIC dans le marché unique numérique[COM(2016) 176 final]

92

2016/C 487/16

Avis du Comité économique et social européen sur la Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions: Plan d’action européen 2016-2020 pour l’administration en ligne — Accélérer la mutation numérique des administrations publiques[COM(2016) 179 final]

99

2016/C 487/17

Avis du Comité économique et social européen sur la Communication de la Commission — Programme indicatif nucléaire, présenté en application de l’article 40 du traité Euratom pour avis au Comité économique et social[COM(2016) 177 final]

104

2016/C 487/18

Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (UE) no 1303/2013 du Conseil en ce qui concerne certaines dispositions ayant trait à la gestion financière pour certains États membres qui connaissent des difficultés ou une menace de graves difficultés quant à leur stabilité financière [COM(2016) 418 final — 2016/0193 (COD)]

111

2016/C 487/19

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition modifiée de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif à des droits de douane supplémentaires sur les importations de certains produits originaires des États-Unis d’Amérique (Texte codifié)[COM(2016) 408 final — 2014/0175 (COD)]

112

2016/C 487/20

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 2004/37/CE concernant la protection des travailleurs contre les risques liés à l’exposition à des agents cancérigènes ou mutagènes au travail[COM(2016) 248 final — 2016/0130 COD]

113


FR

 


I Résolutions, recommandations et avis

AVIS

Comité économique et social européen

519e session plénière du CESE des 21 et 22 septembre 2016

28.12.2016   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 487/1


Avis du Comité économique et social européen sur les «Nouvelles mesures en faveur d’une gouvernance et d’une mise en œuvre axées sur le développement — Évaluation des Fonds structurels et d’investissement européens et recommandations y afférentes»

(Avis d’initiative)

(2016/C 487/01)

Rapporteur:

Etele BARÁTH

Décision de l’Assemblée plénière

21.1.2016

Base juridique

Article 29, paragraphe 2, du règlement intérieur

 

Avis d’initiative

Compétence

section «Union économique et monétaire, cohésion économique et sociale»

Adoption en section spécialisée

8.9.2016

Adoption en session plénière

21.9.2016

Session plénière no

519

Résultat du vote

(pour/contre/abstentions)

171/1/4

1.   Conclusions et recommandations

1.1.

Le Comité économique et social européen (CESE) estime qu’il y a lieu de mettre en place une gouvernance européenne coordonnée et axée sur le développement, visant à contribuer à la construction d’une Europe renouvelée, forte et pacifique. Il convient de renforcer la coordination, éventuellement en dotant la gouvernance d’un nouveau mode d’organisation.

1.2.

Il conviendrait de rétablir un développement dynamique de l’économie au moyen d’évolutions coordonnées, et de consolider les fondements du bien-être social et de la démocratie, la coexistence des différentes cultures et le respect exemplaire de l’environnement.

1.3.

Le CESE souligne que l’application cohérente du principe de partenariat vise à favoriser la participation des parties prenantes à la planification et à la mise en œuvre des investissements des fonds de l’Union européenne. Cette participation renforcera l’engagement collectif en faveur des investissements et permettra de recourir plus largement à l’expertise. Elle rendra plus efficace la mise en œuvre des projets, augmentera la transparence et contribuera à prévenir les fraudes et les abus.

1.4.

Ce dont nous avons besoin, ce sont des objectifs et une stratégie simples et accessibles, un projet unique pour l’Europe (stratégie UE 2030-50). Il y a lieu de confirmer que la création d’une Europe innovante, viable et inclusive demeure un objectif stratégique majeur de l’Union. À cet effet, les objectifs de la COP 21 (objectifs de développement durable) devraient également être intégrés dans le projet.

1.5.

Les programmes de développement doivent être mieux coordonnés. L’élaboration des programmes et outils de développement à court, moyen et long termes doit reposer sur un ensemble d’objectifs concis. Par «outils», on entend l’ensemble des instruments politiques, juridiques, organisationnels et financiers.

1.6.

Pour améliorer la coordination, le CESE préconise d’utiliser, au service des objectifs européens communs, les Fonds structurels et d’investissement européens (Fonds ESI) traditionnels ainsi que les projets, axés sur le marché et mobilisant aussi des capitaux privés, qui émanent du Fonds européen pour les investissements stratégiques (FEIS). À cette fin, il importe de coordonner les objectifs et la réglementation relative à leur mise en œuvre.

1.7.

Le Comité propose que le principal instrument au service d’une gouvernance centrale axée sur le développement et renforcée soit le semestre européen, qui s’appuie sur l’examen annuel de la croissance et qui devrait aussi prévoir les moyens d’influencer de façon continue le projet pour l’Europe et d’en suivre attentivement les développements. Le semestre européen pourrait ainsi s’acquitter par la même occasion des missions des systèmes qui visent à assurer un environnement social garantissant le bien-être.

1.8.

Parallèlement à l’indicateur de performance du PIB déjà adopté et de nature essentiellement économique, un indicateur de résultat (résultat intérieur brut), complémentaire du premier, reflétant aussi la durabilité et comportant principalement des facteurs sociaux et environnementaux, pourrait servir de base au contrôle de l’efficacité de la gouvernance axée sur le développement.

1.9.

Une étroite coordination et la mise en place d’une méthode ouverte de coopération entre les États membres sont nécessaires. Il y a lieu de procéder à l’adaptation de l’expérience acquise à ce jour dans les processus de développement.

1.10.

Les instruments juridiques et financiers doivent être consolidés. Les performances de la gouvernance axée sur le développement seront fonction du dynamisme de l’économie, de l’accroissement du capital mobilisé, de l’efficacité accrue du système d’investissement, du niveau de qualifications renforcé de la main-d’œuvre et du degré d’innovation des entreprises. Mais son principal objectif à plus long terme est de créer du bien-être et une société renouvelée et de garantir un environnement amélioré et durable.

1.11.

Une mise en œuvre partagée, à plusieurs niveaux, est nécessaire. Parallèlement à la réforme en cours (programme REFIT), il convient de développer les instruments juridiques et administratifs de la gouvernance axée sur le développement. À cet égard, les instruments de niveau intermédiaire, c’est-à-dire les instruments de coordination des développements macrorégionaux, doivent être considérablement renforcés. De plus, le rôle des régions fonctionnelles, des villes, des zones urbaines, des agglomérations, des zones métropolitaines et des réseaux acquiert une valeur considérable dans le cadre du projet pour l’Europe.

1.12.

L’un des principaux éléments d’une gouvernance axée sur le développement à long terme est la continuité. Il y a lieu de coordonner les conditions de la nature cyclique des politiques, des processus de programmation et de développement et des horizons budgétaires. L’activité de développement suppose une analyse continue, un contrôle et des corrections.

1.13.

Il est particulièrement important d’informer le public avec précision, de promouvoir son engagement, de développer la communication et le marketing politique et de présenter comme il se doit les résultats concrets et les faiblesses.

1.14.

Le CESE a toujours plaidé en faveur du renforcement de la participation démocratique. S’agissant de la méthode ouverte de coopération, la participation des partenaires économiques et sociaux et des organisations non gouvernementales (ONG) devrait être garantie à tous les niveaux, ce qui, au niveau européen, doit aller de pair avec la valorisation du rôle du CESE.

1.15.

Comme il l’a déjà indiqué dans son avis de 2012 (1), le CESE soutient l’initiative de la Commission européenne relative à l’instauration d’un code dit «de conduite européen en matière de partenariat» (CCEP), dont l’objectif est de fournir aux États membres un cadre de partenariat en matière de planification et de mise en œuvre. La conception que les partenaires ont de l’Europe contribuera à définir les objectifs et à favoriser l’identification à ces derniers, et améliorera l’efficience de la mise en œuvre des plans.

1.16.

Le CESE souligne qu’il y a lieu de dépasser la réglementation du partenariat fondée sur les propositions et les bonnes pratiques et de préciser largement les attentes minimales auxquelles les autorités des États membres seront tenues de satisfaire sous peine de sanctions.

1.17.

Le CESE recommande que les États membres soient tenus de mettre en place des systèmes de financement efficaces en faveur du renforcement des capacités des partenaires. Ces systèmes devraient dépasser les simples formations ou transmissions d’informations et couvrir également le développement de réseaux de partenariat et la mise en place d’instruments de participation effective.

1.18.

Le CESE invite instamment la Commission européenne à renforcer la coopération avec les réseaux de partenariat européens. Il convient que la Commission européenne mette en place un système de financement qui contribue au fonctionnement des réseaux européens d’ONG actives dans la politique régionale, s’agissant notamment du contrôle des processus nationaux et de la garantie du retour d’informations.

2.   Pour une Europe renouvelée et forte

2.1.    État des lieux et exposé des motifs

2.1.1.

L’Union européenne est forte, mais se trouve toujours confrontée à une crise multiforme qui se renouvelle, comme le démontre bien le Brexit. La crise économique de 2008 a brisé l’euphorie suscitée par l’élargissement du début des années 2000 et inversé, dans de nombreux pays, le processus de rattrapage.

2.1.2.

La crise économique, et plus particulièrement la baisse des investissements qui en a découlé, a fissuré l’unité fondée sur la croissance qui existait entre les États membres et causé des tensions politiques, économiques et sociales croissantes. En dépit de l’objectif fondamental de l’Union, les écarts de développement entre les États membres se creusent.

2.1.3.

La poursuite de l’imposition de politiques d’austérité strictes à des pays touchés par un niveau élevé de dettes publique et extérieure et par des déficits budgétaires contribue à élargir encore l’écart entre les pays les plus avancés et ceux qui sont confrontés à l’austérité. De nouvelles politiques s’imposent pour combiner, d’une part, la croissance économique et le contrôle du déficit budgétaire et, d’autre part, des politiques efficaces d’insertion sociale.

2.1.4.

La pauvreté, la précarité de l’emploi et le chômage ont atteint un niveau inacceptable. L’absence de perspectives pour les jeunes constitue un obstacle de taille à l’avenir renouvelable de l’Europe.

2.1.5.

L’Union européenne a perdu son statut de lieu attrayant pour les investisseurs et acquis une réputation de lourdeur. S’agissant des investissements productifs, elle perd progressivement du terrain par rapport aux États-Unis et à certains de ses États membres, tels que l’Allemagne et le Royaume-Uni. Les pays à la traîne freinent les plus dynamiques. La nécessité d’une interdépendance mutuelle diminue. Dans certains pays, en dépit d’un excédent budgétaire substantiel, l’écart se creuse en raison de la baisse des investissements productifs, ce qui, en outre, accentue encore le décrochage des régions les plus pauvres. La réaction est lente et bureaucratique.

2.1.6.

Les acquis fondamentaux de l’Union, tels que la zone euro ou l’espace Schengen, apparaissent aujourd’hui, dans un contexte dominé par la crise des migrants et le terrorisme, comme des facteurs de division plutôt que des éléments de cohésion. Dans de nombreux pays, l’Union européenne est instrumentalisée à des fins de lutte politique intérieure.

2.1.7.

Les niveaux de développement des régions ne convergent pas. Mesuré en PIB, l’écart entre les régions les plus avancées et les plus en retard de développement est de 14 à 1. Certains pays, comptant parmi les grands bénéficiaires, utilisent les fonds qui leur sont attribués en lieu et place de leurs instruments étatiques et facilités d’investissement, leur contribution nationale ayant été réduite à un niveau minimal, nettement en-deçà des objectifs initiaux. Les conseils de la compétitivité nouvellement créés pourraient mettre leurs instruments à profit pour apporter une contribution majeure à la convergence des niveaux de développement des régions.

2.1.8.

Les citoyens et acteurs économiques, sociaux et non gouvernementaux (ONG) européens n’ont plus aucune perspective, ils se sont éloignés du processus politique pour se replier de plus en plus sur eux-mêmes. Ils perçoivent l’Union européenne comme une institution rigide, manquant de flexibilité et incapable de renouvellement.

2.1.9.

L’Union européenne, principalement en raison de la faiblesse de ses performances et de son système institutionnel dans le domaine du développement, n’est pas en mesure de mobiliser des moyens suffisants pour atteindre ses objectifs, par ailleurs fragmentés.

2.1.10.

Il n’y a pas d’unicité dans la vision de l’avenir, la volonté politique ou la capacité de gouvernance. La méthode de coordination est insuffisante et obsolète, les instruments juridiques n’ont aucun impact ou sont difficilement utilisables, la participation des organisations et le soutien social sont faibles, notamment en raison d’une communication défaillante.

2.1.11.

La stratégie de développement à long terme de l’Union, jusqu’en 2020, ne voit déjà plus suffisamment loin et n’est plus réaliste, en plus d’être fragmentée et incapable d’orienter les processus dans des cadres méthodologiques actuels. Dans l’intervalle, la prise en considération des 17 grands objectifs de développement durable qui ont été adoptés a permis à la Commission européenne d’entamer, dans le cadre d’une stratégie complexe à long terme, l’examen du système et des instruments de gouvernance.

2.2.    De nouvelles voies

2.2.1.

C’est dans ce contexte que la nouvelle Commission européenne, soutenue par le Parlement européen, a lancé un nouveau paradigme de développement économique. Les objectifs formulés — la création d’emplois et la promotion de la croissance, la réalisation du marché unique européen, la simplification du système de régulation économique, la consolidation des développements communautaires prioritaires, le marché de l’énergie, le soutien des investissements dans le marché et les services numériques, le traitement prioritaire des réseaux intellectuels et physiques pour interconnecter l’Europe, et le renforcement de la responsabilité environnementale peuvent apporter une nouvelle dynamique importante à l’économie.

2.2.2.

Le semestre européen et ses composantes constituent un système qui dépasse le cadre de la gouvernance économique. Il conviendrait de renforcer le rôle des objectifs socio-environnementaux à long terme dans le cadre du mécanisme du semestre européen.

2.2.3.

Le programme prioritaire visant à consolider pleinement le système financier de la zone euro n’est d’une part pas satisfaisant, et, d’autre part, renforce la crainte bien réelle de voir s’approfondir encore le fossé entre les pays européens. Des objectifs de développement au niveau européen pourraient atténuer la paralysie de l’Europe à deux vitesses.

2.2.4.

À l’heure actuelle, deux grands ensembles d’instruments économico-financiers très différents, assortis chacun de leur propre procédure, déterminent les processus de développement. Il y a lieu de renforcer la complémentarité entre ces ensembles dès le stade de la coordination des objectifs.

2.2.5.

Il s’agit, premièrement, des traditionnels Fonds structurels et d’investissement européens (Fonds ESI), inscrits dans les traités, dont le but est de favoriser la cohésion sociale, économique et territoriale. Ils prennent la forme d’aides à l’investissement et au développement, modernisées en permanence, mais dont la nature reste inchangée, disponibles grâce à la redistribution du budget de l’Union alimenté par les contributions des États membres. Dans un certain nombre de cas, ces fonds ne sont pas estimés à leur juste valeur par les bénéficiaires, qui font valoir qu’ils leur «sont dus». Lors de la révision dite «à mi-parcours» de la période courant jusqu’en 2020, l’adoption d’une nouvelle réglementation s’impose pour favoriser la complémentarité mentionnée plus haut.

2.2.6.

Le second ensemble d’instruments est le Fonds européen pour les investissements stratégiques (FEIS), qui doit permettre de réaliser le nouveau «plan Juncker» et qui est un nouvel instrument financier axé sur le marché, offrant la possibilité de soutenir le capital-risque et mobilisant des fonds publics, bancaires et privés, et dont le montant peut encore être augmenté. Le mécanisme de gouvernance mis en place doit devenir un élément constitutif de la gouvernance axée sur le développement. L’harmonisation de ces deux systèmes de financement devrait également avoir lieu au niveau de chaque État membre.

2.2.7.

En comparaison de ces régimes de financement, les autres instruments financiers qui fonctionnent bien sont des instruments diversifiés, adaptés à leurs missions, mais à l’ampleur limitée et aux objectifs spécifiques. Les cadres du projet pour l’Europe sont susceptibles de faire l’objet d’une coordination étroite et systématique.

2.2.8.

À ce jour, les moyens directs susceptibles de favoriser la réalisation des objectifs, peu nombreux mais non interconnectés, de la stratégie Europe 2020 visant à améliorer la coordination, n’ont pas été mis en œuvre. En l’absence de tels moyens, l’on peut toutefois se demander s’il est possible de coordonner le développement de l’Union européenne de manière adéquate. Il convient donc que la planification de l’interaction entre les différents instruments figure également parmi les missions du nouveau plan pour la période après 2020.

2.2.9.

Il faudrait que les 11 objectifs thématiques du cadre financier pluriannuel régissant les Fonds ESI ainsi que les 10 objectifs principaux du plan Juncker, qui ne se recoupent que vaguement avec les objectifs précités, et leur réglementation financière et réglementaire respective contribuent aujourd’hui à la réalisation de la stratégie Europe 2020. À cela s’ajoutent les 17 critères de référence des objectifs de développement durable, déterminants pour l’avenir. Les missions dans le cadre du processus de programmation pour la période postérieure à 2020 devraient s’appuyer sur un nombre réduit d’objectifs clairs et concis.

2.2.10.

À l’heure actuelle, les différents mécanismes associés aux objectifs, les diverses échéances et dates de début et de fin ont encore pour conséquence qu’aucun objectif n’est transparent ni ne peut être compris et suivi aisément par les milieux économiques et sociaux et la société civile. L’absence de synergies ou d’interactions entre les différents objectifs réduit considérablement l’efficacité des instruments et des investissements. Il convient de renforcer les synergies entre le FEIS et la stratégie «Europe 2020» renouvelée en élaborant une nouvelle stratégie UE 2030-2050 (projet pour l’Europe).

2.2.11.

Alors que les Fonds structurels s’accompagnent de mécanismes de préparation, d’exécution, de contrôle et d’analyse très bureaucratiques, à la fois centralisés et décentralisés, et qu’il existe au niveau de l’Union un grand nombre d’agences pour veiller à leur mise en œuvre, le nouveau mécanisme de gouvernance du récent FEIS sort du cadre de la Commission européenne et sa nouvelle structure organisationnelle repose sur les besoins liés au climat financier et d’investissement. La coordination des deux grands ensembles suppose la mise en place d’un instrument stratégique et d’un nouveau système de gouvernance (2).

2.2.12.

La mise en place d’un nouveau système de gouvernance axée sur le développement peut donner lieu à une coordination renforcée et une coopération ouverte entre les partenaires concernés.

2.2.13.

Pour améliorer l’efficacité et l’efficience des Fonds ESI, il convient de renforcer la structure institutionnelle du partenariat et de l’ouvrir, en vertu du droit de participation publique, à tous les citoyens européens. Ceux-ci devraient en effet se voir garantir la possibilité d’accéder à l’information pertinente et de participer aux décisions de planification et de mise en œuvre. Ils devraient également pouvoir donner leur avis en ce qui concerne les projets de programmes, d’appels d’offres et de rapports d’évaluation.

3.   Renforcer le partenariat

3.1.

Le CESE a déjà abordé la question du principe de partenariat et formulé des propositions détaillées à cet égard dans plusieurs avis.

3.1.1.

Dans l’avis qu’il a adopté en 2010 (3), le CESE a souligné que les règlements en vigueur laissaient une marge d’interprétation trop large du concept de partenariat à l’échelon national et que la Commission européenne devrait en conséquence jouer un rôle plus fort et beaucoup plus volontariste en tant que gardienne du principe de partenariat. Il a estimé essentiel que tous les programmes opérationnels garantissent aux partenaires les ressources d’assistance technique nécessaires au renforcement de leurs capacités. Il a plaidé en faveur d’un retour aux programmes d’initiative communautaire pour l’innovation sociale et le développement local.

3.1.2.

Dans son avis datant de 2012 (4), le CESE a apporté son soutien à l’initiative de la Commission européenne visant à instaurer un code de conduite européen en matière de partenariat. Il a fait part des préoccupations de la société civile organisée liées au non-respect du principe de partenariat et a suggéré de mettre en place un système de contrôle du partenariat géré par les partenaires eux-mêmes. Il a proposé de conditionner la conclusion des accords de partenariat avec les États membres à une mise en œuvre adéquate du code de conduite et de compléter à cette fin les ressources des programmes opérationnels au moyen d’incitations financières. Il a en outre confirmé ses recommandations concernant le renforcement des capacités des partenaires.

3.2.

La législation relative à la politique de cohésion prévoit l’instauration d’un code dit «de conduite européen en matière de partenariat» (CCEP), qui contient des principes directeurs et des bonnes pratiques.

3.3.

Il ressort des expériences acquises dans le contexte de la mise en œuvre du CCEP que certains pays n’ont que formellement appliqué les dispositions du code dans le cadre des processus nationaux de programmation et de la transformation de la structure institutionnelle de mise en œuvre des Fonds ESI.

3.4.

Dans plusieurs pays, les partenaires ne se sont pas vu accorder suffisamment de temps pour formuler une opinion par rapport aux documents pertinents. Ils n’ont pas été associés sur le fond aux principales décisions stratégiques, telles que celles concernant la définition des priorités ou encore les dotations financières. Aucun mécanisme ou instrument spécial de communication et de participation n’a été mis en place pour favoriser la participation active.

3.5.

Les analyses réalisées par plusieurs ONG (5) ont montré que, dans un certain nombre de pays, les exigences relatives à la sélection des partenaires appelés à siéger au sein des comités de suivi ont été formellement respectées, sans pour autant que la représentativité et la couverture thématique soient assurées dans tous les cas. L’échange d’informations entre les autorités de gestion et les membres des comités de suivi laisse à désirer.

3.6.

Ainsi, les autorités responsables des questions horizontales, comme par exemple les ministères de l’environnement, n’ont pas obtenu de siège dans plusieurs comités de suivi pertinents. Les autorités de gestion ne s’appliquent pas à associer les partenaires de la société civile représentant les principes horizontaux à la planification des appels à projets et à l’évaluation des propositions.

3.7.

Les interventions visant à renforcer les capacités des partenaires sont insuffisantes dans certains pays. En effet, elles s’y limitent dans une large mesure aux formations et au remboursement des frais de voyage, alors que plusieurs propositions du CCEP, concernant par exemple le développement de réseaux et la coordination, ou encore la couverture des frais d’experts nécessaires pour assurer une participation effective du partenaire, restent lettre morte.

3.8.

La Commission européenne et les États membres n’ont pas accordé une attention suffisante à l’utilisation des instruments de la méthode du développement local mené par les acteurs locaux au développement local mené par les acteurs locaux (DLAL) au cours de la première moitié de la période budgétaire.

3.9.

Le CESE estime nécessaire de procéder à un examen général des pratiques en matière de partenariat. Cet examen doit également comporter une évaluation de la mise en place des procédures de planification et de la structure institutionnelle de mise en œuvre, et évaluer dans quelle mesure le système réglementaire actuel est capable de déboucher sur un partenariat efficace. Les partenaires devraient être activement associés au processus d’évaluation.

Bruxelles, le 21 septembre 2016.

Le président du Comité économique et social européen

Georges DASSIS


(1)  Avis du CESE sur «Le principe de partenariat dans le cadre de la mise en œuvre des fonds relevant du cadre stratégique commun — Éléments en vue d’un code de conduite européen en matière de partenariat» (JO C 44 du 15.2.2013, p. 23).

(2)  Avis de la commission de la politique de cohésion territoriale et du budget de l’UE du CdR sur la «Simplification des Fonds ESI du point des vue des collectivités locales et régionales», rapporteur: Petr Osvald (CZ/PSE).

(3)  Avis du CESE sur le thème «Comment encourager des partenariats efficaces en matière de gestion des programmes de la politique de cohésion, en se fondant sur les bonnes pratiques du cycle 2007-2013» (JO C 44 du 11.2.2011, p. 1).

(4)  Voir note de bas de page (1).

(5)  Les analyses réalisées par le réseau CEE Bankwatch et SFteam for Sustainable Future.


28.12.2016   

FR

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C 487/7


Avis du Comité économique et social européen sur «Les droits des prestataires de services à la personne logés à domicile»

(avis d’initiative)

(2016/C 487/02)

Rapporteur:

M. Adam ROGALEWSKI

Décision de l’assemblée plénière

21.1.2016

Base juridique

Article 29, paragraphe 2, du règlement intérieur

 

Avis d’initiative

Compétence

Section spécialisée «Emploi, affaires sociales, citoyenneté»

Adoption en section spécialisée

9.9.2016

Adoption en session plénière

21.9.2016

Session plénière no

519

Résultat du vote

(pour/contre/abstentions)

168/2/6

1.   Recommandations

1.1.

Il est nécessaire d’engager une discussion sur l’établissement en Europe d’une définition commune de la profession des «prestataires de services à la personne logés à domicile», qui reconnaisse cette activité comme une forme de prestation de services à la personne dispensée à domicile. La définition des services à la personne fournis par des prestataires logeant à domicile devrait couvrir les formes de travail dans lesquelles les travailleurs (salariés ou indépendants) résident dans des domiciles privés, où leur activité principale consiste notamment à prodiguer des services à des personnes âgées ou handicapées. Il convient de rattacher les prestataires de services à la personne logeant au domicile du bénéficiaire au secteur des services de longue durée à la personne, indépendamment de leur statut de salariés ou d’indépendants. L’introduction d’une définition commune de cette profession vise à reconnaître l’existence des prestataires de services à la personne logeant à domicile sur le marché européen du travail et à améliorer la qualité des services de prise en charge à long terme qu’ils fournissent.

1.2.

Dans un souci d’éclairer l’élaboration des politiques, Eurostat devrait recueillir des données adéquates sur les prestataires de services à la personne logés à domicile.

1.3.

Le Comité économique et social européen (CESE) appelle la Commission européenne à mener des recherches sur la situation de ces travailleurs, concernant notamment leurs nombre, nationalité, statut migratoire, mobilité transfrontière, intégration réelle au marché du travail et aux systèmes de protection sociale, conditions de travail et de vie, ainsi que leur contribution effective et potentielle aux économies européennes.

1.4.

Le CESE souligne que les prestataires de services à la personne logés à domicile devraient être traités de la même manière que les autres travailleurs du secteur des services à la personne. En conséquence, ils devraient bénéficier d’une protection similaire, par exemple en ce qui concerne les limites fixées à leur temps de travail (y compris les périodes d’astreinte) et le travail indépendant fictif. Les prestataires de services à la personne logés à domicile qui sont salariés ne devraient pas être exclus du champ d’application des réglementations afférentes dans l’Union européenne et ses États membres qui ont trait à l’emploi et qui portent, entre autres, sur une rémunération décente, la protection de la santé et de la sécurité, la sécurité sociale et la liberté d’association, et de négociation collective.

1.5.

Il convient d’agir de manière résolue pour remédier à la pénurie de main-d’œuvre dans le secteur des services de longue durée à la personne en Europe, en garantissant des conditions de travail et de rémunération décentes, en inversant la tendance au sous-investissement, en assurant le respect des principes de la libre circulation, en éliminant les entraves qui empêchent ces travailleurs d’exercer leurs droits et en créant des passerelles à l’intention des migrants pour qu’ils aient accès à un emploi régulier.

1.6.

Le CESE invite l’Union européenne à collaborer étroitement avec les États membres pour coordonner l’offre de prestataires de services à la personne logés à domicile et la mobilité de ces travailleurs dans le cadre d’une stratégie visant à améliorer la capacité globale du secteur à offrir des prestations de qualité. Les mesures spécifiques devraient comprendre les points suivants:

améliorer les garanties prévues par la directive 2009/52/CE sur les sanctions à l’encontre des employeurs, afin de protéger les droits des travailleurs sans-papiers dans le contexte de la lutte contre leur emploi irrégulier. Il y a lieu d’appliquer rigoureusement les dispositions de la directive 2012/29/UE sur les droits des victimes, afin de fournir, quel que soit leur statut migratoire, une assistance efficace aux prestataires de services à la personne logés à domicile qui sont victimes d’exploitation,

aligner toutes les directives de l’Union européenne concernées sur la convention no 189 de l’Organisation internationale du travail (OIT) qui octroie des droits aux travailleurs domestiques,

inclure les droits des prestataires de services à la personne logés à domicile et les bénéficiaires de ces prestations dans les futures révisions ou propositions de législation de l’Union européenne et des États membres,

inscrire la réforme des régimes de services à la personne par des prestataires logés à domicile au rang des priorités au sein de la plate-forme européenne de lutte contre le travail non déclaré, une initiative à laquelle le CESE a réservé bon accueil,

inscrire les droits des travailleurs du secteur des services à la personne dans le cadre du semestre européen et les inclure dans les consultations menées sur le thème «Un nouvel élan pour concilier vie professionnelle et vie privée»,

lancer une campagne d’information, à l’échelle européenne, à destination des bénéficiaires et des prestataires de ces services, sur les droits desdits prestataires de services à la personne logés à domicile,

promouvoir et soutenir la mise en place d’organisations et de coopératives de prestataires de services à la personne logés à domicile,

appliquer des procédures de reconnaissance, d’harmonisation et de transférabilité des qualifications et expériences acquises par les prestataires de services à la personne logés à domicile, à l’aide de dispositifs servant à la reconnaissance des qualifications, notamment ceux récemment introduits par la stratégie pour des compétences nouvelles et des emplois (1),

réaffecter des fonds européens pour financer l’organisation de formations à l’intention des prestataires de services à la personne logés à domicile qui exercent déjà cette activité ou qui pourraient s’y destiner, afin d’améliorer la qualité des prestations,

surveiller et améliorer le détachement des prestataires de services à la personne logés à domicile en appliquant le principe «à travail égal, salaire égal».

En outre, il convient de noter que la proposition de la Commission relative au socle européen des droits sociaux (SEDS) ne contient aucune référence à la situation des prestataires de services à la personne logés à domicile. Dans la suite des préparatifs concernant ce socle, sur lequel le CESE est en train d’élaborer un avis, il conviendrait d’envisager que les droits de ces prestataires soient pris en compte.

1.7.

Les États membres devraient s’assurer de la protection des droits des bénéficiaires et des prestataires de services à la personne, y compris ceux qui sont logés à domicile. Les mesures spécifiques devraient comprendre les points suivants:

ratifier et mettre en œuvre la convention no 189 de l’OIT (2) et régulariser les prestataires de services à la personne logés à domicile qui sont sans-papiers,

lancer des mesures de soutien, en jouant notamment un rôle d’intermédiaire pour aider les bénéficiaires de services à la personne à trouver un prestataire de ces services qui les assure en logeant à leur domicile,

mettre en place un système complet d’aide à l’intention des bénéficiaires de services et de leurs familles, moyennant notamment des incitations fiscales ou des subventions,

offrir des programmes de formation aux prestataires de services à la personne logés à domicile, qui devraient bénéficier de congés payés afin d’y assister,

promouvoir la liberté d’association et de négociation collective dans le secteur, en soutenant notamment le droit des prestataires de services à la personne logés à domicile et de leurs employeurs à rejoindre ou constituer des associations,

lutter contre le dumping social et l’exploitation,

réglementer par anticipation le secteur des services de longue durée à la personne, en vue notamment d’y assurer le respect du droit du travail, afin de garantir la protection de leurs bénéficiaires comme des prestataires de services à la personne logés à domicile. Ces dispositions doivent donner aux services d’inspection du travail et autres organisations, publiques ou non gouvernementales, compétentes la possibilité d’avoir accès aux lieux de travail situés dans des logements privés.

1.8.

Le CESE souligne qu’il y a lieu de concrétiser, par un investissement public adéquat et pérenne, une aide financière en faveur des destinataires de services à la personne qui dépendent de prestataires logés à leur domicile.

1.9.

Les syndicats, les employeurs et les organisations de la société civile doivent être associés à la planification des politiques au niveau des États membres et de l’Union européenne. Il convient de promouvoir le dialogue social et civil avec toutes les parties prenantes et à tous les niveaux.

1.10.

Le CESE devrait jouer un rôle actif pour encourager le développement de politiques européennes destinées à accompagner les prestataires de services à la personne, les destinataires de ces prestations et leurs familles, notamment par l’organisation d’une conférence sur l’avenir en Europe des prestataires logés au domicile des bénéficiaires.

2.   Contexte

2.1.

Les pénuries de main-d’œuvre dans le secteur des soins de santé constituent une «bombe à retardement». La crise en la matière est persistante (3) et s’aggravera si des mesures appropriées ne sont pas engagées pour y répondre. En 1994 déjà, la Commission européenne qualifiait les services à la personne de secteur stratégique. En 2010, elle adressait une mise en garde en indiquant qu’il manquerait deux millions de professionnels du secteur de la santé, d’ici 2020, si aucune action n’était entreprise d’urgence afin de juguler la pénurie au niveau de l’offre de travail, attendu qu’il manquait jusqu’à un million de prestataires dans le secteur des services de longue durée à la personne (4).

2.2.

Parmi les travailleurs du secteur des services de longue durée à la personne, les prestataires de services à la personne logés à domicile forment une catégorie numériquement importante mais marginalisée. Ils se caractérisent par une grande mobilité et occupent le bas de la hiérarchie professionnelle de leur branche d’activité. Ils sont souvent laissés pour compte dans la réflexion de l’Union européenne et des États membres sur la planification de ce domaine des services de longue durée à la personne.

2.3.

Faute de données, il est difficile de connaître le nombre exact de prestataires de services à la personne logés à domicile. En effet, cette catégorie de travailleurs est souvent négligée par les systèmes de collecte de données. Dans un contexte où la main-d’œuvre employée dans le secteur des services à la personne est peu reconnue et mal rémunérée, les prestataires de ces services qui sont logés au domicile des bénéficiaires restent depuis trop longtemps invisibles aux yeux des décideurs politiques.

2.4.

On trouve des prestataires de services à la personne logés à domicile dans tous les États membres. Ce sont souvent des migrants issus de pays tiers mais aussi des citoyens européens, qui travaillent dans leur pays d’origine ou à l’étranger. Certains sont des migrants sans-papiers et employés de manière irrégulière, et d’aucuns se rattachent à des circuits de migration circulaire ou temporaire. Bon nombre d’entre eux exercent leur activité dans des conditions précaires, qui peuvent notamment prendre la forme d’un travail indépendant fictif.

2.5.

En l’absence d’une définition de leur profession à l’heure actuelle, les prestataires de services à la personne logés à domicile ont une situation assimilée à celle des travailleurs domestiques (5). L’OIT estime que le travail domestique, services à la personne compris, représente entre 5 et 9 % de l’emploi total dans les pays industrialisés (6).

2.6.

Certains États membres ont progressé dans la régularisation et l’intégration des migrants sans-papiers qui travaillent comme prestataires de services à la personne, en signant la convention no 189 de l’OIT.

2.7.

Le CESE a déjà apporté une contribution à l’élaboration des politiques touchant aux services d’aide de longue durée à la personne en rédigeant des avis sur les droits des travailleurs domestiques (7), sur la nécessité d’engager des investissements sociaux (8) et sur l’aide sociale à long terme et la désinstitutionalisation (9). Le présent avis s’appuie sur ces prises de position, en se concentrant sur la situation spécifique des prestataires de services à la personne logés à domicile.

3.   Pénurie de main-d’œuvre, austérité, migration et prestataires de services à la personne logés à domicile

3.1.

Les services aux personnes à domicile se développent rapidement, sous l’influence du choix de plus en plus fréquent que font les personnes qui ont besoin de ces services de les recevoir chez eux, de leur coût prohibitif en institution pour de nombreux citoyens, ainsi que de l’insuffisance de l’investissement dans les infrastructures de services à la personne.

3.2.

Les mesures d’austérité engagées par la plupart des États membres ont abouti à réduire les infrastructures qui étaient en place, alors qu’elles étaient déjà limitées, et à diminuer l’offre de main-d’œuvre dans le secteur des services de longue durée à la personne. Le CESE estime qu’il convient d’avoir une vision positive de l’investissement dans les services de longue durée à la personne, en les considérant comme une perspective favorable pour l’économie et un relais privilégié de la création d’emplois, de l’accompagnement social des familles et de l’égalité entre les sexes. Investir dans ce domaine augmente les taux de participation au marché de l’emploi et ouvre une piste envisageable pour sortir de la crise économique (10).

3.3.

Dans de nombreux États membres, on relève une pénurie de main-d’œuvre dans les professions des services à la personne. Le recrutement de prestataires de services à la personne logés à domicile, qu’ils soient en situation régulière ou sans-papiers, atténue le manque de travailleurs dans le secteur des services de longue durée à la personne. Les systèmes de santé du sud de l’Europe, en particulier, s’appuient massivement sur ces prestataires de services à la personne logés à domicile. En Italie, ceux de ces prestataires qui sont des immigrés représentent ainsi les trois quarts environ des effectifs des services à la personne assurés à domicile (11).

3.4.

Les pays d’Europe centrale et orientale sont également affectés par la pénurie de main-d’œuvre dans le secteur des services à la personne, ainsi que par la demande croissante pour ces services en Europe occidentale. La Pologne, par exemple, fournit à d’autres pays de nombreux prestataires de services à la personne logés à domicile, alors même que dans ce secteur des services domestiques, ses ressources en travailleurs s’épuisent. Ce déficit de personnel est comblé par l’arrivée sur son territoire de travailleurs en provenance d’Ukraine et d’autres pays tiers.

3.5.

Malgré une prise de conscience grandissante de l’importance que le secteur des services à la personne revêt pour la prospérité économique, la contribution qu’apportent à l’économie européenne les prestations de services à la personne assurées par des travailleurs résidant au domicile des bénéficiaires n’a pas été mesurée et devrait faire l’objet de recherches à l’échelle européenne.

3.6.

De nombreuses femmes en Europe se trouvent dans une situation où elles sont comme prises en étau, dans la mesure où l’on attend d’elles qu’elles s’occupent à la fois de leurs parents et de leurs enfants. Pour assumer cette tâche, elles font de plus en plus appel à des prestations rémunérées de services à la personne. La mondialisation des activités de services à la personne débouche sur l’essor de filières mondiales assurant ces prestations (12). Il est fréquent que les travailleurs migrants du secteur des services à la personne qui quittent leur pays pour trouver du travail soient contraints eux-mêmes d’embaucher des prestataires d’aide à la personne issus d’autres milieux, souvent plus démunis, pour s’occuper des membres de leur propre famille.

4.   Les conditions de travail des prestataires de services à la personne logés à domicile

4.1.

Le manque de considération qui touche les prestataires de services à la personne logés à domicile est le fruit de stéréotypes sexistes, selon lesquels les prestations d’aide à la personne constitueraient des «métiers de femmes» peu qualifiés. Ces préjugés sont entretenus aussi par la marginalisation structurelle des femmes immigrées. Diverses enquêtes sur la force de travail rangent les travailleurs domestiques dans la catégorie des actifs faiblement qualifiés, voire non qualifiés. Cependant, bon nombre de prestataires de services à la personne logés à domicile possèdent des compétences et qualifications, qui sont le fruit d’années d’expérience ou de programmes non reconnus de formation ou de certification. Il leur est souvent demandé de prouver, pour être embauchés, qu’ils ont de l’expérience ou disposent de qualifications, sans pour autant que ces atouts ne trouvent une traduction dans leurs conditions de travail.

4.2.

Ils sont nombreux à être confrontés à des régimes d’emploi non réglementés et beaucoup exercent leur activité de manière irrégulière. Il est fréquent qu’ils soient empêchés de faire valoir leurs droits et soient victimes d’exploitation. Ces conditions s’assimilent parfois à de l’esclavage moderne: ces travailleurs peuvent subir l’isolement, être victimes de violences ou de maltraitance, être forcés de travailler 24 heures sur 24, 7 jours sur 7, sans bénéficier de conditions d’hébergement d’un niveau élémentaire, par exemple sans disposer d’un espace personnel privatif. D’autres encore sont employés dans un cadre de travail indépendant fictif. Dans bien des cas, l’inspection du travail, les autres organismes gouvernementaux d’inspection ou les syndicats ne peuvent pas rencontrer ces aidants sur leurs lieux de travail, en l’occurrence des domiciles privés.

4.3.

Il convient d’encourager les mesures visant à régulariser et légaliser la situation des prestataires de services à la personne logés à domicile, afin de jeter des passerelles juridiques vers le secteur des services à la personne. Depuis 2002, l’Espagne et l’Italie ont régularisé quelque 500 000 travailleurs domestiques sans-papiers (13). Il y a lieu de développer des politiques de migration professionnelle qui donnent à des ressortissants de pays tiers la possibilité de travailler dans le secteur des services à la personne, en leur assurant l’égalité de traitement et le droit de changer d’employeur.

4.4.

Au sein de la main-d’œuvre du secteur des services de longue durée à la personne, les prestataires qui sont logés au domicile des bénéficiaires constituent l’un des segments dont la mobilité est la plus élevée. Ceux issus des pays d’Europe centrale et orientale sont souvent des femmes d’âge moyen, qui ont elles-mêmes des obligations familiales (14). Il est fréquent que les prestataires de services à la personne qui sont originaires de cette région travaillent pour des périodes allant jusqu’à trois mois consécutifs dans un État d’Europe occidentale avant de regagner leur pays d’origine.

4.5.

Pour leur pays d’origine, l’émigration de prestataires qualifiés de services à la personne logés au domicile des bénéficiaires constitue une «fuite de main-d’œuvre» d’ampleur significative. Quand leurs qualifications ne sont pas reconnues dans l’État de destination, il en résulte une perte économique et sociale, dans un contexte où l’Europe et le monde entier sont touchés par des pénuries généralisées de main-d’œuvre dans le secteur des soins de santé.

4.6.

Ce tableau d’ensemble témoigne des carences dans la protection que les cadres juridiques actuels, au niveau de l’Union européenne comme à celui des États membres, offrent aux prestataires de services à la personne logés à domicile.

4.7.

Les États membres devraient encourager et aider ces prestataires à ne pas travailler de manière irrégulière.

5.   Le rôle des bénéficiaires de services à la personne et de leurs familles

5.1.

Les destinataires de services à la personne et leurs familles éprouvent des difficultés à trouver des prestataires pour les assurer. Dans la plupart des cas, le recrutement s’effectue par le canal de réseaux informels de parents ou d’amis. Généralement, le personnel recruté de la sorte n’offre guère de garantie quant à la qualité des prestations de services à la personne qui sont dispensées. Les familles doivent souvent faire face à l’absence de directives claires sur la façon d’embaucher en toute légalité des prestataires de services à la personne.

5.2.

Les bénéficiaires de ces prestations d’aide à la personne et leurs familles devraient recevoir une assistance adaptée de l’État. Pour le court terme, cette assistance devrait inclure une campagne d’information et un soutien continu concernant les droits du travail et les droits sociaux des prestataires de services à la personne logés à domicile. Pour le long terme, les États membres devraient prendre des mesures afin d’assurer une supervision, ainsi que la présence d’un intermédiaire pour assister les bénéficiaires dans leur recherche de prestataires de services à la personne logés à domicile.

5.3.

Il convient d’offrir aux bénéficiaires des prestations d’aide à la personne et à leurs familles une palette de services d’accompagnement qui soit fonction de leurs besoins et pourra comprendre, par exemple, des services à la personne effectués à domicile à temps partiel ou complet. Tous les dispositifs de prestation de services à la personne doivent garantir des conditions décentes au personnel employé, qu’il soit salarié ou indépendant.

5.4.

Il conviendrait également d’encourager les bénéficiaires de prestations d’aide à la personne et leurs familles à être davantage conscients des besoins des prestataires de ces services à la personne qui sont logés à domicile et à les traiter comme des travailleurs à qui l’on doit le respect et qui possèdent des droits. Les activités d’aide à la personne sont très exigeantes, d’un point de vue tant physique que psychologique. Les prestataires de services à la personne logés à domicile devraient donc bénéficier d’un hébergement adéquat et d’un espace privatif, et dans le cas des salariés, les limites établies pour leur temps de travail, y compris les périodes d’astreinte, doivent être respectées.

5.5.

Parallèlement, il conviendrait également d’assurer le respect du droit de bénéficier de prestations adéquates qu’ont les destinataires de services à la personne. Cet impératif vaut tout particulièrement pour les personnes appartenant à des catégories vulnérables ou ayant des besoins spéciaux, par exemple celles qui souffrent de démence.

6.   Le rôle des employeurs

6.1.

Un grand nombre de petites entreprises, notamment des agences de recrutement, sont de plus en plus actives dans le secteur des services à la personne assurés par du personnel logeant à domicile et exercent leurs activités parallèlement à un marché informel très peu réglementé.

6.2.

Le secteur des services à la personne peut contribuer à créer des emplois décents au domicile de particuliers et à insuffler de la croissance dans l’économie européenne. Seuls des postes de qualité sont à même de garantir des prestations d’aide à la personne d’un niveau satisfaisant.

6.3.

Du fait de l’absence de réglementation en ce qui concerne l’emploi transfrontière des prestataires de services à la personne logés à domicile, certaines entreprises peuvent appliquer des prix inférieurs pour un travail similaire, favorisant ainsi le dumping social. Ce constat est particulièrement flagrant pour les agences polonaises et slovaques qui envoient en Europe occidentale des prestataires de services à la personne logés à domicile (15). La persistance d’une telle concurrence déloyale est néfaste, tant pour les employeurs que pour l’économie européenne.

7.

Le rôle de la société civile

7.1.

Les organisations à base locale et les groupements de nature confessionnelle (16) jouent, aux côtés des employeurs, publics et privés, un rôle déterminant dans la fourniture de prestations d’aide à la personne à différents niveaux. De nombreuses organisations de terrain ont contribué à la régularisation de prestataires immigrés de services à la personne logés au domicile des bénéficiaires (17).

7.2.

Néanmoins, dans bon nombre d’États membres, le soutien apporté à ces prestations d’aide à la personne n’est pas adéquat. Dans toute l’Europe, la récente crise économique a entraîné un sous-investissement dans les services à la personne, déclenchant ainsi des évolutions négatives, telles qu’une dégradation dans la qualité des prestations et les conditions de travail de ce secteur.

7.3.

Il convient d’assurer un financement adéquat des organisations de prestataires de services à la personne, afin de répondre à la demande croissante pour ces prestations. Compte tenu de leur expérience, elles doivent être associées à un véritable dialogue social et sociétal, qui débouche sur l’établissement d’un ensemble de réglementations sectorielles régissant la manière dont il convient d’organiser et de dispenser les prestations d’aide à la personne.

8.   Le rôle des États membres et de l’Union européenne

8.1.

La Suède fournit un bon exemple de pays qui assure des prestations d’aide de qualité aux personnes en associant à la démarche toutes les parties prenantes. Ce dispositif s’appuie sur un niveau élevé de soutien public, financé par la fiscalité (18). Les systèmes de chèques, comme il en existe en France et en Belgique, ont contribué à officialiser le travail domestique et, dans certains cas, à améliorer les conditions de travail des personnes actives dans les services aux ménages. Pour ce qui est de la Belgique, les prestations d’aide à la personne sont exclues de ce dispositif (19).

8.2.

Pour répondre aux besoins de services de longue durée à la personne, l’Autriche a développé un système de prestataires indépendants de services à la personne logés à domicile et a établi des exigences légales concernant la qualité et le cadre général de la fourniture de ces prestations. En 2015, elle a adopté des dispositions supplémentaires pour accroître les exigences de qualité et la transparence de ce dispositif. La population autrichienne a largement recours à ce système, lequel fait néanmoins l’objet de critiques de la part des syndicats autrichiens qui considèrent qu’il fragilise les normes en matière d’emploi.

8.3.

Dans la mesure où les modèles de bonnes pratiques en matière de prestations de qualité pour les services à la personne ne sont pas toujours intégralement transposables dans tous les États membres, c’est au niveau européen qu’il faudrait coordonner une approche globale, garantissant, à tous les échelons, la participation de l’ensemble des intervenants.

8.4.

Le CESE a la conviction que l’Union européenne devrait assurer un suivi concernant l’offre, en Europe, de prestataires de services à la personne logés à domicile, ainsi que la mobilité de ces professionnels, et promouvoir des méthodes qui viseront à renforcer la capacité globale du secteur à offrir des prestations d’aide de qualité et à créer des emplois décents.

8.5.

Les problèmes de pénurie de main-d’œuvre constatés en Europe dans le secteur des services à la personne doivent être placés au rang des priorités d’action de l’Union européenne. Il y a lieu d’attirer l’attention sur la situation des prestataires de services à la personne logés à domicile, qui sont très largement négligés dans les schémas actuels d’action politique.

Bruxelles, le 21 septembre 2016.

Le président du Comité économique et social européen

Georges DASSIS


(1)  COM(2010) 682 final: http://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/PDF/?uri=CELEX:52010DC0682&from=FR

(2)  La convention no 189 de l’OIT, entrée en vigueur le 5 septembre 2013, a été ratifiée à ce jour par l’Allemagne, la Belgique, la Finlande, l’Irlande, l’Italie, le Portugal et la Suisse, ainsi que par 14 pays en dehors de l’Europe.

(3)  UNI Europa, Unicare (2016).

(4)  Commission européenne (2013).

(5)  Dans sa définition du travail domestique, Eurostat inclut les activités des ménages en tant qu’employeurs de personnel domestique, qu’il s’agisse de bonnes, cuisiniers, serveurs, valets de chambre, blanchisseuses, jardiniers, concierges, gouvernantes, gardiennes d’enfants, tuteurs, secrétaires, etc.

(6)  Organisation internationale du travail (2012).

(7)  JO C 21 du 21.1.2011, p. 39; JO C 12 du 15.1.2015, p. 16; JO C 242 du 23.7.2015, p. 9.

(8)  JO C 271 du 19.9.2013, p. 91, JO C 226 du 16.7.2014, p. 21.

(9)  JO C 332 du 8.10.2015, p. 1.

(10)  JO C 226 du 16.7.2014, p. 21.

(11)  Service de recherche du Parlement européen (2016).

(12)  Hochschild, A. R. «Global Care Chains and Emotional Surplus Value» («Chaînes de soins mondiales et valeur ajoutée émotionnelle»), in Hutton, W. et Giddens, A. (éd.) On The Edge: Living with Global Capitalism («Dans les marges — vivre avec le capitalisme mondial»), Londres, 2000.

(13)  Plate-forme pour la coopération internationale sur les sans-papiers (2013).

(14)  Témoignage d’une prestataire de services à la personne qui est logée au domicile du bénéficiaire, Mme Alina Badowska, lors de l’audition publique SOC/535 (2016).

(15)  Conclusions du projet pour une mobilité équitable de la Confédération allemande des syndicats (DGB): www.faire-mobilitaet.de.

(16)  En Allemagne, Caritas et Diakonie jouent notamment un rôle de soutien important pour les prestataires de services à la personne logés à domicile et pour les bénéficiaires de leurs prestations.

(17)  Voir par exemple: www.gfambh.com.

(18)  Sweden.se (2016).

(19)  Organisation internationale du travail (2013).


28.12.2016   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 487/14


Avis du Comité économique et social européen sur «La politique de l’UE en matière de biodiversité»

(avis d’initiative)

(2016/C 487/03)

Rapporteur:

Lutz RIBBE

Décision de l’assemblée plénière

21.1.2016

Base juridique

Article 29, paragraphe 2, du règlement intérieur

 

Avis d’initiative

Compétence

Section spécialisée «Agriculture, développement rural et environnement»

Adoption en section spécialisée

5.9.2016

Adoption en session plénière

21.9.2016

Session plénière no

519

Résultat du vote

(pour/contre/abstentions)

156/31/22

1.   Résumé des conclusions et recommandations du CESE

1.1

La politique de l’Union européenne (UE) en matière de biodiversité constitue un exemple classique d’une politique qui ne tient pas ses promesses, au niveau européen et national et ce, bien qu’elle ait parfaitement cerné les problèmes et mis en place les instruments nécessaires.

1.2

Le CESE met en avant les appréciations portées par la Commission sur l’importance de la protection de la biodiversité, qui est comparable à celle de la préservation du climat. Son enjeu ne se limite pas à sauvegarder des espèces animales et végétales, mais consiste bel et bien aussi à préserver les bases mêmes de l’existence humaine.

1.3

Le CESE appelle de ses vœux l’application cohérente et immédiate des directives «Oiseaux» et «Habitats», ainsi que de la directive-cadre sur l’eau qui, selon lui, contribuerait fortement à améliorer la protection de la biodiversité.

1.4

Il est grand temps que les États membres définissent les besoins financiers réels qu’exige la mise en œuvre de la législation européenne et que la Commission mette à disposition les ressources nécessaires. Étant donné que le financement de Natura 2000 au titre des fonds communautaires et principalement du Fonds européen de développement régional (FEDER) et du Fonds européen agricole pour le développement rural (Feader) apparaît avoir échoué à bien des égards, le CESE demande la création d’une ligne budgétaire distincte qui devra servir à financer le réseau Natura 2000.

1.5

Le CESE réclame qu’une cohérence soit assurée entre tous les domaines d’intervention qui ont une incidence sur la biodiversité. À cet égard, il espère que l’évaluation à mi-parcours des «surfaces d’intérêt écologique» et celle dont la PAC pourrait faire l’objet seront mises à profit pour garantir que celle-ci apportera dorénavant une contribution stratégique plus ciblée à la réalisation des objectifs fixés en matière de biodiversité. Pour l’heure, il s’impose, de l’avis du CESE, d’apporter des modifications à ces surfaces pour ce qui est de la taille et de la qualité.

1.6

Le CESE se félicite expressément du renforcement de l’infrastructure verte. C’est pourquoi il demande à la Commission et aux États membres d’élaborer et de mettre en œuvre une stratégie cohérente en la matière. Par ailleurs, il invite l’UE à faire des réseaux transeuropéens de l’infrastructure verte (RTE-V) une priorité d’investissement. Dans ce domaine aussi, il est urgent que des moyens financiers soient spécifiquement dégagés à cette fin.

1.7

Aucune modification substantielle n’a été effectuée, ces dernières années, pour remédier aux incohérences des politiques européennes qui, à maintes reprises, ont été recensées et critiquées par les services de la Commission, le Conseil «Environnement», le Parlement européen, le Comité des régions(CdR) et le CESE. Or, si l’UE ne prend pas au sérieux et ne met pas en œuvre les propositions qu’elle formule elle-même pour résoudre les problèmes liés à la biodiversité, il n’est pas étonnant que a) les résultats escomptés ne soient pas au rendez-vous et que b) la déception gagne toutes les parties prenantes et la société en général.

1.8

Force est donc de considérer que les diverses stratégies et programmes d’action en matière de biodiversité que l’UE a adoptés en 1998, 2001, 2006 et 2010, et qui ont tous fait une description très pertinente des problèmes et proposé les bons instruments, apparaissent, avec le recul, être en grande partie inutiles, dans la mesure où ils n’ont pas été en mesure de tenir les engagements politiques ni d’enrayer la perte de biodiversité causée par la société.

