ISSN 1977-0936

Journal officiel

de l'Union européenne

C 177

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Édition de langue française

Communications et informations

59e année
18 mai 2016


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III   Actes préparatoires

 

COMITÉ ÉCONOMIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN

 

515e session plénière du CESE des 16 et 17 mars 2016

2016/C 177/01

Avis du Comité économique et social européen sur la Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — Améliorer le marché unique: de nouvelles opportunités pour les citoyens et les entreprises [COM(2015) 550 final]

1

2016/C 177/02

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil concernant le prospectus à publier en cas d’offre au public de valeurs mobilières ou en vue de l’admission de valeurs mobilières à la négociation [COM(2015) 583 final]

9

2016/C 177/03

Avis du Comité économique et social européen sur la Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil et à la Banque centrale européenne — Feuille de route en vue d’une représentation extérieure plus cohérente de la zone euro dans les instances internationales [COM(2015) 602 final] et la Proposition de décision du Conseil arrêtant des mesures en vue d’établir progressivement une représentation unifiée de la zone euro au sein du Fonds monétaire international [COM(2015) 603 final — 2015/0250 (NLE)]

16

2016/C 177/04

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (UE) no 806/2014 afin d’établir un système européen d’assurance des dépôts [COM(2015) 586 final — 2015/0270 (COD)]

21

2016/C 177/05

Avis du Comité économique et social européen sur la communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil et à la Banque centrale européenne relative aux mesures à prendre pour compléter l’Union économique et monétaire [COM(2015) 600 final] et sur la décision (UE) 2015/1937 de la Commission du 21 octobre 2015 créant un comité budgétaire européen consultatif indépendant [C(2015) 8000 final]

28

2016/C 177/06

Avis du Comité économique et social européen sur la Recommandation de recommandation du Conseil sur la création de conseils nationaux de la compétitivité dans la zone euro [COM(2015) 601 final]

35

2016/C 177/07

Avis du Comité économique et social européen sur la Recommandation de recommandation du Conseil concernant la politique économique de la zone euro [COM(2015) 692 final]

41

2016/C 177/08

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil établissant le programme d’appui à la réforme structurelle pour la période 2017-2020 et modifiant les règlements (UE) no 1303/2013 et (UE) no 1305/2013 [COM(2015) 701 final — 2015/0263 (COD)]

47

2016/C 177/09

Avis du Comité économique et social européen sur la Communication de la Commission au Parlement européen et au Conseil — Mettre en œuvre le programme européen en matière de sécurité: plan d’action de l’Union européenne contre le trafic illicite et l’utilisation d’armes à feu et d’explosifs [COM(2015) 624 final] et la Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil sur la lutte contre le terrorisme et remplaçant la décision-cadre 2002/475/JAI du Conseil relative à la lutte contre le terrorisme [COM(2015) 625 final — 2015/0281(COD)]

51

2016/C 177/10

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (CE) no 1406/2002 instituant une Agence européenne pour la sécurité maritime [COM(2015) 667 final — 2015/0313 (COD)]

57


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III Actes préparatoires

COMITÉ ÉCONOMIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN

515e session plénière du CESE des 16 et 17 mars 2016

18.5.2016   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 177/1


Avis du Comité économique et social européen sur la «Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — Améliorer le marché unique: de nouvelles opportunités pour les citoyens et les entreprises»

[COM(2015) 550 final]

(2016/C 177/01)

Rapporteur:

M. Antonello PEZZINI

Le 15 juillet 2015, la Commission européenne a décidé, conformément à l’article 304 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la:

Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — Améliorer le marché unique: de nouvelles opportunités pour les citoyens et les entreprises

[COM(2015) 550 final].

La section spécialisée «Marché unique, production et consommation», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 1er mars 2016.

Lors de sa 515e session plénière des 16 et 17 mars 2016 (séance du 16 mars 2016), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 170 voix pour, 2 voix contre et 1 abstention.

1.   Conclusions et recommandations

1.1.

Le Comité économique et social européen (CESE) a affirmé à différentes reprises que le marché unique est une pièce maîtresse de l’intégration européenne et qu’il a la capacité d’offrir des avantages concrets et de générer une croissance durable pour les économies de l’Union européenne.

1.1.1.

Le CESE demande qu’une place importante soit accordée, dans la mise en œuvre du marché unique, aux secteurs de l’économie verte, en développant des modèles de marché favorisant une production et une consommation durables et en continuant d’appliquer les principes de l’économie circulaire et de la lutte contre le changement climatique, et ce par l’établissement de nouveaux indicateurs.

1.1.2.

S’agissant du marché de l’énergie, le CESE juge nécessaire d’intensifier les efforts et les investissements dans le domaine des réseaux de gaz et d’électricité et d’appliquer le principe de subsidiarité aux stockages d’énergie entre les États membres.

1.2.

Le Fonds européen de développement régional et le Fonds social européen devraient prêter une attention toujours croissante au marché unique et à l’inclusion sociale des citoyens et des travailleurs européens.

1.3.

En ce qui concerne le train de mesures sur la mobilité des travailleurs, celui-ci devrait être orienté vers la levée de tous les obstacles à la libre circulation des travailleurs, tout en maintenant des niveaux élevés de sécurité. À cette fin, le CESE appelle de ses vœux une meilleure coordination entre les systèmes de sécurité sociale, par la mise en place d’organismes de sécurité sociale dont les fonctions sont reconnues au niveau européen. À ses yeux, il est fondamental de mettre pleinement en œuvre les dispositions du traité relatives aux droits des travailleurs, insiste sur l’importance de l’information et de la consultation, et préconise d’impliquer davantage les travailleurs à la gouvernance de l’entreprise.

1.4.

Le CESE estime que les consommateurs doivent être considérés comme des acteurs essentiels du marché unique et demande à la Commission de jouer un rôle plus actif dans la coordination du droit de l’Union dans ce domaine et d’améliorer les mécanismes de règlement des différends. Il convient de déployer davantage d’efforts pour améliorer la sécurité des produits et la surveillance du marché, en prêtant une attention particulière aux escroqueries sur le marché numérique. À cette fin, il souhaite la mise en place d’un mécanisme de recours collectif efficace pour les consommateurs, qui soit également valable au niveau transnational.

1.5.

Le CESE estime que les services financiers de détail doivent être améliorés dans tous les pays et se prononce en faveur de l’ouverture de guichets uniques et de réseaux de guichets dans les différents pays, raccordés à un système central européen.

1.6.

L’entrepreneuriat social et coopératif est essentiel à la cohésion sociale, pour assurer aux citoyens européens une croissance économique plus efficace et durable. À cet égard, le CESE peut contribuer à la réflexion de la Commission et a d’ores et déjà proposé la création d’une structure permanente (1) afin d’approfondir ces aspects.

1.7.

Les services et les réseaux qui offrent des services et des informations, des conseils juridiques et une assistance à la commercialisation devraient couvrir toute la gamme des types d’entreprises (2), avec une attention particulière portée aux micro-entreprises.

1.7.1.

Toutes les organisations reconnues comme étant les plus représentatives des différents types d’entreprises devraient être associées au dialogue social au niveau de l’entreprise, dès lors que leur représentativité est démontrée.

1.8.

Les entreprises européennes, surtout les PME, et a fortiori les micro-entreprises, ont besoin d’un marché unique fort et dynamique. Selon le CESE, il convient d’élaborer une proposition législative concernant l’insolvabilité des entreprises et leur redressement rapide et soutient la proposition d’offrir une «seconde chance» aux entrepreneurs. Cette proposition doit mettre l’accent sur la protection des travailleurs et des consommateurs et sur la nécessité de leur assurer des garanties adéquates.

1.9.

Le CESE estime indispensable de développer, entre les entreprises et les autorités publiques, l’application du principe de la reconnaissance mutuelle des produits non harmonisés.

1.10.

Le CESE souligne qu’il est essentiel de réduire et de supprimer les barrières administratives qui entravent le développement des entreprises et qui pèsent davantage sur les PME et les micro-entreprises. Les exigences supplémentaires et inutiles imposées par les États membres devraient être supprimées lorsqu’elles sont en contradiction avec une directive ou vont à l’encontre de ses objectifs, et la Commission devrait procéder à des contrôles de cohérence accrus. Le Comité souligne qu’il convient de maintenir les spécificités des professions libérales, tout en renforçant la collaboration en ligne entre les autorités des États membres.

1.11.

Il importe d’améliorer l’efficacité de la directive sur les services et les procédures de notification correspondantes, en empêchant toute forme de protectionnisme et l’apparition de nouveaux obstacles à la libre circulation des services, dans le cadre d’une approche secteur par secteur, en vue de détecter les anomalies et les obstacles, et d’adopter le principe de la tolérance zéro en recourant à des procédures d’infraction ciblées en cas de non-conformité prouvée à la directive.

1.12.

Le CESE souhaite une meilleure mise en œuvre de la directive relative au détachement des travailleurs (96/71/CE) et de la directive d’application de 2014.

1.13.

Il apparaît important et opportun d’insister sur la reconnaissance des qualifications professionnelles et universitaires, en soutenant la mise en œuvre de la reconnaissance mutuelle, au moyen d’un processus d’harmonisation garantissant l’égalité d’accès.

1.13.1.

En ce sens, il importe d’étendre la carte professionnelle européenne à de nouvelles professions.

1.14.

Il est également essentiel de soutenir la normalisation européenne à l’aide d’un système ascendant, avec une participation continue des partenaires sociaux, des consommateurs et des organisations de défense de l’environnement.

1.15.

Le Comité plaide pour que soit lancée une campagne de participation directe des citoyens, en particulier des jeunes, qui permette à chacun de s’approprier les valeurs de la citoyenneté européenne. Cette campagne irait de pair avec le lancement d’une application pour smartphone et d’un guichet électronique interactif européen accessible dans toutes les langues, comportant des contributions personnelles, afin de gérer au mieux le bon fonctionnement du marché intérieur dans son ensemble et de combattre l’asymétrie des informations partagées avec les citoyens ou qui leur sont destinées. Le CESE préconise aussi la création d’un Erasmus de l’artisanat et de l’apprentissage au sein du marché unique , permettant à de jeunes artisans, à de nouveaux membres des professions libérales et à des apprentis d’expérimenter l’unicité du marché intérieur européen et de procéder à des échanges d’expériences et de savoir-faire.

1.16.

Le Comité attache également de l’importance au lancement, à l’extérieur de l’Union européenne, d’une campagne de promotion, organisée avec la participation active du Service européen pour l’action extérieure (SEAE), consacrée au thème suivant: «Le marché unique européen — une occasion unique d’établir des partenariats sûrs et solides avec plus de 500 millions de personnes» .

2.   Une feuille de route pour exploiter pleinement le potentiel du marché unique

2.1.

Le marché unique est la clé de voûte de l’intégration européenne. C’est sur lui que se fondent la confiance des citoyens dans le projet européen, l’esprit d’initiative des entreprises européennes, le développement harmonieux et durable des activités productives, commerciales et de services et la valorisation des ressources humaines.

2.2.

Récemment, la Commission a mis en œuvre les propositions relatives à une union européenne de l’énergie, la stratégie pour le marché unique numérique, un plan d’action pour la mise en place d’une union des marchés des capitaux, l’initiative «Commerce pour tous», un vaste train de mesures sur l’économie circulaire et un paquet sur la transparence des systèmes de taxation.

2.3.

Créé pour permettre à tous les citoyens européens de profiter pleinement des avantages découlant de la possibilité de vivre, de travailler, de se déplacer, d’étudier, de produire, de vendre et d’acheter partout dans l’Union européenne, sans restriction d’aucune sorte, le marché unique a éliminé, au cours des 23 années écoulées depuis sa création, une multitude d’obstacles et d’entraves au libre exercice de ces libertés fondamentales.

2.4.

En dépit des progrès accomplis, l’achèvement du marché unique est entravé par d’importantes carences et lacunes qui «bloquent l’innovation et dissuadent les entreprises de développer de nouveaux produits et services en Europe, d’embaucher et de conquérir de nouveaux marchés» (3).

2.5.

Les obstacles à la libre circulation des personnes, des biens, des services et des capitaux sont autant de barrières qui empêchent la croissance et la création d’emplois et nuisent à la compétitivité des entreprises européennes. Compte tenu des résultats positifs des Actes pour le marché unique I et II, une avancée décisive est nécessaire aujourd’hui pour optimiser le fonctionnement du marché unique et en libérer le potentiel inexploité.

2.6.

Il y a donc lieu de «continuer à éliminer les obstacles et à faire tomber les barrières intellectuelles et idéologiques de sorte que cette stratégie de coopération sans équivalent puisse produire pleinement ses effets et ses bénéfices dans l’ensemble des 28 États membres et des trois pays de l’Espace économique européen» (4).

2.7.

Dans son programme 2015-2018, l’Observatoire du marché unique a proposé comme priorités «la stratégie pour le marché unique du numérique et le marché de l’énergie» ainsi que diverses autres formes de coopération, telles que le développement du réseau Solvit (5).

2.8.

La Commission avait lancé les initiatives «Acte pour le marché unique I» en avril 2011 et «Acte pour le marché unique II» en octobre 2012. Le CESE a eu l’occasion de se prononcer sur le sujet (6) — sur la base des recommandations émises dans le rapport Monti de 2010.

2.9.

L’instauration d’un marché unique approfondi et plus équitable est l’une des dix priorités politiques de la Commission: la suppression des obstacles réglementaires et non réglementaires subsistant au sein du marché unique des biens et des services a été définie comme prioritaire dans le cadre de l’examen annuel de la croissance 2015  (7).

2.10.

Depuis le rapport Cecchini de 1988 sur le coût de la non-Europe, plusieurs plans d’action établissant des priorités pour l’achèvement du marché unique se sont succédés, et la Commission a proposé à différentes reprises des orientations et des mesures qui, jusqu’à présent, n’ont toutefois pas permis d’atteindre des résultats satisfaisants. C’est dans ce cadre que s’inscrit l’invitation à agir concrètement que lance la Commission avec cette nouvelle feuille de route.

3.   Les propositions présentées dans le cadre de la feuille de route de la Commission

3.1.

La feuille de route mentionne trois objectifs principaux en vue de l’achèvement du marché unique:

ouvrir de nouvelles perspectives aux consommateurs, aux professionnels et aux entreprises;

encourager et faciliter la modernisation et l’innovation dont l’Europe a besoin;

garantir des résultats concrets qui bénéficient aux consommateurs et aux entreprises dans leur vie quotidienne.

3.2.

Les grandes lignes de l’initiative sont les suivantes:

a)

développement équilibré de l’économie collaborative;

b)

croissance des PME et des jeunes pousses;

c)

réalisation du marché sans frontières des services;

d)

lutte contre les mesures restrictives du commerce de détail;

e)

prévention des discriminations à l’égard des consommateurs et des entrepreneurs;

f)

modernisation du système de normalisation technique et réglementaire;

g)

consolidation du cadre européen de propriété intellectuelle;

h)

culture renforcée du respect des règles et du contrôle de leur application;

i)

marchés publics transparents, efficaces et responsables;

j)

renforcement du marché unique des biens et des services: pleine mise en œuvre de la directive sur les services et de son extension, reconnaissance mutuelle et contrôles de conformité des produits illégaux.

3.3.

La Commission entend favoriser ce processus en veillant activement à la mise en œuvre des différents règlements et directives pertinents et en adoptant un ensemble de mesures fondées sur l’ouverture de perspectives, des actions de modernisation et l’obtention de résultats concrets, selon un calendrier précis et, espérons-le, contraignant.

4.   Observations générales

4.1.

Le CESE s’est déclaré à plusieurs reprises convaincu de la nécessité de mesures permettant de libérer le potentiel du marché unique au profit des entreprises, des travailleurs, des consommateurs, des citoyens et des autres parties prenantes, et ce dans des domaines tels que les services, l’accès au financement, l’allégement des charges administratives pour les PME — dans le respect de la protection des travailleurs, des consommateurs et de l’environnement — l’actualisation et le renforcement des normes techniques et réglementaires, le commerce en ligne, le marché unique numérique et la mobilité.

4.1.1.

À cet égard, le Comité juge indispensable que tous les citoyens, en particulier les jeunes, s’approprient les valeurs du marché unique européen, moyennant les mesures suivantes:

lancement d’une campagne de participation directe des citoyens, sous le slogan «Le marché unique européen appartient à tous et ne saurait tolérer aucun dysfonctionnement» . Cette campagne irait de pair avec la mise en circulation d’une application pour smartphone et d’un guichet électronique interactif au niveau de l’Union européenne , dans toutes les langues, afin de gérer au mieux le bon fonctionnement du marché intérieur dans son ensemble et de combattre l’asymétrie de l’information avec et pour les citoyens;

création d’un Erasmus de l’artisanat et de l’apprentissage au sein du marché unique , permettant à de jeunes artisans, à de nouveaux membres des professions libérales et à des apprentis d’expérimenter l’unicité du marché intérieur européen et de procéder à des échanges d’expériences et de savoir-faire;

lancement d’une campagne en faveur du marché unique européen , afin de diffuser la présence éclairée de l’Europe en tant que telle sur les marchés mondiaux, en particulier les marchés asiatiques et américains, avec la participation active du Service européen pour l’action extérieure (SEAE);

lancement d’une campagne axée sur les spécificités respectives des secteurs de services à caractère sensible, dans un cadre européen cohérent.

4.2.

Avant de mettre en chantier de nouvelles initiatives législatives, il conviendrait selon le CESE de donner la priorité à des mécanismes assurant l’application effective des règles existantes, grâce à la création d’un système dynamique de collecte des informations, ainsi qu’à une meilleure évaluation d’impact, afin d’identifier tant les infractions que les nouvelles mesures à proposer en vue d’améliorer la réalisation du marché intérieur. Ce faisant, il convient d’examiner dans quelle mesure une déréglementation peut permettre d’atteindre les objectifs visés (pronostic).

4.3.

Aux yeux du CESE, il importe de procéder à une sélection qualitative des règles de protection des consommateurs, en assurant le respect des principes de proportionnalité, de transparence et d’efficacité, ainsi qu’une véritable valeur ajoutée européenne.

4.4.

Le CESE juge prioritaire de réaffirmer les clauses de reconnaissance mutuelle, à travers une analyse au cas par cas, afin de favoriser et d’intensifier la libre circulation des biens et des services.

4.4.1.

À cette fin, il est souhaitable d’instaurer des règles, dont certaines — dans des cas bien précis — pourraient faire l’objet d’un 29e régime, concernant les meilleures expériences réalisées par les différents États.

4.5.

Le CESE soutient le développement de services dans les secteurs productifs, au moyen de mesures garantissant de nouveaux modèles commerciaux pour la fourniture conjointe de biens et de services. Une meilleure transposition de la directive sur les services et une formulation plus claire et consensuelle de ses dispositions d’application pourraient garantir des applications compatibles avec des normes techniques et réglementaires de qualité.

4.6.

Le Comité se félicite que la communication de la Commission consacre un chapitre à l’économie collaborative. Il a déjà adopté plusieurs avis sur cette question (8). À l’heure actuelle, il élabore un avis exploratoire à la demande de la présidence néerlandaise, ainsi que deux avis d’initiative sur des thèmes en rapport avec les nouvelles tendances de consommation.

4.6.1.

De l’avis du CESE, l’économie fondée sur la collaboration permet des avancées importantes sur la voie d’une économie plus morale, conforme aux valeurs européennes, et aide les consommateurs à adopter des modèles de consommation éthiques.

4.6.2.

L’économie de collaboration entraîne, par certains aspects, une révolution conceptuelle de la culture du travail, ce qui en fait une importante source potentielle d’emplois. Elle représente également une intégration novatrice d’un point de vue écologique.

4.6.3.

Le CESE peut contribuer aux travaux de la Commission en la matière et a d’ores et déjà proposé la création d’une structure permanente afin d’approfondir ce sujet.

4.7.

Le CESE est d’avis qu’il convient d’exploiter toutes les potentialités de l’économie collaborative, tout en clarifiant davantage les règles applicables aux services fournis par celle-ci, à l’aide d’une collecte fiable de données concernant les situations prévalant dans toute l’Union européenne. Toute action législative à entreprendre devra tenir compte de la nécessité d’assurer une égalité de traitement entre l’ensemble des acteurs présents sur le marché. Dans ce contexte, les normes européennes élevées en matière de droit du travail, de protection sociale et de protection des consommateurs doivent également être garanties.

4.8.

Le CESE considère qu’il y a lieu de lever les obstacles à la libre circulation des services en mettant l’accent sur les services commerciaux, la construction, le tourisme et le commerce de détail, ainsi que sur les services aux entreprises: les États membres doivent développer davantage les services d’information sur les dispositions nationales régissant la fourniture de services transfrontaliers et justifier toutes les règles ou autres exigences imposées de manière non discriminatoire aux prestataires de services, en les notifiant à la Commission. Le CESE demande à la Commission d’œuvrer à la consolidation et à l’amélioration des performances des «guichets uniques», en améliorant les interconnexions entre les instruments existants (9).

4.9.

Le CESE juge essentiel de durcir les procédures d’infraction, afin de garantir le respect de la législation au niveau de l’Union européenne et une transposition adéquate à l’échelon national: les États membres doivent véhiculer cette culture du respect, notamment par le biais d’un strict contrôle au niveau central de l’application des dispositions et par la mise en œuvre à l’échelon européen de procédures d’infraction plus rapides en cas de nécessité, ainsi que d’une coopération et d’un partenariat accrus entre la Commission et les administrations nationales.

4.10.

De l’avis du CESE, les initiatives relatives aux PME, aux jeunes pousses, à l’aide à l’innovation et aux applications numériques devraient occuper une place plus importante dans la feuille de route proposée, dans la mesure où elles jouent un rôle déterminant dans la croissance et la relance de l’emploi au sein de l’Union. Dans ce contexte, il y a lieu d’envisager la possibilité d’offrir une «seconde chance aux entrepreneurs».

4.11.

Le CESE invite la Commission à veiller avec la plus grande attention à ce que les nouvelles directives sur les marchés publics (10) soient transposées par les États membres en temps utile et selon les modalités appropriées, sachant que ce secteur représente environ 20 % du PIB de l’Union.

4.12.

Les différentes formes d’entreprises de l’Union européenne sont le fruit de l’évolution historique diversifiée de notre continent. Parmi ces différentes formes d’entreprises, l’économie collaborative occupe une place à part et acquiert une importance de plus en plus grande, car elle est en mesure d’offrir à un prix abordable une réponse aux besoins de la société, et recouvre différentes formes d’emploi et d’entrepreneuriat.

4.13.

Le Comité invite la Commission européenne à promouvoir l’économie sociale, y compris au moyen d’un plan, et à supprimer les obstacles spécifiques qui freinent les activités des entreprises sociales, en les empêchant d’exploiter pleinement le potentiel du marché unique.

4.14.

La normalisation européenne doit concourir de plus en plus largement, grâce à la contribution de tous les partenaires sociaux et des parties prenantes, à compléter et à enrichir les processus à l’œuvre dans les économies mondiales, que ce soit pour apporter la valeur ajoutée qui distingue l’Union européenne en tant qu’économie sociale de marché, ou pour favoriser l’économie européenne dans le cadre des processus de mondialisation.

4.14.1.

Il est souhaitable que la culture européenne de la normalisation soit plus présente et occupe une place plus importante dans les processus mondiaux de normalisation.

5.   Observations particulières

5.1.    Consommateurs et citoyens

5.1.1.

Les consommateurs européens sont de plus en plus conscients du fait que les gouvernements des États membres, souvent sous la pression de puissants intérêts économiques, érigent un nombre croissant d’obstacles, directs et indirects, à la libre circulation des personnes, des biens, des services et des capitaux.

5.1.2.

Les assurances couvrant des biens, des services et des responsabilités devraient pouvoir jouer librement dans tous les États membres de l’Union européenne.

5.1.3.

Il n’existe pas de système électronique commun aux États membres qui permette d’harmoniser et de simplifier les péages autoroutiers pour les véhicules privés et commerciaux.

5.1.4.

Le système de contrôle des véhicules automobiles n’a pas été harmonisé ni rendu accessible aux citoyens dans tous les États.

5.1.5.

Les prises électriques, qui sont de plus en plus utiles aux citoyens européens, n’ont pas encore été standardisées.

5.1.6.

Les tailles des vêtements et des chaussures diffèrent elles aussi entre de trop nombreux États.

5.1.7.

Le CESE souhaite que soient menées de vastes campagnes de sensibilisation à l’intention des consommateurs, concernant les avantages d’une action énergique en faveur du développement de règles communes au sein du marché unique.

5.1.8.

Le CESE invite la Commission à présenter une proposition visant à harmoniser les informations aux citoyens relatives au mobilier.

5.2.    Handicapés

5.2.1.

Les personnes handicapées, qui représentent 15 % de la population européenne, se heurtent à des obstacles supplémentaires, qui les empêchent de bénéficier des libertés garanties par le marché unique. Le CESE accueille favorablement la récente présentation, par la Commission européenne, de l’Acte sur l’accessibilité dans l’Union européenne, dont l’objectif est de promouvoir l’accessibilité des biens et des services.

5.3.    Professions libérales

5.3.1.

Le CESE défend la nécessité d’instaurer une réglementation commune pour les professions libérales, valable dans tous les pays européens, et estime qu’il convient d’étendre la carte professionnelle européenne à toutes les catégories possibles, dans le respect de la directive européenne relative aux qualifications professionnelles.

5.4.    Brevets

5.4.1.

Les systèmes de protection de la propriété intellectuelle sont défaillants, en particulier pour les PME, et soulèvent des incertitudes du fait de la coexistence du brevet unitaire et des brevets nationaux, ainsi que de certificats complémentaires de protection délivrés au niveau national.

5.4.2.

Le CESE convient de la nécessité de mettre en place un tribunal unique qui soit en mesure de garantir une juridiction unique pour les affaires relatives aux brevets.

5.4.3.

Le CESE approuve la proposition de la Commission visant à transférer au niveau de l’Union européenne, le processus de concession du titre unitaire pour les certificats complémentaires de protection.

5.5.    Marchés publics

5.5.1.

En ce qui concerne les marchés publics, le CESE souhaite la mise en œuvre d’un système de collecte des données et de nouveaux instruments d’analyse permettant de déceler les problèmes et les irrégularités.

5.5.2.

Il pourrait s’avérer très utile d’établir des registres européens des marchés publics ayant pour but de détecter les anomalies dans les procédures de passation de marchés.

5.5.3.

Le CESE convient de l’opportunité d’instaurer un mécanisme volontaire d’évaluation ex ante des aspects liés à la passation des marchés publics relatifs à certains grands projets d’infrastructure.

5.6.    Solvit

5.6.1.

Le CESE invite la Commission à étendre les pouvoirs et l’influence du réseau Solvit, afin d’amener les États membres, très attentifs ces derniers temps à la résurgence de forts courants nationalistes, à respecter les dispositions du marché unique.

5.6.2.

Le CESE constate que l’objectif de la réalisation du marché unique ne bénéficie toujours pas d’une adhésion suffisante et que de trop nombreuses actions nationales génératrices de distorsions s’opposent à son achèvement.

Bruxelles, le 16 mars 2016.

Le président du Comité économique et social européen

Georges DASSIS


(1)  JO C 177 du 11.6.2014, p. 1.

(2)  JO C 255 du 22.9.2010, p. 31.

(3)  COM(2015) 550 final, paragraphe 1.2.

(4)  EESC-2014-04518-00-00 (contribution de l’OMU à l’intention du comité de pilotage Europe 2020).

(5)  EESC-2015-05912-00-00 (programme de travail de l’OMU).

(6)  JO C 67 du 6.3.2014, p. 53; JO C 76 du 14.3.2013, p. 24; JO C 24 du 28.1.2012, p. 99.

(7)  COM(2014) 902 final.

(8)  JO C 177 du 11.6.2014, p. 1; JO C 13 du 15.1.2016, p. 26; JO C 67 du 6.3.2014, p. 23.

(9)  Solvit, RAPEX, points de contact «produit», etc.

(10)  Directives 2014/23/UE, 2014/24/UE et 2014/25/UE.


18.5.2016   

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Journal officiel de l'Union européenne

C 177/9


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil concernant le prospectus à publier en cas d’offre au public de valeurs mobilières ou en vue de l’admission de valeurs mobilières à la négociation»

[COM(2015) 583 final]

(2016/C 177/02)

Rapporteure:

Mme Milena ANGELOVA

Le 15 janvier 2016 et le 18 janvier 2016, respectivement, le Parlement européen et le Conseil ont décidé, conformément à l’article 114 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, de consulter le Comité économique et social européen (CESE) sur la:

«Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil concernant le prospectus à publier en cas d’offre au public de valeurs mobilières ou en vue de l’admission de valeurs mobilières à la négociation»

[COM(2015) 583 final].

La section «Union économique et monétaire, cohésion économique et sociale», chargée de préparer les travaux du CESE en la matière, a adopté son avis le 3 mars 2016.

Lors de sa 515e session plénière des 16 et 17 mars 2016 (séance du 16 mars 2016), le CESE a adopté le présent avis par 158 voix pour, 1 voix contre et 2 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1.

Le CESE soutient fermement l’actuelle proposition de règlement, ainsi que l’approche qui la sous-tend, à savoir simplifier et rationaliser les exigences en matière de prospectus à publier en cas d’offre de valeurs mobilières sur les marchés réglementés afin de les rendre plus rentables et plus utiles pour les investisseurs s’agissant des informations qu’ils contiennent. Il se félicite de la clarté juridique accrue que la forme d’un règlement plutôt que celle d’une directive apporte dans ce cas aux émetteurs, aux investisseurs et à l’ensemble des parties prenantes, car elle permettra d’accroître la confiance des investisseurs et favorisera la réalisation d’une union des marchés des capitaux (UMC).

