ISSN 1977-0936

Journal officiel

de l'Union européenne

C 82

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Édition de langue française

Communications et informations

59e année
3 mars 2016


Numéro d'information

Sommaire

page

 

III   Actes préparatoires

 

COMITÉ ÉCONOMIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN

 

513e session plénière du CESE des 20 et 21 janvier 2016

2016/C 082/01

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil établissant des règles communes en matière de titrisation ainsi qu’un cadre européen pour les opérations de titrisation simples, transparentes et standardisées, et modifiant les directives 2009/65/CE, 2009/138/CE et 2011/61/UE et les règlements (CE) no 1060/2009 et (UE) no 648/2012 [COM(2015) 472 final — 2015/0226 (COD)] et la Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (UE) no 575/2013 concernant les exigences prudentielles applicables aux établissements de crédit et aux entreprises d’investissement [COM(2015) 473 final — 2015/0225 (COD)]

1

2016/C 082/02

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil établissant un cadre pour l’étiquetage de l’efficacité énergétique et abrogeant la directive 2010/30/UE [COM(2015) 341 final — 2015/0149 (COD)]

6

2016/C 082/03

Avis du Comité économique et social européen sur la Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — Lancement du processus de consultation publique sur une nouvelle organisation du marché de l’énergie [COM(2015) 340 final]

13

2016/C 082/04

Avis du Comité économique et social européen sur la Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — Une nouvelle donne pour les consommateurs d’énergie [COM(2015) 339 final]

22


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III Actes préparatoires

COMITÉ ÉCONOMIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN

513e session plénière du CESE des 20 et 21 janvier 2016

3.3.2016   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 82/1


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil établissant des règles communes en matière de titrisation ainsi qu’un cadre européen pour les opérations de titrisation simples, transparentes et standardisées, et modifiant les directives 2009/65/CE, 2009/138/CE et 2011/61/UE et les règlements (CE) no 1060/2009 et (UE) no 648/2012»

[COM(2015) 472 final — 2015/0226 (COD)]

et la

«Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (UE) no 575/2013 concernant les exigences prudentielles applicables aux établissements de crédit et aux entreprises d’investissement»

[COM(2015) 473 final — 2015/0225 (COD)]

(2016/C 082/01)

Rapporteur:

M. Daniel MAREELS

Le Conseil, le 27 octobre 2015, et le Parlement européen, le 14 octobre 2015, ont décidé, conformément à l’article 114 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE), de consulter le Comité économique et social européen sur la

«Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil établissant des règles communes en matière de titrisation ainsi qu’un cadre européen pour les opérations de titrisation simples, transparentes et standardisées, et modifiant les directives 2009/65/CE, 2009/138/CE et 2011/61/UE et les règlements (CE) no 1060/2009 et (UE) no 648/2012»

[COM(2015) 472 final — 2015/0226 (COD)].

et la

«Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (UE) no 575/2013 concernant les exigences prudentielles applicables aux établissements de crédit et aux entreprises d’investissement»

[COM(2015) 473 final — 2015/0225 (COD)].

La section spécialisée «Union économique et monétaire, cohésion économique et sociale», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 16 décembre 2015.

Lors de sa 513e session plénière des 20 et 21 janvier 2016 (séance du 20 janvier 2016), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 176 voix pour, 1 voix contre et 6 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1.

Le CESE accueille favorablement les propositions relatives à un régime de titrisation «simple, transparent et standardisé» (titrisations STS), ainsi que l’adaptation des exigences prudentielles applicables aux établissements de crédit et aux entreprises d’investissement. Ces propositions s’inscrivent dans le cadre plus large du «Plan d’action pour la mise en place d’une union des marchés des capitaux» (1).

1.2.

Le Comité se félicite de l’adoption rapide des propositions en matière de titrisation, qui ont été publiées en même temps que le plan d’action pour la mise en place d’une union des marchés des capitaux. Il s’agit de prendre les mesures nécessaires à brève échéance. Cette démarche devrait permettre de générer d’importantes ressources supplémentaires pour les financements bancaires, ce qui revêt une importance capitale, surtout pour les PME et les ménages.

1.3.

Dans le système financier européen actuel, les prêts bancaires représentent 75 à 80 % du financement total de l’économie et à l’avenir, les PME et les ménages resteront certainement très largement dépendants du financement bancaire. Une relance de ce marché pourrait mettre à la disposition du secteur privé un volume de crédit supplémentaire de 100 à 150 milliards d’euros, ce qui représente une augmentation de 1,6 % du crédit octroyé aux entreprises et aux ménages. Par ailleurs, le Comité a déjà souligné l’importance des opérations de titrisation pour les PME, étant donné le rôle majeur de ces dernières dans l’économie européenne

1.4.

S’agissant des financements bancaires, le Comité estime qu’ils sont indissociables des financements par le marché, qui seront développés davantage dans le cadre de l’union des marchés des capitaux. Ces deux formes de financement ne doivent pas être jugées concurrentes mais plutôt complémentaires.

1.5.

Le CESE est d’avis qu’il importe de privilégier maintenant une approche globale. Le nouveau cadre de titrisation requiert une approche durable et approfondie et l’établissement d’un équilibre équitable et adéquat. Il y a lieu de prendre en compte, à tous les niveaux, l’ensemble des objectifs requis et des intérêts de tous les acteurs concernés. Sont appréciés à cet égard tant les efforts entrepris en faveur de la stabilité du système financier que l’approche privilégiée, selon laquelle les investisseurs ont à la fois des droits et des obligations.

1.6.

La relance des opérations de titrisation suppose que le nouveau règlement soit suffisamment ambitieux. Les critères STS doivent être réalistes et réalisables pour l’ensemble des banques actives dans le domaine du financement de crédit, qu’elles soient grandes ou petites et locales. De même, les opérations de titrisation doivent être attrayantes pour les investisseurs. En cas de succès, le nouveau règlement pourrait contribuer considérablement à améliorer le financement de l’économie, à augmenter les investissements et à relancer la croissance. Il convient dans le même temps de déterminer clairement les risques qui en découleront et de désigner les acteurs qui devront les assumer, en prenant en compte l’ensemble de la chaîne, de l’émetteur à l’investisseur. Il importe maintenant d’éviter de reproduire les erreurs du passé.

1.7.

Les principes de sécurité, de transparence et d’applicationenforcement») doivent être intégrés dans le règlement, afin de renforcer la confiance dans les nouveaux marchés. La surveillance doit être développée de manière adéquate, tant au niveau de la BCE qu’à celui des autorités de contrôle nationales, et la dimension internationale ne peut être négligée.

1.8.

Compte tenu de la complexité et des risques qui y sont liés, le Comité partage le point de vue selon lequel la titrisation ne peut être accessible aux petits investisseurs et aux consommateurs. Le Comité estime en outre que l’approche volontaire actuelle est insuffisante et demande qu’une interdiction formelle figure explicitement dans les textes.

1.9.

Il est prévu d’évaluer le régime après une période de quatre ans. Le Comité estime souhaitable que cette évaluation ait lieu plus tôt. Un délai de deux ans semble indiqué.

1.10.

Le CESE juge essentiel que les décideurs européens jouent un rôle de premier plan dans le débat international et mondial sur les titrisations, afin de garantir les acquis européens, ainsi qu’une harmonisation suffisante au niveau international.

2.   Contexte

2.1.

Dès son entrée en fonctions, la Commission Juncker s’est fixée trois priorités absolues, à savoir la croissance, l’emploi et l’investissement.

2.2.

Pour atteindre ces objectifs, la Commission a adopté un plan d’investissement pour l’Europe qui prévoit trois volets:

mobiliser des investissements à hauteur d’au moins 315 milliards EUR sur trois ans,

soutenir les investissements dans l’économie réelle,

créer un environnement propice aux investissements  (2).

2.3.

Dans son plan d’action pour la mise en place d’une union des marchés des capitaux en date du 30 septembre 2015, la Commission veut à la fois mobiliser des capitaux en Europe et mettre en place un véritable marché unique des capitaux, mais également concrétiser l’une des composantes majeures du troisième volet de son plan d’investissement d’ici 2019.

2.4.

Parallèlement à son plan d’action, la Commission a présenté ses propositions en matière de titrisation  (3). Les propositions sont contenues dans un paquet législatif englobant deux propositions, qui traitent chacune d’aspects spécifiques:

2.4.1.

d’une part, une proposition relative à la titrisation. La proposition de règlement a notamment pour objectif l’élaboration d’un cadre concret et commun applicable à tous les participants au marché de la titrisation et la définition d’un sous-ensemble d’opérations répondant à certains critères d’éligibilité: «les titrisations simples, transparentes et standardisées», ou «titrisations STS»  (4)  (5); et

2.4.2.

d’autre part, une proposition visant à modifier le cadre réglementaire régissant la titrisation dans le droit de l’Union, notamment en ce qui concerne les exigences de fonds propres applicables aux établissements de crédit et aux entreprises d’investissement, en vue d’assurer une réglementation des titrisations STS qui soit plus sensible au risque (6), et ce, afin de tenir dûment compte des spécificités des titrisations STS.

2.4.3.

La première proposition prévoit non seulement un certain nombre de dispositions qui s’appliquent à toutes les titrisations, mais crée notamment un cadre pour les titrisations STS. Ainsi, il est fait référence au processus de structuration de la titrisation et non à la qualité de crédit sous-jacente des actifs concernés.

2.4.4.

La seconde proposition concerne, de manière complémentaire, le traitement prudentiel des titrisations, qui tient mieux compte des spécificités de ces marchés. En particulier, la proposition aborde les exigences de fonds propres pour les positions de titrisation, notamment un traitement des titrisations STS plus sensible au risque.

3.   Observations

3.1.

Le CESE se félicite que les propositions en matière de titrisation aient été publiées en même temps que le plan d’action pour la mise en place d’une union des marchés des capitaux. Il s’agit maintenant de prendre rapidement les mesures nécessaires. En effet, les économies européennes restent très largement dépendantes du financement bancaire. Dans le système financier européen, les prêts bancaires représentent 75 à 80 % du financement total de l’économie (7). Le Comité estime que les financements bancaires et ceux passant par le marché vont de pair et qu’ils doivent être considérés comme complémentaires.

3.2.

Par ailleurs, les niveaux d’investissement restent fort inférieurs à ceux enregistrés avant la crise financière et économique. Alors que le produit intérieur brut (PIB) et la consommation privée de l’Union européenne étaient globalement proches des niveaux de 2007 au deuxième trimestre 2014, le montant total des investissements était de 15 % inférieur à celui de 2007 (8).

3.3.

Le Comité a déjà souligné l’importance de la titrisation, en particulier pour les PME qui sont encore très dépendantes du financement bancaire (9). Les PME jouent un rôle majeur dans l’économie européenne étant donné qu’elles représentent plus de 98 % des entreprises européennes, fournissent plus de 67 % des emplois du secteur privé dans l’Union européenne et produisent 58 % de la valeur ajoutée brute des entreprises (10).

3.4.

En outre, les titrisations de prêts aux PME sont pour l’instant très limitées, contrairement aux titrisations qui concernent les biens fonciers, lesquelles ont très peu souffert de la crise financière. À l’heure actuelle, seuls 8 % du marché de la titrisation concernent les PME, comparativement à 58 % pour les RMBS (11). Le Comité estime dès lors qu’il est nécessaire de mettre plus particulièrement l’accent sur les titrisations liées aux PME dans le cadre de la stratégie pour la mise en place d’un marché unique des capitaux.

3.5.

La redynamisation du marché de la titrisation et, plus particulièrement, de son segment «PME» est essentielle. Dans le plan européen d’investissement, la création d’un marché durable de la titrisation de qualité figure parmi les cinq domaines réclamant une action à court terme. Si ce marché de la titrisation retrouvait les niveaux d’émission moyens d’avant la crise, les établissements de crédit pourraient, s’ils affectaient les nouvelles émissions à l’octroi de nouveaux crédits, mettre à la disposition du secteur privé un volume de crédit supplémentaire de 100 à 150 milliards d’EUR. Ce montant représenterait une augmentation de 1,6 % du crédit pour les entreprises et les ménages de l’Union européenne (12).

3.6.

Le CESE a déjà plaidé en faveur d’une redynamisation, mais sous certaines conditions. Afin de ne pas répéter les erreurs commises par le passé aux États-Unis, le Comité préconise de préciser clairement le cadre en matière de titrisation (13). De même, il estime qu’un marché durable de la titrisation de haute qualité requiert de promouvoir des structures de base caractérisées par des chaînes d’intermédiation courtes afin d’établir un lien direct entre emprunteurs et épargnants (14).

3.7.

Le Comité juge maintenant qu’il est important d’adopter une approche globale, durable et approfondie, de prendre en compte tous les objectifs requis, ainsi que les intérêts de tous les acteurs concernés, et de s’atteler à concilier tous ces facteurs de manière équitable et adéquate. Chaque mesure doit avoir une incidence positive à la fois sur le financement de l’économie (cf. supra), la stabilité du système financier et les intérêts des investisseurs.

3.8.

Opter pour un règlement dans le cadre de la mise en œuvre de cette initiative est un bon choix aux yeux du Comité s’il s’agit de construire un véritable marché unique. La réglementation doit donc être suffisamment ambitieuse et attrayante pour les investisseurs si l’on veut qu’elle s’accompagne d’effets positifs concrets.

3.9.

Le Comité est sensible aux efforts entrepris en faveur de la stabilité du système financier et au potentiel qu’ils recèlent. Les propositions prévoient ainsi une série d’obligations en matière de transparence et facilitent une répartition plus large et plus efficace des risques entre plusieurs acteurs, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur du secteur financier.

3.10.

Le Comité accorde une grande importance à ces obligations de transparence, le manque de transparence et d’uniformité constituant justement l’un des principaux obstacles à la mise en place du marché de la titrisation. Le principe de base d’une distinction entre différentes catégories de produits titrisés et de l’introduction de produits simples, transparents et standardisés est donc perçu comme un moyen adéquat pour renforcer la confiance des investisseurs et relancer le marché.

3.11.

L’exigence de rétention du risque veille à ce que les parties qui effectuent ces opérations ne doivent elles-mêmes prendre qu’un risque en portefeuille minimal. Le Comité la considère donc comme un principe général valable. Il attire également l’attention sur l’impossibilité pour les modèles «octroi pour cession» de faire leur réapparition.

3.12.

Les investisseurs ont des droits et des devoirs. Ceux qui placent leurs fonds en vue de faire un profit ont une obligation de vigilance («due diligence») par rapport aux titrisations dans lesquelles ils investissent. Changer de point de vue et imputer la responsabilité aux autorités de surveillance et aux pouvoirs publics impliquerait de devoir se pencher sur la question gênante du risque moral («moral hazard»).

3.13.

Les opérations et les marchés de la titrisation peuvent, dans certaines circonstances, comporter des risques. C’est la leçon que l’on peut tirer du passé récent, au cours duquel certaines erreurs ont été commises. Il s’agit aujourd’hui de veiller à ce que, dans le cadre de la redynamisation à laquelle nous travaillons, les erreurs du passé ne soient pas répétées, volonté, du reste, explicitement affichée par la Commission dans le plan d’investissement qu’elle a publié fin 2014. Il convient de décrire clairement, dans le cadre du nouvel environnement, le risque qui en découle et les acteurs à qui il incombe de l’assumer. Grâce à une harmonisation des normes en matière de notification, à la fourniture de données plus structurées et à l’utilisation de modèles fixes, il sera possible de renforcer la confiance des investisseurs et d’améliorer l’évaluation des risques. Combiné à une meilleure qualité des données, ce renforcement devrait contribuer à rendre l’intervention d’agences externes d’évaluation de crédit totalement superflue.

