ISSN 1725-2431

Journal officiel

de l'Union européenne

C 28

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Édition de langue française

Communications et informations

49e année
3 février 2006


Numéro d'information

Sommaire

page

 

II   Actes préparatoires

 

Comité économique et social européen

 

421ème session plénière des 26 et 27 octobre 2005

2006/C 028/1

Avis du Comité économique et social européen sur le Livre Vert sur les successions et testaments[COM(2005) 65 final]

1

2006/C 028/2

Avis du Comité économique et social européen sur la Situation et perspectives des sources d'énergie traditionnelles que sont le charbon, le pétrole et le gaz naturel dans la future combinaison énergétique

5

2006/C 028/3

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif au financement pluriannuel de l'Agence européenne pour la sécurité maritime dans le domaine de la lutte contre la pollution causée par les navires et modifiant le règlement (CE) no 1406/2002[COM(2005) 210 final — 2005/0098 (COD)]

16

2006/C 028/4

Avis du Comité économique et social européen sur la Communication de la Commission au Conseil relative à la gestion des risques et des crises dans le secteur agricole[COM(2005) 74 final]

18

2006/C 028/5

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de directive du Conseil fixant des règles minimales de protection des poulets destinés à la production de viande[COM(2005) 221 final — 2005/0099 CNS]

25

2006/C 028/6

Avis du Comité économique et social européen sur le thème Proposition de décision du Parlement européen et du Conseil établissant, pour la période 2007-2013, le programme Citoyens pour l'Europe visant à promouvoir la citoyenneté européenne active[COM(2005) 116 final — 2005/0041 (COD)]

29

2006/C 028/7

Avis du Comité économique et social européen sur la Communication de la Commission au Conseil sur les politiques européennes de la jeunesse Répondre aux préoccupations des jeunes Européens — Mise en œuvre du Pacte européen pour la jeunesse et promotion de la citoyenneté active[COM(2005) 206 final]

35

2006/C 028/8

Avis du Comité économique et social européen sur La période de réflexion: la structure, les sujets et le cadre pour une évaluation du débat sur l'Union européenne

42

2006/C 028/9

Avis du Comité économique et social européen sur La mobilité des personnes dans l'Europe élargie et son impact sur les moyens de transport

47

2006/C 028/0

Avis du Comité économique et social européen sur les

52

2006/C 028/1

Avis du Comité économique et social européen sur la Communication de la Commission au Conseil et au Parlement européen — Rapport sur la mise en œuvre de la stratégie forestière de l'Union européenne[COM(2005) 84 final]

57

2006/C 028/2

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de règlement du Conseil portant organisation commune des marchés dans le secteur des semences[COM(2005) 384 final — 2005/0164 (CNS)]

66

2006/C 028/3

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de règlement du Conseil modifiant le règlement (CE) no 1493/1999 portant organisation commune du marché vitivinicole[COM(2005) 395 final — 2005/0160 CNS]

68

2006/C 028/4

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil instituant le Fonds de Solidarité de l'Union européenne[COM(2005) 108 final — 2005/0033 (COD)]

69

2006/C 028/5

Avis du Comité économique et social européen sur le thème: Commerce éthique et dispositifs visant à apporter une garantie aux consommateurs

72

2006/C 028/6

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de règlement du Conseil portant organisation commune des marchés dans le secteur du houblon[COM(2005) 386 final — 2005/0162 (CNS)]

82

2006/C 028/7

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de règlement du Conseil modifiant le règlement (CE, Euratom) no 1605/2002 du Conseil portant règlement financier applicable au budget général des Communautés européennes[COM(2005) 181 final — 2005/0090 (CNS)]

83

2006/C 028/8

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de directive du Conseil définissant les modalités du remboursement de la taxe sur la valeur ajoutée, prévu par la directive 77/388/CE, en faveur des assujettis non établis à l'intérieur du pays mais qui sont établis dans un autre État membre{COM(2004) 728 final — 2005/0807 (CNS)]

86

2006/C 028/9

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil abrogeant la directive 90/544/CEE du Conseil relative aux bandes de fréquences désignées pour l'introduction coordonnée du système paneuropéen public terrestre de radiomessagerie unilatérale (RMU) dans la Communauté[COM(2005) 361 final — 2005/0147 (COD)]

88

2006/C 028/0

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de décision du Parlement européen et du Conseil modifiant la décision no 2256/2003/CE en vue de la prolongation en 2006 du programme pour la diffusion des bonnes pratiques et le suivi de l'adoption des TIC[COM(2005) 347 final — 2005/0144 (COD)]

89

2006/C 028/1

Avis du Comité économique et social européen sur la Préparation de la 6ème conférence ministérielle de l'OMC — Position du CESE

90

2006/C 028/2

Avis du Comité économique et social européen sur la Communication de la Commission au Conseil, au Parlement européen, au Comité économique et social européen et au Comité des régions: dialogue entre les sociétés civiles de l'Union européenne et des pays candidats[COM(2005) 290 final]

97

2006/C 028/3

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 2000/14/CE concernant le rapprochement des législations des États membres relatives aux émissions sonores dans l'environnement des matériels destinés à être utilisés à l'extérieur des bâtiments[COM(2005) 370 final — 2005/0149 (COD)]

104

FR

 


II Actes préparatoires

Comité économique et social européen

421ème session plénière des 26 et 27 octobre 2005

3.2.2006   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 28/1


Avis du Comité économique et social européen sur le «Livre Vert sur les successions et testaments»

[COM(2005) 65 final]

(2006/C 28/01)

Le 1er mars 2005, la Commission européenne a décidé, conformément à l'article 262 du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur le: «Livre Vert sur les successions et testaments»

La section spécialisée «Marché unique, production et consommation», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 21 septembre 2005 (rapporteur: M. RETUREAU).

Lors de sa 421ème session plénière des 26 et 27 octobre 2005 (séance du 26 octobre), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 118 voix pour et 2 abstentions.

1.   Les propositions de la Commission.

1.1

Conformément au Programme de La Haye (2001), la Commission présente un livre vert consultatif en matière de testaments et successions présentant des aspects internationaux, qui porte sur l'ensemble de la matière:

la loi applicable,

la compétence juridictionnelle et la reconnaissance mutuelle des actes et décisions judiciaires,

les dispositions administratives, les actes notariés ou administratifs et leur reconnaissance mutuelle,

les moyens d'une simplification au niveau européen: certificats d'hérédité, enregistrement des testaments.

1.2

Pour les ayants droit, une succession transnationale présente des difficultés et obstacles particuliers, car elle se heurte à la diversité du droit substantiel, des normes de procédure et des règles de conflit de lois en vigueur dans chaque État membre.

1.3

Le Livre vert propose donc d'envisager l'éventualité de l'adoption, dans l'Union, de règles substantielles et de règles relatives à la compétence, au droit applicable et à la reconnaissance non seulement des décisions judiciaires, mais aussi des décisions et actes administratifs relatifs aux testaments et successions, y compris lorsque la composante internationale de la succession concerne un pays tiers.

2.   Observations à caractère général du Comité

2.1

Au niveau international, la matière a fait l'objet de trois conventions de La Haye sur les successions et les testaments et d'une convention relative aux trusts:

Convention sur les conflits de lois en matière de forme des dispositions testamentaires (conclue le 5 octobre 1961, entrée en vigueur le 5 janvier 1964). Parties: Allemagne, Autriche, Belgique, Danemark, Espagne, Estonie, Finlande, France, Grèce, Luxembourg. Cette convention est aussi entrée en vigueur dans des autres États membres, notamment les Pays-Bas, le Royaume-Uni et la Suède (ratifications); l'Irlande et la Pologne (adhésions); et la Slovénie (succession à l'ancienne Yougoslavie).

Convention sur l'administration internationale des successions (conclue le 2 octobre 1973, entrée en vigueur le 1er juillet 1993) entrée en vigueur dans certains États membres, notamment le Portugal (ratification), la République slovaque et la République tchèque (successions à l'ancienne Tchécoslovaquie).

Convention sur la loi applicable aux successions à cause de mort (conclue le 1er août 1989) pas encore entrée en vigueur, mais a déjà été ratifiée par un État membre (les Pays-Bas).

Convention relative à la loi applicable au trust et à sa reconnaissance (conclue le 1er juillet 1985, entrée en vigueur le 1er janvier 1992). Parties: Italie, Luxembourg. Cette convention est aussi entrée en vigueur dans des autres États membres, notamment les Pays-Bas, le Royaume-Uni (ratifications) et Malte (adhésion).

2.2

Une convention (UNIDROIT) portant loi uniforme sur la forme d'un testament international a été conclue à Washington le 26 octobre 1973 et est entrée en vigueur le 9 février 1978. Les pays membres faisant partie de cette convention sont: Belgique, Chypre, (Tchécoslovaquie), France, (Saint-Siège), Italie, Royaume Uni, Slovénie et plusieurs pays tiers dont les États-Unis et la Fédération de Russie. Cette convention prévoit un système international d'enregistrement et un formulaire uniforme pour y procéder.

2.2.1

Les pays membres, parties à la Convention de Bâle de 1972 conclue sous les auspices du Conseil de l'Europe, mais ouverte à l'adhésion des pays tiers, relative à l'établissement d'un système d'inscription des testaments, sont la Belgique, Chypre, l'Espagne, l'Estonie, la France, l'Italie, la Lituanie, le Luxembourg, les Pays-Bas et le Portugal.

2.3

Les conventions de La Haye portent sur la compétence et la loi applicable, les conventions UNIDROIT sur le droit substantiel pour les matières présentant une composante internationale. Seules les dispositions internationales sur la forme des testaments et sur leur inscription dans un registre international présentent actuellement un nombre suffisamment significatif de ratifications ou d'adhésions.

2.4

La matière porte sur une forme particulière de transmission du droit de propriété, (droit humain fondamental), à cause de mort. Une législation communautaire en matière de compétence, de loi applicable et de reconnaissante mutuelle pour les successions à composante internationale devrait prendre la forme d'un règlement.

2.5

En raison de la complexité de la matière, les objectifs et les propositions de la Commission sont ambitieuses, mais présentent une pertinence et une nécessité essentielles au sein du marché intérieur qui concerne de nombreux particuliers. Afin de renforcer l'efficacité du règlement et d'éviter toute antinomie entre dispositifs de réglementation ou des décisions discordantes entre États, il conviendrait d'inclure le plus grand nombre de questions possibles dans l'objet des règles de conflit de lois, en les subordonnant toujours, fonctionnellement et essentiellement, à la question successorale (éviter d'ajouter, par exemple, des questions qui sont essentiellement du ressort du régime juridique des droits réels).

2.6

L'importance économique d'une réglementation communautaire est indéniable, notamment en ce qui concerne la transmission des PME en Europe, afin d'en assurer la continuité après le décès de l'entrepreneur, question qui a aussi une importance pour l'emploi et la compétitivité en Europe.

2.7

Des aménagements aux règles qui, dans certains pays, interdisent les pactes sur successions futures ou l'affectation d'une partie du patrimoine à une finalité particulière, devraient être envisagés dans ces pays, et promus au niveau communautaire aux fins d'une meilleure harmonisation du droit matériel et de garantir la permanence d'entreprises ou d'exploitations agricoles qui risqueraient autrement d'être liquidées au moment du partage entre plusieurs héritiers.

2.8

Le Comité, en raison des différences profondes entre les législations nationales actuelles, en dépit de certaines évolutions récentes, et considérant le nombre limité de ratifications des conventions internationales pertinentes, partage l'opinion de la Commission quant à l'impossibilité de concevoir actuellement un droit substantiel uniforme valable dans tout pays de l'Union en matière de testaments et successions internationales; les thèmes de travail et les priorités proposés lui conviennent car une avancée dans ces domaines réglerait déjà de nombreuses difficultés pratiques pour les ayant-droits, les notaires, les administrations, les juges et les professionnels du droit concernés.

2.8.1

D'autres pistes peuvent aussi être explorées en tenant compte du droit international, que les pays membres pourraient être invités à prendre en considération en vue d'une ratification ou d'une adhésion à certaines conventions (forme de testaments, loi applicable, testament international, enregistrement national et international).

2.8.2

Le droit successoral et testamentaire a longtemps été marqué, en pays de droit romano-germanique, par une conception à bien des égards très surannée de l'héritage. Le patrimoine du «de cujus»  (1) était censé représenter une forme de continuation de sa personne dans celle de ses héritiers; le droit des successions évolue de plus en plus vers la contractualisation; après l'Allemagne ou la Suisse, une réforme du droit successoral est en cours en France, ce qui permettra à la volonté du «de cujus» et à celle des héritiers de jouer un rôle beaucoup plus important dans le règlement des successions, y compris pour mieux garantir la continuité des entreprises.

2.8.3

Les régimes de grande liberté, permettant au testateur de déshériter certains de ses descendants sans justification sont, de leur côté, de plus en plus contestés, comme en témoigne le développement important du contentieux.

2.8.4

Sans supprimer certaines des particularités historiques et sociologiques des divers systèmes juridiques, il est possible de considérer qu'à long terme une plus grande harmonisation, ou à tout le moins certaines convergences, qui pourraient être accélérées par la création d'un testament européen, et d'un instrument sur la loi applicable suffisamment ouvert et permissif, finiraient par se faire jour en Europe pour faciliter l'exécution des testaments et le règlement des successions à composante internationale. L'hypothèse de dispositions substantielles communautaires pourrait aussi être étudiée, dans le contexte d'une acceptation de la «professio juris»  (2), comme alternative à un ou plusieurs des droits nationaux applicables.

2.9

Le Comité relève que le Règlement (CE) no 2201/2003 du Conseil du 27 novembre 2003 relatif à la compétence, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière matrimoniale et en matière de responsabilité parentale abrogeant le règlement (CE) no 1347/2000 représente une source d'inspiration, et notamment que les articles 21(3) et 46 du règlement 2201(2003) constituent des sources pertinentes, et à tout le moins des précédents en droit de la famille, pour déterminer le contenu de certaines des dispositions législatives envisagées (3).

2.10

Le Comité considère donc le Livre vert comme bienvenu et les questions posées comme fondamentales et urgentes. Il s'efforcera d'apporter des réponses aux questions posées, en partant des intérêts et besoins des citoyens européens et en tenant compte de leur mobilité croissante, ainsi que des migrations importantes déjà intervenues dans le passé.

2.11

Il conviendrait de commencer par les questions relatives à la forme des testaments, à la compétence juridictionnelle internationale et à la solution des conflits de loi en ce qui concerne le droit applicable, à l'enregistrement des testaments, ainsi qu'à la reconnaissance mutuelle des décisions des autorités judiciaires et d'autres autorités compétentes, et à l'apostille, sujets sur lesquels des précédents existent en droit européen et international.

2.12

Le Comité estime qu'un système unitaire (loi successorale unique et discipline unitaire du patrimoine héréditaire) est préférable à la dispersion du règlement de la succession; néanmoins, pour des raisons pratiques, ce principe devrait souffrir des exceptions dans certains cas, notamment pour les immeubles ou certains biens meubles particuliers (navires, aéronefs, fonds de commerce, etc.) situés à l'étranger.

2.13

Certaines questions, telle que les pactes successoraux ou les trusts, restent de compétence nationale (4); mais celles concernant la reconnaissance sans exequatur des décisions judiciaires contentieuse ou non en matière successorale, la compétence résiduelle, la reconnaissance de décisions et d'actes d'autorités non judiciaires publiques ou privées ou l'inscription dans les registres fonciers nationaux sur la base du certificat européen d'héritier doivent faire partie de la législation européenne envisagée.

3.   Observations sur des questions spécifiques posées par le livre vert

3.1

Un règlement comme celui précité, no 2201(2003) mais applicable en matière successorale ne suffirait pas à résoudre les problèmes posés par une succession internationale. En effet, la plupart des successions ne sont pas contentieuses, et il faut aussi résoudre les problèmes posés en l'absence de tout contentieux; de plus, l'intervention d'un juge est parfois nécessaire dans certains pays ou à propos de certaines questions sans qu'il y ait un contentieux à trancher.

3.2

Si l'instrument communautaire doit certes régler les problèmes posés précédemment de détermination du (des) fora compétents, et de reconnaissance des décisions judiciaires, il lui faudra aussi envisager les possibilités de régler:

successions testamentaires: conditions de validité du testament, (forme et contenu, capacité de tester, limites de l'autonomie de la volonté), réserves successorales, successions anomales, pactes successoraux (autorisés ou prohibés), réserves successorales, trusts successoraux, qualité d'héritier;

successions «ab intestat» et testamentaires: qualité d'héritier et parts d'héritage, règles relatives à l'indivision, à la liquidation et au partage de l'héritage, etc.);

outre la reconnaissance des jugements (et les éventuelles exceptions d'ordre public), la reconnaissance des actes non judiciaires liés à un règlement non contentieux de la succession: le testament, les actes notariés et autres actes administratifs ou la compétence internationale des agents publics et professionnels du droit impliqués;

quant aux critères de rattachement en matière de compétence judiciaire, une certaine flexibilité paraît indispensable à la fois pour que ces critères correspondent au droit que le testateur avait l'intention de voir appliquer, ou éventuellement au droit que les héritiers pourraient légitimement s'attendre à voir appliquer (nationalité du testateur, lieu de sa résidence habituelle, du décès, de la rédaction et du dépôt du testament, lieu où l'essentiel des biens sont situés ...).

3.3

Le Comité appuie le programme communautaire de La Haye en ce qu'il prévoit la création d'un «certificat européen d'héritier» et la création d'un système d'enregistrement des testaments. Les pays membres devront déterminer l'autorité compétente pour délivrer un tel certificat et, s'il n'existe pas déjà, la création d'un dépôt central national; un registre central communautaire (ou européen, au sens du Conseil de l'Europe, si les pays membres qui ne l'ont pas encore fait étaient invités à ratifier la convention de Bâle) devrait être créé, et juges, notaires et autres agents compétents déterminés par la loi nationale applicable devraient avoir accès à l'information contenue dans ce registre central (au moins, à partir du nom du «de cujus» et de sa date de naissance, savoir dans quel pays membre et éventuellement quel pays tiers, à quelle date et auprès de quelle autorité un testament a été déposé, afin de pouvoir en requérir copie auprès de ladite autorité nationale).

3.3.1

Le système européen d'enregistrement devrait en tout état de cause être compatible avec le système de la convention de Bâle, et avec celui de la convention de Washington, compte tenu du fait que plusieurs pays membres sont déjà parties à ces conventions, et que le projet de législation communautaire concernera aussi les successions pouvant impliquer un pays tiers.

3.4

Une fois la qualité d'héritier reconnue et la liquidation de la succession et le partage effectués, les démarches administratives devraient être simplifiées dans toute la mesure du possible; le Comité se prononce en faveur de la reconnaissance mutuelle des actes et documents des agents légalement reconnus par le droit local, et l'inscription directe dans le registre foncier (ou auprès des autorités compétentes pour enregistrer les droits en matière d'immeubles) du droit de propriété, ainsi que des servitudes, hypothèques ou des démembrements éventuels qui peuvent grever les biens considérés, en fonction du droit national applicable.

3.5

Le Comité tient à attirer l'attention de la Commission sur les problèmes fiscaux qui peuvent se poser aux héritiers d'un patrimoine localisé dans deux ou plusieurs pays; il conviendrait d'éviter les problèmes éventuels de double imposition sur tout ou partie de chaque part d'héritage, qui pourrait s'avérer confiscatoire dans certaines successions ou qui pourrait créer des inégalités entre héritiers en fonction de la nature des biens attribués à chacun. Il conviendrait de recenser les dispositions fiscales applicables aux successions internationales dans les pays membres pour identifier ceux qui prétendent saisir par leur fiscalité des biens et valeurs non situés sur leur territoire, comparer les taux et envisager des solutions équitables à soumettre aux pays concernés. Éventuellement, la Commission pourrait envisager de proposer une convention-type contre la double imposition en matière de successions internationales, entre les pays membres.

3.6

Faut-il envisager un «testament européen» sur le modèle du «testament international» de la convention de Washington, et prévoir, outre son enregistrement européen dans la forme prévue par la convention de Bâle, un enregistrement international? Cela pourrait encourager une plus large ratification des conventions de Washington et de Bâle, et mieux garantir les ayant droits d'une succession testamentaire internationale impliquant non seulement des pays membres, mais également des pays tiers. Le Comité suggère cette piste de travail aux services de la Commission, car ces conventions sont déjà connues dans les pays membres, soit qu'ils les aient ratifiées, soit que les officiers publics et juges aient déjà eu affaire à des testaments et enregistrements soumis à ces régimes juridiques.

3.7

Si cette hypothèse devenait réalité, le testament européen serait admis dans sa forme par tous les droits nationaux; en effet, le droit européen doit permettre d'empêcher que de simples questions de forme puissent mettre en échec le principe universellement reconnu du respect de la volonté du testateur, («favor testamen») dans les limites permises par le droit applicable.

3.8

Une réglementation spécifique communautaire est indispensable pour que cette législation s'applique à tous les cas de successions rattachables à deux ou plusieurs pays membres, voire des pays tiers, y compris dans ceux qui sont parties à des conventions internationales, pour garantir en toutes circonstances l'application du droit communautaire (la «loi spéciale» communautaire ayant alors précédence sur la loi internationale).

4.   Autres questions posées

4.1

Le Livre vert pose 39 questions principales, assorties de sous-questions. Le Comité ne saurait répondre à toutes à ce stade préliminaire, mais suggère à la Commission de consulter individuellement les organisations représentatives des professions juridiques concernées par chacun des thèmes considérés par le Livre vert.

4.2

Le Comité se contentera de suggérer quelques unes des réponses possibles à certaines des questions qui lui semblent présenter une importance plus particulière; l'orientation générale choisie sera en principe celle de la compatibilité avec les conventions de La Haye et celles de Bâle et de Washington, afin que les règles européennes soient harmonisées autant que possible dans la perspective future d'un consensus juridique largement acceptable par le plus grand nombre possible de pays membres et, au-delà, de pays tiers.

4.3

Les critères de rattachement prévus par la convention de La Haye de 1961 sur les conflits de lois en matière de forme des dispositions testamentaires devraient être au moins retenus, car ils offrent une diversité suffisante, permettant de justifier dans la plupart des cas l'applicabilité de la loi sous laquelle a été fait le testament.

4.4

Dans la logique de certaines réformes intervenues récemment ou en cours en Europe continentale, une protection particulière devrait être accordée aux intérêts des héritiers incapables (mineurs ou majeurs) ou lourdement handicapés, si les possibilités d'extension de la contractualisation des successions ou de choix de la loi applicable par les héritiers amenaient à modifier le régime de la réserve successorale ou à introduire des inégalités entre héritiers; cette plus grande flexibilité pour le testateur ou les ayant-droits ne devrait pas remettre en cause les dispositions les plus protectrices existantes dans l'une des lois applicables en ce qui concerne ces héritiers (voir questions 5 et 10 du Livre vert).

4.5

Les actes d'administration de la succession par un des héritiers ou son mandataire, dans les pays où un administrateur n'est pas obligatoirement désigné, ne doivent pas être considérés comme une acceptation implicite de la succession sans bénéfice d'inventaire.

4.6

L'option d'une acceptation de la succession par les héritiers dans la limite des créances grevant le patrimoine devrait être envisagée, ainsi que celle d'un pacte d'héritiers ou d'un contrat d'héritage prévoyant un partage inégal à des fins légitimes (continuation d'exploitation ou d'entreprise, avantages en faveur d'un héritier incapable ou handicapé) ainsi que ceux prévoyant un partage égal entre enfants de différents lits ou naturels si le droit applicable n'organisait pas cette égalité, ou transmission directe de son droit par un héritier à ses propres descendants, compte tenu de l'accroissement de l'espérance de vie.

4.7

Il conviendrait encore de permettre, de manière encadrée limitativement, le choix par le testateur du droit applicable à sa succession, par exemple si ce droit est celui de sa nationalité (ou de l'une de ses nationalités), ou si ce droit est celui de sa résidence habituelle.

4.8

Le Comité estime enfin qu'il conviendrait de poursuivre et développer l'excellent travail comparatiste déjà engagé par les services de la Commission, et de le mettre à jour régulièrement sur le site communautaire ainsi que de le traduire dans un nombre de langues suffisant pour qu'il soit généralement utile aux professionnels du droit, officiers publics, administrateurs et juges confrontés à des successions internationales, et conçu aussi de façon à ce que des synthèses par chapitres permettent la compréhension des principes généraux par les citoyens européens envisageant de rédiger un testament à composante internationale ou par leurs héritiers.

4.9

Le Comité attend avec intérêt les résultats des consultations déjà engagées par la Commission ou celles encore à venir; il espère qu'une orientation générale et des propositions législatives plus concrètes pourront ensuite lui être soumises pour avis, et se propose alors de les examiner en détail, car il considère la question des testaments et successions comme une question d'intérêt majeur pour les citoyens européens; la simplification des formalités comme la plus grande sécurité juridique et fiscale et la plus grande rapidité du règlement des successions internationales qu'ils attendent d'une initiative communautaire ne doivent pas être déçues, qu'il s'agisse des particuliers ou des entreprises, exploitations agricoles et autres activités économiques dont les entrepreneurs ou propriétaires souhaitent assurer la continuité après leur disparition.

Bruxelles, le 26 octobre 2005.

La Présidente

du Comité économique et social européen

Anne-Marie SIGMUND


(1)  Personne dont il est question (la personne décédée).

(2)  Choix, par le testateur, du droit applicable à sa succession.

(3)  JO L 338 du 23.12.2003.

(4)  Les trusts successoraux ne sont pas reconnus dans de nombreux pays continentaux; en outre, certains de ces pays considèrent la réserve successorale ou le rapport des donations comme étant d'ordre public. Cela encourage d'ailleurs des stratégies de contournement du droit successoral, notamment en ce qui concerne les immeubles situés sur le territoire de ces pays.


3.2.2006   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 28/5


Avis du Comité économique et social européen sur la «Situation et perspectives des sources d'énergie “traditionnelles” que sont le charbon, le pétrole et le gaz naturel dans la future combinaison énergétique»

(2006/C 28/02)

Le 10 février 2005, le Comité économique et social européen a décidé, en vertu de l'article 29, paragraphe 2 de son règlement intérieur, d'élaborer un avis sur la «Situation et perspectives des sources d'énergie “traditionnelles” que sont le charbon, le pétrole et le gaz naturel dans la future combinaison énergétique»

La section spécialisée «Transports, énergie, infrastructures, société de l'information», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a élaboré son avis le 1er septembre 2005 (rapporteur: M. WOLF).

Lors de sa 421èmesession plénière des 26 et 27 octobre 2005 (séance du 26 octobre 2005), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 119 voix pour, 1 voix contre et 3 abstentions.

Le Comité a adopté récemment toute une série d'avis (1) sur la question énergétique. Étant donné que jusqu'à présent, l'approvisionnement en énergie reste en majeure partie basé sur les sources d'énergies fossiles traditionnelles que sont le charbon, le pétrole et le gaz naturel dont l'utilisation pose la question de l'épuisement des ressources naturelles et de l'émission des gaz à effet de serre, le présent avis entend proposer une évaluation de ces sources d'énergie traditionnelles.

L'objectif stratégique de cette série, qu'un avis sur les sources d'énergie renouvelables et le présent avis viendront clôturer, doit être de proposer des bases fondamentales permettant d'élaborer des options réalistes en matière de combinaison énergétique pour l'avenir.

Une synthèse résumant les conclusions de cette série figurera ultérieurement dans un avis sur le thème: «Approvisionnement énergétique de l'UE: stratégie pour une combinaison énergétique optimale».

SOMMAIRE

1.

Résumé et recommandations

2.

La question énergétique

3.

Ressources, réserves, niveau des réserves

4.

Les réserves énergétiques de l'UE — Dépendances à l'égard des fournisseurs extérieurs

5.

Évolution de la consommation d'énergie dans l'UE

6.

Combinaison énergétique durable du charbon, du pétrole et du gaz naturel

7.

Protection de l'environnement et lutte contre les changements climatiques

8.

Évolution des technologies

9.

Piégeage et séquestration du CO2

1.   Résumé et recommandations

1.1

La société moderne et notre mode de vie actuels reposent sur les sources d'énergie exploitables. Seule la mise à disposition d'énergie en quantités suffisantes nous a permis d'atteindre le niveau de vie que nous connaissons aujourd'hui. Un approvisionnement en énergie utilisable qui soit sûr, économique, non préjudiciable à l'environnement et durable est une condition sine qua non de la réalisation de la stratégie de Lisbonne ainsi que des objectifs de Göteborg et de Barcelone.

1.2

Les combustibles fossiles que sont le charbon (2), le pétrole et le gaz naturel constituent actuellement l'épine dorsale de l'approvisionnement énergétique européen et mondial. Ils conserveront leur importance dans les prochaines décennies et restent donc indispensables.

1.3

Leur extraction et leur utilisation s'accompagnent cependant de nombreuses nuisances pour l'environnement, par exemple l'émission de gaz à effet de serre, notamment de CO2 et de méthane. Nous nous trouvons face à une consommation de ressources dont les réserves sont limitées.

1.4

Leur utilisation a conduit l'Europe vers une extrême dépendance énergétique à l'égard de cette matière première vitale, dépendance qui devrait s'aggraver à l'avenir, notamment à l'égard du pétrole mais aussi, et de plus en plus, du gaz.

1.5

On estime que le niveau des ressources et réserves mondiales (3) de charbon, de pétrole et de gaz dépend de plusieurs facteurs (croissance économique, exploration, développement technologique). Il est suffisant pour encore quelques décennies (voire des centaines d'années pour le charbon), bien qu'une baisse des réserves et une raréfaction de l'offre puissent se faire sentir vers la moitié de ce siècle, notamment pour le pétrole. L'évolution actuelle des marchés pétroliers montre que des augmentations de prix qu'il n'était guère possible de prévoir peuvent déjà intervenir à très court terme et ont un impact considérable sur les économies de marché (4).

1.6

D'une part, la politique énergétique de l'UE doit comprendre toutes les mesures nécessaires pour diminuer cette dépendance à long terme, notamment en prenant des mesures d'économie et en utilisant plus efficacement toutes les sources d'énergie ainsi qu'en renforçant l'utilisation d'autres systèmes énergétiques telles que les énergies renouvelables et l'énergie nucléaire. Dans ce contexte, il importe tout particulièrement de poursuivre le développement des systèmes énergétiques de remplacement.

1.7

La politique énergétique de l'UE doit d'autre part mettre tout en œuvre pour garantir l'approvisionnement et sécuriser les voies d'approvisionnement des combustibles fossiles; dans ce contexte, la question de la stabilité politique de certains des principaux fournisseurs pose problème. La collaboration avec la Fédération de Russie, les États de la CEI, les pays du Proche et du Moyen-Orient ainsi que les régions voisines de l'UE (par exemple, l'Algérie et la Libye) revêt à cet égard une grande importance.

1.8

On pourrait également atténuer cette dépendance en faisant davantage appel aux réserves considérables de charbon en Europe.

1.9

Si le marché intérieur européen remplit sa fonction et que l'on prend des mesures appropriées pour lutter contre les changements climatiques, les combustibles fossiles pourraient trouver des champs d'application adaptés à leurs caractéristiques ainsi qu'à leurs niveaux de prix et de coûts. Ils seront alors automatiquement utilisés d'une manière particulièrement efficace sur le plan économique et énergétique.

1.10

C'est la raison pour laquelle on constate que le charbon prédomine dans la sidérurgie et les centrales électriques, tandis que le pétrole et le gaz servent principalement à la production thermique et dans les applications à des fins non énergétiques. Dans le domaine des transports, ce sont les produits dérivés du pétrole qui prédominent.

1.11

Dans la combinaison énergétique, les matières premières plus rares et d'utilisation plus souple que sont le gaz naturel et le pétrole devraient dès lors être réservées aux applications – carburant pour les transports, matière première pour l'industrie chimique — pour lesquelles le charbon entraînerait un supplément de frais, de consommation d'énergie et d'émissions de CO2.

1.12

Il faut continuer à réduire constamment les émissions de CO2 par unité de produit (par exemple en g CO2/kWh, en t CO2/t d'acier, en g CO2/km parcouru), en tirant parti des progrès technologiques. Cela nécessite d'améliorer l'efficacité énergétique dans tous les domaines liés à la transformation et l'utilisation de l'énergie.

1.13

La politique énergétique et la politique économique doivent donc mettre en place un cadre fiable pour les investissements, grâce auquel il sera possible d'améliorer les techniques dans l'industrie, le commerce et les installations privées.

1.14

Dans les prochaines décennies, l'Europe aura besoin d'augmenter ses capacités de production de près de 400 GWe (5) par la construction de nouvelles unités. Ces nouvelles installations devront être dotées des meilleures techniques disponibles afin de limiter/réduire les émissions de CO2 et la consommation de combustibles.

1.15

Le secteur des transports nécessitera un maximum d'efforts pour réduire la consommation spécifique de carburant (consommation par véhicule-kilomètre) et éviter que la consommation globale ne continue d'augmenter. Cela ne sera possible qu'avec des progrès techniques dans de nombreux domaines de développement des véhicules et des carburants ainsi que des mesures visant à limiter les embarras de circulation (construction de routes et de tunnels, systèmes de guidage) et à réduire le trafic (6). Une utilisation accrue des véhicules à propulsion électrique, comme le chemin de fer électrique, réduit la dépendance vis-à-vis du pétrole car elle permet une plus grande diversification des sources d'énergie primaires (charbon, gaz, sources d'énergie renouvelables, énergie nucléaire).

1.16

La condition préalable à toute amélioration de l'efficacité dans le secteur énergétique est de mettre l'accent sur la recherche et le développement, en particulier dans les centrales fonctionnant aux énergies fossiles, tant du côté de l'industrie que pour ce qui concerne les mesures bénéficiant d'aides publiques.

1.17

Par conséquent, le Comité se félicite que «l'Énergie» soit une priorité thématique inscrite dans le projet de 7e programme-cadre de RDT. Celle-ci devrait être dotée de moyens suffisants et englober toutes les possibilités des techniques énergétiques. En particulier, ce programme devrait prévoir également des mesures augmentant le rendement lors de l'utilisation de combustibles fossiles, car cela serait extrêmement profitable globalement.

1.18

Il est également possible de réduire à long terme et de manière significative les émissions de CO2 par volume énergétique lors de la production d'énergie à partir des combustibles fossiles, pour autant qu'aient été prévus des procédés de piégeage et de séquestration du CO2 (technologie du charbon propre). C'est la raison pour laquelle il est particulièrement important que de tels procédés soient développés et testés dans le cadre du 7e programme-cadre de RDT.

2.   La question énergétique

2.1

La société moderne et notre mode de vie actuels reposent sur les sources d'énergie exploitables (7). Seule la mise à disposition d'énergie en quantités suffisantes nous a permis d'atteindre le niveau de vie que nous connaissons aujourd'hui. Le besoin d'un approvisionnement en énergie utilisable qui soit sûr, économique, non préjudiciable à l'environnement et durable est à la croisée des objectifs de Lisbonne, de Göteborg et de Barcelone.

2.2

Le Comité a constaté à de nombreuses reprises que l'approvisionnement énergétique et l'utilisation de l'énergie polluaient l'environnement, comportaient des risques, impliquaient un problème de dépendance à l'égard de pays tiers et étaient liés à toute une série d'impondérables. Aucune des options et technologies susceptibles de contribuer à l'approvisionnement énergétique futur n'est techniquement parfaite, exempte de tout effet perturbateur sur l'environnement et en mesure de couvrir tous les besoins, avec une évolution des coûts et une disponibilité suffisamment prévisibles à long terme. A cela s'ajoute le problème de l'épuisement des réserves et ressources naturelles, avec toutes les conséquences que cela entraîne. Il faut en outre s'attendre à ce que les problèmes s'aggravent sensiblement avec la croissance de la population mondiale, l'appétit énergétique grandissant des pays en voie de développement et la forte augmentation des besoins énergétiques des nouveaux pays industrialisés tels que la Chine, l'Inde et le Brésil.

2.3

C'est pourquoi l'un des principaux objectifs d'une politique européenne de l'énergie orientée vers l'avenir doit être d'assurer un approvisionnement énergétique à long terme compatible avec les exigences écologiques et économiques. Pour les raisons énoncées précédemment, cet approvisionnement énergétique ne peut se baser sur quelques sources d'énergie seulement. La solution aux pénuries énergétiques et aux autres risques réside plutôt dans la combinaison d'énergies de type et origine très divers qui fasse appel à toutes les sources d'énergie et techniques disponibles et les développe (en les améliorant) et qui sera finalement soumise à la concurrence commune dans des conditions en constante évolution et le respect d'exigences écologiques acceptées.

3.   Ressources, réserves, niveau des réserves

3.1

A l'heure actuelle, les énergies fossiles, pétrole, gaz naturel et charbon, représentent presque quatre cinquièmes de l'approvisionnement énergétique mondial ainsi que de l'approvisionnement énergétique de l'UE des 25.

3.2

En règle générale, toutes les prévisions sur les évolutions futures dépendent — et c'est la raison pour laquelle elles peuvent diverger en fonction du point de vue et souvent de l'intérêt des protagonistes — d'hypothèses sur le développement démographique et économique, sur la mise au point de nouvelles techniques d'exploration et d'exploitation, ainsi que sur le cadre politique prévalant dans les différents pays. Cela s'applique tout particulièrement à l'énergie nucléaire ainsi qu'à l'importance des mesures de soutien aux sources d'énergie renouvelables.

3.2.1

Selon les prévisions de référence (8) de l'AIE (Agence internationale de l'énergie à Paris) et de l'administration pour l'information énergétique (EIA) du ministère américain de l'énergie pour l'année 2004, les énergies dites fossiles couvriront encore dans 25 ans plus de 80 % de la consommation mondiale d'énergie.

3.2.2

Certes, la part des énergies renouvelables augmentera, mais, toujours selon les estimations de l'AIE et de l'EIA, pas plus que la consommation globale d'énergie; cela signifie que la part des énergies renouvelables restera constante. Selon la tendance actuelle, on s'attend également à ce que la contribution de l'énergie nucléaire à l'approvisionnement énergétique augmente un peu — en chiffres absolus –, mais cette hausse sera inférieure à l'évolution globale de la consommation, pour autant que le cadre politique ne soit pas radicalement modifié en Europe. Par conséquent, l'AIE et l'EIA prévoient même actuellement une réduction de la part de l'énergie nucléaire dans la couverture de la consommation énergétique mondiale.

3.2.3

Le scénario de base publié en septembre 2004 par la Commission européenne pour l'Europe des 25 (9), qui vient contredire le scénario prévisionnel de la tendance mondiale de l'AIE et l'EIA, prévoit une croissance de la part des énergies renouvelables dans la consommation d'énergie totale de l'UE des 25, qui passerait de 6 % actuellement à 9 % en 2030. Par ailleurs, comme, selon les estimations, la part de l'énergie nucléaire devrait cependant diminuer dans l'UE des 25, la Commission en conclut également que les énergies fossiles représenteront encore en 2030 plus de 80 % de la consommation énergétique totale dans l'UE des 25.

3.3

Les énergies fossiles ne sont pas des matières premières inépuisables. Pour pouvoir évaluer le laps de temps pendant lequel le pétrole, le gaz naturel et le charbon conserveront leur place prédominante, il convient d'examiner le potentiel de ces sources d'énergie fossiles.

3.4

A cet effet, il convient de poser au préalable un certain nombre de définitions et d'unités de mesure. On utilisera les termes de réserves, ressources et potentiels. Les sources d'énergie sont généralement mesurées en diverses unités10, comme les tonnes ou les barils pour le pétrole, la tonne métrique ou tonne équivalent charbon pour le charbon, le mètre cube ou le pied cube pour le gaz naturel. Pour pouvoir les comparer, on mesure leur pouvoir calorifique exprimé en joule ou watt/s (Ws).

3.5

Le potentiel total (qualifié aussi de réserves mondiales ultimes) comprend l'ensemble des réserves de combustibles récupérables dans la croûte terrestre, telles qu'elles existaient avant que l'homme ne commence à les exploiter. Il s'agit d'une estimation et les divers experts peuvent donc parvenir à des résultats divergents. Néanmoins, plus les connaissances sur la croûte terrestre s'affinent et plus les techniques d'exploration s'améliorent, plus les prévisions se rejoignent.

3.6

Seule la fraction récupérable des réserves présentes en sous-sol entre dans le calcul du potentiel total. Comme le taux de récupération est fonction des conditions techniques et économiques du moment, cette fraction récupérable est susceptible d'augmenter au fur et à mesure des progrès techniques. Si l'on enlève du potentiel total les quantités de ressources qui ont déjà été extraites, on obtient le potentiel restant.

3.7

Le potentiel restant est l'addition des réserves et des ressources. Par réserves, on entend les quantités de matières premières énergétiques physiquement prouvées et économiquement exploitables dans les conditions techniques actuelles. Par ressources, on entend à la fois les quantités de matières premières énergétiques prouvées mais pas encore récupérables dans les conditions économiques et/ou techniques du moment et les quantités qui, même si elles ne sont pas encore physiquement prouvées, sont considérées comme probables compte tenu des caractéristiques géologiques.

3.8

L'importance des réserves mondiales est une question au cœur des débats officiels, étant donné que c'est de celle-ci que dépend la «durée de vie» des réserves d'énergie. Le rapport des réserves sur la production annuelle du moment donne ce que l'on appelle une projection statistique. D'après ce calcul, on arrive à une projection statistique des réserves mondiales d'environ 40 ans pour le pétrole, 60 ans pour le gaz naturel et 200 ans pour le charbon.

3.9

Cependant, ces estimations ne constituent nullement des valeurs fixes. En effet, lorsque les estimations des réserves diminuent, les activités d'exploration s'intensifient, ce qui a pour conséquence de faire passer les ressources, du fait des progrès techniques, dans la catégorie des réserves. (Cela explique par exemple que dans les années 70 du siècle passé, les réserves de pétrole étaient estimées à 30 bonnes années).

3.10

Dans le cas du pétrole, les statistiques montrent que les ressources sont deux fois plus élevées que les réserves, voire dix fois supérieures pour ce qui concerne le gaz naturel et le charbon.

3.11

La fraction déjà extraite du potentiel total donne également une indication sur la disponibilité future des énergies fossiles. Si ce pourcentage dépasse les 50 % et atteint alors le «point moyen de déplétion», l'on est donc au maximum («pic») de production et il devient difficile de continuer à augmenter la production, et même de la conserver au même niveau.

3.12

Pétrole: plus du tiers du potentiel total du pétrole dit conventionnel, estimé à environ 380 milliards de tonnes équivalent pétrole, ont déjà été extraits. Au taux d'extraction actuel, la moitié du potentiel conventionnel aura été consommée dans une dizaine d'années. Pour augmenter la production, il conviendra alors de faire de plus en plus appel aux gisements non-conventionnels (pétrole lourd, sables et schistes bitumineux). Cela permet de reculer un peu dans le temps le moment du pic de production. Si ce n'est pas le cas, une baisse des réserves et une grave raréfaction de l'offre (10) pourraient se faire sentir dès la moitié de ce siècle.

3.13

Gaz naturel et charbon: pour ce qui concerne le gaz naturel, on peut parler d'une situation similaire puisqu'en tenant compte des gisements non conventionnels par exemple d'hydrates de gaz, on augmente le potentiel total restant. Pour le charbon, seul 3 % environ du potentiel total, estimé à 3400 milliards de tonnes équivalent pétrole, a été extrait jusqu'ici.

3.14

Cependant, l'exploration des hydrates de gaz (hydrates de méthane) et les technologies permettant de les extraire sont encore au stade de la recherche, de sorte qu'il n'est actuellement pas possible de donner des informations fiables quant à l'importance de leur éventuelle contribution à l'approvisionnement énergétique. D'une part, selon certaines estimations, le contenu énergétique des réserves possibles dépasserait celui de toutes les réserves actuellement connues de sources d'énergie fossiles, mais d'autre part, il n'existe encore aucune certitude quant à leur exploitation (principe, technique, coûts). En outre, leur libération — d'origine climatique ou anthropique — comporte un important facteur d'incertitude, voire de risque, étant donné que cela pourrait entraîner une concentration particulièrement dangereuse pour le système climatique de méthane dans l'atmosphère, l'un des principaux gaz à effet de serre.

3.15

Les coûts d'extraction des énergies fossiles sont très variables. Pour le pétrole, ils varient à l'heure actuelle de 2 à 20 USD/baril, en fonction du gisement. S'il est vrai que l'on est amené de plus en plus à exploiter les gisements plus petits, dans des conditions géologiques et géographiques défavorables, ce qui a pour effet d'augmenter les coûts d'exploitation, cette hausse peut se voir compensée parfois très largement par le gain de productivité dû la plupart du temps à des innovations techniques. Pour le gaz naturel, les coûts d'extraction varient aussi largement en fonction des conditions. Pour le charbon, les coûts dépendent très largement de la profondeur du gisement, de l'épaisseur du filon et de la possibilité de l'exploiter à ciel ouvert ou uniquement sous terre. Les écarts entre les coûts sont extrêmes. Ils vont de quelques dollars américains par tonne (par exemple dans le basin de Powder River aux États-Unis) à 200 dollars la tonne pour l'extraction de charbon dans certains bassins houillers européens.

3.16

Pareillement, la répartition régionale des réserves d'énergies fossiles est très inégale. C'est particulièrement vrai pour le pétrole. Le Proche-Orient détient 65 % des réserves mondiales de pétrole. Le gaz naturel est tout aussi inégalement réparti puisque deux régions concentrent respectivement 34 % (Proche-Orient) et 39 % (les États successeurs de l'URSS) des réserves mondiales. Par contre, les réserves de charbon sont réparties de manière plus égale. C'est l'Amérique du Nord qui en détient les plus grandes réserves. Il existe cependant de grands gisements en Chine, en Inde, en Australie, en Afrique du Sud et en Europe.

3.17

La concentration des énergies fossiles qui revêtent une importance stratégique, notamment le pétrole mais aussi le gaz naturel, dans des régions du Proche et du Moyen-Orient qui présentent des risques géopolitiques importants, pose des problèmes particuliers en ce qui concerne la sécurité d'approvisionnement.

4.   Les réserves énergétiques de l'UE (11) -– Dépendances à l'égard des fournisseurs extérieurs

4.1

La consommation d'énergie primaire dans l'UE des 25 se montait en 2004 à près de 2,5 milliards de tonnes équivalent charbon (tec) soit environ 75 exajoule (75 x 1018 joule), ce qui correspond à 16 % de la consommation mondiale d'énergie, qui se monte à 15,3 milliards de tec. La consommation d'énergie par habitant est de 5,5 tec dans l'UE des 25, soit plus du double de la moyenne mondiale mais la moitié de la consommation en Amérique du Nord. Par rapport à la performance économique fournie, la consommation d'énergie en Europe ne représente que la moitié environ de la moyenne de toutes les régions hors d'Europe, étant donné que l'énergie y est utilisée bien plus efficacement que dans de nombreuses autres régions du monde.

4.2

En 2004, les principales sources d'énergie de l'UE des 25, en pourcentage de la consommation totale d'énergie primaire, étaient le pétrole (39 %), le gaz naturel (24 %) et le charbon (17 %). Parmi les autres sources importantes d'approvisionnement en énergie de l'UE, on peut citer l'énergie nucléaire (14 %) et les énergies renouvelables et autres énergies (6 %). La part des diverses énergies fossiles est extrêmement variable selon les 25 États membres de l'UE. Pour le gaz naturel, les pourcentages varient de 1 % en Suède à presque 50 % aux Pays-Bas, pour le pétrole de moins de 30 % en Hongrie à deux tiers au Portugal et pour le charbon de 5 % en France à 60 % en Pologne. Ces écarts s'expliquent principalement par l'inégale répartition des réserves d'énergies fossiles dans les divers États membres.

4.3

L'ensemble des réserves d'énergies de l'UE des 25 est relativement faible. Celles-ci se montent à environ 38 milliards de tec, ce qui représente près de 3 % des réserves mondiales, si l'on inclut les hydrocarbures non conventionnels. L'essentiel est constitué par des gisements de charbon (lignite et houille), qui représentent 31 milliards de tec. Les gisements de lignite et de houille sont représentés en proportion à peu près égale. Les réserves de gaz naturel se montent à 4 milliards de tec et les réserves de pétrole à 2 milliards de tec. À court terme, l'UE des 25 restera le plus grand importateur net d'énergie dans le monde. Selon les estimations de la Commission européenne, cette dépendance augmentera de plus de deux tiers d'ici 2030.

4.4

Les réserves d'énergies fossiles sont très inégalement réparties entre les divers États membres de l'UE des 25. Les gisements de pétrole se concentrent surtout sur les côtes britanniques et les côtes danoises voisines de la mer du Nord. Ils sont pratiquement épuisés, de telle sorte que leur exploitation va diminuer. Les principales réserves de gaz naturel se trouvent aux Pays-Bas et en Grande-Bretagne. Les réserves de charbon se répartissent essentiellement entre l'Allemagne, la Pologne, la Tchéquie, la Hongrie, la Grèce et la Grande-Bretagne. En outre, les réserves norvégiennes de pétrole et de gaz jouent également un rôle important, la Norvège n'étant pas membre de l'UE, mais bien membre de l'Espace économique européen (EEE).

4.5

Étant donné que ses réserves totales d'énergies fossiles sont limitées, l'UE des 25 est déjà aujourd'hui obligée de couvrir par des importations la moitié de ses besoins énergétiques totaux. Selon le livre vert de la Commission européenne, ce pourcentage augmentera de 70 % d'ici 2030. Sa dépendance à l'égard des fournisseurs extérieurs est particulièrement élevée pour ce qui concerne le pétrole. Quasiment les trois quarts des besoins en pétrole doivent être couverts par des importations de pays tiers. Le gaz naturel est importé pour environ 55 % et pour un tiers pour le charbon.

4.6

Cela a aboutit à une dépendance élevée de l'Europe vis-à-vis des importations de cette matière première vitale qu'est l'énergie, et cette dépendance pourrait encore augmenter à l'avenir, en particulier en ce qui concerne le pétrole, et de plus en plus, également, le gaz naturel. L'UE est même le plus grand importateur mondial net d'énergie.

4.7

La politique énergétique de l'UE doit donc d'une part mettre tout en œuvre pour garantir l'approvisionnement et sécuriser les voies d'approvisionnement des combustibles fossiles; dans ce contexte, la question de la stabilité politique de certains des principaux fournisseurs pose problème. La collaboration avec la Fédération de Russie et les États de la CEI, les pays du Proche et du Moyen-Orient ainsi que les régions voisines de l'UE (par exemple, l'Algérie et la Libye) revêt à cet égard une grande importance.

4.8

D'autre part, la politique énergétique de l'UE doit comprendre toutes les mesures nécessaires pour diminuer cette dépendance à long terme, notamment en utilisant plus efficacement toutes les sources d'énergie fossiles ainsi qu'en renforçant l'utilisation d'autres systèmes énergétiques telles que les énergies renouvelables — qu'il convient également de développer et de commercialiser — et l'énergie nucléaire. À cet égard, il importe tout particulièrement de poursuivre le développement des systèmes énergétiques de remplacement.

4.9

Dans ce contexte, on pourrait également atténuer cette dépendance en faisant davantage appel aux réserves considérables de charbon en Europe, d'autant plus que le secteur minier européen est déjà soumis à des exigences environnementales sensiblement plus élevées que dans d'autres régions du monde.

5.   Évolution de la consommation d'énergie dans l'UE

5.1

L'évolution de la consommation d'énergie dans l'UE des 25 devrait probablement suivre le scénario de base décrit dans la publication de la Commission «European Energy and Transport Scenarios on Key Drivers» (12) et qui prévoit que les tendances et politiques actuelles se poursuivront. Les prévisions sont les suivantes:

5.2

La consommation d'énergie primaire devrait passer d'ici à 2040 à 2,9 milliards de tec, c'est-à-dire n'augmenter que de 0,6 % par an. En revanche, on prévoit que le produit intérieur brut augmentera en moyenne de 2,4 % par an d'ici à 2030. Cela implique de diminuer l'intensité énergétique (le rapport de la consommation d'énergie sur le produit intérieur brut) de plus de 1,7 % par an (!) en réalisant des réformes structurelles, en améliorant l'efficacité énergétique et en faisant appel à des technologies avancées.

5.3

La part des énergies fossiles dans la couverture des besoins en énergie primaire augmentera même de 2 points d'ici à 2030 pour passer à 82 %.

5.4

Charbon: après un premier recul, la consommation de charbon devrait être relancée à partir de 2015 environ, étant donné que sa position s'améliorera sur le marché de la production d'électricité par rapport à ses concurrents. Selon ces estimations, la consommation de charbon devrait revenir en 2030 à son niveau de consommation de 2000. La part du charbon dans la consommation d'énergie primaire de l'UE des 25 devrait alors, comme en 2005, représenter environ 15 %. Comme l'extraction charbonnière devrait connaître une baisse de près de 40 % dans l'UE de 2005 à 2030 alors que les importations de charbon augmenteraient dans le même temps de 125 %, la part des importations dans la couverture des besoins en charbon de l'UE des 25 devrait passer d'un tiers en 2005 à presque deux tiers en 2030.

5.5

Pétrole: étant donné que le taux de croissance du pétrole suivra vraisemblablement une courbe inversement proportionnelle de 0,2 % par an, on estime que la part du pétrole dans la consommation d'énergie primaire devrait diminuer pour passer à 34 % en 2030, soit 5 points de moins qu'aujourd'hui.

5.6

Gaz naturel: la consommation de gaz connaîtra une hausse exponentielle d'ici à 2015 avec 2,7 % par an. Ensuite, la tendance s'atténuera. Les causes de cette croissance seront notamment la baisse de compétitivité du gaz par rapport au charbon dans la production d'électricité. Néanmoins, c'est le gaz naturel qui devrait connaître la hausse de consommation la plus importante des énergies fossiles sur l'ensemble de la période jusqu'en 2030. La part du gaz naturel dans la consommation d'énergie primaire de l'UE des 25 augmentera pour passer de 26 % en 2005 à 32 % en 2030. Le gaz naturel liquéfié (GNL) permet une diversification de l'approvisionnement en gaz, car les livraisons peuvent se faire par mer. Actuellement, le GNL représente 25 % du commerce mondial de gaz. Le plus gros exportateur de GNL est l'Indonésie, suivie par l'Algérie, la Malaisie et le Qatar.

5.7

L'extraction des énergies fossiles dans l'UE des 25 diminuera d'environ 2 % par an jusqu'en 2030. Cela signifie que la dépendance à l'égard des fournisseurs externes pour toutes les énergies fossiles augmentera pour représenter plus de deux tiers de la consommation d'ici à 2030. En 2030, le charbon sera importé pour les deux tiers, comme on l'a mentionné plus haut, à 80 % pour le gaz naturel et à presque 90 % pour le pétrole. Pour le gaz naturel, la dépendance croissante envers un petit nombre de fournisseurs deviendra particulièrement problématique.

5.8

La consommation d'électricité devrait augmenter en moyenne de 1,4 % par an jusqu'en 2030. Cela exigera d'augmenter de 400 GW les capacités de production actuelles qui sont d'environ 700 GW (puissance de production maximale), c'est-à-dire de passer à 1100 GW en 2030. En outre, toutes les centrales électriques devront être remplacées par de nouvelles installations. La Commission européenne estime dans son scénario de base que les capacités de production devraient s'accroître avec l'augmentation de près de 300 GW de la puissance électrique dans le secteur des énergies fossiles et de près de 130 GW pour les énergies éolienne, hydraulique et solaire, alors que les centrales nucléaires devraient voir leurs capacités diminuer de l'ordre de 30 GW de 2005 à 2030 en l'absence d'une modification durable du cadre politique.

5.9

Pendant les 25 prochaines années, l'approvisionnement en énergie constituera donc pour l'UE un défi et une mission majeurs, qui pourraient toutefois être également liés à des opportunités économiques. Les enjeux porteront notamment sur la sécurité de l'approvisionnement, y compris la diminution de la dépendance vis-à-vis des importations, le respect d'exigences environnementales toujours croissantes, la garantie de la compétitivité des prix de l'énergie et la nécessité des réaliser des investissements.

6.   Combinaison énergétique durable du charbon, du pétrole et du gaz naturel

6.1

Le charbon, le pétrole et le gaz naturel sont des hydrocarbures naturels qui ont mis des millions d'années à se former par la transformation de la biomasse résultant de l'accumulation de substances biologiques, c'est-à-dire qu'il s'agit de l'accumulation d'énergie solaire. Les produits diffèrent en fonction des conditions géologiques qui ont présidé à leur formation (par exemple pression, température, âge des sédiments). L'un des facteurs de différenciation essentiel est la teneur en hydrogène du combustible. Le rapport hydrogène sur carbone est le plus important pour le gaz naturel (4:1), d'environ 1,8:1 pour le pétrole et de 0,7:1 pour le charbon. C'est ce rapport qui détermine pour l'essentiel l'utilisation de ces énergies fossiles dans les divers domaines d'application.

6.2

Jusqu'à maintenant, le charbon, le pétrole et le gaz naturel sont irremplaçables en tant que sources d'énergie, matières premières à l'origine de la fabrication de nombreux produits (des médicaments aux matières plastiques de fabrication industrielle) et agent réducteur carboné dans la production de fer et d'acier. Cependant, leurs caractéristiques physiques et chimiques (par exemple agrégats, teneur en hydrogène, teneur en carbone, teneur en cendres) font qu'ils se prêtent particulièrement bien à certaines applications et beaucoup moins à d'autres. La sélection des hydrocarbures à utiliser se fait en fonction de critères économiques, techniques et environnementaux.

6.3

Près de 7 % des énergies fossiles consommées dans l'UE sont utilisées à des fins dites non énergétiques, c'est-à-dire principalement pour la fabrication de produits chimiques. Au début du siècle passé, le secteur de production qui commençait à se développer se basait alors sur des matières valorisables extraites du charbon. Depuis, les produits dérivés de la houille ont pratiquement été remplacés par le gaz naturel et les produits pétroliers. Tant que cela sera possible du point de vue de l'approvisionnement, le gaz naturel et le pétrole continueront à dominer dans ce secteur du marché. Les réserves de pétrole et de gaz naturel nécessaires auraient une durée de vie nettement plus longue si l'on parvenait à limiter l'utilisation de ces sources d'énergie dans la production d'énergie et de chaleur.

6.4

Le mode de production de l'acier à l'oxygène s'est établi à partir de la filière fonte dans des hauts fourneaux avec convertisseur. Dans ce mode de production, la coke sert de réducteur lors de l'élaboration de la fonte, de support et favorise la circulation des gaz montants (rôle perméabilisant). La consommation moyenne d'agent réducteur dans les installations européennes modernes est avec 457 kg/tonne de fonte proche du minimum requis par les conditions techniques.

6.5

Le secteur des transports connaît encore un taux de croissance important. Il représente près de 25 % de la consommation d'énergie, le transport routier étant pratiquement totalement dépendant de la production de pétrole. Les combustibles liquides ont une teneur énergétique élevée par unité de volume ou de masse. C'est une condition préalable indispensable à une utilisation économique et efficace dans le secteur des transports. Les combustibles liquides se sont donc imposés avec leurs infrastructures dans le transport routier. Une utilisation accrue des véhicules à propulsion électrique, comme le chemin de fer électrique, permet une plus grande diversification des sources d'énergie primaires (charbon, gaz, sources d'énergie renouvelables, énergie nucléaire) et peut ainsi contribuer à la réduction de la dépendance vis-à-vis du pétrole.

6.6

L'utilisation directe du gaz naturel et du gaz naturel liquéfié (GNL) comme combustible entre en concurrence directe avec les combustibles pétroliers liquides. On ne sait pas encore si cette ligne de produits remportera d'importantes parts de marché (13).

6.7

Les ménages et les petits consommateurs représentent environ 30 % de la consommation d'énergie. Ils choisissent leurs sources d'énergie en fonction de critères économiques et en tenant de plus en plus compte d'exigences de confort et de protection de l'environnement. Dans ce secteur, le fioul domestique, le gaz naturel et l'électricité et, dans les régions à forte densité démographique également le chauffage urbain grâce aux installations de cogénération, sont tous en concurrence.

6.8

La transformation en électricité et chaleur dans les centrales représente 40 % de la consommation d'énergie de l'UE. Le charbon, le pétrole et le gaz naturel, de même que l'énergie nucléaire, bénéficient de technologies tout aussi adaptées techniquement pour la transformation en électricité. Dans les centrales à haut rendement technique, le gaz naturel atteint un rendement de presque 60 % (de l'énergie primaire à l'énergie électrique). Avec le charbon, le rendement des installations modernes se situe entre 45 et 50 %, avec 43 % pour la lignite.

