ISSN 1725-2431

Journal officiel

de l'Union européenne

C 256

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Édition de langue française

Communications et informations

50e année
27 octobre 2007


Numéro d'information

Sommaire

page

 

I   Résolutions, recommandations et avis

 

RÉSOLUTIONS

 

Comité économique et social européen
436e session plénière des 30 et 31 mai 2007

2007/C 256/01

Résolution du Comité économique et social européen sur la Contribution au Conseil européen des 21 et 22 juin 2007 — Feuille de route pour le processus constitutionnel

1

 

III   Actes préparatoires

 

COMITÉ ÉCONOMIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN

 

437e session plénière des 11 et 12 juillet 2007

2007/C 256/02

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil relative aux mesures pénales visant à assurer le respect des droits de propriété intellectuelleCOM(2005) 276 final — 2005/0127 (COD)

3

2007/C 256/03

Avis du Comité économique et social européen sur Le potentiel des entreprises, notamment des PME (stratégie de Lisbonne)

8

2007/C 256/04

Avis du Comité économique et social européen sur le thème L'investissement dans la connaissance et l'innovation (Stratégie de Lisbonne)

17

2007/C 256/05

Avis du Comité économique et social européen sur le Livre vert sur la révision de l'acquis communautaire en matière de protection des consommateursCOM(2006) 744 final

27

2007/C 256/06

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil relative aux rétroviseurs des tracteurs agricoles ou forestiers à roues (version codifiée) COM(2007) 236 final — 2007/0081 (COD)

31

2007/C 256/07

Avis du Comité économique et social européen sur La définition d'une politique énergétique pour l'Europe (stratégie de Lisbonne)

31

2007/C 256/08

Avis du Comité économique et social européen sur les

39

2007/C 256/09

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil relative au transport intérieur des marchandises dangereusesCOM(2006) 852 — 2006/0278 (COD)

44

2007/C 256/10

Avis du Comité économique et social européen sur le Livre vert sur les applications de la navigation par satelliteCOM(2006) 769 final

47

2007/C 256/11

Avis du Comité économique et social européen sur la Communication de la Commission au Conseil et au Parlement européen — Programme indicatif nucléaire, présenté pour avis au Comité économique et social européen, sur la base de l'article 40 du traité EuratomCOM(2006) 844 final

51

2007/C 256/12

Avis du Comité économique et social européen sur le thème Conférences maritimes — Convention des Nations uniesCOM(2006) 869 final — 2006/0308 (COD)

62

2007/C 256/13

Avis du Comité économique et social européen sur le thème Identification par radiofréquences (RFID)

66

2007/C 256/14

Avis du Comité économique et social européen sur la Communication de la Commission au Parlement Européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions Galileo à la croisée des chemins: la mise en œuvre des programmes européens de GNSSCOM(2007) 261 final

73

2007/C 256/15

Avis du Comité économique et social européen sur le Rapport de situation bisannuel sur la stratégie européenne de développement durable

76

2007/C 256/16

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif aux statistiques sur les produits phytopharmaceutiquesCOM(2006) 778 final — 2006/0258 (COD)

86

2007/C 256/17

Avis du Comité économique et social européen sur le thème Innovation: impact sur les mutations industrielles et le rôle de la BEI

88

2007/C 256/18

Avis du Comité économique et social européen sur L'emploi pour les catégories prioritaires (stratégie de Lisbonne)

93

2007/C 256/19

Avis du Comité économique et social européen sur Le rôle des partenaires sociaux dans la conciliation de la vie professionnelle, de la vie familiale et de la vie privée

102

2007/C 256/20

Avis du Comité économique et social européen sur La flexicurité (dimension de la flexibilité interne — la négociation collective et le rôle du dialogue social en tant qu'instruments de régulation et de réforme des marchés du travail)

108

2007/C 256/21

Avis du Comité économique et social européen sur le thème: Employabilité et esprit d'entreprise — Le rôle de la société civile, des partenaires sociaux et des organismes régionaux et locaux du point de vue du genre

114

2007/C 256/22

Avis du Comité économique et social européen sur Santé et migrations

123

2007/C 256/23

Avis du Comité économique et social européen sur les Eurorégions

131

2007/C 256/24

Avis du Comité économique et social européen sur Les relations UE-Amérique centrale

138

2007/C 256/25

Avis du Comité économique et social européen sur La promotion de l'esprit d'entreprise chez les femmes dans la région Euromed

144

FR

 


I Résolutions, recommandations et avis

RÉSOLUTIONS

Comité économique et social européen 436e session plénière des 30 et 31 mai 2007

27.10.2007   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 256/1


Résolution du Comité économique et social européen sur la «Contribution au Conseil européen des 21 et 22 juin 2007 — Feuille de route pour le processus constitutionnel»

(2007/C 256/01)

Lors de sa réunion du 29 mai 2007, le Bureau du Comité économique et social européen a décidé de présenter lors de la session plénière une résolution sur la feuille de route relative au processus constitutionnel en tant que contribution au Conseil européen des 21 et 22 juin 2007.

Lors de sa session plénière des 30 et 31 mai 2007 (séance du 30 mai 2007), le Comité économique et social européen a adopté la présente résolution par 171 voix pour, 18 voix contre et 16 abstentions.

1.

Le CESE confirme résolument ses avis relatifs au Traité constitutionnel datés du 24 septembre 2003 (1), du 28 octobre 2004 (2), du 17 mai 2006 (3), ainsi que sa résolution du 14 mars 2007 adoptée à l'occasion du 50e anniversaire de la signature des Traités de Rome (4). Dans tous ses avis, le CESE s'est prononcé sans réserve en faveur de la méthode conventionnelle, ainsi que du résultat obtenu.

2.

Le CESE continue d'appuyer le traité constitutionnel qui se différencie nettement et positivement de tous les textes institutionnels visant à réviser les traités de Rome que les différentes conférences intergouvernementales ont produits jusqu'à présent: il est le fruit d'un débat libre et public auquel ont participé des parlementaires nationaux et européens; il regroupe de manière systématique dans un seul texte l'ensemble du dispositif politico-institutionnel tel qu'il s'est développé depuis la création des Communautés européennes; il contient les dispositions régissant les nécessaires réformes institutionnelles et procédurales du système de décision de l'Union européenne; il décrit les objectifs que l'Union devrait poursuivre, désigne les valeurs sur lesquelles elle devrait fonder ses politiques et codifie les droits fondamentaux qu'elle devrait respecter et protéger.

3.

Tous ces points ont justifié que l'on appelle le projet de la Convention un «Traité instituant une constitution pour l'Europe». En raison de multiples malentendus dans certains États membres, le terme de «constitution» a toutefois été rejeté. Le CESE ne s'oppose pas à ce que le nouveau traité reçoive un autre nom. La substance du texte est plus importante que sa dénomination.

4.

En tant que représentant institutionnel de la société civile organisée, le CESE considère de plus que le soutien qu'il continue d'apporter au traité constitutionnel est justifié par les raisons déterminantes suivantes qui contribuent au renforcement de la légitimité démocratique de l'Union:

l'accroissement des compétences du Parlement européen par l'extension de la codécision à de nouveaux domaines;

une association accrue des parlements nationaux aux activités de l'Union européenne: il leur est accordé un droit de contrôle concernant le respect du principe de subsidiarité;

l'amélioration de la transparence des délibérations du Conseil de l'Union européenne;

le renforcement du rôle du dialogue social autonome et la reconnaissance des partenaires sociaux en tant qu'acteurs de l'intégration européenne;

la reconnaissance de l'importance de la démocratie participative notamment par le fait que les institutions européennes sont tenues de mener un dialogue transparent et régulier avec les organisations de la société civile et les citoyens de l'Union;

dans le même esprit, l'introduction d'un droit d'initiative pour les citoyens.

5.

Le CESE rappelle que les chefs d'État ou de gouvernement de tous les États membres réunis au sein du Conseil européen ont approuvé traité constitutionnel et l'ont signé solennellement à Rome le 29 octobre 2004. Depuis lors, une majorité des deux tiers des États membres représentant une nette majorité des citoyens de l'Union européenne a ratifié le traité constitutionnel. Le CESE insiste dès lors pour que le Traité constitutionnel reste le fondement des délibérations à venir visant à résoudre la crise actuelle.

6.

Le CESE soutient la présidence allemande dans son intention de présenter, lors de la conférence du Conseil européen des 21 et 22 juin de cette année, une feuille de route concernant les actions à venir pour résoudre la crise et se félicite que la «Déclaration de Berlin» du 25 mars 2007 ait fixé la date des élections européennes de 2009 comme limite pour l'entrée en vigueur du nouveau traité.

7.

Cela signifie que, d'ici la fin de l'année 2007, une conférence intergouvernementale de courte durée doit décider des modifications à apporter au projet existant pour parvenir à un nouveau consensus. Le mandat de cette conférence intergouvernementale sera de spécifier précisément les quelques dispositions qui pourront faire l'objet d'une nouvelle délibération. Le résultat devrait être ratifié par tous les États membres dans le courant de l'année 2008.

8.

Les nouvelles délibérations sur le traité doivent aboutir à ce que la substance de ce qui a été décidé dans le cadre de la Convention européenne puis approuvé à l'unanimité par les chefs d'État et de gouvernement soit conservée. Il s'agit principalement des nouveautés institutionnelles et procédurales ainsi que du caractère contraignant de la Charte des droits fondamentaux. Cela signifie que la partie I (objectifs, institutions, structure de l'Union), la partie II (Charte des droits fondamentaux de l'Union) et la partie IV (dispositions générales et finales) doivent rester en l'état. Le dispositif de la partie III, qui contient principalement les dispositions des traités en vigueur relatives aux politiques de l'Union européenne, ne doit pas obligatoirement faire partie du nouveau «traité»; les dispositions institutionnelles et procédurales de la partie III devraient, dans la mesure où elles vont au-delà du droit actuellement en vigueur, être intégrées à la partie I.

9.

Le CESE suivra les travaux de la conférence intergouvernementale de manière constructive. Il insiste cependant pour que, malgré la brièveté probable de la conférence intergouvernementale et son mandat réduit, les organisations de la société civile aient la possibilité d'y participer à titre consultatif. Le CESE est prêt à organiser en coopération avec la présidence du Conseil les réunions d'information et de consultation correspondantes; il peut pour cela s'appuyer sur les expériences positives qu'il a eues avec le Présidium de la Convention européenne pendant les travaux de celle-ci, ainsi qu'avec le Parlement européen.

10.

Il est urgent de mettre rapidement fin à la crise actuelle en adoptant un traité qui satisfasse aux exigences d'une Union à 27 membres. De nouveaux défis rendent en effet nécessaire que l'Union européenne se mette d'accord sur de nouvelles politiques et qu'elle prenne des décisions d'une grande portée, notamment en ce qui concerne le développement du modèle de société européen, dont les services d'intérêt général (SIG) sont un élément constitutif, et le renforcement de la dimension sociale de l'intégration européenne, la maîtrise des effets négatifs découlant de la mondialisation de toutes les relations économiques, sociales et culturelles, la promotion de la croissance économique et le renforcement de la compétitivité, la lutte contre le changement climatique, la sécurité des approvisionnements énergétiques, la résolution des problèmes liés à l'immigration et la lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale.

Bruxelles, le 30 mai 2007.

Le Président

du Comité économique et social européen

Dimitris DIMITRIADIS


(1)  Avis à l'intention de la conférence intergouvernementale (CESE 1171/2003). JO C 10 du 14.1.2004.

(2)  Avis sur le traité établissant une constitution pour l'Europe. JO C 120 du 20.5.2005.

(3)  Avis du 17 mai 2006 intitulé «Contribution au Conseil européen des 15 et 16 juin 2006 — Période de réflexion». JO C 195 du 18.8.2006.

(4)  JO C 161 du 13.7.2007.


III Actes préparatoires

COMITÉ ÉCONOMIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN

437e session plénière des 11 et 12 juillet 2007

27.10.2007   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 256/3


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil relative aux mesures pénales visant à assurer le respect des droits de propriété intellectuelle»

COM(2005) 276 final — 2005/0127 (COD)

(2007/C 256/02)

Le 21 septembre 2005, le Conseil a décidé, conformément à l'article 95 du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la proposition susmentionnée.

La section spécialisée «Marché unique, production et consommation», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 4 juin 2007 (rapporteur: M. RETUREAU).

Lors de sa 437e session plénière des 11 et 12 juillet 2007 (séance du 12 juillet 2007), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 76 voix pour et 3 voix contre.

1.   Conclusions

1.1

Le Comité restera attentif à la mise en œuvre coordonnée de la directive de 2004 avec la présente proposition modifiée de directive, ainsi que des décisions-cadre complémentaires pertinentes, afin de vérifier dans le temps l'efficacité de la lutte contre la contrefaçon et contre ses ramifications internationales, y compris au-delà du territoire communautaire.

1.2

Tout en appuyant les dispositions proposées dans leur approche générale, il invite la Commission à considérer les observations formulées dans le présent avis, qui suggère de concentrer principalement les efforts de répression et de coopération pénale et douanière sur les entreprises de contrefaçon massive, et sur les contrefaçons commises par des organisations criminelles ou quand l'infraction implique un risque pour la santé ou la sécurité des personnes.

1.3

Le Comité souhaite en particulier que la directive puisse concerner l'ensemble des droits de propriété industrielle, et donc ne pas exclure les brevets d'invention, qui en constituent le domaine le plus important pour l'industrie européenne.

1.4

Le CESE souligne l'imprécision de certains concepts juridiques, comme ceux d'«échelle commerciale» ou de «caractère commercial» des infractions, qui figurent dans la proposition de directive à l'examen, ce flou contrevenant aux principes fondamentaux du droit pénal qui veulent que la consistance d'un délit soit objective et définie de manière claire et précise. Le CESE s'élève également contre le mode de définition des peines qui sont prévues à l'article 2 de la proposition de directive, car il considère qu'il conviendra de n'édicter qu'un cadre général de sanction pénale (en se bornant à prescrire une sentence d'emprisonnement ou des pénalités pécuniaires ou amendes), tandis que la fixation des peines concrètes doit rester de la compétence exclusive des législations nationales.

2.   Introduction

2.1

Dans un MEMO/05/437 du 23 novembre 2005 résumant sa Communication du même jour, la Commission se félicite de l'arrêt de la Cour de justice reconnaissant des compétences à la Communauté dans l'adoption de mesures pénales dissuasives et proportionnées pour garantir l'application des normes relatives aux politiques communautaires inscrites dans le TCE.

2.2

Dans la communication, la Commission expose son interprétation de l'arrêt du 13 septembre 2005 par lequel la Cour a annulé une décision-cadre relative à la protection de l'environnement par le droit pénal. Selon elle, la Cour a considéré que la Communauté avait compétence pour prendre les mesures en relation avec le droit pénal nécessaires pour assurer l'effectivité du droit communautaire. La portée de cet arrêt dépasse largement, selon la Commission, le domaine de l'environnement, et vise l'ensemble des politiques communautaires ainsi que les libertés fondamentales reconnues par le traité. L'insertion de sanctions pénales dans le droit communautaire doit être motivée par une nécessité dûment justifiée, et respecter la cohérence générale de la construction du droit pénal de l'Union.

2.3

Cette interprétation extensive d'un jugement portant sur l'environnement n'a pas emporté l'adhésion unanime des Etats membres et de la doctrine. Beaucoup considèrent que les incriminations et l'échelle des sanctions pénales correspondantes relèvent essentiellement de la subsidiarité et que leur harmonisation éventuelle au niveau de l'Union relève de la coopération judiciaire interétatique prévue dans le TUE.

2.4

Il faut noter que cette interprétation est très largement partagée par le Parlement européen, car les domaines pouvant relever d'une compétence pénale communautaire ne relèvent plus de la seule unanimité des Etats membres au Conseil, mais d'une majorité qualifiée dans une procédure de codécision qui implique le Parlement, dont les compétences de colégislateur sont ainsi élargies (1).

2.5

Mais il s'agit d'un élargissement considérable des compétences communautaires, résultant d'une décision prétorienne, et les risques de divergences d'interprétations entre les institutions peuvent, entre autres choses, retarder l'adoption de législations comportant des dispositions pénales, ou restreindre a posteriori leur portée, suite par exemple à de nouveaux recours judiciaires, ou à des compromis; dans le cas de cette proposition de directive, la question de l'inclusion ou non des brevets d'invention dans le champ de la protection pénale reste ouverte, car le Parlement estime que seul le droit d'origine communautaire est concerné par l'arrêt de la Cour, alors que la Commission entend viser l'ensemble du droit, communautaire et national, de la propriété intellectuelle.

3.   Propositions de la Commission

3.1

La proposition modifiée de directive COM(2006) 168 final vise à établir un cadre pénal horizontal et harmonisé pour assurer le respect des droits de propriété industrielle et de propriété littéraire et artistique et autres droits incorporels assimilés (regroupés sous l'appellation «propriété intellectuelle»). Elle concerne le marché intérieur et est motivée par la nécessité affirmée d'une intervention européenne dans ce domaine, respectant les principes de subsidiarité et de proportionnalité. La base juridique est l'article 95 TCE.

3.2

Elle établit un cadre pénal général définissant les «droits de propriété intellectuelle» (DPI) protégés, les infractions à ces droits et les sanctions pénales maximales à appliquer dans un souci d'harmonisation, au sein du marché intérieur, de la répression pénale de la contrefaçon de biens matériels, de services et de créations intellectuelles et artistiques protégés par le droit substantiel européen et les droits nationaux, ainsi que par les conventions internationales pertinentes et en particulier l'ADPIC (2) conclu en 1994 à l'OMC qui contient des dispositions relatives à la sanction pénale (3) des violations de certains droits protégés.

3.3

Une directive adoptée en 2004 établit déjà un cadre de protection contre la copie, le piratage et la contrefaçon (4) à des fins commerciales; une liste détaillée des droits protégés par l'article 2 de cette directive a été donnée par une déclaration de la Commission (5). Il s'agit de la propriété industrielle (brevets d'invention et certificats complémentaires, certificats d'utilité, marques, appellations d'origine, dessins et modèles, obtentions végétales) et du droit d'auteur et des droits voisins, ainsi que de droits sui generis créés par le droit communautaire sur les topographies de circuits électroniques et sur les bases de données. Ce sont des droits exclusifs, considérés juridiquement comme faisant partie d'un droit de propriété incorporel. Une partie de ces droits sont inclus dans l'acquis communautaire, voire font l'objet d'une protection matérielle communautaire organisée (dessins et modèles, marques, obtentions végétales) (6). D'autres, comme les brevets, relèvent exclusivement du droit national, dans l'attente d'un brevet communautaire réclamé par tous les secteurs industriels. Il s'agit donc, sous l'appellation consacrée de propriété intellectuelle, d'un domaine très hétérogène de droits incorporels, dont la nature et le régime juridique diffèrent considérablement.

3.4

Les pays membres sont soumis aux obligations de l'ADPIC, qui demande la mise en place d'une législation nationale adéquate en matière de poursuites et de sanctions pénales de la contrefaçon à des fins commerciales; cependant, une certaine latitude d'interprétation leur est laissée, et en outre certains états n'ont pas encore établi de répression pénale proportionnée aux atteintes aux DPI commises sur leur territoire, y compris parmi les membres de l'UE. La directive de 2004 permet aux victimes de violations de leurs droits d'obtenir réparation, en créant à la charge des pays membres, des obligations en matière d'enquête, de procédure, de saisie (7) et d'indemnisation, dans un but d'harmonisation du droit applicable et de lutte contre la criminalité organisée (8), très active en matière de contrefaçon. Cependant, cette directive ne concerne que la procédure et les sanctions en matière civile, commerciale et administrative, visant principalement la réparation des dommages causés aux propriétaires de droits protégés qui ont engagé une action en contrefaçon, et quelques pays membres ne l'ont pas encore transposée !

3.5

La protection de la «propriété intellectuelle» est inscrite dans la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme, ainsi que dans la Charte des Droits Fondamentaux de l'UE, déclaration solennelle adoptée à Nice en décembre 2000. Une protection internationale est aussi prévue et assurée par des conventions conclues dans le cadre des organisations spécialisées de l'ONU compétentes (OMPI, UNESCO) ou dans un cadre régional (Convention de Munich, 1973, créant l'OEB et le brevet européen). Seul l'ADPIC contient pour l'instant des dispositions pénales minimales. La proposition de la Commission veut apporter une certaine harmonisation communautaire, en obligeant les États membres à introduire des sanctions pénales dans leur droit interne, avec des définitions d'infractions et des sanctions-type communes.

3.6

La proposition modifiée de directive vise donc le rapprochement du niveau des peines pour infraction aux DPI en ce qui concerne les peines d'emprisonnement, d'amendes pénales et les confiscations. Elle veut fixer des règles de compétence judiciaire pour centraliser, si possible, les poursuites dans un seul État membre lorsque l'infraction concerne plusieurs pays membres, et faciliter les enquêtes; il est proposé que les victimes ou leurs représentants soient associées à ces enquêtes.

3.7

La révision principale, par rapport aux propositions antérieures, consiste à fixer le niveau et la nature des sanctions pénales applicables aux incriminations d'atteinte à la propriété intellectuelle, également définies par le projet.

3.8

Les personnes physiques coupables d'infractions visées à l'article 3 de la directive devraient être punies d'une peine maximale d'au moins 4 ans d'emprisonnement lorsqu'elles ont agi dans le cadre d'une organisation criminelle ou lorsque l'infraction a entraîné un risque pour la santé ou la sécurité des personnes (Article 2, para. 1).

3.9

Les personnes physiques et morales coupables d'infractions visées à l'article 3 de la directive devraient être passibles de sanctions effectives, proportionnées et dissuasives, comprenant des amendes pénales et non pénales d'un maximum d'au moins 100 000 euros (300 000 euros dans les cas graves art. 2, para. 1, sans préjudice de peines plus graves en cas de risque de mort ou d'infirmité).

3.10

Le droit national devrait prévoir la confiscation des produits contrefaits, des biens et instruments en rapport avec le crime, au moins dans les cas graves (criminalité organisée, risque d'atteinte à la santé et à la sécurité des personnes) (Art. 3).

3.11

La proposition modifiée permet aux États membres d'aller au-delà des niveaux retenus.

3.12

Suite au retrait du projet de Décision-cadre du Conseil qui accompagnait le projet initial, la Commission envisage d'appliquer l'approche horizontale dans le cadre des procédures pénales adoptée le 23.12.2005 dont l'objet est de soutenir l'entraide judiciaire et d'amener l'échelle des peines à des niveaux comparables d'un pays à l'autre afin de pouvoir mettre Eurojust en œuvre (9).

3.13

L'initiative des enquêtes et poursuites revient aux États membres; elle ne devrait pas seulement dépendre d'une plainte des victimes.

4.   Observations générales du Comité

4.1

Le Comité constate l'utilisation de plus en plus généralisée d'un concept flou, celui de «propriété intellectuelle», qui mélange des concepts juridiques bien distincts, divers modes de protection et d'utilisation; mais ce terme est néanmoins devenu consacré par le droit européen et international. La nature, la durée et la portée de chacun des droits incorporels concernés diffèrent très sensiblement, chacun relève d'un régime juridique propre, d'une validité territoriale variable et d'institutions particulières d'enregistrement ou de protection, et de plus l'interprétation des infractions à ces droits peut varier selon le pays et évolue rapidement dans certains cas.

4.2

Des analyses de la composition de médicaments (sans exploitation ni publication du résultat), ou l'ingénierie inverse de logiciels ou de composants électroniques à des fins d'intéropérabilité, ou l'exercice d'un droit légitime comme le droit à la copie privée par contournement d'un dispositif (en général assez faible) de protection peuvent être qualifiés de contrefaçon ou de copie illégale dans plusieurs pays membres, où en outre les peines peuvent être très élevées, y compris en dehors de toute visée commerciale ou d'association criminelle.

4.2.1

Le Comité s'est déjà prononcé pour une lutte coordonnée au niveau communautaire contre les diverses formes de contrefaçon commerciale affectant l'économie européenne, et pour une répression des divers délits portant atteinte à la propriété industrielle et aux droits d'auteur (10) qui causent des préjudices importants à l'économie européenne; la contrefaçon massive est souvent le fait d'organisations criminelles ou de bandes organisées, et peut porter atteinte à la santé, à la sécurité ou à la vie des personnes: dans ces derniers cas, il doit s'agir de circonstances aggravantes dans la détermination des sanctions pénales. Le projet de directive devrait retenir le principe de l'aggravation des peines pour l'ensemble des circonstances aggravantes.

4.2.2

Le Comité approuve, comme pour la directive de 2004, le fait que l'harmonisation envisagée ne concerne que les infractions commises à une échelle commerciale, et donc de nature à affecter substantiellement le marché unique; encore serait-il utile de mieux définir ce caractère «commercial», par exemple en précisant que les produits ou services contrefaits sont destinés à la vente en nombre, de nature à causer un préjudice économique significatif, ou qu'ils sont dangereux pour les personnes, indépendamment de la quantité vendue ou qu'en tout état de cause, les auteurs de ces délits agissent en vue d'en tirer un avantage pécuniaire illégal. La mise en œuvre de sanctions pénales suppose une atteinte manifeste à l'ordre public, et cette atteinte peut varier en intensité et en gravité: l'échelle des délits et des peines doit être proportionnée à l'atteinte, mais on peut s'interroger sur le fait de savoir si les distinctions entre «violations à une échelle commerciale d'un droit de propriété intellectuelle» et «violations graves», et si la rigueur des peines correctionnelles proposées répondent bien au principe de proportionnalité inhérent au droit pénal. Par ailleurs, les échanges privés de fichiers sur internet ou la reproduction (ou le «remix» musical), ou la représentation d'œuvres, matérielles ou intellectuelles, dans un cadre familial ou privé ou aux fins d'étude et d'expérience sont implicitement exclus du champ d'application de la législation proposée; il serait utile que cette exclusion soit explicite.

4.2.3

Le Comité tient à rappeler que les droits incorporels concernés par la contrefaçon ne sont pas des droits absolus; chacun des droits concernés a ses spécificités propres, et chacun accorde en principe une exclusivité et un monopole temporaire d'exploitation dont la durée et l'extension géographique de validité varient, c'est à dire instaure une mesure protectionniste limitée dans le temps (en contrepartie de la publication des inventions en matière de brevets, du fait de la création d'une œuvre en matière de droit d'auteur); mais les titulaires de licences et les utilisateurs légitimes ou de bonne foi de produits et services ou d'œuvres de l'esprit ont aussi des droits, parfois très étendus dans le cadre de certaines licences (11). Or, l'état de plusieurs droits nationaux contient des incohérences, et privilégie souvent de manière unilatérale les droits des producteurs et distributeurs et des industries par rapport aux droits des consommateurs; la volonté d'introduire en droit national des sanctions pénales lourdes dans de nombreux pays semble participer de ce biais. On en arrive à ce paradoxe que le maximum de peine pour violation à une échelle commerciale dans la proposition de directive pourrait s'avérer égale ou même moins lourd que celui existant pour une violation individuelle!

4.2.4

Le Comité souhaiterait qu'à l'initiative de la Commission, par exemple par une étude comparative approfondie des droits nationaux après la transposition, soit réalisée une véritable remise à plat du droit pénal national par rapport au droit pénal communautaire, en vue d'une véritable harmonisation européenne, en particulier dans le domaine du droit d'auteur et des droits voisins qui font parfois l'objet de surenchères dans les sanctions pénales qui produisent des échelles de sanctions et de peines disproportionnées, et sans véritable nécessité puisque les modèles commerciaux de diffusion des oeuvres sont en pleine évolution, avec à court terme la suppression programmée des DRM (protection contre la copie), et que parfois la taxation des supports indemnise largement les titulaires de droits contre les copies sauvages.

4.3   Observations particulières

4.3.1

Le Comité souhaiterait qu'une définition plus claire soit donnée de la nature du délit de culpabilité morale pour les infractions de contrefaçon et d'imitation de produits ou de services ressortissant à la propriété intellectuelle. Une infraction pénale comprend un élément intentionnel de la commettre de la part de son auteur, ou de ses complices: l'ADPIC évoque «un acte délibéré de contrefaçon», et la directive parle d'un acte intentionnel, délibéré; l'infraction comprend aussi un élément matériel, qui est l'exécution du délit, ou au moins la tentative d'exécution, assimilable à un commencement d'exécution: les deux éléments sont cumulatifs, la simple intention n'étant pas suffisante à constituer l'infraction (sauf à établir une police de la pensée). Mais l'incitation à la commission d'un délit ne peut en général être retenue lorsque «l'incitateur» ne fournit pas d'instruments (généralement illégaux) aux fins spécifiques de la commission du délit en cause; aussi, pour le Comité, la simple fourniture de matériels ou de logiciels d'usage courant, ou d'un accès internet, ne peut être assimilée à une complicité ou à un délit «d'incitation» (qui n'existe généralement que dans des situations très limitées en droit pénal, et est au reste difficile à prouver) si ces moyens sont utilisés par les contrefacteurs. La notion de complicité devrait suffire dans la législation communautaire, la question des co-auteurs étant réglée dans le détail par les droits nationaux. Sinon, des incriminations en l'absence d'éléments intentionnels pourraient en résulter, qui créeraient de grandes incertitudes juridiques pour nombre de fournisseurs de matériels ou de services.

4.3.2

La reproduction illicite d'œuvres, de modèles, de procédés ou d'inventions protégés par un monopole temporaire constitue le délit de contrefaçon; il conviendrait d'en rester à cette définition, sans l'élargir au concept de piratage (qui consiste généralement en l'intrusion frauduleuse dans des systèmes informatiques pour en prendre le contrôle, y voler des données ou utiliser la bande passante, généralement à des fins illégales). Le piratage est différent de la contrefaçon proprement dite, et les délits pénaux doivent rester d'interprétation stricte. L'intrusion sans autorisation dans des systèmes informatiques, le vol de données ou de bande passante, les atteintes à la vie privée, doivent certes faire l'objet d'incriminations pénales appropriées, mais ne relèvent pas directement de la contrefaçon. La répression de la piraterie informatique devrait être traitée de manière spécifique, même si les concepts sont utilisés de façon imprécise dans nombre de déclarations politiques, qui tendent à les mêler et à entretenir une certaine confusion; la piraterie informatique est utilisée dans le cadre d'entreprises terroristes et devrait faire l'objet d'une attention toute particulière et d'une coopération internationale appropriée.

4.3.3

Le terme «d'organisation criminelle» ou de criminalité organisée qui figure dans l'exposé des motifs devrait être complété par celui de «bande organisée», qui existe déjà comme circonstance aggravante dans certaines législations pénales. La commission de la contrefaçon commerciale en bande organisée ou dans le cadre d'une organisation criminelle devrait constituer une circonstance aggravante, justifiant une aggravation des peines et amendes.

4.3.4

La Commission indique que les états membres sont libres d'adopter des peines plus graves, ou de sanctionner d'autres actes. Cela peut être interprété comme un encouragement à la pénalisation d'actes qui n'auraient pas de finalité commerciale, voire à étendre le délit de contrefaçon à des faits qui ne constituent pas une reproduction ou une copie proprement dites d'un produit, d'un procédé ou d'une œuvre.

4.3.5

Le Comité s'interroge sur l'assimilation, par le droit communautaire et dans certains pays, de logiciels de copie pouvant contourner ou annuler les DRMs (12) (dispositifs anti-copie, matériels ou logiciels, le plus souvent faibles et non cryptés) à une contrefaçon des dispositifs DRMs, alors que ce qui est ainsi qualifié de «contrefaçon» ne constitue pas une copie ou une reproduction du dispositif original. De plus, les dispositifs dits de DRMs ne sont pas standards, ils dépendent d'une plate-forme ou d'un fournisseur, les formats des fichiers peuvent être propriétaires, et cela constitue des obstacles à l'interopérabilité ou vise à constituer des marchés captifs en écartant la concurrence; la création et l'utilisation de moyens de copie pour permettre au consommateur ou à l'entreprise titulaire d'une licence logicielle d'exercer leurs droits (copie privée, de sauvegarde, pour utilisation sur divers matériels standards) ne devraient pas être pénalisés en tant que tels, mais seulement s'il existe l'élément moral et l'élément matériel d'un délit à une échelle commerciale.

4.3.6

Le Comité soutient le principe de l'indépendance de l'action pénale par rapport à toute plainte de la victime au civil ou au pénal; en effet, dans un contexte maffieux, les victimes pourraient hésiter à engager une action pour protéger leurs droits. En outre, la contrefaçon commerciale, en particulier par des bandes ou organisations relevant du crime organisé voire du terrorisme, affecte les économies et le bien être social, et sa répression constitue une responsabilité propre de l'État.

4.3.7

Le Comité espère qu'une coopération effective entre États membres pourra permettre de s'attaquer efficacement aux réseaux internationaux de contrefaçon, en particulier ceux liés aux organisations criminelles et aux activités de blanchiment financier, tout en rappelant que nombre de ces réseaux opèrent à partir de pays tiers et qu'il est indispensable d'élargir l'action au-delà des frontières de l'Union en utilisant les moyens offerts par le droit international.

4.3.8

Au niveau communautaire, le Comité estime que des équipes communes d'enquête policière devraient coopérer également avec les équipes des douanes, comme avec les victimes de contrefaçons ou leurs experts mandatés. Il se félicite de l'intégration des victimes dans les procédures d'enquête, mais propose de limiter leur rôle à des activités de pure information des autorités publiques. Il serait excessif que suite à une accusation de contrefaçon à une échelle commerciale, une entreprise puisse par exemple participer à des contrôles et saisies chez un concurrent, qui est réputé innocent jusqu'à preuve judiciaire et définitive du contraire par force de chose jugée. Le Comité tient à éviter des dérives de justice privée, d'ingérence ou d'intrusion abusive de personnes non revêtues de l'autorité publique dans les procédures pénales.

4.3.9

Enfin, le Comité est préoccupé de la tendance à l'occupation commerciale croissante des réseaux de l'internet et aux demandes d'extension à ce secteur d'activité des sanctions pénales prévues dans les TRIPs, comme cela est clairement exprimé dans le rapport 2006 du département du commerce des États-Unis sur les chapitres 301 et super 301 (13), en application des traités de l'OMPI sur la propriété intellectuelle sur internet, instrument libre du domaine public et bien commun universel.

Bruxelles, le 12 juillet 2007.

Le Président

du Comité économique et social européen

Dimitris DIMITRIADIS


(1)  L'opt in pour le Royaume Uni et l'Irlande et l'exception en ce qui concerne le Danemark ne seraient plus opposables à la législation, comme c'est le cas pour les initiatives relevant du 3e pilier.

(2)  Accord sur les Droits de Propriété Intellectuelle liés au Commerce.

(3)  Article 61 ADPIC.

(4)  Directive 2004/48/CE relative au respect des droits de propriété intellectuelle.

(5)  Déclaration 2005/295/CE de la Commission relative à l'interprétation de l'article 2 de la directive précitée.

(6)  À la considérable exception du brevet communautaire, toujours dans les limbes (NdA).

(7)  Décision-cadre du Conseil 2005/212/JAI relative à la confiscation des produits, des instruments et des biens en rapport avec le crime (contrefaçon, piratage) (JO L 68 du 15.3.2005).

(8)  Projet de décision cadre du Conseil relative à la lutte contre la criminalité organisée. La contrefaçon peut aussi être impliquée dans le financement de réseaux terroristes; le blanchiment des revenus de la contrefaçon sont également des actes de nature criminelle à combattre avec vigueur.

(9)  COM(2005) 696 final.

(10)  Voir avis Malosse (JO C 221 du 7.8.2001).

(11)  Licence «Creative Commons», «General Public Licence», «BSD», licence audio-visuelle libre de la BBC, etc.

(12)  Digital Rights Management (gestion des droits numériques, euphémisme pour «protection contre la copie»).

(13)  2006 SPECIAL 301 REPORT USA.


27.10.2007   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 256/8


Avis du Comité économique et social européen sur «Le potentiel des entreprises, notamment des PME (stratégie de Lisbonne)»

(2007/C 256/03)

Le 14 septembre 2006, conformément à l'article 31 de son règlement intérieur, le Comité économique et social européen a décidé de charger la section spécialisée «Marché unique, production et consommation» de l'élaboration d'un rapport d'information sur «Le potentiel des entreprises, notamment des PME (Stratégie de Lisbonne)».

Au cours de la session plénière des 14 et 15 mars 2007, il a été décidé, conformément à l'article 29, paragraphe 2 du règlement intérieur, de transformer le rapport d'information en avis d'initiative.

La section spécialisée «Marché unique, production et consommation», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 3 mai 2007 (rapporteuse: Mme FAES).

Lors de sa 437e session plénière des 11 et 12 juillet 2007 (séance du 12 juillet 2007), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 123 voix pour, 1 voix contre et 3 abstentions.

1.   Préface

1.1

Les conclusions de la présidence, qui font suite au Conseil européen tenu les 23 et 24 mars 2006, demandent au Conseil économique et social européen de présenter au début de 2008 des rapports de synthèse sur les activités appuyant le partenariat pour la croissance et l'emploi.

1.2

Le Conseil européen propose en outre des domaines spécifiques d'action prioritaire pour la période 2005-2008:

i.

l'investissement dans la connaissance et l'innovation;

ii.

le potentiel des entreprises, notamment des PME;

iii.

l'emploi pour les catégories prioritaires (…);

iv.

la définition d'une politique énergétique pour l'Europe (…);

v.

des mesures à prendre dans tous les domaines pour maintenir la dynamique dans le cadre de tous les piliers du partenariat pour la croissance et l'emploi (…).

2.   Conclusions et recommandations

2.1

Bien que la stratégie de Lisbonne ait donné lieu à des évolutions positives, elle n'a pas encore apporté, à l'heure qu'il est, tous les résultats escomptés, et ce en particulier dans le domaine de la croissance économique et industrielle et de la création d'emplois plus nombreux et de meilleure qualité. En matière de concurrence internationale, l'Europe doit faire face aux défis que lui posent ses concurrents traditionnels comme des compétiteurs plus récents, et auxquels elle ne parvient pas à répondre de manière appropriée.

2.2

Les entreprises européennes sont confrontées, dans leur activité, à un marché intérieur qui reste encore inachevé, en matière notamment d'harmonisation des règles fiscales, du fait d'une transposition trop lente des directives par les États membres, des charges administratives qui persistent ainsi que d'une mobilité des travailleurs trop faible. Les petites et moyennes entreprises, en particulier, ont des difficultés pour surmonter ces obstacles.

2.3

Parmi les autres défis à surmonter figurent notamment le manque de culture entrepreneuriale, le vieillissement de la population et ses effets sur l'entrepreneuriat et l'offre de main-d'œuvre ainsi que la nécessité de mettre davantage l'accent sur la transmission des entreprises, l'accès au financement au cours des phases de démarrage et de croissance, l'accès aux résultats de la recherche et les opportunités d'innovation qui en découlent.

2.4

Les petites et moyennes entreprises jouent un rôle essentiel s'agissant d'atteindre les objectifs de Lisbonne. En dépit de ce fait et alors même que leur contribution aurait été nécessaire, celle-ci a été négligée au cours des premières années de mise en œuvre. Il conviendrait en particulier de renforcer la participation des organisations de PME à l'évaluation des progrès accomplis, ainsi que leur rôle dans la promotion des PME à tous les échelons décisionnels. Le CESE souhaite que soient formulées, à l'occasion de la prochaine révision des lignes directrices intégrées pour la croissance et l'emploi pour la période 2008-2010, des lignes directrices sur les PME mieux ciblées et plus rationnelles, en particulier en ce qui concerne le chapitre relatif aux réformes microéconomiques. Dans l'optique de pleinement les impliquer dans le processus, le CESE invite le Conseil à donner sans plus tarder une base juridique à la charte des petites entreprises, conformément à la demande du Parlement européen — afin de consolider les fondements qui permettront une action renforcée. Les orientations et les mesures citées ci-après nous semblent cruciales pour développer le potentiel des PME.

2.4.1

Le Comité appelle la Commission et le Conseil à mettre tout en œuvre pour que le principe suivant lequel il faut penser d'abord aux petites entreprises devienne un fil directeur dans toutes les mesures réglementaires pertinentes.

2.4.2

Le CESE souhaiterait que 2009 soit déclarée «Année européenne de l'entrepreneuriat» afin de mettre l'accent sur le rôle essentiel que jouent les entrepreneurs pour la croissance et la prospérité et d'inciter — notamment — les jeunes à envisager le choix d'une carrière de chef d'entreprise.

2.4.3

Le CESE demande que des efforts soient consentis pour s'assurer que le programme pour l'innovation et la compétitivité donne des résultats, qu'il permette aux PME de bénéficier d'un soutien efficace et de tirer aisément parti des possibilités qu'il offre, et pour faire en sorte que les PME puissent accéder facilement aux mécanismes du 7e programme-cadre pour la recherche et le développement et aux Fonds structurels. L'efficacité et l'accessibilité de ces programmes comme de l'initiative JEREMIE devraient faire l'objet d'un suivi attentif.

2.4.4

L'atout le plus précieux d'une entreprise est son capital humain. Il conviendrait que des structures de soutien adéquates, des offres de formation sur mesure et des incitations financières bien conçues aident les PME à améliorer, par le biais d'un nouvel effort d'investissement dans la formation continue, les compétences et aptitudes des travailleurs comme celles des entrepreneurs.

2.4.5

Le CESE appelle la Commission à effectuer une analyse de la participation des PME aux programmes communautaires. Si cette participation n'est pas jugée suffisante, il conviendrait d'instaurer un pourcentage minimum obligatoire.

2.4.6

Les marchés publics sont un moyen important d'aider les PME à développer leurs activités. La participation des PME devrait faire l'objet d'un suivi attentif et il conviendrait de prendre des mesures pour les aider à accéder à ces marchés. Les échanges de bonnes pratiques devraient être encouragés.

2.4.7

Il conviendrait de créer, au niveau de la Commission, une structure de coordination qui permette d'appliquer dans tous les programmes, actions et mesures législatives une véritable politique en faveur des PME qui soit efficiente et efficace.

2.4.8

Il convient de réaliser des actions spécifiques pour promouvoir et utiliser les meilleures pratiques dans le domaine des PME et en ce qui concerne la croissance de la compétitivité, notamment dans les régions dont le développement européen est peu élevé. Des actions de ce genre devraient être menées par le biais des organisations de PME.

3.   Observations générales

3.1

La stratégie de Lisbonne est connue avant tout, de manière réductrice, en tant qu'engagement à faire de l'Europe l'économie de la connaissance la plus dynamique et la plus compétitive du monde d'ici 2010. Outre les grandes lignes de cette stratégie, le Conseil a adopté une charte européenne des petites entreprises en juin 2000 à Santa Maria da Feira.

3.2

Le Comité rappelle que le mandat de Lisbonne du 24 mars 2000 avait dès l'origine:

souligné la nécessité d'associer activement, par diverses formes de partenariats, les partenaires sociaux et la société civile à cette stratégie;

précisé que la réussite de celle-ci reposerait essentiellement sur le secteur privé et sur des partenariats entre les secteurs public et privé et sur l'implication tant des États membres que de l'Union européenne;

veillé à un développement équilibré de ses trois volets, à savoir la croissance économique, la cohésion sociale et la durabilité environnementale en stimulant la compétitivité européenne et la création d'emplois tout en s'appuyant sur des politiques environnementales adéquates.

3.3

Lors du sommet européen de printemps, en mars 2005, le Conseil a procédé à l'examen à mi-parcours de la stratégie de Lisbonne et a décidé de relancer le processus, en remettant l'accent sur la croissance et l'emploi en tant que principales priorités d'action européennes. Un accord a été conclu au sujet des lignes directrices pour la croissance et l'emploi (1) qui sont destinées à garantir une plus grande cohérence des mesures de réforme ainsi qu'un plan clair pour l'élaboration des programmes nationaux de réforme.

3.4

Dans l'évolution de la stratégie de Lisbonne, la recherche de la compétitivité et de la croissance constitue un élément crucial pour ce qui est de susciter une amélioration du bien-être économique, de créer de l'emploi, ainsi que de préserver et d'améliorer la qualité des modes de vie. En retour, une amélioration de la qualité de vie, des avancées sociales et la durabilité environnementale peuvent eux aussi être des facteurs de croissance. C'est en particulier dans le domaine de la croissance économique et industrielle ainsi que de la création d'emplois plus nombreux et de meilleure qualité que la stratégie de Lisbonne n'a pas encore apporté les résultats escomptés. L'Europe fait face à des difficultés en matière de concurrence internationale. Depuis le lancement de la stratégie de Lisbonne, l'UE a connu un élargissement majeur, qui a porté le nombre de ses États membres de 15 à 25, puis un autre qui a amené ce nombre à 27.

3.5

Un premier constat du Comité est que la stratégie de Lisbonne a déjà permis d'amorcer certaines évolutions positives, comme notamment:

une prise de conscience de l'exigence des réformes, au-delà des clivages traditionnels;

une diffusion accélérée des technologies de l'information et des processus d'innovation;

davantage d'appuis aux créations d'entreprises et au financement des PME;

un meilleur souci de durabilité du développement, visant à réduire les déficits publics, stabiliser le budget de la protection sociale, et préserver l'environnement;

des initiatives des partenaires sociaux dans le domaine des réformes sociales;

des mesures de simplification législative et administrative, qui ont cependant eu jusqu'à présent un impact limité.

3.6

Malgré ces points positifs, le constat dominant demeure toutefois que l'Europe, prise en tenaille entre ses grands concurrents industrialisés et les économies émergentes à bas coût de production, qui intègrent de plus en plus les nouvelles technologies, fait face à des défis compétitifs sans cesse croissants. Beaucoup d'indicateurs sont devenus préoccupants, tels que:

la baisse de la demande intérieure, de l'investissement, de la productivité et de la croissance économique dans l'Union européenne, qui lui font perdre du terrain par rapport à ses principaux concurrents et aux marchés émergents;

la mondialisation, qui conduit à l'intégration de nouveaux pays au sein du système économique international;

l'échec s'agissant des objectifs en matière d'emploi;

dans plusieurs États membres (qui ne sont pas toujours les mêmes), la persistance de déficits publics;

des taux d'imposition et des règlementations fiscales trop disparates pour les entreprises;

la persistance de charges administratives pour les entreprises et des lenteurs dans la mise en œuvre des directives par les États membres;

le vieillissement démographique de l'Europe, qui pèsera énormément sur les finances publiques et l'offre de main-d'œuvre;

la menace d'une raréfaction des ressources ou de la volatilité des prix, du changement climatique et de la perte de la biodiversité;

le manque de mobilité des travailleurs alors qu'il s'agit là d'un élément essentiel à la réalisation du marché intérieur;

le choix de certaines entreprises présentes en Europe de se tourner vers les marchés émergents qui affichent une croissance rapide;

la perte d'intérêt des citoyens européens par rapport à l'Union européenne.

3.7

Dans le même temps, les réformes de la stratégie de Lisbonne ont pris du retard:

3.7.1

Sur le plan européen, les États membres ont bien convenu d'achever le marché unique dans plusieurs domaines (énergie, services, marchés publics, réseaux transeuropéens, adaptation des services publics), mais ont souvent renâclé à adopter dans les délais les mesures requises.

3.7.1.1

Sur le plan européen, la Commission a lancé, depuis les années 1990, une large gamme d'initiatives destinées d'une part à mieux comprendre les besoins et le fonctionnement des PME, et d'autre part à soutenir leur développement et à les aider à mieux concrétiser leur potentiel de création d'emploi. Ces actions ont été renforcées au cours des dernières années, avec la nomination d'un représentant pour les PME, l'adoption en 2004 d'un plan d'action pour l'esprit d'entreprise et les mesures prises en vue d'améliorer la législation, l'accès des entreprises aux financements (dans le cadre du Fonds européen d'investissement et de la Banque européenne d'investissement) et enfin l'adoption du programme-cadre pour l'innovation et la compétitivité.

3.7.2

Sur le plan national, les résultats sont inégaux, avec des insuffisances concernant surtout:

la complexité structurelle des réglementations et des procédures administratives;

des taux de chômage élevés, en particulier chez certains groupes cibles;

des taux élevés de départ anticipé à la retraite, malgré les engagements pris;

l'inadaptation des systèmes d'éducation et de formation, en particulier du point de vue des compétences entrepreneuriales et de celles qui ont trait aux TIC;

l'insuffisance de l'offre en matière d'éducation et de formation tout au long de la vie;

les dépenses de recherche qui, au lieu d'augmenter pour atteindre l'objectif de Lisbonne (3 % du PIB), ont en règle générale continué à baisser;

le manque d'innovation, même si le dernier rapport «Tableau européen de l'innovation» fait apparaître de meilleurs résultats;

les carences en matière d'accès des PME aux sources de financement, associées à une méconnaissance des possibilités existant au niveau européen;

la persistance de déficits budgétaires, qui ne concernent toutefois pas toujours les mêmes États membres.

3.7.3

Les nouveaux États membres doivent souvent surmonter des handicaps supplémentaires dus à leurs retards de développement — par exemple en matière d'emploi, de technologies, d'environnement -, bien que ces handicaps soient parfois aussi compensés par des mesures de rénovation plus radicales que dans les 15 «anciens» États de l'UE.

3.8

Il est fait référence au rapport élaboré par le Comité économique et social européen (CESE) à la demande du Conseil européen de mars 2005, qui présente les résultats de sa consultation avec ses partenaires dans l'ensemble des États membres et au niveau européen sur la mise en œuvre de la stratégie de Lisbonne et le rôle qui appartient aux partenaires sociaux ainsi qu'à d'autres composantes de la société civile organisée (2). Au cours des dernières années, le Comité a publié plusieurs rapports sur la stratégie de Lisbonne en général et sur certains de ses aspects en particulier (3).

4.   Améliorer le potentiel des entreprises, notamment des PME

4.1   L'importance des PME dans l'économie européenne

4.1.1

La grande majorité des entreprises européennes sont des PME (99,8 %). La forme d'entreprise la plus courante en Europe est celle de la microentreprise (91 %), l'Europe comptant en outre 7 % de petites entreprises. Non seulement les entreprises de petite taille prédominent, mais elles représentent également une part importante de l'emploi (2/3 de l'emploi du secteur privé) et de l'activité économique en Europe (57 % du PNB) (4).

4.1.2

Afin d'améliorer le suivi des performances économiques des PME, le CESE appelle la Commission européenne à relancer les activités de l'Observatoire européen des PME.

4.1.3

Les PME sont les principales entités créatrices d'emploi, représentant l'une des premières sources de recettes du budget de l'État (impôts, TVA, etc.) et offrant des possibilités d'accomplissement professionnel et social à une grande partie de la population, et notamment à son segment le plus actif et innovant qui «tire» l'économie dans son sillage. En outre, elles constituent la principale composante d'un tissu économique propice à l'économie de marché, caractérisé par la flexibilité, l'innovation et le dynamisme et portant en germe de futures grandes entreprises, notamment dans les nouveaux domaines de l'économie, fondés sur des technologies complexes.

4.2   Compétitivité

4.2.1

L'accent mis sur la compétitivité revient à reconnaître la nécessité d'arriver à une compétitivité durable dans une économie ouverte et mondialisée, en améliorant notre utilisation des nouvelles technologies, en privilégiant des formes plus efficaces de formation professionnelle, en disposant de main-d'œuvre qualifiée et en améliorant la productivité. La notion de qualité (qualité des produits, des services, des réglementations, de la gouvernance, de l'emploi, des relations sociales et de l'environnement) occupe une place centrale dans la stratégie.

4.2.2

Afin d'assurer la stabilité économique, les États membres devraient maintenir leurs objectifs budgétaires à moyen terme tout au long du cycle économique ou bien prendre toutes les mesures correctrices nécessaires. Sous réserve de cette obligation, les États membres devraient éviter de mener des politiques budgétaires procycliques. Les États membres dont le déficit de la balance des opérations courantes risque de devenir insoutenable devraient s'atteler à le résorber en réalisant des réformes structurelles qui renforcent la compétitivité extérieure et mener des politiques budgétaires qui contribuent à la résorption du déficit. Étant donné le vieillissement démographique de l'Europe, ces mesures sont un minimum.

4.2.3

Le CESE estime que seule une réorientation fondamentale de la politique économique, et en particulier de la politique macroéconomique, permettra d'éliminer les obstacles à une relance durable et porteuse de la conjoncture économique au sein de l'UE. L'UE doit compter sur ses propres forces afin de remettre l'économie européenne sur la route de la croissance et du plein emploi. Une politique macroéconomique équilibrée doit englober les objectifs de la stratégie de Lisbonne, notamment le plein emploi, le renforcement de la compétitivité ainsi que la prise en compte réelle de l'obligation d'un développement «durable» selon les conclusions du sommet de Göteborg.

4.2.4

Le CESE rappelle que la politique monétaire devrait avoir pour objectif l'instauration d'un équilibre entre la stabilité des prix, la croissance économique et l'emploi. À cet égard, il serait opportun d'inciter la BCE à poursuivre un objectif de stabilité «au sens large», qui vise non seulement la stabilité des prix mais également la stabilité de la croissance, du plein-emploi et du système de cohésion sociale (5). Pour que des résultats puissent être obtenus, il importe que les budgets nationaux soient conformes aux politiques de la BCE et que le pacte de stabilité et de croissance soit respecté.

4.2.5

En outre, le CESE fait remarquer qu'au sein des PME, les services liés aux entreprises revêtent une pertinence toute particulière dans la perspective de la réussite de la stratégie de Lisbonne et de la compétitivité de l'UE. Dans le prolongement de la communication de la Commission sur le sujet (6), le CESE souligne qu'il est nécessaire de mettre en place un environnement réglementaire qui permette aux PME concernées de répondre aux demandes auxquelles elles sont confrontées de la part de la société.

4.2.6

Le CESE adhère, en outre, à l'ample analyse qui est faite, dans le document de la Commission sur une approche plus intégrée de la politique industrielle, sur les mesures de soutien nécessaires dans 27 secteurs de l'industrie manufacturière, mais il insiste sur la nécessité de mettre véritablement en œuvre cette action, en coordination avec les États membres (7).

4.3   Mieux légiférer (8)

4.3.1

Le CESE soutient pleinement la proposition récente de la Commission européenne qui vise à réduire le fardeau administratif des entreprises de 25 % d'ici 2012 (9). Une telle mesure pourrait entraîner une augmentation du PIB de l'Union européenne de 1,5 %. Le CESE invite la Commission à présenter sans tarder une stratégie claire destinée à une simplification d'ensemble de l'environnement réglementaire, pour permettre à l'UE d'atteindre ses objectifs dans ce domaine (10).

4.3.2

L'allégement des contraintes administratives peut stimuler le dynamisme économique. Pour réduire la charge que constituent les obligations juridiques et réglementaires, il est nécessaire que les pouvoirs publics locaux, régionaux et nationaux, ainsi que l'Union européenne adoptent une approche globale. Il est essentiel que les réglementations soient bien conçues et proportionnées.

4.3.3

Le CESE soutient le projet, annoncé par la Commission dans son examen stratégique du programme «Mieux légiférer dans l'Union européenne» (11), de créer un comité chargé d'analyser l'impact de la législation (sur les entreprises) en vue de renforcer la qualité et l'efficacité des analyses d'impact. La portée de son action ne doit toutefois pas se limiter à un simple travail de coordination; il faudrait en outre qu'il évalue la qualité des textes au regard de la prise en compte des PME et qu'il analyse les conséquences économiques et sociales des propositions réglementaires. Les nouvelles réglementations au niveau national et communautaire devraient être passées au crible pour évaluer leur incidence sur les PME.

4.3.4

Les conséquences économiques, sociales et environnementales des réglementations nouvelles ou révisées doivent être soigneusement évaluées pour permettre l'identification des possibilités de synergies et d'arbitrages entre différents objectifs des politiques menées. En outre, la réglementation existante est examinée pour détecter d'éventuelles possibilités de simplification et son impact sur la compétitivité est évalué. Il convient d'attacher une attention particulière à la conduite d'études indépendantes qui portent sur l'impact de toutes les propositions législatives et réglementaires de la Commission européenne sur les entreprises et s'intéressent plus particulièrement au cas des petites et moyennes entreprises. Enfin, une approche commune de mesure des coûts administratifs engendrés par une législation nouvelle ou existante est actuellement mise au point. Au moment de réviser la législation existante et de concevoir de nouvelles règles, le principe suivant lequel il faut penser d'abord aux petites entreprises devrait prévaloir. Cela implique que la législation devrait prendre en compte les particularités des PME.

4.3.5

Le CESE souligne que c'est particulièrement pour les petites et moyennes entreprises qu'il est important que de telles améliorations interviennent, dans la mesure où les ressources dont elles disposent pour s'occuper des tâches administratives imposées tant par la législation communautaire que par la législation nationale sont limitées.

4.3.6

Il convient de prendre toutes les mesures nécessaires afin de s'assurer que les États membres transposent les directives en temps voulu et à travers des réglementations de grande qualité, et de convaincre les gouvernements et les législateurs nationaux et régionaux de réaliser leurs propres projets de simplification, en s'intéressant plus particulièrement aux réglementations qui, par la mise en œuvre de la législation européenne, ont été alourdies d'exigences supplémentaires.

4.3.7

La plupart des intervenants présents aux échelons régional, national et européen ne connaissent pas suffisamment la réalité des petites entreprises et leurs véritables besoins. Une meilleure implication des associations de PME (12) à tous les niveaux constitue un prérequis pour l'amélioration de la politique à l'égard des PME en Europe. Le renforcement des associations de petites entreprises est également l'un des éléments clés de la charte européenne des petites entreprises (2000). Les associations représentatives des PME devraient être associées, en qualité d'acteurs de premier plan, à tous les niveaux du processus décisionnel.

4.3.8

Le CESE soutient résolument la Charte européenne des petites entreprises, qui s'est avérée être un bon instrument pour suivre les progrès réalisés et identifier les problèmes rencontrés par les PME, ainsi que pour décider les États membres à agir en vue d'améliorer la coordination des politiques entrepreneuriales dans l'ensemble de l'Europe. Il importe de garder un rythme soutenu dans le processus destiné à intégrer aux rapports annuels de l'agenda de Lisbonne les rapports sur la mise en œuvre de la Charte. Il est impératif de l'actualiser constamment et de la compléter par rapport à la stratégie de Lisbonne révisée et du processus majeur d'élargissement qu'a connu l'Union européenne.

4.4   Culture entrepreneuriale et création d'entreprise (13)

4.4.1

L'esprit d'entreprise est un phénomène complexe qui allie des éléments de sens de l'initiative, de prise de risque et d'innovation. Les petites et les nouvelles entreprises sont à la source d'innovations, occupent des niches de marché, sont créatrices d'emploi et augmentent la concurrence: elles favorisent ainsi l'efficacité économique.

4.4.2

L'Union européenne dans son ensemble souffre d'un faible niveau d'activité pour ce qui est des jeunes entreprises. Le dernier rapport du Global Entrepreneurship Monitor (GEM) ne place aucun État membre dans les 10 premiers pays de son classement (14). À l'inverse, 8 États membres figurent parmi les pays affichant les 10 taux de participation les plus faibles (15).

4.4.3

L'entrepreneuriat est important pour l'ensemble de la société. Pour promouvoir et favoriser l'émergence d'une culture d'entreprise comme pour faire comprendre l'importance de l'entrepreneuriat pour le développement global d'un pays, le Comité propose que l'année 2009 soit déclarée «Année européenne de l'entrepreneuriat». Dans ce contexte, le Comité observe que le bilan à mi-parcours de plusieurs programmes communautaires importants interviendra en 2010. Des attitudes publiques positives doivent être affichées concernant l'entrepreneuriat. Cette année devrait également fournir l'occasion de consolider et de renforcer les échanges existants de bonnes pratiques.

4.4.4

Au sein de l'UE, il est grand besoin de faire évoluer les programmes d'éducation et de formation — en particulier ceux de l'enseignement supérieur — afin de mettre davantage l'accent sur une formation à l'entrepreneuriat de niveau avancé, sur l'importance stratégique de la gestion de l'information et des TIC et sur la constitution de réseaux. Les établissements scolaires et universitaires ont un rôle essentiel à jouer dans la promotion de l'esprit d'entreprise chez les jeunes. Il conviendrait par exemple de faire participer activement les représentants du monde de l'entreprise aux programmes de formation et d'y associer également des organisations d'entreprises. Les médias et l'image des entreprises qu'ils véhiculent sont également importants.

4.4.5

Il conviendrait d'intensifier les politiques destinées à faciliter la création et le développement d'entreprises, notamment en ce qui concerne la réduction du temps et des coûts nécessaires à la création d'entreprises, les mesures visant à améliorer l'accès au capital-risque, l'augmentation du nombre des programmes de formation au métier d'entrepreneur, des mesures destinées à faciliter l'accès aux réseaux et aux services d'utilité publique, et le renforcement de la densité du réseau de services d'assistance s'adressant aux petites entreprises. De plus, des décisions politiques devraient être prises en vue de réformer les systèmes fiscaux, la réglementation, l'accès au marché, les procédures de sauvetage et de restructuration des entreprises ainsi que les règles régissant les droits de succession. Un changement culturel doit s'opérer en ce qui concerne l'attitude à l'égard des faillites.

4.4.6

L'accès de l'entreprise à des financements en phase de démarrage est une question d'importance cruciale. En Belgique, le gouvernement a pris des initiatives en vue de réduire le déficit de fonds propres (equity gap). Le fonds ARKimedes, qui a levé 110 millions d'euros sous la forme d'actions ou d'obligations garanties par le gouvernement régional flamand, en constitue un exemple.

4.4.7

Il est tout aussi important de fournir des informations et des services de soutien aux entreprises, et notamment aux jeunes entrepreneurs. Les programmes de parrainage mis en œuvre en Flandre (Belgique) ont fait leurs preuves.

4.4.8

La peur de l'échec a une incidence négative importante sur les créations d'entreprise potentielles. Un cadre social approprié doit être adopté pour les indépendants. Il faudrait également qu'ils puissent plus facilement bénéficier d'une deuxième chance.

4.5   Marché intérieur (16)

4.5.1

Il convient de libérer le potentiel du marché unique. L'Union européenne devrait maintenant bénéficier des avantages d'un marché qui est de plus grandes dimensions que ceux des États-Unis ou de la Chine, mais:

trop de directives n'ont pas été transposées intégralement en droit national;

en matière de normalisation et de reconnaissance mutuelle dans le secteur de la prestation de services, les progrès réalisés sont insuffisants;

des retards sont intervenus dans la libéralisation des marchés, et notamment des marchés du secteur public;

des difficultés sont apparues lorsqu'il s'est agi de s'entendre sur un système européen fonctionnel dans le domaine des droits de propriété intellectuelle;

certaines formes de différences entre les systèmes fiscaux provoquent des distorsions.

4.5.2

L'attrait de l'Union européenne en tant que lieu d'investissement dépend de la dimension et de l'ouverture de ses marchés, de son environnement réglementaire et de la qualité de son infrastructure. L'augmentation des investissements rendra l'Europe plus productive, car les niveaux de productivité de la main-d'œuvre sont conditionnés par les investissements afférents au capital physique et humain ainsi que par les investissements relatifs à la connaissance et aux infrastructures.

4.5.3

La capacité des producteurs européens à faire face à la concurrence et à survivre sur le marché intérieur détermine leur compétitivité sur les marchés internationaux. Alors que le marché intérieur est relativement bien intégré pour les biens, les marchés restent plutôt fragmentés, juridiquement ou de facto, pour ce qui concerne les services. Pour encourager la croissance et l'emploi et renforcer la compétitivité, le marché intérieur des services doit être pleinement opérationnel tout en préservant le modèle social européen. L'élimination des entraves fiscales aux activités transfrontalières et des derniers obstacles à la mobilité des travailleurs peut également permettre d'importants gains d'efficacité. Enfin, l'intégration complète des marchés financiers améliorerait la production et l'emploi en permettant une affectation plus efficace des capitaux et en améliorant les conditions de financement des entreprises.

4.5.4

Pour les PME, et en particulier dans le secteur des services, la pleine réalisation du marché intérieur n'est toujours pas intervenue. L'importance des contraintes administratives auxquelles donnent lieu les opérations transfrontalières et l'inadaptation des normes européennes empêchent les petites entreprises de tirer profit d'un plus vaste marché.

4.5.5

Les normes jouent un rôle essentiel pour l'accès aux marchés. Les procédures de normalisation actuelles en cours ne prennent pas suffisamment en compte les spécificités de l'artisanat et des PME. Il faut que les PME soient mieux associées à l'élaboration des normes européennes et internationales. Bien que la Commission ait fortement appuyé des structures telles que NORMAPME (17), il est nécessaire que des efforts supplémentaires soient fournis en faveur des PME, en particulier pour les productions en petites séries et la production sur mesure, pour des coûts de normalisation moins élevés, pour un meilleur équilibre en matière de représentation dans les commissions techniques, pour la simplification des systèmes de certification.

4.5.6

Il reste une marge de progrès considérable dans le domaine des procédures de marchés publics. De tels progrès se traduiraient par une augmentation de la part des appels d'offres faisant l'objet d'une information publique. Il faut mettre l'accent sur les possibilités dont disposent les PME pour participer aux procédures de marchés publics. Le CESE est favorable à ce que la Commission rédige un recueil de bonnes pratiques qui ont été enregistrées dans ce domaine par les États membres de l'UE mais aussi par les États-Unis et le Japon et ont eu pour effet d'élargir l'accès des PME aux marchés publics.

4.5.7

En Europe, les PME doivent faire face à 27 systèmes d'imposition différents, ce qui engendre des coûts de conformité prohibitifs et crée des entraves sérieuses au marché commun. Les coûts de conformité sont beaucoup plus élevés pour les petites entreprises que pour les grandes entreprises (18). Une simplification est attendue, en particulier en faveur des PME.

4.6   Capital humain, développement des compétences et dialogue social

4.6.1

Dans le contexte d'une économie mondialisée et fondée sur la connaissance, les entreprises doivent constamment s'adapter au changement. S'ils veulent réussir, les entrepreneurs doivent, plus que jamais, s'appuyer sur un socle solide de connaissances et de qualifications afin de faire face à une concurrence accrue et d'être à même de remporter la course à l'innovation. Face aux évolutions technologiques, les entrepreneurs comme les salariés doivent en outre développer régulièrement de nouvelles compétences, en particulier dans le domaine des TIC, et mettre à jour leurs connaissances (19).

4.6.2

Depuis le lancement de la stratégie de Lisbonne en 2000, les objectifs de formation et les stratégies d'éducation et de formation tout au long de la vie ont été nettement renforcés en Europe; il reste toutefois encore des progrès à accomplir, comme l'indique le rapport de suivi 2006 du «Cadre d'actions pour le développement des compétences et des qualifications tout au long de la vie» qui a été adopté en 2002 par les partenaires sociaux (CES, BusinessEurope, CEEP, UEAPME). Dans ce contexte, il conviendrait également que le nouveau «programme d'action intégré dans le domaine de l'éducation et de la formation tout au long de la vie» de l'Union européenne participe pleinement à cet effort, son objectif déclaré étant de contribuer à la réalisation des objectifs de Lisbonne à savoir le «développement de l'Union européenne en tant que société de la connaissance avancée, caractérisée par un développement économique durable, des emplois plus nombreux et meilleurs et une cohésion sociale accrue».

4.6.3

Comme l'a fait remarquer à juste titre le CESE (20), «les programmes éducatifs de l'Union européenne qui ont été développés jusqu'à présent figuraient parmi les rares activités communautaires axées directement sur les citoyens européens. Il conviendra que le nouvel instrument se fixe pour objectif, d'une part, de favoriser une évolution démocratique fondée sur l'idéal de la démocratie participative et d'une citoyenneté active et, d'autre part, de promouvoir l'emploi et un marché du travail diversifié». Étant donné que cet instrument englobe également les principaux programmes européens de mobilité que sont Leonardo da Vinci pour les apprentis, les jeunes en formation professionnelle initiale et les jeunes travailleurs, ainsi qu'Erasmus pour les étudiants, il conviendrait par ailleurs de faciliter l'accès à la mobilité individuelle dans ce cadre. Non seulement étudier et travailler à l'étranger pendant une période donnée est enrichissant du point de vue des compétences et du savoir-faire mais cela apporte en outre aux citoyens une meilleure compréhension de l'Europe et de la citoyenneté européenne. Une telle expérience aide de plus les personnes concernées à adopter une attitude plus active et à se sentir plus responsables de leur aptitude à l'emploi dans le cadre de leur vie professionnelle.

4.6.4

Le CESE a en outre souligné qu'il était «particulièrement attaché à ce que les PME puissent accéder aux mécanismes du programme» et a préconisé «que la question des PME soit abordée par une démarche propre, via une simplification des procédures concernées, de manière que leur participation au programme soit de l'ordre du réalisable et produise des résultats». Dans une économie axée sur les services, l'atout le plus précieux d'une entreprise est son capital humain. Pour que les entreprises, et en particulier les PME, puissent appliquer des stratégies de développement des compétences, il convient de concevoir des mécanismes de soutien qui les aident à investir dans la formation continue, notamment sous la forme d'offres de formation sur mesure, de soutiens financiers et d'incitations fiscales.

4.6.5

Le dialogue social constitue un instrument important pour relever les défis économiques et sociaux. Une de ses principales réalisations a été d'améliorer le fonctionnement du marché du travail et de permettre d'anticiper le changement. De plus, le dialogue social participe à créer un climat de confiance dans les entreprises. Il peut également permettre de trouver des solutions adaptées aux petites entreprises, pour autant qu'il s'accompagne d'une prise en compte de la spécificité et de la qualité du cadre de travail et des relations de travail, ainsi que de la particularité de la situation caractérisant les activités et le développement de l'artisanat et des petites entreprises.

4.7   Innovation

4.7.1

L'agenda de Lisbonne avait fixé l'objectif de consacrer 3 % du PIB à la recherche-développement, dont deux tiers doivent provenir du secteur privé qui, aujourd'hui, ne contribue qu'à hauteur de 56 % à cet effort. Malheureusement, il faut constater que l'Europe consacre à la recherche-développement une part de son PIB bien inférieure à celle que lui consacrent les États-Unis et le Japon (dans l'UE, la part de PIB qui lui est consacrée est de 1,93 %, un chiffre qu'il faut comparer aux 2,59 % des États-Unis et aux 3,15 % du Japon). En outre, sur le plan de l'intensité de l'effort de recherche, la Chine est en voie de rattraper l'UE d'ici 2010. En ce qui concerne la recherche-développement, en 2002, le secteur privé a consacré à la recherche 100 milliards d'euros de plus aux États-Unis qu'en Europe.

4.7.2

Le futur institut européen de technologie (IET), dont l'objectif est d'atteindre le niveau le plus élevé possible d'intégration de l'éducation, de la recherche et de l'innovation, dans une quête d'excellence, devrait reconnaître et fortement valoriser le potentiel des PME. Il convient de renforcer la coopération entre, d'une part, les universités et les centres de recherches, et, d'autre part, les entreprises, en particulier celles de petite taille. Il conviendrait d'inciter les chercheurs à avoir des contacts avec les entreprises. On ne peut pas sous-estimer l'importance de la promotion des transferts de technologie par le biais des centres technologiques et des pépinières. Dans le nouveau cadre pour les aides d'État à la recherche, au développement et à l'innovation (R&D&I), il conviendrait de prévoir des mesures d'appui aux prestataires de services de soutien à l'innovation. Il faudrait que, dans chacun des 27 États membres de l'Union européenne, les chercheurs européens se voient offrir davantage d'opportunités. Il est impératif de mieux promouvoir et de mieux diffuser les résultats de la recherche, afin d'améliorer l'accès des entreprises à ces résultats ainsi que l'impact économique qui en découle.

4.7.3

La réglementation européenne doit être harmonisée dans un sens favorable à l'innovation. Il est nécessaire qu'interviennent de nouvelles initiatives pour la création d'un brevet communautaire, afin de protéger l'innovation et de répondre aux besoins des entreprises européennes. Dans le cadre d'un tel système, il conviendrait que soit prévu un régime de taxes réduites pour les PME ainsi qu'une structure appropriée pour l'assurance des litiges relatifs aux brevets.

4.7.4

La Commission européenne a reconnu, dans ses communications les plus récentes, qu'il est nécessaire d'élargir la définition de l'innovation, afin de mettre l'accent sur les PME et de prendre en compte l'innovation non technique dans l'ensemble des secteurs économiques. Pour qu'elle porte ses fruits pour les petites entreprises, cette nouvelle approche doit à présent être mise en œuvre dans l'ensemble des domaines d'action.

4.7.5

Il est essentiel que les PME renforcent la qualification de leur capital humain existant et intègrent des universitaires dans les processus de production et d'innovation. Le 7e programme-cadre devrait aider les PME à adopter des technologies avancées de recherche et de production, ainsi que d'autres formes d'innovation importantes pour des structures de ce type.

4.7.6

Les ressources nécessaires sur le plan communautaire doivent provenir du programme d'action en faveur de la compétitivité et de l'innovation, du programme-cadre pour la recherche, des Fonds structurels et des programmes éducatifs, pour ne citer que les principaux. La coordination des politiques, y compris des ressources, sera une tâche difficile et délicate. En effet, les ressources financières communautaires disponibles sont relativement limitées par rapport aux besoins et à la demande. Pour assurer que les moyens financiers provenant des Fonds structurels soient utilisés pour cofinancer (par le biais du Fonds européen d'investissement — JEREMIE) des programmes en faveur des PME innovantes, des nouvelles entreprises et des entreprises faisant l'objet d'une transmission, il conviendra d'adopter des mesures appropriées à l'échelon des États membres et d'effectuer un suivi étroit de leur efficacité et de leur accessibilité.

4.7.7

L'introduction de nouvelles méthodes et outils de production avancés, notamment dans les PME, nécessitera des conditions de crédit avantageuses. La BEI et le FEI devraient être étroitement impliqués dans les travaux des groupes de planification sectorielle et intersectorielle.

4.7.8

Les PME doivent bénéficier d'une assistance plus substantielle à l'utilisation des applications des TIC, qui peuvent leur permettre de minimiser leurs coûts, d'accroître leur productivité et d'améliorer leur compétitivité.

4.8   Transmission d'entreprises (21)

4.8.1

Des études européennes montrent qu'environ un tiers des entrepreneurs européens, principalement des propriétaires d'entreprises familiales, prendront leur retraite au cours des dix années à venir. D'après les estimations, ce sont 690 000 entreprises, représentant au total 2,8 millions d'emplois, qui seront concernées. Il convient de promouvoir les transmissions d'entreprises, en faisant valoir qu'elles constituent une solution de remplacement tout à fait satisfaisante à la création d'une nouvelle entreprise.

4.8.2

Contrairement à la façon dont les choses se déroulaient par le passé, de plus en plus d'entreprises sont transmises à des tiers, en dehors de la famille. Par ailleurs, un intérêt de plus en plus marqué se fait sentir pour la reprise d'entreprises existantes plutôt que de créer une entreprise en partant de zéro. La recherche fait état d'un taux de survie de 96 % des transmissions d'entreprises au cours des cinq premières années contre un taux de 75 % pour les nouvelles entreprises.

4.8.3

Le premier défi est donc de mettre en place une plate-forme et d'aider au rapprochement entre les acheteurs potentiels et les vendeurs d'entreprises. Une telle bourse devrait revêtir un caractère transparent, afin d'augmenter les chances de contact et de garantir la continuité d'entreprises existantes et viables. Il est essentiel de disposer de services de qualité élevée assurant rapprochement, conseil et confidentialité. Des bourses, publiques ou bénéficiant d'un soutien public, pour l'aide aux transmissions d'entreprises existent dans la plupart des pays européens (22). Il conviendrait de développer ces initiatives dans tous les États membres de l'UE.

4.9   Accès au financement

4.9.1

Il conviendrait que les PME et, en particulier, les nouvelles entreprises, les entreprises faisant l'objet d'une transmission et les entreprises innovantes disposent d'un meilleur accès au financement, afin qu'elles soient en mesure d'exploiter tout leur potentiel et de créer de la croissance économique et plus d'emplois en Europe. Les modèles de partage des risques, tels que les dispositifs de garantie mutuelle et de garantie publique, se sont révélés être des instruments fort efficaces; il convient de les favoriser davantage tant à l'échelon européen qu'à celui des États membres.

4.9.2

Pour que les nouvelles entreprises, les PME et les entreprises en croissance rapide disposent de capital à un coût raisonnable, il est nécessaire que les taux d'intérêt et les primes de risques soient maintenus à des niveaux raisonnables, et que les dispositifs d'aide publique soient rationalisés.

4.9.3

Il conviendrait de renforcer et de soutenir les services de conseil que les organisations de PME fournissent aux petites et moyennes entreprises. Il est également nécessaire d'instaurer des instruments financiers qui soient adaptés aux besoins et aux moyens des petites entreprises. Le CESE appelle la Commission ainsi que la BEI et le FEI à financer l'innovation dans les petites entreprises au moyen du capital-risque et de dispositifs de garantie.

4.9.4

Les investisseurs de capital-risque et les réseaux d'investisseurs individuels (business angels) représentent, pour les PME, des voies importantes d'accès au financement. Pour réduire le déficit de fonds propres au stade de l'amorçage (small equity gap), il est essentiel que soit stimulée la création de réseaux entre, d'une part, les investisseurs de capital-risque et les réseaux d'investisseurs individuels (business angels) et, d'autre part, les nouveaux entrepreneurs.

4.9.5

Pour soutenir les petites entreprises, les dispositifs de garantie se sont révélés être très efficaces et présenter un bon rendement par rapport aux ressources investies. En France, la Caisse mutuelle de garantie de la mécanique (CMGM) a plus de 45 années d'expérience dans ce domaine. Cette structure offre des garanties bancaires pour la quasi-totalité des types de crédits (investissement, transmission d'entreprise, warrants, crédit à l'exploitation) qu'elle accorde aux entreprises. Celles-ci souscrivent à son capital et à son fonds de garantie. Ce système permet de réduire les garanties personnelles demandées aux entrepreneurs, de mettre à leur disposition des sommes plus élevées et leur donne une sécurité vis-à-vis de leur banquier. Il conviendrait d'encourager les échanges de bonnes pratiques entre les États membres de l'UE au sujet de l'accès aux financements et aux fonds de garantie destinés aux PME.

4.10   Internationalisation

4.10.1

L'Union européenne doit saisir les occasions que lui offre l'ouverture de marchés d'Asie en forte croissance, telles la Chine et l'Inde. Parallèlement, l'Union européenne doit faire face à la nouvelle répartition internationale du travail qui en résulte: c'est ainsi que la Chine commence à se spécialiser dans la production de biens à haute valeur ajoutée et que l'Inde se transforme en plate-forme d'externalisation de services. Il est essentiel d'adopter une approche commune vis-à-vis des pays tiers pour améliorer les conditions d'accès au marché pour les entreprises de l'Union.

4.10.2

Bien que le marché unique existe aujourd'hui depuis plus de 14 années, beaucoup d'entreprises continuent à exercer leur activité uniquement sur le territoire national. Les principaux obstacles auxquels elles se heurtent sont les barrières linguistiques, les différences qui subsistent en termes de législation et de réglementation et une connaissance insuffisante des autres marchés. Le CESE est favorable à la création de services d'assistance de proximité à l'attention des entrepreneurs, à l'image du passeport pour les exportations («Passport to export») instauré au Royaume-Uni (23). Il faudrait également que l'accès des PME aux marchés publics soit favorisé.

4.10.3

Il convient de mettre au point des dispositifs de soutien adéquats pour stimuler les activités transfrontalières, tant à l'intérieur de l'Union européenne que sur d'autres marchés.

4.10.4

Le CESE souligne qu'il faudrait mettre un accent particulier sur les PME dans les documents de la Commission relatifs à la politique commerciale (stratégie d'accès aux marchés, instruments de défense commerciale, stratégie pour une Europe compétitive dans une économie mondialisée).

Bruxelles, le 12 juillet 2007.

Le Président

du Comité économique et social européen

Dimitris DIMITRIADIS


(1)  Décision du Conseil du 12 juillet 2005 relative aux lignes directrices pour les politiques de l'emploi des États membres (2005/600/CE) (JO L 205 du 6.8.2005, p. 21).

(2)  «Mise en œuvre de la stratégie de Lisbonne — Contributions suite au mandat du Conseil européen des 22 et 23 mars 2005».

(3)  JO C 185 du 8.8.2006, et CCMI/032.

(4)  Chiffres disponibles pour 2003, «Pocket book» publié par Eurostat en 2006.

(5)  Le Comité économique et social européen a demandé à plusieurs reprises que la politique monétaire contribue également à la réalisation des objectifs de croissance et de plein emploi.

(6)  «La compétitivité des services liés aux entreprises et leur contribution à la performance des entreprises européennes», COM(2003) 747 final du 4 décembre 2003.

(7)  Communication de la Commission «Mettre en œuvre le programme communautaire de Lisbonne: Un cadre politique pour renforcer l'industrie manufacturière de l'UE — vers une approche plus intégrée de la politique industrielle», COM(2005) 474 final; «Politique industrielle moderne».

(8)  Le CESE a récemment publié plusieurs avis sur le thème de la simplification et de l'amélioration de la législation:

 

«Mieux légiférer», avis exploratoire élaboré à la demande de la présidence britannique (rapporteur: M. RETUREAU) — JO C 24 du 31.1.2006.

 

«Comment améliorer la mise en œuvre et l'application de la législation communautaire?», avis d'initiative (rapporteur: M. van IERSEL) — JO C 24 du 31.1.2006.

 

«Mettre à jour et simplifier l'acquis communautaire (COM(2003) 71 final)» (rapporteur: M. RETUREAU) — JO C 112 du 30.4.2004.

(9)  COM(2006) 689, 690 et 691 du 14 novembre 2006.

(10)  «Programme d'action pour la réduction des charges administratives dans l'Union européenne» COM(2007) 23 final du 24 janvier 2007.

(11)  Communication de la Commission du 14 novembre 2006.

(12)  Par organisation de PME, nous entendons les organisations représentant les PME (dans leur définition européenne) dans différents domaines d'action: artisanat, industrie, services, commerce, professions libérales. Cette acception inclut tant des organisations multisectorielles que des organisations plus spécifiquement liées à un secteur en particulier.

(13)  JO C 309 du 12.12.2006, avis du Comité économique et social européen sur la communication de la Commission «Mise en œuvre du Programme communautaire de Lisbonne: Stimuler l'esprit d'entreprise par l'enseignement et l'apprentissage» COM(2006) 33 final.

(14)  L'Irlande occupe la 11e place.

(15)  Hongrie, Belgique, Suède, Slovénie, Pays-Bas, Danemark, Italie et Finlande.

(16)  Avis exploratoire sur le thème «Réexamen du marché unique». JO C 93 du 27.4.2007.

(17)  NORMAPME: Bureau européen de l'artisanat et des petites et moyennes entreprises pour la normalisation —

www.normapme.com

(18)  Il s'agit des coûts de conformité afférents à la fiscalité des activités transfrontalières.

(19)  Même des professions traditionnelles comme celles de plombier ou de menuisier doivent tenir compte des techniques d'économie d'énergie.

(20)  JO C 221 du 8.9.2005.

(21)  «Mise en œuvre du programme communautaire de Lisbonne pour la croissance et l'emploi — La transmission d'entreprise — La continuité grâce à un nouveau départ», COM(2006) 117 final du 14 mars 2006.

(22)  En France, en Italie, au Luxembourg, aux Pays-Bas, en Autriche, en Finlande et en Belgique (où existe une base de données distincte pour chaque région). Le taux de réussite pour ces pays est d'environ 25 %, ce qui signifie que, dans la base de données, environ une entreprise sur quatre a trouvé un successeur.

(23)  Pour de plus amples détails concernant le marché unique, voir le Flash Eurobaromètre 180 — TNS Sofres/EOS Gallup Europe, «Le marché intérieur — Opinions et expériences des entreprises de l'UE-15», publié en juin 2006.

Pour de plus amples détails concernant le programme «Passport to export» géré par l'organisation gouvernementale UK Trade and Investment et destiné à permettre aux exportateurs britanniques de remédier à leurs faiblesses en matière de commerce international, se reporter à la charte européenne des petites entreprises et au recueil de bonnes pratiques qui l'accompagne (2006, p. 9).


27.10.2007   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 256/17


Avis du Comité économique et social européen sur le thème «L'investissement dans la connaissance et l'innovation (Stratégie de Lisbonne)»

(2007/C 256/04)

Le 14 septembre 2006, Le Comité économique et social européen a décidé, conformément à l'article 31 de son Règlement intérieur, de charger la section spécialisée «Marché unique, production et consommation» de l'élaboration d'un rapport d'information sur «L'investissement dans la connaissance et l'innovation».

Au cours de la session plénière des 14 et 15 mars 2007, il a été décidé de transformer le rapport d'information en avis d'initiative (Article 29, paragraphe 2, du Règlement intérieur).

La section spécialisée «Marché unique, production et consommation» chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 3 mai 2007 (rapporteur: M. WOLF).

Lors de sa 437e session plénière des 11 et 12 juillet 2007 (séance du 12 juillet 2007), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 120 voix pour et 1 abstention.

CONTENU

1.

Introduction

2.

Résumé et recommandations

3.

Observations générales

4.

Éducation, formation, formation professionnelle et formation continue

5.

Questions financières et procédures

6.

Aspects structurels et conditions-cadres

7.

Le facteur humain — chercheurs, ingénieurs et entrepreneurs

1.   Introduction

1.1

C'est sous le titre «Relance de la stratégie de Lisbonne pour l'emploi et la croissance» que le Conseil européen a salué, dans les Conclusions de la présidence du Conseil des 23 et 24 mars 2006 (paragraphe 12), l'initiative du Comité économique et social européen visant à permettre, dans la Communauté, aux acteurs concernés d'avoir davantage le contrôle du processus de la stratégie de Lisbonne. Il encourageait le CESE à poursuivre ses travaux et lui demandait de présenter au début de l'année 2008 un rapport de synthèse sur les activités appuyant le partenariat pour la croissance et l'emploi.

1.2

Dans un premier temps, le Comité a adopté dès le 15 février 2007 une résolution sur la mise en œuvre de la Stratégie de Lisbonne renouvelée destinée au Conseil européen du printemps 2007.

1.3

Dans le cadre de la préparation du rapport de synthèse demandé par le Conseil européen, quatre rapports d'information vont être élaborés sur les thèmes suivants:

«L'investissement dans la connaissance et l'innovation»,

«Le potentiel des entreprises, notamment en ce qui concerne les PME»,

«L'emploi pour les catégories prioritaires», et

«Une politique énergétique pour l'Europe».

Ces rapports d'information constitueront la base du rapport qui sera adressé au Conseil européen.

1.4

Le texte qui suit, auquel ont contribué également des représentants des Conseils économiques et sociaux nationaux de plusieurs États membres, traite exclusivement de «l'investissement dans la connaissance et l'innovation».

2.   Résumé et recommandations

2.1

La force de l'Europe réside dans le potentiel de performance de ses citoyens.

2.2

La libre interaction entre créativité artisanale et initiative entrepreneuriale d'une part, et le caractère méthodique et systématique de la science d'autre part, ainsi que les technologies et les procédés industriels que celle-ci a permis de développer sont les ingrédients qui ont permis d'atteindre notre niveau de vie actuel, allant de pair avec les évolutions historiques en matière de politique sociale qui ont façonné le libre citoyen de l'État moderne, qui se caractérise par la séparation des pouvoirs, la démocratie et les droits fondamentaux.

2.3

L'élaboration et l'utilisation intensive de procédés industriels, de machines et de moyens de transports consommateurs d'énergie constituent un facteur déterminant de cette évolution: l'énergie a libéré l'être humain des travaux physiques les plus pénibles, elle a multiplié sa productivité, apporté la chaleur et la lumière et permis une mobilité et une communication insoupçonnées. L'énergie est devenue «l'aliment» et le moteur des économies modernes.

2.3.1

Compte tenu du caractère fini des ressources en sources d'énergie fossiles, de la forte augmentation de la demande en énergie à l'échelle mondiale, ainsi que de l'impact attendu de la consommation d'énergie sur l'évolution future du climat, la garantie d'un approvisionnement énergétique durable et compatible avec le climat se trouve logiquement au premier plan du débat politique. Si l'on veut s'acquitter de cette tâche très difficile, il semble indispensable d'en passer par un programme de recherche et de développement consacré à l'énergie qui soit fort, qui englobe tous les aspects du problème et qui soit efficace.

2.4

En outre, il reste encore de nombreux autres problèmes et des tâches dont que seuls la recherche, le développement et l'innovation pourront venir à bout. Il s'agit par exemple de la lutte contre les maladies physiques et psychiques, l'amélioration du quotidien et la participation à la société des personnes handicapées, les retombées de la mutation démographique, et notamment la recherche sur le vieillissement, la protection de l'environnement ainsi que, de manière générale, la garantie et la poursuite du développement de notre mode de vie, de notre système de valeurs et de notre modèle social européens. Enfin, la recherche et le développement sont également au service de l'objectif fondamental de création de connaissances nouvelles et plus nombreuses. Un savoir accru aide non seulement à résoudre les problèmes, mais il élargit également notre vision du monde, dépassionne les situations de conflits et enrichit notre culture.

2.5

La Communauté européenne doit en outre faire face au défi que constitue le renforcement de la concurrence mondiale, au sein de laquelle l'UE doit préserver ses emplois, son niveau de revenu ainsi que ses normes sociales et environnementales. Et ce, non seulement face à la puissance économique des États-Unis et du Japon mais surtout face aux résultats impressionnants et en progression constante enregistrés par les secteurs de l'industrie et de la recherche de pays comme la Chine, l'Inde et le Brésil, dont les salaires et les normes sociales et environnementales sont sensiblement moins élevés.

2.6

Cela ne pourra se faire que si l'Europe conserve à l'avenir sa longueur d'avance en matière de recherche, de développement technologique et d'innovation constante, dans un contexte social et culturel caractérisé par la démocratie, l'État de droit, la stabilité politique, la liberté d'entreprendre, une planification sûre, la volonté d'être performant, la reconnaissance des résultats et la sécurité sociale.

2.7

Des prestations scientifiques et techniques de haute qualité et leur transposition industrielle en force économique concurrentielle sont, par conséquent, les conditions décisives qui nous permettront de garantir notre avenir, en particulier concernant la question énergétique et climatique, de conserver et d'améliorer notre position actuelle sur la scène internationale et de développer notre modèle social européen au lieu de le mettre en péril.

2.8

La première condition est l'existence d'un climat social ouvert au progrès, à l'innovation et à l'entreprenariat, qui permette à cette approche de se déployer pleinement, afin que soient créées les conditions-cadres nécessaires et que soient prises les décisions correspondantes à tous les niveaux de la politique, et que l'industrie soit suffisamment confiante et optimiste pour consentir les investissements nécessaires en Europe et créer de nouveaux emplois. Mais pour y parvenir, il y a lieu de sensibiliser davantage les citoyens à l'importance élémentaire de la recherche fondamentale, étant donné qu'elle porte en elle les innovations futures. Il est notamment essentiel de disposer d'esprits entrepreneurs prêt à innover et à prendre des risques, de leaders politiques, de fiabilité et du sens des réalités.

2.9

En particulier, l'objectif fixé à Barcelone concernant la réalisation de la stratégie de Lisbonne doit être pris très au sérieux par tous les acteurs afin de combler le retard de l'Europe dans la compétition mondiale en matière d'investissements en recherche et développement. Cet objectif signifie que les dépenses globales de R&D de l'UE doivent être augmentées de manière à parvenir à un niveau équivalant à peu près à 3 % du PIB. Les investissements nécessaires pour ce faire devraient être financés aux deux tiers par le secteur privé.

2.10

Le septième programme-cadre de recherche et de développement 2007-2013 (RP7) a été adopté en décembre 2006 par le Conseil, avec un budget d'environ 50 milliards d'euros, soit une augmentation significative par rapport à celui du précédent programme. Ceci est un nouveau succès remarquable de la politique européenne, que le Comité a largement soutenue. Cependant, la Commission ne contribuerait pour sa part, sur le total de ce budget de 50 milliards d'euros, qu'à hauteur de quelque 2 % (et donc uniquement un cinquantième) des investissements dans la recherche et le développement prévus par les objectifs de Barcelone. Le Comité a déjà souligné à plusieurs reprises que ce pourcentage est très insuffisant pour permettre à l'aide communautaire d'exercer pleinement, comme on l'espérait, son puissant effet de levier et sa force d'intégration à l'égard de la politique d'aide des États membres et de la nécessaire volonté d'investir des entreprises.

2.11

C'est pourquoi le Comité confirme sa précédente recommandation d'augmenter, à l'occasion de la révision du budget communautaire en 2008, le pourcentage de l'aide communautaire dans un premier temps de la moitié, donc de 3 % du total des investissements envisagés dans l'objectif de Barcelone. Ceci vaut en particulier aussi étant donné la création prochaine de l'Institut européen de technologie (IET) et l'urgence de consacrer davantage de travaux de R&D à un approvisionnement énergétique durable et compatible avec le climat.

2.12

En même temps, il est toutefois indispensable d'inciter l'industrie, notamment les PME, à investir dans la recherche et le développement en leur offrant un cadre juridique (y compris en matière de responsabilité), administratif, fiscal et financier plus attrayant et plus intéressant. La législation communautaire en matière d'aides d'État joue un rôle important à cet égard; elle doit permettre aux États membres de promouvoir les capacités des universités, des organismes de recherche et de l'industrie en matière de recherche et de développement, et d'assurer la nécessaire mise en réseau de ces différents établissements de manière plus efficace et moins bureaucratique que ce n'était le cas jusqu'à présent. Pour cette raison, il y a lieu d'étudier attentivement si les «cadres communautaires pour les aides d'État pour la recherche, le développement et l'innovation» soutiennent effectivement ces objectifs.

2.13

Le savoir repose sur deux piliers de même importance, qui sont interdépendants: la formation et la recherche. Les nouvelles connaissances sont acquises au moyen de la recherche et du développement. Les acquis précédents constituent la base. Celle-ci est assimilée et transmise à travers l'éducation, la formation, la formation professionnelle et la formation continue. Il convient à cet égard de vérifier si les méthodes comme les contenus sont bien au service des objectifs annoncés. Ces deux piliers nécessitent en outre des investissements financiers sensiblement plus nombreux et des conditions-cadres adéquates.

2.14

La force de l'Europe réside dans le potentiel de performance de ses citoyens. C'est pourquoi il est primordial d'encourager davantage encore ce potentiel afin de lui permettre de s'épanouir. En conséquence, le Comité demande aux États membres de renforcer et d'améliorer leurs établissements d'enseignement et de consentir les investissements nécessaires pour cela. Donner une éducation solide à de larges catégories de population est aussi important que former une élite dirigeante scientifique. Dans cette perspective, il est nécessaire de disposer d'une offre d'établissements d'enseignement fiables et d'excellente qualité, depuis les écoles primaires jusqu'aux universités. Ceci est la première condition de l'avènement d'une société favorable à l'éducation et aux sciences en général.

2.15

Le Comité confirme sa recommandation de développer, à travers une coopération transnationale plus importante dans les domaines de l'enseignement, de l'innovation et de la recherche, un espace européen du savoir qui viendrait compléter et parachever l'espace européen de la recherche. Les incitations et mesures en faveur de l'apprentissage tout au long de la vie ont en l'occurrence un rôle important à jouer: l'apprentissage tout au long de la vie est en effet la clé de la société de la connaissance. Les obstacles au marché unique, qui entravent la transition vers la société européenne du savoir, doivent être supprimés le plus rapidement possible.

2.16

Ceci suppose que les États membres encouragent de manière plus active encore la mobilité des personnes, et que l'Union renforce les programmes communautaires œuvrant dans ce domaine (Erasmus, Marie Curie). La mobilité est un moyen d'acquisition et de transfert de compétences. La libre circulation de la main-d'œuvre, des chercheurs et des étudiants doit être garantie et récompensée par des incitations; elle doit s'accompagner de rémunérations, de conditions de travail et de politiques familiales décentes. A cette fin, il convient également d'améliorer l'accès à l'échelle de l'Europe aux informations sur les postes disponibles dans tous les États membres.