1.9

C’est la raison pour laquelle le CESE formule à nouveau le constat qu’il avait déjà émis dans nombre de ses précédents avis sur la politique de l’UE en matière de biodiversité: ce ne sont pas les bases juridiques qui font défaut mais bien la volonté politique. Il n’est pas nécessaire de modifier les fondements de droit existants.

2.   Contexte: l’évolution dans le temps de la politique de l’UE en matière de biodiversité et les réponses du CESE

2.1

Partant du constat, tel que formulé dans la stratégie en faveur de la diversité biologique de 1998 (1), que «la diversité biologique de l’Union européenne, caractérisée par sa richesse, a connu une lente mutation au fil des siècles sous l’effet de l’activité humaine» et qu’«au cours des dernières décennies, l’influence de l’homme s’est propagée de façon spectaculaire», la stratégie en faveur du développement durable adoptée par le Conseil européen en 2001, dite «stratégie de Göteborg», a défini des objectifs clairs en matière de biodiversité, à savoir enrayer la diminution de la biodiversité dans l’UE d’ici à 2010 et veiller à restaurer les habitats et les écosystèmes.

2.2

Afin de mettre en œuvre ces objectifs, un plan d’action en faveur de la diversité biologique (2) a été publié en 2001, suivi d’un deuxième en mai 2006 (3), dont le contenu ne différait cependant guère du premier.

2.3

En mars 2010, les chefs d’État et de gouvernements ont dû admettre qu’ils ne tiendraient pas la promesse faite en 2001, et ce en dépit des divers plans d’action présentés, que le CESE avait, à chaque fois, jugés pertinents et judicieux.

2.4

C’est sur la base de la communication de la Commission intitulée «Options possibles pour l’après 2010 en ce qui concerne la perspective et les objectifs de l’Union européenne en matière de biodiversité» (4) qu’a ensuite été arrêtée une nouvelle «stratégie de l’UE à l’horizon 2020 en matière de biodiversité» (5), laquelle, une fois de plus, ne faisait pour l’essentiel que reprendre les anciens impératifs et instruments des plans d’action précédents, et reportait à 2020 les objectifs initialement fixés pour 2010.

2.5

Le texte contenait cette affirmation optimiste que «la stratégie de l’UE en matière de biodiversité à l’horizon 2020 […] met l’UE sur la bonne voie pour respecter ses propres objectifs de biodiversité et ses engagements au niveau planétaire».

2.6

Le CESE s’était prononcé également sur cette stratégie (6) et avait émis des remarques critiques à son propos, en soulignant notamment sa profonde préoccupation de constater que «jusqu’ici les décideurs politiques n’ont pas trouvé la force ou la volonté de mettre en œuvre des mesures dont la nécessité est reconnue depuis des années, bien que la communication démontre une fois encore que la société et l’économie tireraient toutes deux bénéfice d’une politique cohérente dans le domaine de la biodiversité. Même les directives centrales de l’UE relatives à la protection de la nature n’ont pas été pleinement mises en œuvre par les États membres, et ce 32 et 19 ans respectivement après leur entrée en vigueur».

2.7

À l’époque, le CESE estimait que «l’on ne sait toujours pas comment pallier l’absence persistante de volonté politique. En ce sens, la stratégie en faveur de la biodiversité à l’examen ne constitue pas une véritable avancée. Les débats auxquels cette communication a jusqu’ici donné lieu au sein du Conseil des ministres montrent que l’intégration de la politique en matière de biodiversité dans les autres domaines politiques est encore loin d’être effective.»

2.8

Le Comité considérait d’ores et déjà qu’il était de la plus haute importance d’établir un lien étroit entre les réformes politiques alors imminentes (par exemple dans les domaines de la pêche, de l’agriculture, des transports, de l’énergie et de la cohésion) et la stratégie en faveur de la biodiversité. Il estimait toutefois qu’il y avait encore de grandes lacunes sur ce point et était donc amené à conclure que «la Commission se doit de prendre davantage au sérieux sa propre stratégie en matière de biodiversité».

2.9

Quatre ans plus tard à peine, il ne reste déjà plus grand chose des assertions de la nouvelle stratégie de l’UE en matière de biodiversité, qui prétendait avoir mis l’UE sur la bonne voie et enrayer enfin la perte de biodiversité: le constat ressort très clairement de l’examen à mi-parcours de ladite stratégie (7).

3.   L’examen à mi-parcours de l’actuelle stratégie en faveur de la biodiversité

3.1

La stratégie comprend en tout 6 objectifs clairement définis et assortis de 20 actions. L’examen à mi-parcours relève:

3.1.1

concernant l’objectif 1 («enrayer la détérioration de l’état de l’ensemble des espèces et habitats couverts par la législation de l’UE relative à la nature et améliorer leur état de manière significative et mesurable…»), que certains progrès ont été accomplis, mais qu’ils sont trop lents pour que cet objectif puisse être atteint. Les principales lacunes ont trait à l’achèvement du réseau marin Natura 2000, à la gestion efficace des sites Natura 2000 et à l’apport des fonds nécessaires pour en soutenir le réseau. Même si le réseau Natura 2000 terrestre est désormais «largement» achevé, en 2012, des plans de gestion n’étaient appliqués ou en cours d’élaboration que pour 58 % des sites en relevant,

3.1.2

concernant l’objectif 2 («d’ici à 2020, les écosystèmes et leurs services seront préservés et améliorés grâce à la mise en place d’une infrastructure verte et au rétablissement d’au moins 15 % des écosystèmes dégradés»), qu’avec les mesures prises jusqu’à présent, «la dégradation des écosystèmes et des services n’a pas encore cessé»,

3.1.3

concernant l’objectif 3 («renforcer la contribution de l’agriculture et de la foresterie au maintien et à l’amélioration de la biodiversité»), qu’«aucun progrès significatif n’a été accompli», que «le déclin continu de l’état des espèces et des habitats d’importance européenne associés à l’agriculture indique qu’il est nécessaire de déployer davantage d’efforts afin de préserver et d’améliorer la biodiversité dans ces zones» et que «la politique agricole commune (PAC) a un rôle essentiel à jouer dans ce processus en interaction avec les politiques pertinentes en matière d’environnement». Une panoplie d’instruments existe désormais à cette fin mais il est indispensable que les États membres les prennent en main «à un niveau suffisant». L’UE pourrait encore être en mesure d’atteindre son objectif d’ici 2020, mais seulement à condition que ces outils soient utilisés «plus largement». Dans l’ensemble, il est «nécessaire d’intensifier sensiblement les efforts»,

3.1.4

concernant l’objectif 4 («garantir l’utilisation durable des ressources halieutiques»), que «des progrès significatifs ont été réalisés dans la mise en place du cadre stratégique», que «toutefois, la mise en œuvre des politiques est inégale dans l’UE», qu’«il subsiste des défis majeurs pour assurer la réalisation des objectifs dans les délais prévus» et qu’«à peine plus de 50 % des stocks évalués» au regard du rendement maximal durable (RMD) «faisaient l’objet d’une pêche durable en 2013». Les espèces et les écosystèmes continuent de décliner dans toutes les mers d’Europe,

3.1.5

concernant l’objectif 5 («lutter contre les espèces exotiques envahissantes»), qu’il s’agit du seul objectif pour lequel l’UE estime «maintenir le cap» et qu’elle prévoit de pouvoir atteindre d’ici 2020,

3.1.6

concernant l’objectif 6 («contribuer à enrayer la perte de biodiversité au niveau mondial»), que «les progrès sont insuffisants pour réduire l’incidence des schémas de consommation de l’UE sur la biodiversité au niveau mondial» et que «les efforts accomplis ne suffiront peut-être pas à atteindre les objectifs d’Aichi pour la biodiversité dans les temps impartis».

3.2

Cet examen à mi-parcours décevant a été présenté au moment même où la Commission européenne envisage de revoir en profondeur les directives européennes les plus importantes dans le domaine de la protection de la nature, à savoir la directive de 1979 concernant la conservation des oiseaux sauvages (directive «Oiseaux»), et la directive de 1992 concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages (directive «Habitats»).

3.3

Les rapports établis par des experts (8) concernant le bilan de qualité des directives «Oiseaux» et «Habitats» confirment le jugement que le CESE répète inlassablement depuis des années: le cadre juridique est suffisant et on ne peut lui imputer la non-réalisation des objectifs de protection de la biodiversité. Les principales lacunes résident dans l’échec de la mise en œuvre, dans l’absence d’un budget consacré à la protection du milieu naturel et dans l’incohérence des politiques de l’UE.

4.   Observations générales

4.1

Le CESE affirme à nouveau que, dans l’UE, «s’agissant de la préservation de la biodiversité, ce ne sont pas les lois, les directives, les programmes, les projets pilotes, les déclarations politiques ou les documents d’orientation qui font défaut, mais bien leur mise en œuvre et des actions concertées à tous les niveaux d’action politique». Il estime que cette assertion est confirmée non seulement par l’étude d’évaluation mais aussi par les conclusions que le Conseil «Environnement» a formulées le 16 décembre 2015 (9), lesquelles ne diffèrent pas fondamentalement de ses conclusions de 2011. Tant que les directives ne sont pas pleinement transposées, que des ressources financières suffisantes ne sont pas mises à disposition et exploitées, et que l’UE n’aligne pas de façon cohérente ses autres domaines d’intervention politique sur les impératifs de la biodiversité, il sera impossible d’obtenir les résultats escomptés.

4.2

Élaborer de nouveaux documents énonçant des stratégies ou des mesures à prendre, ou remanier le cadre juridique afférent ne changera rien à la situation; au contraire, ce semblant d’activité politique est condamné à rester vain tant que ne seront pas réglés les véritables problèmes, qui consistent en l’absence de transposition du cadre existant.

4.3

Pour réussir à conserver la biodiversité, il convient d’adopter plusieurs approches.

4.4    La mise en place du réseau Natura 2000

4.4.1

Le réseau Natura 2000 revêt une importance absolument capitale pour la protection «classique» de la nature, par exemple pour préserver des espèces animales et végétales rares et des biotopes uniques, comme les tourbières, les milieux secs, les vestiges de formations forestières quasi-naturelles, etc. Natura 2000 s’appuie essentiellement sur la directive «Habitats» de 1992, ainsi que sur les zones de protection d’oiseaux déjà définies dans le cadre de la directive «Oiseaux» de 1979.

4.4.2

En adoptant la directive «Habitats», en particulier, les États membres et la Commission européenne ont pris deux engagements:

d’une part, achever la mise en place du réseau Natura 2000 dans les trois ans (10),

d’autre part, fournir des financements à cette fin, afin que la charge de l’opération ne retombe pas sur les propriétaires ou les utilisateurs des sites.

4.4.3

La mise en place du réseau aurait donc dû être achevée en 1995, soit il y a plus de 20 ans. La plupart des zones concernées ont certes déjà été établies, puisque 18 % de la superficie des États membres de l’UE est classée territoire Natura 2000, mais le processus de détermination n’en est pas pour autant terminé. Nombreux sont les sites qui ne disposent pas encore de protection juridique durable et à peine plus de la moitié d’entre eux disposent de plans d’exploitation ou de gestion. Tant que les citoyens et les administrations, mais surtout les propriétaires et les utilisateurs de terrains, ne sauront pas exactement ce qu’il leur est désormais permis ou interdit de faire, il ne sera possible ni de protéger efficacement la nature, ni d’octroyer des compensations pour d’éventuelles contraintes d’utilisation.

4.4.4

Il est particulièrement révélateur que le 19 décembre 2011, le Conseil «Environnement» ait encouragé les États membres — et se soit donc lui-même engagé en ce même sens — «à achever, en temps utile, la mise en place du réseau Natura 2000, à élaborer et à appliquer des plans de gestion ou d’autres instruments équivalents […], ce qui permettra d’établir une base solide pour la planification stratégique dans la perspective de la mise en œuvre ultérieure duCFP 2014-2020». En 2011, on a derechef demandé d’achever «en temps utile» une tâche qui aurait dû l’être depuis 20 ans — et qui n’a toujours pas été accomplie à ce jour.

4.4.5

C’est pour cette raison que le 16 décembre 2015, le Conseil «Environnement» a une fois de plus invité «instamment» les États membres à «achever la mise en place du réseau Natura 2000» et s’y est lui-même engagé à nouveau.

4.5    Les mesures prises à l’extérieur des zones protégées

4.5.1

La Commission, le Conseil «Environnement» et le Parlement européen (11) soulignent à juste titre que la politique en matière de biodiversité ne porte pas seulement sur la protection des espèces animales et végétales et des habitats, mais également sur les bases mêmes des productions et de l’existence humaines. Parmi bien d’autres exemples, on citera l’activité pollinisatrice d’insectes, tels que les abeilles ou les papillons, dont la valeur économique est inestimable, et ce, pas seulement pour l’agriculture. Pourtant, la Commission a bien dû constater «que les services écosystémiques […] ne peuvent plus offrir la qualité et la quantité optimales de services de base, tels que la pollinisation des cultures et la propreté de l’air et de l’eau» (12).

4.5.2

Ce n’est pas en se concentrant exclusivement sur la détermination de zones protégées que l’on parviendra à protéger les espèces qui assurent la pollinisation et la décomposition — ainsi que de nombreuses autres — et leur action. Aussi est-il également nécessaire de formuler, dans le cadre de la politique de l’UE en matière de biodiversité, un impératif concernant les territoires à l’extérieur des zones protégées et, dans cette optique, la cohérence avec la politique d’affectation des sols joue un rôle déterminant.

4.5.3

Il est tout à fait juste, à cet égard, que la Commission tout autant que le Conseil insistent sans cesse, et encore dernièrement dans le cadre de l’examen à mi-parcours, sur l’importance du secteur agricole. Le Conseil «souligne l’importance particulière que revêt une augmentation de la contribution du secteur agricole à la stratégie; constate avec préoccupation que l’agriculture est l’une des plus grandes pressions exercées sur les écosystèmes terrestres et qu’il n’y a pas eu d’amélioration sensible de l’état des espèces et des habitats de zone agricole couverts par la directive “Habitats” jusqu’en 2012 et regrette les déclins sensibles des oiseaux des terres agricoles, des papillons des prairies et des services de pollinisation, qui mettent en évidence les pressions constantes exercées par certaines pratiques agricoles, telles que les modalités d’abandon et d’intensification des terres agricoles» (13).

4.6    Incohérence des politiques de l’UE

4.6.1

La stratégie de l’Union en faveur de la biodiversité à l’horizon 2020 a certes souligné que celle-ci faisait «partie intégrante de la stratégie Europe 2020» (14) mais les termes «biodiversité», «habitats», «protection de la nature» ou «protection des espèces», ainsi que «protection de la diversité des ressources génétiques» n’apparaissent pas une seule fois dans ladite stratégie Europe 2020. Seul le concept de «biodiversité» y est mentionné brièvement, à deux reprises, et ce uniquement dans des membres de phrases consacrées au thème de «l’utilisation efficace des ressources». Le CESE ne comprend donc absolument pas comment la Commission européenne a pu aboutir à cette conclusion, sachant que la politique qu’elle mène concrètement témoigne exactement de l’inverse.

4.6.2

Or, dans la mesure où la stratégie de l’UE en matière de développement durable de l’année 2001 ne joue pratiquement plus aucun rôle politique, c’est précisément la stratégie Europe 2020 qui constituerait le cadre approprié pour aborder le problème. Le CESE n’a que trop souvent demandé que les ministres de l’économie et des finances réfléchissent à l’enjeu économique que représente le recul de la biodiversité (15). Cette réflexion n’a toujours pas eu lieu.

4.6.3

Par ailleurs, étant donné que les objectifs des directives européennes de protection de la nature et de la stratégie de l’UE en matière de biodiversité répondent également à ceux qui ont été convenus à l’échelon international, comme ceux d’Aichi, dans le cadre de la convention des Nations unies sur la diversité biologique, ou les objectifs de développement durable (ODD), il s’impose d’urgence que la politique en matière de biodiversité soit intégrée de manière globale, d’une part, dans la stratégie de mise en œuvre des ODD ou, d’autre part, dans une nouvelle stratégie de l’Union en matière de développement durable.

4.6.4

Jusqu’à présent, toutefois, bon nombre de services de la Commission et certains Conseils des ministres de l’UE ont plutôt considéré — et continuent à considérer — que la politique en faveur de la biodiversité constitue un domaine d’intervention concurrent aux leurs, qui bloque ou ralentit partiellement le développement économique et, en outre, absorbe des ressources financières.

4.6.5

Il est incontestable qu’il existe des conflits entre différentes revendications en matière d’utilisation des sols et que les directives sur la protection de la nature peuvent parfois prévenir des atteintes à l’équilibre naturel. C’est pourtant précisément là que réside le rôle de la protection de la nature: l’État doit veiller à une relation équilibrée entre l’exploitation économique et la préservation des ressources essentielles à la vie. De ce point de vue, la protection de la nature ne se démarque aucunement d’autres domaines d’intervention du politique, où des dispositions politiques viennent policer le «libre jeu des forces du marché».

4.6.6

L’absence d’une véritable cohérence entre la politique économique classique et celle de l’environnement n’a rien de nouveau. En 2006 déjà, le CESE avait déploré «le fossé qui sépare les déclarations d’intention de la réalité» et regretté «que les plans et programmes d’aide n’aboutissent généralement qu’à appauvrir davantage la biodiversité» (16).

4.6.7

Une cause fondamentale de ce conflit d’objectifs réside dans l’opposition entre la satisfaction d’intérêts individuels, notamment économiques, et la poursuite de l’intérêt général. Des déclarations effectuées jusqu’à présent par l’UE, on peut inférer que c’est aux fins de l’intérêt général qu’elle soutient la protection de la biodiversité. En conséquence, elle devrait définir des barrières concrètes pour contenir les intérêts économiques qui vont à l’encontre de la protection de la biodiversité et veiller à ce qu’elles soient respectées.

4.7    Politique agricole/agriculture

4.7.1

Le CESE s’est penché à plusieurs reprises sur la relation entre l’agriculture, la politique agricole commune et la biodiversité et a constaté, à cet égard, que le déclin de la biodiversité qui, pour être insidieux, n’en est pas moins massif et continu, se produit bien que la plupart des agriculteurs respectent les législations en vigueur. Il s’inscrit donc dans le cadre même de ces lois, par l’accomplissement des prétendues «bonnes pratiques». Pareille situation ne peut être modifiée par une réforme du droit environnemental: la seule solution est de changer les pratiques d’exploitation, en lien avec une modification de la politique d’aides à l’agriculture. Sur ce point, le CESE renvoie à son avis d’initiative sur «La réforme de la politique agricole commune en 2013» (17), dans lequel il expose de manière circonstanciée les modifications qu’il estime nécessaires.

4.7.2

La Commission est parfaitement consciente de la portée de l’agriculture: elle relève que «la politique agricole commune (PAC) est l’instrument ayant la plus forte incidence sur la biodiversité dans les zones rurales […] L’un des échecs pour la biodiversité a été la suppression du gel obligatoire des terres (18).» Bien souvent, la politique agricole se trouve être encore et toujours en antinomie avec celle de la biodiversité, bien que certaines des composantes de la PAC, en particulier les programmes agroenvironnementaux ressortissant au second pilier, ont démontré comment ces contradictions pouvaient être résolues.

4.7.3

Ce n’est pas pour améliorer la durabilité écologique des territoires cultivés que le gel des terres avait été instauré au milieu des années 1980, mais pour réduire les excédents de production. Toutefois, lors de la réforme de la PAC de 2013, on renoua avec l’idée que certaines parcelles cultivées pourraient faire l’objet d’une exploitation moins intensive. Dans le cadre de l’«écologisation», il fut alors prescrit d’établir des «surfaces d’intérêt écologique». L’initiative suscita néanmoins une vigoureuse controverse concernant l’étendue de ces parcelles et la définition à donner à la notion de «priorité écologique».

4.7.4

Aujourd’hui, par exemple, on fait rentrer dans cette définition les plantations de légumineuses ou les cultures intermédiaires. Même s’il convient, sur un plan de principe, de se féliciter de l’augmentation des surfaces consacrées aux premières comme aux secondes, ces mesures n’apportent pas véritablement de contribution à l’amélioration de la biodiversité. De même, l’autorisation partielle d’utiliser des pesticides sur les surfaces d’intérêt écologique entre en contradiction frontale avec la volonté d’écologiser la politique agricole: ces substances ne concourent pas à accroître la biodiversité mais au contraire à la réduire.

4.7.5

La Commission devrait dresser le plus rapidement possible un premier bilan des effets produits par les mesures arrêtées, d’autant que l’écologisation est l’une des principales justifications alléguées pour maintenir les subventions que le budget de l’Union verse à l’agriculture.

4.7.6

Par ailleurs, si l’on se fonde sur ces considérations, il conviendrait également que les politiques transversales de l’UE, en particulier celles liées à la recherche, au développement et à l’innovation (RDI), prennent en compte et examinent avec une attention particulière la contribution que cette activité de RDI, quand elle est appliquée à l’agriculture, peut apporter pour améliorer la biodiversité dans l’Union européenne.

4.8    L’infrastructure verte

4.8.1

La directive «Habitats» comporte un défaut technique déterminant: bien que son article 10 attire expressément l’attention sur l’importance du maillage entre les éléments du paysage, elle ne prévoit aucun mécanisme contraignant qui aboutirait à un dispositif cohérent de connexion des biotopes. Dans sa communication sur l’infrastructure verte, la Commission a esquissé un processus propre à combler cette lacune, grâce à des investissements adéquats dans la conservation et la remise en état de l’infrastructure verte, tant à grande qu’à petite échelle. Dans ce contexte, il importe particulièrement d’adopter et d’appliquer une stratégie cohérente en matière d’infrastructure verte. En tout état de cause, une de ses composantes maîtresses devrait consister en un dispositif méthodique et il faudrait qu’elle inclue un instrument de financement pour les réseaux transeuropéens de l’infrastructure verte (RTE-V). Cet impératif vaut pour les grandes étendues comme pour les petites, par exemples dans les zones de cultures.

4.9    Observations concernant la politique menée dans les États membres et les pays candidats

4.9.1

Dans de nombreux États membres et pays candidats, la nature continue à subir de graves destructions. Pour ne citer que quelques exemples:

4.9.2

En Roumanie, les forêts primaires naturelles occupaient, au moment de l’adhésion à l’UE, une superficie plus de 2 000 km2. Ces surfaces sont presque entièrement enregistrées comme sites Natura 2000. Depuis lors, on a constaté que des coupes à blanc, aussi nombreuses que considérables, ont été effectuées dans ces forêts roumaines, entraînant la perte irréversible d’un patrimoine naturel européen.

4.9.3

Les écosystèmes fluviaux des Balkans, en particulier dans les pays occidentaux de cette région, sont de loin les plus précieux en Europe. Environ un tiers des fleuves qui coulent dans les États de l’ex-Yougoslavie et en Albanie présentent une dynamique naturelle et peuvent encore être considérés comme des cours d’eau naturels. Les projets d’installation de centrales hydroélectriques, attestés au nombre de plus de 2 700, dont au moins un tiers dans des réserves naturelles protégées, fait peser une menace énorme sur la dynamique naturelle et la biodiversité de ces rivières balkaniques. Des ressources publiques sont utilisées pour le financement de ces projets. Dans presque tous les États membres de l’UE, la biodiversité de la quasi-totalité des rivières est d’ores et déjà extrêmement dégradée, de sorte qu’aujourd’hui, d’importantes sommes doivent être consacrées à leur restauration écologique, notamment au titre de la mise en œuvre de la directive-cadre de l’UE sur l’eau.

4.9.4

De nombreuses espèces aviaires figurant à l’annexe I de la directive sur la protection des oiseaux, et donc protégés dans l’UE, sont impitoyablement chassées dans les pays candidats des Balkans; la chasse aux oiseaux représente également un problème qui n’a toujours pas été réglé dans de nombreux États membres. Les tirs de spatules blanches, grues, cormorans pygmées et fuligules nyrocas, pour ne citer que ces quelques espèces, ont pour résultat de réduire leurs aires de nidification dans l’UE.

4.10    Financement

4.10.1

Un autre problème, abordé dans l’évaluation à mi-parcours comme dans les conclusions du Conseil, réside dans le financement, notamment mais pas seulement, du réseau Natura 2000. Dans une communication publiée en 2004 (19), la Commission se penchait sur ce financement du réseau, en examinant en particulier a) le montant des ressources nécessaires à ce projet et b) la question de savoir quelle source budgétaire assurerait leur couverture. À l’époque, on avait avancé le chiffre approximatif de 6,1 milliards d’euros par an; il fut décidé qu’au lieu de créer une ligne budgétaire propre ou de remanier le programme LIFE en conséquence, on utiliserait pour ce faire principalement le second pilier de la PAC et d’autres Fonds de l’UE.

4.10.2

Le CESE avait alors émis des doutes quant aux montants annoncés, et estimé qu’il était «indispensable de présenter le plus rapidement possible un calcul des coûts plus précis.» Il doutait, «par exemple, que la somme de 0,3 milliard d’euros se rapportant aux nouveaux États membres (pour l’UE des Quinze: 5,8 milliards d’euros) puisse s’avérer suffisante» (20).

4.10.3

Sur ce point, rien n’a changé à ce jour: il est toujours question des mêmes montants. Les États membres responsables et la Commission ont évité jusqu’à présent d’apporter la moindre clarification dans ce domaine.

4.10.4

À l’époque, le CESE avait déjà souligné qu’en finançant au titre du second pilier les mesures relevant du programme Natura 2000, on courait le risque qu’elles n’entrent en concurrence avec d’autres mesures de développement rural (21). Ces appréhensions se sont confirmées à deux égards: d’une part, les paiements au titre du second pilier ont été réduits de 30 % dans la période 2007-2013 par rapport à la précédente et, d’autre part, la Cour des comptes européenne et le Conseil «Environnement» ont relevé à très juste titre que «les États membres n’ont pas toujours considéré le Fonds européen de développement régional (FEDER) comme un instrument adéquat pour promouvoir la biodiversité bien que son potentiel en tant que source de financement pour Natura 2000 n’ait pas été suffisamment reconnu» (22).

4.10.5

En conséquence, la Commission européenne (23) a dû reconnaître que le Fonds européen agricole pour le développement rural (Feader) demeure bien, aujourd’hui comme hier, la principale source de financement de l’UE en faveur de Natura 2000 et de la biodiversité sur son territoire mais qu’«en Europe, seulement 20 % du total des besoins de financement pour la gestion des zones protégées, dont le réseau Natura 2000, sont couverts».

4.10.6

Il est donc urgent de déterminer exactement quels sont les besoins financiers nécessaires pour mettre en œuvre les directives sur la protection de l’environnement et de dégager les ressources adéquates, en leur affectant une ligne budgétaire distincte, par exemple dans le cadre d’un budget LIFE élargi.

4.11    Processus d’association et de participation

4.11.1

L’une des raisons auxquelles il faut également imputer les carences constatées dans la mise en œuvre de la stratégie de l’UE en matière de biodiversité, en particulier en ce qui concerne Natura 2000, consiste en ce que dans les différentes zones protégées, nous n’avons pas suffisamment réussi à associer la société civile à la démarche ou à s’assurer de sa participation. Si la délimitation d’espaces de protection doit être considérée au premier chef comme un acte administratif, qui doit s’effectuer dans le respect de tous les principes de l’état de droit, il convient qu’au moment où l’on entreprend d’élaborer et de mettre à exécution les plans de gestion et d’exploitation, les propriétaires de terrains, les exploitants de terres, les organisations de protection de la nature et les communes soient étroitement intégrés au processus. Ce n’a bien souvent pas été le cas et cette situation a fréquemment suscité la méfiance envers la politique de biodiversité de l’UE et abouti à son rejet.

Bruxelles, le 21 septembre 2016.

Le président du Comité économique et social européen

Georges DASSIS


(1)  COM(1998) 42 final.

(2)  COM(2001) 162 final.

(3)  COM(2006) 216 final.

(4)  COM(2010) 4 final.

(5)  COM(2011) 244 final.

(6)  JO C 24 du 28.1.2012, p. 111.

(7)  COM(2015) 478 final.

(8)  Milieu, IEEP et ICF, Evaluation Study to support the Fitness Check of the Birds and Habitats Directives, («Étude d’évaluation à l’appui du bilan de qualité des directives “Oiseaux” et “Habitats”»), mars 2016.

(9)  Conseil de l’Union européenne, document no 15389/15.

(10)  Les États membres devaient déclarer les sites concernés dans les trois ans (c’est-à-dire jusqu’en 1995). Pour une part, ce processus n’a toujours pas été définitivement mené à bien.

(11)  Voir notamment la résolution du Parlement européen du 2 février 2016 sur l’examen à mi-parcours de la stratégie de l’Union européenne en faveur de la biodiversité [2015/2137(INI)].

(12)  COM(2010) 548 final du 8.10.2010, p. 3.

(13)  Document du Conseil de l’Union européenne 15389/2015, paragraphe 36.

(14)  COM(2011) 244 final, p. 2.

(15)  JO C 48 du 15.2.2011, p. 150, paragraphe 2.3.

(16)  JO C 195 du 18.8.2006, p. 96.

(17)  JO C 354 du 28.12.2010, p. 35.

(18)  COM(2010) 548 final, p. 5.

(19)  COM(2004) 431 final.

(20)  JO C 221 du 8.9.2005, p. 108, paragraphe 3.10.1.

(21)  JO C 221 du 8.9.2005, p. 108, paragraphes 3.14.1. et 3.14.2.

(22)  Conseil «Environnement» du 16 décembre 2015.

(23)  COM(2010) 548 final, p. 13.


ANNEXE

Les amendements suivants, qui ont recueilli au moins un quart des suffrages exprimés, ont été rejetés au cours des débats:

Paragraphe 4.7.4 — Modifier comme suit:

 

Aujourd’hui, par exemple, on fait rentrer dans cette définition les plantations de légumineuses ou les cultures intermédiaires. Même s’i Il convient, sur un plan de principe, de se féliciter de l’augmentation des surfaces consacrées aux premières comme aux secondes, ces mesures n’apportent pas véritablement de contribution à l L ’amélioration de la biodiversité est notamment favorisée par le renforcement de la vie des sols par la symbiose de légumineuses et de rhizobiums . De même, l L’utilisation de autorisation partielle d’utiliser des pesticides produits phytopharmaceutiques sur les surfaces d’intérêt écologique est partiellement autorisée dans le cadre de règles européennes strictes en matière d’autorisation et d’application, ce qui permet de promouvoir les cultures protéagineuses en Europe .entre en contradiction frontale avec la volonté d’écologiser la politique agricole: ces substances ne concourent pas à accroître la biodiversité mais au contraire à la réduire.

Exposé des motifs

Cette mesure en est seulement à sa deuxième année d’application. On ne dispose pas encore d’analyses significatives en ce qui concerne la biodiversité. L’usage ciblé de produits phytopharmaceutiques peut être utile dans certains cas, par exemple pour protéger contre les mauvaises herbes les cultures peu compétitives durant leur stade juvénile. Conformément à l’article 46 du règlement (UE) no 1307/2013 du Parlement européen et du Conseil, la Commission devra présenter d’ici à mars 2017 un rapport d’évaluation sur la mise en œuvre des surfaces d’intérêt écologique.

Résultat du vote

Pour

69

Contre

96

Abstentions

26

Paragraphe 4.7.4 — Modifier comme suit:

 

Aujourd’hui, par exemple, on fait rentrer dans cette définition les plantations de légumineuses ou les cultures intermédiaires. Même s’il convient, sur un plan de principe, de se féliciter de l’augmentation des surfaces consacrées aux premières comme aux secondes, ces mesures n’apportent pas véritablement de contribution à l’amélioration de la biodiversité. De même, l’autorisation partielle d’utiliser des pesticides sur les surfaces d’intérêt écologique entre en contradiction frontale avec la volonté d’écologiser la politique agricole: ces substances ne concourent pas à accroître la biodiversité mais au contraire à la réduire. Néanmoins, on relèvera que l’UE souffre d’un fort déficit de protéagineux cultivés sur son territoire et qu’une interdiction générale des pesticides sur ses cultures de légumineuses ne ferait que l’aggraver encore.

Exposé des motifs

Sera présenté oralement.

Résultat du vote

Pour

80

Contre

105

Abstentions

11

Paragraphe 1.5 — Supprimer le passage suivant:

 

Le CESE réclame qu’une cohérence soit assurée entre tous les domaines d’intervention qui ont une incidence sur la biodiversité. À cet égard, il espère que l’évaluation à mi-parcours des «surfaces d’intérêt écologique» et celle dont la PAC pourrait faire l’objet seront mises à profit pour garantir que celle-ci apportera dorénavant une contribution stratégique plus ciblée à la réalisation des objectifs fixés en matière de biodiversité. Pour l’heure, il s’impose, de l’avis du CESE, d’apporter des modifications à ces surfaces pour ce qui est de la taille et de la qualité.

Exposé des motifs

L’«écologisation» instaurée en 2015 n’en est actuellement qu’à sa deuxième année d’application. Il n’existe donc pas encore d’analyses suffisamment solides permettant de tirer des conclusions valables sur cette question. Conformément à l’article 46 du règlement (UE) no 1307/2013, la Commission doit présenter d’ici à mars 2017 un rapport d’évaluation sur la mise en œuvre des surfaces d’intérêt écologique. Des mesures appropriées devront ensuite être prises sur la base des résultats de cette évaluation.

Résultat du vote

Pour

57

Contre

120

Abstentions

11

Paragraphe 1.5 — Modifier comme suit:

 

Le CESE réclame qu’une cohérence soit assurée entre tous les domaines d’intervention qui ont une incidence sur la biodiversité. À cet égard, il espère que l’évaluation à mi-parcours des «surfaces d’intérêt écologique» et celle dont la PAC pourrait faire l’objet seront mises à profit pour garantir que celle-ci apportera dorénavant une contribution stratégique plus ciblée à la réalisation des objectifs fixés en matière de biodiversité. Pour l’heure, il s’impose, de l’avis du CESE, d’apporter des modifications à ces surfaces pour ce qui est de la taille et de la qualité tout en assurant qu’elles puissent mieux s’intégrer dans les pratiques agricoles modernes.

Exposé des motifs

Sera présenté oralement.

Résultat du vote

Pour

75

Contre

118

Abstentions

9


28.12.2016   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 487/24


Avis du Comité économique et social européen sur «L’après-Paris»

(avis d’initiative)

(2016/C 487/04)

Rapporteure:

Tellervo KYLÄ-HARAKKA-RUONALA

Décision de l’assemblée plénière

26.4.2016

Base juridique

Article 29, paragraphe 2, du règlement intérieur

 

Avis d’initiative

Compétence

section spécialisée «Agriculture, développement rural et environnement»

Adoption en section spécialisée

5.9.2016

Adoption en session plénière

21.9.2016

Session plénière no

519

Résultat du vote

(pour/contre/abstentions)

129/0/0

1.   Conclusions et recommandations

1.1.

L’accord de Paris constitue un engagement mondial encourageant en faveur de l’atténuation du changement climatique. Il s’agit maintenant de faire en sorte que cet accord soit ratifié, mis en œuvre et approfondi. Dans le présent avis, le Comité économique et social européen (CESE) expose ses vues sur les principales approches à adopter concernant la voie à suivre à long terme pour se diriger vers un monde neutre en carbone, tel que l’accord l’appelle de ses vœux.

1.2.

Les énormes défis mondiaux exigent une réorientation majeure de l’approche de l’Union européenne. Il convient que celle-ci, au lieu d’avoir les yeux rivés sur ses seules émissions de gaz à effet de serre, réfléchisse à la manière dont elle peut contribuer à produire les effets les plus bénéfiques en termes de climat dans une perspective mondiale. Le CESE invite dès lors la Commission européenne à élaborer une stratégie à long terme concernant les moyens de faire progresser et de maximiser l’action positive de l’Union européenne en matière de carbone (carbon handprint) à l’échelle mondiale (1).

1.3.

Il convient également que l’Union européenne soit ambitieuse dans ses efforts pour trouver des solutions qui soient triplement bénéfiques sur le plan économique, social et environnemental. En conséquence, le CESE demande instamment à la Commission d’élaborer la stratégie pour le climat de façon qu’elle contribue à renforcer l’économie de l’Union européenne et à améliorer le bien-être de ses citoyens, tout en atténuant le changement climatique.

1.4.

Il est essentiel de prendre un engagement à l’échelle mondiale si l’on veut produire des effets significatifs sur le climat et éviter les fuites de carbone, d’investissements et d’emplois. Le CESE invite la Commission à continuer de pratiquer une diplomatie active dans le domaine du climat, avec pour objectif de favoriser une vaste mise en œuvre de l’accord et d’encourager les grandes économies à accroître leur niveau d’engagement afin qu’il soit aussi ambitieux que celui de l’Union européenne. Le CESE invite aussi la Commission à intégrer les considérations liées au climat dans tous les volets de la politique extérieure, notamment dans les domaines du commerce et de l’investissement ainsi que de la coopération au développement.

1.5.

Concernant les mesures concrètes, c’est en exportant des technologies et des solutions destinées à réduire les émissions et à accroître les puits de carbone, mais aussi par la production d’articles destinés au marché mondial avec des émissions de CO2 plus basses que celles de ses concurrents, que l’Union européenne peut contribuer au mieux à lutter contre le changement climatique. Le CESE appelle dès lors à susciter un élan puissant en faveur de l’innovation — depuis la recherche jusqu’à l’entrée sur le marché — pour que l’Union européenne se retrouve à l’avant-garde mondiale des solutions de lutte contre le changement climatique. Une attention particulière doit être portée au potentiel des petites et moyennes entreprises (PME).

1.6.

En ce qui concerne la dimension intérieure de la politique en matière de lutte contre le changement climatique, l’Union européenne doit s’efforcer d’être une «union pour le climat» qui soit tournée vers l’action, efficace et cohérente du point de vue de ses mesures internes. Désormais, tout effort doit être concentré sur la mise en œuvre des décisions prises jusque-là, dans laquelle tant la Commission que les États membres ont leur propre rôle à jouer.

1.7.

Par ailleurs, le CESE invite la Commission à baser la stratégie à long terme sur une approche intégrée. La voie à suivre doit être élaborée dans le cadre des différentes «unions» connexes du marché unique, et tout particulièrement celles qui existent dans le domaine de l’énergie, des transports, du passage au numérique, de l’industrie, de l’agriculture, des capitaux et de l’innovation. Il y a lieu d’accorder une attention particulière également aux problèmes liés aux systèmes alimentaires durables ainsi qu’au rôle des puits de carbone.

1.8.

Pour mettre en œuvre les objectifs fixés par l’accord de Paris, il convient de tirer le meilleur parti des mécanismes du marché. Un système de fixation du prix mondial des émissions de carbone serait une manière neutre et efficace d’engager tous les acteurs du marché. Le CESE encourage la Commission à explorer activement différentes pistes et mesures et à s’engager avec d’autres pays sur la voie d’une tarification des émissions de carbone au niveau mondial.

1.9.

Au lendemain de la conférence de Paris, la transition vers une économie neutre en carbone constitue un immense défi. Pour gérer cette transition de façon juste et contrôlée, de même que pour aider les entreprises et les citoyens à s’adapter aux changements et à mettre au point de nouvelles solutions et compétences, il y a lieu de prévoir, dans le cadre de la stratégie pour le climat, des mesures d’ajustement appropriées.

1.10.

Ce sont les partenaires de la société civile qui induiront le passage à une économie neutre en carbone, grâce à leurs actions sur le terrain, tandis qu’il appartient aux décideurs politiques de leur fournir un environnement propice et un financement, y compris au moyen d’actions de sensibilisation sur toutes les possibilités de financement disponibles. Une approche de gouvernance à plusieurs niveaux doit être développée afin de faciliter les actions de la société civile en faveur du climat et de supprimer les obstacles qui les entravent. Le CESE escompte qu’il sera pleinement associé à l’élaboration de cette infrastructure impliquant diverses parties prenantes ainsi qu’à la préparation de la stratégie à long terme de l’Union européenne en matière de climat.

2.   L’Union européenne, un acteur mondial de premier plan en matière de climat

2.1.

La conférence de Paris sur le climat (COP 21) a donné lieu à un accord mondial destiné à mettre la communauté internationale sur la bonne voie afin de contenir le réchauffement de la planète nettement en dessous de 2 oC et de poursuivre l’action menée pour limiter l’élévation des températures à 1,5 oC par rapport aux niveaux préindustriels. La réalisation de ces objectifs nécessitera une réduction drastique des émissions au niveau mondial et un changement radical dans nos sociétés.

2.2.

Les futurs défis mondiaux exigent de modifier radicalement l’approche adoptée par l’Union européenne pour atténuer les effets du changement climatique. Il est crucial que l’Union européenne déploie des efforts considérables pour obtenir des résultats efficaces à l’échelle mondiale. Elle doit par conséquent s’efforcer d’accroître son action positive en matière de carbone au lieu de se contenter de diminuer son empreinte carbone.

2.3.

Il est essentiel de prendre un engagement à l’échelle mondiale si l’on veut résoudre le problème du changement climatique et éviter les fuites de carbone, d’investissements et d’emplois. L’Union européenne a fait preuve d’initiative avant et pendant la conférence de Paris et devrait continuer de travailler dans cet esprit en vue des prochaines conférences des parties. Dans le cadre de ses activités diplomatiques dans le domaine du climat, l’Union européenne devrait se concentrer sur les pays qui génèrent le plus d’émissions de gaz à effet de serre, mais aussi sur ses concurrents les plus redoutables ou ses partenaires les plus prometteurs dans une perspective économique. La diplomatie en matière de climat et la diplomatie économique doivent donc aller de pair.

2.4.

Les plus grands émetteurs de gaz à effet de serre sont la Chine, les États-Unis et l’Union européenne avec respectivement plus de 25 %, quelque 15 % et environ 10 % des émissions mondiales. Selon les prévisions, la part de l’Union européenne devrait tomber à environ 5 % d’ici 2030. Dès lors, pour exercer une influence maximale sur l’atténuation du changement climatique, l’Union européenne doit déployer tous les efforts possibles afin d’encourager les autres parties à relever leur niveau d’ambition.

2.5.

Sur le plan pratique, l’Union européenne peut contribuer au mieux à l’atténuation du changement climatique en exportant des solutions sobres en carbone, mais aussi par la production d’articles destinés au marché mondial avec des émissions de CO2 plus basses que celles de ses concurrents.

2.6.

Outre les États-Unis, la Chine et d’autres pays en développement rapide sont eux aussi devenus d’importants fournisseurs de technologies sobres en carbone. Au cours des cinq dernières années, l’Union européenne a enregistré un net recul dans certains secteurs, tant sur les marchés d’exportation que sur son marché intérieur, et a perdu la suprématie technologique qui était auparavant la sienne au niveau mondial. La Commission Juncker a certes exprimé son intention de faire de l’Union européenne le chef de file mondial dans le domaine des énergies renouvelables, mais cet objectif semble aujourd’hui loin d’être atteint.

2.7.

Un nouvel élan supplémentaire est donc indispensable dans les meilleurs délais pour que l’Union européenne se retrouve de nouveau à l’avant-garde des solutions liées au climat. Les possibilités au niveau mondial recouvrent un large éventail de technologies, de produits, de services et de connaissances, ainsi que des modèles généraux de production et de consommation. L’exportation des savoir-faire concernant les puits de carbone, tels que la gestion durable des forêts et les mesures de boisement, doit également être considérée comme un débouché capable d’avoir des effets à l’échelle mondiale.

2.8.

Le CESE se félicite que la Commission ait adhéré à l’initiative «Mission Innovation» dans le cadre de laquelle les principales économies mondiales se sont engagées à doubler dans les cinq ans leur financement pour la recherche et le développement en matière d’énergies propres.

2.9.

Une politique de commerce et d’investissement efficace constitue un outil indispensable pour fournir des solutions sobres en carbone et promouvoir les progrès vers une économie mondiale neutre sur le plan des émissions. Afin de garantir un résultat positif, les problèmes climatiques doivent faire partie intégrante des négociations sur les accords de commerce et d’investissement. L’objectif devrait être de supprimer les obstacles au commerce des produits, technologies et solutions respectueux du climat; dans ce contexte, l’accord sur les biens environnementaux aurait un rôle important à jouer. Des solutions conjointes sont également nécessaires pour éviter les distorsions des échanges commerciaux causées par des divergences au niveau des politiques climatiques et exigences des différentes régions.

2.10.

Pour ce qui est de la politique de développement, l’objectif actuel de 100 milliards de dollars par an promis par les pays développés pour financer les mesures de lutte contre le changement climatique a été prorogé, lors de la COP 21, jusqu’en 2025, et une feuille de route concrète a été demandée afin d’atteindre cet objectif. Les pays ont également fait, à titre individuel, des promesses de financement. Il importe que ces promesses soient tenues et que les fonds correspondants soient utilisés de manière responsable sur le plan économique, environnemental et social. Des campagnes de sensibilisation sont nécessaires afin de fournir aux acteurs de la société civile des informations sur l’accès aux financements, en particulier dans les pays en développement, comme l’a proposé le CESE dans le cadre de la stratégie UE-Afrique.

2.11.

La coopération technologique a également un rôle à jouer dans la politique de développement. À cet égard, les droits de propriété intellectuelle (DPI) doivent être protégés de manière adéquate car ils sont indispensables à l’innovation. Il est également important de veiller à ce que les solutions apportées reflètent les conditions qui prévalent dans les pays en développement et — dans un esprit de partenariat — les aident à adopter une croissance à faible intensité de carbone sans entraver leur développement. De plus, il est nécessaire de renforcer les capacités de ces pays afin de les aider à atténuer les changements climatiques et à s’y adapter.

2.12.

De manière générale, les considérations liées au climat devraient être appliquées transversalement à tous les volets de la politique extérieure de l’Union européenne, avec l’objectif de favoriser la mise en œuvre de l’accord de Paris à l’échelle mondiale.

3.   Vers une union pour le climat plus efficace

3.1.

Afin de se doter d’un socle solide qui lui permette de devenir un acteur important sur le plan mondial, l’Union européenne doit s’efforcer de devenir une «union pour le climat» qui soit pleinement efficace, cohérente et crédible du point de vue de ses mesures internes. Elle doit être avant tout une union d’action. Désormais, tout effort doit être concentré sur la mise en œuvre des décisions prises jusque-là, dans laquelle tant la Commission que les États membres ont leur propre rôle à jouer.

3.2.

Puisque l’atténuation du changement climatique s’applique à tous les secteurs de l’économie, il convient que l’union pour le climat repose sur une approche intégrée. En conséquence, les prochaines mesures en faveur du climat devraient être élaborées dans le cadre des différentes «unions» connexes, telles que l’union de l’énergie, l’espace européen unique des transports, le marché unique des biens et services, le marché unique numérique, la politique industrielle européenne, la politique agricole commune, l’union des marchés des capitaux et l’union de l’innovation. Il convient aussi de trouver une approche optimale s’agissant d’articuler la politique européenne en matière de climat et sa mise en œuvre au niveau national.

3.3.

L’Union européenne devrait réaliser ses engagements climatiques d’une façon qui renforce son économie et améliore le bien-être des citoyens. La politique climatique ne saurait être considérée comme la simple recherche d’un équilibre entre les facteurs économiques, sociaux et environnementaux: il convient de s’efforcer de trouver des solutions qui soient bénéfiques sur ces trois plans. À cette fin, il est nécessaire de déployer des efforts pour stimuler une croissance sobre en carbone, en exploitant pleinement les possibilités offertes notamment par le passage au numérique, les technologies propres, la bioéconomie et l’économie circulaire.

3.4.

Outre à l’échelle mondiale, des investissements importants dans les technologies sobres en carbone sont également nécessaires au sein de l’Union européenne. Les aspects liés au climat doivent être pris en compte dans les critères de financement des programmes d’investissements publics, y compris en ce qui concerne l’utilisation des fonds de l’Union européenne. La coopération public-privé ainsi que le rôle joué par le Fonds européen pour les investissements stratégiques et la Banque européenne d’investissement sont de la plus haute importance. Le CESE se félicite du lancement du portail européen de projets d’investissement et de la plateforme européenne de conseil en investissement, et insiste sur le fait que les seuils retenus pour les projets ne doivent pas exclure les projets de petite dimension.

3.5.

Dans le secteur privé, les investissements dans les technologies sobres en carbone sont assortis des mêmes conditions préalables que tout autre investissement. Pour être à même de tirer pleinement parti des possibilités et du potentiel économique qu’ouvre l’atténuation du changement climatique, il est essentiel de disposer d’un environnement entrepreneurial encourageant, compétitif et stable.

3.6.

Afin d’être à la pointe des technologies et des solutions liées au climat à l’échelle mondiale, l’Union européenne doit investir dans un environnement propice à l’innovation qui recouvre la recherche, le développement, le lancement de projets pilotes, la démonstration et, enfin, l’entrée sur le marché et la diffusion internationale. Il y a lieu de prêter une attention particulière au potentiel d’innovation des PME et à leur possibilité d’entrée sur le marché international. À cette fin, il convient de garantir que l’accès au financement ne représente pas un obstacle pour elles.

3.7.

Étant donné que la plupart des émissions de gaz à effet de serre proviennent de la production d’énergie, cette dernière se trouve au cœur de la transition. Les mesures clés comprennent le remplacement des combustibles fossiles par des sources d’énergie à faible intensité de carbone et l’amélioration de l’efficacité énergétique dans tous les secteurs et activités. L’électrification croissante de la société, lorsque les combustibles fossiles sont remplacés, peut contribuer considérablement à la réduction des émissions. L’un des principaux défis à relever et l’une des principales opportunités à cet égard est de mettre au point des solutions pour le stockage de l’électricité.

3.8.

En ce qui concerne la décarbonisation des transports, et notamment du transport routier, il est nécessaire de mettre en place un large éventail de mesures. L’électricité et les sources d’énergie alternatives, les biocarburants de dernière génération, l’amélioration de l’efficacité énergétique des véhicules et de la logistique, l’utilisation croissante de modes de transport sobres en carbone, la comodalité et les transports publics, de même que la planification de l’utilisation des terres, ont un rôle à jouer dans la transition. En ce qui concerne le transport maritime et aérien, le CESE demande des résultats ambitieux au niveau mondial dans le cadre de l’Organisation maritime internationale (OMI) et de l’Organisation de l’aviation civile internationale (OACI).

3.9.

Réussir la décarbonisation exige aussi de mettre au point des produits et méthodes de production adaptés. Les plus grandes possibilités en la matière sont à rechercher dans des modèles commerciaux innovants et dans le développement de nouveaux produits sobres en carbone, en se concentrant principalement sur leur fonction et les services qu’ils procurent. Il convient d’exploiter le potentiel de tous les secteurs et acteurs, et les responsables politiques ne devraient pas «miser sur des gagnants potentiels», par exemple en soutenant certains secteurs, techniques ou produits.

3.10.

L’agriculture et la sylviculture sont liées au changement climatique de plusieurs manières. Outre la réduction des émissions, la séquestration du dioxyde de carbone joue un rôle essentiel dans l’atténuation du changement climatique, ce qui souligne l’importance de l’utilisation durable des ressources forestières et la bonne gestion des sols. D’un autre côté, ces deux domaines sont confrontés à des défis importants sur le plan de l’adaptation au changement climatique. Une activité intense de recherche et de développement est donc nécessaire en ce qui concerne la résilience et l’adaptation et aussi le rôle du sol en tant que puits de carbone.

3.11.

Dans le contexte d’une croissance démographique rapide, le lien entre le changement climatique et la sécurité alimentaire est primordial. Pour relever les énormes défis que représentent la sécurité alimentaire et l’atténuation du changement climatique, il est nécessaire de rendre les systèmes alimentaires plus durables tout en évitant les fuites de carbone et d’emplois.

3.12.

La numérisation est un élément transversal du processus de décarbonisation de la société. L’automatisation, la robotique et l’internet des objets rendent les procédés industriels et la logistique plus efficaces. Grâce aux réseaux énergétiques, à la mobilité, aux bâtiments et aux communautés dits «intelligents», les citoyens participent au processus de décarbonisation et les consommateurs peuvent devenir des «prosommateurs», tandis que les plateformes numériques fournissent aux consommateurs des possibilités de partager des produits et des services.

3.13.

De manière générale, les citoyens ont un rôle essentiel à jouer dans la transition vers une économie neutre en carbone. Des habitudes de consommation plus durables et une modification du mode de vie, par exemple en matière de régime alimentaire, d’achats, de mobilité et de loisirs, permettent d’obtenir des résultats remarquables. La sensibilisation, l’information sur les produits et l’éducation sont des outils qui peuvent être utilisés pour aider les citoyens à opérer des choix éclairés.

3.14.

En ce qui concerne les mesures plus spécifiques de transition vers un avenir neutre en carbone à prendre dans les domaines clés susmentionnés, le CESE a élaboré plusieurs avis pertinents ces dernières années (2).

3.15.

La transition vers une économie neutre en carbone fera inévitablement des gagnants et des perdants. Il est donc impératif de gérer la transition de manière juste et contrôlée. Des mesures adéquates sont nécessaires pour aider les entreprises et les citoyens à s’adapter à la nouvelle situation. Les principales menaces à contrer sont la hausse des coûts et les déficits de compétences. Une assistance financière ciblée, sur la base de l’identification des secteurs et des groupes de population les plus vulnérables, constitue un choix pertinent dans ce contexte. Néanmoins, il convient d’axer les efforts principalement sur la recherche de nouvelles solutions et le développement des compétences.

4.   Exploiter toutes les possibilités des mécanismes de fixation des prix

4.1.

Les mécanismes de marché devraient être utilisés autant que possible lors de la mise en œuvre des mesures prises afin de réaliser les objectifs fixés par les responsables politiques dans le cadre de l’accord de Paris. Afin de dynamiser l’action en faveur du climat de façon neutre et efficace, il est important d’œuvrer à mettre en place une tarification mondiale pour les émissions de gaz à effet de serre. En conséquence, si l’on veut permettre au système de tarification de fonctionner correctement, il faudrait supprimer progressivement les subventions énergétiques qui sont en contradiction ou se chevauchent.

4.2.

Différents systèmes de tarification du carbone sont déjà en place dans plusieurs pays et régions; il s’agit principalement de la taxation des émissions de carbone et des régimes de plafonnement et d’échange des quotas d’émission. Des mesures visant à relier les différents systèmes sont également en cours d’examen.

4.3.

En ce qui concerne le système d’échange de quotas d’émission de l’Union européenne, le prix de ces quotas est resté plus faible que prévu, parce que l’offre de quotas a nettement excédé la demande et que le chevauchement des subventions a eu une incidence sur le marché. Le plafonnement des émissions garantit la réalisation de l’objectif de réduction des émissions, mais le système n’incite pas à investir dans l’énergie à faible intensité de carbone. Il serait donc nécessaire d’augmenter le prix du carbone, tout en veillant à ce que des mesures soient prises pour éviter les fuites de carbone.

