ISSN 1977-0936

doi:10.3000/19770936.C_2012.229.fra

Journal officiel

de l'Union européenne

C 229

European flag  

Édition de langue française

Communications et informations

55e année
31 juillet 2012


Numéro d'information

Sommaire

page

 

I   Résolutions, recommandations et avis

 

AVIS

 

Comité économique et social européen

 

481e session plénière des 23 et 24 mai 2012

2012/C 229/01

Avis du Comité économique et social européen sur Le marché numérique — un moteur pour la croissance (avis exploratoire)

1

2012/C 229/02

Avis du Comité économique et social européen sur le thème Paradis fiscaux et financiers: une menace pour le marché intérieur de l'UE (avis d'initiative)

7

2012/C 229/03

Avis du Comité économique et social européen sur le thème Horizon 2020: feuille de route concernant le vieillissement (avis d'initiative)

13

2012/C 229/04

Avis du Comité économique et social européen sur le thème Évaluation par le CESE du rapport de suivi 2011 sur la stratégie de l'Union européenne en faveur du développement durable (avis d'initiative)

18

 

III   Actes préparatoires

 

COMITÉ ÉCONOMIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN

 

481e session plénière des 23 et 24 mai 2012

2012/C 229/05

Avis du Comité économique et social européen sur la Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions sur le thème Définir une stratégie maritime pour la région atlantiqueCOM(2011) 782 final

24

2012/C 229/06

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de règlement du Conseil fixant le cadre financier pluriannuel pour la période 2014-2020COM(2011) 398 final — 2011/0177 (APP) et sur la Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — un budget pour la stratégie Europe 2020COM(2011) 500 final

32

2012/C 229/07

Avis du Comité économique et social européen sur la Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions: partenariat pour la recherche et l'innovationCOM(2011) 572 final

39

2012/C 229/08

Avis du Comité économique et social européen sur la Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — initiative pour l'entrepreneuriat social — construire un écosystème pour promouvoir les entreprises sociales au cœur de l'économie et de l'innovation socialesCOM(2011) 682 final

44

2012/C 229/09

Avis du Comité économique et social européen sur la Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions Small Business, Big World — un partenariat pour aider les PME à exploiter les possibilités du marché mondialCOM(2011) 702 final

49

2012/C 229/10

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif aux fonds d'entrepreneuriat social européensCOM(2011) 862 final – 2011/0418 (COD)

55

2012/C 229/11

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de décision du Conseil relative à l'adoption d'un programme complémentaire de recherche pour le projet ITER (2014-2018)COM(2011) 931 final — 2011/0460 (NLE)

60

2012/C 229/12

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 2009/65/CE portant coordination des dispositions législatives, réglementaires et administratives concernant certains organismes de placement collectif en valeurs mobilières (OPCVM) et la directive 2011/61/UE sur les gestionnaires de fonds d’investissement alternatifs en ce qui concerne le recours excessif aux notations de créditCOM(2011) 746 final — 2011/0360 (COD)

64

2012/C 229/13

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil établissant le code des douanes de l'UnionCOM(2012) 64 final — 2012/0027 (COD)

68

2012/C 229/14

Avis du Comité économique et social européen sur le Livre vert relatif au droit au regroupement familial des ressortissants de pays tiers résidant dans l'Union européenne (directive 2003/86/CE)COM(2011) 735 final

72

2012/C 229/15

Avis du Comité économique et social européen sur la Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — responsabilité sociale des entreprises: une nouvelle stratégie de l'UE pour la période 2011-2014COM(2011) 681 final

77

2012/C 229/16

Avis du Comité économique et social européen sur la communication de la Commission au Parlement européen et au Conseil — Vers une approche plus ferme de l'UE en matière de lutte contre la drogueCOM(2011) 689 final

85

2012/C 229/17

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données (règlement général sur la protection des données)COM(2012) 11 final — 2012/011 (COD)

90

2012/C 229/18

Avis du Comité économique et social européen sur la Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — un cadre de qualité pour les services d'intérêt général en EuropeCOM(2011) 900 final

98

2012/C 229/19

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de règlement du Conseil instituant un instrument relatif à la coopération en matière de sûreté nucléaireCOM(2011) 841 final

103

2012/C 229/20

Avis du Comité économique et social européen sur la Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil et au Comité économique et social européen sur la stratégie de l'Union européenne pour la protection et le bien-être des animaux au cours de la période 2012-2015COM(2012) 6 final

108

2012/C 229/21

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil concernant certaines mesures relatives aux pays autorisant une pêche non durable aux fins de la conservation des stocks halieutiquesCOM(2011) 888 final — 2011/0434 (COD)

112

2012/C 229/22

Avis du Comité économique et social européen sur le thème Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant les directives 2000/60/CE et 2008/105/CE en ce qui concerne les substances prioritaires pour la politique dans le domaine de l'eauCOM(2011) 876 final — 2011/0429 (COD)

116

2012/C 229/23

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif aux mouvements non commerciaux d’animaux de compagnieCOM(2012) 89 final — 2012/0039 (COD) et la Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 92/65/CEE du Conseil en ce qui concerne les conditions de police sanitaire régissant les échanges et les importations dans l’Union de chiens, de chats et de furetsCOM(2012) 90 final — 2012/0040 (COD)

119

2012/C 229/24

Avis du Comité économique et social européen sur la Communication de la Commission au Parlement européen et au Conseil — une vision européenne pour les passagers: communication sur les droit des passagers dans tous les modes de transportCOM(2011) 898 final

122

2012/C 229/25

Avis du Comité économique et social européen sur la Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — Feuille de route pour l'énergie à l'horizon 2050COM(2011) 885 final

126

2012/C 229/26

Avis du Comité économique et social européen sur le thème Accroître l'impact de la politique de développement de l'UE: un programme pour le changement — la future approche de l'appui budgétaire de l'UE en faveur des pays tiersCOM(2011) 637 final et COM(2011) 638 final

133

2012/C 229/27

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 2006/66/CE relative aux piles et accumulateurs ainsi qu'aux déchets de piles et d'accumulateurs en ce qui concerne la mise sur le marché de piles et d'accumulateurs portables contenant du cadmium destinés à être utilisés dans des outils électriques sans filCOM(2012) 136 final — 2012/0066 (COD)

140

2012/C 229/28

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant les directives 1999/4/CE, 2000/36/CE, 2001/111/CE, 2001/113/CE et 2001/114/CE en ce qui concerne les compétences à conférer à la CommissionCOM(2012) 150 final — 2012/0075 (COD)

143

2012/C 229/29

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition modifiée de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (CE) no 1760/2000 en ce qui concerne l'identification électronique des bovins et supprimant ses dispositions relatives à l'étiquetage facultatif de la viande bovineCOM(2012) 162 final — 2011/0229 (COD)

144

2012/C 229/30

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de directive du Conseil fixant des exigences pour la protection de la santé de la population en ce qui concerne les substances radioactives dans les eaux destinées à la consommation humaineCOM(2012) 147 final — 2012/0074 (NLE)

145

FR

 


I Résolutions, recommandations et avis

AVIS

Comité économique et social européen

481e session plénière des 23 et 24 mai 2012

31.7.2012   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 229/1


Avis du Comité économique et social européen sur «Le marché numérique — un moteur pour la croissance» (avis exploratoire)

2012/C 229/01

Rapporteuse: Mme BATUT

Le 11 janvier 2012, la Présidence danoise de l'Union européenne a décidé, conformément à l'article 304 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur le thème:

«Le marché numérique — un moteur pour la croissance»

(avis exploratoire).

La section spécialisée «Transports, énergie, infrastructure, société de l'information», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 10 mai 2012.

Lors de sa 481e session plénière des 23 et 24 mai 2012 (séance du 23 mai 2012), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 141 voix pour, 7 voix contre et 5 abstentions.

1.   Introduction

1.1   L’économie numérique modifie en profondeur toutes les habitudes et touche tout l’édifice social et économique de nos sociétés. La sécurité et l’interopérabilité y sont primordiales. L’Agenda numérique de l’Union est l'une des initiatives phares de la Stratégie UE 2020. Le Comité a déjà adopté un grand nombre d’avis sur les conséquences du numérique (1) dans nos sociétés.

1.2   La Présidence danoise, consciente des enjeux, a demandé au CESE d'identifier ce qui manque pour en faire un pourvoyeur de croissance. Le Comité considère que les dialogues social et civil devraient faire partie intégrante de toutes les réflexions sur l'économie numérique ainsi que des concertations et des partenariats.

1.3   Le marché pour le marché (2) n’est pas une fin en soi. Le numérique doit être un moyen au service de l’économie sans menacer les acquis économiques, sociaux, humains et culturels. Produire et échanger en ligne et développer l’économie numérique change le marché de l'emploi. Le CESE souhaite plus de visibilité, d’information pour les acteurs de l'entreprise et pour les consommateurs, et des garanties pertinentes pour tous.

1.4   L'UE est en retard sur les grands concepteurs et providers (États-Unis) et sur les grands constructeurs (Asie). Elle devrait mettre en œuvre en urgence l'ensemble de sa stratégie numérique et infléchir son approche pour faire face aux défis de court (comme les DPI) et de long terme (vieillissement démographique). Pour le CESE, les priorités sont: avoir l'ambition de miser sur l'intelligence économique, avoir l'ambition de faire émerger des leaders européens, avoir l'ambition de localiser dans l'Union leurs centres de décision et leur R&D, et d'en faire profiter tous les citoyens, construire la confiance, augmenter les capacités de tous: développer la productivité, inclure le numérique dans la stratégie de croissance durable.

L'ensemble des paragraphes ci-dessous constitue les recommandations du CESE:

2.   Déclencher la croissance par le numérique

2.1   Les infrastructures utiles doivent achever rapidement de couvrir tout le territoire européen y compris les pays et territoires d'outre-mer (3). L’accès universel doit être garanti par les opérateurs pour toutes les zones, même isolées. Le CESE estime que la communication COM(2011) 942 sur le renforcement de la confiance dans le marché unique numérique ne sera peut-être pas suffisante.

2.2   L’accessibilité de tous les publics  (4) aux matériels et logiciels, la formation à l'utilisation sont des prérequis fondamentaux. Un quart de la population a atteint l’âge de senior. Cette force économique doit être intégrée. Le Comité estime que l’accessibilité doit être une priorité de l’agenda.

2.3   Les TIC (technologies de l'information et de la communication) devraient faire l'objet de normes définies avec l'industrie, et toutes autres parties prenantes de la société civile (5), dans le but de garantir la pleine interopérabilité et compatibilité des applications et des services liés aux TIC et de mettre en place une politique de normalisation des TIC appuyant les politiques de l'Union (Résolution du Parlement européen du 21.10.2010 (6), points 69 et 72. Le CESE estime utile d'aider financièrement les PME et les acteurs sociétaux participant à la normalisation.

2.4   Les interconnexions des réseaux européens doivent être achevées pour amplifier la mise en place de l’économie numérique et augmenter l’offre de biens et services (avis CESE 490/2012 – TEN/469).

2.5   Le Comité estime que l’interopérabilité de l’offre doit être organisée au niveau de l’UE. La normalisation permettra aux intérêts européens l'accès à de nouveaux marchés au niveau international.

2.6   Le Comité a déjà pris position en faveur d’un Internet neutre et ouvert  (7).

2.7   Le marché intérieur doit offrir toutes les garanties d’utilisation afin de libérer le potentiel de la demande par l'utilisation de logiciels libres et ouverts.

2.8   Le CESE soutient le développement de normes d'interfaces communes.

2.9   Le CESE estime indispensable de réussir la coopération administrative entre États membres ainsi que l’ouverture de services d'administration transfrontaliers en ligne, qui pourraient être facilités par le recours généralisé au système IMI (système d'Information du Marché Intérieur). Cette évolution devrait se faire dans le cadre d’une gouvernance européenne multilatérale (8).

2.10   Le commerce Internet pousse à l’harmonisation des taux nationaux de TVA: le CESE estime que ce sera un réel avantage pour les entreprises comme pour les citoyens si elle n’est pas un prétexte à égaliser les taux vers le haut.

2.11   Opérateurs et citoyens devraient trouver facilement toutes les informations sur leurs droits, afin de réaliser leurs transactions transfrontalières en toute quiétude.

2.12   Pour le Comité, les représentants de la société civile devraient être présents (voir Stratégie UE 2020 «Parties prenantes et société civile») dans la construction de l’économie numérique européenne, et être invités à concertation et partenariat. En raison de son caractère arborescent elle diffuse dans toute la société. Tout projet devrait avoir un volet numérique et social.

2.13   Le numérique favorise une économie de services qui peut conduire à la désindustrialisation, voire à la destruction d’emplois européens. Dans la recherche de nouveaux marchés, il convient selon le CESE de lier innovation et fabrication (constructeurs) technologiques en Europe. Les «start-up» du secteur des TIC devraient être à même de réaliser leur potentiel de croissance rapide. Le CESE estime qu'il est urgent de se demander pourquoi le contexte ne favorise pas l'émergence de grands fournisseurs d'accès européens, de grands sites de vente européens qui seraient connus du monde entier.

2.14   La formation et l'apprentissage tout au long de la vie aident les salariés à rester dans l’emploi. Le numérique peut faciliter cette démarche, particulièrement pour les populations des territoires isolés, ou en situation de vulnérabilité. Des formations au numérique qualifiantes sont nécessaires pour tous.

2.15   D'ici 2015, 95 % de postes de travail nécessiteront des compétences liées à internet. Le Comité souhaite que les mesures prises évitent les conséquences négatives sur le monde du travail, telles que:

des salariés esclaves de l’urgence, et soumis à une surveillance «quasi policière»;

du télétravail, payé à prix bradés et contournant les médiateurs du conflit social que sont les syndicats, au double détriment des individus et des droits collectifs.

Pour le CESE, dans l’économie numérique comme ailleurs, seul l’emploi décent doit être considéré car il permet d’augmenter la demande globale.

3.   Construire la croissance par la confiance dans l'économie numérique

3.1   Droits fondamentaux

3.1.1   Le Comité souhaite préserver les droits et la sécurité des citoyens sans réduire leur liberté. En 2012, une stratégie d'ensemble sur la sécurité d'Internet sera étudiée en Europe. L'établissement du Centre européen de la cybercriminalité d'ici à 2013 revêtira une importance particulière. Le CESE souhaite qu'enfin l'UE favorise l'émergence d'un puissant moteur européen de recherche de type «Google».

3.1.2   Le Comité prépare un avis sur la protection des données personnelles qui est un domaine capital (COM(2012) 10 final). Il a déjà pris position en faveur du droit à l’oubli (9) et des droits des internautes, en particulier pour les plus jeunes et les publics vulnérables. Il souhaite que la proposition de la Commission soit adoptée dans les meilleurs délais et souhaite qu'il soit tenu compte des observations qu'il a faites, malgré les oppositions qui se manifestent déjà chez les FAI étrangers à l'UE.

3.1.3   Le CESE attend de l'Union qu'elle favorise l'innovation et qu'elle protège ses propres créations. Le brevet européen est une urgence et représente une opportunité pour le marché unique numérique.

3.2   Développer le commerce électronique

3.2.1   L'offre de biens commerciaux doit être décloisonnée et les frontières ouvertes aux professionnels et aux consommateurs pour leur accès à des prix compétitifs (http://ec.europa.eu/consumers/consumer_research/editions/cms6_en.htm).

3.2.2   Le Comité estime que l’interopérabilité de l’offre doit être organisée au niveau de l’UE. La normalisation permettra aux intérêts européens l'accès à de nouveaux marchés au niveau international.

3.2.3   Le CESE estime urgent de résoudre les problèmes d’achat en ligne en éliminant les discriminations en raison de la nationalité ou du lieu de résidence et de créer les conditions d'un droit d'accès égal pour tous.

3.2.4   Les utilisateurs devraient être facilement informés de leurs droits (COM(2011) 794 final) et des possibilités de se défendre. La création de guichets uniques en ligne devient nécessaire. Le Comité (10) se réjouit du fait que la Commission précise qu’un tel système ne devrait priver ni les consommateurs, ni les commerçants de leurs droits à demander réparation devant les tribunaux. La Commission devrait intégrer les interfaces intelligentes telles que BATNA (Best Alternative to a Negotiated Agreement) dans sa directive 2000/31/CE, pour ne pas rester en retard en matière de règlements de «première génération». La possibilité pour les consommateurs d’obtenir une bonne résolution des conflits  (11) qui naissent de relations commerciales est importante pour augmenter la demande en ligne. Les utilisateurs devraient être clairement et facilement informés de leurs droits. Tous les types de litiges en ligne devraient être couverts.

3.2.5   Le CESE estime que les textes européens doivent donner aux citoyens le même degré de confiance dans le marché numérique qu’ils pourraient espérer dans leur propre pays. Les consommateurs ont besoin d’informations sur les opportunités du marché pour être des praticiens éclairés. Un guide du numérique au service des consommateurs pourrait être largement diffusé dans ce but.

Dans le contexte de la directive en projet 2011/942, le CESE engage les autorités de l’Union à prendre des initiatives, en matière:

d'information des opérateurs des services en ligne et de protection des internautes,

de systèmes de paiement et de livraison inadéquats,

de lutte contre les abus trop nombreux.

3.2.6   Des moyens comme:

la e-signature sécurisée;

l'horodatage électronique des actes;

l'interopérabilité des systèmes de e-signatures;

la reconnaissance mutuelle des organismes de certification (SSCD - «Secure Signature Creation Devices»), doublée de l'accréditation de prestataires de services de certification électronique (PSCE);

le système de protection des consommateurs et l'harmonisation des voies de recours (directive 2011/83/UE et document COM(2012) 100 final);

le rapport relatif à l'application du règlement (CE) no 2006/2004 du Parlement européen et du Conseil du 27 octobre 2004 relatif à la coopération entre les autorités nationales chargées de veiller à l'application de la législation en matière de protection des consommateurs;

le règlement relatif à la coopération en matière de protection des consommateurs;

devraient, en se généralisant, créer la confiance des acteurs.

3.2.7   Le CESE est toujours partisan d'actions collectives pour l’obtention d’une réparation effective des dommages en cas de violation de droits collectifs. Cela compléterait la protection existant par les voies de recours tant alternatives que judiciaires (12) (voir directive 98/27/CE du 19 mai 1998). Il faut assurer les conditions d’une concurrence loyale au sein du marché intérieur (Préambule TFUE alinéa 4). Le principe du droit à un recours effectif est un droit fondamental de la Charte européenne des droits fondamentaux (art. 47).

3.2.8   Le Comité accueille avec satisfaction la communication de la Commission sur un droit de la vente  (13). Les consommateurs ont besoin de sécurité juridique. Le CESE se réjouit de voir que sa proposition de «second régime» est retenue par la Commission bien que sa préférence soit allée à deux textes séparés (un pour le B2B et un pour le B2C).

3.2.9   Le Comité attend avec intérêt l'agenda du consommateur européen (COM(2011) 777 final/2) annoncé par la Commission qui évaluera l'impact de la révolution numérique sur le comportement des consommateurs. Un cadre paneuropéen pour l’identification, l'authentification et la signature électroniques est nécessaire pour doubler le volume du e-commerce et en faire un levier de croissance (COM(2011) 942 final).

3.3   Sécuriser les échanges

3.3.1   Pour lutter contre le piratage et les contrefaçons, le projet douanier «FISCUS» (14) a pour objectif l’installation de contrôles en ligne dans toute l’UE. Pour le CESE, les douanes doivent être potentialisées au niveau des personnels et des contrôles effectués. L’Observatoire européen de la contrefaçon et du piratage pourrait être mieux profilé et se voir doté d'outils à la hauteur des enjeux économiques et de sécurité publique.

3.3.2   La réglementation doit aider les administrations à mener des enquêtes à partir des flux financiers suspects sur Internet. Les douanes peuvent être investies de la mission de protecteur du patrimoine culturel et immatériel européen et voir renforcer leur rôle d’aide aux PME à partir de bases de données, telle que la base sur l’accès aux marchés, le help desk «Exportation» ou le portail d’information virtuel unique.

3.4   Le Comité souhaite pour le citoyen une charte de la gouvernance et de la transparence. Il estime urgente la régulation sur le e-commerce incluant les e- et m-paiements.

3.4.1   Le CESE estime que la sécurité des nouveaux moyens de paiement numériques doit être garantie par des normes publiques. Pour le moment, seuls des acteurs privés (opérateurs) créent et contrôlent leurs normes et leur interopérabilité. Le CESE estime néfaste la situation où un pays tiers aurait la possibilité de contrôler tout mouvement financier européen.

4.   Développer la productivité et la croissance inclusive

4.1   Contexte utile à la croissance

4.1.1   Le marché numérique a besoin de gouvernance européenne, loyale et respectant les droits des citoyens. Après 2015, le guichet unique pour les biens et services devrait procurer assistance aux acteurs de l’économie européenne. Les entreprises du numérique doivent être soumises aux principes de la RSE et du dialogue social.

4.1.2   Le marché unique numérique reste fragmenté en marchés nationaux. Une législation unifiée donnerait l’occasion aux acteurs économiques de faire des économies d’échelle. Le CESE estime que la Commission devrait mettre en synergie les travaux de ses directions pour construire le puissant leadership nécessaire au développement du numérique dans toute l'Union et au rattrapage de tous ses retards; il est urgent pour l'UE de se doter de l'équivalent d'une «Silicon Valley» européenne centralisant cerveaux et capitaux publics/privés capables de risquer des «joint-ventures» gagnantes.

4.1.3   Le Comité rappelle son avis sur l’inclusion numérique où il évoque comment remédier aux inégalités d'accès au numérique; il souhaite que l'Union reconnaisse l'accès à l'infrastructure et à l'outil comme un droit fondamental et fasse du numérique un outil d’inclusion.

4.2   Les entreprises dans l'action «numérique» pour la croissance

4.2.1   L'économie numérique doit viser une croissance rapide du PIB, notamment par le financement de «start-up». Une certain «start-up» américaine est capitalisée aujourd'hui à hauteur de 75 milliards d'euros … La promotion de l’innovation passe par des modèles économiques basés sur la connaissance et augmente l’offre en ligne.

4.2.2   L'acceptation par le marché de nouveaux services dépend de la capacité des PME à s’engager dans le numérique (15) et à être interopérables. Elles devraient pour cela bénéficier d'une aide à leurs projets concrets. Le CESE demande à la Présidence de tirer le bilan des mesures:

le lancement du partenariat entre les pouvoirs publics de chaque État membre et les principaux acteurs des TIC;

l’utilisation de l'allocation de 300 millions d'euros aux entreprises développant des infrastructures dédiées aux économies d'énergie ainsi que les technologies intelligentes afférentes.

4.2.3   Les paiements électroniques par carte et mobile: L’Europe devrait garder dans ces domaines un leadership comparable à celui relatif à la carte à puce qui a entraîné une forte réduction de la fraude.

4.2.4   Le projet SEPA (Single Euro Payments Area – Espace unique de paiement en euros, règlement de février 2012, fixant le remplacement des virements et prélèvements nationaux par leur équivalent européen au 1er février 2014) englobe les principaux instruments de paiement de détail. Pour le CESE, les commissions entre banques et entre États membres devraient être harmonisées. La concurrence ne doit pas empêcher l’innovation, ni créer des coûts supplémentaires pour le consommateur.

4.2.5   Le CESE estime qu'un cadre approprié est nécessaire pour aider les PME à entrer sur le marché numérique comme sur les autres marchés.

a)

Sur le plan interne:

4.2.6.1

Le CESE préconise de définir au niveau européen le périmètre de l’économie numérique et l'intégrer dans des normes comptables. Ce périmètre pourrait englober les biens numériques et numérisables tout comme les biens qui ont besoin du numérique.

4.2.6.2

Le Comité estime que les entreprises devraient intégrer leurs avoirs numériques dans leur valorisation.

4.2.6.3

La mesure de l’impact réel du secteur des TIC sur les entreprises et sur la richesse nationale devrait se faire à partir de critères définis au niveau européen.

4.2.6.4

L'établissement du statut d’entreprise privée européenne (2008) (16) (proposition législative COM(2008) 396 final) permettrait aux PME de se développer en facilitant leurs activités commerciales transfrontalières.

b)

Sur le plan externe:

4.2.7.1

Un environnement industriel de soutien est utile à l’économie de la connaissance. Il facilite les investissements, l’usage transfrontalier des TIC et l’activité numérique. Mais les PME souffrent d'abord de la fragmentation juridique et technique, du manque de transparence et de modes livraisons sont souvent inadaptés.

4.2.7.2

Les modèles de réussite, comme DiSCwise, (DG TREN, In Freight Transport Logistics Action Plan), pourraient inspirer d’autres entreprises afin de créer des emplois et de la croissance (transport intelligent).

4.2.7.3

Mondialisation: Pour rester compétitive sur ses produits à forte valeur ajoutée, l'UE a besoin de la création de consortiums d'exportation, de clusters aidant la R&D, reconnus dans les États membres pour favoriser l’internationalisation des PME (http://ec.europa.eu/enterprise/newsroom/cf/itemlongdetail.cfm?item_id=4968.).

4.2.8   Le Cloud Computing peut aider les PME (17) si la sécurité des données, qui revêt un enjeu majeur entre les «géants» des services en ligne et les «FAI» (fournisseurs d'accès à internet) est réellement garantie. La Commission européenne devrait mettre l'accent sur le cloud au bénéfice des PME et les aider à y accéder (formations, financement).

4.2.9   L'Union devrait miser plus sur l’information des entreprises concernant leurs possibilités d’obtenir des financements, et diffuser l’idée de project bonds  (18).

4.2.9.1.1   Le CESE recommande de faciliter les investissements en capital risque au bénéfice des chercheurs et des entreprises innovantes (COM(2011) 702 final – Small Business, Big world).

4.2.10   Le Comité recommande d’établir un guide pour l’accès des entreprises à l’économie numérique transfrontière.

4.3   Le cas de la propriété intellectuelle

4.3.1   Pour le CESE, il est vital que l’Union protège la création, garante de son avenir, sur le plan interne et externe. L’exception culturelle doit être préservée car elle participe de la diversité européenne. Les mesures de protection à l’étude ne devront pas la menacer au profit des créations américaines.

4.3.2   , l'Article 118 du TFUE assure désormais la protection des droits de propriété intellectuelle dans l’Union; mais les 27 membres contrôlent différemment l'usage d'internet.

4.3.3    l’Union réexamine la politique d’application des DPI (Droits de Propriété Intellectuelle) dans les pays tiers en intégrant un concept de réciprocité et de négociations multilatérales comme dans le cas ACTA (ACTA: Anti-Counterfeiting Trade Agreement séparé de l'OMC signé par la Commission et 22 États membres en janvier 2012.).

4.3.4   Le Comité a voté un avis sur les droits de «DPI» qui préconise de ne pas les aborder avec une approche purement patrimoniale et financière (19).

4.3.4.1   En vue de la future proposition législative de la Commission (2012), le Comité insiste sur la nécessaire consultation des organisations représentatives des droits et intérêts en cause (20). Il insiste sur la transparence et le contrôle des organismes de gestion des droits d'auteur et droits voisins. Le Comité estime que la taxe pour copie privée est inéquitable car cette copie fait partie intégrante du fair use. Il faut faire la différence entre un citoyen qui a téléchargé pour son usage personnel et une personne organisant une activité lucrative basée sur de la contrefaçon à grande échelle. Les industries culturelles ne doivent pas devenir des machines à faire de l’argent ni le web un outil de privatisation de la culture et du savoir.

4.3.4.2   Le Parlement européen a reçu une pétition européenne de plus de 2 millions de signatures (site AVAAZ.org) appelant à «défendre un Internet libre et ouvert, et à refuser de ratifier ACTA». Il est important de noter que parmi les pays signataires d’ACTA ne figurent pas la Chine, la Russie, le Brésil et l’Inde d’où viennent de nombreux produits contrefaits.

Le Comité a le sentiment de ne pas avoir été entendu à propos de l’accord international «ACTA» (21). Il propose que dans l’hypothèse où ACTA serait applicable, la Commission veille à protéger la liberté des citoyens et leur capacité à créer.

4.3.5   Le CESE estime  (22) que pour éviter les détournements de trafics «numériques» et le dumping tout en protégeant les droits d’auteurs, la création d’un Code européen du droit d’auteur pourrait supprimer les doutes quant à la législation fiscale applicable.

4.4   Le secteur public

4.4.1   Les marchés publics, représentant 20 % du PIB, ont aussi besoin d’être sécurisés.

4.4.2   Le CESE estime nécessaire que les administrations publiques soient accessibles rapidement en ligne grâce à la sécurisation de l'identification électronique et des signatures électroniques pour tous, particuliers, administrations, entreprises, marchés publics.

4.4.3   Pour le secteur public, les États membres pratiquent avec la Commission «l'évaluation mutuelle» pour la mise en œuvre de la directive «Services». Le Comité préconise l’évaluation de la directive «Services» sur le plan des opportunités créées pour le marché unique numérique.

4.4.3.1   Le CESE est convaincu que le marché intérieur numérique peut développer l'offre publique grâce à la sécurité juridique et la technologie: les économies issues de solutions pour des services publics intelligents peuvent créer des marchés publics transfrontaliers «sans couture».

4.4.4   La révision par la Commission de la directive (23) sur la réutilisation de l'information de service public (ISP) peut simplifier le travail des entreprises et des particuliers (voir avis TEN/478 – en cours de rédaction).

5.   Faire du numérique un levier de croissance durable

5.1   Créer une économie sociale de marché durable et hautement compétitive passe pour l’Union par la création et l’innovation. Le numérique est un moyen mais aussi une valeur qui ne se réduit pas à sa dimension de marchandise.

5.2   Le Comité estime que manque une stratégie individualisée visant à garantir le caractère «durable» du marché unique numérique.

5.3   Des enquêtes devraient être faites pour mesurer l’empreinte carbone des entreprises engagées sur le marché numérique où elles sont en expansion. Le Comité estime que les technologies intelligentes peuvent optimiser la consommation énergétique globale et réduire ainsi les émissions de CO2.

5.4   Les matériels du numérique doivent être décarbonnés; le traitement propre en Europe des déchets venant des systèmes de traitement de l’information (avec récupération des métaux rares) représente un important marché potentiel et empêcherait de polluer les pays-tiers.

5.5   Le Comité demande à la Présidence qu'au cours de cette année 2012 pour le vieillissement actif soit mis en avant le caractère productif du numérique pour la gestion des soins médicaux et sociaux particulièrement dans le cas du vieillissement démographique: maintien dans l'activité par l'allègement de la pénibilité, et à titre général, communication, lutte contre l'isolement, télémédecine, robotique, sécurisation des personnes. Tous ces domaines représentent des opportunités de marché et la création de nouvelles formes d'emplois et de croissance.

5.6   L'achèvement des chantiers de l'espace est nécessaire à l'Union pour intégrer son marché numérique. Les moyens nécessaires doivent être alloués. Le CESE regrette que Galileo et son GNSS ne soient pas encore fonctionnels, alors que le modèle américain GPS est utilisé dans toute l'Europe et le monde (24).

Bruxelles, le 23 mai 2012.

Le président du Comité économique et social européen

Staffan NILSSON


(1)  Principaux avis du CESE sur le sujet:

JO C 318 du 23.12.2006, p. 20 - JO C 157 du 25.5.1998, p. 1JO C 376 du 22.12.2011, p. 62JO C 143 du 22.05.2012, p. 69JO C 318 du 29.10.2011, p. 99JO C 318 du 29.10.2011, p. 105JO C 68 du 6.3.2012, p. 28JO C 248 du 25.8.2011, p. 144JO C 97 du 28.4.2004, p. 21JO C 175 du 27.7.2007, p. 91JO C 77 du 31.3.2009, p. 60JO C 175 du 28.7.2009, p. 8JO C 218 du 11.9.2009, p. 36JO C 277 du 17.11.2009, p 85JO C 48 du 15.2.2011, p. 72JO C 54 du 19.2.2011, p. 58JO C 107 du 6.4.2011, p. 44JO C 107 du 6.4.2011, p. 53JO C 107 du 6.4.2011, p. 58JO C 376 du 22.12.2011, p. 92JO C 24 du 28.1.2012, p. 40JO C 318 du 29.10.2011, p. 9JO C 143 du 22.05.2012, p. 120.

(2)  JO C 175 du 28.7.2009, p. 43.

(3)  JO C 44 du 11.2.2011, p. 178.

(4)  JO C 318 du 29.10.2011, p. 9.

(5)  JO C 376 du 22.12.2011, p. 69.

(6)  JO C 70 E du 8.3.2012, p. 56-57.

(7)  JO C 24 du 28.1.2012, p. 139.

(8)  JO C 376 du 22.12.2011, p. 92.

(9)  JO C 143 du 22.05.2012, p. 120.

(10)  JO C 162 du 25.6.2008, p. 1.

(11)  Avis CESE «Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif au règlement en ligne des litiges de consommation (règlement relatif au RLLC)» (pas encore publié au JO)

(12)  JO C 162 du 25/06/2008, p. 1.

(13)  Avis CESE «Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif à un droit commun européen de la vente» et la «Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions: un droit commun européen de la vente pour faciliter les transactions transfrontières sur le marché unique»JO C 181 du 21.6.2012, p 75.

(14)  Avis CESE JO C 143 du 22.05.2012, P. 48.

(15)  JO C 80 du 3.4.2002, p. 67.

(16)  JO C 125 du 27.5.2002, p. 100.

(17)  JO C 24 du 28.1.2012, p. 40.

(18)  JO C 143 du 22.05.2012, p. 116 et JO C 143 du 22.05.2012, p. 134.

(19)  JO C 68 du 6.3.2012, p. 28.

(20)  Voir la note de bas de page précédente.

(21)  JO C 24 du 28.1.2012, p. 139.

(22)  JO C 143 du 22.05.2012, p. 69.

(23)  Avis CESE «Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 2003/98/CE concernant la réutilisation des informations du secteur public», JO C 191 du 29.6.2012, p. 129.

(24)  Avis CESE «Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif à la mise en place et l'exploitation des systèmes européens de radionavigation par satellite», JO C 181 du 21.6.2012, p. 179.


31.7.2012   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 229/7


Avis du Comité économique et social européen sur le thème «Paradis fiscaux et financiers: une menace pour le marché intérieur de l'UE» (avis d'initiative)

2012/C 229/02

Rapporteur: M. IOZIA

Corapporteur: M. HERNÁNDEZ BATALLER

Le 14 juillet 2011, le Comité économique et social européen a décidé, conformément aux dispositions de l'article 29, paragraphe 2, de son règlement intérieur, d'élaborer un avis d'initiative sur le thème:

«Paradis fiscaux et financiers: une menace pour le marché intérieur de l'UE».

La section spécialisée «Marché unique, production et consommation», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 8 mai 2012.

Lors de sa 481e session plénière des 23 et 24 mai 2012 (séance du 24 mai 2012), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 144 voix pour, 30 voix contre et 13 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1   L'Union européenne doit, par tous les moyens, renforcer son action au sein du G20, de l'OCDE et du Groupe d'action financière (GAFI) pour mettre fin, à court terme, à l'existence de juridictions opaques en matière de fiscalité et pour obliger ses États membres à lutter contre la criminalité qui trouve son origine dans nombre de ces territoires.

1.2   Les progrès réalisés en matière de gouvernance fiscale dans les enceintes internationales telles que l'OCDE et le G20 ne doivent pas empêcher l'Union européenne d'appliquer des normes plus strictes, facilitant le recouvrement des capitaux placés illégalement à l'étranger au détriment du marché intérieur.

1.3   Le CESE demande instamment aux institutions de l'Union européenne de prendre des mesures pour prévenir le recours abusif au «principe de résidence» dans le cadre de régimes de propriété et de domiciliation fictifs par lesquels des sociétés-écrans ou des sociétés holding sans aucune activité permettent à leurs propriétaires de ne pas être imposés dans le pays où ils sont domiciliés. Il souscrit à la décision de la Commission de présenter d'ici la fin de cette année une nouvelle proposition sur les paradis fiscaux et financiers, et souhaite que l'on parvienne à surmonter les réticences de certains États membres à trouver une réponse efficace et perspicace de lutte contre le recours à des activités visant à frauder les systèmes fiscaux nationaux ou à y échapper.

1.4   La Commission a publié une proposition de directive (COM(2012) 85 final) dans laquelle elle présente pour la première fois la réglementation relative au gel et à la confiscation des produits du crime dans l'Union européenne. Le CESE recommande vivement de considérer l'intégration des infractions fiscales, liées à l'utilisation des paradis fiscaux, dans les dispositions de cette directive. La proposition s'inscrit dans une initiative politique plus large destinée à protéger l'économie légale contre l'infiltration par les réseaux criminels et se fonde sur les articles 82, paragraphe 2 et 83, paragraphe 1, du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE).

1.5   Il est notoire que les nombreux territoires – 44 au total – considérés comme des paradis fiscaux sont liés à un État souverain du point de vue de la compétence juridictionnelle, ou sont eux-mêmes des États souverains. Même lorsqu'ils ne sont pas des États souverains, les paradis fiscaux bénéficient d'une grande autonomie administrative, appliquent des régimes opaques d'exonérations ou de réductions fiscales en ce qui concerne la propriété ou la provenance des capitaux et le fonctionnement des sociétés financières et commerciales établies sur leur territoire.

1.6   Le Comité considère que les pratiques des consultants fiscaux et juridiques et de certaines sociétés de conseil sont particulièrement graves et déplorables; en effet, elles offrent aux entreprises, en ayant notamment recours à des informations publicitaires, la possibilité de créer des entités juridiques leur permettant de bénéficier des paradis fiscaux et financiers et de se soustraire ainsi aux obligations pesant sur les entreprises établies dans l'Union, en particulier les obligations fiscales de paiement de l'impôt sur les sociétés, la transparence des activités des entreprises et de leurs opérations de financement.

1.7   Les paradis fiscaux engendrent des distorsions du marché intérieur; dès lors, une action résolue de l'Union s’avère nécessaire, qui soit en mesure de garantir l'équité fiscale, de lutter contre le manque de transparence, facteur de déstabilisation, et contre l'évasion fiscale et la corruption favorisées par les paradis fiscaux. Il ne faut pas exclure de prévoir la détection d'un délit pénal dans cette matière.

1.8   Il y a lieu de lever tous les obstacles s'opposant à l'échange automatique des informations bancaires dans le but d'identifier facilement les propriétaires réels des opérations et des comptes bancaires. Il importe d'exiger des entreprises multinationales qu'elles établissent leur bilan désagrégé par pays, précisant l'encours des créances, le nombre de salariés et l'importance des bénéfices réalisés dans chaque pays.

1.9   Sans préjudice d'autres avancées découlant d'initiatives à caractère général prises par les organisations internationales multilatérales, notamment par l'ONU et l'OCDE, il importe de mettre en œuvre l'ensemble de ces mesures dans un climat de confiance, en respectant le principe de l'équivalence des lois et en recherchant de nouvelles normes de coopération internationale plus exigeantes en matière de paradis fiscaux.

1.10   LE CESE souhaite qu'il y ait une stratégie coordonnée avec les principaux pays, au premier chef les États-Unis, en vue d'adopter l’approche la plus globale possible de la réglementation de ces questions. Parallèlement, le CESE rappelle que la difficulté à mettre en place un plan d'action adopté à l'échelon international ne peut en aucun cas freiner ou retarder l'action de l'Union européenne. Les normes européennes comptent parmi les plus efficaces au monde, par exemple celles prévues dans la directive sur l'épargne en Europe. La loi sur la conformité fiscale des comptes étrangers (Foreign Account Tax Compliance Act –FATCA) constitue une étape importante des efforts prodigués par les États-Unis en vue de renforcer le respect de la réglementation fiscale par les citoyens américains qui détiennent des instruments financiers étrangers et des comptes à l'étranger. Le fisc américain demande aux institutions financières étrangères de fournir de manière «automatique» les noms des citoyens qui ont une activité à l'étranger.

1.11   Parmi les États européens, la Belgique dispose d'une législation très avancée qui s'inspire du principe «confidentialité contre politique anti-criminalité». Le secret des données constitue l'alibi qui relègue au second plan le programme fiscal et le développement d'une politique de lutte contre l'évasion fiscale.

1.12   Il est nécessaire de développer des politiques intégrées et d'établir un lien entre les différents domaines d'action. Les normes comptables internationales ont été élaborées pour sauvegarder les intérêts des investisseurs et du marché: il y a lieu maintenant de faire porter les efforts également sur l'intérêt des citoyens. Il y a lieu de réévaluer le rôle du Conseil des normes comptables internationales (International Accounting Standards Board –- IASB), qui est un organisme privé, et sa fonction de fixation de règles comptables; ces dernières devraient être beaucoup plus simples et accessibles grâce à une lecture limpide et transparente.

1.13   Le CESE constate avec regret que l'ensemble des autorités policières, judiciaires et économiques savent depuis longtemps que la plupart des opérations de corruption de fonds publics, de fraude aux finances publiques réalisée grâce à l'évasion vers les paradis fiscaux, de recel de biens au moyen de prête-noms, de blanchiment d'argent et de corruption des autorités publiques seraient impossibles sans l'aide d'un «tissu» technico-légal qui couvre ces réseaux, en tire largement profit et peut parfois finir par se hisser à leur sommet. Une action de l'Union s'avère donc nécessaire dans ce domaine.

1.14   Le CESE soutient l'élaboration d'une stratégie coordonnée visant à renforcer la lutte contre la fraude fiscale, notamment contre les «pratiques abusives», et à adopter des réglementations qui imposent des restrictions à la liberté d'établissement en cas de montage purement artificiel à des seules fins fiscales.

2.   Introduction

2.1   Les «paradis fiscaux» sont des endroits qui abritent des cadres supérieurs des principaux groupes financiers et industriels de la planète, des personnalités de la jet-set artistique ou sociale, ainsi que des multimillionnaires qui y concilient revenus et loisirs. Ils fréquentent tous des personnes plus ou moins obscures qui utilisent les mêmes ressources financières afin de blanchir et d'utiliser des capitaux générés non seulement par infraction aux règlementations en vigueur, mais au moyen d'actes criminels et de délits financiers, allant de l'assassinat (gravité maximale) à l'extorsion, en passant par le trafic de drogues et d'armes, la contrefaçon, la fraude, l'escroquerie, la traite des blanches et les jeux illicites. Ces territoires sont dotés d'une série de caractéristiques communes, telles que le manque de transparence de leur fonctionnement ou un faible niveau de taxation pour les non résidents, qui, par ailleurs, n'exercent aucune activité sur ce territoire. Cela entraîne une concurrence nuisible reposant sur une structure secrète, créant un statut juridique sans aucune transparence.

2.2   Il y a lieu d'analyser la question des paradis fiscaux en fonction de trois aspects principaux: la réglementation fiscale et l'évasion fiscale qui pourrait en résulter; l'introduction de brèches dans la structure de la réglementation financière entraînant une menace pour la stabilité financière; l'opacité des informations avec le risque que des activités criminelles s'appuient sur ces paradis fiscaux. Le dénominateur commun de ces aspects, régis respectivement par l'OCDE, le Conseil de stabilité financière (CSF) et le Groupe d'action financière (GAFI) est constitué par le caractère secret des données ou par la difficulté à accéder aux informations. La suppression ou la limitation de l'opacité des informations permettraient de réduire considérablement les problèmes et les menaces liés aux paradis fiscaux. Le débat sur les normes en cours à l’OCDE devrait se poursuivre et avoir pour objectif de réduire la charge pour les autorités fiscales et juridictionnelles. Le risque réel encouru est que l'on s'accorde sur des normes insuffisamment contraignantes et trop compliquées dans le seul but d'apporter une réponse à l'opinion publique (window dressing). La solution la plus simple pour surmonter ces problèmes consisterait à parvenir à un échange automatique des informations.

2.3   Le phénomène des paradis fiscaux et financiers est partie intégrante de l'histoire du capitalisme et l'on en trouve des exemples dès la fin du Moyen Âge. La révolution française et la révolution industrielle ont marqué un tournant essentiel pour la naissance et le développement des paradis fiscaux.

2.4   Le phénomène a pris une dimension très importante au cours de la période qui a suivi la Seconde Guerre mondiale et s'est répandu dans toutes les régions du globe, dans le Pacifique, dans la région des Caraïbes, dans les îles de l'Atlantique mais également dans des États européens de petite ou de toute petite dimension. L'on estime que seulement dans ce qu'il est convenu d'appeler les paradis fiscaux, financiers et de sociétés, disséminés sur tout le territoire européen, un million de sociétés et deux millions de trusts ont été créés. D'après Raymond Baker, directeur de l'organisation Global Finance Integrity, rien que dans les Îles Vierges britanniques, 619 916 sociétés sont enregistrées, soit 20 par habitant.

2.5   Le contexte économique actuel est caractérisé par la mondialisation des échanges des biens et des services, la libre circulation des capitaux et le recours massif aux nouvelles technologies s'appliquant également aux transactions financières internationales et commerciales. Malgré la présence d'un département de vérification de la conformité dans la plupart des institutions financières, les prescriptions qui régissent les transactions, dont le nombre quotidien est exorbitant, ne sont pas suffisantes.

2.6   Le marché intérieur européen, le bon fonctionnement des marchés financiers et commerciaux, le développement harmonieux d'une économie respectant des règles communes adoptées pour sauvegarder l'intérêt général, doivent se mesurer à des flux financiers massifs mis à l'abri dans des régions et des États faisant preuve de complaisance, protégés par des intérêts très puissants et par une capacité à corrompre et à assujettir à ses propres intérêts des services administratifs entiers.

2.7   Les paradis fiscaux introduisent des distorsions tant au niveau macroéconomique que microéconomique. Au niveau macroéconomique, comme nous l'avons déjà rappelé, ils peuvent constituer une menace pour la stabilité des systèmes financiers. Par ailleurs, la possibilité offerte de se soustraire à la taxation sur les investissements réels et/ou financiers ou de l'éviter entraîne une diminution des recettes fiscales des États, qui, inévitablement, devront être compensées par une taxation des revenus du travail: les paradis fiscaux constituent ainsi une source de distorsion du juste équilibre entre la taxation du travail et la taxation du capital. Au niveau microéconomique, l'on constate une distorsion entre les grandes, les petites et les microentreprises: pour ces trois types d'acteurs, en effet, la possibilité de bénéficier des offres d'évasion fiscale, ou tout au moins de planification fiscale agressive, proposées par les paradis fiscaux, diminue progressivement.

2.8   Au cours de la première décennie du XXIe siècle, à la suite des deux catastrophes qui ont eu pour épicentre les États-Unis – les attentats criminels du 11 septembre 2001 à New York et à Washington et la crise financière déclenchée par la faillite de la banque Lehman Brothers en septembre 2008 –, des actions concertées de la communauté internationale ont été promues afin de réglementer le fonctionnement de ce qu'il est convenu d'appeler «les paradis financiers et fiscaux».

3.   Paradis fiscaux et financiers

3.1   Les fâcheuses conséquences engendrées par ces régimes ont conduit dans de nombreux cas à engager des poursuites pénales à cause du financement du terrorisme international et de la criminalité organisée, de l'évasion fiscale et du blanchiment d'argent, ce qui a donné lieu, entre autres, à des risques systémiques sur les marchés financiers et des entraves aux principes fondamentaux de la libre concurrence.

3.2   Ainsi, comme nous venons de le voir, cette situation a encouragé, ces dernières années, la mise en œuvre d'actions au niveau mondial et il a été décidé de mettre en place des structures et des mécanismes de réaction commune aux menaces pour la sécurité nationale des États et le bien-être de leurs citoyens.

Parmi les différentes décisions prises au niveau international, une évolution fondamentale est peut-être intervenue par rapport aux approches adoptées avant l'accord conclu lors du sommet de Londres du G20 du 2 avril 2009.

3.3   Le CESE soutient la mise en œuvre de mesures qui favorisent la lutte contre la fraude fiscale et toute autre activité illégale portant atteinte aux intérêts financiers de l'UE et de ses États membres, et qui visent à garantir la coopération administrative sous forme d'échange d'informations en matière fiscale. Il convient d'autoriser l'UE à entamer des négociations en vue de conclure un accord avec la Confédération suisse pour lutter contre la fraude et l'évasion dans le domaine de la fiscalité directe et garantir la coopération administrative sous forme d'échange d'informations en matière fiscale.

3.4   À la suite de ce sommet du G20, la méthode de l'analyse et de la recommandation, qui était utilisée dans le cadre des précédentes procédures des organismes et des forums traitant ces problèmes, est abandonnée et l'on exige une condamnation des «juridictions non coopératives», notamment tous les paradis fiscaux et financiers. Des sanctions unilatérales, bilatérales et multilatérales sont également proposées, ainsi que l'élimination progressive du secret bancaire et la publication périodique des listes des territoires contrevenants.

3.5   Néanmoins, la mise en œuvre ultérieure de ces engagements pris par le G20 a été très décevante. Différentes raisons peuvent être invoquées.

3.6   De nombreux territoires ont échappé à l'appellation de pays et juridictions non coopératifs grâce à la simple conclusion d'au minimum douze accords fiscaux bilatéraux qui s'appliquent entre ces territoires (par exemple, l'accord entre les Principautés du Liechtenstein et de Monaco).

3.7   En résumé, ces accords sont suffisants pour garantir un échange d'informations, à la demande des autorités responsables de l'application des mesures concernées (fiscales, pénales, etc.), sans que les pouvoirs publics du territoire en question puissent s'y opposer en alléguant l'intérêt national, le secret bancaire ou d'autres raisons semblables.

3.8   Dans ces cas, le manque d'efficacité du modèle d'action bilatérale est évident, et il faudrait dès lors s'attacher à améliorer l'action aux échelons international (multilatéral) et supranational.

C'est ce que confirme le rapport publié le 4 octobre 2011 par le Réseau mondial pour la justice fiscale (Tax Justice Network), qui considère inutiles presque tous les accords bilatéraux conclus depuis 2009. Par conséquent, ce réseau a élaboré un indice d'opacité financière sur la base de deux critères: les obstacles aux demandes d'informations émanant des autorités compétentes d'un autre pays, et l'importance des juridictions soupçonnées d'opacité sur le marché financier mondial.

3.9   Par ailleurs, comme le montrent également différents rapports spécialisés (tel que celui élaboré par l'organisation Global Financial Integrity), les flux de capitaux illicites ne cessent d'augmenter à un taux supérieur à 10 % par an, entraînant des conséquences désastreuses qui aggravent les crises de la dette souveraine frappant de nombreux pays de la communauté internationale et, notamment, certains États de l'Union européenne.

3.10   Malheureusement, seule l'UE a défini un cadre réaliste pour engager des actions dans ce domaine, cadre qui d'ailleurs n'est pas appliqué de manière suffisante.

3.11   Cette situation est illustrée de manière éclatante par la mise en œuvre de la directive 2003/48 en matière de fiscalité de l'épargne des non-résidents (personnes physiques) sous forme de paiements d'intérêts.

3.12   Ces insuffisances ont été constatées même si, dès l'entrée en vigueur de la directive, des systèmes d'échange automatique d'informations fiscales entre tous les États membres ont été mis en place, et bien que la conclusion de conventions avec les quatre États européens qui étaient auparavant considérés comme des paradis financiers et fiscaux (les Principautés d'Andorre, du Liechtenstein, de Monaco et la République de Saint-Marin) ait été encouragée.

3.13   Mais ces États européens, tout comme la Confédération suisse, ont établi avec l'Union européenne des relations hétérogènes qui rendent l'application de ces conventions très complexe. Par exemple, la Principauté du Liechtenstein a adhéré à l'accord sur l'Espace économique européen mais n'a pas d'obligation en ce qui concerne la compétence juridictionnelle civile et commerciale à coopérer sous les mêmes contraintes avec les autorités administratives concernées, car elle n'est pas partie à la Convention de Lugano II du 30 octobre 2007 concernant la compétence judiciaire et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale.

3.14   Espérons qu'à brève échéance cette modification de statut juridique apportera les changements attendus, compte tenu de l'entrée en vigueur du traité de Lisbonne, qui, en vertu de l'article 8, paragraphe 2 du traité sur l'Union européenne et de la déclaration no 3 annexée à cet article, soutient la mise en place de relations spécifiques structurelles avec les pays proches de petite dimension territoriale.

3.15   De toute évidence, l'instrument idéal pour réglementer cette question serait de signer un partenariat multilatéral afin d'intégrer au sein d'un modèle unique ces juridictions non coopératives dans l'espace géopolitique, juridique et économique naturel.

3.16   De la même manière, quatre États membres ont fait l'objet de recours par la Commission européenne devant la Cour de justice pour non-transposition de la directive 2005/60 concernant le gel des fonds.

3.17   Dans le but de promouvoir une action ayant un réel impact supranational, il y a lieu que le Comité économique et social européen s'aligne sur la position ferme exprimée par le Parlement européen dans sa résolution d'avril 2011 (1), dans laquelle il a défendu entre autres le renforcement de la lutte contre l'opacité des informations relatives aux transactions financières transnationales. L'on pourrait également instituer un instrument de dénonciation semblable à l’acte de clémence en matière de libre concurrence afin d'encourager le signalement de ce type de comportement, en gratifiant de mesures économiques les personnes dénonçant les faits par une réduction de la sanction devant être infligée.

3.18   Par ailleurs, en complément à la mesure précédente, il convient d'insister sur la nécessité de disposer de mécanismes concertés dans le cadre du G20 en vue de combler les failles législatives relatives aux activités «offshore» qui contournent la législation fiscale en vigueur dans les principaux centres financiers du monde.

3.19   Dans le cadre rigoureux des compétences établi par l'Union européenne, il importe d'adopter sans tarder des règles ad hoc contraignantes de droit dérivé qui comportent, entre autres, des dispositions interdisant à toute personne physique ou morale, contrôlant des fonds ou des entités domiciliées dans des paradis fiscaux et financiers, de bénéficier de fonds publics.

3.20   En 2009, l'OCDE estimait que les capitaux déposés dans ces paradis fiscaux oscillaient entre 1 700 et 11 000 milliards de dollars, et avait dès lors établi une liste, qui a servi de base au G20 pour lancer avec une certaine fermeté un débat avec les États n'appliquant aucune, ou seulement quelques-unes des conventions internationales relatives à la transparence bancaire ou fiscale.

3.21   Le rapport établi par l'OCDE a suscité de vives protestations, notamment de la Suisse, du Luxembourg et bien entendu de l'Uruguay. Des débats animés ont eu lieu concernant l'État du Delaware aux États-Unis.

3.22   Que l'État du Delaware soit une sorte de paradis fiscal est un fait notoire pour la population américaine: presque la moitié des sociétés cotées à Wall Street et sur le marché du Nasdaq ont leur siège social dans l'État du vice-président des États-Unis, Joe Biden, dans le but de payer moins de taxes locales, les bénéfices n'étant pas imposables. En revanche, à l'exclusion des opérateurs du secteur qui sont informés depuis longtemps, moins nombreux sont ceux qui savent que ce petit État situé au sud de la Pennsylvanie offre d'importants avantages aux sociétés offshore, se présentant comme une alternative aux Îles Caïmans ou aux Bermudes. Les bénéficies des sociétés établies dans l'État du Delaware sont imputables dans un souci de transparence à leurs propriétaires, lesquels ne sont pas soumis à taxation dans ce pays lorsqu’ils ne sont pas citoyens américains ou lorsque l'activité de la société est exercée en-dehors des États-Unis.

3.23   Le blanchiment d'argent, l'évasion fiscale, les provisions pour des opérations de corruption ou pour détourner des fonds vers des sociétés propres constituent le principal fonds de commerce de ces paradis fiscaux. C'est de ces territoires que partent les attaques spéculatives contre les dettes souveraines des États en difficulté, ainsi que les grandes campagnes de défense de la liberté inconditionnelle de circulation des capitaux, qui impliquent les médias, les partis politiques et les représentants des institutions.

3.24   Une mauvaise gouvernance en matière fiscale encourage la fraude et l'évasion fiscale, et grève lourdement les budgets nationaux et le système des ressources propres de l'Union européenne.

3.25   Un grand nombre de multinationales se sont organisées pour tirer parti de l'évasion fiscale dans les diverses juridictions où elles exercent leurs activités. La disparité des régimes fiscaux d'une juridiction à l'autre favorise les entreprises de grande taille, d'envergure internationale ou de création ancienne au détriment des entreprises de petite taille, d'envergure nationale ou de création récente (start-ups). Ces stratégies d'évasion fiscale sont contraires au principe de la concurrence loyale et à la responsabilité des entreprises. Par ailleurs, ces territoires deviennent une base opérationnelle d'organisations et d'entreprises qui introduisent sur le marché intérieur des marchandises dépourvues de certificat d'origine correspondants et de garanties requises par l'UE, ce qui nuit gravement aux intérêts des consommateurs et, parfois, à la santé publique. Un système utilisé dans ce but est celui de l'abus de l'établissement du prix de transfert, qui permet de fixer les prix des transactions au sein du même groupe en se basant sur des paramètres d'évaluation dépendant des exigences fiscales du groupe au lieu de se référer aux conditions normales du marché.

3.26   Les entreprises multinationales disposent sans aucun doute des ressources pour fournir, sans lourdes charges administratives additionnelles, des rapports publics établis pays par pays sur les ventes, les bénéfices d'exploitation, les opérations intragroupe, les bénéfices avant impôts, les impôts. Si ces informations tombaient dans le domaine public, l'on verrait avec plus de clarté qui abuse de la pratique de l'établissement du prix de transfert ou qui est en train d'adopter une planification fiscale agressive.

3.27   L'absence de contrôles fiscaux ou l'existence de réglementations insuffisantes en matière de surveillance prudentielle, l'opacité des informations pour identifier les personnes physiques ou morales ou tout autre élément inhérent au cadre juridique ou administratif permettent aux entreprises opérant depuis les paradis fiscaux de bénéficier d'une impunité presque totale et d'avantages compétitifs inacceptables, ainsi que d'une protection contre les recours des autorités judiciaires et administratives des États tiers.

3.28   Le CESE condamne expressément le rôle joué par les paradis fiscaux, qui incitent à pratiquer l'évasion fiscale, la fraude fiscale et la fuite des capitaux, ainsi qu'à en tirer profit. L'Union européenne doit renforcer son action contre ces pratiques et appliquer des sanctions concrètes.

3.29   La communauté internationale, consciente des graves préjudices causés par l'existence de ces territoires au commerce international, aux intérêts des Trésors publics nationaux, à la sécurité et à l'ordre public, et, comme le prouve la crise qui a commencé en 2008, à l'équilibre même des systèmes financiers, a pris quelques initiatives timides afin de les repérer et de s'employer à les éliminer progressivement.

3.30   L'action conjointe du G20 et des Nations unies, ainsi que les efforts réalisés dans le cadre des initiatives dirigées par l'OCDE, ont débouché sur des résultats qui demeurent insuffisants pour faire face aux défis que représentent les paradis fiscaux et les centres financiers offshore et qui doivent être suivis d'actions déterminantes, efficaces et cohérentes.

3.31   Cependant, les actions entreprises entre autres par le G20, le GAFI et l'OCDE ont seulement permis jusqu'à présent d'alléger les graves conséquences des préjudices causés par les paradis fiscaux et financiers.

3.32   Il est nécessaire de mettre en évidence les juridictions qui refusent de coopérer, la définition d'une procédure d'évaluation du respect des règles et l'application de mesures dissuasives permettant d'encourager le respect des normes. Le CESE considère, en outre, que l'OCDE n'est pas un cadre satisfaisant pour lutter contre les paradis fiscaux. Il est nécessaire d'améliorer l'indicateur qui permet d'obtenir le statut de juridiction coopérative, par exemple en lui donnant une valeur qualitative. En outre, l'OCDE ne devrait pas permettre aux États d'éviter de se retrouver sur sa liste noire par la simple promesse de respecter les principes de l'échange d'informations, mais sans garantir que ces principes soient effectivement mis en pratique.

3.33   Il y a lieu de penser que la crise financière a été engendrée en partie par des opérations complexes et peu transparentes réalisées par des acteurs financiers domiciliés dans des juridictions caractérisées par le secret fiscal, ce qui a causé un grave préjudice aux investisseurs et aux acquéreurs de ces produits financiers. Les paradis fiscaux hébergent des opérations hors bilan d'institutions financières ainsi que des produits financiers complexes, qui n'ont pas contribué à l'innovation du secteur financier et qui provoquent une instabilité financière. L'on dispose de suffisamment de preuves que, notamment dans les pays en voie de développement, de nombreux investissements étrangers proviennent des paradis fiscaux.

3.34   L'Union européenne, consciente de la situation, a condamné régulièrement ces régimes par la voix de différentes autorités institutionnelles. Malheureusement, elle n'a pas été en mesure de promouvoir un cadre réglementaire et administratif supranational qui contribue à réduire les cas d'impunité.

3.35   L'action menée par l'UE a visé essentiellement à éliminer environ cent régimes fiscaux nuisibles et situés dans la juridiction de ses États membres avec pour corollaire un contrôle financier insuffisant, ou situés à l'extérieur, sur le territoire de pays tiers. À cet égard, la Commission européenne a adopté deux communications, en 2009 et en 2010, sur la bonne gouvernance dans le domaine fiscal, ainsi qu'un code de conduite. En outre, trois directives relatives aux bénéfices des ressources récupérées de l'évasion fiscale, la coopération administrative et la fiscalité de l'épargne (en cours de révision) sont en vigueur. Par ailleurs, le statut des clauses de conformité des bonnes pratiques ou la bonne gouvernance en matière de taxation sont très répandus dans les accords conclus entre l'UE et des pays tiers en matière d'association, de commerce et de coopération.

3.36   Toutefois, les progrès restent limités car les compétences en matière d'enquête et de sanction relèvent des États membres.

3.37   Selon les établissements bancaires, la réglementation américaine mentionnée a montré que l'adoption unilatérale de ce type de mesures peut poser des problèmes pour les établissements financiers découlant de l'incompatibilité des obligations de communication, de saisies conservatoires et de fermeture des comptes imposées par la loi FACTA et la législation de l'Union et/ou du pays de résidence de l'établissement financier.

3.38   Un important discours a été prononcé au Congrès américain le 4 mars 2009, par le Premier ministre britannique de l'époque, qui a exhorté son allié à un engagement commun en faveur d'un système économique réglementé à l'échelle mondiale et à une détermination à lutter contre l'utilisation des systèmes financiers à des seules fins d'enrichissement personnel.

Bruxelles, le 24 mai 2012.

Le président du Comité économique et social européen

Staffan NILSSON


(1)  Résolution du Parlement européen du 6 avril 2011 sur la protection des intérêts financiers de l'Union européenne et la lutte contre la fraude – Rapport annuel 2009 (2010/2247(INI)).


31.7.2012   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 229/13


Avis du Comité économique et social européen sur le thème «Horizon 2020: feuille de route concernant le vieillissement» (avis d'initiative)

2012/C 229/03

Rapporteure: Renate HEINISCH

Le 14 juillet 2011, le Comité économique et social européen a décidé, conformément à l'article 29, paragraphe 2, de son règlement intérieur, d'élaborer un avis sur le thème

«Horizon 2020: feuille de route concernant le vieillissement»

(avis d'initiative).

La section spécialisée «Marché unique, production et consommation», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 8 mai 2012.

Lors de sa 481e session plénière des 23 et 24 mai 2012 (séance du 23 mai 2012), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 184 voix pour, 3 voix contre et 4 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1   Pour faire face aux enjeux majeurs actuels et tirer parti des possibilités offertes par le changement démographique en termes d’évolutions socio-économiques futurs, les États membres de l'Union européenne seront de plus en plus souvent appelés dans les années à venir à prendre des dispositions appropriées à différents niveaux et dans de multiples domaines.

1.2   Une recherche coordonnée peut contribuer de manière déterminante à l'adoption de mesures adéquates au niveau régional, national et européen, en offrant des bases solides aux mesures de planification et à la prise de décisions.

1.3   Le CESE soutient sans réserve la demande déjà exprimée à plusieurs reprises de voir la recherche européenne dans le domaine du vieillissement et de l'évolution démographique poursuivre des activités à long terme et interdisciplinaires, transfrontalières ou tout au moins comparables.

1.4   Pour développer une recherche européenne d'excellence, il est essentiel de disposer d'infrastructures adaptées et d'assurer la coordination des activités de recherche à des fins d'intégration. Une coordination centrale s'avère également indispensable lorsqu'il s'agit de réunir un budget et de répartir les ressources. Le Comité recommande en conséquence la création d'un centre européen de la recherche sur le vieillissement, qui assumerait les tâches de coordination.

1.5   Des feuilles de route pour la mise en train de programmes de recherche à long terme constituent des instruments utiles qui définissent les priorités de la recherche future. Les feuilles de route actuelles sur le vieillissement et l'évolution démographique ont déjà mis en avant des aspects essentiels qui entrent en ligne de compte dans le programme-cadre «Horizon 2020» (1).

1.6   Le Comité se félicite que, parmi les axes de recherche de la priorité «Défis de société» du 8e PC, figurent «la santé, l’évolution démographique et le bien-être» (2).

1.7   En dehors des priorités actuelles de recherche figurant dans les feuilles de route aujourd'hui en vigueur et dans le 8e PC «Horizon 2020», le Comité invite la recherche européenne future à se pencher également sur d'autres domaines, beaucoup plus innovants et sans doute plus problématiques, liés au vieillissement et à l'évolution démographique. Cela inclut des aspects tels que la préservation de la santé et la rééducation, l'allongement de la vie active, les exigences d'une vie de plus en plus autonome et coresponsable, l'apprentissage en vue d'une longue vie, les répercussions de la technicité croissante sur certains aspects de la vie et les enjeux que constitue pour la société européenne l'évolution démographique, sociale et technique.

2.   Motivation / Observations générales

2.1   Pour faire face aux enjeux et tirer parti des possibilités offertes par le changement démographique, il importera dans les années à venir de poser de solides jalons pour des mesures de planification et la prise de décisions, qui permettent l'adoption de mesures qui détermineront la ligne de conduite future. C'est notamment grâce à une recherche appropriée que de telles bases pourront être établies. Les résultats des programmes européens de recherche des années passées, comme par exemple les cinquième, sixième et septième programmes-cadres de recherche (3), le programme commun d'assistance à l'autonomie à domicile (4) (PCAAD) (5), le programme-cadre pour l’innovation et la compétitivité (PIC) (6) et les activités ERA-Net ont déjà clairement mis en évidence l'utilité de la recherche. La recherche peut ainsi contribuer de manière déterminante à la maîtrise de l'évolution démographique, en tirant parti de ses potentialités positives au niveau régional, national et européen.

2.2   Les feuilles de route constituent une étape dans l'élaboration de programmes de recherche à long terme. C'est là le format adéquat pour exposer des voies ou des scénarios de développement possibles pour l'avenir, signaler la nécessité d'interactions transsectorielles, répertorier les partenaires et les parties prenantes dont la coopération s'imposera, sonder les marges de manœuvre politiques et les options de financement et développer des stratégies de mise en œuvre des processus et des résultats.

2.3   Des feuilles de route ayant trait à la recherche ont été élaborées et déployées dans de nombreux domaines ces dernières années. Parmi la multitude de feuilles de route nationales et internationales circulant actuellement, nous n'en citerons ici qu'un petit nombre à titre d'exemple: en Suisse, la feuille de route pour les infrastructures de recherche (7), en Allemagne, le projet porté par le ministère fédéral de l'éducation et de la recherche «Feuille de route sur les technologies environnementales à l'horizon 2020» (8), aux États-Unis, la feuille de route des Républicains sur l'avenir de l'Amérique (9), les feuilles ERA sur le développement de bâtiments à haute efficacité énergétique (10), ou encore la feuille de route de recherche VPH-FET (Virtual Physiological Human-Future and Emerging Technologies) (11).

2.4   Les feuilles de route afférentes à la recherche et l'innovation des années à venir dans le domaine du vieillissement et de l'évolution démographique mettent l’accent sur les aspects liés à la santé prise dans son acception la plus large. Parmi elles, entre autres, les feuilles de route émises dans le cadre des projets européens de «Future BNCI»: Future Directions in Brain/Neuronal Computer Interaction (BNCI) Research (2010-2011); DIAMAP: Road Map for Diabetes Research in Europe (2008-2010); ROAMER: A Roadmap for Mental Health Research in Europe (2011-2014); WhyWeAge: A road map for molecular biogerontology (2008-2010) (12), sans oublier les feuilles de route nationales telles que la feuille de route afférente au programme de recherche sur la santé élaborée par le gouvernement fédéral allemand (13).

2.5   Les feuilles de route aux thématiques plus larges consacrées à la question du vieillissement et de l'évolution démographique, citent elles aussi des aspects liés à la santé comme étant des priorités de recherche. On pense ici à celles élaborées dans le cadre des projets européens FUTURAGE – A Road Map for Ageing Research (14) et BRAID: Bridging Research in Ageing and ICT Development (2010-2012) (15). La feuille de route FUTURAGE développe trois axes en lien avec la santé: «Healthy Ageing for More Life in Years» [Vieillir en bonne santé pour vivre plus intensément son grand âge], «Maintaining and Regaining Mental Capacity» [Conserver et restaurer ses capacités mentales] et «Biogerontology: from Mechanisms to Interventions» [La biogérontologie: des mécanismes aux interventions] (16). Dans le cas du projet BRAID, l'articulation se joue autour du thème «Health and Care in Life» [La santé et les soins au cours de la vie].

2.6   La Commission entend, au moyen de partenariats public-privé et public-public (17), mettre en place de nouveaux instruments permettant de répondre aux défis sociétaux auxquels nous faisons face aujourd'hui (18). Pour ce qui est des initiatives conjointes, il convient de citer en particulier les partenariats d'innovation européens, dont le partenariat d'innovation européen pour un vieillissement actif et en bonne santé (19), la stratégie numérique pour l'Europe (20), l'initiative de programmation conjointe «Vivre plus longtemps, et mieux – Les enjeux et les défis de l'évolution démographique» (21) ainsi que le futur programme-cadre «Horizon 2020» (22).

2.7   Si ces ébauches de constitution de partenariats pour la recherche et l'innovation sont importantes et nécessaires, il est urgent de mettre en place d'autres activités de recherche plus ambitieuses encore. Le monde, la société, les techniques, la médecine, évoluent en permanence, et ceux et celles concernés par le vieillissement changent aussi avec le temps. C'est pourquoi il faudra toujours entreprendre de nouvelles recherches, pour pouvoir s'adapter à temps, à l'aide des mesures (politiques) adéquates, aux nouvelles circonstances, et éviter ainsi d'être à la remorque de l'évolution.

2.8   Dès lors, le CESE se félicite que la Commission soutienne ainsi les initiatives de programmation conjointe et l'élaboration de feuilles de route afférentes aux activités futures de recherche à mener dans le domaine du vieillissement et de l'évolution démographique (23), et salue la programmation d'un volet intitulé «Santé, évolution démographique et bien-être» au sein de l'axe prioritaire «Défis sociétaux» du programme-cadre «Horizon 2020» (24).

3.   Observations particulières

3.1   Infrastructures requises

3.1.1   La recherche européenne, on le dit depuis longtemps, doit être menée à long terme et sur un mode qui privilégie l'interdisciplinarité, dans un cadre transnational, ou à défaut de manière à permettre les comparaisons (25). Ces exigences n'ont rien perdu de leur pertinence et peuvent être reprises dans le cadre du présent avis. Il est évident que toute recherche comparative requiert qu'il soit tenu compte des conditions structurelles qui ont présidé dans chaque cas.

3.1.2   De plus, la recherche dans le domaine du vieillissement doit inclure tous les acteurs travaillant sur ou concernés par le sujet, au nombre desquels comptent sociologues, biologistes, et autres spécialistes du monde vivant, ingénieurs et designers, fabricants et prestataires de services, responsables politiques, architectes, urbanistes et responsables des infrastructures de transport, représentants de l'économie et de la société civile, sans oublier les personnes vieillissantes. Dès lors, on ne peut que se féliciter de l'intégration prévue des différents mécanismes européens d'intervention (ERA-Net, ERA-Net Plus, INNOVA et PRO INNO) au sein d'un instrument ERA-Net qui gagnerait en souplesse, afin de rendre plus aisée la participation des acteurs concernés.

3.1.3   On ne peut prétendre à une recherche européenne d'excellence au sein de l'Espace européen de recherche (EER) sans disposer de l'infrastructure correspondante et sans coordonner les activités de recherches et procéder à leur intégration. L'élaboration d'un budget et la répartition des fonds réclament elles aussi une coordination centralisée. Pour autant, les activités de recherche menées à l'échelon national n'en deviennent nullement superflues. Ce qu'il faut viser, en revanche, c'est une compatibilité maximale des recherches menées isolément au niveau national, afin que les résultats puissent être soumis à des analyses comparatives et partant, exploités. Le Comité recommande dès lors l'instauration d'un centre européen de recherche sur le vieillissement qui assurerait la coordination.

3.2   Autres besoins en matière de recherche

3.2.1   Outre les exigences générales déjà mentionnées, des domaines thématiques se dessinent dans lesquels il faudra intensifier l'activité des chercheurs à l'avenir. Nous vivons aujourd'hui non seulement une évolution démographique sans précédent, mais assistons également à des évolutions technologiques susceptibles de modifier durablement la vie en société, les soins de santé et notre rapport à l'environnement.

3.2.2   Rester en bonne santé

Il conviendrait de regrouper dans un premier grand domaine de recherche toutes les questions qui ont trait au maintien des personnes en bonne santé, car la santé physique et mentale est une condition préalable d'une vie qui soit réellement synonyme d'autonomie et d'activité une fois atteint un certain âge. Pour les chercheurs, cette préoccupation se traduit par exemple par les questions suivantes:

Comment encourager les gens, dès leur enfance, à adopter un mode de vie sain?

Quelles stratégies mettre en œuvre pour élaborer avec succès des mesures de prévention et les promouvoir de façon ciblée?

Quels types de traitement et de rééducation se sont révélés les plus performants à l'échelle internationale? Quels domaines accusent un retard qu'il faudra combler ou réclameraient davantage de recherche et développement?

Comment améliorer les compétences des patients?

Comment échapper aux dangers sanitaires touchant tous les pays, aux maladies rares ou chroniques, à la démence sénile et aux autres maladies neurodégénératives, ou, faute de mieux, établir des diagnostics précoces et par quel traitement y répondre?

Les recherches portant sur l'efficacité des médicaments et leurs interactions auprès des patients âgés, notamment la population féminine, demeurent lacunaires. Jusqu'à présent, les essais de médicaments sont réalisés majoritairement sur des patients jeunes, alors qu'ils sont administrés principalement à des patients âgés.

La manière dont les douleurs chroniques influent sur l'état de santé des personnes âgées mérite d'être mise en évidence; il s'agit notamment de s'interroger sur les moyens de les atténuer et de faire en sorte que la population vieillissante de l'UE se sente mieux.

L'abus d'alcool et de narcotiques chez la population âgée n'a guère fait l'objet de recherches jusqu'à présent, pas plus que n'ont été explorées les causes de ce phénomène, et ses conséquences physiques, psychiques et sociales.

3.2.3   Allongement de la vie active professionnelle

Compte tenu des modifications structurelles que connaît la pyramide des âges et de l'allongement de l'espérance de vie, le maintien d'une activité professionnelle au-delà de la limite d'âge actuelle apparaît comme une nécessité incontournable. Dès lors, la recherche devra par exemple répondre aux interrogations suivantes:

Quel est le sentiment exprimé par les actifs à l'égard d'une plus grande souplesse au niveau de la limite d'âge fixée pour le travail? Quels paramètres déterminent ce positionnement (par exemple, nature du travail, critère des prestations sociales prévues par les États, spécificités régionales, etc.)?

Quels doivent être les critères présidant à l'éducation et à la prévention, afin de permettre ou d'accentuer cet assouplissement? Quelles expériences ont-elles déjà été menées au niveau national et quels enseignements en tirer?

Comment configurer les emplois, organiser les régimes de temps de travail et atténuer le stress professionnel, pour permettre un allongement de la vie professionnelle? Quel rôle peuvent jouer les innovations techniques à cet égard?

Que font les entreprises - ou que pourraient-elles faire - pour encourager un engagement citoyen, pour que leur personnel s'engage plus volontiers en faveur de causes citoyennes avant même le départ à la retraite? Qu'est-ce qui se fait dans ce domaine dans les différents États membres?

3.2.4   Vivre en toute autonomie, conscient de ses responsabilités vis-à-vis de soi-même et des autres

La part des jeunes dans la population se réduisant, les possibilités, pour les personnes âgées, de disposer d'un soutien personnel, iront en diminuant. C'est pourquoi elles seront toujours plus amenées à assumer elle-même le maintien de leur autonomie et de leur participation à la société. À cet égard, les questions suivantes réclament entre autres d'être étudiées:

Qu'entendent les personnes âgées d'un pays à l'autre par «se prendre en charge» et comment cette conception influe-t-elle sur la consolidation et la promotion systématiques d'un mode de vie adapté à cette fin?

Qu'entendent, d'un pays à l'autre, les personnes âgées par «assumer ses responsabilités vis-à-vis des autres» (les générations futures, l'environnement) et qu'induisent ces différentes conceptions? Comment les personnes âgées s'organisent-elles, comment s'organisent les offres ciblant la génération à laquelle elles appartiennent et les générations qui leur succèderont? Quelles formes prend leur engagement en faveur d'autrui, de leur voisinage, du monde qui les entoure?

Quelles formules de soutien au niveau communal, favorisent une telle organisation personnelle? Ces questions mériteraient également de faire l'objet d'études menées dans des contextes comparables sur le plan structurel (communal, régional).

Il conviendrait en général d'examiner dans des différents contextes comparables sur le plan structurel (par exemple zones urbaines et rurales pays par pays) comment les municipalités peuvent encourager les personnes âgées à adopter un mode de vie actif et responsable, en menant par exemple dans cette perspective une certaine politique de la ville, du logement ou des transports.

Comment créer des «communautés d'aidants» témoignant d'un désir de partager les responsabilités et comment soutenir ces dernières? Quel état des lieux dresser aujourd'hui de la collaboration entre les familles, les bénévoles et les professionnels du soin à domicile (par exemple, dans le cas de personnes atteintes d'une pathologie physique ou mentale incurable)? En quoi la mise en place de systèmes d'assistance techniques peut-elle apporter un soutien à ce type de communautés? Comment les entreprises répondent-elles à leurs besoins spécifiques? Sous quelles formes la responsabilité partagée se décline-t-elle d'un État membre à l'autre? Comment ces communautés d'aidants s'intègrent-elles dans la politique sociale des États et dans les programmes des communes en matière de structures sociales?

Parmi les modes de vie et les solutions de logement proposés d'un pays à l'autre aux personnes âgées, et notamment aux personnes très âgées vivant seules ou des personnes atteintes de démence sénile, lesquels ont fait leurs preuves et seraient susceptibles d'être adoptés ailleurs?

3.2.5   Éducation

Il est désormais entendu qu'une société vieillissante attend de chacun qu'il continue d'apprendre tout au long de sa vie. Cela invite à s'interroger sur les questions suivantes:

Comment faire de l'apprentissage tout au long de la vie un apprentissage en perspective d'une longue vie?

Quelles offres de formation proposer, au-delà de la formation professionnelle continue, à une population vieillissante? Quelle forme donner à ces offres pour qu'elles incitent à un apprentissage actif?

Quels sont les besoins spécifiques, en matière d'apprentissage, des personnes qui ont fait le choix d'un engagement citoyen?

Quelle importance revêt l'éducation au Beau pour la préservation de la plasticité cognitive et émotionnelle et le maintien de la créativité passé un certain âge? Quels enseignements tirer d'une observation comparative pays par pays des offres en la matière?

Quel rôle différentes institutions (universités, universités du temps libre, etc.) jouent-elles dans le renforcement des différentes compétences, par exemple pour l'utilisation des nouvelles technologies, l'engagement citoyen, les activités de soin, le partage de connaissances sociales ou d'une expertise, etc.?

3.2.6   Technicisation de tous les domaines de la vie

Quel domaine de la société n'est pas encore investi par la technique? Pourtant, ni cette réalité, ni la nécessité de recourir à des systèmes techniques pour promouvoir l'autonomie, l'activité et la participation des personnes âgées n'ont fait l'objet d'études pour ce qui est de leurs répercussions à long terme. Il est donc urgent d'examiner des questions telles que les suivantes:

Quelles mesures prendre sur le plan technique, organisationnel, conceptuel et aux fins d'une meilleure acceptation, pour que le potentiel que représentent la surveillance à distance, les services de santé à distance et la rééducation à distance puisse être utilisé efficacement et sans heurter les principes éthiques, afin d'améliorer les soins de santé?