1.2.

Le CESE accueille favorablement l’attention particulière accordée à la reconquête de la confiance des investisseurs, approuve les mesures spécifiques prises à cet égard et soutient le principe selon lequel rendre les prospectus plus accessibles au lecteur et les adapter à la situation spécifique de l’émetteur présente le double avantage d’en réduire les coûts et d’en accroître la pertinence pour les investisseurs potentiels. Il estime par ailleurs que la possibilité de rendre disponibles tous les prospectus publiés au sein de l’Union européenne dans une base de données commune, conviviale et accessible devrait donner un élan vigoureux au développement des marchés des capitaux en Europe, à l’amélioration de la confiance des investisseurs et au développement de produits financiers plus diversifiés.

1.3.

La proposition de règlement vise clairement à réduire la charge administrative liée à l’élaboration des prospectus pour tous les émetteurs, en particulier pour les petites et moyennes entreprises (PME), les émetteurs fréquents de valeurs mobilières et les émissions secondaires, et, par conséquent, mérite le soutien du CESE. Les efforts visant à renforcer le rôle des prospectus comme moyen de divulgation d’informations auprès des investisseurs potentiels et à permettre une convergence accrue entre le prospectus de l’Union européenne et d’autres règles de l’Union européenne en matière de publication d’informations sont également louables.

1.4.

Afin de garantir que la proposition de règlement atteindra les objectifs qu’elle s’est fixé, il est nécessaire que toutes les parties prenantes soient étroitement associées au processus d’élaboration de la législation de niveau 2 et que soit effectuée une analyse d’impact qualitative approfondie deux ans après l’entrée en vigueur du règlement. Le CESE est particulièrement intéressé à participer activement à ces consultations.

1.5.

Le CESE demande instamment à la Commission de clarifier certains points imprécis susceptibles d’influer sur l’impact de la proposition de règlement ainsi que d’éviter toute situation où la marge discrétionnaire laissée aux États membres pourrait contribuer à produire une charge inutile et disproportionnée pour les émetteurs ou nuire à la clarté des informations présentant un intérêt pour les investisseurs. Il est dès lors vivement conseillé à l’Autorité européenne des marchés financiers (AEMF) de tenir compte, dans le cadre de l’exercice de ses compétences en vue d’une plus grande harmonisation des pratiques de surveillance dans les États membres, des avis non seulement des autorités réglementaires locales, mais aussi des parties prenantes locales, y compris des acteurs des marchés.

2.   La proposition de la Commission européenne

2.1.

La réforme de la législation en matière de prospectus à publier en cas d’offre de valeurs mobilières au public s’inscrit dans le troisième pilier du plan d’investissement pour l’Europe (1), qui vise à améliorer l’environnement des entreprises et constitue un élément clé de l’UMC (2).

2.2.

La proposition de règlement est l’aboutissement des efforts à long terme de la Commission pour améliorer le cadre juridique dans le domaine de la divulgation des informations relatives à l’émission de valeurs mobilières. En conséquence, il convient d’évaluer les éléments de la proposition de manière rétrospective en tenant compte des progrès déjà accomplis au cours des différentes étapes de ce processus.

2.2.1.

La directive 2003/71/CE du Parlement européen et du Conseil (3) a remplacé deux directives antérieures sur les prospectus [adoptées en 1980 (4) et en 1989 (5)], fortement critiquées par les parties prenantes parce qu’elles autorisaient des pratiques très divergentes dans l’Union et se basaient sur un système de reconnaissance mutuelle, laissant une discrétion importante aux autorités de l’État membre d’accueil. Elle a également introduit, pour la première fois, le principe de «passeport unique».

2.2.2.

Le réexamen de la directive 2003/71/CE en 2010 a montré que, malgré quelques progrès, elle n’offrait toujours pas la clarté juridique indispensable, n’était pas suffisamment efficace et efficiente et n’assurait pas un juste équilibre entre l’efficacité du marché et la protection des investisseurs, ce qui a conduit à son remplacement par la directive 2010/73/UE du Parlement européen et du Conseil (6).

2.2.3.

L’impact de la directive 2010/73/UE a fait l’objet d’une évaluation trois ans après son entrée en application. Les résultats de celle-ci ont clairement montré qu’elle n’avait pas produit les effets escomptés (par exemple en ce qui concerne le résumé du prospectus), n’était pas suffisamment ambitieuse (en matière des régimes d’information proportionnés) et ne contenait tout simplement pas les mesures nécessaires pour répondre à toutes les attentes des parties prenantes.

2.2.4.

La proposition de règlement contient un grand nombre de mesures et d’éléments nouveaux, et peut être considérée comme un important pas en avant s’agissant de réglementer mieux et avec une plus grande efficacité les émissions pour le public, et de permettre effectivement aux investisseurs et aux émetteurs d’opérer au sein de l’Union européenne.

2.3.

L’objectif principal de la proposition est d’accroître les possibilités pour les entreprises de lever, plus aisément et à moindre coût, des capitaux dans toute l’Union, sur la base d’un aval unique donné par l’autorité réglementaire d’un unique État membre (en général, le pays d’origine), tout en garantissant une information suffisante et exacte aux investisseurs.

3.   Observations générales

3.1.

Le CESE soutient pleinement l’initiative de la Commission visant à simplifier l’élaboration et les modalités de publication des prospectus d’offre de valeurs mobilières au public ou d’admission de valeurs mobilières à la négociation sur un marché réglementé établi ou opérant dans un État membre, en les rendant ainsi plus efficaces du point de vue des coûts et plus utiles pour les investisseurs sous l’angle des informations qu’ils contiennent. Le CESE a déjà exprimé son soutien à ces mêmes principes dans son avis sur la directive 2003/71/CE (7).

3.2.

Le CESE souligne l’importance de reconquérir la confiance des investisseurs et, à cet égard, se félicite de l’attention particulière accordée aux investisseurs dans le projet de règlement. Il approuve les mesures spécifiques prises à cet égard et soutient le principe selon lequel rendre les prospectus plus accessibles au lecteur et mieux les adapter à la situation spécifique de l’émetteur présente le double avantage d’en réduire les coûts et d’en accroître la pertinence pour les investisseurs potentiels. Il se félicite également de la meilleure structuration des facteurs de risque dans le prospectus.

3.3.

Le CESE exprime également son plein soutien et son approbation à l’égard de la Commission européenne quand elle estime qu’il convient de prendre des mesures pour améliorer la situation des émetteurs, en réduisant la charge administrative lors de l’offre de valeurs mobilières au public, car, à l’heure actuelle, les PME se heurtent à des difficultés à cet égard, en raison de l’énorme quantité de documents nécessaire et des coûts élevés que cela entraîne. Il est d’avis que les gains estimés de temps et d’argent pour les émetteurs mentionnés dans l’analyse d’impact de la proposition de règlement (environ 175 millions d’EUR par an) contribueront également à renforcer la compétitivité des entreprises de l’Union européenne.

3.4.

Le CESE estime que la possibilité de rendre disponibles tous les prospectus publiés au sein de l’Union européenne dans une base de données commune devrait donner un élan vigoureux au développement des marchés des capitaux en Europe, à l’amélioration de la confiance des investisseurs et au développement de produits financiers plus diversifiés. Pour que cette base de données puisse être réellement efficace, elle doit être conçue d’une manière conviviale et avoir un format qui rende l’information aisément accessible et utilisable.

3.5.

Le CESE salue l’obligation de réduire le volume d’informations publiées, mais de les communiquer de manière normalisée, qui permettra également de rationaliser le travail des administrations concernées et, par conséquent, de réduire les coûts liés à leurs activités.

3.6.

Le CESE accueille favorablement le choix de l’instrument législatif, ainsi que la décision de régir ce domaine au moyen d’un règlement plutôt que d’une directive. Dans la mesure où il s’agit d’un dispositif unique de règles directement applicables dans tous les États membres, le règlement mettra un terme au pouvoir discrétionnaire qui accompagnait jusqu’à présent la transposition de la directive (8) dans les législations nationales des États membres. L’adoption d’un règlement garantira l’unité et l’intégrité du marché intérieur, réduira les disparités et la fragmentation des réglementations en vigueur dans l’Union européenne et contribuera à la mise en place de l’UMC. Cette approche facilitera grandement la tâche des investisseurs qui ne devront pas se familiariser avec les différentes législations nationales, lorsqu’ils décident d’investir à l’étranger.

3.7.

Compte tenu de l’évolution de la législation de l’Union européenne en matière de prospectus et de la nécessité avérée de son amélioration continue, le CESE se félicite que, dès le stade de la proposition de règlement, la Commission ait l’intention d’évaluer l’incidence du règlement après son entrée en vigueur et que, plus particulièrement, elle ait défini les paramètres sur la base desquels cette évaluation sera réalisée. Il considère toutefois que cinq ans est un délai trop long pour procéder à une évaluation aussi importante et insiste pour qu’il soit sensiblement réduit et limité à deux ans après l’entrée en vigueur du règlement. Cela permettra d’examiner plus rapidement les effets du règlement proposé et de prendre, le cas échéant, des mesures correctives. En complément aux critères d’évaluation quantitatifs prévus, le CESE recommande également une évaluation qualitative en profondeur, qui analyse également minutieusement comment et dans quelle mesure les capitaux levés grâce aux efforts de simplification des prospectus ont amélioré la compétitivité des entreprises et dans quelle mesure ils ont contribué à l’accomplissement de progrès en matière de promotion des marchés des capitaux dans les États membres, et qui détermine de quelle manière cela a influencé le climat général des affaires au niveau national. Il est également essentiel d’évaluer si les États membres ont surréglementé la mise en œuvre du règlement dans le cas de l’application des dispositions dans les domaines où ils sont libres de les adapter.

4.   Observations spécifiques

4.1.

Le relèvement à 500 000 EUR (9) du seuil des émissions à partir duquel la publication d’un prospectus est exigée constitue un pas dans la bonne direction pour simplifier les démarches administratives dans la perspective d’améliorer l’accès des PME au financement. Cependant, le fait que les États membres aient le droit d’exiger des formes particulières de divulgation d’informations concernant ces émissions (10) ne doit pas entraîner de barrières administratives supplémentaires ni une surréglementation (11) et doit figurer dans l’analyse d’impact menée après l’entrée en vigueur du règlement. Le CESE entrevoit certains risques potentiels à cet égard et invite la Commission à étudier ce point de manière plus approfondie lors de l’analyse d’impact.

4.2.

Le CESE approuve entièrement l’attention particulière accordée par la Commission à une définition précise des PME et partage le point de vue selon lequel il pourrait s’avérer nécessaire d’encore affiner cette définition (12). Dans plusieurs de ses récents avis, le CESE a déjà mis en évidence la nécessité de fournir une définition harmonisée, actualisée et plus précise (13).

4.2.1.

Le CESE souscrit à la définition arrêtée dans la proposition de règlement [article 2, paragraphe 1, point f)], qui introduit l’obligation de satisfaire simultanément à au moins deux des trois conditions fixées dans la recommandation 2003/361/CE (14). Il estime que cette approche devrait être adoptée plus largement et être intégrée dans toutes les propositions législatives de la Commission européenne, ainsi que dans le droit et la pratique des États membres.

4.2.2.

Le CESE juge extrêmement positive l’augmentation du seuil de 100 à 200 millions d’EUR dans la définition des «sociétés à capitalisation boursière réduite» (15), qui reprend la définition figurant dans la directive 2014/65/UE (16) et remédie à la divergence existant entre cette dernière et la définition établie dans la directive 2003/71/CE (17).

4.3.

La possibilité de publier un prospectus «volontaire» (18) offre davantage de souplesse aux émetteurs ainsi qu’un accès plus facile aux marchés de capitaux de l’Union européenne.

4.4.

Les dispositions facilitant la négociation ultérieure «en cascade» des valeurs mobilières (19) constituent un nouvel élément très positif.

4.5.

La description extrêmement détaillée concernant le résumé du prospectus (20) qui est proposée réduit sensiblement la charge imposée aux émetteurs et comble une lacune relevée dans la directive 2010/73/UE à la suite de l’évaluation réalisée. L’exigence de n’inclure que des informations essentielles et concrètes constitue elle aussi une simplification tant pour les émetteurs que les investisseurs, car elle facilite pour ces derniers la navigation dans les données transmises et la comparaison des prospectus de différents émetteurs. Le CESE invite la Commission à veiller à ce que la responsabilité civile soit appliquée à tous les cas.

4.6.

La possibilité d’élaborer un prospectus de base pour l’émission de titres autres que de capital offre davantage de souplesse pour une catégorie supplémentaire d’émetteurs.

4.7.

Le document d’enregistrement universel est une possibilité (21) à exploiter, car elle allège considérablement bon nombre de contraintes administratives pour les émetteurs, facilitant ainsi leur accès au marché des capitaux.

4.8.

Les régimes spécifiques d’information (22) facilitent la publication de prospectus par les entreprises et leur traitement par les investisseurs, et méritent donc également d’être salués et soutenus.

4.9.

Le CESE se félicite vivement du fait que l’AEMF soit chargée d’élaborer certaines normes techniques réglementaires et d’exécution. Cela concerne notamment des instructions en vue d’un traitement plus clair des facteurs de risque et leur répartition dans des catégories pertinentes en mettant l’accent sur les risques spécifiques plutôt que sur les risques généraux ainsi que des listes destinées à étendre les informations qui peuvent être mentionnées par référence dans le prospectus. Ces dispositions favoriseront le processus d’intégration dans le domaine des marchés des capitaux.

4.10.

Le CESE suggère d’inclure également des propositions visant une plus grande harmonisation des procédures d’examen et de révision du prospectus en cas de suspension ou d’annulation de la publication. Très souvent, il existe de multiples procédures d’aller-retour avant la prise de la décision finale par l’institution régulatrice. Cette situation génère des retards inutiles qui peuvent s’avérer assez coûteux pour l’émetteur par rapport à ce que l’on peut observer lorsque toutes les recommandations de l’autorité de régulation sont présentées en une seule étape. Le CESE estime dès lors qu’il serait bénéfique pour le développement d’une UMC que l’AEMF élabore des règles uniformes à l’intention des États membres en matière de délais et de formats à employer pour fournir des indications concrètes aux émetteurs potentiels sur les façons de remédier à d’éventuelles insuffisances dans leurs projets de prospectus. De telles initiatives faciliteraient l’élaboration des prospectus par les émetteurs, et, en particulier, les PME, et, dans le même temps, permettraient de créer un environnement plus homogène et de réduire les motifs de pouvoir réglementaire discrétionnaire.

4.11.

Le CESE soutient également la pratique consistant à prévoir une partie volontaire dans le prospectus permettant aux entreprises de communiquer aux investisseurs des informations supplémentaires non financières factuellement correctes concernant des questions comme la protection de l’environnement, les pratiques de production, la participation à des programmes sociaux, etc. Ces informations revêtent une importance particulière pour les grandes entreprises publiques qui sont les porte-drapeaux de la responsabilité sociale des entreprises et répondent à la demande d’un prospectus correct, clair et complet.

4.12.

Le CESE formule les recommandations suivantes en vue de l’amélioration des annexes de la proposition de règlement.

4.12.1.

Les sections traitant des facteurs de risque devraient être plus précises: le document d’enregistrement universel devrait faire une distinction entre les risques pour la société et ceux pour l’activité de la société (annexe II, II.C., p. 5).

4.12.2.

La note relative aux valeurs mobilières ne devrait traiter que des risques liés aux titres (annexe III, III.C., p. 8) afin d’éviter les doublons.

4.12.3.

L’identification des directeurs, des membres de l’encadrement supérieur, des consultants, des auditeurs et certaines autres informations (annexe III, I, p. 8) devraient être retirées de la note relative aux valeurs mobilières, car ces informations figurent déjà dans le document d’enregistrement, sauf lorsque des titres sont proposés par des actionnaires.

4.12.4.

Le statut de l’émetteur peut être mis à disposition sous la forme d’un document distinct auquel le prospectus peut se référer.

4.12.5.

Le CESE recommande de réduire le délai d’approbation des prospectus pour les émetteurs occasionnels et de raccourcir le délai de réponse de l’autorité de régulation en cas d’envoi de corrections, qui devraient être plus courts que les délais proposés initialement. Il devrait également être possible de ne communiquer que les parties corrigées du prospectus en réponse aux observations et de réduire le nombre d’exemplaires sur papier en prévoyant une variante électronique du prospectus et de ses annexes.

4.12.6.

Le CESE invite la Commission à prévoir un délai raisonnable afin de permettre une progression régulière dans la mise en œuvre des nouvelles dispositions et de laisser le temps aux marchés et aux émetteurs de s’adapter en conséquence aux changements en question.

5.   Questions en suspens

5.1.

Certaines questions qui pourraient influer sur l’impact de la présente proposition de règlement ne sont pas suffisamment éclaircies; le CESE recommande de les traiter de manière plus appropriée.

5.1.1.

Pour les offres de valeurs mobilières au public, aucun prospectus ne sera exigé si le montant de celles-ci est inférieur au seuil de 500 000 EUR (23). Dans ce dernier cas, il est proposé que les autorités nationales de régulation puissent arrêter sur une base discrétionnaire «des formes appropriées de publicité de la part des émetteurs». Le CESE recommande que le contenu de ces «formes appropriées» soit précisé au préalable de manière à prévenir toute forme de traitement inégal des émetteurs dans les différents États membres et qu’elles soient plus simples que le prospectus.

5.1.2.

Par ailleurs, il est prévu que les autorités nationales de régulation aient la faculté d’exclure du champ d’application des dispositions du règlement relatives à l’harmonisation des prospectus toutes les émissions de 500 000 à 10 000 000 EUR, pour autant que la dérogation ne s’applique que sur le territoire de l’État membre concerné et que le prospectus ne doive pas être «passeporté». À cet égard, nous considérons que plus la marge d’appréciation de l’autorité nationale de régulation est grande, plus élevée est la probabilité que des mêmes catégories d’émetteurs fassent l’objet d’un traitement inégal de la part des législations nationales des différents États membres. Cela contribue aussi à éviter les éventuels effets indésirables d’un abaissement du niveau de protection des consommateurs. Dans ces conditions, le CESE estime qu’il convient de limiter dans une certaine mesure le pouvoir discrétionnaire de l’échelon national. Afin de développer cette idée un peu plus, le CESE invite la Commission à examiner si l’exemption susmentionnée de toutes les émissions de 500 000 à 10 000 000 EUR peut être préjudiciable, notamment aux PME, dans la perspective de l’UMC. Le CESE invite la Commission à revoir, à la lumière des conclusions de cette analyse, la question de savoir s’il convient de maintenir ou de supprimer cette exemption.

5.1.3.

Les actes délégués visés à l’article 42 du règlement proposé devraient faire l’objet d’un examen approfondi avec toutes les parties prenantes avant leur adoption définitive. Le CESE est particulièrement intéressé à participer activement aux consultations relatives à l’élaboration de la législation de niveau 2.

5.1.4.

De la même façon, l’AEMF devrait tenir compte, dans le cadre de l’exercice de ses compétences en matière d’harmonisation des pratiques de surveillance dans les États membres, des avis non seulement des autorités réglementaires locales, mais aussi des parties prenantes locales, y compris des acteurs des marchés.

5.1.5.

Étant donné qu’aucun prospectus ne sera exigé pour les émissions d’une valeur inférieure à 500 000 EUR, qui n’entrent pas dans le champ d’application du règlement, le CESE recommande que la Commission européenne ou l’AEMF formule des recommandations à l’intention des États membres sur la manière de clarifier le statut des «PME émettrices», qui ne sont pas autorisées à négocier sur les marchés réglementés mais opèrent dans les systèmes multilatéraux de négociation ou par l’intermédiaire de plates-formes de financement participatif. Ces recommandations devraient également porter sur la question de savoir si ces entreprises doivent être assimilées à des entreprises publiques ou privées et quels sont les dispositifs de surveillance prévus pour elles.

5.1.6.

Le CESE attire l’attention sur le texte de l’article 25, paragraphe 2, qui se réfère à «une langue usuelle dans la sphère financière internationale». Il estime qu’il devrait s’agir d’une langue officielle de l’Union européenne, qui soit acceptée par le pays hôte.

5.1.7.

En ce qui concerne l’article 7 relatif au résumé fournissant des informations aux investisseurs, il serait utile d’inclure des mises en garde spécifiques concernant les risques associés à l’investissement.

Bruxelles, le 16 mars 2016.

Le président du Comité économique et social européen

Georges DASSIS


(1)  COM(2014) 903 final.

(2)  COM(2015) 468 final. Le plan d’action pour la mise en place d’une UMC présente un programme exhaustif et ambitieux de mesures visant à renforcer le rôle du financement par les marchés financiers dans l’économie européenne.

(3)  Directive 2003/71/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003 concernant le prospectus à publier en cas d’offre au public de valeurs mobilières ou en vue de l’admission de valeurs mobilières à la négociation, et modifiant la directive 2001/34/CE (JO L 345 du 31.12.2003, p. 64).

(4)  Directive 80/390/CEE du Conseil du 17 mars 1980 portant coordination des conditions d’établissement, de contrôle et de diffusion du prospectus à publier pour l’admission de valeurs mobilières à la cote officielle d’une bourse de valeurs (JO L 100 du 17.4.1980, p. 1).

(5)  Directive 89/298/CEE du Conseil du 17 avril 1989 portant coordination des conditions d’établissement, de contrôle et de diffusion du prospectus à publier en cas d’offre publique de valeurs mobilières (JO L 124 du 5.5.1989, p. 8).

(6)  Directive 2010/73/UE du Parlement européen et du Conseil du 24 novembre 2010 modifiant la directive 2003/71/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003 concernant le prospectus à publier en cas d’offre au public de valeurs mobilières ou en vue de l’admission de valeurs mobilières à la négociation et la directive 2004/109/CE sur l’harmonisation des obligations de transparence concernant l’information sur les émetteurs dont les valeurs mobilières sont admises à la négociation sur un marché réglementé (JO L 327 du 11.12.2010, p. 1).

(7)  Avis du CESE sur la directive 2010/73/UE du Parlement européen et du Conseil du 24 novembre 2010 modifiant la directive 2003/71/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003 concernant le prospectus à publier en cas d’offre au public de valeurs mobilières ou en vue de l’admission de valeurs mobilières à la négociation et la directive 2004/109/CE sur l’harmonisation des obligations de transparence concernant l’information sur les émetteurs dont les valeurs mobilières sont admises à la négociation sur un marché réglementé (JO C 347 du 18.12.2010, p. 79).

(8)  Directive 2010/73/UE.

(9)  Article 1er, paragraphe 3, point d), de la proposition de règlement.

(10)  Article 3, paragraphe 2, de la proposition de règlement.

(11)  Dans sa communication intitulée «Améliorer la réglementation pour obtenir de meilleurs résultats — Un enjeu prioritaire pour l’Union européenne» [COM(2015) 215 final, p. 7], la Commission évoque la surréglementation en ces termes: «Les États membres vont aussi souvent au-delà de ce qui est strictement requis par la législation de l’Union européenne lorsqu’ils mettent cette dernière en œuvre au niveau national (“surréglementation”)». La Commission précise dans le même paragraphe que cette pratique «peut en amplifier les retombées positives, mais aussi entraîner, pour les entreprises et les pouvoirs publics, des coûts supplémentaires inutiles imputés, à tort, à la législation de l’Union européenne».

(12)  Article 2, paragraphe 1, point f), de la proposition de règlement.

(13)  Avis du CESE sur le Livre vert «Construire l’union des marchés des capitaux» (JO C 383 du 17.11.2015, p. 64). Rapport d’information du CESE sur l’«Accès au financement pour les PME» (EESC-2014-06006-00-00-RI-TRA) et avis du CESE sur «L’entreprise familiale en Europe comme source de croissance renouvelée et d’emplois de meilleure qualité» (JO C 13 du 15.1.2016, p. 8). Dans ces avis, le CESE appelle la Commission européenne à affiner la définition des PME, de manière à mieux refléter la diversité des entreprises en Europe et à répondre à la nécessité de normaliser les diverses définitions figurant actuellement dans la recommandation 2003/361/CE de la Commission (laquelle reprend dans les grandes lignes la recommandation 96/280/CE de la Commission de 1996, qui est particulièrement obsolète et ne tient pas compte de l’élargissement de l’Union européenne) ainsi que dans la directive 2014/65/UE du Conseil du 15 mai 2014 sur les marchés d’instruments financiers et la directive 2013/34/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 relative aux états financiers annuels, aux états financiers consolidés et aux rapports associés de certaines formes d’entreprises (les divergences dans la définition proposée par ces deux directives sont corrigées dans la présente proposition de règlement).

(14)  Article 2, paragraphe 1, point f), de la proposition de règlement. Dans la pratique, la définition originale des PME, telle qu’établie dans la recommandation 96/280/CE, prévoit que deux des trois conditions soient satisfaites simultanément. Mais la recommandation 2003/361/CE donne ensuite le pouvoir discrétionnaire aux autorités compétentes «pour des raisons de simplification administrative» leur permettant de «ne retenir qu’un seul critère, celui de l’effectif, pour la mise en œuvre de certaines de leurs politiques» (considérant 7), ce qui peut mener à l’exclusion d’une grande partie des entreprises du champ d’application de la définition, entreprises qui seraient retenues si deux des trois critères étaient utilisés simultanément selon la définition initiale.

(15)  Article 2, paragraphe 1, point f), deuxième tiret, de la proposition de règlement.

(16)  Article 4, paragraphe 1, point 13), de la directive 2014/65/UE.

(17)  Article 2, paragraphe 1, de la directive 2003/71/CE.

(18)  Article 4 de la proposition de règlement.

(19)  Article 5 de la proposition de règlement.

(20)  Article 7 de la proposition de règlement.

(21)  Article 9, en liaison avec l’article 10, paragraphe 2, l’article 11, paragraphe 3, l’article 13, paragraphe 2, et l’article 19, paragraphe 5, de la proposition de règlement.

(22)  Articles 14 et 15 de la proposition de règlement.

(23)  Article 1, paragraphe 3, point d), de la proposition de règlement.


18.5.2016   

FR

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C 177/16


Avis du Comité économique et social européen sur la «Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil et à la Banque centrale européenne — Feuille de route en vue d’une représentation extérieure plus cohérente de la zone euro dans les instances internationales»

[COM(2015) 602 final]

et la

«Proposition de décision du Conseil arrêtant des mesures en vue d’établir progressivement une représentation unifiée de la zone euro au sein du Fonds monétaire international»

[COM(2015) 603 final — 2015/0250 (NLE)]

(2016/C 177/03)

Rapporteur:

M. Petr ZAHRADNIK

Le 11 novembre 2015, la Commission européenne a décidé, conformément à l’article 304 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, de consulter le Comité économique et social européen (CESE) sur la

«Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil et à la Banque centrale européenne — Feuille de route en vue d’une représentation extérieure plus cohérente de la zone euro dans les instances internationales»

[COM(2015) 602 final]

et la

«Proposition de décision du Conseil arrêtant des mesures en vue d’établir progressivement une représentation unifiée de la zone euro au sein du Fonds monétaire international»

[COM(2015) 603 final — 2015/0250 (NLE)].

La section spécialisée «Union économique et monétaire et cohésion économique et sociale», chargée de préparer les travaux du CESE en la matière, a adopté son avis le 3 mars 2016.

Lors de sa 515e session plénière des 16 et 17 mars 2016 (séance du 17 mars 2016), le CESE a adopté le présent avis par 204 voix pour, 5 voix contre et 3 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations (propositions)

1.1.

La conclusion générale principale est que, si la zone euro entend être plus active, efficace et visible dans les institutions financières internationales, elle doit renforcer sa représentation extérieure. Cela permettra d’augmenter son poids relatif dans les institutions financières internationales et lui donnera une place plus importante sur les marchés financiers internationaux. Le CESE a fait connaître ses avis sur cette question avant que la Commission européenne ne publie les documents à l’examen (1).

1.2.

Le CESE approuve de même la logique qui sous-tend ces deux documents, à savoir que, à la suite de la consolidation notable de la gouvernance interne de la zone euro (en particulier entre 2009 et 2014), il est opportun de se montrer à la hauteur de ce progrès en améliorant la représentation de la zone dans l’économie mondiale. Il s’agit de manifester ainsi le renforcement du pilier politique qui assure des liens équilibrés et une cohérence entre la cohésion interne et les nécessités extérieures du fonctionnement de la zone euro, et qui conduit également au rapprochement du modèle de politiques économiques de chacun des États qui en sont membres.

1.3.

Le CESE convient également qu’il y a lieu d’accorder la priorité au renforcement de la représentation extérieure de la zone euro au sein du Fonds monétaire international (FMI). Plusieurs raisons justifient ce choix, la première étant le rôle prépondérant du FMI dans la gouvernance économique et la politique économique mondiales, ainsi que sa participation très concrète aux plans de sauvetage d’un certain nombre d’États membres de l’Union européenne ces dernières années.

1.4.