2.17

Concernant l'importance et la promotion de l'innovation, le Comité souhaite non seulement renvoyer à ses recommandations, exposées en détail ci-dessous, mais également surtout à l'excellent rapport Aho qu'il soutient. Celui-ci concerne en particulier les conditions-cadre juridiques et sociétales nécessaires à l'entreprise désireuse d'innover et au marché favorable à l'innovation. Le Comité renvoie en outre à son avis détaillé intitulé «libérer et renforcer le potentiel de l'Europe pour la recherche, le développement et l'innovation».

2.18

Le progrès et l'innovation reposent sur la transformation de nouvelles connaissances en processus et en produits nouveaux et améliorés (ainsi que l'innovation permanente de ceux qui existent déjà), sur de nouveaux modèles de société et sur des méthodes d'encadrement adaptées; c'est donc l'esprit d'entreprise et l'initiative entrepreneuriale qui sont en jeu, tous deux étant novateurs. Le progrès et l'innovation reposent toutefois également sur des services d'un type nouveau, sur le développement du secteur de la santé, et en général, sur les meilleures solutions possibles aux questions sociales, compte tenu des exigences économiques.

2.19

L'innovation signifie également imaginer et réaliser des techniques, procédés, modes d'organisation, modèles commerciaux et types de formation nouveaux, qui n'existaient pas encore, ou ne pouvaient encore exister. Pour cette raison, il importe que les dispositions légales concernant ce domaine aient une marge de manœuvre suffisante pour donner à toutes les idées, y compris la plus nouvelle à laquelle personne n'a encore jamais pensé, la possibilité d'être réalisée, au lieu que celle-ci soit condamnée a priori à ne jamais voir le jour, parce qu'elle n'entrerait pas dans le maillage d'une législation trop détaillée. Un excès de dispositions limitatives entrave l'innovation. C'est pourquoi le Comité soutient tous les efforts visant à simplifier la réglementation et à vérifier qu'elle ne contient pas de dispositions superflues, trop détaillées, voire inutilement restrictives.

2.20

L'innovation signifie également accepter un certain risque de réussite ou d'échec; car, en règle générale, la performance, mais également les inconvénients ou les conséquences annexes d'une nouvelle approche ou d'un nouveau projet n'apparaissent que lorsque celle-ci est soumise à l'épreuve de la pratique, et en situation de compétition avec les procédés concurrents. Même un échec bénéficie à la connaissance. L'opportunité et le risque sont les deux revers d'une même médaille. En principe, les bénéfices attendus d'une innovation doivent surpasser les risques inhérents. Les risques éventuels pour la société doivent faire l'objet d'une évaluation spécifique. L'on pourrait réfléchir par ailleurs à la création, au moins pour les petites et moyennes entreprises, par exemple auprès de la BEI, d'un fonds de risque qui aiderait à compenser les dommages ou les pertes éventuelles.

2.21

Le Comité a déjà évoqué à plusieurs reprises le fait que les compétences et le potentiel des êtres humains constituent la ressource la plus sensible et la plus précieuse pour le savoir et l'innovation. C'est pourquoi le nombre, les équipements et la qualité des établissements de formation nécessaires pour cela sont un pré-requis décisif pour répondre à la demande en scientifiques, ingénieurs et enseignants de qualité.

2.22

Eu égard aux investissements consentis par la société et les chercheurs eux-mêmes en vue d'acquérir les vastes et complexes notions de bases et connaissances spécialisées requises, il incombe à la société — représentée par le monde politique — de veiller à utiliser au mieux ces investissements. Cette responsabilité doit aussi se traduire par un souci de proposer aux chercheurs ainsi formés des chances de trouver un emploi et des possibilités d'épanouissement proportionnels à leur investissement, ainsi qu'une carrière appropriée, avec des possibilités de bifurcation attrayantes sans voie de garage ou même sans issue. Le chômage, la rémunération insuffisante ou le sous-emploi (y compris un volume excessif de tâches administratives ou de participation à des comités) des scientifiques et ingénieurs qualifiés représentent pour l'économie un gaspillage d'investissements et ont un effet dissuasif sur la nouvelle génération d'élites, qui choisira des métiers n'ayant aucun rapport avec les sciences et la technique ou quittera l'Europe.

2.23

Il n'est pas contradictoire avec ce qui précède de demander que l'on associe davantage qu'on ne l'a fait jusqu'à présent, des spécialistes expérimentés et des chercheurs en sciences et techniques aux processus de décision importants et aux actes administratifs en matière de politiques de recherche, des entreprises et de l'innovation. La création du Conseil européen de la recherche (CER) est en l'occurrence un premier pas très encourageant. Mais les aides à la recherche et à l'innovation de la Communauté (y compris celles de la Commission) et des États membres nécessite d'intégrer et de conserver suffisamment d'expertise sur le sujet. L'administration pure ne suffit pas.

2.24

La transposition de la recherche et de l'innovation en produits et en processus industriels pose un problème particulier. Ce n'est pas sans raison que l'objectif de Lisbonne demande que 2/3 des efforts de R&D soient financés par le secteur de l'industrie. La raison en est également qu'il s'agit tout particulièrement d'améliorer l'image professionnelle de l'entrepreneur et de le confirmer dans son importance décisive en matière d'innovation, de progrès économique et de prospérité générale dans la société. C'est pourquoi le Comité, en tant que pont vers la société civile organisée, a placé au centre de son prochain programme de travail le thème de «l'entrepreneuriat à visage humain». Ce n'est qu'avec des entreprises responsables, efficaces et inventives, susceptibles de se développer du mieux possible, que nous pourrons réussir en fin de compte à atteindre les objectifs de Lisbonne.

2.25

Nous nous référons, pour de nombreux points de vue et détails supplémentaires, aux développements plus détaillés ci-dessous mais également, au-delà du présent document, à deux avis du Comité en particulier: «Le cheminement vers la société européenne de la connaissance — la contribution de la société civile organisée à la stratégie de Lisbonne» (1) et «Libérer et renforcer le potentiel de l'Europe pour la recherche, le développement et l'innovation» (2).

3.   Observations générales

3.1

Le développement des sciences et de la technique. L'Europe est le berceau de la science et de la recherche modernes, qui sont en continuelle évolution. Si l'on prend en compte la culture gréco-égyptienne et les influences croisées qui se sont produites à certaines périodes avec la culture indienne et arabe (3), on peut affirmer qu'elle est le berceau de la science d'une manière générale. La science et la recherche ont été liées dans toute l'Europe, au-delà des frontières nationales, en dépit de fluctuations temporaires et des interruptions en période de guerres. Leurs méthodes et modes de pensée ont joué un rôle décisif dans le développement de la société européenne actuelle, ses valeurs, ses modes et niveau de vie. Elles ont marqué de leur sceau l'espace culturel européen (4). La libre interaction entre créativité artisanale et esprit d'entreprise et d'initiative d'une part et le caractère méthodique et systématique de la science d'autre part, ainsi que les technologies et les procédés industriels que celle-ci a permis de développer, sont les ingrédients qui ont favorisé l'obtention des résultats dont nous disposons.

3.2

L'évolution de la société. Les évolutions de la politique sociale qui ont été décisives pour façonner le citoyen libre de l'État moderne, caractérisé par la séparation des pouvoirs, la démocratie, les droits fondamentaux et les lois sociales, sont quasiment allées de pair avec le progrès scientifique et technique.

3.3

L'évolution des conditions de vie. Ces deux processus simultanés ont débouché sur une modification et une amélioration des conditions de vie des citoyens des États et des régions concernés, qui sont sans précédent dans l'histoire de l'humanité. Au cours des 135 dernières années, l'espérance de vie moyenne de la population (5) a plus que doublé (6). Au cours des 50 dernières années, la production agricole par hectare de superficie a quasiment triplé. Dans les débats des pays industrialisés prospères, le surpoids a supplanté la sous-alimentation, la surcharge d'informations a remplacé le manque d'informations et le vieillissement occupe désormais la place de la mortalité infantile. Les compétences et les résultats que la société industrielle moderne a pu obtenir grâce à la recherche, au développement et à l'innovation englobent tous les domaines ayant trait à l'épanouissement de l'individu et à la qualité de vie.

3.4

L'utilisation de l'énergie. L'élaboration et l'utilisation intensive de procédés industriels, de machines et de moyens de transports consommateurs d'énergie constituent un facteur déterminant de cette évolution: l'énergie a libéré l'être humain des travaux physiques les plus pénibles, elle a multiplié sa productivité, apporté la chaleur et la lumière et permis une mobilité, une communication et un épanouissement culturels que l'on n'envisageait pas auparavant. L'énergie est devenue «l'aliment» et le moteur des économies modernes.

3.5

La problématique du climat et de l'approvisionnement en énergie. Cette évolution positive nous conduit toutefois à de nouveaux problèmes et de nouveaux défis. Le réchauffement de la terre, dont les possibles conséquences, ainsi que les stratégies destinées à le limiter, font l'objet de décisions politiques de grande ampleur (7) et de nombreuses études (8) présentant parfois des points de vue opposés. Le rapport Stern (9) sur «Les conséquences économiques du réchauffement climatique», publié fin octobre 2006, constate qu'un montant égal à environ 1 % du PIB sera nécessaire rien que pour limiter le réchauffement global induit par les gaz à effet de serre. Cette somme comprend également en particulier d'autres mesures de R&D requises à cette fin. Mais, même indépendamment de cette problématique liée au climat, un secteur de R&D fortement renforcé contribuerait de manière significative à résoudre la question d'une sécurisation accrue de l'approvisionnement énergétique de l'Europe (et du monde), qui représente l'un des principaux défis politiques actuels (10).

3.6

Autres problèmes et défis (11). Toutefois, le changement climatique et l'approvisionnement énergétique ne sont pas les seuls domaines qui posent problème. La lutte contre les maladies physiques et psychiques, l'amélioration du quotidien des personnes handicapées ou défavorisées d'une quelconque manière, dans le but de faciliter leur accès à l'épanouissement professionnel et à la société de la connaissance; les retombées de la mutation démographique, et notamment la recherche sur le vieillissement; une meilleure compréhension des interactions et mécanismes économiques, sociaux et culturels complexes; la protection de l'environnement ainsi que, de manière générale, la garantie et la poursuite du développement de notre mode de vie, de notre système de valeurs et de notre modèle social européens, sont des exemples de thèmes de recherche importants sur lesquels le Comité a émis des recommandations détaillées dans de précédents avis tels que celui sur le 7 programme-cadre de recherche et de développement (12) et ses «programmes spécifiques» (13).

3.7

La concurrence mondiale. La Communauté européenne doit en outre faire face au défi très sérieux que constitue le renforcement de la concurrence mondiale, au sein de laquelle l'UE doit en particulier préserver ses emplois, son niveau de revenu ainsi que ses normes sociales et environnementales. Et ce, non seulement face à la puissance économique des États-Unis et du Japon mais aussi et surtout face aux résultats impressionnants et en progression constante enregistrés par les secteurs de l'industrie et de la recherche de pays tels que la Chine (qui a l'intention de supplanter, d'ici à 2050, les États-Unis en tant que première nation au monde dans le secteur des technologies (14)), l'Inde et le Brésil, dont les salaires et les normes sociales et environnementales sont sensiblement moins élevés. Dans le contexte ainsi tracé, caractérisé par la concurrence mondiale et la course aux investissements dans la recherche et le développement qu'elle implique, y compris la concurrence pour les meilleurs scientifiques et ingénieurs, la Communauté européenne doit optimiser sa politique en la matière. Il est donc ici avant tout question de la concurrence sur le plan mondial, pas de celle au sein de l'Union.

3.8

Une longueur d'avance en matière de recherche, de développement et d'innovation. On le voit, l'Europe ne peut maintenir une position concurrentielle que si elle conserve à l'avenir sa longueur d'avance en matière de recherche, de développement technologique et d'innovation permanente, dans un contexte social et culturel caractérisé par la démocratie, l'État de droit, la stabilité et la fiabilité politique, la liberté d'entreprendre, une sécurité de planification, la volonté d'être performant et la reconnaissance des résultats. Il est indispensable de renforcer et de développer l'espace européen de la recherche. Si cet objectif figure désormais dans toutes les déclarations politiques d'intention, des lacunes subsistent clairement, et c'est regrettable, lorsqu'il s'agit de le mettre en œuvre sous forme de priorités concrètes (par exemple le budget de la recherche) et de dispositions réglementaires (par exemple la structure des salaires (15) ou la législation fiscale (16)), que ce soit au niveau communautaire ou au niveau de la majorité des États membres. La dimension tragique de cet état de fait ne doit pas être sous-estimée, même si, heureusement, une certaine tendance au rattrapage est observée dans quelques États membres (17).

3.9

Des prestations scientifiques et techniques de haute qualité. Des prestations scientifiques et techniques de haute qualité et leur application dans une économie concurrentielle sont, par conséquent, les conditions décisives qui nous permettront de garantir notre avenir, en particulier concernant la question énergétique et climatique, de conserver et d'améliorer notre position actuelle sur la scène internationale et de développer notre modèle social européen au lieu de le mettre en péril. Enfin, la recherche et le développement sont également au service de l'objectif fondamental de créer des connaissances nouvelles et plus nombreuses. Un savoir accru aide non seulement à résoudre les problèmes, mais il élargit également notre vision du monde, dépassionne les situations de conflits et enrichit notre culture.

3.10

Réactiver la tradition. Il s'agit désormais, pour l'Europe, de prendre conscience et de sa tradition de chef de file en tant qu'espace de recherche et d'innovation et de la réactiver. La force de l'Europe réside dans le potentiel de ses citoyens. C'est pourquoi il est nécessaire d'encourager davantage encore que par le passé ce potentiel. C'est pourquoi il est également indispensable d'investir bien davantage dans la recherche et le développement, d'augmenter l'efficacité de ce secteur, de renforcer la volonté et la capacité d'innovation de l'industrie, du commerce et de l'administration, d'encourager et de reconnaître la performance, et de surmonter les obstacles.

3.11

Augmenter les investissements. Cela signifie en particulier qu'il y a lieu, pour la Communauté et les États membres, d'investir encore bien davantage dans la recherche et le développement, et donc dans la formation des indispensables chercheurs et ingénieurs des deux sexes. Mais cela signifie surtout qu'il faudrait inciter l'industrie, notamment les PME, à investir dans la recherche et le développement en leur offrant un cadre juridique, administratif, fiscal (18) et financier plus attrayant et plus intéressant.

3.12

Un climat social favorable au progrès. Parmi toutes les conditions à remplir, la plus importante est l'existence d'un climat social ouvert au progrès, à l'innovation et à l'entrepreunariat, qui permette à une telle approche de se déployer pleinement, afin que soient créées les conditions-cadres nécessaires et que soient prises les décisions correspondantes à tous les niveaux de la politique, mais aussi afin de créer des emplois et de rendre l'industrie suffisamment confiante et optimiste pour qu'elle consente les investissements nécessaires. Pour y parvenir, il y a lieu de familiariser davantage les citoyens avec les résultats obtenus et l'importance des sciences, des techniques et des performances pionnières en matière de création d'entreprise. Il faut également reconnaître qu'en particulier la recherche fondamentale (19) porte en elle les futures connaissances et futures innovations.

3.13

Reconnaître les acquis. La société doit prendre conscience du rôle décisif de ces acquis pour notre mode de vie actuel, des conditions qui ont dû être réunies pour qu'elles puissent voir le jour ainsi que des performances techniques, scientifiques, entrepreneuriales et culturelles sous-jacentes, les enseigner dans les écoles et apprécier à sa juste valeur leur importance vitale.

3.14

Conditions supplémentaires. Le progrès et l'innovation permanente ne reposent toutefois pas exclusivement sur la science et la technique, mais aussi sur la volonté, les capacités et la motivation de tous les intéressés, sur des modèles d'entreprise inédits, sur les bonnes méthodes de gestion et sur des conditions-cadre légales favorables.

3.15

L'acceptation du risque. Afin de développer de nouvelles approches de recherche et de technologies, procédures ou modèles d'entreprise innovants, il faut accepter le fait que la réussite, voire son absence, comporte un certain risque, étant donné qu'en règle générale, les avantages et le caractère productif, mais également les inconvénients, les risques et les conséquences annexes d'une nouvelle approche n'apparaissent que lorsque celle-ci est soumise à l'épreuve de la pratique, et en situation de compétition avec les procédés concurrents. Même un échec bénéficie à la connaissance. L'opportunité et le risque sont en effet les deux revers d'une même médaille. En principe, les bénéfices attendus d'une innovation devraient surpasser les risques inhérents. Les risques éventuels pour la société doivent faire l'objet d'une évaluation spécifique. L'on pourrait en outre réfléchir à la possibilité de créer, au moins pour les petites et moyennes entreprises, et par exemple auprès de la BEI, un fonds de risque qui permettrait plus facilement aux entreprises de compenser des dommages ou des pertes.

4.   Éducation, formation, formation professionnelle et formation continue

4.1

Le savoir fondamental. Le savoir repose sur deux piliers de même importance: la formation et la recherche. Les nouvelles connaissances ne peuvent être acquises qu'au moyen de la recherche et du développement. Pour cela, elles doivent s'appuyer sur les acquis, qui sont transmis et assimilés à travers l'éducation, la formation, la formation professionnelle et la formation continue. Les objectifs en la matière sont les suivants:

4.1.1

Les connaissances de base. D'une part, il s'agit de prévoir dans un tronc commun de connaissances nécessaire à tous les citoyens, de solides connaissances fondamentales en sciences, en techniques et en économie, leurs modalités de fonctionnement et leurs lois fondamentales. Ce n'est qu'ainsi que les citoyens seront capables de porter un jugement sur des situations souvent complexes, dont la connaissance est nécessaire aussi à l'élaboration d'une opinion politique qualifiée. Par conséquent, il y a lieu de définir les programmes scolaires et le nombre d'heures de cours de tous les cycles de manière à initier progressivement les enfants et les adolescents, à l'aide d'exemples clairs et de cours et d'explications motivantes, au mode de pensée scientifique et technique et à la somme des connaissances existantes (20), et à les sensibiliser à l'importance décisive des travaux scientifiques, de l'évolution technique des conduites sociales et économiques novatrices, ainsi qu'à celle de la société de la connaissance en général pour leur avenir et leurs chances dans la vie. Il convient donc de faire une place sensiblement plus importante à cet aspect des programmes scolaires. Le Comité se félicite des recommandations du rapport Rocard (21) sur cette question, qu'il soutient totalement.

4.1.2

Des incitations en matière de choix professionnels. Par ailleurs, les élèves les plus doués devront être encouragés à choisir une profession en rapport et des études dont personne n'ignore la difficulté, et devront être dotés en outre de connaissances fondamentales. C'est également pour cette raison que les programmes scolaires, en particulier ceux des établissements secondaires d'enseignement général, doivent être étoffés par des programmes d'enseignement élargis et d'un excellent niveau.

4.1.3

Des retards tous azimuts. Les programmes scolaires présentent également des lacunes évidentes dans les domaines scientifiques et techniques, nonobstant le fait que naturellement, toutes les aptitudes doivent être largement encouragées, y compris dans le domaine socio-économique et dans les matières comme les lettres et les sciences humaines. Donner une éducation solide à de larges catégories de population, ce qui nécessite bien évidemment de la part de l'élève engagement et discipline, est aussi important que former une élite scientifique efficace. La première condition nécessaire à l'avènement d'une société globalement favorable à l'éducation et aux sciences est l'existence d'établissements d'enseignement d'excellente qualité, depuis les écoles primaires jusqu'aux universités.

4.1.4

L'espace européen du savoir. Le Comité confirme sa recommandation selon laquelle il y a lieu de développer, à travers une coopération transnationale plus importante dans les domaines de l'enseignement, de l'innovation et de la recherche, un espace européen du savoir qui viendrait compléter et parachever l'espace européen de la recherche. Á cette fin, les obstacles au marché unique qui entravent la société européenne de la connaissance doivent être supprimés le plus rapidement possible. Le Comité renvoie à ce sujet à son avis intitulé «Le cheminement vers la société européenne de la connaissance — la contribution de la société civile organisée à la stratégie de Lisbonne» (22).

4.1.5

L'apprentissage tout au long de la vie et la mobilité. Les incitations et mesures en faveur de l'apprentissage tout au long de la vie ont en l'occurrence un rôle important à jouer: l'apprentissage tout au long de la vie est en effet la clé de la société du savoir. Ceci suppose que les États membres encouragent de manière plus active encore la mobilité des personnes, et que l'Union renforce les programmes communautaires dans ce domaine (Erasmus, Marie Curie). La mobilité relie les Européens entre eux, et elle est un moyen d'acquisition et de transfert de compétences. La libre circulation de la main-d'œuvre, des chercheurs et des étudiants doit être garantie et s'accompagner de rémunérations, de conditions de travail et de politiques familiales décentes. Á cette fin, il convient également d'améliorer l'accès, à l'échelle européenne, aux informations sur les postes disponibles dans tous les États membres.

4.2

Des normes concernant la formation technique. Il est également nécessaire que les universités comme les instituts universitaires technologiques dispensent une formation scientifique et technique d'un niveau correspondant aux normes les plus élevées sur le plan international: des chercheurs et des ingénieurs des deux sexes, hautement qualifiés et motivés, qui acquièrent et développent leurs connaissances en continuant à se former tout au long de leur carrière, et parmi lesquels un nombre suffisant sera capable d'assumer un rôle de chef de file et d'être des pionniers dans les domaines les plus ardus, sont le capital le plus important pour la recherche et l'innovation.

4.3

Des chances pour tous. Le progrès et la réussite seront à l'avenir plus que jamais le produit d'un travail d'équipe structuré, selon le mode de la répartition des tâches dans lequel il est essentiel d'offrir à chacun selon ses talents, ses capacités et sa créativité les meilleures chances de s'épanouir et de prendre ses propres initiatives. Il est donc indispensable de disposer d'établissements d'enseignement d'excellent niveau, afin que soit représenté l'ensemble des qualifications nécessaires aujourd'hui et à l'avenir, en termes de spécialistes et de techniciens pour remplir toutes les missions dans les techniques, les sciences et en économie.

4.4

Les réseaux. En particulier dans le cas de la formation professionnelle et de la formation continue, il faudrait interconnecter davantage encore la formation, la recherche et ses applications industrielles, le rapport étant manifeste avec la question de l'apprentissage tout au long de la vie et de la mobilité (cf. paragraphe 4.1.5). Une meilleure interconnexion transfrontalière entre universités, instituts universitaires technologiques et établissements d'enseignement supérieurs est également nécessaire. Dans cette perspective, le Comité se félicite dès lors du projet de création d'un Institut européen de technologie (IET) (23) qui doit contribuer à développer ultérieurement la capacité d'innovation de la Communauté et des États membres en associant au plus haut niveau des actions de formation, de recherche et d'innovation. Ces dernières concernent également, au-delà de l'éducation et de la formation, la question de la recherche et du développement commun et «préconcurrentiel» (24) d'entreprises industrielles, comme par exemple le développement commun de technologies améliorées en matière de moteurs dans l'industrie automobile.

5.   Questions financières et procédures

5.1

L'investissement est la mission de tous. La Communauté, les États membres et les entreprises privées doivent faire de leur mieux, ce qui signifie considérablement plus que ce qu'elles consentent actuellement, pour apporter les financements nécessaires en matière de formation, de recherche et de développement.

5.2

L'objectif de Barcelone. L'objectif fixé à Barcelone relativement à la réalisation de la stratégie de Lisbonne doit être pris très au sérieux et poursuivi de toutes leurs forces par tous les acteurs afin d'éviter tout retard dans la compétition mondiale en matière d'investissements en recherche et développement. Cela signifie que les dépenses globales de R&D de l'UE doivent être augmentées de manière à parvenir à un niveau équivalant à peu près à 3 % du PIB. Les investissements nécessaires devraient être financés aux deux tiers par le secteur privé.

5.3

L'effet de levier du 7e programme-cadre de R&D. Le septième programme-cadre de recherche et de développement 2007-2013 a été adopté en décembre 2006 par le Conseil, avec un budget d'environ 50 milliards d'euros, soit une augmentation significative par rapport à celui du précédent programme. Ceci est un nouveau succès très remarquable de la politique européenne, que le Comité a largement soutenue. Cependant, la Commission ne contribuerait pour sa part, sur le budget total de 50 milliards d'euros, qu'à hauteur de quelque 2 % (et donc uniquement un cinquantième) des investissements dans la recherche et le développement prévus par les objectifs de Barcelone. Le Comité a déjà souligné à plusieurs reprises que ce pourcentage est très insuffisant pour permettre à l'aide communautaire d'exercer pleinement son puissant effet de levier et sa force d'intégration à l'égard de la politique d'aide des États membres et de la nécessaire volonté d'investir des entreprises, et donc de susciter une augmentation importante des investissements, nécessaire pour atteindre l'objectif de Barcelone.

5.4

Confirmation d'une recommandation. C'est pourquoi le Comité confirme — en particulier aussi étant donné la création prochaine de l'Institut européen de technologie (IET) et l'urgence de consacrer davantage de travaux de R&D à un approvisionnement énergétique durable et compatible avec les exigences du climat — sa recommandation (25) d'augmenter, à l'occasion de la révision du budget communautaire en 2008, le pourcentage de l'aide communautaire dans un premier temps de la moitié, pour passer à environ 3 % du total des investissements envisagés dans l'objectif de Barcelone. Ce serait, de la part de la Communauté, une mesure particulièrement efficace pour pouvoir atteindre plus rapidement les objectifs importants de Lisbonne et de Barcelone et trouver une solution aux problèmes évoqués ci-dessus.

5.4.1

La compétition avec la Chine. Les efforts de formation consentis en la matière, par exemple par la Chine, se traduisent en croissance rapide et l'Europe doit s'efforcer par tous les moyens de ne pas perdre le marché des technologies importantes et nécessaires dans le monde entier, face à la concurrence internationale. Toutefois, il ne serait pas très crédible sur le plan politique de demander au secteur privé d'apporter les investissements nécessaires tant que la Communauté et les États membres n'ont même pas encore versé leur propre part du financement de l'objectif de Barcelone qu'ils ont eux-mêmes formulé.

5.4.2

Le primo-financement par les États membres. Les États membres devraient veiller au moins à ce que leurs universités et leurs organismes de recherche disposent d'un financement de départ suffisant pour pouvoir bénéficier dans la mesure espérée d'un cofinancement au titre du 7e programme-cadre de RD&T.

5.5

Le cadre communautaire en matière d'aides d'État. Le droit communautaire en matière d'aides d'État devrait être élaboré de manière à inciter les États membres — et leur donner la marge de manœuvre nécessaire pour ce faire — à promouvoir, davantage que ce n'était le cas jusqu'ici, et de manière renforcée, plus efficace et moins bureaucratique, les capacités des universités, des organismes de recherche et de l'industrie en matière de recherche et développement, et à développer la nécessaire mise en réseau de ces différents établissements. C'est pourquoi il convient de vérifier soigneusement si les «cadres communautaires pour les aides d'État pour la recherche, le développement et l'innovation» (26) soutiennent réellement ces objectifs.

5.6

La législation budgétaire des États membres. S'agissant de la promotion des mesures de R&D, la législation des États membres en matière budgétaire devrait permettre des demandes de paiement et une circulation des ressources plus souple et mieux adaptée aux projets, en leur donnant par exemple la possibilité de transférer les ressources allouées sur l'année calendrier ou sur l'exercice budgétaire suivant.

5.7

Le développement de l'infrastructure scientifique. C'est la raison pour laquelle le Comité a recommandé à plusieurs reprises (27) qu'une partie beaucoup plus importante des fonds disponibles au titre des Fonds structurels communautaires soit consacrée au développement de l'infrastructure scientifique. Des fonds provenant de la Banque européenne d'investissement pourraient également être très utiles dans ce contexte.

5.8

Le potentiel des PME. Il faut également continuer à renforcer le potentiel d'innovation des PME et plus particulièrement des start-up et, d'une manière générale, créer des mesures d'encouragement pour que les industries investissent davantage. Le Comité se réfère en outre à ses recommandations (28) relatives au programme communautaire intitulé «Programme pluriannuel pour les entreprises et l'esprit d'entreprise, en particulier pour les petites et moyennes entreprises (PME)» et, dans ce contexte, à la promotion particulièrement importante du secteur de l'économie basée sur la connaissance. Le fait que 98 % des entreprises de l'UE soient des PME montre assez quelle importance revêt le renforcement de la capacité d'innovation de cette catégorie d'entreprise (pour cette raison, le Comité se félicite de ce que le septième programme-cadre réserve 1,3 milliard d'euros pour les dépenses de R&D des PME). Les dispositions actuelles qui compliquent la tâche des PME doivent être examinées et «débureaucratisées» dans la mesure du possible; en outre, les administrations pourraient proposer une aide pour accéder aux possibilités de financement à travers les réseaux d'investisseurs individuels (business angels). L'Europe pourrait également s'inspirer des politiques d'aides d'autres pays dans ce domaine.

6.   Aspects structurels et conditions cadres

6.1

Référence à d'autres textes antérieurs. Le Comité renvoie d'abord à ce sujet aux deux récentes communications de la Commission (29) sur le thème de l'innovation, ainsi qu'à l'excellent rapport Aho (30). Il rappelle également son propre avis (31) intitulé «Libérer et renforcer le potentiel de l'Europe pour la recherche, le développement et l'innovation», qui présente un grand nombre de chevauchements avec le présent texte, mais traite de manière beaucoup plus approfondie plusieurs des sujets abordés ici.

6.2

L'innovation, c'est plus que cela. Le Comité, confirmant et complétant le rapport cité ci-dessus, rappelle que le progrès et l'innovation ne reposent pas seulement sur la science et la technique, mais également sur la transformation de nouvelles connaissances en processus et en produits nouveaux et améliorés, sur de nouveaux modèles de société et sur les bonnes méthodes d'encadrement; ce sont donc l'esprit d'entreprise et l'initiative entrepreneuriale, tous deux novateurs, qui sont en jeu. Le progrès et l'innovation reposent toutefois également sur de nouveaux types de services, sur la poursuite du développement du secteur de la santé, et en général, sur la meilleure manière de résoudre les questions sociales; le traitement par le Comité de la notion de «Flexicurité» (32) en est un exemple.

6.3

L'innovation, un pas vers l'inconnu. L'innovation signifie également imaginer et réaliser des techniques, procédés, modes d'organisation, modèles commerciaux et types de formation nouveaux qui n'existaient pas encore. C'est pourquoi la performance n'est prouvée la plupart du temps qu'a posteriori, lorsqu'elle est confirmée par la compétition pratique.

6.4

Élaborer une réglementation ouverte. En revanche, les réglementations sont élaborées sur la base de l'état actuel des connaissances. Pour cette raison, il est très important que la réglementation dans ce domaine laisse une marge de manœuvre suffisante, et une place assez grande à la pluralité et à la variabilité, de manière à laisser à toutes les idées, y compris la plus nouvelle, à laquelle personne n'a encore pensé, la possibilité d'être réalisée, au lieu que celle-ci soit condamnée a priori à être étouffée dans l'œuf ou à dépérir lentement, parce qu'elle n'entrerait pas dans le maillage d'une législation trop détaillée. Il convient donc de veiller, dans le cas de toute législation, certes à englober et classer les questions fondamentales, mais à éviter les dispositions qui entreraient excessivement dans les détails; la surréglementation et l'excès de dispositions limitantes, même lorsqu'elles sont motivées par les meilleures intentions, constituent des entraves et des obstacles à l'innovation. C'est pourquoi le Comité soutient tous les efforts visant à simplifier la réglementation et à vérifier qu'elle ne contient pas de dispositions superflues, voire inutilement limitantes. Cela servira également à libérer les spécialistes de tâches administratives inutiles (cf. ci-dessous). En outre, les erreurs de quelques-uns ne doivent pas conduire à la surréglementation pour tous.

6.5

La liberté de la recherche. Répétons-le: l'innovation requiert une liberté d'entreprendre suffisante. La liberté de la recherche, y compris la liberté par rapport à des exigences non pertinentes, restrictives (33) ou idéologiques, est une condition fondamentale pour parvenir à une science créative comme à de nouvelles découvertes et inventions, sans préjudice des limites fixées par la législation en ce qui concerne les questions à caractère éthique et d'une bonne utilisation des ressources allouées.

6.6

Confirmation du document CESE 1566/2006. Pour d'autres points de vue important, l'on renverra à l'avis (34) cité au paragraphe 5.1 ci-dessus, qui se voit ici confirmé. Cet avis présente, dans ses paragraphes 4.7 à 4.11, des recommandations au sujet des thèmes importants suivants: De la connaissance de la nature aux produits innovants, aux processus innovants et aux services innovants. La mobilité entre le monde universitaire et la sphère industrielle. Des systèmes d'information accessibles au public. Le voisinage très proche («cluster»). Les «start-ups». La recherche fondamentale. Les produits innovants. Le secteur des marchés publics. La propriété intellectuelle et la nécessité d'un brevet communautaire. Le délai de prépublication anticipé. Le problème linguistique. La situation particulière des nouveaux États membres.

6.6.1

Protection de la propriété intellectuelle. Il importe de mettre encore une fois l'accent sur l'importance d'une protection suffisante de la propriété intellectuelle (35): les investissements réalisés par les entreprises dans la recherche, le développement et l'innovation doivent être rentables et les charges aussi bien financières que juridiques et administratives supportées pour l'obtention et la conservation des droits de propriété intellectuelle ne doivent pas — par comparaison avec les concurrents internationaux — compromettre la puissance économique européenne. Cela montre également l'urgente nécessité de l'introduction d'un brevet communautaire (qui préciserait une période de grâce).

7.   Le facteur humain

7.1

De précieuses ressources. Le Comité se réfère tout d'abord à l'avis qu'il a consacré à ce thème (36), et dont il confirme et souligne les termes. Dans cet avis, il rappelait, comme il avait déjà eu l'occasion de le souligner, que le capital humain est la ressource la plus sensible et la plus précieuse pour le savoir et l'innovation. En conséquence, il est essentiel d'inciter les jeunes gens doués à opter pour une filière scientifique ou technique et de leur proposer la meilleure formation possible.

7.2

La qualité des établissements de formation (cf. chapitre 4). C'est pourquoi le nombre, les équipements et la qualité des établissements de formation nécessaires à cela sont un prérequis décisif pour répondre à la demande en scientifiques, ingénieurs et entrepreneurs de qualité. Aussi convient-il de créer ou de garder un nombre suffisant d'universités, et surtout d'institut universitaires technologiques, bien équipées, attrayantes, de qualité, disposant d'excellents professeurs, dans lesquelles la recherche et l'enseignement sont étroitement liés (37). Ces établissements doivent pouvoir soutenir la concurrence avec les meilleures universités des États-Unis ou d'autres pays tiers et disposer également d'un pouvoir d'attraction suffisant pour les meilleurs étudiants non européens.

7.3

La responsabilité de la société. Eu égard aux investissements consentis par la société et les chercheurs eux-mêmes en vue d'acquérir les vastes et complexes notions de bases et connaissances spécialisées requises, il incombe à la société — représentée par le monde politique — de veiller à utiliser au mieux ces investissements. Cette responsabilité doit aussi se traduire par un souci de proposer aux chercheurs ainsi formés des chances de trouver un emploi et des possibilités d'épanouissement proportionnels à leur investissement, ainsi qu'une carrière appropriée, avec des possibilités de bifurcation attrayantes sans voie de garage ou même sans issue. Le chômage, la rémunération insuffisante ou le sous-emploi des scientifiques et ingénieurs qualifiés représentent pour l'économie un gaspillage d'investissements et ont un effet dissuasif sur la nouvelle génération d'élites, qui choisira des métiers n'ayant aucun rapport avec les sciences et la technique ou quittera l'Europe. L'excès de tâches administratives (cf. paragraphe 7.7) représente également un emploi inadéquat.

7.4

Faire fructifier les talents. Il importe d'offrir aux citoyens — et donc à tous les collaborateurs des entreprises, des universités et des instituts de recherche — les meilleures possibilités pour que leurs talents et leur initiative personnelle puissent s'épanouir, compte tenu de leurs aptitudes, de leurs capacités et de leur créativité. Il convient également de créer un contexte social qui leur permettent de fonder une famille, et qui favorise et encourage leur potentiel de création. Ceci suppose donc également que les jeunes gens qui bénéficient de ce type de formation et de soutien doivent de leur côté tout mettre en œuvre pour utiliser au mieux, consciencieusement et avec engagement, les capacités et les talents qu'ils auront acquis. Ce sont là des questions essentielles de la politique et de la recherche sociales, de la politique familiale, de la gestion d'entreprise et, plus généralement, de la culture de gestion. À ce propos, il est désormais admis qu'un bon équilibre entre vie professionnelle et vie privée revêt une grande importance pour la créativité et la productivité (38).

7.5

Le repérage et l'évaluation des chercheurs (39). Il est difficile d'appréhender l'excellence des capacités et des prestations à travers les systèmes d'évaluation formels, qu'il est en outre toujours possible de mal utiliser. Ainsi, le comportement de certains auteurs scientifiques est par exemple problématique, se citant de préférence mutuellement dans leurs publications, créant ainsi des «cartels de citations» et s'assurant par là même des avantages au regard des évaluations schématiques quantitatives. Or, ni le nombre de publications, ni celui des citations ou des brevets, ou d'autres chiffres du même ordre ne constituent à eux seuls des critères d'évaluation suffisants ni fiables; celle-ci s'attachera davantage à la qualité, au caractère de nouveauté ou au retentissement. En outre, il est parfois arrivé que ce soient précisément les découvertes ou les inventions les plus révolutionnaires qui aient été d'abord connues, reconnues, utilisées ou citées avec une certaine hésitation. C'est pourquoi l'évaluation d'une personnalité et de ses performances, dans l'ensemble de ses manifestations et de ses facettes, nécessite toute l'expérience et la capacité personnelle de jugement des représentants éminents (et sans pour autant réussir à écarter totalement le risque qu'ils puissent se tromper) de la spécialité dans lequel sont effectuées ou attendues les prestations dont il est question.

7.6

La participation aux processus de décision. En outre, il est indispensable d'associer davantage qu'on ne l'a fait jusqu'à présent, les spécialistes expérimentés et les chercheurs scientifiques et techniques aux processus de décision importants et aux actes administratifs en matière de politiques de recherches, des entreprises et de l'innovation. La création du Conseil européen de la recherche (CER) est en l'occurrence un premier pas très encourageant, que le Comité a expressément soutenu (40). Mais la gestion des aides à la recherche et à l'innovation de la Communauté (c'est-à-dire en particulier celles de la Commission) et des États membres nécessite d'intégrer et de conserver suffisamment d'expertise sur le sujet. Il conviendrait donc d'engager en particulier de jeunes ingénieurs et chercheurs performants. L'aide à la recherche et à l'innovation doit en effet aller plus loin que l'administration pure.

7.7

Supprimer l'excès de tâches non scientifiques. Chercher, développer et trouver, mais également préparer et transmettre le savoir sont des tâches qui nécessitent de passer beaucoup de temps à réfléchir ou travailler en laboratoire. Le Comité a indiqué à plusieurs reprises depuis l'an 2000 (41) que la quantité toujours en augmentation de participation à des comités, à des conférences ou à des expertises, de la rédaction de rapports, c'est-à-dire globalement des travaux administratifs, représente à présent pour de nombreux experts la majeure partie de leur temps de travail et détourne ceux-ci de leur véritable mission, nuisant ainsi à l'innovation et à la performance, ainsi qu'à l'excellent spécialiste lui-même. Cette évolution regrettable est de plus en plus dénoncée dans les médias (42). Le Comité apprécie que la Commission ait déclaré avoir l'intention de se pencher sur ce sujet, et de chercher une solution en collaboration avec les États membres. Dans ce domaine, demander la participation d'experts aux processus de décision concernant la politique de recherche n'est pas contradictoire avec le nécessaire allégement des tâches administratives; cela peut même être utile à cet objectif. L'on devrait avoir pour objectif concret d'unifier et de rassembler les nombreuses procédures de demandes, rapport et suivis destinés aux différents organismes de financement, institutions partenaires, réseaux ainsi qu'aux comités de suivi et d'évaluation. Cela permettrait en outre de gagner considérablement en transparence.

7.8

Fuite des cerveaux et mobilité. Le métier de chercheur dans l'espace européen de la recherche requiert à juste titre (cf. également paragraphe 4.1.5) de la mobilité et de la flexibilité. Cela ne doit toutefois pas nuire aux conditions de vie personnelle et familiale et à la sécurité sociale des chercheurs (43). Par ailleurs, ceci ne doit pas conduire à une expatriation unilatérale des meilleurs en dehors de l'Europe. Les conditions d'emploi doivent donc être suffisamment intéressantes en Europe si l'on veut éviter cela et parvenir à un bilan au minimum équilibré en matière de mobilité mondiale des meilleurs chercheurs. Cependant, l'on s'inquiète dans certains États membres du fait qu'une fuite des cerveaux à sens unique pourrait avoir lieu au sein de l'UE. Comme le Comité l'a déjà recommandé à plusieurs reprises (cf. également le paragraphe 5.7), il faudrait donc qu'une partie sensiblement plus importante des ressources issues des Fonds structurels communautaires soit utilisée au développement de l'infrastructure scientifique, de manière à créer dans tous les États membres des centres de recherches intéressants qui puissent attirer les scientifiques souhaitant rentrer chez eux et devenir en même temps des partenaires dans le cadre des réseaux.

7.9

L'image du métier d'entrepreneur. La transposition de la recherche et du développement en produits et en processus novateurs pose un problème particulier. Ce n'est pas sans raison que l'objectif de Lisbonne demande que 2/3 des efforts de recherche soient financés par le secteur de l'industrie. Il s'agit en particulier également d'améliorer l'image professionnelle de l'entrepreneur et de le confirmer dans son importance décisive en matière d'innovation, de progrès économique et de prospérité générale dans la société. C'est pourquoi le Comité, en tant que pont vers la société civile organisée, a placé au centre de son prochain programme de travail le thème de «l'entrepreneuriat à visage humain». Ce n'est qu'avec des entreprises responsables et efficaces, susceptibles de se développer du mieux possible, que nous pourrons réussir en fin de compte à atteindre les objectifs de Lisbonne.

Bruxelles, le 12 juillet 2007.

Le Président

du Comité économique et social européen

Dimitris DIMITRIADIS


(1)  JO C 65 du 17 mars 2006.

(2)  JO C 325 du 30 décembre 2006.

(3)  Éventuellement aussi avec la culture chinoise.

(4)  Ces processus sont exposés de manière très détaillée et nuancée dans l'avis d'initiative du Comité intitulé «Science, société et citoyens en Europe» (JO C 221 du 7 août 2001).

(5)  En Allemagne.

(6)  Surtout grâce à la diminution du taux de mortalité infantile.

(7)  Conseil européen des 23 et 24 mars 2007 — Conclusions de la Présidence (Énergie durable).

(8)  

Par ex.:

1)

Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat OMM/PNUE — «Changement climatique 2007: les éléments de sciences physiques — Résumé à l'intention des décideurs» ou

2)

Lettre ouverte de 61 scientifiques au Premier ministre canadien

(http://www.lavoisier.com.au/papers/articles/canadianPMletter06.html) (en anglais)

(9)  http://www.hm-treasury.gov.uk/independent_reviews/stern_review_economics_climate_change/sternreview_index.cfm (en anglais)

(10)  JO C 241 du 7.10.2002: «Les besoins en recherche pour la sécurité et la durabilité de l'approvisionnement énergétique». Voir également le récent ISBN 92-79-02688-7 «Transition to a sustainable energy system for Europe — The R&D perspective» (La transition vers un système d'énergie durable pour l'Europela perspective R&D, publié par la DG Recherche) ainsi que «nature» Vol 444, édition no 7119, page 519 (novembre 2006) «Our emperors have no clothes».

(11)  Voir également à ce sujet le document JO C 185 du 8 août 2006.

(12)  JO C 65 du 17 mars 2006.

(13)  JO C 185 du 8 août 2006.

(14)  Revue «Bild der Wissenschaft» 9/2006, p. 109.

(15)  Notamment en ce qui concerne les revenus et les contrats des jeunes scientifiques et des jeunes ingénieurs.

(16)  Voir à ce sujet la Communication de la Commission COM(2006) 728 final «Vers une utilisation plus efficace des incitations fiscales en faveur de la recherche et du développement».

(17)  Frankfurter Allgemeine Zeitung no 49, p. 17 du 27 février 2007«Zwischen Fortschritt und Stillstand»(Entre progrès et immobilisme).

(18)  Voir à ce sujet la Communication de la Commission COM(2006) 728 final «Vers une utilisation plus efficace des incitations fiscales en faveur de la recherche et du développement». Le Comité va élaborer son propre avis sur ce thème.

(19)  Voir à ce sujet en particulier le document JO C 110 du 30 avril 2004. Historiquement, c'est même dans le domaine de la recherche fondamentale qu'ont été lancées les premières initiatives de coopération scientifique en Europe (occidentale). Elles naquirent de la nécessité de construire des centres pouvant accueillir des grands appareils et de créer une masse critique dont les coûts dépassaient la capacité ou la volonté financière de chaque État pris individuellement.

(20)  Il s'agit moins d'apprendre et de maîtriser un grand nombre de formules que d'acquérir une compréhension de base de la technique et des lois fondamentales de la nature ainsi que de prendre conscience de l'importance des liens proportionnels et de l'utilité des mathématiques.

(21)  A Renewed Pedagogy for the Future of Europe, Direction générale de la science et de la recherche 2007, EUR 22845, Groupe d'experts sur l'éducation scientifique, Michel Rocard (Président), Peter Csermely, Doris Jorde, Dieter Lenzen, Harriet Walberg-Henriksson, Valerie Hemmo (rapporteuse).

(22)  JO C 65 du 17 mars 2006.

(23)  JO C 93 du 27.4.2007.

(24)  Voir également à ce sujet le chapitre 7 du document JO C 204 du 18 juillet 2000.

(25)  JO C 325 du 30.12.2006.

(26)  JO C 323/I du 30 décembre 2006.

(27)  Voir notamment JO C 65 du 17 mars 2006.

(28)  JO C 234 du 22 septembre 2005.

(29)  COM(2006) 502 final du 13 septembre 2006«Mettre le savoir en pratique: une stratégie d'innovation élargie pour l'UE»; COM(2006) 589 final du 12 octobre 2006«Une Europe réellement innovante et moderne».

(30)  EUR 22005 «Creating an Innovative Europe»(Créer une Europe novatrice) ISBN 92-79-00964-8.

(31)  JO C 325 du 30 décembre 2006.

(32)  Par exemple «Flexicurité: le cas du Danemark» (JO C 195 du 18 août 2006).

(33)  Cf. notamment JO C 65 du 17 mars 2006, paragraphe 4.13.2 «Charte», y compris note de bas de page.

(34)  JO C 325 du 30 décembre 2006.

(35)  Cf. à ce sujet également le discours du Commissaire Günter Verheugen du 19 avril 2007 (SPEECH/07/236), intitulé: «Geistiges Eigentum — Antrieb für Innovation in Europa»(La propriété intellectuelle: un moteur de l'innovation en Europe).

(36)  «Les chercheurs dans l'espace européen de la recherche: une profession, des carrières multiples» (JO C 110 du 30 avril 2004).

(37)  Dans ce contexte, une meilleure interconnexion entre les Universités et les instituts de recherche non universitaires pourrait être utile, surtout pour pouvoir prendre en compte leurs équipements et leur infrastructure dans le cadre de la liaison entre recherche et étude, mais aussi afin de prendre en compte les nouvelles connaissances dans l'enseignement.

(38)  Voir la Frankfurter Allgemeine Zeitung no 257 du 4 novembre 2005, C1.

(39)  Voir à ce sujet également JO C 110 du 30 avril 2004.

(40)  Voir également à ce sujet JO C 110 du 30 avril 2004.

(41)  Voir en particulier les paragraphes 9.8 de l'avis JO C 204 du 18 juillet 2000; on lit par exemple au paragraphe 9.8.2: «Dans cet esprit, tout scientifique productif a un nombre limité de capacités et ne dispose que d'une fraction de son temps pour prendre des contacts fructueux avec d'autres personnes, d'autres groupes, instances et commissions sans que cela nuise à la qualité de ses activités scientifiques. Des procédures de demandes et d'expertise trop nombreuses et trop coûteuses, surtout lorsqu'elles sont infructueuses, privent la recherche d'éléments dont elle a besoin. Cela est d'autant plus vrai qu'il existe beaucoup d'instruments d'encouragement et de procédures d'évaluation qui, souvent, se recouvrent et sont utilisés pour le même projet».

(42)  Voir par exemple la Frankfurter Allgemeine Zeitung no 60 du 12 mars 2007«Ein Forscher geht»(Un chercheur s'en va); ainsi que la Frankfurter Allgemeine Zeitung no 67 du 20 mars 2007: entretien avec Harald Uhlig.

(43)  Voir également JO C 110 du 30 avril 2004.


27.10.2007   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 256/27


Avis du Comité économique et social européen sur le «Livre vert sur la révision de l'acquis communautaire en matière de protection des consommateurs»

COM(2006) 744 final

(2007/C 256/05)

Le 8 février 2007, la Commission européenne a décidé, conformément à l'article 262 du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur le «Livre vert sur la révision de l'acquis communautaire en matière de protection des consommateurs».

La section spécialisée «Marché unique, production et consommation» chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 4 juin 2007 (rapporteur: M. ADAMS).

Lors de sa 437e session plénière des 11 et 12 juillet 2007 (séance du 12 juillet 2007), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 55 voix pour avec 2 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1

Le CESE prend acte du Livre vert mais doute que l'approche proposée n'aboutisse à un niveau élevé et uniforme de protection des consommateurs dans toute l'UE. La garantie d'une telle protection grâce à un acquis communautaire simplifié, cohérent et respecté est un thème récurrent dans les avis du CESE sur la défense des consommateurs, mais le processus de révision actuel semble indiquer que cet objectif pourrait être difficile à atteindre. La révision de l'acquis constitue donc un véritable exercice de mise en œuvre de l'initiative «Mieux légiférer». La base et les objectifs d'un tel exercice doivent être clairs et convenus, en amont, avec les parties prenantes.

1.2

Une véritable légitimation démocratique de l'acquis communautaire révisé en matière de protection des consommateurs est nécessaire, ainsi qu'une base juridique et conceptuelle claire.

1.3

Le CESE apprécierait particulièrement que les principes de l'acquis soient appliqués à l'environnement numérique, qui se développe rapidement et qui est peu réglementé.

1.4

Le CESE considère la politique des consommateurs non seulement comme une partie intégrante de la stratégie du marché intérieur de l'UE, mais également comme un élément essentiel affirmant la citoyenneté. Le Comité est partisan d'une mise en œuvre des principes d'une meilleure réglementation en matière de protection des consommateurs. Toute proposition d'harmonisation dans ce domaine devrait être étayée par une évaluation d'impact adéquate, et viser à la simplification et à la clarification des règles existantes.

1.5

Les mesures visant à améliorer la mise en œuvre, le renforcement ou la mise en place de processus clairs et simples pour obtenir réparation sont autant d'éléments sur lesquels il conviendrait d'insister en priorité.

1.6

Le Comité encourage la Commission à tenir compte de son avis du mois d'avril 2006 sur le cadre juridique pour la politique des consommateurs  (1), dans lequel il a proposé de permettre l'adoption de mesures de politique des consommateurs en tant que telles et pas uniquement comme éléments découlant de la mise en place du marché intérieur.

1.7

L'harmonisation de la législation en matière de protection des consommateurs dans toute l'UE doit avoir comme principe directeur l'adoption du meilleur niveau de protection — le plus élevé — parmi les États membres. Tout «instrument horizontal» devrait être basé sur les normes les plus élevées alors que l'«intégration verticale» nécessaire se concentrerait sur la clarification des questions techniques. Toutefois, un instrument horizontal pourrait contenir des règles pleinement harmonisées dans des domaines spécifiques tels que le droit de rétractation et la définition du consommateur, de même que les clauses abusives, la livraison ou le droit de recours des consommateurs, alors que l'harmonisation minimale s'appliquerait ailleurs. Il reste à espérer que la Commission, mais aussi tous les États membres, accordent leur préférence à cette approche.

2.   Introduction

2.1

Au début du mois de février 2007, au terme d'une longue attente, la Commission a adopté son Livre vert sur la révision de l'acquis communautaire en matière de protection des consommateurs (législation sur les droits des consommateurs). L'adoption de ce Livre vert a permis de mettre un point final à ce que la Commission appelle la «phase diagnostique» de la révision. La Commission souhaite recueillir des points de vue sur les possibilités de simplification, de modernisation et d'harmonisation de la législation communautaire existante en matière de protection des consommateurs. Le Livre vert démontre que l'analyse des forces et des faiblesses de la législation actuelle ainsi que l'apport de révisions appropriées peuvent profiter tant aux consommateurs qu'aux entreprises. Pour la Commission, la révision est l'occasion de créer une uniformité entre les États membres et, d'une manière générale, d'améliorer la législation communautaire en matière de protection des consommateurs — une partie de celle-ci ayant été adoptée il y a 20 ans — en identifiant notamment les points où des différences existent en matière de réglementation et en s'interrogeant sur la question de savoir si ces différences engendrent, pour les consommateurs et les entreprises, des entraves au marché intérieur, et ce, tout en respectant le principe de subsidiarité. Par conséquent, cet avis se concentre sur la manière dont sont perçues et présentées les questions sous-jacentes à l'acquis communautaire en matière de protection des consommateurs. Jusqu'à présent, seuls des changements envisageables ont été mis sur la table.

2.2

Les dépenses des consommateurs représentent 58 % du PIB de l'UE mais restent très fragmentées entre les 27 marchés nationaux. Le marché intérieur pourrait être le plus grand au monde et la Commission a expliqué que sa stratégie consiste à réveiller «un géant qui sommeille au sein du marché intérieur: le commerce de détail» (2). À l'heure actuelle, la Commission définit sa politique des consommateurs de la manière suivante: «assurer à tous les consommateurs de l'Union, où qu'ils vivent, voyagent ou effectuent leurs achats dans l'UE, un niveau élevé commun de protection contre les risques et menaces pour leur sécurité et leurs intérêts économiques; accroître l'aptitude des consommateurs à défendre leurs propres intérêts» (3) .

2.3

L'objectif consistant à garantir l'application uniforme d'un cadre commun pour les droits des consommateurs dans l'UE est largement approuvé. Ce type de cadre permettrait à tous les consommateurs de bénéficier de droits et d'une protection clairement définis et équitables, tout en créant des conditions de concurrence loyale pour les fournisseurs de biens et de services. Le Livre vert sur les droits des consommateurs reconnaît explicitement que les progrès vers la réalisation d'un tel objectif ont été lents et disparates et qu'ils ont été entravés par toute une série de priorités et d'exceptions nationales variant en fonction des États membres. L'arrivée de nouveaux États membres, dont on ne peut que se féliciter, a encore compliqué la conception commune de la protection des consommateurs. Cette révision de l'acquis communautaire en matière de protection des consommateurs présente le point de vue de la Commission sur un processus susceptible d'améliorer la clarté, la cohérence et l'application des directives existantes. Toutefois, nombreuses sont les organisations de consommateurs qui affirment qu'elle pose aussi des questions sur l'orientation globale de la politique des consommateurs.

2.4

Les directives qui font l'objet de cette révision couvrent toute une série de questions liées au droit des contrats de consommation comme le démarchage à domicile, la multipropriété, les voyages à forfait, la vente à distance, la vente de biens et les clauses abusives dans les contrats. Toutefois, la révision ne concerne pas toutes les directives relatives à la protection des consommateurs, parce que certaines sont jugées trop récentes pour être prises en compte ou que la Commission les examine dans un autre contexte. Dans le Livre vert, l'accent a été mis sur le fait que la directive multipropriété nécessitait une révision urgente et une directive révisée est attendue prochainement. L'environnement numérique, qui illustre les défis mondiaux du commerce électronique, apparaît comme un domaine nouveau et important qui devrait être inclus dans les principes de l'acquis.

2.5

Pour réviser les directives, la Commission a:

procédé à une analyse comparative de la manière dont les directives sont mises en œuvre dans les États membres;

analysé le point de vue des consommateurs et des entreprises;

organisé des ateliers réunissant des experts des États membres et les parties prenantes en matière de droit des contrats.

2.6

La terminologie bien établie qui est utilisée par les spécialistes des questions relatives à la protection des consommateurs est susceptible de créer la confusion. Il convient dès lors d'expliquer, à ce stade précoce, un certain nombre de concepts clés. On parle d'«harmonisation minimale» lorsqu'une directive impose une série d'exigences minimales que l'État membre doit appliquer. Cela laisse à l'État membre la possibilité d'appliquer des exigences plus strictes que celles qui sont spécifiées dans la directive. L'«harmonisation maximale» ou «harmonisation totale» signifie que les États membres doivent appliquer les règles définies dans la directive et qu'ils ne peuvent pas aller plus loin (seuil et plafond de l'harmonisation). Ainsi, nombreuses sont les organisations de consommateurs qui en sont arrivées à estimer que l'harmonisation totale était synonyme de niveau minimal de protection des consommateurs et que l'harmonisation minimale permettait un niveau de protection beaucoup plus élevé.

2.7

La publication du Livre vert marque la fin de la phase exploratoire de la révision entreprise par la Commission. La Commission a demandé les points de vue sur le Livre vert pour le 15 mai 2007. Elle analyse actuellement les réponses à la consultation, élaborera une synthèse des points de vue et tranchera la question de savoir si un instrument législatif s'avère nécessaire, ce qui prendra plusieurs mois. Toute proposition en ce sens sera accompagnée d'une évaluation d'impact. «L'idéal serait, au terme de l'exercice, de pouvoir dire aux consommateurs européens: “Où que vous soyez dans l'Union européenne et où que vous achetiez, la situation ne change pas: vos droits essentiels restent les mêmes”» (4).

3.   Résumé du Livre vert

3.1

Le Livre vert vise à fournir le cadre qui permettra de recueillir l'avis des parties intéressées sur les démarches envisageables pour réviser l'acquis en matière de protection des consommateurs et sur un certain nombre de questions particulières. Il définit les principaux aspects du problème qui sont:

L'évolution du marché: la plupart des directives qui font partie de l'acquis en matière de protection des consommateurs ne répondent pas aux exigences des marchés d'aujourd'hui, caractérisés par une évolution rapide. Les téléchargements musicaux et les ventes aux enchères en ligne sont cités comme exemples, au même titre que l'exclusion des logiciels et des données de la directive sur les ventes aux consommateurs.

L'éclatement de la réglementation: les directives actuelles autorisent les États membres à adopter un niveau plus élevé de protection des consommateurs dans leur législation nationale. Sur de nombreux sujets, comme la durée du délai de réflexion, il n'y a pas de cohérence entre les législations nationales.

Le manque de confiance: la majorité des consommateurs estime qu'en cas d'achats dans un autre État membre, il existe un risque plus élevé de non-respect de la législation relative à la protection des consommateurs.

3.2

En se fondant sur ses travaux antérieurs, la Commission présente ensuite deux stratégies positives pour la révision de l'acquis en matière de protection des consommateurs.

Option I: l'approche verticale, qui comporterait la modification des directives individuellement et, à terme, leur mise en conformité les unes avec les autres.

Option II: l'approche mixte, qui impliquerait d'identifier et d'extraire les questions communes à toutes les directives et de les régir de manière cohérente dans le cadre d'un «instrument horizontal». Dans certains cas, il conviendrait également d'effectuer un ajustement «vertical» de directives particulières.

3.3

Le Livre vert mentionne également brièvement une troisième stratégie, celle de l'«absence d'action législative», mais note que les problèmes existants ne seraient pas résolus et que les incohérences entre les États membres pourraient s'en trouver accrues.

3.4

Le Livre vert examine ensuite le champ d'application que pourrait avoir un instrument horizontal. Trois solutions sont proposées:

I

Un instrument cadre applicable à la fois aux transactions intérieures et aux transactions transfrontalières, mais qui ne remplacerait pas les règles spécifiques aux secteurs donnés qui continueraient à prévaloir. Les services financiers et les assurances sont mentionnés à titre d'exemple.

II

Un instrument applicable aux seuls contrats transfrontaliers. Cette solution permettrait de renforcer la sécurité et la confiance des consommateurs qui achètent des biens et des services dans d'autres États membres, mais pourrait conduire à des normes différentes en matière de protection intérieure et transfrontalière.

III

Un instrument horizontal limité aux transactions à distance, qu'elles soient transfrontalières ou intérieures. Cet instrument remplacerait la directive sur la vente à distance mais risquerait également d'entraîner, en matière de protection, un éclatement entre les transactions à distance et les transactions effectuées en présence des deux parties.

3.5

Pour beaucoup, le point suivant du Livre vert, intitulé degré d'harmonisation, sera une question essentielle dans la révision de l'acquis communautaire en matière de protection des consommateurs. À l'heure actuelle, les États membres peuvent offrir de meilleurs niveaux de protection des consommateurs que ceux prévus par les directives. C'est ce que l'on appelle le principe de l'«harmonisation minimale». Les objectifs et les priorités de la protection des consommateurs varient considérablement entre les États membres, ce qui, parfois, trouble les consommateurs et dissuade les entreprises de commercialiser leurs produits ou services dans les autres pays de l'Union européenne. Là aussi, deux solutions possibles sont présentées comme pouvant entrer en ligne de compte:

1.

Une législation pleinement révisée et pleinement harmonisée. Pour les questions où l'harmonisation totale ne serait pas possible, une clause de reconnaissance mutuelle s'appliquerait «pour certains aspects couverts par la législation proposée, mais ne faisant pas l'objet d'une harmonisation totale».

2.

Une législation révisée qui serait basée sur une harmonisation minimale, combinée à une clause de reconnaissance mutuelle ou au principe du pays d'origine (5).

3.6   Annexe I — La consultation

La majeure partie du Livre vert reprend l'exercice de consultation détaillé et hautement structuré dans lequel les répondants sont invités à donner leurs points de vue sur toute une série de questions: mesures politiques générales, définitions, questions relatives au droit des contrats, questions de principe, questions concernant le champ d'application et certains points de détail. La consultation commence par les trois questions «politiques» décrites précédemment.

Approche législative générale

Champ d'application d'un éventuel instrument horizontal

Degré d'harmonisation

Pour chaque thème, la Commission pose une question principale et propose trois ou quatre pistes de réponse. Suivent ensuite 27 questions spécifiques liées aux directives à l'examen. La Commission utilise ici aussi le même schéma, à savoir une brève introduction à la question, puis une question principale (par exemple: «Dans quelle mesure les règles relatives aux clauses contractuelles abusives devraient-elles s'appliquer aux clauses ayant fait l'objet d'une négociation individuelle?» ou «La durée des délais de réflexion devrait-elle être harmonisée dans l'ensemble de l'acquis afférent à la protection des consommateurs?») et enfin trois ou quatre options de réponse.

4.   Observations générales

4.1

Depuis de nombreuses années, le CESE soutient, dans ses travaux et ses avis, l'objectif premier de la politique européenne des consommateurs: un niveau de protection élevé, uniforme et cohérent pour tous. Le Comité soutient également l'objectif secondaire qui consiste à permettre aux consommateurs d'être informés et d'avoir les moyens de faire un choix éclairé, sur un marché sans frontières. De par la structure du Livre vert, il est inévitable que les tensions sous-jacentes s'expriment lorsque l'on essaie de réaliser pleinement ces deux objectifs.

4.2

Il apparaît clairement que garder l'acquis en matière de protection des consommateurs dans sa forme actuelle ne devrait pas être considéré comme une option pour le long terme. Les différences entre les lois des États membres, les définitions contradictoires, les divergences considérables dans la manière dont la législation des consommateurs est appliquée et mise en œuvre, ainsi que le manque de clarté — voire l'inexistence — des procédures de réclamation et de recours contribuent tous, d'une certaine manière, à la création de barrières au marché unique.

4.3

Il apparaît également que la Commission voit dans la révision une occasion d'examiner certains aspects de la politique des consommateurs, considérés jusqu'ici comme essentiels, et de voir s'ils sont compatibles avec un marché unique dynamique, et notamment un marché unique qui soit compétitif dans le contexte de la mondialisation. À cet égard, on constate des ressemblances avec d'autres révisions qui ont été lancées dans le cadre de la mise en œuvre de l'agenda de Lisbonne. Certains estiment qu'un niveau élevé et uniforme de protection des consommateurs fait partie intégrante du modèle social européen. On peut considérer que l'importance que l'on entend désormais accorder à «redéfinir la politique européenne des consommateurs afin que cette dernière contribue plus efficacement aux deux objectifs essentiels de l'UE: d'une part, créer de la croissance économique et des emplois et, d'autre part, renouer les liens entre l'Europe et ses citoyens»  (6) conteste cette conception.

4.4

Bien que l'entreprise soit ardue, le CESE se félicite de la révision de l'acquis en matière de protection des consommateurs et soutient la Commission dans son objectif déclaré de réduction des obstacles au marché unique tout en maintenant un niveau élevé de protection des consommateurs. Toutefois, il estime qu'un tel effort ne doit pas se limiter aux 8 directives en cours d'examen mais doit au moins englober les 22 directives figurant sur la liste établie par la Commission en mai 2003.

4.5

Le CESE souhaite participer activement à ce débat afin de renforcer le marché unique au bénéfice de tous les acteurs — consommateurs, professionnels, entreprises et citoyens.

5.   Observations spécifiques

5.1

Le Livre vert soulève des questions complexes en ce qui concerne la politique, les principes et la réglementation. Les États membres ont eux-mêmes développé des corpus législatifs en matière de protection des consommateurs, qui, bien que cohérents au niveau des grands principes et entre les pays, diffèrent dans leurs détails et leur application. Le processus de consultation systématique et étendu annexé au document reflète cette complexité. Ce cadre détaillé demande des réponses de la part des centaines d'acteurs organisationnels souhaitant faire connaître leur point de vue. Toutefois, dans le présent avis, le CESE limitera ses observations aux principales questions politiques ci-après, estimant que, au cas par cas, il devra se prononcer sur chacune des directives à revoir, comme il l'a déjà fait dans son avis sur la directive relative aux ventes à distance (avis INT/334 sur la communication de la Commission COM(2006) final, du 21 septembre 2006).

5.2

Il conviendrait prioritairement de remédier aux lacunes des directives existantes et de coordonner ces directives les unes avec les autres.

5.3

Il est probable que l'«harmonisation minimale», combinée à une approche positive des États membres pour adopter, de manière cohérente, des normes plus élevées dans le domaine de la protection des consommateurs, constitue la base de la majeure partie de l'acquis en matière de protection des consommateurs dans un avenir proche. Pour des raisons sociales et économiques diverses (et changeantes), les États membres souhaiteront soit conserver le niveau de protection des consommateurs dont ils bénéficient déjà, soit aller vers un niveau de protection différent, à pas mesurés, au rythme qu'ils auront choisi. Cette position respecte le principe de subsidiarité et est beaucoup plus facile à concilier avec ce dernier. Elle reconnaît toutefois aussi que diverses catégories de consommateurs dans toute l'UE sont défavorisées s'agissant de leur niveau de protection actuel ou de leur capacité à demander réparation et qu'une action s'impose, tant au niveau de l'UE qu'à celui des États membres.

5.3.1

Cela ne signifie pas pour autant que, dans le cadre d'un examen casuistique et dans des domaines bien précis dans lesquels prévaut l'intérêt de la réalisation du marché intérieur, l'on ne doive pas envisager la possibilité d'une harmonisation maximale, à condition que soit garanti un niveau élevé de protection des consommateurs, éventuellement même en recourant à des règlements.

5.4

L'objectif déclaré de permettre au consommateur de tenir les rênes — grâce à la connaissance de ses droits, à sa capacité à intenter des actions contre des fournisseurs et à obtenir réparation — ne devrait pas être considéré comme une alternative à une protection claire et proactive reposant sur une combinaison des droits européen et national. L'information est une chose tout à fait différente de la protection. En effet, dans la plupart des transactions commerciales, c'est normalement le fournisseur qui est en position de force, et la majorité des lois de protection des consommateurs visent à garantir les droits de l'acheteur.

Bruxelles, le 12 juillet 2007.

Le Président

du Comité économique et social européen

Dimitris DIMITRIADIS


(1)  JO C 185 du 8.8.2006.

(2)  http://europa.eu/rapid/pressReleasesAction.do?reference=IP/07/320&format=HTML&aged=0&language=FR&guiLanguage=en.

(3)  http://ec.europa.eu/consumers/overview/cons_policy/index_fr.htm.

(4)  http://ec.europa.eu/consumers/cons_int/safe_shop/acquis/green-paper_cons_acquis_fr.pdf.

(5)  La reconnaissance mutuelle signifierait que les États membres garderaient la possibilité d'introduire dans leur législation nationale des règles plus strictes en matière de protection des consommateurs, mais qu'ils n'auraient pas le droit d'imposer leurs propres exigences, qui seraient plus strictes, à des entreprises établies dans d'autres États membres d'une manière qui créerait des restrictions injustifiées à la libre circulation des biens ou à la liberté de fournir des services. L'application du principe du pays d'origine signifierait qu'un État membre garderait la possibilité d'introduire, dans sa législation nationale, des règles plus strictes en matière de protection des consommateurs, mais que les entreprises établies dans d'autres États membres devraient uniquement se conformer aux règles applicables dans leur pays d'origine.

(6)  Mme Meglena KUNEVA, commissaire chargée de la protection des consommateurs

http://europa.eu/rapid/pressReleasesAction.do?reference=IP/07/256&format=HTML&aged=0&language=FR&guiLanguage=en.


27.10.2007   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 256/31


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil relative aux rétroviseurs des tracteurs agricoles ou forestiers à roues» (version codifiée)

COM(2007) 236 final — 2007/0081 (COD)

(2007/C 256/06)

Le 29 mai 2007, le Conseil de l'Union européenne a décidé, conformément à l'article 95 du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la proposition susmentionnée.

Ayant estimé que le contenu de la proposition est entièrement satisfaisant et n'appelle aucun commentaire de sa part, le Comité, lors de sa 437e session plénière des 11 et 12 juillet 2007 (séance du 11 juillet), a décidé par 145 voix pour, 2 voix contre et 4 abstentions de rendre un avis favorable au texte proposé.

 

Bruxelles, le 11 juillet 2007.

Le Président

du Comité économique et social européen

Dimitris DIMITRIADIS


27.10.2007   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 256/31


Avis du Comité économique et social européen sur «La définition d'une politique énergétique pour l'Europe (stratégie de Lisbonne)»

(2007/C 256/07)

Le 14 septembre 2006, le Comité économique et social européen a fait savoir son intention — confirmée le 26 octobre 2006 — d'élaborer, conformément à l'article 31 de son règlement intérieur, un rapport d'information sur «La définition d'une politique énergétique pour l'Europe».

Au cours de la session plénière des 14 et 15 mars 2007, il a été décidé de transformer le rapport d'information en avis d'initiative (article 29, paragraphe 2 du règlement intérieur).

La section spécialisée «Transports, énergie, infrastructures, société de l'information», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 19 juin 2007 (rapporteuse: Mme SIRKEINEN).

Lors de sa 437e session plénière des 11 et 12 juillet 2007 (séance du 12 juillet 2007), le Comité économique et social européen a adopté l'avis suivant par 126 voix pour et 4 abstentions.

1.   Recommandations

1.1

L'énergie est devenue une question politique centrale fortement liée à la stratégie de Lisbonne pour la croissance et l'emploi.

L'énergie conditionne une part grandissante de l'économie européenne. Pour répondre aux défis de politique énergétique qui se posent en matière de changement climatique, de sécurité d'approvisionnement et de compétitivité, l'UE doit devenir une économie énergétique à haut rendement et à faible émission de CO2.

Pour cela il convient d'avoir une approche globale et de réfléchir au niveau de l'Union à une maîtrise de la demande européenne d'énergie, et à la sécurisation des approvisionnements, à travers le recours à des sources diversifiées, l'accès aux réseaux, la capacité à s'exprimer d'une seule voix dans les relations extérieures en matière d'énergie, ainsi que d'autres mesures potentielles.

Certaines conditions doivent être remplies et certaines mesures spécifiques doivent être prises à l'échelon de l'UE, des États membres et des collectivités régionales et locales, afin de permettre l'émergence d'innovations qui rendront possible une telle évolution, et de favoriser leur implantation sur le marché.

1.2

La création d'emplois plus nombreux et de meilleure qualité se trouve au cœur de la stratégie de Lisbonne. Lorsque les conditions de marché changent, le secteur énergétique perd certains emplois. Dans le même temps, de nouvelles solutions énergétiques peuvent être de puissants moteurs de création d'emplois de haute qualité. L'éducation et la formation jouent dans ce cas un rôle clé.

1.2.1

Outre l'emploi, d'autres aspects de la dimension sociale de l'énergie revêtent un caractère essentiel dans le contexte de Lisbonne. Citons, en particulier, un service public de haute qualité à des prix abordables. La société civile, y compris les partenaires sociaux, doit être activement associée au développement de la politique énergétique.

1.3

Le CESE, conjointement avec les conseils économiques et sociaux nationaux, souhaite présenter les recommandations de politique énergétique citées ci-après, dans le contexte de la stratégie de Lisbonne et dans l'optique d'«Une politique de l'énergie pour une société de la connaissance». Il préconise:

d'examiner les politiques énergétiques comme les autres conditions-cadres pouvant entrer en ligne de compte à la lumière de l'objectif que s'est fixé l'UE de devenir une économie à haut rendement et à faible émission de CO2;

de pouvoir compter sur une main-d'œuvre qualifiée et motivée, grâce à un système d'enseignement de grande qualité;

de réaliser un effort de recherche et de développement public qui soit suffisant et atteigne un niveau comparable à celui des principaux concurrents de l'UE et de stimuler la croissance de la part du financement privé de la recherche et du développement;

de développer la coopération internationale dans le domaine des technologies énergétiques, notamment avec d'autres acteurs importants, et de suivre systématiquement les politiques et mesures adoptées par les principaux concurrents et partenaires en matière de technologies énergétiques;

de s'assurer de la disponibilité de financements par capital-risque au moment des phases de développement et de lancement de l'activité des PME, ainsi que pour les investissements en matière de nouvelles technologies;

de favoriser une concurrence saine et ouverte sur les marchés de l'énergie en vue de forcer les entreprises à innover. Dans le cas des énergies renouvelables, l'accès aux réseaux peut s'avérer essentiel pour permettre à l'innovation d'être couronnée de succès;

de supprimer les obstacles qui entravent les investissements indispensables pour favoriser l'utilisation des nouvelles technologies. Les exigences en termes de programmation et d'autorisation ont pour effet de ralentir voire de bloquer les investissements. Pour réduire les risques que présente l'investissement, le cadre réglementaire doit être prévisible et stable;

de permettre l'accès des nouvelles technologies aux marchés de l'UE et des autres pays du globe;

de s'assurer de conditions de marché équitables au niveau mondial, au moyen par exemple de la fixation d'un prix pour le CO2 à l'échelle mondiale, tout en veillant à ce qu'il ne devienne pas une marchandise comme les autres puisque sa réduction réelle conditionne la survie de la planète;

de garder à l'esprit qu'en fixant des objectifs ambitieux, on peut contribuer à développer une position de force de l'UE sur les marchés mondiaux en matière de technologies favorisant l'efficacité énergétique et les énergies renouvelables. Les objectifs et leurs échéances doivent néanmoins être fixés avec prudence, afin de s'assurer qu'il existe des chances réelles de les atteindre;

de procéder avec une grande circonspection pour choisir, parmi les mesures citées ci-après, des solutions permettant de soutenir activement l'innovation et d'obtenir de bons résultats à un coût avantageux:

financement de la recherche et du développement;

éducation et formation;

sensibilisation de la population;

mécanismes de prix, fiscalité;

subventions;

objectifs contraignants et obligations;

réglementation et normes obligatoires;

normes volontaires, accords volontaires;

marchés publics.

1.4

En vue de mener à bien les transformations qui s'imposent d'urgence dans le secteur de l'énergie, il convient d'accélérer le rythme de l'innovation. Le Comité préconise de veiller en particulier:

à prendre des mesures permettant d'établir le prix économique des émissions de gaz carbonique à un niveau approprié;

à accroître la recherche et le développement dans les secteurs public et privé pour favoriser de nouvelles formes d'énergie et l'efficacité énergétique;

à mettre à profit la réglementation (ou d'autres mesures lorsque celles-ci ont un meilleur rapport coût-efficacité) pour accélérer le progrès en matière d'amélioration de l'efficacité énergétique des produits de tout type;

à utiliser les marchés publics de manière nettement plus proactive pour promouvoir des normes plus élevées d'efficacité énergétique, en particulier dans le domaine de la construction.

2.   Introduction

2.1

En collaboration avec les conseils économiques et sociaux nationaux, le CESE doit présenter début 2008 un «rapport de synthèse» au sujet des priorités de la stratégie de Lisbonne pour la croissance et l'emploi. Le présent avis sur le thème de la politique énergétique constitue un volet de ce rapport de synthèse. Il a été élaboré en coopération avec les conseils économiques et sociaux nationaux et, plus particulièrement, grâce aux contributions actives des conseils français, italien et maltais.

2.2

Le présent avis se rapporte à la «Section B — Réformes microéconomiques visant à augmenter le potentiel de croissance de l'Europe» des «Lignes directrices intégrées pour la croissance et l'emploi 2005-2008» et en particulier à la ligne directrice no 8 relative au renforcement de la compétitivité, à la ligne directrice no 12 qui porte sur la recherche et le développement, à la ligne directrice no 13 sur l'innovation et les technologies de l'information et de la communication, et à la ligne directrice no 14 sur l'utilisation durable des ressources (1).

Le Conseil européen de mars 2006

2.3

Dans les conclusions de son sommet tenu à Bruxelles les 23 et 24 mars 2006, le Conseil européen salue «les initiatives prises par le Parlement européen, le Comité des régions et le Comité économique et social européen pour que, dans la Communauté, les acteurs concernés aient davantage le contrôle du processus [de la stratégie de Lisbonne renouvelée pour la croissance et l'emploi]. Il encourage le Comité économique et social européen et le Comité des régions à poursuivre leurs travaux et leur demande de présenter au début de 2008 des rapports de synthèse sur les activités appuyant le partenariat pour la croissance et l'emploi» (point 12 des conclusions de la présidence).

2.4

Le Conseil européen fait observer que «la situation en Europe se caractérise par l'intensification de la concurrence étrangère, le vieillissement de la population, l'augmentation des prix de l'énergie et la nécessité de préserver la sécurité énergétique» (point 7 des conclusions de la présidence). Il confirme en outre que «les lignes directrices intégrées pour l'emploi et la croissance (2005-2008) restent valables. Dans ce cadre, il convient de certains domaines d'action prioritaires concernant l'investissement dans la connaissance et l'innovation, le potentiel des entreprises, notamment des PME, et l'emploi pour les catégories prioritaires; ainsi que de la définition d'une politique énergétique pour l'Europe» (point 16).

2.5

En ce qui concerne la question énergétique, le Conseil européen note que l'Europe est confrontée à un certain nombre de défis dans le domaine de l'énergie, à savoir la situation difficile que connaissent actuellement les marchés du pétrole et du gaz, la dépendance croissante à l'égard des importations et la diversification limitée réalisée à ce jour, la hausse et la volatilité des prix de l'énergie, la croissance de la demande mondiale d'énergie, les risques en matière de sécurité qui touchent tant les pays producteurs et les pays de transit que les voies d'acheminement, les menaces croissantes liées aux changements climatiques, la lenteur des progrès réalisés en matière d'efficacité énergétique et d'utilisation des énergies renouvelables, la nécessité d'accroître la transparence sur les marchés de l'énergie et de poursuivre l'intégration et l'interconnexion des marchés énergétiques nationaux dans le contexte d'une libéralisation quasi-achevée du marché de l'énergie (juillet 2007) et la coordination limitée entre les acteurs énergétiques alors que de grands investissements sont nécessaires dans les infrastructures énergétiques (point 43).

2.6

Pour faire face à ces défis et compte tenu du livre vert de la Commission intitulé «Une stratégie européenne pour une énergie sûre, compétitive et durable», le Conseil européen préconise une politique énergétique pour l'Europe afin à la fois d'assurer l'efficacité de la politique communautaire, la cohésion entre les États membres et la cohérence entre les actions menées dans différents domaines et d'atteindre, tout en les équilibrant, les trois objectifs que sont la sécurité de l'approvisionnement, la compétitivité et la viabilité environnementale (point 44).

2.7

Le Conseil européen souligne que, pour parvenir à cette cohérence dans les politiques tant internes qu'externes de l'UE, la politique énergétique doit répondre aux impératifs relevant de nombreux domaines. S'inscrivant dans une stratégie de croissance, et par le jeu de marchés ouverts et concurrentiels, elle favorise les investissements, le développement technologique ainsi que les échanges intérieurs et extérieurs. Elle est intimement liée à la politique de l'environnement et en relation étroite avec l'emploi, la politique régionale et particulièrement avec la politique des transports. Par ailleurs, les aspects de politique étrangère et de développement revêtent une importance croissante pour la promotion auprès d'autres pays des objectifs de la politique énergétique (point 45).

2.8

La politique énergétique pour l'Europe devrait être établie sur la base de perspectives communes concernant l'offre et la demande à long terme ainsi que sur une évaluation objective et transparente des avantages et des inconvénients liés à chaque source d'énergie; elle devrait aussi contribuer de façon équilibrée à la réalisation de ses trois principaux objectifs, à savoir (points 46 et 47):

renforcer la sécurité d'approvisionnement;

garantir la compétitivité des économies européennes et un coût abordable pour l'approvisionnement énergétique, tant pour les entreprises que pour les consommateurs, dans un cadre réglementaire stable;

promouvoir la viabilité environnementale.

2.9

Lors de la réalisation de ces principaux objectifs, la politique énergétique pour l'Europe devrait:

garantir la transparence et la non-discrimination sur les marchés;

être conforme aux règles de la concurrence;

être compatible avec les obligations de service public;

respecter pleinement la souveraineté des États membres sur les sources d'énergie primaire et leurs choix quant aux sources d'énergie utilisées.

Le «paquet énergie» 2007

2.10

La Commission présentera périodiquement, à compter de 2007, une analyse stratégique de la situation énergétique. Le 10 janvier 2007, elle a ainsi publié sa première analyse ainsi qu'une communication au Conseil européen et au Parlement européen intitulée «Une politique de l'énergie pour l'Europe» — ensemble qui forme le «paquet énergie».

2.11

Le point de départ de la Commission pour une politique énergétique européenne est triple: la lutte contre le changement climatique, la promotion de l'emploi et de la croissance, enfin la limitation de la dépendance de l'UE envers les importations de gaz et de pétrole.

2.12

Le principal objectif énergétique que la Commission propose pour l'UE est qu'elle réduise les émissions de gaz à effet de serre de 20 % d'ici 2020. L'objectif de l'UE doit être appréhendé dans le contexte de la nécessité d'une action internationale des pays industrialisés face au changement climatique. Lorsque des engagements auront été pris en ce sens, l'UE devra faire davantage. Elle devrait par conséquent s'attacher à relever cet objectif pour viser une réduction de 30 % d'ici 2030 et de 60 à 80 % d'ici 2050.

2.13

Le changement climatique n'est pas la seule préoccupation: sont également en jeu la sécurité d'approvisionnement énergétique de l'Europe, l'économie et le bien-être de la population. La Commission estime que la réalisation de cet objectif peut également limiter l'exposition croissante de l'UE à la volatilité et à la hausse des prix du pétrole et du gaz, intensifier la concurrence sur le marché intérieur de l'énergie, et stimuler les technologies et l'emploi.

2.14

En termes strictement énergétiques, cette réduction globale des émissions de gaz à effet de serre implique pour l'UE de réduire de 20 % au moins, et sans doute encore davantage, le volume de CO2 occasionné par sa consommation d'énergie, et ce dans les 13 prochaines années. L'UE doit à cette fin assumer un rôle de pionnière mondiale pour catalyser une nouvelle révolution industrielle.

2.15

Pour ce faire, la Commission propose également de se concentrer sur certaines mesures liées à l'énergie: l'amélioration de l'efficacité énergétique; l'augmentation de la part des énergies renouvelables dans le bouquet énergétique, ainsi que de nouvelles mesures visant à garantir que tous puissent tirer parti du marché intérieur de l'énergie; le renforcement de la solidarité entre les États membres, avec une vision à plus long terme pour le développement des technologies énergétiques, un accent renouvelé sur la sûreté et la sécurité nucléaires, et enfin des efforts résolus pour que l'UE «parle d'une seule voix» avec ses partenaires internationaux, y compris les producteurs énergétiques, les importateurs d'énergie et les pays en développement.

2.16

L'analyse stratégique comporte un plan d'action en dix points assorti d'un calendrier de mesures. Un premier train de mesures concrètes est présenté avec le plan d'action. Il comprend:

un rapport sur la mise en œuvre par les États membres du marché intérieur du gaz et de l'électricité, ainsi que les résultats d'une enquête sur l'état de la concurrence dans ces deux secteurs;

un plan relatif aux interconnexions prioritaires dans les réseaux électriques et gaziers des États membres, afin que le réseau européen devienne une réalité;

des propositions visant à promouvoir une production électrique durable à partir des combustibles fossiles;

une feuille de route et d'autres initiatives destinées à promouvoir les énergies renouvelables, notamment les biocarburants pour les transports;

une analyse de la situation de l'énergie nucléaire en Europe;

un programme de travail en vue d'un futur plan stratégique européen pour les technologies énergétiques.

2.17

Le plan d'action pour l'efficacité énergétique, que la Commission a adopté le 19 octobre 2006, fait également partie de ce plan d'action. La communication de la Commission «Limiter le réchauffement de la planète à 2 degrés Celsius — route à suivre à l'horizon 2020 et au-delà» et l'analyse stratégique se complètent et se renforcent mutuellement.

2.18

Le Conseil européen a pleinement approuvé les propositions de la Commission lors de son sommet de printemps des 8 et 9 mars 2007. La Commission élabore actuellement des propositions détaillées de mesures législatives et d'autres actions pertinentes, conformément aux conclusions du Conseil européen. Dans deux ans, elle livrera une deuxième analyse stratégique de la situation énergétique, qui décrira les progrès accomplis, les chefs d'État et de gouvernement s'étant engagés à examiner régulièrement les questions énergétiques.

Précédents avis du Comité économique et social européen au sujet de la politique énergétique

2.19

Au cours de son mandat 2002-2006, le CESE a élaboré plusieurs avis sur les questions de politique énergétique et notamment sur les caractéristiques et le rôle des différentes sources d'énergie et des technologies utilisées en la matière. Lors de sa session plénière de septembre 2006, le CESE a finalement adopté un avis exploratoire fondé pour une large part sur ses précédents avis, lequel portait sur «L'approvisionnement énergétique de l'UE — Stratégie d'optimalisation» (2). L'avis en question abordait bon nombre des thèmes évoqués par le Conseil européen de mars 2006. Ses principales conclusions étaient les suivantes.

2.20

Le CESE estimait que l'Europe devait se fixer pour objectif stratégique de diversifier sa combinaison énergétique en répondant à des objectifs d'optimisation économique, de sécurité de l'approvisionnement et de lutte contre le changement climatique. Toutes les sources d'énergie et toutes les technologies présentent, vis-à-vis de ces objectifs, des avantages et des inconvénients qui doivent être pris en considération d'une manière ouverte et équilibrée.

2.21

Les sources d'énergie renouvelables recèlent un potentiel qu'il conviendrait d'exploiter en augmentant leur utilisation. Cependant, même dans le cas où l'objectif d'une utilisation des énergies renouvelables portée à 20 % d'ici 2020 serait atteint, il est peu probable que les sources d'énergie renouvelables puissent remplacer totalement les sources d'énergie traditionnelles dans un avenir proche.

2.22

Toutes les options doivent être examinées. Les scénarios envisagés pour l'UE des 25 et présentés dans l'avis viennent étayer ce raisonnement. Même le scénario basé sur l'évolution la plus favorable de l'efficacité énergétique et de l'accroissement des énergies renouvelables ne pouvait tabler sur l'obsolescence de telle ou telle technologie sans conséquence négative soit sur l'environnement soit sur l'économie.

2.23

Par le biais de stratégies politiques, la combinaison énergétique actuelle devrait être davantage orientée vers une diminution de la dépendance vis-à-vis de fournisseurs externes ainsi que vers les sources d'énergie qui sont disponibles en Europe et ne participent pas aux émissions de gaz à effet de serre, tout en gardant présent à l'esprit que ce sont les acteurs du marché qui choisissent leurs investissements dans telle ou telle technologie.

2.24

Le CESE recommandait d'élaborer une stratégie visant l'optimisation de la combinaison énergétique. Dans ce contexte, il est important de clarifier les rôles de l'UE, des États membres, des autorités indépendantes et des acteurs du marché.

Il a été proposé que la stratégie pour l'optimisation de la combinaison énergétique soit basée sur les éléments suivants:

l'efficacité énergétique, y compris via la cogénération;

les sources d'énergie renouvelables et notamment l'utilisation des biocarburants pour les transports;

l'efficacité énergétique dans les transports;

l'amélioration de la sécurité nucléaire et la résolution du problème du carburant utilisé;

les technologies propres du charbon et la préparation d'un nouvel accroissement de l'exploitation des réserves de charbon au sein de l'UE;

des incitations aux investissements dans les terminaux de gaz naturel liquide;

un cadre approprié pour garantir des investissements suffisants dans la production et la transmission de l'énergie;

l'UE doit parler d'une seule voix et se poser comme l'un des intervenants les plus puissants sur la scène internationale;

l'analyse des conséquences des mesures politiques qui sont et seront prises dans le cadre de la protection de l'environnement et de la lutte contre le changement climatique sur les autres objectifs en matière de politique énergétique;

une solution mondiale pour les politiques de lutte contre le changement climatique à mener dans «l'après Kyoto», avec au moins la participation des principaux responsables des émissions;

des efforts de recherche et développement accrus et le soutien de l'UE à la recherche et au développement en matière d'énergie à court comme à long terme.

3.   Observations du CESE au sujet d'une politique de l'énergie pour l'Europe dans le contexte de la stratégie de Lisbonne

3.1

L'énergie est un élément indispensable dans les sociétés modernes. Pour répondre à nos besoins en termes d'alimentation, de chauffage (lorsque la fraîcheur du climat l'exige), d'éclairage, de transport, de produits et de biens de consommation ainsi qu'à nos besoins, de plus en plus importants aujourd'hui, en matière de télécommunications et de technologies de traitement des informations, nous devons disposer d'un approvisionnement énergétique qui soit sécurisé. Toutefois, notre manière de répondre à ces besoins peut également être changée et c'est ce à quoi nous devons nous employer. Face aux défis actuels, et en particulier à celui du changement climatique, il nous faut d'urgence changer de paradigme pour nous orienter vers une économie énergétique à haut rendement et à faible taux d'émission de CO2.

3.2

La question de l'énergie est étroitement liée à la stratégie de Lisbonne pour la croissance et l'emploi, car, pour atteindre les objectifs de Lisbonne, nous devons disposer d'un approvisionnement énergétique suffisant à des prix abordables et compétitifs. Dans le même temps, de nouvelles solutions énergétiques peuvent être de puissants moteurs de promotion de la compétitivité européenne et de création d'emplois de haute qualité, en particulier si elles rencontrent le succès sur les marchés mondiaux.

3.3

Les objectifs généraux de la politique énergétique, à savoir la compétitivité, la sécurité de l'approvisionnement et la viabilité sont et restent valables. Pour relever le défi majeur que représente le changement climatique, il est nécessaire d'endiguer la croissance de la demande énergétique par une amélioration nette de l'efficacité énergétique et un accroissement substantiel de la part des énergies renouvelables et des autres technologies énergétiques à faible émission de CO2, parmi lesquelles la capture et le stockage du carbone qui pourraient constituer une solution à l'avenir. L'amélioration de l'efficacité énergétique, la diversification des sources d'approvisionnement et la capacité de l'UE à s'exprimer d'une seule voix sur la scène internationale contribueront également à assurer la sécurité de l'approvisionnement énergétique. Il convient d'accroître la compétitivité, en favorisant un marché ouvert fondé une concurrence effective et loyale, en permettant notamment l'accès aux réseaux tout en garantissant un service public de grande qualité.

3.4

La création d'emplois plus nombreux et de meilleure qualité est un élément central de la stratégie de Lisbonne. Comme pour la plupart des marchés, où les entreprises doivent améliorer leur productivité pour faire face à la concurrence, les entreprises du secteur de l'énergie doivent également renforcer leur efficacité. Lorsque des emplois sont perdus dans le secteur de l'énergie, les travailleurs concernés doivent être soutenus de manière appropriée. Parallèlement, il est possible que le nombre d'emplois dans les secteurs consommateurs d'énergie se maintienne voire augmente. En particulier, l'évolution vers une meilleure efficacité énergétique et le recours aux sources d'énergie renouvelables ainsi qu'à d'autres technologies en cours de développement permettront de créer de nombreux emplois, pour la plupart de grande qualité.

3.4.1

Une attention particulière doit être accordée à la dimension sociale de la politique énergétique dans le cadre de Lisbonne. Elle couvre les questions du travail et de l'emploi ainsi que la disponibilité d'énergie pour tous à des prix abordables, c'est-à-dire un service public de haute qualité. La société civile, y compris les partenaires sociaux, doit être activement associée au développement de la politique énergétique.

3.5

Le CESE a présenté son point de vue détaillé sur ces questions essentielles de politique énergétique dans des avis récents et il élaborera en temps opportun des avis portant sur les actes législatifs et les autres propositions précises qui seront présentés par la Commission, sur la base des conclusions formulées par le Conseil européen relativement au «paquet énergie».

3.6

Pour éviter de reproduire plusieurs fois les mêmes travaux et pour apporter une contribution optimale au débat sur l'énergie, le CESE entend centrer le présent avis sur la relation entre la politique énergétique et la vision, qui sous-tend la stratégie de Lisbonne, de l'Europe comme société de la connaissance. Dans le présent avis, nous formulerons des remarques sur les thèmes abordés dans le paquet énergie et qui se rapportent aux innovations.

Le rôle de la technologie et de l'innovation dans la réponse à apporter aux défis énergétiques du siècle présent

3.7

Les objectifs et les mesures fixés politiquement posent un cadre d'action, mais la technologie et les autres modes d'innovation, en ce compris les changements de comportement, sont essentiels pour apporter de véritables progrès. Un tel constat vaut pour l'amélioration de l'efficacité énergétique, aussi bien en matière de conversion d'énergie que d'utilisation finale. L'innovation peut contribuer de manière considérable à réduire la dépendance vis-à-vis des sources d'approvisionnement énergétique externes, en permettant la diversification du bouquet énergétique. L'innovation est véritablement nécessaire pour réduire les émissions de gaz à effet de serre via le développement et l'utilisation de sources d'énergie renouvelables, de charbon propre et d'autres combustibles fossiles ainsi que d'une énergie nucléaire sûre.

3.8

L'innovation est synonyme de renouveau au sens large. Elle consiste à développer de nouveaux concepts, à en étendre l'utilisation et à les traduire en valeur économique. Elle couvre l'innovation technologique ainsi que les nouvelles méthodes de gestion et les autres solutions organisationnelles. Elle est réalisée dans l'industrie mais aussi dans les services et le secteur public. C'est souvent la recherche qui est à la source de l'innovation mais, naturellement, tel n'est pas toujours le cas. Le Comité souhaiterait faire référence ici à son avis intitulé «Les besoins en recherche pour la sécurité et la durabilité de l'approvisionnement énergétique» (3).

3.8.1

Les technologies énergétiques et notamment les technologies qui permettent d'améliorer l'efficacité de la combustion, les éoliennes, les capteurs solaires ou les solutions futures des piles à combustible, des technologies de l'hydrogène et des techniques de fusion de l'hydrogène sont au centre de l'attention. Tout aussi importantes sont les technologies liées, par exemple en matière de développement des matériaux et de météorologie, qui contribuent à une optimisation efficace grâce à de meilleures prévisions.