3.14.

Les principes de sécurité, de transparence et d’application («enforcement») doivent trouver leur place dans le nouveau règlement, ce qui contribuera également à améliorer la confiance dans les nouveaux marchés. La surveillance doit être développée de manière adéquate et la dimension internationale ne peut être négligée.

3.15.

Le CESE se félicite également du principe selon lequel ces opérations et marchés sont réservés aux investisseurs professionnels et institutionnels, aux banques et autres investisseurs à long terme. Dans les projets de texte, le point de vue mis en avant est que les petits investisseurs et les consommateurs ne doivent pas y avoir accès. Compte tenu de la complexité de la question et des risques y afférents, il s’agit de la bonne approche, mais le Comité insiste pour que cette interdiction figure formellement dans les textes.

3.16.

Le Comité est parfaitement conscient du fait que les textes actuels se limitent à promouvoir l’harmonisation d’un certain nombre d’éléments clés des marchés de titrisation et qu’ils n’évoquent nullement une future harmonisation complémentaire, menée par ces marchés, des processus et pratiques qui y sont présents. Tous les efforts déployés dans ce domaine doivent retenir notre attention et faire l’objet d’un suivi et d’une évaluation.

3.17.

Pour ce qui est de l’évaluation prévue quatre ans après l’entrée en vigueur de cette initiative, le CESE est favorable au raccourcissement du délai à deux ans afin de garantir au projet toutes les chances de succès.

3.18.

Par ailleurs, il est important que les décideurs politiques européens jouent un rôle central dans les débats menés sur le plan international. Il s’agit plus particulièrement des discussions de Bâle (15), sur le développement d’un cadre juridique pour des opérations de titrisation simples, transparentes et standardisées, et ce, afin de garantir une harmonisation suffisante au niveau international.

Bruxelles, le 20 janvier 2016.

Le président du Comité économique et social européen

Georges DASSIS


(1)  Voir la Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions du 30 septembre 2015 — «Un plan d’action pour la mise en place d’une union des marchés des capitaux», COM(2015) 468 final. Voir http://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/?qid=1447000363413&uri=CELEX:52015DC0468.

(2)  Voir site internet de la Commission européenne http://ec.europa.eu/priorities/jobs-growth-investment/plan/index_fr.htm.

(3)  Le projet de règlement (considérant 1) décrit les titrisations comme suit: une titrisation est une opération qui permet à un prêteur, généralement un établissement de crédit, de refinancer un ensemble de prêts ou d’expositions, tels que prêts immobiliers, leasings automobiles, prêts à la consommation ou cartes de crédit, en les convertissant en titres négociables. Le prêteur regroupe et reconditionne un portefeuille de prêts, qu’il organise en différentes catégories de risque adaptées à différents investisseurs. Cette opération permet à ces derniers d’investir dans des prêts et d’autres expositions auxquels ils n’ont, en principe, pas directement accès. La rémunération des investisseurs est générée par les flux de trésorerie des prêts sous-jacents.

(4)  Proposition de règlement sur la titrisation (voir la note de bas de page no 3).

(5)  L’abréviation STS correspond à l’expression anglaise «simple, transparent and standardised securitisations».

(6)  Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (UE) no 575/2013 concernant les exigences prudentielles applicables aux établissements de crédit et aux entreprises d’investissement. Voir http://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/PDF/?uri=CELEX:52015PC0473&qid = 1445963164202&from = FR.

(7)  Voir «Bank deleveraging, the move from bank to market-based financing, and SME financing» (Le désendettement des banques, l’abandon du financement bancaire au profit du financement par le marché et les financement des PME), OCDE 2012. Voir: http://www.oecd.org/finance/financial-markets/Bank_deleveraging-Wehinger.pdf.

(8)  «Fiche d’information 1 — Pourquoi un plan d’investissement pour l’Union européenne?» Document conjoint de la Commission européenne et de la BEI. Voir http://ec.europa.eu/priorities/jobs-growth-investment/plan/docs/factsheet1-why_fr.pdf.

(9)  Voir le rapport d’information «Accès au financement pour les PME» (EESC-2014-06006-00-01-RI-TRA), paragraphe 1.2.5, et l’avis «Financement des entreprises: recherche de nouveaux mécanismes financiers». (JO C 451 du 16.12.2014, p. 20), paragraphe 1.5.

(10)  Rapport annuel 2013/2014 sur les PME européennes, tel que mentionné dans le rapport d’information «Accès au financement pour les PME» (EESC- 2014-06006-00-01-RI-TRA).

(11)  Residential Mortgage-Backed Securities (prêts hypothécaires résidentiels).

(12)  Proposition de règlement en matière de titrisation.

(13)  Voir avis du CESE sur le thème «Financement à long terme — Suivi», (JO C 451 du 16.12.2014, p. 91), paragraphe 3.3.2.

(14)  Voir l’avis sur le Livre vert «Construire l’union des marchés des capitaux» — (JO C 383 du 17.11.2015, p. 64), paragraphe 3.9.

(15)  Consultation du Comité de Bâle sur le contrôle bancaire et de l’Organisation internationale des commissions de valeurs relative aux critères permettant de définir des opérations de titrisation simples, transparentes et comparables. La consultation s’est déroulée du 11 décembre 2014 au 13 février 2015.


3.3.2016   

FR

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C 82/6


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil établissant un cadre pour l’étiquetage de l’efficacité énergétique et abrogeant la directive 2010/30/UE»

[COM(2015) 341 final — 2015/0149 (COD)]

(2016/C 082/02)

Rapporteur:

Emilio FATOVIC

Le 31 août 2015 et le 15 septembre 2015, respectivement, le Conseil et le Parlement européen ont décidé, conformément à l’article 194, paragraphe 2, du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la:

«Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil établissant un cadre pour l’étiquetage de l’efficacité énergétique et abrogeant la directive 2010/30/UE»

[COM(2015) 341 final — 2015/0149 (COD)].

La section spécialisée «Transports, énergie, infrastructures, société de l’information», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 7 janvier 2016.

Lors de sa 513e session plénière des 20 et 21 janvier 2016 (séance du 20 janvier), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 218 voix pour, 2 voix contre et 6 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1.

Le CESE soutient la proposition de la Commission visant à établir un cadre pour l’étiquetage énergétique, mû par la conviction que s’il est correctement mis en œuvre, en combinaison avec la directive sur l’écoconception, ce cadre pourra avoir une incidence favorable sur l’environnement, les consommateurs, les entreprises et les travailleurs.

1.2.

Le Comité estime que la proposition aborde les principaux problèmes liés à la réglementation en vigueur, parmi lesquels l’application effective de la réglementation, la surveillance efficace du marché et le droit des consommateurs à recevoir des informations claires, compréhensibles et comparables. En particulier, le CESE invite la Commission à poursuivre sur la voie de l’harmonisation et de la simplification des classes énergétiques pour toutes les catégories de produits.

1.3.

Le CESE approuve le recours à l’instrument du règlement, en lieu et place de la directive, dans le but de garantir une mise en œuvre effective et uniforme de cet acte législatif sur l’ensemble du territoire européen.

1.4.

Le Comité juge approprié le choix de créer une «base de données sur les produits», en tant qu’outil susceptible d’assurer une surveillance plus efficace du marché. Il estime toutefois qu’il est essentiel de renforcer les contrôles instrumentaux des produits en vente, afin de vérifier si leurs caractéristiques correspondent bien à celles mentionnées sur l’étiquette.

1.5.

Le CESE invite la Commission à créer et financer des formations communes et harmonisées pour tous les travailleurs et les autres acteurs associés aux processus de surveillance et de contrôle.

1.6.

Le CESE souscrit au choix de revenir à l’ancienne échelle énergétique de A à G, dans la mesure où elle est plus facilement compréhensible pour les consommateurs, ainsi que d’introduire une échelle de couleurs, de vert à rouge, permettant de mieux identifier l’efficacité énergétique d’un produit.

1.7.

Le Comité propose d’élaborer un nouveau visuel graphique pour l’étiquette énergétique, afin de lutter contre la contrefaçon et d’éviter toute confusion dans l’esprit des consommateurs, en particulier durant la période de transition. Par ailleurs, le CESE propose de laisser en gris, sur l’échelle de couleurs, les classes qui ne sont pas occupées par des produits sur le marché, que ce soit à la suite d’un remaniement ou en raison des limites imposées par la directive sur l’écoconception.

1.8.

Le CESE suggère de compléter la nouvelle étiquette en y apposant d’autres informations sensibles pour les consommateurs, comme la «durée de vie minimale des produits» et la «consommation du produit pendant tout son cycle de vie», compte tenu notamment de son «empreinte carbone». Ces informations sont essentielles pour rendre vraiment comparables économiquement des produits énergétiques appartenant à des classes différentes et pour contrecarrer et refréner l’obsolescence programmée des produits.

1.9.

Le CESE estime que s’en remettre aux États membres pour gérer un aspect aussi essentiel que l’adoption d’un régime de sanction revient à favoriser une application inégale de la réglementation, privant ainsi de toute utilité le recours au règlement en remplacement de la directive.

1.10.

Le Comité estime que l’Union, conformément au principe de subsidiarité, devra faciliter l’accessibilité des produits présentant la plus grande efficacité énergétique aux catégories sociales les plus défavorisées, de manière à lutter contre le phénomène de la «pauvreté énergétique».

1.11.

Le CESE estime que, à l’image du principe de la «conception pour tous», qui vise à concevoir des produits utilisables par tous, les étiquettes devront elles aussi être de plus en plus compréhensibles pour tous, en accordant une attention particulière aux besoins des personnes handicapées.

1.12.

Le Comité invite l’Union à faire en sorte que les éventuels coûts additionnels induits par le nouveau système d’étiquetage ne soient pas automatiquement répercutés sur les détaillants ou les utilisateurs finaux.

1.13.

Le CESE déplore l’absence de stratégie ad hoc pour le commerce en ligne, pourtant jugée nécessaire, dans la mesure où il s’agit de l’un des secteurs où l’application de la réglementation laisse fortement à désirer. Le Comité souhaite plus particulièrement que des mesures soient prises rapidement pour réglementer les «sites bazar», sur lesquels les manquements à l’obligation d’afficher les étiquettes énergétiques sont les plus nombreux.

1.14.

Le CESE constate l’absence de mesures ad hoc concernant les produits énergétiques «régénérés». Le CESE estime notamment nécessaire de réglementer la commercialisation de ces produits, lorsqu’ils sont vendus dans des commerces spécialisés, afin de ne pas créer de vides réglementaires et, surtout, de favoriser une meilleure intégration entre les stratégies sur l’efficacité énergétique et celles relatives à l’économie circulaire.

1.15.

Le Comité invite la Commission européenne à prêter une attention particulière aux produits importés de pays tiers, afin de protéger la production européenne contre d’éventuelles formes de concurrence déloyale ou de fraude lorsque les étiquettes ont de toute évidence été falsifiées.

1.16.

Le CESE estime que l’Union européenne ne pourra atteindre les objectifs qu’elle s’est fixés en matière d’efficacité énergétique que moyennant une participation active des consommateurs. C’est pourquoi il demande que la société civile organisée œuvre aux côtés des gouvernements nationaux afin de mener à bien des activités d’information et de sensibilisation plus efficaces et généralisées, y compris auprès des différents détaillants.

1.17.

Le Comité soutient la proposition relative à l’obligation de faire figurer, pour chaque produit, l’étiquette énergétique dans les annonces publicitaires ou, lorsque ce n’est pas possible, au moins la classe énergétique, afin d’améliorer l’information et la sensibilisation des consommateurs.

1.18.

Le CESE juge trop court le délai d’une seule semaine qui est prévu au terme de la période de transition pour passer définitivement au nouveau système d’étiquetage des produits. C’est pourquoi il demande que ce délai soit porté à 30 jours.

1.19.

Le CESE demande à la Commission d’adopter une approche plus prudente et mesurée en matière d’actes délégués. Il souhaite en particulier que les délégations soient claires et bien définies, que le contrôle du Parlement soit garanti et surtout que l’adoption des actes délégués soit toujours subordonnée à la consultation et à la participation effectives des États membres, du CESE et des parties prenantes.

1.20.

Le CESE juge raisonnable le délai de huit ans prévu pour le réexamen du cadre relatif à l’étiquetage, mais propose que ce cadre fasse l’objet d’une analyse d’impact réalisée à mi-parcours.

1.21.

Le Comité considère qu’il est essentiel de définir un mécanisme de remaniement clair et stable, afin que les remaniements qui seront rendus nécessaires par les avancées technologiques sur le marché soient économiques, précis et ne prêtent pas à controverse. Il propose dès lors de ne procéder à ce remaniement que lorsque les produits de la classe énergétique A représentent au moins 20 % du marché.

2.   Introduction

2.1.

Le 25 février 2015, la Commission européenne a publié le paquet «Union de l’énergie», qui se compose de trois communications:

un cadre stratégique pour une Union de l’énergie résiliente (1),

une communication sur la position de l’Union européenne dans la perspective de l’accord mondial sur le climat,

une communication présentant les mesures nécessaires pour atteindre l’objectif de 10 % d’interconnexion électrique d’ici à 2020.

2.2.

La stratégie pour l’Union de l’énergie, qui repose sur une approche globale, a pour objectif d’améliorer la sécurité, la viabilité et la compétitivité de l’approvisionnement énergétique et s’articule autour de cinq dimensions:

la sécurité énergétique, la solidarité et la confiance,

la pleine intégration du marché européen de l’énergie,

l’efficacité énergétique comme moyen de modérer la demande,

la décarbonisation de l’économie,

la recherche, l’innovation et la compétitivité.

2.3.

C’est dans le cadre de cette stratégie que s’inscrit le règlement établissant un cadre pour l’étiquetage de l’efficacité énergétique et abrogeant la précédente directive 2010/30/UE (2).

2.4.

Le nouveau cadre pour l’étiquetage a pour pendant la directive 2009/125/CE sur l’écoconception (3). Selon le commissaire européen responsable du climat et de l’énergie, M. Miguel Arias Cañete, grâce à la mise en œuvre conjointe des deux réglementations, «l’Europe économisera d’ici à 2020 autant d’énergie que celle consommée annuellement en Italie, soit l’équivalent de 166 millions de tonnes de pétrole», ce qui aura aussi un impact important sur la réduction des émissions de CO2.

2.5.

Le nouveau règlement tient compte, entre autres, des conclusions de l’évaluation ex post de la législation en vigueur, des résultats des consultations effectuées auprès des citoyens et des parties concernées, ainsi que d’une analyse d’impact spécifique (4).

3.   Contenu essentiel de la proposition de la Commission

3.1.

La proposition de la Commission se présente pour la première fois sous la forme d’un règlement et non plus d’une directive, dans le but de simplifier l’environnement réglementaire pour les États membres et les entreprises, mais surtout d’assurer que les principes édictés dans ce règlement soient appliqués et respectés de manière uniforme dans l’ensemble de l’Union européenne.