6.9

A l'échelle mondiale, près de 40 % des besoins en électricité sont produits à partir du charbon, ce pourcentage étant de près de 30 % dans l'UE. Environ 63 % de la production mondiale de charbon est consacrée à la production d'électricité: le charbon est plus rentable que le pétrole ou le gaz naturel et disponible sans aucun doute partout dans le monde dans des régions de production fortement diversifiées.

6.10

La concentration de l'utilisation du charbon sur la production d'acier et d'électricité peut favoriser la combinaison des énergies fossiles, ce qui permettrait d'en retirer des avantages sur le plan économique, de la protection de l'environnement, de la sécurité des approvisionnements et de la préservation des ressources naturelles. Les réserves de charbon mondiales sont nettement plus importantes que celles de pétrole ou de gaz naturel.

6.11

Il conviendrait de fixer les conditions politiques nécessaires afin que les matières premières plus rares et d'utilisation plus souple que sont le gaz naturel et le pétrole soient réservées aux applications — en particulier dans les secteurs des transports et de l'industrie chimique — pour lesquelles le recours au charbon (ainsi qu'à l'énergie nucléaire, et actuellement, aux énergies renouvelables) entraîne des suppléments de coûts, de technique et de consommation d'énergie — et donc d'émissions de CO2! Cela permettrait de retarder l'épuisement des réserves au profit des prochaines générations.

6.12

Simultanément, cela implique la promotion du charbon (ainsi que de l'énergie nucléaire et des énergies renouvelables) dans les centrales électriques pour la production d'électricité, afin que celles-ci puissent se passer du pétrole et du gaz naturel (cf. également le paragraphe 8.12). L'Europe dispose, en Europe centrale et orientale, de réserves conséquentes de houille et de lignite. L'exploitation de ces réserves peut éviter d'augmenter encore la dépendance énergétique de l'UE vis-à-vis des fournisseurs externes.

7.   Protection de l'environnement et lutte contre les changements climatiques

7.1

Les analyses et comparaisons environnementales entre les énergies fossiles doivent comprendre l'ensemble de la chaîne de production et d'utilisation, de l'extraction et transport de la matière première à la transformation en énergie et utilisation de l'énergie finale. Chaque étape a des conséquences environnementales et implique des pertes énergétiques plus ou moins importantes. Pour ce qui concerne les importations d'énergie, il convient de tenir également compte des conséquences environnementales en dehors des frontières communautaires.

7.2

Lors de l'extraction et la production de charbon, pétrole et gaz naturel, il faut envisager divers impacts environnementaux. Il convient de limiter l'exploitation des sols et les émissions de poussières lors de l'extraction du charbon. Lors des forages et de l'extraction du pétrole, il faut éviter les fuites de pétrole et de gaz ainsi que de sous-produits. La même remarque s'applique à l'extraction de gaz naturel ainsi qu'au transport ultérieur de pétrole et de gaz par pipeline ou par bateau. L'extraction en mer nécessite de prendre des précautions particulières. Le méthane qui se forme lors de l'extraction du pétrole ne devrait pas être éliminé par torchage mais doit faire l'objet d'une exploitation industrielle. De même pour le grisou, qui se dégage dans les mines de charbon et qui est formé en grande partie de méthane.

7.3

La directive européenne sur les grandes installations de combustion fixe des normes environnementales strictes pour la construction et l'exploitation des centrales électriques d'une puissance égale à 50 MWth. La concentration des polluants dans les rejets de gaz dans les centrales au gaz, au pétrole ou au charbon doit être limitée selon l'état de la technique fixé dans cette directive. Les anciennes installations doivent être modernisées. La directive entend garantir que les émissions de poussières (y compris les particules fines, cf. par. 7.6), de dioxine de souffre, d'oxyde d'azote et de métaux lourds particulièrement nocifs, ainsi que des substances organiques toxiques ou cancérigènes restent à un niveau tolérable pour l'homme et la nature. Il faut réduire préventivement les émissions sonores de manière à éviter le plus possible les nuisances.

7.4

Le charbon contient des substances non combustibles qui sont éliminées sous forme de cendres (captées par des électrofiltres ou des filtres à manche) à l'issue de la combustion dans la centrale. Le taux de cendres du charbon représente généralement 10 % maximum (jusque 15 % dans certains cas). Selon leur composition, les cendres sont utilisées comme agrégats dans les cimenteries et utilisées dans la construction routière ou le comblement des mines ou des excavations.

7.5

Le pétrole a lui aussi un taux de cendres mais celui-ci est moindre. Le traitement du pétrole dans les raffineries produit des cendres, qui contiennent notamment du vanadium et du nickel, sous une forme solide, à savoir le coke de pétrole. Pour utiliser complètement l'énergie, celui-ci sert de combustible dans les centrales électriques et les installations de combustion qui disposent de systèmes d'épuration pour piéger toutes les substances polluantes.

7.6

Depuis quelques années, le débat fait rage sur ce que l'on appelle les émissions de particules fines (14). Il s'agit de particules en suspension inférieures à 10 μm qui sont susceptibles de pénétrer dans les poumons et de provoquer des pathologies des voies respiratoires. Ces particules peuvent également être émises dans les installations de chauffage au charbon ou au fioul, étant donné qu'il n'est pas possible d'éliminer dans les filtres les cendres les plus fines (cendres volantes). Néanmoins, la principale source d'émission de particules fines reste les véhicules diesel, dans la mesure où ceux-ci ne sont pas équipés de filtres à particules. Pour les centrales au charbon ou au mazout, la directive européenne sur les grandes installations de combustion fixe à 20 mg/m la valeur limite des émissions de poussières. Pour les grandes centrales, les émissions de particules fines connaissent une réduction supplémentaire grâce au procédé de désulfuration par voie humide. Pour réduire encore les émissions de particules fines et respecter les valeurs limites d'émission sur l'ensemble du territoire européen, l'UE a adopté pour les véhicules diesel des dispositions plus strictes qui prévoient l'installation de filtres à particules sur les véhicules à partir de 2008.

7.7

Certains États membres de l'UE ont imposé dès les années 80 du siècle dernier la désulfuration des gaz d'échappement des grandes centrales à charbon et des installations de combustion industrielles. C'est ainsi que l'on a pu mettre un frein à l'acidification des sols et des mers que l'on constatait alors. La version la plus récente de la directive européenne sur les grandes installations de combustion fixe à 200 mg/m3 la valeur limite des rejets de SO2 pour les installations de plus de 300 MW. En l'état de la technique, il est possible de piéger plus de 90 % des composés du soufre. Les produits issus du piégeage du soufre, principalement le plâtre, ont trouvé de nouveaux marchés et permis de réduire l'exploitation des ressources naturelles.

7.8

La combustion des énergies fossiles dégage à température de combustion élevée ce que l'on appelle des oxydes d'azote, à partir de l'azote présent dans le combustible lui-même et dans l'air ambiant ainsi que de l'oxygène de combustion. L'augmentation de la concentration de ces oxydes d'azote peut provoquer des pathologies des voies respiratoires; c'est à partir de ces oxydes d'azote que se forme l'ozone, qui est un polluant. La directive européenne sur les grandes installations de combustion impose des plafonds d'émission des oxydes d'azote à 200 mg/m3 pour les installations de plus de 300 MW.

7.9

Les scientifiques partent de l'hypothèse qu'il existe une relation de cause à effet entre les émissions de CO2 anthropiques et d'autres gaz dits «à effet de serre» et l'augmentation de la température à la surface de la terre (effet de serre). On ne mesure pas encore toute l'ampleur de cet effet de serre. Chaque année, près de 20 milliards de tonnes de CO2 sont émis lors de processus de combustion de charbon, de pétrole et de gaz naturel. C'est la source principale des émissions de CO2 anthropiques. Outre l'augmentation de l'efficacité des procédés et les mesures à prendre pour économiser l'énergie, c'est avant tout le développement des technologies de piégeage du CO2 (cf. ci-dessous) qui permettra d'obtenir une diminution conséquente de ces émissions.

7.10

Il est indispensable d'améliorer l'efficacité des procédés de transformation et d'utilisation de l'énergie si l'on veut obtenir des résultats dans la lutte contre les changements climatiques. Il convient de s'atteler fermement à la tâche pour prendre les mesures nécessaires. Les stratégies de substitution des combustibles ne remplissent pas vraiment l'objectif recherché puisqu'elles prônent unilatéralement l'utilisation de certaines énergies, comme le gaz, ce qui pourrait diminuer le rapport coût-efficacité et remettre en question la sécurité de l'approvisionnement énergétique de l'UE. Le gaz est par ailleurs une matière première trop importante pour la chimie et le secteur des transports pour être utilisé à des fins de production électrique.

7.11

Comparé au charbon, la combustion du gaz naturel ne produit, ramené en unité énergétique, que 50 à 60 % du CO2 responsable des changements climatiques, car outre le carbone présent dans le gaz naturel, l'hydrogène qu'il contient est également utilisé (brûlé) pour la production d'énergie. Néanmoins, le méthane lui-même, composant principal du gaz naturel, est un gaz à effet de serre qui a bien plus d'effets sur le climat (environ 30 fois plus) que le CO2. Lors de la production et l'utilisation des sources d'énergie fossiles, il faut donc s'efforcer au maximum d'éviter les émissions de méthane. Le méthane libéré lors de l'extraction du pétrole et de la houille doit être récupéré et valorisé. Il faut de même éviter à tout prix les fuites de méthane lors du transport de gaz naturel. En effet, des pertes très faibles lors du transport par pipeline impliquent déjà à elles seules que le gaz naturel perd son avantage à cet égard sur le charbon.

7.12

Les résultats rapides obtenus dans la lutte contre les changements climatiques et la protection de l'environnement lors de l'exploitation du charbon, du pétrole et du gaz, sont dus principalement, comme l'expérience le prouve, au remplacement d'installations et de centrales vieillies par les technologies les plus modernes d'une efficacité bien supérieure. Les politiques qui favorisent les investissements dans les nouvelles technologies sont donc particulièrement indiquées pour parvenir à des résultats ambitieux sur le plan de la protection de l'environnement.

7.13

La législation environnementale de l'UE a permis ces vingt dernières années d'harmoniser les normes environnementales en vigueur dans les pays de l'Union européenne. Les deux directives européennes sur les grandes installations de combustion et sur la qualité de l'air ambiant y ont tout autant contribué que les politiques et mesures visant à augmenter l'efficacité énergétique et à éviter l'émission de gaz à effet de serre.

8.   Développement technologique (15)

8.1

Dans l'UE des 25, les centrales au charbon, au mazout et au gaz représentent plus de 60 % de l'ensemble des centrales électriques en fonctionnement et constituent donc l'épine dorsale de la production électrique en Europe. La nécessité de remplacer les installations vieillissantes tout en répondant au besoin d'augmenter les capacités des centrales électriques (cf. par. 5.8) signifie que dans les 25 prochaines années, il faudra construire un nombre significatif de nouvelles centrales. Même dans le cas où les énergies renouvelables seraient davantage sollicitées et où l'on poursuivrait le développement de l'énergie nucléaire, il sera indispensable de faire appel aux centrales au charbon et au gaz pour couvrir une grande partie de la production manquante. Plus l'on parviendra à augmenter l'efficacité de ces centrales et à piéger les substances polluantes, plus il sera facile de respecter les exigences en matière de lutte contre les changements climatiques et en matière environnementale.

8.2

C'est la raison pour laquelle il convient d'intensifier aussi les efforts de R&D dans le domaine du développement des centrales aux énergies fossiles. C'est un secteur qui a été quelque peu négligé dans les années 90, avec une réduction très importante des aides publiques à la recherche dans pratiquement tous les États membres.

8.3

Le Comité se félicite que le 7e programme-cadre de RDT ait suivi la recommandation qu'il a formulée à plusieurs reprises pour la création d'une priorité thématique «Énergie». Il conviendrait cependant d'adapter en conséquence la dotation des programmes de recherche concernés des États membres. Cela pourrait contribuer à inverser véritablement la tendance. La même remarque s'applique à la poursuite du développement des technologies d'utilisation des énergies fossiles, ce qui serait bénéfique pour la compétitivité du parc européen sur le marché mondial des centrales en pleine expansion.

8.4

Les centrales au charbon modernes atteignent aujourd'hui un rendement de plus de 45 % avec la houille et de plus de 43 % avec la lignite. On connaît déjà les étapes à franchir pour améliorer la technologie et parvenir à un rendement de 50 % dans les centrales au charbon d'ici à 2020. L'objectif à long terme est d'élever à 700oC/350 bar la pression et la température du circuit de vapeur dans la centrale, ce qui nécessite de développer les matériaux nécessaires. Pour toute une nouvelle génération de centrales à charbon, il faut tester des installations de séchage de la lignite en amont de la combustion. L'ambition de ces objectifs de développement est telle qu'elle requiert une coopération au niveau international, comme elle existe par exemple dans les projets communautaires AD 700 et Comtes 700 pour le développement d'une centrale à 700oC. L'expérimentation de nouveaux concepts de centrales requiert des investissements pouvant aller jusqu'à 1 milliard d'euros. Comme aucune entreprise n'est véritablement en mesure d'assumer à elle seule les coûts et les risques liés à ce type de projet, il faut encourager les entreprises européennes à travailler en collaboration.

8.5

Le développement de turbines à gaz à haut rendement a permis ces dernières décennies d'enregistrer une amélioration sensible de l'efficacité des centrales à gaz. Le rendement des nouvelles centrales au gaz naturel a atteint presque 60 %. Cependant, l'augmentation considérable des prix du gaz sur le marché laisse planer des doutes sur leur compétitivité à long terme et donc sur la construction de nouvelles centrales à gaz.

8.6

Pour que les progrès de la technologie des turbines à gaz puissent s'appliquer aussi dans les procédés de transformation du charbon en électricité, il faut au préalable que le charbon ait été transformé en gaz. Dans les années 80 et 90, l'UE a largement contribué, grâce à son effort de recherche, au développement de la technologie de gazéification, et financé la construction de deux centrales de démonstration à gazéification intégrée (IGCC). Cet effort de développement des technologies ne doit pas seulement se poursuivre dans le but d'augmenter l'efficacité des centrales au charbon, mais aussi servir de base technique à la mise au point d'une future centrale au charbon «propre» (sans émission de CO2).

8.7

L'augmentation de l'efficacité et la diminution des émissions de CO2 ne doivent pas se limiter au secteur industriel et à la production d'électricité. Le potentiel d'économie d'énergie chez les ménages et les petits professionnels, en tant que consommateurs finaux, reste particulièrement important parce qu'il y a peu d'incitation économique (réduction de la consommation/coûts de nouvelles installations ou aménagements).

8.8

Comme auparavant, le secteur des transports est un secteur dont les besoins énergétiques vont croissants, la mobilité croissante après l'élargissement en étant une des causes. L'augmentation des émissions de polluants nocifs pour la santé et des gaz à effet de serre doit être dans un premier temps limitée grâce au développement de moteurs et véhicules plus efficaces et moins polluants, puis évitée à tout prix. Il faut améliorer en permanence les dispositifs antipollution des véhicules. Manifestement, il ne sera possible d'atteindre cet objectif que grâce au développement et à l'utilisation sur un large territoire de toute une gamme de technologies avancées, qui porteront notamment sur l'amélioration des moteurs à combustion, la technologie du diesel, les moteurs hybrides, les combustibles, le rendement des moteurs de véhicules, le développement des piles à combustibles voire la technologie basée sur l'hydrogène.

8.9

Les piles à combustible devraient permettre en principe, tant dans les véhicules que pour des applications fixes domestiques, commerciales ou industrielles, d'enregistrer une augmentation pouvant aller jusqu'à 20 % environ de l'efficacité de la production combinée d'électricité et de chaleur. Elles se basent sur l'utilisation d'un combustible sous forme gazeuse, soit le gaz naturel, soit un gaz de synthèse soit de l'hydrogène pur, qui peut être obtenu par exemple à partir du méthanol grâce au reformeur monté sur la pile. Il est à noter cependant que jusqu'ici, la pile à combustible, bien que connue depuis 150 ans, n'a pas effectué de percée économique ou technologique dans le domaine de la propulsion (compétitive) des véhicules ou des groupes électrogènes ou générateurs thermiques décentralisés. Cependant, il conviendrait que la recherche et le développement continuent à bénéficier d'aides publiques pour en évaluer pleinement et si possible exploiter le potentiel.

8.10

Aucune autre option énergétique n'a suscité autant d'intérêt ces dernières années que la filière «hydrogène» puisque certains parlent même d'une future «société de l'hydrogène». La plupart des gens cependant se méprennent et pensent que l'hydrogène est une source d'énergie primaire, au même titre que le pétrole ou le charbon. Ce n'est pas le cas: l'hydrogène est produit soit à partir des hydrocarbures fossiles soit à partir de l'eau, sous l'action d'une énergie électrique. De même que le CO2 résulte de la combustion de carbone, l'eau (H2O) résulte de la combustion d'hydrogène.

8.11

Il faut ajouter que le transport d'hydrogène est moins avantageux sur le plan technique, énergétique et économique que le transport d'électricité ou d'hydrocarbures liquides. Cela signifie que l'hydrogène ne devrait rentrer en ligne de compte que lorsque l'électricité n'est ni possible ni envisageable. Il conviendrait de réaliser une analyse objective de ce concept pour concentrer les efforts de recherches sur des objectifs réalistes.

8.12

Étant donné l'importance capitale que revêt pour le secteur des transports un hydrogène (combustible) facilement transportable, il conviendrait de préserver le plus possible les réserves et ressources naturelles, c'est-à-dire de ne pas utiliser le pétrole dans les cas où le charbon, les combustibles nucléaires ou les énergies renouvelables peuvent entrer en ligne de compte de manière prometteuse.

9.   Piégeage et séquestration du CO2

9.1

Il ne sera possible de réduire les émissions mondiales de gaz à effet de serre d'ici au milieu du siècle de manière significative et au-delà des exigences de «Kyoto», objectif que l'UE s'est fixé, que si dans quelques décennies les centrales et les autres grandes installations industrielles sont conçues, construites et fonctionnent pour produire sans émission de CO2 ou très peu. Ni l'énergie nucléaire ni les sources d'énergie renouvelables ne seront en mesure d'assurer à elles seules la production et de remplacer dans quelques dizaines d'années les combustibles fossiles, même si elles connaissent un développement intensif.

9.2

Plusieurs procédés permettant de faire fonctionner les centrales au charbon sans rejet de CO2 ont été proposés. Ces procédés sont également applicables, avec quelques aménagements, à la combustion au mazout et au gaz. Trois options théoriques sont envisagées: (i) le piégeage du CO2 à la sortie des cheminées des centrales traditionnelles, (ii) le développement des techniques de combustion de l'oxygène et (iii) les centrales à gazéification intégrée dans des cycles combinés (IGCC) avec séparation du CO2 du gaz combustible. C'est pour ce dernier concept que les recherches sont les plus avancées.

9.3

La séparation du CO2 du gaz combustible lors de la gazéification du charbon produit de l'hydrogène pur qui peut être utilisé dans les turbines à hydrogènes pour produire de l'électricité. Les seuls rejets sont composés de vapeur d'eau inoffensive. Si cette technologie devait tenir ses promesses, on pourrait envisager facilement une synergie avec les technologies basées sur l'hydrogène dans d'autres applications.

9.4

Depuis plus de 20 ans, le concept des centrales à gazéification intégrée dans des cycles combinées (Integrated Gasification Combined Cycle ou IGCC) fait l'objet de recherches et de développements intensifs. Les principes de gazéification sont connues mais nécessitent l'adaptation des technologies de combustion du charbon. Néanmoins, les coûts de production d'électricité de ce type de centrales pourraient presque être multipliés par deux par rapport à ceux des centrales classiques sans piégeage du CO2, avec une augmentation d'un tiers de la consommation des ressources. Malgré tout, cette technologie se révèlera pour certains sites plus avantageuse sur le plan économique que d'autres technologies sans rejet de CO2 comme l'énergie éolienne, l'énergie solaire ou la production d'électricité à partir de la biomasse.

9.5

Dans les années 80, divers concepts d'IGCC, sans que l'on parle encore à l'époque de piégeage du CO2, ont été développés, certains avec des aides de l'UE. Des centrales de démonstrations de 300 MK pour la houille ont été construites et ont fonctionné en Espagne et aux Pays-Bas. Une centrale de démonstration pour la lignite a été développée, construite et exploitée, ici encore avec des aides communautaires, pour la production de gaz de synthèse visant à une synthèse ultérieur du méthanol. L'Europe a ainsi créé les conditions techniques préalables parfaites pour développer des centrales au charbon sans rejet de CO2, à tester dans des installations de démonstrations.

9.6

Il conviendrait de ne pas se limiter aux centrales mais de se pencher également sur les possibilités de piégeage du CO2 pour d'autres procédés industriels qui sont à l'origine d'un rejet très important de CO2, par exemple la production d'hydrogène, divers procédés de l'industrie chimique et le traitement des huiles minérales ainsi que la production de ciment et d'acier. Pour nombres de ces procédés, le piégeage du CO2 peut se révéler plus rentable et plus facile à réaliser techniquement que dans des centrales.

9.7

Les besoins de recherche se font également sentir pour mettre au point des techniques rentables et écologiques assurant la fiabilité à long terme de la séquestration du CO2. On envisage de stocker celui-ci dans les gisements épuisés de pétrole ou de gaz, les sites géologiques aquifères, dans les gisements de charbon voire dans les océans. Si le stockage dans des gisements épuisés de pétrole ou de gaz, quand c'est possible, devrait représenter la solution la plus rentable, la préférence pour les grands volumes va aux sites aquifères, d'autant plus qu'on en trouve partout dans le monde. Il s'agit de montrer, preuves à l'appui, que de tels sites sont capables de stocker le CO2 à long terme sans conséquences négatives sur l'environnement. L'UE soutient tout une série de programmes de recherches qui couvrent cet objectif. À ce jour, les résultats sont encourageants mais pour ce qui concerne le stockage dans les océans par exemple, il n'est pas certain que le CO2 ne serait pas libéré si la température de l'eau devait augmenter (cf. également le par. 3.14).

9.8

Les technologies de piégeages et de séquestration du CO2 ne seront utilisables à grande échelle qu'après 2020, sous réserve que les efforts de R&D indispensables aient lieu en temps utile et aient tenu leurs promesses. Les études estiment que les coûts varieront, pour chaque tonne de CO2 évitée, de 30 à 60 euros/t. pour le piégeage, le transport et la séquestration du CO2, ce qui reste plus avantageux que la plupart des procédés de production d'électricité à partir des énergies renouvelables.

Bruxelles, le 26 octobre 2005.

La Présidente

du Comité économique et social européen

Anne-Marie SIGMUND


(1)  cf. dans le même contexte les avis suivants: «Promouvoir les énergies renouvelables: moyens d'action et instruments de financement» (JO C 108 du 30.4.2004), «Les enjeux du nucléaire pour la production d'électricité» (JO C 112 du 30.4.2004), «La fusion nucléaire» (JO C 302 du 7.12.2004), «L'utilisation de l'énergie géothermique – la chaleur issue de la terre» (JO C 110 du 30.4.2004).

(2)  Houille et lignite.

(3)  Voir chapitre 3.

(4)  Une étude publiée en avril 2005 par la banque d'investissement Goldman Sachs évoque le début d'une flambée des prix du pétrole et estime que les cours pourraient atteindre 105 dollars le baril en 2005. Les prévisions étaient auparavant de 50 dollars/baril pour 2005, passant ensuite à 55 dollars/baril en 2006; or, le prix du baril dépassait déjà les 70 dollars le 29 août 2005.

(5)  Les centrales électriques modernes peuvent normalement produire 1 GW de puissance électrique (GWe) par bloc. Un GW (gigawatt) équivaut à 1000 mégawatts (MW), soit 1 million de kilowatts (kW) ou 1 milliard de watts (W). Un wattseconde (Ws) équivaut à 1 joule (J), un kilowattheure (kWh) est donc égal à 3,6 millions de joules – soit 3,6 mégajoules (MJ). Ainsi, 1 mégajoule (MJ) est égal à environ 0,28 kilowattheure (kWh).

(6)  Sur l'importance qu'il y a à limiter les embarras de circulation et le trafic, cf. également CESE 93/2004.

(7)  L'énergie n'est pas consommée mais simplement transformée pour être utilisée. Cette transformation se fait selon des procédés appropriés, par exemple la combustion de charbon, la transformation de l'énergie éolienne en électricité ou la fission nucléaire (conservation de l'énergie; E = mc2). On parle également dans ce contexte d'«approvisionnement en énergie», de «production d'énergie» ou de «consommation d'énergie».

(8)  (AIE) World Energy Outlook 2004, p. 57: «Fossil fuels will continue to dominate global energy use. Their share in total demand will increase slightly, from 80 % in 2002 to 82 % in 2030».

(EIA) International Energy Outlook, avril 2004, [http://www.eia.doe.gov/oiaf/ieo/]: «The IEO2004 reference case projects increased consumption of all primary energy sources over the 24-year forecast horizon» (figure 14 et annexe A, tableau A2).

(9)  (Commission européenne), [http://europa.eu.int/comm/dgs/energy_transport/figures/scenarios/doc/chapter_1.pdf], EU-25 energy and transport reference case to 2030 (baseline): page 9, tableaux 1 à 8.

(10)  1 kg de pétrole = 42,7 MJ; 1 kg tec = 29,3 MJ; 1m2 de gaz PCI = 31,7 MJ (pour les définitions de joule (J) et de mégajoule (MJ), voir note no 3).

(11)  La crise des prix du pétrole que nous connaissons actuellement, qui va en s'aggravant, indiquerait même que ces effets pourraient se faire sentir bien avant.

(12)  Conseil mondial de l'énergie, Energie für Deutschland, Fakten, Perspektiven und Positionen im globalen Kontext 2004 Schwerpunktthema, «Zur Dynamik der Öl- und Erdgasmärkte» (Énergie pour l'Allemagne – Faits, perspectives et positions dans le contexte mondial 2004 – Thème principal: «La dynamique des marchés du pétrole et du gaz»).

(13)  Document de la Direction générale de l'énergie et des transports de la Commission européenne de septembre 2004 disponible uniquement en anglais.

(14)  La même remarque s'applique aux combustibles liquides issus de la biomasse, qui ne sont pour le moment commercialisables que grâce à d'importantes subventions.

(15)  Directive 96/62/CE du Conseil du 27 septembre 1996 concernant l'évaluation et la gestion de la qualité de l'air ambiant.


3.2.2006   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 28/16


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif au financement pluriannuel de l'Agence européenne pour la sécurité maritime dans le domaine de la lutte contre la pollution causée par les navires et modifiant le règlement (CE) no 1406/2002»

[COM(2005) 210 final — 2005/0098 (COD)]

(2006/C 28/03)

Le 7 juin 2005, le Conseil a décidé, conformément à l'article 71 du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la proposition susmentionnée.

La section spécialisée «Transports, énergie, infrastructures, société de l'information», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 4 octobre 2005 (rapporteur: M. Chagas).

Lors de sa 421ème session plénière des 26 et 27 octobre 2005 (séance du 26 octobre 2005), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 124 voix pour et 4 abstentions.

1.   Introduction

1.1

Avec l'adoption du règlement (CE) no 724/2004 du 31 mars 2004 modifiant le règlement (CE) no 1406/2002 instituant une Agence européenne pour la sécurité maritime (AESM), l'Agence s'est vu assigner des tâches nouvelles dans le domaine de la lutte contre la pollution aux hydrocarbures.

1.2

La proposition à l'examen fixe des procédures pour le financement communautaire des nouvelles tâches de l'Agence, sur la base d'un engagement pluriannuel sur une période de sept ans, de 2007 à 2013. La Commission propose un montant de 154 millions d'euros pour le financement nécessaire sur sept ans.

1.3

Suite à l'assignation de ces nouvelles tâches, le conseil d'administration de l'Agence a adopté en octobre 2004 un plan d'action en matière de préparation et de lutte en cas de pollution aux hydrocarbures. Le plan d'action répertorie les activités que l'Agence a l'intention d'exercer dans le contexte du règlement concerné, tant dans le domaine de la réaction aux marées noires au moyen de navires spécialisés dans les interventions en cas de pollutions que dans le domaine de la préparation pour la mise sur pied d'opérations d'intervention efficaces.

1.4

L'AESM a identifié quatre zones d'action prioritaires: la mer Baltique, les parages Ouest de la Manche, la côte Atlantique et la mer Méditerranée (en particulier la zone correspondant à la route des pétroliers en provenance de la mer Noire), où l'Agence entend stationner des navires d'intervention antipollution affrétés, prêts à entrer en action lorsqu'au moins un État membre le demande. Il convient de souligner que le rôle de l'AESM dans ce domaine sera de compléter, et non de remplacer, les mécanismes nationaux d'intervention antipollution. Le plan d'action prévoit également une capacité de réaction supplémentaire en cas d'incidents impliquant des substances nocives et potentiellement dangereuses (SNPD).

1.5

Au titre du règlement modifié en 2004, l'AESM doit fournir à la Commission et aux États membres une assistance technique et scientifique en matière de lutte antipollution, et ce sous 3 formes: information, coopération et coordination, assistance opérationnelle.

1.6

C'est l'assistance opérationnelle qui nécessitera le principal investissement financier, le plan d'action prévoyant la création d'un système de navires de réserve pour la récupération des hydrocarbures ainsi que d'un centre de services d'imagerie par satellite. Les contrats devant être passés par l'AESM pour l'assistance en matière de récupération des hydrocarbures couvrent toutes les actions et leurs conséquences financières jusqu'au lancement de l'intervention suite à une marée noire. Les frais occasionnés par l'intervention d'un navire pour la récupération des hydrocarbures seront supportés par l'État membre demandeur.

1.7

Ces nouvelles responsabilités étant des responsabilités à long terme, la Commission propose un budget pluriannuel pouvant fournir les investissements à long terme nécessaires et garantir la sécurité financière requise, en réduisant les dépenses grâce à la possibilité de négocier des contrats à long terme.

2.   Observations générales

2.1

Dans son avis sur la proposition assignant de nouvelles tâches à l'AESM en matière de lutte antipollution (1), le CESE se félicitait de la proposition de la Commission et soulignait le rôle clé de l'AESM dans l'amélioration de la sécurité maritime dans les États membres. Il déplorait toutefois le fait que plusieurs États membres n'étaient pas encore suffisamment équipés pour faire face aux accidents majeurs tels que ceux de l'Erika ou du Prestige.

2.2

Malgré les progrès accomplis, la situation actuelle laisse encore à désirer, dans certains cas. Parallèlement au plan d'action, l'Agence a présenté une vue d'ensemble des capacités de réaction des États membres face à une pollution aux hydrocarbures, qui montre que la capacité de réaction devrait être améliorée dans certaines régions, au moyen de navires et équipements supplémentaires pour la récupération des hydrocarbures.

2.3

On ne peut pas s'attendre à ce que tous les États côtiers disposent en permanence de toutes les ressources nécessaires pour faire face seuls aux accidents maritimes importants, notamment les grandes marées noires. Le manque actuel de ressources s'est toutefois traduit par des dommages écologiques ayant des conséquences à long terme.

2.4

Le CESE soutient donc la proposition visant à fournir à l'AESM les ressources nécessaires pour compléter, sur demande, les mécanismes nationaux de prévention et de lutte contre la pollution. Le CESE souligne toutefois que ces ressources ne peuvent servir que de complément. En effet, ces ressources financières ne doivent en aucun cas être utilisées pour remplacer les mesures de prévention de la pollution qui doivent être prises par les États membres.

2.5

Le CESE souligne notamment la nécessité d'un programme de financement pluriannuel pour ces mécanismes. C'est la seule façon de garantir une programmation cohérente des activités de l'AESM dans ce domaine et d'optimiser l'utilisation des ressources en passant des contrats d'une durée minimum de trois ans pour la fourniture de navires de réaction rapide (2).

2.6

Le CESE répète le commentaire qu'il avait fait dans l'avis cité au paragraphe 2.1, au sujet de la nécessité de s'assurer que le(s) propriétaire(s) des navires affrétés pour effectuer ces tâches respecte(nt) la législation communautaire et internationale applicable, notamment en ce qui concerne les conditions de sécurité à bord et les conditions de vie et de travail de l'équipage.

2.7

Le plan d'action adopté par l'Agence identifiant les priorités sur la base des fonds limités prévus, le CESE est préoccupé par le fait que, compte tenu des difficultés actuelles à parvenir à un accord sur le budget communautaire, les fonds qui seront finalement débloqués pourraient être moindres que ceux fixés dans la proposition de budget. Cela signifierait qu'il faudrait choisir certaines mesures au détriment d'autres ou progresser dans certains domaines seulement. Le CESE ne peut soutenir cette approche, car la décision des États membres de renforcer les compétences de l'Agence implique la nécessité de garantir le financement nécessaire lui permettant d'atteindre ses objectifs dans le domaine de la prévention de la pollution maritime. Il est essentiel d'accorder, également au niveau communautaire, l'importance requise à la prévention et la lutte contre la pollution maritime et de s'assurer que celles-ci ne sont pas considérées uniquement d'un point de vue purement économique.

2.8

Le CESE s'inquiète des retards pris par certains États membres dans la mise en oeuvre de certaines mesures déjà adoptées en matière de prévention et de lutte contre la pollution maritime, notamment en ce qui concerne la désignation de zones de refuge et de zones protégées, la mise à disposition d'installations de réception ou l'accroissement de leurs ressources pour garantir l'efficacité des contrôles par l'État du port. Ces retards font douter du véritable engagement de ces États envers la prévention et la lutte contre la pollution maritime, en dépit des bonnes intentions régulièrement exprimées, notamment après chaque nouvel accident maritime d'importance.

2.9

Il convient également d'investir dans les moyens et équipements de surveillance aérienne permettant de détecter et de combattre la pollution ainsi que de prévenir la violation de la réglementation antipollution.

2.10

Les images par satellite peuvent également être utilisées pour compléter les activités de surveillance et de suivi. Le CESE soutient le projet de la Commission visant à créer un centre de services d'imagerie par satellite, pour aider les États membres à détecter, surveiller et gérer les rejets illicites et les déversements accidentels d'hydrocarbures.

2.11

Compte tenu du coût élevé (3) des images par satellite, le CESE estime qu'il convient d'optimiser l'utilisation des ressources et, notamment, que le recours aux images doit être coordonné entre les États membres, ce qui pourrait permettre de réaliser des économies considérables. Dans le même temps, il conviendrait d'investir dans l'amélioration de la collecte d'images dans toutes les zones maritimes de l'UE, la couverture actuelle n'étant pas totale, notamment en Méditerranée.

2.12

Le CESE estime également que les mesures prévues pour l'information, la coopération et la coordination sont très importantes. Elles garantiront une utilisation plus rationnelle des ressources existantes et l'Agence a là un rôle essentiel à jouer.

3.   Conclusions

3.1

Le CESE soutient la proposition consistant à fournir à l'AESM les ressources nécessaires pour compléter les mécanismes nationaux de prévention et de lutte contre la pollution, à la demande des États membres.

3.2

Le Comité regrette cependant qu'un certain nombre d'États membres n'aient pas encore alloué les ressources nécessaires ou mis en place des mécanismes par eux-mêmes. Il demande à la Commission de les inviter à accélérer le processus.

3.3

Le CESE est préoccupé par le fait que, compte tenu des difficultés actuelles à parvenir à un accord sur le budget communautaire, les fonds qui seront finalement débloqués pourraient être moindres que ceux fixés dans la proposition de budget. La décision des États membres d'attribuer des compétences supplémentaires à l'Agence implique la nécessité de garantir le financement nécessaire lui permettant d'atteindre ses objectifs dans le domaine de la prévention de la pollution maritime. Il est essentiel d'accorder, également au niveau communautaire, l'importance requise à la prévention et la lutte contre la pollution maritime et de s'assurer que celles-ci ne sont pas considérées uniquement d'un point de vue purement économique.

3.4

Le rôle de l'Agence en matière de promotion de la coopération et de la coordination des ressources et activités des États membres est essentiel pour la mise en place d'une stratégie rationnelle et rentable.

Bruxelles, le 26 octobre 2005.

La Présidente

du Comité économique et social européen

Anne-Marie SIGMUND


(1)  JO C 108 du 30.4.2004, rapporteur: M. Chagas.

(2)  Dans ce contexte, «rapide» signifie que le navire concerné peut intervenir dans les 24 heures. La transformation du navire, ycompris l'installation à bord de l'équipement nécessaire, prend généralement de 4 à 8 heures. De plus, 4 à 8 heuressupplémentaires sont requises pour que le navire arrive sur le lieu de l'accident.

(3)  Le coût par image couvrant une zone de 500 km2 est compris entre 800 et 1000 euros en fonction de plusieurs facteurs (notamment du délai de transmission demandé et de la date de signature du contrat). Selon une estimation raisonnable del'AESM, 1000 images par an sont nécessaires.


3.2.2006   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 28/18


Avis du Comité économique et social européen sur la «Communication de la Commission au Conseil relative à la gestion des risques et des crises dans le secteur agricole»

[COM(2005) 74 final]

(2006/C 28/04)

Le 20 avril 2005, la Commission européenne a décidé, conformément à l'article 262 du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la «Communication de la Commission au Conseil relative à la gestion des risques et des crises dans le secteur agricole»

La section spécialisée «Agriculture, Développement rural et Environnement», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 7 octobre 2005 (rapporteur: M. BROS).

Lors de sa 421ème session plénière des 26 et 27 octobre 2005 (séance du 26 octobre 2005), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 122 voix pour, 1 voix contre et 3 abstentions.

1.   Introduction

1.1

Cette Communication de la Commission européenne fait suite à de nombreux travaux réalisés au niveau européen: Rapport de la Commission sur la gestion des risques en janvier 2001, débat du Conseil sous Présidence suédoise au printemps 2001, Mémorandum espagnol et Conférence Internationale à Madrid début 2002 sur «les assurances agricoles et la garantie des revenus», Mémorandum grec et Séminaire sur les catastrophes naturelles à Thessalonique en 2003, Conférence organisée par la Présidence néerlandaise en décembre 2004 sur les coûts matériels et immatériels de la lutte contre les maladies animales.

1.2

Plus précisément, la Communication répond à un engagement de la Commission pris dans le cadre de la Réforme de la PAC en juin 2003 à Luxembourg sous la forme d'une déclaration:

«La Commission étudiera des mesures spécifiques pour faire face aux risques, aux crises et aux catastrophes naturelles à l'échelle nationale dans le domaine de l'agriculture. Un rapport assorti de propositions adéquates sera présenté au Conseil avant la fin de 2004. La Commission étudiera en particulier la possibilité de financer ces mesures par le biais du point de pourcentage de modulation qui serait redistribué directement aux États membres ainsi que de prévoir, dans le cadre de chaque organisation commune de marché, un article habilitant la Commission à agir, en cas de crise à l'échelle communautaire, en s'inspirant des principes établis pour de tels cas dans l'organisation commune de marché dans le secteur de la viande bovine».

1.3

Elle répond aussi aux Conclusions du Conseil de décembre 2003 demandant à poursuivre le débat et à faire un inventaire des instruments de gestion des risques disponibles; à examiner les options en matière de gestion des risques et les éventuels nouveaux instruments (Organisation Commune de Marché, engagements financiers, règles de concurrence) et enfin à évaluer et adapter les lignes directrices concernant les aides d'État en matière agricole.

1.4

La PAC offrait par le passé une protection via des politiques de soutien aux marchés et aux prix. Mais suite à la dernière réforme, les agriculteurs sont confrontés de façon plus directe à toute une série de risques. Aussi, la Commission souhaite expérimenter de nouveaux instruments dans le cadre de la PAC visant à aider les agriculteurs à améliorer leur capacité de gestion des risques et des crises.

1.5

Dans ses documents de travail, la Commission a dressé un inventaire des risques existants en agriculture: risque humain ou personnel; risque sur le capital (bâtiment etc.); risque financier; risque en responsabilité (biotechnologie...); risque sur la production (climatique…); risque sur le prix. Elle a aussi dressé un inventaire des outils de gestion des risques existants: endettement et investissement (épargne défiscalisée); adaptation des techniques de production; diversification; technique de commercialisation (contrat, intégration); marché à terme; fonds de mutualisation et assurance.

1.6

Ces réflexions très larges doivent être approfondies pour répondre au mieux aux attentes et limiter les impacts négatifs des crises dans le secteur de l'agriculture.

2.   La proposition de la Commission

2.1

Dans les trois premières pages de la Communication, la Commission replace la problématique de la gestion des risques et des crises dans son contexte. De nombreuses idées sont abordées dans les documents de travail joints à la Communication. Par la suite, dans ses propositions, la Commission répond aux demandes explicitement indiquées dans les Conclusions du Conseil, à savoir: l'extension d'un filet de sécurité, le financement des mesures de gestion des risques et des crises par la modulation au travers de trois options: l'assurance contre les catastrophes naturelles, le soutien aux fonds de mutualisation et la fourniture d'une couverture de base contre les crises de revenu.

2.2

L'utilisation des fonds issus de la modulation implique des outils basés sur des mesures de développement rural. En conséquence, ces nouvelles mesures devraient améliorer la compétitivité des exploitations (axe 1), respecter l'annualité budgétaire, respecter les règles sur les aides d'état et être compatibles avec la boîte verte de l'OMC.

2.3

La première option concerne les assurances contre les catastrophes naturelles. Pour la Commission ceci peut aider à réduire les paiements ad hoc effectués par les États membres. La prime payée par l'agriculteur peut être subventionnée à hauteur de 50 %. Un paiement est effectué lorsque les pertes sont supérieures à 30 % de la production moyenne des 3 dernières années, ou la production médiane des 5 dernières années (on supprime du calcul la meilleure et la plus mauvaise année des 5 dernières années). La compensation ne peut pas dépasser 100 % des pertes. La compensation ne doit pas spécifier le type ou le volume de production future. Une alternative à la subvention de la prime est la ré-assurance des compagnies d'assurance privées.

2.4

La deuxième option concerne les fonds de mutualisation. Il s'agit d'encourager les agriculteurs à partager les risques entre eux. Un soutien temporaire et dégressif peut être apporté sous la forme d'une prise en charge des coûts administratifs. La subvention est calculée selon le nombre d'agriculteurs participants. Le fonds doit être reconnu par l'état membre. La compatibilité avec la boîte verte de l'OMC doit être analysée au cas par cas.

2.5

La troisième option est une couverture de base au revenu. Elle s'inspire du modèle canadien et des spécifications de la boîte verte. Il s'agit d'augmenter la trésorerie en cas de crise (soutien au revenu). Le système doit être ouvert à tous les agriculteurs. La compensation est déclenchée si la perte est supérieure à 30 % de la période de référence (idem option 1). Un indicateur de revenu est à déterminer. La compensation doit être inférieure à 70 % des pertes et ne doit pas spécifier le type ou le volume de la production future.

3.   Remarques générales

3.1

Le Comité se félicite de la proposition de la Commission qui ouvre le débat sur un sujet primordial pour l'avenir de l'Agriculture. La Commission a réalisé cette Communication suite à des demandes précises dans un cadre contraignant. Le Comité estime qu'il ne s'agit que de premières réflexions, qu'il faudra approfondir pour répondre aux risques et crises décrits en introduction.

3.2

Dans le chapitre 1 (Introduction) et le chapitre 2 (Contexte) de sa communication, la Commission expose brièvement les nouvelles conditions en vigueur depuis la réforme de la PAC de 2003 (introduction du régime de paiement unique) et rend compte des différentes mesures prises et des missions imparties par le Conseil concernant la gestion des risques et des crises dans le secteur agricole. Ni la communication de la Commission ni le document de travail de la DG Agriculture n'évoquent de manière explicite les changements intervenus en ce qui concerne les risques auxquels est exposée l'agriculture européenne.

3.3

Le Comité remarque que la réforme de juin 2003 conduit à une forte augmentation de la volatilité des prix agricoles, qui s'ajoute à la volatilité existante des prix des intrants, et donc à une augmentation de la probabilité de crises économiques dommageables aux exploitations agricoles. De plus, les aléas climatiques sont eux aussi en augmentation selon de nombreux scientifiques. En cas de crise, les agriculteurs sont toujours les maillons les plus faibles dans les filières. Ils ont donc besoin d'outils performants pour faire face aux risques et aux crises. Le Comité souhaite donc se prononcer sur de nombreux points esquissés par la Commission.

3.4

La Commission européenne a le mérite de proposer trois options. Ces trois options seraient facultatives au niveau des États membres et complémentaires. Elles sont intéressantes en tant que telles et aucune d'entre elles ne doit être rejetée a priori. Il faut au contraire approfondir les analyses sur chacune d'elles.

3.5

Concernant le financement de ces options, la Commission a examiné l'utilisation d'un point de modulation. Au préalable, la Commission aurait dû réaliser une évaluation des besoins financiers des mesures proposées. Le Comité souligne que la proposition de la Commission est neutre du point de vue budgétaire, mais s'interroge sur la suffisance des fonds prévus par rapport aux besoins.

3.6

Les fonds du 1er pilier ont un rôle de stabilisation des marchés et des revenus, qui a été garanti aux agriculteurs jusqu'en 2013. Ils sont indispensables à la survie de nombreuses exploitations, il faut donc veiller à ne pas accroître la modulation des aides directes.

3.7

Les montants issus de la modulation sont très variables entre les États membres, voire nuls pour les nouveaux États Membres. Le Comité propose donc une alternative à ce point de modulation: chaque État membre pourrait attribuer à la gestion des risques et des crises une part de son enveloppe nationale du FEADER jusqu'à un plafond de 0,1 % du Produit Agricole National.

3.8

En raison de l'utilisation des fonds de la modulation, la Commission a travaillé dans le cadre du développement rural. Le Comité estime qu'il faut avoir une approche plus large et envisager d'autres modalités d'action, notamment au niveau des organisations communes des marchés (OCM), de la politique de la concurrence, des échanges commerciaux, etc.…

3.9

Si un certain nombre de risques et de crises doivent être étudiés, leur gestion ne relève pas toujours de la Politique agricole commune. Les risques liés aux catastrophes naturelles non prévisibles, et donc non assurables, les épidémies, comme celle de la fièvre aphteuse, ne peuvent pas être du ressort de la PAC. Les autres instruments existants comme le Fonds vétérinaire ou le Fonds de solidarité doivent pouvoir être utilisés pour répondre à ces situations spécifiques. De plus, un système de catastrophe naturelle au niveau européen est en cours de réflexion (1) et doit couvrir ces risques pour l'agriculture.

3.10

Le Comité insiste sur le fait que tous ces dispositifs ne pourront fonctionner qu'en complément des mécanismes de gestion de marchés actuels au sein des OCM qui comportent les outils les plus performants adaptés aux différents secteurs. De même, au niveau commercial il faut absolument que dans le cadre du cycle de Doha, l'UE sauvegarde la préférence communautaire.

3.11   Remarques sur la proposition de la Commission dans le cadre du développement rural

3.11.1   Les assurances agricoles

3.11.1.1

Le Comité rappelle son avis (2) sur «Le régime communautaire d'assurances agricoles». Plusieurs demandes exprimées dans cet avis sont toujours d'actualité. Les assurances agricoles sont des outils pertinents pour couvrir un certain nombre de risques déterminés. Ces outils ne peuvent pas se substituer aux pouvoirs publics dans la gestion des risques exceptionnels.

3.11.1.2

Aujourd'hui, selon les lignes directrices concernant les aides d'État dans le secteur agricole, des aides sont autorisées jusqu'à concurrence de 80 % du coût des primes d'assurance couvrant les pertes imputables à des calamités naturelles, telles que des tremblements de terre et autres événements extraordinaires. Les pertes résultant de mauvaises conditions climatiques ou de maladies animales et végétales sont assimilées à des calamités naturelles uniquement si le dommage atteint un certain seuil, fixé à 20 % de la production normale dans les régions défavorisées et à 30 % dans les autres régions.

3.11.1.3

Les assurances qui, outre les calamités naturelles, couvrent également les pertes résultant de mauvaises conditions climatiques ou de maladies animales ou végétales inférieures à ces seuils peuvent bénéficier d'aides d'État jusqu'à concurrence de 50 % du coût des primes.

3.11.1.4

Les propositions de la Commission sur ce chapitre sont donc en retrait par rapport aux dispositifs déjà autorisés dans le cadre des aides d'état. Pour être réellement un facteur incitatif à la mise en place de ces outils par un maximum d'agriculteurs, il est nécessaire de prévoir un dispositif plus intéressant pour le bénéficiaire.

3.11.1.5

Il existe dans certains États membres des mécanismes ayant fait leurs preuves dans certains secteurs de la prévention des risques (par exemple sous la forme d'assurances multirisques). Le CESE soutient l'approche de la Commission de création d'un nouvel outil complémentaire d'assurance agricole. En effet, l'introduction de nouvelles dispositions au niveau de l'UE ne doit pas remettre en question les régimes existants ayant fait la preuve de leur efficacité au niveau national.

3.11.1.6

Bien qu'il soit de caractère horizontal dans le développement rural, le dispositif des assurances agricoles doit permettre une mise en œuvre sectorielle pour s'adapter aux besoins des différentes régions de l'Union européenne.

3.11.1.7

Les possibilités de ré-assurances ont fait l'objet de nombreux travaux, non publiés. Une solidarité pourrait être mise en place entre les mutuelles et les assurances privées dans la création d'un Fonds de réassurance. La création d'une réassurance au niveau européen pourrait apporter une réelle valeur ajoutée communautaire.

3.11.2   Les fonds de mutualisation

3.11.2.1

Le soutien prévu par la Commission n'est pas assez incitatif. Il faut prévoir au minimum une dotation en capital lors du lancement de ces Fonds pour assurer leur fonctionnement en début de période. Cette option pour être opérationnelle devrait s'appuyer sur des organisations de producteurs.

3.11.2.2

L'absence d'accord au Conseil lors des travaux sur la création d'un fonds dans le secteur porcin montre les difficultés d'un tel exercice. Dans le cas d'une crise importante d'un secteur, les cotisations des professionnels ne suffisent pas à faire face aux besoins. Toutefois, dans de nombreux cas, les fonds de mutualisation lors d'une crise permettent la survie d'exploitations économiquement viables.

3.11.2.3

Une incitation forte à un regroupement des producteurs et de tous les acteurs de la filière serait la gestion directe de fonds de mutualisation pour des actions sur les marchés, comme la promotion, la transformation, le stockage ou la vente sur Pays Tiers. Ceci responsabiliserait les acteurs de la filière qui joueraient un rôle plus important sur les marchés, répondant ainsi à l'orientation de la réforme de 2003. De plus, la mise en œuvre proche des opérateurs économiques est souvent mieux adaptée à un bon fonctionnement des outils que le niveau de mise en œuvre des pouvoirs publics.

3.11.2.4

Si, auparavant, des fonds de mutualisation ont été mis en place, ils ne doivent pas être concurrencés par ce nouveau dispositif, mais en bénéficier.

3.11.3   La couverture de base au revenu

3.11.3.1

Cette option est à expérimenter et il faut poursuivre les travaux sur le sujet. Dans l'Union européenne, cette politique de soutien au revenu pour de nombreux secteurs est assurée par des aides directes. Aussi, aujourd'hui, le dispositif proposé ne peut en aucune façon remplacer les paiements directs aux agriculteurs. Mais ceci ne doit pas empêcher la Commission d'explorer d'autres voies pour le long terme.

L'analyse de la mise en oeuvre d'un tel système au Canada (3) montre qu'il pourrait s'agir d'un outils intéressant pour une application à moyen et long terme dans l'Union européenne. En effet, il s'agit d'un outil important pour certains de nos partenaires commerciaux comme les États-Unis ou le Canada. Toutefois ce mécanisme tel qu'appliqué par le Canada est l'un des outils principaux de leur politique de soutien du revenu agricole et nécessite un important budget public qui n'est pas disponible dans l'UE pour l'instant.

3.11.4   L'information sur les mesures de gestion des risques et des crises existantes

3.11.4.1

Le Comité partage l'avis de la Commission sur la nécessité de promouvoir le développement des outils de gestion des risques fondés sur le marché (assurance, marché de contrats à terme, agriculture sous contrat).

3.11.4.2

Le Comité rappelle son avis sur le développement rural (4) et demande à ce que des actions de formation et d'information soient prises en charge par le Fonds Social Européen et non sur le développement rural qui poursuit d'autres objectifs.

3.11.5   Des dispositifs harmonisés

3.11.5.1

Le développement rural est mis en œuvre au niveau des États membres selon le principe de la subsidiarité. Aussi, seules les mesures agro-environnementales sont obligatoires. Le Comité reconnaît l'intérêt de cette approche pour adapter cette politique aux réels besoins des régions de l'UE. Toutefois, la probabilité des risques et des crises a augmenté dans toute l'Union européenne. Il faut donc une certaine harmonisation, pour que les agriculteurs de toute l'Union européenne soient traités équitablement et aient accès à des dispositifs de gestion des risques et des crises.

3.12   Propositions dans le cadre des Organisations Communes de Marché

Au-delà des 3 options présentées par la Commission, le CESE souhaite faire d'autres propositions. Pour être plus efficace et financièrement moins coûteux, la Commission doit envisager des outils d'intervention précoces, à un niveau adapté, comme la promotion, le stockage privé, la réduction de production, etc. pour intervenir rapidement en cas de crise.

Les outils de connaissance des marchés permettent actuellement dans de nombreux secteurs d'anticiper l'apparition d'une crise conjoncturelle. Ces crises ont souvent pour origine un déséquilibre momentané entre l'offre et la demande à un niveau régional. Une action rapide et éventuellement régionalisée permettrait d'éviter à cette crise de s'installer et de se développer à un niveau géographique plus large.

3.12.1   Promouvoir les produits agricoles

3.12.1.1

Au niveau de l'UE, les actions de promotion peuvent être financées par différents outils: développement rural, marché intérieur ou marché des Pays Tiers. Comme cela a déjà été mentionné dans ce document, une action de promotion précoce est un moyen très efficace d'éviter l'aggravation d'une crise. Dans les différents règlements, la Commission devrait simplifier la mise en œuvre de ces actions afin de permettre une action rapide.

3.12.2   Aider au stockage des produits

3.12.2.1

En cas de crise sectorielle, les mesures d'aides au stockage ont fait leur preuve dans un certain nombre d'OCM. En effet, elles permettent d'éviter les crises conjoncturelles de surproduction en étalant la vente des produits sur une période plus longue. L'Union européenne devrait autoriser les organisations de producteurs à mettre en place cet outil dans le cadre des Fonds de mutualisation. De plus, il s'agit d'un levier intéressant pour favoriser l'organisation des producteurs.

3.12.3   Étendre le «filet de sécurité» en cas de crise de marché

3.12.3.1

En cas de crises communautaires majeures dans l'OCM Viande Bovine, la Commission peut agir sur la base juridique de l'article 38 du règlement (5) portant organisation commune des marchés dans le secteur de la viande bovine, qui prévoit: «Lorsqu'une hausse ou une baisse sensible des prix est constatée sur le marché de la Communauté, que cette situation est susceptible de persister et que, de ce fait, ce marché est perturbé ou risque d'être perturbé, les mesures nécessaires peuvent être prises».

3.12.3.2

Au regret du CESE, la Commission a estimé que sa généralisation n'était pas opportune, puisque aucune autre OCM n'en bénéficie. Le Conseil des Ministres a suivi la Commission sur cette approche.

3.12.3.3

Le Comité rappelle que depuis la réforme de 2003, la situation a évolué. De plus, certaines OCM n'ont pas de filet de sécurité. Une crise de confiance des consommateurs dans le secteur porcin ou avicole aboutissant à une chute brutale de la consommation conduirait à la faillite de nombreuses exploitations.

3.12.3.4

Afin d'avoir un traitement équitable de tous les secteurs, sachant qu'il ne s'agit que de donner une base juridique à la Commission pour agir, si elle le juge opportun, le Comité demande la généralisation d'une clause «filet de sécurité» à toutes les OCM et en conséquence demande à la Commission et au Conseil de revoir leur position.

3.12.4   Aider à la transformation

3.12.4.1

Dans les secteurs où les produits peuvent être consommés frais ou transformés, des mesures d'aide à la transformation permettent d'éviter une crise du frais en autorisant momentanément un surplus de production au niveau de la transformation, dont le marché est moins volatil et donc moins sensible aux variations de volume de production. Ces actions pourraient être mises en œuvre par les États membres ou par les organisations de producteurs.

3.12.5   Soutenir la réduction volontaire de production

3.12.5.1

Les mesures de réduction de la production font partie des mesures les plus efficaces qui existent. Si les perspectives de marché laissent envisager un surplus de l'offre par rapport à la demande, des actions volontaires ou obligatoires de réduction de production avant récolte permettent d'éviter une crise. Ces actions pourraient être mises en œuvre par les États membres ou par les organisations de producteurs.

4.   Remarques spécifiques

4.1   Il faut définir les crises agricoles

4.1.1

La Commission européenne définit les crises comme «une situation imprévue qui met en péril la viabilité des exploitations agricoles, à l'échelle locale, dans tout un secteur de production ou à une échelle géographique plus grande (6)». Le Comité estime qu'il faut distinguer clairement les crises économiques des autres crises, et définir les crises économiques avec des critères objectifs et transparents.

4.1.2

Pour des crises économiques, la Commission doit définir précisément la situation de «crises régionales», «crises nationales» et «crises communautaires». Cette définition devrait s'appuyer sur une bonne connaissance des marchés pour déterminer le prix moyen des 3 dernières années ou le prix moyen des 5 dernières années en supprimant la meilleure et la plus mauvaise année. En cas de chute des prix d'une production de X % pendant une durée de Y jours, le marché serait déclaré en crise. X et Y doivent être définis selon les secteurs, selon les États membres, voire selon les bassins de production. Des dates de début de crise et de fin de crise pourraient ainsi être définies par les pouvoirs publics.

4.1.3

Pour les autres crises, chaque État membre s'est doté de définitions suffisantes pour gérer les situations existantes dans leur contexte particulier.

4.2   Il faut adapter les règles de concurrence en cas de crise

4.2.1

Lors des crises, la baisse du prix payé au producteur n'est pas toujours répercutée au consommateur (7), ce qui empêche le fonctionnement optimal du marché. Le Conseil doit revoir le règlement de 1962 sur l'application de certaines règles de concurrence à la production et au commerce des produits agricoles (8) pour étendre les missions de la DG Concurrence, afin de l'obliger à assurer un bon fonctionnement du marché en cas de crise en dérogeant aux principes habituels.

4.2.2

Des outils spécifiques peuvent être mis en place à cette fin, notamment pour les fruits et légumes. Cette intervention des pouvoirs publics dans le fonctionnement du marché doit être acceptée par la Commission dans le cadre des règlements d'exception qui existent pour certains secteurs comme les assurances. Cette dérogation aux règles de la concurrence serait temporaire et contrôlée par les pouvoirs publics durant la crise.

4.2.3

Il pourrait s'agir d'accords interprofessionnels sur des prix, comme peuvent le faire les entreprises ayant intégré toute la filière ou les distributeurs au travers des centrales d'achat.

4.2.4

Il pourrait s'agir de limitation de la différence entre le prix d'achat au producteur et le prix de vente au consommateur pour des produits non transformés.

4.3   Il faut mieux gérer les flux commerciaux

4.3.1

Dans le cadre de l'accord-cadre d'août 2004 concernant la libéralisation des échanges agricoles à l'OMC, il a été convenu la suppression totale des restitutions à l'exportation sous condition de parallélisme avec les autres outils existants. Il reste à définir la date et le rythme de leur suppression.

4.3.2

Toutefois, plus le marché de l'Union européenne est ouvert, plus les producteurs sont exposés à des risques de crises. Au cours des négociations en cours, il faut donc préserver la préférence communautaire. Les normes sociales, tarifaires et environnementales de l'UE ne doivent pas être contournées par le dumping social et écologique de produits d'importation bon marché. Il faut prendre en compte les critères liés à la souveraineté alimentaire. Pour les raisons citées précédemment, il convient d'établir et de développer un système de protectionnisme conditionnel ou d'accès conditionnel au marché.

4.3.3

En période de crise, l'Union européenne devrait limiter les importations et utiliser toutes les marges de manœuvre disponibles durant la période de mise en œuvre des futurs accords de l'OMC pour favoriser les exportations.

4.3.4

La Commission pourrait envisager de conserver une part des droits notifiés à Genève afin de créer un nouvel outil de gestion des flux commerciaux.

4.3.5

Ce droit maintenu à l'OMC ne serait pas utilisé pour des restitutions sectorielles, mais par exemple comme mécanisme concerté avec les Pays Tiers (comme ce qui existe avec l'Égypte), mis en œuvre en cas de crises communautaires, pour faciliter l'approvisionnement des marchés extérieurs sans pour autant exporter la crise.

4.3.6

La concertation avec les autorités compétentes des Pays Tiers permettrait, en effet, de fixer un prix pour le pays bénéficiaire qui ne perturberait pas son propre marché. L'aide européenne pourrait porter sur les coûts de transport, les coûts administratifs ou le coût de la marchandise (cas de l'aide alimentaire).