3.8.2

La gamme de techniques pouvant être utilisées pour accroître l'efficacité de la consommation énergétique est quasiment illimitée: une meilleure isolation, des appareils électriques à plus faible consommation d'énergie, des matériaux plus légers, une meilleure planification industrielle des produits et des procédés, des équipements plus efficaces. Dans ce contexte, les industries grandes consommatrices d'énergie jouent un rôle important: en effet, si elles n'assurent pas la demande par des investissements et une expertise, on assistera dans l'UE à un essoufflement de l'innovation pour une bonne partie des technologies qui permettent d'améliorer le rendement énergétique et sont destinées à l'industrie.

3.8.3

Les technologies de l'information et de la communication présentent un grand potentiel. Leur application à la production, la conversion et la distribution de l'énergie peut, comme c'est le cas pour les autres procédés, conduire à en accroître l'efficacité et la productivité. Il en va de même s'agissant d'assurer la sûreté et la sécurité des opérations, et ce en particulier dans le cas des réseaux de transmission. Les technologies de l'information et de la communication aident les utilisateurs et les consommateurs à maîtriser leur consommation d'énergie. Un des exemples d'utilisation, qui pourrait avoir de nombreux effets positifs, consisterait à réduire la surcharge aux heures de pointe en facilitant la réaction immédiate des utilisateurs face aux signaux donnés par les prix. Plus largement, l'utilisation des technologies de l'information et de la communication pourrait offrir une solution de substitution aux besoins en termes de transport, via par exemple le télétravail et les téléconférences.

3.8.4

Nous avons également besoin de nouvelles méthodes — d'innovations — dans le domaine de l'exploitation et de la gestion de l'énergie et des systèmes connexes, le but étant de fournir des services de grande qualité à un prix abordable. Il s'agit par exemple d'assurer la sûreté de l'exploitation des systèmes de production et de transmission, la maintenance ainsi que la gestion du marché (des échanges), la gestion des pics de consommation et l'adaptation à la lumière du jour. Enfin, et c'est là un élément important, une logistique efficace peut contribuer de manière considérable à répondre à la demande énergétique et à améliorer la gestion des combustibles.

3.8.5

Il faut également de l'innovation dans les comportements. Le consommateur est le principal acteur en la matière — il tient à chacun de nous d'adopter un mode de consommation énergétique qui soit plus intelligent et cela implique de nouvelles idées et une meilleure information. Il y a là un grand défi à relever s'agissant de mieux sensibiliser les consommateurs et de les informer de manière appropriée afin de guider leurs choix. Les politiques d'aménagement du territoire mises en œuvre au niveau local et régional ainsi que les solutions architecturales et les règles de construction peuvent contribuer de manière importante à encourager les choix énergétiques des citoyens; à cette fin, il conviendrait de promouvoir des campagnes d'information officielles en faveur de l'efficacité de la consommation énergétique et des économies d'énergie.

3.9

Il est nécessaire de mettre au point des solutions radicalement nouvelles pour résoudre les problèmes auxquels nous sommes confrontés et il est impératif qu'un changement s'accomplisse d'urgence. Les changements radicaux prennent du temps; c'est pourquoi il importe de s'y prendre dès à présent et d'allouer immédiatement des ressources à cet effet. Dans le même temps, il convient d'étendre l'utilisation des meilleures technologies existantes, afin, par exemple, de réduire la consommation d'énergie dans les foyers.

3.10

Afin d'orienter les innovations et les investissements vers la rentabilité, il conviendrait d'évaluer quantitativement le rapport coût-efficacité des technologies en amont. Un exemple important est le coût de différentes technologies pour éviter la production d'une tonne de CO2: il apparaît que les éoliennes sont bien plus onéreuses que les actions d'isolation de bâtiments.

Conditions et mesures politiques pour favoriser l'innovation

3.11

Pour que des innovations puissent voir le jour et s'implanter, certaines conditions doivent être remplies et certaines mesures politiques spécifiques doivent être prises à l'échelon local, régional, national et européen. Dans la mesure où l'UE a pour ambition de devenir le chef de file mondial en matière d'efficacité énergétique et de technologies à faible émission de carbone, il est d'une importance cruciale d'examiner les politiques énergétiques comme les autres conditions-cadres pouvant entrer en ligne de compte à la lumière de cet objectif.

3.12

La première condition sine qua non pour assurer le succès de l'innovation est de disposer d'une main d'œuvre qualifiée et motivée, qui s'appuie sur un système d'enseignement de grande qualité. Le développement de nouvelles technologies requiert un effort suffisant en termes de recherche et de développement ainsi qu'un financement par capital-risque au moment des phases de développement et de lancement de l'activité des PME. Une concurrence saine et ouverte force les entreprises à innover. L'accès aux marchés, à l'échelle mondiale y compris, est indispensable. Dans le cas des énergies renouvelables, l'accès aux réseaux peut s'avérer essentiel pour permettre à l'innovation d'être couronnée de succès. Le cadre réglementaire doit être conçu de manière à favoriser l'innovation et à cette fin, il peut notamment prévoir de récompenser plus particulièrement les auteurs d'innovations (par exemple, le système communautaire d'échange de quotas d'émission ne rétribue pas ceux qui ont été parmi les premiers à agir pour réduire les émissions). La surrégulation constitue un frein à l'innovation.

3.12.1

Des investissements sont nécessaires pour favoriser l'utilisation des nouvelles technologies. Les entreprises doivent dégager des bénéfices pour être à même d'investir. Un tel constat vaut également pour les investissements visant à améliorer l'efficacité énergétique, bien que le retour sur capital investi puisse être rapide. Si les activités du secteur énergétique ont été très lucratives ces dernières années, les investissements n'en restent pas moins faibles. Comme on le sait, les exigences en termes de programmation et d'autorisation et les contraintes en termes de permis ont pour effet de ralentir voire de bloquer les investissements. Pour réduire les risques que présente l'investissement, le cadre réglementaire doit être prévisible et stable. Étant donné que les délais de retour sur investissement sont souvent longs dans le cas des infrastructures énergétiques, la possibilité d'avoir recours à des formes de contrats à long terme présenterait des avantages.

3.12.2

Pour qu'une entreprise investisse dans le développement ou l'utilisation d'une nouvelle technologie, elle doit être en mesure d'obtenir un retour sur investissement à partir de marchés de taille suffisante. Dans la plupart des cas, les marchés nationaux ne sont pas suffisamment grands à cette fin — l'accès aux marchés mondiaux devient de plus en plus souvent un prérequis pour la réalisation de l'investissement. La demande mondiale ainsi que l'existence de conditions de marché équitables ont tout autant d'importance. Les mesures prises par l'UE sur une base unilatérale ne sont pas créatrices de demande sur un autre point du globe, bien qu'une telle évolution puisse se produire avec le temps. Par exemple, la fixation d'un prix pour le CO2 peut constituer une mesure incitative importante, mais il faudrait qu'elle soit prise à l'échelle mondiale.

3.12.3

La position de force dont jouit l'UE sur les marchés mondiaux en matière de technologies favorisant l'efficacité énergétique et les énergies renouvelables devrait être encore développée et renforcée. La capacité de l'UE à atteindre cet objectif peut être renforcée par son ambition de devenir un chef de file dans le domaine des politiques de lutte contre le changement climatique, en se fixant des objectifs ambitieux, et d'être aux avant-postes dans le domaine de l'efficacité énergétique et de l'utilisation des énergies renouvelables. Toutefois, cela ne fonctionne pas de manière automatique. Les objectifs et leurs échéances doivent être fixés avec prudence, afin de s'assurer qu'il y ait de réelles chances de les atteindre; si tel n'est pas le cas, leur résultat peut se limiter à des coûts additionnels et éventuellement des pertes d'emplois. Il faut par exemple que les technologies appropriées soient dans une phase de développement qui leur permette d'être prêtes à temps compte tenu des échéances fixées. Il convient également de tenir compte des cycles d'investissement existant dans différents secteurs.

3.12.4

L'UE semble mettre l'accent sur le jeu des forces de marché comme moyen pour renforcer l'innovation, ce qui pourrait toutefois s'avérer insuffisant. Les États-Unis et d'autres pays préconisent davantage un financement public de la recherche et du développement. L'Europe doit quant à elle augmenter le financement tant public que privé de la recherche et du développement en matière d'énergie. Il conviendrait de développer la coopération technologique avec les autres acteurs importants et de suivre systématiquement les politiques et mesures qu'ils adoptent. En Europe, la coopération entre les États membres doit être nettement renforcée et les efforts nationaux et communautaires doivent être mieux coordonnés, sans que la concurrence soit pour autant éliminée. Il conviendrait de favoriser une coopération plus étroite entre la recherche publique et les entreprises, tant du point de vue de la planification que de l'exécution des programmes de recherche, afin de faire en sorte que les efforts de recherche conduisent à l'innovation. Le projet d'Institut européen de technologie (IET) pourrait apporter une contribution à cet égard.

3.13

Pour soutenir activement l'innovation, il est généralement nécessaire de combiner plusieurs instruments. Il convient d'appliquer des mesures différentes en fonction des phases de développement des innovations et de leur situation sur le marché, en vue d'obtenir de bons résultats. En fonction des mesures nécessaires pour en faire des innovations qui s'implantent avec succès sur le marché, les technologies peuvent être regroupées, par exemple, en trois catégories:

1)

technologies encore éloignées de l'introduction sur le marché, en phase de recherche et de développement: dans de tels cas, un soutien ciblé à la recherche, au développement et à la démonstration est nécessaire. Les signaux donnés au moyen de prix, par exemple via la fixation d'un prix pour le CO2, ne sont pas suffisants;

2)

technologies proches de l'implantation sur le marché: une technologie qui fonctionne mais qui demeure trop chère pour les marchés. La fixation d'un prix pour le CO2 peut constituer l'incitation appropriée; on peut aussi prévoir un soutien spécifique destiné à assurer une croissance rapide de la demande et des volumes de production importants pour y répondre;

3)

de bons produits sur le marché mais qui font l'objet d'une faible demande (ce dont on peut trouver des exemples dans le domaine des technologies favorisant l'efficacité énergétique). Le principal enjeu consiste ici à sensibiliser l'opinion publique, ce à quoi on peut contribuer par des mécanismes d'audit énergétique et d'autres mesures analogues.

3.14

Il existe un large choix de mesures et d'instruments disponibles aux niveaux européen, national et régional. Il convient de procéder avec une grande circonspection pour choisir des mesures adaptées aux différents objectifs, si l'on souhaite obtenir de bons résultats à un coût avantageux. La vitesse d'action devrait être évaluée de manière critique afin d'éviter un gaspillage des ressources et des répercussions imprévues. Les mesures servant clairement des objectifs directs et indirects — mesures «sans regret» — devraient être mises en œuvre dès que possible. En revanche, les mesures plus complexes, souvent de nature nouvelle, telles que les modalités de fixation d'un prix de marché pour le CO2, devraient d'abord faire l'objet d'un examen minutieux. Pour éviter de faire face à des complications ou des effets secondaires imprévus et se prémunir contre des solutions qui ne seraient pas optimales, il faut veiller à ne pas multiplier les mesures mises en œuvre pour atteindre un objectif donné. Au moment de choisir les mesures à employer, il importe également de prendre en considération le bon fonctionnement du marché intérieur — ce qui n'a pas toujours été le cas jusqu'à présent.

3.14.1

Financement de la recherche et du développement: Le Comité souhaiterait faire référence ici à son avis intitulé «L'investissement dans la connaissance et l'innovation (Stratégie de Lisbonne)» (INT/325). L'UE dans son ensemble accuse un retard manifeste par rapport aux États-Unis et à d'autres concurrents majeurs. Le septième programme cadre pour la recherche et le développement prévoit une somme totale d'environ 4 milliards d'euros sur sept ans pour l'énergie (à l'exception de la construction de l'ITER), alors que la loi américaine sur l'énergie propose que la part du budget fédéral consacrée à ce domaine s'élève à 4,4 milliards de dollars pour la seule année 2007 et augmente au cours des années suivantes. En plus d'augmenter l'enveloppe publique pour la recherche et le développement en matière d'énergie, il conviendrait, d'une part, d'instaurer des incitations afin que davantage de fonds privés soient alloués dans ce domaine, et, d'autre part, de favoriser la coopération entre les États membres de l'Union européenne.

3.14.2

Éducation et formation: outre les efforts qui doivent être consentis pour améliorer la qualité de l'éducation et de la formation en Europe, il faut faire en sorte que les métiers de l'énergie constituent pour les jeunes un choix de carrière attractif qui offre de bonnes perspectives. Compte tenu du rythme accéléré des mutations technologiques, l'éducation et la formation tout au long de la vie ont une importance essentielle.

3.14.3

Sensibilisation de la population: C'est un grand défi que de changer le comportement de chacun d'entre nous pour tous nous inciter à utiliser l'énergie d'une manière plus intelligente. Une contribution peut être apportée à cet égard dans le cadre du système scolaire et au moyen de campagnes d'information. L'éducation des futurs citoyens en la matière pourrait commencer dès l'école primaire, car les enfants sont très réceptifs au devenir de la planète et désireux d'agir. Dans les milieux professionnels et les entreprises, les audits énergétiques réalisés, par exemple, sur la base d'accords volontaires ont donné de bons résultats.

3.14.4

Mécanismes de prix, fiscalité: Les signaux donnés au moyen des prix peuvent, s'ils sont bien conçus, contribuer efficacement à soutenir l'innovation en orientant les choix des utilisateurs. En tant qu'instrument pour réduire la consommation d'énergie en général, l'augmentation des prix n'est pas très efficace, étant entendu que l'élasticité-prix dans le domaine de l'énergie est généralement faible.

3.14.5

Subventions: Des subventions bien conçues peuvent permettre d'orienter efficacement les choix. Au cours des premières étapes des courbes d'apprentissage, des subventions sont souvent nécessaires pour compenser des risques qui, sans elles, seraient trop importants. Pour qu'elles n'engendrent pas de distorsion de la concurrence, on peut se limiter à les utiliser dans le cadre des règles qui existent au niveau de l'UE, c'est-à-dire pour répondre aux défaillances du marché. Les subventions doivent être limitées dans le temps et progressivement abandonnées. En vue de favoriser l'efficacité énergétique, des incitations appropriées doivent être mises au point pour aider à surmonter le coût initial additionnel que représentent des appareils à meilleur rendement énergétique, sachant que les délais de retour sur investissement sont souvent courts.

3.14.6

Objectifs et obligations fixés au niveau politique: Ils servent à indiquer la direction dans laquelle on souhaite orienter le développement. Les instruments politiques qui sont réellement mis en œuvre afin d'atteindre les objectifs fixés ont un impact tout aussi important sur les décisions d'investissement. Lorsque l'on fixe des objectifs, il convient de garder à l'esprit qu'en règle générale certains pans de l'économie en tirent profit mais que d'autres en pâtissent et qu'ainsi, des objectifs par trop ambitieux peuvent avoir davantage de retombées négatives que d'effets positifs. Il semblerait qu'il y ait aujourd'hui une tendance à fixer des objectifs globaux et de les compléter par des objectifs spécifiques qui concourent à la même fin: par exemple, des objectifs de réduction des émissions de CO2 et, dans le but de les atteindre, des objectifs d'augmentation de l'utilisation des énergies renouvelables. Une telle approche peut conduire à faire le choix de solutions qui ne soient pas optimales pour atteindre l'objectif global. Les objectifs comme les instruments spécifiquement choisis doivent faire l'objet d'études d'impact exhaustives, à l'image des accords conclus avec l'industrie en Allemagne et en Finlande.

3.14.7

Échanges de quotas d'émission, certificats verts/blancs: Il s'agit d'instruments efficaces qui, s'ils sont correctement conçus, peuvent conduire à la réalisation des objectifs fixés. Il est toutefois difficile d'en estimer préalablement les coûts, qui peuvent fortement varier. Idéalement, le marché doit être aussi vaste et le nombre d'acteurs de marché pour les échanges de droits ou de certificats aussi élevé que possible. En cas d'application à des entreprises actives sur un marché mondial, ce système devra avoir une dimension mondiale afin de ne pas donner lieu à une distorsion de la concurrence.

3.14.8

Réglementation ou normes obligatoires: Une réglementation élaborée avec soin peut favoriser l'innovation. En particulier, une réglementation peut être un moyen efficace de se débarrasser de technologies obsolètes. En fixant des objectifs intermédiaires ambitieux pour relever les normes d'efficacité, la réglementation peut également stimuler l'innovation de sorte à imposer l'efficacité énergétique en matière de produits. Le risque de freiner l'innovation est, cependant, toujours présent. Dans tous les cas, il convient de s'assurer que les dispositions réglementaires ne donnent pas lieu à la création de barrières sur le marché.

3.14.9

Normes volontaires, accords volontaires, certification: Il s'agit d'instruments politiques favorables à l'innovation. S'il est possible qu'ils ne permettent pas toujours d'atteindre leurs objectifs ou leurs buts exacts, ils aident néanmoins à accomplir de grandes avancées en termes d'innovation, et ce pratiquement sans risque d'effets secondaires négatifs.

3.14.10

Marchés publics: Les marchés publics peuvent jouer un rôle important dans la promotion de l'innovation énergétique. Il conviendrait, à cette fin, de développer des méthodes et de les diffuser largement. Une écologisation des marchés publics nécessite normalement l'utilisation d'analyses de cycle de vie. Pour le recours à ces dernières ainsi qu'à d'autres nouvelles méthodes, les autorités ont souvent besoin d'une formation. Les règles communautaires régissant les marchés publics, qui doivent être respectées, prévoient que les marchés publics soient plus écologiques, en exigeant l'application de solutions de pointe.

3.14.11

En vue de mener à bien les transformations qui s'imposent d'urgence dans le secteur de l'énergie, il convient d'accélérer le rythme de l'innovation. Le Comité préconise de veiller en particulier:

à prendre des mesures permettant d'établir le prix économique des émissions de gaz carbonique à un niveau approprié;

à accroître la recherche et le développement dans les secteurs public et privé pour favoriser de nouvelles formes d'énergie et l'efficacité énergétique;

à mettre à profit la réglementation (ou d'autres mesures lorsque celles-ci ont un meilleur rapport coût-efficacité) pour accélérer le progrès en matière d'amélioration de l'efficacité énergétique des produits de tout type;

à utiliser les marchés publics de manière nettement plus proactive pour promouvoir des normes plus élevées d'efficacité énergétique, en particulier dans le domaine de la construction.

Bruxelles, le 12 juillet 2007.

Le Président

du Comité économique et social européen

Dimitris DIMITRIADIS


(1)  COM(2005) 141 final, «Lignes directrices intégrées pour la croissance et l'emploi».

(2)  JO C 318 du 23.12.2006, p. 185.

(3)  JO C 241 du 7.10.2002, p. 13.


27.10.2007   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 256/39


Avis du Comité économique et social européen sur les

«Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil relative à l'interopérabilité du système ferroviaire communautaire» (codification)

«Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (CE) no 881/2004 instituant une agence ferroviaire européenne»

«Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 2004/49/CE concernant la sécurité des chemins de fer communautaires»

COM(2006) 783 final — 2006/0273 (COD)

COM(2006) 785 final — 2006/0274 (COD)

COM(2006) 784 final — 2006/0272 (COD)

(2007/C 256/08)

Le 16 janvier 2007, le Conseil a décidé, conformément aux articles 71 et 156 du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur les propositions susmentionnées.

La section spécialisée «Transports, énergie, infrastructures, société de l'information», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 19 juin 2007 (rapporteur: M. CONFALONIERI).

Lors de sa 437e session plénière des 11 et 12 juillet 2007 (séance du 11 juillet), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 137 voix pour et 2 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1

Les propositions:

modifiant le règlement (CE) no 881/2004 instituant une Agence ferroviaire européenne;

modifiant la directive 49/2004 concernant la sécurité des chemins de fer communautaires;

de directive du Parlement européen et du Conseil relative à l'interopérabilité du système ferroviaire communautaire;

semblent cohérentes avec la volonté de faciliter l'accès des opérateurs au système ferroviaire européen.

Ces propositions:

simplifient les procédures de certification du matériel roulant sur le système interopérable;

harmonisent la majeure partie des vérifications qui sont opérées au niveau national concernant le matériel roulant, les processus de maintenance, les opérateurs de la circulation et de la maintenance;

mettent en place un système complet de comparaison des normes nationales de certification, y compris pour les paramètres qui ne sont pas inclus dans les spécifications techniques d'interopérabilité (STI).

1.2

Le CESE marque son accord avec l'objectif visant à simplifier la procédure de mise en service.

1.3

LE CESE est d'avis que ces simplifications renforceront l'utilisation du système ferroviaire européen en détournant une partie de la demande des autres modes de transport, en contribuant à l'amélioration de l'environnement et en utilisant les sources d'énergie préconisées par les plans énergétiques de l'UE.

1.4

Le CESE préconise que le processus de future application des normes européennes d'interopérabilité et la répartition des contrôles de certification entre les organismes nationaux et communautaires n'entraînent pas de risques pour la sécurité.

1.5

Le CESE recommande notamment que la délimitation des compétences entre les organismes créés par le nouveau système soit maniée avec attention.

1.6

Le CESE considère que pour les wagons et les voitures à passagers mis en service après l'entrée en vigueur de la présente directive, une seule autorisation de mise en service, délivrée par un État membre de la Communauté, doit suffire. Le nouveau règlement relatif à l'Agence européenne permettra aux opérateurs ferroviaires, aux gestionnaires des infrastructures, aux détenteurs de wagons, mais surtout aux organismes nationaux de certification:

de réduire les délais de certification;

de restreindre le nombre de vérifications, en éliminant les doublons nationaux pour les normes communes;

de pouvoir agir dans un cadre réglementaire univoque et d'avoir la possibilité d'utiliser les indications techniques de l'Agence.

1.7

Le CESE prend acte du fait qu'en vertu de l'action envisagée, l'Agence se présente comme l'organe directeur de la création du système ferroviaire européen (constitué du réseau à grande vitesse (GV), des corridors des réseaux transeuropéens (RTE) et, à l'avenir, de l'ensemble des autres réseaux nationaux), grâce à la coordination et à l'extension du système européen de gestion du trafic ferroviaire (ERTMS — European Rail Traffic Management System), et en prévoyant la publication d'un système de comparaison des normes nationales et un support technique apporté aux organismes nationaux de certification.

1.8

Le renforcement progressif du rôle de l'Agence européenne en tant qu'organisme d'orientation et de contrôle du processus d'interopérabilité ferroviaire et de l'évolution technologique, entraînera en même temps une modification partielle du rôle des organismes nationaux de certification.

1.9

Dans le but de créer une base de connaissances pour des paramètres communs, il est demandé à la Commission d'étudier l'opportunité d'un registre européen commun des risques en matière de sécurité de la circulation, auquel les États membres seraient parties prenantes.

1.10

Le résultat visé est de mettre en place un marché européen du matériel roulant, des activités de maintenance des systèmes et du matériel roulant, et des ressources humaines destinées à la gestion des services de transport.

1.11

Cela offrira une opportunité unique aux constructeurs européens de matériel roulant, notamment si les choix techniques relatifs aux STI préservent la possibilité de conserver un nombre adapté de constructeurs, afin de garantir un marché européen du matériel roulant (et de la maintenance) qui soit compétitif.

1.12

Le CESE préconise que, pour le matériel roulant mis en service avant l'entrée en vigueur de la directive à l'examen et dépourvu de déclaration CE de vérification, l'application de la directive concernant la sécurité des chemins de fer ne pénalise pas du point de vue administratif les opérateurs ferroviaires.

1.13

Le CESE considère qu'il faut prévoir des organismes nationaux de certification dans les pays appartenant au système statistique européen (SSE).

1.14

Il y a lieu de prévoir que dans le cadre de l'analyse des dérogations aux STI, l'on évalue précisément, du point de vue de l'équilibre économique du projet, l'impact du cofinancement communautaire sur la faisabilité économique de ce projet.

1.15

Le CESE n'est pas d'avis que l'analyse des dérogations puisse être réalisée pour chaque STI individuellement mais considère au contraire qu'elle doit l'être pour le système de toutes les STI dans leur ensemble.

1.16

Le CESE préconise d'appliquer, dans le cadre de la publication des STI réalisée par l'Agence, le régime linguistique actuel.

Il est d'avis que les évaluations et les avis de l'Agence doivent être sollicités pour toute intervention de construction ou de rénovation, même lorsqu'elles ne sont pas financées par la Communauté européenne, afin d'orienter aussi bien les actions nationales que communautaires vers les choix allant dans le sens du système européen de sécurité.

1.17

Le CESE estime qu'il y a lieu d'accorder à l'ensemble des acteurs concernés la possibilité de demander des avis à l'Agence européenne, même si ces derniers devaient être en désaccord avec les évaluations des organismes nationaux de certification. En particulier, il estime nécessaire de garantir un accès aux entreprises ferroviaires communautaires et aux organisations des travailleurs du secteur concerné.

2.   Argumentations et observations

2.1   Éléments principaux et cadre général de la proposition

2.1.1

La réalisation progressive d'un espace ferroviaire européen sans frontières rend nécessaire une action de réglementation technique pour les aspects liés à la sécurité, à la gestion et aux procédures d'accès au système.

2.1.2

Les directives 91/440/CEE du Conseil du 29 juillet 1991, 95/18/CE du Conseil du 19 juin 1995, 2001/14/CE du Parlement européen et du Conseil du 26 février 2001 relatives au développement des chemins de fer communautaires, prévoient une ouverture progressive du droit d'accès à l'infrastructure communautaire à toutes les entreprises ferroviaires communautaires titulaires d'une licence délivrée par un État membre, et qui souhaitent offrir des services de transport de fret dans un nouveau cadre de référence.

2.1.3

La poursuite simultanée d'objectifs de sécurité et d'interopérabilité exige un travail technique qui doit être placé sous la direction d'un organisme spécialisé. C'est pour cette raison qu'a été créée une Agence ferroviaire européenne pour la sécurité et l'interopérabilité.

2.1.4

Les principaux objectifs poursuivis par l'Agence européenne sont les suivants:

promouvoir la réalisation d'un espace ferroviaire européen, contribuer à la reprise du secteur et accroître la sécurité,

développer des indicateurs, des objectifs et méthodes communs de sécurité,

faciliter les procédures de délivrance des certificats de sécurité aux entreprises ferroviaires,

garantir la plus grande transparence possible et une diffusion efficace des informations,

assurer une continuité aux activités et au développement des STI dans le temps, dans un cadre technique permanent,

renforcer l'interopérabilité du réseau transeuropéen par l'adoption de nouveaux projets d'investissement, soutenus par la Communauté, en respectant l'objectif de l'interopérabilité,

soutenir la mise en place d'un système de certification des ateliers de maintenance,

apporter le soutien technique nécessaire afin que les compétences professionnelles nécessaires à la conduite des trains soient dûment prises en considération au niveau européen,

fournir le support technique pour la mise en place d'un système d'immatriculation destiné à la reconnaissance de l'aptitude du matériel roulant à circuler dans des conditions spécifiées,

assurer la plus grande transparence et l'égalité d'accès de toutes les parties concernées aux informations pertinentes,

favoriser la promotion de l'innovation en matière de sécurité ferroviaire et d'interopérabilité.

2.1.5

Les procédures nationales d'homologation des locomotives sont considérées à l'heure actuelle comme l'un des plus importants obstacles à la création de nouvelles entreprises ferroviaires dans le domaine du fret, ainsi qu'un frein majeur à l'interopérabilité du système ferroviaire européen.

2.1.6

Compte tenu du fait qu'aucun État membre ne peut décider, seul, que l'autorisation de mise en service qu'il délivre aura une validité sur le territoire d'autres États membres, une initiative communautaire est nécessaire afin d'harmoniser les procédures nationales, de les simplifier et de recourir plus systématiquement au principe de la reconnaissance mutuelle.

2.1.7

Par ailleurs, dans le cadre du programme de simplification de la législation, la Commission se propose de consolider et de fusionner les directives sur l'interopérabilité ferroviaire, afin de créer un système unique de règles pour le système ferroviaire européen.

2.1.8

Ces initiatives permettront de rendre le transport plus compétitif, en réduisant les coûts de la filière du transport ferroviaire.

2.2   Agence ferroviaire européenne

2.2.1

L'Agence facilite la procédure de certification du matériel roulant existant en développant un document de référence permettant d'établir la correspondance des règles nationales applicables.

2.2.2

L'Agence évalue les demandes de financement communautaire dans le domaine des projets d'infrastructure et de matériel roulant, dans le but d'en vérifier le «caractère interopérable».

2.2.3

L'Agence évalue les relations entre les détenteurs de wagons et les entreprises ferroviaires (ancien accord RIV qui régissait l'échange et l'utilisation de wagons entre entreprises ferroviaires), notamment dans le domaine de la maintenance, et présente des recommandations à la Commission sur leur régulation.

2.2.4

L'Agence formule des recommandations concernant les critères communs pour la définition des compétences professionnelles et l'évaluation du personnel participant à l'exploitation et à l'entretien du système ferroviaire.

2.2.5

L'Agence joue le rôle d'autorité du système dans le cadre du projet ERTMS.

2.3   Interopérabilité

2.3.1

La proposition entend simplifier et moderniser le cadre réglementaire en Europe. Dans ce contexte, elle propose une nouvelle fois la codification et la fusion des directives actuelles relatives à l'interopérabilité ferroviaire.

2.3.2

En se fondant sur une expérience de dix ans en matière d'application des directives sur l'interopérabilité, la Commission propose également une série d'améliorations des aspects techniques du cadre réglementaire.

2.4   Sécurité des chemins de fer européens

2.4.1

La modification de l'article 14 de la directive concernant la sécurité ferroviaire permet de préciser quelle partie d'une autorisation doit être reconnue mutuellement et quelle autre est étroitement liée à la compatibilité du véhicule en question avec l'infrastructure visée.

2.4.2

Suite aux modifications apportées à la réglementation:

A chaque fois qu'un véhicule est mis en service, un «responsable» de la maintenance doit être clairement identifié,

l'entreprise ferroviaire doit faire la preuve que les wagons qu'elle utilise sont exploités et entretenus conformément aux règles en vigueur,

les entreprises ferroviaires clarifient le système et les procédures qu'elles ont mises en place pour s'assurer que l'utilisation de wagons en provenance de différents détenteurs ne précarise pas la sécurité ferroviaire,

l'Agence évalue les procédures mises en place par les entreprises ferroviaires pour gérer leurs relations avec les détenteurs de wagons.

3.   Observations générales

3.1   Agence ferroviaire européenne

3.1.1

Les caractéristiques du système ferroviaire sont telles que tous les éléments contribuent à la sécurité du système.

3.1.2

Si le champ de responsabilité de l'Agence s'élargit du système interopérable à celui de la sécurité, ses compétences s'étendront avec le temps à tous les éléments du système.

3.1.3

On peut estimer qu'au terme du processus, il n'y aura qu'un seul système communautaire et une seule Agence ferroviaire.

3.1.4

La phase de comparaison entre les réglementations doit être appréhendée comme l'une des étapes nécessaires dans cette direction.

3.1.5

Il est nécessaire d'évaluer l'impact différent que les choix opérés en matière de STI et les nouvelles procédures de certification auront sur chaque État membre, sur les gestionnaires des infrastructures, sur les entreprises ferroviaires, les détenteurs de wagons et les clients finaux.

3.1.6

La préservation de l'équilibre économique des différents réseaux nationaux et des différents acteurs du marché doit être prise en compte, notamment au cours des phases d'harmonisation des normes techniques et des procédures de certification.

3.1.7

L'Agence doit être saisie d'une mission d'orientation des choix technologiques sur un réseau ouvert à l'interopérabilité, actuelle et à venir, même sans avoir recours au levier financier.

3.1.8

Il y a lieu de considérer que les compétences de l'Agence seront étendues à l'ensemble du réseau ferroviaire communautaire, conformément à ce qui est prévu par la proposition de directive sur l'interopérabilité.

3.2   Interopérabilité

3.2.1

La proposition de directive prévoit une simplification des STI relatives au système à GV et au système conventionnel, lorsqu'ils sont comparables.

3.2.2

La proposition de directive prévoit d'étendre la validité des STI au-delà du réseau à GV et des corridors des réseaux transeuropéens (RTE) jusqu'à couvrir l'ensemble des réseaux nationaux, hormis les cas d'exception.

3.2.3

Cette extension marque un tournant dans la politique d'évolution technologique du système ferroviaire européen vers un réseau européen unique. L'impact économique et stratégique qui en découle dépasse ce qui est indiqué dans l'avant-propos de la proposition.

3.2.4

Les décisions relatives à la typologie des STI à appliquer pour les nouvelles réalisations et les adaptations d'envergure des infrastructures existantes relèveront en large partie de la responsabilité de l'UE.

3.2.5

Les décisions communautaires sur la fixation des STI et sur leur évolution par rapport à la situation actuelle de chaque État membre auront un grand impact économique sur la programmation des investissements en technologie et infrastructures des différents États membres.

3.2.6

Pour chacun des États membres, une évaluation économique de l'impact des nouvelles STI apparaît nécessaire, et elle devra constituer le fondement de l'évaluation de l'opportunité de leur adoption.

3.2.7

Cette évaluation doit être réalisée de manière différente pour les STI ayant un impact sur les investissements publics des États membres et pour celles ayant une influence sur les investissements des entreprises ferroviaires et des opérateurs privés.

3.2.8

L'extension du champ d'application des STI à l'ensemble du réseau ferroviaire européen, hormis les exceptions, suggère également un nouveau système de relations entre l'Agence ferroviaire européenne et les organismes de certification de chaque État membre.

3.2.9

En ce qui concerne ces derniers, l'on peut prévoir qu'à l'avenir ils concentreront leur action sur les activités opérationnelles de certification pour les entreprises et les opérateurs, plutôt que sur la gestion de l'évolution des normes technologiques.

3.2.10

La modification de la directive sur la sécurité constitue l'une des corrections techniques destinées à atteindre l'objectif de simplification de la circulation du matériel roulant interopérable.

3.2.11

En parallèle, un nouvel acteur est introduit, le «détenteur» de wagons.

3.2.12

La procédure de certification du matériel roulant est organisée de manière à ce que ce dernier soit soumis à l'évaluation d'organismes différents, en fonction des différents paramètres techniques.

3.2.13

Les paramètres inclus dans les STI seront certifiés par l'un quelconque des organismes nationaux de certification.

3.2.14

Les paramètres nationaux complémentaires seront contrôlés par l'organisme national de certification du réseau concerné. L'organisme national de certification prend acte des certifications «communautaires», vérifie les certifications spécifiques nationales et délivre le certificat de sécurité. Il a le droit de refuser la demande de certification et conserve ainsi la responsabilité de la cohérence de tous les éléments certifiés.

3.2.15

S'agissant de l'issue d'une demande de certification, l'Agence ferroviaire européenne fait office d'instance indépendante de recours.

3.2.16

Exception faite des observations générales formulées dans les paragraphes précédents (Interopérabilité et Agence européenne), le CESE n'entend pas formuler d'autres observations.

4.   Observations particulières

4.1   Agence ferroviaire européenne

4.1.1

Art. 8 bis: d'une part, l'Agence élabore et met à jour un document de comparaison et d'équivalence des normes nationales pour chaque paramètre (paragraphe 2) et, de l'autre, elle émet des avis uniquement techniques sur:

l'équivalence des normes,

une demande d'information complémentaire,

la motivation d'un refus d'autorisation.

L'action de l'Agence serait plus efficace si ces avis avaient une force contraignante et s'ils pouvaient être demandés également par les acteurs intéressés: gestionnaires de l'infrastructure, entreprises ferroviaires, détenteurs de matériel roulant.

4.1.2

Art. 15: la mission de l'Agence devrait être étendue à tous les projets de renouvellement, de réaménagement ou de construction qui concernent les éléments d'infrastructure soumis aux STI, actuelles et à venir.

4.1.3

Art. 16 bis: il apparaît nécessaire de fournir à l'Agence des paramètres d'évaluation pour le choix entre le système «volontaire ou obligatoire» de certification, sur la base des éléments suivants:

les niveaux de sécurité,

la transparence des relations entre les entreprises,

la transparence du marché et la régulation.

Il y a lieu de souligner l'éventuel impact qu'aura le système de certification sur les entreprises ferroviaires détentrices de wagons.

4.1.4

Art. 18: il y a lieu d'insister sur le fait que, dans l'élaboration des formulaires pour la demande d'immatriculation, l'Agence fait en sorte de limiter le plus possible les spécifications non reprises dans les parties communes.

4.1.5

Art. 21 ter: le mandat semble complet par rapport aux objectifs poursuivis par l'Agence. Le principe de subsidiarité n'est pas préservé.

4.2   Interopérabilité

4.2.1

Art. premier: lorsqu'il est prévu d'étendre les STI à l'Espace économique européen, il convient de prévoir simultanément la reconnaissance des organismes nationaux de certification.

4.2.2

Art. 6: la liberté dont dispose l'Agence en matière de régime linguistique pour la publication des annexes techniques des STI, ne va pas dans le sens d'un accès facile et partagé à la législation communautaire sur l'interopérabilité.

4.2.3

Art. 7: le concept de dérogation semble particulièrement vaste, notamment en ce qui concerne les motifs économiques, dans la mesure où il ne prévoit pas une prise en compte de l'influence des financements communautaires sur l'analyse de faisabilité économique. Le système des dérogations s'appliquerait mieux à l'ensemble des STI relatives au projet examiné, qu'en qualité de dérogation à des STI considérées individuellement.

Bruxelles, le 11 juillet 2007.

Le président

du Comité économique et social européen

Dimitris DIMITRIADIS


27.10.2007   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 256/44


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil relative au transport intérieur des marchandises dangereuses»

COM(2006) 852 — 2006/0278 (COD)

(2007/C 256/09)

Le 19 janvier 2007, le Conseil de l'Union européenne a décidé, conformément aux articles 71 et 251 du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la proposition susmentionnée.

La section spécialisée «Transports, énergie, infrastructures, société de l'information», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 19 juin 2007 (rapporteur: M. Krzysztof OSTROWSKI).

Lors de sa 437e session plénière des 11 et 12 juillet 2007 (séance du 11 juillet 2007), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 136 voix pour avec 4 abstentions.

1.   Position du CESE

1.1

Le Comité accueille favorablement la proposition de directive de la Commission relative au transport intérieur des marchandises dangereuses, qui a pour objectif stratégique d'harmoniser le droit communautaire dans ce domaine. Une telle mesure doit aboutir à améliorer les conditions de sécurité en ce qui concerne le transport de ces marchandises.

1.2

La proposition de directive met à jour quatre directives existantes et quatre décisions de la Commission qui touchent au domaine du transport des marchandises dangereuses et les fusionne en un seul acte législatif, en étendant par la même occasion à la batellerie le champ d'application de ces règles communautaires, qui visaient à l'origine les transports par route et par chemin de fer.

1.3

Le Comité partage le point de vue de la Commission quand elle estime qu'il est difficile de prétendre mettre en place des conditions qui soient aussi sûres que possible pour le transport des marchandises dangereuses si l'on n'adopte pas une législation communautaire unique qui couvre tous les modes de transport intérieur (route, rail et batellerie).

1.4

Le Comité est d'accord avec la Commission pour dire qu'en harmonisant les règles en vigueur dans le domaine du transport par route et par chemin de fer des marchandises dangereuses sans pour autant modifier fondamentalement les dispositions existantes et en étendant à cette occasion le champ de la législation communautaire au transport par batellerie, on aboutit à une simplification significative des règles et des procédures administratives pour les pouvoirs publics comme les acteurs privés.

1.5

Adopter un acte législatif unique qui couvre les trois modes de transport intérieur et prévoir la possibilité que les annexes de la directive se réfèrent simplement aux conventions et accords internationaux sur le transport des marchandises dangereuses, au lieu de les reprendre textuellement comme c'est le cas aujourd'hui, induira une réduction significative du volume de l'acquis communautaire.

1.6

Le Comité estime que la forme juridique proposée pour l'adoption des nouvelles règles, à savoir le choix d'une directive, offre une bonne solution. Eu égard toutefois au large éventail d'exceptions et de latitudes qui sont prévues dans ce domaine pour les États membres, le Comité les appelle tous à coopérer le plus étroitement possible avec la Commission en la matière afin d'assurer que l'harmonisation de la réglementation soit effective.

1.7

Le Comité souhaite souligner qu'étant donné la minutie des dispositions du projet de texte qui portent sur les spécifications techniques en matière de transport des marchandises dangereuses ainsi que la typologie de celles-ci, il ne peut se référer qu'aux aspects de la proposition qui sont d'ordre plus général.

1.8

Le Comité est satisfait d'apprendre, d'après les informations données par la Commission, que le contenu de la proposition a été fortement influencé par les avis des États membres et des parties intéressées que sont les fédérations professionnelles représentant les entreprises actives dans le transport de marchandises dangereuses et que l'on a cherché, pendant la procédure de consultation, à arriver autant que possible à une position commune.

1.9

Le Comité se félicite de noter que la Commission continuera d'être assistée par un comité spécial de réglementation chargé des questions de transport des marchandises dangereuses, qui lui apportera son aide dans le cadre des procédures de comitologie.

1.10

Il se dit en outre satisfait que les fédérations professionnelles aient pu faire connaître leurs points de vue tout au long du processus d'élaboration de la proposition, grâce à la possibilité qui leur a été donnée d'assister aux réunions du comité de réglementation, et que, par ailleurs, les États membres de l'Association européenne de libre-échange (AELE) aient également été consultés et le Parlement européen informé en continu.

1.11

Le Comité apprécie que la Commission centrale pour la navigation du Rhin ait elle aussi été consultée, étant donné que ce fleuve concentre 80 % du transport de marchandises de ce type en Europe.

1.12

Le Comité prend également note des informations données par la Commission lorsqu'elle explique qu'en 2004-2005, des consultants extérieurs ont procédé à une évaluation de ce domaine d'action, sous le titre «Évaluation de la politique de l'UE relative au transport de produits dangereux depuis 1994», que l'exercice a confirmé la pertinence de l'approche présentée dans la proposition et qu'en outre, une grande majorité des personnes interrogées dans le cadre des consultations publiques se sont prononcées en faveur des mesures proposées par la Commission.

1.13

Sur la question du transfert vers les États membres de la charge qui était assumée jusqu'à présent par la Communauté et consiste à traduire et à publier, lorsque nécessaire, les annexes techniques de la directive, le Comité estime qu'il serait très souhaitable que la Commission accorde un soutien financier pour la réalisation de ces traductions au niveau national.

1.14

À la lumière des considérations qui précèdent, le Comité est convaincu qu'il est opportun de soutenir la proposition présentée par la Commission, laquelle a été élaborée par des experts de haut niveau dans le domaine du transport intérieur des marchandises dangereuses issus de différents États membres.

1.15

Le Comité souhaiterait toutefois attirer l'attention sur un certain nombre de points qui demanderaient, selon lui, à être encore précisés ou éclaircis: ils portent en l'occurrence sur l'absence de définition de l'expression même «marchandises dangereuses» aux fins de la directive; sur le droit qui est donné aux États membres d'interdire le transport de marchandises dangereuses sur leur territoire, pour des raisons exclusivement autres que la sécurité de cet acheminement, ainsi que sur l'absence totale d'informations dans les annexes III.2 et III.3.

Les remarques du Comité sur ces questions sont présentées dans la partie «Observations particulières».

2.   Principaux éléments de la proposition

2.1

Le transport intérieur de marchandises dangereuses (produits chimiques, produits de nettoyage, essence, explosifs, cartouches pour armes de petit calibre, aérosols, matières radioactives, pesticides, etc.) s'accompagne d'un risque notable d'accident. Le constat vaut pour tous les modes de transport, qu'il s'agisse de la route, du rail ou des voies navigables. Il met en péril la santé et la vie des personnes qui participent à cet acheminement mais aussi de vastes populations citadines et rurales.

2.2

Des actions ont déjà été entreprises en vue d'assurer que les conditions de transport de ce type de marchandises soient les plus sûres possibles. À l'heure actuelle, le transport international de marchandises dangereuses est régi par les conventions et accords internationaux conclus sur la base des recommandations de l'Organisation des Nations unies (ONU). Pour garantir la sécurité des transports de marchandises dangereuses tout en assurant la libre circulation et l'intermodalité dans les services de transports internationaux, les Nations unies ont élaboré et actualisé un document établissant des «Recommandations relatives au transport des marchandises dangereuses» qu'elles présentent sous la forme d'un «règlement type».

2.3

S'il importe de réglementer le transport de marchandises dangereuses, c'est en raison non seulement des caractéristiques propres à ces marchandises mais également des volumes qui en sont acheminés. La masse totale des marchandises dangereuses transportées dans l'Union européenne s'élève déjà à 110 milliards de tonnes-km/an, ce qui représente environ 8 % du trafic de marchandises dans l'UE. Ce transport s'effectue pour 58 % par route, 25 % par rail et 17 % par les voies navigables et exception faite de la voie ferrée, il présente une tendance à l'augmentation.

2.4

En Europe, les prescriptions des accords internationaux dans le secteur du transport intérieur ont été mises en œuvre au moyen de trois instruments:

a)

l'ADR ou «accord européen relatif au transport international des marchandises dangereuses par route», qui a été conclu le 30 septembre 1957 à Genève, avec des modifications ultérieures,

b)

le RID, ou «règlement concernant le transport international ferroviaire des marchandises dangereuses», qui constitue l'appendice C de la convention relative aux transports internationaux ferroviaire (COTIF). Il a été arrêté le 3 juin 1999 à Vilnius et a été modifié ultérieurement,

c)

l'ADN, ou «accord européen relatif au transport international des marchandises dangereuses par voies de navigation intérieure», qui a été conclu le 26 mai 2000 à Genève, avec des modifications ultérieures.

2.5

La législation de l'Union européenne en matière de transport intérieur des marchandises dangereuses ne s'applique cependant qu'au trafic routier et ferroviaire. Pour ces deux modes de transport, les dispositions législatives en vigueur garantissent déjà un haut niveau de sécurité, la libre prestation des services en la matière et la libre circulation des moyens de transport sur le territoire de l'Union européenne. Le droit communautaire qui régit ce domaine comprend quatre actes législatifs. Il s'agit de:

a)

la directive 94/55/CE du Conseil, du 21 novembre 1994, relative au rapprochement des législations des États membres concernant le transport des marchandises dangereuses par route,

b)

la directive 96/49/CE du Conseil du 23 juillet 1996 relative au rapprochement des législations des États membres concernant le transport de marchandises dangereuses par chemin de fer,

c)

la directive 96/35/CE du Conseil du 3 juin 1996 concernant la désignation ainsi que la qualification professionnelle de conseillers à la sécurité pour le transport par route, par rail ou par voie navigable de marchandises dangereuses,

d)

la directive 2000/18/CE du Parlement européen et du Conseil du 17 avril 2000 relative aux exigences minimales applicables à l'examen des conseillers à la sécurité pour le transport par route, par rail ou par voie navigable de marchandises dangereuses.

2.6

Il n'existe en revanche aucune règle communautaire qui régisse le transport des marchandises dangereuses par les voies navigables intérieures. En ce qui concerne le transport des marchandises dangereuses par batellerie, il existe certes deux ensembles de prescriptions gouvernant ce trafic sur le Rhin (ADN-R) et le Danube (ADN-D), mais il s'agit de dispositifs régionaux. Il faut encore y ajouter les dispositions nationales sur les transports domestiques. L'absence de réglementation dans ce domaine s'explique notamment par la non-signature de l'ADN. La proposition de directive du Parlement européen et du Conseil que la Commission avait présentée en 1997 sur le rapprochement des législations des États membres concernant le transport de marchandises dangereuses par la batellerie n'a pour sa part pas été adoptée et a été retirée en 2004.

2.7

Toutefois, l'accord relatif au transport par voies de navigation intérieure est maintenant en cours de ratification et il est prévu qu'il entre en vigueur au plus tard en 2009. Compte tenu de cet état de choses, le Comité s'accorde avec la Commission à penser qu'il est logique d'incorporer le transport par batellerie dans le droit communautaire, ne fût-ce que dans un souci d'harmonisation. Ces circonstances fournissent également l'occasion d'actualiser et d'harmoniser les dispositions législatives en vigueur. Par ailleurs, il serait inopportun de laisser se créer deux régimes de réglementation différents, l'un pour les transports internationaux et l'autre pour les transports nationaux. Un autre motif qui justifie des modifications réside dans la complexité assez forte que présente la législation de l'Union européenne qui régit aujourd'hui le transport des marchandises dangereuses. Les actes législatifs relatifs à tel ou tel mode de transport présentent des incohérences et certaines de leurs dispositions sont déjà obsolètes, ou le deviendront bientôt. Par exemple, deux directives peuvent aujourd'hui être considérées comme superflues, étant donné que leurs dispositions ont été incorporées dans l'ADR, le RID et l'ADN. Il se pose également un problème d'ordre technique lié à la structure actuelle des directives existantes. Tous les deux ans en effet, à chaque révision des conventions et accords internationaux, leurs volumineuses annexes doivent, aux termes des directives, être traduites dans leur intégralité. La réalisation de cette opération s'avère extrêmement ardue et coûteuse.

2.8

D'après les informations produites par la Commission, les problèmes susmentionnés ne disparaîtront pas mais risquent même de s'aggraver si rien n'est fait en la matière. Selon toute vraisemblance, les règles qui sont déjà complexes à l'heure actuelle le deviendront encore davantage à chaque modification des conventions et accords internationaux, on laissera subsister des prescriptions obsolètes, qui seront une source de confusion pour les utilisateurs, et des dispositions contraignantes risqueront de plus en plus d'être enfreintes. Au lieu de devenir plus conviviales pour leurs utilisateurs, les réglementations de l'Union européenne risquent de devenir totalement opaques. Dans le contexte d'un recours accru aux approches multimodales, l'existence de règles différentes pour chaque mode de transport risque d'alourdir les problèmes concrets qui se posent au quotidien en matière de transports et d'augmenter inutilement les coûts qui s'y rapportent. De même, s'il devait être régi par des règles différentes selon que le transport concerné est international ou national, le secteur de la batellerie sera entravé dans son développement, alors que dans l'hypothèse inverse, il devrait être dans bien des cas le mode de transport préféré, comme le montrent les données statistiques.

2.9

C'est pour ces raisons qu'il est proposé d'arrêter une nouvelle directive qui mettra à jour les quatre directives et les quatre décisions de la Commission relatives au transport des marchandises dangereuses par route et par chemin de fer en les fusionnant en un seul acte législatif, les trois modes de transport intérieur étant régis globalement par un seul texte juridique, et en incluant le transport batelier dans le champ d'application des règles communautaires.

2.10

La nouvelle directive devrait amener à l'abrogation des directives 94/55/CE et 96/49/CE, telles que modifiées, concernant le transport des marchandises dangereuses, des directives 96/35/CE et 2000/18/CE concernant les conseillers à la sécurité pour les marchandises dangereuses, et des décisions 2005/263/CE et 2005/180/CE de la Commission, telles que modifiées, autorisant certaines dérogations nationales aux directives 94/55/CE et 96/49/CE. On se doit d'ajouter ici que les dispositions des directives 96/35/CE et 2000/18/CE sont actuellement reprises dans les annexes des directives 94/55/CE et 96/49/CE, ce qui les rend sans objet pour les transports routiers et ferroviaires.

2.11

La proposition intègre dans le droit communautaire les règles existantes en matière de transport international et étend l'application des règles internationales au transport national. Elle détermine ainsi une simplification substantielle du droit communautaire dans le domaine du transport des marchandises dangereuses, alors même qu'elle en étend le champ d'application.

2.12

La proposition vise également à reporter sur les États membres une charge que la Communauté, en l'occurrence la Commission, avait assumée jusqu'à présent, à savoir l'obligation de traduire et publier les annexes techniques de la directive. Une des principales raisons qui expliquent cette démarche est que les traductions réalisées au niveau communautaire n'étaient pas toujours de très bonne qualité et que, dans les faits, les États membres étaient de toute façon contraints d'effectuer leurs propres traductions ou éventuellement de procéder à des corrections. Les annexes sont mises à jour tous les deux ans. Dans cette perspective, la Commission devra donc accorder un soutien financier pour la réalisation de ces traductions au niveau national. Elle est toutefois convaincue que l'aide ainsi octroyée aux États membres sera plus que compensée par les économies que la Communauté pourra réaliser en termes de coûts de traduction et de publication.

2.13

La proposition entend instaurer un système grâce auquel les annexes de la directive se borneront à faire référence aux conventions et accords internationaux sur le transport des marchandises dangereuses au lieu de les reprendre textuellement, comme c'est le cas à l'heure actuelle. Il est prévu que cette mesure aboutira à réduire le volume de l'acquis communautaire de quelque 2 000 pages.

2.14

La simplification de la législation communautaire devrait faciliter sa transposition en droit national. Si les règles régissant le transport des marchandises dangereuses étaient harmonisées, le travail des autorités chargées de les mettre en œuvre, se trouverait facilité et gagnerait en efficacité, notamment en ce qui concerne l'élaboration de rapports.

2.15

L'existence de règles simplifiées et harmonisées allégerait les procédures administratives pour toutes les parties prenantes du transport de marchandises dangereuses, de l'expéditeur au destinataire.

2.16

Avec des règles harmonisées, il deviendrait également plus aisé d'établir les documents concernant les opérations et les véhicules de transport, tout comme seraient simplifiés la formation des personnes concernées et le travail des conseillers à la sécurité pour le transport des marchandises dangereuses.

2.17

La proposition est reprise dans le programme glissant de la Commission pour la mise à jour et la simplification de l'acquis communautaire, ainsi que dans son programme législatif et de travail.

3.   Observations particulières

Le Comité souhaiterait attirer ici l'attention sur quelques points, au sujet desquels il émet certaines réserves:

3.1

Premièrement, la proposition intitulée «directive du Parlement européen et du Conseil relative au transport intérieur de marchandises dangereuses» précise, dans le chapitre qu'elle consacre aux définitions, l'acception qui est donnée à divers termes ou expressions (par exemple ADR, RID, ADN, véhicule, wagon, bateau) au sens de la directive envisagée. Elle ne donne toutefois pas d'indications sur la manière dont il faut entendre la notion même de «marchandises dangereuses». La chose est sans conteste malaisée, étant donné qu'il existe quantité de types de marchandises et que cette liste s'allonge sans cesse avec le progrès technique. Le Comité est toutefois d'avis que le texte devrait contenir des indications quant à la manière dont il faut entendre le concept de «marchandises dangereuses» au sens de la directive.

3.2

Deuxièmement, le projet de directive donne aux États membres le droit de réglementer ou d'interdire, pour des raisons exclusivement autres que sa sécurité, le transport de marchandises dangereuses sur leur territoire. Bien qu'il conçoive les motifs qui ont conduit à accorder aux États membres ce droit de réglementation, voire d'interdiction, le Comité ne comprend pas sur quelles bases s'appuie la proposition pour leur donner le droit d'agir «pour des raisons autres que la sécurité du transport uniquement». Il estime que dans le cas de la proposition à l'examen, dont le but est de renforcer la sécurité du transport des marchandises dangereuses, la formulation proposée a pour implication qu'un État membre ne pourra pas interdire le transport de marchandises dangereuses sur son territoire pour des raisons qui seraient justement liées à la sécurité dudit transport: cette position ne semble pas logique. Par ailleurs, le Comité ne voit pas clairement de quelle manière on pourrait assurer la coordination de ces interdictions concernant le transport transfrontalier, dans le cas où les États membres adopteraient des types différents d'interdictions.

3.3

Troisièmement, les points III.2 et III.3 de la troisième annexe (transport par voie navigable), ne comportent aucune information concernant les dispositions transitoires supplémentaires et les dispositions nationales supplémentaires qui sont prévues. De ce fait, le Comité demande qu'il soit précisé s'il n'est réellement prévu aucune mesure de ce genre ou si elles sont simplement en cours d'élaboration.

Bruxelles, le 11 juillet 2007.

Le Président

du Comité économique et social européen

Dimitris DIMITRIADIS


27.10.2007   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 256/47


Avis du Comité économique et social européen sur le «Livre vert sur les applications de la navigation par satellite»

COM(2006) 769 final

(2007/C 256/10)

Le 8 décembre 2006, la Commission européenne a décidé, conformément à l'article 262 du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur le «Livre Vert sur les applications de navigation par satellite».

La section spécialisée «Transports, énergie, infrastructures, société de l'information», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 19 juin 2007 (rapporteur: M. BUFFETAUT).

Lors de sa 437e session plénière des 11 et 12 juillet 2007 (séance du 11 juillet 2007), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 134 voix pour et 5 abstentions.

1.   Introduction

1.1

Galileo est le programme phare de la politique spatiale européenne. L'ampleur du projet et son caractère stratégique ont conduit l'Agence spatiale européenne (ESA) à travailler de concert avec l'Union européenne. Ainsi culture intergouvernementale et culture communautaire devraient-elles concourir au succès de l'entreprise. Dans le même esprit de coopération le projet devrait être mis en œuvre sous la forme d'un partenariat public/privé.

1.2

Le premier satellite expérimental, précurseur des futurs satellites de la constellation qui en comportera trente, a été mis sur orbite à la fin de 2005 et le développement du projet suit donc son cours, mais non sans difficulté ni sans retard.

1.3

Galileo constituera un système mondial de navigation par satellite qui offrira une série de services de positionnement, de navigation et de datation.

1.4

Galileo avec ses trente satellites et ses stations terriennes permettra de fournir des informations concernant leur position géographique aux usagers de nombreux secteurs de la vie économique tels que le transport (localisation de véhicules, de navires, d'aéronefs, systèmes de guidage, recherche d'itinéraire, etc.), la justice, la police et les douanes (contrôle des frontières), les travaux publics (topographie, géodésie et systèmes d'information géographique), les loisirs (orientation en mer et en montagne), les services sociaux (par exemple aide aux handicapés ou aux personnes âgées), les services gouvernementaux de sûreté, et enfin, grâce au service de localisation de balises de détresse, au sauvetage de personnes en haute mer ou dans des régions isolées de notre globe.

1.5

Selon certaines prévisions, le marché des produits et des services nés des applications de navigation par satellite devrait représenter 400 milliards d'euros d'ici à 2025.

1.6

Aujourd'hui, les négociations du contrat de concession sont au point mort, tant est profond le désaccord des divers partenaires sur le modèle économique de Galileo et sur la gouvernance du consortium industriel. La situation est telle que les retards accumulés et l'absence de progrès dans les négociations constituent un risque pour le projet lui-même.

1.7

Face à ces difficultés, le Conseil transport du mois de mars avait demandé à la Commission Européenne de faire le point sur l'état de la négociation du contrat de concession et d'étudier d'éventuelles solutions alternatives. Celle-ci, dans sa communication «Galileo à la croisée des chemins», et devant cette situation de blocage, invite le Conseil et le Parlement européen à prendre acte de l'échec des négociations actuelles du contrat de concession et à décider d'y mettre fin. Mais, dans le même temps, elle leur demande de réaffirmer leur volonté de mettre en place et de poursuivre le programme Galileo. Elle propose la mise en œuvre d'un scénario alternatif dans lequel les phases de développement et de déploiement seraient supportées et financées par la puissance publique, tandis que le contrat de concession ne porterait plus que sur l'exploitation. L'Agence spatiale européenne serait le maître d'œuvre et le pouvoir adjudicataire pour le compte de l'Union européenne.

2.   Le contenu du Livre vert

2.1

Le texte de la Commission comporte, d'une part, une rapide description du système mis en place et de ses évolutions prévisibles et, d'autre part, l'innovation des diverses applications possibles, en rappelant que seront proposés cinq types de services (le service ouvert, le service commercial, le service «sauvegarde de la vie», le service de recherche et de sauvetage et le service gouvernemental à accès réservé PRS). Le livre vert n'aborde pas les applications relevant de ce dernier service, qui relèvent du souhait des États membres de l'utiliser ou non. Chaque État membre est donc interrogé directement sur ce sujet par la Commission, qui compilera les réponses et en fera une synthèse.

2.2

Les types d'activités concernées et potentiellement intéressées, listées par la Commission sont:

l'information sur la position géographique (pour le grand public) et les appels d'urgence,

le transport routier,

les transports ferroviaires,

la navigation maritime et fluviale et la pêche,

le transport aérien,

la protection civile, la gestion des situations d'urgence et l'aide humanitaire,

le suivi de marchandises dangereuses,

le transport du bétail,

l'agriculture, le mesurage des parcelles, la géodésie et le cadastre,

l'énergie, le pétrole et le gaz,

le service de recherche et de sauvetage,

la logistique,

l'environnement,

le sport et le tourisme,

le maintien de l'ordre.

2.3

L'aspect «liste à la Prévert» des applications possibles souligne en fait l'ampleur et la grande diversité des applications possibles.

2.4

Le Livre vert se conclut, comme de coutume, par une liste de questions en direction des parties intéressées. Il n'appartient pas au CESE d'y répondre précisément mais plutôt de souligner celles qui lui paraissent particulièrement importantes et d'évoquer celles qui auraient dû être posées et ne l'ont pas été.

2.5

La Commission effectue l'analyse des réponses au Livre vert qu'elle a reçu de la part des parties intéressées. Celles-ci sont assez peu nombreuses et parfois trop générales pour pouvoir en tirer partie. Elle va donc compléter la consultation en engageant des consultations approfondies afin de publier un plan d'action en octobre 2007. Jusqu'à présent aucun grand secteur économique n'a réellement manifesté d'intérêt pour les services payants. On perçoit bien là toute la difficulté d'être en concurrence avec un service ouvert gratuitement au public, même si celui-ci n'est pas garanti. Ceci pose donc la question de l'équilibre économique et financier du système européen, service de nature civile et ne disposant pas du même soutien public (en l'espèce militaire) que le GPS américain.

3.   Des questions majeures

3.1

La question 2 (1), relative à la protection de la vie privée revêt une importance particulière, à laquelle le CESE a déjà attaché une grande attention en demandant que le principe du respect de la vie privée soit très strictement protégé. Se pose ici la question de l'équilibre entre le droit à la protection de la vie privée et les possibilités offertes par la technique. Il faut toutefois souligner que les systèmes de positionnement/navigation par satellite permettent aux utilisateurs de déterminer leur position, mais que cette position n'est connue que d'eux-mêmes et n'est pas disponible pour des tiers, sauf si l'utilisateur décide de la communiquer, par exemple par un moyen de télécommunication mobile de type GSM. Du fait que ces systèmes fonctionnent à sens unique, l'opérateur d'un système de navigation, que ce soit GPS, Galileo, ou encore le GLONASS russe, ne connait pas les utilisateurs et n'a aucun moyen de savoir qui utilise les signaux de navigation, et encore moins leur position géographique. De ce fait, la question de la protection de la vie privée est à examiner au niveau des services individuels d'application qui seront proposés aux utilisateurs. Beaucoup de ces services nécessitent en effet de renvoyer la position géographique instantanée de l'utilisateur vers un serveur qui peut alors communiquer l'information demandée par celui-ci (par exemple une information relative au trafic routier).

3.2

La question 5 (2), relative à la coopération internationale soulève des interrogations. Des accords de coopération ont été signés par l'Union européenne avec la Chine, Israël, la Corée du Sud, le Maroc et l'Ukraine, et d'autres accords sont envisagés avec l'Inde, le Brésil, l'Argentine et l'Australie. S'il est évident que ces accords de coopération sont souhaitables afin de renforcer l'assiette internationale de Galileo, notamment pour des questions de standardisation, d'ouverture des marchés, d'agrément et de fréquences ainsi que pour les droits de propriété intellectuelle, il convient cependant de rester vigilent car certains partenaires ont pour motivation principale d'acquérir la connaissance et le savoir-faire européen afin de gagner du temps pour développer une technologie propre qui deviendrait alors concurrente de celle de Galileo. Il est tout à fait clair aujourd'hui que telle était bien la motivation de la Chine dans la signature en 2003, de son accord de coopération sur Galileo avec l'Union européenne. Par ailleurs, il est surprenant de constater que ni la Norvège, ni la Suisse n'ont encore d'accord en place avec l'Union européenne encadrant leur coopération sur Galileo alors même qu'ils financent la phase de développement/validation du programme à travers leur participation via l'agence spatiale européenne. De ce fait la question de leur éventuel accès au service PRS de Galileo n'est pas réglée.

3.3

En tout état de cause, et d'une façon générale, les coopérations engagées ne concernaient pas le service gouvernemental à accès réservé. De surcroît, les négociations en matière de coopération internationale se sont ralenties car la priorité qui s'est imposée est la mise en œuvre effective du projet européen de navigation par satellite, phénomène révélateur des difficultés rencontrées.

3.4

Les questions 6 et 7 (3) sur les normes et agrément posent en fait le problème de la certification des équipements et du système lui-même et des terminaux de navigation embarqués. Cette question est particulièrement sensible pour le transport aérien, comme pour le transport ferroviaire, deux secteurs où les équipements de sécurité et de signalisation sont soumis à une procédure rigoureuse de certification reconnue sur le plan international. La certification du système Galileo lui-même n'a de sens que vis-à-vis d'un secteur d'application particulier, par exemple l'aviation civile, qui définit des normes et les procédures de certification applicables. La certification des terminaux et équipements embarqués à bord des engins mobiles qui utilisent les services de Galileo implique beaucoup plus que le seul terminal de positionnement, mais aussi tous les autres équipements qui exploitent l'information de position et délivrent in fine l'information élaborée au pilote ou au commandant de bord. Les procédures de certification habituelles, propres à l'application, s'appliquent alors. Ainsi la question doit être traitée pour chaque application particulière.

3.5

L'autre aspect de la question, qui est celui de la responsabilité, n'est qu'esquissé alors qu'elle revêt une importance considérable. Il faut reconnaître qu'elle est d'une particulière complexité. Il convient d'envisager les questions de responsabilité contractuelle, relativement simples, mais encore celles de la responsabilité extra contractuelle, beaucoup plus difficiles à traiter. En outre il faut considérer que le niveau de responsabilité peut varier selon que l'on se trouve dans le cadre du service ouvert, du service commercial ou du service gouvernemental. La Commission européenne réfléchit à un schéma proche de celui de l'aviation civile, c'est-à-dire la couverture jusqu'à un certain montant par les assurances puis par les pouvoirs publics. La question essentielle dans ce cas est celle de la fixation du seuil de déclanchement de la couverture publique du risque. Le seuil envisagé aujourd'hui est élevé, autour d'un milliard d'euros.

3.6

Jusqu'à quel niveau le fournisseur de signal garantit-il la performance? La question est d'une acuité particulière en matière de transport aérien, de transport ferroviaire ou encore de transport maritime.

3.7

Si, par exemple, une mauvaise qualité de signal était à l'origine d'une catastrophe aérienne ou d'un naufrage, provoquant peut-être une marée noire, qui devrait supporter la responsabilité et dans quelle proportion? Il convient ici de distinguer d'une part la responsabilité contractuelle et d'autre part la responsabilité extracontractuelle.

3.8

L'opérateur du système Galileo doit-il supporter la totalité de la responsabilité ou la partager avec les États? Et quels États? L'État de lancement, l'Union européenne, les États participant au projet Galileo? Ces questions méritent d'être abordées et traitées pour que les applications commerciales de Galileo puissent se développer dans un cadre juridique satisfaisant et sûr.

3.9

Il existe des précédents. Par exemple ARIANE. Le risque de dommages causé aux tiers né d'un lancement est supporté jusqu'à 100 millions d'euros par ARIANESPACE, puis supporté au-delà de ce montant par l'État français. Il existe des partages du risque semblables entre les opérateurs commerciaux et les États dans le domaine de l'aviation civile, qui pourraient peut-être s'appliquer à Galileo. Toutefois, le point délicat reste celui de s'entendre sur la position du curseur: quel est le partage adéquat entre la puissance publique et l'opérateur, surtout lorsqu'il s'agit d'un service nouveau?

3.10

Un système inspiré de celui-ci, pour le programme Galileo implique évidemment de définir clairement quelle autorité publique serait à même de partager la responsabilité avec l'opérateur de Galileo.

3.11

La question 9 (4) sur la propriété intellectuelle est importante. Même si des institutions publiques financent la recherche initiale, il serait important que la propriété intellectuelle des développements soit acquise aux entreprises, notamment les PME, qui les mettent au point et les mettent en œuvre.

3.12

Il convient enfin de s'interroger sur l'aspect de l'usage militaire de Galileo. À l'inverse de GPS, système militaire ouvert discrétionnairement au civil, Galileo est un système civil. Comme c'est le cas pour le signal civil de GPS, rien n'empêche les forces armées d'un pays quelconque d'utiliser le service ouvert de Galileo pour une utilisation militaire alors que l'utilisation du service gouvernemental à accès réservé, dont l'accès est précisément réglementé par les États membres de l'Union européenne, présente des avantages de meilleure robustesse au brouillage et d'indépendance par rapport aux autres services fournis par Galileo (les bandes de fréquences utilisées ne sont pas les mêmes).

3.13

Sans vouloir s'engager dans le débat sur les différents types d'utilisation militaire du signal PRS de Galileo, qui déborderait largement du cadre de cet avis et n'est pas abordé dans le Livre vert, il reste que l'équilibre économique de l'exploitation de Galileo en dépend en partie. Dans la nouvelle configuration du projet Galileo tel qu'il a été proposé par la Commission, il ne fait pas de doute que ce point sera encore discuté. Au demeurant, dans sa communication, la Commission note que «sans remettre en cause le caractère civil du système, il faut admettre que des recettes substantielles peuvent être générées par les utilisateurs militaires».

4.   Conclusion

4.1

Le Livre vert sur les applications de la navigation satellite passe en revue bien des secteurs d'activité effectivement concernés par elle. Il demande à être complété sur des questions très importantes comme la propriété intellectuelle de procédés susceptibles d'ouvrir de nouveaux champs d'application, les questions de certification et le régime de responsabilité.

4.2

La question de l'usage gouvernemental ou même militaire de Galileo par les États membres de l'Union européenne, qui est traitée à travers un dialogue direct entre la Commission et les États membres et entre les États membres eux-mêmes au sein du Galileo security board, est importante dans la mesure où elle a un impact significatif sur le modèle économique de Galileo. Il apparait clairement que cette question devra être à nouveau abordée et cela d'autant plus que la contribution publique est appelée à augmenter sensiblement du fait de l'échec du premier schéma de partenariat public/privé.

4.3

Enfin s'interroger sur les applications de la navigation par satellite est fort utile et intéressant, encore faudrait-il être sûr que la mise en place de la constellation aille à sont terme. Les nouvelles propositions de la Commission constituent une dernière chance pour le projet Galileo. Le CESE est bien conscient des efforts financiers qu'elles impliquent pour les États membres mais, dans une période où l'Union européenne se heurte à un certain scepticisme de la part des peuples d'Europe, une forme de «désamour» révélé par les débats sur le projet de traité constitutionnel, l'abandon du programme Galileo aurait un effet désastreux en Europe et hors d'Europe. Un tel échec manifesterait au monde l'incapacité de l'Union européenne à se mobiliser autour d'un projet de haute portée scientifique, technique et économique. Il est essentiel de mener Galileo à son terme et de prouver ainsi la faculté de rebond de l'Union européenne et sa capacité à mener à bien de grands projets d'avenir.

4.4

La réalité est que, pour ces raisons, le projet Galileo traverse une passe difficile. Le CESE ne peut qu'affirmer qu'un éventuel échec de ce projet phare pour l'Union européenne constituerait un élément grave de perte de confiance des citoyens envers la construction européenne et que tout doit être fait pour l'éviter.

Bruxelles, le 11 juillet 2007.

Le Président

du Comité économique et social européen

Dimitris DIMITRIADIS


(1)  COM(2006) 769, par. 4.

(2)  COM(2006) 769, par. 5.3.

(3)  COM(2006) 769, par. 5.4.

(4)  COM(2006) 769, par. 5.6.


27.10.2007   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 256/51


Avis du Comité économique et social européen sur la «Communication de la Commission au Conseil et au Parlement européen — Programme indicatif nucléaire, présenté pour avis au Comité économique et social européen, sur la base de l'article 40 du traité Euratom»

COM(2006) 844 final

(2007/C 256/11)

Le 10 janvier 2007, la Commission européenne a décidé, conformément à l'article 40 du traité Euratom, de consulter le Comité économique et social européen sur la proposition susmentionnée.

La section spécialisée «Transports, énergie, infrastructures, société de l'information», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a élaboré son avis le 19 juin 2007 (rapporteuse: Mme SIRKEINEN).

Lors de sa 437e session plénière des 11 et 12 juillet 2007 (séance du 12 juillet 2007), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 81 voix pour, 28 voix contre et 15 abstentions.

1.   Résumé

1.1

En 2004, le CESE suggérait dans son avis sur «Les enjeux du nucléaire pour la production d'électricité» qu'«un effort d'information des véritables enjeux de l'industrie nucléaire: sécurité d'approvisionnement, non-émission de CO2, prix compétitifs, sûreté et gestion des combustibles usés soit envisagé et conduit pour permettre à la société civile organisée d'analyser de façon critique le contenu des débats qui lui sont proposés sur ces questions». Le nouveau programme indicatif nucléaire pour la Communauté (PINC) fournit cette information. Le CESE approuve dans une large mesure l'analyse et la description présentées dans la communication de la Commission. La plupart des aspects essentiels de l'énergie nucléaire sont abordés et, aux yeux du Comité, correctement décrits. Le Comité met en outre le doigt sur certains aspects du nucléaire qu'il convient de prendre en considération.

1.2

Le nucléaire, qui représentait 31 % de l'électricité et 15 % de toute la consommation d'énergie primaire dans l'UE en 2004, joue un rôle crucial sur le marché de l'énergie. Il répond par ailleurs tout à fait aux objectifs de la politique énergétique de l'UE. Le coût de l'énergie nucléaire est aujourd'hui clairement compétitif. La dépendance extérieure est faible et les sources de combustible sont diversifiées et sûres, ce qui répond aux exigences en matière de sécurité d'approvisionnement. L'énergie nucléaire représente actuellement la plus grande source d'énergie exempte essentiellement de dioxyde de carbone en Europe.

1.3

Suite à la décision du Conseil européen sur les objectifs en matière d'émissions de gaz à effet de serre pour 2020 et au-delà, il est évident que toutes les capacités supplémentaires de production électrique à faible émission de carbone, qu'il s'agisse des énergies renouvelables, du nucléaire ou du charbon potentiellement propre, devraient se substituer aux capacités émettrices de CO2 et accroître ainsi le total de l'électricité à faible émission de carbone. Concrètement, si la part actuelle de l'énergie nucléaire n'est pas au moins maintenue jusqu'à ce que de nouvelles solutions énergétiques soient disponibles, les objectifs relatifs au climat et aux autres volets de la politique énergétique ne pourront être atteints.

1.4

Le CESE souligne le rôle toujours central incombant à l'échelon communautaire dans la mise au point du cadre le plus avancé pour l'énergie nucléaire dans les États membres qui choisissent le nucléaire, conformément aux normes les plus strictes en matière de sûreté, de sécurité et de non-prolifération, comme l'exige le traité Euratom.

1.5

La tâche la plus importante est de trouver une solution à la question des déchets radioactifs, en particulier l'élimination définitive des combustibles nucléaires usés, pour laquelle la technologie existe mais les décisions politiques font défaut. Le CESE épouse également les vues de la Commission au sujet des autres questions qui nécessitent toujours une attention à l'échelon de l'UE: la sûreté nucléaire et la radioprotection, qui sont excellentes en Europe, ainsi que l'assurance du financement à long terme du démantèlement.

1.6

Le CESE attire l'attention sur certains aspects supplémentaires du nucléaire qui ne sont pas couverts par le projet de PINC. Il s'agit de la menace du terrorisme et, dans certaines centrales, de la question de la disponibilité suffisante d'eau de refroidissement.

1.7

L'attractivité du secteur, à la fois en tant qu'employeur et que sujet de recherche, peut s'avérer être une source de préoccupation pour les États membres qui entendent continuer de miser sur l'énergie nucléaire. Le CESE partage l'avis de la Commission selon lequel l'expertise en matière de protection radiologique et de technologie nucléaire est fondamentale pour l'UE, et qu'il convient dès lors de se pencher sur l'éducation, la formation et la recherche dans ces secteurs.

1.8

Pour terminer, le CESE souligne le droit de chaque État membre de choisir son propre bouquet énergétique, y compris l'utilisation du nucléaire, comme mentionné dans le PINC.

2.   Introduction

2.1

Conformément à l'article 40 du traité Euratom, la Commission européenne «publie périodiquement des programmes de caractère indicatif portant notamment sur des objectifs de production d'énergie nucléaire et sur les investissements de toute nature qu'implique leur réalisation. La Commission demande l'avis du Comité économique et social sur ces programmes, préalablement à leur publication». Depuis 1958, quatre programmes indicatifs et une mise à jour ont été publiés, la dernière fois en 1997.

2.2

La Commission a publié l'actuel projet de programme indicatif nucléaire pour la Communauté (PINC) le 10 janvier 2007, dans le contexte du paquet énergie et climat, intitulé «Une politique énergétique pour l'Europe». La version finale sera élaborée et publiée dès que la Commission aura reçu l'avis du CESE.

2.3

Les autres volets du paquet concernent d'abord une proposition d'objectifs relatifs aux changements climatiques: réduire de 30 % les gaz à effet de serre dans les pays développés d'ici 2020, par rapport aux niveaux de 1990, ou en tous cas de 20 % pour l'UE seule. Le paquet couvre en outre le marché intérieur du gaz et de l'électricité, les interconnexions des réseaux d'électricité et de gaz, des propositions visant à promouvoir une production électrique durable à partir des combustibles fossiles. Il contient une feuille de route pour la promotion des énergies renouvelables, y compris un objectif contraignant, soit une proportion de 20 % d'énergies renouvelables dans le bouquet énergétique global de l'UE d'ici 2020 et des économies d'énergie en vue d'une augmentation de 20 % de l'efficacité énergétique d'ici 2020, ainsi qu'un futur plan stratégique européen pour les technologies énergétiques. Le Conseil européen du 9 mars 2007 a appuyé les objectifs et les principaux contenus politiques du paquet.

2.4

Le CESE a rédigé des avis au sujet de chaque PINC, comme l'exige le traité. Il a également abordé l'énergie nucléaire dans plusieurs de ses avis, en particulier récemment dans l'avis d'initiative sur le rôle du nucléaire, en 2004, où l'on peut lire dans les conclusions: «Le Comité considère que le nucléaire devrait constituer un des éléments d'une politique énergétique diversifiée, équilibrée, économique et durable au sein de l'UE. Compte tenu des questions qu'il pose, il ne saurait être envisagé de tout miser sur le nucléaire, mais, à l'opposé, le Comité estime que son abandon partiel ou total compromettrait les chances de respecter les engagements de l'Union vis-à-vis de la question climatique».

3.   Le document de la Commission

3.1

Le document de la Commission passe en revue les investissements réalisés au cours des dix dernières années dans l'énergie nucléaire, décrit les conditions économiques de la production d'électricité nucléaire, ses conséquences sur le bouquet énergétique ainsi que les conditions d'une acceptation sociale. Le contenu est décrit de manière plus détaillée ci-dessous.

3.2

Il appartient à chaque État membre de décider s'il entend s'appuyer ou non sur l'énergie nucléaire pour produire de l'électricité. La France et la Finlande ont récemment pris la décision de développer le nucléaire. Aux Pays-Bas, en Pologne, en Suède, en République tchèque, en Lituanie, en Estonie, en Lettonie, en Slovaquie, au Royaume-Uni, en Bulgarie et en Roumanie, un débat a été relancé au sujet de la politique de l'énergie nucléaire. L'Allemagne, l'Espagne et la Belgique poursuivent, malgré les débats en cours, leurs politiques d'abandon progressif du nucléaire. Douze des vingt-sept États membres de l'UE renoncent complètement à produire de l'énergie nucléaire.

3.3

Avec 152 réacteurs répartis dans l'UE 27, l'énergie nucléaire produit aujourd'hui 30 % de l'électricité européenne. Toutefois, si la politique d'abandon progressif du nucléaire décidée dans certains États membres se poursuit, cette part sera sensiblement réduite. Afin de répondre à la demande prévue en énergie et de réduire la dépendance de l'Europe face aux importations, on pourrait prendre des décisions concernant de nouveaux investissements ou la prolongation de la durée de vie de certaines centrales.

3.4

Selon la Commission, le renforcement de la production d'énergie nucléaire pourrait représenter une possibilité de réduire les émissions de CO2 et de jouer un rôle central dans la lutte contre les changements climatiques mondiaux. L'énergie nucléaire ne dégage pratiquement pas d'émissions de dioxyde de carbone et s'inscrit dans le scénario de réduction du carbone établi par la Commission, dont l'un des objectifs est de réduire les émissions de CO2. Cet élément pourrait également avoir son importance lors des discussions sur les futurs systèmes d'échange de droits d'émissions.

3.5

Les perspectives de croissance de l'énergie nucléaire sont avant tout tributaires des considérations économiques sous-jacentes, car une centrale nucléaire implique un investissement initial de l'ordre de 2 à 3,5 milliards d'euros. Par rapport aux combustibles fossiles, la production d'énergie nucléaire suppose des coûts de construction plus élevés mais, une fois l'investissement initial effectué, les coûts de fonctionnement sont nettement inférieurs. En détail, la Commission donne les explications suivantes:

3.5.1

«Les risques économiques des centrales nucléaire sont liés à l'importance de l'investissement initial et imposent ensuite un fonctionnement pratiquement sans défaillance au cours des 15 à 20 premières années d'exploitation, sur une durée de vie de 40 à 60 ans, pour récupérer le capital initial. En outre, le déclassement et la gestion des déchets obligent à prévoir des actifs financiers disponibles à échéance de 50 à 100 ans après l'arrêt du réacteur.»

3.5.2

«On compte 152 réacteurs nucléaires dans l'UE des 27 (1), en exploitation dans 15 États membres. La moyenne d'âge des centrales nucléaires avoisine les 25 ans (2). Dans le cas de la France, qui possède le parc de réacteurs le plus important (59), qui fournissent 80 % de son électricité, et de la Lituanie, où une seule centrale nucléaire assure 70 % de la production d'électricité, la moyenne d'âge des réacteurs est de 20 ans. Le parc de 23 centrales au Royaume-Uni a une moyenne d'âge avoisinant 30 ans, tandis que l'âge moyen du parc allemand (17 centrales) est de 25 ans.»

3.5.3

«L'électronucléaire présente traditionnellement une combinaison de coûts élevés de construction et de coûts d'exploitation faibles par rapport à la production d'électricité à partir des combustibles fossiles, dont le coût en capital est moindre mais les coûts d'exploitation sont plus élevés et plus sensibles à la variation des prix du combustible.»

3.6

Le nucléaire est très peu affecté par la variation du prix des matières premières puisqu'il ne faut qu'une quantité limitée d'uranium, provenant en général de régions stables du monde, pour qu'un réacteur fonctionne pendant des décennies. Les réserves connues d'uranium raisonnablement assurées et exploitables à des prix compétitifs peuvent subvenir aux besoins de l'industrie nucléaire pendant au moins 85 ans au niveau actuel de consommation. C'est pourquoi dans la plupart des pays industrialisés, construire de nouvelles centrales nucléaires offre un moyen économique de produire l'électricité destinée à assurer la charge de base.

3.7

L'industrie nucléaire a considérablement investi depuis 1997. La Commission reconnaît qu'il est essentiel de maintenir une avance technologique dans le domaine de l'énergie nucléaire, et appuie la mise au point du cadre le plus avancé en la matière, y compris dans les domaines de la non-prolifération, de la gestion des déchets et du démantèlement. Depuis la conclusion du traité Euratom, la sûreté nucléaire et la protection radiologique de la population ont figuré parmi les principales préoccupations de la Communauté européenne. L'importance de ces questions a d'ailleurs augmenté du fait des derniers élargissements.

3.8

Il devrait incomber à l'échelon communautaire de poursuivre la mise au point du cadre le plus avancé pour l'énergie nucléaire dans les États membres qui choisissent le nucléaire, conformément aux normes les plus strictes en matière de sûreté, de sécurité et de non-prolifération, comme l'exige le traité Euratom. Cela devrait inclure la gestion des déchets nucléaires et le démantèlement.

3.9

La Commission propose que la discussion sur la voie à suivre porte notamment sur les points suivants:

reconnaître des niveaux de référence communs de sûreté nucléaire en vue de leur mise en œuvre dans l'UE, sur la base de la vaste expertise des autorités nationales de sûreté nucléaire;

créer un groupe de haut niveau sur la sûreté et la sécurité nucléaires, chargé d'élaborer progressivement une vision commune et, à terme, des règles européennes supplémentaires concernant la sûreté et la sécurité nucléaires;

veiller à ce que les États membres mettent en place des plans nationaux de gestion des déchets radioactifs;

au cours de la première phase du 7e PC, mettre en place des plates-formes technologiques afin de mieux coordonner la recherche dans les programmes nationaux, industriels et communautaires pour les domaines «fission nucléaire durable» et «évacuation en couche géologique»;

suivre la mise en œuvre de la recommandation sur l'harmonisation des approches nationales pour la gestion des fonds de démantèlement, afin de garantir que des ressources adéquates soient mises à disposition;

simplifier et harmoniser les procédures d'autorisation, sur la base d'une meilleure coordination entre les autorités réglementaires nationales, en vue de maintenir les normes de sûreté les plus élevées;

veiller à une meilleure disponibilité de prêts Euratom, pour autant que les plafonds soient mis à jour en fonction des besoins du marché, comme l'a déjà proposé la Commission;

élaborer un régime de responsabilité harmonisé et des mécanismes garantissant la disponibilité de fonds en cas de dommage causé par un accident nucléaire;

relancer la coopération internationale par une collaboration plus étroite avec l'AIEA et l'AEN ainsi que dans le cadre d'accords bilatéraux avec les pays tiers et d'une assistance renouvelée aux pays voisins.

4.   Observations générales

4.1

Le CESE salue la nouvelle proposition de programme indicatif nucléaire de la Commission. L'environnement énergétique a grandement évolué depuis la dernière publication il y a dix ans. Ces dernières années en particulier, de nouvelles évolutions spectaculaires ont mis sous les feux de la rampe les trois aspects de la politique énergétique: sécurité d'approvisionnement; compétitivité et prix raisonnables; et environnement, en particulier pour ce qui est des changements climatiques. Les propositions relatives à une politique énergétique européenne constituent la réponse de l'UE aux problèmes et défis évidents. Dans ce contexte, il est nécessaire de mener une analyse et d'avancer des propositions au sujet de l'énergie nucléaire. Cela positionne l'énergie nucléaire sur la scène énergétique globale et fournit les informations nécessaires au débat et à la définition d'une politique énergétique pour l'Europe.

4.2

Dans son avis sur «Les enjeux du nucléaire pour la production d'électricité» de 2004, le CESE suggérait qu'«un effort d'information des véritables enjeux de l'industrie nucléaire: sécurité d'approvisionnement, non-émission de CO2, prix compétitifs, sûreté et gestion des combustibles usés soit envisagé et conduit pour permettre à la société civile organisée d'analyser de façon critique le contenu des débats qui lui sont proposés sur ces questions». Le nouveau PINC fournit cette information et le CESE approuve dans une large mesure l'analyse et la description présentées dans la communication de la Commission. La plupart des aspects essentiels de l'énergie nucléaire sont abordés et, aux yeux du Comité, correctement décrits. Le Comité met en outre le doigt sur certains aspects du nucléaire qu'il convient de prendre en considération.

4.3

Le nucléaire, qui représentait 31 % de l'électricité et 15 % de toute la consommation d'énergie primaire dans l'UE en 2004, joue un rôle crucial sur le marché de l'énergie. Il répond par ailleurs tout à fait aux objectifs de la politique énergétique de l'UE. Le coût de l'énergie nucléaire est aujourd'hui clairement compétitif, en particulier lorsqu'elle est utilisée comme charge de base. La dépendance extérieure est faible et les sources de combustible sont diversifiées et sûres, ce qui répond aux exigences en matière de sécurité d'approvisionnement. L'énergie nucléaire représente actuellement la plus grande source d'énergie exempte essentiellement de dioxyde de carbone en Europe (voir paragraphe 4.8 ci-dessous).

4.4

L'objectif absolument prioritaire de la politique énergétique est d'augmenter l'efficacité énergétique, y compris la production combinée de chaleur et d'électricité, et ainsi de maîtriser la demande. De vastes investissements dans la production électrique restent nécessaires dans l'UE afin de remplacer les vieilles centrales et éventuellement de répondre à un accroissement de la demande, étant donné que les évolutions du marché et les développements technologiques pourraient engendrer une augmentation de la part de l'électricité dans la demande totale en énergie.

4.4.1

À moyen et long terme, il se peut que de nouvelles technologies énergétiques, telles que la technologie de l'hydrogène, les pompes à chaleur et les voitures électriques, augmentent la part de la demande d'électricité dans la demande globale d'énergie plus rapidement qu'estimé dans les scénarios existants. Une évolution de ce type pourrait conférer à l'énergie nucléaire un rôle beaucoup plus important que celui qu'il joue actuellement dans la palette énergétique de l'UE. Dans ce cas, il conviendrait d'évaluer à nouveau l'adéquation des ressources en uranium.

4.5

Le Comité note l'existence de plans visant à prolonger l'activité des centrales qui sont arrivées au-delà de leur période d'exploitation commerciale, à savoir environ 30 à 40 ans. Dans son document, la Commission n'a pas approfondi la question du vieillissement des centrales européennes, qui demande à être complété. Dans la mesure où la Commission relève que «certains risques financiers et environnementaux demeurent à la charge des pouvoirs publics dans certains États membres, notamment la responsabilité des installations pour l'évacuation et la gestion à long terme des déchets», des dispositions réglementaires devront encore être prises en la matière.

4.6

Idéalement, ces nouveaux investissements devraient correspondre aux objectifs de sécurité d'approvisionnement, de compétitivité et de lutte contre les changements climatiques. Eu égard aux caractéristiques et aux potentialités d'autres formes de production électrique, on peut s'attendre à une prolongation de la durée de vie des centrales existantes ainsi qu'à de nouveaux investissements. Sur ce point, le Comité est en accord avec la Commission.

4.7

D'après la Commission, les réserves d'uranium peuvent subvenir aux besoins de l'industrie nucléaire pendant 85 ans au niveau de consommation actuel. Diverses sources fournissent des informations disparates sur cette question, qui varient entre 85 et 500 ans. La disponibilité de combustibles étant cruciale pour la sécurité de l'approvisionnement énergétique, la Commission devrait donner des informations plus détaillées sur la disponibilité de combustibles pour le nucléaire.

4.8

Lorsqu'on compare les répercussions environnementales de différentes sources d'énergie, il importe d'évaluer les effets généraux sur l'environnement de l'ensemble du processus, soit de l'approvisionnement en matières premières à la production, au transport et à la génération d'énergie jusqu'aux phases de recyclage et d'élimination. Le Conseil mondial de l'énergie (CME) a publié un rapport intitulé «Comparaison des systèmes énergétiques à partir de l'évaluation du cycle de vie» (CME, juillet 2004), qui identifie et passe en revue plusieurs études existantes sur l'évaluation du cycle de vie. Ce rapport montre que le taux d'émissions de CO2 par kWh d'électricité produite à partir du nucléaire est faible et qu'il se situe à un niveau comparable à celui de l'énergie éolienne, de la biomasse et de l'énergie hydraulique, soit entre 1 et 5 % du taux d'émissions générées par les centrales au charbon.

4.9

Par conséquent, il est essentiel de tenir compte de la contribution précieuse de l'énergie nucléaire pour éviter les gaz à effet de serre. Si l'on se base sur le bouquet énergétique actuel, le recours au nucléaire dans l'UE évite l'émission d'environ 600 millions de tonnes de CO2 par an. À l'échelle de la planète entière, ce chiffre s'élève à près de 2 milliards de tonnes de CO2, soit le volume total actuel d'émissions de CO2 produit par la France, l'Allemagne et le Royaume-Uni. Si l'abandon progressif prévu dans certains États membres est maintenu, une grande partie des centrales nucléaires européennes existantes devront être remplacées par d'autres sources d'énergie non émettrices. De plus, si les centrales nucléaires existantes ne sont pas remplacées par de nouvelles une fois leur cycle de vie terminé, tous les besoins en énergie nucléaire devront être remplacés à moyen terme par d'autres énergies non émettrices.

4.10

Suite à la décision du Conseil européen sur les objectifs en matière de gaz à effet de serre pour 2020 et au-delà, il est évident que toutes les capacités supplémentaires de production électrique à faible émission de carbone, qu'il s'agisse des énergies renouvelables, du nucléaire ou du charbon potentiellement propre, devraient se substituer aux capacités émettrices de CO2 et accroître ainsi le total de l'électricité à faible émission de carbone. Concrètement, si la part actuelle de l'énergie nucléaire n'est pas au moins maintenue jusqu'à ce que de nouvelles solutions énergétiques soient disponibles, les objectifs relatifs au climat et aux autres volets de la politique énergétique ne pourront être atteints d'une manière qui soit économiquement acceptable. Par ailleurs, il est évident qu'une proportion croissante d'énergie nucléaire et d'énergies renouvelables contribuerait à améliorer le rapport coût-efficacité dans la lutte contre le changement climatique.

4.11

Le CESE soutient l'objectif relatif à l'internalisation des coûts externes dans les prix de toutes les activités des marchés de l'énergie et autres. Une étude sur les coûts externes (3) réalisée par la Commission révèle que les coûts externes de l'énergie nucléaire s'élèvent à quelque 0,4 cents/kWh. D'après les estimations, les coûts externes correspondants pour la production d'électricité par des centrales au charbon sont plus de dix fois supérieurs, et ceux pour la biomasse quelques fois supérieurs. Ces coûts sont inférieurs pour l'énergie éolienne et à un niveau identique dans le cas de l'énergie hydraulique.

4.12

La Commission indique qu'une question essentielle est de savoir si le nucléaire a besoin d'interventions de politique publique. Toutes les technologies énergétiques propres devraient être traitées sur un pied d'égalité. Il conviendrait d'imaginer des mécanismes permettant d'encourager la recherche concernant les réacteurs de prochaine génération et le cycle du combustible nucléaire qui y est associé. Une subvention n'est envisageable que pour des développements tout à fait nouveaux — projets-pilotes. L'énergie nucléaire traditionnelle n'a pas besoin d'une quelconque subvention et ne devrait pas en bénéficier.

4.13

La Commission reconnaît que l'opinion publique et les perceptions concernant l'énergie nucléaire sont cruciales pour l'avenir de la politique nucléaire. Le Comité partage cet avis, tout en rappelant que l'acceptation varie grandement d'un État membre à un autre. L'accessibilité du public à l'information ainsi que la transparence des procédures décisionnelles doivent être améliorées, des études montrant que le public européen n'est pas bien informé au sujet des questions nucléaires. La Commission pourrait jouer un rôle judicieux en la matière. Cependant, comme le CESE l'a affirmé à plusieurs reprises par le passé, il faut également prendre de véritables mesures pour répondre aux préoccupations de la population.

4.14

Le Comité souligne le rôle toujours central incombant à l'échelon communautaire dans la mise au point du cadre le plus avancé pour l'énergie nucléaire dans les États membres qui choisissent le nucléaire, conformément aux normes les plus strictes en matière de sûreté, de sécurité et de non-prolifération, comme l'exige le traité Euratom.

4.15

La tâche la plus urgente est de trouver une solution à la question des déchets radioactifs, en particulier l'élimination définitive des combustibles nucléaires usés, pour laquelle la technologie existe mais les décisions politiques font défaut. Il s'agit là d'une priorité en termes d'impacts sur l'environnement et la santé et d'acceptation par le public de l'énergie nucléaire. Le PINC souligne qu'aucun pays n'a pour l'heure mis en œuvre la solution finale proposée. Des progrès ont toutefois été constatés en Finlande, où un site d'évacuation a été choisi, ainsi qu'en Suède et en France, où un grand pas a été effectué vers le choix d'un site.

4.16

Le Comité épouse également les vues de la Commission au sujet des autres questions qui nécessitent toujours une attention à l'échelon de l'UE: la sûreté nucléaire et la radioprotection, qui sont excellentes en Europe, ainsi que la nécessité d'assurer le financement du démantèlement.