3.2.

La proposition prévoit la création d’une base de données sur les produits, afin d’assurer une surveillance plus efficace du marché. Ce sont les producteurs qui auront l’obligation de saisir diverses informations dans cette base de données. Il importe de souligner qu’à l’heure actuelle, ces informations doivent déjà être fournies par les entreprises à la demande des autorités nationales de surveillance du marché. Aussi la Commission européenne estime-t-elle que les coûts additionnels qui en découleront pour les entreprises seront minimes (5).

3.3.

La proposition vise à revoir l’échelle énergétique en vigueur, introduite par la directive 2010/30/UE, et ce pour deux raisons:

a)

il a été constaté que l’introduction des classes A + à A +++ nuit à la lisibilité des étiquettes et dissuade les consommateurs d’acheter des produits présentant une meilleure efficacité énergétique;

b)

les classes énergétiques les plus élevées ont déjà atteint la saturation en ce qui concerne différentes catégories de produits.

C’est la raison pour laquelle la Commission propose de revenir à l’ancienne échelle de A à G, jugée plus compréhensible, en «remaniant» le classement de tous les produits commercialisés à ce jour. Les classes A et B seront laissées vacantes, pour éviter le problème de saturation immédiate des classes les plus élevées (6). À titre complémentaire, il est en outre prévu d’insérer sur l’étiquette une échelle de couleurs allant du vert au rouge, pour identifier les produits plus ou moins efficaces du point de vue énergétique.

3.4.

La proposition prévoit une période de transition de six mois au cours de laquelle les produits actuellement en vente seront disponibles avec un double étiquetage, afin de mener à bien le processus de «remaniement» sans générer davantage de confusion dans l’esprit des consommateurs. Durant cette phase, les États membres devront en outre mener des campagnes ad hoc pour informer les consommateurs sur le nouveau système d’étiquetage.

3.5.

La Commission prévoit que l’activité de contrôle et la définition d’un régime de sanction doivent continuer de relever de la compétence des États membres respectivement concernés (7).

3.6.

La Commission se voit confier le pouvoir d’adopter des actes délégués afin de garantir la bonne application de la réglementation. Ce pouvoir pourra être révoqué à tout moment par le Conseil ou le Parlement. La Commission devra veiller, pour chaque acte délégué, à ce que soit assurée une participation équilibrée des représentants des États membres et des parties concernées par le groupe de produits considéré. Les États membres et les parties prenantes se réuniront au sein d’un forum de consultation ad hoc.

3.7.

La prochaine évaluation du cadre pour l’étiquetage devrait intervenir dans un délai de huit ans. Les étiquettes des produits qui sont déjà sur le marché seront soumises à révision dans un délai de cinq ans, alors qu’aucun calendrier précis n’a été fixé pour le remaniement de l’étiquetage des produits commercialisés après l’adoption du règlement.

4.   Observations générales

4.1.

Le CESE accueille favorablement la proposition de la Commission, qui découle de la prise de conscience du fait que l’étiquetage énergétique a une incidence positive sur l’environnement, les consommateurs, les entreprises européennes et le niveau d’emploi (8).

4.2.

Le CESE assigne au nouveau système d’étiquetage un rôle stratégique important, qui ne se limite pas à des aspects purement techniques, puisqu’il influe de manière directe et indirecte sur les secteurs de l’énergie, du commerce intérieur, du développement technologique, de l’environnement et plus généralement sur les processus de développement durable.

4.3.

Le CESE reconnaît que la proposition, bien que souffrant à certains égards d’un manque d’ambition et de vision, a le mérite de traiter les principaux problèmes posés par la réglementation en vigueur. En effet, la proposition s’attache à résoudre les problèmes immédiats et contraignants, sans envisager les possibles développements futurs du commerce et de la production énergétique.

4.4.

Le CESE invite la Commission à poursuivre sur la voie de l’harmonisation et de la simplification des classes énergétiques pour toutes les catégories de produits. Ce processus contribuera grandement à sensibiliser les consommateurs à une approche sélective en matière d’achats et valorisera les produits de meilleure qualité.

4.5.

Le CESE approuve le choix de recourir à l’instrument du règlement, en lieu et place de la directive, afin de garantir de manière uniforme la mise en œuvre effective et rapide de cette législation sur l’ensemble du territoire européen. L’utilisation sélective de cet instrument est également essentielle aux fins de l’efficacité du processus d’intégration européenne.

4.5.1.

Le Comité soutient la proposition de créer une «base de données sur les produits», qui s’avère être un outil indispensable pour assurer une surveillance efficace du marché. Comme on a pu l’observer en effet, les associations de consommateurs de nombreux pays européens ont à plusieurs reprises soulevé le problème de la non-application de la précédente directive 2010/30/UE, avec pour conséquence la présence sur le marché de produits dépourvus d’étiquettes sur la consommation d’énergie. Une telle intervention s’impose également afin de garantir des conditions de concurrence véritablement équitables entre les produits présents sur le marché intérieur.

4.6.

Le CESE estime cependant que si la création d’une «banque de données sur les produits» est importante, elle n’apporte pas de solution définitive en matière de surveillance adéquate du marché, et attend des autorités compétentes qu’elles renforcent les contrôles instrumentaux sur les produits en vente, afin de vérifier si leurs caractéristiques correspondent réellement à celles mentionnées sur l’étiquette.

4.7.

Compte tenu de la nature éminemment technique des activités de contrôle et de surveillance du marché, le CESE invite la Commission à mettre en place des formations communes et harmonisées pour les travailleurs et les autres acteurs associés à ces opérations au moyen de lignes de financement spécifiques, afin de garantir que le règlement puisse être mis en œuvre en temps utile et avec efficacité.

4.8.

Le CESE souscrit au choix de revenir à l’ancienne échelle énergétique de A à G, dans la mesure où elle est plus aisément compréhensible pour les consommateurs. Il est à noter par exemple qu’entre un réfrigérateur de classe A +++ et un autre de classe A +, la différence de consommation d’énergie est de 42 %, même si l’actuel système d’étiquetage ne permet pas de saisir immédiatement la différence en termes d’efficacité énergétique et de coûts. Dès lors, le principe selon lequel mieux vaut «dépenser plus pour dépenser moins» prévaut pour certaines catégories de produits, en permettant aux consommateurs d’amortir rapidement le coût d’un produit de catégorie supérieure. Cela suppose toutefois que les étiquettes soient plus claires, compréhensibles et comparables.

4.9.

Le CESE estime que l’objectif premier de cette proposition est d’assurer son application uniforme à l’échelle européenne. Mais s’en remettre aux États membres pour gérer un aspect aussi essentiel que l’adoption d’un régime de sanction revient à favoriser une application inégale de la réglementation, privant ainsi de toute utilité le recours au règlement en remplacement de la directive.

4.10.

Dans l’ensemble, le CESE estime qu’une fois restructuré, le nouveau système d’étiquetage permettra de garantir:

4.10.1.

la communication aux consommateurs d’informations plus précises, pertinentes et comparables sur l’efficacité et sur la consommation d’énergie de tous les produits vendus dans l’Union européenne, en favorisant des achats effectués en connaissance de cause, économiquement avantageux à long terme et respectueux de l’environnement;

4.10.2.

l’amélioration de la libre circulation des produits, tout en assurant des conditions équitables. Cela renforcera également la compétitivité des entreprises européennes, qui seront incitées à innover et auront l’avantage d’accéder au marché avant celles des pays tiers, avec la possibilité d’obtenir des marges bénéficiaires accrues;

4.10.3.

le relèvement des taux d’emploi, à condition que les entreprises européennes s’engagent à ne pas délocaliser davantage leurs productions, contribuant ainsi de manière indirecte à la relance de la production européenne et de la consommation intérieure.

5.   Observations particulières

5.1.

Le CESE estime que le nouveau système d’étiquetage représente une amélioration par rapport à la législation actuelle mais qu’il ne répond pas à tous les besoins d’information des consommateurs. À cet égard, il est conseillé d’insérer sur l’étiquette d’autres données telles que la «durée de vie minimale des produits» (9) et la «consommation énergétique du produit pendant tout son cycle de vie», compte tenu notamment de son «empreinte carbone». Ces informations s’avèrent indispensables pour rendre vraiment comparables économiquement des produits énergétiques appartenant à des classes différentes et pour contrecarrer et refréner l’obsolescence programmée des produits.

5.1.1.

D’autres informations utiles, mais non indispensables pour les consommateurs, comme le coût énergétique additionnel généré par les produits utilisés en domotique, pourraient être accessibles à l’aide d’un site internet spécifique consacré à l’efficacité énergétique des produits ou d’un code QR apposé sur l’étiquette, de sorte que chaque produit soit facilement accessible à partir de tablettes et de smartphones, comme cela a déjà été fait dans un but similaire pour d’autres produits commerciaux, en vue d’un développement raisonné du plan d’action relatif à «L’internet des objets» (10).

5.2.

Le Comité propose d’élaborer un nouveau visuel graphique pour l’étiquette énergétique, afin de lutter contre la contrefaçon et d’éviter toute confusion dans l’esprit des consommateurs, en particulier durant la période de transition. Par ailleurs, le CESE propose de laisser en gris, sur l’échelle de couleurs, les classes qui ne sont pas occupées par des produits sur le marché, de manière à ne pas dissuader les consommateurs de les acheter. Cette opération devra être réalisée pour les classes les plus basses, dont les produits ont été évincés du marché par la directive relative à l’écoconception, et pour les classes les plus élevées dans lesquelles les produits sur le marché ne rentrent pas encore ou qui résultent d’un remaniement de l’échelle.

5.3.

Le CESE rappelle à la Commission la position qu’il a déjà défendue dans son avis TEN/516 (11), concernant en particulier le phénomène de la «pauvreté énergétique», qui touche plus de 50 millions de citoyens dans l’ensemble de l’Union européenne. Il convient en conséquence que l’Union, conformément au principe de subsidiarité, favorise dans toute la mesure du possible l’accessibilité des produits les plus performants en termes d’efficacité énergétique, notamment pour les catégories sociales les plus pauvres et défavorisées. Dans le même temps, l’Union européenne doit veiller à ce que les éventuels coûts additionnels induits par le nouveau système d’étiquetage ne soient pas répercutés de manière automatique sur les détaillants ou les utilisateurs finaux.

5.3.1.

De nombreux États européens ont déjà introduit avec succès de bonnes pratiques en matière de subsidiarité et d’accessibilité des produits énergétiques. L’une d’entre elles consiste à pouvoir déduire, dans la déclaration de revenus, le coût des produits énergétiques de classe supérieure. Toutefois, au-delà des bonnes pratiques nationales, sans aucun doute utiles et importantes, le CESE souhaite que l’Union européenne et le Conseil européen, en particulier, compte tenu de l’importance du défi de l’efficacité énergétique, donnent effectivement corps au principe de subsidiarité et s’efforcent d’instaurer une stratégie unique, afin d’associer tous les citoyens au processus de la «révolution énergétique».

5.4.

Le CESE estime que, à l’image du principe de la «conception pour tous», qui vise à concevoir des produits utilisables par tous, les étiquettes devront elles aussi être de plus en plus «compréhensibles pour tous», en accordant une attention particulière aux besoins des personnes handicapées.

5.5.

Le CESE déplore l’absence d’une stratégie spécifique pour le commerce en ligne, dont le chiffre d’affaires est en constante augmentation et qui, à ce jour, constitue l’un des secteurs où la comparabilité des produits et surtout la surveillance du marché apparaissent extrêmement complexes et difficiles. Comme l’a relevé l’observatoire MarketWatch, 23 % seulement des produits en ligne sont convenablement étiquetés. Cela représente un facteur de distorsion du marché qui engendre un préjudice évident pour les entreprises et les consommateurs.

5.5.1.

Le Comité fait observer que l’actuel règlement délégué (UE) no 518/2014 relatif à l’étiquetage des produits liés à l’énergie sur l’internet, qui est entré en vigueur le 1er janvier 2015, n’a pas été mis en relation de manière adéquate avec la nouvelle proposition de règlement. Ce règlement prévoit entre autres que seul l’étiquetage des nouveaux produits est obligatoire, celui des produits déjà en vente étant volontaire. En outre il n’aborde pas la question des «sites bazar», sur lesquels le consommateur achète souvent sans le savoir des produits mis en vente par des annonceurs tiers et qui ne sont pas tenus responsables de la publicité mensongère ou erronée qui est y faite concernant les produits en question.

5.6.

Le CESE constate que ni le système d’étiquetage actuel ni le nouveau système n’abordent la question des produits énergétiques «régénérés». Il estime à cet égard juste et nécessaire de réglementer la mise sur le marché de ces produits, en particulier ceux vendus dans des commerces spécialisés, afin de ne pas laisser de vides réglementaires et, surtout, afin de favoriser une meilleure intégration entre la directive sur l’écoconception et la communication de la Commission intitulée «Vers une économie circulaire» (12). Le CESE rappelle également ses prises de position passées contre l’«obsolescence programmée», par lesquelles il encourage la commercialisation de produits plus durables et résistants (13).

5.7.

Le CESE invite la Commission européenne à accorder une attention particulière aux produits importés de pays tiers, afin de protéger la production européenne contre d’éventuelles formes de concurrence déloyale. Le Comité demande plus particulièrement à la Commission de lancer une campagne d’information énergique contre la contrefaçon des étiquettes, de rendre leur falsification difficile, de renforcer les contrôles de conformité subjective et objective et, en cas de contrefaçon avérée, de sanctionner l’importateur en retirant le produit du marché.

5.8.

Le CESE souligne que l’éducation à l’achat et à l’utilisation éclairés des produits constituent des aspects déterminants pour la réalisation des objectifs que l’Union européenne s’est fixés en matière d’efficacité énergétique. C’est à juste titre que les États membres sont appelés à jouer un rôle clé au moyen de campagnes d’information et de sensibilisation ciblées. Le CESE plaide néanmoins en faveur d’une participation active de la société civile organisée, tant au niveau national qu’au niveau européen, en vue d’une communication plus efficace et généralisée (14), y compris auprès des différents détaillants.

5.8.1.

Le Comité soutient la proposition de la Commission relative à l’obligation de faire figurer, pour chaque produit, l’étiquette énergétique dans les annonces publicitaires ou, lorsque ce n’est pas possible, au moins la classe énergétique, afin de mieux informer et sensibiliser les consommateurs à un achat et à une utilisation responsables des produits énergétiques (15).

5.9.

Le CESE souligne l’opportunité de revoir certains aspects de la période transitoire nécessaire pour le «remaniement» du classement des produits. Le règlement prévoit en effet qu’à l’expiration du délai de six mois évoqué ci-dessus, une semaine soit suffisante pour passer d’un système de double étiquetage à un système où ne subsistent que des produits étiquetés conformément aux nouvelles règles. Ce laps de temps risquant d’être trop court et peu réaliste, il est demandé de le porter à 30 jours, délai habituellement accordé aux entreprises pour faire l’inventaire des produits.

5.10.

Le CESE invite la Commission à maintenir une approche plus prudente et mesurée en matière d’actes délégués. Il souhaite en particulier que les délégations soient claires et bien définies, que le contrôle du Parlement soit garanti et surtout que l’adoption des actes délégués soit toujours subordonnée à la consultation et à la participation effectives des États membres, du CESE et des parties prenantes (16).