Quelles seront les exigences sur le plan organisationnel, légal, éthique et, pour ce qui est de la protection des données personnelles, technique, lorsqu'il s'agira de mettre en place de tels systèmes sur tous les territoires concernés, pour l'organisation et la réglementation à l'échelon communal, régional, national et européen?

Comment le recours accru à des systèmes techniques influe-t-il à long terme sur les relations entre les personnes âgées et les membres de leur famille, entre les patients et les médecins, les malades et leurs soignants professionnels et aidants informels?

Encore très peu de recherches ont été effectuées sur les implications psychologiques, sociales et éthiques liées à l’implantation toujours plus invasive de capteurs et d’autres dispositifs techniques dans le corps humain. Quels effets ces possibilités ont-elles sur l’image de soi et l’identité de la personne concernée d’une part, et sur la perception par la société de la maladie, de la santé ou du handicap d’autre part?

L’on sait également très peu de choses sur les moyens techniques permettant d’accompagner dignement la fin de vie, par exemple à l’aide de la musique et l'éclairage, tout en apportant un soutien émotionnel.

3.2.7   La société européenne de l’avenir

Un dernier domaine de recherche devrait englober toutes les questions liées aux mutations actuelles et futures de la société européenne. Les questions à explorer dans ce domaine concernent notamment les images du vieillissement, les différences culturelles, les expériences divergentes et l’inégalité des conditions de vie en Europe:

Quelles représentations du vieillissement actif et du vieillissement rencontrons-nous compte tenu du changement démographique dans les différents pays européens? Comment les échanges entre les pays peuvent-ils donner naissance à des images du vieillissement qui soient réalistes et non pas stéréotypées?

Comment vieillit-on dans les cultures de plus en plus diversifiées représentées dans les États membres? Que signifient le vieillissement, la maladie et la mort dans chacune de ces cultures? De quelle manière les échanges d’expérience peuvent-ils être organisés, afin de contribuer à une compréhension et un enrichissement mutuels?

Quelle signification la musique et les arts plastiques ont-ils dans le processus de vieillissement dans les différentes cultures? Quels en sont les effets et comment en diffuser les bienfaits au profit de tous?

Comment faire le lien entre les différentes expériences, alors que celles-ci divergent de plus en plus entre les générations et en leur sein, en raison de l’augmentation de l’espérance de vie et de la rapidité d'évolution des techniques et de la société? Comment, dans ces circonstances, l’apprentissage et la compréhension réciproques sont-ils encore possibles?

Les mêmes questions se posent concernant les inégalités existantes – et parfois même croissantes – en matière de conditions de vie entre les pays européens et au sein d’entre eux.

Une autre question à clarifier est celle de l'effet que produisent les différentes approches de la mort, variables selon les pays, sur les individus vieillissants et sur la société dans son ensemble. Ces questions et les conséquences éventuelles qui pourraient en résulter ne doivent pas être ignorées, en particulier dans une société vieillissante.

Bruxelles, le 23 mai 2012.

Le président du Comité économique et social européen

Staffan NILSSON


(1)  COM(2011) 809 final.

(2)  Cf. note de bas de page 1.

(3)  JO L 26 du 1.2.1999, p. 1, JO L 232 du 29.8.2002, p. 1, JO L 412 du 30.12.2006, p. 1 et JO C 65 du 17.3.2006, p. 9.

(4)  http://www.aal-europe.eu.

(5)  Cf. http://europa.eu/rapid/pressReleasesAction.do?reference=IP/10/1726&format=HTML&aged=1&language=FR.

(6)  JO L 310 du 9.11.2006, p. 15 et JO C 65 du 17.3.2006, p. 22.

(7)  Confédération suisse, Département fédéral de l'intérieur (DFI), Secrétariat d'État à l'éducation et à la recherche, Ressort Recherche nationale,: 2011: Schweizer Roadmap für Forschungsinfrastrukturen (Feuille de route suisse pour les infrastructures de recherche), consultable à l'adresse: http://www.sbf.admin.ch/htm/dokumentation/publikationen/forschung/11.03.30.NFO.RoadmapForschungsinfrastrukturen_d.pdf.

(8)  Schippl, J. et al.: Roadmap Umwelttechnologien 2020 – Endbericht (Feuille de route relative aux technologies environnementales 2020 – Rapport final). Karlsruhe: Forschungszentrum Karlsruhe 2009 (Wissenschaftliche Berichte FZKA 7519).

(9)  http://www.roadmap.republicans.budget.house.gov.

(10)  http://www.eracobuild.eu.

(11)  https://www.biomedtown.org/biomed_town/VPHFET.

(12)  http://future-bnci.org; http://www.diamap.eu; http://www.roamer-mh.org; http://www.whyweage.eu.

(13)  Gesundheitsforschungsrat (GFR) des Bundesministeriums für Bildung und Forschung (Hrsg.) (2007): Roadmap für das Gesundheitsforschungsprogramm der Bundesregierung (Feuille de route relative au programme de recherche sur la santé du gouvernement fédéral, publiée par le Conseil de la recherche en matière de santé du Ministère fédéral de l’éducation et de la recherche). Bonn/Berlin: BMBF.

(14)  http://futurage.group.shef.ac.uk/road-map.html.

(15)  http://www.braidproject.eu.

(16)  The Future of Ageing Research in Europe. A Road Map. (L’avenir de la recherche sur le vieillissement en Europe. Une feuille de route).

(17)  Citons à titre d'exemple de partenariats public-public, entre autres, ERA-NET et ERA-NET Plus, les initiatives au titre de l'article 185 et la programmation conjointe. Citons également, pour ce qui est des partenariats public-privé (PPP) en matière de recherche et d'innovation, les initiatives technologiques conjointes et l'internet du futur.

(18)  Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions Partenariat pour la recherche et l'innovation (COM(2011) 572 final du 21.9.2011).

(19)  Cf IP/10/1288.

(20)  Voir IP/10/581, MEMO/10/199 et MEMO/10/200.

(21)  Voir http://www.jp-demographic.eu.

(22)  Cf. MEMO-11-435.

(23)  Voir entre autres JO C 132 du 3.5.2011, p. 39 concernant le document COM(2010) 546 final.

(24)  COM(2011) 809 final.

(25)  Voir entre autres JO C 74 du 23.3.2005, p. 44.


31.7.2012   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 229/18


Avis du Comité économique et social européen sur le thème «Évaluation par le CESE du rapport de suivi 2011 sur la stratégie de l'Union européenne en faveur du développement durable» (avis d'initiative)

2012/C 229/04

Rapporteur: M. PALMIERI

Le 25 octobre 2011, le Comité économique et social européen a décidé, conformément à l'article 29, paragraphe 2, de son règlement intérieur, d'élaborer un avis d'initiative sur le thème:

«Évaluation par le CESE du rapport de suivi 2011 sur la stratégie de l'Union européenne en faveur du développement durable».

La section spécialisée «Agriculture, développement rural, environnement», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 11 mai 2012.

Lors de sa 481e session plénière des 23 et 24 mai 2012 (séance du 23 mai 2012), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 138 voix pour, 9 voix contre et 12 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1   Le Comité économique et social européen (CESE) considère que le rapport de suivi publié par Eurostat (2011 monitoring report of the EU sustainable development strategy) est un outil utile et important qui permet:

de faire le point sur les progrès accomplis jusqu'à présent concernant la réalisation des buts et objectifs de la stratégie européenne en faveur du développement durable;

de revoir et d'améliorer les objectifs, actions et mesures prévus par cette stratégie ainsi que d'affiner les méthodes et instruments en vigueur en matière d'évaluation du développement durable;

de faire face aux nouveaux défis qui s'annoncent, en particulier compte tenu des répercussions de la crise économique et financière mondiale sur la stratégie en faveur du développement durable.

1.2   À cet égard, le CESE regrette que la Commission n'ait pas présenté de rapport sur l'état de la mise en œuvre de la stratégie de l'UE en faveur du développement durable; il invite par conséquent la Commission et les autres institutions à réagir aux conclusions du rapport Eurostat, qui fait partie intégrante de la stratégie même et est un outil essentiel permettant d'évaluer, sur le plan politique, les mesures mises en œuvre jusqu'ici et de définir des orientations pour l'avenir.

1.3   Le CESE considère dès lors que la mise en œuvre des objectifs poursuivis par la stratégie requiert un engagement politique plus efficace. Il convient avant tout de veiller à apprécier correctement l'état du développement durable, ce qui implique une évaluation à la fois scientifique et politique de l'efficacité des mesures mises en œuvre pour promouvoir un tel développement.

1.4   À cette fin, le CESE demande à nouveau que l'on tienne compte des impulsions données et des réflexions engagées sur ces questions au sein de son Observatoire du développement durable, dans le but de donner la parole à la société civile. Pour être efficace, la transition vers un modèle de développement plus durable doit être assortie de procédures démocratiques favorisant la sensibilisation et la participation du public au processus décisionnel, à travers le développement de structures de dialogue entre la société civile et les responsables politiques.

1.5   Le CESE juge opportun de renforcer les liens entre la stratégie en faveur du développement durable et les autres grandes initiatives politiques de l'UE. Le caractère transversal et omniprésent de la notion de développement durable exige en effet une interconnexion étroite avec toutes les autres politiques émergentes (équité sociale, lutte contre la pauvreté et le chômage, justice sociale, utilisation efficace des ressources, protection du capital naturel, cohésion sociale et coopération au développement).

1.5.1   Cette demande d'interconnexion entre les différentes stratégies politiques de l'UE revêt une importance particulière précisément en cette période historique. Les lourdes conséquences de la crise économique mondiale requièrent que l'on établisse une distinction entre les répercussions de la conjoncture économique mondiale et le développement de stratégies de développement durable à long terme, approfondies et structurées.

1.5.2   En particulier, le CESE rappelle qu'il convient de mieux coordonner et intégrer la stratégie européenne en faveur du développement durable et la stratégie «Europe 2020», pour faire en sorte que les mesures prises au titre de cette dernière soient effectivement axées sur la réalisation d'un développement plus durable. L'analyse et la recherche de nouveaux indicateurs permettent d'évaluer l'efficacité des mesures visant à encourager des modèles de consommation et de production durables et de nourrir le processus de suivi de la stratégie «Europe 2020».

1.6   Le CESE recommande de renforcer la dimension sociale du développement durable, surtout compte tenu des répercussions de la crise économique sur les questions sociales, en particulier l'augmentation du chômage, des inégalités et du risque d'exclusion sociale, qui touchent davantage les catégories les plus vulnérables de la population, ont, à long terme, un effet boule de neige sur les conditions de vie des citoyens et limitent notamment les possibilités d'intervention en faveur de la protection de l'environnement.

1.7   Le CESE soutient fermement la promotion d'un développement économique à même de garantir la croissance de l'économie en neutralisant ses conséquences négatives sur l'environnement et qui tienne compte des principes clés que sont l'équité, la coopération et la justice sociale, lesquels sous-tendent la notion même de développement durable.

1.7.1   Le CESE est favorable à la notion de croissance verte et à la réalisation d'une économie verte qui soit mise en place dans le cadre d'un développement durable à long terme et réduise les disparités et l'inégalité des chances concernant la transition vers un modèle de développement à faible intensité de carbone (1).

1.7.2   À cet égard, le CESE se félicite des recommandations de l'OIT (Organisation internationale du travail) sur les emplois verts qui visent à garantir des conditions de travail dignes et des emplois de qualité aux travailleurs lors de la transition vers une économie verte et à éviter que celle-ci ne reproduise les disparités sociales engendrées lors de mutations antérieures.

1.8   La transition vers le développement durable implique que l'on augmente les investissements dans la recherche et l'innovation, surtout dans le secteur énergétique, non seulement afin de promouvoir un modèle de développement reposant davantage sur les sources d'énergie renouvelable et moins dépendant des combustibles fossiles et de continuer à réduire l'intensité énergétique de l'économie, mais aussi en raison des conséquences positives que ces investissements sont susceptibles d'avoir sur la croissance et l'emploi en créant de nouvelles activités et en stimulant la compétitivité de l'économie.

1.9   Outre la qualité de la recherche et de l'innovation technologique, la formation joue elle aussi un rôle fondamental: elle guide la société civile vers un modèle de développement différent, en fournissant les outils idoines pour relever efficacement les défis qu'il présente et renforcer son rôle de catalyseur du changement.

1.10   Garantir une sensibilisation et une formation adéquates en matière de développement durable est dès lors un objectif crucial qui doit aller de pair avec la mise en œuvre de paramètres plus pertinents pour évaluer les progrès accomplis vers davantage de durabilité.

1.11   En particulier, il convient de poursuivre les efforts entrepris par le CESE dans le but de promouvoir l'élaboration d'autres indicateurs que le PIB (2) pour mesurer le progrès économique et de conjuguer les analyses quantitative et qualitative, en prenant également en compte la manière dont les acteurs sociaux perçoivent et apprécient les questions de durabilité.

1.12   Seul un processus participatif et partagé par les experts, les forces politiques et sociales et la société civile permettra de créer une nouvelle culture politique et sociale à même de générer une idée du développement qui embrasse, en les conjuguant, les sphères économique, sociale et environnementale sur lesquelles repose la notion d'un progrès humain de qualité et durable.

2.   Introduction

2.1   En proposant un état des lieux de la stratégie de l'UE en faveur du développement durable en 2011, le rapport de suivi d'Eurostat (2011 monitoring report of the EU sustainable development strategy) fournit un aperçu détaillé de la situation telle qu'elle se présente dans les États membres de l'Union deux ans après le début de la crise. Il permet par conséquent d'effectuer une évaluation critique tant des mutations profondes que connaissent nos sociétés que du débat en cours sur la question de savoir si la transition vers une économie à faible intensité de carbone ne serait pas une occasion de lutter contre la récession dans la mesure où elle favoriserait la relance de la production et mettrait fin aux pertes d'emploi.

2.2   Compte tenu de son rôle de pont entre les institutions européennes et la société civile organisée, le CESE entend contribuer à la réflexion engagée sur le rapport susmentionné en favorisant la participation des institutions représentant les citoyens européens à l'évaluation des thèmes et des projets pertinents pour réaliser un développement économique, social et environnemental durable.

2.3   Le présent avis s'inscrit par ailleurs dans le fil des précédents avis élaborés par le CESE dans le cadre de la préparation de la Conférence des Nations unies sur le développement durable (CNUDD) qui se tiendra à Rio de Janeiro (Rio + 20) en juin 2012.

2.3.1   Cet avis représente la contribution de la société civile aux négociations du sommet de Rio + 20, en particulier en ce qui concerne l'un des deux principaux enjeux qui seront au cœur de cet événement: le cadre institutionnel du développement durable.

3.   Observations générales

3.1   Il ressort de l'analyse des indicateurs présentés dans le rapport 2011 que certains des résultats obtenus, allant dans la direction tracée par les objectifs de la stratégie de l'UE en faveur du développement durable, sont davantage à attribuer à la conjoncture économique mondiale actuelle qu'à la mise en œuvre de stratégies structurées à long terme pour réaliser un développement durable. La priorité doit être accordée à l'analyse et à l'examen des différences qui existent entre les États membres concernant la poursuite de ces objectifs.

3.1.1   S'agissant des évolutions positives mises en évidence par le rapport pour la période comprise entre 2000 et 2011, l'on constate:

une diminution du nombre des personnes menacées de pauvreté ou d'exclusion sociale (en dépit d'une augmentation du pourcentage de travailleurs pauvres);

une augmentation de l'espérance de vie et une amélioration du cadre général de la santé publique (bien que des inégalités subsistent en matière d'accès aux soins de santé);

une réduction des émissions de gaz à effet de serre et une augmentation de la consommation d'énergies renouvelables;

une certaine stabilité concernant le nombre et la variété des espèces d'oiseaux communs, qui représentent bien l'état général de la biodiversité et de l'intégrité des systèmes naturels.

3.1.2   S'agissant des tendances défavorables, l'on observe:

un accroissement de la demande de matières premières, en dépit d'une tendance positive concernant l'augmentation de la productivité des ressources;

une augmentation du taux d'emploi des travailleurs plus âgés, qui n'atteint toutefois pas l'objectif prévu pour 2010;

le maintien des activités de pêche au-delà des niveaux de durabilité fixés pour les stocks de poissons;

un découplage relatif entre le développement économique et la consommation d'énergie dans le secteur des transports, et une absence de transfert du transport de marchandises et de personnes vers des moyens dont l'empreinte écologique est moins importante;

la non réalisation de l'objectif prévu pour 2010, à savoir consacrer 0,56 % du revenu national brut à l'aide officielle au développement.

3.2   S'agissant de l'incidence de la crise sur les tendances favorables ou défavorables analysées dans le rapport Eurostat, il convient de souligner que la réduction des émissions de gaz nocifs pour le climat est due non seulement à une utilisation plus efficace de l'énergie et à une utilisation accrue de combustibles à faible intensité de carbone mais également à la récession induite par la crise.

3.2.1   L'énergie, qui est une condition indispensable à toute activité économique, apparaît comme la variable la plus étroitement liée à la croissance de l'économie, comme le montre la diminution de la consommation d'énergie finale parallèlement à la chute du PIB. Il est dès lors essentiel d'enregistrer d'autres avancées sur le front du découplage de la croissance économique et de la pression environnementale en dissociant la production des richesses de la consommation d'énergie.

3.3   Le scénario présenté dans le rapport Eurostat montre en définitive que l'Union européenne a accompli d'importants progrès vers un développement environnemental, économique et social durable mais qu'elle dispose toujours d'une économie à forte intensité de carbone et d'énergie. Il convient dès lors d'intensifier les efforts en faveur de changements structurels profonds à même d'engager un processus de transition à long terme, qui ne soit pas entravé par les effets de la conjoncture économique mondiale actuelle.

4.   Observations particulières

4.1   L'analyse des indicateurs qui mesurent l'évolution du développement socioéconomique de 2000 à 2011 montre très clairement les effets de la récession générée par la crise économique mondiale. Ces effets sont évidents, surtout au vu du PIB, des investissements et de la productivité du travail.

4.1.1   L'on observe une évolution négative concernant le chômage et l'emploi, le taux de chômage des jeunes étant particulièrement préoccupant. L'on constate en revanche des tendances positives concernant la reprise de l'épargne des ménages en réponse à la crise, la croissance des dépenses pour la recherche et le développement et l'amélioration de l'intensité énergétique, pour laquelle l'on enregistre un découplage absolu.

4.1.2   L'analyse du développement socioéconomique mesure les progrès accomplis pour construire une société fondée sur une économie novatrice et écologiquement efficace qui offre un niveau de vie élevé à la société civile. La crise économique a eu une influence négative sur la réalisation de ces objectifs. Toutefois, le développement d'un processus de verdissement de l'économie peut exercer un puissant effet de levier pour lutter contre la récession, en contribuant à la relance de la production et de l'emploi.

4.2   L'analyse des progrès accomplis en direction de modèles de production et de consommation durables révèle des tendances contradictoires. Bien que l'UE ait amélioré son efficacité en matière d'utilisation des ressources, la demande de matières premières continue de croître. Sur le plan énergétique, la consommation d'électricité augmente, cependant que la consommation d'énergie finale diminue. S'agissant des déchets, si la production de déchets dangereux est en hausse, la quantité de déchets non minéraux baisse et le recyclage s'intensifie. En outre, si le nombre d'automobiles est toujours en augmentation constante, l'on observe toutefois une réduction des émissions de substances polluantes due en bonne partie à la décroissance du secteur des transports et à la généralisation de moteurs plus performants.

4.2.1   L'état des lieux contrasté que révèlent les indicateurs analysés montre qu'en dépit des progrès accomplis, des efforts supplémentaires sont nécessaires pour atteindre l'objectif consistant à rompre le lien entre la croissance économique et l'utilisation des ressources, dans le respect de la capacité de charge des écosystèmes. Il est en outre fondamental d'envisager la consommation et la production de manière plus interdépendante, en promouvant la notion de cycle de vie des produits. Il convient par conséquent d'investir davantage dans des actions de sensibilisation en faveur de modèles de production et de consommation plus responsables sur le plan environnemental.

4.3   Les indicateurs relatifs à l'inclusion sociale montrent une évolution plutôt favorable, indiquant une réduction du risque de pauvreté ou d'exclusion sociale. L'on constate toutefois une augmentation du risque de pauvreté dans le groupe des 25-49 ans et, dans une moindre mesure, une augmentation du taux de chômage des jeunes de 18 à 24 ans. En revanche, l'intensité de la pauvreté, les inégalités de revenus, le taux de chômage à long terme et les écarts de salaires entre les sexes ont diminué.

4.3.1   Au nombre des tendances négatives, l'on observe que le pourcentage des travailleurs pauvres a augmenté, que la participation à l'apprentissage tout au long de la vie n'a pas évolué de manière suffisante pour atteindre l'objectif fixé pour 2010 et qu'il convient de réduire davantage le taux d'abandons scolaires prématurés.

4.3.2   Le tableau dépeint dans le rapport Eurostat est assez favorable mais il convient d'améliorer les résultats relatifs à l'abandon scolaire et à l'apprentissage tout au long de la vie. Le risque de pauvreté touche en effet davantage les personnes qui ont un faible niveau d'instruction. En outre, l'instruction et la formation jouent un rôle fondamental pour pouvoir bénéficier des possibilités d'emploi liées au développement de l'économie verte, qui exige l'élaboration de nouvelles technologies écologiquement efficaces et l'adaptation des compétences au processus d'innovation technologique. La formation est donc essentielle, tant pour favoriser l'insertion des jeunes sur le marché du travail que pour répondre aux exigences des personnes qui ont un emploi et doivent relever les nouveaux défis découlant des mutations en cours.

4.4   L'analyse de l'évolution démographique fait apparaître de nettes améliorations concernant le taux d'emploi des travailleurs âgés, l'espérance de vie – qui dépasse 65 ans – et la diminution du risque de pauvreté pour les plus de 65 ans.

4.4.1   Cependant, en dépit de ces améliorations, l'on constate une augmentation de la quantité et de la qualité des dépenses liées à la protection sociale et à la dette publique. L'évolution démographique à laquelle nous assistons - en particulier, la diminution du taux de fertilité et l'augmentation de l'espérance de vie ainsi que les déséquilibres intergénérationnels qui en découlent - exige que l'on relève le défi consistant à créer une société inclusive en maintenant un niveau de dépenses publiques viable et en modulant les dépenses liées à la protection sociale en fonction des nouvelles exigences qu'implique une demande accrue en matière de retraites, de santé et de soins à long terme.

4.5   L'analyse de la santé publique montre des améliorations allant dans le sens d'une vie plus longue et plus saine: l'espérance de vie augmente, les décès dus à des maladies chroniques et le nombre de suicides diminuent; l'on constate en outre une baisse de la production de substances chimiques toxiques, du pourcentage d'accidents graves sur le lieu de travail, et de l'exposition à la pollution acoustique. En dépit de ces éléments favorables, des inégalités subsistent cependant entre les différents groupes socioéconomiques concernant l'accès à l'aide sanitaire.

4.5.1   La notion de santé publique embrasse différents aspects sociaux, économiques et environnementaux du développement (la santé et la sécurité sur le lieu de travail, le financement des soins médicaux, l'exposition aux agents polluants, etc.). C'est là l'un des principaux défis de la stratégie de l'UE pour un développement durable, qui requiert davantage d'efforts pour parvenir à une approche analytique intégrée permettant de regrouper ces trois aspects du développement durable, qui finissent souvent par être envisagés séparément.

4.6   L'analyse des indicateurs relatifs au changement climatique et à l'énergie révèle un certain nombre d'améliorations significatives. Cependant, la crise économique a notamment eu un impact considérable sur ces tendances en raison du lien étroit qui existe entre l'énergie et le développement économique. Sur le plan des évolutions favorables, citons: la réduction des émissions de gaz à effet de serre qui a permis à l'UE de se rapprocher de l'objectif de réduction de 20 % à l'horizon 2020 et de l'objectif de Kyoto fixé pour 2012; l'augmentation du pourcentage d'énergie issue de sources renouvelables, qui pourrait, d'ici à 2020, atteindre l'objectif des 20 % d'énergie issue des sources renouvelables pour couvrir la consommation intérieure brute d'énergie, et l'augmentation de l'utilisation des énergies renouvelables dans les transports. L'on observe enfin une baisse de la demande d'énergie.

4.6.1   S'agissant des évolutions défavorables, l'on observe les tendances suivantes: entre 2000 et 2009, la dépendance à l'égard des importations d'énergie a augmenté, l'objectif des 21 % d'énergies renouvelables dans la production d'électricité n'a pas été atteint, la cogénération et le transfert de la charge fiscale du travail vers l'utilisation des ressources n'ont que faiblement progressé.

4.6.1.1   La production et la consommation d'énergie sont les principales sources d'émission de CO2 et ont dès lors l'impact le plus élevé sur l'environnement mondial. Aussi l'innovation technologique en matière énergétique est-elle extrêmement importante. Par ailleurs, le développement des sources d'énergies renouvelables et de l'efficacité énergétique peut réduire les émissions de gaz nocifs pour le climat mais aussi générer des bénéfices économiques et sociaux grâce à de nouvelles activités créatrices d'emplois, en conjuguant les impératifs de la protection de l'environnement et ceux de la croissance économique et de l'emploi.

4.6.1.2   À cette fin, il convient d'éviter que la crise économique ne mette en péril les processus de verdissement de l'économie qui sont actuellement en cours mais semblent particulièrement fragiles en cette période de récession.

4.7   Certains des changements observés dans le domaine du transport durable sont eux aussi dus aux conséquences de la crise économique. En particulier, la réduction du volume des transports qui en découle peut expliquer la diminution des accidents de la route, tout comme celle des émissions des gaz à effet de serre et de la consommation d'énergie, pour lesquelles le découplage n'est toutefois que relatif.

4.7.1   S'agissant des tendances positives, l'on note que des progrès ont été accomplis concernant la réduction des émissions de CO2 des nouveaux véhicules, tout comme la diminution des substances polluantes dans l'atmosphère. S'agissant des tendances négatives, l'on observe en revanche que tant dans le domaine du transport de marchandises que dans celui du transport de passagers, il n'y a pas eu de transferts vers des moyens de transport ayant une empreinte écologique réduite.

4.7.1.1   Le secteur du transport est complexe et ses aspects problématiques sont imputables à des facteurs très divers, qui concernent également le mode de vie et les modèles culturels de consommation. En ce sens, les transports illustrent bien que pour être efficace, la lutte contre le changement climatique ne doit pas se borner à mettre en cause la seule action publique et les seuls choix techniques: elle doit aussi et surtout revoir le mode de vie quotidien des citoyens.

4.8   Les efforts accomplis pour protéger les ressources naturelles ont débouché sur un certain nombre de résultats positifs, mais le chemin à parcourir est encore long. Si la quantité et la variété de nombreuses espèces d'oiseaux communs sont stables, il n'en reste pas moins que les stocks de poissons (3) sont surexploités. Alors que la définition de zones naturelles est en augmentation, l'expansion des zones urbaines se poursuit au détriment des terrains agricoles et semi-naturels.

4.8.1   Les ressources naturelles sont une condition préalable au développement des activités de production et de consommation humaines, mais aussi un facteur dont dépendent les équilibres écosystémiques, l'altération desquels peut avoir des conséquences irréversibles sur la planète entière. C'est la raison pour laquelle un engagement accru s'impose pour mettre fin à la dégradation de l'environnement grâce à la conservation du capital naturel du sol et de ses ressources en matière de biodiversité.

4.8.2   Il est urgent de combler le fossé qui existe concernant les indicateurs écologiques en définissant des indicateurs supplémentaires, de façon à mieux refléter l'état des ressources vivantes et les bénéfices actuels et futurs découlant du fonctionnement des écosystèmes pour l'ensemble de la société.

4.9   En dépit de l'impact négatif que la crise a eu sur les flux commerciaux (en raison de l'augmentation des importations en provenance des pays en développement et de la réduction des subsides à l'agriculture européenne), sur les financements en faveur du développement durable et sur la gestion des ressources naturelles, le partenariat mondial développé à partir de 2000 se révèle positif.

4.9.1   En revanche, le taux du revenu national brut utilisé dans le cadre de l'aide officielle au développement des pays en développement n'augmente que faiblement, ce qui ne permet pas d'atteindre l'objectif prévu pour 2010. L'on observe en outre une réduction de l'écart en matière d'émissions de CO2 entre l'UE et les pays en développement en raison d'une augmentation des émissions de ces derniers alors qu'elles sont en baisse dans les pays de l'Union.

4.9.2   Le partenariat mondial est une dimension essentielle de la stratégie de l'UE en faveur du développement durable: lutter contre la pauvreté généralisée, les inégalités et le manque d'accès aux ressources dans les pays moins développés et en voie de développement sont en effet des défis majeurs du développement durable. Ce principe est à l'origine de l'engagement visant à aider de manière équitable les pays les moins développés et autres pays en développement à opérer la transition vers le développement durable sans être distancés, en faisant face à la croissance de la population mondiale, aux attentes grandissantes en matière de niveau de vie et à l'augmentation de la consommation de matières premières.

4.10   Les indicateurs servant à mesurer le niveau de bonne gouvernance mettent en évidence à la fois des tendances positives et des tendances négatives. S'agissant des évolutions favorables, l'on note les éléments suivants: a) une baisse significative des cas d'infractions à la législation de l'UE au niveau national; b) de 2007 à 2009, le nombre de transpositions des directives européennes a dépassé l'objectif des 98,5 %; c) une augmentation de la disponibilité de l'administration en ligne pour les services publics de base et de son utilisation par les citoyens des États membres; d) la moitié des citoyens interrogés a déclaré avoir confiance dans le Parlement européen. S'agissant des tendances négatives, l'on observe que: e) la participation aux élections nationales est en baisse, de même que le taux de participation aux élections du Parlement européen, qui est inférieur au taux de participation aux élections nationales (plus de 20 % de différence dans l'ensemble des États membres, sauf dans un); f) les progrès restent insuffisants en matière de transfert de la taxation vers un pourcentage plus important de taxes environnementales par rapport au montant total des recettes fiscales.

4.10.1   La notion de gouvernance est étroitement liée au développement durable et à l'affirmation d'un principe d'équité sociale et intergénérationnelle impliquant que les intérêts des générations futures sont pris en compte dans les accords conclus par les générations actuelles. Une bonne gouvernance exige le développement d'une société démocratique grâce à la pleine participation du monde économique, des partenaires sociaux et de la société civile au moyen de structures de dialogue entre les citoyens et les responsables politiques.

4.11   Le CESE considère que l'engagement et la participation de la société civile revêtent une importance fondamentale pour continuer à progresser sur la voie du développement durable et consolider la stratégie de l'UE en la matière. Pour assurer la participation de la société civile et lui permettre de contribuer à la réalisation du développement durable, il convient d'élargir l'accès à la connaissance et à l'information sur les thèmes pertinents.

4.12   Améliorer l'efficacité de la communication requiert également une mise en œuvre plus efficace des paramètres visant à mesurer les progrès accomplis en direction du développement durable. En particulier, il convient de poursuivre dans la voie tracée par le CESE concernant l'élaboration d'autres indicateurs que le PIB (4) pour mesurer les progrès économiques, qui permettent d'intégrer l'évaluation de la qualité environnementale et sociale dans l'évaluation économique. Il est également nécessaire de conjuguer les dimensions quantitatives et qualitatives, ainsi que de prendre en compte la manière dont les acteurs sociaux perçoivent et évaluent les questions liées au développement durable.

4.13   En réalité, la mise au point d'un système d'information valable est loin de ne présenter qu'un intérêt purement informatif: il s'inscrit dans le cadre du processus décisionnel et politique dans la mesure où il constitue le socle sur lequel construire le système des préférences sociales. C'est la raison pour laquelle la réflexion sur le sens même du progrès social et environnemental et, partant, la recherche de nouveaux indicateurs et outils d'interprétation doit s'effectuer avec la participation active des experts, des forces politiques et sociales et de la société civile, en permettant à ces acteurs d'être associés de manière démocratique aux décisions.

4.14   Le CESE souligne par ailleurs l'absence d'un rapport sur les perspectives futures découlant des travaux d'Eurostat et demande des éclaircissements sur la manière dont l'élaboration des politiques et projets futurs sera incorporée aux travaux de la Commission et des États membres.

Bruxelles, le 23 mai 2012.

Le président du Comité économique et social européen

Staffan NILSSON


(1)  Avis du CESE sur «La position du CESE sur la préparation de la conférence des Nations unies sur le développement durable (Rio + 20)», rapporteur: M. WILMS, JO C 143 du 22.05.2012, p. 39.

(2)  Avis du CESE sur le thème «Le PIB et au-delà – L'implication de la société civile dans le processus de sélection d'indicateurs complémentaires», JO C 181 du 21.06.2012, p. 14 .

(3)  Avis du CESE sur le thème «Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil portant organisation commune des marchés dans le secteur des produits de la pêche et de l’aquaculture», JO C 181 du 21.06.2012, p. 183 .

(4)  Avis du CESE sur le thème «Le PIB et au-delà – L'implication de la société civile dans le processus de sélection d'indicateurs complémentaires», JO C 181 du 21.06.2012, p. 14 .


III Actes préparatoires

COMITÉ ÉCONOMIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN

481e session plénière des 23 et 24 mai 2012

31.7.2012   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 229/24


Avis du Comité économique et social européen sur la «Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions sur le thème “Définir une stratégie maritime pour la région atlantique”»

COM(2011) 782 final

2012/C 229/05

Rapporteur: Luis Miguel PARIZA

Le 13 juillet 2011, le Comité économique et social européen a décidé, conformément à l'article 29, paragraphe 2, de son règlement intérieur, d'élaborer un avis d'initiative sur le thème

«La stratégie de l'UE pour la région atlantique».

Le 21 novembre 2011, la Commission européenne a décidé de consulter le Comité économique et social européen, en vertu de l'article 304 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne sur la

«Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions ”Définir une stratégie maritime pour la région atlantique».

COM(2011) 782 final.

Le 6 décembre 2011, le Bureau du Comité économique et social européen a chargé la section spécialisée «Union économique et monétaire, cohésion économique et sociale» de préparer les travaux du Comité en la matière, l'avis d'initiative devenant une consultation.

La section spécialisée «Union économique et monétaire, cohésion économique et sociale», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 7 mai 2012.

Lors de sa 481e session plénière des 23 et 24 mai 2012 (séance du 24 mai 2012), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 151 voix pour, 2 voix contre et 5 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1   La façade atlantique, qui est la porte occidentale de l'Europe, doit renforcer son caractère central et éviter le risque d'éloignement du centre politique et économique de l’Europe. L'Europe établit des liens économiques et politiques avec l'Amérique et l'Afrique à travers l'Atlantique.

1.2   La macrorégion atlantique inclut les régions et les îles de la façade atlantique de l'Irlande, du Royaume-Uni, de la France, de l'Espagne et du Portugal. L'Islande, avec laquelle négociations d'adhésion ont débuté, devrait y être associée, tout comme la Norvège, qui fait partie de l'EEE. Cela vaut également pour le Groenland et les îles Féroé. Même si les régions de la mer du Nord partagent déjà des intérêts dans l'espace atlantique, elles pourraient, à l'avenir, lancer une stratégie spécifique.

1.3   La région atlantique européenne possède une longue expérience de coopération politique en ce qui concerne la promotion d'actions d'intérêt commun dans des projets s'inscrivant dans le cadre de programmes européens transnationaux. Les autorités régionales aussi bien que la société civile participent à cette coopération.

1.4   Le CESE accueille favorablement l'initiative de la Commission européenne pour l'Atlantique, dans le cadre de la politique maritime intégrée: le soutien des nouveaux secteurs économiques émergents, ainsi qu'un appui renouvelé aux secteurs traditionnels, dans le cadre d'une approche de développement durable.

1.5   Mais le CESE propose d'adopter une approche plus ambitieuse: une stratégie macrorégionale, qui, en plus du pilier maritime, incorpore un pilier territorial, en tenant compte des expériences des régions de la mer Baltique et de la région du Danube.

1.6   La proposition du CESE s'accompagne de la position du Parlement européen, des gouvernements des régions de la Commission de l'Arc atlantique, des Conseils économiques et sociaux du Réseau transnational atlantique, ainsi que de nombreux acteurs de la société civile (employeurs, syndicats, chambres de commerce, villes, etc.).

1.7   Le CESE considère que le forum atlantique prévu dans le cadre de la stratégie maritime pour l’Atlantique constitue un premier pas pour accompagner le processus de transformation de cette dernière en une stratégie macrorégionale. Le forum utilisera l’expérience acquise dans l’élaboration, le suivi et l’évaluation des questions maritimes, pour devenir un forum macrorégional définissant les lignes stratégiques communes d'action, ainsi que les projets prioritaires pour la cohésion territoriale des régions atlantiques.

1.8   Le CESE, qui participe au «Leadership Group of the Atlantic Forum», propose que le Réseau transnational atlantique (RTA) des conseils économiques et sociaux participe aussi au forum, car il regroupe des acteurs de terrain, indispensables pour définir et exécuter les projets. Pour garantir la réussite du plan d'action, les principaux acteurs sociaux et régionaux doivent participer à son élaboration.

1.9   Les objectifs prioritaires de la macro-région atlantique doivent s'inscrire dans les piliers thématiques de la stratégie UE 2020. Le CESE considère que la stratégie de l'Atlantique est très importante, non seulement pour les régions concernées, mais aussi pour l'ensemble de l'Union européenne.

1.10   La stratégie atlantique devra être associée aussi bien aux politiques sectorielles qu'à la politique de cohésion, raison pour laquelle le CESE propose de surmonter les contraintes des «trois non», de telle sorte que les stratégies macrorégionales disposent à l'avenir d'une législation adéquate, de financements spécifiques et des structures administratives nécessaires.

2.   Les stratégies macrorégionales de l’UE: nouveaux instruments de coopération et de cohésion territoriale

2.1   En juin 2009, la Commission européenne a présenté une stratégie européenne pour la région de la mer Baltique (1) laquelle, tout en encourageant la coopération territoriale, définit un cadre géographique stratégique multisectoriel et intégré au travers de différents objectifs spécifiques en vue de résoudre des problèmes communs. La stratégie pour la région du Danube a été lancée ultérieurement (2).

2.2   La Commission qualifie les macrorégions de zones regroupant différentes régions administratives ayant en commun suffisamment de problématiques pour justifier l’adoption d'une approche stratégique unique (3). Partant d'une base géographique, les macrorégions se définissent au niveau fonctionnel.

2.3   Les conditions administratives, réglementaires et financières se fondent sur le principe des «trois non»: non au financement supplémentaire, non aux nouvelles structures administratives et non aux nouvelles dispositions législatives. Même si c'est la condition qu'ont posée les États membres au Conseil, le CESE n'approuve pas ces contraintes.

2.4   Huit États membres de l’UE et trois États voisins participent à la stratégie pour la région de mer Baltique.

2.5   En 2011, l’UE a lancé la stratégie pour la région du Danube, à laquelle participent huit États membres de l’UE et six pays tiers (4).

2.6   Il ressort du premier bilan de la stratégie pour la région de la mer Baltique (5) qu'il s'agit d'un instrument d’amélioration de la coopération macrorégionale satisfaisant pour relever les défis et profiter des possibilités offertes par les domaines régional et national. C’est un instrument très utile pour poursuivre l’objectif de cohésion territoriale de la stratégie «Europe 2020».

2.7   Le CESE soutient qu'il convient d’étendre ce type d’instrument à d’autres macrorégions susceptibles d'apporter une valeur ajoutée.

2.8   Le traité de Lisbonne, qui incorpore l’objectif de cohésion territoriale à celui de cohésion économique et sociale, constitue une avancée pour les stratégies macrorégionales.

2.9   L’agenda territorial 2020 (6) adopté en mai 2011 à Gödöllő adopte une approche de terrain («place-based approach») novatrice, tout en tenant compte des stratégies macrorégionales existantes.

2.10   La politique de cohésion est l’instrument fondamental qui permet de relever les défis de la politique territoriale de l’UE et de favoriser le développement endogène des macrorégions.

2.11   Le processus de définition du nouveau cadre financier pluriannuel de l’UE et de la politique de cohésion pour la période 2014-2020 est déjà enclenché.

2.12   La coopération territoriale demeure un objectif de la politique de cohésion, qui verrait son budget augmenter. Elle disposera d'un règlement et s'appuiera expressément sur de «nouvelles formes de coopération territoriale, sortes de réponses sur mesure à des problèmes macrorégionaux»  (7).

3.   La région atlantique

3.1   La façade atlantique européenne (annexe I) constitue un vaste espace géographique sur l’axe nord/sud qui a pour lien fondamental l’océan Atlantique. La macrorégion atlantique inclut les régions et les îles de la façade atlantique de l'Irlande, du Royaume-Uni, de la France, de l'Espagne et du Portugal. L'Islande, avec laquelle les négociations d'adhésion ont débuté, est également intéressée tout comme la Norvège, qui fait partie de l'EEE. Cela vaut également pour le Groenland et les îles Féroé.

3.2   Sa localisation à l’Ouest du continent européen et son ouverture sur la mer ont, pendant des siècles, été un facteur important de dynamisme et de prospérité.

3.3   La dimension maritime est une caractéristique essentielle de cet espace, dont l’héritage économique, technologique et culturel commun comprend des activités telles que la pêche, la construction navale, l'industrie métallurgique, l'ingénierie, la recherche et les sciences, les ports, le commerce et le transport maritime.

3.4   La façade atlantique européenne est en train de se retrouver éloignée du centre politique et économique de l’Europe. À cela s’ajoutent les difficultés d’accès, un manque d’infrastructures de transport, d’énergie et de communications entre les régions atlantiques elles-mêmes et entre celles-ci et les zones plus prospères de l’Europe.

3.4.1   La plupart des régions atlantiques ont un niveau de revenu inférieur à la moyenne européenne et certaines régions se retrouvent dans l’objectif de «convergence» de la politique de cohésion (annexe II).

3.4.2   La situation se détériore et l'on constate un net recul des activités traditionnelles de la région atlantique, avec un secteur de la pêche en surcapacité qui a considérablement réduit ses effectifs et ses captures, le déclin des chantiers navals et des capacités de transport maritime et portuaire sous-utilisées.

3.5   D’un autre côté, l’Atlantique dispose de précieuses ressources encore inexploitées pouvant constituer des sources de richesse, de diversification économique, de création d’emplois et d’amélioration de l’environnement, comme les énergies marines renouvelables, les ressources du sous-sol, les biotechnologies marines et les activités nautiques de loisir et de tourisme, entre autres.

3.6   Le CESE considère que l’espace atlantique se compose d’un ensemble hétérogène de territoires confrontés à leurs propres défis en matière de développement, dont l’unité et la spécificité résident dans son caractère maritime et ouvert sur le monde et dans sa situation de connexion insuffisante avec les centres économiques et politiques européens.

4.   La communication «Définir une stratégie maritime pour la région atlantique»

4.1   À la demande du Conseil et du Parlement, la Commission européenne a publié, le 21 novembre, une communication intitulée: «Définir une stratégie maritime pour la région atlantique» (8).

4.2   Ayant pour objectif prioritaire de promouvoir une croissance et des emplois durables, la stratégie aborde les enjeux et les perspectives qui attendent la région atlantique regroupés en cinq thématiques liées entre elles:

4.2.1

La mise en œuvre d'une approche écosystémique: les activités ayant une incidence sur la mer doivent être gérées de manière à préserver un écosystème pour qu'il demeure sain et productif. La stratégie repose sur le développement de trois domaines: la pêche, l'aquaculture et les systèmes d'observation.

4.2.2

La réduction de l’empreinte carbonique en Europe, avec trois éléments prioritaires: l'énergie éolienne marine, l'énergie marémotrice et le transport maritime.

4.2.3

L'exploitation durable des ressources naturelles des fonds marins de l'Atlantique vise à encourager la durabilité, la recherche et la connaissance.

4.2.4

La réponse aux menaces et aux situations d’urgence, résultant aussi bien d'accidents que de catastrophes naturelles, en améliorant la sécurité et la coordination.

4.2.5

Une croissance ouverte à tous, car bien des communautés atlantiques doivent créer de nouveaux emplois dans des activités émergentes appelées à remplacer les activités traditionnelles en déclin.

4.3   Les instruments de l'UE résultent de la combinaison stratégique d'instruments financiers et législatifs de l'UE.

4.4   Quant à l'exécution de la stratégie, un plan d'action sera adopté pour fin 2013.

4.4.1   Les instruments qui seront utilisés incluent: la coopération politique, des actions ciblées dans le cadre des accords et des structures existants et la combinaison des instruments de financement et des actes législatifs.

4.4.2   Un forum atlantique sera mis sur pied auquel contribueront les États membres, le Parlement européen, les autorités régionales, la société civile et les représentants des industries existantes. Le forum, qui démarrera en 2012 et sera dissous en 2013, inclura des ateliers thématiques et un laboratoire d’idées.

5.   Observations générales

5.1   Le CESE accueille favorablement l'initiative de la Commission européenne, qui propose une approche de la politique maritime intégrée (PMI) au niveau de la façade atlantique. La PMI fournit un cadre commun à toutes les politiques sectorielles ayant une incidence sur la mer, afin d'éviter les incohérences et l'inefficacité.

5.2   Le CESE est d'avis que l'application concrète de la PMI pour l'Atlantique permettra d'adopter une nouvelle approche pour l'élaboration des politiques liées à la mer et de tirer parti des possibilités qu'offre l'Atlantique en termes de développement socio-économique.

5.3   Le CESE est favorable à l'approche qui sous-tend la stratégie de soutien aux nouveaux secteurs économiques émergents, et d'élan renouvelé pour les secteurs traditionnels, dans le cadre d'une approche de développement durable.

5.4   Le Comité propose que les énergies renouvelables marines reçoivent un appui politique maximum et un soutien financier des institutions de l'UE, car elles permettent de réduire l'empreinte carbonique en Europe et de générer une activité industrielle et économique très intense autour d'elles, allant au-delà des zones portuaires proches de parcs d'éoliennes.

5.5   La stratégie doit servir de moteur aux capacités de recherche, de développement technologique et de production du secteur énergétique marin, de son industrie auxiliaire et de son appareil logistique dans les régions atlantiques. Cela permettra à la fois de diversifier le tissu économique et de réorienter les secteurs en déclin.

5.6   Ces capacités incluent non seulement les éoliennes sur fondations fixes, mais aussi les éoliennes flottantes.

5.7   Les vagues et les marées offrent des ressources énergétiques et économiques à haut potentiel, d'autant plus dans l'Atlantique où elles figurent parmi les plus élevées au monde. Le CESE propose que la stratégie atlantique renforce le soutien accordé à la recherche et au développement de ces activités.

5.8   Les sources d'énergie renouvelables en mer doivent bénéficier de la connexion entre les principaux centres de production et de consommation. Les réseaux de connexion entre les centres de génération et les réseaux de consommation sont fondamentaux pour permettre l'utilisation du potentiel énergétique de la mer; c'est la raison pour laquelle il faut disposer de réseaux électriques maritimes connectés aux réseaux terrestres.

5.9   La construction navale est une autre activité économique traditionnelle des régions atlantiques qui mérite d'être encouragée, mais sur de nouvelles bases. En effet, la construction de bateaux évolués sur le plan technologique, offrant de meilleures performances environnementales, répondant à des législations restrictives en termes d'émissions et de pollution, ainsi que la gamme d'embarcations liées aux énergies éoliennes marines, constituent de nouveaux secteurs d'avenir pour la construction navale des régions atlantiques.

5.10   Pour pallier l'éloignement géographique de nombreuses communautés de la façade atlantique, en particulier de certaines îles, il est essentiel que les nouvelles technologies de communication permettent un développement d'activités économiques innovatrices, l'établissement de réseaux et le contact avec les marchés.

5.11   Le CESE propose le renforcement des mesures de croissance fondée sur l'intégration sociale dans les régions atlantiques. La formation, en particulier des jeunes, est fondamentale. Il y a lieu de garantir la transmission des connaissances et des compétences de génération en génération. Il convient d'améliorer la collaboration entre universités, entreprises et établissements d'enseignement secondaire. Il y a également lieu de renforcer le dialogue social.

5.12   La pêche est un secteur qui a subi de très grosses pertes d'emplois ces dernières décennies. Pour cette raison, le CESE considère qu'il est nécessaire de prévoir, pour les localités côtières s'adonnant traditionnellement à cette activité, des mesures de diversification et de promotion de nouvelles activités. La pêche artisanale côtière, la pêche aux coquillages et l’aquaculture sont les activités les plus durables et déterminantes dans le développement socio-économique de certaines régions côtières, et revêtent par ailleurs une grande importance culturelle.

5.13   Le CESE propose le renforcement du transport de marchandises par mer et la réduction du transport routier. Il convient d'encourager les autoroutes de la mer et cela suppose d'améliorer les systèmes d'intermodalité entre les ports et les chemins de fer.

5.14   Divers accidents ont mis en évidence l'importance du défi de la sécurité face aux urgences et aux menaces. Il est nécessaire d'installer des dispositifs et des systèmes pour renforcer la surveillance et la sécurité. Le CESE propose l'accroissement du rôle de l'Agence européenne pour la sécurité maritime, le renforcement de la coordination entre États membres et l'adoption de législations appropriées, susceptibles d'éviter les risques actuels.

5.15   La stratégie atlantique constitue une occasion à saisir pour les régions concernées. Le CESE propose d'agir ambitieusement pour mobiliser toute les ressources existantes.

5.16   Le forum atlantique doit être ouvert, d'une manière appropriée, à la participation de tous les acteurs concernés par le développement stratégique de l'Atlantique. Il est très important que les collectivités régionales et les organisations de la société civile y participent en plus des États membres et des institutions européennes.

5.17   Le CESE, qui participe au «Leadership Group of the Atlantic Forum», a proposé que le Réseau transnational atlantique (RTA) des conseils économiques et sociaux participe au forum, car il regroupe des acteurs de terrain, indispensables pour définir et exécuter les projets. Pour garantir la réussite du plan d'action, les principaux acteurs sociaux et régionaux doivent participer à son élaboration.

5.18   Le forum peut jouer un important rôle de suivi et d'évaluation de l'exécution du plan d'action et de la stratégie; le CESE déplore par conséquent que la Commission envisage la dissolution du forum au début de la phase opérationnelle d'exécution des projets. Le Comité propose que le forum atlantique soit maintenu en activité après l'élaboration du plan d'action.

6.   La coopération atlantique: réseaux et projets de coopération transnationale

6.1   Afin d’encourager le développement équilibré de l’UE, des réseaux de régions irlandaises, britanniques, françaises, espagnoles et portugaises, de villes et d’organisations de la société civile de ces régions ont été créés: conseils économiques et sociaux, chambres de commerce, syndicats, organisations patronales, organisations de l'économie sociale, ONG, universités, etc.

6.2   La Commission Arc Atlantique (9), est l’une des six commissions géographiques de la Conférence des régions périphériques et maritimes d’Europe (CRPM). Elle regroupe 24 régions de la façade atlantique. C’est un forum politique défendant les intérêts des régions, qui dynamise la coopération transnationale atlantique en matière de projets communs. De même, les villes atlantiques poursuivent des objectifs analogues dans le cadre de la Conférence des villes de l'Arc Atlantique (10).

6.3   Le Réseau transnational atlantique (RTA) (11) des agents économiques et sociaux a été créé en 2003 et regroupe les conseils économiques et sociaux et les institutions similaires de la façade atlantique britannique, française, espagnole et portugaise, au sein d’une plate-forme de coopération de la société civile de l’espace atlantique. Ce réseau vise à promouvoir la coopération et l’élaboration de politiques qui, dans le contexte de l’intégration européenne, ont des effets positifs sur le développement des régions atlantiques, en améliorant la compétitivité et la cohésion sociale et territoriale et en surmontant les désavantages liés à leur situation géographique.

6.4   Le RTA a élaboré diverses études et propositions dans les domaines de l’innovation et du transfert de technologies, et dans celui de l’intermodalité dans le transport de marchandises, en accordant une attention particulière au transport maritime, aux ports et à leurs «arrière-pays» ainsi qu'à la sécurité maritime de l’espace atlantique. Le RTA a récemment travaillé au développement des énergies marines renouvelables et sur la stratégie européenne pour l’Atlantique.

6.5   Il existe des réseaux atlantiques comme l’Association des chambres d’agriculture de l’Arc Atlantique (AC3A) ainsi que d’autres réseaux dans le milieu universitaire. Depuis 2007, la Commission Arc Atlantique accueille au sein de son comité de coordination des représentants de tous ces réseaux, dans un espace commun de réflexion sur les thèmes stratégiques pour l’espace atlantique.

6.6   La coopération a démarré en 1989, dans le cadre du programme INTERREG. Durant la période de programmation actuelle, des projets de grande envergure et intégrateurs sont en cours de développement dans les domaines du transport et de la création d’un «pôle» de dimension atlantique spécialisé dans les énergies marines renouvelables.

6.7   Le CESE partage l’avis des agents concernés: la coopération atlantique a souffert des limites de la coopération territoriale transnationale en général, d’un manque de vision stratégique, de l’absence de coordination entre les projets, ce qui a entraîné une perte de synergies et la prolifération de projets non opérationnels (12).

6.8   Le CESE considère que cette expérience de coopération, dynamique et diversifiée entre les acteurs atlantiques constitue une base très solide pour le lancement de nouveaux projets de coopération plus ambitieux et dotés d’une plus grande dimension stratégique.

7.   La proposition du CESE: une stratégie macrorégionale pour l’espace atlantique

7.1   Le CESE considère que la stratégie macrorégionale est un instrument adéquat pour la région atlantique. La promotion du développement endogène de la macrorégion atlantique par une stratégie de grande envergure placera l’espace atlantique dans une meilleure position par rapport aux objectifs de l’UE.

7.2   Le Conseil a appelé les États membres et la Commission à continuer de promouvoir les stratégies macrorégionales actuelles et à envisager de mettre en œuvre d’autres stratégies à l’avenir.

7.3   Le CESE perçoit les motifs d’équilibre territorial de l’UE justifiant de promouvoir une stratégie macrorégionale dans l’Atlantique qui permette d’aborder les défis transnationaux auxquels cet espace est confronté. La situation de l’Arc atlantique dans la région occidentale de l'Europe est accentuée par l’élan donné aux régions du Nord et du centre de l’UE avec les deux stratégies macrorégionales actuelles.

7.4   La préparation du cadre financier pluriannuel 2014-2020 et la configuration des politiques pendant la nouvelle période de programmation offrent la possibilité de prendre dès à présent les décisions adéquates.

7.5   Une stratégie macrorégionale est une occasion de profiter de l’expérience de coopération riche et dense qui a été acquise et de réaliser un saut qualitatif vers des formes de coopération plus complexes et ambitieuses, car la région atlantique doit développer des projets communs à grande échelle qui ne peuvent être traités avec les instruments actuels.

7.6   La dimension maritime atlantique comprend bon nombre des défis et des possibilités de l’espace atlantique, mais compte tenu de sa relation fondamentale avec le continent, le CESE propose d'ajouter à la dimension maritime une dimension territoriale. Le territoire continental aménage et développe l’«arrière-pays» sans lequel la valorisation du potentiel maritime perd toute perspective. La façade maritime a besoin d’un «arrière-pays» actif et dynamique ainsi que de synergies permettant le développement cohérent de l’ensemble du territoire.

7.7   Le Parlement européen s’est également prononcé en faveur d’une approche macrorégionale qui aborde le pilier maritime et le pilier territorial dans l’espace atlantique (13).

8.   Structure et piliers thématiques

8.1   Le CESE recommande un schéma analogue à celui de la stratégie pour la région de la mer Baltique, à savoir:

8.1.1   Un document stratégique clair et tourné vers l’action qui reprenne les piliers thématiques;

8.1.2   Un plan d’action contenant les actions prioritaires développées dans le cadre des piliers thématiques et des projets phares.

8.1.3   Le CESE considère qu’il est nécessaire d’introduire des systèmes d’évaluation des progrès de la stratégie, car il s'agit d'un processus dynamique et innovant qui doit comporter des mécanismes de suivi, d’évaluation et de révision.

8.2   Le CESE propose que la stratégie macrorégionale pour la région de l’Atlantique repose sur les piliers thématiques de la stratégie «Europe 2020», en intégrant de la sorte les contenus thématiques et les politiques sectorielles.

8.3   Dimension internationale

8.3.1   L'Islande et la Norvège sont deux pays européens qui partagent aussi la région de l'Atlantique et doivent participer à la stratégie macrorégionale, ainsi que le Groenland et les îles Féroé. Les États membres de la région de la mer du Nord peuvent également être intéressés par la mise en œuvre d'une stratégie macrorégionale dans ce domaine.

8.3.2   La position géopolitique de l’Atlantique, les liens historiques et culturels et l’expérience de coopération doivent être intégrés au sein d’une stratégie macrorégionale atlantique. La dimension transatlantique est fondamentale car les relations avec les États-Unis, l'Amérique centrale et du Sud et l’Afrique sont stratégiques pour l'UE.

8.4   Croissance durable

8.4.1   La région atlantique a besoin d’un système de transports plus durable qui permette de réduire la dépendance vis-à-vis du transport routier, lequel est responsable de taux d’émission de CO2 plus élevés que d'autres moyens de transport. Il faut déplacer le trafic vers la mer en favorisant le transport maritime, les autoroutes de la mer, et les connexions portuaires terrestres, en utilisant en priorité le transport ferroviaire. Ceci suppose d’aménager des espaces portuaires, des connexions ports-villes et l’ensemble des réseaux et des plates-formes de transport. La sécurité maritime et la coopération en matière de prévention et de réponse aux situations de catastrophe doivent y être intégrées.

8.4.2   La durabilité de l’environnement marin est étroitement liée et très vulnérable aux pressions exercées par les différentes activités humaines, y compris les pollutions terrestres diffuses et les eaux intérieures qui se déversent dans l’Atlantique.

8.4.3   Concernant la durabilité du littoral et la gestion intégrée des zones côtières, il conviendra d'envisager, en plus des activités économiques et de la pollution du littoral, le phénomène de la forte concentration sur le littoral du développement urbain et la relation entre le littoral et l’intérieur.

8.4.4   Il faudra inclure des mesures d’adaptation et de prévention pour ce qui est du changement climatique et de ses conséquences sur le littoral urbanisé et naturel.

8.4.5   Le potentiel des énergies renouvelables dans l’Atlantique constitue une immense source d’énergie propre et locale qui demeure encore inexploitée.

8.5   Croissance intelligente

8.5.1   La communication de la région atlantique par son axe nord/sud et sa connexion vers les marchés de l’Europe centrale et orientale suppose un facteur de compétitivité très important à atteindre par l’établissement d’un couloir ferroportuaire atlantique. Les connexions aériennes atlantiques sont également insuffisantes.

8.5.2   L’utilisation des ressources de l’Atlantique comme les énergies marines renouvelables, les biotechnologies marines ou les autres gisements du sous-sol marin offrent la possibilité de créer des secteurs économiques florissants, très novateurs, pouvant être source de richesse et d’emploi.

8.5.3   Ces politiques exigent une mobilisation importante des agents économiques et sociaux et des agents scientifiques, technologiques et financiers. Il sera nécessaire de fixer des objectifs dans des domaines tels que les infrastructures, l’industrie, la formation, les politiques de R&D&I, les collaborations entre les universités, les centres technologiques et les entreprises, la création de pôles, etc.

8.5.4   La recherche en systèmes et technologies environnementaux avancés ouvre de nouvelles stratégies et de nouveaux horizons pour les activités atlantiques traditionnelles en déclin comme la pêche et la construction navale. Le secteur nautique est également florissant et contribue aux stratégies de développement.

8.5.5   Le tourisme nautique et de vacances est un pôle d'attraction qu'il convient de valoriser au niveau des aspects liés au patrimoine tant naturel que culturel. Le tourisme est générateur d'activité économique et d'emploi tout en contribuant à développer l'identité atlantique et européenne.

8.6   Croissance inclusive

8.6.1   La stratégie pour la région atlantique doit inclure une dimension sociale majeure. Le développement économique et la création de nouveaux emplois doivent contribuer à retenir les populations qui résident dans les régions atlantiques et à améliorer leur qualité de vie.

8.6.2   Les autorités régionales doivent promouvoir le dialogue social et la participation des partenaires sociaux et de la société civile.

8.6.3   Il est prioritaire d’améliorer la formation dans les domaines maritime et nautique, ainsi que la collaboration entre les universités et les centres de formation.

8.6.4   Les technologies de l’information doivent être mieux développées, essentiellement dans les zones les plus éloignées de la région atlantique qui ont besoin d’améliorer leur connectivité.

8.6.5   Sur la base d’une approche intégrée de la cohésion territoriale, il est nécessaire de tenir compte de la situation des petits villages du littoral, des îles, des villes, des zones métropolitaines et des localités rurales.

9.   Gouvernance et financement

9.1   Le CESE considère que le traité dispose de nombreuses bases juridiques sur lesquelles reposent ces politiques, notamment les articles 174 à 178 (Cohésion), 38 et 39 (Agriculture et pêche), de 90 à 100 (Transports), 170 et 171 (Réseaux de transports), 173 (Industrie), de 191à193 (Environnement), 194 (Énergie), 195 (Tourisme) et 349 (Régions ultrapériphériques).

9.2   La stratégie doit être européenne, élaborée par la Commission, approuvée par le Conseil et le Parlement et soutenue par le CESE et le CdR. Un engagement fort des États membres de la façade atlantique est nécessaire pour la mise en œuvre de cette stratégie.

9.3   Cette stratégie doit être menée à bien dans le cadre d’un vaste processus de consultation et de dialogue avec tous les acteurs concernés, aux niveaux national, régional et local, tant dans les sphères institutionnelles qu'avec les organisations de la société civile.

9.4   La participation de divers acteurs est nécessaire; ceux-ci ne peuvent être mobilisés que par un modèle de gouvernance à plusieurs niveaux qui les regroupe et facilite leur participation et leur contribution de manière équilibrée et structurée.

9.5   Le CESE considère qu'il y a lieu d'éliminer les contraintes des «trois non», en tenant compte des expériences des régions de la mer Baltique et du Danube, car il sera nécessaire à l'avenir de disposer de nouveaux instruments juridiques, administratifs et financiers pour garantir le succès des stratégies macrorégionales.

9.6   La Commission européenne devrait jouer un rôle de facilitateur et de coordonnateur des actions.

9.7   Il conviendrait de créer un groupe de haut niveau de représentants des États membres, aux côtés de la Commission, du Parlement européen, du CESE et du Comité des régions.

9.8   Les points de contact dans chacun des cinq États membres concernés devraient être chargés de coordonner les mesures prises au niveau national dans le cadre de la stratégie.

9.9   Les coordonnateurs de chaque domaine prioritaire et les coordonnateurs des projets pourront être issus d'organes aussi bien étatiques que régionaux et locaux.

9.10   Le CESE veut souligner l’importance d'un forum atlantique guidé par une approche de gouvernance à plusieurs niveaux, qui se réunisse et canalise la participation et la contribution de toutes les parties concernées, non seulement dans l’élaboration mais aussi au cours du processus de suivi, d’évaluation et de révision de la stratégie. Les pouvoirs régionaux, les autorités régionales, les organisations de la société civile, les entreprises, les syndicats, l'économie sociale, les universités, les centres technologiques et les autres acteurs devraient participer activement aux activités de ce forum.

9.11   Le principe selon lequel il ne faut «pas de financement supplémentaire» sous-entend que les fonds de la politique de cohésion sont la source de financement la plus importante pour la stratégie macrorégionale. Le CESE considère toutefois qu'il sera nécessaire, à l'avenir, de disposer de financements spécifiques.

9.12   Le CESE considère que les fonds actuellement utilisés présentent certaines limitations pour le financement d'une série de projets stratégiques. Il est donc nécessaire d'étendre les instruments de financement en utilisant également les fonds européens liés aux politiques sectorielles.

9.13   La Banque européenne d’investissement peut aussi financer des projets concrets. Les ressources nationales, régionales et locales doivent cofinancer les projets, tout comme le partenariat public-privé.

9.14   Le contexte actuel de configuration du cadre européen de financement pluriannuel et de réforme de la politique régionale de l’UE est opportun pour s’assurer que la réglementation des fonds permettra de financer les stratégies macrorégionales.

9.15   Pour que les actions et les projets de la stratégie macrorégionale pour l’Atlantique puissent être incorporés à la programmation des fonds de la période 2014-2020, il convient de prendre les décisions nécessaires en 2013 afin que la stratégie macrorégionale soit opérationnelle dès le début de la nouvelle période de programmation.

Bruxelles, le 24 mai 2012.

Le président du Comité économique et social européen

Staffan NILSSON


(1)  Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions du 10 juin 2009 concernant la stratégie de l'Union européenne pour la région de la mer Baltique (COM(2009) 248 final).

(2)  Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions intitulée «Stratégie de l’Union européenne pour la région du Danube» (COM(2010) 715 final).

(3)  Voir le point 1 ci-dessus.

(4)  Voir les avis du CESE sur la stratégie de l'UE pour la région du Danube, JO C 48 du 15.2.2011, p. 2, et JO C 248 du 25.8.2011, p. 81.

(5)  Rapport de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions de 2011 sur la stratégie de l’Union européenne pour la région de la mer Baltique – (COM(2011) 381 final).

(6)  Agenda territorial de l'Union européenne 2020. Vers une Europe inclusive, intelligente et durable, faite de régions diverses, du 19 mai 2011.

(7)  Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil portant dispositions particulières relatives à la contribution du Fonds européen de développement régional à l’objectif «Coopération territoriale européenne», [COM(2011) 611 final].

(8)  Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions «Définir une stratégie maritime pour la région atlantique», du 21/11/2011, COM(2011) 782 final.

(9)  http://arcatlantique.org.

(10)  http://www.atlanticcities.eu.

(11)  Welsh Economic Forum, Conseils économiques, sociaux et environnementaux régionaux de Basse-Normandie, Bretagne, Pays de la Loire, Poitou-Charentes, Aquitaine, Centre et Limousin; Consejos Económicos y Sociales de País Vasco, Cantabria, Asturias, Galicia y Canarias; Instituto de Soldadura e Qualidade de Lisboa, USALGARVE.

(12)  Schéma de développement de l'espace atlantique (SDEA), Commission Arc Atlantique - CRPM.

(13)  Résolution du Parlement européen du 9 mars 2011 sur la stratégie européenne pour la région atlantique.


31.7.2012   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 229/32


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de règlement du Conseil fixant le cadre financier pluriannuel pour la période 2014-2020»

COM(2011) 398 final — 2011/0177 (APP)

et sur la «Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — un budget pour la stratégie Europe 2020»

COM(2011) 500 final

2012/C 229/06

Rapporteur: M. PALMIERI

Corapporteur: M. KRAWCZYK

Le 29 juin 2011, le Conseil a décidé, conformément à l'article 304 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la

«Proposition de règlement du Conseil fixant le cadre financier pluriannuel pour la période 2014-2020»

COM(2011) 398 final — 2011/0177 (APP)

Le 19 octobre 2011, le Conseil a décidé, conformément à l'article 304 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la

«Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions “Un budget pour la stratégie Europe 2020”»

COM(2011) 500 final.

La section spécialisée «Union économique et monétaire, cohésion économique et sociale», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 7 mai 2012.

Lors de sa 481e session plénière des 23 et 24 mai 2012 (séance du 24 mai 2012), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 165 voix pour, 9 voix contre et 5 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1   Le CESE comprend que sur le nouveau cadre financier pluriannuel (CFP), la Commission s'efforce de parvenir à une position équilibrée, qui se situe à mi-chemin de deux exigences contradictoires, la première étant la volonté que manifestent les États membres de restreindre les engagements de ressources publiques en raison de la crise, qui est inévitablement appelée à peser sur le cours du débat et les contenus de l'accord final, tandis que la seconde réside dans la nécessité de relever, de manière appropriée et efficace, les ambitieux défis auxquels l'UE est confrontée et qui tirent leur origine du traité de Lisbonne comme de la stratégie Europe 2020.

1.2   L'Europe se trouve en effet dans une phase difficile, à cause tant de la crise financière et économique aiguë que de l'absence d'une réaction conjointe des différents États membres pour y faire face. Une telle situation risque de remettre en cause le fonctionnement même de l'UE et d'ébranler jusqu'à ses perspectives.

1.3   Dans le cadre du présent avis, le CESE rappelle, comme il l'avait déjà affirmé précédemment dans d'autres, en concordance avec le Parlement européen et le Comité des régions, que pour faire droit à ces ambitions de l'UE, il est non seulement souhaitable mais tout à fait indispensable d'accroître la taille de son budget pour relancer la croissance économique et l'emploi. Le CESE partage l'idée que l'Union a besoin de «plus d'Europe (et d'une meilleure Europe)» et non de «moins d'Europe». A contrario, geler en termes réels le cadre financier pluriannuel à son niveau actuel serait se condamner à ne pas relever nombre des défis auxquels l'UE devra faire face dans les prochaines années.

1.4   Il apparaît donc que la proposition de la Commission s'attache de manière excessive à une démarche de maintien du statu quo, du point de vue des ressources allouées comme de la structure du budget, et cette attitude crée un hiatus entre, d'une part, l'ampleur et la teneur des nouveaux défis posés à l'UE et, d'autre part, les ressources disponibles, ou, en d'autres termes, entre les ambitions de l'Europe et les moyens pour les réaliser.

1.5   En outre, le CESE estime que le débat sur le réexamen du budget européen doit être axé sur sa capacité à servir le projet politique de l'UE, que la crise actuelle remet sérieusement en question. Le critère sur lequel devra se fonder l'évaluation du cadre financier pluriannuel sera que l'UE soit adéquatement dotée des ressources nécessaires pour atteindre ses priorités stratégiques sans alourdir la pression fiscale sur les particuliers et les entreprises et qu'elle soit capable de fournir, au niveau européen, une «valeur ajoutée (1)» proportionnelle aux charges qu'elle impose aux citoyens européens.

1.6   En ce qui concerne le contenu détaillé de la proposition, le CESE adhère à l'idée d'améliorer et de simplifier la structure du budget de l'UE, afin de désamorcer le débat sur le «juste retour» et l'équité horizontale entre les États membres et de pouvoir porter l'attention sur la réalisation efficace des objectifs stratégiques européens.

1.7   Sur le versant des recettes, on relève un élément fort novateur, avec la proposition d'instaurer un nouveau système de ressources propres, fondé tant sur la modification de la ressource TVA que sur la taxation des transactions financières, à propos de laquelle le CESE a déjà fait part de sa préférence pour un retour à l'esprit original du traité de Rome (2), propre à assurer à l'UE une réelle autonomie financière.

1.7.1   Le CESE soutient la modification de la ressource propre TVA, dans la mesure où elle concourrait à développer le marché intérieur de l'UE en évitant des distorsions économiques parmi les États membres. Il souligne toutefois que la proposition de la Commission ne comporte pas de données précises sur les modifications apportées à la structure de la TVA et les différences qu'elles induiraient pour chaque État membre en fait de volumes financiers. Tout en rappelant que la taxe sur les transactions financières (TTF) s'applique à l'échelle mondiale, il estime que son instauration au niveau européen, grâce à la fixation d'un taux plancher pour tous les États membres, permettrait de favoriser un apport accru du secteur financier au budget de l'UE et des États membres et de réduire l'instabilité économique due aux mouvements de pure spéculation.

1.8   Pour réaliser les objectifs de la stratégie Europe 2020, il sera par ailleurs nécessaire d'engager des moyens qui excèdent largement ceux prévus par le cadre financier pluriannuel; aussi le CESE recommande-t-il d'étudier de manière plus approfondie la possibilité de créer des instruments financiers originaux pour assurer la couverture de tels investissements (emprunts obligataires destinés au financement de projets), non sans avoir toutefois procédé à une évaluation préalable soignée de leurs éventuelles conséquences et du transfert de risque au secteur public qu'ils pourraient induire.

1.9   Du côté des dépenses, les priorités dégagées par la Commission européenne appellent des actions qui, ne pouvant être mises en œuvre qu'au seul niveau européen, constituent par excellence la «valeur ajoutée» de l'Europe, lorsqu'un euro dépensé au niveau de l'Union s'avère plus efficace que s'il l'était à l'échelle nationale. Sont ici visés des «biens publics européens», dont la fourniture n'est pas assurée de manière optimale à l'échelon national, en raison d'imperfections du marché dans un pays ou de l'impossibilité d'y transposer des économies d'échelle, et qui requièrent dès lors une intervention européenne efficace.

1.10   Dans ce contexte, le CESE porte un jugement positif sur la réforme de la politique agricole commune (PAC), qui a été entreprise pour garantir à l'Europe un modèle d'agriculture efficace et fonctionnel, en créant dans le même temps une valeur ajoutée authentique pour l'UE. Le CESE réitère ici sa conviction, déjà exprimée par ailleurs, quant à la nécessité de configurer la PAC, ainsi que la politique commune de la pêche (PCP), d'une manière qui renforce le lien de l'agriculture, de la sylviculture et de la pêche avec la protection de l'environnement et la gestion durable des ressources naturelles. Cette approche aura pour effet de mettre en valeur les bonnes pratiques environnementales sans que la bonne santé économique et la compétitivité des exploitations agricoles et des entreprises de pêche en pâtissent pour autant, dans un contexte caractérisé par la forte variabilité des prix des grands produits de base.

1.11   Pour ce qui est du régime des paiements directs, le CESE souligne que l'harmonisation des conditions de concurrence des agriculteurs européens et l'intégration renforcée des nouveaux États membres constituent un objectif dont la mise en œuvre doit passer par une évaluation soigneuse des effets qui pourraient en résulter pour tous les États membres. Afin d'éviter les distorsions de concurrence, qui peuvent avoir des conséquences sociales, il convient de garantir qu'au terme de l'exécution du cadre financier pour la période 2014-2020, le niveau des paiements directs ne soit, pour aucun État membre, inférieur à 90 % de la moyenne des États membres de l'UE à 27.

1.12   Il convient de prendre pour principe directeur de la future politique de cohésion l'article 174 du traité de Lisbonne stipulant que «l'Union vise à réduire l'écart entre les niveaux de développement des diverses régions et le retard des régions les moins favorisées».

1.13   En ce qui concerne la politique de cohésion, le CESE estime qu'il apparaît convaincant de la concentrer sur un petit nombre de priorités européennes pertinentes mais est hostile à la proposition d'appliquer une conditionnalité macroéconomique à l'octroi des fonds destinés à la politique de cohésion. Il juge par ailleurs que la création d'une nouvelle catégorie de régions «en transition», en lieu et place des mécanismes d'entrée et de sortie progressives, ne peut obérer les ressources destinées aux régions les moins développées et que le Fonds de cohésion ne peut être indûment utilisé pour des tâches autres que celles qui ressortissent à son champ d'application originel. Néanmoins, à titre exceptionnel, les fonds résiduels du plan 2007-2013 peuvent être affectés au financement d'un plan européen pour la croissance que devrait lancer l'Union européenne. La même faculté devra être donnée en ce qui concerne les ressources du prochain plan 2014-2020, pour un laps de temps limité, par exemple, aux trois premières années.

1.14   Pour concrétiser dans les faits les objectifs du nouveau cadre financier pluriannuel, il est nécessaire, de l'avis du CESE, que le budget de l'UE soit exemplaire, fonctionnel, efficace et transparent, de manière à ce qu'il acquière une crédibilité vis-à-vis des citoyens européens et qu'ils puissent facilement y repérer, de leurs propres yeux, les avantages induits par l'Europe et les coûts liés à la «non-Europe». Dans le contexte ainsi tracé, le CESE rappelle qu'il y a lieu de lancer ou de mettre en œuvre des dispositifs qui permettent de suivre les résultats de toutes les politiques européennes, afin de vérifier leurs effets dans le domaine social, économique et régional.

1.15   Considérant que la proposition de la Commission constitue une base de négociation sur laquelle les tractations sont désormais lancées, le CESE s'engage dès à présent à effectuer, en s'appuyant sur les observations du présent avis, un travail de suivi et d'intervention concernant les modalités par lesquelles elle sera traduite en modifications législatives.

2.   La proposition de la Commission de cadre financier pluriannuel (CFP) pour la période 2014-2020

2.1   Le présent avis concerne la proposition de règlement du Conseil COM(2011) 398 final, laquelle, en établissant le cadre financier pluriannuel pour la période 2014-2020, constitue la transposition législative de la communication de la Commission européenne COM(2011) 500, du 29 juin 2011, sur «Un budget pour la stratégie Europe 2020».

2.2   Au total, le cadre financier pluriannuel mobilise 1 025 milliards d'euros, soit 1,05 % du revenu national brut (RNB) de l'UE, auxquels il convient d'ajouter 58,5 milliards d'euros de dépenses qui ne relèvent pas dudit cadre (à savoir le Fonds européen de développement et le Fonds européen d'ajustement à la mondialisation). Son montant total est presque identique, compte tenu de l'inflation, à celui du cadre financier précédent (pour la période 2007-2013), qui avait été fixé à 994 milliards d'euros.

2.3   En ce qui concerne les dépenses, les changements apportés sont les suivants:

il procède à une simplification, grâce à une réduction du nombre de programmes et d'objectifs, afin de réduire les lourdeurs bureaucratiques pour les bénéficiaires et de faciliter les évaluations d'impact;

il réduit les ressources allouées aux Fonds structurels (FEDER, FSE et Fonds de cohésion), qui, déduction faite du mécanisme pour l'interconnexion en Europe, passent de 355 milliards d'euros à 336 milliards, tout en créant une nouvelle catégorie de «régions en transition» pour remplacer le système actuel de suppression et d’instauration progressives de l’aide;

il crée un cadre stratégique commun pour les Fonds structurels, le développement rural et la pêche, ainsi qu'Horizon 2020, qui couvrira la recherche et l'innovation et accordera un rôle clé à l'Institut européen de technologie;

il instaure un nouveau mécanisme pour l'interconnexion en Europe destiné aux réseaux à grande échelle de transports, d'énergie et de technologies de l'information et de la communication (40 milliards d'euros, auxquels s'ajoutent 10 milliards d'euros en provenance du Fonds de cohésion);

il lance une réforme de la PAC, en diminue légèrement l'ampleur, en pourcentage du budget global (montant annuel de 60 milliards) comme en termes réels (3), et l'articule plus étroitement avec les dynamiques environnementales (écologisation) et avec l'engagement à une plus grande flexibilité;

il augmente le financement de la recherche et de l'innovation, ainsi que de l'éducation et de la formation (80 milliards d'euros).

2.4   En ce qui concerne les recettes, il est proposé de passer progressivement d'un budget provenant essentiellement des contributions fondées sur le revenu national brut (RNB) à un budget intégré, qui se fonde sur de véritables ressources propres et est doté de mécanismes de correction réaménagés. La Commission propose notamment que l'UE renonce aux ressources propres actuelles, fondées sur la TVA, et les remplace, à partir de 2018 au plus tard, par un système de ressources propres qui repose sur l'instauration de la taxe sur les transactions financières et une nouvelle TVA, afin de renforcer l'harmonisation des différents régimes nationaux et d'éliminer les exemptions et dérogations.

3.   Observations générales

3.1   Il relève de l'évidence que la Commission européenne s'efforce de parvenir à une position équilibrée sur le nouveau cadre financier pluriannuel, dans une phase qui est particulièrement difficile pour le fonctionnement et les perspectives de l'UE, tant à cause de la crise financière et économique en Europe qu'en raison de la non-adhésion des États membres à la réaction politique européenne. Il s'agit ici de trouver un équilibre entre deux exigences tout aussi contradictoires que prégnantes: d'une part, le climat d'austérité instauré par la crise, qui débouche sur une volonté de limiter les engagements de ressources publiques et continuera inévitablement à influer sur le cours du débat et le contenu de l'accord final et, d'autre part, la nécessité de dégager les moyens financiers requis pour relever efficacement les défis ambitieux qui attendent l'UE.