4.17

Le PINC ne fait pas mention de la nouvelle menace posée par le terrorisme, qui représente un sérieux danger pour les centrales nucléaires ainsi que pour de nombreux autres sites industriels et bâtiments publics dans le monde. Toutes les nouvelles centrales nucléaires devraient être conçues de manière à résister au crash d'un gros avion de passagers sans générer d'émissions radioactives à l'extérieur. Il convient également de prévoir des systèmes de sécurité techniques et humains et de les mettre en place de manière à prévenir toute attaque terroriste à l'intérieur des centrales nucléaires. La Commission devrait, en coopération avec les autorités et les opérateurs responsables, lancer des initiatives pour faire en sorte que des mesures appropriées de prévention de la menace terroriste soient prises dans chaque centrale nucléaire.

4.18

Les étés chauds et secs que nous avons connus récemment ont également mis en lumière la question de la disponibilité suffisante d'eau de refroidissement des rivières vers les centrales à condensation. Le problème est resté pour l'heure très local et ne s'est présenté ni fréquemment ni longtemps. Dans certains cas, toutefois, il pourrait devenir plus sérieux au fil du temps. Il convient d'en tenir compte dans la conception des unités de centrales et dans le choix de leur implantation.

4.19

Après une vingtaine d'années de quasi-moratoire en Europe, l'attractivité du secteur de l'énergie nucléaire, à la fois en tant qu'employeur et que sujet de recherche, est également une source de préoccupation. Le manque d'intérêt des étudiants et des experts professionnels qui en résulte crée un goulot d'étranglement pour le développement général de l'énergie nucléaire et peut également représenter un risque en matière de sûreté. Le CESE partage l'avis de la Commission selon lequel l'expertise dans le domaine de la protection radiologique et de la technologie nucléaire est fondamentale pour l'UE, et qu'il convient dès lors de se pencher sur l'éducation, la formation et la recherche dans ces secteurs. Il en va de même pour la préservation et la transmission des connaissances de la génération de scientifiques et d'ingénieurs qui ont construit le parc existant de centrales en Europe, alors que dans bon nombre de pays aucun jeune expert n'a intégré dans ce secteur pendant des années.

4.20

La Commission rappelle qu'il appartient à chaque État membre de décider s'il entend utiliser l'énergie nucléaire. Le CESE approuve le droit de chaque État membre de choisir son propre bouquet énergétique, y compris l'utilisation du nucléaire. Ce droit devrait être respecté non seulement par l'UE, mais également par les autres États membres. Cependant, les décisions prises par un État membre influencent à bien des égards la situation des autres, et cette interdépendance grandira avec l'ouverture accrue des marchés intérieurs.

5.   Observations sur les mesures proposées

5.1

À la section 6.5 du PINC, intitulée «La voie à suivre», la Commission avance pour discussion des propositions de mesures, principalement à l'échelon de l'UE (voir paragraphe 3.9). Les positions du CESE sur les propositions avancées sont les suivantes:

5.1.1

Le CESE adhère à la position actuelle de la Commission, selon laquelle il convient de baser les niveaux de référence communs de sûreté nucléaire et leur mise en œuvre adéquate sur la vaste expertise des autorités nationales de sûreté nucléaire des États membres, par une collaboration au sein de la WENRA (4). Toute autre approche pourrait mettre en danger dans certains États membres les bonnes performances actuelles en matière de sûreté.

5.1.2

Un groupe de haut niveau sur la sûreté et la sécurité nucléaires, composé de représentants d'autorités nationales compétentes, pourrait contribuer au processus d'harmonisation et aider à améliorer les liens avec les conventions internationales sur la sûreté nucléaire.

5.1.3

Le CESE estime que les États membres recourant au nucléaire devraient mettre en place de toute urgence des plans nationaux de gestion du combustible nucléaire et des déchets radioactifs. Ces plans nationaux peuvent prévoir une approche purement nationale, une approche multinationale, ou une combinaison des deux. Toute autre possibilité doit être considérée comme la transmission irresponsable des obligations des générations actuelles aux générations futures.

5.1.4

Les plates-formes technologiques se sont avérées être des instruments très utiles pour créer des partenariats public-privé visant à développer les agendas européens de la recherche stratégique. Le CESE soutient l'idée de la Commission d'utiliser cet instrument dans les domaines de la fission nucléaire durable et de l'évacuation en couche géologique. Cela pourrait être un instrument indispensable pour attirer de jeunes scientifiques dans cette industrie.

5.1.5

Afin de garantir une couverture complète des coûts opérationnels tout au long de la durée de vie et des conditions équitables, il est essentiel que les opérateurs débloquent des moyens appropriés par l'intermédiaire de fonds de démantèlement tant au sein de l'UE qu'à l'échelle mondiale. Cependant, le Comité estime qu'il n'est pas nécessaire d'harmoniser complètement la gestion de ces fonds, pour autant que soient respectés les principes de couverture complète et sûre, ainsi que de transparence.

5.1.6

Le respect des normes de sûreté les plus strictes, conjugué à la simplification des procédures d'autorisation ainsi qu'à leur harmonisation graduelle grâce à une coopération entre autorités nationales de réglementation, est nécessaire afin de rendre les délais de mise en service des projets de construction plus prévisibles et, ainsi, de permettre une planification et un calcul des coûts plus précis. La sûreté ne peut en aucun cas être compromise.

5.1.7

Le CESE approuve les propositions de la Commission de mettre à jour les plafonds des prêts Euratom et de veiller à améliorer leur disponibilité. En principe, les investissements dans toutes les formes d'énergie devraient bénéficier d'un accès égal et équitable aux instruments financiers, qui sont autrement fournis par la BEI.

5.1.8

Le CESE estime qu'un régime de responsabilité harmonisé, y compris des mécanismes garantissant la disponibilité de fonds en cas de dommage causé par un accident nucléaire, et ce, sans qu'il puisse être fait appel à des fonds publics, constitue une autre condition pour une meilleure acceptabilité de l'énergie nucléaire. Le dispositif actuel, dans lequel la responsabilité est plafonnée à 700 millions de dollars, ne fait pas droit à cet impératif. Le problème d'assurances posé par une probabilité d'accident extrêmement faible combiné à des dégâts potentiellement très sérieux et coûteux doit être abordé de manière ouverte, constructive et concrète. Un modèle à suivre pourrait être celui du système d'assurances collectives (pool scheme).

5.1.9

Le CESE salue la proposition visant à relancer la coopération internationale avec l'AIEA et l'AEN ainsi que dans le cadre d'accords bilatéraux. Il convient de mettre un accent particulier sur l'assistance aux pays voisins.

5.2

Outre les propositions de la Commission, le CESE est d'avis que les questions suivantes devraient être examinées lorsque la Commission préparera les prochaines mesures:

5.2.1

Attirer l'attention des États membres sur la possibilité d'accroître à nouveau les besoins en éducation et en formation dans le vaste secteur de l'énergie et de la technologie nucléaires, en particulier l'éducation et la formation en faveur de la sûreté nucléaire. L'éducation constitue non seulement un moyen de former de nouveaux professionnels dans le domaine de l'énergie nucléaire, mais permet également de sensibiliser davantage les citoyens à cette question, ce qui revêt une importance fondamentale dans le processus de formation de l'opinion publique.

5.2.2

Examiner d'autres problèmes potentiels liés aux investissements dans l'énergie nucléaire sur un marché de l'énergie ouvert, étant donné les montants et les longs délais de mise en service, et avancer des propositions de solution fondées sur le marché.

5.2.3

L'industrie européenne de la technologie nucléaire a acquis une position de pionnier mondial, ce qui fournit des emplois de haut niveau tout en étant bénéfique pour la sûreté nucléaire dans le monde entier, étant donné les excellents niveaux de sûreté en Europe. Afin de conserver cette position de leader alors que l'on s'attend à une explosion mondiale des investissements dans le nucléaire, il convient que cette industrie, ainsi que l'industrie produisant ses composantes en amont, soit considérée comme une cible pour la nouvelle approche sectorielle de la Commission en matière de politique industrielle.

5.3

Enfin, le CESE se félicite également de l'intention de la Commission d'augmenter la fréquence de publication des programmes indicatifs nucléaires, fournissant ainsi une image plus à jour de la situation dans l'UE.

Bruxelles, le 12 juillet 2007.

Le Président

du Comité économique et social européen

Dimitris DIMITRIADIS


(1)  Annexe 2: informations par pays sur les activités actuelles dans le cycle du combustible nucléaire.

(2)  Annexe 1: voir les figures 6 et 7, qui présentent les centrales par âge et la répartition des âges entre les pays.

(3)  «External Costs — Research results on socio-environmental damages due to electricity and transport», Commission européenne, 2003.

(4)  «Western European Nuclear Regulatory Authorities» (Association des autorités de réglementation nucléaire d'Europe de l'Ouest).


ANNEXE

à l'avis du Comité

Les amendements suivants, qui ont recueilli plus du quart des suffrages exprimés, ont été rejetés:

Paragraphe 1.1

Modifier comme suit:

«En 2004, le CESE suggérait dans son avis sur “Les enjeux du nucléaire pour la production d'électricité” qu'“un effort d'information des véritables enjeux de l'industrie nucléaire: sécurité d'approvisionnement, non-émission de CO2, prix compétitifs, sûreté et gestion des combustibles usés soit envisagé et conduit pour permettre à la société civile organisée d'analyser de façon critique le contenu des débats qui lui sont proposés sur ces questions”. Le nouveau programme indicatif nucléaire pour la Communauté (PINC) fournit certaines de ces informations cette information. Le CESE approuve dans une large mesure l'analyse et la description présentées dans la communication de la Commission, mais constate dans le même temps que des thèmes importants ne sont pas abordés (voir notamment le paragraphe 1.6). La plupart des aspects essentiels de l'énergie nucléaire sont abordés et, aux yeux du Comité, correctement décrits . Le Comité met en outre le doigt sur certains aspects du nucléaire qu'il convient de prendre en considération».

Exposé des motifs

La modification ici proposée est la suite logique des autres amendements proposés, ainsi que du paragraphe 1.6 du projet d'avis, qui souligne que certains aspects du dossier (terrorisme, eau de refroidissement) n'ont pas été suffisamment débattus.

Résultat du vote

Voix pour: 49

Voix contre: 52

Abstentions: 11

Paragraphe 1.2

Modifier comme suit:

«Le nucléaire, qui représentait 31 % de l'électricité et 15 % de toute la consommation d'énergie primaire dans l'UE en 2004, joue un rôle crucial sur le marché de l'énergie. Il répond par ailleurs tout à fait aux objectifs de la politique énergétique de l'UE. Le coût de l'énergie nucléaire est aujourd'hui clairement compétitif. La dépendance extérieure est faible et les sources de combustible sont diversifiées et sûres, ce qui répond aux exigences en matière de sécurité d'approvisionnement. L'énergie nucléaire représente actuellement une des plus grandes sources d'énergie exemptes essentiellement de dioxyde de carbone en Europe. Ses autres implications environnementales sont limitées et maîtrisées».

Exposé des motifs

Le document de la Commission ne parle pas du nucléaire comme de «la plus grande source d'énergie exempte de dioxyde de carbone» mais de «l'une des plus grandes». Nous devrions le citer avec exactitude.

En ce qui concerne les autres incidences environnementales du nucléaire, voir le reste des amendements.

Résultat du vote (N.B.: la suppression de la dernière phrase a été acceptée par la session plénière)

Voix pour: 57

Voix contre: 60

Abstentions: 3

Paragraphe 1.3

Modifier comme suit:

«Suite à la décision du Conseil européen sur les objectifs en matière d'émissions de gaz à effet de serre pour 2020 et au-delà, il est évident que toutes les capacités supplémentaires de production électrique à faible émission de carbone, qu'il s'agisse des énergies renouvelables, du nucléaire ou du charbon potentiellement propre, devraient se substituer aux capacités émettrices de CO2 et accroître ainsi le total de l'électricité à faible émission de carbone. Le Comité constate qu'au dire de la Commission “actuellement, plus de 110 installations nucléaires dans l'Union se trouvent à divers stades du démantèlement. On prévoit qu'au moins un tiers des 152 centrales nucléaires actuellement en service dans l'Union européenne élargie devront être démantelées d'ici à 2025 (compte non tenu des éventuellement prolongations de leur durée de vie).” Par ailleurs, la Commission n'ayant jusqu'à présent reçu notification de la construction que d'un seul nouveau réacteur, il est de la plus haute vraisemblance que la part de l'énergie nucléaire dans la production électrique baissera fortement. Il n'en est pas moins possible, comme le montre une étude des services de la chancellerie fédérale allemande concernant la République fédérale d'Allemagne, de respecter les objectifs climatiques, à la condition toutefois de consentir des efforts supplémentaires en faveur des économies d'énergie, de l'efficacité énergétique et de l'utilisation des énergies renouvelables. Concrètement, si la part actuelle de l'énergie nucléaire n'est pas au moins maintenue jusqu'à ce que de nouvelles solutions énergétiques soient disponibles, les objectifs relatifs au climat et aux autres volets de la politique énergétique ne pourront être atteints.»

Exposé des motifs

Les motifs qui ont amené à proposer le présent amendement ressortent de l'étude qui y est évoquée et du texte de la Commission.

Résultat du vote

Voix pour: 49

Voix contre: 65

Abstentions: 6

Paragraphe 1.7

Reformuler comme suit:

«Après une vingtaine d'années de quasi-moratoire en Europe, l L'attractivité du secteur, à la fois en tant qu'employeur et que sujet de recherche, est également peut s'avérer être une source de préoccupation pour les États membres qui entendent continuer de miser sur l'énergie nucléaire. Le CESE partage l'avis de la Commission selon lequel l'expertise en matière de protection radiologique et de technologie nucléaire est fondamentale pour l'UE, et qu'il convient dès lors de se pencher sur l'éducation, la formation et la recherche dans ces secteurs, tâche qui incombe avant tout aux exploitants des installations.»

Exposé des motifs

Il n'y a pas lieu de parler de «moratoire». Par ailleurs, la responsabilité en matière d'éducation etc. revient en priorité aux entreprises et non aux pouvoirs publics nationaux ni à la Communauté.

Résultat du vote (N.B.: seule la seconde partie de l'amendement a été mise aux voix, la première partie a, elle, été acceptée)

Voix pour: 45

Voix contre: 71

Abstentions: 2

Paragraphe 3.6.1

Ajouter un nouveau paragraphe 3.6.1:

«En ce qui concerne la disponibilité des ressources en uranium, le Comité constate que des divergences existent entre la communication de la Commission et le sommaire de la dernière édition du “Livre rouge” de l'AIEA, où l'on peut lire, cités littéralement, les propos suivants: “Selon les prévisions actuelles, la capacité théorique de production primaire d'uranium des centres existants, commandés, prévus et envisagés utilisant des ressources identifiées (…) pourrait satisfaire les besoins projetés en uranium d'ici 2010 si tous les projets d'agrandissement et d'ouverture de mines se déroulent comme prévu et si la production se poursuit à plein régime dans toutes les installations. (…) [Les] sources secondaires devraient pourtant perdre de leur importance, notamment après 2015, de sorte qu'il faudra de plus en plus couvrir les besoins des centrales nucléaires par le développement des capacités de production existantes et le développement de nouveaux centres de production, ou par l'introduction d'autres cycles de combustible, deux solutions coûteuses et de longue haleine. Il faudra qu'à court terme la demande d'uranium se maintienne à un niveau élevé pour stimuler la mise en valeur en temps voulu des ressources identifiées. Compte tenu des délais requis pour découvrir de nouvelles ressources et les mettre en exploitation (de l'ordre de 10 ans, voire davantage), des pénuries d'approvisionnement en uranium et de fortes pressions à la hausse sur les prix de l'uranium sont envisageables à mesure que les sources d'approvisionnement secondaires s'épuiseront.” Le Comité escompte que la Commission apportera des clarifications sur ce point.»

Exposé des motifs

Nous nous devons de pointer les divergences manifestes, plutôt que de les taire.

Résultat du vote

Voix pour: 49

Voix contre: 65

Abstentions: 5

Paragraphe 4.1

Reformuler comme suit:

«Le CESE salue prend acte de la nouvelle proposition de programme indicatif nucléaire de la Commission. L'environnement énergétique a grandement évolué depuis la dernière publication il y a dix ans. Ces dernières années en particulier, de nouvelles évolutions spectaculaires ont mis sous les feux de la rampe les trois aspects de la politique énergétique: sécurité d'approvisionnement; compétitivité et prix raisonnables; et environnement, en particulier pour ce qui est des changements climatiques. Les propositions relatives à une politique énergétique européenne constituent la réponse de l'UE aux problèmes et défis évidents. Dans ce contexte, il est nécessaire de mener une analyse et d'avancer des propositions au sujet de l'énergie nucléaire. Cela positionne l'énergie nucléaire sur la scène énergétique globale et fournit les une partie des informations nécessaires au débat et à la définition d'une politique énergétique pour l'Europe.»

Exposé des motifs

La rapporteuse écrit elle-même que tous les aspects du dossier (terrorisme, etc.) n'ont pas été discutés.

Résultat du vote

Voix pour: 50

Voix contre: 69

Abstentions: 2

Paragraphe 4.5

Modifier comme suit:

«Idéalement, ces nouveaux investissements devraient correspondre aux objectifs de sécurité d'approvisionnement, de compétitivité et de lutte contre les changements climatiques. Eu égard aux caractéristiques et aux potentialités d'autres formes de production électrique, le Comité constate qu'un débat se déroule dans certains États membres quant on peut s'attendre à une prolongation de la durée de vie des centrales existantes ainsi qu'à de nouveaux investissements. Sur ce point, le Comité est en accord avec la Commission.»

Exposé des motifs

L'auteur de l'amendement ne voit pas dans quel passage la Commission aurait affirmé que l'«on peut s'attendre» à une prolongation de la durée de vie des centrales existantes. Cette assertion constitue une pure spéculation.

Voir également le paragraphe 1.5, modifié lors de la réunion de la section, au cours de laquelle nous avons exprimé notre préoccupation quant à une éventuelle prolongation de la durée de vie des centrales.

Résultat du vote

Voix pour: 50

Voix contre: 67

Abstentions: 6

Paragraphe 4.6

Modifier comme suit:

«D'après la Commission, les réserves d'uranium peuvent subvenir aux besoins de l'industrie nucléaire pendant 85 ans au niveau de consommation actuel. Diverses sources fournissent des informations disparates sur cette question, qui varient entre 85 et 500 ans. La disponibilité de combustibles étant cruciale pour la sécurité de l'approvisionnement énergétique, la Commission devrait donner des informations plus détaillées sur la disponibilité de combustibles pour le nucléaire. Dans le même temps, on signalera à nouveau que la question de la disponibilité des ressources d'uranium donne lieu à des divergences notables.»

Exposé des motifs

Ressort du texte.

Résultat du vote

Voix pour: 55

Voix contre: 68

Abstention: 0

Paragraphe 4.8

Modifier comme suit:

«Par conséquent, il est essentiel de tenir compte de la contribution précieuse de l'énergie nucléaire pour éviter les gaz à effet de serre. Si l'on se base sur le bouquet énergétique actuel, le recours au nucléaire dans l'UE évite l'émission d'environ 600 millions de tonnes de CO2 par an. À l'échelle de la planète entière, ce chiffre s'élève à près de 2 milliards de tonnes de CO2, soit le volume total actuel d'émissions de CO2 produit par la France, l'Allemagne et le Royaume-Uni. Si l'abandon progressif prévu dans certains États membres est maintenu, une grande partie des centrales nucléaires européennes existantes devront être remplacées par d'autres sources d'énergie non émettrices, des dispositions d'efficacité énergétique ou des mesures d'économie. De plus, si les centrales nucléaires existantes ne sont pas remplacées par de nouvelles une fois leur cycle de vie terminé, tous les besoins en énergie nucléaire devront être remplacés à moyen terme par d'autres énergies non émettrices et des mesures d'efficacité et d'économie

Exposé des motifs

Notre réflexion doit aller bien au-delà de la simple substitution d'une source de production électrique à une autre: le CESE l'a souligné à maintes reprises.

L'auteur de l'amendement fait en outre observer qu'il a demandé à la rapporteuse de justifier les chiffres concernant les économies de CO2, étant donné que dans le document de travail, elle faisait état, en indiquant ses sources, de 300 millions de tonnes. Elle n'en a malheureusement rien fait.

Résultat du vote

Voix pour: 61

Voix contre: 61

Abstentions: 2

Paragraphe 4.9

Compléter comme suit la fin de ce paragraphe:

«Suite à la décision du Conseil européen sur les objectifs en matière de gaz à effet de serre pour 2020 et au-delà, il est évident que toutes les capacités supplémentaires de production électrique à faible émission de carbone, qu'il s'agisse des énergies renouvelables, du nucléaire ou du charbon potentiellement propre, devraient se substituer aux capacités émettrices de CO2 et accroître ainsi le total de l'électricité à faible émission de carbone. Concrètement, si la part actuelle de l'énergie nucléaire n'est pas au moins maintenue jusqu'à ce que de nouvelles solutions énergétiques soient disponibles, les objectifs relatifs au climat et aux autres volets de la politique énergétique ne pourront être atteints d'une manière qui soit économiquement acceptable. Par ailleurs, il est évident qu'une proportion croissante d'énergie nucléaire et d'énergies renouvelables contribuerait à améliorer le rapport coût-efficacité dans la lutte contre le changement climatique. Des études — émanant des services de la chancellerie fédérale allemande, en ce qui concerne la République fédérale d'Allemagne — prouvent qu'il est possible de respecter les objectifs climatiques, à la condition toutefois de consentir des efforts supplémentaires en faveur des économies d'énergie, de l'efficacité énergétique et de l'utilisation des énergies renouvelables.»

Exposé des motifs

Ressort du texte.

Résultat du vote

Voix pour: 58

Voix contre: 65

Abstention: 1

Paragraphe 4.11.1

Ajouter un nouveau paragraphe 4.11.1 rédigé comme suit:

«La Commission constate que “la responsabilité en cas d'accident nucléaire est régie, dans l'ancienne ‘UE-15’, par la convention de Paris de 1960, qui a créé un système international harmonisé de responsabilité en cas d'accident nucléaire, dans lequel la responsabilité des exploitants en cas d'accident nucléaire est actuellement limitée à environ 700 millions de dollars US”. Le CESE considère que ce dispositif constitue déjà une subvention indirecte en faveur de l'énergie nucléaire et demande que les exploitants s'engagent à assumer eux aussi tous les dommages potentiels, en se couvrant par des assurances suffisantes

Exposé des motifs

Dans les réunions du groupe d'étude, la rapporteuse avait fait valoir qu'«une solution doit et peut être trouvée». Cette position ne transparaît pas dans le projet d'avis. L'amendement proposé vise précisément à remédier à cette lacune.

Note: En Allemagne, les voitures sont couvertes par des assurances en responsabilité pour un montant total de 100 millions d'euros: les 700 millions de dollars des centrales nucléaires apparaissent dérisoires en comparaison, au vu des dommages potentiels!

Résultat du vote

Voix pour: 41

Voix contre: 44

Abstentions: 3

Paragraphe 4.14

Modifier comme suit:

«La tâche la plus urgente est de trouver une solution à la question des déchets radioactifs, en particulier l'élimination définitive des combustibles nucléaires usés, pour laquelle la technologie existe mais les décisions politiques font défaut. Il s'agit là d'une priorité en termes d'impacts sur l'environnement et la santé et d'acceptation par le public de l'énergie nucléaire. Le PINC souligne qu'aucun pays n'a pour l'heure mis en œuvre la solution finale proposée. Des progrès ont toutefois été constatés en Finlande, où un site d'évacuation a été choisi, ainsi qu'en Suède et en France, où un grand pas a été effectué vers le choix d'un site.»

Exposé des motifs

Cette technologie n'existe pas.

Résultat du vote

Voix pour: 55

Voix contre: 69

Abstentions: 4


27.10.2007   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 256/62


Avis du Comité économique et social européen sur le thème «Conférences maritimes — Convention des Nations unies»

COM(2006) 869 final — 2006/0308 (COD)

(2007/C 256/12)

Le 20 mars 2007, la Conseil a décidé, conformément à l'article 80 du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la proposition susmentionnée.

Le 14 février 2007, le Bureau du Comité a chargé sa section spécialisée «Transports, énergie, infrastructures, société de l'information» de préparer les travaux du Comité en la matière.

Compte tenu de l'urgence des travaux, le Comité économique et social européen a décidé au cours de sa 437e session plénière des 11 et 12 juillet 2007 (séance du 11 juillet 2007) de nommer Mme BREDIMA-SAVOPOULOU rapporteuse générale, et a adopté le présent avis par 86 voix pour, et 3 abstentions.

1.   Conclusions

1.1

Le CESE approuve la proposition d'abrogation du règlement 954/79, étant donné que celle-ci découle inévitablement de l'abrogation du règlement 4056/86 prévoyant une exemption par catégorie pour les conférences maritimes. Le CESE observe que ces deux règlements sont juridiquement liés.

1.2

Le règlement 954/79 concerne la ratification par les États membres de la convention des Nations unies relative à un code de conduite des conférences maritimes ou l'adhésion de ces États à la convention, ci-après dénommé code maritime de la CNUCED ou le code. À cet égard, il y a lieu de noter que le code de conduite des conférences maritimes a été ratifié par 81 États, notamment les nouvelles locomotives du commerce mondial (Chine, Inde, Russie et Brésil), ainsi que l'Australie, l'Arabie saoudite, le Canada, l'Indonésie, le Japon, le Mexique, le Nigéria et Singapour. Le code a également été ratifié par seize États membres de l'Union européenne. Les services de ligne représentent en outre 60 % de la valeur totale des trajets internationaux de fret, essentiellement par conteneurs. Aussi l'abrogation du règlement 954/79, ainsi que du règlement 4056/86, aura à l'évidence des répercussions qu'il ne faut pas sous-estimer.

1.3

Le CESE recommande en particulier à la Commission de clarifier ce que sera le statut juridique international des opérateurs maritimes de l'UE après l'abrogation du règlement 954/79. En effet, compte tenu de l'importance que revêtent une politique communautaire maritime intégrée pour la place de l'UE dans l'économie mondiale et, d'une manière générale, les services maritimes, y compris les services européens, par rapport au total des trajets communautaires et internationaux, une vigilance redoublée est de rigueur s'agissant de cette abrogation. Il convient en outre de bien prendre en considération ses conséquences, tant à l'échelon européen qu'international. Pour ce qui est de la proposition de la Commission d'abroger le règlement 954/79, le CESE estime qu'elle ne tient pas compte des deux aspects suivants: a) la discrimination entre opérateurs maritimes communautaires que pourrait entraîner cette abrogation et qu'il convient d'éviter (conformément à l'article 12 du traité CE); et b) le nécessaire maintien de la compétitivité des opérateurs communautaires de services de ligne, notamment celle des opérateurs maritimes à courte distance (conformément à la stratégie de Lisbonne rénovée).

1.4

Dans la droite ligne de ses avis antérieurs, ainsi que de ceux du Parlement européen, le CESE invite instamment la Commission à se pencher sur les conséquences (politiques, juridiques et pratiques) qu'entraînerait l'abrogation des règlements 4056/86 et 954/79, et ce afin de prévenir toute atteinte aux intérêts des opérateurs maritimes européens au niveau international.

1.5

L'on peut, semble-t-il, considérer que les lignes directrices destinées à éclaircir les modalités d'application au transport maritime des règles communautaires de concurrence qui, à partir du 18 octobre 2008, c'est-à-dire après l'interdiction des conférences maritimes à destination et en provenance de l'UE, s'appliqueront aux services de ligne autoriseraient essentiellement les opérateurs maritimes à procéder à une auto-évaluation de leurs accords au regard du droit communautaire de la concurrence. Le CESE estime qu'il est peu probable que ces lignes directrices abordent les conséquences internationales d'ordre politique, juridique et pratique d'une abrogation des règlements 4056/86 et 954/79. Dans leurs précédents avis, le CESE et le Parlement européen ont néanmoins demandé à la Commission à maintes reprises d'analyser ces conséquences et de les prendre en compte à l'avenir, lors de la mise en place de tout nouveau régime. Le CESE souhaite par conséquent être consulté le moment venu et avoir la possibilité d'émettre un avis sur ces lignes directrices.

1.6

S'il approuve l'abrogation du règlement 954/79, le CESE ne voit en revanche aucune urgence à procéder à cette abrogation tant que n'auront pas été précisément évaluées les répercussions au niveau international des récentes politiques européennes en matière de transport maritime de ligne et que des mesures n'auront pas été prises pour y faire face.

2.   Introduction

2.1

Le secteur du transport maritime par conteneurs est une composante essentielle de l'économie européenne. Le transport de conteneurs par voie maritime représente en valeur 40 % environ des échanges extérieurs de l'UE-25. Les trois plus grands opérateurs mondiaux de services de ligne sont européens et les trajets reliant l'Asie et l'Europe, conjointement avec ceux reliant l'Asie et les Etats-Unis, sont de loin les trajets commerciaux les plus importants (1). Il existe actuellement, de surcroît, quelque 150 conférences maritimes internationales dans le monde, dont 28 concernant des trajets à destination et en provenance de l'Union européenne. Les États membres ayant des opérateurs de services de ligne réguliers à titre principal sont notamment le Danemark, l'Allemagne, la France, l'Italie, les pays baltes, le Royaume-Uni et Chypre. Les dernières données disponibles (2) font apparaître que les services de ligne, y compris des conférences maritimes, représentent 60 % de la valeur totale du commerce maritime international et 25 % des 5,9 milliards de tonnes de fret transporté par voie maritime.

2.2

La proposition à l'examen vise à abroger le règlement (CEE) no 954/79 du Conseil du 15 mai 1979 concernant la ratification par les États membres de la convention des Nations unies relative à un code de conduite des conférences maritimes ou l'adhésion de ces États à la convention. Cette proposition fait suite à l'abrogation du règlement (CEE) no 4056/86 qui prévoyait une exemption par catégorie pour les conférences maritimes au titre du règlement (CE) no 1419/2006 du Conseil du 25 septembre 2006. Ce dernier règlement élargit également le champ d'application du règlement (CE) no 1/2003 au cabotage et aux services internationaux de tramp.

2.3

La convention des Nations unies relative à un code de conduite des conférences maritimes (Genève, 6 avril 1974) a été établie sous les auspices de la conférence des Nations unies sur le commerce et le développement (CNUCED) afin de définir un cadre international harmonisé pour le déroulement des conférences maritimes. Le code de conduite de la CNUCED a été adopté afin de faire droit aux aspirations légitimes de pays en développement désireux d'accroître la participation de leurs opérateurs au transport de ligne de fret. Il est le fruit de longues négociations multilatérales entre pays développés et pays en développement (3). La formule d'attribution du fret entre les opérateurs des pays situés aux deux extrémités d'un trajet et les opérateurs de pays tiers avait pour objectif d'enrayer les tendances protectionnistes. Le règlement 954/79 visait à mettre ce mécanisme en conformité avec les principes du traité CE.

2.4

Ont ratifié la le code de conduite de la CNUCED ou y ont adhéré les États membres suivants: Belgique, Bulgarie, République tchèque, Danemark, Finlande, France, Allemagne, Italie, Malte, Pays-Bas, Portugal, Roumanie, Slovaquie, Espagne, Suède et Royaume-Uni. La Norvège, État membre de l'EEE, a également adhéré au code.

2.5

Lors du débat sur l'abrogation du système des conférences maritimes dans l'UE, le Parlement européen a souligné dans deux avis (2005-2006) que «l'application du présent règlement (4) (abrogeant le règlement 4056/86) créant un conflit de lois en raison de l'adhésion de certains États membres au code de conduite des conférences maritimes de la CNUCED, il est recommandé que ces États membres s'en retirent, sans que l'on puisse toutefois les y contraindre. Il découle de cette situation la nécessité de disposer d'une procédure précise permettant de gérer les conflits de droit international pouvant survenir à cet égard. Il convient que la Commission présente au Parlement européen un aperçu clair de la position des pays tiers (Chine, États-Unis d'Amérique, Canada, Japon, Singapour et Inde) à l'égard de la nouvelle politique de l'Union en matière de lignes régulières (acceptation, ajustement, opposition, effets négatifs) et sur leur volonté d'adapter leurs propres systèmes. La Commission devrait examiner de manière approfondie les répercussions commerciales et politiques d'une dénonciation du code de la CNUCED. La Commission doit examiner s'il est nécessaire d'amender ou d'abroger d'autres éléments de la législation communautaire, tels que le règlement (CEE) no 4055/86 du Conseil du 22 décembre 1986 portant application du principe de la libre prestation des services aux transports maritimes entre États membres et entre États membres et pays tiers (5)». En outre, le Parlement européen «invite la Commission (6) à ne pas abroger l'article 9 du règlement (CEE) no 4056/86, qui prévoit des négociations en cas de conflit entre le droit communautaire et le droit de pays tiers, eu égard, a fortiori, à l'intention de la Commission de procéder à la révision du droit de la concurrence dans le secteur des transports maritimes». En dépit des recommandations du Parlement européen, l'article 9 a néanmoins été abrogé en même temps que le règlement 4056/86, et ce alors qu'il semble qu'à l'heure actuelle il n'ait été procédé à aucune évaluation approfondie des effets juridiques et politiques de la suppression du système des conférences maritimes dans l'Union européenne, contrairement à ce qui avait été demandé.

2.6

Le CESE a également examiné en détail la question de l'abrogation du règlement 4056/86 et a, en fin de compte, notamment adopté deux avis sur cette question en 2004 et 2006. En 2006, le CESE a en outre réservé sa position afin de déterminer si la proposition d'abrogation du règlement 4056/86 aurait un effet durable. Il en ressort que «le système des conférences dépend encore d'accords multilatéraux et bilatéraux auxquels les États membres de l'UE et la Communauté sont parties». Le CESE observait par ailleurs que «la Commission reconnaît qu'en raison de ces accords, la date de l'abrogation des dispositions suivantes du règlement 4056/86 (c'est-à-dire l'article premier, paragraphe 3, points (b) et (c), les articles 3 à 8 et 26) devrait être reportée à deux ans, afin de permettre de dénoncer ou de réviser ces accords conclus avec des pays tiers». Le CESE estimait que «la Commission devrait également prendre en considération les intérêts des petites et moyennes entreprises en ce qui concerne l'abrogation du règlement 4056/86. Les petites et moyennes entreprises constituent l'épine dorsale de l'économie de l'UE et jouent un rôle important dans le contexte de la stratégie de Lisbonne révisée. Les marchés devraient rester ouverts à la concurrence actuelle et potentielle, y compris celle des petits et moyens opérateurs du secteur maritime». Enfin, le CESE affirmait que «bien que la consolidation puisse avoir des effets positifs pour l'industrie de l'UE (gains d'efficacité, économies d'échelle, économies sur les coûts), la prudence est de rigueur pour éviter que cette consolidation — qui pourrait découler de l'abrogation du règlement 4056/86 — n'aboutisse à une réduction du nombre d'acteurs sur les marchés en cause, c'est-à-dire à moins de concurrence».

3.   La proposition de la Commission européenne

3.1

La proposition de règlement à l'examen ne contient que deux articles. L'article premier abroge le règlement 954/79 et l'article 2 fixe la date d'entrée en vigueur du nouveau règlement au 18 octobre 2008.

4.   Observations générales

4.1

Le CESE suit de près depuis plus de vingt ans les règles de concurrence applicables au transport maritime et en particulier la question des conférences maritimes et des points de vue divergents se sont exprimés quant à l'opportunité de supprimer l'exemption par catégorie pour les conférences maritimes. À la suite de l'abrogation du règlement 4056/86 en vertu du règlement 1419/2006, les conférences maritimes à destination et en provenance de l'UE seront toutefois interdites à partir du 18 octobre 2008.

4.2

Les règlements 4056/86 et 954/79 sont juridiquement liés, le règlement 954/79 ayant été adopté en raison de la ratification par certains États membres de l'UE du code de conduite maritime de la CNUCED. Aussi l'abrogation du règlement 4056/86 a-t-elle rendu nécessaire l'abrogation du règlement 954/79. Par conséquent, le CESE, dans un premier temps opposé puis contraint de se déclarer favorable à l'abrogation du règlement 4056/86 tout en mettant en garde contre ses répercussions, ne peut qu'approuver la proposition d'abroger le règlement 954/79 aux fins de simplifier la législation communautaire. Néanmoins, comme dans le cas de l'abrogation du règlement 4056/86, le CESE tient à souligner une fois encore qu'il convient d'étudier attentivement les éventuelles incidences juridiques et politiques (et les effets potentiellement défavorables) que pourrait avoir la proposition de supprimer le règlement 954/79. Le CESE relève toutefois que la proposition d'abrogation du règlement 954/79 ne semble toujours pas s'accompagner d'une évaluation des éventuels problèmes politiques, juridiques voire pratiques qui pourraient en découler. Sans remettre en cause la nécessité de cette abrogation, inévitable compte tenu de l'abrogation du règlement 4056/86, le CESE continue de croire, et répète une fois de plus, que l'UE doit en traiter convenablement toutes les répercussions éventuelles, d'ordre politique, juridique et pratique.

4.3

Le code de conduite des conférences maritimes de la CNUCED et la notion de conférence maritime sont évoqués dans l'acquis communautaire ainsi que dans d'autres instruments juridiques adoptés par l'UE. Ils constituent par exemple la base juridique des règlements 4055/86, 4058/86 (7) et 823/2000 relatif aux consortiums entre compagnies maritimes de ligne. Le code est en outre mentionné explicitement dans certains accords bilatéraux, tels que l'accord UE/Russie (article 39, paragraphe 1, lettre a)) et dans le récent accord d'association UE/Algérie conclu en 2005 (article 34, paragraphe 3).

4.4

Lorsqu'elle a abrogé le règlement 4056/86, la Commission européenne a indiqué qu'elle formulerait des lignes directrices afin d'expliquer comment les règles communautaires en matière de concurrence s'appliquent au transport maritime, et notamment aux services de ligne. S'agissant de ces services, les lignes directrices devraient aider les opérateurs à procéder à une auto-évaluation de leurs accords au regard du droit communautaire de la concurrence (c'est-à-dire des articles 81 et 82 du traité CE) après le 18 octobre 2008, date à partir de laquelle les conférences maritimes seront interdites à destination ou en provenance de l'UE. Il reste toutefois à voir si ces lignes directrices comporteront des solutions à tous problèmes juridiques qui pourraient apparaître au niveau international du fait de l'abrogation du règlement 954/79. Pour le moment, le CESE croit savoir que le projet de lignes directrices est de nature très générale et qu'il n'apporte pas la sécurité juridique nécessaire au secteur maritime pour procéder à une auto-évaluation. Il semblerait en outre que le projet de lignes directrices n'aborde pas les implications internationales de l'abrogation des règlements 4056/86 et 954/79. C'est pourquoi le CESE souhaite être consulté le moment venu afin de pouvoir suivre de près la suite des événements et, si besoin est, apporter son assistance et/ou son expertise lors de l'élaboration de la version finale des lignes directrices.

4.5

Le CESE estime que la question essentielle à résoudre est celle de savoir si la proposition d'abroger le règlement 954/79 entraînerait une obligation juridique de dénoncer le code de conduite de la CNUCED. Le CESE observe que dans l'exposé des motifs de sa proposition de règlement abrogeant le règlement 954/79 la Commission fait l'impasse sur cette question. La Commission laisse néanmoins entendre que pour elle, les États membres parties au code de conduite ne seraient pas juridiquement tenus de le dénoncer. En pareille hypothèse, la situation juridique, une fois abrogé le règlement 954/79, serait la suivante: les États membres de l'UE ne seront pas obligés de dénoncer le code mais ne pourront plus s'en prévaloir pour ce qui est du trafic à destination et en provenance de l'Union européenne, le code continuant toutefois de s'appliquer pour les autres continents. Dans le même temps, les États membres n'ayant pas encore ratifié le code de conduite ne seront plus en mesure de le faire après le 18 octobre 2008, comme l'explique la Commission dans l'exposé des motifs et comme cela est précisé au cinquième considérant de la proposition de règlement abrogeant le règlement 954/79. De ce fait, si un État membre qui n'est pas partie au code de conduite de la CNUCED souhaitait y adhérer pour préserver les intérêts de ses opérateurs de services de ligne sur des trajets hors UE, il en serait alors empêché.

4.6

Dans ce contexte, le paradoxe juridique suivant pourrait apparaître après le 18 octobre 2008: les opérateurs des États membres parties au code de conduite mais qui ne le dénonceraient pas continueraient de pouvoir se prévaloir de ses dispositions en matière de droits des compagnies tierces et des opérateurs n'appartenant pas à une conférence maritime, tels que visés à l'article 2, paragraphe 4, lettres a) et b) et dans la résolution no 2. Par ailleurs, les opérateurs des États membres qui ne sont pas parties au code et qui, après le 18 octobre 2008, ne seront plus autorisés à le ratifier ni à y adhérer, ne pourront pas se prévaloir de ses dispositions. Dans ces conditions, un certain nombre de questions se posent: serait-il possible d'adopter une proposition synonyme de discrimination entre opérateurs communautaires, en contravention de l'article 12 du traité CE? De plus, cette situation ne pèserait-elle pas sur la compétitivité des entreprises de l'UE en Europe et dans le monde, contrairement à l'objectif fixé par la stratégie de Lisbonne rénovée? S'agissant du transport maritime, cette situation n'illustre-t-elle pas la nécessité de prévoir une approche horizontale des politiques communautaires, notamment des politiques des transports et de la concurrence, comme l'envisage le Livre vert sur une politique maritime de l'Union.

4.7

Le CESE recommande fortement à l'Union européenne de ne pas sous-estimer les conséquences internationales que comporterait l'abrogation du système des conférences maritimes. Le CESE observe que certains partenaires maintiennent pour le moment leurs systèmes «d'immunité antitrust» libre concurrence. Certains États tiers se sont dits préoccupés par l'abrogation du système des conférences maritimes dans l'Union européenne. Mentionnons à cet égard la récente déclaration du Forum des armateurs asiatiques — ASF (Busan, Corée, le 29.5.2007):

«Les membres prennent acte des récents développements en Australie, en Chine, à Hong Kong, au Japon et à Singapour mais se déclarent préoccupés de la décision de l'Union européenne d'abroger son exemption par catégorie applicable aux conférences maritimes. Les délégués réaffirment la position adoptée de longue date par l'ASF, à savoir que le système d'immunité antitrust est indispensable à la bonne santé du secteur maritime et à sa capacité d'encourager les investissements nécessaires pour satisfaire aux exigences croissantes du commerce international; ce système bénéficie à l'ensemble du secteur du commerce. Il a été convenu que les opérateurs poursuivront leurs efforts afin que les autres parties intéressées, notamment les expéditeurs et les pouvoirs publics, reconnaissent le rôle important des accords entre transporteurs pour les échanges. L'ASF observe que les associations affiliées KSA, JSA et SSA, en particulier, se sont adressées par écrit à la Commission européenne et aux autres instances compétentes pour leur faire part de leur opposition à l'abrogation du système d'immunité antitrust. La Commission a répondu à KSA qu'elle entendait certes abroger le règlement 4056/86, mais qu'elle prévoyait aussi d'élaborer une solution de remplacement tout en maintenant inchangé le règlement sur les consortiums qui constitue l'un des deux axes du système d'immunité antitrust». Le CESE prend acte de la déclaration du Forum des armateurs asiatiques et considère que celle-ci illustre la nécessité, évoquée à maintes reprises par le CESE et le Parlement européen, d'évaluer ou, tout au moins, d'examiner attentivement, l'incidence au niveau international et dans une économie mondialisée de l'abrogation dans l'Union européenne du système des conférences maritimes.

4.8

Au vu de ces considérations, le CESE est fermement convaincu que la question à l'examen ne saurait être abordée sous le seul angle du droit de la concurrence. Il ne faut pas sous-estimer les dimensions politiques de l'abrogation du système des conférences maritimes et, dès lors, du règlement 954/79, ni ses implications en matière de politique du transport maritime. C'est pourquoi le CESE ne comprend pas que la Commission propose en urgence d'abroger le règlement 954/79 alors que les répercussions internationales de la politique communautaire de la concurrence en matière de transport maritime, et notamment de l'abrogation du système des conférences maritimes, n'ont pas encore été convenablement examinées, et ce en dépit des nombreuses demandes en ce sens, y compris de la part du CESE.

5.   Observations particulières

5.1

S'agissant de l'état actuel des ratifications du code de conduite des conférences maritimes, le CESE constate que l'exposé des motifs de la proposition de la Commission abrogeant le règlement 954/79 fait référence à treize États membres de l'UE parties au code de conduite de la CNUCED, alors qu'en réalité ce nombre est de seize après la ratification du code par la Roumanie, la Bulgarie et Malte.

Le règlement 954/79 comporte un certain nombre de réserves visant à sauvegarder notamment les intérêts des compagnies maritimes de pays tiers («compagnies tierces»). Toutefois, la proposition d'abroger ce règlement ne prévoit pas de telles mesures de sauvegarde. À cet égard, les intérêts des compagnies maritimes de l'UE assurant le trafic entre d'autres continents (pour lesquels le code de conduite s'applique) ne doivent pas être sous-estimés. Signalons également que le code de conduite de la CNUCED a été ratifié par 81 pays, parmi lesquels les nouvelles locomotives du commerce mondial que sont la Chine, l'Inde, la Russie et le Brésil (BRICS) ainsi que l'Indonésie, le Mexique, le Nigéria, l'Arabie Saoudite, l'Australie, le Canada, le Japon et Singapour.

Bruxelles, le 11 juillet 2007.

Le Président

du Comité économique et social européen

Dimitris DIMITRIADIS


(1)  Rapport final intitulé «The Application of Competition Rules to Liner Shipping» élaboré par Global Insight, octobre 2005.

(2)  (CNUCED — 2003, Clarksons — 2003).

(3)  JO C 157 du 28.6.2005.

(4)  Rapport A6-0217/2006 du Parlement européen du 22.6.2006.

(5)  JO L 378 du 31.12.1986, p. 1.

(6)  Rapport A6-0314/2005 du Parlement européen du 24.10.2005.

(7)  Le règlement (CEE) no 4055/86 du 22.12.1986 portant application du principe de la libre prestation des services aux transports maritimes entre États membres et entre États membres et pays tiers se fonde sur l'article 4, paragraphe 1, lettres a) et b), du code de conduite des conférences maritimes de la CNUCED et prévoit la suppression progressive des arrangements en matière de partage des cargaisons en référence directe au code de conduite; le règlement (CEE) no 4058/86 du 22.12.1986 concernant une action coordonnée en vue de sauvegarder le libre accès au trafic transocéanique a pour base le code de conduite des conférences maritimes. Son article premier prévoit que la procédure s'applique au transport de ligne sur des trafics codistes et non codistes — JO L 378 du 31.12.1986, p. 4.


27.10.2007   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 256/66


Avis du Comité économique et social européen sur le thème «Identification par radiofréquences (RFID)»

(2007/C 256/13)

Par courrier daté du 26 février 2007, la Commission européenne a demandé au Comité économique et social européen, conformément aux dispositions de l'article 262 du traité instituant la Communauté européenne, d'élaborer un avis sur: «Identification par radiofréquences (RFID)».

La section spécialisée «Transports, énergie, infrastructures, société de l'information», chargée de l'élaboration des travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 19 juin 2007 (rapporteur: M. MORGAN).

Lors de sa 437e session plénière des 11 et 12 juillet 2007 (séance du 11 juillet 2007), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 138 voix pour, 1 voix contre et 6 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1

L'identification par radiofréquences (RFID) est une technologie importante qui est appelée à devenir essentielle à l'avenir. Ses applications actuelles et futures pourraient permettre d'améliorer grandement toute une série de processus commerciaux tant dans le secteur public que privé et d'apporter des avantages significatifs aux particuliers comme aux entreprises. Elle pourrait également stimuler un développement massif des applications internet, rendant possible ce qu'une agence de l'ONU a décrit comme l'«internet des objets». Toutefois, si l'identification par radiofréquences n'est pas soigneusement contrôlée, elle pourrait également violer la vie privée, anéantir les libertés civiles et menacer la sécurité des personnes et des entreprises.

1.2

La communication à l'étude est intitulée «L'identification par radiofréquences en Europe: vers un cadre politique». La Commission a déjà mené une vaste consultation sur laquelle s'est fondée cette communication. Le CESE est maintenant invité à élaborer un avis exploratoire. Sur la base des réactions à la communication, la Commission émettra une recommandation aux États membres à la fin de l'année. Tout acte législatif, dont l'élaboration sera plus longue, ne viendra que plus tard. Aussi convient-il que le présent avis se concentre sur le contenu de cette recommandation.

1.3

La Commission a décidé d'instaurer un groupe des parties intéressées par la RFID, qui fera office de caisse de résonance afin de l'aider à formuler sa recommandation. Le CESE serait très heureux de pouvoir exposer le présent avis auprès du groupe des parties intéressées.

1.4

Le CESE soutient les actions proposées par la Commission pour ce qui est du spectre radioélectrique, des normes, de la santé, de la sûreté et de l'environnement. Il souligne qu'il est urgent d'établir une contribution industrielle efficace pour le forum de normalisation.

1.5

Étant donné que la Commission publiera sa recommandation aux États membres à la fin de l'année, on peut raisonnablement supposer qu'elle acceptera l'infrastructure de sécurisation des données et de protection de la vie privée telle qu'elle existe aujourd'hui. Cela laisse notamment entendre que les organes de protection des données existant déjà dans chaque État membre deviendront l'autorité chargée des questions que la RFID soulève en matière de protection de la vie privée et des données. Ces questions sont au cœur du présent avis.

1.6

Les menaces que l'identification par radiofréquences fait peser sur la vie privée et les libertés civiles sont graves:

Les étiquettes RFID peuvent être placées dans ou sur des objets et des documents sans que la personne obtenant ces articles n'en ait connaissance. Étant donné que les ondes radio passent sans encombre et en silence à travers le tissu, le plastique et d'autres matériaux, il est possible de lire des étiquettes RFID cousues à l'intérieur de vêtements ou apposées sur des objets transportés dans un sac à main, dans un sac à provision, dans une valise ou autre.

Le code produit électronique pourrait permettre de doter chaque objet sur terre de sa propre carte d'identité unique. L'utilisation de numéros d'identification uniques pourrait entraîner la création d'un système mondial d'enregistrement des articles, par lequel chaque objet physique est identifié et associé à son acquéreur ou à son propriétaire au point de vente ou de transfert.

Le déploiement de l'identification par radiofréquences nécessite la création de gigantesques bases de données contenant les données des étiquettes uniques. Ces registres pourraient être croisés avec les données d'identification des individus, notamment à mesure que grandissent la mémoire des ordinateurs et leur capacité de traitement.

Les étiquettes peuvent être lues à distance, à travers des obstacles, par des lecteurs pouvant être incorporés de manière invisible dans quasiment n'importe quel environnement où se rassemblent des personnes. Les lecteurs peuvent être placés dans du carrelage, cousus dans des tapis, cachés dans des entrées et dissimulés dans des rayonnages, si bien qu'il est pratiquement impossible pour une personne de savoir si, et quand, elle est scannée.

Si l'identité des personnes est croisée avec les numéros d'étiquettes RFID uniques, il sera possible de localiser ou de dresser le profil de personnes à leur insu et sans leur consentement.

On peut imaginer un monde où les lecteurs RFID forment un réseau mondial omniprésent. Un tel réseau n'aurait pas besoin de lecteurs partout. Le système de la zone de circulation taxée à Londres peut localiser tous les véhicules entrant dans le centre-ville grâce à un nombre relativement réduit de caméras placées à des points stratégiques. Un réseau de lecteurs d'étiquettes RFID stratégiquement placés pourrait être construit de la même manière. Une telle évolution ne doit pas être permise.

1.7

Les implications de ces menaces sont les suivantes:

Les utilisateurs de RFID doivent rendre publiques leurs politiques et leurs pratiques; il ne devrait pas exister de bases de données secrètes regroupant des informations personnelles.

Les personnes ont le droit de savoir lorsque des articles dans l'environnement du commerce de détail contiennent des étiquettes ou des lecteurs RFID. Toute lecture d'étiquettes opérée dans l'environnement du commerce de détail doit être transparente pour toutes les parties.

Les utilisateurs de RFID doivent informer le public de l'utilisation qui sera faite des étiquettes et des lecteurs. La collecte d'informations devrait être limitée aux éléments nécessaires pour atteindre l'objectif déclaré.

Il appartient aux utilisateurs de RFID de mettre en œuvre la technologie et de la faire fonctionner dans le respect des lois et des lignes directrices en matière de sécurité des données. Ils sont également responsables de la sécurité et de l'intégrité du système et de sa base de données.

1.8

Les modalités d'application de ces principes font l'objet de controverses. L'idéal serait que toute entreprise participant à des transactions entre entreprises et consommateurs, telles que la vente au détail, les billetteries, les contrôles d'accès ou les services de transport, donne aux consommateurs une forme de garantie que ces principes seront respectés, une sorte de charte de protection des consommateurs. Sur le plan conceptuel, une telle charte pourrait inclure tous les principes de bonnes pratiques en matière de protection des données énoncés au paragraphe 4.5. En outre, le CESE propose les lignes directrices suivantes:

a)

il convient d'interdire aux commerçants de forcer ou d'obliger les clients à accepter que les produits qu'ils achètent contiennent des étiquettes actives ou passives. On pourrait notamment envisager d'apposer les étiquettes sur l'emballage ou d'utiliser des étiquettes électroniques pouvant être enlevées comme les étiquettes de prix;

b)

les consommateurs devraient avoir la possibilité de retirer ou de désactiver toute étiquette placée sur des articles en leur possession;

c)

l'identification par radiofréquences ne devrait en principe pas être utilisée pour localiser des personnes. Cette pratique est déplacée, que cela soit, par exemple, par le biais de vêtements, de marchandises, de billets ou d'autres articles;

d)

l'identification par radiofréquences ne devrait jamais être utilisée d'une manière pouvant supprimer ou réduire l'anonymat;

e)

l'autorité responsable devrait signifier clairement que les points (c) et (d) ne seront admissibles que dans des circonstances exceptionnelles et après notification officielle préalable à ladite autorité.

1.9

Certaines exceptions aux lignes directrices mentionnées ci-dessus peuvent être envisagées dans les cas suivants:

si des particuliers choisissent de faire usage de la possibilité de maintenir les étiquettes en activité pour leur convenance personnelle;

si des particuliers consentent à être localisés dans des environnements sensibles tels que des établissements et des institutions publics et privés de haute sécurité;

si des particuliers choisissent d'utiliser des applications qui les localiseront et les identifieront de la même manière qu'ils sont déjà localisés et identifiés par l'utilisation de téléphones portables, de cartes bancaires, d'adresses internet, etc.

Il convient que toute exception de ce type soit notifiée à l'autorité responsable.

1.10

La technologie de l'identification par radiofréquences n'est pas arrivée à maturité, si bien que nous ne saisissons pas encore son plein potentiel. D'un côté, elle pourra apporter des avantages encore inconcevables à notre civilisation technologique, de l'autre, elle pourra représenter la plus grande menace que la technologie ait jamais fait peser sur la vite privée et la liberté. Le CESE est d'avis que les applications RFID devraient être développées selon un code éthique strict, dans le respect de la vie privée, de la liberté et de la sécurité des données mais que, avec les mesures de sauvegarde nécessaires, le développement des applications devrait se poursuivre.

1.11

En conclusion, il convient que là où les applications RFID sont autorisées, leur mise en œuvre soit absolument transparente pour toutes les personnes concernées. Les applications destinées à améliorer le maniement des marchandises sont dans l'ensemble acceptables. Les applications concernant l'étiquetage des personnes ne sont en général pas acceptables, sauf dans des environnements de passage. Les applications associant des personnes à des marchandises peuvent être acceptables à des fins de marketing. Les applications identifiant des personnes grâce aux marchandises qu'elles ont achetées sont en général inacceptables. En outre, certaines applications n'ont pas leur place dans une société libre et ne devraient jamais être autorisées. Le besoin impératif de préserver la vie privée et l'anonymat doit être au centre de la recommandation adressée par la Commission aux États membres.

2.   Qu'est ce que l'identification par radiofréquences et pourquoi est-elle importante?

2.1

L'identification par radiofréquences est une technologie qui permet d'identifier et de saisir des données automatiquement en utilisant les radiofréquences. Cette technologie a pour caractéristique principale d'associer, à l'aide d'une étiquette électronique, un identificateur unique et d'autres informations à tout objet, animal, voire à toute personne, et d'en permettre la lecture par l'intermédiaire d'un dispositif sans fil.

2.2

Les étiquettes sont constituées d'un circuit électronique qui contient des données et d'une antenne qui transmet ces données par ondes radio. Un lecteur RFID interroge les étiquettes pour obtenir l'information qu'elles contiennent. Lorsque le lecteur émet des ondes radio, toutes les étiquettes à sa portée communiquent avec lui. Un logiciel est nécessaire afin de gérer le lecteur et de récolter et filtrer les informations.

2.3

Il existe différents types de systèmes RFID disponibles. Les étiquettes peuvent être actives ou passives. Les étiquettes actives sont munies d'une pile incorporée alimentant le circuit interne et générant des ondes radio; elles peuvent émettre même en l'absence d'un lecteur RFID. Les étiquettes passives sont alimentées par l'énergie des ondes radio transmises par le lecteur et ne disposent pas de leur propre source d'énergie. Les étiquettes peuvent être en mode «lecture seule» ou «lecture-écriture». Les étiquettes en lecture seule sont moins chères à fabriquer et sont utilisées dans la plupart des applications actuelles.

2.4

La portée d'un système RFID dépend de la fréquence radio, de la puissance du lecteur et de la matière présente entre l'étiquette et le lecteur. Elle peut atteindre quelques mètres pour les systèmes passifs mais dépasse les cent mètres dans le cas des systèmes actifs.

2.5

L'identification par radiofréquences est au bas de l'échelle des technologies sans fil. Si l'on se réfère à la distance parcourue par les signaux, les systèmes de communication par satellite comme le GPS occupent la première place. Viennent ensuite les technologies de téléphonie mobile à longue portée comme le GSM et le GPRS, puis les signaux de plus petite portée à l'intérieur de bâtiments, comme le Wifi, ensuite les réseaux personnels comme le Bluetooth, et enfin la RFID. Chacune de ces technologies fonctionne de manière séparée et autonome, de sorte qu'il n'y a par exemple pas de danger que les systèmes satellitaires lisent les étiquettes RFID. Cependant, les données peuvent être transmises d'un système à un autre par des appareils tels que les téléphones portables.

2.6

Parmi les avantages que pourraient apporter les applications RFID, on notera les exemples suivants:

pour les particuliers, elle pourra être synonyme de sûreté (par exemple sécurité alimentaire, soins de santé, lutte contre la contrefaçon), de commodité (par exemple moins d'attente aux caisses, meilleure manutention des bagages dans les aéroports, paiements automatisés), et de meilleurs soins pour les patients, en particulier dans le cas de maladies chroniques telles que la démence;

dans le domaine des transports, elle devrait accroître l'efficacité, la sécurité et la qualité des services pour les personnes et les biens;

dans le domaine de la santé, elle a le potentiel d'élever le niveau de qualité des soins et de sécurité des patients, et d'améliorer l'observance thérapeutique et la logistique. On étudie actuellement le placement d'étiquettes RFID sur chaque cachet;

dans le commerce de détail, elle pourrait limiter les ruptures d'approvisionnement, les niveaux de stock et les vols;

dans bon nombre de secteurs où la contrefaçon est très répandue, l'utilisation de la RFID pourrait aider à déterminer l'endroit où les marchandises illicites entrent dans la chaîne d'approvisionnement;

l'étiquetage RFID pourrait également permettre d'améliorer le tri et le recyclage des pièces et des matériaux composant les produits, entraînant des retombées positives pour la gestion des déchets et le développement durable.

2.7

De nombreux aspects de la RFID sont illustrés par son utilisation dans la gestion du cycle de vie des livres. Le nombre même de livres imprimés crée un cauchemar logistique pour les éditeurs, les distributeurs, les bibliothèques et les détaillants. Outre la logistique de la chaîne d'approvisionnement, il est nécessaire de localiser les livres une fois qu'ils ont été placés en rayon afin qu'ils puissent être retrouvés et remis à leur place. Par ailleurs, les bibliothèques doivent contrôler le cycle de prêt, et les acheteurs peuvent éprouver des difficultés à remettre la main sur leurs propres livres. L'étiquetage RFID des livres apporte une solution à tous ces problèmes. Le contrôle des prêts bibliothécaires trouvera des analogies dans toute autre application où des articles sont recyclés ou loués.

2.8

Afin d'illustrer la nature des menaces inhérentes à cette technologie, voici la synthèse d'une demande de brevet (20020615758) déposée par IBM en novembre 2002. Elle concerne l'identification et la localisation de personnes à l'aide d'articles étiquetés par RFID.

«Méthode et système d'identification et de localisation de personnes à l'aide d'articles étiquetés par RFID portés par ces personnes. L'historique des achats effectués par chaque personne dans un magasin de détail est compilée par les terminaux de vente et conservé dans une base de données des transactions. Lorsqu'une personne portant avec elle ou sur elle des articles munis d'étiquettes RFID entre dans le magasin ou dans une autre zone définie, un scanneur d'étiquette RFID situé à l'intérieur de cet espace scanne les étiquettes RFID portées par cette personne et lit les informations contenues dans les étiquettes RFID. Les informations provenant des étiquettes RFID sont croisées avec l'historique des transactions stocké dans la base de données des transactions en fonction d'algorithmes de corrélation connus. Sur la base des résultats de cette corrélation, on peut déterminer l'identité exacte de cette personne ou certaines de ses caractéristiques. Ces informations sont utilisées pour suivre le mouvement de la personne dans le magasin ou dans d'autres espaces.»

La demande de brevet American Express 20050038718 est assez semblable.

2.9

L'identification par radiofréquences est clairement bien plus qu'un code barre électronique. En effet, le dispositif décrit dans la demande de brevet citée ci-dessus présente les différences majeures suivantes par rapport à un code barre électronique:

(a)

l'étiquette contient non seulement une description de l'article, mais aussi une identification de chaque article pris séparément, ce qui permet d'identifier ensuite l'acheteur;

(b)

l'étiquette ne doit pas nécessairement être une micro puce; les circuits peuvent être imprimés directement sur la plupart des matériaux, par exemple sur un vêtement;

(c)

l'étiquette peut continuer à fonctionner après la vente, de sorte qu'elle peut être relue continuellement;

(d)

les lecteurs d'étiquette ne sont pas seulement situés au point de vente, ils peuvent être n'importe où, et pas uniquement dans l'enceinte du magasin;

(e)

la corrélation par la base de données confère une nouvelle dimension à la collecte de données, au respect de la vie privée et à la sécurité des données.

2.10

La question de savoir si une étiquette devrait rester active une fois passée la caisse du détaillant fait l'objet d'un débat. D'un côté, cela représente une menace pour la vie privée. De l'autre, cela pourrait profiter à l'acheteur. Par exemple, la possibilité de disposer de lecteurs RFID chez soi pourrait aider à organiser sa cave à vin, son frigidaire, sa garde robe ou sa bibliothèque. Il est dès lors logique que le choix appartienne aux particuliers. Toutefois, la technologie et l'application doivent lui laisser ce choix.

2.11

L'identification par radiofréquences a bien d'autres applications que l'identification des produits de détail. Les badges d'identification du CESE fonctionnent avec cette technologie. Le système du métro londonien recourt largement à des cartes RFID pour les paiements et l'accès. Les cartes de crédit seront bientôt dotées d'un dispositif RFID pour effectuer des transactions de faible valeur sans code secret. Des plaques RFID sont utilisées pour les péages routiers et d'autres applications d'identification des conducteurs. Dans certaines stations de ski d'Europe, l'accès aux remontées mécaniques est contrôlé par des plaquettes RFID que l'utilisateur porte dans une poche de sa combinaison de ski. Le rapporteur du présent avis utilise quotidiennement trois cartes et une plaque RFID. Son chien est identifié par une puce sous-cutanée RFID. L'utilisation de te telles puces pourrait se généraliser dans le monde entier pour étiqueter les animaux et garantir ainsi une traçabilité dans la chaîne alimentaire. De là à étiqueter les criminels et les patients à problèmes simplement comme les chiens, il n'y a qu'un pas.

2.12

Les badges d'identification tels que ceux utilisés par le CESE sont une application RFID inoffensive. L'identification représente un défi bien plus important lorsque des étiquettes RFID sont incorporées dans des vêtements de travail ou des uniformes afin de pouvoir suivre continuellement les mouvements de la personne qui les porte grâce à des scanneurs situés à tous les points névralgiques des lieux. Il convient cependant de reconnaître que dans certaines situations, une telle identification peut être souhaitable, notamment pour des raisons de sécurité. En tout état de cause, suivre une personne à la trace constituerait, en l'absence de garanties suffisantes, une grave intrusion dans la vie privée qui doit être sérieusement motivée et très soigneusement contrôlée.

2.13

L'hebdomadaire The Economist a fait état d'un étrange signe avant-coureur de ce que pourraient être les applications futures de cette technologie: au Baja Beach Club de Barcelone, le billet d'entrée dans la zone VIP est une micro-puce implantée dans le bras du client. À peine plus grosse qu'un grain de riz et enrobée de verre et de silicone, la puce est utilisée pour identifier les clients lorsqu'ils entrent et paient leurs consommations. Elle est implantée par une infirmière sous anesthésie locale. Il s'agit en fin de compte d'une étiquette RFID.

3.   Contenu essentiel de la communication

3.1

L'identification par radiofréquences présente un intérêt politique en raison de sa capacité à devenir un nouveau moteur de croissance et de création d'emplois et donc à contribuer grandement à la stratégie de Lisbonne, à condition que les obstacles à l'innovation puissent être levés.

3.2

La Commission a organisé, en 2006, une consultation publique sur la RFID qui a mis en évidence les espoirs que l'on pouvait fonder sur cette technologie à partir des résultats obtenus par ses premiers utilisateurs, mais aussi les craintes de la population concernant des applications qui impliquent l'identification ou la localisation des personnes.

3.3

Le développement plus poussé et la diffusion généralisée de la RFID pourraient renforcer encore le rôle des technologies de l'information et des communications comme moteur de l'innovation et facteur de croissance économique.

3.4

Il est nécessaire d'instaurer un cadre juridique et politique clair et prévisible afin de rendre cette nouvelle technologie acceptable pour les utilisateurs. Comme la technologie RFID est par essence transfrontalière, ce cadre devrait garantir la cohérence au sein du marché intérieur.

3.5   Sécurité, respect de la vie privée et éthique

3.5.1

Cette technologie omniprésente et «catalysante» suscite de graves préoccupations au sujet du respect de la vie privée. En effet, on peut l'utiliser pour recueillir des informations qui sont directement ou indirectement liées à une personne identifiée ou identifiable, et donc considérées comme des données à caractère personnel; les étiquettes RFID peuvent contenir des données personnelles; la technologie RFID pourrait servir à localiser des individus ou à suivre leur déplacement, ou encore à en établir le profil comportemental. L'identification par radiofréquences pourrait devenir une technologie intrusive. Des craintes ont été exprimées au sujet des violations des valeurs fondamentales et de la vie privée, ainsi qu'en ce qui concerne un accroissement de la surveillance, en particulier sur le lieu de travail, menant à des formes de discrimination, d'exclusion, de victimisation et éventuellement à des licenciements.

3.5.2

Il est clair que la mise en œuvre de la RFID doit être socialement et politiquement acceptable, admissible sur le plan éthique et juridiquement possible. La RFID ne sera en mesure de produire de nombreuses retombées positives pour l'économie et la société que si des garanties effectives sont prévues en ce qui concerne la protection des données, le respect de la vie privée et les aspects éthiques connexes qui sont au cœur du débat sur l'adhésion du public à la RFID.

3.5.3

Le cadre législatif communautaire sur la protection des données à caractère personnel et de la vie privée en Europe a été conçu pour rester robuste dans un contexte d'innovation. La protection des données à caractère personnel est couverte par la directive générale sur la protection des données (1) qui est applicable à toutes les technologies, y compris la RFID. La directive générale sur la protection des données est complétée par la directive Vie privée et communications électroniques (2). Conformément à ces directives, il appartiendra aux pouvoirs publics nationaux de veiller à ce que l'introduction des applications RFID soit conforme à la législation sur la protection de la vie privée et des données. Aussi pourra-t-il être nécessaire de fournir des indications précises sur la mise en œuvre pratique des applications RFID et d'élaborer des codes de conduite en la matière.

3.5.4

Concernant la sécurité, les entreprises, les États membres et la Commission devront conjuguer leurs efforts pour mieux appréhender les problèmes systémiques et les menaces que le déploiement massif des technologies et systèmes RFID pourrait faire peser sur la sécurité. Un élément important de la réponse apportée pour relever les défis mentionnés ci-dessus consistera à définir et à adopter des critères de conception qui limitent les risques pour la vie privée et la sécurité non seulement au niveau technique, mais aussi d'un point de vue organisationnel et des processus commerciaux. Il faut dès lors, avant de sélectionner les systèmes RFID et de déployer les applications RFID, étudier de près les risques spécifiques qu'ils présentent pour la sécurité et la vie privée en termes de coût et d'avantages.

3.5.5

Il est fait état de préoccupations en ce qui concerne le caractère ouvert et neutre des bases de données où seront enregistrés les identificateurs uniques qui sont au cœur du système RFID, le stockage et la gestion des données recueillies, et leur utilisation par des tiers. Il s'agit d'une question importante, étant donné que l'identification par radiofréquences entraînera une nouvelle vague de développement de l'internet qui permettra à terme d'interconnecter des milliards de dispositifs intelligents et de capteurs perfectionnés pour en faire une infrastructure mondiale de communication en réseau. Cette nouvelle phase du développement d'internet est appelé l'«internet des objets».

3.5.6

Il convient que le système d'enregistrement et de nomenclature des identités dans le futur «internet des objets» soit conçu de manière à exclure les pannes ou les utilisations involontaires susceptibles de créer de graves perturbations. Il ne devrait pas être contrôlé par des intérêts particuliers qui pourraient utiliser ces bases de données et ces systèmes pour leurs propres desseins. Les exigences en matière de sécurité, d'éthique et de respect de la vie privée devraient être sauvegardées pour tous les intéressés (qu'il s'agisse de particuliers ou d'entreprises) dont certaines informations commerciales sensibles seraient intégrées aux processus basés sur la RFID.

3.5.7

Il convient qu'au cours de la conception du système d'information RFID, l'on prenne en compte les exigences des parties directement impliquées dans la configuration de ce système (organisations commerciales, administrations publiques, hôpitaux) comme celles des utilisateurs finaux qui seront soumis au système (citoyens, consommateurs, patients, employés). Comme les utilisateurs finaux ne sont généralement pas impliqués dans le processus de conception, la Commission soutiendra l'élaboration d'un ensemble d'orientations spécifiques pour les applications (code de conduite, bonnes pratiques) par un groupe restreint d'experts représentant toutes les parties. D'ici à la fin 2007, la Commission publiera une recommandation énonçant les principes que les pouvoirs publics et autres parties concernées devront appliquer en matière d'utilisation de la RFID.

3.5.8

La Commission étudiera également la possibilité d'ajouter des dispositions appropriées à la prochaine proposition de modification de la directive Vie privée et communications électroniques; dans le même temps, elle prendra en compte les éléments d'information fournis par le futur groupe des parties intéressées par la RFID, le groupe de travail article 29 sur la protection des données et d'autres initiatives concernées comme le groupe européen d'éthique des sciences et des nouvelles technologies. Sur cette base, la Commission examinera la nécessité de prendre de nouvelles mesures législatives afin de garantir la protection des données et de la vie privée.

3.5.9

La Commission suivra de près l'évolution vers l'«internet des objets» dont la RFID devrait constituer un élément central. À la fin de 2008, la Commission publiera une communication analysant la nature et les conséquences de cette évolution, avec un accent particulier sur les questions relatives au respect de la vie privée, à la confiance et à la gouvernance. Elle évaluera différentes options politiques, notamment la possibilité de nouvelles mesures législatives pour assurer la protection des données et de la vie privée ainsi que pour œuvrer à d'autres objectifs de politique générale.

3.5.10

Les observations relatives aux questions de sécurité, de respect de la vie privée et d'éthique se trouvent à la section 4 du présent avis.

3.6   Autres questions politiques en matière de RFID

3.6.1

Outre le vaste domaine de la sécurité, du respect de la vie privée et de l'éthique, les autres questions politiques soulevées par la RFID concernent le spectre radioélectrique, les normes, la santé, la sûreté et l'environnement.

3.6.2

Il est important d'harmoniser les conditions d'utilisation du spectre pour faciliter la mobilité et limiter les coûts. La Commission a récemment adopté une décision (2006/808/CE) sur les fréquences RFID dans la bande UHF. Cette allocation est jugée appropriée pour l'horizon de trois à dix ans; toutefois, au cas où le besoin de fréquences supplémentaires se ferait sentir, la Commission prendra les mesures qui s'imposent, en vertu des pouvoirs que lui confère la décision Spectre radioélectrique (676/2002/CE). Le CESE soutient cette position.

3.6.3

L'adoption rationnelle de nouvelles normes internationales ISO et l'harmonisation des normes régionales sont essentielles pour un lancement sans heurt des services. Les organes européens de normalisation concernés, le CEN et l'ETSI, sont entièrement impliqués. La Commission invite ces organes, en coopération avec l'industrie, à faire en sorte que les normes émergentes répondent aux exigences européennes, notamment en matière de respect de la vie privée, de sécurité, de DPI et d'autorisations. Étant donné que les normes industrielles et les brevets de marques déposées avancent souvent en parallèle, le CESE exhorte la Commission à mobiliser ses forces afin d'inciter l'industrie et les organes de normalisation à agir rapidement, de manière à empêcher que les applications européennes de RFID ne deviennent trop dépendantes de propriété intellectuelle coûteuse appartenant à des acteurs extracommunautaires.

3.6.4

En ce qui concerne l'environnement, les dispositifs RFID sont entièrement couverts par la directive relative aux déchets d'équipements électriques et électroniques (dite DEEE) et par la directive relative à la limitation de l'utilisation de certaines substances dangereuses dans les équipements électriques et électroniques (dite RoHS ou LSDEEE). Pour ce qui est de la santé, la question des champs électromagnétiques associés à des dispositifs RFID pourrait se poser. Les champs électromagnétiques associés aux RFID sont généralement de faible puissance, de sorte que l'exposition des travailleurs et de la population devrait rester bien en deçà des seuils fixés actuellement. Néanmoins, dans le contexte de l'accroissement général des applications sans fil, la Commission restera attentive au cadre juridique. Le CESE soutient cette position.

4.   Observations

4.1

Étant donné que la Commission publiera sa recommandation aux États membres à la fin de l'année, on peut raisonnablement supposer qu'elle acceptera l'infrastructure de sécurisation des données et de protection de la vie privée telle qu'elle existe aujourd'hui. Cela laisse notamment entendre que les organes de protection des données existant déjà dans chaque État membre deviendront l'autorité chargée des questions que la RFID soulève en matière de protection de la vie privée et des données.

4.2

Dans sa communication, la Commission affirme notamment qu'elle entend instaurer et consulter un nouveau groupe des parties intéressées par la RFID. Le CESE voudrait exposer le présent avis auprès de ce groupe.

4.3

Les menaces que l'identification par radiofréquences fait peser sur la vie privée et les libertés civiles sont graves:

(a)

Les étiquettes RFID peuvent être placées dans ou sur des objets et des documents sans que la personne obtenant ces articles n'en ait connaissance. Étant donné que les ondes radio passent sans encombre et en silence à travers le tissu, le plastique et d'autres matériaux, il est possible de lire des étiquettes RFID cousues à l'intérieur de vêtements ou apposées sur des objets transportés dans un sac à main, dans un sac à provision, dans une valise ou autre.

(b)

Le code produit électronique pourrait permettre de doter chaque objet sur terre de sa propre carte d'identité unique. L'utilisation de numéros d'identification uniques pourrait entraîner la création d'un système mondial d'enregistrement des articles, par lequel chaque objet physique est identifié et associé à son acquéreur ou à son propriétaire au point de vente ou de transfert.

(c)

Le déploiement de l'identification par radiofréquences nécessite la création de gigantesques bases de données contenant les données des étiquettes uniques. Ces registres pourraient être croisés avec les données d'identification des individus, notamment à mesure que grandissent la mémoire des ordinateurs et leur capacité de traitement.

(d)

Les étiquettes peuvent être lues à distance, à travers des obstacles, par des lecteurs pouvant être incorporés de manière invisible dans quasiment n'importe quel environnement où se rassemblent des personnes. Les lecteurs peuvent être placés dans du carrelage, cousus dans des tapis, cachés dans des entrées et dissimulés dans des rayonnages, si bien qu'il est pratiquement impossible pour une personne de savoir si, et quand, elle est scannée.

(e)

Si l'identité des personnes est croisée avec les numéros d'étiquettes RFID uniques, il sera possible de localiser ou de dresser le profil de personnes à leur insu et sans leur consentement.

(f)

On peut imaginer un monde où les lecteurs RFID forment un réseau mondial omniprésent. Un tel réseau n'aurait pas besoin de lecteurs partout. Le système de la zone de circulation taxée à Londres peut localiser tous les véhicules entrant dans le centre-ville grâce à un nombre relativement réduit de caméras placées dans des points stratégiques. Un réseau de lecteurs d'étiquettes RFID stratégiquement placés pourrait être construit de la même manière. Une telle évolution ne doit pas être permise.

4.4

Dans le 7e programme-cadre de R&D, la Commission a déjà donné des indications sur les applications éthiques de la technologie affectant la sécurité des données et la vie privée (voir le guide à destination des candidats à des projets de collaboration, p. 54 (3)). L'identification par radiofréquences est un excellent exemple de la relation changeante entre la technologie, d'une part, et le droit juridique ou les attentes du public en matière de respect de la vie privée lors de la collecte et du partage de données, d'autre part. Des questions de respect de la vie privée se posent dès que des données permettant une identification unique d'une ou plusieurs personnes sont collectées et conservées, sous forme numérique ou autre. Les problèmes de respect de la vie privée peuvent être causés par un contrôle inadéquat ou inexistant en matière de divulgation de ces données. Les sources de données les plus courantes touchées par les questions de respect de la vie privée concernent la santé, la justice pénale, les finances, la génétique et la localisation. La localisation est le problème central posé par la RFID.

4.5

Dans ses instructions (4) sur l'approche à adopter en matière de protection des données et de la vie privée, la Commission a établi huit principes de bonnes pratiques applicables. Ceux-ci prévoient que les données à caractère personnel doivent être:

traitées loyalement et licitement;

traitées à des fins limitées;

adéquates, pertinentes et non excessives;

exactes;

conservées uniquement aussi longtemps que nécessaire;

traitées conformément aux droits de la personne concernée par les données;

sûres;

non transférées à des pays sans protection adéquate.

Ces lignes directrices sont pleinement appropriées au vu des questions de respect de la vie privée et de sécurité des données liées aux applications RFID.

4.6

De l'avis du CESE, les principes fondamentaux de bonnes pratiques sont les suivants:

Les utilisateurs de RFID doivent rendre publiques leurs politiques et leurs pratiques; il ne devrait pas exister de bases de données secrètes regroupant des informations personnelles.

Les personnes ont le droit de savoir lorsque des articles dans l'environnement du commerce de détail contiennent des étiquettes ou des lecteurs RFID. Toute lecture d'étiquettes opérée dans l'environnement du commerce de détail doit être transparente pour toutes les parties.

Les utilisateurs de RFID doivent informer le public de l'utilisation qui sera faite des étiquettes et des lecteurs. La collecte d'informations devrait être limitée aux éléments nécessaires pour atteindre l'objectif déclaré.

Il appartient aux utilisateurs de RFID de mettre en œuvre la technologie et de la faire fonctionner dans le respect des lois et des lignes directrices en matière de sécurité des données. Ils sont également responsables de la sécurité et de l'intégrité du système et de ses bases de données.

4.7

Les modalités d'application de ces principes font l'objet de controverses. L'idéal serait que toute entreprise participant à des transactions entre entreprises et consommateurs, telles que la vente au détail, les billetteries, les contrôles d'accès ou les services de transport, donne aux consommateurs une forme de garantie que ces principes seront respectés, une sorte de charte de protection des consommateurs. En outre, le CESE propose les lignes directrices suivantes:

a)

il convient d'interdire aux commerçants de forcer ou d'obliger les clients à accepter que les produits qu'ils achètent contiennent des étiquettes actives ou passives. On pourrait notamment envisager d'apposer les étiquettes sur l'emballage ou d'utiliser des étiquettes électroniques pouvant être enlevées comme les étiquettes de prix;

b)

les consommateurs devraient avoir la possibilité de retirer ou de désactiver toute étiquette placée sur des articles en leur possession;

c)

l'identification par radiofréquences ne devrait en principe pas être utilisée pour localiser des personnes. Cette pratique est déplacée, que cela soit, par exemple, par le biais de vêtements, de marchandises, de billets ou d'autres articles;

d)

l'identification par radiofréquences ne devrait jamais être utilisée d'une manière pouvant supprimer ou réduire l'anonymat;

e)

l'autorité responsable devrait signifier clairement que les points (c) et (d) ne seront admissibles que dans des circonstances exceptionnelles et après notification officielle préalable à ladite autorité.

4.8

Certaines exceptions aux lignes directrices mentionnées ci-dessus peuvent être envisagées dans les cas suivants:

si des particuliers choisissent de faire usage de la possibilité de maintenir les étiquettes en activité pour leur convenance personnelle;

si des particuliers consentent à être localisés dans des environnements sensibles tels que des établissements et des institutions publics et privés de haute sécurité;

si des particuliers choisissent d'utiliser des applications qui les localiseront et les identifieront de la même manière qu'ils sont déjà localisés et identifiés par l'utilisation de téléphones portables, de cartes bancaires, d'adresses internet, etc.

Il convient que toute exception de ce type soit notifiée à l'autorité responsable.

4.9

La localisation de personnes ou de biens dans un environnement de passage constitue une classe d'applications qui pourrait bénéficier d'une exemption générale. Dans le secteur du transport aérien, les bagages pourraient être étiquetés lors de leur enregistrement afin d'accroître la sécurité et le degré de certitude associés au maniement des bagages; les passagers pourraient être étiquetés pour améliorer et accélérer à temps les mouvements des avions et accroître la rapidité des processus de sécurité. Une autre application pourrait servir à localiser les patients après leur admission à l'hôpital en vue d'une opération. Afin que cette classe d'applications puisse être acceptable, il est essentiel d'avoir la certitude que les étiquettes seront détruites au terme de l'opération.

4.10

La technologie de l'identification par radiofréquences n'est pas arrivée à maturité, si bien que nous ne saisissons pas encore son plein potentiel. D'un côté, elle pourra apporter des avantages encore inconcevables à notre civilisation technologique, de l'autre, elle pourra représenter la plus grande menace que la technologie ait jamais fait peser sur la vite privée et la liberté. Le CESE est d'avis que les applications RFID devraient être développées selon un code éthique strict, dans le respect de la vie privée, de la liberté et de la sécurité des données mais que, avec les mesures de sauvegarde nécessaires, le développement des applications devrait se poursuivre.

4.11

En conclusion, il convient que là où les applications RFID sont autorisées, leur mise en œuvre soit absolument transparente pour toutes les personnes concernées. Les applications destinées à améliorer le maniement des marchandises sont dans l'ensemble acceptables. Les applications concernant l'étiquetage des personnes ne sont en général pas acceptables, sauf dans des environnements de passage. Les applications associant des personnes à des marchandises peuvent être acceptables à des fins de marketing. Les applications identifiant des personnes grâce aux marchandises qu'elles ont achetées sont en général inacceptables. En outre, certaines applications n'ont pas leur place dans une société libre et ne devraient jamais être autorisées. Le besoin impératif de préserver la vie privée et l'anonymat doit être au centre de la recommandation adressée par la Commission aux États membres.

Bruxelles, le 11 juillet 2007.

Le Président

du Comité économique et social européen

Dimitris DIMITRIADIS


(1)  Directive 1995/46/CE relative à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données.

(2)  Directive 2002/58/CE concernant le traitement des données à caractère personnel et la protection de la vie privée dans le secteur des communications électroniques.

(3)  http://cordis.europa.eu/fp7/dc/index.cfm?fuseaction=UserSite.CooperationDetailsCallPage&call_id=11 (disponible en anglais uniquement).

(4)  Article 6 de la directive 95/46/CE relative à la protection des données.


27.10.2007   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 256/73


Avis du Comité économique et social européen sur la «Communication de la Commission au Parlement Européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions “Galileo à la croisée des chemins: la mise en œuvre des programmes européens de GNSS”»

COM(2007) 261 final

(2007/C 256/14)

Le 16 mai 2007, la Commission européenne a décidé, conformément à l'article 262 du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la proposition susmentionnée.

Le 29 mai 2007, le Bureau du Comité économique et social européen a chargé la section spécialisée «Transports, énergie, infrastructures, société de l'information» de préparer les travaux en la matière.

Vu la nature urgente des travaux, le Comité économique et social européen a désigné M. BUFFETAUT rapporteur général lors de sa 437e session plénière des 11 et 12 juillet 2007 (séance du 11 juillet 2007), et a adopté le présent avis par 95 voix pour et 1 abstention.

1.   Conclusions et recommandations

1.1

Le Comité économique et social européen salue le réalisme et le courage de la Commission qui a su tirer dans sa communication «Galileo à la croisée des chemins, la mise en œuvre des programmes européens GNSS», COM(2007) 261, les conséquences du blocage des négociations du contrat de concession du système Galileo.

1.2

Il approuve pleinement qu'un terme soit mis à ces négociations dans l'impasse et la mise en œuvre d'une stratégie de rechange.

1.3

Il soutient totalement la volonté du Conseil, du Parlement européen et de la Commission de mener à bien le projet Galileo en conservant l'ampleur et la définition initiale.

1.4

Il considère que le projet Galileo constitue un projet stratégique pour l'Union européenne, capable de manifester la capacité de l'Europe de se mobiliser pour une formidable aventure humaine, scientifique, technique et économique.

1.5

Il estime que l'abandon du projet serait désastreux pour l'Union européenne.

1.6

Il souligne que le scénario proposé par la Commission représente une proposition intéressante et réaliste pour mener à bien le projet et pense que le fait de confier la responsabilité et le financement de la phase de développement et de déploiement à la puissance publique correspond à une vue réaliste de la situation.

1.7

Ce scénario ayant d'importantes conséquences sur le plan financier et nécessitant un effort certain de la part des finances publiques, le CESE insiste sur la nécessité de réfléchir sans a priori sur la possibilité d'un usage militaire, notamment défensif, du système Galileo par les Etats membres de l'Union européenne, ainsi que sur l'éventualité d'un faible prélèvement sur le prix des terminaux du système afin de contribuer à l'équilibre financier du projet.

1.8

Le CESE recommande de clarifier au plus vite les conditions et le mode de mise en concession du système EGNOS complément régional européen du GPS américain, et de bien coordonner la mise en œuvre de ce programme avec celle de Galileo.

1.9

Il approuve le choix de faire de l'Agence spatiale européenne le maître d'œuvre et l'adjudicataire du projet.

1.10

Il met en garde sur la tentation de soumettre le projet Galileo aux contraintes du principe dit du «juste retour», même s'il comprend les justes préoccupations des Etats membres en matière de développement scientifique, technique et économique.

1.11

Il rappelle que les questions de gouvernance et de répartition des responsabilités économiques et techniques, lorsqu'elles sont mal maîtrisées, peuvent se révéler très dangereuses, comme l'a démontré l'histoire récente d'Airbus.

1.12

Il demande aux États membres de tout faire pour mener à bon port le projet Galileo.

2.   Le contexte de la communication

2.1

Cinq mois après la publication du Livre vert sur les applications de la navigation par satellite, la Commission a publié une nouvelle communication au titre alarmiste: «Galileo à la croisée des chemins: la mise en œuvre des programmes européens de GNSS».

2.2

Titre choc provoqué par le blocage des négociations du contrat de concession. En effet aucun accord ne s'est révélé envisageable avec le consortium industriel candidat à cette concession. Il existait en effet des divergences fondamentales quant au modèle économique du projet.

2.3

Dès lors la Commission européenne ne pouvait faire autrement que de prendre acte de cet échec, lequel venant après une série de retard dans la mise en œuvre de Galileo, nécessitait une réorientation majeure du projet tant sur le plan économique que juridique.

2.4

Au demeurant le Conseil des Ministres des transports du 22 mars dernier avait demandé à la Commission d'évaluer la situation et de proposer des scénarios de rechange détaillés pour le contrat de concession, ainsi qu'un scénario de mise à disposition à bref délai du système de navigation EGNOS, complément régional du GPS américain, comme précurseur de Galileo.

2.5

Le Parlement européen, tout en réaffirmant son soutien au projet Galileo, s'était alarmé des retards répétés dans le développement du projet et avait demandé à la Commission de formuler des propositions pour redresser la situation.

2.6

La communication de la Commission répond à cette double demande des institutions décisionnaires de l'Union européenne.

3.   Le contenu de la communication

3.1

Le premier point important est que la Commission invite le Conseil et le Parlement européen à prendre acte de l'échec des négociations actuelles du contrat de concession et par conséquent d'y mettre fin. En vérité, devant le blocage des négociations, elle n'avait guère d'autre solution.

3.2

Toutefois elle demande aussitôt au Conseil et au Parlement de réaffirmer leur engagement pour la mise en place d'un système de navigation par satellite indépendant et à soutenir la poursuite du programme Galileo. Ainsi l'échec présent des négociations du contrat de concession ne doit pas signifier l'abandon de Galileo. Tout au contraire la Commission souhaite que soit réaffirmé le caractère stratégique du projet pour l'Union européenne, ainsi que son importance sur le plan économique.

3.3

La poursuite du programme Galileo doit se faire, pour la Commission, dans un schéma identique au schéma actuel. Les caractéristiques techniques doivent demeurer les mêmes, à savoir une constellation de 30 satellites offrant cinq services différents avec une excellente qualité du signal.

3.4

Il ne saurait donc être question de se rabattre sur un Galileo au rabais.

3.5

La Commission propose deux scénarios alternatifs:

a.

Scénario A): Le secteur public finance et acquiert dans un premier temps un système restreint offrant des capacités opérationnelles limitées. Ce système restreint comporterait 18 satellites avec le segment sol associé. Il permettrait une précision de positionnement et une couverture géographiques suffisantes pour offrir des services sur le marché, sans toutefois tirer pleinement partie de la valeur ajoutée technique de Galileo.

Les 12 satellites restants seraient ensuite mis en place par le secteur privé dans le cadre d'un contrat de concession:

b.

Scénario B): Le secteur public finance et acquiert tout le système avec des capacités opérationnelles totales. L'infrastructure comprendrait 30 satellites avec le segment sol associé. Elle permettrait la fourniture de tous les services de Galileo à l'ensemble des utilisateurs potentiels et démontrerait au futur concessionnaire la fiabilité de la conception du système. Le partenariat public-privé, sous la forme d'un contrat de concession de service, couvrirait le fonctionnement, l'exploitation du système et la maintenance de la constellation des 30 satellites. Le déploiement complet serait achevé fin 2012 et le contrat de concession couvrirait la période 2010-2030.

3.6

La Commission préconise l'adoption du second scénario en deux étapes:

commencer l'exploitation immédiate d'EGNOS par une mise en concession spécifique, comme système précurseur de Galileo, pour 2008. L'exploitation, après déploiement de la constellation Galileo complète, devant être effective pour fin 2012;

en parallèle, négocier et mettre en place un partenariat public-privé, sous la forme d'une concession, pour la phase d'exploitation d'EGNOS et de Galileo entre 2010 et 2030.

3.7

Elle souhaite que le Conseil et le Parlement soutiennent ces deux programmes en affirmant un certain nombre de principes:

rendre le système EGNOS opérationnel dès 2008,

décider que les programmes européens de navigation par satellite soient définis, acceptés, gérés et supervisés par l'Union européenne, dans l'intérêt de tous les Etats membres,

reconnaître le caractère stratégique de Galileo,

choisir l'Agence spatiale européenne comme maître d'œuvre et pouvoir adjudicataire, pour le compte de l'Union européenne, sous son autorité et selon ses règles,

introduire une concurrence loyale dans le programme, lorsque cela est possible,

renforcer et restructurer la gouvernance publique des programmes en confiant la responsabilité politique et le rôle dirigeant à la Commission européenne,

susciter la confiance des investisseurs.

3.8

Un tel programme nécessite la mobilisation de ressources financières importantes d'engager les montants prévus dans les perspectives financières pour le programme actuellement proposé, mais encore d'assurer un financement supplémentaire.

3.9

Dans le cadre financier 2007-2013, il s'agirait de disposer de 2,4 milliards d'euros afin de poursuivre le schéma actuel en y ajoutant des mesures visant à réduire les risques. Si l'on se place dans la perspective de l'acquisition de la première constellation complète (30 satellites), suivie d'un PPP pour la phase d'exploitation de 2010 à 2013, il faudrait mobiliser 3,4 milliards d'euros.

4.   Commentaires généraux

4.1

Il est sain que la Commission ait pris acte du blocage des négociations du contrat de concession dans le cadre actuel, et préconisé la nécessité d'y mettre fin. Des faux-semblants n'auraient fait que prolonger une situation de malaise et auraient encore retardé la mise en œuvre du programme.

4.2

Le Conseil a conclu, sur ce point, de la même façon que la Commission et a décidé de clore les négociations pour repartir sur de nouvelles bases. Il a également tenu à réaffirmer le caractère prioritaire du projet Galileo, ce dont se réjouit le CESE.

4.3

Au demeurant, une récente étude d'Euro baromètre (mai/juin 2007) sur le programme Galileo, commandée par la DG TREN, indique que 80 % de la population de l'Union européenne soutient l'idée d'un système de navigation par satellite indépendant et 63 % de cette population serait favorable à un financement complémentaire pour mener à bien le projet. Toutefois l'appréciation des effets d'un abandon de Galileo sur l'image de l'Union européenne est assez contrastée. 44 % des personnes interrogées estiment que l'effet serait néfaste et 41 % estiment que cela n'aurait aucun impact.

4.4

Le CESE se félicite du soutien du Conseil et de l'opinion publique au projet Galileo mais considère qu'un abandon du projet aurait un effet désastreux sur l'image de l'Union européenne et sur la confiance que l'on peut placer dans les projets européens. Il serait le signe de l'incapacité de l'Union européenne à mener à bien un projet scientifique et technique d'avenir, de nature à mobiliser le meilleur de nos facultés de recherche, d'innovation, et de technicité ouvrant des opportunités de marché importantes.

4.5

Ceci étant rappelé, la communication laisse des questions ouvertes. Un accent fort est mis sur le système EGNOS et la nécessité de le mettre en exploitation dans les délais les plus brefs, mais la Commission repousse la question de savoir qui va l'exploiter. Elle se borne à indiquer qu'il sera procédé à une mise en concession, mais aucune indication n'est fournie sur la forme de celle-ci et sur les éventuels partenaires (entreprise, consortium des organismes ou sociétés chargés de la gestion du trafic aérien? …). S'agira-t-il d'un opérateur public ou privé? Quelles seront les procédures de mise en œuvre et quels sont les délais?

4.6

Les systèmes d'augmentation qui permettent d'améliorer la qualité du service GPS sont régionaux (outre EGNOS, il en existe un en Amérique du nord, le WAAS et un autre en Inde). Quelles sont les connexions entre ces systèmes régionaux et quels accords internationaux nécessitent-ils?

4.7

En ce qui concerne les difficultés qui ont été rencontrées avec le consortium candidat à la concession Galileo, il faut prendre garde à ne pas être confrontés à de semblables difficultés dans les nouveaux scénarios proposés. En effet derrière les membres du consortium, se profilaient souvent les directives nationales. Beaucoup des sociétés concernées dépendent en effet de la commande publique ou sont des sociétés d'Etat et il serait naïf de croire qu'il s'agissait d'un consortium «privé» classique. Ce cas de figure peut se reproduire dans les nouveaux scénarios. Dans cette perspective, une réelle mise en concurrence devra être rigoureusement organisée.

4.8

Le CESE se félicite que le schéma général du projet n'ait pas été modifié et notamment la gamme des services proposés. La proposition de la Commission est la plus raisonnable. Changer l'économie du projet aurait entraîné des retards supplémentaires, des coûts financiers accrus et une prise de risques inutiles.