5.11.

Le CESE est favorable à la création d’un forum consultatif ad hoc afin d’instaurer un dialogue structuré entre la Commission, les États membres et les acteurs concernés.

5.12.

Tout en jugeant approprié le délai de huit ans fixé pour le réexamen du cadre relatif à l’étiquetage, le CESE souhaite que ce cadre fasse l’objet d’une évaluation approfondie à mi-parcours, afin de s’assurer d’une manière globale de son impact et de l’état réel de sa mise en œuvre. Cette initiative est jugée d’autant plus appropriée que la proposition à l’examen vise à passer d’une directive à un règlement.

5.13.

Le Comité considère qu’il est essentiel de définir un mécanisme de remaniement clair et stable, afin que les remaniements qui seront rendus nécessaires par les avancées technologiques sur le marché soient économiques, précis et ne prêtent pas à controverse. À cet égard, il juge nécessaire de procéder à ce remaniement si cela est réellement nécessaire et uniquement lorsque les produits de la classe énergétique A représentent au moins 20 % du marché.

Bruxelles, le 20 janvier 2016.

Le président du Comité économique et social européen

Georges DASSIS


(1)  Réf.: COM(2015) 80 final.

(2)  Directive 2010/30/UE du Parlement européen et du Conseil du 19 mai 2010 concernant l’indication, par voie d’étiquetage et d’informations uniformes relatives aux produits, de la consommation en énergie et en autres ressources des produits liés à l’énergie (JO L 153 du 18.6.2010, p. 1 ).

(3)  Directive 2009/125/CE du Parlement européen et du Conseil du 21 octobre 2009 établissant un cadre pour la fixation d’exigences en matière d’écoconception applicables aux produits liés à l’énergie (JO L 285 du 31.10.2009, p. 10).

(4)  SWD(2015) 139.

(5)  COM(2015) 341 final, paragraphe 2.3 de l’«exposé des motifs».

(6)  COM(2015) 341 final, art. 7, par. 3.

(7)  COM(2015) 341 final, art. 4, par. 5.

(8)  Avis du CESE sur le thème «Écoconception/Produits consommateurs d’énergie», (JO C 112 du 30.4.2004, p. 25).

(9)  Avis du CESE sur le thème «Durée de vie des produits et information du consommateur», (JO C 67 du 6.3.2014, p. 23).

(10)  Avis du CESE sur le thème «L’internet des objets — Un plan d’action pour l’Europe», (JO C 255 du 22.9.2010, p. 116).

(11)  Avis du CESE sur le thème «Pour une action européenne coordonnée pour prévenir et combattre la pauvreté énergétique», (JO C 341 du 21.11.2013, p. 21).

(12)  COM(2014) 398 final. Avis du CESE sur le thème «Économie circulaire dans l’Union européenne», (JO C 230 du 14.7.2015, p. 91).

(13)  Voir note de bas de page 9.

(14)  Étude du CESE sur le rôle de la société civile dans la mise en œuvre de la directive sur les énergies renouvelables, coordonnateur général: M. RIBBE, janvier 2015.

(15)  COM(2015) 341 final, considérant 10 et article 3, par. 3, point a).

(16)  Avis du CESE sur le thème «Actes délégués», (JO C 13 du 15.1.2016, p. 145).


3.3.2016   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 82/13


Avis du Comité économique et social européen sur la «Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — Lancement du processus de consultation publique sur une nouvelle organisation du marché de l’énergie»

[COM(2015) 340 final]

(2016/C 082/03)

Rapporteur:

M. Lutz RIBBE

Le 15 juillet 2015, la Commission européenne a décidé, conformément à l’article 304 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la:

«Communication de la Commission au Parlement Européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — Lancement du processus de consultation publique sur une nouvelle organisation du marché de l’énergie»

[COM(2015) 340 final].

La section spécialisée «Transports, énergie, infrastructures, société de l’information», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 7 janvier 2016.

Lors de sa 513e session plénière des 20 et 21 janvier 2016 (séance du 20 janvier 2016), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 212 voix pour, 4 voix contre et 7 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1.

Le CESE accueille favorablement la communication et soutient nombre de ses propositions qui constituent une conséquence logique de la réflexion engagée au sujet de l’Union européenne de l’énergie.

1.2.

Les améliorations des marchés qui y sont présentées, y compris les marchés intrajournaliers, l’abrogation de règles produisant des effets de distorsion de concurrence, le pilotage de la demande et la création de signaux de prix exacts sont, sur un plan de principe, des mesures adéquates et importantes pour restructurer un marché de l’énergie qui, à l’avenir, doit être davantage orienté vers les spécificités des énergies renouvelables à production décentralisée et variable.

1.3.

Procurer aux entreprises et aux ménages un approvisionnement fiable en énergie (propre) à des prix abordables représente un fondement vital pour l’économie et les citoyens dans la société moderne. Le système énergétique est donc, par principe, l’affaire de la société dans son ensemble, et sa réalisation nécessite un équilibre bien calculé entre le marché et la réglementation. Jusqu’à présent, cet aspect n’a pas fait l’objet de discussions suffisantes au plan politique, y compris dans la communication à l’examen.

1.4.

L’objectif d’un approvisionnement énergétique qui présente une faible intensité en carbone et fasse la part belle à des sources d’énergie renouvelables à caractère modulable ne pourra être atteint à court ou à moyen terme que, d’une part, si tous les acteurs du marché, y compris ceux qui y sont apparus de fraîche date, ont à leur disposition suffisamment de possibilités de créer de la flexibilité, qu’il s’agisse, par exemple, de capacités adéquates de stockage, d’options de réglage de la demande souples et simples pour le consommateur, ou encore de technologies flexibles de production d’électricité, telles la production combinée de chaleur et d’électricité, et que, d’autre part, s’il existe des infrastructures de distribution de courant suffisamment développées et interconnectées, que les consommateurs bénéficient d’une information suffisante, prompte et correcte, qu’ils reçoivent la faculté d’exploiter leurs propres canaux de commercialisation de leur production et que les investissements nécessaires dans les technologies et lesdites infrastructures soient rentables, soit autant de conditions qui, aujourd’hui, ne sont pas réunies.

1.5.

Les signaux de prix sont importants dans la mesure où la transformation du système actuel va nécessiter des investissements considérables. Aux prix actuellement enregistrés sur les bourses, qui sont de 30 ou 40 EUR/MWh, les investissements ne sont pas susceptibles d’être refinancés, qu’ils concernent de nouvelles capacités de production électrique ou des technologies de stockage. Si ces prix de bourse peuvent être atteints, c’est uniquement parce qu’il circule sur le marché de grandes quantités d’électricité générées par des centrales électriques déjà amorties et que des subventions sont versées pour du courant produit à partir du charbon, de l’énergie nucléaire et de sources d’énergies renouvelables. Les prix enregistrés aujourd’hui en bourse ne reflètent donc même pas la structure réelle des coûts. Du fait des subventions et de la surréglementation, les prix boursiers de l’électricité fournissent une image faussée de son coût réel. Seuls des prix réalistes et transparents permettront de créer les signaux appropriés pour les gros investissements que nécessite la réorganisation du système existant.

1.6.

En conséquence, il est nécessaire d’adopter, pour la fixation des prix, des approches totalement novatrices, afin d’assurer une base économique au réseau de qualité nouvelle qui est souhaité, couvrant également le pilotage de la demande et le stockage. Une approche envisageable en la matière consisterait à davantage axer les composantes réglementaires sur les innovations souhaitées et à mieux évaluer la stabilité du système.

1.7.

Les prix devront dorénavant refléter l’intégralité des coûts réels de production, de distribution et d’élimination en lien avec l’électricité — et les externalités négatives, telles que l’empreinte en CO2, en font également partie. La formation des prix doit désormais s’effectuer de manière réaliste. Elle implique aussi que la Commission procède à des adaptations de son propre système d’aide et que les tarifs qui sont, aujourd’hui encore, fixés par l’État soient abolis. La Commission n’a pas encore présenté de conception cohérente en la matière.

1.8.

Le grand défi technique que le nouveau système énergétique doit relever réside avant tout en ce qu’à l’avenir, la distribution de l’énergie électrique ne s’effectuera plus selon un schéma organisé de manière centralisée, qui part des grosses centrales pour descendre jusqu’aux consommateurs, dans une «approche descendante», mais que désormais des «îlots de production et d’approvisionnement» vont émerger, qui s’appuieront sur de nombreuses sources d’énergie décentralisées, en partie fluctuantes et renouvelables, et devront être maillés en réseau, suivant une «approche ascendante», dans laquelle le pilotage de la demande, y compris par stockage, et la commercialisation à échelle locale et régionale sont amenés à jouer un rôle éminent.

1.9.

Le CESE a souligné à plusieurs reprises que ces nouveaux systèmes énergétiques plus décentralisés ouvrent des perspectives dont la portée va bien au-delà du souci de susciter l’adhésion de l’opinion publique en faveur des modifications structurelles qui s’imposent et des indispensables investissements (1): c’est également du point de vue des économies régionales que de nouvelles ouvertures et possibilités de création de valeur peuvent se dessiner en dehors des structures qui nous étaient familières jusqu’à présent. Grâce aux nouvelles technologies, il est désormais possible de combiner d’une manière novatrice développement régional et politique énergétique. En outre, les îlots de production maillés en réseau aboutissent à améliorer l’état de sécurité du dispositif du point de vue des attaques dont les infrastructures sensibles peuvent faire l’objet.

1.10.

Par conséquent, la Commission se doit de réfléchir à partir de l’infrastructure énergétique nécessaire et de modeler le système d’échanges en ce sens, au lieu de tenter de concevoir les adaptations qu’il serait nécessaire d’apporter à ladite infrastructure énergétique de manière à ce qu’elle soit compatible avec ce dispositif de transactions tel. qu’il existe aujourd’hui. Elle doit aussi examiner avec les opérateurs du marché les modifications de l’infrastructure énergétique et du système d’échanges susceptibles de créer les conditions pour offrir une énergie qui soit plus diversifiée, souple, axée sur le consommateur et efficace par rapport à ses coûts qu’elle ne l’est aujourd’hui.

1.11.

Non content de saluer les déclarations de la Commission concernant la nouvelle diversité des acteurs, le CESE considère même que la participation active des consommateurs, c’est-à-dire les entreprises, les citoyens, les régies municipales, etc., est essentielle pour la production et la commercialisation directe, à l’échelle locale ou régionale. Lorsque des entreprises, des citoyens ou des services municipaux décident aujourd’hui d’exploiter des potentiels énergétiques présents au niveau local ou régional, par exemple sous la forme d’équipements solaires ou éoliens gérés par la communauté, il conviendrait de leur conférer la capacité de commercialiser beaucoup plus facilement qu’aujourd’hui, directement et sans encombre, l’énergie ainsi produite, sans l’intervention de bourses ou d’opérateurs de marché. Or, sur ce point aussi, le texte de la Commission laisse ouvertes nombre de questions.

1.12.

La Commission a souligné à maintes reprises que les énergies renouvelables se heurtent, aujourd’hui comme hier, à des obstacles qu’il convient de démanteler et que ces sources d’énergie doivent bénéficier d’un soutien qui respecte les règles du marché et soit régionalisé. Tel est également le point de vue que défend le CESE. Il souligne toutefois qu’étendre le marché et réduire la réglementation ne permettront pas en soi d’augmenter la production d’énergie renouvelable. Malheureusement, la communication de la Commission qui fait l’objet du présent avis n’indique pas quelles sont ses conceptions précises à ce propos.

2.   Synthèse et contexte de la communication de la Commission

2.1.

La mise en place d’une Union de l’énergie résiliente, soutenue par une politique climatique clairvoyante, compte parmi les objectifs stratégiques qui figurent dans les orientations politiques de la Commission Juncker.

2.2.

Cette ambition a été confirmée dans le programme de travail de la Commission pour 2015 (2) et est décrite plus en détail dans le cadre stratégique pour une Union de l’énergie résiliente, dotée d’une politique clairvoyante en matière de changement climatique (3): outre un approvisionnement en énergie fiable et d’un prix abordable, l’enjeu est de créer un système énergétique durable et sans incidence sur le climat, placé sous le signe d’une concurrence intensive et de l’innovation. La stratégie-cadre met tout particulièrement en avant le rôle actif des citoyens dans le remodelage du système énergétique. La transformation du marché de l’énergie, en particulier celui de l’électricité, constitue une étape importante dans la réalisation de ces objectifs.

2.3.

Le processus de consultation publique lancé par la communication de la Commission à l’examen a pour but de contribuer à venir à bout d’une série d’obstacles considérables qui s’opposent à la mise en place d’un système énergétique durable.

2.4.

La Commission européenne établit un rapport entre ces défis et le constat que le «concept actuel de marché remonte à une époque à laquelle, d’une part, de grandes unités de production d’électricité centralisées, en grande partie alimentées par des combustibles fossiles, avaient pour but premier d’approvisionner, sans limiter la demande, tous les foyers et toutes les entreprises d’une zone limitée, en général un État membre et, d’autre part, les consommateurs (ménages, entreprises et industrie) étaient considérés comme passifs». La Commission appelle de ses vœux une «modification fondamentale du système énergétique européen», grâce à laquelle une production d’électricité plus décentralisée reposera dans une large mesure sur des sources d’énergie intermittentes, un nombre toujours plus grand d’acteurs participeront au marché, en assumant des rôles évolutifs, et la modulation de la demande fera partie des nouveaux grands impératifs à respecter.

2.5.

La Commission mentionne les défis spécifiques suivants:

la fixation des prix et les mesures d’incitation aux investissements sur des marchés fragmentés,

la persistance de réglementations nationales en matière de prix et d’accès au marché, ainsi que d’autres interventions sur le marché qui sont effectuées dans les États membres,

le manque de souplesse dont souffrent les marchés, côté offre comme côté demande, vis-à-vis de l’expansion des énergies renouvelables et du principe de l’«efficacité énergétique avant tout»,

l’insuffisance des possibilités dont disposent les citoyens pour s’approprier l’avenir énergétique.

2.6.

S’agissant de maîtriser ces exigences, la Commission recense un certain nombre de mesures:

la mise en place d’un marché à court terme souple et transfrontalier pour les échanges d’électricité («marché intrajournalier»),

la fixation de signaux de prix à long terme, par le truchement du marché européen du carbone,

le parachèvement de l’interconnexion entre les infrastructures,

la promotion des sources d’énergie renouvelables selon des modalités qui respectent le marché et soient régionalisées,

l’établissement d’un lien entre le commerce de gros et le marché de détail en vue de renforcer le signal de prix pour les utilisateurs finaux,

la suppression des régulations de prix sur le marché de détail et des entraves à l’accès au marché pour les agrégateurs et les autres acteurs du marché,

la coordination régionale de la politique énergétique,

le développement d’une démarche européenne et régionale pour coordonner les régulateurs de marché et les opérateurs de réseau,

l’harmonisation des méthodes utilisées pour évaluer si les systèmes énergétiques sont en adéquation avec la sécurité nationale et européenne de l’approvisionnement,

l’élaboration d’un cadre pour la mise en place de mécanismes transfrontaliers en matière de capacités.

3.   Observations générales

3.1.