3.2   La proposition de la Commission «Un budget pour la stratégie Europe 2020» doit dès lors être replacée dans le contexte de la conjoncture économique et politique actuelle. Étant donné qu'aucune discussion sur la forme que devrait revêtir le budget de l'UE ne saurait faire l'économie de la question du rôle que l'intégration européenne doit jouer aujourd'hui afin que nous puissions relever les nouveaux défis d'un monde en mutation, nous devons également comprendre quelles sont les intentions réelles des États membres pour lui reconnaître cette fonction et lui permettre de l'assumer.

3.2.1   Les négociations tortueuses qui ont abouti au cadre financier pluriannuel pour la période 2007-2013, ainsi que les difficultés rencontrées lors de l'adoption du budget 2011 de l'UE et la lettre signée par neuf chefs d'État et de gouvernement des États membres qui a été adressée à l'été 2011 au président de la Commission, M. Barroso, donnent à penser qu'un nombre pour le moins significatif de pays (4) souhaiteraient un engagement financier européen aussi réduit que possible. Il est probable que cet état d'esprit conduise – à nouveau – à des tractations délicates et compliquées.

3.3   Au moment où l'UE affronte des défis toujours plus nombreux et ardus (crise économique, financière et sociale, compétitivité, changement climatique etc.), il semble toutefois que la proposition de la Commission s'attache dans une mesure excessive à préserver le statu quo. En d'autres termes, elle paraît témoigner de l'existence d'un hiatus entre, d'une part, l'ampleur et la teneur des nouveaux défis posés à l'UE et, d'autre part, les ressources disponibles, ou, en d'autres termes, entre les ambitions de l'Europe et les moyens pour les réaliser.

3.4   Le CESE a déjà affirmé (5) et rappelle à nouveau qu'une augmentation du budget européen est non seulement souhaitable mais nécessaire, vu l'ampleur des nouveaux défis qui appellent une réaction commune: «Le réexamen du budget de l'UE n'est pas une question de chiffres mais un outil en faveur d'un projet politique. L'Union européenne ne dispose aujourd'hui de moyens budgétaires suffisants ni pour mettre en œuvre sa stratégie politique, ni pour honorer les obligations qui découlent du nouveau traité de Lisbonne.»

3.4.1   Le CESE rappelle la position du Parlement européen, pour lequel la solution à la crise et aux défis auxquels l'UE est confrontée est qu'il faut «plus d'Europe» et non «moins d'Europe». Du point de vue du Parlement, geler en termes réels le cadre financier pluriannuel au niveau actuel, comme le propose la Commission, c'est se condamner à ne pas relever nombre des défis auxquels l'UE devra faire face dans les prochaines années. En conséquence il a appelé à augmenter de 5 % le niveau des ressources affectées au prochain cadre financier pluriannuel et mis le Conseil au défi, au cas où il ne partagerait pas cette approche, d'indiquer clairement quelles priorités ou quels projets politiques pourraient être purement et simplement abandonnés au cours de la période 2014-2020, malgré leur valeur ajoutée européenne avérée (6).

3.4.2   Dans le même ordre d'idées, le Comité des régions «estime qu'il y a donc lieu de considérer le niveau de financement ainsi proposé comme le montant minimal absolu nécessaire pour réaliser les ambitions de l'Union dont ont convenu les États membres» et juge «qu'il est nécessaire de changer les attitudes, qui dominent notamment parmi les services nationaux du trésor, de manière à ce que les missions essentielles de l'UE soient considérées comme un investissement plutôt que comme une dépense» (7).

3.4.3   En outre, en raison des changements apportés par le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, la fixation du cadre financier pluriannuel 2014-2020 n'est plus du ressort exclusif de la Commission et des gouvernements des États membres, car le Parlement européen a davantage voix au chapitre dans un contexte de responsabilité démocratique accrue. Cette nouvelle configuration fournit à la société civile, et donc au CESE plus particulièrement, l'occasion de suivre les travaux préparatoires du nouveau cadre financier pluriannuel et de participer activement au débat, en étroite coordination avec le Parlement européen.

3.5   En conséquence, le CESE s'engage à effectuer un travail de suivi et d'intervention concernant le processus de négociation par lequel la proposition de la Commission se traduira dans la pratique par des modifications de législation. Le rôle du cadre financier pluriannuel est de doter l'UE des ressources nécessaires pour poursuivre ses priorités sans pour autant alourdir la pression fiscale sur les citoyens et les entreprises: c'est sous cet aspect qu'il conviendra absolument d'en juger.

3.6   S'attacher davantage aux résultats implique par conséquent que l'attention porte moins sur le respect formel des règles, où seul importe le volume des dépenses, que sur un contrôle réel concernant la qualité et l'efficacité dans l'utilisation des financements et l'obtention des résultats, notamment dans le domaine de la politique de cohésion et de la PAC. Ce changement de perspective, qu'exprime clairement l'idée «d'accroître la valeur ajoutée de la dépense de l'UE», requiert donc d'adopter une approche cohérente des mécanismes tant de gestion que de contrôle.

3.7   Il convient de ne pas perdre de vue que même si le budget de l'EU représente environ 1 % du RNB de l'UE, il n'en constitue pas moins un apport significatif de ressources d'investissement durant la période 2007-2013, et que s'il est utilisé à bon escient, il peut jouer un rôle crucial pour stimuler la croissance économique de l'UE. C'est pourquoi le CESE souhaite un renforcement des synergies appropriées entre le budget de l'UE et les budgets nationaux lors de la mise en œuvre des grands objectifs stratégiques de l'Europe.

3.8   Le CESE estime essentiel que le cadre financier pluriannuel 2014-2020 suscite la confiance des citoyens de l'Union et soit crédible à leurs yeux, en mettant en évidence les avantages de l'Europe et les coûts de la «non Europe». Pour ce faire, le budget de l'UE doit:

être bien géré et ne pas générer de coûts administratifs excessifs,

se caractériser par son efficacité du point de vue des économies réalisées par rapport à l'actuel cadre financier pluriannuel,

se montrer apte à faciliter la réalisation des objectifs fixés et produire un effet visible dans la vie des citoyens européens,

être transparent et contrôlable sous tous les aspects pour ce qui est des coûts, des ressources employées et des résultats obtenus,

être axé sur le respect des principes européens de solidarité, de concurrence loyale et de compétitivité.

3.9   Le CESE estime que pour examiner la validité de la proposition de la Commission, il est indispensable de la soumettre à une évaluation qui détermine:

sa valeur ajoutée européenne et les priorités stratégiques pertinentes,

sa capacité à relever les défis qui se posent, en orientant l'Europe vers une stratégie efficace de développement solidaire, face à la tendance des États membres à comprimer leurs dépenses publiques nationales.

3.9.1   En ce qui concerne la valeur ajoutée européenne, la Commission met en évidence des priorités importantes qu'il n'est possible de relever qu'au seul niveau européen. Elles concernent les «biens publics européens», domaines d'intervention où un euro dépensé à l'échelon de l'UE est plus efficace qu'un euro dépensé à l'échelon national.

3.9.2   Parmi les biens publics européens, figurent la recherche et le développement, la défense commune, la sécurité alimentaire, l'immigration et le droit d'asile, la réaction au changement climatique et les investissements d'infrastructure à l'échelle de l'Europe entière dans les domaines de l'énergie, de la communication et du marché unique (qui reste encore à achever). Le cadre financier pluriannuel 2014-2020 accroît la dotation budgétaire de ces domaines stratégiques par rapport au cadre précédent 2007-2013, et ce, malgré la contrainte d'un budget serré.

3.9.3   Si le CESE reconnaît les innovations importantes de la proposition de la Commission, il se doit néanmoins d'y relever l'absence complète de débat sur ces priorités, le risque étant alors que le budget de l'UE ne parvienne pas à affronter directement les problèmes essentiels que pose la crise économique et financière actuelle et qu'il continue à être soumis aux pressions de groupes d'intérêts spécifiques.

3.10   Dans ce contexte délicat, le CESE rappelle à nouveau (8) qu'il convient de définir la politique budgétaire de l'UE d'une manière qui soit cohérente avec le choix fondamental entre le fédéralisme et un système intergouvernemental et, donc, avec le degré d'intégration voulu. Le principe du «juste retour» aux États membres, en particulier, se fonde sur une comptabilisation des ressources financières en fonction des PIB nationaux qui contredit la lettre et l'esprit des traités de l'UE.

3.10.1   Fondé sur les contributions des États membres, le système actuel de ressources se caractérise en effet par une complexité et un manque de transparence qui minent le contrôle démocratique dont il doit faire l'objet; il ne contribue pas à mettre en valeur l'effort consenti en faveur de l'intégration européenne; la quote-part versée à l'UE apparaît comme un poids supplémentaire à charge des budgets nationaux et les ressources dont peuvent disposer les politiques européennes s'en trouvent dès lors limitées; enfin, il n'assure pas la création, indispensable pourtant, d'un lien entre l'UE et les citoyens.

3.11   Le CESE rappelle (9) que, sans accroître la charge fiscale qui pèse sur les revenus des citoyens et des entreprises, le nouveau système doit lier les recettes et les dépenses budgétaire de l'UE à l'engagement à mettre en œuvre sa stratégie politique propre et aux missions qui découlent du nouveau traité de Lisbonne. Ce système doit garantir un traitement équitable de tous les États membres et il se doit d'être bien plus transparent, simplifié et compréhensible aux yeux des citoyens.

4.   Observations spécifiques

4.1   Avec le nouveau cadre financier pluriannuel, la Commission propose d'apporter dans le financement du budget de l'UE une modification importante, fondée essentiellement sur un renforcement de son autonomie financière grâce à l'instauration d'un nouveau système de ressources propres, qui puisse assurer un traitement plus équitable entre les différents États membres. La nouvelle proposition induit un changement de modèle: l'Union rompt avec sa situation de dépendance financière vis-à-vis des États membres pour passer progressivement à l'autosuffisance financière.

4.1.1   Au centre de la proposition sur le «nouveau système des ressources propres», on trouve la modification de la ressource TVA et l'instauration de la taxe sur les transactions financières, mécanisme qui permettrait d'équilibrer davantage le budget de l'UE, de manière qu'il soit financé à hauteur de 40 % par les nouvelles ressources propres, de 20 % par les ressources propres classiques et de 40 % par la contribution des États membres, fondée sur le RNB (10). Ce nouveau dispositif présenterait l'avantage d'atténuer le sentiment des États membres que les contributions nationales sont comme un impôt prélevé sur leurs recettes, lequel justifierait de réclamer et d'obtenir un «juste retour» et un rééquilibrage sous forme de retombées économiques.

4.1.2   Le CESE rappelle qu'en remplacement de celle actuellement en vigueur, qui est devenue inadaptée, il soutient (11) la création de la nouvelle ressource TVA, étant donné qu'elle contribuera à développer le marché intérieur de l'UE, en évitant des distorsions économiques parmi les États membres. Il souligne toutefois que la proposition de la Commission ne comporte pas de données précises sur les modifications apportées à la structure de la TVA et les différences qu'elles induiraient pour chaque État membre en fait de volumes financiers. En outre, il estime qu'elle doit être complétée par l'adoption de mesures visant à éliminer les fraudes en matière de TVA.

4.1.3   Bien qu'elle en soit toujours au stade du débat, la proposition de la Commission introduit un élément intéressant d'innovation avec la taxe sur les transactions financières. Tout en rappelant la nécessité qu'elle soit appliquée au niveau mondial, le CESE s'est dit favorable à ce qu'une telle taxe soit instaurée à l'échelon européen (12). Il souligne qu'il convient de gérer soigneusement les conséquences macroéconomiques et microéconomiques de son introduction et demande dès lors que les retombées liées à sa mise en œuvre fassent l'objet d'un contrôle permanent, suivi d'une évaluation annuelle.

4.1.4   Cette taxe permettrait de poursuivre au moins trois objectifs:

accroître la part pour laquelle le secteur financier contribue aux budgets publics de l'UE et des États membres (il a été estimé qu'à plein régime, cette taxe devrait procurer des rentrées d'environ 57 milliards d'euros) (13),

modifier le comportement des acteurs de la finance, en réduisant le volume des opérations financières à haute fréquence et faible latence, qui, au sein des États membres de l'UE, atteignent un pourcentage compris entre 13 et 40 % du volume des échanges (14),

définir un taux plancher de taxation financière pour tous les États membres.

4.1.5   La réforme des mécanismes de correction et le remplacement des dispositifs existants de remboursements forfaitaires vont également dans le sens de la simplification souhaitée et d'une plus grande transparence, d'autant que les conditions économiques des États membres sont à présent complètement différentes de ce qu'elles étaient lors de la mise en place de ce système en 1984. Comme l'a déjà relevé le CESE (15), il reste cependant nécessaire de déterminer plus précisément quels seront les effets de pareille réforme, dans la mesure où au stade actuel, on ne voit clairement ni quels seront les montants de ressources concernés, ni comment ce dispositif se présentera par rapport à celui qui a cours aujourd'hui.

4.2   Le CESE porte un jugement très positif sur l'amélioration qu'il est préconisé d'apporter, à charge égale pour les citoyens européens, à la structure du budget de l'UE, car elle aboutira à ce que les problèmes de juste retour et d'équité horizontale perdront une bonne part de leur ampleur et que le critère d'évaluation sera désormais plutôt de savoir si les dépenses de l'UE sont efficaces et opérantes tant pour la satisfaction des besoins de ses citoyens et de ses entreprises que du point de vue de l'effet obtenu par rapport aux montants engagés. Le CESE rappelle toutefois (16) qu'il déplore que la proposition de la Commission centre exclusivement sa réflexion sur la structure et le contenu qualitatif interne du budget sans prendre appui sur de nouvelles ressources propres afin d'aborder la question essentielle de son volume, en tant qu'outil au service du projet politique et des ambitions de l'Union.

4.3   Comme l'a souligné le Parlement européen, le budget de l'Union est avant tout un budget d'investissement, susceptible d'amorcer d'autres engagements, d'origine publique ou privée (17). Dans cette perspective, le CESE estime qu'afin de dépasser les limites quantitatives et les contraintes légales du budget de l'UE, il serait possible d'expérimenter certaines formes d'emprunts obligataires liés à des projets afin de financer des actions spécifiques en matière d'infrastructures et d'éducation (18) dans l'esprit de l'initiative lancée par la Commission concernant les emprunts obligataires pour le financement de projets (19).

4.3.1   Ces emprunts obligataires pour des projets pourraient induire un effet de levier significatif en faveur du développement économique de l'Europe, grâce aux effets d'entraînement qu'ils susciteraient, alors qu'ils sont actuellement entravés par la rigidité des budgets des États membres qui affrontent les conséquences de la crise économique et tentent de se conformer au pacte de stabilité et de croissance.

4.3.2   Le CESE relève néanmoins qu'il s'impose de procéder à une évaluation approfondie des modalités inédites de financement externe du cadre financier pluriannuel, car l'expérience tirée des partenariats public-privé démontre que la possibilité existe que des risques ne soient reportés sur le secteur public (20).

4.4   Dans les dépenses de l'UE, la proposition de la Commission ne remet pas en question les postes les plus importants, à savoir la politique de cohésion et la politique agricole commune (PAC), alors que dans le contexte de la stratégie Europe 2020, la tendance est plutôt de mettre en avant soit de nouvelles motivations pour garantir un engagement efficace et opérant des ressources, soit la valeur ajoutée des instruments de dépense existants.

4.4.1   Le CESE se félicite du lancement de la réforme de la PAC, destinée à redimensionner sa part dans le budget total de l'UE et à renforcer le lien entre les dépenses de l'UE et les biens communs produits par le secteur agricole, ainsi que l'a demandé la Commission elle-même dans sa communication «La PAC à l'horizon 2020» (21). Dans la période de vaches maigres que nous traversons actuellement, il conviendrait d'évaluer la PAC, ainsi que la politique commune de la pêche (PCP), à l'aune des objectifs et des missions que lui assigne le traité de Lisbonne: améliorer la situation en ce qui concerne la qualité de l'environnement (biodiversité, eau, sols et air), la protection des paysages, le dynamisme de l'espace rural, le bien-être animal, ainsi que la sécurité et la durabilité de l'alimentation (22).

4.4.2   Le CESE a déjà fait valoir (23) que l'agriculture, la sylviculture et la pêche assument un rôle fondamental pour la défense de l'environnement et la gestion durable des ressources naturelles. Tout en accueillant favorablement la démarche d'«écologisation» de la PAC qui a été amorcée par la Commission, il tient dès lors à rappeler qu'il convient de veiller tout particulièrement à ce que le processus de révision ne bouleverse pas les objectifs et les mécanismes de la PAC et le soutien qu'elle assure aux opérateurs de la filière agricole, alimentaire et environnementale.

4.4.3   Le CESE considère avec inquiétude l'action de la Commission lorsqu'elle s'efforce de réduire la part du budget allouée à la PAC en assignant à d'autres instruments, comme le Fonds social européen et le Fonds européen d'ajustement à la mondialisation, des missions supplémentaires liées à des objectifs qui ressortissent à l'agriculture et à l'alimentation.

4.4.4   Le CESE estime que l'harmonisation des conditions de concurrence des agriculteurs européens et l'intégration renforcée des nouveaux États membres constituent un objectif dont la mise en œuvre doit passer par une évaluation soigneuse des effets qui pourraient en résulter pour tous les États membres. Le CESE souligne l'importance des efforts visant à réduire l'écart entre le niveau des aides reçues par les agriculteurs dans les différents États membres. Il avait déjà recommandé précédemment (24) que les enveloppes affectées aux paiements directs soient redistribuées sur la base de critères objectifs et non discriminatoires et qu'une période de transition appropriée soit prévue pour réaliser la convergence équitable envisagée, qui délaisse le principe de référence historique, de manière à ce qu'à l'expiration du cadre financier pour la période de 2014 à 2020, aucun pays ne se situe en deçà de 90 % de la moyenne de l'UE à 27 États membres en ce qui concerne les paiements directs.

4.4.5   De l'avis du CESE, le nouveau cadre financier pluriannuel devra assurer une PAC et une PCP à même de garantir:

la sécurité de l'approvisionnement alimentaire,

l'existence d'une filière agroalimentaire compétitive et capable d'innover,

la rentabilité du secteur agricole et halieutique,

un revenu équitable pour les agriculteurs et les pêcheurs européens.

Si l'on suit ces lignes d'action, il sera alors possible, dans un contexte caractérisé par la forte variabilité des prix des produits de base de l'agriculture, d'insister sur la double nature de la PAC, en mettant en valeur les bonnes pratiques environnementales sans que la bonne santé économique et la compétitivité des exploitations agricoles en pâtissent pour autant et en relançant ainsi sa mission historique, qui est de produire des aliments sains, nourrissants et en quantités suffisantes, à des prix accessibles pour les citoyens européens.

4.5   Un même souci d'efficacité doit animer les projets financés par la politique de cohésion, qui conserve un rôle déterminant pour renforcer l'intégration des nouveaux États membres et, comme l'affirme le rapport Barca (25), doit s'articuler autour d'un petit nombre de priorités européennes pertinentes, dont il convient d'évaluer soigneusement l'incidence sur le contexte social, économique et territorial avant, pendant et après leur mise en œuvre, sans que ces évaluations puissent débouchent sur des charges bureaucratiques supplémentaires.

4.5.1   En revanche, le CESE est hostile à la proposition d'appliquer une conditionnalité macroéconomique à l'octroi des fonds destinés à la politique de cohésion, car il convient de ne pas faire peser de contraintes supplémentaires sur les États membres dans la conjoncture socio-économique difficile qui prévaut aujourd'hui. Il juge, par ailleurs, que la création d'une nouvelle catégorie de régions «en transition», en lieu et place des mécanismes d'entrée et de sortie progressives, ne peut obérer les ressources destinées aux régions les moins développées. Enfin, tout en approuvant la proposition de mécanisme pour l'interconnexion en Europe, il souligne qu'il ne peut être question que ce mécanisme soit financé, à raison de quelque 10 milliards d'euros, par le truchement du Fonds de cohésion, afin d'éviter qu'il ne soit indûment utilisé pour des missions qui excèdent son champ d'action originel.

4.6   Il convient de prendre pour principe directeur de la future politique de cohésion l'article 174 du traité de Lisbonne stipulant que «l'Union vise à réduire l'écart entre les niveaux de développement des diverses régions et le retard des régions les moins favorisées».

Dès lors:

Il faut préserver et amplifier les investissements de la politique de cohésion, en mettant l'accent sur l'objectif de convergence.

Pour les États membres qui présentent une croissance moyenne du PIB négative pour la période 2007-2009 et un bon taux d'absorption pour la période actuelle, le plafond des dotations pour la politique de cohésion sera fixé à un niveau au moins identique à celui de la période actuelle.

4.7   Le CESE souhaite que soit renforcé le mécanisme destiné à suivre les résultats des politiques de l'UE, en particulier ceux de la PAC et des Fonds de cohésion, eu égard à leur poids dans le budget total de l'UE, le but étant de donner la possibilité d'évaluer l'efficacité de ses dépenses et sa capacité à atteindre les objectifs essentiels qu'elle s'est elle-même fixés, en premier lieu avec la stratégie Europe 2020 (26). Pour ce faire, il est également envisageable d'établir un dispositif qui allie sanctions, si l'objectif fixé n'est pas atteint, et incitations financières en faveur des États membres qui ont obtenu les meilleurs résultats.

4.7.1   Dans ce contexte, le CESE souhaite néanmoins que les collectivités locales et régionales soient soutenues et davantage associées aux processus, au niveau national et à celui de l'UE, de manière à ce qu'elles soient dûment en mesure de saisir toutes les occasions de gérer et de mettre en œuvre les programmes financés par la politique de cohésion et la PAC, grâce à des programmes appropriés de mise à niveau professionnelle concernant les procédures européennes de programmation, d'accompagnement, de suivi et d'évaluation.

Bruxelles, le 24 mai 2012.

Le président du Comité économique et social européen

Staffan NILSSON


(1)  C'est-à-dire “la valeur résultant d’une intervention de l’UE, s'ajoutant à celle qui aurait autrement été générée par la seule action de l'État membre” (COM(2010) 700 final, SEC(2011) 867 final).

(2)  Article 201.

(3)  En termes nominaux, les sommes affectées à la PAC ne diminueront pas mais resteront à un niveau constant tout au long de la période de programmation, de sorte qu'en termes réels, elles présenteront une tendance à la baisse par rapport à 2012.

(4)  Voir www.euractiv.com/euro-finance/eu-countries-call-slim-eu-budget-news-507532 (en anglais).

(5)  JO C 248 du 25.8.2011 p. 75.

(6)  Résolution du Parlement européen INI/2010/2211 du 8 juin 2011: «Investir dans l'avenir: un nouveau cadre financier pluriannuel (CFP) pour une Europe compétitive, durable et inclusive».

(7)  Avis du CdR sur Le nouveau cadre financier pluriannuel pour la période après 2013; JO C 54, 23.2.2012, p. 40.

(8)  Avis du CESE sur le «Système des ressources propres de l'Union européenne»JO C 181 du 21.6.2012, p. 45.

(9)  JO C 248 du 25 août 2011, p. 75.

(10)  COM(2011) 510 final, p. 5. Actuellement, la contribution des États membres, fondée sur le RNB, compte pour 70 % de l'ensemble des ressources du budget de l'UE, les ressources propres classiques (droits de douanes, taxe sur le sucre) en assurent 14,1 %, la taxe sur la valeur ajoutée intervient pour 11,2 % et les rentrées diverses (surplus des années précédentes) comptent pour 4,7 % (SEC(2011) 876 final).

(11)  Avis du CESE sur le «Système des ressources propres de l'Union européenne», JO C 181 du 21.6.2012, p. 45.

(12)  Avis du CESE sur la «Proposition de directive du Conseil établissant un système commun de taxe sur les transactions financières et modifiant la directive 2008/7/CE», adopté par l'Assemblée plénière du 29 mars 2012, JO C 181 du 21.6.2012, p. 55.

(13)  SEC(2011) 1103 final.

(14)  Commission européenne, 8 décembre, consultation publique sur le thème du réexamen de la directive sur les marchés d’instruments financiers (MiFiD), direction générale Marché intérieur et services. SEC(2011) 1226 final.

(15)  Avis du CESE sur le «Système des ressources propres de l'UE», JO C 181 du 21.6.2012, p. 45.

(16)  Avis du CESE sur le «Système des ressources propres de l'UE», JO C 181 du 21.6.2012, p. 45.

(17)  Résolution du Parlement européen, cf. supra.

(18)  Haug J. et al., op. cit., ch. 4.

(19)  http://ec.europa.eu/economy_finance/consultation/index_en.htm (en anglais).

(20)  JO C 143 du 22.5.2012, p. 134.

(21)  COM(2010) 672 final.

(22)  Hart K. – Baldock D. (éd.): Quels outils pour la politique agricole européenne afin d'encourager la fourniture de biens publics, Parlement européen, juillet 2011.

(23)  JO C 132 du 3.5.2011, p. 63.

(24)  Avis CESE sur «La PAC à l'horizon 2020», JO C 191 du 29.6.2012, 116.

(25)  Barca F. (éd.): «An Agenda for a Reformed Cohesion Policy: A Place Based Approach to meeting European Union Challenges and expectations» («Un agenda pour une politique de cohésion réformée: une approche de terrain pour répondre aux défis et aux attentes de l'Union européenne»), rapport pour la direction générale Politique régionale, mai 2009.

(26)  Chambon, N. et Rubio, E.: À la recherche de «la dépense la plus rentable: analyse des idées et propositions actuels pour renforcer les performances de la dépense de la PAC et de la politique de cohésion»; atelier de la conférence de Notre Europe «Les perspectives financières après 2013: repenser le budget de l'UE en période de crise», à Turin les 7 et 8 juillet 2011.


31.7.2012   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 229/39


Avis du Comité économique et social européen sur la «Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions: partenariat pour la recherche et l'innovation»

COM(2011) 572 final

2012/C 229/07

Rapporteure: Mme HEINISCH

Le 21 septembre 2011, la Commission européenne a décidé, conformément à l'article 304 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la:

«Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions: Partenariat pour la recherche et l'innovation»

COM(2011) 572 final.

La section spécialisée «Marché unique, production et consommation», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 8 mai 2012.

Lors de sa 481e session plénière des 23 et 24 mai 2012 (séance du 23 mai 2012), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 191 voix pour, 2 voix contre et 7 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1   Le CESE partage le point de vue de la Commission quant aux avantages multiples que présentent les partenariats et à la possibilité d'exploiter plus largement encore le potentiel qu'ils recèlent. Il se félicite donc expressément de l'initiative de la Commission d'établir et d'encourager, dans le cadre de l'initiative phare «Une Union de l'innovation», les partenariats européens d'innovation (PEI), qui visent à accroître l'efficacité du cycle européen de recherche et d'innovation et à abréger les délais de mise sur le marché des innovations.

1.2   Pour garantir la viabilité et l'effet durable des partenariats, il convient de leur fournir un cadre adéquat, de nature à résoudre les défis liés à la gouvernance, au financement et à la mise en œuvre.

1.3   Il est fondamental que les partenariats soient simples, souples, inclusifs et ouverts, les groupes de pilotage représentatifs et équilibrés, et les relations entre les initiatives et les instruments existants clarifiées dès le départ.

1.4   Le CESE souligne l'importance des innovations sociales, instrument essentiel de création d'un environnement favorable à l'innovation, propre à inciter les entreprises, le secteur public, les partenaires sociaux et d'autres organisations de la société civile à coopérer et à renforcer ainsi leur capacité d'innovation et leur performance.

1.5   Pour mettre en œuvre le concept de partenariat, il est nécessaire de clarifier la relation entre les PEI et d'autres initiatives politiques (paragraphe 2.3.2 de la communication à l'examen), et de faire montre d'une vigilance constante sur ce point.

1.6   L'indispensable démarche d'encouragement à une mise en œuvre coordonnée des programmes européens et nationaux et du financement afin de remédier plus efficacement aux problèmes de société (paragraphes 3.1.3 et 3.3.3 de la communication à l'examen) devrait également recouvrir l'adaptation des procédures administratives, des dispositions d'octroi de l'aide et des modalités de financement des États membres.

1.7   Le Comité recommande en outre de concentrer davantage les ressources disponibles, de veiller à ce que les différentes possibilités de (co)financement soient plus claires, moins ambiguës et plus aisées à imputer à une thématique, de les utiliser de manière ciblée et d'en informer de manière centrale et systématique.

1.8   Le Comité préconise par ailleurs d'intégrer l'ensemble des acteurs et initiatives à l'échelon national et européen susceptibles de contribuer à un suivi réglementaire approprié, à la viabilité des partenariats, ainsi qu'à la mise en œuvre de leurs résultats.

1.9   Il conviendrait de continuer à soutenir la participation des pays tiers aux partenariats pour la recherche et l'innovation, afin d'accroître l'attractivité de l'Europe aux yeux des acteurs mondiaux.

1.10   En s'inspirant des expériences de partenariat antérieures, il convient de déterminer la forme et le degré d'engagement requis pour garantir la flexibilité, l'esprit d'ouverture et la capacité d'innovation tout en veillant à la viabilité et à la stabilité des partenariats en vue de leur assurer un effet durable.

1.11   Si l'on entend préserver les ressources humaines, temporelles et financières, il conviendra à l'avenir d'aspirer à un meilleur niveau d'efficacité. Pour ce faire, il s'agira de mieux coordonner et d'évaluer régulièrement les mesures, et de faire preuve de cohérence dans leur mise en œuvre.

1.12   Il y a lieu d'établir des liens étroits avec les acteurs aux échelons national, régional et local, de manière à tenir compte des spécificités nationales et régionales. Dans le même temps, il importe de ne pas perdre de vue l'importance de la dimension mondiale que présentent les défis actuels.

2.   Communication de la Commission

2.1   La communication de la Commission sur le thème «Partenariat pour la recherche et l'innovation»  (1) traite de la nécessité d'optimiser les ressources disponibles pour la recherche et l'innovation de façon à pouvoir réaliser l'espace européen de la recherche d’ici 2014, l'Union de l'innovation, l'agenda numérique ainsi que d'autres initiatives phares de la stratégie Europe 2020 (2), en particulier dans le contexte de la crise économique et financière actuelle.

2.2   Par cette communication, la Commission reprend le concept de partenariats, dont l'importance comme moyen d'unir les forces a été mise en évidence dans sa communication d'octobre 2010 sur une Union de l'innovation (3). L'objectif de ces derniers est de réunir les acteurs européens et nationaux du secteur public au sein de partenariats public-public (P2P) et public-privé (PPP) (4) en vue d'affronter les grands défis auxquels les sociétés sont confrontées et de renforcer la position concurrentielle de l'Europe.

2.3   Afin de parvenir à un consensus sur la contribution possible des partenariats pour la recherche et l'innovation à une croissance intelligente et durable en Europe, des modèles de partenariat ont été développés et expérimentés au sein du 7e programme-cadre de recherche (7e PC), du programme pour la compétitivité et l'innovation (PCI), de l'espace européen de la recherche (EER) et du cadre politique de l'Union de l'innovation.

2.4   Dans son évaluation d'ensemble, la Commission conclut que les partenariats présentent des avantages multiples et que leur potentiel pourrait être utilisé de façon plus large encore.

2.5   Les partenariats européens d'innovation (PEI) peuvent constituer un cadre général pour les différentes formules de partenariat, en ce qu'ils rassemblent tous les acteurs importants du cycle de recherche et d'innovation, tant du côté de l'offre que de la demande, et stimulent l'engagement politique autour de mesures consensuelles. Les partenariats sont en outre une méthode efficace pour associer davantage les petites et moyennes entreprises (PME) à la recherche et à l'innovation.

2.6   Néanmoins, les partenariats ne vont pas de soi. Pour en garantir la viabilité et l'effet durable, il convient de leur fournir un cadre adéquat, de nature à résoudre les défis qu'ils posent en matière de gouvernance, de financement et de mise en œuvre.

2.7   Le bilan des divers partenariats a déjà permis de formuler des conclusions essentielles pour la formation des partenariats et d’identifier des pistes de solution aux défis mentionnés ci-avant (5).

3.   Observations générales

3.1   Les changements démographique et climatique, les mutations que subissent l'industrie, l'économie et le marché du travail en raison de la mondialisation constituent les plus grands défis pour le développement futur des États membres de l'Union européenne. Pour y répondre, il est nécessaire de consentir des efforts communs, d'y associer tous les intervenants potentiels et de coordonner les mesures adéquates de manière centralisée. Il est urgent de prendre ces problèmes à bras-le-corps en s'appuyant sur une synergie entre la recherche, les innovations fondées sur la science et la technologie, et les innovations sociales.

3.2   Une coordination centralisée est également requise s'agissant de concentrer les ressources, d'élaborer un budget approprié et de répartir les moyens, afin que les opportunités qui sont également liées au changement démographique et aux défis mondiaux puissent être exploitées de façon efficace au bénéfice de la recherche et de l'innovation.

3.3   Le CESE se félicite donc expressément de l'initiative de la Commission d'établir et d'encourager, dans le cadre de l'initiative phare «Une Union de l'innovation» (6), les partenariats européens d'innovation (PEI), dont le but est de rendre le cycle européen de recherche et d'innovation plus efficace et d'abréger les délais de mise sur le marché des innovations (7).

3.4   L'analyse des formules de partenariat expérimentées au sein du 7e programme-cadre de recherche (7e PC) (8), du programme pour la compétitivité et l'innovation (PCI) (9), de l'espace européen de la recherche (EER) (10), du cadre politique de l'Union de l'innovation et du partenariat européen pilote pour un vieillissement actif et en bonne santé (PIVABS) (11) a d'ores et déjà permis de tirer les premières conclusions quant à la forme à donner aux partenariats (12).

3.5   Des constatations faites, il ressort notamment que les partenariats doivent être simples, souples, inclusifs et ouverts, les groupes de pilotage représentatifs et équilibrés, et les relations entre les initiatives et les instruments existants clarifiées dès le départ. En outre, pour connaître un développement durable et stable, les partenariats nécessitent un cadre clair sur le plan des structures, du financement et des processus.

3.6   Le CESE loue et soutient les efforts de la Commission pour développer davantage les conclusions susnommées afin de les transformer en propositions et orientations concrètes et pour en intégrer les éléments pertinents dans le programme «Horizon 2020». Les propositions exposées dans la communication à l'examen sont nécessaires, mais de l’avis du Comité, méritent encore d’être complétées.

4.   Observations particulières au sujet des propositions de la Commission

4.1   Objectifs des partenariats européens d'innovation (PEI)

4.1.1   Le Comité apprécie et soutient l’objectif formulé par la Commission dans sa communication d’associer au moyen des PEI les instruments éprouvés du «côté de l’offre» (recherche et technologie) à ceux qui ont fait leurs preuves du «côté de la demande» (utilisateurs, autorités, normalisation, etc.) (paragraphe 2.3.1). Il partage l'avis de la Commission selon lequel les PEI peuvent rassembler les principaux acteurs aux échelons national et régional, du secteur public et de la société civile, et intensifier les échanges entre eux, ce qui permet d'utiliser les instruments de manière optimale, de renforcer les synergies, de mettre en commun les ressources, d'encourager les innovations, notamment les innovations sociales telles que de nouveaux modèles commerciaux (13), et de renforcer l'engagement politique.

4.1.2   Le Comité souligne, dans ce contexte, l'importance des propositions de la Commission qui reposent sur les conclusions des documents de travail des services de la Commission concernant le partenariat européen d'innovation pilote pour un vieillissement actif et en bonne santé et d'autres partenariats (14). Il en ressort clairement qu'un cadre clair est indispensable, tant en ce qui concerne la gouvernance que la mise en œuvre et le financement, afin que les partenariats pour la recherche et l'innovation puissent se développer efficacement et à long terme.

4.2   Mise en œuvre du concept de partenariat

4.2.1   En vue de mettre en œuvre le concept de partenariat, le Comité considère que les points suivants sont particulièrement importants et propose pour chacun d'entre eux les éléments complémentaires suivants:

4.2.2   Clarifier la relation entre les PEI et d'autres initiatives politiques (paragraphe 2.3.2 de la communication à l'examen): il conviendrait de vérifier en permanence cette relation et de la préciser, notamment en ce qui concerne les nouveaux PEI.

4.2.3   Intégrer l'ensemble des acteurs qui sont en mesure d’assurer un suivi réglementaire approprié (paragraphe 2.3.2). Il convient dans cette optique de cerner le rôle et les besoins respectifs des différents protagonistes du processus d'innovation et d'en tenir compte. Il est tout aussi important d'offrir la possibilité de mettre fin à une mesure, soit que celle-ci ait satisfait à l'objectif fixé, soit qu'elle s'avère inopportune en cours de route.

4.2.4   Encourager une mise en œuvre coordonnée des programmes européens et nationaux et du financement afin de remédier plus efficacement aux problèmes de société (paragraphe 3.1.3): le Comité estime que cette action recouvre également l'adaptation la plus large possible des dispositions nationales d'octroi de l'aide et des modalités de financement. La communication de la Commission met elle-même en exergue (en son paragraphe 3.3.3) la nécessité pour les États membres d'harmoniser leurs procédures administratives.

4.3   Partenariats existants pour la recherche et l'innovation

4.3.1   Les concepts de partenariat ont été développés et expérimentés au sein du 7e PC, du PCI, de l'EER, et du cadre politique de l'Union de l'innovation (15).

4.3.2   Parmi les initiatives conjointes actuelles, figurent notamment le partenariat européen d'innovation pour un vieillissement actif et en bonne santé (PIVABS) (16), la stratégie numérique pour l'Europe (17), l’initiative de programmation conjointe «Vivre plus longtemps et mieux – Les enjeux et les défis de l'évolution démographique» (18), ainsi que le programme prévu «Horizon 2020» (19).

4.3.3   Il est indispensable d'associer d'autres acteurs et initiatives importants aussi bien au niveau national qu'européen, si l'on veut éviter la fragmentation du marché et les doubles emplois. Des partenariats pour la recherche et l'innovation, ou en tout cas des synergies, sont envisageables, par exemple avec l'Année européenne du vieillissement actif et de la solidarité intergénérationnelle 2012 (20), avec le programme de l'OMS pour un environnement favorable aux personnes âgées (21), et avec la Convention de l'ONU relative aux droits des personnes handicapées (22).

4.3.4   De la même manière, il conviendrait de tenir davantage compte, tant au niveau national qu'européen, des travaux préliminaires menés par d'autres acteurs. On peut citer à cet égard, entre autres, divers programmes et initiatives de la DG SANCO, de l'Institut européen d'innovation et de technologie (23) et de l'Institut de prospective technologique (IPTS) de Séville (24).

4.3.5   Le CESE souligne en outre l'importance que revêtent les partenariats pour renforcer l'attractivité de l'Europe en qualité de partenaire mondial dans les domaines de la recherche et de l'innovation. En permettant d'en accroître la dimension et la portée, les partenariats améliorent l'efficience et l'efficacité des investissements en faveur de la recherche en Europe aux yeux des acteurs mondiaux (25). Le CESE encourage à poursuivre le développement des partenariats en ce sens.

4.3.6   Au même titre que le cadre structurel, une vision commune novatrice et pérenne est indispensable à la viabilité des partenariats pour la recherche et l'innovation. De l'avis du Comité, il convient dès lors d'y associer en particulier, parallèlement à tous les acteurs envisageables, aux représentants de la société civile et aux personnes âgées, les partenaires sociaux, ainsi que les jeunes et leurs représentants, afin d'obtenir un soutien ferme de leur part dans la perspective d'avancées et d'applications durables.

4.3.7   Les innovations ne sont pas nécessairement le fruit d'un processus linéaire, mais plutôt de la connexion et de l'intégration de secteurs, systèmes et concepts. Les changements structurels s'opérant au sein de la société, les nouvelles exigences des clients et la réponse des entreprises à ces transformations comptent parmi les facteurs les plus courants de l'émergence d'innovations dans le domaine des services. Il convient de prendre ces facteurs en considération, notamment dans la perspective des innovations sociales.

4.4   Autres propositions de modification

4.4.1   Financement et mise en œuvre – paragraphe 3.2 de la communication de la Commission

4.4.1.1   Un cadre de financement fiable est indispensable pour que les partenariats puissent se dérouler sur le long terme. Aussi, les propositions de la Commission de simplifier et de coordonner les instruments de financement existants, tant à l'échelon européen que national, jouent un rôle précieux à cet égard et méritent absolument d'être poursuivies.

4.4.1.2   Il serait en outre souhaitable que les différentes possibilités de (co)financement soient plus claires, moins ambiguës et plus aisées à imputer à une thématique, pour permettre de fonder la planification et la mise en œuvre d'initiatives sur une base solide. C'est pourquoi le Comité recommande de concentrer davantage les ressources disponibles, de les utiliser de manière ciblée et d'en informer de manière centrale et systématique.

4.4.2   Détermination de la force contraignante des futurs partenariats

Pour ce qui est du caractère obligatoire, les partenariats mis en œuvre à ce jour vont d'une coopération libre axée sur des priorités thématiques bien précises à un engagement à long terme de toutes les parties au partenariat, en passant par des conventions entre les différents partenaires certes contraignantes, mais circonscrites dans le temps et sur le plan budgétaire. Dans l'optique du programme «Horizon 2020», il convient, en s'inspirant des expériences réalisées jusqu'à présent, de déterminer la forme et le degré d'engagement requis pour garantir la flexibilité, l'esprit d'ouverture et la capacité d'innovation tout en veillant à la viabilité et à la stabilité des partenariats en vue de leur assurer un effet durable.

4.4.3   Mise en œuvre

Il conviendrait de faire de la mise en œuvre rapide et cohérente des mesures jugées adéquates une priorité des partenariats pour la recherche et l'innovation. Il y a lieu en conséquence de renforcer la synergie entre la science et la pratique, ainsi que l'approche guidée par le souci des utilisateurs finaux et de la participation de ces derniers aux partenariats pour l'innovation. Pour éviter de gaspiller en pure perte un temps précieux, ainsi que les ressources humaines et financières, il s'agira à l'avenir d'aspirer à un meilleur niveau d'efficacité, de mieux coordonner et d'évaluer constamment les mesures à l'aune de critères définis, et de faire preuve de cohérence dans leur mise en œuvre.

4.4.4   Propriété intellectuelle

Lorsque plusieurs acteurs prennent part à un projet ou à un partenariat, la question des droits de propriété intellectuelle quant aux fruits de leur travail commun revêt une grande importance. Dans la perspective des futurs partenariats d'innovation également, il convient de s'employer à résoudre équitablement cette question en amont, afin que tous les protagonistes, y compris les utilisateurs finaux associés au projet, obtiennent une part adéquate du soutien financier et des éventuels profits ultérieurs.

4.4.5   Localisation à l'échelon régional

Les partenariats doivent toujours être réalisés et faire leurs preuves dans un contexte concret. C'est pourquoi il convient de recommander absolument d'établir des liens étroits avec les acteurs aux échelons national, régional et local et de tenir compte des spécificités nationales et régionales, sachant que la situation varie considérablement, tant au sein des États membres qu'entre ces derniers. Cette orientation contextuelle ne doit toutefois pas faire perdre de vue l'importance de la dimension mondiale que présentent les défis actuels.

4.4.6   Exemples de bonnes pratiques

4.4.6.1   Il conviendrait de rassembler et de faire connaître les partenariats existants réussis, pour qu'ils servent de modèle de succès pour les partenariats. Le CESE suggère de compléter les canaux de transmission utilisés à ce jour, tels que le site Internet de CORDIS, en créant par exemple un portail Internet spécifique ou en organisant des manifestations annuelles où les partenariats les plus réussis se verraient décerner un prix.

4.4.6.2   Cependant, il peut également s'avérer utile de connaître les raisons de l'échec de partenariats et d'en tirer des enseignements. C'est pourquoi le Comité recommande de recenser les conditions qui ont prévalu non seulement au succès des concepts exemplaires, mais également à l'échec de certains projets, et de diffuser activement les informations à ce propos.

4.4.7   Précision des notions

4.4.7.1   Le sens à donner aux termes d'«innovation», de «recherche» et de «partenariat» n'est pas précisé d'emblée. Si la communication de la Commission définit le cadre essentiel des «partenariats» (26) et que la notion d'«innovation» (27) est clarifiée dans des communications et avis divers, l'objet des recherches futures reste en revanche extrêmement flou ou anecdotique. Face au changement démographique et aux défis sociétaux mondiaux, une excellente recherche fondamentale est toutefois indispensable.

4.4.7.2   Les considérations susceptibles d'être formulées sur ce point dépasseraient le cadre du présent avis. Le Comité y consacre un avis d'initiative spécifique, intitulé «Le huitième programme-cadre de recherche et de développement: feuille de route concernant le vieillissement» (28).

4.4.8   Meilleure utilisation des potentialités

Le vieillissement de la population est précisément un exemple frappant du succès de la synergie entre la recherche et le développement médico-technique d'une part, et le progrès social d'autre part. De la concentration de toutes les ressources intellectuelles, financières et pratiques disponibles peuvent naître à l'avenir des forces colossales pour relever les défis qui se posent à l'heure actuelle.

Bruxelles, le 23 mai 2012.

Le président du Comité économique et social européen

Staffan NILSSON


(1)  COM(2011) 572 final du 21.9.2011.

(2)  COM(2010) 546. Voir aussi IP/10/225. Conçu sur dix ans, le programme succédant à la stratégie de Lisbonne a été adopté en juin 2010 par le Conseil européen. L'objectif est une croissance intelligente, durable et inclusive, et une meilleure coordination de l'économie aux niveaux national et européen.

(3)  COM(2010) 546, voir aussi l'avis du CESE, JO C 132, 3.5.2011, p. 39.

(4)  À titre d’exemples de partenariats public-public, on peut citer les programmes ERA-NET et ERA-NET Plus, les initiatives au titre de l'article 185 et la programmation conjointe. Parmi les partenariats public-privé en matière de recherche et d’innovation, on peut citer par exemple les initiatives technologiques conjointes (ITC) et l'Internet du futur.

(5)  Voir le document de travail des services de la Commission SEC(2011) 1028 final du 1.9.2011.

(6)  COM(210) 546 du 06.10.2010

(7)  COM(2011) 572 final du 21.9.2011.

(8)  JO L 412 du 30.12.2006, p. 1; JO C 65 du 17.3.2006, p. 9.

(9)  JO L 310 du 9.11.2006, p. 15; JO C 65 du 17.3.2006, p. 22.

(10)  COM(2006) 6 final; JO C 204 du 18.7.2000, p. 70.

(11)  Se référer à la note de bas de page no 6.

(12)  Voir le document de travail des services de la Commission SEC(2011)1028 final du 1.9.2011.

(13)  JO C 132 du 3.5.2011, pp. 22-25.

(14)  SEC(2011) 1028 final.

(15)  Voir la note de bas de page no 4. Le programme commun d'assistance à l'autonomie à domicile (AAD), d'un montant supérieur à 600 millions d'euros constitue un exemple pertinent de partenariat public-public. L'initiative commune ARTEMIS sur les systèmes informatiques embarqués constitue un exemple concret de partenariat public-privé.

(16)  Voir aussi: IP/10/1288.

(17)  Voir IP/10/581, MEMO/10/199 et MEMO/10/200.

(18)  Voir http://www.jp-demographic.eu.

(19)  Programme-cadre de recherche et d’innovation (2014-2020), MEMO-11-435. Consulter également à ce sujet le projet d'avis INT/614-615-616-631 sur le thème «Horizon 2020», rapporteur: M. WOLF.

(20)  http://europa.eu/ey2012.

(21)  http://www.who.int/ageing/age_friendly_cities/.

(22)  http://www.un.org/disabilities/default.asp?id=150.

(23)  http://eit.europa.eu.

(24)  http://ipts.jrc.ec.europa.eu.

(25)  Pour ne citer que deux exemples: à la suite de l'initiative de programmation conjointe relative aux maladies neurodégénératives, le Canada a conféré à son programme de recherche dans ce domaine une nouvelle orientation axée sur la coordination avec l'Europe, et participe à présent, à titre de partenaire, à une action pilote consacrée aux centres d'excellence; l'Inde s'intéresse activement à l'initiative de programmation conjointe dans le domaine de l'eau, à laquelle elle envisage de participer.

(26)  Voir entre autres IP/11/1059 et MEMO/11/623 du 21 septembre 2011.

(27)  COM(2010) 546 final; voir également à ce sujet l'avis du CESE, JO C 132 du 3.5.2011, p. 39.

(28)  «Horizon 2020: feuille de route concernant le vieillissement» (avis d'initiative), Voir page 13 du présent Journal officiel, CESE 1290/2012.


31.7.2012   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 229/44


Avis du Comité économique et social européen sur la «Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — initiative pour l'entrepreneuriat social — construire un écosystème pour promouvoir les entreprises sociales au cœur de l'économie et de l'innovation sociales»

COM(2011) 682 final

2012/C 229/08

Rapporteur: M. GUERINI

Le 25 octobre 2011, la Commission a décidé, conformément à l'article 304 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la

Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des Régions — Initiative pour l'entrepreneuriat social. Construire un écosystème pour promouvoir les entreprises sociales au cœur de l'économie et de l'innovation sociales

COM(2011) 682 final.

La section spécialisée “Marché unique, production et consommation”, chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 8 mai 2012.

Lors de sa 481e session plénière des 23 et 24 mai 2012 (séance du 23 mai 2012), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 193 voix pour, 4 voix contre et 8 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1   Le Comité économique et social européen (CESE) accueille favorablement l'initiative de la Commission, qui intervient opportunément en présentant cette communication dans laquelle sont annoncées onze actions clés. Le CESE note également avec satisfaction que la Commission s'est inspirée en plusieurs points de l’avis exploratoire (1) sur l'entrepreneuriat social.

1.2   Le CESE considère qu'il convient de soutenir les entreprises sociales en raison du rôle essentiel qu'elles peuvent jouer en tant que moteur de l'innovation sociale, tant parce qu'elles introduisent de nouvelles méthodes pour la mise en œuvre de services et d'interventions visant à améliorer la qualité de la vie des personnes que parce qu'elles favorisent la création de nouveaux produits répondant à de nouveaux besoins de la société. Le CESE souhaite en particulier souligner l'énorme potentiel que représente l'entreprise sociale en termes d'amélioration de l'accès à l'emploi et des conditions de travail, notamment pour les femmes et les jeunes, mais aussi pour diverses catégories de travailleurs défavorisés.

1.3   Cette initiative de la Commission offre une occasion privilégiée d'appuyer les actions concourant à une clarté terminologique toujours plus grande (en évitant les chevauchements entre les concepts d'économie sociale, d'entreprise sociale et d'entrepreneuriat social). Cela peut contribuer à consolider les objectifs et les finalités de cette initiative et à en accroître l'efficacité. C'est pourquoi le CESE recommande aux institutions de l’UE d'utiliser à bon escient l'expression “entreprise sociale”, tant dans leurs propositions politiques que dans leur communication.

1.4   Le CESE accueille favorablement l'action prévue par la Commission d'élaborer des outils permettant d'améliorer la connaissance du secteur et la visibilité des entreprises sociales, et soutient l'objectif consistant à développer des initiatives aidant les entreprises sociales à renforcer leurs capacités managériales, la professionnalisation et la mise en réseau de leurs compétences, ce également afin de stimuler leur contribution à une croissance intelligente, durable et inclusive.

1.5   Il y a lieu de saluer et d'approuver les objectifs de la Commission relatifs à l'amélioration de l'accès aux financements et du cadre réglementaire. Un environnement économique et réglementaire approprié doit en effet être recommandé, car il est indispensable à la promotion de l'entreprise sociale.

1.6   Le CESE soutient l’invitation formulée dans la communication à présenter des initiatives destinées à encourager et favoriser les mesures facilitant l'accès des entreprises sociales aux marchés publics.

1.7   Le CESE fait sien l'appel adressé aux États membres afin qu'ils développent des cadres nationaux appropriés pour la croissance et le développement de l'entreprise sociale, en prenant en considération les domaines clés entrant en ligne de compte pour des mesures de soutien et de développement et en recommandant notamment l'adoption d'initiatives qui permettent aux États membres de défiscaliser les bénéfices non distribués, de manière à favoriser la consolidation du patrimoine des entreprises sociales.

1.8   Afin de soutenir plus efficacement les actions proposées dans la communication, il serait utile de promouvoir des mesures d'évaluation des résultats et des bénéfices générés par les entreprises sociales.

2.   Introduction

2.1   L'entreprise sociale a acquis ces dernières années une importance de plus en plus grande dans les politiques économiques et les politiques de cohésion. On a vu se succéder une multitude d'initiatives diverses, promues par différents organismes. Le CESE a lui-même été à l'origine de plusieurs avis d'initiative, dans le prolongement desquels s'inscrit le présent document. On peut notamment mentionner l'avis de 2009 sur “La diversité des formes d'entreprise (2) et l'important avis exploratoire récemment adopté sur le thème “Entrepreneuriat social et entreprise sociale (3). Ce dernier, élaboré à la demande de la Commission européenne en tant que contribution à la préparation de l'initiative pour l'entrepreneuriat social, mentionne plusieurs domaines clés prioritaires pour le développement et la croissance de l'entreprise sociale.

2.2   Depuis quelques années s'est développée en Europe et ailleurs une solide expérience académique et scientifique dans le domaine de l'entreprise sociale, qui a conduit les institutions de l'UE à apporter leur contribution.

2.3   Il convient de rappeler ici la résolution du Parlement européen du 19 février 2009 sur l'économie sociale (2008/2250(INI)), ainsi que l'appel lancé par 400 universitaires européens au Parlement européen le 13 octobre 2010, sous l'intitulé “Passer des mots à l’action: soutenir les coopératives et les entreprises sociales pour parvenir à une Europe inclusive, soutenable et prospère”, avec la participation des commissaires Barnier et Tajani.

2.4   Le concept d'“entrepreneuriat social” a pris au fil du temps des significations diverses et a vu son champ sémantique s'élargir progressivement suivant les auteurs qui ont fait usage. Initialement, il était utilisé pour désigner les activités d'entreprise promues par des organisations à but non lucratif, afin de générer des bénéfices réinvestis dans le financement de ces organisations. Il importe de préserver le concept d'entreprise sociale en veillant à ce qu'il ne puisse être confondu avec celui de “responsabilité sociale des entreprises”. Il convient de mettre l'accent sur cet aspect dans le cadre des prochaines initiatives de l'UE en la matière.

3.   La définition de l'entreprise sociale

3.1   La définition de l'entreprise sociale qui est proposée dans la communication sur l'initiative pour l'entrepreneuriat social dénote un progrès dans la reconnaissance de la spécificité de ce type d'organisation et doit servir de description de référence pour les institutions de l’UE. En effet, elle prend dûment en considération les trois dimensions essentielles qui caractérisent l'entreprise sociale: l'objectif/la finalité social(e); l'activité entrepreneuriale; et la gouvernance participative. Le CESE insiste sur la nécessité d'utiliser la même définition dans la proposition de règlement relatif aux fonds d'entrepreneuriat social européens.

3.2   Il importe également de rappeler que dans la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil établissant un programme de l'Union européenne pour le changement social et l'innovation sociale, la Commission européenne définit elle-même un certain nombre de critères tout à fait pertinents pour l'identification de l'entreprise sociale.

3.3   Il y a lieu d'approuver le fait que la Commission ne donne pas de définition normative de l'entreprise sociale et tienne compte des différentes réglementations en vigueur au niveau national, lesquelles doivent être respectées, en veillant à éviter toute utilisation abusive de la définition de l'entreprise sociale.

3.4   Le CESE saisit cette occasion pour rappeler l'avis exploratoire qu'il a récemment adopté sur le thème “Entrepreneuriat social et entreprise sociale”, qui contient une description de l'entreprise sociale, laquelle répond aux caractéristiques suivantes:

cette entreprise poursuit des objectifs principalement sociaux, non axés sur le profit, et génère des avantages sociaux dans l'intérêt de ses membres ou plus généralement de la collectivité;

elle poursuit avant tout un but non lucratif, et les bénéfices sont réinvestis et non distribués aux actionnaires ou aux propriétaires;

elle se présente sous une multiplicité de formes juridiques et de modèles (tels que les coopératives, les mutuelles, les associations de bénévolat, les fondations, les entreprises à but lucratif ou non lucratif), en combinant souvent plusieurs de ces formes juridiques et en en changeant parfois, le cas échéant;

il s'agit d'un acteur économique producteur de biens et de services (souvent d'intérêt général), la plupart du temps avec une forte composante d'innovation sociale;

elle fonctionne comme (un ensemble d’)entité(s) indépendante(s) et réserve une place importante à la participation et à la codécision (employés, clients, associés) ainsi qu'à la gouvernance et à la démocratie (représentative ou ouverte);

elle est souvent issue de la société civile organisée.

3.5   Concernant ces caractéristiques, il convient de souligner les critères distinctifs suivants:

l'absence de but lucratif: celle-ci doit figurer dans les statuts, en prévoyant l'obligation d'affecter les bénéfices et les excédents de trésorerie à l'exercice de l'activité statutaire ou à l'augmentation du patrimoine, via leur versement sur un fonds indivisible constitué entre les propriétaires pour la durée de vie de l'entreprise et en cas de dissolution de celle-ci. L'entreprise sociale proscrit la distribution directe des bénéfices et des excédents de trésorerie ainsi que des fonds et réserves aux administrateurs, associés, participants, salariés ou collaborateurs. Cette restriction s'étend bien entendu aussi à des formes indirectes de distribution, telles que le versement aux administrateurs et aux salariés de compensations supérieures à celles prévues dans les entreprises opérant dans des secteurs et des conditions identiques ou similaires. De même, la rémunération des instruments financiers doit être limitée et ne peut dépasser un pourcentage déterminé, afin de garantir une capitalisation appropriée des entreprises sociales;

l'importance attachée au bien commun et à l'intérêt général de la communauté. L'entreprise sociale se définit souvent par référence à deux aspects distincts: l'objectif social élargi à l'intérêt général, par référence à la communauté locale ou à certains groupes sociaux “défavorisés” d'une façon ou d'une autre; mais surtout le type de biens ou de services fournis en adéquation avec l'objectif poursuivi;

la fonction de promotion de la cohésion sociale, grâce à la fourniture de biens et de services conformes à l'objectif d'obtention d'une meilleure durabilité économique, sociale et environnementale.

4.   Observations relatives à la proposition de la Commission

4.1   La communication met en avant divers aspects ayant trait à l'amélioration de l'accès aux financements (3.1), à la visibilité des entreprises sociales (3.2) et à l'amélioration de l'environnement juridique (3.3).

4.2   S'agissant de l'amélioration des possibilités d'accès aux financements, le CESE partage la position de la Commission européenne quant aux besoins de financement des entreprises sociales. L'on observe effectivement, tant de la part des établissements de crédit que des gestionnaires des mesures de soutien au crédit mises en œuvre par les institutions publiques, le manque d'instruments adaptés pour l'évaluation de la solvabilité des entreprises sociales. Il existe en effet une tendance générale à ne pas vouloir reconnaître la valeur “entrepreneuriale” et la viabilité économique des entreprises sociales.

4.3   Pour rendre plus visibles les bénéfices de l'entreprise sociale, il est essentiel de partir de l'évaluation des performances sociales autres que les résultats purement économiques. Il faut souligner la nécessité de disposer d'instruments permettant de mesurer et de valoriser l'impact et la performance sociale des activités des entreprises sociales.

4.4   Les pratiques en rapport avec la responsabilité sociale jouent un rôle fondamental pour les organisations de l'économie sociale. Il existe divers instruments permettant de mesurer les résultats – sociaux – d'une entreprise. Bien qu’ils aient été principalement développés par les organisations plus structurées, il conviendrait d'étudier et de modéliser des instruments qui puissent également être utilisés par de petites entreprises sociales. La Commission devrait lancer une étude afin de comparer les modèles existants, encourager leur utilisation et s'efforcer de développer un système ou un code de conduite européen commun, pouvant être utilisé par un large éventail d'entreprises sociales.

4.5   Si l'on veut accroître la confiance dans les entreprises sociales, il est important de fonder cette confiance sur la comparaison entre les “labels” sociaux existant dans l'ensemble de l'UE. Pour ce faire, l'on pourrait créer une base de données publique, comme le propose la Commission dans l'action clé 6, afin de comparer les systèmes de mesure des performances sociales et leurs modalités actuelles d'application.

4.6   Il est utile de vouloir améliorer l'environnement juridique utilisable par l'entrepreneuriat social européen (action clé 9), tant en ce qui concerne la simplification du règlement sur le statut de la société coopérative européenne, que la proposition de créer un statut de la fondation européenne. L'amélioration de l'environnement juridique de l'entreprise sociale pourrait également s'appuyer sur l'utilisation d’orientations concernant la création de statuts pour les associations de promotion et de volontariat dont sont souvent issues les entreprises sociales. Le Comité invite en conséquence le Conseil et le Parlement à aller de l'avant dans l'adoption des dispositions proposées.

4.7   À cet égard, l'engagement pris par la Commission européenne dans sa communication de lancer une étude sur la situation des mutuelles dans tous les États membres, afin notamment d'examiner leurs activités transfrontalières, est jugé utile. La redécouverte et la valorisation du système des mutuelles en tant qu'instrument de protection sociale offrent sans aucun doute une perspective majeure pour le maintien d'un système de sécurité sociale inclusive.

4.8   Le soutien apporté aux entreprises sociales peut être l'occasion d'expérimenter l'inclusion des parties prenantes et favoriser la participation des citoyens à des formes auto-organisées d'aide qui favorisent des processus d'agrégation de la demande et promeuvent les expériences d'assistance mutualiste.

4.9   L'entreprise sociale d'insertion professionnelle, pour autant qu'elle bénéficie d'une promotion adéquate, peut constituer un instrument d'avenir pour les politiques actives de l'emploi et favoriser l'emploi de personnes défavorisées. En cette période de crise de l'emploi, elle peut jouer un rôle essentiel pour les personnes exclues du marché du travail.

4.10   La participation des travailleurs peut constituer un levier important auquel recourir pour faire face à certaines crises industrielles. L'on pourrait prévoir des formes de rachat d'entreprises par les travailleurs associés dans le cadre de diverses formes d'entreprise sociale.

4.11   Les entreprises sociales exercent une fonction essentielle en tant que moteur de l'innovation sociale. L'expérience des coopératives sociales d'insertion professionnelle en est un exemple évident mais, indépendamment de la forme juridique, l'innovation sociale réside également dans les nouvelles méthodes de fourniture de services, la création de nouveaux produits innovants et les services répondant aux nouveaux besoins de la société. Dès lors, les institutions européennes doivent suivre une approche cohérente en coordonnant les mesures relatives à l'entreprise sociale avec celles relatives à l'innovation et aux mutations sociales.

4.12   Les organisations favorisant la création et le développement de réseaux d'entreprises sociales contribuent très utilement à l'innovation en promouvant la participation à des partenariats et la constitution de consortiums d'entreprises sociales. D'où l'importance de la proposition de la Commission qui, avec l'action clé 5, présente des mesures destinées à favoriser le regroupement et les réseaux d'entreprises sociales qui facilitent l'échange de bonnes pratiques, les économies d'échelle et les services communs (formation, planification, administration, etc.).

4.13   Le CESE accueille favorablement les mesures prévues par la Commission afin de développer des instruments permettant d'améliorer la connaissance du secteur et la visibilité de l'entrepreneuriat social (actions clés 5, 6, 8). Une meilleure connaissance des potentialités de ce modèle entrepreneurial peut utilement favoriser une coopération plus étroite entre entreprises sociales et entreprises ordinaires.

4.14   Il importe de développer des initiatives qui aident les entreprises sociales à renforcer leurs capacités managériales, la professionnalisation et la mise en réseau de leurs compétences. L'idée de promouvoir des plateformes pour l'échange des bonnes pratiques peut être utile à cet égard, afin notamment de relever le degré d'internationalisation des entreprises sociales.

4.15   Le CESE estime que la Commission devrait mettre l’accent sur la comparaison entre les nouvelles formes juridiques émergentes d'entreprise sociale en menant une étude exploratoire à ce sujet. La subsidiarité devrait néanmoins être le principe directeur, étant donné que les modèles nationaux pourraient nécessiter – ou non – des cadres réglementaires adaptés aux situations et traditions propres à chaque pays.

4.16   Il convient d'encourager une attitude plus favorable à la subsidiarité de la part des institutions publiques, ainsi que le lancement de politiques d'incitation ciblées et le développement d'initiatives en faveur des associations d'entreprises, lesquelles ont joué un rôle essentiel dans l'apparition des entreprises sociales.

4.17   Les politiques d'incitation ne doivent pas entraîner de distorsions des règles de la concurrence, mais doivent reconnaître les spécificités de l'entreprise sociale, qui ne sauraient donner lieu à des manipulations opportunistes dans le but d'obtenir des avantages.

4.18   S'agissant du développement d'instruments destinés à améliorer les financements, le CESE devrait recueillir et partager les approches innovantes mises en œuvre dans les États membres. Il conviendrait de privilégier celles orientées vers les aspects à forte connotation entrepreneuriale, à savoir:

les instruments de garantie du crédit pour l'entreprise sociale (tels que les réseaux de garantie de type mutualiste ou les fonds publics de garantie);

les instruments de capitalisation pour les investissements sociaux à moyen et à long terme (tels que les fonds éthiques, les fonds pour l'innovation sociale, les fonds de capital-risque social);

les dispositifs de nature réglementaire ou fiscale visant à soutenir la capitalisation des entreprises sociales, en encourageant ou en facilitant la participation des différents acteurs concernés.

4.19   Il conviendrait de prêter une attention particulière aux formes hybrides d'investissement qui sont plus adaptées à l'entreprise sociale car elles combinent des éléments d'appréciation de type solidaire et de type financier. Il importe en outre de valoriser, à côté des entreprises sociales, les meilleures pratiques de banques et d'établissements de crédit à forte orientation communautaire et participative, comme c'est le cas des banques de crédit coopératif ou des banques poursuivant un objectif éthique et social.

4.20   Il y a lieu de soutenir des lignes d'action telles que le microcrédit (action clé 2), mais il faut faire la distinction entre la louable fonction sociale du microcrédit, formidable instrument permettant à des individus d'échapper aux pièges de la pauvreté, et les instruments de développement de l'entreprise, nécessairement plus complexes et articulés. Certaines entreprises sociales réalisent en effet des investissements de plusieurs centaines de milliers d'euros, pour lesquels le microcrédit ne saurait représenter une aide suffisante.

4.21   Le CESE accueille favorablement les possibilités de soutenir l'innovation sociale, l'entrepreneuriat social et l'entreprise sociale, offertes par les nouveaux programmes des fonds structurels visés dans les actions clés 3 et 4 ou dans l'initiative pour l'entrepreneuriat social. Le CESE souligne que les États membres doivent accorder à ces domaines une place prioritaire dans les programmes nationaux de réforme, afin qu'ils puissent être inclus dans la prochaine période de programmation du Fonds social européen. De plus, la proposition de programme pour le changement social et l'innovation sociale pourrait également prévoir un soutien additionnel pour le développement des capacités et du financement des entreprises sociales, mesure qui est accueillie favorablement.

4.22   S'agissant de l'action clé 1 (fonds d'entrepreneuriat social), le CESE approuve cette initiative mais souligne la nécessité de conserver la même définition que celle figurant dans l'initiative pour l'entrepreneuriat social. Ce fonds doit être considéré comme l'une des diverses formes d'instruments d'investissement destinés à l'entreprise sociale.

4.23   Il serait utile de revoir de manière moins restrictive la règle “de minimis” pour les entreprises sociales (action clé 11), en particulier les entreprises d'insertion professionnelle, même lorsque les aides publiques sont allouées directement à l'entreprise et non pas aux travailleurs. Cette position peut se justifier par le cas récent du “Big Society Fund” anglais, cofinancé pour une part importante sur des fonds publics, ce que la Commission n'a pas considéré comme une aide d'État étant donné l'évidente valeur sociale de cette initiative.

4.24   La volonté de faciliter l'accès des entreprises sociales aux marchés publics (action clé 10) est louable. Ces dernières années, la Commission européenne a joué un rôle déterminant dans la promotion des clauses sociales dans les marchés publics. Depuis plus de dix ans, les institutions européennes se montrent davantage sensibilisées à la question de la cohésion sociale et du développement durable, étant pleinement conscientes du fait que, si l'on souhaite atteindre l'objectif d'une société plus prospère et plus juste, il faut que la croissance économique favorise la durabilité environnementale et la cohésion sociale.

4.25   La Commission devrait poursuivre avec détermination l'action entreprise pour promouvoir les critères sociaux et environnementaux parmi les critères d'adjudication des marchés publics et devrait recueillir auprès des États membres et partager les meilleurs modèles, qui tiennent compte des aspects sociaux et environnementaux dans les critères d'adjudication. Du reste, la Cour de justice de l'Union européenne a elle-même reconnue dans sa jurisprudence l'importance de dispositions en ce sens.

4.26   Le CESE est favorable à l'action clé 6 de la Commission visant à créer une base de données sur les certifications, afin de faciliter la comparaison entre les différents systèmes. La Commission devrait en outre réaliser une étude sur ces systèmes afin de dégager des synergies et de tirer des enseignements communs. Dans le cadre de ce travail exploratoire, le CESE a mis en évidence la nécessité de statistiques comparables et consolidées, de recherches et de données relatives aux entreprises sociales. La Commission et Eurostat devraient jouer un rôle central afin de faciliter l'apprentissage mutuel au sein de l’UE.

4.27   La proposition de créer un point d'accès unique pour les données (action clé 8) est favorablement accueillie et devrait être complétée par des initiatives similaires mises en œuvre dans les États membres afin d'assurer la compatibilité et les synergies nécessaires.

4.28   La Commission européenne joue un rôle fondamental en préservant le soutien apporté à l'entreprise sociale dans le cadre de l'agenda politique et en veillant à ce que celle-ci bénéficie d'une considération appropriée. C'est pourquoi la proposition de mettre en place un groupe consultatif sur l'entrepreneuriat social, chargé d'examiner l'avancement des mesures envisagées dans la communication, est importante. La création de structures similaires dans les États membres également devrait être encouragée.

Bruxelles, le 23 mai 2012.

Le président du Comité économique et social européen

Staffan NILSSON


(1)  JO C 24 du 28.1.2012, p. 1.

(2)  JO C 318 du 23.12.2009, p. 22.

(3)  JO C 24 du 28.1.2012, p. 1.


31.7.2012   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 229/49


Avis du Comité économique et social européen sur la «Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions “Small Business, Big World — un partenariat pour aider les PME à exploiter les possibilités du marché mondial”»

COM(2011) 702 final

2012/C 229/09

Rapporteur: M. Ivan VOLEŠ

Le 9 novembre 2011, la Commission européenne a décidé, conformément à l'article 304 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la

«Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions “Small Business, Big World — un partenariat pour aider les PME à exploiter les possibilités du marché mondial” »

COM(2011) 702 final.

La section spécialisée «Marché unique, production et consommation», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 8 mai 2012.

Lors de sa 481e session plénière des 23 et 24 mai 2012 (séance du 23 mai°2012), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 195 voix pour, 2 voix contre et 7 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1   L'exploitation du potentiel des petites et moyennes entreprises (PME) européennes pour pénétrer les marchés tiers, notamment ceux qui connaissent une croissance rapide, peut constituer un facteur important pour favoriser la croissance et l'emploi. C'est pourquoi il convient d'intégrer l'internationalisation des PME dans toutes les politiques de l'UE concernant les PME.

1.2   Cette internationalisation recouvre une large gamme d'activités, telles que l'exportation, l'importation, l'investissement étranger direct, la sous-traitance, la coopération technique et autres. Le Comité déplore que la communication à l'examen se limite pour l'essentiel au soutien des exportateurs et des investisseurs.

1.3   Compte tenu de l'imbrication étroite de l'internationalisation et de l'innovation, le Comité recommande de rendre les nouveaux programmes Horizon 2020 et COSME plus accessibles et plus conviviaux pour les PME. Pour soutenir l'internationalisation, il convient d'utiliser également le Fonds social européen.

1.4   Le soutien européen à l'internationalisation devrait tenir compte des aides offertes à l'échelon national, avec lesquelles il ne devrait pas faire double emploi, mais qu'il devrait compléter dans les domaines qui ressortissent des compétences de l'UE, à savoir l'ouverture des marchés, la conclusion d'accords bilatéraux et multilatéraux, la levée des barrières, la fourniture d'informations dans les domaines des douanes, de la protection de la propriété intellectuelle, de la protection des investissements, des normes, de la règlementation, des marchés publics, de la lutte contre la corruption et autres.

1.5   Le CESE appelle à améliorer la coordination et à unifier la conduite de la politique d'internationalisation entre les directions générales de la Commission, le Conseil, le Service européen pour l'action extérieure, le Parlement européen et le réseau des représentants nationaux pour les PME.

1.6   Le portail en ligne proposé peut accomplir son rôle à condition qu'il chapeaute l'ensemble des sources d'information disponibles, qu'il soit relié aux portails nationaux et qu'il fournisse à l'avenir les informations les plus essentielles dans toutes les langues officielles de l'UE.

1.7   Le CESE attire l'attention sur l'insuffisance de l'utilisation des possibilités qu'offre le réseau Entreprise Europe et est favorable à la proposition d'en modifier la structure administrative. Il demande d'associer les organisations des entreprises à la gestion de ce réseau.

1.8   Il conviendrait de lier étroitement la politique européenne de soutien à l'entrée des PME sur les marchés tiers aux activités transfrontalières des PME sur le marché unique, car c'est précisément là que la plupart de ces PME acquièrent leurs expériences des marchés étrangers, et cette politique devrait également inclure le soutien de l'entrée des PME sur le marché unique et la levée des obstacles qui les en empêchent.

1.9   L'une des plus grandes faiblesses des dispositifs existants de soutien, européens et nationaux, est que les PME ne connaissent guère leur existence, qu'elles peinent à trouver les informations pertinentes, qu'elles n'en comprennent pas la langue et qu'elles ont du mal à démêler l'accès aux instructions précises pour suivre les procédures. Le CESE recommande à cet égard d'associer en premier lieu les organisations de représentation des PME à des actions d'information.

1.10   Un préalable important à l'internationalisation des PME est l'accès aux financements, notamment en période de crise. C'est pourquoi le CESE invite la Commission à créer de nouveaux instruments financiers de soutien à l'internationalisation des PME, tels que les garanties de financement à l'exportation, l'assurance des activités internationales et un octroi aisé de crédit au moyen de cartes de crédit garanties.

1.11   Le Comité demande d'unifier les modalités des différents programmes pour différentes régions du monde, tels qu'East Invest, AL Invest, MedInvest et autres, ce qui faciliterait leur utilisation par les PME. Il demande également de réviser la règle actuelle qui prévoit que seules les PME provenant de pays partenaires puissent bénéficier du soutien à la participation aux actions du programme.

1.12   Le CESE propose une série de mesures concrètes qui pourraient compléter de manière adéquate au niveau européen les aides existantes, telles que l'institution d'un prix européen de l'export des PME, l'utilisation de manifestations à l'échelle de toute l'Europe, telles que le prix européen de l'entreprise, la publicité en faveur de l'internationalisation des PME dans le cadre de la Semaine des PME, la création et l'entretien d'une base de données des meilleures expériences des fournisseurs d'aide, le renouvellement de manifestations d'appariement d'entreprises du genre Europartenariat ou Interprise.

1.13   Le CESE approuve l'idée de convoquer chaque année un forum afin d'évaluer les résultats de l'internationalisation et demande qu'il devienne une plateforme permanente, à laquelle seraient associés de manière efficace les partenaires sociaux, ainsi que les autres parties intéressées, y compris le CESE.

1.14   Le CESE recommande d'ajouter aux zones géographiques prioritaires choisies (pays «BRIC») d'autres marchés porteurs, comme ceux des pays du Golfe, d'Asie du sud-est et autres.

2.   Contenu essentiel du document de la Commission

2.1   L’Union européenne a besoin de trouver de nouvelles sources de croissance et d'emplois. Les grands marchés des pays tiers, tels que la Chine, l’Inde, la Russie et le Brésil, constituent des débouchés intéressants pour les entreprises de l’UE, du fait de leur taux ou de leur potentiel de croissance. C'est pourquoi l'appui aux activités qu'exercent les PME hors de l'UE relève du renforcement de la compétitivité de l'UE prôné par la stratégie Europe 2020, ainsi que d'autres documents (1).

2.2   En novembre 2011, la Commission a publié une communication sur le thème «Small Business, Big World – un nouveau partenariat pour aider les PME à exploiter les possibilités du marché mondial» (2), dans laquelle elle proposer une révision complète du système de soutien aux PME au niveau européen dans le domaine de l'internationalisation, qui devrait contribuer à rendre ce soutien plus efficace, plus transparent et plus large.

2.3   Si 25 % des PME de l’UE ont exporté sur le marché intérieur au cours des trois dernières années, seules 13 % d’entre elles ont une activité internationale hors de l’UE, ce qui montre l'ampleur des débouchés encore inexploités dans les pays tiers, notamment des industries innovatrices de fabrication et de création.

2.4   La Commission y définit les objectifs qu'elle souhaite atteindre - offrir aux PME des informations aisément accessibles, améliorer la cohérence des activités de soutien, améliorer le rapport coût-efficacité, combler les lacunes des services offerts à l'échelon national par les secteurs public et privé et assurer une égalité d’accès aux PME de l’ensemble des États membres de l’UE.

2.5   Pour atteindre ces objectifs, la Commission souhaite utiliser notamment les instruments suivants: fournir des informations à la porte des PME, conférer une dimension européenne à la fourniture de services aux PME sur les marchés prioritaires, soutenir des clusters et des réseaux, rationaliser les nouvelles activités sur les marchés prioritaires, en respectant trois principes: complémentarité, viabilité et efficacité de l’utilisation des fonds publics en utilisant des objectifs dits SMART, à savoir: spécifiques, mesurables, acceptables, réalistes et situés dans le temps. La Commission détermine des zones géographiques prioritaires selon des critères définis. L'internationalisation des PME devrait s'intégrer aux autres politiques de l'UE.

3.   Observations générales

3.1   Le CESE se félicite de la communication de la Commission à l'examen et reprend à son compte la plupart de ses analyses et conclusions. Il constate que cette communication se concentre davantage sur le mécanisme d'octroi des aides que sur leur contenu et leurs objectifs. Le Comité rappelle ses avis antérieurs dans lesquels il a récemment formulé sa position s'agissant de la problématique de l'internationalisation des PME: «Réexamen du “Small Business Act” pour l'Europe»  (3), «Soutenir les PME dans leur adaptation aux évolutions des marchés mondiaux»  (4) et «Volet extérieur de la politique industrielle européenne»  (5).

3.2   Le CESE convient que la politique de soutien à l'entrée des petites et moyennes entreprises sur les marchés des pays tiers devrait s'inscrire dans la stratégie de compétitivité de l'UE, Europe 2020, et dans les autres politiques de l'UE et il souligne la nécessité de coordonner ces politiques, s'agissant de leur utilisation en faveur de l'internationalisation des PME.

3.3   Le Comité déplore que la communication à l'examen se limite pour l'essentiel au soutien des exportateurs directs vers les marchés des pays tiers. L'internationalisation recouvre l'exportation, l'importation, l'investissement étranger direct, la coopération techniques, les relations de sous-traitance et d'autres activités, grâce auxquelles les PME s'intègrent dans la chaîne de création de valeur.

3.4   Il convient d'élargir les soutiens à l'information et à la formation à ces autres domaines de l'internationalisation, afin qu'ils soient profitables au plus grand nombre possible d'utilisateurs et, ce faisant, de bien distinguer les besoins des différentes catégories d'entreprises, selon leur taille et leur expérience des activités à l'étranger.

3.5   Il convient de juger avec réalisme du nombre éventuel de PME susceptibles de participer à l'internationalisation, tel qu'il découle des statistiques publiées (6), en tenant compte du fait qu'une partie non négligeable des PME ne vise qu'à satisfaire les besoins d'un marché local, comme par exemple les petits services, la production artisanale pour les besoins locaux etc.

3.6   Le CESE souligne qu'il convient de créer de manière continue et conséquente un environnement entrepreneurial favorable aux PME, où il s'agit notamment de réduire la charge administrative et la réglementation superfétatoire qui menace la compétitivité des entreprises européennes sur les marchés des pays tiers et d'éliminer systématiquement tous les obstacles qui empêchent les PME de participer à l'internationalisation.