4.9

Le Comité considère également que la Commission a eu raison de souligner que «sans remettre en cause le caractère civil du système, il faut admettre que des recettes substantielles peuvent être générées par les utilisateurs militaires». Conscient du caractère sensible de cette question, il estime que les discussions à ce sujet doivent être poursuivies entre les États membres. Il considère que les Etats membres de l'Union Européenne devraient pouvoir librement décider d'utiliser le système gouvernemental à accès réservé pour des usages militaires défensifs s'ils le souhaitent, et moyennant des financements adéquats.

4.10

La question du financement du projet étant essentielle, le CESE se demande s'il ne faudrait pas envisager un très faible prélèvement sur la vente des terminaux afin de contribuer au financement de Galileo.

4.11

Si le CESE soutient l'idée de voir l'Agence spatiale européenne devenir maître d'œuvre du projet et adjudicataire, il souligne que ceci ne doit pas soumettre le projet Galileo à la règle dite du juste retour, même s'il est parfaitement conscient que les accords entre États dans le précédent scenario avaient été le fruit de subtils équilibres économiques entre États membres. Il souligne la nécessité de ne pas mettre en péril un projet aussi essentiel qu'emblématique pour l'Union européenne, en raison de craintes relatives aux retombées économiques du projet pour les principaux Etats membres participants. Il rappelle que les difficultés que rencontre aujourd'hui EADS sont nées de ce genre d'appréhensions. La volonté d'équilibre économique entre partenaires est légitime mais, si elle aboutit à une paralysie de fait ou à des retards dans la mise en œuvre des projets, c'est l'ensemble de ce projet européen emblématique, avec ses dimensions industrielle et scientifique aussi bien que ses retombées économiques qui est remise en cause.

4.12

Enfin, le CESE suppose que la volonté de la Commission de préserver les principes de gouvernance communautaire l'a amené à revendiquer de façon insistante la maîtrise politique du projet, d'une façon peut-être peu diplomatique et sous estimant le rôle important joué par l'Agence Spatiale Européenne.

Bruxelles, le 11 juillet 2007.

Le Président

du Comité économique et social européen

Dimitris DIMITRIADIS


27.10.2007   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 256/76


Avis du Comité économique et social européen sur le «Rapport de situation bisannuel sur la stratégie européenne de développement durable»

(2007/C 256/15)

Dans un courrier adressé à Monsieur DIMITRIADIS en date du 11 décembre 2006, la Commission européenne a invité le Comité économique et social européen, conformément à l'article 262 du traité instituant la Communauté européenne, à élaborer un avis sur le «Rapport de situation bisannuel sur la stratégie européenne de développement durable».

La section spécialisée «Agriculture, développement durable, protection de l'environnement (Observatoire du développement durable)», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 8 juin 2007 (rapporteur: M. RIBBE).

Lors de sa 437e session plénière des 11 et 12 juillet 2007 (séance du 11 juillet), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 70 voix pour, 21 voix contre et 10 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations du Comité

1.1

Le Comité se félicite du fait que la «nouvelle» stratégie en faveur du développement durable adoptée lors du sommet européen de juin 2006 ait clairement fait évoluer le débat. En particulier, l'obligation de présenter des rapports de situation tous les deux ans contribuera à ce que les décideurs politiques et la société disposent d'informations plus concrètes sur les avancées positives et les problèmes de mise en œuvre.

1.2

Dans ses précédents avis sur la durabilité, s'il a en principe toujours accueilli favorablement les documents présentés par la Commission, le Conseil et le Parlement européen, le CESE a toutefois aussi soulevé des points critiques et élaboré des propositions parfois détaillées qui, souvent, n'ont pas été prises en compte par ces institutions. Une fois de plus, le CESE regrette que les objectifs de la plupart des secteurs reconnus comme prioritaires soient toujours formulés de manière trop imprécise, et surtout que la nouvelle stratégie reste bien trop vague en ce qui concerne les instruments à mettre en œuvre.

1.3

Le CESE approuve en particulier les objectifs-clés et principes politiques directeurs définis par la nouvelle stratégie, et invite la Commission, le Conseil et le Parlement européen à les prendre dûment et sérieusement en compte.

1.4

Le Comité espère que le premier rapport de situation, dont la publication est prévue pour septembre 2007, fournira notamment des informations plus précises sur les éléments suivants:

quels instruments économiques la Commission utilisera-t-elle pour «favoriser la transparence du marché ainsi que des prix qui tiennent compte des coûts économiques, sociaux et environnementaux réels des produits et des services (fixer des prix justes)»?

comment mettre en œuvre dans la pratique la demande du Conseil européen consistant à «envisager de nouvelles mesures fiscales qui épargnent l'emploi et visent plutôt à taxer l'utilisation des ressources et la consommation d'énergie et/ou la pollution, afin de contribuer à la réalisation des objectifs de l'UE en matière d'augmentation du taux d'emploi et de réduction des incidences négatives sur l'environnement selon des modalités efficaces au regard des coûts»?

quel calendrier concret la Commission se fixe-t-elle pour mettre en œuvre l'objectif du Conseil européen qui est de supprimer progressivement les subventions ayant des effets négatifs sur l'environnement et l'idée formulée par le CESE consistant à transférer une partie au moins de ces ressources dans un «fonds de durabilité de l'UE» pourrait-elle être prise en compte?

de quelle manière la Commission entend-elle éviter à l'avenir les contradictions qui subsistent manifestement entre les intentions et la réalité en matière de politique de durabilité, par exemple dans le secteur des transports (cf. paragraphes 4.15 et 4.16) et

quelle attitude adopter à l'égard des États membres qui n'ont pas présenté une stratégie nationale de développement durable valable?

1.5

Étant donné que les incidences sur le climat s'aggravent considérablement, le Comité comprend qu'une importance particulière soit accordée aux secteurs du climat et de l'énergie. Il considère toutefois que:

s'il convient de s'en féliciter, il ne faudrait cependant pas que d'autres éléments-clés de la stratégie s'en trouvent négligés,

bien qu'il soit urgent de prendre des mesures politiques, toutes les décisions devraient être adoptées conformément aux «principes directeurs des politiques» définis par la nouvelle stratégie, c'est-à-dire moyennant la participation des citoyens, des entreprises et des partenaires sociaux, en exploitant les meilleures connaissances disponibles, etc. La décision qui a été prise dans le cadre du paquet «énergie» de produire à l'avenir 10 % des carburants à partir de la biomasse, au lieu des 5,75 % décidés au préalable, est contraire à ces principes. Le CESE considère que ce secteur est susceptible de poser d'importants problèmes, qu'il identifiera dans un avis séparé sur le rapport de situation correspondant de la Commission (1).

2.   Lignes générales et contexte de l'avis

2.1

En 2001, le Conseil européen de Göteborg a adopté la «stratégie européenne de développement durable». En décembre 2005, la Commission a présenté une communication au Parlement européen et au Conseil intitulée «Examen de la stratégie en faveur du développement durable — une plate-forme d'action» (2), définissant «de nouvelles mesures concrètes pour l'avenir».

2.2

Au cours des dernières années, le Comité économique et social européen a consacré nombre de ses avis à la stratégie de développement durable. À chaque fois, il a mis l'accent sur l'importance considérable que revêt le développement durable pour notre société. Le Comité a toujours accueilli favorablement les principes des approches présentées par la Commission et appuyé les déclarations du Conseil européen selon lesquelles la stratégie du développement durable constitue la stratégie suprême de l'Union, dont les objectifs doivent notamment inspirer la stratégie de Lisbonne.

2.3

Toutefois, dans ses avis consacrés au «développement durable», le CESE s'est également souvent montré critique et a soulevé des questions constructives, à certaines desquelles la Commission et le Conseil n'ont, à ce jour, toujours pas répondu.

2.4

Dans son dernier avis sur ce thème, le CESE s'est penché sur la communication susmentionnée de la Commission de décembre 2005. Dans cet avis, il a regretté que dans son programme d'action, qu'elle qualifie «d'ambitieux», la Commission ne suive ni la recommandation émise en avril 2004 par le Comité ni sa propre promesse de juin 2005. En effet, contrairement à ce qu'elle avait affirmé, elle ne fixait à nouveau aucun objectif clair à atteindre dans le cadre de la stratégie de développement durable.

2.4.1

Le CESE avait rappelé à l'époque qu'une stratégie décrit la voie à suivre pour atteindre des objectifs. L'absence d'objectifs concrets entraîne forcément des problèmes concernant la désignation des instruments à utiliser. En effet, sans savoir où l'on veut aller, il est impossible de déterminer comment s'y rendre. Aussi, de l'avis du CESE, la communication a-t-elle laissé plus de questions en suspens qu'elle n'a donné de réponses et d'orientations.

2.4.2

Si l'on ne fournit à l'opinion publique et aux partenaires sociaux ni objectifs ni outils, en d'autres termes si «une grande incertitude plane sur ce que représente concrètement le développement durable et sur la manière dont les évolutions futures modifieront les conditions de vie actuelles, … (cela) suscite craintes et résistance dans les secteurs susceptibles d'être concernés», affirmait le CESE en 2004 dans un de ses avis (3). Malheureusement, force est de constater qu'au cours des trois dernières années, la situation ne s'est guère clarifiée, ce qui nuit indubitablement à la crédibilité de la politique de durabilité.

2.5

La présidence autrichienne qui était en place au premier semestre 2006 devait probablement partager cet avis. C'est la raison pour laquelle elle a plus ou moins mis en attente la communication de la Commission de 2005 et élaboré un document distinct qui a été examiné et adopté en tant que «nouvelle stratégie» par les chefs d'État et de gouvernement lors du sommet de juin 2006 (4).

2.6

Cette nouvelle stratégie confère un rôle important au CESE, sur la base de l'engagement dont il a fait preuve jusqu'ici dans le domaine du développement durable. En effet, conformément au paragraphe 39, le Comité «devrait jouer un rôle actif en faisant en sorte que le public soit partie prenante au processus et notamment en faisant office de catalyseur pour favoriser le débat au niveau européen». En outre, il est «invité à contribuer au rapport de situation bisannuel de la Commission».

2.7

Le CESE entend assumer cette responsabilité et répondre à cette demande au moyen du présent avis. Il commencera par formuler quelques observations générales sur la «nouvelle» stratégie (paragraphe 3) et examinera ensuite brièvement les thèmes abordés par la nouvelle stratégie (paragraphe 4). Pour terminer, il exposera son point de vue sur certains éléments du rapport de situation qui doit être présenté en septembre 2007 (paragraphe 5).

3.   Observations générales concernant la «nouvelle» stratégie

3.1

Lorsque l'institution politique la plus importante de l'UE examine et modifie l'une de ses politiques, comme le Conseil européen l'a fait avec la «Stratégie de l'UE en faveur du développement durable», la société civile s'attend à ce qu'un document soit élaboré, qui précise:

les raisons pour lesquelles un examen était nécessaire;

les conclusions de l'analyse des carences, c'est-à-dire le niveau auquel des problèmes se posaient;

les aspects qui doivent concrètement être modifiés dans le futur, quels domaines ne seront plus abordés ou le seront différemment ou quelles raisons justifient l'examen de nouveaux domaines et

la manière dont la Commission envisage par exemple d'atteindre l'objectif nécessaire consistant à intégrer les questions de durabilité dans les travaux de toutes ses Directions générales.

3.2

Il est malheureusement vain de chercher toute trace d'une telle réflexion et de ses conclusions dans le document à l'examen. La Commission se contente de présenter une «nouvelle» stratégie.

3.3

Sur la base d'une communication de la Commission, quatre domaines prioritaires avaient été intégrés dans la stratégie de Göteborg:

les changements climatiques;

les transports;

la santé publique et

les ressources naturelles.

3.4

À l'époque, la Commission avait proposé deux thèmes supplémentaires dans son document: la lutte contre la pauvreté et le vieillissement de la population. Ceux-ci n'avaient toutefois pas été retenus dans la stratégie de Göteborg, sans que le Conseil européen ne motive sa décision. Dans son avis d'avril 2004 (5), le CESE avait déploré l'exclusion de ces thèmes, estimant qu'elle allait «à l'encontre de l'objectif recherché». Il avait également regretté que la stratégie ne fasse pas l'objet d'un document unique qui pourrait être transmis et promu à l'égard de l'opinion publique et que la dimension externe du développement durable ait été traitée dans le cadre d'un processus séparé ayant donné lieu à l'élaboration d'un document distinct.

3.5

La «nouvelle stratégie» décrit désormais sept défis-clés et dégage les objectifs opérationnels et mesures correspondants. Il s'agit des domaines suivants:

changement climatique et énergie propre;

transport durable;

consommation et production durables;

conservation et gestion des ressources naturelles;

santé publique;

inclusion sociale, démographie et migration;

pauvreté dans le monde et défis en matière de développement durable.

3.6

La comparaison des deux stratégies montre que la «nouvelle» n'implique en soi aucun déplacement de priorité. Elle se contente de compléter les thèmes de la stratégie de Göteborg en y ajoutant les impératifs identifiés par la Commission dès 2001 («lutte contre la pauvreté» et «vieillissement de la population») ainsi que la «consommation et production durables».

3.7

Le CESE le comprend très bien, dans la mesure où tant les questions intégrées en 2001 que celles qui ont été rejetées ne sont pas résolues et qu'il est plus urgent que jamais qu'elles fassent l'objet d'une politique forte. Toutefois, compte tenu précisément de l'absence de mesures politiques suffisantes, il est intéressant de se demander ce qui différencie réellement la nouvelle stratégie de l'ancienne et de quelle manière évaluer les succès enregistrés par cette dernière. Il est surtout important de se poser cette question afin qu'on ne puisse pas dire que le fait d'élaborer constamment de nouveaux documents crée plus de confusion qu'il ne contribue au renforcement politique d'un processus nécessaire. Le CESE a à plusieurs reprises attiré l'attention sur le fait que la politique de durabilité ne se mesure pas au volume des documents élaborés par les services administratifs et les décideurs politiques mais exclusivement aux mesures concrètes adoptées.

3.8

La nouvelle stratégie repose sur une série d'excellents principes en matière de développement durable et s'efforce de les traduire au moyen d'un certain nombre d'objectifs et d'actions concernant chacun des sept domaines prioritaires sélectionnés, ainsi que de certaines actions relatives à des thèmes transversaux et au développement de processus pour la mise en œuvre et le contrôle des progrès accomplis. À cet égard, la nouvelle stratégie représente certainement une amélioration par rapport à la précédente.

3.9

Les premières constatations suggèrent que les parties de la stratégie relatives aux changements climatiques et à l'énergie sont actuellement prises à bras le corps. s'il convient de s'en féliciter, il ne faudrait cependant pas que d'autres éléments-clés de la stratégie s'en trouvent négligés. Le présent passage en revue de la mise en œuvre de la stratégie est une occasion importante d'examiner la question, de tenter de lui donner davantage de poids et de lui faire jouer un rôle moteur dans tous les domaines-clés qu'elle aborde. Le Comité rappelle à nouveau que le développement durable est une approche intégrante globale et non une série d'options distinctes dans lequel chacun peut choisir le menu qui lui convient. Les objectifs en matière de changement climatique sont à présent suffisamment clairs, précis et urgents pour devenir réellement une force motrice poussant à l'action. Toutefois, s'agissant de la plupart des autres thèmes de la stratégie, les objectifs de développement durable sont trop vagues et extensibles pour être en mesure d'induire un changement significatif.

3.10

Objectif de la stratégie. Si les sept thèmes de la nouvelle stratégie constituent un progrès par rapport aux quatre thèmes inadéquats de la version précédente, il subsiste toutefois un certain nombre d'omissions importantes. Dans son avis exploratoire d'avril 2004 (6), le CESE avait déjà réclamé que des fonds spécifiques soient octroyés à l'agriculture. Le Comité réitère sa demande, dans la mesure où il a, à de nombreuses reprises, exprimé de sérieux doutes quant à la possibilité de pratiquer une agriculture durable telle qu'elle est préconisée par le «modèle agricole européen» dans les conditions créées par un marché mondialisé. Ses réserves sur le fait de savoir si la PAC va véritablement dans la bonne direction sont renforcées par le fait que, pour la période de programmation 2007-2013, les chefs d'État et de gouvernement ont réduit sensiblement les crédits du deuxième pilier de la PAC, qui est extrêmement important pour le développement de l'agriculture durable. Le CESE a souvent déploré cette décision, dont il se demande comment elle est conciliable avec la politique du développement durable. Traiter, dans le cadre de la nouvelle stratégie, la question de l'agriculture sous la rubrique «ressources naturelles» ne permet pas de résoudre le problème.

3.11

La question de savoir si une politique agricole axée sur des marchés mondiaux ouverts est susceptible d'être durable soulève automatiquement la question plus générale des règles qui s'appliquent au niveau de la production et du commerce à l'échelle mondiale. L'OMC est une organisation basée sur des accords dont l'objectif est de promouvoir la libre-concurrence. Toutefois, et le CESE l'a montré à maintes occasions, cela ne veut pas dire que les échanges commerciaux libres et libéralisés sont nécessairement durables. Malheureusement, et c'est une grave lacune, la nouvelle stratégie ne contient aucune piste pour transformer le commerce libre en commerce compatible avec les principes de durabilité. À nouveau, force est malheureusement de constater que les responsables de l'UE ont jusqu'ici omis de répondre à cette question soulevée par le CESE il y a trois ans déjà (7), même si celui-ci reconnaît que ces dernières années, l'UE s'est véritablement efforcée de négocier de nouvelles règles en matière de commerce mondialisé, y compris avec le FMI et la Banque mondiale.

3.11.1

La dimension globale revêt évidemment une importance considérable pour la stratégie en faveur du développement durable, dans la mesure où l'économie européenne est également affectée par les évolutions extérieures. C'est pourquoi la stratégie européenne doit être cohérente avec une approche globale du développement durable et l'appuyer activement. La nouvelle stratégie reconnaît cette nécessité dans la mesure où elle fait référence aux objectifs de la déclaration du millénaire, à Kyoto, au PNUE ainsi qu'à d'autres initiatives internationales. La stratégie reconnaît également la nécessité d'œuvrer à ce que «la mondialisation contribue au développement durable» et annonce que la Commission proposera en 2007 un plan d'action communautaire pour la consommation et la production durables. Toutefois, le CESE considère qu'une analyse plus vaste s'impose si l'on veut avoir une chance de résoudre la question des inégalités mondiales. La «dynamique de croissance» des pays récemment industrialisés qui aspirent, à juste titre, à un niveau de vie beaucoup plus élevé aura presque certainement des conséquences catastrophiques sur les ressources et les systèmes mondiaux. Aussi la stratégie est-elle le contexte approprié pour aborder la question des limites de la «capacité d'absorption» de la planète, déjà mise à rude épreuve par 200 ans d'industrialisation inégalement répartie.

3.11.2

Aussi le CESE propose-t-il que la Commission élabore une communication qui définisse des orientations en matière de gestion et d'allocation des ressources mondiales communes. Cette communication devrait être axée sur un cadre à long terme afin de stabiliser les concentrations de gaz à effet de serre à un niveau «sûr», grâce à la répartition au niveau international d'un «budget d'émissions globales». À l'issue d'une période convenue, au cours de laquelle les émissions par tête devraient converger, ces droits seraient identiques. Cette approche, intitulée «contraction et convergence», est déjà largement débattue et en mesure de tenir compte tout à la fois des conséquences de la croissance démographique, de la capacité industrielle, de la mondialisation et de la nécessité de réattribuer de manière équitable et pratique l'atmosphère de notre planète en tant que ressource partagée.

3.12

Clarté des objectifs. Il est largement admis que le développement durable constitue un objectif général pour la société. Toutefois, pour que la stratégie de développement durable puisse avoir quelque chance d'exercer un rôle moteur ou d'impulsion, elle doit être traduite en objectifs spécifiques quantifiables, sur la base d'une analyse rigoureuse. La nouvelle stratégie comporte certes un grand nombre d'objectifs et de mesures mais elle ne les met en relation ni avec une analyse quantitative des données et des tendances ni avec une analyse qualitative de questions et problèmes. Aussi est-il fréquent que la raison du choix de certains objectifs et actions ne soit pas claire, de même que la manière dont seront évalués les progrès accomplis en vue de leur réalisation et dans quelle mesure ils sont susceptibles de contribuer à la durabilité générale, y compris s'ils sont atteints. Le présent passage en revue devrait donner l'occasion de préciser et de clarifier tous ces points pour qu'il soit réellement possible, à l'avenir, d'évaluer les progrès accomplis de manière plus systématique.

3.13

Après ces quelques observations plutôt critiques, le CESE souhaite mettre l'accent sur un aspect positif. La «nouvelle stratégie» formule clairement des objectifs plus concrets que le «programme d'action» présenté en décembre 2005 par la Commission. C'est par exemple le cas concernant la limitation des émissions nocives pour le climat ou l'efficacité énergétique. Les conclusions formulées par le Conseil européen de mars 2007 concernant plus particulièrement le climat et, dans une certaine mesure, l'efficacité énergétique, font apparaître désormais plus clairement certains objectifs.

3.14

Outils de mise en œuvre. Cependant, la nouvelle stratégie (tout comme les conclusions du Conseil européen de mars 2007) reste elle aussi beaucoup trop imprécise sur les instruments à utiliser pour réaliser ces objectifs désormais un peu plus concrets et, partant, sur la «stratégie» qui sera adoptée. Il est toutefois intéressant de souligner que l'on peut quand même trouver, plutôt entre les lignes il est vrai, au moins quelques allusions concernant des outils susceptibles d'entrer en ligne de compte. Ces déclarations sont certes encore beaucoup trop imprécises au goût du CESE, et c'est la raison pour laquelle le rapport de situation pourrait et devrait formuler des précisions à cet égard et fournir ainsi une aide et des lignes directrices dans ce domaine (cf. paragraphe 5).

4.   Observations particulières concernant la «nouvelle» stratégie

4.1

La nouvelle stratégie met l'accent sur l'importance d'inscrire la dynamique du processus de la stratégie de Lisbonne dans les objectifs plus vastes du développement durable. Cependant, elle ne poursuit pas le raisonnement jusqu'au bout en proposant une analyse sérieuse de la manière dont il faudra modifier les modèles de croissance et de développement planétaire pour rendre le monde plus durable dans le futur. Les conséquences d'un développement non durable sont de plus en plus visibles. Ils apparaissent de manière particulièrement manifeste au niveau des conséquences catastrophiques du changement climatique, mais aussi de la diminution de la biodiversité au niveau mondial qui se poursuit, du fossé qui ne cesse de se creuser entre riches et pauvres ou de l'épuisement, à terme, des réserves de matières premières.

4.2

Ces conséquences auront des répercussions dramatiques sur le plan économique. Dans certaines régions, c'est la base même de l'économie qui menace de s'effondrer complètement. En Suisse, les banques n'accordent par exemple plus de crédit à ceux qui veulent investir dans des infrastructures de sports d'hiver lorsque celles-ci sont situées à moins de 1 500 mètres au-dessus du niveau de la mer. Par ailleurs, la plus grande incertitude règne quant au sort de l'agriculture et du tourisme en Méditerranée au cas où le climat continuerait de se réchauffer et de devenir plus sec.

4.3

«Les dépenses publiques consacrées dans l'Union à la protection du littoral contre les risques d'érosion et d'inondation se chiffrent, d'après les estimations, à 3,2 milliards d'euros, contre 2,5 milliards d'euros en 1986. Les études indiquent que le coût de l'érosion côtière atteindra en moyenne 5,4 milliards d'euros par an au cours de la période 1990-2020». Toutefois, ces sommes importantes permettront seulement d'éviter ou d'atténuer en partie les conséquences négatives auxquelles il faut s'attendre.

4.4

La situation est grave, dans la mesure où le système économique dans lequel nous vivons considère que du point de vue macroéconomique les coûts liés à la maladie et à la pollution environnementale, par exemple les milliards qu'a coûtée début 2007 la tempête Cyril sont positifs puisqu'ils contribuent à la croissance du PIB. Le CESE se réjouit que dans sa nouvelle stratégie, le Conseil européen commence enfin, même si ce n'est malheureusement que de façon marginale, à se préoccuper davantage de cette contradiction. Le Conseil européen a entièrement raison de demander, au point 20 de sa nouvelle stratégie, «d'élargir le système central de comptabilité du revenu national, notamment en intégrant les concepts de stocks et de flux et le travail non marchand, et le perfectionner en y incluant les comptes satellites, par exemple les dépenses d'environnement et les flux de matières».

4.5

Dans le contexte ainsi tracé, le CESE rappelle ses déclarations de 2004 selon lesquelles il «juge opportun d'examiner, dans le cadre de la stratégie en faveur du développement durable, des questions qui étaient considérées jusqu'ici presque comme des tabous. L'une d'elles est la croissance économique permanente en tant qu'objectif premier et aspect fondamental de toutes les politiques» (8). Le CESE veut dire par là que la croissance ne peut être purement quantitative et qu'il faut faire place à une nouvelle idée de cette notion qui accorde la priorité à des objectifs qualitatifs, basés sur des critères de durabilité. La Commission et le Conseil devraient tirer profit du futur rapport de situation:

pour déterminer s'il n'y a pas une incompatibilité — jusqu'ici non reconnue ou non déclarée — entre le développement durable d'une part et la stratégie de Lisbonne d'autre part, plus particulièrement en ce qui concerne l'utilisation du «PIB» comme indicateur de bien-être social et de prospérité économique et

pour préciser quelles devraient être les caractéristiques d'un nouvel «indicateur de bien-être» plus en conformité avec les principes de durabilité.

4.6

De nombreux exemples montrent clairement que les progrès en matière économique et environnementale ne génèrent pas nécessairement une croissance du PIB mais qu'ils peuvent parfaitement créer des emplois et contribuer à la protection de l'environnement. L'utilisation d'éclairages à économie d'énergie au lieu des traditionnelles ampoules moins efficaces réduit la consommation d'énergie et le PIB aura plutôt tendance à diminuer, malgré les investissements que cette démarche implique. Toutefois, le CESE espère davantage de «croissance» dans ce secteur, tout comme dans celui de l'isolation des bâtiments, des moteurs à faible consommation d'essence, des appareils à plus grande efficacité énergétique, etc.

4.7

Le Comité se félicite par conséquent que la Commission explore actuellement des voies alternatives au PIB comme mesure du bien-être social et accordera toute son attention à ces travaux.

4.8

Comme le CESE l'a maintes fois répété, le développement durable a un coût. Il a en outre souligné à plusieurs reprises qu'il est nécessaire, au niveau macroéconomique, de procéder à de profonds changements structurels et que ceux-ci se produiront, qu'on le veuille ou non. La tâche des décideurs politiques devrait être d'engager les changements nécessaires en douceur afin d'éviter des ruptures trop importantes et d'atténuer les conséquences négatives.

4.9

S'agissant de la responsabilité de la résolution de ces problèmes, le Comité fait observer que, au niveau microéconomique, que ce ne sont pas seulement les décideurs politiques qui sont invités à mettre en place les conditions adéquates. Le monde de l'industrie doit lui aussi participer, de même que chaque citoyen. Depuis de nombreuses années, la Commission attire à juste titre l'attention sur la responsabilité sociale des entreprises qui associe l'économique, le social et l'environnemental par le dialogue social.

4.10

Dans sa nouvelle stratégie, le Conseil européen indique (9) que celle-ci «forme le cadre général (…). (…) les objectifs sociaux et environnementaux peuvent se renforcer mutuellement». Il estime en outre que toutes les décisions politiques de l'UE devraient être prises après analyse «objective» des «dimensions sociales, environnementale et économique du développement durable, en prenant en compte la dimension externe du développement durable et les coûts de l'immobilisme». Mais lorsque la nouvelle stratégie s'intéresse aux moyens, il n'est plus question de dialogue social, mais d'un dialogue institutionnalisé entre la Commission et les États membres d'une part, et «les entreprises» de l'autre, pour définir des objectifs de performance pour des produits et procédés.

4.11

Le CESE souligne qu'il est essentiel de mener véritablement, avec toutes les forces sociales, un vaste débat sur la question des mesures politiques à prendre, de toujours garder à l'esprit les «objectifs-clés» et «principes directeurs» définis dans la nouvelle stratégie et de les prendre sérieusement en compte. C'est en effet la seule manière d'éviter d'éventuelles évolutions pernicieuses, de parvenir à une large acceptation de la part de l'opinion publique et de faire en sorte que le développement durable devienne un véritable principe d'action.

4.11.1

Les décisions du Conseil européen concernant l'incorporation de 10 % de biocarburants, au lieu des 5,75 % décidés au préalable, dans le cadre du paquet énergétique sont un exemple de ce qu'il ne faut techniquement pas faire au niveau de la procédure. Le CESE appuie sans réserve l'objectif fixé par le Conseil européen de réduire d'ici à 2020 les émissions de CO2 de 20 ou 30 % (en fonction des engagements des partenaires non européens) et reconnaît également l'objectif plus vaste (réduction de 60 à 80 % d'ici à 2050). L'incorporation de biocarburants ne doit pas seulement être un moyen de réaliser cet objectif, elle doit aussi satisfaire aux autres principes directeurs.

4.11.2

En conséquence, il y a lieu de tenir compte à la fois du bilan en matière d'énergie, de nature, et d'environnement ainsi que des incidences de la concurrence en termes d'occupation des sols, que ce soit au niveau national ou mondial. La multiplication actuelle des débats par exemple sur l'utilisation très importante d'énergies fossiles dans la production des biocarburants qui seraient dépourvus de CO2  (10), sur leur pertinence pour le climat (11) ou sur leurs incidences sur la production de denrées alimentaires (12) indique que l'on est encore loin de disposer d'une réponse satisfaisante à toutes les questions que pose la durabilité. Le CESE consacrera un avis séparé à ce thème extrêmement important.

4.12

Le Comité se réjouit que la présentation du rapport Stern notamment ait permis d'introduire un nouvel élément objectif dans le débat sur les conséquences économiques et financières de la durabilité. Comme on le sait, ce rapport calcule que «seul» 1 % du PIB suffirait pour éviter par exemple les pires conséquences du changement climatique. Une étude présentée par l'entreprise Vattenfall lors du sommet de l'économie mondiale de Davos estime que ce coût pourrait même être encore «inférieur». Même si, exprimé en une somme d'argent concrète, 1 % du PIB semble être un montant astronomique, il convient de la comparer à d'autres domaines en politique qui coûtent également très cher. La réalisation des projets TINA (13) dans le secteur des transports exigerait par exemple un investissement annuel d'environ 1,5 % du PIB d'ici à 2015 rien que dans les corridors définis, ce qui revient à dire qu'elle serait plus chère que le coût requis pour atténuer les conséquences du changement climatique selon les estimations du rapport Stern.

4.13

Cependant, comme on l'a dit, il ne s'agit pas seulement d'argent mais surtout de modifications structurelles. La «nouvelles stratégie» préconise par exemple de «dissocier la croissance économique de la demande de transports afin de réduire les incidences sur l'environnement», ce dont le CESE se félicite. Toutefois, ceci signifie aussi qu'il faut par exemple porter un regard critique sur le système de production «juste à temps» qui permet aux entreprises de renoncer au stockage et aux frais qu'il implique et de transformer les camions ou trains de marchandises en entrepôts roulants.

4.14

Le Comité constate malheureusement qu'un fossé apparaît très rapidement entre ce que l'on voudrait et la réalité. En effet, exactement 13 jours seulement après la définition de cet objectif opérationnel par le Conseil européen, la Commission a présenté son «Examen à mi-parcours du livre blanc sur les transports publié en 2001 par la Commission européenne» (14). Dans ce document, la Commission prévoit, pour la période de 2000 à 2020, une augmentation probable de 52 % concernant le PIB, de 55 % concernant le transport routier de marchandises et de 108 % concernant le transport aérien. La dissociation souhaitée s'observe principalement dans le cas du transport ferroviaire de marchandises (+ 13 %) ainsi que du transport ferroviaire de passagers (+ 19 %).

4.15

Le CESE ne peut que s'étonner du fait qu'il n'y a apparemment pas eu de concertation lors de l'élaboration de l'examen à mi-parcours du libre blanc sur les transports et de la nouvelle stratégie de durabilité, dans la mesure où le problème posé par cette contradiction manifeste entre l'objectif à atteindre et la réalité ne fait l'objet d'aucun commentaire. S'agissant du secteur des transports, il apparaît que la Commission a quasiment abandonné le premier objectif spécifique de la stratégie de développement durable, à savoir dissocier la croissance économique et de la croissance de la mobilité. La Commission devra à l'avenir mettre tout en œuvre pour éviter ce genre de contradictions. Par ailleurs, dans le secteur des transports, il convient de rechercher des solutions pour organiser nos villes et nos communautés ainsi que des modèles d'activités visant à raccourcir les lignes de communication et les trajets plutôt qu'à accroître constamment les distances que les biens et les personnes doivent parcourir pour que les besoins et souhaits soient satisfaits. Ceci implique l'adaptation des politiques fiscales et d'aménagement du territoire, ainsi qu'une coordination adéquate de tous les niveaux administratifs, du niveau de l'UE au niveau local.

4.16

S'agissant de la résolution des problèmes de transport qui ne cessent de s'accentuer, la nouvelle stratégie est plutôt décevante. Force est de constater que dans le domaine de la politique énergétique, l'UE propose désormais des solutions beaucoup plus concrètes que dans le secteur des transports, dont l'incidence négative sur le climat ainsi que sur la protection de l'environnement et de la nature va continuer à s'accroître.

4.17

Les conclusions du Conseil européen de mars 2007 (15) selon lesquelles le système d'échange de quotas d'émissions pourrait être étendu le cas échéant au transport terrestre et maritime, devraient être intégrées dans le rapport de situation sur la stratégie de développement durable et évaluées sous l'angle de leurs effets éventuels, notamment par comparaison avec d'autres instruments.

5.   Contenu du rapport de situation

5.1

Le CESE se félicite du fait que conformément au paragraphe 33 de la nouvelle stratégie, la Commission présentera tous les deux ans (à compter de septembre 2007) un rapport de situation sur la mise en œuvre de la stratégie en faveur du développement durable dans l'UE et les États membres, qui portera également sur les futures priorités, orientations et actions. Le CESE s'attend à ce que cette démarche permette de régler les questions restées en suspens.

5.2

La présentation de ce rapport est plus particulièrement importante concernant les instruments économiques et de gestion, qui sont mentionnés de manière plutôt vague. Par exemple, le paragraphe 22 indique qu'«il conviendrait d'utiliser les instruments économiques les plus adaptés pour favoriser la transparence du marché ainsi que des prix qui tiennent compte des coûts économiques, sociaux et environnementaux réels des produits et des services (fixer des prix justes)». Cette recommandation rejoint l'exigence posée à maintes reprises par le CESE en matière d'internalisation des coûts externes et des instruments nécessaires à cet effet. Le CESE rappelle que ce débat dure depuis plusieurs années, sans grands résultats. Fin mars 2007, la Commission a présenté, avec trois ans de retard, son «Livre vert sur les instruments fondés sur le marché utilisés à des fins de politique environnementale et aux fins politiques connexes», qui insuffle un nouvel élan au débat. Le Comité veillera à ce que cette question cruciale pour la durabilité évolue enfin dans le contexte du rapport de situation.

5.3

Au paragraphe 23, le Conseil européen, donc les chefs d'État et de gouvernement, exhortent les États membres à «envisager de nouvelles mesures fiscales qui épargnent l'emploi et visent plutôt à taxer l'utilisation des ressources et la consommation d'énergie et/ou la pollution, afin de contribuer à la réalisation des objectifs de l'UE en matière d'augmentation du taux d'emploi». Le CESE s'en félicite et invite la Commission à accorder une large place à ce chapitre dans son rapport de situation ainsi qu'à présenter des propositions concrètes sur la manière de parvenir à ce résultat. Dans ce contexte, il convient d'examiner très attentivement tant les conséquences sur la politique environnementale que la répartition des charges, afin que les nouvelles mesures fiscales ne touchent surtout les populations défavorisées.

5.4

Par ailleurs, le CESE accueille favorablement l'annonce selon laquelle «d'ici 2008 la Commission devrait présenter une feuille de route pour la réforme, secteur par secteur, des subventions qui ont des effets négatifs considérables sur l'environnement et qui sont incompatibles avec le développement durable». Il appuie également l'objectif qui consiste à «les supprimer progressivement». À cet égard, il estime qu'il serait utile de définir un calendrier précis et d'étudier l'éventualité de transférer les ressources économisées vers un «Fonds communautaire de durabilité» que les États membres peuvent actionner lorsqu'une mesure visant à préserver l'environnement implique des coûts disproportionnés pour leur budget (art. 175.5 et 174.1 du traité de Nice).

5.5

Dans ses précédents avis, le CESE n'a cessé de rappeler qu'il est important pour les citoyens, les entreprises et les autres acteurs concernés d'avoir une idée claire de ce qui est prévu concrètement sur le plan politique et pour quelles raisons. C'est une condition indispensable pour que l'opinion publique soit disposée à suivre et à soutenir activement ce processus. Aussi le Conseil européen a-t-il raison d'inviter la Commission à «élaborer un manuel de vulgarisation concernant cette stratégie, dans lequel figureraient notamment les bonnes pratiques et les mesures appliquées dans les États membres» (cf. paragraphe 26). Malheureusement, une feuille de route concrète fait également défaut dans ce cas. Le rapport de situation devrait aborder cette question.

5.6

La stratégie encourage une meilleure élaboration des politiques par le recours aux analyses d'impact et à une participation accrue des acteurs concernés. Le Comité s'en félicite et exhorte la Commission et les États membres à passer en revue les expériences en matière de méthodes d'analyse d'impact du développement durable et de veiller à ce que celles-ci soient effectivement appliquées dans tous les domaines de politique et d'action.

5.7

Le CESE juge importante l'approche préconisée au paragraphe 27, à savoir «élaborer une vision concrète et réaliste de l'UE sur la voie du développement durable pendant les cinquante prochaines années». Toutefois, dans ce cas également, la question se pose de savoir quelles mesures concrètes présenter, et dans quels délais. Le Comité recommande de développer dès à présent une telle vision pour l'après-2060 également. En effet, compte tenu des principes directeurs et objectifs-clés annoncés dans le document relatif à la nouvelle stratégie (16), les orientations sociales devraient être arrêtées le plus tôt possible, y compris pour le très long terme. En principe, le Conseil européen s'est déjà engagé dans cette voie lors du sommet tenu début mars 2007, dans le mesure où il a demandé de «réduire collectivement les émissions de 60 à 80 % d'ici 2050 par rapport à 1990» (17). Les réserves de certaines matières premières fossiles ou non renouvelables seront certainement encore disponibles pendant plus de 50 ans, mais elles finiront quand même par s'épuiser, de sorte qu'il est bon de réfléchir dès à présent à une politique qui voit plus loin que les cinquante prochaines années, si l'on veut parler sérieusement d'équité entre générations.

5.8

Le Comité trouverait rassurant que, de ces données transversales énoncées comme devant être intégrées à tous les niveaux d'élaboration des politiques (de l'Union comme des États membres), il soit tenu compte dans les éléments de la stratégie, pour qu'elles soit rendues opérationnelles. Or il n'est pas indiqué comment elles seront garanties, probablement parce qu'en l'état actuel des textes, confirmé par le projet de traité constitutionnel, la compétence de l'Union en la matière est une compétence partagée, et que les États membres ont en charge le financement et l'exécution de la politique de l'environnement (article 175.4 du Traité de Nice). Les acteurs n'en sont donc pas précisés.

5.9

La nouvelle stratégie annonce que chaque État membre désignera un représentant qui jouera le rôle de point de contact. Le CESE part du principe que le rapport de situation précisera si cette désignation a eu lieu et de quelle manière se déroule la coopération.

5.10

Le premier rapport de situation devrait également indiquer si tous les États membres ont à présent mis leur (première) stratégie nationale au point, comme cela était prévu pour juin 2007.Le CESE se demande qui est chargé de vérifier la qualité des stratégies nationales, sur la base de quels critères et ce qu'il se passera si certains États n'ont pas mis leur stratégie au point ou si ces stratégies ne sont pas de bonne qualité.

5.11

Au paragraphe 41, le Conseil européen évoque des «examens collégiaux volontaires» des stratégies nationales, qui devraient débuter en 2006 avec un premier groupe d'États membres. Le rapport de situation devrait préciser quelles sont les conclusions de ces examens et quelles conséquences on peut en tirer pour la stratégie européenne.

5.12

Bien qu'il respecte pleinement les compétences des États membres et des collectivités territoriales concernant de nombreux aspects du développement durable et qu'il soit conscient qu'il est important pour les États membres et les collectivités de développer leurs propres approche et engagement à l'égard d'un grand nombre de problème, le Comité considère que les progrès en matière de développement durable ne pourront être maintenus au niveau voulu que si l'on renforce la capacité de la Commission à surveiller les progrès généraux et à prendre de nouvelles mesures lorsque la mise en œuvre donne des signes de faiblesse et qu'une approche collective européenne est requise. Le CESE doute qu'une coordination et l'échange de bonnes pratiques soient suffisants. Il souhaite être destinataire chaque année de la compilation des résultats des États membres soumis à l'examen.

5.13

La stratégie recommande de mettre en place ou de renforcer les conseils nationaux sur le développement durable. Ces conseils jouent un rôle important dans la préparation des stratégies nationales en faveur du développement durable et peuvent également jouer un rôle en impulsant des mesures dans les États membres, en associant la société civile au moyen d'actions en matière de développement durable et en contrôlant les progrès accomplis. Il leur appartient également d'appliquer le principe de développement durable tout en maintenant un équilibre dynamique entre ses composantes économiques, sociales et environnementales. À la connaissance du Comité, peu de progrès ont été accomplis concernant cette recommandation. Il se penchera sur la question plus tard dans l'année et recommande entre-temps que ce thème soit également abordé avec les États membres dans le cadre du réexamen de la mise en œuvre.

5.14

Il est par ailleurs important que les États membres et la Commission examinent la manière d'assurer la coordination des questions du développement durable au sein de leurs propres structures. Le développement durable est une notion horizontale et intégrative, qui devrait transcender et parfois modifier les préoccupations plus sectorielles des différents départements et agences. L'expérience montre que sur le plan opérationnel, ceci n'est possible que s'il existe une unité centrale forte, capable de promouvoir le développement durable dans un gouvernement et qui dispose des connaissances et de l'autorité nécessaires pour défier et mettre en cause les dogmes de certains groupes ou départements. Le rapport de situation devrait mentionner les améliorations que la Commission juge encore nécessaire d'apporter au sein même de ses services. Le CESE est convaincu qu'il y a encore des progrès à faire (cf. paragraphes 4.15 et 4.16).

5.15

La stratégie rappelle à juste titre que le développement durable doit être pleinement intégré aux missions et pratiques de tous les niveaux de pouvoirs régionaux et locaux. Certaines autorités locales et régionales européennes ont joué un rôle de précurseur en orientant leurs travaux vers le développement durable et en élaborant des réponses innovantes au changement climatique et à d'autres défis posés par la durabilité. La révision de la mise en œuvre de la stratégie de développement durable est une excellente occasion d'évaluer les progrès accomplis en matière de développement durable aux niveaux local et régional et d'examiner de quelle manière diffuser le plus largement possible les meilleures pratiques existantes.

5.16

Le paragraphe 45 évoque l'éventualité de décider, en 2011, à quel moment un «examen» de la stratégie en faveur du développement durable sera nécessaire. Le CESE ne peut marquer son accord avec cette procédure. S'il apparaît, dans le cadre du rapport de situation, que l'Europe rencontre des problèmes sur la voie de la durabilité, cela veut dire que la stratégie (la manière d'atteindre les objectifs fixés) n'est pas bonne. Et dans ce cas, un examen s'impose immédiatement, pas en 2011.

Bruxelles, le 11 juillet 2007.

Le président

du Comité économique et social européen

Dimitris DIMITRIADIS


(1)  COM(2006) 845 final.

(2)  COM(2005) 658 final du 13.12.2005.

(3)  JO C 117 du 30.4.2004, page 22, paragraphe 2.2.1.

(4)  Conseil de l'Union européenne, document 10117/06 du 26.6.2006«Examen de la stratégie de l'UE en faveur du développement durable — Nouvelle stratégie».

(5)  JO C 117 du 30.4.2004.

(6)  JO C 117 du 30.4.2004.

(7)  JO C 117 du 30.4.2004, notamment paragraphe 0.8 ainsi que 6.4 et suivants.

(8)  JO C 117 du 30.4.2004, page 22, paragraphe 2.3.9.

(9)  Cf. paragraphe 8.

(10)  83 % de la teneur énergétique de l'éthanol produit à partir de maïs provient d'énergies fossiles.

(11)  Pourcentage élevé de protoxyde d'azote dans la production de colza (une étude sera disponible avant les vacances d'été, donc avant la plénière).

(12)  Cf. Mexico: troubles déclenchés par de la hausse croissant du prix des tortillas, le maïs étant de plus en plus souvent utilisé comme carburant.

(13)  TINA = Transport Infrastructure Needs Assessment.

(14)  COM(2006) 314 final.

(15)  Cf. paragraphe 35.

(16)  À savoir permettre aux «générations futures» de «satisfaire leurs besoins», «préserver la justice sociale et la cohésion» et garantir un «niveau de vie élevé» et le «plein-emploi» et pour mettre en œuvre les principes directeurs mentionnés, à savoir «placer les êtres humains au centre des politiques de l'Union européenne en promouvant les droits fondamentaux, en combattant toutes les formes de discrimination et en contribuant à la réduction de la pauvreté et à l'élimination de l'exclusion sociale».

(17)  Cf. conclusions, paragraphe 30.


ANNEXE

à l'avis du Comité

Les amendements suivants, qui ont recueilli plus du quart des suffrages exprimés, ont été rejetés:

Paragraphe 2.4

Modifier comme suit:

«2.4

Dans son dernier avis sur ce thème, le CESE s'est penché sur la communication susmentionnée de la Commission de décembre 2005. Dans cet avis, il a regretté que dans son programme d'action, qu'elle qualifie “d'ambitieux”, la Commission ne suive ni la recommandation émise en avril 2004 par le Comité, ni sa propre promesse de juin 2005. En effet, contrairement à ce qu'elle avait affirmé, elle et qu'elle ne fixe à nouveau aucun objectif clair à atteindre dans le cadre de la stratégie de développement durable».

Résultat du vote

Voix pour: 35

Voix contre: 61

Abstentions: 4

Paragraphe 2.4.1

Modifier comme suit:

«2.4.1

Le CESE avait rappelé à l'époque qu'une stratégie décrit la voie à suivre pour atteindre des objectifs. L'absence d'objectifs concrets, qu'il est du reste difficile de fixer sachant qu'il faut tenir compte des différents volets du développement durable, entraîne forcément des problèmes concernant la désignation des instruments à utiliser. En effet, sans savoir où l'on veut aller, il est impossible de déterminer comment s'y rendre. Aussi, de l'avis du CESE, la communication a-t-elle laissé plus de questions en suspens qu'elle n'a donné de réponses et d'orientations.».

Résultat du vote

Voix pour: 34

Voix contre: 63

Abstentions: 3

Paragraphe 3.11

Modifier comme suit:

«3.11

La question de savoir si une politique agricole axée sur des marchés mondiaux ouverts est susceptible d'être durable soulève automatiquement la question plus générale des règles qui s'appliquent au niveau de la production et du commerce à l'échelle mondiale. L'OMC est une organisation basée sur des accords dont l'objectif est de promouvoir la libre-concurrence. Toutefois, et le CESE l'a montré à maintes occasions, cela ne veut pas dire que les échanges commerciaux libres et libéralisés sont nécessairement durables. Malheureusement, et c'est une grave lacune, l La nouvelle stratégie ne contient aucune piste pour transformer rendre le commerce libre en commercecompatible avec les principes de durabilité. À nouveau, force est malheureusement de constater que les responsables de l'UE ont jusqu'ici omis de répondre à cette question soulevée par le CESE il y a trois ans déjà, même si celui-ci reconnaît que ces dernières années, l'UE s'est véritablement efforcée de négocier de nouvelles règles en matière de commerce mondialisé, y compris avec le FMI et la Banque mondiale».

Résultat du vote

Voix pour: 35

Voix contre: 63

Abstentions: 8

Paragraphe 3.11.2

Supprimer le paragraphe.

Résultat du vote

Voix pour: 38

Voix contre: 63

Abstentions: 3

Paragraphe 4.2

Modifier comme suit:

«4.2

Ces conséquences pourront avoir auront des répercussions dramatiques sur le plan économique. Dans certaines régions, c'est la base même de l'économie est menacée qui menace de s'effondrer complètement. En Suisse, les banques n'accordent par exemple plus de crédit à ceux qui veulent investir dans des infrastructures de sports d'hiver lorsque celles-ci sont situées à moins de 1 500 mètres au-dessus du niveau de la mer. Par ailleurs, la plus grande incertitude règne quant au sort de l'agriculture et du tourisme en Méditerranée au cas où le climat continuerait de se réchauffer et de devenir plus sec».

Résultat du vote

Voix pour: 41

Voix contre: 57

Abstentions: 3

Paragraphe 4.4

Modifier comme suit:

«4.4

La situation est grave, dans la mesure où le système économique dans lequel nous vivons considère que du point de vue macroéconomique Le fait que les coûts liés à la maladie et, dans certains cas, à la pollution environnementale, par exemple les milliards qu'a coûté début 2007 la tempête Cyril, sont positifs puisqu'ils contribuent à la croissance du PIB, tandis que certaines activités importantes ne sont pas couvertes par cet indicateur, constitue un problème bien connu. Le CESE se réjouit que dans sa nouvelle stratégie, le Conseil européen commence enfin, même si ce n'est malheureusement que de façon marginale, à se préoccuper davantage de cette contradiction. Le Conseil européen a entièrement raison de demander, au point 20 de sa nouvelle stratégie, d'élargir le système central de comptabilité du revenu national, notamment en intégrant les concepts de stocks et de flux et le travail non marchand, et le perfectionner en y incluant les comptes satellites, par exemple les dépenses d'environnement et les flux de matières».

Résultat du vote

Voix pour: 35

Voix contre: 56

Abstentions: 8

Paragraphe 4.10

Modifier comme suit:

«4.10

Dans sa nouvelle stratégie, le Conseil européen indique que celle-ci “forme le cadre général (…). (…) les objectifs sociaux et environnementaux peuvent se renforcer mutuellement”. Il estime en outre que toutes les décisions politiques de l'UE devraient être prises après analyse “objective” des “dimensions sociales, environnementale et économique du développement durable, en prenant en compte la dimension externe du développement durable et les coûts de l'immobilisme”. Mais lorsque dans la nouvelle stratégie s'intéresse aux moyens, il n'est plus question de dialogue social, mais d'un dialogue institutionnalisé entre la Commission et les États membres d'une part, et “les entreprises” de l'autre, pour définir des objectifs de performance pour des produits et procédés».

Résultat du vote

Voix pour: 41

Voix contre: 55

Abstentions: 3

Paragraphe 4.14

Modifier comme suit:

«4.14

Cependant, comme on l'a dit, il ne s'agit pas seulement d'argent mais surtout de modifications structurelles. La “nouvelle stratégie” préconise par exemple de “dissocier la croissance économique de la demande de transports afin de réduire les incidences sur l'environnement”, ce dont le CESE se félicite. Toutefois, ceci signifie aussi qu'il faut par exemple porter un regard critique sur le système de production “juste à temps” qui permet aux entreprises de renoncer au stockage et aux frais qu'il implique et de transformer les camions ou trains de marchandises en entrepôts roulants».

Résultat du vote

Voix pour: 39

Voix contre: 56

Abstentions: 6

Paragraphe 4.16

Modifier comme suit:

«4.16

Le CESE ne peut que s'étonner du fait qu'il n'y a apparemment pas eu de concertation lors de l'élaboration de l'examen à mi-parcours du livre blanc sur les transports et de la nouvelle stratégie de durabilité, dans la mesure où le problème posé par cette contradiction manifeste entre l'objectif à atteindre et la réalité ne fait l'objet d'aucun commentaire. S'agissant du secteur des transports, il apparaît que la Commission a quasiment abandonné le premier objectif spécifique de la stratégie de développement durable, à savoir dissocier la croissance économique et de la croissance de la mobilité. La Commission devra à l'avenir mettre tout en œuvre pour éviter ce genre de contradictions. Par ailleurs, dans le secteur des transports, il convient de rechercher des solutions pour organiser nos villes et nos communautés ainsi que des modèles d'activités visant à raccourcir les lignes de communication et les trajets plutôt qu'à accroître constamment les distances que les biens et les personnes doivent parcourir pour que les besoins et souhaits soient satisfaits. Ceci implique l'adaptation des politiques fiscales et d'aménagement du territoire, ainsi qu'une coordination adéquate de tous les niveaux administratifs, du niveau de l'UE au niveau local».

Résultat du vote

Voix pour: 36

Voix contre: 63

Abstentions: 4


27.10.2007   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 256/86


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif aux statistiques sur les produits phytopharmaceutiques»

COM(2006) 778 final — 2006/0258 (COD)

(2007/C 256/16)

Le 16 mai 2007, le Conseil a décidé, conformément à l'article 285, paragraphe 1 du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la proposition susmentionnée.

La section spécialisée «Agriculture, développement rural, environnement», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 8 juin 2007 (rapporteur: M. van OORSCHOT).

Lors de sa 437e session plénière des 11 et 12 juillet 2007 (séance du 11 juillet 2007), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 138 voix pour, 1 voix contre et 3 abstentions.

1.   Synthèse des conclusions et recommandations

1.1

Le CESE accueille favorablement le règlement relatif aux statistiques sur les produits phytopharmaceutiques comme un instrument permettant de mesurer les avancées des États membres dans la réalisation des objectifs de la directive-cadre relative à l'utilisation durable des pesticides (1).

1.2

Le Comité déplore que le règlement relatif aux statistiques ne couvre que l'utilisation professionnelle des produits phytopharmaceutiques à des fins agricoles et ne traite pas de leur utilisation potentiellement polluante sur les surfaces durcies.

1.3

Le CESE souligne que lorsqu'il s'agit de coupler les données sur les utilisations et celles relatives au niveau maximal de résidus des pesticides, la quantité de produits utilisés et la superficie de culture traitée ne sont pas les seules données pertinentes. Les données relatives au rendement des cultures le sont également. Si on veut garantir le couplage des données sur les utilisations aux statistiques communautaires existantes en matière de cultures — et plus spécifiquement à celles concernant leur rendement — il importe de mentionner explicitement l'utilisation des statistiques sur les cultures dans le règlement.

2.   Proposition de la Commission

2.1

Le règlement proposé vise à créer un cadre pour la production de statistiques communautaires relatives à la mise sur le marché et à l'utilisation des produits phytopharmaceutiques en faisant obligation à l'ensemble des États membres de produire régulièrement des statistiques détaillées. Afin d'assurer la comparabilité de ces statistiques entre États membres et au niveau communautaire, le règlement définit une couverture statistique, qui se limite à l'utilisation professionnelle à des fins agricoles, et établit des règles harmonisées pour la collecte et la compilation des données.

2.2

Ces statistiques seront essentielles pour estimer les risques pour la santé humaine et l'environnement que présentent l'utilisation des produits phytopharmaceutiques, et pour mesurer les progrès accomplis dans la réalisation des objectifs de la directive-cadre relative à l'utilisation durable des pesticides.

2.3

Il convient d'examiner les bénéfices découlant de ce règlement à la lumière de la directive-cadre générale. L'objectif global visé par la mise en œuvre des mesures de la directive-cadre est d'obtenir des améliorations en matière d'environnement et de santé, ou d'autres avantages pour la société comme la réduction des coûts externes induits par l'emploi de produits phytopharmaceutiques, en optant pour une utilisation plus durable des pesticides. L'évaluation des progrès réalisés ne peut se baser que sur des données fiables et des indicateurs pertinents. On peut s'attendre à ce qu'une meilleure connaissance de l'emploi des pesticides permette de retirer de ce règlement des bénéfices directs au niveau national et communautaire, tels que des systèmes de surveillance améliorés et des politiques mieux ciblées et plus efficaces. De plus, la disponibilité de statistiques officielles à travers l'Europe rendra le marché plus transparent, ce qui devrait permettre d'améliorer la compétitivité de l'industrie des pesticides.

3.   Cadre législatif existant

3.1

Règlement (CE) no 396/2005 du Parlement européen et du Conseil du 23 février 2005 concernant les limites maximales applicables aux résidus de pesticides présents dans ou sur les denrées alimentaires et les aliments pour animaux d'origine végétale et animale et modifiant la directive 91/414/CEE du Conseil.

3.2

Règlement (CE) no 852/2004 du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 relatif à l'hygiène des denrées alimentaires, et notamment l'annexe 1, partie A, point 9, qui introduit une obligation pour les exploitants du secteur alimentaire qui produisent ou récoltent des produits végétaux de tenir des registres concernant toute utilisation de produits phytosanitaires et de biocides.

3.3

Directive 2000/60/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2000 établissant un cadre pour une politique communautaire dans le domaine de l'eau.

3.4

Directive 91/414/CEE du Conseil du 15 juillet 1991 concernant la mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques, actuellement en cours de révision.

4.   Contenu essentiel du document de la Commission

4.1

Le règlement proposé instaure un cadre juridique et définit des règles harmonisées pour la collecte et la diffusion de statistiques relatives à la mise sur le marché et à l'utilisation des produits phytopharmaceutiques. En particulier, il définit des règles pour les États membres:

concernant la fréquence du recueil des données (chaque année pour la mise sur le marché et tous les cinq ans pour l'utilisation);

concernant la manière de collecter les données, que ce soit par des enquêtes représentatives, par des procédures d'estimation statistique basées sur des modèles ou des avis d'experts, par des obligations de déclaration pour les acteurs de la chaîne de distribution des produits phytopharmaceutiques, par des obligations de déclaration pour les utilisateurs professionnels, par des sources administratives ou par la combinaison de ces différents moyens;

concernant les modalités de transmission des informations à la Commission.

4.2

Le règlement charge également la Commission d'adapter certains aspects techniques et de définir les critères d'évaluation de la qualité et le format de transmission des données.

5.   Observations générales

5.1

Le CESE accueille favorablement le règlement relatif aux statistiques sur les produits phytopharmaceutiques comme un instrument permettant de mesurer les avancées des États membres dans la réalisation des objectifs de la directive-cadre relative à l'utilisation durable des pesticides.

6.   Observations spécifiques

6.1   Utilisation professionnelle non agricole

6.1.1

Les données fournies par l'industrie néerlandaise de l'eau potable indiquent que plus de 50 % des cas d'infraction aux normes en matière d'eau potable impliquant des produits phytopharmaceutiques sont dus à une utilisation non agricole sur des surfaces durcies.

6.1.2

Le règlement relatif aux statistiques permet de procéder à une estimation grossière des utilisations non agricoles en soustrayant de la quantité totale de produit mise sur le marché en un an la part de ce même produit utilisée à des fins professionnelles dans l'agriculture.

6.1.3

Le CESE est d'avis que ce calcul détourné de l'utilisation hors agriculture de produits phytopharmaceutiques est trop imprécis pour permettre une évaluation correcte de la politique découlant de la directive-cadre.

6.1.4

Le Comité plaide par conséquent pour qu'en plus de rassembler des données sur les utilisations professionnelles de produits phytopharmaceutiques dans l'agriculture, on ait recours au règlement relatif aux statistiques pour collecter des données sur leur emploi à des fins professionnelles dans le secteur sylvicole, sur leurs utilisations professionnelles sur les surfaces durcies et sur leur emploi non professionnel.

6.2   Règlements relatifs aux statistiques et données sur le niveau maximal des résidus de pesticides

6.2.1

Le CESE souligne que lorsqu'il s'agit de coupler les données sur les utilisations et celles relatives au niveau maximal de résidus des pesticides, la quantité de produits utilisés et la superficie de culture traitée ne sont pas les seules données pertinentes. Les données relatives au rendement des cultures le sont également. Une même quantité de produit répartie sur une superficie égale entraîne, en cas de rendement moindre, une éco-efficacité moins bonne et augmente les risques de dépasser le niveau maximal de résidus des pesticides.

6.2.2

Dans l'annexe II à la proposition, il est fait référence au règlement (CEE) 571/88 du Conseil portant organisation d'enquêtes communautaires sur la structure des exploitations agricoles. L'objectif visé est l'utilisation d'une seule et même classification des cultures dans le cadre des enquêtes sur la structure des exploitations et dans celui de la collecte des données sur l'emploi de produits phytopharmaceutiques. Cela permettra de coupler efficacement les statistiques sur l'emploi de ces produits aux statistiques relatives au rendement des cultures.

6.2.3

Le CESE reconnaît que la référence au règlement 571/88 offre la possibilité de coupler les données sur l'emploi de produits phytopharmaceutiques à celles relatives au rendement des cultures concernées. Afin de veiller à ce que cette possibilité soit exploitée, il importe de mentionner explicitement dans le règlement l'utilisation des statistiques relatives aux cultures — et plus spécifiquement des statistiques sur le rendement de ces cultures — dans le cadre de l'analyse des données sur l'utilisation des produits.

Bruxelles, le 11 juillet 2007.

Le Président

du Comité économique et social européen

Dimitris DIMITRIADIS


(1)  COM(2006) 373 final «Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil instaurant un cadre d'action communautaire pour parvenir à une utilisation durable des pesticides».


27.10.2007   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 256/88


Avis du Comité économique et social européen sur le thème «Innovation: impact sur les mutations industrielles et le rôle de la BEI»

(2007/C 256/17)

Le 6 juillet 2006, le Comité économique et social européen a décidé, conformément à l'article 29, paragraphe 2 de son règlement intérieur, d'élaborer un avis d'initiative sur l'«Innovation: impact sur les mutations industrielles et le rôle de la BEI».

La commission consultative des mutations industrielles, chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 20 juin 2007 (rapporteur: M. TÓTH; corapporteur: M. CALVET CHAMBON).

Lors de sa 437e session plénière des 11 et 12 juillet 2007 (séance du 11 juillet 2007), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 138 voix pour, 1 voix contre et 3 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1

Le CESE, ayant examiné les liens entre l'innovation et les mutations industrielles ainsi que les nombreuses initiatives menées aux échelons européen et national par rapport à ces domaines, a décidé de mettre à profit son avis d'initiative pour analyser les aspects du système d'innovation qui sont susceptibles de favoriser la traduction directe des résultats de la recherche en réussite commerciale ainsi que le renforcement et la croissance de l'industrie et de l'économie européennes, et pour formuler des recommandations sur ces questions.

1.2

Le CESE considère qu'il convient de prêter attention à la corrélation étroite qui existe dans de nombreux pays et régions entre la réussite de l'innovation, d'une part, et, de l'autre, l'ouverture de la société et du système éducatif. Dans la mesure où, au siècle actuel, l'innovation, au-delà d'être présente, devient aussi décisive, non seulement dans l'économie, mais dans toutes les activités, les ressources humaines peuvent clairement devenir un facteur de croissance. Le CESE estime que ce facteur deviendra de plus en plus décisif en tant que catalyseur du développement et que, par conséquent, l'innovation devra avant tout reposer sur une large base d'éducation et de formation, conforme aux critères de l'apprentissage tout au long de la vie, fondée pour ce faire sur un accès égal aux bases de données à source ouverte et au contenu libre.

1.3

Pour le CESE, il est important que, dans les entreprises, l'innovation et l'industrie «humaine» de la connaissance établissent une synergie qui non seulement constitue la base de l'innovation, mais qui appuie aussi son épanouissement. Dans le même temps, il convient de trouver les moyens de faire en sorte que l'évolution du système de l'emploi suive, en toute flexibilité, la restructuration industrielle et que les conditions financières nécessaires soient réunies.

1.4

Le CESE est très attaché à ce que soient accrus dans l'opinion publique la visibilité, la présence et l'écho positif des initiatives d'innovation couronnées de succès. Le rôle de l'innovation sociale revêt une importance clé dans toute la chaîne de l'innovation. L'innovation non technologique, par exemple les nouveaux modèles d'entreprises, l'amélioration de la planification, l'augmentation de la qualité en matière d'organisation du travail et de compétences, est tout aussi importante que l'innovation technologique. D'une manière générale, l'innovation organisationnelle, en matière de développement organisationnel, est nécessaire pour que le potentiel d'innovation technologique puisse s'exprimer de la meilleure manière qui soit.

1.5

Les partenaires sociaux, ainsi que les acteurs et institutions de la société civile organisée, jouent d'ores et déjà un rôle très important pour faire sentir, consolider et accepter la portée modernisatrice des messages émanant de l'innovation, mais nous estimons qu'il conviendrait de renforcer cette fonction en y incluant également l'identification des priorités stratégiques et l'élaboration des politiques.

1.6

Le CESE en est convaincu: pour résoudre le paradoxe européen — suivant lequel nous sommes forts en recherche fondamentale, mais nous nous laissons devancer dans l'exploitation pratique, commerciale, des résultats atteints —, il convient, plutôt que de mettre l'accent sur l'augmentation de la part du PIB consacrée aux efforts financiers en faveur de la R&D, d'insister sur une transformation de la structure de ces dépenses. Il est nécessaire d'accroître nos efforts en matière de dépenses, mais il convient aussi de redoubler d'attention pour les nouvelles approches.

1.6.1

Dans les États membres de l'Union européenne, le marché de l'offre reste souvent dominant dans le domaine de la R&D: l'offre composée des résultats des recherches de la sphère de la R&D est plus importante que la demande de la part des entrepreneurs. Il est nécessaire de renforcer le marché de la demande en limitant les risques liés à l'entrepreneuriat, en créant des conditions plus favorables à la recherche en entreprise, en transformant l'environnement de l'activité entrepreneuriale, et en stimulant la coopération entre les universités, les instituts scientifiques et les entreprises.

1.6.2

Pour faire croître la capacité d'innovation durable des entreprises, il faut des efforts coordonnés dans les domaines du financement, de la R&D, de l'industrie, des questions fiscales, de l'éducation, de la protection de l'environnement, des médias et de la communication, tant au niveau européen qu'à l'échelon national et régional.

1.6.3

Nous considérons qu'il convient d'envisager une solution qui se pratique déjà à l'échelon des États membres, et qui consiste à faire en sorte que les entreprises, si elles ont des activités de développement et qu'elles confient des missions en ce sens à des instituts de recherche, aient accès, par voie d'appel d'offres, à des fonds supplémentaires, qu'ils soient à charge du budget ou qu'ils proviennent de sources privées.

1.7

Le CESE souligne que la reconnaissance et la protection de la valeur de la propriété intellectuelle dans l'UE est de moins en moins à la hauteur des exigences croissantes de la concurrence à l'échelon mondial. Il faut continuer de reconnaître l'importance de la publication des performances scientifiques et le rôle que joue l'évaluation reposant sur cette publication, c'est-à-dire l'importance du «marché de la science»; pour autant, trouver des solutions en matière d''exploitation commerciale et de brevetage des résultats de la recherche, faire respecter les droits de propriété intellectuelle, faire mieux valoir les intérêts communautaires exige de se pencher avec davantage d'attention sur ces sujets et de prendre à leur égard des mesures globales. Le CESE estime qu'il est important que, parallèlement au développement du droit communautaire, les États membres examinent par quels instruments ils pourraient développer la protection des droits de propriété intellectuelle et étendre cela au suivi institutionnel de l'exploitation des brevets, améliorant ainsi la coopération à l'intérieur de l'UE.

1.8

Le CESE a la conviction que pour promouvoir l'innovation et pour faire croître de manière dynamique la compétitivité dans une optique de développement durable, il est indispensable d'assurer des fonctions de gestion de l'innovation stratégique et de trouver des solutions à la question de la formation de chercheurs et d'experts d'entreprise dans ce domaine. Il est particulièrement important que, par l'intégration dans l'éducation des technologies de l'information et de la communication (1), l'apprentissage en ligne prête une attention spéciale à la formation à la gestion de l'innovation, sur un dispositif d'incitation en la matière, et sur la mise en place des conditions de son organisation.

1.9

De l'avis du CESE, dans l'intérêt de l'innovation, il faut s'efforcer de faire en sorte que les axes prioritaires des mutations industrielles et ceux de la formation et de la formation continue soient cohérents, et qu'il soit possible, dans le cadre de la formation aussi, de réagir à temps aux exigences et aux mutations du marché. Il faut contribuer à faire en sorte qu'en plus de la libre circulation des chercheurs, le dispositif de gestion de l'innovation soit caractérisé par une mobilité adéquate, et que se mette en place une large coopération entre les responsables exécutifs des institutions d'innovation et ceux des parcs scientifiques et technologiques.

1.10

Le CESE considère que les structures de direction et d'organisation à même d'améliorer l'efficacité des transferts technologiques jouent un rôle particulier pour stimuler la mutation des structures industrielles. Les parcs industriels, scientifiques ou technologiques, les centres technologiques sont des instruments extrêmement importants pour assurer que soient disponibles le conseil et l'aide indispensables et les laboratoires absolument nécessaires pour que des petites et moyennes entreprises soient lancées, qu'elles s'établissent, qu'elles prennent (gagnent) des parts de marché et pour qu'elles suivent les avancées des technologies. Pour que les entreprises disposent à un coût relativement faible et avec un contenu de niveau satisfaisant des conditions leur permettant d'innover, il est de plus en plus nécessaire que les organismes de transfert technologique fonctionnent en réseau de manière à ce que les tâches logistiques soient effectuées par le biais des technologies de l'information et des communications. Il est important que la Commission réfléchisse à des pistes diverses pour le développement de telles structures, en particulier en encourageant le développement des pôles de technologie scientifique (de compétitivité) et des centres de la connaissance. Il convient de donner aux pôles scientifiques (de compétitivité) englobant universités, parcs scientifiques ou technologiques et centres d'incubation et technologiques un rôle clef pour la réalisation des priorités de développement de l'UE, et de pousser à la création de telles structures.

1.11

Le CESE estime que les objectifs sur lesquels l'UE a fortement insisté, comme l'ambition de la stratégie de Lisbonne de faire de l'Europe dans un délai raisonnable l'espace le plus compétitif du monde, ne se retrouvent pas dans les débats budgétaires, et en particulier dans le chiffrage budgétaire entériné. La Commission consacre des instruments importants à des programmes de R&D, mais le rôle et le poids de ces instruments ne croissent pas dans la mesure souhaitée. Ces programmes rempliraient leur rôle de manière vraiment efficace si, dans les États membres, leur impact se multipliait, et s'ils engendraient des programmes conformes aux caractéristiques des différents pays. Ce n'est pas le cas. Le CESE estime qu'il est nécessaire que la Commission réexamine son système de l'innovation, et qu'elle accorde son soutien, afin que les efforts des États membres soient mieux coordonnés et que le rôle multiplicateur des ressources de R&D s'impose davantage, compte tenu en particulier des priorités de développement de l'Union européenne.

1.12

En ce qui concerne la question du financement, le CESE salue les efforts multiformes de la Banque européenne d'investissement (Groupe BEI) afin de renforcer la vigueur et la capacité d'innovation de l'économie européenne tant du côté de l'offre que du côté de la demande. Le CESE fait remarquer qu'il ne s'agit là que d'un élément de l'éventail des instruments financiers: il est nécessaire que le budget européen garantisse à l'innovation des ressources financières dans une mesure conforme à celle décidée dans la stratégie de Lisbonne. Par ailleurs, une contribution des budgets des États membres et des régions est également nécessaire, dans une proportion similaire.

1.13

Selon le CESE, les expériences engrangées montrent que le fonctionnement de la BEI déclenche un effet de levier fondamental. C'est précisément la raison pour laquelle le CESE invite le Groupe BEI à revoir continuellement et scrupuleusement ses possibilités de promouvoir un effet de levier, en coordination avec la Commission et le monde financier en général, l'objectif étant d'obtenir un effet de levier maximal.

1.14

Le CESE considère que le Groupe BEI dispose encore d'une énorme marge de manœuvre en tant que banque publique, mais aussi en tant que fournisseur de services. Le CESE invite le Groupe BEI à étendre ses activités de gestionnaire de fonds, au-delà des ressources du budget communautaire, à celles du marché privé des capitaux.

2.   Une Europe moderne et favorisant l'innovation

2.1

La communication de la Commission européenne COM(2006) 589, publiée à l'occasion de la réunion informelle des chefs d'État et de gouvernement européens qui s'est tenue à Lahti, le 20 octobre 2006, sous l'égide de la présidence finlandaise, traite à plusieurs titres de questions relatives à l'impact de l'innovation sur la mutation du tissu industriel. Elle établit que l'Europe et ses États membres disposent de nombreux atouts en matière d'innovation, mais souffrent d'un certain nombre de contradictions: nous, Européens, inventons et innovons, mais souvent nous ne convertissons pas nos inventions en nouveaux produits, emplois et brevets; beaucoup de petites entreprises hautement innovantes se mettent en place, mais elles ne deviennent pas facilement de grandes entreprises qui réussissent au niveau mondial; en outre, dans certains secteurs, tels que les télécommunications, l'adoption d'innovations (TIC) a généré d'importants gains de productivité, mais dans d'autres, comme le montrent certains exemples, cela n'a pas été le cas. On ne peut, dans les domaines de l'innovation et des mutations industrielles, faire l'économie d'une législation sérieuse et souple en matière d'enregistrement de brevets et de propriété intellectuelle. À cette fin, il conviendrait de réexaminer la proposition de règlement du Conseil sur le brevet communautaire du 1er août 2000 afin de mieux l'adapter aux réalités économiques qui évoluent rapidement (voir notamment les licences obligatoires et les causes d'extinction du brevet communautaire). Il faut pour ce faire disposer de procédures qui soient aptes à faciliter les diverses applications industrielles et/ou commerciales des brevets enregistrés et à reconnaître la propriété intellectuelle de l'innovation produite par chaque acteur — qu'il soit chercheur, cadre ou ingénieur — ou par des groupes d'acteurs, même s'ils font partie d'une structure administrative ou entrepreneuriale, dès lors que l'innovation est distincte de cette structure.

2.2

L'innovation peut exercer un impact optimal sur la transformation du tissu industriel s'il existe un dispositif articulant de manière coordonnée des instruments relevant respectivement des échelons de l'entreprise, du secteur, de la région, de l'État membre et de l'UE, et si ce dispositif fournit des instruments faciles d'accès et d'utilisation aux entités parties au processus, ces entités pouvant être des entreprises, des salariés, des établissements d'enseignement et des instituts de recherche, ou encore d'autres organisations d'acteurs concernés.

2.3

À l'échelon de l'entreprise, les moteurs proactifs de l'innovation sont plus particulièrement: (i) la gestion stratégique de l'innovation; (ii) la gestion stratégique des ressources humaines; (iii) le développement des compétences; (iv) l'utilisation de nouvelles méthodes d'organisation du travail; (v) des accords d'innovation au niveau de l'entreprise. Le passage d'une organisation du travail figée à une organisation plus dynamique, qui mette l'accent sur le respect et la valorisation des compétences et des capacités de chaque travailleur et professionnel, et qui oriente le choix de ces derniers entre les programmes de formation continue et/ou de reconversion professionnelle, ne peut que favoriser la connaissance et l'innovation ainsi qu'une production plus large et généralisée d'idées innovantes.

2.4

À l'échelon de l'entreprise, les moteurs actifs de la gestion des mutations sont avant tout: (i) les évaluations des compétences et les plans personnalisés d'avancement dans la carrière; (ii) l'externalisation des services; (iii) la formation continue et la formation de reconversion; (iv) les conventions collectives et les plans sociaux relatifs à la réorganisation de l'entreprise.

2.5

Les éléments suivants peuvent être considérés comme des instruments proactifs susceptibles d'être mis en œuvre tant à l'échelon sectoriel qu'à l'échelon régional: (i) les développements de systèmes productifs locaux (clusters); (ii) les réseaux et partenariats d'innovation; (iii) les parcs scientifiques, technologiques et industriels, les pôles d'innovation; (iv) des stratégies d'innovation régionales et des plans de développement régionaux, ainsi que des institutions en assurant la mise en œuvre; (v) les régions de la connaissance.

2.6

La Commission européenne examine continuellement dans quels secteurs l'innovation, en Europe, semble la plus efficace.

2.7

Le Comité économique et social européen fait par ailleurs valoir que pour aucun secteur, on ne saurait exclure une croissance rapide de la capacité d'innovation ou une augmentation de la part représentée par la valeur ajoutée. Le Comité recommande de soutenir toute idée innovante relative à de nouvelles méthodes d'utilisation des matériaux, au développement des technologies et des nouveaux produits et à l'affirmation de nouvelles qualités et d'une nouvelle valeur ajoutée.

2.8

C'est avant tout par le biais de l'articulation des politiques nationales qui leur sont propres en matière d'emploi, d'industrie, d'innovation, de protection de l'environnement, d'éducation et de commerce, et par leur coordination à tous les niveaux de l'administration publique, que les gouvernements des États membres sont en mesure de favoriser, de manière proactive, l'impact de l'innovation. Dans ce processus, la valeur ajoutée que représente un partenariat avec les partenaires sociaux et avec les acteurs de la société civile organisée apparaît de manière évidente. Toujours à l'échelon national, il convient d'avoir recours aux éléments suivants: (i) recherche et système de prévision pour le dégagement de nouvelles sources de création d'emplois; (ii) programmes de formation continue et de formation de reconversion; (iii) stratégie pour l'éducation et la formation tout au long de la vie; (iv) conditions favorables, dans la réglementation du marché du travail, à la construction de compétences et à la mobilité.

2.9

Les formes innovantes de coopération transfrontalière peuvent être dotées d'un rôle de catalyseur particulièrement important et spécifique dans le domaine de l'innovation et de la transformation du tissu industriel. À cet égard, il convient de souligner l'importance des initiatives technologiques communes (JTI), des nanotechnologies, des médicaments innovants, des piles à combustible et d'hydrogène, des systèmes informatiques embarqués, de l'aéronautique et du transport aérien, ainsi que de la surveillance mondiale de l'environnement et de la sécurité. Il convient en outre d'insister sur l'importance des plates-formes technologiques européennes et sur l'intérêt de poursuivre leur développement. Il pourrait être par exemple particulièrement approprié de diffuser largement les expériences de la plate-forme technologique européenne de l'acier, de la plate-forme pour le charbon propre et de la plate-forme technologique WATERBORNE, qui disposent déjà d'un bilan solide.

2.10

À l'échelon des institutions européennes, il convient d'articuler de manière coordonnée et proactive la mise en œuvre et le développement des éléments suivants: (i) la stratégie de Lisbonne; (ii) la stratégie en faveur du développement durable; (iii) le partenariat pour la croissance et l'emploi; (iv) le dialogue social européen (sectoriel et intersectoriel); (v) les programmes communautaires en matière de recherche-développement, d'innovation, d'emploi, d'éducation et de formation tout au long de la vie; (vi) la politique régionale communautaire, (vii) le Fonds social européen (FSE), le Fonds européen de développement régional (FEDER); (viii) l'Observatoire européen du changement, (ix) un système européen de prévision de nouvelles sources de création d'emploi.

2.11

L'initiative relative à la fondation de l'Institut européen de technologie (IET) (2) est prometteuse. Dans le cadre du présent avis, il convient de souligner que c'est la phase actuelle du développement du cadre de fonctionnement de cet institut, c'est-à-dire la phase initiale, qui est la plus adaptée pour assurer qu'il contribue réellement à ce que l'innovation se convertisse en produits et en emplois.

2.12

Parmi les initiatives de la Commission européenne, il convient d'insister sur la communication COM(2006) 728 final, publiée le 22 novembre 2006 et intitulée «Vers une utilisation plus efficace des incitations fiscales en faveur de la recherche et du développement».

2.13

Tout aussi importante est l'initiative de la Commission européenne visant à favoriser la recherche-développement et l'innovation, et portant sur les règles en matière d'aides d'État (3).

2.14

Le Comité économique et social européen convient de ce qu'il est particulièrement important: (i) d'ériger les fondements d'un rôle moteur de l'Europe dans les technologies stratégiques de l'avenir; (ii) de prendre des mesures de fond pour renforcer sensiblement les liens entre les universités, la recherche et les entreprises; (iii) de faire évoluer les conditions cadre.

2.15

Concernant les conditions cadres générales, il convient d'accorder une attention toute particulière aux éléments suivants: (i) le marché intérieur unique; (ii) le financement de l'innovation; (iii) la propriété intellectuelle au XXIe siècle; (iv) l'appui aux relations commerciales et économiques extérieures des entreprises de l'UE et l'accès au marché des pays tiers.

2.16

En outre, il faut aussi effectuer au plus tôt des évaluations sectorielles, afin de rendre aussi avantageuses que possible les conditions spécifiques aux secteurs. Dans le cadre de ce processus, il conviendra d'accorder une attention particulière aux éléments suivants: (i) points de vue relatifs aux PME; (ii) contribution à la réalisation de la stratégie de Lisbonne; (iii) mise en place de réseaux entre les régions.

3.   Le rôle du Groupe Banque européenne d'investissement

3.1

Le CESE fait remarquer qu'il est nécessaire, pour que l'impact de l'innovation par rapport aux mutations industrielles soit le plus favorable possible, de disposer de la totalité de l'éventail des instruments de financement et que ceux-ci fonctionnent de manière harmonisée. Chaque produit adéquat des marchés financiers et des capitaux doit être accessible, indépendamment du fait qu'il a été créé par une entreprise financière classique, par des pouvoirs publics régionaux ou d'un État membre, ou par l'Union européenne. Des instruments de financement doivent être accessibles tout au long du processus d'innovation, et ce jusqu'à ce que la mise en œuvre soit terminée, et en faisant en sorte que des ressources financières soient assurées pour stimuler la poussée technologique/la demande du marché («push/market pull»). Dans ce contexte de la vaste question du financement, le présent avis se penche plus particulièrement sur l'un des acteurs clés de ce domaine, le Groupe Banque européenne d'investissement, associant les instruments de la Banque européenne d'investissement (BEI) et ceux du Fonds européen d'investissement (FEI).

3.2

Parmi les objectifs primordiaux que se sont fixés la BEI et le FEI, figurent le renforcement des performances économiques et de l'innovation en Europe. Pour réaliser cet objectif, qui constitue une contribution à la stratégie de Lisbonne et à l'Action européenne pour la croissance, des mécanismes appropriés seront mobilisés et développés. L'initiative Innovation 2010 (i2i) constitue la principale contribution de la BEI au processus visant à rendre l'Europe plus innovante et plus compétitive, avec l'objectif de prêter 50 milliards d'euros au cours de la décennie pour soutenir des projets d'investissement à travers l'Europe, dans les domaines de l'éducation et de la formation, de la recherche, du développement et de l'innovation (RDI), des technologies de l'information et des communications (TIC) avancées (y compris les services de médias audiovisuels et leurs contenus) et des services en ligne.

3.2.1

Il est estimé que la valeur des engagements pris pour des soutiens à des projets i2i depuis 2000 a atteint fin 2006 un niveau de 46 milliards d'euros, ce qui indique que l'objectif d'arriver à 50 milliards d'euros en 2010 est susceptible d'être dépassé. En outre, en vue de diriger des ressources financières vers les produits, les procédés et les systèmes de pointe et innovants, la BEI a augmenté sa capacité de financement utilisable pour des investissements par le biais du mécanisme de financement structuré (MFS), dont l'utilisation n'est pas limitée à des objectifs de R&D. Il s'agit de soutenir des projets et des promoteurs impliquant un risque de crédit accru, dans la mesure où les projets n'ont pas valeur d'investissement. Afin de financer les activités d'investissement développées par les PME, la BEI met en place des lignes de crédit avec des intermédiaires financiers appropriés.

3.2.2

En outre, des transactions innovantes sont développées, entre autres des mécanismes à risque partagé et/ou l'articulation d'instruments de soutien nationaux et régionaux avec des produits de la BEI, afin de répondre aux besoins spécifiques des PME. La BEI se concentre spécifiquement sur les petites et moyennes entreprises (PME) par le biais du capital-investissement et de garanties. L'action du FEI est complémentaire au soutien aux PME apporté par la BEI.

3.2.3

S'agissant de l'accès des PME au crédit, il convient de noter l'effet négatif de l'Accord de Bâle II. De manière générale, cet accord établit des obligations spécifiques pour le secteur bancaire, les banques étant tenues d'octroyer une notation à chaque PME désirant obtenir un crédit. Pour le calcul de cette notation, les PME vont devoir assurer la disponibilité d'un ensemble bien plus important qu'auparavant d'informations quantitatives, mais aussi qualitatives. Les PME qui ne disposent pas de systèmes d'information de type ERP (planification des ressources d'entreprise) ne seront pas en mesure de fournir toutes les informations nécessaires; les systèmes ERP sont très chers et la grande majorité des PME n'en disposent pas, ce qui les rend susceptibles de ne pas se voir octroyer de crédit à des conditions avantageuses et a une incidence négative sur leur développement. Il est demandé à la BEI et à la Commission européenne de surveiller attentivement le niveau d'accès des PME aux financements qui leur sont nécessaires et les effets en la matière de l'Accord de Bâle II.

3.3

L'appui à l'innovation apporté par le Groupe BEI suppose le développement de modalités de financement nouvelles et appropriées au profil de risques des opérations, et de produits dotés des mêmes caractéristiques. Parallèlement, en vue d'accroître la valeur ajoutée et les synergies entre les différents instruments de financement de la Communauté, de nouvelles initiatives conjointes entre le Groupe BEI et la Commission sont mises en œuvre par le biais de la mise en place de partenariats avec des programmes financés à partir du budget européen tels que le 7e programme-cadre (PC7) et le programme pour la compétitivité et l'innovation (PCI). De telles initiatives conjointes ne se limitent pas à la facilité de financement à risque partagé (FFRP), qui verra le jour à partir de 2007, ni aux nouvelles initiatives mises en œuvre par le FEI dans le cadre du PCI, mais ces derniers exemples en sont des illustrations particulièrement pertinentes.

3.4   La facilité de financement à risque partagé (FFRP)

3.4.1

La facilité de financement à risque partagé (FFRP) est une initiative nouvelle et innovante mise en place conjointement par la Commission européenne et par la Banque européenne d'investissement, dans le but de favoriser l'investissement en Europe dans la recherche, le développement technologique et la démonstration, ainsi que dans l'innovation, en particulier par le secteur privé, en mettant en place des garanties appropriées sur les prêts couvrant des projets européens plus risqués dans le domaine de l'innovation. Ce nouveau dispositif devrait faciliter l'accès au financement par l'emprunt pour les activités caractérisées par un profil de risque plus élevé que la moyenne, sur la base d'un partage des risques entre la Communauté européenne, la BEI et les porteurs de projets de RDI. Le financement que la BEI apporte dans le cadre de la FFRP sera accessible à la communauté des chercheurs européens en complément aux fonds du PC7.

3.4.2

La FFRP, dont le fonctionnement est régi par un cadre identique aux règles existantes de la BEI relatives au MFS, se composera de deux volets, financés respectivement par la contribution de la Commission européenne (le PC7) et par la BEI, chacun pour un montant pouvant atteindre jusqu'à 1 milliard d'euros pour la période 2007-2013. Les ressources du PC7 seront utilisées pour financer des projets de recherche, de développement et de démonstration; quant aux ressources de la BEI, elles pourront également être utilisées en complément pour financer des projets d'innovation. La mobilisation, à partir de ces deux volets, d'un montant pouvant atteindre 2 milliards d'euros en vue du financement sur capitaux à risque, permettra de financer dans une plus large mesure les programmes de recherche, de développement et d'innovation dotés d'un profil de risque plus élevé que la moyenne. Cela implique que la BEI devrait, suivant les attentes, être capable d'apporter un appui financier dans le cadre d'un financement complémentaire générant un effet de levier pouvant aller jusqu'à 10 milliards d'euros. La FFRP vise à soutenir des initiatives européennes de recherche telles que le forum stratégique européen sur les infrastructures de recherche (ESFRI), la plate-forme technologique européenne, l'initiative technologique commune ou encore les projets engagés dans le cadre de l'Agence européenne pour la coordination de la recherche (Eureka).

3.4.3

En se fondant sur l'idée d'un partage des risques entre la Communauté, la BEI et les bénéficiaires, la FFRP apporte un instrument supplémentaire pour financer la recherche, le développement et l'innovation, ouvrant ainsi un large éventail de possibilités tant au secteur privé qu'à la communauté des chercheurs, et complétant ainsi l'éventail des instruments existants pour le financement de la RDI. La FFRP donne à la BEI la capacité d'élaborer des produits financiers qui pallient les faiblesses du marché et qui répondent aux exigences ciblées spécifiques à chaque secteur et propres à chaque porteur de projet, élargissant ainsi l'éventail des bénéficiaires potentiels de financements. La FFRP sera accessible à des entités juridiques de toute taille et de tout statut, notamment à des grandes entreprises, à des entreprises de taille intermédiaire (mid-caps), à des PME, à des organisations de recherche, à des universités, à des structures de collaboration, à des entreprises communes ou à des structures ad hoc (Special Purpose Vehicles). Par le biais d'accords de partage de risques avec le secteur bancaire, la FFRP contribuera à améliorer la capacité globale des acteurs financiers à soutenir les activités de RDI, en particulier dans les domaines des PME.

3.4.4

Le Conseil «Compétitivité» qui s'est tenu en juillet 2006 a décidé d'allouer dans un premier temps à la FFRP un montant de 500 millions d'euros jusqu'à la période de révision à mi-parcours du 7e programme-cadre, afin de garantir ainsi que la FFRP puisse être lancée rapidement en étant dotée, au niveau des instruments financiers, d'une masse critique suffisante. Le prélèvement d'un montant de 500 millions d'euros supplémentaires jusqu'en 2013 à charge du budget communautaire sera possible en fonction des résultats de l'évaluation à mi-parcours et de l'estimation de la demande potentielle pour ce nouvel instrument. Tandis que les conditions générales relatives à l'utilisation des fonds et aux règles de gestion de la FFRP, y compris les critères d'éligibilité, la réglementation et la répartition du risque entre institutions, sont définies dans le cadre des programmes Coopération et Capacités du PC7, les mesures détaillées, quant à elles, seront réglées par un accord bilatéral entre la Commission européenne et la BEI, lequel a été signé le 5 juin 2007.

3.5   L'aide à l'innovation de la part du FEI

3.5.1

Le FEI met en œuvre les mandats qui lui sont confiés par ses actionnaires (BEI, Commission européenne) ou par des tiers (à l'échelon des États membres) en vue d'appuyer l'innovation et le financement des PME, conformément aux objectifs de la Communauté. Fin 2006, la totalité des transactions du FEI a atteint 15 milliards d'euros, dont 11,1 milliards d'euros consacrés à des garanties et 3,7 milliards d'euros à des opérations de capital-risque.

3.5.2

La stratégie de Lisbonne, qui vise à renforcer la compétitivité européenne, constitue l'un des principaux moteurs des activités du FEI (celui-ci étant le seul instrument de l'UE pour le financement des PME). Avec 3,7 milliards d'euros investis dans 244 fonds de capital-investissement, le FEI a contribué à combler l'écart existant en matière d'innovation, en exerçant un effet de levier suscitant des financements d'environ 20 milliards d'euros en faveur de PME et de nouvelles entreprises à forte croissance (dont certaines réussites d'échelon mondial telles que Skype, Bluetooth/Cambridge Silicon Radio ou Kelkoo). Les conclusions de la présidence du Conseil européen de mars 2005 indiquent que le Conseil européen encourage le FEI à diversifier ses activités en faveur du financement des transferts technologiques. En 2006, les premières opérations de transferts technologiques ont été signées pour des activités de concession de licences et des activités d'essaimage.

3.5.3

Dans le cadre des nouvelles perspectives financières, le FEI sera en charge de la gestion du programme pour la compétitivité et l'innovation (PCI) et sera l'un des principaux acteurs de l'initiative JEREMIE. Ces deux programmes visent à améliorer le financement des PME et l'ingénierie financière.

3.5.3.1

Le PCI, qui constitue l'un des instruments d'action essentiels de l'UE pour les PME et l'innovation, apporte du capital-risque (y compris par le financement d'activités de transferts technologiques, de réseaux d'investisseurs providentiels (business angels) et de l'éco-innovation) et le recours à des mécanismes de garanties à l'intention des PME.

3.5.3.2

Dans le cadre de l'initiative «JEREMIE» (Joint European Resources for Micro to Medium Enterprises, Alliance de ressources européennes en faveur des TPE et PME), les pouvoirs publics nationaux et régionaux peuvent choisir de déployer les ressources provenant du FEDER sous la forme d'instruments financiers adaptés et répondant à une logique de marché, tels que des fonds propres, du capital-risque, des garanties ou des prêts. L'initiative JEREMIE a été conçue de manière à optimiser les financements du FEDER en suscitant des ressources complémentaires, tout en bénéficiant d'une mise en œuvre facilitée par un cadre réglementaire plus souple. En 2007, l'augmentation du capital du FEI devrait compléter les ressources du PCI et de JEREMIE; selon des estimations, ce sont, d'ici 2013, plus d'un million de PME qui auront bénéficié des instruments financiers du FEI.

3.5.3.3

Dans la mesure où ils disposent d'un effet de levier élevé (par exemple, 1 euro provenant du budget communautaire suscite jusqu'à 50 euros pour les PME par le biais de l'activité de garantie) et d'un rôle puissant de catalyseur vis-à-vis des acteurs financiers (notamment des fonds de capital-risque), il convient de considérer les instruments financiers de la Communauté comme l'une des meilleures pratiques dans le cadre de l'agenda de Lisbonne. Pour faire en sorte que les applications technologiques soient plus largement utilisées dans le cadre du PCI, il conviendrait de cibler les universités et les PME, et de mettre davantage l'accent sur la promotion de mesures visant à favoriser l'identification du capital intellectuel, sur les autorisations et leur délivrance, sur les accords de coopération et sur le profit qui en est retiré. Une exécution réussie doit être garantie par le biais de l'initiative JEREMIE, de manière semblable aux réglementations relatives aux financements et aux aides d'État.

3.5.4

En 2006, la BEI et le FEI ont convenu d'opérations conjointes qui ont consisté en particulier à articuler des lignes de crédit de la BEI avec des garanties du FEI pour les PME innovantes. Il est probable que de telles opérations voient leur développement se poursuivre, en particulier dans le cadre de JEREMIE.

Bruxelles, le 11 juillet 2007.

Le Président

du Comité économique et social européen

Dimitris DIMITRIADIS


(1)  «Apprentissage tout au long de la vie appuyé sur les technologies informatiques et mutations industrielles», CCMI/034, 13 septembre 2006.

(2)  COM(2006) 604 final.

(3)  Règlement (CE) no 364/2004 de la Commission du 25 février 2004 modifiant le règlement (CE) no 70/2001 (JO L 63 28.2.2004).


27.10.2007   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 256/93


Avis du Comité économique et social européen sur «L'emploi pour les catégories prioritaires (stratégie de Lisbonne)»

(2007/C 256/18)

Le 14 septembre 2006, le Comité économique et social européen a décidé (décision confirmée le 26 octobre 2006), conformément à l'article 31 de son règlement intérieur (dans le cadre des travaux du CESE suite à la demande du Conseil européen des 23 et 24 mars 2006) d'élaborer un rapport d'information sur «L'emploi pour les catégories prioritaires (stratégie de Lisbonne)».

Le 15 mars 2007, conformément à l'article 29, paragraphe 2 de son règlement intérieur, le Comité économique et social européen a décidé de convertir ce rapport d'information en avis d'initiative.

La section spécialisée «Emploi, affaires sociales, citoyenneté», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 18 juin 2007 (rapporteur: M. GREIF).

Lors de sa 437e session plénière des 11 et 12 juillet 2007 (séance du 12 juillet 2007), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 122 voix pour et 2 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1

Le présent avis fait état de la réalisation limitée des ambitieux objectifs de la stratégie de Lisbonne s'agissant de l'amélioration quantitative de l'emploi, même s'il ne faut pas perdre de vue qu'il existe des différences notables d'un pays à l'autre. Pour ce qui est de l'aspect qualitatif de l'emploi, le tableau est là encore contrasté: les exemples louables de bonnes pratiques en matière de politique de l'emploi dans les différents États membres, que le CESE recommande à l'avenir de recueillir et d'exploiter de manière plus systématique, ne parviennent toujours pas à faire oublier la réalité de la situation à l'échelle européenne:

Bien qu'au niveau de l'Union européenne la plupart des emplois continuent d'être des emplois classiques, force est de constater d'une part que les créations emplois observées ces dernières années sont essentiellement la conséquence d'une progression des postes à temps partiel, surtout occupés par des femmes, d'autre part qu'il existe toujours un manque criant d'emplois adaptés aux travailleurs âgés et enfin que l'on assiste, notamment chez les jeunes, à une forte augmentation des formes d'emploi atypiques, certaines trop précaires sur le plan juridique ou social.

