ISSN 1725-2431

doi:10.3000/17252431.C_2009.182.fre

Journal officiel

de l’Union européenne

C 182

European flag  

Édition de langue française

Communications et informations

52e année
4 août 2009


Numéro d'information

Sommaire

page

 

I   Résolutions, recommandations et avis

 

AVIS

 

450e session plénière des 14 et 15 janvier 2009

2009/C 182/01

Avis du Comité économique et social européen sur La dimension sociale et environnementale du marché intérieur

1

2009/C 182/02

Avis du Comité économique et social européen sur La dimension extérieure de la politique énergétique européenne

8

2009/C 182/03

Avis du Comité économique et social européen sur L'instrument européen pour la démocratie et les droits de l'Homme (IEDDH)

13

2009/C 182/04

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de directive du Conseil relative à la mise en œuvre du principe de l'égalité de traitement entre les personnes sans distinction de religion ou de convictions, de handicap, d'âge ou d'orientation sexuelle

19

 

III   Actes préparatoires

 

COMITÉ ÉCONOMIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN

 

450e session plénière des 14 et 15 janvier 2009

2009/C 182/05

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil concernant les prescriptions pour l’homologation relatives à la sécurité générale des véhicules à moteur

24

2009/C 182/06

Avis du Comité économique et social européen sur la Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions: Think Small First: Priorité aux PME — Un Small Business Act pour l'Europe

30

2009/C 182/07

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 2006/116/CE du Parlement européen et du Conseil relative à la durée de protection du droit d’auteur et de certains droits voisins

36

2009/C 182/08

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de règlement du Conseil relatif à un cadre juridique communautaire applicable aux infrastructures européennes de recherche (ERI)

40

2009/C 182/09

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 2006/42/CE du 17 mai 2006 relative aux machines en ce qui concerne le matériel d'application des pesticides

44

2009/C 182/10

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil relative aux émissions industrielles (prévention et réduction intégrées de la pollution) (Refonte)

46

2009/C 182/11

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant les règlements (CE) no 549/2004, (CE) no 550/2004, (CE) no 551/2004 et (CE) no 552/2004 afin d'accroître les performances et la viabilité du système aéronautique

50

2009/C 182/12

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de Règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement(CE) no 717/2007 concernant l'itinérance sur les réseaux publics de téléphonie mobile à l'intérieur de la Communauté et la directive 2002/21/CE relative à un cadre réglementaire commun pour les réseaux et services de communications électroniques

56

2009/C 182/13

Avis du Comité économique et social européen sur le thème Relever les défis de l'approvisionnement en pétrole

60

2009/C 182/14

Avis du Comité économique et social européen sur la Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — Un agenda social renouvelé: opportunités, accès et solidarité dans l’Europe du XXIe siècle

65

2009/C 182/15

Avis du Comité économique et social européen sur la Communication de la Commission au Conseil européen Un plan européen pour la relance économique

71

2009/C 182/16

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 98/8/CE concernant la mise sur le marché des produits biocides, en ce qui concerne la prolongation de certains délais

75

2009/C 182/17

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil concernant certains éléments et caractéristiques des tracteurs agricoles ou forestiers à roues (version codifiée)

76

2009/C 182/18

Avis du Comité économique et social européen sur Proposition de directive du Conseil concernant le régime fiscal commun applicable aux sociétés mères et filiales d'États membres différents (codification)

77

FR

 


I Résolutions, recommandations et avis

AVIS

450e session plénière des 14 et 15 janvier 2009

4.8.2009   

FR

Journal officiel de l’Union européenne

C 182/1


450e SESSION PLÉNIÈRE DES 14 ET 15 JANVIER 2009

Avis du Comité économique et social européen sur «La dimension sociale et environnementale du marché intérieur»

(2009/C 182/01)

Rapporteur: M. Andrzej ADAMCZYK

Le 17 janvier 2008, le Comité économique et social européen a décidé, conformément à l'article 29, paragraphe 2, de son règlement intérieur, d'élaborer un avis sur:

«La dimension sociale et environnementale du marché intérieur».

La section spécialisée «Marché unique, production et consommation» chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 6 janvier 2009 (rapporteur: M. Andrzej ADAMCZYK).

Lors de la 450e session plénière des 14 et 15 janvier (séance du 14 janvier 2009), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 94 voix pour, 29 voix contre et 15 abstentions.

1.   Conclusions

1.1   Bien qu'il ne représente pas une fin en soi, le marché intérieur est un instrument qui contribue à améliorer le bien-être des citoyens de l'UE, à accroître leur prospérité, à leur faciliter l'accès à différents biens et services et à améliorer la qualité et la sécurité de leurs emplois, tout en leur permettant de voyager, de s'établir, de travailler et d'étudier sur tout le territoire de l'Union.

1.2   Ces avancées sont à mettre en corrélation avec l'amélioration des opportunités qu'offre le marché intérieur tant aux entreprises, grâce à l'expansion du marché des biens, des services et à la liberté d'investissement, qu'aux travailleurs, en leur donnant pour la première fois la chance d'accéder au marché de l'emploi dans n'importe quel pays européen.

1.3   Si l'Union européenne veut préserver sa compétitivité à long terme, le marché intérieur doit garantir une croissance durable et à longue échéance, ce qui implique également la prise en compte de sa dimension environnementale. Il est donc essentiel que les nouveaux produits, ainsi que les nouvelles normes, règles et idées prennent en considération ce défi majeur, bien que cela risque d'engendrer des tensions inévitables dans certains secteurs, d'autant plus que tout cela n'a de sens que dans la mesure où l'économie européenne a une chance de survie, c'est-à-dire si sa compétitivité à court terme n'est pas menacée.

1.4   Le but poursuivi est d'améliorer significativement le fonctionnement du marché intérieur dans une économie de marché sociale, en garantissant des règles égales pour tous dans un environnement juridique uniforme. Il s'agit d'une mesure essentielle pour créer les conditions d'une concurrence loyale, créer plus d’emplois et de meilleure qualité en intégrant les dimensions sociales et environnementales dans le marché intérieur afin de renforcer la compétitivité européenne.

1.5   Dans leur approche visant à approfondir le marché intérieur, les institutions européennes doivent tenir dûment compte des intérêts légitimes des entreprises tout en respectant les droits sociaux fondamentaux que reconnaissent aux citoyens le droit communautaire, les normes internationales du travail et les législations des différents États membres, et notamment le droit de négociation collective.

1.6   Afin de garantir le bon fonctionnement du marché intérieur, il convient de lever certaines ambiguïtés inhérentes à l'application du droit communautaire. Un cadre juridique clair et prévisible est une condition préalable au développement et à l'approfondissement ultérieurs du marché intérieur.

1.7   Plus spécifiquement, les controverses entourant les récents arrêts de la Cour de justice européenne concernant l'interprétation juridique de la directive sur le détachement des travailleurs semblent légitimer la demande allant dans le sens de son réexamen ou de la conclusion d'un accord complémentaire entre les partenaires sociaux.

1.8   En tant que moyen de médiation entre les institutions et les citoyens, le réseau SOLVIT pourrait jouer un rôle extrêmement important à cet égard. Force est toutefois de constater qu'il souffre d'un manque cruel de ressources financières et humaines. Il convient également de réexaminer son rôle et son fonctionnement.

2.   Introduction

2.1   Bien qu’il soit continuellement en construction, le marché intérieur, qui représente une réalisation essentielle de l'intégration européenne, a déjà apporté aux citoyens de l'Union européenne de nombreux avantages mesurables (1). L'ouverture progressive des marchés et la levée des obstacles ont néanmoins entraîné une série de difficultés et de problèmes, qu'il faut résoudre une fois pour toutes, si l'on souhaite obtenir le soutien nécessaire afin de poursuivre l'approfondissement du marché intérieur.

2.2   Il faut en effet rappeler que le développement du marché intérieur ne constitue pas un objectif en soi mais qu'il représente un outil destiné à améliorer la qualité de vie des citoyens de l'Union européenne, à accroître leur bien-être, à faciliter l’accès aux biens et aux services, à renforcer la qualité et la sécurité de l'emploi, à donner la possibilité de circuler, de s'établir et de travailler librement sur le territoire de l'Union européenne (2). Ces avantages accordés aux citoyens sont indissociables d'un renforcement de la liberté d'établissement pour les entreprises ainsi que d'un élargissement des débouchés commerciaux des biens et des services, et de la liberté d'investir.

2.3   La suppression progressive des obstacles concernant les questions directement liées aux quatre libertés fondamentales crée des difficultés et des tensions dans les domaines où il y a d’importantes disparités entre chaque État, à savoir: les traitements, les systèmes de sécurité sociale, le droit du travail, les attributions des partenaires sociaux. Ces tensions peuvent être écartées, et elles le sont en partie, grâce à des réglementations supplémentaires. Ces réglementations visent à:

supprimer les ambiguïtés juridiques découlant de l'application des prescriptions des différents États;

lutter contre le dumping social et la concurrence déloyale;

protéger les droits du consommateur (3);

garantir que les fabricants et les distributeurs de biens et les fournisseurs de services disposent d'un accès effectif au marché intérieur de l'UE;

garantir l'accessibilité de tous les biens et services, et notamment des services d’intérêt général, par des politiques d'accès universel (4);

promouvoir des politiques actives afin d'assurer l'égalité des sexes et de lutter contre toutes les formes de discrimination.

2.4   La levée des ambiguïtés liées à l'application du droit communautaire apparaît essentielle afin que le marché intérieur fonctionne correctement. On ne peut accepter qu'en ce qui concerne les questions qui sont essentielles pour les partenaires sociaux, il soit indispensable d'en référer à la Cour de justice des Communautés européennes, ses décisions provoquant parfois incompréhension ou controverses.

2.5   À cet égard, il convient de saluer la décision de la Commission d'avoir invité les partenaires sociaux et les États membres à examiner les questions que soulèvent les récents arrêts de la Cour et d'avoir organisé un forum pour débattre du respect des droits sociaux dans le contexte d'une plus grande mobilité de la main-d'œuvre (5).

3.   Marché intérieur: avantages et défis

3.1   La liste des avantages découlant des principes du marché intérieur est longue. Il s'agit d'avantages tant pour les entreprises, que pour les travailleurs et les simples citoyens, qui tirent profit des effets du fonctionnement du marché intérieur dans différents domaines. Parmi les réalisations incontestables du marché unique figurent l'accroissement du bien-être lié à l'augmentation du produit intérieur brut (PIB), la possibilité de voyager, de s'établir, de travailler et d'étudier dans un pays de l'Union européenne choisi librement, l'amélioration sensible de l'accès à des biens et services de grande qualité et souvent disponibles à moindre prix, rendue possible grâce à l'accès élargi des producteurs, opérateurs du marché et fournisseurs de services au marché intérieur, sans oublier l'extension des droits des consommateurs à l'ensemble du territoire de l'Union européenne indépendamment du pays où l'achat a été réalisé.

3.2   Les restrictions à la libre circulation des personnes, imposées par certains États membres sous la forme de ce que l'on nomme les périodes transitoires, continuent de provoquer des controverses, malgré la limitation de leur effet dans le temps. Il convient cependant de constater que la protection du marché intérieur du travail par les États dans lesquels est en vigueur une période transitoire, s'est révélée plus incertaine que ne le prévoyaient initialement ces pays, et que le départ d’une main-d'œuvre qualifiée constitue un problème réel dans les pays d’où proviennent les travailleurs à la recherche d’un emploi.

3.3   Le CESE considère toutefois (6) que l'intégration professionnelle constitue la meilleure protection contre l'exclusion sociale. La Commission européenne doit travailler de concert avec les partenaires sociaux afin de mieux exploiter le potentiel de la main-d'œuvre européenne dans des sociétés en constante mutation. Un problème n'a toujours pas été résolu: la reconnaissance mutuelle des qualifications (7).

3.4   Les avantages dont bénéficient les entreprises sont la possibilité d'accéder à un marché comptant presque 500 millions de consommateurs, la simplification du commerce transfrontalier et de la création de nouvelles entreprises, la diffusion des normes et d'un étiquetage européens ainsi que l'amélioration de la coopération transfrontalière et du transfert de technologies. Un autre avantage est l'accès aisé aux marchés des capitaux, même si le fonctionnement des services financiers doit encore être amélioré. Toutes ces réalisations du marché intérieur, qu'elles concernent directement les citoyens ou les entreprises, ont leurs implications sociales et sont liées à des défis bien précis.

3.5   Autant il semble évident que l'instauration du marché intérieur ait contribué à un développement économique sans précédent et qu’il ait également eu une influence positive sur la situation sociale des citoyens, autant la question de savoir combien le degré d'ouverture du marché et l'étendue de la réglementation dans les secteurs respectifs sont souhaités et acceptables du point de vue social, reste discutable. Tant les controverses qui ont entouré les récentes décisions de la Cour de justice des Communautés européennes (affaires Viking (8), Laval (9), Rüffert (10), Commission/Luxembourg (11)) que le débat qui les a précédées sur la directive européenne sur les services et les problèmes liés à l'ouverture des marchés du travail, au dumping social, à la concurrence déloyale ou à l'influence du marché intérieur sur le fonctionnement du modèle social européen, exigent certainement une analyse, voire même des décisions visant à déterminer s'il convient d'adopter de nouveaux actes législatifs ou d'opter pour la corégulation.

3.6   Le marché intérieur a entraîné la baisse du prix de nombreux biens, ce qui est souhaitable pour le consommateur et pour que l'économie européenne soit concurrentielle. Cependant, cette baisse des prix se réalise souvent aux dépens de travailleurs licenciés à la suite des restructurations des entreprises ou des délocalisations des emplois. Du point de vue social, il est donc essentiel de concilier l'intérêt des consommateurs (prix bas) et celui des travailleurs comme par exemple la sécurité de l'emploi, les normes pour les travailleurs ou les conditions d'emploi et de rétribution.

3.7   La croissance économique insufflée par le marché intérieur a également contribué à créer de nouveaux emplois. Ce phénomène serait très utile s'il ne s'agissait pas souvent d'emplois faiblement rétribués, compte tenu des efforts consentis pour faire face aux contraintes de la concurrence.

3.8   Il faut rappeler dans ce contexte que l'Europe a réussi à atteindre une compétitivité élevée notamment grâce à ses investissements dans les nouvelles technologies, l'éducation et la formation des travailleurs, une meilleure organisation du travail, l'amélioration des conditions sanitaires et de sécurité au travail ainsi que par le biais d'une promotion active du dialogue social et du partenariat. Les travailleurs n'en étant pas moins des consommateurs, le renforcement d’une économie concurrentielle grâce à la réduction du coût du travail peut conduire dans les faits à réduire le pouvoir d'achat, c'est-à-dire à une baisse de la consommation et à un ralentissement de la croissance économique.

3.9   Des problèmes spécifiques sont liés à l'ouverture partielle du marché du travail aux migrations de la main-d'œuvre à des fins économiques. L'échec de certains États membres à inclure efficacement les migrants économiques dans leurs conventions collectives et/ou dans les autres réglementations, dispositions ou pratiques légales porte atteinte aux conditions de travail au niveau local tout en favorisant l'économie informelle. Cela conduit à une dégradation des relations de travail, à un affaiblissement du dialogue social, au dumping social et à une concurrence déloyale; il y a lieu que les syndicats et les organisations patronales luttent résolument contre ces pratiques.

3.10   Certaines pratiques des entreprises qui ont recours à des travailleurs détachés ont été qualifiées de dumping social et de concurrence déloyale par des acteurs concernés. Par ailleurs, la Cour de justice des communautés européennes, en rendant son jugement dans les affaires Viking, Laval, Rüffert et Commission/Luxembourg, a reconnu que ces pratiques sont conformes au droit et à la directive sur le détachement des travailleurs, ce qui a provoqué des controverses importantes notamment du fait que les jugements contredisaient clairement l'objectif déclaré de la directive. La promotion de la fourniture transfrontalière de services exige un environnement de concurrence loyale et la garantie du respect des droits des travailleurs. Il semble donc que la question de garantir l'égalité des chances, une concurrence équitable et le respect des droits des travailleurs exigera que de nouvelles initiatives législatives soient prises, et que les partenaires sociaux négocient davantage, surtout en ce qui concerne la question des travailleurs détachés.

3.11   Le Comité (12) considère toutefois qu'avant même d'élaborer une nouvelle réglementation, il est urgent de prendre les mesures qui s'imposent pour garantir la pleine application de la directive 96/71/CE, eu égard notamment au fait que ses objectifs n'ont toujours pas été totalement atteints bien que le texte soit entré en vigueur il y a dix ans.

3.12   L'ouverture du marché des services et les problèmes des services d'intérêt général dont traite, entre autres, la directive sur les services adoptée récemment, demeurent une question à part. Cette directive est actuellement mise en œuvre et il faut encore attendre pour évaluer ses effets. Il est néanmoins clair que la dimension sociale des services de base dépasse largement les seules questions inhérentes aux travailleurs et au dialogue social et concerne dans une mesure toute aussi importante la garantie de l’accessibilité à ces services par tous les citoyens (13).

3.13   Dans le contexte des récentes augmentations des prix en Europe, la question de l'accessibilité des services d'intérêt général est étroitement liée à celle du pouvoir d'achat, et notamment en ce qui concerne les prix de l'énergie. Cependant, le problème de l'approvisionnement énergétique ne doit pas être considéré uniquement sous l'angle de l'augmentation des prix (passée ou à venir); il convient également de tenir compte de la dimension environnementale de la consommation d'énergie.

4.   L'impact de la récente jurisprudence sur le marché intérieur

4.1   Le bon fonctionnement du marché intérieur nécessite un socle de règles clairement définies. La poursuite de son intégration dépendra fortement de sa capacité à trouver un équilibre acceptable entre ses dimensions économique, sociale et environnementale dans un cadre juridique clair et prévisible.

La récente jurisprudence de la Cour de justice européenne a provoqué une vague de controverses dans les milieux industriels aux quatre coins de l'Europe. Seules des réponses claires aux points controversés peuvent recréer une assise commune, condition indispensable de la confiance des citoyens.

4.2.1   Dans l'affaire Viking, la Fédération internationale des ouvriers du transport (ITF) et l'Union des marins finlandais (FSU) ont menacé de mener une action collective à l'encontre des projets de la Viking Line, qui envisageait de changer le pavillon finlandais de l'un de ses navires et d’enregistrer celui-ci sous pavillon estonien, et de remplacer les membres d'équipage par des travailleurs estoniens, moins bien rémunérés. La Cour a arrêté qu'une menace de grève visant à contraindre un employeur à conclure une convention collective pouvait, dans ce cas, restreindre la liberté d'établissement.

4.2.2   L'affaire Laval concerne une société lettone ayant détaché des travailleurs en Suède, selon des conditions de travail lettones, bien en deçà des conditions de travail définies dans les conventions collectives suédoises. Les syndicats suédois ont réagi en menant des actions collectives et en organisant un boycott du chantier de Vaxholm. La Cour a estimé que lorsque la directive sur le détachement de travailleurs est applicable, toute action collective menée par les syndicats pour réclamer des conditions de travail supérieures aux règles obligatoires de protection minimale stipulées dans la directive est illégale.

4.2.3   Dans l'affaire Rüffert, une entreprise allemande a remporté un marché public du land de Basse-Saxe portant sur des travaux de construction dans une prison. L'entreprise allemande a sous-traité les travaux auprès d'une entreprise polonaise, qui ne versait à ses ouvriers que 47 % du salaire minimum prévu par la convention collective sectorielle régionale. Le land de Basse-Saxe a par conséquent résilié le contrat, mais la Cour a estimé qu'une loi locale obligeant un adjudicataire de travaux publics à respecter des conventions collectives est incompatible avec la directive sur le détachement de travailleurs, à moins que la convention collective ne soit déclarée d’application générale.

4.2.4   Dans l'affaire Commission/Luxembourg, la Cour de justice européenne a donné raison à la Commission en décidant que le Luxembourg avait été trop loin dans la mise en œuvre de la directive sur le détachement de travailleurs en ce qui concerne les obligations imposées dans ce pays aux entreprises nationales, s'agissant notamment des périodes maximales de travail et des périodes minimales de repos, de l'indexation automatique des salaires et du respect des conventions collectives.

4.3   Les décisions rendues dans les affaires précitées ont également suscité des inquiétudes en ce qui concerne l'interprétation faite par la Cour de justice européenne de la directive sur les travailleurs détachés. Ces affaires divisent largement l'opinion et de nombreux acteurs les considèrent comme favorisant le dumping salarial. En effet, des entreprises étrangères ont contourné, au détriment des entreprises locales et aux dépens des salariés, les conventions collectives, les dispositions ou pratiques légales et les réglementations en vigueur dans le pays où elles sont en activité.

4.4   Le marché intérieur doit être une source de sûreté juridique et non d'ambiguïté. Il est donc primordial de se mettre d'accord sur les principes à revoir, conformément à la lettre et à l'interprétation du droit, et de trouver une base commune clairement définie.

5.   Mécanismes et instruments améliorant le fonctionnement du marché unique

5.1   Le fonctionnement du marché intérieur a été progressivement complété par un certain nombre de mécanismes destinés à en améliorer l'efficacité. Ces mécanismes peuvent être utiles pour examiner les possibilités d'intégrer les dimensions sociale et environnementale dans le marché intérieur.

5.2   Dans le contexte des derniers élargissements, les débats sur l'harmonisation et la reconnaissance mutuelle ont refait surface. Il est largement admis que l'harmonisation doit se limiter au strict nécessaire et qu'il est utopique de se fixer des objectifs trop ambitieux en matière d'harmonisation dans une Union européenne comptant 27 pays membres. Parallèlement, la reconnaissance mutuelle, bien qu'étant l'un des piliers du marché intérieur, est largement ignorée. L'harmonisation pourrait être utile pour la construction du modèle social européen. Néanmoins, la dimension sociale reste dans une large mesure le domaine réservé des 27 États membres et, dans la plupart des cas, cela se fait avec l'appui sans réserve des partenaires sociaux et conformément au principe de subsidiarité. Pourtant, le principe de reconnaissance mutuelle pourrait s'avérer utile dans le domaine environnemental, en établissant des règles applicables aux produits et aux processus, conformément aux objectifs ambitieux que l'Union européenne s'est elle-même fixés en la matière.

5.3   En tant que moyen de médiation entre les institutions et les citoyens, le réseau SOLVIT pourrait jouer un rôle extrêmement important à cet égard. Il lui incombe d'informer, de conseiller et d'examiner des problèmes liés au marché intérieur et qui concernent les entreprises, les consommateurs, les travailleurs etc. au sein des États membres. Le réseau dispose d'une grande quantité de données et d'un savoir-faire exceptionnel. De manière générale, force est toutefois de constater qu'il souffre d'un manque cruel de ressources financières et humaines. Il convient également de réexaminer son rôle et son fonctionnement.

5.4   La «nouvelle approche» a eu pour effet de mettre en retrait les législateurs européens, tout en définissant les exigences de base et déléguant les aspects techniques aux organismes de normalisation compétents. Même s'il est peu probable que ce schéma puisse être reproduit en ce qui concerne la dimension sociale, cette démarche pourrait être d'une importance capitale, ce qu'elle est d'ailleurs déjà, dans le domaine de l'environnement (normes de qualité etc.; il serait pertinent que la Commission procède à des actualisations dans un certain nombre de domaines pertinents).

5.5   Le principe du pays d'origine demeure un sujet délicat et le fait que les organisations de consommateurs se déclarent non satisfaites de ce principe en est une preuve. En vertu de celui-ci, lorsque l'exercice d'une activité ou la prestation d'un service ont lieu dans un pays, mais leur bénéficiaire se situe dans un autre, la loi applicable est celle du pays de l'opérateur. L'objectif du principe est de promouvoir la libre circulation des biens et des services et de favoriser la concurrence transfrontalière. Il a été toutefois rejeté lors du débat concernant la directive sur les services. En effet, il aurait été nécessaire que les pays appliquent des dispositions juridiques différentes aux entreprises et aux particuliers en fonction de leur pays d'origine.

5.6   En interprétant de manière plus cohérente les pratiques et traditions nationales et en facilitant leur convergence au niveau de la réglementation, le processus Lamfalussy illustre très bien la façon dont les questions de réglementation paneuropéenne pourraient être améliorées. Au-delà de l'exemple des services financiers, ce processus constitue une référence pour la création d'un système simple et de qualité. Reste à savoir s'il peut améliorer l'efficacité de la législation dans d'autres domaines, et notamment en matière environnementale.

5.7   Dans le contexte de la libre circulation des biens, la clause Monti indique qu'il ne faut pas interpréter la directive comme portant atteinte, si peu que ce soit, à l'exercice des droits fondamentaux de l'UE, et notamment au droit de mener des actions syndicales. Dans ses récents arrêts, la Cour de justice remet en question la validité de la clause Monti et il importe de clarifier où se situent ses limites et pourquoi.

6.   Un meilleur cadre pour l'intégration du volet environnemental dans le marché intérieur

6.1   L'énergie et l'environnement sont devenus, et resteront dans un avenir proche, les priorités absolues des gouvernements et des citoyens européens. Malheureusement, la protection de l'environnement est souvent considérée comme une contrainte pour le marché, un ensemble d'exigences négatives qui portent inévitablement atteinte à la compétitivité des entreprises.

6.2   De nos jours, il est néanmoins largement reconnu que l'une des manières les plus efficaces de garantir la compétitivité de l'UE dans le futur est de progresser sérieusement dans l'élaboration d'idées, de produits et de normes permettant de relever l'un des plus grands défis auxquels est confrontée l'humanité aujourd'hui, et de développer ainsi un marché intérieur qui prenne véritablement en compte la dimension environnementale qui est au cœur de cet objectif. Il va de soi que cela ne change rien au fait que les nouvelles dispositions réglementaires en la matière risquent inévitablement d'engendrer des tensions dans certains secteurs, d'autant plus que la compétitivité à court terme revêt également une importance cruciale.

6.3   Le traité d'Amsterdam a renforcé l'idée selon laquelle l'intégration de la dimension environnementale dans d'autres domaines d'action politique constitue le facteur déterminant pour la promotion du développement durable. La Commission européenne s'est penchée sur les possibilités d'accroître les synergies entre le marché unique et les préoccupations liées à l'environnement en intégrant la dimension environnementale dans des domaines tels que les marchés publics, les procédures d'évaluation d'impact, la normalisation, l'information financière, ou en utilisant des instruments économiques tels que les taxes écologiques etc. La Commission s'est également interrogée sur les nouveaux secteurs et domaines nécessitant éventuellement des mesures d'harmonisation.

6.4   Étant donné la diversité qui caractérise à l'heure actuelle les secteurs et pratiques concernés par la durabilité environnementale, l'intégration des préoccupations y afférentes dans le marché intérieur reste un problème encore peu défini. Cet aspect est lié à des domaines essentiels d'action politique, tels que l'énergie et les transports, tandis que la portée de certaines mesures, qui ne concernaient initialement que la libre circulation des biens, a été élargie à d'autres secteurs. Il conviendrait par conséquent, tout en gardant à l'esprit que l'environnement est actuellement une priorité politique, de déployer des efforts nettement plus substantiels dans des domaines susceptibles d'être améliorés et d'identifier les instruments du marché intérieur les plus appropriés pour mener à bien cette mission.

7.   Observations finales

7.1   Le chantier du marché intérieur est en cours, l'objectif ultime étant de créer un marché intérieur dégagé de toute entrave. Un marché intérieur totalement achevé permettra à tous les opérateurs d'accéder, sur un pied d'égalité, à tous les marchés nationaux. Enfin, il convient de noter que l'égalité d'accès aux marchés de tous les États membres de l'Union implique également que les entreprises, les travailleurs et les prestataires de services puissent évoluer dans un environnement juridique uniforme, garantissant les mêmes conditions pour tous et luttant contre la concurrence déloyale sur le territoire de l'Union et contre toute autre action susceptible de porter atteinte à la compétitivité du marché intérieur dans son ensemble.

7.2   Selon un avis du Comité (14), le succès du marché intérieur relève de la responsabilité partagée de l'Union européenne et des États membres. Ces derniers doivent se l'approprier davantage. Il conviendrait également de mettre davantage l'accent sur le rôle que jouent les partenaires sociaux dans la construction et la mise en œuvre du marché intérieur.

7.3   Le débat en cours sur les limites de l'intégration européenne ainsi que la récente discussion concernant la directive sur les services ont montré à quel point la conciliation des principes du marché intérieur avec des normes sociales contraignantes, le système de sécurité sociale, le fonctionnement et l'accessibilité des services publics et une concurrence équitable, représente un défi difficile. La réponse à ces questions légitimes devrait être au centre des réflexions sur le marché intérieur. En fournissant leurs réponses, il convient que les institutions européennes prennent en considération tant les intérêts légitimes des entreprises que le fait que les libertés économiques doivent obéir à des réglementations assurant que la pratique de ces libertés ne mette à mal l'application des droits sociaux fondamentaux reconnus par le droit communautaire, les normes internationales du travail et par les systèmes juridiques des États membres, sans oublier le droit de négocier, de conclure et de mettre en œuvre des conventions collectives.

7.4   Dans sa récente communication sur l'agenda social renouvelé (15), la Commission rappelle le profond attachement de l'UE à des sociétés harmonieuses, fondées sur la cohésion et l'inclusion, qui respectent les droits fondamentaux et s'inscrivent dans des économies de marché saines. La Commission s'engage également à veiller à ce qu'il n'y ait aucune contradiction entre les libertés fondamentales inscrites dans le traité et la protection des droits fondamentaux.

7.5   Il reste à évaluer le fonctionnement du marché intérieur au regard des dispositions du traité de Lisbonne; le premier examen du texte du traité, réalisé par le CESE, révèle que le marché intérieur, sans subir de modification majeure, semble néanmoins accorder davantage d'importance aux aspects sociaux.

Bruxelles, le 14 janvier 2009.

Le Président du Comité économique et social européen

Mario SEPI


(1)  COM(2007) 724 final.

(2)  JO C 93 du 27.4.2007, p. 25.

(3)  JO C 175 du 27.7.2007, p. 14.

(4)  JO C 175 du 27.7.2007, p. 14.

(5)  COM(2008) 412.

(6)  JO C 77 du 31.3.2009, p. 15.

(7)  JO C 224 du 30.8.2008, p. 100.

(8)  JO C 51 du 23.2.2008, affaire C-438/05.

(9)  JO C 51 du 23.2.2008, affaire C-341/05.

(10)  JO C 128 du 24.5.2008, affaire C-346/06.

(11)  JO C 209 du 15.8.2008, affaire C-319/06.

(12)  JO C 151 du 17.6.2008, p. 45.

(13)  JO C 161 du 13.7.2007, p. 80.

(14)  JO C 77 du 31.3.2009, p. 15.

(15)  COM(2008) 412.


ANNEXE

à l'avis du Comité économique et social européen

Le texte ci-après, qui figurait dans l'avis de la section, a été écarté en faveur d'un amendement adopté par l'assemblée, mais a recueilli au moins un quart des voix exprimées:

1.4.   Le but poursuivi est de supprimer toutes les entraves au fonctionnement du marché intérieur en garantissant des règles du jeu égales pour tous dans un environnement juridique uniforme. Il s'agit d'une mesure essentielle afin de créer les conditions d'une concurrence loyale pour tous, tout en renforçant la compétitivité de l'économie européenne.

Résultat du vote:

Voix pour: 79

Voix contre: 46

Abstentions: 11

L'amendement suivant, qui a recueilli au moins un quart des votes exprimés, a été repoussé au cours du vote

Supprimer le paragraphe 4.3

Exposé des motifs

Il n'est pas du ressort du CESE de critiquer les jugements de la Cour de justice européenne. Ce faisant, il créerait un dangereux précédent, qui pourrait ternir notre réputation.

Résultat du vote:

Voix pour: 44

Voix contre: 78

Abstentions: 14


4.8.2009   

FR

Journal officiel de l’Union européenne

C 182/8


Avis du Comité économique et social européen sur «La dimension extérieure de la politique énergétique européenne»

(2009/C 182/02)

Rapporteuse: Mme SIRKEINEN

Lors de sa session plénière de 17 janvier 2008, conformément à l'article 29, paragraphe 2 de son règlement intérieur, le Comité économique et social européen a décidé d'élaborer un avis sur

«La dimension extérieure de la politique énergétique européenne».

La section spécialisée «Relations extérieures», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 11 décembre 2008 (rapporteuse: Mme SIRKEINEN).

Lors de sa 450e session plénière des 14 et 15 janvier 2009 (séance du 14 janvier 2009), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 181 voix pour, 4 voix contre et 3 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations: Vers une stratégie européenne pour une politique énergétique extérieure

1.1   Depuis longtemps, l'énergie est au centre de la politique internationale. Les autres grands acteurs de la scène politique mondiale ont défini de solides stratégies, officielles ou cachées, en matière d'énergie. L'énergie est aussi souvent utilisée comme un instrument, voire une arme dans les conflits internationaux.

Selon le CESE, l'UE, en tant qu'unité économique la plus puissante au monde, doit de toute urgence affirmer son rôle au sein du paysage énergétique mondial.

1.2   Les citoyens européens sont préoccupés par la sécurité de leur approvisionnement énergétique, des prix de l'énergie élevés et instables, ainsi que le changement climatique et, de manière générale, par le développement mondial non viable. Le CESE est d'avis que l'UE doit définir une politique énergétique extérieure claire et exhaustive pour répondre aux préoccupations de ses citoyens, et, en particulier, avoir la volonté et la détermination de la mettre en œuvre.

Le CESE propose que la politique énergétique extérieure de l'UE soit axée autour de deux piliers:

la sécurité de l'approvisionnement énergétique, et

une politique active et responsable en matière d'énergie et de climat.

1.3   De nombreux éléments d'une telle stratégie sont déjà en place. La question de la sécurité énergétique figure dans les conclusions du Conseil européen des 15 et 16 octobre 2008, et d'autres propositions ont été présentées par la Commission dans le cadre de sa deuxième analyse stratégique de la politique énergétique du 13 novembre 2008 (1), sur laquelle le CESE reviendra plus en détail dans un avis ultérieur.

Selon le CESE, l'UE a besoin d'une stratégie élaborée en matière de politique énergétique extérieure ainsi que d'un plan d'action pratique, prenant entre autres en compte les observations figurant dans le présent avis.

Reconnaissant l'interdépendance entre les fournisseurs et les utilisateurs d'énergie, le CESE insiste en particulier sur la réciprocité de l'accès aux réseaux et des conditions d'investissement, y compris en ce qui concerne l'accès aux investissements en amont.

Plusieurs projets de pipelines entre l'Europe et la région du Caucase, l'Asie et la Russie sont en cours de développement. Ils sont de la plus haute importance, mais pourraient ne pas suffire pour l'Europe à moyen terme.

1.4   Jusqu'à présent, la politique énergétique de l'UE a surtout porté sur la création d'un marché intérieur de l'énergie, en particulier d'électricité et de gaz.

Le CESE est d'avis que pour être efficace et porter ses fruits, la stratégie extérieure doit absolument reposer sur une politique intérieure commune claire et un marché intérieur de l'énergie qui fonctionne bien.

Le CESE souligne que les mesures prises en matière de politique énergétique intérieure peuvent avoir une influence décisive sur la réduction de la dépendance énergétique extérieure et l'augmentation de la sécurité d'approvisionnement — il s'agit en particulier de mesures concernant l'efficacité énergétique, la diversification de la combinaison énergétique ou des investissements suffisants dans l'infrastructure, ainsi que des mesures visant à prévenir les crises telles que les dispositifs d'alerte précoce, le partage d'informations et le stockage / la substitution.

1.5   L'Europe a à la fois la responsabilité et la possibilité d'induire un profond changement de la culture de consommation d'énergie — la troisième révolution industrielle.

L'UE devrait garder son avance en matière de politique climatique mondiale, et promouvoir, par tous les moyens, un avenir énergétique durable dans les pays en développement.

1.6   Parce qu'elles permettent de relever les défis énergétiques à court comme à long terme, tant à l'intérieur de l'UE qu'à l'échelle planétaire, les technologies innovantes et améliorées ont un rôle essentiel à jouer.

Le CESE demande instamment que l'UE, les États membres et les entreprises consacrent des ressources suffisantes à la R&D et à l'innovation dans le domaine de l'énergie, et réclame une coopération plus large au niveau mondial en ce qui concerne la R&D dans le domaine de l'énergie.

1.7   Les dispositions du traité de Lisbonne en matière de politique énergétique et de relations extérieures renforceraient les possibilités pour les États membres de l'UE d'agir de conserve et d'avoir ainsi une plus grande influence sur la scène internationale en matière de politique énergétique.

Le CESE recommande à toutes les instances compétentes de tout mettre en œuvre pour trouver un moyen de faire entrer en vigueur le traité de Lisbonne le plus rapidement possible.

L'exigence essentielle est que les pays de l'UE agissent réellement de conserve. À cette fin, la stratégie devrait être basée sur un accord clair en ce qui concerne les différents rôles de l'Union, des États membres et des acteurs économiques.

1.8.1   Au niveau extérieur, purement politique, ce sont les États membres qui ont le pouvoir. S'agissant de relever le défi consistant à parler d'une seule voix, une évolution positive a récemment pu être constatée, en particulier dans le cadre des relations avec la Russie.

Le CESE invite instamment les États membres à coopérer en matière de politique extérieure et à tout mettre en œuvre pour éviter que l'énergie ne soit utilisée comme une arme dans les conflits internationaux.

1.8.2   L'UE dispose d'une politique commerciale commune fondée sur des principes communs. La Commission est chargée de mener des négociations commerciales sur la base d'un mandat octroyé par le Conseil.

Le CESE recommande que les mandats de négociation multilatérale et bilatérale avec d'autres pays et régions soient suffisamment ambitieux, tout en permettant d'obtenir des résultats tangibles.

1.8.3   Les contrats d'achat et les contrats portant sur l'infrastructure et d'autres projets sont mis en œuvre par les sociétés. Les gouvernements apportent souvent une valeur ajoutée importante, voire décisive, lors de la négociation de contrats.

Le CESE recommande que dans le cadre des négociations de contrats, les représentants des gouvernements des États membres de l'UE exigent, comme condition préalable de leur soutien, que le pays tiers en question applique certaines règles sur ses marchés, comme la réciprocité, l'égalité de traitement, la transparence et la protection des investissements, ainsi que le respect de l'État de droit et des droits de l'homme; le Conseil devrait convenir d'un tel cadre de principes, qui s'appliquerait à toutes les négociations de contrats énergétiques avec des pays tiers.

1.9   L'objectif d'une politique énergétique extérieure est de répondre aux besoins et aux préoccupations des citoyens, s'agissant de leur vie privée ou professionnelle.

Le CESE recommande que les partenaires sociaux ainsi que les organisations environnementales et d'autres représentants de la société civile, soient entendus et associés activement à la définition de la politique énergétique extérieure. Leur capacité à soutenir le dialogue et les négociations au niveau international devrait être pleinement exploitée.

1.10   La société civile organisée ainsi que les conseils économiques et sociaux ont de l'influence et sont donc eux aussi responsables de l'élaboration d'une politique énergétique extérieure de l'UE.

Le CESE invite les organisations de la société civile à insister auprès de leur gouvernement national et de leurs pouvoirs régionaux pour qu'ils coopèrent en la matière au niveau de l'UE. La solidarité entre Européens doit passer avant l'intérêt local ou national restreint, car une action conjointe permet de mieux atteindre les objectifs de sécurité énergétique et de responsabilité internationale.

1.11   Le dialogue et les négociations sur les relations énergétiques internationales se déroulent dans diverses enceintes, étant donné les implications géopolitiques et la grande complexité de cette question. Un dialogue ouvert couvrant, dans la mesure du possible, les différents aspects du sujet permettrait une compréhension et une participation plus larges des acteurs concernés.

La question de l'énergie devrait être inscrite à l'ordre du jour des réunions et des tables rondes du CESE avec ses partenaires internationaux, ou devrait y figurer comme point permanent.

Le CESE estime qu'il pourrait lui-même jouer un rôle en organisant régulièrement des vastes séminaires sur les aspects extérieurs de la politique énergétique de l'UE, en particulier avec la participation des organisations de la société civile de régions et pays tiers. L'audition organisée par le groupe d'étude du CESE sur la dimension extérieure de la politique énergétique européenne, le 1er octobre 2008 à Bruxelles, s'est déjà avéré fructueux.

2.   Introduction

2.1   L'énergie est aujourd'hui au centre des préoccupations politiques dans le monde entier. Les troubles politiques, voire militaires, présentant un lien évident avec l'énergie, accentuent encore ces préoccupations. En toile de fond, l'on constate un accroissement de la demande, principalement dans les pays en développement — à la suite de l'évolution favorable du niveau de vie dans ces pays — et l'on prévoit une pénurie de certains combustibles fossiles. De plus, l'approvisionnement de pétrole et de gaz est caractérisé par une dépendance élevée par rapport à quelques pays producteurs, et la concentration de la production ne devrait cesser de croître à l'avenir.

2.2   Les turbulences de l'économie mondiale sont liées aux prix de l'énergie. Il y a un peu moins de deux ans, les prix du pétrole, et ensuite du gaz, ont commencé à augmenter sensiblement, entraînant une inflation élevée et des problèmes considérables pour les consommateurs et la société dans son ensemble. Actuellement, le prix du pétrole a fortement baissé, ce qui a suscité des préoccupations quant à savoir si la production est suffisante et la sécurité d'approvisionnement garantie. Indépendamment de cette instabilité, les prix de l'énergie devraient afficher une tendance à la hausse en raison de l'équilibre des marchés, et, en particulier, des mesures politiques visant à lutter contre le changement climatique. Dans nos sociétés, les plus faibles sont menacés par la pauvreté énergétique.

2.3   Actuellement, 53 % de l'énergie primaire utilisée dans l'UE est importée. Le taux de dépendance des importations est de 40 % pour les combustibles solides, de 56 % pour le gaz et de 82 % pour le pétrole (chiffres de 2005). Le scénario de base de la Commission, mis à jour en 2007, prévoit pour 2030 un taux global de dépendance des importations de 67 %. La deuxième analyse stratégique de la politique énergétique, effectuée récemment, prévoit qu'en 2020, lorsque les politiques climatique et énergétique de l'UE auront été pleinement mises en œuvre, les importations de combustibles fossiles se situeront grosso modo aux mêmes niveaux qu'actuellement.

2.4   L'UE importe plus de 40 % de son pétrole et un quart de son gaz de Russie, et la part du gaz, en particulier, va augmenter. Après la Russie, ses plus gros fournisseurs de pétrole sont le Moyen-Orient et la Norvège, alors que pour le gaz, sa seconde source d'importation est la Norvège, suivie de l'Algérie. Cette dépendance est réciproque — les fournisseurs de l'UE dépendent de notre demande. Cela s'applique en particulier à la Russie, dont plus de la moitié des exportations d'énergie sont destinées à l'UE.

2.5   Ces taux élevés de dépendance des importations ainsi que la domination de certaines sources d'importation qui ne respectent pas toutes les mêmes règles de marché et principes politiques que l'UE ont fait de la sécurité énergétique une priorité élevée de l'agenda européen. Les quelques interruptions de livraison de la Russie, ainsi que les récentes actions militaires en Géorgie, n'ont fait que renforcer l'urgence de la question.

2.6   L'énergie n'est pas un secteur homogène en ce qui concerne la politique énergétique ou sa dimension extérieure. Le pétrole est principalement utilisé dans les transports et ne peut pas être remplacé facilement. L'UE fait partie des marchés pétroliers mondiaux et ne dispose dès lors que d'une petite marge de manœuvre. D'autres sources d'énergie et technologies ont des utilisations diversifiées et sont largement interchangeables. Le charbon et l'uranium se négocient sur un marché mondial ouvert, tandis que l'attention doit se tourner vers le gaz, en raison de la croissance rapide de la demande ainsi que du nombre limité et des caractéristiques spécifiques des fournisseurs.

2.7   Ces dernières années, l'UE a pris plusieurs mesures destinées à garantir son approvisionnement énergétique extérieur.

2.8   Récemment, le Conseil européen des 15 et 16 octobre 2008 a demandé à la Commission de lui soumettre des propositions ou initiatives pertinentes sur la question de la sécurité énergétique, et a défini six priorités. La Commission a répondu à cette invitation dans sa deuxième analyse stratégique de la politique énergétique. Le CESE élaborera un avis détaillé distinct sur ce document et l'ensemble des propositions qui l'accompagnent.

3.   Éléments internes de la politique énergétique extérieure de l'UE

3.1   Plusieurs actions politiques au sein de l'UE et des États membres peuvent ouvrir la voie à une diminution de la dépendance énergétique extérieure et une amélioration de la sécurité énergétique, ce qui assurera à l'UE une meilleure position dans le cadre de sa politique énergétique extérieure. Ces mesures ne seront rappelées que brièvement ici, puisqu'elles ont été examinées en détail dans d'autres avis du CESE.

3.2   La toute première mesure est l'amélioration de l'efficacité énergétique, car celle-ci influence l'évolution de la demande d'énergie et par conséquent, de la dépendance extérieure.

3.3   Une combinaison énergétique équilibrée et une diversification des sources d'énergie, vers, en particulier, les sources d'énergie indigènes à faible émission de carbone telles que les bioénergies, l'énergie éolienne et l'énergie nucléaire sont souhaitables.

3.4   En ce qui concerne les combustibles fossiles, il conviendrait d'améliorer la cogénération de chaleur et d'électricité à haut rendement ainsi que la capture et le stockage de carbone.