4.4   Il faut sortir de l'annualité budgétaire

4.4.1

Dans le cadre du budget actuel basé sur les ressources propres de l'Union européenne et sur des dépenses annuelles, il est impossible aujourd'hui de refuser ce principe. Pourtant, il est lourd de conséquences et devrait à terme être revu pour améliorer le fonctionnement de l'UE.

4.4.2

A plus brève échéance, il est possible d'échapper à cette contrainte. Une solution pourrait consister à considérer comme dépense, les montants investis dans des fonds de stabilisation. Ces fonds ne seraient utilisés qu'en cas de crises l'année où cela s'avère nécessaire.

4.5   Il faut s'appuyer sur les organisations de producteurs

4.5.1

Le fait de pouvoir organiser les producteurs pour leur permettre d'avoir un véritable poids dans une négociation commerciale est un bon outil de gestion du risque commercial. La Commission européenne doit continuer à œuvrer dans cette direction et promouvoir par des outils incitatifs l'organisation économique des producteurs.

4.5.2

En terme de gestion de crise, le Comité souhaite un regroupement des organisations de producteurs et des acteurs de la filière à un niveau pertinent au regard des missions qui pourraient lui être confiées.

5.   Conclusions

5.1

Les propositions de la Commission sont un premier pas dans la bonne direction pour répondre aux problèmes de la gestion des risques et des crises. Mais ce n'est qu'un premier pas.

5.2

Ces propositions ne sont que des compléments à la gestion des marchés agricoles réalisée au niveau européen par les OCM et la régulation des échanges commerciaux. En aucun cas, il ne faut remettre en cause ces dispositifs, qui ont démontré leur efficacité.

5.3

Il est nécessaire d'assurer la coordination des outils qui existent et qui sont pertinents pour répondre à certains risques ou certaines crises. Ainsi, le Fonds vétérinaire et le Fonds de solidarité de l'Union européenne doivent être maintenus et améliorés pour répondre aux risques et aux crises du secteur agricole de façon complémentaire aux propositions décrites dans ce rapport.

5.4

La réforme de la PAC de 2003 et l'augmentation des aléas climatiques auront des conséquences importantes sur la gestion des exploitations agricoles, dont la sensibilité aux risques et aux crises va s'accroître. En conséquence, il est indispensable que la libéralisation des échanges en cours dans le cycle de Doha sauvegarde la préférence communautaire.

5.5

Les 3 options proposées par la Commission doivent être approfondies et mises en œuvre à court ou moyen terme. Toutefois, ces propositions sont insuffisantes pour faire face à la situation prévisible des années à venir. Il faut donc poursuivre les travaux sur ce sujet au niveau sectoriel au cours des prochaines réformes des OCM, mais aussi en terme de règlement horizontal.

5.6

Concernant le financement, il est sans doute positif de consacrer 1 % de modulation, mais il faut s'assurer du traitement équitable de tous les agriculteurs de l'UE par exemple avec 0,1 % du produit agricole national. A l'avenir il faudra trouver d'autres sources de financement.

5.7

Le CESE demande instamment que des études d'évaluations ex-ante et ex-post soient réalisées pour d'une part évaluer les nouveaux niveaux de risques en agriculture et les besoins budgétaires nécessaires, notamment suite à la réforme de la PAC, à l'augmentation des aléas climatiques et aux négociations de l'OMC et pour d'autre part analyser la pertinence des solutions proposées pour répondre à ces situations.

5.8

L'organisation des producteurs et des filières est une perspective d'avenir pour l'agriculture européenne. La Commission doit amplifier ses actions pour promouvoir cette organisation.

5.9

La Commission européenne a le mérite d'avoir proposé trois options. Il ne s'agit pas de faire un choix définitif entre elles, mais de les conserver ouvertes pour l'avenir et de les approfondir.

5.10

Ce sujet de gestion des risques et des crises est fondamental pour le CESE. Sur la base de travaux réalisés dans la gestion des risques et des crises, il est souhaitable que la Commission, dans un avenir proche, rende opérationnelles les différentes dispositions dans une proposition législative, sur laquelle le CES européen souhaite être consulté.

Bruxelles, le 26 octobre 2005.

La Présidente

du Comité économique et social européen

Anne-Marie SIGMUND


(1)  Cf. avis du CESE sur la «Communication de la Commission au Conseil, au Parlement européen, au Comité économique et social européen et au Comité des régions: Perfectionner le mécanisme communautaire de protection civile», rapporteur: Mme SANCHEZ MIGUEL en cours d'élaboration.

(2)  JO C 313 du 30.11.92, p. 25.

(3)  Informations complémentaires disponibles à l'adresse internet: http://www.agr.gc.ca/pcsra/main.html.

(4)  JO C 221 du 8.9.2005, p. 40.

(5)  Reg. no 1254/1999; JO L 160 du 26.6.1999, p. 21.

(6)  COM(2005) 74.

(7)  JO C 255 du 14.10.2005, p. 44.

(8)  Reg. no 26/1962, JO no B030 du 20.4.1962, p. 0993.


3.2.2006   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 28/25


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de directive du Conseil fixant des règles minimales de protection des poulets destinés à la production de viande»

[COM(2005) 221 final — 2005/0099 CNS]

(2006/C 28/05)

Le 13 juin 2005, le Conseil, en vertu de l'article 37 du traité, a décidé de consulter le Comité économique et social européen sur la proposition susmentionnée.

La section spécialisée «Agriculture, développement rural, environnement», chargée d'élaborer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 7 octobre 2005 (rapporteur: M. Leif E. Nielsen).

Lors de sa 421e session plénière des 26 et 27 octobre 2005 (séance du 26 octobre 2005), le Comité économique et social européen a adopté l'avis suivant par 123 voix pour, 3 voix contre et 2 abstentions.

1.   Introduction

1.1

L'élevage intensif de poulets destinés à la production de viande pose des problèmes s'agissant du bien-être et de la santé des animaux concernés. Un rapport du comité scientifique de la santé animale et du bien-être des animaux attribue la plupart des problèmes de bien-être à la sélection d'espèces avec des vitesses de croissance élevée et un bon indice de consommation, sans que cette sélection ne s'accompagne d'un meilleur niveau de bien-être des animaux et de santé animale. Un certain nombre de caractéristiques métaboliques et comportementales ont été altérées par la sélection génétique. L'apparition de troubles du métabolisme est à l'origine d'affections des pattes, d'ascites, du syndrome de la mort subite et d'autres problèmes de police sanitaire. Le comité scientifique constate de même que les effets négatifs de fortes densités d'élevage diminuent dans les locaux à l'intérieur desquels de bonnes conditions climatiques peuvent être maintenues.

1.2

L'UE ne dispose que d'exigences générales en ce qui concerne la protection des animaux dans les élevages (1). Certains États membres ont toutefois adopté, au niveau national, des dispositions relatives à la protection des poulets destinées à la production de viande, et il existe des régimes d'assurance-qualité volontaires qui comportent également des aspects liés au bien-être. De l'avis de la Commission, des règles minimales communes permettraient de résoudre les problèmes de bien-être, de garantir des conditions de concurrence plus égales et un meilleur fonctionnement du marché intérieur. Cette prise de position correspond en outre à la reconnaissance croissante par la société civile de la nécessité de normes raisonnables de protection des animaux et s'inscrit dans le plan d'action de la Commission relatif au bien-être des animaux.

1.3

La Commission propose de fixer la densité maximale de poulets par mètre carré de surface utilisable (ci-après dénommée «densité d'élevage») à 30 kilogrammes de poids vif. Les États membres peuvent toutefois autoriser, pour l'élevage de poulets, une densité d'élevage maximale allant jusqu'à 38 kilogrammes de poids vif dans les établissements ou unités individuelles d'établissement à condition que le propriétaire ou détenteur respecte un certain nombre d'exigences relatives à l'inspection, au contrôle et au suivi par les autorités compétentes de l'État membre. La proposition comporte en outre une série d'exigences minimales détaillées s'appliquant à tous les établissements: surveillance, contrôle, abreuvoirs, alimentation, litière, niveau de bruit, de lumière, nettoyage, désinfection, notification et documentation, interventions chirurgicales, formation et orientation. Les établissements dont la densité d'élevage maximale est supérieure doivent répondre à des exigences maximales complémentaires concernant la notification et la documentation, la concentration de NH3 et de CO2, la température et l'humidité, l'aménagement et l'inspection de systèmes de ventilation, de refroidissement et de chauffage, ainsi que l'évaluation d'indicateurs de bien-être animal dans les inspections post-mortem et les procédures en cas de manquement aux dites exigences. La Commission propose également une procédure réglementaire afin de garantir l'application uniforme et l'adaptation permanente des dispositions figurant dans les annexes, avec la collaboration du comité permanent de la chaîne alimentaire et la santé animale.

1.4

Cette «approche intégrée» pour les établissements et les unités individuelles d'établissements ayant une densité maximale supérieure est fondée sur un flux accru d'informations entre le producteur, l'autorité compétente et l'abattoir, sur la base de contrôles post-mortem. De l'avis de la Commission, la collecte d'informations sur les paramètres de production dans un but commercial et afin de contrôler dans quelle mesure sont respectées (2) la législation sur les substances et les aliments et les exigences relatives à l'hygiène doit également pouvoir être utilisée à des fins d'amélioration des normes du bien-être des animaux. Cette approche intégrée est en outre à la base des nouvelles dispositions relatives à l'hygiène des denrées alimentaires et aux contrôles vétérinaires (3).

1.5

La Commission souhaite présenter, au plus tard deux ans après l'adoption de la directive et à la lumière de l'expérience acquise grâce à l'application de régimes d'étiquetage volontaires, un rapport sur l'introduction éventuelle, au niveau communautaire, d'un régime spécifique, obligatoire et harmonisé d'étiquetage de la viande de poulet et des produits et préparations à base de viande de poulet, fondé sur le respect de normes du bien-être animal, et examiner la compatibilité d'un tel régime avec les règles de l'Organisation mondiale du commerce. La Commission souhaite en outre, sur la base d'un avis scientifique, soumettre un rapport ainsi que, le cas échéant, des propositions législatives appropriées concernant l'influence des paramètres génétiques sur les déficiences identifiées préjudiciables au bien-être des poulets.

2.   Observations générales

2.1

Comme le souligne la Commission, les aspects liés au bien-être animal dans les systèmes d'élevage intensif font l'objet d'une préoccupation croissante de la part de l'opinion publique dans l'Union européenne. L'on se reportera notamment à une enquête de 2005 effectuée par l'Eurobaromètre (4). Il y a lieu dès lors de considérer le bien-être des animaux, de même que d'autres facteurs, comme un élément du «modèle social européen» afin de pallier les conséquences négatives de la libéralisation des échanges et de l'intensification de la concurrence, tant au sein de l'UE que dans le reste du monde.

2.2

Il n'est pas possible d'attribuer la responsabilité de tous les problèmes de bien-être des animaux à un seul échelon de la chaîne de production et de commercialisation des poulets destinés à la production de viande dans l'UE. Entrent également en ligne de compte la sélection génétique dans des centres d'élevage concentrés au niveau international, la production de stocks reproducteurs de poulets, de couvoirs, l'échelon de la production en tant que tel, les abattoirs, la commercialisation et les consommateurs. Il existe en outre, au sein de chaque catégorie, des divergences portant à la fois sur les problèmes liés au bien-être des animaux, sur les aspects économiques et sur les aspects liés à la concurrence. Le CESE, en tant que représentant de la société civile et compte tenu de la diversité de sa composition, a de toute évidence pour tâche de collaborer à l'élaboration de normes minimales pour le bien-être des animaux dans l'UE, à un niveau qui soit à la fois raisonnable et acceptable.

2.3

Le CESE apprécie le sérieux des travaux préparatoires réalisés par la Commission et souscrit à l'approche proposée. Les dispositions générales, qui s'appliquent à tous les troupeaux, sont des exigences fondées sur un contrôle accru au sein des établissements et ne posent dans l'ensemble pas de problème. Le CESE approuve en outre dans les grandes lignes les exigences figurant dans l'approche intégrée pour les troupeaux à forte densité, qui prend comme base le système de pointage proposé pour les lésions de la pelote plantaire, la mortalité et d'autres signes éventuels de mauvaises conditions d'hygiène, pour une intervention et une refonte des conditions dans l'établissement en question.

2.4

La question centrale est celle de la densité d'élevage; les normes en la matière doivent prendre comme point de départ les meilleures données scientifiques disponibles et reposer sur un équilibre entre les divers indicateurs relatifs à l'état physiologique, au comportement et à la santé. Le CESE, sur la base du rapport du comité scientifique, juge défendable et acceptable d'instaurer une limite maximale de 30 kg/m2 pour les troupeaux en général et de 38 kg/m2 pour les troupeaux où les conséquences négatives sont palliées par des exigences particulières relatives aux conditions climatiques dans les locaux.

2.5

Dans le même temps, il y a lieu de reconnaître que la densité d'élevage est un facteur décisif en ce qui concerne les coûts de production et la compétitivité. Selon une étude effectuée aux Pays-Bas en mars 2005, la densité d'élevage maximale proposée aura un impact sur pratiquement tous les élevages du pays. Dans ce pays, dans un élevage de poulets de chair moyen, le bénéfice moyen, après déduction des coûts variables et fixes, n'est que de 1,89 centimes d'euro par poulet (5). Cela montre l'étroitesse de la marge de manœuvre pour la production. Pour conserver le même bénéfice avec des taux de densité d'élevage respectifs de 30 et 38 kg/m2, le prix d'un poulet de chair, sur la base de ces estimations, devrait augmenter d'environ 8,0 et 2,5 centimes respectivement, ce qui paraît minime du point de vue du consommateur. Toutefois, au niveau européen, les professionnels du secteur maintiennent qu'une densité maximale inférieure à 42 kg/m2 entraînera inexorablement une marginalisation progressive des ventes de l'UE tant sur le marché communautaire que sur les marchés des pays tiers, par suite de la concurrence des principaux pays exportateurs extérieurs à l'UE.

2.6

C'est la raison pour laquelle l'exigence relative à une réduction des densités d'élevage dans l'UE doit s'accompagner d'une adaptation des règles du commerce international afin que des exigences identiques ou équivalentes s'appliquent également aux importations en provenance de pays tiers. Le CESE reconnaît qu'il est difficile d'aborder cette question lors du cycle de négociations actuellement en cours à l'Organisation mondiale du commerce. Toutefois, si l'UE se décide à adopter des normes d'un niveau raisonnable et justifié en matière de bien-être des animaux dans ce domaine et dans d'autres, elle doit également pouvoir imposer à la communauté internationale, en tant que l'un des principaux acteurs du commerce mondial, l'instauration d'une clause permettant le maintien de ce niveau (6).

2.7

Les pays tiers disposant d'avantages comparatifs et de conditions acceptables en matière de bien-être des animaux ont par la nature des choses la possibilité d'accroître leurs parts de marché dans l'UE; l'on peut supposer dès lors qu'ils soutiendront l'instauration de normes internationales. Il serait toutefois paradoxal et inacceptable que les pays tiers appliquant des normes moins strictes, prennent progressivement le contrôle de la production communautaire et des débouchés sur le marché européen et sur le marché des pays tiers du fait de l'existence de normes plus contraignantes dans l'UE, ou encore que l'UE soit empêchée d'agir en faveur d'une amélioration des conditions du bien-être animal sous prétexte qu'il existe des lacunes dans ce domaine chez certains de ses principaux partenaires commerciaux et, partant, un danger de délocalisation de la production vers ces pays.

2.8

Il est dès lors nécessaire que l'UE avec ou sans acceptation préalable au niveau international, exige de tous les pays tiers qu'ils appliquent des règles équivalentes lors de l'entrée en vigueur. Une provocation, en cas de non-acceptation au niveau international, peut se révéler nécessaire afin d'attirer l'attention sur ce point et de mieux faire comprendre la nécessité d'une modification de la législation. Quelles que soient les circonstances, la Commission doit élaborer une analyse économique approfondie de la situation de la concurrence deux ans après l'entrée en vigueur de la directive dans les États membres, afin de fournir un aperçu de la situation.

2.9

L'Office international des épizooties (OIE) a récemment adopté des recommandations élaborées et relative à certains autres aspects du bien-être des animaux, ce qui montre une prise de conscience croissante, au niveau international, de la nécessité de normes minimales. L'OIE fonde ses recommandations sur les conclusions d'une conférence tenue en 2004, qui a permis un dialogue constructif entre institutions, experts scientifiques, groupes d'intérêts et ONG du monde entier, y compris de nombreux pays en développement. La conférence a souligné la nécessité d'une base scientifique pour l'élaboration des normes internationales pour le bien-être animal. De l'avis du CESE, l'OMC doit assumer cette tâche de sorte que les normes minimales décidées sous l'égide de l'OIE puissent également être applicables dans le cadre de l'OMC.

2.10

Compte tenu des expériences négatives telles que les défaillances dans la mise en oeuvre ou dans l'application, au niveau national, d'exigences plus sévères qui se traduisent par une distorsion de la concurrence, les professionnels du secteur estiment, au niveau de l'UE, que les règles doivent être fixées dans le cadre d'un règlement. Le CESE reconnaît les avantages d'un règlement, mais constate que les États membres préfèrent les directives, lesquelles permettent d'appliquer les dispositions en tenant compte des caractéristiques nationales. La directive est en outre perçue comme plus appropriée à l'introduction de l'approche intégrée proposée; de même, une réglementation commune sur les détails techniques concernant les méthodes d'élevage n'aura pas la souplesse nécessaire s'agissant des systèmes en usage et entravera les évolutions techniques allant dans le sens de méthodes d'élevage plus efficaces et plus axées sur le bien être. Il convient toutefois de faire valoir avec force à l'intention de la Commission qu'un défaut d'application, voire une application déficiente, ne saurait être tolérée.

2.11

Il est toutefois paradoxal que la Commission justifie sa proposition ainsi que la nécessité de règles communes relatives à la distorsion sur l'hétérogénéité des réglementations nationales alors que, dans le même temps, la proposition ouvre la voie à des règles nationales plus strictes dans les États membres. L'existence de règles communes dans l'UE constitue un point de départ essentiel pour l'action de l'UE visant à parvenir à des règles communes au niveau international. S'agissant des déficiences des États membres, ou des lacunes dans la mise en oeuvre des directives, la Commission doit, à l'avenir, prendre au sérieux la tâche que lui impose le traité et veiller à la bonne application des règles dans les délais fixés par les États membres eux-mêmes.

2.12

Le CESE soutient pleinement l'extension des régimes volontaires sous forme de «code de pratiques» et verrait d'un bon oeil leur remplacement par un régime commun au niveau européen dans l'esprit de la législation sur les produits écologiques. L'on donnerait ainsi le choix aux consommateurs, et l'on permettrait au marché de montrer dans quelle mesure il existe un intérêt pour les aspects liés au bien-être des animaux à un niveau plus élevé que les exigences minimales actuellement en vigueur. Pour autant qu'il soit compatible avec les règles de l'OMC, le CESE est en outre favorable à un système obligatoire d'étiquetage pour les produits de l'UE. Cela dit, il est bien évident que la législation communautaire existante doit être respectée, indépendamment de la nécessité de l'étiquetage. Il y a lieu d'examiner si, comme dans le cas des boîtes à œufs, il serait possible d'indiquer le mode de production pour les poulets emballés prêts à consommer.

2.13

La Commission devrait, comme elle l'a annoncé, soumettre un rapport fondé sur les nouvelles données scientifiques disponibles, qui prendrait en compte les nouvelles recherches et les expériences pratiques dans le but d'améliorer encore le bien-être des poulets destinés à la production de viande. Ce rapport devrait aussi traiter de l'influence des paramètres génétiques sur les déficiences identifiées. La proposition doit tenir compte dès maintenant des conséquences de la sélection génétique; de même, il y a lieu de réglementer le bien-être des cheptels parentaux. Les travaux doivent dès lors commencer le plus tôt possible et, si nécessaire, faire l'objet d'une révision à la lumière des données relatives à l'abattage. Dans le cas contraire, les travaux de la Commission dans ce domaine ne pourraient commencer que 5 ans après l'adoption de la directive, lorsque ces données seraient disponibles.

2.14

Le CESE reconnaît que la recherche est un processus à long terme, et que les règles en vigueur doivent être adaptées en fonction des nouvelles connaissances et de l'évolution de la technique. De même, il y a lieu d'intensifier la recherche dans ce domaine et dans d'autres, en vue d'accroître et de diversifier nos connaissances lorsque des lacunes sont constatées. Cela vaut notamment pour la cohésion entre le taux de densité d'élevage et les conditions climatiques et environnementales (7). Enfin, il y a lieu d'insister davantage sur la sécurité biologique en raison de l'étroite interaction entre la santé animale, le bien-être et l'environnement, notamment en ce qui concerne la lutte contre l'influenza aviaire (8).

3.   Observations particulières

3.1

Indépendamment des systèmes de production, de la densité d'élevage, de l'équipement technique etc., la gestion des cheptels et les bonnes pratiques agricoles ont une influence décisive pour le bien-être et l'état de santé des animaux. Ces conditions et leur importance dans le contact quotidien avec les animaux — et les soins qui leur sont prodigués — ne peuvent, de par leur nature même, être garanties par la législation et le contrôle. Dans ce contexte, les dispositions de la proposition de directive à l'examen relatives aux instructions et orientations, aux cours et à la formation et aux inspections au moins deux fois par jour doivent être une évidence. Le CESE est toutefois préoccupé par l'absence de toute exigence relative aux compétences et par le fait que l'expérience puisse remplacer la formation, indépendamment de la nature de ladite expérience.

3.2

Il convient de garantir l'indépendance de l'évaluation du bien-être des animaux et de veiller à ce que cette évaluation soit effectuée par des inspecteurs suffisamment formés et expérimentés dans l'évaluation des conditions de protection des animaux. De même, le Comité est favorable à la tenue de rapports uniformes dans les États membres.

3.3

Pour plus de clarté, il y a lieu en outre de préciser que les établissements où le taux de densité est peu élevé ne seront inspectés que dans le cadre du «paquet hygiène». Dans le même temps, il y a lieu d'exiger des projets de formation reconnus ainsi que des formations documentées pour toutes les exploitations au-delà d'une certaine taille.

3.4

Les exigences relatives à la concentration maximale de NH3 et de CO2 doivent être formulées de sorte que ces limites ne soient pas dépassées dans des conditions normales. En cas de situation climatique atypique, il sera impossible de dépasser ces seuils dans la plupart des systèmes de production bien aménagés.

3.5

La proposition de directive prévoit que «tous les locaux doivent disposer d'un éclairage d'une intensité minimale de 20 lux pendant les périodes de luminosité, selon une mesure prise au niveau de l'œil de l'oiseau» et que «l'éclairage doit suivre un rythme de vingt-quatre heures et comprendre des périodes d'obscurité d'au moins huit heures au total, dont au moins une période ininterrompue d'obscurité de quatre heures au minimum». Cette disposition est conforme à la recommandation du Conseil de l'Europe (9). En revanche, les professionnels du secteur estiment suffisant, sur la base de rapports scientifiques et d'expériences pratiques, un minimum de 15 lux pendant les 14 premiers jours et de 5 lux minimum après cette période, avec une période ininterrompue d'obscurité de quatre heures au minimum. Ils font valoir que des tentatives d'éclairage avec une luminosité plus intensive et des périodes d'obscurité plus longue se sont soldées par une augmentation des lésions de la pelote plantaire et à des rejets d'animaux du fait de lésions cutanées. Le CESE estime qu'il y a lieu de trouver un juste milieu et que l'élaboration d'une politique dans ce domaine doit reposer sur les découvertes scientifiques et l'expérience pratique les plus pertinentes. En cas d'incertitude ou de documentation insuffisante, il convient d'effectuer des enquêtes supplémentaires, de sorte que les dispositions en vigueur puissent être ajustées et reflètent à tout moment les meilleures connaissances dans le domaine.

3.6

La proposition de directive à l'examen prévoit la possibilité d'intervenir dans les établissements où la densité d'élevage est la plus forte en cas de dépassement du taux de mortalité de 1 % plus 0,06 % multipliés par l'âge d'abattage du troupeau en jours, soit environ 3,5 %. Les professionnels du secteur estiment justifié un seuil minimum de 0,12 % de mortalité par jour et pensent que bien qu'il n'existe aucun lien entre le bien-être et la mortalité au cours des sept premiers jours, la limite pourrait raisonnablement être fixée, si nécessaire, à 1,5 %. De l'avis du CESE, il y a lieu, dans ce domaine comme dans d'autres, de fixer la limite à un niveau reflétant les possibilités pratiques dans un élevage fonctionnant correctement. Il y a lieu en outre, dans les élevages où ont été constatées des déficiences sérieuses, d'envisager de remplacer l'enregistrement du taux de mortalité et de dermatite de la pelote plantaire par l'enregistrement, par exemple, des problèmes d'affections des pattes et de péritonite.

3.7

Il serait souhaitable que la Commission fournisse des descriptions détaillées, effectuées par écrit et accompagnées de photos de lésions de la pelote plantaire afin de normaliser les classifications.

4.   Conclusion

4.1

Le CESE, sous réserve des observations formulées ci-dessus, approuve dans les grandes lignes l'approche de la Commission et les dispositions détaillées de la proposition de directive. La fixation de seuils différents pour l'intensité de l'éclairage, la concentration maximale de NH3 et de CO2, de taux de mortalité et de lésions de la pelote plantaire doit se faire à un niveau reflétant les possibilités pratiques d'un établissement dans des conditions normales de fonctionnement.

4.2

Toute réduction de la densité d'élevage par rapport aux pratiques en vigueur doit nécessairement s'accompagner d'une clause de bien-être dans les règles relatives aux échanges commerciaux internationaux, permettant ainsi à l'UE d'élaborer des règles équivalentes à celles applicables aux importations en provenance des pays tiers, de sorte que les déficiences constatées dans les principaux pays d'exportation en dehors de l'UE n'entravent pas l'adoption d'une norme raisonnable et fondée dans l'UE. En cas de non-acceptation sur le plan international, une action unilatérale de la part de l'UE sera nécessaire afin de favoriser la prise de conscience de la nécessité d'une adaptation de la situation juridique. Dans le cas contraire, il est probable que la production sera, dans une large mesure, délocalisée vers les pays où la législation est moins contraignante. Dans le même temps, la Commission devra procéder à une analyse économique détaillée de l'évolution de la situation deux ans après l'entrée en vigueur de la directive dans les États membres.

4.3

La recherche étant nécessairement un processus à long terme, les règles doivent être ajustées à la lumière des nouvelles connaissances et de l'évolution technique. Dans le même temps, la recherche doit être intensifiée afin de fournir des données plus complètes dans les domaines où des déficiences ont été enregistrées.

Bruxelles, le 26 octobre 2005.

La Présidente

du Comité économique et social européen

Anne-Marie SIGMUND


(1)  Directive 98/58/CE, JO L 221 du 8.8.1998, p. 23 (la directive a été élaborée sur la base de la Convention européenne, laquelle comporte une référence aux volailles qui elle-même comporte des dispositions complémentaires à la viande de volaille).

(2)  Règlement 882/2004, JO L 165 du 30.4.2004, p. 1; corrigendum au JOCE L 191 du 28 mai 2004, page 1.

(3)  Règlement no 882/2004 du 29 avril 2004«Paquet Hygiène», JO L 165 du 30 avril 2004.

(4)  Eurobaromètre, juin 2005: attitudes des consommateurs envers le bien-être des animaux d'élevage.

(5)  P. van Horne, Economic consequences of reduction of stocking density of broilers, LEI (Agricultural Economics Research Institute), Université et centre de recherche de Wageningen, mars 2005.

(6)  La question est abordée dans la communication de la Commission au Conseil et au Parlement européen relative à la législation applicable au bien-être animal des animaux d'élevage dans les pays tiers et sur son incidence pour l'UE (COM(2002) 626 du 18 novembre 2002).

(7)  Parmi les publications scientifiques récentes, l'on mentionnera par exemple l'article intitulé «Chicken welfare is influenced more by housing conditions than by stocking density» paru dans la revue Nature, vol. 427, du 22 janvier 2004 www.nature.com.

(8)  COM(2005) 171.

(9)  Articile 14 de la recommandation du Conseil de l'Europe de 1995, adopté conformément à la convention à l'unanimité par les quelque 40 États membres.


3.2.2006   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 28/29


Avis du Comité économique et social européen sur le thème «Proposition de décision du Parlement européen et du Conseil établissant, pour la période 2007-2013, le programme “Citoyens pour l'Europe” visant à promouvoir la citoyenneté européenne active»

[COM(2005) 116 final — 2005/0041 (COD)]

(2006/C 28/06)

Le 11 mai 2005, le Conseil a décidé, conformément à l'article Article 151, 305, 251 du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la proposition susmentionnée.

La section spécialisée «Emploi, affaires sociales, citoyenneté», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 5 octobre 2005 (rapporteur: M. LE SCORNET).

Lors de sa 421e session plénière des 26 et 27 octobre 2005 (séance du 26 octobre 2005), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 125 voix pour et 6 abstentions.

1.   Introduction

1.1

Le présent programme a pour but d'encourager la coopération entre les citoyens et les organisations citoyennes de différents pays, afin qu'ils puissent se rencontrer, agir ensemble, et se forger leurs propres idées dans un environnement européen qui transcende une vision purement nationale et respecte leur diversité. La compréhension mutuelle, la solidarité et le sentiment d'appartenance à l'Europe sont les fondements de la participation des citoyens.

1.2

Il garantit la continuité du programme de participation civique en cours et ouvre la voie à de nouvelles activités, tout en présentant le degré de flexibilité nécessaire pour pouvoir être adapté à de futures évolutions.

1.3

L'objectif global du programme proposé est de contribuer, en reprenant ici les termes de la proposition, à:

donner aux citoyens l'occasion d'interagir et de participer à la construction d'une Europe toujours plus proche, unie dans sa diversité culturelle et s'enrichissant de cette diversité;

forger une identité européenne, fondée sur des valeurs, une histoire et une culture communes reconnues;

améliorer la compréhension mutuelle des citoyens européens en respectant et célébrant la diversité culturelle, tout en contribuant au dialogue interculturel.

1.4

Compte tenu de la situation actuelle et des besoins mis en évidence, les objectifs spécifiques les plus appropriés devant être réalisés à l'échelle transnationale sont les suivants:

rapprocher les individus des communautés locales de toute l'Europe, pour qu'ils partagent et échangent leurs expériences, leurs opinions et leurs valeurs, tirent des enseignements de l'histoire et oeuvrent à la construction de l'avenir;

favoriser l'action, les débats et la réflexion en matière de citoyenneté européenne, grâce à la coopération des organisations de la société civile au niveau européen;

rendre l'idée de l'Europe plus tangible pour ses citoyens, en promouvant et célébrant les valeurs et les réalisations européennes, tout en préservant la mémoire de son passé;

encourager l'intégration équilibrée des citoyens et des organisations de la société civile de tous les États membres, en contribuant au dialogue interculturel et en mettant en évidence tant la diversité que l'unité de l'Europe, une attention particulière étant accordée aux activités faisant intervenir les États membres qui ont récemment adhéré à l'Union européenne.

1.5

Trois types d'actions sont prévus pour réaliser ces objectifs: Action 1: Des citoyens actifs pour l'Europe (jumelage des villes, projets citoyens et mesures de soutien); Action 2: Une société civile active en Europe (soutien structurel aux organismes de recherche et de réflexion sur les politiques publiques européennes, soutien structurel aux organisations de la société civile au niveau européen, soutien aux projets lancés par des organisations de la société civile); Action 3: Tous ensemble pour l'Europe (Évènements à haute visibilité, Études, Instruments d'informations et de diffusion).

2.   Contexte

2.1

La Commission propose d'ériger le développement de la citoyenneté européenne au rang de priorité essentielle de l'action de l'Union (1). Cette «priorisation essentielle» apparaît aux yeux du CESE non seulement comme juste mais urgente, décisive même pour la poursuite de la construction européenne. Le faible taux de participation aux dernières élections du Parlement européen, que souligne l'exposé des motifs du programme, n'est pas le seul indicateur de cette urgence. Les avatars de la ratification du Traité constitutionnel européen démontrent que le manque d'implication et de participation des citoyens européens au processus de construction de l'Union a pour conséquence la défiance vis-à-vis de ses institutions et peut même conduire à des attitudes de rejet.

2.2

Cette situation est commune, à des degrés évidemment différents, à tous les États membres et concerne ou concernera les pays candidats. De ce point de vue, il est positif que le programme s'adresse sur un pied d'égalité à l'ensemble de ceux-ci.

2.3

Car cette situation de faible acculturation à une réalité européenne «déjà là», si elle ne s'exprime pas exactement de façon identique dans chaque pays adhérent, notamment du fait de la diversité des modes de ratification choisis dans chacun des pays, si elle ne peut pas être, de ce fait, observée avec la même intensité partout, semble cependant être présente, à des degrés divers, dans tous les États membres.

2.4

Même lorsqu'il y a débat européen — parfois très intense, inédit, notamment dans les pays ayant voulu ou pu utiliser la voie référendaire de ratification du Traité constitutionnel européen — ce débat tourne plus autour de l'identité et de la citoyenneté nationales (et de leur préservation sur un mode souvent défensif, voire «nationaliste») que de la réalité des acquis, des avancées proposées par le Traité constitutionnel, notamment en terme de politiques sociales (sujet, à juste titre, perçu comme indicateur central de citoyenneté), en terme de politiques démocratiques («plombé» par le préjugé quasi général et pourtant déjà largement immérité d'une Europe a-démocratique, technocratique, éloignant quasi volontairement le citoyen de la participation à la décision).

2.5

Quoi que couvrant les années 2007-2013, et donc se situant au-delà de la période où tous les États membres auront procédé, sous une forme ou sous une autre, à la ratification ou non du TCE, le programme proposé, sa discussion et son approbation dans le contexte actuel, ne peuvent pas ne pas avoir de répercussion immédiate sur la question centrale de la citoyenneté européenne, telle qu'elle se dramatise «ici et maintenant». Or, le programme qui couvre la période 2007/2013 reste trop mimétique à la décision du Conseil en date de 2004 (2). Il est doté de peu de moyens, et les méthodes qu'il valorise, si elles ont fait leurs preuves, innovent insuffisamment au regard des défis tels qu'ils sont plus clairement encore posés aujourd'hui. Ceci alors que c'est maintenant qu'il y a problème et que les enfants qui naissent aujourd'hui auront 8 ans en 2013 et que déjà leurs schémas mentaux de futurs citoyens seront en partie formés.

2.6

Le CESE est persuadé que le contexte actuel et que le débat dans ce contexte sur un nouveau programme «'citoyens pour l'Europe» pour la période 2007-2013 sont, paradoxalement, extrêmement favorables pour poser enfin en grand la question de la citoyenneté européenne. Pour sortir d'un discours un peu convenu sur l'unité dans la diversité où, en fait, si on n'y prend pas garde, seule la diversité, voire l'hétérogénéité risquent d'être mises en avant. Il approuve donc la proposition de donner un prolongement au programme 2004-2006 sans attendre même le rapport d'évaluation externe qui était prévu au plus tard à la fin 2006 (évaluation qui doit être maintenue). Il veut être en tant que CESE un acteur majeur, synthétiseur, de l'importance accordée à ce programme. Il conçoit tout à fait qu'un tel programme doive garantir la continuité avec le programme de participation civique en cours, mais il partage largement les fortes critiques adressées par le Parlement et certaines organisations de la société civile concernant le manque d'ambition du programme de participation civique en cours. Ses propositions ont donc pour objectif à ce que le programme 2007-2013 ne soit pas seulement un aménagement du programme en cours.

2.7

Il est d'évidence que le présent programme, vu son extrême modestie financière, ne couvre pas l'ensemble de la problématique de la citoyenneté européenne, contrairement à ce que pourraient laisser penser la multiplicité de ses objectifs et des actions qu'il couvre. Il en est cependant un maillon essentiel, à savoir celui de la «citoyenneté européenne active», qui se définit comme la capacité des citoyens de s'organiser de façon autonome pour exercer pouvoirs et responsabilités dans les politiques publiques, afin d'assurer la défense et le développement des biens communs (3). Le CESE demande donc avec insistance que le budget alloué (235 millions d'euros sur 7 ans!) soit sanctuarisé, quelles que soient les conclusions finales du débat sur les perspectives financières de l'Union européenne.

2.8

Si le contexte exige un saut qualitatif, il le permet également. De ce point de vue, le CESE souhaiterait qu'une étude de contexte concernant le sentiment d'appartenance actuel du citoyen à l'Union européenne — ou du moins que la mutualisation des études déjà disponibles permettant de dégager un diagnostic suffisamment fin soit diligentée.

2.9

Il apparaît en effet au CESE que «l'attitude distante à l'égard des institutions européennes et les difficultés à se situer dans le processus d'intégration européenne (4)» est le fruit paradoxal — outre les méconnaissances et incompréhensions réelles de la «mécanique» communautaire, de sa logique propre, outre les indéniables replis nationalistes et protectionnistes liés aux différents risques et aux différentes peurs, objectives et subjectives générées par les processus de mondialisation — du manque de reconnaissance de la citoyenneté européenne telle qu'elle existe déjà, et en particulier de ses formes les plus actives et organisées.

2.10

De ce point de vue, on pourrait arguer que les considérables rapprochements, mobilités de tous ordres (même si très en deçà des possibles ouverts par l'intégration européenne), effacements physique et matériel des frontières, monnaie commune, marché unique, ne sont pas suffisamment nommés: «l'identité commune des Européens n'est pas perçue parce qu'elle n'est pas dite (5). Or, et cela apparaît d'autant plus manifeste, lorsqu'on regarde l'Europe de l'extérieur, lorsqu'on voyage ou lorsqu'on vit hors de l'Europe, qu'un véritable “european way of life” est partout identifié, est partout attractif».

2.11

Les crispations identitaires nationales actuelles ne doivent donc pas cacher le niveau déjà élevé de cohérence et de qualité du mode de vie européen, de ces formes démocratiques et participatives. Un programme de «citoyenneté européenne active» plus ambitieux peut réduire, apaiser, transformer ces crispations.

2.12

En tout état de cause, et quelles que soient les difficultés, voire les impasses momentanées, qui peuvent naître des débats actuels concernant la ratification du Traité constitutionnel, la période obligatoirement agitée qui suivra pour la construction européenne, le CESE juge que le contexte est extrêmement favorable pour la problématique de la citoyenneté européenne active. Que le programme 2007-2013 qui y est relatif doit être vu — et si possible approfondi — à la faveur d'un contexte où les citoyens s'intéressent nouvellement — quelle que soit leur position — à l'Europe, à leurs capacités d'intervenir directement et par leurs organisations volontairement organisées, aux décisions européennes.

2.13

Le CESE propose donc la tenue d'un symposium ouvert qui permettrait d'aborder dans sa globalité la problématique de la citoyenneté européenne dans ce nouveau contexte, de penser réellement la profondeur du concept et de ne pas seulement éclater les réponses dans une multitude de programmes distincts, insuffisamment lisibles et opérationnels. Le CESE pourrait être l'organisateur d'un tel symposium. Il se réjouit que la Commission envisage positivement une telle initiative (6).

3.   Observations générales

3.1

Le CESE, institution européenne de la société civile organisée, inscrite nommément dans les traités au même titre que les autres institutions européennes, s'il apprécie qu'un tel programme lui soit soumis pour avis — ce qui n'était pas formellement obligatoire — juge que la proposition soumise au Conseil de l'Union européenne et au Parlement européen aurait gagné à lui être soumise plus en amont encore. Certes, ce programme a fait l'objet d'une importante consultation en ligne entre décembre 2004 et février 2005 (avec un millier de réponses) et d'un forum consultatif (qui a rassemblé 350 participants) les 3 et 4 février 2005. Mais miser sur un rôle consultatif plus fort, en première instance, et non seulement «pour avis ex poste», du Comité économique et social européen serait une des façons de lutter contre les multiples causes de l'éloignement ressenti des citoyens européens vis-à-vis de leurs capacités concrètes, individuelles et organisées, à peser vraiment sur les décisions de l'Union.

3.2

Le CESE trouve dommageable que le programme, qui fait référence à l'identification par la Commission de trois types de réponses au problème de l'attitude distante des citoyens vis-à-vis des institutions européennes, ne permette pas de resituer ledit programme dans la globalité de la problématique. S'il est attaché à voir spécifier les réponses suivant les thèmes, le CESE suggère que ces trois types de réponses soient aussi réunis dans un programme chapeau. Programme chapeau permettant de saisir l'ensemble des éléments de la problématique, de travailler sur leurs objectifs communs, leurs cohérences et leurs complémentarités.

3.3

L'information des citoyens sur les institutions européennes, la communication sur les questions européennes, la conscience des droits conférés par la citoyenneté européenne et le sentiment d'appartenance, l'identité européenne forment un tout. Or, si le programme présenté par la Commission parle de complémentarité avec d'autres programmes et instruments de la Communauté, il reste vague sur cette question essentielle et ne dit rien des modalités qui permettraient d'assurer la cohérence des objectifs et des actions. Un abord insuffisamment recoupé de ces trois volets aura du mal à renverser la très mauvaise situation actuelle en termes de sentiment d'appartenance et d'identité européenne.

3.4

Le CESE voudrait être certain que, lors même du présent programme spécifique, une vigoureuse impulsion en termes d'information et de communication sur les institutions et les droits des citoyens européens soit parallèlement organisée. Cette impulsion doit inclure l'information sur l'existence et le rôle propre du CESE lui-même, trop peu valorisé dans la communication européenne par les autres institutions européennes. Ceci même s'il revient au CESE de repenser lui aussi radicalement sa communication beaucoup trop en-deçà du rôle qu'il prétend jouer dans l'émergence d'une citoyenneté européenne active, en tant qu'institution privilégiée de celle-ci.

3.5

Tout en prenant, semble-t-il, la mesure de la prise de distance du citoyen vis-à-vis des institutions européennes et sa difficulté à se situer dans le processus d'intégration européenne, le programme présenté n'apparaît pas en tirer toutes les conséquences. Cela déjà dans les mots et les formules qu'il emploie alors que l'on sait que la façon même de nommer cette crise d'identification, de participation, peut jouer un rôle important dans la faculté de la dépasser. Ainsi, il apparaît peu crédible de présenter un programme, aussi modeste financièrement vu l'enjeu, comme étant le vecteur qui permettra de «réserver une place centrale aux citoyens» dans la construction européenne. Qui peut y croire? De même, et là encore vu le niveau de l'enjeu (bien diagnostiqué par l'exposé des motifs du programme), on a du mal à percevoir, au-delà de novations non négligeables (pluri-annualisation des projets, mise en commun des expériences, élargissement des partenaires, allègement des contraintes pesant sur les bénéficiaires, soutien à des manifestations de grande ampleur, notamment dans le contexte du dialogue interculturel), les innovations majeures qui peuvent contribuer à changer réellement la donne actuelle.

3.6

L'impression globale est celle d'une trop forte continuité avec le programme 2004-2006. Le soutien structurel de nouveau accordé à un certain nombre d'organisations nommément identifiées par le programme comme poursuivant a priori un but d'intérêt général européen devrait être éliminé et remplacé par une procédure ouverte d'accès aux fonds, établie sur la base de critères clairs et transparents. La notion elle-même «d'intérêt général européen» devrait être précisée pour devenir opérationnelle.

3.7

Le CESE est tout à fait conscient que ce programme est plus spécifiquement ouvert aux associations et aux ONG qui ne bénéficient pas comme d'autres organisations de la société civile, partenaires sociaux notamment, de l'accès à d'autres programmes et d'autres modalités qui leur permettent de contribuer fortement à l'expansion d'une citoyenneté européenne active.

Cependant, par souci de bien identifier la volonté expresse des partenaires sociaux et d'autres organisations de la société civile, mutuelles, coopératives, de participer spécifiquement et visiblement à cette expansion, le programme doit aussi leur être formellement et pratiquement ouvert. Quitte à ce qu'en retour, sur d'autres lignes budgétaires, les partenaires sociaux soient eux-mêmes attentifs à une plus grande mixité avec les associations et les ONG.

3.8

Le CESE insiste à nouveau, comme il a eu l'occasion de le faire à maintes reprises, sur l'urgence qu'il y a à définir une citoyenneté européenne ouverte, dotée de droits propres, accessible à toutes les personnes qui résident de manière stable et régulière ou depuis longtemps dans l'Union européenne (7). L'inclusion dans le Traité de Constitution européen de la charte des droits fondamentaux et l'adhésion de l'Union européenne à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales supposent la reconnaissance d'une citoyenneté «civique» relativement indépendante de la citoyenneté européenne actuellement uniquement conférée par la citoyenneté nationale des États membres. Ce premier pas vers une citoyenneté participative pour toutes les personnes résidant de manière stable sur le territoire de l'Union européenne devrait être «légalisé» si on veut réellement aboutir à une identité, une citoyenneté européenne propre. Si on veut réellement que cette citoyenneté ne soit pas seulement la superposition d'une citoyenneté européenne abstraite à la citoyenneté nationale des États membres.

3.9

Du point de vue du CESE, il reste, et restera, difficile d'avancer réellement en ce domaine essentiel s'il n'y a pas la maturation progressive de supports matériels concrets, non réductibles aux citoyennetés nationales, de la citoyenneté européenne. Sans qu'un certain nombre de devoirs soient attachés aux droits conférés par cette citoyenneté européenne unique, rassembleuse. De ce fait, la non-utilisation d'un instrument législatif pour promouvoir la participation des citoyens, si elle peut se comprendre en absence de supports matériels spécifiques à la citoyenneté européenne, est discutable si on s'oriente, même progressivement vers la mise en place de droits et de devoirs spécifiquement attachés à cette citoyenneté. Le CESE est d'avis qu'il faudra avancer en ces domaines, quels que soient le ou les supports matériels et symboliques choisis: par exemple, au-delà de la mise en place d'un service civil européen pour la jeunesse déjà proposé par la Commission, l'acquittement personnel d'une part, même minimum, des ressources européennes — même s'il s'agit d'un sujet difficile à aborder — et/ou l'élection, le même jour, dans tous les pays, des représentants des peuples, des scrutins impliquant tous les pays de l'Union.

4.   Observations particulières sur les actions du programme

4.1   Action 1: des citoyens actifs pour l'Europe

Le CESE est bien sûr attentif et favorable à l'encouragement du jumelage des villes dans la mesure où il participe à la connaissance mutuelle et à la mobilité des citoyens en Europe. Mobilité dont il faut cependant constater la bien trop faible ampleur. Favoriser les expériences originales de participation au niveau local et leur échange dans le cadre du jumelage devrait être l'une des priorités de ce type d'action. En ce qui concerne les projets citoyens, le caractère extrêmement vague du texte sur ce point rend difficile la compréhension de leurs potentialités. Enfin, on peut s'interroger sur le fait que 40 % d'un budget déjà très limité soit consacré aux actions de type 1, et notamment au jumelage de villes, alors que cet instrument ne paraît pas être le plus adapté pour atteindre les objectifs du programme. Surtout que ce programme favorise peu les innovations en cours dans ce domaine, notamment les jumelages dits à «trois pieds» dans lesquels deux collectivités territoriales européennes s'accordent pour construire des développements durables avec d'autres collectivités de la planète. Pourtant, ces innovations signent une ouverture au monde pouvant être considérée comme une des caractéristiques de la citoyenneté européenne, notamment pour et par la jeunesse. En tout état de cause, et quel que soit le type de jumelage, il apparait important de faire connaître aux citoyens le soutien direct par l'Union européenne à ce type de promotion de la citoyenneté active, soutien que les intéressés méconnaissent.

4.2   Action 2: une société civile active en Europe

4.2.1

Pour le CESE, cette partie-là du programme pourrait être nettement valorisée. Se rencontrer et agir ensemble au niveau transnational est la base même de la citoyenneté européenne. Le CESE juge de ce fait que la possibilité de définitivement régler la question des statuts de l'Association européenne, de la Mutualité européenne comme des fondations européennes, même si elle ne dépend pas de ce programme spécifique, devrait l'accompagner afin de valoriser la solidarité et l'action mutuelle, notamment dans un cadre bénévole.

4.2.2

Le renforcement des réseaux européens constitue, aux yeux du CESE, et en conformité avec le programme, un élément décisif. Cependant, le CESE insiste de nouveau sur le fait que tous les réseaux européens doivent avoir les mêmes possibilités d'accéder à ces soutiens structurels, sans que certaines organisations soient financées a priori, même si la Commission contrôle qu'il ne s'agit pas d'un «ticket automatique» mais de projets évaluables. Par ailleurs, le financement de projets, même de petite taille, est fondamental car il permet aux organisations nationales ou locales, en contact direct avec les citoyens, d'acquérir une dimension européenne et de contribuer à combler la distance entre citoyens et institutions européennes. Le CESE se félicite par ailleurs du fait que le programme permet, en subventionnant de petits projets, l'émergence à partir de réseaux nationaux d'initiatives transnationales, même si celles-ci ne couvrent pas l'ensemble des États membres.

4.2.3

Le CESE est extrêmement préoccupé par toute proposition de la Commission qui, telle celle de la DG Justice, Liberté et Sécurité (8) conduirait au nom de la sécurité, au nom de la lutte contre le terrorisme, à jeter une suspicion générale sur les ONG et les associations. Ceci en ce qu'elle pourrait être sujette par nature à l'entrisme de tels phénomènes. A faire que, par des dispositions bureaucratiques lourdes, ce soient les associations qui aient la charge de la preuve en la matière. Une telle démarche, si elle devait se concrétiser, irait matériellement et conceptuellement à l'exact opposé du présent programme.

4.2.4

Le CESE considère que le Comité des régions et lui-même, en accord avec l'avis du Parlement européen, devraient se voir confier expressément la responsabilité de coordonner la consultation des organisations sociale et des collectivités locales. Celle de synthétiser leur avis et d'en assurer la remontée auprès des autres institutions communautaires. Ainsi que celle de veiller à la bonne diffusion de l'information en amont de celles-ci. Il y a lieu de préconiser que le Parlement européen consulte régulièrement et formellement le CESE et le CdR à ce sujet.

4.2.5

L'objectif d'un partenariat formel (9), et non au coup par coup, fondé sur l'égalité dans la diversité des fonctions, entre le Parlement et la société civile organisée, structurée par ses institutions européennes, devient décisif alors qu'il est, pour l'instant, loin d'être réalisé et même pensé. Le programme pour la citoyenneté européenne active devrait s'attacher à faire disparaître toute trace d'une vision hiérarchisée des instances européennes, la culture européenne étant aussi une culture du partage des pouvoirs et des fonctions.

4.3   Action 3: tous ensemble pour l'Europe

4.3.1

Pour le CESE, la focalisation sur le dialogue interculturel intra-européen devrait, dans ce programme, être l'objectif principal. Le débat en cours sur le TCE démontre qu'ont été sous-estimés la méconnaissance des différences culturelles intra-européennes, la grande inertie des stéréotypes, le caractère parfois antithétique des sources les plus fondamentales, notamment de droit et de constitution, qui déterminent l'imaginaire de chacun des États membres. Tout comme sont sous-estimées les convergences de modes de vie, de valeurs, de représentation du monde, l'assurance qu'un «homo europeus» distingue assez nettement, en terme de citoyenneté, l'européen de tout autre citoyen de la planète. Cet «homo europeus» est le fruit de la mise en œuvre concrète du patrimoine spirituel et moral de l'Union qui se fonde sur les valeurs indivisibles et universelles de dignité humaine, de liberté, d'égalité et de solidarité; elle repose sur le principe de la démocratie et le principe de l'Etat de droit. Elle place la personne au cœur de son action en instituant la citoyenneté de l'Union et en créant un espace de liberté, de sécurité et de justice. Des événements à haute visibilité, des instruments d'information et de diffusion, des études formalisant non seulement les diversités réelles (et non les différences stéréotypées) mais aussi, et surtout, cet «european way of life» doivent donc en effet être intensément promus. La culture européenne ne repose pas seulement sur les valeurs héritées mais aussi sur celles dues à la construction de l'Union européenne elle-même, de son marché unique, de sa monnaie commune, de la réunification de l'Europe avec elle-même (élargissement aux pays de l'Est de l'Europe). Cependant, afin que ces événements à haute visibilité favorisent le sentiment d'appartenance et renforcent effectivement l'identité européenne, il est fondamental que les citoyens et leurs organisations soient très étroitement associés à leur idéation et à leur réalisation, ou mieux encore qu'ils en soient à l'origine, car ils sont les mieux à même d'identifier les éléments essentiels et les symboles d'une identité qu'ils vivent déjà au quotidien.

4.3.2

Pour sa part et en fonction de ce qu'il est de ses compétences propres, le CESE considère que son apport pour promouvoir la dimension sociale de la culture, pour organiser un partenariat pérenne, outillé, avec le Parlement européen en ce domaine, constitue une condition essentielle d'identification et de formation en continu d'une identité culturelle commune du citoyen européen. Identité culturelle qui ne peut pas être obtenue par la seule préservation d'un héritage culturel souvent bien moins commun qu'on ne veut bien l'affirmer. La citoyenneté européenne commune a une forte dimension contemporaine. Elle se forge par la décision d'unir toujours plus les États d'Europe, de toute l'Europe, par le travail difficile mais essentiel de partage des souverainetés. Car, comme le dit Claude Lévi Strauss, «j'ai connu une époque où l'identité nationale était le seul principe concevable des relations entre les États. On sait quels désastres en résultent». Une culture des souverainetés partagées — et non pas d'abandon de souveraineté — telle est la culture et l'identité du citoyen européen d'aujourd'hui, et de demain plus encore.

5.   Conclusions et propositions

5.1

La citoyenneté européenne est au cœur de la crise qui vient de s'ouvrir suite au rejet par certains pays du Traité constitutionnel européen. Le rapprochement des citoyens et des institutions de l'Union doit donc plus que jamais être au centre des préoccupations et de la politique de la Commission, et ce notamment grâce à la promotion de la citoyenneté européenne active. Il est donc nécessaire d'organiser une réflexion approfondie sur ce thème en impliquant tous les acteurs du secteur avant que le nouveau programme pour la période 2007-2013 ne soit approuvé.

Cette réflexion pourrait être organisée dans le cadre du symposium défini au point 2.11 de cet avis, dont la préparation pourrait être confiée au CESE.

5.2

Ce symposium devrait délibérer de façon ouverte de la citoyenneté européenne active, définissant des droits et des responsabilités des citoyens européens distincts de ceux conférés par la citoyenneté de chacun des États membres.

La définition et l'expérimentation de droits économiques, sociaux, politiques, etc. et environnementaux propres à la citoyenneté européenne active, notamment en matière de solidarité et de sécurité (on peut penser à la sécurité civile immédiatement), devraient pouvoir être examinées et soumises à un scrutin européen unique au suffrage universel.

5.3

Le CESE considère que la concrétisation du statut européen de l'Association constitue à ce stade, et malgré les difficultés réelles pour y aboutir, une ardente obligation, si l'on veut doter la citoyenneté européenne active d'un cadre approprié bien au-delà d'un simple, et discutable, code de bonne conduite «sécuritaire».

5.4

En tout état de cause, et quel que soit l'aboutissement des négociations concernant le budget européen, le CESE demande que le budget du présent programme soit sanctuarisé tant il constitue une enveloppe minimum en faveur d'un élément clef du développement de la citoyenneté européenne que la Commission élève à juste titre au niveau d'une «priorité essentielle» de l'action de l'Union. Par ailleurs, le CESE propose de ne pas s'en tenir au budget annoncé de 0,55 € par habitant pour 6 ans, mais de cultiver toutes les synergies entre les différentes Directions Générales de la Commission pour mettre en commun objectifs et moyens sur ce dossier qui concerne toutes les institutions européennes par sa centralité et son importance pour l'avenir. A ce titre, la politique de l'Union européenne sur la citoyenneté active devrait être élaborée au sein d'une cellule interinstitutionnelle permanente, qui regrouperait toutes les Directions Générales de la Commission intéressées par cette question et des représentants de toutes les autres institutions de l'Union.

5.5

Le CESE suggère que les cycles d'éducation primaire, et pas seulement les programmes liés à la formation tout au long de la vie, soient les moments et les lieux de la construction d'une citoyenneté européenne pouvant être enseignée pour elle-même et ne faisant plus seulement l'objet d'actions cosmétiques (couleurs, stickers, casquettes, fête…). La citoyenneté ne concerne pas seulement les tranches d'âge actives.

Dans cet ordre d'idées, la Commission pourrait proposer aux États membres d'inscrire dans leurs programmes scolaires une méthode et des contenus de connaissances de l'Union et des questions propres à la citoyenneté européenne. Un «Erasmus» dans le cycle primaire adapté à cette tranche d'âge devrait être envisagé bien au-delà des processus d'échanges linguistiques traditionnels.

Toutes ces potentialités des NTIC doivent être sollicitées, notamment dans leur caractère ludique, interactif, participatif (avec, pourquoi pas, la création pour chaque nouveau support citoyen d'une cellule psychologique d'évaluation), en dépassant le caractère statique, peu attractif, des «sites» européens actuels. Une telle suggestion et de telles propositions sont cohérentes avec le programme Comenius, dont les objectifs sont:

1)

faire mieux comprendre aux jeunes et au personnel éducatif la diversité des cultures européennes et sa valeur;

2)

aider les jeunes à acquérir les qualifications et compétences vitales de base qui sont nécessaires à leur développement personnel, à leur activité professionnelle future et à une citoyenneté européenne active.

5.6

En ce qui concerne les actions spécifiques, tous les niveaux doivent être promus ensemble, sans que les micro-projets dont les citoyens sont les acteurs — et qui participent à la promotion de l'identité européenne au niveau local ou national — soient éliminés au profit du soutien accordé aux réseaux européens. Les fonds consacrés aux différents types d'action doivent être répartis avec pour seul critère leur impact sur la citoyenneté européenne active et la participation des citoyens au processus de construction de l'Union européenne et à la définition et mise en oeuvre de ses politiques.

5.7

Le CESE tient à soutenir pleinement les propositions de la Commission visant, sur le plan technique, à aboutir à une très nette simplification des procédures dans un domaine (la participation directe et active du citoyen lui-même) qui souffre moins qu'ailleurs encore de se heurter à des obstacles bureaucratiques.

5.8

Le CESE est persuadé que «l'invention» d' attributs propres à la citoyenneté européenne, non réductibles à la seule addition des citoyennetés nationales (que ces attributs soient d'ordre symbolique, économique, sociopolitique, culturel, juridique), constitue désormais une priorité absolue de l'Union européenne et que la promotion de la citoyenneté active peut y contribuer de façon significative. Il est prêt à prendre sa part dans cette «invention» en coordonnant la consultation des organisations de la société civile organisée et en favorisant la connaissance et la prise en compte de leur point de vue par les autres institutions communautaires.

Bruxelles, le 26 octobre 2005.

La Présidente

du Comité économique et social européen

Anne-Marie SIGMUND


(1)  Communication intitulée «Construire notre avenir commune: défis politiques et moyens budgétaires de l'Union élargie 2007-2013» (COM(2004) 101 du 10.2.2004).

(2)  JO L 30 du 2.2.2004, p. 6.

(3)  Manuale di Cittadinanza Attiva, Giovanni Moro, Carocci Editore, 1998.

(4)  Introduction du COM(2005) 116 final.

(5)  Sondage 2005 TNS-Sofres des 10 pays représentant 85 % de la population des 25 sur les valeurs communes des Européens.

(6)  Déclaration du Commissaire Jan Figel devant la Section SOC du CESE du 21 juin 2005.

(7)  Avis du CESE sur «L'accès à la citoyenneté de l'Union européenne» (JO C 208 du 3.9.2003, rapporteur: M. PARIZA CASTAÑOS) et sur l«Immigration, intégration et emploi» (JO C 80 du 30.9.2004, rapporteur: M. PARIZA CASTAÑOS).

(8)  Draft recommendations to Member States regarding a code of conduct for non-profit organisations to promote transparency and accountability best practices, du 22 juillet 2005.

(9)  Le Parlement européen avait lui-même proposé ce type de partenariat formel dans un rapport sur la participation des citoyens et acteurs sociaux au système institutionnel de l'Union européenne – 1996 rapporteur Philippe Herzog.


3.2.2006   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 28/35


Avis du Comité économique et social européen sur la «Communication de la Commission au Conseil sur les politiques européennes de la jeunesse “Répondre aux préoccupations des jeunes Européens” — Mise en œuvre du Pacte européen pour la jeunesse et promotion de la citoyenneté active»

[COM(2005) 206 final]

(2006/C 28/07)

Le 30 mai 2005, la Commission européenne a décidé, conformément à l'article 262 du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la proposition susmentionnée.

La section spécialisée «Emploi, affaires sociales, citoyenneté», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 5 octobre 2005 (rapporteuse: Mme Jillian VAN TURNHOUT).