Les perspectives d'insertion sur le marché de l'emploi n'ont pratiquement pas évolué pour les catégories défavorisées (comme le font apparaître la permanence d'un chômage de longue durée élevé ainsi que des taux de chômage relativement hauts, en particulier pour ce qui est des jeunes et des personnes faiblement qualifiées, et un faible taux d'activité, notamment pour les personnes âgées); la situation sur le marché du travail des groupes touchés par l'exclusion sociale reste elle aussi extrêmement problématique.

1.2

Dans ce contexte, le Comité considère que dans les débats actuels autour du concept de flexicurité, il importe de veiller à ce que toute définition générale de ce concept associe toujours des mesures en faveur de l'adaptabilité des entreprises et des salariés avec un niveau élevé de sécurité sociale, une politique volontariste du marché de l'emploi, la promotion de la formation initiale et continue et l'accès à des services sociaux.

1.3

S'agissant des politiques nationales dans le domaine social et de l'emploi concernant les catégories prioritaires du marché du travail évoquées dans le présent avis, le CESE invite à accorder à l'avenir une attention accrue aux aspects suivants:

mesures promouvant l'insertion des jeunes sur le marché du travail afin de leur proposer un premier emploi offrant des perspectives d'avenir;

lutte accrue contre les nombreuses discriminations qui subsistent en liaison avec l'âge, le sexe, le handicap ou l'origine ethnique, notamment en ce qui concerne l'accès à la formation ainsi que l'accès et le maintien sur le marché de l'emploi;

augmentation de la sécurité du marché de l'emploi et lutte contre la précarité, notamment en veillant à ce que les chômeurs ne soient pas contraints d'accepter des emplois non protégés, en luttant contre le travail non déclaré et en empêchant le recours excessif à des salariés en contrat à durée déterminée;

mesures visant à améliorer la qualité de l'emploi et à protéger les travailleurs contre les discriminations;

investissements accrus dans la qualité et dans l'aménagement de conditions de travail adaptées aux personnes âgées;

investissements dans le domaine de la formation initiale et continue et de l'enseignement et de la formation tout au long de la vie, et résorption du décalage entre l'offre et la demande de compétences sur le marché du travail;

modernisation et amélioration lorsqu'il y a lieu de la protection sociale des formes d'emplois atypiques;

réduction de la segmentation du marché du travail entre les sexes, notamment par des mesures efficaces permettant de concilier vie professionnelle et familiale (notamment développement de services complets de garde d'enfants ainsi que de dispositifs de soutien pour les personnes nécessitant une assistance et leurs familles, notamment des institutions de prise en charge de ces personnes, fonctionnant 24 heures sur 24);

pour les personnes ayant des obligations familiales, levée des obstacles à l'insertion (ou réinsertion) professionnelle et au maintien sur le marché du travail et incitations à une participation accrue des pères aux tâches liées à la garde des enfants;

multiplication des mesures et des aides de nature à inciter les entreprises à recruter davantage de jeunes et de seniors confrontés à des problèmes particuliers sur le marché du travail.

1.4

S'agissant des catégories socialement marginalisées, des mesures spécifiques sont en outre nécessaires:

par exemple la création de marchés de l'emploi de transit proposant des incitations appropriées en direction des entreprises afin qu'elles recrutent davantage les personnes appartenant à ces catégories, parallèlement à des aides pour leur permettre de surmonter les problèmes à l'origine de leur exclusion sociale (tout en évitant à tout prix à la fois les effets d'aubaine involontaires et les distorsions de concurrence);

les initiatives en faveur de l'emploi mises en œuvre dans le secteur des activités à but non lucratif, notamment celui de l'économie sociale, ont un rôle spécifique à jouer dans ce contexte. Il y a lieu de prévoir les aides correspondantes dans le cadre des budgets de la politique du marché de l'emploi.

1.5

Le CESE souligne avec insistance que la mise en œuvre des priorités évoquées dans le présent avis nécessite de la part de nombreux États membres des efforts plus soutenus en matière de politique de l'emploi, ce pour quoi il convient de prévoir un budget adéquat.

Ainsi, l'ensemble des mesures de la politique active du marché de l'emploi adoptées au niveau national et européen resteront sans grands effets si elles ne sont pas dûment prises en compte dans les prévisions budgétaires des États membres.

Le CESE constate des disparités dans de nombreux États membres entre les propositions ayant trait à des initiatives relatives au marché du travail — par exemple dans le cadre des plans nationaux de réformes — et la couverture budgétaire prévue (1).

Les expériences positives réalisées par les différents pays devraient être mieux prises en compte dans les programmes d'action nationaux et le FSE doit voir son utilisation adaptée en conséquence pour la période 2007-2013.

1.6

Le CESE a fait valoir à plusieurs reprises que cette couverture budgétaire requiert un environnement macroéconomique favorable, qui doit être orienté vers une politique économique axée sur la croissance, afin de pouvoir surmonter les crises conjoncturelles de longue durée (2).

1.7

Dans un grand nombre d'États membres, les prélèvements sociaux liés au coût du travail atteignent un niveau tel que la création d'emplois risque d'être compromise. Dans bien des cas, la reprise du travail peut s'avérer peu intéressante en raison d'une différence minime entre le revenu salarial après impôt et le niveau des transferts sociaux. Il importe de prévenir ces «trappes à chômage» sans pour autant remettre en question la couverture financière des systèmes sociaux. Le CESE rejoint à cet égard les recommandations du groupe de haut niveau sur l'avenir de la politique sociale dans l'Union élargie, lesquelles préconisent d'élargir la base de financement des systèmes de protection sociale et ainsi de répartir plus équitablement les charges sur l'ensemble des facteurs de production, de manière à délester le facteur travail (3).

1.8

S'agissant de la révision imminente des lignes directrices de la politique de l'emploi en 2008, le CESE estime nécessaire, dans le cadre de plusieurs des thématiques abordées dans le présent avis, de se concentrer davantage sur la fixation de priorités et de proposer des mesures plus concrètes.

Le CESE préconise à cet égard la fixation plus contraignante d'objectifs au niveau européen, afin d'imposer aux États membres un cadre clair assorti d'obligations bien définies. Le contrôle de la mise en œuvre de ces objectifs au niveau national exige selon lui que la Commission se voie attribuer un rôle plus significatif dans le cadre de la stratégie pour l'emploi.

Le CESE souhaite en outre que de nouvelles améliorations soient apportées aux objectifs fixés, notamment en ce qui concerne l'emploi des jeunes et la lutte contre le chômage des jeunes (par exemple la réduction du délai de six mois pour l'insertion dans la vie active des jeunes en quête d'un emploi ou d'une place d'apprentissage), la promotion intensive de l'égalité des chances, l'aide aux personnes handicapées et l'intégration des migrants.

Le CESE souhaiterait obtenir par ce biais que les programmes nationaux de réforme en matière de politique de l'emploi soient plus ambitieux à l'avenir et affichent une amélioration qualitative pour ce qui est des délais, des responsabilités, du caractère contraignant des mesures et de la base financière. Le CESE suggère à cet égard de réfléchir à l'adoption d'objectifs concrets afin que dans chaque État membre, des ressources budgétaires appropriées soient réservées à la politique active du marché de l'emploi.

Le CESE présentera dans un avis spécifique sa vision des ajustements — qu'il ne fait qu'évoquer brièvement ici — à apporter aux lignes directrices de la politique de l'emploi à compter de 2009.

2.   Contexte

2.1

Dans ses conclusions des 23 et 24 mars 2006, le Conseil européen a demandé au CESE de présenter, en préalable au sommet de printemps 2008, un «rapport de synthèse sur les activités appuyant le partenariat pour la croissance et l'emploi», en se concentrant notamment sur le thème «Augmenter les possibilités d'emploi pour les catégories prioritaires». Le CESE soumet en conséquence le présent avis d'initiative, élaboré en faisant appel à l'expertise des Conseils économiques et sociaux nationaux.

2.2

Le CESE a toujours insisté sur le fait que l'amélioration de la compétitivité et l'obtention d'une croissance économique durable dans le cadre de la stratégie de Lisbonne ne sont pas un objectif en soi, mais doivent aussi permettre de résorber le chômage, qui atteint un niveau élevé dans l'UE, de rechercher le plein emploi, d'asseoir les systèmes de protection sociale sur une base plus stable et d'assurer une protection contre l'exclusion sociale (4).

2.3

S'agissant de la politique de l'emploi, la stratégie de Lisbonne devrait ainsi relancer la stratégie européenne en faveur de l'emploi et partant relever le taux d'activité et améliorer la qualité de l'emploi. Car l'objectif de la stratégie de Lisbonne n'est pas uniquement de créer des emplois, mais aussi des emplois de meilleure qualité. C'est pourquoi les investissements dans les ressources humaines, la recherche, la technologie et l'innovation sont jugés aussi prioritaires que les mesures relatives au marché du travail et à la politique structurelle (5).

2.4

Dans le présent avis, l'analyse des évolutions du marché du travail et les recommandations politiques du CESE seront axées sur les catégories à propos desquelles le Conseil a instamment demandé à plusieurs reprises aux États membres de prévoir des mesures spécifiques, afin

d'améliorer la situation des jeunes sur le marché du travail et de réduire sensiblement le chômage des jeunes;

d'appliquer des stratégies de vieillissement actif afin de permettre aux seniors de rester plus longtemps sur le marché du travail;

d'encourager résolument de travail des femmes et de faire en sorte qu'il soit plus facile, à la fois pour les femmes et pour les hommes, de concilier activité professionnelle et vie privée;

d'améliorer l'insertion professionnelle des personnes handicapées et leur maintien durable sur le marché du travail;

d'accroître le taux d'activité et les perspectives d'emploi des immigrés et des minorités ethniques.

2.5

Le CESE entend proposer pour ces différentes catégories un ensemble de mesures préventives et actives d'insertion (ou réinsertion) qui devraient trouver une prise en compte accrue dans le cadre de la politique du marché du travail et de l'emploi des États membres. Il se penche également sur les catégories socialement marginalisées, qui sont fréquemment exclues du marché du travail. Il formule ensuite des recommandations politiques concernant notamment les lignes directrices de la politique de l'emploi qui devraient être revues d'ici au sommet de printemps 2008.

3.   Taux d'emploi, chômage et emploi — état des lieux (6)

3.1

Pour la première fois depuis 2001, l'UE a enregistré en 2005 et en 2006 une croissance de l'emploi et un net recul du taux de chômage (de 9,0 % en 2004 à 7,9 % en 2006). Avec une augmentation de 0,6 %, le taux d'emploi connaît une reprise (plus prononcée pour les femmes que pour les hommes) après une stagnation de plusieurs années. Cette tendance positive se maintient en 2007 (7).

3.2

Force est néanmoins de constater que

les progrès accomplis dans la réalisation des objectifs intermédiaires de Lisbonne et de Stockholm sont lents et ces objectifs n'ont pas été atteints en 2005, qu'il s'agisse du taux d'emploi général de 67 % (2005: 63,8 %) ou du taux d'emploi des femmes de 57 % (2005: 56,3 %). Il est de plus en plus évident que les objectifs fixés pour 2010 ne seront pas atteints dans un grand nombre d'États membres ni dans l'Union dans son ensemble;

même si les emplois à temps plein restent la forme d'emploi la plus répandue dans l'UE, il est à noter que la hausse de l'emploi observée ces dernières années — notamment chez les femmes — s'explique largement par la multiplication des emplois à temps partiel (ce qui se traduit par une hausse nettement moindre des équivalents temps plein, voire un recul dans certains États membres);

c'est encore chez les personnes âgées que l'augmentation la plus significative de l'emploi a été enregistrée ces dernières années. Mais le taux d'emploi des travailleurs âgés n'en reste pas moins lui aussi nettement en deçà des objectifs fixés (42,5 % seulement en moyenne pour les 55-64 ans en 2005). Neuf États membres seulement ont atteint en 2005 l'objectif de 50 % (écart prononcé entre les femmes et les hommes: objectif atteint pour les hommes dans 17 États, pour les femmes dans 4 États seulement: les pays scandinaves et l'Estonie);

le taux de chômage des jeunes, qui était de 18,5 % en moyenne en 2005 dans l'UE-25, reste deux fois plus élevé que le taux de chômage global;

en dépit d'une amélioration générale dans plusieurs États membres, notamment ceux qui connaissent un taux de chômage très lourd, le chômage dans l'UE se maintient à un niveau élevé (un peu moins de 8 %) et enregistre même une hausse dans certains pays;

les disparités régionales en matière de taux d'activité restent élevées dans certains États membres (notamment au regard des équivalents temps plein). Le nombre de personnes vivant aujourd'hui dans l'UE 27 dans des régions où le taux de chômage dépasse 15 % s'est nettement accru avec les derniers élargissements;

la situation du marché du travail reste extrêmement difficile pour les catégories socialement marginalisées.

Face aux développements du marché du travail brièvement évoqués ici, et en dépit des progrès relatifs réalisés, un long chemin reste à parcourir pour atteindre les ambitieux objectifs de Lisbonne.

3.3

Ce d'autant plus que le développement de l'emploi affiche en outre — avec des amplitudes parfois très variables selon les pays et les secteurs — les caractéristiques et les tendances suivantes:

les perspectives d'insertion sur le marché de l'emploi n'ont pratiquement pas évolué pour les catégories défavorisées (comme le font apparaître la permanence d'un chômage de longue durée élevé ainsi que des taux de chômage relativement hauts, en particulier pour ce qui est des jeunes et des personnes faiblement qualifiées, et un faible taux d'activité, notamment pour les personnes âgées);

bien qu'au niveau de l'Union européenne, les emplois continuent pour la plupart d'être des emplois classiques, les données disponibles font apparaître une forte augmentation des formes d'emploi atypiques, certaines juridiquement et socialement insuffisamment protégées. Globalement, la part des emplois à durée déterminée augmente, surtout chez les jeunes. Les emplois contractuels, le travail temporaire et le travail pseudo-indépendant (8), ainsi que les emplois se situant en deçà d'un certain seuil de rémunération et bénéficiant d'une couverture sociale moins favorable, enregistrent eux aussi une forte hausse, la situation variant il est vrai fortement d'un État membre à l'autre. D'une manière générale, la précarité gagne du terrain, en particulier dans les catégories défavorisées. Ces formes d'emploi ne peuvent se justifier qu'en tant que passerelle vers le marché du travail traditionnel et à la seule condition qu'elles aient été choisies librement et s'accompagnent d'une certaine protection;

dans un grand nombre d'États membres, la précarité de l'emploi est de plus en plus grande, notamment chez les travailleurs faiblement qualifiés, en particulier les personnes ayant interrompu prématurément leurs études et celles ne disposant pas d'une formation professionnelle. En raison du déséquilibre constaté entre les qualifications demandées et celles offertes, l'insertion dans le marché du travail et la reprise d'une activité professionnelle après une période de chômage s'avèrent particulièrement difficiles pour ces catégories;

les personnes ayant des enfants à charge ont toujours autant de mal à trouver un emploi stable et satisfaisant;

les personnes handicapées restent largement représentées parmi les exclus du marché du travail. Selon les dernières données européennes, 40 % seulement des personnes handicapées ont un travail. Ces chiffres sont encore plus préoccupants s'agissant des personnes lourdement handicapées;

il existe en outre un grand nombre de personnes dont la marginalisation est due à des causes telles que les addictions, le surendettement ou l'absence de domicile fixe et dont l'intégration sur le marché du travail requiert des mesures particulières d'insertion sociale;

dans la plupart des États membres, les conditions de travail et les perspectives d'insertion sur le marché de l'emploi des immigrés et des personnes issues de l'immigration sont plus précaires que celles du reste de la population. Les Roms, qui avec l'élargissement à la Roumanie et à la Bulgarie sont devenus la principale minorité en Europe et dont la situation sur le marché de l'emploi (avec un taux de chômage atteignant dans certains cas 70 à 90 %) est on ne peut plus préoccupante, et ce pour de multiples raisons, méritent à cet égard une attention particulière. Le CESE se prononcera à ce sujet dans le cadre d'un avis d'initiative séparé.

3.4

Le développement du secteur informel, qui se caractérise par des conditions d'emploi peu sûres et souvent de bas salaires, risque de disqualifier durablement les catégories qui ne parviennent pas à accéder au marché régulier de l'emploi. Cette évolution (difficile à recenser statistiquement) est non seulement source d'une grande incertitude pour les personnes concernées mais est également à l'origine de pertes fiscales élevées et remet en question la durabilité du potentiel de production dans l'UE.

4.   Créer un cadre favorable à la croissance ainsi qu'au développement et à la qualité de l'emploi

4.1

Depuis des années, la ligne dominante de la politique européenne consiste à attribuer la responsabilité des problèmes du marché de l'emploi aux difficultés structurelles du système du marché de l'emploi. De nombreux pays de l'UE ont axé unilatéralement la politique de l'emploi sur le démantèlement des dispositions générales du droit du travail, l'application de conditions plus strictes pour bénéficier des prestations sociales et la diminution de celles-ci, ainsi que la flexibilisation des conditions d'emploi.

4.2

Les interventions relevant d'une politique active du marché de l'emploi, telles que par exemple la promotion de l'employabilité, le rattrapage des lacunes en termes de qualification et les programmes prioritairement axés sur l'insertion dans le marché du travail des catégories défavorisées, n'ont en revanche pas été suffisamment mises en œuvre dans de nombreux pays, même si depuis 1995 certains d'entre eux, dont le niveau de dépenses était faible, l'ont revu à la hausse. Dans la plupart des États (pour lesquels des données sont disponibles), la part des dépenses «actives» sur l'ensemble des dépenses consacrées à la politique du marché de l'emploi (mesures de soutien «passives» et «actives») a même décru durant ces dernières années. Il est essentiel de veiller à ce que les moyens affectés aux mesures de la politique active du marché de l'emploi soient à la hauteur des défis posés et, dans le même temps, de renforcer l'efficacité des mesures de la politique du marché de l'emploi et de faire en sorte qu'elles se concentrent sur les catégories concernées.

4.3

Dans ce contexte, le CESE a déjà fait valoir à différentes reprises que les mesures relevant de la politique du marché de l'emploi et les réformes structurelles ne pourront en définitive être efficaces que dans un environnement macro-économique favorable qui s'efforce de surmonter la crise conjoncturelle qui perdure et de consolider la croissance (9). Pour ce faire, il faut que les États membres et l'UE prônent une politique économique tournée vers la croissance et assortie de conditions monétaires, fiscales et économiques appropriées:

conformément à son mandat, la Banque centrale européenne devrait contribuer, notamment à travers sa politique des taux d'intérêt, à soutenir la croissance économique et à résorber le chômage dans un contexte de stabilité des prix. Une forte reprise de l'emploi ne sera possible que par le biais de la hausse de la productivité à moyen terme, dans le cadre d'une croissance économique soutenue;

la marge de manœuvre accrue offerte par le pacte de croissance et de stabilité réformé doit être mise à profit pour permettre aux États membres de l'UE de prendre des contre-mesures conjoncturelles et de libérer une marge budgétaire pour des réformes structurelles socialement acceptables et un volume adéquat d'investissements publics.

Les objectifs de Lisbonne indiquent la direction à donner aux investissements: développement des infrastructures de communication et de transport, lutte contre le changement climatique, stratégie en faveur de la recherche et du développement, mise en place généralisée de services de garde d'enfants, promotion de la formation initiale et continue, politique active du marché du travail et qualité des emplois. Les programmes nationaux de réforme devraient à cet égard être conçus de telle sorte qu'ils débouchent sur un programme de dynamisation de l'économie coordonné à l'échelon de l'UE et auquel l'ensemble des acteurs nationaux et européens apportent leur concours.

5.   Mesures efficaces de lutte contre le chômage des jeunes

5.1

Le chômage des jeunes reste l'un des points sensibles de la politique européenne de l'emploi. Il est supérieur dans tous les pays de l'UE au taux de chômage général et dans la plupart des États membres, il est au moins deux fois plus élevé que dans l'ensemble de la population. Dans certains pays de l'UE-15 ainsi que dans plusieurs des nouveaux pays membres, la situation est encore plus critique. L'insécurité de l'emploi s'est aggravée dans plusieurs États membres, y compris dans le domaine des emplois qualifiés.

5.2

L'accès à l'emploi passe de plus en plus souvent par des formes d'emploi alternatives offrant pour certaines des conditions beaucoup moins sûres sur le plan social et du droit du travail. Les frontières entre travail formel et travail informel tendent de plus en plus à s'estomper. L'accès à un emploi régulier s'avère de plus en plus difficile pour certaines catégories de jeunes telles que ceux disposant d'un faible niveau de qualification, les jeunes issus de l'immigration ou ceux appartenant aux couches défavorisées de la population. Le risque de rester en marge de la population active s'accroît, en particulier pour ceux qui cumulent plusieurs de ces handicaps.

5.3

L'enjeu dans ce contexte est d'offrir au plus grand nombre possible de jeunes des perspectives d'avenir en dehors du travail précaire. Des considérations démographiques interviennent également: la situation économique des jeunes influe de manière déterminante sur leur désir de fonder une famille. Il y a lieu de se féliciter dans ce contexte que la Commission européenne réclame dans son rapport de printemps, outre l'amélioration du niveau de qualification, une intensification des mesures relevant d'une politique active du marché de l'emploi et insiste en particulier pour que les jeunes à la recherche d'un emploi bénéficient d'un soutien beaucoup plus rapide et pour que soient levés les obstacles structurels au passage de la formation à l'emploi.

5.4

L'on pourrait s'inspirer à cet égard des modèles ayant fait leurs preuves dans plusieurs États membres (l'Allemagne, l'Autriche, les Pays-Bas dans une certaine mesure) et combinant d'une part des systèmes de formation orientés vers la pratique et vers les besoins des entreprises et d'autre part une formation scolaire. De nombreuses études mettent en avant la qualité de cette «formation professionnelle duale» et estiment qu'elle joue un rôle essentiel en facilitant la transition entre l'école et la vie active, contribuant ainsi à réduire l'écart entre le chômage des jeunes et le taux de chômage général.

5.5

Mesures actives et préventives de formation initiale et continue pour l'amélioration des perspectives qui s'offrent aux jeunes en matière d'emploi (10):

la garantie de pouvoir bénéficier d'un niveau de qualification élevé depuis le stade de la formation initiale jusqu'à la formation professionnelle et continue, afin de faciliter l'accès au marché de l'emploi et le maintien sur celui-ci, ce qui nécessite non seulement une intervention publique mais aussi la contribution des opérateurs économiques;

une aide active et précoce aux jeunes en quête d'un emploi ou d'un poste d'apprentissage (le cas échéant après quatre mois seulement), des programmes prioritaires renforcés ainsi qu'un soutien et un accompagnement individuel axés sur l'insertion des catégories en difficulté, telles que les jeunes chômeurs de longue durée et des personnes en rupture avec le système éducatif et de formation, notamment par le biais de projets d'intérêt général en matière d'emploi et une aide à la formation;

la mise en place généralisée pour les jeunes de services d'orientation professionnelle et d'information aisément accessibles à tous les niveaux de la formation; l'amélioration correspondante de la qualité et l'attribution aux services de l'emploi de ressources humaines appropriées, notamment en termes de personnel;

la réduction du fossé existant entre les qualifications offertes et celles demandées sur le marché du travail; l'amélioration de l'efficacité de l'enseignement primaire (en particulier, diminution du nombre de ceux qui abandonnent prématurément leurs études, lutte contre l'analphabétisme), et une plus grande perméabilité entre l'apprentissage et la formation ultérieure; la réduction de la ségrégation entre les sexes dans le cadre de l'orientation professionnelle;

la mise en œuvre de mesures visant à garantir que les contrats à durée déterminée et les emplois offrant une faible protection sociale restent des épisodes transitoires pour les jeunes.

6.   Amélioration des perspectives d'intégration pour les travailleurs immigrés

6.1

Dans la plupart des États membres de l'UE, la situation n'a pas beaucoup changé en ce qui concerne la discrimination dont font l'objet les travailleurs migrants et les membres de leur famille sur le marché de l'emploi. Ils restent surreprésentés dans les secteurs caractérisés par de faibles rémunérations et de mauvaises conditions de travail, sont beaucoup plus exposés au risque de perte d'emploi et restent largement cantonnés dans des postes présentant des garanties limitées, des risques importants pour la santé, une sécurité insuffisante et (dans certains pays) une protection limitée dans le cadre des conventions collectives.

6.2

Il est particulièrement préoccupant que la deuxième génération de migrants «hérite» de cette situation de précarité sur le marché de l'emploi, en liaison notamment avec d'importantes difficultés scolaires. Dans la plupart des États membres, les jeunes issus de l'immigration comptent parmi les catégories les plus exposées à la précarité et courant le plus de risques d'être évincées du marché régulier de l'emploi.

6.3

Le CESE a déjà plusieurs fois déclaré qu'il juge la migration de main-d'œuvre indispensable, notamment au vu du développement démographique de l'UE, en citant en exemple à cet égard certains États membres, par exemple l'Espagne et l'Irlande. Mais cela doit toujours aller de pair avec une politique d'intégration adaptée dans les États membres, notamment en ce qui concerne l'emploi (11). La situation en matière d'immigration diffère fortement d'un État membre à l'autre, de même que les mesures adoptées dans le domaine de l'intégration, notamment en ce qui concerne la politique de l'emploi et de l'éducation. Il convient que les États membres accordent une importance particulière à la situation des demandeurs d'asile, compte tenu des difficultés spécifiques auxquelles ces derniers sont fréquemment confrontés.

6.4

Priorités pour l'amélioration de l'intégration des immigrés:

l'accent doit être mis sur l'aide individuelle (pré)scolaire et les investissements précoces dans les qualifications linguistiques et préparatoires à la vie professionnelle; suppression des discriminations lors de l'accès à l'emploi (notamment en remédiant aussi tôt que possible aux barrières linguistiques) et simplification de la reconnaissance des formations acquises à l'étranger pour les migrants;

inclusion des questions liées à l'intégration dans l'ensemble de la politique sociale et de la politique de l'emploi (entre autres amélioration des compétences interculturelles des autorités et des services de l'emploi et aide aux entreprises, en particulier les PME); octroi par les autorités européennes et nationales d'un budget adapté pour les mesures en faveur de l'intégration;

élimination des entraves institutionnelles et des discriminations à l'accès au marché de l'emploi des États membres (par exemple réduction des délais d'attente pour l'octroi de permis de travail, notamment pour les demandeurs d'asile (12)) et lutte contre le dumping salarial, parallèlement à l'amélioration des perspectives d'intégration dans le cadre de la politique européenne en matière d'immigration (éviter une politique de l'immigration qui fasse obstacle à l'intégration en promouvant les migrations temporaires et partant les formes de travail précaires et la marginalisation);

amélioration de la situation en ce qui concerne les liens entre le statut de travailleur issu de l'immigration et la ségrégation et la discrimination sur le marché de l'emploi (13);

mise en œuvre de mesures préventives et de sanctions ainsi que de partenariats entre les partenaires sociaux et les pouvoirs publics au niveau national afin de lutter contre le travail clandestin et de prévenir le dumping social et les distorsions de concurrence, notamment en liaison avec les flux transfrontaliers de main-d'œuvre.

7.   Mise à profit des opportunités offertes par l'emploi des personnes âgées

7.1

Le défi démographique appelle en priorité la réponse suivante: politique de croissance ciblée et développement de l'emploi. Le potentiel de main-d'œuvre disponible est suffisant. Mais le potentiel d'activité des personnes âgées de plus de 55 ans reste insuffisamment exploité au niveau de l'UE.

7.2

Le risque d'être confronté au chômage de longue durée augmente rapidement avec l'âge. Le taux de chômage de longue durée des personnes âgées de 50 à 64 ans dépasse en moyenne 60 % dans l'UE-25. Face à une telle situation, il y a lieu de veiller à ce que les travailleurs âgés aient réellement une chance de trouver un emploi et de l'exercer durablement.

7.3

Les principales raisons pour lesquelles les personnes concernées se retirent prématurément de la vie active sont les problèmes de santé liés à des conditions de travail pénibles, une intensité de travail élevée, le licenciement prématuré des travailleurs âgés, l'insuffisance des mesures de remise à niveau et le manque de possibilités de (re)trouver un emploi. S'efforcer de relever le taux d'emploi des personnes âgées en intervenant principalement sur les systèmes de pension, avec pour corollaire une détérioration des conditions d'accès et d'éligibilité, n'est pas pertinent.

7.4

Seule une politique volontaire de «vieillissement actif», incluant de larges possibilités de participation à des mesures de perfectionnement ainsi qu'à l'éducation et à la formation tout au long de la vie, peut permettre d'augmenter durablement le taux d'emploi des personnes âgées. Il existe dans les pays nordiques des modèles (avant tout l'ensemble intégré de mesures adoptées en Finlande dans le cadre du programme d'action national en faveur des personnes âgées) qui montrent avec succès la voie d'une solution socialement acceptable, permettant de créer, avec la participation des partenaires sociaux, un marché de l'emploi fonctionnel pour les personnes âgées, assorti d'une grande stabilité de l'emploi et d'un niveau élevé de capacité de travail et d'activité des personnes âgées.

7.5

Les grands axes d'une réorientation résolue vers un monde du travail adapté aux personnes âgées (14):

mesures globales de conseil et d'accompagnement pour les personnes à la recherche d'un emploi et soutien actif des services de l'emploi (par exemple emplois subventionnés, aides à l'insertion, projets sociaux d'intérêt général) et le cas échéant mesures de réadaptation en vue d'une réinsertion durable; octroi des ressources correspondantes pour des politiques actives du marché de l'emploi afin de permettre une planification à long terme de la part des services de l'emploi;

mesures socialement acceptables incitant à différer l'âge du départ à la retraite et, lorsque cela est possible ou souhaitable, développement de modèles attrayants facilitant le passage de la vie active à la retraite dans le cadre des régimes publics de retraite (notamment poursuite du développement de modèles de temps partiel pour les personnes âgées);

mesures permettant de rester plus longtemps en activité à des conditions physiquement et psychiquement appropriées, en particulier moindre exigence de rendement dans les entreprises et des conditions de travail adaptées aux personnes âgées (notamment incitations à renforcer la protection de la santé sur le lieu de travail; lancement généralisé dans les entreprises de programmes de promotion de la santé et de prévention des maladies ainsi que de protection des travailleurs);

participation accrue des personnes âgées aux mesures de formation continue (campagne de qualification 40+, incitations visant à remédier au manque de participation à la formation continue au sein de l'entreprise, notamment chez les personnes peu qualifiées);

mesures de sensibilisation en faveur des personnes âgées (valorisation de l'expérience et transmission à des travailleurs plus jeunes des compétences professionnelles acquises pendant la vie active) et conseil et soutien aux entreprises, notamment les PME, pour une gestion prévisionnelle des ressources humaines et l'instauration d'une organisation du travail adaptée aux personnes âgées.

8.   Amélioration de la situation en ce qui concerne l'emploi des femmes

8.1

Même si, pendant les 30 dernières années, les femmes ont largement rattrapé leur retard en termes de niveau formel de qualification, l'égalité des chances est encore loin d'être acquise sur le marché du travail. Les femmes restent dans leur majorité concentrées dans les secteurs traditionnels des services et dans les secteurs industriels employant traditionnellement une main-d'œuvre essentiellement féminine. Sur le plan du statut professionnel, les femmes ont beaucoup plus de mal à exploiter leurs qualifications. Il reste incomparablement plus difficile pour les femmes que pour les hommes de concilier vie professionnelle et familiale.

8.2

Leur pourcentage dans les emplois à temps partiel dépasse nettement celui des hommes dans tous les groupes d'âge. Le développement du travail à temps partiel qui, s'il est librement choisi et s'effectue à des conditions ne conduisant pas à une impasse en termes d'évolution salariale et d'insertion sur le marché de l'emploi, est en soi positif, reste dans la plupart des États membres un facteur essentiel de segmentation du marché de l'emploi entre les sexes.

8.3

Les disparités salariales entre les femmes et les hommes restent encore importantes dans la grande majorité des catégories professionnelles, indépendamment de la position occupée sur le marché de l'emploi. Les longues interruptions de carrière liées à la garde d'enfants et aux soins prodigués à des proches pèsent très lourdement sur les perspectives de promotion, les revenus et les droits à des prestations sociales. Alors que les hommes peuvent s'attendre à voir leur salaire augmenter avec l'ancienneté, les revenus des femmes cessent d'évoluer dans le groupe d'âge où elles interrompent leur carrière pour élever leurs enfants ou occuper un emploi à temps partiel.

8.4

L'exemple en particulier du Danemark et de la Suède montre qu'il peut en aller autrement et que l'intégration dans la politique du marché de l'emploi des questions d'égalité hommes/femmes peut être plus qu'un slogan. Dans ces pays, les écarts salariaux sont moindres, le taux d'activité des femmes et la couverture des besoins en termes de places dans les services d'accueil à l'enfance — notamment pour les enfants de moins de 2 ans — sont nettement plus élevés que dans d'autres États membres de l'UE. Les Pays-Bas offrent un autre exemple intéressant. Le taux d'activité des femmes y est élevé, celles-ci occupant très souvent des emplois à temps partiel, la plupart du temps choisis.

8.5

Mesures clés pour résoudre les problèmes structurels de l'emploi des femmes (15):

mesures visant à supprimer les discriminations actuelles sur le marché du travail et les facteurs structurels à l'origine des écarts salariaux entre les femmes et les hommes, en particulier promotion de la protection sociale individuelle des femmes, notamment via des mesures visant à limiter les emplois à temps partiel non protégés se situant au-dessous d'un certain seuil de rémunération et à mieux réglementer le travail à temps partiel (par exemple extension du droit à travailler à temps partiel pour les parents assorti du droit à retrouver un travail à temps plein, lutte contre l'intégration insuffisante dans les programmes de formation continue internes à l'entreprise);

développement massif sur l'ensemble du territoire de services extérieurs de qualité et compatibles avec la vie professionnelle pour la garde d'enfants en bas âge et en âge scolaire, ce à un prix accessible à tous; mesures actives de promotion du partage des obligations familiales entre les deux partenaires (notamment incitations à accroître la participation des pères);

suppression des mesures de politique familiale incitant fortement à quitter ou à interrompre durablement la vie professionnelle, au prix de difficultés accrues pour retrouver un emploi dans des conditions appropriées; les allocations versées pendant le congé parental ne doivent pas influer négativement sur l'évolution salariale, ne doivent pas représenter pour les femmes une incitation supplémentaire à quitter leur emploi et ne pas créer des obstacles supplémentaires au partage des tâches familiales entre les deux partenaires;

mesures de la politique de l'emploi favorisant la réinsertion professionnelle à l'issue du congé parental (et notamment soutien à la création d'entreprises) et mesures s'opposant à la déqualification et à la perte de revenus (notamment grâce à des modèles flexibles permettant de suivre une formation continue pendant le congé de maternité ou de continuer d'exercer son emploi selon un horaire réduit);

temps de travail adapté aux obligations familiales (par exemple possibilité pour les parents d'enfants en bas âge ou en âge scolaire d'aménager leurs horaires de travail en conséquence, accords en matière de télétravail et droit légal à un aménagement souple du temps de travail pour les personnes ayant des proches à charge).

9.   Promotion des chances des personnes handicapées sur le marché du travail

9.1

Les handicapés restent largement représentés parmi les exclus du marché du travail. Ils occupent plus fréquemment des emplois mal rémunérés et font souvent l'objet de discriminations quant à l'accès à la formation et aux promotions. Sachant que 15 % de la population en âge de travailler dans l'UE souffre d'un handicap quelconque et étant donné le faible taux d'activité de cette catégorie, augmenter le taux d'emploi des personnes handicapées contribuerait de manière significative à la réalisation des objectifs de la stratégie de Lisbonne.

9.2

Le CESE accueille favorablement dans ce contexte le document de la Commission intitulé «Intégration du handicap dans la stratégie européenne pour l'emploi» (16), qui représente une base appropriée pour faire progresser l'intégration sur le marché de l'emploi des personnes moins valides et rappelle que l'insertion professionnelle est la meilleure arme contre l'exclusion sociale. Le CESE rappelle que la plupart des gens développent leur handicap durant leur vie professionnelle et que bien peu ont la possibilité de retrouver un emploi conciliable avec ce handicap. Dans ce domaine, saluons par exemple la législation britannique rigoureuse de lutte contre les discriminations qui prévoit des dispositifs de recours et le modèle danois qui concilie tout à la fois la flexibilité du marché du travail, une sécurité sociale satisfaisante et un niveau élevé de formation initiale et continue.

9.3

Mesures prioritaires visant à promouvoir l'emploi des personnes handicapées (17):

ajustement des systèmes fiscaux et des systèmes de prestations de manière à rendre attrayants le travail et la transition vers le travail, par exemple à travers le versement de prestations aux travailleurs; par ailleurs, il serait possible de bénéficier de nouveau de la pension d'invalidité au terme d'une période d'essai;

développement, mise en œuvre et promotion des programmes actifs du marché de l'emploi (en particulier mesures de rééducation) spécifiquement destinés aux personnes handicapées et mesures facilitant le passage des emplois protégés aux emplois «normaux» (par exemple adaptation des mesures d'information et de communication à l'intention des personnes handicapées à la recherche d'un emploi);

aménagement d'emplois adaptés aux personnes handicapées et soutien aux mesures positives spécifiquement destinées aux travailleurs qui développent leur handicap durant leur vie professionnelle; l'on pourrait envisager des périodes de congés combinées à une formation continue, l'adaptation de la description de leurs fonctions ou l'affectation à d'autres fonctions;

mesures prévoyant une assistance supplémentaire pour les travailleurs handicapés ainsi que des services de soins pour les personnes handicapées, afin de permettre aux travailleurs dont un membre de la famille est handicapé de continuer à travailler.

Bruxelles, le 12 juillet 2007.

Le Président

du Comité économique et social européen

Dimitris DIMITRIADIS


(1)  Voir à cet égard l'avis du CESE du 17.5.2006 sur la «Proposition de décision du Conseil relative aux lignes directrices pour les politiques de l'emploi des États membres», rapporteur: M. GREIF (JO C 195 du 18.8.2006).

(2)  Voir à ce propos le rapport de mai 2004 du groupe de haut niveau sur l'avenir de la politique sociale dans l'Union européenne élargie.

(3)  Idem.

(4)  Voir à ce sujet l'avis exploratoire du CESE du 13.9.2006 sur le thème «Qualité de la vie professionnelle, productivité et emploiface à la mondialisation et aux défis démographiques», rapporteuse: Mme ENGELEN-KEFER (JO C 318 du 23.12.2006).

(5)  Voir également à ce propos l'avis d'initiative du CESE du 9.2.2005 sur la «Politique de l'emploi: rôle du CESE après l'élargissement et dans la perspective du processus de Lisbonne», rapporteur: M. GREIF (JO C 221 du 8.9.2005).

(6)  Voir à ce sujet les différents graphiques présentés en annexe.

(7)  Emploi en Europe 2006.

(8)  Cf. le Livre vert «Moderniser le droit du travail pour relever les défis du XXIe siècle», COM(2006) 708 final.

(9)  Voir notamment l'avis du CESE du 11.12.2003 sur «Les grandes orientations des politiques économiques pour la période de 2003 à 2005», rapporteur: M. DELAPINA (JO C 80 du 30.3.2004) et l'avis du CESE du 17.5.2006 sur la «Proposition de décision du Conseil relative aux lignes directrices pour les politiques de l'emploi des États membres», rapporteur: M. GREIF (JO C 195 du 18.8.2006).

(10)  Voir à ce propos les avis suivants du CESE: avis sur la «Communication de la Commission au Conseil sur les politiques européennes de la jeunesse “Répondre aux préoccupations des jeunes Européens — Mise en œuvre du Pacte européen pour la jeunesse et promotion de la citoyenneté active”» (du 26.10.2005), rapporteuse: Mme VAN TURNHOUT (JO C 28 du 3.2.2006); avis sur la «Communication de la Commission — L'Agenda social» (du 13.7.2005), rapporteuse: Mme ENGELEN-KEFER (JO C 294 du 25.11.2005); avis sur la «Proposition de décision du Conseil relative aux lignes directrices pour les politiques de l'emploi des États membres (en application de l'article 128 du Traité CE)» (du 31.5.2005), rapporteur: M. MALOSSE (JO C 286 du 17.11.2005).

(11)  Voir à ce sujet l'avis du CESE du 10.12.2003 sur la «Communication de la Commission au Conseil, au Parlement européen, au Comité économique et social européen et au Comité des régions sur l'immigration, l'intégration et l'emploi», rapporteur: M. PARIZA CASTAÑOS (JO C 80 du 30.3.2004).

(12)  Voir sur ce point d'avis du CESE du 28.11.2001 sur la «Proposition de directive du Conseil relative à des normes minimales pour l'accueil des demandeurs d'asile dans les États membres», rapporteur: M. MENGOZZI (JO C 48 du 21.2.2002).

(13)  Eurostat élabore actuellement un module ad hoc sur la situation des migrants et de leurs descendants directs, qui sera mis en oeuvre lors de la collecte de données 2008. Il a pour objet de mieux intégrer les personnes issues de l'immigration dans l'enquête de l'UE sur les forces de travail.

(14)  Voir à ce propos l'avis du CESE du 15.12.2004 sur la «Communication de la Commission au Conseil, au Parlement européen, au Comité économique et social européen et au Comité des régions, intitulée: Accroître l'emploi des travailleurs âgés et différer la sortie du marché du travail», rapporteur: M. DANTIN (JO C 157 du 28.6.2005).

(15)  Voir à ce propos l'avis du CESE du 13.9.2006 sur la «Communication de la Commission au Conseil, au Parlement européen, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — Une feuille de route pour l'égalité entre les femmes et les hommes 2006-2010», rapporteuse: Mme ATTARD (JO C 318 du 23.12.2006) et l'avis du CESE du 29.9.2005 sur «La pauvreté des femmes en Europe», rapporteuse: Mme KING (JO C 24 du 31.1.2006).

(16)  EMCO/11/290605.

(17)  Voir à cet égard l'avis du CESE du 20.4.2006 sur la «Communication de la Commission au Conseil, au Parlement européen, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — La situation des personnes handicapées dans l'Union européenne élargie: plan d'action européen 2006-2007», rapporteuse: Mme GREIF (JO C 185 du 8.8.2006) et avis exploratoire du CESE du 17.1.2007 sur le thème «Égalité des chances pour les personnes handicapées», rapporteur: M. JOOST (JO C 93 du 27.4.2007).


27.10.2007   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 256/102


Avis du Comité économique et social européen sur «Le rôle des partenaires sociaux dans la conciliation de la vie professionnelle, de la vie familiale et de la vie privée»

(2007/C 256/19)

Le 13 février 2007, la future présidence portugaise du Conseil de l'Union européenne a décidé de consulter le Comité économique et social européen sur «Le rôle des partenaires sociaux dans la conciliation de la vie professionnelle, de la vie familiale et de la vie privée».

La section spécialisée «Emploi, affaires sociales, citoyenneté», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière a adopté son avis le 18 juin 2007 (rapporteur: M. CLEVER).

Lors de sa 437e session plénière des 11 et 12 juillet 2007 (séance du 11 juillet 2007), le Comité économique et social européen a adopté l'avis suivant par 145 voix pour avec 4 abstentions.

1.   Contexte

1.1

Dans le cadre de la stratégie de Lisbonne, les chefs d'État et de gouvernement sont convenus de porter d'ici 2010 le taux d'activité des femmes à 60 %, objectif confirmé dans les lignes directrices intégrées (ligne directrice intégrée no 17) adoptées en 2005 en tant qu'élément central du nouveau dispositif d'orientation de la stratégie de Lisbonne.

1.2

Les objectifs ambitieux de la stratégie de Lisbonne en matière de croissance, d'emploi et de compétitivité pourront être atteints plus rapidement et dans des conditions plus durables si, en dépit du recul de la population active provoqué par les changements démographiques, l'Union européenne parvient au cours de la prochaine décennie à augmenter plus fortement le nombre d'actifs occupés et à accroître leurs qualifications. Une hausse sensible du taux d'activité féminin offre en ce sens des perspectives favorables dans la mesure où les jeunes femmes sont aujourd'hui plus désireuses d'exercer une activité professionnelle et que leur niveau de qualification est par ailleurs nettement plus élevé. Reste que dans ce domaine un certain nombre d'obstacles doivent encore être levés.

1.3

Pour atteindre cet objectif, les États membres de l'UE sont notamment convenus:

d'adopter des mesures énergiques destinées à relever le taux d'activité des femmes et à réduire les écarts entre les sexes en matière d'emploi, de chômage et de rémunération; et

d'œuvrer à une meilleure conciliation du travail et de la vie privée et de prévoir des structures accessibles et abordables de garde d'enfants et de prise en charge de la dépendance (ligne directrice intégrée no 18).

1.4

La présidence portugaise du Conseil a demandé au Comité économique et social européen d'élaborer un avis exploratoire sur «Le rôle des partenaires sociaux dans la conciliation de la vie professionnelle, de la vie familiale et de la vie privée».

1.5

La conciliation de la vie professionnelle, familiale et privée apporte, de l'avis des partenaires sociaux européens, une contribution majeure à la promotion de la croissance économique, à la prospérité et à la compétitivité en Europe.

1.6

La conciliation du travail, de la vie familiale et de la vie privée compte en outre parmi les priorités énoncées par la Commission européenne dans sa feuille de route pour l'égalité entre les femmes et les hommes adoptée en mars 2006 (1). Pour mieux concilier travail, famille et vie privée, la Commission a retenu dans sa feuille de route trois priorités:

1.

favoriser des modalités souples d'organisation du temps de travail tant pour les femmes que pour les hommes;

2.

étoffer l'offre de prise en charge;

3.

favoriser une meilleure conciliation pour les femmes et pour les hommes.

1.7

En publiant le 12 octobre 2006 sa communication intitulée «L'avenir démographique de l'Europe, transformer un défi en opportunité» qu'elle avait annoncée dans sa feuille de route, la Commission européenne a engagé, en vertu de l'article 138 du traité CE, la première phase de consultation des partenaires sociaux concernant la conciliation de la vie professionnelle, de la vie familiale et de la vie privée.

1.8

Pendant le premier volet de la consultation, la Commission souligne l'importance du thème de la conciliation du travail, de la vie familiale et de la vie privée. Il convient d'accroître la participation des femmes à la vie active, notamment au regard de l'évolution démographique et des contraintes qu'elle fait peser sur les systèmes de sécurité sociale. L'accent est également mis sur le rôle de la conciliation pour ce qui est d'atteindre les objectifs de Lisbonne fixés par la Commission.

1.9

Dans sa réponse à la Commission, chacun des partenaires sociaux européens a insisté sur l'importance de la question de la conciliation de la vie familiale et du travail, notamment face à une participation toujours insuffisante des femmes au marché du travail et au vieillissement de la population. Les partenaires sociaux soutiennent explicitement la mise en œuvre des objectifs en matière de développement de la garde d'enfants fixés en 2002 par le Conseil européen de Barcelone et se rejoignent pour estimer que les trois priorités pour l'égalité énoncées dans la feuille de route y concourent. Les partenaires sociaux font en outre valoir que la conciliation de la vie professionnelle, familiale et privée et la question de l'égalité des chances entre les femmes et les hommes doivent être placées au cœur du débat public, a fortiori dans un contexte de changement démographique. Par ailleurs, il convient en particulier de dépasser les rôles traditionnels dévolus jusqu'à présent à l'un et l'autre sexe, faute de quoi les progrès ne pourront être que limités.

1.10

En vue d'accroître l'égalité des chances entre les femmes et les hommes dans le monde professionnel, les partenaires sociaux (BUSINESSEUROPE/UEAPME, CEEP et CES) (2) ont pour leur part adopté en 2005 un «cadre d'actions sur l'égalité hommes-femmes» (3). Parmi les quatre priorités à partir desquelles seront déclinées les actions que mèneront les partenaires sociaux nationaux d'ici 2010, compte expressément la conciliation de la vie professionnelle et de la vie familiale. Le Conseil des ministres a dès lors raison de vouloir confier aux partenaires sociaux l'organisation du temps de travail, facteur capital d'équilibre entre la vie familiale et l'exercice d'une activité professionnelle, afin de dégager des solutions pratiques pour l'ensemble des parties intéressées.

1.11

En contribuant à instaurer de meilleures conditions de travail, les partenaires sociaux peuvent améliorer le quotidien des familles. Ils jouent dans ce contexte un rôle capital. Le cadre d'action est l'une des contributions des partenaires sociaux à la mise en œuvre de la stratégie de Lisbonne. Vu la complexité et l'interdépendance des causes des déséquilibres persistants sur les marchés du travail, les partenaires sociaux européens sont convaincus que, pour remédier efficacement aux problèmes et promouvoir l'égalité entre les sexes, une stratégie intégrée s'impose. La conciliation de la vie familiale et de la vie professionnelle constitue l'un des principaux instruments pour y parvenir.

1.12

Bien que, ces dernières années, certaines entreprises se soient engagées davantage en faveur de la conciliation de la famille et de l'exercice d'une activité professionnelle, de sorte que la prise en compte des besoins des familles est devenue un élément essentiel de leur politique du personnel et de leur culture d'entreprise, comme en atteste le premier bilan commun de l'accord conclu entre les partenaires sociaux que ceux-ci ont publié en février 2007, il convient de continuer à pallier les manquements persistants des entreprises, des partenaires sociaux et des États membres (4).

1.13

La notion d'égalité des chances sur le lieu de travail, le lancement d'initiatives pour aider à la conciliation de la vie familiale et professionnelle, ainsi que la définition d'un modèle de gouvernance de l'«entreprise d'égalité des chances» font partie intégrante d'une conception de la responsabilité sociale des entreprises qui les incite à instaurer de bonnes pratiques et agir de manière responsable vis-à-vis de leurs salariés.

2.   État des lieux

2.1

Les changements sociaux ont conduit à une forte différentiation des structures familiales. Une politique visant à concilier vie professionnelle, vie familiale et vie privée doit tenir compte de l'ensemble des formes de familles existantes (par exemple parents isolés, familles recomposées, célibataires, parents divorcés, parents adoptifs, travailleurs étudiants, partenariats entre personnes de même sexe, personnes vivant seules). La proportion croissante de personnes du troisième et du quatrième âge accroît en outre le besoin de prise en charge au sein de la famille et en dehors.

2.2

Parallèlement à leur activité professionnelle, les femmes sont, contrairement aux hommes, toujours plus fortement impliquées dans l'organisation du ménage et de la famille, si bien qu'elles se trouvent fréquemment en situation de stress et de surmenage permanent, phénomène qui n'épargne ni les agricultrices ni les femmes établies comme indépendantes. Dans ces conditions, les femmes se sentent souvent obligées d'accepter une activité à temps partiel, synonyme de revenus moins élevés, d'une moins bonne retraite et de perspectives de carrière moins favorables. Aussi la conciliation de la vie familiale et de la vie professionnelle est-elle un instrument important pour imposer dans le monde du travail l'égalité entre les hommes et les femmes, mais aussi entre les femmes avec et sans enfants.

2.3

En effet, la nature des problèmes de fond et les possibilités de les résoudre étant différentes d'un État membre à l'autre mais aussi d'une région ou même d'une entreprise à l'autre, il n'y a pas de solution toute faite qui puisse s'appliquer indifféremment à la multiplicité des situations. Le CESE estime par conséquent que les partenaires sociaux sont parfaitement à même d'apporter à ces questions des éléments de réponse. Forts des structures dont ils disposent dans les différents États membres et de leur engagement s'agissant de la conciliation de la vie familiale et professionnelle, ils peuvent largement influencer le quotidien des salariés.

2.4

Même si la décision de fonder une famille est personnelle par nature, tout comme l'est la décision de prendre en charge des membres de la famille ou des proches malades, handicapés ou âgés, elles ont une incidence sur la société tout entière. L'augmentation du déficit de naissances est synonyme à long terme d'un manque de personnel qualifié et de cadres, de clients, de main-d'œuvre, de chefs d'entreprises, de scientifiques et de chercheurs, ce qui ne sera pas sans conséquence pour la société dans son ensemble (5). Aussi les pouvoirs publics ont-ils une responsabilité particulière à cet égard, notamment pour ce qui est des leviers suivants:

un soutien matériel et financier (allocations, prise en compte dans le calcul de la retraite),

des infrastructures de soutien (structures de garde d'enfants, écoles accueillant les enfants toute la journée, centres aérés ouverts pendant les vacances et activités extrascolaires proposées par des organisations de volontaires, dispositifs d'aide, s'agissant par exemple des soins ambulatoires,

un congé parental adapté en faveur tant des mères que des pères de famille (y compris en cas d'adoption), et

un monde du travail soucieux des besoins des familles.

2.5

La Commission considère qu'il importe de prévoir des règles souples d'organisation du temps de travail pour tirer pleinement profit de tout le potentiel de la population active, ce qui suppose que les femmes et les hommes puissent en bénéficier dans les mêmes conditions. Il y a dès lors lieu de prévoir le cadre juridique adéquat. Toutefois, les femmes font jouer nettement plus souvent que les hommes les possibilités dans ce domaine, ce qui provoque un déséquilibre entre les sexes qui nuit au statut des femmes dans l'entreprise et à leur indépendance économique. Il convient donc d'inciter davantage que par le passé les hommes à assumer les tâches familiales, notamment en encourageant les congés parentaux et de paternité, afin qu'au sein des couples ils partagent équitablement avec les femmes les charges liées au travail domestique non rémunéré et à la garde des enfants et des proches.

3.   Évolution des rôles

3.1

À la faveur des mutations de la société, le niveau de qualification des femmes a fortement augmenté et leur rôle et leurs attentes ont eux aussi évolué. Les jeunes Européennes disposent désormais de qualifications supérieures à celles des hommes du même âge et considèrent l'exercice d'une activité professionnelle comme un élément inhérent à leur projet de vie. L'augmentation du niveau de qualification des femmes devrait également avoir pour conséquence de réduire les écarts entre le salaire moyen des femmes et celui des hommes. Actuellement, les disparités en matière de rémunération tiennent dans une large mesure au grand nombre de femmes qui travaillent à temps partiel, aux interruptions de carrière plus longues et, partant, à une expérience professionnelle moindre, à une proportion plus faible de femmes occupant des postes à responsabilités et à un niveau de qualification moins élevé des travailleuses âgées. Bien que les grilles de salaires établies par les conventions collectives veillent précisément à ce que pour un même travail et à qualification égale femmes et hommes touchent le même salaire, l'inégalité salariale persiste. En outre, afin que les individus puissent véritablement choisir leur projet de vie, il faut que les conditions sociales donnent aux femmes et aux hommes la possibilité d'opter pour le mode de vie qui correspond à leurs souhaits sans que leur décision donne lieu à une quelconque appréciation, positive ou négative, de la part de la société.

3.2

Parmi les conditions qui déterminent fortement les projets de vie figure, outre les structures d'accueil des enfants dans un pays donné, la perception qu'a la société des mères et des pères actifs qui se consacrent à leur famille. La position des partenaires sociaux sur ces questions contribue largement à influencer l'état d'esprit de la société. Les expériences menées dans les pays scandinaves et en Allemagne ont montré qu'il pouvait être utile de ne verser à une famille les aides financières, par exemple une partie des allocations parentales, ou de ne les augmenter qu'à la condition que le père de famille se consacre lui aussi pendant une certaine période à la garde de son enfant. Les pères bénéficient dès lors d'un cadre juridique leur permettant, pour une période de temps limitée, de participer plus facilement à l'éducation de leurs enfants. L'avantage tient pour les mères de famille à ce qu'elles peuvent ainsi revenir plus tôt dans la vie active.

3.3

Le CESE souligne que modifier isolément certains paramètres ne sera pas suffisant pour faire évoluer la double charge que représente pour les femmes actives la conciliation de la vie familiale, de la vie professionnelle et de la vie privée. L'objectif doit plutôt consister à remettre à plat la répartition fondamentale entre les hommes et les femmes des tâches extraprofessionnelles non rémunérées, telles que l'éducation des enfants, les soins prodigués aux proches ou encore l'organisation du ménage. Les hommes doivent être incités à assumer une plus grande part des tâches au sein du couple, ce qui suppose un changement en profondeur des mentalités et des structures.

4.   Mesures de soutien des partenaires sociaux en faveur de la conciliation au sein des entreprises de la vie familiale, de la vie professionnelle et de la vie privée

4.1

L'évolution démographique et les changements qu'elle entraîne ont des répercussions majeures tant pour les salariés que pour les employeurs. Les partenaires sociaux contribuent largement à faciliter la conciliation de l'exercice d'une activité professionnelle, de la vie de famille et de la vie privée, et ce à tous les niveaux.

4.2

Pour parvenir à une conciliation efficace dans l'entreprise, il est essentiel que la politique du personnel tienne compte des intérêts de l'entreprise mais aussi des tâches élémentaires qui incombent à chaque salarié en dehors des heures de travail ainsi que de ses responsabilités familiales et de ses préoccupations d'ordre privé, tout en veillant à trouver entre eux le juste équilibre. Il est dès lors indispensable que les États membres prévoient:

de bonnes structures de garde capables de satisfaire les besoins actuels, tant s'agissant de la petite enfance que des adolescents;

une offre suffisante et de bonne qualité en matière de prise en charge et de soins des personnes âgées et handicapées;

des modalités équitables d'organisation du temps de travail;

des mesures afin que les congés et le travail à temps partiel pour s'occuper d'enfants et de personnes dépendantes n'affectent pas les prestations futures;

une bonne qualification du personnel qui doit être rémunéré en conséquence.

L'existence d'un réseau étendu de telles structures est dans l'intérêt tant des salariés que des entreprises, des pouvoirs publics et de la société.

4.3

L'éventail de mesures de politique du personnel, pour certaines négociées entre les partenaires sociaux, que peuvent prévoir les entreprises comprend notamment:

l'introduction d'horaires de travail innovants, mais non pénalisants (morcellement du temps, empilement de petits jobs), du télétravail, des congés sabbatiques et de dispositifs d'annualisation ou de modulation du temps de travail,

la sécurité juridique du contrat de travail stable,

des possibilités de conserver des contacts avec l'entreprise pendant les congés parentaux,

un soutien en matière d'organisation de la garde des enfants, par des crèches d'entreprise, l'achat de places réservées et des aides financières,

un soutien en matière de prise en charge des proches âgés ou dépendants, et

un soutien par des mesures de développement personnel,

un soutien à la réintégration après des situations de temps partiel ou de congés pour la garde d'enfants et de personnes dépendantes.

4.4

Ainsi, il est également fait droit à l'objectif consistant à faciliter pour l'ensemble des personnes concernées la conciliation de la vie professionnelle, de la vie familiale et de la vie privée en proposant des modalités de travail à temps partiel sur mesure et très souples tenant compte des intérêts tant des entreprises que de leur personnel. Lorsqu'il n'est pas choisi volontairement, l'exercice d'une activité à temps partiel ne concourt pas à cet objectif. Le CESE considère qu'il est urgent que le personnel masculin accepte plus fréquemment des offres d'emploi à temps partiel, dans les cas où l'un des parents est obligé d'adopter cette forme d'emploi pour les besoins de la famille. Ils pourront ainsi montrer dans la pratique que les obligations extraprofessionnelles dans le couple ou la famille n'incombent pas uniquement aux femmes mais qu'elles doivent être partagées de manière responsable et assumées en commun.

4.5

Les partenaires sociaux peuvent contribuer à dégager des pistes afin de permettre aux parents d'opter pour le mode de vie qu'ils souhaitent. Dans les entreprises, des possibilités de contact spécifiques, sous la forme du remplacement du personnel en congé ou en congé pour maladie par des mères de famille en congé parental ou encore en invitant ces dernières aux fêtes d'entreprise ont fait la preuve de leur pertinence pour, après une période consacrée à la famille, faciliter le retour des femmes à leur activité professionnelle. Le CESE souligne que la réglementation en vigueur qui protège les femmes enceintes et le personnel en congé parental doit être rigoureusement respectée et en aucun cas contournée par une discrimination indirecte.

4.6

Par ailleurs, les parents peuvent bénéficier d'un soutien par la mise en place de dispositifs de garde d'enfants. Un certain nombre d'entreprises proposent à leurs salariés de les aider dans leurs recherches d'assistantes maternelles et de places en crèche ou de solution de garde d'urgence en cas de maladie d'un enfant. Certaines entreprises tentent également, au moyen de mesures ciblées telles que l'octroi d'un jour de congé le jour de l'anniversaire de l'enfant, d'inciter leur personnel masculin à assumer une plus large part des tâches familiales et à passer davantage de temps avec leurs enfants. Les entreprises pratiquant cette politique méritent d'être soutenues. Toutefois, dans la majorité des cas, les parents ne sont pas épaulés, en pratique. Cette attitude, en plus d'être contraire à la législation, porte également préjudice aux entreprises elles-mêmes, dans la mesure où elle alourdit l'ambiance de travail et entame la motivation du personnel.

4.7

Le CESE renvoie aux études scientifiques réalisées par la société Prognos AG dont il ressort que la mise en œuvre dans les entreprises de mesures tenant compte spécifiquement des réalités de la vie familiale et privée de leur personnel se révèle payante sur le plan économique pour l'employeur, dans la mesure où ces leviers de politique du personnel réduisent l'absentéisme et augmentent l'engagement du personnel, sa motivation et sa productivité. Une politique du personnel de cette nature accroît en outre l'attractivité des emplois, notamment lorsqu'elle permet également aux mères de famille actives d'atteindre plus facilement des postes à responsabilités et de s'y maintenir. Ce type d'organisation des entreprises contribue par ailleurs à créer une ambiance de travail sereine et est à l'évidence un facteur susceptible d'attirer des investisseurs dans une région donnée.

4.8

Le CESE fait observer qu'il convient lors de l'introduction d'horaires de travail flexibles de tenir compte du concept de flexicurité qui, au regard de la stratégie de Lisbonne constitue une approche intégrée de réforme du marché du travail. En effet, la flexicurité ouvre la voie à des assouplissements nécessaires ou souhaitables, tout en y associant la sécurité et la prévisibilité indispensables pour toutes les parties prenantes. La flexibilité négociée entre les partenaires sociaux doit viser à créer pour les entreprises et les salariés une situation de gagnant-gagnant. Il convient de tenir compte à la fois de la nécessité pour les entreprises de s'adapter aux exigences du marché et de l'intérêt croissant que présentent pour les salariés ces assouplissements, s'agissant notamment de l'organisation de leur temps de travail, pour mieux assumer leurs obligations familiales ou les autres tâches extraprofessionnelles liées à leur vie privée, en préservant la sécurité et en évitant la précarisation des relations de travail. En règle générale, les solutions individualisées et adaptées aux besoins spécifiques négociées entre les partenaires sociaux sont à cet égard les plus pertinentes. Le CESE souligne qu'il convient, dans le débat autour de la flexicurité, d'attacher une plus grande attention aux situations différentes que connaissent les femmes et les hommes (6).

4.9

La conciliation de la vie professionnelle, de la vie familiale et de la vie privée est d'autant plus réussie que les facteurs de cette conciliation sont présents dans l'entreprise. Aussi convient-il d'accorder une importance aussi grande que possible à sa mise en œuvre dans les États membres.

4.10

Le CESE considère les concours d'entreprises soutenus par les partenaires sociaux comme pouvant être un instrument de nature à diffuser largement et à promouvoir les exemples de bonnes pratiques favorables aux familles et aux femmes. Ainsi, ces concours d'entreprises sont l'occasion de présenter au public des instruments aussi innovants que:

la mise à disposition de salles de jeu destinées aux enfants du personnel,

l'ouverture de crèches d'entreprise, ou encore

l'instauration dans les entreprises de réseaux d'aide entre les générations qui coordonnent des services bénévoles, par exemple l'accomplissement par d'anciens salariés retraités de certaines formalités administratives ou de courses pour le compte de jeunes salariés, pères ou mères de famille.

4.11

Il va de soi que la plupart des petites ou moyennes entreprises, qui constituent la majorité des entreprises de l'UE, ne disposent pas des moyens leur permettant de proposer des avantages aussi attractifs, raison pour laquelle il faudrait envisager des incitations fiscales spécifiques. Les liens sociaux étroits noués dans les petites et moyennes entreprises garantissent justement que les parties concernées s'entendent rapidement sur des solutions individualisées et très concrètes pour leur personnel. Il est outre possible que, dans une région donnée, plusieurs petites entreprises s'associent avec les collectivités territoriales, les associations de citoyens et les organisations non gouvernementales pour proposer certains services, rehaussant ainsi leur image et celle de la région aux yeux des investisseurs.

5.   Initiatives pratiques à l'échelon régional et local

5.1

Afin d'améliorer concrètement et pratiquement les conditions d'une conciliation efficace de la vie professionnelle, de la vie familiale et de la vie privée, il est particulièrement opportun que les acteurs locaux, dans toute leur diversité, coordonnent leur action. Aussi le CESE encourage-t-il les partenaires sociaux à lancer à l'échelon régional et local des initiatives qui réuniraient des parties prenantes engagées (chefs d'entreprise, délégués du personnel, associations de parents, communautés religieuses, associations sportives, responsables locaux etc.) dans les villes et les communes afin de façonner ensemble l'environnement local de telle sorte que les préoccupations professionnelles, familiales et privées puissent être conciliées au mieux. Ces évolutions au niveau local bénéficient directement à l'ensemble des parties concernées. Le champ d'action des différents acteurs locaux est extrêmement large et ouvert à des idées innovantes de tous ordres. Citons un certain nombre d'exemples concrets dont la liste ci-dessous n'est toutefois pas exhaustive:

la création d'un site internet municipal présentant des informations ciblées destinées aux familles;

la constitution de bases de données proposant des places en structure d'accueil pour les enfants;

la création de points de rencontre mettant en contact les jeunes familles sans grands parents et les personnes âgées sans enfants;

l'accompagnement des enfants lors des trajets entre l'école et leur domicile;

le soutien aux organisations de volontaires et aux volontaires qui consacrent une partie de leurs loisirs à la prise en charge des enfants;

l'organisation d'ateliers concernant un aménagement urbain favorable aux familles afin de mettre un terme à l'exode des jeunes parents;

la création de programmes de tutorat destinés aux pères de famille travaillant à temps partiel;

la modification des horaires des bus scolaires afin que les parents puissent mieux adapter leurs horaires de travail à ceux de l'école;

l'assouplissement des horaires des crèches;

l'organisation par les entreprises de manifestations relatives à la conciliation de la vie familiale et professionnelle à l'occasion desquelles elles présenteraient au public leur politique du personnel favorable aux familles;

un examen de toutes les décisions municipales à l'aune du bien-être des enfants.

6.   Structures de garde d'enfants et prise en charge des proches âgés

6.1

Le CESE rappelle que le deuxième rapport intermédiaire sur la mise en œuvre de la stratégie de Lisbonne que la Commission européenne a publié à la mi-décembre 2006 (7) précise que dans plusieurs États membres l'insuffisance de structures d'accueil des enfants à un coût abordable reste un problème. Les États membres sont par conséquent invités à proposer davantage de structures d'accueil de qualité accessibles à tous, dans le respect de leurs propres objectifs.

6.2

Le Conseil européen réuni à Barcelone en 2002 (8) a en outre décidé que, d'ici 2010, devaient être mises en place dans les États membres des structures d'accueil pour 90 % des enfants ayant entre trois ans et l'âge de la scolarité obligatoire et pour 33 % des enfants âgés de moins de trois ans.

6.3

Compte tenu précisément de l'évolution des rôles des femmes et des hommes, il importe que les partenaires sociaux fassent valoir que le développement de l'enfant n'est pas affecté par l'exercice par sa mère d'une activité professionnelle ni par le fait que son père participe aux tâches familiales.

6.4

Compte tenu de la grande diversité des situations nationales s'agissant des places en structure de garde pour les enfants de moins de trois ans, le CESE recommande instamment à chaque État membre de fixer concrètement des objectifs chiffrés pour l'accueil des enfants de cet âge. Pour permettre de concilier famille et activité professionnelle, il conviendrait d'assurer d'ici 2010 une place en crèche ou auprès d'une assistante maternelle agréée à au moins 33 % des enfants de moins de trois ans.

6.5

Le CESE estime qu'il est indispensable d'accorder au développement des possibilités de garde d'enfants dans les États membres de l'Union européenne une importance plus grande que par le passé et, dès lors, de prendre les mesures politiques adéquates afin d'accélérer les progrès dans ce domaine.

6.6

Dans son avis sur «La famille et l'évolution démographique» (9), le CESE a examiné en détail les changements démographiques dans l'Union européenne et leurs conséquences pour les familles. Si l'allongement de l'espérance de vie peut pour bon nombre d'entre nous être synonyme d'une amélioration de notre qualité de vie, il aura également pour conséquence que, demain, un nombre croissant de personnes devront se consacrer, parallèlement à leur activité professionnelle, à la prise en charge de leurs proches âgés. Il convient donc d'attacher une plus grande attention au développement des services de soins destinés au grand âge afin de décharger les aidants familiaux.

6.7

Dans ce contexte, il pourrait revenir aux partenaires sociaux d'informer des mesures existantes qui ont d'ores et déjà fait leurs preuves dans la pratique. Citons par exemple une adaptation temporaire du temps de travail afin de prendre en charge un proche dont, cas fréquent, l'état de santé s'est brusquement dégradé; une configuration du poste de travail adaptée au besoins de l'aidant, c'est-à-dire où sont mis à la disposition du salarié concerné un téléphone où il peut être joint ainsi qu'un ordinateur connecté à internet afin qu'il puisse régler les problèmes liés à la prise en charge; ou encore la fourniture de documentation concernant les aspects organisationnels, financiers et juridiques de la prise en charge.

7.   Perspectives

7.1

Le CESE invite le Conseil, le Parlement européen et la Commission à tenir compte dans leurs prochains travaux des propositions formulées dans le présent avis exploratoire et à les soutenir afin d'améliorer encore la conciliation de la vie professionnelle, de la vie familiale et de la vie privée en Europe.

7.2

Le CESE estime que la conciliation de la vie professionnelle et de la vie familiale est immanquablement liée à l'obtention de l'égalité de genre et que les résultats recherchés par les partenaires sociaux en la matière, quand ils y réussissent, viennent étayer la conciliation. Pour qu'elle devienne une réalité ordinaire, les programmes d'éducation des jeunes enfants devraient montrer comme normale et nécessaire la conciliation entre vie familiale et professionnelle.

Bruxelles, le 11 juillet 2007.

Le Président

du Comité économique et social européen

Dimitris DIMITRIADIS


(1)  COM(2006) 92 final.

(2)  BUSINESSEUROPE (anciennement UNICE) est la confédération européenne des associations d'employeurs et d'industries, UEAPME est la fédération européenne de l'artisanat et des petites et moyennes entreprises, CEEP est la confédération du secteur public et la CES est la confédération européenne des syndicats.

(3)  http://ec.europa.eu/employment_social/news/2005/mar/gender_equality_fr.pdf.

(4)  Voir l'avis exploratoire du CESE du 23.2.2007 sur «L'impact économique et budgétaire du vieillissement des populations», rapporteuse: Mme FLORIO (JO C 161 du 13.7.2007).

(5)  Voir sur ce point l'avis exploratoire du CESE du 14.3.2007 sur «La famille et l'évolution démographique», rapporteur: M. BUFFETAUT (JO C 161 du 13.7.2007).

(6)  Voir l'avis exploratoire du CESE sur «La flexicurité (dimension de la flexibilité interne — la négociation collective et le rôle du dialogue social en tant qu'instruments de régulation et de réforme des marchés du travail)», rapporteur: M. JANSON (JO C 97 du 28.4.2007).

(7)  COM(2006) 816 — Communication de la Commission au Conseil européen de printemps: mise en œuvre de la stratégie de Lisbonne renouvelée pour la croissance et l'emploi — «Une année de résultats».

(8)  Conclusions de la présidence: Conseil européen de Barcelone des 15 et 16 mars 2002.

(9)  Voir l'avis exploratoire du CESE du 22.2.2007 sur «La famille et l'évolution démographique», rapporteur: M. BUFFETAUT (JO C 161 du 13.7.2007).


27.10.2007   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 256/108


Avis du Comité économique et social européen sur «La flexicurité (dimension de la flexibilité interne — la négociation collective et le rôle du dialogue social en tant qu'instruments de régulation et de réforme des marchés du travail)»

(2007/C 256/20)

Le 13 février 2007, la Présidence portugaise de l'Union européenne a demandé au Comité économique et social européen d'élaborer un avis sur la proposition susmentionnée.

La section spécialisée «Emploi, affaires sociales, citoyenneté», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 18 juin 2007 (rapporteur: M. Thomas Janson).

Lors de sa 437e session plénière des 11 et 12 juillet 2007 (séance du 11 juillet 2007), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 163 voix pour, 2 voix contre et 5 abstentions.

1.   Résumé et conclusions

1.1

Le CESE se félicite de l'invitation de la Présidence portugaise à élaborer un avis sur la flexicurité, étant donné que le débat sur la question s'est principalement limité, jusqu'à présent, à la flexibilité externe croissante et aux manières de compenser cette augmentation en renforçant les politiques de l'emploi ou les dispositions en matière de protection sociale. Au lieu de cela, l'objectif devrait être de se concentrer sur d'autres dimensions afin d'améliorer la création de situations gagnant-gagnant.

1.2

Le CESE souhaiterait souligner que le rôle des partenaires sociaux soit être renforcé. Ceux-ci devraient participer à tous les débats sur la flexicurité et ils devraient jouer un rôle de premier plan dans les consultations de la Commission européenne. La Commission devrait donc avoir mis davantage l'accent sur la consultation, en particulier, des partenaires sociaux européens sur la définition européenne de la notion de flexicurité.

1.3

Le renforcement des systèmes de relations professionnelles, à l'échelon tant européen que national, est nécessaire à toute discussion sur la flexicurité. Un dialogue social fort et vital, dans lequel les partenaires sociaux assument une part active et sont en position de négocier, d'influencer et d'assumer la responsabilité de la définition, des composants et d'évaluer les résultats de la flexicurité, est un élément essentiel.

1.4

La Commission et les États membres devraient s'engager à lier les discussions pouvant conduire à des réformes fondées sur la notion de flexicurité au renforcement et à la modernisation des relations sociales dans l'entreprise à tous les niveaux. Le CESE souhaite donc voir émerger un lien plus fort entre le débat sur la flexicurité et le renforcement du dialogue social à tous les niveaux, et des négociations collectives aux niveaux appropriés, tout en respectant la diversité des différents systèmes de relations professionnelles dans les États membres. Il convient que le concept de flexicurité conforte à la fois la flexibilité et la sécurité, et ce de manière équilibrée. Le concept de flexicurité n'est pas synonyme d'une diminution unilatérale et illégitime des droits des travailleurs, idée que le CESE rejette.

1.5

Le CESE reconnaît que, étant donné le rôle essentiel des partenaires sociaux dans le développement progressif des politiques de flexicurité à l'échelon européen, ce débat peut être vu comme n'étant ni distinct du contenu du dialogue social européen, ni indépendant de l'évolution future du dialogue social lui-même.

1.6

Le CESE souhaite souligner que la Commission et les États membres devraient accorder une plus grande attention à l'égalité entre les hommes et les femmes et à la solidarité intergénérationnelle dans le contexte de la flexicurité. Les femmes, les travailleurs âgés et les jeunes sont souvent désavantagés sur le marché du travail au regard de la flexibilité et de la sécurité, il conviendrait donc de s'efforcer d'aligner davantage la situation de ces catégories.

1.7

Le CESE demande aux États membres et à la Commission d'étudier le renforcement de l'adaptabilité à travers la flexibilité interne et d'en faire une dimension viable et acceptable de la flexicurité. La flexibilité interne peut jouer un rôle clé pour augmenter la productivité, l'innovation et la compétitivité, et peut ainsi contribuer à atteindre les objectifs de la stratégie de Lisbonne. Elle peut également jouer un rôle important pour permettre aux travailleurs de concilier le travail et d'autres activités ou responsabilités, et d'améliorer la qualité de leur emploi. La condition essentielle est toutefois qu'elle s'inscrive dans un cadre réglementaire garantissant aux travailleurs la protection de l'emploi et de la santé, de même que la stabilité et la sécurité. La protection de l'emploi, alliée à des services efficaces de réemploi et à des politiques actives en matière de marché du travail, est cruciale pour l'adaptabilité et la sécurité tant des entreprises que des employés.

1.8

Aux yeux du CESE, il convient de rechercher un équilibre entre la flexibilité du temps de travail et la protection du travailleur; des réglementations fixées par des négociations collectives et selon les pratiques nationales étant la meilleure façon de garantir cet équilibre. Une négociation de ce type sur la flexibilité du temps de travail nécessite un contexte solide de droits, un bon fonctionnement des institutions sociales et des systèmes de sécurité sociale favorables à l'emploi.

1.9

La flexibilité fonctionnelle est également une question clé des négociations collectives entre partenaires sociaux. Ces négociations peuvent permettre d'équilibrer et d'affiner les besoins des entreprises et des travailleurs, et de définir des compensations adéquates pour rétribuer les travailleurs qui améliorent leurs compétences.

1.10

La flexibilité fonctionnelle nécessite une mise à jour permanente des connaissances et des capacités des travailleurs, ainsi qu'une infrastructure d'éducation et de formation en parfait état de fonctionnement pour soutenir cela. Bien que de nombreux engagements aient été pris par le passé en matière d'apprentissage tout au long de la vie, il reste beaucoup à faire dans la pratique.

2.   Historique

2.1

La Présidence portugaise a demandé au CESE d'émettre un avis exploratoire sur la flexicurité en intégrant des questions telles que:

1)

la dimension de la flexibilité interne;

2)

la négociation collective et le rôle du dialogue social en tant qu'instrument de régulation et de réforme des marchés du travail.

2.2

Plusieurs orientations issues des lignes directrices pour l'emploi (2005-2008) pourraient servir de point de départ à un débat sur la flexicurité. Le Conseil européen du printemps 2006 a demandé aux États membres d'accorder une attention spécifique au problème crucial de la «flexicurité» (équilibre entre flexibilité et sécurité). Les États membres étaient invités à poursuivre, conformément à leurs différentes situations au regard de l'emploi, les réformes en matière d'emploi et de politiques sociales dans le cadre d'une approche intégrée de la flexicurité.

2.3

La question de la flexicurité a été débattue à l'occasion de deux sommets sociaux, liés l'un au sommet européen de décembre 2006, l'autre à celui de mars 2007.

2.4

La Commission a mis en place un groupe d'experts travaillant à la proposition de «parcours de la flexicurité», c'est-à-dire à certaines dimensions de flexibilité et de sécurité dans la vie professionnelle. Sur cette base, la Commission a publié une communication sur la flexicurité en juin 2007, qui présentera notamment une série de principes communs. Ceux-ci devraient en effet être intégrés, en décembre 2007, à la révision des lignes directrices pour l'emploi de 2008. Le Livre vert intitulé Moderniser le droit du travail pour relever les défis du XXIe siècle  (1) abordait également la dimension de la flexicurité, sous l'angle particulier du contrat de travail, et avançait des recommandations que l'on considère comme étant ici reproduites.

2.5

Le CESE souhaiterait également évoquer le travail important accompli par la Fondation européenne pour l'amélioration des conditions de vie et de travail dans ce contexte, qui fixe d'importants aspects de la définition même de flexicurité.

3.   Les dimensions des stratégies de flexicurité

3.1

a)

Les stratégies de flexicurité se réfèrent aux stratégies qui tentent de combiner différents types de flexibilité et de sécurité de l'emploi d'une manière équilibrée, afin de renforcer la capacité d'adaptation des travailleurs et des entreprises, et dans le but de leur apporter une stabilité et une protection à l'égard des risques. À titre d'exemples de types de flexibilité et types de sécurité concernés, on peut citer:

Exemples de flexibilité

Flexibilité numérique externe

Ajustement du volume d'emploi au moyen d'un échange avec le marché du travail extérieur en utilisant des licenciements temporaires, du travail temporaire et des contrats à durée déterminée.

Flexibilité numérique interne

Ajustement temporaire de la charge de travail au sein d'une même entreprise, grâce à des pratiques telles que des temps de travail atypiques et des systèmes de compte épargne temps.

Flexibilité fonctionnelle interne

Organisation de la flexibilité au sein de l'entreprise au moyen de la formation et de la rotation «multitâche» des postes, qui repose sur la capacité des employés à effectuer des tâches et des activités différentes.

Flexibilité financière

Variation entre le salaire de base et les primes en fonction de la performance de l'individu ou de l'entreprise.

Exemples de sécurité

Sécurité de l'emploi

Sécurité qui découle de la législation sur la protection de l'emploi, etc. limitant la capacité de l'employeur à licencier comme il le voudrait.

Sécurité professionnelle

Opportunités d'emplois adéquates en raison de niveaux élevés de capacité à retrouver un emploi, grâce à la formation et à l'éducation.

Sécurité des ressources

Protection d'un niveau de ressources adéquat et stable.

Sécurité de conciliation

Sécurité consistant, pour un travailleur, à pouvoir combiner son emploi et d'autres responsabilités ou engagements qu'un travail salarié.

b)

Il convient de laisser en dehors du débat la sécurité juridique du contrat de travail en raison de sa nature essentielle qui le rend opposable à tous devant les tribunaux. Elle implique le maintien du lien de subordination, également essentiel, qui génère, entre autres, toutes les conséquences relatives au droit à la protection sociale pour le salarié (maintenu et appliqué).

3.2

À l'instar de la Commission européenne et inspiré par certains aspects de l'exemple danois, le débat sur la flexicurité, au plan européen, s'est principalement limité à la flexibilité externe accrue et aux manières de compenser cette augmentation en renforçant les politiques de l'emploi ou les dispositions en matière de protection sociale. Les avantages et inconvénients de la flexibilité externe est une question sur laquelle les avis des syndicats et des organisations patronales divergent souvent totalement. En outre, l'OCDE (2) a récemment indiqué que la législation sur la protection de l'emploi n'avait pas d'impact significatif sur le taux d'emploi global. De plus, l'OIT a montré qu'il y avait un lien positif entre la titularisation et la productivité (cf. Annexe).

3.3

Cet avis a pour objectif d'élargir le débat sur la flexicurité dans trois directions. Premièrement, il vise à souligner qu'il convient de renforcer le rôle des partenaires sociaux dans ce débat, et dans les réformes concernant le marché de l'emploi en général. Deuxièmement, le CESE estime que le débat sur la flexicurité devait accorder une attention plus grande aux différences entre les hommes et les femmes et, en tant que telle, à la catégorie des jeunes sur le marché de l'emploi. L'égalité des chances a été largement absente de toute discussion sur la flexicurité. Bien que la majorité des femmes et des hommes soit favorable à davantage de flexibilité par le biais du travail à temps partiel afin de garantir un meilleur équilibre entre la vie professionnelle et la vie privée, les femmes sont souvent désavantagées sur le marché du travail au regard de la flexibilité et de la sécurité, il conviendrait donc d'essayer d'aligner leur situation sur celle des hommes (3). Troisièmement, le CESE considère comme important d'élargir ce débat en explorant des manières alternatives de réaliser l'adaptabilité, de faciliter la formation tout au long de la vie, d'améliorer la productivité et d'encourager l'innovation, qui sont des dimensions essentielles du processus de Lisbonne. Ce sont également des questions que le CESE a abordées dans son avis sur les lignes directrices pour l'emploi (4). En revanche, cet avis n'aborde pas la question de la flexibilité externe, mais il se concentre sur les possibilités de renforcer l'adaptabilité au moyen de la flexibilité externe.

3.4

La flexicurité revêt une pertinence indéniable dans le monde des petites et moyennes entreprises (PME) compte tenu de leur poids au niveau de l'emploi. Par conséquent, les politiques que les États membres définiront en la matière devront prévoir des dispositions qui tiennent compte des besoins des PME et de leurs employés.

3.5

Le CESE souligne que le fondement de tous les modèles de flexicurité repose sur un État providence à même de garantir des niveaux élevés de protection sociale, sur une prise en charge par des services publics dotés de moyens suffisants, ainsi que sur un cadre juridique stable pour la négociation collective et le dialogue social. Les systèmes de protection sociale généraux peuvent améliorer la mobilité en garantissant que les travailleurs n'y perdent pas lorsqu'ils font face à des changements affectant leur emploi. Un cadre stable pour le dialogue social et la négociation collective donne aux partenaires sociaux forts la possibilité d'être d'accords sur les questions clé en rapport avec le marché du travail.

4.   La flexicurité et les partenaires sociaux

4.1

La flexicurité impose une décision concernant l'équilibre des droits et des obligations entre employeurs et salariés. Le dialogue social et les négociations collectives sont comme des instruments essentiels pour élaborer et mettre en œuvre tout type de réforme du marché du travail, y compris la flexicurité. Le Comité économique et social européen souligne donc que les partenaires sociaux sont parties prenantes de tous les débats sur la flexicurité à tous les niveaux. Ceux-ci devraient de plus en plus jouer un rôle de premier plan pour définir l'équilibre entre la flexibilité et la sécurité, et de cette manière, contribuer à améliorer les règles du marché de l'emploi.

4.2

À l'échelon européen, le CESE reconnaît que la Commission a informé les partenaires sociaux de ses projets relatifs à ce débat. Toutefois, sur ce sujet, le CESE estime que la Commission devait insister davantage sur la consultation, en particulier, des partenaires sociaux européens sur la définition de la notion de flexicurité. En l'absence d'une implication et d'un engagement forts de la part des partenaires sociaux, il sera difficile de mettre en place une stratégie de flexicurité, quelle qu'elle soit.

4.3

Le Comité économique et social européen notait dans son avis sur le système danois de flexicurité (5) que «les partenaires sociaux ont joué un rôle central dans la mise au point de la version danoise de la flexicurité, en ce qui concerne tant le processus décisionnel que la mise en œuvre, par exemple, de la politique d'éducation et des réformes structurelles du marché du travail. […] Le rôle des partenaires sociaux résulte […] de l'évolution historique […] une participation et une influence accrues des partenaires sociaux peuvent jouer à l'avantage de la compétitivité de la société et de sa capacité d'adaptation».

4.4

Dans son avis sur le modèle social européen (6) le CESE souligne qu'«en ce qui concerne la structure de base du modèle social européen, on ne saurait assez apprécier le rôle essentiel joué par les partenaires sociaux dans la politique économique et sociale. Ainsi, le rôle régulateur des organisations syndicales et patronales est particulièrement important dans le cadre des conventions collectives».

4.5

Le calendrier de la flexicurité ne devrait donc pas être élaboré de manière hiérarchique «descendante», établi par la Commission puis discuté par les gouvernements des États membres. Les partenaires sociaux devraient avoir la possibilité de négocier, d'influencer et d'assumer la responsabilité de la définition, des composants et d'évaluer les résultats de la flexicurité. La flexicurité étant si étroitement liée au dialogue social et à la négociation collective, l'émergence du débat sur la flexicurité mettra également en lumière les faiblesses présentes dans le dialogue social et la négociation collective. Ces lacunes devraient être traitées en même temps que l'on avance sur le calendrier de la flexicurité. Le CESE souhaite donc voir un rapport plus manifeste entre le débat sur la flexicurité et le renforcement du dialogue social à tous les niveaux, et de la négociation collective aux niveaux appropriés, tout en respectant la diversité des différents systèmes de relations professionnelles dans les États membres.

4.6

Le dialogue social à l'échelon européen est unique au monde, en ce qu'il accorde aux partenaires sociaux le rôle de colégislateurs dans le domaine social. Ces dernières années, cette situation a évolué vers un dialogue social plus autonome. Les partenaires sociaux ont le droit d'aborder les questions d'intérêt général en vue d'un meilleur fonctionnement des marchés de l'emploi en Europe. Le CESE reconnaît que, étant donné le rôle essentiel joué par les partenaires sociaux dans le développement progressif de politiques de flexicurité à l'échelon européen, ce débat peut être considéré comme n'étant dissocié ni du contenu du dialogue social européen, ni de la future évolution du dialogue social lui-même. Les partenaires sociaux ont conclu dans leurs programmes de travail pluriannuels un accord pour explorer les différents aspects de la flexicurité, mais également pour œuvrer en faveur du développement d'une compréhension commune des instruments du dialogue social européen (7). Le CESE a développé sa position en la matière dans son avis intitulé «Employabilité et esprit d'entreprise — Le rôle de la société civile, des partenaires sociaux et des organismes régionaux et locaux du point de vue du genre» (8).

4.7

Il existe dans les États membres de nombreux exemples, à tous les niveaux, du rôle crucial des partenaires sociaux qui renforcent à la fois la flexibilité et la sécurité pour les employeurs comme pour les salariés. Les conventions collectives en elles-mêmes ne sont pas uniquement un facteur de sécurité pour les employeurs et les salariés, mais elles permettent également une flexibilité négociée. Parce qu'ils comportent des éléments de flexibilité interne accrus, les avancements de carrière et les droits à la formation tout au long de la vie deviennent de plus en plus naturels dans un environnement de plus en plus compétitif. Toutefois, dans les États membres où le dialogue social est inadéquat en raison de la fragilité des systèmes de relations sociales dans l'entreprise, les travailleurs sont de ce fait exposés de manière excessive aux forces du marché sur le marché de l'emploi, se voyant offrir souvent une protection trop limitée. Renforcer et moderniser les systèmes de relations sociales dans l'entreprise dans les États membres devraient donc aller de pair avec tout débat sur la flexicurité dans ces mêmes États membres.

4.8

Le CESE souhaiterait, dans ce contexte, souligner quelques exemples d'accords entre partenaires sociaux:

des accords danois issus de négociations collectives, qui mettent en place des délais de notification obligatoires, pour permettre aux travailleurs de se préparer en vue d'un autre emploi;

en Suède, des conventions collectives dans le secteur industriel ont mis en place des fonds de «transition professionnelle» financés par le secteur des affaires et gérés conjointement par les partenaires sociaux. Ces fonds permettent de proposer aux travailleurs ayant été informés de leur prochain licenciement des formations, une aide à la recherche d'emploi, ou des stages rémunérés dans d'autres entreprises, y compris pendant qu'ils sont toujours officiellement employés par l'entreprise qui les licencie;

l'accord tripartite espagnol sur la manière de limiter l'utilisation des contrats de travail à durée déterminée. Celui-ci repose sur le principe qu'une proportion trop élevée de travail à durée déterminée n'est pas dans l'intérêt commun du travail ni des affaires;

des conventions collectives allemandes, avec la possibilité d'un aménagement flexible du temps de travail et de l'organisation du travail dans certaines limites, élaborées et mises en œuvre dans le cadre de la cogestion avec les représentations d'intérêts au sein de l'entreprise.

Le CESE estime également que les accords conclu par les partenaires sociaux européens par exemple sur le travail à durée déterminée, le congé parental, le travail à temps partiel ou le télétravail font partie d'une notion de flexicurité qui contribue à la sécurité et à la flexibilité pour les salariés comme pour les employeurs.

4.9

Si l'on veut que les partenaires sociaux soient à même de négocier sur les questions essentielles du marché de l'emploi en vue de parvenir à un équilibre socialement acceptable entre la flexibilité et la sécurité, il doit exister sur le plan national un cadre légal qui encourage les partenaires sociaux à apporter leur contribution et à négocier effectivement au sujet des questions de flexicurité. La réglementation sur la protection de l'emploi et un cadre juridique fort peuvent donner aux partenaires sociaux la possibilité de négocier des accords susceptibles de promouvoir l'effort, la coopération et la bonne volonté des travailleurs, ce qui aura un effet positif sur l'emploi et l'efficacité économique. La contribution des partenaires sociaux garantit la considération accordée à la fois aux intérêts de l'entreprise, et aux intérêts des salariés. En outre, la protection de l'emploi, alliée à des services efficaces de réemploi et à des politiques actives en matière de marché du travail, est cruciale pour l'adaptabilité et la sécurité tant des entreprises que des employés.

4.10

La contribution des partenaires sociaux pourrait avoir pour objectif d'augmenter la mobilité protégée et de tirer parti des transitions. Ils peuvent contribuer à l'organisation du contrôle collectif et négocié des opportunités et des droits sur le marché du travail. Le CESE estime que ceci contrerait les tendances à la segmentation et améliorerait l'intégration.

5.   Égalité des chances, solidarité intergénérationnelle et flexicurité

5.1

La flexibilité et la sécurité touchent les hommes et les femmes de manière différente sur le marché du travail. Les femmes occupent souvent des emplois plus précaires et moins sûrs, caractérisés par une flexibilité excessive. La flexibilité excessive, qui pourrait, dans certains cas, entraîner un risque de précarité et d'insécurité des emplois, doit être compensée par une forme de sécurité adéquate. Et en raison de la persistance des rôles traditionnels, les femmes assument souvent davantage de responsabilités à l'égard des enfants et des personnes âgées, et doivent faire face à de plus grandes difficultés en matière de conciliation du travail et des activités non professionnelles. En outre, en dépit d'une législation contre la discrimination, il subsiste un écart de salaire entre hommes et femmes, et les femmes ont souvent des droits plus réduits en matière de protection sociale, et notamment de pensions. Partant, les femmes subissent davantage les aspects négatifs de la flexibilité.

5.2

Le CESE souligne que le débat sur la flexicurité doit comporter une dimension significative d'égalité des chances, élément largement absent du débat jusqu'à présent. Il importe d'améliorer la situation des femmes sur le marché du travail en traitant à la fois des questions de flexibilité et de sécurité, et notamment en augmentant le nombre des emplois sécurisés, leur intégration dans les systèmes de protection sociale et un meilleur soutien des institutions afin de concilier le travail et les activités non professionnelles. En outre, la question de la répartition des responsabilités entre les hommes et les femmes en matière de garde d'enfants et de tâches ménagères devrait faire partie du débat. Le CESE, dans son avis sur «Le rôle des partenaires sociaux dans la conciliation de la vie professionnelle, de la vie familiale et de la vie privée» a développé plus avant sa position sur ces thèmes pour la Présidence portugaise (9).

5.3

De même que la flexicurité a une dimension d'égalité des chances, la flexicurité a également une dimension intergénérationnelle. Le taux d'emploi parmi les travailleurs âgés est plus faible, comparé à l'ensemble de la population active. De même, les jeunes sont confrontés, dans de nombreux États membres, à un marché du travail incertain assorti d'un fort taux de chômage, à des contrats à durée déterminée, à une couverture sociale insuffisante et à des emplois inférieurs à leur niveau de qualification.

5.4

Le CESE (10) a fait observer que les emplois devraient correspondre à la formation et à l'expérience professionnelle de chacun, sans discrimination fondée sur l'âge, et qu'il appartenait aux États membres de transposer et appliquer la directive sur l'égalité de traitement dans l'emploi (2000/78/CE). Le CESE demandait également une politique qui encouragerait un marché de l'emploi d'excellente qualité qui guiderait et formerait des générations de citoyens à travers leur vie professionnelle. Ceci suppose que les partenaires sociaux, et tous les acteurs économiques et sociaux aux échelons local, national et européen, jouent un rôle proactif.

5.5

Les partenaires sociaux européens ont conclu un cadre d'action sur l'égalité des chances qui peut être utilisé également dans le débat sur la flexicurité. Ils y ont défini quatre priorités: traiter la question du rôle des hommes et des femmes, promouvoir les femmes à des postes de décision, encourager l'équilibre entre le travail et la vie, et supprimer les écarts de salaire entre les hommes et les femmes.

5.6

Les considérations du paragraphe antérieur et le dialogue entre les partenaires sociaux doivent accorder une pertinence et une importance identiques aux problèmes des travailleurs handicapés et des jeunes étudiants.