3.5   Il y a lieu d'intensifier la concurrence sur le marché du gaz en développant l'installation de terminaux de GNL et d'autres infrastructures.

3.6   Un marché intérieur de l'énergie qui fonctionne bien garantit une utilisation efficace des ressources et offre une solution aux éventuels problèmes locaux ou régionaux d'approvisionnement. Des investissements suffisants dans l'infrastructure sont nécessaires, ainsi qu'un libre accès aux réseaux et autres infrastructures. La clé d'une interconnexion efficace est une réelle coopération entre les régulateurs de l'énergie.

3.7   Des mesures spécifiques s'imposent pour gérer les risques liés à la sécurité de l'approvisionnement. Une solidarité effective et des mécanismes d'alerte précoce devraient être mis en place pour agir conjointement en cas de crise énergétique et d'interruption de fourniture. Le CESE rendra en temps utile un avis sur les propositions récentes de la Commission en la matière.

3.8   Le Comité exprime son soutien particulier aux mesures efficaces prises pour relier des régions isolées de l'Union, notamment les États baltes, au marché commun de l'énergie, et assurer un approvisionnement énergétique suffisant et diversifié.

4.   Observations du CESE sur une politique énergétique extérieure de l'UE

4.1   Selon le CESE, la politique énergétique extérieure doit être axée autour de deux piliers:

la sécurité de l'approvisionnement énergétique, et

une politique mondiale active et responsable en matière d'énergie et de climat.

4.2   De telles politiques doivent reposer sur des approches à court et à long terme. À court terme, étant donné que le remplacement à grande échelle des sources d'énergie et des infrastructures demande du temps, il est nécessaire d'augmenter l'approvisionnement énergétique tout en prenant toutes les mesures possibles à brève échéance pour réduire la demande. À plus long terme, lorsque les investissements dans la recherche et les nouvelles technologies porteront leurs fruits, la demande d'énergie pourra être réduite davantage, et en particulier, des solutions de remplacement s'offriront pour les sources d'énergie limitées ou posant d'autres problèmes.

4.3   Entre-temps, le CESE prévoit que les politiques de changement climatique influenceront sensiblement le paysage énergétique, et ce à deux niveaux — des prix plus élevés et une dépendance moindre vis-à-vis des combustibles fossiles.

4.4   Les nouvelles technologies constituent l'ultime moyen d'accroître l'utilisation de l'énergie et de remplacer les sources d'énergie problématiques. L'Europe étant à la pointe en matière de politique énergétique et climatique, elle devrait saisir cette possibilité pour développer les technologies nécessaires, aider les autres à résoudre leurs problèmes et créer de nouveaux emplois. À cette fin, il est nécessaire, dès aujourd'hui, d'investir suffisamment dans la recherche-développement en matière d'énergie.

5.   Garantir l'approvisionnement énergétique de l'UE

5.1   L'UE a fourni de nombreux efforts au niveau bilatéral et multilatéral pour étendre ses règles et leur mise en œuvre au reste du monde, en particulier ses partenaires énergétiques. Elle n'a rencontré jusqu'à présent qu'un succès limité. Des mesures plus vigoureuses s'imposent.

5.2   Il est urgent de garantir la réciprocité des conditions d'investissement. De nombreux pays producteurs d'énergie ont besoin des investissements étrangers pour développer leurs sources d'énergie et leurs infrastructures, mais cela n'arrivera pas tant que les règles feront défaut, seront obscures ou ne seront pas systématiquement mises en œuvre. Les dispositions de la charte de l'énergie devraient être maintenues et des approches similaires devraient être intégrées dans les futurs traités bilatéraux en matière d'énergie.

5.3   Cela s'applique également à d'autres questions relevant de la réglementation, telles que l'égalité de traitement, la liberté de contrat et le respect du contrat, ainsi que l'accès à l'infrastructure de transit.

5.4   L'UE devrait réclamer et défendre activement le droit et la possibilité pour les entreprises européennes d'investir en amont dans le développement de sources d'énergie et les infrastructures.

5.5   L'Europe a besoin d'une sécurité d'approvisionnement tandis que ses fournisseurs, en particulier la Russie, font remarquer qu'ils ont besoin d'une sécurité de la demande pour pouvoir faire les investissements nécessaires. Des contrats à long terme sont souvent nécessaires pour soutenir le développement d'infrastructures à grande échelle. Afin de mieux équilibrer les forces, de tels contrats devraient être élaborés dans un cadre européen. Cela nécessiterait un partage d'informations entre États membres et une étroite coopération avec les acteurs du marché.

5.6   Le plan d'interconnexion prioritaire de l'UE porte sur quelques grands projets d'interconnexion, y compris avec l'extérieur — le gazoduc Nabucco pour le transport du gaz de la mer Caspienne vers l'Europe centrale. Ces projets sont de la plus haute importance, mais pourraient ne pas suffire pour l'Europe à moyen terme.

5.7   Plusieurs nouveaux gazoducs, en plus du projet Nabucco, pourraient être nécessaires pour relier l'UE au Caucase et à l'Asie centrale. L'UE devrait présenter des propositions afin de coordonner des projets régionaux d'envergure, et de mobiliser les investissements publics et privés.

5.8   Le CESE prend acte des six projets d'infrastructure prioritaires proposés par la Commission dans sa deuxième analyse stratégique de la politique énergétique. Le Comité prendra position à cet égard ainsi que sur le livre vert intitulé «Vers un réseau d’énergie européen sûr, durable et compétitif» (2).

5.9   Les dialogues avec l'OPEP et le Conseil de coopération du Golfe doivent être approfondis, et les accords avec l'Azerbaïdjan et le Kazakhstan pleinement mis en œuvre. Il convient de nouer des liens plus étroits avec les producteurs d'Asie centrale comme le Turkménistan et l'Ouzbékistan pour faciliter le transport des ressources énergétiques caspiennes vers l'UE.

5.10   L'importance de l'Afrique en tant que fournisseur d'énergie s'est considérablement accrue. Tout partenariat développé avec l'Afrique doit être exhaustif, et soutenir de manière équilibrée le développement durable des économies des producteurs africains de gaz et de pétrole.

5.11   La coopération méditerranéenne, en plein essor, a un rôle important à jouer en couvrant différents aspects de l'énergie — production, transit et consommation.

5.12   L'importance de la dimension septentrionale ne cessera de croître. La politique énergétique extérieure de l'UE devrait accorder une priorité accrue aux champs de pétrole et de gaz dans l'océan Arctique et à la coopération dans les régions septentrionales. La coopération avec la région baltique, pour sa part, couvre principalement les pays utilisateurs et de transit de l'énergie, qui accordent la priorité à la connexion avec la Russie.

5.13   Avec la Russie, l'objectif devrait être la conclusion d'un accord-cadre solide et global, basé sur l'égalité, la compréhension mutuelle et la réciprocité. La Russie devrait autoriser le transit de gaz par le réseau russe et permettre aux sociétés européennes d'investir dans le développement des réseaux et des sources russes. Il appartient à la Russie de lever les doutes quant à sa fiabilité en tant que fournisseur d'énergie, tout comme ses partenaires européens sont censés respecter leurs contrats et leurs engagements.

5.14   L'UE devrait également développer la coopération avec d'autres utilisateurs d'énergie, au sein et au-delà du cadre de l'Agence internationale de l'énergie.

6.   Une politique mondiale active et responsable en matière d'énergie et de climat

6.1   La culture de consommation actuelle est apparue en Europe et aux États-Unis avec la première révolution industrielle. Alors qu'ils essayent d'améliorer leur niveau de vie, de nombreux pays en développement se trouvent maintenant dans la même phase que l'Europe il y a quelques dizaines d'années. Pour ces pays, cela implique une augmentation rapide de la consommation d'énergie — c'est leur droit, et c'est nécessaire pour la sécurité de la planète et le développement pacifique. Actuellement, l'Europe a à la fois la responsabilité et la possibilité d'induire un profond changement de la culture de consommation d'énergie — la troisième révolution industrielle.

6.2   Environ 2 milliards de personnes dans le monde, vivant dans des pays en voie de développement, n'ont pas accès à l'électricité et doivent recourir au bois, au fumier et aux déchets agricoles, la pollution de l'air intérieur représentant ainsi l'une des 10 causes principales de mort prématurée. L'accès de ces personnes au réseau électrique et à la capacité de production est l'un des principaux défis planétaires. Cela implique d'énormes investissements et une augmentation considérable de la consommation mondiale d'énergie. Toutefois, ces investissements doivent être réalisés afin d'offrir à chacun des conditions de vie humaines et décentes, et la possibilité d'avoir un meilleur niveau de vie.

6.3   L'UE a légitimement pris la tête en matière de politiques climatiques. Le principal objectif dans ce domaine serait d'arriver à un véritable accord international couvrant tous les pays, car c'est à l'extérieur de l'Europe que les effets du réchauffement de la planète comme l'augmentation des émissions de gaz à effet de serre seront les plus importants. La conférence sur le climat qui se tiendra à Copenhague en décembre 2009 sera la pierre angulaire des négociations mondiales, et l'UE devrait s'y investir le plus possible. Toutefois, des actions unilatérales de l'UE feraient peser un fardeau intenable sur l'économie européenne.

6.4   L'UE a développé — et continue à le faire — des instruments pour atténuer le changement climatique: des technologies reposant sur des énergies renouvelables et autres énergies à faible émission de carbone, ainsi que des technologies d'efficacité énergétique. Ces technologies devraient être effectivement utilisées dans le monde entier. Cela devrait également augmenter la demande de savoir-faire et de produits européens, et permettrait de créer de l'emploi.

6.5   Le CESE soutient avec force l'idée d'un accord international sur l'efficacité énergétique entre les principaux pays consommateurs d'énergie (États-Unis, Canada, Japon, Australie, Inde et Chine). Le forum ayant fait l'objet d'un accord au sein du G-8 au Japon en juillet 2008 est une première étape dans cette direction. Il faut toutefois veiller à ce que ces grands consommateurs participent activement à l'accord et y contribuent équitablement. L'accord devrait non seulement porter sur la promotion des politiques d'efficacité énergétique ainsi que sur le développement et la diffusion des technologies et des énergies renouvelables, mais également viser à éviter les systèmes de double prix, c'est-à-dire des prix de l'énergie subventionnés pour les utilisateurs nationaux, ce qui entraîne un gaspillage d'énergie considérable.

6.6   L'UE devrait également soutenir effectivement l'efficacité énergétique dans les pays en développement. Il conviendrait d'y éviter les investissements dans la production et la consommation gourmandes en énergie. Les politiques de développement de l'UE devraient être mieux utilisées à cette fin.

6.7   Parmi les outils de la coopération énergétique avec les pays en développement, le principal devrait être l'aide à l'éducation et à la formation.

6.8   Le CESE souligne que toute coopération, en particulier avec les pays en développement, doit tenir compte de l'objectif de développement durable de ces pays, y compris le développement démocratique et le respect des droits de l'homme.

Bruxelles, le 14 janvier 2009.

Le Président du Comité économique et social européen

Mario SEPI


(1)  Communication de la Commission européenne: Deuxième analyse stratégique de la politique énergétique — Plan d’action européen en matière de sécurité et de solidarité énergétiques (SEC(2008) 2794, SEC(2008) 2795).

(2)  Livre vert «Vers un réseau d’énergie européen sûr, durable et compétitif» (COM(2008)782 final).


4.8.2009   

FR

Journal officiel de l’Union européenne

C 182/13


Avis du Comité économique et social européen sur «L'instrument européen pour la démocratie et les droits de l'Homme (IEDDH)»

(2009/C 182/03)

Rapporteur: M. IULIANO

Le Comité économique et social européen a décidé, le 10 juillet 2008, conformément aux dispositions de l'article 29, paragraphe 2, de son règlement intérieur, d'élaborer un avis sur:

«L'instrument européen pour la démocratie et les droits de l'Homme».

La section spécialisée «"Relations extérieures», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 11 décembre 2008 (rapporteur: M. IULIANO).

Lors de sa 450e session plénière des 14 et 15 janvier 2009 (séance du 15 janvier 2009), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 115 voix pour et 4 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1   Renforcement des droits économiques, sociaux et culturels

Le CESE demande que l'Union européenne accorde davantage d'importance, dans ses politiques, aux droits économiques, sociaux et culturels (1), en recourant aux instruments géographiques et thématiques dont elle dispose, en particulier l'Instrument européen pour la démocratie et les droits de l'homme (IEDDH) comme instrument complémentaire.

Eu égard à la récente approbation du protocole facultatif au Pacte des Nations unies relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, le CESE demande que l'Union européenne lance un appel à la ratification universelle et à la mise en œuvre du pacte et de son protocole (voir annexe 1).

1.2   Le dialogue social et le travail décent dans les priorités de l'IEDDH

Dans le cadre de l'affirmation des droits économiques, sociaux et culturels, et parmi les conditions indispensables au maintien de la paix et au développement démocratique de tous les pays, le CESE souligne l'importance de la protection du travail sous tous ses aspects (le travail comme élément déterminant de l'identité sociale et du droit de citoyenneté de tout individu) (2). Le CESE attire l'attention sur le lien entre la protection du travail et tous les droits qui y sont liés, comme défini explicitement dans les conventions internationales fondamentales de l'Organisation internationale du travail (droit au travail, droit d'association et de négociation collective, non-discrimination au travail, interdiction du travail des mineurs et du travail forcé), qui les considèrent comme faisant partie des droits humains fondamentaux. Par conséquent, le travail décent (selon la définition de l'OIT) et le dialogue social, condition indispensable à l'affirmation et à la protection des droits du travail, doivent être reconnus comme il se doit parmi les priorités de l'IEDDH.

1.3   Soutien des partenaires sociaux

Les partenaires sociaux (organisations de travailleurs et d'employeurs), en tant que protagonistes du dialogue social, doivent être considérés comme des acteurs et des interlocuteurs essentiels de l'Union européenne dans ce contexte. Les partenaires sociaux doivent être intégrés pleinement dans le dialogue politique et doivent pouvoir bénéficier d'un soutien direct.

1.4   Renforcement du rôle de la société civile dans les processus de consultation en matière de droits de l'Homme

De manière générale, le CESE demande que les objectifs de promotion de la démocratie et des droits de l'Homme figurent toujours au premier plan des politiques extérieures adoptées par l'UE, et en particulier que les programmes et instruments thématiques soient prioritairement destinés à la société civile indépendante, dans tous les cas où cela est possible.

Le CESE souhaite donc qu'une réflexion institutionnelle soit lancée sur le rôle de la société civile dans la politique extérieure de l'Union en matière de droits de l'Homme et sur la possibilité d'associer plus directement la société civile à la définition et à la mise en œuvre de cette politique. La consultation de la société civile organisée devrait être systématique avant l'élaboration de tout document de stratégie, y compris les documents de stratégie spécifiques par pays.

1.5   Le rôle du CESE: orientation, suivi et évaluation

Le CESE demande à être associé formellement au processus de consultation interne en amont de la programmation stratégique multiannuelle et annuelle de l'IEDDH afin de pouvoir répercuter les résultats du travail effectué avec ses partenaires de la société civile dans les pays tiers, avec lesquels il a des relations privilégiées (table ronde avec l’Inde, zone euro-méditerranéenne, pays ACP, etc.). Il demande à être consulté également lors de l’évaluation à mi-parcours et du bilan de l’IEDDH.

Le CESE se propose de jouer un rôle actif dans ce processus, en se basant sur sa propre expérience et sur ses «réseaux» de référence (partenaires économiques et sociaux et conseils économiques et sociaux).

Le CESE suggère de lancer une réflexion sur la création de «points focaux» pour le soutien des défenseurs des droits de l'Homme, qui permettraient aux institutions et organes de l'UE de travailler en réseau, dans leurs sphères de compétence respectives.

Le CESE peut aussi jouer un rôle important vis-à-vis de la société civile, dans le cadre du suivi postélectoral, afin de consolider les régimes démocratiques.

Le CESE propose, à l'instar de ce qui a été fait au Parlement européen, la création d'un Comité de suivi de l'IEDDH qui aurait pour mission, d'une part, de répondre aux demandes urgentes de consultation dans le cadre des nouvelles procédures mises en place pour les instruments financiers et, d'autre part, d'assurer un suivi de la programmation et de la mise en œuvre de l'IEDDH.

2.   L'Union européenne et les droits de l'Homme

2.1   La protection des droits de l'Homme et des libertés fondamentales constitue l'un des principaux objectifs de l'Union européenne (UE), tant à l'intérieur de ses frontières que dans ses relations avec des pays tiers. L'article 6 du traité sur l'Union européenne (1999) stipule que l'Union européenne «est fondée sur les principes de la liberté, de la démocratie, du respect des droits de l'Homme et des libertés fondamentales, ainsi que de l'État de droit, principes qui sont communs aux États membres» et l'article 7 du même traité prévoit un mécanisme pour sanctionner les violations graves et persistantes de ces droits par un État membre.

2.2   L'article 11 du traité sur l'Union européenne concerne également la dimension extérieure de l'UE en matière de défense des droits de l'Homme. Le traité de Nice, conclu en décembre 2000, étend par la suite l’objectif du respect des droits de l’Homme et des libertés fondamentales, en l'insérant dans le contexte des actions de coopération au développement et de toutes les autres formes de coopération avec des pays tiers (articles 181 et 181 A du traité instituant la Communauté européenne — TCE). La charte des droits fondamentaux de l'UE, promulguée lors du sommet de Nice en 2000, constitue enfin le texte de référence en matière de droits de l'Homme, tant pour la dimension interne qu'externe de l'Union (3).

2.3   Au cours des dernières décennies, le développement exponentiel du processus de mondialisation a fait de la protection des droits de l'Homme une question de plus en plus pertinente pour l'UE, surtout en ce qui concerne ses relations avec des pays en voie de développement. La Commission et le Conseil, avec l'approbation du Parlement européen (4), ont depuis longtemps relevé le lien entre développement (lutte contre la pauvreté) et protection des droits de l'Homme, étant donné que ce sont ces derniers qui créent les conditions nécessaires au développement socioéconomique effectif et stable d'un pays, et qui contribuent aux objectifs du millénaire pour le développement (OMD).

2.4   «… en tant qu'acteur économique et politique jouissant d'un rayonnement diplomatique international et consacrant un important budget à l'aide extérieure, l'Union européenne possède à la fois une influence et un pouvoir de négociation qu'elle peut mettre au service de la démocratisation et des droits de l'Homme (dans les pays tiers)» (5). L'Union exerce actuellement cette influence par le biais de dialogues politiques sur les droits de l'Homme avec les pays avec lesquels elle est en relation. L'on peut citer à titre d'exemple les dialogues structurés concernant exclusivement les droits de l'Homme (avec la Chine), ou encore les dialogues au niveau régional et bilatéral dans le contexte des accords de partenariat et de coopération et des accords d'association, respectivement avec des pays en voie de développement, les nouveaux voisins de l'UE et les pays candidats.

2.5   Un exemple particulier est la clause sur les droits de l'Homme introduite par l'UE dans les accords bilatéraux avec des pays tiers, qui stipule que le respect des droits de l'Homme et de la démocratie constitue un «élément essentiel» de l'accord. Cette clause figure dans les accords bilatéraux conclus par l'UE depuis 1992 et s'applique actuellement à plus d'une centaine de pays (6). En cas de violation éventuelle d'un élément essentiel, diverses mesures peuvent être prises à différents niveaux, comme l'interruption des contacts au niveau politique ou des modifications des programmes de coopération. L'UE possède en outre un autre instrument, la «clause d'incitation sociale» au sein du système des préférences généralisées (SPG et SPG+), qui prévoit des préférences supplémentaires pour les pays qui respectent certaines normes de l'Organisation internationale du travail (OIT) (7).

2.6   Toutefois, des lacunes et contradictions peuvent encore être décelées dans la politique européenne en ce qui concerne les droits de l'Homme. Le Parlement européen (PE) lui-même a adopté en 2005 une résolution (8) dans laquelle il souligne que de nombreux accords sectoriels de l'UE (dans les secteurs du textile, de la pêche, de l'agriculture, etc.) ne sont pas dotés de la «clause des droits de l'Homme». Il déplore de manière générale l'imprécision des termes et des procédures utilisées dans les accords existants, ce qui ne permet pas une application effective de la clause. Plus particulièrement, le Parlement attire l'attention sur son rôle limité dans la procédure de négociation (surveillance et suspension) des accords proprement dits, le Conseil et la Commission disposant ainsi d'une plus large marge de décision.

2.7   Dans les accords de partenariat économique (APE) (9) avec les pays d'Afrique, des Caraïbes et du Pacifique (ACP), ainsi que dans les accords de libre-échange avec la Méditerranée (PEV), l'Union tend à se concentrer principalement sur les aspects commerciaux. L'aide au développement risquerait par conséquent d'être interprétée comme un instrument de pression vis-à-vis des partenaires du Sud et les accords, en fin de compte, ne serviraient pas le développement (et partant, la protection des droits de l'Homme) des pays bénéficiaires.

2.8   Le CESE réaffirme la nécessité pour l'UE de mener des politiques cohérentes et complémentaires promouvant les droits de l'Homme et la démocratisation, et garantissant un niveau de priorité identique dans les différents secteurs de la politique extérieure, commerciale et de coopération au développement. Un plus vaste processus de consultation de la société civile semble également nécessaire pour garantir le respect effectif de cette cohérence. Les organisations de la société civile pourraient en effet apporter une contribution précieuse à différentes étapes, de la négociation des accords à la surveillance, à l'évaluation et au contrôle dans la phase d'exécution.

3.   Introduction sur l'IEDDH (instrument européen pour la démocratie et les droits de l'Homme)

3.1   L'IEDDH est l'instrument financier de l'UE consacré au soutien des activités de promotion des droits de l'Homme et de la démocratie dans les pays tiers. En ce sens, l'IEDDH doit être considéré comme un instrument complémentaire à d'autres moyens de mise en œuvre des politiques en matière de démocratie et de droits de l'Homme, déjà cités précédemment: dialogues politiques, démarches diplomatiques, accords commerciaux, instruments et programmes géographiques et thématiques de coopération.

3.2   Cet instrument a été créé dans le contexte des perspectives financières de l'UE 2007-2013, qui ont marqué le lancement d'un long processus de réorganisation des programmes financiers d'aide extérieure de l'Union. Ce nouveau cadre comprend désormais des instruments géographiques — IPA (instrument de préadhésion, s'adressant aux pays candidats et candidats potentiels), IEPV (instrument européen de voisinage et de partenariat pour les pays du Caucase, d'Europe centrale et de la Méditerranée), DCI (instrument de financement de la coopération au développement), ICI (instrument financier de coopération avec les pays industrialisés) — ainsi que des instruments thématiques — IEDDH (droits de l'Homme), IS (instrument de stabilité), ICSN (instrument de coopération en matière de sûreté nucléaire). L'accord des autorités des pays tiers n'est pas nécessaire pour pouvoir mettre en œuvre les instruments thématiques.

3.3   Le règlement relatif à l'IEDDH (10) est entré en vigueur le 1er janvier 2007, créant ainsi un instrument doté d'un budget propre. La genèse de cet instrument n'a pas été facile, dans la mesure où les propositions initiales prévoyaient que les droits de l'Homme et la démocratie feraient l'objet d'un volet thématique de l'instrument de financement de la coopération au développement, perdant ainsi de l'autonomie par rapport à d'autres actions de coopération au développement. Grâce à la pression du Parlement européen, ainsi que des organisations de la société civile, un règlement spécifique pour les droits de l'Homme et la démocratie a finalement été obtenu.

3.4   Cet instrument remplace l'initiative européenne pour les droits de l'Homme, qui était le programme en vigueur de 2000 à 2006. Le nouvel instrument répond aux critiques adressées à l'initiative européenne, considérée comme trop rigide d'un point de vue administratif et financier et mal adaptée à la société civile des pays dans lesquels la démocratie et les droits de l'Homme sont dans une situation difficile.

3.5   La mise en œuvre de l'instrument se décline en plusieurs phases: 1) la programmation stratégique pluriannuelle qui définit le cadre de l'assistance de l'UE, en fixant les priorités et l'enveloppe financière indicative. Le document stratégique est élaboré par la direction générale «Relations extérieures» de la Commission européenne, après consultation d'autres acteurs concernés, dont des représentants de la société civile; 2) le plan d'action annuel repose quant à lui sur le document stratégique et définit de manière plus détaillée les objectifs, les secteurs d'intervention, les procédures de gestion et le montant du financement. Le plan d'action annuel est élaboré par Europe Aid.

3.6   Notons que les documents de stratégie préparés par la Commission européenne et adoptés par les États membres font l'objet d'un examen juridique par le Parlement européen. Les commentaires du Parlement sont pris en compte par la Commission européenne au moment de la mise en œuvre des politiques.

3.7   Les objectifs (11) de l'IEDDH sont actuellement au nombre de cinq:

Objectif 1 — Renforcer le respect des droits de l'Homme là où ils sont le plus menacés

Objectif 2 — Renforcer le rôle de la société civile dans la promotion des droits de l'Homme et des réformes démocratiques, dans le soutien à la réconciliation pacifique d'intérêts particuliers et dans l'extension de la participation et de la représentation politiques

Objectif 3 — Soutenir les actions liées aux droits de l’Homme et à la démocratie dans les domaines couverts par les orientations communautaires, notamment en ce qui concerne le dialogue sur les droits de l’Homme, les défenseurs des droits de l’Homme, la peine de mort, la torture, les enfants dans les conflits armés

Objectif 4 — Soutenir et renforcer le cadre international et régional pour la protection des droits de l’Homme, la justice, l’État de droit et la promotion de la démocratie

Objectif 5 — Susciter la confiance dans les processus électoraux démocratiques, notamment par le biais de l’observation électorale.

3.8   L'IEDDH est un instrument essentiel pour la mise en pratique d'actions concrètes de promotion des droits de l'Homme. Il est particulièrement important pour les organisations de la société civile, qui y trouvent une assise solide leur permettant de lancer leurs initiatives.

4.   Observations générales

4.1   De manière générale, le CESE est favorable au nouvel IEDDH. Son importance pour le soutien de la politique européenne en matière de droits de l'Homme dans le monde est indiscutable. Le Comité se réjouit également de l'augmentation des ressources financières allouées à cet instrument. Grâce à son expérience spécifique, le Comité est prêt à soutenir la société civile des pays tiers, qui doit être la principale destinataire des ressources de l'instrument. Enfin, le CESE constate de fortes similitudes entre les thèmes traités par l'instrument et les priorités stratégiques définies par sa propre section des relations extérieures.

4.2   Cependant, le CESE relève deux éléments à caractère général et voudrait souligner deux exigences: 1) conférer davantage d'importance à la protection des droits économiques, sociaux et culturels, en particulier du droit international du travail, dans la structure générale de l'IEDDH (les droits économiques, sociaux et culturels peuvent en effet constituer un point de départ pour pouvoir par la suite promouvoir les droits civils et politiques, surtout quand il s'agit de pays difficiles), et 2) donner un rôle plus actif au CESE et à la société civile organisée dans les différents processus de consultation impliquant les institutions européennes en matière de droits de l'Homme (12).

4.3   Comme le stipule le règlement relatif à l'IEDDH, «le défi permanent que constitue véritablement l'instauration et l'entretien d'une culture des droits de l'Homme ainsi que le fonctionnement d'une démocratie» ne peut être relevé si les droits économiques et sociaux ne sont pas pleinement respectés. La protection du travail et de ses droits conformément aux conventions de l'OIT constitue aujourd'hui un aspect essentiel du développement des pays tiers. Comme le rappelle la Commission européenne, «l'Union européenne est d'avis que le respect des droits sociaux et des normes de travail est le gage d'un développement socio-économique durable et équitable» et par conséquent, «au nombre des acteurs principaux figurent aussi les partenaires sociaux (organisations patronales et syndicales) … Les syndicats sont souvent les organisations de masse les plus importantes dans les pays partenaires et les gardiens des normes de travail internationales» (13).

4.4   Nous avons déjà abordé plus haut la question de la participation de la société civile organisée, principalement au cours des processus de négociation des accords entre l'UE et les pays tiers. Mais pas uniquement. Il semble indiqué que la société civile organisée soit davantage impliquée dans le processus décisionnel, également dans le cadre de l'élaboration des programmations stratégiques et annuelles pour l'aide extérieure. Il est vrai qu'actuellement, il est prévu que la Commission consulte les organisations de la société civile sur les questions relatives aux droits de l'Homme. Cependant, cette procédure devrait être plus transparente et officialisée dans les calendriers institutionnels.

4.5   En particulier, la consultation des délégations de l'UE dans le pays bénéficiaire apparaît fondamentale pour garantir une cohérence effective entre l'aide et les besoins réels de la société (14).

4.6   Le CESE souligne l'importance d'une consultation systématique de la société civile, également à l'intérieur des États membres, au niveau régional et local. Le CESE encourage dès lors les représentants à tous les niveaux à associer la société civile à toutes les décisions politiques préalablement à l'élaboration de tout document ou toute décision stratégiques. Étant donné qu'il n'existe pas d'analyse comparative en la matière, le CESE suggère, afin de renforcer le processus de consultation de la société civile, d'en assurer le suivi et l'évaluation réguliers, et sur la base de faits avérés, de développer une appréciation des méthodes approuvées.

4.7   À cette fin, le CESE souligne la nécessité de raviver un véritable dialogue entre la société civile organisée et les délégations de l'UE. Le CESE espère donc que toutes les délégations de l'UE seront largement impliquées dans la mise en œuvre des projets et pourront être dotées de personnel spécifique affecté à cette tâche, par exemple des «responsables société civile», comme il en existe déjà à certains endroits.

4.8   Le CESE demande que les ressources humaines et budgétaires affectées à la mise en œuvre de l’IEDDH soient adaptées à la spécificité des projets menés avec la société civile et des contraintes qui leur sont propres en matière de temps, de personnel et de risque financier aussi bien dans les délégations de la Commission dans les pays tiers qu’au siège même de cette dernière (15). Cela requiert une action spécifique de sélection et de formation des ressources humaines, en plus des mesures positives déjà prises par la Commission.

4.9   Le CESE demande en particulier que soient analysés les moyens dont dispose réellement l’Union pour soutenir les initiatives de renforcement des capacités administratives en faveur des organisations concernées de la société civile, telles que les petites organisations indépendantes et informelles de la société civile, en tenant compte de la nécessité de pouvoir leur apporter un soutien direct (core funding) ponctuel et souvent de faible ampleur.

5.   Observations particulières

5.1   Objectif 1:

Le CESE accueille favorablement l'inclusion spécifique du droit d'association ainsi que du droit de constituer une organisation syndicale et/ou d'y adhérer comme base d'intervention prioritaire dans le cadre de cet objectif.

Il serait toutefois également souhaitable d'ajouter le droit de négociation collective, complémentaire au droit d'association, conformément aux conventions de l'Organisation internationale du travail (OIT).

Le CESE rappelle combien ces questions sont importantes et cruciales pour de nombreux pays (16). En effet, les droits fondamentaux que sont les libertés d'expression et d'association y sont niés; certains membres des organisations syndicales paient souvent de leur vie le prix de leur lutte pour défendre les droits de l'Homme. Dans ce contexte, la solidarité et l'aide internationales sont nécessaires pour soutenir les organisations locales, avec la participation, si possible, de l'ensemble des partenaires sociaux (17).

Le CESE souligne néanmoins l'importance de la liberté d'entreprendre, un droit ayant pour finalité le développement économique, et dont l'exercice est souvent entravé dans de nombreux pays.

5.2   Objectif 2:

Cet objectif est centré sur les réformes démocratiques, le soutien de la conciliation entre les intérêts des différents groupes et la consolidation de la participation et de la représentation. Le CESE souligne l'absence du dialogue social parmi les priorités citées dans le plan d'action.

Bien que la liberté d'association soit à nouveau citée, le dialogue social devrait être expressément mentionné comme prioritaire en tant qu'instrument, à part entière, de la participation, de la représentation et également de la conciliation d'intérêts, en l'occurrence justement ceux des partenaires sociaux (employeurs et travailleurs). Le dialogue social est une modalité permettant la rencontre des intérêts des parties, sur la base de laquelle les parties elles-mêmes trouvent un accord. Le principe d'égalité de représentation, ainsi que l'affirmation des principes de base de la démocratie, sont inhérents à un tel processus. Le dialogue social constitue donc une preuve concrète de l'exercice des libertés d'expression et d'association, qui, comme l'indique le règlement relatif à l'IEDDH, «sont indispensables au pluralisme politique et au processus démocratique».

La mise en œuvre du dialogue social, qui est le modèle établi d'accord entre partenaires sociaux au sein de l'UE, doit être également soutenue dans les pays tiers, où les dynamiques de la démocratie doivent justement être cultivées et fortifiées. Il ne faut pas oublier que grâce à ses caractéristiques, le dialogue social constitue également un instrument de prévention, plus que de résolution, des conflits.

Le CESE rappelle que la liberté d'association et le dialogue social constituent des éléments fondamentaux pour l'application des politiques de soutien du travail décent , acceptées formellement et entérinées tant par la Commission que par le Conseil en 2006 (18). Le Comité attire l'attention sur le fait que le document stratégique de l'IEDDH contient également une référence explicite à la promotion des conditions de travail décentes. Il espère donc que ces considérations pourront se transformer en véritables objectifs de l'instrument pour les droits de l'Homme.

5.3   Objectif 3: défenseurs des droits de l'Homme

Le CESE demande que l'on accorde davantage d'attention aux défenseurs des droits du travail et propose de renforcer le soutien aux défenseurs des droits de l’Homme menacés, en collaboration avec les réseaux d'organisations de la société civile (19).

Le CESE suggère de lancer une réflexion sur la création de «points focaux» pour le soutien des défenseurs des droits de l'Homme, qui permettraient aux institutions et organes de l'UE de travailler en réseau, dans leurs sphères de compétence respectives (y compris le Conseil de l'Europe, qui a déjà pris des initiatives en ce sens).

Il propose enfin de favoriser la collaboration avec le Comité des régions et l'implication directe de ce dernier en ce qui concerne les initiatives dans ce domaine (cf. par exemple les villes refuges  (20)).

5.4   Rôle spécifique du CESE

Le CESE demande à la Commission européenne de le consulter régulièrement en ce qui concerne l'IEDDH. Le CESE, en tant qu'organe consultatif des institutions européennes, au sein duquel sont représentés les partenaires sociaux et d'autres organisations de la société civile, qui à leur tour travaillent activement en partenariat avec les organisations de la société civile dans les pays tiers, peut apporter une contribution précieuse, tant à la programmation stratégique de l'instrument qu'à son évaluation.

Le CESE propose, à l'instar de ce qui a été fait au Parlement européen, la création d'un Comité de suivi de l'IEDDH qui aurait pour mission, d'une part, de répondre aux demandes urgentes de consultation dans le cadre des nouvelles procédures mises en place pour les instruments financiers et, d'autre part, d'assurer un suivi de la programmation et de la mise en œuvre de l'IEDDH.

Le CESE peut enfin jouer un rôle de soutien à la société civile, tant dans les pays «difficiles» dans le cadre du suivi postélectoral pour consolider les systèmes démocratiques (mise en place des institutions démocratiques et notamment des institutions pouvant assurer le dialogue entre partenaires sociaux).

Bruxelles, le 15 janvier 2009.

Le Président du Comité économique et social européen

Mario SEPI


(1)  L'article 3 du pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels stipule que «Les États parties au présent Pacte s'engagent à assurer le droit égal qu'ont l'homme et la femme au bénéfice de tous les droits économiques, sociaux et culturels qui sont énumérés dans le présent Pacte»; par ailleurs, les articles 6 à 15 reconnaissent:

le droit au travail;

le droit de jouir de conditions de travail justes et favorables;

le droit de former des syndicats et de s'y affilier;

le droit à la sécurité sociale, y compris aux assurances sociales;

qu'une protection et une assistance aussi larges que possible doivent être accordées à la famille, aux mères, aux enfants et aux adolescents;

le droit à un niveau de vie suffisant;

le droit qu'a toute personne de jouir du meilleur état de santé physique et mentale qu'elle soit capable d'atteindre;

le droit à l'éducation; et

le droit à la culture.

(2)  Article 23 de la Déclaration universelle des droits de l'Homme, portant sur le travail décent, repris dans les articles 6, 7 et 8 du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels de 1966.

(3)  Il convient de rappeler ici la Charte sociale européenne de 1961, première source juridique au niveau européen ayant codifié les droits économiques et sociaux. Entrée en vigueur en 1965, elle a été révisée en 1996, et est applicable, dans sa version actuelle, depuis 1999. Rappelons enfin la Charte communautaire des droits sociaux fondamentaux des travailleurs de 1989.

(4)  Déclaration conjointe sur la politique de développement de l'Union européenne, Conseil et Commission, le 10 novembre 2000, accessible à l'adresse http://register.consilium.europa.eu/pdf/fr/00/st13/13458f0.pdf; La politique de développement de l’Union européenne — «Le consensus européen», COM(2005) 311 final.

(5)  Communication de la Commission au Conseil et au Parlement européen: le rôle de l'Union européenne dans la promotion des droits de l'Homme et de la démocratisation dans les pays tiers, COM(2001) 252 final.

(6)  Communication de la Commission sur la prise en compte du respect des principes démocratiques et des droits de l'Homme dans les accords entre la Communauté et les pays tiers, COM(95) 216 final.

(7)  Règlement (CE) no 2820/98 du Conseil du 21 décembre 1998 portant application d'un schéma pluriannuel de préférences tarifaires généralisées pour la période du 1er juillet 1999 au 31 décembre 2001, JO L 357 du 30.12.1998, pp. 1-112.

(8)  Résolution du Parlement européen sur la clause relative aux droits de l'Homme et à la démocratie dans les accords de l'Union européenne (2005/2057(INI)).

(9)  Les négociations en vue de conclure de tels accords ont débuté en 2002 sur la base de l'accord de Cotonou (2000). Ces accords prévoient la création de zones de libre-échange entre l'UE et ses partenaires ACP.

(10)  Règlement (CE) no 1889/2006 du Parlement européen et du Conseil du 20 décembre 2006 instituant un instrument financier pour la promotion de la démocratie et des droits de l'Homme dans le monde; JO L 386/1 du 29.12.2006.

(11)  EIDHR Strategy Paper 2007-2010 (en anglais uniquement), DG RELEX/B/1 JVK 70618, site internet d'Europe Aid.

(12)  Le CESE rappelle que la société civile organisée est importante non seulement pour l'IEDDH, mais également pour tous les instruments relatifs à l'aide extérieure de l'UE. Il demande par exemple que le programme thématique «asile et migration» intégré au sein du DCI soit essentiellement destiné à soutenir les initiatives de la société civile dans la promotion des droits économiques, sociaux et culturels des migrants, prenant ainsi en compte les priorités qu’il a définies dans ses avis sur la politique migratoire de l’UE adoptés en juillet 2008). Voir avis «Migration et développement: opportunités et défis» — (rapporteur. M. Sukhdev Sharma) JO C 120 du 16.5.2008, p. 82..

(13)  Communication de la Commission au Conseil et au Parlement européen: le rôle de l'Union européenne dans la promotion des droits de l'Homme et de la démocratisation dans les pays tiers, COM(2001) 252 final.

(14)  Il convient en particulier d'assurer une répartition cohérente des ressources financières entre les divers pays et zones géographiques, compte tenu de conditions objectives et des besoins effectifs.

(15)  Actuellement, les ressources destinées à l'IEDDH représentent environ 10 % du total des fonds disponibles pour les programmes de coopération. Le reste des ressources est attribué par le biais des accords bilatéraux et programmes «d'aide budgétaire» en faveur des pays bénéficiaires. Par conséquent, outre le fait que les crédits les plus importants circulent au niveau gouvernemental, ce système fait que le personnel de la délégation manifeste un plus grand intérêt et est davantage disponible pour les programmes bénéficiant d'une priorité plus élevée du point de vue financier.

(16)  Voir le site internet du CDHNU (Conseil des droits de l'Homme des Nations unies).

(17)  Voir avis sur «La liberté d'association dans les pays du partenariat Euromed»; rapporteur: M. Juan Moreno, JO C 211 du 19.8.2008, p. 77.

(18)  Communication de la Commission au Conseil, au Parlement européen, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — Promouvoir un travail décent pour tous — La contribution de l'Union à la mise en œuvre de l'agenda du travail décent dans le monde (COM(2006) 249 final).

(19)  Rappelons par exemple les mécanismes de coordination et de réaction en cas de violations des droits humains et syndicaux mis en place par le Département droits humains et syndicaux de la Confédération syndicale internationale (CSI).

(20)  Voir par exemple le site http://www.icorn.org/


4.8.2009   

FR

Journal officiel de l’Union européenne

C 182/19


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de directive du Conseil relative à la mise en œuvre du principe de l'égalité de traitement entre les personnes sans distinction de religion ou de convictions, de handicap, d'âge ou d'orientation sexuelle»

COM(2008) 426 final (supplément d'avis)

(2009/C 182/04)

Rapporteur: M. CROOK

Le 23 octobre 2008, conformément à l'article 29, point A des modalités d'application de son règlement intérieur, le Comité économique et social a décidé d'élaborer un supplément d'avis sur la

«Proposition de directive du Conseil relative à la mise en œuvre du principe de l'égalité de traitement entre les personnes sans distinction de religion ou de convictions, de handicap, d'âge ou d'orientation sexuelle»

COM(2008) 426 final (supplément d'avis)

La section spécialisée «Emploi, affaires sociales, citoyenneté», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 10 décembre 2008 (rapporteur: M. CROOK).

Lors de sa 450e session plénière des 14 et 15 janvier 2009 (séance du 14 janvier 2009), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 183 voix pour, 7 voix contre et 18 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1   Le CESE approuve la proposition de directive qui suit largement les recommandations faites dans son récent avis d'initiative sur les mesures de lutte contre la discrimination dans les domaines au-delà de l'emploi (1) et qui devrait mener, dans toute l'UE, à des normes homogènes de protection contre la discrimination concernant tous les motifs figurant à l'article 13 du traité CE.

1.2   Néanmoins, le CESE estime que dans certains domaines, la directive offre une protection moindre que celle découlant déjà des directives existantes sur l'égalité raciale et l'égalité entre les femmes et les hommes.

1.3   C'est le cas de l'article 2 qui permet des exceptions à l'interdiction de la discrimination, en particulier pour les services financiers. Le CESE recommande que soient appliquées à l'âge et à l'handicap les mêmes exigences de transparence, d'analyse et de supervision que celles déjà en vigueur en ce qui concerne l'égalité entre les femmes et les hommes.

1.4   Le CESE considère que l'article 3, définissant le champ d'application de la directive, impose des limites et autorise de larges exceptions qui porteront ombrage à l'efficacité de la directive dans son ensemble.

1.5   Le CESE estime que dans l'article 4, l'obligation qu'ont les fournisseurs de biens et de services de prendre des mesures anticipatives par rapport aux besoins des personnes handicapées et de procéder à des aménagements raisonnables, est trop limitée.

1.6   Le CESE constate qu'au contraire des organismes désignés au titre des directives sur l'égalité raciale et l'égalité entre les femmes et les hommes, les organismes chargés de l'égalité de traitement qui seront désignés au titre de l'article 12 ne couvriront pas le domaine de l'emploi. Il recommande donc que cette question soit traitée par l'introduction d'un nouveau considérant.

1.7   Le CESE regrette que la directive ne traite pas de manière satisfaisante le problème des discriminations multiples et invite la Commission à présenter une recommandation à ce sujet.

2.   Aperçu général

2.1   Dans son récent avis d'initiative, le CESE a examiné la législation actuelle de l'Union européenne et des États membres en matière de lutte contre la discrimination et a conclu qu'il était «désormais indispensable d'adopter une nouvelle législation communautaire pour combattre la discrimination fondée sur la religion ou les convictions, le handicap, l'âge ou les préférences sexuelles dans les domaines en dehors de l'emploi».

2.2   Ayant eu l'occasion de réfléchir sur le contenu de la proposition de la Commission concernant la directive du Conseil relative à la mise en œuvre du principe de l'égalité de traitement entre les personnes sans distinction de religion ou de convictions, de handicap, d'âge ou d'orientation sexuelle, et constatant que certains des points préoccupants relevés n'avaient pas encore été entièrement traités, le CESE a décidé d'élaborer un supplément d'avis sur la proposition de directive.

2.3   Le CESE se félicite du fait que bon nombre des dispositions de la proposition de directive reproduisent celles des autres directives relevant de l'article 13: les définitions de la discrimination directe et indirecte et du harcèlement, les dispositions concernant le contrôle de l'application et la réparation en justice, y compris le renversement de la charge de la preuve, la protection contre la victimisation et des sanctions qui doivent être effectives, proportionnées et dissuasives. Comme dans la directive sur l'égalité raciale (2), le champ d'application de la proposition de directive couvre la protection sociale, y compris les soins de santé, les avantages sociaux, l'éducation, l'accès aux biens et aux services, notamment au logement (bien que la directive introduit, comme on le constatera ci-après, des restrictions et exceptions qui pourraient réduire sa portée totale).

2.4   Dans les observations développées ci-après, le CESE se penche sur certaines dispositions qui, selon lui, explicitement ou implicitement, pourraient fournir une protection moindre en matière de religion ou de convictions, de handicap, d'âge ou d'orientation sexuelle que celle offerte par les autres directives relevant de l'article 13 relatives à l'égalité raciale, ethnique ou de genre.