Lors de sa 421ème session plénière des 26 et 27 octobre 2005 (séance du 26 octobre 2005), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 126 voix pour, aucune voix contre et 3 abstentions.

1.   Introduction

1.1

Le Comité économique et social européen prend acte du pacte européen pour la jeunesse et de son élaboration telle que décrite par la Commission dans la communication sur les politiques européennes de la jeunesse. Cette dernière constitue un cadre pouvant servir de base aux évolutions futures des politiques dans les domaines affectant les jeunes dans l'Union européenne.

1.2

L'avenir de l'Europe dépend chaque jour davantage de sa capacité à promouvoir des sociétés accueillantes pour les enfants et les jeunes. En adoptant, au printemps 2005, le pacte européen pour la jeunesse dans le cadre de la stratégie de Lisbonne révisée pour la croissance et l'emploi, le Conseil européen a reconnu que l'intégration des jeunes dans la société et la vie active et une meilleure utilisation de leur potentiel étaient des éléments essentiels pour un retour à une croissance soutenue et durable en Europe.

1.3

Reconnaissant la multitude de défis auxquels font face les jeunes dans la société actuelle, le CESE apporte, depuis plus de dix ans (1), une contribution régulière aux développements communautaires de la politique à l'égard de la jeunesse. Il a initié des débats importants dans des domaines majeurs tels que l'emploi des jeunes, l'intégration sociale, l'éducation, la mobilité, la participation et le rôle des ONG. Le CESE est également conscient des défis auxquels l'Union européenne fait face en ce moment et de la nécessité de recréer un climat de confiance.

1.4

Le CESE préconise de placer les jeunes au centre de ce dispositif, de les inciter à participer activement à l'élaboration des politiques et de leur en donner l'occasion. La perspective de contribuer aux changements motive grandement les jeunes à s'impliquer. Les États membres et les institutions doivent fournir les ressources, le soutien et les mécanismes nécessaires permettant aux jeunes à tous les niveaux de s'associer plus facilement à la prise de décisions et de mesures ayant un effet sur leurs vies. Seul l'exercice d'une influence réelle peut mener à une responsabilité réelle.

1.5

Plus que jamais, l'Europe a besoin de l'engagement continu des jeunes pour aider à construire une Europe intégrée, compétitive, sûre et inclusive. Si l'on veut que l'Union européenne ait une signification pour les jeunes, il faut qu'elle joue un rôle dans leurs vies et s'intéresse explicitement et réponde de façon visible et créative à leurs besoins. De la même façon, le succès de cette initiative dépend de la mobilisation de toutes les parties concernées et, en premier lieu, des organisations de jeunesse, des autorités régionales et locales ainsi que des partenaires sociaux. Le CESE fait sienne «l'idée qui émerge» du rapport du Groupe de haut niveau sur l'avenir de la politique sociale dans une Union européenne élargie: «d'un nouveau pacte entre les générations» pour passer «d'un pacte centré sur les personnes âgées et fondé sur la peur … à un nouveau pacte centré sur les jeunes et fondé sur la confiance… de transformer toutes ces peurs en un processus» gagnant-gagnant «reposant sur une perception positive de l'avenir et sur un nouvel équilibre intergénérationnel».

1.6

Aussi le CESE espère-t-il que cette communication posera les bases, tant au niveau européen que national, d'un partenariat rapproché entre les décideurs et les jeunes. Une participation réelle et continue des jeunes et des organisations de jeunesse à l'élaboration et à la mise en œuvre des politiques permettra de répondre aux besoins des jeunes et d'assurer qu'ils s'approprient le processus de Lisbonne.

2.   Contexte

2.1

Lors du sommet européen de printemps des 22 et 23 mars, les chefs d'État et de gouvernement ont adopté un «pacte européen pour la jeunesse» (2). En proposant ce pacte, les chefs d'État et de gouvernement de la France, de l'Allemagne, de l'Espagne et de la Suède ont identifié quatre thèmes majeurs: la vulnérabilité des jeunes; la nécessité de la solidarité intergénérationnelle dans une société vieillissante; la nécessité d'améliorer les compétences des jeunes par l'éducation et la formation; la nécessité d'une plus grande cohérence dans tous les domaines politiques qui concernent les jeunes.

2.2

La communication aborde nombre de questions et de domaines d'intervention qui intéressent grandement les jeunes Européens et qui ont été définis comme tels dans le Livre blanc de la Commission intitulé «Un nouvel élan pour la jeunesse européenne» ainsi que dans la résolution subséquente du Conseil adoptée le 27 juin 2002. Cette dernière établit un cadre pour la politique de jeunesse en Europe.

2.3

En réponse aux conclusions du Conseil européen de printemps, la Commission européenne a adopté le 12 avril 2005 des lignes directrices intégrées pour la croissance et l'emploi (3). Cet ensemble de lignes directrices, qui inclut, d'une part, une recommandation relative aux grandes orientations des politiques économiques et, d'autre part, une proposition approuvée pour décision du Conseil relative aux lignes directrices pour les politiques de l'emploi, devrait servir de base pour les trois années à venir aux programmes nationaux de réforme que les États membres devront élaborer.

2.4

Dans l'introduction des lignes directrices, un accent particulier est mis sur la nécessité d'impliquer les parties concernées dans le cadre de la stratégie de Lisbonne. Le texte établit que les États membres, tout comme l'Union européenne, devraient profiter de chaque occasion d'impliquer les collectivités territoriales, les partenaires sociaux ainsi que la société civile dans la mise en œuvre des lignes directrices intégrées.

2.5

Alors que les grandes orientations des politiques économiques mettent l'accent sur la contribution des politiques économiques à la réalisation des objectifs de Lisbonne, les lignes directrices pour l'emploi se rapportent plus particulièrement à la stratégie européenne pour l'emploi et visent à coordonner les politiques de l'emploi des divers États membres. Certaines lignes d'action du pacte européen pour la jeunesse sont reprises explicitement dans les lignes directrices intégrées, plus précisément dans le cadre des lignes directrices pour l'emploi. Deux lignes directrices en particulier reflètent le contenu du pacte européen pour la jeunesse: la ligne numéro 18, qui inclut la création de parcours vers l'emploi pour les jeunes et la réduction du chômage des jeunes, un meilleur équilibre entre la vie professionnelle et la vie familiale et les structures de garde d'enfants, et la ligne numéro 23, qui inclut la réduction du nombre de jeunes quittant prématurément l'école, l'amélioration de l'accès à l'enseignement professionnel initial, à l'enseignement secondaire et à l'enseignement supérieur, y compris aux apprentissages et à la formation à l'entreprenariat. La ligne numéro 24, quant à elle, inclut l'extension de l'offre d'instruments d'éducation et de formation et la création des conditions nécessaires à la transparence des qualifications ainsi qu'à la reconnaissance effective et à la validation de l'éducation et de la formation non formelles et informelles. Il est répété à la fin des lignes directrices pour l'emploi que les États membres devraient créer un vaste partenariat pour le changement en associant à leur action les instances parlementaires et les parties concernées, y compris aux niveaux régional et local.

2.6

Cette initiative valorise la jeunesse dans des domaines clés du partenariat de Lisbonne pour la croissance et l'emploi grâce, notamment, aux stratégies européennes pour l'emploi et l'inclusion sociale ainsi qu'au programme de travail «Éducation et formation 2010» et appelle à la mise en cohérence des initiatives dans ces domaines.

2.7

L'adoption du pacte coïncide avec la fin du premier cycle de mise en œuvre du Livre blanc «Un nouvel élan pour la jeunesse européenne», publié en 2001 et sur lequel le Conseil a basé sa résolution de juin 2002. Ce Livre blanc établit un cadre de coopération européenne dans le domaine de la jeunesse, en vue de renforcer la citoyenneté active des jeunes en proposant une méthode ouverte de coordination (MOC) et en intégrant mieux la dimension de la jeunesse dans d'autres politiques.

2.8

Dans sa version finale, adoptée à la session de printemps du Conseil européen, le pacte européen pour la jeunesse souligne qu'il est nécessaire que les jeunes Européens puissent bénéficier d'un ensemble de politiques et de mesures s'intégrant pleinement à la stratégie de Lisbonne. Il vise également à améliorer l'enseignement, la formation, la mobilité, l'intégration professionnelle et l'inclusion sociale des jeunes et à faciliter la conciliation entre vie professionnelle et vie familiale. Le pacte affiche également l'ambition de garantir la cohérence d'ensemble des initiatives à prendre dans ces domaines et de servir de point de départ à une mobilisation forte et continue en faveur des jeunes. Il rappelle également que sa réussite suppose l'implication de tous les acteurs concernés et, en tout premier lieu, des organisations de jeunesse aux niveaux national, régional et local ainsi que des instances européennes, des collectivités territoriales et des partenaires sociaux. Les États membres sont invités à s'inspirer des lignes d'action dans les trois domaines suivants: 1) emploi, intégration et promotion sociale; 2) éducation, formation et mobilité; 3) conciliation de la vie professionnelle et familiale.

3.   Participation des jeunes

3.1

Au cours de l'élaboration du présent avis, le CESE a organisé, le 6 septembre 2005, une consultation de représentants d'organisations de jeunes. Les conclusions de cette consultation sont reprises dans le présent avis.

3.2

La participation des jeunes doit être le point de départ pour tous les volets du Pacte. Toute politique ciblée sur les jeunes doit respecter le principe fondamental de participation des jeunes, principe qui a été réitéré au niveau européen et international (4). Tandis que le CESE salue les mesures de consultation des jeunes au niveau européen, notamment l'organisation des états généraux de la jeunesse en 2005, il déplore le fait que la communication ne précise pas suffisamment, par des recommandations claires, la manière dont les jeunes et les organisations de jeunesse seront associés et participeront au niveau des États membres. Le CESE appelle la Commission et les États membres à recourir à des méthodes plus créatives pour atteindre et impliquer les jeunes.

3.3

Le CESE souligne l'importance d'une participation active des jeunes et de leur autonomie, tant sur le marché du travail que dans la société en général. La participation active des jeunes dans la société et leur autonomie devraient constituer à la fois un objectif et un outil contribuant au développement personnel des jeunes, à leur sens de l'initiative, à leur intégration sociale et à la cohésion sociale en général.

3.4

Le CESE constate avec regret que la communication ne mentionne pas clairement les mécanismes destinés à associer véritablement les jeunes et leurs organisations. Lors de son audition du 6 septembre 2005 mentionnée au point 3.1, il a été souligné, par exemple, par des organisations étudiantes combien le fait de voir la jeunesse gérer par délégation des institutions d'intérêt général, en l'occurrence le régime obligatoire de protection sociale des étudiants, permet à la jeunesse en son ensemble — et pas seulement à la jeunesse organisée — de se responsabiliser et de se représenter en tant que telle. Il appelle la Commission et les États membres à concevoir et à mettre en œuvre leurs politiques en partenariat avec les jeunes et les organisations de jeunesse et à continuer à les associer à toutes les étapes. Les jeunes, les organisations de jeunesse et les partenaires sociaux doivent être consultés au sujet de l'élaboration de mesures dans le cadre de l'initiative sur les programmes nationaux de réforme découlant de la stratégie de Lisbonne ainsi qu'au sujet de leur mise en œuvre ultérieure.

3.5

Le CESE attend avec impatience de lire le rapport de synthèse (5) de la Commission résumant le travail effectué jusqu'à présent par les États membres dans le domaine de la participation des jeunes dans le cadre de la MOC (6). Il espère que ce rapport fournira des exemples de bonnes pratiques pouvant être appliquées dans d'autres pays.

3.6

Le CESE cherche à clarifier le rôle que les organisations de la société civile, en particulier les organisations de jeunesse, sont appelées à jouer tout au long du processus de la méthode ouverte de coordination. Il convient de rappeler que le paragraphe 38 des conclusions du Conseil européen de Lisbonne décrit le rôle incombant aux ONG dans la méthode ouverte de coordination (7). Le CESE peut, par son expertise et son expérience, jouer un rôle actif en la matière et contribuer à élaborer et à mettre en place en son sein un mécanisme permettant d'impliquer les jeunes et les organisations de jeunesse.

4.   La jeunesse dans le partenariat de Lisbonne pour la croissance et l'emploi

4.1

Le CESE se félicite que le pacte accorde une attention particulière à la question de l'emploi des jeunes. Néanmoins, il conviendrait de développer et de mettre en œuvre le pacte dans une perspective qui lui confère une valeur d'objectif essentiel en soi, et non simplement une valeur d'élément de la stratégie de Lisbonne. En outre, si la réussite de la stratégie de Lisbonne revêt pour les jeunes une grande importance, ils jouent eux-même un rôle de premier plan dans la réussite de cette stratégie. Il est essentiel d'investir dans les jeunes afin d'atteindre des taux de croissance et d'emploi plus élevés, une innovation soutenue et un esprit d'entreprise plus fort. Afin que la stratégie de Lisbonne puisse fonctionner, il est nécessaire que les jeunes s'y associent, s'approprient ses objectifs et s'engagent à les réaliser.

4.2

Dans le même ordre d'idée, l'emploi est au centre des préoccupations des citoyens européens. Il convient de tout mettre en œuvre afin de lutter contre le chômage, dont le niveau inacceptable constitue une menace réelle pour la cohésion de nos sociétés (8). Le taux de chômage des jeunes en Europe reste plus de deux fois supérieur au taux de chômage moyen. De nombreux jeunes courent le risque bien réel d'être sans emploi ou de vivre dans des conditions difficiles avec de faibles revenus. Pour les jeunes issus de milieux défavorisés, les minorités ethniques, les immigrants, les handicapés et les femmes, les risques d'exclusion sociale sont bien plus élevés encore. Plus globalement c'est l'ensemble de la jeunesse qui est touché par les phénomènes de précarisation, de paupérisation et de dépendances, ce qui constitue à la fois un drame historique inédit et une possibilité neuve de solidarisation d'ensemble des jeunes et de la société pour sortir de cette situation inédite en Europe.

4.3

Les jeunes sont plus sujets au chômage et, s'ils travaillent, plus susceptibles d'avoir de faibles revenus (9). L'objectif de la stratégie de Lisbonne est de créer des emplois non seulement plus nombreux, mais également de meilleure qualité. Pour que l'accès au marché du travail devienne pour chaque jeune une réelle possibilité, il est nécessaire de mettre davantage l'accent sur une formation professionnelle adéquate et des enseignements, des apprentissages et des opportunités adéquats pour les jeunes, qui permettent à ceux-ci de se réaliser personnellement et professionnellement et d'acquérir des qualifications vitales. Il importe, en outre, que l'enseignement reçu dans le système scolaire leur permette de gérer leur vie professionnelle et d'utiliser avec succès les mécanismes de formation tout au long de cette dernière.

4.4

Le CESE insiste sur la reconnaissance des changements démographiques en Europe et souligne les liens existant avec le Livre vert de la Commission sur les changements démographiques (10). À titre d'exemple, le groupe des plus jeunes (0-14 ans) diminuera de 11 % entre 2000 et 2015 et continuera son déclin, de l'ordre de 6 %, jusqu'en 2030. Parallèlement à ce changement, le Comité attire l'attention sur les évolutions sociales, culturelles et politiques que connaît l'Europe. Les changements démographiques ne sont pas faits exclusivement de statistiques et de chiffres. Il est impératif d'adopter une perspective plus large lorsque l'on envisage les politiques et les mesures à prendre. Comme le Groupe de haut niveau sur l'avenir de la politique sociale dans une Union européenne élargie le signale, cette situation démographique qui verra diminuer considérablement le poids relatif du groupe jeunes jusqu'au moins l'horizon 2025 constitue, si on la saisit, une opportunité puisqu'elle implique «une demande réduie en ressources sociétales» et la possibilité à coûts maintenus d'apporter des améliorations substantielles dans ces domaines.

4.5

C'est pourquoi le CESE estime qu'un pacte européen pour et par les jeunes aurait le potentiel nécessaire pour améliorer substantiellement les conditions de vie ainsi que les perspectives d'avenir des jeunes Européens et qu'il pourrait en même temps contribuer à la mise en œuvre effective de la stratégie de Lisbonne.

5.   Le pacte européen pour la jeunesse

5.1

Le CESE accueille favorablement les conclusions du Conseil européen selon lesquelles les jeunes bénéficieraient d'une série de politiques et de mesures entièrement intégrées dans la stratégie de Lisbonne révisée.

5.2

Dans la communication, les aspects suivants des lignes directrices intégrées sont considérés comme pouvant maximiser les effets du pacte pour la jeunesse:

(i)

Mesures pour l'emploi, l'insertion et la promotion sociale des jeunes. Les lignes directrices intégrées sont axées sur la contribution des politiques de l'emploi à la création d'emplois plus nombreux et de meilleure qualité.

(ii)

Mesures pour l'éducation, la formation et la mobilité. Les lignes directrices intégrées soulignent la nécessité pour l'Europe d'accroître et d'améliorer les investissements dans le capital humain et d'adapter les systèmes d'éducation et de formation. Par ailleurs, les États membres sont invités à améliorer les possibilités de mobilité des jeunes, en multipliant notamment les possibilités pour les jeunes de travailler et d'étudier à l'étranger.

(iii)

Mesures favorisant la conciliation de la vie familiale et de la vie professionnelle. Les lignes directrices intégrées soulignent la nécessité de parvenir à un meilleur équilibre entre travail et famille en abordant des problèmes tels que les garderies d'enfants, les arrangements professionnels favorables à la vie de famille et l'égalité des sexes.

5.3

Le CESE déplore que, bien que des actions aient été identifiées pour chacune des mesures mentionnées ci-dessus, la communication ne définit aucun objectif explicite et mesurable que les États membres ou la Commission seraient tenus de réaliser. Alors que les citoyens remettent en cause la valeur de l'Union européenne, il est primordial que l'Europe prenne des mesures concrètes. Pour ce faire, les objectifs doivent être non équivoques et axés sur les résultats.

5.4

Il convient d'inciter les gouvernements nationaux à quantifier leurs buts et à fixer des objectifs clairs dans leurs programmes nationaux de réforme. Ces buts et objectifs ne doivent pas se cantonner aux défis rencontrés par les jeunes dans les domaines identifiés, mais doivent être élargis à des thèmes ayant une incidence significative, même indirecte, sur la réalisation de ces buts et objectifs. Le logement et l'hébergement, ainsi que la nécessité d'une politique familiale à destination des jeunes parents constituent des thèmes essentiels. Il convient également de mettre en place des mécanismes de coordination efficaces, tant au niveau européen que national, afin de parvenir à une approche cohérente dans tous les domaines.

5.5

Le CESE demande que soit envisagée l'inclusion des objectifs suivants dans les programmes nationaux de réforme de la stratégie de Lisbonne des États membres:

définir des objectifs spécifiques pour chaque pays membre, visant à réduire le chômage des jeunes d'au moins 50 % au cours de la période 2006-2010 (le chômage touche actuellement 17,9 % des moins de 25 ans dans l'UE) (11);

concevoir des systèmes de protection sociale offrant la possibilité aux jeunes de décider de leur propre avenir;

lancer des mesures de promotion de l'inclusion sociale des jeunes, notamment afin de lutter contre le problème des jeunes qui ne suivent ni enseignement ni formation, n'occupent pas d'emploi ou ne sont pas inscrits comme chômeurs;

fixer des objectifs de réduction des écarts dans l'accès aux formations professionnelles et technologiques entre filles et garçons et réduire les disparités de salaires à l'embauche;

réduire le décrochage scolaire de moitié au cours de la période 2006-2010 et promouvoir les stages de découverte en entreprise;

promouvoir le rôle des compétences en langues étrangères dans l'amélioration des opportunités en matière d'éducation et d'emploi ainsi que de la mobilité des jeunes;

stimuler l'esprit d'entreprise chez les jeunes en apportant une aide financière et technique et en réduisant au minimum les démarches administratives liées à la reprise, à la transmission et à la création d'une entreprise;

soutenir un système universel d'éducation et de soins de la prime enfance, réglementé et contrôlé selon des normes agréées;

fournir une aide supplémentaire aux familles défavorisées.

5.6

Le CESE invite la Commission à poursuivre dans la voie de la reconnaissance du travail des jeunes et se réjouit de l'introduction d'initiatives, notamment le «passeport jeunesse». Le Comité estime toutefois que le «passeport jeunesse» à lui seul ne constitue pas une action suffisante afin d'améliorer la reconnaissance du travail des jeunes. Aussi recommande-t-il à la Commission de s'engager, aux côtés des organisations d'employeurs, des organisations de travailleurs, des représentants du système d'enseignement officiel et des ONG appropriées, afin de mettre au point une méthodologie polyvalente destinée à amener une prise de conscience au sujet de la contribution que le travail des jeunes apporte à leur développement et au sujet des compétences, valeurs et attitudes que les jeunes acquièrent en s'impliquant activement dans les organisations de jeunesse et dans des activités de travail des jeunes. Le CESE pourrait faciliter ce processus.

5.7

Les pays européens qui occupent le haut du classement de la compétitivité établi par le Forum économique mondial consentent tous des investissements importants dans la politique sociale et le régime de sécurité sociale et présentent des taux d'emploi élevés et de faibles niveaux de pauvreté après les transferts sociaux (12). Des systèmes de sécurité sociale durables, basés sur le principe de solidarité, qui couvrent les risques majeurs de la vie, constituent les piliers d'une action réussie en la matière.

5.8

Le CESE appelle instamment à une prise en considération accrue de la situation des jeunes dans les zones rurales et dans les zones urbaines défavorisées. Les jeunes sont souvent désavantagés en raison de l'endroit où ils vivent. Dans de nombreuses zones rurales et zones urbaines défavorisées, les jeunes n'ont pas accès à un enseignement, à des formations, à la mobilité, à des services sanitaires, à des installations de loisirs ou à des opportunités d'emploi de qualité, ni n'ont la chance de participer à la société civile. Des mesures spécifiques devraient être mises en place afin d'assurer que les jeunes, dans certaines zones géographiques, puissent bénéficier pleinement des opportunités et opérer des choix dans leur propre vie. La périphéricité de nombreuses zones rurales implique que les jeunes ne peuvent pas accéder aisément aux informations, en particulier celles relatives aux opportunités existantes.

5.9

Le CESE salue la proposition de lancer en 2005 une étude sur l'intégration sociale des jeunes très défavorisés. Néanmoins, les États membres doivent relever plus rapidement le défi de l'éradication de la pauvreté des enfants et se fixer des objectifs immédiats. Ce défi nécessitera un plan d'action global, soutenu et doté de ressources prenant en compte la nature pluridimensionnelle de la pauvreté des enfants. Cette dernière a de graves effets sur les enfants dans toute une série de domaines tels que la santé, l'éducation ainsi que les perspectives de vie futures, caractérisées par la difficulté à sortir du cercle vicieux de la pauvreté. Les États membres doivent mettre en œuvre sans tarder des politiques visant à résoudre l'ensemble des ces questions.

5.10

La Commission est décidée à intégrer les questions de handicap dans les politiques communautaires, une volonté qu'elle a expressément confirmée dans le plan d'action européen relatif à l'égalité des chances pour les personnes handicapées adopté en 2003 (13). La Commission se doit dès lors de combattre les discrimination dans toutes les actions qu'elle entreprend. Il est nécessaire d'intégrer le handicap afin de garantir l'inclusion et la participation pleine et égale des personnes souffrant de handicap dans la société. En vue d'inclure entièrement les jeunes handicapés dans la politique de jeunesse, le CESE souligne la nécessité d'insérer les points suivants dans la communication de la Commission: égalité de participation aux activités du programme «Jeunesse»; égalité d'accès aux informations concernant la politique de jeunesse et les projets destinés aux jeunes; mesures de sensibilisation de la population.

5.11

Les jeunes ne constituent pas une catégorie homogène. C'est pourquoi le CESE recommande qu'au niveau des États nationaux, les politiques soient définies de manière suffisamment différenciée et tiennent compte aussi bien des besoins du marché du travail que des besoins des individus. Dans le même temps, le Comité recommande à la Commission de procéder à une analyse de la situation et des besoins des jeunes en Europe.

6.   La citoyenneté active des jeunes

6.1

Le CESE félicite la Commission d'avoir inclus la citoyenneté active des jeunes dans cette initiative alors qu'elle n'a pas été reprise dans le pacte européen pour la jeunesse. Le CESE partage la proposition de la Commission de maintenir et de consolider les quatre objectifs actuels, à savoir la participation, l'information, le volontariat et la connaissance des questions relatives à la jeunesse. Le Comité indique toutefois qu'il est essentiel de veiller à ce que la méthode ouverte de coordination produise désormais des résultats tangibles. Aussi les défaillances identifiables du système et du processus MOC doivent-elles être notées et palliées.

6.2

Le CESE est conscient que les États membres rendront compte, à la fin de l'année 2005, de la réalisation des objectifs communs de participation et d'information, et que les rapports sur les activités de volontariat et une meilleure connaissance du domaine de la jeunesse sont attendus pour 2006. Il plaide cependant en faveur d'un partenariat rapproché et souligne la nécessité d'associer toutes les parties prenantes, notamment les jeunes et les organisations de jeunesse, au processus d'élaboration des rapports nationaux sur les progrès accomplis. Au nom de la transparence, il convient également que ces rapports soient élaborés publiquement ou tout du moins disponibles publiquement lors de leur remise. Les ONG devraient également être encouragées et aidées financièrement à entreprendre leur propre évaluation de la méthode ouverte de coordination.

6.3

Les organisations de la société civile et les partenaires sociaux font partie intégrante de toute démocratie pluraliste. Dans ce contexte, les organisations de jeunesse jouent un rôle précieux dans la promotion d'une citoyenneté active et participative, en travaillant directement avec et pour les jeunes afin de développer leurs compétences et leur confiance de manière à exploiter pleinement leur potentiel et parvenir à un niveau et à une qualité de vie optimale. Ces organisations interviennent à la base et s'attaquent aux problèmes locaux avec le soutien de personnes ou de groupes présents dans leur environnement immédiat. L'une de leurs activités consiste également à promouvoir et à développer la capacité des jeunes à défendre leurs intérêts. Les ONG militant en faveur des jeunes devraient bénéficier d'un financement approprié et jouir de la reconnaissance et des moyens nécessaires leur permettant de participer en tant qu'acteurs à part entière au processus décisionnel et à la société à tous les niveaux.

6.4

Dans ses discussions concernant la représentativité des organisations européennes de la société civile dans le cadre du dialogue social, le CESE a déjà souligné à plusieurs reprises (14) que seule une représentativité clairement établie peut donner aux acteurs de la société civile un droit de participer de manière effective au processus de formation et de préparation des décisions communautaires, comme cela est le cas pour les partenaires sociaux dans le cadre du dialogue social européen.

6.5

Le CESE déplore que la principale contribution du volontariat à la société soulignée par la Commission soit celle liée à son rôle dans les catastrophes naturelles. Ce rôle est certes louable, mais le CESE estime que la Commission et les États membres devraient reconnaître et souligner le rôle constant et permanent que jouent les volontaires au sein de nombreuses ONG actives au niveau local, régional, national et européen. En particulier, le Comité invite les États membres à favoriser les activités de volontariat, notamment par des politiques fiscales adéquates, sachant que ces activités de volontariat répondent non seulement aux besoins psychologiques et éthiques des jeunes, mais permettent également de développer d'innombrables services sociaux et d'assistance ou d'en réduire le coût.

6.6

Le CESE regrette que les actions proposées soient limitées et dénuées de but ou d'objectif clair. Il s'agit d'une occasion manquée de progresser dans ce domaine clé.

6.7

Les programmes européens jouent un rôle primordial aux fins de la réalisation des objectifs de la méthode ouverte de coordination et du pacte européen pour la jeunesse ainsi que dans le renforcement de l'implication des jeunes dans d'autres politiques qui les concernent. Le CESE partage le point de vue de la Commission selon lequel les projets qui incitent les jeunes à devenir des citoyens actifs et impliqués et qui sont destinés à les aider à accroître leur potentiel devraient être développés aux niveaux local, régional, national et communautaire dans le cadre des différents programmes européens. Néanmoins, même si nombre de programmes pourraient en effet être utilisés à cette fin, il convient de promouvoir leur utilisation par et pour les jeunes et les organisations de jeunesse et de les rendre plus conviviaux pour ces derniers. L'utilisation des divers programmes, en particulier le fonds social européen et les fonds structurels, constitue une grande opportunité de faire progresser la politique de jeunesse du stade de la rhétorique à celui de l'action. Divers projets conçus pour améliorer les conditions de vie ou l'emploi des jeunes sont souvent de taille trop réduite pour bénéficier de ces fonds. Par conséquent, la Commission et les États membres devraient s'engager auprès des organisations de jeunesse pour faciliter l'utilisation des programmes financés par l'UE en faveur des jeunes.

6.8

Le CESE estime que le programme le plus à même d'améliorer le développement personnel et social des jeunes et de promouvoir une citoyenneté active est le programme européen pour la jeunesse. Il appuie l'initiative d'un nouveau programme «Jeunesse en action» pour la période 2007-2013 et continuera à s'impliquer activement dans le processus de préparation. Eu égard à l'extension dudit programme et au désir croissant de jeunes d'en bénéficier, le CESE lance un appel pressant au Conseil, afin qu'il soutienne la proposition visant à augmenter légèrement les ressources consacrées à cette initiative pour les porter à 1,2 milliard d'euros. Par ailleurs, le CESE considère qu'il convient de consulter régulièrement les jeunes, les organisations de jeunesse en Europe et le Forum européen de la jeunesse en ce qui concerne la mise en œuvre du programme. Le CESE invite les conseils économiques et sociaux nationaux à s'engager dans des expériences novatrices pour faciliter la participation des jeunes aux procédures de consultations nationales et à échanger leurs bonnes pratiques sur le thème de la place des jeunes dans leurs instances.

7.   Intégration de la dimension de la jeunesse dans d'autres politiques

7.1

Le CESE soutient la proposition de la Commission de se concentrer avant tout sur les domaines d'intervention du pacte européen pour la jeunesse. Le Comité souligne toutefois l'importance d'une approche intégrée et transsectorielle lors de la mise en place de politiques dans le domaine de la jeunesse.

7.2

Une approche horizontale dans la mise au point des politiques garantit une stratégie mieux coordonnée et plus efficace. Les États membres consultent régulièrement les organisations patronales et syndicales lorsqu'ils élaborent des politiques comme les lignes directrices pour l'emploi. De la même manière, les États membres se doivent de consulter les jeunes et leurs organisations au sujet des politiques les concernant.

7.3

Le CESE observe dans son avis d'initiative intitulé «L'Obésité en Europe — Rôle et responsabilités des différents partenaires de la société civile» (15) que plus de 14 millions d'enfants en Europe souffrent de surcharge pondérale, dont trois millions sont obèses. Plus inquiétant encore, 400 000 nouveaux cas sont recensés chaque année. Le CESE en appelle à l'implication collective de toutes les parties concernées, y compris des jeunes.

7.4

Le Comité partage l'intérêt prioritaire de la Commission pour les actions en faveur de la santé des enfants et des jeunes, et en particulier celles visant à promouvoir des modes de vie sains. Il estime que les citoyens sont particulièrement sensibles à de telles actions, et que celles-ci sont urgentes, et demande donc que l'initiative visant à promouvoir ce type d'actions, prévue pour 2006, soit avancée d'un an, compte tenu également des consultations et des initiatives en cours.

7.5

Le CESE est favorable à ce que des études soient entreprises par le septième programme-cadre de recherche sur les résultats de la participation des jeunes à la démocratie représentative et aux activités de volontariat. Ce rapport pourrait éventuellement permettre d'obtenir de précieuses informations au sujet de l'impact de la participation.

Bruxelles, le 26 octobre 2005.

La Présidente

du Comité économique et social européen

Anne-Marie SIGMUND


(1)  Livre blanc: Politique de jeunesse (JO C 116 du 20 avril 2001; rapporteuse: Mme HASSETT-VAN TURNHOUT).

Livre blanc de la Commission européenne: Un nouvel élan pour la jeunesse européenne (JO C 149 du 21 juin 2002; rapporteuse: Mme HASSETT-VAN TURNHOUT).

Proposition de décision du Parlement européen et du Conseil établissant l'Année européenne de l'éducation par le sport 2004 (JO C 149 du 21 juin 2002; rapporteur: M. KORYFIDIS).

Proposition de décision du Parlement européen et du Conseil établissant un programme d'action communautaire pour la promotion des organismes actifs au niveau européen dans le domaine de la jeunesse (JO C 10 du 14 janvier 2004; rapporteuse: Mme HASSETT-VAN TURNHOUT).

SOC/174 Relations entre générations (JO C 157 du 28 juin 2005; rapporteur: M. BLOCH-LAINÉ).

SOC/177 Proposition de décision du Parlement européen et du Conseil établissant le programme «Jeunesse en action» pour la période 2007-2013 (JO C 234 du 22 septembre 2005; rapporteur. M. RODRIGUEZ GARCÍA-CARO).

(2)  http://ue.eu.int/ueDocs/cms_Data/docs/pressdata/fr/ec/84331.pdf.

(3)  SOC/206 Lignes directrices pour l'emploi – 2005/2008 (JO C 286 du 17.11.2005 – rapporteur: M. MALOSSE).

(4)  Avis du CESE sur le Livre blanc: politique de la jeunesse, JO C 116 du 20.4.2001; Résolution des Nations-Unies pour l'Année internationale de la jeunesse en 1985 «Participation, développement, paix»; Convention des Nations-Unies relative aux droits de l'enfant, 1989; Charte européenne de la participation des jeunes à la vie municipale et régionale du Congrès des pouvoirs locaux et régionaux de l'Europe, 1992; Résolution du Conseil et des ministres chargés de la jeunesse, réunis au sein du Conseil du 8 février 1999 (JO 1999/C42/01).

(5)  Il est prévu que le document sera publié vers la fin 2005.

(6)  Méthode ouverte de coordination.

(7)  Le paragraphe 38 des conclusions du Conseil européen de Lisbonne stipule qu'une méthode d'évaluation des meilleures pratiques en matière de gestion des changements sera élaborée par la Commission européenne en coordination avec différents prestataires et utilisateurs, à savoir les partenaires sociaux, les entreprises et les ONG.

(8)  Conclusions de la présidence du Conseil européen, Luxembourg, 1997.

(9)  Rapport du Groupe de haut niveau sur l'avenir de la politique sociale dans une Union européenne élargie.

(10)  COM(2005) 94 – Changements démographiques – solidarité entre générations.

(11)  P. 3 de la communication de la Commission.

(12)  Rapport du Groupe de haut niveau sur l'avenir de la politique sociale dans une Union européenne élargie, mai 2004.

(13)  COM(2003) 650 final, Bruxelles, le 30 octobre 2003.

(14)  Voir par exemple la documentation relative à la «Première Convention de la société civile organisée au niveau européen» des 15 et 16 octobre 1999 et celle relative à la Conférence sur «le rôle de la société civile organisée dans la gouvernance européenne» des 8 et 9 novembre 2001, ainsi que les avis pertinents: «Le rôle et la contribution de la société civile organisée dans la construction européenne», 23 septembre 1999 (JO C 329 du 17 novembre 1999), «La Commission et les organisations non gouvernementales – Renforcement du partenariat», 13 juillet 2000 (JO C 268 du 19 septembre 2000), «La société civile organisée et la gouvernance européenne – contribution du Comité à l'élaboration du Livre blanc», 26 avril 2001 (JO C 193 du 10 juillet 2001), «La gouvernance européenne – un Livre blanc», 21 mars 2002 (JO C 125 du 27 mai 2002).

(15)  SOC 201 (2005) – «Obésité en Europe - Rôle et responsabilités des différents partenaires de la société civile».


3.2.2006   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 28/42


Avis du Comité économique et social européen sur «La période de réflexion: la structure, les sujets et le cadre pour une évaluation du débat sur l'Union européenne»

(2006/C 28/08)

Le 6 septembre 2005, le Parlement européen a décidé, conformément à l'article 262 du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social européen, en vertu de, sur «La période de réflexion: la structure, les sujets et le cadre pour une évaluation du débat sur l'Union européenne».

Conformément à l'article 19, paragraphe 1 de son règlement intérieur, le Comité a décidé de créer un sous-comité chargé de préparer ses travaux en la matière.

Le sous-comité «Réflexion: débat sur l'Union européenne», chargé de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 13 octobre 2005 (rapporteuse: Mme Jillian VAN TURNHOUT).

Lors de sa 421ème session plénière des 26 et 27 octobre 2005 (séance du 26 octobre 2005), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 130 voix pour, 3 voix contre et 3 abstentions.

1.   La logique et les analyses sous-jacentes restent inchangées

1.1

La logique et les analyses qui ont conduit le CESE à adopter, à une très large majorité, son avis en faveur du traité constitutionnel (le 28 octobre 2004) n'ont pas changé, et les arguments et recommandations présentés n'ont donc pas changé non plus. En effet, le Comité estime que les péripéties du processus de ratification du traité constitutionnel confirment la validité des positions qu'il a adoptées.

1.2

Par exemple, les résultats des referendums en France et aux Pays-Bas outre qu'ils démontrent la défaillance des États membres et des institutions européennes pour communiquer l'Europe pour ce qu'elle est, pour la façon dont elle construit des compromis, témoignent d'un fossé entre les citoyens et le projet européen. Ce fossé n'est certainement pas spécifique à ces seuls pays, n'est pas d'ordre uniquement communicationnel et conjoncturel, mais interroge la nature du compromis lui-même et, donc, sa méthode de construction.

1.3

Il est utile de rappeler quels étaient les messages clairs que, dans son avis d'octobre 2004, le Comité jugeait souhaitable de faire passer à la société civile:

l'utilisation de l'instrument de la «Convention», un «pas en avant dans la démocratisation de la construction européenne»;

une Constitution, «révolution» dans l'histoire de la construction européenne;

une union plus démocratique qui reconnaîtrait les citoyens comme souverains de la construction de l'Europe;

une union qui protégerait mieux les droits fondamentaux des citoyens européens;

une Union qui grâce à sa méthode et à ses politiques communautaires pourrait répondre aux aspirations des citoyens.

1.4

Malgré une série de points faibles du traité constitutionnel, qu'il a également mis en lumière, le Comité a plaidé fortement pour une mobilisation de la société civile européenne en faveur des aspects positifs du traité constitutionnel afin de remédier à ces points faibles.

1.5

Les points faibles mis en évidence par le Comité étaient notamment les suivants:

L'insuffisance de dispositions opérationnelles pour mettre en oeuvre le principe de démocratie participative;

l'absence de dispositions reconnaissant le rôle de la société civile organisée dans la mise en œuvre du principe de subsidiarité;

la faiblesse de la gouvernance communautaire en matière de politique économique et de l'emploi ainsi que l'absence de règles prévoyant de consulter le Parlement européen et le CESE dans ces domaines qui concernent au premier chef les acteurs de la société civile.

1.6

Le Comité estime que toutes ces observations restent pertinentes et valables. Dans son avis d'octobre 2004, le Comité non seulement a plaidé avec force en faveur de la ratification du traité constitutionnel, mais a également fait valoir qu'il fallait sensibiliser les citoyens de l'UE aux progrès démocratiques que représentait le projet de Constitution et aux avantages de ce projet.

1.7

Les débats qui ont eu lieu autour du processus de ratification ont démontré encore une fois que l'un des principaux défis auxquels se trouve confrontée l'Union européenne est la question de savoir comment préserver et garantir la croissance, les emplois et la prospérité pour les générations actuelles et futures. Le dernier sondage Eurobaromètre (Eurobaromètre 63, septembre 2005) montre que cette question se situe au coeur des préoccupations des citoyens européens.

1.8

Un élément essentiel de la réponse à ce défi se trouve dans les objectifs que fixe la stratégie de Lisbonne, telle que l'ont présentée les chefs d'État ou de gouvernement en 2000, stratégie qui propose une vision concrète de l'avenir de la société européenne.

1.9

Il est nécessaire de reconnaître néanmoins que malgré cinq ans de débats et d'activités intenses au niveau européen, les résultats ont jusqu'ici été décevants et la mise en oeuvre insuffisante.

1.10

«À côté de progrès indéniables, il y a des lacunes et des retards évidents», a observé le Conseil européen en mars 2005. Il y a peut-être beaucoup de raisons qui expliquent ces lacunes et ce retard, mais presque tout un chacun peut souscrire aux deux remarques suivantes:

la stratégie est trop abstraite. Il n'y a pas de conséquences visibles pour les personnes et les entreprises. L'opinion publique ne fait pas de distinction entre les effets de la mondialisation, ceux de la politique de l'UE et ceux de la politique nationale sur leurs conditions de vie et de travail;

la stratégie reste un processus «descendant». La participation de la société civile organisée est insuffisante. Dans certains États membres la stratégie est plus ou moins inconnue d'un grand nombre d'intervenants. Aucune véritable consultation ne semble avoir eu lieu, en particulier dans le cadre de la méthode ouverte de coordination pour la recherche et l'éducation.

1.11

Ainsi, le Conseil européen de mars 2005 a notamment souligné la nécessité pour la société civile de s'approprier les objectifs de la stratégie de Lisbonne et de participer activement à leur réalisation.

1.12

Il est particulièrement clair dans ce contexte que l'avenir du modèle européen de la société, y compris son modèle social, qui est une part fondamentale de l'identité collective des citoyens européens et avec lequel ils s'identifient fortement, dépendra de la réalisation des objectifs de la stratégie de Lisbonne. Ainsi, le défi ne tient pas tant à l'avenir du traité constitutionnel, si important qu'il soit, mais à la création des conditions qui permettront aux citoyens européens de se réapproprier le projet européen sur la base d'une vision globale partagée quant au type de société qu'ils désirent.

1.13

C'est pourquoi, dans son avis d'octobre 2004, le Comité a également établi un lien entre le traité constitutionnel et la stratégie de Lisbonne, faisant valoir que:

«La stratégie de Lisbonne devrait être présente dans les débats parce qu'elle apporte la vision d'un avenir pour chaque citoyen européen: la compétitivité, le plein emploi, le partage des connaissances, l'investissement dans le capital humain, la croissance mais aussi la préservation du cadre et de la qualité de vie par un développement durable …».

2.   «Redresser la barre» — une vision partagée grâce à la démocratie participative

2.1

Pour relever avec succès les défis auxquels est confrontée l'Union européenne, il faut «relégitimer» le processus d'intégration européenne sur la base d'une nouvelle conception de l'action démocratique qui attribue un rôle déterminant à la société civile et à ses institutions représentatives.

2.2

Dans ce but, la participation de la société civile au processus décisionnel public est un instrument essentiel du renforcement de la légitimité démocratique des institutions européennes et de l'action européenne. Elle joue un rôle encore plus essentiel dans l'encouragement à la genèse d'une conception partagée de la finalité et de la direction de «l'Europe», et donc d'un nouveau consensus, sur la base duquel il devrait être possible de poursuivre le processus d'intégration européenne et de définir et de mettre en oeuvre un projet pour l'Europe de demain qui répondra plus pleinement aux attentes de ses citoyens.

2.3

Les institutions de l'Union européenne et les gouvernements des États membres doivent encourager une véritable culture de la subsidiarité qui englobe non seulement les différents niveaux de pouvoir, mais aussi les différentes composantes de la société, de manière à démontrer au citoyen européen que l'UE n'agira que lorsque son action fournit une valeur ajoutée indéniable et toujours dans le respect du principe consistant à mieux légiférer.

2.4

Selon les derniers résultats de l'Eurobaromètre, 53 pour cent des personnes interrogées pensaient que leur voix ne comptait pas dans l'Union européenne. 38 pour cent seulement étaient d'un avis opposé.

2.5

Ces résultats montrent qu'il est nécessaire de construire et d'utiliser des outils qui permettront aux citoyens européens d'être vraiment partie prenante du processus consistant à définir un projet pour l'Europe élargie, projet qui devrait posséder un contenu réel et qui les encouragera à soutenir le processus d'intégration européenne et à s'identifier à lui.

2.6

Dans ce contexte il convient de souligner que la légitimité démocratique de l'Union européenne ne repose pas seulement sur une définition précise des pouvoirs et des compétences de ses institutions. La légitimité démocratique suppose également:

que ces institutions jouissent de la confiance du public et qu'elles puissent s'appuyer sur un engagement ferme des citoyens en faveur du projet européen,

que la participation active des citoyens à la vie démocratique de l'Union européenne soit pleinement garantie, et

que des attributs propres à la citoyenneté européenne, qui ne soit pas la simple juxtaposition des citoyennetés nationales, soient recherchés (1).

2.7

Pour le Comité, le fait que le processus de ratification du traité constitutionnel soit actuellement suspendu, ou retardé, comporte une ironie essentielle: l'absence de Constitution, et notamment l'absence des dispositions du titre VI concernant la vie démocratique de l'Union européenne, soulignent encore davantage la nécessité de la Constitution. L'Union doit donc affronter un défi fondamental, qui est la question de savoir comment faire passer ce message élémentaire.

2.8

Pour le Comité, la logique qui sous-tend les dispositions de la Constitution en matière de démocratie participative et de dialogue civil reste totalement valable. C'est pourquoi les institutions européennes doivent investir sans réserves dans la logique du traité constitutionnel et établir une authentique démocratie participative.

2.9

La nécessité d'améliorer la participation est d'autant plus urgente que, malgré tout ce qui s'est produit dans un passé récent, les citoyens de l'Union européenne attendent beaucoup de l'Union. La même enquête Eurobaromètre, déjà citée, indique qu'environ 60 pour cent des citoyens de l'Union européenne sont favorables à une intégration accrue au sein de l'Union (plusieurs autres sondages parviennent à la même conclusion). Les résultats indiquent également que face à des défis urgents, tels que la lutte contre le chômage, la pauvreté et l'exclusion sociale, les citoyens de l'Europe aimeraient voir renforcer le rôle de l'Union.

2.10

Dès le mois d'octobre 2004, le Comité faisait valoir qu'afin de remédier aux points faibles du traité et aussi d'assurer sa ratification par la mobilisation de la société civile, l'on aurait pu adopter un certain nombre de mesures pour développer le cadre institutionnel proposé et pour l'améliorer par des mesures opérationnelles. En particulier, le Comité faisait valoir que:

les dispositions sur la démocratie participative auraient dû faire l'objet d'une série de communications définissant les méthodes de consultation et le rôle du CESE;

le contenu de la loi européenne définissant les procédures de mise en œuvre du droit d'initiative populaire aurait dû faire l'objet de consultations de la société civile. Le CESE aurait ainsi pu en être saisi par une demande d'avis exploratoire;

le principe de la démocratie participative aurait dû s'appliquer aux grandes stratégies de l'Union en faveur de la croissance, de l'emploi et du développement durable.

2.11

Le Comité a ainsi cherché à convaincre les gouvernements de l'UE et les institutions de la nécessité cruciale de mobiliser la société civile et les organisations de la société civile en faveur de l'esprit, autant que de la lettre, de la Constitution.

2.12

Le Comité constate que le «large débat» auquel pensaient les chefs d'État ou de gouvernement dans leur déclaration de juin n'a pas lieu actuellement. Le Comité estime qu'il conviendrait de relancer dès que possible ce large débat. Néanmoins, le Comité estime également que ce débat serait contreproductif si l'on ne rassurait pas d'une manière ou d'une autre l'opinion publique quant à la nature du processus d'intégration européenne et, notamment, quant aux aspects démocratiques de ce processus.

2.13

Il conviendrait naturellement d'utiliser la période de réflexion décidée par les chefs d'État ou de gouvernement des États membres en juin pour envisager des moyens susceptibles d'apporter une solution à la situation politique et institutionnelle engendrée par les résultats des referendums en France et aux Pays-Bas.

2.14

Mais pour le Comité, il conviendrait surtout de tirer parti de la période de réflexion pour contribuer à établir les fondements d'une vision largement partagée dans la population quant à l'avenir de l'Europe et quant à un nouveau contrat social entre l'Europe et ses citoyens, un nouveau consensus qui établirait aussi le cadre dans lequel pourraient s'inscrire les politiques nécessaires pour garantir la croissance, l'emploi et la prospérité. Dans ce contexte, les gouvernements des États membres devraient ramener l'Union au cœur de leur pays.

2.15

Il est d'une importance cruciale de démontrer que la «démocratie participative» et le «dialogue civil» ne sont pas des slogans vides de sens, mais, au contraire, des principes essentiels dont dépend la réussite des politiques de l'Union européenne, et donc l'avenir de celle-ci.

2.16

C'est pourquoi il est indispensable de faire participer aussi largement que possible la société civile, au niveau national, régional et local, à tous les débats et discussions futurs, d'encourager les citoyens de l'Union à exprimer leurs attentes concrètes et, pour y parvenir, de mettre en place une véritable stratégie d'écoute et de dialogue à propos des politiques de l'Union et de la manière dont ils voient leur avenir partagé.

2.17

Dans ce contexte, le Comité va examiner avec attention le «plan D» de la Commission, d'autant plus qu'il est convaincu que, pour l'instant, rien ne s'est vraiment enclenché en terme de dé bat et que la méthode, le calendrier et les moyens qui vont être consacrés pour impulser le débat dans chaque pays adhérent, mais aussi au niveau intra-communautaire seront décisifs. Le CESE souscrit aux arguments développés à plusieurs reprises par Mme Margot WALLSTRÖM, vice-présidente de la Commission européenne, arguments selon lesquels la communication est un processus à double sens et selon lesquels «l'Europe» doit écouter davantage. Pour le Comité, «écouter» ne signifie pas nécessairement «suivre», mais signifie à coup sûr «associer» et «comprendre».

3.   «Communiquer l'Europe»

3.1

Plus généralement, le Comité a accueilli favorablement l'apparition de l'idée que l'Union européenne devrait se doter d'une véritable stratégie de communication et qu'elle devrait moderniser et améliorer ses outils de communication. Le Comité a accueilli favorablement le rapport du Parlement européen en date du 26 avril 2005 sur la mise en oeuvre de la stratégie d'information et de communication de l'Union européenne, et il a marqué sa satisfaction à propos de l'adoption par la Commission européenne, le 20 juillet 200

3.2

Le Comité a lui-même adopté et régulièrement révisé un plan de communication stratégique. De plus, en décembre 2004, le Bureau du Comité a approuvé une approche stratégique globale par rapport au défi qui consiste à «communiquer l'Europe». Dans l'un et l'autre contextes, le Comité a voulu améliorer la fonction de «vecteurs de communication» qui est celle de ses membres et des organisations qu'ils représentent. Le Comité s'est investi dans la participation à ce que l'on appelle «l'initiative de Wicklow» de 2004, notamment en présentant, à Amsterdam, à la réunion informelle des ministres des Affaires européennes, un document stratégique intitulé «Le projet de Constitution européenne: le CESE comme vecteur de communication» et traitant de la manière dont il conviendrait d'associer plus pleinement au processus de communication la société civile organisée en général et le Comité en particulier.

3.3

Le Comité a accueilli favorablement la demande adressée en novembre 2004 par le Conseil européen à la Commission européenne et visant à l'élaboration d'une stratégie cohérente de communication pour l'Union. Le Comité, en collaboration étroite avec la Commission européenne, organise en ce moment un forum des parties concernées sur le thème du défi de la communication, forum destiné à permettre aux organisations de la société civile de faire apport de leurs idées à la réflexion actuellement en cours, idées que la Commission européenne pourra aussi prendre en considération lors de la rédaction d'un Livre blanc consultatif qui est attendu: ce Livre blanc sera consacré au défi de la communication.

3.4

Le Comité, qui a organisé en avril 2005 un forum de même nature rassemblant les parties concernées pour examiner la question politique du développement durable, est prêt et disposé à organiser de telles opérations de consultation et d'écoute à propos de problèmes politiques importants, de manière à renforcer la voix de la société civile organisée et à aider «Bruxelles» à mieux écouter.

3.5

Dans ce contexte, le Comité souligne le rôle central que joue le Parlement européen (et que le Comité espère le voir continuer à jouer) en tant que premier élément (et élément le plus essentiel) du processus de «mise en communication» démocratique. Le Comité est prêt à agir en tant que partenaire du Parlement européen, comme il l'a fait pendant la Convention, en organisant des auditions et des forums de sa propre initiative ainsi que sur les questions à propos desquelles le Parlement souhaite plus particulièrement consulter la société civile organisée.

3.6

Ces réflexions amènent le Comité à mettre l'accent sur deux considérations fondamentales. Tout d'abord, si le Comité accueille favorablement l'importance croissante accordée aux stratégies de communication et aux outils de communication, il convient néanmoins de rappeler que toute démarche de communication ne vaut que par le contenu du message qu'elle véhicule. Ainsi, la communication est un mécanisme complémentaire, et non une fin en soi. En second lieu, si le Comité s'engage sans réserves vis-à-vis des processus parallèles de mise en place d'une stratégie de communication au niveau européen et d'amélioration des outils de communication, il n'en reste pas moins que l'on se doit de considérer l'activité menée au niveau de l'Union comme complémentaire des activités de communication qui se déploient au sein des États membres. Ainsi, cette stratégie de niveau européen est extrêmement nécessaire, mais elle est loin d'être suffisante.

3.7

Dans ce contexte, il conviendrait de souligner le rôle des institutions représentatives et consultatives au niveau des États membres (notamment des parlements nationaux et des conseils économiques et sociaux), ainsi qu'au niveau régional et local.

4.   Recommandations

Commencer dès maintenant à faire de la démocratie participative une réalité!

4.1

Les motifs et la logique qui ont amené le Comité à voter en faveur du traité constitutionnel à une aussi importante majorité (et plus particulièrement en faveur des dispositions relatives à la vie démocratique de l'Union) demeurent inchangés. Le Comité reste fermement convaincu que la meilleure manière de garantir la vie démocratique de l'Union consiste à fonder ces dispositions dans un système d'organisation constitutionnelle fixe. Toutefois, l'actuelle période d'incertitude ne devrait pas empêcher l'ensemble des intervenants de l'Union européenne de prendre d'ores et déjà des mesures pour commencer à faire de la démocratie participative une réalité. C'est pourquoi il convient que toutes les institutions de l'Union réfléchissent activement à la manière dont elles pourraient:

donner aux citoyens et aux associations représentatives la possibilité de faire connaître et d'échanger publiquement leurs idées dans tous les domaines d'action de l'Union;

maintenir un dialogue ouvert, transparent et régulier avec les associations représentatives et avec la société civile;

procéder à de larges consultations avec les parties concernées afin de faire en sorte que les actions de l'Union soient cohérentes et transparentes.

En outre, il conviendrait que la Commission européenne envisage d'anticiper sur les dispositions de l'article I-47 (4) du traité constitutionnel en consultant la société civile sur le contenu du droit européen définissant les procédures de mise en oeuvre du droit d'initiative des citoyens (le CESE pourrait être saisi d'une demande d'avis exploratoire à ce sujet).

4.2

Pour sa part, le Comité économique et social européen réaffirme sa détermination de jouer un rôle important, même s'il n'est que complémentaire, dans le renforcement du dialogue civil, non seulement par la voie des mécanismes traditionnels de consultation, mais aussi à travers son rôle de passerelle entre l'Europe et la société civile organisée. À cet égard, le Comité attire l'attention sur la nécessité d'une réflexion nouvelle sur les manières d'interagir avec la société civile organisée. Le Comité est prêt et disposé à jouer un rôle de partenaire à part entière dans toutes les activités visant à renforcer le dialogue civil, et il en a aussi la capacité.

Captiver l'imagination de l'opinion publique et faire en sorte que la stratégie de Lisbonne porte ses fruits!

4.3

Les conditions économiques qui règnent en Europe sont un facteur de première importance pour ce qui est de déterminer les réactions de l'opinion publique vis-à-vis du processus d'intégration européenne. Le Comité économique et social européen réaffirme son soutien vis-à-vis de la stratégie de Lisbonne, mais insiste pour que l'Union et ses États membres démontrent qu'ils respectent leurs engagements. Le Comité a la conviction que la stratégie de Lisbonne constitue, par rapport à l'avenir de l'Union, la meilleure garantie possible de prospérité économique et de bien-être social, environnemental et culturel; malgré cela, l'Union a singulièrement échoué lorsqu'il s'est agi de captiver l'imagination de l'opinion publique comme était parvenue à le faire, par exemple, la campagne «1992» pour la création du Marché unique. Il faut que les États membres acceptent et exercent leurs responsabilités à cet égard. Il faut rendre la stratégie de Lisbonne moins abstraite et intégrer ses objectifs (sinon son appellation) dans le langage politique national. Il faut associer la société civile et la société civile organisée.

4.4

Pour sa part, le Comité économique et social européen continuera de travailler dans le cadre du mandat qui lui a été confié par le Conseil européen des 22 et 23 mars, mandat consistant «à établir avec les Comités économiques et sociaux des États membres et d'autres organisations partenaires un réseau interactif d'initiatives de la société civile destiné à promouvoir la mise en oeuvre de la stratégie» (doc. 7619/1/05/rév. 1 Conseil, paragraphe 9).

Combler le fossé — renforcer la communication

4.5

Le Comité a plaidé de manière constante pour la nécessité de renforcer la communication entre l'Union européenne et les citoyens, au nom desquels elle fait profession d'agir. Le Comité reconnaît qu'un travail important a récemment été effectué au niveau des institutions de l'UE, aussi bien dans une dimension individuelle que collective; l'on peut évoquer, pour ne citer que deux exemples récents, la restructuration complète du site Internet du parlement européen et du service «Europe Direct» de la commission européenne. Le Comité est favorable à une étroite coopération interinstitutionnelle dans le domaine de la communication. Il prend note du «Plan D» de la Commission, et aussi de l'intention de celle-ci de publier dans un proche avenir un Livre blanc. Le Comité s'engage sans réserves à jouer un rôle d'appui chaque fois qu'il le pourra lorsqu'il s'agira de combler le fossé, comme le prouve le forum des acteurs concernés qu'il organise sur ce thème les 7 et 8 novembre.

4.6

Toutefois, le Comité est d'avis que la communication ne saurait être meilleur que le message qu'elle véhicule. Renvoyant à ses analyses concernant la stratégie de Lisbonne, le Comité estime que les institutions européennes, mais surtout les États membres, doivent pousser plus avant la réflexion sur la manière de communiquer l'Europe. L'on a déjà beaucoup parlé de la nécessité de mettre fin au jeu du «bouc émissaire», mais il est clair que «l'Europe» est trop souvent perçue dans un sens négatif ou défensif, et que l'on ne fait pas suffisamment d'efforts pour «vendre» les aspects positifs du processus d'intégration.

4.7

Dans le contexte du renforcement de la coordination, le Comité demande que l'on relance l'initiative dite «de Wicklow» (réunions informelles des ministres des affaires européennes), mais que l'on assortisse ce processus d'un mandat précis et permanent qui serait d'examiner les méthodes pouvant permettre de mieux communiquer l'Europe et de fournir aux États membres un contexte informel dans lequel ils pourraient prendre la mesure de l'opinion publique et échanger de bonnes pratiques. Au niveau interinstitutionnel, le Comité demande que l'on confie de même au Groupe interinstitutionnel le mandat de se réunir à des intervalles plus réguliers et plus fréquents pour débattre de questions de communication. Ces mécanismes sont particulièrement importants, compte tenu de la rapidité du rythme des évolutions technologiques (par exemple, les téléphones mobiles, la large bande) ainsi que du développement des nouvelles techniques de communication destinées à en tirer parti.

4.8

Le Comité insiste sur sa conviction que la communication doit être une préoccupation permanente et non pas l'objet d'une campagne occasionnelle consacrée à un problème déterminé.

Reconnaître où se trouve la responsabilité première

4.9

Il faut que les institutions de l'Union européenne se gardent de croire, fût-ce à l'évidence avec les meilleures intentions, que l'actuelle «coupure de communication» est un problème qui peut se résoudre centralement au niveau de «Bruxelles». En réalité, ce que font les institutions européennes en matière de communication ne peut être que complémentaire. C'est ailleurs que se trouve la responsabilité principale. L'issue des élections au Parlement européen et des référendums en France et aux Pays-Bas sur le traité constitutionnel montre clairement que l'Europe suscite le scepticisme de nombre de citoyens, surtout en ce qui concerne les effets de la législation européenne sur leurs conditions de vie et de travail. Il appartient aux États membres d'expliquer à leurs citoyens le sens de l'Union européenne et la nécessité d'une législation européenne spécifique, tout comme ils se doivent de communiquer les effets qui en résultent à chaque sphère nationale pertinente.

4.10

L'opinion publique, y compris la société civile, ne sera convaincue de la légitimité et de la réalité de l'avenir commun de l'Union européenne que si celle-ci suscite une impression de crédibilité et de confiance, qu'elle applique un processus législatif transparent et qu'y règne l'état de droit. C'est en premier lieu aux gouvernements des États membres qu'il appartient de préserver ce type de relation. Il faut que les gouvernements se comportent en véritables copropriétaires de l'Union et s'abstiennent de tomber dans le schéma «eux et nous», ainsi que dans le double discours constant que ce schéma engendre.