3.7   Les innovations stimulent cette internationalisation des entreprises et dans le même temps, l'internationalisation peut améliorer les performances des entreprises (7). Au cours du cadre financier pluriannuel de l'UE en vigueur, les PME n'utilisent dans le 7e programme cadre que 15 % des moyens financiers disponibles au titre du programme «Coopération» (8). Les nouveaux programmes «Horizon 2020», COSME et le 4e pilier du Fonds social européen offrent de grandes possibilités de contribuer, grâce à l'innovation, au renforcement de la compétitivité et de créer ainsi de meilleures conditions pour l'internationalisation des PME européennes et en conséquence pour une croissance plus élevée et la création d'emplois. Il convient cependant de faire en sorte que les PME aient connaissance de ces programmes, qu'elles puissent y accéder et que la complexité administrative de leur utilisation soit simplifiée.

3.8   L'efficacité des aides à l'internationalisation des PME requiert un changement d'approche de ses fournisseurs, tant à l'échelon européen que national, et le passage de services forfaitaires et standardisés à des services «sur mesure» ciblés, volontaristes, adaptés qui tiendront compte du secteur d'activité, du cycle de vie, de la disponibilité des ressources, de la position concurrentielle et des conditions internes de l'entreprise, telles que les connaissances linguistiques et la connaissance de la culture et du milieu des affaires locaux (9).

3.9   Entreprendre vise à dégager un profit, à croître et à accroître sa part de marché; ces objectifs peuvent âtre atteints grâce à une entrée sur les marchés étrangers; toutefois, cette dernière ne se solde pas automatiquement par un succès. Si 50 % des PME qui entreprennent à l'étranger enregistrent une hausse de leur chiffre d'affaires, ce n'est pas le cas des 50 % restantes. Le soutien octroyé vise à réduire autant que possible les risques d'échec liés au manque d'information et d'expérience.

3.10   Le soutien à l'internationalisation des PME relève de la compétence des États membres, qui offrent un grand nombre de programmes de soutien (plus de 300), sur fonds tant publics que privés (10); c'est pourquoi il convient de peser minutieusement la valeur ajoutée que pourraient apporter de nouvelles aides au niveau européens, afin d'éviter les doublons et les chevauchements avec les aides existantes. Pour cette raison, il serait utile que les organismes nationaux qui soutiennent l'internationalisation des PME échangent régulièrement leurs informations et coordonnent leurs activités avec les directions compétentes de la Commission.

3.11   La contribution de l'Europe devrait viser en premier lieu à ouvrir les marchés, à en faciliter l'accès, à conclure des accords bilatéraux et multilatéraux, à lever les obstacles tarifaires et non tarifaires, à fournir des informations (grâce à la base de données sur l'accès aux marchés «MADB»), notamment celles relatives à des domaines spécialisés et communs - en matière de protection des droits de propriété industrielle, de normes, de tarifs douaniers, de formulaires administratifs à l'exportation et à l'importation, de règlementation, de règles sanitaires, phytosanitaires et vétérinaires, de lutte contre la corruption et de marchés publics. L'UE devrait exiger de manière conséquente des pays partenaires qu'ils reconnaissent les certificats nationaux de ses États membres, reconnus dans le cadre du marché unique, et prévenir de cette manière une discrimination de certains de ses États membres.

3.12   Il conviendrait d'utiliser également l'aide européenne afin d'égaliser les conditions pour les activités des PME provenant des petits et des nouveaux États membres, qui n'ont pas la possibilité d'entretenir une représentation sur les marchés tiers.

3.13   Le principe de partenariat entre les institutions publiques, les représentations des entreprises (chambres de commerces, associations de défense des intérêts des PME, les fédérations d'entreprises et de secteurs) devrait être strictement respecté. L'association des partenaires sociaux, notamment à l'échelon régional et local, devrait servir à mettre en évidence les politiques et les ressources nécessaires au soutien de l'internationalisation des PME, ainsi qu'à surveiller leur bonne utilisation. Ce principe de partenariat devrait respecter les intérêts nationaux et les différentes formes de soutien et la libre concurrence entre les entreprises et les fournisseurs d'aide. Il conviendrait que les institutions publiques des États membres, lorsqu'elles fournissent des services en faveur de l'internationalisation, ne fassent pas concurrence aux organisations représentant les entreprises.

3.14   Le CESE déplore l'absence dans la communication à l'examen de proposition visant à améliorer la coordination et à unifier le pilotage de cette stratégie d'internationalisation au niveau européen. Les compétences des directions générales de la Commission (Entreprises et industries, commerce, marché intérieur, développement et coopération, fiscalité et union douanière etc.) ne sont pas clairement délimitées s'agissant de l'internationalisation des PME. Il conviendrait également d'améliorer la coopération des directions concernées de la Commission et du Service européen pour l'action extérieure avec le Conseil, du réseau des représentants de PME, du Parlement européen, des représentations diplomatiques des États membres dans les pays tiers et d'autres organismes qui contribuent à l'élaboration de la politique d'internationalisation, ainsi qu'à sa mise en œuvre.

4.   Observations spécifiques et recommandations concernant les propositions de la Commission

4.1   L'état des lieux proposé devrait viser notamment à évaluer l'efficacité des mesures et instruments européens actuels de soutien et à mettre en évidence les lacunes existantes des systèmes nationaux de soutien et à les compléter au moyen d'une contribution européenne.

4.2   Il convient de réfléchir très soigneusement à la création du nouveau portail européen d'information du point de vue de son coût et il conviendrait à cet égard de partir des principes suivants:

il ne devrait pas s'agir d'un dédoublement des portails nationaux existants;

ce portail devrait relier entre eux l'ensemble des sources d'information existantes, tant européennes que nationales, de manière à ce qu'elles soient aisément accessibles d'un seul point;

les informations communes provenant de sources européennes devraient être fournies dans les langues officielles;

les informations provenant des sources propres de l'UE devraient viser à mettre en évidence et à éliminer les barrières à l'accès aux marchés, à présenter les règles relatives aux douanes, à la certification, aux règles sanitaires, phytosanitaires et vétérinaires, aux incitations aux investissements et à leur protection, à la protection de la propriété industrielle et intellectuelle, aux marchés publics etc.;

Les PME devraient être informées des aspects des principes directeurs de l'OCDE à l'intention des entreprises multinationales qui les concernent également (11);

il conviendrait de prendre en considération les besoins de tous les participants à l'internationalisation: les exportateurs, les importateurs, les investisseurs, les fournisseurs, ainsi que les spécificités des différents secteurs.

4.3   Le CESE déplore l'absence de mesures pour soutenir le commerce électronique, qui pourrait devenir un domaine important pour l'internationalisation des PME. À cet égard, il est nécessaire de réaliser les objectifs de l'UE en matière d'internet à haut débit, et notamment de couverture des zones rurales et périphériques, qui faciliterait l'accès des PME aux informations indispensables à leur internationalisation.

4.4   Le CESE apprécie la contribution du Réseau entreprise Europe en vue de développer les contacts et les relations commerciales entre les entreprises de l'UE dans certains pays, même s'il estime qu'il serait possible d'exploiter bien davantage le potentiel de ce réseau, comme le prouve le faible degré d'information de la majorité des PME européennes sur son existence même. Les services de ce réseau devraient autant que possible découler des demandes et des besoins réels des PME. Dans de nombreuses régions, les organisations de représentation des PME ne sont pas associées à ce Réseau entreprise Europe. C'est pourquoi le CESE souligne la nécessité de le doter d'une nouvelle structure administrative et demande que les organisations d'entreprises les plus proches des PME participent également à sa gestion.

4.5   Le soutien européen au PME pour entrer sur les marchés des pays tiers devrait également recouvrir différentes formes de soutien des PME sur le marché unique et la levée des obstacles qui les empêchent d'en exploiter les possibilités que prévoit l'Acte pour le marché unique. D'habitude, les PME commencent leurs activités commerciales internationales dans le cadre du marché unique, avant de les élargir aux marchés des pays tiers.

4.6   Toutes les enquêtes et études montrent que les PME ne connaissent guère les aides et les programmes disponibles. Les institutions européennes et nationales doivent utiliser un langage simple, compréhensible et adapté aux particularités des PME. Le CESE recommande d'élaborer un guide à la fois bref et clair pour s'orienter dans le labyrinthe des aides et d'améliorer la communication sur les aides existantes de la part des institutions européennes. Il convient d'associer à la dissémination des informations et des connaissances sur ces aides notamment les organisations qui représentent les intérêts des PME, telles que les chambres de commerce, les associations sectorielles, les unions de PME, et de leur offrir le soutien financier dont elles ont besoin pour fournir les services de conseil nécessaires.

4.7   À la lumière du plan d'action de la Commission (12), le CESE souhaiterait améliorer l'accès des PME aux financements, car il s'agit d'un préalable essentiel à une éventuelle internationalisation, notamment durant la crise économique et financière qui sévit actuellement dans l'UE. C'est pourquoi le CESE invite la Commission à créer de nouveaux instruments financiers de soutien à l'internationalisation des PME, tels que les garanties de financement à l'exportation, l'assurance des activités internationales et un octroi aisé de crédit au moyen de cartes de crédit garanties (13).

4.8   À la différence des programmes existants, comme par exemple East Invest, AL Invest et d'autres, les nouveaux programmes qui visent une région du monde donnée devraient être établis selon des modalités financières et administratives identiques. Le Comité demande à la Commission de réviser les règles actuelles qui prévoient que seules les PME provenant de pays partenaires puissent bénéficier du soutien à la participation aux actions du programme. Ils devraient également faciliter l'association des PME des États membres à leur réalisation en élargissant leur aide au remboursement des charges initiales liées à la participation aux activités des programmes.

4.9   Le CESE se félicite de l'effort de la Commission visant à permettre aux PME des États membres qui n'ont pas de représentations dans les pays tiers les plus importants d'accéder aux aides ou aux informations fournies par d'autres États membres de l'UE. Il attire cependant l'attention sur la difficulté de la tâche que représentent les modalités d'une telle coopération. Il conviendra de préciser si les services financés par les fonds publics d'un État donné pourront être utilisés par les PME d'autres États membres.

4.10   Il serait possible de surmonter cet obstacle grâce à la création progressive de centres européens de soutien aux PME pour les échanges commerciaux dans les pays partenaires les plus importants. Il y a lieu que les organisations de représentation des PME soient directement associées à la décision sur la teneur et la forme de leurs activités. Le CESE recommande de consacrer le soutien financier nécessaire aux organisations qui représentent les PME à l'échelon aussi bien national qu'européen, afin qu'elles fassent connaître leurs services.

4.11   Le CESE demande que la société civile organisée (à savoir les employeurs, les syndicats, les consommateurs, les associations de PME, les chambres et associations de professions libérales etc.), y compris le CESE et des organisations telles qu'EUROCHAMBRES, l'UEAPME, Business Europe, la CES et éventuellement des associations sectorielles européennes dans les domaines les plus importants pour l'internationalisation, participe à un forum annuel afin d'évaluer l'internationalisation des PME. Ce forum devrait prendre la forme d'une plateforme permanente de coordination, qui suivra entre autres la manière dont des sommes considérables sont attribuées aux différents programmes et aides et suivre leur efficacité selon des critères précis.

4.12   Le CESE propose que soit créé un prix européen pour le meilleur exportateur parmi les PME, qui serait décerné chaque année par exemple à l'occasion de la session du forum.

4.13   Afin de faire connaître les activités réussies menées par les administrations publiques dans le domaine de l'internationalisation, il serait possible d'utiliser de manière plus voyante le Prix européen de l'entreprise et le prix de la Région européenne entreprenante décerné par le Comité des régions.

Les semaines des PME organisées chaque année devraient comprendre des manifestations en faveur de l'internationalisation et un échange des meilleures pratiques dans ce domaine entre les États membres.

Le CESE appelle à créer et à entretenir une base de données en ligne des expériences les plus réussies dans le domaine de l'internationalisation vécues par les chambres de commerce européennes, les associations et unions qui représentent les PME, les organisations sectorielles, et appelle aussi à la diffusion ciblée de ces expériences par l'intermédiaire des organisations qui représentent les PME.

4.14   Le CESE recommande de revenir aux rencontres d'appariement d'entreprises à l'échelle européenne, qui ont déjà fait leurs preuves et qui ont profité dans le passé à de nombreuses PME de pays candidats s'agissant de leur internationalisation et qui prenaient la forme de ce que l'on appelait l'europartenariat ou Interprise.

4.15   S'agissant de l'orientation géographique de l'internationalisation des PME, le CESE approuve qu'elle se concentre sur les pays BRIC qui connaissent une forte croissance économique, mais il recommande de l'élargir à d'autres marchés porteurs dans les pays du Golfe, de l'Asie du sud-est et d'autres. Le CESE recommande également de définir des priorités sectorielles qui guideraient l'internationalisation des PME.

4.16   Le CESE recommande d'associer bien davantage les «représentants des PME», dans les États membres où chacun d'entre eux agit, à l'internationalisation des PME, qui devrait également devenir l'une des priorités essentielles des politiques nationales de soutien aux PME.

Bruxelles, le 23 mai 2012.

Le président du Comité économique et social européen

Staffan NILSSON


(1)  Voir les communications sur une politique industrielle intégrée, COM(2010) 614 final, sur le réexamen du «Small Business Act» pour l'Europe, COM(2011) 78 final, sur la politique commerciale, COM(2010) 612 final, et sur l'acte pour le marché unique, COM(2010) 608 final.

(2)  Voir: COM(2011) 702 final du 9.11.2011.

(3)  JO C 376 du 22.12.2011, p. 51.

(4)  JO C 255 du 22.9.2010, p. 24.

(5)  JO C 218 du 23.7.2011, p. 25.

(6)  Voir l'étude d'EIM, p. 5. Les PME participent à hauteur de 25 % à l'ensemble des exportations de l'UE à 27, dont à peu près la moitié est destiné à des marchés hors de marché unique (13 %); les PME contribuent à hauteur de 29 % à l'ensemble des importations de l'UE à 27, et dans ce cas également, la moitié provient de marchés tiers (14 %). 7 % des PME dans le cadre de l'UE à 27 participent à des coopérations avec un partenaire étranger dans le domaine des technologies, 7 % sont des sous-traitants d'un partenaire étranger, 7 % ont des sous-traitants étrangers et 2 % sont actives dans le domaine des investissements étrangers directs.

(7)  Tableau des performances des PME. Les PME peuvent-elles créer davantage et de meilleurs emplois? EIM, novembre 2011, p. 77

(8)  Rapport sur la participation des PME au 7e programme-cadre 2007-2011. Commission européenne, janvier 2012.

(9)  Fabio Antoldi, «Les PME peuvent-elles réellement s'engager sur des voies internationales de croissance rapide?», contribution au séminaire du Parlement européen le 24 janvier 2012, p. 31.

(10)  Voir le rapport final de l'étude l'EIM:«Opportunities for the internationalization of European SMEs» («Chances à saisir pour l'internationalisation des PME»), p. 30.

(11)  Principes directeurs de l'OCDE à l'intention des entreprises multinationales, 2000.

(12)  Voir: «Un plan d'action pour faciliter l'accès des PME au financement», COM(2011) 870 final.

(13)  Voir la «carte Szechenyi» en Hongrie, qui permet aux PME d'utiliser un crédit sans garantie collatérale, et garanti par l'État: www.iapmei.pt/conferencia/1_Laslo_Krisan.ppt.


31.7.2012   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 229/55


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif aux fonds d'entrepreneuriat social européens»

COM(2011) 862 final – 2011/0418 (COD)

2012/C 229/10

Rapporteure: Ariane RODERT

Le Conseil, en date du 20 janvier 2012, et le Parlement européen, en date du 17 janvier 2012, ont décidé, conformément à l'article 114 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la

«Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif aux fonds d'entrepreneuriat social européens»

COM(2011) 862 final — 2011/0418 (COD).

La section spécialisée «Marché unique, production et consommation», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 17 avril 2012.

Lors de sa 481e session plénière des 23 et 24 (séance du 23 mai 2012), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 194 voix pour, 1 voix contre et 9 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1   Le CESE accueille favorablement la proposition de règlement relatif aux fonds d'entrepreneuriat social européens présentée par la Commission européenne, qui vise à encadrer le développement de ce type de fonds en apportant clarté et certitude à l'ensemble des partenaires tout en facilitant la levée des fonds au niveau transnational.

1.2   L'entrepreneuriat social est un secteur en plein essor qui contribue largement à la réalisation de la stratégie Europe 2020. Le CESE se réjouit de l'attention portée à ce secteur par la Commission et du soutien qu'elle entend apporter à son développement et à sa croissance.

1.3   Un meilleur accès à un capital adapté pour l'entrepreneuriat social constitue une priorité. Le CESE souhaite toutefois souligner que cette initiative ne doit être considérée que comme l'un des nombreux instruments financiers hautement nécessaires qui doivent encore être développés.

1.4   Le CESE invite la Commission à recourir à la définition de l'entrepreneuriat social déjà utilisée dans le cadre de l'initiative pour l'entrepreneuriat social, plutôt que d'en forger une nouvelle. Il convient en particulier d'ajuster et de clarifier l'approche différente du règlement s'agissant de l'autorisation de distribuer les bénéfices aux propriétaires. Cela permettra d'indiquer clairement la position spécifique de l'entrepreneuriat social par rapport aux entreprises à visées strictement lucratives, mais aussi l'orientation du fonds par rapport à d'autres types de fonds de capital-risque, plus traditionnels.

1.5   Selon le CESE, certains des instruments de capitaux propres proposés risquent d'avoir une incidence limitée sur les investissements dans l'entrepreneuriat social, étant donné que la structure des instruments d'investissement proposés suppose un type de propriété de l'entreprise qui, dans la plupart des cas, est en contradiction avec les formes juridiques sous lesquelles de nombreuses entreprises sociales exercent leurs activités. Pour ces formes juridiques, les instruments les plus intéressants à développer ultérieurement sont plutôt le prêt à long terme ou la marge de manœuvre prévue pour «tout autre type de participation».

1.6   Il convient également de tenir compte d'autres particularités de l'entrepreneuriat social. Par exemple, la cession des avoirs dans le cas d'activités concernant des groupes vulnérables, l'influence sur la manière dont les entreprises sociales évaluent leur indépendance, leur mode de gestion particulier, le besoin en investissements à long plutôt qu'à court terme et les taux de rentabilité moindres doivent être pris en considération.

1.7   Afin d'accroître l'impact de ce type de fonds sur l'entrepreneuriat social, il y a lieu de l'envisager comme l'un des éléments d'une solution de capital hybride, qui est la forme la plus appropriée de financement de l'entrepreneuriat social. Le capital hybride combine subventions, prêts «patients» de longue durée et d'autres instruments dont la durabilité et la viabilité sont assurées par une participation ou une garantie publiques. Il convient également de prendre en considération la collaboration avec d'autres formes de capital privé comme les subventions et les donations, ainsi que des formes plus appropriées pour la propriété des «entreprises de portefeuille» (terme utilisé par le règlement pour désigner les objets d'investissement, à savoir les entreprises sociales), notamment la propriété sans droit de vote.

1.8   Le règlement propose que ces nouveaux fonds s'adressent dans un premier temps aux investisseurs professionnels et aux particuliers fortunés, qui s'engagent à investir au moins 100 000 euros. Le CESE insiste toutefois sur la nécessité que ces types de fonds, sous certaines formes, soient à terme ouverts à des investissements plus modestes et accessibles au public.

1.9   Le plus grand défi posé par cette proposition est la nécessité de mesurer et de communiquer les effets produits par les entreprises de portefeuille et leur incidence sur la société. Le CESE recommande qu'une étude et un travail communs au niveau de l'UE servent de point de départ, tandis que l'échelon national se chargerait des critères et des indicateurs en fonction de la forme, de l'orientation et des objectifs des activités, en collaboration avec l'ensemble des acteurs concernés.

1.10   La délégation de pouvoir accordée à la Commission pour adopter des actes délégués, en vue de définir des notions essentielles, doit entrer en vigueur dans les plus brefs délais et prendre la forme d'une vaste consultation ouverte avec des représentants des acteurs concernés, c'est-à-dire les fonds de placement, les investisseurs et les entreprises sociales.

1.11   Il y a lieu de lancer un programme pour soutenir la propension à l'investissement et d'autres formes de renforcement des capacités pour l'ensemble des partenaires, de manière à construire la confiance et des structures conjointes particulièrement adaptées à ce type de fonds destinés à l'entrepreneuriat social.

2.   Introduction

2.1   Dans l’Acte pour le marché unique (1), la Commission s'est engagée à prendre plusieurs mesures pour soutenir le développement et la croissance de l'entrepreneuriat social en Europe. La proposition relative à un cadre réglementaire européen pour les fonds d'entrepreneuriat social est l'une de ces mesures qui a également été soulignée comme action clé dans l'initiative pour l'entrepreneuriat social (2).

2.2   Les entreprises sociales constituent un secteur en plein essor dans l'UE et selon les estimations, ce marché de l'investissement solidaire croîtra très rapidement et dépassera largement les 100 milliards d’euros (3), ce qui confirme le potentiel de ce secteur émergent. Le fait de donner à ce secteur les moyens de continuer de croître permet d'obtenir de précieuses avancées dans la réalisation des objectifs de la stratégie Europe 2020. Cependant, la réglementation, que ce soit au niveau de l'UE ou des États membres, n'est pas conçue pour faciliter la levée de capitaux par ces types d'entreprises. Ce point avait déjà été clairement souligné par le CESE dans son avis exploratoire sur l'entrepreneuriat social et l'entreprise sociale (INT/589) (4).

2.3   La proposition de règlement relatif aux fonds d'entrepreneuriat social européens (ci-après «le règlement») vise à établir des règles et des exigences uniformes applicables aux organismes de placement collectif souhaitant utiliser la dénomination «fonds d'entrepreneuriat social européen» (FESE). Le règlement définit des règles applicables à ces fonds afin d'instaurer un climat de confiance, de certitude et de fiabilité pour les investisseurs tout en soutenant la croissance de l'entrepreneuriat social par l'amélioration de l'efficacité de la collecte de fonds auprès des investisseurs privés. La proposition a été précédée d'une consultation publique et d'une analyse d'impact effectuées en 2011.

2.4   Le présent avis établit des priorités et formule des recommandations sur les éléments à clarifier afin que la proposition relative aux fonds européens d'entrepreneuriat social produise le résultat escompté.

3.   Observations du CESE sur la proposition de règlement

3.1   Chapitre IObjet, champ d'application et définitions

3.1.1   Le CESE se réjouit de voir que la Commission entend rendre plus visible et soutenir l'entrepreneuriat social en Europe et accorder la priorité à l'accès au capital pour son développement et sa croissance. Le CESE estime que la proposition de règlement peut faciliter la levée de fonds privés pour certaines entreprises sociales ou certains types d'entrepreneuriat social, et qu'elle est indispensable au même titre que les autres propositions figurant dans l'initiative pour l'entrepreneuriat social, laquelle mentionne également la nécessité d'autres modes de financement.

3.1.2   Le capital est fondamental pour le développement d'un entrepreneuriat social renforcé, mais il est particulièrement difficile, en raison de la forme de certaines parties du capital décrit dans le règlement, de rendre celui-ci accessible à l'entrepreneuriat social, surtout s'il fait partie de l'économie sociale. Ce règlement doit donc être considéré comme une mesure parmi de nombreuses autres, nécessaires pour améliorer l'accès de l'entrepreneuriat social au capital de développement.

3.1.3   Parmi les instruments d'investissement mentionnés dans le règlement (article 3, paragraphe 1, lettre (c)), il convient de mettre l'accent sur les instruments de prêt tels que les prêts à faible taux d'intérêts, appelés «crédits patients», car il peut être plus difficile, pour certains acteurs, de tirer parti des instruments de capitaux propres. La plupart des entreprises sociales européennes appartiennent à leurs membres, à leurs partenaires, à des fondations ou à des associations sans but lucratif, ce qui, dans de nombreux cas, complique toute participation extérieure. D'autres types de propriété plus adaptés, que l'on trouve déjà dans certains États membres, notamment les parts ou actions spécifiques sans droit de vote librement cessibles et d'autres formes de résolution de la dette, devraient être considérés comme des titres et d'autres actifs financiers de l'entreprise sociale. Il convient également d'examiner de plus près les avantages fiscaux en tant qu'éléments du modèle de rentabilité.

3.1.4   S'agissant des instruments d'investissement évoqués dans le règlement (article 3, paragraphe 1, lettre (c) v)), il conviendrait d'insister davantage sur les instruments couramment utilisés par les entreprises sociales, qui sont plus adaptés à leurs caractéristiques, tels que les titres de capital, les initiatives spécifiques du secteur de la finance (banques coopératives (5), banques éthiques et sociales (6), banques commerciales proposant un programme social (7)), des instruments innovants tels que les «Social Impact Bonds» (8) (obligations à effet social) ainsi que des solutions préférentielles financées par la fiscalité. Ces instruments et d'autres actifs financiers peuvent faire partie du «capital hybride», plus généralement utilisé par les entreprises sociales.

3.1.5   Il convient d'encourager la participation publique à ces fonds, dans le cadre notamment de solutions de type «fonds de fonds» ou fonds de pension, comme garantie de durabilité des investissements. Cependant, le CESE insiste sur la nécessité de ne pas mélanger cet engagement public avec les ressources des Fonds structurels, dont les objectifs politiques sont tout autres.

3.1.6   La définition des «entreprises de portefeuille éligibles» – terme utilisé par le règlement pour désigner les entreprises sociales – limite le chiffre d'affaires de ces dernières à 50 millions d'euros (article 3, paragraphe 1, lettre (d)). Il convient d'envisager la suppression de ce plafond, qui bride plutôt les ambitions de croissance. En outre, un plafond fixé à ce niveau exclurait certains secteurs de l'entrepreneuriat social tels que les soins de santé et l'action sociale, ainsi que les logements sociaux.

3.1.7   Le CESE estime crucial que la définition de l'entrepreneuriat social et des entreprises sociales soit conforme à celle figurant dans l'initiative pour l'entrepreneuriat social. Le règlement propose une définition légèrement adaptée des «entreprises de portefeuille éligibles» (article 3, paragraphe 1, lettre (d)). La différence réside notamment dans la description des activités de l'entreprise de portefeuille (article 3, paragraphe 1, lettre (d) i)). À cet égard, le CESE considère que la meilleure définition est celle faisant référence à la mission de l'organisation, étant donné que l'entrepreneuriat social est un secteur complexe aux activités diverses.

3.1.8   S'agissant de la situation des bénéfices (article 3, paragraphe 1, lettre (d) ii)), le CESE renvoie à son avis INT/589, qui soulignait déjà clairement que l'entreprise sociale devait «être principalement à but non lucratif, avec des bénéfices qui, pour l'essentiel, soient réinvestis et non distribués aux actionnaires ou propriétaires privés». La disposition du règlement autorisant l'entreprise à réaliser des bénéfices et à les distribuer aux actionnaires et aux propriétaires doit être clarifiée et sa formulation élargie, de manière à préciser que les bénéfices utilisés pour réaliser les principaux objectifs sociaux de l'entreprise ainsi que les très rares cas dans lesquels une exception peut être accordée en la matière sont soumis à des règles claires, afin de ne pas nuire à l'objectif social. Le règlement devrait clarifier cette approche ainsi que les règles correspondantes afin de bien faire la distinction avec règlement sur les fonds de capital-risque, qui est examiné parallèlement, et qui vise les petites et moyennes entreprises (9).

3.1.9   Les types de biens et de services, les méthodes de production de biens ou de services ainsi que les groupes-cibles des activités matérialisant un objectif social (article 3, paragraphe 1, lettre (d) i) et article 3, paragraphe 2) doivent être définis conjointement avec un groupe de travail représentant l'entrepreneuriat social. Il importe que ce groupe de travail soit également le reflet de la diversité qui caractérise les entreprises sociales en Europe.

3.1.10   Une quatrième exigence devrait être appliquée aux «entreprises de portefeuille éligibles». En cas de dissolution de l'entreprise sociale, la majorité de ses fonds propres (par exemple un minimum de 60-70 %) ne peut être répartie entre les partenaires, actionnaires, propriétaires ou employés mais doit être utilisée à des fins sociales.

3.1.11   Le règlement s'adressera dans un premier temps aux investisseurs professionnels et aux «particuliers fortunés». Il convient d'inclure également dans ce groupe les investisseurs spécialisés des secteurs public et à but non lucratif, par exemple les banques coopératives et les institutions financières à orientation sociale. Le CESE recommande toutefois à la Commission d'élaborer dans les plus brefs délais un calendrier pour l'ouverture de ces fonds au grand public, étant donné que des avoirs de ce type revêtent également un intérêt majeur pour ce dernier.

3.2   Chapitre II – Conditions d'utilisation de la dénomination «Fonds d'entrepreneuriat social européen»

3.2.1   Le CESE juge appropriée, dans un premier temps, la proportion d'entreprises de portefeuille éligibles dans les fonds – celles-ci doivent représenter au moins 70 % des actifs des fonds. Il convient toutefois de prévoir ce que sont les actifs non éligibles qui constituent les 30 % restants afin d'insister davantage sur l'orientation du fonds en faveur de l'entrepreneuriat social. En ce qui concerne l'acquisition d'actifs autres que des investissements éligibles, une évaluation de leur pertinence doit toujours être exigée (article 5, paragraphe 1). Il convient d'encourager les investissements stables et durables tels que les obligations d'État, afin de stabiliser le fonds. Dans le même esprit, il convient de clarifier la définition des «équivalents de trésorerie».

3.2.2   Il existe de nombreuses similitudes entre la proposition de règlement relatif aux fonds d'entrepreneuriat social européens et la directive OPCVM (10). Il convient de clarifier les similitudes et les différences entre ces documents. Cela vaut notamment pour la définition des clients professionnels (article 6), les actes des gestionnaires (article 7) ainsi que l'application du fonds (article 8). Étant donné que dans de nombreux cas, les entreprises sociales sont de petites entreprises locales, il importe de permettre aux fonds de moindre importance de travailler sur ce marché. Par conséquent, il convient de revoir, à terme, le seuil minimal d'investissement de 100 000 euros (article 6 a)).

3.2.3   Il importe de détecter, de prévenir, de gérer, de suivre et de déclarer rapidement les éventuels conflits d'intérêts. Des mesures pour éviter les conflits d'intérêt doivent être prises avant l'entrée en vigueur du règlement. Il est primordial que la Commission clarifie dès maintenant ses intentions par rapport à ces mesures (article 8, paragraphe 5). Il est également important de préciser quelles sont les règles qui s'appliquent lorsque des conflits d'intérêts surviennent entre des investisseurs et/ou des gestionnaires de fonds (article 8, paragraphe 2).

3.2.4   Le règlement relatif aux fonds d'entrepreneuriat social dépend largement de la capacité à mesurer les effets sociaux et l'incidence sur la société, ce qui est loin d'être aisé. Il n'existe aujourd'hui aucune méthode claire et unique pouvant être simplement adaptée au milieu dans lequel travaillent les fonds d'entrepreneuriat social. Il est essentiel de mesurer (tant qualitativement que quantitativement) l'incidence sociale des activités plutôt que celle des entreprises de portefeuille. Plutôt que de rechercher une méthode commune pour le suivi et l'évaluation de l'incidence sociale, il est plus avantageux de créer un cadre européen qui servirait de base à la définition de critères et d'indicateurs mesurables au niveau national. La Commission doit préciser dès maintenant comment elle entend mesurer les effets sociaux et l'incidence sur la société, en lançant une étude sur les différentes méthodes de mesure et les diverses expériences en la matière, en collaboration avec les entreprises sociales, les chercheurs et les fournisseurs de capitaux.

3.2.5   L'un des fondements des entreprises sociales est leur indépendance. Par conséquent, les procédures mises en œuvre par les gestionnaires de fonds, conformément au règlement, afin «d'établir et de suivre […] les effets sociaux» doivent être décrites plus clairement, tout comme l'obligation des gestionnaires de fonds de présenter un rapport sur les effets sociaux à l'intention des investisseurs pour garantir que le fonds investit réellement dans des activités sociales (article 9, paragraphes 1 et 2). Les imprécisions à cet égard dans le règlement sont source de malentendus quant au rôle du gestionnaire de fonds, et qu'il convient d'y remédier. Il est à la fois inapproprié et irréaliste que l'incidence sociale doive être mesurée et suivie par le gestionnaire de fonds, car d'une part, cela compromet l'indépendance des entreprises sociales et d'autre part, l'on ne dispose pas de méthodes adéquates pour effectuer des mesures et un suivi efficaces.

3.2.6   La problématique de la mesure se reflète également dans les règles relatives au rapport technique et à la méthode utilisée pour mesurer les effets sociaux (article 12, paragraphe 2, lettre (a)). Il y a lieu de préciser comment ce rapport s'articulera avec les spécifications métrologiques que la Commission entend développer.

3.2.7   Le rapport technique prévoit même la possibilité pour le gestionnaire du fonds de céder une entreprise de portefeuille (article 12, paragraphe 2, lettre (b)). Le règlement doit être clair quant aux règles qui s'appliquent à la cession d'entreprises de portefeuille. Une entreprise sociale travaillant avec des groupes défavorisés ne peut pas être cédée de la même façon qu'un avoir dans une société commerciale, en raison du caractère délicat de ses activités. Les investisseurs et les gestionnaires de fonds doivent être sensibilisés à la particularité – et à la vulnérabilité – de ces activités, et adapter leur comportement en conséquence. La Commission doit également indiquer ce qu'il convient de faire du marché de seconde main engendré par de telles cessions. De nombreuses entreprises sociales dépendent d'investissements à long terme et durable pour pouvoir développer leurs activités.

3.2.8   Il importe de préciser comment la méthode de mesure des effets sociaux que la Commission entend développer s'articulera avec la méthode qui devra être appliquée par le gestionnaire de fonds pour son rapport et pour tout ce qui servira de base aux informations transmises aux investisseurs (article 13, paragraphe 1, lettres (c) et (d)). Il est également essentiel de fournir une description des actifs autres que les entreprises de portefeuille éligibles ainsi que des informations sur les critères à appliquer pour les sélectionner. Le règlement doit prévoir des règles concernant les actifs et les investissements non éligibles, même pour cette partie du fonds (article 13, paragraphe 1, lettre (e)). S'agissant de la procédure d'évaluation et de la méthode de fixation des prix dans le fonds (article 13, paragraphe 1, lettre (g)), le CESE est d'avis qu'il convient d'élaborer un modèle spécifiquement adapté aux formes et aux activités de l'entreprise sociale.

3.3   Chapitre III – Surveillance et coopération administrative

3.3.1   Les règles relatives aux mesures et sanctions administratives à appliquer en cas d'infraction aux dispositions du règlement doivent être harmonisées dans toute l'UE. Par conséquent, ces règles doivent être définies au niveau de l'UE plutôt qu'à celui des États membres (article 20, paragraphe 2). Ces règles doivent être effectives, proportionnées et dissuasives. Il convient de définir des mesures autres que la simple interdiction d'utiliser la dénomination «fonds d'entrepreneuriat social européen», étant donné que l'initiative a également pour but de créer un climat de confiance et de réduire autant que possible les abus. Des mécanismes de protection doivent être mis en place pour les entreprises de portefeuille se trouvant dans le fonds, de manière à ce qu'elles puissent poursuivre leurs activités au cas où des sanctions seraient prises à l'encontre du gestionnaire du fonds.

3.4   Chapitre IV – Dispositions transitoires et finales

3.4.1   Le règlement stipule à plusieurs reprises que des délégations de pouvoirs sont accordées à la Commission pour une période de quatre ans après son entrée en vigueur (en 2013). Bon nombre de ces pouvoirs sont essentiels en ce qui concerne la conception du fonds, par exemple son champ d'activité (biens, services et méthodes de production), l'éventuelle distribution des bénéfices et les conflits d'intérêts. L'ensemble des acteurs concernés – c'est-à-dire les fonds de placement, les investisseurs et les entreprises sociales – doivent participer aux processus d'élaboration de ces actes délégués. À cet égard, un rôle essentiel peut être joué par le «groupe consultatif multipartite» annoncé dans l'initiative pour l'entrepreneuriat social.

4.   Autres observations

4.1   Il est essentiel d'assurer un suivi permanent des résultats de ce règlement afin de s'assurer que les principaux groupes-cibles des entreprises sociales (qui appartiennent souvent à l'économie sociale) aient réellement bénéficié d'un meilleur accès à des capitaux adaptés. Le CESE entend insister chaque année sur ce point dans le cadre de ses travaux en cours sur l'entrepreneuriat social et l'économie sociale.

4.2   Étant donné que le concept plus large de fonds sociaux (privés ou publics) est peu connu et relativement limité dans la plupart des États membres, une stratégie doit être mise en place pour améliorer leur visibilité. De tels fonds font défaut dans plusieurs pays européens, et lorsqu'ils existent, ils sont peu connus du grand public. C'est ici que la Commission peut jouer un rôle essentiel de rassemblement et de diffusion de ces instruments innovants et efficaces pour créer et développer la croissance de l'entrepreneuriat social en Europe.

4.3   Il importe également au plus haut point d'assurer l'existence d'aides et de programmes en faveur de la propension à l'investissement et du renforcement des capacités (au niveau des structures et de la compréhension), pour l'ensemble des partenaires – investisseurs, gestionnaires de fonds et entreprises de portefeuille – tant à l'échelon de l'UE que des États membres. C'est ici que les «intermédiaires» déjà établis dans bon nombre d'États membres peuvent jouer un rôle essentiel, et leur existence doit être encouragée. À cet égard, il vaut la peine de remarquer que les investissements dans l'entrepreneuriat social ont été notés dans plusieurs contextes comme présentant un risque faible (11), ce qu'il convient de souligner dans ces programmes.

4.4   Le règlement utilise très souvent et de manière inappropriée l'expression «actionnaires» des entreprises sociales, ce qui implique que la société anonyme par actions est la forme d'entreprise sociale la plus courante. C'est faux et trompeur. Il convient d'utiliser les expressions «membres» ou «partenaires» des entreprises sociales, qui sont essentiellement des coopératives, associations, fondations et sociétés à responsabilité limitée (qui ne peuvent pas avoir d'actions mais des participations sociales et des membres).

Bruxelles, le 23 mai 2012.

Le président du Comité économique et social européen

Staffan NILSSON


(1)  COM(2011) 206 final.

(2)  COM(2011) 682 final.

(3)  Voir J.P.Morgan, Impact Investments:An Emerging Asset Class, 2011.

(4)  JO C 24 du 28.1.2012, p. 1.

(5)  www.eurocoopbanks.coop.

(6)  www.triodos.be.

(7)  Par exemple, www.bancaprossima.com, https://www.unicredit.it/it/chisiamo/per-le-imprese/per-il-non-profit/universo-non-profit.html et www.ubibanca.com/page/ubi-comunita.

(8)  www.socialfinance.org.uk/sib.

(9)  COM(2011) 860/2 final.

(10)  Directive 2009/65/CE du Parlement européen et du Conseil du 13 juillet 2009.

(11)  En 2011, la Banque d'Italie a noté un taux de défaut de 4,3 % pour les institutions à but non lucratif, bien au-dessous du taux de défaut moyen pour l'ensemble des secteurs (5,4 %), les sociétés non financières (7,9 %) et les microenterprises (10,3 %). En outre, les banques coopératives ont constaté un taux de défaut de seulement 0,6 % pour les institutions à but non lucratif (source: Federcasse, Association nationale italienne des banques coopératives).


31.7.2012   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 229/60


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de décision du Conseil relative à l'adoption d'un programme complémentaire de recherche pour le projet ITER (2014-2018)»

COM(2011) 931 final — 2011/0460 (NLE)

2012/C 229/11

Rapporteur: M. Gerd WOLF

Le 3 février 2012, le Conseil a décidé, conformément à l'article 7 du traité Euratom, de consulter le Comité économique et social sur la

«Proposition de décision du Conseil relative à l'adoption d'un programme complémentaire de recherche pour le projet ITER (2014-2018)»

COM(2011) 931 final — 2011/0460 (NLE).

La section spécialisée «Marché unique, production et consommation», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 8 mai 2012.

Lors de sa 481e session plénière des 23 et 24 mai 2012 (séance du 23 mai 2012), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 183 voix pour, 7 voix contre et ç abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1   Le Comité recommande une nouvelle fois avec fermeté d'investir davantage dans la recherche et le développement en vue d'assurer l'ambitieuse et indispensable conversion de notre système énergétique actuel aux technologies ayant le potentiel de garantir un approvisionnement énergétique sur le long terme qui soit suffisant, durable et sans incidence néfaste sur le climat. Par là, on entend également les travaux de développement portant sur l'utilisation de l'énergie issue de la fusion. L'énergie est l'élixir de longue vie de notre civilisation et du mode de vie qui est le nôtre aujourd'hui.

1.2   En tant que projet international de grande envergure implanté dans l'UE, ITER constitue l'avancée décisive et unique au monde qui s'impose aujourd'hui dans l'optique de l'utilisation future de l'énergie de fusion. ITER est donc un élément important de la recherche dans le domaine de l'énergie et a fortiori du plan SET. Le Comité réaffirme l'importance de ce projet non seulement du point de vue de l'approvisionnement en énergie pour le futur, mais également au regard de la compétitivité de l'industrie européenne dans le domaine des nouvelles technologies les plus ambitieuses.

1.3   Le Comité désapprouve dès lors sans réserve la Commission lorsque celle-ci propose, au rebours de ce qui s'est fait jusqu'ici, de retirer les engagements européens relatifs à la construction d'ITER du cadre financier pluriannuel (CFP), dans lequel ne subsisteraient que les activités de recherche. Ce retrait entamerait l'importance du projet et ébranlerait la fiabilité de l'UE en tant que partenaire international. Au cours de la période 2014-2018, la construction d'ITER doit plutôt être considérée comme un volet/projet du programme de recherche, de développement et de démonstration Euratom - mais un volet autonome et découplé des autres éléments du programme -, et donc figurer au sein du CFP.

1.4   Sachant qu'a priori, la Commission ne prévoit malheureusement pas de l'y inclure, le Comité recommande de rechercher, avec le Conseil, le Parlement et la Banque européenne d'investissement, des solutions permettant de le faire a posteriori sans porter atteinte de façon notable aux autres éléments du programme, en particulier ceux relatifs à la recherche dans le domaine de l'énergie.

1.5   À cette fin, le Comité suggère de préférence de puiser dans les fonds non utilisés du CFP, qui sont en temps normal rétrocédés aux États membres. Cette solution est manifestement déjà prévue pour le financement du projet ITER pour la période 2012-2013.

1.6   Le Comité souscrit aux initiatives du Parlement européen selon lesquelles les fonds non utilisés du CFP ne devraient pas, de manière générale, mener à une réduction du CFP, mais plutôt bénéficier aux programmes conjoints de l'UE, comme suggéré spécifiquement ci-dessus pour le projet ITER.

1.7   Seul le cas où cette mesure s'avérerait insuffisante, voire impossible, justifierait une réduction des postes existants du CFP, de maximum 0,3 % environ chacun.

1.8   Afin de respecter au mieux le calendrier et le cadre financier, le projet doit être doté d'un comité de pilotage fort dont les compétences décisionnelles, tant sur le plan technique qu'administratif, soient suffisantes, ainsi que d'une structure rigoureuse.

1.9   En ce qui concerne la période après 2018, le Comité appuie la Commission dans son souci bien légitime d'établir prochainement un cadre juridique et d'orientation stable permettant de garantir une sécurité de planification intra-européenne et surtout, internationale.

2.   Contenu essentiel de la proposition de la Commission et de son argumentation

2.1   La proposition de la Commission vise à définir l'accord de financement pour la contribution de l'UE au projet ITER pour la période 2014-2018, sous la forme d'un «programme complémentaire de recherche» conforme au traité Euratom. Le programme complémentaire de recherche doit être financé par les États membres (plus les «pays tiers associés») en dehors du CFP. L'enveloppe concernée s'élève à 2,6 milliards d'euros, soit 0,26 % du CFP (voir également les paragraphes 4.7 et 4.7.1).

2.2   L'objectif principal du projet international ITER est de construire et de faire fonctionner un réacteur expérimental de fusion. Ce projet constitue une étape majeure vers la démonstration de la fusion en tant que source d'énergie durable. Par conséquent, le programme de recherche associé à ITER a pour but avoué de «contribuer à la décarbonisation à long terme du système énergétique et ce, de façon sûre, efficace et sécurisée. En outre, ce programme contribuera à la stratégie Europe 2020 et à l'initiative phare intitulée “Une Union pour l'innovation”».

2.3   Le projet ITER figure dans le plan stratégique européen pour les technologies énergétiques (plan SET) et contribuera à la stratégie Europe 2020, car la participation de l'industrie européenne de la haute technologie devrait apporter à l'UE un avantage concurrentiel au niveau mondial dans ce secteur prometteur.

2.4   Le projet ITER est régi par l'accord sur l'établissement de l'organisation internationale ITER pour l'énergie de fusion en vue de la mise en œuvre conjointe du projet ITER (l'«accord ITER») (1), conclu entre la Communauté européenne de l'énergie atomique («Euratom») et six autres parties (la Chine, l'Inde, le Japon, la Corée, la Russie et les États-Unis).

2.5   La contribution de l'UE au projet ITER est gérée par l'intermédiaire de l'entreprise commune européenne pour ITER et le développement de l'énergie de fusion («Fusion for Energy»), établie par la décision du Conseil du 27 mars 2007 (2).

2.6   Les coûts de construction d'ITER dépassent les prévisions initiales (3), d'où la nécessité de trouver des financements supplémentaires (cf. le paragraphe 2.1). Selon la Commission, cela implique soit de redéployer des fonds du CFP déjà affectés à d'autres priorités, soit de remettre en question les plafonds de celui-ci.

2.7   Il convient de trouver une approche différente apportant des certitudes durables quant à ce projet ambitieux. En conséquence, la Commission a suggéré, dans sa communication du 29 juin 2011 intitulée «Un budget pour la stratégie Europe 2020» (4), de financer le projet ITER en dehors du CFP après 2013.

2.8   Le traité Euratom limite la durée des programmes de recherche à cinq ans. Conformément à l'accord ITER, le projet ITER aura une durée initiale de 35 ans (soit jusqu'en 2041). Ultérieurement, de nouvelles décisions du Conseil seront donc nécessaires pour continuer à financer la contribution de l'UE à ce projet.

3.   Observations du Comité – État des lieux

3.1   S'appuyant sur ses déclarations précédentes (5) quant à l'importance de la fusion nucléaire pour un approvisionnement énergétique futur sobre en CO2, le Comité se range à l'opinion de la Commission selon laquelle ITER constitue l'avancée décisive et unique au monde qui s'impose aujourd'hui dans l'optique de l'utilisation future de l'énergie de fusion (6). De toutes les technologies permettant de faire face de façon durable et suffisante au défi colossal que constitue un approvisionnement énergétique sûr et sans incidence néfaste sur le climat, l'énergie de fusion est la seule solution connue qui ne soit pas encore disponible ou mise en œuvre à ce jour, fût-ce à titre d'essai. ITER est un élément important de la recherche dans le domaine de l'énergie et a fortiori du plan SET.

3.2   JET (Joint European Torus) (7), la plus importante expérience de fusion du monde à l'époque en raison de ses propriétés et de ses résultats, dépassait déjà les possibilités ou la volonté des États membres de concrétiser et financer ce projet au niveau national, en raison de son coût considérable. C'est donc devenu un modèle et un champ d'expérimentation pour les actions européennes communes et couronnées de succès dans le cadre du traité Euratom. Depuis sa création, JET est au cœur du programme européen de fusion.

3.3   Le projet ITER, qui repose sur les découvertes de la recherche internationale dans le domaine de la fusion et en particulier sur les résultats de JET, dépasse nettement dans ses objectifs scientifiques et techniques, dans son volume et dans ses coûts les moyens requis pour JET. C'est pourquoi l'idée d'une coopération internationale dépassant le cadre de l'UE s'est rapidement imposée. Fruit d'une initiative de MM. REAGAN, GORBATCHEV et MITTERRAND, elle a finalement débouché sur le projet international ITER. ITER devrait permettre la production de 500 mégawatts (!) d'énergie thermique par fusion, avec un bilan énergétique positif.

3.4   Le 26 novembre 2006, l'accord sur l'établissement de l'organisation internationale ITER pour l'énergie de fusion en vue de la mise en œuvre conjointe du projet ITER a été signé par les représentants des sept parties à cet accord, à savoir la Communauté européenne de l'énergie atomique, le gouvernement de la République populaire de Chine, le gouvernement de la République de l'Inde, le gouvernement du Japon, le gouvernement de la République de Corée, le gouvernement de la Fédération de Russie et le gouvernement des États-Unis d'Amérique. La Commission a non seulement agi comme signataire au nom de l'UE, mais a également coordonné la suite du programme dans le cadre de l'entreprise commune européenne pour ITER ainsi que le reste du programme de fusion.

3.5   La décision prise alors de stationner ITER dans l'UE (à Cadarache, dans le sud de la France) a permis d'implanter l'un des plus importants projets d'avenir en Europe et de profiter de son pouvoir d'attraction sur les meilleurs chercheurs et ingénieurs ainsi que de ses retombées dans les secteurs industriels les plus ambitieux. À l'issue d'une période de démarrage pour le moins difficile, tant du point de vue de la gouvernance que de la gestion, (jamais un projet n'avait donné lieu à une telle collaboration dans le domaine scientifique et technique, avec une telle quantité et diversité de partenaires internationaux) il s'est avéré, pour des raisons diverses, que l'évaluation initiale des coûts, et donc la contribution financière du programme Euratom, devait être revue à la hausse (8). Le Comité estime que la Commission était consciente de ces faits avant même l'élaboration du cadre financier pluriannuel (CFP).

4.   Observations du Comité – Opinions et recommandations

4.1   En principe, le Comité soutient l'intention de la Commission d'accroître le budget de R&D disponible pour la recherche dans le domaine de l'énergie, en l'occurrence pour le projet ITER dans le cadre d'Euratom. Le Comité avait déjà indiqué dans son avis concernant le plan SET (9) qu'«il est évident qu'en dépit de la croissance ininterrompue de la population mondiale, de l'appétit énergétique et des immenses besoins de rattrapage de cette dernière, des réserves épuisables d'énergies fossiles primaires et de la dépendance croissante de l'Europe vis-à-vis des importations, de nombreux hommes politiques et autres acteurs sous-estiment encore fortement la gravité du problème climatique et énergétique, tout comme l'ampleur des investissements requis pour le contrer». Le Comité a répété cet avertissement dans son avis sur le thème «Horizon 2020» et a recommandé en conséquence qu'une part plus importante du cadre financier pluriannuel (CFP) soit consacrée à la recherche dans le domaine de l'énergie (10).

4.1.1   C'est pourquoi le Comité soutient aussi la Commission dans ses efforts, malheureusement infructueux jusqu'à présent, pour élargir le cadre financier pluriannuel (CFP) afin de pouvoir s'atteler plus résolument à cette importante tâche conjointe de l'Union et à d'autres qui le sont tout autant (11). Il estime toutefois que c'est à tort qu'on tentera d'y parvenir en créant, à coup de dérogations ad-hoc et au rebours de la pratique antérieure, en douce pour ainsi dire, un programme de recherche complémentaire en dehors du CFP, destiné à financer la contribution de l'UE à la construction d'ITER. Il conviendrait bien plutôt de reconduire pour la période 2014-2018 l'intégration de la construction d'ITER au programme de recherche, de développement et de démonstration Euratom, autrement dit, au sein du cadre financier pluriannuel, .

4.2   Ce n'est pas le seul argument contre le retrait des engagements européens relatifs à la construction d'ITER du CFP. Le Comité n'est pas en mesure de suivre le raisonnement présenté par la Commission au point 2.6. Lorsque la Commission, en pleine connaissance de cause, présente pour décision une proposition de CFP dans laquelle elle exclut délibérément les coûts pour la construction d'ITER, elle ne peut s'en prendre qu'à elle-même d'avoir créé une situation qui, de son propre aveu, rend la prise en compte de ces coûts dans le CFP difficile.

4.3   Par ailleurs, il existe aussi de puissants arguments de fond s'opposant à une exclusion d'ITER du CFP.

4.3.1   Ils concernent, d'une part, le principe de subsidiarité et la question de la valeur ajoutée européenne. En l'occurrence, il s'agit précisément du type de projets qui dépassent le potentiel d'un seul État membre: des infrastructures scientifiques et techniques de grande envergure ou des projets comme Galileo et ITER justement, qui constituent un prototype pour les projets conjoints de l'Union dans le cadre du CFP, dont la valeur ajoutée européenne ne fait donc pas l'ombre d'un doute. C'est exactement dans cette optique que les programmes-cadres de RDT ont été établis dans le cadre du CFP.

4.3.2   D'autre part, ils ont trait à l'effet produit sur les partenaires internationaux. Vu l'importance politique de ce partenariat, le Comité considère que la proposition de la Commission émet un mauvais signal, qui porte atteinte à la confiance dans la fiabilité de l'UE en tant que partenaire dans le cadre d'accords internationaux. Ce constat concerne non seulement le programme de fusion, mais aussi les efforts visant à conclure d'autres partenariats et accords contraignants à l'échelle internationale, dans le cadre de la politique de sécurité ou de la politique énergétique et climatique, par exemple.

4.3.3   Mais ils touchent également à un autre aspect plus général déjà abordé par le Comité dans son avis sur le thème «Horizon 2020» (12), à savoir la tendance affichée à transférer à des agences certaines des tâches et activités de soutien à la recherche et à l'innovation incombant jusqu'ici à la Commission, celle-ci se limitant pour sa part aux questions juridiques et à la gestion des aspects financiers. Le Comité émet de sérieuses réserves à cet égard. En effet, cela signifie que la Commission renoncerait non seulement à assurer un suivi spécialisé et à cultiver une capacité d'appréciation propre (y compris aux experts nécessaires à cet effet), mais cesserait également de se préoccuper des véritables questions et objectifs de fond et de s'y identifier comme il convient. Or ce dernier élément est indispensable pour défendre au niveau politique un thème aussi important que la R&D et l'innovation avec compétence, succès et conviction. À défaut, un important levier de contrôle disparaîtrait du fragile système de contrôles et de contre-pouvoirs, et un poids crucial serait perdu dans la balance politique.

4.4   Comme exposé précédemment, si le Comité soutient sans réserve le souhait de la Commission de renforcer le CFP, il est néanmoins d'avis que le projet ITER devrait être financé par le CFP et rester structurellement établi en son sein. Par conséquent, le Comité recommande de rechercher, avec le Conseil, le Parlement et la Banque européenne d'investissement, des solutions permettant de l'y inclure a posteriori sans porter atteinte de façon notable aux autres éléments du programme, en particulier ceux relatifs à la recherche dans le domaine de l'énergie.

4.5   Pour ce faire, le Comité préconise de préférence d'élaborer des procédures appropriées afin de garantir que l'ensemble du budget déjà approuvé pour le CFP puisse effectivement servir aussi à l'accomplissement des tâches conjointes de l'Union et qu'il ne soit pas amputé par le reflux habituel des fonds non utilisés vers les États membres. Par cette recommandation, le Comité rejoint aussi une initiative émanant du Parlement européen du 5 juillet 2010 (13).

4.6   Eu égard à la problématique concrète exposée, le Comité recommande de combler le déficit de financement d'ITER évoqué ici au moyen de ces fonds non utilisés et non rétrocédés (comme cela a apparemment été le cas pour 2012/2013 (14)). Dans la mesure où cette procédure nécessite d'autres mesures formelles ou juridiques, le Comité recommande que cette question fasse d'abord l'objet d'un débat avec la BEI, puis d'une négociation avec les organes compétents.

4.7   Au cas où la solution préconisée au paragraphe 4.6 s'avèrerait insuffisante ou impossible, à l'exclusion de tout autre contexte, le Comité recommande de couvrir les coûts en question, y compris un «contingent» fixé en conséquence (voir paragraphe 4.7.1) en opérant des réductions mineures dans tous les autres postes du CFP (ce qui, en intégrant un «contingent» de 10 % environ, revient non plus à 0,26 % mais à 0,3 % environ pour chaque).

4.7.1   Le Comité recommande en effet avec insistance de davantage tenir compte de l'expérience acquise dans l'édification de projets d'envergure du même type, concernant des domaines technologiques inexplorés, et, partant, de veiller à l'instauration d'un «contingent», 10 % nous paraissant par exemple une valeur adaptée à la situation, quitte à devoir modifier les cadres réglementaires de la Commission à cet égard. Le volume mentionné au paragraphe 2.1 s'en trouverait porté de 0,26 % à environ 0,3 %. Il conviendrait toutefois alors que le comité de pilotage gère séparément le budget alloué à ce «contingent» et ne libère les fonds qu'au regard de critères stricts, pour éviter toute planification a priori qui lui ferait manquer ses objectifs.

4.7.2   Au paragraphe 4.1.1, le Comité recommande de faire de la construction de la partie européenne d'ITER un volet/un projet autonome du programme de fusion, découplé des autres volets de ce programme. Afin de respecter au mieux le calendrier et le cadre financier, le projet doit être doté d'un comité de pilotage fort dont les compétences décisionnelles, tant sur le plan technique qu'administratif, soient suffisantes, ainsi que d'une structure rigoureuse. Le Comité recommande de s'inspirer à cette fin des exemples que constituent le CERN, l'Agence spatiale européenne (ASE) ou encore l'Observatoire européen austral (ESO).

4.8   En ce qui concerne les années ultérieures à la période 2014-2018 en question, le Comité soutient la Commission dans sa préoccupation, bien légitime d'établir un cadre stable et une base solide et durable pour l'ensemble de la durée du projet international ITER, à ceci près que le Comité estime indispensable d'inscrire dans le cadre du CFP. Cette démarche devrait apporter une sécurité dans la planification intra-européenne et internationale et démontrer aux partenaires internationaux la fiabilité de l'UE.

Bruxelles, le 23 mai 2012.

Le président du Comité économique et social européen

Staffan NILSSON


(1)  JO L 358 du 16.12.2006.

(2)  JO L 90 du 30.3.2007.

(3)  JO C 181 du 21.06.2012, p. 111, paragraphe 5.5.3.

(4)  COM(2011) 500 final, 29.6.2011.

(5)  Par exemple JO C 302 du 7.12.2004, p. 27, JO C 21 du 21.1.2011, p. 49, JO C 218 du 23.7.2011, p. 87, JO C 181 du 21.06.2012, p. 111.

(6)  Voir également http://www.iter.org/.

(7)  Cf. aussi www.jet.efda.org.

(8)  JO C 181 du 21.06.2012, p. 111, paragraphe 5.5.3.

(9)  JO C 21 du 21.1.2011, p. 49, paragraphe 3.1.1.

(10)  JO C 181 du 21.06.2012, p. 111, paragraphe 4.2.1.

(11)  JO C 143 du 22.5.2012, paragraphe 6.

(12)  JO C 181 du 21.06.2012, p. 111, paragraphe 3.12.1.

(13)  A7-0254/2011: Résolution du Parlement européen du 24 novembre 2010 sur la position du Conseil sur le projet de budget rectificatif no 3/2011 de l'Union européenne pour l'exercice 2011, section III – Commission (11630/2011 – C7-0388/2011 – 2011/2075(BUD)).

(14)  Conseil de l'Union européenne (Compétitivité), 19 décembre 2011, document no 18807/11, PRESSE 508 (uniquement disponible en EN).


31.7.2012   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 229/64


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 2009/65/CE portant coordination des dispositions législatives, réglementaires et administratives concernant certains organismes de placement collectif en valeurs mobilières (OPCVM) et la directive 2011/61/UE sur les gestionnaires de fonds d’investissement alternatifs en ce qui concerne le recours excessif aux notations de crédit»

COM(2011) 746 final — 2011/0360 (COD)

2012/C 229/12

Rapporteur: M. Jörg Freiherr FRANK VON FÜRSTENWERTH

Le 9 février 2012, le Conseil de l'Union européenne a décidé, conformément à l'article 53, paragraphe 1, du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la

«Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 2009/65/CE portant coordination des dispositions législatives, réglementaires et administratives concernant certains organismes de placement collectif en valeurs mobilières (OPCVM) et la directive 2011/61/UE sur les gestionnaires de fonds d’investissement alternatifs en ce qui concerne le recours excessif aux notations de crédit».

COM(2011) 746 final — 2011/0360 (COD).

La section spécialisée «Marché unique, production et consommation», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 8 mai 2012.

Lors de sa 481e session plénière des 23 et 24 mai 2012 (séance du 23 mai 2012), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 130 voix pour et 4 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1   Le présent avis s'inscrit dans la série de travaux que le Comité, soucieux de participer à la réflexion sur les leçons à tirer des récentes crises, a consacrés à la réglementation des agences de notation de crédit (1). Le Comité a salué il y a peu les efforts déployés par la Commission sous la forme de la présentation de nouveaux instruments législatifs pour remédier aux graves insuffisances observées sur le plan de la transparence, de l'indépendance, des conflits d'intérêts, ainsi que de la qualité des notations et des méthodes employées dans ce domaine (2). Il s'est cependant dit déçu que le manque de réglementation dans les agences de notation suscite une réaction aussi tardive et aussi peu cohérente.

1.2   La proposition de directive modifie sur le plan formel la directive OPCVM (organismes de placement collectif en valeurs mobilières) ainsi que la directive sur les gestionnaires de fonds d’investissement alternatifs (FIA). Le cœur du dispositif réglementaire réside dans des modifications concernant la gestion des risques, lesquelles doivent limiter, voire empêcher, le recours systématique, mécanique, sans vérification préalable, à des notations de crédit externes. Ces règles vont de pair avec une modification du règlement sur les agences de notation de crédit (règlement ANC) à propos de laquelle le Comité a déjà élaboré un avis (3). Les deux propositions législatives sont étroitement liées sur le plan de leur contenu.

1.3   Le Comité se félicite de ce que, grâce à cette proposition, le problème posé par le recours excessif aux notations de crédit pour les OPCVM et les AIF trouve enfin un angle d'attaque et salue la tentative d'empêcher le grégarisme auquel les opérateurs financiers se laissent aller lorsque les notations sont insatisfaisantes. Il faut que ces efforts englobent à la fois le droit de l'Union dans son intégralité, les législations nationales et les contrats de droit privé.

1.4   Le Comité considère que l'approche réglementaire choisie est la bonne, laquelle met en place des dispositions spécifiques pour la gestion des risque des OPCVM et des FIA. Toutefois, il met l'accent sur les problèmes que les petits établissements financiers pourraient rencontrer lorsqu'il s'agira de développer des capacités propres à des fins d'analyse de risque. Il propose dès lors que soient ménagées dans les actes délégués des dispositions réglementant la question de la coopération grâce à laquelle développer une expertise externe visant à renforcer l'indépendance des petits établissements financiers vis-à-vis des agences de notation externes. Le Comité s'oppose résolument à la formulation d'exigences qui permettraient aux petites et moyennes entreprises d'externaliser la décision à rendre quant à la qualité de crédit d'un engagement.

1.5   Le Comité estime nécessaire que davantage soit fait pour développer des procédures et des critères/évaluations de référence dans les processus de gestion des risques, auxquels il serait possible de se référer au lieu de recourir aux notations.

1.6   Le Comité insiste sur la nécessité d'opter pour une progression commune à l'échelle du G-20. Il ne sera remédié au déficit de réglementation au niveau mondial que si les différents ordres juridiques nationaux se sont un tant soit peu coordonnés.

1.7   Le Comité réitère le scepticisme dont il a fait état en détail dans son avis du 12.3.2012 (4), à savoir que ni les notations effectuées par les acteurs des marchés financiers du risque qu'ils encourent, ni le recours moindre aux notations des agences externes, ne garantissent l'objectivité des décisions que prennent ces acteurs des marchés financiers, non plus qu'une prise en compte de tous les aspects révélés par cette évaluation. De plus, selon lui, l'un des principaux problèmes de l'évaluation des risques réside dans la crédibilité (et l'indépendance) des notations émises par les agences de notation de crédit, lesquelles, ces dernières années, se sont révélées inexactes à maintes reprises, quand elles ne trahissaient pas trop fortement les structures et le mode de pensée de leur marché d'origine extra-européen ou n'étaient pas trop fortement modelées par les intérêts de celui-ci ou ceux des émetteurs à l'origine de la demande d'évaluation. Dans ces circonstances, le Comité exhorte les intéressés à ne jamais perdre de vue, lorsqu'ils discuteront de la régulation des agences de notation de crédit, que ces dernières ont immanquablement, dans un passé récent, nuit à la société entière, et que nous en paierons longtemps encore les conséquences. Le Comité ne peut dès lors que déplorer que l'agence européenne de notation, structure indépendante à la création de laquelle les institutions s'emploient, n'ait toujours pas vu le jour.

2.   Résumé et contexte

2.1   La proposition s'inscrit dans le train de mesures qu'il s'agit de prendre, dans le domaine de la surveillance des agences de notation de crédit, pour répondre à la crise bancaire initiale, laquelle s'est mue en une crise financière avant de prendre la forme d'une crise de la dette souveraine. Depuis le 7 décembre 2010, date de l'entrée en vigueur du règlement ANC, les agences de notation sont tenues de respecter certaines règles relatives à leur fonctionnement, lesquelles participent de la prévention des conflits d'intérêts et doivent garantir la qualité des notations et des processus de notation et un certain niveau de transparence à cet égard. Le 11 mai 2011, le règlement ANC a été modifié en cela que l'Autorité européenne des marchés financiers (AEMF) s'est vu confier l'exclusivité des pouvoirs de surveillance des agences de notation enregistrées dans l'Union européenne (5).

2.2   Le règlement ANC, même dans sa version modifiée de mai 2011, ne permet toutefois pas de résoudre un problème qui a participé du déclenchement des crises, à savoir le risque que les opérateurs financiers, parmi lesquels notamment les organismes de placement collectif en valeurs mobilières (OPCVM) et les gestionnaires des fonds d'investissement alternatifs ne s'en remettent excessivement, et de façon «mécanique», aux notes attribuées en externe pour faire fonctionner leurs systèmes de gestion des risques et renoncent dans le même temps à évaluer les risques en interne et à remplir leur devoir de diligence. Ce sont là les dérives auxquelles on assiste lorsque les acteurs des marchés financiers pensent coûts et simplification. Pour le commun des mortels, le danger réside en revanche dans le risque de voir les opérateurs financiers se comporter en «moutons de Panurge» (6). En cas d'abaissement de la note en dessous de la catégorie «investissement», cette tendance mécanique, inspirée par des notations toutes identiques, peut conduire à ce que les opérateurs revendent tous simultanément les instruments de créance incriminés, compromettant ainsi la stabilité financière. La procyclicité et les variations brutales (les «effets de falaise» déclenchés par l'abaissement, au-dessous d'un certain seuil, de la note de solvabilité d'un titre, lequel provoque la vente en cascade d'autres titres) sont d'autres phénomènes décrivant ce risque. Les mises en garde quant à l'urgence qu'il y a à réduire ces risques n'ont pourtant pas manqué (7).

2.3   La proposition à l'examen s'attaque au problème du recours excessif aux notations, de la part des acteurs des marchés, pour les OPCVM et les FIA. La résolution de ce même problème s'agissant des établissements de crédit, des compagnies d'assurance et des entreprises d'investissement appartenant à un conglomérat financier fait l'objet d'autres propositions (8). Les articles 1 et 2 affûtent les dispositions relatives à la gestion du risque pour les OPCVM et les FIA en cela qu'ils prévoient que les sociétés concernées ne sont plus autorisées à se fier exclusivement ou mécaniquement aux notations de crédit externes. Les règles existantes en matière de surveillance s'en trouvent complétées, lesquelles prévoyaient jusqu'alors que les acteurs des marchés financiers sont tenus d'utiliser des systèmes de gestion des risques leur permettant de contrôler et de mesurer à tout moment le risque associé aux positions et la contribution de celles-ci au profil de risque général du portefeuille. Parallèlement, La Commission se voit dotée d'une compétence élargie lui permettant de définir, par l'adoption d'actes délégués, les critères selon lesquels apprécier l'adéquation des systèmes de gestion des risques, de manière aussi à éviter tout recours excessif aux notations de crédit externes.

2.4   La proposition à l'examen doit être considérée à la lumière du texte présenté le même jour, à savoir la «proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (CE) no 1060/2009 sur les agences de notation de crédit» (9). D'autres propositions, entre autres questions traitées, y sont faites, lesquelles sont destinées à empêcher que les opérateurs financiers ne se fient excessivement aux notations de crédit, en obligeant les agences de notation à mettre à la disposition des premiers des informations exhaustives. On entend par là des informations sur les méthodes de notation, les hypothèses qui les sous-tendent et sur les différents types de notation. Les émetteurs d'instruments financiers structurés seront quant à eux tenus de divulguer davantage d'informations sur leurs produits (qualité du crédit, performances des actifs sous-jacents, structure de l’opération de titrisation, flux de trésorerie, etc.). Si l'on envisage en bloc l'ensemble de ces propositions, alors la révision du règlement ANC doit pouvoir rendre la tâche des OPCVM et des FIA plus aisée au moment d'évaluer en interne la qualité de crédit des instruments Dès lors, ce serait une erreur que de considérer isolément l'une et l'autre proposition.

3.   Observations générales

3.1   La proposition de la Commission ne porte que sur un seul aspect des défaillances de réglementation dans le secteur des agences de notation de crédit, à savoir les répercussions des notations sur l'activité des acteurs des marchés financiers et les conséquences de cette activité sur les marchés eux-mêmes. La proposition à l'examen est le fruit de l'analyse des causes à l'origine des récentes crises. Les agences de notation de crédit y ont leur part de responsabilité. Elles se prononcent sur la solvabilité et la volonté de respecter ses engagements financiers d'un créancier, qu'il s'agisse de créanciers privés ou d'États. Elles exercent une influence notable sur les marchés financiers mondiaux, car de nombreux opérateurs financiers (OPCVM, FIA, établissements de crédits et assurances) se réfèrent aux notations pour déterminer leurs choix d'investissements. Ces dernières années, le Comité s'est à maintes reprises saisi de la question des défaillances réglementaires concernant les agences de notation de crédit – son avis du 12.3.2012 (10) en est l'illustration la plus récente – et a émis des positions sans équivoque à cet égard, lesquelles sous-tendent le présent avis et auxquelles il est fait référence.

3.2   Les crises récentes ont, pour qui ne l'avait pas déjà compris, fait clairement apparaître que les évaluations erronées contenues dans les notations de crédit peuvent avoir des effets extrêmement néfastes sur de larges pans de l'économie, voire causer du tort à des États entiers et à la société dans son ensemble. Elles ont par ailleurs également montré que les marchés n'étaient pas en mesure d'empêcher les dérives. Dès lors, il est nécessaire que les États soumettent les agences de notation de crédit à une réglementation stricte et cohérente. Cela étant dit, il faut que la réglementation envisagée à l'échelle européenne soit soutenue dans le contexte global de ce qui se joue au niveau du G-20 afin de garantir un minimum de cohérence des règles appliquées à l'échelle mondiale. Il est absolument indispensable que les activités de notation de crédit s'exercent conformément aux principes d'intégrité, de transparence, de responsabilité et de bonne gouvernance, lesquels doivent être garantis et respectés (11).

3.3   Le Comité confirme que ces dernières années, quoique fort tardivement, la réglementation des agences de notation de crédit a progressé sur des points qui ne sont pas des moindres. Si, grâce à la proposition de modification du règlement ANC du 15 novembre 2011 (12), seront désormais abordés les volets problématiques que continuent de constituer les «perspectives de notation», «l'indépendance des agences de notation de crédit», «la publication d'informations», “les notations souveraines, «la comparabilité des notations de crédit», «la rotation imposant un changement régulier d'agence de notation», «la responsabilité civile» et «le recours à des notations externes», alors on ne peut que s'en féliciter. Le Comité s'est déjà prononcé à ce sujet et a émis des observations concrètes (13). Il est toutefois décevant que les questions de la position dominante occupée [sur les marchés] par les grandes agences de notation et du recours à d'autres modèles de paiement n'aient été qu'effleurées.

3.4   Dans la proposition à l'examen, la Commission se saisit désormais – à titre complémentaire – du problème que pose le recours mécanique et irréfléchi à des notations de crédit externes y compris au niveau des OPCVM et des FIA, ce qui peut amener, pour reprendre le libellé de la proposition, les acteurs financiers à se comporter de manière grégaire, ou révéler le caractère performatif de ces notations (cf. en anglais: «self-fulfilling prophecy»), comme le Comité l'a décrit dans un précédent avis (14). Sur ce point, la proposition à l'examen recoupe les modifications proposées le même jour dans le cadre de la révision du règlement ANC. Cette «double approche» fait sens. En ce qui concerne les acteurs des marchés, à qui s'adressent les notations de crédit externes, il y a lieu d'enrayer, ou à défaut de restreindre, leurs «automatismes», tandis qu'il faudra qu'à l'issue du processus de réglementation, les agences de notation de crédit respectent les critères de transparence et mettent à la disposition des premiers les informations pertinentes.

3.5   On ne saurait méconnaître que les OPCVM et les FIA ont aussi leur part à jouer pour empêcher les «comportements grégaires» et les «effets en cascade». En effet, tant que leurs systèmes de gestion des risques tolèrent de tels effets, ils constituent une partie du problème. Le CESE partage complètement les conclusions de la Commission sur ce point. Dès lors, quand sera venu le moment de mettre en œuvre la proposition à l'examen, il s'agira surtout de veiller à ce que les actes délégués reflètent fidèlement la volonté du législateur. En outre, dans le domaine de la régulation financière, une réglementation ne vaut que ce que vaut la manière dont elle est répercutée en bout de chaîne au niveau des pratiques de surveillance.

4.   Observations particulières

4.1   Il est indiscutable que la confiance mécanique, automatique et aveugle accordée aux notations de crédit externe provoque la revente simultanée des titres concernés, ou est susceptible d'y conduire, ce qui peut provoquer, sur les marchés, des chocs de nature à compromettre la stabilité financière. C'est également ce à quoi concluent la large consultation menée par la Commission auprès des parties prenantes (15), la résolution non législative du Parlement européen du 8 juin 2011 (16) et les principes publiés par le Conseil de stabilité financière (17).

4.2   Pour casser un tel automatisme, une série de mesures sont nécessaires. Il s'agit en premier lieu de veiller à ne négliger aucune possibilité et à les exploiter toutes, et de faire en sorte que les acteurs aient le choix entre les notations émises par les grandes agences de notation et d'autres mesures de la qualité de crédit. Il s'agit en même temps de contrôler les règles prudentielles existantes provoquant, en vertu d'une disposition légale ou sur décision administrative, un automatisme entre une notation externe et une évaluation, comme c'est le cas aussi des établissements de crédit et des assurances. Ces mêmes mesures doivent également permettre d'enrayer les automatismes qui parasitent les systèmes de gestion des risques mis en place par les acteurs financiers. Il est en principe nécessaire, d'un point de vue global, de veiller à ce que ne subsiste, tant dans le droit de l'Union que dans les législations nationales, aucune disposition de nature à déclencher les automatismes décrits plus haut. De même, il faut faire en sorte, sur le plan réglementaire, que les contrats privés prévoyant un tel automatisme soient également invalidés. De plus, les acteurs financiers ont besoin d'être suffisamment informés pour élaborer plus aisément leurs propres évaluations.

4.3   La proposition de la Commission fournit, en guise d'orientation générale, les précisions nécessaires quant à la forme que devront adopter les systèmes de gestion des risques des OPCVM et des FIA. Cette approche est, fondamentalement, la bonne. Néanmoins, il faudra attendre les actes délégués pour la voir prendre vie, si bien que l'essentiel du travail à mener pour juguler les dysfonctionnements auxquels conduit le recours systématique aux notations externes est encore devant nous.

4.4   En pratique, il est vain de penser pouvoir revenir complètement sur les notations de crédit externes. Il faudrait pour cela que l'expérience, l'expertise ainsi que les capacités qui se substitueraient aux notations externes soient largement partagées, ce qui est loin d'être le cas aujourd'hui. À commencer par les petits établissements financiers qui ne disposent pas toujours des moyens nécessaires pour mettre sur pied ou développer des unités d'analyse. Le Comité insiste pour qu'au-delà de la possibilité d'une évaluation renforcée du risque en interne, laquelle créerait une plus grande indépendance vis-à-vis des agences de notation externes, soient ménagées à l'attention des petites et moyennes entreprises des possibilités d'externaliser l'analyse des risques. En effet, il ne fait pas de doute que pour des marchés spécifiques, faciliter l'accès aux informations externes permettra, sur la base de la coopération, de développer une expertise et d'obtenir ainsi un meilleur rapport coût-efficacité. Cela permettrait justement aux petites et moyennes entreprises de s'émanciper elles aussi des agences de notation de crédit. Toute mesure allant dans ce sens mérite un accueil favorable. Pour autant, le Comité affirme avec force que la décision d'évaluation de la qualité de crédit d'un engagement en tant que telle appartient à l'entreprise, et à elle seule, et ne saurait être externalisée.

4.5   De l'avis du CESE, l'application de la proposition, qui prévoit le développement des systèmes de gestion de risque ainsi que le développement et le renforcement de modèles internes, risque d'être en partie responsable d'une augmentation considérable du coût de la régulation. Eu égard néanmoins aux préjudices menaçant de frapper la société dans son ensemble, il n'y a guère d'autre issue que celle-là.

Bruxelles, le 23 mai 2012.

Le président du Comité économique et social européen

Staffan NILSSON


(1)  Voir notamment JO C 277 du 17.1.2009, p. 117 et JO C 54 du 19.2.2011, p. 37.

(2)  JO C 181 du 21.6.2012, p. 68 sur la «Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (CE) no 1060/2009 sur les agences de notation de crédit» COM(2011) 747 final – 2011/0361(COD).

(3)  Cf. note de bas de page no 2.

(4)  Cf. note de bas de page no 2.

(5)  JO L 145 du 31.5.2011, p. 30.

(6)  Cf. Le Cycle financier, Facteurs amplificateurs et réponses envisageables par les autorités monétaires et financières, Banque de France, Bulletin no 95, novembre 2001, p. 68.

(7)  COM(2010) 301 final; document de consultation de la Commission relatif à la révision du règlement ANC: http://ec.europa.eu/internal_market/consultations/2010/cra_en.htm.; conclusions du Conseil du 23 octobre 2011; principes du Conseil de stabilité financière d'octobre 2010pour réduire l'importance accordée par les autorités et les établissements financiers aux notations établies par les agences de notation.

(8)  COM (2011) 453 final.

(9)  COM(2011) 747 final – 2011/0361(COD).

(10)  Cf. note de bas de page no 2.

(11)  Voir note 2, paragraphe 1.2 du texte cité.

(12)  COM(2011) 747 final – 2011/0361(COD).

(13)  Cf. note de bas de page no 2.

(14)  Voir note 2, paragraphe 1,7 du texte cité.

(15)  Cf. note de bas de page no 6.

(16)  Résolution du Parlement européen du 8 juin 2011 sur les perspectives d'avenir des agences de notation (2010/2302 (INI)).

(17)  Cf. note de bas de page no 6.


31.7.2012   

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Journal officiel de l'Union européenne

C 229/68


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil établissant le code des douanes de l'Union»

COM(2012) 64 final — 2012/0027 (COD)

2012/C 229/13

Rapporteur: M. PEZZINI

Le 7 mars 2012 et le 13 mars 2012, le Conseil et le Parlement ont respectivement décidé, conformément aux articles 33, 114 et 207 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la:

«Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil établissant le code des douanes de l'Union (Refonte)»

COM(2012) 64 final — 2012/0027 (COD).

La section spécialisée «Marché unique, production et consommation», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 8 mai 2012.

Lors de sa 481e session plénière des 23 et 24 mai 2012 (séance du 23 mai 2012), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 135 voix pour, 3 voix contre et 3abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1   Le Comité considère qu'une union douanière efficace est une condition sine qua non du processus d'intégration européenne pour garantir une libre circulation des marchandises efficiente, sûre et transparente, à même d'offrir une protection maximale des consommateurs et de l'environnement et de lutter contre la fraude et la contrefaçon de manière efficace et homogène sur l'ensemble du territoire de l'Union.

1.2   Le Comité demande dès lors que l'on suive une politique douanière unique fondée sur des procédures uniformes, modernisées, transparentes, efficaces et simplifiées, qui soit en mesure de contribuer à la compétitivité économique de l'UE au niveau mondial et d'assurer la protection de la propriété intellectuelle, ainsi que de garantir les droits et la sécurité des entreprises et des consommateurs européens.