3.   Observations relatives à certains articles

3.1   Article 2

L'article 2 définit le concept de discrimination; les paragraphes 1 et 4 de l'article 2 reprennent les mêmes définitions des concepts clés que les autres directives relevant de l'article 13. Selon le paragraphe 5, le refus de réaliser un aménagement raisonnable, comme le prévoit l’article 4, au paragraphe 1, point b), est une forme de discrimination interdite.

3.1.1.1   Afin de garantir une transposition correcte de la directive dans le droit national et considérant le jugement rendu par la Cour européenne de justice dans l'affaire Coleman-v-Attridge Law, qui confirme que l'interdiction de la discrimination fondée sur un handicap (directive 2000/78/CE) s'applique à une personne associée à une personne handicapée (3), le CESE recommande que la directive mentionne clairement que la discrimination fondée sur les motifs stipulés dans la directive inclut la discrimination basée sur une association avec des personnes d'une religion ou de convictions, d'un handicap, d'un âge ou d'une orientation sexuelle donnés.

Le paragraphe 6 de l'article 2 permet aux États membres de prévoir que les différences de traitement fondées sur l'âge ne constituent pas une discrimination si «elles sont justifiées par un but légitime et que les moyens de parvenir à ce but sont appropriés et nécessaires».

3.1.2.1   Le CESE recommande que les personnes handicapées puissent également bénéficier d'un traitement préférentiel sur la base des mêmes tests d'éligibilité; cette mesure devrait s'ajouter à celles visant à garantir un accès effectif au titre de l'article 4.

3.1.2.2   Il convient de préciser que pour qu'un objectif soit «légitime» à cet égard, il doit être conforme au principe d'égalité de traitement et par exemple, aider le groupe concerné à participer à la vie publique en toute égalité.

Le paragraphe 7 de l'article 2 autoriserait les États membres à permettre aux fournisseurs de services financiers d'instaurer des «différences proportionnées de traitement» lorsque «l’utilisation de l’âge ou d'un handicap constitue un facteur déterminant pour l’évaluation du risque, sur la base de données actuarielles ou statistiques précises et pertinentes».

3.1.3.1   Le CESE craint que cette large dérogation ne contribue à perpétuer une situation, bien documentée, désavantageant les jeunes, les personnes âgées et handicapées en ce qui concerne les services bancaires et une gamme de produits d'assurance.

3.1.3.2   Ce régime contraste sensiblement avec celui établi par la directive sur l'égalité de traitement entre les femmes et les hommes dans l'accès aux biens et aux services (4), selon lequel les États membres peuvent autoriser des différences de traitement entre les femmes et les hommes au niveau des primes d'assurance et des indemnités, mais seulement sur la base de données actuarielles exactes qui sont compilées, publiées et régulièrement remises à jour; les États membres doivent ensuite revoir leur décision cinq ans plus tard.

3.1.3.3   Le CESE reconnaît que pour certaines activités, les risques encourus peuvent être plus importants pour les personnes appartenant à certains groupes d'âge ou pour celles souffrant de certains types de handicap; néanmoins, le paragraphe 7 de l'article 2 permet une latitude trop grande en ce qui concerne la différenciation des primes sans exiger des assureurs qu'ils communiquent des données actuarielles. Les clients potentiels ne peuvent pas savoir si les différences au niveau des primes sont justifiées et les concurrents ne seront pas incités à proposer des prix plus équitables.

3.1.3.4   Même si la différenciation des primes est justifiable, il est nécessaire de divulguer les données actuarielles ou statistiques pour garantir la proportionnalité requise par le paragraphe 7 de l'article 2.

3.1.3.5   Le CESE recommande que soient appliquées à l'âge et au handicap les mêmes exigences de transparence, d'analyse et de supervision que celles déjà en vigueur en ce qui concerne l'égalité entre les femmes et les hommes. La directive proposée devrait donner la faculté aux États membres d'autoriser des traitements différenciés à condition d'exiger des fournisseurs de services financiers qu'ils publient des données actuarielles ou statistiques actualisées ayant trait à l'activité à risque en question (par exemple la conduite automobile, les voyages, le remboursement d'un prêt immobilier), et au groupe d'âge ou au handicap concernés. Ces données doivent être réexaminées périodiquement afin de relever tout changement concernant les risques. Les États membres devraient également, après une période donnée, être astreints à reconsidérer le fondement du traitement différentiel et à envisager le partage progressif des risques et l'égalisation des primes.

3.2   Article 3

L'article 3 définit le champ d'application de la proposition de directive, à savoir les domaines d'activité auxquels s'appliquera l'interdiction de discrimination fondée sur la religion ou les convictions, le handicap, l'âge ou l'orientation sexuelle.

3.2.1.1   Le CESE se félicite que l'article 3, paragraphe 1, points a) à d) reproduise le champ d'application de la directive sur l'égalité raciale (5) ainsi qu'il l'avait recommandé (6).

3.2.1.2   L'article 3, paragraphe 1, point d) interdit la discrimination en ce qui concerne «l'accès aux biens et aux services mis à la disposition du public, y compris en matière de logement»; le projet de directive établit ensuite que «le point d) s'applique aux particuliers uniquement dans la mesure où ceux-ci exercent une activité professionnelle ou commerciale».

3.2.1.3   Cette exception, présente également dans le considérant 16, ne figure pas dans la directive sur l'égalité raciale. Le CESE craint qu'en l'absence d'une définition pour les termes «activité professionnelle ou commerciale», l'impact de la directive soit plus faible par manque de clarté. Si, comme la Commission le suggère (7), le but est d'exempter les transactions entre les personnes privées, alors le CESE recommande que cela soit interprété de manière que seuls les biens et services mis à la disposition du public entrent en ligne de compte. En outre, le considérant 17 affirme: «Tout en interdisant la discrimination, il est important de respecter … la protection de la vie privée et familiale ainsi que les transactions qui se déroulent dans ce cadre».

Le paragraphe 2 de l'article 3 établit que la protection contre la discrimination ne s'applique dans aucuns des quatre domaines lorsqu'il s'agit de pratiques tombant sous les législations nationales relatives à l'état matrimonial ou familial et aux droits en matière de procréation.

3.2.2.1   Le CESE reconnaît que l'état matrimonial, le statut familial et les droits en matière de procréation sont des questions qui relèvent des compétences législatives des États membres, mais n'accepte pas que ces compétences invalident complètement les protections juridiques contre la discrimination à l'échelle communautaire.

3.2.2.2   État matrimonial. En ce qui concerne les prérogatives nationales en matière de réglementation de l'état matrimonial, la Cour de justice a récemment arrêté que «l’état civil et les prestations qui en découlent sont des matières relevant de la compétence des États membres et le droit communautaire ne porte pas atteinte à cette compétence. Toutefois, il importe de rappeler que les États membres doivent, dans l’exercice de ladite compétence, respecter le droit communautaire, notamment les dispositions relatives au principe de non-discrimination» (8).

3.2.2.3   Statut familial. Le concept de «statut familial» n'est pas défini et est par conséquent trop vague que pour être utilisé comme base pour exclure la protection.

3.2.2.4   Droits en matière de procréation. Le CESE estime que l'accès aux services de procréation assistée fait partie intégrante des services de santé, c'est pourquoi il ne devrait pas y avoir de discrimination pour un motif quelconque ni dans le cadre de la législation communautaire, ni dans celui des lois nationales. Dans le domaine de l'assistance à la procréation, l'on constate l'existence d'une discrimination fondée sur l'orientation sexuelle, le handicap et l'âge. En outre, sachant que ce sont les femmes qui font appel aux services de procréation assistée, le fait de ne pas interdire la discrimination dans ce domaine pourrait constituer une discrimination fondée aussi bien sur le genre que sur le handicap ou l'âge, ou l'orientation sexuelle.

3.2.2.5   Le CESE considère donc que l'article 3, paragraphe 2 devrait être réexaminé dans sa totalité et que toute disposition finale devrait prévoir que les lois nationales concernant l'état matrimonial, le statut familial ou les droits en matière de procréation soient appliquées de manière à éviter toute discrimination fondée sur n'importe lequel des motifs couverts par la directive.

3.2.2.6   L'article 3, paragraphe 3 stipule que l'interdiction de la discrimination en matière d'éducation relève «des responsabilités des États membres en ce qui concerne le contenu, les activités et l’organisation de leurs systèmes d'éducation, y compris en matière d'éducation répondant à des besoins spécifiques».

3.2.2.7   Le CESE craint que cette exception, qui ne figure pas dans la directive sur l'égalité raciale et qui va au-delà de l'article 149, la disposition spécifique du traité en matière d'éducation (9), ne limite indûment l'impact de la présente directive quant à l'éradication de la discrimination et du harcèlement dans les écoles et autres établissements éducatifs.

3.2.2.8   Le CESE fait remarquer que l'article 150 du TCE stipule, dans des termes quasiment identiques à ceux de l'article 149, que les États membres sont responsables du contenu et de l'organisation de la formation professionnelle; cela étant, la formation professionnelle entre dans le champ d'application de la législation communautaire anti-discrimination sans aucune limitation (10).

3.2.2.9   L'existence de la discrimination dans l'éducation sur l'ensemble du territoire de l'UE, fondée sur la religion ou les convictions, le handicap et l'orientation sexuelle était une des principales motivations de cette directive. Le CESE estime que l'interdiction de la discrimination et la promotion de l'égalité de traitement dans l'éducation revêtent une importance si fondamentale pour le développement de sociétés démocratiques et tolérantes, pour le progrès économique et social et pour la cohésion sociale, qu'une législation communautaire dans ce domaine est indispensable, dans le respect des principes de subsidiarité et de proportionnalité définis à l'article 5 du TCE.

3.2.2.10   Il est particulièrement important d'établir un haut niveau de protection contre la discrimination dans le cadre de l'éducation répondant à des besoins spécifiques, afin de garantir un traitement honnête et équitable à tous les enfants indépendamment de leur religion ou de leurs convictions, de leur âge, de leur handicap ou de leur orientation sexuelle. Cette façon d'agir n'interfère pas avec les politiques des États membres concernant l'éducation séparée ou intégrée mais offre la garantie que ces politiques sont appliquées sans discrimination. L'arrêt prononcé par la Cour européenne des droits de l'homme dans l'affaire D.H. et autres c. République tchèque montre à quel point les décisions concernant le placement dans des établissements d'enseignement spécifique peuvent entretenir des comportements discriminatoires fortement ancrés dans le domaine de l'éducation (11).

3.2.2.11   Le CESE est d'avis qu'il est tout à fait essentiel d'assurer une cohérence dans la protection contre la discrimination en matière d'éducation, car dans ce domaine, la discrimination fondée sur l'origine ethnique et raciale se superpose souvent à celle fondée sur la religion ou les convictions. Si la limitation figurant dans l'article 3, paragraphe 3 n'était pas nécessaire dans la directive sur l'égalité raciale, il n'est pas clair pourquoi elle le serait dans la présente directive proposée.

3.2.2.12   Quelles que soient les responsabilités des États membres en matière d'éducation, la directive devrait indiquer explicitement que ceux-ci doivent exercer leurs fonctions sans discrimination.

3.2.2.13   La deuxième proposition de l'article 3, paragraphe 3 permet des différences de traitement s'agissant de l'accès aux établissements d’enseignement fondés sur la religion ou les convictions. Le CESE estime que la directive devrait apporter la garantie que ce type d'établissement ne sera pas en mesure de procéder à une discrimination fondée sur un autre motif.

3.3   Article 4

L'article 4 porte sur l'égalité de traitement des personnes handicapées.

3.3.1.1   La convention des Nations unies relative aux droits des personnes handicapées (12) contient une description non exhaustive des personnes considérées comme «handicapées». Les États membres de l'UE devraient tenir compte de cette description lors de l'élaboration des lois nationales en matière de protection et de promotion de l'égalité des droits des personnes handicapées. La directive proposée devrait comprendre des orientations en ce sens ainsi que sur la signification de la discrimination fondée sur un handicap.

3.3.1.2   Le CESE se réjouit de la double approche adoptée dans l'article 4 pour supprimer les obstacles à l'accès à la protection sociale, aux avantages sociaux, aux soins de santé et à l'éducation, ainsi qu'à l'accès aux biens et services et à la fourniture des biens et services mis à la disposition du public, y compris en matière de logement et de transports, conformément aux recommandations du CESE (13). L'article contient une obligation de prendre des mesures en anticipation des besoins d'accès des personnes handicapées (article 4, paragraphe 1, point a)) et une exigence de procéder à des aménagements raisonnables pour garantir un accès non discriminatoire lorsqu'un cas particulier le requiert (article 4, paragraphe 1, point b)). Au sens de l'article 2, paragraphe 5, le non respect de l'article 4, paragraphe 1, point b) constitue une forme de discrimination interdite. Le CESE recommande que la directive clarifie le sens du concept «d'accès non discriminatoire effectif.»

3.3.1.3   Le CESE est préoccupé par les trois limitations à l'obligation anticipative de l'article 4, paragraphe 1, point a) et notamment, par le fait que les mesures à prendre pour répondre aux besoins d'accès ne devraient pas:

a)

imposer une charge disproportionnée;

b)

nécessiter une modification fondamentale de la protection sociale, des avantages sociaux, des soins de santé, de l’éducation ou des biens et services concernés, ou

c)

nécessiter une substitution de ces biens et services.

3.3.1.4   Les limitations b) et c) manquent de précision et risquent de contribuer à entretenir des pratiques discriminatoires non justifiées. Par exemple, un praticien qui fournit des services de santé uniquement aux personnes valides pourrait utiliser la limitation b) comme prétexte pour refuser de modifier son service. Ou bien, une collectivité locale qui offre actuellement, pour se rendre à l'hôpital local, un service de bus non aménagé pour des personnes en fauteuil roulant pourrait s'appuyer sur la limitation c) pour refuser de fournir une forme alternative de transport. Le CESE suggère qu'il serait suffisant de préciser que les mesures anticipatives doivent être «raisonnables», ce qui n'est pas actuellement exigé au titre de l'article 4, paragraphe 1, point a), et de limiter l'obligation en matière d'accès imposée par ce même article à la seule condition que les mesures adoptées ne doivent pas représenter de charge disproportionnée.

3.3.1.5   L'article 4, paragraphe 2 communique un caractère juridiquement contraignant aux facteurs spécifiques que l'on doit prendre en compte pour déterminer si les mesures adoptées au titre de l'article 4, paragraphe 1, points a) et b) «représentent une charge disproportionnée». Dans le considérant 19, l'on identifie la taille, les ressources et la nature de l’organisation en tant que facteurs qu'il convient de prendre en considération pour évaluer si la charge est disproportionnée. Dans la directive 2000/78/CE, des facteurs similaires sont définis dans le considérant 21. L'article 4, paragraphe 2 contient deux facteurs supplémentaires: «le cycle de vie des biens et services» et «les avantages potentiels d’une meilleure accessibilité pour les personnes handicapées». Étant donné que ces deux facteurs supplémentaires font partie de toute évaluation de la proportionnalité, le CESE estime qu'ils sont superflus et risquent de dissuader les prestataires des services de protection sociale, des avantages sociaux, des soins de santé et de l’éducation, des biens et services, y compris en matière de logement et de transports, d'accepter la nécessité de prendre des mesures pour garantir un accès effectif aux personnes handicapées.

3.3.1.6   L'article 15, paragraphe 2 autorise les États membres à reporter jusqu'à quatre ans le respect total de l'obligation d'assurer un accès effectif. Même si le CESE espère que tous les États membres progresseront vers la garantie d'un accès correct aux personnes handicapées aussi rapidement que possible, le Comité n'est pas contre l'idée que les États membres devraient pouvoir disposer d'un délai pour remplir l'obligation anticipative prévue à l'article 4, paragraphe 1, point a), sans dépasser cette période limitée. Il est toutefois essentiel que la directive indique clairement qu'aucun délai après la date limite pour la transposition ne serait accordé pour ce qui est de se conformer à l'obligation de procéder à des aménagements raisonnables pour une personne handicapée en particulier, selon les dispositions de l'article 4, paragraphe 1, point b).

3.4   Article 12

3.4.1   Le CESE se félicite de l'obligation pour les États membres de désigner un ou plusieurs organismes chargés de promouvoir l'égalité de traitement sans distinction de religion ou de convictions, de handicap, d'âge ou d'orientation sexuelle et dotés de compétences parallèles à celles des organismes similaires prévus par les directives sur l'égalité raciale et sur l'égalité d'accès aux biens et aux services. Le CESE se réjouit en outre du fait qu'il soit clairement indiqué dans le préambule (14) que ces organismes devraient agir de manière compatible avec les principes de Paris définis par les Nations unies visant, en particulier, à garantir l'indépendance des institutions nationales de défense des droits de l'homme. Comme le CESE l'a déjà précisé auparavant, ces organismes devraient être chargés d’évaluer régulièrement les résultats des politiques nationales de lutte contre les discriminations (15). Ces instances devraient engager, sur une base régulière, un dialogue constructif avec les organisations représentatives des personnes exposées à la discrimination pour les différents motifs repris dans la proposition de directive.

3.4.2   La proposition formulée dans l'article 12 laisse toutefois une lacune, étant donné qu'il n'existe toujours pas d'obligation de désigner un ou plusieurs organismes chargés de la promotion de l'égalité de traitement et de la lutte contre la discrimination pour les motifs concernés dans le domaine de l'emploi et du travail, car la directive-cadre pour l'emploi (2000/78/CE) n'exige pas la mise en place d'organismes spécialisés. Les organismes créés dans le cadre de la directive sur l'égalité raciale doivent s'occuper de l'égalité sans distinction de race ou d'origine ethnique à la fois dans le domaine de l'emploi et en dehors de l'emploi, alors que les organismes mis en place dans le cadre des directives sur l'égalité d'accès aux biens et aux services et sur l'égalité de traitement (refonte — 2006/54/CE) doivent couvrir l'égalité entre les hommes et les femmes aussi bien sur le marché de l'emploi que dans d'autres domaines.

3.4.3   Le CESE recommande dès lors d'ajouter un considérant au préambule de la directive proposée encourage les États membres à doter les organismes désignés au titre de l'article 12 de compétences équivalentes en matière d'égalité de traitement sans distinction de religion ou de convictions, de handicap, d'âge et d'orientation sexuelle dans le cadre de la directive-cadre pour l'emploi.

4.   Discrimination multiple

4.1   Dans son récent avis d'initiative, le CESE a constaté l'existence de cas fréquents de discrimination multiple, c'est-à-dire, de discrimination fondée sur plusieurs motifs couverts par l'article 13. Le CESE a suggéré l'adoption d'une nouvelle directive confirmant que le principe de l'égalité de traitement englobe la protection contre la discrimination multiple afin que cette protection devienne effective dans les lois nationales et communautaires.

4.2   La directive proposée reconnaît (16) que les femmes sont souvent victimes de discrimination multiple, mais n'aborde pas le problème de discrimination multiple sous d'autres aspects. Le CESE suggère que l'on pourrait progresser vers une reconnaissance totale de la discrimination multiple de deux manières:

a)

ajouter un considérant supplémentaire à la directive proposée afin d'inciter les États membres à garantir l'existence de procédures juridiques pour traiter les cas de discrimination multiple, en spécifiant notamment que les procédures juridiques nationales doivent permettre au plaignant de soulever tous les aspects de la discrimination multiple dans une seule et même plainte;

b)

adopter une recommandation de la Commission affirmant la nécessité de tenir compte de la discrimination multiple lors de l'élaboration et de la mise en œuvre des lois nationales, qui ne sera pas juridiquement contraignante pour les États membres mais devra être prise en considération par les tribunaux nationaux.

Bruxelles, le 14 janvier 2009.

Le Président du Comité économique et social européen

M. Mario SEPI


(1)  Avis du CESE intitulé «Étendre les mesures de lutte contre la discrimination aux domaines au-delà de l'emploi — pour une directive unique et globale de lutte contre la discrimination», rapporteur: M. Crook (JO C 77 du 31.3.2009, p. 102).

(2)  Directive 2000/43/CE du Conseil, art. 3.

(3)  [2008] CJCE C-303/06 du 17 juillet 2008, une affaire concernant de la discrimination à l'encontre de parents non handicapés en charge de soins primaires pour un enfant handicapé.

(4)  Directive 2004/113/CE du Conseil, art. 5

(5)  Directive 2000/43/CE du Conseil, art. 3.

(6)  Première note de bas de page, paragraphe 8.6.

(7)  COM(2008) 426 final, chapitre 5 «Explication détaillée des différentes dispositions».

(8)  Maruko contre Versorgungsanstalt der deutschen Bühnen, C-267/06, 1er avril 2008, paragraphe 59.

(9)  L'article 149, paragraphe 1 du TCE stipule: «La Communauté contribue au développement d'une éducation de qualité en encourageant la coopération entre États membres et, si nécessaire, en appuyant et en complétant leur action tout en respectant pleinement la responsabilité des États membres pour le contenu de l'enseignement et l'organisation du système éducatif ainsi que leur diversité culturelle et linguistique».

(10)  Par exemple, la directive du Conseil 2000/43/CE, article. 3 (1) (b) ou la directive du Conseil 2000/78/CE, article 3 (1) (b).

(11)  Arrêt de la Grande Chambre du 13.11.2007 (no 57325/00).

(12)  Article 1.

(13)  Note de bas de page 1, paragraphe 8.10.2.

(14)  Considérant 28.

(15)  Voir note de bas de page 1, paragraphe 8.10.8.

(16)  Considérant 13.


III Actes préparatoires

COMITÉ ÉCONOMIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN

450e session plénière des 14 et 15 janvier 2009

4.8.2009   

FR

Journal officiel de l’Union européenne

C 182/24


450e SESSION PLÉNIÈRE DES 14 ET 15 JANVIER 2009

Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil concernant les prescriptions pour l’homologation relatives à la sécurité générale des véhicules à moteur»

COM(2008) 316 final — 2008/0100 (COD)

(2009/C 182/05)

Rapporteur: M. RANOCCHIARI

Le 9 juin 2008, le Conseil de l'Union européenne a décidé, conformément à l'article 95 du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la

«Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil concernant les prescriptions pour l’homologation relatives à la sécurité générale des véhicules à moteur»

COM(2008) 316 final — 2008/0100 (COD).

La section spécialisée «Marché unique, production et consommation», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 6 janvier 2009 (rapporteur: M. RANOCCHIARI).

Lors de sa 450e session plénière des 14 et 15 janvier 2009 (séance du 14 janvier 2009), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 173 voix pour, 2 voix contre et 1 abstention.

1.   Conclusions et recommandations

1.1   Le CESE a toujours été favorable à toute initiative visant à simplifier la législation, surtout s'agissant d'aspects sensibles comme la sécurité et l'environnement. Dans cette optique, il ne peut qu'approuver la démarche de la Commission européenne, qui souhaite avec sa proposition de règlement atteindre ces importants objectifs en réglementant l'homologation des véhicules à moteur et des pneumatiques.

1.2   L'approche choisie par la Commission, qui consiste à abroger plus de 150 directives existantes en les remplaçant par le règlement proposé apparaît d'emblée très intéressante et tout à fait conforme à la simplification souhaitée. Cette proposition risque toutefois, pour autant qu'elle ne soit pas appropriée et conçue de manière adéquate, de surajouter de nouvelles procédures, parfois non compatibles avec celles existantes, ce qui aggraverait les difficultés et les charges pour les entreprises et les administrations des États membres.

1.3   En particulier, le CESE se demande comment cette proposition se rattache à la récente directive cadre sur la réception européenne (2007/46/CE), ainsi qu'avec les règlements Commission économique des Nations unies pour l’Europe (CEE-ONU) en cours d'élaboration, sur lesquels l'avis reviendra plus longuement ci-après.

1.4   Le CESE estime en effet que la simplification du processus d'homologation et des procédures que la Commission se propose d'atteindre grâce à l'introduction de prescriptions harmonisées, peut s'obtenir en insérant les règlements actuels et futurs de la CEE-ONU à l'annexe IV de la directive précitée sur la réception européenne, de manière graduelle et moyennant l'adaptation de ces prescriptions au progrès technique.

1.5   S'agissant des «technologies de sécurité avancées», étant donné qu'il n'existe pas pour toutes et dans la même mesure de spécifications techniques appropriées, le CESE juge préférable qu'elles fassent l'objet de propositions individuelles, en tenant compte de l'état de la technique dans les groupes compétents de la CEE-ONU de Genève.

1.6   En ce qui concerne enfin les prescriptions relatives aux pneumatiques, le CESE juge acceptable la proposition de l'industrie du secteur, qui respecte le calendrier de la proposition de la Commission tout en la simplifiant, en prévoyant deux cycles d'application au lieu des cinq envisagés.

1.7   Á la lumière des réserves exprimées jusqu'ici, le CESE a accueilli favorablement l'initiative du Parlement européen, qui a souhaité procéder à une nouvelle étude sur la question, après celle réalisée à la demande de la Commission européenne. Mais les résultats de cette deuxième étude n'ont pas fourni les éclaircissements attendus.

1.8   Le CESE craint en conséquence qu'en l'absence de données concluantes quant aux coûts/bénéfices de certaines des solutions proposées, la majoration substantielle des coûts qui en résulterait pour l'industrie et partant pour les consommateurs ne freine encore le renouvellement du parc roulant européen, qui souffre déjà des effets de la crise économique actuelle.

1.9   Enfin, le CESE recommande dès à présent aux autorités des États membres chargées d'effectuer les contrôles dans le cadre de la procédure d'homologation de prêter une attention accrue et rigoureuse aux exigences de sécurité des véhicules et surtout des pneumatiques qui seront importés en Europe après l'adoption du règlement à l'examen.

2.   Introduction

2.1   Malgré les progrès significatifs accomplis au cours de la dernière décennie, la sécurité des véhicules et la protection de l'environnement demeurent, à juste titre, au centre des préoccupations dans l'ensemble de l'Union européenne. Les résultats, toujours modestes, en matière de réduction de la pollution engendrée par les transports, notamment les émissions de CO2, ainsi que le nombre des victimes de la route restent en particulier inquiétants. Tous les ans, les accidents de la route font encore plus de 44 000 morts et 1 700 000 blessés (1) dans les vingt-sept États membres de l'UE.

2.2   La législation communautaire relative à l'homologation impose des règles précises pour la construction des véhicules à moteur. Ces règles visent d'une part à garantir la plus grande sécurité possible aux occupants des véhicules et à tous les usagers de la route, et d'autre part à préserver une protection de l'environnement. Actuellement, l'homologation est régie par quelque soixante directives de base, dont cinquante concernent la sécurité et une dizaine porte sur l'environnement, auxquelles s'ajoute une autre centaine de directives modificatrices.

2.3   Dans le secteur automobile, l'activité de recherche et développement se poursuit de manière continue, et permet aujourd'hui d'apporter des réponses plus nombreuses et de meilleure qualité aux deux exigences citées précédemment et auxquelles doivent satisfaire les nouveaux types de véhicules et, du moins en partie, ceux qui circulent déjà, l'objectif de ces nouvelles technologies étant de réduire le nombre d'accidents ainsi que la pollution.

2.4   Selon les recommandations du rapport CARS 21 (2), même ces problèmes considérables doivent être abordés grâce à une approche intégrée visant à atteindre des objectifs qui, comme l'a rappelé M. Günter Verheugen, vice-président de la Commission européenne, en présentant cette proposition de règlement, sont favorables aux citoyens, à l'environnement et à l'industrie. Afin d’atteindre les objectifs de l’Union européenne en matière de sécurité et de protection de l’environnement, il est nécessaire d’actualiser continuellement les différents règlements qui s’appliquent à la construction des nouveaux véhicules. Par ailleurs, il est également nécessaire de limiter le fardeau réglementaire imposé à l’industrie et de simplifier autant que possible la législation existante. Le document CARS 21 cité ci-dessus recommandait également l'utilisation à cette fin des règlements CEE-ONU (3) éventuellement disponibles.

3.   La proposition de la Commission

La proposition de règlement à l'examen entend modifier la législation régissant l'homologation des véhicules selon trois axes thématiques: la simplification, les technologies de sécurité avancées et les prescriptions en matière de pneumatiques.

Plus précisément, la proposition de règlement prévoit:

3.1.1   La révision de l'actuelle législation qui s'applique à l’homologation des véhicules et de leurs composants en matière de sécurité

La Commission prévoit d'abroger plus de 150 directives existantes en les remplaçant par un règlement unique du Parlement et du Conseil, directement applicable dans l'UE.

3.1.2   La mise en place des obligations suivante en matière de sécurité:

à partir de 2012, le montage des systèmes électroniques de contrôle de la stabilité (Electronic Stability Control –ESC) sera obligatoire pour les nouveaux types de voitures et de véhicules commerciaux; tous les véhicules neufs en seront équipées d'ici 2014. Les systèmes électroniques de contrôle de la stabilité agissent sur les systèmes de freinage et de puissance d’un véhicule pour aider le conducteur à en conserver le contrôle dans les situations critiques (dues par exemple au mauvais état de la chaussée ou à une vitesse excessive dans un virage);

à partir de 2013, le montage des systèmes avancés de freinage d’urgence (Advanced Emergency Braking Systems — AEBS) sera obligatoire pour les véhicules de grande taille; des capteurs avertissent le conducteur lorsque son véhicule est trop proche de celui qui le précède et déclenchent, dans certaines situations, le freinage d'urgence afin d'empêcher une collision ou d'en réduire la gravité. À partir de 2015, tous les nouveaux véhicules en seront équipés;

à partir de 2013, le montage des systèmes de détection de dérive de la trajectoire (Lane Departure Warning — LDW) sera obligatoire pour les véhicules de grande taille; ils avertissent le conducteur lorsque le véhicule risque de dévier involontairement de sa trajectoire, ce qui a principalement pour cause un défaut d'attention du conducteur. Après 2015, tous les nouveaux véhicules en seront équipés (4).

3.1.3   Nouvelles exigences concernant les pneumatiques (5)

à partir de 2012, les véhicules devront être équipés de pneumatiques à faible résistance au roulement (Low Rolling Resistance Tyres — LRRT), qui réduisent la consommation de carburant et la résistance au mouvement qui accompagne le roulement du pneumatique, principalement en raison des déformations des roues, des pneumatiques et de la chaussée;

à partir de 2012, les véhicules devront être équipés de systèmes de contrôle de la pression des pneumatiques (Tyre Pressure Monitoring Systems — TPMS) qui informent le conducteur lorsque le niveau de pression d'un pneumatique est inférieur à la pression optimale;

réduction du bruit de roulement, conformément à l'annexe I de la proposition de règlement;

adhérence sur revêtement humide, conformément à l'annexe I de la proposition de règlement.

4.   Observations générales

4.1   Le CESE accueille favorablement la proposition de la Commission d’établir des règles harmonisées en matière de construction de véhicules à moteur en vue d’assurer le bon fonctionnement du marché intérieur tout en garantissant un niveau élevé de sécurité et de protection de l’environnement.

4.2   Le CESE estime que la proposition de règlement à l'examen pourrait être un excellent outil pour d'une part développer la sécurité active et passive, et réduire ainsi le nombre d'accidents de la route, et d'autre part, prévoir la mise en place de mesures susceptibles de limiter la consommation de CO2, après un examen attentif des directives à abroger et des implications de cette abrogation.

4.3   Le CESE reconnaît que l'option privilégiée vise une simplification maximale dont bénéficieront avant tout les autorités nationales et l'industrie. Le CESE est néanmoins d'avis que l'on ne peut se contenter, au titre de la simplification législative, de regrouper les procédures actuellement en vigueur dans une sorte de règlement-cadre relatif à la sécurité. Le CESE note en outre qu'il convient de prendre en considération les conséquences de la mise en œuvre de la nouvelle directive-cadre sur la réception européenne (directive 2007/46/CE) (6) afin de garantir la cohérence et d'éviter que les nouvelles procédures ne fassent double emploi et, au lieu de limiter les coûts, n'imposent des frais supplémentaires aux administrations ou aux constructeurs.

4.4   Le CESE approuve le principe énoncé par la Commission européenne selon lequel la mise en place progressive des nouvelles obligations spécifiques en matière d'homologation des véhicules devra tenir compte de l'applicabilité effective de ces exigences. D'une manière générale, elles ne s'appliqueront initialement qu'aux nouveaux types de véhicules. Ceux qui existent déjà bénéficieront d'un certain délai pour se conformer aux nouvelles prescriptions.

4.5   Concernant les prescriptions relatives aux pneumatiques, il ne faut pas perdre de vue que le pneumatique est le seul élément de connexion entre le véhicule et la route et que ses caractéristiques de sécurité doivent primer sur tout autre objectif. En conséquence, le CESE considère:

qu'il est nécessaire de s'assurer que l'amélioration que l'on prévoit d'apporter aux performances environnementales ne porte pas atteinte aux impératifs, tout aussi importants, en matière de sécurité des utilisateurs de véhicules et des citoyens;

qu'il convient d'adopter une approche intégrée ne nuisant pas aux performances globales des pneumatiques (résistance au roulement, adhérence sur revêtement humide, etc.) dans le seul objectif, certes important, de réduction du bruit.

4.6   Par ailleurs, le CESE fait part de ses réserves concernant l'efficacité de l'étude d'impact réalisée à la demande de la Commission et a accueilli favorablement l'option proposée par le Parlement européen, à savoir l'élaboration d'une autre étude indépendante. En effet, le CESE estime que les données utilisées dans l'étude d'impact pourraient en avoir faussé les conclusions.

Il faut toutefois déplorer que l'étude réalisée à la demande du Parlement européen et publiée fin novembre 2008 (7) ne réponde pas aux attentes et ne dissipe pas les doutes exprimés par le CESE, tant pour ce qui est des aspects administratifs et techniques qu'en ce qui concerne une évaluation plus précise des coûts/bénéfices de la proposition de la Commission.

4.7.1   L'étude en question porte exclusivement sur les pneumatiques et sur le système de contrôle de la pression des pneumatiques (TPMS). S'agissant de ce dernier, elle marque une préférence discutable pour le système «direct», plus coûteux que le système «indirect» qui sera évoqué plus loin, tandis qu'elle n'apporte aucune information concernant les autres systèmes avancés de sécurité ainsi que sur les effets de la simplification proposée.

4.8   Dans ces conditions, il semble au CESE que le surcoût qui est à prévoir pour l'industrie et partant pour les consommateurs en cas d'application du règlement tel qu'il se présente aujourd'hui ne sont pas compensés par des bénéfices dûment démontrés, ce qui risque à l'évidence de freiner encore le renouvellement du parc roulant (vieux de plus de huit ans en moyenne), qui subit déjà les effets de la crise économique actuelle.

4.9   Le CESE note en outre que pour garantir la compétitivité de l'industrie européenne, dont les prestations atteignent un excellent niveau en matière de sécurité, il convient d'adopter un règlement qui, dans l'ensemble, ne fausse pas la concurrence au profit des constructeurs extracommunautaires. Ceux-ci affichent des coûts moins élevés, mais souvent aussi des niveaux de sécurité nettement inférieurs. Cela signifie qu'il faudra s'assurer que les véhicules et surtout les pneumatiques importés satisfont à l'ensemble des critères qui seront définis par le règlement.

4.10   Le CESE souligne également qu'il y a lieu d'évaluer sérieusement l'impact de ce règlement sur l'ensemble de l'industrie du pneumatique. Une première analyse montre que la viabilité économique de l'activité des petites et des moyennes entreprises du secteur de la distribution, peut être menacée. Les excédents de stock qu'engendrerait vraisemblablement l'entrée en vigueur de ces mesures dans les délais proposés par la Commission pourraient mettre en difficulté la chaîne de distribution. En effet, l'écoulement de stocks parfois considérables ne semble pas à la portée de la plupart des entreprises de ce secteur, qui sont généralement de petites entreprises ne pouvant opérer sur le marché international.

4.11   Même si cette question ne relève pas de la compétence exclusive de la Communauté, le CESE est d'accord avec la Commission qui, soucieuse d'éviter l'apparition d'obstacles au marché unique et consciente des implications transfrontalières du contenu de la proposition de règlement, considère que les objectifs de la proposition ne peuvent pas être atteints par les seuls États membres, des mesures contraignantes devant être adoptées à l'échelle européenne.

4.12   Le CESE ne peut que soutenir la proposition selon laquelle il revient aux États membres d'établir les sanctions applicables en cas d'infraction au règlement à l'examen et de veiller à ce qu'elles soient efficaces, proportionnées et dissuasives.

4.13   Le CESE se félicite en outre que l'instrument législatif choisi, à savoir le règlement, garantisse des délais et des modalités d'application sûrs dans tous les États membres, aspect particulièrement important pour une réglementation à caractère technique. En outre, le fait d'avoir opté, là encore, pour une approche à plusieurs niveaux (split approach) permet de définir les dispositions fondamentales dans le règlement adopté en codécision, tout en laissant le soin à un second règlement, adopté selon la procédure de comitologie, de préciser les aspects les plus techniques.

5.   Observations spécifiques

5.1   Le CESE soutient toute initiative qui vise à simplifier la réglementation; comme indiqué précédemment, il exprime néanmoins de fortes réserves concernant les modalités choisies pour y parvenir. En effet, le Comité estime qu'il convient de procéder à une réelle simplification; le présent règlement ne doit pas être une compilation des textes antérieurs et il faut dans tous les cas éviter d'imposer des charges supplémentaires aux autorités de certification.

Le CESE considère notamment que la simplification du processus d'homologation et des procédures que la Commission se propose d'atteindre grâce aux prescriptions harmonisées doit être obtenue en insérant les règlements actuels et futurs de la CEE-ONU à l'annexe IV de la directive précitée 2007/46/CE (8). Cette intégration doit être progressive (surtout lorsque les dispositions des règlements sont plus strictes et qu'un certain délai de mise en œuvre (lead time) (9) est nécessaire pour y adapter le produit) et aller de pair avec la nécessité d'adapter ces dispositions au progrès technique.

5.2.1   Ces modalités d'action ne sont pas envisagées dans le cadre de l'option (c) de l'étude d'impact du règlement («Remplacer toutes les directives existantes par le règlement proposé»), mais sous l'option (b), qui suggère de «réexaminer chaque directive à mesure qu’elle doit être amendée et décider alors si son remplacement s’impose». Qui plus est, l'explication fournie pour justifier le choix de l'option (c) de l'étude d'impact ne semble pas suffisamment motivée («elle offre le moyen le plus rapide de simplifier le régime actuel et elle est conforme aux recommandations CARS 21») et ne prend pas dûment en considération les autres éléments fondamentaux de CARS 21 tels que la durabilité, la référence à la CEE-ONU et la nécessité de garantir un délai de mise en œuvre suffisant aux industriels à qui s'adresse la législation.

5.2.2   Si l'on retient le choix proposé à l'option (c), le règlement à l'examen devrait s'avérer efficace pour autant qu'il n'existe pas de règlement équivalent de la CEE-ONU ou lorsque le règlement de la CEE-ONU ne contient pas certaines prescriptions d'installation nécessaires comme, par exemple, pour les pneumatiques.

5.3   À défaut, le CESE juge qu'afin de doter le règlement d'une véritable efficacité, le compromis suivant pourrait être envisagé: il s'agirait de déterminer une date d'entrée en vigueur et d'éviter ainsi les problèmes que pose actuellement le règlement proposé, en éliminant le risque que la CEE-ONU n'adopte des règlements en désaccord avec les dispositions (ou les dates d'application) des directives qui seraient abrogées.

5.4   Par conséquent, en ce qui concerne les aspects administratifs, le CESE est d'avis et propose, au vu de l'étude sur les directives visées à l'annexe IV, qu'indépendamment de l'entrée en vigueur du règlement ou des éléments de celui-ci, le règlement devrait lui-même garantir la cohérence avec les dates d'application prévues par les directives à abroger, tout en tenant compte des dispositions transitoires prévues par les règlements de la CEE-ONU qui les remplaceront.

5.5   Le CESE pense en outre que les «technologies de sécurité avancées» ne devraient pas être intégrées dans un règlement «horizontal», mais qu'elles devraient faire l'objet de propositions individuelles et donner lieu à l'adoption de nouveaux règlements de la CEE-ONU et/ou à la modification de textes en vigueur. Dans ces deux cas, les propositions devraient être examinées et débattues par les groupes techniques compétents au sein de la CEE-ONU de Genève (GRB, GRRF, GRSP (10)), lorsqu'il est possible de procéder à des évaluations techniques correctes des systèmes de sécurité proposés. Une procédure similaire devrait être adoptée dans les cas, signalés par la Commission, où la CEE-ONU n'a pas prévu de disposition précise par rapport aux exigences des directives communautaires.

Quant aux systèmes avancés de sécurité routière, le CESE signale notamment que:

5.6.1   Les systèmes électroniques de contrôle de la stabilité ont fait l'objet d'une adaptation des règlements de Genève et qu'ils sont complets en ce qui concerne les véhicules des catégories M2, N2, M3 et N3 (11). Le CESE est d'avis que le calendrier doit rester le même que celui du tableau 12.4.1 auquel obéit le règlement CEE-ONU no 13 (12), qui prévoit une mise en œuvre progressive, allant de juillet 2009 à juillet 2016, en fonction du type de véhicule.

Les systèmes avancés de freinage d'urgence: l'industrie ne peut développer des systèmes obligatoires que si elle dispose de spécifications techniques bien définies qui, comme le révèlent les informations disponibles, n'existent pas dans le cas des systèmes avancés de freinage d'urgence. Il est impossible de fixer des dates de mise en place concernant un système qui n'a pas été techniquement défini. L'introduction doit être précédée d'une étude d'impact en bonne et due forme, comprenant les coûts et les bénéfices évalués avec soin.

5.6.2.1   La définition du dispositif avancé de freinage d'urgence donnée à l'article 3 de la proposition de règlement est très vaste et peut englober des systèmes qui ne sont pas encore suffisamment fiables. Ceux-ci peuvent engendrer eux-mêmes un risque pour la sécurité et ce en raison de technologies n'ayant pas atteint leur maturité. Il est indispensable de prévoir une phase d'étude et de développement adéquate ainsi qu'un délai de mise en œuvre suffisamment long.

5.6.3   Le champ d'application des dispositions concernant les systèmes avancés de freinage d'urgence couvre les véhicules de catégorie M2, M3, N2 et N3. Dans la plupart des cas, les véhicules commerciaux légers de la catégorie N1 existent également dans des versions relevant de catégories supérieures (N2, M2, et M3), d'où la nécessité de diversifier la gamme pour les modèles plus lourds dont les volumes sont relativement faibles. Il semble opportun de limiter l'application des dispositions concernant les systèmes avancés de freinage d'urgence aux véhicules commerciaux lourds ou, du moins, aux véhicules dont le PTT (poids total à terre) est supérieur à 7,5 tonnes, et d'examiner la nécessiter d'en exempter des catégories spécifiques, telles par exemple que les autobus, les véhicules destinés au ramassage des déchets et autres véhicules publics circulant à vitesse limitée.

5.6.4   Les systèmes de détection de dérive de la trajectoire: selon le CESE, l'on peut formuler les mêmes observations que celles qui concernent les systèmes avancés de freinage de sécurité:

nécessité de spécifications techniques définies par le bureau de la CEE/ONU de Genève;

différenciations techniques selon les différentes catégories de véhicules;

évaluation du rapport coûts/bénéfices, et pertinence des exemptions pour certaines catégories spécifiques.

5.7   En conclusion, le CESE estime qu'il est prématuré de généraliser les systèmes avancés de freinage d'urgence et les systèmes de détection de dérive de la trajectoire qui ne s'appliquent pour l'instant qu'aux véhicules lourds. Une période de recherche et d'expérimentation est encore indispensable afin d'évaluer les avantages réels de ces systèmes. Cela fournirait également des éléments utiles en vue de leur future extension aux véhicules légers.

5.8   Systèmes de surveillance de la pression des pneus: compte tenu du fait que les spécifications techniques de ces systèmes sont actuellement examinées par le groupe informel du GGRF (13), le CESE demande à la Commission européenne d'attendre les conclusions de ces travaux (qui devraient également tenir compte des dispositions déjà en vigueur dans les pays tiers) avant de prendre sa décision. Afin de ne pas alourdir encore à l'avenir les coûts des véhicules, il serait souhaitable de choisir une sensibilité de détection qui permettrait aussi l'application du système «indirect», qui présente de nombreux aspects positifs, dont le premier est de fonctionner même en cas de remplacement des pneumatiques. En effet, le système «direct» exige la présence d'un capteur sur chaque pneumatique. De ce fait, le changement des pneumatiques nécessitera également celui des capteurs ou une opération de démontage/récupération et remontage, manipulation coûteuse et difficile en raison du risque élevé de détérioration des capteurs, non visibles depuis l'extérieur.

5.9   Concernant les dispositions techniques relatives aux pneumatiques, le CESE note en particulier que:

le bruit: les niveaux de réduction du bruit qui sont proposés pourraient entraîner une diminution de la sécurité des véhicules et des utilisateurs, tandis qu'en limitant la vitesse dans les zones de trafic dense et/ou en réparant le revêtement des routes, on pourrait parvenir à une réduction du bruit qui serait trois ou quatre fois plus importante. En outre, pour la catégorie C3 par exemple, il serait difficile d'atteindre une réduction de 3dB sans réduire les niveaux d'adhérence des pneumatiques. La catégorie C3 correspond aux pneumatiques de traction qui doivent être dotés d'une bande de roulement «agressive» afin de bénéficier d'une bonne adhérence sur les surfaces glissantes;

la résistance au roulement: il est indispensable de revoir les dates d'application pour les catégories C1 et C2, tandis que la nature spécifique des pneumatiques de catégorie C3 exige que soient effectuées de nouvelles analyses. La mise en œuvre de ces dispositions pourrait même être retardée afin que puisse être réalisée une nouvelle étude d'impact;

l'adhérence sur revêtement humide: la proposition de la Commission de mettre en place des dispositions obligatoires s'appuyant sur le règlement CEE/ONU no 117 (14) doit être reprise telle quelle.