Pour atteindre les objectifs de l’Union européenne de l’énergie, de nombreux changements seront nécessaires: il y a notamment lieu, comme le souligne la Commission, de procéder à une réorientation majeure de l’organisation du marché de l’électricité.

3.2.

Ces changements n’arriveront à susciter une adhésion suffisante dans la collectivité qu’à la double condition: a) que l’on parvienne à mettre en place un processus intensif et bien organisé de consultation avec les parties intéressées et la société civile et b) que celles-ci soient considérées non seulement comme des instances à consulter, mais comme des partenaires agissants à part entière.

3.3.

Dans l’étude qu’il a consacrée à l’évaluation du processus de consultation des parties prenantes par la Commission européenne (4), le CESE a exposé sous quel aspect ce processus pourrait se présenter et il renvoie par ailleurs à son initiative de «dialogue européen sur l’énergie».

3.4.

Les améliorations des marchés qui sont présentées, y compris les marchés intrajournaliers, l’abrogation de règles qui produisent des effets de distorsion de concurrence et créent des obstacles, le pilotage de la demande et la création de signaux de prix exacts sont des mesures adéquates et importantes pour la restructuration d’un marché de l’énergie qui, à l’avenir, doit être davantage orienté vers les spécificités des énergies renouvelables à production variable. C’est seulement dans ces conditions qu’il sera possible d’atteindre les objectifs de l’Union européenne de l’énergie, dont le CESE s’est félicité, et de garantir aux ménages comme aux entreprises un approvisionnement en électricité présentant un bon rapport coût-efficacité, respectueux de l’environnement, sûr et abordable.

3.5.

Le CESE souligne la fonction d’une importance toute particulière qu’assure le commerce intrajournalier pour organiser des échanges judicieux de volumes d’électricité issue des énergies renouvelables à production variable.

3.6.

Le CESE se félicite que la communication décrive à nouveau les grands principes du «nouveau système énergétique». Il considère qu’il s’agit là d’un signal adéquat à l’adresse de tous les acteurs du marché et de la société dans son ensemble. Parmi ces éléments figurent:

le principe de l’«efficacité énergétique avant tout»,

la visée d’un approvisionnement en énergie exempt de sources fossiles (5),

la reconnaissance qu’à l’avenir, la production électrique s’effectuera de manière beaucoup plus décentralisée, à partir de sources qui produisent de manière fluctuante,

l’importance de la modulation de la demande et du stockage dans le système énergétique de demain,

l’acceptation du constat que le rôle des utilisateurs est en train d’évoluer vers une configuration où ils seront des consommateurs actifs, ainsi que des producteurs et des prestataires de services en faveur du système (6).

3.7.

Procurer aux entreprises et aux ménages un approvisionnement fiable en énergie propre à des prix abordables représente un fondement vital pour l’économie et les citoyens dans la société moderne. Le système énergétique est donc, par principe, l’affaire de la société dans son ensemble, et sa réalisation nécessite un équilibre bien calculé entre le marché et la réglementation. Cet aspect n’a pas fait jusqu’à présent l’objet de discussions suffisantes au plan politique, y compris dans la présente communication. Par exemple, la question de savoir s’il ne serait pas préférable pour les réseaux de transport et de distribution, à l’instar des autoroutes, de celui du rail ou de l’adduction d’eau, d’être subordonnés à la puissance publique, ne se décide certes pas à Bruxelles mais il est néanmoins possible qu’un débat y soit organisé à ce sujet. La politique énergétique implique de fixer un cadre général clair et une surveillance réglementaire. Cet impératif s’étend également à la protection des consommateurs et des groupes sociaux vulnérables.

3.8.

Le CESE souhaiterait s’abstenir de commenter ici de manière positive les nombreuses mesures adéquates présentées par la Commission, dont sa position critique à l’égard des réserves de capacités: il s’emploiera plutôt à approfondir la réflexion sur certains éléments que sa communication lui semble négliger, ou qu’elle n’apprécie pas comme ils le mériteraient.

4.   Observations particulières

4.1.

Le CESE partage pleinement le point de vue de la Commission quand elle estime qu’«une transformation totale du système énergétique de l’Europe» est indispensable. Cependant, les solutions exposées dans la communication ne constituent pas tant, de l’avis du Comité, une «transformation totale» qu’elles ne consistent à adapter ou compléter le système actuel.

4.2.

Le CESE souhaite en particulier faire observer qu’une «transformation totale» ne peut se réduire à réunir les systèmes nationaux en un réseau européen, réformer les marchés et systèmes existants et augmenter de manière significative la part des énergies renouvelables: l’enjeu consiste bien plutôt à concevoir et bâtir un tout nouveau système énergétique, qui fasse place à un éventail d’intervenants plus étendu et décentralisé. Cet impératif implique non seulement de réaliser une évaluation des systèmes actuels de transport et de distribution de l’électricité mais également de les asseoir sur une infrastructure neuve, plus prometteuse d’un point de vue technique. Ce réseau nouvellement créé se caractériserait donc par des structures de production, d’interconnexion et de commercialisation totalement nouvelles et plus diversifiées, nos actuelles sources d’énergie classiques n’y jouant qu’un rôle de soudure.

4.3.

L’objectif d’un approvisionnement énergétique qui soit dépourvu de carbone et fasse la part belle à des sources d’énergie modulables ne pourra être atteint, à court ou à moyen terme, qu’à la condition de respecter tous les préalables suivants:

a)

si tous les acteurs du marché, y compris ceux qui y sont apparus de fraîche date, ont à leur disposition suffisamment de possibilités de créer de la flexibilité, qu’il s’agisse, par exemple, de capacités adéquates de stockage, d’options de réglage de la demande souples et simples pour le consommateur, ou encore de technologies flexibles de production d’électricité, telles la production combinée de chaleur et d’électricité à haut rendement,

b)

si les consommateurs bénéficient d’une information suffisante, prompte et correcte,

c)

s’ils bénéficient de la faculté d’exploiter leurs propres canaux de commercialisation de leur production,

d)

s’il existe des infrastructures de distribution de courant suffisamment développées et interconnectées,

e)

si les investissements nécessaires dans les technologies et lesdites infrastructures sont rentables,

soit autant de conditions qui, aujourd’hui, ne sont pas réunies.

4.4.   Signaux de prix et mesures d’incitation à l’investissement

4.4.1.

La Commission souligne l’importance des signaux de prix, qui doivent: a) encourager les consommateurs à jouer un rôle actif sur le marché de l’énergie et b) créer des incitations qui poussent les entreprises à investir dans de nouvelles technologies énergétiques à faibles émissions de carbone. De tels signaux de prix sont importants dans la mesure où la transformation du système actuel va nécessiter des investissements considérables. Aux prix actuellement enregistrés sur les bourses qui se situent aujourd’hui à 30 ou 40 EUR/MWh et sont naturellement intéressants pour le consommateur, pour autant qu’il en bénéficie, les investissements ne sont pas refinançables, et ce, qu’ils concernent de nouvelles capacités de production électrique ou des technologies de stockage. Si ces prix de bourse peuvent être atteints, c’est uniquement parce qu’il circule sur le marché de grandes quantités d’électricité générées par des centrales électriques déjà amorties et que des subventions élevées sont versées pour du courant produit à partir du charbon, de l’énergie nucléaire et de sources d’énergies renouvelables. Les prix enregistrés aujourd’hui en bourse ne reflètent donc pas la structure réelle des coûts. Du fait des subventions et de la surréglementation, les prix boursiers de l’électricité fournissent une image faussée de son coût réel. Seuls des prix réalistes et transparents permettront de créer les signaux appropriés pour les gros investissements que nécessite la réorganisation du système existant.

4.4.2.

La communication de la Commission n’apprécie pas suffisamment les implications de la structure de coûts particulière que présentent les énergies renouvelables: lorsqu’elles parviennent, tout comme les accumulateurs électriques, à un coût marginal nul, les marchés de gros n’envoient plus aucun signal de prix positif. Cette situation a une double conséquence. D’une part, si aucun signal n’émane des prix de gros de l’électricité pour l’affectation à court terme du courant, il y a lieu d’en émettre par d’autres mécanismes, par exemple au moyen de subventions. D’autre part, des coûts marginaux nuls nécessitent des mécanismes de refinancement complètement nouveaux pour les énergies renouvelables à production variable, ainsi que pour les accumulateurs électriques.

4.4.3.

En conséquence, il est nécessaire d’adopter, pour la fixation des prix, des approches totalement novatrices, afin d’assurer une base économique au réseau de qualité nouvelle qui est souhaité, couvrant également le pilotage de la demande et le stockage. L’une des approches possibles consisterait à envisager d’engager une refonte des composantes réglementées du prix facturé à l’utilisateur final, notamment en ce qui concerne la taxe sur l’électricité et les redevances d’utilisation du réseau. Il y a lieu d’étudier une réorganisation du financement des frais généraux dans le système énergétique.

4.4.4.

Pour que les prix reflètent avec précision la totalité des coûts de la fourniture d’électricité, le CESE souhaiterait que la Commission s’attache à assurer qu’ils présentent une transparence élevée, dans le cadre d’une approche harmonisée au niveau de l’Union. Les coûts déclarés et susceptibles d’être comparés devraient refléter l’intégralité de ceux qu’induisent réellement les opérations de production, de distribution et d’élimination nécessaires en matière d’électricité. Pour les établir, il faudrait également prendre en considération les externalités négatives, telles que l’empreinte en CO2, ainsi que les subventions. Sur ce point, le CESE renvoie à des avis (7) et déclarations qu’il a effectués antérieurement et persiste à demander instamment à la Commission de tenir sa promesse d’internaliser intégralement dans les prix de l’énergie l’ensemble des coûts, y compris externes, allant de la production à l’élimination, et de ne pas tolérer que les différentes sources d’énergie se fassent concurrence à coups de subventions, qu’elles soient directes ou indirectes.

4.4.5.

Indépendamment de cette question des coûts réels, les conditions-cadre doivent être modelées de telle manière que les prix parviennent également à tenir compte tout à la fois des prestations fournies et de l’évitement d’émissions dommageables pour le climat, ou des créations d’emplois de haute qualité qui seront requises. Les tarifs pratiqués doivent traduire l’existence de plages caractérisées par une offre élevée et une demande faible et d’autres où, à l’inverse, l’électricité est très demandée alors qu’elle n’est offerte que plus chichement. Les adaptations souhaitées par la Commission, telles que le pilotage de la demande ou un fonctionnement plus souple des centrales électriques et des capacités de stockage, ne pourront se produire que si les prix reflètent toute la vérité des coûts et des performances et que les baisses de coûts sont répercutées dans leur intégralité jusqu’au consommateur final.

4.4.6.

Le CESE est d’accord avec l’analyse de la Commission estimant qu’il y a lieu de démanteler les tarifs réglementés. C’est emprunter la bonne voie que de permettre aux prix de se former librement — à la hausse comme à la baisse. Cette façon de procéder déclenche les nécessaires réactions de la part du marché et préserve les options de flexibilité, telles que la gestion de la demande et les dispositifs de stockage. Le CESE considère qu’en prescrivant qu’aucune subvention ne peut être versée pour les périodes où le prix de l’électricité est négatif, les lignes directrices sur les aides d’État commettent une énorme ingérence sur les marchés, au préjudice exclusif des énergies renouvelables, et favorisent ainsi des technologies nocives qui ont des coûts marginaux plus élevés. Les aides actuelles représentent une compensation pour les déficiences enregistrées dans le fonctionnement des signaux de prix, qui sont dues en particulier à une mauvaise internalisation des coûts externes. La Commission européenne peut remédier elle-même à cette situation, en réformant ses orientations en la matière. Le CESE escompte, de la part de la Commission, une proposition permettant à la fois de lutter contre les causes des prix négatifs et de rendre les aides durablement superflues.

4.4.7.

Entre autres questions, le document de la Commission évoque également la nécessité d’améliorer le système d’échanges de droits d’émission. Le CESE a émis un avis spécifique à ce sujet (8). Il souligne toutefois que, même si ce dispositif est soumis à une réforme drastique, les prix n’intégreront que certaines composantes des coûts externes imputables aux sources d’énergies fossiles. Le Fonds monétaire international (FMI) chiffre à un total de 330 milliards de dollars (USD) par an les subventions qui sont octroyées à ces énergies fossiles et il les taxe d’inefficacité, car elles entravent l’innovation, grèvent les budgets, sont socialement injustes et ont un effet catastrophique du point de vue de la politique de l’environnement (9).

4.4.8.

Aucune nouvelle organisation de marché, si excellente soit-elle, ne peut compenser les faux signaux qui sont ainsi émis en matière de prix et les problèmes qui en découlent.

4.4.9.

La Commission souligne certes à maintes reprises que les énergies renouvelables se heurtent, aujourd’hui comme hier, à des obstacles qu’il convient de démanteler et que ces sources d’énergie doivent bénéficier d’un soutien qui respecte les règles du marché et soit régionalisé. Tel est également le point de vue que défend le CESE. Néanmoins, la communication à l’examen ne fournit malheureusement que bien trop peu d’indications quant à la nature exacte des conceptions de la Commission dans ce domaine.

4.5.   Échanges d’électricité

4.5.1.

Le titre de la communication de la Commission parle d’«une nouvelle organisation du marché de l’énergie». Pourtant, le texte ne traite presque exclusivement que des réformes qui sont envisageables et jugées indispensables dans le domaine des réseaux électriques et des marchés et échanges commerciaux concernant l’électricité. Au chapitre 5, il est même fait état d’une «communication consultative sur l’organisation du marché de l’électricité».

4.5.2.

Cette focalisation marquée sur le réseau électrique et le marché de l’électricité ne permet pas de donner toute la place qu’il mériterait au véritable défi, considérable, auquel l’Europe se trouve confrontée en matière de politique énergétique. Les secteurs de la production de chaleur et des transports doivent être plus fortement associés aux débats, étant donné qu’on peut prévoir qu’à l’avenir, il existera entre les trois domaines des interconnexions nettement plus importantes, qui ouvriront de nouvelles perspectives et atténueront certains problèmes, à l’instar du chauffage par l’éolien, de la conversion de l’électricité en gaz (hydrogène) ou de la mobilité électrique.

4.5.3.

Une convergence des secteurs de l’électricité, du chauffage et de la mobilité est bien plus facile à réaliser dans des systèmes d’alimentation électrique qui sont organisés de manière décentralisée que leur équivalent centralisé. En effet, la chaleur et la mobilité sont décentralisées par nature et, partant, elles se prêtent mieux à être utilisées comme instruments de flexibilisation pour l’électricité lorsque celle-ci peut également faire l’objet d’une commercialisation décentralisée et directe. C’est pourquoi la transformation du marché de l’électricité constitue une entreprise étroitement liée au développement des possibilités qui sont ménagées pour la commercialisation décentralisée de l’électricité produite à partir d’énergies renouvelables à production variable et dans lesquelles doivent également figurer des applications en rapport avec la chaleur et la mobilité.

4.5.4.

Pour ce qui est du marché de l’électricité, la Commission formule de nombreuses propositions concernant de nouvelles structures à créer dans le système de négoce existant, prenant essentiellement la forme d’échanges au sein de bourses. Bien évidemment, il est souhaitable et important que le commerce de l’énergie, tel qu’il existe aujourd’hui, revête une plus grande diversité, à l’échelon local, régional, national ou européen mais les bourses et les opérateurs de marché ne peuvent en aucun cas être les uniques vecteurs de toutes les évolutions. Or, la Commission n’aborde pas cette question.