4.4.

Un système de tarification du carbone au niveau mondial qui soit performant et juste garantirait des conditions de concurrence équitables pour les activités d’exportation sur les marchés mondiaux en diminuant par là même le risque de fuite des investissements et des emplois. Cela éliminerait en outre l’avantage compétitif dont bénéficient les marchandises importées dont le prix est inférieur en raison d’exigences climatiques moins strictes. Par ailleurs, ce système dirigerait les flux financiers vers les pays en développement. C’est pourquoi il convient d’œuvrer résolument en faveur de l’adoption d’une réglementation en ce sens au niveau mondial. Le Comité rappelle qu’il s’est en outre prononcé — en quelque sorte à titre de solution provisoire — pour un mécanisme de «compensation des prix du carbone aux frontières», en attendant qu’un tel régime mondial entre en vigueur (3). Il convient toutefois d’accorder une attention particulière aux défis et aux risques liés à ces mécanismes.

4.5.

Afin d’étudier les conditions préalables et les effets d’un système de tarification adéquat, il convient d’examiner attentivement différentes solutions. Il serait judicieux, pour le moins, d’explorer les voies et les mesures suivantes:

relier les systèmes régionaux de tarification et d’échange existants avec ceux d’autres régions;

établir des systèmes internationaux intra-sectoriels d’échange de quotas d’émission pour les secteurs les plus pertinents.

Le CESE invite la Commission à explorer activement différentes pistes et mesures, à partager ses expériences et à s’engager avec d’autres pays sur la voie d’un système de tarification des émissions de carbone au niveau mondial.

5.   Les divers rôles de la société civile

5.1.

La société civile a un rôle crucial à jouer aux niveaux mondial, européen, national et local dans le processus de transition vers un monde neutre en carbone. Ce sont en réalité les entreprises, les travailleurs, les consommateurs et les citoyens qui induisent des changements grâce à leurs propres actions sur le terrain, tandis qu’il appartient aux responsables politiques de leur fournir un environnement de travail propice et stimulant.

5.2.

Beaucoup de progrès sont accomplis sur les différents marchés: un nombre croissant d’investisseurs privés et institutionnels prennent le «risque carbone» en compte dans leurs cibles d’investissement, et des fonds de capitaux privés liés au climat ont été créés. De nombreuses entreprises renouvellent et développent leurs activités et leurs offres de produits afin de répondre aux exigences des clients et des actionnaires soucieux des questions climatiques. De nouveaux écosystèmes d’entreprises se créent entre les différents secteurs, et entre les grandes entreprises et les PME.

5.3.

Au cours de la COP 21, un important volet d’activités a mis en évidence le rôle qui incombe aux collectivités territoriales, au secteur privé et à d’autres acteurs de la société civile pour réaliser les objectifs relatifs au climat et favoriser l’éclosion de nouveaux partenariats. Le programme mondial d’action sur le climat nécessite de maintenir l’élan actuel et de stimuler davantage ce type d’activité.

5.4.

Comme l’a proposé le CESE (4), une coalition entre les responsables politiques, l’administration et la société civile devrait être mise en place, afin de stimuler et de sensibiliser davantage aux actions non gouvernementales en faveur du climat à différents niveaux, de fournir un espace de dialogue structuré, et de supprimer les obstacles qui entravent les actions. Le CESE escompte qu’il sera pleinement associé à la mise en place d’une telle infrastructure cohérente impliquant diverses parties prenantes.

5.5.

En ce qui concerne la coopération de la société civile avec d’autres régions, en particulier les États d’Afrique, des Caraïbes et du Pacifique (ACP) (5) et la région méditerranéenne, la problématique du climat — en relation avec l’enjeu de la sécurité alimentaire — figure en bonne place parmi les priorités du CESE.

5.6.

Le CESE tient également à œuvrer aux côtés de la Commission pour élaborer la stratégie climatique à long terme de l’Union sur la manière de progresser vers un monde neutre en carbone.

Bruxelles, le 21 septembre 2016

Le président du Comité économique et social européen

Georges DASSIS


(1)  «Handprint» désigne une mesure des retombées favorables pour l’environnement ou la société, tandis que «footprint» mesure les effets négatifs notamment en termes d’émissions. (Norris 2015). En conséquence, «carbon handprint» est une mesure de l’impact positif sur le climat de la réduction des émissions ou de l’accroissement des puits. L’action positive de l’Union européenne en matière de carbone correspond à la somme des effets positifs de l’Union partout dans le monde.

(2)  Voir par exemple les avis suivants du CESE: sur Les effets des conclusions de la COP 21 en matière de politique européenne des transports (JO C 303 du 19.8.2016, p. 10); sur L’État de l’union de l’énergie 2015 (JO C 264 du 20.7.2016, p. 117); sur Le Paquet économie circulaire (JO C 264 du 20.7.2016, p. 98); sur Un plan SET intégré (JO C 133 du 14.4.2016, p. 25); relatif à Une nouvelle organisation du marché de l’énergie (JO C 82 du 3.3.2016, p. 13); relatif à L’étiquetage de l’efficacité énergétique (JO C 82 du 3.3.2016, p. 6); sur Une nouvelle donne pour les consommateurs d’énergie (JO C 82 du 3.3.2016, p. 22); sur la Révision du système d’échange de quotas d’émission de l’Union européenne (JO C 71 du 24.2.2016, p. 57); sur Le Protocole de Paris (JO C 383 du 17.11.2015, p. 74); sur les Incidences de la politique en matière de climat et d’énergie sur les secteurs agricole et forestier (JO C 291 du 4.9.2015, p. 1); sur Un cadre d’action 2020-2030 en matière de climat et d’énergie (JO C 424 du 26.11.2014, p. 39); sur Les Instruments de marché (JO C 226 du 16.7.2014, p. 1 ).

(3)  Voir l’avis sur «Les instruments du marché», paragraphes 3.5.1 et 3.5.2. (JO C 226 du 16.7.2014, p. 1).

(4)  Avis sur «Une coalition pour concrétiser les engagements de l’accord de Paris», adopté le 14 juillet 2016 (JO C 389 du 21.10.2016, p. 20).

(5)  Voir la résolution du réseau des acteurs économiques et sociaux UE-Afrique de juillet 2016 de Nairobi.


28.12.2016   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 487/30


Avis du Comité économique et social européen sur «La position du CESE sur des questions clés spécifiques soulevées dans le cadre des négociations sur le partenariat transatlantique de commerce et d’investissement (PTCI)»

(avis d’initiative)

(2016/C 487/05)

Rapporteur:

Philippe DE BUCK

Corapporteure:

Tanja BUZEK

Décision de l’assemblée plénière

21.1.2016

Base juridique

Article 29, paragraphe 2, du règlement intérieur

 

Avis d’initiative

Compétence

Section REX

Adoption en section spécialisée

19.7.2016

Adoption en session plénière

21.9.2016

Session plénière no

519

Résultat du vote

(pour/contre/abstentions)

213/23/17

1.   Conclusions et recommandations

1.1.

En 2016, les négociations sur le partenariat transatlantique de commerce et d’investissement (PTCI) entrent dans une année critique. Les négociateurs principaux de l’Union européenne et des États-Unis ont déclaré qu’ils s’engageaient à accélérer les négociations dans le but de parvenir, avant la fin du mandat présidentiel américain en cours, à un accord politique ambitieux et global, définissant les «zones d’atterrissage» envisageables dans tous les domaines. Le Comité économique et social européen (CESE) a dès lors décidé d’élaborer un avis d’initiative sur des questions clés spécifiques soulevées dans le cadre du PTCI.

1.2.

Le présent avis ne formule pas d’observations sur l’éventuel accord final qui pourrait résulter des négociations entre l’Union européenne et les États-Unis. Néanmoins, il importe d’évaluer dans quelle mesure les positions de la société civile organisée européenne, telles qu’exprimées notamment dans les avis antérieurs du CESE, ont été prises en compte dans les propositions de l’Union européenne qui sont actuellement à la disposition du public. Cette démarche permettra d’établir la base d’un partenariat renforcé entre la Commission européenne et la société civile européenne dans l’élaboration de la politique commerciale de l’Union européenne.

1.3.

Le CESE, soulignant son rôle institutionnel, formule dès lors les recommandations ci-après.

1.4.    Coopération réglementaire

1.4.1.

Les négociations du PTCI créent une nouvelle dynamique de renforcement de la coopération réglementaire, assortie d’attentes plus élevées. Par conséquent, le Comité constate avec satisfaction que le chapitre proposé porte sur la poursuite d’objectifs de politique publique ainsi que d’un niveau élevé de protection dans un certain nombre de domaines définis. Le CESE se félicite également de la clarification explicite du fait que la fonction et la finalité de la structure institutionnelle pour la coopération réglementaire est d’apporter, sous contrôle démocratique, un soutien et des conseils aux décideurs; cette structure n’aura pas le pouvoir d’adopter des actes juridiques et ne remplacera aucune procédure de réglementation interne.

1.4.2.

Cependant, le Comité sollicite une définition plus claire du «fardeau» que représentent certaines réglementations et souligne que les réglementations qui protègent les droits des consommateurs, des travailleurs et de l’environnement ne devraient pas, en soi, être considérées comme un «fardeau».

1.4.3.

Le CESE demande également que le chapitre sur les bonnes pratiques réglementaires ne limite pas le droit des parties de réglementer ou d’instaurer des procédures équivalentes à celle qui régit, aux États-Unis, le signalement d’un projet et la prise en compte des commentaires qui s’y rapportent (notice-and-comment).

1.4.4.

En outre, le CESE demande à la Commission européenne de clarifier les modalités concernant la participation représentative des parties intéressées, en particulier des partenaires sociaux et des représentants de la société civile.

1.5.    Obstacles techniques au commerce (OTC) et mesures sanitaires et phytosanitaires (MSP)

1.5.1.

Le CESE estime que les propositions relatives à la normalisation, à la réglementation technique, au marquage et à l’étiquetage doivent être considérées comme autant d’intérêts offensifs importants de l’Union européenne. Il prend note des dispositions importantes en matière de transparence, mais préconise toutefois:

la prise en compte des préoccupations exprimées par les organismes européens de normalisation CEN et Cenelec concernant le risque lié à la reconnaissance mutuelle des normes volontaires,

l’approfondissement des travaux sur les exigences en matière de marquage et d’étiquetage.

1.5.2.

Pour ce qui est du chapitre consacré aux MSP, le CESE note qu’il se fonde sur l’accord sur l’application des MSP de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), qui inclut le principe de précaution. Toutefois, le CESE demande davantage de garanties concernant la non-modification de la législation alimentaire de l’Union européenne et le maintien par cette dernière des restrictions sur les hormones, les activateurs de croissance et les organismes génétiquement modifiés.

1.6.    Douanes et facilitation des échanges

1.6.1.

Le CESE reconnaît l’importance de la facilitation des échanges, notamment pour les petites entreprises, et se félicite du chapitre proposé par la Commission européenne. Il recommande cependant la poursuite de la simplification des régimes douaniers et la clarification des règles en matière de sanctions et de responsabilité en cas de violation de la législation douanière.

1.7.    Services

1.7.1.

Le CESE se félicite des engagements significatifs de l’Union européenne dans le cadre du chapitre sur les services et réitère son appel en faveur d’un accès accru au marché à l’échelle fédérale ainsi qu’au niveau des États, d’une coopération réglementaire renforcée (en reconnaissant que l’accès au marché en dépend aussi) et de la préservation des services publics conformément au traité sur le fonctionnement de l’Union européenne. Le CESE réaffirme également que les services audiovisuels ne font pas partie de l’accord et ne devraient donc figurer dans aucun engagement. Il soutient également la décision de la Commission européenne de suspendre les négociations sur l’accès au marché des services financiers jusqu’à ce que les négociateurs états-uniens conviennent clairement d’engager des discussions sur la coopération réglementaire, dans le but d’accroître les niveaux de protection et la stabilité financière dans ce secteur. Le CESE demande aussi que l’exemption concernant les services d’utilité publique au sens large soit formulée de manière explicite et détaillée afin de garantir que l’accord ne s’applique pas à l’ensemble des services publics qui font l’objet d’une externalisation ou sont financés par l’État ou des organisations privées, avec ou sans but lucratif.

1.8.    Commerce et développement durable

1.8.1.

Le CESE approuve la portée globale et détaillée de la proposition de la Commission européenne concernant le commerce et le développement durable. Cependant, il rappelle que la valeur réelle de ces dispositions dépend principalement de la possibilité de les mettre en œuvre de manière efficace. Il appelle de ses vœux un mécanisme d’application efficace, ainsi qu’un solide système de suivi par la société civile. Le CESE n’est pas à même de commenter les mesures d’exécution concernant le chapitre sur le développement durable du PTCI, sachant que la publication des propositions de texte a été retardée. Il importe que la Commission européenne communique avec la société civile et les partenaires sociaux au sujet de ces propositions, afin de veiller à ce qu’elles soient conçues pour être efficaces dans la pratique. Le CESE se réserve la possibilité de commenter ces éléments lorsqu’ils seront rendus publics.

1.9.    Protection des investissements

1.9.1.

Le CESE se félicite des propositions visant à réformer le système de protection des investissements, ainsi que de l’objectif de création d’une juridiction multilatérale permanente des investissements qui remplace les tribunaux d’arbitrage privés. Il continue toutefois à voir d’importants points problématiques, exposés au paragraphe 8.8, auxquels il convient de remédier. Il invite également la Commission européenne à réaliser une évaluation d’impact portant aussi bien sur les coûts que sur le fonctionnement du nouveau système juridictionnel des investissements.

2.   Contexte

2.1.

Depuis le lancement des négociations sur le PTCI en juin 2013, le CESE a joué un rôle important dans la formulation des positions de la société civile organisée européenne en élaborant des avis sur des aspects précis des négociations sur le PTCI (1), sur la protection de l’investissement et le règlement des différends entre investisseurs et États (2), ainsi que sur l’impact du PTCI sur les petites et moyennes entreprises (PME) (3). Dans l’intervalle, la Commission européenne a publié son importante communication intitulée «Le commerce pour tous» (4), qui fixe les conditions des futurs traités en matière de commerce et d’investissement. Le CESE a soutenu, dans son avis (5), l’approche présentée dans la communication. Le Comité s’efforce également, en coopération avec les autres institutions de l’Union européenne, de contribuer à un débat éclairé sur le PTCI au sein de la société civile, par l’intermédiaire d’activités liées à ce thème. Il s’agit notamment d’organiser des auditions et des visites de membres du CESE aux États-Unis.

2.2.

Le CESE constate que les négociations sur le PTCI sont menées de manière plus transparente que les précédentes négociations en matière de commerce et d’investissement. Ce sont les premières pour lesquelles le mandat du Conseil ainsi que les positions et plusieurs propositions de texte de l’Union européenne ont été publiés. Un groupe consultatif a été créé, réunissant des experts qui représentent un large éventail d’intérêts (consommateurs, syndicats, entreprises, environnement et santé publique) dans le but de fournir aux négociateurs commerciaux de l’Union européenne des avis de très grande qualité dans les domaines faisant l’objet des négociations. Toutefois, le CESE déplore, compte tenu de son rôle consultatif, de ne pas avoir été formellement inclus dans ce groupe consultatif «Partenariat transatlantique» spécifique (6). La Commission européenne a créé une page internet consacrée au PTCI, qui comprend des fiches d’information et des guides de lecture, des documents de prise de position de l’Union européenne (qui exposent et décrivent l’approche générale de l’Union européenne sur un thème), des propositions de texte de l’Union européenne (c’est-à-dire ses premières propositions de texte juridique sur des sujets abordés dans le cadre du PTCI), et l’offre de l’Union européenne en matière d’accès au marché pour ce qui est des services. Le CESE approuve la proposition de la Commission européenne concernant la création d’un Forum de la société civile, qui sera composé de représentants d’organisations de la société civile indépendantes, dont des participants aux groupes consultatifs internes, en vue de mener un dialogue sur la mise en œuvre et l’application de l’accord.

2.3.

Le présent avis s’appuie sur les conclusions des avis antérieurs, qui demandaient à ce que les avantages du PTCI soient également répartis entre le monde des entreprises (y compris les PME), les travailleurs, les consommateurs et les citoyens, et à faire de la préservation des normes élevées en vigueur dans l’Union européenne une condition préalable à l’acceptation de l’accord. Le CESE juge important de commenter les positions et les propositions de texte de l’Union européenne déjà publiées pour un certain nombre de chapitres, afin d’examiner dans quelle mesure elles cadrent avec ces conditions préalables, ainsi que de recenser les principaux points d’intérêt et de préoccupation pour la société civile européenne. En particulier, le CESE a choisi de concentrer son analyse sur les propositions en matière de coopération réglementaire, y compris les bonnes pratiques réglementaires (rendues publiques le 21 mars 2016), les OTC et les MSP (publiées dans les deux cas en janvier 2015), les questions douanières et la facilitation des échanges (mises à disposition en janvier 2015 et modifiées en mars 2016), les services (publiées en juillet 2015), le développement durable (publiées en novembre 2015) et les investissements (publiées en novembre 2015). Le présent avis examine les documents publiés jusqu’au 14 juillet 2016.

2.4.

Il est à noter que la Commission européenne a publié, le 14 juillet 2016, une proposition concernant la composition institutionnelle de l’accord (7), qui porte notamment sur la création de groupes consultatifs internes (GCI), composés de représentants de la société civile et compétents pour conseiller les parties sur l’application de l’accord. Le Comité se réjouit que le mandat des GCI soit élargi en vue de couvrir toute question présentant un intérêt dans le cadre de l’accord, mais regrette que la réunion des deux GCI, qu’ils doivent prendre l’initiative d’organiser, ne soit pas explicitement mentionnée dans la proposition de l’Union européenne et que le Forum de la société civile ne puisse être convoqué que par la commission mixte. Les réunions du Forum de la société civile devraient permettre aux membres des deux GCI de travailler sur des recommandations communes aux parties.

2.5.

À cet égard, le CESE déplore profondément que, lorsque les négociations seront finalement menées sur la base de textes consolidés, le degré élevé de transparence atteint jusqu’à présent soit gravement compromis, sauf si les États-Unis acceptent de mettre les textes à la disposition du public ou, à tout le moins, du groupe consultatif de l’Union européenne. Par conséquent, le CESE demande à la Commission européenne de continuer à tout mettre en œuvre pour aborder cette question avec son homologue.

3.   Coopération réglementaire

3.1.

La coopération réglementaire, qui est l’un des trois piliers du PTCI (les deux autres étant l’accès au marché et les règles), se compose de quatre éléments: les aspects horizontaux (qui comprennent une partie sur la «cohérence réglementaire» ou les «bonnes pratiques réglementaires», d’une part, et une partie sur la «coopération réglementaire» entre les régulateurs, d’autre part), les obstacles techniques au commerce (OTC), la sécurité alimentaire et la santé animale et végétale (MSP), ainsi que des annexes sectorielles. L’objectif de la présente partie est de commenter le premier de ces éléments (les aspects horizontaux), tandis que la partie suivante traitera des OTC et des MSP.

3.2.

La coopération réglementaire a été reconnue comme l’un des principaux objectifs du PTCI, car elle pourrait jouer un rôle important pour faciliter le commerce et l’investissement ainsi qu’améliorer la compétitivité, notamment des petites entreprises. Les petites et moyennes entreprises, en particulier, espèrent l’ouverture de nouvelles possibilités, sachant qu’elles ne disposent pas, contrairement aux grandes entreprises, des ressources nécessaires pour évoluer dans différents environnements réglementaires des deux côtés de l’Atlantique. Dans le même temps, une compatibilité accrue des régimes de réglementation permettrait aux grandes entreprises de tirer parti des économies d’échelle entre l’Europe et les États-Unis.

3.3.

Les efforts en faveur d’une coopération réglementaire ne sont pas une nouveauté (8). Les négociations du PTCI créent une nouvelle dynamique de renforcement de la coopération réglementaire, assortie d’attentes plus élevées. Le CESE considère qu’il n’est pas facile d’estimer les avantages découlant du renforcement de la coopération réglementaire, principalement parce qu’ils seront fonction du degré de coopération qui sera convenu au cours des négociations. Selon les estimations du projet de rapport technique intermédiaire élaboré par la Commission européenne concernant l’évaluation de l’impact sur le développement durable, 76 % de l’incidence globale du PTCI seront le résultat de la coopération en matière de réglementation, contre 24 % pour la réduction tarifaire (9).

3.4.

Toutefois, le CESE considère qu’il importe de mettre en place une protection afin de garantir que le processus de coopération réglementaire n’est pas utilisé pour réduire les normes sociales, environnementales, de protection des consommateurs et de travail, mais qu’il vise au contraire à les améliorer. Si ces conditions étaient remplies, les avantages ne seraient pas seulement économiques mais pourraient également faciliter la tâche des régulateurs en ce qui concerne la réalisation des objectifs de politique publique.

3.5.

Pour le CESE, le maintien des niveaux élevés de protection en vigueur dans l’Union européenne constituait un élément fondamental. La proposition actuelle de l’article x1b du chapitre sur la coopération réglementaire porte sur la poursuite d’objectifs de politique publique et d’un niveau élevé de protection, notamment dans les domaines suivants: santé publique; santé humaine, animale et végétale; santé et sécurité; conditions de travail; bien-être des animaux; environnement; consommateurs; protection et sécurité sociales; données à caractère personnel et cybersécurité; diversité culturelle; et stabilité financière.

3.6.

Cependant, le CESE s’inquiète du fait que cela pourrait être mis à mal par l’article x1d qui énonce un objectif consistant à «réduire les exigences réglementaires qui représentent un fardeau inutile» (10). Le CESE s’inquiète du fait que ce libellé puisse être interprété en ce sens que les réglementations qui protègent les droits des consommateurs, du travail et de l’environnement sont un «fardeau» en soi.

3.7.

Par conséquent, le CESE souhaite réitérer avec force les déclarations selon lesquelles le maintien de normes élevées est une exigence fondamentale et que, outre son objectif d’accroître les possibilités commerciales, la coopération réglementaire devrait également améliorer la sécurité, la santé ainsi que le bien-être économique et social des citoyens des deux côtés de l’Atlantique. Dès lors, cet engagement devrait être réaffirmé en des termes très clairs et détaillés dans l’accord final. Le CESE est préoccupé par la proposition de l’Union européenne relative aux bonnes pratiques réglementaires. La coopération réglementaire devrait avoir pour objectif d’améliorer le dialogue entre régulateurs, pas d’influencer mutuellement les processus législatifs des partenaires. Le CESE demande à la Commission européenne de clarifier la section de sa proposition consacrée aux bonnes pratiques réglementaires.

3.8.

En ce sens, le CESE estime que la proposition actuelle concernant le chapitre sur les bonnes pratiques réglementaires, qui observe que les parties devront examiner des «alternatives non réglementaires (y compris l’option de ne pas réglementer) […] qui permettraient d’atteindre l’objectif de l’acte réglementaire», ne devrait pas être considérée comme limitant le droit de réglementer des parties. Pour plus de certitude, le texte de l’accord devrait préciser que cette disposition ne limite pas ce droit. Il note également que la procédure visée à l’article 6 relatif aux consultations des parties prenantes de la proposition ne devrait pas être assimilée à la procédure qui régit, aux États-Unis, le signalement d’un projet et la prise en compte des commentaires qui s’y rapportent (notice-and-comment).

3.9.

Pour le CESE, le développement du commerce doit dès lors conserver son statut d’objectif central. Il est important que les négociations relatives au PTCI défendent la suppression des obstacles inutiles au commerce (11).

3.10.

Le CESE se réjouit que l’actuelle proposition de la Commission européenne précise explicitement que la fonction et l’objectif de la structure institutionnelle visent à fournir un soutien et des conseils aux décideurs sous le contrôle démocratique du Parlement européen et du Conseil de l’Union européenne (12). Le processus ordinaire d’élaboration des politiques ne doit pas être fragilisé, et il convient d’éviter les retards ou les gels réglementaires. Le CESE se félicite de l’article 1er proposé, qui réaffirme à la fois le droit de réglementer et celui d’établir les niveaux de protection. Il est toutefois crucial que la proposition définisse la composition et les règles de procédure des différents comités et groupes. Le CESE invite la Commission européenne à assurer la cohérence et l’homogénéité entre les chapitres portant sur la coopération horizontale en matière de réglementation, ceux concernant les OTC et les MSP, et les annexes sectorielles.

3.11.

Les dialogues qui se déroulent au début du processus réglementaire augmentent les chances de cerner des solutions politiques comprenant des considérations transfrontières, et seront donc prévus. L’association des parties intéressées par l’intermédiaire d’une procédure transparente, qui est l’un des principes fondamentaux d’un bon processus législatif au sein de l’Union européenne, doit faire l’objet d’une description détaillée dans la proposition de la Commission européenne. Pour que la coopération réglementaire permette d’obtenir des résultats inclusifs et des propositions pour les régulateurs, il doit y avoir une participation structurée et équilibrée des parties prenantes, notamment des entreprises, des consommateurs, des groupes d’intérêt en matière d’environnement, et des travailleurs.

3.12.

Pour que des progrès précis se concrétisent, des consultations précoces sur l’activité réglementaire entre les régulateurs européens et américains doivent être prévues. Les discussions à un stade précoce dans le processus d’élaboration des politiques devraient augmenter le potentiel de créer des règles d’interopérabilité à l’avenir et de permettre aux acteurs du marché de se conformer simultanément aux deux régimes. Cependant, les régulateurs doivent considérer comme volontaires le dialogue et la réponse à des observations de leurs homologues ou de toute personne intéressée, afin d’éviter tout gel réglementaire.

3.13.

Le CESE demande à la Commission européenne de clarifier les modalités concernant à la fois le dialogue susmentionné et la participation représentative des parties intéressées, en particulier les partenaires sociaux et les représentants de la société civile. Il doit être clairement garanti que les parties prenantes concernées auront la possibilité de contribuer à un dialogue transparent au moyen d’une procédure bien définie, rendant obligatoire l’égalité de traitement et permettant d’éviter des retards dans le processus réglementaire. Du côté de l’Union européenne, le registre de transparence devrait être pris en compte dès lors qu’il s’agit de déterminer la pertinence et la représentativité des parties prenantes.

4.   Questions relatives aux OTC et aux MSP

4.1.

Le CESE se réjouit que l’accord de l’OMC sur les OTC soit intégré tel quel dans la proposition. Par ailleurs, le chapitre proposé concernant les OTC traite les exigences techniques (normes et règlements techniques) et les exigences en matière d’évaluation de la conformité. Le CESE estime que les propositions relatives à normalisation, à la réglementation technique, au marquage et à l’étiquetage doivent être considérées comme autant d’intérêts offensifs importants de l’Union européenne. Il importe que l’on n’utilise pas ces propositions pour remettre en question des réglementations indispensables en matière de sécurité, de santé et de protection sociale.

4.2.

Le CESE prend acte des importantes dispositions relatives à la transparence: il réitère l’obligation de notifier les mesures à l’OMC, de communiquer des informations à l’autre partie, de donner la possibilité de formuler des observations écrites et d’apporter des réponses à ces observations. Il prévoit en outre la publication de l’ensemble des réglementations techniques applicables dans un registre, qu’elles soient nouvelles ou existantes, ainsi que des normes mentionnées dans des réglementations techniques (sachant que l’immense majorité des normes sont appliquées par l’industrie, mais ne sont pas «citées» — appliquées — par les régulateurs dans les réglementations techniques).

4.3.

En ce qui concerne la normalisation, le CESE salue la coopération entre les organismes de normalisation, de même que les principes de reconnaissance mutuelle limitée. Toutefois, le CESE a pris note des préoccupations exprimées par le CEN/Cenelec sur les risques de la reconnaissance mutuelle de normes volontaires dans le cadre du PTCI. Le CESE demande à la Commission européenne d’examiner les propositions des organismes de normalisation de l’Union européenne, et de veiller à ce que les intérêts de l’Union soient préservés. Même la garantie que tous les acteurs concernés pourraient contribuer à l’élaboration de nouvelles normes est importante.

4.4.

Les systèmes de normalisation américain et européen diffèrent considérablement l’un de l’autre. En particulier, le principe selon lequel «un produit = une norme acceptée partout», qui représente un pilier du marché unique de l’Union européenne, n’existe pas aux États-Unis. En Europe, au moment de l’adoption d’une nouvelle norme, les normes nationales entrant éventuellement en contradiction avec elle sont supprimées; aux États-Unis, différentes normes coexistent sur le marché, ce qui complique les choses pour les PME qui ont du mal à comprendre laquelle correspondrait le mieux à leur gamme de produits. Dans le but d’augmenter la transparence et de faciliter les démarches des petites entreprises, il est essentiel de créer un service d’assistance (helpdesk) du côté américain, qui apporterait de l’aide aux entreprises de l’Union européenne souhaitant exporter leurs produits sur le marché américain. Il s’agit souvent de petites entreprises dont les ressources sont limitées, mais disposant d’un haut niveau de spécialisation sur un marché de niche qui est à l’origine de leur compétitivité.

4.5.

Le CESE regrette que des domaines clés comme la sécurité électrique, la compatibilité électromagnétique, les machines et les télécommunications, dans lesquels l’Union européenne possède un intérêt offensif manifeste, font partie des domaines de priorité à considérer ultérieurement; ils devraient figurer parmi les résultats référencés spécifiques concernant l’évaluation de la conformité découlant des négociations.

4.6.

De même, le CESE déplore que dans la partie consacrée au marquage et à l’étiquetage, aucun domaine prioritaire n’ait été déterminé pour les travaux futurs et qu’il n’y ait d’espace réservé ni pour le calendrier de la future révision des exigences en matière de marquage et d’étiquetage, ni pour les résultats découlant des négociations dans des secteurs particuliers.

4.7.

Le chapitre proposé en ce qui concerne les MSP s’appuie sur l’accord sur les MSP de l’OMC, et commente le texte proposé par l’Union européenne pour discussion avec les États-Unis lors du cycle de négociations qui s’est tenu du 29 septembre au 3 octobre 2014, et a été rendu public le 7 janvier 2015.

4.8.

L’accord sur les MSP de l’OMC, qui régit l’application des dispositions concernant la santé animale et végétale, inclut le principe de précaution (article 5, paragraphe 7), qui est désormais également inscrit dans le traité de Lisbonne. Cet élément ne peut pas être négociable et ne devrait donc pas faire partie de l’accord. Dès lors, le CESE se félicite vivement des assurances données par l’Union européenne sur le fait que le PTCI ne modifierait en rien la législation alimentaire existante, que l’Union européenne maintiendrait ses restrictions sur les hormones et les activateurs de croissance dans la viande, et que le PTCI ne modifierait pas la législation de l’Union en matière d’organismes génétiquement modifiés.

5.   Douanes et facilitation des échanges

5.1.

Comme les échanges de marchandises représentent une grande partie du commerce transatlantique, tout effort visant à améliorer les procédures douanières aura une forte incidence sur les échanges bilatéraux, notamment pour les petites entreprises.

5.2.

Le CESE accueille favorablement les propositions complémentaires visant à faciliter les procédures douanières, et notamment à: mettre en place un guichet unique des deux côtés de l’Atlantique, améliorer la coordination en matière de normes internationales et élaborer un programme de partenariat sur la facilitation des échanges; harmoniser et aligner les données, et s’engager à évaluer quelles données il y a lieu d’aligner; étendre les responsabilités du comité mixte de coopération douanière, afin qu’il agisse en tant que «comité douanier spécialisé» dans un certain nombre de domaines à définir et de décisions anticipées.

5.3.

Le CESE demande à la Commission européenne d’éclaircir les éléments qui revêtent une importance particulière pour les entreprises de l’Union européenne et ne sont pas encore clairement définis dans le texte disponible, tels que la «valeur de minimis», la suppression de tous les frais supplémentaires, ainsi que la question des sanctions et de la responsabilité en cas d’infraction à la législation douanière.

6.   Services

6.1.

Dans son offre sur les services, l’Union propose des engagements significatifs dans des secteurs qui sont essentiels pour stimuler la compétitivité et la croissance de l’Europe (dans les domaines du numérique et des télécommunications), accélérer l’intégration des chaînes de valeur mondiales (transports, services de messagerie, services aux entreprises et services professionnels) ou qui concernent des secteurs économiques cruciaux (construction, distribution, énergie).

6.2.

Le CESE note également avec satisfaction que la proposition de l’Union européenne contient un cadre destiné à faciliter un régime équitable, transparent et cohérent pour la reconnaissance mutuelle des qualifications professionnelles par les parties et définit les conditions générales pour la négociation d’accords de reconnaissance mutuelle, qui sont d’une importance capitale pour garantir aux prestataires de services de l’Union européenne un meilleur accès au marché.

6.3.

Le CESE rappelle trois aspects principaux liés aux services: la nécessité d’accroître l’accès au marché à l’échelon fédéral comme à l’échelon de l’État; la reconnaissance du fait que l’accès au marché dépend aussi de l’amélioration de la coopération réglementaire; la nécessité de préserver le caractère spécifique des services publics, conformément au traité sur le fonctionnement de l’Union européenne.

6.4.

Le CESE souligne que la Commission européenne devrait garantir qu’en matière de services, le PTCI aille au-delà des accords existants tels que l’accord général sur le commerce des services (AGCS) et l’accord sur le commerce des services (ACS), et que des accords spécifiques soient conclus afin de lever les nombreux obstacles discriminatoires existants aux États-Unis.

6.5.

Le CESE souligne que la Commission européenne devrait prendre tout particulièrement en compte la question qui concerne le déséquilibre de l’accès au marché: les entreprises américaines peuvent bénéficier du marché unique européen, tandis que les sociétés de l’Union européenne sont face à un marché américain fragmenté, du fait qu’un grand nombre de secteurs des services sont réglementés à l’échelon des États. Le CESE attire l’attention sur le fait que le maintien, par les États-Unis, de l’obligation de visa pour les ressortissants de certains États membres, alors que les citoyens américains n’ont pas besoin de visa pour se rendre dans l’Union européenne, constitue à l’égard des citoyens européens un traitement discriminatoire qui est préjudiciable aux relations bilatérales.

6.6.

Le CESE souhaite formuler les observations suivantes au sujet de certains secteurs en particulier:

les services audiovisuels ne font pas partie de l’accord et ne devraient donc figurer dans aucun engagement,

l’accès au marché des services financiers devrait être suspendu jusqu’à ce que les négociateurs américains conviennent clairement d’entamer des discussions au sujet de la coopération réglementaire. Cette coopération devrait avoir pour objectif de renforcer les niveaux de protection et la stabilité financière,

il importe de protéger intégralement les services publics qui garantissent les normes élevées existantes de la fourniture de services essentiels et sensibles aux citoyens. Dans cette optique, des exemptions claires et définies de manière large devraient être mises en place.

6.7.

En ce qui concerne les services publics, l’avis du CESE sur «Le commerce pour tous» a fait valoir que «le meilleur moyen [de] parvenir [à les protéger dans les accords commerciaux] consiste à recourir à une liste positive en ce qui concerne tant l’accès au marché que le traitement national». Toutefois, la proposition actuelle de l’Union européenne portant sur les services dans le PTCI adopte une approche «hybride» inédite pour établir une liste de services, qui pourrait être source de grandes incertitudes.

6.8.

À l’annexe III, qui concerne l’accès au marché, figure une liste positive qui reprend la même formulation que la liste AGCS de l’Union européenne, selon laquelle «il existe des services collectifs dans des secteurs tels que les services de conseil dans des domaines scientifiques et techniques, les services de recherche et développement en sciences sociales et humaines, les services d’essais et d’analyses techniques, les services relatifs à l’environnement, les services de santé, les services de transport et les services auxiliaires de tous les modes de transport. Des droits exclusifs sur ce genre de services sont souvent accordés à des opérateurs privés, notamment à des opérateurs ayant obtenu des concessions de la part de pouvoirs publics et qui sont soumis à des obligations de service spécifiques. Comme les entreprises de service public sont également souvent présentes au niveau régional, il n’est pas possible d’en dresser une liste détaillée et exhaustive par secteur» (13). Toutefois, la «clause d’utilité publique», qui permet de préserver les monopoles, présente plusieurs lacunes, dont celle de ne pas couvrir les limitations telles que les examens des besoins économiques ou les quotas. Le CESE souhaite insister sur le fait que l’exemption concernant les services d’utilité publique doit s’appliquer à l’ensemble des modes de fourniture.

6.9.

Le CESE demande que, à l’annexe III, l’exemption concernant les services d’utilité publique soit formulée de manière explicite et détaillée afin de garantir que l’accord ne s’applique pas à l’ensemble des services publics qui font l’objet d’une externalisation ou sont financés par l’État ou des organisations privées, avec ou sans but lucratif.

6.10.

Bien que les clauses de suspension et d’ajustement ne s’appliquent pas à l’annexe II, le CESE redoute que les négociations puissent aboutir à ce que les réserves de l’Union européenne qui sont actuellement énumérées dans cette annexe soient déplacées à l’annexe I, empêchant ainsi la remise en cause de la libéralisation. À cet égard, le CESE soutient l’affirmation du rapport consultatif élaboré par le Conseil économique et social néerlandais, selon laquelle «les gouvernements doivent conserver la liberté de déclarer que certains services, désignés selon leur propre préférence, sont “d’intérêt général”» (14).

6.11.

Le CESE est également préoccupé par le fait que toute réglementation publique régissant un service qui n’est pas correctement mentionné par la liste figurant dans les annexes I et II risque d’être contestée par le gouvernement des États-Unis dans le cadre d’une procédure contentieuse d’État à État pour rupture des clauses de traitement national ou de la nation la plus favorisée, ou par le biais du système juridictionnel des investissements.

6.12.

Le CESE déplore que, par rapport à d’autres chapitres, l’accès au marché des services se trouve négligé et invite la Commission européenne à intensifier ses efforts pour éliminer les derniers obstacles à l’accès au marché américain. Les États-Unis continuent à imposer une interdiction totale en matière de transport maritime. Il existe des plafonds de participation, fixés par exemple à 25 % dans le secteur du transport aérien et à 20 % dans celui des télécommunications, ainsi que des obstacles non négligeables à l’intérieur des frontières, notamment dans les secteurs des télécommunications et des satellites. Une très longue liste de critères de citoyenneté est appliquée, par exemple dans les domaines de la banque, des assurances et de la comptabilité. Il existe des exigences de résidence pour les services juridiques, de comptabilité, d’ingénierie et d’assurance. Une présence locale est également exigée par exemple pour les services juridiques, la comptabilité et l’assurance, ainsi qu’une exigence de forme juridique, notamment dans le domaine des assurances.

7.   Développement durable

7.1.

Le PTCI offre aux parties l’occasion de promouvoir le développement durable par le commerce et d’aller au-delà de tout autre accord commercial conclu par l’une ou l’autre d’entre elles en ce qui concerne les objectifs de développement durable. Dans ses avis REX/390 et REX/449 (15), le CESE demandait l’inclusion d’un solide chapitre sur le commerce et le développement durable, défini comme une composante essentielle de l’accord, et se félicite dès lors du champ d’application complet et détaillé de la proposition de la Commission européenne. Cependant, le CESE estime que la valeur réelle de ces dispositions dépend principalement de la possibilité qu’elles soient en fin de compte mises en œuvre, et ce, de manière efficace.

7.2.

L’avis REX/390 indiquait que tout accord devra absolument intégrer un mécanisme efficace de suivi conjoint par la société civile. Par conséquent, le CESE soutient pleinement la déclaration de la commissaire Malmström selon laquelle le chapitre sur le développement durable doit prévoir des mécanismes d’application efficaces (16). De même, le CESE soutient les recommandations du rapport consultatif du Conseil économique et social néerlandais et du Conseil économique, social et environnemental français concernant la «capacité d’imposer, si nécessaire, des sanctions efficaces aux parties» (17).

7.3.

Le CESE félicite la Commission européenne pour son profond engagement en faveur de normes élevées en matière de travail et d’environnement. Le CESE se réjouit que le préambule de l’accord ainsi qu’un article spécifique du chapitre sur le développement durable réitèrent le droit de réglementer et de fixer des niveaux de protection élevés.

7.4.

Le CESE avait invité les parties à réaffirmer leur engagement de mettre en œuvre de manière effective leur législation sur le travail et de veiller à son application, ainsi que de respecter les obligations découlant de leur adhésion à l’Organisation internationale du travail (OIT). Par conséquent, le CESE accueille favorablement l’inclusion de dispositions contraignantes sur la protection des normes fondamentales du travail, telles que la liberté d’association et le droit de négociation collective par la création de syndicats et l’adhésion à ces organisations, l’élimination du travail forcé ou obligatoire, l’abolition effective du travail des enfants, ainsi que l’égalité des chances et la non-discrimination en matière d’emploi et de profession. Par ailleurs, le CESE se félicite de la mention supplémentaire de l’engagement des parties à garantir des conditions de travail décentes, ainsi que la santé et la sécurité au travail. Afin de rendre contraignantes ces dispositions relatives au développement durable, une «approche en trois étapes» doit être suivie avec une consultation des pouvoirs publics, des groupes consultatifs nationaux et des groupes d’experts, faisant intervenir l’OIT et la disposition de l’accord relative au mécanisme général de règlement des différends.

7.5.

En ce qui concerne les aspects environnementaux, l’ajout d’une disposition sur le commerce en rapport avec la gestion écologiquement rationnelle des produits chimiques et des déchets coïncide parfaitement avec les préoccupations de la société civile. Le CESE approuve donc le fait que l’accord comprenne des dispositions visant à prévenir ou à réduire autant que possible les effets néfastes des substances chimiques et des déchets sur la santé humaine et l’environnement. De même, le CESE salue l’engagement des parties en faveur de la gestion durable des forêts et de la reconnaissance mutuelle de l’incidence négative considérable de la pêche illicite, non déclarée et non réglementée.

7.6.

La disposition concernant la coopération entre les parties sur les aspects liés au commerce des politiques en matière de travail et d’environnement est opportune dans la proposition. Le CESE est favorable à ce que soit reconnue l’importance de la coopération en vue de promouvoir le travail décent dans les chaînes d’approvisionnement mondiales, ainsi que d’élaborer des stratégies et des politiques visant à encourager la contribution du commerce à l’utilisation efficace des ressources, à l’économie verte et à l’économie circulaire (18).

7.7.

Le CESE appuie l’objectif de protéger les droits des travailleurs et l’environnement grâce à un code de conduite, à des régimes standard, à l’étiquetage, à la certification, à la vérification et à d’autres politiques d’entreprise connexes.

7.8.

Un comportement responsable des entreprises, à l’image de la responsabilité sociale des entreprises, peut contribuer aux objectifs de durabilité. Le CESE juge souhaitable que le chapitre sur le développement durable comprenne des références explicites aux principes directeurs de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) à l’intention des entreprises multinationales, au pacte mondial des Nations unies, à la norme ISO 26000, à la déclaration de principes tripartite sur les entreprises multinationales et la politique sociale de l’OIT, ainsi qu’aux principes directeurs des Nations unies relatifs aux entreprises et aux droits de l’homme.

7.9.

Le CESE note que la proposition de texte de l’Union européenne ne comprend pas d’éléments liés au règlement des différends, qui seront traités ultérieurement, et se réserve la possibilité de commenter ces éléments lorsqu’ils seront rendus publics.

7.10.

Afin de soutenir la mise en œuvre de l’engagement des parties à promouvoir le commerce international de manière à contribuer à l’objectif de poursuivre un développement durable, le CESE préconise un mécanisme d’application fondé sur le dialogue social. Le CESE accueille favorablement les propositions de la Commission européenne relatives à la mise en place de groupes consultatifs internes, au sein desquels seraient représentés de manière équilibrée les groupes de la société civile; défendant de façon proportionnée les intérêts des entreprises, des travailleurs, des consommateurs, de l’environnement et de la santé publique, ces groupes pourraient soumettre des avis ou des recommandations sur la mise en œuvre du PTCI (19). L’expérience acquise avec les accords en vigueur montre que, pour garantir l’efficacité de tels mécanismes de suivi, il importe que les recommandations formulées par les organes de surveillance donnent lieu à une enquête menée par les institutions européennes, et qu’elles soient liées à un processus d’application.

8.   Investissements

8.1.

Le CESE constate que la Commission européenne a proposé un texte visant à instaurer un système juridictionnel des investissements, qui introduit une réforme procédurale créant un nouveau système pour remplacer le mécanisme de règlement des différends entre investisseurs et États (RDIE). Il se compose de deux éléments, les dispositions substantielles relatives à la protection des investissements, et le fonctionnement de ce système qui vise à régler les différends entre les investisseurs et les États. Il comporte également une introduction qui fournit des définitions spécifiques à la protection des investissements.

8.2.

Comme le demandait l’avis REX/390, des définitions plus détaillées sont fournies concernant «le droit de réglementer», «l’expropriation indirecte» et «le traitement juste et équitable». Il s’agit des conditions à remplir pour réguler une procédure de règlement d’un différend entre un État et un investisseur. Ces éclaircissements sont dans l’intérêt du droit des parties à réglementer en faisant primer l’intérêt général par rapport à la protection de l’investisseur.

8.3.

Le CESE souligne que les définitions figurant dans l’accord, en particulier le droit de réglementation, devraient être dépourvues d’ambiguïtés et garantir le droit de l’État à conserver et à instaurer des normes strictes, notamment en matière de protection sociale, de protection de l’environnement et de protection des consommateurs, tout en garantissant une protection adéquate et légitime des investisseurs à l’égard du protectionnisme et de la discrimination. Le CESE salue le fait qu’un article spécifique ait été intégré dans le corps de l’accord, en plus de son préambule. Le droit de réglementation dans le domaine de la protection sociale devrait mentionner explicitement les conventions collectives, y compris les conventions tripartites et/ou générales (erga omnes), afin d’exclure la possibilité qu’elles soient soumises à interprétation, en violation des attentes légitimes d’un investisseur. Les conditions de travail et de rémunération fixées dans le cadre de ces conventions peuvent ne pas être considérées comme des obstacles non tarifaires au commerce.

8.4.

Cependant, le CESE reconnaît que les changements les plus significatifs ont été apportés aux aspects procéduraux du règlement des différends. Le système d’arbitrage a été transformé en un système judiciaire doté d’un tribunal, dans lequel les arbitres ad hoc qui étaient désignés par les parties au litige sont remplacés par des juges figurant dans un registre permanent et nommés par les parties à l’accord. Ces changements rendent ce système plus institutionnalisé. Le CESE invite les parties à veiller à ce que le système juridictionnel des investissements soit pleinement opérationnel dès la ratification du traité, que les juges bénéficient d’une légitimité démocratique et qu’ils soient nommés selon une modalité qui élimine tout risque de politisation du système judiciaire, mais aussi tout risque de conflits d’intérêts.

8.5.

Le CESE est heureux de souligner qu’un code de conduite strict est introduit afin de garantir l’impartialité et d’éviter les conflits d’intérêts. Une cour d’appel est également mise en place pour juger les sentences du tribunal, en réponse aux critiques légitimes formulées à l’égard du RDIE. En outre, la transparence est garantie étant donné que les dispositions de la Cnudci s’appliqueraient aux litiges.

8.6.

S’il accueille favorablement les améliorations qui ont été apportées en vue de réformer le système, le CESE continue à voir d’importants points problématiques auxquels il convient de remédier.

8.7.

Le CESE reconnaît en outre que des inquiétudes liées à la mise en œuvre du nouveau système persistent et qu’elles varient selon les acteurs. Le CESE invite la Commission européenne à prendre davantage en compte ces inquiétudes dans ses efforts permanents visant à améliorer le système de règlement des différends liés aux investissements.

8.8.

Certaines de ces inquiétudes peuvent être résumées comme suit:

la nécessité de trouver le juste équilibre entre des politiques publiques légitimes et les normes de protection des investissements en termes de «traitement juste et équitable» et de «protection contre les expropriations indirectes», en s’appuyant sur des définitions claires qui limitent le risque d’interprétation trop extensive,

une liste très limitée des objectifs politiques légitimes, tels que la protection de la santé publique, de la sécurité, de l’environnement et de la moralité publique, la protection sociale ou celle du consommateur, ou la promotion et la protection de la diversité culturelle, qui sont liés au droit de réglementer,

pas d’exclusion explicite des règlements s’appliquant à l’organisation ou la fourniture de services publics,

l’exclusion totale du manque à gagner lors du calcul de la compensation pour les investissements réalisés,

la mise en œuvre du principe du «perdant payeur» qui pourrait empêcher une entreprise, en particulier une PME, de faire usage du système,

la nécessité de se référer aux obligations des investisseurs énoncées dans la déclaration de l’OIT sur les entreprises multinationales, les principes directeurs des Nations unies relatifs aux entreprises et aux droits de l’homme, et les principes directeurs de l’OCDE à l’intention des entreprises multinationales,

un certain manque de clarté quant à la manière dont les jugements seront reconnus et exécutés par les tribunaux nationaux, et leur lien avec la convention de New York pour la reconnaissance et l’exécution des sentences arbitrales étrangères ou les règles du Centre international pour le règlement des différends relatifs aux investissements (CIRDI). Ce point est à préciser, étant donné que les investisseurs se heurtent déjà à des problèmes d’application dans le système actuel,

la nécessité d’évaluer attentivement la compatibilité du système juridictionnel des investissements avec le cadre juridique de l’Union européenne,

l’absence d’une réelle indépendance des juges car, dans la nouvelle proposition, ils restent autorisés à travailler, dans certains cas, comme juristes d’entreprise,

la nécessité de tenir compte des recommandations du projet de rapport technique intérimaire de l’EIDD sur le PTCI afin d’exclure que des services publics puissent être mis en cause dans le cadre du système juridictionnel des investissements (20).

Le CESE invite la Commission européenne à mobiliser la société civile et la communauté juridique européenne pour répondre à ces préoccupations.

8.9.

De plus, certains acteurs remettent en question la nécessité d’un système d’arbitrage des investissements distinct si les systèmes juridiques nationaux fonctionnent correctement et sont très développés (21).

8.10.

En conclusion, le CESE estime que la proposition de la Commission européenne concernant le système juridictionnel des investissements est un pas dans la bonne direction, mais que pour fonctionner comme un organe judiciaire international indépendant, ce système doit encore être amélioré dans un certain nombre de domaines. Le Comité regrette que le système ait été proposé sans qu’un processus de consultation complet et adéquat ait été mené et avant une évaluation d’impact préalable portant à la fois sur ses coûts et son fonctionnement, et demande à la Commission européenne d’élaborer une telle analyse d’impact.

Bruxelles, le 21 septembre 2016.

Le président du Comité économique et social européen

Georges DASSIS


(1)  Voir l’avis d’initiative du CESE sur «Les relations commerciales transatlantiques et le point de vue du CESE sur l’amélioration de la coopération et un éventuel accord de libre-échange entre l’Union européenne et les États-Unis» (JO C 424 du 26.11.2014, p. 9).

(2)  Voir l’avis d’initiative du CESE sur la protection des investisseurs et le règlement des différends entre investisseurs et États dans les accords de commerce et d’investissement de l’UE avec des pays tiers (JO C 332 du 8.10.2015, p. 45).

(3)  Voir l’avis d’initiative du CESE sur «Le PTCI et son impact sur les PME» (JO C 383 du 17.11.2015, p. 34).

(4)  Communication de la Commission européenne intitulée «Le commerce pour tous — Vers une politique de commerce et d’investissement plus responsable» [COM(2015) 497 final].

(5)  Voir l’avis du CESE sur le thème «Le commerce pour tous — Vers une politique de commerce et d’investissement plus responsable» (JO C 264 du 20.7.2016, p. 123).

(6)  Voir la note 5 de bas de page.

(7)  Voir http://trade.ec.europa.eu/doclib/docs/2016/july/tradoc_154802.pdf

(8)  Par exemple le Conseil économique transatlantique (CET) mis en place en 2007, le Forum de coopération de haut niveau et le Forum de haut niveau pour la coopération réglementaire.

(9)  Ecorys, «Trade SIA on the Transatlantic Trade and Investment Partnership (TTIP) between the EU and the USA — Draft Interim Technical Report» [«Évaluation de l’impact du commerce sur le développement durable du partenariat transatlantique de commerce et d’investissement (PTCI) entre l’Union européenne et les États-Unis — Projet de rapport technique intérimaire»], p. 18 (http://www.trade-sia.com/ttip/wp-content/uploads/sites/6/2014/02/TSIA-TTIP-draft-Interim-Technical-Report.pdf).

(10)  Proposition de texte révisée de l’Union européenne en matière de coopération réglementaire, rendue publique le 21 mars 2016 (http://trade.ec.europa.eu/doclib/html/154377.htm).

(11)  Sociaal-Economische Raad (SER — Conseil économique et social néerlandais), rapport consultatif 16/04E sur le PTCI (https://www.ser.nl/~/media/files/internet/talen/engels/2016/ttip.ashx).

(12)  Voir l’avis du Conseil économique, social et environnemental français sur «Les enjeux de la négociation du projet de Partenariat transatlantique pour le commerce et l’investissement (PTCI)»

(http://www.lecese.fr/sites/default/files/pdf/Avis/2016/2016_01_projet_partenariat_transtlantique.pdf).

(13)  Services and Investment offer of the European Union (Proposition de l’Union européenne portant sur les services et les investissements) (http://trade.ec.europa.eu/doclib/docs/2015/july/tradoc_153670.pdf).

(14)  Voir la note 11 de bas de page.

(15)  Voir la note 5 de bas de page.

(16)  Déclaration de la commissaire Malmström du 17 novembre 2015, http://trade.ec.europa.eu/doclib/docs/2015/november/tradoc_153968.pdf

(17)  Voir les notes 12 et 11 de bas de page.

(18)  Voir l’avis d’initiative du CESE sur le thème «Un travail décent dans les chaînes d’approvisionnement mondiales» (JO C 303 du 19.8.2016, p. 17).

(19)  Voir la note 7 de bas de page.

(20)  Ecorys, «Trade SIA on the Transatlantic Trade and Investment Partnership (TTIP) between the EU and the USA — Draft Interim Technical Report» [«Évaluation de l’impact du commerce sur le développement durable du partenariat transatlantique de commerce et d’investissement (PTCI) entre l’Union européenne et les États-Unis — Projet de rapport technique intérimaire»], p. 144 (http://www.trade-sia.com/ttip/wp-content/uploads/sites/6/2014/02/TSIA-TTIP-draft-Interim-Technical-Report.pdf).

(21)  Voir par exemple la position de la CES sur la proposition de la Commission européenne visant à inclure un système juridictionnel des investissements dans le PTCI et l’AECG (https://www.etuc.org/fr/documents/etuc-position-commissions-proposal-investment-court-system-ttip-and-ceta#.V3S6_dKNh8w).