6.   Flexicurité et flexibilité interne

6.1

La flexibilité est une question qui, dans le débat sur la flexicurité, n'a pas reçu toute l'attention qu'elle mérite. Dans le débat sur la flexicurité, la question de la flexibilité interne, en tant qu'alternative à la flexicurité externe, n'a pas été suffisamment développée. La flexibilité interne concerne la flexibilité du temps de travail et la flexibilité fonctionnelle, et elle renforce l'adaptabilité. Cette question est emblématique des sujets sur lesquels les partenaires sociaux ont une grande expérience en matière de négociation de conventions collectives, avec des résultats positifs. La flexibilité interne peut jouer un rôle clé pour promouvoir la productivité, l'innovation et la compétitivité et contribuer ainsi à réaliser les objectifs de la stratégie de Lisbonne. Elle peut également jouer un rôle essentiel pour permettre aux salariés de mieux concilier travail et autres activités ou responsabilités, et améliorer la qualité de leur emploi. Pour les salariés comme pour l'entreprise, elle peut améliorer la stabilité et la prédictibilité. Toutefois, la flexibilité interne peut également devenir excessive, et aboutir à de mauvaises conditions de travail ou à des emplois précaires, voire à nuire à l'équilibre entre le travail et les activités non professionnelles, ou même à occasionner des effets nuisibles sur la qualité des biens et sur les garanties de prestation de services aux consommateurs. Pour cette raison, une telle flexibilité n'est réalisable que s'il s'agit du produit d'une négociation collective et s'il s'inscrit dans le contexte des réglementations légales garantissant la protection de l'emploi et de la santé, facteurs de stabilité et de sécurité pour les travailleurs. Envisager une flexibilité interne négociée au sein de ce contexte législatif constitue une approche viable et vise à associer l'amélioration de la compétitivité et l'amélioration de la qualité de l'emploi et de la vie professionnelle.

6.2   Flexibilité du temps de travail

6.2.1

La flexibilité du temps de travail concerne la répartition du temps de travail hebdomadaire classique, telle qu'elle est fixée par les conventions collectives et/ou par la loi sur une période plus longue). Elle peut profiter aux entreprises à travers les possibilités de s'ajuster aux fluctuations de la demande ou du personnel et d'utiliser au maximum les investissements en capitaux, en faisant usage des heures supplémentaires, de la programmation flexible des horaires de travail au moyen de cadres horaires prédéfinis, du travail par équipes, etc. De cette manière, la flexibilité du temps de travail peut renforcer la productivité et la compétitivité.

6.2.2

La flexibilité du temps de travail peut également concerner la répartition du temps de travail au cours de la vie professionnelle, et un équilibre entre le travail et la vie (sans porter toutefois sur la durée de la semaine de travail classique). Des formes de flexibilité du temps de travail de ce type peuvent également profiter aux salariés en raison des possibilités de concilier positivement le travail et les activités ou responsabilités non professionnelles en utilisant des dispositions de «flexi-time» (temps flexible), en travaillant sur les comptes épargne temps, les congés parentaux et les congés éducatifs, les possibilités d'alterner entre travail à temps plein ou à temps partiel, etc.

6.2.3

Le CESE souhaite ardemment éviter un élargissement de la flexibilité du temps de travail au bénéfice des seules entreprises, sans prendre en compte simultanément le besoin de protection des employés (11). De même, l'organisation du temps de travail devrait permettre «… aux travailleurs d'avoir une plus grande maîtrise dans la gestion de leur temps, d'encore respecter la protection de leur santé et de leur sécurité qui sont essentielles, et leur offrent notamment de meilleures possibilités de concilier vie professionnelle et vie familiale» (12).

6.2.4

À cette fin, le CESE estime qu'il convient de rechercher un équilibre entre la flexibilité du temps de travail et la protection du travailleur; des réglementations fixées par des négociations collectives étant la meilleure façon de garantir cet équilibre. En effet, dans un précédent avis, le CESE avait déclaré que «l'élaboration de règles applicables au temps de travail dans les conventions collectives présente un intérêt crucial pour les partenaires sociaux, qui possèdent une grande expertise et une grande expérience en ces matières» (13).

6.2.5

Une telle négociation sur la flexibilité du temps de travail nécessite un contexte solide de droits et d'institutions sociales pour la soutenir, ainsi que des lois apportant stabilité et protection aux travailleurs, une protection sociale pour les contrats à temps partiels, facilitant les systèmes de congés parentaux et le développement de structures d'accueil des enfants et des personnes âgées. Il importe que la législation soit flexible et neutre, afin de permettre aux partenaires de trouver des solutions adaptées.

6.3   Flexibilité fonctionnelle

6.3.1

La flexibilité fonctionnelle signifie utiliser la capacité des travailleurs à accomplir différentes tâches quand cela est nécessaire, au moyen d'une rotation de postes, en élargissant les profils de postes et l'enrichissement professionnel. Elle peut profiter aux entreprises en leur permettant d'ajuster le type d'activité effectué par les travailleurs aux fluctuations de la demande ou du personnel, et d'utiliser les ressources humaines et les investissements en capitaux de manière plus productive. La flexibilité fonctionnelle peut également être dans l'intérêt des travailleurs étant donné qu'elle peut améliorer leurs possibilités de développement personnel, d'apprentissage et de capacité à trouver un emploi, de satisfaction au travail et d'augmentations de salaire.

6.3.2

La flexibilité fonctionnelle peut être un facteur clé dans la poursuite des objectifs de Lisbonne qui sont l'amélioration de la productivité, l'innovation et la compétitivité. Comme le montre par exemple la Fondation de Dublin, la flexibilité fonctionnelle associée à la formation a un effet positif sur le développement et le maintien des compétences, qui influencent à leur tour positivement la productivité (14).

6.3.3

La flexibilité fonctionnelle nécessite toutefois des conditions d'emploi sécurisées, des conditions de travail décentes, la possibilité de participer aux décisions et des méthodes de travail coopératives. Le CESE a développé dans un précédent avis l'argument selon lequel «des emplois plus sûrs et des conditions de travail plus respectueuses de la santé, ainsi que des formes coopératives d'organisation du travail, qui laissent aux salariés une plus grande marge d'action dans leur travail, sont un facteur important d'augmentation de la productivité, et donc de la capacité d'innovation» (15). Dans le même avis, la rapporteuse remarquait que «les formes de travail coopératives, présentant une hiérarchie horizontale et une grande autonomie dans le travail, telles que le travail de groupe ou d'équipe permettent d'exploiter à fond les connaissances et les capacités des employés, et tiennent en même temps compte du fait que l'économie exige aujourd'hui davantage de flexibilité. De bonnes conditions de travail et des formes d'organisation du travail positives, le fait d'élargir les marges de manœuvre et les possibilités de participation constituent en même temps une condition essentielle à l'amélioration de la productivité du travail et au renforcement de la capacité d'innovation des entreprises» (16).

6.3.4

La Fondation de Dublin a toutefois attiré l'attention sur le fait que la flexibilité fonctionnelle pourrait aboutir à une augmentation de la pression et du stress liés au travail. Elle souligne donc qu'il est important de parvenir à un équilibre entre les exigences et le contrôle du travail, afin de prévenir le phénomène d'épuisement, ou «burn-out», parmi les employés (17).

6.3.5

La formation tout au long de la vie devrait constituer un élément fondamental des stratégies en matière de flexibilité fonctionnelle. L'importance de la formation tout au long de la vie pour améliorer les qualifications des salariés, leurs possibilités de carrière ainsi que la productivité a été soulignée dans un certain nombre d'avis récents du CESE (18). La flexibilité fonctionnelle nécessite une mise à jour permanente des connaissances et des capacités des travailleurs, et une infrastructure d'éducation et de formation qui fonctionne bien afin de soutenir cela. Bien que de nombreux engagements aient été pris par le passé, il reste encore beaucoup à faire dans la pratique.

6.3.6

Comme il a déjà été indiqué, la flexibilité fonctionnelle est une question clé des négociations collectives entre les partenaires sociaux. Ces négociations permettent d'équilibrer et d'affiner les besoins des entreprises et des travailleurs, et de définir des compensations adéquates pour rétribuer les travailleurs qui améliorent leurs compétences.

Bruxelles, le 11 juillet 2007.

Le Président

du Comité économique et social européen

Dimitris DIMITRIADIS


(1)  Cf. COM(2006) 708 «Livre vert — Moderniser le droit du travail pour relever les défis du XXIe siècle» et l'avis du CESE du 30.5.2007 sur le thème «Moderniser le droit du travail», SOC/246 (rapporteur: M. Retureau), JO C 175 du 27.7.2007 .

(2)  Perspectives de l'OCDE sur l'emploi 2006: augmenter les emplois et les revenus.

(3)  Cf. les avis du CESE en cours d'élaboration sur «Le rôle des partenaires sociaux dans la conciliation de la vie professionnelle, familiale et privée», SOC 271, (rapporteur: M. Clever) et sur l'«Employabilité et esprit d'entreprise — Le rôle de la société civile, des partenaires sociaux et des organismes régionaux et locaux du point de vue du genre», SOC 273 (rapporteur: M. Pariza Castaños).

(4)  Cf. l'avis du CESE du 31.5.2005 sur «Les lignes directrices pour l'emploi 2005-2008», rapporteur: M. Malosse (JO C 286 du 17 novembre 2005).

(5)  Cf. l'avis du CESE du 17.5.2006 sur la «Flexicurité: le cas du Danemark», rapporteuse: Mme Vium (JO C 195 du 18 août 2006).

(6)  Cf. l'avis du CESE du 6.7.2006 sur le thème «Cohésion sociale: donner du contenu à un modèle social européen», rapporteur: M. Ehnmark (JO C 309 du 16 décembre 2006).

(7)  Le programme de travail pluriannuel des partenaires sociaux européens pour 2006-2008 inclut une analyse commune des défis clés auxquels les marchés de l'emploi européen font face.

(8)  «Employabilité et esprit d'entreprise — Le rôle de la société civile, des partenaires sociaux et des organismes régionaux et locaux du point de vue du genre», SOC 273 (rapporteur: M. Pariza Castaños).

(9)  Avis en cours d'élaboration sur «Le rôle des partenaires sociaux dans la conciliation de la vie professionnelle, familiale et privée» (rapporteur: M. Clever).

(10)  Avis du CESE du 14.3.2007 sur «L'impact économique et budgétaire du vieillissement des populations», ECO/186 (rapporteuse: Mme Florio), JO C 161 du 13.7.2007.

(11)  Cf. l'avis du CESE du 11.5.2005 sur la «Modification relative à la directive 2003/88/CE concernant certains aspects de l'aménagement du temps de travail», paragraphe 3.4, rapporteuse: Mme Engelen-Kefer (JO C 267 du 27 octobre 2005).

(12)  Ibid, paragraphe 3.6.

(13)  Avis du CESE du 1.7.2004 sur la «Révision de la directive 93/104 sur l'aménagement du temps de travail», paragraphe 2.2.6, rapporteur: M. Hahr (JO C 302 du 7 décembre 2004).

(14)  http://eurofound.europa.eu/ewco/2004/02/NL0402NU03.htm

(15)  Avis du CESE du 13.9.2006 sur la «Qualité de la vie professionnelle, productivité et emploi face à la mondialisation et aux défis démographiques», rapporteuse: Mme Engelen-Kefer (JO C 318 du 23 décembre 2006, paragraphe 1.3).

(16)  Idem, paragraphe 1.4.

(17)  http://eurofound.europa.eu/ewco/2004/02/NL0402NU03.htm.

(18)  Avis du CESE sur la «Proposition de recommandation du Parlement européen et du Conseil sur les compétences clés pour l'éducation et la formation tout au long de la vie», rapporteuse: Mme Herczog (JO C 195 du 18 août 2006), et sur le thème «Formation et productivité» (avís exploratoire), rapporteur: M. Koryfidis (JO C 120 du 20 mai 2005).


27.10.2007   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 256/114


Avis du Comité économique et social européen sur le thème: «Employabilité et esprit d'entreprise — Le rôle de la société civile, des partenaires sociaux et des organismes régionaux et locaux du point de vue du genre»

(2007/C 256/21)

Le Comité économique et social européen a reçu le 13 février 2007 une lettre de saisine de la future présidence portugaise sur la proposition susmentionée.

La section spécialisée «Emploi, affaires sociales, citoyenneté», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 18 juin 2007 (rapporteur: M. PARIZA CASTAÑOS).

Lors de sa 437e session plénière des 11 et 12 juillet 2007 (séance du 11 juillet 2007), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 141 voix pour, aucune voix contre et 5 abstentions.

1.   Résumé des propositions du CESE

1.1

L'inégalité entre les hommes et les femmes dans le monde de l'entreprise et sur le marché du travail constitue un problème grave qui affecte l'ensemble de la société européenne, concernant aussi bien les hommes que les femmes, les entreprises, les travailleurs, les gouvernements, les partenaires sociaux et la société civile. Le CESE considère que le moment est venu de donner un nouvel élan aux politiques d'égalité, en mettant en œuvre de nouvelles politiques actives sur le marché du travail en matière de création d'entreprises et d'organisation de la vie sociale.

1.2

L'égalité entre les femmes et les hommes constitue un défi fondamental pour l'avenir de l'Europe, raison pour laquelle le CESE considère qu'il faut renforcer la dimension de genre dans la Stratégie de Lisbonne et que la révision à mi-parcours des lignes directrices intégrées et les plans nationaux de réforme incluent les éléments suivants:

1.2.1.1

Le développement résolu du Pacte européen pour l'égalité entre les hommes et les femmes par les États et la désignation, par ces derniers, d'une responsable nationale pour l'égalité entre les hommes et les femmes dans les plans nationaux de réforme.

1.2.2

L'inclusion de nouveaux objectifs spécifiques pour atteindre l'égalité entre les hommes et les femmes dans les politiques pour l'emploi, dotés d'indicateurs qualitatifs et quantitatifs; il est en effet prioritaire de faire en sorte qu'il y ait plus de femmes chefs d'entreprise, qu'elles aient un emploi, et que ce dernier soit de meilleure qualité.

1.2.3

L'inclusion d'objectifs précis pour éliminer les stéréotypes sexistes (en particulier dans l'enseignement) qui limitent l'esprit d'entreprise des femmes.

1.2.4

L'amélioration de la gouvernance par la participation adéquate des partenaires sociaux et des organisations de la société civile, en particulier aux niveaux local et régional. L'association active des pouvoirs locaux et régionaux aux plans nationaux de réforme.

1.2.5

Une plus grande transparence dans les services publics pour l'emploi et les agences privées afin d'éliminer la discrimination dans les procédures de recrutement.

1.2.6

L'engagement, de la part des institutions de surveillance du secteur des services financiers, à s'assurer que lors de l'examen des demandes de prêt déposées par des femmes chefs d'entreprise, ces dernières ne soient pas victimes de discrimination fondée sur le genre. L'aide publique pour l'accès au crédit est également nécessaire, surtout pour les femmes qui se lancent dans une activité économique pour la première fois.

1.2.7

Des objectifs précis pour encourager la formation universitaire et professionnelle, ainsi que l'accès des femmes à toutes les professions, en surmontant les stéréotypes culturels.

1.2.8

L'appui et le soutien des partenaires sociaux, en particulier aux niveaux sectoriel, local et régional, pour éliminer, par le biais de la négociation collective et du dialogue social, les déséquilibres entre les hommes et les femmes qui placent les femmes dans une position d'infériorité au sein de l'entreprise.

1.2.9

Les plans d'égalité et les mesures d'action positive que les partenaires sociaux adoptent et mettent en œuvre dans de nombreux secteurs et entreprises, doivent être élargis et soutenus par les gouvernements nationaux, régionaux et locaux; des ressources communautaires doivent également y être allouées.

1.2.10

Les lignes directrices communautaires doivent renforcer les objectifs nationaux pour l'égalité salariale entre les hommes et les femmes par le biais d'indicateurs précis.

1.2.11

Il faut élaborer, aux niveaux local et régional, des programmes spécifiques pour l'accès des femmes immigrées et des groupes minoritaires à l'emploi et à la création d'entreprises.

1.2.12

Il est également nécessaire de mettre en œuvre des programmes et des objectifs spécifiques pour les femmes handicapées.

1.2.13

Les plans de réforme nationaux de systèmes de calcul des pensions doivent éviter que de nombreuses femmes perdent leur droit à la pension ou n'en reçoivent une que d'un montant très limité parce qu'elles ont travaillé à temps partiel ou ont connu des interruptions de carrière en raison, notamment, d'obligations familiales. Il faut également que les conjointes co-entrepreneurs disposent d'un statut juridique adéquat.

1.2.14

Les collectivités locales et régionales doivent collaborer avec les entreprises et les travailleurs et travailleuses, pour leur permettre de concilier leur vie familiale et leur vie professionnelle.

1.2.15

En raison du vieillissement de la génération actuelle des chefs d'entreprises, la question de la transmission de nombreuses entreprises, en particulier des PME, offre une opportunité pour permettre l'accès des femmes à des postes de dirigeantes d'entreprises. Il est crucial que ce passage de témoin soit préparé par des dispositions nationales ou locales favorisant ces reprises d'entreprises par des femmes. Au niveau européen cela mériterait une étude de cette réalité et un recensement de pratiques d'accompagnement incitatives.

2.   Introduction

2.1

La future présidence portugaise de l'Union européenne a demandé au CESE d'élaborer un avis exploratoire sur le thème «Employabilité et esprit d'entreprise — Le rôle de la société civile, des partenaires sociaux et des instances régionales et locales, dans une perspective de genre», dans le but de préparer ses travaux.

2.2

Le CESE se félicite de la proposition de la présidence portugaise de renforcer le processus de consultation sur les nouvelles lignes directrices intégrées pour la croissance et l'emploi 2008-2010 grâce à l'insertion d'une perspective de genre et à sa mise en œuvre par la société civile, les partenaires sociaux et les collectivités locales et régionales, ainsi que les gouvernements, car la perspective de genre, qui vise l'égalité entre les hommes et les femmes, pose un défi à l'ensemble de la société européenne.

2.3

Le Traité mentionne clairement que l'UE compte parmi ses objectifs la promotion du progrès économique et social, un niveau élevé d'emploi et l'égalité entre les femmes et les hommes.

2.4

L'égalité entre les sexes constitue l'un des principes fondamentaux de l'Union européenne, garanti dans le Traité ainsi que dans la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne. Les institutions et les organes communautaires sont tenus de lutter contre la discrimination dont les femmes sont victimes et de promouvoir l'égalité entre les femmes et les hommes dans la législation et les politiques publiques.

2.5

L'UE dispose d'un acquis considérable en matière de politiques d'égalité. En matière de politiques d'emploi et de législation du travail, il y a lieu de citer deux directives: d'une part, la directive 2002/73/CE relative à la mise en œuvre du principe de l'égalité de traitement entre les hommes et les femmes en ce qui concerne l'accès à l'emploi, à la formation et à la promotion professionnelles, et les conditions de travail; et, d'autre part, la directive 2004/113/CE mettant en œuvre le principe de l'égalité de traitement entre les femmes et les hommes dans l'accès à des biens et services et la fourniture de biens et services.

2.6

Le CESE a élaboré divers avis au cours des dernières années (1), contribuant de la sorte au développement de l'acquis communautaire, à l'amélioration des instruments législatifs et à la qualité des politiques d'égalité. Le Comité a apporté son soutien à la stratégie européenne pour l'emploi et souligné l'avancée qu'elle a marqué pour résoudre des problèmes nationaux et locaux par le biais d'une approche commune et coordonnée au niveau européen. Le Comité considère qu'il est nécessaire de soutenir cet effort par un nombre plus important d'actions et une meilleure coordination.

2.7

Le CESE entend réaliser une évaluation des politiques adoptées à ce jour, mettre en exergue les bonnes pratiques et proposer de nouvelles initiatives, pour faire en sorte que les femmes européennes développent leur esprit d'entreprise et soient plus actives sur le marché de l'emploi. Le présent avis s'inscrit dans le cadre des débats d'évaluation et de réforme de l'Agenda de Lisbonne; les propositions peuvent être développées dans le cadre de la révision de la stratégie intégrée pour la croissance et l'emploi et des futurs plans nationaux de réforme.

3.   L'Agenda de Lisbonne

3.1

La Stratégie de Lisbonne préconise de parvenir au plein emploi en Europe à travers le renforcement de la qualité et de la productivité au travail et la cohésion économique, sociale et territoriale, conjugués à une meilleure gouvernance, dans le cadre d'une société de la connaissance adaptée aux options personnelles des femmes et des hommes. Pour la première fois, un barème quantitatif a été établi pour parvenir à l'égalité entre les femmes et les hommes dans la vie économique avec, pour objectif chiffré, un taux d'emploi féminin de 60 % en 2010.

3.2

À la demande du Conseil européen, le CESE collabore avec les CES nationaux pour la mise en œuvre de la Stratégie de Lisbonne (2).

3.3

Malgré les bons résultats obtenus, l'expérience a montré la nécessité de mener des réformes plus vastes dans le cadre de la Stratégie de Lisbonne, pour garantir la participation équitable des femmes et des hommes, dans la création d'entreprises et l'accès à l'emploi.

3.4

En effet, en Europe, les femmes n'ont pas encore les mêmes opportunités entrepreneuriales que les hommes ni les mêmes possibilités sur le marché du travail. À cause des stéréotypes sociaux et culturels hérités du passé, le taux d'activité des femmes est globalement inférieur à celui des hommes et la ségrégation professionnelle subsiste au sein du marché de l'emploi. D'une manière générale, les femmes ont des emplois plus précaires et de moindre qualité, avec des salaires inférieurs, et rencontrent plus de difficultés pour développer leurs qualifications professionnelles; par ailleurs, les femmes chefs d'entreprise rencontrent plus d'obstacles pour accéder au financement.

3.5

Aussi, le CESE considère-t-il qu'il faut renforcer la dimension de genre dans la Stratégie de Lisbonne, en révisant les objectifs communautaires et nationaux pour faire en sorte qu'il y ait plus de femmes chefs d'entreprise, plus de femmes ayant un emploi, et que ce dernier soit de meilleure qualité. La qualité est à entendre ici au sens de plus grande diversification professionnelle, d'égalité salariale, de plus grande stabilité d'emploi ainsi que d'accès à la formation et à la promotion professionnelle.

3.6

Après l'examen à mi-parcours de la Stratégie de Lisbonne, le Conseil a approuvé en mars 2005 la «relance de la Stratégie de Lisbonne» avec pour principal changement de ne pas concentrer exclusivement l'attention sur des objectifs quantitatifs mais plutôt sur les politiques et les actions pratiques à mettre en œuvre pour les atteindre. Les priorités vont à la création d'un plus grand nombre d'emplois et de meilleure qualité; il faut pour ce faire attirer et retenir plus de personnes sur le marché du travail, moderniser les systèmes de protection sociale, améliorer l'adaptabilité des travailleurs et des entreprises, accroître la flexibilité des marchés du travail et investir davantage dans le capital humain à travers l'amélioration de l'éducation et des qualifications (3).

3.7

L'Agenda de Lisbonne révisé souligne également l'importance d'une bonne gouvernance, par le biais d'une méthode de travail politique plus efficace qui rassemble toutes les parties concernées, les États membres, les citoyens, les parlements, les partenaires sociaux et la société civile, aux côtés des institutions communautaires, autour d'une vision commune de progrès et d'opportunités d'avenir. Le CESE considère qu'il est nécessaire d'améliorer la gouvernance de l'Agenda de Lisbonne, à travers un rôle plus actif de la société civile, des partenaires sociaux et des organismes locaux et régionaux.

3.8

Le CESE fait valoir l'importance de ce que les partenaires sociaux participent le plus en amont possible dans le processus d'élaboration des lignes directrices et soient consultés sur les aspects relatifs à l'inclusion de critères de genre.

3.9

Les lignes directrices intégrées pour la croissance et l'emploi 2005-2008, qui servent de base à la préparation des programmes nationaux de réforme dans les États membres, renforcent le caractère essentiel de l'égalité entre les hommes et les femmes pour faire face aux priorités établies, combinant des mesures spécifiques relatives à l'emploi féminin avec l'intégration de l'égalité dans toutes les actions entreprises (4).

3.10

Comme il l'a déjà fait valoir dans son avis sur les lignes directrices pour l'emploi, le CESE trouve surprenant que malgré la priorité accordée à l'égalité entre les hommes et les femmes en matière d'emploi dans la Stratégie de Lisbonne, cette question ne fasse pas l'objet d'une ligne de conduite intégrée spécifique dans ces orientations (5).

3.11

Le bilan du programme communautaire de Lisbonne et des programmes nationaux de réforme (6) met en évidence la nécessité de renforcer les politiques d'égalité des chances entre les hommes et les femmes, par la mise en œuvre de mesures qui permettent de concilier la vie professionnelle, familiale et personnelle.

3.12

Le rapport conjoint sur l'emploi 2006/2007 évalue positivement la croissance rapide des taux d'emploi des femmes, faisant valoir que c'est un progrès sur la voie de la réalisation de l'objectif de Lisbonne (7). Toutefois, il souligne que la plupart des rapports remis par les États membres ne font pas référence à de quelconques mesures spécifiques destinées à promouvoir l'emploi des femmes ou à réduire les différences entre les hommes et les femmes sur le marché du travail, à l'exception des mesures destinées à améliorer l'accès à l'infrastructure d'accueil à l'enfance. Certains États membres (AT, BE, DK, DE, ES, IE, IT, LU, PT et UK) se sont fixés des objectifs nationaux concernant les infrastructures d'accueil à l'enfance, mais rares sont ceux qui communiquent les progrès accomplis vers l'objectif européen dans ce domaine. Le progrès vers la réalisation de cet objectif reste lent. Seuls certains États membres (AT, DK, FI, IE, MT et NL) disposent de mesures visant à rendre plus accessibles les services d'accueil à l'enfance en appliquant des prix maximums ou des coûts réduits. La nécessité de renforcer le rôle des hommes dans la conciliation du travail et de la vie familiale n'est pas mentionnée. SI a lancé une campagne pour que les hommes jouent un rôle plus actif dans la vie familiale, LT a offert de nouvelles possibilités de congé de paternité rémunéré et CZ, DE et EL vont accroître la possibilité pour les pères de prendre des congés parentaux.

4.   Le Pacte européen pour l'égalité entre les hommes et les femmes et la Feuille de route pour l'égalité entre les hommes et les femmes

4.1

Le «Pacte européen pour l'égalité entre les hommes et les femmes» (8), approuvé par le Conseil européen de mars 2006, constitue un saut qualitatif dès lors qu'il associe tous les États membres à la poursuite de l'objectif d'une plus grande participation des femmes au marché du travail et de la promotion de l'égalité entre les femmes et les hommes.

4.2

La «Feuille de route pour l'égalité entre les hommes et les femmes 2006-2010», adoptée par la Commission définit six domaines prioritaires pour l'action de l'Union européenne: une même indépendance économique pour les femmes et les hommes, la conciliation de la vie privée et de la vie professionnelle, une représentation paritaire dans la prise de décision, la suppression de toute forme de violence à l'égard des femmes, l'élimination des stéréotypes sexistes et la promotion de l'égalité entre les hommes et les femmes en matière de politique extérieure et de coopération au développement (9).

4.3

Afin d'améliorer la gouvernance en matière d'égalité entre les hommes et les femmes, la Feuille de route prévoit également une série d'actions très importantes, la Commission s'engageant à assurer un suivi étroit des progrès dans ce domaine.

4.4

Dans son avis sur la Feuille de route pour l'égalité entre les hommes et les femmes 2006-2010, le CESE salue la volonté politique de la Commission de continuer à accorder la priorité à l'égalité entre les hommes et les femmes dans son programme de travail pour la période 2006-2010 et souligne qu'il est important d'associer toutes les parties concernées à la mise en œuvre des actions y relatives (10).

4.5

Le CESE marque également son soutien à la création de l'Institut européen pour l'égalité entre les hommes et les femmes (11).

4.6

Le Comité considère que le moment est venu de donner un nouvel élan aux politiques d'égalité, en mettant en œuvre de nouvelles politiques actives sur le marché du travail en matière de création d'entreprises et d'organisation de la vie sociale. Différents États membres sont en train d'adopter de nouvelles législations visant à assurer une égalité effective entre les hommes et les femmes en politique, au sein des organisations sociales et des entreprises, tant au niveau des travailleurs salariés que de l'encadrement et des conseils d'administration. Il soutient de manière générale ces réformes qui incluent des politiques actives sur la base d'un cadre légal rationnel de nature à garantir une protection effective au travail de même que la sécurité et la stabilité indispensables.

5.   Les propositions du CESE: renforcer la dimension de genre dans l'Agenda de Lisbonne

5.1

Les déséquilibres et l'inégalité entre les femmes et les hommes dans le monde de l'entreprise et sur le marché du travail constitue un problème grave qui affecte l'ensemble de la société européenne, concernant aussi bien les hommes que les femmes, les entreprises, les travailleurs et travailleuses, les gouvernements, les partenaires sociaux et la société civile. L'égalité entre les femmes et les hommes constitue un défi fondamental pour l'avenir de l'Europe.

5.2

Le CESE soutient la Résolution du Parlement européen du 13 mars 2007 (12) sur une Feuille de route pour l'égalité entre les femmes et les hommes 2006-2010 et, en particulier, son point 1.7 qui demande «aux États membres d'intégrer ou de renforcer, dans leurs plans d'action nationaux pour l'emploi et l'intégration sociale, des mesures destinées à favoriser l'accès des femmes au marché du travail à dignité égale et à salaire égal pour un travail identique, à encourager l'entreprenariat féminin» et son point 20 qui «demande aux États membres de nommer une responsable nationale pour l'égalité des genres dans le cadre de la mise en œuvre de la Stratégie de Lisbonne chargée de participer à l'élaboration et à la révision des différents plans nationaux et de contrôler leur mise en œuvre afin de favoriser l'intégration de la dimension du genre, notamment dans le budget, pour les politiques et les objectifs définis par ces plans».

5.3

Le CESE insiste sur la nécessité que les nouveaux plans nationaux de réforme prévoient l'obligation, pour les États membres, de nommer une responsable nationale pour l'égalité entre les femmes et les hommes.

5.4

Les lignes directrices pour l'emploi doivent établir des objectifs concrets et quantifiables nécessaires pour mener une évaluation comparative entre États membres des progrès accomplis en matière d'égalité effective des femmes sur le marché du travail et dans les initiatives entrepreneuriales.

5.5

Le CESE considère qu'il faudrait accorder plus d'attention, au niveau européen, aux femmes qui travaillent dans des zones rurales dépendant de l'agriculture, peu fondées sur la culture de l'apprentissage et soutenir leur participation au marché de l'emploi.

5.6

Dans le cadre de la subsidiarité, certains gouvernements entendent revoir à la baisse certaines exigences communautaires concernant les plans nationaux de réforme. Toutefois, le CESE estime que, dans l'ensemble, les lignes directrices intégrées sont suffisamment souples pour que les États membres puissent définir les solutions qui répondent le mieux à leurs besoins.

5.7

En outre, le CESE est d'avis que, tout en respectant le principe de subsidiarité, il y a lieu de renforcer le caractère communautaire de l'Agenda de Lisbonne et des lignes directrices intégrées pour la croissance et l'emploi. Dans l'avis sur la Feuille de route pour l'égalité entre les hommes et les femmes (2006-2010), il est dit que: «Le Comité reconnaît que pour augmenter le taux de participation des femmes au marché du travail, il est indispensable d'établir des priorités communes dans la coordination des politiques en matière d'emploi. Lors de son évaluation des programmes nationaux de réforme, la Commission doit veiller à ce que la priorité soit accordée à l'élimination des disparités entre les hommes et les femmes et que les actions nécessaires soient entreprises en ce sens»  (13).

5.8

La gouvernance dans le cadre de la Stratégie européenne pour l'emploi a été améliorée, mais le CESE estime que la situation n'est pas encore pleinement satisfaisante. Il y a lieu de renforcer la collaboration entre la Commission, les États membres, les partenaires sociaux, les organisations qui travaillent pour l'égalité et les organisations de la société civile, afin de garantir une participation adéquate à tous les niveaux et à tous les stades d'action.

5.9

Le CESE considère qu'il est nécessaire d'améliorer la participation des citoyens à la stratégie européenne d'emploi. Il faut permettre aux partenaires sociaux et aux organisations de la société civile de s'associer à ces politiques, en leur offrant la possibilité de participer à tous les niveaux (communautaire, national, régional et local), à travers des procédures appropriées. Pour atteindre les objectifs de la Stratégie de Lisbonne, il faut mettre en marche l'amélioration de la gouvernance, la valeur ajoutée de l'engagement actif des partenaires sociaux, de la société civile et des organismes locaux et régionaux.

5.10

Pour ce qui est de l'emploi, c'est au niveau local que l'on perçoit le mieux l'impact de l'application des politiques. Par conséquent, le rôle des collectivités locales et régionales et des partenaires sociaux est essentiel dans la mise en œuvre de ces politiques. L'insertion professionnelle des femmes dans des conditions d'égalité requiert une connaissance approfondie et de proximité des caractéristiques de leur situation et de leurs besoins ainsi que du contexte économique et social du territoire. Aussi est-il nécessaire que les institutions locales et régionales participent au diagnostic, à la conception, à l'exécution et à l'évaluation des actions.

5.11

S'il est vrai que ces dernières années les femmes ont fortement gagné du terrain en matière d'accès à l'université (59 % des diplômés de l'enseignement supérieur sont des femmes) (14), la répartition des hommes et des femmes dans les différentes branches d'études répond encore à des stéréotypes bien ancrés. Ainsi, sur dix femmes diplômées, une seule possède un diplôme technique, le rapport étant de quatre sur dix pour les hommes. Cependant, l'enseignement, les humanités et les sciences de l'art et de la santé concentrent presque la moitié des diplômées et moins d'un quart des diplômés. Le CESE propose donc que les autorités éducatives adoptent des mesures générales de promotion pour surmonter les stéréotypes sexistes afin que les femmes et les hommes optent pour des professions où ils sont sous-représentés.

5.12

Les politiques de conciliation de la vie professionnelle et de la vie familiale contribuent à améliorer la qualité de vie des femmes et des hommes. Elles aident toutes les personnes à entrer et à rester dans le marché du travail et contribuent à l'utilisation de tout le potentiel de main-d'œuvre. Ces politiques doivent s'adresser autant aux hommes qu'aux femmes.

5.13

Le CESE (15) rappelle aux États membres les engagements qu'ils ont pris dans le cadre du Pacte européen pour l'égalité entre les hommes et les femmes et propose à la Commission de demander aux États membres de prévoir dans leurs programmes nationaux de réforme davantage d'engagements à améliorer la conciliation de la vie de famille et de la vie professionnelle des hommes et des femmes. Il rappelle aussi que, dans la mesure où c'est la société dans son ensemble qui est concernée, il est nécessaire de garantir une coresponsabilité de toutes les parties prenantes, y compris des entreprises.

5.14

La conciliation ne doit pas être confondue avec certaines mesures de politique familiale qui font obstacle à l'emploi au moyen d'incitations fortes à s'éloigner de la vie professionnelle et à l'interrompre de manière prolongée, avec pour conséquences moins d'opportunités de réintégration réussie par la suite sur le marché du travail.

5.15

Il faut mettre en œuvre des mesures plus efficaces de réintégration professionnelle des femmes et des hommes, après une absence due à une prise en charge de personnes dépendantes ou à une maternité. Parmi ces mesures pourraient figurer des formules flexibles de formation continue pendant la période d'absence et la poursuite de l'activité professionnelle à temps partiel. Dans ce sens, il y a lieu de citer l'accord cadre européen sur le télétravail, conclu par les partenaires sociaux (CES, UNICE/UEAPME et CEEP), qui réglemente la définition et le champ d'application du télétravail, le caractère volontaire, les conditions d'emploi, la protection des données, la vie privée, les équipements, la santé et la sécurité, l'organisation du travail, la formation et les droits collectifs, ainsi que la mise en œuvre et le suivi dudit accord.

5.16

Les ONG jouent un rôle très important dans la promotion de l'égalité entre les hommes et les femmes en Europe; elles mènent des campagnes dans le monde des idées politiques et des valeurs culturelles, ainsi que des actions à caractère social qui favorisent l'amélioration des opportunités pour de nombreuses femmes. Par ailleurs, les femmes participent souvent dans des ONG représentant différents groupes de femmes devant les institutions locales et régionales; celles-ci doivent être soutenues.

5.17

Les femmes d'origine immigrée ou appartenant à des minorités rencontrent des difficultés particulières pour créer des entreprises et accéder au marché de l'emploi dans des conditions d'égalité. Aussi, est-il nécessaire d'inclure de nouveaux objectifs dans les nouvelles lignes directrices pour l'emploi.

5.18

Le CESE a élaboré plusieurs avis pour doter l'UE d'une politique commune en matière d'immigration et faire en sorte que la lutte contre la discrimination et les politiques d'intégration soient des objectifs prioritaires pour les gouvernements européens. Ces politiques doivent inclure la perspective de genre, pour que les femmes immigrées ou appartenant à des minorités ethniques ou culturelles, puissent mener à bien leurs projets d'entreprise et s'intégrer au marché de l'emploi, dans des conditions d'égalité.

5.19

Par ailleurs, les femmes handicapées rencontrent des difficultés supplémentaires pour s'intégrer dans le marché de l'emploi et créer leur propre entreprise. Le CESE propose de renforcer, dans les nouvelles lignes directrices et les plans nationaux de réforme, l'objectif d'intégrer ces femmes au marché de l'emploi et de l'assortir d'indicateurs spécifiques.

5.20

Le CESE propose que les autorités locales et régionales encouragent la mise en œuvre de politiques de promotion de l'égalité des chances pour les femmes handicapées et que les partenaires sociaux adoptent des stratégies pour l'égalité dans le cadre des conventions collectives et des pratiques professionnelles.

5.21

Le FSE a développé, à travers l'initiative EQUAL et dans le cadre de la Stratégie de Lisbonne, d'intéressantes approches innovatrices pour encourager l'esprit d'entreprise et l'employabilité de ces femmes qui subissent une discrimination accrue. Ces expériences pourraient être utilisées, en particulier, par les autorités locales et régionales et être développées ultérieurement, dans le cadre des actions du FSE prévues pour la nouvelle période de programmation 2007-2013, afin d'adopter de nouvelles initiatives pour promouvoir l'accès à l'emploi de ces groupes de femmes ayant des difficultés particulières.

6.   Employabilité

6.1

Depuis le lancement de la Stratégie de Lisbonne, 6 millions de postes de travail sur les 8 millions créés dans l'UE ont été occupés par des femmes. En 2005, le taux d'emploi des femmes a atteint 56,3 % (+ 1,1 %), contre 71 % pour l'emploi masculin (+ 0,6 %). Le taux d'emploi des femmes âgées de plus de 55 ans a également augmenté plus rapidement que celui des hommes, atteignant 33,7 % (16).

6.2

Le chômage est en baisse: 8,8 % en 2005, se situant à 9,9 % pour les femmes et à 7,9 % pour les hommes. Malgré l'évolution favorable du taux d'emploi global des femmes en Europe, leur contribution n'est pas encore pleinement mise à profit. La preuve en est leurs taux d'activité et d'occupation inférieurs, leur taux élevé de chômage, une plus grande précarité d'emploi, une forte ségrégation aux plans professionnel et sectoriel, les inégalités de salaires et les difficultés des femmes et des hommes pour concilier la vie professionnelle et la vie de famille.

6.3

Le CESE rappelle que même si le taux établi (60 % en 2010) pour l'emploi des femmes peut être atteint (bien que pas dans tous les pays), il ne faut pas oublier que ce pourcentage inclut le travail à temps partiel, le travail flexible et le travail saisonnier. Or ce sont en grande partie des femmes qui occupent ces emplois, pas toujours par choix mais souvent en conséquence de la répartition inégale des responsabilités familiales entre les femmes et les hommes.

6.4

Des différences très importantes persistent entre le rôle des hommes et des femmes au sein du marché du travail, ainsi qu'une grande segmentation surtout en ce qui concerne les conditions de travail ou les secteurs dans lesquels elles sont présentes ou les professions qu'elles exercent. Ces différences affectent aussi bien les femmes qui travaillent que celles qui sont à la recherche d'un emploi. En conséquence, il faut encourager la mise en œuvre de nouvelles politiques visant à éliminer les causes qui sont à l'origine de ce déséquilibre sur le marché du travail.

6.5

Les femmes rencontrent également plus de difficultés que les hommes pour trouver un emploi correspondant à leur formation. De plus, leur accès et leur maintien sur le marché du travail sont entravés par les problèmes de conciliation de la vie de famille et de la vie professionnelle, la situation étant pour elles incomparablement plus problématique que pour les hommes.

6.6

Le CESE juge très positifs les programmes d'égalité que les partenaires sociaux ont adoptés dans de nombreuses entreprises en vue d'améliorer l'intégration des femmes, leur maintien dans l'entreprise, leur niveau de formation et leur carrière professionnelle et de lutter contre la discrimination. Pour ce faire, des mesures d'actions positives ont été prises. Les autorités publiques et, en particulier, les niveaux locaux et régionaux doivent apporter leur soutien aux programmes d'égalité.

6.7

Le dialogue social européen, qui relève de la responsabilité des partenaires sociaux, a un rôle important à jouer dans le développement de la perspective de genre dans la Stratégie de Lisbonne. Le CESE rappelle et soutient l'importance du cadre d'action pour l'égalité entre les hommes et les femmes que les partenaires sociaux européens ont conclu en 2005 (17), développé actuellement aux niveaux sectoriel et national.

6.8

Le récent accord-cadre européen sur le harcèlement et la violence au travail (18) est un exemple de bonnes pratiques que le CESE veut soutenir. De même, certains des comités de dialogue sectoriel sont en train d'intégrer une approche de genre. Le Comité recommande à la Commission de collaborer plus activement avec les partenaires sociaux pour parvenir à la réalisation de ces objectifs.

6.9

La négociation collective selon les lois et les pratiques nationales constitue l'une des caractéristiques du modèle social européen. Les partenaires sociaux mènent dans les différents domaines des négociations et concluent des accords pour améliorer la sécurité et la flexibilité de l'emploi et actualiser les salaires et l'organisation du travail ainsi que les systèmes de formation et de qualification professionnelle.

6.10

C'est à travers la négociation collective dans les entreprises et les secteurs qu'il faut supprimer les déséquilibres de genre plaçant les femmes dans une position secondaire. Aussi, le CESE considère-t-il que la négociation collective et le dialogue social sont des instruments fondamentaux pour développer les programmes d'égalité dans les entreprises européennes. Il est nécessaire pour l'Europe, les États membres, les entreprises et la société dans son ensemble, de mettre un terme aux discriminations professionnelles, dont sont victimes de nombreuses femmes, véhiculées par les stéréotypes culturels et sociaux.

6.11

Le «principe de l'égalité de rémunération» entre travailleurs masculins et travailleurs féminins pour un même travail, inscrit à l'article 141 du traité implique pour un même travail ou pour un travail auquel est attribué une valeur égale, l'élimination, dans l'ensemble des éléments et conditions de rémunérations, de toute discrimination fondée sur le sexe entre les hommes et les femmes. Or, en moyenne, les femmes gagnent 15 % de moins par heure prestée que les hommes (écart relatif de la rémunération horaire brute moyenne entre les hommes et les femmes) (19). Cette discrimination salariale se produit dans tous les secteurs d'activité et en particulier dans les catégories professionnelles les plus élevées.

6.12

Le CESE soutient l'idée que l'égalité salariale entre les hommes et les femmes qui fait déjà partie des lignes directrices intégrées de l'Union européenne soit renforcée par l'évaluation sur la base de critères précis.

6.13

La collaboration active des partenaires sociaux dans les différents domaines est nécessaire pour éliminer les discriminations salariales. Dans l'avis sur la Feuille de route pour l'égalité entre les femmes et les hommes (2006-2010), il est recommandé que: «… pour augmenter le taux de participation des femmes au marché du travail, il est indispensable d'établir des priorités communes dans la coordination des politiques en matière d'emploi. Lors de son évaluation des programmes nationaux de réforme, la Commission doit veiller à ce que la priorité soit accordée à l'élimination des disparités entre les hommes et les femmes et que les actions nécessaires soient entreprises»  (20).

6.14

Les services publics de l'emploi sont des institutions essentielles pour le bon fonctionnement des marchés du travail et ils doivent s'engager à promouvoir des politiques actives pour que les femmes au chômage puissent avoir accès à l'emploi. Pour que la législation existante puisse être appliquée d'une manière adéquate, le CESE propose que les services publics de l'emploi et les agences privées élaborent des codes de bonnes pratiques visant à s'assurer que les offres d'emploi et les procédures de sélection ne soient pas discriminatoires envers les femmes.

6.15

Sur les marchés de l'emploi plus transparents, l'égalité entre les femmes et les hommes est plus importante; ainsi, le secteur public, affiche-t-il une plus grande participation des femmes, entre autres car les procédures de sélection permettent d'évaluer les compétences des candidats et de mieux éliminer les préjugés discriminatoires fondés sur les stéréotypes de genre.

6.16

Les systèmes de calcul de pensions portent souvent préjudice aux femmes, car ils sont liés à la carrière professionnelle. Or, nombre de femmes occupent des postes à temps partiel, avec des périodes d'interruption ou de travail précaire et rencontrent donc des difficultés pour percevoir une pension de retraite ou n'en reçoivent une que d'un montant très faible. Le CESE propose que la Commission et les États membres, à travers la méthode ouverte de coordination pour les réformes des systèmes de retraite, prennent en considération ces situations qui portent préjudice à l'égalité des femmes sur le marché du travail et qu'ils recherchent des solutions plus équitables.

6.17

La formation continue est fondamentale pour que les hommes et les femmes puissent mener durablement leur activité professionnelle. Le CESE propose que les collectivités locales et régionales développent, en collaboration avec les partenaires sociaux, des programmes de formation continue destinés aux femmes chefs d'entreprise et aux travailleuses dans le cadre des politiques d'emploi et d'égalité des opportunités.

6.18

Le CESE tient à souligner le rôle actif des partenaires sociaux pour résoudre les difficultés que rencontrent les femmes dans la société et sur le marché du travail. De nombreuses femmes s'intègrent aux organisations syndicales et entrepreneuriales pour donner un élan décisif de l'intérieur à des politiques actives et des programmes d'égalité mais leur nombre est encore faible et elles doivent surmonter de nombreuses difficultés pour parvenir aux postes de direction.

7.   Esprit d'entreprise

7.1

Les femmes chefs d'entreprise représentent encore un pourcentage faible (30 % de l'entrepreneuriat dans l'UE), le travail indépendant féminin représentant quant à lui 37 % (21).

7.2

Les femmes rencontrent également plus d'obstacles que les hommes à la création d'entreprises, à cause des stéréotypes et des barrières sociales et culturelles, en termes d'orientation de leur éducation et de leur formation, ainsi que des difficultés supplémentaires pour obtenir des financements pour les projets d'entreprise. Toutefois, une fois l'entreprise créée, rien ne permet de dire que les femmes parviennent moins bien que les hommes à la consolider.

7.3

Le CESE propose à tous les acteurs politiques et sociaux de redoubler d'efforts pour promouvoir l'esprit d'entreprise chez les femmes européennes et d'éliminer les vieux stéréotypes sociaux qui perdurent tels que: «Le monde des entreprises est un monde d'hommes, avec des horaires incompatibles avec la vie de famille, etc.» Ces stéréotypes sociaux sont à l'origine de nombreuses difficultés culturelles et sociales auxquelles se heurtent les femmes lorsqu'elles exercent une activité indépendante ou créent des entreprises.

7.4

Le plan d'action de la politique de l'esprit d'entreprise (22) propose une série de mesures relatives à l'encouragement de l'esprit d'entreprise, que devraient appliquer l'UE et les responsables politiques de tous les États membres. Entre autres, le plan souligne la nécessité d'accorder un soutien personnalisé aux femmes. Cependant, les rapports de suivi sur le respect des objectifs de la Charte européenne des petites entreprises (23), n'incluent aucune référence à cette question. Le CESE considère que les rapports annuels devraient inclure des informations concrètes sur les progrès réalisés au niveau européen et dans les États membres sur le soutien apporté aux femmes chefs d'entreprise, afin de faciliter l'échange de bonnes pratiques et de connaissances.

7.5

Il est nécessaire d'encourager l'esprit d'entreprise chez les femmes et chez les hommes en Europe (24). En 2006, le CESE a adopté un avis (25) sur la communication de la Commission intitulée: «Mise en œuvre du Programme communautaire de Lisbonne: Stimuler l'esprit d'entreprise par l'enseignement et l'apprentissage», dans lequel il soulignait l'importance des femmes chefs d'entreprises, de la capacité d'entreprendre des femmes et le fait que l'esprit d'entreprise est un facteur clé pour la croissance, l'emploi et l'épanouissement personnel. Il était affirmé dans cet avis que le développement d'une mentalité entrepreneuriale est un processus d'apprentissage permanent, qui doit par conséquent faire partie des programmes d'étude.

7.6

Le CESE recommande par conséquent d'inclure l'éducation à l'entreprise (techniques de gestion d'entreprise et outils informatiques etc.) dans les programmes d'étude nationaux et régionaux aux deuxième et troisième niveaux, en particulier à l'intention des élèves filles, et d'adopter des mesures visant à augmenter le nombre de femmes chefs d'entreprises

7.7

L'objectif est de faire en sorte que les femmes aient les mêmes opportunités que les hommes d'accéder au monde de l'entreprise en éliminant toute discrimination existante. Les gouvernements locaux et régionaux doivent encourager les femmes à développer leur esprit d'entreprise, en tant que facteur d'égalité et de développement économique et social local.

7.8

Il faut prendre des mesures de soutien pour que les femmes chefs d'entreprise puissent utiliser les services financiers et obtenir les crédits dont elles ont besoin. Les banques doivent leur proposer des programmes de microcrédit spécifiques. Par ailleurs, les institutions financières doivent éviter la discrimination envers les femmes car il est vrai que celles-ci rencontrent plus de difficultés que les hommes pour obtenir le financement nécessaire au développement de l'activité entrepreneuriale, à l'expansion de l'entreprise ainsi qu'à la mise en œuvre de programmes d'innovation et d'activités de formation et de recherche.

7.9

Il est nécessaire d'accroître les informations sur les possibilités de financement des Fonds structurels pour explorer des formules innovatrices, telles que la création d'instruments financiers flexibles, combinant subventions, microcrédits et garanties.

7.10

Les fonds communautaires pour promouvoir l'esprit d'entreprise, renforcés et gérés par les gouvernements nationaux et régionaux, doivent être transparents et facilement accessibles pour les petites et moyennes entreprises dirigées par des femmes. Les pouvoirs locaux et régionaux, en collaboration avec les organisations entrepreneuriales, doivent faciliter l'installation, l'aide financière et les conseils aux femmes chefs d'entreprise, surtout durant la phase initiale de leur projet d'entreprise.

7.11

Parmi les exemples de bonnes pratiques, le CESE faire remarquer qu'en France, le Fonds de garantie pour la création, la reprise ou le développement d'entreprise à l'initiative des femmes facilite l'accès au financement à toute femme qui souhaite créer, reprendre ou développer une entreprise. Ce fonds a été créé pour aider les femmes à surmonter les difficultés d'accès aux crédits bancaires. Il est géré par une organisation privée, l'Institut de développement de l'économie sociale et reçoit des financements de diverses entités, parmi lesquelles le Fonds social européen.

7.12

Les États doivent accorder un plus grand soutien aux petites entreprises, la plupart des femmes chefs d'entreprise considérant que les politiques fiscales sont l'un des principaux obstacles au développement de l'entreprise, à cause des incohérences législatives.

7.13

En principe, la personne qui crée sa propre entreprise peut mieux maîtriser son temps. Cela explique qu'un nombre croissant de femmes et d'hommes se tournent vers l'emploi indépendant et l'esprit d'entreprise. Cependant, dans la pratique, les femmes chefs d'entreprise rencontrent plus d'obstacles que les hommes pour concilier leur vie professionnelle et leur vie familiale.

7.14

Il y a, dans toute l'Europe, de nombreux exemples de bonnes pratiques pour promouvoir le rôle des femmes au sein des organisations entrepreneuriales aux différents niveaux. Par ailleurs, des associations de femmes chefs d'entreprise ont aussi été constituées. Les chambres (26) de l'industrie et du commerce mènent aussi de nombreuses initiatives positives que le CESE soutient.

7.15

Le CESE soutient le travail réalisé par le «Réseau européen pour la promotion de l'entrepreneuriat féminin» (WES), dont le principal objectif est d'accroître la visibilité des femmes chefs d'entreprise, en créant un environnement propice grâce à des éléments tels que l'échange d'informations sur les financements, la formation, les réseaux, le conseil, la recherche et les statistiques.

7.16

Souvent, les femmes ont recours aux entreprises de l'économie sociale, comme les coopératives, les mutuelles, les associations et les fondations, en raison de leur nature, pour mener à bien leur initiative entrepreneuriale, car elles y rencontrent moins de difficultés que dans d'autres types d'entreprises pour atteindre leurs objectifs professionnels.

7.17

Conformément à leur raison sociale, les entreprises de l'économie sociale promeuvent dans une large mesure l'intégration professionnelle des femmes. Aussi, doivent-elles recevoir le soutien des collectivités locales et régionales pour encourager ce grand labeur social.

7.18

La plupart des conjointes co-entrepreneurs sont des femmes, travaillant souvent à temps partiel. Les préoccupations relatives aux congés de maternité, aux garderies, les problèmes liés au décès de leur conjoint ou au divorce, sont très spécifiques aux femmes et diffèrent des problèmes que rencontrent les hommes. Dans de nombreux États membres, l'on ne dispose pas d'un statut juridique adéquat.

7.19

Les inégalités qui découlent des régimes de sécurité sociale sont également importantes. Il est nécessaire de mener des actions précises en matière de protection sociale, de formation et de soutien aux nouvelles entreprises créées par des femmes. En ce qui concerne la protection sociale des femmes chefs d'entreprise et des conjointes co-entrepreneurs, certains pays offrent un éventail de différents statuts dont peuvent bénéficier les femmes chefs d'entreprise, par exemple «conjoint collaborateur», «conjoint salarié» ou «conjoint associé». Le CESE propose à la Commission de promouvoir un débat ayant pour objectif d'améliorer la protection sociale des femmes chefs d'entreprise.

Bruxelles, le 11 juillet 2007.

Le Président

du Comité économique et social européen

Dimitris DIMITRIADIS


(1)  Avis du CESE du 13.9.2006 sur la «Communication de la Commission au Conseil, au Parlement européen, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — Une feuille de route pour l'égalité entre les femmes et les hommes 2006-2010». Rapporteuse: Mme Attard (JO C 318 du 23.12.2006).

Avis du CESE du 14.12.2005 sur la «Proposition de décision du Parlement européen et du Conseil relative à l'année européenne de l'égalité des chances pour tous (2007) — Vers une société juste». Rapporteuse: Mme Herczog (JO C 65 du 17.3.2006).

Avis du CESE du 29.9.2005 sur «La pauvreté des femmes en Europe». Rapporteuse: Mme King (JO C 24 du 31.1.2006).

Avis du CESE du 28.9.2005 sur la «Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil portant création d'un Institut européen pour l'égalité entre les hommes et les femmes». Rapporteuse: Mme Štechová (JO C 24 du 31.1.2006).

Avis du CESE du 2.6.2004 sur la «Communication de la Commission au Conseil, au Parlement européen, au Comité économique et social européen et au Comité des régions établissant les lignes directrices du second tour de l'initiative communautaire EQUAL, concernant la coopération transnationale pour la promotion de nouvelles pratiques de lutte contre les discriminations et inégalités de toute nature en relation avec le marché du travail — Libre circulation des bonnes idées». Rapporteur: M. Sharma (JO C 241 du 28.9.2004).

Avis du CESE du 15.12.2004 sur la «Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil relative à la mise en œuvre du principe de l'égalité des chances et de l'égalité de traitement entre hommes et femmes en matière d'emploi et de travail». Rapporteuse: Mme Sharma (JO C 157 du 28.6.2005).

Avis du CESE du 10.12.2003 sur la «Proposition de décision du Parlement européen et du Conseil établissant un programme d'action pour la promotion des organisations actives au niveau européen dans le domaine de l'égalité entre les femmes et les hommes». Rapporteuse: Mme Wahrolin (JO C 80 du 30.3.2004).

Avis du CESE du 14.2.2006 sur «La représentation des femmes dans les organes de décision des groupes d'intérêts économiques et sociaux de l'Union européenne». Rapporteur: M. Etty (JO C 88 du 11.4.2006).

Avis du CESE du 3.6.2004 sur la «Proposition de directive du Conseil mettant en œuvre le principe de l'égalité de traitement entre les femmes et les hommes dans l'accès à des biens et services et la fourniture de biens et services». Rapporteuse: Mme Carroll (JO C 241 du 28.9.2004).

(2)  Voir les conclusions du Conseil européen des 22 et 23 mars 2005 et les travaux réalisés, notamment la déclaration des présidents et secrétaires généraux des CES de l'UE et du CESE faite à Paris le 25.11.2005.

http://eesc.europa.eu/lisbon_strategy/eesc_documents/index_fr.asp

(3)  «Travaillons ensemble pour la croissance et l'emploi — Un nouvel élan pour la stratégie de Lisbonne» COM(2005) 24 final.

(4)  «Lignes directrices intégrées pour la croissance et l'emploi (2005-2008)» COM(2005) 141 final.

(5)  Avis du CESE du 31.5.2005 sur la «Proposition de décision du Conseil relative aux lignes directrices pour les politiques de l'emploi des États membres (en application de l'article 128 du Traité CE)». Rapporteur: M. Malosse (JO C 286 du 7.11.2005).

(6)  COM(2006) 30 final.

(7)  Rapport conjoint sur l'emploi 2006/2007, adopté par le Conseil (EPSCO) le 22 février 2007, pour transmission au Conseil européen des 8 et 9 mars 2007.

(8)  Conclusions de la présidence, 7775/1/06/rév. 1.

(9)  COM(2006) 92 final.

(10)  Avis du CESE du 13.9.2006 sur la «Communication de la Commission au Conseil, au Parlement européen, au Comité économique et social et au Comité des régionsUne Feuille de route pour l'égalité entre les femmes et les hommes 2006-2010». Rapporteuse: Mme Attard (JO C 318 du 23.12.2006).

(11)  Avis du CESE du 28.9.2005 sur la «Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil portant création d'un Institut européen pour l'égalité entre les hommes et les femmes». Rapporteuse: Mme Štechovà (JO C 24 du 31.1.2006).

(12)  Résolution du Parlement européen du 13 mars 2007 sur une feuille de route pour l'égalité entre les femmes et les hommes 2006-2010 (2006/2132(INI)).

http://www.europarl.europa.eu/sides/getDoc.do?pubRef=-//EP//TEXT+TA+P6-TA-2007-0063+0+DOC+XML+V0//FR

(13)  Voir le paragraphe 2.3.3.1.3 de l'avis CESE du 13.9.2006 sur la «Communication de la Commission au Conseil, au Parlement européen, au Comité économique et social et au Comité des régions — Une Feuille de route pour l'égalité entre les femmes et les hommes 2006-2010». Rapporteuse: Mme Attard (JO C 318 du 23.12.2006).

(14)  COM(2007) 49 final.

(15)  Avis du CESE du 11.7.2007 sur le thème: «Le rôle des partenaires sociaux dans la conciliation de la vie professionnelle, familiale et privée». Rapporteur: M. Clever.

(16)  Rapport conjoint sur l'emploi 2006/2007.

http://register.consilium.europa.eu/pdf/fr/07/st06/st06706.fr07.pdf

(17)  http://ec.europa.eu/employment_social/news/2005/mar/gender_equality_en.pdf

(18)  http://ec.europa.eu/employment_social/emplweb/news/news_en.cfm?id=226

(19)  COM(2007) 49 final.

(20)  Voir le paragraphe 1.2 de l'avis du CESE du 13.9.2006 sur la «Communication de la Commission au Conseil, au Parlement européen, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — Une Feuille de route pour l'égalité entre les femmes et les hommes 2006-2010». Rapporteuse: Mme Attard (JO C 318 du 23.12.2006).

(21)  Une feuille de route pour l'égalité entre les femmes et les hommes 2006-2010. COM(2006) 92 final du 1.3.2006.

http://eur-lex.europa.eu/LexUriServ/site/fr/com/2006/com2006_0092fr01.pdf

(22)  Plan d'action: l'agenda européen de la politique de l'esprit d'entreprise

http://eur-lex.europa.eu/LexUriServ/site/fr/com/2004/com2004_0070fr01.pdf

(23)  http://ec.europa.eu/enterprise/enterprise_policy/charter/index_en.htm

(24)  Le CESE élabore actuellement un avis sur «L'esprit d'entreprise et la stratégie de Lisbonne».

(25)  Avis du CESE du 16.7.2006 sur la «Communication de la Commission au Conseil, au Parlement européen, au Comité économique et social européen et au Comité des régions. Mise en œuvre du Programme communautaire de Lisbonne: Stimuler l'esprit d'entreprise par l'enseignement et l'apprentissage» (COM(2006) 33 final). Rapporteuse: Mme Jerneck (JO C 309 du 16.12.2006).

(26)  Voir http://www.eurochambres.eu/women_onboard/index.htm


27.10.2007   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 256/123


Avis du Comité économique et social européen sur «Santé et migrations»

(2007/C 256/22)

Dans une lettre en date du 14 février 2007, la future présidence portugaise a décidé de demander au Comité économique et social européen d'élaborer un avis exploratoire sur la «Santé et migrations».

La section spécialisée «Emploi, affaires sociales, citoyenneté», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 18 juin 2007 (rapporteur: M. SHARMA, corapporteuse: Mme CSER).

Lors de sa 437e session plénière des 11 et 12 juillet 2007 (séance du 11 juillet 2007), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 109 voix pour, 3 voix contre et aucune abstention.

1.   Conclusions

Cet avis porte sur les rapports entre santé et migrations et, à ce titre, ne constitue pas en soi un débat sur le phénomène migratoire. Les migrations, importantes pour l'économie de l'UE, sont un processus qui implique une proportion significative et croissante de la population de l'UE comme de la population mondiale.

Il est vital que les politiques de l'UE et des États membres offrent un niveau de protection élevé aux migrants et à leurs familles. Pour ce faire, il y a lieu d'agir dans de nombreux domaines, y compris l'emploi et la santé et la sécurité au travail, l'éducation, la protection sociale, la promotion de la santé et les soins de santé.

Cet avis répertorie plusieurs problèmes auxquels sont confrontés les migrants dans le domaine de la santé et leurs conséquences sur la santé publique qui nécessitent une intervention de la part des États membres et de l'UE.

1.1   Recommandations

Une mondialisation humaniste (1) et juste (2) doit reposer sur des valeurs universelles, sur le respect des droits de l'homme, sur le respect de normes élevées de santé et de sécurité alimentaire pour tous les groupes de population et en particulier les plus vulnérables, sur la diversité culturelle et linguistique, et sur le partage du savoir et sa diffusion à l'ensemble de la population.

Sur la question des droits universels de la personne humaine, le CESE préconise:

1.1.1

De mettre en place des centres de rencontre et d'information, visant à faciliter l'accès des migrants à l'information en matière de soins de santé et de services sociaux, information qui devra être délivrée par des personnes appartenant à la même minorité immigrée et travaillant dans ces centres. Ces centres serviront également de points focaux destinés à encourager la coopération entre les pouvoirs publics, les ONG des pays d'origine et leurs homologues dans les pays d'accueil.

1.1.2

Les États membres, ainsi que l'Union européenne dans son ensemble, devraient renforcer la coopération avec les organisations internationales dans le domaine de la santé des migrants, et assurer le suivi et l'évaluation des problèmes et des effets positifs qui se manifestent aux niveaux local, régional, national et européen.

1.1.3

D'intégrer au système éducatif des programmes nationaux de santé publique qui prennent en considération les cultures minoritaires.

1.1.4

Il convient de mettre en place un fonds d'indemnisation spécifique, ainsi que des programmes dans le domaine de la formation, de la réinstallation et de la coopération entre les pays d'accueil et d'origine.

1.1.5

Promouvoir comme un droit humain, pour toute personne vivant sur le territoire de l'UE quel que soit son statut, l'accès aux traitements médicaux et aux soins préventifs, conformément à la Charte des droits fondamentaux garantissant l'accès aux soins préventifs et curatifs

1.1.6

Instaurer des clauses de confidentialité entre patients et établissements médicaux (là où elles font défaut) afin de garantir qu'aucune information relative au statut d'un immigrant ne soit révélée à des tiers, cela dans le but de ne pas dissuader les migrants de solliciter une aide et un traitement médical, et ce en particulier dans le cas des immigrés clandestins ou en situation irrégulière.

1.1.7

Les États membres et l'UE devraient coopérer afin d'améliorer la collecte des données et de réaliser des études sur les migrations et la santé au sein de l'UE.

1.1.8

Prendre en compte la santé en tant que dimension essentielle de l'immigration.

1.1.9

Prévoir, par l'intermédiaire d'évaluations d'impact sanitaire, les conséquences éventuelles à la fois des actions liées à la santé et des actions non liées à la santé sur la santé des migrants.

1.1.10

Les États membres qui ont une tradition de services de santé spécialisés en médecine tropicale doivent offrir leur compétence à tous les résidents de l'UE et maintenir une recherche de qualité dans les thérapies des maladies tropicales, en particulier le paludisme.

1.1.11

Améliorer les mécanismes d'évaluation et d'offre en matière de besoins de santé pour toutes les catégories de migrants, et ce le plus tôt possible après leur arrivée. Resserrer la coopération entre l'UE et les États membres afin de satisfaire dans l'immédiat les demandes des migrants présentant des besoins médicaux urgents à leur arrivée, en particulier an s'assurant de service d'interprète.

1.1.12

Faire de la santé des migrants au travail une priorité. Cela suppose une coopération entre les partenaires sociaux et les autorités compétentes afin de veiller au respect de normes de santé et de sécurité au travail élevées dans les secteurs où les migrants sont le plus souvent employés. Il serait aussi nécessaire d'élaborer de nouveaux programmes de promotion de la santé sur le lieu de travail en coopération avec les services de proximité afin d'aider à faire face aux besoins de travailleurs migrants et de leurs familles.

1.1.13

Envisager l'élaboration de programmes de promotion de la santé en milieu scolaire en tant que moyen de répondre aux besoins des enfants de migrants en matière de santé. Faire de la santé des enfants de migrants une priorité toute particulière. Les services de santé scolaire et préscolaires doivent répondre aux besoins de tous les enfants dans leur diversité ce qui inclut les enfants de migrants avec une attention particulière pour les primo-arrivants.

1.1.14

Offrir des traitements et des services de prévention adaptés aux spécificités et sensibilités culturelles des migrants sans rien céder à l'interdiction de l'excision.

1.1.15

Offrir aux professionnels de santé des formations permanentes et des opportunités de carrière afin de les aider à se préparer aux nouveaux besoins des communautés immigrées en matière de santé.

1.1.16

Concevoir le recrutement de personnels de santé formés dans des pays en développement avec une conception de codéveloppement qui facilite leur retour après un séjour temporaire ou offre un dédommagement au pays d'origine qui a assuré la formation. La Commission doit être attentive aux domaines de bonnes pratiques en matière de recrutement éthique de personnel médical originaire de pays tiers dans la perspective de proposer un code européen de bonnes pratiques.

1.1.17

Réévaluer le rôle des autorités chargées du contrôle de la santé publique et encourager l'échange de bonnes pratiques. Les autorités de l'Union européenne devraient assumer une fonction de coordination en la matière.

1.1.18

Accroître le dialogue interculturel — en ciblant plus particulièrement l'état de santé et les soins de santé (3).

1.1.19

Le CESE réitère ses recommandations précédentes, à savoir que les États membres devraient mettre en œuvre les conventions de l'OIT sur les migrants (4).

2.   Historique

2.1

Le Comité économique et social européen se félicite de l'intérêt constant que porte la présidence portugaise au thème «Santé publique et migration». Les présidences allemande, portugaise et slovène sont toutes d'accord sur le fait que «la politique de santé joue un rôle décisif puisqu'une meilleure prévention et des soins de santé transfrontières apportent des avantages directs aux citoyens européens» (5).

Les trois présidences se sont engagées à œuvrer sans relâche afin de remédier aux inégalités qui affectent les migrants en termes d'accès aux services de santé. Elles ont convenu d'apporter leur soutien à une gamme étendue d'activités communautaires afin de contribuer à un niveau élevé de santé pour tous les citoyens, notamment en matière de promotion de la santé, de prévention des maladies, d'innovation et d'accès aux soins de santé.

2.2

Le Comité a adopté une série d'avis sur la question des migrations régulières et irrégulières (6); par conséquent, le présent avis exploratoire portera plus particulièrement sur les questions de santé. Nous renvoyons la présidence portugaise et les autres parties prenantes à nos travaux précédents dans le domaine des migrations.

3.   Introduction

3.1

Beaucoup a été écrit sur le thème «Santé et migrations»; le présent document s'inspire du récent rapport élaboré pour le Programme d'analyse politique et de recherche de la Commission mondiale sur les migrations internationales (Carballo et Mboup, septembre 2005). Les autres références sont mentionnées dans le corps du texte.

3.2

L'Organisation mondiale de la santé définit la santé comme «un état de bien-être physique, mental et social complet et non seulement l'absence de maladie ou d'infirmité». Pour les auteurs du présent avis, la notion de «santé» telle que définie ci-dessus est un droit de l'homme.

3.3

La santé des migrants et des réfugiés est importante à plus d'un titre:

les droits de l'homme universels et le respect de la dignité humaine;

l'ampleur des pertes en vies humaines, des maladies et des risques sanitaires encourus par certains migrants, spécialement les clandestins;

les risques sanitaires encourus par une partie importante des migrants qui s'établissent dans un nouveau pays;

l'inégalité face à l'accès aux soins de santé et aux services sociaux;

les risques pour les pays d'origine des migrants résultant de la perte de personnels de santé.

4.   Ampleur et portée du problème

4.1

Au plan international, l'on estime à plus de 200 millions le nombre de personnes qui migrent chaque année pour trouver un emploi et une vie meilleure; parmi ces migrants, au moins 30 à 40 (7) millions sont des clandestins. En termes d'effectif, les immigrés présents dans le monde constitueraient le 5e pays le plus peuplé de la planète (8). En 2005, les femmes représentaient 49,6 % des immigrés dans le monde. En Europe, les sans-papiers sont entre 7 et 8 millions (9).

4.2

Aux fins du présent avis exploratoire, le Comité a envisagé les migrations et les questions de santé principalement sous l'angle des ressortissants de pays tiers migrant vers l'UE. À l'heure actuelle, quelque 18 millions de ressortissants de pays tiers vivent sur le territoire de l'UE. Mentionnons également la présence d'un nombre important de citoyens nés à l'étranger et de migrants en situation irrégulière ou illégale. La grande majorité des immigrants présents sur le territoire de l'UE y sont entrés légalement.

4.3

Les demandeurs d'asile représentent une proportion relativement faible de la population migrante globale et leur nombre a chuté au cours des dernières années, davantage du fait de la politique de l'UE plutôt que d'une diminution du nombre de personnes ayant besoin de protection.

 

2006

2005

2004

2003

2002

Demandes d'asile dans l'Union européenne

266 270

350 103

421 236

532 300

640 347

Réponses favorables

38 857

46 742

35 872

41 823

59 705

% de réponses favorables

22,71

20,55

13,36

12,4

14,73

Ces dernières années, l'immigration, tant légale qu'irrégulière, a augmenté dans un certain nombre de pays d'Europe du Sud, parmi lesquels le Portugal, l'Espagne et l'Italie. Parmi ces immigrants, nombreux sont ceux qui sont originaires d'Afrique du Nord, d'Afrique subsaharienne, d'Amérique latine ou d'Asie et des pays de la CEI.

4.4

Alors que les migrants sont généralement en meilleure santé que la moyenne de la population de leurs pays d'origine, ils peuvent être sujets à des problèmes de santé plus nombreux que la moyenne des ressortissants du pays d'accueil. Parmi les facteurs qui expliquent cette situation, citons notamment:

les différentes formes de stress psychologique et social résultant du contact avec une culture inconnue, de l'illégalité, du changement d'environnement, de la non-connaissance des langues étrangères, du manque de confiance et d'information, de problèmes de santé mentale;

les risques acquis dans leur pays d'origine;

la pauvreté et le fait de travailler dans des conditions dangereuses;

les difficultés d'accès aux soins de santé, à l'information relative aux services de santé, à la promotion de la santé et aux services de prévention;

les risques supplémentaires encourus dans le pays de destination;

les conditions de logement.

4.5

Les migrants en provenance de certaines régions du monde présentent une incidence plus élevée de maladies contagieuses et de problèmes à long terme: problèmes de santé mentale, maladies cardiovasculaires, maladies respiratoires et diabète.

4.6

Les immigrants irréguliers, y compris leurs familles et spécialement les enfants, sont exposés à des problèmes de santé plus graves que les immigrants légaux, ce qui peut s'expliquer par les risques encourus pour pénétrer sur le territoire de l'UE, la difficulté des conditions économiques et sociales et un accès insuffisant aux services.

5.   Les différents types de migration

5.1   Migration volontaire

5.1.1

Si les facteurs économiques sont le principal moteur de la migration vers l'UE, la volonté de fuir les conflits ou les persécutions constituent également des raisons importantes. Aujourd'hui comme hier, les gens émigrent pour différentes raisons. Certains émigrent avec l'intention de s'établir dans un nouveau pays et de recommencer une nouvelle vie, d'autres dans l'intention de gagner suffisamment d'argent pour rentrer dans leur pays d'origine.

5.1.2

Certains immigrants partent avec des papiers en règle pour travailler pendant une période donnée, d'autres sont en situation irrégulière mais trouvent un emploi et séjournent à l'étranger pendant une durée indéterminée. Les uns comme les autres peuvent être confrontés à des problèmes de santé qui sont souvent liés aux politiques nationales et aux attitudes de la société envers les immigrants, ainsi qu'à d'autres facteurs déterminants pour la santé tels que l'éducation, l'emploi et le logement.

5.1.3

Les migrations circulaires sont de plus en plus reconnues comme une forme importante de migration (10) qui, si elle est gérée correctement, peut aider à résoudre le problème de l'offre et de la demande de main-d'œuvre au niveau mondial et contribuer ainsi à une allocation plus efficace des ressources disponibles et à la croissance économique. Ce pourrait être une réponse à la nécessité devant laquelle se trouve placé l'UE d'offrir une alternative crédible à l'immigration illégale.

5.2   Migrations forcées

5.2.1

L'impact des migrations forcées sur la santé publique est important et sa portée est considérable. Chaque année, des populations forcées de quitter leur pays deviennent des réfugiés bénéficiant de la protection des Nations unies; des millions de personnes, forcées de quitter leur domicile, demeurent à l'intérieur des frontières de leur pays.

5.2.2

Souvent, ils doivent payer de fortes sommes d'argent pour franchir les frontières, ce qui les met dans une situation financière précaire. Les migrants vivent dans la peur et sont facilement exploités par les employeurs. Il n'est pas rare que les femmes soient victimes de viols et d'exploitation sexuelle.

5.2.3

Le trafic d'être humains est un crime qui viole les droits de l'homme fondamentaux et détruit des vies humaines. Le trafic d'êtres humains est reconnu comme une forme moderne d'esclavage; chaque année, l'on estime que le nombre total de gens vivant d'une manière ou d'une autre en état de servitude dans le monde (selon l'OIT) est de 12 millions, tandis que plus d'un million de personnes sont vendues comme des marchandises, soit pour être prostituées, soit pour être soumises au travail forcé. Selon des chiffres communiqués par le ministère américain des affaires étrangères, il s'agit dans 80 % des cas de femmes et de filles, et dans 50 % de mineurs. Toujours selon les mêmes chiffres, ces personnes sont en majorité victimes de trafics à des fins d'exploitation sexuelle.

5.2.4

Ce trafic engendre pour les trafiquants des profits considérables s'élevant, selon certaines estimations, à 10 milliards de dollars américains par an (11) (UNICEF).

5.3   Tourisme international

5.3.1

L'Organisation mondiale du tourisme (OMT) constate qu'au cours de la dernière décennie du XXe siècle, le tourisme international représentait 30 % des industries de services dans le monde et estime que les «arrivées» internationales dépasseront le chiffre de 1,55 milliard d'ici 2020, dont 400 millions de trajets long courrier à travers des zones écologiques.

5.3.2

L'on estime à 14 millions le nombre de passagers en provenance des pays industrialisés qui se rendent chaque année sous les tropiques en Afrique, en Asie, en Amérique latine et dans les îles du Pacifique. Un nombre important de ces passagers rentrent chez eux après avoir contracté une maladie nécessitant un traitement. La diarrhée est le problème le plus répandu, mais le paludisme est devenu très courant en termes de diagnostic, de traitement et de coût pour les pays d'origine des touristes après le retour de ces derniers.

5.3.3

Sans protection, les touristes risquent de contracter une hépatite A et des maladies sexuellement transmissibles, parmi lesquelles le sida.

6.   L'impact des migrations sur la santé et la santé publique

6.1   Politique

6.1.1

De nombreux États membres de l'Union européenne ont mis en œuvre des politiques relatives au droit d'entrée, à la durée du séjour et à la date de départ des immigrants. Dans l'ensemble, ces politiques sont davantage restrictives que permissives, et rendent les migrations plus difficiles. Il peut en résulter des conditions économiques et sociales préjudiciables à la santé des immigrants.

6.1.2

Les approches relatives à la santé publique et aux examens de santé varient d'un pays à l'autre, tout comme l'approche relative à l'accès aux soins de santé et aux services sociaux. Il semble toutefois qu'il existe un manque d'information comparant les pratiques nationales.

6.2   Données statistiques

6.2.1

Rares sont les États membres de l'Union européenne qui prennent la peine de rassembler des données sur la santé des migrants, ce qui rend difficile la diffusion d'informations fiables sur le profil sanitaire et les besoins des migrants en termes de santé. Dans de nombreux pays, les statistiques de santé ne mentionnent pas la qualité d'immigrant des patients.

6.2.2

Les pays qui rassemblent ces données sont peu nombreux; d'autres s'attachent à la région d'origine ou à l'origine ethnique. Les termes mêmes d'«immigrés» et de «descendants d'immigrés» peuvent être ambigus. Dans certains cas, l'on retient uniquement l'origine ethnique des personnes et l'on ne fait aucune distinction entre les véritables immigrants et les personnes descendants d'immigrants.

6.2.3

Il existe également un nombre inconnu de migrants irréguliers et dès lors non comptabilisés, qui peuvent être réticents à recourir aux soins de santé quand ils en ont besoin.

6.2.4

En outre, les migrants peuvent se montrer réticents à fournir des informations concernant leur statut aux autorités sanitaires, de crainte que ces renseignements ne soient utilisés contre eux. Cela aggrave le manque d'informations fiables.

6.2.5

Cette réticence peut avoir des origines culturelles et religieuses. En outre, les autorités et les services sanitaires manquent eux aussi de la connaissance appropriée et ne sont pas préparés à faire face aux besoins spécifiques des migrants. Pour toutes ces raisons, les informations sur les migrants et leur état de santé sont insuffisantes.

6.3   Migration et bien-être psychologique et social

6.3.1

Pour les immigrants, qu'ils soient en situation légale ou irrégulière, des défis tels que la langue, la culture et les politiques du pays d'accueil sont exacerbés par la peur de l'inconnu (Tizon, 1983). Parmi les autres problèmes qui affectent la santé des personnes et des communautés, mentionnons notamment:

la séparation des familles, des couples et des enfants;

l'exploitation par les employeurs;

l'exploitation sexuelle;

l'anxiété et le mal du pays;

le manque d'intégration dans la société;

les problèmes de santé physique ou mentale.

Tous ces problèmes affectent la santé des individus comme des communautés.

6.4   Migration et santé mentale

6.4.1

Des recherches (12) ont montré que certains groupes de migrants en Europe présentent les taux les plus élevés en matière de schizophrénie, de suicide, de toxicomanie et d'abus d'alcool, ainsi qu'un risque élevé de dépression et d'anxiété. La recherche suggère également que l'accès à la santé et au soutien social pour ces groupes n'est pas adapté.

6.4.2

Parmi les facteurs identifiés comme contribuant à la mauvaise santé mentale des migrants, on trouve le changement de régime alimentaire, le contexte familial et social, la culture, la langue et le climat, à quoi s'ajoutent l'hostilité, le racisme et la xénophobie de la part des populations d'accueil, les traumatismes liés à la fuite de la guerre dans le pays d'origine avec leur cortège de tortures, de pertes de membres de la famille et d'abus sexuels.

6.4.3

La recherche suggère que deux tiers des réfugiés sont fréquemment sujets à l'anxiété ou à la dépression et à des symptômes de stress post traumatiques tels que des cauchemars et des attaques de panique.

6.4.4

L'accès aux traitements, à l'aide et au soutien pour ces différents troubles est particulièrement difficile pour les demandeurs d'asile et les sans-papiers, qui sont ceux qui ont le plus besoin de ces services.

6.5   Migration et santé physique

6.5.1

Toute personne possède une «empreinte» sanitaire liée à son lieu d'origine et à l'environnement social dans lequel elle vit. De manière générale, les émigrants quittant leur pays pour des raisons économiques ont tendance à migrer des pays pauvres vers les pays riches; dans une certaine proportion, leur profil de santé est le reflet de cette pauvreté.

6.6   Maladies contagieuses

6.6.1

L'aide apportée aux immigrants séropositifs ou souffrant de tuberculose est variable et pose des défis en fonction de la culture, de la langue et de la religion des personnes concernées, ainsi que de leur statut économique et social. Les jeunes, les femmes et les jeunes filles sont les plus exposés au risque de contracter le VIH/SIDA.

6.6.2

Il n'existe aucune politique cohérente en matière de visite médicale; au niveau local, même la manière dont sont effectuées les visites médicales avant l'entrée sur le territoire n'est pas uniforme. L'attitude des intéressés en ce qui concerne ces visites médicales est très variable. Certains services font état d'un taux de non-présentation de plus de 50 % pour les rendez-vous de suivi, un chiffre que les prestataires de services expliquent par les difficultés de communication, la peur des autorités et le manque de compréhension des services proposés. Le CESE prend acte que M. KIPRIANOU, commissaire européen, a demandé au Centre européen de prévention et de contrôle des maladies (CEPCM) de présenter un plan d'action communautaire sur la tuberculose. Ce plan sera publié à l'automne 2007 et tiendra compte de la situation propre à chaque État membre.

6.6.3

Entre 1995 et 2005, l'UE a constaté une augmentation constante du nombre de cas de tuberculose déclarés. Le dernier rapport épidémiologique du CEPCM relève que «les cas d'origine étrangère» représentent 30 % de la totalité des cas relevés dans les 25 pays (Premier rapport épidémiologique européen sur les maladies transmissibles, CEPCM, 2007). Il faut également reconnaître que les migrants sont souvent concentrés dans des quartiers où les conditions de logements sont mauvaises, où la promiscuité dans le logement comme sur le lieu de travail est importante, avec tous les risques de propagation d'infections respiratoires qu'entraîne une telle situation.

6.6.4

En ce qui concerne le VIH, le rapport de l'UE intitulé «AIDS & Mobility — HIV/AIDS Care & Support for Migrants and Ethnic Minority Communities in Europe» (EU — Clark, K. et Broring, G.) fait le point sur la situation dans les États membres et examine plus particulièrement les aspects suivants:

politique nationale;

accès à la santé et soutien social;

soins de santé.

6.6.5

Ce rapport met en relief le fait que la situation des migrants en Europe (statistiques, origine ethnique et épidémiologie) et les réponses de la société sont très variables d'un pays à l'autre.

6.6.6

La possibilité existe que des personnes originaires de régions du monde à fort taux de prévalence du virus HIV n'apportent la maladie. De fait, entre 1997 et 2005, 47 % de tous les cas de transmission du VIH à des personnes hétérosexuelles dans l'UE ont été diagnostiqués chez des patients en provenance de pays à fort taux de prévalence du VIH.

6.6.7

À l'inverse, les migrants originaires de pays dans lesquels le taux de prévalence du VIH est faible ne semblent pas être davantage exposés (voire moins) que les ressortissants du pays d'accueil.

6.7   Maladies non contagieuses

6.7.1

Les maladies de longue durée telles que les cardiopathies coronariennes, les broncho-pneumopathies chroniques obstructives (BPCO), les accidents vasculaires cérébraux (AVC) et le diabète posent un défi considérable aux services de santé dans la plupart des pays du monde et sont responsables de la moitié des décès qui ont lieu chaque année.

6.7.2

Les cardiopathies coronariennes sont la principale cause de mortalité et ont la plus forte incidence en termes de traitement, de coût et d'impact sur les individus, les travailleurs sociaux et les communautés. Dans les communautés de migrants, ces maladies peuvent être liées à des prédispositions ethniques, au régime alimentaire et au stress. Au Royaume-Uni, les Asiatiques de sexe masculin tendent à être davantage sujets à ces maladies que les autres (Baljaran et Raleigh, 1992; McKeigue et Sevak, 1994, BMJ 2003).

Les hommes et les femmes originaires d'Asie du Sud ont des taux de mortalité dus aux maladies cardio-vasculaires de 30 à 40 % supérieurs à ceux des autres groupes de population (Baljaran, 1991).

6.7.3

De source britannique, l'on indique que les migrants originaires des Caraïbes sont deux fois plus sujets aux ACV que la population «blanche» (Stewart, 1999). En Suède, des taux élevés d'obésité et de maladies cardiovasculaires ont été constatés chez des immigrés finlandais, du fait de leur régime alimentaire et de leur consommation d'alcool (Jarhult et al., 1992).

6.8   Maladies héréditaires

6.8.1

Les migrations de personnes originaires de différentes parties du monde peuvent aussi entraîner la circulation des maladies génétiques. La drépanocytose (anémie falciforme) et la thalassémie sont devenues plus courantes à la suite des migrations en provenance d'Afrique, des Caraïbes et du bassin méditerranéen. La drépanocytose est relativement commune dans l'UE et l'on estime qu'au Royaume-Uni, environ 6 000 adultes et quelque 75 à 300 bébés en sont atteints chaque année (Karmi 1995). Un fort taux de prévalence de cette maladie a également été constaté chez des immigrants au Portugal (Carrerio et al., 1996).

6.8.2

La thalassémie est une maladie héréditaire du sang, répandue dans le Bassin méditerranéen et que l'on retrouve au Royaume-Uni chez les populations originaires du Moyen-Orient et de Chypre; cette maladie pourrait également être répandue chez des personnes originaires du Pakistan, de Chine et du Bangladesh.

6.8.3

Ces maladies nécessitent le diagnostic d'un spécialiste et des services de conseil qui ne sont pas toujours disponibles.

6.9   Maladies professionnelles

6.9.1

Les migrants occupent souvent des emplois peu qualifiés, dont la population du pays hôte ne veut plus. Certains de ces emplois, tels que les mines, l'amiante, les industries chimiques ou les emplois pénibles dans l'industrie, comportent des risques pour la santé. Dans le secteur agricole, l'on a constaté un lien entre l'exposition aux pesticides ou à d'autres produits chimiques et le taux élevé de dépressions, de migraines et, chez les femmes, de fausses couches.

6.9.2

L'on constate fréquemment des cas de stress liés au travail chez les diplômés de l'enseignement supérieur, les personnes très qualifiées, celles ayant émigré dans le cadre de la fuite des cerveaux ou encore les migrants dits «circulaires»; leurs conditions de travail sont moins bonnes que celles des employés ressortissants des pays d'accueil (les droits, notamment, ne sont pas les mêmes); toutefois, du fait de leurs statut de dépendance économique, ces personnes n'ont pas d'autre solution (13).

6.10   Accidents

6.10.1

En Europe, les accidents du travail sont approximativement deux fois plus fréquents parmi les migrants (Bollini et Siem, 1995). En Allemagne, les accidents sont particulièrement fréquents chez les immigrants, surtout chez ceux qui travaillent dans des industries où les mesures de santé et de sécurité sont insuffisantes (Huismann et al., 1997). S'agissant des trajets, les chiffres montrent que les enfants de 5 à 9 ans sont plus vulnérables aux accidents de la route et à d'autres accidents que les enfants du même âge (Korporal et Geiger, 1990). Aux Pays-Bas, il semblerait que les enfants d'origine turque et marocaine soient plus souvent victimes d'accidents domestiques, y compris d'empoisonnements et de brûlures, ainsi que d'accidents de la route (de Jong et Wesenbeek, 1997).

6.11   Santé génésique

6.11.1

Certains groupes de migrants, comme par exemple les hommes séparés de leurs épouses, présentent une fréquence plus élevée de maladies sexuellement transmissibles. Dans de nombreux États membres de l'UE, le nombre de maladies liées à la grossesse est plus élevé chez les femmes immigrées que chez les ressortissantes du pays hôte. Le taux d'interruption de grossesse est souvent plus élevé chez les femmes immigrées. À Barcelone, les demandes d'IVG sont deux fois plus nombreuses chez les femmes immigrées que chez les Espagnoles. Une étude effectuée par le Centre international pour la migration et la santé, à Genève, montre que le taux d'avortement parmi les femmes immigrées en situation irrégulière est trois fois plus élevé que chez les femmes de nationalité suisse d'âge comparable (Garballo et al., 2004).

6.11.2

Au Royaume-Uni, les bébés nés de mère asiatique ont souvent un poids à la naissance inférieur à celui constaté dans les autres groupes ethniques, et le risque de morbidité périnatal et postnatal est plus élevé. Les bébés de mères originaires des Caraïbes présentent, eux aussi, des taux de mortalité postnéonatale supérieurs à la moyenne. En Belgique et en Allemagne, l'on constate des taux élevés de mortalité périnatale et infantile chez les femmes immigrées originaires du Maroc et de Turquie. L'on constate de même un poids à la naissance plus faible ainsi que des problèmes liés à l'accouchement chez les femmes originaires d'Afrique subsaharienne, d'Amérique centrale et d'Amérique du Sud.

6.11.3

Les enfants de migrants présentent parfois des taux de prévention (immunisation par exemple) plus faibles que la moyenne.

6.12   Barrières qui empêchent l'accès aux systèmes de soins et l'utilisation efficace de ces derniers par les migrants

6.12.1

Les migrants doivent faire face à des problèmes d'ordre juridique, psychosocial et économique qui freinent leur accès aux soins de santé. Les barrières linguistiques sont un problème évident, de même que le coût des soins; dans le cas de personnes à faible revenu, même une somme modeste peut constituer une barrière infranchissable. Dans de nombreux pays, les migrants en situation irrégulière et les demandeurs d'asile dont le dossier est en cours de traitement sont confrontés à des obstacles juridiques pour se faire soigner.

6.12.2

En outre, les services de santé publique sont souvent dans l'impossibilité de répondre aux problèmes de santé spécifiques rencontrés par les migrants et ne sont pas toujours sensibles, ou qualifiés, pour offrir avec succès des prestations de santé à des gens dont les conceptions en matière de santé, l'attitude envers la maladie, la douleur et la mort et la manière d'exprimer les symptômes, de réagir à la maladie et d'exprimer leurs attentes face à un médecin sont parfois très différentes des leurs.

6.12.3

De plus, la complexité du secteur de santé des États membres et son caractère extrêmement développé et différencié peut contribuer à compliquer la situation.

6.12.4

L'organisation de la prévention des maladies et de la promotion de la santé auprès des populations de migrants est souvent inadaptée. Cela est vrai non seulement dans le cas des examens prénataux mais aussi pour les programmes de vaccination et les autres formes de prévention et de détection précoce, y compris les examens de dépistage. Jusqu'ici, les programmes de prévention ont rarement eu recours à des approches tenant compte de la culture des migrants.

6.12.5

Le prix élevé de certains services de santé et le coût des médicaments sont un lourd fardeau pour la plupart des migrants. Ces facteurs peuvent se traduire par une réticence à rechercher un traitement en amont, par le non-respect des traitements prescrits ou par la non-prise de médicaments. Tout cela cause une augmentation incalculable de la souffrance des personnes concernées et du coût économique global pour la société.

6.13   Professionnels de la santé

6.13.1

La tendance croissante de l'UE et des autres pays développés à recruter activement des professionnels de santé dans les pays pauvres constitue un autre défi de taille. Si cette tendance se poursuivait, elle constituerait un obstacle majeur au développement de la santé dans les pays d'origine (pays perdants) et y compromettrait la viabilité des formations de médecins et d'infirmières. L'exode des professionnels de santé qualifiés des pays pauvres constitue une perte considérable en termes d'investissement dans la formation de personnel médical (14). Il convient d'élaborer des solutions nouvelles pour répondre à ce problème, parmi lesquelles un fonds spécial d'indemnisation, la mise en place de formations et des mesures de réinstallation. Les cas du Royaume-Uni et de l'Irlande, où l'on veille à ce que les services de santé adoptent des pratiques de recrutement «éthiques», sont souvent cités en exemple. Les États membres doivent veiller à l'adoption de ces pratiques et à leur application aux agences de recrutement de personnels de santé, ainsi qu'aux établissements hospitaliers du secteur privé comme du secteur public.

6.13.2

Les professionnels de santé (spécialement les infirmières et les médecins) jouent un rôle clef dans le maintien et l'amélioration des soins de santé aux migrants. Les États membres doivent faire en sorte qu'ils soient en mesure de faire face aux besoins de santé des migrants et de comprendre les particularités liées à la culture, à la religion et au mode de vie qui influencent les habitudes sanitaires de ces groupes spécifiques.

Bruxelles, le 11 juillet 2007.

Le Président

du Comité économique et social européen

Dimitris DIMITRIADIS


(1)  Voir l'avis du CESE daté du 31 mai 2007 sur «Les défis et chances de l'UE dans le contexte de la globalisation» (avis exploratoire), rapporteur M. Henri Malosse et corapporteur M. Staffan Nilsson, JO C 175 du 27.7.2007.

(2)  Organisation internationale du travail, «Une mondialisation juste» 2004.

(3)  Voir avis CESE du 20 avril 2006 sur la «Proposition de décision du Parlement européen et du Conseil relative à l'Année européenne du dialogue interculturel (2008)» — COM(2005) 467 final — 2005/0203 (COD), rapporteuse: Mme CSER (JO C 185 du 8 août 2006).

(4)  La convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leurs familles, adoptée en 1990, est entrée en vigueur en juillet 2003. Elle complète la convention de l'OIT sur la migration pour l'emploi de 1949 (no 97) et celle sur les travailleurs migrants (dispositions complémentaires) de 1975 (no 143). Prises ensemble, ces trois conventions fournissent un cadre établissant les droits des travailleurs migrants et les questions relatives aux migrations irrégulières. Elles se situent dans un cadre politique plus large, qui inclut les traités de l'ONU récemment adoptés sur le trafic des êtres humains, la contrebande et l'exploitation, tels que la Convention des Nations unies sur la criminalité transnationale organisée (2000) et son protocole additionnel du 15 novembre 2000 visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants, le protocole contre le trafic illicite de migrants par terre, air et mer (2000), le protocole facultatif relatif aux droits de l'enfant, concernant la vente d'enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants (2000) ainsi que la conventions de 1951 et le protocole de 1967 relatifs au statut de réfugié. Alors que jusqu'ici, les pays, voire les organisations régionales sont relativement peu nombreux à avoir ratifié ces conventions (à l'exception des traités concernant les réfugiés) ces instruments offrent des éléments importants pour un calendrier d'action d'ensemble.

(5)  Conseil de l'Union européenne, Programme de 18 mois des présidences allemande, portugaise et slovène, Bruxelles, 21 décembre 2006.

(6)  Voir les avis du CESE suivants:

13 septembre 2006: «L'immigration au sein de l'UE et les politiques d'intégration: coopération entre les gouvernements régionaux et locaux et les organisations de la société civile», rapporteur: M. PARIZA CASTAÑOS (JO C 318 du 23 décembre 2006).

15 décembre 2005: sur la «Communication de la Commission au Conseil et au Parlement européen: programme de La Haye: Dix priorités pour les cinq prochaines années — Le partenariat pour la rénovation européenne dans le domaine de la liberté, de la sécurité et de la justice» — COM(2005) 184 final, rapporteur: M. PARIZA CASTAÑOS (JO C 65 du 17 mars 2006).