4.5.5.

Lorsque des entreprises, des citoyens ou des services municipaux décident aujourd’hui d’exploiter des potentiels énergétiques présents au niveau local ou régional, par exemple sous la forme d’équipements solaires ou éoliens gérés par la communauté, il conviendrait de leur conférer la capacité de commercialiser beaucoup plus facilement qu’aujourd’hui, directement et sans encombre, l’énergie ainsi produite, sans l’intervention de bourses ou d’opérateurs de marché.

4.5.6.

Toutefois, on ne trouve encore guère de propositions sur la manière dont il convient de soutenir les nouvelles formes d’utilisation directe et décentralisée ou les modalités de commercialisation locale en direct (d’entreprise à entreprise) dont on peut discerner l’émergence; les formules locales d’échanges et les alternances dans les types d’énergie (stockage) constituent des problématiques qui sont tout aussi peu abordées.

4.6.   Structures du marché et production décentralisée

4.6.1.

La communication de la Commission parle tantôt d’«intégrer les énergies renouvelables dans le système électrique», tantôt de la nécessité d’«adapter l’organisation du marché aux énergies renouvelables» ou, ailleurs encore, de «préparer le marché aux énergies renouvelables». Le CESE souhaite préciser que selon lui, l’enjeu essentiel ne consiste pas à «intégrer» les énergies renouvelables dans le système d’alimentation électrique tel qu’il existe aujourd’hui, encore qu’à long terme, ces types d’énergie devront y jouer un rôle central.

4.6.2.

Le grand défi technique que ce nouveau système énergétique doit relever consiste avant tout, comme la Commission devrait le souligner davantage encore dans le processus de consultation, en ce qu’à l’avenir, la distribution de l’énergie électrique ne s’effectuera plus selon un schéma organisé de manière centralisée, qui part des grosses centrales pour descendre jusqu’aux consommateurs dans une «approche descendante» mais que désormais des «îlots de production et d’approvisionnement» vont émerger, qui s’appuieront sur de nombreuses sources d’énergie décentralisées, en partie fluctuantes et renouvelables, et devront être maillés en réseau, suivant une «approche ascendante», dans laquelle le pilotage de la demande, y compris par le stockage, est amené à jouer un rôle important.

4.6.3.

Dans la logique de la nouvelle diversité des acteurs qui est souhaitée, cette mutation impliquera qu’à côté des structures classiques de négoce, notamment de gros, il conviendra d’établir également des formes de commercialisation et des systèmes de gestion énergétique qui seront totalement inédits, de type décentralisé.

4.6.4.

Aujourd’hui, des vagues d’innovation, concernant les technologies de l’information et de la communication, les dispositifs de stockage et le système de distribution aussi bien que les techniques de construction des bâtiments ont suscité l’émergence de nombreux «îlots de production et d’approvisionnement» de ce type, qui, voici quelques années encore, auraient paru inimaginables. Des particuliers, des entreprises, des groupements, comme des coopératives de producteurs d’énergie, ou encore des communes, sous la forme de services municipaux, se sont dotés de certains équipements partiellement ou totalement autonomes qui les ont rendus bien moins dépendants des offres et des flux commerciaux traditionnels, lesquels sont eux-mêmes devenus plus flexibles. Il est important de saisir ce parallélisme entre évolutions techniques ou technologiques et sociales ou sociologiques. Les deux vont dans le même sens, celui d’une plus grande autonomie et d’entités formant des réseaux autoréglementés et plus décentralisés.

4.6.5.

Cette évolution s’enclenche tout en bas de l’échelle: on assiste dès à présent au développement de structures entièrement nouvelles, à l’exemple des systèmes photovoltaïques. Voici cinq ans environ, l’autoconsommation d’électricité photovoltaïque était encore dénuée de tout intérêt, économiquement parlant: l’électricité produite était simplement injectée dans le réseau. La situation a totalement changé depuis lors: aujourd’hui, pour des raisons économiques, aucune installation photovoltaïque n’est plus mise en service sur un toit sans qu’il ne soit prévu que sa production électrique soit autoconsommée dans toute la mesure du possible, de sorte que la demande pour les technologies de stockage augmente et qu’en conséquence, leur développement se poursuit. De ce fait, ces nouvelles installations photovoltaïques contribuent à soulager le réseau ou à l’équilibrer. C’est ainsi que dans le contexte de la mobilité électrique telle qu’elle se dessine, ou d’une production d’électricité combinée avec celle de chaleur, des possibilités supplémentaires et décentralisées d’une totale nouveauté s’ouvrent au consommateur pour produire de l’électricité et l’utiliser.

4.6.6.

Or, les utilisateurs qui, générant et consommant leur propre électricité, souhaitent faire profiter leurs voisins de leurs éventuels surplus ne constituent plus des «parties prenantes actives» du marché au sens traditionnel. Malheureusement le document de la Commission n’explique pas de quelle manière il conviendrait de modifier concrètement l’encadrement général afin d’encourager ce type de structures.

4.6.7.

De même, il n’expose pas dans une mesure suffisante quels sont les obstacles concrets sur lesquels les énergies renouvelables continuent de buter encore et toujours.

4.6.8.

Le CESE a souligné à plusieurs reprises que ces nouveaux systèmes énergétiques plus décentralisés ouvrent des perspectives dont la portée va bien au-delà du souci de susciter l’adhésion de l’opinion publique en faveur des modifications structurelles qui s’imposent et des indispensables investissements: c’est également du point de vue des économies régionales que de nouvelles ouvertures et possibilités de création de valeur peuvent se dessiner en dehors des structures qui nous étaient familières jusqu’à présent. Grâce aux nouvelles technologies, il est désormais possible de combiner d’une manière novatrice développement régional et politique énergétique, ainsi que d’améliorer sensiblement la situation au regard des exigences de sécurité accrues qui sont imposées aux infrastructures sensibles.

4.6.9.

Le renforcement de la production locale et la commercialisation directe mériteraient déjà d’être saluées au seul motif qu’elles limitent les pertes de réseau. L’Agence fédérale allemande des réseaux déclare à ce sujet (10) que «la transformation du système énergétique n’aura évidemment de perspectives optimales de succès que si tous les acteurs intéressés coopèrent entre eux. […] Nous devrions favoriser les approches qui ont pour effet que l’énergie soit, le plus possible, consommée là où elle est produite. Tel est d’ailleurs le principe sur lequel la fourniture de courant a toujours reposé, car il réduit au maximum les pertes de réseau.»

4.6.10.

Par conséquent, la Commission se doit de réfléchir à partir de l’infrastructure énergétique souhaitée et modeler le système d’échanges en ce sens, au lieu de tenter de concevoir les adaptations qu’il serait nécessaire d’apporter à ladite infrastructure énergétique de manière à ce qu’elle soit compatible avec ce dispositif de transactions tel qu’il existe aujourd’hui.

4.6.11.

Il convient toutefois de prendre également en considération l’expérience de nombreux pays, dans lesquels certains acteurs du marché, tels que les investisseurs stratégiques, ont délibérément choisi certaines branches au sein du secteur de la production d’énergie dans le seul but de maximiser leurs bénéfices, tout en refusant d’investir dans la sécurité d’approvisionnement, l’innovation et la maintenance, répercutant ces coûts sur leurs consommateurs.

4.7.   Coopération régionale et mise en réseau européenne des régulateurs et gestionnaires de réseau

4.7.1.

Une nouvelle politique énergétique européenne ne peut toutefois avoir pour objectif de créer le plus grand nombre possible de zones d’approvisionnement autarciques et, donc, coupées du réseau. Son but doit être, bien au contraire, tout en créant le plus grand nombre possible de ces îlots de production et d’approvisionnement efficaces, compétitifs et proches du consommateur, de les connecter à un regroupement européen. Cette action devrait notamment s’effectuer en considération d’un contexte où l’UE a pour tâche de garantir la sécurité énergétique, alors que la mission spécifique d’assurer la fourniture d’énergie relève de la responsabilité communale ou, le cas échéant, régionale.

4.7.2.

Dès lors que les conditions générales seront réunies et que les bons signaux de prix auront été émis, il sera possible de créer un grand nombre de ces petites unités, qui représenteront une solution idéale, d’un point de vue économique, pour l’autoproduction et l’autoconsommation, mais qui devront être connectées aux réseaux voisins ou d’échelon supérieur, afin, par exemple, de fournir une énergie d’équilibrage positive ou négative.

4.7.3.

Au sein de ces systèmes mais également au niveau supérieur, le pilotage de la demande est amené à assumer une fonction primordiale; le CESE considère que les technologies de stockage en font partie intégrante. Les dispositifs de stockage vont jouer un rôle important dans le réseau, car, d’un point de vue technique, ils seront des deux côtés de la barrière, étant tout à la fois des consommateurs et des producteurs contre-cycliques.

4.7.4.

Les gestionnaires nationaux de réseaux, les autorités de régulation de chaque pays et l’UE ont une tâche importante à assumer pour susciter et préserver cette grande diversité d’acteurs, créer des conditions de concurrence loyale et coordonner les dispositifs. En effet, les systèmes de fourniture d’énergie de demain devront disposer d’une structure de gestion énergétique bien coordonnée à l’échelon européen, assez comparable au mécanisme gérant le trafic aérien, qui possédera une vue d’ensemble sur les situations de chacun des «îlots de production et d’approvisionnement», et pourra détecter les perturbations qui l’affecteront éventuellement. Dans les situations exceptionnelles, il sera ainsi possible d’intervenir, de manière automatique ou manuelle, afin d’assurer la stabilité du réseau ou la sécurité.

4.7.5.

Cette coopération ne peut fonctionner que si l’on dispose de réseaux de transport et de distribution bien développés et organisés de manière optimale. À cette fin, étant donné que, comme évoqué ci-dessus, les incitations à l’investissement déclenchées par les prix sont insuffisantes, il s’impose que les ressources publiques, telles que le mécanisme pour l’interconnexion en Europe, soient utilisées dans une plus large mesure pour créer des réseaux électriques transfrontières plutôt que de cibler, par exemple, des infrastructures pétrolières ou gazières.

4.7.6.

Les gestionnaires de réseau doivent, et sur ce point, le CESE partage l’avis de la Commission, «avoir un rôle neutre de facilitateurs du marché pour permettre la mise au point de services fondés sur le marché fournis par des tiers aux consommateurs». Il conviendrait que la Commission expose plus clairement quels sont les éléments qu’elle envisage de modifier pour parvenir à cet objectif et qu’elle définisse plus précisément les rôles et devoirs des gestionnaires de réseaux de distribution mais aussi des instances de régulation.

Bruxelles, le 20 janvier 2016.

Le président du Comité économique et social européen

Georges DASSIS


(1)  Voir l’étude du CESE «Changer l’avenir énergétique — étude du CESE sur le rôle de la société civile dans la mise en œuvre de la directive sur les énergies renouvelables» (EESC-2014-04780-00-04-TCD-TRA).

(2)  COM(2014) 910 final, 16.12.2014.

(3)  COM(2015) 80 final, 25.2.2015.

(4)  JO C 383 du 17.11.2015, p. 57.

(5)  Voir COM(2011) 885 final.

(6)  Voir TEN/578, «Une nouvelle donne pour les consommateurs d’énergie» — voir page 22 du présent Journal officiel.

(7)  Voir notamment JO C 226 du 16.7.2014, p. 1.

(8)  Voir JO C 424 du 26.11.2014, p. 46.

(9)  Voir le document de travail du FMI, «How Large Are Global Energy Subsidies?» («Quel montant représentent les subventions à l’énergie dans le monde?») (WP/15/105), mai 2015.

(10)  «“Smart Grid” und “Smart Market”: Eckpunktepapier der Bundesnetzagentur zu den Aspekten des sich verändernden Energieversorgungssystems» («Réseau intelligent et marché intelligent: document d’orientation de l’Agence fédérale allemande des réseaux sur l’évolution du système de distribution d’énergie»), décembre 2011, p. 42.


3.3.2016   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 82/22


Avis du Comité économique et social européen sur la «Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — Une nouvelle donne pour les consommateurs d’énergie»

[COM(2015) 339 final]

(2016/C 082/04)

Rapporteur:

Lutz RIBBE

Le 14 octobre 2015, la Commission européenne a décidé, conformément à l’article 304 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la:

«Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — Une nouvelle donne pour les consommateurs d’énergie»

[COM(2015) 339 final].

La section spécialisée «Transports, énergie, infrastructures, société de l’information», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 7 janvier 2016.

Lors de sa 513e session plénière des 20 et 21 janvier 2016 (séance du 20 janvier 2016), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 209 voix pour, 4 voix contre et 6 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1.

Le CESE se félicite de l’analyse de la Commission et soutient fermement les propositions de cette dernière. Il est grand temps de mettre le consommateur au centre de la politique énergétique européenne et de lui donner toutes les possibilités d’y participer activement.

1.2.

Dans sa communication, la Commission évoque les «obstacles empêchant les consommateurs d’autoproduire et d’autoconsommer», qui constituent un problème à résoudre d’urgence, mais elle ne décrit hélas pas suffisamment où et comment ces obstacles apparaissent dans la pratique, ni ce qu’il convient concrètement de faire pour les éliminer. Le Comité recommande à la Commission d’élaborer un document spécifique à cet égard.

1.3.

Le CESE juge judicieuse la démarche adoptée par la Commission, qui consiste à reconnaître, à prendre davantage en compte et à promouvoir l’ancrage local, ainsi qu’à renforcer l’intégration des acteurs de marché locaux.

1.4.

La question de l’organisation des systèmes énergétiques revêt une importance stratégique. Une concurrence portant sur la mise en place du système global le plus efficace est nécessaire, ce qui va bien au-delà de la production et de la mise sur le marché classique.

1.5.

La modulation de la demande jouera un rôle central. Tout d’abord, il convient entre autres d’établir, y compris du côté des consommateurs, les conditions techniques préalables (compteurs et réseaux «intelligents»), lesquelles doivent être prises en considération et financées dans le cadre du déploiement du réseau.

1.6.

Grâce aux systèmes de modulation de la demande, les consommateurs devraient pouvoir faire plus qu’adapter simplement leur consommation énergétique et, ainsi, économiser de l’argent. La Commission mentionne à très juste titre que «[l]a combinaison des options de stockage et de production décentralisés avec la flexibilité de la demande peut en outre permettre aux consommateurs de devenir leurs propres fournisseurs et gestionnaires pour (une partie de) leurs besoins en énergie, de se transformer en producteurs-consommateurs et de réduire leurs factures énergétiques» (1) (référence aux «prosommateurs»).

1.7.

Il y a lieu d’élaborer de nouveaux modèles incitatifs qui récompensent une organisation utile au système en ce qui concerne l’autoconsommation, l’approvisionnement direct, le stockage en période de pointe et la mise à disposition de l’énergie d’équilibrage, c’est-à-dire une gestion active de la demande pour tous les acteurs du marché.

1.8.