28.12.2016   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 487/41


Avis du Comité économique et social européen sur «Le développement durable — Recensement des politiques intérieures et extérieures de l’Union européenne

(avis exploratoire)

(2016/C 487/06)

Rapporteur:

Ioannis VARDAKASTANIS

Corapporteure:

Jarmila DUBRAVSKÁ

Consultation

Commission européenne, le 8.6.2016

Base juridique

Article 304 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne

Compétence

Section spécialisée «Agriculture, développement rural et environnement»

Adoption en section spécialisée

5.9.2016

Adoption en session plénière

21.9.2016

Session plénière no

519

Résultat du vote

(pour/contre/abstentions)

171/0/2

1.   Conclusions et recommandations

1.1.

L’adoption du programme de développement durable des Nations unies à l’horizon 2030 marque une transition historique vers un nouveau modèle, qui s’attaque aux disparités économiques, sociales et environnementales dans le cadre d’une démarche universelle et intégrée. Tous les pays doivent transposer et mettre en œuvre le programme, quel que soit le niveau de leurs revenus. Ce programme unique reflète pleinement les valeurs européennes de la justice sociale, de la gouvernance démocratique, de l’économie sociale de marché et de la protection de l’environnement. L’Union européenne dispose là d’une excellente occasion de faire jouer ces valeurs et d’aborder la mise en œuvre du programme de manière globale. Le Comité économique et social européen (CESE) encourage l’Union européenne à montrer l’exemple en engageant ce processus hautement ambitieux à l’échelle mondiale.

1.2.

Le CESE se félicite que l’Union européenne se soit engagée à réaliser les objectifs de développement durable (ODD). Il s’inquiète toutefois de ce qu’une année se soit écoulée depuis l’adoption du programme des Nations unies à l’horizon 2030 sans que l’Union européenne ait pris de mesures concrètes et tournées vers l’avenir pour intégrer les ODD dans ses politiques et ses programmes, et sans qu’elle ait lancé de consultation de vaste ampleur avec la société civile.

1.3.

L’Union européenne fait face à des défis politiques, sociaux, économiques et structurels absolument critiques dans tous les domaines de l’économie et de la société. Les inégalités, le chômage, notamment celui des jeunes, l’exclusion sociale et la pauvreté, les disparités entre les hommes et les femmes, ainsi que la discrimination et la marginalisation de groupes vulnérables dans les sociétés européennes érodent les fondements mêmes de l’Union européenne. En outre, dans de nombreux États membres, la crise financière a aggravé le problème et se transforme en une crise des droits humains et sociaux.

1.4.

Le programme des Nations unies à l’horizon 2030 devrait se transformer en une démarche proactive, positive et porteuse de changement pour l’Europe, et ce processus devrait être mû par une volonté politique ferme et une détermination à façonner une Union européenne durable en réorientant nos économies vers un développement fondé sur la résilience et la compétitivité, efficace dans l’utilisation des ressources, sobre en carbone et axé sur l’intégration sociale. Cette trame narrative orientée vers l’avenir contribuerait également à combler le manque de confiance sans précédent des citoyens européens dans le projet de l’Union, et notamment à gagner le soutien des jeunes. C’est ainsi que l’Union européenne devrait s’appuyer sur le programme des Nations unies à l’horizon 2030 pour offrir à ses citoyens une nouvelle vision pour l’Europe, sous la forme d’un contrat social pour le XXIe siècle.

1.5.

Le CESE plaide en faveur d’une stratégie globale et intégrée pour une Europe durable à l’horizon 2030 et au-delà, qui fournisse les perspectives à long terme ainsi que la coordination et la cohérence des politiques qui s’imposent pour la mise en œuvre du programme des Nations unies à l’horizon 2030. Cette stratégie devrait se fonder sur un accord interinstitutionnel entre la Commission, le Conseil et le Parlement européen afin de créer une base solide pour poursuivre une action politique. De l’avis du CESE, les stratégies européennes actuelles telles que la stratégie Europe 2020, qui a marginalisé la stratégie de l’Union européenne en faveur du développement durable de 2001 en tant que stratégie globale antérieure, et les dix priorités du président Juncker ne fournissent pas le moyen de relever pleinement le défi que constitue la réalisation des ODD dans l’Union européenne.

1.6.

La stratégie globale susmentionnée doit inclure des cibles spécifiques pour les mécanismes de mise en œuvre, de surveillance et de contrôle relatifs aux ODD, ainsi que des plans d’action qui prévoient les instruments législatifs et politiques nécessaires, des activités de sensibilisation — par exemple, un sondage Eurobaromètre sur les ODD — et un plan de mobilisation de ressources financières. La Commission devrait lancer le processus menant à cette stratégie dans sa prochaine communication; la phase de conception de la stratégie devrait prévoir une vaste consultation de la société civile, des gouvernements, des parlements et des collectivités locales. Le CESE est prêt à assumer un rôle de coordination pour appuyer ce processus.

1.7.

L’exercice mené par la Commission, consistant à recenser les politiques intérieures et extérieures de l’Union européenne en fonction des 17 ODD, est une étape nécessaire. Le CESE demande à la Commission de le compléter par une analyse détaillée des lacunes présentes au niveau de chacun des 17 ODD, afin de déterminer les domaines dans lesquels l’Union européenne devrait entreprendre une action préalable et immédiate.

1.8.

Le CESE a défini les principaux domaines d’action ci-après, porteurs d’une transformation radicale en faveur du développement durable, et recommande à la Commission de mettre en place les initiatives phares adéquates, assorties de plans d’action transparents et d’échéances, en tenant compte des recommandations formulées au paragraphe 4.3 du présent avis:

transition vers une économie sobre en carbone, circulaire et collaborative,

transition vers une économie et une société fondées sur l’inclusion sociale, le travail décent et les droits de l’homme,

transition vers une consommation et une production alimentaires durables,

investissement dans l’innovation et dans la modernisation à long terme de l’infrastructure, et soutien aux entreprises durables,

mise à contribution du commerce au service d’un développement mondial durable.

1.9.

Le CESE invite la Commission à intégrer les ODD dans toutes les politiques pertinentes. Les révisions à mi-parcours à entreprendre au cours de la période 2014-2020 devraient être utilisées à cette fin. Les futurs cadres financiers pluriannuels (CFP) seront une excellente occasion de placer les ODD au cœur des programmes de dépenses de l’Union européenne.

1.10.

Il est particulièrement important d’intégrer le programme des Nations unies à l’horizon 2030 dans l’action extérieure de l’Union européenne. La Commission devrait entièrement adapter des domaines d’activité de grande importance — notamment les politiques commerciales et de développement, les politiques environnementales et de lutte contre le changement climatique à l’échelle mondiale, l’aide humanitaire, la réduction des risques de catastrophes, les transferts de technologie et la promotion des droits de l’homme — de façon à œuvrer activement à la mise en œuvre du programme des Nations unies à l’horizon 2030. Le CESE recommande également à la Commission d’intégrer et d’appliquer pleinement le programme des Nations unies à l’horizon 2030 dans le cadre du consensus européen pour le développement, et regrette qu’il n’ait pas été suffisamment incorporé dans la stratégie globale pour la politique étrangère et de sécurité de l’Union européenne.

1.11.

Le CESE demande à la Commission d’évaluer et d’améliorer la coordination de ses politiques horizontales et verticales pour une mise en œuvre efficace du programme des Nations unies à l’horizon 2030. L’amélioration de la gouvernance est un facteur essentiel du développement durable. Il y a lieu de transformer le semestre européen en un cadre de gouvernance approprié pour la coordination verticale du processus de réalisation des ODD avec les États membres. Le CESE souligne que la participation, la transparence, le suivi et l’évaluation, la responsabilité et l’adhésion citoyenne devraient figurer parmi les principaux éléments et caractéristiques d’une meilleure gouvernance.

1.12.

Eurostat devrait élaborer et appliquer une série d’indicateurs et de critères, à l’image de ceux établis par les Nations unies, afin de faciliter le réexamen, le suivi, la responsabilité et la transparence du processus de réalisation des ODD, et de fournir aux institutions de l’Union européenne, aux États membres et à l’ensemble des parties prenantes des données statistiques concrètes ventilées par ODD et par cible.

1.13.

Le CESE constate avec satisfaction que quatre États membres figuraient parmi les 22 pays ayant présenté les premiers rapports volontaires sur la réalisation des ODD au Forum politique de haut niveau des Nations unies pour le développement durable en 2016. Le CESE engage l’Union européenne à montrer l’exemple et à être la première région à présenter un rapport volontaire au Forum politique de haut niveau en 2017. Le CESE serait prêt à organiser la contribution de la société civile.

1.14.

L’Union européenne devrait adopter une approche pluripartite pour la réalisation des ODD, en associant tous les acteurs et les organisations de la société civile sur la base des principes de participation, de responsabilité et de partenariat. Le CESE a lui-même déjà présenté une initiative spécifique concernant la création du Forum de la société civile européenne en faveur du développement durable, qui est une plateforme réunissant diverses parties prenantes. La Commission devrait prendre l’initiative d’explorer et d’élaborer un projet de charte pour les ODD, afin de favoriser la création de partenariats solides aux niveaux national, européen et international.

2.   Introduction

2.1.

En septembre 2015, les dirigeants mondiaux ont adopté un document des Nations unies intitulé Transformer notre monde: le programme de développement durable à l’horizon 2030, établissant un ensemble d’objectifs de développement durable (ODD) visant à éradiquer la pauvreté, à protéger la planète, à veiller à la protection des droits de l’homme et à garantir la prospérité de tous. Chaque objectif comporte des cibles spécifiques à atteindre au cours des quinze années à venir.

2.2.

L’Union européenne jouera un rôle clé dans la réalisation des ODD en Europe. Dans son programme de travail pour 2016, la Commission a annoncé une nouvelle initiative intitulée Prochaines étapes pour un avenir européen durable, qui a pour but d’intégrer les ODD dans les politiques internes et externes de l’Union européenne (1).

2.3.

Comme première étape, la Commission procède actuellement à un exercice de recensement visant à déterminer, parmi les politiques menées par l’Union, celles qui relèvent déjà les défis posés par les ODD. La Commission a demandé au Comité de contribuer à ce processus au moyen du présent avis exploratoire. Afin de tenir compte du débat élargi mené au sein de la société civile européenne, le Comité a pris note des conclusions de deux conférences majeures sur la réalisation des ODD tenues au siège du CESE en 2016, ainsi que d’autres grandes conférences (2).

3.   Convertir les ODD en un programme européen à l’horizon 2030: vers une union du développement durable

3.1.

Le Comité se félicite de l’initiative intitulée Prochaines étapes pour un avenir européen durable , évoquée dans le programme de travail de la Commission pour 2016, en tant que nouvelle approche visant à garantir le développement économique et la durabilité sociale et environnementale de l’Europe au-delà de l’horizon 2020 et consistant à mettre en œuvre les ODD de manière intégrée dans les politiques internes et externes de l’Union européenne (3). Des inquiétudes subsistent toutefois quant à un éventuel manque d’engagement et de volonté politiques, l’Union européenne n’ayant pas, jusqu’à présent, déployé beaucoup d’efforts pour traduire le programme en actions concrètes.

3.2.

Dans une situation où le projet européen est mis à mal et où de nombreux citoyens perdent confiance en lui, l’Union européenne devrait s’appuyer sur les ODD pour construire un récit porteur de changement positif pour une Europe durable, en traduisant des perspectives éloignées en interventions concrètes à court et moyen termes. La durabilité est une «marque européenne» (4): le programme des Nations unies à l’horizon 2030 reflète les valeurs de l’Europe ainsi que son modèle de justice sociale et de gouvernance démocratique. Il offre dès lors une excellente occasion d’écrire une nouvelle page, positive et convaincante, de l’histoire de l’Union européenne, et de la traduire en une nouvelle vision.

3.3.

Le programme des Nations unies à l’horizon 2030 a été approuvé par chacun des États membres de l’Union européenne, ainsi que par l’Union européenne dans son ensemble. L’heure est maintenant venue de prendre un engagement politique clair au plus haut niveau, qui témoigne de l’adoption par l’Union européenne de ce nouveau programme en tant que vision et cadre général sur la voie d’une union du développement durable (5).

3.4.

La réalisation des ODD n’est pas seulement affaire de développement ou d’environnement. Les ODD apportent une réponse aux principaux défis posés par les mutations qui s’opèrent dans nos économies et nos sociétés, ainsi que dans les autres États développés. Leur réalisation dans l’Union européenne requiert un nouveau modèle de développement qui soit plus durable sur le plan économique, plus porté sur l’intégration sociale et davantage viable à long terme du point de vue environnemental, et qui garantisse un partage équitable des ressources de notre planète parmi une population mondiale de plus en plus nombreuse. Il faut procéder à un renversement de nos économies (6). Il serait nécessaire, selon cette nouvelle conception du développement, de redéfinir la notion de prospérité pour l’Union européenne et de se doter d’une nouvelle palette d’indicateurs. Il convient de faire usage des ODD comme de leviers pour enclencher et accélérer la transition à long terme vers une économie européenne qui soit résiliente et compétitive, qui utilise les ressources de manière efficace et qui favorise l’intégration sociale.

3.5.

En établissant une feuille de route sur un nouveau consensus européen pour le développement, la Commission laisse à penser qu’elle entend s’attacher en premier lieu à mettre en œuvre le nouveau programme dans ses politiques de développement. Le fait de hiérarchiser ainsi les priorités ne correspond pas à une approche intégrée des ODD, qui supposerait d’adopter des stratégies de mise en œuvre globales et intégrées portant tout à la fois sur les politiques intérieures et extérieures.

3.6.

Afin de mettre en place un cadre de gouvernance pour la réalisation des ODD, l’Union européenne devra étendre son horizon de programmation bien au-delà de 2020. Une stratégie globale et à long terme pour une Europe durable à l’horizon 2030 et au-delà (7) devrait traduire les ODD dans les politiques internes et externes de l’Union européenne, s’attaquer à des défis spécifiquement européens, et être assortie de feuilles de route et de plans d’action transparents pour des initiatives législatives et politiques ainsi que d’un calendrier détaillé jusqu’en 2030. Le Parlement européen a préconisé une approche similaire (8).

4.   Recensement des politiques intérieures et extérieures de l’Union européenne

4.1.    L’exercice de recensement doit être accompagné d’une analyse des lacunes dans les politiques menées

4.1.1.

L’élaboration d’une stratégie politique et d’une feuille de route de l’Union européenne relatives à la réalisation des ODD requiert davantage qu’un simple recensement des politiques européennes existantes. Un tel recensement en fonction de chaque ODD ne permet pas d’évaluer si l’Union européenne peut atteindre ces objectifs sans aucune mesure supplémentaire. Il se pourrait que les politiques actuelles ne soient pas efficaces ou qu’elles soient contredites ou sapées par d’autres politiques, ou encore qu’il existe d’autres obstacles. Par conséquent, le recensement des politiques doit s’accompagner d’une analyse des lacunes, qui cerne les véritables carences des stratégies de l’Union européenne au regard des 17 objectifs du programme des Nations unies à l’horizon 2030 et des cibles correspondantes.

4.1.2.

Le CESE se félicite, à cet égard, des notes stratégiques intitulées «Sustainability Now!» («La durabilité dès maintenant!»), élaborées sous la responsabilité de Karl FALKENBERG, ancien directeur général de la DG Environnement, qui mettent résolument en évidence la nécessité d’une réforme de l’Union européenne découlant du programme des Nations unies à l’horizon 2030, en prenant l’exemple d’un nombre limité de domaines d’action.

4.1.3.

Une analyse fouillée des lacunes de l’Union européenne vis-à-vis des ODD fait toujours défaut. Toutefois, un récent rapport «SDG Index and Dashboards» («Index et tableau de bord des ODD») et d’autres évaluations menées à bien dans les États membres de l’Union européenne montrent que les ODD constituent une aspiration ambitieuse également pour les pays à revenus élevés (9), principalement en raison de la manière dont ces pays produisent, fournissent et consomment des produits et des services, ainsi que des incidences négatives qui en découlent pour l’environnement. Les principaux défis à relever par les pays de l’Union européenne sont l’ODD 12 (consommation et production responsables), l’ODD 13 (lutte contre les changements climatiques), les ODD 14 et 15 sur la conservation des écosystèmes, les cibles en matière d’agriculture durable et de nutrition relevant de l’ODD 2, ainsi que l’ODD 9 sur l’industrie, l’innovation et l’infrastructure, où un retard d’investissement a été constaté.

4.1.4.

Les autres défis sont ceux suscités par les ODD «centrés sur les personnes», en particulier l’ODD 10 sur la réduction des inégalités, l’ODD 8 sur le travail décent et l’emploi, et l’ODD 1 sur la pauvreté, ainsi que l’ODD 5 sur l’égalité entre les sexes et l’ODD 4 sur l’éducation.

4.1.5.

Plusieurs pays membres de l’OCDE n’atteignent pas les niveaux prévus par l’ODD 17 sur les contributions financières à la coopération au développement.

4.1.6.

En tant que programme à vocation universelle, les ODD visent également à réduire les incidences sociales et environnementales négatives que les économies des pays à revenu élevé peuvent engendrer dans des pays tiers. À ce jour, cet aspect a été moins mesuré que d’autres, mais il s’agit d’un défi important pour les pays de l’Union européenne.

4.2.    La contribution des stratégies européennes actuelles à la réalisation des ODD

4.2.1.

Le Comité considère que le recensement des politiques de l’Union européenne devrait d’abord mettre l’accent sur les instruments de son action qui revêtent une importance stratégique pour l’élaboration et la mise en œuvre de ses politiques. Les premières appréciations indiquent que ces instruments ne sont pas suffisants pour relever le défi que constitue la réalisation des ODD dans l’Union européenne (10). Aucune de ces stratégies n’a la même amplitude temporelle que le programme des Nations unies à l’horizon 2030.

4.2.2.

Pendant le mandat de la Commission Barroso, la stratégie Europe 2020 a été déclarée stratégie principale de l’Union européenne, remplaçant ainsi celle en faveur du développement durable. Bien qu’elle aborde, en principe, les trois dimensions du développement durable, il s’agit toutefois d’une stratégie à relativement court terme et à visée clairement européenne. Non seulement elle ne se place pas dans une perspective internationale, mais elle ne décrit pas non plus les incidences des politiques intérieures de l’Union européenne sur d’autres parties du monde, ou ses politiques extérieures, notamment la coopération au développement. Elle n’a donc jamais pu prétendre se substituer à la stratégie en faveur du développement durable antérieure. Deux ODD ne sont pas couverts (ODD 2 — Alimentation et agriculture et ODD 16 — Gouvernance), tandis que d’autres ne le sont que partiellement (par exemple, ODD 6 — Eau et ODD 11 — Villes).

4.2.3.

Parmi les dix priorités du président Juncker, deux ODD ne sont pas du tout pris en compte (ODD 14 — Océans et ODD 15 — Biodiversité), et d’autres ne le sont que de façon limitée (par exemple ODD 4 — Éducation, ODD 6 — Eau, ODD 11 — Villes et ODD 12 — Consommation et production durables).

4.2.4.

Un ensemble de priorités plus restreint a été sélectionné dans le cadre du «rapport des cinq présidents», qui insiste sur les problématiques économiques, financières, monétaires et budgétaires, et contient également un cinquième chapitre sur la gouvernance. Le rapport comprend un certain nombre de références à des domaines visés par les ODD, dont l’énergie, l’emploi, l’inclusion sociale et les systèmes de santé.

4.2.5.

Le Fonds européen pour les investissements stratégiques (EFSI) attire des projets dans des secteurs qui semblent correspondre à certains défis qui se posent en matière de réalisation des ODD: énergie (40 %), environnement et efficacité dans l’utilisation des ressources (12 %) et infrastructures sociales (3 %) (11).

4.2.6.

Plusieurs des ODD (en particulier l’ODD 3 — Santé, l’ODD 5 — Égalité des sexes, l’ODD 10 — Inégalité et l’ODD 11 — Villes) ne sont pas pris en compte comme il se devrait dans les priorités d’investissement thématiques des Fonds structurels et d’investissement européens (Fonds ESI).

4.2.7.

Avec sa nouvelle stratégie globale pour la politique étrangère et de sécurité, l’Union européenne dispose d’un cadre plus large dans lequel traiter des domaines du programme des Nations unies à l’horizon 2030 tels que le commerce, le développement, la démocratie, les droits de l’homme, l’aide humanitaire, la réduction des risques de catastrophes, les transferts de technologie et l’action en faveur du climat. La stratégie, dans une certaine mesure, recouvre les ODD qui ont trait à la nécessité de veiller à ce que la prospérité soit partagée à l’échelle mondiale. Elle prévoit notamment que les ODD contribueront au futur partenariat post-Cotonou et orienteront la réforme du consensus de l’Union européenne pour le développement.

4.3.    Principaux domaines d’action vecteurs de transformation

4.3.1.

Il conviendrait que la Commission fasse l’inventaire des domaines d’action essentiels pour opérer les mutations nécessaires, en s’appuyant à cet effet sur une analyse des lacunes réelles ainsi que des tendances observées dans la progression de l’Union européenne en direction des objectifs et des cibles du programme à l’horizon 2030. Les politiques suivies devraient mettre l’accent sur ces domaines clés moyennant l’adoption de grandes initiatives adéquates, comportant des objectifs intermédiaires et des plans d’action transparents. Le CESE, à la lumière notamment de ses travaux antérieurs en la matière, considère comme essentiels les principaux domaines d’action ci-après.

Transition équitable vers une économie sobre en carbone, circulaire et collaborative

(ODD 7, 8, 9, 11, 12 et 13)

4.3.2.1.

L’une des principales visées des ODD est l’adoption de modes de développement respectueux des limites de notre planète, tant en matière de climat, de consommation des ressources, de qualité de l’air et de l’eau, que de protection de la biodiversité marine et terrestre. Il est nécessaire, à cette fin, que les régions développées telles que l’Europe réduisent drastiquement l’empreinte écologique de leur économie, en s’appuyant sur une évolution des modèles de production, de consommation et de société vers une économie circulaire et sobre en carbone. Cette transition constitue pour l’Union européenne l’occasion de moderniser son économie, en développant ainsi sa compétitivité et sa résilience, et d’améliorer la qualité de vie et le bien-être de ses citoyens.

4.3.2.2.

Le 7e programme d’action pour l’environnement (PAE), le cadre d’action en matière de climat et d’énergie à l’horizon 2030, et le plan d’action en faveur de l’économie circulaire ont permis d’établir des feuilles de route en la matière. Cependant, il est évident que les progrès sur le terrain doivent être plus rapides (12). La cohérence avec d’autres domaines d’action doit être renforcée et les lacunes constatées dans la mise en œuvre au sein de nombreux États membres doivent être comblées, et ce, en intégrant pleinement la transition vers une économie circulaire et sobre en carbone dans le semestre européen (13). Si l’on veut qu’ils aboutissent à des résultats effectifs, le 7e PAE et le plan d’action en faveur de l’économie circulaire nécessitent de solides mécanismes de mise en application et une coordination active avec d’autres domaines stratégiques au sein de la Commission (14). Pour aller de l’avant, il est indispensable d’améliorer le dialogue et les partenariats avec la société civile, notamment les entreprises et les organisations syndicales. Les politiques actives en matière d’emploi doivent donner lieu à une transition équitable (15). La politique en matière de climat doit reposer sur le principe de «justice climatique», c’est-à-dire veiller à ce que les charges et les avantages du changement climatique, du point de vue de son incidence sur les droits de l’homme, la pauvreté et l’égalité, soient répartis équitablement et que ce ne soient pas les groupes les plus vulnérables qui souffrent.

4.3.2.3.

Il convient de veiller à ce que les marchés favorisent la transition économique et que les prix reflètent les coûts externes réels des émissions nocives pour le climat et de l’utilisation des ressources naturelles (16). Les engagements pris pour supprimer les subventions néfastes pour l’environnement doivent être concrétisés et la réforme de la fiscalité environnementale soutenue plus fermement. Il y a lieu d’assurer l’essor de nouveaux modèles de marchés énergétiques propres et décentralisées, où les consommateurs deviennent également des producteurs. De même, une économie du partage décentralisée permet aux consommateurs d’évoluer vers le modèle d’économie circulaire. L’économie collaborative émergente s’accompagne d’une modification de la conception du travail et représentera une importante source d’emplois. Il faudra veiller à ce que les droits des consommateurs et des travailleurs soient protégés et à ce que règne une concurrence loyale dans ce nouveau secteur (17).

Transition vers une société et une économie fondées sur l’inclusion sociale — Travail décent et droits de l’homme

(ODD 1, 3, 4, 5, 8 et 10)

4.3.3.1.

Les principaux enjeux des ODD sont d’éradiquer la pauvreté et de garantir que chacun puisse s’épanouir pleinement dans l’égalité et la dignité. En ce sens, les ODD reflètent les valeurs et le modèle social européens. Néanmoins, l’écart entre les riches et les pauvres en Europe n’a cessé de se creuser au cours des dernières décennies, et les huit ans de récession et de crise financière qui viennent de s’écouler ont entraîné une nouvelle hausse des taux de chômage et de pauvreté, aggravé encore les inégalités et mis davantage sous pression les systèmes de protection sociale, l’incidence de ces phénomènes étant particulièrement ressentie par les groupes les plus défavorisés.

4.3.3.2.

La réalisation des ODD exige de l’Union européenne qu’elle adapte son modèle économique pour évoluer vers un modèle de développement plus inclusif, qui répartira la richesse existante plus équitablement et renforcera également la résilience économique et financière (18). L’Union européenne doit créer un environnement propice aux investissements qui, associé à un marché intérieur opérationnel, à une compétitivité internationale et à une demande intérieure accrue, permettrait de créer des emplois et de la croissance économique.

4.3.3.3.

Les ODD devraient être l’occasion de confirmer les objectifs de la stratégie Europe 2020 en matière de réduction de la pauvreté, d’emploi et d’éducation, et de réfléchir aux meilleurs moyens de les atteindre. Des objectifs sociaux fondamentaux, tels que l’emploi décent, l’éradication de la pauvreté, la réduction de l’inégalité et les investissements sociaux doivent être mis sur un pied d’égalité avec les considérations macroéconomiques dans le cadre du semestre européen (19). La première proposition de la Commission de socle européen des droits sociaux ne contenait aucune référence aux ODD. Il convient d’envisager l’intégration des ODD dans la suite de l’élaboration du socle européen des droits sociaux. Le Comité prépare actuellement un avis sur ce socle, dans lequel il exprimera pleinement son point de vue.

4.3.3.4.

L’Union européenne devrait investir dans une approche plus cohérente et plus systématique en matière de lutte contre l’exclusion sociale, la marginalisation et la pauvreté, approche qui mettrait l’accent sur les groupes vulnérables, serait fondée sur les droits de l’homme et s’attaquerait également à la discrimination fondée sur le genre. La directive sur l’égalité de traitement reste à adopter (20).

4.3.3.5.

Les systèmes de protection sociale doivent s’adapter non seulement aux difficultés liées au chômage et au vieillissement de la population, mais aussi aux nouveaux défis, en particulier à ceux causés par les nouvelles formes d’emploi, qui offrent de nouvelles possibilités de travailler mais qui peuvent déboucher sur des activités précaires et la pauvreté au travail. Il convient d’exploiter le potentiel de création d’emplois que recèlent les transitions économiques clés, comme celles de l’économie numérique, de l’économie sobre en carbone et de l’économie circulaire (21). Des normes en matière d’emploi et un revenu minimum européen contribueront à garantir la cohésion territoriale et sociale, ainsi qu’à redistribuer équitablement les ressources et les revenus (22), en tenant compte des compétences des États membres dans ces domaines. L’énorme potentiel d’emploi des investissements sociaux devrait être mobilisé par les acteurs tant publics que privés (23). Afin de «ne laisser personne de côté», il est nécessaire d’investir dans une éducation inclusive et de qualité, ainsi que dans des services de haut niveau, abordables et intégrés pour aider les personnes dans le besoin.

4.3.3.6.

Les entreprises sociales favorisent l’insertion sur le marché du travail, tout en fournissant des produits et services abordables à des fins sociales, par exemple des services au sein d’une économie circulaire, décentralisée et sobre en carbone. Elles devraient être soutenues au moyen d’incitations à la création d’entreprises dans le secteur de l’économie sociale, ainsi que par la création d’un environnement réglementaire favorable (24).

Transition vers une consommation et une production alimentaires durables

(ODD 2, 12 et 15)

4.3.4.1.

Les aliments — la façon dont ils sont cultivés, produits, consommés, échangés, transportés, stockés et commercialisés — sont au cœur du lien fondamental qui unit les humains et la planète, et constituent la clé qui permettra de parvenir à une croissance économique inclusive et durable (25). Les ODD, en particulier les objectifs 2 et 12, fournissent un cadre essentiel pour une action conjointe en vue de nourrir le monde de manière durable d’ici à 2030. Une transition vers des systèmes alimentaires plus durables, englobant tous les stades de la production à la consommation, est absolument indispensable. Les producteurs doivent accroître la production alimentaire tout en réduisant les répercussions sur l’environnement, tandis que les consommateurs doivent être encouragés à opter pour des régimes alimentaires sains et nutritifs qui ont une faible empreinte carbone.

4.3.4.2.

La réforme de la PAC a mis en place une combinaison de mesures dont on peut considérer qu’elles vont dans la bonne direction (26). Une transition vers des systèmes alimentaires durables ne requiert pas seulement une politique agricole, mais aussi une politique alimentaire globale, associée à une stratégie de grande ampleur en matière de bioéconomie. En se fondant sur la reconnaissance de l’interdépendance entre la production et la consommation alimentaires, il y a lieu de mettre au point une approche politique européenne adéquate qui trace la voie vers un développement durable, la santé et la résilience (27).

4.3.4.3.

À cet égard, il convient, entre autres choses, de répondre à la question soulevée dans le «rapport Falkenberg», qui est de savoir si, par exemple, la stratégie d’exportation du secteur agricole européen est compatible avec l’objectif de renforcer la production de denrées alimentaires dans les pays en développement.

4.3.4.4.

L’Union européenne aura un rôle essentiel à jouer dans la réalisation de l’objectif 12.3, à savoir réduire de moitié le gaspillage alimentaire par habitant au niveau mondial. Alors que près de 800 millions de personnes à travers le monde souffrent de la faim, les statistiques montrent qu’un tiers des aliments produits pour la consommation humaine est perdu ou gaspillé dans le monde; ce volume s’élève à 100 millions de tonnes rien que dans l’Union européenne (28). Le CESE se félicite que la Commission prévoie de créer une plateforme des parties prenantes pour aider à définir les mesures qui s’imposent et à partager les bonnes pratiques en matière de prévention et de réduction du gaspillage alimentaire (29).

Investissement dans l’innovation et dans la modernisation à long terme de l’infrastructure, et soutien aux entreprises durables

(ODD 7, 8, 9 et 13)

4.3.5.1.

La transformation de l’économie en un modèle plus durable requiert une réorientation majeure des investissements. Il est estimé que la réalisation des ODD sur le plan mondial nécessiterait environ 3 000 milliards de dollars des États-Unis (30) d’investissements provenant de sources tant publiques que privées. Un plan global est nécessaire pour mobiliser des ressources financières au niveau de l’Union européenne et des États membres. Les divers programmes et initiatives de financement de l’Union européenne doivent être utilisés conjointement.

4.3.5.2.

L’Union européenne doit orienter plus efficacement ses investissements publics dans les pays en développement de manière à instaurer un développement durable intégré. Elle doit par ailleurs tenir compte des indicateurs des ODD dans le cadre du financement public de projets de développement. Toutefois, elle doit avant tout stimuler et intensifier les investissements du secteur privé dans ces domaines.

4.3.5.3.

Même au sein de l’Union européenne, les ODD nécessitent des investissements considérables dans la modernisation des infrastructures et des entreprises durables. Les premières évaluations de la réalisation des ODD dans l’Union européenne font apparaître de graves déficits d’investissement dans les secteurs de l’industrie, de l’innovation et des infrastructures (31).

4.3.5.4.

La durabilité présente un intérêt évident pour les entreprises. Pour tirer pleinement parti de cette possibilité, l’Union européenne devrait créer un environnement favorable aux entreprises et propice à l’innovation, à l’esprit d’entreprise et à des investissements durables. Certaines entreprises se sont déjà lancées sur cette voie, mais il est primordial de développer et de reproduire les projets concluants en matière de durabilité. Les approches volontaires, telles que la responsabilité sociale des entreprises, peuvent contribuer positivement à cette transition. Elles doivent être complétées par des mesures complémentaires, notamment des dispositions permettant d’accroître la transparence, de développer les compétences, de faciliter les partenariats et de guider les entreprises dans l’élaboration de leurs rapports. La Commission devrait évaluer si des alliances entre plusieurs parties prenantes et le secteur privé seraient un instrument utile au niveau de l’Union européenne.

4.3.5.5.

Les programmes de financement de l’Union doivent être alignés sur les ODD. Des initiatives telles que le plan Juncker, de même que les institutions financières et les banques d’investissement publiques, joueront un rôle déterminant. Le défi, en l’occurrence, consiste à réaffecter le capital. L’union des marchés des capitaux offre la possibilité de promouvoir les investissements durables (32). L’examen à mi-parcours du CFP sera l’occasion d’intégrer les ODD dans les principaux Fonds de l’Union européenne. Il convient de recourir à des mesures incitatives pour encourager l’investissement à long terme, ainsi que de supprimer les obstacles (33).

Mise à contribution du commerce au service d’un développement mondial durable

(ODD 12 et 17)

4.3.6.1.

Dans une économie mondialisée, le commerce a une incidence déterminante sur le développement durable de l’Union européenne et de la planète. Il est dès lors considéré, au titre de plusieurs ODD, comme un moyen important de mettre en œuvre le programme des Nations unies à l’horizon 2030. Par sa communication intitulée «Le commerce pour tous», la Commission a lancé un plan d’action ambitieux pour une politique de commerce et d’investissement plus responsable, en vue de maintenir les normes sociales et environnementales dans les échanges commerciaux, et de promouvoir le développement durable (34). La réalisation des ODD devra être liée à ce plan d’action de manière systématique et effective, et les résultats devront faire l’objet d’un suivi.

4.3.6.2.

Tous les accords commerciaux et d’investissement de l’Union européenne devraient comporter des chapitres ambitieux relatifs au commerce et au développement durable, qui devraient être mis en œuvre et appliqués de manière effective. La dimension du développement durable dans le cadre de l’OMC doit être renforcée (35). Une participation nettement accrue de la société civile tout au long des négociations et du processus de mise en œuvre et de suivi constitue le meilleur moyen de garantir des normes sociales, environnementales et de travail dans les accords de libre-échange (36).

4.3.6.3.

La Commission devrait adopter une stratégie de promotion du travail décent dans les chaînes d’approvisionnement mondiales (37). Il y a lieu de soutenir les initiatives visant à promouvoir le devoir de diligence dans lesdites chaînes.

4.4.    Une meilleure gouvernance pour un développement durable

4.4.1.

À l’appui des activités qu’elle mène dans les domaines d’action essentiels, l’Union européenne doit évaluer et améliorer la coordination de ses politiques horizontales et verticales pour une mise en œuvre efficace du programme des Nations unies à l’horizon 2030. Une meilleure gouvernance constitue un vecteur essentiel du développement durable (38), et l’amélioration de la coordination est une démarche capitale pour assurer la cohérence des politiques.

4.4.2.

L’Union européenne doit améliorer la cohérence de ses politiques et veiller à ce qu’elles poursuivent avec constance un développement durable et équilibré. Le mécanisme existant de «cohérence des politiques au service du développement» visant à intégrer dans d’autres domaines des considérations liées à la politique de développement devrait être réexaminé, renforcé et son concept modifié pour le transformer en un instrument de «cohérence des politiques au service du développement durable», lié à d’autres efforts de coordination horizontale.

4.4.3.

La Commission devrait également examiner les moyens d’exploiter les instruments du cadre «Mieux légiférer» pour contribuer à la réalisation des ODD. Il y a lieu de revoir en conséquence les lignes directrices relatives aux analyses d’impact (en intégrant, par exemple, un critère de durabilité dans les analyses d’impact des nouveaux instruments législatifs).

4.4.4.

Afin d’intégrer les ODD dans tous les domaines d’action pertinents, la Commission devrait se servir des principes directeurs du programme des Nations unies à l’horizon 2030 en tant que cadre à l’aune duquel réexaminer la législation et l’élaboration des politiques de l’Union européenne, notamment au regard d’une approche fondée sur les droits de l’homme et du principe de «ne laisser personne en marge».

4.4.5.

L’Union européenne doit établir, sur la base des indicateurs mondiaux des ODD, complétés par des indicateurs européens appropriés, un système de contrôle et de réexamen qui fonctionne en coordination avec le suivi effectué dans les États membres de l’Union européenne et qui en assure l’articulation avec le suivi mondial au niveau du Forum politique de haut niveau (FPHN).

4.4.6.

Il conviendrait aussi d’intégrer les indicateurs des ODD aux processus existants de suivi et d’évaluation des politiques. Cette proposition s’applique en particulier au semestre européen qui, en tant que mécanisme central de gouvernance de l’Union européenne, doit être adapté à la réalisation des ODD.

4.4.7.

Une plus grande importance accordée aux indicateurs de la durabilité dans le processus de répartition budgétaire constituerait un levier puissant dans la mise en œuvre d’un développement durable. Les critères de conditionnalité appliqués pour les Fonds structurels et d’investissement européens devraient être adaptés en vue de la réalisation des ODD.

4.4.8.

Un soutien devrait être apporté à l’initiative menée par le réseau européen pour le développement durable (ESDN) pour mettre en place une plateforme d’apprentissage par les pairs entre États membres.

4.4.9.

L’Union européenne devrait faire preuve d’initiative et être la première organisation régionale à présenter un rapport volontaire lors de la session de 2017 du FPHN. En outre, l’Union européenne devrait publier des rapports annuels exposant la manière dont les dimensions intérieure et extérieure de l’action de l’Union européenne contribuent à la réalisation des ODD dans le domaine correspondant à l’axe thématique annuel du FPHN (39). La société civile devrait être pleinement associée à l’élaboration du rapport volontaire et des rapports thématiques par l’intermédiaire du Forum européen du développement durable.

5.   La société civile comme force motrice

5.1.

Le programme des Nations unies à l’horizon 2030 requiert le passage d’un modèle de gouvernance aux mains des États à un système qui associe les diverses parties intéressées et qui accorde un rôle accru à la société civile. Les ODD ne pourront être atteints que si la société civile et d’autres parties prenantes jouent un rôle actif et adhèrent au programme. La société civile doit être associée depuis les niveaux local, régional et national jusqu’à ceux de l’Union européenne et du FPHN, et ce à tous les stades de la mise en œuvre.

5.2.

Pour ce qui concerne l’Union européenne et ses États membres, le CESE suggère de créer un Forum européen du développement durable qui associerait un large éventail d’organisations de la société civile et de parties prenantes à la réalisation des ODD dans l’Union européenne, ainsi qu’à leur suivi et leur réexamen continus (40). La première tâche revenant à ce forum devrait être de faciliter le dialogue avec la société civile dans le processus qui aboutira à une stratégie globale de l’Union européenne en faveur du développement durable.

5.3.

La Commission devrait mettre en place un programme et une ligne de financement spécifiques pour soutenir le renforcement des capacités des organisations de la société civile afin qu’elles puissent participer pleinement à ce processus. Les actuels programmes de renforcement des capacités doivent être plus explicitement ouverts aux organisations de la société civile qui traitent des dossiers nationaux et qui effectuent la «liaison» entre les dimensions intérieures et extérieures de l’intégration des ODD et des questions de gouvernance.

Bruxelles, le 21 septembre 2016

Le président du Comité économique et social européen

Georges DASSIS


(1)  COM(2015) 610 final.

(2)  Conférence sur le thème «Comment faire des ODD l’affaire de l’Europe?», coorganisée par la présidence néerlandaise, le CESE, le Réseau des solutions pour le développement durable des Nations unies (SDSN) et la Charte néerlandaise pour les ODD, les 30 et 31 mai 2016; conférence du CESE sur le thème «Prochaines étapes pour un avenir européen durable», le 7 juillet 2016; conférence de l’IDDRI sur le thème «Sustainable development: it’s time!» («Développement durable: il est temps!»), à Paris, les 10 et 11 mai 2016; conférence de l’IASS sur le thème «Jump-starting the SDGs in Germany» («Lancer les ODD en Allemagne»), du 1er au 3 mai 2016.

(3)  Avis CESE sur Un Forum de la société civile européenne en faveur du développement durable (JO C 303 du 19.8.2016, p. 73).

(4)  «Sustainability now!» («La durabilité dès maintenant!»), Notes stratégiques du Centre européen de stratégie politique (CESP), numéro 18, 20 juillet 2016.

(5)  Op. cit.

(6)  Discours prononcé par le vice-président de la Commission, Frans Timmermans, lors du sommet des Nations unies, le 27 septembre 2015.

(7)  Paragraphe 4.3.3 de l’avis du CESE sur le thème État des lieux de la stratégie Europe 2020 pour une croissance intelligente, durable et inclusive (JO C 12 du 15.1.2015, p. 105); avis du CESE sur Un Forum de la société civile européenne en faveur du développement durable (JO C 303 du 19.8.2016, p. 73).

(8)  Résolution du Parlement européen 2016/2696(RSP).

(9)  SDSN, Bertelsmann Stiftung, «SDG Index & Dashboards», juillet 2016; Niestroy, document de réflexion 9/2016 de l’Institut allemand de développement (DIE) intitulé «How are we getting ready?» («Comment nous préparons-nous?»).

(10)  Comme fondement des appréciations évoquées dans les paragraphes 4.2.2-4.2.7, voir Niestroy (2016), p. 38-45; Commission européenne, direction générale de la recherche et de l’innovation (2015). The role of science, technology and innovation policies to foster the implementation of the (SDGs) (Le rôle joué par les politiques en matière de science, de technologie et d’innovation pour favoriser la réalisation des ODD).

(11)  COM(2016) 359 final.

(12)  Avis du CESE sur le thème Protocole de Paris — Programme de lutte contre le changement climatique planétaire après 2020 ( JO C 383 du 17.11.2015, p. 74); avis du CESE sur les Instruments de marché (JO C 226 du 16.7.2014, p. 1).

(13)  Avis du CESE sur Les instruments de marché (JO C 226 du 16.7.2014, p. 1).

(14)  Avis du CESE sur L’économie circulaire, (JO C 264 du 20.7.2016, p. 98).

(15)  Avis du CESE sur le thème Une coalition pour concrétiser les engagements de l’accord de Paris, adopté le 14 juillet 2016 (non encore publié au JO).

(16)  Avis du CESE sur Les instruments de marché(JO C 226 du 16.7.2014, p. 1); avis du CESE sur Une nouvelle organisation du marché de l’énergie (JO C 82 du 3.3.2016, p. 13); avis du CESE sur Une nouvelle donne pour les consommateurs d’énergie (JO C 82 du 3.3.2016, p. 22).

(17)  Avis du CESE sur La consommation collaborative ou participative, un modèle de développement durable pour le XXIe siècle, JO C 177 du 11.6.2014, p. 1; avis du CESE sur L’économie du partage et l’autorégulation, JO C 303 du 19.8.2016, p. 36.

(18)  Avis du CESE sur L’impact de l’investissement social sur l’emploi et les budgets publics (JO C 226 du 16.7.2014, p. 21); avis du CESE sur les Principes pour des systèmes de prestations sociales efficaces et fiables (JO C 13 du 15.1.2016, p. 40).

(19)  Avis du CESE sur L’impact de l’investissement social sur l’emploi et les budgets publics (JO C 226 du 16.7.2014, p. 21); avis du CESE sur la Lutte contre la pauvreté (JO C 133 du 14.4.2016, p. 9).

(20)  COM(2008) 426 final.

(21)  Avis du CESE sur L’économie circulaire (JO C 230 du 14.7.2015, p. 99); avis du CESE sur le thème Société numérique: accès, éducation, formation, emploi, outils pour l’égalité (JO C 451 du 16.12.2014, p. 25); avis du CESE sur le thème Vers une économie de la donnée prospère (JO C 242 du 23.7.2015, p. 61).

(22)  Avis du CESE sur le Revenu européen minimum et indicateurs de pauvreté (JO C 170 du 5.6.2014, p. 23).

(23)  Avis du CESE sur L’impact de l’investissement social sur l’emploi et les budgets publics (JO C 226 du 16.7.2014, p. 21).

(24)  Avis du CESE sur le thème Construire un écosystème financier pour les entreprises sociales (JO C 13 du 15.1.2016, p. 152).

(25)  La FAO et les 17 objectifs de développement durable: http://www.fao.org/documents/card/fr/c/71d88702-42d5-4c36-a05f-207571b19fc3

(26)  Avis du CESE sur Des systèmes alimentaires plus durables (JO C 303 du 19.8.2016, p. 64).

(27)  Op cit.

(28)  FUSIONS (2016). Estimations des niveaux de gaspillage alimentaire en Europe; http://www.eu-fusions.org/phocadownload/Publications/Estimates%20of%20European%20food%20waste%20levels.pdf

(29)  Voir note de bas de page 26.

(30)  IDDRI, 2015, document d’information: http://www.iddri.org/Publications/Three-commitments-governments-should-take-on-to-make-Sustainable-Development-Goals-the-drivers-of-a-major-transformation.

(31)  Niestroy 2016, p. 28.

(32)  Enquête du PNUE, Bâtir un système financier durable dans l’Union européenne, p. 5: http://web.unep.org/inquiry.

(33)  Avis du CESE sur le Financement à long terme (JO C 327 du 12.11.2013, p. 11).

(34)  COM(2015) 497 final.

(35)  Avis du CESE sur le thème Commerce, croissance et développement (JO C 351 du 15.11.2012, p. 77); avis du CESE sur le thème Financement du développemen — La position de la société civile (JO C 383 du 17.11.2015, p. 49).

(36)  Avis du CESE sur Le commerce pour tous (JO C 264 du 20.7.2016, p. 123).

(37)  Avis du CESE sur le thème Un travail décent dans les chaînes d’approvisionnement mondiales (JO C 303 du 19.8.2016, p. 17).

(38)  «En définitive, on en revient toujours à la question de la gouvernance», a déclaré le commissaire Timmermans lors de son discours devant les Nations unies, le 27 septembre 2015.

(39)  Avis du CESE sur le Programme à l’horizon 2030 — Une Union européenne engagée en faveur des objectifs de développement durable à l’échelle mondiale, non encore publié au JO.

(40)  Avis CESE sur Un Forum de la société civile européenne en faveur du développement durable, JO C 303 du 19.8.2016, p. 73.


28.12.2016   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 487/51


Avis du Comité économique et social européen sur «Une législation à l’épreuve du temps»

(avis exploratoire)

(2016/C 487/07)

Rapporteur:

Christian MOOS

Corapporteur:

Denis MEYNENT

Consultation

Présidence slovaque, 14.3.2016

Base juridique

Article 304 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne

Compétence

Sous-comité «Une législation à l’épreuve du temps»

Adoption en sous-comité

7.9.2016

Adoption en session plénière

21.9.2016

Session plénière no

519

Résultat du vote

(pour/contre/abstentions)

213/2/5

1.   Conclusions et recommandations

1.1.

La présidence slovaque a invité le Comité économique et social européen (CESE) à donner son avis sur «Une législation à l’épreuve du temps». Ce nouveau concept s’inscrit dans le fil d’autres demandes spécifiques adressées à la Commission et aux colégislateurs dans le but d’assurer une plus grande adéquation de la législation, notamment avec la compétitivité de l’Union européenne et la prise en compte de la spécificité des petites et moyennes entreprises (PME) et des microentreprises, aspects sur lesquels le CESE s’est exprimé à plusieurs reprises.

1.2.

Le CESE note que des efforts sont fournis pour améliorer la qualité de la législation européenne et qu’il convient de les intensifier.

1.3.

Le CESE estime qu’une législation de haute qualité, simple, compréhensible et cohérente «est un facteur d’intégration essentiel qui ne constitue pas une charge ou un coût à réduire». Elle est indispensable si l’on souhaite générer une croissance économique durable et stimuler l’innovation, la compétitivité des entreprises, y compris des PME, ainsi que la création d’emplois de qualité.

1.4.

Le «principe d’innovation», tel que défini au chapitre 2, s’inscrit aussi dans la logique du programme REFIT. Le CESE rappelle les principes du programme «Mieux légiférer», déjà définis et appliqués, et souligne que ce nouveau principe ne doit pas prendre le pas sur eux et doit être appliqué avec intelligence et prudence, en particulier dans les domaines de la protection sociale et environnementale, de la santé et de la protection des consommateurs.

1.5.

Le CESE suggère de poursuivre l’examen des potentialités qu’offre le «principe d’innovation», en procédant à un échange de bonnes pratiques.

1.6.

L’innovation est l’une des conditions nécessaires à la croissance durable en Europe. Il convient donc de prévoir un cadre réglementaire favorable à l’innovation, bien qu’il n’existe pas de relation simple entre innovation et cadre réglementaire. Outre les dispositions législatives, il est aussi nécessaire de prendre des mesures visant à promouvoir et à développer l’innovation (mesures administratives, fiscalité, plan d’investissement, etc.).

1.7.

L’objectif de la législation européenne doit toujours être de créer un cadre juridique permettant aux entreprises et aux citoyens de bénéficier des atouts du marché intérieur et d’éviter des charges administratives inutiles. La législation européenne est à l’épreuve du temps si elle est proactive et prévoyante; le CESE se prononce en faveur d’une législation qui s’adapte. Il estime qu’une législation à l’épreuve du temps doit reposer sur la méthode communautaire.

1.8.

Il s’impose d’éviter les coûts inutiles de la réglementation. Les coûts de la règlementation doivent être proportionnels aux bénéfices qu’ils engendrent.

1.9.

Le CESE est convaincu que toute législation doit être le résultat de délibérations politiques publiques. À cet égard, le rôle de la société civile et des partenaires sociaux est très important et il convient de prévoir le cadre approprié pour garantir un dialogue social et civique de qualité, au sein duquel les points de vue exprimés seront dûment pris en compte.

1.10.

Le CESE note que ce n’est pas seulement le contenu de la législation mais le processus législatif même qui doivent être à l’épreuve du temps pour correspondre aux besoins des entreprises et des citoyens.

1.11.

Une législation à l’épreuve du temps doit être ferme quant à sa finalité, toujours en cohérence avec les objectifs énoncés dans le traité et flexible dans le cadre de sa transposition dans le droit national. Elle n’entre pas dans les détails mais se contente de fixer un cadre, qu’il convient de transposer en temps voulu et de manière appropriée au niveau national, en consultant également les partenaires sociaux et les organisations de la société civile représentatives, et en tenant compte de leurs points de vue. L’utilisation des clauses de limitation dans le temps («sunset clauses») mérite d’être analysée plus avant.

1.12.

Le CESE se prononce en faveur d’une clarification des principes de subsidiarité et de proportionnalité qui sont parfois utilisés comme arguments par les adversaires d’initiatives législatives sans que leur raisonnement sous-jacent ne soit suffisamment étayé.

1.13.

La société civile doit être la caisse de résonance d’une législation à l’épreuve du temps. Le CESE est bien placé pour être l’intermédiaire entre le législateur et les organisations de la société civile et les partenaires sociaux.

1.14.

Le CESE souligne l’importance des évaluations d’impact au niveau national et européen, y compris le test PME, et ce pour toute initiative législative ou non-législative, de sorte que les décisions politiques soient prises en connaissance de cause et sur la base d’éléments concrets. Les analyses d’impact constituent une aide à la décision politique; elles ne sauraient la remplacer.

1.15.

Le CESE demande à être consulté lorsque la Commission, le Parlement et le Conseil s’accordent sur le retrait de propositions législatives car il importe d’évaluer les conséquences matérielles et immatérielles de tels retraits.

1.16.

Le CESE est d’avis que le Conseil doit devenir plus transparent et qu’une future réforme des traités devrait tenter d’améliorer la cohérence des décisions du Conseil. Les droits du Parlement doivent être renforcés.

1.17.

Le CESE estime nécessaire d’exploiter de manière accrue la coopération renforcée, tout en évitant que les institutions ne soient affaiblies ce faisant.

1.18.

Le CESE insiste sur sa participation aux processus consultatifs qui doivent aller de pair avec l’approfondissement de l’UEM. Le Parlement européen ainsi que les instances consultatives doivent être mieux intégrés dans le cycle du Semestre européen.

1.19.

Le CESE est favorable à une procédure législative accélérée dans le cadre du trilogue uniquement dans les cas d’urgence.

2.   Observations générales

2.1.

La Présidence slovaque a invité le CESE à donner son avis sur une législation à l’épreuve du temps et à réfléchir à la manière dont l’Union européenne peut améliorer la législation afin qu’elle s’adapte aux besoins de l’économie et de la société en ces temps de mutations rapides. La présidence demande comment on peut maintenir les coûts réglementaires pour les entreprises à un niveau raisonnable, sans négliger les objectifs des traités.

2.2.

La législation européenne est à l’épreuve du temps si elle est proactive, prévoyante, et offre un maximum de clarté et de sécurité juridiques. Le CESE se prononce donc en faveur d’une législation qui s’adapte et qui dispose, en même temps, de la capacité de prévoir.

2.3.

Des réglementations sont également nécessaires si l’on veut que les objectifs politiques des traités soient atteints. L’Union européenne est une économie sociale de marché et certaines règles ont dès lors un coût pour les entreprises, par exemple dans le domaine de la sécurité et de la santé au travail. C’est l’équilibre entre les objectifs économiques et sociaux qui garantit la paix sociale en Europe. Une législation à l’épreuve du temps doit respecter cet équilibre et promouvoir la cohésion économique, sociale et territoriale, ainsi que la solidarité entre les États membres.

2.4.

Le CESE soutient et souligne la nécessité de renforcer la légitimité de la législation européenne en légiférant mieux, mais il tient à ce que la compréhension de ce qui est à l’épreuve du temps ne mène pas à une dépolitisation du processus législatif. Il est convaincu que toute législation doit être le résultat de délibérations politiques. À cet égard, le rôle majeur de la société civile et des partenaires sociaux dans le cadre du dialogue social doit être pris en compte.

2.5.

La législation européenne est à l’épreuve du temps si elle est considérée comme légitime par les citoyens. Elle doit être basée sur la représentation, le consensus et la participation, et elle doit avoir la capacité d’apporter des résultats ou des solutions à un problème collectif.

2.6.

Le CESE juge que le processus législatif européen mériterait d’être revu dans le cadre du traité de Lisbonne et, si nécessaire, dans le cadre d’un nouveau traité pour que les politiques européennes fournissent de meilleurs résultats. C’est précisément cet aspect d’une législation à l’épreuve du temps que le CESE souhaite mettre en lumière, c’est-à-dire sa qualité, sa légitimité, sa transparence et sa nature inclusive.