5.10   Le CESE souligne que la proposition de règlement prévoit des changements tous les deux ans, ce qui ne correspond pas aux délais de mise en œuvre nécessaires à l'industrie du pneumatique. Cela ne répond en aucun cas à l'objectif de «mieux légiférer». Par conséquent, le CESE soutient la suggestion de l'industrie, à savoir respecter le calendrier de la proposition tout en la simplifiant, en prévoyant deux cycles d'application (2012-2016 et 2016-2020) au lieu des cinq actuellement envisagés. Ainsi, les processus d'homologation, la logistique et les éventuels stocks pourraient être gérés de manière efficace.

5.11   Il reste également à clarifier la question du traitement auquel seront soumis les pneumatiques rechapés. En effet, la définition de ce type de pneumatiques (règlement CEE/ONU R109) se réfère au site de production et non au pneumatique lui-même. La difficulté de définir le «type» de pneumatique conforme aux nouvelles prescriptions, par exemple en matière de bruit, dans un même établissement rechapant les types de pneumatiques les plus divers, est évidente. De l'avis du CESE, étant donné l'extrême difficulté d'application et les coûts considérables qui pèseraient sur ces entreprises, le plus souvent des PME, ce secteur devrait être exempté de l'application du règlement, sous réserve du respect de tous les critères de sécurité prévus.

5.12   Enfin, le CESE invite la Commission à évaluer l'opportunité de considérer la date de fabrication comme la référence à utiliser pour l'application des exigences relatives aux pneumatiques. En effet, cette date peut être facilement identifiée par les vendeurs, les consommateurs et les autorités nationales puisqu'elle doit obligatoirement être apposée sur tous les pneumatiques commercialisés dans l'Union européenne. C'est cette date, et non celle de la mise sur le marché ou celle de leur acquisition, qui devrait permettre de prouver que le pneumatique respecte les nouvelles exigences en vigueur.

Bruxelles, le 14 janvier 2009.

Le Président du Comité économique et social européen

Mario SEPI


(1)  Source: CARE (base de données communautaire sur les accidents de la route), base de données qui recueille et traite les données des États membres sur les accidents de la route.

(2)  COM(2007)22 final, 1er février 2007 — «Un cadre réglementaire concurrentiel pour le secteur automobile au XXIe siècle».

(3)  Commission économique des Nations unies pour l’Europe, Genève. Elle promeut la coopération et l'intégration entre les 56 États membres en développant des normes et des dispositions communes, y compris dans le domaine de l'homologation des véhicules à moteur.

(4)  Pour rappel, les dates prévues pour l'entrée en vigueur des prescriptions relatives à la sécurité:

systèmes électroniques de contrôle de la stabilité: le 29/10/2012 pour l'homologation de nouveaux types de véhicules et le 29/10/2014 pour tous les véhicules nouvellement immatriculés;

systèmes avancés de freinage d’urgence: le 29/10/2013 pour l'homologation de nouveaux types de véhicules et le 29/10/2015 pour tous les véhicules nouvellement immatriculés;

systèmes de détection de dérive de la trajectoire: le 29/10/2013 pour l'homologation de nouveaux types de véhicules et le 29/10/2015 pour tous les véhicules nouvellement immatriculés.

(5)  Par souci de clarté, voici pour rappel les dates fixées par la Commission européenne pour l'entrée en vigueur des prescriptions relatives aux pneumatiques:

2012: homologation de l'adhérence sur revêtement humide uniquement pour les pneumatiques de classe C1; homologation de la résistance au roulement et du bruit de roulement pour les pneumatiques de classe C1, C2 et C3 (phase 1);

2014: nouvelle immatriculation uniquement pour pneus de classe C1 conformes aux exigences en matière d'adhérence sur revêtement humide et les pneus de classe C1 et C2 conformes aux exigences en matière de résistance au roulement (phase 1);

2016: nouvelle homologation pour tous les nouveaux pneus de classe C1, C2 et C3 conformes aux exigences en matière de résistance au roulement (phase 2); ne pourront être immatriculés et commercialisés sur le marché intérieur que les pneus de classe C1, C2 et C3 conformes aux exigences relatives au bruit de roulement;

2018: ne pourront être immatriculés et commercialisés sur le marché intérieur que les pneus de classe C1 et C2 conformes aux exigences relatives à la résistance au roulement (phase 2);

2020: ne pourront être immatriculés et commercialisés sur le marché intérieur que les pneus de classe C3 conformes aux exigences relatives à la résistance au roulement (phase 2).

(6)  Directive 2007/46/CE du Parlement européen et du Conseil du 5 septembre 2007 établissant un cadre pour la réception des véhicules à moteur, de leurs remorques et des systèmes, des composants et des entités techniques destinés à ces véhicules.

(7)  Type approval requirements for the general safety of motor vehicles (IP/A/IMCO/ST/2008-18).

(8)  Directive 2007/46/CE — annexe IV: «Liste des exigences aux fins d’une réception CE par type de véhicules».

(9)  Délai nécessaire à l'industrie pour mettre en œuvre toutes nouvelles exigences comportant des interventions sur la structure du produit.

(10)  Les groupes de travail de la Commission économique des Nations unies pour l'Europe à Genève sont: le Groupe de travail en matière de roulement et de freinage (GRRF); le Groupe de travail du bruit (GRB); le Groupe de travail sur l'éclairage et la signalisation lumineuse (GRE); le Groupe de travail des dispositions générales de sécurité (GRSG); le Groupe de travail de la pollution et de l'énergie (GRPE) et le Groupe de travail de la sécurité passive (GRSP).

(11)  Les véhicules de catégorie N sont ceux dotés d'au moins quatre roues et destinés au transport de marchandises. Ils se subdivisent en trois classes, N1, N2 et N3, en fonction du poids maximum: N1 < 3 500 kg; N2 < 12 000 kg; N3 > 12 000 kg. La classe N1 est subdivisée en trois sous-classes, dénommées NI, NII et NIII, que l'on identifie toujours en fonction du poids. En revanche, les véhicules de catégorie M sont ceux dotés d'au moins 4 roues et destinés au transport de passagers. Ils se subdivisent en trois classes (M1, M2, M3) en fonction du nombre de places et de leur poids maximum: M1 < 9 places; M2 > 9 places et < 5 000 kg; M3 > 9 places et > 5 000 kg. La catégorie O comprend les véhicules avec remorques.

(12)  Règlement CEE/ONU no 13: «Freinage des poids lourds».

(13)  Groupe de travail en matière de roulement et de freinage.

(14)  Règlement CEE-ONU no 117: «Prescriptions uniformes relatives à l’homologation des pneumatiques en ce qui concerne le bruit de roulement et l’adhérence sur sol mouillé».


4.8.2009   

FR

Journal officiel de l’Union européenne

C 182/30


Avis du Comité économique et social européen sur la Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions: «Think Small First»: Priorité aux PME — Un «Small Business Act» pour l'Europe

COM(2008) 394 final

(2009/C 182/06)

Rapporteur: M. MALOSSE

Corapporteur: M. CAPPELLINI

Le 25 juin 2008, la Commission a décidé, conformément à l'article 262 du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la communication susmentionnée:

Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions: «Think Small First»: Priorité aux PME — Un «Small Business Act» pour l'Europe

COM(2008) 394 final

La section spécialisée «Marché unique, production et consommation», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 6 janvier 2009 (rapporteur: M. MALOSSE et corapporteur: M. CAPPELLINI).

Lors de sa 450e session plénière des 14 et 15 janvier 2009 (séance du 14 janvier 2009), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 112 voix pour, 10 voix contre et 9 abstentions.

1.   Résumé et conclusions

1.1   Avec ses avis INT/390 et INT/394 (1), le CESE s’est déjà exprimé en faveur d’un Small Business Act européen ambitieux à la hauteur du potentiel de croissance et d’emplois que représentent pour l’Union les 23 millions de petites et moyennes entreprises et toutes celles supplémentaires qui pourraient être crées.

1.2   Malgré des déclarations de bonne volonté et des projets positifs (Société privée européenne, délais de paiement notamment), le CESE estime que le projet de la Commission européenne, n’est pas à la hauteur de cet enjeu, en particulier dans le contexte des difficultés économiques et financières actuelles.

1.3   Le CESE propose donc un SBAE ambitieux comportant notamment:

un instrument juridique contraignant pour l’application du principe «Think small first/Penser d'abord aux PME» pour garantir, par un degré de contrainte maximum, une mise en œuvre effective et concrète de ces principes de gouvernance, au niveau communautaire comme dans les États membres et les régions;

une feuille de route accompagnée d’un calendrier précis et de moyens adéquats pour la mise en œuvre de dispositions concrètes et de grande ampleur du SBAE;

des engagements clairs en matière de réduction de la charge bureaucratique et notamment le principe du «une fois seulement» pour toutes les formalités administratives;

une refonte des services de la Commission européenne pour donner aux PME un véritable interlocuteur et des instruments pour favoriser l’«européanisation» des entreprises;

des outils européens pouvant servir de levier pour favoriser la capitalisation, la mise en réseau, les investissements et la formation tout au long de la vie dans les petites et moyennes entreprises;

un cadre politique cohérent pour toutes les politiques européennes afin que la petite et moyenne entreprise soit considérée comme la règle et non l’exception;

une déclinaison au niveau national des objectifs du SBAE, y compris au niveau législatif;

le retour à la pratique de la consultation permanente des organisations intermédiaires et des partenaires sociaux.

2.   Introduction

2.1   La présidence française de l'Union européenne a saisi l’Union européenne afin qu’elle se penche sur l’idée d’un Small Business Act à l’européenne et ce en citant l’exemple de la loi en faveur des PME actuellement en vigueur aux USA. L’idée de ce Small Business Act avait d’ailleurs déjà été mentionnée par le CESE (2) et évoquée aussi par le Parlement européen.

2.2   Pour rappel, la loi américaine citée se caractérise par l’établissement d’une Administration chargée d’aider les PME américaines (Small Business Administration), de mesures en faveur de la création et du développement de petites entreprises notamment auprès des minorités ethniques, des femmes et des jeunes. Le Small Business Act américain comporte également des mesures destinées à favoriser le recours à des PME américaines lors de passation de marchés publics par l’État fédéral américain et ses différentes agences gouvernementales.

2.3   Alors que l’Union européenne traverse, comme toute la planète, une grave crise financière et économique, ce sont les entreprises et en particulier les PME, qui sont les rouages à la fois les plus sensibles et aussi les plus importants en matière d’emplois et de capacité de relance. Ainsi, s’il était revu avec beaucoup plus d’ambition, le SBAE pourrait être un instrument fondamental d'une nouvelle stratégie à long terme de l'UE en faveur des investissements, de la croissance et de l’emploi.

2.4   Le CESE s'est prononcé récemment sur le sujet à deux occasions:

avec un avis exploratoire, à la demande de la présidence slovène, sur «les différentes mesures politiques susceptibles de contribuer à la croissance et au développement des PME» qui a émis des propositions pour un SBAE efficace autre qu’une simple déclaration politique (3);

avec un avis exploratoire, à la demande de la présidence française, sur le thème des «marchés publics internationaux» qui faisait explicitement référence aux négociations en cours dans le cadre de la révision de l'accord Marchés publics (AMP) de l'Organisation mondiale du commerce (OMC), et qui proposait notamment la mise en place d’une feuille de route ambitieuse pour la mise en place du SBAE (4).

2.5   S’il se félicite d’une série d’initiatives positives contenues dans ce Small Business Act, le CESE déplore la forme retenue par la Commission (une simple communication) qui ne comporte aucune obligation de calendrier et de moyens. ni aucune proposition garantissant la mise en œuvre effective du principe «Think Small First/Penser d'abord aux PME».

2.6   Il déplore ainsi que le principe «Think small First\Penser d’abord aux PME» ne fasse pas l’objet d’une mesure législative spécifique destinée à en assurer l’application systématique dans le processus législatif et son application. Le CESE considère que l’enjeu de caractère contraignant est particulièrement important lorsqu’il s’agit de mettre en œuvre des principes de gouvernance en faveur des petites entreprises. L’application de ce principe de façon concrète et ses déclinaisons à toutes les étapes de l’élaboration des législations et politiques communautaires, nationales et territoriales méritent donc d’être consacrés par un texte ou un instrument approprié.

2.7   Il regrette fortement que sa proposition de «Feuille de route» contraignante, précédemment évoquée, n’ait pas été retenue en ce qui concerne le programme de travail et les priorités, qui n’ont pas besoin de faire l’objet de procédures législatives car elles font déjà partie des programmes existants ou peuvent l’être, notamment dans le cadre de leur révision à mi parcours. De même, un grand nombre de mesures concrètes proposées sont soit déjà en cours d’élaboration soit annoncées depuis longtemps. Les propositions phares et utiles que sont notamment le Statut de Société privée européenne, la directive délais de paiements, la TVA réduite ou encore le Bloc d’exemption sur les Aides d’État sont assez symptomatiques de cette situation.

2.8   Le «Small Business Act» doit faire la distinction claire, entre, d’une part les petites entreprises à caractère familial ou artisanales et à marché local qui représentent la très grande majorité des PME et dont une grande part ne souhaitent pas croître en taille afin de garder la maîtrise de leur entreprise et, d’autre part des entreprises moyennes ou petites à fort potentiel de développement que l'on peut baptiser les «précurseurs». Une attention particulière devrait être appliquée à cet égard aux petites et moyennes entreprises des régions à handicaps structurels, en particulier les régions insulaires, zones de montagnes et à faible densité de population.

2.9   Dans ce contexte, le CESE a été saisi pour donner son avis sur la communication de la Commission. Il a organisé le 7 octobre 2008 à Paris, en coopération avec l'Assemblée permanente des Chambres de Métiers, une audition afin de mieux préparer sa réponse.

3.   Préconisation 1 du CESE: Pour un instrument juridique contraignant sur l’application du principe «Think small first\Penser d’abord aux PME»

3.1   Le SBAE ne doit pas se limiter à une simple reconnaissance politique de plus; il doit avoir une traduction législative qui rende son application contraignante.

Concernant le principe «Think Small First\Penser d’abord aux PME» le CESE réaffirme sa position précédente (avis INT/390) et demande qu’il soit érigé en règle contraignante sous une forme (code de conduite, accord interinstitutionnel, décision du Conseil) qui reste à définir mais qui engagerait le Parlement européen, la Commission et le Conseil. La «piste» d’un accord interinstitutionnel fondé sur les mêmes bases juridiques que l’Accord sur le «Mieux légiférer» de 2003 paraît être une option intéressante que le CESE pourrait explorer, avec d’autres pistes. D'une manière très concrète, il conviendrait que cet acte contraignant prévoit d’assurer:

3.2.1   que les textes législatifs à tous niveaux soient conçus en tenant compte des situations spécifiques et besoins particuliers des différentes catégories de PME; toute nouvelle législation européenne concernant l'entreprise doit faire l'objet d'une consultation préalable des organisations intermédiaires concernées y compris des partenaires sociaux et organisations de l’économie sociale avec un délai de réponse minimum de 12 semaines (et non 8 comme proposé par la Commission européenne).

3.2.2   qu'aucune législation concernant l'entreprise ne soit modifiée trop souvent (6 ans serait le minimum). Il devrait être proposé aussi que les dates d'entrée en vigueur de toute nouvelle législation soient regroupées au 1er janvier de chaque année lorsqu’elles peuvent avoir des effets contraignants tandis que toute législation qui apporte un allègement ou une simplification des charges devrait pouvoir entrer en vigueur avec effet immédiat à tout moment.

3.2.3   que les législations à tous les échelons respectent quatre principes fondamentaux:

une analyse d'impact systématique sur les PME doit être rendue obligatoire sur toute nouvelle législation, aucun texte législatif ne devrait pouvoir être adopté s’il n’a pas fait l’objet d’une analyse d’impact sur les différentes catégories d’entreprises du secteur d’activités concerné;

le principe de proportionnalité, appliqué de façon systématique aux différentes typologies d'entreprises;

le principe «une fois seulement» pour toute formalité demandée à une entreprise;

le principe de sauvegarde ou de précaution pour se prémunir de toute législation contraignante supplémentaire.

3.2.4   Que soit fixée une obligation quantifiée de simplification des charges administratives pour les entreprises sur le marché intérieur sur la base de l'objectif d'une réduction de la charge bureaucratique de la législation européenne de l'ordre de 25 % jusqu'en 2012.

4.   Préconisation 2 du CESE: une feuille de route précise avec des délais, des moyens et des financements si nécessaires.

4.1   Le CESE préconise une feuille de route précise comprenant des priorités d'actions, des mesures concrètes, des délais de mise en œuvre, des moyens de réalisation et des financements le cas échéant. Il convient de s’assurer que toutes les mesures proposées soit mises en œuvre d’ici 2013 avec des mesures de suivi et d'évaluation.

4.2   Concernant la partie opérationnelle sous forme d’un catalogue de 92 actions: tout en soutenant ces actions qu’il souhaite voir rapidement mises en œuvre tant au niveau communautaire que dans les États membres, le CESE rappelle qu’il considère ces mesures comme la mise en œuvre ou la prolongation d’actions déjà engagées ou décidées, à l’instar des quatre mesures législatives. Ces mesures ne tiennent pas suffisamment compte des attentes et besoins des différentes catégories de PME et le CESE réclame un plan plus ambitieux, à la hauteur du rôle réel des petites entreprises et de la situation économique mondiale. Il propose donc à la Commission, au Conseil et au Parlement de mettre en place un véritable projet européen en faveur des PME et des microentreprises, basé non seulement sur le soutien aux entreprises à fort taux de croissance mais aussi aux entreprises de l’économie de proximité, des entreprises de l’économie sociale et des activités traditionnelles, sur une meilleure gouvernance permettant un meilleur dialogue entre les pouvoirs publics, les partenaires économiques et sociaux, les organisations représentatives des différentes catégories de PME et sur une prise en compte effectives des différentes réalités de ces catégories de PME.

4.3   Parmi les actions proposées au niveau communautaire, le CESE soutient en particulier:

le projet de Règlement concernant la création d'une Société Privée européenne  (5), initiative que le CESE avait proposée dans un avis d'initiative en 2001 afin de créer des «euroentreprises» susceptibles de profiter des opportunités de croissance du marché unique et de réduire ainsi les formalités et les coûts liées à l’établissement de filiales dans différents Etats membres. Le CESE souhaite que ce projet soit adopté rapidement en trouvant une formule qui ne crée pas de distorsion de concurrence, ni d'affaiblissement des droits sociaux d'une manière ou d'une autre;

le projet de directive révisée sur les délais de paiement  (6) qui devrait alourdir les contraintes et les pénalités pour les autorités publiques en cas de paiement au-delà de 30 jours.

4.4   Le CESE préconise qu’on ajoute des actions ambitieuses et concrètes et notamment:

des actions pilotes en faveur de l'efficacité énergétique pour les PME du secteur de la construction en raison de leur importance dans ce secteur (80 % des entreprises) et de leur contribution potentielle considérable à l'objectif de réduction des émissions de CO2 (40 % des émissions proviennent de l'habitat);

des dispositifs adaptés aux différentes branches et filières d’activité et des processus progressifs de management environnemental par étapes pour les petites entreprises afin de garantir que les objectifs environnementaux et énergétiques n’excluront pas les petites entreprises du marché;

des actions concrètes de l'UE en faveur de l'européanisation des entreprises sous forme de programmes de rapprochement et de coopération (cf. les anciens programmes EUROPARTENARIAT et INTERPRISE supprimés à tort dans les années 2000 par la Commission européenne);

mieux associer les entreprises aux actions européennes de formation et d'éducation, notamment sous la forme d'un nouveau programme pour rapprocher les entreprises des établissements d'enseignement. Le CESE réitère en outre sa demande de renforcer les programmes pour favoriser la mobilité des apprentis et jeunes en formation professionnelle initiale;

faciliter et encourager la transmission d’entreprises; le CESE réaffirme l’enjeu de la transmission reprise d’entreprises, notamment de petites entreprises de production et de services en milieu urbain et en milieu rural, dont la disparition annoncée aura des effets négatifs considérables. Il préconise notamment de favoriser des systèmes de rapprochement, des incitatifs fiscaux, d’incitation à la capitalisation et de partenariats publics privés;

développer de manière plus conséquente le réseau «Entreprises Europe network» afin d’en faire un véritable réseau européen d’information et de coopération.

4.5   Face au défi de la récession mondiale, le CESE soutient particulièrement des mécanismes financiers renforcés au travers de la BEI et du FEI pour faciliter l'accès au financement à court terme et soutenir quand c’est encore utile les entreprises en difficulté. À cet égard les initiatives actuelles et celles proposées par le SBAE devraient être élargies considérablement en raison de la situation économique du moment. Il conviendrait surtout d’en finir avec les projets pilotes marginaux et d’œuvrer réellement pour décloisonner et renforcer les réseaux de financement de proximité (capital risques, «business angels», cautionnement mutuel) et de soutenir la création de fonds destinés à soutenir les projets européens et transfrontaliers.

4.6   En outre, le CESE demande, comme indiqué dans son avis précédent 390/2008 que le SBAE engage de nouvelles initiatives qui répondent aux demandes des organisations exprimées lors de nombreuses conférences communautaires et par le CESE ainsi que le Parlement européen:

intégrer la dimension PME dans toutes les politiques communautaires: le CESE a souligné que, au-delà des discours politiques, c’est le modèle de la grande entreprise qui prédomine encore trop souvent lors de l’élaboration des législations;

poursuivre le politique de simplification administrative, mais en veillant surtout à une parfaite coordination avec les organisations intermédiaires sectorielles concernées; la Commission doit veiller à ce que à une collaboration plus forte avec ces organisations et le CESE, afin d’éviter que cette simplification n’ait des effets contraires au but recherché. Il renouvelle son scepticisme sur le bien fondé et l’efficacité d’exempter systématiquement les petites entreprises de l’application de certaines mesures législatives; il préfère la proportionnalité dans la mise en œuvre des textes;

soutenir les activités d’accompagnement et de conseil des organisations intermédiaires; le CESE attache une grande importance aux questions de gouvernance, en particulier la question de la consultation et du suivi. Il regrette que la Commission européenne n'accorde pas plus de prix au rôle des organisations intermédiaires, élément fondamental si l'on veut dialoguer avec des millions d'entreprises, leurs dirigeants et leurs salariés. Le CESE réaffirme que ces organisations sont un rouage essentiel pour le succès des politiques communautaires, quelles jouent un rôle irremplaçable dans la transmission d’informations et l’aide aux entreprises, notamment les plus petites;

mettre en place un politique élargie et cohérente de l’innovation pour soutenir non seulement les entreprises déjà connues comme innovantes mais aussi l’innovation courante, de mise sur le marché, de basse et moyenne technologie ainsi que l’innovation non technologique particulièrement dans les petites entreprises;

élargir l’accès aux programmes communautaires en simplifiant les carcans juridiques, financiers et administratifs décourageant les PME et en facilitant les projets groupés proposés par les organisations intermédiaires. Le CES renouvelle sa demande à la Commission d’engager une concertation avec les organisations européennes représentatives des entreprises afin de simplifier les règles d’accès aux programmes et préciser de nouvelles conditions d’élaboration et de participation aux programmes aux différents niveaux territoriaux. Au niveau du recours des PME aux financements européens, il est nécessaire de simplifier au maximum les procédures d’accès. Dans cette perspective, un premier pas pourrait être franchi en articulant les différents programmes communautaires les uns avec les autres (Fonds structurels, CIP, 7e PCRD, …), quand l’on sait que les procédures à suivre pour chacun d’eux sont différentes. De même, une clarification du langage des documents de cadrage permettrait à la majorité des PME d’utiliser plus facilement les différents outils de développement proposés par ces programmes. Enfin, une action concertée de simplification des procédures entre institutions européennes et institutions nationales s’avère nécessaire: en effet, les contraintes administratives restent toujours trop lourdes pour une entreprise dont le métier n’est pas en règle générale «l’expertise administrative».

4.7   En matière de marchés publics, chaque État membre devrait établir une structure d'aide personnalisée aux PME qui souhaitent accéder aux marchés publics tant au niveau national qu’au niveau communautaire. Grâce à cette aide, la PME pourrait connaître les démarches à effectuer pour constituer une candidature, pour vulgariser le vocabulaire propre aux marchés publics. (l’inaccessibilité des PME passe aussi par l’incompréhension de la terminologie utilisée).

5.   Préconisations 3 du CESE: propositions particulières pour le niveau communautaire

5.1   Pour que le SBAE soit effectif, le CESE préconise au niveau communautaire une politique visible et ambitieuse qui fait défaut aujourd’hui. Il préconise notamment:

redonner à un Commissaire européen une responsabilité pleine et entière pour l’application du Small Business Act européen;

une refonte des services afin que, comme à l'époque de la Task Force PME, les entreprises petites et moyennes disposent aussi d'un Interlocuteur politique visible et accessible uniquement dédié à la PME et à la défense de ses intérêts au sein des institutions européennes, notamment dans le cadre du processus décisionnel;

la mise en place d'un comité de gestion «Comité européen du SBA» avec, en plus des représentants des états membres, des délégués des organisations européennes représentatives concernées, y compris les partenaires sociaux. Le CESE souhaite que ce Comité soit doté de pouvoirs étendus de contrôle de l'application du SBA, du suivi du plan d'action et de coordination avec les plans mis en œuvre par les Etats membres. Le CESE appelle aussi à ce que, à l'occasion de la mise en place du SBA;

la nomination d’un correspondant PME dans chaque direction générale de la Commission chargé de veiller à ce que les mesures législatives et les programmes gérés par la DG compétente intègrent bien les priorités et attentes des PME et des microentreprises;

le contexte entrepreneurial qui doit être mis en place, dans l’application concrète du «Think small First\Penser aux PME d'abord» suppose qu’il soit créé tant au niveau de la société qu’au niveau des Institutions. Car, faire en sorte que «les règles édictées respectent la majorité de ceux à qui elles sont applicables», en l’occurrence les PME, suppose une certaine connaissance du monde de la PME. C’est pourquoi, la Commission européenne devrait encourager les États membres à suivre son exemple en la matière, à travers son programme «Enterprise Experience Program» qui permet à de nombreux fonctionnaires européens de se familiariser avec le monde des PME. Une telle initiative devrait inspirer les différents États membres, tout du moins ceux qui ne mettent pas en œuvre une démarche similaire.

6.   Préconisation 4 du CESE: des actions spécifiques au plan national

6.1   En ce qui concerne les domaines de compétence nationale, le CESE préconise que chaque État membre:

fasse adopter une loi au plan national pour rendre contraignant le principe du «Think small First\Penser d’abord aux PME»;

élaborer un «Plan national du Small Business Act» en partenariat étroit avec les acteurs économiques et sociaux concernés. Chaque année un rapport distinct du rapport sur les PNR — programmes nationaux de réforme — serait présenté pour faire connaître les réalisations de chaque plan national. Une conférence annuelle pourrait mettre en valeur les «bonnes pratiques» et «success stories». La participation étroite des organisations européennes concernées et du CESE permettraient de valider cet exercice;

soutenir des actions communes pour développer des actions en faveur par exemple de transmission d'entreprise (questions juridiques et fiscales); le droit des faillites afin de donner toujours une «autre chance» aux entreprises et aux entrepreneurs, le développement des guichets uniques et l'application du principe «une fois seulement» pour les formalités;

la création d’un SME Envoy au niveau de chaque État membre, chargé d’une part de gérer l’application du SBAE dans l’État membre et, d’autre part, de veiller à ce que les législations nationales de mise en œuvre de la législation communautaire respectent les principes fondamentaux «Think Small First/Penser d'abord aux PME».

6.2   Pour les domaines d’action de compétence nationale, le CESE recommande que les États membres se concertent davantage et envisagent des actions communes, le cas échéant dans le cadre de coopérations renforcées, pour développer en commun des actions en faveur par exemple de transmission d’entreprise (questions juridiques et fiscales); le droit des faillites afin de donner toujours une «seconde chance» aux entreprises et aux entrepreneurs,

6.3   Au niveau national et transfrontalier, le CESE insiste sur le développement et l’interopérabilité des guichets uniques à travers l'UE. Les États membres pourraient être incités à développer l’interopérabilité et le décloisonnement de leurs guichets nationaux de formalités, physiques et virtuels. Sur ce dernier point, des initiatives ont été prises dans le cadre de la Directive Services ou encore dans le règlement visant à l’amélioration du fonctionnement du principe de la reconnaissance mutuelle. Globalement, il faudrait que la mise en place de ces guichets uniques soit accompagnée d’une communication à destination des PME pour les informer dès le moment où elles se créent et tout au long de leur «vie», de l’existence de tels services.

7.   Préconisation 5 du CESE: cohérence, participation et évaluation

7.1   Face aux grands enjeux internationaux, à la situation économique actuelle et à l’objectif de révision du processus de Lisbonne, le Comité estime que le Small Business Act doit prévoir:

les initiatives structurantes au niveau de la garantie des droits de propriété intellectuelle, à savoir: le brevet communautaire, la juridiction compétente en matière de brevets à l’échelon de l’Union, mais également la mise en place d’un Observatoire européen de la contrefaçon et du piratage (réclamé pour la 1re fois par le CESE en 2001);

favoriser une approche intégrée de la politique en faveur des PME qui intègre l'ensemble des politiques sectorielles menées au niveau communautaire, au niveau national et au niveau régional;

permettre de développer la gouvernance, le partenariat et la coopération entre les pouvoirs publics, les collectivités, les partenaires économiques et sociaux, les organisations représentatives des différentes catégories de PME à tous les échelons du territoire européen;

soutenir le développement et la compétitivité de toutes les entreprises, y compris les entreprises agissant dans des marchés de proximité; les actions positives du Small Business Act doivent clairement distinguer d’une part les entreprises à marché local qui représentent la très grande majorité des PME, d’autre part les entreprises à fort potentiel de développement technologique ou extraterritorial. Les premières doivent trouver un environnement favorable à leurs activités, les secondes, les moyens d'accélérer leur croissance, de s'européaniser, voire de s’internationaliser, tout en gardant en mémoire que de nombreuses entreprises de proximité peuvent avoir l’opportunité de se développer dans des marchés élargis ou d’agir dans le cadre de coopérations et de «clusters» pour atteindre les tailles critiques de succès à l’européanisation ou l’internationalisation.

7.2   Le CESE considère que, outre la volonté politique des pouvoirs publics au niveau européen, national et local de s’engager en faveur des PME en particulier des plus petites entreprises, la réussite du SBAE dépendra en très grande partie de l’action des organisations intermédiaires représentatives. Il demande aux autorités concernées de mettre en place toutes les mesures et appuis destinées à favoriser leur action et qu’elles soient associées aux réflexions sur le processus communautaire post-Lisbonne.

7.3   Le CESE réitère sa demande expresse d’une évaluation annuelle de la mise en œuvre du SBAE, tant pour son programme d’actions que pour l’application du principe «Think Small First/Penser d'abord aux PME», ainsi que de l’ensemble des politique PME au niveau communautaire et national, et qu’il soit rendu compte annuellement des progrès accomplis, y compris dans la concertation avec les organisations intermédiaires. Ce rapport doit faire l’objet d’une démarche distincte dans le cadre de la mise en œuvre de la stratégie de Lisbonne, donner lieu à des recommandations de la Commission aux États membres et aux régions, permettre une adaptation ou une révision du SBAE, et être soumis au Parlement européen, au Comité des régions et au CESE.

Bruxelles, le 14 janvier 2009.

Le Président du Comité économique et social européen

Mario SEPI


(1)  Avis du CESE sur «Les différentes mesures politiques, hormis un financement approprié, susceptibles de contribuer à la croissance et au développement des petites et moyennes entreprises» (JO C 27 du 3.2.2009, p. 7) et Avis du CESE sur les «Marchés publics internationaux» (JO C 224 du 30.8.2008, p. 32).

(2)  Voir les travaux du CESE relatifs à l'avis CESE (rapporteuse: Mme Faes — JO C 256 du 27.10.2007, p. 8).

(3)  Avis du CESE sur «Les différentes mesures politiques, hormis un financement approprié, susceptibles de contribuer à la croissance et au développement des petites et moyennes entreprises» (JO C 27 du 3.2.2009, p. 7).

(4)  Avis du CESE sur les «Marchés publics internationaux» (JO C 224 du 30.8.2008, p. 32).

(5)  COM(2008) 394 final.

(6)  Directive 2000/CE/35 (JO L 200 du 8.8.2000, p. 35). Avis CESE JO C 407 du 28.12.1998, p. 50.


4.8.2009   

FR

Journal officiel de l’Union européenne

C 182/36


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 2006/116/CE du Parlement européen et du Conseil relative à la durée de protection du droit d’auteur et de certains droits voisins»

COM(2008) 464 final — 2008/0157 (COD)

(2009/C 182/07)

Rapporteur: M. GKOFAS

Le 4 septembre 2008, le Conseil a décidé, conformément à l'article 47, paragraphe 2, et aux articles 55 et 95 du traité instituant la Communauté européenne, de solliciter l'avis du Comité économique et social européen sur la

«Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 2006/116/CE du Parlement européen et du Conseil relative à la durée de protection du droit d’auteur et de certains droits voisins»

COM(2008) 464 final — 2008/0157 (COD)

La section spécialisée «Marché unique, production et consommation», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 6 janvier 2009 (rapporteur: M. GKOFAS).

Lors de sa 450e session plénière des 14 et 15 janvier 2009 (séance du 14 janvier 2009), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 115 voix pour, 3 voix contre et 15 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1   Le Comité demande qu'en matière de création musicale, il soit instauré entre les États membres un régime homogène de protection et d'harmonisation, couvrant les contributions des différents créateurs, de manière à éviter des problèmes de répartition transfrontalière des droits d'exploitation.

1.2   Le Comité réclame par ailleurs qu'une création consistant en une composition assortie de paroles soit considérée comme une seule et unique œuvre, couverte par une période de protection qui prendra fin 70 ans après la mort du dernier de ses auteurs.

1.3   Les États membres autorisent souvent le fonctionnement d'instances de gestion collective qui sont en grand nombre et se différencient en fonction de l'objet du droit d'auteur, tant et si bien que les utilisateurs sont assujettis et redevables à plusieurs d'entre eux même pour une œuvre qu'ils auront acquise en tant qu'ouvrage complet, indépendant et unique, enregistré sur un support matériel. Il y a lieu de prévoir et d'indiquer expressément que l'œuvre qui a été ainsi fixée constitue un produit unique, complet et non divisé et qu'il est traité en tant que tel.

1.4   Pour le recouvrement des redevances des ayants droit mais aussi pour leur protection, il y a lieu de mettre en place une instance unique de gestion des droits d'auteur, qui sera également seule responsable pour les collecter mais aussi pour tenir ultérieurement ces sommes, le cas échéant, à la disposition des autres instances de représentation desdits ayants droit, qu'elles existent déjà ou soient nouvellement fondées, de sorte que l'utilisateur puisse s'accorder et passer contrat avec un seul interlocuteur et non plusieurs.

1.5   Le Comité propose que la durée de protection des fixations matérielles des exécutions soit portée de 50 à 85 ans. Dans le but d'intensifier l'effort de protection des interprètes anonymes, qui, pour l'essentiel, cèdent les droits d'exploitation de leurs phonogrammes en échange d'une «juste rémunération» ou d'une somme forfaitaire, il y aura lieu d'instaurer une réglementation telle que les producteurs de disques mettent en réserve au moins 20 % des revenus supplémentaires provenant de la vente desdits phonogrammes qu'ils décideront d’exploiter durant la prolongation de la période de protection.

1.6   Le Comité propose que l'obligation soit instaurée de créer une agence pour les interprètes, en particulier ceux de «second rang», dans la mesure où les «grands noms», pour leur part, parviennent toujours à s'accorder avec les producteurs concernant le pourcentage qu'ils percevront sur les ventes de phonogrammes.

1.7   Le Comité estime qu'une convention écrite devra être conclue entre les interprètes et les membres des sociétés de gestion collective qui les représentent, afin de garantir la légalité de l'administration et du recouvrement des droits. En l'absence d'un tel accord passé avec chaque ayant droit en particulier, consigné par écrit et dûment daté, ces sociétés ne seront pas habilitées à recouvrer une somme, de quelque manière que ce soit, au nom de ce bénéficiaire avec lequel elles ne se seraient pas accordées.

1.8   Pour assurer la bonne distribution des ressources, ces sociétés devront être à but non lucratif et une totale transparence devra régner dans les quittances de recouvrement et de versement des droits.

1.9   Le Comité craint néanmoins que ces rentrées procurées par les recettes provenant de sources secondaires ne fassent peser un poids excessif sur les personnes tenues de les verser. Concrètement, il y aura lieu d'éclaircir au niveau communautaire, puis de transposer dans la législation de chaque État, la notion de communication au public par des moyens radiophoniques ou télévisuels, que l'on peut tout à fait comprendre comme la reproduction raisonnable et la rediffusion par des moyens privés d'exécutions publiques prépayées.

1.10   Le Comité pense que la rémunération doit être équitable pour les deux parties, les ayants droit et les assujettis. Il convient de dissiper le flou concernant la rétribution qui est légitime pour le transfert du droit de location des interprètes. Il est inadmissible qu'il n'existe pas de réglementation communautaire unique sur ce point et qu'il soit laissé à l'appréciation discrétionnaire des législateurs de chaque État membre, lesquels, à leur tour, remettent cette compétence aux sociétés de recouvrement, qui fixent souvent des tarifs incontrôlables et bien souvent injustes.

1.11   Le Comité juge qu'il y a lieu de préciser de manière claire et franche que l'«utilisation publique» est celle au cours de laquelle l'utilisateur exploite une œuvre avec une visée lucrative et dans le cadre de l'activité entrepreneuriale qui exige ou justifie l'usage concerné (d'une œuvre sonore, visuelle ou sonore et visuelle).

1.12   Il serait envisageable de mentionner plus particulièrement si l'œuvre est reproduite ou diffusée au moyen d'un équipement ou par communication directe, grâce à des disques optiques ou des ondes magnétiques (récepteurs), auquel cas la responsabilité de la diffusion publique (et de la sélection) est assumée par le diffuseur et non l'utilisateur et la notion d'exécution publique ne tient pas, dans la mesure où ce n'est pas ce dernier qui est l'exploitant de l'œuvre.

1.13   Le recours à des médias ne peut constituer une exécution publique primaire lorsque la retransmission s'effectue à partir de lieux tels que des restaurants, cafés, autobus, taxis, etc. Elle doit dès lors être exemptée de l'obligation de versement d'une redevance pour les droits d'auteur des interprètes. Ceux relatifs aux phonogrammes ont déjà été acquittés auparavant par les personnes qui ont le droit de les communiquer au public par des moyens avec fil ou sans fil. Écouter des phonogrammes à la radio doit être considéré comme une utilisation privée de la part du citoyen, qu'il se trouve à son domicile, à son travail, dans un autobus ou dans un restaurant et dans la mesure où il ne peut se trouver simultanément en deux lieux, la redevance a été payée à qui de droit par les stations, lesquelles constituent les véritables utilisateurs.

1.14   Il y a lieu d'exempter les secteurs professionnels dans l'activité desquels la musique ou l'image ne jouent aucun rôle pour le processus de production. Quant aux branches où la diffusion de musique ou d'images ne remplit qu'une fonction accessoire dans l'exercice de l'activité entrepreneuriale, il convient de ne leur faire payer que le minimum fixé, qui aura été évidemment déterminé à l'issue de négociations entre les organismes de représentation collective des utilisateurs et l'instance unique de gestion des droits d'auteur.

1.15   Le Comité estime que pour garantir que les sociétés de gestion collectives reverseront les ressources aux interprètes, il s'impose de constituer une agence qui, au cas où elles rencontrent des difficultés, agisse comme fonds de garantie. Il s'agira d'insérer la clause d'utilisation obligatoire sous peine de perte (clause UIOLI, «use-it-or-lose-it») dans les contrats d'enregistrement sonore qui sont conclus entre interprètes et producteurs, ainsi que le principe de la «table rase» pour les contrats couvrant la période d'extension, après les cinquante années initiales.

1.16   Le Comité s'inquiète tout particulièrement de constater que considérée globalement, la législation communautaire, vise à protéger les droits d'auteur et droits voisins mais néglige de prendre en compte ceux des utilisateurs et des consommateurs finaux. En effet, s'il est signalé que les actions créatives, artistiques et entrepreneuriales constituent, dans une mesure importante, des activités de professions libérales et doivent en tant que telles être facilitées et protégées, ce n'est pas la même approche qui est suivie au niveau des consommateurs. Il convient dès lors d'aplanir les divergences qui existent dans les droits nationaux des États membres et de remplacer par des amendes administratives les mesures pénales que certains d'entre eux prévoient pour l'infraction de non-versement des droits dus.

1.17   Le Comité marque son accord avec la modification de l'article 3, paragraphe 1, moyennant l'instauration d'une période de protection de 85 ans. En ce qui concerne la deuxième et la troisième phrase de l'article 3, paragraphe 2, il propose également une durée de 85 ans. Il convient également que le paragraphe 5, touchant à la rétroactivité de la directive, a été introduit à bon droit dans la directive.

1.18   Le Comité demande à la Commission de tenir compte de ses observations et propositions, de manière que la jurisprudence existante soit améliorée et que les États membres se conforment aux directives et prennent les mesures législatives indispensables pour les incorporer dans leur ordre juridique interne.

2.   Introduction

2.1   Le régime en cours, qui prévoit une période de protection d'une durée de 50 ans, découle de la directive 2006/116/CE du Parlement européen et du Conseil relative à la durée de la protection accordée au droit d'auteur et, d'une manière générale, à certains droits voisins des interprètes.

2.2   De plus, comme le souligne l'exposé des motifs de la proposition, cette situation lésera les artistes connus mais aussi et surtout ceux qui ont cédé leurs droits exclusifs aux producteurs de phonogrammes en échange du versement d'une somme forfaitaire. Bien entendu, ces paiements qui sont effectués en leur faveur pour unique et juste rétribution de la diffusion radiophonique ou télévisuelle de leurs phonogrammes prendront également fin.

3.   Observations générales

3.1   La présente saisine vise à modifier certains des articles existants de la directive 2006/116, qui régit la durée de la protection appliquée aux exécutions et phonogrammes, ainsi qu'à attirer l'attention sur des mesures supplémentaires destinées à assurer cet objectif mais aussi à exposer diverses problématiques qui contribueront à réaliser plus efficacement ce but, en l'occurrence à atténuer, socialement parlant, les disparités entre producteurs, interprètes vedettes et musiciens de studio.

3.2   Faisant part de sa préoccupation soutenue pour la question de la protection des droits d'auteur des interprètes, et plus généralement, de leurs droits voisins, principalement sous forme de phonogrammes, le CESE propose que les impératifs en la matière soient couverts par une contribution minimale en leur faveur, grâce à l'extension de la période de protection.

4.   Observations particulières

4.1   L'idée de la Commission est essentiellement centrée sur l'allongement de la durée de protection des droits d'auteur des interprètes.

4.2   Le Comité pense que cette harmonisation entre les États membres est indispensable pour éviter les difficultés dans la répartition transfrontalière des droits d'exploitation en provenance de différents pays de l'Union.

4.3   Le Comité a également la conviction qu'une création consistant en une composition assortie de paroles doit être considérée comme une seule et unique œuvre, couverte par une période de protection qui prendra fin 70 ans après la mort du dernier de ses auteurs, étant donné que protéger au maximum les droits d'auteur des créateurs constitue une solution préférable à une contraction du temps de protection, qui créera de multiples problèmes.

4.4   Dans le fil des considérations ci-dessus, le Comité propose que la période de protection pour les fixations matérielles des exécutions soit portée de 50 à 85 ans.

4.5   Pour renforcer l'effort de protection des interprètes anonymes, qui, pour l'essentiel, cèdent les droits d'exploitation de leurs phonogrammes en échange d'une «rémunération équitable» ou d'une somme forfaitaire, il y aura lieu d'instaurer une réglementation telle que les producteurs de disques mettront en réserve au moins 20 % des revenus supplémentaires provenant de la vente desdits phonogrammes qu'ils décideront d’exploiter durant la prolongation de la période de protection.

4.6   Pour concrétiser l'objectif ci-dessus, le Comité pense qu'il y aura lieu de créer une agence pour les interprètes, en particulier ceux de «second rang».

4.7   Il est proposé que l'administration et le paiement des rémunérations s'effectuent par le truchement de sociétés de gestion collective, qui administreront ces «droits à rémunération secondaire». Il conviendra toutefois d'instaurer certains garde-fous en ce qui concerne le fonctionnement et la composition de ces organismes.

4.8   Le Comité croit que par principe, une convention écrite devra être conclue entre les interprètes et les membres des sociétés de gestion collective qui les représentent, afin de garantir la légalité de l'administration et du recouvrement des droits.