Cependant, le CESE estime également que la proposition d’amélioration de la représentation extérieure de l’Union européenne ou de la zone euro constitue une première étape dans le déroulement d’ensemble de cette démarche, qui sera suivie par un scénario tout aussi détaillé concernant les relations envers d’autres institutions qui jouent, par exemple, un rôle dans la poursuite des objectifs d’une union bancaire et d’une union des marchés des capitaux, telles que la Banque des règlements internationaux (BRI) ou l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE). Le CESE propose que la Commission européenne, tout en poursuivant la priorité de renforcer la représentation extérieure de la zone euro au sein du FMI, élabore aussi des scénarios visant à renforcer et à rendre plus efficaces les liens avec d’autres organismes internationaux pertinents, en tenant compte en particulier de leurs domaines de compétence.

1.5.

Le CESE souscrit dans une large mesure à l’objectif final d’une présidence unique au FMI à l’horizon 2025, tel qu’il figure dans la proposition relative à la représentation extérieure de la zone euro, ainsi qu’au scénario pour y parvenir. Il soutient également l’appel lancé par la Commission afin que le Parlement européen et le Conseil parviennent à un consensus qui permettra à ce dernier d’adopter une décision globalement favorable à l’approche proposée.

1.6.

Dans ce contexte, le CESE préconise dans le même temps de délimiter clairement et explicitement les rôles de la représentation extérieure de la zone euro, d’une part, et de les relier de manière coordonnée avec ceux de l’Union européenne dans son ensemble, d’autre part, dans l’idée de préserver l’intégrité du marché unique. De l’avis du CESE, la représentation proposée de la zone euro au sein du FMI englobe des domaines qui, en réalité et en substance, ne se limitent pas à cette seule zone, mais sont également extrêmement importants pour l’ensemble de l’Union européenne et pour tous ses États membres. Le CESE préconise dans le même temps de prendre aussi en considération, dans le cadre de la démarche relative à la représentation extérieure de la zone euro, la question de sa future extension. L’existence d’une telle coordination peut constituer une raison et un motif supplémentaires pour jauger la décision sur l’état de préparation d’un État membre à l’entrée dans la zone euro.

1.7.

Le CESE approuve les principaux éléments du scénario en trois étapes visant à obtenir, à l’horizon 2025, un siège unique au FMI, ainsi que les phases de transition pour y parvenir. Il est toutefois nécessaire de faire en sorte d’exercer une pression politique appropriée afin que soient accomplies en temps voulu les obligations, ainsi que les engagements qui en découlent, pour les États membres.

1.8.

Le CESE approuve également la proposition de mettre en place un système qui permettrait de créer une fonction de représentant des intérêts de la zone euro, doté de compétences — en premier lieu au sein du FMI, mais également au sein de toutes les autres institutions financières concernées à Bruxelles (faisant ainsi du SCFMI un sous-comité à part entière du comité économique et financier). Il conviendrait également de constituer une entité chargée de représenter les intérêts communs de la zone euro à Washington, et qui assumerait également la coordination réelle et explicite avec les États membres n’appartenant pas à la zone euro.

1.9.

Le CESE escompte que la procédure proposée se traduira par une coordination plus efficace et plus intense entre les États membres dans le domaine de la politique économique et de ses aspects extérieurs, et s’attend à ce qu’il y ait une concertation à cet égard entre les institutions et organes de l’Union européenne concernés, garantissant également la plus grande transparence.

1.10.

De l’avis du CESE, les deux documents se concentrent principalement sur les aspects de procédure et organisationnels ou législatifs/juridiques de la question. Le CESE recommande d’inclure une analyse économique et un bref exposé des avantages et des retombées attendus à la suite de sa mise en œuvre.

1.11.

Le CESE approuve et soutient la pratique proposée de remise, au plus tôt à dater du printemps 2017, de rapports réguliers sur les progrès accomplis pour parvenir à un renforcement de la représentation extérieure de la zone euro.

2.   Les propositions de la Commission: contenu et analyse

2.1.

Le présent avis fait la synthèse des observations relatives à deux documents publiés le 21 octobre 2015 dans le cadre d’un ensemble de mesures relatives à l’Union économique et monétaire (UEM). Tous deux traitent de l’une des priorités dudit paquet, à savoir la représentation extérieure de la zone euro. L’ensemble de ces mesures est conçu comme un système de mesures interconnectées et conditionnelles, qui toutes sont essentielles pour atteindre l’objectif recherché en 2025.

2.2.

L’idée sous-jacente s’appuie sur les propositions qui existent déjà en vue de la mise en place d’une union économique et monétaire véritable et approfondie (novembre 2012) et a été une nouvelle fois mise en évidence dans le rapport des cinq présidents de juin 2015.

2.3.

Les documents examinés partent du principe selon lequel le FMI est la principale institution à l’égard de laquelle la représentation extérieure de la zone euro devrait être renforcée.

2.4.

Une zone euro qui aurait un seul président serait également en mesure de s’entretenir d’une seule voix avec le FMI, sur des domaines dans lesquels les politiques de l’Union européenne sont dans une large mesure coordonnées, à savoir la politique économique et budgétaire, la surveillance macroéconomique, les politiques de taux de change et la stabilité financière.

2.5.

La proposition formulée en réponse à cet état de fait est favorable à une représentation extérieure de la zone euro plus cohérente et plus efficace au sein du FMI, sur la base d’une stratégie visant à convenir d’un scénario le plus rapidement possible et à le mettre en œuvre progressivement. Trois étapes sont proposées.

2.6.

La notion de renforcement de la représentation extérieure de la zone euro doit être mise en œuvre de manière transparente et les groupes concernés du public doivent être informés au moyen de rapports réguliers sur les progrès réalisés.

2.7.

La représentation unifiée de la zone euro au sein du FMI, telle qu’envisagée pour 2025 au plus tard, est définie comme suit dans les dispositions législatives de la proposition de décision [COM(2015) 603 final]:

conseil des gouverneurs: présentation des points de vue de la zone euro par le président de l’Eurogroupe,

Comité monétaire et financier international (CMFI): représentation de la zone euro par le président de l’Eurogroupe,

conseil d’administration du FMI: représentation directe de la zone euro par l’administrateur d’un groupe «zone euro», après l’établissement d’un ou de plusieurs groupes composés exclusivement d’États membres de la zone euro (élection de l’administrateur sur proposition du président de l’Eurogroupe; coordination totale des déclarations orales et écrites).

2.8.

En cas d’extension de la zone euro, les modifications nécessaires seront réalisées en coordination avec les États hors zone euro et des mesures seront prises afin d’adapter en conséquence la représentation unifiée.

3.   Observations générales

3.1.

Le premier document examiné se concentre principalement sur les questions de procédure et d’organisation, le second intégrant son contenu dans un projet de loi. Tous deux contribuent à part entière à créer le pilier politique de la zone euro et à assurer l’équilibre entre les instruments internes et externes dont celle-ci dispose. Le fait de parler d’une seule voix dans le cadre de la représentation extérieure de la zone euro en renforcera la coordination et la cohésion et contribuera également à rapprocher toute la gamme des politiques économiques entre chacun de ses membres. Pour garantir et accomplir cette vision, il est nécessaire d’accepter une responsabilité accrue dans le sens d’une intégration plus intense et du renforcement des institutions.

3.2.

La période de 2009 à 2014 a vu l’adoption d’un nombre sans précédent de mesures visant à coordonner les politiques économiques de l’Union. Il s’agit notamment de l’introduction du processus cyclique du semestre européen, de la modification des règles du pacte de stabilité et de croissance, de l’adoption des mesures législatives dites «six-pack» et «two-pack» du traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance au sein de l’Union économique et monétaire (pacte budgétaire), du mécanisme européen de stabilité (MES), de l’union bancaire et de l’union des marchés des capitaux). Ces mesures visaient majoritairement à remédier aux lacunes des éléments constitutifs de la zone euro ou à adopter des actions de sauvetage à court terme pour répondre aux exigences impérieuses de politique économique et budgétaire. Le paquet de mesures publié le 21 octobre 2015, qui fait suite au rapport des cinq présidents, constitue, pour la première fois depuis longtemps, un projet ambitieux, résolument tourné vers l’avenir et destiné en premier lieu à développer et à améliorer le cadre institutionnel et la palette des instruments de la zone euro, ainsi que son architecture, que la réalisation desdites mesures devrait permettre d’optimiser et d’intégrer plus avant.

3.3.

Les mesures prises au cours de la période 2009-2014 portaient essentiellement sur le renforcement du fonctionnement interne de la zone euro. De ce fait, les modalités de la représentation extérieure n’ont pas tenu compte de l’importance accrue de celle-ci ni de la transition alors en cours en matière d’harmonisation des politiques économiques. Au sein des institutions financières internationales et, en fin de compte, sur les marchés financiers internationaux, la zone euro soit a perdu du terrain en termes relatifs, soit n’a pas pleinement exploité son potentiel. Il s’ensuit que l’amélioration de la position extérieure de la zone euro devrait se faire sentir dans le monde extérieur et doit être plus cohérente et unifiée au sein du système financier mondial.

3.4.

La représentation extérieure de la zone euro devrait être considérée dans le contexte politique plus large qui a motivé le rapport des cinq présidents. Il est possible d’en tirer implicitement la conviction que:

a)

la structure actuelle de l’UEM ne permet pas d’assurer le respect des contributions qui sont attendues de la zone euro;

b)

en l’absence de représentation extérieure adéquate, les mesures relatives aux affaires intérieures de la zone euro ne peuvent être efficaces au regard du rôle qui est celui de l’euro dans l’économie mondiale.

3.5.

On peut faire valoir que, si la représentation extérieure de la zone euro n’est pas mise en œuvre, le potentiel de cette zone à formuler une politique monétaire et économique mondiale ne sera pas exploité et l’attrait de l’euro en tant que monnaie d’échange, d’investissement et de réserve dans le contexte mondial, sera réduit.

3.6.

La nécessité de se concentrer sur le FMI vient de la forte complémentarité entre les politiques économiques de l’Union européenne et du FMI et leurs instruments, maintenant qu’ils ont été nettement renforcés et coordonnés au sein de l’Union européenne et en particulier dans la zone euro (2). Le FMI est l’institution clé de la gouvernance économique mondiale et a également joué un rôle important, en collaboration avec la Commission européenne et la Banque centrale européenne, dans l’élaboration et la mise en œuvre des plans de sauvetage des États membres touchés par les crises économique et de la dette souveraine. Le rôle du FMI devrait continuer à se développer et la nécessité d’une collaboration entre le Fonds et la zone euro va désormais être abordée dans une perspective nettement plus large et plus globale que le point de vue isolé des États membres individuels. Dans le même temps, le CESE attire toutefois l’attention sur le fait que, si la zone euro avait d’emblée disposé de son propre Fonds monétaire européen, comme le prévoyaient déjà les propositions initiales qui ont précédé la création du système monétaire européen à la fin des années 70, celui-ci aurait pu tenir pendant la crise le rôle que le FMI a précisément joué dans les faits.

3.7.

Une représentation extérieure de la zone euro plus forte et plus efficace est entravée par de nombreux obstacles correctement identifiés et évalués:

la dispersion des États membres (les 19 États membres de la zone euro présents au conseil d’administration du FMI sont répartis entre six groupes, deux de ces États disposant de leur propre siège; ce système empêche souvent les États membres de la zone euro d’exprimer une position commune);

la représentation insuffisante de la zone euro dans son ensemble (aucun représentant unique de la zone euro ne dispose d’un mandat officiel au conseil d’administration du FMI — ce rôle est actuellement rempli par le président de l’EURIMF); le FMI ne dispose pas non plus d’un partenaire idéal en ce qui concerne les questions d’intérêt commun pour la zone euro (il suffit à nouveau de penser aux mesures récemment prises en vue de coordonner davantage les politiques économiques); la Banque centrale européenne dispose du statut d’observateur au sein du conseil d’administration du FMI;

une coordination insuffisante au niveau de la zone euro (incapacité à exécuter pleinement la stratégie de Vienne du Conseil européen qui remonte à 1998); la coordination à l’échelle de l’Union européenne, par le comité économique et financier et son sous-comité sur les questions relatives au FMI et les questions connexes (SCIMF), consiste en réalité en la défense par chaque État membre de sa propre position.

3.8.

Compte tenu de ce qui précède, l’on peut tirer des deux documents à l’examen une observation fondamentale: la concrétisation de leur teneur requiert un degré intense de coordination à plusieurs égards, à savoir entre les instruments internes et externes dont dispose la zone euro en vue d’en optimiser la structure et le fonctionnement, d’harmoniser les politiques économiques, de parvenir à la cohésion et à la convergence, entre les États qui appartiennent à la zone euro et ceux des États membres qui n’ont pas adopté la monnaie commune (au moyen de la procédure élaborée en cas d’extension de la zone euro) et entre les différentes formes de représentation extérieure de la zone euro (pour les questions monétaires, la politique structurelle, le secteur bancaire et le marché financier, la politique économique). L’on peut considérer l’idée selon laquelle l’euro constitue la monnaie commune de l’Union européenne comme le point de départ des principes qui régissent cette coordination.

3.9.

L’on peut également considérer comme une observation générale la nécessité de rééquilibrer le caractère procédural, administratif et législatif des documents à l’examen au moyen d’un argumentaire adéquat fondé sur une analyse économique et d’ordre politique.

4.   Observations particulières

4.1.

En parallèle aux observations générales formulées ci-avant, il serait opportun qu’un schéma simple, de principe, soit établi afin d’illustrer la corrélation entre la nouvelle gouvernance économique de l’Union européenne et les politiques du FMI ainsi que, le cas échéant, d’autres institutions. Il devrait être similaire, par exemple, au calendrier et au programme d’exécution et de réalisation du semestre européen et rendrait les discussions sur cette question plus transparentes et plus accessibles.

4.2.

L’on peut également recommander d’élaborer un scénario relatif à la coordination interne du fonctionnement des institutions et organismes de l’Union européenne concernés, dans l’idée d’obtenir des synergies effectives entre eux, en particulier au cours de la phase préparatoire et des phases transitoires de la réalisation de ce projet et au cours d’une période d’extension de la zone européenne sous l’angle de la souplesse des règles et des procédures. Afin de garantir un maximum de transparence et de responsabilité démocratique, comme demandé dans la communication de la Commission, le Parlement européen devrait pouvoir intervenir dans ces matières, en conformité avec la méthode communautaire de prise de décision.

4.3.

La proposition d’étendre la représentation extérieure de la zone euro fait partie d’un paquet qui refond le semestre européen et introduit les conseils nationaux de la compétitivité et un comité budgétaire européen. Ces mesures en particulier exigeront de l’Union européenne et de la zone euro d’être représentées au sein d’autres enceintes internationales pertinentes. À cet égard, il semble utile de renforcer les synergies avec l’OCDE, le G7, le G20, la BRI ou encore la Banque mondiale. Ces démarches touchent à l’exécution et à la coordination des politiques macroéconomiques, de la réforme de la règlementation financière et de la transparence fiscale (par les représentants de l’Union européenne et de la zone euro — à savoir le président du Conseil européen, le président de la Commission européenne, le président de l’Eurogroupe, les représentants de la Commission européenne, de la Banque centrale européenne — et les ministres de chacun des États représentés au sein du G7 et du G20), des questions liées à la mise en place d’une union bancaire et d’une union des marchés des capitaux et d’autres thèmes en rapport. D’autres institutions pourraient être concernées, comme la Banque asiatique d’investissement pour les infrastructures (BAII), où de nombreux États membres de l’Union européenne sont représentés.

4.4.

Les conclusions qui viennent d’être mises en évidence donnent à penser que la nécessité d’une efficacité accrue de la représentation extérieure de la zone euro constitue un premier pas indispensable afin de renforcer le poids, l’importance et le statut de l’unité monétaire de l’Union européenne dans l’économie mondiale; il convient de franchir ce pas dans le contexte du projet d’achèvement de l’UEM, et son succès dépendra fortement des performances économiques réelles de la zone euro et de la qualité d’exécution de l’ensemble des politiques économiques qui s’y rapportent.

Bruxelles, le 17 mars 2016.

Le président du Comité économique et social européen

Georges DASSIS


(1)  Avis d’initiative du CESE sur le thème «Achever l’UEM: le pilier politique» (JO C 332 du 8.10.2015, p. 8).

(2)  Avis d’initiative du CESE «Les implications de la crise de la dette publique pour la gouvernance de l’Union européenne» (JO C 51 du 17.2.2011, p. 15).


18.5.2016   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 177/21


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (UE) no 806/2014 afin d’établir un système européen d’assurance des dépôts»

[COM(2015) 586 final — 2015/0270 (COD)]

(2016/C 177/04)

Rapporteur:

M. Daniel MAREELS

Les 18 et 20 janvier 2016, respectivement, le Parlement européen et le Conseil ont décidé, conformément à l’article 114 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la:

«Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (UE) no 806/2014 afin d’établir un système européen d’assurance des dépôts»

[COM(2015) 586 final — 2015/0270 (COD)].

La section spécialisée «Union économique et monétaire, cohésion économique et sociale», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 3 mars 2016.

Lors de sa 515e session plénière des 16 et 17 mars 2016 (séance du 17 mars 2016), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 197 voix pour, 2 voix contre et 8 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1.

Conjointement et simultanément à sa proposition relative à un système européen d’assurance des dépôts (SEAD), la Commission a publié une communication intitulée «Vers l’achèvement de l’union bancaire»  (1). Il ressort de la publication que les deux textes vont de pair: l’introduction de nouvelles mesures de partage des risques (la proposition SEAD) doit s’accompagner de mesures additionnelles de réduction des risques au sein de l’union bancaire (la communication). Il apparaît ainsi que les deux documents constituent deux éléments d’un même ensemble et, par conséquent, le Comité juge opportun de se prononcer également sur la communication. Le CESE accueille favorablement la proposition législative et la communication.

1.2.

En résumé et en principe , le Comité estime, puisqu’il est désormais établi que le SEAD et les mesures annoncées en matière de réduction des risques ont en commun un certain nombre d’objectifs fondamentaux et importants liés au renforcement et à l’achèvement de l’union bancaire, que ces deux types de mesures devront être mises en œuvre de la même manière et avec des outils et méthodes réellement équivalents. Ces deux approches, qui doivent donner des garanties identiques afin d’atteindre effectivement les objectifs respectivement visés, s’imposent d’autant plus que les deux types de mesures sont complémentaires et nécessaires pour offrir une solution équilibrée et acceptable pour tous, qui soit en même temps concluante. Par conséquent et pour que de réels progrès puissent être enregistrés, le Comité juge essentiel de veiller à ce que le SEAD et les mesures pertinentes de réduction des risques soient traités et mis en œuvre sans délai, simultanément et de manière effective, conformément à un calendrier clair et pratique. La création des conditions appropriées pour pouvoir progresser est tout aussi cruciale afin de poursuivre la réalisation de l’Union économique et monétaire (UEM), dont l’union bancaire constitue un élément majeur.

1.3.

En ce qui concerne le SEAD, celui-ci revêt une grande importance au sein de l’union bancaire, dont il constitue le troisième pilier. Le Comité a déjà manifesté précédemment un soutien sans faille à l’achèvement de l’union bancaire et au système d’assurance des dépôts, en insistant la nécessité d’une action rapide en la matière, en vue de renforcer la stabilité économique et financière dans l’Union européenne.

1.4.

Des dépôts stables, sûrs et bien protégés sont dans l’intérêt de tous, et surtout des épargnants et des déposants. Le CESE reste convaincu de l’importance de préserver leur confiance et de leur offrir la meilleure protection possible. Il convient dès lors de renforcer la confiance des épargnants et des déposants dans les banques et de leur permettre de profiter des bénéfices de l’intégration financière et d’une concurrence équitable entre les banques. Les dépôts stables restent en outre indispensables pour le financement de l’économie, ainsi que des ménages et des entreprises, en particulier les PME.

1.5.

Pour le CESE, le SEAD doit permettre de continuer à renforcer l’union bancaire, d’accroître sa capacité de résistance aux éventuelles crises financières et d’améliorer la stabilité financière. Un système européen d’assurance des dépôts est de nature à influencer favorablement la situation des États membres et des banques étant donné qu’il peut mieux contribuer à absorber les chocs locaux. Cela peut ôter à certains l’envie de spéculer contre certains pays ou certaines banques, et ainsi faire baisser le risque de panique bancaire. Dans le même temps, le lien entre les banques et leurs emprunteurs souverains devient encore plus ténu.

1.6.

Quant aux mesures annoncées en matière de réduction des risques dans l’union bancaire, elles sont tout aussi indispensables. Elles contribuent au renforcement de l’union bancaire en garantissant des conditions de concurrence équitables entre les banques et l’affaiblissement de leur lien avec leurs emprunteurs souverains. La résistance et la stabilité du système s’en trouvent renforcées. L’acceptation de mécanismes de partage des risques requiert la mise en place effective de conditions équitables en matière de réglementation et de supervision, ce qui, à son tour, contribue à la confiance mutuelle nécessaire entre toutes les parties concernées par le projet d’union bancaire.

1.7.

Ces mesures impliquent une transposition et une mise en œuvre complètes, par tous les États membres, du cadre législatif existant de l’union bancaire [directive relative au redressement et à la résolution des défaillances bancaires (BRRD) et directive relative aux systèmes de garantie des dépôts (DSGD)]. Il est positif de constater que le nombre d’États membres devant encore fournir un effort a diminué depuis la publication des propositions relatives au SEAD et de la communication. La Commission prend des mesures visant les pays en retard de transposition.

1.8.

Il y a lieu de s’attacher à réduire encore les risques dans le secteur bancaire et à veiller à une harmonisation optimale, au sein de l’union bancaire, dans les domaines où des mesures ont déjà été prises. À cet égard, il est indispensable de mettre en place au préalable des systèmes nationaux de garantie des dépôts qui soient bien capitalisés, stables et efficaces. Il convient d’éviter au maximum les divers risques potentiels d’aléa moral, s’agissant à la fois des banques, des pouvoirs publics et des épargnants, également dans le cadre de la mise en œuvre ultérieure de ce pilier de l’union bancaire. En effet, des cas réels d’aléa moral sont susceptibles de porter atteinte à l’efficacité et à la sûreté mêmes du fonctionnement de l’union bancaire. La condition selon laquelle un État membre ne peut recourir au SEAD que lorsque toutes les conditions sont réunies n’est pas superflue ici.

1.9.

Le Comité estime que la Commission devrait procéder à une étude d’impact approfondie et globale, qui pourrait éventuellement s’appuyer sur des études similaires réalisées précédemment dans le cadre des directives concernant les SGD, compte tenu de l’importance de cette question pour l’union bancaire, l’achèvement de l’UEM et la confiance des épargnants et des déposants. Les résultats de cette étude devront en outre être publiés, notamment afin de renforcer encore la légitimité de la proposition.

1.10.

En outre, les différences entre les pays restent importantes et de nombreux défis subsistent dans plusieurs domaines, comme le révèlent d’ailleurs quelques rapports internationaux récents. Il y a lieu de s’attaquer à ces différences et de relever ces défis. Sans vouloir être exhaustif, il est notamment question ici du volume important de «prêts non productifs» dans le secteur bancaire et de la répartition inégale de ce volume entre les banques et entre les États membres de la zone euro.

1.11.

Le Comité estime que, dans le cadre de la réduction des risques, il convient néanmoins d’accorder une attention suffisante à son incidence sur l’octroi de crédits. En particulier, l’octroi des crédits en faveur des PME, des PMI, des jeunes pousses et autres jeunes entreprises doit être et demeurer une priorité essentielle pour l’Union européenne et ses États membres.

1.12.

En outre, le Comité juge tout aussi important de progresser dans l’achèvement de l’UEM, fondée entre autres sur un pilier monétaire et financier, ce qui implique la mise en œuvre d’une véritable union bancaire pilotée par l’Union européenne. Le Comité ayant précédemment indiqué, concernant l’UEM, que celle-ci restait fragile et devait faire face à d’immenses défis, il convient dès lors de continuer à la renforcer en poursuivant le développement de tous ses piliers.

1.13.

Le CESE estime qu’il est absolument indispensable, dans ce domaine, de créer les conditions propices et appropriées pour que des progrès puissent être réalisés. Selon le Comité, le principal enjeu est la «confiance» et son renforcement entre les États membres. La confiance entre les États membres requiert également des conditions de concurrence équitables et des orientations similaires, axées sur la convergence.

1.14.

Cette convergence a souffert de la crise et il s’agit maintenant, à court terme, de recommencer à progresser dans les États membres et de les faire avancer ensemble. Dans le même temps, il convient également de soutenir la reprise, de faciliter la correction des déséquilibres macroéconomiques et d’améliorer la capacité d’adaptation.

1.15.

Le Comité est favorable à ce que le nouveau système d’assurance des dépôts n’ait pas d’incidence sur les coûts pour le secteur bancaire, tout en étant d’avis qu’il est préférable que la méthode de calcul des contributions fondée sur les risques soit précisée directement dans la proposition sur le SEAD plutôt que dans des actes délégués. Il s’agit en effet d’un élément essentiel de la réglementation envisagée, qui mérite — par principe — d’être défini au plus haut niveau.

2.   Contexte

2.1.

Lors de la création de l’union bancaire, il avait été décidé que ses piliers seraient mis en place progressivement.

2.2.

L’institution du mécanisme de surveillance unique, dans le cadre duquel la Banque centrale européenne (BCE) supervise (2) les banques (3) de la zone euro, ainsi que le lancement du mécanisme de résolution unique, à compter du 1er janvier 2016, constituent les deux premières étapes.

2.3.

C’est aujourd’hui le système européen d’assurance des dépôts  (4), troisième pilier de l’union bancaire, qui est proposé. Celui-ci se fonde sur la directive existante en matière de garantie des dépôts (SGD) (5), qui avait instauré les systèmes nationaux de garantie des dépôts et prévoyait la reconnaissance de systèmes institutionnels de protection en tant que SGD. Le «rapport des cinq présidents» intitulé «Compléter l’Union économique et monétaire européenne» (6) avait lui aussi proposé le lancement d’un tel système à plus long terme.

2.4.

Il est prévu que le nouveau système (7) soit mis en place progressivement, par étapes (8):

2.4.1.

La première phase consiste en une approche de réassurance qui durera trois ans, jusqu’en 2020. Durant cette phase, un système national de garantie des dépôts n’aura accès aux fonds du SEAD qu’après avoir épuisé toutes ses ressources propres et à condition que l’État membre concerné se soit conformé aux dispositions de la directive relative aux systèmes de garantie des dépôts. L’objectif est donc d’atténuer le lien entre les banques et leurs emprunteurs souverains.

2.4.2.

Ensuite, le SEAD deviendra progressivement un système mutualisé («coassurance»). Au cours de cette phase, un système de garantie national n’aura pas besoin d’avoir épuisé ses propres ressources avant de pouvoir recourir, si nécessaire, aux fonds du SEAD. La contribution du SEAD sera fixée au début à un niveau relativement bas (20 %), pour atteindre 80 % après quatre ans. Cela introduit un plus haut niveau de partage des risques entre les systèmes nationaux.

2.4.3.

Pendant la troisième phase, la part du risque assumée par le SEAD sera progressivement augmentée jusqu’à atteindre 100 %. Ainsi, à compter de 2024, les systèmes nationaux de garantie des dépôts seront entièrement remplacés par le nouveau système européen, qui deviendra le seul responsable du paiement de compensations aux déposants.

2.5.

Dans ce contexte, la proposition prévoit la création immédiate d’un Fonds européen d’assurance des dépôts. Il sera financé par les contributions des banques, qui seront fixées en fonction de leurs risques. Le système ne devrait pas avoir d’incidence sur les coûts du secteur bancaire dans la mesure où les contributions européennes seront déduites de leurs contributions aux SGD nationaux.

2.6.

Le système s’accompagne de solides garanties: ainsi, seuls les SGD nationaux qui satisfont aux règles de l’Union européenne et ont été conçus conformément à ces règles sont assurés.

2.7.

Parallèlement à la mise en place du nouveau système, la Commission a annoncé, dans une communication intitulée «Vers l’achèvement de l’union bancaire», un train de mesures destinées à réduire les risques au sein de l’union bancaire (9)  (10).

3.   Observations générales et commentaires

3.1.

Le Comité constate qu’une communication (11) sur la réduction des risques au sein de l’union bancaire est publiée en même temps que les propositions relatives au SEAD. Selon la Commission, ces deux publications vont de pair. L’introduction d’un partage accru des risques (grâce à la proposition sur le SEAD) doit s’accompagner d’autres mesures d’atténuation du risque. Le Comité considère dès lors que ces deux textes constituent deux éléments d’un même ensemble. Il en sera tenu compte lors de la formulation des observations et commentaires sur les nouveaux textes.

3.2.

Depuis le début, le CESE s’est prononcé en faveur de l’union bancaire et des mesures prises concernant ses premier et deuxième piliers (12). Le Comité estimait qu’il s’agissait là d’une question à traiter sans délai (13).

3.3.

De même, le Comité a toujours été partisan d’un achèvement de l’union bancaire (14), à compléter rapidement par le troisième pilier relatif à la protection des dépôts. Dans ce cadre, il avait déjà préconisé de renforcer et d’améliorer le système commun de protection des dépôts (15).

3.4.

Le Comité accueille favorablement les propositions relatives au SEAD et souscrit aux objectifs visés afin de renforcer l’union bancaire par un règlement visant à protéger les dépôts, améliorer et harmoniser la protection des épargnants, consolider la stabilité financière et restreindre davantage le lien entre les banques et leurs emprunteurs souverains.

3.5.