2.7.

Le CESE note que ce n’est pas seulement le contenu de la législation mais le processus législatif même qui doivent être à l’épreuve du temps pour correspondre aux besoins des entreprises et des citoyens. En d’autres termes, c’est la question de la démocratie au niveau européen qui est posée.

2.8.

La volonté politique des élus et leurs choix sont dès lors déterminants. Chaque législation peut être analysée à l’aune de sa capacité à traduire cette volonté politique dans les faits, et jugée par sa qualité démocratique. Le CESE propose ainsi d’examiner non seulement le contenu de la législation, mais aussi le processus législatif.

2.9.

Ce nouveau concept de «législation à l’épreuve du temps» est lié à d’autres initiatives visant à améliorer la législation. Le CESE s’est exprimé à plusieurs reprises dans ses avis (1) sur le programme «Mieux légiférer» et le programme REFIT (2). Il tient à rappeler son avis consacré à une approche proactive de la législation. (3)

2.10.

La mise en œuvre des programmes «Mieux légiférer» et REFIT, ce dernier lancé par la Commission européenne en 2012 afin de mesurer les charges administratives des dispositions législatives en vigueur et, le cas échéant, de les éliminer, sont des priorités clefs du trio présidentiel (Pays-Bas, Slovaquie et Malte) de janvier 2016 à juin 2017. Il est évident que l’idée d’une législation à l’épreuve du temps s’inscrit dans la logique de ces programmes.

2.11.

Le CESE note que des efforts sont fournis pour améliorer la qualité de la législation européenne et insiste sur la nécessité de les intensifier. Le CESE a pris acte de la communication de la Commission du 19 mai 2015 (4) et de l’accord interinstitutionnel «Mieux légiférer» du 13 avril 2016 (5) tout en constatant qu’il n’a pas été associé à ce dernier.

2.12.

Le CESE estime qu’une législation de haute qualité, simple, compréhensible et cohérente, garantie par la Commission, le Parlement et le Conseil, constitue une condition indispensable pour générer une croissance économique durable et stimuler l’innovation, la compétitivité des entreprises — y compris des PME et des microentreprises — et la création d’emplois de qualité. Il importe en outre de mettre en pleinement œuvre le Small Business Act dans tous les domaines.

2.13.

La réglementation européenne «est un facteur d’intégration essentiel qui ne constitue pas une charge ou un coût à réduire. Bien proportionnée, elle est au contraire un gage de protection, de promotion et de sécurité juridique important pour tous les acteurs et citoyens européens» (6).

2.14.

Le CESE rappelle l’importance des principes déjà définis pour assurer une législation appropriée. Il s’agit entre autres des principes de mise en œuvre correcte dans les temps, de subsidiarité et de proportionnalité, du principe de précaution, de prévisibilité, du «think small first», de la dimension externe de la compétitivité et du test du marché intérieur.

2.15.

Un nouvel aspect de la législation semble actuellement gagner une importance prioritaire pour le Conseil: le principe d’innovation. Ce principe, qui implique de tenir compte de l’impact sur la recherche et l’innovation lors de l’élaboration et de la révision de la réglementation, est l’un des nombreux critères qui permettent d’évaluer les propositions législatives de la Commission dans des domaines de nature technique, technologique et scientifique. Il devrait toutefois être appliqué de manière intelligente et avec prudence, en particulier dans les domaines de la protection sociale et environnementale, de la santé et de la protection des consommateurs.

2.16.

Il ressort des conclusions du Conseil Compétitivité de l’Union européenne (7) qu’«il convient d’appliquer le “principe d’innovation”, ce qui implique de tenir compte de l’impact sur la recherche et l’innovation lors de l’élaboration et de la révision de la réglementation, tous domaines d’actions confondus». Cela se reflète aussi dans la demande de la présidence slovaque ainsi que dans une étude récente du CEPS (8), selon laquelle fixer des règles trop strictes risquerait de bloquer les investissements et de freiner l’innovation. Cette interprétation entre aussi dans la logique du programme REFIT.

2.17.

Le CESE estime que le recours à ce nouveau principe doit être préalablement défini et son utilisation soigneusement précisée.

2.18.

Pour le CESE, le principe d’innovation doit avoir le même poids que les autres critères évoqués au point 2.14 et utilisés par la Commission pour analyser l’impact d’une proposition législative. Il convient donc de trouver un équilibre entre le principe d’innovation et les autres critères et de veiller à ce qu’il ne prenne pas le pas sur eux.

2.19.

Le CESE suggère à la Présidence slovaque de poursuivre l’examen des potentialités qu’offre le principe d’innovation, en procédant à un échange de bonnes pratiques. Le CESE demande que, sur cette base, la Commission puisse tirer un bilan des opportunités et de l’impact de ce nouveau principe.

2.20.

L’objectif de la législation européenne doit toujours être de créer un cadre juridique permettant aux entreprises et aux citoyens de bénéficier des atouts du marché intérieur et de ses libertés, c’est-à-dire de promouvoir les forces innovantes en Europe. Ceci implique d’éviter les charges administratives inutiles, tandis que les règles mal conçues, obsolètes et pesantes doivent être revues ou abolies.

2.21.

Le CESE estime que les coûts de la réglementation doivent être proportionnels aux bénéfices qu’ils engendrent. Les coûts et les charges administratives inutiles doivent être évités dans l’intérêt des entreprises, des citoyens et des administrations chargées de l’application de la réglementation. Il importe que le bénéfice net et la valeur ajoutée d’une réglementation l’emportent sur son coût pour les entreprises ou la société dans son ensemble.

3.   Propositions prospectives pour une législation à l’épreuve du temps

3.1.

Le CESE insiste pour que la notion de «législation à l’épreuve du temps» soit mieux définie. Elle doit être respectueuse des valeurs et des objectifs de l’Union européenne conformément aux articles 1er et 2 du traité de Lisbonne. Dès lors, le principe d’innovation, qui est l’une des priorités de la Présidence slovaque (9) et donc étroitement lié au nouveau concept de législation à l’épreuve du temps, se doit d’être responsable.

3.2.

L’innovation est l’une des conditions nécessaires à la croissance durable de l’Europe. Toute législation, qu’elle soit européenne ou nationale, doit éviter aux entreprises, surtout aux PME qui ont peu de moyens, d’être soumises à des charges inutiles. L’innovation et la compétitivité sont à la base du succès de l’économie sociale de marché européenne. L’innovation a besoin d’un cadre règlementaire de qualité. L’interaction entre la législation et l’innovation est complexe et ne saurait être considérée que du seul point de vue quantitatif, dans le sens de plus ou moins de dispositions législatives (10).

3.3.

Le CESE estime que l’utilisation des clauses de limitation dans le temps («sunset clause») dans la législation européenne, pour éviter de futurs obstacles bureaucratiques, mérite d’être analysée plus avant.

3.4.

Une législation à l’épreuve du temps doit être ferme quant à sa finalité, toujours en cohérence avec les objectifs des traités, et flexible dans le cadre de sa transposition dans le droit national, dans le respect des principes évoqués ci-dessus. Elle n’entre pas dans les détails mais se contente de fixer un cadre qui peut être complété, le cas échéant, soit par des instruments non législatifs, soit par les régulateurs nationaux, les partenaires sociaux ou des régimes d’autorégulation, ces derniers étant toujours sous le contrôle du législateur au niveau adéquat.

3.5.

Le CESE se prononce en faveur d’une clarification des principes de subsidiarité et de proportionnalité. Le respect de la subsidiarité, ou plutôt de la répartition des compétences, est primordial pour le bon fonctionnement de l’Union européenne comme espace juridique commun. Néanmoins, ces deux principes sont parfois utilisés comme arguments par les adversaires d’initiatives législatives sans que leur raisonnement sous-jacent ne soit suffisamment étayé. Il convient de clarifier les critères qui déterminent l’application des principes de subsidiarité et de proportionnalité. L’espace juridique de l’Union européenne doit être un et indivisible.

3.6.

Le CESE juge nécessaire d’examiner en premier lieu le processus législatif au niveau européen pour améliorer la qualité de la législation. Un grand nombre d’initiatives visent l’amélioration du processus législatif, mais les parties prenantes à ce processus ne sont pas d’accord sur les moyens. Le CESE renvoie aux orientations de la Commission dans son programme «Mieux légiférer» (19 mai 2015) et l’accord interinstitutionnel (décembre 2015/16, avril 2016), le rapport Brok-Bresso (février 2016), le rapport Hübner (mars 2016), le rapport Giegold (fin mai 2016) et notamment le Small Business Act (février 2011). Il attire aussi l’attention sur les propositions des gouvernements et des parlements des États membres, sur les initiatives telles que celles du Mouvement européen international (MEI) et des Fédéralistes européens (UEF), ainsi que sur les contributions des instituts de recherche et des groupes de réflexion.

3.7.

La société civile organisée revêt une importance décisive pour le développement d’une opinion publique européenne. L’Europe a besoin d’une opinion publique moins fragmentée servant de caisse de résonnance à une législation européenne à l’épreuve du temps. En tant qu’organe de représentation de la société civile organisée en Europe, le CESE est bien placé pour faciliter le consensus entre les différents acteurs de la société civile à tous les niveaux, et aussi dans les États membres. Plus précisément, il est un intermédiaire important entre le législateur et les organisations de la société civile et les partenaires sociaux.

3.8.

Le CESE est conscient de l’importance des évaluations d’impact, notamment pour les PME. Celles-ci doivent être prises en compte dans le processus législatif, mais ne sauraient pour autant remplacer le processus politique.

3.9.

La simplification de lois difficiles à comprendre, voire à appliquer, ou l’abandon de réglementations devenues superflues peuvent être bénéfiques pour les citoyens et les forces de l’économie, contribuant ainsi à un environnement propice à la croissance et à la création de plus d’emplois de qualité («enabling environment»). Néanmoins, le CESE demande à être consulté lorsque la Commission, le Parlement et le Conseil s’accordent sur le retrait de propositions législatives. Dans ce contexte, il importe d’évaluer les conséquences matérielles et immatérielles de tels retraits et d’en informer le CESE.

3.10.

Le traité de Lisbonne vise à renforcer le rôle du Parlement européen ainsi que la méthode communautaire. Dans le sillage de la crise, le Conseil européen est devenu la pierre angulaire du système institutionnel européen. Le CESE estime que cette dérive doit être corrigée. Une législation européenne à l’épreuve du temps doit reposer sur la méthode communautaire.

3.11.

Les réunions des formations du Conseil fonctionnant à la majorité qualifiée devraient être publiques, à des fins de plus grande transparence et de plus de démocratie. Le vote à la majorité qualifiée pour les décisions du Conseil devrait être la règle. Le CESE est aussi d’avis qu’une future réforme des traités devrait tenter d’améliorer la cohérence des décisions du Conseil dont les formations poursuivent à présent des politiques en partie contradictoires, avec des conséquences évidentes sur la qualité de la législation.

3.12.

L’extension des droits du Parlement européen, prévue par les traités sans qu’elle ne se traduise dans les faits, doit être réalisée dans les meilleurs délais. Ainsi, le droit d’initiative restreint introduit par le traité de Lisbonne (article 225 du TFUE) devrait être appliqué de manière accrue conformément aux termes de ce traité. Un rejet par la Commission ne devrait être possible que pour des raisons formelles, notamment lorsque la base des compétences n’est pas suffisante.

3.13.

Les différences en termes de rythme d’intégration sont depuis longtemps une réalité dans l’Union européenne et ces écarts sont inévitables à l’avenir, au regard du nombre d’États membres. Dans ce contexte, le CESE estime nécessaire d’exploiter de manière accrue la coopération renforcée. Dans le même temps, il faut éviter que les institutions de l’Union européenne ne soient affaiblies par une géométrie variable des projets d’intégration européenne. La coopération renforcée devrait fonctionner sur la base de la majorité qualifiée.

3.14.

Le CESE appuie la demande du Parlement européen de transformer l’Union économique et monétaire (UEM) en un «gouvernement économique efficace et démocratique» et insiste à nouveau sur sa participation aux processus consultatifs qui doivent aller de pair avec un tel approfondissement de l’UEM si l’on veut y associer la société civile.

3.15.

Le CESE est d’avis que la procédure législative accélérée dans le cadre du trilogue ne devrait être appliquée qu’aux seuls cas d’urgence, ce qui est d’ailleurs conforme aux termes du traité. Contrairement aux commissions du Parlement européen, les réunions du trilogue ne sont ni transparentes ni accessibles. La limitation de la procédure législative à une seule lecture conduit à une limitation de la participation de la société civile.

3.16.

Le CESE estime que les instruments et procédures introduits dans le sillage de la crise financière et de la crise de l’euro doivent être mieux intégrés dans le cadre législatif européen. Le Parlement européen, mais aussi les organes tels que le Comité européen des régions (CdR) et le CESE, doivent être mieux intégrés dans le cycle du semestre européen. Le mécanisme européen de stabilité doit être rattaché au cadre législatif de l’Union européenne.

3.17.

S’agissant des actes délégués, la Commission européenne devrait apporter plus de transparence à sa prise de décision (voir l’article 290 du TFUE), ce que le Comité a souligné à plusieurs reprises.

Bruxelles, le 21 septembre 2016.

Le président du Comité économique et social européen

Georges DASSIS


(1)  Liste des avis et rapports d'information du CESE.

(2)  JO C 230 du 14.7.2015, p. 66 et JO C 303 du 19.8.2016, p. 45.

(3)  JO C 175 du 28.7.2009, p. 26.

(4)  «Améliorer la réglementation pour obtenir de meilleurs résultats — Un enjeu prioritaire pour l’Union européenne» [COM(2015) 215 final].

(5)  «Mieux légiférer» (JO L 123 du 12.5.2016, p. 1).

(6)  JO C 303 du 19.8.2016, p. 45.

(7)  Conclusions du Conseil «Compétitivité» du 26/5/2016 (point 2), http://www.consilium.europa.eu/register/fr/content/out/?&typ=ENTRY&i=ADV&DOC_ID=ST-9580-2016-INIT

(8)  Le Centre d’études des politiques européennes (CEPS) est un groupe de réflexion basé à Bruxelles.

(9)  http://www.eu2016.sk/data/documents/presidency-programme-fra-nahlad2.pdf.

(10)  «Better regulations for innovation-driven investment at EU level» (Améliorer la réglementation relative aux investissements axés sur l’innovation à l’échelle européenne), document de travail des services de la Commission: https://ec.europa.eu/research/innovation-union/pdf/innovrefit_staff_working_document.pdf.


III Actes préparatoires

COMITÉ ÉCONOMIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN

519e session plénière du CESE des 21 et 22 septembre 2016

28.12.2016   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 487/57


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil sur le cadre juridique de l’Union régissant les infractions douanières et les sanctions qui y sont applicables»

[COM(2013) 884 final — 2013/0432 (COD)]

(2016/C 487/08)

Rapporteur général:

M. Antonello PEZZINI

Consultation

Parlement européen, 22.6.2016

Base juridique

Article 114 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne

Compétence

Section spécialisée «Marché unique, production et consommation»

Adoption en session plénière

21.9.2016

Session plénière no

519

Résultat du vote

(pour/contre/abstentions)

173/0/3

1.   Conclusions et recommandations

1.1.

Le Comité économique et social européen (CESE) a toujours été d’avis qu’une union douanière efficace constitue un élément essentiel du processus d’intégration européenne, afin de garantir une libre circulation des marchandises sûre et transparente reposant sur le respect des règles de concurrence et assurant une protection maximale des consommateurs et de l’environnement, de lutter efficacement contre les infractions, la fraude et la contrefaçon, et de favoriser le développement du commerce légitime.

1.2.

Le Comité soutient fermement les objectifs de la proposition de la Commission, les mesures proposées étant destinées à:

constituer un premier pas vers un régime effectif de douane unique européenne, doté d’une gouvernance unitaire et d’instances administratives et juridictionnelles douanières communes telles que: un tribunal européen des douanes; des dispositions communes d’application des règles du code des douanes; un système informatique unique doté de procédures de conformité uniformes; une interprétation réglementaire univoque permettant de favoriser le développement du commerce au sein de l’Union et avec les pays tiers;

apporter une sécurité au niveau de la réglementation et de son application, uniforme sur tout le territoire de l’Union, au moyen d’un régime homogène de détection et d’imputation d’infractions et de sanctions, civiles et non pénales, proportionnées aux droits éludés et à leur degré de gravité, dans le cadre de seuils et de plafonds communs, y compris moyennant la possibilité de sanctions non pécuniaires;

prévoir des systèmes communs renforcés de prévention et de dissuasion des infractions qui fassent partie intégrante de la réglementation, au moyen de modélisations TIC de conformité et de systèmes d’alerte rapide automatique;

prévoir des mécanismes communs de composition et de transaction en cas de sanctions en vue de rationaliser et d’accélérer le développement du commerce européen et d’éviter des procédures juridiques longues et coûteuses;

répondre de manière exhaustive aux obligations découlant des cadres de référence internationaux de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) et de l’Organisation mondiale des douanes (OMD).

1.3.

Le CESE demande que, parmi les objectifs de la directive, il soit indiqué que cet instrument, qui permet une convergence progressive mais nécessaire vers un régime réglementaire unitaire unique, sur le plan de son application et de son interprétation, doit être complété par un contrôle et une surveillance du marché basés sur des mécanismes automatiques de relevé qui n’entravent pas le développement du commerce européen légitime.

1.4.

Le Comité recommande que le rapport biennal à présenter au Parlement européen (PE), au Conseil et au CESE, en plus d’une évaluation du degré de convergence de la mise en œuvre de la nouvelle législation au niveau territorial, propose des indicateurs pour les prochaines étapes visant la création de:

une véritable Agence européenne des douanes;

un Tribunal européen des douanes;

un corps des douanes commun, efficace et efficient, afin d’aligner les systèmes douaniers d’infraction et de sanction sur une base réglementaire et d’application unique faisant l’objet d’une interprétation univoque.

2.   Introduction

2.1.

L’union douanière (UD) est le fondement de l’Union européenne. La législation douanière de l’Union est totalement harmonisée du point de vue des règles matérielles et procédurales depuis 1992. Le nouveau code des douanes de l’Union (Union Customs Code — UCC), le règlement (UE) no 952/2013, a été adopté en 2013 et est entré en vigueur en 2016.

2.2.

Les douanes, pour ce qui est de leurs aspects réglementaires, relèvent de la compétence exclusive de l’Union conformément à l’article 3 du TFUE, tandis que les activités relatives à l’organisation des contrôles, le système de sanctions ainsi que les activités d’application réglementaire relevant de la coopération judiciaire en matière pénale relèvent de la compétence des États membres (titre V du TFUE).

2.3.

Les opérations douanières de l’Union européenne représentent environ 16 % du commerce mondial, pour des importations et exportations représentant plus de 3 500 milliards d’EUR par an. Les droits de douane prélevés en 2013 se situaient à un niveau de 15,3 milliards d’EUR, soit près de 11 % du budget de l’Union européenne.

2.4.

Les systèmes nationaux d’infractions et de sanctions douanières non harmonisés peuvent inciter le commerce illicite à réorienter les échanges vers les États membres dans lesquels les risques d’être découverts et les sanctions sont moindres, alors que les entreprises qui opèrent dans la légalité doivent supporter des coûts plus élevés lorsqu’elles opèrent à travers plusieurs juridictions, et que les différents régimes de sanctions risquent d’altérer les flux commerciaux et les modèles d’activité économique au sein du marché unique et de conférer un avantage aux entreprises opérant dans des pays dont les contrôles douaniers sont moins stricts.

2.5.

Une analyse des régimes nationaux des États membres applicables aux infractions et aux sanctions douanières, menée depuis la mise en œuvre du programme «Douane 2013», a fait apparaître de nombreuses différences entre les régimes, ce qu’ont confirmé des analyses approfondies récentes (1).

2.6.

En effet, la lutte contre les infractions à la réglementation douanière suit 28 (2) régimes juridiques et traditions administratives ou juridiques différents, ce qui entraîne une grande variété dans la définition et la sévérité des sanctions: la non-uniformité dans l’application de la législation douanière se répercute sur les conditions de concurrence, qui devraient être homogènes dans le marché intérieur.

2.7.

Les divergences dans l’application de la réglementation concernent en particulier la nature des sanctions administratives et/ou pénales, la typologie des sanctions, les seuils et l’étendue de la violation, les systèmes de composition/transaction, les niveaux et types de responsabilité, les circonstances aggravantes ou atténuantes, les délais de procédure et de prescription et la responsabilité des personnes morales.

2.8.

Il est devenu nécessaire de surmonter les divergences au niveau de l’application des règles et de mettre en œuvre des systèmes douaniers européens harmonisés selon le principe d’une douane unique, au sein desquels les États membres autorisent des mécanismes de règlement des différends pour les apurements, en cas d’infractions douanières, en fonction de la nature et de l’étendue de celles-ci, en essayant d’éviter des procédures juridiques longues et coûteuses pour les deux parties.

2.9.

Il convient par ailleurs de rappeler que l’union douanière est l’organe opérationnel chargé de mettre en œuvre une grande partie des mesures de politique commerciale de l’Union européenne et qui applique de nombreux accords internationaux liés aux flux commerciaux, en mettant en place — par l’intermédiaire des administrations des États membres — d’importants processus horizontaux de gestion des données, de gestion des opérateurs commerciaux et des applications. Les divergences prévalant au sein du système européen sur le plan de l’application des règles ont déjà fait l’objet de réclamations devant l’OMC.

2.10.

Face aux graves problèmes de fonctionnement auxquels l’UD est confrontée, eu égard aux divergences d’application de la réglementation qui menacent de compromettre son efficacité globale, le CESE a déjà eu l’occasion de souligner la nécessité «que l’on suive une politique douanière unique fondée sur des procédures uniformes, modernisées, transparentes, efficaces et simplifiées, qui soit en mesure de contribuer à la compétitivité économique de l’Union européenne au niveau mondial» (3).

2.11.

Pour le parachèvement d’un véritable marché intérieur, comme le CESE l’a déjà rappelé (4), il faut garantir des délais sûrs concernant les dispositions d’application; les interprétations uniformes de la réglementation douanière de l’Union, qui doit servir de cadre administratif unique afin de parvenir à un traitement uniforme des opérateurs en quelque point que ce soit du territoire douanier de l’Union européenne; un accès plus aisé au statut d’opérateur économique agréé; une information bénéficiant d’une vaste diffusion auprès de tous les opérateurs intéressés; des procédures informatisées et une formation de qualité des ressources humaines. En substance, nous devrions être en mesure de mettre en place une douane unique européenne.

2.12.

Ce n’est qu’au moyen de progrès solides vers une douane unique européenne et des structures de gouvernance appropriées que l’on pourra remédier à la complexité et à la non-homogénéité du fonctionnement opérationnel de l’union douanière.

3.   La proposition de la Commission

3.1.

L’objectif principal de la proposition de directive de la Commission est de parvenir, par le biais d’une directive d’harmonisation, à un cadre juridique commun de référence visant à permettre:

l’égalité de traitement des opérateurs économiques;

la protection efficace des intérêts financiers de l’Union européenne;

l’application effective de la réglementation en matière d’infractions et de sanctions douanières;

une situation de sécurité juridique (lex certa) et de conditionnalité et proportionnalité des peines (nulla poena sine culpa);

en assurant le respect des règles douanières de manière uniforme dans l’ensemble de l’Union européenne par une application harmonisée de la réglementation en matière d’infractions et de sanctions douanières qui évite de trop grandes différences entre les systèmes nationaux d’infraction et de poursuites, de nature à fausser les règles de concurrence et d’affecter la libre circulation des marchandises.

3.2.

En particulier, l’exécutif communautaire, en raison de la base juridique choisie, l’article 33 du TFUE, propose:

une longue typologie d’infractions passibles de sanctions, réparties en trois grandes catégories: infractions de responsabilité stricte (concept assimilable à la responsabilité objective), infractions où il y a faute ou négligence, et dol;

un barème de sanctions «efficaces, proportionnées et dissuasives» pour chacune des catégories, selon les critères dégagés de la jurisprudence de la Cour de justice (5);

un éventail de sanctions susceptibles d’être infligées, pouvant aller jusqu’à 30 % de la valeur des marchandises, ou correspondant à un tarif forfaitaire si l’infraction concerne certains statuts ou autorisations;

l’introduction, pour remédier aux délais divergents appliqués par les autorités détentrices du pouvoir punitif, d’un délai de prescription de quatre ans à compter du jour de l’infraction ou, dans le cas d’infractions continues ou répétées, du jour où elles cessent;

l’introduction de mécanismes de suspension des poursuites administratives, dans le cas où des procédures pénales sont engagées pour les mêmes faits;

l’encouragement de la coopération et de l’échange d’informations entre les États membres.

3.3.

La proposition, présentée il y a trois ans par la Commission européenne, a été soumise au Parlement européen et a suscité des objections de plusieurs États membres. Le Parlement lituanien a fait valoir que «le fondement légal retenu (article 33 du TFUE) de la proposition n’autorise pas l’Union à prendre des mesures en établissant un cadre concernant les infractions à la législation douanière de l’Union et prévoyant des sanctions en cas d’infraction» (6), la proposition ne satisfaisant pas au principe de subsidiarité, en particulier lorsqu’elle ne respecte pas les exigences du principe d’attribution selon lequel l’Union agit uniquement lorsque les traités prévoient une base juridique d’action.

3.4.

Le PE a maintenant repris l’examen de la proposition et confié la rédaction de son avis à M. Kaja KALLAS, rapporteur pour la commission IMCO, qui a demandé l’extension de la base juridique à l’article 114 du TFUE également (7). Ce dernier prévoit la consultation obligatoire du CESE, comme indiqué dans la lettre de saisine du CESE par le président de la Commission IMCO du Parlement européen.

3.5.

Le CESE souscrit pleinement à ce choix, et souligne l’importance d’un système douanier homogène, permettant de donner des valeurs et une unité non seulement au marché intérieur, mais à l’ensemble de la société européenne, aujourd’hui plus que jamais à la recherche de systèmes unifiés.

4.   Observations générales

4.1.

Le Comité économique et social européen a toujours soutenu qu’une union douanière efficace est un élément essentiel du processus d’intégration européenne pour garantir une libre circulation des marchandises, dans le respect des règles de concurrence et avec une protection maximale des consommateurs et de l’environnement.

4.2.

Le CESE estime qu’il est essentiel d’adopter une approche commune vis-à-vis de la prévention, de la dissuasion et de l’identification unique des infractions, et de disposer d’une gestion uniforme du régime de sanctions, y compris pour les systèmes de règlement transactionnel, afin de garantir une application uniforme et non discriminatoire des réglementations européennes sur tout le territoire, comme le prévoit l’article 3 du TFUE.

4.3.

Le CESE est pleinement favorable à une accélération de l’évolution vers une véritable douane européenne unique caractérisée par une gouvernance unitaire reposant sur une Agence européenne des douanes et la mise en place d’instances administratives et juridictionnelles communes (8), notamment un Tribunal européen des douanes (9), à l’instar de l’exemple nord-américain, pour la mise en œuvre d’un système unique pour les infractions et d’un système unique de sanctions de dernière instance, complété par la mise en place ex ante de systèmes de prévention et de systèmes de composition/transaction visant à limiter, voire éliminer, les contentieux coûteux et pénalisants pour le commerce communautaire, surtout pour les petites et moyennes entreprises.

4.4.

Selon le Comité, l’uniformité d’application de la réglementation douanière européenne doit aussi couvrir la phase du contentieux pour les opérateurs économiques, du point de vue du marché tant intérieur qu’international, ainsi que l’approche ex ante de prévention reposant sur des solutions télématiques TIC, uniques et renforcées, pour éviter des charges bureaucratiques excessives en matière d’identification.

4.4.1.

Le Comité souligne l’importance de la mise en œuvre d’«une politique douanière unique sur la base de procédures uniformes, transparentes, efficaces, efficientes […], de façon que l’Union européenne puisse affronter la concurrence mondiale et de manière à préserver les droits […] des entreprises et des consommateurs européens ainsi que la propriété intellectuelle» (10).

4.5.

Le CESE est convaincu que tout système européen d’infractions, de composition et de transaction doit s’accompagner de mesures couvrant tous les autres éléments qui relèvent du système d’application général de la réglementation, comme la supervision, le contrôle, les enquêtes et la surveillance.

4.6.

Le Comité estime qu’il est essentiel de garantir la sécurité juridique en ce qui concerne la réglementation et son application, de manière uniforme, sur tout le territoire de l’Union, au moyen d’un régime homogène de détection et d’imputation des infractions, pour des catégories précises et bien définies, et de sanctions, civiles et non pénales, proportionnées à leur gravité, dans le cadre de seuils et de plafonds communs, imposant une convergence de lignes directrices, tout en prévoyant des sanctions autres que pécuniaires.

4.7.

Selon le CESE, cette première étape de convergence des régimes d’infraction et de sanction de la réglementation douanière commune devrait:

aligner les délais de prescription sur les délais de prescription pour la notification d’une dette douanière, soit trois ans, comme le prévoit le code des douanes;

veiller à ce que les infractions soient sanctionnées en fonction du degré de culpabilité;

paramétrer les amendes de manière proportionnée et en fonction des droits éludés et non de la valeur des marchandises.

4.8.

Le CESE insiste pour que soit assurée la pleine interopérabilité des différentes bases de données en place dans le système européen de surveillance du marché, pour accroître l’effet dissuasif sur les infractions, sur la base d’une stratégie commune et avec un fort soutien des programmes communautaires, de façon à assurer le partage des informations entre les différentes autorités, aux différents niveaux, en temps réel, en particulier dans les cas d’infractions graves et de lourdes sanctions, notamment afin de renforcer la lutte contre le commerce illégal et d’accélérer les procédures qui régissent les échanges légitimes.

4.9.

Conformément à la jurisprudence de la Cour de justice, le Comité considère que l’inclusion de l’article 114 en plus de l’article 33 dans la base juridique de la proposition est une bonne chose, dans la mesure où les dispositions de l’article 114 du TFUE visent à améliorer les conditions de fonctionnement du marché intérieur et contribuent à la suppression de distorsions de concurrence, et correspondent dès lors à l’esprit de la proposition législative à l’examen.

4.10.

Dans l’attente d’une véritable union douanière, le CESE demande l’intensification des actions de l’Union européenne en faveur de la formation et du développement de ressources humaines qualifiées et du renforcement des capacités de gestion du cadre réglementaire de l’Union, notamment grâce à des interventions sur les capacités administratives et à la création d’une force d’intervention commune en matière douanière qui garantisse une application uniforme des régimes de sanctions, de composition et de transaction.

4.11.

Le CESE préconise que dans le rapport qu’elle devrait présenter tous les deux ans au Parlement européen, au Conseil et au CESE, la Commission n’inclue pas seulement une évaluation du degré de convergence de mise en œuvre des États membres, mais aussi et surtout une vision synoptique des indicateurs clés de performance des sanctions douanières, de la diffusion des bonnes pratiques, de l’efficacité des services compétents et de l’efficacité du cadre juridique adopté par l’Union afin d’apprécier quelles doivent être les prochaines étapes en vue de la création d’une véritable Agence européenne des douanes, d’un Tribunal européen des douanes et d’un corps de douanes commun efficace et efficient.

Bruxelles, le 21 septembre 2016.

Le président du Comité économique et social européen

Georges DASSIS


(1)  V. Analysis and effects of the different Member States’ customs sanctioning systems. PE 569.990 — janvier 2016.

(2)  À l’heure actuelle.

(3)  V. JO C 229 du 31.7.2012, p. 68.

(4)  V. avis du CESE JO C 229 du 31.7.2012, p. 68 et JO C 251 du 31.7.2015, p. 25.

(5)  V. arrêts de la Cour de justice dans les affaires C-382/92 et C-91/02.

(6)  V. Parlement de la République de Lituanie — Conclusions de la commission des affaires européennes, document no ES-14-51, 9 juillet 2014, no 100-P-71.

(7)  L’article 33 du TFUE constitue donc la base juridique appropriée lorsqu’il s’agit d’un cadre de coopération entre les autorités douanières. L’article 114 du TFUE est la base juridique utilisée pour l’adoption des mesures d’harmonisation relatives au marché intérieur. Les mesures d’harmonisation visées à cet article exigent comme préalable que les législations des États membres montrent des divergences susceptibles de perturber les échanges commerciaux au sein du marché intérieur.

(8)  L’hypothèse est juridiquement viable, sur la base des dispositions prévues à l’art. 257 du TFUE, déjà appliquées par le Tribunal de la fonction publique (c’est-à-dire le tribunal du travail des fonctionnaires et agents européens) et susceptibles d’être également utilisées à terme pour la création d’un tribunal européen des marques et brevets.

(9)  Le modèle de référence pourrait être celui de la United States Court of International Trade (Tribunal de commerce international des États-Unis). «The Customs Courts Act of 1980 creates a comprehensive system for judicial review of civil actions arising out of import transactions and federal transactions affecting international trade

(10)  V. avis du CESE (JO C 271 du 19.9.2013, p. 66).


28.12.2016   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 487/62


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 2013/34/UE en ce qui concerne la communication, par certaines entreprises et succursales, d’informations relatives à l’impôt sur les bénéfices»

[COM(2016) 198 final — 2016/0107 (COD)]

(2016/C 487/09)

Rapporteur:

M. Victor ALISTAR

Corapporteur:

M. Petru Sorin DANDEA

Consultation

Parlement européen, 28 avril 2016

Conseil, 28 avril 2016

Base juridique

Article 50, paragraphe 1, du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne

Compétence

Section spécialisée «Union économique et monétaire, cohésion économique et sociale»

Adoption en section spécialisée

8 septembre 2016

Date de l’adoption en session plénière

21 septembre 2016

Session plénière no

519

Résultat du vote

(pour/contre/abstentions)

204/7/16

1.   Conclusions et recommandations

1.1.

Le Comité économique et social européen (CESE) soutient la proposition de la Commission visant à rendre plus transparents les régimes fiscaux grâce à la déclaration pays par pays, et estime que cette mesure est de nature à renforcer la confiance des citoyens en l’Union européenne.

1.2.

La transparence de la fiscalité constitue un instrument utile pour garantir que soit reconnu l’apport des entreprises multinationales s’agissant d’alimenter les recettes publiques dans les pays où elles déploient leurs activités.

1.3.

Le CESE constate que la publication, dans le cadre d’un système pays par pays, des données spécifiques en matière de respect des obligations d’imposition fiscale, qui sont déjà établies par d’autres réglementations au niveau européen et à celui des États membres et des marchés de capitaux, est réclamée à la fois par l’opinion publique et les milieux d’affaires.

1.4.

Le climat de concurrence économique loyale est assuré dès lors qu’existe une charge fiscale équitable entre tous les opérateurs actifs sur le marché unique s’agissant des bénéfices réalisés dans le cadre du marché unique européen, et ce indépendamment de leur mode d’organisation au niveau du marché mondial.

1.5.

Si les normes proposées par la Commission sont minimales et plus réduites que celles établies par l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) en ce qui concerne les données devant être déclarées, la proposition de directive demande en revanche leur publication, afin de veiller à la cohérence avec les déclarations déontologiques et la responsabilité publique des sociétés concernées vis-à-vis de l’ensemble des consommateurs, partenaires et contribuables de l’Union européenne. C’est pourquoi le CESE est d’avis que le jeu de données à fournir doit être celui prescrit par la norme BEPS, qui a déjà été adopté par l’Union européenne et la plupart des États membres, étant donné que la réglementation à l’examen se réfère au principe de transparence et n’a pas vocation à revoir à la baisse les engagements internationaux pris à ce jour.

1.6.

Le CESE est d’avis que les réglementations de la Commission figurant dans le paquet de mesures contre l’évasion fiscale doivent veiller à ce que les grandes entreprises ou multinationales qui respectent avec honnêteté leurs obligations fiscales ne soient pas désavantagées par les pratiques de planification fiscale agressive d’autres sociétés multinationales.

1.7.

Le CESE recommande que la publication des données se fasse, parmi les langues officielles de l’Union européenne, dans une de celles qui sont véhiculaires sur le plan international, afin de réaliser l’objectif de donner au grand public un accès effectif aux données concernant l’ensemble du marché unique.

1.8.

Afin de simplifier la charge administrative liée à la publication et à la gestion des données au niveau de l’Union européenne, le CESE estime qu’il y a lieu d’obliger les États membres à tenir un registre public des déclarations pays par pays, assorti d’un système uniformisé au niveau européen.

1.9.

Conformément aux engagements pris par les États membres et la Commission dans le cadre du partenariat pour un gouvernement ouvert (OGP), la publication des données sur un portail doit prendre la forme d’un système ouvert, qui aide la société civile et les entreprises à y accéder et leur en facilite l’utilisation.

1.10.

Le CESE estime que, pour résoudre les problèmes de fond, la Commission doit présenter un train de mesures plus ambitieux, qui poursuive la démarche actuelle d’harmonisation fiscale et veille à ce que les ressources nécessaires aux programmes d’investissement, à la protection sociale et à la croissance économique des États membres soient collectées de manière efficace, proportionnée et non discriminatoire, en évitant à la fois l’érosion de la base fiscale et les risques d’abus et de taxation excessive dans certaines juridictions.

1.11.

Le CESE estime que la limite de 750 millions d’EUR est trop élevée et demande soit qu’elle soit revue à la baisse, soit que l’on prévoie un calendrier pour diminuer progressivement ce seuil.

1.12.

Il est nécessaire d’établir des critères plus clairs pour définir la bonne gouvernance fiscale et recenser les juridictions fiscales qui ne s’y conforment pas.

2.   La proposition de la Commission européenne

2.1.

En mars 2016, la Commission européenne a présenté une communication (1) comprenant un projet de directive portant modification à la directive comptable (2). Ce projet de directive a été annoncé dans le cadre du paquet de mesures contre l’évasion fiscale présenté par la Commission au mois de mars 2016, à titre de volet du plan d’action (3) pour un système d’imposition des sociétés plus transparent, plus juste et plus efficace.

2.2.

La lutte contre l’évasion fiscale et la planification fiscale agressive constitue une priorité pour la Commission européenne. Cette dernière entend, par la proposition qu’elle a déposée, garantir l’application du principe selon lequel les bénéfices devraient être imposés dans le pays où ils ont été réalisés.

2.3.

La directive proposée impose aux entreprises multinationales dont le chiffre d’affaires dépasse 750 millions d’EUR de divulguer publiquement, dans une déclaration pays par pays (DPPP), les impôts sur les bénéfices qu’elles paient ainsi que d’autres informations fiscales pertinentes.

2.4.

La proposition de directive n’impose aux petites entreprises et microentreprises aucune nouvelle obligation concernant les impôts sur les bénéfices qu’elles ont acquittés.

2.5.

La proposition de directive modifiant la directive 2013/34/UE comporte des mesures visant à mettre en œuvre de manière uniforme, au niveau des États membres, l’action 13 (4) du plan d’action BEPS (Base erosion and profit shifting — plan d’action pour lutter contre l’érosion de la base d’imposition et le transfert de bénéfices) de l’OCDE. Ces dispositions portent sur l’amélioration du mécanisme d’échange automatique d’informations entre les services fiscaux des États membres et inclut parmi les types de données faisant l’objet d’un échange celles qui portent sur les résultats de fin d’exercice des entreprises multinationales.

2.6.

La proposition de la Commission répond aux demandes du Parlement européen souhaitant que soit instauré au niveau de l’Union européenne un régime de DPPP en matière d’impôt sur les bénéfices des sociétés.

2.7.

De juin à décembre 2015, les services de la Commission ont procédé à une vaste consultation concernant les propositions relatives à l’instauration d’un système de DPPP. Les 400 acteurs qui y ont pris part comprenaient notamment des entreprises, des associations professionnelles de branche, des organisations non gouvernementales, des citoyens et des groupes de réflexion. La plupart des particuliers qui ont répondu à la consultation publique souhaitent que l’Union européenne soit à la pointe du débat et aille, si nécessaire, au-delà des initiatives actuellement menées à l’échelle internationale en matière de déclaration pays par pays. La majorité des entreprises qui ont répondu ont exprimé leur préférence pour un régime de DPPP qui soit aligné sur la norme BEPS de l’OCDE.

2.8.

La proposition s’appuie sur une analyse d’impact qui a été accueillie favorablement par le comité d’examen de la réglementation et a bénéficié de plusieurs améliorations à la suite de l’avis rendu par ledit comité.

2.9.

La Commission estime que ce sont quelque 6 000 entreprises qui devront élaborer une déclaration ventilée pays par pays du fait qu’elles exercent leurs activités dans l’Union européenne. Parmi celles-ci, environ 2 000 ont leur siège dans l’Union, soit une infime partie seulement des 7,5 millions d’entreprises européennes.

3.   Observations générales et particulières

3.1.

La proposition de directive appelle à mettre en œuvre de manière uniforme dans tous les États membres les règles définies dans le plan d’action BEPS de l’OCDE (5), qui vise à lutter contre la planification fiscale agressive au niveau mondial. Comme il l’a déjà souligné dans de précédents avis (6), le CESE accueille favorablement l’initiative de la Commission et soutient les efforts qu’elle déploie pour lutter contre la planification fiscale agressive pratiquée par certaines multinationales, laquelle contribue à éroder les assiettes fiscales des États membres pour un montant estimé à plusieurs dizaines de milliards d’EUR par an.

3.2.

Le train de mesures de la Commission contre l’évasion fiscale vient contribuer au renforcement de la transparence des pratiques fiscales et crée une pression légitime pour assurer un cadre équitable de concurrence et de performance économique entre les entreprises qui ont les moyens de faire de la planification fiscale et celles qui opèrent uniquement sur le marché intérieur. La directive à l’examen ne modifie pas les principes d’imposition, mais instaure une transparence accrue quant à leur application, conformément à une demande exprimée par l’opinion publique européenne à la suite des scandales des fuites luxembourgeoises (Luxleaks) et des documents de Panama.

3.3.

La proposition de directive exclut de son champ d’application 85 à 90 % des entreprises multinationales, en fixant un seuil de 750 millions d’EUR au-delà duquel il devient obligatoire de présenter une DPPP. Le CESE considère que ce seuil est trop élevé et discriminatoire. En effet, en laissant la majorité des entreprises multinationales en dehors du champ d’application de la directive, il est susceptible de réduire les effets qui sont escomptés de son application.

3.4.

Le CESE considère que le seuil de 750 millions d’EUR doit être revu progressivement à la baisse et qu’un calendrier doit être prévu à cet effet, après une étude d’impact intermédiaire.

3.5.

La Commission propose que la DPPP contienne un ensemble d’informations, qui sont détaillées dans l’article 48 quater de la proposition de directive. Le CESE estime qu’il convient d’inclure aussi dans cette catégorie d’informations la déclaration par l’entreprise des opérations éventuellement effectuées sur le territoire de certaines juridictions fiscales figurant sur la liste prévue à l’article 48 octies. De même, pour que l’application de la directive conduise aux résultats escomptés, il convient que la liste reprenant les types d’informations à déclarer, prévues à l’article susmentionné, comprenne aussi des données relatives aux actifs et aux ventes de l’entreprise, ainsi que la liste de toutes ses filiales ou succursales, comme le recommande la norme BEPS de l’OCDE.

3.6.

La Commission propose que la DPPP soit détaillée et présente les états financiers séparément pour chacun des États membres dans lesquels l’entreprise mère possède des succursales ou des filiales. Pour les juridictions situées en dehors de l’Union européenne, la proposition de directive prévoit que les informations soient présentées de manière consolidée. Le CESE estime que cette présentation consolidée des données est susceptible de cacher d’éventuelles opérations spécifiques de planification fiscale agressive, entraînant ainsi une perte d’efficacité dans l’application de la directive. Le CESE recommande à la Commission de prévoir que la DPPP soit publiée de manière détaillée par juridiction fiscale pour toutes celles dans lesquelles l’entreprise mère possède des succursales ou des filiales.

3.7.

L’article 48 octies de la proposition de directive couvre l’établissement de la liste des juridictions fiscales qui ne sont pas coopérantes ou ne respectent pas les normes en matière de bonne gouvernance fiscale. Le CESE a appuyé l’idée d’une liste européenne reprenant les juridictions qui refusent d’appliquer les normes de bonne gouvernance dans le domaine fiscal (7). Actuellement, la majeure partie des États membres disposent de leur propre système de listes, ainsi que de sanctions s’agissant des transactions financières avec ces juridictions. Le CESE considère qu’une liste établie au niveau de l’Union européenne et définissant des critères précis pour identifier les juridictions qui refusent de jouer le jeu, ainsi que des sanctions appliquées de manière uniforme par tous les États membres, serait un instrument beaucoup plus efficace pour lutter contre l’évasion fiscale et la planification fiscale agressive. Aussi le CESE souscrit-il aux mesures présentées par la Commission dans sa stratégie.

3.8.

En vue de réaliser l’objectif consistant, en matière de politique publique, à améliorer la transparence fiscale des entreprises, le CESE recommande d’instaurer un registre national public, géré par les administrations fiscales des États membres, afin que la DPPP soit accessible sans restrictions. Dans ce contexte, pour faciliter le processus de travail et réduire la charge administrative des entreprises, le CESE recommande que la directive établisse un format standard commun au niveau des États membres, qui permette de traiter les données suivant un régime ouvert, conformément aux engagements pris dans le cadre du partenariat pour un gouvernement ouvert.

3.9.

Le CESE estime également que, pour garantir un régime uniforme d’éthique fiscale au niveau du marché intérieur, il s’impose que les politiques fiscales soient sous-tendues par une harmonisation accrue des principes et stratégies d’imposition, qui place davantage l’accent sur le principe de la taxation des bénéfices à l’endroit où ils sont générés, y compris pour les relations de production et de commercialisation entre États membres.

3.10.

Compte tenu des demandes répétées émanant des organisations de la société civile, qui réclament une plus grande transparence concernant la fiscalité des entreprises multinationales, le CESE salue l’initiative de la Commission d’inclure dans les dispositions de la directive l’obligation pour les États membres de divulguer les données figurant dans les DPPP.

3.11.

La proposition de directive prévoit que la DPPP soit publiée dans la langue officielle de l’État membre sur le territoire duquel l’entreprise exerce son activité. Le CESE estime qu’il conviendrait d’en effectuer également la publication dans au moins une langue étrangère d’audience internationale, afin de garantir que le public ait accès aux informations de nature fiscale qui y sont contenues.

3.12.

Compte tenu des effets négatifs que la crise a produits sur les capacités administratives des services fiscaux des États membres, le CESE recommande à la Commission et à ces derniers d’allouer, aux fins de l’application des nouvelles règles dans le domaine fiscal, les ressources humaines et financières nécessaires pour garantir la réussite de leur mise en œuvre.

Bruxelles, le 21 septembre 2016.

Le président du Comité économique et social européen

Georges DASSIS


(1)  COM(2016) 198 final.

(2)  Directive 2013/34/UE.

(3)  http://ec.europa.eu/taxation_customs/sites/taxation/files/resources/documents/taxation/company_tax/anti_tax_avoidance/timeline_without_logo.png

(4)  http://www.oecd.org/fr/fiscalite/documentation-des-prix-de-transfert-et-aux-declarations-pays-par-pays-action-13-rapport-final-2015-9789264248502-fr.htm

(5)  http://www.oecd.org/fr/ctp/beps-actions.htm

(6)  Voir l’avis du CESE intitulé «La lutte contre la fraude et l’évasion fiscale» (JO C 198 du 10.7.2013, p. 34), et celui portant sur le «Paquet de mesures contre l’évasion fiscale» (JO C 264 du 20.7.2016, p. 93).

(7)  Voir avis du CESE sur le paquet relatif à la transparence fiscale (JO C 332 du 8.10.2015, p. 64).


28.12.2016   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 487/66


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (UE) 2016/399 en ce qui concerne l’utilisation du système d’entrée/sortie»

[COM(2016) 196 final — 2016/0105 (COD)]

et sur la «Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil portant création d’un système d’entrée/sortie pour enregistrer les données relatives aux entrées et aux sorties des ressortissants de pays tiers qui franchissent les frontières extérieures des États membres de l’Union européenne ainsi que les données relatives aux refus d’entrée les concernant, portant détermination des conditions d’accès à l’EES à des fins répressives et portant modification du règlement (CE) no 767/2008 et du règlement (UE) no 1077/2011»

[COM(2016) 194 final — 2016/0106 (COD)]

(2016/C 487/10)

Rapporteur:

M. Cristian PÎRVULESCU

Consultation

Parlement européen, 9 mai 2016

Base juridique

Article 304 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne

Compétence

Section spécialisée «Emploi, affaires sociales, citoyenneté»

Adoption en section spécialisée

9 septembre 2016

Adoption en session plénière

21 septembre 2016

Session plénière no

519

Résultat du vote

(pour/contre/abstentions)

155/2/0

1.   Conclusions et recommandations

1.1.

Le Comité économique et social européen (CESE) considère que le système d’entrée/sortie (Entry/Exit System — EES), dans sa nouvelle forme, est indispensable, dans la mesure où il apporte une valeur ajoutée en matière de sécurité au niveau européen. Comme il le fait dans les autres domaines d’action politique et de réglementation, le Comité promeut, au moyen de ses avis, une approche équilibrée, qui permet de concilier l’exigence de sécurité et la bonne application de la législation, sans jamais déroger aux valeurs fondamentales prônées par l’Union européenne.

1.2.

Le Comité considère que la mise en œuvre du nouveau système d’entrée/sortie doit s’accompagner de campagnes de sensibilisation visant à en expliquer le fonctionnement le plus clairement possible, en mettant l’accent sur la protection des données à caractère personnel. Il recommande d’organiser des campagnes d’information et d’éducation à l’intention tant des autorités que des ressortissants des pays tiers.

1.3.

Le Comité juge nécessaire de prévoir une information et une formation adéquates du personnel intervenant dans l’exploitation du système. Il recommande que le processus de formation de ce personnel reçoive un soutien financier et institutionnel approprié.

1.4.

Le Comité estime que le respect des droits fondamentaux devra faire l’objet d’un contrôle permanent effectué par les institutions spécialisées de l’Union européenne, mais auquel pourront également être associées les organisations de la société civile au niveau européen et à l’échelon national.

1.5.

S’agissant des données à caractère personnel, le Comité insiste sur la nécessité que les droits relatifs à leur accès, à leur rectification et à leur suppression soient clairement définis et garantis.

1.6.

Le Comité recommande de procéder, après la mise en place du système, à une enquête similaire à celle effectuée dans le cadre du projet pilote, afin de pouvoir évaluer dans les conditions réelles l’impact du système sur les voyageurs.

2.   Introduction: contexte et arguments justifiant l’instauration d’un nouveau système d’entrée/sortie de l’Union européenne

2.1.

Dans la mesure où on estime qu’en 2025 le nombre de franchissements réglementaires des frontières sera de 887 millions, dont un tiers concernant des déplacements de ressortissants de pays tiers voyageant dans l’espace Schengen pour une visite de courte durée, il y a lieu de procéder à une modernisation des frontières qui permettra de gérer conjointement et efficacement les flux de voyageurs.

2.2.

Le champ d’application du nouveau EES couvre le franchissement des frontières par tous les ressortissants de pays tiers qui pénètrent dans l’espace Schengen pour un séjour de courte durée (90 jours maximum sur une période de 180 jours), qu’ils soient soumis à l’obligation d’obtention d’un visa, exemptés de celle-ci ou, le cas échéant, en possession d’un visa d’itinérance (jusqu’à un an).

2.3.

La mise en place de l’EES vise à: 1) lutter contre les retards enregistrés dans le processus de vérification aux frontières et améliorer la qualité de ces vérifications pour les ressortissants de pays tiers; 2) garantir l’identification systématique et fiable des personnes qui dépassent la durée de séjour autorisée; 3) renforcer la sécurité intérieure, ainsi que la lutte contre le terrorisme et la grande criminalité.

2.4.

En février 2013, la Commission a présenté une série de propositions législatives sur les frontières intelligentes, en vue de moderniser la gestion des frontières extérieures de l’espace Schengen. Depuis 2013, plusieurs changements ont eu lieu qui ont facilité la conception et la mise en œuvre de l’EES:

2.4.1.

le système d’information sur les visas (VIS) est devenu pleinement opérationnel et la vérification biométrique des titulaires de visas par consultation du VIS aux frontières extérieures de Schengen est désormais obligatoire;

2.4.2.

les dialogues avec les pays des Balkans occidentaux et les pays situés à la frontière orientale et sud-orientale de l’Union européenne au sujet de la libéralisation du régime des visas ont été conclus ou accélérés, ce qui entraînera une augmentation de la proportion des voyageurs exemptés de l’obligation de visa entrant dans l’Union européenne;

2.4.3.

le Fonds pour la sécurité intérieure (ISF-B) a été adopté; celui-ci a alloué 791 millions d’EUR au développement des frontières intelligentes;

2.4.4.

l’agenda européen en matière de migration a défini la gestion des frontières comme étant l’un des quatre piliers pour une meilleure gestion des migrations;

2.4.5.

l’arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne relatif à la directive sur la conservation des données a apporté des précisions juridiques sur les conditions et les garanties à respecter en ce qui concerne le stockage et l’utilisation des données de l’EES.

3.   Observations générales concernant l’instauration d’un nouveau système d’entrée/sortie de l’Union européenne

3.1.

Le Comité juge nécessaire de passer d’un système non intégré et pesant, fondé sur l’apposition par le personnel affecté aux frontières d’un cachet sur les documents de voyage, à un système quasi automatisé, facilitant l’accès des ressortissants de pays tiers. Dans ce cas, la valeur ajoutée des efforts déployés par l’Union européenne est évidente. L’Union européenne a besoin d’un système de frontières qui permette à la fois de faire face à la mobilité accrue et de garantir la sécurité sur le territoire de l’Union, d’un système qui facilite la mobilité sans mettre à mal les droits fondamentaux.

3.2.

Le Comité se félicite que ce système ait fait l’objet d’un projet pilote et que les effets de l’utilisation des différents dispositifs d’identification biométriques sur les ressortissants en provenance de pays tiers aient pu être observés en pratique (voir l’étude publiée à l’issue du projet pilote) (1). Les résultats du sondage effectué montrent que les répondants ont largement confiance en la fiabilité des technologies biométriques et reflètent le consensus existant entre les experts s’agissant des moyens d’identification biométriques les plus sûrs et les plus fiables pour déterminer l’identité d’une personne.

3.3.

Il convient de saluer la participation de l’Agence des droits fondamentaux de l’Union européenne, qui a réalisé, auprès des ressortissants de pays tiers qui ont expérimenté le système, un sondage d’opinion portant sur divers dispositifs biométriques qui pourraient être utilisés, afin d’enquêter, dans différents types de sites (aéroports, gares et trains, ports et frontières maritimes, points de franchissement d’une frontière routière) et dans des conditions variées, sur les éléments d’identification biométriques des ressortissants de pays tiers, tous les dispositifs utilisés dans le cadre de cette expérience étant déjà disponibles sur le marché (2).