4.11

Comme l'a démontré le rôle du forum national irlandais sur l'Europe, la société civile organisée peut parfois apporter des contributions décisives. Il est essentiel de renforcer la communication à un niveau pertinent (local, professionnel, etc.) et d'expliquer en termes appropriés et accessibles à ce niveau en quoi les politiques ou le processus législatif de l'Europe sont une réussite. La société civile organisée est bien placée pour le faire. Ainsi, le CESE et déterminer à soutenir et à encourager la société civile organisée dans les États membres, en particulier à travers la fonction de passerelle à laquelle participent ses membres. De surcroît, si l'on entend, à juste titre, ouvrir un large débat sur le projet européen et sur les politiques européennes, ce débat doit débuter aux niveaux inférieurs de la société civile dans les États membres. Un forum d'ampleur européenne n'a de sens que s'il permet à ce type d'opinions de s'exprimer pour être répercutées vers le haut et aussi vers le bas. De fait, ce qu'il faut en l'occurrence, ce n'est pas tant une démarche «de haut en bas» ou «de bas en haut» qu'une démarche «de bas en bas».

4.12

C'est délibérément que le présent avis évite les longues considérations sur l'avenir du traité constitutionnel et les choix qui s'offrent à l'Union européenne. De toute évidence, le retour permanent au statu quo du traité de Nice ne saurait être un choix envisageable. Mais peut-être le large débat auquel pensent les chefs d'État ou de gouvernement pourrait-il contribuer à éclairer le meilleur chemin à suivre pour progresser. Toutefois, le Comité constate, non sans graves inquiétudes, que ce large débat est dans une grande mesure absent de la réalité de la plupart des États membres. En l'absence d'un tel débat, il est difficile de concevoir comment des progrès pourront se faire jour.

Bruxelles, le 26 octobre 2005.

La Présidente

du Comité économique et social européen

Anne-Marie SIGMUND


(1)  Avis du CESE SOC/203 «Programme d'action citoyenneté active».


3.2.2006   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 28/47


Avis du Comité économique et social européen sur «La mobilité des personnes dans l'Europe élargie et son impact sur les moyens de transport»

(2006/C 28/09)

Le 10 février 2005, le Comité économique et social européen a décidé, en vertu de l'article 29, paragraphe 2 de son règlement intérieur, d'élaborer un avis sur le thème: «La mobilité des personnes dans l'Europe élargie et son impact sur les moyens de transport».

La section spécialisée «Transports, énergie, infrastructures, société de l'information», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 4 octobre 2005 (rapporteur: M. LEVAUX).

Lors de sa 421ème session plénière des 26 et 27 octobre 2005 (séance du 26 octobre 2005), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 74 voix pour et 4 abstentions.

1.   Objet de l'avis d'initiative

1.1

À l'horizon 2020/2030 l'Union Européenne, qui comporte aujourd'hui 25 États membres, sera certainement élargie avec l'adhésion de nouveaux États à commencer par la Roumanie, la Turquie, la Bulgarie, la Croatie etc. Sans préjuger d'éventuelles adhésions supplémentaires, il est probable qu'en termes de coopération et d'échanges, les limites d'influence de proximité de l'UE s'étendront aux États périphériques comme l'Ukraine, la Géorgie et la Russie.

1.2

Dans ce vaste espace territorial à la dimension d'un continent, qui s'inscrira dans un rectangle de 6 000 km d'Est en Ouest et de 4 000 km du Nord au Sud, de nouveaux besoins se feront sentir concernant le transport des personnes pour permettre la libre circulation en application des principes de liberté, pour développer une forme de démocratie européenne qui suppose les échanges culturels et pour favoriser le développement économique.

1.3

C'est en référence à l'objectif fixé lors du Sommet de Lisbonne en l'an 2000 que doit s'envisager le développement des moyens de transport correspondant aux besoins de mobilités probables dans les 2 ou 3 prochaines décennies:

«L'Europe doit devenir l'économie de la connaissance la plus compétitive et la plus dynamique du monde, capable d'une croissance économique durable accompagnée d'une amélioration quantitative et qualitative de l'emploi et d'une plus grande cohésion sociale».

1.4

Ainsi l'ensemble des propositions visant à développer les moyens de transport des personnes, collectifs et individuels, devra tenir compte:

des plus récentes études prospectives concernant les besoins quantitatifs et qualitatifs de déplacement des personnes à l'horizon 2020/2030,

du comportement plus réactif des citoyens européens, stimulés par les objectifs de compétitivité préconisés par l'Union Européenne en ce début du 21e siècle,

du changement de comportement des citoyens européens plus respectueux de l'environnement,

des besoins d'échanges dans les domaines de la culture, des patrimoines (artistiques, architecturaux, etc.), de l'éducation, de la connaissance scientifique,

d'une population européenne plus cosmopolite, sur un territoire dont la surface aura plus que doublé,

de l'apparition et de l'extension de nouvelles technologies, permettant d'envisager de nouveaux moyens de déplacements (pour autant que les réglementations, les crédits de recherche et les modes de financements des investissements nécessaires à leur émergence et à leur réalisation soient rapidement décidés),

d'une augmentation des échanges et du tourisme en provenance de l'extérieur de l'Europe, en particulier du Sud-est asiatique, de la Chine et de l'Inde.

1.5

Toutes réflexion et mesures relatives au développement des moyens de transport des personnes devront, dans un souci d'inclusion et d'égalité des chances, tenir compte des passagers à mobilité réduite (PMR), telles que les personnes handicapées, âgées et les très jeunes enfants. Pour assurer aux PMR une mobilité indépendante et sans entraves, il conviendra de mettre en place des dispositions réglementaires, garantissant que les futurs moyens de transport et infrastructures connexes leur seront accessibles, comme dans les transports aériens pour lesquels la Commission propose un règlement précisant les droits des PMR (1).

1.6

Le Comité constate que depuis plusieurs décennies l'Union Européenne s'est activement préoccupée du transport des marchandises et a multiplié les initiatives pour augmenter les capacités de transport de fret afin de favoriser les échanges européens, et donc le développement économique. Les réalisations d'infrastructures de transport se sont ainsi multipliées principalement dans le domaine des infrastructures routières, plus rarement dans le domaine ferroviaire et exceptionnellement dans le domaine fluvial.

1.7

Fin 2005, la Commission va présenter une communication sur les résultats obtenus à mi-parcours des propositions faites dans le Livre Blanc sur «La politique européenne des transports Horizon 2010: l'heure des choix». Il sera alors possible de vérifier l'évolution de la place des usagers au cœur de la politique des transports et de vérifier si la prise en compte du développement durable s'est traduite par un réel transfert de l'augmentation du transport de fret vers des modes de transport alternatif à la route (rail, voies navigables et maritimes …). Le Comité, sur la base de ce bilan et le moment venu, présentera dans les formes habituelles un avis approprié qu'il ne convient pas d'anticiper ici.

1.8

En attendant ce bilan, le Comité constate que si, en nombre total de passagers-km dans l'Ouest de l'Europe, des projections de l'Union Internationale des Chemins de fer existent pour 2010/2020 (2), il manque une réflexion globale concernant le transport des personnes. Depuis plusieurs décennies, il semble admis qu'en satisfaisant les exigences et les besoins concernant le transport de fret, on apportera des solutions suffisantes au transport des personnes. Ce constat est une évidence pour le développement des infrastructures routières qui sont utilisées indifféremment pour le transport de fret et pour les déplacements individuels ou collectifs des personnes (automobile, autocar). Les routes ont eu de tout temps cette double vocation. Aujourd'hui le développement du trafic rend la coexistence du transport de fret et des déplacements des personnes difficile, voire dangereuse, sur de nombreux axes routiers. Ce besoin prioritaire en faveur du seul transport de fret a eu pour effet de privilégier les infrastructures routières, utilisables à la fois par le fret et les personnes, au détriment des autres modes de transport.

1.9

Le Comité estime que cet état de fait:

est éloigné de la priorité fixée par le Livre blanc qui place l'usager au cœur de la politique des transports,

est difficilement compatible avec la volonté réaffirmée de prise en compte des principes du Développement durable,

est peu favorable au regard de la nécessaire recherche de cohésion européenne qui passe par la facilitation des échanges de toute nature, donc de la mobilité des personnes,

ne tient pas compte du bénéfice que l'Union Européenne peut recevoir grâce au développement du tourisme international en provenance de la Chine et de l'Inde qui, à l'horizon 2030, devraient atteindre un niveau de vie suffisant pour permettre à plusieurs centaines de millions de leurs ressortissants de voyager chaque année dans le monde.

1.10

Dans ces conditions, le Comité, dont la vocation n'est pas d'engager des études, demande que la Commission engage rapidement une réflexion globale pour:

évaluer à l'horizon 2020/2030 l'importance des déplacements des personnes au sein de l'UE et de sa zone d'influence de proximité,

estimer à l'horizon 2020/2030 l'importance des mouvements des Européens qui sortiront de l'espace européen pour des destinations internationales et l'importance des étrangers à l'UE qui entreront et circuleront dans l'espace européen pour affaire, pour tourisme ou pour d'autres raisons,

vérifier à partir de ces évaluations prospectives que les capacités existantes ou actuellement planifiées dans les différents programmes sont compatibles pour satisfaire les besoins exprimés en matière de transport des personnes à l'horizon de 2020/2030,

proposer, dans un nouveau Livre blanc 2010 dédié à la politique des transports, une place plus importante sur «le déplacement des personnes dans l'Europe élargie et son impact sur les moyens de transport à l'horizon 2020/2030», avec un programme d'action en cohérence avec les ambitions et les intérêts de l'UE et de ses citoyens.

2.   Orientations et champ d'investigation d'une réflexion globale dédiée au déplacement ou à la mobilité des personnes

2.1   Les nouvelles dimensions de l'Espace européen: distance et temps

2.1.1

Le Comité souhaite que la Commission intervienne pour que les décideurs et les citoyens européens prennent conscience des dimensions géographiques de l'espace européen tel qu'il est aujourd'hui et tel qu'il sera dans un avenir proche. En effet en une génération, l'UE qui comporte actuellement 25 États membres, aura à l'horizon 2020/2030 sans doute accueilli de nouveaux États, élargi sa zone d'influence du fait de la proximité (ou compte tenu de coopération avec des États voisins) pour couvrir tout le continent européen au sein duquel les problèmes de transport de personnes, comme d'ailleurs de fret, doivent s'envisager à une échelle différente.

2.1.2

A ce jour trop peu d'Européens ont conscience que l'UE, et sa zone d'influence, couvrira un territoire qui s'étend d'Est en Ouest de l'Océan Atlantique au cœur de la Russie par la Mer Noire et la Volga ou par la Mer Baltique, et du Nord au Sud jusqu'au bord de la Méditerranée et, donc, du continent africain.

2.1.3

Dans ce nouvel espace, les distances et les durées nécessaires aux déplacements ne peuvent plus s'envisager comme un prolongement ou dans une simple continuité de la situation que nous avons connue précédemment, compte tenu des limites technologiques et des vitesses prévisibles à moyen terme.

2.1.4

De même la mondialisation et l'élévation recherchée et probable des niveaux de vie de certains pays à forte population favoriseront l'émergence de besoins quantitatifs en déplacement de centaines de millions de personnes vivant à l'extérieur de l'UE et qui, chaque année, auront le désir ou la nécessité d'entrer dans l'espace européen pour y circuler à l'occasion de déplacements successifs de durée relativement courte. Le Comité estime en conséquence que la prise en compte des nouvelles dimensions de l'Europe doit se faire tant au niveau des distances (au sein de l'espace européen lui-même, de sa zone d'influence de proximité, et de ses relations internationales), qu'au niveau du temps (durée des déplacements, vitesse des moyens de transport, optimisation du temps consacré aux déplacements selon les souhaits et les contraintes des utilisateurs).

2.2   Les champs possibles d'une réflexion globale dédiée à la mobilité des personnes

2.2.1

Les principales raisons qui justifient le besoin de déplacement des personnes:

 

La libre circulation des personnes et des biens est un principe fondamental au cœur de la construction européenne. Le Comité estime qu'il faut en permanence vérifier que ce principe est convenablement appliqué, notamment aujourd'hui avec le double effet de l'élargissement et de la mondialisation. Le respect de ce principe constitue un enjeu majeur pour la démocratie et la cohésion européennes.

 

La libre circulation des personnes implique de fixer des règles (juridiques, judiciaires, protection contre le terrorisme, transport des personnes à mobilité réduite, etc.). Ce n'est pas l'objet du présent avis d'initiative consacré aux moyens et aux équipements qu'il convient de réunir pour satisfaire ce principe de libre circulation de personnes donc de leur mobilité.

 

Identifier les raisons pour lesquelles les personnes souhaitent ou doivent se déplacer est un préalable indispensable car en fonction de ces raisons et de leurs importances qualitatives et quantitatives respectives, les moyens à mettre en œuvre seront différents.

2.2.2

Le Comité suggère, sans être exhaustif, d'explorer les raisons suivantes:

déplacements pour affaires (échanges commerciaux, professionnels …);

déplacements liés à la formation et aux échanges de savoirs (étudiants, colloques, coopération en matière de recherche …);

déplacements pour raisons professionnelles (emploi avec détachement, exercice d'un métier, ...);

déplacements pour découvertes et échanges (tourisme, culture, patrimoine …);

etc.

2.2.3

Le Comité suggère que la réflexion globale dont il demande l'ouverture se limite à des déplacements qui génèrent des flux répétitifs ou continus d'une certaine ampleur.

2.2.4   Deux façons de se déplacer

Il conviendra de prendre en compte les façons dont les personnes souhaitent se déplacer car elles déterminent pour partie les moyens qui seront utilisés.

On peut distinguer deux grandes catégories:

Le déplacement individuel ou en très petits groupes (quelques personnes, couple, famille, …)

Nota: On pourrait, par exemple, retenir pour la dimension d'un petit groupe le nombre de passagers autorisés par les codes de la route à circuler dans un véhicule conduit par un particulier.

Le déplacement en groupe d'importance diverse (professionnels, touristes, retraités, vacanciers, etc.).

2.2.5   Les distances parcourues

Le Comité souhaite limiter le champ de la réflexion globale en précisant que la limitation de ce champ nécessite en elle-même une réflexion particulière. En effet il est à priori évident que, selon les distances à parcourir, les moyens qui peuvent être utilisés seront multiples, différents, complémentaires et coordonnés. De même les temps que les usagers souhaitent consacrer aux déplacements sont fonction des distances à parcourir, des moyens utilisés ou des raisons pour lesquelles ils se déplacent. De même s'agissant de définir les moyens à mettre œuvre il faut tenir compte des structures qui en auront la responsabilité (État, collectivités locales, communes…).

2.2.6

C'est la raison pour laquelle le Comité propose de distinguer les distances de:

0 à 100 km: exclu du champ de la réflexion globale à engager car il s'agit de déplacements urbains ou périurbains, qui relèvent de l'organisation des villes ou des groupements de villes, donc d'un sujet particulier à traiter séparément. Les difficultés rencontrées partout en Europe pour développer en matière de transports urbains des offres de services adaptées et cohérentes (sécurité, confort, respect de l'environnement, pollution, qualité et continuité du service…) imposent la mise en commun des expériences pour en tirer le meilleur profit pour les usagers;

100 à 250 km: avec des déplacements allers-retours journaliers de plus en plus fréquents, inclus pour les frontaliers. Par exemple pour des trajets «domicile-lieu de travail» grâce à des moyens de transport rapides et peu coûteux permettant à ceux qui résident loin des grands centres urbains de se rendre quotidiennement sur leur lieu de travail;

250 à 750 km: distances pour lesquelles il convient d'examiner les conditions dans lesquelles peut s'exprimer une concurrence entre la route (véhicules privés ou cars) et le ferroviaire (classique ou grande vitesse);

750 à 1.500 km: distances pour lesquelles il convient d'examiner les conditions dans lesquelles peut s'exprimer une concurrence entre le ferroviaire (grande vitesse) et l'aérien;

Supérieures à 1.500 km: distances à l'échelle du continent européen pour lesquelles plus que pour des distances inférieures la contrainte temps est prioritaire et rend incontournable le redéploiement du transport aérien.

2.2.7

Enfin dans ce chapitre consacré aux distances, il conviendra d'intégrer les déplacements internationaux ou transcontinentaux pour prendre en compte les flux entrants et sortants de l'espace européen.

2.2.8

Le Comité souhaite évidemment que la réflexion globale qu'il demande porte sur les moyens de transport et les infrastructures utilisables pour les déplacements des personnes. Dans ce domaine, il faut non seulement identifier, évaluer et optimiser les moyens existants qui sont déjà largement connus, mais il faut aussi explorer sans à priori des voies nouvelles susceptibles d'intégrer rapidement les techniques et des technologies qui apparaîtront dans ce domaine au cours des prochaines décennies. Cela suppose à la fois que la Commission fasse des propositions pour favoriser, organiser et coordonner des programmes de recherche sur l'évolution des moyens de transport et anticiper les besoins du futur tout en permettant d'intégrer les opportunités.

2.2.9

Les moyens de transport actuels pour les personnes pourraient, dans le cadre de cette réflexion globale, être répertoriés comme suit:

Le transport routier: les déplacements se font en véhicules privés et en cars. Rien ne permet aujourd'hui d'anticiper une remise en cause de ces modes de transport (bien au contraire) qui devront bénéficier des avancées technologiques en matière de moteurs et de carburants moins polluants. Deux attitudes sont possibles:

Laisser faire, attendre et constater les évolutions en espérant pouvoir corriger les effets les plus néfastes,

Définir les axes d'une politique volontariste par exemple en préparant les réseaux de maintenance et d'alimentation des futurs véhicules utilisant des nouveaux carburants, en créant et en entretenant des infrastructures uniquement dédiées à certains véhicules et usagers de la route, en reprenant les recherches sur les autoroutes intelligentes les dispositifs d'assistance et de prise en charge de la conduite sur de longues distances.

Le transport ferroviaire: semble aujourd'hui privilégier le transport à grande vitesse en occultant parfois malheureusement l'insuffisance du réseau traditionnel.

Le transport aérien, compte tenu des conditions nouvelles dans lesquelles évolue l'UE, est un moyen incontournable à la fois sur les grandes distances et pour les échanges internationaux. Face aux évolutions constatées et au programme de commercialisation rapide de l'Airbus A 380, très rapidement les infrastructures aéroportuaires européennes (incluses les liaisons avec les centres urbains à desservir) doivent être aménagées pour recevoir ces avions «gros-porteurs» et absorber les augmentations de trafic qu'ils anticipent.

Le transport par voies maritimes en mer du Nord, en mer Baltique ou en Méditerranée, assure localement et régulièrement le transport des personnes sur des distances plus ou moins grandes. Ce mode de transport peut notamment sur les lignes des «autoroutes de la mer» être développé et compléter d'autres modes de transport.

Le transport par voies navigables est considéré aujourd'hui comme marginal, sauf dans quelques capitales construites sur un fleuve, où les personnes se rendent à leur travail ou font du tourisme (croisière fluviale ou «bateaux-bus»). Il doit pouvoir être envisagé dans le domaine des «possibles» et non systématiquement rejeté (desserte de l'aéroport de Venise, etc.).

2.3   L'évaluation des besoins de déplacement des personnes à l'horizon 2020/2030.

2.3.1

Le Comité en recherchant des données chiffrées sur les prévisions disponibles en matière de déplacements des personnes dans les prochaines décennies a fait le constat d'une réelle insuffisance dans ce domaine. Les constats réalisés sur le passé sont relativement nombreux, mais ils ne permettent pas de faire des projections suffisamment fiables sur l'avenir. Ils ne prennent en compte ni les évolutions récentes comme l'élargissement de l'UE à 25 États membres, ni les perspectives à moyen terme des nouvelles adhésions envisagées, ni les évolutions au sein des pays situés dans la zone d'influence de proximité de l'UE.

2.3.2

Le CESE n'a pas eu connaissance d'enquête disponible sur les conséquences et l'impact potentiel pour l'UE de l'évolution des niveaux de vie dans des pays émergents permettant de faire circuler plusieurs centaines de millions de leurs ressortissants à l'extérieur de leurs frontières chaque année et, dès 2020 pour la Chine et probablement 2030 pour l'Inde (prévisions convergentes émanant de sources distinctes). Le chiffre avancé et souvent repris de 100 millions de Chinois pouvant chaque année voyager en touristes hors de leurs frontières en 2020 paraît aujourd'hui irréaliste. Cela ne représente cependant que 8 % de la population chinoise. Un pourcentage inférieur à celui des Japonais voyageant actuellement hors de leurs frontières (environ 12 millions de personnes). Une étude récente affirme que dès aujourd'hui 4 % de la population chinoise dispose en moyenne du même niveau de vie que la moyenne des Européens. 4 % c'est peu, mais à l'échelle de la Chine cela représente plus de 50 millions de personnes !

2.3.3

Par comparaison, en supposant que seulement 50 millions de Chinois choisissent de venir en Europe et adoptent un comportement touristique les conduisant à utiliser l'avion pour visiter plusieurs pays de l'UE pour des séjours relativement courts (une dizaine de jours en moyenne), le Comité souhaite que l'UE s'interroge sur l'évolution nécessaire des capacités, après vérification des hypothèses prévisionnelles. Il incite les États à se doter de moyens adaptés pour bénéficier de l'apport économique qu'une telle évolution du tourisme peut lui apporter. A défaut, le besoin de mobilité ayant atteint les Chinois et les Indiens, ceux-ci iront, le moment venu, là où on sera en mesure de les accueillir.

2.3.4

Le Comité à pris connaissance avec intérêt du dossier publié par la Commission intitulé: «European energy and transport: Scenario on key drivers», en septembre 2004. Ce document, auquel il convient de se référer, fourni les résultats d'une enquête prospective dans de nombreux domaines en visant trois horizons: 2010/2020/2030. L'objectif est principalement tourné vers les besoins énergétiques et les possibilités d'utilisation d'énergies moins polluantes et/ou renouvelables. Le chapitre VI est consacré dans cette perspective au transport et permet certaines projections qu'il conviendrait de pouvoir recomposer pour extraire et isoler les données propres au transport des personnes actuellement présentées en parallèle avec le transport de fret qui conserve une position dominante dans ces statistiques.

2.3.5

L'annexe de ce rapport (3) fournit quelques indications sur les évolutions envisagées.

On notera que ces projections sont établies pour 30 pays (les 25 États membres auxquels la Commission a ajouté la Roumanie, la Bulgarie, la Suisse, la Norvège et la Turquie). Globalement l'activité transport de personnes croît dans ces 30 pays sur une période de 40 ans. (Gpkm = Gigapassenger-kilomètre)

4.196 Gpkm en 1990 à 5.021 en 2000 (+ 20 % en 10 ans)

5.817 Gpkm en 2010 (+ 16 % en 10 ans)

6.700 Gpkm en 2020 (+ 15 % en 10 ans)

7.540 Gpkm en 2030 (seulement 12,5 % en 10 ans)

2.3.6

Le Comité note que, de façon intéressante, les prévisions de croissance pour les décennies à venir sont inférieures à la croissance constatée pour la période 1990/2000. Cela laisserait supposer que la mobilité des personnes n'est plus un critère de vitalité économique.

2.3.7

On remarquera que le transport des personnes par la route en véhicules privés augmentera de 45 % sur la période 2000/2030 et le transport ferroviaire seulement de 30 %. Le transport aérien dans le même temps augmentera de 300 %. Le Comité n'est pas en mesure d'apprécier la cohérence de ces prévisions, mais il note qu'elles doivent faire l'objet d'un examen approfondi pour avoir une vision globale de la situation à moyen et long terme.

2.3.8

Le Comité demande donc qu'une enquête prospective complète et spécifique soit lancée par la Commission pour apprécier aussi complètement que possible les besoins quantitatifs et qualitatifs pour faire face aux besoins de déplacements des personnes aux horizons 2020 et 2030.

2.3.9

Cette enquête devrait porter non seulement sur les 30 pays définis par la Commission elle-même dans le document précité mais encore sur les pays situés dans la zone d'influence et de proximité de l'UE (Croatie, Albanie, Ukraine Russie, Afrique du Nord…) qui dans les 25 ans qui viennent auront, quelque que soient les modalités, des relations renforcées avec l'UE.

2.3.10

L'enquête devrait aussi permettre d'évaluer l'impact des déplacements internationaux notamment ceux du tourisme en provenance des pays émergents (Chine, Inde, …) pour les mouvements d'entrées et de sorties de l'espace européen et les déplacements à l'intérieur de cet espace.

3.   Propositions et conclusions

Le CESE:

3.1

Considère que la mobilité des personnes dans l'Europe élargie doit être impérativement assurée pour renforcer la démocratie et contribuer à la cohésion de l'UE.

3.2

Constate qu'il existe peu d'études prospectives sur la mobilité des personnes à l'horizon 2030, permettant d'évaluer les impacts sur le volume des moyens de transport nécessaires et les infrastructures correspondantes.

3.3

Souligne que toute réalisation d'infrastructures d'envergure à l'échelle du Continent européen nécessite de très longs délais (de l'ordre de deux décennies) avant sa mise en service.

3.4

Estime, sur la base des informations disponibles qui montrent une forte évolution prévisible des besoins de déplacements des personnes, que la Commission devrait engager des études et, ensuite, une réflexion globale et spécifique sur ce sujet, parallèlement aux études et réflexions sur le développement du transport des marchandises.

3.5

Propose que ces réflexions puissent faire l'objet, en 2010, d'un nouveau «Livre blanc: Politique des transports» avec une place plus importante qu'en 2001 pour satisfaire les besoins de transports de personnes à l'horizon 2020/2030. Les critères ci-dessous pourraient y figurer:

raisons principales justifiant le déplacement de la personne,

façons de se déplacer (groupe ou individuel),

classement par distances parcourues,

modes de transport utilisés par les personnes qualités d'accessibilité, de sûreté, de sécurité, etc.

3.6

Suggère à la Commission de mettre en place, avec les États concernés, les moyens nécessaires pour assurer la mobilité des personnes, dans des conditions optimales et conformes aux principes du développement durable, en prenant en compte notamment:

les difficultés et contraintes des personnes handicapées ou âgées, ou des jeunes enfants, en coopération avec les organisations représentant les personnes à mobilité réduite;

les financements nécessaires en termes de recherche et développement de techniques et technologies nouvelles adaptées aux moyens de transport des personnes;

Les dispositions législatives, réglementaires et financières pour permettre aux États de réaliser les projets d'équipement répondant aux besoins.

3.7

Souligne pour terminer que l'Europe Unie doit veiller à ce que les États offrent un service équilibré en matière de transport, tant pour le fret que pour les personnes, et souhaite être informé de l'engagement de cette réflexion globale, y être associé et être consulté sur les conclusions.

Bruxelles, le 26 octobre 2005.

La Présidente

du Comité économique et social européen

Anne-Marie SIGMUND


(1)  Avis du CESE sur la «Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil concernant les droits des personnes à mobilité réduite lorsqu'elles font des voyages aériens».

(2)  Voir annexe 1.

(3)  Voir annexe 2.


3.2.2006   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 28/52


Avis du Comité économique et social européen sur les

«Proposition de règlement du Conseil portant organisation commune des marchés dans le secteur du sucre»

«Proposition de règlement du Conseil modifiant le règlement (CE) no 1782/2003 établissant des règles communes pour les régimes de soutien direct dans le cadre de la politique agricole commune et établissant certains régimes de soutien en faveur des agriculteurs»

«Proposition de règlement du Conseil instituant un régime temporaire de restructuration de l'industrie sucrière dans la Communauté européenne et modifiant le règlement (CE) no 258/1999 relatif au financement de la politique agricole commune»

[COM(2005) 263 final — 2005/0118-0119-0120 CNS]

(2006/C 28/10)

Le 25 juillet 2005, le Conseil a décidé, conformément aux articles 36 et 37 du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur les propositions susmentionnées.

La section spécialisée «Agriculture, développement rural, environnement», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 7 octobre 2005 (rapporteur: M. BASTIAN).

Lors de sa 421ème session plénière des 26 et 27 octobre 2005 (séance du 26 octobre 2005), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 103 voix pour, 22 voix contre et 18 abstentions.

1.   Introduction

1.1

Vingt et un pays de l'Union européenne produisent du sucre de betterave. Les départements d'outre-mer français et l'Espagne, dans une faible proportion, produisent du sucre de canne (280 000 tonnes). Au total, la production sucrière européenne fluctue selon les années entre 17 et 20 millions de tonnes pour une consommation européenne de sucre estimée à 16 millions de tonnes.

1.2

La betterave qui intervient dans la rotation des cultures, est cultivée sur 2,2 millions d'hectares par 320 000 agriculteurs (un peu moins de 7 ha de betterave en moyenne par betteravier). La betterave est transformée dans 236 sucreries employant directement près de 75 000 salariés, permanents et saisonniers. Le secteur betterave/sucre européen représente au total 500 000 emplois directs ou indirects.

1.3

On compte également dans l'Union européenne une production de 500 000 tonnes d'isoglucose et de 250 000 tonnes de sirop d'inuline, ainsi qu'une industrie de raffinage de sucre brut de canne (dont la majeure partie — 1,6 million de tonnes — est importée des pays ACP (1)).

1.4

Dans le secteur du sucre, de l'isoglucose et du sirop d'inuline, la dernière reconduction du régime des quotas date de 2001.

1.5

La Commission a présenté le 14 juillet 2004 une communication sur la réforme du secteur sucre (2), sur laquelle le CESE a adopté un avis le 15.12.2004 (3).

1.6

La Commission a présenté le 22 juin 2005 trois propositions législatives (4) qui font l'objet du présent avis.

Parallèlement la Commission a présenté une proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil établissant des mesures d'accompagnement en faveur des pays signataires du Protocole sur le Sucre touchés par la réforme du régime de l'Union européenne dans le secteur du sucre (5).

1.7

La proposition législative de la Commission se distingue de la communication du 14 juillet 2004 par:

une durée qui court jusqu'à la campagne 2014/2015 incluse;

un prix minimum de la betterave t abaissé de 42,6 % en deux campagnes (à 25,05 €/T.) avec une éventuelle baisse supplémentaire de 10 % par accord interprofessionnel;

un prix de référence du sucre abaissé de 39 % en 4 campagnes (à 385,5 €/T.), le prix de référence net l'étant en deux campagnes (la différence est la cotisation à payer au fonds de restructuration);

une cotisation à la production de 12 €/T. de sucre du quota, à partager à égalité entre planteurs et fabricants;

des quotas A et B fusionnés en un seul quota, un contingent supplémentaire de 1 million de tonnes étant réparti entre les États membres producteurs de sucre C, contre le paiement d'un montant de 730 €/T. de quota supplémentaire;

un régime de restructuration de quatre ans suivi d'une éventuelle réduction linéaire de quota;

des quotas isoglucose augmentés de 100 000 tonnes par an pendant trois ans;

des dispositions de gestion du marché constituées par le report du sucre hors quota, le retrait éventuel du sucre du quota excédant les besoins du marché et une aide éventuelle au stockage privé lorsque le prix de marché tombe en dessous du prix de référence;

la possibilité pour le secteur de la chimie et de la pharmacie de s'approvisionner aussi en sucre hors quota, comme le secteur des levures et de l'alcool, et en cas de difficulté d'approvisionnement d'obtenir un contingent tarifaire spécifique;

jusqu'à 2009/2010 une garantie d'approvisionnement des raffineries à hauteur de leurs besoins traditionnels;

la proposition ne limite pas l'importation des sucres des PMA à compter de 2009/2010;

en matière d'exportations, la proposition interdit l'exportation de sucre hors quota et n'envisage pas l'exportation de sucre du quota sans restitution;

la transférabilité des quotas au niveau européen est abandonnée par la Commission ainsi que la réduction linéaire des quotas de 2 800 000 tonnes en quatre ans. Un plan de restructuration est mis en place. Il est alimenté par une cotisation sur les quotas sucre, isoglucose et inuline. Plus de 50 % des cotisations sur les quotas sucre sont financés par les agriculteurs à travers la baisse du prix de la betterave;

le fonds de restructuration octroie aux fabricants de sucre, d'isoglucose et d'inuline qui abandonnent leur quota, arrêtent de produire et démantèlent leur installation une aide variable dégressive selon l'année d'arrêt;

la Commission prévoit que le fonds de restructuration pourrait concerner jusqu'à 6,160 millions de tonnes de quota pour un budget total de 4,2 milliards d'euros;

l'aide compensatoire égale à 60 % de la perte de recette résultant de la baisse du prix de la betterave est attribuée aux planteurs de betteraves et de chicorée de manière découplée et en respectant des montants par hectare destiné à la production A et B et un plafond par État membre.

le choix de la période de référence à utiliser pour effectuer la répartition est laissé à l'État membre;

le montant de l'enveloppe financière destinée à l'aide directe au revenu des agriculteurs est de 907 millions d'euros en 2006/2007 et de 1 542 millions d'euros à partir de 2007/2008.

2.   Remarques générales

2.1

Le CESE estime qu'une réforme de l'OCM Sucre est nécessaire. Il rappelle à cet égard son avis du 15.12.2004 (6) et, plus particulièrement, les points 2.1, 2.4, 2.6, 2.7, 2.8, 2.9, 2.10.

2.2

Le CESE constate cependant que la proposition de réforme va beaucoup plus loin que ce qui était annoncé dans la Communication du 14 juillet 2004. Les baisses de prix et de production sont beaucoup plus élevées, et les exportations sont rapidement supprimées. La proposition est donc un mauvais signal donné à nos concurrents dans les négociations à l'OMC. En outre, elle ne défend pas l'objectif d'une production sucrière européenne capable de garantir l'approvisionnement du marché, notamment dans les régions où la reconversion est difficile.

2.3

Le CESE s'inquiète de l'effet des baisses de prix et de production proposées sur les revenus agricoles et sur l'emploi. Il souligne à cet égard le rôle important de la filière sucrière dans l'économie de nombreuses régions. Le CESE estime que la proposition ne respecte pas le modèle agricole européen, la volonté maintes fois répétée par le CONSEIL de soutenir la production agricole traditionnelle également dans les régions ou États membres moins favorisés, la multifonctionnalité, la durabilité et la stratégie de Lisbonne. Les propositions de réforme conduisent en effet à la perte de 150 000 emplois directs ou indirects.

2.4

Le CESE ne croit pas que l'option de réforme choisie par la Commission qui consiste à rechercher l'équilibre du marché par la baisse des prix puisse atteindre son but, maintenir à long terme une culture betteravière et une industrie sucrière européennes solides et respecter les pays en développement fournisseurs de sucres préférentiels. Le CESE estime qu'il convient de tout faire pour éviter que, via le SWAP (commerce triangulaire) de sucre, qui est sans aucun profit pour le développement des PMA, de nouvelles parts de marché mondial soient ouvertes, notamment au Brésil. Dans ce contexte, le Comité souligne que la production de sucre au Brésil, largement soutenue par la politique du bioéthanol et la politique monétaire, se réalise dans des conditions sociales, environnementales et de propriété foncière qui ne sont pas acceptables mais qui expliquent les coûts de production brésiliens extrêmement bas, l'augmentation de la production ces dernières années et donc du stock sur le marché mondial, et en conséquence la faiblesse des prix sur ce marché. Le CESE estime que l'accès au marché communautaire devrait être soumis au respect de certaines normes sociales, telles que celles qui figurent dans la déclaration de la conférence de l'Organisation internationale du travail de 1998.

2.5

Le CESE (7)«estime que les baisses de prix proposées sont un pas important en direction de la libéralisation complète du marché du sucre. Ceci ne peut donc offrir de perspectives durables aux planteurs de betteraves, salariés du secteur sucre et consommateurs des pays européens».

2.6

Le CESE (8)«ne comprend pas que la Commission n'ait pas retenu l'idée de négocier des quotas d'importation préférentielle avec les PMA comme ceux-ci le demandent d'ailleurs. Ceci permettrait de satisfaire, d'une façon plus ciblée, les intérêts des pays en développement les plus pauvres, et de parvenir à un approvisionnement équilibré du marché et à un niveau de prix soutenable en Europe. Le CESE attire l'attention sur la contradiction fondamentale dans laquelle se trouve la Commission qui, d'un côté justifie la réforme radicale de l'OCM Sucre par l'initiative» Tout Sauf les Armes «et d'un autre côté refuse de donner suite au souhait explicitement exprimé par les PMA d'obtenir un système de quotas préférentiels».

2.7

Le CESE (9) ne croit pas que la baisse significative des prix du sucre bénéficiera aux consommateurs. 70 % du sucre est consommé à travers des produits élaborés, qui peuvent très difficilement faire l'objet de baisses de prix qui se répercuteraient sur le prix à la consommation. Il faut ajouter à cela que dans les pays ayant connu une libéralisation de leur marché du sucre, aucune baisse des prix à la consommation ne s'est produite.

2.8

Le CESE ne comprend pas pourquoi la Commission propose d'abandonner rapidement les exportations de sucre en l'état. L'Union européenne, même si elle a perdu devant le panel à l'OMC, dispose encore du droit d'exporter 1 273 000 tonnes de sucre en l'état avec subvention, qu'il s'agisse de sucre du quota avec restitution ou de sucre hors quota sans restitution. La culture betteravière connaît par ailleurs une certaine variabilité des rendements et le marché sera soumis à la variabilité des importations. Il est donc souhaitable de disposer, grâce à l'exportation, d'une certaine flexibilité pour gérer la variation des disponibilités de sucre du quota ou hors quota. Cette souplesse est nécessaire pour assurer la durabilité de la production et un emploi rationnel des salariés et des équipements.

2.9

Le CESE appuie la proposition de la Commission relative au plan de restructuration volontaire qui améliore sensiblement les conditions de réalisation de la restructuration. Il souhaite cependant que ce plan soit complété pour tenir compte des intérêts des planteurs de betteraves et des salariés de l'industrie sucrière.

2.10

Le CESE (10) estime globalement que la Commission n'a pas bien mesuré l'impact de sa proposition qui conduit à un transfert massif de ressources du secteur rural (agricole et de première transformation) d'Europe et des pays en développement vers les grandes sociétés internationales de l'alimentation et de la distribution et qui, dans le même temps, démantèle une part considérable de l'industrie sucrière européenne et des pays ACP au profit presque exclusif de la production sucrière brésilienne (11).

3.   Remarques particulières

3.1

Le CESE se félicite de ce que, comme il l'avait demandé, la Commission propose un règlement pour la période du 1.7.2006 au 30.9.2015.

3.2

Le CESE estime que les baisses de prix proposées sont exagérées et qu'elles n'auront de plus aucun effet sur les importations de sucre réalisées à travers des opérations de commerce triangulaire (Marché mondial, PMA, E.U.) et dont le montant variera en fonction des fluctuations du prix mondial et des taux de change. Le CESE demande donc que les baisses de prix soient limitées à ce qui est nécessaire, compte tenu des négociations à l'OMC, et qu'elles soient étalées dans le temps, comme le seront les baisses de tarif, notamment afin de donner aux nouveaux États membres le temps qui leur est nécessaire pour s'adapter.

Le CESE demande par ailleurs au Conseil d'être particulièrement attentif aux problèmes des agriculteurs des régions difficiles ou de celles qui offrent peu d'alternatives rentables à la culture betteravière.

3.3

Le CESE s'étonne que la proposition prévoie une taxe à la production à la charge des planteurs et des fabricants, alors que le niveau des quotas sera manifestement inférieur à la consommation et que la logique de la Commission est une logique de compétition de la production européenne avec les sucres importés. La taxe est à cet égard discriminatoire pour les planteurs et les fabricants de sucre communautaires. Le CESE en demande donc la suppression ou à défaut l'extension à tous les sucres importés.

3.4

Le CESE estime qu'il est impossible d'avoir une OCM Sucre efficace sans possibilité de contrôler d'une manière ou d'une autre les importations. Il recommande donc l'inclusion de dispositions interdisant le SWAP de sucre avec les Pays les Moins Avancés et, en cas de décision de la Commission de retirer du marché un tonnage de sucre du quota (procédure de retrait) ou en cas d'application d'une mesure d'aide au stockage privé (prix de marché inférieur au prix de référence), l'application automatique d'une clause de sauvegarde quantitative à l'égard des importations des PMA.

3.5

Le CESE estime que la proposition de règlement est déraisonnablement restrictive en matière d'exportation. Il estime que toutes les possibilités d'exportation autorisées à l'OMC doivent être autorisées par le règlement et notamment l'exportation d'un volume complémentaire de sucre hors quota lorsque les limites quantitatives et budgétaires autorisées à l'OMC pour les exportations subventionnées n'ont pas été atteintes par les exportations avec restitution de sucre du quota.

Par ailleurs le règlement devrait rendre libre l'exportation sans restitution de sucre du quota.

3.6

Le CESE dénonce la faiblesse des instruments de gestion du marché proposés par la Commission en remplacement de l'intervention. Il est en effet prévisible que face à l'irrégularité et à l'imprévisibilité des importations conduisant à une pression permanente sur le marché,, le stockage privé et le retrait obligatoire ne permettront pas d'assurer que le prix de marché respecte le prix de référence. Le CESE demande donc le maintien du régime d'intervention.

3.7

Le CESE prend note de la proposition de la Commission de compenser à 60 % les pertes de recette betteravière résultant de la baisse des prix. Il estime que les compensations doivent être équitables et que le pourcentage doit être d'un niveau analogue à celui des compensations aux autres cultures. Il constate que la baisse effective du prix de la betterave, compte tenu de la cotisation à la production et du risque de baisse supplémentaire de 10 %, pourrait atteindre 50 %. Dans ces conditions la compensation ne serait que de 51 %. Le CESE recommande donc une moindre baisse de prix et un plus fort taux de compensation, dans le respect des limites budgétaires proposées. Le CESE insiste sur le fait que l'octroi d'aide compensatoire pour baisse de prix ne supprime pas le besoin durable d'instruments de gestion efficaces si l'on veut éviter un effondrement du marché et garantir les revenus des agriculteurs.

3.8

Le CESE constate que la proposition de compensation envisage des aides découplées, réparties à l'hectare de betterave ou de chicorée ayant fait l'objet d'un contrat pour la production de sucre A et B ou de sirop d'inuline. Le CESE estime que les États membres par des dispositions adaptées doivent avoir toute liberté pour attribuer aux planteurs de betteraves et de chicorée la totalité des aides dans la limite des plafonds nationaux prévus dans la proposition. Le CESE recommande que les conséquences à long terme du découplage fasse l'objet d'une évaluation de la Commission.

3.9

Le CESE estime anormal que la proposition prévoie une augmentation gratuite de quotas isoglucose de 300 000 tonnes alors qu'est mis en place un programme de restructuration onéreux visant à réduire sensiblement le quota sucre et que le million de tonnes de quota sucre supplémentaire pouvant être attribué sera payant.

3.10

Le CESE note que la Commission a retenu sa suggestion de mettre en œuvre un programme de restructuration volontaire indemnisée en début de règlement, en remplacement de son mécanisme de réduction obligatoire des quotas et de la transmissibilité des quotas au niveau européen.

Le CESE exige une codécision planteurs/fabricants en matière de restructuration, ainsi que l'attribution d'une indemnité convenable de restructuration aux planteurs touchés par la restructuration.

Le CESE constate à cet égard que l'indemnité supplémentaire de 4,68 EUR par tonne de betteraves A et B accordée en 2006/2007 aux planteurs touchés par la restructuration n'est qu'une application anticipée à ces planteurs des aides compensatoires pour la baisse de prix en vigueur à partir de 2007/2008. Il ne s'agit donc pas d'une indemnité de restructuration.

3.11

Le CESE estime que le Conseil devrait attacher la plus grande importance à l'impact de la proposition de la Commission sur l'emploi dans les différentes régions touchées par la restructuration sucrière. Il demande aux États membres et à la Commission de faciliter l'accès aux Fonds structurels européens et au Fonds social européen, notamment dans les régions les plus touchées par la restructuration et les nouveaux États membres, pour contribuer à alléger les effets négatifs de la réforme sur l'emploi par des plans sociaux dépassant largement le cadre légal obligatoire. Il faut en effet faciliter la création de nouveaux emplois, la diversification et la reconversion.

3.12

Le CESE estime à cet égard nécessaire que la Commission et les États membres soutiennent d'urgence par les moyens réglementaires et financiers adaptés une politique volontariste d'usage des biocarburants dans laquelle la betterave devrait avoir un rôle important. Le CESE considère qu'il est absolument indispensable de poursuivre le développement des processus ayant pour objectif la valorisation du sucre produit hors quotas dans le secteur non-alimentaire.

3.13

Le CESE attire l'attention de la Commission et du Conseil sur l'effet fortement déstabilisateur des importations de sucre des Balkans sur les marchés des pays limitrophes. Il recommande la définition et l'application des mesures de sauvegardes nécessaires, (notamment le respect du prix d'intervention ou du prix de référence), et insiste en outre pour que soit rapidement fixé le quota de la Croatie.

4.   Conclusions

4.1

Le CESE reconnaît la nécessité d'adapter l'OCM Sucre mais il estime que les propositions de réforme vont beaucoup trop loin en matière de réduction de production et de prix.

Leur mise en œuvre se traduirait par des répercussions considérables sur le secteur sucrier européen et notamment par la perte d'au moins 150 000 emplois dans des régions souvent déjà fragilisées et qui n'ont pas d'alternatives rentables à cette culture.

4.2

Le CESE demande au Conseil d'avoir plus d'ambition que la Commission en matière de production betteravière et sucrière européenne, grâce à un contrôle quantitatif des importations et à l'autorisation d'utiliser toutes les possibilités d'exportation permises par l'OMC. Un objectif de production supérieur de 2 à 3 millions de tonnes à celui que propose la Commission est en effet possible, notamment, en contrôlant les importations. Il permettrait de sauver de 50 000 à 75 000 emplois et environ 50 000 exploitations betteravières situées dans de nombreuses régions de la Communauté.

4.3

Le CESE craint que les objectifs de l'initiative «Tout Sauf les Armes» et de la réforme de l'OCM Sucre en matière de politique de développement ne soient pas atteints, et c'est pourquoi il appuie la demande des PMA de négocier avec l'Union des quotas d'importation de sucre. Il convient en tout état de cause d'interdire la pratique du SWAP et d'établir des clauses de sauvegarde automatiques et un code de conduite avec des critères de durabilité sociale et environnementale ainsi que de souveraineté alimentaire à respecter pour accéder au marché communautaire.

4.4

Le CESE recommande le maintien d'un courant d'exportations de sucre du quota ou hors quota correspondant aux tonnages autorisés à l'OMC afin de continuer à servir nos clients traditionnels les plus proches.

4.5

Le CESE insiste pour que les baisses de prix soient étalées dans le temps et strictement limitées aux engagements internationaux et que, si nécessaire, le sucre soit traité en tant que produit sensible dans le cadre des négociations de l'Agenda de Doha pour le développement.

4.6

Il recommande le maintien du régime d'intervention et l'application durable d'instruments efficaces de gestion du marché.

4.7

Le CESE demande que les compensations partielles des planteurs pour les pertes de revenu résultant de la baisse du prix de la betterave soient augmentées dans la mesure du possible, et attribuées en totalité. Il insiste sur la nécessité d'assurer la durabilité de ces aides et de préserver le budget sucre.

4.8

Il soutient la proposition de la Commission relative au programme de restructuration, mais demande un droit de codécision pour les planteurs et l'octroi d'une aide aux planteurs touchés par les fermetures d'usine pour leur permettre de restructurer leurs exploitations.

4.9

Le CESE insiste pour que soient mobilisés les Fonds structurels et les Fonds sociaux européens afin de donner, au-delà des indemnisations nécessaires, les meilleures chances de reconversion aux salariés touchés par la restructuration de l'industrie sucrière européenne.

4.10

Le CESE considère nécessaire et urgent que le secteur du sucre soit inclus dans le débat énergétique (une politique des biocarburants) comme un moyen de contribuer à compenser les effets négatifs de la réforme.

4.11

Le Comité insiste pour que les effets déstabilisateurs des importations de sucre des Balkans soient rapidement corrigés.

4.12

Le CESE demande au Conseil d'être attentif à la situation des régions difficiles ou offrant peu d'alternatives agricoles rentables.

Bruxelles, le 26 octobre 2005.

La Présidente

du Comité économique et social européen

Anne-Marie SIGMUND


(1)  ACP: pays en développement d'Afrique, des Caraïbes et du Pacifique signataires du protocole sucre de la Convention de Cotonou.

(2)  COM(2004) 499 final.

(3)  JO C 157 du 28.6.2005.

(4)  COM(2005) 263 final.

(5)  COM(2005) 266 final.

(6)  Voir footnote 3.

(7)  JO C 157 du 28.6.2005.

(8)  JO C 157 du 28.6.2005.

(9)  JO C 157 du 28.6.2005.

(10)  JO C 157 du 28.6.2005.

(11)  JO C 157 du 28.6.2005.


3.2.2006   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 28/57


Avis du Comité économique et social européen sur la «Communication de la Commission au Conseil et au Parlement européen — Rapport sur la mise en œuvre de la stratégie forestière de l'Union européenne»

[COM(2005) 84 final]

(2006/C 28/11)

Le 17 mars 2005, la Commission a décidé, conformément à l'article 262 du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la proposition susmentionnée.

La section spécialisée «Agriculture, développement rural, environnement», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 7 octobre 2005 (rapporteur: M. KALLIO, corapporteur: M. WILMS).

Lors de sa 421ème session plénière des 26 et 27 octobre 2005 (séance du 26 octobre 2005), le Comité économique et social européen a adopté l'avis suivant par 97 voix pour et une abstention.

1.   Introduction

1.1

Le traité sur l'Union européenne ne prévoit pas de politique forestière commune et il n'en est pas non plus question dans le projet de nouveau traité constitutionnel.

1.2

Le 18 novembre 1998, la Commission a publié une communication sur la stratégie forestière de l'UE. Le 15 décembre de cette même année, le Conseil des ministres de l'UE a adopté une résolution relative à une stratégie forestière pour l'UE fondée sur la communication de la Commission.

1.3

Le Conseil a déterminé comme éléments fondamentaux de cette stratégie forestière commune, la gestion et l'utilisation durables des forêts, déjà identifiées lors de la conférence des ministres sur la protection des forêts en Europe de 1993 à Helsinki, ainsi que le rôle multifonctionnel des forêts, en tant que principes d'action généraux.

1.4

Parmi les autres principes essentiels de cette stratégie forestière, le Conseil a mis en exergue le principe de subsidiarité, selon lequel la responsabilité de la politique forestière incombe aux États membres, et la possibilité qu'a la Communauté de contribuer à la mise en œuvre d'une gestion et d'une utilisation durables des forêts et à la multifonctionnalité des forêts lorsque les actions à l'échelon communautaire sont susceptibles d'apporter une valeur ajoutée.

1.5

Le 9 décembre 1999, le Comité économique et social européen a adopté un supplément d'avis d'initiative sur «La stratégie forestière de l'Union européenne».

1.6

Dans sa résolution, le Conseil a invité la Commission à lui faire un rapport sur la mise en oeuvre de la stratégie forestière de l'UE dans un délai de cinq ans.

1.7

Le 10 mars 2005, la Commission a publié une communication sur la mise en oeuvre de la stratégie forestière de l'UE. En annexe de ladite communication figure un document de travail des services de la Commission, qui contient une description détaillée des actions et initiatives mises en oeuvre au cours de la période 1999-2004 dans le cadre de la stratégie forestière de l'UE.

1.8

Le Comité soutient les orientations définies dans la communication de la Commission, en particulier le renforcement de la mise en oeuvre et l'amélioration de la coordination de la stratégie forestière. Pour le Comité, il est fondamental que le plan d'action de l'UE pour la gestion durable des forêts, proposé par la Commission, soit mis en oeuvre sans délai.

2.   La mise en oeuvre de la stratégie forestière de l'UE

2.1   Évolution du contexte

2.1.1

De nombreux changements sont intervenus dans le contexte politique, qui ont eu des répercussions après 1998 sur les défis du secteur forestier et de la politique forestière de l'UE. Dans sa communication, la Commission cite au nombre de ces changements l'élargissement de l'UE, l'approbation des objectifs politiques stratégiques de l'UE ainsi que l'évolution au plan international des politiques forestière et environnementale.

2.1.2

Avec l'élargissement, la superficie forestière de l'UE a augmenté de près de 20 % et les ressources forestières de quelque 30 %, tandis que le nombre de propriétaires forestiers est passé de 12 à 16 millions. Dans les nouveaux États membres, il est nécessaire de renforcer la capacité institutionnelle afin de promouvoir une sylviculture durable: un défi particulier consiste à développer les structures et les cadres institutionnels de la propriété forestière privée.

2.1.3

Lors du Sommet mondial pour le développement durable, tenu en 2002 à Johannesburg, l'accent a été mis sur l'importance d'une sylviculture durable en tant que ressource du développement durable et moyen de contribuer à la réalisation des objectifs du millénaire pour le développement, de plus vaste ampleur. Un plan d'action contraignant pour les gouvernements a également été élaboré à cette occasion, qui contient de nombreuses décisions relatives aux forêts.

2.1.4

Dans l'UE, le secteur sylvicole a dû composer avec un marché de produits forestiers de plus en plus mondialisé et une industrie forestière fortement concentrée nécessitant une production de bois plus efficace que par le passé.

2.1.5

Les forêts jouent un rôle de taille et présentent de nombreux avantages pour la société. Dans le même temps, l'utilisation durable des forêts et les services environnementaux fournis par celles-ci ont gagné en importance. Si la sylviculture est face à de nouveaux défis, c'est en particulier le fait d'accords environnementaux internationaux signés par l'UE et ses États membres.

2.1.6

En mars 2000, le Conseil européen de Lisbonne a adopté un nouvel objectif stratégique pour l'UE, celui de devenir l'économie de la connaissance la plus compétitive et la plus dynamique du monde, capable d'une croissance économique durable accompagnée d'une amélioration quantitative et qualitative de l'emploi et d'une plus grande cohésion sociale. En juin 2001, le Conseil européen de Göteborg a approuvé une stratégie de développement durable pour l'UE, qui complète la stratégie de Lisbonne et implique que les politiques économiques, sociales et environnementales soient abordées dans un esprit de synergie.

2.1.7

De nombreuses politiques, dispositions et mesures communautaires ont un effet direct ou indirect sur la sylviculture. Leur compatibilité et leur complémentarité avec la stratégie forestière de l'UE et sa mise en oeuvre n'ont cependant pas fait l'objet d'une évaluation.

2.2   L'Union européenne et la politique forestière internationale

2.2.1

Dans sa résolution relative à une stratégie forestière pour l'UE, le Conseil a préconisé que la Communauté participe activement à la mise en oeuvre des résolutions des conférences ministérielles sur la protection des forêts en Europe et joue un rôle moteur dans les discussions et les négociations internationales relatives aux questions forestières, en particulier dans le cadre du forum intergouvernemental sur les forêts des Nations unies.

2.2.2

Dans l'un de ses avis, adopté en 1999, le Comité économique et social européen a considéré que l'UE devait s'engager fermement dans la mise en oeuvre au niveau mondial d'un instrument juridiquement contraignant pour la gestion, la conservation et le développement durable de tous les types de forêts, dans le respect des principes forestiers définis à Rio. Cet objectif est toujours d'actualité, étant donné notamment l'internationalisation du commerce des produits forestiers, la mondialisation de l'industrie forestière et la disparition constante de surfaces forestières ainsi que la nécessité de protéger les droits des communautés locales dépendant de la forêt.

2.2.3

Afin d'empêcher les coupes illégales et le commerce illégal du bois, la Commission a élaboré un plan d'action communautaire sur l'application des réglementations forestières, la gouvernance et les échanges commerciaux (FLEGT) ainsi qu'une proposition de règlement concernant la mise en place d'un régime d'autorisation FLEGT. Le Comité estime qu'il est extrêmement important de lutter contre les coupes illégales et le commerce illégal du bois. Les coupes illégales engendrent de sérieuses pertes au plan environnemental, économique et social, et le bois provenant de cette filière illégale entraîne une distorsion du commerce des produits du bois. Toutefois, pour empêcher les coupes illégales, il conviendrait de donner avant tout la priorité aux actions susceptibles d'être entreprises dans les pays producteurs, en coopération avec les pays importateurs de bois, pour renforcer le processus administratif et améliorer l'application des règles. Ce serait la meilleure manière de prendre en compte les facteurs sociaux nationaux et les effets produits, par exemple, sur les conditions de vie et le bien-être des communautés dépendant de la forêt. Il conviendrait d'accorder une attention particulière à la protection des forêts naturelles originelles et de leur diversité. Une clarification des droits d'utilisation des terres est une condition préalable essentielle aux efforts de réduction des coupes illégales. Le régime d'autorisation proposé ne supprime en rien la nécessité d'intensifier ces mesures.

2.2.4

L'impact de la politique économique, sociale et environnementale au niveau international et des conventions environnementales des Nations unies sur les forêts et le cadre des activités sylvicoles dans l'UE s'est accentué. Un vaste programme de travail relatif à la diversité des forêts a été approuvé en 2002 dans le cadre de la convention des Nations unies sur la diversité biologique. Le rôle des forêts et des puits de carbone qu'elles contiennent dans la lutte contre le changement climatique est inscrit dans la convention des Nations unies sur le climat. Plus particulièrement, le protocole de Kyoto a tout à la fois posé de nouveaux défis et offert de nouvelles possibilités au secteur forestier. Une sylviculture durable peut influencer de manière significative la mise en oeuvre des obligations imposées par les conventions environnementales internationales. À cet égard, il faut que l'UE adopte une approche coordonnée et convergente concernant la politique environnementale, économique et sociale sur le plan international et ses propres politiques, qui tienne compte de manière équilibrée des différentes dimensions de la sylviculture durable et respecte les nombreux modes d'utilisation des forêts.

2.2.5

Au niveau paneuropéen, la conférence des ministres sur la protection des forêts en Europe (CMPFE) est le plus important forum de discussion de politique forestière, qui est parvenu à instaurer un cadre fonctionnel pour favoriser une gestion et une utilisation durables des forêts du point de vue économique, écologique, social et culturel.

2.3   La stratégie forestière de l'UE et les politiques forestières nationales des États membres

2.3.1

La quatrième conférence des ministres sur la protection des forêts en Europe, qui s'est tenue à Vienne du 28 au 30 avril 2003, a souligné l'importance des programmes forestiers nationaux pour renforcer la coopération entre le secteur forestier et les autres secteurs. Il a également été convenu au cours de cette conférence des ministres que les programmes forestiers nationaux constituent un processus participatif, global, intersectoriel et évolutif de planification, d'exécution, de suivi et d'évaluation des orientations politiques à l'échelon national et/ou local, qui permet d'améliorer la gestion et l'utilisation durables des forêts, telles que définies à la conférence d'Helsinki, et de contribuer au développement durable en général.

2.3.2

Conformément au principe de subsidiarité, les programmes forestiers nationaux constituent un instrument essentiel pour mettre en oeuvre les objectifs de la stratégie forestière de l'UE. Il s'agit de programmes-cadres adoptant une approche globale et horizontale, qui tiennent compte de l'impact du secteur forestier sur les autres domaines d'action et inversement. Les programmes forestiers nationaux peuvent prendre en compte et équilibrer les utilisations multiples des forêts et les attentes de la société à leur sujet en prenant en considération les spécificités nationales. Les programmes forestiers nationaux permettent d'assurer une cohérence et une cohésion entre les orientations politiques nationales et vis-à-vis des engagements internationaux. Ces programmes doivent être évalués afin de vérifier qu'ils remplissent les objectifs fixés.

2.3.3

Pour mettre en oeuvre au mieux dans les forêts et le secteur forestier les engagements en matière de politique environnementale et forestière pris par l'UE et ses États membres au niveau international, il conviendrait d'incorporer les obligations découlant de ces engagements dans les programmes forestiers nationaux.

2.3.4

L'UE doit encourager l'élaboration des programmes forestiers nationaux conformément aux lignes directrices des CMPFE, afin de promouvoir une gestion durable des forêts et de parvenir à une approche globale pour développer la sylviculture et la politique forestière de la Communauté et des États membres.

2.4   La politique de développement rural et la sylviculture

2.4.1

La politique de développement rural a constitué le principal instrument de mise en œuvre de la stratégie forestière au niveau communautaire. Pour la période 2000-2006, le soutien financier aux mesures sylvicoles dans le cadre du développement rural s'élève à 4,8 milliards EUR, dont la moitié pour le boisement de zones agricoles et l'autre moitié pour d'autres mesures sylvicoles.

2.4.2

Dans son rapport spécial no9/2004 relatif aux mesures forestières dans le cadre de la politique de développement rural, la Cour des comptes européenne constate que ni la Commission ni les États membres n'ont pris la responsabilité d'évaluer la contribution de projets à la réalisation de la stratégie forestière de l'UE.