1.3   Dans cette perspective, le Comité accueille favorablement l'adoption, par la Commission européenne, de la proposition de règlement qui constitue une refonte du règlement (CE) no 450/2008 du 23 avril 2008, et espère que celle-ci fera l'objet de délais sûrs, d'interprétations uniformes, d'actions d'information et de formation déterminées ainsi que de ressources financières nationales et européennes adéquates.

1.4   Le CESE souscrit bien entendu à l'alignement des dispositions du code sur le traité de Lisbonne en ce qui concerne la délégation de pouvoirs et l'attribution de compétences d'exécution, et ce dans le respect d'un juste équilibre entre le Parlement et le Conseil, ces deux institutions étant placées sur un pied d'égalité en ce qui concerne les actes délégués.

1.5   Le Comité juge par ailleurs nécessaire et important d'introduire des mesures de modernisation, telles que la simplification de la législation douanière et l'achèvement de l'informatisation interopérationnelle des services douaniers en vue d'assouplir les pratiques commerciales et de renforcer la coordination des activités de prévention et de répression.

1.6   Le CESE est préoccupé par le fait que la législation douanière de l'Union puisse faire l'objet d'interprétations divergentes au niveau national, ce qui représenterait une charge administrative considérable pour les entreprises, en particulier celles de petite taille, et aurait une incidence négative sur la compétitivité européenne.

1.7   À cet égard, le CESE appuie fermement le processus de dédouanement centralisé au moyen de systèmes électroniques appropriés, l'utilisation systématique de méthodes de travail standardisées, la modélisation des processus d'activité, la diffusion de toutes les initiatives relatives aux douanes électroniques et la création, à titre expérimental, d'une task force européenne d'intervention rapide en appui aux processus innovants.

1.8   Le Comité reconnaît que le report de l'application du code est pertinente pour avoir le temps de développer des systèmes électroniques harmonisés et améliorer les procédures douanières aux frontières extérieures de l'Union européenne, mais surtout pour pouvoir informer et former de manière adéquate les personnels et favoriser ainsi le commerce international et la circulation rapide des personnes et des marchandises.

1.9   De l'avis du CESE, une coopération plus étroite s'impose entre les administrations douanières, les autorités de surveillance du marché, les services de la Commission et les agences européennes, afin de mieux contrôler la qualité des biens qui franchissent les frontières.

1.10   Le Comité souligne qu'il importe d'améliorer la qualité de la prestation de services aux opérateurs économiques et aux autres entités, et invite la Commission à encourager, au moyen d'avantages tangibles et de procédures simplifiées, les opérateurs à solliciter le statut d'opérateur économique autorisé.

1.11   Le Comité insiste sur la nécessité de fournir des informations adéquates et de dispenser une formation conjointe aux fonctionnaires des douanes, opérateurs économiques et expéditeurs en douane, afin de garantir une application et une interprétation uniforme des dispositions et une protection accrue des consommateurs, notamment grâce à la création, en étroite collaboration avec des universités et des centres de recherches de toute l'UE, de chaires Jean Monnet en matière de droit des douanes européen.

1.12   Le Comité est convaincu de la nécessité de valoriser les capacités et les aptitudes des différents États membres, dans le but ultime de créer une haute école de formation douanière européenne, à même de promouvoir l'excellence de la profession et de réaliser, à terme, une douane européenne unique.

2.   Le contexte actuel

2.1   Les douanes ont un rôle essentiel à jouer pour ce qui est de garantir la sécurité et la sûreté, de protéger les consommateurs et l'environnement, d'assurer une perception intégrale des recettes, de renforcer la lutte contre la fraude et la corruption, et de garantir le respect des droits de propriété intellectuelle. L'importation dans l'Union de marchandises de contrefaçon entraîne une perte de revenus et viole les droits de propriété intellectuelle, mais peut aussi poser des risques graves en termes de sécurité et de santé des consommateurs européens.

2.2   Le code des douanes communautaire de 1992, qui est toujours d'application, est mis en oeuvre au moyen de procédures qui prévoient souvent l'utilisation d'un support papier, alors que le dédouanement électronique au moyen de systèmes nationaux informatisés existe depuis un certain temps déjà, même si aucune norme européenne ne rend son utilisation obligatoire.

2.3   Le rôle des douanes s'est entre-temps élargi, à la suite de l'intensification des flux commerciaux et pour d'autres raisons liées à la sécurité des produits et aux nouvelles technologies informatiques, qui ont rendu le marché intérieur plus compétitif notamment grâce aux modifications apportées par le traité de Lisbonne.

2.4   Le code des douanes modernisé (CDM) (1) a été adopté en 2008 pour faire face à l'accroissement des flux commerciaux, à la nouvelle gestion des risques, ainsi qu'à la protection et à la sécurité du commerce légitime, et pour créer un environnement informatique commun en matière de douanes et de commerce.

2.5   Le CDM est déjà entré en vigueur, mais il ne sera pleinement applicable que lorsque ses dispositions d'application seront entrées en vigueur, c'est-à-dire d'ici au 24 juin 2013. Pour des raisons d'ordre technique et pratique liées à la complexité des aspects juridiques, informatiques, techniques et opérationnels, ce délai ne pourra cependant pas être respecté.

2.6   Dans les avis qu'il a élaborés en la matière, le CESE a déjà eu l'occasion de signaler que «ces délais (…) ont été établis avec un certain optimisme» (2) et de faire observer que «l'absence de règlement d'application, dont la rédaction relève cependant de la compétence de la Commission, laisse pour l'heure place à certaines incertitudes concernant différentes règles» (3). Le CESE est toutefois toujours d'avis que «l'Union douanière, qui a été le fer de lance de l'intégration économique européenne, ne pourrait sans dommage aujourd'hui prendre du retard sur le monde du commerce international» (4).

2.7   S'agissant des ressources financières, le Comité confirme la position qu'il a exprimée dans son récent avis sur la proposition établissant un programme d'action pour la douane et la fiscalité dans l'Union européenne pour la période 2014-2020 (Fiscus)  (5). Cependant, comme le CESE l'a suggéré à plusieurs reprises (6), cette proposition ne devrait être que le début d'une coopération organisée entre toutes les agences, nationales ou européennes, qui participent à la lutte contre la fraude ou la criminalité financières: blanchiment d'argent, crime organisé, terrorisme, contrebande, etc.

2.8   Par ailleurs, dès lors que ces dernières années ont vu l'émergence de deux programmes, Douane 2013 et Fiscalis 2013, qui ont suivi des parcours différents pour aujourd'hui confluer en un programme unique dénommé FISCUS, le Comité estime qu'il convient de préserver«le principal aspect positif d'un tel programme» à savoir «l'importance accordée au facteur humain»:

«il convient de s'assurer que les administrations douanières et fiscales sont suffisamment équipées pour relever les défis auxquels elles seront confrontées au cours de la prochaine décennie;

les secteurs de la fiscalité et des douanes doivent disposer d'un système informatique moderne et efficace comprenant notamment des éléments tels que le code des douanes modernisé;

le Comité souhaiterait que l'impact sur les budgets de l'UE et des gouvernements des États membres fasse l'objet d'analyses plus approfondies» (7).

2.9   Afin de moderniser le secteur des douanes, il faut des ressources financières correspondant aux procédures et aux processus connexes aux activités douanières, en particulier à la création de systèmes électroniques et à la formation des ressources humaines intéressées.

2.10   Les objectifs stratégiques de la nouvelle proposition de règlement restent les mêmes que ceux du règlement (CE) no 450/2008 qui fait l'objet de la refonte, c'est à dire des objectifs cohérents avec les politiques existantes en matière d'échanges de marchandises qui entrent ou sortent de l'Union européenne. Le Comité a déjà eu l'occasion de se prononcer sur ces objectifs (8).

2.11   Le Parlement européen s'est exprimé dans sa résolution du 1er décembre 2011 sur la modernisation des services douaniers (9), rapport dans le cadre duquel il a traité des problèmes suivants: stratégies douanières, instruments permettant de garantir la compétitivité et la gestion du risque; guichet unique; harmonisation des systèmes de contrôle et de sanction; simplification des procédures; intérêts financiers; droits de propriété intellectuelle et coopération renforcée.

2.12   Pour sa part, la Commission elle-même, dans son rapport sur les progrès réalisés sur le plan de la stratégie pour l'avenir de l'union douanière (10), a souligné la nécessité:

d'adopter une approche stratégique plus large de la coopération avec les autres agences et les partenaires internationaux dans le domaine de la sécurité, de la santé et de l’environnement;

d'améliorer et d'actualiser la gouvernance, tant au niveau des structures que des méthodes de travail, notamment en évoluant vers une approche plus axée sur les entreprises pour les processus de l’union douanière;

de partager et de mettre en commun les aptitudes et les capacités entre les États membres et entre les États membres et la Commission dans un souci d’efficacité et d’uniformité et afin de réaliser des économies d’échelle dans le cadre du programme FISCUS;

de définir une base en vue de mesurer et évaluer les performances (les résultats et les produits) afin de garantir que l’union douanière réalise ses objectifs et de détecter les retards ou lacunes.

2.13   Pour sa part, le Conseil, dans sa résolution du 13 décembre 2011 (11), a décidé de définir une stratégie pour l'avenir de la coopération, afin de déterminer les mesures qu'il convient de prendre pour améliorer encore la coopération douanière ainsi que la coopération avec les autres services, pour renforcer le rôle de premier plan que jouent les services douaniers en tant qu'autorité de contrôle des mouvements de marchandises dans l'espace de liberté, de sécurité et de justice et pour protéger plus efficacement les citoyens de l'Union.

3.   Proposition de la Commission

3.1   La Commission propose de remplacer le règlement (CE) no 450/2008 (le code des douanes modernisé) par un règlement refondu qui permette entre autres:

d'aligner le texte sur le traité de Lisbonne,

de l’adapter aux aspects pratiques et à l’évolution de la législation en matière douanière et dans d’autres domaines politiques ayant un rapport avec les mouvements de marchandises entre l’UE et les pays tiers, et

de réserver suffisamment de temps pour permettre la conception des systèmes informatiques nécessaires à son fonctionnement.

3.2   La refonte du règlement (CE) no 450/2008 permet une meilleure adéquation de la législation avec les pratiques commerciales, au moyen d'une architecture et d'une planification optimales des développements informatiques, tout en intégrant tous les avantages du règlement objet de la proposition de refonte, à savoir la simplification des procédures administratives pour les autorités publiques (de l’UE ou nationales) et les entités du secteur privé.

4.   Observations générales

4.1   Le Comité accueille favorablement l'adoption par la Commission européenne de la proposition de règlement qui constitue une refonte du règlement (CE) no 450/2008 du Parlement européen et du Conseil du 23 avril 2008 établissant le code des douanes communautaire (modernisé).

4.2   Le Comité estime toutefois qu'il faut garantir:

des délais sûrs s'agissant des dispositions d'application, afin d'éviter de nouvelles refontes et de nouveaux reports;

des interprétations uniformes de la réglementation douanière de l'Union, qui doit servir de cadre administratif unique en vue de la réalisation d'une douane européenne unique;

des niveaux de contrôle identiques et un traitement uniforme des opérateurs en quelque point que ce soit du territoire douanier de l'UE, au moyen de mesures normalisées de contrôle, du perfectionnement du guichet unique et d'un accès plus aisé au statut d'opérateur économique agréé;

une information bénéficiant d'une vaste diffusion auprès de tous les opérateurs intéressés, afin de garantir une application homogène et uniforme des nouvelles réglementations et procédures informatisées, sur la base de normes communes assurant une pleine interopérabilité;

une formation de qualité des ressources humaines des douanes et des opérateurs, sur la base de plateformes et de normes européennes, afin d'accroître le niveau de professionnalisme et de responsabilité, assortie d'un suivi opportun, sur la base de paramètres de qualité européens;

des ressources financières nationales et communautaires adéquates, permettant la mise en œuvre de programmes ciblés comme FISCUS, des programmes communautaires de formation permanente, notamment en matière de préparation linguistique et de TIC, ainsi que des chaires Jean Monnet;

un partage et une mise en commun des capacités et des compétences entre les États membres et au niveau européen, afin de présider à la création d'une Haute école de formation douanière européenne, apte à promouvoir l'excellence dans le secteur des douanes.

4.3   Le Comité estime que ces points sont particulièrement pertinents s'agissant de la formation et des initiatives communes en matière de technologies de l'information, dans l'optique de garantir des niveaux élevés d'interopérabilité des systèmes douaniers et un corpus douanier européen uniforme de compétences et des normes de fonctionnement homogènes.

4.4   Les investissements notables déjà effectués pour la mise en œuvre des systèmes douaniers informatisés et interopérables n'ont pas encore comblé les différences existant au niveau de la réglementation et de l'utilisation des données: le calendrier figurant dans la proposition de la Commission doit être utilisé pour un effort d'harmonisation plus poussé et pour concrétiser un «corpus douanier européen» qui serve de base à l'objectif préconisé par le Comité, à savoir la création d'une douane unique européenne.

4.4.1   Afin de pourvoir à une application homogène du nouveau règlement, le CESE suggère que soit créée à titre expérimental une task force européenne d'intervention rapide susceptible d'apporter une contribution au travail qualifié et ardu des douanes, surtout aux frontières extérieures.

4.5   Le CES réitère ce qu'il a déjà exprimé précédemment, à savoir «que la gestion communautaire des douanes devrait figurer parmi les objectifs à long terme de l'Union: une gestion de ce type présenterait des avantages en termes de simplicité, de fiabilité et de coûts, ainsi que du point de vue de l'interopérabilité avec d'autres systèmes de l'UE et des pays tiers» (12).

4.6   Le Comité souligne l'importance de disposer de lignes directrices actualisées pour le contrôle des importations, sous l'angle de la sécurité des produits, ainsi que d'une banque de données publique sur les marchandises dangereuses interceptées aux douanes.

4.7   La Commission devrait tenir compte des observations que le CES a formulées dans son avis du 13 décembre 2007 sur le cadre juridique horizontal (13) quant à la nécessité d'améliorer la coordination et le renforcement des activités de surveillance du marché.

4.8   En ce qui concerne la protection juridique sur le marché de l'UE, les règles devraient s'orienter vers de nouveaux systèmes qui permettent de déterminer l'origine et de garantir la traçabilité des produits, afin d'améliorer l'information des consommateurs et de renforcer l'activité de prévention des irrégularités et des fraudes dans le secteur douanier.

Bruxelles, le 23 mai 2012.

Le président du Comité économique et social européen

Staffan NILSSON


(1)  Cf. JO L 145 du 4.6.2008, p. 1.

(2)  Cf. JO C 318 du 23.12.2006, p. 47.

(3)  Cf. JO C 309 du 16.12.2006, p. 22.

(4)  Cf. JO C 324 du 30.12.2006, p. 78.

(5)  Cf. avis JO C 143 du 22.05.2012, p. 48.

(6)  Cf. avis du CESE «La lutte contre la fraude dans le domaine de la taxe sur la valeur ajoutée», JO C 347 du 18.12.2010, p. 73; «Encourager la bonne gouvernance dans le domaine fiscal», JO C 255 du 22.9.2010, p. 61; «La fraude fiscale liée aux importations», JO C 277 du 17.11.2009, p. 112; «Recouvrement des créances relatives aux taxes, impôts, droits et autres mesures» et «Coopération administrative dans le domaine fiscal», JO C 317 du 23.12.2009, p. 120.

(7)  Cf. note 5, ibidem.

(8)  Cf. note 2.

(9)  Cf. résolution PE 1.12.2011 (2011/2083/INI).

(10)  Cf. COM(2011) 922 du 20 décembre 2011.

(11)  Cf. JO C 5 du 7.1.2012, p. 1.

(12)  JO C 318 du 13.09.2006, p. 47.

(13)  JO C 120 du 16.5.2008, p. 1.


31.7.2012   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 229/72


Avis du Comité économique et social européen sur le «Livre vert relatif au droit au regroupement familial des ressortissants de pays tiers résidant dans l'Union européenne (directive 2003/86/CE)»

COM(2011) 735 final

2012/C 229/14

Rapporteur: M. PÎRVULESCU

Le 15 novembre 2011, la Commission a décidé, conformément à l'article 304 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur le

«Livre vert relatif au droit au regroupement familial des ressortissants de pays tiers résidant dans l'Union européenne (directive 2003/86/CE)»

COM(2011) 735 final.

La section spécialisée «Emploi, affaires sociales, citoyenneté», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 18 avril 2012.

Lors de sa 481e session plénière des 23 et 24 mai 2012 (séance du 23 mai 2012), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 131 voix pour, 5 voix contre et 8 abstentions.

1.   Introduction

1.1   Tant le programme de Stockholm que le pacte européen sur l’immigration et l’asile ont vu dans le regroupement familial une question appelant un développement des politiques de l’Union, surtout en ce qui concerne les mesures d’intégration. En 2003 ont été approuvées des règles européennes communes en matière d'immigration, qui régissent les conditions d'exercice du droit au regroupement familial des ressortissants de pays tiers dans l'Union européenne.

1.2   La directive définit les conditions d'admission et de séjour pour les membres de la famille ressortissants de pays tiers qui rejoignent un ressortissant de pays tiers qui réside déjà légalement dans un État membre. Cette directive ne s'applique pas aux citoyens de l'Union européenne.

1.3   Dans son premier rapport sur l'application de la directive [COM(2008) 610 final], la Commission a relevé les défauts de la directive et les problèmes que pose son application au niveau national.

1.4   La Commission a estimé qu'il était nécessaire de lancer un débat public sur le regroupement familial, en mettant en exergue certaines questions liées à l'application de la directive. Tel est l'objectif du livre vert à l'examen. Toutes les parties intéressées ont été invitées à répondre à différentes questions concernant la manière de renforcer l'efficacité des règles sur le regroupement familial à l'échelle de l'Union européenne.

1.5   En fonction des résultats de cette consultation, la Commission décidera si un suivi politique concret est nécessaire (par exemple une modification de la directive, des lignes directrices interprétatives ou le statu quo).

2.   Observations générales

2.1   Le Comité économique et social européen juge positive l'initiative de la Commission européenne d'organiser une vaste consultation publique sur la directive relative au regroupement familial. En sa qualité de représentant de la société civile organisée, le CESE proposera son aide pour l'organisation de ces consultations et émettra un avis fondé sur l'expérience qu'il a engrangée.

2.2   Le Comité économique et social européen constate avec inquiétude que, dans le contexte politique, économique et social actuel, les débats sur les questions touchant à l'immigration sont très sensibles. La crise financière et économique a délité les liens de solidarité entre les individus et a entraîné une radicalisation du discours et de l'action politiques. Il convient de souligner que les perspectives démographiques et économiques européennes rendent nécessaire une ouverture vers les citoyens des pays tiers désireux de vivre dans l'UE. La société européenne doit rester ouverte, même s'il existe des fluctuations sur le marché du travail. Bien que nécessaire, le débat sur le regroupement familial, dans le cadre de la politique de l'immigration, est de nature à remettre en question les règles et pratiques existantes, lesquelles constituent pour beaucoup d'entre elles des étapes importantes pour la réalisation des objectifs de cette politique.

2.3   Le Comité économique et social européen est favorable à ce débat; qui plus est, il se mobilisera pour faire en sorte que la voix de la société civile organisée soit un facteur constructif pour avancer dans ce domaine. Quels que soient les défis d'ordre politique ou économique auxquels la société européenne est confrontée, il convient de préserver et de renforcer les fondements de la construction européenne, et en particulier le respect des droits fondamentaux.

2.4   Le CESE apprécie le fait que la Commission européenne soit ouverte à la société civile et au monde universitaire, qui se sont montrés à plusieurs reprises critiques sur le contenu et l'application de la directive. Il souligne à cet égard le rôle positif joué par le Forum européen sur l'intégration, qui facilite le dialogue structuré entre les institutions européennes et différents acteurs engagés dans la question de la migration et de l'intégration.

2.5   De l'avis du Comité, il est nécessaire que le débat consacré à la directive et à son impact soit orienté sur les modalités pratiques de la mise en œuvre et que l'on définisse, lors d'une phase ultérieure, en consultant à nouveau les acteurs intéressés, le mode d'intervention adopté ainsi que ses instruments.

2.6   Le débat sur la directive doit avoir lieu en tenant compte des nombreux traités et conventions internationales protégeant la vie privée ainsi que la famille et ses membres, en particulier les enfants. Le droit au respect de la vie privée et familiale constitue un droit fondamental et doit être considéré comme tel, quelle que soit la nationalité de la personne concernée. Il est consacré, directement ou indirectement, par différents documents: la Déclaration universelle des droits de l'homme (articles 12, 16 et 25), la Convention relative aux droits de l'enfant, la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales (article 7), la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne (articles 8, 9, 24 et 25) et la Charte sociale européenne (article 16).

2.7   Le Comité considère qu'il est nécessaire et opportun de procéder à un débat sur la directive, compte tenu de l'accumulation de données empiriques concernant le regroupement familial, mais aussi pour que la directive reste en phase avec les moyens technologiques qui peuvent être utilisés dans le courant des procédures d'octroi des titres de séjour (par exemple, les tests ADN). Il convient par ailleurs de prendre en considération la jurisprudence de la Cour européenne de justice.

2.8   Même s'il existe de nombreuses données pertinentes sur la migration, le Comité constate que pour des sujets très sensibles tels que les fraudes ou les mariages forcés, il n'existe pas de données suffisantes pour guider la conception des politiques. Aussi recommande-t-il de poursuivre les efforts de collecte des données, notamment qualitatives, dans des domaines aussi sensibles et significatifs.

3.   Observations particulières

3.1   Champ d'application. Qui peut être regroupant aux fins de la directive?

Question 1

Ces critères (une perspective fondée d'obtenir un droit de séjour permanent au moment de la demande, comme le prévoit l'article 3, et une période d'attente jusqu'à ce que le regroupement puisse réellement avoir lieu, comme le prévoit l'article 8) conviennent-ils et constituent-ils les meilleures conditions à remplir pour être regroupant?

3.1.1   Le Comité considère que ce critère de «perspective fondée» est par trop nébuleux sur le plan juridique et peut déboucher sur une interprétation restrictive. Par conséquent, il recommande de conserver la condition de détenir un titre de séjour valable d'une durée supérieure ou égale à un an, mais de supprimer l'autre condition, relative aux perspectives fondées.

3.1.2   De la même manière, la période d'attente minimale est susceptible de poser un problème. Le droit à la vie familiale et le droit à la vie privée sont des droits fondamentaux. Le CESE estime que la concrétisation de ce droit doit permettre au regroupant, au sens de la directive, de pouvoir entamer des procédures de regroupement familial dès le moment de l'obtention du titre de séjour, et que le critère de durée minimale du séjour légal doit être éliminé.

3.1.3   Le Comité comprend que l'on opère une distinction entre les immigrants hautement qualifiés et moins qualifiés, sur le plan du statut et de la protection dont ils bénéficient. Il attire toutefois l'attention sur le fait que l'économie européenne a besoin en une égale mesure de ces deux catégories, et qu'aucune différence ne peut être faite en matière de droits, qu'il s'agisse de la protection de la vie privée ou de la vie familiale, sur la base des qualifications.

3.2   Membres de la famille admissibles. Dispositions obligatoires – la famille nucléaire

Question 2

Est-il légitime d'avoir un âge minimal du conjoint différent de l'âge de la majorité dans un État membre?

Existe-il d'autres moyens de prévenir les mariages forcés dans le contexte du regroupement familial et, dans l'affirmative, lesquels?

Disposez-vous de preuves évidentes du problème des mariages forcés? Dans l'affirmative, quelle est l'ampleur du phénomène (statistiques) et est-il lié aux dispositions sur le regroupement familial (âge minimal différent de celui de la majorité)?

3.2.1   Le Comité estime que la réglementation concernant l'âge minimal du conjoint constitue un instrument qui est à la fois inefficace pour combattre les mariages forcés et de nature à contrevenir au droit fondamental à la vie familiale. Une possibilité en la matière serait de procéder, après un regroupement familial sur le territoire d'un État membre, à une évaluation de la nature du mariage, au moyen d'enquêtes et/ou d'entretiens. Afin d'augmenter les chances de déceler les mariages forcés, lesquels touchent de façon quasi exclusive les femmes, le CESE recommande de concevoir un système d'incitations pour les personnes reconnaissant qu'elles ont été forcées de se marier. Une solution possible, mais en aucun cas exclusive, serait d'octroyer un titre de séjour d'une durée minimale d'un an aux personnes concernées. Le Comité ne dispose pas de preuves manifestes concernant les mariages forcés et recommande que la Commission européenne et d'autres agences spécialisées s'associent pour obtenir des données pertinentes.

Question 3

Pensez-vous qu'il est judicieux de conserver des clauses de statu quo auxquelles les États membres n'ont pas recours, telles que celle sur les enfants âgés de plus de 15 ans?

3.2.2   Le Comité estime qu'il n'est pas nécessaire de conserver les deux clauses visées. La première clause, relative à des conditions d'intégration pour les enfants de plus de 12 ans, n'a été utilisée que par un seul État membre. De plus, il existe un risque que les conditions d'intégration nécessaires soient fixées de manière non uniforme et arbitraire, ce qui peut avoir un impact sur les droits des personnes se trouvant en situation vulnérable - par exemple les mineurs. La deuxième clause, qui concerne les mineurs de plus de 15 ans, est elle aussi susceptible de poser un problème. Aucun État membre n'a eu recours à cette restriction. Le fait d'exiger d'un mineur de justifier d'autres motifs que le regroupement familial pose un problème d'ordre éthique, si l'on considère que le regroupement se fait en vertu d'un droit établi par toutes les conventions internationales sur la protection de l'enfance.

3.3   Disposition facultative - autres membres de la famille

Question 4

Les dispositions relatives aux membres de la famille admissibles conviennent-elles et sont-elles assez vastes pour tenir compte des définitions de la famille autres que celle de la famille nucléaire?

3.3.1   Ces dispositions sont insuffisantes, car il n'existe pas de définition unique de la famille, applicable tant dans les pays tiers que dans les États membres de l'UE. Toutefois, si l'UE ne dispose pas de base juridique pour définir la famille, elle a des instruments pour prévenir la discrimination. Les règles relatives au regroupement familial devraient être suffisamment souples pour recouvrir les différents types de structures familiales reconnus au niveau national (y compris les unions entre personnes de même sexe, les familles monoparentales, les partenariats civils, etc.) et pour prendre en compte d'autres liens de parenté.

3.3.2   Dans la mesure où plus de la moitié des États membres ont utilisé la disposition facultative et ont inclus les parents du regroupant et/ou de son conjoint parmi les membres de la famille admissibles au regroupement, le CESE considère qu'il est utile de conserver cette clause facultative. Les États membres qui le souhaitent ont ainsi la possibilité d'inclure d'autres personnes dans le regroupement familial. Par exemple, il est possible d'inclure les beaux-parents, qui peuvent assumer un rôle bénéfique pour la formation affective et intellectuelle des petits enfants.

3.4   Conditions requises pour l'exercice du droit au regroupement familial - Mesures d'intégration

Question 5

Ces mesures servent-elles efficacement le but de l'intégration? Comment peut-on l'évaluer dans la pratique?

Quelles sont les mesures d'intégration les plus efficaces à cet égard?

Selon vous, ces mesures devraient-elles être davantage définies à l'échelle de l'Union européenne?

Recommanderiez-vous des mesures préalables à l'admission?

Dans l'affirmative, comment mettre en place des garanties afin de s'assurer qu'elles ne créent pas de facto des obstacles excessifs au regroupement familial (tels que des frais ou des exigences disproportionnés) et qu'elles tiennent compte des caractéristiques individuelles telles que l'âge, l'analphabétisme, le handicap et le niveau d'éducation?

3.4.1   Le Comité considère que les mesures d'intégration sont les bienvenues à condition qu'elles soient conçues ou appliquées non pas pour faire obstacle au regroupement familial, mais en faveur des regroupants et des membres de la famille dans laquelle ils vivent. Le CESE considère que les mesures d'intégration doivent être prises sur le territoire du pays d'accueil, membre de l'UE, et non sur le territoire du pays tiers.

3.4.2   L'Agenda pour l'intégration des ressortissants de pays tiers propose une «boîte à outils» (Integration Toolbox) qui peut être utilisée. Le CESE estime nécessaire, dans le cadre de cette palette d'outils, de mettre l'accent sur l'apprentissage linguistique, ainsi que sur l'enseignement de type formel et non formel. Le CESE a rappelé à de nombreuses reprises que l'éducation est une dimension clé de l'intégration. L'utilisation de ces outils doit être adaptée aux spécificités démographiques et socioéconomiques des membres de la famille. Il est recommandé de faire participer les enfants mineurs aux programmes d'enseignement formels et non formels, et de faire participer les adultes et les personnes âgées aux programmes d'apprentissage des langues et de qualification professionnelle, ainsi qu'à ceux d'intégration électronique («e-inclusion»). Ces mesures pourraient aider les membres de la famille à apporter une contribution à l'économie et la société du pays d'accueil, ainsi qu'à celles des pays d'origine.

3.4.3   Le CESE estime qu'il conviendrait d'éviter les mesures préalables à l'admission. Les membres de la famille regroupée sur le territoire de l'UE peuvent, idéalement, avoir des connaissances linguistiques et des bases culturelles ou éducatives propres à faciliter leur intégration, mais cela ne doit pas devenir une condition du regroupement, si celui-ci n'est pas encore opéré. Outre le problème des obstacles excessifs (par exemple, les frais), il est possible que les États membres de l'UE et les pays tiers ne disposent pas de l'infrastructure institutionnelle suffisante pour assumer ces mesures préalables. Le fait d'organiser les mesures d'intégration sur le territoire de l'État membre d'accueil peut assurer aux membres de la famille un niveau plus élevé de protection, un soutien plus important de la part des regroupants et une chance supérieure d'intégration. Il est possible que les ONG aient un rôle important dans l'intégration, mais le rôle principal doit rester aux mains des autorités publiques, qui disposent de la responsabilité juridique et des ressources nécessaires pour assurer l'intégration.

3.5   Période d'attente en ce qui concerne la capacité d'accueil

Question 6

Compte tenu de son application, est-il nécessaire et justifié de conserver dans la directive une telle dérogation prévoyant une période d'attente de trois ans à compter de la date de dépôt de la demande?

3.5.1   Dans la mesure où un seul État membre a eu recours à cette dérogation, le CESE estime qu'il n'est pas justifié de la conserver. De plus, la décision d'octroyer un titre de séjour doit prendre en considération les circonstances individuelles, et non la capacité d'accueil. La capacité d'accueil est variable et résulte d'une politique qui est susceptible de changer si nécessaire.

3.6   Entrée et séjour des membres de la famille

Question 7

Faudrait-il instaurer des dispositions particulières régissant la situation dans laquelle le titre de séjour du regroupant n'est plus valable que pendant moins d'un an mais est sur le point d'être renouvelé?

3.6.1   Les titres de séjour des regroupants et des membres de leur famille doivent avoir la même période de validité. Avant l'expiration de l'ensemble des titres de séjour et afin d'éviter des décalages temporels entre eux, il pourrait être envisagé de déposer une demande commune pour les membres de la famille.

3.7   Questions relatives à l'asile - Exclusion de la protection subsidiaire

Question 8

Le regroupement familial de ressortissants de pays tiers bénéficiaires de la protection subsidiaire devrait-il être soumis aux dispositions de la directive relative au regroupement familial?

Les bénéficiaires de la protection subsidiaire devraient-ils bénéficier des dispositions plus favorables de la directive relative au regroupement familial, qui dispense les réfugiés de certaines obligations (logement, assurance maladie, ressources stables et régulières)?

3.7.1   Le Comité estime que les bénéficiaires de la protection subsidiaire devraient bénéficier des dispositions plus favorables de la directive relative au regroupement familial, et par conséquent rentrer dans le champ d'application de la directive. Les bénéficiaires de la protection subsidiaire viennent de pays et de régions du monde reconnus dangereux pour leur sécurité et leur bien-être. Cela rend d'autant plus nécessaire d'avancer vers une uniformisation des deux statuts.

3.8   Autres questions relatives à l'asile

Question 9

Les États membres devraient-ils continuer d'avoir la possibilité de restreindre l'application des dispositions plus favorables de la directive aux réfugiés dont les liens familiaux sont antérieurs à leur entrée sur le territoire d'un État membre?

Le regroupement familial devrait-il être assuré pour d'autres catégories de membres de la famille qui dépendent des réfugiés, et si oui, dans quelle mesure?

Faut-il continuer à exiger des réfugiés qu'ils prouvent qu'ils remplissent les conditions concernant le logement, l'assurance maladie et les ressources si la demande de regroupement familial n'est pas introduite dans un délai de trois mois suivant l'octroi du statut de réfugié?

3.8.1   Le Comité estime que la définition de la famille ne doit pas comprendre de critère de durée. Certaines personnes fondent leur famille dans l'État membre d'accueil, et non dans le pays tiers d'origine. La famille doit pouvoir être regroupée indépendamment du moment et du lieu où elle a été fondée. Le regroupement familial devrait être étendu de sorte à prendre en compte des catégories de personnes plus diverses, notamment s'agissant des enfants ayant atteint l'âge de 18 ans ou des frères et sœurs, en prenant en considération les facteurs de risque liés au pays d'origine ainsi que les facteurs culturels. Deuxièmement, il faut supprimer le délai limité pour l'introduction de la demande de regroupement familial, ou étendre ce délai pour permettre aux regroupants potentiels de contacter les membres de leur famille qui peuvent se trouver dans des régions éloignées, et de préparer l'ensemble des documents nécessaires à leur demande. On peut envisager de fixer un délai en fonction de la date d'expiration du titre de séjour temporaire (par exemple, 6 mois).

3.9   Fraude, abus et problèmes de procédure - Entretiens et enquêtes

Question 10

Disposez-vous de preuves évidentes de problèmes de fraude? Quelle est l'ampleur du phénomène (statistiques)? Pensez-vous que des dispositions régissant les entretiens et les enquêtes, y compris les tests ADN, peuvent contribuer de manière significative à résoudre ces problèmes?

Serait-il, selon vous, utile de régir plus spécifiquement ces entretiens et enquêtes à l'échelle de l'Union européenne? Dans ce cas, quel type de règles envisageriez-vous?

3.9.1   Le CESE ne dispose pas de preuves manifestes concernant les problèmes de fraude. Il considère que les entretiens et enquêtes sont légitimes aussi longtemps qu'ils ne rendent pas inopérant le droit au regroupement familial.

Concernant les tests ADN, le CESE les désapprouve. Bien qu'il s'agisse d'un moyen scientifiquement valable de prouver les liens biologiques entre personnes, il ne prend pas en compte l'ensemble des relations émotionnelles, sociales et culturelles qui peuvent se créer entre les membres d'une même famille, sans qu'il y ait nécessairement de lien biologique. En cas d'adoption, les tests ADN sont inappropriés. De plus, les tests ADN peuvent révéler des situations familiales fort délicates (adoptions passées sous silence, infidélités). Ainsi, les tests ADN sont manifestement contraires au droit à la vie privée et sont susceptibles de faire naître des drames personnels dont une autorité publique ne saurait se rendre responsable. Le CESE estime par conséquent nécessaire de mettre en place des règles régissant les enquêtes et entretiens, embrassant tout l'éventail d'instruments existants, tant juridiques que technologiques. À cette fin, il pourrait être judicieux de faire participer l'Agence des droits fondamentaux. Le Comité se dit prêt à collaborer avec les institutions européennes ainsi qu'avec les autres institutions et organisations en vue de définir de telles règles. Il attire également l'attention sur le principe de proportionnalité. Le regroupement familial ne peut être traité comme un élément de droit pénal.

3.10   Mariages de complaisance

Question 11

Disposez-vous de preuves évidentes de problèmes de mariages de complaisance? Disposez-vous de statistiques sur de tels mariages (s'ils sont décelés)?

Sont-ils liés aux dispositions de la directive?

Les dispositions de la directive concernant les contrôles pourraient-elles être mises en œuvre de façon plus efficace et, dans l'affirmative, comment?

3.10.1   Le CESE ne dispose pas de preuves manifestes concernant les mariages de complaisance. Les futures réglementations sur les contrôles, les vérifications et les entretiens peuvent contribuer à limiter ce phénomène. Le CESE souligne que ces règles devront être définies en collaboration avec l'Agence européenne des droits fondamentaux de l'Union européenne, afin de garantir qu'elles ne contreviendront pas au respect des droits fondamentaux des personnes concernées.

3.11   Frais

Question 12

Conviendrait-il de régir les frais administratifs à verser lors de la procédure?

Dans l'affirmative, devrait-ce être sous la forme de garanties ou faudrait-il donner des indications plus précises?

3.11.1   Le CESE estime injustifié que les frais à verser ne soient pas uniformes. Il est par conséquent nécessaire de fixer un plafond pour ces frais, afin de ne pas porter atteinte à la substance de la directive. Le CESE estime que l'on pourrait envisager soit d'imposer un plafond unique et de faible montant, soit de déterminer l'ensemble des frais en fonction du revenu par habitant – ou d'un autre indicateur - du pays tiers La demande de regroupement étant une procédure individuelle, il pourrait être envisagé, plus profitablement, de fixer un plafond en fonction des revenus de chaque requérant (par exemple, un pourcentage du revenu annuel moyen). Quant aux mineurs, ils doivent payer des frais réduits, ou être exonérés de frais.

3.12   Durée de la procédure - délai pour la décision administrative

Question 13

Le délai administratif pour l'examen de la demande fixé par la directive est-il justifié?

3.12.1   Le CESE estime qu'il convient de modifier la directive afin d'harmoniser les pratiques et les rendre communes au niveau des États membres. Il recommande donc de réduire le délai de 9 à 6 mois.

3.13   Dispositions horizontales

Question 14

Comment faciliter et garantir l'application de ces dispositions horizontales dans la pratique?

3.13.1   Le CESE estime que le moyen le plus adapté d'appliquer les dispositions horizontales, s'agissant tant de l'intérêt supérieur de l'enfant mineur que de l'obligation qui est faite d'examiner chaque demande au cas par cas, moyen qui permettra aussi de résoudre d'autres aspects problématiques du regroupement familial, est de fixer des règles spécifiques et uniformes régissant tous les types d'examens, de contrôles et d'enquêtes possibles. Ces règles devront être proportionnées et respecter les droits humains fondamentaux.

Bruxelles, le 23 mai 2012.

Le président du Comité économique et social européen

Staffan NILSSON


31.7.2012   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 229/77


Avis du Comité économique et social européen sur la «Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — responsabilité sociale des entreprises: une nouvelle stratégie de l'UE pour la période 2011-2014»

COM(2011) 681 final

2012/C 229/15

Rapporteure: Mme Madi SHARMA

Corapporteur: M. Stuart ETHERINGTON

Le 25 octobre 2011, la Commission européenne a décidé, conformément à l'article 304 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la

«Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions. Responsabilité sociale des entreprises: une nouvelle stratégie de l'UE pour la période 2011-2014»

COM(2011) 681 final.

La section spécialisée «Emploi, affaires sociales, citoyenneté», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 18 avril 2012.

Lors de sa 481e session plénière des 23 et 24 mai 2012 (séance du 24 mai 2012), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 203 voix pour, 12 voix contre et 12 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1   Le CESE salue l'engagement de la Commission européenne de promouvoir l'adoption de pratiques responsables par les entreprises au moyen de l'éventail d'initiatives politiques qui sont présentées dans le paquet «Entreprises responsables» (1) proposé dans le cadre de la stratégie Europe 2020.

1.2   Le CESE note que la Commission européenne respecte la nature volontaire de la RSE (qui est différente de «sans engagement») et qu'elle souligne les progrès enregistrés en matière de sensibilisation des entreprises à la RSE, en reconnaissant l'importance de la flexibilité pour que celles-ci puissent innover.

1.3   Le CESE note que la nouvelle proposition étend la définition de la RSE au-delà du cadre existant. Elle laisse toutefois de nombreuses questions sans réponse. Ainsi, elle ne clarifie pas:

la signification du terme «entreprise» qui devrait inclure l'ensemble des parties prenantes, publiques ou relevant de la société civile, et à éviter tout malentendu;

les différentes approches culturelles de la RSE;

la différence entre la responsabilité «sociale» (qui ne concerne que le lieu de travail) et la responsabilité «sociétale» (les activités qui dépassent le cadre du lieu de travail);

sur quelles activités volontaires les entreprises seront tenues de faire rapport, étant entendu que toute activité de RSE est volontaire et excède les exigences de la loi;

les mesures spécifiques aux PME – la communication opte pour une approche uniforme;

la distinction entre la RSE et la gouvernance d'entreprise, alors qu'il est capital de préserver une séparation entre ces deux domaines.

1.4   Le plan d'action de la Commission reflète principalement l'ancienne définition (désormais abandonnée) de la RSE et se présente comme une simple continuation des activités de promotion menées ces dix dernières années. Compte tenu de la nouvelle définition de la RSE, le Comité s'attendait plutôt à des plans relevant de ce qui devrait être nouveau dans la «nouvelle stratégie»: afin d'encourager et d'aider les entreprises à se responsabiliser quant à l'impact de leur activité sur la société et à démontrer à leurs parties prenantes comment elles s'emploient à le faire. En l'absence de tels plans, le Comité ne peut pas dire grand chose de la «nouvelle stratégie» et prend seulement note de l'intention de la Commission de présenter une proposition de législation sur la transparence des informations d'ordre social et environnemental fournies par les entreprises dans tous les secteurs d'ici l'été de l'année en cours.

1.5   Le Comité soutient l'initiative de la révision de la directive 2003 (2) en proposant que les entreprises qui font de la RSE un axe de leur stratégie ou de leur communication produisent chaque année des informations sociales et environnementales selon des modalités répondant à une démarche de preuve et de transparence. Il s'agit de généraliser des pratiques devenues courantes à partir d'outils de mesure et d'évaluation reconnus au niveau international.

1.6   Le Comité rappelle qu'en aucun cas des pratiques de RSE ne peuvent viser à se substituer à une législation nationale ni vouloir réduire des dispositions d'accords conventionnels issus de la procédure de dialogue social. Pour y veiller, le Comité apprécie très positivement la proposition de création d'une base de données pour analyser et permettre le suivi des contenus des accords transnationaux négociés (ACI) qui participent à une régulation sociale et environnementale de la mondialisation.

1.7   La RSE constitue une activité volontaire de première importance en matière d'expérimentation du dialogue civil dans certaines entreprises, une activité qui permet une évaluation par les parties prenantes externes de la responsabilité de ces entreprises vis-à-vis des effets qu'elles exercent sur la société.

2.   Introduction

2.1   Le 25 octobre 2011, la Commission européenne a publié une nouvelle communication intitulée «Responsabilité sociale des entreprises: une nouvelle stratégie de l'UE pour la période 2011-2014» («RSE»). La stratégie expose un plan d'action qui prévoit des objectifs opérationnels à atteindre entre 2011 et 2014.

2.2   Pour réaliser l'objectif de renouvellement de la politique en matière de RSE, la communication prévoit:

de redéfinir la RSE,

de rebâtir la confiance des consommateurs et des citoyens dans les entreprises européennes,

de promouvoir la RSE au moyen d'avantages et de récompenses de marché,

d'améliorer le cadre réglementaire,

d'accorder davantage d'importance à la RSE dans le contexte de l'éducation, de la formation et de la recherche,

de rapprocher les conceptions européenne et mondiale de la RSE,

de promouvoir le dialogue social et la transparence, et

de créer une base de données des accords-cadres internationaux (ACI).

2.3   Selon la nouvelle définition élargie proposée, la RSE est «la responsabilité des entreprises vis-à-vis des effets qu'elles exercent sur la société». Cette définition envisage de nouveaux aspects que les entreprises devraient inclure dans leurs stratégies de RSE et met à jour la précédente définition, à savoir «un concept qui désigne l'intégration volontaire, par les entreprises, de préoccupations sociales et environnementales à leurs activités commerciales et leurs relations avec leurs parties prenantes».

2.4   La Commission à l'intention de continuer, pour développer son action, à s'appuyer sur des lignes et principes directeurs reconnus internationalement en coopérant avec les États membres, les pays partenaires et les enceintes internationales concernées et en amenant les entreprises à renforcer leur engagement envers ces cadres.

3.   Observations générales

3.1   La RSE est développée par les entreprises dans le cadre de leur stratégie commerciale et comme un instrument leur permettant de contribuer à relever les défis économiques, environnementaux et sociaux internes et externes. La RSE ne pourra concourir à la mise en œuvre de la stratégie Europe 2020 que si elle est développée par les entreprises dans le cadre d'un dialogue avec les diverses parties prenantes et si l'approche privilégiée est non réglementaire.

3.2   La RSE constitue une approche relevant du développement durable et les retombées bénéfiques des pratiques qui en découlent devraient promouvoir le rôle positif que les entreprises jouent dans la société, lequel dépasse les valeurs purement économiques. En tout état de cause, la RSE ne peut être utilisée pour remplacer des droits sociaux garantis par des instruments législatifs, nationaux ou internationaux, lesquels sont en premier lieu du ressort des États et des gouvernements.

3.3   Dans un contexte économique et politique difficile, l'initiative politique de la RSE offre une occasion de nouer un dialogue positif avec le monde de l'entreprise, pour peu que l'on comprenne que la RSE concerne les efforts fournis par les entreprises en vue de promouvoir les impacts positifs et de prévenir ou minimiser les répercussions négatives de leur activité sur la société, en menant des actions volontaires qui dépassent le cadre de leurs obligations légales. Le Comité réitère son avis de 2006 (3) selon lequel la RSE doit rester une activité volontaire (ce qui est différent de «sans engagement»). Le CESE est d'avis que le discours portant sur la RSE devrait être ajusté de manière constructive afin d'identifier les entreprises comme des parties prenantes de la communauté.

3.4   Dans le cadre de cette révision de la politique, il est important de reconnaître que tous les groupes de parties intéressées peinent dans le climat économique actuel. Les propositions d'action de la Commission devraient être complémentaires aux objectifs de stimulation de la croissance, une condition indispensable à la création d'emploi de qualité et de prospérité, tout en se concentrant sur la création de conditions favorables à des pratiques d'entreprise plus responsables.

3.5   Les diverses formes que prend actuellement l'engagement dans la RSE et les différentes motivations qui le sous-tendent influencent son impact sur la société. Les décideurs politiques devraient développer une meilleure compréhension des différentes raisons d'agir et de la manière dont elles dépendent de la taille, des capacités, des revenus, du secteur et des activités d'une entreprise. Cerner les différents outils et l'assistance correspondant aux besoins des divers secteurs contribuera à ce que la révision des cadres de la politique de RSE se fonde sur une meilleure information. Le Comité partage l'avis de la Commission selon lequel le respect de la législation applicable et des conventions collectives conclues entre les partenaires sociaux est une condition préalable pour que les entreprises assument leur responsabilité quant à l'impact de leur activité sur la société.

3.6   L'engagement dans la RSE s'est intensifié, à la faveur de l'attention accrue dont bénéficient les questions environnementales. Cette évolution a permis d'établir un équilibre entre les conditions de travail et les relations sociales d'une part et les questions environnementales de l'autre. Compte tenu de la crise actuelle, la Commission doit promouvoir le chapitre social de la RSE.

3.7   Le rôle et la présence du secteur de l'économie sociale, et notamment des ONG, sont négligés dans l'agenda de la RSE. Il conviendrait que la Commission reconnaisse la valeur et l'importance que le secteur revêt pour la participation à l'agenda de la RSE, tant de manière indépendante qu'en partenariat avec d'autres secteurs, et évalue les retombées indirectes des propositions sur le secteur de l'économie sociale s'agissant du développement de liens avec les entreprises.

3.8   Au regard des engagements soutenus par l'UE à la conférence de Rio + 20, le Comité souligne l'intérêt d'une campagne de sensibilisation à l'information extra-financière à travers la publication d'un rapport périodique de développement durable pas seulement par toutes les entreprises d'une certaine taille (plus ou moins 500 salariés) mais aussi les administrations publiques et les grandes organisations de la société civile. Une telle perspective conforterait l'intérêt de la recherche sur les indicateurs pour aller au-delà du PIB ou sur l'empreinte carbone ou sur le cycle de vie. En cohérence avec ses engagements à Rio, le Comité a déjà mis en pratique cette démarche en publiant ses résultats selon l'outil de diagnostic EMAS.

3.9   Dans un souci d'agir par étapes, le Comité encourage la Commission à consolider le cadre réglementaire européen d'évaluation et d'information sociale et environnementale prévu par la directive 2003 en cours de révision. Un tel cadre européen exigible de toute entreprise de grande taille faisant de la RSE un axe de sa stratégie ou de sa communication devra s'appuyer sur les outils de mesure reconnus au plan international et s'inspirer des législations nationales déjà existantes dans plusieurs pays européens.

3.10   Au travers de bonnes pratiques de plus en plus nombreuses incluant les accords négociés dans le cadre du dialogue social, la RSE illustre de façon concrète les apports complémentaires apportés par le dialogue civil pour l'étude et la résolution de problèmes sociétaux. L'apport du dialogue civil est crucial pour développer de bonnes pratiques de RSE afin de mettre en place une évaluation pertinente aux yeux des parties prenantes, qui requièrent une information de qualité sur la démarche engagée volontairement par des entreprises ou des investisseurs responsables.

3.11   La communication de la Commission européenne ne reconnaît pas la valeur des femmes dans les conseils d'administration et dans la RSE ni leur valeur ajoutée économique pour la communauté. Il est avéré que la présence de femmes dans les conseils d'administration et pour la RSE est corrélée à un type de direction qui tient compte de la dimension de genre et qui a un impact positif sur la RSE (4).

3.12   Les services de courtage maximisent le potentiel de croissance et la valeur sociétale de l'engagement dans la RSE en organisant stratégiquement l'adéquation entre les besoins et les compétences des diverses entreprises en vue de constituer des partenariats fructueux. Il y a lieu de promouvoir cette démarche en tant que meilleure pratique.

3.13   Il y a lieu de demander à l'Union européenne de promouvoir et de faire respecter des cadres internationaux contraignants en matière de RSE. Les entreprises devraient respecter ces instruments et s'en inspirer pour guider leurs activités liées à la RSE et montrer à leurs parties prenantes l'usage qu'il faut en faire.

4.   Observations particulières

4.1   Mise à jour de la définition de la RSE

4.1.1   La force de la nouvelle proposition réside dans sa définition actualisée de la RSE. Le CESE estime néanmoins qu'il est nécessaire que la Commission clarifie les acceptions de l'élément «entreprise» de cette définition afin d'éviter toute erreur d'interprétation. La Commission devrait également préciser quelles nouvelles politiques seront mises sen œuvre sur la base de la définition mise à jour, y compris l'initiative législative annoncée. De même, elle devrait apporter des précisions sur ses plans destinés à stimuler la RSE pour les différentes composantes du monde des entreprises, telles que les grandes sociétés, les PME et les entreprises de l'économie sociale.

4.1.2   Le CESE fait en outre remarquer que la Communication est incomplète en ce qu'elle ne cherche pas à évaluer les résultats des dix dernières années de stratégie en faveur de la RSE et notamment l'impact de cette stratégie sur le comportement des entreprises, afin de disposer d'une meilleure information dans le cadre des initiatives et des politiques proposées en vertu de cette stratégie.

4.1.3   La définition européenne proposée intègre la notion de responsabilité à celle de pratique volontaire. Cette nouvelle définition fait droit à la nature multidimensionnelle de la RSE, telle qu'exposée dans la communication (5). Néanmoins, l'UE devrait faire preuve de prudence dans sa tentative de créer une nouvelle norme qui pourrait entrer en conflit avec ISO 26000. L'agenda de la RSE doit être élaboré par les entreprises en concertation avec les différentes parties prenantes pour aider la stratégie Europe 2020 à générer une croissance intelligente et inclusive.

4.1.4   De plus en plus, des produits et services sont fournis par différentes organisations sous des formes qui s'apparentent à des services publics et se situent à cheval entre l'entreprise, le secteur public et celui de l'économie sociale. La définition proposée inclut ce volet des organisations non commerciales. Toutefois, il est nécessaire de mieux clarifier la définition et ses implications pour toutes les entreprises au sein desquelles la RSE devrait être mise en œuvre.

4.1.5   Les conséquences sociétales de la crise financière soulignent l'impact plus large des pratiques d'entreprise. Il est légitime que les entreprises soient tenues de répondre des retombées de leurs activités et d'inclure la RSE dans leur stratégie d'entreprise en vue d'encourager des pratiques plus responsables, tout particulièrement dans un contexte de crise et de concurrence exacerbée. Néanmoins, il conviendrait de recentrer la RSE, pour mettre l'accent sur l'interdépendance entre les entreprises et la société.

4.1.6   Le dialogue social et la transparence doivent être au cœur des liens intrinsèques entre le monde entrepreneurial et la société. À cet égard, les différentes tâches liées à la RSE sont nombreuses:

—   liens internes à l'organisation (au sein de l'entreprise)– il s'agit ici de coordonner les structures internes afin de rencontrer les obligations liées au bien-être et au développement des employés,

—   liens avec les parties prenantes extérieures– il y a lieu de collaborer avec les actionnaires, les clients et les autres partenaires, dont les pouvoirs publics et les communautés, pour préserver les intérêts de l'entreprise,

—   liens propres au cadre local– il s'agit à ce niveau d'évaluer les effets des pratiques d'entreprise sur les communautés locales environnantes et sur l'environnement et d'améliorer ces retombées.

Les entreprises devraient reconnaître ces liens et s'engager par anticipation active dans leur RSE en la considérant comme un objectif essentiel pour maximiser la valeur financière et sociale de leurs activités, en faveur de l'ensemble des parties prenantes. Donner un nouveau souffle aux réseaux locaux (6) dotera l'ensemble des parties prenantes de la société, y compris les pouvoirs publics, d'un canal pour s'engager et coopérer au bénéfice de toute la société.

4.1.7   L'approche adoptée par la Commission à l'égard des PME est loin d'être idéale. La manière dont la Commission parle des entreprises est déconnectée de la réalité de l'impact des PME sur l'agenda de la RSE à travers l'Union. L'on n'a en outre pas saisi l'occasion d'élaborer une politique globale prenant en compte les nouveaux modes de conduite des activités économiques tels que le commerce en ligne, et assurant une meilleure information des PME sur l'agenda de la RSE.

4.1.8   Les PME ont été négligées dans les propositions de l'agenda. La communication n'explique pas ce qu'elle entend par «entreprise» mais le langage employé suggère qu'elle se réfère aux grandes entreprises. Or, les PME sont, dans l'ensemble de l'UE, une pièce maîtresse pour les efforts visant à améliorer l'emploi et la croissance et l'accent placé sur la compétitivité, tels que prévus par le traité de Lisbonne. Une approche uniforme de la RSE pour tous les types d'entreprises n'est pas acceptable.

4.2   Promouvoir les retombées positives et les mesures d'incitation en faveur de l'engagement dans la RSE

4.2.1   Il est important de reconnaître les motivations économiques qui sous-tendent l'engagement dans la RSE. La communication abordent diverses retombées positives, qui devraient bénéficier d'une meilleure promotion, tout comme les exemples de meilleures pratiques, afin d'encourager les entreprises et de les amener à s'engager plus vigoureusement dans la RSE.

4.2.2   Cependant, les bénéfices économiques apportés par les activités de RSE ne devraient pas être surestimés. Les entreprises ont des départements de marketing et des ventes qui se consacrent à la publicité et la compréhension des besoins des consommateurs. La RSE est essentiellement une démarche de développement durable, intégrant croissance économique et préoccupations sociales et environnementales. La réduire à des résultats purement économiques pourrait entraîner des effets indésirables tels que son abandon si les résultats ne s'avèrent pas à la hauteur des espérances financières.

4.2.3   Le recours aux marchés publics comme mesure incitative de récompense sous forme de marché demande un examen soigné et une mise en œuvre appropriée. Les critères sociaux, y compris les clauses de l'OIT, doivent demeurer en lien avec l'objet du contrat, afin d'éviter que l'engagement pour la RSE soit purement symbolique et de garantir une valeur sociale bénéfique. Cette approche est également susceptible d'encourager à poursuivre des activités de RSE plus appropriées et efficaces dans les secteurs de l'industrie.

4.2.4   Il est essentiel de prévoir des clauses sociales dans le cadre de l'octroi des contrats avec la plus grande transparence. Ce point est capital pour garantir une passation de marchés de services appropriée et la conformité aux principes de concurrence loyale dans le marché unique. La direction générale Concurrence doit être consultée sur l'utilisation des marchés publics comme mesure d'incitation relevant du marché.

4.2.5   Les possibilités intéressantes que l'Initiative pour l’entrepreneuriat social, présentée comme un instrument d'action complémentaire et distinct dans le train de mesures «Entreprises responsables» de la Commission (7), peuvent offrir pour l'agenda de la RSE ont été négligées. Dans un contexte économique difficile, les entreprises sont moins enclines à consentir à des dépenses non recouvrables. Il est largement admis que les entreprises sociales ont recours aux capitaux privés pour une partie de leurs plans de financement (8). Ainsi, l'investissement social et la fourniture de services non financiers gratuits à de nouvelles entreprises sociales sont un moyen pour les entreprises de rentabiliser financièrement et socialement  (9) leurs investissements réalisés dans le cadre de la RSE. Il serait possible d'atteindre les objectifs de ces deux initiatives tout en maximisant le potentiel de croissance et la capacité de créer de la valeur sociale.

4.3   Comprendre les motivations et soutenir les activités de RSE

4.3.1   Actuellement, l'engagement dans la RSE prend de nombreuses formes et répond à des motivations diverses, qui influencent son impact sur la société. Cet engagement peut prendre la forme d'une protection défensive des intérêts des actionnaires mais aussi de dons aux œuvres caritatives, de mécénat, comme observé dans certains États membres, ou aller jusqu'à se traduire par des activités plus significatives, stratégiquement liées au métier de base ou source d'efforts générateurs de changement visant à repérer et traiter les racines profondes des problèmes sociaux (10). Le CESE attire l'attention sur le fait que de nouvelles règles pourraient s'avérer contre-productives. Des entreprises pourraient en effet, dans certains pays, mettre un terme à des activités pour lesquelles elles seraient tenues de faire rapport.

4.3.2   Les décideurs politiques doivent comprendre toute l'étendue de cet engagement afin de faciliter l'émergence d'un environnement favorable à de nouvelles initiatives de RSE, plus stratégiques et génératrices de changement. Les exigences ne devraient pas avoir pour effet de réduire cet engagement dans la RSE à une norme minimale et devraient demeurer des codes volontaires, extérieures et supérieures aux prescriptions légales.

4.3.3   Il y a lieu de concentrer les efforts en vue de stimuler l'information et l'engagement en matière de dialogue civil à tous les échelons de l'entreprise, de la direction aux travailleurs, afin de mettre en œuvre de meilleurs programmes de RSE et de favoriser l'émergence d'une culture d'organisation plus éthique. Il a été démontré que des groupes de pilotage créés à cette fin et composés de cadres supérieurs ont pu donner une orientation stratégique bénéfique et contribuer à la mise en œuvre des activités de RSE.

4.3.4   Il est en principe judicieux de s'en remettre à l'autorégulation et à la corégulation mais des mécanismes doivent être mis en place pour s'assurer que le respect des exigences ne devienne pas, sans qu'on le veuille, une charge pour les PME, à cause de clauses de contrats qu'elles auront conclus avec de grandes entreprises en qualité de sous-traitantes ou de maillons de la chaîne d'approvisionnement. La Commission, dans le cadre de sa proposition d'élaborer un code de bonnes pratiques, devra veiller à guider les PME désireuses de se lancer dans des activités de RSE sans perdre de vue ce qui fait la nature propre de l'autorégulation et de la corégulation.

4.4   L'engagement à l'égard du rôle des travailleurs dans l'agenda de la RSE

4.4.1   Sans engagement des travailleurs, la RSE restera lettre morte au sein de l'entreprise. Il conviendrait que le programme d'action en la matière soit défini en commun par la direction, les salariés et les partenaires sociaux, s'il y a lieu, afin de traduire l'éthique de l'organisation. La RSE va bien au-delà de la simple opération de développement de l'esprit d'équipe et la mobilisation du personnel constitue un facteur primordial pour le succès de cette stratégie.

4.4.2   Le rôle des partenaires sociaux est précieux dans tout programme de RSE, en ce qu'ils diffusent l'information et améliorent le dialogue social. Des plateformes visant à assurer les conventions collectives, la transparence, la communication et la participation – autant d'éléments de l'agenda de la RSE – devraient être créées dans les entreprises concernées.

4.4.3   Les droits de l'homme, les conditions de travail et les pratiques en matière d'emploi constituent des paramètres importants de la RSE, avec sa nature multidimensionnelle. Les entreprises devraient développer des activités allant au-delà des réglementations et lignes directrices internationales et européennes basées sur les huit conventions principales de l'OIT sur les droits de l'homme, d'une part, et concernant la santé, le bien-être et la formation des salariés d'autre part. Il convient que toutes prennent en compte la nécessité de structures de gouvernance interne qui soient éthiques, équitables et ne prévalent pas sur les conventions collectives.

4.5   Échange de connaissances

4.5.1   Mettre en place, entre les États membres, un examen par des pairs des politiques de RSE est essentiel (intention 9). Il y a lieu d'insister tout particulièrement sur l'assistance à apporter à tous les États membres dans l'élaboration et la mise à jour de leurs politiques nationales dans ce domaine, ainsi que sur les leçons à tirer des politiques nationales adoptées par le passé.

4.5.2   Tous les organismes publics de l'Union – instances nationales, régionales, locales, institutions européennes – doivent élaborer et suivre une stratégie de RSE, de manière à donner l'exemple aux autres secteurs. Il s'agira notamment de mettre en place des politiques internes de RSE solides, de lancer des activités et de piloter des modèles novateurs en la matière, de faciliter l'échange de bonnes pratiques et d'accompagner le développement de réseaux locaux pour assurer l'engagement de la communauté.

4.5.3   Les plates-formes plurilatérales dans certains domaines d'activité pourraient contribuer à la négociation dans le cadre de discussions sérieuses entre entreprises et parties prenantes concernant des pratiques d'entreprise et contribuer à ce que les différents secteurs puissent, procéder, en leur sein comme entre eux, à un échange utile de meilleures pratiques et d'expériences enrichissantes, dans le respect comme il se doit de l'autonomie des acteurs chargés de déterminer le champ d'intervention et les activités de la plate-forme. Il conviendrait cependant que les pratiques litigieuses puissent également être sanctionnées par les tribunaux.

4.5.4   Il convient de s'assurer de la participation des PME aux plates-formes des parties prenantes. Par le passé, ce genre d'exercice a surtout été dominé par les grandes entreprises. Toutes les entreprises doivent pouvoir y prendre part afin que des secteurs entiers et les principaux domaines de préoccupation y soient désormais mieux représentés.

4.5.5   Le CESE soutient l'intention d'accorder un soutien financier aux projets d'enseignement et de formation portant sur la RSE et de sensibiliser davantage les professionnels de l’éducation et les entreprises à son importance (intention 8). Il s'agit là d'un aspect qui compte tout particulièrement pour les PME, qui, souvent, ne sont pas conscientes des possibilités qui s'offrent à elles ou manquent de l'expertise nécessaire pour se lancer dans des projets de RSE.

4.5.6   Il y a lieu d'examiner avec beaucoup de soin la question de l'utilisation des fonds structurels pour les initiatives de RSE. On rappellera que le prochain programme de financement structurel sera marqué du sceau des économies et qu'en conséquence, tous les fonds alloués à des initiatives de RSE devraient être utilisés en faveur d'objectifs ciblant clairement la lutte contre la pauvreté, l'exclusion sociale et le développement régional. Ces moyens devraient bénéficier exclusivement à des entreprises dont les capacités et les ressources financières sont limitées comme les PME et les organisations de la société civile, afin de les aider à mettre en place les politiques et l'engagement en faveur de la RSE.

4.5.7   Il convient de soutenir et développer les portails d'information, afin d'aider les entreprises, ainsi que les sociétés de commerce électronique, à se connecter et de fournir une plateforme accessible pour permettre un échange efficace des bonnes pratiques, des compétences et des ressources financières et non financières pour le bénéfice de la société.

4.6   La RSE et les partenaires de l'économie sociale

4.6.1   Le secteur de la société civile a été négligé dans le cadre de la l'initiative d'action en matière de RSE. Les organisations de la société civile offrent des modèles de stratégie économique, de gouvernance et de forums d'échanges qui sont empreints de responsabilité et participent souvent à des activités de RSE. La communication omet d'explorer de façon approfondie la relation entre les secteurs marchand et non marchand.

4.6.2   Il existe une longue tradition intersectorielle de travail en partenariat, qu'il convient de continuer à soutenir. Le Comité est en effet d'avis que «l'engagement social des entreprises est un important pilier de l'édification et du maintien des institutions de la société civile» (11).

4.6.3   Il y a lieu de promouvoir l'intérêt mutuel que présente le partenariat, en vue d'encourager un engagement significatif en faveur de la RSE. La mise en adéquation des besoins et des compétences dans le cadre de partenariats renforce l'efficacité et l'utilité des retombées sociales et économiques pour les communautés et les entreprises. Il importe de promouvoir les aides non financières pour élargir la portée du soutien émanant d'autres secteurs et contribuer à une réflexion plus stratégique sur les capacités en matière de RSE. Il pourra notamment s'agir de promouvoir le volontariat parmi leurs travailleurs, de fournir des services gratuits, de faire des dons en nature (bâtiments, équipements, etc.).

4.6.4   L'un des éléments indispensables pour assurer un bon fonctionnement des partenariats est la communication entre les secteurs. Les services d'intermédiation (12) apportent une assistance pour rationaliser et simplifier la façon dont deux secteurs font des affaires et surmonter les différences culturelles. Il convient de les soutenir et d'en faciliter l'accès aux entreprises afin d'aider ces dernières à vaincre les barrières pour créer une valeur commune qui transcende les limites des secteurs et pour susciter un véritable engagement dans les initiatives de RSE.

4.7   Orientations et conventions internationales

4.7.1   L'OIT a fait des huit conventions fondamentales le fondement des droits au niveau mondial. Les États membres les ont déjà ratifiées. L'UE pourrait témoigner de son soutien en veillant à ce que les pays tiers respectent également ces conventions.

4.7.2   Le CESE soutient fermement la Commission dans son intention de rendre la promotion de la RSE pleinement compatible avec les instruments qui existent à l'échelle mondiale, notamment les principes directeurs de l'OCDE, la déclaration de l'OIT tripartite sur les entreprises multinationales et la politique sociale, ISO 26000, les principes directeurs des Nations unies relatifs aux entreprises et aux droits de l'homme et les Accords cadre internationaux (ACI). Il demande à la Commission de donner des explications circonstanciées quant à la manière dont elle compte réaliser cet objectif.

4.7.3   Les principes directeurs de l'OCDE ont été entérinés par 42 pays, dont 24 États membres de l'UE. Ils prévoient un mécanisme spécifique de suivi, un point de contact par pays, chargé de diffuser les principes directeurs et de traiter les cas où ils sont censés avoir été violés. En conséquence, le CESE recommande que la stratégie révisée de l'UE pour la RSE réserve des ressources pour le développement des capacités concernant lesdits principes directeurs et que la Commission et les États membres accordent un rôle plus important aux partenaires sociaux au sein de ces points de contact.

4.7.4   Le CESE estime que la politique de RSE devrait s'attacher à fournir une orientation stratégique aux entreprises, dans la mesure où assurer un suivi des engagements en la matière pris par les entreprises de plus de mille salariés (intention 10) est un objectif irréaliste et exigerait que l'UE y consacre un important volant de ressources.

Bruxelles, le 24 mai 2012.

Le président du Comité économique et social européen

Staffan NILSSON


(1)  COM(2011) 685 final.

(2)  Quatrième directive sur les comptes annuels, 2003/51/CE.

(3)  JO C 325 du 30.12.2006, pp. 53-60.

(4)  Voir: http://newsforchangingtimes.com/2012/02/17/women-boardroom-csr-un-women-ingrid-kragl/

(5)  COM(2011) 681 final, p. 8.

(6)  JO C 175 du 28.07.2009, p. 63-72.

(7)  COM(2011) 685 final.

(8)  JO C 24 du 28.1.2012, p. 1.

(9)  COM(2011) 682 final, p. 6.

(10)  www.csrinternational.org

(11)  JO C 125 du 27.5.2002, p. 44.

(12)  Les services d'intermédiation sont des sociétés qui offrent des prestations d'intermédiaires pour aider à mettre des organisations en rapport par delà les barrières sectorielles et négocier des relations de travail plus efficaces, en appariant les besoins, les compétences et les ressources. Pilot Light fournit un exemple d'entreprise de ce genre (voir http://www.pilotlight.org.uk/).


ANNEXE

à l'AVIS du Comité économique et social européen

Les amendements suivants, qui ont recueilli plus du quart des suffrages exprimés, ont été repoussés au cours des débats (article 54(3) du règlement intérieur):

Paragraphe 2.3

Modifier comme suit:

«Selon la nouvelle définition élargie proposée, la RSE est “la responsabilité des entreprises vis-à-vis des effets qu'elles exercent sur la société”. Cette définition de nouveaux aspects que les entreprises devraient inclure dans leurs stratégies de RSE et la précédente définition, à savoir “un concept qui désigne l'intégration volontaire, par les entreprises, de préoccupations sociales et environnementales à leurs activités commerciales et leurs relations avec leurs parties prenantes” ».

Résultat du vote

Voix pour

:

88

Voix contre

:

91

Abstentions

:

23

Paragraphe 4.1

Modifier comme suit:

«de la définition de la RSE»

Résultat du vote

Voix pour

:

80

Voix contre

:

106

Abstentions

:

23

Paragraphe 4.1.1

Modifier comme suit:

«Le CESE estime néanmoins qu'il est nécessaire que la Commission clarifie les acceptions de l'élément “entreprise” de cette définition afin d'éviter toute erreur d'interprétation. La Commission devrait également préciser quelles nouvelles politiques seront mises sen œuvre sur la base de la définition mise à jour législative annoncée . De même, elle devrait apporter des précisions sur ses plans destinés à stimuler la RSE pour les différentes composantes du monde des entreprises, telles que les grandes sociétés, les PME et les entreprises de l'économie sociale.»

Résultat du vote

Voix pour

:

85

Voix contre

:

121

Abstentions

:

20

Paragraphe 4.4.2

Modifier comme suit:

«Le rôle est précieux dans tout programme de RSE, l'information et dialogue social. »

Résultat du vote

Voix pour

:

86

Voix contre

:

125

Abstentions

:

14


31.7.2012   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 229/85


Avis du Comité économique et social européen sur la communication de la Commission au Parlement européen et au Conseil — «Vers une approche plus ferme de l'UE en matière de lutte contre la drogue»

COM(2011) 689 final

2012/C 229/16

Rapporteur: M. TOPOLÁNSZKY

Le 25 octobre 2011, la Commission européenne a décidé, conformément à l'article 304 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la

Communication de la Commission au Parlement européen et au Conseil — «Vers une approche plus ferme de l'UE en matière de lutte contre la drogue»

COM(2011) 689 final.

La section spécialisée «Emploi, affaires sociales, citoyenneté», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 18 avril 2012.

Lors de sa 481e session plénière des 23 et 24 mai 2012 (séance du 24 mai 2012), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 118 voix pour, 1 voix contre et 2 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

Le Comité économique et social européen (CESE)

1.1   accueille favorablement le contenu de la communication de la Commission et convient que les mesures à prendre pour renforcer l'Europe doivent être fermes et que celles visant à intervenir efficacement sur l'offre et sur la demande en matière de drogue doivent être équilibrées;

1.2   fait part, pour cette raison justement, de sa déception: la communication apparaît comme un recul par rapport à l'approche équilibrée et consensuelle qui prévalait jusqu'ici, en tant qu'elle accorde un poids prépondérant aux mesures de réduction de l'offre;

1.3   estime que l'approche réglementaire et pénale n'est pas suffisante, et préconise vivement d'élaborer une nouvelle stratégie de l'UE en matière de lutte contre la drogue sur la base d'une évaluation approfondie de la stratégie actuelle qui arrive à expiration;

1.4   fait part de son inquiétude quant à la modification des priorités de la politique de financement, et préconise vivement, sur ce point aussi, de rétablir une approche équilibrée;

1.5   soutient la poursuite de l'harmonisation des dispositions nationales de lutte contre le commerce de stupéfiants, et recommande d'étendre aussi le processus d'harmonisation de la politique pénale dans l'UE aux modalités comportementales de l'abus de drogue;

1.6   recommande la mise en place et l'utilisation de dispositifs d'évaluation indépendants et scientifiquement éprouvés en matière d'interventions de réduction de l'offre, ainsi que la mise à disposition les ressources appropriées à l'exécution de ces missions;

1.7   est d'accord avec les mesures proposées en vue de confisquer et de recouvrer les avoirs d'origine criminelle, et recommande que les avoirs issus des confiscations soient – au moins en partie – consacrés au financement des activités axées sur la réduction de la demande, qui sont largement sous-financées;

1.8   souligne que, dans le cas des nouvelles drogues dangereuses, un acte réglementaire ne suffira pas non plus: il importe en tout état de cause de le mettre en œuvre dans le cadre d'une politique d'intervention intégrée et globale, dont les retombées feront l'objet d'un suivi et d'une évaluation permanentes;

1.9   estime que la partie de la communication consacrée à la réduction de la demande est disproportionnée et bâclée, et recommande à la Commission d'engager la mise en place de mécanismes institutionnels garantissant la concrétisation d'initiatives fondées sur des preuves scientifiques dans ce domaine d'action;

1.10   est fermement convaincu que, pour éviter que les incidences respectives de politiques jusqu'ici distinctes ne se neutralisent respectivement, il convient qu'à moyen terme déjà, soit élaborée une politique globale et coordonnée en matière d'addiction, couvrant le problème de la consommation de toutes les substances psychoactives (licites et illicites);

1.11   soutient l'activité du Forum de la société civile sur la drogue et recommande que les constats de cet organisme soient davantage pris en considération tant à l'échelon de l'Union qu'à celui des États membres.

2.   Observations générales

2.1   Le Comité économique et social européen (CESE) accueille favorablement la communication de la Commission européenne intitulée «Vers une approche plus ferme de l'UE en matière de lutte contre la drogue» (1).

2.2   Il approuve la conclusion du document, suivant laquelle, suite à l'adoption du traité de Lisbonne, «la réponse européenne au problème de la drogue se doit d'être ferme et déterminée, tant sur le front de la demande que sur celui de l’offre de drogue». Il se réjouit de constater que la Commission est disposée à conférer un nouvel élan à la politique de l'UE en matière de lutte contre la drogue, et convient que «l'Union européenne se doit de (…) [concentrer] son action dans les domaines où (…) elle apporte une valeur ajoutée plus grande».

2.3   Le CESE fait cependant part de sa déception quant au fait que la communication apparaît comme un recul par rapport à l'approche équilibrée et consensuelle qui prévalait jusqu'ici, laquelle se fondait dans les mêmes proportions sur la réduction de l'offre et sur celle de la demande: en effet, le document limite son propos en majeure partie aux instruments juridiques de réduction de l'offre, alors que, pour ce qui concerne la réduction de la demande, il se contente de formuler à la va-vite des séries d'objectifs.

2.4   Il juge regrettable qu'un document de la Commission semble négliger, en matière de consommation de drogue, des points de vue transversaux de politique sociale liés aux droits de l'homme, en mettant au contraire en avant des instruments juridiques et pénaux peu évalués scientifiquement mais dont l'efficacité est peu avérée sur la base des données actuellement disponibles, et qui sont plus coûteux (2).

2.5   Le Comité est persuadé que la réduction de l'offre ne prend tout son sens que si elle constitue un pan, un élément d'un dispositif stratégique. Il y a lieu d'éviter que la politique pénale ne prédomine de manière déséquilibrée, en tant qu'instrument ultime (ultima ratio). Dès lors, l'éventuelle relégation au second plan des outils de prévention ne saurait être la caractéristique de la politique de cette même Europe qui a soutenu une stratégie globale et plurielle dans ses instruments face aux approches simplistes, répressives, peu soucieuses des droits de l'homme qui sont la règle dans bon nombre de régions du monde.

2.6   Le CESE est convaincu, concernant la politique de l'UE en matière de lutte contre la drogue, qu'il y a lieu, en se fondant sur l'évaluation de la stratégie actuelle, d'élaborer, de débattre largement et d'adopter une nouvelle stratégie consensuelle qui exprime l'engagement commun des États membres en faveur de la réflexion stratégique, des programmes d'action et de la politique de financement (la meilleure combinaison de politiques) qui prévalaient jusqu'ici, qui présentaient un certain équilibre et qui s'appuyaient sur les valeurs fondamentales du traité de Lisbonne.

2.7   Conformément au principe fondamental suivant lequel l'État ne doit pas causer des dommages et des risques plus grands que ceux dont il entend protéger, il convient de mettre en place un mécanisme décisionnel qui permettrait de modifier sans délai une politique donnée si une évaluation indépendante en démontrait les résultats négatifs.

3.   Financement

3.1   Le CESE se montre préoccupé face à la mutation et à la réduction du nombre de priorités de financement de la Commission. Le programme «La santé en faveur de la croissance» annoncé dans le cadre du 3e programme de financement pluriannuel 2014-2020 ne traite pas du problème de la drogue et de la réduction de la demande en drogues. Il n'y est pas non plus question des ressources financières nécessaires à la réduction de la demande conformément aux objectifs de la stratégie et du programme d'action de l'UE en matière de lutte contre la drogue.

3.2   Le même changement a frappé les priorités de financement de la proposition de la Commission relative aux programmes «Justice» et «Droits fondamentaux et citoyenneté», puisque les subventions accordées pour traiter le problème de la drogue mettront surtout l'accent sur les aspects relatifs à la prévention de la criminalité. Le CESE invite résolument la Commission à modifier sa politique de financement conformément aux besoins d'une approche stratégique équilibrée.

4.   Observations concrètes et de fond

4.1   Abus et trafic de drogue

4.1.1   Concernant la lutte contre le trafic de drogue, la communication insiste sur le phénomène de l'évolution constante du marché des drogues illicites, et l'apparition, en matière de contrebande, de méthodes innovantes et de nouvelles technologies. Pour lutter efficacement contre tous ces phénomènes négatifs, elle insiste sur la nécessité d'améliorer la coordination des initiatives contre le trafic de drogue.

4.1.2   Le document souligne que l'entrée en vigueur du traité de Lisbonne (3) permet de renforcer les instruments juridiques et politiques de la lutte contre le trafic de drogue; cependant, il rapporte que certains instruments juridiques (4)«[n'avaient] guère permis de rapprocher les mesures nationales dans le domaine de la lutte contre le trafic de drogue et [n'avaient] pas suffisamment contribué à faciliter la coopération judiciaire à cet égard» (5).

4.1.3   La communication de la Commission recommande à cet égard de nouveaux instruments juridiques, grâce auxquels elle entend, tout d'abord, mettre en place des normes minimales communes, s'agissant des circonstances aggravantes et atténuantes, en matière de lutte contre les grands réseaux de trafic de drogue transfrontière, en deuxième lieu, travailler à l'amélioration de la définition des infractions et des sanctions, et, enfin, durcir les obligations en matière de rapports imposées aux États membres.

4.1.4   La communication de la Commission recommande à cet égard de nouveaux instruments juridiques, grâce auxquels elle entend, tout d'abord, mettre en place des normes minimales communes en matière de lutte contre les grands réseaux de trafic de drogue transfrontière, en deuxième lieu, travailler à l'amélioration de la définition des infractions et des sanctions, et, enfin, durcir les obligations en matière de rapports imposées aux États membres.

4.1.5   Le CESE, qui approuve pour l'essentiel les conclusions du document, souligne toutefois que ces efforts ne pourront être couronnés de succès que si, du point de vue des interventions visant à réduire l'offre, un instrument approprié de mesure des résultats ainsi que des indicateurs éprouvés sont en place. Dès lors, le Comité réclame instamment l'élaboration de mécanismes d'évaluation et de suivi à même de mesurer l'efficacité et la rentabilité véritables de ces interventions; il soutient les travaux déjà entamés en vue d'élaborer des indicateurs adéquats (6).