Grâce au principe du partage des risques, un tel programme peut avoir une incidence positive sur la situation de certains États membres et de certaines banques puisqu’il est en mesure, mieux que les systèmes nationaux existants, de contribuer, le cas échéant, à l’absorption de chocs importants au niveau local. Il peut ôter à certains l’envie de spéculer contre certains pays ou certaines banques, et ainsi faire baisser le risque global dans l’ensemble de l’union bancaire.

3.6.

Il est crucial d’assurer une bonne protection et la garantie optimale des dépôts des épargnants. Depuis la crise, des avancées importantes ont été réalisées et la finalité des nouvelles propositions peut aider à accroître encore la confiance, car elles peuvent contribuer à une plus grande intégration financière entre les pays et à des conditions de concurrence équitables entre les banques.

3.7.

Des dépôts stables représentent une source de financement saine et essentielle de l’économie, surtout pour les ménages, ainsi que les petites et les jeunes entreprises [comme les PME, les PMI (16) et les jeunes pousses], et contribuent donc à l’indispensable croissance économique. Les PME (au sens large) apportent une contribution vitale à l’économie européenne. Elles représentent aujourd’hui plus de deux tiers du total de l’emploi privé et 85 % de la croissance nette de l’emploi. Pour le CESE, il est évident que garantir l’octroi de crédits aux PME viables est essentiel à la croissance économique et à la création de nouveaux emplois. Il y a donc lieu d’en faire une priorité majeure tant au niveau européen qu’au niveau national.

3.8.

Les mesures visant à réduire encore les risques s’inscrivent dans une approche similaire à celle adoptée pour le SEAD, et le Comité accueille dès lors tout aussi favorablement le document de la Commission. C’est d’autant plus le cas dès lors que, d’une part, ces deux textes ont en commun un certain nombre d’objectifs fondamentaux tels que le renforcement de l’union bancaire et l’atténuation du lien entre les banques et les emprunteurs souverains et, d’autre part, la réalisation des objectifs requiert clairement une «combinaison de mesures».

3.9.

En ce qui concerne la réduction des risques, la situation actuelle ne doit pas être ignorée. Il y a lieu de continuer à s’attacher en priorité à réduire les risques dans le secteur bancaire et à veiller à une meilleure harmonisation, au sein de l’union bancaire, dans les domaines où des mesures ont déjà été prises.

3.10.

Avant toute chose, le cadre existant relatif à l’union bancaire doit être intégralement transposé et mis en œuvre dans tous les États membres. Si, au moment de la publication de la proposition relative au SEAD, un grand nombre d’États membres n’avaient pas encore transposé — ou n’avaient transposé que partiellement — les directives BRRD et/ou SGD, la situation s’est améliorée depuis lors. La Commission prend des mesures visant les pays en retard de transposition (17).

3.11.

La poursuite de la transposition et de la mise en œuvre du règlement relatif à la garantie des dépôts et du système de financement ex ante qui y est lié pose certains défis. Une harmonisation accrue et la réalisation préalable de systèmes nationaux de garantie des dépôts bien capitalisés, stables et efficaces sont également jugées nécessaires pour limiter le risque d’«aléa moral». Il convient également d’être attentif à réduire ce risque à chaque étape de la mise en œuvre du SEAD. À cet égard, il ne faut pas négliger les dangers qui pourraient découler d’une mutualisation trop rapide et trop stricte des risques. La condition selon laquelle un État membre ne peut recourir au SEAD que lorsque toutes les conditions sont réunies et après avoir mis en œuvre la législation existante, n’est pas superflue ici.

3.12.

En outre, les différences entre les pays restent tout aussi importantes, et de nombreux défis subsistent dans plusieurs domaines, comme le révèlent d’ailleurs quelques rapports internationaux récents (18)  (19). Il convient de s’y attaquer. L’on peut notamment penser au volume important de «prêts non productifs» dans le secteur bancaire et à la répartition inégale de ce volume entre les banques et entre les États membres de la zone euro (20). Une résolution efficace de cette situation, qui tiendrait compte de tous les autres éléments pertinents, peut être considérée comme une condition pour progresser vers un partage des risques au niveau de la protection des dépôts. Cela requiert, entre autres, de mettre en place un mécanisme de surveillance homogène piloté par l’Union européenne.

3.13.

Les résultats de l’analyse d’impact approfondie préalable sur le SEAD n’ont pas été mis à la disposition du public, ce qui est contraire aux exigences de transparence. Il est certainement nécessaire de procéder à une étude d’impact approfondie et globale, qui pourrait éventuellement s’appuyer sur des études similaires réalisées précédemment dans le cadre des directives concernant les SGD (21), compte tenu de l’importance de cette question pour l’union bancaire, l’achèvement de l’UEM et la confiance des épargnants et des déposants. Les résultats de cette étude devront en outre être publiés, entre autres afin de renforcer encore la légitimité de la proposition.

3.14.

Les futures mesures additionnelles annoncées en faveur de la diminution du risque doivent faire l’objet d’une approche similaire à celle adoptée pour le SEAD, étant donné que ces deux types de mesures visent à renforcer l’union bancaire, et il convient de les concrétiser et de les mettre en œuvre dès que les conditions nécessaires seront réunies.

3.15.

Compte tenu de tout ce qui précède, il est clair qu’il faudra s’efforcer de mettre en œuvre ces deux types de mesures de la même manière. Elles sont en effet complémentaires et nécessaires pour parvenir à une solution équilibrée qui soit en même temps concluante. Par conséquent, il est essentiel de veiller à ce que le SEAD et les mesures pertinentes de réduction des risques (22) soient traités et mis en œuvre sans délai, simultanément et de manière effective. Cette démarche constituera non seulement la plus grande contribution à la réalisation de l’union bancaire et à l’achèvement de l’UEM (voir infra) mais également la meilleure garantie que de réels progrès puissent être réalisés.

3.16.

Pour le Comité, cette question revêt aussi une importance majeure dans le cadre de l’achèvement de l’UEM, qui repose entre autres sur un pilier monétaire et financier, impliquant une union bancaire à part entière. Le Comité ayant précédemment indiqué, concernant l’UEM, que celle-ci restait fragile et devait faire face à d’immenses défis (23), il convient dès lors de continuer à la renforcer en poursuivant le développement de tous ses piliers.

3.17.

Il a déjà été constaté précédemment que, en raison des relations qu’entretiennent toujours les emprunteurs souverains et les banques, les États membres demeurent peu enclins à créer les conditions politiques et économiques nécessaires, et les décisions les plus appropriées et efficaces sont ainsi renvoyées aux calendes grecques (24).

3.18.

C’est pourquoi il est important de pouvoir accomplir des progrès, et, à cet égard, le principal enjeu est la «confiance» et son renforcement entre les États membres. La confiance entre les États membres requiert également des conditions de concurrence équitables et des orientations similaires, axées sur la convergence.

3.19.

Cette convergence a souffert de la crise et il s’agit maintenant, à court terme, de recommencer à progresser dans les États membres et de les faire avancer ensemble. Dans le même temps, il convient également de soutenir la reprise, de faciliter la correction des déséquilibres macroéconomiques et d’améliorer la capacité d’adaptation.

4.   Observations particulières et commentaires

4.1.

En ce qui concerne la proposition relative au SEAD, le CESE est favorable au principe selon lequel le nouveau système ne doit pas avoir d’incidence sur les coûts pour le secteur bancaire. La contribution du secteur bancaire a été fixée antérieurement à 0,8 % (25)  (26) des dépôts garantis, à la suite d’une étude d’impact approfondie. Il importe donc de ne pas augmenter la contribution totale aux systèmes nationaux et européen, afin de respecter la neutralité des coûts.

4.2.

En outre, il importe dans ce cadre d’harmoniser de manière optimale les contributions nationales, de manière à garantir l’égalité de traitement des systèmes nationaux de garantie des dépôts et d’éviter les divergences entre ces systèmes.

4.3.

Cette approche d’égalité de traitement devrait tout autant présider aux relations à la fois entre les pays membres de l’union bancaire et avec les États membres qui n’en font pas partie. Cela suppose, entre autres, que l’on poursuive désormais les efforts d’harmonisation des dispositions actuelles de la directive SGD, afin de promouvoir une plus grande convergence entre les systèmes qui existent dans tous les États membres.

4.4.

Les systèmes de protection institutionnels apportent un soutien financier lorsque leurs membres se trouvent dans une situation difficile, et contribuent ainsi à éviter les faillites bancaires. L’action préventive de ces systèmes devrait être pleinement reconnue dans le nouveau règlement SEAD, faute de quoi son concept risque d’être remis en cause.

Bruxelles, le 17 mars 2016.

Le président du Comité économique et social européen

Georges DASSIS


(1)  COM(2015) 587 final.

(2)  Depuis novembre 2014.

(3)  Les grandes banques (environ 130) sont surveillées directement par la BCE, tandis que pour les autres (plus de 6 000), ce sont les autorités nationales de surveillance qui interviennent en première ligne.

(4)  Également appelé «SEAD», ou «EDIS» en anglais (European Deposit Insurance Scheme).

(5)  Cette directive prévoit la protection des dépôts des épargnants de l’Union européenne à concurrence de 100 000 EUR.

(6)  Voir «Compléter l’Union économique et monétaire européenne — Rapport préparé par Jean-Claude Juncker en étroite coopération avec Donald Tusk, Jeroen Dijsselbloem, Mario Draghi et Martin Schulz», notamment la p. 13.

(7)  Voir la «Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (UE) no 806/2014 afin d’établir un système européen d’assurance des dépôts», COM(2015) 586 final — 2015/0270 (COD), publiée le 24 novembre 2015.

(8)  L’architecture du SEAD respecte la structure type de l’union bancaire: un corpus de règles unique sous la forme de l’actuelle directive sur la garantie des dépôts, applicable aux 28 États membres, complété par le SEAD, obligatoire pour les pays de la zone euro et ouvert aux autres États membres souhaitant rejoindre l’union bancaire.

(9)  Il s’agit notamment des mesures suivantes:

réduction des options et des marges d’appréciation nationales dans l’application des règles prudentielles de manière que le mécanisme de surveillance unique puisse fonctionner aussi efficacement que possible;

harmonisation des systèmes nationaux de garantie des dépôts;

adoption d’une législation pour mettre en œuvre les éléments restants, ayant trait aux banques, du cadre réglementaire défini au niveau international, notamment afin de limiter l’effet de levier des banques, de garantir la stabilité du financement des banques et d’améliorer la comparabilité des actifs pondérés en fonction des risques, et dans le but de permettre l’application, d’ici à 2019, des recommandations du Conseil de stabilité financière sur la capacité totale d’absorption des pertes pour les banques, de sorte que des ressources adéquates soient disponibles pour les banques en difficulté sans qu’il soit nécessaire de faire appel aux contribuables;

respect des règles existantes afin de réduire au minimum les fonds publics utilisés pour soutenir un secteur bancaire résilient et solvable;

plus grande convergence de la législation en matière d’insolvabilité, comme indiqué dans le plan d’action sur une union des marchés de capitaux;

initiatives relatives au traitement prudentiel des expositions des banques sur le risque souverain, notamment une limitation de l’exposition des banques à un emprunteur souverain particulier, pour que leur risque souverain global soit suffisamment diversifié.

(10)  Voir la communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, à la Banque centrale européenne, au Comité économique et social européen et au Comité des régions «Vers l’achèvement de l’union bancaire», COM(2015) 587 final du 24 novembre 2015.

(11)  Voir paragraphe 2.7 ci-dessus.

(12)  À savoir, le mécanisme de surveillance unique et le mécanisme de résolution unique.

(13)  Voir entre autres l’avis du CESE sur la «Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (UE) no 1093/2010 instituant une Autorité européenne de surveillance (Autorité bancaire européenne) en ce qui concerne son interaction avec le règlement (UE) no …/… du Conseil confiant à la Banque centrale européenne des missions spécifiques ayant trait aux politiques en matière de contrôle prudentiel des établissements de crédit» [COM(2012) 512 final — 2012/0244 (COD)] et la «Communication de la Commission au Parlement européen et au Conseil — Une feuille de route pour une union bancaire» (JO C 11 du 15.1.2013, p. 34), paragraphe 1.12.

(14)  Voir entre autres les avis du CESE «Achever l’Union économique et monétaire — Les propositions du Comité économique et social européen pour la prochaine législature européenne» (JO C 451 du 16.12.2014, p. 10) et «Achever l’UEM: le pilier politique» (JO C 332 du 8.10.2015, p. 8).

(15)  Voir les avis mentionnés aux notes 13 et 14.

(16)  Petites et moyennes industries.

(17)  Concernant la DSGD, voir le communiqué de presse de la Commission européenne du 10 décembre 2015 intitulé «Services financiers: la Commission demande à 10 États membres de mettre en œuvre les règles de l’Union relatives aux systèmes de garantie des dépôts» (http://europa.eu/rapid/press-release_IP-15-6253_fr.htm).

Concernant la BRRD, voir le communiqué de presse du 22 octobre 2015 intitulé «La Commission forme un recours contre six États membres devant la Cour de justice européenne pour non-transposition des règles de l’Union européenne en matière de redressement et de résolution des banques» (http://europa.eu/rapid/press-release_IP-15-5827_fr.htm).

(18)  Voir entre autres EBA — 2015 EU-wide transparency exercise — aggregate report, https://www.eba.europa.eu/documents/10180/1280458/2015+EU-wide+Transparency+Exercise+Report+FINAL.pdf (novembre 2015), et BCE, Economic Bulletin no 2015/5, https://www.ecb.europa.eu/pub/pdf/ecbu/eb201505.en.pdf.

(19)  Voir le rapport de l’EBA, notamment la synthèse p. 6 et 7: «La qualité des actifs et les taux de rentabilité se sont également améliorés, même si le niveau de départ était bas et qu’ils restent préoccupants. Les expositions non performantes, publiées pour la première fois conformément à la définition harmonisée de l’EBA, représentent près de 6 % de l’ensemble des prêts et avances dans toute l’Union européenne, et 10 % si l’on ne considère que les sociétés non financières, bien qu’il existe des écarts considérables entre les pays et les banques. La rentabilité s’est améliorée en 2015 mais reste faible au regard des évolutions passées et des coûts estimés des fonds propres des banques. Le rendement global des fonds propres réglementaires des banques de l’Union européenne est de 9,1 % à partir de juin 2015.

Enfin, en ce qui concerne les expositions souveraines, les données publiées aujourd’hui montrent que la préférence nationale en matière d’investissement dans les dettes souveraines est toujours d’actualité, même si elle s’atténue progressivement, les banques ayant indiqué en juin 2015 un accroissement de leurs portefeuilles de dettes souveraines étrangères.»

(20)  BCE, Financial Stability Review, novembre 2015, https://www.ecb.europa.eu/pub/pdf/other/financialstabilityreview201511.en.pdf?24cc5509b94b997f161b841fa57d5eca, p. 74 et suivantes.

(21)  Selon les déclarations de représentants de la Commission, les propositions actuelles s’appuient sur l’étude d’impact qui a été réalisée à l’occasion de la modification de la directive SGD. Voir: http://eur-lex.europa.eu/legal-content/EN/TXT/?uri=CELEX:52010SC0834, et plus précisément les paragraphes 7.8 et 7.11.

(22)  En ce qui concerne ces mesures de réduction du risque, il s’agira de mettre en œuvre en priorité les mesures les plus pertinentes dans la perspective décrite ici.

(23)  Voir les avis mentionnés à la note 14.

(24)  Voir le premier avis mentionné à la note 14, paragraphe 4.1.2.

(25)  Dans le cadre de la directive SGD.

(26)  Ou 0,5 %, si certaines conditions sont réunies.


18.5.2016   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 177/28


Avis du Comité économique et social européen sur la communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil et à la Banque centrale européenne relative aux mesures à prendre pour compléter l’Union économique et monétaire

[COM(2015) 600 final]

et sur la

décision (UE) 2015/1937 de la Commission du 21 octobre 2015 créant un comité budgétaire européen consultatif indépendant

[C(2015) 8000 final]

(2016/C 177/05)

Rapporteur:

M. Carmelo CEDRONE

Le 11 novembre 2015, la Commission européenne a décidé, conformément à l’article 304 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la:

«Communication de la Commission européenne au Parlement européen, au Conseil et à la Banque centrale européenne relative aux mesures à prendre pour compléter l’Union économique et monétaire»

[COM(2015) 600 final]

et la

«Décision (UE) 2015/1937 de la Commission du 21 octobre 2015 créant un comité budgétaire européen consultatif indépendant»

[C(2015) 8000 final].

La section spécialisée «Union économique et monétaire, cohésion économique et sociale», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 3 mars 2016.

Lors de sa 515e session plénière des 16 et 17 mars 2016 (séance du 17 mars 2016), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 195 voix pour, 4 voix contre et 4 abstentions.

1.   Conclusions et propositions

1.1.

Le CESE estime que la communication de la Commission relative aux mesures à prendre pour compléter l’Union économique et monétaire (UEM) peut offrir une occasion de choix pour lancer un débat, tant au niveau politique qu’à celui de la société civile, visant à mener une «opération-vérité» sur l’ensemble des problématiques concernant la zone euro, sans oublier tous les développements qui se sont produits depuis l’époque de Maastricht, ainsi qu’après la crise financière et économique qui a affecté tout particulièrement ladite zone euro, et ce, de manière à dégager des pistes de solution qui aillent au-delà des éléments actuellement contenus dans la communication. Les principaux éléments en sont les suivants:

1.2.

Semestre: il serait plus utile, en ce qui concerne le semestre européen, de formuler une proposition qui s’inscrive dans un accord global sur la gouvernance économique dépassant celui qui a cours aujourd’hui, grâce à une modification de la conditionnalité macroéconomique et au renforcement du rôle de la conférence interparlementaire, ainsi que le CESE l’a déjà prôné.

1.3.

Gouvernance économique: une gouvernance économique globale de la zone euro (au plan macroéconomique, microéconomique, monétaire, etc.) doit prendre une envergure bien plus importante que celle proposée par la Commission. C’est à une inversion radicale des paradigmes économiques actuels qu’il convient de procéder; les autorités nationales pour la compétitivité, en particulier, devraient également tenir compte des politiques de cohésion et des retombées qui, sur le plan social et sur celui de l’emploi, découlent notamment des déséquilibres et des divergences entre pays qui se sont creusés avec la crise (1). La Commission européenne et les autorités nationales devraient par ailleurs prendre en compte les nouveaux facteurs et paramètres sur lesquels se fondent — et sur lesquels continueront de se fonder — la compétitivité et la concurrence entre les différents blocs de l’économie mondiale. Le comité budgétaire consultatif devrait fonctionner selon une procédure plus transparente et démocratique, tant en ce qui concerne la nomination de ses membres que l’utilisation de ses prescriptions, qui risquent de continuer à échapper à tout contrôle démocratique.

1.4.

Représentation extérieure de la zone euro: la proposition avancée est juste et nécessaire mais, outre que les délais sont trop longs, le problème se pose de savoir quel sera le contrôle démocratique qui s’exercera sur cette fonction et quelles modifications législatives sont requises pour que soit reconnu le rôle de l’UEM dans les questions propres à la zone euro (2).

1.5.

Union financière: la proposition est positive, bien que l’élan ait été perdu, au plan politique comme du point de vue du calendrier. Il s’agit de la démarche la plus importante, à la condition cependant qu’elle se concrétise rapidement et que les dispositifs européens instaurant des règles communes soient totalement révisés dans des délais rapprochés, grâce aux mécanismes prévus, portant sur la résolution unique et la garantie des dépôts (3), et à l’union des marchés des capitaux (4). À cet égard, il serait fort profitable que la Commission avance une proposition, déjà formulée par le CESE (5), sur la question de la dette publique et privée, dans le but de réduire les dangers et la spéculation qui guettent le système financier de la zone euro.

1.6.

Légitimité démocratique: c’est le point le plus faible de la communication, en tout cas au stade actuel, et tant que la phase 2 n’a pas débuté. La légitimité démocratique n’est évoquée que de manière superficielle et approximative, alors qu’elle constitue le cœur de tout le dispositif et l’essence même du débat et des préoccupations de l’opinion publique européenne, en particulier ces derniers mois, et qu’elle conditionnera l’avenir de la zone euro et de l’Union européenne. Comme il a été dit, aucune des propositions opérationnelles formulées par la Commission n’aborde cette question du contrôle démocratique.

1.6.1.

Le dialogue social tripartite pourrait produire une contribution sur ce point, pour autant qu’il soit bâti selon un schéma structuré et que la mise en œuvre des accords conclus entre ses parties prenantes revête un caractère obligatoire.

1.7.

Phase 2 — Achèvement de l’UEM: alors qu’elle présente une importance prioritaire et capitale pour conférer de la crédibilité au reste des propositions, cette phase repose essentiellement sur la présentation d’un «livre blanc», à la fin 2017. Confier toute la démarche à un tel document, par des consultations et des dialogues avec les citoyens, sans donner d’explication quant à la manière de les mener à bien, ni mobiliser le CESE, nous semble inconsistant au regard du thème le plus important et capital de la communication, qui est celui de la démocratie et de la construction du pilier politique de la zone euro, bien que pour la phase 2, nous nous trouvions dans une situation d’attente.

1.8.

Par ailleurs, le CESE considère que la feuille de route qui est évoquée par la Commission n’est pas adéquate au regard de l’importance des questions à traiter et du caractère urgent des solutions à leur apporter, puisqu’elles sont toujours repoussées et mises en attente sans qu’une échéance ne soit fixée; aussi s’engage-t-il, notamment sur la base de son échéancier propre, tel qu’il l’a déjà établi, à présenter son propre plan sur la phase 2, éventuellement en coopération avec la Commission, afin de débattre de ces questions dans les pays de l’Union européenne, en partant de ceux de la zone euro.

1.9.

Les propositions: dans plusieurs avis qu’il a élaborés depuis le début de la crise, le CESE a déjà formulé des propositions sur différents aspects qu’elle revêt dans le domaine financier, ainsi que sur les carences des politiques économiques que l’Union européenne a déployées. Il a formulé, notamment dans plusieurs avis d’initiative, des propositions spécifiques, concernant, par exemple, la gouvernance économique, financière et monétaire de l’UEM et la gouvernance politique de la zone euro, devançant ainsi largement la Commission européenne elle-même. Aussi renvoie-t-il à ses avis, que leur élaboration soit terminée (6) ou encore en cours (7), pour ce qui concerne les propositions-cadres sur les matières abordées dans la communication à l’examen.

2.   Contexte

2.1.

Par le présent avis, le CESE entend donner une vision d’ensemble sur la communication de la Commission relative à la zone euro. Dans d’autres, il en abordera les aspects spécifiques.

2.2.

La communication de la Commission tire son origine de la nécessité de donner suite au second rapport des cinq présidents sur l’Union économique et monétaire, étant donné que le premier avait été totalement ignoré par la Commission Barroso. Ils avaient l’un et l’autre pour objectif de remédier aux faiblesses de l’UEM, que la crise financière et économique avait, comme on sait, mises en lumière et portées à la connaissance de tous les Européens, voire divulguées plus largement encore. Ayant facilité et orienté la spéculation sur l’euro, elles ont été et sont toujours la raison principale de la crise qui frappe la zone euro — et de sa persistance.

2.3.

C’est le même motif qui avait incité le CESE à formuler, avant même la Commission et les autres instances de l’Union européenne, des propositions précises en la matière, qui n’ont que tout récemment trouvé un écho et recueilli la considération et la reconnaissance qu’elles méritaient (8). À cet égard, le Comité salue et souligne l’appréciation que la Commission a exprimée dans un rapport de suivi sur les avis qu’il a adoptés récemment, en particulier quand elle affirme qu’elle «souhaite remercier le Comité économique et social européen pour son avis fouillé et complet sur le pilier politique de l’Union économique et monétaire. En plus de dresser l’état des lieux actuel de ce dossier et de mettre en évidence les faiblesses de l’UEM, ce texte avance également de très intéressantes propositions pour la compléter».

2.4.

Le second rapport des cinq présidents et, par voie de conséquence, la communication de la Commission censée le mettre en œuvre sont plus faibles et moins courageux que le premier, qui était déjà déficient, la raison en étant peut-être que les tensions touchant à la zone euro se sont atténuées ou que les États membres ont du mal à partager leur souveraineté. Il n’y a pas lieu de s’en réjouir.

2.5.

En outre, la question des immigrants, des réfugiés et de la sécurité, faisant suite aux attentats terroristes d’inspiration islamiste, a semé la panique parmi la population et la classe politique en Europe, creusé les fossés entre les pays, exacerbé le retour des nationalismes, fait naître un mouvement qui est en train de déboucher sur la fermeture des frontières, etc. De ce fait, le plan d’achèvement de l’UEM a cessé d’être une urgence et est passé au second plan ou a été mis sous le boisseau. Il a disparu du débat politique et de la scène médiatique, sans doute au grand soulagement de nombre d’hommes politiques — parmi lesquels on ne dénombre pas que des adversaires de l’Union européenne — qui pensent «l’avoir échappé belle».

2.6.

De l’avis du CESE, toute cette évolution ne fait au contraire que souligner de manière encore plus évidente qu’il est nécessaire d’agir, de reprendre cette initiative, plus urgente que jamais, qui vise à améliorer l’Europe, en renouant avec les principes et les valeurs inspiratrices contenues dans le traité: la paix, la prospérité et la cohésion sociale, et ce, dans l’intérêt de tous et de chacun, car les pays européens et leurs citoyens doivent redécouvrir le sens de la responsabilité commune et retrouver la confiance mutuelle et ne peuvent se payer le luxe de se diviser à nouveau comme ils l’ont toujours fait par le passé: ce serait là s’engager sur une pente glissante.

3.   Observations générales

3.1.

Que ce soit dans sa formulation ou dans ses propositions, la communication se place malheureusement dans une logique fondée sur les structures existantes. Comme le cas s’est produit tant de fois par le passé, il se peut qu’elle en reste au stade de la déclaration de bonnes intentions et produise ainsi un effet boomerang. Pour une grande part, le contenu du texte se situe dans le fil des politiques qui ont été mises en œuvre depuis l’éclatement de la crise et dont il réclame le renforcement, alors que l’on sait que certaines d’entre elles ont été la cause de l’aggravation de la situation économique et sociale qu’ont connue nombre de pays de l’UEM. Sont ainsi ignorées les raisons de l’échec qu’ont essuyé toutes les tentatives qui, depuis le rapport Werner de 1970 jusqu’à celui des quatre présidents, de 2012, ont été effectuées jusqu’à présent pour réaliser une véritable Union économique et monétaire — et étaient déjà fondées, comme celle qui est à l’examen, sur une démarche de petits pas bureaucratiques.

3.2.    Les points forts

3.2.1.

En tout état de cause, bien qu’il soit de piètre qualité et, en outre, dépourvu d’une feuille de route en bonne et due forme, il est bienvenu que la Commission ait décidé de se retrousser les manches, en entreprenant de mettre en œuvre le rapport des cinq présidents, dans un contexte où nombre d’États membres y sont quasi hostiles, adoptant ainsi une attitude aussi grave que dangereuse, de sorte que le CESE leur lance un appel, qui s’adresse en premier à ceux de la zone euro, pour qu’ils changent de position et soutiennent l’initiative de ladite Commission, en remédiant aux points faibles relevés dans le présent avis et en suivant les propositions contenues dans ceux qu’il a adoptés antérieurement.

3.2.2.

Un second élément positif réside dans l’attention que le document de la Commission européenne accorde à l’union financière, dans ses diverses structurations. Indubitablement, il s’agit là, avec le parachèvement de l’union bancaire, de la démarche la plus importante découlant de la crise, pour autant qu’elle soit concrétisée dans des délais rapides et que soient pleinement déployés, grâce aux mécanismes prévus, à savoir le dispositif de résolution unique et celui de garantie des dépôts, et à l’union des marchés des capitaux, les systèmes européens de règles communes qui réduisent le risque que les épargnants et déposants et les contribuables aient à éponger les dettes du secteur bancaire et que les investisseurs et les entreprises restent contraints d’opérer dans le cadre de marchés financiers qui ne sont guère transparents et ne présentent qu’une faible diversification du point de vue des sources de financement. Dans cette optique, il serait opportun de prescrire, comme l’a prôné le CESE, une séparation entre banques commerciales et banques d’investissement, en prévoyant à titre temporaire des structures de défaisance («mauvaises banques») pour solder les comptes du passé.

3.2.3.

La proposition de donner vie à la «représentation extérieure unifiée» de l’UEM est importante, quoique de portée limitée, la Commission européenne en repoussant la traduction concrète à un horizon lointain, pour 2025 (9), tandis que dans l’immédiat, elle se borne à souhaiter un renforcement des modalités de coordination, instaurées depuis 2007 déjà, entre les représentants de la zone euro et le Fonds monétaire international.

3.3.    Les points critiques (faiblesses)

3.3.1.

Le document reste dans la même logique que celle poursuivie tout au long du déroulement de la crise, si bien qu’en le parcourant, on a l’impression de l’avoir déjà lu cent fois. Le CESE, en effet, s’est déjà prononcé à diverses occasions sur des contenus de même teneur, en formulant des propositions différentes de celles de la Commission et des États membres. On s’entête néanmoins à continuer dans la même ligne et essayer de faire croire, par exemple, a) que le problème du maintien dans l’UEM se réduit à une affaire de respect des règles de la «comptabilité»; b) qu’une «coordination» suffit à résoudre la question de la gouvernance économique; c) que la viabilité macroéconomique et financière de la zone euro est un simple enjeu de transparence; et d) que la très grave problématique du chômage peut être traitée par des propositions purement «formelles» comme on le fait depuis des années. Le CESE estime que sur toutes ces thématiques, comme sur d’autres encore, il convient que la Commission exerce son droit d’initiative pleinement et avec davantage de conviction.