20 avril 2006 sur la «Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif aux statistiques communautaires sur la migration et la protection internationale» — COM(2005) 375 final — 2005/0156 (COD), rapporteuse: Mme SCIBERRAS (JO C 185 du 8 août 2006).

(7)  «Trends in Total Migrant Stock: The 2003 Revision», ONU.

(8)  Bureau de recensement américain «US Census», base de données IDB — Classement des pays par population,

http://www.census.gov/ipc/www/idbrank.html

(9)  Rapport de la Banque mondiale sur les Perspectives économiques 2006,

http://www.worldbank.org/

(10)  COM(2007) 248, Communication relative aux migrations circulaires du 16 mai 2007.

(11)  «The New Global Slave Trade», Ethan B. Kapstein, Foreign Affairs, novembre/décembre 2006.

(12)  M.G. Carta, M. Bernal, M.C. Hardoy et J.M. Abad.

(13)  Kim VAN EYCK (directeur de publication) «Who cares? Women Health Workers in the Global Labour Market», thèse de 3e cycle, 2005.

(14)  Kim Van Eyck ed., 2005. Who cares? UNISON-UK: Internationale des services publics (ISP).


ANNEXE

à l'avis du Comité économique et social européen

Les amendements suivants, qui ont recueilli plus du quart des suffrages exprimés, ont été repoussés au cours des débats (article 54(3) du règlement intérieur):

Paragraphe 1.1.8

Supprimer le paragraphe:

«D'intégrer au système éducatif des programmes nationaux de santé publique qui prennent en considération les cultures minoritaires».

Résultat du vote:

Voix pour: 44

Voix contre: 51

Abstentions: 11


27.10.2007   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 256/131


Avis du Comité économique et social européen sur les «Eurorégions»

(2007/C 256/23)

Le 17 janvier 2006, le Comité économique et social européen a décidé, en vertu de l'article 29, paragraphe 2 de son Règlement intérieur, d'élaborer un avis sur les «Eurorégions».

La section spécialisée «Union économique et monétaire, cohésion économique et sociale», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 21 juin 2007 (rapporteur: M. ZUFIAUR).

Lors de sa 437e session plénière des 11 et 12 juillet 2007 (séance du 11 juillet 2007), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 108 voix pour avec 1 abstention.

1.   Situation actuelle

1.1   Définition

1.1.1

Les eurorégions sont des structures permanentes de coopération transfrontalière entre collectivités régionales et locales de proximité directe situées de part et d'autre de frontières nationales partagées.

1.1.1.1

Elles présentent notamment les particularités suivantes (1):

les eurorégions et les structures similaires ne forment ni une nouvelle administration ni un nouvel échelon gouvernemental mais constituent une plate-forme d'échange et de coopération transfrontalière horizontale entre les collectivités locales et régionales; elles encouragent également une plus grande coopération verticale entre les collectivités territoriales, les pouvoirs nationaux et les institutions européennes;

ce sont des associations de collectivités locales et régionales situées de part et d'autre d'une frontière nationale, parfois dotées d'une assemblée parlementaire;

ce sont des associations transfrontalières avec un secrétariat permanent, une équipe technique et administrative, et des ressources propres;

dans certains cas, ce sont des entités de droit privé, reposant sur des associations sans but lucratif ou des fondations de part et d'autre d'une frontière, en accord avec leurs juridictions nationales respectives. Dans d'autres cas, ce sont des entités de droit public, basées sur des accords conclus entre États, veillant notamment à la participation et la coopération des collectivités territoriales;

très souvent, les eurorégions sont non seulement définies par leurs limites géographiques ou politico-administratives mais partagent également des caractéristiques économiques, sociales ou culturelles communes.

1.1.2

Divers termes sont utilisés pour désigner les différentes «eurorégions»: Eurorégio, Eurorégion, Europarégion, Grande Région, Régio, etc.

1.2   Objectifs

1.2.1

Les eurorégions et autres structures similaires (2) ont pour objectif principal la coopération transfrontalière. Les priorités sont choisies sur des bases variant selon les particularités régionales et géographiques. La promotion de la compréhension mutuelle, l'établissement de relations culturelles ainsi que le renforcement de la coopération économique sont mis en avant dans les phases initiales ou dans le cadre de communautés de travail poursuivant des objectifs très spécifiques. Les eurorégions dotées de structures plus intégrées et de moyens financiers propres se donnent des objectifs plus ambitieux. Elles s'occupent de toutes les questions liées à la coopération transfrontalière, de la promotion des intérêts communs à tous les niveaux jusqu'à la réalisation et la gestion de programmes transfrontaliers et de projets concrets.

1.2.2

Les activités transfrontalières englobent non seulement le développement socio-économique et la coopération culturelle, mais également d'autres domaines qui présentent un intérêt général pour les populations limitrophes, en particulier: les affaires sociales; la santé; l'éducation et la formation; la recherche et développement; la gestion des déchets; la protection de la nature et la gestion des paysages; le tourisme et les loisirs; les catastrophes naturelles ainsi que les transports et les voies de communication.

1.2.3

Les eurorégions sont considérées comme un cadre idéal pour la mise en œuvre des politiques communautaires en matière de mobilité des travailleurs et de cohésion économique, sociale et territoriale, grâce à l'adoption de procédures de coopération dans les zones frontalières, qui permettent d'éviter les conflits de compétences.

1.2.4

Les eurorégions contribuent à insuffler un élan venant de la base et de la vie quotidienne à la construction et l'intégration de l'Union européenne.

1.2.5

La coopération de part et d'autre des frontières contribue, quant à elle, à la mise en place de formes transfrontalières d'organisation et d'action pour faire face à des problèmes communs, telles que les comités syndicaux interrégionaux, la collaboration entre organisations patronales et chambres de commerce, la création de comités économiques et sociaux eurorégionaux, etc.

1.2.6

À cet égard le groupe d'étude chargé de l'élaboration du présent avis a eu l'occasion de contrôler cette affirmation en direct, lorsqu'il a été invité par le comité économique et social de la Grande Région (3) à une audition au Luxembourg, le 13 février 2007.

1.3   Évolution historique

1.3.1

Le Conseil de l'Europe, dont le siège se trouve à Strasbourg, est l'organisation européenne qui traite depuis des décennies le thème des eurorégions et, plus généralement, celui de la coopération transfrontalière.

1.3.2

Les premières expériences de coopération transfrontalière ont commencé à la fin des années quarante. L'accord du Benelux, conclu en 1948, a été une première initiative visant à dépasser le clivage des frontières nationales. L'Eurégio a été créée en 1958 à l'entour de la région néerlandaise de Enschede et de la région allemande de Gronau. peu de temps après, mais en dehors de la Communauté européenne, diverses expériences ont été encouragées en Scandinavie, notamment dans les régions de l'Øresund, de la Calotte polaire et du Kvarken, aux frontières du Danemark, de la Finlande, de la Norvège et de la Suède.

1.3.3

Entre 1975 et 1985, une série de communautés de travail (CT) ont été créées entre régions de différents États (notamment la CT du Jura et la CT des Pyrénées), avec une capacité d'action limitée.

1.3.4

La coopération régionale transfrontalière et la création des eurorégions ont pris de l'ampleur à partir de 1990 (4). Parmi les facteurs qui ont contribué à cet élan, citons notamment:

les progrès en matière d'intégration européenne, en particulier suite à la mise en place du marché unique, à l'introduction de l'euro et à l'élargissement de l'UE;

la décentralisation et la régionalisation croissantes des États européens;

l'augmentation du travail frontalier;

la reconnaissance, quoique limitée, du rôle des régions dans la gouvernance des institutions européennes;

la mise en œuvre d'initiatives communautaires de coopération transfrontalière, telles qu'INTERREG.

1.3.5

Les deux derniers élargissements, qui ont porté le nombre d'États membres de 15 à 27, ont permis une augmentation importante du nombre et des caractéristiques des régions frontalières. Concrètement, le nombre de régions frontalières, au niveau NUTS II, s'est élevé à 38 et le nombre de kilomètres de frontières est passé de 7 137 à 14 300.

1.3.6

Dans sa résolution de décembre 2005 (5), le Parlement européen considère que la coopération transfrontalière revêt une importance fondamentale pour l'intégration et la cohésion européennes et invite les États membres et la Commission à promouvoir et à soutenir l'utilisation des eurorégions. La coopération transfrontalière est également incluse dans le projet de traité constitutionnel européen (art III-220).

1.4   Formes de coopération

1.4.1

À travers l'initiative communautaire INTERREG III en faveur de la coopération entre régions, la Commission a identifié trois domaines de coopération:

A — coopération transfrontalière

L'objectif de la coopération transfrontalière consiste à assurer une intégration économique et sociale par le biais de stratégies communes de développement et d'échanges structurés entre les deux côtés d'une frontière.

B — coopération transnationale

L'objectif de la coopération transnationale entre pouvoirs nationaux, régionaux et locaux consiste à promouvoir une meilleure intégration territoriale en formant des grands groupes de régions européennes ou macrorégions.

C — coopération interrégionale

L'objectif de la coopération interrégionale consiste à intensifier l'échange d'informations et d'expériences entre des régions pas nécessairement frontalières.

Les eurorégions relèvent plus particulièrement du type A, et également de plus en plus du type B.

2.   Cadre communautaire

2.1

Récemment, différentes propositions communautaires ont amélioré le cadre général dans lequel les eurorégions opèrent. Durant le premier semestre 2006, plusieurs décisions importantes, ayant des implications pour la coopération transfrontalière, ont été adoptées par le Parlement européen et le Conseil des ministres.

2.2   Perspectives financières

2.2.1

La Commission a présenté en 2004 sa proposition initiale sur la révision des perspectives financières 2007-2013 (6). Dans cette proposition portant sur une Union à 27 États membres, la Commission a calculé le niveau des dépenses à environ 1,14 % du RNB pour la période 2007-2013. Dans son avis (7), le CESE, tenant compte des défis importants auxquels l'Union européenne doit faire face, s'est déclaré en faveur d'une augmentation des ressources propres avec un plafonnement à 1,30 % du RNB (dépassant le plafond précédent qui était de 1,24 %). Le Conseil européen de décembre 2005 a fixé le total des dépenses pour la période 2007-2013 à 1,045 % du RNB. Finalement, en avril 2006, suite aux négociations entre le Conseil et le parlement européen, la proposition définitive a été arrêtée à 864 316 millions d'euros, soit 1,048 % du RNB.

2.2.2

Cette réduction substantielle a affecté les ressources consacrées à la cohésion économique et sociale qui passent de 0,41 % du RNB dans l'UE à 15 à 0,37 % dans l'UE à 27. Et ce alors que l'arrivée des nouveaux États membres et les défis auxquels est confrontée l'UE, tels que la mondialisation, exigeraient davantage de moyens et non moins.

2.2.3

S'agissant de la coopération territoriale européenne, le nouvel objectif 3 prévoit 8 720 millions d'euros (2,44 % des 0,37 % du RNB attribués à la cohésion), alors que la Commission demandait 13 000 millions d'euros dans sa proposition initiale. Il est clair qu'il faudra faire plus avec moins.

2.2.4

Les incitations financières de l'UE en faveur de la coopération transfrontalière ont augmenté par rapport à la période précédente (2000-2006), mais la réduction de financement par rapport à la proposition initiale de la Commission européenne rend nécessaire une plus grande coopération de la part des autorités régionales et locales et le recours, dans une plus grande mesure, au partenariat public-privé. Les moyens prévus couvrent à présent davantage de zones frontalières depuis l'adhésion des 12 nouveaux États membres, en particulier en Europe centrale et orientale.

2.3   Nouveaux règlements

2.3.1

Dans les propositions présentées en juillet 2004 par la Commission sur les fonds structurels pour la période 2007-2013, l'objectif «convergence» remplace l'ancien objectif 1, l'objectif «compétitivité régionale et emploi» remplace l'ancien objectif 2 et un nouvel objectif 3 «coopération territoriale européenne» a été créé pour donner une importance accrue aux actions dans le domaine régional transfrontalier.

2.3.2

Ce nouvel objectif (8) 3, basé sur l'expérience de l'initiative communautaire INTERREG, veillera en particulier à promouvoir l'intégration équilibrée du territoire de l'Union par la coopération transfrontalière, transnationale et interrégionale.

2.3.3

Le Comité a élaboré ses avis sur la réforme des fonds structurels et de cohésion en 2005 (9). Le Conseil et le Parlement européen ont approuvé les nouvelles propositions de règlement en 2006 (10).

2.4   Politique de cohésion: orientations stratégiques

2.4.1

La communication de la Commission (11) sur les directives stratégiques de cohésion a été approuvée après adoption des différents règlements relatifs aux fonds structurels. Cette communication confirme l'importance du nouvel objectif 3 «coopération territoriale européenne» dans sa triple dimension: la coopération transfrontalière, transnationale et interrégionale.

2.4.2

La finalité de ce nouvel objectif de coopération est de promouvoir une plus grande intégration du territoire de l'Union et de réduire les effets de barrière par le biais de la coopération transfrontalière et de l'échange des meilleures pratiques.

2.4.3

Les orientations stratégiques pour la politique européenne de cohésion visent à:

a)

faire des régions de l'UE un lieu plus attractif pour les investissements;

b)

promouvoir l'innovation et l'esprit d'entreprise;

c)

créer des emplois; et de façon plus spécifique prendre en compte la dimension territoriale des politiques de cohésion.

2.4.4

Comme on le sait, les frontières nationales constituent souvent un obstacle au développement du territoire européen dans son ensemble, et peuvent entraver son potentiel de compétitivité. Un des objectifs principaux de la coopération transfrontalière communautaire est par conséquent l'élimination de l'effet de barrière entre les frontières nationales et l'établissement de synergies pour affronter des problèmes partagés en trouvant des solutions communes.

2.4.5

La politique de cohésion doit se concentrer sur les actions qui apportent une valeur ajoutée aux activités transfrontalières: par exemple, augmenter la compétitivité frontalière en promouvant l'innovation et les efforts de recherche et développement; œuvrer à la connexion de réseaux immatériels (services) ou de réseaux physiques (transports) en vue d'un renforcement de l'intégration transfrontalière dans le cadre de la citoyenneté européenne; promouvoir la mobilité et la transparence du marché transfrontalier du travail; gérer les ressources hydriques et contrôler les risques d'inondations; développer le tourisme; encourager la participation des acteurs économiques et sociaux; valoriser le patrimoine culturel; améliorer l'aménagement du territoire, etc.

2.5   Nouvelle base juridique pour la coopération territoriale

2.5.1

Historiquement, l'absence d'une base juridique européenne homogène en matière de coopération transfrontalière a constitué un frein au développement d'actions utiles dans ce domaine.

2.5.2

La Commission a proposé en 2004 la création d'un groupement européen de coopération tranfrontalière (GECT), dont elle a ensuite modifié la dénomination en remplaçant dans sa dernière proposition le terme «transfrontalière» par «territoriale».

2.5.3

Dans le règlement adopté (12) le 31 juillet 2006, il est reconnu que:

des mesures s'imposent pour réduire les difficultés significatives rencontrées par les États membres, en particulier par les régions et les collectivités locales, pour réaliser et gérer des actions de coopération territoriale dans le cadre des législations et des procédures nationales différentes;

pour surmonter les obstacles entravant la coopération territoriale, il est nécessaire d'instituer un instrument de coopération au niveau communautaire permettant d'établir, sur le territoire de la Communauté, des groupements coopératifs dotés de la personnalité juridique, dénommés «groupements européens de coopération territoriale (GECT)»;

il convient de créer les conditions de la coopération territoriale, conformément au principe de subsidiarité consacré à l'article 5 du traité. Conformément au principe de proportionnalité tel qu'énoncé au dit article, le présent règlement n'excède pas ce qui est nécessaire pour atteindre ces objectifs, le recours au GECT étant facultatif, dans le respect de l'ordre constitutionnel de chaque État membre.

3.   Intégration économique et cohésion sociale et territoriale

3.1   Intégration et spécialisation

3.1.1

Dans les grands États traditionnels, une grande partie de l'activité économique se trouve centralisée, le plus souvent dans la capitale et les villes plus importantes. Au sein de chaque État, les régions se sont, dans une certaine mesure, spécialisées dans des domaines économiques différents.

3.1.2

L'intégration européenne favorise la création de nouveaux espaces de coopération tels que les eurorégions. Avec l'intégration européenne, cette spécialisation régionale ne se fait plus au niveau de chaque État, mais de plus en plus au niveau de l'Union. Les frontières entre États ont cessé d'être un obstacle infranchissable aux échanges, ce qui favorise l'établissement de nouvelles relations entre des régions, aux niveaux de développement parfois distincts, appartenant à des États membres différents mais poursuivant des objectifs communs, dans le cadre de la spécialisation croissante sur le territoire européen.

3.1.3.

Une telle coopération est particulièrement nécessaire pour les activités de petite envergure et davantage affectées par l'effet de frontière, comme celles des PME.

3.1.4

Le CESE estime que les eurorégions devraient contribuer de manière significative aux objectifs de la politique de cohésion économique, sociale et territoriale de l'UE. Dans cet ordre d'idées, la nouvelle proposition de politique territoriale de l'Union européenne se donne comme objectifs prioritaires la convergence et la croissance de la compétitivité et de l'emploi, notamment dans les régions les moins prospères confrontées aux nouveaux défis de la spécialisation.

3.2   Compétitivité

3.2.1

Les eurorégions favorisent les économies d'échelle. Elles induisent globalement une augmentation de la taille des marchés (économies d'agglomération), une complémentarité des facteurs de production et de meilleures mesures d'encouragement à l'investissement. On estime de manière générale que certains investissements dans les domaines de l'innovation et du développement peuvent avoir un impact direct dans un rayon de 250 à 500 kilomètres. Bien que certaines eurorégions soient plus étendues, elles mesurent en moyenne de 50 à 100 kilomètres au maximum.

3.2.2

Les eurorégions sont essentielles à l'obtention d'une masse critique suffisante dans certains domaines, en ce qu'elles rendent possible une gamme d'investissements dans les services essentiels, qui ne pourraient se faire en l'absence de coopération transfrontalière.

3.2.3

Afin d'augmenter la compétitivité, la coopération transfrontalière entre autorités régionales et locales peut fournir différents biens publics:

réseaux d'information, communication, énergie et transports et autres infrastructures transfrontalières;

services publics tels que les écoles, les hôpitaux, les services d'urgence;

institutions et services favorisant l'activité économique privée, le développement du commerce, l'esprit d'entreprise et l'association d'entreprises transfrontalières, la création de nouvelles opportunités d'emplois et la mobilité des travailleurs.

3.3   Cohésion: difficultés du travail transfrontalier

3.3.1

Si la majorité des eurorégions recouvrent des territoires aux niveaux de développement similaires, il en est d'autres, qui associent des régions dont les niveaux de développement diffèrent. Un des objectifs des eurorégions est de promouvoir des activités économiques et autres ayant pour effet de réduire les disparités interrégionales. À cette fin, il est essentiel que les États concernés ainsi que l'UE soient davantage impliqués.

3.3.2

Les investissements sociaux dans les services de base effectués dans les zones frontalières sont généralement inférieurs à ceux des zones plus centrales de chaque pays. Cela s'explique très souvent par la moindre influence des zones frontalières dans les centres de prise de décisions. Cette réalité s'accompagne souvent d'une fourniture insuffisante de services de qualité, diversifiés et rentables, en particulier aux groupes les plus vulnérables de la population (enfants, immigrants, familles au pouvoir d'achat très faible, handicapés, malades chroniques, etc.).

3.3.3

Les eurorégions peuvent se révéler précieuses pour développer ce type de services et pour que ces groupes sociaux puissent ainsi bénéficier d'une meilleure protection grâce à une approche transfrontalière. En outre, les eurorégions peuvent contribuer à surmonter en grande partie les barrières et asymétries juridiques, administratives et financières qui entravent la marche en avant de leurs populations. Elles contribuent également à vaincre les préjugés historiques, à élaborer des études conjointes et à promouvoir une meilleure compréhension mutuelle de leurs différences respectives.

3.3.4

La libre circulation des travailleurs frontaliers souffre encore de lacunes juridiques et d'une harmonisation insuffisante qui n'ont été que partiellement résolues par l'acquis communautaire et la Cour de justice. Avec la croissance du nombre des travailleurs frontaliers, celles-ci sont devenues une réalité significative à l'échelle européenne, notamment en ce qui concerne les domaines de la fiscalité, de la sécurité sociale et de l'assistance sociale où subsistent différentes façons de définir et de traiter des concepts tels que la résidence, la situation familiale, le remboursement de frais de santé, la double imposition et autres types de contraintes administratives (13).

4.   Coopération transfrontalière, une valeur ajoutée pour l'intégration européenne

4.1   Franchissement des frontières

4.1.1

La nécessité de surmonter les obstacles à l'intégration est une expérience de tous les jours pour les frontaliers. Il ne s'agit pas de modifier les frontières ni de porter atteinte à la souveraineté des États, mais de permettre une coopération concrète au-delà des frontières dans tous les aspects de la vie, en améliorant les conditions de vie et en faisant en sorte que l'Europe des citoyens devienne une réalité.

4.1.2

Les frontières de l'UE sont largement sorties de leur ancien rôle de barrière, mais il subsiste encore des différences économiques, socioculturelles, administratives et juridiques, différences particulièrement marquées aux frontières extérieures de l'UE. C'est pourquoi, l'objectif de la coopération dans les zones transfrontalières est de développer des structures, des procédures et des instruments coopératifs permettant de lever les obstacles administratifs et normatifs, d'arriver à éliminer les facteurs historiques de division et de transformer la proximité en facteur de mobilité, de développement économique et de progrès social. Il s'agit, en somme, de faire des régions transfrontalières des «zones de prospérité partagée».

4.2   Valeur ajoutée

4.2.1

La coopération transfrontalière et sa réalisation durable par le biais des eurorégions permettent non seulement d'éviter les conflits, de réagir face à des catastrophes ou de surmonter des barrières psychologiques mais également d'améliorer de manière substantielle le développement de part et d'autre des frontières. Cette valeur ajoutée peut se traduire en termes politiques, institutionnels, économiques, sociaux, culturels et d'intégration européenne. La coopération transfrontalière implique une contribution importante à la promotion de la cohabitation, de la sécurité et de l'intégration européennes. Elle constitue un moyen très efficace de réaliser les principes communautaires de subsidiarité, de partenariat, de cohésion économique, sociale et territoriale ainsi que de soutenir la pleine intégration de nouveaux États membres dans l'UE.

4.2.2

Ces dispositifs permanents de coopération transfrontalière permettent une implication active et durable des citoyens et des administrations, ainsi que des groupes politiques et sociaux à caractère transnational. Ils garantissent une connaissance mutuelle et permettent un partenariat vertical et horizontal à partir de structures et de compétences nationales différentes. Ils permettent également de gérer des programmes et des projets transfrontaliers, ou d'administrer conjointement des fonds de diverses provenances (communautaires, nationaux, propres ou autres). De l'avis du CESE, le développement commun de ce type d'initiatives peut être mené à meilleure fin et avec plus d'efficacité si la société civile organisée joue un rôle clé.

4.2.3

D'un point de vue socioéconomique, les structures de coopération transfrontalièrepermettent de:

mobiliser le potentiel endogène de tous les acteurs (chambres de commerce, associations, entreprises, syndicats, institutions sociales et culturelles, groupes de défense de l'environnement ou agences de tourisme, parmi tant d'autres);

ouvrir les marchés de l'emploi et harmoniser les qualifications professionnelles;

accroître le développement économique et la création d'emplois par le biais d'actions dans d'autres secteurs tels que les infrastructures, le transport, le tourisme, l'environnement, l'éducation, la recherche et la coopération entre les PME.

4.2.4

Dans le domaine socioculturel, la valeur ajoutée de la coopération transfrontalière réside dans la diffusion permanente des connaissances générales, prise au sens d'un continuum transfrontalier, qui peut être abordé dans différentes publications et sous différentes formes. De même, la coopération transfrontalière permet de former un réseau d'entités agissant comme multiplicateurs. Cela concernerait les centres éducatifs, les groupes de protection de l'environnement, les associations culturelles, les bibliothèques, les musées, etc. En outre, la coopération transfrontalière favorise l'égalité des chances et la connaissance étendue de la langue du pays voisin, y inclus les dialectes locaux, composantes essentielles du développement régional transfrontalier et condition préalable à la communication.

4.2.5

La coopération transfrontalière ainsi décrite, soutenue par des structures permanentes telles que les eurorégions, constitue une valeur ajoutée aux mesures nationales grâce à l'additionnalité des programmes et projets transfrontaliers, aux synergies mobilisées, à la recherche et l'innovation conjointes, à la création de réseaux dynamiques et stables, à l'échange de connaissances et de bonnes pratiques, aux effets indirects du franchissement des frontières et à la gestion transfrontalière et efficace des ressources disponibles.

4.3   Obstacles

Il subsiste toutefois certains phénomènes qui entravent la coopération transfrontalière (14), les plus manifestes sont les suivants:

les limitations juridiques aux activités transfrontalières des administrations régionales et locales imposées par les législations nationales;

les différences de structures et de compétences des différents échelons administratifs de chaque côté de la frontière;

le manque de volonté politique, en particulier au niveau national, pour faire disparaître les restrictions, notamment par le biais de règlements nationaux ou de traités bilatéraux;

l'absence de cadres communs en matière de fiscalité et de sécurité sociale, ou la reconnaissance des qualifications universitaires et professionnelles;

les différences économiques structurelles de chaque côté de la frontière;

les barrières linguistiques, culturelles et psychologiques, notamment les préjugés et les résistances d'ordre historique entre les peuples.

4.4   Principes généraux de la coopération transfrontalière

4.4.1

Une multitude d'exemples à travers toute l'Europe permettent d'identifier une série de principes généraux pour la réussite de la coopération transfrontalière:

la proximité des citoyens: les habitants des zones transfrontalières souhaitent coopérer afin de surmonter les problèmes auxquels ils font face ou d'améliorer leurs perspectives de vie;

l'implication des représentants politiques (locaux, régionaux, nationaux et européens) est essentielle à une bonne coopération transfrontalière;

la subsidiarité: les niveaux locaux et régionaux se sont avérés être les meilleurs pour réaliser la coopération transfrontalière, bien qu'une alliance soit nécessaire avec les gouvernements nationaux;

le partenariat: l'implication de tous les acteurs de chaque côté de la frontière est essentielle pour la réalisation des objectifs communs;

les structures conjointes dotées de ressources communes (instruments techniques, administratifs, financiers et décisionnels) garantissent la durabilité des activités et leur évolution constante. Elles garantissent également l'exercice de certaines compétences, la gestion de programmes (y compris les programmes européens), le dégagement de consensus par-delà les frontières et la prévention d'égoïsmes nationaux.

5.   Vers une gouvernance coopérative

5.1   Nouvelles formes de gouvernance pour de nouveaux espaces

5.1.1

Les eurorégions sont des espaces territoriaux qui mettent en œuvre de nouveaux modèles de coopération et d'association dans le secteur public, dans le secteur privé et entre les deux secteurs, avec la participation accrue de tous les acteurs réellement concernés, dans le but d'élaborer de nouvelles politiques en réseau.

5.1.2

Le concept de gouvernance recouvre une forme d'administration plus participative et horizontale que les formes traditionnelles plus hiérarchisées et verticales. Cette conception de gouvernance s'applique particulièrement bien aux eurorégions, car il s'agit de trouver des solutions communes à des problèmes communs.

5.1.3

Les eurorégions, quant à elles, jouent de plus en plus un rôle subsidiaire mais fondamental dans la gouvernance européenne de la politique de cohésion économique, sociale et territoriale.

5.1.4

Dans ce contexte, le CESE estime que les eurorégions et les autres structures similaires devraient fournir une contribution essentielle à l'approfondissement du processus d'intégration et de construction européennes.

5.1.5

L'établissement des eurorégions demande, quant à lui, une coopération entre des acteurs institutionnels et sociaux qui, souvent, relèvent de traditions et de logiques très différentes. Mais proximité n'est pas toujours synonyme de coopération accrue. Les institutions et organisations de la société civile ont par conséquent un rôle important à jouer dans la gouvernance horizontale.

5.1.6

La participation des acteurs économiques et sociaux dans la gouvernance des eurorégions nécessite l'établissement de cadres institutionnels qui la rendent effective. Il s'agit d'associer les organisations de la société civile à l'élaboration et à la mise en œuvre des politiques qui émanent des différents niveaux transfrontaliers de coopération entre deux ou plusieurs États. La participation des partenaires sociaux au réseau EURES dans les domaines transfrontaliers concrétise grandement ce principe.

6.   Conclusions et recommandations

6.1

L'adoption du règlement relatif à la mise en place du Groupement européen de coopération territoriale (GECT) et à l'inclusion d'un nouvel objectif de coopération territoriale a ouvert la porte à de nouvelles possibilités d'actions pour les eurorégions. D'une part, parce qu'il établit un instrument juridique communautaire pour la coopération transfrontalièr, et qu'il offre en outre la possibilité aux États membres, en leurs différents niveaux, de s'associer à la coopération territoriale transfrontalière. D'autre part, le passage de la «coopération transfrontalière» à la «coopération territoriale» signifie que les eurorégions peuvent étendre leur champ d'actions, au-delà du domaine de la coopération à l'échelle locale et à celle des collectivités proches, vers un développement intégral de territoires plus grands qui partagent des synergies et des potentialités communes.

6.2

Par conséquent, le CESE estime que la coopération territoriale mise en avant par les eurorégions constitue un élément essentiel pour promouvoir l'intégration européenne, réduire la fragmentation économique, sociale et culturelle engendrée par les frontières nationales et développer la cohésion économique, sociale et culturelle. À cet effet, le CESE plaide pour que la coopération territoriale transfrontalière fasse l'objet d'une attention particulière lors du prochain débat sur l'adoption définitive du nouveau traité européen.

6.3

Afin que la coopération territoriale européenne puisse répondre aux attentes engendrées par les réformes mentionnées plus haut, le CESE est d'avis que les États membres et leurs structures intermédiaires doivent s'impliquer davantage dans le développement des eurorégions. À cette fin, il conviendrait d'élaborer des stratégies nationales de coopération territoriale dans le cadre communautaire. Plus particulièrement, les États devraient contribuer à la résolution des problèmes les plus immédiats de leurs populations transfrontalières, qui ont généralement trait au marché du travail, à la santé, à l'assistance sociale, à l'éducation et au transport.

6.4

Le CESE est d'avis que pour améliorer l'efficacité des actions dans le domaine de la coopération territoriale, il conviendrait, en application du principe de subsidiarité que les GECT assurent davantage la gestion directe des projets transfrontaliers et, dans certains cas, celle des projets transnationaux financés par des fonds communautaires ou nationaux.

6.5

Convertir les eurorégions en «zones de prospérité partagée» nécessite une plus grande participation des entreprises privées (y compris l'économie sociale) aux initiatives de développement transfrontalier, en tenant compte à cet effet de l'importance des petites et moyennes entreprises dans la structuration du tissu productif et la création d'emploi.

6.6

Le CESE estime que les eurorégions, de même que les GECT créés conformément au règlement 1082/2006, concrétisent de manière exemplaire les principes de gouvernance européenne définis par la Commission dans son livre blanc de 2001. Dans cet ordre d'idées, le CESE considère que l'efficacité des actions et politiques transfrontalières et de coopération territoriale, en général, dépend du développement d'un véritable «partenariat» entre tous les acteurs territoriaux et socio-économiques concernés. Par conséquent, le CESE demande d'établir des formules de participation des organisations représentatives de la société civile organisée aux projets de coopération territoriale.

6.7

Plus particulièrement, le CESE estime que le réseau EURES devrait devenir un instrument européen exerçant réellement un rôle central d'intermédiaire entre l'offre et de la demande d'emploi. L'environnement transfrontalier constitue à cet égard un laboratoire essentiel. C'est pour cela que le CESE déplore la tendance à la renationalisation de la gestion d'EURES, observée ces dernières années, et plaide pour une gestion réellement transfrontalière de ce réseau, tout en tenant également compte qu'EURES, outre sa fonction de médiateur dans le marché du travail, exerce aussi un rôle important de facilitateur du dialogue social dans les zones transnationales limitrophes.

6.8

Il est notoire que les organisations socio-économiques exercent une fonction importante dans l'intégration européenne. À cet égard, le CESE accueille favorablement les expériences de transnationalisation liées notamment aux conseils syndicaux interrégionaux, aux différentes formes transnationales de coopération et d'association d'organisations patronales, aux chambres de commerce, aux centres de recherche et universités ou à la création de comités économiques et sociaux eurorégionaux. Il encourage ces expériences et offre son aide pour les renforcer et les développer.

6.9

De l'avis du CESE, les eurorégions jouent un rôle important, qui pourrait être encore plus grand, dans les régions frontalières avec des pays tiers, tant du point de vue du développement économique que de la sécurité publique et de l'intégration sociale. C'est pour cette raison que le CESE demande que ce type de structures et les actions qu'elles peuvent opérer soient intégrées dans les politiques de voisinage et de préadhésion de l'UE.

6.10

Compte tenu de la grande richesse des expériences réalisées dans le cadre d'actions transfrontalières (dont nous vous livrons quelques exemples en annexe du présent avis) et de la grande méconnaissance de ces dernières, même d'une eurorégion à l'autre, le CESE juge qu'il serait très opportun que la Commission élabore un «Guide de bonnes pratiques» en la matière, en y incluant les cas de partenariat public-privé existants.

6.11

Il paraît évident que l'examen d'une question aux aspects tellement multiples, comme celle que nous abordons, nécessite plus d'un avis pour en faire le tour. Le CESE estime donc qu'il convient d'approfondir le thème de la coopération territoriale transfrontalière et des structures qui la soutiennent à l'aide d'autres avis portant sur des thèmes d'intérêt transfrontalier commun tels que le marché du travail, le tourisme et les pôles de développement.

Bruxelles, le 11 juillet 2007.

Le Président

du Comité économique et social européen

Dimitris DIMITRIADIS


(1)  Les particularités s'inspirent du «Guide pratique de la coopération transfrontalière», 2000, ARFE.

(2)  Lorsque nous parlons d'eurorégions, il est présumé que les structures similaires sont également incluses.

(3)  Sarre, Lorraine, Grand-Duché de Luxembourg, Rhénanie-Palatinat, Région wallonne, Communauté française de Belgique, Communauté germanophone de Belgique.

(4)  Il existe actuellement plus de 168 eurorégions et structures similaires. Environ la moitié des régions des États membres de l'Union européenne font partie d'une eurorégion.

(5)  Résolution du 1.12.2005 du Parlement européen sur le rôle des «eurorégions» dans le développement de la politique régionale.

(6)  COM(2004) 101 final.

(7)  Avis du CESE sur la communication de la Commission au Conseil et au Parlement européen «Construire notre avenir commun — Défis politiques et moyens budgétaires de l'Union élargie — 2007-2013», JO C 74 du 23.3.2005, p. 32.

(8)  COM(2004) 495 final, article 6: Coopération territoriale européenne.

(9)  Avis du CESE sur les «Dispositions générales» sur les Fonds, le «Fonds de Cohésion», le «Fonds européen de développement régional» et le «Groupement européen de coopération transfrontalière (GECT)», JO C 255 du 14.10.2005, p. 76, 79, 88 et 91.

(10)  JO L 210 du 31.7.2006.

(11)  COM(2005) 299 final et COM(2006) 386 (communication adoptée par le Conseil des ministres le 5 octobre 2006).

(12)  JO L 210 du 31.7.2006.

(13)  Le futur observatoire de l'emploi du CESE pourrait effectuer un suivi de la problématique du travail frontalier et transfrontalier en Europe.

(14)  Avis du CESE du 21 avril 2006 sur «La gestion des mutations industrielles dans les zones transfrontalières à la suite de l'élargissement de l'Union européenne» — JO C 185 du 8.8.2006.


27.10.2007   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 256/138


Avis du Comité économique et social européen sur «Les relations UE-Amérique centrale»

(2007/C 256/24)

Le 17 janvier 2007, lors de sa session plénière, le Comité économique et social européen, en application de l'article 29, paragraphe 2 de son Règlement intérieur, a décidé d'élaborer un avis sur «Les relations UE-Amérique centrale».

La section spécialisée «Relations extérieures», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 14 juin 2007 (rapporteur: M. SOARES).

Lors de sa 437e session plénière des 11 et 12 juillet 2007 (séance du 12 juillet 2007), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 63 voix pour, 0 voix contre et 2 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1

Depuis plusieurs années, le CESE considère que les relations entre l'Union européenne et l'Amérique latine s'inscrivent dans un cadre stratégique plus vaste qui, au-delà des relations commerciales, témoignent de la volonté de l'Europe de s'affirmer en tant qu'interlocuteur valable dans la construction d'un modèle de société reposant sur l'État de droit, la démocratie et le respect des droits de l'homme, la paix et la solidarité entre les peuples (1).

1.2

D'autre part, du point de vue historique, les relations avec l'Amérique latine et les Caraïbes vont bien au-delà de la simple recherche de partenariats économiques ou géostratégiques. Depuis très longtemps, les peuples latino-américains ont avec l'Europe des liens culturels, politiques, sociaux, linguistiques et affectifs, partageant la même vision du monde. Autant de liens qu'il ne faut pas oublier mais, bien au contraire, valoriser profondément dans le cadre du processus de négociation qui commence.

1.3

Les négociations entre l'Union européenne et les pays d'Amérique centrale en vue de conclure un accord d'association entre ces deux régions ayant été entamées, le CESE demande instamment de redoubler d'efforts pour que l'on parvienne rapidement à un accord satisfaisant pour les deux parties, qui serve également de modèle, pour les négociations actuelles ou futures avec l'Amérique latine et les Caraïbes, en ce qui concerne les avantages réciproques d'un partenariat stratégique avec l'Union européenne. Des avantages qui doivent aller bien au-delà du commerce et reposer sur des bases de progrès économique, social et de développement durable, dans le respect des normes de l'État de droit et du principe de dignité de tous les êtres humains.

1.4

Le CESE espère que les négociations permettront d'amener les gouvernements d'Amérique centrale à renforcer le dialogue avec la société civile organisée de leur pays. Un dialogue démocratique, transparent et fondé sur des propositions concrètes respectées mutuellement. D'autre part, le CESE invite le Comité consultatif du système d'intégration d'Amérique centrale (CC-SICA) à poursuivre ses efforts pour trouver des solutions aussi consensuelles que possible, qui reflètent la position de l'ensemble de la société civile d'Amérique centrale envers le processus de négociation et qui permettent d'atteindre les compromis nécessaires pour poursuivre l'ensemble du processus.

1.5

Le CESE recommande que les négociations tiennent compte des aspects suivants:

1.5.1

La nécessité de renforcer la société civile organisée d'Amérique centrale, en particulier par le biais du renforcement institutionnel du CC-SICA, organe consultatif du système d'intégration d'Amérique centrale. L'Union européenne doit contribuer à ce que ses partenaires de négociation reconnaissent le rôle fondamental qu'a joué et doit jouer le CC-SICA pour parvenir à une bonne intégration régionale, tout en analysant des mesures de soutien financier à cette structure, conformément à l'objectif adopté par la Commission dans le document de coopération régionale.

1.5.2

L'introduction des clauses sociales nécessaires pour que l'accord d'association bénéficie à l'ensemble de la société et soit un facteur décisif de consolidation des démocraties, de lutte contre la pauvreté, l'exclusion sociale et le chômage, de développement d'un modèle économique qui ne contribue pas à accroître ou approfondir les inégalités. L'accord doit servir également à renforcer la cohésion sociale et le respect de la biodiversité environnementale (dans ce sens, l'accord devrait contribuer à inclure les milliers de petits producteurs qui désirent pratiquer une agriculture plus respectueuse de l'environnement). D'autre part, durant la négociation et l'application ultérieure de l'accord d'association, il faudra accorder une attention particulière au respect et à la stricte application des Normes internationales du travail de l'OIT par les gouvernements.

1.5.3

L'existence d'un système de préférences généralisées (SPG), instrument unilatéral de l'Union européenne pour soutenir les pays moins développés. Le chapitre commercial de l'accord devra par conséquent apporter aux pays d'Amérique centrale plus d'avantages que ceux prévus dans ce système qui, il faut le signaler, est déjà assez positif.

1.5.4

La nécessité de faire en sorte que la société civile organisée reçoive des informations régulières, opportunes et pertinentes afin qu'elle puisse assurer le suivi des négociations au niveau institutionnel. Par ailleurs, il faut inclure la possibilité de mener des consultations avant les négociations pour que l'on tienne compte du point de vue de la société civile organisée et de mettre sur pied des forums ouverts à une participation plus vaste, pour que l'ensemble de la société puisse suivre de près l'évolution des négociations. À cet égard, un élément central de la participation de la société civile doit être la création d'un comité conjoint de suivi des négociations qui fonctionne d'une manière institutionnalisée, puisse suivre toutes les négociations et servir de pont entre le processus de négociation et la société civile dans son ensemble.

1.5.5

Enfin, pour que tous les chapitres de l'accord d'association UE-Amérique centrale bénéficient véritablement de la participation de la société civile organisée, le CESE recommande que le Comité consultatif conjoint, organe institutionnel consultatif composé par le CESE et le CC-SICA et prévu à l'article 52.4 de l'accord politique entre les deux régions, entre en fonctionnement immédiatement après la signature de l'accord avec la mission de réaliser le suivi de l'accord.

2.   Introduction

2.1

Les relations entre l'Union européenne et l'Amérique centrale dans son ensemble n'ont pas été très intenses jusqu'à présent. Toutefois, l'Union européenne a apporté une contribution décisive au processus de pacification et de démocratisation de la région et lancé un processus de dialogue interministériel, le dialogue ministériel de San José, en 1984, qui constitue toujours une référence pour la région.

2.2

En 2003, l'UE et l'Amérique centrale ont signé un accord visant à consolider le dialogue politique et la coopération. Plus récemment, à l'occasion du IVe sommet des chefs d'État et de gouvernement de l'Union européenne et d'Amérique latine et Caraïbes, tenu en mai 2006, la volonté fut affirmée de parvenir, le plus rapidement possible, à un accord d'association entre les deux régions (2).

2.3

Dans la «Déclaration de Vienne» adoptée en avril 2006 à l'occasion de la quatrième rencontre des organisations de la société civile organisée UE-Amérique latine et Caraïbes, l'on affirme que les accords d'association entre l'UE et l'ALC ne devraient pas se limiter aux seuls aspects commerciaux et économiques, mais devraient tenir compte des contenus politiques, culturels et sociaux, afin d'atteindre une cohésion sociale accrue.

2.4

De même, le protocole de coopération signé entre le CESE et le CC-SICA établit, comme lignes directrices de l'action des deux institutions, de travailler pour l'inclusion de la dimension sociale dans le futur accord d'association UE/SICA et de soutenir l'initiative de travail sur la proposition de constitution d'un comité consultatif mixte de la société civile organisée des deux régions dans le cadre institutionnel du futur accord d'association. La réussite de l'accord d'association est intimement liée à la capacité de la société civile des deux parties d'accompagner efficacement les négociations et d'avoir la capacité d'informer l'ensemble de la société sur l'état d'avancement, les difficultés rencontrées et les succès remportés.

3.   Une nouvelle étape dans les relations Union européenne/Amérique centrale

3.1

Actuellement, les relations entre l'Union européenne et l'Amérique centrale s'inscrivent dans le cadre du dialogue politique et de coopération. Quant aux relations commerciales, elles sont régies par le système des préférences généralisées que l'UE a lancé dans les années 70, qu'est venu compléter un régime spécial d'incitation au développement durable et à la bonne gouvernance (SPG+), incluant la lutte contre le trafic de drogues (SPG+).

3.2

Avec 12 % du commerce global, l'UE est le deuxième principal partenaire commercial de l'Amérique centrale après les États-Unis dont la part s'élève à 46 %. En ce qui concerne la coopération et l'aide au développement, l'UE est le principal donateur d'Amérique centrale, avec une dotation budgétaire de 563,2 millions d'euros pour la période 2002-2006, auxquels il faut ajouter 74,5 millions d'euros au titre du mémorandum entre la Commission et le secrétariat général du SICA. Outre ces fonds, l'UE a dégagé 279 millions d'euros supplémentaires au titre d'aide, suite aux catastrophes naturelles qui ont frappé la région, notamment l'ouragan Mitch et le séisme qui a frappé El Salvador. Pour la période 2007-2013, l'UE a promis de relever le montant de l'aide au développement pour l'amener à 840 millions d'euros. Le volume des investissements directs européens à destination de l'Amérique centrale continue à augmenter.

3.3

Toutefois, les relations entre l'Union européenne et l'Amérique centrale vont bien au-delà du volet commercial et de coopération; elles reposent sur une vision stratégique plus vaste qui englobe des domaines aussi sensibles que la sécurité et la lutte contre le terrorisme, la défense de l'environnement et la construction d'un modèle de développement durable, le phénomène migratoire et la nécessité de le contrôler au bénéfice des pays récepteurs ou exportateurs de main-d'œuvre, l'instauration d'un nouvel ordre économique mondial reposant sur les bonnes pratiques de gouvernement respectueuses des droits de l'homme, économiques et sociaux.

3.4

La décision prise à Vienne, en mai 2006, d'ouvrir les négociations avec l'Amérique centrale en vue d'atteindre un accord d'association avec cette région constitue en soi un défi et une opportunité qu'il ne faut pas laisser passer.

3.5

Étant donné que la stratégie européenne de conclusion d'accords d'association repose sur un dialogue interrégional, il convient d'analyser l'état de l'intégration de la région d'Amérique centrale.

3.5.1

L'intégration d'Amérique centrale est un projet ancien, qui plonge ses racines dans l'indépendance même des États de la région. Avec le protocole de Tegucigalpa de 1991 et le traité général d'intégration économique centre-américaine de 1993, ce projet a retrouvé un nouveau souffle.

3.5.2

Malgré qu'il existe un consensus majoritaire sur l'intégration régionale, la réalité est que les avancées ont été peu significatives. Ceci est imputable aux difficultés rencontrées pour concrétiser les décisions prises au niveau politique, aux profondes faiblesses de nature économique et à l'absence de solidarité régionale. Cependant, l'on peut dire qu'à partir de 2002, l'intégration semble avoir emprunté une voie plus solide (3).

3.5.3

Cependant, la fragilité des institutions régionales qui empêche la prise de décisions au niveau supranational, la différence de développement des pays dont se compose la région, la quasi-absence des secteurs sociaux dans le processus de prise de décisions et la prise de conscience des avantages de l'intégration régionale sont autant de facteurs qui rendent plus difficile une avancée décisive du processus d'intégration.

3.5.4

Malgré les difficultés existantes, il y a plusieurs raisons d'être optimistes en ce qui concerne le processus d'intégration régionale, notamment la tradition et la culture unissant les différents pays, l'existence d'un cadre juridique et institutionnel relativement stable et engagé ainsi que la nécessité ressentie et manifestée de réformer certaines institutions (comme le PARLACEN (4)) afin qu'il soit possible d'accroître l'efficacité des stratégies de mise en œuvre de politiques régionales. Par ailleurs, la prise de conscience et l'intervention plus importantes de la société civile constituent une source d'optimisme et de confiance.

3.5.5

Dans le cadre des récentes rencontres du Comité conjoint UE/Amérique centrale, réalisées en avril 2007, les gouvernements d'Amérique centrale se sont engagés à présenter un cadre juridique pour établir l'union douanière d'Amérique centrale assorti d'un calendrier prévoyant son application jusqu'à la fin des négociations de l'accord d'association. Ceci est un pas important et décisif sur la voie de l'intégration centre-américaine et de la possibilité de parvenir à un accord entre les deux régions.

3.6

Le processus de négociation qui s'ouvre maintenant offre aux deux parties des opportunités extraordinaires, qu'il ne faut pas laisser passer. À titre d'exemple, l'on peut citer les aspects suivants:

3.6.1

Le développement et le renforcement de l'Union douanière et la suppression des barrières économiques et douanières entre les pays de la région, politique soutenue par l'Union européenne, peuvent largement contribuer à renforcer les économies d'Amérique centrale par une compétitivité accrue face à ses partenaires économiques actuels et potentiels. D'autre part, il facilitera les éventuels investissements européens dans la région ainsi que la mise en œuvre de la coopération au développement.

3.6.2

Une cohésion sociale plus forte et harmonieuse contribuera à renforcer les jeunes démocraties d'Amérique centrale, en réduisant les causes possibles de conflit, en renforçant la sécurité juridique, et en rendant possible l'échange entre les deux régions basé sur des règles claires, mutuellement décidées et respectées. Comme en témoignent les recherches successives réalisées par la Commission économique pour l'Amérique latine et les Caraïbes des Nations unies, la CEPAL, le développement politique, économique et social d'un pays dépend, dans une large mesure, du niveau de cohésion sociale qu'il parvient à atteindre. D'où la nécessité d'impliquer la société civile organisée dans tout le processus de négociation.

3.6.3

Un autre domaine d'intérêt pour les deux régions est la recherche de solutions de prévention des catastrophes naturelles, afin de réduire la vulnérabilité des pays d'Amérique centrale. En effet, cette région est fortement soumise à ce type de phénomènes qui occasionne de lourdes pertes humaines et détériore les conditions de vie et de travail de millions de personnes. Les négociations devraient en tenir compte afin de trouver des mesures de prévention et d'action pour gérer ces phénomènes. Simultanément, ces mesures faciliteraient les opérations d'aide dans les cas d'urgence et réduiraient les coûts d'intervention internationale solidaire.

3.6.4

Enfin, sans prétendre épuiser le sujet, il y a lieu de rappeler la convergence d'intérêts entre l'UE et l'AC en ce qui concerne le besoin urgent de protéger l'environnement et la diversité par la mise en œuvre de politiques, de programmes et d'actions concrètes. Si les négociations parviennent à encourager l'exploitation rationnelle des ressources naturelles, le refus d'utilisation de formes et de produits agressifs pour la nature, le respect des droits du travail et syndicaux des travailleurs/euses agricoles, ainsi que la reconnaissance de l'existence de réserves naturelles qu'il faut protéger, l'accord d'association aura apporté une contribution importante pour les deux régions, s'érigeant en modèle d'association d'un nouveau type qui servira d'exemple dans le cadre d'autres négociations.

4.   La situation politique, économique et sociale d'Amérique centrale

4.1

Les pays d'Amérique centrale figurent parmi les plus pauvres d'Amérique latine. Les profondes lacunes de développement économique et la grande vulnérabilité sociale, alourdissent la menace qui pèse sur la cohésion sociale de chacun des pays et de l'ensemble de la région. Un niveau élevé de pauvreté et une distribution très inégale des richesses contribuent à renforcer cette vulnérabilité.

4.2

S'agissant d'une région qui vit des processus démocratiques récents après avoir subi des dictatures et des conflits armés prolongés qui ont laissé de profondes séquelles (à la seule exception du Costa Rica), il est possible de déterminer précisément certaines des principales contraintes à son développement:

a)

une situation démocratique encore fragile qui se caractérise, notamment, par une protection insuffisante des libertés fondamentales, le caractère permanent de l'impunité et de la corruption, le manque de transparence des décisions économiques, politiques et de gestion publique;

b)

la faiblesse économique due essentiellement au manque de compétitivité des différents pays et à leur vulnérabilité face aux fluctuations des marchés internationaux;

c)

la faible cohésion sociale due, fondamentalement, aux niveaux de pauvreté élevée et à la distribution très inégale des richesses qui ne permet pas aux couches les plus défavorisées de la société de bénéficier de la croissance économique, en générant des phénomènes de survie alternative tels que l'émigration et, dans une autre mesure, de violence sociale;

d)

les multiples vulnérabilités de l'environnement dues à des phénomènes naturels auxquels la région est soumise (tremblements de terre, inondations, sécheresses prolongées) mais aussi à l'exploitation irrationnelle des ressources naturelles. Selon le PNUD, les facteurs qui accroissent la fragilité de l'environnement en Amérique centrale sont, entre autres, le processus d'urbanisation désordonné et peu planifié, la surexploitation des ressources hydriques, l'usage excessif de pesticides dans l'agriculture et la déforestation.

4.3

Sur le plan économique, la région d'Amérique centrale a connu une certaine croissance économique néanmoins insuffisante pour relever les défis sociaux qui se posent à elle. Au cours des dernières années, le taux moyen annuel de croissance régionale se situait entre 3,2 % et 3,5 %. Néanmoins, l'absence de compétitivité des économies d'Amérique centrale, à l'exception relative du Costa Rica et d'El Salvador, place les pays de la région en position modeste sur l'échelle de compétitivité du World Economic Forum pour 2006 — 53e (Costa Rica), 61e (El Salvador), 75e (Guatemala), 93e (Honduras) et 95e (Nicaragua) sur un total de 125 pays.

4.4

Sur le plan social, il importe de rappeler que la société d'Amérique centrale est très complexe et diverse, incluant des communautés indigènes et une importante communauté afrodescendante qui ont été, en règle générale, oubliées voire marginalisées.

4.5

En ce qui concerne les communautés indigènes, il est commun de les associer aux zones rurales pauvres, oubliant l'important phénomène de migration vers les villes. Imputable à la détérioration croissante des économies rurales, ce phénomène a contribué à élargir la ceinture de pauvreté des grandes villes.

4.6

Quant à la population afrodescendante, éparpillée dans les différents pays (à l'exception d'El Salvador), elle n'a pas suffisamment retenu l'attention politique, et est donc victime de phénomènes de discrimination raciale, professionnelle et sociale.

4.7

L'inégalité entre les hommes et les femmes, dont témoignent tous les indicateurs socio-économiques, est un phénomène d'une grande ampleur qui ne peut être ignoré. Le chômage, l'emploi précaire, la qualité de l'emploi, les salaires perçus, l'abandon scolaire qui frappe surtout les filles, montrent que les femmes d'Amérique centrale sont largement pénalisées, leur situation étant presque dramatique, d'autant plus qu'un pourcentage élevé d'entre elles sont, pour des raisons diverses, chefs de ménage.

4.8

L'absence de données statistiques actualisées, fiables et comparables, sur la situation des filles et des femmes semble suggérer que l'on accorde peu d'attention à cette question bien que les gouvernements de la région aient assigné et ratifié les conventions internationales, telles que les conventions de l'OIT sur le sujet ou la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes, des Nations unies. La situation de violence à l'égard des femmes (déclinée dans ses différentes versions, de la violence domestique à la violence au travail) reste très préoccupante, malgré les efforts consentis par les mouvements de femmes.

4.9

Cette situation de pauvreté qui affecte pratiquement la moitié ou plus de la population, à l'exception du Costa Rica, le poids du travail informel qui se situe autour de 40 %, les budgets plus qu'insuffisants destinés aux secteurs sociaux tels que la santé et l'éducation et le chômage sont autant d'éléments à prendre en considération pour comprendre l'absence de cohésion sociale qui existe dans la région.

4.10

Il est également important de souligner l'absence généralisée d'une politique respectueuse des droits de l'homme. Il faut en particulier faire remarquer l'absence de respect des droits du travail et syndicaux malgré que plusieurs pays d'Amérique centrale aient ratifié un nombre significatif de conventions de l'OIT, engageant la responsabilité des gouvernements. Dans la région, l'exercice des droits civiques et syndicaux se fait très souvent à un risque personnel très élevé pouvant mettre en danger la vie même.

5.   Critères à prendre en considération en vue d'un accord d'association UE/Amérique centrale

5.1

Dans l'approche à suivre pour la concrétisation du futur accord d'association, il importe d'établir clairement certains critères qui devront être pris en considération et qui doivent, selon le CESE, constituer des éléments essentiels non seulement de la réussite de cet accord mais également d'une stratégie plus globale pour toute l'Amérique latine.

5.2

Asymétries. L'un des premiers éléments dont il faut tenir compte est l'existence de profondes asymétries entre les deux régions à plusieurs égards: extension territoriale, population, PIB, relations commerciales et développement socio-économique.

5.2.1

L'existence d'asymétries aussi importantes entre les deux régions oblige à mettre en œuvre des mesures compensatoires pour la réussite de l'accord d'association de sorte qu'il puisse contribuer à ce que les politiques commerciales et de coopération soient cohérentes et non divergentes dans leurs objectifs.

5.3

Promotion de la cohésion sociale. Il doit s'agir d'un critère central du futur accord non seulement parce que la cohésion sociale est un élément stratégique de l'action de l'Union européenne dans ses relations avec les pays tiers mais également parce que c'est la clé du développement de l'Amérique centrale, région en proie à d'énormes problèmes de pauvreté et d'exclusion sociale.

5.3.1

Pour ce faire, il faut prendre toutes les mesures nécessaires et suffisantes en matière de développement de politiques sociales: éducation, santé et sécurité sociale, par exemple, et de fiscalité, entre autres domaines, afin que la société dans son ensemble puisse bénéficier du développement économique et des opportunités qu'offrirait l'accord d'association.

5.4

Renforcement de la démocratie et des institutions. Dans une société aussi diverse et aussi déchirée par la pauvreté, de longues dictatures et des guerres civiles que l'Amérique centrale, il importe que l'accord soit l'occasion de renforcer la démocratie, en particulier la démocratie participative, ainsi que les institutions qui interviennent dans ce processus.

5.4.1

Des institutions aussi diverses que celles qui luttent pour la défense des droits de l'homme, des droits des peuples indigènes ou afrodescendants, des droits des femmes, des travailleurs ou de l'environnement, réclament aujourd'hui une plus grande participation au processus de décision politique, économique et social malgré les difficultés qu'elles affrontent pour se faire entendre en tant qu'interlocuteurs à part entière. Il importe que l'accord soit un facteur de stimulation de la reconnaissance de leur intervention.

5.4.2

Concernant concrètement le CC-SICA, Comité consultatif du Système d'intégration centraméricain, organe consultatif consacré par l'article 12 du protocole de Tegucigalpa, son rôle de représentant de la société civile organisée doit être reconnu et soutenu et il doit se voir accorder les moyens logistiques et budgétaires nécessaires pour mener à bien sa mission.

5.4.3

Le CESE reconnaît le CC-SICA comme un partenaire institutionnel avec lequel il a conclu en avril 2006 un accord sur la base d'un engagement commun à défendre les principes de la démocratie, les droits de l'homme et les droits économiques et sociaux et d'une volonté de participation au processus de dialogue et d'instauration de liens économiques et de coopération plus étroits entre l'Union européenne et le Système d'intégration centraméricain.

5.5

Renforcement de l'intégration régionale. L'intégration régionale ne doit pas être envisagée uniquement comme une exigence européenne en vue de la conclusion d'un accord commercial mais elle doit également être considérée comme une opportunité à saisir, par les pays d'Amérique centrale, pour surmonter leurs faiblesses économiques et mettre à profit les synergies qu'elle peut produire.

5.5.1

L'on ne peut néanmoins avoir une vision maximaliste de la question. L'intégration régionale est un processus de longue haleine qui requiert des aides et un effort continu. En ce sens, l'accord doit prévoir un ensemble de mécanismes (notamment la création de fonds de compensation douanière et de cohésion économique et sociale) de nature à stimuler, à soutenir et à faciliter le processus intégrateur de l'Amérique centrale.

5.6

Conférer une dimension sociale à l'accord d'association. L'accord d'association comporte trois volets étroitement liés: politique, commercial et de coopération. Ces trois volets sont importants et il n'est pas possible d'accorder dans les négociations plus d'importance à celui qui pourrait sembler plus complexe et difficile.

5.6.1

Au plan politique, l'accord d'association devra instaurer des mesures concrètes d'appui à la bonne gouvernance, comporter une dimension sociale visant à parvenir à un niveau maximal de cohésion sociale, comprendre des clauses relatives à la prise en considération du rôle des femmes et à la défense des droits de l'homme, du travail, environnementaux, des indigènes et des afrodescendants.

5.6.2

Il devra également aborder la situation de l'immigration en Amérique centrale, dont les conséquences pour le développement des pays de la région peuvent être contradictoires (transferts de fonds/fuite des cerveaux et de travailleurs en activité). Cette approche doit prendre en compte le respect dû à la dignité et aux droits des immigrés qui vivent et travaillent dans l'Union européenne.

5.6.3

Dans le domaine de la coopération, l'accord doit prévoir le maintien voire le renforcement des aides communautaires destinées au développement de la région et à la résolution de ses carences politiques, économiques, sociales et environnementales. Selon le CESE, cet accord peut et doit prévoir un soutien d'institutions spécialisées dans certaines questions, telles que l'OIT, l'UNESCO ou l'OMS en vue de suivre l'évolution des éléments les plus sensibles.

5.6.4

D'ailleurs, pour répondre aux attentes des pays de la région d'Amérique centrale qui ont déjà l'expérience d'autres accords internationaux (en particulier le CAFTA, conclu avec les États-Unis d'Amérique), l'Europe doit démontrer que cet accord poursuit des objectifs plus larges et qui correspondent à une vision sociale globale, inspirée des principes fondateurs de l'UE-même, sans oublier le modèle économique capable de conduire au développement durable de la région.

6.   Les recommandations du CESE

Compte tenu de ce qui est exposé aux paragraphes antérieurs, le CESE formule les recommandations suivantes:

6.1

L'accord d'association entre l'UE et les pays d'Amérique centrale doit être une priorité politique de l'Union en raison de son caractère stratégique pour l'action birégionale de l'UE avec d'autres partenaires d'Amérique latine.

6.2

Il doit englober, sur un pied d'égalité, tous les volets concernés: politique, commercial et de coopération.

6.3

Il doit tenir compte du fait que le partenaire de cette négociation avec l'UE inclut les pays les plus pauvres d'Amérique latine et que les asymétries criantes existant entre les deux régions imposent de renforcer les programmes de coopération de manière à éviter les impacts négatifs qui pourraient s'ensuivre et de prévoir une ouverture commerciale s'inscrivant dans cette logique.

6.4

Il doit comporter des mesures qui favorisent la compétitivité des entreprises et assure la stabilité juridique des investissements et prévoir l'existence d'un instrument de compensation des difficultés naturelles que la réalisation du marché unique d'Amérique centrale soulève en raison des asymétries existantes entre les différentes économies de la région.

6.5

L'accord doit contribuer de manière décisive au renforcement de la cohésion sociale dans la région, les bénéfices devant par conséquent être visibles pour tous et non seulement pour certains secteurs, déjà bien lotis.

6.6

Il doit comprendre une dimension socioprofessionnelle eu égard surtout aux normes de l'OIT. L'Accord d'association doit encourager le respect par les parties signataires des principes et des valeurs consacrés dans la Constitution de l'OIT ainsi que l'application de ses principaux instruments en matière sociale, tels que la Déclaration relative aux principes et aux droits fondamentaux au travail (1998), la Déclaration de principes tripartite sur les entreprises multinationales et la politique sociale (1977, amendée en 2000), et la Résolution de la Conférence internationale du travail sur les droits syndicaux et leur lien avec les libertés civiles (1970).

6.7

Il doit comporter une dimension sociale claire non seulement en raison de l'importance accordée aux questions d'ordre professionnel mais également par souci du respect de l'environnement et dans le but de parvenir au progrès global de la région et de sa population.

6.8

Il doit prêter attention aux secteurs les plus vulnérables de la population tels que les femmes, les indigènes et les afrodescendants.

6.9

Il doit prévoir les mécanismes nécessaires à une participation effective de la société civile depuis le début des négociations jusqu'à la mise en œuvre de ce qui aura été négocié.

6.10

Dans cette optique, il y a lieu de renforcer les aides aux organismes de consultation de la société civile organisée, et plus particulièrement au CC-SICA, organe institutionnel du processus d'intégration de la région d'Amérique centrale, de manière à ce qu'ils puissent disposer des moyens humains, logistiques et financiers nécessaires à l'accomplissement de leur mission.

6.11

Il convient également d'instaurer d'ores et déjà le Comité conjoint de suivi des négociations, composé de membres du CESE et du CC-SICA, auxquels pourront se joindre, d'un commun accord entre les parties, d'autres organisations dont la présence serait jugée nécessaire et pertinente pour l'analyse du processus de négociation.

6.12

Enfin, il faut engager les discussions entre le CC-SICA et le CESE au sujet de la composition, des fonctions et du mode de fonctionnement du futur Comité consultatif conjoint, organe institutionnel consultatif du futur accord d'association.

Bruxelles, le 12 juillet 2007.

Le Président

du Comité économique et social européen

Dimitris DIMITRIADIS


(1)  «La cohésion sociale en Amérique latine et dans les Caraïbes», JO C 110 du 10.4.2004; «Les relations UE-Mexique», «Les relations entre l'UE et la Communauté andine des nations», JO C 309 du 16.12.2006.

(2)  Il est dit au paragraphe 31 de la Déclaration finale du sommet de Vienne: «Rappelant l'objectif stratégique commun de la déclaration de Guadalajara et ayant à l'esprit les résultats positifs de l'exercice d'évaluation conjoint sur l'intégration économique régionale réalisé avec l'Amérique centrale, nous saluons la décision qu'ont prise l'Union européenne et l'Amérique centrale de lancer des négociations en vue d'un accord d'association, y compris de la création d'une zone de libre-échange».

(3)  Les exportations entre pays d'Amérique centrale ont augmenté de près de 60 % entre 1995 et 2002. «Rapport sur l'Amérique centrale 2004» BID.

(4)  Parlement d'Amérique centrale.


27.10.2007   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 256/144


Avis du Comité économique et social européen sur «La promotion de l'esprit d'entreprise chez les femmes dans la région Euromed»

(2007/C 256/25)

Le 17 janvier 2007, le Comité économique et social européen a décidé, conformément à l'article 29, paragraphe 2 de son règlement intérieur, d'élaborer un avis sur «La promotion de l'esprit d'entreprise chez les femmes dans la région Euromed».

La section spécialisée «Relations extérieures», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 14 juin 2007 (rapporteuse: Mme ATTARD).

Lors de sa 437e session plénière des 11 et 12 juillet 2007 (séance du 12 juillet 2007), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 130 voix pour, 1 voix contre et 4 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1

Le CESE se félicite de l'engagement sans réserve de l'Union européenne et des États méditerranéens en faveur du partenariat euro-méditerranéen, comme prévu dans le programme quinquennal de travail de la Commission européenne, qui soutient en particulier les projets visant à développer des actions pour promouvoir l'émancipation des femmes. Il propose à cette fin que soient alloués des fonds spécifiques pour financer ceux des pays de la région euro-méditerranéenne qui s'engageront dans des actions positives visant à améliorer concrètement le statut juridique de la femme (1).

1.2

Le CESE plaide instamment pour que les mécanismes d'évaluation créés à la suite des conclusions de la première conférence ministérielle euro-méditerranéenne sur «Le renforcement du rôle des femmes dans la société» soient mis à profit pour suivre et évaluer attentivement le développement de l'activité entrepreneuriale des femmes et que des mesures soient prises pour le favoriser.

1.3

Le CESE appelle à ce que des mesures et des objectifs spécifiques destinés à promouvoir l'esprit d'entreprise chez les femmes soient intégrés aux plans d'action nationaux adoptés dans le cadre de la politique européenne de voisinage (PEV).

1.4

Le CESE recommande d'augmenter les financements alloués au titre de la PEV pour le développement des activités entrepreneuriales des femmes et l'assistance technique dont elles bénéficient pour la création d'entreprises.

1.5

Le CESE salue les initiatives prises par la direction générale des entreprises et de l'industrie ainsi que l'Office de coopération EuropeAid (2) à l'attention des chefs d'entreprise en Europe et dans les pays partenaires du bassin méditerranéen. Il appelle les partenaires euro-méditerranéens à prendre des mesures analogues, en ciblant les besoins de la région au moyen des plans d'action qui ont été négociés avec les pays partenaires méditerranéens.

1.6

Le CESE accueille avec satisfaction la création d'une commission ad hoc sur les droits de la femme au sein de l'Assemblée parlementaire euro-méditerranéenne (APEM). Il invite cette dernière à proposer sans tarder des mesures pour renforcer les structures entrepreneuriales gérées à l'heure actuelle par des femmes et à promouvoir des initiatives durables et orientées vers l'avenir qui s'inscrivent dans le contexte de la concurrence mondiale.

1.7

Le CESE recommande que des mesures visant spécifiquement les femmes soient prises dans le cadre de la mise en œuvre de la charte euro-méditerranéenne pour l'entreprise (3).

1.8

Des efforts doivent être consentis pour faire en sorte que la proportion de jeunes femmes et de jeunes hommes bénéficiant des programmes euro-méditerranéens à destination de la jeunesse soit équilibrée et ce aussi bien au niveau des participants à ces programmes que des personnes responsables.

1.9

Le CESE salue les initiatives prises par la plateforme Euromed Jeunesse, qui a créé un réseau Euromed d'associations de jeunesse travaillant sur les questions d'égalité entre hommes et femmes (4), ainsi qu'un réseau Euromed pour les jeunes entrepreneurs (5).

1.10

Le CESE estime que de meilleurs résultats pourront être obtenus dans le domaine de la promotion de l'esprit d'entreprise chez les femmes en coopérant au niveau interministériel pour les échanges de vues relatifs aux domaines d'action prioritaires, en y associant les autres acteurs concernés, et notamment des représentants des institutions financières et des organismes de mise en œuvre, des représentants des entreprises, des experts et des bailleurs de fonds, et en facilitant la transmission d'entreprises existantes à des femmes.

1.11

Le CESE appelle à ce que l'action des ONG et des organisations socioprofessionnelles travaillant dans le domaine de la promotion des activités économiques des femmes soit renforcée par le biais de partenariats public-privé.

1.12

Le CESE invite les acteurs concernés euro-méditerranéens à organiser sans tarder une conférence sur le thème des femmes chefs d'entreprise dans la région euro-méditerranéenne pour débattre de questions connexes et émettre des propositions relatives à la contribution que peuvent apporter les femmes pour relever les défis mondiaux auxquels est confrontée la région.

1.13

Le CESE réaffirme sa conviction que la promotion de l'esprit d'entreprise chez les femmes dans la région euro-méditerranéenne joue un rôle important pour la création d'une économie active et dynamique adaptée à un contexte mondialisé.

1.14

Le CESE considère que le renforcement de l'environnement entrepreneurial pour les femmes est un préalable nécessaire pour développer l'accès aux marchés au sein des pays de la zone et vis-à-vis des États membres de l'Union européenne.

1.15

Dans l'optique de relever les défis auxquels seront confrontées les femmes chefs d'entreprise, le CESE recommande de réaliser des recherches plus approfondies pour identifier les besoins spécifiques existant au sein de chaque pays.

1.16

Le CESE relève qu'il existe un grand nombre d'observatoires (Global Entrepreneurship Monitor (GEM), PNUD, Banque mondiale) qui étudient la situation des entreprises dans la région Euromed; il préconise toutefois la mise en place d'une plate-forme afin de mieux communiquer les résultats de ces observations aux responsables politiques et d'assurer la collecte et la diffusion des informations auprès des microentreprises et des PME dans la région Euromed. Cette plateforme devrait se concentrer sur:

a)

les domaines dans lesquels les femmes chefs d'entreprise rencontrent des difficultés particulières;

b)

des mesures destinées à soutenir et à développer des programmes en faveur des femmes chefs d'entreprise;

c)

l'élaboration de mécanismes relatifs au statut juridique des coentrepreneurs et des conjoints aidants et à leur protection sociale;

d)

des actions visant à renforcer la sécurité sociale et le statut juridique des femmes qui créent leur propre entreprise.

1.17

Dans le domaine des technologies de l'information et de la communication, le Comité suggère:

d'encourager en priorité les investissements en matière d'infrastructures et les stratégies destinées à améliorer l'accès aux nouvelles technologies de l'information et de la communication;

de faire en sorte que les femmes qui créent leur propre entreprise puissent plus facilement avoir accès aux équipements et aux formations en matière de technologies de l'information et de la communication, et qu'ainsi, elles puissent plus aisément commercialiser leurs produits et les acheminer aux consommateurs par le biais des chaînes de distribution appropriées, sachant que l'utilisation des technologies de l'information et de la communication pourrait également permettre d'améliorer le marketing;

de renforcer la participation des femmes au processus décisionnel relatif aux technologies de l'information et de la communication, ainsi qu'à leur développement et à leur conception, en établissant un dialogue avec les entreprises de ce secteur et les autres acteurs concernés, pour dégager des domaines de coopération et d'action commune.

Le CESE engage instamment le Forum universitaire Euromed permanent (6) créé à Tampere à accorder la priorité aux aspects de ses initiatives qui se rapportent à l'égalité entre les hommes et les femmes, et ce notamment dans le domaine de l'esprit d'entreprise.

1.18

Le CESE recommande d'accorder une attention particulière à l'influence des médias de masse et notamment de la télévision sur l'esprit d'entreprise et les femmes.

2.   Recommandations pour des mécanismes spécifiques à l'entrepreneuriat féminin dans la zone Euromed

2.1

Il est nécessaire d'introduire des politiques et des programmes spécifiques afin que les femmes puissent apporter une plus grande contribution à la croissance et au développement. Certaines de ces politiques pourraient être déterminées dans un plan d'action doté d'un calendrier et de procédures d'évaluation précis, ce plan d'action devant inclure les éléments suivants:

1.

Mécanismes de renforcement des capacités et systèmes de soutien encourageant les femmes à appréhender les environnements dans lesquels elles vivent et travaillent et la manière dont elles peuvent participer activement à leur développement au moyen de leurs propres capacités. Ces mesures pourraient inclure des modalités visant à promouvoir la création de groupes d'entraide.

2.

Investissements dans les infrastructures et les services sociaux afin d'aider les femmes salariées et indépendantes.

3.

Définition de ce que sont les activités entrepreneuriales traditionnelles, les PME et le travail indépendant.

4.

Création de conditions d'égalité pour les entreprises détenues par des hommes et celles détenues par des femmes, quelle que soit la taille de l'entreprise.

5.

Création d'un système juridique équitable permettant aux femmes de s'engager contractuellement et d'accéder à la propriété.

6.

Formation sur mesure, établie en fonction de leurs besoins spécifiques, pour les femmes qui gèrent ou possèdent une entreprise. Cette formation pourrait également inclure subsidiairement des programmes de tutorat, la création d'organismes professionnels et des conseils sur des questions juridiques et fiscales.

7.

Création d'entreprises de garantie mutuelle, organes économiques dont les membres sont des propriétaires de PME qui agissent en tant que garants pour l'obtention de facilités bancaires.

8.

Mise en œuvre de programmes spécifiques pour faciliter la création d'entreprises par les femmes migrantes et les groupes minoritaires.

9.

Mécanismes d'information et de soutien pour la création d'entreprises et de coopératives sociales.

10.

Coopération et participation à des réseaux avec les homologues de l'UE afin d'identifier des structures et des mécanismes, notamment les meilleures pratiques, qui ont fourni une valeur ajoutée ailleurs.

11.

Politiques éducatives qui promeuvent un état d'esprit et des attitudes favorables à l'entreprise dès le plus jeune âge (7). L'état d'esprit entrepreneurial doit être conçu comme un processus d'apprentissage tout au long de la vie, qui débute dans l'enseignement primaire. Cela peut fournir une flexibilité accrue à différentes étapes de la vie d'une personne.

12.

Renforcement de la participation des femmes au processus décisionnel à tous les niveaux: gouvernement national, collectivités locales, pouvoir judiciaire.

13.

Ouverture des marchés publics aux PME et en particulier aux entreprises détenues par des femmes afin de stimuler la croissance économique.

14.

Objectifs spécifiques d'égalité hommes-femmes dans les politiques de l'emploi, assortis d'indicateurs qualitatifs et quantitatifs, car il est vital que davantage de femmes deviennent chefs d'entreprise ou obtiennent un emploi, et que la qualité de cet emploi soit améliorée (8).

3.   Situation actuelle et défis à relever

3.1

Il est important que la problématique des droits des femmes ne soit pas abordée de manière isolée et que l'on veille à faire le lien entre cette question et celle du rôle des femmes dans le développement économique. Il est essentiel que tous les partenaires sociaux reconnaissent le lien qui unit les droits de l'homme, la démocratie, le développement et les droits des femmes. Il convient de donner la priorité à l'élimination des obstacles à l'émancipation des femmes, qui résultent des traditions et des codes culturels et familiaux.

3.2

Pour s'attaquer aux questions de disparités entre hommes et femmes en termes d'éducation et d'emploi dans la région euro-méditerranéenne, il s'impose de mener une action concertée et de créer par là un environnement au sein duquel les femmes pourront développer leurs activités entrepreneuriales.

3.3

Le taux de femmes analphabètes, s'il varie d'un pays à l'autre, continue à être extrêmement élevé dans la région du Proche Orient et de l'Afrique du Nord, s'élevant à 42 % en moyenne contre un taux de 21 % en moyenne pour les hommes. Les deux dernières décennies ont toutefois été marquées par une évolution positive en matière d'égalité d'accès à l'éducation, avec des résultats variables selon les pays. Dans tous les pays de la zone, il existe une différence importante entre le taux d'alphabétisme des jeunes femmes (15-24 ans) et celui des femmes adultes (24 ans et plus) (9).

3.4

Au cours de la dernière décennie, les opportunités d'emploi se sont accrues pour les femmes, du fait de l'éducation et de la formation ainsi que sous l'effet de la croissance qu'ont connue les secteurs où la demande de main-d'œuvre féminine est la plus forte, tels les services sociaux, l'éducation et la santé et les professions de services. Parmi les femmes en âge d'exercer une activité, seules 32 % travaillent ou sont à la recherche d'un emploi en dehors de leur foyer. Dans les classes sociales traditionnelles où les femmes sont scolarisées, on les dissuade en outre de chercher un emploi.

3.5

Il faudrait que le système scolaire encourage les initiatives entrepreneuriales et la prise de risques. Il est primordial de mettre en place des programmes nationaux d'éducation destinés à améliorer la qualité de l'enseignement de base et à éradiquer l'analphabétisme chez les femmes et en particulier chez celles faisant partie de groupes de population défavorisés ou souffrant d'un handicap.

3.6

Il est certes important d'agir dans le domaine de l'éducation civique et d'informer la population au sujet des droits sociaux, politiques, juridiques et économiques des femmes, mais il est également nécessaire de sensibiliser les représentants des organismes financiers et les autres acteurs concernés aux besoins des femmes dans le cadre de leur activité économique.

3.7

Les inégalités de traitement entre les hommes et les femmes doivent être considérées comme un sujet d'importance majeure dans le contexte social et politique ainsi que dans le cadre du développement global de la croissance économique de la région. Le rôle et le statut particuliers que la société impose aux femmes par l'intermédiaire du droit traditionnel de la famille, également connu sous le nom de «Code du statut personnel» constituent pour elles une source de discrimination. Bien que la déclaration du millénaire ait été ratifiée par quasiment 190 pays et notamment les pays arabes (10), le statut légal des femmes, qui régit leur participation aux activités économiques, politiques, sociales, civiques et culturelles reste l'un des principaux obstacles à surmonter.

3.8

Il est nécessaire de conférer une visibilité aux petites entreprises traditionnelles gérées par des femmes et de les renforcer. Il s'agit notamment d'activités non rémunérées réalisées par les femmes au sein de la structure familiale ainsi que d'activités traditionnelles. Il conviendrait de proposer des formations et d'apporter un soutien en vue d'encourager le développement et la modernisation de nombreuses petites entreprises et activités artisanales, qui peuvent devenir des activités rémunératrices et productives, via la mise en place de services commercialisables qui permettront de les rendre économiquement viables.

3.9

C'est dans le secteur agricole que la participation des femmes est la plus élevée. Dans les zones rurales, où une proportion élevée de femmes sont analphabètes ou ne disposent que d'un niveau d'éducation primaire, l'accès aux moyens de formation est très limité (11). Les femmes ne sont pas suffisamment sensibilisées aux possibilités dont elles disposent et manquent de confiance en elles pour améliorer leur situation et celle de leur famille. Aussi est-il nécessaire de prévoir à leur attention des programmes intégrés axés tout à la fois sur le développement personnel, la formation continue, l'apprentissage de l'esprit d'entreprise et l'acquisition de compétences de base en matière de gestion d'entreprise, ainsi que des mesures d'assistance pour leur permettre d'élaborer des plans d'entreprise viables et d'accéder à des prêts à la création d'entreprise et à des crédits pour l'établissement de microentreprises dans leur village. Il conviendrait que ces programmes de formation offrent aux femmes vivant en milieu rural la possibilité de mener conjointement des projets dans le domaine de l'agriculture et d'autres secteurs et qu'ils contribuent à ce que les hommes vivant au sein de leurs collectivités les soutiennent pour la réalisation de leurs activités non agricoles.

3.10

Il est important de constituer de petites coopératives afin d'apporter un soutien aux femmes chefs d'entreprise.

3.11

Il importe en outre d'aider les femmes chefs d'entreprise à découvrir de nouveaux secteurs où elles peuvent prendre des initiatives pour développer des activités économiques non traditionnelles et notamment de renforcer les capacités des entreprises ainsi créées sur le plan de la publicité, du marketing et de la tarification, et ce en ciblant les marchés étrangers.

3.12

Pour créer des opportunités en vue de développer les activités économiques des femmes, il est nécessaire de disposer d'une vision claire de la situation socioéconomique actuelle et future au sein des différentes régions.

3.13

L'implication de tous les acteurs concernés est nécessaire pour éliminer les obstacles auxquels se heurtent les femmes et mettre en place des politiques et des programmes spécifiques, afin de leur donner la possibilité de contribuer plus largement à la croissance et au développement.

3.14

L'accès aux moyens de financement revêt une importance cruciale. Il convient de relever les plafonds de crédit pour encourager les microentreprises et les petites structures à se développer et à investir dans leur activité. Les gouvernements et les bailleurs de fonds pourraient proposer des incitations aux organismes de prêt officiels dans le cadre de ces projets. Les décideurs politiques devraient toujours garder à l'esprit les différences qui existent entre les PME et les micro-entreprises en termes d'organisation, de financement, de productivité et de potentiel de croissance.

3.15

Dans le cadre des incitations au lancement de projets entrepreneuriaux et à la création d'entreprise, il conviendrait que l'efficacité du secteur des microcrédits soit renforcée et que les banques commerciales proposent des conditions satisfaisantes et réalistes pour l'octroi de prêts.

3.16

En organisant des actions de marketing et de promotion dans la région et au sein des États membres de l'Union européenne, on peut ouvrir la voie à des initiatives axées sur l'exportation et ce notamment dans le secteur manufacturier.

3.17

Il convient d'envisager l'avenir des femmes dans la région euro-méditerranéenne dans le contexte économique, politique, social et familial global. Sans croissance économique et sans augmentation du taux d'emploi, les femmes continueront à faire l'objet de discriminations dans le cadre d'une concurrence déloyale avec les hommes.

3.18

Il est nécessaire de mettre en place des politiques et des programmes spécifiques qui permettent aux femmes de contribuer plus largement à la croissance et au développement.

3.19

Des stratégies visant tout particulièrement les femmes chefs d'entreprise peuvent leur offrir des opportunités de s'affranchir des structures économiques traditionnelles et d'investir davantage dans l'activité entrepreneuriale.

3.20

Les recherches réalisées en vue d'étayer toutes les initiatives prises dans ce contexte doivent identifier les besoins propres à chaque pays, en examinant les atouts et les faiblesses des femmes à travers une typologie par tranches d'âge et des études sectorielles spécifiques.

3.21

Il est nécessaire d'identifier et d'évaluer les mesures nationales relatives aux créations d'entreprises, aux services d'information et de conseil, au financement, à la formation, au tutorat et à la constitution de réseaux en vue de mettre en lumière et d'échanger des bonnes pratiques entre le Nord et le Sud de la zone euro-méditerranéenne ainsi qu'entre les pays de la rive méridionale du bassin. Il est impératif de suivre sur une base régulière les progrès réalisés dans les pays partenaires euro-méditerranéens en vue de s'assurer de l'évolution vers une pleine participation des femmes à la vie économique de leur pays.

3.22

À travers les programmes transnationaux mis en œuvre dans la région euro-méditerranéenne, les associations de femmes chefs d'entreprise peuvent échanger leurs expériences et bonnes pratiques, ce qui est un bon moyen pour développer les activités entrepreneuriales et les compétences sur lesquelles les entreprises peuvent compter.

3.23

Le système des franchises peut offrir une bonne solution permettant aux femmes de s'émanciper par le biais d'une activité indépendante et la création d'une petite entreprise. Ce système peut réduire les risques associés au lancement d'un nouveau projet, dans la mesure où il permet de s'appuyer sur des méthodes et des compétences qui ont déjà fait leurs preuves. Il importe également d'améliorer les performances des centres d'affaires. Il est nécessaire de renforcer les capacités d'une manière qui prenne en compte les exigences auxquelles sont confrontées les entreprises et pour ce faire, on peut notamment s'inspirer des méthodes et des programmes qui ont donné de bons résultats dans d'autres pays.

3.24

En examinant les possibilités offertes par de nouveaux secteurs tels que les services en technologies de l'information et de la communication, la recherche et le développement, la gestion des médias et la production de programmes médiatiques innovants, ainsi qu'en sondant les nouvelles niches économiques qui existent dans le secteur du tourisme, on peut ouvrir de nouveaux champs d'opportunités entrepreneuriales pour les femmes.

3.25

Les technologies de l'information et de la communication contribuent à la productivité, à la croissance, à la compétitivité et à l'emploi. Le développement de ce secteur est essentiel pour que la région euro-méditerranéenne puisse faire face à la concurrence mondiale. Lorsque l'on met en place les infrastructures nécessaires, il est important de s'assurer qu'elles soient accessibles à tous et d'éviter ainsi que la fracture numérique ne s'étende, notamment au détriment des femmes et des franges de la population dont le taux d'analphabétisme est élevé. Un développement des technologies de l'information et de la communication porteur d'une valeur ajoutée permettra de stimuler les compétences entrepreneuriales des hommes comme des femmes.

3.26

Le portail Internet sur l'entrepreneuriat des femmes (12) qui a été mis en ligne par la direction générale des entreprises et de l'industrie de la Commission européenne peut constituer un instrument utile pour l'échange de bonnes pratiques et la constitution de réseaux.

3.27

Des emplois formels pourraient en outre être créés dans les structures de garde d'enfant, ce qui aiderait également les femmes à concilier vie familiale et responsabilités professionnelles.

3.28

En proposant aux femmes des services d'assistance et d'information au sujet de l'emploi indépendant, on pourra contribuer à réduire la pression exercée par l'immigration. En effet, il sera ainsi possible de créer des emplois dans le pays d'origine comme dans le pays d'accueil.

4.   Le processus de Barcelone et la politique européenne de voisinage

4.1

La politique européenne de voisinage vise à favoriser l'intégration économique entre l'UE et ses partenaires. Les moyens budgétaires alloués aux partenaires méditerranéens pour la période 2007-2013 au titre de la PEV atteignent un chiffre de 12 milliards d'euros, ce qui correspond à une augmentation de 32 %. La PEV n'a toutefois pas accordé suffisamment d'attention à la promotion des activités économiques des femmes.

4.2

Au cours de la session plénière tenue par l'Assemblée parlementaire euro-méditerranéenne les 16 et 17 mars 2007, le statut d'observateur permanent a été accordé au CESE et il dispose, à ce titre, d'un droit de parole au cours de toutes les réunions de l'APEM. Il bénéficie ainsi d'une occasion majeure de plaider en faveur du renforcement de l'activité économique des femmes.

4.3

Lors de la première conférence ministérielle euro-méditerranéenne sur «Le renforcement du rôle des femmes dans la société» tenue en novembre 2006 à Istanbul (13), l'engagement a été pris de promouvoir les activités entrepreneuriales des femmes en favorisant leur accès à la terre, aux financements, aux marchés, à l'information, à la formation et aux réseaux et d'inciter les institutions financières à établir des offres adaptées aux besoins des femmes chefs d'entreprise, notamment au moyen de microcrédits.

5.   La charte euro-méditerranéenne pour l'entreprise

5.1

Lors de la cinquième conférence euro-méditerranéenne tenue à Caserte, en Italie, le 4 octobre 2004, les ministres de l'industrie ont approuvé un programme de travail en matière de coopération industrielle pour les années 2005 et 2006. Ils ont notamment proposé de procéder à des échanges de connaissances et d'expériences dans le domaine de l'éducation à l'esprit d'entreprise.

5.2

À la suite de ces décisions, la direction générale des entreprises et de l'industrie de la Commission européenne a lancé la charte euro-méditerranéenne pour l'entreprise (14) qui a été adoptée par neuf partenaires méditerranéens. Un des principes essentiels de la charte est de bâtir une société de l'entreprise dans la région euro-méditerranéenne par une action qui s'adresse à la fois aux jeunes et aux adultes et passe par le biais du système scolaire à tous les niveaux, dans une optique d'éducation et de formation tout au long de la vie. La charte ne contient toutefois aucune indication spécifique pour relever les défis auxquels les femmes chefs d'entreprise sont confrontées.

5.3

La charte est un instrument efficace en vue d'améliorer les conditions d'activité des entreprises. La promotion de l'esprit d'entreprise chez les femmes n'est toutefois ni un principe clé ni un des objectifs de sa mise en œuvre.

5.4

Si le programme de travail en matière de coopération industrielle euro-méditerranéenne pour la période 2007-2008 s'appuie sur ce qui a été réalisé jusqu'à présent et renforce les mesures prises en vue d'améliorer la mise en œuvre, il ne vise toujours pas spécifiquement la promotion de l'esprit d'entreprise chez les femmes.

5.5

Plusieurs initiatives menées par la Commission européenne peuvent servir d'exemples de bonnes pratiques et de transfert de connaissances entre les pays européens et ceux du bassin méditerranéen (15).

6.   Le rôle de la société civile

6.1

La société civile organisée joue un rôle important pour l'émancipation des femmes, leur participation et représentation dans la sphère publique ainsi que pour la promotion de leurs activités entrepreneuriales.

6.2

En choisissant de s'appuyer sur sa très forte tradition d'action en faveur des groupes de population défavorisés, et notamment en faveur des femmes handicapées ou de celles dont les possibilités d'accès aux structures d'éducation et de formation sont limitées voire inexistantes, on pourra s'assurer d'une meilleure utilisation des ressources disponibles, moyennant l'organisation de formations dans le domaine de la gestion et l'octroi de financements.

6.3

À travers les partenariats public-privé, les ONG et les organisations socioprofessionnelles peuvent contribuer efficacement à promouvoir la croissance économique (16). Les partenariats ainsi établis peuvent permettre de proposer une nouvelle gamme de services favorables aux activités rémunératrices.

6.4

Les ONG et les organisations socioprofessionnelles qui disposent d'une expérience dans ce domaine pourraient en outre prendre en charge des activités visant à former et habiliter des personnes, dans l'optique d'éliminer le fossé entre les hommes et les femmes en matière d'éducation.

7.   Le rôle du CESE

7.1

Le CESE a un rôle important à jouer pour garantir la participation de la société civile à la mise en œuvre des actions euro-méditerranéennes relatives à l'intégration des femmes dans la vie économique et sociale (17).

7.2

Le CESE a apporté une contribution sur le thème «Femmes et emploi» à travers un rapport qui a été présenté lors de la 21e réunion du comité consultatif mixte UE-Turquie des 13 et 14 juillet 2006 (18), et il élaborera un rapport sur les femmes et l'esprit d'entreprise pour la prochaine réunion qui se tiendra en novembre 2007 en Turquie.

7.3

Dans la déclaration finale du sommet euro-méditerranéen des Conseils économiques et sociaux et institutions similaires tenu à Ljubljana en Slovénie, des 15 au 17 novembre 2006 (19), les participants se sont engagés à mettre à profit leurs initiatives pour favoriser l'intégration des femmes dans la vie économique et sociale et ce notamment par le biais du développement de l'esprit d'entreprise chez les femmes.

7.4

Le CESE se félicite également que les ministres euro-méditerranéens aient reconnu qu'il importe de promouvoir le rôle de la société civile et de renforcer ses possibilités d'action au moyen d'une meilleure interaction entre, d'une part, les gouvernements et les parlements et, d'autre part, les organisations de la société civile, les organisations de femmes, de jeunes, les syndicats, les associations d'entreprises et fédérations professionnelles, ainsi que par le biais de la coopération entre les administrations nationales, régionales et locales.

7.5

Dans le cadre du processus de Barcelone, l'UE a lancé plusieurs programmes, qui, pour certains, visaient directement la jeunesse des pays euro-méditerranéens. Le Comité a présenté un rapport d'information sur «Le soutien aux jeunes dans les pays partenaires méditerranéens», dans lequel il aborde également le thème de la promotion de l'esprit d'entreprise chez les femmes (20).

8.   Conclusion

8.1

Il conviendrait que la Commission européenne s'attache à réaliser une étude d'impact des mesures prises dans le cadre de la politique européenne de voisinage et notamment des programmes MEDA, et qu'elle veille à y prendre en compte de manière systématique les questions liées à l'égalité entre hommes et femmes. La participation des femmes aux activités entrepreneuriales de la région Euromed est essentielle pour relever les défis économiques de la mondialisation. Le programme régional de la Commission européenne qui est destiné à la région du Proche Orient et de l'Afrique du Nord et vise à promouvoir le rôle des femmes dans la vie économique marque une avancée positive. Des mesures devraient être prises en vue de faire en sorte que les représentants de la société civile concernés et notamment les ONG actives dans le domaine des droits des femmes soient consultés au cours de l'ensemble des phases des projets (programmation, mise en œuvre, évaluation et suivi), afin de s'assurer que les objectifs fixés puissent être atteints.

Bruxelles, le 12 juillet 2007.

Le Président

du Comité économique et social européen

Dimitris DIMITRIADIS


(1)  http://ec.europa.eu/external_relations/euromed/barcelona_10/docs/10th_comm_fr.pdf

(2)  http://ec.europa.eu/europeaid/index_fr.htm.

(3)  http://ec.europa.eu/enterprise/enterprise_policy/ind_coop_programmes/med/doc/f1950_fr.pdf.

(4)  http://www.cesie.org/cms/index.php?option=com_content&task=view&id=70&Itemid=85

(5)  REX/222 Rapport d'information — «Le soutien aux jeunes dans les pays partenaires méditerranéens», CESE 642/2006 fin.

(6)  http://www.medainstitute.fi/?navi=360&lang=2.

(7)  Avis du CESE «Stimuler l'esprit d'entreprise par l'enseignement et l'apprentissage», rapporteuse Mme JERNECK.

(8)  Avis du CESE «Employabilité et esprit d'entreprise — Le rôle de la société civile, des partenaires sociaux et des organismes régionaux et locaux du point de vue du genre», rapporteur: M. PARIZA CASTAÑOS.

(9)  Base de données centrale de la Banque mondiale (avril 2006).

(10)  HIJAB, Nadia, 2001: «Laws, Regulations and Practices impeding Women's Economic Participation in the MENA Region» («Lois, règles, et pratiques faisant obstacle à la participation des femmes dans la vie économique de la région du Proche Orient et de l'Afrique de Nord») rapport parallèle soumis à la Banque mondiale en avril.

(11)  Émancipation économique des femmes palestiniennes vivant en milieu rural — programme MEDA, EuropeAid, janvier 2006 — décembre 2007 — un projet de développement conjoint de l'Autorité palestinienne, d'Israël et de l'Union européenne.

(12)  http://ec.europa.eu/enterprise/entrepreneurship/craft/craft-women/womenentr_portal.htm.

(13)  http://ec.europa.eu/comm/external_relations/euromed/women/docs/conclusions_1106.pdf.

(14)  http://ec.europa.eu/enterprise/enterprise_policy/ind_coop_programmes/med/doc/f1950_fr.pdf.

(15)  http://ec.europa.eu/enterprise/entrepreneurship/craft/craft-women/women-dgentr-activities.htm.

http://ec.europa.eu/enterprise/entrepreneurship/craft/craft-women/database-women.htm.

(16)  file://E:\PPP for women entrepreneurship.htm 8.3.2007.

(17)  «Le rôle des organes consultatifs et des organisations socioprofessionnelles dans la mise en œuvre des accords d'association et dans le cadre de la politique européenne de voisinage».

(18)  Comité consultatif mixte UE-Turquie.

(19)  http://www.europarl.europa.eu/intcoop/empa/home/final_declaration_ljubljana_112006_fr.pdf

(20)  Rapport d'information — «Le soutien aux jeunes dans les pays partenaires méditerranéens».