3.4.

Les résultats de l’enquête montrent que le prélèvement des données biométriques est considéré comme humiliant par certains groupes de personnes, en moyenne par 45 % des sondés (Amérique du Nord: 30 %, Europe: 43 %, Amérique latine et Caraïbes: 46 %, Asie: 52 % et Afrique: 58 %) (3). S’agissant du type de données biométriques prélevées, le scan de l’iris est considéré par la plupart des répondants (32 %) comme vraiment humiliant, suivi par la reconnaissance faciale (26,2 %). Il est en outre pertinent de souligner qu’une proportion considérable des personnes interrogées (44,3 %) estime que l’utilisation de ce système produira moins de discriminations.

3.5.

À de nombreuses reprises, le Comité a cherché à promouvoir, au moyen de ses avis, une approche équilibrée, qui permette de concilier les exigences de sécurité et la bonne application de la législation, sans jamais déroger aux valeurs prônées par l’Union, ni à sa vision d’un espace à la fois libre, ouvert et sûr.

3.6.

Il est de la plus haute importance pour l’Union européenne et ses États membres de faciliter le système d’entrée/sortie de manière à attirer davantage de visiteurs — des touristes aux hommes d’affaires et aux professionnels — plutôt que de les décourager. Le Comité a donc attiré l’attention sur les évolutions préoccupantes observées dans plusieurs États membres qui tendent à se montrer de plus en plus réticents à accueillir des ressortissants de pays tiers. «Le Comité craint qu’il ne faille pas s’attendre à ce que l’on permette aux ressortissants des pays tiers l’accès aux États membres de l’Union, si dans le même temps, certains États membres menacent des ressortissants d’autres pays membres de l’Union de les expulser vers leur pays d’origine parce qu’ils sont au chômage ou que nous leur en avons tout simplement interdit l’entrée.» (4)

3.7.

Dans un avis précédent consacré aux «frontières intelligentes», le CESE a souhaité «souligner que l’identité de l’Union européenne est explicitement et implicitement associée à l’ouverture et à l’interconnexion, non seulement à l’intérieur, mais aussi au-delà de ses frontières. L’Union européenne constitue une espace culturel, social, politique et économique dynamique, et la mobilité transfrontalière s’avère essentielle pour maintenir son importance sur la scène internationale. Dans cet esprit, les institutions européennes et les États membres devraient s’assurer que les nouveaux systèmes n’aient pas d’incidence sur les voyages dans l’Union européenne des ressortissants de pays tiers, ni sur leur volonté de s’y rendre» (5).

3.8.

Dans le même avis, le Comité a souligné l’importance de protéger les droits fondamentaux, d’assurer la non-discrimination et de garantir par des moyens procéduraux et institutionnels l’intégrité et l’utilisation adéquate des données collectées et stockées dans le système.

3.9.

La mesure dans laquelle les États membres doivent contribuer, sur le plan budgétaire et institutionnel, à la mise en œuvre de ce système reste incertaine. Il convient de clarifier ce point et de trouver des solutions pour obtenir de la part des États membres un engagement ferme à coopérer et à contribuer à la mise en œuvre du système.

3.10.

Le Comité attire l’attention sur les expériences similaires menées dans des pays qui ont mis en œuvre des systèmes du même type. Les attentes des citoyens et de toutes les parties intéressées doivent être ajustées en fonction des capacités du système à atteindre tous les objectifs fixés.

4.   Observations spécifiques

4.1.

En ce qui concerne les éléments d’identification biométriques, le Comité accueille favorablement la réduction du nombre d’empreintes digitales de 10 à 4, un nombre minimal nécessaire qui, associé à l’identification faciale, permet d’obtenir des données pertinentes.

4.2.

S’agissant des données à caractère personnel, le Comité insiste sur la nécessité que les droits relatifs à leur accès, à leur rectification et à leur suppression soient clairement définis et garantis.

4.3.

Il est absolument essentiel que, lorsqu’elles mettent en œuvre l’EES, les autorités compétentes veillent au respect de la dignité humaine et de l’intégrité des personnes dont les données sont demandées et s’attachent à éviter toute discrimination fondée sur le sexe, la couleur de peau, l’origine ethnique ou sociale, les caractéristiques génétiques, la langue, les convictions religieuses ou philosophiques, les opinions politiques, l’appartenance à une minorité nationale, la fortune, la naissance, le handicap, l’âge ou encore l’orientation sexuelle.

4.4.

La mise en œuvre de l’EES a un impact considérable sur l’exercice des droits prévus par la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne: le droit à la dignité humaine (article 1), l’interdiction de l’esclavage et du travail forcé (article 5), le droit à la liberté et à la sûreté (article 6), le respect de la vie privée et familiale (article 7), la protection des données à caractère personnel (article 8), le droit à la non-discrimination (article 21), les droits de l’enfant (article 24), les droits des personnes âgées (article 25), les droits des personnes handicapées (article 26) et le droit à un recours effectif (article 47). Le Comité estime que le respect des droits fondamentaux devra faire l’objet d’un contrôle permanent effectué par les institutions spécialisées de l’Union européenne, mais auquel pourront également être associées les organisations de la société civile au niveau européen et à l’échelon national.

4.5.

Bien que le projet pilote qui a permis de tester le fonctionnement du système sur plusieurs sites n’ait suscité aucune résistance ni réticence significative de la part des utilisateurs, les résultats de l’enquête réalisée par l’Agence des droits fondamentaux de l’Union européenne donnent à penser que son utilisation présentera des difficultés pour certaines catégories de personnes et qu’il sera perçu négativement par la population. Il est possible qu’aux réticences de ces catégories de personnes viennent s’ajouter celles de certains par rapport au prélèvement des données biométriques, que ce soit pour des raisons culturelles ou religieuses ou par méfiance quant à la manière dont ces données seront utilisées et protégées par les autorités.

4.6.

Dans ce contexte, le Comité considère que la mise en œuvre de ce système doit s’accompagner de campagnes de sensibilisation visant à en expliquer le fonctionnement le plus clairement possible, en mettant l’accent sur la protection des données à caractère personnel. Toutes les mesures de précaution relatives au prélèvement, au stockage et à l’utilisation des données doivent être communiquées au public de manière à surmonter les réticences éventuelles et à faciliter une mobilité sans entraves.

4.7.

Le Comité juge nécessaire de prévoir une information et une formation adéquates du personnel intervenant dans l’exploitation du système. Comme il ressort également du projet pilote, le personnel affecté aux frontières a lui-même insisté sur la nécessité de prévoir une formation afin de pouvoir se familiariser avec les nouveaux équipements et processus (6). Les États membres sont quant à eux responsables du bon fonctionnement du système. À cet égard, il convient de viser des règles et des procédures qui donnent la possibilité de préciser la responsabilité des États membres en cas de préjudices résultant du non-respect des dispositions du règlement.

4.8.

Le Comité considère que la communication des données à caractère personnel recueillies par les États membres grâce à l’EES ou leur mise à la disposition d’un pays tiers, d’une organisation internationale ou d’une entité de droit privé établie ou non dans l’Union doivent être limitées et pleinement justifiées.

4.9.

Le Comité estime que les autorités désignées et Europol ne devraient demander à accéder à l’EES que lorsqu’ils ont des motifs raisonnables de croire que cet accès leur fournira des informations qui contribueront de manière significative à la prévention ou à la détection d’infractions terroristes ou d’autres infractions pénales graves, ou encore aux enquêtes en la matière. L’utilisation de l’EES aura une valeur ajoutée pour l’activité policière, mais il importe d’en réglementer strictement l’accès.

4.10.

Le Comité se félicite que les coûts escomptés du système aient été revus nettement à la baisse (passant de 1,1 milliard à 480 millions d’EUR).

Bruxelles, le 21 septembre 2016.

Le président du Comité économique et social européen

Georges DASSIS


(1)  Agence européenne pour la gestion opérationnelle des systèmes d’information à grande échelle au sein de l’espace de liberté, de sécurité et de justice, Projet pilote «Frontières intelligentes», Rapport sur les conclusions techniques du projet pilote, 2015, vol. 1.

(2)  Agence européenne pour la gestion opérationnelle des systèmes d’information à grande échelle au sein de l’espace de liberté, de sécurité et de justice, Projet pilote «Frontières intelligentes» — Annexes, novembre 2015, p. 307-335.

(3)  Agence européenne pour la gestion opérationnelle des systèmes d’information à grande échelle au sein de l’espace de liberté, de sécurité et de justice, Projet pilote «Frontières intelligentes» — Annexes, novembre 2015, p. 322.

(4)  Avis du Comité économique et social européen sur la communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — «Faire de l’Europe ouverte et sûre une réalité» [COM(2014) 154 final] (JO C 451 du 16.12.2014, p. 96).

(5)  Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil portant création d’un système d’entrée/sortie pour l’enregistrement des entrées et sorties des ressortissants de pays tiers franchissant les frontières extérieures des États membres de l’Union européenne» [COM(2013) 95 final — 2013/0057 (COD)], sur la «Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (CE) no 562/2006 en ce qui concerne l’utilisation du système d’entrée/sortie (EES) et le programme d’enregistrement des voyageurs (RTP)» [COM(2013) 96 final — 2013/0060 (COD)] et sur la «Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil portant création d’un programme d’enregistrement des voyageurs» [COM(2013) 97 final — 2013/0059 (COD)] (JO C 271 du 19.9.2013, p. 97).

(6)  Agence européenne pour la gestion opérationnelle des systèmes d’information à grande échelle au sein de l’espace de liberté, de sécurité et de justice, Projet pilote «Frontières intelligentes», Rapport sur les conclusions techniques du projet pilote, 2015, vol. 1, p. 14.


28.12.2016   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 487/70


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil concernant des mesures visant à garantir la sécurité de l’approvisionnement en gaz naturel et abrogeant le règlement (UE) no 994/2010»

[COM(2016) 52 final — 2016/0030 (COD)]

(2016/C 487/11)

Rapporteur:

M. Graham WATSON

Consultation

Commission européenne: 16.9.2016

Parlement européen: 7.3.2016

Conseil de l’Union européenne: 9.3.2016

Base juridique

Articles 194 et 304 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne

Compétence

Section spécialisée «Transports, énergie, infrastructures et société de l’information»

Adoption en section spécialisée

7.9.2016

Adoption en session plénière

22.9.2016

Session plénière no

519

Résultat du vote

(pour/contre/abstentions)

133/4/9

1.   Conclusions et recommandations

1.1.

La politique de l’Union européenne dans le domaine de la sécurité de l’approvisionnement en gaz est une réussite partielle, en ce qu’elle a encouragé les États membres à raisonner en termes de solidarité et de sécurité partagée. Il n’en demeure pas moins que la plupart des questions liées à la politique énergétique continuent d’être traitées principalement comme des intérêts nationaux. Pour satisfaire les attentes des européens en matière de sécurité, la question de l’approvisionnement en énergie doit être abordée de manière plus cohérente au niveau de l’Union européenne.

1.2.

Une telle réglementation de portée européenne doit tenir compte du contexte plus vaste lié au déploiement à l’échelle planétaire d’efforts d’atténuation du changement climatique en vue d’atteindre les objectifs ambitieux fixés par l’accord de Paris, du cadre stratégique pour une union de l’énergie résiliente, dotée d’une politique clairvoyante en matière de changement climatique, ainsi que de diverses tensions géopolitiques en Europe et dans le monde, notamment les flux de réfugiés, les crises aux frontières de l’Europe, y compris les récentes crises en Ukraine, Turquie, Libye et Géorgie, ainsi que la montée du régionalisme qui menace l’intégration européenne.

1.3.

D’importants investissements sont nécessaires pour garantir l’approvisionnement en gaz de l’Europe. Il importe que ces investissements soient essentiellement privés; dans l’industrie du pétrole et du gaz, les profits sont tels que les aides publiques ne devraient pas être requises. Un cadre politique prévisible et fiable est nécessaire pour garantir la confiance des investisseurs et, partant, un approvisionnement stable et fiable en gaz.

1.4.

Le règlement proposé vise à éviter les crises d’approvisionnement en gaz comme celles qui se sont produites en 2006 et en 2009. La majeure partie de la demande de gaz est destinée au chauffage de bâtiments. Un vaste programme de modernisation visant à améliorer l’efficacité énergétique des bâtiments, tel que proposé dans la directive 2010/31/UE sur la performance énergétique des bâtiments et dans la directive 2012/27/UE relative à l’efficacité énergétique, conduirait à une baisse considérable de la demande de gaz, surtout s’il cible les bâtiments chauffés au gaz et en particulier durant l’hiver, saison au cours de laquelle les précédentes crises sont intervenues.

1.5.

Le gaz naturel demeure une importante source d’énergie transitoire et contribue grandement à réduire les émissions de gaz à effet de serre, de composés chimiques, ainsi que de substances toxiques dangereuses, telles que les particules PM10 et PM2,5. En raison d’indicateurs de niveau d’émission nettement inférieurs à ceux du charbon, une part accrue de gaz naturel dans le bouquet énergétique des États membres revêt une importance particulière pour l’amélioration de la qualité de l’air et, par conséquent, la santé des citoyens des États membres et de leurs voisins. Toutefois, il convient d’accélérer la transition vers une économie sobre en carbone, et la politique d’approvisionnement en gaz devrait tenir compte de cette nécessité.

1.6.

Les consommateurs peuvent jouer un rôle majeur dans le développement et la gestion de l’approvisionnement. Des méthodes destinées à mobiliser les consommateurs devraient être mises au point en coopération avec les consommateurs eux-mêmes, notamment en utilisant les TIC de manière innovante. La pauvreté énergétique devrait être traitée en premier lieu par des mesures de politique sociale. De telles mesures devraient inclure des plans nationaux spécifiques visant à promouvoir les investissements dans des programmes de rénovation des bâtiments, comme le prévoit l’article 4 de la directive 2012/27/UE relative à l’efficacité énergétique, en donnant la priorité aux consommateurs en situation de pauvreté énergétique et vulnérables et en promouvant la collaboration entre les partenaires sociaux.

1.7.

Le déploiement des sources d’énergie renouvelables (SER), associé à une électrification croissante, pourrait bien réduire la consommation de gaz dans l’Union européenne et, partant, les importations de l’Union; plus vite les SER seront adoptées, moins les politiques extérieures de l’Union européenne visant à garantir l’approvisionnement en gaz seront pertinentes. Le Comité demande que la Commission fournisse une évaluation du degré de précision de la coordination entre les prévisions de consommation de gaz de l’Union européenne, la sécurité de l’approvisionnement en gaz de l’Union européenne, le développement des sources d’énergie renouvelables et les progrès en matière d’efficacité énergétique dans les différents secteurs.

2.   Introduction (contenu essentiel de la proposition de la Commission)

2.1.

Compte tenu des perturbations économiques et des souffrances personnelles causées par les interruptions de l’approvisionnement en gaz, la Commission européenne tente de s’appuyer sur les travaux antérieurs de l’Union européenne afin d’assurer une plus grande interconnexion des infrastructures d’approvisionnement en gaz et davantage de solidarité entre les États membres dans leur volonté de partager le fardeau généré par les interruptions.

2.2.

Le projet de règlement vient actualiser une importante politique relevant de l’effort de l’Union européenne visant à créer une union européenne de l’énergie [COM(2015) 80 final]. L’union de l’énergie doit s’inscrire dans le contexte des engagements pris par l’Union européenne d’agir pour stopper et, si possible, inverser le changement climatique induit par l’homme et résultant de l’utilisation de combustibles fossiles.

2.3.

L’objectif du projet de règlement est de garantir que tous les États membres mettent en place les outils appropriés pour se préparer à une pénurie de gaz (à la suite d’une rupture d’approvisionnement ou à un pic exceptionnel de demande) et en gérer les effets.

2.4.

Pour réaliser cet objectif, le projet de règlement prévoit une coordination régionale accrue, certains principes et normes étant définis à l’échelon de l’Union européenne. L’approche proposée est que les États membres coopèrent étroitement au sein de leurs régions respectives aux fins des évaluations régionales des risques. Les risques recensés dans les évaluations régionales seront traités dans les plans d’action préventifs et les plans d’urgence régionaux, qui feront l’objet d’un examen par les pairs et seront approuvés par la Commission.

2.5.

Afin de garantir que les évaluations des risques et les plans soient complets et cohérents entre eux, le règlement prévoit des modèles obligatoires indiquant les aspects qui doivent être pris en compte aux fins de l’évaluation des risques et de l’élaboration des plans.

2.6.

Le règlement améliore également l’application des normes d’approvisionnement aux clients protégés (principalement les ménages) et des normes relatives aux infrastructures (possibilité de fournir du gaz même si la plus grande infrastructure n’est pas disponible). Il permet la mise en place de capacités bidirectionnelles permanentes. Enfin, il propose l’introduction de mesures supplémentaires assurant la transparence des contrats d’approvisionnement en gaz, ceux-ci étant susceptibles de perturber la sécurité de l’approvisionnement dans l’Union européenne.

2.7.

La nécessité d’agir à l’échelon de l’Union européenne se justifie par le fait que les approches nationales aboutissent à des mesures suboptimales et aggravent les conséquences d’une crise. Une mesure prise dans un pays peut entraîner une pénurie de gaz dans les pays voisins.

2.8.

Bien que des marchés opérationnels soient d’une importance cruciale pour sécuriser les approvisionnements gaziers, des mesures bien coordonnées de la part des États membres, en particulier en situation d’urgence, peuvent renforcer sensiblement la sécurité de l’approvisionnement. Cela concerne l’amélioration de la coordination non seulement des actions nationales d’atténuation en situation d’urgence, mais également des actions préventives nationales, telles que les propositions visant à améliorer la coordination du stockage national ou les politiques concernant le gaz naturel liquéfié (GNL) [COM(2016) 49 final], qui peuvent être d’une importance stratégique dans certaines régions.

2.9.

Selon un rapport d’évaluation publié en 2014 par l’Agence de coopération des régulateurs de l’énergie, de graves sujets de préoccupations subsistent concernant la coopération entre États membres (les mesures essentiellement nationales qu’ils prennent n’étant pas appropriées pour faire face aux problèmes d’approvisionnement); en outre, le test de résistance mené au cours de l’été 2014 [COM(2014) 654 final] a montré qu’une rupture grave de l’approvisionnement en gaz provenant de l’Est aurait encore d’importantes répercussions pour l’ensemble de l’Union.

3.   Observations générales

3.1.

La principale difficulté que présente cette proposition de règlement n’est pas son texte, mais son contexte. Alors que le cadre stratégique de l’Union pour une union de l’énergie résiliente, dotée d’une politique clairvoyante en matière de changement climatique [COM(2015) 80 final], évoque, sur un ton quasi messianique, la nécessité de lutter contre le changement climatique, le projet de règlement considéré, tout en étant cohérent avec des règlements antérieurs concernant la sécurité de l’approvisionnement en gaz, n’est pas entièrement compatible avec les objectifs du cadre stratégique.

3.2.

D’après de nombreux spécialistes du climat, pour avoir une chance raisonnable de limiter l’élévation de la température de la planète à 2 oC, il nous faudra supprimer presque entièrement les émissions de gaz à effet de serre d’ici 2050, et même plus tôt, si l’on veut que cette hausse ne dépasse pas 1,5 oC. Pour éliminer les quelque 4 611 millions de tonnes d’équivalents CO2 que nous avons par exemple rejetés dans l’atmosphère en 2013, nous devons répondre à la demande d’énergie primaire de l’Union européenne (1 567 millions de tonnes d’équivalent pétrole en 2013) en recourant à des sources d’énergie propres. Plus de deux tiers des émissions proviennent des combustibles fossiles, qui alimentent nos industries depuis toujours, et nous devons nous en détourner.

3.3.

Le gaz naturel demeure une importante source transitoire de combustible et a permis à l’Union européenne de réduire les émissions de gaz à effet de serre issues des combustibles solides, en particulier dans les pays où le charbon joue un rôle de premier plan. Toutefois, il convient d’accélérer la transition vers des sources d’énergie sobres en carbone et, à terme, sans émission de carbone. Il s’agit d’une condition requise pour la réalisation de l’objectif à long terme prévu par l’accord de Paris, qui vise à limiter à 1,5 oC l’élévation de la température moyenne de la planète, ce dont la politique d’approvisionnement en gaz doit tenir compte. Cela devrait figurer dans les évaluations des risques que les États membres sont tenus d’effectuer. Il est nécessaire de mieux coordonner la politique d’approvisionnement en gaz de l’Union européenne et les dimensions de l’union de l’énergie, notamment la pleine intégration du marché européen de l’énergie, l’amélioration de l’efficacité énergétique et la décarbonisation, afin de promouvoir des investissements efficaces et de définir un cadre pour un système énergétique résilient.

3.4.

Cinq ans après l’adoption du règlement (UE) no 994/2010, la question de la sécurité de l’approvisionnement gazier se pose toujours avec autant d’acuité, surtout en raison des tensions entre l’Ukraine et la Russie. Des efforts sont faits au niveau national et européen pour renforcer la sécurité de l’approvisionnement en gaz pour l’hiver 2016/2017 et au-delà. Cependant, une dynamique soutenue visant à assurer une meilleure performance énergétique des bâtiments grâce à l’isolation, qui accorde la priorité aux bâtiments chauffés au gaz, aurait une forte incidence sur la demande de gaz.

3.5.

Le gaz naturel a remplacé les combustibles solides en tant que deuxième combustible le plus utilisé dans l’Union européenne, représentant 23,8 % de la totalité de l’énergie primaire consommée en 2013, ce qui a permis à l’Union européenne de réduire ses émissions de gaz à effet de serre. L’essor des sources d’énergie renouvelables est néanmoins remarquable: leur part dans la consommation brute finale d’énergie dans l’Union européenne, qui était de 8,3 % en 2004, est passée à 15 % en 2013, l’Union européenne étant ainsi en passe d’atteindre son objectif de 20 % en 2020. La production brute d’électricité à partir de sources renouvelables a plus que doublé entre 2000 et 2013 et représentait plus d’un quart de la production totale en 2013.

3.6.

Le déploiement des sources d’énergie renouvelables (SER), associé à une électrification croissante, pourrait bien réduire la consommation de gaz dans l’Union européenne et, partant, les importations de l’Union; plus vite les SER seront adoptées, moins les politiques extérieures de l’Union européenne visant à garantir l’approvisionnement en gaz seront pertinentes. Une meilleure coordination entre les prévisions de consommation de gaz de l’Union européenne, la sécurité de l’approvisionnement en gaz de l’Union européenne, le développement des sources d’énergie renouvelables et les progrès en matière d’efficacité énergétique dans les différents secteurs est dès lors essentielle.

3.7.

La coordination entre les pays de l’Union européenne pour acheminer et distribuer tous les types de combustible est essentielle à la création d’une union de l’énergie, tant au niveau des politiques qu’à celui des stratégies à long terme. La proposition de la Commission vise à diviser l’Union européenne en sept «régions», dans lesquelles la politique doit être coordonnée. Cette solution est, au mieux, intermédiaire, car la coordination politique à l’échelle de l’Union européenne sera bientôt nécessaire et devrait dans l’idéal être étendue, de façon à inclure les parties contractantes de la Communauté de l’énergie, c’est-à-dire les pays voisins avec lesquels l’Union européenne a passé des accords dans le domaine de l’énergie.

3.8.

Étant donné l’accroissement de la concurrence en matière d’approvisionnement énergétique et la nécessité de diversifier les sources d’approvisionnement, l’énergie doit continuer d’occuper une place importante au sein des politiques extérieures de l’Union européenne; ces dernières devraient néanmoins s’orienter de plus en plus vers la garantie d’un approvisionnement énergétique issu de sources renouvelables, notamment grâce à des technologies éprouvées telles que la production d’énergie solaire et éolienne, afin de compléter l’approvisionnement issu de la production intérieure provenant de sources d’énergie renouvelables.

3.9.

Un nouveau système de gouvernance de la politique énergétique doit garantir la cohérence entre les différents aspects de l’approvisionnement en énergie ainsi que la réalisation des objectifs définis au niveau de l’Union européenne. Pour assurer cette cohérence, il importe notamment de privilégier un engagement précoce, systématique et structuré avec la société civile, afin de veiller à ce que les organisations qui la représentent soient largement sensibilisées aux défis de la sécurité énergétique et, surtout, que les responsables politiques de l’Europe entière soient conscients des inquiétudes et des intérêts de la société civile et des partenaires sociaux, ainsi que des ressources et des solutions qu’ils offrent pour relever ces défis et atteindre les objectifs de la politique énergétique de l’Union européenne. À cette fin, le CESE a œuvré activement en faveur de l’idée d’un dialogue européen sur l’énergie, initiative que la Commission a accueillie très favorablement.

3.10.

Le renforcement mutuel des dimensions externe et interne de la politique énergétique, tel que défini dans le plan d’action concernant la diplomatie énergétique, devrait être un autre élément important de la gouvernance en matière de politique énergétique. Le CESE a précédemment plaidé pour que la conception et la mise en œuvre de la politique énergétique extérieure de l’Union européenne permettent de renforcer les processus de coopération et de dialogue existants en matière d’énergie, et d’en établir de nouveaux, avec les principaux États et régions de production, les États et les régions de transit, les pays voisins, ainsi que les principaux partenaires stratégiques mondiaux et régionaux et ce, en vue d’accroître la diversification des sources d’énergie, des fournisseurs et des itinéraires d’approvisionnement de l’Union européenne.

3.11.

La politique énergétique extérieure de l’Union européenne, y compris la politique d’approvisionnement en gaz, doit tenir compte d’un vaste contexte géopolitique. Le CESE a déjà eu l’occasion de souligner que les aspects commerciaux du projet ne devraient pas être le seul facteur intervenant dans la décision, compte tenu en particulier de la tendance de la Russie à utiliser l’énergie comme un instrument au service d’objectifs géopolitiques. Parmi les facteurs que l’Union européenne doit prendre en considération dans le cadre de sa diplomatie énergétique figurent la stabilité politique des pays situés le long du tracé des gazoducs et leur vulnérabilité à l’égard de l’influence politique étrangère, le bilan social et environnemental des promoteurs de projets, ainsi que la participation de sociétés russes aux activités d’exploration et de production. Lors de l’évaluation de nouveaux projets, il est en outre nécessaire de prendre en compte les incidences qu’ils peuvent avoir sur la sécurité énergétique des pays voisins. En ce qui concerne l’Ukraine, par exemple, les projets visant à supprimer le transit du gaz par son territoire risquent d’avoir une incidence sur ses recettes, d’empêcher les investissements dans la modernisation des réseaux et de priver le pays d’un moyen de pression à l’égard de Moscou.

4.   Observations particulières

4.1.

Le CESE se félicite de la définition commune du «client protégé» proposée par la Commission.

4.2.

Le CESE accueille favorablement les notions de «responsabilité partagée» et d’«approche à trois niveaux» liant les entreprises de gaz naturel, les États membres et l’Union européenne en matière de sécurité de l’approvisionnement en gaz, ainsi que la proposition selon laquelle la Commission coordonnerait les actions en cas de nécessité, comme demandé dans un précédent avis du CESE (1). Cette approche est particulièrement importante pour garantir la transparence des contrats d’approvisionnement.

Le Comité considère en outre qu’il y a lieu de distinguer la responsabilité et les compétences des autorités publiques visées à l’article 3 de celles des entreprises et entités privées. Il propose en conséquence de modifier le libellé de cet article afin de préciser que:

la sécurité de l’approvisionnement en gaz est une tâche qui relève des autorités compétentes des États membres et de la Commission, dans leurs domaines respectifs de responsabilité;

les entreprises de gaz naturel et les entreprises consommatrices de gaz doivent coopérer et appliquer les mesures adoptées par les autorités compétentes.

4.3.

Le CESE prend note des critères proposés pour la composition des sept «régions» au sein de l’Union européenne. Il faudrait tout au moins prévoir une solution dans laquelle un État membre pourrait être inclus dans plusieurs «régions» à la fois.

4.4.

Le CESE fait remarquer que la norme relative aux infrastructures proposée n’a globalement pas changé par rapport à celle mentionnée dans le règlement de 2010. Il se réjouit de la proposition de mettre en place une capacité bidirectionnelle («flux inversé») sur les interconnexions entre les États membres.

4.5.

Le CESE observe que la norme d’approvisionnement proposée est dans une large mesure identique à celle du règlement de 2010. Il se félicite de l’obligation de réaliser une analyse d’impact avant d’adopter de nouvelles mesures non fondées sur le marché.

4.6.

Le CESE prend note de la proposition visant à ce que les risques soient désormais évalués au niveau régional et s’en réjouit, y voyant un pas vers une future évaluation des risques au niveau de l’Union européenne. Il est favorable au modèle proposé par la Commission et juge le processus d’examen par les pairs important à cet égard.

4.7.

Le CESE applaudit les propositions concernant les plans d’urgence, les procédures de gestion des crises et les mesures d’urgence.

4.8.

Le CESE accueille favorablement les suggestions en matière de transparence et de solidarité entre les États membres sur la base des tests de résistance de l’été 2014, estimant qu’il s’agit d’un mécanisme d’assurance adéquat. En particulier, le Comité note avec satisfaction que le groupe à haut niveau sur la connexion gazière pour l’Europe centrale et du Sud-Est a conclu un accord sur une liste de projets prioritaires, dont la mise en œuvre permettra aux pays de la région d’avoir accès à au moins trois sources de gaz, ce qui garantira la diversification et la sécurité de l’approvisionnement.

4.9.

Le CESE se félicite de la proposition relative à la coopération avec les pays tiers qui sont des partenaires contractuels au sein de la Communauté de l’énergie.

4.10.

Le CESE reconnaît l’importance que revêt la proposition de surveillance permanente des mesures visant la sécurité de l’approvisionnement en gaz, et demande instamment à la Commission d’y inclure la nécessité de supprimer progressivement le recours au gaz naturel en faveur des sources d’énergie renouvelables.

4.11.

Le CESE prend acte des dérogations proposées pour Malte et Chypre et encourage ces deux pays, compte tenu de leur climat favorable, à se positionner à l’avant-garde de la transition vers un système où les besoins énergétiques seront couverts par les sources d’énergie renouvelables plutôt que les combustibles fossiles.

Bruxelles, le 22 septembre 2016

Le président du Comité économique et social européen

Georges DASSIS


(1)  JO C 339 du 14.12.2010, p. 49.


28.12.2016   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 487/75


Avis du Comité économique et social européen sur la «Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — Une stratégie de l’Union pour le gaz naturel liquéfié et le stockage du gaz»

[COM(2016) 49 final]

(2016/C 487/12)

Rapporteur:

Marian KRZAKLEWSKI

Consultation

Commission européenne, 16.2.2016

Base juridique

Article 304 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne

Compétence

Section spécialisée «Transports, énergie, infrastructures et société de l’information»

Adoption en section spécialisée

7.9.2016

Adoption en session plénière

22.9.2016

Session plénière no

519

Résultat du vote

(pour/contre/abstentions)

109/0/8

1.   Conclusions et recommandations

1.1.

Le Comité économique et social européen (CESE) estime que la stratégie de l’Union pour le gaz naturel liquéfié (GNL) et le stockage du gaz, exposée dans la communication COM(2016) 49 final, constitue un élément indispensable du projet d’union de l’énergie, visant à assurer la sécurité et la diversification de l’approvisionnement énergétique.

1.2.

Dans les prochaines années, la capacité mondiale de liquéfaction de gaz augmentera, ce qui déclenchera probablement une baisse des prix. C’est pourquoi le Comité considère qu’il s’agit là d’une chance à saisir afin d’accroître la sécurité et la résilience du système gazier de l’Union européenne.

1.3.

Le Comité reconnaît la nécessité d’accroître la flexibilité du marché européen du gaz en augmentant la part du GNL sur ce marché.

1.4.

Le CESE juge que cette augmentation de la part du GNL sur le marché européen du gaz, la constitution de réserves appropriées de gaz dans les installations de stockage, ainsi qu’une véritable diversification de l’approvisionnement en énergie sont des facteurs qui permettent de garantir la sécurité énergétique des États de l’Union européenne.

1.5.

La communication de la Commission à l’examen attire à juste titre l’attention sur l’adéquation apparente des capacités de regazéification de l’Union européenne, puisque ce potentiel n’est pas réparti de manière optimale au niveau régional.

1.6.

Le Comité partage la conviction qu’il convient d’adopter une approche différenciée de la construction de nouveaux terminaux de GNL dans le cadre des efforts déployés pour parvenir à une diversification complète et durable des approvisionnements en gaz de l’Union européenne.

1.6.1.

Il convient de traiter en priorité des investissements favorisant un meilleur équilibre entre les voies d’approvisionnement. Un financement judicieux, grâce aux fonds de l’Union européenne, de la construction de nouveaux terminaux de GNL et d’interconnexions transfrontalières de transport doit prendre en compte les régions qui sont actuellement isolées et dépendantes d’un seul fournisseur.

1.6.2.

Pour ce qui est d’élargir le marché du GNL dans l’Union européenne, il importe de réaliser correctement et en temps voulu les investissements prévus dans les projets d’intérêt commun. Il y a lieu d’élaborer des mécanismes transparents afin d’assurer une juste répartition des coûts d’investissement et d’exploitation entre les États membres et les opérateurs économiques.

1.6.3.

Le Comité estime que l’Union européenne doit faire en sorte que le développement accéléré (fast-track) des terminaux de GNL et des unités flottantes de stockage et de regazéification («Floating storage and regasification units» —FSRU) soit un choix neutre sur le plan technologique, qui s’appuie sur les investissements les plus efficaces.

1.7.

Le CESE soutient l’intention de la Commission de vérifier la compatibilité avec le droit de l’Union européenne des accords intergouvernementaux relatifs à des achats de GNL auprès de pays tiers.

1.8.

Le Comité attire l’attention sur le fait que la communication de la Commission à l’examen ne montre pas la cohérence entre, d’une part, la stratégie en vue d’accroître la part du GNL et de renforcer le stockage de gaz et, d’autre part, les investissements majeurs que les voisins de l’Union européenne prévoient actuellement d’injecter dans les réseaux, par exemple Nord Stream 2.

1.9.

Le CESE reconnaît et souligne l’importance du gaz naturel, et notamment le rôle prépondérant que joue le GNL dans le cadre de la transition vers un secteur énergétique de l’Union européenne à faible intensité de carbone, ainsi que dans les efforts visant à réduire les émissions de gaz à effet de serre, mais également les émissions de gaz toxiques et de particules (PM10, PM2,5) dangereux pour la santé et la vie des citoyens des États membres.

1.9.1.

Il conviendrait, dans le cadre de la stratégie exposée dans la communication à l’examen, de mettre plus fortement l’accent sur le rôle important que joue le gaz naturel en tant que technologie intermédiaire durant la période de transition d’un secteur de l’énergie basé sur le charbon vers celui à faible intensité de carbone. Étant une source d’énergie plus propre, le gaz a une fonction particulière dans le processus de réduction drastique des émissions de faible hauteur, notamment dans le secteur des ménages et dans celui des transports.

1.9.2.

Le Comité recommande, au cours de la période de transition susmentionnée, d’accroître la part du gaz naturel dans le bouquet énergétique des États membres et notamment de ceux d’entre eux où le charbon détient une part majoritaire.

1.10.

Le CESE partage la thèse de la communication à l’examen, selon laquelle le recours au GNL dans le secteur du transport lourd de marchandises, tout comme dans le transport maritime, peut contribuer à limiter sensiblement les retombées négatives sur l’environnement.

1.10.1.

Dans le même temps, le Comité constate que la communication, dans sa partie consacrée au GNL, n’accorde que trop peu d’attention à un développement intensif du système européen d’approvisionnement et d’utilisation du GNL comme combustible dans le secteur du transport, aussi bien routier que maritime.

1.11.

Le Comité perçoit l’importance toute particulière que revêt le stockage du gaz dans le système européen de sécurité et dans le maintien d’un approvisionnement stable en gaz naturel. Les capacités de stockage existantes dans l’Union européenne sont considérables [COM(2016) 49 final], mais leur implantation n’est pas satisfaisante.

1.12.

Le CESE estime qu’il est nécessaire, pour parvenir à l’équilibre et à la sécurité énergétique, que les acteurs des systèmes fassent leur le principe selon lequel le volume minimal de gaz stocké doit couvrir 100 % de la demande sur le marché national du gaz durant la période hivernale; toutefois, l’option la meilleure consisterait à équilibrer les stocks de gaz à l’échelon régional.

1.13.

Le Comité approuve et juge importants les plans de la Commission visant à lever les obstacles aux échanges commerciaux entre les véritables nœuds gaziers régionaux et les marchés des différents États.

1.14.

Dans le contexte de la question, soulevée dans la communication à l’examen, de la réalisation des infrastructures manquantes, le CESE estime qu’il convient d’exploiter les possibilités qu’offre le Fonds européen pour les investissements stratégiques (FEIS) afin de compléter le financement des projets d’infrastructures énergétiques et informatiques critiques.

2.   Contexte de l’avis

2.1.

En mars 2015, le Conseil européen a adopté ses conclusions relatives à l’union de l’énergie. Le passage le plus significatif de ce document énonce l’affirmation que: «L’Union européenne est résolue à mettre en place une Union de l’énergie dotée d’une politique d’avenir en matière de climat, sur la base du cadre stratégique présenté par la Commission, dont les cinq dimensions sont étroitement liées et se renforcent mutuellement»:

la sécurité énergétique, la solidarité et la confiance,

la pleine intégration du marché européen de l’énergie

l’efficacité énergétique comme moyen de modérer la demande,

la décarbonisation de l’économie,

la recherche, l’innovation et la compétitivité.

2.2.

Le CESE relève qu’au paragraphe 2, point a), de ce même document, le Conseil préconise d’accélérer les projets d’infrastructure pour l’électricité et le gaz, y compris les interconnexions en particulier vers les régions périphériques, afin d’assurer la sécurité énergétique et le bon fonctionnement du marché intérieur de l’énergie.

2.3.

Le CESE analyse ici la stratégie de l’Union pour le gaz naturel liquéfié (GNL) et le stockage du gaz présentée dans le cadre de la communication COM(2016) 49 final. Cette stratégie constitue une pièce importante du projet d’union de l’énergie [COM(2015) 80], que ce soit sous l’angle de son apport à la sécurité de l’approvisionnement énergétique, de la compétitivité des marchés de l’énergie ou encore des objectifs en matière de climat et d’environnement poursuivis dans le cadre de l’union de l’énergie et par ailleurs.

2.4.

Le gaz naturel est un combustible qui tient une place importante dans le bouquet énergétique de l’Union européenne. Il représente 25 % de l’utilisation totale des vecteurs d’énergie. Il convient de relever que l’extraction de cette matière première dans les États membres couvre 34 % des besoins pour la production d’énergie dans l’industrie, dans les services et à des fins privées.

2.5.

L’extraction du gaz naturel diminue assez rapidement sur le territoire de l’Union européenne. Si en 2004, elle s’élevait à 229,5 milliards de m3, elle n’était que de 132,3 milliards en 2014. De surcroît, les réserves existantes sont modestes et ne suffiront que pour 11,3 ans. Dans ce contexte, l’on comprend les raisons pour lesquelles l’Union européenne est le plus grand importateur de gaz naturel au monde. En 2014, la consommation de gaz sur le territoire de l’Union européenne s’élevait à 386,9 milliards de m3. Il s’agissait du niveau le plus faible depuis 10 ans, inférieur de 11,6 % à celui de l’année précédente, alors que la consommation annuelle de gaz dans l’Union européenne s’élevait en moyenne à 447 milliards de m3 au cours de la période 2004-2013.

2.6.

Les réserves mondiales exploitables de gaz naturel sont immenses (187 000 milliards de m3) et correspondent à un RPP de 54 ans. Si l’on tient compte des réserves de gaz non conventionnel, ce ratio pour les réserves de gaz naturel passe à 290 ans.

2.7.

D’ici 2020, la capacité mondiale de liquéfaction de gaz augmentera significativement (de 50 %), notamment aux États-Unis et en Australie (plus de 100 millions de tonnes par an), ce qui déclenchera à coup sûr une baisse des prix. Les États membres de l’Union européenne doivent y voir une chance d’accroître la sécurité et la résilience du système gazier de l’Union face à d’éventuelles ruptures d’approvisionnement.

2.8.

Au cours de la première décennie du XXIe siècle, les importations de gaz vers l’Union européenne se sont principalement effectuées par le système de gazoducs et le GNL a représenté à peine 20 % de ces importations, alors qu’il occupe un volume 600 fois inférieur, ce qui en rend le transport et le stockage plus économiques.

3.   Observations générales

3.1.

Le CESE reconnaît toute l’importance du gaz dans la transition vers un secteur énergétique de l’Union européenne à faible intensité de carbone et dans les efforts de réduction des émissions. Assurer un accès égal et libre des États membres à des marchés de producteurs de gaz à la fois diversifiés et stables sur le plan politique devient une priorité extrêmement importante à court et moyen terme, qui contribuera à la réalisation de la politique de l’Union européenne en matière de climat et d’énergie, ainsi qu’à la création d’une union de l’énergie stable. La politique concernant la part du gaz dans le bouquet énergétique devrait tenir compte de l’objectif à long terme, fixé par l’accord de Paris (conclu lors de la COP 21), qui est de maintenir la hausse de la température moyenne mondiale en dessous de 1,5 oC.

3.2.

Le Comité constate que la communication COM(2016) 49 final de la Commission s’inscrit dans la lignée de l’accord adopté par le Conseil de l’Union européenne les 23 et 24 octobre 2014 sur le cadre d’action de l’Union européenne en matière de climat et d’énergie, qui prévoit la réalisation à l’horizon 2030 des objectifs suivants:

une réduction de 40 % des émissions de CO2,

une part d’au moins 27 % des sources d’énergie renouvelables dans le bouquet énergétique de l’Union européenne,

une amélioration d’au moins 27 % de l’efficacité énergétique.

3.3.

L’interaction des cinq facteurs ci-après déterminera, dans les dix années à venir, la compétitivité économique du gaz en tant que combustible dans les États de l’Union européenne, ainsi que sa capacité de réellement concurrencer les combustibles solides, notamment le charbon:

la politique en matière de climat et d’énergie, et tout particulièrement le respect de la qualité de l’air,

les prix du gaz,

la mise en œuvre du système européen d’échanges de quotas d’émissions, et partant, la fixation des prix des quotas d’émissions de CO2,

l’évolution des exportations de gaz (GNL) en provenance des États-Unis et d’Australie,

les prix de vente sur le marché mondial du pétrole et du charbon.

3.4.

Le CESE approuve et juge importants les plans de la Commission visant à lever les obstacles aux échanges commerciaux entre les véritables nœuds gaziers régionaux et les marchés des différents États. À cette fin, il s’impose d’achever la création de marchés intérieurs du gaz, de supprimer les obstacles règlementaires, commerciaux et juridiques, ainsi que d’assurer l’accès à ces marchés.

3.4.1.

Sachant que les importations de gaz de schiste en provenance des États-Unis pourraient avoir une incidence positive sur le marché européen du gaz, le CESE encourage les autorités de l’Union à mener, dans le cadre du PTCI, des négociations actives visant à supprimer les obstacles à l’importation de ce gaz en provenance des États-Unis.

3.5.

Il convient également de relever que la communication de la Commission à l’examen ne montre pas la cohérence entre, d’une part, la stratégie en vue d’accroître la part du GNL et de renforcer le stockage de gaz et, d’autre part, les investissements prévus pour le projet Nord Stream 2 [COM(2016) 49 final].

3.6.

Il conviendrait, dans le cadre de la stratégie exposée dans la communication à l’examen, de mettre plus fortement l’accent sur le rôle important que joue le gaz naturel en tant que technologie intermédiaire durant la période de transition d’un secteur de l’énergie basé sur le charbon vers celui à faible intensité de carbone. En tant que combustible, le gaz se prête particulièrement bien à la production rapide et stable d’électricité et d’énergie de chauffage; il peut également constituer une technologie de secours pour les sources d’énergie renouvelables.

3.7.

Le Comité recommande, au cours de la période de transition d’un secteur de l’énergie basé sur le charbon vers une économie à faible intensité de carbone, d’accroître la part du gaz naturel dans le bouquet énergétique des États membres et notamment de ceux où le charbon prédomine. Cette évolution revêt une importance particulière pour l’amélioration de la qualité de l’air, ce qui aura des effets positifs sur la santé des citoyens de ces États et de leurs voisins et limitera également de manière significative les émissions de gaz à effet de serre et toxiques.

3.7.1.

Dans certains États membres, deux tiers en moyenne de la consommation finale d’énergie sont consacrés au chauffage des habitations et sont produits dans des centrales à charbon peu efficaces. Des investissements dans les centrales de cogénération au gaz de faible puissance permettraient d’améliorer la stabilité du système énergétique et la qualité de l’air. La réalisation de tels investissements prend peu de temps (deux années); les coûts financiers (dépenses en capital) sont relativement faibles (bien que les coûts opérationnels s’y ajoutent) et compensent en partie les coûts assez élevés du combustible. Un autre avantage des centrales de cogénération au gaz de faible puissance réside dans la très grande rapidité de la synchronisation avec le réseau de distribution énergétique, ce qui en fait une excellente source d’énergie d’appoint dans les périodes de pics de consommation.

3.8.

Dans le contexte de la question, soulevée dans la communication à l’examen, de la réalisation des infrastructures manquantes, il convient d’exploiter les possibilités qu’offre le Fonds européen pour les investissements stratégiques (FEIS). Dans le cadre de ce programme, l’on prévoit notamment de compléter le financement des projets d’infrastructures énergétiques et informatiques critiques visant à:

développer les interconnexions énergétiques entre les États;

diversifier les sources d’énergie et les voies de transport;

élaborer des plans européens et régionaux pour le cas d’une crise énergétique;

améliorer l’efficacité énergétique de l’économie.

4.   Observations particulières concernant le GNL

4.1.

Le Comité reconnaît la nécessité d’accroître la flexibilité du marché européen du gaz en augmentant la part du GNL sur ce marché.

4.2.

Cette augmentation, la constitution de réserves appropriées de gaz placées dans les installations de stockage, ainsi qu’une véritable diversification des voies d’approvisionnement, sont des facteurs qui permettent d’accroître la sécurité énergétique des États de l’Union européenne.

4.3.

La communication de la Commission à l’examen attire à juste titre l’attention sur l’adéquation apparente des capacités de regazéification de l’Union européenne. Cette adéquation n’est qu’apparente, car ce potentiel n’est pas réparti de manière optimale sur le plan géographique. Il n’est que faiblement exploité dans les États de la péninsule Ibérique, en France, au Royaume-Uni, aux Pays-Bas, alors que les États membres de la région de la mer Baltique, d’Europe centrale et orientale ainsi que d’Europe du sud et de l’est dépendent dans une très large mesure d’un fournisseur unique.

4.4.

Le Comité partage la conviction qu’une approche différenciée de la construction de nouveaux terminaux de GNL est nécessaire dans le cadre des efforts pour parvenir à une diversification complète et durable des approvisionnements. Il convient de traiter en priorité des investissements favorisant un meilleur équilibre entre les voies d’approvisionnement.

4.5.

Un financement judicieux, grâce aux fonds de l’Union européenne, de la construction de nouveaux terminaux de GNL et d’interconnexions transfrontalières de transport doit prioritairement prendre en compte les régions qui sont actuellement isolées et dépendantes d’un seul fournisseur. Cette manière de stimuler les investissements viserait à assurer à de nombreux fournisseurs de gaz un accès égal à ces régions sur la base d’une concurrence libre et loyale. Dans ce contexte, il importe tout particulièrement d’accroître les interconnexions entre les systèmes facilitant les échanges commerciaux de gaz entre les marchés intérieurs des États membres, notamment dans les régions dont le degré de sécurité des approvisionnements n’est pas suffisant à l’heure actuelle.

4.6.

S’agissant d’élargir le marché du GNL dans l’Union européenne, il importe au plus haut point de réaliser correctement et en temps voulu les investissements dans les PIC. Il y a lieu d’élaborer des mécanismes clairs afin d’assurer une juste répartition des coûts d’investissement et d’exploitation entre les États membres, qui possèdent des niveaux d’infrastructures de GNL et des capacités de stockage du gaz différents.

4.7.

L’Union européenne doit faire en sorte que le développement accéléré (fast-track) des terminaux de GNL et des unités flottantes de stockage et de regazéification (FSRU) soit un choix neutre sur le plan technologique, qui s’appuie sur les investissements les plus efficaces dont les retours doivent prendre la forme des prix les plus bas possibles de regazéification, d’un raccourcissement du délai de mise sur le marché des produits, d’un risque réduit de mise en œuvre, ainsi que d’une certitude accrue sur le marché.

4.8.

Le CESE soutient pleinement l’intention de la Commission européenne de vérifier la compatibilité avec le droit de l’Union européenne des accords intergouvernementaux relatifs à des achats de GNL conclus entre des États membres et des pays tiers.

4.9.

Le Comité partage la thèse de la communication de la Commission à l’examen, selon laquelle le recours au GNL dans le secteur du transport lourd de marchandises en tant que substitut au gazole, ou en tant qu’ersatz du fioul lourd dans le transport maritime, peut contribuer à limiter sensiblement les retombées négatives sur l’environnement.

4.9.1.

Le Comité constate que la communication à l’examen, dans sa partie consacrée au GNL, n’accorde que trop peu d’attention au système européen d’approvisionnement et d’utilisation du GNL comme combustible dans le secteur du transport, aussi bien routier que maritime. Il s’agit en particulier de développer de manière novatrice le système d’approvisionnement, ainsi que le réseau de stations de ravitaillement dans le transport routier et de points de soutage dans le transport maritime. De tels objectifs sont réalisés, entre autres, dans le cadre du projet de «couloir bleu» qui traverse les États de l’Union européenne, de la France à la mer Baltique.

4.10.

Dans certains États membres de l’Union européenne, qui ne disposent que d’un accès limité aux réseaux gaziers, l’on continue de recourir à très grande échelle aux combustibles fossiles pour produire de l’électricité et de la chaleur. Le recours au GNL en tant que combustible de substitution dans les systèmes locaux, où il est susceptible de remplacer les combustibles classiques qui génèrent des gaz et des particules polluants, peut entraîner une amélioration rapide de la qualité de l’air. Dans de telles conditions, conformément aux objectifs à long terme en matière de développement durable, le GNL ne peut supplanter les sources d’énergie renouvelables.

4.11.

Le CESE partage l’avis de la Commission exprimé dans la communication à l’examen, selon lequel les sources d’énergie renouvelables et l’efficacité énergétique doivent être des solutions rentables et qu’il convient d’analyser soigneusement les options lorsque sont prises les décisions relatives aux infrastructures de GNL, afin d’éviter un verrouillage technologique ou l’accumulation d’actifs irrécupérables. Il faut éviter que l’investissement dans des sources d’énergie se dissocie du développement économique des pays de l’Union européenne.

5.   Observations particulières concernant le stockage du gaz

5.1.

Le Comité perçoit l’importance toute particulière que revêt le stockage du gaz dans le système européen de sécurité et dans le maintien d’un approvisionnement stable de l’économie de l’Union européenne en gaz naturel. Les capacités de stockage existantes dans l’Union européenne sont considérables, mais leur implantation est loin d’être satisfaisante. Plus de 83 % du volume de stockage de gaz se trouvent sur le territoire de l’Europe de l’ouest et du sud-ouest. Les barrières réglementaires et tarifaires, ainsi que l’insuffisance du réseau d’interconnexions dans certaines régions d’Europe constituent des obstacles importants à l’exploitation transfrontalière des capacités de stockage.

5.2.

Le CESE relève qu’il est nécessaire, pour parvenir à l’équilibre et à la sécurité énergétique, que les acteurs des systèmes fassent leur le principe selon lequel le volume minimal de gaz stocké doit couvrir 100 % de la demande sur le marché national du gaz durant la période hivernale. Toutefois, l’option la plus rationnelle sur le plan économique consisterait à équilibrer les stocks de gaz à l’échelon régional. Il sera possible d’obtenir ce modèle optimal une fois qu’auront été construites les interconnexions en Europe du nord-ouest (Finlande, Suède, pays baltes, Pologne), en Europe du sud-est (Bulgarie, Turquie, Serbie, Croatie) et en Europe du sud-ouest (Portugal, Espagne, France). Une seconde condition consiste à éliminer toutes les obstacles au transport transfrontalier, notamment les droits aux frontières.

5.3.

Le Comité accueille favorablement la proposition de la Commission européenne de garantir l’égalité des conditions de concurrence entre des instruments de flexibilité concurrents et d’élaborer des codes de réseau pour l’ensemble de l’Union, qui tiendraient compte de l’harmonisation des tarifs de transport du gaz depuis et vers les installations de stockage, pour autant que les structures tarifaires en reflètent les coûts.

5.4.

Il y a lieu de reconnaître le caractère essentiel que revêtent les mesures visant à assurer la liberté d’accéder physiquement aux installations de stockage et à la capacité du système de transport, et ce également dans un contexte transfrontalier. Le CESE partage la conviction de la Commission européenne quant à la nécessité d’optimiser l’utilisation des installations de stockage existantes en achevant les travaux sur les codes de réseau. De ce point de vue, il importerait d’établir une coopération efficace des États membres avec les pays voisins pour ce qui est d’optimiser l’utilisation des capacités de stockage des deux parties.

Bruxelles, le 22 septembre 2016.

Le président du Comité économique et social européen

Georges DASSIS


28.12.2016   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 487/81


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de décision du Parlement européen et du Conseil établissant un mécanisme d’échange d’informations en ce qui concerne les accords intergouvernementaux et les instruments non contraignants conclus entre des États membres et des pays tiers dans le domaine de l’énergie, et abrogeant la décision no 994/2012/UE»

[COM(2016) 53 final]

(2016/C 487/13)

Rapporteur:

Vladimír NOVOTNÝ

Consultation

Commission européenne, 16.2.2016

Conseil, 2.3.2016

Parlement européen, 7.3.2016

Base juridique

Article 194, paragraphe 2, et article 304 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne

Compétence

Section spécialisée «Transports, énergie, infrastructures, société de l’information»

Adoption en section spécialisée

7.9.2016

Adoption en session plénière

21.9.2016

Session plénière no

519

Résultat du vote

(pour/contre/abstentions)

139/0/4

1.   Conclusions et recommandations

1.1.

Le Conseil économique et social européen (CESE) se félicite de la proposition de la Commission et de la proposition de nouvelle décision dans son ensemble, et considère qu’elle constitue un pas vers le renforcement de la sécurité juridique dans le domaine des investissements dans le secteur de l’énergie et celui des projets d’infrastructures en rapport, vers l’accroissement de la transparence sur les questions de sécurité de l’approvisionnement en gaz et vers l’amélioration des fonctions du marché intérieur de l’énergie.