3.3.2.

La même observation s’applique aux lourdes répercussions que ce chômage produit sur la société dans bon nombre de pays de la zone euro: cette problématique devrait revêtir un caractère prioritaire pour l’UEM, à l’instar de la compétitivité et de la gouvernance économique et politique. On constate, en effet, qu’aucune proposition concrète n’est formulée et qu’aucun instrument de solidarité n’est préconisé et il faut bien avouer qu’on ne comprend pas le sens qu’il faut donner à l’expression de «pilier européen» pour les droits sociaux (s’agit-il de ceux qui sont déjà en vigueur dans les différents pays?).

3.3.3.

Pour ce qui regarde le semestre européen, la communication s’en tient aux décisions prises jusqu’à présent sans apporter les modifications importantes, méthodologiques notamment, que le CESE avait souhaitées, à commencer par la modification de la conditionnalité macroéconomique et le renforcement de la conférence interparlementaire, tant et si bien que les budgets nationaux eux-mêmes risquent fort de rester dépourvus de quelque forme de contrôle démocratique que ce soit.

3.3.4.

Le texte évoque bien un «budget» de l’UEM, en parlant de sa stabilisation, mais l’on n’a ici affaire, en réalité, qu’aux budgets de chaque État ou à leur somme, soit une réalité qui n’a rien à voir avec un budget de la zone euro au sens véritable et spécifique du terme, et il n’est fait aucunement référence ni à la dette souveraine existante, ni à une dette souveraine commune qui pourrait s’avérer nécessaire, ni à une fiscalité européenne destinée à couvrir les dépenses liées à l’immigration, aux réfugiés ou à la sécurité. En tout état de cause, c’est l’absence de propositions concernant la légitimité démocratique qui représente le véritable talon d’Achille de toute la communication proposée (paragraphe 6) (10).

3.3.5.

Le texte fait très largement l’impasse sur les «corps intermédiaires» de la société, en tant qu’ils pourraient servir de points de référence pour la phase de consultation, à commencer par ceux représentés au CESE, sans même parler du «politique», qui est pratiquement évacué du dossier ou à peine mentionné, comme s’il ne constituait qu’un élément résiduel.

3.3.6.

Le CESE apprécie que la Commission évoque une association des partenaires sociaux aux autres politiques. Il juge toutefois qu’il s’impose de réaliser un saut qualitatif, au plan politique et procédural, pour donner un caractère non plus purement «formel» mais substantiel à cette participation au dialogue social tripartite, qu’il convient dès lors de réglementer, afin que les accords conclus deviennent opérants. Une telle évolution aurait en outre l’avantage de favoriser la confiance réciproque et de rendre chaque intervenant plus responsable.

3.3.7.

Pour préparer la phase 2, qui consiste à achever l’UEM et revêt une importance prioritaire et capitale si l’on veut crédibiliser le restant des propositions, on table exclusivement sur la présentation d’un «livre blanc», des consultations préliminaires et des «dialogues avec les citoyens», dont on omet de préciser la manière dont ils pourront s’effectuer, en excluant même les acteurs représentés au CESE. Le dispositif est insuffisant: il conviendrait d’y associer également, par exemple, aux côtés du Parlement européen, ceux des États membres.

3.4.    Les risques

3.4.1.

Les intentions affichées par la Commission sont assurément louables mais son approche n’est guère crédible, même si l’on ne dispose pas encore des propositions pour la phase 2. La communication ne constitue pas un véritable tournant qui, dans l’optique du traité actuel, viserait à résorber, fût-ce partiellement, le «déficit» de Maastricht. Il y manque un «projet» d’ensemble, qui servirait de signal déclencheur d’un changement, ainsi qu’un concept d’avenir pour la zone euro et les citoyens de l’Union européenne.

3.4.2.

Il est dommageable de rester dans la même trajectoire que celle suivie jusqu’à présent pour les politiques tant économiques que sociales; on ne peut considérer que la seule variable d’ajustement du système réside dans le marché de l’emploi et les salaires, en négligeant ou en minorant la question de la demande interne, des déséquilibres d’ordre macro- et microéconomique, des déséquilibres sociaux et des comptes courants.

3.4.3.

Renvoyer le programme d’action politique à une phase ultérieure, plutôt que de commencer par s’en occuper ou, à tout le moins, à le mener en parallèle aux autres interventions, vu les priorités urgentes, anciennes et nouvelles, témoigne, de la part des États membres, de craintes et de calculs politiques qui sont excessifs, aboutissant à enterrer l’Europe au lieu d’y apporter des améliorations et d’ouvrir sur des perspectives d’espoir pour l’avenir.

3.4.4.

La superficialité avec laquelle le document évoque la légitimité démocratique du semestre, des autres politiques de l’UEM et des instruments proposés est symptomatique. On n’a affaire, vu la position des différents pays, qu’à des paroles pusillanimes, constituant un simple succédané de démocratie. Il s’agit peut-être là de l’aspect le plus faible de toute la proposition, du moins tant qu’elle restera dans son état actuel, dans l’attente de la phase 2, qui devra être élaborée à l’aide d’initiatives qui sollicitent la société civile et le monde politique et recherchent son appui.

3.4.5.

C’est à tout le moins faire preuve de désinvolture et se bercer d’illusions que de penser que l’on arrivera à résoudre le problème démocratique de la zone euro par le «dialogue avec les citoyens» tout en s’abstenant d’en préciser les modalités de réalisation, les procédures de participation et les instruments qu’il convient d’utiliser, au niveau tant européen que national. Il convient, au contraire, de trouver une manière plus concrète de susciter l’intérêt et la mobilisation de la population européenne pour les questions touchant à la nécessité de parachever l’euro, grâce à de grandes assemblées publiques dans toutes les villes ou le vote, par les parlements nationaux, de propositions, y compris de celles qui tracent des démarches de substitution.

3.5.    Les ouvertures

3.5.1.

L’on pourrait mettre à profit la publication de cette communication en exploitant la possibilité qu’elle offre d’effectuer une «opération-vérité» à destination des citoyens européens concernant aussi bien toutes les facettes du traité qui n’ont pas été exploitées et ses potentialités que tous les événements qui se sont déroulés depuis la naissance de l’euro. Il serait opportun d’évaluer toutes les évolutions qui se sont produites avec la crise, les erreurs commises tant au niveau de l’Union européenne que par l’action des États membres, qui devraient se tourner davantage vers des politiques tenant compte de la valeur des personnes. Il y a lieu d’examiner les chances qui ont été gâchées et les risques réels auxquels les citoyens européens, et non quelque fantomatique «Europe», se trouvent exposés si certains pays continuent à agir comme ils le font aujourd’hui.

3.5.2.

Cette démarche «cartes sur table» prend un caractère d’urgence accrue — et peut se trouver facilitée — du fait qu’il est nécessaire d’apporter une réponse appropriée face à l’aggravation de deux autres phénomènes qui sont en train de mettre en péril la sécurité de tous les citoyens européens: la problématique urgente des immigrés et réfugiés, la menace du terrorisme islamique et la question de la sécurité.

3.5.3.

La communication pourrait également être une occasion à saisir pour lancer une réflexion qui ne soit pas de pure forme et de nature oratoire sur les valeurs communes, qu’elles soient d’ordre citoyen, éthique ou religieux, qui sont à la base de notre identité — et que nous avons peur de brandir et de défendre: telle sera la véritable assise sur laquelle la zone euro et les pays qui souhaitent se joindre à cette initiative pourront renaître. Il s’agira d’une expérience unique d’intégration qui sera ouverte non seulement aux dix-neuf pays composant cette zone mais aussi à tous les autres États membres de l’Union européenne, dont les adhérents plus récents, qui désirent faire partie d’un noyau politique destiné à grandir progressivement, comme il en advint de la première Communauté économique européenne, de 1957, constituée de six pays fondateurs, qui étaient les vrais et véritables audacieux de l’époque et sans lesquels aujourd’hui, nous ne serions pas occupés à parler d’Europe, ni ne serions les «vingt-huit»!

3.5.4.

À cette fin, il peut s’avérer très utile d’associer au processus les corps intermédiaires de la société, en particulier les partenaires sociaux et les acteurs de la société civile, en favorisant une relance vigoureuse du dialogue social et citoyen, au niveau européen comme à celui de chaque pays. Ce sont eux qui pourraient constituer les relais qui, avec l’aide du CESE et de la Commission, ouvriront une enceinte d’information et de débat sur les risques et les dangers des évolutions qui se produisent, sur les chances offertes pour modifier réellement certaines politiques de l’Union européenne et sur la nécessité qui s’impose à nous, pour rester unis, de consolider les fondations de notre maison commune, de la doter du toit qui lui fait défaut et de nous garder d’en démolir les parties que nous avions pu édifier jusqu’ici.

4.   Comité budgétaire européen consultatif indépendant (décision de la Commission)

4.1.

S’agissant de la création d’un comité de ce type (11), qui aura pour tâche de fournir une évaluation de la mise en œuvre du cadre budgétaire de l’Union européenne, notamment en ce qui concerne la cohérence horizontale des décisions en matière de surveillance budgétaire, la décision de la Commission ne fournit pas d’éléments probants pour en justifier la création; établir ce comité européen revient à produire des doublons pour les tâches et responsabilités que la Commission assume déjà elle-même dans le cadre des nouvelles attributions prévues par la gouvernance européenne.

4.2.

En effet, on ne voit pas bien quelle serait la «valeur ajoutée» de cette structure, composée de cinq experts externes, auxquels il serait demandé de déployer une action plus fouillée d’analyse des politiques budgétaires, tant au niveau national qu’à celui de la zone euro. On a ici l’impression d’avoir affaire à un énième comité européen de suivi, qui sera appelé à fournir des conseils sur les budgets des institutions des deux structures, à savoir celles de l’Union européenne et des pays de la zone euro, sans bénéficier de pouvoirs effectifs pour intervenir quand les politiques budgétaires, que ce soit au niveau national ou à celui de ladite zone euro, ne sont pas respectées ou s’avèrent inadéquates.

4.3.

Le CESE est surpris par les modalités de désignation des composantes du comité consultatif: qu’il suffise de rappeler que sur les cinq membres dont il est formé au total, trois sont choisis sur les indications du président désigné, sans que le Parlement européen soit aucunement associé à la procédure, ainsi qu’il le relève lui-même, à juste titre, dans sa résolution (12). De ce fait, il paraît moins être un comité propre à épauler la Commission dans ses choix qu’une sorte de moyen utilisé par le Conseil pour placer sous tutelle une mission aujourd’hui confiée à ladite Commission. Il pourrait en résulter une aggravation de la situation actuelle, qui, aujourd’hui déjà, repose sur des équilibres fort fragiles.

4.4.

Dans sa communication, la Commission évoque également une coordination entre ledit comité budgétaire européen consultatif indépendant et les conseils budgétaires nationaux mais elle omet d’expliquer les objectifs que l’on entend poursuivre par là, de délimiter leurs champs d’intervention respectifs et de définir les responsabilités et domaines de collaboration entre les deux partenaires.

Bruxelles, le 17 mars 2016.

Le président du Comité économique et social européen

Georges DASSIS


(1)  Avis du CESE sur «Les conseils nationaux de la compétitivité» (voir page 35 du présent Journal officiel).

(2)  Avis du CESE sur «La représentation extérieure de la zone euro» (voir page 16 du présent Journal officiel).

(3)  Avis du CESE sur «Le système européen d’assurance des dépôts» (voir page 21 du présent Journal officiel).

(4)  Avis du CESE sur le Livre vert «Construire l’union des marchés des capitaux» (JO C 383 du 17.11.2015, p. 64) et le «Plan d’action pour la mise en place d’une union des marchés des capitaux» (JO C 133 du 14.4.2016, p. 17).

(5)  Avis du CESE sur le thème «Croissance et dette souveraine dans l’UE: deux propositions novatrices» (JO C 143 du 22.5.2012, p. 10).

(6)  Avis du CESE sur les thèmes, entre autres, «Achever l’Union économique et monétaire — Les propositions du Comité économique et social européen pour la prochaine législature européenne» (JO C 451 du 16.12.2014, p. 10), «Achever l’UEM: le pilier politique» (JO C 332 du 8.10.2015, p. 8), «Le recours à la méthode communautaire pour rendre l’UEM démocratique et sociale» (JO C 13 du 15.1.2016, p. 33).

(7)  Avis du CESE sur «La représentation extérieure de la zone euro», «Le système européen d’assurance des dépôts», «Les conseils nationaux de la compétitivité» et «La politique économique de la zone euro (2016)» (voir page 16 du présent Journal officiel).

(8)  Avis du CESE sur les thèmes «Dix ans après, où va l’euro? L’avenir économique et politique de l’UE et le nouveau traité» (JO C 271 du 19.9.2013, p. 8); «Achever l’Union économique et monétaire — Les propositions du Comité économique et social européen pour la prochaine législature européenne» (JO C 451 du 16.12.2014, p. 10); «Achever l’UEM: le pilier politique» (JO C 332 du 8.10.2015, p. 8).

(9)  COM(2015) 603 — 2015/0250 (NLE).

(10)  Avis du CESE sur «Le recours à la méthode communautaire pour rendre l’UEM démocratique et sociale» (JO C 13 du 15.1.2016, p. 33).

(11)  C(2015) 8000 final.

(12)  Résolution du Parlement européen du 17 décembre 2015 sur l’achèvement de l’Union économique et monétaire européenne [2015/2936(RSP)].


18.5.2016   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 177/35


Avis du Comité économique et social européen sur la «Recommandation de recommandation du Conseil sur la création de conseils nationaux de la compétitivité dans la zone euro»

[COM(2015) 601 final]

(2016/C 177/06)

Rapporteur:

Thomas DELAPINA

Corapporteur:

David CROUGHAN

Le 11 novembre 2015, la Commission a décidé, conformément à l’article 304 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, de consulter le Comité économique et social européen (CESE) sur la:

«Recommandation de recommandation du Conseil sur la création de conseils nationaux de la compétitivité dans la zone euro»

[COM(2015) 601 final].

La section «Union économique et monétaire et cohésion économique et sociale», chargée de préparer les travaux du CESE en la matière, a adopté son avis le 3 mars 2016.

Lors de sa 515e session plénière des 16 et 17 mars 2016 (séance du 17 mars 2016), le CESE a adopté le présent avis par 200 voix pour, 3 voix contre et 11 abstentions.

1.   Synthèse et recommandations

1.1.

Le CESE examine dans quelle mesure les conseils nationaux de la compétitivité peuvent, au sein de la zone euro, contribuer à l’amélioration nécessaire de la gouvernance économique, en permettant de réduire les écarts entre les membres de l’union monétaire et d’éviter leur apparition à l’avenir, en reflétant la politique économique et sociale, et en renforçant la perspective européenne via l’intégration d’un réseau propre à la zone euro.

1.2.

La compétitivité n’est pas une fin en soi. Elle ne constitue un objectif pertinent que si elle accroît de manière concrète la prospérité des citoyens. Le CESE estime qu’il n’est pas envisageable de poursuivre la politique actuelle. La stratégie centrée exclusivement sur la réduction des coûts et la croissance des exportations afin de renforcer la compétitivité au sein de l’Union économique et monétaire (UEM) a plutôt contribué à intensifier les effets de la crise, car elle repose sur une définition bien trop étroite de la compétitivité.

1.3.

Le CESE recommande donc d’utiliser à l’avenir une définition actualisée de la compétitivité («compétitivité 2.0») et de tenir compte des concepts proposés dans le cadre du projet WWWforEurope, financé par la Commission européenne. Cette nouvelle définition s’inscrit dans le contexte des objectifs de la stratégie Europe 2020, qui couvrent également les objectifs «au-delà du PIB»: la compétitivité est ainsi définie comme «la capacité pour un pays (région, lieu) d’atteindre, au bénéfice de ses citoyens, les objectifs “au-delà du PIB”». Selon cette approche, la compétitivité s’appuie sur trois piliers: les revenus, les facteurs sociaux et la durabilité. En conséquence, le CESE recommande d’élargir le débat, qui ne devrait plus porter sur les «conseils de la compétitivité», mais sur les «conseils de la compétitivité, de la cohésion sociale et de la durabilité».

1.4.

Le CESE demande également à la Commission de clarifier un certain nombre de points pour que les activités de ces nouveaux conseils de la compétitivité, de la cohésion sociale et de la durabilité puissent être évaluées. Il reste encore à résoudre un certain nombre de questions techniques, telles que la nomination des membres, les dispositions relatives à la responsabilité, etc.

1.4.1.

Le CESE souscrit à la démarche de la Commission, qui permet aux États membres d’établir leurs conseils nationaux soit en créant de nouvelles institutions, soit en adaptant le mandat d’organismes existants, pour autant qu’ils soient indépendants et qu’ils n’aient pour objectif ni d’interférer avec le processus de fixation des salaires et le rôle des partenaires sociaux, ni d’harmoniser les systèmes nationaux de fixation des salaires. Comme il convient d’éviter tout chevauchement avec des organes et des travaux existants, le CESE invite la Commission à effectuer un état des lieux complet à ce sujet [travaux réalisés par le Fonds monétaire international (FMI), l’Organisation de coopération et de développemement économiques (OCDE), les comités existants, les organismes nationaux ou autres pouvant s’avérer utiles, etc.]. Un tel aperçu global constituerait un outil précieux d’aide à la décision, qui permettrait d’estimer la valeur ajoutée des conseils proposés, d’entamer une analyse coûts-bénéfices et d’évaluer la nécessité de structures supplémentaires.

1.4.2.

Le CESE invite la Commission à présenter des propositions concrètes sur la manière de maintenir les exigences nécessaires suivantes:

la responsabilité, la légitimité et la transparence, en associant pleinement les institutions démocratiquement légitimes telles que les parlements, les partenaires sociaux et d’autres organisations représentant la société civile;

la représentation d’une expertise mesurée et impartiale, afin de refléter la diversité des opinions existantes;

le caractère non contraignant des propositions du conseil, en particulier en préservant pleinement l’autonomie des partenaires sociaux;

la prise en compte, lors de l’évaluation de la compétitivité selon la nouvelle définition, de la double nature des salaires, qui sont un facteur de coût pour les entreprises et le principal élément déterminant de la demande intérieure.

1.5.

Avant que la Commission ne publie son dernier train de mesures, le CESE avait déjà présenté des propositions concrètes sur l’approfondissement de l’UEM, propositions qu’il convient de mettre en œuvre.

Ce sont non pas des stratégies nationales concurrentielles qui sont nécessaires, mais un cadre stratégique européen commun. Dans ce contexte, il est essentiel de renforcer le dialogue macroéconomique et de mettre un tel dialogue en place pour la zone euro. C’est à ce niveau qu’il y a lieu de coordonner les politiques économiques et les trois grands facteurs de la politique macroéconomique.

À l’échelon national, le rôle des partenaires sociaux doit être consolidé et les structures d’un dialogue macroéconomique doivent être établies, voire renforcées.

Le rôle des parlements nationaux et du Parlement européen doit être accru pour garantir la responsabilité démocratique, et non usurpé par des groupes d’experts technocratiques.

Le CESE insiste sur l’importance de placer sur un pied d’égalité les objectifs économiques et sociaux, ainsi que d’évaluer l’incidence sociale de toutes les mesures relatives au semestre européen.

La promotion des investissements publics et privés joue un rôle crucial dans la réduction des déséquilibres, ce qui requiert une politique budgétaire plus favorable à la croissance et à la création d’emplois de haute qualité.

Ce dernier point concerne d’une part les recettes et donc un aménagement approprié des systèmes fiscaux, permettant d’assurer une base de financement suffisante. D’autre part, le CESE voit également sur le front des dépenses la nécessité de prendre des mesures davantage axées sur la croissance. En particulier, une «règle d’or» plus large en matière de financement des investissements publics semblerait compatible avec les mesures existantes permettant de répartir sur plusieurs générations les coûts de financement des investissements futurs.

2.   Recommandation de la Commission

2.1.

Dans sa communication relative aux mesures à prendre pour compléter l’Union économique et monétaire, la Commission propose de renforcer la zone euro d’ici le début de l’année 2017 (phase 1 — «Approfondissement par la pratique», lancée le 15 juillet 2015), puis, sur la base de critères définissant une nouvelle convergence vers le haut des économies de la zone euro, d’engager des réformes plus fondamentales en adoptant une vision à moyen et à long terme en vue de nouvelles perspectives de croissance (phase 2 — «Achèvement de l’UEM»). L’un des éléments clés de la phase 1 consiste en une panoplie améliorée de mesures en faveur de la gouvernance économique, notamment la proposition formulée à l’attention du Conseil afin qu’il recommande de mettre en place des autorités nationales de la compétitivité au sein des États membres de la zone euro (tout en encourageant les autres États membres à créer des organes similaires).

2.2.

La Commission souhaite que la mobilisation d’une expertise nationale indépendante encourage les États membres à assumer eux-mêmes la responsabilité des mesures et des réformes nécessaires au niveau national. L’objectif est la création de conseils nationaux de la compétitivité chargés de suivre les performances obtenues et les politiques menées dans le domaine de la compétitivité, au sens global du terme, afin de favoriser une convergence économique soutenue et une appropriation plus large, au niveau national, des réformes nécessaires. Les États membres sont invités à mettre en œuvre les principes énoncés dans la recommandation et, au plus tard douze mois après l’adoption de cette dernière, la Commission est invitée à établir un rapport décrivant les progrès accomplis dans la mise en œuvre de la recommandation et son adéquation, et notamment la nécessité ou non d’adopter des dispositions contraignantes.

2.3.

Chaque conseil suivrait l’évolution de la compétitivité dans l’État membre concerné, et notamment les facteurs susceptibles d’influer à court terme sur les prix et la qualité des biens et des services par rapport à ceux des concurrents mondiaux. Les compétences des conseils de la compétitivité engloberaient «non seulement la dynamique des salaires, mais aussi les facteurs non salariaux, les déterminants de la productivité et les paramètres évolutifs liés à l’investissement, à l’innovation et à l’attrait de l’économie aux yeux des entreprises». Les conseils analyseraient et évalueraient les mesures concernées, et formuleraient des recommandations stratégiques, en tenant compte des particularités nationales et des pratiques établies. Ils fourniraient également des informations pertinentes pour étayer les processus de fixation des salaires au niveau national, sans porter atteinte aux droits de négociation et de convention collectives, tels qu’énoncés à l’article 28 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne.

2.4.

Les conseils jouiraient d’une indépendance fonctionnelle et structurelle vis-à-vis des entités publiques des États membres. Ils devraient consulter les parties prenantes concernées (par exemple les acteurs ou groupes d’acteurs nationaux, dont les partenaires sociaux, qui participent régulièrement au dialogue économique et social de l’État membre), sans pour autant communiquer uniquement ou principalement les opinions et les intérêts d’un groupe particulier.

2.5.

Les conseils seraient tenus d’établir des rapports annuels. Pour assurer la prise en compte des objectifs de la zone euro et de l’Union, la Commission entend coordonner les activités des conseils; elle se concerterait avec eux pour l’établissement des rapports et lors des missions d’information dans les États membres. Ces rapports éclaireraient également les analyses effectuées par la Commission dans le cadre du semestre européen et de la procédure concernant les déséquilibres macroéconomiques.

3.   Observations générales

3.1.

À l’instar de la Commission, le CESE est convaincu de la nécessité d’améliorer et d’approfondir l’UEM; il s’est exprimé et a formulé des propositions précises à cet égard dans nombre de ses avis. Le Comité fait aussi l’éloge des mesures positives prises par la Commission et partage son point de vue selon lequel une coordination accrue des politiques économiques nationales est absolument indispensable si l’on veut supprimer les déséquilibres existants et réduire la probabilité d’apparition de nouveaux déséquilibres à l’avenir. Une partie importante de la valeur ajoutée de ces conseils nationaux serait leur appartenance à un réseau propre à la zone euro, comprenant d’autres conseils de ce type, qui renforcerait la perspective européenne des débats politiques entre les États membres et la Commission.

3.2.

Cependant, les politiques actuelles ne s’attaquent pas correctement à ce problème: des instruments plus efficaces sont indispensables pour gérer les déséquilibres macroéconomiques. Par conséquent, le CESE se félicite vivement que la Commission reconnaisse enfin la nécessité de mettre davantage l’accent sur les performances des États membres en matière d’emploi et d’objectifs sociaux, ainsi que de renforcer l’«appropriation» des efforts de réforme. La Commission a également raison de préconiser une participation accrue des partenaires sociaux nationaux à l’élaboration des programmes nationaux de réforme et, par l’intermédiaire des représentations de la Commission, au processus du semestre européen au niveau national. Les conseils nationaux, établis avec la participation pleine et entière de toutes les parties prenantes, pourraient servir à refléter l’incidence économique et sociale des mesures politiques actuelles et futures.

3.3.

Pour les États membres qui se sont engagés dans une politique monétaire unique (une seule monnaie, un seul taux d’intérêt), dont il est peu probable qu’elle donne lieu, à moyen terme ou même jamais, à une union économique, sociale et budgétaire intégrale comparable à une véritable union fédérale, il n’est plus envisageable de corriger les déséquilibres en dévaluant la monnaie nationale. Jusqu’à présent, les efforts visant à stimuler la compétitivité dans la zone euro se sont limités, pour l’essentiel, à un objectif étroitement défini, à savoir l’amélioration des résultats à l’exportation et de la balance courante, souvent via une réduction des coûts pouvant être contre-productive. La politique actuelle n’a pourtant pas été en mesure d’éliminer les déséquilibres et les conséquences négatives de la crise. Au contraire, certaines mesures ont aggravé ces conséquences (1) en mettant trop l’accent sur une politique d’austérité axée exclusivement sur l’offre, qui a affaibli la demande et accru le chômage, les déficits publics et les inégalités sociales. Sachant que les déséquilibres sont susceptibles de provoquer des situations difficiles s’ils ne sont pas corrigés dans les meilleurs délais, il est nécessaire de mettre en place de nouveaux instruments politiques pour éviter que la charge de l’adaptation ne retombe entièrement sur les salaires et les marchés de l’emploi.

3.4.

Bien que, dans sa recommandation, la Commission plaide pour le «concept de compétitivité dans une acception large», le CESE tient à rappeler qu’en 2002, elle a publié une définition beaucoup plus étendue du terme, à savoir «la capacité d’une économie à assurer de façon durable à sa population un taux d’emploi élevé et un niveau de vie élevé et en progression» (2). Dans le cadre du projet WWWforEurope (3), financé par la Commission, cette définition a été élargie pour couvrir les objectifs «au-delà du PIB», tels que l’insertion sociale et un environnement durable dans le contexte de la stratégie Europe 2020 (4). La compétitivité est ainsi définie comme «la capacité pour un pays (région, lieu) d’atteindre, au bénéfice de ses citoyens, les objectifs “au-delà du PIB”» (5). La compétitivité est mesurée sur la base de trois piliers: le pilier des revenus (y compris le revenu disponible des ménages et les dépenses des consommateurs), le pilier social (effets socio-économiques d’un système, comme le risque de pauvreté, les inégalités et le chômage des jeunes) et le pilier environnemental, qui mesure la productivité des ressources, l’intensité des émissions de gaz à effet de serre, l’intensité énergétique et la part des énergies renouvelables dans la production d’électricité. Il y a également lieu de tenir compte de la stratégie numérique. Cela ne signifie pas que les déséquilibres (tels que celui de la balance des paiements courants) peuvent être négligés, comme ce fut le cas au lendemain de la crise financière.

3.5.

Pour garantir la bonne compréhension d’une définition globale de la compétitivité («compétitivité 2.0»), le CESE propose que les futures discussions portent non pas sur les «conseils de la compétitivité», mais sur les «conseils pour la compétitivité, la cohésion sociale et la viabilité».

4.   Observations particulières

4.1.

Il existe, au niveau international, de nombreuses procédures et institutions (notamment le FMI et l’OCDE, ainsi que la Commission européenne) qui assurent le suivi de la compétitivité et émettent des recommandations stratégiques à cet égard. De même, au niveau national, de nombreux organes, tels que les instituts indépendants de recherche économique, les bureaux des statistiques et les conseils économiques et sociaux, traitent de ces questions. La Commission fait observer que des institutions et des travaux existants pourront être exploités lors de la mise en place des conseils de la compétitivité, étant donné que certains États membres possèdent déjà des organes de ce type et que d’autres disposent d’entités qu’ils pourraient utiliser à cette fin. Il importe toutefois que les conseils soient indépendants et que leur rôle consultatif reflète adéquatement les avis d’experts formulés dans l’intérêt général.

4.2.

Le CESE note que la Commission propose de réaliser, dans les douze mois suivant l’adoption de la recommandation sur la création de conseils nationaux de la compétitivité, en s’appuyant sur les informations pertinentes communiquées par les États membres, un rapport sur l’état d’avancement de la mise en œuvre de cette recommandation et sur son adéquation. Avant de créer les conseils, il conviendrait de réaliser un état des lieux évaluant les activités et l’efficacité des organes existants et de ceux susceptibles d’être créés à l’avenir. Cet examen complet, reposant notamment sur l’expertise des partenaires sociaux, faciliterait la prise de décision, car il permettrait d’estimer la valeur ajoutée de ces conseils, d’effectuer une analyse des coûts et avantages, ainsi que d’évaluer la nécessité de prévoir des organes supplémentaires.