4.1.6   Le CESE souligne que les ressources disponibles pour l'évaluation des instruments relatifs aux interventions en matière de réduction de l'offre sont excessivement réduites, par rapport à l'ampleur du tort causé aux droits fondamentaux de ceux des toxicomanes qui, sur le plan juridique, ne portent pas préjudice à d'autres, et n'agissent pas dans un but lucratif.

4.1.7   Le CESE recommande que, dans l'esprit de la communication de la Commission européenne relative à cette question (7), l'harmonisation de la politique de l'UE en matière pénale porte aussi sur les comportements pour lesquels les pratiques judiciaires pénales (normes, peines, procédures, exemptions) diffèrent tellement d'un État membre à l'autre que les droits de l'homme et la sécurité juridique ne peuvent qu'être mis à mal. De l'avis du CESE, c'est actuellement le cas en ce qui concerne la consommation abusive de drogue (8).

4.1.8   Le CESE rappelle que l'harmonisation des peines minimales prévue par l’UE ne doit pas conduire à une aggravation des peines maximales encourues au sein d’un État membre. Il attire dans le même temps l'attention sur le fait qu'une politique qui se focalise sur la réduction de l'offre est aussi susceptible d'envoyer un message d'impuissance des responsables politiques et c'est la raison pour laquelle il est absolument nécessaire de trouver un équilibre entre la menace de sanction pénale d'une part et les interventions indispensables en matière de traitements et d'aide de l'autre.

4.1.9   Le CESE estime nécessaire, au lieu de poursuivre une approche exclusivement axée sur la lutte contre le trafic drogues, de repenser les stratégies en matière de justice pénale tout en s'attachant à réduire les dommages sociaux et pour la santé liés au marché de la drogue et à promouvoir la sécurité des personnes et de la société.

4.2   Les «précurseurs de drogues»

4.2.1   Le CESE est d'accord avec l'évaluation de la situation livrée dans ce chapitre ainsi qu'avec la position selon laquelle les mesures existantes et envisagées doivent assurer un contrôle efficace des utilisations illégales de ces produits chimiques sans pour autant en perturber le commerce licite.

4.2.2   Le Comité estime à l'instar de la Commission qu'il conviendrait dans ce domaine de renforcer la coopération internationale en dépit des grands écarts existants en matière de qualité des données, de possibilités de fournir celles-ci et de disposition à le faire, surtout pour des pays tiers concernés.

4.3   La confiscation et le recouvrement des avoirs d'origine criminelle

4.3.1   Le CESE soutient les efforts de la Commission dans ce domaine et estime les instruments législatifs mentionnés proportionnels et adaptés au traitement des problèmes visés. Il déplore toutefois que, pour différentes raisons, ces instruments n'aient pas eu l'efficacité escomptée.

4.3.2   Pour cette raison, le CESE appuie l'élaboration de nouveaux actes législatifs européens plus stricts et l'extension à ce domaine de l'harmonisation législative au niveau européen.

4.3.3   Le Comité propose de consacrer au moins une partie des ressources confisquées au soutien des mesures en faveur de la réduction de la demande qui, bien que souffrant traditionnellement d'un financement insuffisant, demeurent le moyen le plus efficace de combattre la consommation de drogue et d'en traiter les conséquences sociétales.

4.4   Nouvelles substances psychoactives

4.4.1   Le CESE partage fondamentalement les constatations de la Communication de la Commission concernant les nouvelles substances psychoactives. La Commission estime que la réglementation générique répondra aux attentes du public et des autorités en ce qui concerne la capacité de contrôler rapidement ces nouvelles substances. Cependant, sans évaluation effective du risque présenté par ces différentes substances, des intérêts thérapeutiques et industriels légitimes pourraient en pâtir. Il souligne également que la méthode actuelle d'évaluation du risque ne reflète pas une approche multidisciplinaire mais se fonde prioritairement sur des analyses chimiques et policières.

4.4.2   Le CESE souligne que, dans le cas des nouvelles drogues dangereuses, un acte réglementaire ne suffira pas non plus. Il importera en tout état de cause de le mettre en œuvre dans le cadre d'une politique d'intervention intégrée et globale, dont les retombées feront l'objet d'une évaluation et d'un suivi permanents. En effet, le risque d'effets pervers n'est pas nul: la tentation pour les consommateurs de se tourner vers de nouvelles substances, la criminalisation, la hausse des prix sur le marché illicite, l'interdiction ou le contrôle automatique de substances utiles à d'autres fins, la consommation clandestine, les risques supplémentaires que comporte le marché illégal, etc.). Le Comité déplore que les instruments réglementaires proposés ne reflètent pas ces points de vue.

4.4.3   Le CESE estime important que, parallèlement à l'établissement d'une liste, les responsables politiques proposent également des mesures visant à traiter les retombées sanitaires et sociales de la consommation de substances psychoactives et explorent le cas échéant des pistes réglementaires alternatives sans criminaliser directement le consommateur. À cette fin, le Comité juge indispensable de combler les lacunes de la collecte de données, d'améliorer l'interactivité du flux d'informations, d'organiser la formation continue des professionnels du secteur, de veiller à une information fiable au moyen des méthodes et des technologies les plus modernes, de développer la réglementation et les contrôles en matière de protection des consommateurs et de mettre en place des services de traitements et d'aide adéquats.

4.4.4   Le CESE soulève par ailleurs le problème suivant: la réponse réglementaire relative aux nouvelles substances continue d'occulter les problèmes parfois beaucoup plus importants que peuvent générer les «anciennes» substances psychoactives non contrôlées que sont l'alcool, la nicotine, certains produits industriels hallucinogènes, etc.

4.5   Réduction de la demande

4.5.1   Le CESE fait part de sa déception par rapport aux propositions de la Commission en matière de réduction de la demande, qui, pour l'essentiel, ne contiennent que des constatations d'ordre général. Il invite la Commission à développer davantage une approche stratégique susceptible de constituer une avancée tant quantitative que qualitative sur la voie d'une garantie des droits fondamentaux en matière de traitements.

4.5.2   Il importe en conséquence que la Commission ne s'efforce pas seulement d'élaborer des normes qualitatives mais qu'elle contribue aussi à la mise en place dans les États membres de politiques de financement reflétant une approche équilibrée.

4.5.3   Il convient de garantir partout en Europe la couverture, l'accessibilité, la disponibilité et le caractère abordable d'une large gamme de services basés sur des données scientifiques et visant à diminuer chez les personnes souffrant de problèmes de drogue les effets nocifs de celle-ci sur la santé (VIH/SIDA, hépatite et overdose). Ces services incluent la désintoxication, les traitements en établissement hospitalier ou en communautés thérapeutiques, ainsi que les traitements ambulatoires, la réadaptation, la réinsertion, les traitements de substitution et les services d'échange de seringues. Ces programmes devraient aussi être pleinement accessibles en milieu carcéral, aux populations minoritaires ainsi qu'aux groupes faisant l'objet de discriminations.

4.5.4   Le CESE est d'avis que les politiques de l'Union et des États membres en matière de drogues devraient accorder la préférence à la fourniture de soins de santé et de traitements aux personnes qui en ont besoin plutôt qu'à la criminalisation et aux sanctions à l'encontre de personnes en proie à des problèmes liés aux stupéfiants.

4.5.5   Le CESE attire l'attention sur le fait qu'actuellement, l'Union européenne ne dispose d'aucun moyen de mettre en garde ou de sanctionner les États membres qui n'assureraient pas la possibilité de bénéficier de services de traitements à l'efficacité prouvée scientifiquement – même quand ces services revêtent une importance vitale pour les intéressés – violant ainsi les droits de l'homme.

4.5.6   Le Comité encourage donc la Commission à promouvoir d'une part la mise en place de mécanismes institutionnels garantissant la concrétisation, dans les différents États membres, des initiatives dans ce domaine dont l'efficacité est scientifiquement avérée, et d'autre part un fonctionnement équilibré et contrôlé des dispositifs de financement favorisant leur mise en œuvre.

4.6   Coopération internationale

4.6.1   Le CESE souscrit au dialogue avec les pays de production et de transit ainsi qu'à la politique de soutien et d'assistance technique et recommande de les intensifier.

4.6.2   Le Comité soutient aussi le renforcement de l'engagement de l'Union à l’égard des pays limitrophes et des partenaires stratégiques ainsi que le long des circuits d’acheminement de la drogue dans l’UE, sur la base d’une approche équilibrée et globale et dans le plein respect des droits de l’homme.

4.6.3   Le CESE salue les résultats engrangés par l'Observatoire européen des drogues et des toxicomanies depuis sa création dans les domaines du suivi de la situation en matière de drogue, du renforcement de la rigueur et de la qualité de la transmission des informations, et de l'élaboration d'approches stratégiques communes.

4.6.4   Le CESE invite la Commission à préparer une évaluation de la situation concernant les changements sociaux générés par la crise économique persistante et à s'attacher plus particulièrement aux caractéristiques relatives à la consommation et au trafic de drogue.

4.6.5   Tout en reconnaissant l'importance des trois conventions des Nations unies sur les stupéfiants (9) et les résultats obtenus grâce à elles, le CESE juge nécessaire de souligner que, malgré leurs objectifs déclarés, elles n'ont pas réussi à mettre en place une accessibilité légale, adéquate et équitable à certaines drogues dans la grande majorité des pays du monde et dans une partie de l'Europe. D'autre part, l'ampleur de la production et de la consommation illicites n'a pas diminué mais a même considérablement augmenté. Dans le même temps, le système mis en place ne permet pas toujours de garantir des interventions en faveur de la santé et du bien-être dont l'efficacité est scientifiquement démontrée.

4.6.6   Pour cette raison, le CESE recommande que l'Union européenne endosse le rôle de gardienne critique des conventions des Nations unies sur les stupéfiants et de leur mise en œuvre en s'appuyant sur un consensus des États membres et tenant grand compte des droits de l'homme et des preuves scientifiques. Pour peu qu'elle le juge nécessaire, l'UE pourrait prendre position en faveur d'une adaptation des conventions.

4.6.7   Le CESE se félicite des travaux du Forum de la société civile sur la drogue et les soutient. Il invite les instances dirigeantes de l'Union à tenir davantage compte de ses découvertes. Le CESE apprécierait que lui soit donnée la possibilité de participer en tant qu'observateur à ce forum.

5.   Perspectives

5.1   En vertu de l'article 11, paragraphes 3 et 4 du traité de Lisbonne, le CESE recommande tant à la Commission qu'aux États membres de consolider le dialogue social actif et d'associer résolument les communautés professionnelles et, dans la mesure du possible, les organisations de consommateurs au processus de planification stratégique afin de favoriser la démocratie participative et de soumettre directement à une évaluation professionnelle civile l'activité de coordination des pouvoirs publics.

5.2   Le Comité estime qu'une planification bidirectionnelle s'impose. Au niveau global tout d'abord, il importe de susciter des synergies entre les approches harmonisées au niveau européen dans le cadre d'une coordination renforcée. Ensuite une approche locale est nécessaire pour faire en sorte que voient le jour des politiques européennes qui ne soient pas abstraites mais en phase avec les besoins réels des communautés locales et susceptibles de pouvoir compter sur leur coopération.

5.3   Le CESE est fermement convaincu de la nécessité, déjà à moyen terme, de mettre en place une politique globale et coordonnée en matière d'addiction, couvrant l'ensemble du problème de la consommation de substances psychoactives (licites et illicites). En effet, à l'heure actuelle, les politiques sont artificiellement distinctes pour des raisons politiques et juridiques, recourent à des moyens extrêmement divers et génèrent des effets qui ont davantage tendance à se neutraliser qu'à se renforcer mutuellement. Du point de vue de la sécurité juridique et des droits humains, l'on peut en outre s'interroger sur le rapport très variable qu'entretiennent ces différentes politiques avec la force contraignante de l'État.

5.4   Le Comité recommande à la Commission de jeter les bases d'un usage médical contrôlé du cannabis thérapeutique et de la gamme complète des traitements de substitution.

5.5   Le CESE porte un regard critique sur la manière dont l'alcoolisme, un problème général responsable des effets les plus dommageables dans nos sociétés, est traité au niveau de l'Union. À cet égard, il renvoie à ses avis antérieurs (10) et invite la Commission à prendre des mesures fermes dans ce domaine.

Bruxelles, le 24 mai 2012.

Le président du Comité économique et social européen

Staffan NILSSON


(1)  COM(2011) 689 final.

(2)  Dans la plupart des pays, les instruments pénaux touchent actuellement de manière prépondérante les toxicomanes; ils ne frappent que très légèrement les auteurs de trafics.

(3)  Article 83, paragraphe 1, du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne.

(4)  Par exemple, la décision-cadre 2004/757/JAI du Conseil du 25 octobre 2004 concernant l’établissement des dispositions minimales relatives aux éléments constitutifs des infractions pénales et des sanctions applicables dans le domaine du trafic de drogue.

(5)  COM(2011) 689 final.

(6)  Première conférence européenne sur les indicateurs relatifs à l'offre de drogues. Initiative conjointe visant à élaborer des options durables en matière de suivi des marchés des stupéfiants, de la criminalité et des activités de réduction de l'offre, Commission européenne, 20-22 octobre 2010.

(7)  COM(2011) 573 final.

(8)  En effet, les mêmes faits (par exemple l'échange de faibles quantités entre consommateurs) peuvent entraîner dans certains pays une peine de prison allant de deux à cinq ans, tandis que dans d'autres ils donnent lieu à une mobilisation des moyens prévus dans la cadre d'une politique nationale/municipale d'aide (création d'emplois, aide au logement, aide sociale, etc.).

(9)  La convention unique sur les stupéfiants de 1961 amendée par le Protocole de 1972, la convention sur les substances psychotropes de 1971 et la convention contre le trafic illicite de stupéfiants et de substances psychotropes de 1988.

(10)  JO C 175 du 27.7.2007, pp. 78-84.

JO C 318 du 23.12.2009, pp. 10-14.


31.7.2012   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 229/90


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données (règlement général sur la protection des données)»

COM(2012) 11 final — 2012/011 (COD)

2012/C 229/17

Rapporteur général: M. PEGADO LIZ

Le Parlement européen, en date 16 février 2012, et le Conseil, en date du 1er mars 2012, ont décidé, conformément à l'article 304 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la

«Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données (règlement général sur la protection des données)»

COM(2012) 11 final — 2012/011 (COD).

Le 21 février 2012, le Bureau du Comité a chargé la section spécialisée «Emploi, affaires sociales, citoyenneté», de préparer les travaux du Comité en la matière.

Compte tenu de l'urgence des travaux, le Comité économique et social européen a décidé au cours de sa 481e session plénière des 23 et 24 mai 2012 (séance du 23 mai 2012), de nommer M. PEGADO LIZ rapporteur général, et a adopté le présent avis par 165 voix pour, 34 voix contre et 12 abstentions.

1.   Conclusion et recommandations

1.1

Le CESE salue l'orientation générale prise par la Commission, marque son accord sur le choix de la base d'habilitation proposée et approuve dans le principe les objectifs de la proposition, lesquels suivent de près un avis du Comité. Pour ce qui est du statut légal de la protection des données, le CESE estime que le traitement et le transfert de données au sein du marché intérieur doivent s'inscrire dans le cadre délimité par le droit à la protection des données à caractère personnel tel que consacré par l'article 8 de la Charte des droits fondamentaux, et par l'article 16.2 du TFUE.

1.2

En ce qui concerne le choix du règlement en tant qu'instrument juridique le plus adéquat eu égard aux objectifs poursuivis, le CESE reste partagé et demande à la Commission de mieux démontrer et justifier les raisons qui rendent cet instrument préférable à la directive, voire indispensable.

1.3

Le Comité regrette cependant les trop nombreuses exceptions et limitations qui affectent les principes affirmés du droit à la protection des données personnelles.

1.4

Dans le contexte nouveau de l'économie numérique, le Comité partage l’opinion de la Commission selon laquelle «les personnes physiques ont le droit d’exercer une maîtrise effective sur leurs données» et il souhaite également que ce droit s’étende aux différents usages pour lesquels des profils individuels sont établis à partir de données recueillies par un grand nombre de moyens (légaux et parfois illégaux) et du traitement des données obtenues.

1.5

S’agissant des droits fondamentaux, l’harmonisation par un règlement dans des domaines spécifiques devrait néanmoins permettre aux Etats membres d’adopter, dans leur droit national, des dispositions qui sont absentes dudit règlement ou plus favorables que celles qui y sont prévues.

1.6

Le Comité ne peut en outre accepter tous les renvois quasi systématiques à des actes délégués qui ne relèvent pas expressément de l'article 290 TFUE.

1.7

Le Comité salue néanmoins la préoccupation de créer un cadre institutionnel efficace pour garantir le fonctionnement effectif des dispositions légales, tant au niveau des entreprises (délégués à la protection des données ou DPD) qu'à celui des administrations publiques des États membres (autorités de contrôle indépendantes). Toutefois, il aurait apprécié que la Commission choisisse une approche plus conforme aux réels besoins et aspirations des citoyens et plus systématisée selon la nature de certains domaines de l’activité économique et sociale.

1.8

Le CESE estime qu’il y a toute une série d’améliorations et de précisions possibles dans le texte proposé et donne des exemples précis relatifs à plusieurs articles, exemples qui vont dans le sens d’une meilleure définition des droits, du renforcement de la protection des citoyens en général et des travailleurs en particulier, de la nature du consentement, de la licéité du traitement, et en particulier, des fonctions des délégués à la protection des données et du traitement des données en matière d’emploi.

1.9

Le CESE estime aussi que des éléments non considérés devraient être inclus, notamment l’élargissement du champ d’application, le traitement des données sensibles ou les actions de groupe.

1.10

Le CESE considère ainsi que les moteurs de recherche tirant la majorité de leurs revenus de la publicité ciblée grâce à la collecte de données personnelles sur leurs visiteurs, voire de leur profilage, doivent entrer expressis verbis dans le champ d'application du Règlement. Il devrait en aller de même pour les sites de serveurs offrant des espaces de stockage et, pour certains, des logiciels (informatique en nuage ou cloud computing), qui collecteraient des données sur leurs usagers à des fins commerciales.

1.11

Il devrait en aller de même encore pour les informations personnelles publiées sur les réseaux sociaux, qui devraient permettre, en vertu du droit à l'oubli, la modification ou l'effacement d'informations par la personne concernée ou la suppression, à sa demande, de sa page personnelle et des liens qui renvoient à d'autres sites très fréquentés où ces informations sont reproduites ou commentées. L'article 9 devrait être modifié à cet effet.

1.12

Enfin, le CESE demande à la Commission de reconsidérer certains aspects de la proposition qu’il juge inacceptables pour des matières sensibles comme la protection des enfants, le droit d’opposition, le profilage, certaines limitations aux droits, le seuil des 250 travailleurs pour nommer un DPD ou la façon dont est réglementé le «guichet unique».

2.   Introduction

2.1

Le CESE vient d'être saisi pour avis de la «Proposition de règlement relatif à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données (règlement général sur la protection des données)» (1).

2.2

Cependant, il faut noter que cette proposition fait partie d'un «paquet» qui comprend également une communication introductive (2), une Proposition de directive (3) et un «Rapport de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions fondé sur l’article 29, paragraphe 2, de la décision-cadre du Conseil du 27 novembre 2008» (4). Le CESE n'est pas saisi sur l'ensemble des législations proposées, mais seulement sur le projet de Règlement, alors qu'il aurait dû l'être aussi sur le projet de Directive.

2.3

La proposition dont le CESE est saisi se situe, selon la Commission, au carrefour de deux des plus importantes orientations juridico-politiques et politico-économiques de l'UE.

2.3.1

Dune part, il y a l’article 8 de la Charte des Droits Fondamentaux de l’Union européenne ainsi que l’article 16, paragraphe 1, du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE), qui consacrent la protection des données en tant que droit fondamental, devant être protégé comme tel. Les communications de la Commission européenne relatives au programme de Stockholm et au plan d'action le mettant en œuvre trouvent là leur fondement (5).

2.3.2

D'autre part, il y a la stratégie numérique pour l'Europe et, plus généralement, la stratégie Europe 2020 qui prônent la consolidation de la dimension «marché unique» de la protection des données et la réduction des charges administratives pesant sur les entreprises.

2.4

L'intention de la Commission est de mettre à jour et de moderniser les principes inscrits dans la directive 95/46/CE consolidée relative à la protection des données afin de garantir à l’avenir les droits de la personne en matière de respect de la vie privée dans la société numérique et ses réseaux. Le but recherché est de renforcer les droits des citoyens, de consolider le marché intérieur de l'UE, d'assurer un niveau élevé de protection des données dans tous les domaines (y compris celui de la coopération judiciaire en matière pénale), d'assurer la bonne application des dispositions prises à cet effet, de faciliter le traitement transfrontière des données et d'établir des normes universelles en matière de protection des données.

3.   Observations générales

3.1

Dans le contexte nouveau de l'économie numérique, le Comité partage l’opinion de la Commission selon laquelle «les personnes physiques ont le droit d’exercer une maîtrise effective sur leurs données», et il souhaite également que ce droit s’étende aux différents usages pour lesquels des profils individuels sont établis à partir de données recueillies par un grand nombre de moyens (légaux et parfois illégaux) et du traitement des données obtenues. Le Comité considère aussi que le traitement et le transfert de données dans le cadre du marché unique doivent être limités par le droit à la protection issu de l’article 8 de la Charte des Droits Fondamentaux. Il s’agit d’un droit fondamental, inscrit dans le droit institutionnel de l’Union et dans la plupart des droits nationaux des Etats membres.

3.2

Tout citoyen ou résident de l’Union dispose de ce fait même des droits fondamentaux inscrits dans la Charte et les traités; ces droits sont aussi reconnus dans le droit des États membres, parfois même au niveau constitutionnel. D'autres droits, comme le droit à l’image ou le droit à la protection de la vie privée complètent et renforcent le droit à la protection des données le concernant. Il doit être possible de faire respecter ces droits en demandant à un site internet de modifier ou de retirer un profil personnel ou un fichier du serveur et, en cas de non-exécution, d’obtenir d'un juge une injonction à cette fin.

3.3

La tenue de fichiers contenant des données individuelles est indispensable à l’administration publique (6), à la gestion du personnel des entreprises, à des services commerciaux, aux associations et syndicats, aux partis politiques, ou aux sites sociaux et aux moteurs de recherche de l’Internet, mais afin de protéger la vie privée des personnes légalement inscrites dans des fichiers, il convient que ces fichiers, aux finalités différentes, ne recueillent que les données essentielles à leurs finalités respectives et qu'ils ne soient pas interconnectés, grâce aux TIC, sans nécessité ni protection légale. L'existence d'une autorité ayant accès sans limitation à toutes les données constituerait un risque pour les libertés publiques et la vie privée.

3.4

Ces personnes concernées doivent, pour les fichiers tenus par des personnes de droit privé, disposer d'un droit d’accès, de correction et même de retrait du fichier, s’agissant des fichiers de prospection commerciale ou ceux des sites sociaux.

3.5

Pour ce qui est des fichiers tenus par des administrations publiques ou privées et qui répondent à des obligations légales, les personnes doivent disposer d’un droit d’accès, de correction en cas d’erreur, voire de retrait si l’inscription de la personne est devenue inutile, par exemple dans le cas d'une amnistie dans un fichier judiciaire ou dans le cas de fin d'un contrat de travail, au-delà des délais légaux de conservation.

3.6

Le CESE salue l'orientation générale prise par la Commission en reconnaissant que les objectifs de la directive 95/46/CE consolidée demeurent d'actualité, bien que, 17 ans s'étant écoulés, et avec tous les changements technologiques et sociaux qui se sont produits dans le domaine de l'environnement numérique, une révision profonde soit devenue indispensable. Par exemple, la directive 95/46/CE ne traitait pas certains aspects de l’échange transfrontière d’informations et de données entre administrations chargées de la répression des délits pénaux et de l’exécution des jugements dans le cadre de la coopération policière et judiciaire. Cette question est traitée dans le projet de directive inclus dans le paquet «protection des données» sur lequel le Comité n'est pas consulté.

3.7

Le CESE approuve dans le principe les objectifs de la proposition, qui s'inscrivent dans la protection des droits fondamentaux, et suivent de près l'avis du Comité (7), notamment en ce qui concerne:

l'établissement d'un corps unique de règles relatives à la protection des données, valable dans toute l'Union à un niveau de protection le plus élevé possible;

la réaffirmation explicite de la liberté de circulation des données à caractère personnel au sein de l'UE;

la suppression de plusieurs obligations administratives inutiles ce qui, selon la Commission, représenterait une économie annuelle de quelque 2,3 milliards d'euros pour les entreprises;

l'obligation faite aux entreprises et organisations de notifier à l'autorité de contrôle nationale les violations graves de données à caractère personnel dans les meilleurs délais (si possible, dans un délai de 24 heures);

la possibilité pour les citoyens de s'adresser à l'autorité chargée de la protection des données dans leur pays, même lorsque leurs données sont traitées par une entreprise établie en dehors du territoire de l'UE;

le fait de faciliter l'accès des personnes à leurs propres données, de même que le transfert de données à caractère personnel d'un prestataire de services à un autre (droit à la portabilité des données);

un «droit à l'oubli numérique», pour assurer aux citoyens la meilleure gestion des risques liés à la protection des données en ligne, avec la faculté d'obtenir la suppression de données les concernant si aucun motif légitime ne justifie leur conservation;

le renforcement, par rapport à la situation actuelle, du rôle des autorités nationales indépendantes chargées de la protection des données afin qu'elles puissent mieux faire appliquer et respecter les règles de l'UE sur le territoire de l'État dont elles relèvent, notamment en ayant le pouvoir d'infliger des amendes aux entreprises qui enfreignent les règles, amendes qui pourront atteindre jusqu'à 1 million d'euros ou 2 % du chiffre d'affaires annuel global de l'entreprise;

la neutralité technologique et l'application à tous les traitements de données, qu'ils soient automatisés ou manuels;

l'obligation d'effectuer des analyses d'impact relatives à la protection des données.

3.8

Le CESE salue l’accent mis sur la protection des droits fondamentaux et marque son plein accord sur le choix de la base juridique proposée, utilisée pour la première fois dans la législation. Il souligne aussi la grande importance que revêt cette proposition pour la réalisation du marché unique et ses effets positifs dans le cadre de la stratégie Europe 2020.En ce qui concerne le choix du règlement, une partie des membres du CESE, indépendamment de leur Groupe, est d'accord avec la Commission et considère qu'il s'agit de l'instrument juridique le plus adéquat pour garantir une application uniforme et un même niveau élevé de protection des données dans tous les États membres; une autre partie est d'avis que la directive serait l'instrument qui pourrait mieux sauvegarder le principe de subsidiarité et mieux protéger les données, surtout dans les États membres qui assurent déjà une protection plus élevée que celle définie dans la proposition de la Commission. Le CESE est également conscient que les États membres sont eux aussi partagés sur ce sujet. Le CESE appelle ainsi la Commission à mieux fonder sa proposition en rendant plus explicites sa compatibilité avec le principe de subsidiarité et les raisons pour lesquelles le choix d'un règlement est indispensable aux objectifs poursuivis.

3.8.1

Puisqu’il s’agit d’un règlement immédiatement et entièrement applicable dans tous les États membres, sans besoin de transposition, le CESE attire l’attention de la Commission sur la nécessité de veiller à la cohérence des traductions dans toutes les langues – ce qui n’est pas le cas avec la proposition.

3.9

Le CESE considère que, d’une part, la proposition aurait pu aller plus loin dans la dimension protectrice de certains droits qui se voient pratiquement dépourvus de contenu à cause d'innombrables exceptions et limitations et que d'autre part, elle aurait dû mieux équilibrer les droits des uns et des autres. Il risque ainsi d’y avoir un déséquilibre entre les objectifs du droit fondamental à la protection des données et ceux du marché unique au détriment du premier. Le CESE partage pour l’essentiel l’avis exprimé par le Contrôleur européen de la Protection des Données (8).

3.10

Le CESE aurait apprécié que la Commission adopte une approche plus conforme aux besoins et aux aspirations des citoyens et plus systématisée selon la nature de certains domaines de l’activité économique et sociale comme, par exemple, le commerce en ligne, le marketing direct, les relations de travail, les autorités publiques, la surveillance et la sécurité, l'ADN, etc., en distinguant le régime juridique selon ces aspects très différents dans le traitement des données.

3.11

En ce qui concerne diverses dispositions contenues dans la proposition (toutes reprises à l’article 86), des aspects très importants de l'instrument juridique et du fonctionnement du système dépendent de futurs actes délégués (26 délégations de pouvoir pour une durée indéterminée). Le CESE considère que cela dépasse largement les limites établies à l'article 290 du traité et définies dans la communication de la Commission européenne relative à la mise en œuvre de l'article 290 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (9), ce qui a des conséquences sur la sécurité et la certitude juridiques du dispositif. Le CESE estime qu'un certain nombre de ces délégations pourraient être réglées directement par le législateur européen. D'autres pourraient relever de la compétence des autorités de contrôle nationales, ou de leur structure de coordination au niveau européen (10). La mise en œuvre des principes de subsidiarité s'en trouverait confortée et la sécurité juridique renforcée.

3.12

Le CESE comprend les raisons qu'a la Commission de ne se pencher, dans cette proposition, que sur les droits des personnes physiques, compte tenu de sa nature juridique spécifique, mais demande que les données relatives aux personnes morales, en particulier celles dotées de la personnalité juridique, fassent aussi l’objet de l’attention de la Commission.

4.   Observations particulières

Les points positifs:

4.1   La proposition reste conforme à l’objet et aux objectifs de la Directive 95/46/CE, en particulier pour ce qui concerne certaines définitions, l’essentiel des principes relatifs à la qualité des données et à la légitimation des traitements, les traitements portant sur des catégories particulières et certains droits d’information et d’accès aux données.

4.2   La proposition est positivement innovante dans des aspects fondamentaux relatifs à de nouvelles définitions, à une meilleure précision des conditions du consentement, en particulier s’agissant des enfants, et à la catégorisation de nouveaux droits, tels que les droits de rectification et d’effacement, en particulier le droit à l’«oubli numérique», le contenu du droit d’opposition et le profilage ainsi que les obligations très détaillées des responsables du traitement et des sous-traitants, la sécurité des données et le cadre général des sanctions, principalement de nature administrative.

4.3   Le Comité salue également la préoccupation de la proposition de créer un cadre institutionnel efficace pour garantir le fonctionnement effectif des dispositions légales, tant au niveau des entreprises (délégués à la protection des données) qu'à celui des administrations publiques des États membres (autorités de contrôle indépendantes), aussi bien que le renforcement de la coopération entre ces autorités et avec la Commission (création du Comité européen de la protection des données), étant entendu toutefois qu'il y a lieu de maintenir les compétences des délégués, nationaux comme régionaux pour partie, à la protection des données.

4.4   Enfin, il considère comme positifs l’encouragement à l’élaboration de codes de conduite et le rôle de la certification et des marques ou labels de protection des données.

Ce qui peut être amélioré

4.5.   Article 3 – Champ d’application territorial

4.5.1   Les conditions d’application prévues au paragraphe 2 sont trop restrictives; rappelons les cas d’entreprises pharmaceutiques ayant leur siège hors Europe et qui, pour des essais cliniques, veulent accéder à des données cliniques de personnes concernées résidant dans l’UE.

4.6.   Article 4 – Définitions

4.6.1   La définition du «consentement» qui est la base essentielle de toute la construction de la protection des données devrait être mieux précisée dans ses éléments et surtout dans la caractérisation de «l’acte positif univoque» (notamment dans la version française).

4.6.2   La notion de «transfert de données», qui n’est définie nulle part, devrait faire l’objet d’une définition à l’article 4.

4.6.3   La notion de «loyauté» mentionnée à l’article 5, alinéa a) doit faire l’objet d’une définition.

4.6.4   La notion de données «manifestement rendues publiques» (article 9, paragraphe 2, alinéa e)) doit aussi faire l’objet d’une définition précise.

4.6.5   La notion de «profilage», utilisée tout au long de la proposition, doit aussi faire l’objet d’une définition.

4.7.   Article 6 – Licéité du traitement

4.7.1   Dans l’alinéa f), la notion «d’intérêts légitimes poursuivis par un responsable du traitement», qui ne soient pas déjà couverts par tous les alinéas précédents, semble vague et subjective et devra être mieux précisée dans le texte même et non laissée à un acte délégué (paragraphe 5), d'autant que le paragraphe 4 ne mentionne pas l’alinéa f) (c'est important par exemple pour les services de postes et le marketing direct (11)).

4.8   Article 7 – Consentement

Au paragraphe 3, il faudrait indiquer que le retrait du consentement empêche tout traitement futur, et qu’il ne compromet la licéité du traitement qu'à partir du moment du retrait du consentement.

4.9   Article 14 - Informations

4.9.1   Dans le paragraphe 4, alinéa b), il conviendra de fixer un délai maximum.

4.10   Article 31 – Notifications des violations aux autorités de contrôle (ADC)

4.10.1   La notification des violations quelles qu'elles soient risque de compromettre le fonctionnement du système et, en définitive, de constituer un obstacle à la responsabilisation effective des coupables.

4.11   Article 35 – Délégués à la protection des données

4.11.1   En ce qui concerne le délégué à la protection des données (DPD), il conviendrait de mieux préciser les conditions liées à cette fonction, notamment la protection contre les licenciements qui doit être clairement définie et s'étendre au-delà de la période pendant laquelle la personne concernée aura assumé cette fonction; les conditions de base assorties d'exigences claires pour exercer cette activité; le dégagement du DPD de toute responsabilité lorsque ce dernier a signalé des irrégularités à l'employeur ou aux autorités nationales de protection des données; le droit de participation directe des représentants du personnel à la désignation du DPD, et droit d’information périodique de ces représentants (12) quant aux problèmes rencontrés et à leur solution. La question des ressources affectées à la fonction devrait aussi être précisée.

4.12   Article 39 – Certification

4.12.1   La certification devra être une des tâches de la Commission.

4.13   Article 82 et 33 – Traitement des données en matière d'emploi

4.13.1   Il manque une référence explicite à l'évaluation de la performance (qui n'est pas évoquée non plus à l'article 20 portant sur le «profilage») à l'article 82. Il n'est en outre pas précisé si cette habilitation s'applique aussi à la formulation des dispositions concernant le DPD. L'interdiction du «profilage» en matière d'emploi devrait également être précisée en ce qui concerne l'analyse d’impact relative à la protection des données (article 33).

4.14   Article 81, 82, 83 et 84

4.14.1   Au lieu de «… dans les limites du présent règlement …» on devrait dire «… sur base du présent règlement …».

Ce qui fait défaut et devrait être inclus:

4.15   Champ d'application

4.15.1   S’agissant des droits fondamentaux, l’harmonisation dans des domaines spécifiques devrait permettre aux Etats membres d’adopter, dans leur droit national, des dispositions absentes ou plus favorables que celles prévues dans le règlement, tel qu’il est déjà consacré pour les domaines prévus aux articles 80 à 85.

4.15.2   Les adresses IP des personnes devraient être incluses expressément dans le corps du règlement dans les données personnelles à protéger et pas seulement dans les considérants.

4.15.3   Les moteurs de recherche, tirant l'essentiel de leurs revenus de la publicité, qui collectent des données personnelles sur leurs usagers et en font un usage commercial, doivent être inclus dans le champ d'application du règlement, et non seulement parmi les considérants.

4.15.4   Il faudrait préciser que les réseaux sociaux entrent dans le champ d'application, et pas seulement lorsqu'ils se livrent au profilage à des fins commerciales.

4.15.5   Certaines méthodes de contrôle et de filtrage de prétendant lutter contre la contrefaçon et, comme elles ont pour effet de profiler certains usagers du net, de les ficher et de contrôler tous leurs mouvements, en l'absence d'une autorisation judiciaire nominative, elles doivent aussi tomber dans le champ d'application du règlement.

4.15.6   Il serait également souhaitable que les institutions et organes de l'Union soient soumis aux obligations du règlement.

4.16   Article 9 - Catégories particulières de données

4.16.1   La meilleure façon de procéder consisterait à définir des régimes spéciaux en fonction des circonstances, des situations et des finalités des traitements des données. Il faut ajouter une interdiction de «profilage» dans ces domaines.

4.16.2   Il y a lieu d'introduire le principe de la non-discrimination dans le traitement des données sensibles à des fins statistiques.

4.17   Des possibilités (non exploitées) devraient être comprises dans les domaines suivants:

Participation, à tous échelons dans les États et en Europe, des représentants du personnel à l'élaboration de «règles d'entreprise contraignantes», qui devraient désormais être admises comme condition pour le transfert international des données (article 43);

information et consultation du Comité d'entreprise européen lors des transferts internationaux de données des employés, en particulier vers des pays tiers;

information et participation des partenaires sociaux européens et des ONG européennes de consommateurs et de défense des droits humains à la désignation des membres du Comité européen de la protection des données qui doit remplacer le groupe de travail «Article 29»;

information et participation de ces partenaires et des ONG précitées au niveau national à la désignation des membres des autorités nationales de protection des données, ce qui n'est pas prévu non plus.

4.18   Articles 74 à 77 – Actions de groupe en matière d'illégalité de fichiers et en dommages et intérêts

4.18.1   La plupart des violations des droits à la protection des données revêtent un caractère collectif: quand cela se produit, ce n’est pas une seule personne qui est visée par une même infraction, mais un groupe ou l’ensemble des personnes fichées. Les voies de recours juridictionnels individuels traditionnels ne sont pas adéquates pour réagir contre ce genre de violations. Or, si l’article 76 autorise tout organisme, toute organisation ou association qui œuvre à la protection des droits des personnes concernées à entamer, au nom d’une ou plusieurs personnes concernées, les procédures prévues aux articles 74 et 75, il n'en va pas de même lorsqu'il s'agit de demander une réparation ou une indemnisation en dommages et intérêts car, dans ce cas, l’article 77 ne prévoit cette possibilité que pour les personnes individuelles et n'admet pas une procédure de représentation collective ou d’action de groupe.

4.18.2   À cette fin, le Comité rappelle ce qu'il soutient depuis des années dans plusieurs avis, la nécessité et l'urgence de doter l'UE d'un instrument judiciaire harmonisé d'action de groupe au niveau européen, nécessaire dans beaucoup de domaines du droit de l'UE et comme cela existe dans plusieurs États membres.

Ce qui est inacceptable:

4.19   Article 8 - Enfants

4.19.1   «L'enfant» ayant été défini comme toute personne âgée de moins de 18 ans (article 4 (18)), conformément à la convention de New York, il n’est pas acceptable qu’au paragraphe 1 de l’article 8, on donne la possibilité à des enfants de 13 ans de «consentir» aux traitements de leurs données personnelles.

4.19.2   Bien que le CESE comprenne la nécessité de définir des règles spécifiques pour les PME, il n'est pas acceptable que la Commission puisse, par acte délégué, exempter purement et simplement les PME de l'obligation de respecter les droits des enfants.

4.20   Article 9 – Catégories particulières

4.20.1   De même, à l’article 9, paragraphe 2, alinéa a) il n’y a aucune raison que des enfants puissent donner leur «consentement» pour le traitement de données qui concernent leurs origine nationale, opinions politiques, religion, santé, vie sexuelle ou condamnations pénales.

4.20.2   Les données fournies volontairement par les personnes elles-mêmes, comme par exemple sur Facebook, ne devraient pas être exclues de la protection, comme on peut l'inférer de l'alinéa e) de l'article 9, et devraient bénéficier au moins du droit à l'oubli.

4.21   Article 13- Droits à l'égard des destinataires

4.21.1   L'exception de la partie finale – «à moins qu’une telle communication se révèle impossible ou suppose un effort disproportionné» - n’est ni justifiable ni acceptable.

4.22   Article 14 - Informations

4.22.1   L’exception identique au paragraphe 5, alinéa b) est également inacceptable.

4.23   Article 19 paragraphe 1 – Droit d’opposition

4.23.1   La formule vague utilisée comme exception – «raisons impérieuses et légitimes» n’est pas acceptable et vide de son contenu le droit d'opposition.

4.24   Article 20 - Profilage

4.24.1   La prohibition du profilage ne devra pas être restreinte aux traitements «automatisés» (13).

4.24.2   Dans le paragraphe 2, alinéa a) l’expression «…qui ont été invoquées …» doit être remplacée par «… qui ont été mises en place …».

4.25   Article 21 - Limitations

4.25.1   La rédaction de l’alinéa c) du paragraphe 1 est totalement inacceptable parce qu’elle contient des expressions vagues et indéfinies telles que: intérêt économique et financier, domaines budgétaires, monétaires ou fiscal et même, stabilité et intégrité des marchés, cette dernière formule ayant été ajoutée à la directive 95/46.

4.26   Articles 25, 28 et 35 – Limite des 250 travailleurs

4.26.1   Le seuil de 250 travailleurs, qui détermine l'applicabilité de certaines dispositions de protection, comme par exemple un délégué à la protection des données, aurait pour conséquence que seul un peu moins de 40 % des salariés bénéficieraient d'une telle disposition. La même limite en ce qui concerne l'obligation de documentation aurait pour conséquence que la grande majorité des salariés n'aurait dès lors aucune possibilité de surveiller l'utilisation de leurs données personnelles et il n'existerait donc plus aucun contrôle. Le Comité suggère d'envisager la possibilité d'un seuil plus bas, par exemple le nombre de travailleurs retenu en général dans les États membres pour la constitution d'une instance de représentation des intérêts du personnel au sein des entreprises. Une autre approche basée sur des critères objectifs pourrait être envisagée qui s'appuierait, par exemple, sur le nombre de fichiers de protection de données traités dans un laps de temps à déterminer, indépendamment de la dimension de l’entreprise ou du service concerné.

4.27   Article 51 - Le «guichet unique»

4.27.1   Si, pour faciliter la vie des entreprises et rendre plus efficaces les mécanismes de protection des données, le principe du «guichet unique» se conçoit, il est néanmoins susceptible d’entraîner une détérioration sensible de la protection des données relatives aux citoyens en général et des données personnelles des travailleurs en particulier, rendant caduque l'obligation actuelle de faire en sorte que les transferts de données personnelles fassent l'objet d'un accord d'entreprise et soient approuvés par une commission nationale de protection des données (14).

4.27.2   Par ailleurs, ce système paraît contraire au souci d’une gestion de proximité et risque de priver le citoyen de la possibilité de voir sa demande instruite par l’autorité de contrôle qui lui sera la plus proche et la plus accessible.

4.27.3   Il y a donc des raisons qui militent en faveur du maintien de la compétence de l’autorité de l’État membre de résidence du plaignant.

Bruxelles, le 23 mai 2012.

Le président du Comité économique et social européen

Staffan NILSSON


(1)  COM(2012) 11 final.

(2)  COM(2012) 9 final.

(3)  COM(2012) 10 final.

(4)  COM(2012) 12 final.

(5)  Elles insistent sur la nécessité pour l’Union de «se doter d’un régime complet de protection des données personnelles couvrant l’ensemble des compétences de l’Union» et de «veiller à ce que le droit fondamental à la protection des données soit appliqué systématiquement», de façon à ce que les personnes physiques aient le droit d’exercer un contrôle effectif sur leurs données.

(6)  Voir avis du CESE sur la «Réutilisation des informations du secteur public»JO C 191 du 29.6.2012, p. 129.

(7)  Voir avis du CESE, JO C 248 du 25.08.2011, page 123.

(8)  Opinion of the European Data Protection Supervisor on «Data Protection Package», 7 mars 2012.

(9)  COM(2009) 673 final du 9.12.2009.

(10)  Cf. l'objection de non-conformité au principe de subsidiarité formulée par le Sénat français.

(11)  On devrait avoir davantage de précisions sur la question de la prospection par lettres adressées nominativement car l'application en l'état du règlement conduirait à son interdiction, alors qu'elle constitue une méthode peu intrusive et ciblée de prospection de nouveaux clients.

(12)  Par exemple, communication d’un rapport périodique de l’activité du DPD aux représentants du personnel, ou aux élus des salariés du Conseil d’administration ou du Conseil de surveillance, national et/ou européen, là où ils existent.

(13)  Voir recommandation CM/Rec(2010)13 du Comité des ministres du Conseil de l'Europe, 23 novembre 2010.

(14)  En particulier, les autorités administratives indépendantes chargées d’autoriser et de contrôler la constitution de fichiers nominatifs; au contraire, leurs compétences devraient être élargies dans la société numérique et sur les réseaux sociaux, et du fait de la valeur d’échange des profils individuels pour la prospection commerciale.


ANNEXE

à l'avis du Comité économique et social européen

L'amendement suivant, qui a obtenu au moins le quart des votes exprimés, a été rejeté au cours du débat (article 54(3) du Règlement intérieur):

Supprimer les paragraphes 4.25 et 4.25.1

«

»

Vote

Pour

:

87

Contre

:

89

Abstentions

:

26


31.7.2012   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 229/98


Avis du Comité économique et social européen sur la «Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — un cadre de qualité pour les services d'intérêt général en Europe»

COM(2011) 900 final

2012/C 229/18

Rapporteur: M. SIMONS

Le 20 décembre 2011, la Commission a décidé, conformément à l'article 304 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la:

«Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — Un cadre de qualité pour les services d'intérêt général en Europe»

COM(2011) 900 final.

La section spécialisée «Transports, énergie, infrastructures, société de l'information», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 10 mai 2012.

Lors de sa 481e session plénière des 23 et 24 mai 2012 (séance du 23 mai 2012), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 145 voix pour, 2 voix contre et 7 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1   Le Comité déplore profondément que le titre de la communication prête à confusion et suggère un contenu d'une portée plus vaste qu'il ne l'est en réalité. La confusion tient au fait que le terme «cadre de qualité» semble avoir ici une signification différente de la valeur commune reconnue de «qualité» telle que l'entendent l'article 14 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE) et son protocole no 26, valeur qui n'est absolument pas évoquée dans la communication en général, pas plus que dans l'examen secteur par secteur.

1.2   Le Comité convient qu'il est nécessaire de publier cette note explicative sur les services d'intérêt général. Pour autant que cette explication figure dans la communication de la Commission, il y souscrit, moyennant la prise en compte des observations qu'il formule. Au cours des dernières années, le CESE a insisté de manière répétée sur la nécessité de services d'intérêt général efficaces, modernes et de bonne qualité.

1.3   Le Comité reste persuadé qu'il est indispensable de traduire les nouvelles dispositions du droit primaire sur les SIG dans le droit dérivé sectoriel et le cas échéant transversal.

1.4   La crise économique et financière actuelle montre une nouvelle fois très clairement à quel point les services d'intérêt général jouent un rôle central pour assurer la cohésion sociale et territoriale. À cet égard, nous ne devons pas perdre de vue les contraintes auxquelles les moyens financiers du secteur public sont soumis du fait de décisions politiques. Le Comité convient qu'il est urgent de prendre des mesures adéquates pour assurer la pérennité des services et en améliorer la qualité.

1.5   Le Comité estime que le cadre institutionnel (l'article 14 TFUE, son protocole no 26 et l'article 36 de la charte des droits fondamentaux) constitue une bonne base pour une poursuite de la mise en œuvre. Toutefois, il juge que la communication ne propose pas encore l'approche cohérente et spécifique qui s'impose en matière de services d'intérêt général.

1.6   Fournir, faire exécuter et financer des services d'intérêt économique général est et reste, selon le Comité, une compétence des États membres exercée au moyen d'une législation sectorielle offrant des solutions sur mesure, alors que la compétence législative de l'UE se situe surtout au niveau de la définition des conditions économiques et financières générales et du contrôle concernant les erreurs manifestes.

1.7   Le Comité estime qu'un examen permanent est nécessaire dans le cadre de la révision de la réglementation sectorielle existante, qui inclut les obligations de service universel, sur la base des nouvelles dispositions du droit primaire, de l'évolution des besoins des utilisateurs et des mutations technologiques et économiques. Et ce, en coopération avec les parties prenantes et la société civile organisée. Selon le Comité, cette révision doit reposer sur une approche qui tienne compte de l'emploi comme de la cohésion sociale et territoriale, car ces aspects ont jusqu'à présent été négligés.

1.8   Le protocole no 26 insiste sur les compétences dont disposent les États membres pour fournir, faire exécuter et organiser des services non économiques d'intérêt public. Le Comité considère que les États membres sont donc responsables au premier chef de leurs évaluations aux niveaux national, régional ou local et qu'à la Commission, il incombe uniquement de diffuser les «bonnes pratiques» et de contrôler ces services au regard des principes généraux établis par les traités de l'UE.

1.9   Le Comité apprécie que dans la communication, la Commission tente de fournir des précisions sur les notions fondamentales utilisées dans le cadre des débats sur les services d'intérêt général et concernant directement les clients et les utilisateurs, et donc, de manière générale, les citoyens. Ses explications sont hélas incomplètes. Le Comité est d'avis que la définition des services d'intérêt général ne devrait pas se limiter à faire référence à l'existence d'un marché. Citons par exemple à cet égard le processus de décision politique dans les États membres, légitimé démocratiquement. Il conviendrait de procéder à une large concertation et de publier une version révisée d'un glossaire explicatif des notions concernées qui n'ouvre plus la porte à des divergences d'interprétation suivant les versions linguistiques, de manière à éviter toute erreur en la matière.

1.10   Le Comité peut souscrire à l'idée d'apporter une clarté et une sécurité juridique accrues en ce qui concerne les règles de l'UE applicables aux services d'intérêt économique général. Il approuve également, surtout s'ils sont dûment rédigés par des spécialistes, la proposition que la Commission publie des «guides» en vue d'améliorer la connaissance et l'application de ces règles.

1.11   S'agissant de garantir un accès durable aux services essentiels, comme les services postaux, les services bancaires de base, les transports publics, l'énergie et les communications électroniques, il importe d'établir un droit d'accès universel, en particulier pour les clients vulnérables tels que les personnes handicapées ou celles vivant sous le seuil de pauvreté. Sur la base du système juridique en vigueur et sous l'œil attentif de la Commission, les États membres doivent en permanence évaluer avec soin l'opportunité de maintenir ou intégrer ces services dans le secteur public ou de les confier (en partie) au marché moyennant des conditions strictes.

1.12   Le Comité est d'avis que la communication à l'examen aurait dû accorder davantage d'attention aux services d'intérêt général ressortissant au domaine social ou à celui de la santé et aux services liés au marché de l'emploi. Aussi invite-t-il la Commission à intensifier son travail de précision de la notion de services sociaux d'intérêt général. Tout comme la Commission, il estime que dans l'UE, ces derniers jouent également un rôle capital, dans des secteurs comme les prestations de santé, l'accueil de l'enfance, la prise en charge des personnes âgées, l'assistance aux personnes handicapées, le logement social ou les services liés au marché de l'emploi.

1.13   Le Comité appelle la Commission à présenter rapidement des propositions en ce qui concerne la promotion des initiatives relatives à la qualité, en particulier pour les services sociaux d'intérêt général, étant donné que la communication à l'examen n'y prête guère attention et que, par ailleurs, la demande pour ces services augmente tandis que leur financement devient de plus en plus problématique. En outre, la Commission devrait poursuivre son action en tirant parti de la mise en œuvre, au niveau des États membres, du cadre européen volontaire pour la qualité des services sociaux d'intérêt général.

2.   Introduction

2.1   L'entrée en vigueur du traité de Lisbonne a instauré de nouvelles dispositions en en ce qui concerne les services d'intérêt général, à savoir l'article 14 du TFUE et le protocole no 26, relatif à l'interprétation de la notion de «valeurs communes» mentionnée par ledit article 14, ainsi qu'aux services d'intérêt général de nature non économique. En outre, l'article 36 de la charte des droits fondamentaux a reçu la même valeur juridique que les traités.

2.2   Par ailleurs, la crise économique et financière persistante met en évidence le rôle central de ces services pour garantir la cohésion sociale et territoriale, ainsi que l'incidence de la crise sur le secteur public. Des études révèlent que les «services publics», qui englobent bien davantage que les seuls services d'intérêt général, représentent plus de 26 % du PIB des 27 États membres de l'UE et procurent un emploi à 30 % de sa main-d'œuvre.

2.3   Telles sont donc les principales raisons pour lesquelles la Commission a décidé de publier la communication à l'examen.

3.   Contenu du document de la Commission

3.1   Selon la Commission, le cadre de qualité doit faire en sorte que l'encadrement réglementaire défini au niveau de l’UE continue de renforcer la dimension sociale du marché unique, tienne davantage compte de la nature spécifique de ces services et permette de relever le défi de fournir ces services dans le respect des valeurs reconnues par le protocole no 26, à savoir leur niveau élevé de qualité et de sécurité, leur caractère abordable, l'égalité de traitement et la promotion de l'accès universel et des droits des utilisateurs.

3.2   La Commission constate qu'au fil des ans, la demande de services d’intérêt général, de même que leurs modalités de prestation, ont sensiblement évolué. Auparavant, estime-t-elle, ils étaient fournis par le gouvernement central, alors qu'aujourd'hui, ils sont largement délégués à des instances publiques de niveau inférieur ou au secteur privé, grâce à une réglementation spécifique.

3.3   Le processus de libéralisation, l’évolution des priorités des politiques publiques, ainsi que certaines modifications des besoins et des attentes des utilisateurs, ont accentué les tendances décrites au paragraphe 3.2. Comme nombre de ces services revêtent un caractère économique, les règles relatives au marché intérieur et à la concurrence leur sont applicables, «dans la mesure où l'application desdites règles ne fait pas échec à l'accomplissement, en droit ou en fait, de la mission particulière qui leur a été impartie».

3.4   Bien que certains s'inquiètent des répercussions de ces règles, notamment sur les services sociaux, la Commission considère qu’il est possible de les appliquer d'une manière qui tienne compte des besoins spécifiques et renforce l'offre de services, moyennant bien entendu une certaine souplesse indispensable dans leur application.

3.5   Le «cadre de qualité» présenté par la Commission est constitué de trois volets d'action, que la Commission ne traduit pas en propositions concrètes.

4.   Observations d'ordre général

4.1   Le Comité déplore profondément que le titre de la communication prête à confusion et suggère un contenu d'une portée plus vaste qu'il ne l'est en réalité. La confusion tient au fait que le terme «cadre de qualité» semble avoir ici une signification différente de la valeur commune reconnue de «qualité» telle que l'entendent l'article 14 du TFUE et son protocole no 26, valeur qui n'est absolument pas évoquée dans la communication en général, pas plus que dans l'examen secteur par secteur. Le même constat vaut pour d'autres valeurs telles que la sécurité, le caractère abordable, l'égalité de traitement et la promotion de l'accès universel et des droits des utilisateurs.

4.2   Il est tout aussi regrettable que la communication ne s'accompagne pas d'une analyse d'impact, car il y aurait beaucoup à dire sur les affirmations et les constatations de la Commission, notamment celles évoquées au paragraphe 3.2. Ainsi, selon le Comité et les experts, il n'est pas nouveau que les niveaux régional et local offrent ce type de services.

4.3   Le Comité convient qu'il est nécessaire de publier cette note explicative sur les services d'intérêt général. Dans des avis antérieurs (1), il a déjà mis en évidence la nécessité de disposer de services d'intérêt général efficaces, modernes, accessibles et abordables, qui sont l'un des piliers du modèle social européen et de l'économie sociale de marché, ainsi que de leur accorder une attention constante, en particulier en cette période où la crise financière et économique sévit en Europe.

4.4   À cet égard, le Comité approuve l'approche de la Commission et l'encourage à poursuivre ses travaux en vue de la reconnaissance des particularités spécifiques des services sociaux d'intérêt général, par exemple dans le domaine des règles relatives aux aides d'État et aux services liés au marché de l'emploi.

4.5   Le Comité reste persuadé qu'il est indispensable de traduire les nouvelles dispositions du droit primaire sur les SIG dans le droit dérivé sectoriel et le cas échéant transversal.

4.6   Le Comité est d'avis que la communication à l'examen aurait dû accorder davantage d'attention aux services d'intérêt général ressortissant au domaine social ou à celui de la santé. Aussi invite-t-il la Commission à intensifier son travail de précision de la notion de services sociaux d'intérêt général. Il fait par ailleurs remarquer qu'il peut y avoir d'autres services d'intérêt général que ceux cités par la Commission, par exemple dans les secteurs de la culture, de l'enseignement, de la radiodiffusion publique, etc. Tout comme la Commission, il estime que dans l'UE, les services sociaux d'intérêt général jouent également un rôle capital, dans des secteurs comme les soins de santé, l'accueil de l'enfance, la prise en charge des personnes âgées, l'assistance aux personnes handicapées, le logement social ou les services liés au marché de l'emploi.

4.7   Avec l'introduction de nouvelles dispositions à la suite de l'entrée en vigueur du traité de Lisbonne, à savoir l'article 14 du TFUE et son protocole no 26 relatif aux services d'intérêt général, ainsi que l'article 36 de la charte des droits fondamentaux qui a reçu à cette occasion la même valeur juridique que les traités, les conditions ont été créées pour que la Commission regroupe l'ensemble de ses initiatives en la matière. Le Comité juge cette avancée positive, bien qu'il convienne d'observer que la communication à l'examen ne présente pas encore l'approche cohérente et spécifique qui s'impose en matière de services d'intérêt général, comme l'accès aux services. Il invite dès lors la Commission à présenter des propositions concrètes.

4.8   L'article 14 du TFUE a conféré à l'UE une compétence législative dans le domaine des services d'intérêt économique général, à savoir la définition par voie réglementaire des principes et des conditions, notamment économiques et financières, auxquels ces services doivent répondre pour être en mesure de remplir leurs fonctions. Selon le Comité, il ressort clairement du contexte de l'article que ce ne sont pas ici les conditions du service lui-même qui sont visées, celles-ci étant définies par les autorités nationales, mais bien les conditions générales et sectorielles dans les domaines de compétences de l'UE (dans ce contexte, l'on entend par autorités nationales le pouvoir central ainsi que les collectivités régionales et locales).

4.9   L’article précise que la compétence de fournir, de faire exécuter et de financer ces services est et reste du ressort des autorités nationales et infranationales des États membres. Par le passé déjà, le Comité n'a cessé de défendre lui aussi cette position. Par conséquent, la Commission devrait continuer à accumuler des connaissances concernant ces services au niveau national, afin d'être en mesure de porter un jugement sur l'application qui y est faite des règles européennes.

4.10   La Commission indique qu'elle continuera d’examiner l’opportunité de revoir la réglementation sectorielle existante qui inclut les obligations de service universel. Le Comité souhaite signaler à cet égard qu'il est indispensable de procéder à cet examen permanent sur la base des nouvelles dispositions du droit primaire, de l'évolution des besoins des utilisateurs et des mutations technologiques et économiques et en collaboration avec les parties prenantes et la société civile. Cette démarche s'impose assurément lorsqu'il s'agit d'explorer les besoins en matière de nouvelles obligations de service universel dans d'autres secteurs. Le Comité a déjà formule son point de vue à cet égard dans un avis antérieur (2).

4.11   Le protocole no 26 établit, en son article premier, les principes fondamentaux applicables aux services économiques d’intérêt général et énonce, en son article 2, les compétences des États membres pour fournir, faire exécuter et organiser des services d'intérêt général de nature non économique. Le Comité considère que les États membres sont donc responsables au premier chef de l'évaluation, aux niveaux national, régional ou local, des services mentionnés à l'article 2; la seule tâche qui incombe à la Commission européenne, dans le cadre du contrôle sur les erreurs manifestes, est de s'assurer que ces services sont conformes aux principes généraux établis par les traités de l'UE.

4.12   Le Comité apprécie que la Commission tente de fournir des précisions concernant les différentes notions utilisées dans le cadre des débats sur les services d'intérêt général. Hélas, elle n'est pas exhaustive à cet égard et tombe même parfois dans l'erreur. Ainsi, elle omet de donner la signification de la notion de «services essentiels» et sa place dans l'ensemble. La question se pose également de savoir si, dans la version néerlandaise, le mot «onmisbaar» (page 3, deuxième tiret) est équivalent à «essentieel». En outre, l'énumération des obligations spécifiques de service universel n'est pas complète. La communication de la Commission fournit elle-même un exemple de confusion, puisque le titre et la première phrase du volet d'action 2 parle de services «essentiels», alors que dans l'ensemble du texte qui suit, il est question d'«obligations de service universel». La Commission ne peut se dispenser de recourir à l'assistance d'experts de renom pour formuler clairement les notions fondamentales utilisées dans le cadre des services d'intérêt général.

4.13   Il convient également de signaler que les différentes versions linguistiques ménagent des possibilités d'interprétations divergentes – et cette remarque ne concerne pas seulement la liste des notions fondamentales. La question se pose ainsi de savoir si l'on parle à chaque fois de choses différentes lorsque l'on utilise côte à côte les notions d'«accès universe» et de «service universel» ou celles de «service d'utilité publique» et d'«obligation de service public» ou encore de «mission de service public». Exemple caractéristique de cette confusion, la Commission affirme, dans son encadré sur les notions fondamentales, qu'elle renonce à utiliser l'expression «services publics» et, quatre paragraphes après, évoque les «conditions permettant à des services publics spécifiques de remplir leurs missions».

4.14   Il convient donc de recommander de procéder à une large concertation sur ces questions et de publier une version révisée d'un glossaire explicatif des notions concernées, de manière à éviter les erreurs d'interprétation. Ce faisant, il conviendra de tenir compte des différences entre les systèmes sociaux des États membres.

5.   Observations spécifiques

5.1   Le Comité considère que l'approche adoptée par la Commission pour l'élaboration de sa communication, consistant à présenter trois volets d'action qui sont mentionnés au paragraphe 3.5, offre un cadre qui se prête bien à être étoffé ultérieurement.

5.2   Le premier volet d'action vise à apporter une clarté et une sécurité juridique accrues en ce qui concerne les règles de l'UE applicables aux services d'intérêt général. Il est évident que le Comité porte un jugement positif sur cet objectif, car il plaide depuis des années en ce sens. Malheureusement, force est de constater que cette démarche ne s'accompagne pas de propositions concrètes.

5.3   S'agissant de la révision des règles en matière d'aides d'État applicables aux services d'intérêt général, la Commission a déjà approuvé ou proposé les changements suivants:

5.3.1

une nouvelle communication qui aborde de manière plus détaillée les problèmes d'interprétation qui se posent aux niveaux national, régional et local,

5.3.2

l'augmentation du nombre de services sociaux qui, pour autant qu'ils remplissent certaines conditions, sont exemptés de l'obligation d'être notifiés préalablement et de faire l’objet d’une appréciation de la part de la Commission. Outre les hôpitaux et le logement social, cette liste comprend à présent, des services d’intérêt économique général répondant à des besoins sociaux dans le domaine de la santé et des soins de longue durée, de l'aide à l'enfance, de l’accès au marché du travail et de la réinsertion sur ce dernier, ainsi que de l'aide aux groupes vulnérables et de leur inclusion sociale,

5.3.3

une étude plus approfondie et plus ciblée des mesures d'aide qui peuvent avoir une forte incidence sur le fonctionnement du marché intérieur,

5.3.4

la proposition d'une nouvelle règle de minimis propre aux services d'intérêt économique général, en vertu de laquelle un concours financier ne sera pas considéré comme une aide lorsque son montant annuel n'excédera pas 500 000 euros sur une période de trois ans. Pour certains secteurs – la Commission cite ceux des transports et de la radiodiffusion publique – des règles sectorielles spécifiques restent applicables.

5.4   En ce qui concerne les propositions relatives à la réforme des règles concernant les marchés publics et les concessions que la Commission a présentées dans le but d'améliorer la qualité de la prestation des services d'intérêt économique général, les éléments pertinents sont les suivants.

5.4.1

Pour les services sociaux et les services de santé, il est prévu un traitement spécifique, allégé, qui tient compte de leur rôle particulier et de leurs caractéristiques spécifiques. Des seuils supérieurs leur seront appliqués et il ne leur sera imposé que des obligations de transparence et d'égalité de traitement. Le recours au critère de «l'offre économiquement la plus avantageuse» est encouragé (la notion de «l’offre économiquement la plus avantageuse», selon la Commission européenne, recouvre également les aspects sociaux et environnementaux).

5.4.2

Une plus grande sécurité juridique est assurée sur la question de la manière dont les règles de l'UE concernant les marchés publics s'appliquent aux relations entre les autorités publiques. Sur ce point, il est fait mention du récent avis du Comité sur «Passation des marchés publics et contrats de concession».

5.5   Par ailleurs, le Comité se félicite vivement, surtout s'ils sont élaborés avec le concours d'experts renommés, que la Commission publie des «guides» en vue de favoriser la connaissance et l'application des règles de l'UE en matière de services d'intérêt général économique.

5.6   Dans le deuxième volet d'action, concernant la garantie d'un accès durable aux services essentiels, la Commission s'efforce de maintenir un équilibre entre la nécessité d'accroître la concurrence et celle de garantir que tout citoyen continue d'avoir accès à des services essentiels de grande qualité à des prix abordables, comme elle l'expliquait d'ailleurs déjà dans son livre blanc de 2004 consacré au même sujet.

5.7   Dans ce contexte, la Commission cite les exemples suivants de services essentiels: les services postaux, les services bancaires de base, les transports publics (de passagers), l'énergie et les communications électroniques. Se référant au paragraphe 4.6, le Comité présume que cette énumération n'est pas limitative. Il considère que les exemples cités sont également des services essentiels, qui doivent être abordables et donner lieu à un droit d'accès universel, en particulier pour les personnes qui demandent à être protégées et soutenues, comme celles qui sont handicapées ou touchées par la pauvreté et l'exclusion. En cas de conflit avec les règles de concurrence, ce sera l'intérêt général qui prévaudra.

5.8   Le troisième volet d'action concerne la promotion des initiatives relatives à la qualité, en particulier dans le cas des services sociaux d'intérêt général, pour lesquels la demande augmente au sein de la société tandis que leur financement devient de plus en plus problématique en raison, d'une part, de la crise économique et financière et d'autre part du vieillissement de la population.

5.9   À cet égard, le Comité tient avant tout à rappeler qu'il attend encore la communication de la Commission sur les services de santé qu'elle avait promis de publier en rapport avec les services d'intérêt général.

5.10   Pour ce troisième volet d'action, la Commission met en exergue quatre initiatives à titre d'exemple. Le Comité souhaite faire observer que sur les quatre, trois concernent des actions qui ont déjà été lancées précédemment. En conséquence, le soutien de nouveaux projets transnationaux qui est envisagé au titre du programme Progress ne devrait pas porter uniquement sur la mise en œuvre des cadres européens volontaires pour la qualité, mais également sur la prise en compte des résultats obtenus par ces projets.

5.11   S'agissant des marchés publics, le Comité se félicite de l'importance qu'attache la Commission à leur attribution «au moindre coût pour la collectivité» et non pas nécessairement au prix le plus bas. Il s'agit là d'un élément crucial notamment lors du dosage optimal entre politique sociale et services liés au marché de l'emploi, des facteurs qui influent fortement l'un sur l'autre. Il est cependant nécessaire de renforcer dans toute la société l'aspect social des marchés publics.

Bruxelles, le 23 mai 2012.

Le président du Comité économique et social européen

Staffan NILSSON


(1)  JO C 48 du 15.02.2011, pp. 77-80, JO C 128 du 18.05.2010, pp. 65-68, JO C 162 du 25.06.2008, pp.42-45, JO C 309 du 16.12.2006, pp. 135-141.

(2)  JO C 48 du 15.02.2011, pp.77-80.


31.7.2012   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 229/103


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de règlement du Conseil instituant un instrument relatif à la coopération en matière de sûreté nucléaire»

COM(2011) 841 final

2012/C 229/19

Rapporteur: M. Richard ADAMS

Le 7 décembre 2011, la Commission européenne a décidé, conformément à l'article 203 du traité instituant la Communauté européenne de l'énergie atomique, de consulter le Comité économique et social européen sur la

«Proposition de règlement du Conseil instituant un instrument relatif à la coopération en matière de sûreté nucléaire»

COM(2011) 841 final.

La section spécialisée «Transports, énergie, infrastructures, société de l'information», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 10 mai 2012.

Lors de sa 481e session plénière des 23 et 24 mai 2012 (séance du 23 mai 2012), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 146 voix pour, 5 voix contre et 6 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1   Le Comité se félicite du règlement qui est proposé et il est favorable, sous certaines conditions, à ce que les pays tiers bénéficient dans une plus large mesure de l'expertise de l'UE en matière de sûreté nucléaire.

1.2   Le Comité constate que le contrôle de l'enveloppe financière, qui atteint le montant appréciable de 631 millions d'euros pour la période 2014-2020, sera confié à EuropeAid – direction générale Développement et coopération et régi par les règles et procédures communes à toutes les politiques d'aide et de développement. Ce dispositif devrait, à son estime, renforcer la fiabilité de cette coopération, sa transparence et sa cohérence avec les autres programmes d'aide.

1.3   Relevant que tous les deux ans à dater de 2016, il recevra de la Commission un rapport sur la mise en œuvre du programme, ses aboutissements et ses effets et retombées les plus importants en ce qui concerne l'aide financière extérieure de l'Union, le Comité compte bien être pleinement associé à ce processus d'examen et d'évaluation. La planification en temps opportun des examens à mi-parcours des programmes devait leur conférer un potentiel maximal de production de résultats et s'effectuer en collaboration avec les programmes géographiques et les délégations de l'UE dans les pays partenaires.

1.4   Il convient de noter que les avis de la société civile européenne à l'égard du développement de l'énergie nucléaire en général varient considérablement d'un État membre à l'autre et le règlement, sous certains aspects, devrait faire donner plus de relief à cet état de fait.

1.5   À l'intention des citoyens européens, en tant que contribuables, il y aurait lieu de préciser en particulier que la majeure partie des dépenses du programme seront affectées à des actions d'assainissement et que seule une faible fraction de l'enveloppe prévue ira à des programmes de conseil dans des économies émergentes dont la stabilité, au plan de la politique et de la société, peut être assurée.

1.6   Pour prêter assistance à des pays émergents, la Commission devrait proposer que les quelques États qui ont la capacité de fournir des activités de consultance en matière nucléaire élaborent une convention internationale sur les critères et préalables à respecter dans ces actions de conseil. Indépendamment d'un tel accord, il serait opportun que l'instrument relatif à la coopération en matière de sûreté nucléaire (ICSN) soit doté de critères clairs qui permettent de décider si un pays émergent:

respecte les critères minimums de stabilité nationale et internationale,

dispose des capacités et de la bonne préparation voulues afin d'assurer la mise en place de la structure administrative, scientifique et technique nécessaire pour se lancer dans la filière nucléaire,

est à même de dégager durablement les ressources financières, techniques et industrielles voulues pour garantir le degré élevé de compétence réglementaire pour fournir tous les instruments requis aux fins d'un fonctionnement sûr, ainsi que de prévoir un programme de gestion à long terme des déchets nucléaires.

1.7   Ces critères ne devraient pas figurer dans l'annexe du règlement mais être repris dans son texte même, car ils couvrent des principes généraux, d'une haute portée, touchant à la sûreté nucléaire internationale, à celle des relations internationales et à la sécurité internationale.

1.8   Des projets d'assistance ne devraient être menés dans un pays émergent que s'il est partie signataire du traité de non-prolifération et de ses protocoles, la convention sur la sûreté nucléaire ainsi que de la convention commune sur la sûreté de la gestion des déchets radioactifs.

1.9   Il ne devrait être fourni de ressources pour l'acquisition d'équipements techniques que dans des cas exceptionnels, en rapport avec une assurance de sécurité. La Commission devrait développer des critères à ce sujet et en rendre compte. L'assistance concernée ne devrait pas être octroyée à des opérateurs.

1.10   Pour favoriser la transparence, il est recommandé de diffuser les études de cas tirées du programme actuel, ainsi que d'améliorer la présentation du site d'EuropeAid et ses références croisées.

1.11   L'ICSN devrait mener une action de promotion et d'évaluation des possibilités existant pour incorporer des instruments contraignants dans le droit de tout pays couvert par ses activités dans la mesure où ils seraient susceptibles de mettre en œuvre ou de renforcer les traités, conventions et accords de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA).

1.12   Le Comité recommande tout particulièrement d'inclure dans le programme une aide aux organisations indépendantes ressortissant de la société civile dans les pays bénéficiaires ou ceux de leur voisinage qui souhaitent accroître par des actions spécifiques la fiabilité et la transparence de la culture de sûreté nucléaire.

2.   Introduction

2.1   Les questions de sûreté et de sécurité du nucléaire hors Europe viennent sporadiquement faire les gros titres de l'actualité, les exemples les plus frappants étant ceux de Three Mile Island, en 1979, de Tchernobyl, en 1986, et de Fukushima, en 2011. De tels accidents trouvent un écho mondial et attirent l'attention sur les effets catastrophiques qui peuvent résulter de défauts de conceptions, d'une culture médiocre en matière de sûreté ou de l'insuffisance de la sécurité opérationnelle et du cadre réglementaire.

2.2   En 2010, 441 réacteurs nucléaires étaient en activité dans 30 pays à travers le monde. Nombre d'entre eux ont été construits dans les décennies 1970 et 1980, pour une durée de vie moyenne d'environ 35 ans. En outre, 56 pays exploitent quelque 250 réacteurs civils de recherche. Plus de 60 nouveaux réacteurs nucléaires destinés à produire de l'électricité sont en construction et le nombre de ceux qui en sont au stade du projet dépasse les 150. Ces réacteurs supplémentaires seront installés avant tout en Chine, en Inde et en Russie mais aussi, peut-être, dans le Sud-Est asiatique, en Amérique latine et au Moyen-Orient. La demande d''électricité augmente inexorablement et certains États peuvent également chercher à exporter davantage encore d'électricité d'origine nucléaire.

2.3   Que nous assistions ou non à sa «renaissance» l'énergie atomique posera toujours, aussi longtemps que des centrales nucléaires seront en activité, d'importantes questions de sécurité du nucléaire, dont l'impact peut être planétaire. Telle est la raison pour laquelle l'UE avance que certains aspects de la sûreté du nucléaire représentent un domaine qui appellent à juste titre sa sollicitude et son engagement, d'autant que depuis le traité Euratom, de 1957, elle n'a cessé de développer dans ce secteur une expertise en matière de recherche, de technologie, d'exploitation et de réglementation. Hébergeant le tiers environ de la capacité nucléaire installée dans le monde et forte de l'expérience la plus étendue concernant des dispositifs divers et dynamiques dans le domaine réglementaire et sécuritaire, l'Europe dispose d'un important réservoir de connaissances en la matière. En fournissant un exemple tragique des faiblesses dont pouvaient souffrir les structures de sûreté de pays tiers, Tchernobyl a, en son temps, encouragé à adopter une approche de dynamisme et d'anticipation vis-à-vis de la coopération pour la sûreté et des risques de prolifération.

2.4   À partir de 1991, l'UE a apporté une assistance de grande ampleur à des pays tiers dans le cadre de son programme TACIS (Technical Assistance to the Commonwealth of Independant States, «assistance technique à la Communauté des États indépendants»). Cette aide a ciblé l'analyse de la sûreté, l'assistance sur site aux centrales nucléaires, avec, dans certains cas, la fourniture d'équipements destinés à améliorer le contrôle de leur fonctionnement, les activités de réglementation et d'autorisation et la gestion des déchets. L'Union a également pris part à des initiatives internationales plus larges, s'agissant notamment d'actions menées à Tchernobyl. Quelque 1,3 milliard d'euros ont été alloués à l'aide en matière de sûreté nucléaire, en Russie et en Ukraine tout particulièrement et, à une échelle nettement moindre, en Arménie et au Kazakhstan.

2.5   L'ICSN (1), qui a succédé à TACIS en 2007 a pour mission spécifique de promouvoir et développer la sûreté nucléaire et son champ d'application ne se limite plus aux États issus de l'éclatement de l'Union soviétique. Il dispose d'un budget de 524 millions d'euros pour la période 2007-2013 et finance des actions destinées à améliorer la sûreté nucléaire, la sécurité du transport, le traitement et l'élimination des déchets radioactifs, la réhabilitation d'anciens sites nucléaires, la protection contre les radiations ionisantes émises par les matières radioactives, la préparation aux situations d'urgence ou la promotion de la coopération internationale dans le domaine de la sûreté nucléaire.

2.6   L'UE travaille en collaboration étroite avec l'AIEA, en fournissant souvent les ressources pour la mise en œuvre de programmes qui, bien que recommandés par cette dernière, resteraient privés de financement à défaut de cette intervention.

2.7   Un nouveau défi est apparu dès lors que des pays tiers affichent l'intention de développer des capacités de production d'électricité d'origine nucléaire. Certains de ces États en phase d'émergence n'ont pas toujours des structures politiques stables et présentent des carences pour ce qui est de la séparation des pouvoirs, du contrôle démocratique, de l'existence de structures administratives éprouvées ou de l'expertise pour la gestion des technologies à haut risque. De nouveaux risques en matière de sûreté du nucléaire pourraient surgir dès lors qu'ils se trouveraient indirectement encouragés à développer les technologies nucléaires du fait du vernis de crédibilité que l'assistance dispensée par l'UE conférerait à leur programme en la matière.

2.8   Indépendamment de ces considérations et quelles que soient les intentions de pays tiers de se doter de capacités de production d'énergie nucléaire, le CESE a conscience que l'utilisation du nucléaire à des fins civiles débouche sur la production de plutonium ou d'autres matières radioactives, ainsi que sur l'acquisition d'un savoir-faire technique qui pourrait provoquer un péril nucléaire international et accentuer les tensions à ce niveau. Les pays tiers instables pourraient présenter des risques accrus à cet égard.

3.   Résumé de la proposition de règlement

3.1   Le règlement actuellement proposé, qui constitue une refonte de celui de 2007 instituant l'ICSN, procède notamment à une révision de son extension géographique, de façon à y inclure tous les pays tiers, dans le monde entier, et définit les priorités et critères de coopération. La responsabilité pour la mise en œuvre des actions incombe à EuropeAid – direction générale Développement et coopération (DEVCO), avec le concours des directions générales Action extérieure et Énergie et du Centre commun de recherche. Le règlement sera notamment soumis aux «Règles et modalités communes pour la mise en œuvre des instruments pour l’action extérieure de l’Union» (COM(2011) 842 final). Ce texte instaure également une procédure de mise en œuvre simplifiée pour l'instrument de la coopération au développement (ICD), l'instrument européen pour la démocratie et les droits de l'homme (IEDDH), l'instrument européen de voisinage (IEV), l'instrument de stabilité (IS), l'instrument d'aide de préadhésion (IAP) et l'instrument de partenariat (IP).

3.2   Le règlement soutient la promotion d'un niveau élevé de sûreté nucléaire et de radioprotection, ainsi que l'application de contrôles de sécurité opérants et efficaces des matières nucléaires dans les pays tiers. Dans une approche étendue, il couvre les questions touchant à l'extraction du combustible, à la construction, à l'exploitation et au déclassement des installations et à la gestion des déchets. Selon la Commission, les critères qui devront servir à mesurer les progrès accomplis seront l'évaluation par des pairs de l'AIEA, l'état d'avancement des stratégies en matière de combustible usé, de déchets nucléaires et de déclassement, les cadres législatifs et réglementaires concernés et la mise en œuvre de projets, ainsi que le nombre et l'ampleur des problèmes relevés dans les rapports correspondants de l'AIEA sur la sûreté nucléaire.

3.3   Le règlement s'emploie à assurer la cohérence de l'action envisagée avec les objectifs politiques de l'UE et les autres mesures de développement des pays tiers grâce à l'élaboration de documents de stratégie, qui seront suivis de programmes indicatifs pluriannuels, couvrant une période de quatre, dans une première phase, puis de trois ans.

3.4   Une annexe définit les mesures spécifiques financées, ainsi que les critères de coopération, dont les priorités qui guideront l'engagement du budget prévu, de 631 millions sur sept ans.

4.   Observations générales

4.1   Le Comité relève qu'il s'est développé, ces vingt dernières années, un processus grâce auquel l'assistance et les programmes de coopération en matière de sûreté nucléaire ont pris de l'extension. La proposition de règlement à l'examen poursuit dans cette voie et s'efforce de préciser que c'est la sûreté de l'énergie nucléaire, et non sa promotion, qui constitue sa visée primordiale (COM(2011) 841 final, annexe, critères, dispositions finales). Le Comité comprend que le but du programme n'est pas d'encourager les pays en phase d'émergence à mettre en œuvre la technologie nucléaire. À cette fin, il conviendrait de mieux mettre en évidence une présentation plus approfondie de la ventilation des dépenses dans le ICSN précédent et celui qui fait l'objet de la proposition à l'examen. Il serait possible, en particulier, de contribuer à dissiper certaines inquiétudes en précisant que la majeure partie des dépenses du programme seront affectées à des actions d'assainissement et que seule une faible fraction de l'enveloppe prévue ira à des programmes de conseil dans des économies émergentes.