1.2.

Le CESE est favorable à la réalisation d’une évaluation des accords internationaux avec des pays tiers dans le domaine de l’énergie suivant un mécanismeex ante, en tant que celui-ci constitue un moyen de prévenir les risques potentiels de conflit des accords conclus avec le droit de l’Union européenne et les exigences du marché intérieur de l’énergie. En même temps, il estime que la prévention constitue dans ce cas un procédé plus efficace que des mesures de remédiation a posteriori.

1.3.

Le CESE propose que la procédure de notification et de vérification précédant la conclusion (ex ante) des accords internationaux dans le domaine de l’énergie se limite à ceux d’entre eux qui concernent l’approvisionnement des États membres en gaz, lequel est le produit énergétique de base le plus sensible, sa fourniture s’étendant généralement à plusieurs États membres de l’Union européenne.

1.4.

De l’avis du CESE, la révision de la décision ne devrait concerner que la conception des accords-cadres qui ont des incidences directes sur le marché intérieur de l’Union et/ou la sécurité de l’approvisionnement énergétique, et la Commission devrait évaluer exclusivement la conformité avec le droit de l’Union du projet d’accord intergouvernemental qui lui est soumis.

1.5.

Le renforcement de la protection des informations confidentielles tout au long du processus de préparation de l’accord intergouvernemental déterminera le succès de la mise en place des procédures proposées de notification et de vérification des accords internationaux en préparation ou en cours de négociation dans le domaine de l’énergie.

1.6.

De l’avis du CESE, il conviendrait d’évaluer les autres accords dans le domaine de l’énergie par la voie des procédures juridiques et administratives ex post en vigueur jusqu’à présent. Le CESE recommande cependant en même temps d’envisager la possibilité de soumettre sur une base volontaire de tels accords à une évaluation ex ante, sur demande de l’État membre concerné.

1.7.

Le CESE considère en outre que le délai proposé de douze semaines imparti à la Commission pour émettre un avis négatif en cas d’incompatibilité du projet d’accord avec le droit de l’Union doit être le délai maximal. Une fois cette période écoulée, il doit être considéré que la Commission a approuvé l’accord proposé et que les négociations pour la conclusion dudit accord intergouvernemental peuvent se poursuivre.

2.   Introduction

2.1.

La proposition de décision du Parlement européen et du Conseil établissant un «mécanisme d’échange d’informations en ce qui concerne les accords intergouvernementaux conclus entre des États membres et des pays tiers dans le domaine de l’énergie» est une composante du «Paquet hivernal» de la Commission européenne axé sur la sécurité de l’approvisionnement énergétique, et ce dans le cadre du projet d’union de l’énergie. Ce paquet s’axe en premier lieu sur les fournitures de gaz en provenance de pays tiers.

2.2.

En 2015, la Commission a procédé à une révision et à une évaluation de l’efficacité de la décision en vigueur no 994/2012/UE du 25 octobre 2012 sur les accords intergouvernementaux, qui a établi un mécanisme d’échange d’informations sur les accords conclus entre des États membres et des pays tiers dans le domaine de l’énergie.

2.3.

Il découle du rapport d’évaluation de la Commission que celle-ci est d’avis que les décisions actuelles ne remplissent pas l’un de leurs principaux objectifs, à savoir assurer la conformité des accords intergouvernementaux avec le droit de l’Union. La Commission a mis en évidence trois causes fondamentales de ce problème:

l’absence de toute notification ex ante des accords intergouvernementaux à la Commission, ce qui entraîne un accroissement du risque que ces accords ne soient élaborés d’une manière qui n’est pas conforme au droit de l’Union européenne,

l’insuffisance des mécanismes juridiques prévus dans certains accords intergouvernementaux qui permettent leur modification ou leur résiliation,

en ce qui concerne les accords intergouvernementaux, le manque de transparence à propos des négociations en cours ou de leur effet de substitution.

2.4.

La Commission a élaboré une proposition de décision qui abroge la décision no 994/2012/UE et qui prévoit plusieurs modifications significatives visant à traiter des conclusions découlant de la révision de ladite décision. Cette révision a deux objectifs principaux:

veiller à la conformité des accords intergouvernementaux avec le droit de l’Union afin de garantir le bon fonctionnement du marché intérieur et de renforcer la sécurité énergétique de l’Union européenne, et

améliorer la transparence des accords intergouvernementaux avec des parties tierces afin d’optimiser le rapport coût-efficacité de l’approvisionnement énergétique de l’Union européenne et d’accroître la solidarité entre les États membres.

3.   Document de la Commission

3.1.

La proposition de décision révisée contient les éléments suivants:

3.1.1.

Obligations en matière de notification en ce qui concerne les accords intergouvernementaux:

obligation pour un État membre d’informer la Commission de son intention d’entamer des négociations avec un pays tiers en ce qui concerne la conclusion de nouveaux accords intergouvernementaux relatifs à la fourniture de gaz ou de modifier les accords existants,

la Commission devrait être tenue informée de l’avancement des travaux préparatoires de l’accord à partir du moment où l’annonce des négociations est faite,

les services de la Commission peuvent fournir aux États membres des conseils sur la manière d’éviter toute incompatibilité entre, d’une part, les dispositions de l’accord intergouvernemental et, d’autre part, le droit de l’Union, les positions adoptées au sein du Conseil sur les politiques de l’Union ou les conclusions du Conseil européen, dans le cas où l’État membre a informé la Commission des négociations,

obligation pour un État membre de notifier à la Commission, en vue d’une évaluation ex ante, un projet d’accord intergouvernemental ou de modification d’un tel accord, assorti de tous les documents d’accompagnement, dès que les négociations entre les parties ont abouti à un accord global sur ses principaux éléments,

obligation pour un État membre de notifier à la Commission un accord intergouvernemental ou la modification d’un tel accord, ainsi que tous les documents d’accompagnement, après sa ratification,

obligation pour un État membre de notifier à la Commission tous les accords intergouvernementaux existants ou les modifications de tels accords, ainsi que tous les documents d’accompagnement,

les accords entre entreprises ne sont pas visés par les obligations en matière de notification, mais ils peuvent être soumis à la Commission sur une base volontaire,

obligation de la Commission de mettre les informations et les documents qu’elle a reçus à la disposition des autres États membres, conformément aux dispositions relatives à la confidentialité des données.

3.1.2.

Évaluation par la Commission:

obligation de la Commission d’effectuer une évaluation ex ante des projets d’accords intergouvernementaux ou de modifications de tels accords et d’informer l’État membre, dans un délai de six semaines, des éventuels doutes qu’elle nourrit quant à la compatibilité avec le droit de l’Union, en particulier avec la législation relative au marché intérieur de l’énergie et le droit de la concurrence de l’Union;

obligation contraignante de la Commission de communiquer à l’État membre son avis sur la compatibilité de l’accord intergouvernemental ou de la modification d’un tel accord avec le droit de l’Union, dans un délai de douze semaines à compter de la date de notification;

un État membre ne peut conclure l’accord intergouvernemental proposé ni en accepter la modification avant que la Commission ne lui ait communiqué dans son avis ses doutes éventuels. Au moment de conclure l’accord intergouvernemental proposé ou d’en accepter la modification, l’État membre tient le plus grand compte des conclusions et recommandations pertinentes de la Commission;

obligation de la Commission d’effectuer une évaluation ex post des accords intergouvernementaux existants ou des modifications de ces accords et d’informer les États membres en cas de doutes quant à la compatibilité de ces accords avec le droit de l’Union, dans un délai de neuf mois à compter de leur notification.

3.1.3.

Obligations en matière de notification et évaluation par la Commission en ce qui concerne les instruments non contraignants:

obligation pour un État membre de soumettre à la Commission les instruments non contraignants existants ou futurs, ainsi que tous les documents d’accompagnement,

la Commission peut effectuer une évaluation ex post des instruments non contraignants qui lui sont soumis et informer l’État membre en conséquence, si elle estime que les mesures mettant en œuvre l’instrument non contraignant pourraient ne pas être conformes au droit de l’Union,

la Commission propose comme l’option la plus efficiente, efficace et proportionnée par rapport aux coûts celle qui prévoit de conférer un caractère obligatoire à l’évaluation ex ante des accords intergouvernementaux à laquelle la Commission procède. Les États membres devraient avoir obligation d’informer la Commission à un stade précoce de toute négociation en cours d’un accord intergouvernemental concernant la fourniture de gaz et de présenter à la Commission leurs propositions y afférentes aux fins de son évaluation ex ante.

3.2.

Les effets de cette décision devraient, selon la Commission, influer sur:

le renforcement de la sécurité juridique, qui favorise les investissements,

le bon fonctionnement du marché intérieur des énergies en l’absence de segmentation et en présence d’une concurrence accrue,

une transparence accrue en ce qui concerne la sécurité des approvisionnements dans tous les États membres.

4.   Observations générales

4.1.

Le CESE a déjà abordé la question des accords dans le domaine de l’énergie en 2012, dans le cadre de la préparation de la décision du Parlement européen et du Conseil no 994/2012/UE (1). Dans son avis, il a souligné que les accords sur l’énergie doivent être guidés par des considérations tant stratégiques que commerciales tout en respectant les principes de proportionnalité et de transparence.

4.2.

Le Comité a regretté, entre autres, que le projet de décision ne couvre pas les accords commerciaux importants d’entités privées dans le domaine de l’énergie s’étendant à plusieurs États membres, pour lesquels il existe un risque de conflit avec le droit de l’Union européenne. Le Comité a fait état des menaces susceptibles de voir le jour lorsque des partenariats stratégiques contraindraient éventuellement à introduire des pratiques imposées par des intérêts extérieurs à l’Union européenne qui pourraient s’avérer néfastes.

4.3.

Quant à la proposition de décision du Parlement européen et du Conseil révisant la décision no 994/2012/UE, les organisations européennes d’employeurs, en tant que partenaires importants du dialogue social, ainsi que les représentants de la société civile organisée ont exprimé leurs réserves. Les associations d’employeurs font valoir que le mécanisme ex post existant est suffisant. Ils ont souligné que l’évaluation devrait être ciblée sur les accords ayant une incidence sur le marché intérieur de l’énergie ou sur la sécurité de l’approvisionnement énergétique.

4.4.

Les organisations de la société civile et un certain nombre d’États membres ont en outre posé l’exigence que la responsabilité soit engagée dans le cas de fuite d’informations commercialement sensibles et l’exigence d’une protection adéquate des intérêts commerciaux. Ils se sont également déclarés favorables à ce que les accords d’entités privées et les accords fondés sur les mécanismes Euratom soient exclus du champ d’application et ont formulé l’exigence que l’ensemble de la révision de la décision no 994/2012/UE respecte la liberté d’entreprise et de commerce, la protection du secret des affaires et le droit à une bonne administration.

4.5.

Au cours des consultations publiques réalisées dans le cadre de ce dossier, des objections similaires ont été également soulevées par les parties intéressées, y compris les organisations sectorielles européennes et les associations de régulateurs. Ils ont souligné, entre autres éléments, que les documents d’accompagnement de la Commission [SWD(2016) 28 final] ne comprennent pas suffisamment de bases probantes et d’arguments chiffrés significatifs permettant de conclure en toute légitimité que la législation actuelle ne remplit pas ses objectifs et doit donc être remplacée par une nouvelle législation. Une application plus stricte de la décision existante peut permettre de corriger les lacunes des accords internationaux, plutôt que le recours à une nouvelle législation.

4.6.

Dans le but de parvenir à un compromis approprié, le CESE se fonde, dans le présent avis, tant sur les commentaires et objections d’une partie du spectre de la société civile organisée qu’il a formulés ci-avant que sur les arguments de la Commission, mais aussi sur les conclusions du Conseil «Énergie» de l’Union européenne.

4.7.

Sur la base de l’expérience de la Commission, s’agissant de la difficulté de procéder à des modifications dans des accords internationaux déjà conclus dans le domaine de l’énergie, dans le cas où l’on découvre après coup une incompatibilité avec le droit de l’Union, le CESE soutient la proposition d’appliquer le mécanisme ex ante en tant que forme de prévention de la violation du droit de l’Union et des règles du marché intérieur de l’énergie, dans les cas qui intéressent l’ensemble de l’Union européenne ou s’étendent à plusieurs États membres.

4.8.

De l’avis du CESE, la révision de la décision ne devrait donc concerner que les accords intergouvernementaux importants avec des pays tiers qui ont des incidences directes sur le marché intérieur de l’Union et/ou la sécurité de l’approvisionnement énergétique, et la Commission devrait évaluer exclusivement la conformité avec le droit de l’Union du projet d’accord intergouvernemental qui lui est soumis.

4.9.

Dans le cadre du processus de négociation d’accords intergouvernementaux à moindre échelle et d’intérêt limité, la Commission ne devrait recevoir aucun mandat spécifique lorsqu’elle fournit assistance à un État membre au cours des négociations. Dans le même temps, il convient toutefois de conserver la possibilité pour l’État membre d’obtenir à sa demande des services de conseil de la Commission en vue de prévenir un conflit de l’accord négocié avec le droit de l’Union européenne. Dans un tel cas, la Commission devrait être liée par des délais impératifs pour fournir les informations pertinentes.

5.   Observations particulières

5.1.

Le CESE estime qu’il y a lieu de continuer à n’appliquer le mécanisme de contrôle qu’aux seuls accords internationaux concernant la fourniture de gaz.

5.2.

Le Comité fait sien l’avis de la Commission selon lequel les obligations découlant de la proposition de décision à l’examen ne doivent pas concerner les accords conclus par des entités privées. Il recommande toutefois d’envisager d’appliquer le mécanisme ex ante proposé dans le cas des accords du secteur privé ayant une incidence significative sur le marché intérieur de l’énergie ou sur la sécurité de l’approvisionnement énergétique. Il convient cependant de fixer des règles claires pour cette procédure.

5.3.

Le CESE escompte voir s’établir une responsabilité en cas de perte d’informations commercialement sensibles, y compris l’examen de tels cas sous l’angle du droit pénal.

5.4.

Le CESE estime qu’il n’est ni nécessaire ni utile que la décision à l’examen s’applique aux instruments juridiquement non contraignants (article 2 de la proposition).

5.5.

Le Comité exprime des doutes quant à l’affirmation de la Commission selon laquelle la proposition n’aura aucune incidence sur le budget de l’Union européenne. En particulier dans le cas d’une extension du mécanisme ex ante aux accords d’entités privées, l’on peut s’attendre à une augmentation tant des coûts administratifs que de la charge administrative. Le CESE ne dispose pas d’analyse concernant la manière dont, dans le cadre de la nouvelle décision, l’on respectera le principe de subsidiarité et l’on fera valoir le principe de proportionnalité.

5.6.

Le CESE approuve la proposition de la Commission de conserver le caractère facultatif de l’assistance qu’elle fournit (article 4 de la proposition), sachant que l’assistance de la Commission européenne ne devrait pas être obligatoire dans le cadre des négociations de l’État membre avec un pays tiers.

Bruxelles, le 21 septembre 2016.

Le président du Comité économique et social européen

Georges DASSIS


(1)  JO C 68 du 6.3.2012, p. 65.


28.12.2016   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 487/86


Avis du Comité économique et social européen sur la communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions intitulée «Initiative européenne en faveur de l’informatique en nuage — Bâtir une économie compétitive des données et de la connaissance en Europe»

[COM(2016) 178 final]

(2016/C 487/14)

Rapporteur:

M. Antonio LONGO

Consultation

Commission européenne, 19.4.2016

Base juridique

Article 304 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne

Compétence

Section spécialisée «Transports, énergie, infrastructures, société de l’information»

Adoption en section spécialisée

7.9.2016

Adoption en session plénière

21.9.2016

Session plénière no

519

Résultat du vote

(pour/contre/abstentions)

149/1/1

1.   Conclusions et recommandations

1.1.

Le Comité économique et social européen (CESE) approuve et soutient le choix stratégique de la Commission d’une informatique en nuage européenne, ouverte et destinée au monde scientifique, s’inscrivant dans un fort engagement politique et économique en faveur de l’innovation numérique. Depuis 2011, il a adressé à plusieurs reprises une série de recommandations à la Commission, ayant pour but de placer l’Europe à la pointe de ce domaine prometteur, avec l’aide d’entreprises chef de file.

1.2.

Il s’agit pour le CESE d’une priorité absolue, qui revêt une importance stratégique, tant en ce qui concerne le comblement du retard technologique qu’au regard du progrès économique, social et culturel de la société.

1.3.

Le CESE propose un nuage européen accessible à l’ensemble des citoyens et des entreprises. Le CESE demande avant tout que soient clarifiés et précisés les délais et les modalités d’extension de la base d’utilisateurs, comme promis aux petites et moyennes entreprises (PME) innovantes et à l’industrie.

1.4.

Le CESE partage l’analyse de la Commission quant aux difficultés qui empêchent l’Europe d’exploiter le potentiel des données, notamment en ce qui concerne le manque d’interopérabilité, la fragmentation des structures et leur fermeture à d’autres apports et échanges. La communication énonce des mesures positives afin de surmonter les divisions entre les réalités nationales, qui empêchent la réalisation d’un véritable marché unique numérique européen, à l’aide d’actions visant à élargir l’accessibilité et à renforcer la confiance entre le secteur public et le monde universitaire, qui souvent sont totalement séparés et ne communiquent pas entre eux.

1.5.

Le CESE demande que les mesures d’intégration soient réalisées de manière à favoriser un changement des mentalités dans la communauté scientifique, au moyen de mécanismes d’intégration entre les infrastructures universitaires, les centres de recherche et les institutions publiques, ainsi que d’une révision de la structure des incitations, afin d’obtenir un meilleur partage des données, tandis que les communautés dans lesquelles le partage des données est déjà monnaie courante devraient être encouragées à jouer un rôle de premier plan dans la définition des modalités de l’ouverture des données.

1.6.

Le CESE recommande que soit clarifiée l’interaction entre l’infrastructure européenne de données, qui devrait encourager également la promotion, le développement et la mise en œuvre de superordinateurs à haute performance (CHP), et l’initiative phare annoncée en matière de renforcement des technologies quantiques.

1.7.

Le CESE propose que la Commission lance, sur la question primordiale de la gouvernance, ainsi que sur l’ouverture progressive à tous et sur les modalités d’utilisation et de conservation des données, une vaste consultation qui associe directement la communauté scientifique et les associations représentatives des intérêts des citoyens.

1.8.

Le CESE préconise que les fournitures de matériel et de logiciels nécessaires au nuage européen soient achetées en Europe et appelle à davantage de clarté quant aux ressources financières, qui proviennent de différents programmes-cadres, des Fonds structurels, du MIE et du FEIS.

1.9.

Le CESE propose que la Commission, en accord avec les États membres, lance un grand programme de développement et de valorisation de nouvelles professions de haut niveau, qui offre de nouvelles possibilités d’emploi qualifiés et favorise le «retour» dans l’Union européenne des jeunes scientifiques travaillant dans d’autres pays.

1.10.

Afin de permettre aux entreprises et aux citoyens de disposer d’un cadre réglementaire précis et clair dans un secteur aussi stratégique mais également aussi complexe et en évolution constante que le secteur numérique, le CESE suggère la création d’un «portail unique de l’Europe numérique», par le biais duquel les citoyens et les entreprises pourraient aisément accéder aux textes de l’Union européenne existants.

1.11.

Enfin, le CESE rappelle que pour mener à bien une véritable révolution numérique, des mesures d’éducation et de formation sont nécessaires pour toutes les classes d’âge de la population européenne et durant toutes les périodes d’activité ou d’inactivité. En particulier, le CESE réaffirme qu’il est nécessaire d’investir dans la formation technologique des femmes et de leur permettre d’accéder aux postes de responsabilité et de décision.

2.   Contexte et contenu

2.1.

La Commission a élaboré une série d’orientations destinées à jeter les bases d’une initiative européenne sur l’informatique en nuage ouverte, destinée au monde scientifique, et a publié une proposition dans laquelle il est estimé que, eu égard au développement des mégadonnées, le nuage est un instrument permettant de tirer le meilleur parti de la masse de données produites par des acteurs publics et privés. L’on estime que la capacité à utiliser les mégadonnées est de nature à avoir un impact sur l’économie mondiale, en offrant la possibilité de grandes innovations en matière industrielle et sociale et en permettant la création de nouveaux services et produits financiers.

2.2.

Cette proposition s’inscrit dans un premier paquet consacré à la politique industrielle dans le cadre de la stratégie pour le marché unique numérique, annoncé le 19 avril 2016, allant de pair avec un plan financier substantiel de 50 milliards d’euros, destiné à un véritable «passage au numérique de l’industrie européenne», et prévoit «une série de mesures destinées à soutenir et à relier les initiatives nationales favorisant le passage au numérique de l’industrie et des services connexes dans tous les secteurs, ainsi qu’à stimuler l’investissement au moyen de partenariats et réseaux stratégiques».

2.3.

L’initiative sur l’informatique en nuage constitue l’un des engagements les plus importants en vue de donner à l’Europe «un rôle de chef de file au niveau mondial dans l’économie des données». Comme l’a déclaré M. Carlos Moedas, commissaire européen chargé de la recherche, de la science et de l’innovation, ce choix est également une réponse à «l’argumentation de la communauté scientifique en faveur d’une infrastructure au service de la science ouverte. […] Les avantages des données ouvertes seront immenses pour la science, l’économie et la société européennes».

2.4.

Selon la Commission, l’Europe doit répondre à quatre questions:

Comment maximiser le partage de données?

Comment faire en sorte que les données puissent être utilisées aussi largement que possible, dans les différentes disciplines scientifiques et entre les secteurs public et privé?

Comment mieux interconnecter les infrastructures de données existantes et nouvelles dans l’ensemble de l’Europe?

Comment coordonner au mieux les instruments de soutien disponibles pour les infrastructures de données européennes?

2.5.

L’instrument choisi par la Commission est le développement d’un «European Open Science Cloud» (nuage européen pour la science ouverte), un environnement fiable et ouvert permettant à la communauté scientifique de stocker, partager et réutiliser des données et résultats scientifiques. Cet important instrument, qui vise à développer les capacités de calcul, la connectivité et des solutions d’informatique en nuage à haute capacité, reposerait sur une infrastructure européenne de données, reliant initialement la communauté scientifique, et ensuite le secteur public et l’industrie. Tout cela requiert la collaboration ouverte de toutes les parties intéressées à tirer parti de la révolution des données en Europe.

2.6.

La Commission précise que l’initiative sera complétée par des mesures supplémentaires au titre de la stratégie pour un marché unique numérique qui couvre les contrats d’informatique en nuage pour les entreprises utilisatrices et le changement de fournisseurs de services d’informatique en nuage, ainsi que par l’initiative en matière de libre circulation des données.

2.7.

La Commission recense cinq raisons pour lesquelles l’Europe n’exploite pas pleinement le potentiel des données:

le fait que les données provenant de la recherche financée par des fonds publics ne soient pas toujours en accès libre,

le manque d’interopérabilité,

la fragmentation des infrastructures de données et informatiques,

l’absence d’une infrastructure de calcul à haute performance (CHP) de pointe pour le traitement des données,

la nécessité de techniques d’analyse avancées (fouille de textes et de données) dans un environnement fiable.

2.8.

Le nuage européen pour la science ouverte devrait conférer à l’Europe une position de leader mondial des infrastructures de données scientifiques, en mettant à disposition de 1,7 million de chercheurs et 70 millions de professionnels un environnement virtuel offrant des services gratuits. Le développement de cet instrument serait porté par la communauté scientifique et serait également destiné, à terme, à l’éducation et à la formation professionnelle. La définition de normes techniques reconnues permettrait la création d’un environnement de données sûr pour les utilisateurs.

2.9.

En se basant sur les infrastructures existantes, la Commission entend s’appuyer également sur des actions déjà prévues, notamment le libre accès aux publications et aux données scientifiques dans le cadre du programme Horizon 2020. La gouvernance du nuage européen pour la science ouverte sera déterminée à l’issue d’un processus d’élaboration complet, qui est déjà en cours.

2.10.

Les mesures spécifiques prévues pour développer le nuage sont présentées dans la communication comme suit:

faire en sorte que toutes les données scientifiques produites par le programme Horizon 2020 soient ouvertes par défaut,

sensibiliser à cette question et modifier les structures d’incitation,

développer l’interopérabilité et le partage des données,

créer une structure de gouvernance paneuropéenne adéquate,

développer des services d’informatique en nuage pour la science ouverte,

élargir la base d’utilisateurs scientifiques du nuage européen pour la science.

2.11.

La Commission envisage également la mise en place d’une infrastructure européenne de données — dotée d’une capacité de CHP intégrée de classe mondiale qui est nécessaire pour l’Europe — à réaliser à l’échelle exa d’ici 2022 et qui la placerait parmi les trois principaux acteurs du secteur.

2.12.

La Commission estime que l’infrastructure européenne de données contribuera également à assurer la numérisation de l’industrie, la promotion de l’innovation industrielle et le développement de plateformes européennes stratégiques dans la recherche.

2.12.1.

Le calendrier des actions s’étendra de 2016 à 2020.

2.13.

Dans sa communication, la Commission annonce également une initiative phare visant à promouvoir la recherche et le développement des technologies quantiques.

2.14.

Enfin, la Commission entend étendre l’accessibilité et renforcer la confiance entre le secteur public et le monde universitaire, en ouvrant le nuage européen au secteur public.

2.15.

La base d’utilisateurs serait élargie ultérieurement aux services publics, aux PME innovantes et à l’industrie. L’extension de l’initiative aux services publics s’appuiera sur les modèles d’excellence existants, tels que la directive INSPIRE sur l’information géographique et le réseau «Santé en ligne». L’extension à l’industrie s’inspirera d’exemples actuels pour la fourniture d’infrastructures scientifiques clés, tels que Helix-Nebula, EBI-EMBL et PRACE. Pour les PME, la prochaine étape pourrait consister à participer en tant que fournisseurs de solutions innovantes pour le nuage européen pour la science ouverte, comme c’est déjà le cas en ce qui concerne le programme «Horizon 2020».

2.16.

La Commission prévoit différentes sources de financement:

le programme-cadre pour la recherche et l’innovation «Horizon 2020»,

le mécanisme pour l’interconnexion en Europe (MIE),

les Fonds structurels et d’investissement européens,

le Fonds européen pour les investissements stratégiques (FEIS).

2.16.1.

Le montant des investissements publics et privés supplémentaires requis est initialement estimé à 4,7 milliards d’EUR sur une période de 5 ans.

2.17.

Avec le temps, cette initiative permettra de générer des recettes propres, à mesure que la communauté scientifique, les jeunes pousses innovantes et le secteur public y recourront.

3.   Observations générales

3.1.

Le choix de la Commission de s’engager politiquement et économiquement en faveur de l’innovation numérique emporte la pleine adhésion du CESE, particulièrement en ce qui concerne le choix d’une informatique en nuage européenne.

3.1.1.

La stratégie présentée par la Commission est très ambitieuse. En dépit de sa très grande complexité, ses objectifs politiques sont clairement définis. Les faiblesses de l’Europe et les défis auxquels elle est confrontée en ce qui concerne la mise en place des services permettant d’exploiter les mégadonnées produites par la science et les services publics sont identifiés avec précision, ce qui devrait en faire le point de départ de l’ensemble des travaux à réaliser au cours des prochaines années.

3.2.

Depuis 2011 (1) et en diverses occasions, le CESE a formulé une série de recommandations à l’intention de la Commission, pour encourager «l’Europe [à] se positionner en pointe dans ce domaine prometteur, [en] s’appuyant sur des entreprises leader».

3.3.

Il convient cependant de rappeler d’entrée de jeu que la proposition du CESE portait sur un nuage européen destiné à l’ensemble des citoyens et des entreprises. Par ailleurs, le titre de la communication risque d’induire en erreur le lecteur, car il ne précise pas que ce nuage est exclusivement destiné au monde scientifique.

3.4.

Le CESE se félicite de la décision de la Commission et souligne l’importance stratégique des choix posés, tant en ce qui concerne le comblement du retard technologique européen, qu’au regard du progrès économique, social et culturel qui en résultera pour la société européenne. Le nuage au service de la science répond aussi à la nécessité pour la communauté scientifique d’accéder aux données des recherches publiques et de les partager.

3.5.

Le CESE rejoint l’analyse de la Commission quant aux difficultés qui empêchent l’Europe d’exploiter le potentiel des données, notamment en ce qui concerne le manque d’interopérabilité, la fragmentation des structures et leur fermeture à d’autres apports et échanges. Par ailleurs, le CESE réaffirme le besoin d’éducation et de formation pour toutes les classes d’âge de la population européenne et durant toutes les périodes d’activité ou d’inactivité (2). En particulier, le CESE insiste sur la nécessité d’investir dans la formation technologique des femmes et de leur permettre d’accéder aux postes de responsabilité et de décision.

3.6.

Le CESE souscrit aux objectifs et aux mesures énoncées dans la communication et visant à surmonter les divisions entre les réalités nationales, qui empêchent la mise en œuvre d’un véritable marché unique numérique européen. Il convient aussi de prendre en considération la tendance générale à ne plus stocker ses données personnelles et de travail sur son ordinateur mais à utiliser désormais des services informatiques en nuage à caractère public ou commercial. L’initiative de l’informatique en nuage va donc dans la bonne direction.

3.7.

Le Comité juge également positif l’engagement de la Commission en faveur d’actions destinées à élargir l’accessibilité, tout en renforçant la confiance entre le secteur public et les universités, qui sont souvent totalement séparés et ne communiquent pas.

4.   Observations particulières

4.1.

Un certain nombre d’éléments doivent être mieux précisés. Le plan de la Commission semble à la fois très complexe dans ses objectifs, mais général sur certains points fondamentaux.

4.2.

Avant tout, le CESE recommande que les fournitures de matériel et de logiciels nécessaires au nuage européen soient achetées en Europe. Les solutions logicielles sont hautement développées en Europe, et il devrait être possible d’éviter la dépendance technologique à l’égard d’autres régions du monde. En ce qui concerne le matériel, il est prévu qu’au moins un des deux superordinateurs à l’échelle exa soit européen, ce qui constitue un élément positif.

4.3.

Le CESE se dit également préoccupé en ce qui concerne les ressources non seulement financières, mais aussi professionnelles nécessaires à la mise en œuvre et au développement de l’informatique en nuage. Pour exploiter pleinement le potentiel que représentent les mégadonnées pour la croissance économique et l’emploi pour l’Europe, il sera essentiel de disposer de ressources humaines dotées des compétences requises. Le CESE adresse également un appel à la Commission pour qu’elle prenne attentivement en compte les systèmes transfrontaliers d’informatique en nuage qui existent déjà et fonctionnent bien dans certaines communautés scientifiques spécifiques, ainsi que les initiatives nationales poursuivant le même objectif.

4.3.1.

Tout en se félicitant des dispositions prévues par le programme Horizon 2020 et par le financement du projet Edison, qui accélère le processus de création de la profession de «scientifique des données», le CESE souhaite que la Commission, en accord avec les États membres, lance un grand programme de développement de nouvelles professions de haut niveau, qui favorise la création d’emplois qualifiés et le «retour» dans l’Union européenne des jeunes scientifiques travaillant dans d’autres pays. En particulier, il existe un important besoin d’«administrateurs de données» capables d’aider les scientifiques, les entreprises du secteur et les pouvoirs publics à utiliser au mieux et à partager les données recueillies. Ces interventions de la Commission ont un caractère d’urgence absolue et doivent également viser à récupérer les possibilités d’emploi.

4.4.

On observe en outre un manque de clarté en ce qui concerne l’interaction entre l’infrastructure européenne de données proposée, qui devrait également encourager la promotion, le développement et la mise en œuvre de superordinateurs à haute performance (CHP), et l’initiative phare qui l’accompagne et qui vise au renforcement des technologies quantiques. Tout en différant sur certains points, ces deux initiatives sont complémentaires. Alors que la réalisation des superordinateurs à l’échelle exa est prévue à l’horizon 2018, la stratégie pour la technologie quantique en est encore à un stade préparatoire et s’inscrit dans une approche à long terme.

4.5.

La communication est très générale, notamment lorsqu’elle présuppose des mécanismes d’intégration naturelle, grâce au nuage européen pour la science ouverte et à l’infrastructure de données européenne, entre les infrastructures universitaires, les centres de recherche et les institutions publiques. Cette stratégie ne pourra réussir que si elle est suivie par toutes les parties concernées. La sensibilisation et le changement des structures d’incitation destinées aux milieux universitaires, à l’industrie et aux services publics pour le partage des données est une étape nécessaire au développement de l’informatique en nuage pour la science ouverte. En particulier, les communautés au sein desquelles le partage des données est déjà monnaie courante, comme c’est le cas dans de nombreux domaines de la recherche, pourraient jouer un rôle majeur dans la définition des modalités de l’ouverture des données dans le cadre d’un processus ascendant.

4.5.1.

Le CESE accueille favorablement le choix de la Commission de faire du libre accès aux données de recherche l’option par défaut pour tous les nouveaux projets du programme Horizon 2020 à compter de 2017. Le CESE encourage la Commission à examiner les recommandations de 2012 relatives à l’accès aux informations scientifiques et à leur conservation.

4.6.

En outre, il convient de préciser les mécanismes d’élargissement de la base d’utilisateurs promis aux PME innovantes et à l’industrie, par l’intermédiaire de centres de données ainsi que de logiciels d’excellence et de pôles d’innovation en matière de services de données pour les PME.

4.7.

Le CESE appelle de ses vœux une meilleure organisation de la gouvernance du nuage qui, selon la Commission, sera définie à l’issue d’un processus préparatoire approfondi qui est déjà en cours. La communauté scientifique, les entreprises et les citoyens ont le droit de participer à cette gouvernance, et la Commission a le devoir d’indiquer comment et dans quelle mesure. L’utilisation de la plateforme OSPP (plateforme sur la politique en matière de science ouverte) peut représenter un instrument positif à cet égard.

4.8.

Le CESE propose qu’une vaste consultation, associant directement la communauté scientifique et les associations représentatives des intérêts des citoyens, soit lancée sur des questions telles que la gouvernance, l’ouverture progressive à tous, ainsi que les modalités d’utilisation et de conservation des données.

4.9.

En particulier, la Commission devrait donner des informations plus détaillées sur la plateforme administrative de gestion de l’informatique en nuage.

4.10.

Quant au financement, compte tenu du grand nombre d’États où le projet devrait être mis en place, mais également de la conjoncture actuelle, caractérisée par la faible croissance de l’économie européenne, qui rend très difficiles les investissements privés dans une initiative européenne, laquelle n’aurait en fait que des retombées indirectes et secondaires sur le monde de l’industrie et des PME, le CESE estime qu’il s’agit d’une priorité absolue pour l’Europe.

4.11.

Les entreprises ne bénéficieraient en effet des effets positifs de l’informatique en nuage et de l’infrastructure de données qu’après leur mise en œuvre, dans le respect de normes techniques communes qui doivent encore être élaborées et dans un cadre réglementaire qui n’est pas encore consolidé en matière de respect de la vie privée, de cybersécurité et de propriété intellectuelle, que ce soit au niveau de la réglementation européenne ou à celui de la transposition dans la législation des États membres.

4.12.

À cet égard, le CESE propose la création d’un «portail unique de l’Europe numérique», afin de faciliter l’accès des citoyens et des entreprises aux textes de l’Union européenne existants.

Bruxelles, le 21 septembre 2016.

Le président du Comité économique et social européen

Georges DASSIS


(1)  JO C 24 du 28.1.2012, p. 40; JO C 76 du 14.3.2013, p. 59.

(2)  JO C 451 du 16.12.2014 p. 25.


28.12.2016   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 487/92


Avis du Comité économique et social européen sur la «Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — Priorités pour la normalisation en matière de TIC dans le marché unique numérique»

[COM(2016) 176 final]

(2016/C 487/15)

Rapporteur:

M. Gundars STRAUTMANIS

Consultation

Commission européenne, 19.4.2016

Base juridique

Article 304 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne

Compétence

Section «Transports, énergie, infrastructures et société de l’information»

Adoption en section spécialisée

7.9.2016

Adoption en session plénière

21.9.2016

Session plénière no

519

Résultat du vote

(pour/contre/abstentions)

159/1/3

1.   Conclusions et recommandations

1.1.

Le CESE est largement favorable au document élaboré par la Commission, dans la mesure où il fixe un point de départ pour des plans et initiatives qui favoriseront la normalisation des technologies de l’information et de la communication (TIC); il détermine des domaines prioritaires et des activités essentielles, assortis d’un calendrier (feuille de route).

1.2.

Le CESE estime que la normalisation doit aider à augmenter la valeur ajoutée, sécuriser l’emploi dans tous les domaines, et améliorer le niveau de bien-être de la société dans son ensemble. C’est pourquoi il importe tout particulièrement de définir correctement les domaines prioritaires où elle doit s’effectuer, y compris dans le secteur des TIC, afin de résoudre ces questions qui revêtent une telle portée pour la collectivité. On peut dès lors reconnaître que cette communication de la Commission est bien nécessaire et discerner pourquoi l’élaboration de ce document est capitale pour normaliser encore davantage les TIC et, ainsi, développer le marché unique numérique.

1.3.

Le CESE souhaite proposer un certain nombre de recommandations susceptibles d’aider la Commission à continuer d’améliorer les communications et autres documents d’accompagnement qu’elle a établis.

1.3.1.   Recommandation no 1

Le CESE préconise que, dans les futures communications et autres documents s’y rapportant, la Commission éclaire tous les acteurs concernés quant à la nécessité d’adopter une démarche équilibrée en matière de normalisation des TIC: les normes en tant que facteur restrictif par opposition à la créativité.

1.3.2.   Recommandation no 2

Le CESE recommande que des efforts soient consentis afin de créer une impression de cohérence entre les domaines prioritaires en matière de normalisation des TIC, qui ont des dénominations différentes dans la communication de la Commission et le plan glissant annuel de normalisation de ces TIC. Pour créer une impression de cohérence entre les différents documents et l’ensemble des textes liés, il convient d’adopter une terminologie unifiée.

1.3.3.   Recommandation no 3

Compte tenu de l’importance que revêt la détermination des priorités en matière de normalisation des TIC, le CESE prône de fournir de plus amples informations sur les justifications, la méthodologie et les résultats concernant les domaines prioritaires.

1.3.4.   Recommandation no 4

Pour que tous les acteurs intéressés puissent avoir une meilleure compréhension de la mise en œuvre et de la cohérence de la communication de la Commission, le CESE recommande que des informations soient diffusées concernant les activités récurrentes, pour compléter ou poursuivre l’entreprise lancée par ce document.

1.3.5.   Recommandation no 5

Afin de garantir que toutes les parties intéressées puissent être certaines que la Commission, lors de l’élaboration de sa communication, s’est projetée au-delà des questions directement liées aux priorités de normalisation des TIC et a également évalué l’impact de ces priorités sur diverses préoccupations sociales (voir l’article 11 TFUE), le CESE recommande que les futures communications de la Commission contiennent des précisions sur la participation de différentes parties prenantes et sur les conséquences sociales de l’approche mise en œuvre dans le domaine de la normalisation des TIC, qui affectent déjà l’ensemble de la société.

1.4.

Tout en soutenant globalement la communication de la Commission, le CESE suggère néanmoins d’évaluer:

si la communication, dans sa forme, suffit pour atteindre les objectifs énoncés, tels que, par exemple, jouer «un rôle de premier plan», ou s’il pourrait être nécessaire de recourir à des formes permettant plus d’action et plus de détermination,

s’il n’y a pas lieu de réexaminer cette notion de «rôle de premier plan» et s’il ne faut pas que la communication de la Commission mette l’accent sur la coopération avec les organisations mondiales de normalisation, sur une base de partenariat, plutôt que sur les principes de la concurrence, étant donné que grosso modo, nous partageons les mêmes besoins, qui excèdent les frontières de l’Union européenne.

2.   Introduction

2.1.

Le 19 avril 2016, la Commission européenne a adopté sa communication au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions sur les «Priorités pour la normalisation en matière de TIC dans le marché unique numérique» [COM(2016) 176 final].

2.2.

Objectifs de la communication de la Commission:

soutenir et renforcer le rôle de l’Europe dans l’économie numérique mondiale,

mieux adapter l’élaboration des normes TIC aux besoins des actions à mener,

veiller à ce que les normes soient dynamiques, ouvertes, plus étroitement liées à la recherche et à l’innovation.

2.3.

Esprit de la communication de la Commission:

une approche politique et stratégique globale de la normalisation des technologies prioritaires dans le domaine des TIC. La communication expose une approche stratégique et politique globale en matière de normalisation des TIC prioritaires qui jouent un rôle primordial dans l’achèvement du marché unique numérique.

Relever les défis liés à la normalisation dans le domaine des TIC. Pour relever les défis liés à la normalisation en matière de TIC, la Commission a annoncé qu’elle allait lancer «un plan intégré de normalisation afin de recenser et de définir les grandes priorités de normalisation, en mettant l’accent sur les technologies et les domaines jugés d’une importance cruciale pour le marché unique numérique».

2.4.

Contexte de la communication de la Commission:

Normes communes, en tant que base d’un marché unique numérique efficace. Les normes communes garantissent l’interopérabilité des technologies numériques et sont la clé de voûte d’un marché unique numérique efficace. Elles garantissent que les technologies s’imbriquent tout en souplesse et en fiabilité, génèrent des économies d’échelle, stimulent la recherche et l’innovation et préservent l’ouverture des marchés. Des normes nationales divergentes risquent toutefois quant à elles de ralentir considérablement l’innovation et de désavantager les entreprises européennes par rapport au reste du monde,

Règlement (UE) no 1025/2012 relatif à la normalisation européenne  (1). La révision récente de la politique de normalisation de l’Union a conduit à l’adoption du règlement (UE) no 1025/2012 relatif à la normalisation européenne et à la création d’un cadre pour un système européen de normalisation plus transparent et plus efficace pour tous les secteurs industriels. La communication à l’examen se fonde sur le règlement (UE) no 1025/2012 et est liée à l’initiative commune envisagée sur la normalisation, qui s’inscrit dans le cadre de la stratégie globale pour le marché unique [COM(2015) 550 final — «Améliorer le marché unique: de nouvelles opportunités pour les citoyens et les entreprises»].

2.5.

Éléments clés de la communication:

les normes TIC, pierre angulaire du marché unique numérique,

élaborer des normes TIC: un contexte mondial complexe et en mutation rapide,

la réponse de l’Europe: un plan à deux piliers pour définir les priorités et concrétiser l’élaboration de normes TIC en faveur du marché unique numérique,

cinq domaines prioritaires: les composantes de la normalisation en matière de TIC,

une mobilisation à un niveau élevé pour assumer et conserver un rôle de premier plan grâce aux normes.

3.   Vue d’ensemble du texte de la communication de la Commission, et commentaires généraux

3.1.    Les normes TIC, pierre angulaire du marché unique numérique

3.1.1.

Au point 1 de la communication de la Commission, il est indiqué que la transformation de l’économie mondiale en économie numérique est une réalité dans tous les secteurs industriels et secteurs de services. De même, le point 1 aborde des questions générales relatives à la communication telles que:

l’objet de la communication,

la nature de la communication,

le contexte de la communication.

3.2.    Élaborer des normes TIC: un contexte mondial complexe et en mutation rapide

3.2.1.

Au point 2 de la communication de la Commission, il est indiqué que l’élaboration de normes TIC va de pair avec plusieurs nouveaux défis qui appellent une solution ciblée et soutenue à l’échelle de l’Union européenne.

3.2.2.

Il est souligné dans le texte de la communication que ces défis pourraient être notamment une dispersion des ressources disponibles en quantité limitée, une efficacité relativement faible et, plus généralement, un affaiblissement de la capacité d’innovation de l’Europe.

3.3.    La réponse de l’Europe: un plan à deux piliers pour définir les priorités et concrétiser l’élaboration de normes TIC en faveur du marché unique numérique

3.3.1.

Au point 3, la communication de la Commission établit un plan d’action prioritaire pour la prochaine vague de normalisation des technologies dans l’économie numérique.

3.3.2.

Approche proposée par la Commission:

1)

La communication établit la liste des composantes prioritaires pour le marché unique numérique pour lesquelles il est le plus urgent d’améliorer la normalisation en matière de TIC, en précisant les objectifs à atteindre et le calendrier y afférent;

2)

La Commission propose de mettre en place un dispositif politique de haut niveau pour valider, suivre et, le cas échéant, adapter la liste de priorités. Il est prévu que ce dispositif utilise les instruments du système européen de normalisation et fasse appel à une grande variété d’acteurs, tant dans l’Union qu’au niveau international.

3.3.3.

Les deux volets de ce plan prioritaire devront être mis en œuvre ensemble, afin que l’Union devienne un acteur de premier plan dans l’économie numérique mondiale.

3.4.    Cinq domaines prioritaires: les composantes de la normalisation en matière de TIC

3.4.1.

Au point 3.1 de la communication, la Commission recense les cinq domaines prioritaires qui sont les composantes technologiques essentielles du marché unique numérique (l’ordre des domaines énumérés n’est pas important):

l’informatique en nuage (cloud computing),

l’Internet des objets — IdO (Internet of things — IoT),

les communications 5G,

les technologies des (méga)données — (big) data technologies,

la cybersécurité.

3.4.2.

Les domaines prioritaires ont été sélectionnés sur la base de l’avis de la plateforme européenne pluripartite sur la normalisation des TIC, qui rassemble des acteurs de l’industrie, des organismes de normalisation, des administrations publiques et des représentants de la société civile.

3.4.3.

La transformation numérique a d’importantes répercussions sur différents secteurs ainsi que sur les consommateurs. Bon nombre de domaine d’application TIC importants (tels que, par exemple, la santé en ligne, les systèmes de transport intelligents, les solutions énergétiques intelligentes, les systèmes de fabrication avancés, les villes intelligentes, etc.) se fondent directement sur une sélection de cinq priorités de normalisation dans le domaine des TIC.

3.4.4.

Les priorités retenues viendront compléter d’autres instruments de normalisation utilisés pour mettre en œuvre la politique européenne de normalisation. Outre le projet d’initiative commune sur la normalisation européenne, les priorités sélectionnées sont le plan glissant pour la normalisation des TIC et le programme de travail annuel de l’Union.

3.5.    Une mobilisation à un niveau élevé pour assumer et conserver un rôle de premier plan grâce aux normes

3.5.1.

Le point 3.2 de la communication de la Commission énonce que la définition de priorités pour la normalisation en matière de TIC pour les besoins du marché unique numérique ne suffira pas à elle seule. La réussite dépend de l’existence d’une mobilisation à un niveau élevé en faveur du travail de normalisation, de la part d’une large base d’acteurs concernés, notamment des milieux industriels, des organismes de normalisation et de la communauté des chercheurs, ainsi que des institutions de l’Union et des administrations nationales.

3.5.2.

La Commission propose un dispositif de haut niveau pour mener à bien les actions prioritaires. Ce dispositif s’appuiera sur, et complétera, la plateforme européenne pluripartite, le plan glissant pour la normalisation des TIC et le programme de travail annuel de l’Union en matière de normalisation européenne, en tant que mécanisme d’exécution et de diffusion de normes. Dans sa communication, la Commission décrit chaque élément du processus et toutes les activités y afférents.

4.   Observations particulières

4.1.    Équilibre entre la normalisation et la créativité

4.1.1.

Dans l’optique de la communication de la Commission, la normalisation n’est pas un but en soi, mais uniquement un moyen; l’une de ses missions est d’encourager la recherche et l’innovation dans le domaine des TIC.

4.1.2.

Toute norme n’offre pas seulement des possibilités, mais fixe également des cadres et des limitations. Les normes peuvent favoriser le développement, mais également le freiner, en particulier dans les secteurs à développement très rapide, tels que les TIC.

4.1.3.

Au point 2 de la communication, intitulé «Élaborer des normes TIC: un contexte mondial complexe et en mutation rapide», qui traite des problèmes rencontrés dans le processus de normalisation, il est affirmé que: «[…] la complexité croissante résultant de la prolifération des normes et la diversité des communautés techniques participant à leur élaboration peuvent freiner l’innovation».

4.1.4.

Les résultats de la consultation publique (Synopsis report on the public consultation «Standards in the digital single market: setting priorities and ensuring delivery» — Rapport synoptique relatif à la consultation publique sur les «normes applicables au marché unique numérique: fixer les priorités, obtenir des résultats») révèlent les points de vue des groupes d’acteurs concernés, tels que le secteur des TIC. Ce secteur souhaite un processus de normalisation «ascendant».

4.1.5.

Il est clair qu’une instauration trop sévère ou prématurée de normes peut:

restreindre la créativité, ce qui retarderait la mise au point et en œuvre de solutions innovantes,

conduire à une situation dans laquelle les normes ont été élaborées et approuvées, mais où les producteurs accomplissent leurs activités quotidiennes en suivant d’autres «normes» qu’ils ont définies eux-mêmes.

4.1.6.

Cela signifie que, lors du processus de normalisation, il y a lieu d’évaluer attentivement la situation en ce qui concerne la conception, l’adoption et la mise en œuvre de chaque norme et il convient de trouver un équilibre raisonnable entre les normes en tant que facteur de limitation, face à la créativité, à savoir le fait de laisser la possibilité de s’exprimer librement dans la création de nouvelles solutions «hors normes».

4.1.7.   Recommandation no 1

Le CESE préconise que, dans les futures communications et autres documents s’y rapportant, la Commission éclaire tous les acteurs concernés quant à la nécessité d’adopter une démarche équilibrée en matière de normalisation des TIC: les normes pouvant être un facteur restrictif par opposition à la créativité.

4.2.    Incohérences entre les domaines prioritaires dans différents documents sur la normalisation

4.2.1.

Au point 3.1 de sa communication, la Commission présente les cinq domaines prioritaires précédemment mentionnés pour la normalisation des TIC:

l’informatique en nuage (cloud computing),

l’Internet des objets — IdO (Internet of things — IoT),

les communications 5G,

la cybersécurité,

les technologies des (méga)données — (big) data technologies.

4.2.2.

Dans le même temps, la communication fait référence au plan glissant annuel pour la normalisation des TIC. Les différents domaines recensés et décrits dans le plan glissant annuel pour la normalisation des TIC 2016 sont énumérés ci-dessous:

3.5.

Facteurs essentiels et sécurité

95

 

3.5.1.

Informatique en nuage

96

 

3.5.2.

Informations du secteur public, données ouvertes et mégadonnées

101

 

3.5.3.

Administration en ligne

106

 

 

3.5.3.1.

Profil d’application DCAT pour portails de données en Europe

107

 

 

3.5.3.2.

Échange de métadonnées sur les ressources d’interopérabilité réutilisables (administration en ligne)

107

 

 

3.5.3.3.

Vocabulaires de base en vue de faciliter le développement de solutions interopérables

107

 

3.5.4.

Identification électronique et services de confiance, y compris signatures en ligne

109

 

3.5.5.

Identification par radiofréquence (RFID)

112

 

3.5.6.

Internet des objets

114

 

3.5.7.

Sécurité des réseaux et de l’information

120

 

3.5.8.

Vie privée et communications électroniques

124

 

3.5.9.

Infrastructures électroniques pour les données de recherche et la science à forte intensité de calcul

127

 

3.5.10.

Cartographie des infrastructures à large bande

131

 

3.5.11.

Conservation du cinéma numérique

134

4.2.3.

Bien que ces deux documents — la communication de la Commission et le plan glissant pour la normalisation des TIC 2016 — soient liés et complémentaires, ils utilisent une terminologie différente. Aucun des deux documents ne fait le lien entre les domaines de normalisation similaires.

4.2.4.   Recommandation no 2

Le CESE recommande que des efforts soient consentis afin de créer une impression de cohérence entre les domaines prioritaires en matière de normalisation des TIC qui ont des dénominations différentes dans la communication de la Commission et le plan glissant annuel de normalisation de ces TIC. Pour créer une impression de cohérence entre les différents documents et l’ensemble des textes liés, il convient d’adopter une terminologie unifiée.

4.3.    Sélection des priorités en matière de normalisation des TIC

4.3.1.

Au point 3.1 de la communication de la Commission, les cinq domaines prioritaires pour la normalisation des TIC sont énumérés et il est précisé: «Ces domaines ont été sélectionnés sur la base de l’avis de la plateforme européenne pluripartite sur la normalisation des TIC, qui rassemble des acteurs de l’industrie, des organismes de normalisation, des administrations publiques et des représentants de la société civile. Une consultation publique a confirmé l’existence d’un large consensus quant aux priorités exposées dans la présente communication.»

4.3.2.

Une consultation publique a eu lieu du 23 septembre 2015 au 4 janvier 2016. 168 personnes y ont participé. Les résultats de la consultation figurent dans le document intitulé «Synopsis report on the public consultation — Standards in the digital single market: setting priorities and ensuring delivery» (Rapport synoptique relatif à la consultation publique sur les «normes applicables au marché unique numérique: fixer les priorités, obtenir des résultats»).

4.3.3.

Étant donné que les résultats de l’enquête sont pris en compte dans la sélection des domaines prioritaires de la stratégie en matière de TIC qui figurent dans la communication de la Commission et concernent une grande partie des entrepreneurs européens, une participation relativement faible (168 répondants) pourrait nécessiter un complément d’information sur la structure de composition des répondants.

4.3.4.

Des informations sur les groupes de répondants sont disponibles dans le rapport (2).

4.3.5.

Comme on peut le voir, de nombreux répondants appartiennent à différentes organisations de normalisation. Une proportion relativement faible est constituée de développeurs et de producteurs — ceux qui sont attentifs aux besoins du marché, qui déterminent ou suivent les tendances des progrès technologiques et qui ont leurs propres plans de développement. En chiffres absolus, leur nombre est faible.

4.3.6.

Les résultats de la consultation qui figurent dans le document «Rapport synoptique» livrent des informations sur les domaines sélectionnés mais n’indiquent toutefois pas le nombre de domaines effectivement examinés ni en quoi ils consistent (ni les domaines cités dans le plan glissant annuel pour la normalisation des TIC). Ils ne précisent pas non plus les auteurs des choix, ni, au cas où la liste initiale comportait encore d’autres domaines, quels étaient les avis.

4.3.7.   Recommandation no 3

Compte tenu de l’importance que revêt la détermination des priorités en matière de normalisation des TIC, le CESE prône de fournir de plus amples informations sur les justifications, la méthodologie et les résultats concernant les domaines prioritaires.

4.4.    Cycle de vie de la communication

4.4.1.