2.4.3

L'article 29 du règlement (CE) no1257/1999 concernant le soutien au développement rural dispose que les mesures sylvicoles des États membres s'inscrivant dans le cadre du développement rural doivent être en rapport avec les programmes forestiers nationaux et subnationaux ou les instruments équivalents. Dans certains États membres les programmes forestiers nationaux sont seulement en cours d'élaboration, tandis qu'ils ne sont effectivement mis en oeuvre que dans quelques États membres.

2.4.4

L'évaluation des mesures sylvicoles au titre de la politique de développement rural est rendue difficile par le fait que les données dont disposent la Commission sur les mesures sylvicoles des États membres sont incomplètes. Il n'existe pas de système effectif de surveillance des mesures sylvicoles des États membres ayant bénéficié d'une aide de l'UE.

2.4.5

Même si une partie importante des fonds est affectée à des mesures de reboisement, aucun objectif fonctionnel clair n'a été fixé pour déterminer comment ces mesures de reboisement devraient être déployées dans le cadre de la stratégie forestière, en tenant compte tout particulièrement des objectifs environnementaux.

2.4.6

De nombreuses directions générales et unités de la Commission participent à la procédure d'approbation des plans de développement rural et des programmes opérationnels de même qu'à l'adoption des mesures sylvicoles. La complexité du processus décisionnel a limité le recours à la politique de développement rural pour la mise en oeuvre de la stratégie forestière de l'UE.

2.4.7

Il conviendrait également d'examiner si, en lieu et place de subventions au reboisement, il ne serait pas plus efficace de concentrer les ressources de l'UE sur la promotion de la vente de bois, sur des systèmes de compensation pour des services environnementaux, sur la recherche, la formation et les activités de conseil ainsi que sur les initiatives de développement rural visant à améliorer à long terme les conditions d'activité et l'emploi dans le secteur forestier et les services environnementaux des forêts.

2.4.8

Par ailleurs, il ne faut pas oublier que la sylviculture et les activités de la filière bois relèvent du secteur ouvert de l'économie et sont orientées par le marché. Pour assurer le bon fonctionnement du marché intérieur de l'UE, il est indispensable que la politique d'aide n'engendre pas une distorsion de la concurrence sur le marché du bois.

2.5   La protection des forêts et la préservation des services environnementaux fournis par les forêts

2.5.1

Les activités sylvicoles doivent être économiquement, écologiquement, socialement et culturellement durables. La protection des forêts, la surveillance de leur état, l'assainissement des forêts endommagées ainsi que la préservation des services environnementaux fournis par les forêts constituent une partie importante de la sylviculture durable. Il convient de veiller à une exploitation durable des forêts en assurant une régénération appropriée.

2.5.2

Le principal objectif concernant les forêts de l'UE consiste à assurer leur bonne santé et leur vitalité en les protégeant des polluants et des incendies ainsi que d'autres agents destructeurs organiques (maladies, insectes) et naturels (érosion).

2.5.3

Chaque année, sur le territoire communautaire, quelque 0,4 milliard d'hectares de forêts sont dévastés par les incendies. Le problème des incendies de forêt est particulièrement important dans les États membres méridionaux. Outre la prévention des incendies de forêt, la Communauté a rassemblé des informations sur ces incendies et examine leur ampleur et leurs causes. Elle a établi un cadre pour une collecte systématique de données sur l'ampleur et les causes des incendies de forêt. Le système mis en place a permis d'évaluer et de suivre les mesures de lutte contre les incendies de forêt prises par les États membres et la Commission. La protection des forêts et de l'environnement de l'UE ne pourra toutefois réussir sans le développement d'une approche fonctionnelle pour la surveillance et la prévention des incendies de forêt.

2.5.4

Les principaux instruments relatifs à la préservation de la bonne santé et de la vitalité des forêts sont la directive phytosanitaire, la directive sur la commercialisation des matériels forestiers de reproduction ainsi que le règlement-cadre concernant la surveillance des forêts et des interactions environnementales (Forest Focus).

2.5.5

Le règlement Forest Focus établit le cadre d'un programme d'action communautaire permettant de poursuivre la surveillance de l'état de santé des forêts et les programmes de prévention des incendies de forêt ainsi que de développer et de diversifier les systèmes de surveillance. L'objectif est de fournir des données fiables et comparables sur l'état des forêts ainsi que sur les facteurs qui ont des conséquences néfastes sur les forêts au niveau communautaire.

2.5.6

Des informations sur la diversité biologique des forêts, les ressources forestières, le carbone stocké dans les forêts, le cycle du carbone ainsi que les produits forestiers et les effets de la protection des forêts figurent déjà dans plusieurs accords internationaux, dans le cadre de l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO), du Comité du bois de la Commission économique des Nations unies pour l'Europe, d'EUROSTAT et de la CMPFE. En ce qui concerne le développement des systèmes de surveillance de la Communauté, il serait opportun de tirer profit des systèmes nationaux, paneuropéens et mondiaux déjà existants ou en cours d'élaboration, et de s'assurer que les données des propriétaires fonciers seront protégées tant lors de leur traitement que de leur diffusion.

2.5.7

La directive phytosanitaire contient des dispositions visant à se prémunir contre les organismes nuisibles aux végétaux ou aux produits végétaux et à empêcher leur propagation. Elle formule également des exigences concernant le commerce international de bois brut et de plants. Le phénomène du changement climatique accentue le risque de propagation et de multiplication des organismes nuisibles. Afin d'empêcher la dissémination sur le territoire de l'UE d'importants organismes nuisibles à la santé des forêts, il faut disposer de règles de protection phytosanitaire suffisamment strictes ainsi que d'un contrôle efficace. Il convient cependant de veiller à ne pas entraîner de distorsions du commerce, qui résulteraient de l'utilisation d'une telle directive comme barrière non tarifaire aux échanges.

2.5.8

Les forêts et leur diversité biologique sont une partie importante de l'environnement naturel de l'Europe. La protection de la biodiversité des forêts constitue un aspect particulier de la politique environnementale commune. La stratégie forestière fait valoir que la préservation de la biodiversité des forêts peut être atteinte au sein de l'Union en grande partie grâce à des systèmes appropriés de gestion des forêts. La sylviculture durable peut contribuer à la préservation de la biodiversité par la création de zones de protection des forêts. Conformément au principe de subsidiarité, c'est aux États membres que revient la responsabilité d'assurer la protection de la diversité biologique des forêts et de veiller à l'inclusion de cette question dans les programmes forestiers nationaux ou les instruments équivalents.

2.5.9

Les plus importantes dispositions communautaires relatives à la protection de la biodiversité des forêts sont contenues dans la directive 92/43/CEE concernant les habitats naturels et la directive 79/409/CEE concernant les oiseaux. La conservation des espèces protégées et des habitats naturels a été assurée à l'échelle de la Communauté grâce à la mise en place d'un réseau de zones de protection spéciale, le réseau Natura 2000. Pour la gestion et l'aménagement des zones Natura 2000, il convient de prendre en compte les conditions préalables en matière sociale, économique et cognitive, les conséquences financières ainsi que les spécificités régionales et locales.

2.5.10

L'intégration de la protection de la biodiversité dans le cadre de l'exploitation forestière durable sur la totalité de la surface boisée et le réseau Natura 2000 sont des conditions indispensables à la préservation de la diversité biologique ainsi qu'au respect des obligations découlant des engagements internationaux.

2.5.11

À l'échelle de la Communauté, la communication concernant une stratégie communautaire en faveur de la diversité biologique (COM(98) 42) donne également des orientations en matière de conservation de la diversité des forêts. Elle souligne l'importance qu'il y a de maintenir un équilibre entre la nécessité d'assurer la conservation et l'enrichissement approprié de la diversité biologique dans les forêts, la nécessité de préserver l'état de santé et l'équilibre écologique des forêts, et la production durable de matières premières pour les industries forestières et de biens et services présentant un intérêt pour la société. Par ailleurs, cette communication fait remarquer que les actions liées à la conservation et au renforcement de la diversité biologique des forêts devraient faire partie de la stratégie forestière de l'UE.

2.5.12

La demande concernant les services environnementaux fournis par les forêts et les exigences de la société en la matière ont augmenté. Le maintien et le développement des fonctions sociales et récréatives des forêts constituent une partie importante de la sylviculture durable. Il y a lieu de resserrer la coopération avec les organisations non gouvernementales et les organisations des consommateurs afin de permettre à la sylviculture de fournir des produits, des services et des avantages répondant aux besoins des citoyens. Il faut informer ces derniers ainsi que les propriétaires de forêts de leur influence sur l'environnement et des différentes manières dont ils peuvent opérer des choix plus durables.. Il serait souhaitable que tous les États membres établissent des bilans d'ensemble de la situation des forêts afin de disposer d'une vue d'ensemble de la valeur globale des activités forestières, tant sur le plan économique que sur le plan social.

2.5.13

La gestion et l'utilisation des forêts dans les États membres de l'UE sont depuis longtemps réglementées par différents instruments de politique forestière. Il convient de respecter le droit des propriétaires forestiers de décider de l'utilisation de leurs forêts et de l'exploitation de leurs ressources forestières conformément à la loi et aux principes d'exploitation forestière durable. Si la production d'avantages sociaux et environnementaux est supérieure aux dispositions légales de l'exploitation forestière et se répercute de manière négative sur la rentabilité de la sylviculture et le droit de décision des propriétaires fonciers quant à leur patrimoine financier, il y a lieu d'instaurer des systèmes de compensation et des formes de rémunération appropriés.

2.5.14

Les services environnementaux et autres avantages fournis par les forêts sont des produits des propriétaires forestiers et doivent être appréciés comme tels. Les services environnementaux fournis par les forêts doivent pouvoir être évalués et des approches développées pour encourager leur production sur une base volontaire et axée sur le marché.

2.6   Les forêts et le changement climatique

2.6.1

Les forêts (y compris leur sol) constituent d'importants puits de dioxyde de carbone et d'importantes réserves de carbone. En fixant le carbone, les forêts ralentissent l'effet de serre et le réchauffement climatique. Maintenir la productivité des forêts et veiller à leur régénération permet de sauvegarder le rôle considérable qu'elles jouent dans le piégeage du carbone.

2.6.2

Les produits du bois peuvent être utilisés pour remplacer des produits plus nuisibles en termes de changement climatique. Promouvoir l'utilisation du bois peut contribuer à augmenter la quantité de carbone fixée dans les produits. Accroître l'utilisation de l'énergie du bois peut contribuer à remplacer les combustibles fossiles et à réduire la pollution atmosphérique qu'ils génèrent.

2.6.3

Le changement climatique a également des répercussions sur les écosystèmes et les conditions de base pour la pratique de la sylviculture. Une forêt bien gérée crée les conditions nécessaires pour s'adapter au changement climatique. La sylviculture étant un processus à long terme, il faut que cette adaptation commence à temps. La sylviculture peut aussi tirer avantage du changement climatique et produire des effets multiplicateurs positifs pour la société et la prévention de ce phénomène. En raison de la grande diversité des écosystèmes forestiers et des activités sylvicoles au sein de l'UE, c'est au niveau national qu'il est le plus opportun de définir les mesures d'adaptation, tandis qu'au niveau communautaire, un soutien peut être apporté à la recherche, à l'échange de données et au développement de systèmes d'information concernant les mesures d'adaptation.

2.7   La compétitivité du secteur forestier de l'UE et la promotion de l'emploi

2.7.1

Le secteur forestier est l'un des principaux domaines d'activité économique de l'UE. Ce secteur, et plus particulièrement la sylviculture en tant que domaine à forte intensité de main-d'œuvre, constitue un important pourvoyeur d'emplois. La sylviculture et les petites et moyennes entreprises du secteur forestier revêtent une importance particulière pour la vitalité et l'emploi dans les zones rurales. La sylviculture et les industries forestières emploient environ 3,4 millions de personnes dans l'UE, pour une production annuelle dont la valeur atteint quelque 356 milliards d'euros.

2.7.2

L'impact de la sylviculture en termes d'emploi ne se limite pas au secteur de la transformation du bois, mais inclut également les produits forestiers non dérivés du bois et autres produits biologiques provenant des forêts. Les produits forestiers autres que le bois, tels que le liège, les champignons et les baies, ainsi que les activités liées au tourisme vert et à la chasse représentent des sources importantes de revenus. Le développement des services environnementaux et récréatifs fournis par les forêts peut aussi générer de nouveaux emplois et de nouvelles sources de revenus.

2.7.3

Des efforts ont été déployés dans le cadre de la mise en oeuvre de la stratégie forestière pour bien promouvoir les questions liées à l'environnement. Le développement de mesures environnementales a également été favorisé par une politique environnementale communautaire forte. Conformément à la stratégie de Lisbonne et à la stratégie de développement durable de l'UE approuvée par le Conseil européen de Göteborg, le secteur forestier et l'industrie forestière de l'UE devraient être développés de manière à pouvoir contribuer pleinement à la réalisation des objectifs fixés en matière de compétitivité, de croissance économique, d'emploi et de cohésion sociale.

2.7.4

Même si les choix parmi les différents modes d'utilisation peuvent fortement varier d'un pays ou d'une région à l'autre, la production de bois continue d'être la fonction principale de la sylviculture. Or, les coupes ne correspondent qu'à 60 % environ des surfaces produites par la croissance annuelle des forêts. L'exploitation des réserves de bois dans l'UE peut être augmentée sans porter atteinte à la durabilité de la production de bois ni aux autres modes d'utilisation des forêts. Une utilisation plus efficace des ressources forestières de l'UE permettrait d'augmenter le nombre d'emplois dans le secteur et d'accroître la capacité de l'industrie forestière et l'autonomie de l'UE en produits de l'industrie forestière.

2.7.5

La compétitivité de l'industrie forestière dans l'UE a fait l'objet d'un examen dans une communication spécifique ainsi que dans l'évaluation de cette communication. Il importe toutefois que la sylviculture et l'industrie forestière coordonnent leurs activités dans le secteur forestier.

2.7.6

L'UE a besoin d'une industrie de transformation du bois attrayante. Pour ce faire, il faut notamment une coopération entre le secteur forestier et les communautés locales afin d'améliorer le niveau des connaissances dans le secteur. Préserver la durabilité des matières premières produites par les forêts et veiller à ce qu'elles existent en suffisance constituent des conditions essentielles pour la production dans le secteur forestier.

2.7.7

L'exploitation forestière durable doit pouvoir servir de base à une industrie forestière européenne compétitive, ce qui suppose de trouver des solutions afin que ce secteur soit aussi une activité économiquement rentable.

2.7.8

L'efficacité, la rentabilité et la compétitivité de la sylviculture et de la production de bois dans l'UE devraient être examinées séparément de la compétitivité de l'industrie forestière. La stratégie forestière n'insiste pas suffisamment sur l'importance économique des forêts ni, par exemple, sur l'efficacité des marchés du bois. Pour maintenir et renforcer la compétitivité, il est indispensable d'améliorer le rapport coût-efficacité de la sylviculture, de créer un environnement propice à assurer l'efficacité de l'exploitation des forêts commerciales et de développer des méthodes de production du bois. Une production de bois rentable permet d'investir dans la préservation et le développement de la durabilité écologique et économique des forêts. Cela ne doit toutefois pas se faire au détriment d'une gestion écologiquement et socialement durable des forêts. Il existe par conséquent un besoin considérable de recherche afin de préciser les conséquences écologiques et sociales de la mécanisation croissante des tâches liées à la gestion des forêts et d'éviter les incidences négatives.

2.7.9

Une utilisation la plus multifonctionnelle possible des forêts apporte une valeur ajoutée et renforce la durabilité tant microéconomique que macroéconomique. Les ressources, en particulier pour les activités de recherche et développement, doivent être centrées sur le développement de nouveaux modes d'utilisation des forêts et des matières premières qu'elles produisent ainsi que sur la création de marchés opérationnels pour ces produits et services.

2.8   La promotion de l'utilisation du bois

2.8.1

Le bois est une matière première renouvelable et recyclable dont les produits stockent de grandes quantités de carbone et freinent ainsi le réchauffement du climat. Grâce à l'énergie forestière, il est possible de remplacer la production d'énergie la plus néfaste pour l'environnement, fondée sur des sources d'énergie non renouvelables.

2.8.2

Afin de favoriser l'utilisation du bois, il conviendrait de mettre en place une stratégie à long terme, centrée notamment sur les obstacles à l'utilisation du bois dans les législations et les normes existantes, les activités de recherche et développement, les utilisations novatrices du bois, l'amélioration des connaissances ainsi que l'information et la communication.

2.8.3

L'utilisation de l'énergie du bois devrait être promue dans le cadre d'une stratégie de l'UE concernant les modes d'énergie renouvelables et d'un plan d'action de l'UE en faveur de l'utilisation de bioénergie. Le marché de l'énergie du bois devrait être développé en fonction de la demande. Les initiatives de promotion de l'utilisation de l'énergie du bois devraient prendre en compte les besoins en matières premières de l'industrie de transformation du bois.

2.8.4

La reconnaissance de l'importance d'une utilisation durable des ressources naturelles renouvelables en tant qu'élément essentiel de la compétitivité et de la durabilité économique est cruciale pour ce qui est de la définition du rôle du secteur forestier et des conditions dans lesquelles les activités forestières doivent se développer. Par ailleurs, la stratégie de développement durable de l'UE et la politique environnementale de l'UE, en particulier la stratégie pour l'utilisation durable des ressources naturelles, doivent prendre en compte le rôle spécifique des ressources naturelles renouvelables dans la construction d'une société plus durable.

2.9   Le développement des capacités et des connaissances des acteurs du secteur forestier

2.9.1

En Europe, la propriété forestière repose sur une large base. L'État, d'autres institutions publiques et de grandes entreprises possèdent de vastes territoires, alors que les exploitations forestières privées de type familial sont beaucoup plus réduites. Les exploitants sylvicoles publics peuvent jouer un rôle déterminant tant dans la production de bois que dans la production d'avantages sociaux et environnementaux.

2.9.2

Il y a lieu de développer les connaissances des différents acteurs du secteur forestier (par exemple, les travailleurs, l'industrie, les propriétaires forestiers, les organes de conseil et de service, les exploitants sylvicoles publics) ainsi que leur capacité à relever les défis à venir. Une partie de ce travail consiste à améliorer les conditions d'activité et les aptitudes des organisations représentant les acteurs du secteur et à développer des mesures pratiques. Il conviendrait de renforcer la coopération entre le secteur forestier et la société civile afin de promouvoir la sylviculture durable.

2.9.3

Quelque 60 % des forêts de l'UE appartiennent à des propriétaires privés, dont le nombre avoisine les 16 millions. Il faut donner aux exploitations forestières familiales des chances égales de participer à la sylviculture durable et à la production de bois et d'accéder aux marchés. Les associations de propriétaires forestiers se sont révélées être un instrument efficace pour diffuser des informations sur la sylviculture durable et les conditions régissant sa pratique. Le développement d'associations de propriétaires forestiers a permis d'offrir une réponse à la fragmentation des propriétés forestières.

2.10   La certification des forêts

2.10.1

La certification des forêts est un instrument d'application volontaire et induit par le marché, destiné à promouvoir la sylviculture durable et à informer les clients et les autres parties prenantes sur les engagements relatifs à la sylviculture durable. Grâce à la certification des forêts, il est possible de soutenir d'autres actions orientées vers la promotion de la sylviculture durable. Dans le cadre de la certification des forêts, il convient de respecter les principes de volontariat, de crédibilité, de transparence, de rentabilité et de non-discrimination et d'offrir aux différentes parties prenantes la possibilité d'y participer.

2.10.2

Il est important que la certification des forêts demeure un instrument d'application volontaire. Il ne faut pas qu'à l'échelle de l'UE des règles soient élaborées, qui, en pratique, supprimeraient le caractère volontaire et imposeraient aux propriétaires forestiers et aux autres acteurs de la sylviculture des obligations de gestion des forêts plus strictes que la législation en vigueur.

2.10.3

Étant donné qu'il s'agit d'un instrument induit par le marché, le rôle des gouvernements et de l'UE dans la certification des forêts se limite à soutenir des initiatives du secteur privé et des organisations non gouvernementales et à promouvoir l'adoption de ladite certification. En tout état de cause, il est exclu que les gouvernements jouent un rôle dominant dans le processus de certification des forêts.

2.10.4

L'UE doit veiller au libre fonctionnement du marché intérieur. S'agissant du secteur forestier, il importe que les pouvoirs publics ne soutiennent pas, par leurs actions, un système de certification des forêts au détriment d'un autre. Le marché doit offrir des alternatives et la concurrence doit être libre. La tâche des pouvoirs publics consiste à s'assurer qu'aucun obstacle artificiel au commerce ne se forme.

2.11   L'UE et la recherche forestière

2.11.1

Le secteur forestier ne peut répondre aux défis qui lui sont posés, notamment ceux en matière de compétitivité et de développement durable, que si des solutions nouvelles et novatrices sont développées en termes d'activités, de méthodes de production et de produits. L'importance des activités de recherche et développement liées au secteur forestier dans les programmes-cadres de recherche de l'UE, actuels et futurs, doit être renforcée.

2.11.2

Le 7ème programme-cadre de recherche de l'UE couvre la période 2007-2013. Les plate-formes technologiques européennes constituent un nouvel instrument pour l'élaboration et la mise en œuvre du programme-cadre. L'industrie européenne du papier (CEPI), les industries du bois (Cei-Bois) et les propriétaires forestiers familiaux (CEPF) ont élaboré de concert un projet de plate-forme technologique du secteur forestier à l'intention de la Commission («utilisation innovante et durable des ressources forestières»).

2.11.3

Il convient d'augmenter la proportion de projets de recherche consacrés aux incidences du changement climatique, à l'état de santé des forêts et aux systèmes de surveillance appropriés. L'UE devrait, grâce à des activités de recherche et l'échange subséquent d'informations, améliorer les connaissances des propriétaires forestiers afin que ceux-ci soient davantage disposés à adapter leurs forêts au changement climatique.

2.12   La coordination des questions forestières

2.12.1

Une condition préalable à la gestion des questions forestières et à la mise en oeuvre des mesures forestières est l'existence d'une coordination efficace entre les domaines de politique ayant une influence sur les forêts et la sylviculture. L'objectif à poursuivre pour la Communauté doit consister, lors de prises de décisions dans les différents domaines de politique, à mieux prendre en compte qu'actuellement les effets sur le secteur forestier.

2.12.2

Le Comité économique et social européen juge important le travail réalisé par le groupe interservices sur la foresterie de la Commission pour renforcer la coordination des questions touchant aux forêts et à la sylviculture. Pour renforcer la coordination et clarifier les responsabilités, il conviendrait toutefois de disposer d'un organe unique, qui serait chargé de la coordination de la mise en oeuvre de la stratégie forestière, de l'échange et de la diffusion d'informations entre les diverses directions générales de la Commission ainsi que de la communication et de l'information avec les autorités forestières des États membres et les acteurs concernés. Il est important de veiller à ce que la coordination s'effectue à un niveau suffisamment élevé. Pour soutenir la sylviculture durable dans les mesures communautaires, il y a lieu de veiller à ce que suffisamment d'effectifs et autres ressources soient mobilisés.

2.12.3

Tant le comité permanent forestier que le groupe consultatif «Forêts, y inclus liège» et le groupe consultatif sur l'industrie forestière doivent disposer de ressources suffisantes pour mener à bien leurs travaux. Les possibilités de participation des acteurs concernés aux prises de décisions lors des réunions régulières des groupes consultatifs précités doivent être accrues. L'expertise forestière des États membres doit être renforcée dans les autres groupes de travail du Conseil et en particulier au sein du comité STAR, lorsque sont débattues des questions liées aux forêts. La coordination des travaux des différents comités et groupes en charge des questions liées aux forêts doit être claire tant en ce qui concerne les questions intracommunautaires que les questions internationales. Les réunions des comités et groupes consultatifs doivent évoluer de telle manière que des discussions s'engagent entre les directions générales concernées par les questions forestières (agriculture, énergie, environnement, entreprise, recherche) et les principales parties prenantes (propriétaires forestiers et fonciers, industrie forestière, ONG et autres groupes d'intérêts).

2.12.4

S'agissant de la mise en oeuvre des engagements internationaux, il importe de préciser la répartition des compétences entre la Communauté et les États membres et de respecter le principe de subsidiarité. Les États membres et la Commission coordonnent leurs positions sur les questions internationales dans le cadre du groupe de travail du Conseil sur les forêts. La position de ce groupe de travail devrait être consolidée et un rôle officiel et cohérent devrait lui être conféré.

3.   Plan d'action visant à renforcer la mise en oeuvre de la stratégie forestière

3.1

Une approche plus efficace est nécessaire pour développer la sylviculture durable et exploiter le potentiel des forêts en faveur du développement durable. Le Comité soutient la proposition de plan d'action de la Commission, qui tiendrait lieu de cadre de référence et d'instrument de coordination pour la mise en oeuvre des mesures dans le secteur forestier.

3.2

Le CESE invite la Commission à élaborer, en collaboration avec les États membres, une vision claire et à fixer des objectifs stratégiques pour les forêts de l'UE dans le cadre du modèle d'exploitation forestière européen. Cette vision et ces objectifs stratégiques devraient respecter et être basés sur les décisions concernant les forêts contenues dans la Déclaration de Rio et l'Agenda 21, et confirmées par le Sommet mondial pour le développement durable de Johannesburg. Ce dernier a réaffirmé que la gestion durable des forêts fait partie intégrante du développement durable. Il convient en outre que les actions communautaires en matière de sylviculture accordent davantage de place au rôle des forêts dans l'instauration d'une société durable et dans la réalisation d'objectifs généraux de développement, tels que les stratégies de Lisbonne et de Göteborg et les objectifs du millénaire pour le développement.

3.3

La vision précitée devrait, sur la base des recommandations du présent avis, inclure au moins les paramètres suivants: les forêts, la sylviculture et la filière bois européennes apporteront une contribution décisive à la mise en place d'une société européenne durable; une sylviculture, une production de bois et une industrie forestière axées sur le marché, économiquement viables et compétitives, renforçant les circuits économiques régionaux, génèrent des emplois et des revenus et pourraient avoir des répercussions particulières sur l'économie et le développement régionaux; les forêts constituent une base indispensable pour les services d'intérêt général, elles jouent également un rôle de premier plan dans le domaine des loisirs et de la culture, ainsi que du point de vue écologique; le secteur sylvicole européen apporte un savoir-faire et des hautes technologies innovantes; l'UE devrait contribuer activement aux processus internationaux en matière de sylviculture, conformément aux décisions du Sommet mondial pour le développement durable et du Forum des Nations unies sur les forêts.

3.4

Il convient que le principe de coordination et l'apport d'une valeur ajoutée aux politiques nationales existantes en matière de sylviculture soient les fondements des objectifs stratégiques du plan d'action. Le secteur forestier devrait être reconnu comme un secteur à part entière. Dès lors, il faudrait procéder à une évaluation ex ante de toutes les nouvelles politiques et mesures qui y sont liées.

3.5

Le plan d'action pour la gestion durable des forêts doit couvrir toutes les dimensions de la sylviculture durable et l'ensemble de la chaîne de production de la sylviculture. Pour garantir une utilisation efficace des ressources dans le cadre du plan d'action, il convient toutefois de pouvoir définir les actions et mesures auxquelles les ressources communautaires devraient être prioritairement affectées.

3.6

Le plan d'action doit insister sur l'intégration de la perspective forestière dans le cadre de la mise en oeuvre d'autres politiques communautaires, telles que celles concernant l'environnement, l'énergie, le développement rural et l'industrie, afin de promouvoir la sylviculture durable de telle manière que les dimensions économique, écologique, sociale et culturelle de la durabilité soient équitablement prises en considération.

3.7

L'échange d'informations sur les services environnementaux des forêts et sur leur évaluation doit être développé dans le cadre du plan d'action. Ce dernier doit appuyer l'élaboration de modes d'action innovants et axés sur le marché pour la fourniture des services environnementaux des forêts. Il y a lieu d'examiner les possibilités qu'offre un système de paiement fondé sur les principes de l'économie de marché afin de compenser les services environnementaux des forêts non liés à l'exploitation du bois (tels que la protection des ressources hydriques ou le captage de CO2) fournis par les propriétaires forestiers.

3.8

Une attention toute particulière doit être accordée à la création d'un environnement favorable à la sylviculture ainsi qu'à la compétitivité et à la viabilité économique du secteur forestier. Le plan d'action doit définir les moyens permettant de soutenir l'élaboration de modes d'action innovants et générateurs d'une valeur ajoutée pour la sylviculture et de promouvoir les initiatives d'entreprises du secteur forestier. Il convient également de prévoir la mise en place d'une bourse du bois visuelle au niveau européen, auprès de laquelle seraient consignés en temps réel, de manière globale et transparente les flux commerciaux (offre et demande) d'essences et variétés de bois, et à laquelle les propriétaires forestiers auraient toujours accès via Internet.

3.9

Un élément essentiel du plan d'action doit être la promotion de l'utilisation du bois et d'autres produits forestiers en tant que matériaux renouvelables et respectueux de l'environnement. Un programme d'information et de communication sur le bois et les autres produits forestiers devrait être mis au point et mis en oeuvre dans le cadre du plan d'action. Ce plan d'action doit également mettre en exergue l'utilisation du bois en tant que source d'énergie renouvelable.

3.10

Le plan d'action doit soutenir la promotion des activités de recherche et développement sur les forêts. Il s'agira notamment d'intégrer les principaux projets de recherche du secteur forestier dans le 7ème programme-cadre de recherche de l'UE et d'appuyer le projet de plate-forme technologique du secteur forestier. Il y a lieu d'entreprendre, en coopération avec des universités sylvicoles européennes, des études scientifiques visant à évaluer les besoins de l'industrie sylvicole européenne en termes de personnel et de qualifications afin qu'elle puisse fonctionner de manière durable et en proximité avec la nature, dans le respect des lois, réglementations et certifications. Il conviendrait également de procéder à une étude de la filière sylvicole.

3.11

Le plan d'action doit en outre tenter de déterminer comment l'UE peut, par ses actions, soutenir le processus des conférences ministérielles sur la protection des forêts en Europe et la mise en oeuvre des décisions prises au cours de celles-ci. Le plan d'action doit, en particulier, renforcer la mise en oeuvre des programmes forestiers nationaux conformément à l'approche commune élaborée lors des conférences ministérielles sur la protection des forêts en Europe.

3.12

Le plan d'action devrait prévoir des programmes d'échange d'employés du secteur sylvicole entre les pays membres, permettant de connaître les points forts et les faiblesses des différents systèmes nationaux et d'en déduire les possibilités d'action pour le travail sur place.

3.13

Une partie du plan d'action doit être consacrée à la définition de pratiques concrètes pour une meilleure coordination et communication dans le cadre du processus décisionnel de l'UE sur les forêts. Il conviendrait de rassembler les activités multiples et intéressantes du secteur sylvicole européen dans le cadre d'une plate-forme européenne d'information et de communication visant à «rapprocher l'Europe des citoyens», et de diffuser ces informations actualisées auprès des parties intéressées du secteur sylvicole dans les pays et régions d'Europe.

3.14

Pour ce qui est de la mise en oeuvre du plan d'action, il conviendrait de définir les responsabilités et d'allouer les ressources appropriées.

3.15

Des mesures visant à accroître et à préserver la biodiversité des forêts devraient constituer un élément important du plan d'action. En outre, il convient d'une part de promouvoir la biodiversité dans les zones protégées par des programmes spéciaux (par exemple, les subventions Natura 2000) ou d'y sensibiliser davantage la population, les propriétaires forestiers et les associations. Afin de garantir la biodiversité des autres forêts, il y a lieu d'autre part de développer un instrument garantissant le maintien et l'amélioration de la diversité des essences typiques dans ces forêts. Par ailleurs, il faut promouvoir la création de zones totalement protégées. En raison des obligations particulières que cela implique, ces activités devraient concerner principalement les forêts d'État, tandis que des systèmes de rétribution appropriés devraient être créés pour les forêts privées.

3.16

Afin de pouvoir évaluer l'efficacité des mesures et des instruments mis en place, il est indispensable d'étendre les différents systèmes de surveillance du plan d'action et de les intégrer dans un concept global. Ainsi, il est impératif, tant à l'intérieur qu'à l'extérieur des zones protégées, de cartographier, d'étudier et de surveiller la biodiversité forestière. Des enquêtes régulières sur l'état de santé des forêts sont tout aussi indispensables. Il convient de vérifier jusqu'à quel point les mesures forestières peuvent contribuer au maintien de la biodiversité.

4.   Conclusions

4.1

Le Comité économique et social européen (CESE) estime important que la stratégie forestière et sa mise en oeuvre demeurent fondées sur le principe de subsidiarité et sur le concept d'une sylviculture économiquement, écologiquement, socialement et culturellement durable.

4.2

Le CESE souligne que lors de la mise en oeuvre de la stratégie forestière il conviendrait de veiller à coordonner ses objectifs avec les stratégies de Lisbonne et de Göteborg.

4.3

Le CESE considère que l'Union européenne doit oeuvrer de manière cohérente à la conclusion d'un accord mondial et juridiquement contraignant sur la gestion, la conservation et le développement durable de tous les types de forêts, qui respecte les principes forestiers adoptés lors de la conférence des Nations unies sur l'environnement et le développement de 1992 et soutient la mise en oeuvre des propositions de mesures approuvées par le panel intergouvernemental sur les forêts et le forum sur les forêts. Le CESE souligne en outre que l'Union européenne doit veiller à ce qu'il soit pleinement tenu compte des processus et instruments existants de promotion de la sylviculture durable dans les accords environnementaux internationaux.

4.4

Le CESE note que les conférences ministérielles sur la protection des forêts en Europe ont un rôle important à jouer dans la coopération forestière entre les pays européens et que les décisions prises lors de ces conférences devraient, autant que de besoin, être intégrées dans la stratégie forestière de l'UE.

4.5

Le CESE insiste sur les effets positifs du secteur forestier sur l'emploi, la vitalité des zones rurales et le développement de l'activité économique. Les mesures sylvicoles mises en oeuvre dans le contexte de la politique de développement rural devraient être fondées sur les programmes forestiers nationaux, qui devraient soutenir la réalisation des objectifs de la stratégie forestière de l'UE. Le CESE demande que soit mis en place un système permettant de suivre les mesures sylvicoles cofinancées par l'UE et adoptées par les États membres dans le cadre du règlement sur le développement rural ainsi que leur impact. Il souligne que l'aide apportée à la sylviculture dans le cadre de la politique de développement rural ne doit pas entraîner une distorsion de la concurrence sur les marchés du bois et autres produits forestiers.

4.6

Le CESE souligne l'effet positif que la forêt exerce sur la santé humaine, le ressourcement de l'esprit et le délassement des travailleurs. C'est pourquoi il invite les États membres à respecter le principe de l'accessibilité des ressources de la nature pour le public, en garantissant le libre accès des bois à tous les citoyens tout en fixant leurs responsabilités s'agissant d'observer les règles de fréquentation des forêts déterminées par leurs propriétaires et par la législation en vigueur, ainsi que les dispositions de protection de la nature.

4.7

Le CESE considère que pour une mise en oeuvre équilibrée de la stratégie forestière, les décisions prises dans le domaine de la politique environnementale de l'UE et les objectifs de développement de la sylviculture dans l'UE doivent être compatibles et complémentaires.

4.8

Le CESE note que la protection des forêts et la sauvegarde des services environnementaux qu'elles fournissent constituent des aspects importants de la sylviculture durable, et que des investissements devraient être consentis, en ce qui concerne la protection des forêts et la production des services environnementaux, afin de développer des modes d'action incitatifs, volontaires et axés sur le marché. La production, grâce aux forêts, d'avantages sociaux et environnementaux dont la société a besoin ne doit pas inutilement limiter les droits de propriété et de prise de décision des propriétaires forestiers ni compromettre la rentabilité de la sylviculture au moment de l'application de la législation ou dans le cadre de la mise en œuvre d'une sylviculture durable.

4.9

Le CESE estime qu'il est important de reconnaître le rôle des forêts et des produits qui en sont tirés dans la maîtrise du changement climatique et que l'UE devrait promouvoir les activités de recherche et les échanges d'informations concernant l'adaptation au changement climatique.

4.10

Le CESE est d'avis que la Commission européenne devrait concentrer plus particulièrement ses efforts sur les questions susceptibles d'appuyer les actions menées par la Communauté en vue de créer un environnement favorable à la sylviculture durable. Le CESE considère que la mise en œuvre équilibrée de la stratégie forestière et des objectifs des stratégies de Göteborg et de Lisbonne exige qu'une plus grande attention soit accordée à la promotion de l'exploitation commerciale des forêts ainsi qu'à la rentabilité, la compétitivité et l'emploi dans le secteur forestier.

4.11

Le CESE considère qu'il est opportun de promouvoir l'utilisation du bois et d'autres produits forestiers en tant que matières premières renouvelables et respectueuses de l'environnement et sources d'énergie, et d'élaborer dans cette optique une stratégie à long terme.

4.12

Le CESE estime qu'il est fondamental de développer les capacités des acteurs concernés pour la pratique d'une sylviculture durable. Selon lui, il est important d'offrir la possibilité aux petits propriétaires forestiers de développer durablement leur sylviculture, en renforçant les organisations sylvicoles privées. Dans les nouveaux États membres, il est nécessaire de renforcer la capacité institutionnelle afin de promouvoir une sylviculture durable: un défi particulier consiste à développer les structures et les cadres institutionnels de la propriété forestière privée.

4.13

Le CESE rappelle que la certification des forêts est un instrument d'application volontaire et induit par le marché destiné à promouvoir la sylviculture durable. Il importe à ses yeux que l'UE veille au bon fonctionnement du marché intérieur et que la certification des forêts ne représente pas un obstacle artificiel au commerce.

4.14

Le CESE juge essentiel de soutenir la durabilité, les capacités et la compétitivité du secteur forestier grâce à des activités de recherche et développement.

4.15

Le CESE juge indispensable que la coordination des questions forestières entre les diverses directions générales de la Commission soit davantage renforcée et que les effets sur le secteur privé soient mieux pris en compte qu'actuellement lors de prises de décisions dans les différents domaines de politique. Pour améliorer la coordination, il conviendrait de définir un organe unique, qui serait chargé de coordonner la mise en œuvre de la stratégie forestière et d'assurer la communication avec les différentes directions générales de la Commission, les autorités forestières des États membres et les parties prenantes.

4.16

Le CESE appuie la proposition de la Commission d'élaborer un plan d'action spécial pour mettre en oeuvre la stratégie forestière. Il est important que ce plan d'action définisse les priorités et les responsabilités et que des ressources suffisantes soient affectées à sa mise en oeuvre.

Bruxelles, le 26 octobre 2005.

La Présidente

du Comité économique et social européen

Anne-Marie SIGMUND


3.2.2006   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 28/66


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de règlement du Conseil portant organisation commune des marchés dans le secteur des semences»

[COM(2005) 384 final — 2005/0164 (CNS)]

(2006/C 28/12)

Le 21 septembre 2005, Le Conseil a décidé, conformément à l'article 36 du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la proposition susmentionnée.

Le 27 septembre 2005, le Bureau a chargé la section spécialisée«Agriculture, Développement rural et Environnement» de préparer les travaux du Comité en la matière.

Compte tenu de l'urgence des travaux, le Comité économique et social européen a décidé au cours de sa 421e session plénière des 26 et 27 octobre 2005 (séance du 26 octobre 2005) de nommer M. BROS rapporteur général, et a adopté le présent avis par 61 voix pour, aucune voix contre et 3 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1

Le Comité approuve la rédaction d'un nouveau règlement reprenant les nombreuses modifications du règlement no2358/71. Toutefois, la proposition de la Commission est restrictive et mérite d'être amendée. Tout particulièrement, la clause de sauvegarde ne doit pas être limitée aux pays non-membres de l'OMC, mais concerner tous les pays tiers.

1.2

Le Comité propose de réintroduire le considérant 2 du Règlement (CEE) no 2358/71:

«Considérant que la situation particulière du marché de certaines semences est caractérisée par la nécessité de maintenir des prix concurrentiels par rapport aux prix mondiaux de ces produits; que, dès lors, il y a lieu d'assurer, par des mesures appropriées, la stabilité du marché ainsi qu'un revenu équitable aux producteurs intéressés».

1.3

Le Comité propose de réintroduire le considérant 6 du Règlement (CEE) no 2358/71, en l'élargissant à tous les produits sensibles:

«Considérant que, pour le maïs hybride destiné à l'ensemencement pour les productions de semences sensibles , il est nécessaire d'éviter, sur le marché de la Communauté, des perturbations dues à des offres faites sur le marché mondial à des prix anormaux; qu'il convient, à cette fin, de fixer pour ce s produit s des prix de référence et d'ajouter aux droits de douane une taxe compensatoire lorsque les prix d'offre franco frontière, augmentés des droits de douane, se situent au-dessous des prix de référence».

1.4

Le Comité propose une modification de l'article 7 paragraphe 1:

«Si, en raison des importations ou des exportations, le marché communautaire d'un ou de plusieurs des produits visés à l'article 1er subit ou risque de subir des perturbations graves susceptibles de mettre en péril la réalisation des objectifs de l'article 33 du traité, des mesures appropriées peuvent être appliquées dans les échanges avec les pays tiers non membres de l'Organisation Mondiale du Commerce jusqu'à ce que la perturbation ou le risque de perturbation ait disparu».

2.   Observations générales

2.1

Cette proposition de la Commission européenne sur la révision de l'OCM semences vise principalement à consolider le règlement (CEE) no 2358/71 suite à de nombreuses modifications et dernièrement à la réforme de la PAC. Mais elle réduit la politique agricole en matière de semences à sa plus simple expression: maintien d'une clause de sauvegarde et demande d'échange d'information statistique entre États membres.

2.2

Les semences ne peuvent pas être considérées comme une simple matière première agricole. Elles constituent un facteur de production stratégique non seulement pour l'adaptation des filières agricoles et agro-alimentaires, mais aussi pour répondre aux attentes des consommateurs (par exemple pour une production exempte d'OGM). La semence est en effet le premier maillon, par sa génétique et ses qualités, pour répondre aux exigences de compétitivité du marché et aux demandes des citoyens en matière de sécurité alimentaire et de respect de l'environnement. L'OCM semences doit définir des moyens plus ambitieux pour préserver, accompagner et orienter la production agricole européenne.

3.   Observations particulières

3.1

Il est nécessaire dans le réexamen du règlement de réellement prendre en compte les articles 33 et 34 du Traité. Il convient notamment au minimum de réintroduire les considérants 2 et 6 du Règlement (CEE) no 2358/71. Il s'agit de donner à la Commission européenne, la capacité d'agir en cas de difficultés sur les marchés des semences afin de respecter le Traité et les exigences des consommateurs européens.

3.2

Dans la liste des produits concernés par cette OCM (article 1er), il est plus cohérent, d'un point de vue législatif, de les lister en faisant référence aux directives no 66/401 et 66/402 (1) de 1966 régissant la commercialisation des semences, en complément de la nomenclature douanière.

3.3

Dans la proposition de la Commission, la clause de sauvegarde autorisant la Commission à prendre des mesures en cas de perturbations graves susceptibles de mettre en péril la réalisation des objectifs de l'article 33 du Traité a été significativement réduite aux pays non membres de l'OMC. Les actuels concurrents de l'Union européenne sur des produits de haute technologie comme les semences sont tous des pays développés (États-Unis, Chili, Australie, Nouvelle-Zélande …). Tous ces pays sont évidemment membres de l'OMC. Restreindre l'utilisation de la clause de sauvegarde aux pays non membres de l'OMC n'est donc pas approprié.

3.4

La qualité des semences et les contrôles sur cette qualité sont régis dans les États membres par les directives 66/401, 66/402, 2002/54 et 2002/57. Au niveau des pays tiers, il est nécessaire de garantir le même niveau de qualité des semences. Ce dernier point relevant des négociations d'équivalence entre l'Union européenne et les pays tiers, l'OCM devrait mentionner cette exigence de qualité, par exemple dans les considérants.

3.5

L'OCM doit définir une véritable politique d'aide à l'organisation des producteurs. La production de semences s'organise obligatoirement dans le cadre d'une relation contractuelle entre une entreprise de semences et un agriculteur. L'agriculteur producteur de semences est en effet dans l'obligation de livrer la totalité de sa récolte à l'entreprise avec laquelle il contracte en vertu du règlement de 1994 (2) sur la protection des obtentions végétales. Dans le cadre de cette organisation, il serait intéressant que l'organisation commune de marché aide à l'organisation des agriculteurs, souvent démunis face aux entreprises, et définisse les règles minimales de contractualisation.

3.6

L'OCM doit définir les moyens permettant de renforcer la collecte d'informations statistiques, en lien avec les objectifs du considérant 8 de la proposition.

3.7

La Commission doit définir une procédure opérationnelle de mise en œuvre des clauses de sauvegarde. Il est en effet très difficile de prouver que des importations ponctuelles à très bas prix mettent «en péril la réalisation des objectifs de l'article 33 du traité» comme il est écrit dans le projet de la Commission ou ne respectent pas les attentes des consommateurs européens.

Bruxelles, le 26 octobre 2005.

La Présidente

du Comité économique et social européen

Anne-Marie SIGMUND


(1)  JO P 125 du 11/07/1966.

(2)  Règlement (CE) no 2100/94 du Conseil du 27.7.1994 – JO L 227 du 1.9.1994.


3.2.2006   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 28/68


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de règlement du Conseil modifiant le règlement (CE) no 1493/1999 portant organisation commune du marché vitivinicole»

[COM(2005) 395 final — 2005/0160 CNS]

(2006/C 28/13)

Le 21 septembre 2005, le Conseil a décidé, conformément à l'article 37 du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la proposition susmentionnée.

Le 27 septembre 2005, le Bureau du Comité économique et social européen a chargé la section spécialisée «Agriculture, développement rural, environnement» de préparer les travaux du Comité en la matière.

Compte tenu de l'urgence des travaux, le Comité économique et social européen a décidé au cours de sa 421ème session plénière des 26 et 27 octobre 2005 (séance du 26 octobre 2005) de nommer M. BARATO TRIGUERO rapporteur général, et a adopté le présent avis par 88 voix pour, 1 voix contre et 1 abstention.

1.   Conclusions et recommandations

1.1

Le Comité économique et social européen accueille favorablement les modifications proposées par la Commission aux articles et annexes du règlement du Conseil no 1493/1999 (1). Ces modifications introduisent les changements nécessaires afin d'adapter le règlement à la réalité du secteur vitivinicole. Le CESE propose cependant qu'en l'absence de motifs justifiant son exclusion des pratiques acceptées, l'usage de charbons œnologiques soit autorisé également pour les vins tranquilles.

1.2

Selon des critères techniques, cette pratique constitue l'unique traitement susceptible de contrôle qui ne présente pas de contre-indications par l'élimination de l'ochratoxine dans les vins rouges qui le nécessitent.

1.3

De l'avis du Comité, la proposition de la Commission de remplacer le point i) du paragraphe 1 de l'annexe IV par le texte: «le traitement des moûts et des vins nouveaux encore en fermentation par des charbons à usage œnologique dans certaines limites», devrait être modifiée afin que les vins tranquilles puissent eux aussi bénéficier d'un traitement aux charbons oenologiques.

1.4

La proposition de la Commission devrait par conséquent être libellée de la façon suivante: «le traitement des moûts et des vins nouveaux encore en fermentation ainsi que des vins tranquilles par des charbons à usage œnologique dans certaines limites».

2.   Exposé des motifs

2.1

La Commission européenne propose de modifier le règlement du Conseil no 1493/1999 portant organisation commune du marché vitivinicole.

2.2

Le CESE estime que la proposition de la Commission est une conséquence logique de la nécessaire adaptation de la réglementation communautaire à l'adhésion des nouveaux États membres à l'Union européenne et aux changements qui se sont opérés dans le secteur vitivinicole européen. La proposition apporte transparence et clarté, tout en offrant une couverture juridique aux pratiques œnologiques reconnues et admises par l'Organisation internationale de la vigne et du vin (OIV).

2.3

Le CESE approuve l'introduction du dicarbonate de diméthyle (DMDC) en tant que nouvelle pratique œnologique mais souligne que si la Direction générale «Santé et protection des consommateurs» décidait de réduire le taux maximal autorisé de sulfites, puis ultérieurement de réduire ou d'éliminer le DMDC en raison de son effet multiplicateur sur la teneur en méthanol, le secteur vitivinicole se verrait privé d'alternatives techniques.

Bruxelles, le 26 octobre 2005.

La Présidente

du Comité économique et social européen

Anne-Marie SIGMUND


(1)  JO L 179 du 14.7.1999, p. 1. Règlement modifié en dernier lieu par le règlement (CE) no 1795/2003 de la Commission (JO L 262 du 14.10.2003, p. 13).


3.2.2006   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 28/69


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil instituant le Fonds de Solidarité de l'Union européenne»

[COM(2005) 108 final — 2005/0033 (COD)]

(2006/C 28/14)

Le 27 septembre 2005, le Conseil a décidé, conformément à l'article 262 du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la proposition susmentionnée.

La section spécialisée de l'Union économique et monétaire et de la cohésion économique et sociale chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 3 octobre 2005 (rapporteur: M. BARROS VALE).

Lors de sa 421ème session plénière des 26 et 27 octobre 2005 (séance du 27 octobre 2005), le Comité économique et social européen a adopté l'avis suivant par 74 voix pour, 0 voix contre et 3 abstentions:

1.   Introduction

1.1

Le Fonds de solidarité de l'Union européenne (FSUE) a été créé en 2002 dans l'objectif d'apporter une assistance aux régions des États membres ou des pays candidats qui viendraient à subir des catastrophes majeures.

1.2

Le fonctionnement du FSUE devrait être souple et le moins bureaucratique possible, de manière à permettre une aide immédiate aux régions touchées.

1.3

La dotation du FSUE pour la période 2002-2006 a été fixée à près d'un milliard d'euros par an.

1.4

Le Règlement du FSUE doit être réexaminé avant la fin de l'année 2006. C'est de la proposition en la matière dont il sera question dans le présent avis.

1.5

Le champ d'application du FSUE actuel se limite aux catastrophes naturelles, et il est très difficile de le faire intervenir dans le cas d'accidents industriels, d'actes terroristes, et même d'une grave crise de santé publique.

1.6

Le seuil actuel pour mobiliser le FSUE — fixé actuellement à environ 3 milliards d'euros de dommages directs, ou à plus de 0,6 % du revenu national brut (RNB) — est extrêmement élevé, raison pour laquelle les deux tiers des aides accordées l'ont été en vertu d'une clause d'exception (dont la dotation annuelle est limitée à 75 millions d'euros).

2.   La nouvelle proposition

2.1   Questions générales

2.1.1

Le champ d'application géographique du FSUE est maintenu et il englobe les États membres actuels ainsi que les pays candidats.

2.1.2

Le champ d'application thématique du FSUE est quant à lui élargi pour couvrir, en plus des catastrophes naturelles, des catastrophes technologiques ou industrielles, des menaces pour la santé publique et des actes de terrorisme.

2.1.3

La définition de «catastrophe» éligible à une aide du fonds répond à un double critère, quantitatif ou politique:

2.1.3.1

Quantitatif — le seuil pour la mobilisation du FSUE est abaissé de 3 milliards à 1 milliard d'euros ou de 0,6 % à 0,5 % du RNB, ce qui permet de le mobiliser plus souvent.

2.1.3.2

Politique — dans certains cas exceptionnels et dûment justifiés (notamment ceux où l'ampleur des dégâts n'est pas encore bien connue au moment de la décision), la Commission peut actionner le fonds, même si le critère quantitatif n'est pas rempli.

2.1.4

Les pays voisins du pays affecté par une catastrophe sont également admissibles au bénéfice du fonds lorsqu'ils sont également touchés par la même catastrophe.

2.1.5

Il faut garantir, également dans le cadre du FSUE, le principe de subsidiarité.

2.1.6

La proposition de la Commission prévoit la possibilité pour le pays touché de demander une avance (près de 5 % du coût total des opérations admissibles au bénéfice de l'aide, avec un plafond de 5 millions d'euros) qui peut être versée immédiatement après la demande d'assistance, et qui devra être remboursée par le pays en question dans l'éventualité où son cas ne serait pas éligible à une intervention du fonds.

2.1.7

Il faudra appliquer le principe de proportionnalité dans l'attribution de l'aide, sur la base soit du total des dommages soit de la dimension du pays et de la gravité future de la catastrophe.

2.1.8

L'utilisation de l'aide est laissée à l'entière discrétion des autorités du pays bénéficiaire, qui est tenu de présenter un rapport justifiant l'utilisation des fonds, conformément au règlement.

2.1.9

La somme proposée pour le FSUE par la Commission reste fixée à 1 milliard d'euros par an.

2.1.10

Le budget de l'UE ne prévoit pas de crédit destiné au FSUE. A Chaque fois que le fonds est mobilisé, c'est par la voie d'un budget rectificatif.

2.1.11

Dans le cas où le montant annuel serait dépassé, l'on utilise celui de l'année suivante, garantissant que l'aide est accordée, toutes les fois que cela se justifie.

3.   Observations générales et spécifiques

3.1

Le Comité économique et social européen (CESE) accueille favorablement l'objectif de la Commission consistant à étendre le champ d'application du Fonds de solidarité et à lui donner une capacité de réaction rapide lors de situations de crise.

3.2

Cela étant, il apparaît au CESE que plusieurs aspects de la proposition de la Commission devront être affinés, de manière à améliorer cette proposition et à la rendre plus efficace, afin que le Fonds soit un instrument puissant et flexible au service de l'Union européenne et que les populations des territoires couverts par son application puissent bénéficier effectivement de l'aide solidaire de celle-ci. Une telle contribution, nécessairement déliée de contraintes bureaucratiques et répondant à des règles permettant de couvrir les différents types de catastrophes — quelle que soit leur origine — dans les moments les plus durs traversés par les collectivités qu'elle entend servir, doit non seulement être une aide précieuse pour le retour à la normalité et au fonctionnement habituel des infrastructures et de la vie économique et sociale, mais aussi constituer un signe politique clair susceptible d'être donné par l'Europe aux citoyens affectés par de graves situations d'urgence.

3.3

De l'avis du CESE, la dimension de l'enveloppe financière proposée semble correspondre aux besoins tels qu'ils ressortent des demandes enregistrées au cours des dernières années. Il doute cependant que le montant proposé puisse permettre de faire face aux besoins engendrés par une grande catastrophe, comme un tremblement de terre ou un raz-de-marée de grande envergure, une pandémie à l'échelle européenne ou encore un accident ou un attentat impliquant des armes de destruction massive. De telles situations véritablement exceptionnelles devraient être prévues dans le cadre d'un mécanisme lui aussi exceptionnel mais auquel l'Union pourrait recourir si une catastrophe de cette envergure devait un jour survenir.

3.4

Les règles d'accessibilité au Fonds de solidarité de l'Union européenne doivent de l'avis du CESE être simples et claires, dans toute la mesure du possible exemptes de lourdeurs administratives, tout en incluant des mécanismes qui rendent possible la transparence ainsi que l'évaluation et le contrôle a posteriori des fins auxquelles ont servi les ressources mises à la disposition de l'État qui en bénéficie.

3.5

Compte tenu de la conjoncture budgétaire actuelle de l'Union et de la réalité économique à laquelle l'Europe est confrontée, le CESE n'est pas opposé à une budgétisation variable plafonnée par des seuils préétablis, ce que le règlement propose, mais considère que dès que possible, le FSUE devrait devenir un fonds permanent autonome, avec un budget annuel fixe qui lui soit propre, dont le solde serait mis en réserve annuellement dans l'hypothèse ou de grandes catastrophes surviendraient.

3.6

S'agissant des délais d'utilisation, le CESE estime que la proposition de la Commission va dans le bon sens et se félicite du mécanisme de réaction rapide prévu, rendant possible une aide rapide dès après la constatation des faits faisant l'objet de l'intervention du FSUE.

3.7

En ce qui concerne la problématique de l'estimation des dommages, le CESE estime que ce processus non seulement est loin d'être simple, eu égard aux dimensions des situations visées par le règlement proposé, mais encore qu'il est très faillible, compte tenu de la multiplicité des coûts et des agents concernés, dès lors qu'il n'est pas ici uniquement question de dommages publics, mais également de dommages privés. Le court laps de temps dans lequel la demande doit être présentée aux services de la Commission ainsi que la vaste gamme des intérêts et des biens matériels affectés sont susceptibles de mener à une survalorisation ou à une sous-valorisation particulière de l'impact d'une crise, ce pourquoi l'évaluation des demandes présentées par les États doit être fondée sur des critères rigoureux, en recourant à des spécialistes et des données historiques et en proportionnant le volume de l'intervention au niveau des prix dans l'État bénéficiaire de l'aide.

3.8

Pour ce qui est des opérations admissibles au titre du Fonds, le CESE souscrit à celles qui sont énumérées à l'article 4 de la proposition de règlement, tout en souhaitant l'introduction d'un point supplémentaire libellé comme suit: «d'autres opérations d'intérêt public visant le retour à la normale de la vie sociale et économique des populations et/ou des zones affectées tout en ouvrant l'accès au bénéfice du FSUE à l'ensemble des acteurs de la société civile, selon des modalités et des précautions à définir». L'inclusion de ce nouveau point se justifie par l'impossibilité qu'il y a à prévoir tous les types et toutes les conséquences des faits susceptibles d'être couverts par le FSUE et par le souci d'accroître la flexibilité de la prise de décision dans des situations très spécifiques ou l'organisation sociale et le dispositif de production sont menacés s'il n'y a pas de possibilité d'intervention sur les dommages privés.

3.8.1

En référence à ce souci d'ouverture, il convient de constater que l'enveloppe prévue est loin d'être utilisée notamment du fait de la close de réserve des fonds qui impose une limitation aux seules dépenses publiques. Ce qui ne permet pas la prise en compte de situations qui s'inscrivent de fait dans la philosophie d'intervention du FSUE.

3.8.2

De même, la notion de seuil devrait également être reconsidérée de façon à ajuster les potentialités d'intervention du fonds avec les exigences du terrain et la dimension régionale de certains phénomènes naturels.

3.9

Le CESE estime que ce sont les citoyens de l'Union européenne qui doivent être les bénéficiaires finals des opérations éligibles menées à bien. Ce n'est que pour des raisons logistiques et organisationnelles que des bénéficiaires intermédiaires, à savoir les États, reçoivent les moyens prévus par le FSUE à cette fin. C'est également pour cette raison que les organismes étatiques ne doivent pas être les seuls à recevoir les moyens publics rendus disponibles par l'intervention du Fonds, mais qu'à cette action doit également être associée la société civile organisée participant aux opérations éligibles, dès lors qu'en général, les États ne disposent pas des moyens d'intervention nécessaires pour remédier sans son intervention aux effets de ce type de catastrophes. Les pompiers et les organisations bénévoles de la société civile actives dans les secteurs de la santé et de l'aide sociale doivent être dûment dédommagés de leurs efforts, de leur engagement et des frais qu'ils acquittent, vu qu'en général, ils ne disposent pas de budgets permettant de faire face à des événements d'une telle ampleur.

3.10

CESE estime qu'il faut revoir le champ d'application géographique du Fonds en cas de catastrophe, de sorte à garantir la couverture et l'extension de l'aide à d'autres pays que ceux directement limitrophes. Lors de catastrophes de grande envergure (le nucléaire n'étant qu'un exemple), d'autres États que ceux qui bordent celui où a eu lieu la tragédie risquent d'être touchés, ce pourquoi l'ensemble des différents États affectés doivent pouvoir bénéficier d'une aide. Dans les cas où il y a d'autres États affectés, lorsque le Fonds est activé, il doit l'être dans les différents États concernés, même si certains de ceux-ci ne répondent pas aux critères établis à l'article 2 de la proposition de la Commission.

3.11

La question du voisinage se pose également, selon le CESE, pour les États non membres ou non candidats, dès lors qu'ils sont touchés par un événement qui trouve son origine dans le territoire de l'Union ou d'un État candidat. Si le FSUE est actionné pour un événement qui trouve son origine ou sa cause dans ce cadre géographique, les autres États voisins doivent également bénéficier de la solidarité de l'Union, soit par le biais du FSUE, soit par celui des autres instruments de coopération internationale, à condition que cela n'ait pas pour effet de réduire les programmes de coopération en vigueur concrètement.

3.12

Le CESE estime qu'il est indispensable d'inclure au rang des événements éligibles les catastrophes découlant de situations d'accumulation ou de prolongation de faits non immédiatement identifiés comme particulièrement dommageables (par exemple, sécheresse grave), ainsi que de clarifier le moment de l'étalonnage. Les changements climatiques auxquels nous assistons, en partie imputables au réchauffement global dont l'ensemble de l'Union est également responsable, affectent plus certains États que d'autres, et il ne serait pas raisonnable ni solidaire que l'Union européenne se dédouane de ses obligations en ce qui concerne tant l'origine de ce problème que ses conséquences.