4.2   Une telle démarche équivaudrait également à reconnaître que les phases antérieures du programme n'ont peut-être pas totalement fait ressortir ou explicité les préoccupations de sécurité qui motivaient le soutien apporté à certaines mesures opérationnelles qui, par ailleurs, concourent nécessairement à un fonctionnement tout à la fois plus étendu et plus sûr des centrales nucléaires. Si le recours à l'énergie nucléaire reste une question controversée au sein de l'opinion publique européenne, le consensus règne quant à la nécessité de favoriser en la matière les normes de sécurité les plus sévères.

4.3   Le Comité pense que la proposition à l'examen n'a pas traité intégralement, en particulier dans le cas d'économies instables en phase d'émergence, la question de savoir si en s'engageant ainsi par l'ICSN, l'Union européenne n'apporte pas un soutien et un encouragement tacites à des programmes nucléaires encore balbutiants. Tout en ayant saisi que l'instrument n'octroiera un financement à des projets que moyennant le respect de conditions strictes, il n'en préconise pas moins qu'avec chaque pays tiers, quel qu'il soit, la première étape consiste à mener, sur les questions relatives à l'énergie nucléaire, un débat exempt de toute condition préalable.

4.4   L'UE doit s'assigner pour objectif de ne pas contribuer à développer dans des pays tiers des capacités de production nucléaire qui pourraient engendrer des risques supplémentaires en matière de sûreté dans ce domaine ou des menaces de cet ordre susceptibles d'affecter la sécurité internationale. Le paragraphe 1.6 suggère des critères à respecter en la matière. En appliquant sur son territoire les normes les plus élevées de sûreté nucléaire, l'UE pourrait revendiquer de prendre la tête, à l'échelle mondiale, d'un mouvement qui vise à atteindre une sûreté et une sécurité maximales dans l'utilisation de l'énergie atomique à des fins civiles.

4.5   On peut également considérer que le programme ICSN est précieux et sert l'intérêt public de l'UE lorsqu'il porte sur des États dont la base en matière de science et de recherche est plus restreinte et qui se sont lancés dans des programmes de production commerciale d'électricité nucléaire ou ont l'intention de le faire, tout en respectant le minimum d'exigences en matière de stabilité. S'il est fort possible que l'appui donné aux bonnes pratiques, en articulation avec l'AIEA, ait renforcé l'encadrement technique et réglementaire dans des pays tiers aux ressources plus limitées, il peut s'avérer difficile de se représenter clairement de quelle manière les programmes actuels et futurs de l'ICSN parviennent à induire ces résultats positifs.

4.6   En conséquence, il est suggéré que la Commission prenne des mesures plus poussées pour mettre en évidence le rôle éminent que la sûreté jouera dans le prochain programme ICSN. Une telle démarche pourrait impliquer de publier des études de cas émanant de celui qui est en cours, d'améliorer la présentation du site Internet d'EuropeAid et ses références croisées et, d'une manière générale, de chercher à affirmer le profil d'un programme qui se caractérise par sa richesse de son contenu. Pareille telle approche serait par ailleurs de nature à favoriser la transparence et stimuler la responsabilité. Étant donné que le règlement encourage un haut niveau de sûreté nucléaire, on recommandera qu'il évoque des exemples parlants de ces normes exigeantes, comme la déclaration de l'Association des régulateurs du nucléaire d'Europe de l'Ouest (WENRA) sur les objectifs de sûreté des nouvelles centrales nucléaires.

5.   Observations particulières

5.1   On notera que contrairement à l'impression que pourrait donner le règlement à l'examen, les directives européennes sur la sûreté nucléaire ne contiennent pas de normes techniques en la matière et que les obligations de l'encadrement réglementaire ne comportent elles aussi que des exigences à caractère général, conforme à la convention sur la sûreté nucléaire.

5.2   La proposition fait également état du déroulement d'une évaluation complète dans l'UE en matière de sûreté. Les «essais de résistance» en cours de réalisation ne constituent cependant qu'une vérification complémentaire de sécurité, ne prenant pas appui sur des critères qui, en l'occurrence, tenteraient de répondre à la question des conséquences qu'aurait une défaillance des dispositifs de sûreté. En outre, il est notoire que ce processus présente certaines limites, eu égard au calendrier extrêmement court qui lui est imposé. Quelles que soient ces faiblesses, les atouts de la démarche de l'UE en matière de sûreté nucléaire reposent sur son intention de considérer ces essais de résistance comme une première étape pour faire évoluer et améliorer sa culture de sûreté nucléaire et atteindre les normes les plus élevées dans ce domaine. Les conclusions provisoires tirées des «essais de résistance» auxquels sont actuellement soumises les centrales nucléaires européennes montrent qu'il pourrait être nécessaire d'apporter des modifications, améliorations et mesures réglementaires supplémentaires. Il y aurait lieu qu'elles trouvent aussi rapidement que possible une traduction dans la mise en œuvre et l'activité de conseil du programme ICSN.

5.3   Il convient de considérer qu'institutionnellement parlant, l'UE ne dispose que d'une expertise très limitée en matière nucléaire et que la mise en œuvre des projets de l'ICSN est effectuée pour l'essentiel par des organisations des États membres. La Commission pourrait être bien placée pour offrir une évaluation et une réflexion critiques précieuses sur la diversité des normes et pratiques européennes mais devrait également s'employer à développer ses capacités propres et ses compétences indépendantes.

5.4   La proposition concernant l'institution de l'ICSN affirme qu'il a pour objectif d'éliminer le risque nucléaire. On relèvera toutefois que d'un point de vue technique et comme dans le cas de la suppression des dangers dans tout processus industriel complexe, il est impossible de garantir que l'on parvienne à ce but, en particulier pour ce qui est de prévenir tout accident nucléaire d'ampleur catastrophique, et il conviendrait de préciser que la visée qui est poursuivie réside dans la prévention des incidents et des accidents selon les meilleures normes connues. Il s'impose également de noter que dans toute filière, avoir la conviction que tout péril a été éradiqué ne favorise pas une culture de sûreté d'un haut niveau.

5.5   La Commission propose que les missions du service intégré d’examen de la réglementation (IRRS) et de l'équipe de l'AIEA chargée d'examiner la sûreté opérationnelle (OSART) aient valeur d'indicateurs mais leur apport ne revêt qu'une valeur limitée, dans la mesure où ces instances n'ont pas été conçues à des fins de contrôle: dans l'accident de Fukushima, par exemple, elles n'ont fourni aucune protection. En outre, aucun de ces deux types d'opérations ne se rapporte à la situation des centrales nucléaires du point de vue de la sûreté. Leur supervision internationale reste une question complexe et controversée.

5.6   Quand il y a lieu, les programmes ICSN devraient également envisager d'inciter chaque pays où ils interviennent à instaurer des outils législatifs à caractère contraignant dès lors que ces dispositifs confortent les traités, conventions et accords de l'AIEA.

5.7   L'exposé des motifs du règlement relève qu'à une majorité écrasante, les réponses fournies lors de la consultation publique sont favorables à ce que les futurs instruments et la mise en œuvre des projets ou programmes accordent une attention accrue aux systèmes de suivi et d'évaluation. Le Comité reconnaît que même si sa création est récente, EuropeAid – direction générale Développement et coopération s'appuie sur une expérience et une expertise de vaste ampleur dans ce domaine, dont il ne doute pas qu'elle tirera pleinement parti.

5.8   Le Comité note toutefois que la liste des mesures spécifiques qui sont soutenues ne comprend pas l'appui aux organisations indépendantes ressortissant à la société civile qui, au sein des pays bénéficiaires ou en dehors d'eux, souhaitent améliorer par des initiatives précises la responsabilité et la transparence en matière de culture de la sûreté nucléaire. Cette démarche peut s'effectuer par le truchement de l'instrument de stabilité, ou encore de l'instrument européen pour la démocratie et les droits de l'homme, et le Comité préconise avec la plus grande force que le programme ICSN reprenne cette assistance parmi les initiatives qui peuvent prétendre à son concours.

5.9   Le Comité prend acte de la souplesse qu'introduit la proposition à l'examen en rassemblant les mesures soutenues et les critères de coopération dans une annexe qui pourra faire l'objet d'une modification suivant la procédure d'évaluation prévue par le règlement commun de mise en œuvre. Il conviendrait toutefois d'envisager la possibilité que les grandes questions de principe relative à la sûreté et à la sécurité nucléaires internationales soient reprises dans le corps même du règlement.

5.10   Les critères de coopération sont définis avec une certaine marge. Le Comité s'en félicite pour ce qui concerne tous les pays qui possèdent des centrales nucléaires en fonctionnement. De même, il pourrait être opportun de nouer des contacts, à un stade exploratoire et préliminaire, avec un très large éventail de pays. Ce n'est pas en imposant des critères plus restrictifs quant aux pays habilités à bénéficier de l'ICSN que l'on garantira au mieux les intérêts de la société européenne en matière de sûreté. S'agissant des États qui sont décidés à effectuer leurs premiers pas dans la production d'électricité nucléaire, la conviction du Comité est qu'il est possible et judicieux de faire intervenir les capacités européennes d'accès, d'expertise, d'analyse et de conseil lorsqu'il est possible de s'appuyer sur les forces d'une société civile active, indépendante et organisée. Toutefois, il s'impose de montrer l'attention la plus soutenue pour la question de la stabilité politique à long terme des pays partenaires et leur capacité à garantir la sécurité civile.

5.11   Le Comité suggère dès lors que soit défini un socle minimum de conditions à remplir pour bénéficier d'une assistance au titre de l'ICSN et que l'UE et les quelques États en mesure de fournir des conseils afférents élaborent une convention internationale sur les préalables obligés dans le domaine de la consultance en matière de sûreté nucléaire (les débats menés au sein du groupe de travail sur la sûreté nucléaire du G8 et les discussions analogues qui se déroulent dans le cadre de l'AIEA ainsi que de l'UE pourraient constituer un point de départ pour cette action).

Bruxelles, le 23 mai 2012.

Le président du Comité économique et social européen

Staffan NILSSON


(1)  JO L 81, du 22.3.2007, p. 1.


31.7.2012   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 229/108


Avis du Comité économique et social européen sur la «Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil et au Comité économique et social européen sur la stratégie de l'Union européenne pour la protection et le bien-être des animaux au cours de la période 2012-2015»

COM(2012) 6 final

2012/C 229/20

Rapporteur: José María ESPUNY MOYANO

Le 19 janvier 2012, la Commission européenne a décidé, conformément à l'article 304 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la

«Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil et au Comité économique et social européen sur la stratégie de l'Union européenne pour la protection et le bien-être des animaux au cours de la période 2012-2015»

COM(2012) 6 final.

La section spécialisée «Agriculture, développement rural, environnement», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 11 mai 2012.

Lors de sa 481e session plénière des 23 et 24 mai 2012 (séance du 23 mai 2012), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 146 voix pour, 3 voix contre et 9 abstentions.

1.   Conclusions

1.1   Le CESE approuve globalement la stratégie sur le bien-être animal présentée par la Commission. Il soutient les consommateurs dans leur aspiration légitime à la salubrité alimentaire et est de plus favorable à une stratégie européenne de production axée sur la qualité.

1.2   Le CESE estime que des problèmes se posent quant à la mise en œuvre des règles existantes, en raison du manque de soutien apporté à leur application et de la perte de compétitivité des productions de l'UE.

1.2.1   Il n'existe pas d'instruments pour compenser la perte de compétitivité des productions d'élevage de l'UE. En effet, les surcoûts induits par la politique de l'UE en matière de bien-être animal (EUPAW) ne sont pas absorbés par le marché. Il faut s'attendre à une perte de parts de marché encore accrue tant sur le marché intérieur que sur les marchés à l'exportation. Aucune réflexion n'a été menée en termes de marché du travail et de conditions de travail.

1.2.2   Le CESE insiste à nouveau sur la nécessité que les produits importés soient soumis aux mêmes règles de production que celles qui sont imposées aux productions de l'UE, en appliquant une approche réciproque dans les accords commerciaux.

1.3   Assurer une formation continue au bien-être animal pour les opérateurs, travailleurs et autorités est un pan essentiel de la stratégie. Le CESE attire également l'attention sur l'importance de consacrer une partie des fonds de coopération à la formation au bien-être dans la production animale pour les autorités, employeurs et travailleurs des pays tiers.

1.4   La mise en œuvre des règles européennes exige d'adapter les ressources financières afin que les producteurs puissent entreprendre les investissements nécessaires et compenser les surcoûts encourus. En complément, la PAC doit fournir l'appui nécessaire à cette stratégie, en lui accordant l'importance qu'elle mérite.

1.5   Il faut concevoir une stratégie de communication axée sur les préoccupations de la société et qui tienne compte des études et des progrès scientifiques en la matière ainsi que des divers points de vue des producteurs, des travailleurs et des consommateurs. Cette communication ne peut se réduire au seul étiquetage obligatoire. Il faut mettre en place des programmes d'information du consommateur qui soient cohérents et l'aident à prendre des décisions mûrement réfléchies sur la base du plus d'éléments possible. Les fonds de promotion des produits agroalimentaires ont un rôle clé à jouer pour que les secteurs productifs participent activement à cette tâche.

1.6   Le CESE estime que le réseau européen de centres de référence doit être ouvert à la participation de tous les acteurs sociaux et consommateurs et a un rôle crucial à jouer dans le développement de la stratégie de bien-être animal:

a)

en coordonnant les différents centres de recherche de l'UE;

b)

en facilitant la mise en œuvre des normes (développement d'indicateurs concrets, formation d'opérateurs, travailleurs et autorités);

c)

en contribuant à évaluer les effets de la réglementation sur la compétitivité des entreprises et du point de vue socioéconomique;

d)

en appuyant les actions d'information et de communication.

1.7   Le renforcement des maillons les plus faibles de la chaîne alimentaire permettra de répartir le plus justement possible les surcoûts générés par l'application des normes de bien-être animal, en maintenant ainsi le tissu productif et le développement des zones rurales.

1.8   Le louable effort de simplification opéré par la Commission s'accorde mal avec son intention d'étendre le champ d'application de la réglementation à davantage d'espèces et d'approfondir les règles existantes.

2.   Résumé de la communication

2.1   La communication de la Commission vise à établir les axes que doit suivre l'EUPAW, dans le prolongement du plan d'action 2006-2010.

2.2   Le document précise que l'UE a déployé d'importants efforts visant le soutien du bien-être animal. L'on constate que l'application de l'EUPAW n'est pas uniforme dans tous les États membres, et que les règles contraignantes n'ont pas été mises en œuvre dans les délais prévus. Cependant, il faut se demander si l'approche reposant sur un système unique peut donner les meilleurs résultats en matière de bien-être animal.

2.3   Selon les conclusions de l’évaluation de la politique de l’Union en matière de bien-être animal, les normes de bien-être ont fait peser des coûts supplémentaires sur les secteurs de l’élevage et des essais en laboratoire.

2.4   L'on constate également que les décisions d'achat des consommateurs sont fondamentalement déterminées par des critères de prix, le bien-être animal n'étant qu'un facteur parmi d'autres dans le choix des produits.

2.5   Il est estimé dans le document que la législation nécessite une simplification, et qu'il est nécessaire d'aborder des matières telles que la compétence des personnes qui manipulent les animaux appartenant à certaines espèces ou relevant de certains systèmes de production et la formation des inspecteurs et des techniciens des États membres. Il est également relevé que les règles en matière de bien-être couvrent certaines espèces et pas d'autres.

2.6   Eu égard à toutes ces considérations, des actions stratégiques sont présentées, réparties en deux volets:

simplifier la législation et faciliter son application;

renforcer les mesures déjà prises par la Commission.

3.   Observations générales

3.1   Le Comité accueille favorablement le document de stratégie présenté et l'intention de la Commission d'améliorer les aspects pouvant contribuer à la réalisation des objectifs de l'UE dans ce domaine.

3.2   Le CESE soutient les consommateurs dans leur aspiration légitime à la salubrité alimentaire et est de plus favorable à une stratégie européenne de production axée sur la qualité. Il invite toutefois la Commission à reconnaître que l'augmentation des coûts imposée aux producteurs par la stratégie sur le bien-être animal n'est que rarement compensée par l'augmentation du prix de vente. De plus, le secteur européen de l'élevage se trouve être désavantagé par l'absence de réciprocité dans les accords commerciaux avec les pays tiers.

3.3   Le CESE déplore que la communication de la Commission ne fasse pas explicitement référence aux conditions de travail des employés qui, finalement, sont ceux qui réalisent les manipulations sur les animaux. Il convient par ailleurs d'insister de manière rigoureuse sur la formation continue et l'acquisition des nouvelles compétences nécessaires pour tenir compte des changements découlant de la proposition.

3.4   Le CESE se déclare favorable aux objectifs de simplification de la législation de l'UE sur le bien-être animal et d'amélioration de la compétitivité de l'agriculture de l'UE. Cependant, la stratégie n'aborde pas comme il convient certains des points saillants figurant dans le rapport sur l'évaluation de la politique de l’UE en matière de bien-être animal, lesquels devraient constituer des priorités pour la période 2012-2015.

3.5   La Commission reconnaît certaines carences enregistrées au niveau des résultats du plan d'action et de l'EUPAW, en pointant les «principaux déterminants communs qui ont nui au niveau de bien-être des animaux dans l'Union»; cependant, elle ne propose pas de diagnostic approfondi quant à leur raison et, partant, n'apporte pas de solutions adéquates aux problèmes relevés.

3.5.1   Il est constaté, dans le document en question, que les États membres n'appliquent pas complètement les dispositions, malgré la longueur des périodes transitoires et les aides accordées. Il n'y est toutefois pas procédé à une analyse critique de la réalité socio-économique et productive dans les différents pays de l'UE. L'on y fait uniquement état d'une «dimension culturelle de la reconnaissance du bien-être animal» en tant que facteur expliquant les différences entre États membres. La Commission omet de faire mention dans le texte de la variété des systèmes d'élevage, de la demande citoyenne, des avantages commerciaux induits par l'application des normes minimales de bien-être animal ou des aides à l'adaptation, qui ne sont pas homogènes dans les différents territoires de l'UE.

3.5.2   La politique de bien-être animal de l'UE doit être bien davantage axée tant sur le marché que sur la sécurité des consommateurs. Il est essentiel que les producteurs reçoivent des compensations pour leurs surcoûts de production et que les consommateurs soient conscients des améliorations et des efforts consentis par les producteurs, ainsi que de la plus haute valeur ajoutée qu'ont les aliments produits selon le modèle européen. Il est tout aussi primordial de pouvoir compter sur un équilibre de la chaîne alimentaire, qui aujourd'hui fait défaut.

3.5.3   L'intention déclarée dans la communication de la Commission, de simplifier les règles de bien-être animal, est contradictoire par rapport à la mention qui est faite de la nécessité d'élargir leur champ d'application à d'autres espèces et de détailler davantage les règles existantes. La stratégie ne tient pas compte de la recommandation figurant dans le document d'évaluation de l'EUPAW selon laquelle il conviendrait d'étudier des voies non législatives pour compléter la législation existante, comme des accords entre différents acteurs du secteur ou entre les maillons de la chaîne de valeur, les acteurs sociaux, les organisations de consommateurs et les administrations, ce qui serait susceptible de mener au résultat voulu sans devoir alourdir encore la charge réglementaire.

4.   Observations particulières.

4.1   Le budget consacré par l'UE au bien-être animal (70 millions d'euros par an) contraste nettement avec le montant des investissements nécessaires pour sa mise en œuvre et, plus encore, avec le coût législatif pour le secteur de l'élevage (2800 millions d'euros selon l'évaluation de l'EUPAW). La stratégie ne propose aucune mesure concrète et réaliste pour résoudre le problème des accroissements de coûts et d'absence d'aides à la mise en œuvre.

4.2   Pour améliorer la compétitivité des producteurs, il faut optimiser les synergies entre l'EUPAW et la politique agricole commune. Dans la PAC d'après 2013, l'UE doit adopter une position équilibrée en matière de bien-être animal. Il faut garantir que les éleveurs et les opérateurs puissent accéder à des mesures d'aide, en prévoyant un budget suffisant pour appliquer l'EUPAW. Il conviendra de tenir compte des conséquences économiques en termes de surcoûts pour les producteurs et de prévoir un soutien suffisant à leurs revenus au moyen de la politique des prix et des marchés et/ou d'aides directes.

4.3   Le CESE convient qu'il est nécessaire de simplifier la réglementation. S'il y est procédé comme il se doit, cette simplification contribuera sans aucun doute à favoriser la mise en œuvre de l'EUPAW. Pour cette raison, dans le cadre des futures actions menées au titre de l'EUPAW, il est nécessaire d'étudier les effets des mesures suggérées, de même que, le cas échéant, le risque de perte de tissu productif que chacune d'entre elles implique et les compensations nécessaires si elles sont mises en œuvre, et aussi de tenir compte de la valeur que l'UE accorde à la santé et à la sécurité des consommateurs.

4.4   Établir des indicateurs scientifiquement validés et fondés sur les résultats et non sur des facteurs de production permettra de parvenir à la simplification et la souplesse nécessaires pour améliorer la compétitivité des éleveurs de l'UE, à condition de tenir compte de leurs implications socioéconomiques, sur la base de la situation générale des exploitations et non de faits ponctuels. Les indicateurs doivent être mis au point en collaboration avec les opérateurs et être simples, pratiques et faciles à appliquer sans engendrer de coûts supplémentaires pour les exploitations. Ils doivent pouvoir s'appliquer aux différentes espèces et systèmes de production et être facilement interprétables et reproductibles (c'est-à-dire ne pas être subjectifs ni dépendre de la perception humaine du bien-être animal).

4.5   Les travaux du projet Welfare Quality sont intéressants comme référence, mais il faut améliorer et simplifier les indicateurs actuels en matière de bien-être animal pour qu'ils puissent être appliqués dans les exploitations. L'interprétation et l'application des critères doit être harmonisée dans les différents États membres pour garantir la validité et la viabilité de leur application dans tous les cas.

4.6   Un défi que doit aborder cette stratégie est celui d'améliorer la coordination, la traçabilité, la transparence et la communication en matière de bien-être animal dans l'UE, en permettant aux administrations, aux agents socioéconomiques et aux consommateurs de participer à cette politique, ce qui induira de meilleures connaissances, une information adéquate et une application correcte des règles. Les centres de référence peuvent et doivent jouer un rôle essentiel pour atteindre cet objectif. En plus de celles qui sont citées dans le document (aide aux autorités, formation et diffusion), leurs activités doivent consister à coordonner, superviser et partager les informations. Il y a lieu de tirer parti des structures existantes pour ne pas générer de charges supplémentaires.

4.7   Les centres de référence pourraient également prodiguer des conseils et évaluer l'application concrète des règles en matière de bien-être. La recherche scientifique doit venir s'ajouter à la recherche appliquée afin de formuler des recommandations. Sur la base des travaux déjà réalisés par le panel scientifique de la DG SANCO et le groupe scientifique sur la santé animale et le bien-être des animaux de l'Autorité européenne de sécurité des aliments (AHAW), ce réseau doit coordonner les essais de nouvelles techniques et évaluer l'impact des normes de bien-être animal. Les opérateurs du secteur contribuent dans une grande mesure à la recherche appliquée. Ils doivent être associés activement à la définition des priorités des projets de réglementation et de recherche dotés de financements de l'UE dans le domaine du bien-être animal.

4.8   Le document d'évaluation de l'EUPAW recommande de développer un plan d'engagement avec les parties intéressées pour chaque aspect de la politique de l'UE sur le bien-être animal et, en accord avec les groupes intéressés, d'évaluer la nécessité de développer de nouvelles formes d'engagement au fil du temps. Il est nécessaire que les autorités compétentes et les opérateurs concernés établissent des feuilles de route qui permettent l'application progressive des règles dans les délais obligatoires et facilitent la coordination préalable et la résolution de problèmes. Il y a également lieu d'inclure dans ce cadre les mesures d'inspection et de contrôle a posteriori, ainsi que la formation et l'information des opérateurs et des personnes chargées dans les États membres de l'application adéquate des règles.

4.9   Il est essentiel de soutenir la coopération internationale pour améliorer la compétitivité de la production de l'UE. Il convient à cette fin de définir des actions concrètes dans le cadre de la stratégie 2011–2015 afin de garantir qu'il soit tenu compte du bien-être animal dans les accords commerciaux bilatéraux négociés par l'UE et au niveau de l'OMC. En tout état de cause, il faut tenir compte des éléments suivants:

4.9.1   Il est indiqué dans l'évaluation qu'il convient d'établir des mécanismes visant à aider les secteurs de l'UE les plus vulnérables aux importations ou à la perte probable de parts de marché, en particulier le secteur des œufs et des ovoproduits. La stratégie ne propose pas de solutions à la perte de compétitivité face aux importations en provenance de pays tiers qui ne respectent pas les mêmes normes de production que l'UE.

4.9.2   L'UE doit consacrer une partie des fonds de coopération à la formation des autorités, employeurs et travailleurs des pays tiers sur le bien-être dans la production animale.

4.10   Il y a lieu d'élaborer une stratégie de communication qui couvre les points énoncés dans l'évaluation de l'EUPAW. Elle comprendra un plan de formation, d'information et de communication sérieux et objectif, qui devra commencer dès l'âge scolaire, pour que les consommateurs, d'aujourd'hui et de demain, soient au courant des normes élevées de bien-être animal imposées par l'EUPAW, à commencer par la législation en vigueur. Cela leur permettra de choisir leurs achats sur la base d'informations exactes concernant le bien-être animal.

4.10.1   Il est essentiel que ces travaux reposent sur la collaboration de sources rigoureuses et reconnues (comme le réseau de centres de référence). C'est là le meilleur moyen de faire connaître et apprécier au consommateur les avantages de l'EUPAW, mais aussi de les informer des coûts de production induits par le modèle européen.

4.10.2   L'information livrée au consommateur sur le bien-être animal ne doit pas se limiter à l'étiquetage ou à la publicité sur les produits, mais faire aussi l'objet de campagnes d'information menées par des organisations sectorielles ou institutions pour communiquer sur les efforts consentis et leur impact sur les coûts de production. Les mécanismes et fonds de promotion des produits agroalimentaires sur le marché intérieur sont des instruments appropriés pour délivrer des informations sur l'EUPAW.

4.11   Outre les mesures mentionnées dans la proposition de la Commission, il convient également de prendre en compte d'autres mesures tout aussi importantes figurant dans l'évaluation de l'EUPAW. Il y est textuellement fait état de «la nécessité de garantir une augmentation adéquate du financement de l'EUPAW durant la prochaine période du plan d'action, pour répondre aux besoins croissants de cette politique et satisfaire les besoins relevés dans le cadre de l'évaluation. Parmi ces besoins figurent l'aide à la mise en application et au respect effectif de la nouvelle législation.»

4.11.1   L'effet négatif que produit la politique de bien-être animal sur la compétitivité est l'un des principaux obstacles à l'application des règles ainsi qu'au maintien de la croissance et de l'emploi dans les zones rurales, en particulier en raison de la difficulté pour les producteurs de répercuter des coûts de production accrus (et de la valeur ajoutée) sur les maillons suivants de la chaîne alimentaire. La stratégie ne prévoit pas de solution pour répondre aux dysfonctionnements de la chaîne alimentaire, non plus qu'aux effets négatifs pour la compétitivité des règles sur les canaux de distribution ou les marchés qui ne relèvent pas du commerce de détail (restauration, industrie, exportations).

4.11.2   En ce qui concerne les fonds de développement rural, les questions clés sont les suivantes:

accroître les financements consacrés au bien-être animal dans les programmes de développement rural (en ce qui concerne tant les investissements que l'augmentation des coûts d'exploitation);

faciliter l'appui à la mise en œuvre des règles obligatoires de bien-être grâce à des aides octroyées par l'UE dans le cadre de la PAC, qui soient obligatoires pour les États membres.

4.11.3   Il convient également de veiller à la cohérence entre la politique de bien-être animal et les politiques environnementale, de santé animale et de développement durable, sans oublier la compétitivité, qui sont étroitement liées, ainsi que les avantages pour les consommateurs, les travailleurs et les employeurs. Il convient que ces considérations figurent dans le document de stratégie.

4.12   Compte tenu de la volonté de simplification qui inspire la stratégie 2012-2015, ainsi que de l'intention d'élaborer des normes qui énoncent les bases réglementaires en matière de bien-être des animaux appartenant à différentes espèces et relevant de différents systèmes de production, il ne convient pas à l'heure actuelle de développer de nouveaux volets législatifs ni d'approfondir ceux qui existent déjà, tant que la voie à suivre n'a pas été arrêtée et qu'il n'a pas été établi s'il convient de tenir compte dans ce cadre des animaux aquatiques ou d'autres espèces.

4.13   Concernant la question délicate de l'abattage rituel, le CESE profite de l'occasion pour rappeler la position déjà exprimée dans son avis (1), où il affirmait que faire une exception pour l'abattage rituel n'est pas en cohérence avec l'objectif général [d'améliorer la protection des animaux]. Les technologies novatrices, tel que le système de contrôle de l'étourdissement, permet à tous ceux qui veulent réaliser l'abattage avec un étourdissement électrique préalable respectant les règles hallal de contrôler avec précision la charge électrique reçue par l'animal. Cela garantit que l'animal est tout à la fois suffisamment étourdi et encore vivant avant la mise à mort. Ce dispositif enregistre tous les étourdissements effectués ainsi que le voltage auquel a été soumis chaque animal. Il est susceptible d'apporter une véritable contribution au bien-être animal. De plus, l'introduction d'un étiquetage indiquant la méthode d'abattage encouragerait l'utilisation de ce système de contrôle de l'étourdissement. Il importe que la Commission soutienne activement la recherche sur des systèmes aptes à persuader les groupes religieux de recourir à l'étourdissement.

Bruxelles, le 23 mai 2012.

Le président du Comité économique et social européen

Staffan NILSSON


(1)  JO C 218 du 11.09.2009, p. 65.


31.7.2012   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 229/112


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil concernant certaines mesures relatives aux pays autorisant une pêche non durable aux fins de la conservation des stocks halieutiques»

COM(2011) 888 final — 2011/0434 (COD)

2012/C 229/21

Rapporteur: M. Gabriel SARRO IPARRAGUIRRE

Le 17 janvier 2012 et le 19 janvier 2012, respectivement, le Parlement européen et le Conseil ont décidé, conformément à l'article 43 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la

«Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil concernant certaines mesures relatives aux pays autorisant une pêche non durable aux fins de la conservation des stocks halieutiques»

COM(2011) 888 final — 2011/0434 (COD).

La section spécialisée «Agriculture, développement rural, environnement», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 11 mai 2012

Lors de sa 481e session plénière des 23 et 24 mai 2012 (séance du 23 mai 2012), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 149 voix pour, aucune voix contre et 11 abstentions.

1.   Conclusions

1.1   Le CESE approuve pleinement la proposition de règlement. Dans le même temps, il félicite la Commission pour sa décision de la présenter et l'invite à l'appliquer rigoureusement.

1.2   Le CESE considère que les pays qui autorisent une pêche non durable sont clairement définis. Il estime toutefois que la condition exprimée à l'article 3, paragraphe 1, point b), alinéa 2 devrait être formulée comme suit: «donnent lieu à des activités de pêche ayant pour effet de réduire le stock à des niveaux n'assurant plus ou ne permettant pas d'atteindre le rendement maximal durable».

2.   Contexte

2.1   La convention des Nations unies sur le droit de la mer du 10 décembre 1982 (UNCLOS) et l'accord aux fins de l'application des dispositions de l'UNCLOS relatives à la conservation et à la gestion des stocks chevauchants et des stocks de poissons grands migrateurs du 4 août 1995 connu sous le nom d'«accord des Nations unies sur les stocks de poissons» exigent la coopération de tous les pays dont les flottes exploitent ledit stock.

2.2   Cette coopération doit être établie dans le cadre des organisations régionales de gestion de la pêche (ORGP).

2.3   Dans le cas où les ORGP n'ont aucune compétence pour le stock concerné, il y a lieu d'établir cette coopération au moyen d'arrangements ad hoc entre les pays ayant un intérêt dans la pêcherie.

3.   Introduction

3.1   La proposition de règlement s'adresse aux pays tiers ayant un intérêt dans une pêcherie impliquant des stocks halieutiques d'intérêt commun pour ce pays et pour l'Union qui exercent, sans tenir dûment compte des modes de pêche existants et/ou des droits, des devoirs et intérêts des autres États et de ceux de l’Union, des activités de pêche qui mettent en péril la viabilité du stock, et qui ne coopèrent pas avec l'Union pour sa gestion.

3.2   En vue de promouvoir la contribution de ces pays à la conservation du stock, la proposition de règlement définit des mesures spécifiques qui seront adoptées par l'Union.

3.3   Le cadre pour l'adoption de ces mesures est établi dans la perspective de garantir la durabilité à long terme des stocks halieutiques d'intérêt commun pour l'Union et les pays tiers concernés.

3.4   En vue de la mise en œuvre de ces mesures, la proposition établit les conditions sous lesquelles un pays peut autoriser une pêche non durable, le droit de ce pays de présenter des observations et la possibilité d'adopter des mesures correctives, l'évaluation des effets environnementaux, commerciaux, économiques et sociaux des mesures avant leur adoption et leur interruption rapide lorsque le pays concerné aura adopté les dispositions nécessaires pour contribuer à la conservation du stock d'intérêt commun.

3.5   L'UE étant un marché de destination lucratif pour les produits de la pêche, elle a une responsabilité particulière pour faire en sorte que l’obligation de coopération de ces pays soit respectée. La proposition de règlement établit dès lors des mesures commerciales rapides et efficaces contre les Etats responsables de dispositions et de pratiques entraînant la surexploitation des stocks halieutiques.

3.6   À ces fins, il est proposé de limiter tant les importations des produits de la pêche capturés par des navires exerçant des activités de pêche dans un stock d'intérêt commun sous la responsabilité d'un pays autorisant une pêche non durable que la fourniture de services à ces navires, sauf en cas d'urgence impérieuse. De même, il est proposé d'éviter que des navires de pêche de l'Union ou un équipement de pêche de l'Union puissent être utilisés pour exploiter le stock d'intérêt commun sous la responsabilité du pays autorisant une pêche non durable.

3.7   La proposition définit le type de mesures qui peuvent être prises et établit les conditions générales pour l'adoption de ces mesures, de sorte qu’elles soient fondées sur des critères objectifs, d'un bon rapport coût/efficacité et compatibles avec le droit international, en particulier l'accord instituant l'Organisation mondiale du commerce.

3.8   De même, afin de garantir l'efficacité et la cohérence de l'action de l'Union, sont prises en considération les mesures énoncées dans le règlement (CE) no 1005/2008 du Conseil du 29 septembre 2008 établissant un système communautaire destiné à prévenir, à décourager et à éradiquer la pêche illicite, non déclarée et non réglementée.

3.9   Enfin, pour garantir des conditions uniformes de mise en œuvre du règlement, la Commission estime qu'il convient de lui attribuer les compétences d'exécution, lesquelles doivent être exercées au moyen d'actes d'exécution prévoyant la procédure d'examen conformément au règlement (CE) no 182/2011 du Parlement européen et du Conseil du 16 février 2011 établissant les règles et principes généraux relatifs aux modalités de contrôle par les États membres de l’exercice des compétences d’exécution par la Commission.

3.10   Pour des raisons d’urgence, les décisions d'abrogation des mesures sont adoptées sous la forme d'actes d'exécution applicables immédiatement et conformément au règlement relatif au contrôle mentionné précédemment.

3.11   Le CESE approuve pleinement les moyens d'action présentés dans la proposition de règlement.

4.   Analyse de la proposition et observations du Comité

4.1   Objet et champ d'application

4.1.1   La proposition de règlement établit le cadre pour l'adoption de certaines mesures concernant les activités et les politiques liées à la pêche menées par les pays tiers, dans le but de garantir la viabilité à long terme des stocks halieutiques d'intérêt commun entre l’Union européenne et ces pays tiers.

4.1.2   Dès lors et conformément à l'UNCLOS, cela s'applique à tout stock halieutique dont la viabilité à long terme présente un intérêt commun pour l'Union européenne et ces pays tiers et dont la gestion est assurée par leur action conjointe.

4.1.3   Les mesures adoptées dans le cadre de la proposition peuvent s'appliquer dans tous les cas où la coopération avec l'Union est nécessaire pour la gestion conjointe des stocks d'intérêt commun, y compris lorsque cette coopération a lieu dans le cadre d'une ORGP ou d'un organisme analogue.

4.2   Pays autorisant une pêche non durable

4.2.1   Un pays tiers peut être considéré comme un pays autorisant une pêche non durable:

4.2.1.1

lorsqu'il ne coopère pas avec l'Union dans la gestion d'un stock de poissons d'intérêt commun, dans le plein respect des dispositions de l'UNCLOS mentionnées au paragraphe 2.1 du présent projet d'avis, et

4.2.1.2

s'il n'a adopté aucune mesure de gestion de la pêche, ou

4.2.1.3

a adopté de telles mesures sans tenir dûment compte des droits, intérêts et obligations des autres parties, et notamment de l'Union européenne, lorsque ces mesures de gestion de la pêche, considérées en liaison avec les mesures prises par l'Union, de manière autonome ou en coopération avec d'autres pays, donnent lieu à des activités de pêche ayant pour effet de réduire le stock à des niveaux n'assurant plus le rendement maximal durable.

4.2.1.4

Le niveau des stocks pouvant assurer le rendement maximum durable est déterminé sur la base des meilleurs avis scientifiques disponibles en la matière.

4.2.2   Le CESE estime que les pays autorisant une pêche non durable sont bien définis. Toutefois, il estime que la condition posée à l'article 3, paragraphe premier, point b), alinéa 2, devrait être formulée comme suit: «donne lieu à des activités de pêche ayant pour effet de réduire le stock à des niveaux n'assurant plus ou ne permettant pas d'atteindre le rendement maximal».

4.3   Mesures pouvant être adoptées en rapport avec des pays autorisant une pêche non durable

4.3.1   La Commission peut adopter, au moyen d'actes d'exécution, les mesures suivantes à l'égard des pays autorisant une pêche non durable:

4.3.1.1

recenser les pays autorisant une pêche non durable;

4.3.1.2

déterminer, le cas échéant, les navires ou flottes spécifiques auxquels certaines mesures s'appliquent;

4.3.1.3

imposer des restrictions quantitatives aux importations dans l'Union des poissons et produits de la pêche issus de ces poissons ou en contenant, provenant du stock d'intérêt commun, et qui ont été capturés sous la responsabilité d'un pays autorisant une pêche non durable; cette interdiction inclut les importations dans l'Union à partir de n'importe quel autre pays de poissons ou de produits de la pêche élaborés à partir de poissons provenant de stocks d'intérêt commun;

4.3.1.4

imposer des restrictions quantitatives aux importations dans l'Union de poissons de toute espèce associée et de produits de la pêche issus de ces poissons ou en contenant, lorsqu'ils ont capturés dans les mêmes conditions que celles visées au paragraphe précédent; de plus, l'interdiction d'importer des espèces associées capturées dans le cadre de la pêche d'intérêt commun par le pays autorisant une pêche non durable s'étend à tout autre pays;

4.3.1.5

appliquer des restrictions à l'utilisation des ports de l’Union par les navires battant pavillon du pays autorisant la pêche non durable dans le stock d'intérêt commun et par les navires de transport de poissons et de produits de la pêche provenant du stock d'intérêt commun qui ont été capturés, soit par les navires battant pavillon du pays autorisant la pêche non durable ou par des navires autorisés par ce pays à exploiter cette pêcherie tout en battant un autre pavillon; ces restrictions ne s'appliquent pas en cas de force majeure ou de détresse, conformément aux dispositions de l'UNCLOS prévues pour ces cas, et uniquement pour les services strictement nécessaires afin de remédier à ces situations;

4.3.1.6

interdire l'achat par des opérateurs économiques de l'Union de tout navire de pêche battant pavillon de l'un de ces pays;

4.3.1.7

interdire aux navires de pêche de l'Union de changer de pavillon pour battre celui de l'un de ces pays;

4.3.1.8

interdire aux États membres d'autoriser des accords d'affrètement avec les opérateurs économiques de ces pays;

4.3.1.9

interdire l'exportation vers ces pays de navires de pêche battant pavillon des États membres ou d'équipements et de matériel de pêche nécessaires à la pêche dans les stocks de halieutiques d'intérêt commun;

4.3.1.10

interdire la conclusion d'accords commerciaux privés entre les ressortissants d'un État membre et les pays autorisant cette pêche, visant à permettre à un navire de pêche battant pavillon de cet État membre d'exploiter les possibilités de pêche de ces pays; et

4.3.1.11

interdire les opérations conjointes de pêche associant des navires de pêche battant pavillon d'un État membre et des navires de pêche battant pavillon d'un pays autorisant une pêche non durable.

4.3.2   Le Comité estime que l'ensemble de ces mesures doit conduire les pays autorisant une pêche non durable à mettre un terme à cette pratique. En outre, il considère que ces mesures sont les plus efficaces que l'Union puisse adopter. Aussi, tout en félicitant la Commission de présenter cette proposition de règlement qui élargit et développe les mesures prévues dans le règlement contre la pêche illicite, il l'exhorte à veiller à sa stricte application, en l'invitant à la contrôler de la manière la plus juste possible et en la prévenant que même si des demandes venaient à être introduites auprès de l'Organisation mondiale du commerce, elle ne doit pas douter de la nécessité d'en poursuivre l'application, car cela permettra de garantir à long terme la viabilité des stocks de poissons d'intérêt commun pour l'Union européenne et les pays tiers.

4.4   Exigences générales applicables aux mesures adoptées en vertu de la proposition de règlement à l'examen

4.4.1   Les exigences générales sont:

4.4.1.1

les mesures adoptées sont toujours liées à la conservation du stock halieutique d'intérêt commun, appliquées conjointement avec des restrictions aux activités de pêche des navires de l'Union ou à la production ou à la consommation à l’intérieur de l’Union applicables aux poissons et aux produits de la pêche issus de ces poissons ou contenant ces poissons, de l’espèce pour laquelle les mesures ont été adoptées en application du règlement proposé. Ces restrictions, dans le cas des espèces associées, ne peuvent s'appliquer que lorsque ces dernières sont capturées dans le cadre de la pêche dans le stock d'intérêt commun;

4.4.1.2

les mesures adoptées sont compatibles avec les obligations imposées par les accords internationaux auxquels l'Union est partie et les autres règles pertinentes du droit international;

4.4.1.3

les mesures adoptées tiennent compte des mesures déjà prises en vertu du règlement (CE) no 1005/2008 sur la pêche illicite;

4.4.1.4

les mesures adoptées ne doivent pas constituer une discrimination entre les pays dans lesquels prévalent les mêmes conditions, ou une entrave déguisée au commerce international;

4.4.1.5

avant d'adopter ces mesures, la Commission en évalue les incidences environnementales, commerciales, économiques et sociales.

4.4.1.6

les mesures adoptées prévoient un système approprié pour leur mise en application par les autorités compétentes

4.4.2   Le CESE estime que ces exigences sont logiques et par conséquent les approuve.

4.5   Procédures préalables à l'adoption de mesures

4.5.1   Lorsqu'il s'avère nécessaire d'adopter des mesures à l'égard d'un pays aux termes de la proposition en objet, la Commission le lui notifiera préalablement, l'informera des motifs de cette adoption et précisera les mesures qui pourront être prises conformément au règlement en question, tout en lui notifiant qu'avant leur application, il dispose d'une possibilité raisonnable de répondre à la notification par écrit et de remédier à la situation.

4.6   Période d'application des mesures

4.6.1   Les mesures adoptées cessent de s'appliquer lorsque le pays en question adopte les mesures correctives appropriées convenues avec l'Union et, le cas échéant, d'autres pays concernés, ou lorsque ces mesures ne compromettent l'impact des mesures prises par l'Union, soit de manière autonome ou en coopération avec d'autres pays pour la conservation des stocks halieutiques concernés.

4.6.2   La Commission déterminera, au moyen d'un acte d'exécution, si les conditions convenues préalablement avec les pays sont remplies et décidera s'il ya lieu de suspendre l'application des mesures adoptées.

4.6.3   Pour des raisons d'urgence impérieuse dûment justifiées et liées à des perturbations économiques ou sociales imprévues, la Commission adopte des actes d'exécution applicables immédiatement, afin de décider de l'éventuelle suspension des mesures adoptées.

4.6.4   Aux fins de l'application correcte du règlement à l'examen, la Commission est assistée par un comité conformément au règlement (UE) no 182/2011 sur les modalités de contrôle par les États membres.

4.6.5   Le CESE approuve les modalités prévues pour la suspension de l'application des mesures adoptées et juge logique l'application immédiate pour des raisons d'urgence, surtout dans le cas des pays en voie de développement.

Bruxelles, le 23 mai 2012.

Le président du Comité économique et social européen

Staffan NILSSON


31.7.2012   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 229/116


Avis du Comité économique et social européen sur le thème «Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant les directives 2000/60/CE et 2008/105/CE en ce qui concerne les substances prioritaires pour la politique dans le domaine de l'eau»

COM(2011) 876 final — 2011/0429 (COD)

2012/C 229/22

Rapporteuse: Mme LE NOUAIL MARLIERE

Les 14 février et 22 février 2012, conformément à l'article 192, paragraphe 1, du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, le Parlement européen et le Conseil ont décidé de consulter le Comité économique et social européen sur la

«Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant les directives 2000/60/CE et 2008/105/CE en ce qui concerne les substances prioritaires pour la politique dans le domaine de l'eau»

COM(2011) 876 final — 2011/0429 (COD).

La section spécialisée «Agriculture, développement rural, environnement», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 11 mai 2012.

Lors de sa 481e session plénière des 23 et 24 mai 2012 (séance du 23 mai 2012), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 135 voix pour, 15 voix contre et 14 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1   Le CESE exprime son soutien à l’actuel projet de directive en ce qu’il élargit la liste des substances prioritaires et celle des substances dangereuses prioritaires, en intégrant l’option la plus complète proposée dans l’analyse d’impact (1).

1.2   Le CESE soutient le nouveau mécanisme proposé par la Commission pour lui fournir, aux fins de la surveillance, des informations ciblées de haute qualité sur la concentration des substances dans l'environnement aquatique, en particulier en ce qui concerne les nouveaux polluants et les substances pour lesquelles les données de surveillance disponibles ne sont pas de qualité suffisante aux fins d'une évaluation des risques. Le CESE considère que ce nouveau mécanisme devrait favoriser le recueil de ce type d'informations dans tous les bassins hydrographiques de l'UE et permettre de maintenir les coûts de surveillance à un niveau raisonnable.

1.3   Le CESE recommande néanmoins que soit ajouté à ce projet, ne serait-ce qu'à titre d’expérimentation, des analyses particulières sur les sujets encore mal maîtrisés.

i.

Des nanoparticules et en particulier de leurs interactions avec les substances prioritaires, dans la mesure où ce thème soulève des interrogations croissantes – relayées par l’agence européenne de l’environnement (2).

ii.

Des effets des combinaisons chimiques de substances, présentes dans les eaux intérieures, dans la mesure où ces combinaisons peuvent avoir des effets importants sur les milieux aquatiques à partir de concentrations très faibles de substances chimiques.

1.4   Le CESE suggère que, dans l’objectif d’une mise en œuvre efficiente de la directive cadre sur l’eau, ce projet serait judicieusement complété par des références de meilleure pratique concernant la gestion des districts hydrographiques.

1.5   Le CESE considère que le plomb et le nickel, en tant que substances persistantes et bioaccumulables, devraient être classées en substance dangereuses prioritaires (SDP) avec un objectif d’élimination des rejets à l’horizon de 20 ans, et ce, même si les coûts impliqués par l’élimination de tout rejet sont estimés comme importants.

1.6   Le CESE estime que le soutien et la participation du public sont une condition préalable pour protéger les ressources hydriques et pour recenser tant les problèmes que les mesures les plus adaptées pour les résoudre, et définir également leur coût. Sans un soutien du public, les mesures réglementaires échoueront. La société civile a un rôle clef à jouer dans la mise en œuvre d'une directive-cadre sur l'eau (DCE) appropriée et pour aider les gouvernements à trouver un équilibre entre les aspects sociaux, environnementaux et économiques devant être pris en considération (3).

1.7   Le CESE insiste afin que l'eau ait un bon état écologique et chimique, que l'on protège la santé humaine, l'approvisionnement en eau, les écosystèmes naturels et la biodiversité (4).

1.8   Le CESE observe que la nouvelle directive devrait simplifier et rationaliser les obligations des États membres en matière de déclaration.

2.   Introduction

2.1   Le projet de directive à l’examen vise à modifier les directives 2000/60/CE et 2008/105/CE concernant les substances prioritaires dans le domaine de l’eau (hors milieu marin), conformément à ce qu’impose la directive cadre sur l’eau:

i.

Réexaminer au moins tous les quatre ans la liste des substances prioritaires, recenser le cas échéant des nouvelles substances prioritaires (SP) ou de nouvelles substances dangereuses prioritaires (SDP);

ii.

D’établir les nouvelles normes de qualité environnementales (NQE) pour les eaux de surface, les eaux souterraines, les sédiments ou le biote suivant les cas, en fonction des derniers éléments connus.

2.2   Ce réexamen a été réalisé avec l’assistance d’un groupe de travail et à l’issue d’une large consultation conduite auprès d’experts de la Commission Européenne et des États membres, des parties prenantes (syndicats professionnels et ONG) et du comité scientifique des risques sanitaires et environnementaux (SCHER).

2.3   A l’issue de ces travaux et de l’analyse d’impact [sec(2011)1547 final] réalisée pour la circonstance, la liste de 33 substances prioritaires a été élargie à 48 dans l’actuel projet de directive, prenant en compte l’option la plus complète de l’analyse d’impact.

2.4   L’objectif du projet de directive est de parvenir à un bon état chimique des eaux intérieures, c’est-à-dire conforme aux normes de qualité environnementales définies en annexe du projet:

i.

Par la réduction des substances prioritaires;

ii.

Et par l’élimination des rejets de substances dangereuses prioritaires à l’horizon de 20 ans à compter de l’adoption de la directive fille.

3.   Observations générales

3.1   Le CESE est réellement convaincu que l'eau n'est pas uniquement un produit de consommation mais également une ressource naturelle précieuse, essentielle pour les générations futures et actuelles. Pour cette raison, et parce que de nombreuses substances polluantes sont utilisées dans l'ensemble de l'UE, il convient d'établir des normes de qualité environnementales (NQE) harmonisées au niveau de l'Union européenne pour ces substances.

3.2   Le cas des substances persistantes, bioaccumulatives et toxiques (PBT) pose un problème particulier du fait de leur ubiquité, de leur capacité à être transportée sur de longues distances, de leur quasi omniprésence dans l’environnement et de leur persistance. Ces substances sont en générales classées comme SDP. Leur présence risquant de masquer l’amélioration de la qualité des eaux obtenues sur les autres substances, les états membres sont autorisés à présenter séparément leur incidence sur l’état chimique des eaux.

3.3   La mise en œuvre de la directive repose sur les plans de gestion des districts hydrographiques et, in fine, sur les États membres. Dans ce cadre, si la Commission relève des cas exemplaires et une amélioration globale de la surveillance et de la transmission de l’information, il apparaît également que tous les États membres ne sont pas au même niveau (5). L’effectivité de la directive apparaît donc améliorable de ce point de vue.

4.   Observations particulières

4.1   La Commission Européenne fonde le cadre législatif sur la notion de dangerosité davantage que sur celle du risque; et partant, le projet de directive inclut des substances avec des limitations à certains dosages, et non des risques d’interactions entre substances présentes dans les milieux aquatiques, même à de très faibles doses.

i.

Ces risques d’interactions peuvent concerner les mélanges chimiques, ainsi que les nanoparticules;

ii.

Ces phénomènes sont encore mal maîtrisés d’un point de vue scientifique, mais des soupçons de toxicité sont très prégnants, suffisamment pour que l'Agence Européenne de l’Environnement en fasse état dans un rapport récent (6);

iii.

S’il paraît difficile de légiférer sur des éléments encore peu maîtrisés, il semble néanmoins essentiel pour l’avenir des écosystèmes aquatiques qu’une directive européenne sur les substances prioritaires dans le domaine de l’eau prépare les états membres à considérer ces phénomènes.

4.2   Le nickel et le plomb font partie de la liste des substances prioritaires, mais ne sont pas intégrées en tant que substances dangereuses prioritaires (SDP).

i.

Or, ces substances sont persistantes (avec une persistance ubiquiste pour le nickel notamment), et bioaccumulables, ce qui les porte à intégrer cette liste selon la définition des substances dangereuses prioritaires de la Commission européenne;

ii.

Le règlement REACH assimile ces substances à des substances extrêmement préoccupantes, soumises à autorisation, dans la mesure où elles peuvent être cancérigènes, toxiques pour la reproduction (CMR 1 et 2) et/ou persistantes, bioaccumulables;

iii.

Un principe de cohérence avec la définition des SDP et avec le règlement REACH exigerait que ces substances soient classées en substances dangereuses prioritaires, incluant ainsi un objectif d’élimination des rejets à l’horizon de 20 ans.

Bruxelles, le 23 mai 2012.

Le président du Comité économique et social européen

Staffan NILSSON


(1)  SEC(2011) 1547 final.

(2)  Agence européenne de l'Environnement, EEA Technical Report, no 8/2011 – Hazardous substances in Europe’s fresh and marine waters, an overview.

(3)  JO C 224 du 30.8.2008, p. 67 et JO C 97 du 28/4/2007, p. 3.

(4)  JO C 248 du 25.08.2011, p. 1.

(5)  Communication de la Commission au Parlement européen et au Conseil – Vers une gestion durable de l’eau dans l’Union européenne, COM(2007) 128 final; Rapport de la Commission au Parlement européen et au Conseil, COM(2009) 156 final.

(6)  EEA Technical report, no 8/2011.


31.7.2012   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 229/119


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif aux mouvements non commerciaux d’animaux de compagnie»

COM(2012) 89 final — 2012/0039 (COD)

et la «Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 92/65/CEE du Conseil en ce qui concerne les conditions de police sanitaire régissant les échanges et les importations dans l’Union de chiens, de chats et de furets»

COM(2012) 90 final — 2012/0040 (COD)

2012/C 229/23

Rapporteur: M. Nikolaos LIOLIOS

Le 16 mars 2012 et le 13 mars 2012 respectivement, le Conseil et le Parlement européen ont décidé, conformément aux articles 43, paragraphe 2, 168, paragraphe 4, et 304 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la

«Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif aux mouvements non commerciaux d’animaux de compagnie»

COM(2012) 89 final — 2012/0039 (COD)

et la

«Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 92/65/CEE du Conseil en ce qui concerne les conditions de police sanitaire régissant les échanges et les importations dans l’Union de chiens, de chats et de furets»

COM(2012) 90 final — 2012/0040 (COD)

La section spécialisée «Agriculture, développement rural, environnement», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 11 mai 2012.

Lors de sa 481e session plénière des 23 et 24 mai 2012 (séance du 23 mai 2012), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 155 voix pour, 2 voix contre et 9 abstentions.

1.   Conclusions

Le CESE reconnaît qu’il est nécessaire d’abroger et de remplacer le règlement (CE) no 998/2003 régissant les problématiques liées aux mouvements non commerciaux d’animaux de compagnie, pour les raisons exposées ci-dessous.

1.1   La protection de la santé publique est un objectif prioritaire et l’établissement de règles régissant des activités telles que les mouvements non commerciaux d’animaux de compagnie contribue à sa réalisation. La proposition de la Commission européenne abrogeant et remplaçant le règlement (CE) no 998/2003 prévoit les conditions de police sanitaire et les règles de marquage et de contrôle des animaux de compagnie, ainsi que des mesures de précaution à prendre lors de leurs mouvements, et met le règlement (CE) no 998/2003 en conformité avec les articles 290 et 291 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, en autorisant des dérogations, par l’octroi à la Commission du pouvoir d’adopter des actes délégués, qui lèvent les obstacles éventuels entravant ces mouvements.

1.2   Les modifications qu’il fallait apporter aux conditions de police sanitaire établies dans le règlement (CE) no 998/2003 mais aussi la nécessité de rendre le règlement relatif aux mouvements d’animaux de compagnie suffisamment clair et accessible pour le simple citoyen confirment qu’il y a lieu de procéder à cette abrogation et à ce remplacement.

1.3   Un point également important est que la période transitoire de huit ans prévue à l’article 4, paragraphe 1, concernant la méthode d’identification des animaux de compagnie, a expiré. Il est devenu nécessaire de préciser à présent de manière claire, à l’intention du simple citoyen, le régime qui s’appliquera par la suite et cet impératif constitue également une invitation à remplacer le règlement (CE) no 998/2003.

1.4   Le CESE estime que la proposition de la Commission abrogeant et remplaçant le règlement (CE) no 998/2003 définit pleinement le cadre dans lequel peuvent s’opérer les mouvements non commerciaux d’animaux de compagnie. Les mouvements des citoyens qui choisissent d’être accompagnés par des animaux d’agrément devront être définis en termes plus explicites, le respect des règles les concernant étant un gage de sécurité pour la santé publique.

1.5   Le CESE convient que dans un souci de cohérence, il y a lieu de modifier la directive 92/65/CEE du Conseil en y remplaçant par des références au texte proposé celles qui se rapportent au règlement (CE) no 998/2003.

2.   Contexte

2.1   Le règlement (CE) no 998/2003 fixait les limites temporelles de la période transitoire de validité d’un système d’identification des chiens, des chats et des furets de compagnie. Le délai ayant expiré et compte tenu de la nécessité de mettre le règlement (CE) no 998/2003 en pleine conformité avec le traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, en raison, par ailleurs, des évolutions des données sanitaires et des nouvelles exigences touchant les mouvements non commerciaux, lesquelles sont directement liées à la nécessité de faciliter également les mouvements des citoyens qui accompagnent ces animaux, et en vertu des efforts visant à établir une législation suffisamment claire et accessible pour les citoyens, la Commission a décidé de proposer un texte abrogeant et remplaçant le règlement (CE) no 998/2003.

2.2   La Commission a également soumis une proposition de modification de la directive 92/65/CEE du Conseil afin d’y remplacer par des références au texte proposé celles qui se rapportent au règlement (CE) no 998/2003.

3.   Observations générales

3.1   L’existence, chez les animaux de compagnie, de maladies transmissibles à l’homme a exigé, afin d’obtenir la sécurité indispensable pour la santé publique, de poser des conditions pour le contrôle et le transport des animaux. Grâce à l’amélioration de la situation sanitaire de l’Union s’agissant de la rage, le régime applicable aux mouvements d’animaux de compagnie à des fins non commerciales a été modifié. La proposition de règlement expose clairement le régime et les procédures à observer.

3.2   La mise en œuvre de vaccinations contre la rage a considérablement modifié la situation épidémiologique de cette maladie. En articulation avec les avis scientifiques concernant l’immunisation des animaux de compagnie, le règlement fixe des mesures prophylactiques concernant la possibilité de mouvement de ces animaux, y compris par des mesures dérogatoires visant à faciliter les déplacements, en fixant d’abord les conditions de réalisation de ces dérogations et les mesures de précaution qui devront être prises.

3.3   Les listes d’animaux qui sont établies comprennent tous ceux qui sont susceptibles d’être introduits, à l’exception de ceux dont le mouvement est couvert par des dispositions de directives de l’UE. Les règles nationales, quant à elles, doivent faciliter le mouvement des animaux considérés par définition comme animaux de compagnie, par rapport à ceux qui sont introduits à des fins commerciales.

3.4   À part la rage, il existe d’autres maladies qui présentent également une menace pour la santé publique. Toutefois, les risques de transmission sont limités, d’une part, par l’obligation de détenir des documents d’identification, et d’autre part, parce que, suivant la procédure, des spécialistes entrent en contact avec les animaux. Il est dès lors possible d’attester de l’état de santé des animaux et de fournir une preuve des conditions de sécurité dans lesquelles s’effectue le mouvement à l’intérieur ou à destination de l’espace européen.

3.5   Un élément important de la proposition de la Commission est qu’elle conserve l’implantation d’un transpondeur comme moyen unique et exclusif d’identification des chiens, chats et furets et qu’elle met fin, dès lors, au marquage par tatouage, lequel n’est considéré comme une méthode acceptable d’identification que dans le cas des animaux déjà marqués de cette manière.

3.6   Il est plus facile de contrôler si les animaux ainsi marqués respectent les mesures sanitaires de prévention destinées à éviter la contagion. Ces mesures sont mises en œuvre dans les États membres conformément aux principes de subsidiarité et de proportionnalité, mais également dans un ensemble d’entre eux, à la suite d’une classification, quand des raisons particulières surviennent, sur la base de données scientifiques validées. Cette démarche débouche ainsi sur une action commune pour faire face aux dangers qui se présentent en matière de santé publique.

4.   Observations spécifiques

4.1   Même si le niveau de formation scientifique des personnes qui s’occupent des animaux de compagnie est à l’heure actuelle suffisamment élevé et que les services fournis sont à même de garantir la santé des animaux de compagnie et, partant, de préserver la santé publique, il faudra faire preuve d’une vigilance constante pour empêcher toute transmission de maladie. Le règlement fixant les conditions de mouvement à des fins non commerciales garantit la sécurité contre les risques de diverses maladies.

4.2   Le règlement instaure cependant la possibilité de dérogations visant à faciliter les déplacements et propose une révision du règlement (CE) no 998/2003, en particulier s’agissant des pouvoirs relatifs aux actes délégués et actes d’exécution. Le CESE est favorable à la suppression des entraves injustifiées à de tels mouvements, sous réserve que seront prises en compte des données scientifiques validées et que la Commission procédera aux consultations appropriées d’experts concernant l’adoption des dérogations, afin que celles-ci correspondent à des circonstances particulières touchant aux mouvements non commerciaux d’animaux de compagnie et en ce qui concerne les conditions de police sanitaire et les règlements et la forme des documents d’accompagnement.

4.3   Il convient cependant d’examiner si les limites de validité prévues sont respectées. La proposition décrit la révocation des actes délégués sur formulation d’une objection du Parlement européen et du Conseil dans les deux mois suivant la notification ou, en cas de prorogation, dans un délai supplémentaire de deux mois. Les questions de santé publique étant passablement importantes, il conviendra cependant de délimiter clairement la durée de la délégation, comme le prévoit aussi le traité sur le fonctionnement de l’Union européenne. De ce fait, le contrôle exercé sur la Commission gagnera en efficacité et le droit de révocation constituera une garantie supplémentaire de sécurité.

4.4   À l’heure d’établir la liste des pays tiers ou territoires auxquels des dérogations peuvent s’appliquer en vertu du principe d’application de règles équivalentes à celles des États membres, la Commission devra fonder son choix sur des garanties délivrées par les autorités sanitaires de ces pays. En effet, s’il est légitime que les animaux de compagnie et de loisirs se déplacent facilement et sans obstacles ni procédures compliquées, il importe avant tout d’assurer la santé publique.

4.5   Si les procédures par lesquelles une dérogation aux conditions types est octroyée à des pays ou parties de pays tiers après la réception des garanties appropriées de leur part s’avèrent être administrativement complexes, longues ou coûteuses, il sera préférable de s’en tenir aux lignes directrices établies en évitant de recourir auxdites dérogations, dans la mesure où elles ne compenseraient pas le risque qui existerait en cas de déplacement.

4.6   Dans cette même perspective, le mouvement d’animaux non vaccinés entre États membres de l’UE génère lui aussi des risques. Le règlement définit les procédures afférentes, et le CESE estime qu’il est essentiel de les respecter pour prévenir toute possibilité de transmission de maladies. Quand elle exerce, aux conditions énoncées dans le règlement, la délégation de pouvoirs qui lui est octroyée pour l’adoption d’actes délégués, la Commission devra veiller à ce que du point de vue de la charge administrative et des effets produits, le risque qu’induit le mouvement soit compensé.

4.7   La délivrance de documents d’identification relatifs aux mouvements non commerciaux d’animaux de compagnie est un élément d’une importance capitale. L’introduction du système de marquage par implantation d’un transpondeur joue également un rôle important dans le renforcement du système d’enregistrement et de suivi des animaux.

4.8   L’implantation du transpondeur doit être effectuée par des vétérinaires, afin qu’il soit possible, grâce à la formation scientifique des personnes réalisant la manipulation, de reconnaître et d’identifier des maladies touchant les animaux sur lesquels l’implantation est réalisée, puis de compléter le document d’identification. Les informations à indiquer sur les documents d’identification requièrent le savoir scientifique d’un vétérinaire agréé à cet effet par l’autorité compétente.

4.9   En mettant en œuvre de manière continue la procédure de marquage et d’enregistrement, les États membres permettent de mettre à jour des bases de données qui fournissent des informations importantes sur la situation épidémiologique d’un pays, les progrès des programmes de vaccination, la densité et la répartition des animaux, ainsi que leurs mouvements.

4.10   Les contrôles documentaires, contrôles d’identité et contrôles physiques réalisés en matière de mouvements non commerciaux d’animaux de compagnie à destination d’un État membre, que ce soit depuis un autre État membre ou depuis un pays tiers ou un territoire, sont d’une importance capitale et devront être assurés sans discontinuer et par un personnel qui aura bénéficié d’informations appropriées sur la procédure et l’importance de tels contrôles.

4.11   En cas de non-conformité avec les procédures prévues pour le respect des conditions de police sanitaire et des règles régissant le mouvement des animaux de compagnie, il conviendra, en plus des dispositions instaurées par le règlement à l’examen, de veiller à informer les autorités sanitaires du territoire d’expédition afin d’examiner la probabilité que dans d’autres circonstances aussi, ledit règlement n’ait pas été respecté.

4.12   La décision d’euthanasier un animal, laquelle est prise sur la base d’un avis circonstancié concernant l’impossibilité de le réexpédier ou de l’isoler, pourrait elle aussi constituer un acte prescrit par des experts, qui auront jugé que la réexpédition ou l’isolation est non seulement difficile mais lourde de risques supplémentaires.

Bruxelles, le 23 mai 2012.

Le président du Comité économique et social européen

Staffan NILSSON


31.7.2012   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 229/122


Avis du Comité économique et social européen sur la «Communication de la Commission au Parlement européen et au Conseil — une vision européenne pour les passagers: communication sur les droit des passagers dans tous les modes de transport»

COM(2011) 898 final

2012/C 229/24

Rapporteur: M. Raymond HENCKS

Le 19 janvier 2012, la Commission européenne a décidé, conformément à l'article 304 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la

«Communication de la Commission au Parlement européen et au Conseil — Une vision européenne pour les passagers: Communication sur les droit des passagers dans tous les modes de transport»

COM(2011) 898 final.

La section spécialisée «Transports, énergie, infrastructures, société de l'information», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 10 mai 2012.

Lors de sa 481e session plénière des 23 et 24 mai 2012 (séance du 23 mai 2012), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 135 voix pour, 1 voix contre et 2 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1   Le CESE approuve largement la politique de l'Union visant à garantir à tous les passagers des transports ferroviaire, aérien, maritime, fluvial, en autocar et autobus, des droits et conditions communs et comparables à tous ces modes de transport collectif et soutient toutes les mesures prévues pour lever les obstacles qui empêchent les citoyens d'exercer efficacement leurs droits, dans le cadre d'une approche intermodale.

1.2   Le Comité estime que les dix droits spécifiques recensés dans la communication sous avis devraient être complétés par trois droits supplémentaires, à savoir le droit à la sécurité et à la sûreté comprenant aussi bien la sécurité technique du matériel de transport que la sécurité physique des passagers, et le droit à des normes minimales de qualité de service, de confort, de protection de l'environnement et d'accessibilité.

1.3   Sur base de ces 13 droits, les dispositions législatives afférentes actuellement en vigueur devraient être soumises à un réexamen afin de les améliorer et de les renforcer en cas de besoin.

1.4   Lors de cet exercice une attention particulière devra être portée sur l'amélioration des informations fournies aux passagers, les conditions et les droits des personnes handicapées et à mobilité réduite, l'indemnisation des passagers en cas de perturbation, d'annulation du voyage ou de perte des bagages, la précision des éléments composant le prix final, la cession d'un contrat de voyage et les conditions de réclamation et des voies de recours, de même que la définition des droits des organisations des passagers qui sont les mieux placées pour informer et soutenir les citoyens dans l’exercice de leurs droits.

1.5   Afin de faciliter le contrôle de l'efficacité et de l'efficience des services de transport, leur adaptation aux évolutions des besoins et le respect des droits des passagers, le CESE propose de mettre en place une procédure d'évaluation indépendante, dans le respect du principe de subsidiarité, par l’élaboration, dans le dialogue avec les représentants des acteurs concernés, notamment les organisations qui représentent les passagers (y compris les passagers handicapés et à mobilité réduite) d’une méthodologie d’évaluation harmonisée à l’échelle européenne sur base d’indicateurs communs.

1.6   En ce qui concerne les réclamations, le CESE suggère que tous les transporteurs utilisent une adresse électronique standard pour toutes les réclamations (réclamations@…) en complément à d'autres modes de dépôt et que des délais de réponse maximum soient fixés.

1.7   Finalement le CESE propose la généralisation de procédures de règlement extrajudiciaires des litiges, sans pour autant priver les passagers de leur droit d'ester en justice. En outre, il recommande que la possibilité d'un mécanisme judiciaire de recours collectif dans l'UE soit clairement établie dans un texte législatif et que le régime de ce mécanisme soit convenablement défini.

2.   Introduction

2.1   Il y a lieu de préciser de prime abord que la communication sous avis traite des droits des passagers dans tous les modes de transport par des transporteurs publics et privés, et que les déplacements par des transporteurs professionnels (taxi, minibus avec moins de 12 passagers, etc.) ne tombent pas dans le champ d’application des dispositions analysées ci-après. Ceci est d'autant plus regrettable que le plan d'action pour la mobilité urbaine (COM(2009) 490 final), qui traite aussi bien des transports professionnels collectifs qu'individuels, retient qu'une attention doit être portée sur la tarification, la qualité, l'accessibilité pour les personnes à mobilité réduite, l'information, et les droits des passagers.

2.2   Les objectifs de développement durable de l'Union européenne impliquent de promouvoir et de développer les transports collectifs afin de réduire, dans la mesure du possible les déplacements individuels.

2.3   Reconnaître et garantir les droits des passagers est donc un pré-requis pour développer et promouvoir les transports collectifs, en rééquilibrant les rapports entre usagers et transporteurs.

2.4   Depuis 2001 l'Union européenne se préoccupe intensivement de la protection des passagers et du renforcement de leurs droits dans les différents modes de transport. À cet effet elle a créé, au fur et à mesure, une législation visant à garantir un haut niveau de protection pour que les utilisateurs des transports ferroviaire, aérien, maritime, fluvial, en autobus et autocar jouissent de droits et conditions comparables dans l'ensemble de l'Union, ceci également pour les personnes handicapées et à mobilité réduite. Toutefois, les règlements concernant le transport par voie d'eau et le transport par autobus/autocar ne s'appliqueront respectivement qu'à partir de décembre 2012 et mars 2013.

2.5   En 2010 la Commission avait lancé une vaste campagne d'une durée de 2 ans, intitulée: Passagers: vos droits à portée de main, notamment par la création d'un site internet http://ec.europa.eu/passenger-rights avec un récapitulatif des droits des usagers, pour chaque mode de transport et dans toutes les langues officielles de l'UE. De même, des brochures gratuites rappelant leurs droits aux voyageurs ont été distribuées et des affiches afférentes ont été apposées dans toutes les gares et les aéroports des États membres. La Commission vient de décider d’étendre cette campagne jusqu’en 2014.

2.6   Les transports collectifs restent toutefois marqués par des asymétries d'informations, de compétences et de situations entre d'un côté les passagers et de l'autre côté les transporteurs. On ne peut se défaire de l'impression que beaucoup de voyageurs ne sont pas encore pleinement conscients de leurs droits ou ne savent pas, en cas de besoin comment les faire valoir ou les utiliser à bon escient. Les études et enquêtes de la Commission font apparaître que pour un litige d'une valeur inférieure à mille euros un consommateur européen sur cinq seulement chercherait à obtenir réparation devant un tribunal en raison des coûts élevés, de la complexité et de la longueur des procédures.

2.7   S'y ajoutent que, selon la Commission, les autorités nationales continuent à appliquer la législation nationale de manière différente, ce qui induit la confusion chez les passagers comme chez les transporteurs et crée des distorsions sur le marché.

2.8   La Commission entend donc renforcer la mise en œuvre des règles actuelles en les améliorant en cas de besoin. À cet effet la Commission vient de lancer une consultation publique sur une éventuelle révision du règlement relatif aux droits des passagers aériens.

3.   Contenu de la Communication

3.1   La communication résume les droits et principes qui s'appliquent dans tous les modes de transport collectif. Elle relève les lacunes susceptibles d'être comblées et entend lever les obstacles qui empêchent les citoyens d'exercer efficacement leurs droits au titre de la législation européenne.

3.2   La communication retient trois principes clés que sont la non-discrimination, des informations exactes disponibles en temps utile et accessibles, ainsi qu'une assistance immédiate et proportionnée. Elle en déduit les 10 droits spécifiques suivants qui, dans l’esprit d’une vision plus intermodale, s’appliquent à tous les modes de transport:

1)

Droit à la non-discrimination dans l'accès aux transports

2)

Droit à la mobilité: accessibilité et assistance sans frais supplémentaires pour les passagers handicapés et les passagers à mobilité réduite (PMR)

3)

Droit à l’information avant l’achat et aux différentes étapes du voyage, notamment en cas d’interruption de celui-ci

4)

Droit de renoncer au voyage (remboursement intégral du prix du billet) lorsqu’il ne se déroule pas comme prévu

5)

Droit à l’exécution du contrat de transport en cas d’interruption de celui-ci (réacheminement et nouvelle réservation)

6)

Droit à une prise en charge en cas de retard important au départ ou aux points de correspondance

7)

Droit à une indemnisation dans certaines circonstances

8)

Responsabilité du transporteur à l’égard des passagers et de leurs bagages

9)

Droit à un système de traitement des plaintes rapide et accessible

10)

Droit à la pleine application et à la mise en œuvre effective du droit de l’UE.

3.3   Même si les conditions et modalités d'application varient et évoluent selon les spécificités des différents modes de transport, le principal objectif sera désormais de rendre les règles faciles à comprendre et d'en consolider l'application et le contrôle pour tous les modes de transport afin d'assurer une approche convergente dans ce domaine.

3.4   Afin d'améliorer la protection des passagers au-delà des frontières de l'UE, les questions relatives aux droits des passagers seront traitées dans des accords bilatéraux et internationaux.

4.   Remarques générales

4.1   La Commission est à féliciter d'avoir engagé une politique de garantie pour les passagers d’un ensemble de droits et conditions communs ou comparables pour tous les modes de transport collectif correspondant aussi bien aux objectifs des traités en matière de protection des consommateurs (article 169, titre XV du Traité de fonctionnement de l'UE) que des orientations de la Charte des droits fondamentaux ou de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne.

4.2   Si le CESE approuve que la communication regroupe dans un même document, de manière synthétique, toutes les règles et prescriptions qui existent d'ores et déjà en matière de droits des usagers des transports collectifs, elle regrette néanmoins l’absence de données chiffrées concernant les entraves constatées.

4.3   Le CESE soutient toutes les mesures susceptibles de lever les obstacles qui empêchent les citoyens d'exercer efficacement leurs droits et félicite la Commission des démarches prévues pour garantir que les utilisateurs des transports ferroviaire, aérien, maritime, fluvial, en autobus et autocar jouissent de droits et conditions comparables, quel que soit le ou les modes de transport utilisé(s).

4.4   Un de ces obstacles est souvent constitué par une information défaillante, incomplète ou incompréhensible des droits et obligations des passagers, au moment de l'achat d'un titre de transport ainsi qu'avant le voyage et, en cas de perturbation, pendant le voyage.

4.5   Afin d'informer clairement chaque passager des ses droits, le CESE propose que, lors de la réservation de chaque voyage ou de l'achat d'un titre de voyage, soit communiqué à chaque passager, par un renvoi à un site Internet afférent et par une impression sur chaque titre de transport, dans un langage clair, concis, compréhensible et accessible, y compris pour les personnes handicapées, où se procurer les informations afférentes, soit par brochures à distribuer dans les points de vente, soit par Internet. La campagne d'information des passagers, lancée en 2010 par la Commission, devrait être poursuivie en collaboration étroite avec les organisations des consommateurs.

4.6   En outre, des différences substantielles, au détriment de l’usager, subsistent entre les différents modes de transport, essentiellement pour le transport aérien, au sujet duquel le CESE avait, dans son avis exploratoire en la matière (1) constaté que les droits des passagers aériens sont dans certains domaines en retrait par rapport aux dispositions dans les autres modes de transport et avait demandé:

de déterminer la portée du droit d’assistance;

d’améliorer l’information aux passagers, également en cours de voyage;

d’étendre le droit à l’information également aux zones d’embarquement:

de préciser ce qu’on entend par «circonstances extraordinaires»;

d'élaborer avec les représentants des personnes à mobilité réduite des lignes directrices clarifiant les définitions du règlement 1107/2006 concernant les droits des personnes handicapées et à mobilité réduite et améliorer sa mise en œuvre;

de préciser les éléments qui composent le prix final;

d'instaurer l'obligation d'indemniser les passagers concernés en cas de faillite d'une compagnie aérienne, mettre en œuvre le principe de la «responsabilité solidaire» pour le rapatriement par d'autres compagnies et de créer un fonds qui permette l'indemnisation des passagers;

de créer la possibilité de céder gratuitement le contrat de voyage à un tiers.

Toutes ces dispositions devraient également s'appliquer aux autres modes de transport dans la mesure où elles n'y existent pas encore.

4.7   Les dix droits spécifiques recensés par la communication sous avis constituent une base pertinente pour aider les passagers à mieux discerner ce qu'ils sont en droit d'attendre comme qualité minimale de la part des services de transport et à aider les transporteurs à appliquer la législation de l'UE de manière plus cohérente et efficace.

4.8   Le CESE estime toutefois que les dix droits recensés devraient être complétés par trois droits supplémentaires, à savoir:

1)

le droit à la sécurité et à la sûreté comprenant aussi bien la sécurité technique du matériel de transport que la sécurité physique des passagers;

2)

le droit à des normes minimales de qualité de service, de confort et d'accessibilité ainsi qu'à l'information au préalable, par le transporteur, en cas de surbooking. Le CESE rappelle que dans sa Communication COM(2009) 490 sur le «plan d'action pour la mobilité urbaine» la Commission avait annoncé vouloir compléter l'approche réglementaire par des indicateurs de qualité communs afin de protéger les droits des voyageurs et des personnes à mobilité réduite.

3)

le droit au respect, par les transporteurs, des principes de préservation, de protection et d'amélioration de la qualité de l'environnement, comme mentionné dans le Traité.

4.9   Sur base de ces 13 droits, les dispositions législatives afférentes actuellement en vigueur devraient être soumises à un réexamen. Ce faisant, les problèmes connus tels que les entraves qui subsistent pour les personnes handicapées et à mobilité réduite, le manque de transparence des structures tarifaires, les informations défaillantes ou incompréhensibles, les voies de recours floues et compliquées, les compensations financières inappropriées, les délais de traitement des réclamations excessifs, etc. devraient être analysés et abolis.

4.10   Comme la Commission reconnaît elle-même dans sa communication sous avis que la publication d'évaluations des performances des opérateurs et d'enquêtes de satisfaction des passagers faciliterait un suivi et un contrôle d'applications uniformes par les organismes nationaux de contrôle, le CESE plaide en faveur d’une telle évaluation et estime que des représentants de toutes les parties prenantes devraient être associées à une analyse des besoins ainsi qu'à une évaluation des performances et du respect des droits des passagers.