Dans sa communication, la Commission évoque de nombreux points concrets qui évolueront avec le temps, notamment les domaines prioritaires, les actions clés, les principaux délais et bien d’autres choses. Cela signifie qu’un tel document, en l’occurrence la communication de la Commission, ne saurait être conçu pour le long terme.

4.4.2.

Par conséquent, il convient de prévoir une procédure spécifique, d’application pratique, qui précise comment et à quelle fréquence il y a lieu de procéder à la gestion du cycle de vie régulier du document et de mener les activités qui y sont liées, à savoir déterminer la fréquence avec laquelle le document sera réexaminé, des consultations publiques seront organisées, des décisions seront prises, la planification opérationnelle sera effectuée et d’autres activités seront menées.

4.4.3.   Recommandation no 4

Pour que tous les acteurs intéressés puissent avoir une meilleure compréhension de la mise en œuvre et de la cohérence de la communication de la Commission, le CESE recommande que des informations soient diffusées concernant les activités récurrentes, pour compléter ou poursuivre l’entreprise lancée par ce document.

4.5.    Thématiques insuffisamment couvertes

4.5.1.

La communication de la Commission évoque de nombreux aspects en relation avec le choix des priorités pour la normalisation des TIC, ainsi qu’avec les activités prévues concernant la poursuite de cette action. Toutefois, en parcourant ce texte et les documents connexes, le groupe d’étude du CESE a constaté que plusieurs aspects importants pour la société n’y sont abordés nulle part, ou n’y sont mentionnés qu’incidemment, «au vol».

4.5.2.

Bien que la visée essentielle de la communication de la Commission soit de déterminer les orientations prioritaires pour la normalisation des TIC et les activités qui s’y rapportent, sa mise en œuvre et son application dans la réalité produiront également des effets, directs ou indirects, dans des domaines tels que:

les droits des consommateurs,

l’activité des petites et moyennes entreprises (PME),

l’emploi et sa sécurité,

le temps et les conditions de travail,

les possibilités d’accès aux TIC pour les personnes présentant des besoins particuliers,

la protection de l’environnement,

diverses autres questions en relation avec la dimension sociale.

4.5.3.

Le CESE note que, durant le processus de normalisation, une attention particulière doit être apportée:

à la garantie, à toutes les parties prenantes, de conditions de concurrence équitables,

à l’importance de mettre l’accent sur les questions de normalisation dans les accords de libre-échange bilatéraux conclus par l’Union européenne,

à la manière dont les secteurs d’activité sont délimités,

à ce que les compétences du personnel répondent aux exigences des normes,

aux droits fondamentaux des travailleurs,

à la participation des représentants de la société civile au dialogue.

4.5.4.   Recommandation no 5

Afin de garantir que toutes les parties intéressées puissent être certaines que la Commission, lors de l’élaboration de sa communication, s’est projetée au-delà des questions directement liées aux priorités de normalisation des TIC et a également évalué l’impact de ces priorités sur diverses préoccupations sociales (voir l’article 11 TFUE), le CESE recommande que les futures communications de la Commission contiennent des précisions plus spécifiques sur la participation de différentes parties prenantes et sur les conséquences sociales de l’approche mise en œuvre dans le domaine de la normalisation des TIC, qui affectent déjà l’ensemble de la société.

Bruxelles, le 21 septembre 2016.

Le président du Comité économique et social européen

Georges DASSIS


(1)  JO L 316 du 14.11.2012, p. 12.

(2)  http://ec.europa.eu/information_society/newsroom/image/document/2016-17/synopsis_report_on_the_public_consultation_-_standards_in_the_digital_single_market_setting_priorities_and_ensuring_delivery_15264.pdf


28.12.2016   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 487/99


Avis du Comité économique et social européen sur la «Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions: Plan d’action européen 2016-2020 pour l’administration en ligne — Accélérer la mutation numérique des administrations publiques»

[COM(2016) 179 final]

(2016/C 487/16)

Rapporteur:

Raymond HENCKS

Consultation

Commission européenne, 19.4.2016

Base juridique

Article 304 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne

Compétence

Section spécialisée «Transports, énergie, infrastructures et société de l’information»

Adoption en section spécialisée

7.9.2016

Adoption en session plénière

22.9.2016

Session plénière no

519

Résultat du vote

(pour/contre/abstentions)

162/1/3

1.   Conclusions et recommandations

1.1.

L’objectif de l’Union européenne de disposer d’ici 2020 d’une administration en ligne fournissant des services numériques qui soient de bout en bout conviviaux, personnalisés et sans frontières ne semble guère réalisable au rythme actuel de mise en œuvre des plans d’action successifs afférents dans un grand nombre d’États membres.

1.2.

Le Comité économique et social européen (CESE) soutient les propositions du 3e plan d’action européen (2016-2020) visant à accélérer la mise en œuvre d’une administration en ligne efficace, interopérable et universellement accessible.

1.3.

Une administration en ligne ne pourra fonctionner que si d’autres prérequis sont remplis, tels que la mise à disposition d’un réseau et de services numériques performants, un accès universel à un prix abordable et une formation numérique adéquate des usagers à tous les niveaux et à tous les âges. Même si à moyen ou long terme, l’administration en ligne est censée devenir le moyen de communication par défaut, il y a lieu de maintenir pour les citoyens qui le désirent les moyens traditionnels de communication (envois postaux, contacts personnels, téléphone) avec l’administration publique.

1.4.

En ce qui concerne les droits des usagers de l’administration en ligne, notamment les droits en matière d’accès et de non-discrimination, de liberté d’expression et d’information, de protection de la vie privée et des données personnelles, d’éducation et de connaissances générales à partir de l’enseignement scolaire jusqu’à la formation tout au long de la vie, de voies de recours, etc., le CESE propose à la Commission de recueillir, sur un seul site, l’ensemble des droits des usagers en matière d’administration en ligne.

1.5.

Le CESE approuve les sept principes sur lesquels se base la proposition de la Commission, mais doute que certains d’eux puissent être mis en œuvre sans que les problèmes juridiques et technologiques afférents soient résolus.

1.6.

Pour ce qui est du principe «une fois pour toutes», selon lequel les particuliers et les entreprises ne devraient pas avoir à fournir plus d’une fois les mêmes informations aux administrations, le CESE constate que des problèmes juridiques et organisationnels restent irrésolus et invite la Commission à lancer une expérience pilote en la matière. Il propose également de prévoir le principe de «l’approche à l’ensemble de l’échelle de l’administration», qui consiste en une collaboration entre les différents organismes publics au-delà des limites de leur domaine de compétence respectif pour fournir au demandeur une réponse intégrée par une seule instance.

1.7.

Le CESE regrette également que le principe d’«actualisation permanente», qui consiste à renouveler les systèmes et technologies informatiques dans les administrations publiques afin qu’ils soient toujours en phase avec l’évolution technologique, ne figure pas parmi les principes retenus.

1.8.

Il insiste pour que, dans le cadre du principe d’«ouverture et transparence», les citoyens et entreprises disposent explicitement d’un droit de contrôler la transmission de leurs données personnelles à d’autres administrations publiques et, le cas échéant, de les faire supprimer (droit à l’oubli), dans le respect des législations et procédures afférentes et demande de soumettre une proposition d’un système sécurisé européen d’archivage et d’échange en ligne des documents.

1.9.

Comme de nombreux citoyens ont besoin de se familiariser avec le nouvel outil de l’administration en ligne, le CESE estime que les États membres et leurs collectivités régionales et locales devraient offrir aux citoyens des formations aux compétences numériques et être invités à créer un service numérique assisté ou un accompagnement de proximité cofinancés par des fonds européens. Les agents des administrations publiques sont également concernés dans le cadre de la formation professionnelle continue.

1.10.

Le CESE regrette vivement que le plan d’action reste totalement muet sur les implications et les conséquences sociales de l’administration en ligne, de même que sur les répercussions pour l’emploi, tant en ce qui concerne les pertes d’emplois que les nombreux emplois vacants faute de candidats pouvant se prévaloir des qualifications professionnelles numériques requises. Dans le cadre d’un redéploiement des emplois, libérés par le passage de l’administration publique au numérique, les agents dont les postes tombent en économie devraient être affectés au service numérique assisté ou être réorientés vers des tâches professionnelles adéquates.

2.   Introduction

2.1.

Le plan d’action européen 2011-2015 pour l’administration en ligne («Exploiter les TIC pour promouvoir une administration en ligne intelligente, durable et innovante») (1) est arrivé à échéance en décembre 2015.

2.2.

Néanmoins l’administration en ligne reste un des grands chantiers de l’agenda numérique et une des principales initiatives, à l’échelle de l’Union européenne et des États membres, nécessaires à l’achèvement d’un «marché unique numérique».

2.3.

De nombreuses initiatives prévues dans le plan d’action venu à échéance n’ont pas encore été toutes dûment mises en œuvre dans de nombreux États membres et doivent être reconduites dans le nouveau plan d’action pour l’administration en ligne pour la période 2016-2020.

2.4.

Les administrations publiques devront dès lors améliorer la conception de leurs services en ligne, en l’axant davantage sur les besoins des usagers afin d’assurer un fonctionnement des services d’administration en ligne efficaces et efficients par-delà les frontières nationales.

3.   Contenu de la communication

3.1.

Le nouveau plan d’action, qui met l’accent sur l’accélération de la mutation numérique, est censé servir de catalyseur et devra permettre de coordonner les efforts et les ressources destinés à la modernisation du secteur public dans le domaine de l’administration en ligne.

3.2.

Il se compose de 20 actions, qui ne se veulent toutefois pas exhaustives et qui pourront être complétées, au fur et à mesure de l’évolution d’un environnement en rapide mutation, par d’autres mesures, proposées soit par la Commission, soit par les parties intéressées.

3.3.

Les initiatives qui seront lancées dans le cadre du nouveau plan d’action devront respecter les principes sous-jacents suivants:

le numérique par défaut: les services par voie électronique devraient devenir la règle générale, tout en conservant d’autres canaux de communication au bénéfice de ceux qui, par choix ou par force, sont hors connexion. En outre, les services publics devraient être fournis par l’intermédiaire d’un point de contact unique ou d’un guichet unique et par différents canaux,

le principe d’«une fois pour toutes»: selon ce principe, les particuliers et les entreprises ne devraient pas avoir à fournir plus d’une fois les mêmes informations aux administrations,

le caractère inclusif et accessibilité: les administrations publiques devraient concevoir des services publics numériques qui sont inclusifs par défaut et qui répondent à divers types de besoins, tels que ceux des personnes âgées ou handicapées,

l’ouverture et la transparence: les administrations publiques devraient partager les informations et les données et permettre aux citoyens et aux entreprises d’accéder à leurs propres données, de les contrôler et de les rectifier; permettre aux utilisateurs de suivre les procédures administratives qui les concernent; et dialoguer, dans un esprit d’ouverture, avec les parties intéressées (entreprises, chercheurs et organisations à but non lucratif) en ce qui concerne la conception et la fourniture des services.

un service transfrontière par défaut: les administrations publiques devraient faire en sorte que les services publics numériques pertinents soient disponibles au-delà des frontières et éviter tout morcellement supplémentaire, afin de faciliter la mobilité dans le marché unique.

l’interopérabilité par défaut: les services publics devraient être conçus de manière à pouvoir fonctionner en continu dans l’ensemble du marché unique, indépendamment des cloisonnements opérationnels, en se fondant sur la libre circulation des données et des services numériques dans l’Union européenne.

la fiabilité et la sécurité: toutes les initiatives devraient aller au-delà du simple respect du cadre juridique applicable à la protection des données à caractère personnel et de la vie privée, ainsi qu’à la sécurité informatique, en intégrant ces éléments dès la phase de conception.

4.   Remarques générales

4.1.

Le CESE soutient la Commission dans ses démarches visant à accélérer le développement et l’utilisation de services d’administration en ligne. Depuis le premier plan d’action pour l’administration en ligne de 2006, les États membres se sont engagés à promouvoir des services d’administration en ligne efficaces, efficients, interopérables et universellement accessibles, y compris des services en ligne par-delà les frontières nationales. Ces engagements ont été confirmés dans la cadre de la stratégie pour un marché unique numérique à l’horizon 2020.

4.2.

Force est toutefois de constater que malgré certains progrès réalisés, tels qu’ils ressortent des évaluations du plan d’action 2011-2015, et malgré de substantiels moyens financiers communautaires mis à disposition, mais peu utilisés par les États membres, les usagers se voient toujours confrontés, à des degrés très variables selon les États membres, à un morcellement dans la modernisation des administrations publiques des États membres, et à une offre insuffisante de services transnationaux en ligne. Le CESE s’interroge sur les raisons pour lesquelles les fonds de l’Union européenne mis à disposition restent largement sous-utilisés et demande à la Commission de faire une analyse en la matière, d’éliminer les éventuelles barrières et d’inciter les États membres à utiliser ces fonds de manière efficace et efficiente, notamment en matière d’administration en ligne.

4.3.

L’administration en ligne est un des éléments clés de la stratégie pour un marché unique numérique. Il reste que d’autres éléments clés du numérique, qui ne sont pas traités dans la présente communication, constituent un prérequis pour une mise en œuvre d’une administration en ligne. Ainsi, il est évident que des réseaux et services numériques, à la pointe du progrès, doivent être à la disposition des citoyens de tous les âges et des entreprises, et que ceux-ci puissent y avoir un accès universel à un prix abordable, quelle que soit leur situation géographique ou financière et qu’ils puissent, le cas échéant, bénéficier d’une assistance et d’une formation pour s’approprier les compétences requises pour profiter des applications numériques de manière efficace et responsable.

4.4.

Un autre élément clé est celui des droits des usagers de l’administration en ligne qui, en premier lieu, relèvent des droits de l’homme et des libertés fondamentales s’appliquant aux usagers de l’internet, notamment les droits en matière d’accès et de non-discrimination, de liberté d’expression et d’information, de protection de la vie privée et des données personnelles, d’éducation et de connaissances générales à partir de l’enseignement scolaire jusqu’à la formation tout au long de la vie, de voies de recours, etc. S’y ajoutent des droits spécifiques en relation directe avec l’administration en ligne. Au vu des sources différentes des droits dont bénéficient les usagers de l’administration en ligne, le CESE propose à la Commission de recueillir dans un seul site l’ensemble des droits des usagers en matière d’administration en ligne.

4.5.

Vu qu’il est souvent difficile pour les utilisateurs de trouver les informations et l’assistance électroniques dont ils ont besoin, la Commission propose, tant au niveau de l’Union qu’au niveau national, la création d’un guichet/portail numérique unique. De tels portails fonctionnent d’ores et déjà dans la majeure partie des États membres et collectivités régionales et locales. Le CESE soutient de ses vœux la création d’un tel point d’accès à l’administration publique centrale nationale, territoriale ou communale afin de rediriger les usagers directement auprès des instances compétentes pour traiter leurs demandes ou desiderata.

4.6.

Le plan d’action 2016-2020 se base sur sept principes qui, en grande partie, prévalaient déjà pour les plans d’action antérieurs. Si, en règle générale, le CESE approuve lesdits principes, il se demande toutefois comment les mettre en œuvre avant d’avoir réglé à l’avance tous les problèmes juridiques (gestion des données personnelles et protection de la vie privée dans un contexte d’administration ouverte) et technologiques (technologies génériques et industrielles, migration des services vers les canaux numériques) afférents.

4.7.

Le nouveau plan d’action met l’accent sur l’interopérabilité et la réutilisation des données en possession des administrations publiques sachant que beaucoup de données récoltées aujourd’hui par l’administration publique ont une finalité unique ou très limitée. Dans le cadre du principe «une fois pour toutes», les usagers n’auront plus à réintroduire leurs données courantes lors de nouveaux contacts avec l’administration publique, qui pourra les partager avec les autres administrations, évidemment dans le respect de la protection des données à caractère personnel et de la protection de la vie privée. Conformément à ce principe, les registres du commerce dans toute l’Union devraient être connectés, les différents systèmes nationaux et transfrontaliers devraient travailler les uns avec les autres, et les administrations n’auraient plus à redemander, à de multiples reprises, des informations dont elles disposent déjà. Même si en matière d’administration en ligne le règlement sur la protection des données reste applicable, le CESE estime qu’il y a lieu de veiller à un équilibre entre le contrôle d’un État de droit et la sécurité et la liberté des citoyens.

4.8.

La nouvelle approche de la Commission entend rester en prise avec un environnement en mutation rapide. Or, le CESE note que le principe d’«actualisation permanente», qui consiste à renouveler les systèmes et technologies informatiques dans les administrations publiques afin qu’ils soient toujours en phase avec l’évolution technologique, ne figure pas parmi les sept principes retenus, dans l’attente qu’il soit testé par la Commission en vue d’une éventuelle mise en œuvre.

4.9.

Selon ses dires, la Commission veut mettre l’accent sur l’implication des citoyens dans l’élaboration des services publics numériques et, dans le cadre du principe «ouverture et transparence», invite les administrations publiques à dialoguer avec les citoyens, entreprises, représentants des partenaires sociaux et des consommateurs, chercheurs et organismes à but non lucratifs en ce qui concerne la conception et la fourniture des services.

4.10.

Les citoyens pourront dès lors faire des propositions et adresser directement leurs demandes spécifiques à la Commission et aux États membres via une «plateforme collaborative» qui mettra en réseau citoyens et autorités et permettra d’identifier des problèmes similaires au sein de différents pays, ainsi que des bonnes pratiques et des solutions de mise en œuvre par les administrations. Le CESE soutient de ses vœux une telle initiative qui permettra à tout un chacun de faire remonter vers les autorités nationales, territoriales ou locales des problèmes rencontrés dans son environnement.

4.11.

Le principe d’«ouverture et transparence» prévoit que les administrations publiques partagent les informations et les données et permettent aux citoyens et aux entreprises d’accéder à leurs propres données, de les contrôler et de les rectifier. Pour ce qui est de leurs données à caractère personnel, le CESE insiste pour que les citoyens et entreprises disposent explicitement d’un droit de contrôler la transmission de leurs données personnelles à d’autres administrations publiques et, le cas échéant, de les faire supprimer (droit à l’oubli) dans le respect des législations et procédures afférentes.

4.12.

Le CESE estime que dans ce contexte, et afin d’éviter de nouvelles incompatibilités, la Commission devrait soumettre une proposition d’un système sécurisé européen d’archivage et d’échange en ligne des documents.

4.13.

Un principe que le plan d’action n’évoque pas, est celui de «l’approche à l’ensemble de l’échelle de l’administration», qui consiste en une collaboration entre les différents organismes publics au-delà des limites de leur domaine de compétence pour fournir au demandeur une réponse intégrée par une seule instance.

4.14.

«Le CESE demande à la Commission d’accélérer la mise en place de «guichets uniques» traitant de l’e-Justice, du domaine maritime, et des autres modes de transport. La future stratégie devrait viser à regrouper, dans la mesure du possible, des portails européens existants (type eJustice, solvit, youreurope, etc.) en un portail unique et surtout, dans un second temps, à l’étendre aux portails nationaux pour faciliter toutes sortes de démarches administratives.

4.15.

Si le CESE approuve l’idée que, pour faire évoluer leurs services en ligne, les États membres et leurs collectivités régionales et locales doivent se tourner à l’avenir vers ces portails, il souligne que ceux-ci devront rester complémentaires des points d’accueil physiques et des moyens de communication traditionnels (envois postaux, échanges face à face dans un guichet, téléphone).

4.16.

L’organisation des Nations unies se sert d’un indice de développement à trois critères pour déterminer quels sont les pays où l’administration en ligne est le plus développée: les services en ligne consacrés aux citoyens, les infrastructures de télécommunication, ainsi que le capital humain. Force est de constater que le plan d’action reste totalement muet sur les implications et les conséquences sociales de l’administration en ligne, de même que sur les répercussions pour l’emploi, tant ce qui concerne les pertes d’emploi que les nombreux emplois vacants faute de candidats pouvant se prévaloir des qualifications professionnelles numériques requises.

4.17.

Le fait d’offrir des services en ligne par défaut ne saurait dispenser de continuer de lutter contre la fracture numérique.

4.18.

Il subsiste d’importantes disparités entre, d’une part, l’offre de services d’administration en ligne et, d’autre part, l’utilisation et l’adoption de ces services par les usagers. Cette réticence des usagers à profiter des services en ligne s’explique souvent par un manque de compétences numériques. De nombreux citoyens ont besoin de se familiariser avec le nouvel outil de l’administration en ligne et d’un «service numérique assisté» ou d’un accompagnement de proximité. Ceci vaut au même titre pour les agents des administrations publiques dans le cadre de la formation professionnelle continue.

4.19.

Le CESE estime que les États membres et leurs collectivités régionales et locales devraient être invités à créer un tel service d’assistance numérique aux citoyens, cofinancés par des fonds européens. Dans le cadre d’un redéploiement des emplois libérés par le passage de l’administration publique au numérique les agents dont les postes tombent en économie devraient être affectés au service numérique assisté ou être réorientés vers des tâches professionnelles adéquates.

Bruxelles, le 22 septembre 2016.

Le président du Comité économique et social européen

Georges DASSIS


(1)  COM(2010) 743 final et COM(2010) 744 final.


28.12.2016   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 487/104


Avis du Comité économique et social européen sur la «Communication de la Commission — Programme indicatif nucléaire, présenté en application de l’article 40 du traité Euratom pour avis au Comité économique et social»

[COM(2016) 177 final]

(2016/C 487/17)

Rapporteur:

M. Brian CURTIS

Consultation

Commission européenne, le 4.4.2016

Base juridique

Article 40 du traité Euratom

Compétence

Transports, énergie, infrastructures et société de l’information

Adoption en section spécialisée

7.9.2016

Adoption en session plénière

22.9.2016

Session plénière no

519

Résultat du vote

(pour/contre/abstentions)

210/2/11

1.   Conclusions et recommandations

1.1.

De nombreuses révisions et initiatives législatives visant à soutenir le développement du programme pour l’union de l’énergie sont actuellement en cours d’élaboration et seront présentées dans les douze mois à venir. L’on aurait pu s’attendre à ce que la réflexion stratégique à l’examen mette en exergue les principaux enjeux pour la production d’énergie nucléaire, la recherche et le déclassement, et apporte ainsi une contribution à ce vaste paquet législatif. Toutefois, le PINC (programme indicatif nucléaire) ne propose pas d’approche claire et globale s’agissant de la réponse stratégique qui peut être apportée à l’avenir complexe de l’énergie nucléaire dans le futur bouquet énergétique européen.

1.2.

La production d’énergie nucléaire est une question politiquement délicate dans la plupart des États membres. Elle est influencée au niveau national par la fluctuation de facteurs sociaux et économiques. Le Comité demande instamment à la Commission de saisir cette occasion pour proposer un processus et une méthodologie analytiques clairs, susceptibles de fournir un cadre volontaire et cohérent pour la prise de décision nationale concernant — le cas échéant — le rôle de l’énergie nucléaire dans le bouquet énergétique.

1.3.

Le Comité économique et social européen (CESE) invite donc à réviser et à compléter le projet de communication, conformément aux recommandations détaillées au paragraphe 4.3, afin qu’il comporte des sections portant spécifiquement sur:

la compétitivité de l’énergie nucléaire à court, moyen et long terme,

les aspects économiques connexes,

la contribution à la sécurité d’approvisionnement,

les objectifs en matière de changement climatique et de réduction des émissions de carbone,

l’acceptabilité pour le public, la responsabilité pour les dommages nucléaires, la transparence et un dialogue efficace au niveau national.

1.4.

Il est indispensable d’assurer un suivi transparent, tant du point de vue de la sûreté nucléaire que de celui de la confiance du public. Le Comité propose dès lors que le document approuve clairement les propositions relatives au suivi et à l’élaboration de rapports sur les plans d’action nationaux des États membres, comme l’a suggéré le groupe des régulateurs européens dans le domaine de la sûreté nucléaire. Il conviendrait de redoubler d’efforts pour inclure des pays voisins non membres de l’Union européenne.

1.5.

Toujours en relation avec la confiance du public, il convient de faire davantage référence au travail intensif de préparation hors site et transfrontalière aux situations d’urgence [Review of Current Off-site Nuclear Emergency Preparedness and Response Arrangements in EU Member States and Neighbouring Countries (Analyse des dispositions hors centrale en vigueur en matière de préparation et de réaction aux situations d’urgence nucléaire dans les États membres de l’Union européenne et les pays voisins), Euratom, décembre 2013], ainsi qu’aux conclusions du sommet sur la sécurité nucléaire de 2016, notamment en ce qui concerne d’éventuelles menaces terroristes.

1.6.

Compte tenu de l’engagement important de l’Union européenne en faveur de la recherche sur la production d’électricité par la fusion nucléaire, il serait utile d’inclure une feuille de route illustrant les progrès réalisés vers la production commerciale.

1.7.

Au vu de la décision de quitter l’Union européenne que les Britanniques ont exprimée par vote, il convient de se pencher sur l’incidence stratégique d’une telle mesure, et notamment sur ses implications pour le traité Euratom. La nécessité d’une réflexion sur les conséquences d’une telle initiative, qui pourraient être considérables, devrait être explicitement reconnue dans le programme indicatif nucléaire.

2.   Introduction

2.1.

Conformément à l’article 40 du traité Euratom, la Commission européenne «publie périodiquement des programmes de caractère indicatif portant notamment sur des objectifs de production d’énergie nucléaire et sur les investissements de toute nature qu’implique leur réalisation. La Commission demande l’avis du Comité économique et social sur ces programmes, préalablement à leur publication» [COM(2003) 370 final]. Depuis 1958, cinq programmes indicatifs nucléaires (PINC) de ce type ont été publiés, dont le dernier en 2007, suivi d’une mise à jour en 2008. La version finale du document à l’examen sera élaborée et publiée dès que la Commission aura reçu l’avis du CESE.

2.2.

Le Comité apprécie, comme par le passé, la possibilité qui lui est offerte de donner son avis sur le projet de document avant que la Commission n’en présente une version finale au Conseil et au Parlement européen. Le CESE demande à la Commission, dans les termes les plus insistants, d’incorporer les recommandations exposées dans la première partie du présent avis, de manière à renforcer la nature globale et stratégique du PINC et à s’assurer qu’il apportera une contribution plus importante au paquet «Union de l’énergie».

2.3.

L’énergie nucléaire est l’une des principales sources d’énergie au sein de l’Union européenne. Le rapport relatif à l’état de l’union de l’énergie 2015 note que «l’Union européenne est l’un des trois seuls grands ensembles économiques mondiaux qui produisent plus de la moitié de leur électricité sans émissions de gaz à effet de serre […] 27 % de l’électricité produite dans l’Union européenne provient de sources d’énergie renouvelables, avec un pourcentage équivalent pour l’énergie nucléaire». Ce rapport indique également que le PINC «devrait clarifier les besoins en investissements à long terme dans le nucléaire et la gestion du passif nucléaire» [COM(2015) 572 final].

2.4.

La stratégie énergétique de l’Union européenne a connu des évolutions considérables depuis la publication du dernier PINC et constitue actuellement une priorité absolue. Les objectifs pour 2020, 2030 et 2050 sont en place mais des variables et des incertitudes importantes subsistent. Il s’agit notamment de la mesure dans laquelle l’accord de Paris sur le changement climatique sera mis en œuvre, de la volatilité du marché international des combustibles fossiles, de la cadence à laquelle les nouvelles technologies seront appliquées, de la question de savoir quels pays seront membres de l’Union européenne, de l’influence des perspectives économiques mondiales et de l’ampleur avec laquelle les investissements massifs prévus dans l’ensemble de la chaîne énergétique se concrétiseront.

2.5.

Indépendamment de la politique énergétique de l’Union européenne, les décisions clés concernant le bouquet des sources énergétiques en vue de la production d’énergie demeurent la prérogative des États membres. La politique énergétique de l’Union européenne peut servir de référence pour ce type de décisions mais l’énergie reste une question éminemment politique et, dès lors, sensible aux variations du climat politique et social qui prévaut à l’échelon national. L’élaboration des politiques de l’Union requiert un processus analytique clair et une méthodologie susceptible de fournir un cadre cohérent pour la prise de décision nationale. Le PINC offre potentiellement cette possibilité pour les États membres qui envisagent l’énergie nucléaire ainsi que pour ceux qui disposent déjà de centrales nucléaires et évaluent l’avenir de cette source d’énergie.

3.   Contenu essentiel de la communication de la Commission

3.1.

La communication de la Commission affirme d’entrée de jeu que «le PINC constitue une base de discussion sur la façon dont l’énergie nucléaire peut contribuer à la réalisation des objectifs énergétiques de l’Union européenne», et conclut: «Technologie à faibles émissions de carbone et facteur important de sécurité d’approvisionnement et de diversification des ressources, l’énergie nucléaire devrait rester une composante importante du bouquet énergétique de l’Union européenne à l’horizon 2050».

3.2.

La communication met l’accent sur les investissements liés aux mises à niveau à la suite de l’accident de Fukushima et à l’exploitation sûre des installations existantes. Elle insiste en outre sur les besoins de financement estimés pour ce qui concerne le déclassement des centrales nucléaires et la gestion des déchets radioactifs et des combustibles utilisés.

3.3.

À l’heure actuelle, 129 réacteurs nucléaires sont exploités dans 14 États membres. Dix de ces États membres envisagent la construction de nouveaux réacteurs. L’Union européenne dispose des normes juridiquement contraignantes les plus avancées au monde en matière de sûreté nucléaire. Ces normes sont maintenues et mises à jour grâce à une révision régulière de la directive sur la sûreté nucléaire (1).

3.4.

L’industrie nucléaire européenne opère sur un marché mondial d’une valeur de 3 billions d’EUR jusqu’en 2050 et est un leader technologique qui emploie directement entre 400 000 et 500 000 personnes et favorise l’existence de 400 000 emplois supplémentaires.

3.5.

La part des entreprises européennes dans la production mondiale de combustible nucléaire est considérable. Elles coopèrent étroitement avec l’Agence d’approvisionnement d’Euratom, qui satisfait aux besoins des réacteurs de conception occidentale de l’Union européenne et dispose de la capacité de développer des assemblages combustibles pour les réacteurs de conception russe (il en existe 19 actuellement en service au sein de l’Union européenne).

3.6.

La Commission prévoit une réduction de la capacité de production nucléaire actuelle de l’Union européenne (120 GWe) jusqu’en 2025, cette tendance s’inversant avant 2030. La capacité nucléaire resterait stable entre 95 et 105 GWe d’ici à 2050, dans l’hypothèse où 90 % du parc nucléaire existant serait remplacé dans ce laps de temps. L’investissement estimé varie entre 350 et 450 milliards d’EUR pour assurer la production jusqu’à la fin du siècle.

3.7.

Les dépassements de coûts et les longs retards dans le cadre de nouveaux projets, de même que les approches divergentes adoptées par les organismes d’agrément nationaux, ont créé des difficultés d’investissement. La normalisation de la conception et une coopération renforcée entre autorités nationales de régulation sont considérées comme des éléments fondamentaux de la future politique.

3.8.

Des programmes visant à prolonger (de 10 à 20 ans) la durée de vie de nombreux réacteurs européens sont en cours d’élaboration, avec un coût estimé de 45 à 50 milliards d’EUR, et il y a lieu d’anticiper et de planifier la charge de travail réglementaire connexe, en conformité avec la directive révisée sur la sûreté nucléaire.

3.9.

Cinquante réacteurs devraient être fermés d’ici 2025. Nonobstant la nature politiquement sensible de cette question, les États membres devront prendre rapidement les décisions que requièrent l’action et l’investissement en matière de stockage géologique et de gestion à long terme des déchets radioactifs, ainsi que les questions de déclassement qui y sont liées.

3.10.

Une expertise considérable existe dans le domaine de l’entreposage et du stockage des déchets de faible et moyenne activité et, s’agissant des déchets de haute activité, des sites de stockage définitif en couches géologiques profondes deviendront opérationnels en Finlande, en Suède et en France entre 2020 et 2030. Le potentiel de partage de cette expertise et la possibilité de convenir du développement d’installations de stockage conjointes entre les États membres apporteront à la fois des gains d’efficacité et des avantages du point de vue de la sécurité. Ils seront encore renforcés par la création d’un centre européen d’excellence.

3.11.

Les exploitants d’installations nucléaires estiment que 253 milliards d’EUR, dont 133 milliards d’EUR de fonds spécifiques identifiés, seront nécessaires pour faire face aux coûts de déclassement. Les États membres ont la responsabilité de garantir que les opérateurs honorent pleinement leurs obligations et que le déclassement se déroule selon un calendrier clair.

3.12.

Une coordination accrue est nécessaire au niveau du développement technique et de la commercialisation des utilisations de la technologie des rayonnements non liées à la production d’énergie. Par exemple, le marché des équipements d’imagerie médicale en Europe représente à lui seul 20 milliards d’EUR par an et cette technologie est de plus en plus utilisée dans l’agriculture, l’industrie et la recherche. Des investissements considérables dans la recherche se poursuivent, tant dans le domaine des centrales de nouvelle génération et à fission modulaire que pour préserver le rôle prépondérant que joue l’Europe dans la recherche en matière de fusion; ils sont considérés comme essentiels pour maintenir son expertise, ses carrières et son influence mondiale. Cet aspect est particulièrement important étant donné que l’énergie nucléaire continue à progresser dans le monde, même si ce n’est pas le cas en Europe.

4.   Observations générales

4.1.

Le Comité s’est régulièrement prononcé sur la sûreté et le rôle de l’énergie nucléaire dans le bouquet énergétique de l’Union européenne (2). La communication à l’examen est la première révision indicative sur le nucléaire émanant de la Commission depuis Fukushima et, bien que le précédent PINC ait promis d’«accroître la fréquence de publication des programmes indicatifs nucléaires» [COM(2007) 565 final], il n’en a rien été. Le PINC de 2016 — bien qu’assorti d’un document de travail détaillé — est deux fois moins long que la communication de 2007. Le Comité suggère d’enrichir le PINC de certains éléments afin de disposer d’un document stratégique dans lequel sont examinés les facteurs contextuels qui façonnent les décisions en matière d’investissement et de définition des objectifs.

4.2.

Le Comité se félicite de l’analyse approfondie de l’investissement dans l’ensemble du cycle du combustible nucléaire que fournit le PINC, et reconnaît qu’il définit à la fois les défis auxquels le secteur est confronté et les perspectives qui s’ouvrent à lui. L’accent mis sur les normes de sécurité les plus élevées et la nécessité d’assurer un financement complet pour tous les aspects du déclassement est également apprécié. Le document de travail fournit une foule de détails et il prend note également de l’importance accordée à la poursuite de la recherche. Toutefois, dans d’autres domaines, de nombreuses questions n’ont pas été abordées, ce qui affaiblit la valeur stratégique du document.

4.3.

Le projet de PINC 2016 annonce un changement d’approche significatif de la part de la Commission. Les PINC précédents avaient placé la révision dans le contexte des enjeux énergétiques qui se posaient à l’Union européenne et à la communauté internationale. Par exemple, le PINC 2007 comprenait des sections non reprises en 2016, qui offraient une réelle perspective stratégique. Celles-ci devraient être ajoutées à la proposition à l’examen et couvrir les questions suivantes:

la compétitivité: présentation des facteurs actuels et futurs ayant une incidence sur la compétitivité de l’énergie nucléaire, tels que le rôle des aides d’État, notamment financières et fiscales, l’évolution des perspectives concernant les coûts de construction, le coût en capital, le stockage des déchets, les procédures d’autorisation, la prolongation de la durée d’exploitation et les coûts relatifs des autres sources d’énergie,

les aspects économiques: la structure du marché de l’énergie demeure incertaine, ce qui décourage l’investissement à long terme, et les risques économiques inhérents à l’énergie nucléaire sont significatifs en période d’incertitude financière et politique,

la sécurité d’approvisionnement: la demande énergétique est en progression constante à l’échelle mondiale, même si elle s’est stabilisée ou a diminué en Europe, et il convient de prêter une plus grande attention à ce que cette évolution implique et aux considérations d’ordre politique et de politique étrangère. La sécurité énergétique, en particulier, est un domaine qui peut bénéficier de la contribution de l’énergie nucléaire, et qui en bénéficie d’ailleurs, les sources d’approvisionnement en combustible (uranium) semblant à présent plus sûres que celles du pétrole ou du gaz (3),

le changement climatique: l’énergie nucléaire représente la moitié de la production européenne d’électricité à faibles émissions de carbone,

l’acceptabilité pour le public: les grandes divergences au sein de l’Union européenne quant à la manière dont l’énergie nucléaire est perçue par l’opinion publique sont une réalité mal comprise, qui a des répercussions significatives sur l’acceptabilité politique.

Toutes ces questions ont gagné en importance au cours des neuf dernières années, mais l’accent principal dans le PINC est placé sur la sécurité et le cycle du combustible, tandis que ces questions sont peu développées, tant dans la communication à l’examen que dans le document de travail. Le PINC ne précise pas non plus la nature des discussions sur ces sujets souvent contestés et controversés (tels que la question du maintien de normes élevées en cas de sous-traitance), ni ne propose de série de lignes directrices ou d’approche stratégique pour le débat sur le nucléaire dans le bouquet énergétique global. Ces omissions reflètent l’approche adoptée dans le cadre du paquet sur l’union de l’énergie, dans lequel on observe une réticence similaire à exposer les implications d’une stratégie énergétique européenne pour les débats nationaux sur le maintien du rôle du nucléaire (le cas échéant) dans le bouquet énergétique.

4.4.

Comme indiqué précédemment, la communication de la Commission a pour ambition affichée de constituer «une base de discussion sur la façon dont l’énergie nucléaire peut contribuer à la réalisation des objectifs énergétiques de l’Union européenne» en tant que «composante importante du bouquet énergétique de l’Union européenne à l’horizon 2050». Or, ces affirmations ne sont pas pleinement corroborées par le contenu du document à l’examen. Des programmes indicatifs précédents avaient apporté une révision analytique majeure du rôle du nucléaire et proposé des orientations pour la politique future.

4.5.

Plus particulièrement, il convient certainement de replacer aujourd’hui l’analyse des besoins d’investissements pour l’énergie nucléaire (qui constituent clairement une difficulté majeure dans les circonstances actuelles) dans le contexte du total de ceux qui sont nécessaires pour atteindre les objectifs de l’union de l’énergie, étant donné qu’il existe des interactions et des effets de vases communicants entre les décisions d’investissement, toutes technologies et infrastructures de production confondues.

4.6.

En outre, il existe de nombreux autres facteurs contextuels qui façonnent la politique et l’économie du nucléaire mais qui n’ont pas été pleinement pris en compte, sur lesquels la Commission peut difficilement travailler étant donné qu’ils sont en cours de réexamen ou en voie d’être réformés. Ainsi en est-il du fonctionnement du système d’échange de quotas d’émission, des propositions de subvention du mécanisme de capacité, du développement du secteur des énergies renouvelables, etc.

4.7.

À l’heure actuelle, l’énergie nucléaire représente 28 % de la production énergétique intérieure de l’Union européenne, et 50 % de son électricité à faibles émissions de carbone (Eurostat, mai 2015). La réduction des émissions de CO2 est un objectif fondamental de la politique énergétique européenne et mondiale. Limiter la hausse de la température de la planète à 2 oC nécessite de réduire en moyenne les émissions de CO2 produites par le secteur énergétique dans le monde de 5,5 % par an entre 2030 et 2050. Les modalités selon lesquelles la contribution de l’Union européenne à cet effort seront concrétisées ont été exposées dans la feuille de route pour l’énergie à l’horizon 2050, laquelle avait adopté une approche multi-scénarios quant à la manière dont le bouquet énergétique pourrait varier en fonction d’un certain nombre de facteurs politiques, économiques et sociaux [COM(2011) 885 final]. La communication part du principe, en s’appuyant sur les chiffres fournis par les États membres, que la capacité nucléaire sera d’environ 100 GWe en 2050 mais, à la lumière du débat actuel, cette hypothèse paraît peu certaine.

4.8.

Le Comité attire l’attention sur l’exemple donné récemment par la Suède, qui a pris la décision (annoncée après la publication du PINC, si bien qu’elle n’est pas évoquée dans ce dernier) de remplacer progressivement ses centrales qui seront fermées par dix nouveaux réacteurs et s’est engagée par ailleurs à agir pour assurer un approvisionnement énergétique composé à 100 % d’énergies renouvelables d’ici à 2040 (Financial Times, 10 juin 2016). Avoir à la fois une politique forte en matière de sources d’énergie renouvelables et une capacité supplémentaire en vue d’approvisionner les voisins en énergie à faible intensité de carbone est, dans ce cas, politiquement acceptable pour toutes les parties et revêt de ce fait une importance stratégique dans le contexte européen. Il conviendrait donc d’actualiser le document pour prendre cet élément en considération.

4.9.

Depuis de nombreuses années, le CESE plaide avec constance pour qu’une approche plus stratégique soit adoptée en ce qui concerne les questions énergétiques et qu’une importance accrue soit accordée à un vaste dialogue public sur la production et la consommation d’énergie (4). La technologie n’est pas exempte de valeurs et les technologies énergétiques comportent un large éventail d’appréciations éthiques, sociétales et politiques. Les États membres disposent d’un pouvoir discrétionnaire en ce qui concerne la composition de leur bouquet énergétique, la moitié d’entre eux seulement ont des centrales nucléaires en activité et une polarisation des points de vue sur l’énergie nucléaire s’est développée depuis le dernier PINC. Une présentation objective des questions d’actualité et hautement médiatisées qui pourraient être abordées dans le cadre de la «discussion sur la façon dont l’énergie nucléaire peut contribuer à la réalisation des objectifs énergétiques de l’Union européenne» enrichirait cet important document de révision cyclique. Il est dès lors proposé d’ajouter un certain nombre de nouvelles sections dans le document final, telles qu’énumérées au paragraphe 4.3, et de prendre davantage en considération, dans l’ensemble de la stratégie, les commentaires spécifiques formulés aux paragraphes 5.3.1 à 5.3.4 ci-dessous.

5.   Observations particulières

5.1.

Le document souligne qu’il importe d’assurer une meilleure coordination nationale entre les États membres, d’accroître la coopération entre les parties prenantes ainsi que d’augmenter la transparence dans les dossiers nucléaires et d’y associer davantage l’opinion publique. Le Comité prend note du rôle de premier plan joué à cet égard par le groupe des régulateurs européens dans le domaine de la sûreté nucléaire (ENSREG), ainsi que de la volonté de la Commission de continuer à «promouvoir le dialogue entre les parties prenantes au sein du Forum européen de l’énergie nucléaire» (FEEN). En décembre 2015, l’ENSREG a publié une déclaration sur les progrès accomplis dans la mise en œuvre des plans nationaux d’action post-Fukushima, dans laquelle il a souligné les écarts dans le degré de mise en œuvre effective et insisté sur la nécessité d’améliorer le taux de réalisation de la mise à niveau en matière de sûreté afin d’atteindre les délais convenus pour ladite mise en œuvre. Il a recommandé que chaque pays participant à la mise en œuvre des plans d’action nationaux mette à jour et publie périodiquement un rapport intermédiaire de manière à permettre un suivi transparent en vue de publier un rapport sur la mise en œuvre en 2017 [quatrième rapport de l’ENSREG, novembre 2015 (anglais uniquement)]. Le CESE suggère que la Commission devrait inclure dans le PINC une déclaration approuvant cette recommandation.

5.2.

La communication aborde aussi les relations avec les États voisins de l’Union européenne dotés du nucléaire, et le CESE estime que l’extension du dialogue actif avec la Biélorussie en particulier aiderait à dissiper les inquiétudes relatives à la transparence et à la sécurité qui sont apparues avec la construction à Ostrovets du premier réacteur nucléaire du pays. Le renforcement des liens par le biais d’ENSREG devrait être élevé au rang de priorité.

5.3.

S’agissant du dialogue et de la transparence en général, le CESE observe que, dans la pratique, le rôle, les ressources, les capacités et le statut du FEEN ont considérablement diminué au cours des deux dernières années. Il est essentiel de clarifier davantage les principaux problèmes auxquels est confronté le dialogue sur la politique nucléaire européenne, et de proposer un cadre commun de discussion au niveau national. Il est aujourd’hui peu probable que des avancées en ce sens seront enregistrées dans le cadre du FEEN et le PINC n’en fait pas mention. Un tel cadre faciliterait également la future gouvernance de l’union de l’énergie et devrait être appliqué de manière cohérente à toutes les sources d’énergie primaires. Pour contribuer à cette clarification, le PINC devrait comporter des sections spécifiques présentant les implications et la pertinence de cette problématique pour la politique d’investissement dans le nucléaire. Ces questions, détaillées dans les quatre paragraphes suivants, constituent des domaines de discussion essentiels, indispensables à toute vision stratégique.

5.3.1.

Le passage à l’électricité et la mesure dans laquelle un approvisionnement constant en électricité peut être assuré à partir de sources primaires. L’énergie nucléaire peut, il est vrai, contribuer à la sécurité énergétique, étant donné qu’elle peut produire de manière continue des volumes importants d’électricité prévisible pendant des périodes de temps prolongées et qu’elle peut ainsi contribuer positivement à la stabilité de fonctionnement des installations électriques (par exemple, le maintien de la fréquence du réseau). En revanche, les coûts en capital de construction des installations sont élevés, les nouvelles règles en matière de sécurité sont exigeantes, les finances sont incertaines et les futures conditions du marché largement imprévisibles. Il s’agit là de problèmes auxquels est confronté tout État membre disposant d’une capacité de production nucléaire, et qui sont susceptibles de déterminer de façon décisive s’il sera possible de mettre en œuvre des plans nationaux réalistes contribuant aux objectifs globaux de l’Union européenne en matière d’énergie et de climat et, dans l’affirmative, de quelle manière ils pourront l’être. Le PINC devrait porter sur un cadre commun de discussion de ces questions, comme l’a proposé la Commission dans d’autres communications stratégiques sur le thème de l’énergie, et présenter une analyse équilibrée du rôle de l’énergie nucléaire.

5.3.2.

Les connaissances des citoyens, leurs comportements et leur degré de sensibilisation en ce qui concerne les risques que comporte la production d’énergie. La sûreté nucléaire, l’impact des catastrophes de Tchernobyl et de Fukushima et les questions en suspens concernant le déclassement et le stockage des déchets radioactifs sont autant de sujets de grave préoccupation pour l’opinion publique dans certains pays. Néanmoins, d’autres sources d’énergie primaire présentent aussi des aspects négatifs non négligeables dont l’importance est souvent sous-estimée. Le CESE n’a eu de cesse de souligner à quel point il est essentiel que le public comprenne le «dilemme» énergétique, qui consiste fondamentalement à essayer de trouver le juste équilibre entre les objectifs interdépendants et parfois contradictoires que sont la sécurité énergétique, la disponibilité d’une énergie à des prix abordables et la durabilité environnementale. La volonté politique est largement influencée par les attitudes de la population et le faible niveau de sensibilisation générale en matière d’énergie peut déboucher sur une prise de décision politique non optimale. Il serait utile de disposer de davantage de ressources et d’un cadre législatif favorable pour permettre, par exemple, la constitution de comités locaux d’information tels qu’ils existent en France.

5.3.3.

Une méthode d’évaluation des coûts et de la compétitivité. Bien qu’une énergie à faible intensité de carbone et d’un prix abordable soit essentielle à la réalisation des objectifs convenus en matière de climat et d’énergie, ce secteur est à l’abri de la concurrence du marché. Il n’existe en outre à l’heure actuelle aucune norme ou méthodologie acceptable en vigueur qui permettrait aux États membres d’évaluer les coûts futurs des solutions de substitution dans leur bouquet de production d’électricité avant de prendre une décision politique (qui sera influencée par d’autres facteurs).

5.3.4.

La pertinence d’une base active de recherche et de production d’électricité pour conserver une position de numéro un sur le marché ainsi que dans les domaines des technologies et de la sûreté. Dans quelle mesure est-il important de conserver une industrie de production nucléaire importante et en évolution pour préserver l’emploi, ou encore l’influence et la domination européennes dans un secteur en pleine expansion dans le monde (Agence américaine pour l’information sur l’énergie, mai 2016 — La production nucléaire mondiale devrait doubler d’ici 2040)? Ainsi, la Chine prévoit de doubler sa capacité nucléaire pour la faire passer à 58 GWe au minimum d’ici 2020-2021, et à 150 GWe à l’horizon 2030. L’importance d’emplois de haute qualité et bien rémunérés au sein de l’Union européenne est reconnue et, si ceux-ci devaient être supprimés progressivement, un programme garantissant une transition équitable et accompagnée devrait être mis en place.

5.4.

L’élément le plus significatif du financement de la recherche nucléaire européenne est lié au développement du programme conjoint sur la fusion nucléaire (ITER). La feuille de route de l’EFDA (Accord européen pour le développement de la fusion) décrit les différentes étapes qui séparent les expériences actuelles en matière de fusion d’une centrale électrique à fusion de démonstration assurant une production nette d’électricité pour le réseau. Le CESE demande que la Commission tienne compte d’un approvisionnement électrique potentiel en provenance des centrales à fusion dans l’ensemble des scénarios portant sur un approvisionnement énergétique affichant un bon rapport coût/efficacité pour l’après-2050. En outre, il convient d’encourager la poursuite du soutien à la recherche sur les réacteurs de quatrième génération, qui sont susceptibles d’entraîner des baisses de coûts ainsi qu’une réduction significative des déchets de haute activité.

5.5.

Le projet de proposition a été préparé avant que les Britanniques ne se prononcent par scrutin en faveur d’une sortie de l’Union européenne et l’avis juridique dans son état actuel donne à penser que la sortie de l’Union européenne implique également celle de l’Euratom. Pour les objectifs énergétiques à l’horizon 2030, notamment, mais aussi pour la recherche, le processus réglementaire, la chaîne d’approvisionnement et la coopération en matière de sûreté, cette situation a d’importantes implications stratégiques. Cette problématique doit dès lors être reconnue par le projet de proposition à l’examen, bien qu’il soit difficile à ce stade d’anticiper l’aboutissement de certaines évolutions.

Bruxelles, le 22 septembre 2016.

Le président du Comité économique et social européen

Georges DASSIS


(1)  JO L 219 du 25.7.2014, p. 42.

(2)  JO C 341 du 21.11.2013, p. 92; JO C 133 du 14.4.2016, p. 25.

(3)  JO C 182 du 4.8.2009, p. 8.

(4)  JO C 291 du 4.9.2015, p. 8.


28.12.2016   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 487/111


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (UE) no 1303/2013 du Conseil en ce qui concerne certaines dispositions ayant trait à la gestion financière pour certains États membres qui connaissent des difficultés ou une menace de graves difficultés quant à leur stabilité financière

[COM(2016) 418 final — 2016/0193 (COD)]

(2016/C 487/18)

Consultation

Parlement européen, 4 juillet 2016

Conseil de l’Union européenne, 8 juillet 2016

Base juridique

Articles 117 et 304 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne

Compétence

Section spécialisée «Union économique et monétaire, cohésion économique et sociale»

Adoption en session plénière

21 septembre 2016

Session plénière no

519

Résultat du vote

(pour/contre/abstentions)

169/1/4

Ayant estimé que le contenu de la proposition est entièrement satisfaisant et que par ailleurs il avait déjà fait l’objet d’avis précédents — à savoir l’avis sur la «Modification du règlement sur les Fonds structurels — Mesures spécifiques pour la Grèce» adopté le 8 octobre 2015 (1), l’avis sur le thème «Gestion financière et règles de dégagement pour États membres en graves difficultés» adopté le 19 septembre 2013 (2), l’avis sur les «Fonds structurels — dispositions générales» adopté le 25 avril 2012 (3) et l’avis sur la «Modification de dispositions ayant trait à la gestion financière (Fonds structurels) pour les États membres en difficulté» adopté le 27 octobre 2011 (4) — le Comité, lors de sa 519e session plénière des 21 et 22 septembre 2016 (séance du 21 septembre 2016), a décidé, par 169 voix pour, 1 voix contre et 4 abstentions, de rendre un avis favorable au texte proposé et de se référer à la position qu’il a soutenue dans les documents susmentionnés.

Bruxelles, le 21 septembre 2016.

Le président du Comité économique et social européen

Georges DASSIS


(1)  JO C 32 du 28.1.2016, p. 20.

(2)  JO C 341 du 21.11.2013, p. 27.

(3)  JO C 191 du 29.6.2012, p. 30.

(4)  JO C 24 du 28.1.2012, p. 81.


28.12.2016   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 487/112


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition modifiée de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif à des droits de douane supplémentaires sur les importations de certains produits originaires des États-Unis d’Amérique (Texte codifié)»

[COM(2016) 408 final — 2014/0175 (COD)]

(2016/C 487/19)

Consultation

Commission européenne, 23 juin 2016

Base juridique

Article 207 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne

Compétence

REX

Adoption en session plénière

21 septembre 2016

Session plénière no

519

Résultat du vote

(pour/contre/abstentions)

165/0/8

Ayant estimé que le contenu de la proposition est entièrement satisfaisant et n’appelle aucun commentaire de sa part, le Comité, lors de sa 519e session plénière des 21 et 22 septembre 2016 (séance du 21 septembre 2016), a décidé, par 165 voix pour et 8 abstentions, de rendre un avis favorable au texte proposé.

Bruxelles, le 21 septembre 2016.

Le président du Comité économique et social européen

Georges DASSIS


28.12.2016   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 487/113


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 2004/37/CE concernant la protection des travailleurs contre les risques liés à l’exposition à des agents cancérigènes ou mutagènes au travail»

[COM(2016) 248 final — 2016/0130 COD]

(2016/C 487/20)

Consultation

Conseil, 24 mai 2016

Parlement européen, 25 mai 2016

Base juridique

Article 148, paragraphe 2, du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne

Compétence

Section spécialisée «Emploi, affaires sociales et citoyenneté»

Adoption en session plénière

21 septembre 2016

Session plénière no

519

Résultat du vote

(pour/contre/abstentions)

171/0/3

Étant donné qu’il s’est déjà prononcé sur le contenu de la proposition en objet dans ses avis sur la proposition de directive du Conseil concernant la protection des travailleurs contre les risques liés à l’exposition aux agents cancérigènes pendant le travail (sixième directive particulière au sens de l’article 8 de la directive 80/1107/CEE), adoptés le 2 juin 1988 (1) et le 20 octobre 1999 (2), ainsi que sur la communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions relative à un cadre stratégique de l’Union européenne en matière de santé et de sécurité au travail (2014-2020), adopté le 11 décembre 2014, le Comité a décidé de ne pas procéder à l’élaboration d’un nouvel avis en la matière, mais de se référer à la position qu’il avait soutenue dans les documents susmentionnés.

Bruxelles, le 21 septembre 2016.

Le président du Comité économique et social européen

Georges DASSIS


(1)  JO C 208 du 8.8.1988, p. 43.

(2)  JO C 368 du 20.12.1999, p. 18.