Les avantages, tels que décrits par la Commission, de la nouvelle approche fondée sur le prosommateur montrent que celle-ci ne fera pas que compléter la «production centralisée». Il s’agit ici de la liberté de choix dont disposent les consommateurs, c’est-à-dire les entreprises, les citoyens, les services municipaux, etc., pour jouer eux aussi un rôle actif dans le futur système énergétique, par l’intermédiaire de la production active, de l’autoconsommation, du stockage et de l’autocommercialisation.

1.9.

Dans sa communication, la Commission ne donne qu’une définition insuffisante de l’autoproduction et de l’autoconsommation. Les exemples cités montrent que sa conception de l’«approche fondée sur le prosommateur» est trop restreinte. Selon le CESE, l’autoproduction et l’autoconsommation ne se limitent pas, loin s’en faut, à la simple production et consommation d’électricité autogénérée à partir d’une installation propre non reliée au compteur de réseau.

1.10.

D’autres formes plus vastes de structures communautaires de prosommateurs sont en train d’apparaître, mais se heurtent à des entraves considérables. La mise en œuvre de modèles économiques innovants permettrait de revaloriser le consommateur dans son nouveau rôle actif et ouvrirait des possibilités de création de valeur ajoutée tout à fait inédites. Il est indispensable d’en tenir compte dans le cadre d’une «nouvelle donne pour les consommateurs d’énergie».

1.11.

Les formes plus larges d’autoproduction et d’auto-approvisionnement, qui utilisent les réseaux publics (bien évidemment à titre onéreux), permettent aussi aux locataires, aux petites entreprises ou à des membres de coopératives de jouer un rôle actif et responsable sur le marché de l’énergie, ainsi que de gagner ou d’économiser de l’argent. Une définition étroite des notions d’autoproduction et d’autoconsommation est donc injuste du point de vue de la politique sociale et discriminatoire au regard de la politique économique.

1.12.

Le système énergétique décentralisé ambitionné par la Commission nécessite également des approches de marché décentralisées (2). Le consommateur devrait pouvoir choisir librement non seulement son fournisseur commercial, mais aussi son producteur d’énergie.

2.   Introduction (contenu de la communication de la Commission)

2.1.

Le cadre stratégique pour une union de l’énergie prévoit la création d’une union de l’énergie «focalisée sur le citoyen — dans laquelle ce dernier prend à son compte la transition énergétique, tire avantage des nouvelles technologies pour réduire sa facture et prend une part active au marché — et qui permette aussi de protéger les consommateurs les plus vulnérables» (3).

2.2.

Alors que le secteur de l’énergie en Europe s’est vu transformé au cours des dernières années, les consommateurs — ménages, entreprises et industrie — demeurent confrontés à des obstacles qui les empêchent de bénéficier pleinement de la transition énergétique en cours, c’est-à-dire de maîtriser leur consommation de manière rationnelle et de réduire leurs factures:

manque de transparence en matière de coûts, de consommation et d’offres de produits,

part croissante occupée par les redevances d’accès au réseau, les taxes et surtout les prélèvements dans la facture d’électricité finale,

manque de concurrence sur de nombreux marchés de détail, absence de récompense pour une participation active et difficulté de changer de fournisseur,

marchés insuffisamment développés pour les services énergétiques résidentiels et la modulation de la demande,

obstacles empêchant les consommateurs d’autoproduire et d’autoconsommer,

inégalité d’accès à l’information et importantes barrières à l’entrée pour les nouveaux concurrents, qui ralentissent l’adoption des technologies et pratiques avancées disponibles, telles que les compteurs intelligents, les appareils électroménagers intelligents, les sources énergétiques décentralisées et les améliorations de l’efficacité énergétique.

2.3.

La nouvelle organisation du marché de l’électricité (4), l’exploitation de nouvelles technologies et l’apparition d’entreprises de services énergétiques innovantes devraient permettre à tous les consommateurs de participer pleinement à la transition énergétique en leur donnant la possibilité de gérer leur consommation d’énergie plus rationnellement afin d’économiser de l’argent et de contribuer à la réduction globale de la consommation d’énergie.

2.4.

Dans le même temps, le rôle du consommateur est amené à changer: il doit non seulement pouvoir mieux réagir, et ce avec davantage de souplesse, par rapport aux offres et services énergétiques et tirer parti de ces derniers, mais aussi pouvoir jouer lui-même un rôle actif en tant que producteur d’énergie.

2.5.

La Commission évoque une «stratégie reposant sur trois piliers», à savoir:

a)

l’autonomisation des consommateurs,

b)

les innovations technologiques dans le domaine des «maisons et réseaux intelligents», et

c)

une attention particulière portée à la gestion et à la protection des données.

Cette stratégie doit être mise en œuvre dans le cadre d’un plan d’action en dix points.

3.   Observations générales

3.1.

Le CESE se félicite de l’analyse de la Commission et soutient fermement les propositions avancées. Il est grand temps de mettre le consommateur au centre de la politique énergétique de l’Europe et de celle des États membres, car des progrès notables pour atteindre un certain nombre d’objectifs visant un approvisionnement énergétique durable et économe en ressources ne seront acceptés et réalisés que si les consommateurs, quelle que soit leur classe sociale, se voient offrir toutes les possibilités d’intervenir de façon active et responsable au regard des objectifs concordants des politiques énergétique et environnementale.

3.2.

Le CESE constate que dans les systèmes énergétiques de nombreux États membres, l’importance structurelle et stratégique des consommateurs est très limitée en raison d’un cadre réglementaire insuffisant. Ce cadre témoigne du fait qu’à ce jour, le rôle actif des consommateurs n’est pas suffisamment reconnu. Dans ce contexte, les propositions apparaissent adéquates pour réaliser les objectifs fixés (entre autres, la réduction de la consommation grâce à la hausse de l’efficacité énergétique et des économies d’énergie, la transition de la production vers des sources d’énergie propres, une meilleure adaptation de la consommation à une offre future plus fluctuante, la réduction de la charge pesant sur les réseaux et leur amélioration grâce à la gestion de la demande, ainsi que la diversification des acteurs) d’une manière qui soit transparente et efficace au regard des coûts pour les consommateurs.

3.3.

Si les consommateurs se voient accorder davantage de droits et de possibilités, il convient également de les informer qu’ils endossent eux aussi une part de responsabilité et doivent accepter les impératifs en matière d’adaptation, ce qui constitue une nouveauté pour nombre d’entre eux.

3.4.

Cette responsabilité ne peut être imposée: il revient à toutes les parties prenantes (y compris les responsables politiques) de l’endosser et d’apprendre à l’exercer. C’est pourquoi il s’impose d’élargir sans délai la participation des consommateurs aux décisions économiques en matière énergétique, aux investissements dans les installations de production, les réseaux énergétiques (y compris dans les applications liées aux «réseaux intelligents») et les dispositifs de stockage, ainsi qu’à la gestion de ceux-ci.

3.5.

Il y a lieu que les coûts de l’énergie soient non seulement abordables pour les consommateurs (problèmes de la concurrence et de la pauvreté énergétique), mais aussi équitables (au sens d’une juste répartition des charges et des avantages). Par le passé, les prix et les technologies de l’énergie ont souvent avantagé ceux qui disposaient de connaissances et d’une expertise spécifiques, de capacités, ainsi que de moyens financiers et techniques dont ils étaient en mesure de se servir. Un système qui ne cherche pas à corriger ce déséquilibre affaiblit la confiance des consommateurs défavorisés à l’égard du marché.

3.6.

Le CESE se range à l’avis de la Commission selon lequel le meilleur moyen de s’attaquer directement à la pauvreté énergétique, qui constitue un problème social croissant, est d’appliquer des mesures de politique sociale. Il importe néanmoins que la «nouvelle donne» pour les consommateurs d’énergie vise aussi à éliminer les déséquilibres et les injustices sur le marché.

3.7.

Il ressort très clairement et à juste titre de la communication que, outre l’accès à l’information, c’est en définitive le prix final (brut) qui oriente de manière décisive le choix du consommateur. Même si les citoyens sont bien plus sensibilisés aux questions relatives au changement climatique et globalement favorables aux énergies renouvelables, le prix reste le principal critère qui détermine leur choix de réaliser des économies d’énergie, de mettre en place des mesures d’efficacité énergétique et d’utiliser des sources d’énergie respectueuses de l’environnement. À cet égard, il est nécessaire de veiller à ce que les consommateurs vulnérables, en particulier, ne soient pas exposés sans aucune protection à des pics de prix extrêmes et à mettre en place des mécanismes (techniques) qui leur apportent quasi automatiquement les avantages souhaités.

3.8.

L’on assiste à un nouveau phénomène, à savoir que les consommateurs demandent non seulement des produits agricoles régionaux, mais aussi une «électricité locale» générée par des installations exploitant des sources d’énergie renouvelables. Presque partout, le régime réglementaire empêche cette demande accrue d’être satisfaite par les offres des fournisseurs d’énergie, particulièrement de ceux permettant aux consommateurs d’avoir une influence directe sur les décisions entrepreneuriales, à l’instar des sociétés énergétiques citoyennes ou de certaines entreprises communales.

3.9.

Cette situation est doublement insatisfaisante. D’une part, la configuration du marché est inefficace, car elle ne répond pas aux préférences et aux besoins des consommateurs. D’autre part, les offres régionales d’énergie verte augmentent la valeur accordée à l’énergie en général, et encouragent les consommateurs à prendre d’autres mesures d’économie et d’efficacité en la matière et à recourir à des formules souples pour compenser les fluctuations de la production d’électricité issue de sources renouvelables.

3.10.

Le CESE juge importante la démarche adoptée par la Commission, qui consiste à reconnaître, à prendre davantage en compte et à promouvoir les sources d’approvisionnement locales, ainsi qu’à renforcer considérablement l’intégration des acteurs de marché locaux, notamment pour pouvoir fixer un prix effectif sur le lieu de consommation et non sur le lieu de production.

3.11.

La question de l’organisation des systèmes énergétiques revêt une importance stratégique. Une concurrence portant sur la mise en place du système global le plus efficace est nécessaire, ce qui va bien au-delà de la production et de la mise sur le marché classique. C’est pourquoi les règles énoncées unilatéralement par certains États membres en faveur de configurations de marché et de système données sont souvent précipitées. Il convient en particulier de cesser de considérer isolément la production, d’une part, et la commercialisation, d’autre part, de même que les secteurs de l’électricité, du chauffage et des transports.

3.12.

Il est nécessaire d’évaluer les systèmes énergétiques pour déterminer dans quelle mesure ils sont conformes à ces exigences. Pour ce qui est du chauffage et des transports, et contrairement au secteur de l’électricité, le consommateur a toujours été davantage intégré dans les processus régionaux. Les objectifs des politiques énergétique et environnementale seront mieux remplis s’il existe une volonté d’axer la configuration des systèmes énergétiques sur l’intégration et la participation du consommateur et sur la convergence des secteurs des transports, du chauffage et de l’électricité. Dans ce contexte, il existe de nombreux arguments en faveur de la prééminence des systèmes énergétiques décentralisés. À cet égard, le CESE se réfère à son avis sur une nouvelle organisation du marché de l’énergie (5).

3.13.

Il y a lieu de mettre un accent particulier sur la convivialité des nouveaux systèmes, qui doivent être simples et transparents et ne doivent en aucun cas être trop complexes pour le consommateur. Les moyens techniques nécessaires pour garantir cette convivialité sont disponibles.

3.14.

Cependant, il convient tout d’abord de mettre en place un cadre harmonisé au sein de l’Union, grâce auquel tous les coûts associés à la production d’énergie, y compris les coûts externes, seront pleinement intégrés au prix de l’énergie. La transparence absolue des prix est encouragée (6), car le consommateur final doit pouvoir interpréter les prix qui lui sont facturés de façon aisée et fiable. Aucune réglementation du marché ne serait assez transparente, souple et ouverte pour compenser les signaux de prix erronés générés par des subventions directes ou indirectes accordées à certaines sources d’énergie.

4.   Pilier 1: «Autonomiser les consommateurs»

4.1.   Observations générales

4.1.1.

S’il existe une volonté politique dans ce sens, le rôle du consommateur dans le secteur de l’énergie pourrait profondément évoluer au cours des prochaines années. Il est donc tout à fait justifié que la Commission y consacre la majeure partie de sa communication. Il ne s’agit pas seulement de questions d’ordre technique et relevant du droit commercial, mais de changements structurels décisifs qui résulteront en des processus énergétiques plus démocratiques.

4.1.2.

Pour que le consommateur puisse mieux maîtriser sa consommation de façon autonome, il a tout d’abord besoin, outre d’informations de meilleure qualité, de conditions techniques et économiques préalables. Il faut remédier au plus vite aux situations où la consommation individuelle n’est ou ne peut pas encore, à ce jour, être mesurée (et, par conséquent, facturée). Lorsqu’il est nécessaire d’installer de nouveaux compteurs, il y a lieu de recourir directement à des «compteurs intelligents».

4.1.3.

Conformément au souhait de la Commission, il convient de procéder sans délai à l’amélioration des informations sur la consommation, ce qui implique notamment d’octroyer aux quelque 28 % de consommateurs qui n’auront probablement pas encore accès à des «compteurs intelligents» après 2020 le droit d’en bénéficier sur demande. Les conditions économiques ne seront garanties que si les économies potentielles reviennent entièrement au client final et ne sont pas compensées par de nouveaux montants forfaitaires.

4.1.4.

Pour que les compteurs intelligents se généralisent rapidement, il faut que leur installation soit financièrement neutre pour le consommateur et imputée aux coûts de réseau. Un cadre homogène et cohérent doit être créé pour les producteurs en matière de protection des données et de protocoles de communication.

4.1.5.

Toutefois, la neutralité des coûts n’est que l’un des éléments nécessaires et essentiels à l’acceptation des «compteurs intelligents» par les consommateurs. Elle doit s’accompagner d’une grande confiance envers les exploitants de réseaux, les fournisseurs et les distributeurs d’électricité qui collectent et analysent les données. Plus les consommateurs sont éloignés de ces acteurs, plus il est difficile d’établir cette relation de confiance. Selon le CESE, les consommateurs doivent incontestablement bénéficier du niveau de protection des données le plus élevé, ce qui signifie notamment qu’ils doivent avoir pleinement accès à l’ensemble des données.

4.1.6.

Aujourd’hui déjà, plusieurs possibilités se présentent au consommateur qui recherche des offres plus avantageuses sur les marchés existants. L’affirmation de la Commission selon laquelle «changer de fournisseur doit être techniquement facile, rapide et fiable» devrait être une évidence dans une Europe qui a été créée pour favoriser la libre circulation des marchandises. Par conséquent, la suppression des frais et pénalités de changement ne devrait pas être «envisagée» (7), mais concrétisée!

4.1.7.

La possibilité de choisir un fournisseur et celle de négocier les conditions contractuelles sont des éléments clés de la concurrence sur le marché. La fréquence du changement de fournisseur constitue un indicateur à cet égard. Si les changements de fournisseur sont plus fréquents, le taux de changement reste très faible dans de nombreux États membres (8). Il s’agit d’une conséquence d’un manque d’information des consommateurs et d’autres obstacles sur le marché.

4.1.8.