3.12.1

Les observations relevées sur le terrain lors de la mission d'étude du CESE en Espagne et au Portugal du 14 au 16 septembre 2005 ont fait apparaître, dans plusieurs cas, la nécessité d'articuler sur une même problématique d'une part:

le FSUE, dans sa capacité d'intervention rapide, pour apporter une solution immédiate aux besoins d'urgence soit auprès des populations, soit de façon matérielle;

les Fonds d'intervention plus structurels, afin d'apporter les réponses à long terme aux problèmes de fond; il peut s'agir de création d'infrastructures pour la sécheresse/reboisement et de développement d'activités alternatives lorsque les incendies ont été trop destructeurs.

3.12.2

L'inscription de l'intervention du FSUE dans un contexte plus large d'actions lourdes à long terme devrait constituer un critère important de sélection de projets par la Commission. On aboutirait ainsi à une meilleure opérationnalité d'ensemble du FSUE et des Fonds structurels.

3.12.3

L'approvisionnement en eau, le fonctionnement des infrastructures et l'aide aux populations, sur le plan social ou de la santé, lors de situations imprévisibles de sécheresse ou de vagues de chaleur, sont autant de phénomènes que se doit de couvrir le FSUE, de la même manière qu'il couvre les inondations, les tornades ou les trombes d'eau. Le règlement doit prévoir ces situations et définir avec clarté à partir de quel moment elles sont susceptibles de donner lieu à une intervention, dès lors qu'elles ne découlent pas d'un événement soudain et immédiatement identifiable, mais bien de l'aggravation continue d'une situation déterminée (climatique ou autre).

3.13

À cette fin pourrait être établie l'obligation d'une «Déclaration officielle de sécheresse grave» émise par l'autorité nationale responsable de la gestion de l'eau sur la base de critères objectifs uniformes à suivre par les différents organismes de gestion de l'eau dans chacun des États membres.

3.14

Le CESE est également d'avis que les États membres et l'Union doivent établir des règles claires quant à l'obligation pour le système d'assurances de l'Union européenne de couvrir certains types de risques auxquels les entreprises du secteur tentent souvent de se soustraire. Cet objectif est d'autant plus important que le FSUE et les aides publiques ne couvrent généralement pas les dommages encourus par des personnes privées, dommages habituellement bien supérieurs aux coûts découlant d'une intervention publique — visant à minimiser ou résoudre d'autres problèmes de caractère collectif — à laquelle les pouvoirs publics se sentent tenus.

3.15

Enfin, le CESE estime que les efforts menés sur le plan de la prévention des risques doivent être encouragés à tous les niveaux susceptibles de minimiser ou de mettre fin aux conséquences de situations néfastes, en anticipant les événements, en évitant les catastrophes et en préparant et mettant en oeuvre des mécanismes préalables de réaction de manière à protéger la vie et la santé humaines ainsi que la destruction d'infrastructures et de biens matériels ou immatériels. Dès lors, le CESE ne serait pas opposé à l'inclusion d'une clause restrictive dans le cadre du règlement proposé, laquelle, afin d'encourager la prévention, limiterait, réduirait ou interdirait l'intervention du FSUE dans les cas avérés de négligence des autorités publiques de l'État concerné, à condition que celui-ci puisse faire face aux conséquences financières de l'événement néfaste. Même dans ces circonstances, il pourrait y avoir intervention du FSUE à titre de prêt et non de subvention à l'État considéré comme négligeant, compte tenu du fait que les bénéficiaires finals que l'on entend soutenir sont les citoyens affectés par l'événement. En effet, l'octroi de fonds par l'Union en cas de négligence des États suscite un climat de laxisme et d'irresponsabilité et accroît les risques de voir survenir certains types de catastrophes parfois évitables.

4.   Conclusions

4.1

Le CESE réitère la position qu'il a toujours défendue, fondée sur la prévention, la responsabilisation et la prévision d'événements graves, tout en jugeant de la plus haute importance l'existence d'un mécanisme tel que celui du FSUE, sous réserve des critiques et des suggestions énoncées au point 3 des observations générales et spécifiques.

4.2

Le Comité accueille favorablement les améliorations introduites par la proposition de règlement, tout en les estimant insuffisantes pour que le FSUE dispose de tout le potentiel et de toute la capacité qui doivent être les siens pour intervenir correctement.

4.3

Le CESE considère que le projet de la Commission doit être modifié à trois points de vue, de manière à le faire correspondre aux besoins véritables:

a)

étendre le champ d'application en incluant d'autres catastrophes non prévues, notamment la sécheresse;

b)

réduire les seuils de dommages avérés, qui sont trop élevés et excluent la plupart des catastrophes ayant eu lieu ces derniers temps, et/ou donner une flexibilité politique à la Commission, afin que les catastrophes ayant un grave impact régional entrent en ligne de considération;

c)

assouplir les types de dépenses admissibles au moyen d'un nouveau paragraphe à la portée plus vaste, qui puisse couvrir des coûts pertinents autres que ceux prévus dans les paragraphes que la Commission propose dans le cadre des «opérations admissibles».

4.4

Un avis d'initiative sur «l'évaluation des principes et du fonctionnement du Fonds de solidarité et son adéquation aux besoins des pays et régions de l'Union européenne» pourrait être élaboré au plus tôt en vue de contribuer à la résolution des problèmes déjà identifiés.

Bruxelles, le 27 octobre 2005.

La Présidente

du Comité économique et social européen

Anne-Marie SIGMUND


3.2.2006   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 28/72


Avis du Comité économique et social européen sur le thème: «Commerce éthique et dispositifs visant à apporter une garantie aux consommateurs»

(2006/C 28/15)

Le 8 février 2005, le Comité économique et social européen a accepté, à la suite d'une demande reçue en février 2005 de la part du gouvernement britannique — qui assurera au second semestre 2005 la présidence de l'Union européenne — d'élaborer un avis sur le «Commerce éthique et dispositifs visant à apporter une garantie aux consommateurs».

La section spécialisée «Relations extérieures», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 10 octobre 2005 (Rapporteur: M. ADAMS).

Lors de sa 421ème session plénière, tenue les 26 et 27 octobre 2005 (séance du 27 octobre 2005), le Comité économique et social européen a adopté l'avis suivant par 75 voix pour, 12 voix contre et 10 abstentions.

Synthèse

1.

Le commerce éthique (dans ses différentes formes, qui font l'objet d'une définition dans le cadre du présent avis) (1) peut contribuer de manière significative au développement durable et à ce que les consommateurs eux-mêmes s'investissent pour donner une réponse positive et responsable à la mondialisation.

2.

En utilisant une série de mécanismes fondés sur la connaissance, il peut informer à la fois le fournisseur et le producteur de biens et de services et stimuler une action à l'échelon du marché et une réaction des consommateurs. L'Europe est le leader mondial dans ce secteur. Une activité de ce type est liée à la stratégie de Lisbonne, tout en constituant une contribution aux objectifs de développement du millénaire.

3.

Les dispositifs visant à apporter une garantie aux consommateurs qui sont en cours de développement ont pour but d'apporter des assurances de nature éthique, sociale et environnementale. La plupart d'entre eux ne traitent qu'un ou plusieurs domaines spécifiques à un produit donné, comme le commerce équitable, l'agriculture biologique, des forêts durables, l'impact environnemental, le travail des enfants ou le bien-être animal.

4.

Le présent avis examine d'un point de vue critique les exigences auxquelles de tels dispositifs doivent se conformer pour être efficaces, l'adéquation de la définition des politiques au sein de l'UE et l'urgence qui se fait sentir du point de vue de la nécessité d'une clarification et d'une coordination. Il propose des mesures concrètes que les institutions de l'UE, les États membres et les collectivités locales et régionales peuvent prendre pour consolider, étayer et améliorer ces initiatives.

5.

Le présent avis émet également une suggestion relative à la mise en place d'un cadre politique qui pourra aider les différentes institutions de l'UE et un large panel d'initiatives de commerce éthique à poser les mêmes questions sur la garantie et la démonstration d'impact, et à partager des expériences quant aux réponses à y apporter. Cela contribuera à améliorer l'efficacité et à éviter au maximum tout chevauchement ou tout gaspillage de l'effort de contrôle.

6.

Un tel cadre devrait apporter une base intelligente pour que les dispositifs visant à apporter une garantie puissent être comparés avec d'autres instruments politiques à buts similaires; il devrait fournir aux institutions européennes et aux États membres un outil de mesure mettant l'accent sur la cohérence politique, ainsi qu'un outil pratique pour l'évaluation de l'investissement des ressources.

7.

L'élaboration du présent avis a suscité un très large intérêt et la participation de la Commission, de représentants des professionnels du commerce, d'associations de consommateurs et d'ONG. Au moyen de travaux d'ordre pratique, le CESE encouragera:

l'organisation concrète d'un dialogue des acteurs concernés en 2006, afin d'élaborer un cadre commun relatif aux garanties à apporter dans le cadre du commerce équitable, sous l'angle de l'évaluation d'impact et de la qualité;

l'organisation concrète d'un dialogue des acteurs concernés en 2006, afin de préparer la participation de l'UE à l'élaboration des normes ISO 26000;

un programme de sensibilisation des consommateurs, dès la petite enfance, s'étendant sur l'ensemble du cursus éducatif et également à la formation tout au long de la vie, et portant sur l'influence dont ils disposent, par une consommation bien informée, sur les dynamiques sociales et environnementales.

1.   Introduction

1.1

En février 2005, le gouvernement britannique a demandé au CESE d'élaborer un avis exploratoire sur le commerce éthique et les dispositifs visant à apporter une garantie aux consommateurs, dans le contexte de la présidence britannique (juillet-décembre 2005), et en vue de contribuer aux initiatives de développement durable. Le «commerce éthique», dans ses différentes formes, a été évoqué dans plusieurs avis récents du CESE, en particulier ceux concernant le développement durable (CESE 661/2004) et la responsabilité sociale des entreprises (CESE 355/2002). En particulier, le commerce équitable fait partie des centres d'intérêt du CESE depuis longtemps, à commencer par l'avis émis par le Comité en 1996 (2). Nous nous réjouissons donc de pouvoir ainsi nous pencher à nouveau sur le sujet du commerce équitable de manière spécifique.

1.2

Le commerce est, d'une manière générale, porteur d'une croissance économique positive, de création de richesses et d'amélioration sociale potentielle, mais il peut aussi engendrer une exploitation des hommes et des ressources et a des effets sur l'environnement. Le «commerce éthique» peut permettre de résoudre certaines de ces tensions. Les consommateurs peuvent diriger le pouvoir dont ils disposent en consommant, produisant ainsi des effets significatifs; en effet, les entreprises sont très réceptives aux changements de tendances de consommation et cherchent à minimiser les risques d'atteinte à leur réputation. Le «commerce éthique» dispose d'une forte influence sur le plan stratégique. 51 des 100 plus grandes puissances économiques du monde sont des entreprises, 49 des États (3). En 2003, les échanges commerciaux internationaux ont dépassé, au niveau mondial, 9,1 milliards de dollars américains — environ 25 % du PIB mondial — et se caractérisent par un taux de croissance annuel moyen de 6 % depuis plus de 20 ans (4). Le volume absolu des flux de «commerce éthique» est difficilement mesurable, mais il est possible d'effectuer une estimation en se fondant sur la quantité des biens et des services vendus par des entreprises qui souscrivent à des dispositifs d'évaluation sociale et environnementale. On obtient ainsi une proportion d'environ 5 à 7 % du commerce mondial.

1.3

La mondialisation économique, la forme que prend le monde du fait de l'avènement de la société de consommation et l'influence croissante des entreprises multinationales ont provoqué un débat sur le «commerce éthique» et ont engendré l'exigence d'une responsabilité sociale et environnementale accrue des acteurs de la chaîne commerciale et à travers un cadre réglementaire national et international plus cohérent. On a ainsi pu voir se multiplier les tentatives visant à mesurer le «commerce éthique» au moyen de divers processus d'évaluation.

1.4

Le «commerce éthique» est directement lié aux intérêts stratégiques de l'UE. L'accent mis sur une économie fondée sur la connaissance garantissant une base concurrentielle solide constitue un aspect essentiel de la stratégie de Lisbonne. Le «commerce éthique» dépend surtout d'une série de mécanismes fondés sur la connaissance, qui sont conçus pour informer à la fois le fournisseur et le producteur de biens et pour stimuler une action à l'échelon du marché et une réaction des consommateurs. L'Europe est dominante au niveau mondial sur le plan des initiatives de «commerce éthique», et, en consolidant cette avance, elle contribuera à la réalisation des objectifs du millénaire pour le développement. En outre, l'importance du rôle des produits et des services qui souscrivent à des objectifs spécifiques de minimisation de l'incidence sur l'environnement sont mis en relief dans le sixième programme d'action pour l'environnement (actuellement en vigueur) (5).

1.5

Les diverses stratégies et initiatives qui se mettent en place pour promouvoir le «commerce éthique» sont toutes caractérisées par une approche non officiellement encadrée et par une reconnaissance du pouvoir dont disposent les consommateurs ou les investisseurs; leurs méthodes et leurs analyses sont complémentaires et souvent identiques à celles du mouvement pour la responsabilité sociale des entreprises (RSE). La Commission européenne a adopté de nouvelles lignes directrices pour la promotion de la RSE en juillet 2002 et publiera prochainement une «Stratégie pour la promotion et le développement de la RSE dans l'Union européenne».

1.6

Ce domaine particulier a fait l'objet d'une analyse approfondie dans le récent avis d'initiative du CESE sur les «Instruments de mesure et d'information sur la responsabilité sociale des entreprises (RSE) dans une économie globalisée (6)».

1.7

Le présent avis apporte une approche complémentaire et se sert d'une base commune. Il reconnaît ainsi que des conventions et des cadres internationaux largement reconnus sont déjà en vigueur ou en cours d'élaboration, concernant les activités commerciales à l'échelon international, le développement international, l'environnement, la corruption, les affaires étrangères, les questions relatives au travail et les droits de l'homme. Ces conventions et ces cadres constituent une articulation de l'éthique humanitaire et du droit international.

1.8

Ces réglementations se traduisent par un corpus normatif qui sert de référence à l'échelon international, comme par exemple la déclaration de l'OIT intitulée «Déclaration de principes tripartite sur les entreprises multinationales et la politique sociale», la Déclaration de l'OIT relative aux principes et droits fondamentaux au travail, les principes directeurs de l'OCDE à l'intention des entreprises multinationales, la Déclaration universelle des droits de l'homme de l'ONU, ainsi que les conventions retenues par les nouvelles mesures sur le SPG+ (voir annexe 1).

1.9

Le fait que la responsabilité sociale des entreprises ait été nettement encouragée, par le biais par exemple du forum plurilatéral concernant la RSE mis en place par la Commission (7) et de l'Initiative pour le commerce éthique (Ethical Trading Initiative) (8) soutenue par le gouvernement britannique, a contribué à aller plus loin dans la mise en place d'un cadre permettant, au sein du marché, l'implication des consommateurs. Les concepts et les outils que ces initiatives et d'autres similaires sont actuellement en train de mettre au point commencent dès à présent à être porteurs d'un consensus pratique de fonctionnement dans le domaine des chaînes de production et d'offre.

1.10

La RSE a surtout trait aux processus engendrés par les fournisseurs, alors que le «commerce éthique» se caractérise par une acception plus large et englobe aussi des initiatives qui proviennent des consommateurs. En particulier, les responsables de vente au détail ont mis au point des programmes d'audit de la chaîne d'approvisionnement (9), dont certains ont reçu le soutien d'ONG et d'organisations syndicales. Certaines ONG ont aussi soutenu l'étiquetage indépendant. Ces initiatives sensibilisent les producteurs et les consommateurs à la dimension sociale du marché, et elles peuvent permettre que puisse être exercée, au travers du pouvoir d'achat, une influence à caractère moral et social.

1.11

Le présent avis reconnaît que tous les consommateurs n'ont pas les moyens financiers de choisir des produits «éthiques»; il se concentrera sur la question de savoir comment les consommateurs qui font le choix de soutenir des programmes «éthiques» peuvent avoir la garantie que ces programmes — et les entreprises qui y participent — sont véritablement fidèles à leurs promesses, qu'ils ne promettent ou suggèrent pas davantage que ce qu'ils peuvent faire en réalité. Il s'agira de se demander si la définition des politiques à l'échelon européen sur le sujet est appropriée, d'observer où se trouvent les responsabilités, d'examiner quel degré de coordination est nécessaire, et de suggérer des mesures pratiques qui peuvent être prises par les institutions européennes, par les États membres et par les collectivités régionales et locales.

1.12

Les résultats de cette initiative bénéficieront aussi à d'autres acteurs concernés. Les syndicats et leurs membres auront particulièrement intérêt à faire en sorte que parmi les dispositifs visant à apporter aux consommateurs une garantie, ceux qui reconnaissent la dignité du travail en entraînant des améliorations pour leurs membres et pour d'autres travailleurs désavantagés soient distingués de ceux qui ne le font pas. De même, les entreprises auront intérêt à s'assurer qu'un soutien public vienne renforcer la confiance des consommateurs dans les bons dispositifs d'assurance de la qualité. Les pouvoirs publics, dans le respect des réglementations européennes relatives à l'approvisionnement, ont aussi toute latitude pour mettre en place des normes de qualité fondées sur le «commerce éthique» dans leurs stratégies d'approvisionnement, renforçant ainsi leurs objectifs politiques.

1.13

Ce faisant, le présent avis contribuera à la mise au point de dispositifs visant à apporter une garantie qui soient en mesure d'offrir un rapport coûts/bénéfices positif, d'assurer de véritables améliorations sociales et environnementales ainsi que la satisfaction des consommateurs, et de permettre aux employeurs responsables de se distinguer de manière objective d'autres employeurs dont l'intention est avant tout d'acquérir un avantage sur le marché.

2.   Cadre du présent avis

2.1

Le «commerce éthique» englobe plusieurs approches qui permettent aux consommateurs de réagir face aux coûts sociaux et environnementaux relatifs à la production. Dans la mesure où il existe une diversité d'approches dans les États membres quant aux priorités à adopter dans ces domaines, il est essentiel de définir clairement dans quel cadre se situe le présent avis.

2.2

Alors que la RSE a trait à la gestion et à la minimisation des conséquences négatives de l'ensemble des activités d'une entreprise, on constate l'apparition d'un ensemble spécifique d'initiatives visant à contrôler, à gérer et à améliorer les incidences sociales, économiques et environnementales des opérations d'approvisionnement de l'entreprise. Cela inclut en général les moyens que cette entreprise utilise pour améliorer le comportement social et environnemental de ses fournisseurs et est désigné par l'expression commerce éthique ou activité commerciale éthique.

2.3

Au sein de cette catégorie large, on peut distinguer les initiatives qui se concentrent sur la gestion du risque de celles qui visent à influer sur la réputation des entreprises ou à acquérir un avantage sur le marché au moyen de déclarations publiques. La plupart des initiatives de commerce éthique revêtent essentiellement un caractère défensif: il s'agit des moyens par lesquels les entreprises peuvent se prémunir contre une couverture médiatique négative ou en élaborer la réaction défensive crédible. D'autres initiatives ont plus clairement l'objectif d'améliorer les débouchés sur le marché en apportant des garanties soit au public soit à d'autres entreprises clientes.

2.4

Une autre distinction doit être faite entre les initiatives dont les résultats se concentrent sur la garantie de qualité et celles dont les résultats comportent l'intention d'améliorer une situation donnée. Dans beaucoup de cas, les dispositifs qui ont uniquement trait à la garantie de qualité se caractérisent par une tendance à une «mentalité coercitive» et à l'usage de sanctions. En revanche, celles qui visent à apporter des améliorations se préoccupent moins du respect des règles en lui-même et s'occupent plutôt de s'attaquer aux causes sous-jacentes de ce non-respect. Ces dernières ont donc tendance à accorder plus d'importance aux relations et à la gestion portant sur le long terme qu'à la nécessité de mettre en œuvre des contrôles.

2.5

Enfin, certains dispositifs sont essentiellement «généralistes», alors que d'autres, au contraire, se fondent sur une minorité de consommateurs recherchant déjà des moyens d'exprimer les valeurs sociales et environnementales qui leur tiennent à cœur au travers de leurs achats. Les dispositifs qui ont un objectif d'amélioration ou qui visent à acquérir un avantage sur le marché sont souvent fondés sur le fait que les consommateurs sont disposés à payer plus pour un produit — ou du moins à exprimer une préférence. D'autres dispositifs sont souvent moins coûteux et les coûts additionnels y sont absorbés dans la chaîne de production et justifiés par la sécurité supplémentaire ainsi apportée à la réputation de l'entreprise.

2.6

Le présent avis a trait uniquement aux initiatives qui sont encouragées dans le but d'assurer les consommateurs que certains bénéfices sociaux et environnementaux bien spécifiés résultent de leur achat. Dans certains cas, ces dispositifs se définissent et se font connaître par l'utilisation d'un label de produit, et ils cherchent à couvrir une ou plusieurs questions peu nombreuses relatives à ce produit en particulier. Des exemples bien connus sont les labels Fairtrade («commerce équitable»), Organic («agriculture biologique»), Marine Stewardship («intendance marine»), Forest Stewardship («intendance des forêts»), Eco-label, Child Labour («travail des enfants»). D'autres dispositifs peuvent également être portés par une entreprise ou une association commerciale en particulier, sans impliquer un «label» tiers, mais en étant mis en valeur auprès des consommateurs au moyen des emballages, des points de vente ou d'actions de relations publiques.

2.7

Tous les dispositifs de ce type présentent néanmoins un risque: si certains exagèrent l'incidence d'un dispositif ou ses bénéfices, ou trompent le public, ce sont tous les dispositifs qui devront alors faire face à une crise de confiance. C'est pourquoi il faut une évaluation officielle de la qualité des dispositifs visant à apporter une garantie aux consommateurs. Dans la mesure où les objectifs des dispositifs se caractérisent par une grande diversité, il n'est ni possible ni souhaitable de disposer d'une définition unique du «commerce éthique». En revanche, un cadre de haut niveau définissant la manière dont la qualité doit être garantie peut être mis en place. Il devra être défini par un organisme qui ne fasse pas l'objet de pressions de nature commerciale ou ayant trait à l'exploitation, c'est-à-dire, par exemple, par un groupe de représentants des divers partenaires concernés.

2.8

Néanmoins, toutes les initiatives ne se fondent pas sur la production de résultats aussi spécifiques. En particulier, l'Ethical trading initiative (ETI, initiative de commerce équitable) au Royaume-Uni se fonde sur la coopération mutuelle d'organisations de la société civile visant à observer comment de tels programmes peuvent être efficaces et apporter les résultats espérés. Même si l'ETI n'est pas à proprement parler un «dispositif», ses enseignements peuvent utilement s'appliquer à plusieurs catégories de dispositifs et, avec le temps, les entreprises qui en sont membres peuvent être amenées devenir fournisseurs des dispositifs ou à rejoindre des dispositifs.

2.9

Dans la pratique, il n'existe pas de frontières nettes entre les catégories et la plupart des dispositifs revendiquent leur contribution à la sensibilisation au développement durable, et à la mise en pratique de celui-ci. Le présent avis a trait en particulier à des dispositifs qui se fondent sur l'action informée des consommateurs pour atteindre leurs objectifs.

3.   Le «commerce éthique» et l'Union européenne

3.1

Les citoyens européens bénéficient d'une protection sociale financée par des niveaux de fiscalité de l'ordre, en moyenne, de 40 % du PIB. En Europe, tant l'industrie que les services sont insérés dans un cadre législatif composé des règles de droit du travail, de droit de l'environnement et de droit social dont les coûts sont ajoutés au prix par le fabricant et répercutés sur le consommateur.

3.2

Toutefois, alors que ce modèle européen a contribué à la réalisation à grande échelle de normes satisfaisantes dans beaucoup de domaines, le marché exerce une forte influence, à l'échelon mondial, sur la diffusion des bonnes pratiques. Le prix et la qualité restent les considérations les plus importantes, mais certains consommateurs ont montré qu'ils souhaitaient de plus en plus sélectionner des produits et des services provenant des entreprises qui affirment apporter la contribution la plus significative au progrès social et environnemental, tant dans l'UE qu'ailleurs — et plus particulièrement dans des pays moins développés. Des dispositifs visant à apporter une garantie, qui inspirent confiance, qui sont transparents et efficaces peuvent, parce qu'ils récompensent les bonnes pratiques, compléter les mesures législatives. Le pouvoir, porteur de sensibilité sociale, dont disposent les consommateurs, est en train de devenir une force significative au sein du monde commercial, récompensant des entreprises qui se conforment aux préoccupations des consommateurs et faisant en sorte que le comportement des entreprises soit en mesure de refléter des valeurs socioéconomiques en mutation, lesquelles, naturellement, varient à des degrés divers d'un État membre à l'autre.

3.3

Dans la mesure où ces dispositifs de garantie ne sont pas officiellement encadrés, ce sont les consommateurs qui doivent supporter les coûts afférents à leur mise en œuvre; ainsi, c'est la demande des consommateurs — s'exprimant par le biais des mécanismes du marché — qui encourage et décourage la croissance. Ce caractère volontaire signifie également que cet effort de promotion des bonnes pratiques ne compromet pas le respect des règles de la concurrence et des règlements commerciaux de l'OMC. En outre, les dispositifs volontaires n'enlèvent rien à la nécessité d'un cadre réglementaire approprié de l'OMC, visant à garantir le respect de normes minimales fondamentales dans toutes les relations commerciales entre pays.

3.4

Plusieurs des dispositifs visant à apporter une garantie actuellement sur le marché ont fait l'objet, dans le cadre de leur mise au point, d'un soutien financier de la part d'États membres comme de la Commission, ce qui représente une reconnaissance non seulement des effets qu'ils peuvent produire sur le plan environnemental et social, mais aussi du rôle qu'ils peuvent jouer pour mieux sensibiliser les consommateurs et modifier leurs comportements. Il est important que la valeur des dispositifs de ce type fasse l'objet d'une évaluation, tant par rapport à la réalisation de leurs objectifs affichés que du point de vue de leur rentabilité.

3.5

De même, les systèmes de production et de fabrication offrant cette garantie ont fait l'objet d'un soutien financier et législatif de la part de l'UE et d'États membres. Il est admis que la mise en place de normes — ainsi que l'aide aux producteurs dans la mise en place concrète de ces normes — est un élément qui permet de distinguer une approche propre à l'Europe. Certains exemples de conditionnement approprié, d'efficacité énergétique, d'enlèvement des produits et d'agriculture biologique, sont à présent des «valeurs sûres». Il convient de remarquer que la mise en place d'une législation visant à l'établissement de tels dispositifs a été précédée d'expériences pratiques de grande envergure consistant en des programmes bien cadrés et fondés sur le volontariat.

3.6

Une attention considérable a été accordée aux conséquences, en termes de moyens, qu'implique la réalisation d'une économie de la connaissance, pour l'équipement des industries et des services en Europe, qui représentent l'offre (technologie, apprentissage tout au long de la vie, recherche, etc.), mais on s'est moins préoccupé de ce que signifie une économie de la connaissance du côté de la demande. Si les consommateurs européens sont les mieux informés au monde, alors il est également vrai qu'ils sont ceux qui ont le plus tendance à exercer une sélection et à effectuer un choix très critique entre les produits, ceux qui sont davantage susceptibles de fonder leurs choix sur des paramètres sociaux et environnementaux, au-delà des critères traditionnels de prix et de qualité. L'étiquetage des produits constitue une manière simple de communiquer des questions complexes. Toutefois, la complexité sous-jacente des questions relatives au «commerce éthique» impose de mettre en place une nouvelle approche d'éducation à la consommation, fondée sur une évaluation en termes de développement durable.

3.7

Les évolutions économiques à l'échelon international (mondialisation, diversification de la production et développement des outils comparatifs à la disposition des consommateurs) font apparaître des marchés d'un nouveau type. Les consommateurs sont, de plus en plus, en position d'exiger — et d'obtenir — des biens et des services conçus en fonction de leurs préférences personnelles. Celles-ci comportent à présent, au-delà des facteurs traditionnels de prix, de style et de qualité, toute une série de paramètres sociaux et environnementaux qui ont trait à ce qui se passe, en amont, dans la chaîne de production et, en aval, dans le cadre des conséquences de l'utilisation et de l'enlèvement des produits. Il est dans l'intérêt des entreprises et des travailleurs européens — qui ont probablement les moyens de réagir — d'encourager cette démarche de consommateur averti, laquelle correspond également tout à fait aux besoins d'un marché libre et efficace où les consommateurs disposent des informations et du discernement nécessaires à la formulation d'exigences précises. Faute de cette connaissance, se produisent des distorsions du marché qui font que les coûts sociaux et environnementaux sont répartis ou assumés de manière inefficace.

3.8

Néanmoins, il est clair que les consommateurs des 25 États membres ont de nombreuses préoccupations et priorités, toutes très diverses. En particulier, dans les nouveaux États membres, les consommateurs se préoccupent, à juste titre, très fortement de la qualité des produits, de la sécurité alimentaire et du rapport qualité-prix. Une garantie minimale sur ce point reste à mettre au point dans plusieurs de ces pays. Le Comité insiste à nouveau sur le fait que les dispositifs visant à apporter au consommateur une garantie dans le cadre du commerce équitable ne sont pas officiellement encadrés, ce qui permet que l'adhésion à ces dispositifs puisse se faire en adéquation avec les priorités des consommateurs.

4.   Les initiatives de «commerce éthique» en Europe

4.1

Plusieurs dispositifs (voir les exemples apportés au paragraphe 2.6) visent à apporter aux consommateurs, en Europe et à l'échelon international, une garantie de qualité, en mettant l'accent sur la réputation des entreprises, l'inspection des sites et l'octroi de certifications ou de labels spécifiques. Ces dispositifs impliquent tous des coûts significatifs, tant lorsqu'il s'agit de se conformer aux normes requises que de prouver qu'on les respecte bien et qu'on continue de les respecter; en général, ce sont les consommateurs désireux de contribuer au progrès social et environnemental qui supportent ces coûts relatifs au prix des produits. Il est difficile d'obtenir des informations exhaustives sur les dispositifs de ce type, dans la mesure où il n'existe pas, à l'heure actuelle, de «bureau central», d'association commerciale ou de point de référence reconnu. Il est cependant possible d'affirmer que plus de 100 dispositifs de garantie aux consommateurs fondés sur l'étiquetage sont sur le marché dans les 25 États membres, avec un chiffre d'affaires de plus de 20 milliards d'euros.

4.2

Chaque dispositif est doté de mécanismes qui lui sont propres pour garantir que les normes soient respectées dans la réalité. Des initiatives sont actuellement en cours pour développer des approches communes à plusieurs dispositifs concernant ce niveau de garantie. Cette communauté d'approches peut et doit permettre de parvenir à une comparabilité des dispositifs visant à apporter aux consommateurs une garantie de qualité, ainsi qu'à une réelle efficacité et à davantage d'économies, qui bénéficieront à l'ensemble des parties concernées.

4.3

Il est, de même, nécessaire de mettre au point et d'adopter une approche commune du contrôle des effets de ces dispositifs, dans la mesure où assurer le respect de certaines normes ne garantit pas en soi que des améliorations aient lieu, que ce soit dans des sites spécifiques ou en général. Par exemple, il est possible de faire respecter très facilement des normes minimales de travail en exerçant une sélection préalable des fournisseurs qui les respectent déjà ou en retirant leur label aux sites qui ne les observent pas. Cela assure un respect des normes sur le plan purement technique, et apporte des garanties aux consommateurs, mais peut également mener, dans les faits, à une dégradation du niveau d'ensemble, en désavantageant encore plus les producteurs plus faibles.

4.4

Une grande partie des dispositifs de garantie contrôlés de façon indépendante (mais pas tous) mettent en place des approches communes visant à démontrer le respect de leurs normes. Ainsi, par exemple, l'Alliance internationale pour l'accréditation et l'étiquetage sociaux et environnementaux (ISEAL) met en place des approches communes de qualité auprès de ses membres. Il est nécessaire de fournir le même effort cohérent pour l'ensemble des dispositifs de garantie aux consommateurs, afin de garantir que ces normes aient les résultats désirés: cela doit prendre la forme d'une évaluation d'impact. Si une approche commune est mise en place pour évaluer l'impact et les coûts, une évaluation plus transparente de ces dispositifs sera possible, ce qui permettra au consommateur de se faire une idée plus claire. Cela permettra également de définir quelles sont les caractéristiques nécessaires à ces dispositifs pour être habilités à obtenir un soutien financier de la part de la Commission, lequel soutien doit se fonder sur des indications relatives à l'impact, afin de contribuer aux objectifs politiques qui ont fait l'objet d'un accord.

4.5

Pour que les consommateurs et les fournisseurs accordent leur confiance au «commerce éthique», il convient que leur soit garanti un équilibre satisfaisant entre, d'une part, les coûts et les bénéfices pour les consommateurs et les entreprises, et, d'autre part, les bienfaits sociaux et environnementaux souhaités. Il se peut qu'un dispositif visant à garantir aux travailleurs situés dans des pays en développement de meilleures conditions de travail mène à un déplacement de la production vers la sphère non réglementée; qu'un mécanisme visant à réduire les effets néfastes sur l'environnement entraîne des frais de contrôle de cette réduction disproportionnés, ou soit à la source de graves problèmes d'efficacité; que les normes relatives à l'élevage biologique aboutissent, si elles sont appliquées de manière mécanique, à ce que les animaux soient moins bien traités; qu'une initiative visant à rassurer les consommateurs au sujet du travail des enfants conduise à ce que ceux-ci se tournent vers des activités plus dangereuses ou à ce qu'ils ne puissent plus, faute de moyens financiers, bénéficier de l'école une partie du temps.

4.6

Dans la mesure où des industriels et des prestataires de services de premier plan perçoivent le «commerce éthique» comme un phénomène de marché significatif, ce sont eux qui disposent des premiers rôles lorsqu'il s'agit de transposer les attentes idéalistes des consommateurs dans des mécanismes concrets et opérationnels. Le fossé inévitable entre les attentes et la réalité fait que le mouvement du «commerce équitable» (dans ses diverses formes) risque d'être accusé de naïveté. Dans le monde de l'entreprise, le comportement varie en fonction de la sensibilité des entreprises à la pression du consommateur et de leur poids relatif au sein de la chaîne commerciale. Certaines réactions traduisent les préoccupations des entreprises en matière de relations publiques (protection d'un capital-marque), certaines obéissent à une logique de marché (développement de nouveaux produits pour ces nouveaux domaines d'intérêt), d'autres concernent les appels d'offres (principe de précaution et gestion des risques). Toutes les approches peuvent être valables, mais la diversité des motivations des entreprises montre qu'un cadre commun d'analyse est nécessaire.

5.   Cadre commun

5.1

Des tensions sont inhérentes à tout système de «commerce éthique» qui dispose d'un pôle conséquent de la garantie aux consommateurs. D'un côté, le système tente d'atteindre des objectifs sociaux et environnementaux au sein de la chaîne d'approvisionnement; de l'autre, il cherche à apporter aux consommateurs des garanties. Cela peut engendrer plusieurs problèmes:

5.2

L'ampleur des dispositions qu'il est nécessaire de prendre pour apporter une garantie peut se révéler disproportionnée face à l'incidence «réelle» sur la réalisation des objectifs: par exemple, il peut être onéreux de procéder à un audit, et les modifications administratives qui s'imposent dans un but de transparence peuvent également se révéler coûteuses et complexes.

5.3

Plus grave encore, les obligations imposées dans un objectif de garantie de qualité peuvent avoir en réalité une incidence négative sur les objectifs du dispositif: par exemple, se concentrer sur ce qui peut être mesuré ou sur ce qui peut faire l'objet d'un audit peut engendrer une distorsion des priorités; il est possible que les obligations et les coûts liés à l'audit entraînent l'exclusion des producteurs qui ont le plus besoin d'améliorations;

5.4

En outre, dans de nombreux cas, le discernement des consommateurs, et donc leurs priorités, peuvent être limités, ce qui peut engendrer des distorsions du dispositif: par exemple, les consommateurs ont en général tendance à donner la priorité à une chaîne d'approvisionnement «propre» (absence de travail des enfants, absence de résidus de pesticides), plutôt qu'à des progrès effectifs sur le terrain (amélioration des salaires et de la scolarisation, amélioration de la gestion de l'environnement).

5.5

Cela seul peut conduire les entreprises à sélectionner de nouveaux fournisseurs qui respectent déjà des normes élevées, au lieu de s'engager dans des améliorations à plus long terme dans leur chaîne d'approvisionnement existante, ce qui peut avoir pour conséquence l'absence de tout bénéfice net par rapport aux objectifs d'ensemble.

5.6

Enfin, il pourrait arriver qu'un dispositif qui ne fasse pas l'objet d'une surveillance rigoureuse et indépendante affiche des garanties qui constituent des exagérations ou des simplifications de l'incidence de ce dispositif (ou même qui constituent des affirmations fausses!), ce qui, à court terme, nuit à la réalisation des objectifs et, à long terme, engendre un effondrement de la confiance des consommateurs dans les dispositifs de garantie en général.

5.7

Dans le cas de systèmes financés par quelques donateurs importants mais peu nombreux, une bonne gestion peut suffire à traiter ces problèmes, mais un système financé en majeure partie par une «prime» aux choix des consommateurs individuels ne dispose pas nécessairement des processus de gestion appropriés, et les consommateurs ne sont pas bien placés pour juger de la qualité ou de la rentabilité d'un dispositif.

5.8

Une critique est communément adressée aux dispositifs visant à apporter une garantie aux consommateurs: dans la mesure où ils sont dépendants, d'une manière ou d'une autre, des attitudes des consommateurs, et où le discernement des consommateurs quant à cette question est peu élevé, certains dispositifs ont tendance à revendiquer une garantie plus simple et plus complète qu'elle ne l'est en réalité. Seul un débat plus ouvert et mieux informé peut résoudre ce problème et permettre à un marché ouvert et informé (et fondé sur la connaissance) de se développer.

5.9

Toutefois, il ne serait pas approprié que l'UE ou les États membres tentent de mettre en place de manière centralisée des définitions ou les normes essentielles des divers niveaux de «commerce éthique»: un tel contrôle centralisé ne disposerait pas de la flexibilité qui est nécessaire à la prise en compte de l'amélioration des résultats et de l'évolution des circonstances, et il irait également à l'encontre du droit des consommateurs à exercer leur choix en fonction des valeurs — en mutation — qui leur sont propres. En revanche, la base qui permet aux consommateurs d'être assurés de ce que ces dispositifs réalisent véritablement leurs objectifs affichés peut et doit, elle, être mise en place de manière centralisée.

5.10

Le présent avis tente de délimiter un cadre au sein duquel diverses initiatives puissent procéder à l'examen des mêmes questions sur la garantie et la démonstration d'impact, et partager des expériences quant aux réponses à y apporter. La dynamique du commerce équitable est présentée sous forme de diagramme en annexe 2. Les divers dispositifs visant à apporter une garantie diffèrent dans leurs objectifs respectifs: il est donc difficile de mener une analyse simplement fondée sur le rapport coûts-bénéfices et, en tout état de cause, celle-ci aurait peu de chances de succès, étant donné la difficulté qu'il y a à procéder à une estimation de «biens» si divers et au caractère aussi subjectif. Cependant, il est possible de mettre au point un cadre commun au sein duquel nous pouvons poser les mêmes questions — relatives à la qualité — sur tous les dispositifs et obtenir des réponses qui puissent être comparées entre elles. Au final, c'est aux consommateurs et aux organisations qui les représentent de mettre leurs valeurs personnelles en rapport avec les résultats.

5.11

Les conditions et la mesure des résultats doivent varier selon les dispositifs, car elles dépendent du champ et des objectifs respectifs de chacun d'entre eux; mais il existe néanmoins plusieurs questions sous-jacentes relatives à la qualité. De nouvelles recherches et de nouvelles consultations devraient permettre d'identifier les questions essentielles auxquelles chaque dispositif devrait être en mesure de répondre, et par rapport auxquelles il devrait pouvoir apporter des preuves démontrant sa qualité. Il sera particulièrement important d'identifier les objectifs élevés sur le plan social, environnemental ou économique auxquels les dispositifs peuvent espérer contribuer: ce sont en effet ces objectifs qui fixent les caractéristiques fondamentales du dispositif (acteurs concernés, champ, mesures d'impact).

5.12

Pour commencer, on peut recommander de mettre en avant les questions suivantes (cependant, au cours des consultations à venir, il est recommandé de rechercher une certaine cohérence avec les cadres de qualité existants et crédibles):

a)   Administration du dispositif

Où se trouve le dernier levier de contrôle du dispositif?

S'agit-il d'un dispositif impliquant plusieurs parties prenantes, au sein duquel c'est une majorité de partenaires concernés qui constitue les organismes de prise de décision?

Le dispositif est-il contrôlé par une sorte de «conseil d'administration» indépendant et dont les intérêts n'entrent pas en jeu, auquel les partenaires concernés peuvent faire appel?

b)   Objectifs du dispositif

Ceux-ci sont-ils clairement définis?

Sont-ils en adéquation avec les besoins des acteurs concernés les plus désavantagés par le fonctionnement du système commercial?

Sont-ils en adéquation avec les préoccupations des consommateurs et avec les idées-forces que met en valeur le dispositif?

Les partenaires concernés (notamment dans les pays en développement) ont-ils été impliqués dans la clarification et la codification des objectifs?

Les objectifs du dispositif sont-ils publics?

c)   Champ du dispositif

Le dispositif traite-t-il le «problème» conformément à la façon qui avait été normalement définie?

Les conditions du dispositif permettent-elles un traitement suffisamment large du champ du problème, ou se focalisent-elles sur des aspects mineurs et faciles à régler?

Les profils respectifs des sites faisant l'objet d'une certification (les «producteurs») sont-ils en adéquation avec les idées-forces mises en valeur et avec les buts du dispositif?

Les sites sont-ils déjà aux normes, ou le dispositif est-il centré sur une amélioration continue?

d)   Normes ou conditions du dispositif

Les normes mises en place et contrôlées par le dispositif sont-elles en adéquation avec ses objectifs?

La définition des normes intervient-elle dans le cadre d'un processus auquel les partenaires concernés (notamment dans les pays en développement) peuvent participer?

Le dispositif est-il doté d'un mécanisme crédible qui permette que l'adoption des normes puisse contribuer à la réalisation des objectifs?

Les conditions ou les normes du dispositif sont-elles publiques?

e)   Évaluation d'impact

Le dispositif est-il doté d'une évaluation crédible de son impact vis-à-vis de ses objectifs?

L'incidence au sens large et à long terme sur le secteur est-elle contrôlée et les changements réalisés (les «résultats») sont-ils en adéquation avec les objectifs du dispositif?

Les partenaires concernés dans la région-cible sont-ils impliqués de manière active et consciente dans la définition des conditions de l'évaluation d'impact et dans la mise en œuvre de cette dernière?

Y a-t-il un processus qui permette d'identifier une quelconque incidence négative du dispositif, et de traiter éventuellement ce problème?

f)   Examen indépendant

Le fonctionnement du dispositif fait-il l'objet d'un examen indépendant?

Les partenaires concernés (notamment dans les pays en développement) sont-ils impliqués dans la définition des conditions de cet examen ou dans cet examen lui-même?

Les conclusions de ce type d'examen sont-elles publiques?

g)   Analyse du rapport coûts-bénéfices

Dispose-t-on d'un processus qui permette de contrôler et d'évaluer le rapport entre, d'une part, les coûts du dispositif que doivent assumer les fournisseurs, les professionnels du secteur du commerce et les consommateurs et, d'autre part, les progrès effectués dans la réalisation des objectifs?

h)   Affirmations publiques

Les affirmations publiques des entreprises ou des fournisseurs certifiés sont-elles en adéquation avec les objectifs, les normes et les résultats du dispositif?

L'examen indépendant — ou effectué par les partenaires concernés — du dispositif contrôle-t-il également les affirmations publiques que font les entreprises participantes?

5.13

Il conviendrait que tout dispositif qui cherche à obtenir la confiance des consommateurs ou le soutien de la Commission et des gouvernements nationaux se conforme à des normes de qualité semblables à celles dont nous avons tenté plus haut de tracer les contours (et qui doivent être précisées et mises à l'épreuve de la réalité). On pourra alors estimer que les dispositifs qui ne se conforment pas à ces normes présentent un mauvais rapport coûts/bénéfices.

5.14

Il est nécessaire qu'une approche plurilatérale des partenaires concernés, dotée du soutien des pouvoirs publics à l'échelon européen, garantisse la crédibilité de la mise au point de ces normes et de leur promotion.

5.15

Il est clair que la mise au point éventuelle d'une estimation comparative du rapport coûts-bénéfices dans ce domaine constitue un défi; celle-ci devrait toutefois apporter une base intelligente pour que les dispositifs visant à apporter une garantie puissent être comparés avec d'autres instruments politiques à buts similaires.

6.   Cadre politique et responsabilités

6.1

Il est essentiel, dans ce secteur qui se développe rapidement, que soient apportées des justifications politiques cohérentes à la question de savoir pourquoi des politiques relatives au commerce équitable sont nécessaires; à cet égard, nous avançons, dans la partie 7 du présent avis, des propositions concernant l'action pratique. L'UE et les États membres estiment que des normes éthiques et humanitaires fortes devraient être partie intégrante du commerce mondial et de la diplomatie. Non seulement un monde meilleur constitue un objectif désirable en soi mais de telles préoccupations communes contribuent à la construction d'une culture transeuropéenne fondée sur des valeurs. De manière plus tangible, en outre, stimuler la consommation de produits «équitables» et sensibiliser par rapport à ceux-ci peut constituer une opportunité non négligeable pour l'industrie européenne, dans la mesure où celle-ci est bien placée pour s'engager vers de nouvelles possibilités sur le plan commercial. L'UE et les États membres ne devraient pas apporter leur appui à un label spécifique, mais devraient encadrer un dispositif de garantie auquel pourraient souscrire toutes les initiatives visant à apporter au consommateur une garantie et disposant d'une bonne réputation.

6.2

Il est par conséquent essentiel qu'il y ait une cohérence sur le plan des politiques, et cela constitue un objectif primordial. Au cours de l'élaboration du présent avis, des échanges étendus et précieux ont d'ores et déjà eu lieu: échanges d'information, de vues et de perspectives politiques. Il est proposé que soit mis en place de manière formelle, à la suite de l'adoption du présent avis, sous les auspices du CESE, un dialogue bien géré et actif entre acteurs concernés sur les questions relatives au «commerce éthique» et aux dispositifs de garantie vis-à-vis des consommateurs.

6.3

Un tel dialogue aurait pour but de mettre en place:

les éléments essentiels à la mise en place d'une politique coordonnée sur les questions relatives aux dispositifs de garantie de qualité sociale et environnementale vis-à-vis des consommateurs,

l'action nécessaire pour qu'une telle politique soit solidement ancrée à l'échelon européen,

la façon dont il est possible d' encourager la prise en considération de ce volet politique au sein des États membres.

7.   Action pratique

7.1

Le présent avis se penche sur la question de savoir si les processus encourageant la présentation auprès des consommateurs des dispositifs de garantie éthique sont ou non cohérents. Il apporte des conseils et des outils politiques pour permettre à l'UE de décider s'il convient qu'elle soutienne davantage ce secteur à l'avenir, et de se demander comment elle peut le faire de manière rationnelle et rentable. L'UE peut adopter quelques actions pratiques peu nombreuses, pour encourager et soutenir la poursuite du développement du «commerce éthique» (dans l'acception que nous lui donnons dans le cadre du présent avis), de façon à garantir que soit maintenue une réelle cohérence avec les objectifs politiques d'ensemble de l'UE.

7.2

Il apparaît clairement que l'UE et certains États membres souhaiteront peut-être continuer à apporter leur soutien à la mise en œuvre d'initiatives spécifiques dans ce domaine. On peut recommander que ce soutien se concentre sur les initiatives qui, tout en offrant aux consommateurs une garantie, puissent également faire la démonstration objective de leur contribution à une amélioration tangible des conditions socioéconomiques et environnementales dans lesquelles vivent les communautés affectées par les chaînes de productions concernées. Il convient d'encourager vivement les dispositifs qui contribuent aux renforcement des capacités des pays du Sud.

7.3

Pour que cet objectif puisse être réalisé plus facilement, l'UE devrait faire effectuer une étude ayant pour objectif d'établir des critères de qualité clairs et largement applicables pour l'évaluation des dispositifs visant à apporter aux consommateurs une garantie. Outre les organisations de consommateurs, il conviendrait que cette étude inclue divers dispositifs, notamment d'étiquetage environnemental et social, et qu'elle se fasse en partenariat avec les acteurs concernés de la chaîne d'approvisionnement, afin de garantir que les critères puissent être largement appliqués et que puissent être élaborés des outils de qualité cohérents au sein du secteur.

7.4

Les questions présentées dans la partie 5 peuvent constituer un utile point de départ pour l'élaboration d'un cadre d'évaluation plus complet. Le CESE souhaite insister sur le fait qu'il ne s'agit pas de mettre en place un nouvel échelon bureaucratique ou une nouvelle barrière au marché pour les entreprises ou les dispositifs de garantie: il estime que tout dispositif doit être en mesure de démontrer son impact, sa qualité et sa rentabilité, et qu'un cadre commun contribuera à éviter un chevauchement des efforts.

7.5

Une telle étude contribuera également à ce que les consommateurs accorde une plus grande confiance aux dispositifs de garantie, en permettant à des organisations de la société civile de recommander à leurs membres et à leurs adhérents de soutenir des dispositifs qui leur paraissent apporter une réponse appropriée aux préoccupations sociales et environnementales qui sont les leurs. Dans la mesure où cette question concerne plusieurs DG, il sera nécessaire de mettre en place un point de coordination centralisant l'information et la mise au point d'une politique cohérente.

7.6

Étant donné que les consommateurs font actuellement confiance aux labels de produits pour identifier les produits dont la production et la commercialisation se fait en conformité avec certaines normes sociales, environnementales et de bien-être animal bien spécifiques, il existe une forte probabilité qu'interviennent des confusions et une inefficacité du côté des consommateurs, dans la mesure où des produits portent des labels multiples. Il est donc également proposé que l'UE commande une étude visant à trouver des solutions de rechange qui permettent de mesurer de manière fiable la valeur sociale et environnementale des produits et de faire en sorte qu'elle soit portée à l'attention des consommateurs.

7.7

Il conviendrait qu'un programme stratégique d'éducation à la consommation dans les États membres soit centré sur la sensibilisation des consommateurs aux potentiels dont sont dotées leurs décisions d'achat et aux moyens de se servir de ces décisions pour contribuer à la réalisation d'objectifs sociaux et environnementaux qui correspondent aux priorités qui sont les leurs.

7.8

Il convient de noter que, du fait du développement rapide des systèmes d'information sur les produits qui sont accessibles au point de vente, via Internet ou par d'autres canaux d'information, il sera de plus en plus aisé, dans les années à venir, d'élaborer des banques de données portant sur la provenance et la qualité des produits. Tout en couvrant les questions sociales et environnementales qui sont en lien avec le présent avis, ces banques de données pourraient également contenir des informations couvrant des thèmes plus larges ayant trait à la qualité et à la sécurité alimentaire, comme par exemple des déterminants diététiques spécifiques, et pourraient ainsi permettre aux consommateurs de donner la priorité à des thèmes spécifiques selon leurs valeurs personnelles ou selon les besoins qui leur sont propres.

7.9

L'élaboration d'un cadre commun de qualité et d'évaluation d'impact des dispositifs de garantie dans le cadre du «commerce éthique» facilitera l'élaboration de politiques d'appel d'offres plus objectives et plus éthiques au sein de la Commission et éventuellement des États membres.

7.10

Il est possible de contribuer, par les achats publics, à faire en sorte que la demande de produits fasse l'objet d'une impulsion nouvelle. Le rôle des achats à but social qu'effectuent les pouvoirs publics a été fortement consolidé et renforcé au cours des cinq dernières années, et les propositions avancées plus haut garantiront que, si les pouvoirs publics effectuant des achats choisissent, au sein du cadre législatif européen, des produits apportant des bénéfices sociaux et environnementaux, cela permette d'atteindre des résultats tangibles.

8.   Aller de l'avant

8.1

La mise au point du présent avis constitue une occasion pour que tous les principaux acteurs concernés réagissent et s'engagent dans un dialogue, même de manière très modeste. Cette consultation donne au CESE l'opportunité de stimuler des travaux au sujet de cinq nouvelles initiatives:

Dialogue continu entre les acteurs concernés les plus importants, notamment les associations de consommateurs, en Europe (et sur le plan mondial lorsque cela apparaît approprié), pour parvenir à une cohérence des politiques qui concernent le «commerce éthique» et les dispositifs visant à apporter aux consommateurs une garantie. Le CESE propose de montrer l'exemple en 2006, en mettant en place un forum des acteurs concernés qui soit spécifique à cette question et qui ressemble dans sa forme à celui qui a déjà montré ses qualités. Il pourrait s'agir notamment de déterminer la faisabilité de la mise en place d'une base de données complète relative à l'information sur les produits, laquelle base de données permettra de rassembler des informations sur les facteurs sociaux, environnementaux et autres qui améliorent la qualité et les résultats des produits, informations qui soient confirmées objectivement et rendues publiques. La DG «Développement» a d'ores et déjà fait savoir qu'elle était intéressée par la perspective de rendre publiques des données critiques et d'évaluation portant sur les dispositifs de garantie relatifs au «commerce éthique», afin d'aider les producteurs et les exportateurs à accéder au marché européen (10).

Élaboration, par une consultation plus large et plus minutieuse des acteurs concernés au sein des États membres et à l'échelon mondial, d'un cadre commun relatif aux garanties dans le cadre du «commerce éthique», en vue d'une évaluation d'impact, et d'évaluations de la qualité. Cela permettra à l'UE et aux États membres de distinguer de manière plus objective les initiatives qui présentent une véritable valeur ajoutée de celles qui ne font qu'apporter des garanties. De tels travaux constitueront un appui aux objectifs politiques de la DG «Développement» car ils encourageront des relations commerciales plus soutenables; par ailleurs, en permettant aux consommateurs de disposer d'informations plus fiables, ils appuieront également les missions de la DG «Santé et protection des consommateurs».

Implication dans l'élaboration de la norme ISO 26000, qui a pour objectif de fournir les lignes directrices relatives à la mise en œuvre concrète de la responsabilité sociale, en identifiant les acteurs concernés, en établissant des contacts avec eux, en mettant en valeur la crédibilité des rapports et des affirmations portant sur la responsabilité sociale. Bien que l'objectif premier soit l'élaboration d'une norme relative à la responsabilité sociale des entreprises, il se peut que cette démarche permette également de disposer d'un tronc commun relatif aux performances, pouvant servir à évaluer des dispositifs éthiques spécifiques.

Programme de sensibilisation des consommateurs, à partir des premières années de scolarisation, s'étendant sur l'ensemble du cursus éducatif et également à la formation tout au long de la vie, et portant sur l'influence dont ils disposent, par une consommation bien informée, sur les dynamiques sociales et environnementales. La DG «Santé et protection des consommateurs» a d'ores et déjà fait savoir que la perspective d'encourager l'éducation des consommateurs au commerce équitable l'intéressait; l'objectif de faire en sorte que des consommateurs mieux informés et dotés d'un plus grand pouvoir puissent effectuer des choix efficaces dans le cadre du marché se trouve au cœur de ses missions.

Proposition visant à la mise en place d'un centre international de recherche consacré particulièrement à la recherche relative aux fournisseurs et au marché, à l'information ayant trait aux ventes et aux questions techniques, aux initiatives d'éducation et à la mise au point de politiques, lequel centre bénéficierait, dans le cadre d'un programme conjoint, du soutien de la Commission, des États membres et de l'ensemble des principaux acteurs concernés.

9.   Note de conclusion: définition des termes utilisés au cours du présent projet d'avis

L'impact global de l'activité commerciale sur la société et l'environnement a entraîné l'apparition d'un certain nombre de termes et de concepts nouveaux. L'on trouvera ci-dessous une définition de la manière dont ces termes et concepts clefs sont utilisés dans l'avis. Compte tenu de la multiplicité des termes et des définitions dans ce domaine dans les différents pays et des difficultés de traduction dans certaines langues lors de l'élaboration de l'avis, il est essentiel d'utiliser le présent glossaire.

Responsabilité sociale des entreprises (RSE): cette expression est aujourd'hui bien établie. Il est admis que la création de richesses et le respect de certaines exigences opérationnelles nationales sont intrinsèques à toute activité économique responsable. La RSE se réfère plus particulièrement aux politiques et pratiques volontaires adoptées par une entreprise dans le but de maintenir et d'améliorer les performances sociales et environnementales de son activité. Elle peut comporter une révision par le biais soit de systèmes internes de gestion et d'évaluation, soit d'audits externes.

Commerce éthique

Il s'agit d'un sous-ensemble de la RSE, et d'un concept plus récent, utilisé principalement dans deux acceptions différentes:

Dans l'usage général, on entend par «commerce éthique» une tentative consciente d'adapter les activités commerciales (production, vente au détail ou achat) d'une entreprise, d'une organisation ou d'un individu à un ensemble de valeurs éthiques. L'éthique est une branche de la philosophie qui s'intéresse au caractère et au comportement de l'être humain. Prise dans ce sens, la notion de commerce éthique peut dès lors refléter un très large éventail de valeurs. Elle peut couvrir un large éventail de produits et de services (notamment services financiers et tourisme) établis dans divers pays, notamment dans des États membres de l'Union européenne. Dans le texte de l'avis, lorsque l'on se réfère à cette acception, l'expression «commerce éthique» apparaît entre guillemets. C'est également dans cette acception qu'il faut entendre le titre de l'avis.

Le deuxième usage, distinct du premier, est courant à la Commission ainsi que dans un certain nombre d'initiatives européennes telles que l'Initiative pour le commerce éthique (ETI) au Royaume-Uni, l'Initiative Clause Sociale (ICS) en France et la Business Social Compliance Initiative (BSCI) qui regroupe des adhérents originaires de divers pays. Dans ce cas précis, l'expression «commerce éthique» se réfère généralement aux politiques et aux pratiques adoptées par une entreprise dans le but d'assumer l'impact social et environnemental de ses opérations d'approvisionnement et en particulier les conditions de travail de ses fournisseurs. Dans le texte de l'avis, lorsque l'on se réfère à cette acception, l'expression commerce éthique apparaît en caractères gras.

Commerce équitable

On peut considérer qu'il s'agit d'un sous-ensemble du commerce éthique. Dans l'usage général, on entend par «commerce équitable» une forme de commerce dans laquelle aucune des parties prenantes au processus d'échange, qu'il s'agisse du producteur, de l'acheteur ou du vendeur, n'est désavantagée et ou chacune obtient des profits raisonnables et proportionnés. Dans le texte de l'avis, lorsque l'on se réfère à cette acception, l'expression «commerce équitable» apparaît entre guillemets.

Le deuxième usage, distinct du premier, définit l'expression comme un partenariat d'échange fondé sur le dialogue, la transparence et le respect, qui vise à ce que le commerce international se caractérise par une plus grande équité, et qui contribue au développement durable pour les producteurs exclus et désavantagés en leur offrant de meilleurs termes de l'échange et en organisant des campagnes de sensibilisation et d'information, en particulier dans les pays du Sud. À titre d'exemple, cette définition est acceptée par les organisations représentées au sein de l'Association européenne pour le commerce équitable. Dans le texte de l'avis, lorsque l'on se réfère à cette acception, l'expression commerce équitable apparaît en caractères gras.

Dispositifs visant à apporter une garantie aux consommateurs

L'avis insiste sur un aspect spécifique du «commerce éthique» et du «commerce équitable»: il s'agit des cas où la pression exercée par les consommateurs est un facteur déterminant et de ceux où le choix du consommateur — ainsi que, souvent, le fait que ces derniers soient disposés à payer davantage pour un produit — est le principal moteur du changement. Dans le texte de l'avis, ces dispositifs visant à apporter une garantie aux consommateurs sont définis comme des systèmes qui permettent aux consommateurs (et les y encouragent) d'acquérir des biens et des services produits de manière à dégager, dans le domaine social ou environnemental, certains résultats spécifiques bénéficiant soit à des communautés particulières, soit à la société dans son ensemble.

Il convient de noter que le terme de «dispositif»apparaît ici tant pour évoquer les approches de garantie de la qualité sociale et environnementale adoptées par des entreprises seules ou alliées que des dispositifs mis en place par des tierces parties indépendantes et impliquant une pluralité d'acteurs concernés.

Développement durable

«Le développement durable est un développement qui répond aux besoins du présent sans compromettre la possibilité, pour les générations à venir, de pouvoir répondre à leurs propres besoins.» (11)

Bruxelles, le 27 octobre 2005.