4.3.

La Commission continue, à juste titre, d’insister sur le besoin d’améliorer la transparence et la légitimité démocratique des politiques grâce à la pleine participation du Parlement européen, des parlements nationaux et des acteurs de la société civile concernés, et notamment des partenaires sociaux. Le CESE préconise dès lors que les organes démocratiquement responsables soient dûment associés au traitement des questions qui devront être clarifiées si les conseils voient le jour, à savoir: la nomination et l’approbation des membres des conseils, les compétences, l’élaboration des programmes de travail, la présentation de rapports et de comptes rendus, etc.

4.4.

Avant que la mise en place de conseils de la compétitivité puisse être approuvée, la Commission doit définir les critères de leur indépendance et de la représentation d’une expertise impartiale et mesurée reflétant la diversité des opinions, y compris celles des partenaires sociaux, afin de dissiper tout doute qui pourrait subsister quant à l’existence d’une expertise neutre et indépendante. Il convient également de clarifier la question de la responsabilité en cas d’analyses ou de prévisions incorrectes émises par les conseils.

4.5.

Prenant note du caractère consultatif de ces organes, le CESE demande à la Commission de fournir des éclaircissements et d’être explicite sur le caractère non contraignant des recommandations formulées par les conseils de la compétitivité. La question du caractère non contraignant se pose notamment au regard de la protection de l’autonomie des parties engagées dans les négociations salariales. Dans sa recommandation, la Commission fait valoir que le droit de négocier et de conclure des conventions collectives ne devrait pas être touché, mais cette affirmation, qui ne concerne que le droit garanti par le traité (6), est trop faible. Toute tentative d’influencer directement la fixation des salaires est absolument exclue du champ de compétence des conseils de la compétitivité.

4.6.

Le CESE prend note de la réflexion plus large au sujet de la compétitivité, au-delà de la compétitivité des coûts. D’autres considérations sur la prévention de l’apparition de déséquilibres doivent tenir compte de la double nature des salaires (facteur de coût pour les entreprises, facteur déterminant la demande intérieure; voir paragraphe 5.5). En outre, il est nécessaire d’adopter une approche symétrique vis-à-vis des excédents et des déficits pour remédier de façon adéquate aux déséquilibres (7).

5.   Propositions du CESE

5.1.

Le CESE est convaincu de la nécessité d’approfondir l’UEM. Ayant relevé, dans l’examen de la recommandation de la Commission ci-dessus, de nombreuses questions non résolues nécessitant une analyse plus approfondie et des éclaircissements, le Comité propose ci-après une synthèse des propositions qu’il a déjà formulées dans ce domaine. Au cours des dernières années, le Comité a adopté plusieurs avis sur le thème «approfondir l’union économique et monétaire» (8), le plus récent étant l’avis ECO/380 sur «La méthode communautaire pour une UEM démocratique et sociale», adopté en 2015 (9).

5.2.

Dans son avis ECO/380, le CESE formule des propositions en vue de futures initiatives de la Commission dans le domaine de l’UEM. Le CESE est convaincu que ce type de mesures contribuera à mettre un terme aux divergences en matière de fonctionnement des marchés du travail et des systèmes sociaux et de fixation des salaires, systèmes qui sont nécessaires pour stabiliser l’UEM et l’approfondir d’un point de vue démocratique et social. L’approche du CESE s’appuie sur l’idée que, dans le cadre général de la politique monétaire, budgétaire et salariale, il est possible de renforcer la confiance et d’assurer une plus grande convergence sans porter atteinte à l’indépendance des négociations collectives.

5.3.

Cela nécessitera des mesures visant à promouvoir le dialogue macroéconomique (MED) et, avant tout, à mettre en place un dialogue macroéconomique dans la zone euro (MED-EURO). Le MED a été lancé en 1999 en vue de parvenir à un dosage macroéconomique durable, axé sur la croissance et la stabilité, c’est-à-dire à une interaction sans heurts entre l’évolution des salaires et les politiques monétaire et budgétaire. Ce forum de coordination des trois grands acteurs de la politique macroéconomique, qui associe directement les partenaires sociaux, pourrait contribuer de manière essentielle à assurer la coordination nécessaire, le respect de l’objectif commun de stabilité et le développement démocratique et social de l’UEM. Ses constatations et conclusions devraient être prises en compte tant dans l’examen annuel de la croissance que dans les recommandations par pays.

5.4.

Le Comité souligne une fois de plus combien il importe de promouvoir le rôle des partenaires sociaux et leur participation à l’élaboration des politiques. Une forme de dialogue macroéconomique est également utile au niveau national. On a constaté une forte croissance de la compétitivité et de la productivité, principalement dans les pays où le dialogue social et les relations de travail sont solides et où un haut niveau de protection sociale et de cohésion sociale est garanti.

5.5.

Le système de fixation des salaires doit être laissé aux partenaires de la négociation collective, sans aucune intervention extérieure. Leur autonomie doit être pleinement respectée et garantie. Ce sont eux qui comprennent le mieux la situation réelle en matière de fixation des salaires et de marché du travail. Les partenaires de la négociation collective tiennent compte du fait que l’évolution des salaires a des répercussions à la fois sur les coûts et sur la demande. Ils ont bien conscience du fait qu’aligner les augmentations salariales sur la croissance de la productivité nationale à moyen terme et le taux d’inflation cible de la Banque centrale européenne a une incidence neutre sur les prix, la compétitivité, la demande intérieure et la répartition des revenus (10). La nécessité de renforcer le dialogue macroéconomique repose sur le fait que cette prise de conscience diffère d’un État membre à l’autre et ne trouve parfois aucune expression concrète, ce qui donne lieu à des déséquilibres.

5.6.

Dans le cadre de la gouvernance de la zone euro, il conviendrait de veiller à une participation plus active des parlements nationaux et du Parlement européen. Le CESE est favorable à la création d’une vaste commission du Parlement européen réunissant tous les députés des pays de la zone euro et des pays qui souhaitent la rejoindre, associée à une coordination renforcée entre parlementaires nationaux de la zone euro concernant les questions liées à l’UEM (COSAC+).

5.7.

Le CESE fait observer que les objectifs de politique économique devraient être plus en phase avec les objectifs de politique sociale de l’Union européenne énoncés à l’article 4, paragraphe 2, du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne et qu’il convient de résoudre les éventuels conflits entre objectifs économiques et sociaux. Au titre de la clause sociale horizontale, toutes les mesures du semestre européen doivent faire l’objet d’une évaluation de leur impact social (11).

5.8.

En outre, le Comité estime que la gestion de la demande à court terme et un programme d’investissement efficace visant à générer des revenus grâce à la croissance, à la cohésion sociale et à la solidarité sont essentiels. Cela nécessite une politique budgétaire favorable à l’emploi et à la croissance. Une coordination fiscale efficace est indispensable pour s’assurer que les pays disposent d’une base imposable adéquate. Des mesures vigoureuses pour lutter contre la fraude fiscale, les paradis fiscaux et la planification fiscale agressive sont également nécessaires.

5.9.

Du côté des dépenses également, le Comité considère qu’il est possible de mettre en place des politiques budgétaires plus favorables à la croissance. L’investissement public est un outil essentiel à la relance économique. Les investissements nécessaires dans les domaines de pointe et le domaine social (recherche, éducation, accueil de la petite enfance, services sociaux, logement social, etc.) favoriseront non seulement la croissance et l’emploi à court terme, mais renforceront aussi la production potentielle à long terme. Les investissements et la croissance, en particulier dans les pays frappés par la crise, sont indispensables au processus de rattrapage et, partant, de suppression des déséquilibres.

5.10.

Le CESE accueille favorablement la proposition de la Commission de ne pas inclure les contributions des États membres au Fonds européen pour les investissements stratégiques dans le calcul des déficits budgétaires. Dans la mesure où il s’agit de dépenses stimulant le potentiel de croissance et dont le produit profitera aussi aux générations futures, leur financement devrait également être étalé sur plusieurs générations. S’appuyant sur le même raisonnement, le CESE s’interroge une fois de plus (12) sur les motifs pour lesquels les investissements tournés vers l’avenir ne pourraient pas bénéficier d’un traitement identique en utilisant le budget général sous la forme d’une règle d’or de l’investissement.

Bruxelles, le 17 mars 2016.

Le président du Comité économique et social européen

Georges DASSIS


(1)  Pour une description détaillée, consulter l’avis du CESE sur la «Recommandation du Conseil concernant la mise en œuvre des grandes orientations des politiques économiques des États membres dont la monnaie est l’euro» (JO C 133 du 9.5.2013, p. 44), paragraphes 3.8 et suivants.

(2)  COM(2002) 714 final.

(3)  http://www.foreurope.eu/.

(4)  WWWforEurope, document de travail no 84, «Competitiveness and Clusters: Implications for a New European Growth Strategy» (Compétitivité et pôles: répercussions sur la nouvelle stratégie européenne de croissance), février 2015.

(5)  Ibidem, p. 9.

(6)  Article 153, paragraphes 1 («En vue de réaliser les objectifs visés à l’article 151, l’Union soutient et complète l’action des États membres dans les domaines suivants: […]») et 5 («Les dispositions du présent article ne s’appliquent ni aux rémunérations, ni au droit d’association, ni au droit de grève, ni au droit de lock-out»), du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne.

(7)  Voir l’avis du CESE «Réexamen de la gouvernance économique» (JO C 268 du 14.8.2015, p. 33), paragraphe 3.2.3.

(8)  Sur le pilier politique en particulier, voir l’avis du CESE sur le thème «Achever l’UEM: le pilier politique» (JO C 332 du 8.10.2015, p. 8).

(9)  Et, précédemment, l’avis du CESE sur le thème «Achever l’UEM: le pilier politique» (JO C 332 du 8.10.2015, p. 8).

(10)  Voir l’avis du CESE «Examen annuel de la croissance» (JO C 132 du 3.5.2011, p. 26), paragraphe 2.3.

(11)  Voir l’avis du CESE «La méthode communautaire pour une UEM démocratique et sociale» (JO C 13 du 15.1.2016, p. 33), paragraphe 1.5.

(12)  Voir l’avis du CESE «Un plan d’investissement pour l’Europe», JO C 268 du 14.8.2015, p. 27 (paragraphe 4).


18.5.2016   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 177/41


Avis du Comité économique et social européen sur la «Recommandation de recommandation du Conseil concernant la politique économique de la zone euro»

[COM(2015) 692 final]

(2016/C 177/07)

Rapporteur:

M. Michael IKRATH

Corapporteure:

Mme Anne DEMELENNE

Le 22 décembre 2015, la Commission européenne a décidé, conformément à l’article 304 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la:

«Recommandation de recommandation du Conseil concernant la politique économique de la zone euro»

[COM(2015) 692 final].

La section spécialisée «Union économique et monétaire et cohésion économique et sociale», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 3 mars 2016.

Lors de sa 515e session plénière des 16 et 17 mars 2016 (séance du 17 mars 2016), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 201 voix pour, 3 voix contre et 6 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1.

Le CESE approuve le principe de l’élaboration, au début du semestre européen, de programmes de priorités économiques afin de stimuler la croissance dans les pays de la zone euro. Cependant, le Comité regrette que la société civile et en particulier les partenaires sociaux n’aient pas été consultés quant à la conception et aux processus nationaux du semestre européen.

1.2.

Le Comité est d’avis que ces recommandations ne doivent en aucun cas creuser l’écart existant entre les pays de la zone euro et les autres États membres, mais plutôt viser à le réduire. En particulier, l’objectif est de s’inscrire dans une perspective à long terme de développement de l’euro pour qu’il devienne la monnaie commune de tous les États membres.

1.3.

Le CESE reconnaît l’importance du document de la Commission pour approfondir l’Union économique et monétaire (UEM). Comme il l’a déjà souligné dans des avis précédents (1), le Comité est fortement partisan de poursuivre le renforcement et l’achèvement de l’UEM. Les États membres, individuellement et collectivement, devraient prendre toutes les mesures nécessaires pour accroître la convergence et l’intégration, particulièrement dans le domaine économique. Ces mesures devraient aller de pair avec des progrès sur la voie de la création d’une union budgétaire de la zone euro (comprenant notamment un budget propre), d’une union sociale et d’une représentation extérieure unifiée auprès des institutions financières internationales.

1.4.

Le CESE reconnaît la nécessité politique de doter la zone euro d’une solide base politique et institutionnelle, qui fait pour le moment toujours défaut depuis la mise en place de l’union monétaire (2). Il convient de saluer les différentes initiatives telles que la création d’une union bancaire ou d’une union des marchés de capitaux, mais celles-ci ne remplacent pas la solide architecture requise.

1.5.

Force est en outre de noter que les récentes campagnes d’investissement en faveur de l’emploi n’ont pas atteint leurs objectifs de manière satisfaisante. Pour parvenir à une reprise de la croissance et de l’emploi, une combinaison de politiques financières, fiscales, budgétaires, économiques et sociales s’impose. Contrairement à ce qu’indique la recommandation de la Commission, la politique budgétaire devrait reposer sur une approche expansionniste plutôt que neutre.

1.6.

Le CESE est convaincu qu’une orientation budgétaire neutre, bien que préférable à la poursuite de l’austérité budgétaire, n’est pas appropriée dans les circonstances actuelles. Étant donné que la récession va de pair avec un affaiblissement du potentiel de croissance, les politiques budgétaires de la zone euro doivent être plus performantes que d’ordinaire pour stimuler l’économie de la zone euro dans son ensemble. À ce stade, les risques de surchauffe des économies sont beaucoup plus limités que ceux liés au faible niveau persistant de l’inflation ou à la déflation. Le CESE préconise dès lors une impulsion budgétaire mettant l’accent sur l’investissement public, ce qui entraînerait une augmentation de la demande à court terme, mais également une hausse du potentiel de croissance à long terme.

1.7.

En outre, le CESE est partisan d’un allégement de la fiscalité sur le travail dans la mesure où la viabilité financière des systèmes de protection sociale, déjà fragilisés, ne s’en trouve pas menacée. Le Comité rappelle que les systèmes modernes de protection sociale devraient reposer sur les principes de solidarité et d’égalité des chances, et non pas seulement sur la promotion de l’employabilité. En outre, au niveau budgétaire, il faudra prendre en compte les conséquences de la robotique et de la numérisation, qui perturberont le marché de l’emploi, avec un impact probable sur les recettes fiscales.

1.8.

Le CESE se félicite que la notion de flexibilité ait été réexaminée, mais les contrats temporaires devraient idéalement déboucher sur des contrats permanents, et non sur des emplois précaires. Pour lutter contre les inégalités sociales croissantes, il est nécessaire de créer de l’emploi et de mettre l’accent sur la qualité du travail. Il convient dans le même temps de tirer parti du potentiel offert par l’économie du partage, plutôt que de l’émousser, et d’instituer de nouvelles formes d’emploi et de travail au service de la société, sans que cela ne se fasse au détriment des droits des travailleurs et des systèmes de protection sociale.

1.9.

Ces huit dernières années, la croissance dans la zone euro a souffert de la faiblesse de la demande, et non de l’insuffisance de l’offre. Le marché du travail s’est adapté, mais cette adaptation s’est faite de manière déséquilibrée et asymétrique, essentiellement par la baisse des salaires nominaux et réels et des coûts unitaires de la main-d’œuvre dans les États membres les plus durement touchés par la crise. Le CESE conclut dès lors que les réformes structurelles visant à améliorer le versant de l’offre et stimuler ainsi les investissements et la croissance ne peuvent pas, à elles seules, résoudre le problème de la faiblesse de la reprise. À tout le moins les réformes structurelles pouvant avoir des effets positifs sur la demande à court terme devraient-elles avoir la priorité, même en cas de resserrement du crédit pour les ménages et les entreprises.

1.10.

Le CESE appelle également à une action coordonnée afin de créer un environnement plus favorable aux petites et moyennes entreprises (qui représentent 99 % des entreprises de l’Union européenne et près de 60 % de la main-d’œuvre, soit environ 65 millions de personnes) grâce à une meilleure réglementation et à une réduction cohérente des lourdeurs administratives, à la garantie d’un financement suffisant et adéquat («accès au financement») (3), ainsi qu’à une facilitation systématique des exportations vers les marchés extérieurs à l’Union européenne. Cette approche permet d’ouvrir des espaces commerciaux pour investir dans la croissance et l’emploi.

1.11.

Le CESE se félicite des initiatives en faveur du financement des PME au sein de l’union des marchés des capitaux. Il est toutefois indispensable, notamment, d’ouvrir de nouvelles possibilités de financement pour les micro-entreprises et les jeunes entreprises, par exemple le capital d’amorçage, le capital-risque, le financement et l’investissement participatifs ainsi que des formes innovantes de financement telles que le capital-investissement. Dans ce contexte, le CESE insiste sur la nécessité de concrétiser le projet de création d’un fonds européen de capital-risque. Il est urgent d’évaluer les possibilités que les nouveaux modèles bancaires (4) pourraient offrir pour le financement des entreprises dans l’Union européenne.

2.   Contexte

2.1.

À la suite de la publication du rapport des cinq présidents intitulé «Compléter l’Union économique et monétaire européenne», l’approche adoptée dans le cadre du semestre européen a été renouvelée afin de renforcer l’intégration entre la zone euro et les niveaux nationaux. Pour la première fois, la Commission publie une recommandation pour la zone euro en novembre, en même temps que l’examen annuel de la croissance 2016, dans le but de mieux intégrer la zone euro et les dimensions nationales de la gouvernance économique de l’Union européenne.

2.2.

L’objectif est d’offrir la possibilité de mener des débats et de formuler des recommandations concernant la zone euro, en amont des discussions concernant chaque pays, de manière que les défis communs soient pleinement pris en compte dans des actions spécifiques à chacun d’entre eux. Il s’agit d’un changement important par rapport aux précédents cycles du semestre européen, au cours desquels les recommandations relatives à la zone euro étaient publiées vers la fin du semestre, en même temps que les recommandations par pays.

2.3.

La Commission a présenté quatre recommandations concernant la politique économique de la zone euro:

mener des politiques qui soutiennent la relance, encourager la convergence, faciliter la correction des déséquilibres macroéconomiques et améliorer la capacité d’ajustement;

mettre en œuvre des réformes qui combinent des contrats d’emploi flexibles et fiables, des stratégies globales d’apprentissage tout au long de la vie, des politiques efficaces pour aider les chômeurs à réintégrer le marché du travail, des systèmes de protection sociale modernes et des marchés des produits et des services ouverts et compétitifs; réduire le coin fiscal du travail, en particulier pour les bas salaires, d’une manière qui soit neutre pour le budget, afin de favoriser la création d’emplois;

maintenir l’orientation budgétaire globalement neutre prévue pour 2016; pour 2017, réduire la dette publique afin de rétablir les réserves budgétaires tout en évitant la procyclité, dans le plein respect du pacte de stabilité et de croissance;

faciliter la réduction progressive du volume des prêts bancaires non productifs et améliorer les procédures d’insolvabilité des entreprises et des ménages.

3.   Observations générales

3.1.

Pour la première fois, le projet de recommandation pour la zone euro est publié au début du cycle du semestre européen, en même temps que l’examen annuel de la croissance, le rapport sur le mécanisme d’alerte et le projet de rapport conjoint sur l’emploi. Le CESE reconnaît que cette nouvelle approche peut contribuer à une meilleure prise en compte de considérations s’appliquant à toute la zone euro lors de la conception des politiques nationales présentées dans les programmes de stabilité et les programmes nationaux de réforme.

3.2.

Le CESE regrette que les partenaires sociaux et la société civile au sens large n’aient pas été consultés quant à la conception du projet de recommandation concernant la politique économique de la zone euro et que les processus nationaux ne soient pas encore adaptés à ce nouveau processus du semestre. Dans le cadre du processus du semestre européen, le dialogue social peut être un élément moteur pour des réformes durables, inclusives et couronnées de succès dans les domaines économique, social et de l’emploi. Les partenaires sociaux, à tous les niveaux, devraient s’entendre avec les pouvoirs publics compétents sur une participation réelle, significative et en temps utile au semestre européen. Le CESE recommande avec force une coopération étroite et permanente entre sa section ECO et la commission ECON du Parlement européen à l’avenir.

3.3.

Le CESE approuve l’accent mis sur une approche coordonnée, non seulement entre tous les États membres de la zone euro, mais aussi pour les politiques monétaires, budgétaires et structurelles ou axées sur l’offre. En outre, le CESE suggère que les réformes structurelles mettent l’accent sur des mesures politiques, de manière que la reprise économique puisse être soutenue à court terme. En ce qui concerne la flexibilité des marchés du travail, elle ne doit pas avoir pour résultat, comme les années précédentes, une perte de pouvoir d’achat de la main-d’œuvre, afin de ne pas compromettre la demande intérieure en tant que facteur clé de la croissance. Cela signifie que la concurrence doit reposer sur l’amélioration de la qualité et de la productivité obtenue grâce à l’innovation, et non sur le bas niveau des prix et des salaires.

3.4.

Bien que le CESE soit conscient des défis considérables liés au renforcement et au développement de l’euro, qui sont nécessaires à ce stade et le resteront dans un avenir proche afin d’assurer une protection durable de l’euro et de la zone euro, il estime souhaitable que les objectifs suivants soient poursuivis:

création d’une représentation extérieure unifiée de la zone euro auprès des organisations internationales (Fonds monétaire international, OCDE, etc.) (5);

création d’une union budgétaire dans la zone euro;

création d’une union sociale, ce qui implique que la Commission, le Conseil et le Parlement européen doivent associer davantage encore les partenaires sociaux à toutes les initiatives législatives.

3.5.

Dans la perspective du bilan à mi-parcours du cadre financier pluriannuel (CFP) de l’Union européenne pour la période 2014-2020 et de la préparation de la réflexion sur le CFP post-2020, le CESE est d’avis que la zone euro doit disposer d’un budget propre, qui: 1) fournisse un transfert de ressources, temporaire mais conséquent, en cas de chocs régionaux; 2) soit capable de contrebalancer les récessions graves dans l’ensemble de la zone; 3) assure la stabilité financière. Dans le même ordre d’idées, la zone euro doit avoir — première étape sur la voie d’un gouvernement économique — son ministre des finances, disposant d’un système de ressources propres et agissant dans le respect des principes de simplicité, de transparence, d’équité et de responsabilité démocratique.

4.   Observations particulières

4.1.    Déséquilibres macroéconomiques

4.1.1.

Le CESE convient avec la Commission que les États membres doivent poursuivre leurs réformes structurelles en fonction des circonstances spécifiques à chaque pays afin de promouvoir la convergence et de faciliter la correction des déséquilibres macroéconomiques. Il y a lieu toutefois de trouver un équilibre entre les réformes structurelles et l’investissement dans des activités productives, source de création d’emplois.

4.1.2.

Le CESE accueille favorablement la recommandation de la Commission préconisant que les États membres qui affichent des excédents importants de leurs comptes courants mettent en œuvre, en priorité, des mesures qui contribuent à canaliser le surplus d’épargne vers l’économie nationale et à doper ainsi l’investissement intérieur. De telles mesures ne devraient toutefois pas être limitées à l’offre (par exemple, les réformes des marchés de produits) mais devraient également comprendre des initiatives gouvernementales plus résolues en matière d’investissements publics, telles que l’actuel plan Juncker (6).

4.1.3.

Le CESE estime que les aides d’État devraient être adaptées notamment aux PME innovantes. Afin d’assurer à cette catégorie d’entreprises un accès plus aisé au financement, il appartient à l’État, d’une part, de leur octroyer des fonds qui leur insufflent un élan et, d’autre part, de mettre en place un système d’assurances et de garanties publiques. Les interactions pertinentes entre l’État, les PME et les universités et instituts de recherche sont un élément important du système d’investissement.

4.1.4.

Le CESE souligne que les exportations représentent un moteur de croissance essentiel pour les PME dans la zone euro. Outre le taux de change euro/dollar favorable grâce à la politique monétaire de la BCE, des accords de libre-échange sont déterminants pour accroître les exportations. Tout en approuvant l’accent placé actuellement sur les négociations du partenariat transatlantique de commerce et d’investissement, le CESE recommande aussi de conclure un accord qui facilitera l’accès au marché pour les entreprises européennes, dans le cadre de leurs échanges commerciaux avec les marchés émergents à forte croissance. Il importe de garantir la protection des droits de l’homme et des normes de l’Organisation internationale du travail, des droits des consommateurs et des règles environnementales en vigueur au sein de l’Union européenne.

4.2.    Marchés du travail, des produits et des services

4.2.1.

Le CESE constate que même si, comme l’indique la Commission, la situation continue de s’améliorer progressivement sur les marchés européens de l’emploi, le fait que le taux d’emploi dans la zone euro, qui était de 68,9 % en 2015, reste bien en deçà de l’objectif de la stratégie Europe 2020, à savoir 75 %, n’est absolument pas évoqué. Le CESE note que, selon les éléments fournis par les services de la Commission européenne (base de données LABREF), il ne semble pas y avoir de relation positive entre le nombre de réformes du marché du travail, quel que soit le moment où elles ont été mises en œuvre (avant ou après la crise), et l’efficacité du marché du travail dans les États membres (7).

4.2.2.

Les réformes structurelles sur les marchés du travail doivent favoriser l’investissement social, c’est-à-dire des mesures qui soutiennent la formation continue de la main-d’œuvre, employée ou non, et veillent à promouvoir sa sécurité financière — en particulier pour les chômeurs. En outre, le CESE est favorable à la réduction de la charge fiscale pesant sur le travail, pour autant qu’elle soit compensée par d’autres sources de recettes publiques. À moyen terme, une participation plus forte au marché de l’emploi peut aussi contribuer à ce processus.

4.2.3.

Afin de résoudre les problèmes touchant à la compétitivité et à la durabilité de l’Union européenne, le CESE recommande de constituer dans le secteur du numérique une société faîtière, comme l’a fait avec beaucoup de succès le groupe Airbus. Cette coopération multinationale, qui associe plusieurs filiales originaires de divers États membres, est un acteur clé de l’économie et de l’industrie européennes.

4.2.4.

La prédominance numérique des États-Unis constitue d’ores et déjà une nouvelle forme de domination mondiale. Des conséquences particulièrement fâcheuses peuvent être observées dans le secteur financier, où les grandes banques d’investissement américaines ont déjà tissé des liens de capital très étroits avec les sociétés de technologie financière innovantes, qui à leur tour menacent le modèle européen de banque de détail traditionnelle («boring banks»), empiétant avec succès sur leurs activités de base.

4.2.5.

Afin de concevoir et de mettre au point les détails d’un modèle comparable de société faîtière européenne dans le secteur du numérique, le CESE suggère la création, dans un avenir proche, d’un groupe de projet interdisciplinaire. Celui-ci devrait se composer de représentants de la Commission (le commissaire OETTINGER) et du Parlement européen (commission ITRE), et être mis en œuvre avec la participation du CESE. En ce qui concerne les questions de financement, il importe de veiller d’emblée à la compatibilité avec le plan d’investissement du président Juncker. Une coopération étroite entre les divers groupes de la société faîtière et les PME elles-mêmes permettra de stimuler fortement la croissance et de créer de nouveaux emplois.

4.3.    Politiques budgétaires

4.3.1.

Le CESE se félicite de l’accent mis par la Commission européenne sur l’examen de l’orientation budgétaire pour la zone euro dans sa globalité lors de la définition des orientations relatives aux politiques budgétaires nationales. Le CESE relève toutefois, sans préjudice de l’indépendance de la BCE, l’absence notable d’une analyse de l’évolution de la politique monétaire dans la zone euro, qui évaluerait l’opportunité d’une politique budgétaire neutre. Cette lacune est à tout le moins étrange, étant donné que les membres du conseil des gouverneurs de la BCE ont, à maintes reprises et publiquement, fait référence aux politiques budgétaires de la zone euro (8).

4.3.2.

Cette omission est préoccupante dans la mesure où la zone euro se trouve actuellement dans une situation où la capacité de la politique monétaire à stimuler la demande est extrêmement limitée. La demande est faible depuis si longtemps que l’inflation (même en ne tenant pas compte des prix du pétrole) est largement inférieure à l’objectif de 2 % de la BCE, dont les principaux taux d’intérêt directeurs sont presque nuls et ne peuvent donc plus faire l’objet de nouvelles réductions substantielles. L’économie de la zone euro se trouve dans une situation dite de «trappe à liquidités» et risque de tomber dans un «piège déflationniste» si l’inflation ne reprend pas rapidement. Le cas échéant, l’économie de la zone euro stagnerait pendant plusieurs années encore et la viabilité politique de l’euro finirait par en être menacée.

4.3.3.

La politique originale d’assouplissement quantitatif poursuivie avec constance par la BCE depuis le début de 2015 ne semble pas avoir véritablement fait la différence (9) pour stimuler la demande. Dans ces circonstances, et en présence du phénomène d’«hystérèse» mentionné plus haut (selon lequel la récession va de pair avec un affaiblissement du potentiel de croissance), les politiques budgétaires de la zone euro doivent être plus performantes que d’ordinaire pour stimuler l’économie de la zone dans son ensemble (10). Compte tenu des contraintes liées aux politiques budgétaires des États membres du sud de la zone euro, les États membres connaissant une inflation inférieure à l’objectif fixé, des coûts d’emprunt public faibles, des ratios dette publique/PIB relativement bas et des excédents de leur balance courante devraient adopter une politique budgétaire expansionniste afin de faire grimper l’inflation au-dessus de l’objectif de 2 % poursuivi par la BCE, de manière que le taux d’inflation moyen dans la zone euro puisse remonter et s’en rapprocher. À ce stade, les risques de surchauffe des économies sont beaucoup plus limités que ceux liés au faible niveau persistant de l’inflation ou à la déflation.