Bien que le changement de fournisseur représente un recours important pour le consommateur, l’on ne peut conclure au bon fonctionnement de la concurrence sur la seule base du taux de changement et du tarif. La satisfaction du client, les relations de proximité et l’engagement citoyen d’opérateurs locaux constituent aujourd’hui déjà des facteurs de plus en plus déterminants dans le choix du fournisseur; il en va de même pour la présence locale des responsables. Les consommateurs portent un intérêt croissant non seulement à la manière dont l’électricité est produite, mais aussi à son origine géographique et à l’identité du producteur. C’est pourquoi il importe que le consommateur soit en mesure de choisir librement son fournisseur d’électricité, mais aussi son producteur d’énergie.

4.1.9.

Il y aura donc concurrence en matière de tarifs et de qualité. Si les coûts de production et de réseau sont transparents, une électricité produite à un coût légèrement plus élevé, mais dont le coût d’acheminement est plus faible, pourrait s’avérer globalement meilleur marché; cela exige néanmoins que les prix soient fonction de la distance parcourue dans la composante relative aux coûts de réseau et qu’il soit possible de commercialiser soi-même et directement, dans des conditions de concurrence équitables, une électricité autoproduite à partir de sources d’énergie renouvelables.

4.1.10.

Le CESE partage l’opinion de la Commission selon laquelle des prix de l’énergie contrôlés ou réglementés par les États ne permettront pas d’atteindre les objectifs des politiques sociale, structurelle et régionale.

4.1.11.

Le CESE juge absolument centrales les déclarations relatives à la «modulation de la demande», à «l’autoconsommation et l’autoproduction», ainsi qu’à la «participation accrue des consommateurs grâce à l’intermédiation et aux systèmes collectifs», car elles ouvrent la voie à des évolutions totalement nouvelles.

4.2.   Modulation de la demande

4.2.1.

Les succès, décrits dans le document de la Commission, d’initiatives existantes de modulation de la demande, notamment par la tarification dynamique (pour les contrats de fourniture d’électricité) et par des systèmes souples de modulation automatique de la demande, illustrent parfaitement l’affirmation selon laquelle «[l]’efficacité énergétique et la modulation de la demande constituent souvent de meilleures options, pour équilibrer l’offre et la demande, que la construction ou le maintien en activité de davantage de centrales électriques ou de lignes de réseau» (9).

4.2.2.

Toutefois, les utilisateurs finaux ne pourront participer activement que si les avantages des tarifs souples compensent les éventuels coûts d’investissement nécessaires dans un délai raisonnable. Par conséquent, les signaux de prix doivent effectivement être exacts, c’est-à-dire que les tarifs que les utilisateurs finaux peuvent sélectionner doivent refléter le fait qu’une offre d’électricité élevée (par exemple en période de grand vent ou de fort ensoleillement) rencontre une demande réduite, ou vice versa.

4.2.3.

Il convient d’informer le consommateur des signaux de prix (de préférence de façon automatisée), afin qu’il puisse les exploiter. Il y a lieu de mettre en place des systèmes les plus autorégulés possible, qui permettraient à tous les clients, et pas uniquement à ceux versés dans le domaine technique, d’en tirer parti. C’est au consommateur de décider dans quelle mesure il souhaite participer à ces marchés.

4.2.4.

Selon toute attente, les «nouveaux consommateurs actifs» participeront d’autant plus à la modulation de la demande qu’ils seront associés plus directement aux décisions relatives aux mesures concernant les infrastructures et qu’ils prendront davantage part aux investissements et à la gestion d’installations de production, de réseaux et d’équipements de stockage. Par conséquent, toutes les formes de participation et de production énergétique citoyennes ou autres structures communautaires de prosommateurs revêtent une grande importance sur le marché de l’électricité. Toutefois, ces liens sont trop peu mis en évidence dans la communication de la Commission.

4.3.   Autoconsommation et autoproduction: le prosommateur dans le paysage énergétique de demain

4.3.1.

Grâce aux systèmes de modulation de la demande, les consommateurs pourraient aller au-delà de la simple adaptation de leur consommation énergétique. La Commission mentionne à très juste titre que «[l]a combinaison des options de stockage et de production décentralisés avec la flexibilité de la demande peut en outre permettre aux consommateurs de devenir leurs propres fournisseurs et gestionnaires pour (une partie de) leurs besoins en énergie, de se transformer en producteurs-consommateurs et de réduire leurs factures énergétiques» (10).

4.3.2.

Cela ne sera toutefois possible que quand il y aura des modèles de marché réellement nouveaux et adaptés aux objectifs fixés, et que l’on ne cherchera pas simplement à modifier le système existant afin d’y incorporer les nouvelles énergies (11).

4.3.3.

Il y a lieu d’élaborer de nouveaux schémas incitatifs qui récompensent l’organisation utile au système de la consommation propre, de l’approvisionnement direct et du stockage en période de pointe, ainsi que la fourniture d’énergie d’équilibrage. Pour ce faire, il convient non seulement de fixer de nouveaux critères d’utilité au système, mais aussi de définir une nouvelle vision de ce qui pourrait être, dans un environnement énergétique de plus en plus décentralisé, un «système énergétique du futur». En tout état de cause, il n’est pas acceptable de s’en tenir à un modèle de système hérité d’une époque où les centrales nucléaires et à charbon traditionnelles fournissaient une charge de base permanente.

4.3.4.

Dans sa communication, la Commission énumère d’autres avantages de la production décentralisée d’énergie renouvelable, et notamment la réduction des pertes de réseau et de la saturation, qui permet d’économiser des coûts de réseau à long terme. Le CESE partage ce point de vue, mais jusqu’à présent, les États membres n’ont pas suffisamment reconnu et pris en compte ces avantages.

4.3.5.

La description détaillée des avantages de cette nouvelle approche qui figure dans le document de travail accompagnant la communication (12) montre clairement que cette «approche fondée sur le prosommateur» ne fera pas «que» compléter utilement la «production centralisée». Il s’agit ici de la liberté de choix dont dispose le consommateur pour jouer un rôle actif dans le futur système énergétique, par l’intermédiaire de l’autoproduction, de l’autoconsommation, du stockage et de l’autocommercialisation.

4.3.6.

Dans sa communication, la Commission ne donne toutefois qu’une définition insuffisante de l’autoproduction et de l’autoconsommation. Les exemples cités dans le document de travail annexe (13) montrent que sa conception de ces notions est trop restreinte. Selon le CESE, elles ne se limitent pas, loin s’en faut, à la simple consommation d’électricité autoproduite à partir d’une installation propre non reliée au compteur de réseau, telle que l’électricité photovoltaïque produite par une installation située sur le toit d’une maison ou, plus généralement, toute électricité générée sans passer par un réseau public. La distinction entre l’exploitant et le consommateur final qui s’imposait jusqu’à présent doit être supprimée, car elle ne concerne qu’une forme particulière d’auto-approvisionnement.

4.3.7.

Des structures plus vastes de prosommateurs sont en train d’apparaître, mais continuent de se heurter à des entraves considérables. Par exemple, il y a lieu de citer le modèle économique représenté par des coopératives qui commercialisent leur électricité directement auprès de leurs membres ou par des sociétés d’énergie citoyenne qui distribuent leur électricité à des consommateurs résidant à proximité immédiate, et ce sans passer par le marché financier ou un distributeur commercial. La mise en œuvre de ce type de modèles permettrait de revaloriser considérablement le consommateur dans son nouveau rôle actif et ouvrirait la voie à des modèles économiques tout à fait inédits, qui doivent être pris en compte dans le cadre d’une «nouvelle donne» pour les consommateurs d’énergie.

4.3.8.

Il importe aussi d’élargir les notions d’autoproduction et d’autoconsommation, car la conception trop restrictive (identité des exploitants des installations et des consommateurs finaux) reconnue jusqu’à présent ne vise qu’un groupe particulier de «consommateurs actifs». En effet, au titre de la définition actuelle, les seuls consommateurs qui peuvent pratiquer l’autoproduction et l’autoconsommation sont ceux qui disposent d’un capital pour investir dans des installations et, avant tout, d’un espace suffisant (par exemple dans ou sur les bâtiments qu’ils occupent) pour les exploiter. D’un point de vue pratique, les locataires, par exemple, sont exclus de cette acception; le même problème se pose dans le cas des consommateurs professionnels, principalement des petites entreprises ou des entreprises ne disposant pas d’un grand espace.

4.3.9.

En revanche, des formes plus larges d’autoproduction et d’auto-approvisionnement, qui utilisent les réseaux publics (bien évidemment à titre onéreux), sont des modèles qui permettent aussi aux locataires, aux petites entreprises, à des membres de coopératives et autres de jouer un rôle actif et responsable en tant que prosommateurs sur le marché de l’énergie, ainsi que de gagner ou d’économiser de l’argent. Une définition étroite des notions d’autoproduction et d’autoconsommation est donc injuste du point de vue de la politique sociale et discriminatoire au regard de la politique économique.

4.4.   Participation des consommateurs grâce à l’intermédiation et aux systèmes collectifs

4.4.1.

La Commission évoque également «des systèmes collectifs et des initiatives locales [qui] voient le jour à une fréquence croissante dans un certain nombre d’États membres. Les consommateurs sont de plus en plus nombreux à s’engager dans des programmes d’autoproduction collective et des systèmes coopératifs pour mieux gérer leur consommation énergétique. Cette innovation introduite par les consommateurs se traduit également par une innovation pour les consommateurs et ouvre la voie à de nouveaux modèles commerciaux. Les sociétés de services énergétiques, les agrégateurs, les courtiers, les entreprises de traitement des données et d’autres sociétés intermédiaires, ainsi que, fréquemment, les organisations de consommateurs aident de plus en plus souvent les consommateurs à obtenir de meilleurs contrats énergétiques tout en leur évitant des procédures administratives et des recherches fastidieuses. Cela ouvre également de nouvelles perspectives pour les populations et les autorités locales, dont les initiatives énergétiques locales et régionales peuvent constituer un lien précieux entre les décideurs, les citoyens et les innovateurs au niveau local» (14).

4.4.2.

L’étude réalisée par le CESE sur les «énergies citoyennes» (15) démontre qu’il est encore possible de citer nombre d’autres avantages (par exemple, le fait de susciter l’adhésion des citoyens à la construction de nouvelles installations, les possibilités de développement économique au niveau régional ou le financement des investissements). Dans tous les États membres visités, le CESE a constaté que la société civile était tout à fait disposée à soutenir activement les modèles privés ou communautaires correspondants et/ou à les mettre elle-même en œuvre. Toutefois, ces démarches se soldent encore souvent par un échec du fait de dispositions juridiques, d’obstacles administratifs ou d’autres types de discrimination, intentionnelle ou non.

4.4.3.

Par exemple, il n’est pas rare que des citoyens qui exploitent collectivement une éolienne citoyenne ne soient pas en mesure de prélever et d’utiliser directement leur propre électricité, et doivent la mettre sur le marché par l’intermédiaire de fournisseurs commerciaux, pour finalement la racheter. Ce n’est pas la conception qu’a le CESE de la «participation active au marché».

4.4.4.

Dans l’introduction de la communication, la Commission définit certes «les obstacles empêchant les consommateurs d’autoproduire et d’autoconsommer» comme un problème à résoudre, mais elle n’explique malheureusement pas de façon concrète où et comment ces obstacles apparaissent, ni ce qu’il convient de faire pour les éliminer. Au vu des pratiques observées dans de nombreux États membres, il n’est pas rare que les instances nationales de réglementation empêchent de fait l’autoproduction, l’autoconsommation, l’auto-approvisionnement ou l’approvisionnement direct au sens large ou, du moins, qu’elles rendent leur mise en œuvre difficile du point de vue économique ou administratif; l’Espagne et l’Allemagne peuvent être citées en exemple à cet égard. Le CESE demande donc à la Commission d’élaborer et de présenter, dans le cadre du processus consultatif, un document séparé qui s’appuie sur le document de travail accompagnant la communication (16) et décrive les désavantages, intentionnels ou non, auxquels font face les approches fondées sur les prosommateurs, la nature des obstacles administratifs qui subsistent et la manière dont il convient d’éliminer les discriminations existantes.

À cet effet, il conviendrait également que la Commission examine de façon critique si ses propres dispositions en matière d’aides d’État sont compatibles avec la teneur de sa communication. Il y a d’ores et déjà lieu de constater que, dans les lignes directrices concernant les aides d’État à la protection de l’environnement et à l’énergie (17), l’autoconsommation, l’auto-approvisionnement et l’approvisionnement direct ne sont pas appréciés à leur juste valeur.

4.4.5.

Il y a également lieu d’aborder la question de l’indépendance des grands fournisseurs commerciaux dans le cadre de la discussion sur le rôle des intermédiaires. Pour alimenter cette discussion, il y aurait tout lieu d’ouvrir un débat subsidiaire sur les modèles économiques des intermédiaires et sur la question de savoir qui sont leurs clients!

5.   Pilier 2: «Maisons et réseaux intelligents»

5.1.

Le nouveau système énergétique se développe de manière ascendante. Les équipements interconnectés créent des logements intelligents, qui constituent ensuite des bâtiments intelligents, qui deviennent à leur tour des éléments actifs du réseau. Le nouveau système énergétique est pour ainsi dire fondé sur les «maisons intelligentes», qui sont aussi un lieu d’apprentissage et d’expérimentation adéquat pour le «consommateur» actif d’aujourd’hui. Ce dernier doit être mieux informé des nombreuses options qui sont déjà à sa disposition.

6.   Pilier 3: «Gestion et protection des données»

6.1.

Des directives homogènes et fiables en matière de protection des données sont la base et la condition préalable de l’introduction rapide et viable à long terme de systèmes de communication modernes. À cet égard, il convient de déterminer:

quelles données doivent impérativement être collectées pour assurer un fonctionnement optimal,

comment les données doivent être chiffrées,

où et pendant combien de temps les données sont conservées,

qui peut décider de la suppression des données.

6.2.

Le CESE juge essentiel que le consommateur soit et demeure propriétaire de ses données, qu’il en ait le plein contrôle et qu’il puisse y accéder, afin de pouvoir les vérifier, les corriger, les supprimer et les transférer en cas de changement de fournisseur.

Bruxelles, le 20 janvier 2016.

Le président du Comité économique et social européen

Georges DASSIS


(1)  COM(2015) 339 final.

(2)  Voir TEN/577: «Lancement du processus de consultation publique sur une nouvelle organisation du marché de l’énergie» — voir page 13 du présent Journal officiel.

(3)  COM(2015) 80 final, p. 2.

(4)  Voir note de bas de page 2.

(5)  Voir note de bas de page 2.

(6)  Voir note de bas de page 2.

(7)  Voir note de bas de page 1.

(8)  Voir ACER/CEER, Annual Report on the Results of Monitoring the Internal Electricity and Natural Gas Markets in 2013 (Rapport annuel sur les résultats du suivi des marchés nationaux de l’électricité et du gaz naturel en 2013), octobre 2014, p. 69.

(9)  Voir note de bas de page 1.

(10)  Voir note de bas de page 1.

(11)  Voir note de bas de page 2.

(12)  SWD(2015) 141 final du 15.7.2015.

(13)  Voir note de bas de page 12.

(14)  Voir note de bas de page 1.

(15)  «Changer l’avenir énergétique: étude du CESE sur le rôle de la société civile dans la mise en œuvre de la directive sur les énergies renouvelables» (EESC-2014-04780-00-04-TCD-TRA-FR).

(16)  Voir note de bas de page 12.

(17)  JO C 200 du 28.6.2014, p. 1.