4.11   Le CESE propose donc de mettre en place un système d’évaluation régulière afin d’accroître l’efficacité et l’efficience des services de transports, ainsi que leur adaptation aux évolutions des besoins des passagers et de vérifier le respect des droits des passagers. Il s’agira de définir au plan communautaire les modalités d’échanges, de comparaison et de coordination, et d’impulser la dynamique de l’évaluation indépendante dans le respect du principe de subsidiarité, par l’élaboration, dans le dialogue avec les représentants des acteurs concernés, notamment les organisations qui représentent les passagers (y compris les passagers handicapés et à mobilité réduite) d’une méthodologie d’évaluation harmonisée à l’échelle européenne sur base d’indicateurs communs.

4.12   Le CESE approuve l’intention de la Commission de ne pas se limiter, comme c’est le cas jusqu’ici, à des mesures sectorielles, mais de viser à développer une approche intermodale, en prenant en compte les besoins de mobilité et de déplacement des usagers, quels que soient les modes qu’ils utilisent ou combinent de façon à assurer une continuité intermodale. Ce n’est que par une plus forte harmonisation des droits des passagers que des distorsions de concurrence entre les différents modes de transport pourront être évitées.

4.13   Pour la plupart des défaillances et lacunes évoquées dans la communication il est renvoyé, soit à l'analyse d'impact en vue de la révision du règlement «transport aérien» qui envisagera des éventuelles mesures contraignantes, soit à des accords volontaires de la part des transporteurs. Le CESE aurait souhaité une attitude plus décidée privilégiant des mesures contraignantes.

4.14   Le CESE regrette que la Communication reste muette sur les droits et pouvoirs des organisations qui représentent les passagers, ceci d’autant plus qu’elles sont les mieux placées pour informer et soutenir les citoyens dans l’exercice de leurs droits y compris les organisations qui représentent les intérêts des personnes handicapées et à mobilité réduite.

4.15   En ce qui concerne les réclamations, les passagers devront être informés, en langage clair, des moyens et instances de contact pour les introduire, ainsi que des voies de recours. Le Comité suggère que tous les transporteurs utilisent une adresse électronique standard pour toutes les réclamations (réclamations@…) étant entendu que tout autre moyen de dépôt d'une réclamation (courrier postal, dépôt dans un point de vente etc.) devrait être possible. En outre des délais maximum contraignants de réponse devront être instaurés.

4.16   Le CESE demande de compléter la communication avec des précisions concernant les voies de recours en cas de refus de prise en compte des plaintes et réclamations des passagers auprès d’organismes à l’échelle de chaque État membre, comme au niveau européen, disposant de pouvoirs de décision et de contrainte. En aucun cas le droit de recours ne devrait être lié au prix payé pour le transport.

4.17   Le CESE rappelle que le droit d'obtenir réparation reste bien souvent théorique notamment lorsqu'il est question de petits litiges dispersés en raison des difficultés pratiques d'exercice de ce droit. Comme il importe que les voies de recours puissent être exécutées sans complexité et frais de nature à décourager les plaignants, le CESE plaide en faveur de la généralisation de procédures de règlement extrajudiciaires des litiges (REL) sans pour autant priver les passagers de leur droit d'ester en justice.

4.18   Le CESE a bien pris acte (dans son avis CESE 803/2012) que les systèmes de REL peuvent dorénavant être appliqués aux conflits collectifs, en tant que premier pas vers la création d'un mécanisme judiciaire de recours collectif dans l'UE, mais recommande que cette possibilité soit clairement établie dans un texte législatif et que le régime de ce mécanisme soit convenablement défini.

Bruxelles, le 23 mai 2012.

Le président du Comité économique et social européen

Staffan NILSSON


(1)  JO 2012/C 24/28 du 28.1.2012, p. 125-130.


31.7.2012   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 229/126


Avis du Comité économique et social européen sur la Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — «Feuille de route pour l'énergie à l'horizon 2050»

COM(2011) 885 final

2012/C 229/25

Rapporteur: M. COULON

Corapporteur: M. ADAMS

Le 15 décembre 2011, la Commission européenne a décidé, conformément à l'article 304 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la

«Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions – “Feuille de route pour l'énergie à l'horizon 2050”»

COM(2011) 885 final.

La section spécialisée «Transports, énergie, infrastructures, société de l'information», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 10 mai 2012.

Lors de sa 481e session plénière des 23 et 24 mai 2012 (séance du 23 mai 2012), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 137 voix pour, 6 voix contre et 9 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1   Le CESE prend note avec un grand intérêt de la Feuille de route pour l'énergie à l'horizon 2050 et dc son objectif de fournir un cadre pour la politique arrêtée de décarbonisation substantielle du secteur de l'énergie en Europe d'ici 2050(Conseil européen, octobre 2009). Le défi ne consiste pas seulement à parvenir à un bouquet énergétique durable et sûr dans un marché concurrentiel, mais aussi à convaincre la société civile qu'il s'agit là d'un objectif réalisable.

1.2   Les États membres de l'UE ont différentes ressources et infrastructures énergétiques, et l'objectif de décarbonisation constitue un défi nettement plus important pour certains pays que pour d'autres. L'approche adoptée dans la Feuille route offre une flexibilité considérable permettant aux pays de développer des plans d'action appropriés et prévoit un degré élevé de répartition des charges en vue d'atteindre l'objectif de décarbonisation.

1.3   Cet objectif est certes ambitieux, mais indispensable si l'Europe veut jouer le rôle qui lui revient dans la lutte contre le changement climatique et parvenir à une plus grande sécurité énergétique. Un débat aussi large que possible parmi la population européenne sera nécessaire, et le Comité estime que la Feuille de route peut utilement servir à amorcer ce dialogue. Elle doit toutefois promouvoir un engagement à tous les niveaux – personnel, communautaire, régional, national et européen – et veiller à ce que celui-ci soit assorti d'une action complémentaire au niveau mondial.

1.4   La Feuille de route se termine par dix conditions ou priorités pour une action immédiate. Le CESE souscrit à toutes ces propositions et en particulier à la dernière, qui recommande la mise en place de jalons concrets et spécifiques pour orienter les efforts des prochaines années. Le Comité reconnaît également que la création d'un cadre politique pour 2030 devient une considération importante en vue de fournir un guide fiable pour les décisions d'investissement des prochaines années, qui devront s’insérer dans une réflexion allant bien au-delà 2020 en ce qui concerne le calcul de leurs avantages et de leurs rendements.

1.5   Préalablement, le CESE recommande de procéder d'urgence à un réexamen de la stratégie énergétique 2020. Cela est essentiel pour ajuster la trajectoire qui devra nous mener jusqu’en 2030 ou 2050. Le Comité aimerait voir des rapports «pays par pays» et «secteur par secteur» sur les trois principaux objectifs fixés pour la décennie en cours.

1.6   Il importe d'obtenir des indications rapides quant à la possibilité d'atteindre les objectifs ambitieux de la Feuille de route et de procéder à une réévaluation de leur impact sur l'économie de l'UE notamment en termes de compétitivité mondiale, d'emploi et de sécurité sociale.

1.7   Il est essentiel d'associer l'opinion publique aux questions liées à la transition énergétique. La réalisation d'un forum de la société civile européenne et l'adoption de mesures volontaristes pour établir une Communauté européenne de l'énergie constituent deux démarches constructives pour atteindre l'objectif souhaité d'un avenir énergétique durable.

2.   Introduction

2.1   La Feuille de route pour l'énergie à l'horizon 2050 est l’ultime des propositions présentées par la Commission européenne pour soutenir les politiques européennes en matière d'énergie et de lutte contre le changement climatique (voir en particulier la Feuille de route vers une économie compétitive à faible intensité de carbone à l’horizon 2050, COM(2011) 112 final). La Feuille de route fournit un cadre pouvant permettre d'atteindre les trois objectifs de la politique européenne de l'énergie: décarbonisation, sécurité de l'approvisionnement et compétitivité. En elle-même, la Feuille de route ne contient pas de recommandations spécifiques sur des mesures politiques ou des objectifs intermédiaires, et les scénarios qui y sont présentés ne doivent pas être considérés comme des propositions d'action.

2.1.1   Globalement, sur la base des tendances et politiques actuelles, la demande primaire d'énergie devrait augmenter d'un tiers entre 2010 et 2035, une augmentation qui ne sera que marginalement affectée par la une croissance économique ralentie. La part des combustibles fossiles dans la consommation mondiale d'énergie primaire ne diminuera que légèrement (passant de 81 % en 2010 à 75 % en 2035), de sorte que des émissions de CO2 liées à l'énergie augmenteront encore de 20 % durant cette période, annonçant une augmentation à long terme de la température mondiale moyenne supérieure à 3,5 °C (Perspectives énergétiques mondiales de l'AIE, novembre 2011).

2.1.2   Quoique la Feuille de route se concentre sur la décarbonisation du système énergétique, elle met en lumière deux vulnérabilités majeures. Les importations d'énergie représentent quelque 55 % du bouquet énergétique de l'UE, tandis que le marché international de l'énergie est hautement compétitif et volatile. En définitive, seule une action coordonnée à l'échelle de la planète peut résoudre ce qui est un problème mondial. L'Europe peut jouer un rôle de chef de file en montrant comment la transformation de la donne énergétique peut être gérée dans une grande région du monde, ce qui pourrait lui permettre d'en retirer des avantages en tant que précurseur de ce processus et de réduire sa dépendance vis-à-vis des importations.

2.2   Il est urgent de relever ce défi. Les investissements énergétiques ont habituellement une durée de vie de 40 ans ou plus. Pour parvenir au type de transition énergétique jugée nécessaire, nous devons commencer à agir dès à présent et éviter de nous engager trop avant dans des investissements à haute intensité de carbone. En raison des incertitudes politiques, techniques et économiques, la Feuille de route ne propose pas un modèle de développement unique à l'horizon 2050. Elle explore les voies de transition possibles et reconnaît le besoin de flexibilité dans un monde changeant et incertain. Bien que le traité de Lisbonne ait étendu les compétences de la Commission en matière de politique énergétique, il dispose cependant que le bouquet énergétique reste de la compétence des gouvernements nationaux et que toute action au niveau européen doit respecter cette répartition des responsabilités. La Feuille de route insiste toutefois sur la nécessité d'un nouvel esprit de coopération pratique pour dégager les meilleurs résultats possibles. Le Comité soutient résolument cette approche pragmatique, par exemple le développement d’une Communauté européenne de l'énergie.

3.   Résumé de la Feuille de route énergie 2050

3.1   D’ici 2020, la voie à suivre en matière d'énergie est déjà largement engagée, vu les plans existants et les politiques mises en place pour mettre en œuvre la stratégie 20-20-20. Aujourd’hui, la Feuille de route met en évidence la nécessité urgente de développer des stratégies énergétiques pour l’après-2020. Les gouvernements doivent agir immédiatement pour assurer la continuité de l'approvisionnement et la confiance des investisseurs ainsi que pour minimiser les effets de verrouillage. Tout retard augmentera les coûts et accroîtra la quantité d'efforts nécessaires pour réduire au minimum les émissions de carbone.

3.2   Vu la difficulté de prédire l'avenir énergétique avec certitude, sept scénarios indicatifs distincts ont été élaborés. Les deux premiers présentent ce qu'il est susceptible de se produire si l'on poursuit simplement les politiques existantes et les initiatives politiques actuelles. Dans les deux cas, l'on n'atteindrait pas les objectifs de réduction du carbone à l'horizon 2050. Les cinq autres scénarios offrent cinq autres chemins vers l'objectif 2050 en fonction des différents choix technologiques et politiques:

mesures radicales en matière d'efficacité énergétique;

politique vigoureuse de tarification du carbone visant à mettre en place une série de solutions à faible intensité de carbone mises en concurrence sur le marché;

mesures d'aide de grande ampleur pour le développement des énergies renouvelables;

recours accru au nucléaire et moindre recours au captage et au stockage du dioxyde de carbone;

recours accru au captage du carbone et moins de nucléaire.

3.3   Se fondant sur la modélisation des scénarios, la Commission avance dix conclusions sur le changement structurel dans le système énergétique. Elles indiquent que la décarbonisation est possible et qu’elle devrait être moins coûteuse que les politiques actuelles à long terme, dans le contexte d'un bouquet énergétique où l'électricité joue un rôle croissant, ses prix augmentant en termes réels, et où les coûts énergétiques gagnent en importance dans les dépenses des ménages jusqu'en 2030. Les coûts de capital augmenteront, mais les coûts des combustibles diminueront, et il sera primordial de réaliser des économies d'énergies très importantes dans l’ensemble du système. La part des énergies renouvelables va sensiblement augmenter dans tous les scénarios et il est supposé que la capture et le stockage du carbone joueront un rôle vital et de taille dans la transformation du système, tandis que l'énergie nucléaire continuera à fournir une contribution importante et que l’interaction entre les systèmes décentralisés et centralisés augmentera à mesure que la gamme d’options s’élargira.

3.4   La Feuille de route indique que la sécurité énergétique nécessite une politique européenne spécifique s’agissant de la sécurité de l'approvisionnement énergétique, du développement des infrastructures et des relations avec les pays tiers producteurs et de transit. Les politiques de développement de nouvelles technologies, d'intégration des énergies renouvelables sur le marché, d'efficacité énergétique, d’économies d'énergie et de développement des infrastructures seront plus efficaces si elles sont coordonnées au niveau européen.

3.5   Tous les scénarios impliquent un changement et une adaptation de la part des utilisateurs de l'énergie, la Commission prenant note de la nécessité d’un engagement et d’une participation du public et d’une reconnaissance de l'impact social. Des niveaux plus élevés d'investissement en R & D et d’innovation technologique seront nécessaires, tandis qu’il faudra traiter les questions pendantes s’agissant du marché unique et de la réglementation dans ce domaine. Les infrastructures de l'énergie devront être considérablement améliorées et dotées de capacités supplémentaires, tandis que les États membres et les investisseurs auront besoin de jalons concrets. La Commission prévoit de publier une autre série de communications pertinentes sur les énergies renouvelables, le marché intérieur, le CSC, la sûreté nucléaire et les technologies énergétiques. Celles-ci façonneront le cadre politique pour 2030.

4.   Observations générales

4.1   Compte tenu des nombreuses incertitudes techniques et politiques sur l'avenir, le Comité juge que la méthode de la Feuille de route, à savoir une modélisation des scénarios alternatifs pour 2050, est appropriée, dès lors qu'elle permet une comparaison et une évaluation des différents développements techniques, combinaisons de politiques et événements extérieurs.

4.2   Il y a un manque de transparence quant à la méthodologie de modélisation et aux hypothèses qui la sous-tendent. Davantage d'informations devraient être fournies à ce sujet afin que d'autres experts puissent tester cette approche et élaborer d'autres scénarios fondés sur des hypothèses différentes. Néanmoins, le Comité pense que les informations contenues dans les annexes à la Feuille de route constituent un pas positif et étayent la conclusion principale de la Feuille de route: une décarbonisation importante d'ici 2050 est faisable, ce qui à long terme donnera à l'Europe une base énergétique plus sûre et durable pour l'avenir que si elle poursuivait les politiques existantes, et ce moyennant un coût dans l'ensemble comparable sur les 40 années qui nous séparent de 2050. Toutefois, s'ils sont réalisables, les défis de décarbonisation découlant de la Feuille de route n'en sont pas moins considérables et confrontés actuellement à de nombreux obstacles.

4.3   La Feuille de route montre qu'il existe différentes manières de parvenir à la décarbonisation. Elles ont toutes des éléments clés en commun: un effort important par rapport à l'efficacité énergétique, une forte expansion des énergies renouvelables, une plus grande part de l'électricité dans le bouquet énergétique, un réseau énergétique plus vaste et plus intelligent, et de nouvelles mesures pour le stockage de l'électricité et pour les capacités de réserve. D'autres éléments sont plus dépendants de développements techniques qui n'ont pas encore pleinement fait leurs preuves ou des ressources et des choix de chaque pays (charbon propre, énergie nucléaire, etc.). L'adhésion du public et les variations de coût sont deux facteurs significatifs qui sous-tendent chacune des options, aucune d'entre elles n'étant dépourvue de dangers.

4.4   Le Comité est d'accord avec cette analyse et la conclusion implicite selon laquelle l'UE devrait focaliser son effort collectif de base sur l'objectif consistant à faire avancer de manière aussi rapide, cohérente et efficace que possible des éléments communs qui seront nécessaires dans toute l'Europe.

4.5   Le Comité est également d'accord avec l'analyse de la Feuille de route des principaux défis et opportunités qu’il convient de traiter au niveau européen pour transformer le système énergétique, repenser les marchés de l'énergie, mobiliser les investisseurs, assurer l’adhésion de la population et orienter les changements au niveau international. Le Comité est prêt à reconnaître comme valables les priorités proposées en respectant les objections et les observations présentées dans les commentaires formulés ci-dessous, en particulier, dans la dernière section du document, aux dix conditions ou questions clés qui doivent être traitées de toute urgence pour stimuler les progrès.

4.6   Le Comité est toutefois consterné par le retard qu'accusent les progrès dans l'UE et dans certains de ses États membres par rapport aux objectifs fixés. Le Comité plaide instamment pour qu'il soit reconnu que l'ampleur de ce problème est masquée par le déclin des processus de production à haute intensité de carbone dans l'UE, leur expansion dans d'autres parties du monde et la réimportation à laquelle ils donnent ensuite lieu dans l'UE.

4.7   Il faut du temps pour que le développement technologique devienne pleinement exploitable à des prix compétitifs. Le cycle des investissements dans l'énergie est particulièrement long (40 ans d'habitude); il est donc nécessaire que l'UE et ses États membres établissent d'urgence des objectifs indicatifs pour 2030, assortis de politiques de soutien pour éviter que des investissements ne soient immobilisés dans des installations à haute densité de carbone. C'est précisément le rythme de ces cycles d'investissement qui est susceptible de déterminer celui des progrès devant mener à l'objectif final de 2050, et si la réalisation de celui-ci est réaliste. Il faudra pour cela une convergence de volontés de la sphère politique et du monde des entreprises qui se traduise par des actions concrètes sous la forme de programmes d'accompagnement et de mesures législatives.

4.8   À l'heure actuelle, la question de l'efficacité et des économies d'énergie n’avance pas assez vite, eu égard, en particulier, aux négociations interinstitutionnelles sur l'actuelle proposition de directive sur l'efficacité énergétique. L'analyse des programmes nationaux d'efficacité énergétique à laquelle la Commission procédera prochainement devrait stimuler des actions supplémentaires, même s'il faut être conscient qu'une réduction de la demande est également susceptible d'avoir une incidence sur les investissements énergétiques. Les progrès en matière d’énergies renouvelables sont freinés par le soutien fluctuant des gouvernements et, dans certains cas, par la résistance locale. La modernisation du réseau et des installations de stockage d'énergie procède trop lentement. Un réseau intelligent qui soit réellement flexible suppose des coûts d'investissement supplémentaires, mais le Comité estime que les avantages qu'il offre pour construire les fondations d'une Communauté européenne de l'énergie mutuellement bénéfique sont prédominants. Nous nous en sommes expliqués plus en détail dans l'avis sur la réglementation en matière d'infrastructures (1).

4.9   Le prix des émissions de carbone fixé par le système communautaire d'échange de quotas d'émission (SCEQE) est beaucoup trop faible et instable pour donner un signal utile aux investisseurs. Cependant, les conséquences envisagées dans les hypothèses de prix unitaires élevés au niveau du SCEQE (200-300 euros/tonne en 2040-2050) nécessitent une analyse plus poussée. Ces questions comme d'autres encore pendantes créent des obstacles à la réalisation des dix conditions nécessaires au progrès recensées dans la Feuille de route. Une première priorité doit être d'examiner ces problèmes ouvertement et honnêtement et de les résoudre à bref délai afin que de nouveaux progrès puissent être accomplis.

4.10   À plus long terme, cela rendra l'économie européenne plus résistante et plus compétitive dans le monde que si les politiques actuelles étaient maintenues. Mais dans le court terme, les investissements nécessaires conduiront inévitablement à des hausses du prix de l'énergie et à des coûts supplémentaires pour les consommateurs, les entreprises ou les gouvernements (ou probablement pour les trois, à des degrés différents). Cela est également susceptible d'avoir des impacts différents selon les États membres, qui présentent à l'heure actuelle des différences sensibles en ce qui concerne leur degré de dépendance par rapport aux combustibles fossiles, leur niveau d'efficacité énergétique et leur potentiel de développement des énergies renouvelables.

4.11   À cet égard, le maintien probable de la dépendance vis-à-vis du charbon en matière de production d'électricité dans de nombreuses zones de l'Europe, accompagné d'un intérêt accru pour le potentiel du gaz de schiste, nécessitera des efforts de recherche et de financement déployés dans un cadre de collaboration afin de mettre en œuvre des programmes complémentaires en matière de CSC. Toutefois, s'il permet de réduire la dépendance énergétique par rapport à des pays tiers, le gaz de schiste comporte des risques considérables pour l'environnement, qu'il y a lieu d'évaluer minutieusement. Il est nécessaire d'établir des principes de partage des charges et de répartition des coûts entre les pays. Les pays dépendant du charbon pour la production d'énergie doivent bénéficier d'encouragements bienveillants et de stimulants pour consentir des efforts de décarbonisation maximums.

4.12   Selon le CESE, il est primordial que tous ces impacts soient entièrement chiffrés, débattus et acceptés par toutes les parties concernées, et que des mesures soient prises pour partager le fardeau de l'ajustement en fonction des capacités et dans un esprit de solidarité tant au niveau européen qu’à celui des États membres. L'expérience montre que des communautés peuvent être amenées à accepter la nécessité du changement et les coûts que supposent de telles transformations - mais seulement si elles y participent pleinement, n'estiment pas être injustement désavantagées, et qu’elles sont en mesure d’en comprendre les raisons et d’y souscrire. Les gouvernements nationaux doivent donner à leurs citoyens les outils leur permettant de participer à ces changements attendus, fixer des objectifs clairs et expliquer pour quelles raisons ces mesures sont nécessaires.

4.13   Il est également essentiel que les consommateurs vulnérables soient protégés de l'impact des prix élevés de l'énergie et que les entreprises vulnérables soient mises à l’abri d’une concurrence inéquitable des zones extérieures à l'UE qui ne sont pas soumises aux mêmes contraintes. Des États membres ou des régions qui rencontrent des problèmes particuliers pour mener à bien la transformation du secteur énergétique peuvent également avoir besoin de soutien supplémentaire par le biais des Fonds structurels ou d'autres mécanismes, même si l'existence de systèmes de soutien différents ne doit pas fausser la concurrence entre les pays et les régions. Il faudrait plutôt procéder à une harmonisation des systèmes de soutien qui sont justifiés et établir des principes de répartition des coûts entre les différents pays participant à de grands projets d'infrastructures. En outre, il convient de prendre acte des risques inhérents au processus de planification centrale que tout ceci nécessite.

4.14   La Commission européenne devrait surveiller de près les stratégies des États membres de l'UE afin de garantir que les intérêts des consommateurs sont défendus et que la mise en œuvre des technologies intelligentes à faible intensité de carbone repose sur un bon rapport coût/efficacité. En particulier, il faut veiller à ce que le bon fonctionnement du marché intérieur, le renforcement des compétences et de l'indépendance des autorités de réglementation du secteur de l'énergie et une obligation étendue de service universel s'inscrivent tous dans un contexte de transparence, de responsabilité et d'information du public en matière de consommation durable.

4.15   La poursuite de l'expansion des énergies renouvelables se heurte également à certains problèmes à l'heure actuelle. Sur le plan technique, il n'y a pas encore de plans ni d'investissements susceptibles de permettre un recours accru à des sources d'approvisionnement variables et bénéficiant d'une large distribution dans le réseau et le système de stockage. Sur le plan économique, quoique le coût unitaire moyen des énergies renouvelables continues de décliner, ce mode de production d'électricité reste jusqu'à présent plus onéreux que les méthodes conventionnelles (en particulier les centrales électriques fonctionnant au gaz). Sur le plan de la consommation, certains types d'installations (en particulier les éoliennes) se heurtent parfois à une opposition locale. Dès lors, même si à l'horizon 2050 le scénario fondé sur un recours massif aux énergies renouvelables reste l'option la plus attrayante en raison de la sécurité accrue d'approvisionnement et du coût pratiquement nul du combustible utilisé (soleil, vent, etc.), les problèmes qu'il faudra surmonter pour le mettre en œuvre semblent les plus élevés si on les contemple depuis la situation qui est la nôtre aujourd'hui, et ils nécessiteront un engagement politique très résolu et cohérent pour y arriver. En tout état de cause, les arguments qui précèdent ne valent que dans la mesure où des systèmes de stockage d'énergie décarbonée et des centrales de réserve sont disponibles pour compenser la nature fluctuante de la plupart des sources d'énergie renouvelable.

4.16   La gestion de cette transformation exigera des efforts déterminés et coordonnés à tous les niveaux. Une action vigoureuse de l’Europe est nécessaire pour établir des normes communes en matière d'efficacité énergétique dans tous les secteurs, pour stimuler l'innovation dans les technologies clés, pour intégrer le marché, harmoniser les mesures fiscales et les systèmes d'incitation, pour réformer le SCEQE et pour coordonner les plans relatifs à un réseau intelligent intégré à l'échelle européenne et à des systèmes de stockage d'énergie, etc. Un réexamen précoce de la stratégie 2020 est essentiel avant que l'Europe ne se lance définitivement sur le chemin qui la mènera jusqu'en 2030 ou 2050. Le Comité souhaiterait disposer de rapports par pays et par secteur en ce qui concerne les trois principaux objectifs établis pour la décennie actuelle.

4.17   Le Comité considère essentiel que la Commission et les États membres établissent des mécanismes efficaces pour mener à bien la transformation nécessaire dans un esprit de coopération. Le Comité est favorable à la mise en place rapide d'une Communauté européenne de l'énergie intégrée. Entre-temps, il appelle la Commission et les États membres, ainsi que les régulateurs et les producteurs d'énergie à établir des mécanismes de coopération qui leur permettent de travailler ensemble, presque comme ils le feraient si une Communauté de l'énergie existait déjà.

5.   Observations spécifiques

5.1   Bouquet énergétique

5.1.1   La décarbonisation du système énergétique européen pourrait être un atout pour la compétitivité de l’Europe à moyen terme. Elle implique des changements profonds du bouquet de production des États membres et l’abandon progressif des énergies fossiles (pétrole, gaz, charbon) qui constituent encore 80 % du bouquet énergétique européen. Ces énergies fossiles sont très majoritairement importées et placent l’Union en situation de dépendance économique et financière (près de 55 % de notre énergie vient de ressources extra-européennes). Les achats annuels de l’Union européenne en pétrole et en gaz s’élèvent respectivement à 270 et 40 milliards d’euros, et le coût de ces approvisionnements risque de s’alourdir dans les prochaines années compte tenu de la volatilité du prix du pétrole et du gaz.

5.1.2   Le passage à des sources d’énergie internes décarbonées sera moins coûteux pour la collectivité européenne que le maintien d’un système énergétique dans lequel l’Europe est dépendante d’énergies primaires importées, en particulier dans le contexte d'une demande mondiale sans cesse croissante. Le système des sources d'énergie réparties stimule l'économie locale, crée des emplois et renforce la sensibilisation de la société aux questions énergétiques. Son développement pourrait contribuer fortement à atteindre les objectifs de l'UE en matière d'énergie et de climat. Les progrès dans la réalisation d'un système de sources d'énergie internes à faible teneur en carbone dépendent des politiques énergétiques et financières des États membres. L'on préconise que la Commission agisse de façon plus résolue pour soutenir les politiques nationales de développement des sources d'énergie locales.

5.1.3   En ce sens, les énergies renouvelables doivent être encouragées, ainsi que toutes les technologies concourant, au moindre coût, à l’objectif de décarbonisation. La biomasse pourrait également avoir un rôle à jouer même s'il est important de garantir que les méthodes choisies contribuent à la réduction du carbone, sur la base d'une analyse portant sur l'ensemble du cycle de vie, et qu'elles n'aggravent pas l'insécurité alimentaire. Dans toute l'Europe, l'énergie nucléaire suscite des inquiétudes et une opposition à son développement. Néanmoins, l’énergie nucléaire peut avoir vocation, dans les pays qui le souhaitent, à contribuer à cette transformation du système énergétique et à participer à la réduction des émissions de CO2, en permettant une réduction des coûts du système et des prix de l’électricité, même si des questions continuent de se poser quant au fait que certains coûts, tels ceux liés à la sécurité, au stockage des déchets, au déclassement et à la responsabilité restent externalisés ou socialisés.

5.1.4   L’électricité doit jouer un rôle plus important qu’aujourd’hui, car elle contribue largement à la décarbonisation du transport et du chauffage/refroidissement. Le doublement envisagé de sa part dans la consommation d’énergie finale doit s’accompagner de transformations profondes de ses modes de production et de ses modalités d’échange entre pays européens, ainsi que d'une concurrence accrue et réelle entre producteurs et vendeurs d'électricité.

5.1.5   Le pétrole doit rester prioritairement affecté au fret et au transport de passagers sur de longues distances; quant au gaz, il peut être temporairement l’énergie de substitution à des sources plus polluantes (comme le charbon ou le pétrole), mais sa vocation première est d’être d’ici 2050 une ressource de transition vers des énergies pauvres en carbone. Dans ce cadre, les ressources gazières internes à l’Union devront être inventoriées de manière exhaustive, car elles participent d’une indépendance énergétique accrue de l’Union.

5.1.6   Vis-à-vis de toutes les énergies fossiles, l’Europe doit procéder d'urgence à de plus amples analyses concernant les conditions de localisation et les aspects économiques du captage/stockage du CO2, en lien avec une valorisation réaliste du carbone et une information accrue de l’opinion publique.

5.1.7   Trois secteurs d’activité auront tout particulièrement à révolutionner leur organisation. La production d'électricité devra réduire ses émissions d’au moins 95 %, chaque État étant libre de trouver sa propre combinaison d’énergies renouvelables, de nucléaire ou de captage et de séquestration du carbone. Le bâtiment, résidentiel ou tertiaire, devra aussi s’adapter, avec des objectifs de -90 %, passant par des normes plus strictes pour les constructions neuves et la consommation des appareils domestiques, et incluant la réhabilitation du parc immobilier existant. L’industrie devra enfin diminuer ses propres émissions de 85 %, en veillant à la menace de délocalisations vers des pays appliquant des normes d’émission moins restrictives.

5.2   Pour un volontarisme industriel et financier

5.2.1   La transition énergétique est l’occasion de relancer l’industrie européenne, de créer de l’activité et de revoir en profondeur nos modes de production et de consommation. La compétitivité de l’Europe doit être fondée sur la recherche, l’innovation et la capacité à commercialiser des technologies propres. Dans cet esprit, l’UE et les États membres doivent prioritairement favoriser des projets d’envergure entre opérateurs européens visant à servir l'industrie en général et les PME en particulier, et il importe également de prendre en compte et d'évaluer le rôle de la production localisée d'énergie.

5.2.2   Cette transition vers une économie à faible intensité carbonique doit promouvoir l’emploi au sein du marché intérieur. Dans un contexte de reconversion de l’industrie énergétique, il faut créer les conditions permettant de développer de nouveaux emplois. Les secteurs du bâtiment et des énergies renouvelables peuvent ainsi engranger 1,5 million d’emplois supplémentaires dès 2020.

5.2.3   Le CESE partage l’analyse de la Commission au terme de laquelle les investissements supplémentaires (270 milliards d’euros par an d’ici 2050), soit 1,5 % du PIB de l'Union, aideront l’Europe à doper sa croissance. Les seuls gains sur les importations d’hydrocarbures peuvent représenter de 175 à 320 milliards d'euros par an. Toutefois, la communauté des investisseurs demande que le marché dispose d'un cadre cohérent et solide à travers l'Europe et que les États membres collaborent davantage. Il conviendrait de développer des instruments d'investissement financier innovants, en particulier pour soutenir les PME dans le domaine de l'énergie.

5.2.4   Les ressources financières nécessaires doivent être mutualisées afin de sortir de systèmes de soutien purement nationaux, inefficaces et discriminants en termes de compétition. La révision en 2013 du cadre des aides d’État environnementales doit permettre d’accompagner la promotion de toutes les technologies participant à une réduction des émissions de CO2.

5.3   Mieux et moins consommer: plus d’efficacité énergétique et d’échanges entre États membres

5.3.1   Une grande impulsion européenne s’impose pour réduire la consommation d’énergie, mieux l’utiliser - en encourageant les comportements sobres et les techniques moins coûteuses en énergie - et l’échanger de manière optimale. Les bâtiments (39 % de la consommation finale d’énergie en Europe), les transports (30 %) ou l’industrie (25 %) sont en attente de vraies orientations communes, obligatoires et contraignantes. Le potentiel d’économie d’énergie est considérable: le secteur industriel pourrait réduire de 19 % sa consommation et le secteur des transports de 20 %.

5.3.2   Le CESE recommande de poursuivre avec lucidité les efforts engagés dans le cadre du Paquet énergie-climat, en prenant notamment en compte le soutien nécessaire aux pays d’Europe centrale et orientale.

5.3.3   L’essor massif des énergies renouvelables en mer du Nord, et potentiellement, bien que dans une moindre mesure, dans la région de la mer Baltique, du solaire et de l’éolien dans le sud de l’Europe va exiger de nouvelles infrastructures, plus «intelligentes», pour mieux échanger entre régions et pays européens. Les progrès sur les «réseaux intelligents» (smartgrids) pourraient permettre de diminuer de 9 % la consommation et de réduire les émissions de CO2 de 9 à 15 %. Cela suppose des investissements prioritaires d’ici 2050 dans ces infrastructures stratégiques, évalués entre 1,5 à 2,2 trillions d'euros, afin de moderniser et développer les réseaux électriques et gaziers européens.

5.3.4   Des groupes d’États membres d’une zone géographique donnée pourraient utilement coordonner leurs bouquets énergétiques ainsi que leurs règles en matière d'infrastructures et de marché afin de mutualiser le bénéfice des différentes sources d’énergie à leur disposition. Mieux interconnectés et harmonisés, leurs marchés seraient plus résilients aux variations de production et de consommation, et, collectivement, plus aptes à sécuriser l’approvisionnement de l’Union européenne en énergie.

5.4   Associer les citoyens à la transition énergétique

5.4.1   L’acceptation par l’opinion publique des choix énergétiques (nucléaire, stockage CSC, parcs éoliens, lignes à haute tension, …) constitue aujourd’hui un défi pour les démocraties européennes. Le CESE, ainsi que les CES nationaux, les organisations de consommateurs et d'autres ONG ont un rôle central à jouer pour favoriser une information claire et transparente sur ces orientations et mieux associer les citoyens européens. La Feuille de route constitue une occasion de développer la démocratie participative autour d'une question qui affecte chaque citoyen.

5.4.2   Le CESE suggère une grande campagne d’information et de sensibilisation des citoyens européens aux différentes options de la transition énergétique, au rôle central des infrastructures et aux nouveaux comportements de consommation attendus des citoyens européens.

5.4.3   Le CESE considère que la création d’un Forum européen de la société civile participerait d’un renforcement des échanges au sein de l’Union, en rassemblant de manière régulière tous les acteurs locaux, régionaux, nationaux et européens afin de débattre, collectivement, des enjeux de la transition énergétique à l’horizon 2050.

5.4.4   La création d’une Communauté européenne de l’énergie consacrerait aussi aux yeux de tous la dimension stratégique et vitale de l’énergie (accessibilité, tarifs et prix abordables, régularité, fiabilité, …) et les mutations à engager dans les quarante prochaines années. Elle incarnerait une Europe à l’écoute des siens, traitant de sujets proches des citoyens. Ce projet participerait d’une plus forte harmonisation sociale, souhaitable pour renforcer et redonner du sens au projet européen.

5.4.5   Le CESE recommande de soutenir plus fermement les initiatives locales et régionales qui sont en première ligne sur les questions de mobilité, d’infrastructures de transport intelligentes, de construction neuve et de réhabilitation, de réseaux de chaleur et de froid ou d’urbanisme. Le CESE considère qu’il faut encourager leurs initiatives, car elles promeuvent souvent des politiques énergétiques innovantes, décentralisées et démocratiques.

Bruxelles, le 23 mai 2012.

Le président du Comité économique et social européen

Staffan NILSSON


(1)  Orientations pour les infrastructures énergétiques transeuropéennes JO C 143 du 22.05.2012, p. 125.


ANNEXE

à l'avis du Comité économique et social européen

Les amendements suivants, qui ont recueilli plus du quart des suffrages exprimés, ont été rejetés au profit d'amendements adoptés par la plénière:

«1.1

Le CESE la Feuille de route pour l'énergie à l'horizon 2050 et son objectif de fournir un cadre pour la politique arrêtée de décarbonisation substantielle du secteur de l'énergie en Europe d'ici 2050 (Conseil européen, octobre 2009). Le défi ne consiste pas seulement à parvenir à un bouquet énergétique durable et sûr dans un marché concurrentiel, mais aussi à convaincre la société civile qu'il s'agit là d'un objectif réalisable.»

Résultat du vote

Voix pour

:

88

Voix contre

:

41

Abstentions

:

13

«4.5

Le Comité est également d'accord avec l'analyse de la Feuille de route des principaux défis et opportunités qu’il convient de traiter au niveau européen pour transformer le système énergétique, repenser les marchés de l'énergie, mobiliser les investisseurs, assurer l’adhésion de la population et orienter les changements au niveau international. Sous réserve des observations plus détaillées formulées ci-dessous, le Comité souscrit aux priorités proposées et, en particulier, dans la dernière section du document, aux dix conditions ou questions clés qui doivent être traitées de toute urgence pour stimuler les progrès.»

Résultat du vote

Voix pour

:

75

Voix contre

:

51

Abstentions

:

24

«5.1.3

En ce sens, les énergies renouvelables doivent être encouragées, ainsi que toutes les technologies concourant, au moindre coût, à l’objectif de décarbonisation. La biomasse pourrait également avoir un rôle à jouer même s'il est important de garantir que les méthodes choisies contribuent à la réduction du carbone, sur la base d'une analyse portant sur l'ensemble du cycle de vie, et qu'elles n'aggravent pas l'insécurité alimentaire. L’énergie nucléaire peut avoir vocation, dans les pays qui le souhaitent, à contribuer à cette transformation du système énergétique et à participer à la réduction des émissions de CO2, en permettant une réduction des coûts du système et des prix de l’électricité, même si des questions continuent de se poser quant au fait que certains coûts, tels ceux liés à la sécurité, au stockage des déchets, au déclassement et à la responsabilité restent externalisés ou socialisés.»

Résultat du vote

Voix pour

:

89

Voix contre

:

53

Abstentions

:

8


31.7.2012   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 229/133


Avis du Comité économique et social européen sur le thème «Accroître l'impact de la politique de développement de l'UE: un programme pour le changement — la future approche de l'appui budgétaire de l'UE en faveur des pays tiers»

COM(2011) 637 final et COM(2011) 638 final

2012/C 229/26

Rapporteure: Mme An LE NOUAIL MARLIÈRE

Le 30 octobre 2011, la Commission européenne a décidé, conformément à l'article 304 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur le thème

«Accroître l'impact de la politique de développement de l'UE: un programme pour le changement / La future approche de l'appui budgétaire de l'UE en faveur des pays tiers»

COM(2011) 637 final et COM(2011) 638 final.

La section spécialisée «Relations extérieures», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 30 avril 2012.

Lors de sa 481e session plénière des 23 et 24 mai 2012 (séance du 24 mai 2012), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 146 voix pour, 60 voix contre et 30 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

Le Comité approuve et soutient les deux propositions en insistant toutefois sur la priorité de traduire les objectifs annoncés dans la réalité des populations à qui sont destinées au final les aides, et à cette fin suggère de:

1.1

Associer les organisations de la société civile (OSC dont font partie entre autres, chacune avec leurs propres spécificités, les organisations syndicales, les coopératives, les ONG ou les organisations des employeurs) non seulement aux orientations générales mais tout au long des processus de choix de projets, mise en œuvre, évaluation de résultats pour appuyer et compléter les procédures administratives, diplomatiques et juridiques de contrôle et d’évaluation des financements de l’UE.

1.2

Associer au lieu de seulement consulter les partenaires sociaux et les autres organisations de la société civile permettrait de bénéficier de l’expertise reposant sur l’expérience sociale, économique et environnementale, et de l’engagement bénévole de citoyens impliqués, en améliorant les critères de représentativité et de démocratie – ouverture, élargissement, transparence, indépendance (objectif d’appropriation).

1.3

À cet égard les conseils économiques et sociaux lorsqu’ils existent constituent une ressource, précieuse. Le CESE, avec ses divers partenaires: organisations du troisième secteur, syndicats, organisations d’employeurs, s’est constamment impliqué quels qu’aient été les obstacles. Il a été un interlocuteur des pouvoirs publics européens auprès des délégations avec lesquelles il a été en relation, tant en faisant le pont entre institutions et organisations civiles, sociales et économiques qu’en recommandant en maintes circonstances une vigilance plus grande de la part des autorités de l'UE en matière de droits humains.

1.4

L'équilibre devrait être mieux assuré lors des modalités de la consultation des OSC européennes, d’une part, et des pays bénéficiaires, d’autre part. Il est indispensable d'éviter l'instrumentalisation de la politique européenne de développement en veillant tout particulièrement à une consultation croisée des acteurs non étatiques (1).

1.5

Le programme en faveur d'un travail décent, appelé à favoriser une croissance inclusive et durable, doit être pris en considération en ce qui concerne la concentration des secteurs au niveau national. Les partenaires sociaux doivent être associés dès le début au débat sur l'élaboration des politiques afin de garantir une appropriation démocratique des politiques de développement qui aille au-delà de la simple participation des gouvernements.

1.6

Les différenciations entre pays ou groupes de pays doivent se fonder sur des indicateurs pertinents tels que l'indicateur de développement humain des Nations unies correspondant à la réduction de la pauvreté. En tout état de cause, il convient de mettre en œuvre une stratégie de suppression progressive de la catégorie des économies dites «émergentes».

1.7

Le soutien de l'UE à la bonne gouvernance et aux droits de l'homme (pilier du programme pour le changement) devrait viser à promouvoir une approche du développement fondée sur les droits de l'homme et dont les caractéristiques seraient: la participation aux processus démocratiques; l'appropriation démocratique et l'émancipation des titulaires des droits; des systèmes de contrôle du respect des engagements convenus au niveau international en matière de droits de l'homme; et une cohérence entre les politiques déployées en matière de droits de l'homme, les politiques d'aide et les politiques économiques.

1.8

Le Comité suggère néanmoins d'accorder une attention toute particulière aux améliorations suivantes, lesquelles devraient permettre un redéploiement plus efficace de l'aide publique et privée:

observant que les pays où l'aide est la plus nécessaire sont souvent aussi ceux où sévissent les formes les plus sévères de corruption, il s'agit d'accorder une attention particulière aux mesures anti-corruption et il serait souhaitable, lorsque des paiements au titre de l'appui budgétaire sont effectués, que les acteurs non étatiques, les partenaires sociaux, les associations actives dans les domaines des droits de l'homme ainsi que les réseaux européens soient consultés et associés à la fixation des priorités, au suivi, etc.;

les thématiques sectorielles devraient être au centre de la redéfinition stratégique des objectifs de l'aide, parmi lesquelles le Comité retient en priorité les objectifs de développement du millénaire. Une attention particulière sera accordée aux secteurs sociaux, aux domaines de l'éducation y compris la formation professionnelle continue, de la santé, au développement des NTIC et de l'accès à celles-ci, au droit des personnes en situation de handicap, aux droits humains et aux droits au travail, à tous les droits concernant les femmes dans leur vie professionnelle et privée et leur participation à la vie publique;

l'aide publique reste essentielle et nécessaire au développement des pays ciblés. Néanmoins, aux fins d'une meilleure coordination de l'aide directe des États membres et de celle de l'UE, l'aide émanant des ONG et du secteur privé devrait être prise en compte dans le processus de coordination et se voir appliquer les mêmes principes de cohérence d'objectifs et de comptabilité;

le Comité reste préoccupé, par la tendance baissière de l'aide officielle au développement de la plupart des États membres et insiste sur la nécessité d'associer davantage la société civile aux décisions qui sont prises.

1.9

Le Comité estime que la Commission devrait renforcer le plus possible l'implication directe de la société civile européenne et des pays bénéficiaires, et ce dans une perspective de partenariat, l'objectif étant d'influer positivement sur les droits de l'homme, de lutter contre la corruption, de réduire le risque d'aide inefficace et d'atténuer les problèmes sociaux.

1.10

Les États membres devraient s'astreindre à coordonner leur aide dans le cadre communautaire. Dans un contexte de crise économique sévère pour l'UE, les contribuables européens devraient pouvoir être mieux sensibilisés aux objectifs de l'aide, en être informés, avoir leur mot à dire sur les objectifs, et pour mieux les soutenir, disposer des informations pertinentes aux travers d'actions de formation destinées au grand public et aux acteurs bénévoles et professionnels des OSC.

1.11

L’UE devrait aussi pouvoir sérieusement améliorer les performances de son aide en évaluant l’impact des accords de partenariat économique ou d’association ou de libre-échange, dans les domaines économique, industriel et agricole, avant de les conclure et dans le cadre de leur suivi.

2.   Introduction

2.1

Dans le prolongement de son livre vert intitulé «La politique de développement durable de l'UE en faveur de la croissance inclusive et du développement durable/accroître l'impact de la politique de développement de l'UE» du 10 novembre 2010 (COM(2010) 629 final), la Commission présente les deux propositions à l'examen.

2.2

Nouveaux défis mondiaux à relever, rapprochement de l'échéance de 2015 pour la réalisation des objectifs du Millénaire pour le développement (OMD) et préparation active du prochain cadre financier pluriannuel (CFP) – l'UE cherche le bon dosage de politiques, d'instruments et de ressources à déployer pour combattre efficacement la pauvreté dans le contexte d'un développement durable. La Commission propose un programme pour le changement de nature à renforcer la solidarité de l'Europe avec les nations du monde en développement dans le cadre de cette lutte.

2.3

L'UE a déjà beaucoup contribué à réduire la pauvreté et plus particulièrement à soutenir la réalisation des OMD. Pourtant, la grande pauvreté persiste dans de nombreuses régions du monde. Par ailleurs, les mouvements populaires survenus en Afrique du Nord et au Proche-Orient ont montré qu'il est essentiel de progresser sérieusement vers la réalisation des OMD. D'après la Commission européenne, la politique de développement de l'UE doit prendre en compte la différenciation accrue entre les pays en développement. L'UE a également l'occasion de collaborer plus étroitement avec le secteur privé, les fondations, les organisations de la société civile et les pouvoirs locaux et régionaux, étant donné que ces acteurs jouent un rôle crucial dans le développement. L'UE et ses États membres devraient parler d'une seule voix et agir de concert afin d'obtenir de meilleurs résultats et d'améliorer la visibilité de l'UE.

2.4

Compte tenu de la période économique et budgétaire actuelle, il est essentiel de veiller à ce que l'aide soit dépensée efficacement, produise les meilleurs résultats possibles et stimule d'autres financements en faveur du développement.

2.5

Les stratégies de développement menées par les pays partenaires continueront de façonner la coopération au développement de l'UE, conformément aux principes d'appropriation et de partenariat. L'UE souhaite parvenir à un engagement réciproque accru avec ses partenaires, notamment une responsabilisation mutuelle au regard des résultats. Le dialogue engagé au niveau des pays dans un cadre coordonné de donateurs doit déterminer précisément le champ et les modalités d'intervention de l'UE. Une collaboration plus efficace sera également déployée dans le cadre du système multilatéral.

2.6

La Commission a aussi adopté le 7 décembre 2011, une proposition de «Règlement du PE et du Conseil instituant un instrument de financement de la coopération au développement» (2) qui formalise les orientations proposées dans le livre vert et les deux communications examinées ci-après.

3.   Observations générales

3.1

Le Comité rappelle qu'il a fait dans des avis précédents nombre d'observations qui restent pertinentes. Il s'agit notamment de:

«L'instrument de financement de la coopération au développement de l'Union européenne» (3)

«L'instrument européen pour la démocratie et les droits de l'homme» (4) dans lequel il plaidait pour qu'«une réflexion institutionnelle soit lancée sur le rôle de la société civile dans la politique extérieure de l'Union en matière de droits de l'homme et sur la possibilité d'associer plus directement la société civile à la définition et à la mise en œuvre de cette politique. La consultation de la société civile organisée devrait être systématique avant l'élaboration de tout document de stratégie, y compris les documents de stratégie spécifiques par pays (…)».

3.2

Le Comité tient particulièrement à appuyer les objectifs de droits humains en particulier dans les domaines des droits humains au travail, de l’égalité entre femmes et hommes, dans la protection et la promotion des droits des enfants, y compris en vue de l’éradication du travail des enfants, et du travail informel non socialement protégé (Travail décent et Conventions de l’OIT).

3.3

Même si la réalisation de l'OdM 1 (éradication de la très grande pauvreté) est soutenue par la Commission, le Comité constate que trop peu d'importance est encore donné aux autres objectifs, en tant que permettant leur réalisation entre eux. Par exemple, mettre en œuvre la réalisation de l'objectif 7, d'un environnement humain durable, contribuerait à réduire la pauvreté.

3.4

Le Comité souligne la nécessité d'allouer spécifiquement des ressources financières aux questions de genre (OdM 3), dans le cadre de la coopération au développement. Il regrette avant tout l'absence d'informations et de données et l'absence de surveillance systématique, qui font qu'il est très difficile de relever quelque impact que ce soit, positif ou négatif, s'agissant de l'égalité hommes-femmes. Cela limite considérablement la possibilité d'adopter des politiques en connaissance de cause et de formuler des stratégies et interventions propres à réduire les inégalités. Pour être efficace, l'intégration des questions de genre dans toutes les politiques doit être mise en œuvre et étayée au moyen d'une prévisibilité des financements et des subventions, faute de quoi elle risque de rester lettre morte, au bénéfice d'autres objectifs en apparence plus urgents (5).

3.5

Concernant la décentralisation et la confiance déléguée aux représentations de l’UE, le CESE à travers ses groupes de contact, de suivi et participation aux «Tables rondes» de l’UE (Inde, Brésil, ACP, etc.) ainsi qu’aux processus en direction de la Méditerranée et du voisinage de l’Est, a rencontré, à chacune de ses missions, les délégations européennes. Le Comité constate que l'appui par les délégations européennes devrait être étendu en direction des OSC européennes présentes sur le terrain, et que la lisibilité de l'aide européenne y gagnerait.

3.6

Le CESE souscrit aux objectifs poursuivis par les propositions à l'examen mais formule quelques suggestions quant à l'instrument de l'«appui budgétaire», en raison du manque de soutien qu'il rencontre auprès du grand public. Les recommandations émises par les organisations de la société civile, les partenaires sociaux et autres devraient davantage être prises en considération au moment de la conception des programmes et dans le cadre de leur suivi: démocratie, transparence, traçabilité pour lutter contre le gaspillage, la corruption, l’évasion fiscale, l’abus de position de pouvoir et d’autorité politique, policière, ou militaire (6) et autres.

3.7

Premièrement, l’on doit aller au bout de l’évaluation si l’on veut éviter d'aboutir de nouveau d’ici huit ans (Perspectives financières 2014-2020) au constat que la Commission a certes bien évalué que les résultats sont décevants et qu’elle a tenté de redresser la situation en tenant compte également des missions confiées par le nouveau traité, mais en continuant finalement la même chose: consulter ex post, renforcer le contrôle en le détaillant à l’excès, sans renforcement des moyens humains ni vérification de la pertinence des cibles contrôlées, réseaux organisés ou individus. La priorité de l’aide devrait être accordée aux groupes sociétaux les plus vulnérables confrontés à des problèmes d'accès, y compris ceux des zones rurales et des régions les plus périphériques.

3.8

Deuxièmement, en favorisant les plus gros acteurs économiques de part et d’autre de l’aide (donateurs/bénéficiaires), l’on privilégie l’apparence de l’efficacité au détriment de l’investissement humain durable.

3.9

Enfin, au moment d'évaluer les objectifs de l’aide, la Commission doit clairement préciser la façon dont ses programmes d'aide s'articulent avec les buts qu'elle poursuit dans les négociations relatives tant aux accords de partenariat économique (APE) que de libre-échange (ALE), et la manière dont ils s'en différencient. Un manque de clarté en la matière non seulement est générateur de confusion et de mécompréhension, mais il peut aussi empêcher de reconnaître que jusqu’à présent, l'APD a insuffisamment stimulé la réalisation des objectifs du Millénaire faute de cohérence entre les objectifs de l'aide et le reste de la politique extérieure de l'UE, notamment commerciale.

3.10

Ainsi, l’UE pourrait stimuler mieux et davantage le développement d'une croissance inclusive orientée vers la transition vers une économie «verte», centrée sur le développement humain, le partage et le transfert des connaissances et des technologies nécessaires, améliorer les performances de son aide en évaluant l’impact des accords qu’elle conclut dans les domaines économiques, rendre performant «L'instrument européen pour la démocratie et les droits de l'Homme» (7).

3.11

Il faut rappeler que l’objectif de 0,7 % du RNB des États membres de la déclaration de Paris reste l’objectif en terme de volumes, mais que nombreux sont les États se sont réfugiés dès avant la crise financière de 2008 derrière le slogan «moins d’aide, de meilleure qualité» (Monterrey 2002, Johannesburg 2002). Les États membres de l’UE contribuent tous à des programmes d’aide européens ou internationaux mais au fil du temps, de larges pans de la société sont exclus des bénéfices annoncés, tant économiques qu’environnementaux. Il est donc nécessaire de rétablir la confiance dans le domaine de l'aide autant que dans la sphère économique, entre la société civile et ses gouvernants politiques et économiques, tant au Nord qu’au Sud.

3.12

Pour réaliser une aide qui soit coordonnée et efficace, les États membres et la Commission européenne doivent partager les efforts de convergence des objectifs. Les institutions européennes sont trop discrètes au regard des intérêts particuliers de chaque État membre contributeur. Les gouvernements des pays bénéficiaires ont ainsi pu tirer parti des intérêts économiques souvent divergents des États membres de l’UE, et jouer de la rivalité ou de la concurrence entre financements de l’aide et entre continents (UE, G20, OCDE, etc.).

3.13

Il est important de prendre des mesures afin de soutenir le processus démocratique. Un équilibre devrait toujours être recherché entre la consultation des partenaires sociaux et celle des autres organisations de la société civile, afin de rencontrer un écho positif et une réalisation concrète des objectifs thématiques.

3.14

L’on ne peut raisonner comme si l’UE elle-même n'avait pas subi de conséquences sociales à partir d'une crise financière qui s'est étendue aux domaines économique, puis budgétaire, social, et politique. L’UE doit à travers son aide et sa coopération au développement encourager une réduction de la consommation de matières premières, faciliter les transferts de technologies, promouvoir les industries de transformation dans les pays exportateurs nets de ressources naturelles, afin de réduire son empreinte écologique, tout en contribuant à réduire les effets du changement climatique.

Environnement des entreprises, intégration régionale, marchés mondiaux

3.15

Dans ce contexte, les résultats de la Conférence de Busan n’ont pas montré que l’UE avait soutenu une conviction particulière, ni ferme, en matière de soutien aux transferts de technologie, d’amélioration de l’habitat face aux changements climatiques, de renforcement des services publics, et ses efforts sont, il faut le reconnaître, noyés dans la profusion de parrainages et financements privés provenant d’intérêts économiques multi ou transnationaux (signe de l'engagement énergique du secteur privé envers le développement), alors même que sa part et sa contribution publique représentent toujours approximativement la moitié de l’AOD (Aide officielle au développement).

3.16

Sur le plan international, certaines grandes entreprises, tout particulièrement présentes sur des secteurs d’infrastructures, construction, eau, agroalimentaire, énergie, etc., fournissent des études préalables de faisabilité aux gouvernements destinataires de l'aide qui servent à convaincre les futurs bailleurs de fonds et tirent parti de l’obligation des États bénéficiaires de répondre à des droits fondamentaux et de les mettre positivement en œuvre en suggérant l’entreprise de grands travaux. Or il est arrivé que les fonds de l'aide obtenue soient placés sur les marchés financiers par des membres de gouvernements locaux ou nationaux bénéficiaires, sans toujours contribuer à la réalisation des projets auxquels ils étaient initialement destinés, en étant redirigés vers des places financières européennes, «en lieu sûr» sur des comptes privés.

3.17

Aussi le Comité approuve-t-il les objectifs de lutte contre l’évasion fiscale et contre la corruption, qui doivent inclure la lutte contre le blanchiment d'argent provenant d'activités criminelles ou de l'évasion fiscale, de l'exploitation du travail informel ou forcé, et de celui des enfants. L’UE atteindrait ainsi mieux l’objectif de cohérence avec les autres donateurs.

3.18

L’UE doit donc impérativement inciter ses États membres à augmenter leur contribution mais de manière coordonnée et intégrée, consulter sa propre société civile sur la pertinence de ses objectifs pour convaincre les États membres que l’aide au développement n’est pas seulement une affaire d’image et de parts de marchés, et promouvoir et favoriser le dialogue entre les différentes organisations de la société civile, les partenaires sociaux, les États membres, et en associant les pouvoirs locaux et régionaux, et cela tant dans l’UE qu’à l'extérieur.

4.   Observations particulières

4.1

Après le soutien que leur a apporté le Forum d'Accra de septembre 2010, les organisations de la société civile ont adopté les «Principes d'Istanbul» pour l'efficacité du développement, qui sont le fruit d'un long processus de consultations menées dans plus de 70 pays et secteurs. Ces principes constituent le socle d'un cadre international pour l'efficacité du développement adopté en juin 2011 qui établit des critères pour interpréter et aligner les pratiques des OSC sur les Principes d'Istanbul, moyennant leur adaptation aux circonstances locales et sectorielles. Dans ce cadre, le Comité a été saisi par la Commission d’un avis exploratoire pour définir ce que pourrait être la participation de la société civile aux politiques de développement et de coopération au développement, dans le cadre du dialogue structuré (8).

4.2

Le Comité attache une importance majeure au contexte de la préparation de la Conférence des Nations unies sur le développement durable qui se tiendra à Rio de Janeiro en Juin 2012.

4.3

À cette fin, il rappelle les conclusions et recommandations formulées dans l'avis du CESE sur «Rio+20: vers une économie verte et une meilleure gouvernance - Contribution de la société civile organisée» (9) ainsi que le message contenu dans son supplément d'avis récent «La position du CESE sur la préparation de la conférence des Nations unies sur le développement durable (RIO+20)» (10) .

4.4

À l’occasion de la conférence Rio+20 des Nations unies, les responsables de la planète doivent s'engager sur un plan d'action concret conduisant à la vérification de réalisation des objectifs du Millénaire, l'instauration d'un développement durable et à l'éradication de la pauvreté (objectif 1), dans les limites des capacités de la planète.

4.5

Le CESE souligne en particulier que l'éradication de la pauvreté et l'accès garanti de tous à une alimentation suffisante, à une eau potable et à une énergie durable doivent être des priorités essentielles de l'agenda de Rio+20. La promotion d'une agriculture locale respectueuse de l'environnement dans les pays en développement joue un rôle crucial dans la lutte contre la pauvreté et l'amélioration de la sécurité alimentaire, et constitue un moteur pour le développement de régions rurales prospères sur le plan économique.

4.6

Concernant le secteur privé, il conviendrait de soutenir la reconnaissance des partenaires sociaux (organisations d'employeurs et de travailleurs) et celle du dialogue social dans de nombreux pays partenaires. Le dialogue social est essentiel pour s'assurer d'une large appropriation démocratique des objectifs de développement économique, social et environnemental, comme préconisé par le PNUD et l'UNEP (transition vers une économie verte), ainsi que du respect des normes fondamentales de travail et de la promotion de la justice sociale. Par le dialogue et la justice sociale, les représentants des employeurs et des travailleurs apportent leur concours à la définition de stratégies efficaces de développement social, économique et environnemental et renforcent la prévention des conflits et la stabilité sociale.

4.7

Il est important que tous les acteurs du secteur privé concernés, encourageant un large usage des principes de la responsabilité sociale des entreprises et d'initiatives similaires, appliquent les principes et normes de travail telles que définies dans les conventions de l'OIT et contrôlées par le système de surveillance instauré par l'OIT. Tout particulièrement les entreprises multinationales, en particulier celles qui, de manière concomitante, bénéficient à un stade ou un autre du soutien public devraient adopter des mesures actives pour respecter les «principes directeurs relatifs aux entreprises et aux droits de l'homme» dans le cadre de référence «protéger, respecter et réparer» des Nations unies, la déclaration des principes tripartite de l'OIT sur les entreprises multinationales et la politique sociale, les principes directeurs de l'OCDE à l'intention des entreprises multinationales, le pacte mondial des entreprises («Global Compact») des Nations unies. Elles ont aussi la possibilité de se conformer aux meilleures pratiques dégagées par la coopération entre la SFI (Banque mondiale) et l'OIT en matière de promotion des normes fondamentales de travail tout au long de la chaîne de production.

4.8

Le soutien du secteur privé peut se révéler un atout pour le développement, mais l'aide officielle au développement ne devrait pas être utilisée pour garantir les risques du secteur privé ou se substituer aux services publics. Quant aux partenariats public-privé (PPP) en s'appuyant sur une analyse approfondie des besoins réels à long terme, ils doivent permettre et garantir un partage équitable des risques pour la communauté, l'accessibilité et le caractère économiquement abordable et soutenable sur le plan environnemental des biens et services produits. Ils doivent véritablement respecter une approche multipartite et ne pas servir d'outil de privatisation des services publics, quand ceux-ci, là où ils existent, sont performants ou peuvent être améliorés.

4.9

En tant qu'acteurs essentiels du développement durable dans les pays destinataires, les entreprises et organisations de l'économie sociale (y compris les coopératives) doivent être consultées et associées à la détermination des objectifs et soutenues pour leur réalisation développant ainsi leur potentiel en tant qu'acteurs de l'aide et de l'appropriation de l'aide.

4.10

Dans de nombreux pays d'Afrique, d'Asie ou d'Amérique latine désormais classés comme «pays à revenu intermédiaire», la pauvreté est encore loin d'avoir disparu, au regard du fossé grandissant entre riches et pauvres. Tout particulièrement, 75 % des pauvres vivent encore dans des pays à revenu intermédiaire. Cela signifie que l'objectif de bâtir des sociétés démocratiques et équitables, avec des partenaires sociaux forts, reste toujours pertinent pour les programmes géographiques.

4.11

En tout état de cause, tous les pays en développement devraient rester éligibles aux programmes thématiques, qui doivent par conséquent être renforcés. À cet égard l'intention de servir trois thématiques maximum par pays devrait être atténuée, en bonne concertation tant avec les gouvernements des États bénéficiaires qu'avec les acteurs économiques et sociaux privés et les autres organisations de la société civile.

4.12

Aussi le choix politique de cesser progressivement de soutenir les «pays en développement plus riches» doit reposer sur des indicateurs pertinents du développement humain et social des Nations unies, et s'opérer dans le cadre du consensus international de l'OCDE, en vue de réduire les écarts internes.

4.13

Le Comité approuve l’objectif de renforcer le poids et la légitimité des acteurs nationaux dans le processus budgétaire des pays partenaires, et considère que, si elle est effective, la publicité des informations factuelles et vérifiables relatives aux opérations d’appui budgétaire peut permettre des avancées sensibles dans la réalisation des objectifs de l'aide et du Millénaire. Aussi soutient-il les efforts de la Commission dans ce sens.

Bruxelles, le 24 mai 2012.

Le président du Comité économique et social européen

Staffan NILSSON


(1)  JO C 211, 19.8.2008, p. 77–81, rapporteur: M. Moreno Preciado: «La liberté d'association dans les pays du partenariat Euromed». et 3.13 du présent avis.

(2)  COM(2011) 840 final du 7.12.2011, SEC (2011) 1469 et 1470.

(3)  Avis du CESE: «Instrument de financement de la coopération au développement de l'Union européenne: le rôle de la société civile organisée et des partenaires sociaux». JO C 44, 11.2.2011, rapporteur: M. Iuliano.

(4)  Avis du CESE: «L'instrument européen pour la démocratie et les droits de l'Homme». JO C 182, 4.8.2009, rapporteur: M. Iuliano.

(5)  Rapport de la commission des droits des femmes et de l’égalité des genres du Parlement Européen sur la Cadre financier pluriannuel 2014-2020: «Assessing Gender relevance of EU External Actions»(Évaluation de la pertinence des actions extérieures de l'UE au regard de l'égalité des genres).

(6)  Avis du CESE: «Intégration régionale pour le développement des pays ACP». JO C 317, 23.12.2009, p. 126–131 rapporteur: M. Dantin et corapporteur M. Jahier.

(7)  Voir note 4.

(8)  Avis du CESE «La participation de la société civile aux politiques de développement et de coopération au développement mises en œuvre par l'Union européenne»JO C 181 du 21.6.2012, p. 28.

(9)  JO C 376 du 22.12.2011, p. 102.

(10)  JO C 143 du 22.05.2012, p. 39.


ANNEXE

à l'avis du Comité économique et social européen

Les amendements suivants, qui ont obtenu au moins un quart des votes exprimés, ont été rejetés.

Amendement 14, paragraphe 3.16

 (1)

Exposé des motifs

Le paragraphe ne semble pas très clair ni/ou apporter une quelconque valeur ajoutée à l'avis. La dernière phrase ne semble pas refléter un problème global, mais plutôt un acte criminel isolé commis par une ou plusieurs personnes. Sa valeur ajoutée est loin d'être claire.

Résultat du vote

Voix pour

:

57

Voix contre

:

137

Abstentions

:

29

Amendement 10, paragraphe 4.8

Le soutien du secteur privé développement Quant aux partenariats public-privé (PPP) en s'appuyant sur une analyse approfondie des besoins réels à long terme, ils doivent permettre et garantir un partage équitable des risques pour la communauté, l'accessibilité et le caractère économiquement abordable et soutenable sur le plan environnemental des biens et services produits. Ils doivent véritablement respecter une approche multipartite et ne pas servir d'outil de privatisation des services publics, là où ils existent, sont performants ou peuvent être améliorés.

Exposé des motifs

Maintenir une approche équilibrée.

Résultat du vote

Voix pour

:

96

Voix contre

:

126

Abstentions

:

11


(1)  


31.7.2012   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 229/140


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 2006/66/CE relative aux piles et accumulateurs ainsi qu'aux déchets de piles et d'accumulateurs en ce qui concerne la mise sur le marché de piles et d'accumulateurs portables contenant du cadmium destinés à être utilisés dans des outils électriques sans fil»

COM(2012) 136 final — 2012/0066 (COD)

2012/C 229/27

Rapporteur général: M. Josef ZBOŘIL

Le 16 avril 2012, le Conseil a décidé, conformément à l'article 304 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la

«Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 2006/66/CE relative aux piles et accumulateurs ainsi qu'aux déchets de piles et d'accumulateurs en ce qui concerne la mise sur le marché de piles et d'accumulateurs portables contenant du cadmium destinés à être utilisés dans des outils électriques sans fil»

COM(2012) 136 final — 2012/0066 (COD).

Le 24 avril 2012, le Bureau du Comité économique et social européen a chargé la section spécialisée «Agriculture, développement rural, environnement» de préparer les travaux du Comité en la matière.

Compte tenu de l'urgence des travaux, le Comité économique et social européen a décidé au cours de sa 481e session plénière des 23 et 24 mai 2012 (séance du 24 mai 2012) de nommer M. Josef ZBORIL rapporteur général, et a adopté le présent avis par 121 voix pour, 6 voix contre et 5 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1   Le CESE approuve la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 2006/66/CE relative aux piles et accumulateurs ainsi qu'aux déchets de piles et d'accumulateurs en ce qui concerne la mise sur le marché de piles et d'accumulateurs portables contenant du cadmium destinés à être utilisés dans des outils électriques sans fil (COM(2012) 136 final du 26 mars 2012), ainsi que l'analyse d'impact y afférente (SWD(2012) 66 final).

1.2   Le Comité estime que les analyses d'impact n'apportent pas d'éléments probants suffisamment fiables pour étayer les propositions de la Commission relatives aux piles nickel-cadmium. Il note que les piles nickel-hydrure métallique ne seront toujours pas utilisées dans les outils électriques en 2015 et ne constituent donc pas une technologie de substitution viable pour les piles d'un point de vue commercial. Ainsi, une seule technologie (lithium-ion) sera disponible au moment où la dérogation concernant les piles nickel-cadmium sera retirée, ce qui représente un risque commercial potentiel pour l'industrie de l'outillage électrique.

1.3   Le Comité recommande l'adoption de la proposition de directive à l'examen, sous réserve que la date finale de cessation de mise sur le marché de piles qui contiennent plus de 0,002 % de cadmium en poids soit fixée au 31 décembre 2018 et qu'il soit prévu d'autoriser sur le marché, pendant les cinq années suivantes, les assemblages en batterie nickel-cadmium de réserve. Après cette date, il ne sera possible de mettre sur le marché que des équipements à piles qui contiennent du cadmium destinés à des systèmes d'urgence et d'alarme et à des équipements médicaux spéciaux.

1.4   Le Comité se félicite de l'application du principe de proportionnalité dans le cadre de ce processus décisionnel très spécifique et il approuve les propositions de la Commission. C'est pourquoi il recommande au Parlement européen et au Conseil de l'UE d'adopter la proposition de directive COM(2012) 136 final, en prenant en compte les amendements proposés au paragraphe 1.3.

1.5   C'est pourquoi le Comité recommande également de conférer à la Commission les compétences d'exécution au sens et à la portée prévus par la proposition de directive à l'examen. Conférer ces compétences prévues par la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil de l'UE (COM(2012) 136 final) doit permettre d'assurer la transparence des procédures et la pleine responsabilité des acteurs s'agissant de l'application de ces compétences d'exécution par la Commission. Le Comité requiert que les instances compétentes agissent de manière transparente et répondent de leurs décisions.

2.   Proposition de la Commission – description du problème

2.1   La directive 2006/66/CE du Parlement européen et du Conseil du 6 septembre 2006 relative aux piles et accumulateurs ainsi qu'aux déchets de piles et d'accumulateurs et abrogeant la directive 91/157/CEE interdit la mise sur le marché des piles et accumulateurs portables, y compris ceux qui sont intégrés dans des appareils, qui contiennent plus de 0,002 % de cadmium en poids. Toutefois, les piles et accumulateurs portables destinés à être utilisés dans des outils électriques sans fil ont été exemptés de cette interdiction.

2.2   La Commission a présenté la proposition à l'examen, car l'article 4, paragraphe 4, de la directive relative aux piles et accumulateurs impose à la Commission de réexaminer la dérogation à l'interdiction concernant le cadmium dont bénéficient les piles et accumulateurs portables destinés à être utilisés dans les outils électriques sans fil (article 4, paragraphe 3, point c)) et de transmettre un rapport accompagné, le cas échéant, de propositions pertinentes en vue de l'interdiction du cadmium dans les piles et accumulateurs.

2.3   Un rapport de la Commission a été présenté au Parlement européen et au Conseil en décembre 2010. La Commission concluait dans ce rapport qu'il n'y avait pas lieu de présenter des propositions concernant la dérogation pour les piles et accumulateurs portables contenant du cadmium destinés aux outils électriques sans fil, car elle ne disposait pas de toutes les informations techniques nécessaires (notamment les coûts et les avantages du cadmium et de ses substituts) permettant de justifier une telle décision.

2.4   Certaines parties intéressées étaient favorables au retrait de la dérogation concernant l'utilisation de piles nickel-cadmium (NiCd) dans les outils électriques sans fil, car, selon elles, les coûts économiques étaient minimes et les avantages environnementaux considérables à long terme. D'autres s'y sont opposées, soulignant que les données concernant l'incidence économique, environnementale et sociale ne justifiaient pas le retrait.

2.5   Dans l'ensemble, la consultation des parties intéressées a confirmé la nécessité de réaliser une évaluation comparative du cycle de vie afin de disposer d'une base solide pour effectuer l'analyse des coûts et des avantages. L'évaluation du cycle de vie ne s'est pas avérée concluante quant aux mérites et aux inconvénients relatifs des compositions chimiques de piles actuellement disponibles. L'analyse d’impact de la Commission indique en conclusion que, par rapport au scénario de base, les autres options stratégiques prévoyant le retrait de la dérogation (retrait immédiat ou retrait en 2016) permettraient de réduire l'incidence environnementale globale, tant au niveau des rejets de cadmium dans le milieu naturel qui pourraient être évités qu'au niveau des incidences environnementales cumulées, évaluées au regard de six indicateurs environnementaux.

2.6   La Commission fait valoir que, dans le cas d'un retrait tardif de la dérogation (en 2016), les avantages pour l'environnement seraient légèrement plus faibles que dans le cadre de l’option prévoyant un retrait immédiat, mais les coûts seraient bien moindres par rapport à cette deuxième option. Certains fabricants d'outils électriques sans fil et certains recycleurs ont donné une estimation des coûts pour les deux options prévoyant le retrait de la dérogation (de l'ordre de 40 à 60 millions d'euros dans le cas du retrait immédiat et de 33 millions d'euros dans le cas du retrait en 2016). Il n'est toutefois pas certain que l'ensemble de ces coûts doive être attribué au retrait de la dérogation, étant donné que les quantités de piles et accumulateurs au cadmium utilisés dans des outils électriques sans fil vont diminuer de 50 % entre 2013 et 2025 dans le cadre du scénario de base.

2.7   La Commission précise qu'au cours de la période 2013-2025, les outils électriques sans fil équipés de piles et d'accumulateurs avec composition chimique de substitution coûteront respectivement, selon la solution retenue (nickel-hydrure métallique ou lithium-ion), 0,8 euros et 2,1 euros de plus si la dérogation est retirée immédiatement et 0,4 euros et 0,9 euros de plus si le retrait n'intervient qu'en 2016. Ces données sont inexactes. Les différences de coûts sont en effet sensiblement plus élevées.

2.8   Les incidences sociales et la charge administrative sont limitées pour toutes les options stratégiques et elles ne devraient pas soulever de problèmes de conformité.

2.9   L'analyse d'impact conclut que si la dérogation n'est retirée qu'en 2016, les avantages pour l'environnement seront légèrement plus faibles que dans le cadre d'un retrait immédiat, mais les coûts seront beaucoup moins élevés par rapport à cette deuxième option. Étant donné que le retrait de l'exemption en 2016 aurait quasiment le même niveau d'efficacité avec une efficience supérieure qu'un retrait immédiat, c'est cette option qui est privilégiée. Il convient que la dérogation existante pour cette utilisation continue à s’appliquer jusqu’au 31 décembre 2015 afin de permettre au secteur d'adapter davantage les technologies pertinentes.

3.   Observations générales et particulières

3.1   Sur la base d'une analyse recouvrant toute une série de situations, de secteurs et de faits, la Commission est parvenue à la conclusion de proposer de maintenir en production et en service les piles contenant du cadmium dans une teneur dépassant 0,002 % en poids destinées aux outils électriques sans fils jusqu'à la fin de l'année 2015.

3.2   L'analyse réalisée prouve qu'il s'agit là d'une solution qui ne porte pas atteinte de manière sensible à l'environnement ni ne compromet la santé de la population. Il est décevant de constater que la proposition de la Commission ne mentionne nullement l'évaluation ciblée des risques (TRAR) réalisée par l'UE au sujet du cadmium ou la stratégie de réduction des risques, adoptée ultérieurement, qui ont abouti à la conclusion qu'il n'était pas nécessaire de prendre d'autres mesures concernant les piles nickel-cadmium qui équipent les outils électriques.

3.3   Du point de vue de la protection des consommateurs, il va de soi que continuent de s'appliquer pour ces produits avec des piles qui contiennent du cadmium des modes de marquage parfaitement conformes aux dispositions juridiques en vigueur. Il en va de même s'agissant de la protection des travailleurs lors de la production de ces piles et des règles relatives au droit du travail. En outre, la production de piles qui contiennent du cadmium sera maintenue pour les équipements médicaux spéciaux et les systèmes électriques d'urgence. Selon l'étude d'impact, ces éléments permettent de faire face aux risques incontestablement liés au report de la date d'interdiction d'utiliser des accumulateurs qui contiennent plus de 0,002 % de cadmium en poids.

3.4   Le Comité recommande de ce fait que cette interdiction entre en vigueur le 31 décembre 2018.

3.5   Le Comité recommande en outre de conférer à la Commission les compétences d'exécution au sens et à la portée prévus par la proposition de directive à l'examen. Conférer ces compétences prévues par la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil de l'UE (COM(2012) 136 final) doit permettre d'assurer la transparence des procédures et la pleine responsabilité des acteurs s'agissant d'appliquer les compétences d'exécution par la Commission.

3.6   Le Comité constate qu'actuellement les assemblages en batterie équipant les outils électriques sont fournis pour l'essentiel par des pays tiers mais que de nombreux outils électriques de marque sont fabriqués dans l'Union européenne. Néanmoins, il tient compte du principe selon lequel il n'est pas souhaitable de renchérir de manière disproportionnée pour les consommateurs le prix d'achat de ces équipements, y compris les outils électriques sans fils avec des piles intégrées ou séparées qui contiennent plus de 0,002 % de cadmium en poids.

Bruxelles, le 24 mai 2012.

Le président du Comité économique et social européen

Staffan NILSSON


31.7.2012   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 229/143


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant les directives 1999/4/CE, 2000/36/CE, 2001/111/CE, 2001/113/CE et 2001/114/CE en ce qui concerne les compétences à conférer à la Commission»

COM(2012) 150 final — 2012/0075 (COD)

2012/C 229/28

Le 18 avril et le 30 avril 2012, respectivement, le Parlement européen et le Conseil ont décidé, conformément à l'article article 43 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la

«Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant les directives 1999/4/CE, 2000/36/CE, 2001/111/CE, 2001/113/CE et 2001/114/CE en ce qui concerne les compétences à conférer à la Commission»

COM(2012) 150 final — 2012/0075 (COD).

Ayant estimé que le contenu de la proposition est satisfaisant, le Comité, lors de sa 481e session plénière des 23 et 24 mai 2012 (séance du 23 mai 2012), a décidé, par 149 voix pour, 5 voix contre et 11 abstentions, de rendre un avis favorable au texte proposé.

Bruxelles, le 23 mai 2012.

Le président du Comité économique et social européen

Staffan NILSSON


31.7.2012   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 229/144


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition modifiée de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (CE) no 1760/2000 en ce qui concerne l'identification électronique des bovins et supprimant ses dispositions relatives à l'étiquetage facultatif de la viande bovine»

COM(2012) 162 final — 2011/0229 (COD)

2012/C 229/29

Le Parlement européen, en date du 10 mai 2012, et le Conseil, en date du 26 avril 2012, ont décidé, conformément à l'article 43 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la

«Proposition modifiée de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (CE) no 1760/2000 en ce qui concerne l'identification électronique des bovins et supprimant ses dispositions relatives à l'étiquetage facultatif de la viande bovine»

COM(2012) 162 final — 2011/0229 (COD).

Ayant estimé que le contenu de la proposition est satisfaisant, le Comité, lors de sa 481e session plénière des 23 et 24 mai 2012 (séance du 23 mai 2012), a décidé, par 154 voix pour, 1 voix contre et 7 abstentions, de rendre un avis favorable au texte proposé.

Bruxelles, le 23 mai 2012.

Le président du Comité économique et social européen

Staffan NILSSON


31.7.2012   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 229/145


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de directive du Conseil fixant des exigences pour la protection de la santé de la population en ce qui concerne les substances radioactives dans les eaux destinées à la consommation humaine»

COM(2012) 147 final — 2012/0074 (NLE)

2012/C 229/30

Le 17 avril 2012, la Commission a décidé, conformément à l'article 31 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la

«Proposition de directive du Conseil fixant des exigences pour la protection de la santé de la population en ce qui concerne les substances radioactives dans les eaux destinées à la consommation humaine»

COM(2012) 147 final – 2012/0074 (NLE).

Ayant estimé que le contenu de la proposition est satisfaisant, le Comité, lors de sa 481e session plénière des 23 et 24 mai 2012 (séance du 23 mai 2012), a décidé, par 159 voix pour et 7 abstentions, de rendre un avis favorable au texte proposé.

Bruxelles, le 23 mai 2012.

Le président du Comité économique et social européen

Staffan NILSSON