4.9   Ces sociétés devront être à but non lucratif et une totale transparence devra régner dans les quittances de recouvrement et de versement des droits. Le Comité est d'avis que ces organismes, qu'il conviendra de constituer dans le respect des règles et des lois de chaque État, ne devront se répartir qu'en deux catégories, selon qu'elles représentent les auteurs ou les interprètes. Le Comité est convaincu que s'il en existait un plus grand nombre, assurant la représentation d'acteurs variés, il en résulterait une situation de confusion et les impératifs de la transparence et du contrôle s'en trouveraient assurément compliqués.

4.10   Les interprètes touchent cependant aussi des revenus provenant d'autres sources. Les sociétés de gestion collective ont été constituées au premier chef dans le but d'administrer les «droits à rémunération secondaire», qui sont pour l'essentiel au nombre de trois: a) la rémunération équitable due pour la diffusion radiotélévisée et la communication au public, b) les redevances pour les copies à usage privé, c) la rémunération équitable pour le transfert du droit de location des interprètes. Ces recettes vont évidemment augmenter grâce à l'allongement de la période de protection, de 50 à 85 ans.

4.11   Le Comité craint néanmoins que ces rentrées procurées par ces sources de revenus secondaires ne fassent peser un poids excessif sur les personnes tenues de les verser, la problématique étant assurément tout à fait indépendante de la prolongation de la période de protection. Concrètement, il y aura lieu d'éclaircir au niveau communautaire, puis de transposer dans la législation de chaque État, la notion de communication au public par des moyens radiophoniques ou télévisuels, que l'on peut tout à fait comprendre comme la reproduction raisonnable et la rediffusion par des moyens privés d'exécutions publiques prépayées.

4.12   Le Comité estime qu'exiger le versement de la «juste rémunération» pour la rediffusion d'une exécution déjà protégée, en particulier lorsqu'elle s'effectue spécifiquement à des fins non lucratives, constitue une pratique abusive et encourage le piratage musical.

4.13   En outre, le Comité nourrit des inquiétudes quant à la manière dont il faut gérer les ressources procurées par les deux autres sources de revenus des artistes. Il s'agit là d'une interrogation qui préoccupe tous les intervenants assujettis au paiement de droits d'auteur. En l'absence de la convention écrite préalable entre l'ayant droit de ce revenu complémentaire et la personne agissant comme son représentant au sein de la société de gestion collective, comment assurer que l'intervenant qui est tenu de verser le revenu supplémentaire le fera effectivement?

4.14   D'autre part, il y a lieu de dissiper le flou qui entoure la juste rémunération pour le transfert du droit de location des interprètes. Le Comité pense que la rémunération doit être équitable pour les deux parties, les ayants droit et les assujettis. Par ailleurs, il convient que cette rémunération équitable soit déterminée de manière proportionnelle, tous les cinq ans environ, à l'issue d'une négociation collective bilatérale.

4.15   Le Comité est convaincu qu'en procédant de cette manière, ainsi qu'en réglementant les redevances pour les copies à usage privé, en particulier pour les professionnels du secteur des loisirs, qui emploient lesdites copies pour un usage non strictement privé, il sera possible d'assurer un flux stable de recettes au titre des droits à rémunération secondaire sur toute la durée de la période d'extension de la protection, de combattre le piratage musical et d'augmenter les ventes légales de phonogrammes via Internet.

4.16   Le Comité estime qu'afin de garantir que les sociétés de gestion collectives reverseront les ressources dues aux interprètes, il s'impose de constituer une agence complémentaire qui, au cas où elles rencontrent des difficultés, agisse comme fonds de garantie et soit en mesure d'allouer les montants concernés.

4.17   Le Comité considère par ailleurs que si l'on veut atteindre l'objectif poursuivi par la présente saisine, il convient également d'intégrer dans la directive à l'examen certaines mesures d'accompagnement. Plus précisément, il s'agira d'insérer la clause d'utilisation obligatoire sous peine de perte (clause UIOLI, «use-it-or-lose-it») dans les contrats d'enregistrement sonore conclus entre interprètes et producteurs, ainsi que le principe de la «table rase» pour les contrats couvrant la période d'extension, après les cinquante années initiales. Au cas où une année s'est écoulée depuis l'extension de la période de protection, les droits que le producteur et l'exécutant détiennent sur le phonogramme mais aussi sur la fixation de l'exécution sont alors frappés de caducité.

4.18   Jugeant sans conteste qu'il est hautement prioritaire de protéger les interprètes du risque que leurs interprétations se trouvent prisonnières de phonogrammes dont les producteurs, par suite de difficultés, ne diffusent aucun exemplaire dans le public, le Comité estime qu'il y aura lieu de prendre des mesures qui empêcheront les seconds de jeter à la poubelle le travail des premiers et pourraient consister en dispositions qui seront de nature administrative ou ressortiront à la catégorie des amendes ou peines.

4.19   Le Comité a également la conviction que dans la mesure où les États membres de l'Union possèdent un vaste patrimoine de chants populaires, il conviendra d'instaurer une réglementation particulière pour ce type d'œuvres mais aussi pour d'autres de nature semblable, qui peuvent être considérées comme «orphelines», afin de les faire tomber dans le domaine public.

4.20   Le Comité donne son assentiment à la mention, dans l'article 10, du caractère rétroactif de la législation, dans le cas de tous les contrats qui sont en vigueur.

4.21   Le Comité accepte également les paragraphes 3 et 6 de l'article 10.

4.22   Le Comité exprime son accord avec le droit à une rémunération annuelle supplémentaire pour les années d'extension de protection dans les conventions de transfert ou de cession des artistes ou des interprètes.

4.23   Le Comité s'accorde à estimer qu'un pourcentage de 20 % des recettes que le producteur a perçues sur l'ensemble de l'année qui précède celle du paiement de ladite rémunération représente un chiffre suffisant pour cette rétribution complémentaire.

4.24   Le Comité n'est pas d'accord avec la proposition qui veut que les États membres disposent de la possibilité de régler le prélèvement de la rémunération complémentaire annuelle par les sociétés collectives de gestion.

4.25   Le Comité juge indispensable qu'un contrat écrit soit passé entre chaque exécutant, pris individuellement, et les représentants de la société. Cette convention précédera obligatoirement le recouvrement des droits des représentants, au nom de l'ayant-droit. Les sociétés devront chaque année rendre des comptes, devant un organe unique et distinct constitué d'interprètes et de producteurs, sur la gestion des recettes qui auront été procurées par les rémunérations supplémentaires dégagées grâce à la période étendue de protection.

4.26   Le Comité adhère tant à la disposition transitoire de l'article 10 qu'à celle qui concerne l'exploitation du phonogramme par l'interprète.

4.27   Le Comité tient pour indispensable la disposition uniformisée aux termes de laquelle certains producteurs, à savoir ceux dont le revenu annuel n'excède pas un seuil de 2 millions d'euros, sont exemptés de l'obligation d'en réserver 20 %. Il conviendra assurément de les soumettre à un contrôle annuel pour établir quels sont ceux qui rentrent dans cette catégorie.

4.28   Le Comité s'alarme de ce qu'en l'absence de dispositions législatives qui règlent au préalable le mode de répartition des ressources, le contrôle de leur distribution, les quittances en attestant, les éventuelles faillites de sociétés, les situations où les ayants droit décèdent ou renoncent à leur rémunération, ou encore la question des contrats passés entre eux et les sociétés de gestion collective, du contrôle de ces dernières et de nombreuses autres problématiques juridiques, l'adoption de la directive concernée, notamment pour ce qui est de la gestion et du versement des 20 % de revenus supplémentaires, créera de nombreux problèmes lors de son application, sans apporter véritablement de solution au défi du rééquilibrage entre les conditions faites aux grands interprètes et le traitement réservé aux interprètes anonymes.

4.29   La solution du problème du rééquilibrage ne passe pas uniquement par la prolongation de la période de protection mais par la conclusion de contrats judicieux au titre de la clause qui oblige à utiliser un droit sous peine de perte définitive. Le Comité pense qu'il est indispensable d'adopter, en même temps que la proposition de modification de la directive, un dispositif de loi qui aidera à éviter que les interprétations ne soient immobilisées durant 50 années. Avant la transposition de la directive modifiée dans l'ordre juridique des États membres, des prescriptions complémentaires doivent absolument être arrêtées, principalement pour encadrer les modalités de leur versement aux ayants droit.

4.30   Le Comité croit que pour éviter les généralisations et les interprétations divergentes, il y a lieu de préciser suffisamment la notion de publication d'un phonogramme. Une autre question qui se pose est le cas de figure où un phonogramme est offert simultanément au public par des interprètes différents, principalement des musiciens de studio, qui n'ont pas cédé leurs droits au producteur concerné, qu'il s'agisse de la transmission via des médias, des répétitions de chansons pour des concours ou de leur diffusion via Internet.

Bruxelles, le 14 janvier 2009.

Le Président du Comité économique et social européen

Mario SEPI


4.8.2009   

FR

Journal officiel de l’Union européenne

C 182/40


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de règlement du Conseil relatif à un cadre juridique communautaire applicable aux infrastructures européennes de recherche (ERI)»

COM(2008) 467 final — 2008/0148 (CNS)

(2009/C 182/10)

Rapporteur: M. STANTIČ

Le 5 septembre 2008, le Conseil de l'Union européenne a décidé, conformément à l'article 172 du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la

«Proposition de règlement du Conseil relatif à un cadre juridique communautaire applicable aux infrastructures européennes de recherche (ERI)»

COM(2008) 467 final — 2008/0148 (CNS).

La section spécialisée «Marché unique, production et consommation», chargée d'élaborer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 6 janvier 2009 (rapporteur: M. STANTIČ).

Lors de sa 450e session plénière des 14 et 15 janvier 2009 (séance du 15 janvier 2009), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 149 voix pour, 1 voix contre et 5 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1   Une infrastructure de recherche de haut niveau constitue l'un des piliers essentiels à la poursuite du développement de l'espace européen de la recherche.

1.2   La mise en place et la gestion d'infrastructures européennes de recherche (ERI) compétitives et de niveau mondial dépassent en règle générale les potentialités des États membres de l'UE pris isolément, tout comme leurs capacités à les exploiter; c'est la raison pour laquelle une action conjointe apporte une valeur ajoutée particulièrement grande dans ce cas précis. L'attrait exercé par de telles infrastructures entraîne une mise en réseau et une coopération plus importantes au sein de l'espace européen de la recherche et permet de remédier à la fragmentation encore observée.

1.3   Aussi le CESE soutient-il la feuille de route présentée par le forum stratégique européen sur les infrastructures de recherche (ESFRI) au sujet de la création, dans les dix à vingt années à venir, de 44 nouveaux projets paneuropéens d'infrastructure de recherche de grande taille.

1.4   Il est peu probable que les différents cadres juridiques nationaux puissent garantir une base juridique appropriée pour mettre en place des infrastructures de recherche d'excellence revêtant une importance paneuropéenne. Le CESE appuie dès lors la proposition de règlement relatif à un cadre juridique communautaire applicable aux infrastructures européennes de recherche, qui pourra simplifier et accélérer la réalisation des projets prévus figurant sur la liste de l'ESFRI.

1.5   La création de nouvelles infrastructures de recherche de niveau mondial sera susceptible de renforcer substantiellement l'espace européen de la recherche et d'empêcher ainsi la «fuite des cerveaux» européens. Cependant, la concentration de grandes infrastructures dans les seuls États membres développés attirera, du moins à court terme, des chercheurs de l'Europe entière. À long terme, il serait possible de compenser ces potentielles répercussions négatives pour certains pays en assurant une répartition géographique adéquate des infrastructures européennes de recherche ainsi que la possibilité d'y accéder aussi librement que possible.

1.6   Le CESE appelle les États membres à emboîter le pas à l'initiative de l'ESFRI et de la Commission et à élaborer dans les meilleurs délais leur feuille de route nationale pour le développement et la modernisation des infrastructures de recherche.

1.7   Le Comité soutient la proposition d'exemption de taxe sur la valeur ajoutée et d'accises, étant donné que cette mesure peut renforcer l'attrait des infrastructures européennes de recherche et leur conférer un avantage concurrentiel par rapport à des projets similaires ailleurs dans le monde.

1.8   Le CESE propose qu'en accroissant les moyens du huitième programme-cadre pour la recherche et le développement, la Communauté participe plus activement au cofinancement des infrastructures européennes de recherche. Ainsi, grâce à l'effet de levier conféré par une prise de participation dans leur propriété, la Communauté pourra plus aisément garantir une plus grande dispersion géographique ainsi que le libre accès à un cercle de chercheurs européens aussi large que possible.

1.9   Le Comité recommande que la politique européenne de cohésion et ses instruments financiers, c'est-à-dire les fonds structurels, accordent une plus grande priorité au développement de nouvelles installations de recherche et d'innovation. Il invite en outre la Commission et les États membres à développer d'autres politiques et instruments destinés à inciter le secteur privé à investir davantage dans l'infrastructure de recherche.

1.10   Le Comité entend mettre particulièrement en exergue la question des coûts de fonctionnement et d'entretien des infrastructures européennes de recherche qui doivent être pris en charge après l'investissement initial. Ces coûts, qui peuvent atteindre annuellement 20 % du montant investi, peuvent compromettre le concept de libre accès pour les chercheurs de pays n'appartenant pas à l'infrastructure européenne de recherche concernée. Aussi convient-il de prévoir également un cofinancement de ce fonctionnement courant par des fonds européens dans le cadre du huitième programme-cadre pour la recherche et le développement.

2.   Introduction

2.1   Depuis 2000 (1), l'instauration d'un espace européen de la recherche est le fil directeur de toutes les mesures communautaires dans le domaine de la recherche et du développement. Si les États membres ont depuis lors adopté de multiples initiatives, il existe toujours bon nombre d'obstacles nationaux et institutionnels qui empêchent la réalisation de l'objectif final, à savoir l'instauration d'une «cinquième liberté» en Europe: la libre circulation de la connaissance. L'un des grands problèmes auxquels est confrontée l'Europe en matière de science et de recherche est sa fragmentation, qui l'empêche de tirer pleinement profit de son potentiel de recherche.

2.2   Il est incontestable que l'existence d'une infrastructure de recherche de haut niveau constitue l'un des piliers centraux pour la poursuite du développement de l'espace européen de la recherche (2). Elle permet en effet:

de promouvoir l'excellence scientifique,

de rendre la recherche fondamentale et la recherche appliquée concurrentielles à l'échelle mondiale,

d'attirer les meilleurs chercheurs,

d'encourager l'innovation dans l'industrie et accélérer le transfert de connaissances,

de contribuer à l'intégration européenne,

de garantir une valeur ajoutée plus élevée à l'échelle européenne.

2.3   Les grandes infrastructures européennes de recherche ont pour caractéristiques, entre autres, que les frais élevés induits par l'investissement à réaliser et les coûts de fonctionnement, ainsi que la capacité à tirer pleinement profit de leurs potentialités, dépassent sont souvent hors de portée d'un État membre pris isolément. Les centres européens d'excellence n'atteignent bien souvent pas la masse critique requise. Certains souffrent en outre de l'absence de réseaux adéquats et du manque de coopération. En dépit de ces insuffisances, l'Europe est parvenue par le passé à mettre en place plusieurs projets paneuropéens d'envergure et de niveau mondial, comme le CERN, l'ITER, l'EMBO, l'ASE ou l'ESRF (3), pour ne citer que ces exemples.

2.4   La proposition de règlement à l'examen (COM(2008) 467 final) est l'une des cinq initiatives présentées par la Commission en 2008 afin de contribuer vigoureusement à accélérer la mise en place de l'espace européen de la recherche (4).

2.5   L'initiative à l'examen est conforme aux objectifs de la stratégie de Lisbonne. Elle a en effet vocation à stimuler les investissements publics et privés dans la recherche, qui restent encore loin de l'objectif de 3 % fixé pour l'horizon 2010, sachant qu'ils représentent actuellement, en moyenne, de 1,7 à 1,8 % du PIB. La proposition pose les fondations de la nécessaire consolidation des infrastructures européennes de recherche, lesquelles renforceront l'espace européen de la recherche et la compétitivité des entreprises européennes.

3.   Contexte

3.1   Dans le but de relever avec succès les nombreux défis relatifs à l'infrastructure de recherche, le Conseil européen a créé en 2002 le forum stratégique européen sur les infrastructures de recherche (ESFRI) (5) et l'a chargé d'élaborer une feuille de route pour le développement et la mise en place d'une nouvelle génération d'infrastructures de recherche d'importance paneuropéenne.

3.2   Sur la base de vastes consultations menées avec un millier d'experts de haut niveau et en collaboration avec la Commission, l'ESFRI a identifié 35 projets paneuropéens (6) qui satisferaient les besoins en infrastructures européennes de recherche de grande taille pour les dix à vingt années à venir (7).

3.3   La feuille de route prévoit des infrastructures de recherche nouvelles, vitales, de diverses par l'ampleur et la valeur, couvrant de très nombreux domaines de recherche, depuis les sciences sociales et naturelles jusqu'aux systèmes d'archivage électronique des publications scientifiques et des bases de données (8). Le montant prévu pour l'ensemble des projets s'élève à plus de 20 milliards d'euros.

3.4   Mettant en évidence les facteurs capables de freiner la mise en place d'infrastructures paneuropéennes de recherche de niveau mondial, l'ESFRI souligne qu'outre les obstacles financiers et organisationnels, il faut également y ranger le cadre juridique. Le problème est causé par l'absence à l'échelon européen de structure juridique permettant la création simple et efficace de partenariats internationaux. Actuellement, les partenaires désireux de coopérer dans le but de créer une infrastructure de recherche commune doivent d'abord s'accorder sur l'utilisation d'une des législations nationales (9) (ou se baser sur un accord international), situation qui engendre des difficultés administratives supplémentaires.

3.5   L'ESFRI a dès lors clairement conclu à la nécessité d'établir un cadre juridique communautaire spécifique pour la création d'infrastructures européennes de recherche (dénommées ci-après ERI) auxquelles participent plusieurs États membres.

3.6   La notion d'«infrastructure européenne de recherche» désigne les installations, les ressources et les services utilisés par la communauté scientifique pour mener des recherches de haut niveau. La définition comprend les équipements scientifiques de base, les ressources cognitives (comme les collections, les archives et les informations scientifiques structurées), les infrastructures reposant sur des technologies de l'information et de la communication, ainsi que tous les autres moyens spécifiques nécessaires pour atteindre un niveau d'excellence en matière de recherche. Ces infrastructures peuvent être implantées en un seul endroit ou être disposées en réseau («distribuées»).

4.   Proposition de la Commission

4.1   Partant du constat que les cadres juridiques existants formés par les différentes législations nationales ne répondent pas aux besoins des nouvelles infrastructures paneuropéennes et agissant à l'initiative des États membres, la Commission européenne a élaboré, sur la base de l'article 171 du traité instituant la Communauté européenne, une proposition de règlement du Conseil relatif à un cadre juridique communautaire applicable aux ERI.

4.2   Le cadre juridique proposé est avant tout destiné à faciliter l'établissement et l'utilisation en nom collectif d'installations de recherche présentant un intérêt paneuropéen par plusieurs États membres et pays associés au programme-cadre communautaire pour la recherche et le développement.

4.3   Les ERI sont des entités juridiques fondées sur leurs membres (au moins trois États membres, pays tiers ou organisations intergouvernementales), dotées d'une pleine capacité juridique reconnue dans tous les États membres. Le règlement établit un cadre fixant les exigences et les procédures à respecter pour la création d'une infrastructure européenne de recherche.

4.4   Au sens des directives sur la taxe sur la valeur ajoutée, sur les accises et sur les marchés publics, les ERI sont dotées du statut d'organisation internationale. Elles seront dès lors exemptées de la TVA et des accises, et leurs procédures de passation de marchés publics ne seront pas couvertes par la directive sur les marchés publics (10).

4.5   Les ERI peuvent être cofinancées par les instruments financiers de la politique de cohésion conformément au règlement du Conseil (11) portant dispositions générales sur le Fonds européen de développement régional, le Fonds social européen et le Fonds de cohésion.

5.   Observations générales

5.1   Le CESE est d'avis que complétant les autres formes juridiques existantes, le nouvel instrument juridique proposé facilitera et accélérera le processus de prise de décisions en ce qui concerne les nouvelles infrastructures d'importance paneuropéenne, et contribuera ainsi à hâter la création de l'espace européen de la recherche et la réalisation des objectifs de Lisbonne.

5.2   Le CESE salue l'engagement clair et décidé de la Commission et des États membres en faveur de l'harmonisation du développement futur des infrastructures européennes de recherche. Il s'agit en effet de la seule manière permettant de mettre en œuvre la feuille de route présentée par l'ESFRI.

5.3   La création de nouvelles infrastructures de recherche du plus haut niveau mondial pourra contribuer notablement à améliorer l'attrait global de l'espace européen de la recherche. Elle est cruciale pour retenir et motiver davantage les 400 000 jeunes chercheurs de grand talent dont l'Europe aura besoin afin d'attendre l'objectif de 3 % en matière d'investissement dans la connaissance et le développement. Qui plus est, une infrastructure de recherche de haut niveau pourra attirer des chercheurs doués et qualifiés du monde entier.

5.4   Eu égard à la nature très exigeante des projets d'infrastructure de recherche proposés (12), les possibilités d'accueillir de grandes infrastructures de recherche ou d'y participer sont en pratique limitées pour les pays de petite taille ou moins développés. On peut s'attendre à ce que les futures grandes infrastructures soient majoritairement implantées dans les pays les plus développés, phénomène qui pourra à court terme accentuer la «fuite des cerveaux» au sein de l'UE. À long terme, ce déséquilibre devrait se réduire, étant donné que 28 des 44 projets figurant sur la liste de l'ESFRI sont disposés en réseau: ce type d'infrastructure se présente comme un réseau à l'échelle du continent, accroissant ainsi les possibilités de coopération, y compris pour les pays de petite taille ou moins développés. Afin que cet objectif puisse véritablement être atteint, le CESE plaide pour un large accès des chercheurs à ces infrastructures. Il convient en outre de garantir une mobilité aussi grande que possible du personnel scientifique, technique et administratif entre les différents sites de telles structures distribuées.

5.5   Quelque 15 % des chercheurs actifs dans les instituts européens de recherche utilisent une infrastructure de recherche en coopération avec l'industrie. La mise en place de nouvelles infrastructures de recherche pourra dès lors générer une nouvelle demande, entraîner de nombreuses retombées positives, et stimuler davantage le transfert de connaissances et de technologies vers l'industrie. C'est de cette manière que l'on pourra accélérer la réalisation des objectifs de Barcelone, qui prévoient d'accroître les investissements privés dans la recherche et le développement pour les porter à 2 % du PIB.

5.6   Le plan européen pour la relance économique, présenté par la Commission le 26 novembre 2008 afin d'atténuer les conséquences de la crise économique et financière, fait expressément mention de la recherche-développement. Parmi les mesures à long terme, le plan met en avant les investissements «intelligents» et appelle les États membres et le secteur privé à investir davantage dans la recherche et le développement, l'innovation et la formation. Le CESE souligne les répercussions positives des investissements dans les infrastructures de recherche. Il s'agit d'un potentiel de marché dont la valeur dépasse 10 milliards d'euros et qui pourra contribuer à protéger de nombreux emplois dans les entreprises qui réaliseront les projets d'infrastructure. Il pourrait également en résulter un effet de levier judicieux permettant un passage plus rapide à la société de la connaissance.

5.7   La feuille de route européenne sur l'infrastructure de recherche constitue une excellente base pour élaborer les feuilles de route nationales. Le Comité note que certains États membres n'ont pas pris ces initiatives avec assez de sérieux. Il les invite dès lors à rattraper le retard dès que possible et à suivre les initiatives de l'ESFRI et de la Commission.

5.8   L'essentiel du financement à venir des infrastructures de recherche émanera toujours de sources provenant des États membres. Aussi importe-t-il de le coordonner. C'est la seule façon de pouvoir garantir une masse critique, l'efficacité des investissements ainsi que la nécessaire spécialisation des infrastructures et leur excellence scientifique.

5.9   En dépit de l'augmentation des moyens financiers alloués à l'infrastructure de recherche dans le septième programme-cadre et des possibilités existant au titre de la politique de cohésion, le budget communautaire est toujours loin de suffire pour concrétiser les projets ambitieux. Le CESE note à cet égard qu'il est nécessaire de renforcer les synergies entre le septième programme-cadre et les Fonds structurels en matière de financement de l'infrastructure de recherche. Le Comité invite en outre la Commission et les États membres à développer d'autres politiques et instruments destinés à inciter le secteur privé à investir davantage dans cette infrastructure. Un engagement accru de la BEI (notamment par l'intermédiaire des mécanismes de financement avec partage des risques) et d'autres institutions financières serait également souhaitable.

5.10   Le Comité recommande que la politique européenne de cohésion et ses instruments financiers, c'est-à-dire les fonds structurels, accordent une plus grande priorité au développement de nouvelles installations de recherche et d'innovation. Dans le même temps, il appelle les gouvernements des États membres à recourir davantage dès à présent aux fonds structurels pour moderniser et élargir leurs capacités de recherche. Dans les nouveaux États membres en particulier, il arrive que les fonds européens ne soient pas utilisés étant donné que les gouvernements ne prévoient pas de participation financière adéquate ou ne donnent pas rang de priorité à l'amélioration des capacités de recherche; c'est la raison pour laquelle beaucoup de scientifiques quittent leur patrie, les possibilités de recherche étant insuffisantes. Dès lors, il est nécessaire de réaliser des progrès en la matière si l'on veut parvenir à résoudre le problème de la «fuite des cerveaux» au sein de l'UE.

6.   Observations particulières

6.1   Le Comité soutient la proposition d'exempter les ERI de la taxe sur la valeur ajoutée, étant donné qu'elle peut considérablement renforcer leur attrait. Cette exemption permettra en outre de leur conférer un certain avantage concurrentiel par rapport à des projets similaires ailleurs dans le monde. Aussi le Comité plaide-t-il pour que les ERI bénéficient d'un régime d'exonération fiscale aussi large que possible (dans le respect des règles sur les aides d'État). De nombreuses infrastructures de recherche existantes qui sont parvenues à remplir les conditions pour disposer du statut d'organisation internationale au sens de la directive concernée bénéficient dès à présent d'un régime d'exemption sur la TVA et les accises. Toutefois, la procédure actuelle nécessite des négociations longues et complexes, qui entraînent des retards dans la construction ainsi qu'une grande insécurité juridique et financière. L'exemption automatique que le règlement à l'examen prévoit d'instaurer dans le cas des ERI supprimerait des obstacles majeurs au développement et au fonctionnement des infrastructures de recherche en Europe.

6.2   Le Comité propose que l'on examine les possibilités d'inclure aussi plus activement la Communauté dans le cofinancement des ERI. Ainsi, grâce à l'effet de levier conféré par un financement ciblé, la Communauté peut garantir une distribution géographique plus équitable des ERI ainsi qu'un meilleur accès pour les pays n'appartenant pas directement à l'une d'entre elles. Afin de concrétiser cette proposition, il conviendrait de prévoir des moyens spécifiques supplémentaires dans le cadre du huitième programme-cadre pour la recherche et le développement.

Le Comité estime qu'il n'y a pas de raison que l'UE n'adopte pas pour les infrastructures de recherche la même approche que celle utilisée pour cofinancer d'autres réseaux européens d'infrastructure, qu'il s'agisse de routes, voies de chemin de fer, lignes à haute tension, gazoducs, etc.

Le Comité entend mettre en exergue le problème des coûts de fonctionnement et d'entretien qui doivent être pris en charge après l'investissement, et qui, selon certaines estimations, peuvent atteindre annuellement 20 % du montant initialement investi. Ces dépenses sont souvent négligées dans les études d'investissement, et peuvent par la suite entraver le bon fonctionnement à long terme des infrastructures de recherche. Aussi le Comité propose-t-il que l'on prévoie, dans le cadre du huitième programme-cadre pour la recherche et le développement, la possibilité de cofinancer leur fonctionnement par des fonds européens.

6.3.1   Au sujet des coûts de fonctionnement, le Comité recommande que soient incluses, parmi leurs activités économiques, citées à l'article 2, des redevances spécifiques pour l'utilisation conjointe de l'infrastructure, qui seraient fixées dans un cadre raisonnable et honnête.

6.4   Le Comité souligne particulièrement l'importance que revêt le libre accès à toutes les ERI pour un cercle aussi large que possible de chercheurs et de scientifiques européens. Il serait déplorable que l'accès soit dans la pratique limité aux pays membres d'une ERI donnée ou qu'il soit déterminé exclusivement en fonction de la capacité à payer. La proposition de prise de participation de la Communauté à la propriété avancée au paragraphe 6.2 serait également propice au libre accès et contribuerait ainsi à renforcer l'intégration de l'espace européen de la recherche.

6.5   Le développement et l'utilisation d'infrastructures d'excellence doit également tenir compte de la protection de la propriété intellectuelle. Il convient que les problèmes potentiels soient résolus de manière responsable et en temps utile.

Bruxelles, le 15 janvier 2009.

Le Président du Comité économique et social européen

Mario SEPI


(1)  La Commission européenne a publié sa communication intitulée «Vers un espace européen de la recherche» en janvier 2000.

(2)  Décisions du Conseil «Concurrence» (marché intérieur, industrie et recherche) des 29 et 30 mai 2008.

(3)  CERN: organisation européenne pour la recherche nucléaire; ITER: réacteur expérimental thermonucléaire international; EMBO: association européenne de biologie moléculaire; ASE: agence spatiale européenne; ESRF: installation européenne de rayonnement synchrotron.

(4)  Les autres initiatives et politiques portent sur les thèmes suivants: programmation conjointe de la recherche, partenariat européen pour les chercheurs, gestion de la propriété intellectuelle et ouverture de l'espace européen de la recherche sur le monde.

(5)  ESFRI — European Strategy Forum on Research Infrastructures, http://cordis.europa.eu/esfri/home.html.

(6)  Feuille de route européenne sur les infrastructures de recherche, rapport 2006, http://cordis.europa.eu/esfri/home.html (disponible en anglais uniquement). La feuille de route a été mise à jour en 2008, pour inclure avant tout des projets relatifs aux sciences environnementales, biologiques et médicales. Elle compte désormais 44 projets au total.

(7)  Feuille de route européenne sur les infrastructures de recherche, rapport 2006, http://cordis.europa.eu/esfri/home.html (disponible en anglais uniquement).

(8)  Les projets d'infrastructures couvrent sept domaines scientifiques: sciences sociales et humaines; sciences de l'environnement; énergie; sciences biomédicales et du vivant; sciences des matériaux; astronomie, astrophysique, physique nucléaire et des particules; calcul et traitement des données.

(9)  Il leur faudra choisir entre différents statuts, par exemple: société civile française, Gesellschaft mit beschränkter Haftung (GmbH) allemande, Limited Liability Company (Ltd.) britannique, stiching (fondation) néerlandaise.

(10)  Directive 2006/112/CE du Conseil du 28 novembre 2006, article 151, paragraphe 1 b); directive 92/12/CEE du Conseil du 25 février 1992, article 23, paragraphe 1; et directive 2004/18/CE du Parlement européen et du Conseil du 31 mars 2004, article 15 c).

(11)  Règlement (CE) no 1083/2006 du Conseil du 11 juillet 2006.

(12)  La valeur budgétaire d'une seule ERI oscille en moyenne entre 500 millions et un milliard d'euros.


4.8.2009   

FR

Journal officiel de l’Union européenne

C 182/44


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 2006/42/CE du 17 mai 2006 relative aux machines en ce qui concerne le matériel d'application des pesticides»

COM(2008) 535 final — 2008/0172 (COD)

(2009/C 182/09)

Rapporteur unique: M. L. JÍROVEC

Le 24 septembre 2008, le Conseil a décidé, conformément à l'article 95 du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la

«Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 2006/42/CE du 17 mai 2006 relative aux machines en ce qui concerne le matériel d'application des pesticides»

COM(2008) 535 final — 2008/0172 (COD).

La section spécialisée «Marché unique, production et consommation», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 6 janvier 2009 (rapporteur: M. JIROVEC).

Lors de sa 450e session plénière des 14 et 15 janvier 2009 (séance du 14 janvier 2009), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 192 voix pour et 3 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1   Le CESE marque son accord le plus complet avec le document qu'a présenté la Commission.

1.2   Le Comité se félicite des modifications dont il s'agit, qui signifient une protection améliorée de la santé et de la sécurité, ainsi qu'une démarche plus économe vis-à-vis de l'environnement lors de l'utilisation de matériel d'application des pesticides au niveau de l'ensemble de la Communauté et de l'EEE.

1.3   Les réserves à exprimer portent sur des aspects insuffisamment clairs concernant les conséquences que comporte le texte proposé pour l'emploi dans les États qui n'ont pas encore traduit les exigences de la directive en dispositions de droit interne.

2.   Introduction

2.1   Le Parlement européen et le Conseil ont reconnu, dans la décision adoptant le 6e programme d'action communautaire pour l'environnement, qu'il convenait de réduire davantage les effets néfastes des pesticides sur la santé humaine et sur l'environnement.

2.2   Depuis lors, la Commission européenne a adopté la stratégie (ci-après dénommée «la stratégie thématique») et proposé une directive du Parlement européen et du Conseil instituant un cadre d'action communautaire portant sur les principaux aspects législatifs de sa mise en œuvre (ci-après dénommée «la directive-cadre»). La stratégie thématique établit les cinq principaux objectifs suivants:

réduire à un minimum les risques liés à l'utilisation des pesticides pour la santé et l'environnement;

renforcer les contrôles portant sur l'utilisation et la distribution des pesticides;

remplacer les pesticides les plus dangereux par des substituts plus sûrs;

favoriser la conversion à une agriculture utilisant des quantités limitées ou nulles de pesticides;

mettre en place un système transparent de notification et de suivi des progrès accomplis.

2.3   La directive-cadre proposée comporte des exigences sur la base desquelles les États membres doivent mettre en place un système d'entretien et d'inspection réguliers du matériel utilisé, conformément au premier objectif de la stratégie thématique.

3.   Contexte général

3.1   L'objectif de la proposition est d'assurer que les machines neuves destinées à l'application des pesticides ne soient pas inutilement nuisibles à l'environnement. Cette proposition comporte des exigences essentielles complémentaires en matière de protection de l'environnement, exigences auxquelles doivent satisfaire les machines neuves avant leur mise sur le marché et/ou leur mise en service dans la Communauté.

3.2   L'harmonisation des exigences est un préalable nécessaire à la garantie d'un haut niveau de protection, en même temps qu'elle assure la libre circulation de ces produits dans la Communauté.

3.3   Cette directive annule la directive 98/37/CE et sera d'application à compter du 29 décembre 2009.

3.4   La proposition s'inscrit pleinement dans les objectifs et les finalités du 6e programme d'action communautaire pour l'environnement, la stratégie de développement durable de l'Union européenne, la stratégie de Lisbonne et la stratégie thématique concernant l'utilisation durable des pesticides.

3.5   La proposition est conforme à l'accord interinstitutionnel «Mieux légiférer».

3.6   Cette proposition fait suite à la communication de la Commission en date de juillet 2002, intitulée «Vers une stratégie thématique concernant l'utilisation durable des pesticides», communication qui a reçu un accueil favorable de la part du Comité économique et social européen.

3.7   La proposition s'appuie sur les réponses à l'analyse d'impact réalisée dans le cadre de la consultation finale, lesquelles ont confirmé la nécessité d'établir, en ce qui concerne le matériel neuf d'application des pesticides, des exigences visant à protéger l'environnement, et auxquelles le matériel neuf d'application des pesticides doit se conformer préalablement à sa mise sur le marché et/ou à sa mise en service.

3.8   Dans l'analyse d'impact, la directive traite du contrôle et de la certification, qu'elle définit plus précisément, et elle fixe comme objectif une solution consistant à mettre en œuvre un système de certification obligatoire pour les nouveaux matériels d'application des pesticides au niveau de la Communauté.

3.9   Un consultant extérieur (BiPRO) a analysé les incidences éventuelles et prévoit que l'harmonisation relèvera les normes pour le matériel neuf au regard de la protection de l'environnement. L'augmentation des dépenses sera variable, étant donné que certains fabricants satisfont dès à présent aux règles et aux systèmes de certification. L'harmonisation, quant à elle, constitue un avantage qui consiste en la garantie d'une concurrence loyale sur le marché intérieur.

4.   Éléments juridiques

4.1   La proposition introduit de nouvelles exigences en matière de protection de l'environnement. Ces exigences essentielles supplémentaires sont des dispositions obligatoires destinées à assurer que les produits ne nuisent pas inutilement à l'environnement.

4.2   La base juridique de la proposition est l'article 95 du traité instituant la Communauté européenne, article qui pose les principes de la réalisation du Marché intérieur. Cette directive garantit la libre circulation du matériel qui relève de son champ d'application.

4.3   Le principe de subsidiarité s’applique dans la mesure où la proposition ne relève pas de la compétence exclusive de la Communauté.

4.4   Certains États membres ont déjà introduit des exigences obligatoires de protection de l'environnement et des procédures d'évaluation de la conformité du matériel d'application des pesticides. D'autres ont annoncé des propositions de réglementation. Aussi longtemps que l'on s'en remettrait, pour la définition des exigences, à un système de certification volontaire, l'on constaterait une multiplication de règles et de procédures nationales différentes. Il pourrait en résulter des coûts inutiles pour l'industrie et des entraves à la libre circulation des marchandises dans la Communauté.

4.5   L'harmonisation des exigences est le seul moyen d'atteindre l'objectif souhaité de protection de l'environnement tout en garantissant un niveau équivalent de protection dans toute la Communauté, la concurrence loyale entre les fabricants et la libre circulation des marchandises dans le marché intérieur.

4.6   La proposition est conforme au principe de subsidiarité.

4.7   La présente proposition n'excède pas ce qui est nécessaire pour atteindre son objectif et est donc conforme au principe de proportionnalité défini à l'article 5 du traité.

4.8   La directive signifie, pour les fabricants de matériel d'application des pesticides, la réduction des charges administratives à un minimum.

4.9   Ce texte est également conforme à l'accord interinstitutionnel «Mieux légiférer».

4.10   La proposition n’a aucune incidence sur le budget de la Communauté.

4.11   Les États membres sont invités à communiquer à la Commission le texte des dispositions de droit interne transposant la directive ainsi qu'un tableau de correspondance entre ces dispositions et la présente directive.

4.12   Le texte proposé présente de l’intérêt pour l’EEE et il convient donc qu’il lui soit étendu.

5.   Explication

5.1   Les exigences de protection de l'environnement se limitent au matériel d'application des pesticides et aux risques pour l'environnement, auxquels s'appliquent les nouvelles exigences essentielles proposées à l'annexe I de la directive.

5.2   La proposition complète la nouvelle définition des «exigences essentielles de protection de la santé et de la sécurité», ce qui évite la nécessité de modifier les références aux exigences essentielles de protection de la santé et de la sécurité dans la directive.

5.3   Les modifications qu'il est proposé d'apporter à l'article 4, paragraphe 1, à l'article 9, paragraphe 3 et à l'article 11, paragraphe 1, fixent l'objectif de protection de l'environnement.

5.4   Les fabricants de matériel d'application des pesticides ont l'obligation d'évaluer les risques d'atteintes à l'environnement.

5.5   La directive définit le matériel d'application des pesticides auquel elle s'applique.

5.6   La directive fixe des exigences essentielles en matière de réduction des atteintes à l'environnement à un minimum.

5.7   Les nouvelles exigences essentielles proposées sont destinées à être appuyées par des spécifications techniques figurant dans les normes harmonisées pour les différentes catégories de machines destinées à l'application des pesticides. À cet égard, la Commission donne mandat aux organismes européens de normalisation compétents.

Bruxelles, le 14 janvier 2009.

Le Président du Comité économique et social européen

Mario SEPI


4.8.2009   

FR

Journal officiel de l’Union européenne

C 182/46


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil relative aux émissions industrielles (prévention et réduction intégrées de la pollution) (Refonte)»

COM(2007) 844 final — 2007/0286 (COD)

(2009/C 182/10)

Rapporteur: M. Stéphane BUFFETAUT

Le 25 février 2008, le Conseil a décidé, conformément à l'article 175, paragraphe 1 du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la

«Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil relative aux émissions industrielles (prévention et réduction intégrées de la pollution) (Refonte)»

COM(2007) 844 final — 2007/0286 (COD)

La section spécialisée «Agriculture, développement rural, environnement», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 30 octobre 2008 (rapporteur: M. Stéphane BUFFETAUT).

Lors de sa 450e session plénière des 14 et 15 janvier 2009 (séance du 14 janvier 2009), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 152 voix pour, 2 voix contre et 4 abstentions.

1.   Introduction

1.1   Le texte soumis au Comité économique et social européen est présenté comme une refonte de l’actuelle directive. Il s’agit en effet de plus qu’une simple révision ou toilettage du texte en rigueur aujourd’hui. La Commission assure que cette refonte s’inscrit dans une logique de simplification s’inscrivant dans le contexte de l’initiative «mieux légiférer», ce que certains contestent. Les buts premiers de cette réglementation sont:

environnemental: la protection efficace de l’environnement par une approche intégrée prenant en compte l’ensemble des facteurs environnementaux;

économique: une harmonisation des procédures et des pratiques afin d'éviter les distorsions de concurrence.

2.   Les objectifs de la Commission

2.1   La Commission reconnaît la réduction des émissions polluantes au cours des dernières décennies, mais la considère insuffisante et souhaite aller plus en avant dans la lutte contre les émissions polluantes.

2.2   La directive IPPC concerne près de 52 000 installations dans l’Union européenne et, malgré les efforts réalisés, les émissions polluantes demeurent très au-delà des objectifs fixés par la stratégie thématique sur la pollution atmosphérique.

2.3   La pollution générée par l’activité industrielle contribue de manière significative aux impacts négatifs sur la santé et l’environnement. Environ 83 % des émissions de dioxyde de souffre, 34 % de celles d'oxydes d'azote, 25 % de celles de dioxine et 23 % du mercure proviennent de ces installations (1). Ces émissions ne se limitent pas aux émissions atmosphériques mais peuvent se traduire par des rejets dans l’eau et dans le sol. Ces activités sont également d'importantes consommatrices de matières premières, d'eau et d'énergie et contribuent à la production de déchets. L’approche intégrée (IPPC) au travers de la procédure de délivrance des permis par les autorités nationales compétentes, qui encadrent les rejets des entreprises concernées est donc un bon moyen pour aborder la réduction des pollutions.

2.4   Pour la Commission, cette approche doit être principalement fondée sur l’utilisation de Meilleures Techniques Disponibles (MTD ou BAT en anglais). Il s’agit dans le principe, d’utiliser les techniques les plus efficaces pour la protection de l’environnement dans un secteur donné, étant entendu que ces techniques sont disponibles sur le plan commercial et économiquement viable.

2.5   Pour favoriser cette approche, la Commission organise un échange d’informations avec les Etats membres et les parties intéressées sur les meilleures techniques disponibles dans le but d’élaborer des documents de référence (les BREF) qui définissent ce qui peut être considéré comme meilleure technique disponible sur le plan communautaire pour chaque secteur industriel. Le bureau de l'IPPC étant à Séville, c'est ce qui est appelé par la suite le processus de Séville.

2.6   Certaines branches industrielles (mais seulement certaines) sont, de plus, couvertes par des directives sectorielles qui déterminent les conditions d’exploitation et les exigences techniques considérée comme le minimum requis. Ces directives fixent en particulier des valeurs limites d’émission pour certains polluants et s'appliquent sans préjudice de la mise en œuvre de la directive IPPC.

2.7   Après avoir fait mener diverses études et enquêtes, la Commission a considéré qu’il était nécessaire de renforcer les dispositions en vigueur pour mieux lutter contre les émissions industrielles. Elle a également considéré qu’il existait des lacunes dans la législation actuelle qui conduisaient d’une part à une mise en œuvre insatisfaisante de la directive, d’autre part à des difficultés de contrôle de l’application de la directive.

2.8   La Commission propose donc de réviser et de fusionner en une seule directive (directive sur les émissions industrielles dite IED Industrial Emissions Directive) sept directives distinctes mais sur le fond elle entend:

renforcer le concept de meilleures techniques disponibles;

réviser les valeurs limites d’émission pour les grandes installations de combustion;

créer un comité chargé d’adapter les exigences techniques non essentielles au progrès technique et scientifique, ou de définir les rapports à présenter par les États membres;

introduire des dispositions relatives aux inspections;

stimuler l’innovation et le déploiement de nouvelles techniques;

simplifier et expliciter certaines dispositions relatives à la procédure d’autorisations;

étendre et clarifier le champ d’application de la directive;

stimuler la prise en compte des techniques nouvelles.

3.   Considérations générales

3.1   Les trois principes de l’actuelle directive:

l’approche intégrée des impacts de l’activité industrielle,

l’utilisation des meilleures techniques disponibles,

la possibilité de prendre en compte des conditions locales pour fixer les conditions des permis

recueillent l’assentiment des entreprises concernées et correspondent à une démarche globale et continue d’amélioration des performances environnementales des sites industriels.

3.2   Il est exact qu’il existe certaines différences dans la mise en œuvre de la directive de 1996 selon les États membres, mais encore faut-il considérer que sa mise en œuvre complète est très récente (octobre 2007 pour les installations existantes) et que l’on ne dispose pas de recul nécessaire pour apprécier pleinement sa mise en œuvre. Toutefois, selon la Commission, les évaluations sur des permis spécifiques et de manière plus générale sur les pratiques des États membres montrent de nombreux problèmes de mise en œuvre dus en particulier aux dispositions non claires de la directive actuelle. Et toujours selon la commission, toutes les consultations et projections réalisées montrent que la situation ne va pas s'améliorer sans un changement de la législation. Il est à noter que la mise en œuvre d’une législation est l’affaire des Etats Membres et que l’obligation de conformité avec les conditions des permis pèse sur les opérateurs des installations concernées.