4.3.4.

Étant donné toutefois les inquiétudes relatives à la viabilité de la dette publique, dans un contexte de changement démographique, les politiques budgétaires expansionnistes, surtout dans les États membres présentant une balance courante très excédentaire, peuvent et doivent se développer moyennant une augmentation des dépenses d’investissement public. Une impulsion budgétaire mettant l’accent sur l’investissement public entraînerait une augmentation de la demande à court terme, mais également une hausse du potentiel de croissance à long terme. Ces investissements publics pourraient se concentrer non seulement sur les infrastructures mais aussi sur les politiques en matière d’éducation et de compétences («investissement social»).

4.4.    Le secteur financier

4.4.1.

Le CESE plaide en faveur de la création d’une loi européenne en matière d’insolvabilité, d’une part, pour permettre un allégement de la dette des ménages et, d’autre part, pour que les jeunes entreprises puissent plus facilement faire face aux défaillances. Cela permettra d’augmenter le pouvoir d’achat des ménages et d’encourager la création de nouvelles entreprises.

4.4.2.

L’existence, dans les banques de la zone euro, de prêts non productifs pour un montant d’environ 900 milliards d’EUR reste un problème grave, qui n’a toujours pas été résolu. Ce n’est qu’en réduisant le volume de ces créances que les banques seront en mesure de développer leur activité de prêt aux entreprises et aux ménages, en renforçant ainsi l’efficacité de la politique monétaire accommodante de la BCE pour améliorer les perspectives de croissance et renforcer la confiance des marchés. Les institutions politiques et organes réglementaires concernés de la zone euro devraient être tenus de présenter des propositions pertinentes en la matière.

4.4.3.

À la suite de la crise financière, il y avait consensus sur l’un des principaux objectifs à atteindre, à savoir diminuer sensiblement les risques souverains dans les bilans des banques européennes. Actuellement, il apparaît que ces risques ont considérablement augmenté pour la plupart des banques. Le CESE souligne que la première priorité devrait être de réduire ces risques souverains dans les bilans afin de garantir à l’avenir la stabilité du secteur bancaire et financier, compte tenu également de la récente proposition relative au système européen d’assurance des dépôts (SEAD) (11).

4.4.4.

Le CESE fait observer que les ménages et les entreprises ne doivent pas être confrontés à un manque de liquidités si l’on veut que les éventuelles retombées positives sur la demande se concrétisent. Le rétablissement de flux de crédit positifs pourrait contribuer à stimuler la demande, mais également à accroître l’efficacité de la politique monétaire de la BCE s’agissant d’améliorer les perspectives de croissance et de renforcer la confiance des marchés. Les institutions politiques et organes réglementaires concernés de la zone euro devraient être tenus de présenter des propositions pertinentes en la matière.

4.4.5.

Par ailleurs, le CESE demande que le programme de réforme et les instances réglementaires mettent davantage l’accent sur une plus grande transparence et sur la surveillance des institutions non bancaires et des banques parallèles, afin de garantir durablement la stabilité des systèmes financiers et de rétablir leur rôle au service de l’économie réelle, particulièrement dans le domaine de la titrisation (12). Il convient de s’assurer que les valeurs mobilières ne deviennent pas des instruments d’investissement spéculatif pour les fonds spéculatifs et les institutions financières dont l’objectif est d’atteindre un rendement maximal (fonds vautours).

4.4.6.

Étant donné que la crise financière a été en grande partie causée par les activités spéculatives des banques d’investissement, ce type d’activité reste une menace latente pour la stabilité des marchés financiers. Aucune analyse n’a encore examiné de manière approfondie dans quelle mesure les activités de négociation hautement spéculatives, telles que les transactions à haute fréquence, peuvent être maintenues alors que l’objectif recherché est une plus grande stabilité des marchés dans le monde, et il y a lieu d’établir une distinction claire entre les pratiques d’investissement et les opérations de crédit à faible risque, d’une part, et les activités de banque d’investissement à haut risque, d’autre part. À cette fin, il existe déjà un certain nombre de modèles tels que le modèle Vickers et la règle Volcker. Le CESE recommande l’adoption dans l’Union européenne d’une loi Glass-Steagall, étant donné que d’autres marchés financiers (comme par exemple ceux des États-Unis et des pays «BRICS») envisagent de la rétablir afin d’améliorer la stabilité du secteur bancaire. On éviterait ainsi des risques pour les épargnants et les contribuables.

Bruxelles, le 17 mars 2016.

Le président du Comité économique et social européen

Georges DASSIS


(1)  Voir les avis du CESE sur le thème «Achever l’Union économique et monétaire — Les propositions du Comité économique et social européen pour la prochaine législature européenne» (JO C 451 du 16.12.2014, p. 10) et sur le thème «Achever l’UEM — Le pilier politique» (JO C 332 du 8.10.2015, p. 8).

(2)  Ibid.

(3)  Voir l’avis du CESE sur le «Plan d’action sur l’union des marchés des capitaux» (JO C 133 du 14.4.2016, p. 17).

(4)  Voir, par exemple, les observations formulées dans les avis antérieurs du CESE sur «Les structures de financement pour les PME dans le contexte financier actuel» (JO C 48 du 15.2.2011, p. 33) et sur «Un plan d’action pour faciliter l’accès des PME au financement» (JO C 351 du 15.11.2012, p. 45) s’agissant de la finance islamique.

(5)  Voir l’avis du CESE sur la «Représentation extérieure de la zone euro» (voir page 16 du présent Journal officiel).

(6)  The Independent Annual Growth Survey 2016, OFCE, ECLM, IMK, AK-Wien, INE-GSEE, 2015, Paris.

(7)  Benchmarking Working Europe 2015, ETUI/ETUC, 2015, Bruxelles, p. 26.

(8)  L’exemple le plus marquant à cet égard est le discours sur «Le chômage dans la zone euro» prononcé par le président Draghi à Jackson Hole en août 2014 (https://www.ecb.europa.eu/press/key/date/2014/html/sp140822.fr.html).

(9)  http://epthinktank.eu/2015/12/10/the-ecbs-quantitative-easing-early-results-and-possible-risks/

(10)  Theodoropoulou, S., How to avert the risk of deflation in Europe: rethinking the policy mix and European economic governance, ETUI, Bruxelles, 2015.

(11)  Voir l’avis du CESE sur un «Système européen d’assurance des dépôts» (voir page 21 du présent Journal officiel).

(12)  Voir l’avis du CESE sur un «Cadre juridique en matière de titrisation» (JO C 82 du 3.3.2016, p. 1).


18.5.2016   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 177/47


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil établissant le programme d’appui à la réforme structurelle pour la période 2017-2020 et modifiant les règlements (UE) no 1303/2013 et (UE) no 1305/2013»

[COM(2015) 701 final — 2015/0263 (COD)]

(2016/C 177/08)

Rapporteur:

M. Ioannis VARDAKASTANIS

Le 2 décembre 2015, le Parlement européen et, le 20 janvier 2016, le Conseil ont décidé, conformément aux articles 175 et 304 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la:

«Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil établissant le programme d’appui à la réforme structurelle pour la période 2017-2020 et modifiant les règlements (UE) no 1303/2013 et (UE) no 1305/2013»

[COM(2015) 701 final — 2015/0263 (COD)].

La section spécialisée «Union économique et monétaire et cohésion économique et sociale», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 3 mars 2016.

Lors de sa 515e session plénière des 16 et 17 mars 2016 (séance du 16 mars 2016), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 153 voix pour et 3 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1.

Le CESE se félicite de l’initiative visant à renforcer, au moyen d’un mécanisme de financement spécifique comme le Programme d’appui à la réforme structurelle (PARS), la capacité de l’Union européenne (UE) de soutenir les réformes structurelles au niveau national.

1.2.

Le CESE déplore cependant que le budget total alloué à ce fonds soit très en-deçà de ce que requièrent les réformes de la politique macroéconomique au sein de l’Union européenne; il regrette en outre que le PARS soit financé sur des ressources existantes des Fonds ESI (Fonds structurels et d’investissement européens) et appelle à trouver un équilibre entre les besoins financiers en matière d’assistance technique au titre des Fonds ESI et ceux liés à l’appui technique prévu par le PARS. Le CESE plaide en faveur de la mise en place, dans le cadre des futures réformes du cadre financier pluriannuel de l’Union européenne, d’un PARS qui soit autonome.

1.3.

Afin de garantir la réussite du PARS, le CESE recommande vivement de veiller à ce que les conditions suivantes soient respectées:

les contributions des États membres aux réformes structurelles effectuées au titre du PARS doivent être considérées comme relevant de la «clause des réformes structurelles» du pacte de stabilité et de croissance,

le PARS reste facultatif pour les États membres et ne comporte pas de procédures obligatoires ou stigmatisantes,

des points de contact centraux sont désignés de manière à faire jouer les complémentarités entre les programmes et les Fonds et à assurer un meilleur usage de ces derniers pour éviter les chevauchements.

1.4.

Le CESE demande instamment que les partenaires sociaux et la société civile soient associés au PARS. À cette fin, il convient de veiller à ce que:

le processus de définition et de lancement du mécanisme d’appui prévoie une consultation élargie des partenaires sociaux et de la société civile selon les modalités prévues par les réglementations nationales,

des dispositions plus strictes, exigeant la participation des partenaires sociaux et de la société civile à la conception et au suivi des programmes de réforme à tous les échelons — national, régional et local — soient prévues,

les actions éligibles incluent le renforcement des capacités des acteurs sociaux et de la société civile engagés dans les programmes de réforme.

1.5.

Le CESE souligne que, sur la base de la division des pouvoirs et des compétences en vigueur dans chaque État membre ainsi que des recommandations spécifiques par pays souvent adressées aux autorités locales et régionales, le programme doit être accessible à ces dernières, lesquelles doivent être impliquées directement dans la conception du projet de réforme structurelle en question.

1.6.

Le CESE regrette que la liste des indicateurs semble insuffisante, ce qui requiert à la fois une mise à jour et l’incorporation des indicateurs existants issus des Fonds ESI.

1.7.

Le CESE souligne que les États membres peuvent étendre les «Objectifs spécifiques et champ d’action du programme» à d’autres domaines d’action politique, tels que la lutte contre la pauvreté, les droits de l’homme, les politiques des transports, les TIC et la mise en œuvre des objectifs de développement durable.

1.8.

Le CESE estime que le PARS pourrait utiliser les mécanismes de contrôle qui existent déjà pour les Fonds ESI, afin de garantir une meilleure qualité du suivi et de l’évaluation, une coordination accrue avec les Fonds ESI et le meilleur rapport qualité-coût à partir des mécanismes de contrôle déjà en œuvre.

1.9.

À cet effet, le CESE soutient les amendements aux règlements (UE) no 1303/2013 et (UE) no 1305/2013 proposés par la Commission européenne, pour autant qu’ils comportent une disposition garantissant que les fonds transférés au nouveau programme soient conformes aux exigences en matière de participation des partenaires sociaux et de la société civile et soumis au même mécanisme de suivi que dans le règlement portant dispositions communes relatives aux Fonds ESI.

1.10.

Le CESE est d’avis que, bien qu’utiles, de telles mesures d’appui mineures ne peuvent qu’être palliatives. Pour résoudre les problèmes engendrés par la crise actuelle, la Commission et les gouvernements nationaux devraient revoir la politique économique en vigueur dans la zone euro depuis le début de la crise. C’est la seule manière de faciliter les réformes structurelles, de prévenir les dégâts causés à ce jour et d’éviter que les Européens ne se retournent «contre» l’Union européenne.

2.   Observations d’ordre général

2.1.

Le CESE estime que l’Union européenne pourrait apporter une valeur ajoutée aux réformes politiques menées à l’échelon national et se félicite par conséquent de l’initiative à l’examen, qui renforcera la capacité de l’Union européenne à soutenir les réformes politiques liées à la mise en œuvre du processus de gouvernance économique (et en particulier des recommandations par pays), des programmes d’ajustement économique et des réformes entreprises de leur propre chef par les États membres, ainsi que le prévoit l’article 3 de la proposition à l’examen.

2.2.

Le CESE estime que les programmes d’appui en faveur de la Grèce («Task force pour la Grèce») et de Chypre («Groupe d’appui pour Chypre») se sont avérés profitables à ces États, et qu’ouvrir à tous les États membres la possibilité de solliciter un tel mécanisme d’appui permettra de renforcer la capacité d’ensemble à mener des réformes institutionnelles, structurelles et administratives.

2.3.

Toutefois, le CESE regrette que, par le passé, la capacité de l’Union européenne à soutenir l’assistance technique à la réforme des politiques ait été réduite. Il en a résulté une incapacité de l’Union européenne à réagir suffisamment rapidement aux situations nécessitant une réforme des politiques en temps de crise, avec pour conséquence l’entrée en action et la prise de direction des opérations par d’autres organisations internationales.

2.4.

Le CESE déplore également que le programme, tel qu’il est proposé actuellement, tire son financement des Fonds existants de l’Union européenne, au lieu de constituer un programme autonome qui n’obérerait pas d’autres Fonds consacrés aux réformes structurelles. Par ailleurs, le CESE considère que l’initiative PARS n’est, en l’état, pas en mesure de répondre à la demande d’assistance technique émanant des États membres en raison des contraintes financières qui sont les siennes.

2.5.

Le CESE souligne que ce programme d’assistance technique ne peut et ne devrait pas être surestimé mais qu’il devrait plutôt être considéré comme un moyen d’aider les États membres à atteindre l’équilibre macroéconomique dans le cadre du processus du semestre européen. Le financement est insuffisant pour créer une véritable dynamique face aux défis macroéconomiques auxquels sont confrontés les États membres œuvrant en faveur de la convergence.

2.6.

Le CESE insiste également sur le fait que les contributions des États membres aux réformes structurelles effectuées au titre du PARS devraient être considérées comme relevant de la «clause des réformes structurelles» du pacte de stabilité et de croissance, en tant que moyen de parvenir à la croissance, de lutter contre la pauvreté et le chômage et de promouvoir la prospérité.

2.7.

Le CESE estime qu’il est important de changer d’attitude à l’égard des réformes structurelles afin d’éviter toute stigmatisation ou sanction et de veiller à ce qu’elles ne créent pas de pièges bureaucratiques. La nouvelle approche devrait encourager les réformes et favoriser la compréhension entre les pays. Le CESE constate dès lors avec satisfaction l’approche positive du programme et met en exergue le caractère volontaire du mécanisme, grâce auquel le programme ne sera pas utilisé ni perçu comme un instrument de surveillance ou destiné à dédouaner les autorités nationales des responsabilités qui leur incombent dans leurs programmes de réforme. Il souligne toutefois l’importance d’exiger des pays qu’ils référencent les soutiens et les succès du programme au moyen de procédures de rapport fiables, démocratiques et responsables.

2.8.

Le CESE se félicite que le lancement du PARS se fasse sur demande d’un État membre; il fait néanmoins valoir la nécessité de prévoir dans le cadre du processus de définition et de lancement dudit mécanisme d’appui une consultation élargie des partenaires sociaux et de la société civile selon les modalités prévues par les réglementations nationales.

2.9.

Le CESE souligne que, sur la base de la division des pouvoirs et des compétences en vigueur dans chaque État membre ainsi que des recommandations spécifiques par pays souvent adressées aux autorités locales et régionales, le programme doit être accessible à ces dernières. Le CESE exige par ailleurs de la part de la Commission qu’elle vérifie que, lorsque les demandes d’assistance technique introduites par les autorités nationales portent sur les domaines de compétence des autorités régionales ou locales, ces dernières aient été impliquées directement dans la conception du projet de réforme structurelle en question et l’aient validé.

2.10.

Le CESE se félicite également de l’approche volontariste du PARS, qui se manifeste par l’extension du champ d’application dudit appui à l’ensemble des États membres, quelle que soit leur situation économique, et fait valoir qu’il convient de considérer ce programme comme un mécanisme d’appui structurel à long terme et non pas comme une simple réponse à des péripéties économiques ou financières ponctuelles.

2.11.

Le CESE insiste sur la nécessité de continuer à conférer à la liste dressée à l’article 5 «Objectifs spécifiques et champ d’action du programme» un caractère non limitatif, afin de préserver la souplesse nécessaire pour affronter des réformes politiques. Le CESE estime que le projet de liste à l’examen est relativement complet, mais il propose de l’élargir à d’autres domaines d’action politique, tels que la lutte contre la pauvreté, la promotion des droits de l’homme, les politiques des transports, les TIC et la mise en œuvre des objectifs de développement durable par les États membres.

2.12.

Le CESE est fermement convaincu que l’élaboration des politiques de l’Union européenne doit avoir lieu avec la participation active du grand public, car un «partenariat qui intègre tous les partenaires tels qu’ils sont définis à l’article 5, paragraphe 1 du règlement portant dispositions communes, dans la préparation, l’exécution et l’évaluation ex post des projets entrepris dans le cadre de la politique de cohésion de l’Union européenne contribue directement à la réussite» des Fonds ESI. Par conséquent, le CESE estime que ce nouveau PARS devrait prévoir des dispositions plus strictes en matière d’association des partenaires sociaux et de la société civile dans la conception des programmes de réforme à tous les échelons, national, régional et local. Cette mesure contribuera à combler le fossé entre les décideurs politiques et les citoyens.

2.13.

Le CESE estime que le PARS pourrait utiliser les mécanismes de contrôle qui existent déjà pour les Fonds ESI, ce qui permettrait d’assurer une meilleure qualité du suivi et de l’évaluation, une coordination accrue avec les Fonds ESI et le meilleur rapport qualité-coût à partir des mécanismes de contrôle déjà en œuvre.

2.14.

Le CESE estime qu’il convient d’appliquer le PARS en vertu des dispositions du règlement portant dispositions communes relatives aux Fonds ESI (sauf en ses articles 25, 58 et 91), lequel fournit une structure d’appui plus développée que la proposition de programme à l’examen.

2.15.

Le CESE recommande que les actions éligibles prévues à l’article 6 incluent le renforcement des capacités des acteurs sociaux et de la société civile engagés dans les programmes de réforme.

2.16.

Le CESE tient à garantir que les nouvelles enveloppes budgétaires, financées par les Fonds ESI, établissent un équilibre entre les besoins financiers en matière d’assistance technique au titre des Fonds ESI et ceux liés à l’appui technique prévu par le PARS, de manière à permettre à chacun de ces deux Fonds de disposer d’une capacité adéquate d’assistance technique.

2.17.

Le CESE reconnaît l’importance de l’approche transversale qu’adopte le PARS afin de soutenir les réformes, mais il appelle les autorités de l’Union européenne et des États membres à éviter les chevauchements avec les programmes sectoriels. Aussi, le CESE estime qu’il est nécessaire de désigner des points de contact centraux de manière à permettre de faire jouer les complémentarités entre les programmes et les Fonds et de mieux utiliser ces derniers pour éviter les chevauchements. Il convient d’étoffer l’article 13 de manière à intégrer davantage d’éléments au mécanisme de coordination.

2.18.

Le CESE souhaite être davantage informé à l’avenir des mécanismes de coordination qui seront mis en place pour ce Fonds.

2.19.

Le CESE regrette que la liste des indicateurs semble insuffisante et fait valoir combien il importe de disposer d’indicateurs appropriés afin de suivre et d’évaluer le programme à l’examen; il fait néanmoins observer que les Fonds ESI recèlent une longue liste d’indicateurs susceptibles de compléter ceux proposés par le PARS. Il est nécessaire de mettre à jour les indicateurs européens de mesure de l’impact des réformes afin de déterminer leur degré de réussite, en établissant un lien entre elles et un contexte de progrès économique et social. Les indicateurs devraient également pouvoir établir si l’impact se cantonne au niveau national ou s’il apporte une réelle valeur ajoutée à l’échelon européen.

2.20.

Le CESE se félicite de la disposition prévoyant que le taux de cofinancement puisse atteindre 100 % des coûts éligibles, sachant que cette possibilité permettra aux États membres d’accéder plus facilement à ce programme.

2.21.

Le CESE estime que le programme d’appui aux réformes structurelles constitue un premier jalon qu’il est nécessaire de consolider et de renforcer à l’occasion de futures réformes du cadre financier pluriannuel de l’Union européenne en vue de créer un programme autonome sans qu’il ne soit nécessaire de remettre en cause les enveloppes budgétaires des autres Fonds de soutien existants de l’Union.

2.22.

À cet effet, le CESE approuve la teneur des modifications que la Commission européenne se propose d’apporter aux règlements (UE) no 1303/2013 et (UE) no 1305/2013 et invite vivement celle-ci à tenir compte des conclusions et recommandations du présent avis.

2.23.

Le CESE propose néanmoins que les règlements modifiés prévoient que les fonds transférés vers les nouveaux programmes soient conformes aux exigences de participation et soumis au même mécanisme de contrôle que les Fonds ESI. Il convient que cela se reflète également dans la proposition de règlement PARS, et que le texte actuel amendé comprenne des dispositions spécifiques et des références au système de suivi du règlement portant dispositions communes relatives aux Fonds ESI.

Bruxelles, le 16 mars 2016.

Le président du Comité économique et social européen

Georges DASSIS


18.5.2016   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 177/51


Avis du Comité économique et social européen sur la «Communication de la Commission au Parlement européen et au Conseil — Mettre en œuvre le programme européen en matière de sécurité: plan d’action de l’Union européenne contre le trafic illicite et l’utilisation d’armes à feu et d’explosifs»

[COM(2015) 624 final]

et la

«Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil sur la lutte contre le terrorisme et remplaçant la décision-cadre 2002/475/JAI du Conseil relative à la lutte contre le terrorisme»

[COM(2015) 625 final — 2015/0281(COD)]

(2016/C 177/09)

Rapporteur:

M. Cristian PÎRVULESCU

Le 22 décembre 2015, la Commission européenne a décidé, conformément à l’article 304 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la:

«Communication de la Commission au Parlement européen et au Conseil — Mettre en œuvre le programme européen en matière de sécurité: plan d’action de l’Union européenne contre le trafic illicite et l’utilisation d’armes à feu et d’explosifs»

[COM(2015) 624 final]

et la

«Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil sur la lutte contre le terrorisme et remplaçant la décision-cadre 2002/475/JAI du Conseil relative à la lutte contre le terrorisme»

[COM(2015) 625 final — 2015/0281(COD)].

La section spécialisée «Emploi, affaires sociales, citoyenneté», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 24 février 2016.

Lors de sa 515e session plénière des 16 et 17 mars 2016 (séance du 17 mars 2016), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 145 voix pour, aucune voix contre et 3 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1.

Le Comité encourage les États membres à mettre leurs ressources en commun aux fins tant de la lutte contre le trafic d’armes et de munitions que du combat contre le terrorisme. L’intensification des mesures de protection, au niveau européen comme à l’échelon national, peut toutefois avoir un effet cumulatif et une incidence globalement négative sur les droits fondamentaux. Ces atteintes ayant inévitablement pour effet que l’Union échouerait dans sa mission fondamentale.

1.2.

Le Comité économique et social européen estime que la proposition de directive et la communication à l’examen sont nécessaires pour construire une Europe qui soit plus sûre pour l’ensemble de ses habitants sur son territoire, dans la mesure où la lutte contre le terrorisme est une compétence partagée des États membres et de l’Union. Cette nature conjointe pose la question des éventuelles mesures contraignantes que la directive pourrait essayer d’imposer aux États. Il est de la responsabilité des États membres de déployer tous les efforts possibles pour prévenir et combattre toutes les formes de criminalité organisée et tout particulièrement le terrorisme, quelle qu’en soit la motivation. De même, il incombe aux institutions de l’Union européenne de contribuer à coordonner et à harmoniser les efforts nécessaires pour limiter la diffusion de ce type d’actes de violence.

1.3.

Le CESE insiste expressément sur le respect par l’ensemble des institutions étatiques et tribunaux du principe de proportionnalité, qui est une composante obligatoirement inhérente à tout État de droit, et exige qu’il soit dûment observé. Afin de prévenir des interprétations erronées ou des abus dans les mesures de protection qui sont nécessaires, le CESE pose, conformément à la résolution 1566 du Conseil de sécurité de l’ONU, qu’il n’est possible de porter l’accusation de terrorisme que lorsque des menaces ou des actes criminels répondant à l’intention de causer la mort ou des blessures graves ou une prise d’otages ou de graves dommages aux infrastructures visent à susciter un climat de terreur, à intimider une population ou à contraindre un gouvernement.

1.4.

Ces modifications législatives s’inscrivent dans un effort plus large, difficile à mener dans les conditions actuelles régissant les relations internationales, pour faire face à un type de menace qui, par sa nature même, atteint les bases des systèmes démocratiques européens. Répandre la peur, diviser l’opinion publique, entretenir les stéréotypes sur certains groupes spécifiques de la population, fragiliser l’équilibre des pouvoirs publics et renforcer les institutions autoritaires au détriment de celles qui assurent une représentation démocratique, tels sont les résultats escomptés par les actes terroristes, qu’il convient de combattre avec détermination et lucidité. Le Comité estime que les européens sont en droit de vivre en sécurité aussi bien qu’en liberté.

1.5.

Le Comité considère qu’il est dangereux pour toute démocratie d’introduire dans la législation des infractions par anticipation (l’incrimination pour des infractions ou des délits qui n’ont pas encore été commis). Le point i) de l’article 3, paragraphe 2, de la proposition devrait être supprimé pour éviter toute confusion entre justice et sécurité. De même, l’article 15 de la directive proposée ne garantit ni les libertés publiques, ni la présomption d’innocence. Le Comité est en outre préoccupé par la question de la preuve de l’intention et estime que dans tous les cas énumérés aux articles 5 à 13, il doit y avoir présentation devant les juges afin de confirmer les accusations.

1.6.

Le Comité estime qu’il est opportun de mettre en place des instruments de prévention de la radicalisation, en tant que volet d’un programme plus large traitant les causes sociales, économiques, culturelles, religieuses et politiques de la diffusion des menaces de ce type, et qu’ils doivent être coordonnés avec les activités touchant à la lutte contre le terrorisme et à la répression de celui-ci. Cependant, qui dit radicalisation ne dit pas nécessairement prédisposition ou appel à la violence. Les politiques et programmes de prévention doivent cibler les individus et les groupes les plus enclins à recourir à la violence à des fins terroristes. La société civile a un rôle crucial à jouer dans le traitement des conditions qui favorisent la radicalisation et la propension à faire usage de la violence.

1.7.

En plus de clarifier la législation et d’améliorer la coopération des États membres dans les domaines énumérés ci-avant, il est nécessaire de coordonner la politique extérieure européenne vis-à-vis du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord, région ayant connu récemment des transformations majeures, qui ont été violentes pour beaucoup et ont, dans certains cas, débouché sur une instabilité et des conflits. Si la menace terroriste a atteint une telle acuité durant ces dernières années, c’est en raison de l’existence de zones de conflit actives, qui offrent un point de concentration dans lequel un grand nombre de citoyens européens trouvent un lieu d’inspiration et d’entraînement. La présence de conflits persistants dans la région, y compris sous une forme gelée, encourage également certains groupes et individus à se mobiliser pour organiser des actes terroristes. Le Comité estime qu’il est prioritaire de s’engager plus clairement en faveur des efforts visant à stabiliser, développer et démocratiser cette région. La lutte contre la pauvreté, la corruption et l’exclusion politique et sociale doit revêtir un caractère prioritaire.

1.8.

Le Comité considère que limiter drastiquement l’accès aux armes à feu, aux munitions et aux explosifs doit être une priorité pour les États membres et les institutions européennes. Les attentats perpétrés récemment en Europe ont montré que les personnes engagées dans des activités terroristes se procuraient des armes dangereuses sur le marché noir, où il existe une offre très diversifiée. La collusion entre les groupes terroristes et ceux du crime organisé constitue un risque majeur pour la sécurité des citoyens européens comme ceux d’ailleurs.

1.9.

Le Comité est favorable à ce que des clarifications soient apportées à la législation relative aux victimes du terrorisme. Ces dernières doivent recevoir une assistance prompte et efficace, non seulement immédiatement après les actes subis, mais aussi à moyen et long terme. De même, il est nécessaire de mieux comprendre les conséquences sociales, économiques et psychologiques des attentats terroristes sur les communautés, les individus et les différents secteurs de l’activité économique. Le Comité encourage la Commission européenne à analyser ces aspects et, en fonction des résultats de ce travail, à proposer les mesures qui s’imposent. Les attentats récents sont susceptibles d’avoir une incidence sur des secteurs comme le tourisme et le transport et il incombe aux pouvoirs publics européens et nationaux de mettre en place des programmes de soutien. Le Comité fait observer que la prévention et la lutte contre le terrorisme impliquent des dépenses et il invite l’Union européenne à envisager de soutenir financièrement les efforts nationaux en ce sens.

2.   Le contexte actuel: concilier le besoin d’une sécurité accrue et le respect des droits fondamentaux

2.1.

Comme il l’a affirmé dans ses avis relatifs au programme de La Haye, à celui de Stockholm et à la communication «Faire de l’Europe ouverte et sûre une réalité», le Comité estime que le fondement et le point de référence de toute politique en matière de liberté, de sécurité et de justice doit être de protéger sans interruption ni discrimination les droits fondamentaux garantis par la Convention européenne des droits de l’homme et la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (1).