3.3   Les BREF (pour BAT Reference Document) ont déjà été adoptés et diffusés depuis 2001 mais il a fallu un délai important pour que ces documents soient traduits dans toutes les langues officielles de l’Union européenne. Il est néanmoins démontré par les études relatives à la mise en œuvre que toutes les administrations nationales n’ont pas parfaitement accompli leurs tâches sans que l’on puisse pour autant en imputer uniquement la responsabilité aux industries concernées en cas de mise en œuvre tardive ou imparfaite si les conditions des permis ne sont pas conformes aux BREF. Il convient donc de faire bon accueil à un retour d’expérience plus important lié à la mise en œuvre généralisée des BREF sur l'ensemble du territoire de l'union étant donné les approches très différentes de leur utilisation.

3.4   Tout ceci peut sans doute expliquer les dysfonctionnements relevés mais on peut s’interroger sur le fait de savoir s’il n’est pas précipité d’entreprendre une réécriture profonde de la directive? En effet un certain nombre d’États membres ont délivré tardivement les permis d’exploitation aux installations existantes, parfois même après l’expiration des délais fixés par la directive.

3.5   Toutefois, on peut s’inquiéter légitimement du fait que les données des États relatives aux émissions projetées laissent penser que la mise en œuvre des MTD, notamment pour les grandes installations de combustion, ne permettra pas d’atteindre les objectifs de la stratégie sur la pollution de l’air.

3.6   En tout état de cause, une telle refonte ne peut s’entreprendre sans respecter «les principes de transparence, d’efficacité économique, d’efficacité au regard des coûts, d’équité et de solidarité dans la répartition des efforts entre les États membres» pour reprendre les termes mêmes du Conseil européen.

4.   Points soulevant des difficultés particulières

4.1   Rôle des BREF

4.1.1   Jusqu’à présent les BREF avaient un double rôle:

référence pour la définition de ce qu'il faut considérer comme MTD lors de la rédaction des permis: les BREF sont utilisés comme une source de référence pour les informations sur les multiples options qu'offrent les MTD pour répondre à la situation spécifique de chaque site. Ils sont le fruit d'une approche plurilatérale des partenaires concernés qui détermine ce qu'il convient de classifier comme MTD et les autorités compétentes choisissent la norme la plus appropriée parmi les techniques adaptées aux différents types de processus,

leur élaboration constituait un lieu d’échange d’information sur les performances et l’évolution des techniques au sein de l’Union.

La sélection des MTD s'est faite en partant du principe que le coût de ces références techniques ne menace pas la compétitivité de l'industrie, principe qui se retrouve dans la définition même des MTD, laquelle requiert que les MTD soient «mises au point sur une échelle permettant de les appliquer dans le contexte du secteur industriel concerné, dans des conditions économiquement et techniquement viables, (…) pour autant que l'exploitant concerné puisse y avoir accès dans des conditions raisonnables» (art. 2.11 PRIP, 3(9 IED)). Dans le cas contraire, notamment pour les techniques nouvelles qui ne sont pas considérées comme MTD, elles représentaient à la fois les bonnes pratiques et l’état de l’art des processus de fabrication et fournissaient une base de données de performances des différentes technologies et modes d'exploitation appliquées dans la branche industrielle concernée.

4.1.2   Il est important de garder la logique actuelle: les MTD représentent les techniques qui au cas par cas permettent de répondre aux exigences de la réglementation et, parmi d'autres objectifs, de contrôler les émissions industrielles en assurant la protection de l'environnement tout en tenant compte des coûts et des bénéfices de l'application de ces techniques. Quant à la réglementation, elle doit rester applicable à tous au même moment dans l’Union afin d'éviter un imbroglio généralisé en fonction des dates de révision des permis, des dates de révision des BREF sectoriels ou des approches plus ou moins conservatrices des secteurs concernés. Les MTD doivent contribuer aussi à réduire les distorsions de concurrence.

4.1.3   Dans le cadre de la révision, il convient de clarifier le rôle des BREF. Ceux-ci ne définissent pas les niveaux d'émission mais doivent rester une référence et un outil de progrès permettant, entre autres objectifs, de respecter des limites d’émission ou des normes de qualité de l'environnement (eau, air, sol) définies par ailleurs. Il convient de rappeler, ainsi que l’énonçaient le guide et les lignes directrices des BREF de 2005, que «les BREF ne prescrivent pas de techniques ni de valeurs limites d'émission». La définition des niveaux d'émission relève de la politique économico-environnementale de l'Union européenne. Enfin, ces outils ne doivent pas faire obstacle à une nécessaire flexibilité en fonction des conditions locales et techniques.

4.2   Le processus de Séville

4.2.1   Il est ouvert et fondé sur la concertation, à défaut d’être démocratique au sens strict du terme. En effet les trois parties concernées «classiques» sont représentées ou peuvent l'être: États, techniciens, organisations non gouvernementales. Néanmoins, le processus reste «vertical» et peu d’échanges entre branches industrielles existent. Les rédacteurs des BREF changent, et ce sont (pour les États membres et la Commission) rarement les mêmes personnes qui rédigent les versions successives des BREF ou des BREF des différents secteurs. Il y a là une perte de substance et d’expertise pour l’approche relative à certains polluants de type «fatal» (NOx, CO, CO2, …) ou globaux (SOx, métaux, poussières …), par rapport aux techniques mises en œuvre, techniques qui devraient servir le Information Exchange Forum (IEF). Toutefois, le processus de Séville a le mérite de faire le point à intervalles réguliers sur les performances constatées des secteurs industriels. Si les États membres étaient un peu plus présents, ils pourraient en tirer un bon parti afin d’en améliorer le fonctionnement, puisqu’ils pourraient apporter les données constatées lors des inspections qu’ils doivent effectuer.

4.3   La révision des permis

4.3.1   Une installation peut être concernée simultanément par plusieurs BREF. Il faut donc s’assurer que la révision périodique des BREF et le rythme de reconsidération des permis pouvant se traduire par des modifications des prescriptions soient compatibles avec les cycles d’amortissement de l'installation. Ici encore, seule une réglementation/programmation de type législatif est adaptée à la situation. Les techniques nouvelles y trouveront d’autant mieux leur place que les enjeux auront été précisés à l’avance. De même, une MTD sera d’autant mieux adaptée qu’elle sera évolutive, mais il paraît impensable d’imposer un changement d’investissement au même rythme que celui de la révision des BREF. C'est donc au législateur européen d’établir un échéancier cohérent de progrès, au regard des performances constatées et des progrès techniques, mais cette tâche ne peut être déléguée au processus de Séville.

4.4   Notion de technique nouvelle

Le nouveau texte introduit la notion de technique nouvelle. Le propre d’une technique nouvelle est de demander à être testée dans un contexte industriel réel; des techniques peuvent être prometteuses en laboratoire, voire dans des installations pilotes et se révéler insatisfaisantes dans un usage normal. Il faut donc prendre garde à ce que l’introduction dans le texte de cette notion soit bien comprise comme un moyen de stimuler l’innovation pour tester de nouvelles techniques mais non comme le prélude à la définition de nouvelles références.

4.5   Approche intégrée

Le nouveau texte maintient le principe d’adaptation en fonction du contexte local et des conditions spécifiques d’exploitation et fait le choix de procéder par dérogations. Ce système, même s’il laisse aux autorités compétentes une certaine flexibilité pour tenir compte de conditions spécifiques est plus rigide que le précédent. Il est important que la définition des meilleures techniques disponibles résulte d’une véritable discussion entre les administrations locales et nationales et les industriels concernés, conduite dans la transparence.

4.6   Intégration des directives sectorielles

Il convient de veiller à ce que cette intégration ne produise pas un texte particulièrement lourd et complexe, ce qui irait à l’inverse du but de simplification recherché. L’intégration des directives sectorielles dans la proposition de directive varie assez sensiblement d’une directive à l’autre principalement en ce qui concerne les valeurs limite d’émission la raison principale étant de rapprocher les valeurs limites d'émissions des valeurs de performance des MTD. Les objectifs de clarté et de cohérence, à la fois pour les Etats membres et les opérateurs concernés, doivent demeurer un objectif essentiel de cette intégration qui permette aussi de parvenir à une diminution des charges administratives inutiles.

4.7   Comitologie, Information Exchange Forum et Bureau IPPC de Séville

La proposition de directive propose un recours accru à la comitologie notamment pour la définition des critères de dérogation au BREF. Quel sera dès lors le rôle des parties prenantes? Et quel sera le rôle dévolu à l’IEF et au Bureau de Séville? Il est à craindre que l’industrie européenne soit, à l’avenir, de plus en plus réticente pour fournir des informations pertinentes sur les meilleurs techniques disponibles au Bureau IPPC de Séville alors que jusqu’à présent cette collaboration est unanimement saluée comme un succès européen. En outre, la comitologie est une procédure assez opaque généralement peu appréciée du Parlement européen. La procédure de la comitologie devrait donc être limitée à la modification d’éléments secondaires de la législation.

4.8   Protection des sols

Le nouveau texte prévoit l’obligation de remise en état du site à l’état initial avant le démarrage de l’installation. La grande diversité des sols en Europe suppose de laisser jouer le principe de subsidiarité en laissant plus de marge de manœuvre aux autorités nationales. La meilleure option semble alors de remettre le site dans un état correspondant à son usage futur approuvé.

4.9   Publicité des rapports

Le texte prévoit qu’après les inspections, les autorités rendront le rapport public dans les deux mois. Le délai est trop court car il conviendrait de donner assez de temps à l’industriel concerné pour faire valoir ses remarques et de définir un plan d’action et que ces éléments soient également rendus publics.

4.10   Application de la directive

La mise en application de la directive prévue pour janvier 2016 semble trop rapprochée au regard de l’expérience de la mise en œuvre de l’actuelle directive IPPC. Par ailleurs, un certain nombre de projets de directives européennes sont actuellement en cours d’élaboration et ont pour future date d’application 2020 (révision de la directive plafonds nationaux d'émissions, mise en œuvre du «green package agreement»). Par ailleurs, le Protocole de Göteborg est en cours de révision au sein de la Commission économique pour l’Europe des Nations unies à Genève et fixe 2020 pour la fixation de ses nouveaux objectifs.

Il serait plus cohérent que la proposition de directive s’harmonise avec les autres réglementations environnementales en proposant 2020 au lieu de 2016 pour sa date de mise en œuvre.

5.   Conclusion

5.1   Si la directive IPPC a été mise en œuvre de façon insatisfaisante, il serait pertinent de développer le maximum d’efforts avec les États membres et les autres parties prenantes pour améliorer rapidement la qualité de la mise en œuvre de la directive actuelle afin que celle-ci puisse servir de fondement concret à la refonte de la directive IPPC, ce qui est prévu dans la Communication de la Commission et le plan d’Action 2008-2010 sur la mise en œuvre de la législation relative aux émissions industrielles. Il conviendrait de fixer pour objectifs de la révision du texte l’efficacité environnementale et économique, la transparence, la concertation avec les professionnels concernés, un bon équilibre coûts bénéfices et le respect du principe d’équité et de solidarité dans la répartition des efforts entre les États membres.

5.2   Le réseau IMPEL pourrait aider à l’amélioration de la mise en œuvre de la directive actuelle, une traduction officielle des documents BREF dans les langues de l’Union devrait également contribuer à améliorer une meilleure compréhension des BREF donc de leur application nationale. En collaboration avec le Bureau IPPC de Séville, il faudrait s’assurer que ne soient pas incluses des vues divergentes dans les BREF qui diminueraient la cohérence et la pertinence de ces documents au niveau européen.

Bruxelles, le 14 janvier 2009.

Le Président du Comité économique et social européen

Mario SEPI


(1)  SEC(2007) 1679.


4.8.2009   

FR

Journal officiel de l’Union européenne

C 182/50


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant les règlements (CE) no 549/2004, (CE) no 550/2004, (CE) no 551/2004 et (CE) no 552/2004 afin d'accroître les performances et la viabilité du système aéronautique»

COM(2008) 388 fin — 2008/0127 (COD)

et la

«Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (CE) no 216/2008 dans le domaine des aérodromes, de la gestion du trafic aérien et des services de navigation aérienne, et abrogeant la directive 2006/23/CE»

COM(2008) 390 fin — 2008/0128 (COD)

(2009/C 182/11)

Rapporteur: M. KRAWCZYK

Le 4 septembre 2008 et le 18 juillet 2008 respectivement, le Conseil européen a décidé, conformément à l'article 80, alinéa 2, du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la

«Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant les règlements (CE) no 549/2004, (CE) no 550/2004, (CE) no 551/2004 et (CE) no 552/2004 afin d'accroître les performances et la viabilité du système aéronautique»

COM(2008) 388 fin — 2008/0127 (COD)

et la

«Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (CE) no 216/2008 dans le domaine des aérodromes, de la gestion du trafic aérien et des services de navigation aérienne, et abrogeant la directive 2006/23/CE»

COM(2008) 390 fin — 2008/0128 (COD)

La section spécialisée «Transports, énergie, infrastructures, société de l'information», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 10 novembre 2008 (rapporteur: M. KRAWCZYK).

Lors de sa 450e session plénière des 14 et 15 janvier 2009 (séance du 15 janvier 2009), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 131 voix pour et 5 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1   La mise en œuvre rapide et globale du ciel unique européen (CUE), tel que proposé par la Commission, constitue une étape stratégique très importante vers une intégration européenne plus poussée et un renforcement du marché commun européen. Cette initiative est également un facteur de cohésion et de mobilité sociale.

Le CESE se félicite de la proposition de la Commission qu'il estime être une mesure importante vers la mise en œuvre du ciel unique européen. Ce paquet législatif appelé «ciel unique européen II» (CUE II) répond à de nombreuses faiblesses observées au niveau de la mise en œuvre de la première version qui date de 2004.

1.2.1   Il convient dès lors de ne pas repousser l'adoption de la proposition législative relative au CUE II, et le CESE invite le législateur de l'UE à parvenir à un accord définitif avant le mois de mars 2009. Il est essentiel, pour atteindre les objectifs du ciel unique européen, que le législateur de l'UE (le Conseil et le Parlement) ne remette pas en cause la teneur des propositions de la Commission.

1.3   L'essentiel consiste, dans un contexte d'accroissement du trafic, à renforcer les exigences de sécurité.

1.4   En particulier, le CESE soutient pleinement:

les propositions relatives au cadre de suivi des performances et aux objectifs contraignants de performance dans la mesure où la performance est estimée en fonction des quatre critères essentiels que sont la sécurité, la capacité, l'environnement et l'efficience des coûts;

l'élargissement des responsabilités de l'Agence européenne pour la sécurité aérienne (AESA) à la sécurité des aérodromes, ainsi qu'à la gestion du trafic aérien et aux services de navigation aérienne;

la reconnaissance de l'importance des facteurs humains pour ce qui est de la sécurité aérienne;

des efforts accrus afin de développer la compétence des personnels chargés d'assurer la sécurité, l'application d'une «culture juste»;

la reformulation de l'article 5 du règlement sur la fourniture des services de navigation aérienne, qui est supprimé dans le cadre de la proposition CUE II, pour permettre une extension du schéma de licence à tous les personnels de la chaîne de sécurité et en premier lieu aux ATSEP;

la fixation du délai à l'année 2012 pour la mise en œuvre des blocs d'espace aérien fonctionnels;

le renforcement de SESAR et de ses méthodes de financement.

le renforcement des fonctions du réseau européen de gestion du trafic aérien;

la réforme d'Eurocontrol;

la reconnaissance des limites de capacité des aéroports;

une modification de l'article 18 a: le CESE n’est pas hostile à la conduite d’une étude si celle-ci n’est pas explicitement destinée à l’ouverture des services annexes de gestion du trafic aérien à la concurrence.

1.5   L'optimisation de la gestion du trafic aérien au niveau européen par la mise en œuvre du ciel unique européen II contribuera largement à la diminution des quantités de CO2 émis par le secteur aérien. L'amélioration conjuguée de la gestion du trafic aérien et des opérations aéroportuaires pourrait entraîner une réduction des émissions pouvant atteindre 12 % pour un vol moyen, ou de 16 millions de tonnes de CO2 par an.

1.6   Bien que le CUE II soit d'une manière générale largement approuvé par les différentes parties concernées, il est indispensable de mener d'autres consultations quant à ses modalités d'application une fois qu'il aura été adopté. Il convient que ces consultations s'engagent à tous les niveaux de mise en œuvre du CUE II (européen, national et régional) et associent les partenaires et acteurs sociaux et industriels.

1.7   L'application du CUE II bénéficiera aux citoyens et aux consommateurs par:

un relèvement du niveau de sécurité;

un raccourcissement des temps de trajet;

un service et des performances accrus, notamment une fiabilité et une prévisibilité améliorées des horaires avec pour conséquence moins de correspondances perdues pour les passagers en transit;

une réduction du prix des voyages du fait de la réduction des coûts supportés par les compagnies aériennes;

une réduction de l'empreinte carbone individuelle.

2.   Introduction

2.1   L'adoption par le Parlement européen et le Conseil du règlement (CE) no 549/2004 fixant le cadre pour la réalisation du ciel unique européen (1), du règlement (CE) no 550/2004 relatif à la fourniture de services de navigation aérienne dans le ciel unique européen (2), du règlement (CE) no 551/2004 relatif à l'organisation et à l'utilisation de l'espace aérien dans le ciel unique européen (3) et du règlement (CE) no 552/2004 concernant l'interopérabilité du réseau européen de gestion du trafic aérien (4) (premier paquet législatif sur le ciel unique européen) a établi la base juridique pour un système de gestion du trafic aérien européen ininterrompu, interopérable et sûr. Le CESE s'est exprimé sur le règlement initial dans son avis de 2002 (TEN/080 — Programme d'action/ciel unique et TEN/098 — Réalisation ciel unique).

2.2   La demande de transport aérien augmente considérablement et la capacité de l'infrastructure risque d'être insuffisante: avec quelque 28 000 vols quotidiens assurés par 4 700 avions commerciaux, les aéroports et la gestion du trafic aérien sont sur le point d'atteindre leurs limites. La politique d'élargissement et la poursuite d'une politique active de voisinage ont étendu le marché européen du transport aérien à 37 pays comptant plus de 500 millions d'habitants (5).

2.3   La gestion parcellaire du trafic aérien empêche d'utiliser au mieux la capacité disponible et impose des charges financières inutiles d'environ 1 milliard d'euros aux compagnies aériennes (en moyenne, les avions parcourent 49 km de plus que nécessaire). En 2007, 468 millions de kilomètres supplémentaires ont été parcourus du fait du manque d'efficacité de la gestion des vols, ce qui représente 2,4 milliards d'euros de coûts supplémentaires pour le transport aérien. Les retards dus aux problèmes de gestion du trafic aérien représentent 21,5 millions de minutes en 2007, soit 1,3 milliard d'euros de coûts inutiles pour les compagnies aériennes et, par conséquent, leurs clients.

2.4   L'industrie aéronautique, les États membres et d'autres parties intéressées souhaitant vivement que le cadre réglementaire applicable au transport aérien en Europe soit simplifié et plus efficace, le groupe de haut niveau sur l'avenir du cadre réglementaire européen en matière d'aviation a ensuite présenté, en juillet 2007, un rapport contenant un ensemble de recommandations sur les moyens d'accroître les performances et de mieux gérer le système aéronautique européen. Ce rapport et les rapports de la commission d'examen des performances d'Eurocontrol ont confirmé que le réseau européen de gestion du trafic aérien doit être conçu et mis en place dans un souci d'efficacité, de sécurité et de viabilité écologique de l'ensemble du réseau de transport aérien de l'UE.

2.5   En décembre 2007, l'AESA a envoyé à la Commission un avis concernant les aérodromes. Son avis sur la gestion du trafic aérien et les services de navigation aérienne, qui a suivi en avril 2008, était en faveur de l'achèvement du processus engagé en 2002, par l'ajout aux tâches confiées à l'AESA des aspects liés à la sécurité des aérodromes et de la gestion du trafic aérien/services de navigation aérienne.

2.6   Le 25 juin 2008, la Commission européenne a publié son paquet de communications intitulé «Ciel unique européen II: vers une aviation plus durable et plus performante» (COM(2008) 388, COM(2008) 389/2, COM(2008) 390).

3.   Proposition de la Commission (Ciel unique européen II)

3.1   Afin d'achever la création du ciel unique européen, il est nécessaire d'arrêter de nouvelles mesures au niveau communautaire visant, en particulier, à améliorer les performances du système aéronautique européen dans des domaines essentiels comme la sécurité, la capacité, l'efficacité des opérations de vol, la rentabilité et l'environnement dans le respect des objectifs impératifs de sécurité.

Le Ciel unique européen II comporte quatre piliers:

Premier pilier — un système de réglementation des performances

a)

Améliorer les performances du système de gestion du trafic aérien en créant un organe indépendant d'évaluation des performances qui contrôlera et évaluera les performances du système. Il mettra au point des indicateurs pour les différents domaines de performance et proposera des objectifs communautaires (retard, réduction des coûts, raccourcissement des itinéraires). La Commission approuvera les objectifs de performance et les transmettra aux autorités nationales. Les objectifs convenus seront contraignants.

b)

Faciliter l'intégration de la fourniture de services grâce au soutien par la Commission de la création de blocs d'espace aérien fonctionnels en fixant des délais de mise en œuvre impératifs (d'ici à la fin de 2012 au plus tard), en étendant le champ d'application à l'espace aérien inférieur jusqu'à l'aéroport et en levant les obstacles juridiques et institutionnels nationaux.

c)

Développer la fonction de gestion de réseau au moyen d'une série de tâches accomplies par différents acteurs, parmi lesquelles: conception du réseau de routes européen, gestion des ressources limitées, gestion des courants de trafic, ainsi que gestion du déploiement des technologies SESAR et de l'acquisition des éléments d'infrastructure à l'échelle européenne.

Deuxième pilier — un cadre de sécurité unique

Les compétences de l'AESA ont été progressivement étendues depuis 2002, jusqu'à couvrir les domaines de la navigabilité des aéronefs, de l'exploitation des aéronefs et de l'octroi de licences au personnel navigant. Selon cette approche, la Commission propose d'étendre encore les compétences de l'Agence aux derniers domaines essentiels en matière de sécurité, à savoir les aérodromes, la gestion du trafic aérien et les services de navigation aérienne.

Troisième pilier SESAR — aspect technologique et opérationnel du ciel unique européen.

L'Europe doit accélérer le développement de son système de gestion du trafic aérien pour relever le défi et synchroniser les déploiements à bord des avions et au sol. SESAR doit permettre de relever les niveaux de sécurité d'un facteur dix afin de pouvoir gérer un trafic trois fois plus important pour un coût par vol inférieur de moitié au coût actuel. En 2006, le CESE a élaboré un avis (TEN 232) dans lequel il soutient pleinement la mise en œuvre de SESAR.

Quatrième pilier — gérer la capacité au sol.

Il comprendra: l'amélioration de l'utilisation des infrastructures existantes; l'amélioration de la planification des infrastructures; la promotion de l'intermodalité et l'amélioration de l'accès aux aéroports; l'Observatoire communautaire de la capacité des aéroports.

4.   Observations spécifiques

Le CESE souscrit pleinement au système d'amélioration des performances des prestataires de services de navigation aérienne (article 11).

4.1.1   Le CESE se félicite de la proposition relative à un système d'amélioration des performances (article 11 du règlement). Le CESE est favorable à la création d'un tel système en ce sens qu'il permet d'améliorer les performances. Il est essentiel, pour atteindre les objectifs du ciel unique européen, que le législateur de l'UE (le Conseil et le Parlement) ne remette pas en cause la teneur des propositions de la Commission.

4.1.2   Le CESE appuie la proposition relative à un système d’amélioration des performances (art. 11 du règlement), dans la mesure où la performance est estimée en fonction de quatre critères essentiels qui sont, par ordre de priorité, la sécurité (safety), la capacité, l’environnement et l’efficience des coûts.

4.1.3   Il importe que les objectifs nationaux ou régionaux correspondent aux objectifs du réseau. Aussi la Commission doit-elle impérativement approuver les plans nationaux ou régionaux de performances. Cela supposera également une consultation réelle et efficace aux niveaux européen, régional et national afin de veiller à ce que les objectifs de chaque prestataire de services de navigation aérienne soient compatibles et complémentaires avec ceux du ciel unique européen.

4.1.4   Le CESE est d'avis qu'il convient dans un premier temps de mettre l'accent sur la sécurité, l'efficacité des opérations de vol (environnement), la rentabilité et la capacité (retards) avant de traiter les autres domaines. La fixation des objectifs doit rechercher un juste équilibre entre les différents domaines essentiels de performance en tenant compte de la diversité des opérations en Europe.

4.1.5   Le CESE estime que les objectifs en matière de sécurité ne pourront être fixés et atteints qu'une fois que des systèmes d'enregistrement des incidents et de gestion de la sécurité auront été mis en place dans l'ensemble des États membres. Les systèmes juridiques européens étant hétérogènes, les données actuellement recueillies sont incomplètes. L'ensemble des États membres doivent adopter une culture juste afin de garantir un enregistrement ouvert et exhaustif des données en matière de sécurité.

4.1.6   De l'avis du CESE, un organe d'évaluation des performances réellement indépendant et doté des ressources adéquates est nécessaire pour suivre et évaluer la performance du système et rendre compte directement à la Commission européenne. Une procédure de recours devrait également être prévue.

4.1.7   Le CESE souligne que l'organe d'évaluation des performances, ainsi que les autorités nationales de surveillance, doivent être indépendants et séparés des organisations dont la performance est évaluée (pour ce qui est de la gouvernance, de la localisation et du personnel). Cette indépendance est essentielle à la crédibilité de l'évaluation.

4.2   Sécurité/AESA

4.2.1   Le CESE approuve sans réserve l'extension du champ d'activité de l'AESA à la gestion du trafic aérien et à la réglementation de la sécurité des aérodromes, et ce afin de garantir une approche intégrée de la sécurité en Europe. Il importe que le législateur de l'UE ne retarde pas l'extension du champ d'activité de l'AESA. Cette mesure est notamment essentiellement pour assurer une mise en œuvre efficace du plan directeur SESAR qui nécessitera une intégration étroite des systèmes au sol et embarqués.

4.2.2   Il est essentiel que les règles de sécurité de l'AESA se fondent sur une évaluation acceptable de l'impact réglementaire et que les institutions de l'UE veillent à ce qu'un financement public adéquat soit mis à disposition de sorte que l'AESA puisse acquérir l'expertise nécessaire à ces fonctions supplémentaires.

4.2.3   Le CESE invite les États membres à élaborer une feuille de route en vue de mettre un terme progressivement aux activités de réglementation de la sécurité d'Eurocontrol (commission de réglementation de la sécurité — SRC/bureau de réglementation de la sécurité — SRU) et de les intégrer à l'AESA. Eurocontrol aura un rôle essentiel à jouer dans ce transfert vers l'AESA mais, une fois ces compétences établies au sein de l'Agence, il ne sera plus nécessaire de consacrer ces ressources à Eurocontrol et une clause de suppression automatique devra être prévue s'agissant de l'ensemble des activités SRC/SRU d'Eurocontrol. Dans ce contexte, le CESE tient à rappeler le modèle concluant utilisé pour les autorités conjointes de l’aviation (JAA) (rapport sur l'avenir des autorités conjointes de l'aviation approuvé par l'ensemble des directions générales de l'aviation civile de la conférence européenne de l'aviation civile), lequel pourrait également être étendu aux fonctions SRC/SRU d'Eurocontrol.

4.2.4   Le CESE estime que la réalisation d'une culture juste devrait être au cœur des objectifs du paquet législatif à l'examen, notamment de la mise en œuvre des systèmes de gestion de la sécurité et de l'enregistrement des incidents. L'application uniforme d'une culture juste, telle qu'approuvée par le groupe à haut niveau, est une condition préliminaire à l'existence de statistiques concernant la sécurité. Cela permettra au système d'amélioration des performances proposé par la Commission de suivre de manière fiable les réalisations en matière de sécurité et fixer des objectifs dans ce domaine.

4.2.5   Le CESE invite le Conseil et le Parlement à reformuler l’article 5 du règlement sur la fourniture des services de navigation aérienne, qui est supprimé dans le cadre de la proposition CUE II, pour permettre une extension du schéma de licence à tous les personnels de la chaîne de sécurité et en premier lieu aux ATSEP.

4.3   Culture juste, facteurs humains et compétence des personnels

4.3.1   Le CESE regrette que la législation proposée ne comporte pas un cinquième pilier relatif à la culture juste, aux facteurs humains et à la compétence des personnels. En effet la gestion du trafic aérien et les services de navigation aérienne resteront encore pour longtemps étroitement dépendants des facteurs humains. Ceux-ci sont donc étroitement liés au maintien et à l’accroissement du niveau de sécurité aérienne. Il convient donc d'accorder une attention spéciale à la compétence des personnels chargés d’assurer cette sécurité.

4.4   Blocs d'espace aérien fonctionnels (BEAF)

4.4.1   Étant donné que le premier paquet législatif relatif au ciel unique européen ne prévoyait pas de délai pour la création de blocs d'espace aérien fonctionnels et qu'aucun n'a dès lors été instauré, le CESE souscrit pleinement à la nécessité de fixer la fin de l'année 2012 comme une date butoir à laquelle l'ensemble des États membres devront mettre en place des BEAF respectant des objectifs de performance précis.

4.4.2   Dans ce contexte, il importe que les ministères des transports et de la défense tirent le meilleur parti possible des potentialités des blocs d'espace aérien fonctionnels (BEAF) par une meilleure coordination civile-militaire et militaire-militaire en matière de gestion du trafic aérien et la consolidation des infrastructures et des services dans ce domaine.

Le CESE approuve la définition plus large des BEAF et le calendrier de leur mise en place. Le CESE estime qu'il importe de prendre des mesures afin de lever les obstacles à la mise en place des BEAF à l'échelon national: la souveraineté, la responsabilité et la pleine intégration des forces armées. Cela étant, il convient de privilégier une approche ascendante parmi les principes régissant l'application des BEAF.

4.4.3.1   Au vu de ces questions, le CESE déplore que la Commission n'ait pas suivi les recommandations du groupe à haut niveau concernant un coordinateur des systèmes de transport aérien chargé d'appuyer la mise en place des BEAF.

4.4.4   Le CESE souligne que, pour atteindre les objectifs de rentabilité, il y a clairement lieu de réduire le nombre de prestataires de services dans la gestion du trafic aérien en Europe. Le nombre de centres de contrôle régional (ACC) en Europe devra être adapté strictement aux besoins opérationnels, indépendamment des frontières nationales, afin de garantir la rentabilité du ciel unique européen. Le CESE souligne que, pour atteindre les objectifs de performance, il convient de développer un schéma de coopération renforcée entre prestataires.

4.4.5   À la faveur d'améliorations technologiques, ainsi que d'une réduction du nombre de prestataires de services et des ACC, il y a lieu d'escompter une hausse de la productivité du système de gestion du trafic aérien. Les avancées technologiques (par exemple le travail à distance) et le fait que l'aviation est en Europe un secteur en croissance amortiront l'essentiel des effets, y compris les répercussions sociales.

4.4.6   Aux termes de la réglementation relative au ciel unique européen, les prestataires de services de navigation aérienne sont tenus de disposer de plans d'urgence pour l'ensemble des services qu'ils fournissent en cas d'événements conduisant à une dégradation significative ou à une interruption de leurs services. À l'heure actuelle, l'ensemble des prestataires de services de navigation aérienne dupliquent l'infrastructure actuelle des centres de contrôle régional. Le CESE fait valoir qu'il importe que les prestataires de services de navigation aérienne concentrent leurs efforts sur des solutions plus efficaces et plus rentables en envisageant d'abord des possibilités de repli compte tenu des infrastructures nationales existantes (autres ACC ou équipements militaires) et qu'ils anticipent les dispositions relatives aux blocs d'espace aérien fonctionnel pour faire face aux situations d'urgence.

4.4.7   Le CESE souligne l'importance du dialogue social à l'échelon de l'UE et des BEAF pour ce qui est de gérer la transition.

4.5   Redevances de route et projets communs/SESAR

4.5.1   Le CESE reconnaît la difficulté qu'il y a actuellement à financer de nouvelles technologies et des programmes d'incitation. Le manque de dispositifs de financement adéquats est un facteur de risque pour le déploiement du premier paquet de mise en œuvre de SESAR et les phases ultérieures du déploiement de SESAR. Aussi le CESE souligne-t-il que les institutions de l'UE doivent allouer un financement relais pour permettre la mise en œuvre de SESAR. Ce financement est important afin de faire face aux coûts de la transition vers le nouveau système SESAR. Le CESE approuve depuis le tout début le projet SESAR.

4.5.2   Le CESE n'est pas favorable à l'utilisation de redevances pour préfinancer des projets communs, tel que proposé à l'amendement à l'article 15 du règlement relatif à la fourniture de services qui continue de prévoir le recours aux redevances de route afin de financer des projets communs «(…) destinés à aider certaines catégories précises d'usagers de l'espace aérien ou de prestataires de services de navigation aérienne à perfectionner des infrastructures collectives de navigation aérienne (…)».

4.5.3   Le CESE approuve les nouveaux concepts opérationnels visés dans le plan directeur SESAR pour l'instauration d'un système de gestion du trafic aérien en ce qu'ils complètent sur le plan technique/opérationnel le ciel unique européen qui découle de la phase de définition de SESAR. Le CESE tient toutefois à souligner que des efforts considérables devront encore être consentis lors de la prochaine phase de SESAR et dans le cadre de l'entreprise commune SESAR. Le CESE accueille par conséquent favorablement la décision du Conseil de lancer la phase de développement de SESAR. Le CESE fait valoir que la prochaine phase de SESAR doit continuer d'être axée sur les utilisateurs et apporter sans tarder une valeur ajoutée.

4.5.4   Le CESE approuve la proposition de la Commission consistant à interdire les subventions croisées entre services de route et services terminaux de gestion du trafic aérien. Cela étant, le CESE regrette que la Commission n'ait pas proposé une interdiction totale des subventions croisées entre services de navigation aérienne. Dans la mesure où les subventions croisées en général conduisent à une distorsion de concurrence, le problème ne se limite pas au seul cas des subventions croisées entre services en route et services terminaux mais concerne également les cas de subventions croisées au sein de l'une de ces catégories, notamment entre services terminaux sur différents aéroports.

4.6   Réglementation de l'espace aérien/fonction de gestion de réseau

4.6.1   Le CESE convient de la nécessité d'une gestion et d'une conception européennes fortes du réseau, notamment pour ce qui est de la conception des routes, de la coordination et de l'affectation des ressources limitées (radiofréquences et codes de répondeur radar), ainsi que d'autres tâches, telles que définies dans le plan directeur ATM. Le CESE souligne également que le principe d'une séparation claire entre la fourniture de services et les activités réglementaires doit s'appliquer aux fonctions de gestion du réseau. Il convient que les fonctions de fourniture de services soient gérées par le secteur.

4.6.2   Il est essentiel que ces fonctions soient exercées au niveau européen, indépendamment des intérêts particuliers des différents prestataires de services de navigation aérienne. En particulier, l'absence d'approche européenne globale a conduit à la détermination de routes non optimisées, ce qui se traduit par une consommation inutile de kérosène et des dommages environnementaux qui pourraient être évités.

4.6.3   Le CESE doute de la nécessité d'adopter des mesures d'exécution destinées à assurer la cohérence entre les plans de vol et les créneaux aéroportuaires et la nécessaire coordination avec les régions limitrophes. Si l'objectif de la Commission consiste à mettre un terme aux abus observés au regard des règles actuelles régissant les créneaux aéroportuaires, objectif auquel le CESE souscrit, il peut être atteint en appliquant le cadre réglementaire actuel.

4.7   Réforme d'Eurocontrol

4.7.1   Le CESE insiste sur l'importance d'une réforme d'Eurocontrol, comme le propose la Commission («La réforme interne de l'organisation doit aligner les structures de gestion de celle-ci sur le ciel unique européen en vue de (i) satisfaire aux exigences des tâches de réseau; et (ii) renforcer la participation de l'industrie conformément à la politique commune des transports»).

4.7.2   Le CESE estime qu'Eurocontrol pourrait continuer de faire bénéficier l'UE de son expertise mais une transparence accrue s'impose quant à son rôle et aux modalités de son financement. Il convient notamment que les missions réalisées pour les États membres soient financées par des fonds publics. La recherche à long terme (au-delà de 2020) en particulier devrait être financée par des fonds publics plutôt que par des redevances de route.

4.7.3   Le CESE estime que, dans la mesure du possible, les services fournis par Eurocontrol (centre expérimental, institut des services de la navigation aérienne) devraient entrer en concurrence avec ceux fournis par d'autres prestataires et être gérés selon les principes du marché. Ces services d'Eurocontrol ne devraient pas être subventionnés par le budget général de l'agence ni par des redevances de route dans le cadre de la gestion du trafic aérien.

4.8   Le manque de capacité aéroportuaire est un obstacle reconnu à la réalisation des futurs objectifs de performance. Le CESE salue la reconnaissance de l'importance de la capacité aéroportuaire. Il se réjouit qu'elle constitue l'un des quatre piliers du ciel unique européen II et reconnaît en particulier la nécessité d'aligner la capacité aéroportuaire et la capacité de gestion du trafic aérien.

4.9   Services annexes de gestion du trafic aérien.

4.9.1   Si la nécessité de fournir des services annexes de gestion du trafic aérien à un niveau de professionnalisme aussi élevé que possible ne fait aucun doute, il importe de tenir compte du fait que leurs coûts sont désormais conséquents. Ainsi, le coût annuel des services météorologiques de route s'élèvent au total à un montant, excessif, d'environ 300 millions d'euros.

4.9.2   Le CESE demande une modification de l’Article 18 a qui implique à terme une restructuration du secteur et une ouverture de certains services aux lois du marché. Le CESE n’est pas hostile à la conduite d’une étude si celle-ci n’est pas explicitement destinée à l’ouverture de ces services à la concurrence. Le CESE rappelle que ce domaine de la gestion du trafic aérien à pour objectif primordial d’assurer la sécurité aérienne.

Le sens de l'urgence constaté parmi les acteurs concernés crée un environnement propice à la mise en œuvre de ces changements.

4.10.1   Il convient que la Commission européenne présente d'autres mesures rapidement après l'adoption du paquet CUE II.

4.10.2   Il convient qu'une équipe de gestion de projet compte également des spécialistes de la gestion du changement expérimentés. Le CUE II vise également à faire évoluer les mentalités et la culture. S'il atteint ses objectifs, le CUE apportera des solutions durables en matière de trafic aérien pour les prochaines générations.

Bruxelles, le 15 janvier 2009.

Le président du Comité économique et social européen

Mario SEPI


(1)  JO L 96 du 31.3.2004, p. 1.

(2)  JO L 96 du 31.3.2004, p. 10.

(3)  JO L 96 du 31.3.2004, p. 20.

(4)  JO L 96 du 31.3.2004, p. 26.

(5)  Plusieurs États voisins ont décidé d'intégrer l'Espace aérien européen commun pour bénéficier d'un facteur de croissance et d'emploi.


4.8.2009   

FR

Journal officiel de l’Union européenne

C 182/56


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de Règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement(CE) no 717/2007 concernant l'itinérance sur les réseaux publics de téléphonie mobile à l'intérieur de la Communauté et la directive 2002/21/CE relative à un cadre réglementaire commun pour les réseaux et services de communications électroniques»

COM(2008) 580 final — 2008/0187 (COD)

(2009/C 182/12)

Rapporteur général: M. HENCKS

Le 6 novembre 2008, le Conseil a décidé, conformément à l'article 95 du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur le thème

«Proposition de Règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (CE) no 717/2007 concernant l'itinérance sur les réseaux publics de téléphonie mobile à l'intérieur de la Communauté et la directive 2002/21/CE relative à un cadre réglementaire commun pour les réseaux et services de communications électroniques»

COM(2008) 580 final — 2008/0187 (COD).

Le 21 octobre 2008, le Bureau du Comité a chargé la section spécialisée «Transport, énergie, infrastructure et société de l'information» de préparer les travaux du Comité en la matière.

Compte tenu de l'urgence des travaux à mener, le Comité économique et social européen a désigné M. HENCKS comme rapporteur général lors de sa 450e session plénière, des 14 et 15 janvier 2009 (séance du 15 janvier 2009), et a adopté le présent avis par 132 voix pour et 1 voix contre.

1.   Conclusions

1.1   L’objectif déclaré du règlement (CE) 717/2007 qui était de faire en sorte que les utilisateurs des services mobiles en itinérance ne paient pas un prix excessif lorsqu’ils passent ou reçoivent des appels a été généralement atteint; 400 millions de consommateurs bénéficient désormais des effets d’un eurotarif.

1.2   Pourtant, selon la Commission l’évolution du tarif des services vocaux en itinérance communautaire n’est, depuis l’entrée en vigueur du règlement précité, pas assez convaincante pour laisser supposer que, sans prix réglementés, la concurrence s’exercera durablement sur les marchés de gros ou de détail au-delà de 2010; les prix de gros et de détail ne varient pas suffisamment en-dessous des niveaux maximaux fixés par le règlement pour permettre une saine concurrence.

1.3   Partant, afin que les consommateurs conservent l’assurance de ne pas payer un prix excessif lorsqu’ils passent ou reçoivent un appel en itinérance réglementé, la Commission propose principalement

de proroger le règlement 717/2007 jusqu’au 30 juin 2013,

de continuer à baisser, pendant la période de prorogation, les prix maximaux des appels par minute à raison de 0,03 euros par an,

de fixer des prix maximaux pour les SMS (gros et détail) et pour la transmission de données (prix de gros) en itinérance.

1.4   Le CESE approuve les nouvelles réductions des prix maximum pour les appels vocaux en itinérance qu’il juge proportionnées et appropriées.

1.5   Il approuve également l’introduction d’un eurotarif SMS maximum pour les prix SMS de détail, ainsi que l’introduction d’un plafond pour les prix de gros.

1.6   En ce qui concerne les services de transmission de données en itinérance, le CESE regrette que la proposition de réduction des prix se limite aux seuls services de données en gros, alors que les prix de détail sont également excessifs faute d’une pression concurrentielle suffisante.

1.7   Finalement le CESE considère comme absolument nécessaire de renforcer les droits d’accès des consommateurs à l’information afin d’élever leur niveau de protection et de transparence des prix.

2.   Historique

2.1   Le Conseil européen des 23 et 24 mars 2006 a conclu qu’il est essentiel de mettre en œuvre, tant au niveau européen que national, des politiques ciblées, efficaces et intégrées dans le domaine des technologies de l’information et des communications pour atteindre les objectifs de croissance économique et de productivité de la stratégie de Lisbonne révisée et, à cet égard, a souligné l’importance que revêt la réduction des frais des communications téléphoniques mobiles transfrontalières.

2.2   Auparavant la Commission s’était déjà, à maintes reprises, préoccupée des prix de détail excessifs à payer par les usagers des réseaux publics de communications mobiles lorsqu’ils utilisent leur téléphone portable à l’étranger à l’intérieur de la Communauté (frais d’itinérance communautaire), dus à un niveau élevé des prix de gros perçus par l’opérateur du réseau hôte étranger et, dans de nombreux cas, des marges élevées réalisées sur le prix de détail par l’opérateur du réseau de l’abonné.

2.3   Le cadre réglementaire pour les communications électroniques de 2002 n’a pas fourni aux autorités réglementaires nationales un outil suffisant pour prendre des mesures efficaces en ce qui concerne des prix excessifs d’itinérance communautaire.

2.4   Dans ces conditions l’Union européenne, par référence à l’article 95 du traité CE, est intervenue sur le marché par le biais d’un règlement (1), pour fixer pour la période du 1.9.2007 au 30.9.2010:

un plafond sur le prix de gros par minute,

un «eurotarif» maximum pour le marché de détail,

que les opérateurs d’un réseau mobile peuvent prélever au titre de la fourniture de services d’itinérance pour les communications mobiles vocales qui ont leur origine et leur terminaison à l’intérieur de la Communauté.

2.5   Dans son avis en la matière (2) le CESE a approuvé la démarche et a jugé que l’intervention de l’Union s'avère nécessaire, proportionnée et de plus, élève le niveau de protection des consommateurs, notamment en renforçant leur droit d'accès à l'information grâce aux mesures de transparence et en protégeant leurs intérêts économiques à travers la mise en place d’un mécanisme consistant en la fixation des plafonds tarifaires préventifs pour la fourniture des services d’itinérance en ce qui concerne les communications mobiles vocales entre États membres.

2.6   Dans sa prise de position, le Parlement européen a approuvé que l’approche commune soit établie pour une période limitée mais a demandé qu’elle puisse être prorogée ou amendée à la lumière d’un examen à effectuer par la Commission, avant le 3 décembre 2008, qui devrait également examiner l’impact du règlement sur les petits fournisseurs de téléphonie mobile dans la Communauté et sur leur position dans l’ensemble du marché communautaire de l’itinérance.

2.7   Etant donné qu’en plus de la téléphonie vocale, de nouveaux services de communication de données mobiles gagnent sans cesse davantage de terrain, le Parlement européen avait invité la Commission européenne à surveiller les développements du marché de l’itinérance des services de communication de données, y compris les messages SMS (short message service) et les MMS (multimédia messaging service) dans la Communauté.

3.   La proposition de la Commission

3.1   La proposition de règlement sous avis se base sur une communication (3) portant sur le réexamen du fonctionnement du règlement 717/2007 et sur deux documents de travail (4) de la Commission.

3.2   Selon ces documents les prix de gros et de détail des appels vocaux en itinérance ne varient pas suffisamment en-dessous des niveaux maximaux fixés par le règlement 717/2007 pour permettre une saine concurrence.

3.3   Les services des SMS et de données en itinérance représentent respectivement 12,3 % et 8,6 % des recettes dans le domaine de l’itinérance. Les prix des SMS en itinérance ont, d’une manière générale, peu varié pendant l’année écoulée, en dépit des pressions politiques exercées sur les opérateurs pour les inciter à baisser les prix et, par là, éviter une réglementation d’office.

3.4   Dès lors, comme le règlement 717/2007 n’a pas abouti à une saine concurrence et comme une relance de la concurrence par une augmentation du nombre d’opérateurs alternatifs est impossible vu la ressource rare que constituent les fréquences, la Commission s’est vue forcée de proposer:

de proroger le règlement actuel au-delà du 30 juin 2010 pour une nouvelle période de trois ans;

de fixer de nouvelles limites maximales des redevances pour des appels vocaux en itinérance que les opérateurs d’un réseau mobile peuvent prélever pendant la période de prorogation;

de préciser les exigences de facturation à la seconde;

d’avancer la date d’abaissement des plafonds sur les prix des appels vocaux en itinérance du 30 août 2009 au 1er juillet 2009;

d’étendre le champ d’application du règlement 717/2007 aux services des SMS en itinérance intracommunautaire;

de fixer un prix plafond pour le tarif de gros des services de données en itinérance et d’instaurer de la transparence et des mécanismes préventifs;

de promouvoir la transparence des prix.

4.   Observations spécifiques

4.1   Dans son avis concernant le règlement 717/2007 le CESE a vivement approuvé l’objectif de la Commission d’aboutir à une réduction des tarifs d'itinérance allant jusqu’à 70 %, ce qui entraînerait une économie pour le consommateur d'environ 5 milliards d'euros.

4.2   Par sa proposition d’une nouvelle baisse des prix maximaux repris ci-après, cet objectif sera dépassé en ce qui concerne les appels entrants (–76 %) alors que pour les appels sortants la baisse totale sera de 55,8 %.

Euro/min hors tva

Prix de gros

Diff. %

Prix de détail MOC  (5)

Diff. %

Prix de détail MTC  (6)

Diff. %

prix moyen avant 1.9.2007

 

 

0,7692

 

0,417

 

 

 

 

 

 

 

 

Règlement 717/2007

 

 

 

 

 

 

prix max. 1.9.2007-31.8.2008

0,30

 

0,49

 

0,24

 

prix max. 1.9.2008-30.6.2009 (7)

0,28

6,67

0,46

6,12

0,22

8,33

prix max. 1.7.2009 (7)-30.6.2010

0,26

7,14

0,43

6,52

0,19

13,64

 

 

 

 

 

 

 

Proposition de règlement COM(2008)580

 

 

 

 

 

 

prix max. 1.7.2010-30.6.2011

0,23

11,54

0,40

6,98

0,16

15,79

prix max 1.7.2011-30.6.2012

0,20

13,04

0,37

7,50

0,13

18,75

prix max 1.7.2012-30.6.2013

0,17

15,00

0,34

8,11

0,10

23,75

 

 

 

 

 

 

 

baisse totale

 

 

0,4292

55,79

0,317

76,01

4.3   Le CESE approuve les nouvelles mesures et félicite la Commission pour son initiative jugée nécessaire et proportionnée, qui, en plus renforce les droits d’accès des consommateurs à l’information afin d’élever leur niveau de protection et de transparence des prix.

4.4   Le CESE note avec satisfaction que selon les informations données par la Commission les réductions tarifaires introduites par le règlement 717/2007 n’ont pas entraîné de diminution de l’emploi, ni une détérioration des conditions de travail dans le secteur.

4.5   Dans ses documents d’analyse, la Commission fait la différence entre les formules de paiement des services vocaux et SMS «prépaid» et «postpaid». Or, cette différence n’est pas prise en considération dans la structure tarifaire fixée ou proposée par la Commission, alors que pour les opérateurs, la plus-value économique varie substantiellement entre ces deux catégories.

4.6   Par ailleurs, le CESE estime que la revendication du Parlement européen demandant d’examiner l’impact du règlement sur les petits fournisseurs de téléphonie mobile dans la Communauté et sur leur position dans l’ensemble du marché communautaire de l’itinérance, n’a été traitée que vaguement.

4.7   Dans son avis concernant le règlement 717/2007 le CESE avait exprimé sa crainte que l'application du règlement n'entraîne un réajustement des tarifs des communications mobiles nationales et n’amène les opérateurs, dans certaines circonstances, à récupérer les coûts en augmentant les recettes générées par d'autres services.

4.8   Depuis la mise en vigueur des premiers prix maximaux administrés, la Commission n’a, selon ses dires, constaté aucune augmentation des tarifs nationaux qui aurait pu être spécifiquement imputée au règlement 717/2007. Force est toutefois de constater que certains opérateurs ont fortement majoré les prix d’itinérance internationale au départ ou à l’arrivée de pays tiers hors UE qui échappent à la compétence de la Commission ou des autorités de régulation nationales.

4.9   En ce qui concerne la facturation de la durée des appels, même si les plafonds du tarif de détail fixés par le règlement sont exprimés en prix par minute, la solution privilégiée par la Commission consistait à permettre aux opérateurs de prélever une redevance maximale d’établissement d’appel équivalent aux 30 premières secondes d’un appel en itinérance passé, puis de facturer à la seconde.

4.10   Or, beaucoup d’opérateurs ont continué leurs anciennes pratiques, ou même ont changé leur structure tarifaire, pour facturer par tranches supérieures à 30 secondes allant jusqu’à 60 secondes. Il a été constaté que la durée facturée des appels sortants dépasse en moyenne de 24 % la durée effective desdits appels.

4.11   La nouvelle proposition de la Commission impose, à partir du 1er juillet 2009, la tarification à la seconde de tout appel itinérance réglementé, passé ou reçu, avec possibilité toutefois d’appliquer une première tranche incompressible de facturation ne dépassant pas 30 secondes. Cette tranche de facturation de 30 secondes se justifie par le fait que tout appel, aussi court soit-il, fait intervenir des moyens techniques importants.

4.12   Or cette dérogation à la règle générale de la facturation à la seconde ne vaut que pour les appels sortants, alors que les appels entrants nécessitent également un support technique substantiel.

4.13   La proposition de la Commission avance la date d’abaissement des plafonds sur les prix de gros et de détail des appels vocaux en itinérance du 30 août au 1er juillet 2009 afin que les utilisateurs bénéficient déjà des nouveaux tarifs au cours de la période où la demande est la plus forte. Ceci présuppose que le règlement sous avis soit mis en vigueur dans les meilleurs délais.

4.14   La proposition sous avis introduit à partir du premier juillet 2009 jusqu’au 30 juin 2013 un «eurotarif» SMS maximum qui ne peut pas dépasser 0,11 euro et un plafond pour les prix de gros de 0,04 euro.

4.15   En ce qui concerne le service des données en itinérance, la proposition de la Commission ne prévoit pas, à ce stade, de réglementation du niveau du prix de détail, mais fixe un plafond prix de gros moyen arrêté à 1EUR/MB à partir du 1.7.2009. Or, la Commission constate dans les considérants du règlement sous avis un niveau élevé du tarif de détail des services de données en itinérance et une concurrence insuffisante sur ce marché ce qu’elle qualifie de préoccupant, ceci d’autant plus que selon ses dires la transparence des prix laisse à désirer.

4.16   Dans ces conditions, le CESE doute fortement que le recours à d’autres moyens pour accéder aux services de données, comme l’accès public sans fil à internet, puisse exercer la pression concurrentielle requise. Le CESE aurait préféré que la Commission intervienne également de suite sur les prix de ce marché.

4.17   D’un autre côté la proposition prévoit l’introduction d’un mécanisme interrompant le service à l’atteinte d’un seuil librement définissable par le client, ainsi qu’un avertissement par message automatisé à l’approche de ce seuil.

4.18   Une telle démarche, aussi pertinente soit-elle, pose des problèmes techniques substantiels et risque de mettre le client dans une situation de blocage s’il ne dispose pas de la possibilité d’outrepasser par une simple manipulation le seuil qu’il s’est lui-même fixé. Par ailleurs elle n’est guère en ligne avec le souci de transparence et d’orientation des tarifs en fonction des coûts. Le CESE regrette que ces questions n’aient pas été traitées dans l’étude d’impact afférente.

4.19   La proposition de la Commission vise également à promouvoir la transparence des prix. Pour ce faire elle étend l’obligation imposée aux fournisseurs de téléphonie mobile de donner à leurs abonnés itinérants des informations tarifaires personnalisées lorsqu’ils entrent dans un autre État membre, également aux SMS et aux services de données en itinérance.

4.20   Le CESE approuve cette mesure étant entendu qu’il faudra éviter des envois multiples de messages d’informations lors de chaque passage des frontières et que, en plus, il faudra veiller à ce que ces informations sur les prix soient clairs, compréhensibles et comparables avec des offres alternatives.

Bruxelles, le 15 janvier 2009.

Le Président du Comité économique et social européen

Mario SEPI


(1)  Règlement(CE) no 717/2007 du Parlement européen et du Conseil du 27 juin 2007 concernant l’itinérance sur les réseaux publics de téléphonie mobile à l’intérieur de la Communauté et modifiant la directive 2002/21/CE.

(2)  Rapporteur: M. Hernandez Bataller, JO C 324 du 30.12.2006, p. 42.

(3)  COM(2008) 579 final.

(4)  SEC(2008) 2489 et SEC(2008) 2490.

(5)  MOC = mobile originating call/appel sortant.

(6)  MTC = mobile terminal call/appel entrant.

(7)  La Commission propose d’avancer de 2 mois la date fixée initialement au 30 août 2009.


4.8.2009   

FR

Journal officiel de l’Union européenne

C 182/60


Avis du Comité économique et social européen sur le thème «Relever les défis de l'approvisionnement en pétrole»

(2009/C 182/13)

Rapporteur général: M. OSBORN

Le 21 novembre 2008, le Parlement européen a décidé, conformément à l'article 262 du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur le thème

«Relever les défis de l'approvisionnement en pétrole».

Le 12 novembre 2008, le Bureau du Comité a chargé la section spécialisée «Transports, énergie, infrastructures, société de l'information» de préparer les travaux du Comité en la matière.

Vu la nature urgente des travaux, le Comité économique et social européen a désigné M. OSBORN rapporteur général lors de sa 450e session plénière des 14 et 15 janvier 2009 (séance du 14 janvier 2009) et a adopté le présent avis par 140 voix pour, 6 voix contre et 2 abstentions.

1.   Résumé et conclusions

1.1   Les deux facteurs essentiels qui façonneront l'avenir du secteur pétrolier au cours des prochaines décennies sont:

l'accélération du changement climatique, largement due à l'augmentation des émissions de CO2 qui sont liées à l'utilisation de combustibles fossiles,

le caractère limité des réserves mondiales et les difficultés techniques et politiques croissantes à obtenir un accès sûr et aisé aux réserves encore disponibles.

1.2   Actuellement, l'interaction entre ces deux facteurs entraîne le monde dans une situation de plus en plus instable, étant donné que la hausse des émissions carboniques est à la base de l'accélération du changement climatique et que la consommation de pétrole toujours plus importante nous rapproche du point où les contraintes d'approvisionnement pourraient causer de graves pénuries et des perturbations économiques sérieuses.

1.3   La seule manière efficace de sortir de la crise énergétique sera de veiller à ce que l'économie mondiale procède rapidement aux transformations nécessaires dans sa base d'approvisionnement énergétique afin de mettre un terme à la dépendance excessive qui prévaut actuellement vis-à-vis de l'utilisation de combustibles fossiles. Il est en effet nécessaire que la demande mondiale de pétrole cesse d'augmenter dans un délai de quelques années, pour ensuite diminuer progressivement et atteindre des niveaux bien plus bas d'ici le milieu de ce siècle. Ce défi revêt une importance toute particulière pour l'Europe, étant donné l'ampleur de sa dépendance aux importations d'hydrocarbures.

1.4   Les nouvelles sources d'hydrocarbures se font de plus en plus rares et sont souvent associées à divers problèmes politiques et environnementaux. Le monde en général et l'Europe en particulier se porteront mieux et seront plus sûrs si la dépendance au pétrole peut être réduite.

1.5   D'ici 2050, la demande européenne devrait être réduite d'au moins 50 %, voire, probablement, de beaucoup plus encore.

1.6   Le marché est incapable de réaliser par lui même l'indispensable transformation par laquelle nous nous distancierons du pétrole.

1.7   Les mesures fiscales visant à faire monter le prix du pétrole (1) (et celui d'autres combustibles fossiles) par rapport à d'autres sources d'énergie par le biais de taxes sur le carbone ou sur le pétrole ou de systèmes d'échange de permis d'émission ont un rôle important à jouer et devraient être développées plus avant. Cependant, d'autres dispositions seront également nécessaires, qui devront être différenciées secteur par secteur.

1.8   Le système d'échange de droits d'émission de l'Union européenne devrait être développé de manière à établir un prix-plancher pour le carbone afin de garantir une plus grande certitude au marché. Ce prix-plancher serait alors progressivement relevé au cours des trois prochaines décennies, pour soumettre les divers opérateurs à une pression du marché qui augmente constamment et les amener à privilégier d'autres sources d'énergie que les combustibles fossiles.

1.9   Dans le secteur des transports, les changements majeurs qui s'imposent sont:

travailler à un aménagement des villes, bourgades et autres implantations afin de réduire tant que faire se peut la longueur et la durée des trajets,

améliorer en permanence l'efficacité énergétique des avions, des bateaux, des trains et des véhicules routiers de tous types et leurs performances en matière d'émissions de carbone,

privilégier

le train plutôt que l'avion,

les transports publics plutôt que privés,

les véhicules électriques ou fonctionnant à l'hydrogène plutôt que ceux dotés d'un moteur à combustion interne,

la bicyclette et la marche à pied, chaque fois que possible.

1.10   Dans les maisons d'habitation et les autres bâtiments, l'utilisation des hydrocarbures (et des autres combustibles fossiles) à des fins de chauffage, de refroidissement ou de cuisson des aliments devra progressivement être remplacée par l'électricité provenant de sources vertes.

1.11   S'agissant de la production d'énergie, le recours aux sources d'énergie renouvelables doit être développé aussi rapidement que possible. Toutefois, les combustibles fossiles resteront inévitablement, pendant de nombreuses années encore, la principale source de production énergétique et c'est pourquoi il est vital de développer et de mettre en place dans les meilleurs délais les technologies de captage et stockage du CO2. Si l'utilisation du pétrole comme combustible pour la production d'électricité devrait diminuer, il convient d'appliquer, là où on l'utilise toujours à cette fin, la technologie de captage du CO2 comme pour le charbon.

1.12   Dans plusieurs pays, une nouvelle génération de centrales nucléaires pourrait avoir un rôle à jouer pour faciliter la transition vers une économie à faible taux d’émissions de carbone. Il importe toutefois de veiller à ce que les investissements dans ce secteur ne se traduisent pas par un détournement de ressources et d'attention politique au détriment du développement des sources d'énergie renouvelables.

1.13   L'Union européenne et ses États membres ont joué très tôt un rôle moteur pour réorienter les politiques dans la bonne direction sur ces différentes questions. Ils doivent cependant aller plus loin et accélérer le mouvement. Il importe également qu'ils s'efforcent de susciter un engagement similaire de la part d'autres pays développés et consacrent des ressources financières substantielles à la promotion d'efforts comparables dans les pays en développement.

1.14   La société civile doit être associée beaucoup plus largement et systématiquement au processus qui vise à sensibiliser aux changements nécessaires et à les faire accepter par la population, plus particulièrement dans le cas de ceux qui sont susceptibles d'influer sur les modes de vie et les comportements.

1.15   L'industrie pétrolière mondiale devra faire face à un double défi dans l'avenir:

aider le monde à s'adapter à une situation de baisse progressive de la dépendance aux hydrocarbures,

mettre à profit les ressources énormes dont elle dispose en termes de connaissance, d'expertise et de moyens financiers afin de devenir (ou d'aider les autres à devenir) des pionniers des nouvelles technologies non utilisatrices de combustibles fossiles.

2.   Émissions carboniques et changement climatique

2.1   Le risque de changements climatiques dévastateurs produits par des émissions de plus en plus importantes de gaz à effet de serre constitue l'un des plus grands défis mondiaux du vingt et unième siècle.

2.2   Le Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC) a établi que pour limiter l’augmentation de la température mondiale causée par les rejets de gaz à effet de serre à un plafond de 2 C au dessus des températures de l'ère préindustrielle, les émissions de CO2 devront cesser de croître dans un délai de 5 à 10 ans pour ensuite baisser progressivement de 50 à 85 % par rapport aux niveaux de 2000 d'ici 2050.

2.3   Cet effort nécessitera de transformer radicalement les modes de consommation et de production actuels à travers le monde, à l'échelle d'une nouvelle révolution industrielle. Les réductions dans le niveau des émissions provenant de la combustion d'hydrocarbures devront jouer leur rôle dans la réduction globale du carbone. Pour réduire progressivement la demande mondiale d'hydrocarbures au cours des quatre prochaines décennies, il serait utile d'établir une feuille de route ou un cadre de référence qui fasse consensus, avec, au sein de ce dispositif, une trajectoire spécifique pour l'Europe. D'ici 2050, il est nécessaire de faire baisser la demande européenne de pétrole d'au moins 50 %, voire de beaucoup plus probablement.

2.4   À l'heure actuelle, la courbe de la consommation mondiale de pétrole poursuit sa hausse d'année en année. Cette croissance est essentiellement due aujourd'hui à la rapide expansion de la demande des économies émergentes. Si celle de l'Europe est actuellement proche de la stabilisation, nous n'avons cependant pas encore entamé la trajectoire décroissante qui sera nécessaire.

2.5   Si le type de mesures que l'Europe met aujourd'hui en place dans le cadre de son paquet énergétique constitue un point de départ, la Commission devra, de l'avis du Comité, très bientôt proposer un second paquet pour réaliser les niveaux de réduction adéquats.

2.6   La demande européenne représente moins de 20 % de la demande mondiale de pétrole. Il sera également important de veiller, dans le cadre des négociations en cours sur le changement climatique, à ce que les autres pays développés et les économies émergentes prennent des engagements similaires de réduire la leur.

3.   L'approvisionnement en pétrole

3.1   Les ressources pétrolières du monde sont limitées et ne dureront pas éternellement. Si l'on continue de découvrir de nouveaux gisements, force est de constater qu'ils ont tendance à être de moindre taille et plus difficilement exploitables et se situent parfois dans des régions du monde politiquement instables ou hostiles. Leur exploitation pourrait coûter plus cher.

3.2   Plusieurs nouveaux gisements sont situés dans des zones écologiquement fragiles comme l'Arctique. D'autres, tels les sables bitumineux canadiens, seront plus difficiles à exploiter et le processus même de leur extraction produira des émissions de CO2 plus importantes. Il serait souhaitable d'éviter, dans la mesure du possible, de recourir à de telles sources ou, au moins, de postposer leur exploitation jusqu'à ce qu'il soit possible de mettre en place des mesures plus efficaces de sauvegarde environnementale et de captage du carbone.

3.3   L'Europe est confrontée à des problèmes particuliers en matière d'approvisionnement en hydrocarbures. Les ressources présentes sur son sol sont en voie d'épuisement et sa dépendance aux importations — qui représentent maintenant plus de 80 % de son approvisionnement pétrolier — s'accroît.

3.4   La position de l'Europe pourrait devenir plus délicate à l'avenir. Les approvisionnements en pétrole pourraient devenir moins disponibles, ou seulement à des prix bien plus élevés. La volatilité des fournitures et des prix pourrait aussi se manifester plus fréquemment.

3.5   Ces problèmes liés à l'approvisionnement ne rendent que plus urgente la nécessité pour l'Europe d'avancer sur la voie d'une réduction de sa dépendance au pétrole. Plus la réduction de notre demande globale et la diversification vers d'autres sources d'énergie plus disponibles se feront rapidement, plus grandes seront notre indépendance et notre sécurité et plus forte notre capacité à faire pression sur les autres intervenants pour qu'ils contribuent à faire baisser la demande afin de lutter contre le changement climatique.

4.   Que faut-il faire? Diversifier vers d'autres sources d'énergie que le pétrole

4.1   Si le pétrole est essentiellement utilisé dans le secteur des transports, il l'est aussi, pour une part significative, à des fins de chauffage des habitations et de cuisson des aliments, de chauffage et de refroidissement d'autres bâtiments et de production énergétique, ainsi que comme matière première pour l'industrie pétrochimique. Dans tous ces secteurs, il sera nécessaire de réduire ou de supprimer la dépendance aux hydrocarbures aussi rapidement que possible.

4.2   Secteur des transports — Trois changements s'imposent

travailler à un aménagement des villes, bourgades et autres implantations afin de réduire tant que faire se peut la longueur et la durée des trajets,

améliorer en permanence l'efficacité énergétique des avions, des bateaux, des trains et des véhicules routiers de tous types et les performances sur le plan des émissions de carbone,

privilégier

le train plutôt que l'avion,

les transports publics plutôt que privés,

les véhicules électriques ou fonctionnant à l'hydrogène plutôt que ceux dotés d'un moteur à combustion interne,

la bicyclette et la marche à pied, chaque fois que possible.

4.3   Il se peut que l'aviation doive demeurer un utilisateur privilégié d'hydrocarbures pour au moins les deux ou trois décennies à venir afin de satisfaire les besoins fondamentaux. Toutefois, ce secteur devrait procéder à toutes les améliorations possibles sur le plan de l'efficacité et le développement des services ferroviaires à grande vitesse devrait être préféré au transport aérien partout où il est possible de la faire. Il convient également de décourager toute expansion supplémentaire du transport aérien et des aéroports.

4.4   S'agissant du transport maritime, il y a lieu de chercher continuellement à améliorer son efficacité et d'encourager activement les idées novatrices telles qu'une propulsion auxiliaire utilisant le vent pour réduire la consommation de carburant des navires.

4.5   Consommation d'hydrocarbures par les ménages

la combustion directe de combustibles fossiles dans les foyers, chaudières ou cuisinières devra être progressivement abandonnée et l'électricité (tirée d'une production locale et renouvelable tout autant que du réseau) ou le bois issu de la culture durable devront devenir les combustibles normaux des ménages. Un calendrier doit être établi pour cette transition.

4.6   Pétrole et entreprises

là où les processus industriels reposent actuellement sur l'utilisation des combustibles fossiles comme matière première, il conviendra de procéder à une analyse secteur par secteur afin de déterminer dans quelle mesure les émissions carboniques produites par ces processus peuvent être capturées et stockées et dans quels domaines ces usages peuvent céder la place à des processus industriels qui ne recourent pas aux énergies fossiles.

4.7   Production d'électricité

dans le domaine de la production électrique, il conviendra de déployer de gros efforts afin de développer aussi rapidement que possible l'utilisation des sources d'énergie renouvelables de tous types. Les objectifs que s'est fixés l'Europe sont un bon début mais il faudra intensifier cette action pour commercialiser les différentes technologies à des prix abordables.

4.8   Le charbon (tout comme, dans une moindre mesure, d'autres combustibles fossiles) restera encore pendant plusieurs décennies une matière première importante pour la production d'électricité. Le captage et le stockage du CO2 devraient être développés dès que possible. Ces technologies devraient ensuite devenir obligatoires également pour l'ensemble des centrales utilisant le pétrole.

4.9   Une nouvelle génération de centrales nucléaires pourrait avoir un rôle à jouer. Toutefois, la technologie nucléaire connaît des problèmes spécifiques de durabilité et il importe de veiller à ce que les investissements dans ce secteur ne se traduisent pas par un détournement de ressources et d'attention politique au détriment du développement vigoureux des sources d'énergie renouvelables et de l'efficacité énergétique, qui constitue l'objectif principal de la transition.

4.10   Afin d'aider tous les acteurs concernés à préparer ces changements, il serait utile de définir des pistes de référence indiquant les niveaux d'économies à atteindre dans chaque sous-secteur utilisant le pétrole ainsi que des calendriers vraisemblables pour ces transitions, tant au niveau mondial que régional.

5.   Que faut-il faire? Prendre les mesures politiques nécessaires pour réduire la dépendance aux combustibles fossiles et encourager la diversification de l'approvisionnement énergétique

5.1   Parmi les mesures nécessaires afin d'encourager et de promouvoir les transformations, nombreuses sont celles qui sont déjà bien connues. Le train de mesures que contient le paquet énergétique adopté récemment par la Commission couvre beaucoup de ces points et devrait constituer une bonne base de départ pour les développements ultérieurs. Partout à travers le monde, y compris en Europe, l'éventail des mesures doit être étendu et appliqué de manière plus vigoureuse et pressante.

5.2   Mesures fiscales visant à intégrer le coût réel des émissions de carbone

le prix des combustibles fossiles devrait intégrer en totalité le coût de la charge que les émissions de CO2 représentent pour le monde. À cette fin, il conviendrait soit de taxer les substances produisant des émissions carboniques (comme l'essence), soit de mettre en place un système de rationnement et d'échange de permis d'émission, soit encore de combiner les deux mécanismes.

5.3   Il est essentiel de développer plus avant, avec détermination, le système d'échange de droits d'émission de l'Union européenne afin qu'il constitue un signal clair et stable du marché en faveur d'une réduction de l'utilisation de combustibles fossiles et d'une diversification en faveur d'autres types de combustibles. Les anomalies doivent être rectifiées et les exemptions limitées. Plus encore, le système doit être étendu au reste du monde développé, tout comme, dès que faire se pourra, aux économies émergentes. Il devrait s'agir là d'un objectif majeur dans le cadre des négociations internationales relatives au changement climatique.

5.4   Il pourrait être souhaitable de développer le système d'échange de droits d'émission de manière à établir un prix-plancher pour le carbone, afin de garantir une plus grande certitude au marché. Ce prix-plancher pourrait alors être progressivement relevé au cours des trois prochaines décennies, pour soumettre les divers opérateurs à une pression du marché qui augmente constamment et les amener à privilégier d'autres sources d'énergie que les combustibles fossiles.

5.5   Mesures réglementaires

les mesures fiscales ne suffisent pas à elles seules pour garantir l'indispensable transition grâce à laquelle nous nous éloignerons du pétrole. La demande est trop rigide et on ne peut augmenter trop rapidement les prix des produits pétroliers, à cause de contraintes politiques. Il convient de mettre sur pied un vaste programme de mesures réglementaires afin de renforcer les normes et d'évincer les processus et les produits inefficaces. Il est également nécessaire de soutenir la recherche, le développement et l'introduction des nouvelles technologies.

5.6   S'agissant de l'efficacité énergétique, un programme global et urgent s'impose pour renforcer les normes relatives à l'ensemble des produits et des services consommateurs d'énergie. L'Europe a encore du chemin à parcourir, tant en ce qui concerne la définition des normes que pour en garantir la mise en œuvre. Le chauffage et le refroidissement des bâtiments, par exemple, sont toujours extrêmement inefficaces d'un point de vue énergétique, d'où la nécessité de mettre en place un programme d'action déterminé pour garantir des améliorations rapides.

5.7   Les normes visant à améliorer les émissions carboniques produites par les véhicules sont particulièrement importantes. Tout en se félicitant des nouvelles normes qui sont à présent adoptées, le Comité préconise que l'on se hâte d'en définir d'autres, encore plus strictes pour les années à venir, afin d'établir un cadre de programmation solide auquel l'industrie automobile devra s'adapter. La prochaine étape à laquelle il convient de s'atteler d'urgence est l'établissement d'un programme drastique du même type pour améliorer progressivement les émissions des véhicules utilitaires et des poids lourds. Ici aussi, les actions lancées au sein de l'Europe devront aller de pair avec des efforts comparables dans d'autres parties du monde.

5.8   Recherche, développement et soutien financier

parmi les nouvelles technologies nécessaires, plusieurs en sont toujours au stade du développement et nécessiteront des aides et des encouragements considérables de la part du secteur public si on veut leur assurer une introduction précoce et une large diffusion. Dans cette catégorie figurent les technologies de captage et de stockage du carbone, la poursuite du développement des énergies renouvelables, la troisième et la quatrième génération de ces énergies, les véhicules électriques (ou propulsés à l'hydrogène) et les infrastructures nécessaires à leur utilisation. Toutes ces technologies requièrent une aide publique considérable, pour que leur lancement soit mené à bonne fin dès que possible dans le monde entier.

5.9   Dans le secteur ferroviaire, des investissements majeurs sont nécessaires pour étendre l'électrification et faire du voyage en train la solution de substitution privilégiée à l'avion pour la plupart des déplacements de courtes distances en Europe et dans d'autres parties du monde.

5.10   Impliquer la société civile

de nombreux efforts devront encore être déployés afin que le grand public, les entreprises, les syndicats et les autres organisations de la société civile deviennent partenaires de l'effort commun et y soient associés.

Il convient d'encourager et d'inciter les citoyens à apporter leur contribution à cet égard, par exemple en améliorant l’efficacité énergétique de leur logement et de leur voiture, en utilisant des formes d’énergie plus vertes pour s’éclairer et se chauffer, en achetant des biens et services plus efficaces du point de vue énergétique et en réduisant l'impact que leurs déplacements et leurs vacances produisent en émissions carboniques. De l'avis du Comité, une proportion croissante de l’opinion publique et des organisations de la société civile serait déjà prête et désireuse d’agir à condition de recevoir, au sujet des attentes placées en elles, un signal politique fort et concret qui soit accompagné de mesures incitatives appropriées.

Beaucoup de collectivités locales et régionales ont déjà démontré leur clairvoyance à ce propos et fait preuve d'un courageux esprit d'initiative politique en la matière. Elles doivent être encouragées et incitées à aller plus loin.

Il convient également d'inciter les entreprises à redoubler d'efforts. Elles doivent être invitées et incitées à améliorer en permanence l'efficacité énergétique de leurs activités et à utiliser de l'énergie produite à partir de sources à faible intensité carbonique. Il faudrait faire un usage plus systématique et plus vigoureux de la réglementation afin d'améliorer les performances énergétiques de tous les types de produits et de services.

Les syndicats ont eux aussi un rôle important à jouer. Nombre de leurs membres sont en première ligne quand il s'agit de mettre en œuvre des améliorations en matière d'efficacité énergétique et de diffuser des informations pratiques; aussi convient-il de reconnaître et d'encourager leur contribution potentielle. Bien gérées, les nouvelles méthodes de production devraient fournir autant de possibilités d'emploi que les anciens schémas productifs à forte intensité carbonique, tout en préservant de bonnes conditions de travail.

5.11   Toutes ces mesures devront être adoptées et mises en œuvre avec détermination au sein de l'UE afin de réduire la demande de carburants fossiles en général et de pétrole en particulier. Il conviendra aussi de les promouvoir auprès d'autres partenaires du monde développé, ainsi que, de plus en plus, dans les économies émergentes et en développement.

5.12   Les économies émergentes et les pays en développement peuvent eux-mêmes devenir des innovateurs et des pionniers en matière d'économie à faible intensité carbonique. Cette tendance devrait être encouragée activement. Nulle part dans le monde, les politiques commerciales ne devraient jamais servir à protéger des processus industriels plus anciens, moins efficaces en matière d’émissions de composés carbonés.

6.   Adaptations dans l'industrie pétrolière et gazière

6.1   Tant que l'économie mondiale continuera à être dépendante du pétrole, il est claire que le secteur pétrolier se devra d'œuvrer à répondre à cette demande. Néanmoins, s'en tenir au maintien du statu quo ne constituera pas une réponse adéquate de sa part. Dans plusieurs domaines, l'industrie pétrolière mondiale peut et doit contribuer à la transition vers une économie à moindre taux d'émission de carbone. Elle pourrait:

reconnaître la nécessité d'une transition de l'économie mondiale vers une moindre utilisation au cours des décennies à venir et mener une réflexion, élaborer des projets et adopter des comportements en ce sens,

continuer d'améliorer ses performances en matière d'émissions de carbone en ce qui concerne ses propres activités,

dans ses produits, substituer, quand l'opération est réalisable et viable, la biomasse et d'autres ressources neutres du point de vue des émissions à l'utilisation de carburants fossiles,

mettre à profit ses énormes ressources en compétences et moyens financiers afin de soutenir d'autres aspects de la transition, ainsi que le développement et le déploiement dans les meilleurs délais du captage et du stockage du carbone,

collaborer étroitement avec le secteur automobile en vue d'aider à accélérer la transition vers des véhicules à émissions de carbone faibles ou nulles.

6.2   Pour leur part, l'Union européenne, les États membres et les autres gouvernements devraient entretenir un dialogue soutenu avec l'industrie pétrolière mondiale afin de chercher à s'entendre sur la voie qu'il y a lieu de tracer pour réduire l'utilisation du pétrole et de définir des mesures incitatives adéquates en vue d'encourager le secteur (ou, si besoin est, de le contraindre) à s'engager dans les cinq directions décrites ci-dessus.

6.3   En matière d'investissements, le Comité aimerait voir le secteur pétrolier déployer plus d'efforts pour contribuer à la transition vers un monde où la demande de pétrole serait réduite, et moins de moyens pour développer davantage de sources pétrolières marginales, en particulier quand il est clair qu'elles-mêmes infligeront de graves dommages à l'environnement.

6.4   Le Comité est d'avis qu'il existe une certaine marge de manœuvre pour le développement des biocarburants (en particulier pour une utilisation accrue de la biomasse) mais que les critères de durabilité doivent être appliqués en la matière et risquent de limiter la portée de la diffusion de cette technologie. Il semble prometteur d'utiliser la biomasse comme source de chaleur pour la pyrolyse, couplée à la production de biochar (ou charbon de bois) applicable aux sols pour les amender et y retenir du gaz carbonique et d'amélioration des sols, semble prometteuse. Dans le secteur des transports, l'électricité et l'hydrogène semblent plus promises à un plus grand avenir comme solutions à long terme. Il y aurait lieu de poursuivre les discussions soutenues qui sont menées avec les différents secteurs industriels concernés dans le but d'essayer de définir des pistes optimales pour ces transitions.

6.5   La hausse du prix du pétrole constitue déjà pour l'industrie un puissant incitant financier pour la pousser à améliorer l'efficacité de l'extraction et du raffinage et minimaliser les frais de transport. La directive relative à la qualité des carburants apportera de nouvelles mesures incitatives en ce sens et encouragera l'introduction des biocarburants.

6.6   La taxation des produits pétroliers rapporte déjà des revenus considérables aux gouvernements. Cette tendance s'accentuera une fois que les permis d'émission seront vendus aux enchères sur une plus vaste échelle. Une partie de ces recettes devrait être consacrée à soutenir le développement des nouvelles technologies énergétiques dont nous avons besoin. Une autre option envisageable consisterait à encourager l'industrie pétrolière à prendre elle-même une plus grande part dans la transition vers une économie à faible taux d'émission de carbone en lui offrant des dégrèvements fiscaux ou des possibilités fiscales d'amortissements pour les investissements nécessaires.

Bruxelles, le 14 janvier 2009.

Le Président du Comité économique et social européen

Mario SEPI


(1)  Le CESE aborde la question des prix du pétrole plus en détails dans son avis CESE 348/2008 Relever le défi de la hausse des prix du pétrole dans lequel le Comité réagit à la communication de la Commission «Relever le défi de la hausse des prix du pétrole» pas encore publié au JO.


4.8.2009   

FR

Journal officiel de l’Union européenne

C 182/65


Avis du Comité économique et social européen sur la «Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — Un agenda social renouvelé: opportunités, accès et solidarité dans l’Europe du XXIe siècle»

COM(2008) 412 final

(2009/C 182/14)

Rapporteuse: Mme REGNER

Corapporteur: M. PEZZINI

Le 2 juillet 2008, la Commission européenne a décidé, conformément à l'article 262 du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la

Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — Un agenda social renouvelé: opportunités, accès et solidarité dans l’Europe du XXIe siècle

COM(2008) 412 final

La section spécialisée «Emploi, affaires sociales, citoyenneté», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 10 décembre 2008 (rapporteuse: Mme REGNER, corapporteur: M. PEZZINI).

Lors de sa 450e session plénière des 14 et 15 janvier 2009 (séance du 14 janvier 2009), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 162 voix pour, 21 voix contre et 25 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1   Le CESE se félicite de la communication de la Commission sur un agenda social renouvelé et, au vu des autres initiatives sociales actuellement menées, considère qu'elle constitue un pas vers la modernisation de l'État-providence européen qui s'attache à donner aux individus les moyens de réaliser leur potentiel et à conférer à l'Union européenne une dimension sociale plus marquée.

1.2   Au vu de la très grave crise financière et économique internationale, il est plus important que jamais que l'Union européenne s'engage en faveur d'une Europe sociale forte et compétitive. Le CESE se prononce donc résolument, nonobstant un agenda social renouvelé, en faveur d'un véritable programme d'action sociale.

1.3   La communication de la Commission se concentre principalement sur la réaction à la nouvelle situation. Il s'agit essentiellement d'adapter la politique sociale au changement intervenant dans les sociétés, mais surtout dans l'économie et sur le marché du travail. L'Europe a besoin d'urgence de politiques de l'emploi modernes et de systèmes sociaux solides, durables et favorables à l'emploi.

1.4   Le CESE constate notamment la réticence de la Commission à continuer à développer des normes minimales en matière de droit du travail. Par le passé, ces normes étaient l'épine dorsale de la politique sociale européenne et de l'amélioration des conditions de vie et de travail. À l'avenir aussi, elles devraient constituer une part importante de tout agenda social dans les situations où elles sont nécessaires et judicieuses.

1.5   Le CESE constate que le dialogue social reste l'un des principaux piliers du modèle social européen, et ce tant au niveau national qu'au niveau européen. Les partenaires sociaux jouent un rôle clé pour toutes les questions relatives aux mutations sociales et devraient par conséquent être associés à l'élaboration, à la mise en œuvre et au suivi de toutes les mesures de l'agenda social renouvelé. Le dialogue avec la société civile constituera à l'avenir un autre élément central de cet agenda.

1.6   Il importe également de renforcer la méthode ouverte de coordination, notamment en y introduisant dans une plus large mesure des impératifs quantitatifs et qualitatifs. À cet égard, le CESE recommande une plus grande participation du Parlement européen et une prise en compte obligatoire d'orientations ou d'objectifs sociaux dans le cadre de la passation des marchés publics.

1.7   Le CESE estime que lors de l'application, de l'harmonisation et du suivi des principes communs de flexicurité, l'Union doit soutenir les États membres, en coopération étroite avec les partenaires sociaux. Le CESE souhaite donc voir émerger un lien plus fort entre le débat sur la flexicurité et le développement du dialogue social à tous les niveaux, et des négociations collectives aux niveaux appropriés.

1.8   Il conviendrait, selon le Comité, d'assortir les mesures communautaires visant à promouvoir l'égalité des sexes, à soutenir les personnes souffrant de handicaps, à lutter contre l'exclusion sociale et à promouvoir l'inclusion active, d'un renforcement des mesures politiques dynamiques axées sur l'emploi des personnes âgées ainsi que sur les catégories défavorisées et les chômeurs. La lutte contre la pauvreté doit également être prioritaire.

1.9   Le CESE estime qu'il y a lieu de réagir de manière appropriée aux arrêts actuels de la CJCE en rapport avec le détachement des travailleurs et avec les mesures syndicales. Le forum de discussion organisé par la Commission européenne constitue un premier pas dans ce sens. Il conviendrait notamment de présenter différentes possibilités qui permettraient de supprimer les tiraillements entre les libertés fondamentales du marché intérieur d'une part et les droits fondamentaux de l'autre. Dans les cas où cela serait nécessaire et adapté, il conviendra d'adopter le plus rapidement possible des mesures adéquates et concrètes relatives à la protection du travailleur, qui établissent clairement que ni les libertés économiques, ni les règles de concurrence n'ont la priorité sur les droits sociaux fondamentaux.

1.10   Face à la crainte, éprouvée par une grande partie de la population européenne, que dans vingt ans beaucoup de personnes ne soient plus assurées de bénéficier de l'accès à des soins de santé de qualité (1), des objectifs clairs et transparents devraient être définis et poursuivis à l'aide de mesures appropriées de suivi et de communication.

1.11   Au-delà des nouvelles opportunités qu'elle représente et de la stimulation qu'elle exerce sur la croissance économique, la migration a aussi des côtés négatifs. À l'avenir, la Commission devrait également se pencher sur ces aspects négatifs et réfléchir à des mesures qui permettraient de les éviter.

1.12   Tout comme la Commission, le CESE accorde une grande importance à l'application et au respect des règles européennes. Se borner à lancer des appels aux États membres est loin d'être suffisant, notamment dans le cas de la directive sur le détachement des travailleurs. Il importe également de renforcer la méthode ouverte de coordination. Sur ce point, il conviendrait plus particulièrement de s'attacher davantage aussi à élaborer des mesures efficaces applicables à la réalisation d'opérations transfrontalières. Le Comité salue en outre l'invitation lancée par la Commission à tous les États membres, pour qu'ils montrent l’exemple en ratifiant et en appliquant les conventions de l’OIT répertoriées comme étant à jour par cette organisation.

2.   La proposition de la Commission

2.1   La Commission européenne a présenté le 2 juillet 2008 une communication sur un agenda social renouvelé (2) dans laquelle elle constate que les nouvelles réalités sociales requièrent de nouveaux types d’actions. Les changements sont rapides. Les politiques doivent suivre le rythme, en apportant des réponses à la fois novatrices et flexibles aux défis de la mondialisation, des progrès technologiques et de l’évolution démographique.

2.2   La Commission explique que le champ d'action est vaste et nécessite de fixer des priorités. L'agenda est ainsi axé sur un certain nombre de domaines clés dans lesquels l'action de l'Union européenne présente une valeur ajoutée manifeste et respecte pleinement les principes de subsidiarité et de proportionnalité:

les enfants et les jeunes — l'Europe de demain;

investissement dans le capital humain, création d'emplois plus nombreux et de meilleure qualité, acquisition de nouvelles compétences;

mobilité;

vivre plus longtemps et en meilleure santé;

lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale;

lutte contre la discrimination;

opportunités, accès et solidarité au niveau mondial.

2.3   Les actions prévues dans chacun de ces domaines concourent à la réalisation des trois objectifs de l'agenda — opportunités, accès et solidarité.

2.4   Selon la Commission, le bilan de la réalité sociale a confirmé que les citoyens et les parties prenantes attendent de l’UE qu’elle apporte une valeur ajoutée européenne au développement social.

2.5   La Commission entend continuer à utiliser les instruments prévus par le traité CE (la législation, le dialogue social, la méthode communautaire, la méthode ouverte de coordination, le financement communautaire, la participation de la société civile) et à exploiter le potentiel de synergies entre ces instruments dans le contexte d’une démarche globale et d’un panachage plus «astucieux» des moyens d’action. La coordination et la surveillance des politiques économiques et budgétaires jouent également un rôle important en la matière.

3.   Observations générales

3.1   La Commission relève dans l'agenda social renouvelé que les politiques communautaires ont d'ores et déjà une dimension sociale marquée et des incidences sociales positives. Le CESE estime en tout état de cause à l'unanimité que tel doit être le cas, notamment lorsque le «village planétaire» est frappé par une crise financière. Celle-ci entraîne une crise économique et une récession se profile dans les États membres de l'UE. Cette récession est synonyme de difficultés pour les entreprises, les travailleurs et pour l'ensemble de la société. Bien que la politique sociale relève pour l'essentiel de la responsabilité des gouvernements nationaux, le CESE se félicite que la Commission ait pris l'initiative, en 2007, de dresser le bilan de la réalité sociale et de présenter aujourd'hui l'agenda social renouvelé. Il estime qu'une stratégie commune contribuera à atténuer les craintes portant sur l'avenir de la prospérité. Un message social encore plus fort doit cependant être adressé aux citoyens européens.

3.2   Le CESE se réjouit également que l'agenda ne se limite pas uniquement aux domaines classiques de la politique sociale, mais qu'il en intègre aussi d'autres tels que l'éducation, la santé et le dialogue interculturel.

3.3   Actuellement, une approche communautaire «traditionnelle» — même renouvelée et étendue à d'autres secteurs — n'est toutefois pas suffisante: la question de l'orientation fondamentale de la politique macroéconomique ne saurait être écartée. Sans cela, il existera un risque que d'importantes orientations restent dépourvues de toute dimension sociable tangible.

3.4   Le Comité considère que la dimension sociale de l'Europe devrait notamment se traduire par un véritable programme d'action sociale. Un simple agenda social renouvelé n'est pas suffisant. Le programme d'action devrait reposer sur une coopération positive entre États membres et non sur un «nivellement par le bas» compétitif en termes de droits sociaux, de protection sociale et de conditions de travail (3). Il devrait se concentrer sur les aspects permettant de progresser en ce qui concerne l'amélioration des conditions de vie et de travail, la consolidation des systèmes de protection sociale fondée sur le respect de l'aspect durable de ces derniers et leur caractère favorable à l'emploi, le renforcement de la compétitivité, l'amélioration de la capacité d'adaptation des entreprises et des travailleurs et la création d'emplois plus nombreux et de meilleure qualité.