2.2.

Pour ce qui est de la lutte contre le terrorisme, le Comité estime qu’il est logique, dans le contexte international actuel, de procéder à une révision du cadre juridique en vigueur afin que les actes associés aux activités terroristes soient considérés comme des infractions. Le Comité note qu’il est fait mention, dans la partie de la proposition de directive consacrée aux droits fondamentaux (chapitre 3 de l’exposé des motifs), de la nécessité d’exclure toute forme d’arbitraire et, comme il l’a fait dans d’autres avis sur le même thème, il fait observer qu’il convient d’accorder la priorité aux droits fondamentaux et à la nécessité de maintenir un climat démocratique solide et opérant face à ce type de menaces (2).

2.3.

Le Comité attire l’attention sur l’importance que revêt la préservation de l’espace Schengen en tant que concrétisation des principes énoncés dans le traité. Il encourage les États membres à ne pas recourir à des formes de limitation de la libre circulation à l’intérieur de l’Union.

2.4.

Conscient des graves défis que pose le contexte géopolitique actuel, le Comité constate que les définitions reprises dans la proposition de directive ne sont pas suffisamment claires pour garantir l’application des droits des citoyens qui sont consacrés par la Charte des droits fondamentaux et inscrits dans le traité. Il fait remarquer que la marge d’interprétation des termes est trop large et que celle-ci n’est, dans les circonstances actuelles, pas laissée à l’appréciation des juges mais à celle des parquets et des forces de l’ordre. Le Comité attire également l’attention sur la tentation éventuelle de faire glisser des mesures d’exception vers le droit commun, au niveau national comme au niveau européen, comme pourrait le laisser penser la proposition d’une telle directive dans un domaine de compétence partagée.

2.5.

Le CESE se félicite de la mise en œuvre de l’interopérabilité des systèmes d’information numériques, dans la mesure où ils sont conçus pour contribuer à contrer les terroristes. À cet égard, le Comité considère que le système d’information Schengen (SIS) constitue un pilier essentiel du dispositif d’information de l’Union et recommande aux décideurs de mettre tout en œuvre pour veiller à ce que tous les États membres y participent.

3.   Observations générales et spécifiques

3.1.    Plan d’action de l’Union européenne contre le trafic et l’utilisation illicite d’armes à feu et d’explosifs

3.1.1.

Observations générales

3.1.1.1.

Le Comité estime que les propositions exposées dans la communication sont bienvenues. Il y a lieu d’améliorer significativement la coopération institutionnelle entre États membres, tant pour ce qui est d’échanger les informations que d’unifier les bases de données existantes. Il conviendrait de faire explicitement référence aux programmes de formation des personnels des administrations nationales, qui n’ont pas constitué une priorité jusqu’à présent.

3.1.1.2.

Le Comité estime qu’assurer l’interopérabilité des bases de données et encourager les autorités nationales à collecter les données sont des éléments de première importance pour garantir une analyse correcte du contrôle de l’utilisation des armes à feu et des explosifs.

3.1.1.3.

Le Comité se félicite de l’attention accordée à la nécessité de perturber l’approvisionnement illicite en armes à feu par l’internet (web visible et invisible), ainsi qu’aux risques liés à l’essor des nouvelles technologies, comme l’impression 3D.

3.1.1.4.

Bien que davantage d’efforts doivent être consentis, à la fois dans l’utilisation des technologies de détection et pour l’uniformisation de leur utilisation, le Comité attire l’attention sur le risque de susciter un «marché» pour ces technologies. Si des agents économiques souhaitent les commercialiser, ils pourraient être tentés d’exagérer les risques potentiels en matière de sécurité et, de ce fait, nourrir un sentiment de crainte au sein de la population. De même, le Comité ne prône pas la généralisation des technologies de détection mais leur utilisation sélective, en fonction des besoins et des risques.

3.1.1.5.

Le Comité encourage la Commission européenne à soutenir une coopération étroite entre Europol, Interpol, les principaux acteurs d’iTrace et d’autres organismes compétents, comme les douanes et les autorités délivrant les permis d’importation et d’exportation d’armes à feu, afin d’optimiser la coopération opérationnelle, la traçabilité et la prévention du détournement d’armes à feu sur le marché noir.

3.1.1.6.

Le Comité se félicite de l’intention affichée de renforcer les activités opérationnelles, d’élargir la portée du plan d’action UE-Europe du Sud-Est et de renforcer la coopération avec les pays du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord (région MENA). Dans ce domaine également, la coopération avec les pays tiers est très importante.

3.1.1.7.

Le Comité attire l’attention sur l’existence, dans la plupart de ces pays, de problèmes de nature institutionnelle, concernant notamment l’intégrité des forces de police. Outre la coopération dans le domaine proprement dit des armes à feu, l’Union européenne doit encourager et soutenir les réformes institutionnelles dans les pays concernés.

3.2.

Directive relative à la lutte contre le terrorisme

3.2.1.

Observations générales

3.2.1.1.

Le Comité est d’avis que les lois et les procédures institutionnelles doivent constamment être adaptées aux évolutions et aux risques en matière de sécurité. Les événements récents ont montré que le phénomène terroriste est en train de prendre une tournure internationale, due tant aux infrastructures de communication qu’à l’existence de conflits au Moyen-Orient et en Afrique du Nord.

3.2.1.2.

Le financement, l’entraînement, l’incitation, le voyage dans le but de participer aux activités d’un groupe terroriste sont autant d’actions qui sont en corrélation avec les actes terroristes proprement dits. Le Comité recommande aux institutions de l’Union européenne et aux États membres d’appliquer le principe de proportionnalité, la manière d’incriminer et de combattre ces actes devant être proportionnelle à leur gravité et à leur caractère intentionnel.

3.2.1.3.

De même, le Comité juge qu’il est judicieux d’incriminer les actions qui consistent à encourager ou à coordonner la commission d’infractions terroristes, lesquelles sont le plus souvent réalisées par des personnes qui ne s’exposent pas directement mais agissent par l’intermédiaire d’autrui.

3.2.1.4.

En même temps, le Comité exprime son inquiétude quant aux capacités des États membres et à leur bonne volonté inégale s’agissant de protéger les droits fondamentaux et de garantir que les dispositions constitutionnelles et celles des traités internationaux seront respectées en pratique. L’instauration de l’état d’urgence en France, au lendemain des attentats terroristes de la fin de l’année dernière, a donné à l’État français la possibilité de prendre des mesures que les organisations de la société civile ont remises en cause sur le plan des droits fondamentaux (3). Le Comité invite les autorités nationales à exercer leurs missions de manière proportionnée et efficace et à éviter toute mesure susceptible de produire des effets contraires à ceux qui sont recherchés. La prévention du terrorisme et la lutte menée à son encontre ne peuvent se faire que dans le respect de l’État de droit, des droits fondamentaux et des traités internationaux. Le Comité considère qu’il est nécessaire de mettre en place une forme de suivi continu des mesures décidées par les États membres en matière de terrorisme. À cet égard, il invite la Commission européenne à envisager d’instaurer des procédures qui permettent de détecter et de corriger les éventuels dérapages. Une possibilité, à cet égard, serait d’utiliser le mécanisme de contrôle du respect de l’État de droit, mis en œuvre par la Commission européenne, qui permet de repérer les infractions et prévoit des procédures pour les corriger.

3.2.1.5.

Afin de garantir une coordination efficace des efforts de prévention, de lutte contre le terrorisme et de traitement de ses effets, ainsi que d’assurer l’uniformité des pratiques, y compris du point de vue des droits fondamentaux, le Comité invite la Commission et les autres institutions de l’Union européenne à envisager la création d’une Agence européenne de lutte contre le terrorisme.

3.2.2.

Observations spécifiques

3.2.2.1.

En ce qui concerne la définition des infractions terroristes (titre II, article 3), le risque existe que celle donnée pour le terrorisme et les actions qui lui sont associées soit bien trop large.

3.2.2.2.

Par exemple, à l’article 3, paragraphe 2, point d), il est indiqué que «le fait de causer des destructions massives […] à une infrastructure, y compris un système informatique» est susceptible d’être considéré comme un acte terroriste. Il n’est pas indiqué clairement si une opération de piratage informatique (hacking) peut être considérée comme un acte terroriste. Il existe des cas où des actions de ce type visent à mettre en circulation des documents d’intérêt public, et même si leur extraction et leur publication sont passibles de peine, ces actes ne cadrent pas avec la définition typique du terrorisme.

3.2.2.3.

À l’article 3, paragraphe 2, point i), il est dit que «la menace de commettre un acte terroriste» équivaut à la commission d’un tel acte. Ce point est extrêmement problématique, surtout si le principe de proportionnalité n’est pas respecté. Une menace ne peut être assimilée à un fait, car elle se rapporte à une éventualité et non à une action effectivement commise. Le Comité propose de retirer de la proposition de directive, le point i) du paragraphe 2 de l’article 3.

3.2.2.4.

Pour ce qui concerne l’«incitation publique à commettre une infraction terroriste» (titre III, article 5), la définition de l’infraction n’est pas claire. Dès lors que la liberté de la presse et la liberté d’expression sont garanties, on peut se demander dans quelles conditions la simple divulgation publique d’un attentat terroriste cesse d’être une simple information pour devenir une incitation. De même, avec le développement des plates-formes de réseaux sociaux, où chaque utilisateur est également auteur de contenus, il est très difficile de retracer et de distinguer de manière appropriée les éléments qui relèvent respectivement de l’information et de l’incitation.

3.2.2.5.

En ce qui concerne l’incrimination de l’action de «se rendre à l’étranger à des fins de terrorisme» (titre III, article 9), il existe un sérieux manque de clarté quant à la définition de l’expression «à des fins de terrorisme». Si la situation est claire lorsqu’il est question d’organiser un attentat ou de participer à des activités d’entraînement, elle ne l’est absolument pas dans le cas d’une personne participant à une insurrection, une rébellion armée ou une guerre civile, comme c’est le cas en Syrie ou en Libye. La participation à une guerre quasi conventionnelle est-elle considérée comme ayant une finalité terroriste (4)? Une situation qui peut se poser est celle des combattants européens qui luttent au côté de groupes d’insurgés qualifiés de terroristes par les gouvernements nationaux sur le territoire desquels ils opèrent, ou par des gouvernements tiers.

3.2.2.6.

En lien avec cette problématique, on relèvera qu’il est difficile de déterminer la nature «terroriste» ou non d’un groupe. Ces difficultés ne se posent pas seulement sur le plan de l’analyse mais aussi au niveau institutionnel. L’Union européenne utilise son propre système pour établir la liste des organisations qualifiées de terroristes et les en radier, notamment pour celles qui figurent sur la liste «autonome», gérée de manière séparée par rapport à celle de l’ONU (5). Il est possible que la pratique d’un État ou sa définition du caractère terroriste diffèrent de celle de l’Union européenne. Dans ce cas, il est nécessaire de procéder à une coordination entre les États membres et les institutions de l’Union européenne et tout particulièrement les organes qui ont des attributions en la matière (par exemple, Europol).

3.2.2.7.

En ce qui concerne les articles 12 à 14, il n’est pas évident qu’il soit nécessaire d’incriminer les actes visés de manière séparée par rapport à ceux qui le sont normalement dans le code pénal des différents États membres. Toutefois, il est possible de reconnaître la finalité terroriste comme un fait aggravant pour les infractions visées, lequel, dans le respect du principe de proportionnalité, devrait justifier une sanction pénale plus lourde.

3.2.2.8.

Concernant le «Lien avec des infractions terroristes» (article 15), la mention «Pour qu’une infraction visée à l’article 4 et au titre III soit punissable, il n’est pas nécessaire qu’une infraction terroriste soit effectivement commise» soulève un problème. Comment établir qu’il y a finalité terroriste, c’est-à-dire qu’une action donnée fait partie d’une chaîne menant à une infraction effectivement commise et ne relève pas d’actions isolées? Cet élément peut avoir des conséquences négatives sur les droits fondamentaux.

3.2.2.9.

Le Comité s’interroge quant à la pertinence de la proposition figurant à l’article 17 concernant les sanctions contre les personnes physiques, où il est demandé aux États membres de veiller à ce que les infractions concernées soient passibles de sanctions pénales «susceptibles d’entraîner l’extradition».

3.2.2.10.

Concernant la transposition, la proposition fait référence à une période de 12 mois après la date d’adoption. Le Comité encourage les États membres à raccourcir autant que possible cette période afin d’accélérer la mise en œuvre de la directive.

Bruxelles, le 17 mars 2016.

Le président du Comité économique et social européen

Georges DASSIS


(1)  JO C 451 du 16.12.2014, p. 96.

(2)  JO C 218 du 23.7.2011, p. 91.

(3)  Voir le rapport France: Abus commis dans le cadre de l’État d’urgence. Les perquisitions administratives et les assignations à résidence sans autorisation judiciaire doivent cesser, Human Rights Watch (HRW), 3 février 2016, et le rapport Devant l’urgence, que deviennent les principes de l’État de droit? (Dominique Guibert), Association européenne pour la défense des droits de l’homme (AEDH)

(4)  On relèvera le cas intéressant des combattants européens qui luttent en Syrie au côté des miliciens kurdes, opposés à Daesh, formation qui se trouve au centre du phénomène terroriste mondial d’inspiration religieuse. Un citoyen néerlandais, ancien militaire dans l’armée nationale, fait l’objet d’une enquête de la part des autorités néerlandaises pour une accusation de meurtre, à la suite de sa participation aux combats en Syrie aux côtés des forces kurdes (YPG). On ne voit pas clairement si la qualification juridique de faits similaires sera modifiée, une fois la directive transposée en droit néerlandais.

(5)  EU Terrorist Listing. An Overview about Listing and Delisting Procedures («La liste des terroristes dans l’Union européenne. Vue d’ensemble des procédures d’inscription et de radiation»), Martin Wahlisch, Berghof Peace Support, 2010.


18.5.2016   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 177/57


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (CE) no 1406/2002 instituant une Agence européenne pour la sécurité maritime»

[COM(2015) 667 final — 2015/0313 (COD)]

(2016/C 177/10)

Rapporteur:

M. Jan SIMONS

Le Conseil, le 27 janvier 2016, et le Parlement européen, le 21 janvier 2016, ont décidé, conformément à l’article 100, paragraphe 2, du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la:

«Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (CE) no 1406/2002 instituant une Agence européenne pour la sécurité maritime»

[COM(2015) 667 final — 2015/0313 (COD)].

La section spécialisée «Transports, énergie, infrastructures, société de l’information», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 4 mars 2016.

Lors de sa 515e session plénière des 16 et 17 mars 2016 (séance du 16 mars 2016), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 175 voix pour et 2 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1.

Le CESE peut souscrire à la proposition de la Commission modifiant le règlement (CE) no 1406/2002 instituant une Agence européenne pour la sécurité maritime (AESM), car elle s’inscrit dans une approche plus large visant à surveiller bien plus efficacement que par le passé les frontières maritimes extérieures.

1.2.

Conformément aux résolutions relatives à l’arrivée massive de réfugiés qu’il a adoptées en septembre et décembre 2015, le Comité souhaite néanmoins souligner une nouvelle fois l’extrême promptitude que requiert la mise en œuvre des mesures proposées. Il n’est ni possible, ni admissible que les flux de réfugiés en mer continuent à payer un lourd tribut en vies, que l’arrivée irrégulière de migrants se poursuive et que des États membres prennent des mesures unilatérales en établissant des contrôles permanents aux frontières.

1.3.

Le Comité demande instamment que l’on supprime les mots «et de garde-côtes» du titre et du texte des projets de règlements, afin de n’y garder que les termes «Agence européenne de garde-frontières». L’Agence de garde-frontières n’assume qu’une seule des tâches que comporte la surveillance côtière alors que l’AESM accomplit déjà un grand nombre des missions dans ce domaine. La mention des mots «et de garde-côtes» dans la dénomination de l’Agence de garde-frontières conduira avec quasi-certitude à une confusion inutile et pourrait à terme donner lieu à des doubles emplois dans les activités.

1.4.

Le Comité est favorable à l’extension des missions de l’AESM, une agence qui a, au cours des dernières années, apporté une réelle contribution pour améliorer la sécurité maritime, ainsi que pour mener une action de prévention et de lutte contre la pollution causée par les navires. Il se montre néanmoins fort dubitatif quant à sa capacité à s’acquitter dûment de ses missions supplémentaires, compte tenu des ressources humaines et financières qui sont à sa disposition.

1.5.

Il est préoccupant qu’il soit impossible ou, à tout le moins, très difficile de détecter les petites embarcations en bois ou en caoutchouc au moyen d’images satellite. La Commission estime que l’utilisation d’aéronefs télépilotés (RPA, également appelés «drones») peut pallier cette lacune. Le Comité souscrit à ce point de vue car leur utilisation permettra une observation complète, grâce à laquelle il sera notamment possible d’éviter de nouvelles pertes de vies humaines.

1.6.

Le Comité s’inquiète également de ce que certains États membres mettent en place des contrôles permanents aux frontières, lesquels, comme il ressort des recherches réalisées dans ce domaine, entraînent des frais considérables. La mise en place d’un système de surveillance côtière efficace et économiquement opérant devrait, de l’avis du CESE, amener les États membres à renoncer aux contrôles permanents et donner la possibilité de rétablir le dispositif de Schengen dans son intégralité de naguère.

1.7.

Le Comité estime qu’une coopération et un échange d’informations plus intensifs réalisés par les trois agences européennes concernées, tant entre elles qu’avec les instances nationales compétentes dans ce domaine, devraient contribuer à mettre en place un système de surveillance maritime qui soit opérationnel et performant. Le CESE insiste toutefois sur une prise de décision rapide. Les problèmes sont trop urgents pour que l’on se permette d’y consacrer beaucoup de temps.

2.   Introduction

2.1.

Le 15 décembre 2015, la Commission européenne a publié une «Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (CE) no 1406/2002 instituant une Agence européenne pour la sécurité maritime» [COM(2015) 667 final], après quoi le Parlement européen et le Conseil ont demandé au Comité économique et social européen, conformément à l’article 100, paragraphe 2, du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, d’émettre un avis sur ce texte.

2.2.

Le Comité accède volontiers à cette demande, dans la mesure où il voit dans cette proposition de modification du règlement no 1406/2002 une étape importante pour parvenir à renforcer la coopération européenne dans le domaine des services soutenant la surveillance côtière des frontières et à améliorer la coopération et la coordination entre les agences européennes compétentes, afin de réaliser des effets de synergie et, ainsi, de permettre à ces agences d’exercer leurs activités de manière plus efficace et opérante, économiquement parlant. De cette manière, les agences de l’Union européenne pourront fournir aux autorités nationales chargées d’exercer les missions de garde-frontières et garde-côtes des informations de bonne qualité et d’un rapport coût-efficacité satisfaisant.

2.3.

Il s’agit là, qui plus est, d’une nécessité pressante dans la mesure où, selon les informations fournies par la Commission, il y aurait à l’heure actuelle, dans les États membres, plus de 300 autorités civiles et militaires qui assument des fonctions de surveillance côtière dans des domaines tels que la sécurité maritime, le contrôle des frontières, des pêches ou des douanes, les services de protection de l’environnement, etc.

2.4.

Dans l’exécution de leurs tâches, ces autorités nationales bénéficient du soutien d’un certain nombre d’agences de l’Union européenne, telles que l’Agence européenne pour la gestion de la coopération opérationnelle aux frontières extérieures des États membres de l’Union européenne (également nommée Frontex), l’AESM et l’Agence européenne de contrôle des pêches (AECP).

2.5.

La proposition législative à l’examen fait partie d’un ensemble de mesures proposées par la Commission pour «renforcer la protection des frontières extérieures de l’Europe» et la coopération européenne dans le domaine de la surveillance maritime. Les autres propositions concernent un règlement visant à créer une Agence européenne de garde-frontières et de garde-côtes et une modification du règlement (CE) no 768/2005 prévoyant la création d’une Agence européenne de contrôle des pêches, du même type que la proposition à l’examen.

2.6.

Dans la communication de la Commission qui accompagne la proposition et est intitulée «Un corps européen de garde-frontières et de garde-côtes et une gestion efficace des frontières externes de l’Europe» [COM(2015) 673 final], il est indiqué que le fondement des propositions de la Commission réside dans le nombre extrêmement élevé de franchissements illégaux des frontières extérieures de l’Union européenne.

2.7.

Selon la communication de la Commission [COM(2015) 673 final, paragraphe 1, note de bas de page 1], plus de 1,5 million de franchissements illicites des frontières extérieures de l’Union auraient eu lieu entre janvier et novembre 2015, avec pour conséquence que des réfugiés et migrants ont poursuivi en masse leur route à travers l’Union européenne, sans avoir été ni identifiés, ni enregistrés.

2.8.

Il en est résulté que l’accord de Schengen a été mis sous pression. Entre-temps, plusieurs États membres ont décidé de réintroduire temporairement un contrôle à leurs frontières intérieures, une situation qui ne peut toutefois se prolonger longtemps.

2.9.

Une étude très récente de l’organisme de réflexion français «France Stratégie» met en évidence que le démantèlement de Schengen pourrait entraîner un préjudice économique susceptible d’atteindre les 100 milliards d’euros. Les échanges entre les 26 États de l’espace Schengen enregistreraient, sur le long terme, une chute de 10 à 20 % et le produit national brut baisserait, dans ces mêmes pays, de 0,8 %.

2.10.

La Commission a constaté, dans son agenda européen en matière de migration datant de mai 2015 [COM(2015) 240], qu’il y a lieu de mettre en place une gestion partagée des frontières extérieures, conformément à l’article 77 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne.

2.11.

En outre, Jean-Claude Juncker, le président de la Commission européenne, a annoncé, lors de son discours sur l’état de l’Union en septembre 2015, qu’une série de propositions seraient formulées par la Commission avant la fin de l’année en vue de la création d’un corps européen de garde-frontières et de garde-côtes pleinement opérationnel. Ce fut chose faite le 15 décembre 2015 et la proposition à l’examen fait partie de cet ensemble.

3.   Observations générales

3.1.

Dans la résolution consacrée à la crise actuelle des réfugiés qu’il a adoptée le 16 septembre 2015, le CESE a déjà insisté sur la nécessité que l’Europe prenne ses responsabilités à l’égard de ce flux massif de réfugiés et agisse immédiatement et de manière collective.

3.2.

Dans cette même résolution, le Comité s’est dit préoccupé que l’accord de Schengen et la libre circulation des personnes et des biens soient fragilisés. Il a fait à nouveau part de son inquiétude à cet égard dans sa résolution sur les réfugiés adoptée le 10 décembre 2015, dans laquelle il souligne qu’«il est important de sécuriser convenablement les frontières extérieures des pays de l’espace Schengen. Toutefois, rétablir des barrières intérieures et construire des murs sont autant de démarches qui n’aideront en rien à rapprocher les citoyens européens ou à favoriser la citoyenneté de l’Union».

3.3.

De l’avis du Comité, il est primordial que des mesures soient prises à court terme pour améliorer la coopération dans le domaine de la surveillance des frontières, y compris côtière. En conséquence, il souscrit à la proposition de la Commission modifiant le règlement (CE) no 1406/2002 instituant une Agence européenne pour la sécurité maritime et, en particulier, à l’idée — sinon à cette proposition en son état actuel — de créer, en lieu et place de Frontex, une «Agence européenne de garde-frontières et de garde-côtes», qui collaborera étroitement avec l’Agence européenne pour la sécurité maritime (AESM) et l’Agence européenne de contrôle des pêches (AECP).

3.4.

En effet, le Comité ne voit pas pourquoi, dans la proposition de la Commission relative à la «nouvelle» agence Frontex, il est question de «garde-côtes», dans la mesure où l’AESM a déjà conçu divers systèmes d’information uniques dans le domaine maritime, a accumulé une certaine expérience en la matière et recevra à l’avenir, en vertu des mêmes propositions de la Commission, des tâches supplémentaires dans ce domaine.

3.5.

Selon les experts en la matière, telle est en effet la conclusion que l’on peut tirer des propositions budgétaires. Les données financières indiquent ainsi que l’AESM aura recours aux services de RPA (services de drones), grâce auxquels elle pourra enrichir ses systèmes d’un niveau complémentaire de données dépassant celles qui concernent simplement la surveillance des frontières.

3.6.

Le Comité recommande par conséquent d’éviter l’emploi du terme de «garde-côtes», afin de prévenir tout malentendu. Du reste, la coopération existante entre les trois agences démontre déjà que la répartition des tâches s’avère dans la pratique efficace et opérante.

3.7.

Les autorités nationales chargées de la mise en œuvre des fonctions de garde-côtes devraient, et le Comité insiste sur ce point, pouvoir recueillir à court terme les fruits de cette coopération renforcée sous la forme d’une amélioration des échanges d’informations et d’une surveillance opérationnelle des frontières extérieures de l’Union européenne.

3.8.

Le Comité juge positif que l’AESM joue un rôle moteur pour améliorer de manière significative, grâce aux services de RPA (drones), la capacité de surveillance aux frontières maritimes extérieures de l’Union européenne. Le déploiement de ces drones permettra non seulement d’assurer un contrôle plus opérant et efficace mais pourra aussi servir divers objectifs.

3.9.

Dans les conclusions de son avis sur la modification du règlement instituant une Agence européenne pour la sécurité maritime (1), le Comité a affirmé porter une appréciation positive sur le rôle joué par cette agence dans l’amélioration de la sécurité maritime au sein des États membres. Il ajoutait, dès cette époque, qu’il jugeait fort important d’étendre les missions et les compétences de l’AESM d’une manière responsable.

3.10.

Pour une bonne mise en œuvre de ses tâches supplémentaires, il est absolument indispensable que l’AESM puisse disposer de moyens humains et financiers suffisants. Le budget de l’Union européenne prévoit que les ressources budgétaires de l’Agence augmentent chaque année de 22 millions d’euros jusqu’à l’année 2020 et que 17 agents temporaires soient recrutés. Le Comité se demande si cette évolution est suffisante. Bien que les premiers concernés, comme l’AESM, jugent que tel est le cas, le Comité est d’avis que l’agence ne dispose plus de la marge nécessaire pour faire face aux situations d’urgence qui ne manqueront pas de survenir. Il considère qu’il serait judicieux de constituer une réserve financière.

3.11.

Le CESE est particulièrement préoccupé de ce qu’il est difficile, dans l’état actuel de la technologie, de suivre à la trace les réfugiés voyageant dans de petites embarcations en bois ou en caoutchouc. Les informations satellitaires ne sont disponibles qu’à certains moments, en fonction de l’orbite des satellites autour de la Terre. Selon la Commission, ces contraintes pourront être levées grâce à l’utilisation de services de RPA (drones).

3.12.

Compte tenu de l’ampleur prise par l’afflux de réfugiés, le Comité estime qu’il est primordial, tant d’un point de vue humanitaire que pour assurer une surveillance côtière véritablement efficace et opérante, de pouvoir observer tous les mouvements en mer, afin que les services de secours puissent intervenir en temps utile.

3.13.

Le Comité considère qu’il est judicieux d’avoir choisi l’AESM parmi les trois agences européennes pour jouer un rôle de première importance dans l’organisation des services de RPA (drones).

4.   Observations spécifiques

4.1.

Le Comité est partisan d’un renforcement de la coopération des agences de l’Union européenne entre elles et avec les instances nationales de surveillance côtière. Cette collaboration améliorée doit aboutir à un contrôle des frontières maritimes extérieures de l’Union européenne qui présente un meilleur rapport coût-efficacité.

4.2.

Compte tenu de l’ampleur du flux de migrants, il importe que ce renforcement soit concrétisé à court terme. De l’avis du Comité, il serait inacceptable de retarder, pour quelque raison que ce soit, l’adoption des mesures nécessaires à cette fin. Au contraire, au-delà de la seule proposition à l’examen, relative à l’AESM, il conviendrait d’adopter et mettre en œuvre sans délai toutes celles qui ont été présentées par la Commission, en tenant compte, bien entendu, des indications du Comité.

4.3.

Le CESE peut souscrire à l’extension des missions de l’AESM, cette agence ayant fait la preuve au cours des dernières années de sa capacité à assurer un haut niveau de sûreté et de sécurité maritimes et joué un rôle clé dans la lutte contre la pollution causée par les navires.

4.4.

L’extension des missions de l’AESM devra avoir pour effet une meilleure diffusion des données de surveillance maritime en temps réel entre les trois agences de l’Union européenne et les instances nationales de surveillance côtière, l’utilisation de services de RPA (drones) pour le contrôle des frontières maritimes extérieures de l’Union européenne, la disponibilité d’informations recueillies par satellite, des services de communication de meilleure qualité à l’appui d’opérations conjointes et une attention nettement accrue accordée à l’éducation et la formation, ainsi qu’une hausse considérable des investissements dans ces domaines.

4.5.

Le Comité se demande pourquoi la Commission consacre un paragraphe à l’interruption de la fourniture gratuite de services du Système d’identification automatique par satellite (données satellitaires AIS) par l’Agence spatiale européenne (ESA) sans renvoyer par ailleurs aux paragraphes financiers de sa proposition, qui prévoient d’allouer des fonds à cette fin à partir de 2017, ni mentionner qu’une solution pourrait être trouvée pour l’année 2016 grâce au programme Copernicus. Le Comité est convaincu que cette dernière option se concrétisera.

Bruxelles, le 16 mars 2016.

Le président du Comité économique et social européen

Georges DASSIS


(1)  JO C 107 du 6.4.2011, p. 68.