3.5   Il est impératif d'œuvrer activement à la réalisation d'objectifs sociaux. Il ne suffit pas d'adopter une position réactive, en considérant que c'est à la politique sociale qu'il revient de réagir aux changements et d'adapter les citoyens aux nouvelles exigences de l'économie. C'est l'individu et l'investissement sur les personnes qui doivent être au centre de l'attention, l'objectif doit être d'améliorer les conditions de vie et de travail, et des instruments clairs, efficaces et contraignants doivent être l'épine dorsale d'une politique sociale européenne.

3.6   Face à la crise actuelle, il convient en effet de ne pas perdre de vue que le bien-être des individus relève de la responsabilité de l'ensemble de la société. Cela signifie notamment une répartition équitable des revenus, des possibilités d'emploi suffisantes dans des entreprises compétitives, une protection sociale contre les risques en matière de santé, d'invalidité, de chômage et de vieillesse, l'assistance aux familles, des possibilités d'éducation pour tous, des garanties contre la pauvreté et des services d'intérêt général de qualité et à des prix accessibles.

3.7   La dynamique économique et le progrès social ne sont pas antinomiques mais se renforcent mutuellement. Une économie sociale de marché associe compétitivité et justice sociale. Il est important de placer sur un pied d'égalité les aspects sociaux, économiques et environnementaux.

4.   Objectifs et priorités de l'agenda social renouvelé

4.1   Le CESE estime qu'il est judicieux et nécessaire que l'Union aide, lors de l'application, de l'harmonisation et du suivi des principes communs de flexicurité les États membres, et ce en étroite coopération avec les partenaires sociaux. La priorité à cet égard devrait être de soutenir les citoyens et d'améliorer leurs conditions de vie et de travail. Il importe de tenir particulièrement compte des points de vue sociaux. La Commission et les États membres devraient s'efforcer de lier les discussions sur des réformes éventuelles au renforcement et à la modernisation des relations sociales dans l'entreprise à tous les niveaux. Le CESE souhaite donc voir émerger un lien plus fort entre le débat sur la flexicurité et le développement du dialogue social à tous les niveaux, et des négociations collectives aux niveaux appropriés. Il convient que le concept de flexicurité conforte à la fois la flexibilité et la sécurité, et ce de manière équilibrée. La notion de flexicurité n'est pas synonyme d'une diminution unilatérale et illégitime des droits des travailleurs, idée que le CESE récuse (4).

4.2   Ce sont avant tout les jeunes demandeurs d'emploi qui rencontrent de grandes difficultés pour accéder à l'emploi. Souvent, la «génération stagiaires» ne peut espérer, sur le marché du travail, que des formes de travail atypiques qui peuvent parfois conduire à des contrats de travail précaires (5). Il convient dès lors de se féliciter expressément des mesures visant à intégrer et soutenir activement la formation tout au long de la vie. L'accès à des postes de qualité et des emplois plus stables dépend dans une grande mesure de la qualité et de l'ampleur de la formation dont on dispose. Mais par ailleurs, l'Union européenne et avant tout les États membres doivent élaborer un dosage politique qui permettra de mieux concilier d'une part les compétences et les qualifications des travailleurs, d'autre part les exigences des entreprises. Il convient de garantir une meilleure employabilité des diplômés et d'améliorer l'environnement des entreprises afin qu'elles puissent proposer des postes de qualité. En outre, il convient de prendre des mesures de manière à éviter le travail précaire. À la veille de l'évaluation du pacte européen pour la jeunesse (qui date de 2005), il serait opportun de passer enfin à l'action.

4.3   Il serait tout aussi souhaitable de lancer une initiative communautaire en faveur d'emplois de qualité pour les jeunes. Il s'agirait de valoriser, avec le soutien actif des partenaires sociaux, les mérites et les prestations des diplômés, au moyen d'un nouveau guichet institué dans le cadre du programme JASMINE sur le microcrédit (6).

4.4   Le CESE estime important d'encourager l'esprit d'entreprise, la formation à l'entrepreneuriat et la promotion de l'éducation financière dans l'UE. L'esprit d'entreprise au sens le plus large — c'est-à-dire en tant que facteur susceptible de stimuler et d'encourager un état d'esprit innovant et créatif — est l'un des principaux outils du programme de Lisbonne, permettant de créer davantage de croissance et d'emplois de meilleure qualité ainsi que d'accroître la cohésion sociale et de lutter contre l'exclusion sociale (7).

4.5   Il conviendrait, dans le cadre de la stratégie pour l'emploi et de la méthode ouverte coordination, de fixer des objectifs beaucoup plus ambitieux, efficaces et mesurables et de conférer une plus grande compétence d'exécution à la Commission européenne. Il y a lieu de se recentrer sur des objectifs européens quantitatifs, notamment dans les domaines de l'activation, de l'éducation et de l'apprentissage tout au long de la vie, de l'emploi des jeunes, de l'accès à des soins de santé de qualité et de l'égalité entre hommes et femmes (8).

4.6   S'agissant du soutien apporté à la formation tout au long de la vie, il conviendrait de tenir tout particulièrement compte du paradoxe qui caractérise la politique éducative et qui veut que les personnes les moins qualifiées soient défavorisées en matière de formation continue.

4.7   Lutte contre le chômage de longue durée et le chômage des jeunes, promotion de l'égalité entre les hommes et les femmes et du relèvement du taux d'activité des femmes, renforcement du programme communautaire pour l'emploi et la solidarité sociale — Progress 2007-2013 (9), ce notamment afin d'augmenter la capacité des principaux réseaux de l'Union à promouvoir et soutenir les politiques communautaires et aux fins de l'introduction d'instruments avancés pour l'analyse des besoins et des perspectives (prospective), au moyen de procédures participatives ascendantes.

4.8   Les conditions cadres du dialogue social doivent être améliorées. À cet égard, le Comité constate que le cadre optionnel offert pour la négociation collective transnationale, dans le cadre de l'agenda social 2005 (10), n'a toujours pas été créé.

4.9   Le CESE partage le point de vue de la Commission selon lequel il est extrêmement important de parvenir rapidement à un accord concernant les propositions de directive sur le temps de travail (11) et sur les travailleurs intérimaires (12). Aussi le CESE se réjouit-il de l'adoption par le Conseil de la directive sur le travail intérimaire.

4.10   Plusieurs arrêts récents de la Cour européenne de justice (affaires Laval (13), Viking (14) et Rüffert (15)), qui ont soulevé des questions fondamentales, ont fait apparaître brutalement les tensions entre les droits conférés par le marché intérieur d'une part et les droits fondamentaux — en particulier les droits syndicaux — de l'autre. Une action s'impose dès lors dans ce domaine. Le forum de discussion mis en place par la Commission européenne constitue un premier pas. À présent, la Commission européenne devrait examiner de manière approfondie l'influence du marché intérieur sur les droits des travailleurs et les négociations collectives. Dans les cas où cela serait nécessaire et adapté, il conviendra d'adopter le plus rapidement possible des mesures adéquates et concrètes relatives à la protection du travailleur, qui établissent clairement que ni les libertés économiques, ni les règles de concurrence n'ont la priorité sur les droits sociaux fondamentaux.

4.11   La mobilité offre un grand nombre d'opportunités et contribue à l'augmentation de la croissance économique et de la compétitivité. Outre ces aspects positifs, le CESE estime cependant nécessaire d'examiner les côtés négatifs de la mobilité, en particulier dans le contexte des flux migratoires accrus. Par côtés négatifs, on entend notamment les répercussions sociales telles que la situation sociale et familiale des migrants et des membres de leur famille, le dumping social principalement lié à l'emploi illégal, les conditions de logement des migrants et les effets éventuels sur le marché du travail. Par ailleurs, il conviendrait d'examiner également les effets de la mobilité sur le système éducatif du pays d'origine, et ce à moyen et à long terme, ainsi que les conséquences de la «fuite des cerveaux» (16). Les résultats devraient ensuite servir de base aux mesures visant à supprimer ce type d'effets.

4.12   Le CESE se félicite de la volonté de la Commission de développer des services sociaux de haute qualité, facilement accessibles et solides. Il est clairement favorable à ce que l'intérêt général lié à ces services prime sur les réglementations relatives au marché intérieur et à la concurrence. Il est en tout cas indispensable de clarifier les concepts et les régimes en jeu. Le CESE propose de ce fait une approche plurielle et progressive, combinant les dimensions sectorielle et thématique, qui conduirait adopter les initiatives législatives lorsqu'elles sont nécessaires et/ou à adapter ces principes et conditions aux différents secteurs concernés (approche horizontale à vocation sectorielle) (17).

4.13   Face à la crainte, éprouvée par une grande partie de la population européenne, que dans vingt ans beaucoup de personnes ne soient plus assurées de bénéficier de l'accès à des soins de santé de qualité (18), des objectifs clairs et transparents devraient être définis et poursuivis à l'aide de mesures appropriées de suivi et de communication.

4.14   Compte tenu de l'arrêt rendu par la CJCE dans l'affaire Rüffert, considérer qu'il existe dans le droit communautaire des marchés publics un «réflexe social fort» (19) est pour le moins présomptueux. Il ne faut pas oublier non plus que les directives européennes régissant l'attribution des marchés publics sont essentiellement axées sur les aspects économiques et que, dans les faits, les marchés publics sont attribués presque exclusivement selon des critères économiques. Afin de tenir pleinement compte des aspects sociaux, les pouvoirs publics adjudicateurs ont besoin d'un cadre juridique clair et contraignant. Par ailleurs, les marchés publics n'auraient un visage social que si les règles qui les régissent allaient au-delà d'une possible prise en compte en les contraignant à respecter certains aspects sociaux. Le CESE estime dès lors opportun que la Commission engage une réflexion concrète en ce sens. Des orientations européennes permettraient ainsi d'introduire des exigences sociales et, de cette manière, de mieux exploiter le potentiel de la méthode ouverte de coordination.

4.15   Dans son avis sur la directive relative au temps de travail (20), le CESE avait déjà estimé que dans le cas où l'Union européenne ne prendrait pas en compte la conciliation entre vie privée et vie professionnelle, elle risquerait de laisser passer une opportunité. Le CESE se félicite dès lors expressément des résultats de la consultation entre la Commission européenne et les partenaires sociaux sur la conciliation de la vie privée et de la vie professionnelle et des propositions publiées entre temps portant sur l'amélioration des conditions du congé de maternité (21) et l'amélioration des droits des femmes exerçant une activité indépendante (22). Le Comité salue également le fait que les partenaires sociaux européens aient entrepris la révision de la directive sur le congé parental.

4.16   Il conviendrait selon le Comité d'assortir les mesures communautaires visant à promouvoir l'égalité des sexes, à soutenir les personnes souffrant de handicaps, à lutter contre l'exclusion sociale et à favoriser l'insertion active, d'un renforcement des mesures politiques actives axées sur l'emploi des personnes âgées ainsi que sur les catégories défavorisées et les chômeurs. La lutte contre la pauvreté doit également être prioritaire. À cet égard, une attention toute particulière devrait être accordée aux femmes et aux familles monoparentales. Dans le même temps, il serait souhaitable de développer les mesures politiques destinées à favoriser une intégration équilibrée des immigrés. Grâce l'Observatoire du marché du travail, le CESE peut apporter une contribution active à ces analyses.

5.   Instruments

5.1   Au cours des dernières décennies, l'UE a créé des normes juridiques minimales dans les domaines de l'égalité des sexes et de la non-discrimination et concernant certains aspects des conditions de travail et de la défense collective des droits des travailleurs. Cette législation constitue une part essentielle de la politique sociale européenne. Bien que des progrès aient été accomplis, il reste encore beaucoup d'améliorations à apporter.

5.2   Le Comité préconise l'utilisation de toute la gamme des instruments de politique sociale (dispositions juridiques, méthode ouverte de coordination, conventions collectives conclues en toute autonomie par les partenaires sociaux) et recommande que pour chaque thématique particulière, il soit fait recours à l'outil le plus adéquat. Le fait est qu'un certain nombre de domaines n'ont encore jamais été traités à l'échelon européen, c'est le cas par exemple du maintien de la rémunération en cas de maladie, de la définition de la qualité de salarié, ou de la protection en cas de mutation. D'autres domaines ne sont que partiellement couverts: citons par exemple celui de la conciliation entre vie professionnelle et vie familiale ou celui de la protection contre les licenciements.

5.3   Il importe sans aucun doute de veiller à une application efficace du droit national et au respect des règles en vigueur. Sur ce point, le CESE partage pleinement l'avis de la Commission. Il est également primordial que la mise en œuvre des normes minimales soit considérée comme un tremplin pour la véritable amélioration des conditions de travail et de vie, et non pas comme la phase ultime de l'évolution amorcée. Une application correcte repose sur des instruments et un soutien efficaces et adaptés, surtout lorsqu'il s'agit d'opérations transfrontalières. Ce dernier aspect est particulièrement pertinent s'agissant de l'application et de la mise en œuvre de la directive sur le détachement des travailleurs (23). Un simple appel à la coopération ne suffit pas: seul un cadre contraignant dans toute l'Europe sera pertinent. Sur ce point, il conviendrait plus particulièrement de s'attacher davantage aussi à élaborer des mesures efficaces applicables à la réalisation d'opérations transfrontalières.

5.4   Le dialogue social interprofessionnel, sectoriel et transnational reste l'un des principaux piliers du modèle social au sein des États membres et de l'UE. Étant d'importantes forces motrices pour la réalisation du progrès économique et social, les employeurs et les syndicats jouent un rôle clé dans la réponse apportée aux défis sociaux (24).

5.5   Le dialogue civil — qu'il y a lieu de distinguer clairement du dialogue social — sera un autre grand pilier à l'avenir. Impliquer les citoyens et leurs organisations à tous les niveaux dans la construction de l'Europe sociale sera un véritable défi (25).

5.6   Le CESE partage le point de vue de la Commission selon lequel il y a lieu d'exploiter le potentiel de la méthode ouverte de coordination (MOC) et de fixer à cet égard des objectifs, tant quantitatifs que qualitatifs. Le CESE confirme que la MOC devrait être plus locale, reflétant de la sorte l'approche participative ascendante et la nécessaire coordination des partenaires et des politiques (26). Il recommande également d'associer plus largement le Parlement européen à la MOC, ce qui permettrait de renforcer la légitimité démocratique de celle-ci.

5.7   Le CESE accueille avec satisfaction la définition d'objectifs pour le bien-être des citoyens, qui dépassent l'indicateur usuel du PIB par habitant, parce qu'elle peut contribuer à relativiser l'angle essentiellement économique sous lequel sont envisagées les performances des économies nationales (27).

Bruxelles, le 14 janvier 2009.

Le Président du Comité économique et social européen

Mario SEPI


(1)  Cf. «Expectations of European citizens regarding the social reality in 20 years' time», Analytic Report, mai 2008, point 2.9.; Flash Eurobaromètre no 227.

(2)  COM(2008) 412 final: Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions: «Un agenda social renouvelé: opportunités, accès et solidarité dans l’Europe du XXIe siècle».

(3)  Avis du CESE sur le thème «Pour un nouveau programme européen d'action sociale», rapporteur: M. OLSSON (JO C 27 du 3.2.2009), paragraphe 4.1.

(4)  Cf. avis du CESE sur «La flexicurité — La négociation collective et le rôle du dialogue social», rapporteur: M. JANSON (, JO C 256 du 27.10.2007, paragraphe 1.4, p. 108).

(5)  Sur ce point, voir le train de mesures dont le CESE préconise l'adoption afin d'ouvrir aux jeunes des perspectives d'avenir autres que celles de l'emploi précaire (avis du CESE, «L'emploi pour les catégories prioritaires», chapitre 5: «Mesures efficaces de lutte contre le chômage des jeunes», JO C 256, du 27.10.2007, p. 93).

(6)  Cf. avis du CESE «Microcrédit», rapporteur: M. PEZZINI, JO C 77 du 31.3.2009, p. 23.

(7)  Cf. avis du CESE sur «L'esprit d'entreprise et le programme de Lisbonne», rapporteuse: Mme SHARMA, corapporteur: M. OLSSON (, JO C 44 du 16.2.2008, paragraphe 1.1, p. 84).

(8)  Cf. avis du CESE sur les «Lignes directrices pour les politiques de l'emploi», rapporteur: M. GREIF, JO C 162 du 25.6.2008, paragraphe 2.1, p. 92.

(9)  Décision no 1672/2006/CE du Parlement européen et du Conseil du 24 octobre 2006 établissant un programme communautaire pour l'emploi et la solidarité sociale –Progress [JO L 315 du 15.11.2006].

(10)  Communication de la Commission sur «L'Agenda Social» du 9.2.2005, COM(2005) 33 final.

(11)  Proposition modifiée de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 2003/88/CE concernant certains aspects de l'aménagement du temps de travail; COM(2005) 246 final.

(12)  Proposition modifiée de directive du Parlement européen et du Conseil relative aux conditions de travail des travailleurs intérimaires; COM(2002) 701 final.

(13)  Arrêt C–341/05 de la CJCE: Laval un Partneri Ltd/Svenska Byggnadsarbetareförbundet (syndicat suédois des travailleurs du secteur du bâtiment).

(14)  Arrêt C-438/05 de la CJCE: International Transport Workers’ Federation u.a../. Viking Line ABP et al.

(15)  Arrêt C-346/06 de la CJCE: Dirk Rüffert, agissant en qualité d’administrateur judiciaire d’Objekt und Bauregie GmbH & Co. KG/Land Niedersachsen.

(16)  Émigration de personnes particulièrement bien formées ou douées.

(17)  Voir avis du CESE sur le thème «Un marché unique pour l'Europe du 21e siècle», rapporteur: M. CASSIDY, corapporteurs: MM. HENCKS et CAPPELLINI (JO C 77 du 31.3.2009, p. 15, paragraphes 1.13 et 1.15).

(18)  Cf. «Expectations of European citizens regarding the social reality in 20 years' time», Analytic Report, mai 2008, point 2.9.; Flash Eurobaromètre no 227; étude réalisée par The Gallup Organization, Hongrie, à la demande de la direction générale Emploi.

(19)  COM(2008) 412 final, point 5.6.

(20)  Voir avis du CESE sur le thème «Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 2003/88/CE concernant certains aspects de l'aménagement du temps de travail», rapporteuse: Mme ENGELEN-KEFER (JO C 267 du 27.10.2005, p. 16).

(21)  Proposition de directive portant modification de la directive 92/85/CEE, COM(2008) 600/4.

(22)  Proposition de directive concernant l'application du principe de l'égalité de traitement entre hommes et femmes exerçant une activité indépendante et abrogeant la directive 86/613/CEE, COM(2008) 636 final.

(23)  Directive 96/71/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 1996 concernant le détachement de travailleurs effectué dans le cadre d'une prestation de services, JO L 18 du 21.1.1997.

(24)  Cf. avis du CESE du 9.7.2008 sur le thème «Pour un nouveau programme européen d'action sociale», rapporteur: M. OLSSON JO C 27 du 3.2.2009, p. 99, paragraphe 5.6.

(25)  Cf. avis du CESE du 9.7.2008 sur le thème «Pour un nouveau programme européen d'action sociale», rapporteur: M. OLSSON JO C 27 du 3.2.2009, p. 99, paragraphe 5.7.

(26)  Cf. avis du CESE du 9.7.2008 sur le thème «Pour un nouveau programme européen d'action sociale», rapporteur: M. OLSSON JO C 27 du 3.2.2009, p. 99, paragraphe 7.9.3.

(27)  Cf. avis du CESE du 9.7.2008 sur le thème «Pour un nouveau programme européen d'action sociale», rapporteur: M. OLSSON JO C 27 du 3.2.2009, p. 99, paragraphe 7.9.2.


4.8.2009   

FR

Journal officiel de l’Union européenne

C 182/71


Avis du Comité économique et social européen sur la Communication de la Commission au Conseil européen «Un plan européen pour la relance économique»

COM(2008) 800 final

(2009/C 182/15)

Rapporteur général: M. DELAPINA

Le 26 novembre 2008, la Commission européenne a décidé, conformément à l'article 262 du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur

«Un plan européen pour la relance économique»

COM(2008) 800 final.

Le 2 décembre 2008, le Bureau du Comité a chargé la section spécialisée «Union économique et monétaire, cohésion économique et sociale» de préparer les travaux du Comité en la matière.

Compte tenu de l'urgence des travaux, le Comité économique et social européen a décidé au cours de sa 450e session plénière des 14 et 15 janvier 2009 (séance du 15 janvier 2009) de nommer M. DELAPINA rapporteur général, et a adopté le présent avis par 179 voix, 1 voix contre et 3 abstentions.

1.   Résumé et conclusions

1.1   En présentant son programme global de stabilisation du secteur financier, dans ses différentes variantes nationales, la communauté internationale a envoyé un signal fort: la politique économique assume clairement la responsabilité de la stabilité économique mondiale. Avec son plan européen pour la relance économique, l'Union européenne manifeste aujourd'hui elle aussi sa volonté de s'attaquer résolument à la crise à l'aide de tous les moyens disponibles.

1.2   L'impact psychologique de ce plan de relance devrait être à la hauteur de celui des montants financiers engagés. Car les signaux ainsi émis par la politique économique devraient rétablir dans une large mesure la confiance des consommateurs et des investisseurs. Il faut toutefois que des actions soient engagées au plus vite par tous les acteurs concernés, en particulier la Commission européenne et les États membres, afin que les anticipations pessimistes ne perdurent pas.

1.3   Les mesures prises pour soutenir l'économie réelle ne pourront atteindre leurs objectifs qu'à condition que soit pleinement restaurée la capacité de fonctionnement du secteur financier. Pour ce faire, outre les divers plans de sauvetage, il faut également prévoir une réorganisation et une nouvelle réglementation des marchés financiers à tous les niveaux, afin d'insuffler de nouveau la confiance.

1.4   La politique économique européenne a reconnu la nécessité de compléter sa démarche, jusqu'ici orientée vers l'offre, d'une politique macroéconomique contracyclique active. Le CESE se félicite également de l'engagement pris en faveur d'une meilleure protection des membres les plus vulnérables de la société et d'une coordination plus efficace de la politique économique. Cela étant, le plan de relance concocté par l'UE apparaît relativement modeste comparé à ceux d'autres régions du monde.

1.5   Le Comité estime essentiel que les programmes d'investissements publics et les incitations financières mis en place pour favoriser la relance économique contribuent également à faciliter la transition vers une économie à faible taux d’émissions de carbone, indispensable pour l'avenir. Le Comité invite la Commission et les États membres à adapter en conséquence leurs plans et programmes de relance.

2.   De la crise des subprimes à la récession mondiale

2.1   Les causes de l'actuelle crise financière et économique sont multiples. Dans la déclaration finale du sommet du 15 novembre dernier, les chefs d'État et de gouvernement du G20 ont mentionné les facteurs suivants: politiques monétaires et politiques des taux de change ayant entraîné une liquidité excessive, absence ou insuffisance de la réglementation concernant certains secteurs ou opérateurs, recherche de rendements irréalistes parallèlement à une sous-estimation ou une méconnaissance des risques de la part des acteurs du marché et des instances de surveillance et de régulation, effets de levier excessifs, mauvaise coordination des politiques macroéconomiques et réformes structurelles insuffisantes. Les dérives qui en ont résulté ont mis en évidence la nécessité de revoir les règles du jeu en ce qui concerne les opérateurs, les biens et les marchés.

2.2   Aux États-Unis s'est produit au milieu de l'année 2007, lorsque les prix de l'immobilier ont cessé de monter, l'effondrement d'une pyramide de crédits immobiliers. Dans un marché immobilier en état de surchauffe, entretenant des attentes déraisonnablement optimistes, les banques ont accordé à des emprunteurs peu solvables des crédits qu'elles ont externalisés et revendus. De nouveaux produits financiers hautement spéculatifs et opaques ont été créés, en dehors de toute surveillance ou régulation, de nombreux acteurs n'étant pas conscients du niveau de risque inhérent à ceux-ci.

2.3   L'éclatement de la bulle immobilière aux États-Unis ainsi que dans quelques États de l'UE a entraîné une crise des fonds spéculatifs, des banques commerciales et d'investissement ainsi que des compagnies d'assurances. Du fait de la titrisation des risques, la finance mondiale a été profondément ébranlée par des ondes de choc. L'insécurité et la méfiance régnant parmi les institutions financières ont conduit au gel de l'octroi de prêts interbancaires, y compris pour les établissements financiers a priori sains, et à l'assèchement du marché interbancaire.

2.4   Par le biais de multiples canaux de transmission, la crise du marché financier a fini par contaminer également l'économie réelle. Cela se traduit notamment par une contraction du crédit, une augmentation des coûts de financement, un «effet de richesse» négatif induit par la chute du cours des actions, un recul des marchés d'exportation, une perte de confiance, des réévaluations à la baisse ainsi qu'un risque de pertes au niveau des bilans. L'on sait aujourd'hui que la récession, dont même les experts sont pour l'instant incapables d'évaluer avec certitude la durée et l'ampleur, touchera l'ensemble de l'OCDE début 2009.

3.   Les défis prioritaires

3.1   Il s'est agi dans un premier temps de stopper la réaction en chaîne sur les marchés financiers. Les banques centrales, notamment la BCE, ont injecté des liquidités sur les marchés afin qu'ils puissent continuer de fonctionner. De multiples trains de mesures de sauvetage ont été ficelés au niveau national et international, incluant des mesures telles que l'injection de fonds et des participations, jusqu'à la nationalisation d'établissements financiers touchés par la crise, des garanties publiques, une meilleure garantie des dépôts d'épargne, etc. Ces dispositions ont dans une certaine mesure permis aux banques de continuer de fonctionner normalement.

3.2   La deuxième étape importante consiste à renforcer l'économie réelle. Il faut restaurer la confiance des consommateurs et des investisseurs. Pour ce faire, des mesures sont nécessaires afin de relancer la demande intérieure et de stabiliser le marché du travail. Il convient en particulier de soutenir les catégories à faibles revenus, car elles sont particulièrement touchées par les effets de la crise, mais aussi parce qu'elles représentent le plus fort taux de consommation ayant une incidence sur la demande intérieure.

3.3   Parallèlement, il convient d'établir des conditions générales permettant d'atténuer les retombées sur les entreprises. De par leurs activités de production, d'investissement, d'exportation ainsi que de recherche et développement, celles-ci jouent un rôle essentiel dans la relance économique et contribuent de manière déterminante à la création d'emplois et partant à la stimulation de la demande intérieure. Mais il convient de ne pas négliger, outre les aspects cycliques, les questions relatives à la durabilité ainsi que les aspects structurels.

3.4   Il convient également de réorganiser l'architecture financière internationale et de réglementer plus efficacement les marchés financiers. Les dispositions s'appliquant aux autorités de surveillance et à leur coordination, aux agences de notation ainsi qu'à la comptabilité et à l'information financière, doivent elles aussi être modifiées, de manière à empêcher l'apparition de crises telles que celle que nous traversons actuellement.

4.   Le rôle de la politique économique européenne

4.1   Même si à l'origine la crise était purement américaine, l'économie européenne a été atteinte du fait de la mondialisation. Dans ce contexte, l'euro s'est avéré être un facteur de stabilisation. Sans la monnaie commune, les retombées sur les économies nationales auraient été beaucoup plus sérieuses. Une crise internationale appelle des réponses internationales. La tâche qui attend la politique économique européenne est immense. Les défis décrits au paragraphe 3 exigent une intervention rapide, déterminée, massive, ciblée et concertée, comportant un grand nombre de mesures temporaires.

4.2   Il est nécessaire dans ce contexte de tirer les leçons du passé. Lorsqu'au début de la décennie, après l'éclatement de la «bulle» spéculative autour des technologies de l'information et les attentats du 11 septembre aux États-Unis, l'ensemble des grandes régions mondiales ont connu une récession significative, la politique économique européenne est la seule à ne pas avoir engagé une politique active de relance fondée sur la politique budgétaire et monétaire et prenant en compte la demande. Si bien que la crise a pu être surmontée au bout de quatre ans seulement et qu'une grande partie de l'Europe souffre aujourd'hui encore d'une atonie de la demande intérieure, ce qui a grandement accru sa vulnérabilité face au repli de la demande internationale.

4.3   Les principales instances en charge de la politique économique ont pris conscience trop tardivement de la gravité de la crise actuelle. Jusqu'au mois de septembre, les ministres de l'économie et des finances réunis au sein du Conseil ECOFIN se montraient sceptiques quant à l'opportunité d'un programme de relance. Alors que l'économie de la zone euro a connu un fléchissement dès le deuxième trimestre 2008, la BCE a augmenté encore une fois les taux directeurs au cours de l'été. Les désaccords constatés entre les chefs de gouvernement lors du sommet sur la crise financière à Paris ont eux aussi dissipé tout espoir de voir prochainement s'engager une action commune. Quant aux démarches nationales non concertées visant à assurer une meilleure garantie de l'épargne, elles n'ont pas donné l'impression d'une action cohérente de l'Union européenne. Cela démontre que l'action pour l'action est de peu d'utilité. Mieux vaut améliorer la coordination des programmes et des plans d'action, notamment au niveau national.

5.   Le plan européen pour la relance économique présenté par la Commission européenne

5.1   On ne peut dès lors que se réjouir que la Commission européenne manifeste aujourd'hui clairement sa volonté et sa disponibilité à engager une action ferme et coordonnée. En présentant sa stratégie pour surmonter la crise financière, elle entend s'attaquer aux problèmes économiques au sens large et faire de l'Europe un acteur clé dans la réaction mondiale à la crise financière. La Commission a également été chargée par les chefs d'État et de gouvernement d'élaborer des propositions d'intervention coordonnée en prévision du sommet de décembre. Ces propositions ont été présentées fin novembre sous forme d'un «plan européen pour la relance économique» qui doit être immédiat, temporaire, ciblé et coordonné, à la suite de quoi le Conseil européen a adopté un programme correspondant les 11 et 12 décembre 2008 à Bruxelles.

5.2   Concrètement, il est proposé de donner une impulsion au budget en injectant des liquidités à hauteur de 1,5 % du PIB de l'UE, ce qui représente 200 milliards d'euros pour les années 2009/2010. Sur cette somme, 170 milliards seront fournis par les États membres, tandis que le budget communautaire et la BEI dégageront chacun 30 milliards d'euros.

5.3   Les mesures proposées visent non seulement à développer les activités de la BEI, notamment auprès des PME, mais aussi, grâce à une simplification et une accélération des procédures, à dégager plus rapidement des crédits au titre des fonds structurels, du Fonds de cohésion et du Fonds de développement rural. Le Fonds social européen financera des mesures en faveur de la promotion de l'emploi, en particulier pour les catégories les plus défavorisées de la population, tandis que l'efficacité du Fonds européen d’ajustement à la mondialisation devra être améliorée. Des facilités sont également prévues pour l'octroi d'aides d'État, ainsi que des mesures destinées à accélérer la passation de marchés publics.

5.4   Les interventions des États membres ont pour objet de relancer la demande grâce à des dépenses publiques et/ou des réductions d'impôt, dans le cadre de la flexibilité accrue offerte par le pacte de stabilité et de croissance réformé, en complément de l'action des stabilisateurs automatiques. La proposition de la Commission mentionne quelques exemples concrets, parmi lesquels l’accroissement provisoire des transferts en faveur des chômeurs ou des ménages à faibles revenus, des investissements publics dans les infrastructures et la formation, l'aide aux PME (par exemple sous forme de prêts ou de participation aux risques), des mesures de lutte contre le changement climatique, une réduction des impôts et des cotisations sociales pour les employeurs et les travailleurs, ainsi qu'une baisse temporaire du taux normal de TVA. Le caractère temporaire de ces mesures vise à éviter que le plan de relance ne compromette la viabilité des finances publiques à moyen et à long terme.

5.5   La situation de départ et la marge de manœuvre des États membres n'étant pas identiques, leurs actions doivent être coordonnées. Elles doivent être limitées dans le temps, car les objectifs budgétaires à moyen terme devront ensuite être rétablis. Ces mesures devraient être assorties de réformes structurelles visant à garantir un meilleur fonctionnement des marchés et une amélioration de la compétitivité.

5.6   Il convient d'établir un lien étroit entre le plan de relance et les domaines prioritaires de la stratégie de Lisbonne pour la croissance et l'emploi (personnes, entreprises, infrastructures et énergie, recherche et innovation). La Commission européenne a adopté un train de mesures visant à soutenir la mise en œuvre du plan européen pour la relance économique et à renforcer la stratégie de Lisbonne pour la croissance et l'emploi. L'adoption des chapitres par pays évaluant les progrès réalisés par chaque État membre dans la mise en œuvre de la stratégie de Lisbonne interviendra au début de l'année prochaine (1). Le plan de relance présente à cet égard un large éventail de mesures, parmi lesquels chaque gouvernement est invité à choisir celles qui lui conviennent.

5.7   Un autre aspect essentiel du plan de relance concerne l'orientation vers une économie «verte», reposant sur des produits intelligents favorisant une économie à faible production de carbone. Cette orientation s'appuie entre autres sur des investissements dans l'efficacité énergétique, l'environnement et la lutte contre le changement climatique. Les mesures destinées à soutenir les secteurs particulièrement touchés par la crise, comme l'industrie automobile et la construction, doivent elles aussi être assorties d'objectifs dans le domaine de l'environnement et des économies d'énergie.

5.8   Le plan de relance met notamment l'accent sur la nécessité d'une approche coordonnée au niveau international, avec la participation des pays émergents, en vue de rétablir la croissance.

6.   Premières appréciations du CESE

6.1   Évaluation qualitative

6.1.1   Le document de la Commission identifie de manière appropriée les enjeux, les interventions requises et les besoins actuels. L'Europe doit engager une action rapide, audacieuse, ambitieuse et bien ciblée. Ce faisant, elle doit être consciente de son importance et peser de tout son poids dans la balance internationale.

6.1.2   La confiance et la demande doivent être renforcées pour enrayer l'engrenage à la baisse. Il convient notamment de combattre fermement les retombées négatives de la crise sur le marché du travail et sur les éléments les plus vulnérables de la société. Le dosage de politiques macro-économiques appliqué jusqu'ici n'a pas répondu de manière appropriée aux problèmes qui se posent, car il a sous-estimé l'importance de la demande intérieure dans le circuit économique. La Commission tient aujourd'hui compte, il est vrai tardivement, du rôle actif et stimulateur de la demande que peut jouer la politique budgétaire et monétaire, comme le demande le CESE depuis des années, politique qui doit être mise sur un pied d'égalité avec les mesures de développement de la compétitivité, orientées vers l'offre. La Commission et les États membres ont fini par reconnaître que la politique budgétaire doit miser sur des mesures expansionnistes, étant donné le peu d'efficacité des mesures de politique monétaire dans la situation actuelle.

6.1.3   La mention par la Commission de la flexibilité accrue offerte par le pacte de stabilité et de croissance depuis sa réforme de 2005 apparaît intéressante à cet égard. Cette flexibilité doit selon elle être mise à profit aujourd'hui, ce qui signifie que dans les circonstances exceptionnelles actuelles, qui conjuguent une crise financière à une récession, un dépassement temporaire de la limite de 3 % du PIB fixée pour le déficit est jugé approprié.

6.1.4   Le CESE se félicite que la Commission souligne le rôle positif que la BCE doit jouer dans le soutien à l'économie réelle. La Commission mentionne à cet égard le rôle essentiel qu'a joué la BCE dans la stabilisation des marchés en prêtant de l'argent aux banques et en contribuant à la fourniture de liquidités, et évoque la perspective de baisses supplémentaires des taux d'intérêt.

6.1.5   Il est clair qu'une fois que la crise sera surmontée et que la reprise se dessinera, la politique budgétaire devra de nouveau se conformer à des objectifs à moyen terme, afin de préserver la viabilité des finances publiques. Il faudra veiller dans ce contexte à ne pas surcharger encore une fois le facteur travail ni à restreindre exagérément les prestations en termes de dépenses. C'est pourquoi il faudrait envisager dès à présent des stratégies afin par exemple d'exploiter de nouvelles sources de revenus. Par ailleurs, il faudrait notamment avoir à l'esprit que revenir sur l'augmentation des dépenses publiques intervenue pendant la crise n'est pas une fin en soi. Dans le contexte de vieillissement de la population et de normes sociales élevées qui caractérise le modèle social européen, un relèvement du niveau des dépenses publiques n'est pas nécessairement un mal. Après tout, les États dont l'on vante d'une manière générale la réussite de la stratégie de flexisécurité affichent eux aussi un niveau de dépenses publiques supérieur à la moyenne.

6.1.6   Il est impératif non seulement de compléter les mesures nationales par des mesures européennes, mais aussi de les coordonner, afin d'obtenir des effets d'entraînement positifs au niveau transfrontalier et d'éviter que certains États ne profitent de la situation. En effet, les États ne participant pas au programme de relance pourraient affaiblir l'efficacité des mesures. Et les pays contribuant activement à l'assainissement de la conjoncture risquent d'être stigmatisés à cause de leur déficit. D'une manière générale, les États membres qui de par leur importance exercent une influence déterminante sur l'évolution générale et qui disposent d'une marge de manœuvre budgétaire relativement élevée assument une responsabilité particulière dans ce contexte.

6.1.7   Parmi les aspects positifs, il faut également relever que le plan de relance de la croissance ne néglige pas les objectifs relatifs à l'environnement, au changement climatique et à l'énergie, et qu'il s'inscrit dans une perspective dépassant le cadre des pays industriels hautement développés. Dans une optique mondiale, les actions visant à contrer les mesures protectionnistes injustifiées sont également significatives.

6.2   Évaluation quantitative

6.2.1   Le CESE souhaite axer le présent avis sur une évaluation macroéconomique générale. Mais il entend poursuivre ses travaux et consacrer un autre avis à l'examen et l'évaluation approfondis des propositions et des décisions présentées. Il conviendra d'étudier dans ce contexte les nécessaires modifications de la législation en matière d'aides ainsi que l'aménagement de la réglementation du Fonds européen d’ajustement à la mondialisation. Il faudra passer en revue de manière critique certaines des mesures présentées dans le cadre de l'abondante «panoplie d'instruments» proposée par la Commission. Parmi celles-ci, il faut notamment mentionner la proposition assez controversée de réduction des cotisations sociales et de la TVA sur les services à haute intensité de main-d'œuvre. La question de la compatibilité avec les règles de concurrence de l'octroi de subventions et des programmes d'aide devrait elle aussi être examinée dans ce contexte.

6.2.2   Étant donné que le plan de relance doit être accompagné de réformes structurelles, il faut veiller à ce que ces dernières n'aillent pas à l'encontre de l'objectif de stimulation de la demande. Les réformes structurelles doivent être conçues de telle sorte qu'elles soient socialement acceptables et profitables à la croissance et à l'emploi.

6.2.3   Un autre point critique concerne en tout cas le fait que l'enveloppe de 200 milliards d'euros allouée pour deux ans est loin d'être aussi importante en réalité qu'elle ne le paraît. Le montant «d'argent frais» injecté est bien moindre. En effet, les fonds octroyés par le budget communautaire et la Banque européenne d'investissement ne sont pour la plupart que des versements anticipés de paiements de toute façon prévus. Quant aux financements nationaux, il ne s'agit généralement pas de nouvelles initiatives supplémentaires, mais plutôt d'un catalogue de mesures déjà planifiées voire adoptées par les gouvernements nationaux, indépendamment du plan de relance de l'UE.

7.   Réorganisation des marchés financiers

7.1   L'apparition de deux graves crises successives dans un court laps de temps constitue un motif suffisant de revoir la réglementation des marchés financiers, et plus particulièrement celle relative aux transactions, aux biens, aux opérateurs, à la surveillance, aux agences de notation, etc., et ce au sein de l'UE mais aussi et surtout au niveau mondial. C'est là une condition indispensable pour rétablir au plus vite la confiance dans les institutions financières et entre celles-ci, ainsi que celle des investisseurs et des consommateurs. La réforme des marchés financiers et la reprise rapide de leur bon fonctionnement sont une condition essentielle pour qu'ils puissent de nouveau jouer leur rôle de soutien à l'économie réelle et ainsi assurer le succès des mesures de relance.

7.2   L'Europe a suivi sans se poser de questions quantité de tendances initiées aux États-Unis, depuis l'introduction des innovations financières jusqu'aux règles comptables, en passant par le financement des systèmes de retraite, avec comme on le sait des résultats peu satisfaisants. Aussi convient-il à l'avenir d'accorder de nouveau davantage de poids aux approches, aux expériences, aux traditions et aux atouts européens, parmi lesquels comptent également des spécificités comme la structure organisationnelle des coopératives. Il convient à cette fin de mettre davantage à profit la «masse critique» de la zone euro, qui s'est accrue au fil des élargissements. Le sommet du G-20 à Washington a posé à cet égard des jalons qui vont dans le bon sens. Les résultats obtenus dans ce contexte doivent être amplifiés en prévision du futur sommet du G20 qui se tiendra le 2 avril 2009 à Londres.

7.3   Le plan de relance de la Commission n'évoque pas la nécessité d'un réaménagement et d'une nouvelle réglementation des marchés financiers. Le CESE espère que cela n'est pas dû au fait que la Commission prévoit d'adopter en juillet 2009 une initiative sur la surveillance des marchés financiers de l'UE. Lors du réaménagement du cadre général, il faudra également se pencher sur les études scientifiques mettant en évidence que les marchés spéculatifs — notamment en raison des systèmes modélisés de transaction et de décision utilisés par les principaux opérateurs du marché — débouchent systématiquement sur des comportements grégaires cultivant les excès dans les deux sens. Le CESE se réserve le droit de présenter ultérieurement des requêtes et des propositions en la matière et renvoie dans ce contexte à la conférence organisée par ses soins les 22 et 23 janvier 2009 à Bruxelles, sur le thème «Rien ne va plus? Comment reconstruire l'économie sociale de marché européenne après l'effondrement du “capitalisme casino”».

Bruxelles, le 15 janvier 2009.

Le Président du Comité économique et social européen

Mario SEPI


(1)  Pour plus de détails concernant ce train de mesures, cf. le communiqué de presse «Décisions de la Commission relatives à la stratégie de Lisbonne pour la croissance et l'emploi» (IP/08/1987).


4.8.2009   

FR

Journal officiel de l’Union européenne

C 182/75


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 98/8/CE concernant la mise sur le marché des produits biocides, en ce qui concerne la prolongation de certains délais»

COM(2008) 618 final — 2008/0188 (COD)

(2009/C 182/16)

Le 5 décembre 2008, le Conseil de l'Union européenne a décidé, conformément à l'article 95 du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la

«Proposition de directive du parlement européen et du conseil modifiant la directive 98/8/CE concernant la mise sur le marché des produits biocides, en ce qui concerne la prolongation de certains délais»

COM(2008) 618 final — 2008/0188 (COD).

Ayant estimé que le contenu de la proposition est entièrement satisfaisant et n'appelle aucun commentaire de sa part, le Comité, lors de sa 450e session plénière des 14 et 15 janvier 2009 (séance du 14 janvier 2009), a décidé par 192 voix pour et 6 abstentions de rendre un avis favorable au texte proposé.

Bruxelles, le 14 janvier 2009.

Le Président du Comité économique et social européen

Mario SEPI


4.8.2009   

FR

Journal officiel de l’Union européenne

C 182/76


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil concernant certains éléments et caractéristiques des tracteurs agricoles ou forestiers à roues» (version codifiée)

COM(2008) 690 final — 2008/0213 COD

(2009/C 182/17)

Le 8 décembre 2008, le Conseil a décidé, conformément à l'article 95 du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la

«Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil concernant certains éléments et caractéristiques des tracteurs agricoles ou forestiers à roues»

(Version codifiée)

COM(2008) 690 final — 2008/0213 COD.

Ayant estimé que le contenu de la proposition est entièrement satisfaisant et n'appelle aucun commentaire de sa part, le Comité, lors de sa 450e session plénière des 14 et 15 janvier 2009 (séance du 14 janvier 2009), a décidé, par 186 voix pour, 1 voix contre et 7 abstentions, de rendre un avis favorable au texte proposé.

Bruxelles, le 14 janvier 2009.

Le Président du Comité économique est social européen

Mario SEPI


4.8.2009   

FR

Journal officiel de l’Union européenne

C 182/77


Avis du Comité économique et social européen sur «Proposition de directive du Conseil concernant le régime fiscal commun applicable aux sociétés mères et filiales d'États membres différents (codification)»

COM(2008) 691 final — 2008/0206 (CNS)

(2009/C 182/18)

Le 19 novembre 2008, le Conseil de l'Union européenne, a décidé, conformément à l'article 94 du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur

«Proposition de directive du Conseil concernant le régime fiscal commun applicable aux sociétés mères et filiales d'États membres différents (codification)»

COM(2008) 691 final — 2008/0206 (CNS).

Ayant estimé que le contenu de la proposition est entièrement satisfaisant et n'appelle aucun commentaire de sa part, le Comité, lors de sa 450e session plénière des 14 et 15 janvier 2009 (séance du 14 janvier 2009), a décidé, par 180 voix pour, 2 voix contre et 6 abstentions, de rendre un avis favorable au texte proposé.

Bruxelles, le 14 janvier 2009.

Le Président du Comité économique et social européen

Mario SEPI