La Présidente

du Comité économique et social européen

Anne-Marie SIGMUND


(1)  Les termes essentiels utilisés dans le cadre du présent avis font l'objet d'une définition claire au paragraphe 9, dans la mesure où ils sont sujets à des divergences d'interprétation.

(2)  «Mouvement European fair trade marking», EXT/134, 18 avril 1996.

(3)  Top 200: The Rise of Corporate Global Power (Top 200: l'essor du pouvoir des entreprises à l'échelon mondial), Institute for Policy Studies (Institut d'étude sur les politiques) 2000. (Mesure les chiffres d'affaires des entreprises et les PIB par pays).

(4)  OMC, statistiques du commerce international, avril 2004.

(5)  COM(2001) 31.

(6)  “Instruments de mesure et d'information sur la responsabilité sociale des entreprises (RSE) dans une économie globalisée”, SOC/192.

(7)  Forum plurilatéral européen sur la RSE, rapport final, juin 2004.

(8)  Alliance d'entreprises, d'ONG et d'organisations syndicales qui vise à promouvoir et à améliorer la mise en oeuvre de codes de conduite ayant trait aux conditions de travail au sein de la chaîne d'approvisionnement.

(9)  Par exemple la BSCI (www.bsci-eu.org) et l'ICS (www.scd.asso.fr).

(10)  Il sera utile d'explorer les perspectives de coopération avec des services horizontaux relatifs aux données et à l'information, comme le projet PRISMA de l'Union européenne.

(11)  Commission mondiale sur l'environnement et le développement (CMED), Notre avenir à tous, 1987.


3.2.2006   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 28/82


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de règlement du Conseil portant organisation commune des marchés dans le secteur du houblon»

[COM(2005) 386 final — 2005/0162 (CNS)]

(2006/C 28/16)

Le 21 septembre 2005, le Conseil a décidé, conformément aux articles 36 et 37, paragraphe 2, troisième alinéa, du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la proposition susmentionnée.

Le 27 septembre 2005, le Bureau du Comité a chargé la section spécialisée «Agriculture, développement rural, environnement» d'élaborer un avis en la matière.

Compte tenu de l'urgence des travaux, le Comité économique et social européen a décidé au cours de sa 421e session plénière des 26 et 27 octobre 2005 (séance du 27 octobre 2005) de nommer M. KIENLE rapporteur général, et a adopté le présent avis par 63 voix pour, zéro voix contre et 3 abstentions.

1.   Synthèse de la position du CESE

1.1

Le CESE appuie la proposition de la Commission européenne visant à remplacer les divers règlements relatifs à l'organisation commune des marchés dans le secteur du houblon par un nouveau règlement unique.

2.   Observations

2.1

Le règlement (CEE) no 1696/71 du Conseil, du 26 juillet 1971, portant organisation commune des marchés dans le secteur du houblon a depuis lors fait l'objet de nombreuses modifications substantielles. Il est dans l'intérêt de la clarté et de la bonne compréhension de la législation communautaire d'abroger les règlement devenus sans objet et d'élaborer un nouveau règlement sur la base d'une consolidation préalable de l'ancienne législation.

2.2

Le CESE a récemment rendu plusieurs avis concernant l'organisation commune des marchés dans le secteur du houblon (1). Dernièrement, le 26 février 2004, il avait estimé «logique et cohérent» qu'après la réforme de la politique agricole commune de 2003 (résolutions de Luxembourg), les aides directes pour le houblon soient dorénavant elles aussi incorporées dans le règlement général sur le soutien direct.

2.3

Le CESE souhaite souligner également dans le présent avis que le houblon (humulus lupulus) constitue une matière première indispensable au brassage de la bière. Il est essentiellement produit dans 8 États membres de l'UE, dans le cadre de petites exploitations familiales spécialisées, d'une superficie moyenne de moins de 8 hectares. Les producteurs communautaires ont su préserver leur première place sur le marché mondial. L'organisation commune du marché du houblon a accompagné positivement les adaptations considérables qu'il a connues ces dernières années. Elle a intégré et favorisé le régime global d'assurance-qualité, qui est indispensable à la bonne marche de la production et de la commercialisation et dont la responsabilité incombe aux groupements de producteurs, en tant que chevilles ouvrières de l'organisation commune de marché. Ces principes devraient conserver leur validité dans le cadre de la nouvelle organisation commune de marché.

2.4

Le CESE fait observer que depuis des années, les dépenses consacrées au secteur houblonnier ont pu être contenues à un niveau stable, qui se situe aux alentours de 13 millions d'euros l'an.

Bruxelles, le 27 octobre 2005.

La Présidente

du Comité économique et social européen

Anne-Marie SIGMUND


(1)  JO C 110 du 30 avril 2004, pp. 116-124.

JO C 80 du 30 mars 2004, p. 46.

JO C 193 du 10 juillet 2001, pp. 38-39.


3.2.2006   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 28/83


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de règlement du Conseil modifiant le règlement (CE, Euratom) no 1605/2002 du Conseil portant règlement financier applicable au budget général des Communautés européennes»

[COM(2005) 181 final — 2005/0090 (CNS)]

(2006/C 28/17)

Le 15 juillet 2005, le Conseil, conformément à l'article 262 du traité instituant la Communauté européenne, a décidé de consulter le Comité économique et social européen sur la proposition susmentionnée.

En raison de l'urgence des travaux, le Comité économique et social européen, lors de la 421ème session plénière des 26 et 27 octobre 2005 (séance du 26 octobre 2005), a désigné M. BURANI rapporteur général (1) et a adopté l'avis suivant par 82 voix pour, aucune voix contre et 1 abstention.

1.   Introduction

1.1

Le nouveau règlement financier a été adopté par le Conseil en juin 2002 et a été suivi par l'approbation en décembre 2002 des modalités d'exécution. La Commission s'est ainsi engagée à faire rapport, avant le 1er janvier 2006, sur l'application du règlement financier et à présenter, le cas échéant, les propositions appropriées. Le document à l'examen répond à cet engagement, et fait actuellement l'objet d'une procédure de consultation au sein du Conseil et de la Cour des comptes. L'évaluation des délais nécessaires pour respecter les procédures laisse toutefois à penser que le règlement entrera en vigueur au plus tôt le 1er janvier 2007: il faudra attendre que le comité budgétaire du Conseil annonce la position des différents États membres à la fin de l'année pour que la procédure de consultation et, le cas échéant, de conciliation avec le Parlement européen soit lancée.

1.2

Dans le présent avis, le CESE entend se concentrer essentiellement sur les aspects du règlement directement ou indirectement liés aux rapports avec les organisations de la société civile. Il estime cependant qu'en principe, il devrait s'abstenir de commenter les règles relatives aux aspects plus techniques et «internes», qui ont déjà fait l'objet d'observations et de propositions de la part des organismes institutionnels compétents jouissant d'une expérience de terrain, à savoir le réseau des unités financières de la Commission (RUF), l'administration du Conseil, la Cour de justice, la Cour des comptes, les services comptables du PE, du CESE et du CdR.

1.3

Le CESE prend acte de l'opinion largement partagée par les organisations de la société civile et plus particulièrement par les ONG, selon laquelle la complexité du règlement financier actuel et des modalités de sa mise en œuvre ne permettrait pas une collaboration efficace et nuirait aux rapports entre ces organisations et la Commission. Par ailleurs, les organisations de la société civile ont déploré le manque de consultation et de dialogue de la part de la Commission, qui a selon elles créé un climat général de confusion, de frustration et de déception.

1.4

Pour sa part, le CESE souhaiterait que la collaboration entre les institutions européennes et la société civile organisée soit renforcée par le biais de consultations structurées, tout en maintenant les responsabilités et les prérogatives des institutions même s'il faut pour cela renoncer à certaines exigences. Quoi qu'il en soit, il convient d'instaurer entre les acteurs concernés des rapports basés sur la compréhension et le respect des positions de chacun. Il faudrait notamment stipuler clairement — dans le règlement financier ou ailleurs — que toute réponse négative à une demande doit être communiquée aux parties concernées et dûment motivée.

2.   Observations générales

2.1

Toute une série de principes généraux sous-tendent les nouvelles règles du règlement financier et des modalités d'exécution, entrées en vigueur au 1er janvier 2003. Le premier d'entre eux concerne la suppression des contrôles ex ante centralisés, qui a renforcé les pouvoirs des ordonnateurs et les a responsabilisés, grâce à un système de contrôles croisés au niveau financier et comptable. Ce système semble avoir porté ses fruits, mais l'expérience montre qu'il faut encore procéder à quelques ajustements.

2.2

La plupart des organismes compétents pour les questions «techniques» (évoqués au paragraphe 1.2) et des organisations de la société civile ont souligné la nécessité de garantir un meilleur équilibre entre les exigences en matière de contrôle ainsi qu'une plus grande souplesse des règles, en particulier lorsque les montants en jeu sont faibles. La Commission semble être disposée à répondre favorablement à cette requête. Le CESE souhaite pour sa part signaler que la notion de «faible montant» n'est pas la même pour les institutions (qui sont amenées à gérer des sommes énormes) et pour les acteurs de la société civile (fournisseurs, consultants, ONG, etc.) dont la taille est relativement réduite: une somme de 10.000 euros peut paraître insignifiante au niveau de l'UE, alors qu'elle constitue un montant considérable pour les opérateurs petits ou moyens.

2.3

A cet égard, il convient de rappeler que dans l'exposé des motifs du document à l'examen, la Commission précise notamment que «toute modification proposée devrait (…) mieux protéger les intérêts financiers de l'UE contre les fraudes et les activités illégales». En d'autres termes et sous un autre angle, les règles comptables de l'UE doivent (ou devraient) contribuer à une «moralisation» du marché afin de lutter contre la tentation de profiter de la «souplesse» des règles. Le CESE est conscient que des contrôles comptables minutieux et complexes représentent une lourde tâche pour l'UE, mais estime que l'intention — louable — de réduire les frais administratifs ne doit pas déboucher sur des solutions laxistes ou trop simplistes. Comme le montrent les rapports de l'OLAF, tous les niveaux sont concernés par la fraude. Le CESE signale à ce propos que la Commission aurait pu tirer de précieuses leçons des expériences passées (sous la forme de règles appropriées) si l'OLAF avait été consulté lors de la rédaction du nouveau règlement financier.

2.3.1.

Ceci dit, le CESE prend acte de la nécessité, soulignée par les organisations de la société civile, de garantir un équilibre entre efficacité et responsabilité tout en préservant le principe de partenariat entre les donateurs et les destinataires des fonds, ce qui permettrait de ne pas nuire aux initiatives innovantes potentielles ni à l'utilisation prudente des fonds publics. Le CESE approuve cette position, mais souligne qu'en aucun cas les principes sous-tendant l'utilisation des deniers publics, à savoir la transparence, l'efficacité et l'obligation de rendre des comptes, ne peuvent être bafoués.

2.4

L'affirmation selon laquelle une modification trop fréquente ou injustifiée des règles peut avoir des conséquences négatives pour les bénéficiaires et nuire à l'image de l'Union européenne mérite elle aussi d'être commentée. Cette position ne peut qu'être partagée, mais devrait être nuancée dans la mesure où l'introduction de nouvelles règles pourrait se justifier dans les secteurs où l'on enregistre davantage d'abus. A cet égard, les rapports de l'OLAF pourraient fournir des informations utiles.

3.   Observations particulières

3.1

En ce qui concerne le recouvrement des créances (art. 72 à 73 bis), le nouveau règlement financier prévoit que les créances de l'Union puissent également bénéficier des mesures adoptées en vertu des directives relatives à la coopération judiciaire, et impose aux États membres d'accorder aux créances de l'UE les mêmes privilèges qu'aux créances fiscales relevant du droit national. Bien qu'il soit conscient qu'un règlement est directement applicable par chaque État membre, le CESE se demande si ces règles n'exigent pas une adaptation des législations nationales, en particulier en ce qui concerne les lois sur la faillite qui accordent généralement un droit de préemption pour ce qui concerne les créances fiscales (au niveau national) mais ne prévoient rien pour les dettes vis-à-vis de l'UE. Toutes les législations nationales devraient prévoir un droit de préemption, quel qu'en soit la forme et bien qu'il soit opposable à des tiers.

3.2

L'adoption, en 2004, de la nouvelle directive CE sur les marchés publics doit être respectée par le nouveau règlement financier. Dès 2002, l'Union a adopté la directive sur les marchés publics, applicable dans les États membres. Le CESE ne juge pas nécessaire de se prononcer sur des règles déjà en vigueur et dont seule l'expérience pourra démontrer l'efficacité ou les lacunes exigeant d'éventuelles modifications.

3.2.1

Le CESE souhaite attirer l'attention sur un point particulier du règlement financier: un alinéa ajouté à l'article 95 prévoit la création d'une base de données commune à deux institutions ou plus, afin d'identifier les candidats qui se trouveraient en situation d'exclusion (art. 93 et 94). Alors qu'il serait souhaitable d'envisager la création d'une base de données centralisée (dont l'accès ne serait pas limité aux seules institutions), la Commission se limite à la possibilité de partager une base de données commune. Le CESE reconnaît l'utilité des bases de données en général, mais se demande si dans ce cas-ci, la fin justifierait les moyens: les partenaires des institutions sont très différents et les critères de collecte des données ne sont pas toujours homogènes.

3.3

Le CESE se dit également préoccupé par les motifs d'exclusion (art. 93) parmi lesquels figurent (art. 93, paragraphe 1 point a) les «jugements ayant autorité de chose». Cette règle a été rédigée dans le respect des lois et des principes inscrits dans la Constitution de la plupart des États membres, et est par conséquent inattaquable. Le CESE note cependant que dans certains États membres, les procédures d'appel à l'encontre d'un jugement de première instance peuvent prendre deux autres formes (appel, cassation) et qu'un jugement n'est considéré comme «définitif» que lorsque toutes les possibilités d'interjeter appel ont été exploitées. D'une instance à l'autre, de longs délais peuvent s'écouler et entre-temps, un jugement de première ou de seconde instance, même s'il est manifestement fondé, ne peut être considéré comme un motif d'exclusion valable d'un point de vue juridique. Sur le plan pratique, il incombera aux responsables de procéder à l'adjudication des marchés publics ou des contrats avec toute la prudence requise. Il sera toutefois ardu — surtout dans certains cas spécifiques — de prendre des décisions conciliant respect de la loi et prudence.

3.3.1

La règle évoquée ci-dessus, malgré son caractère inopposable, suscite une confusion certaine. Elle semble également poser un problème de cohérence avec le paragraphe suivant (art. 93 paragraphe 1 point b), selon lequel sont exclus de la participation à un marché les candidats ou soumissionnaires qui «font actuellement l'objet d'une sanction administrative visée à l'article 96». En cas de sanction administrative, un recours administratif ou judiciaire est toujours prévu; or le texte proposé semble sous-entendre qu'une sanction administrative est définitive même si elle est en cours d'application. L'incompatibilité entre ces deux règles suscite de sérieux doutes quant aux critères logiques et juridiques dont elle s'inspire: d'un côté, l'article 93 paragraphe 1 point a), qui stipule que les candidats ou soumissionnaires «soupçonnés» de fautes graves jouissent de la présomption d'innocence jusqu'à leur condamnation définitive, alors que selon l'article 93 paragraphe 1 point b), les sanctions administratives en cours (et par conséquent susceptibles de faire l'objet d'un recours en appel) constituent un motif d'exclusion immédiate. Le CESE demande non plus d' assouplir l'article 93 paragraphe 1 point b) mais de trouver un critère supplémentaire qui rendra l'article 93 paragraphe 1 point a) moins «ouvert».

3.4

Le chapitre relatif aux subventions (art. 108 et suivants) mérite une attention toute particulière, non seulement parce qu'il traite d'un sujet très délicat mais également parce que la répartition des financements publics à une multitude de bénéficiaires pour des motifs très variés peut susciter une série de critiques au sein de l'opinion publique. Ces critiques, parfois justifiées, trahissent souvent un manque de transparence réel ou supposé, dû y compris à l'opacité des règles et de leurs critères d'application. Il faut à cet égard reconnaître qu'il n'est pas aisé de rédiger des règles visant à encadrer un domaine aussi diversifié et multiforme, avec une variété de cas telle qu'il est difficile de les classifier dans des catégories précises. La transparence (prise ici dans le sens de la clarté des concepts et du langage utilisé) constitue par conséquent la garantie majeure de l'administration contre les éventuelles conséquences qu'implique son large pouvoir de discrétion.

3.4.1

L'article 109 constitue un exemple marquant des problèmes de compréhension qui se posen: le paragraphe 2 de cet article stipule que « les subventions ne peuvent avoir pour objet ou pour effet de donner lieu à profit », tandis que le paragraphe 3 point c) précise que «le paragraphe 2 ne s'applique pas (…) aux actions ayant pour objet de renforcer la capacité financière du bénéficiaire ou de générer un revenu». La différence concrète entre «profit» et «revenu» est loin d'être claire: le CESE invite à clarifier cet article tant au niveau de la forme que du fond.

3.4.2

L'article 109 paragraphe 2 point d) précise que l'interdiction de générer du profit ne s'applique pas aux subventions de faible montant prenant la forme de montants forfaitaires ou de financements à taux forfaitaire article 113 bis paragraphe 1 point b) ou c). En ce qui concerne le concept de «faible montant», le CESE invoque les observations émises au paragraphe 2.2: il semble nécessaire de trouver un compromis entre ce que ce concept recouvre pour l'UE et ce que signifie un «montant objectivement important» pour les bénéficiaires des subventions. Quoi qu'il en soit, cette question devrait être résolue dans le cadre du règlement financier et non des modalités d'exécution.

3.4.3

Toujours à propos des subventions, et plus particulièrement en cas de faibles montants, à aucun moment le règlement financier n'évoque une obligation de compte rendu ou un quelconque engagement à présenter un rapport sur l'utilisation réel des montants perçus. Le CESE a pris acte du souhait de la Commission de réduire les coûts administratifs, mais ne peut accepter le fait que l'octroi des deniers publics ne fasse pas l'objet d'un suivi. Les comptes rendus devraient être contrôlés ponctuellement, et des sanctions devraient être prévues en cas de manquement, ne fut-ce que pour réaffirmer le principe de saine administration des affaires publiques.

3.4.4

L'article 114 suscite également quelques commentaires. Bien que le paragraphe 4 stipule que «des sanctions administratives et financières d'un caractère effectif, proportionné et dissuasif peuvent être appliquées (…) par l'ordonnateur», il semble légitime de se demander quelles sont les garanties offertes par les bénéficiaires de subventions (qui bien souvent diffèrent considérablement des titulaires de contrats ou de marchés de par leurs caractéristiques et la nature de leur patrimoine) en ce qui concerne leur capacité ou leur volonté d'assumer les obligations dérivant des sanctions qui leurs sont infligées. Selon le CESE, il serait nécessaire — dans le cas de demandeurs dont le siège se trouve dans un État membre — que ce soit l'État membre concerné qui entreprenne les démarches relatives aux demandes et qui garantisse la bonne exécution des obligations dérivant des éventuelles sanctions administratives ou financières.

4.   Conclusions

4.1

Le CESE approuve la ligne suivie par la Commission dans sa proposition relative à un nouveau règlement financier, en particulier en ce qui concerne la suppression des contrôles ex ante centralisés et l'instauration de contrôles préalables à l'autorisation des paiements relatifs aux projets approuvés.

4.2

Par ailleurs, le CESE invite à la prudence en ce qui concerne les réponses aux demandes adressées par les services financiers de nombreuses institutions, qui tendent à simplifier ou à supprimer une série de formalités et de contrôles pour les contrats et les subventions concernant de «faibles montants». Même s'il reconnaît que les contrôles représentent une lourde charge en termes de ressources et de temps, il estime que la tentative — louable — de réduire les coûts devrait être contre-balancée par la nécessité de ne pas donner aux citoyens européens et aux opérateurs l'impression que les affaires concernant de «faibles» montants sont traitées de façon superficielle ou avec négligence.

4.3

Les organisations de la société civile demandent quant à elles que toute révision du règlement financier soit faite en consultation avec la Commission et soit fondée sur le principe de la compréhension mutuelle tout en tenant compte de la nécessité d'une bonne gestion financière pour les deux parties. Le CESE soutient cette demande, mais rappelle que toutes les décisions doivent obligatoirement être adoptées dans le respect d'une gestion saine et transparente des deniers publics.

Bruxelles, le 26 octobre 2005.

La Présidente

du Comité économique et social européen

Anne-Marie SIGMUND


(1)  Sous réserve d'approbation par l'assemblée plénière.


3.2.2006   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 28/86


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de directive du Conseil définissant les modalités du remboursement de la taxe sur la valeur ajoutée, prévu par la directive 77/388/CE, en faveur des assujettis non établis à l'intérieur du pays mais qui sont établis dans un autre État membre»

{COM(2004) 728 final — 2005/0807 (CNS)]

(2006/C 28/18)

Le 20 juillet 2005, le Conseil de l'Union européenne a décidé, conformément à l'article 93 du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la proposition susmentionnée.

Vu l'urgence des travaux, lors de sa 421e session plénière des 26 et 27 octobre 2005 (séance du 26 octobre 2005) le Comité économique et social européen a désigné M. BURANI rapporteur général et a adopté le présent avis par 79 voix pour, aucune voix contre et 1 abstention.

1.   Introduction: le document de la Commission

1.1

En octobre 2003, la Commission présentait un document (1) passant en revue la stratégie TVA qu'elle avait lancée en juin 2000. L'un des objectifs de cette stratégie était la simplification des procédures, qui a mené dans un document (2) ultérieur de la Commission, d'octobre 2004, à ce que trois initiatives concrètes soient proposées: deux d'entre elles (3) ont donné lieu à un avis du CESE (4), la troisième étant l'objet du présent document.

1.2

La proposition de la Commission a pour but d'accélérer et de simplifier les procédures de remboursement, en faveur des assujettis non établis à l'intérieur du pays, de la TVA ayant grevé les biens qui leur ont été livrés ou les services qui leur ont été rendus à l'intérieur du pays, ou ayant grevé l'importation de biens dans le pays.

1.3

En fait, les règles générales qui régissent cette matière restent inchangées: le véritable progrès réside dans la proposition de simplifier substantiellement les formalités administratives auxquelles doivent se plier les assujettis ayant droit à un remboursement de la TVA, tout en établissant leur droit de se voir dédommagés lorsque l'administration fiscale débitrice retarde le paiement au-delà d'un certain délai.

1.4

La simplification des formalités administratives est consacrée par l'article 5 de la proposition de directive: celui-ci prévoit que pour être remboursé, il suffit à l'intéressé d'introduire une demande par voie électronique, et non plus une demande sur formulaire standardisé accompagné des originaux des factures et des documents de douane. Bien entendu, la demande doit contenir une série d'indications, précisées dans l'article, devant permettre à l'administration fiscale d'identifier et de contrôler la régularité de l'opération.

1.5

De manière générale, la demande doit concerner des achats de biens ou de services facturés ou des importations effectuées au cours d'une période qui n'est ni inférieure à trois mois ni supérieure à une année civile. Elle doit être présentée dans un délai de six mois à compter de la fin de l'année civile au cours de laquelle la taxe est devenue exigible. Il est toutefois possible, dans certaines circonstances, de modifier tant la période sur laquelle porte la demande de remboursement que les délais de présentation de celle-ci.

1.6

L'administration fiscale de l'État membre dans lequel la TVA a été acquittée doit communiquer sa décision dans un délai de trois mois à compter de la date d'introduction de la demande. Le remboursement doit être effectué dans le même délai. Toute réponse négative doit être motivée. Les recours sont admis dans les mêmes délais et conditions que ceux prévus pour les assujettis établis dans l'État membre. D'éventuels renseignements complémentaires peuvent être demandés, mais uniquement dans un délai de trois mois à compter de l'introduction de la demande; dans ce cas, toutefois, le délai de remboursement commence à courir à la date où ces informations ont été demandées. En l'absence de décision de rejet expresse prise dans les délais appropriés, le remboursement est considéré comme accordé.

1.7

Comme cela a été dit au paragraphe 1.6 ci-dessus, le versement des montants dus doit être effectué dans un délai de trois mois à compter de l'introduction de la demande. Pour tout retard, l'État membre doit verser au requérant un intérêt de 1 % par mois sur la somme due.

2.   Observations du CESE

2.1

Toute proposition tendant à simplifier les formalités administratives auxquelles les utilisateurs sont soumis ne peut que recevoir l'accord du CESE, surtout si, comme dans le cas à l'examen, la simplification se traduit pour les administrations publiques aussi en un allégement des procédures et qu'elle favorise une meilleure organisation du travail. En outre, dans le cas d'espèce, la simplification correspond à un réel besoin plutôt qu'à de simples velléités d'allégement des procédures: il convient en effet de mentionner, comme cela a déjà été souligné par le CESE (5) que dans l'introduction aux trois propositions (6), la Commission elle-même déclare que «… la procédure de remboursement prévue actuellement … semble être tellement lourde que, selon les estimations, 53,5 % des grandes entreprises n'ont pas demandé les remboursements auxquels elles avaient droit à un moment ou à un autre, en raison de ces problèmes».

2.2

La directive s'applique, comme l'indique son titre même, aux «assujettis non établis à l'intérieur du pays mais qui sont établis dans un autre État membre», selon les modalités et pour les opérations prévues par les dispositions actuellement en vigueur.

2.3

L'innovation vraiment importante figure à l'article 5 de la proposition de directive, qui prévoit l'admissibilité d'une demande envoyée par voie électronique contenant toutes les références permettant à l'administration de retrouver les documents nécessaires déjà en sa possession, au lieu d'une demande sur papier en annexe de laquelle figureraient les factures, attestations douanières originales et autres justificatifs. Le CESE souscrit naturellement à cette proposition, mais ne peut manquer d'observer que dès à présent, même sans l'aide de l'électronique, les administrations pourraient suivre la même procédure si seulement elles étaient mieux et plus efficacement organisées.

2.4

Cette observation est moins banale qu'on pourrait le croire et elle contient un message concret: si la mise en oeuvre de la directive devait traîner en longueur, il serait souhaitable qu'entre-temps, les administrations fiscales et douanières s'emploient à procéder à une rationalisation de leurs méthodes, qu'elles se fondent sur un support papier ou électronique, afin de permettre à l'utilisateur de transmettre une documentation simplifiée.

2.5

Le CESE approuve pleinement le contenu de l'article 6 de la proposition (7): il relève avec satisfaction les efforts déployés par la Commission pour imposer aux États membres une règle qui devrait toujours être à la base de leurs relations avec les citoyens, qu'ils soient acteurs économiques ou non: l'administration publique a le devoir de répondre avec rapidité à toutes les demandes qui lui sont soumises. Les délais de réaction établis — en particulier celui de trois mois imposé à l'administration publique pour procéder au remboursement ou donner une réponse négative — semble équitable et raisonnable. On peut toutefois se demander s'ils sont réalistes pour chacun des 25 pays de l'Union: dans certains d'entre eux, en effet, les retards de remboursement sont tellement longs qu'ils donnent à penser qu'ils relèvent d'une inefficacité fondamentale, à laquelle il saurait difficilement être remédié rapidement.

2.6

L'article 8 s'inspire lui aussi d'un principe d'équité qui devrait toujours valoir dans le domaine des rapports entre l'administration publique et les contribuables. Il dispose en effet que si le remboursement n'intervient pas dans un délai de trois mois à compter de la date de la demande ou de l'envoi des éclaircissements demandés, l'administration publique devra verser au requérant des intérêts de retard de 1 % par mois. Le CESE est d'accord sur le principe, mais estime cette mesure difficile d'application. Il rappelle en effet qu'un taux mensuel de 1 % correspond à un intérêt annuel composé de 12,68 %. Dans certains pays, les lois de protection des consommateurs fixent des limites au-delà desquelles un taux est considéré comme usuraire; dès lors, si le taux de 12,68 % est supérieur à cette limite, il s'ensuivrait que le taux d'intérêt à acquitter par l'administration publique serait fixé par une loi à un niveau considéré comme illégal par une autre loi. Le CESE propose donc de modifier l'article 8 dans le sens suivant: les intérêts de retard devraient être calculés, dans chaque pays, sur la base de celui que les lois nationales appliquent aux contribuables retardataires.

2.7

En conclusion, le CESE marque son accord quant aux principes introduits par la proposition de directive, en particulier en ce qui concerne les droits des requérants, le remboursement et l'incitation — indirecte mais efficace — à améliorer le fonctionnement de l'administration publique. Il recommande seulement que les règles soient davantage empreintes de réalisme, pour tenir compte du fait qu'il existe encore entre les 25 États membres de grandes différences en termes de niveaux de protection des consommateurs, d'efficacité et de ressources technologiques.

Bruxelles, le 26 octobre 2005.

La Présidente

du Comité économique et social européen

Anne-Marie SIGMUND


(1)  COM(2003) 614 final.

(2)  COM(2004) 728 final.

(3)  «Proposition de directive du Conseil modifiant la directive 77/388/CEE en vue de simplifier les obligations relatives à la taxe sur la valeur ajoutée» et «Proposition de règlement du Conseil modifiant le règlement (CE) no 1798/2003 en vue d'introduire des modalités de coopération administrative dans le cadre du système de guichet unique et de la procédure de remboursement de la taxe sur la valeur ajoutée».

(4)  Avis du CESE sur la «Proposition de directive du Conseil modifiant la directive 77/388/CEE en vue de simplifier les obligations relatives à la taxe sur la valeur ajoutée» et la «Proposition de règlement du Conseil modifiant le règlement (CE) no1798/2003 en vue d'introduire des modalités de coopération administrative dans le cadre du système de guichet unique et de la procédure de remboursement de la taxe sur la valeur ajoutée» COM(2004) 728 final – 2004/0261 (CNS) – 2004/0262 (CNS).

(5)  JO C 267 du 27.10.2001.

(6)  COM(2004) 728 du 29.10.2004, point 1, paragraphe 7.

(7)  Voir paragraphes 1.6 et 1.7 du présent document.


3.2.2006   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 28/88


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil abrogeant la directive 90/544/CEE du Conseil relative aux bandes de fréquences désignées pour l'introduction coordonnée du système paneuropéen public terrestre de radiomessagerie unilatérale (RMU) dans la Communauté»

[COM(2005) 361 final — 2005/0147 (COD)]

(2006/C 28/19)

Le 15 septembre 2005, le Conseil a décidé, conformément à l'article 95 du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la proposition susmentionnée.

Le 27 septembre 2005, le Bureau du Comité a chargé la section spécialisée «Transports, énergie, infrastructures, société de l'information» de préparer les travaux du Comité en la matière.

Compte tenu de l'urgence des travaux, le Comité économique et social européen a décidé au cours de sa 421ème session plénière des 26 et 27 octobre 2005 (séance du 27 octobre 2005) de nommer M. RETUREAU rapporteur général, et a adopté le présent avis par 64 voix pour et 2 abstentions.

1.   Proposition de la Commission

1.1

La directive proposée (1) vise à abroger la directive ERMES de 1990 (2) qui réservait la bande hertzienne de 169,4 à 169,8 Mégahertz (MHz) de fréquence au système européen de RMU. Une directive d'abrogation est nécessaire pour abroger une directive antérieure (principe du parallélisme des formes).

1.2

Base juridique: article 95 TCE (Marché intérieur, application de l'article 14 TCE); procédure de coordination (art. 251 TCE).

1.3

Motivation: l'utilisation de cette bande de fréquence pour la RMU tombe en désuétude, et le spectre de cette bande est de moins en moins utilisé; d'autres utilisations existent déjà (SMS par GSM). Dans le cadre de la Décision du Parlement et du Conseil «spectre radioélectrique» de 2002 (3), la Commission veut introduire d'autres services par un plan harmonisé d'utilisation, préparé avec le CEPT (4), qui fera l'objet d'une décision ultérieure de la Commission.

1.4

Les principales utilisations communautaires envisagées de la bande de fréquence 169,4 à 169,8 MHz concernent le renforcement de l'inclusion sociale et de la mobilité des personnes malentendantes et âgées dans la Communauté (5), l'amélioration de la protection contre le vol, la sécurité apportée par une efficacité accrue des capacités de surveillance des entreprises de distribution d'eau, de gaz et d'électricité, et la mise à disposition d'outils de communication électronique; un impact positif est souligné pour les industries du secteur des services de communications à distance.

1.5

Les États membres pourront attribuer des fréquences au niveau national dans les secteurs de la bande précitée qui ne seront pas attribués au plan communautaire par la Commission et le CEPT.

2.   Observations du Comité

2.1

Les besoins en matière de spectre radioélectrique pour développer des services nouveaux ne cessent de s'accroître, et la proposition d'abrogation de la directive RMU vise à ouvrir un secteur actuellement sous-utilisé du spectre à de nouvelles utilisations, en particulier en faveur des personnes handicapées, des personnes âgées, au renforcement de la sécurité, aux services mobiles, etc.

2.2

Le Comité approuve en conséquence la proposition, avec l'espoir qu'en particulier les services relatifs à l'inclusion sociale seront développés prioritairement, et que cela conduira à la création d'entreprises et d'emplois dans des activités indispensables aux citoyens européens. Il invite également les États membres à privilégier l'inclusion sociale et l'emploi dans la société de l'information lorsqu'ils attribueront des fréquences à de nouveaux services à distance.

Bruxelles, le 27 octobre 2005.

La Présidente

du Comité économique et social européen

Anne-Marie SIGMUND


(1)  COM(2005) 361 final.

(2)  Directive 90/544/CEE du Conseil du 9 octobre 1990 relative aux bandes de fréquences désignées pour l'introduction coordonnée du système paneuropéen public terrestre de radiomessagerie unilatérale (RMU) dans la Communauté (directive ERMES).

(3)  Décision no676/2002/CE du Parlement européen et du Conseil du 7 mars 2002 relative à un cadre réglementaire pour la politique en matière de spectre radioélectrique dans la Communauté européenne (décision «spectre radioélectrique»).

(4)  Conférence européenne des administrations des postes et télécommunications (CEPT). V. «final report from CEPT, Radio Spectrum Ctee, rewiew of the frequency band 169.4-169.8» MHz, RSCOM04-69, Brussels, 24 Nov. 2004.

(5)  Directive cadre 2002/21/CE, qui prévoit que les besoins de groupes sociaux particuliers, notamment les utilisateurs handicapés, doivent être satisfaits; conclusions du Conseil informel des ministres des télécommunications de Vitoria appelant à ce que l'accessibilité de tous les services électroniques soit assurée pour les personnes handicapées ou âgées, et plan d'action eEurope 2005 adopté par le Conseil européen des 21 et 22 juin 2002 à Séville.


3.2.2006   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 28/89


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de décision du Parlement européen et du Conseil modifiant la décision no 2256/2003/CE en vue de la prolongation en 2006 du programme pour la diffusion des bonnes pratiques et le suivi de l'adoption des TIC»

[COM(2005) 347 final — 2005/0144 (COD)]

(2006/C 28/20)

Le 10 octobre 2005, le Conseil a décidé, conformément à l'article 157(3) du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la proposition susmentionnée.

Le 27 septembre 2005, le Bureau du Comité a chargé la section spécialisée «Transports, énergie, infrastructures, société de l'information» de préparer les travaux du Comité en la matière.

Compte tenu de l'urgence des travaux, le Comité économique et social européen a décidé au cours de sa 421ème session plénière des 26 et 27 octobre 2005 (séance du 27 octobre 2005) de nommer M. RETUREAU rapporteur général, et a adopté le présent avis par 79 voix pour, 1 voix contre et 2 abstentions.

1.   Introduction

1.1

Le programme MODINIS (1) s'inscrivait dans le prolongement de l'objectif des Conseils de Lisbonne des 23 et 24 mars 2000 (faire de l'économie de l'UE une économie de la connaissance, la plus compétitive au monde) et de Feira des 19 et 20 juin 2000 adoptant le plan d'action eEurope 2005 et les perspectives d'encourager à long terme une économie du savoir favorisant l'accès de tou(te)s les citoyen(ne)s de l'Union aux nouvelles technologies de l'information et de la communication (TIC).

1.2

Il s'agissait d'un programme pluri-annuel de financement de la Société de l'Information (SI), portant sur la période 2003-2005 dans le cadre du suivi du plan e-Europe qui vient à expiration à la fin de cette année; la Commission propose la prolongation de MODINIS en 2006 pour ce qui concerne la coopération et la promotion de bonnes pratiques en matière de TIC et d'analyse de la SI par la méthode ouverte de coordination (les questions de sécurité des réseaux et de l'information qui étaient incluses dans le programme initial sont désormais transférées à l'ENISA, et ne sont plus financées par MODINIS).

1.3

En effet, il convient de garantir une continuité d'action entre la fin du plan e-Europe fin 2005, le lancement de l'initiative i2010 en 2006 et le lancement du programme d'appui stratégique en matière de TIC de manière anticipée en 2007. La prolongation de MODINIS du 1er janvier au 31 décembre 2006 évite toute solution de continuité; le coût en est estimé à 7,72 millions d'euros. Un programme détaillé de travail indiquant les priorités et les actions pour 2006 sera prochainement publié. La décision proposée présente de l'intérêt pour l'EEE.

2.   Observations générales

2.1

Le Comité s'est exprimé à diverses occasions dans nombre d'avis pour appuyer et encourager toutes les initiatives de promotion de la SI, telles que le plan eEurope, et se prononcera prochainement sur i2010; il est de l'avis que l'échange d'expériences et de bonnes pratiques, l'établissement d'indicateurs pour l'analyse de la SI sont indispensables et apportent une valeur ajoutée afin de promouvoir la compétitivité de l'économie européenne de la connaissance, la cohésion et l'inclusion sociale ainsi que l'emploi qualifié et une croissance durable.

2.2

A cet égard, le Comité avait notamment demandé que les pays membres soient incités à instituer des procédures consultatives sur les thèmes du programme afin de tenir compte au mieux des propositions et des besoins exprimés par les usagers, les experts, et l'économie des réseaux. Cela est également souhaitable dans le cadre du programme cadre qui prendra le relais de eEurope, où notamment les questions des qualifications et de l'emploi dans la SI devraient faire l'objet de consultations approfondies avec les partenaires sociaux.

2.3

Le Comité appuie la proposition de décision présentée par la Commission pour prolonger d'un an le programme MODINIS. Il souhaite être informé très prochainement du programme de travail préparé par la Commission pour 2006.

Bruxelles, le 27 octobre 2005.

La Présidente

du Comité économique et social européen

Anne-Marie SIGMUND


(1)  COM(2002) 425 final - 2002/0187 CNS; décision no 2256/2003/CE; JO C 61 du 14.3.2003 – rapporteur: M. Daniel RETUREAU.


3.2.2006   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 28/90


Avis du Comité économique et social européen sur la «Préparation de la 6ème conférence ministérielle de l'OMC — Position du CESE»

(2006/C 28/21)

Le 10 février 2005, le Comité économique et social européen a décidé, conformément à l'article 29, paragraphe 2 de son règlement intérieur, d'élaborer un avis sur le thème: «Préparation de la 6ème conférence ministérielle de l'OMC — Position du CESE».

La section spécialisée «Relations extérieures», qui était chargée de la préparation des travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 10 octobre 2005 (M. Staffan NILSSON, rapporteur).

Lors de sa 421e session plénière des 26 et 27 octobre 2005 (séance du 27 octobre 2005), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 95 voix pour, 4 voix contre et 3 abstentions.

Résumé des principaux points

1.

Le CESE estime que la réussite de la conférence ministérielle de Hong-Kong enverrait un signal positif et explicite de confiance, indiquant de la part des États membres un engagement vis-à-vis d'un solide régime multilatéral des échanges. Cela renforcerait également la confiance dans l'économie mondialisée face aux incertitudes créées par choc pétrolier, les menaces globales quant à la sécurité et les pressions protectionnistes croissantes.

2.

Le CESE trouve matière à préoccupation dans le rythme des négociations menant à la conférence ministérielle de Hong-Kong. Plusieurs semaines nous séparent de cette conférence et au cours de cette période, il faudra réaliser des progrès impressionnants dans tous les domaines pour résoudre certains des problèmes litigieux et pour rattraper le retard accumulé par rapport au calendrier de négociations qui avait été prévu.

3.

Le CESE demande que l'on distingue mieux entre les pays en développement. Le CESE réaffirme que les dispositions concernant le traitement spécial et différencié font partie intégrante des accords de l'OMC et devraient être pleinement prises en compte dans les négociations. Il conviendrait en particulier de prendre en considération les préoccupations des PMA. Il conviendrait de fournir aux pays à faibles revenus une assistance technique en matière d'échanges commerciaux et de création de capacité pour leur permettre d'améliorer leur participation au commerce global.

4.

Le CESE considère que d'ici à la conférence ministérielle de Hong-Kong, il faut que les positions des États membres convergent sur l'établissement de modalités contraignantes pour l'ensemble des soutiens à l'exportation, sur le traitement et l'ampleur de la réduction des aides agricoles qui faussent les échange et sur une formule de réduction des droits de douane permettant à la fois d'améliorer l'accès aux marchés et de laisser aux États la flexibilité nécessaire à la préservation des secteurs agricoles stratégiques.

5.

Le CESE souligne que l'Union européenne a déjà beaucoup concédé en matière agricole au cours de cette négociation: initiative Tout Sauf les Armes en 2001, découplage des aides de la PAC en 2003, engagement à l'élimination des subventions à l'exportation en 2004. Il appartient désormais aux autres pays de réaliser les efforts nécessaires pour aboutir à un accord global.

6.

Le CESE réaffirme que pour ce qui est de l'AMNA (accès aux marchés non agricoles), les États membres devraient trouver un accord sur la structure de la formule de réduction des tarifs, ainsi que sur d'autres éléments clés du paquet AMNA, et répondre aux nécessaires critères chiffrés lors de la conférence de Hong-Kong.

7.

Le CESE regrette le caractère décevant des résultats obtenus jusqu'à présent dans les négociations sur les services et il est favorable à la recherche de méthode et de modalités complémentaires de négociations pendant les mois qui restent avant la conférence ministérielle de Hong-Kong.

8.

Le CESE considère que s'agissant des questions d'antidumping et de subventions, les États membres devraient au moins parvenir à un accord général en la matière, accord qui consisterait pour les ministres à accepter de lancer des négociations fondées sur des textes juridiques.

9.

Le CESE demande que l'on élimine le plus rapidement possible les entraves aux échanges de biens et de services environnementaux, et que l'on arrête une liste de biens et de services environnementaux en temps utile pour la conférence ministérielle de Hong-Kong.

10.

Le CESE estime qu'il est important d'intégrer dans le système commercial international les normes essentielles de l'OIT qui sont reconnues à l'échelle internationale en matière de travail et demande que l'on accorde à l'OIT le statut d'observateur permanent à l'OMC. Pour le CESE, il est nécessaire de faire progresser le débat d'ensemble sur les droits sociaux.

11.

Le CESE encourage les différentes organisations de la société civile à prendre des mesures pour participer aux campagnes d'information sur les questions qui sont en jeu dans l'ordre du jour de Doha, et à contribuer par leurs évaluations et leurs propositions au succès du développement durable. Il plaide pour l'instauration d'un dialogue institutionnalisé entre l'OMC et la société civile et pour une participation de la société civile organisée au mécanisme de règlement des différends.

12.

Il convient de renforcer encore davantage le caractère démocratique et la transparence de l'OMC. Le CESE a aussi proposé précédemment que l'OMC se donne une dimension parlementaire.

1.   Introduction

1.1

Le CESE a présenté dans des avis ses observations et ses prises de position préalablement à des conférences ministérielles antérieures au sein de l'OMC: la quatrième qui s'est tenue à Doha en 2001 (1), ainsi que la cinquième, qui s'est tenue à Cancún en 2003 (2). Ces avis demeurent largement pertinents. Ce nouvel avis à adopter en prévision de la sixième conférence ministérielle, qui aura lieu à Hong Kong au mois de décembre 2005, concernera principalement les nouvelles négociations actuellement en cours, négociations qui font partie du cycle de Doha (ou, pour employer une terminologie plus correcte, de «l'Agenda de développement de Doha», l'ADD).

1.2

Il existe aussi d'autres avis du CESE qui concernent et qui affectent la position du Comité par rapport à la poursuite du processus de l'OMC, comme par exemple l'avis sur «La dimension sociale de la mondialisation» (3) faisant suite à une communication de la Commission européenne (4). Les travaux que mène en ce moment le CESE dans le cadre de la coopération avec les pays ACP abordent aussi directement des questions qui touchent aux négociations de l'OMC, étant donné que ce que l'on appelle les APE (accords de partenariat économique), accords qui sont en cours d'élaboration à l'horizon 2007 dans le cadre de l'accord de Cotonou, doivent être conformes au traité de l'OMC. De surcroît, le CESE a adopté un avis intitulé «Accord général sur le commerce des services (AGCS) — Négociations Mode 4 (mouvement occasionnel des personnes physiques)» (5).

1.3

Le cycle de Doha a débuté lors de la quatrième conférence ministérielle de Doha en 2001. En réalité, son appellation dans les documents officiels est: «Programme de travail de Doha», mais on l'a dénommé par la suite «Agenda de développement de Doha», ou ADD. L'objectif visé était de pouvoir conclure le cycle de négociations en janvier 2005. Un examen de mi-parcours a été effectué lors de la cinquième conférence ministérielle de Cancun, ce qui a toutefois abouti à une rupture des négociations, étant donné l'impossibilité d'adopter une déclaration ministérielle au terme de la conférence. Il fut néanmoins possible de réaliser certains progrès sur les dossiers. Après une initiative renouvelée, en juillet 2004, les négociations purent prendre un nouveau départ, avec l'adoption par le Conseil général de l'OMC, le 1er août, de ce que l'on appelle couramment «le paquet de juillet». Les négociations purent ainsi reprendre, avec à l'horizon l'objectif d'un accord qui serait conclu en décembre 2005 au plus tard. Des «mini-conférences ministérielles» ont été organisées afin d'imprimer des orientations politiques à des négociations passablement techniques. L'on nourrit maintenant l'espoir de pouvoir accomplir des progrès suffisants lors de la sixième conférence ministérielle de Hong Kong pour mener à leur terme les négociations dans le courant de l'année 2006.

1.4

Alors que quelques semaines seulement nous séparent de la sixième conférence ministérielle de Hong Kong, qui se tiendra en décembre 2005, l'on peut constater de graves insuffisances de progrès dans tous les domaines sur lesquels portent les négociations. Il est actuellement peu probable que le cycle de Doha puisse se conclure à la fin du mois de décembre 2005. Si la conférence de Hong Kong se solde par un échec, cela risque d'entraîner un certain nombre de conséquences négatives.

affaiblissement de l'OMC en tant qu'organisation,

abandon du système multilatéral de négociations au sein de l'OMC, au profit d'accords bilatéraux et régionaux, ce qui ne va pas dans le sens des besoins des pays en développement,

atteinte portée à l'économie mondialisée et à la confiance dans le développement économique, ce qui aurait pour effet d'aggraver l'incertitude quant au développement futur,

incertitude due au fait qu'aux États-Unis, le mandat de négociation donné par le Congrès expire le 30 juin 2007 et que l'on n'est pas assuré de voir ce mandat renouvelé.

2.   La reprise du cycle de Doha — Les observations du CESE en vue de la 6ème conférence ministérielle de l'OMC

2.1

L'ADD privilégie tout particulièrement les besoins des pays en développement. Les domaines qui sont en cours de négociations et où il conviendrait de prendre des mesures de libéralisation des échanges sont notamment les suivants:

L'agriculture, où se pose la question de l'amélioration de l'accès au marché, des réductions des aides intérieures qui perturbent les échanges et de la réduction des subventions aux exportations,

L'«Accès aux Marchés Non Agricoles/AMNA», domaine où il s'agit de l'amélioration de l'accès aux marchés des produits autres que les produits de l'agriculture, en particulier des produits industriels.

Les services, où la libéralisation et l'amélioration de l'accès aux marchés dans le cadre de l'accord sur le commerce des services, dit «Accord Général sur le Commerce des Services», ou AGCS, se trouvent au centre des négociations.

Les procédures commerciales.

«Traitement spécial et différencié/TSDAgenda de développement», domaine à propos duquel sont traitées des questions d'une importance toute particulière pour les pays en développement.

Les règles antidumping.

Les questions sociales.

La perspective environnementale.

3.   Les négociations agricoles

3.1

Le CESE constate également que l'Union européenne s'est placée en première ligne dans les négociations sur l'agriculture. L'UE a déjà mis en oeuvre des réformes d'envergure de la politique agricole commune et s'est également engagée à éliminer progressivement les aides existantes aux exportations, à une double condition. D'une part, les autres pays doivent prendre les engagements correspondants pour toutes les formes d'aides directes et indirectes aux exportations, y compris les aides aux produits alimentaires qui sont utilisées pour réguler le marché. D'autre part, comme l'ont rappelé dans une lettre commune datant de mai 2004, les Commissaires européens au Commerce extérieur, Pascal LAMY, et à l'agriculture, Franz FISCHLER, cette élimination des subventions aux exportations ne sera possible que dans le cadre d'un accord agricole équilibré entre ses trois volets.

3.2

Le CESE estime qu'il faudra réussir de manière équilibrée et simultanée dans chacun des trois domaines sur lesquels portent les négociations agricoles: accès au marché, aides nationales et concurrence à l'exportation. Rien n'est décidé tant que tout n'est pas décidé.

3.3

De l'avis du CESE, il est d'une importance cruciale que d'autres pays exportateurs fassent des offres correspondant à celles que l'Union européenne a déjà faites. Le CESE juge tout particulièrement nécessaire que les pays ayant des entreprises de commerce d'État («State Trading Enterprises») et où existent les crédits à l'exportation, et les pays qui utilisent les aides aux produits alimentaires pour des raisons commerciales proposent des initiatives permettant de faire progresser les négociations.

3.4

Des réformes ont été apportées à la politique agricole commune de l'Union européenne afin, entre autres, de rendre possible un futur accord au sein de l'OMC. De l'avis du CESE, il faut respecter ces réformes dans tous leurs éléments. Certains États membres ont proposé de radicaliser la politique agricole commune, de la rapatrier au niveau national ou d'y mettre fin purement et simplement. Les négociations de l'OMC et les besoins de recettes des pays en développement sont souvent utilisés comme arguments à l'appui de ces demandes. Le Comité estime que cela n'est pas compatible avec un marché commun intérieur dans l'UE. Les réformes réalisées n'ont d'ailleurs pas été mises en oeuvre en totalité et il n'est pas possible de prendre la mesure de leurs effets. C'est pourquoi le résultat du cycle de Doha pourrait, à cet égard, aller au-delà des réformes de la PAC qui ont été mises en oeuvre.

3.5

Il est une question qui revêt une importance particulière, et c'est la question de savoir comment les négociations abordent certains problèmes qui ne concernent pas directement les échanges commerciaux: la multifonctionnalité, la protection des animaux, la qualité des aliments et la sécurité alimentaire. L'accord sur les produits agricoles prévoit que ces intérêts qui ne sont pas liés aux échanges commerciaux doivent être pris en compte. Mais la question qui n'a pas encore de réponse est celle de savoir comment le faire. La difficulté consiste à faire entrer ces importantes questions en ligne de compte, mais aussi les questions phytosanitaires et autres, sans que cela puisse être utilisé à des fins protectionnistes pour faire échec à la concurrence. Mais si l'on veut rendre l'OMC et ses accords légitimes et acceptables aux yeux des populations, il faut, d'ores et déjà et dans les négociations à venir sur la libéralisation des échanges, prendre sérieusement ces questions en considération.

3.6

Dans ce contexte, l'on ne saurait non plus négliger le fait que dans le domaine commercial, les différents acteurs du marché s'attachent à promouvoir leurs propres programmes et leurs propres normes. Par exemple, les chaînes commerciales européennes EUREPGAP ont récemment décidé, lors d'une conférence réunissant des participants venus de la plupart des continents, d'élargir leur norme de bonne pratique agricole. Bien que cette norme se situe en partie à un niveau peu élevé, inférieur aux obligations légales imposées par certains pays, cela montre, de l'avis du CESE, que les opérateurs du marché sont à la fois demandeurs de dispositions correspondant à une tendance qui se manifeste globalement et disposés à s'y conformer: il s'agit en l'occurrence d'exiger que les consommateurs puissent davantage faire confiance aux produits commercialisés.

3.7

Pour la première fois, il existe aussi depuis mai 2005 une norme qui est reconnue à l'échelle internationale dans le cadre de l'Organisation mondiale de la santé animale (World organisation for Animal Health, OIE) et qui devrait constituer un premier pas vers l'adoption de règles internationales au sein de l'OMC.

4.   Accès aux marchés non agricoles (AMNA)

4.1

L'Union européenne fait partie des intervenants dont les tarifs pour les produits industriels sont les moins élevés du monde. Des produits importés de nombreux pays parviennent aussi sur le marché communautaire en raison d'accords bilatéraux ou autres, ou bien d'engagements unilatéraux, qui accordent à certains pays des préférences ou un traitement privilégié sur la base de l'accord SPG et du programme «Tout Sauf des Armes» (Everything But Arms). Le CESE s'est déjà prononcé précédemment en faveur de nouvelles réductions à convenir dans un cadre multilatéral, surtout pour ce qui concerne les produits environnementaux et les produits présentant un intérêt particulier pour les pays en développement (PVD).

4.2

Une réduction des tarifs peut améliorer l'accès aux marchés de certains pays développés pour les pays pauvres en voie de développement et pour les pays les moins avancés (PMA); et, ce qui est peut-être plus important, cela renforcera le commerce sud-sud. Le CESE est d'avis que des pays comme l'Argentine, le Brésil et l'Inde ont atteint un niveau de développement significatif. Il convient que ce pays participent aux négociations et que ce qui leur est offert corresponde à leur niveau de développement économique; il ne conviendrait guère de leur garantir la même flexibilité que celle que l'on offre généralement aux pays en développement. Les pays les moins avancés n'ont pas lieu de réduire leurs tarifs douaniers conformément à ce que l'on appelle le «paquet de juillet».

4.3

De l'avis du CESE, il importe que l'on parvienne à des tarifs fixes, comme on l'a fait dans les négociations agricoles de manière à améliorer la transparence et la sécurité des échanges et des transactions. Des tarifs qui ne seraient pas fixes seraient désavantageux pour les pays en développement et pour ceux des PMA qui ont fait en sorte que leurs tarifs douaniers soient fixes.

4.4

Il faut, de l'avis du CESE, mettre en évidence les entraves non tarifaires («Non-Trade Barriers» ou NTB), telles que les réglementations techniques ou administratives et les procédures non coordonnées, et réduire leurs effets lorsque cela est possible. Il faut élaborer des accords sur les entraves techniques au commerce dans le cadre des efforts visant à la mise en place de réglementations communes de marquage et de certification. Il y a lieu, dans le cadre des négociations de l'OMC, de tenir compte dans une plus grande mesure des normes internationales existantes.

4.5

L'accord GATT et les réglementations de l'OMC permettent de mettre en place des entraves au commerce lorsque celles-ci ont pour objet de protéger la santé humaine, la santé animale ou celle des plantes, ou bien de préserver des ressources naturelles susceptibles d'épuisement, si de telles mesures s'accompagnent de limitations apportées à la production ou à la consommation intérieures. Ainsi, par exemple, c'est l'accord dit «SPS» (accord sur les mesures sanitaires et phytosanitaires) qui prévaut en cas de conflit entre l'accord GATT et l'accord SPS. Le CESE est d'avis que cette protection doit aussi pouvoir être intégralement respectée dans le cadre d'un futur accord.

4.6

Le CESE est favorable à la proposition de la Commission concernant ce que l'on appelle une simple formule «à la Suisse», consistant en un coefficient pour tous les pays développés et des coefficients différents pour les pays en développement, en fonction du recours qu'ils font aux mesures de flexibilité du paragraphe 8 (par exemple, s'ils ont moins recours à ces mesures de flexibilité, le coefficient sera plus élevé et de ce fait, les réductions résultant de la formule seront moins importantes). Il importe qu'au cours des semaines qui restent avant la conférence ministérielle de Hong Kong, les États membres de l'OMC s'entendent sur la structure qui doit être celle de la forme des réductions de tarifs douaniers et d'autres éléments essentiels du paquet AMNA.

4.7

Le CESE est favorable à l'accord réalisé au sein du groupe de négociation, accordent sur lequel les négociations AMNA devraient opter sur tous les produits non inscrits à l'annexe 1 de l'accord sur l'agriculture. Le CESE approuve en outre la participation active de l'UE aux négociations AMNA sur les composantes tarifaires sectorielles fondées sur l'approche dite «de la masse critique». Le CESE note que d'autres questions importantes, telles que la conversion des équivalents ad valorem et le traitement des lignes tarifaires non liées devront être traitées rapidement d'ici au mois de décembre.

4.8

Jusqu'à présent les négociations ont donné trop peu de résultats pour que l'on puisse compter qu'une avancée puisse avoir lieu lors de la conférence de Hong Kong de décembre 2005.

5.   Les services

5.1

C'est l'accord AGCS sur le commerce des services qui recèle le plus grand potentiel pour l'avenir. Ce secteur de négociation se trouve être celui où l'on a accompli le moins de progrès. Les engagements pris par les États membres ont été insuffisants en nombre et en qualité. Pour l'Union européenne, il s'agit là d'un domaine particulièrement important. Les prestations de services dans les pays les plus riches représentent approximativement 65 % de la production totale, mais pour les pays les plus pauvres aussi, la production de services est relativement élevée, avec approximativement 40 % de la production totale. Tandis que le commerce international des services représente seulement 20 % environ du commerce mondial

5.2

Des secteurs tertiaires efficaces sont importants pour la croissance de toute économie. Il est difficile d'imaginer un pays qui connaîtrait une croissance économique élevée et soutenue et des volumes accrus d'échanges internationaux sans infrastructures modernes de services dans des secteurs tels que les services financiers, les services juridiques et autres services professionnels, les télécommunications et les transports. Et, il convient de ne pas l'oublier, les services (communications, distribution, banque, etc.) constituent également un facteur essentiel de production des marchandises.

5.3

Le CESE regrette la qualité des diacres des offres initiales et révisées qui ne créent pas de libéralisation supplémentaire dans les secteurs des services. Les grandes économies en développement (par exemple, l'Afrique du Sud, le Brésil, le Venezuela) et certains pays développés (par exemple, les États-Unis) doivent aller au-delà des niveaux existants d'accès au marché, de manière à apporter de nouveaux débouchés commerciaux, de nouveaux investissements, et de nouvelles possibilités d'emploi aux fournisseurs de services à l'échelle mondiale. Le rôle constructif de l'Inde dans les négociations sur les services est à citer au titre d'exemple encourageant.

5.4

Le CESE approuve la prise en compte du stade de développement des pays pauvres en développement, et notamment le fait que l'on exige peu des pays les moins avancés (PMA). Néanmoins, il importe que les PMA maintiennent leur engagement vis-à-vis de la participation aux négociations sur les services, avant tout dans leur propre intérêt économique.

5.5

Dans son avis sur l'AGCS mode 4, le CESE approuve la facilitation de la prestation de services temporaires telle que la propose l'UE. Le CESE souligne l'importance qu'il y a à prendre des mesures pour assurer la protection des travailleurs temporaires et pour garantir la non-discrimination et la mise en place de mécanismes de surveillance appropriés. Le CESE est favorable dans le principe à la proposition qu'a présentée l'ESF (Forum européen des services) et qui vise à la création d'un «permis AGCS». Cela améliorerait la fluidité du mouvement des prestataires de services aussi bien au départ qu'à destination de l'Union européenne et rendrait aussi plus transparent le suivi de l'utilisation du Mode 4. Le CESE invite instamment l'Union européenne et les États membres à ne pas accepter, pour le moment, d'élargissement du Mode 4 aux travailleurs semi-qualifiés ou non qualifiés.

5.6

Le CESE rappelle la nécessité de maintenir la capacité des pays à réglementer les services publics dans le but d'atteindre des objectifs sociaux et des objectifs de développement, et il est favorable à l'idée d'exclure des négociations les services publics tels que l'enseignement, l'eau, la santé, et l'énergie.

5.7

Le CESE note que les négociations sur les services, qui se fondent sur l'approche «demande-offre» depuis plus de 5 ans, ont produit très peu de résultats positifs en termes de libéralisation des marchés des services. Un certain nombre de participants aux négociations mettent en question l'efficacité de cette approche. Le CESE est favorable à la recherche, pendant les mois qui nous séparent de la réunion ministérielle de Hong-Kong, de méthodes et de modalités complémentaires de négociations sur les services, méthodes et modalités qui imposeraient des obligations plus strictes aux membres de l'OMC (par exemple, approches «par formules» au niveau multilatéral et plurilatéral, approche sectorielle, etc.).

5.8

Le CESE est disposé à étudier la proposition de l'UE concernant un tronc commun d'engagements sur le commerce des services et une approche «par formules». Cette proposition peut toutefois influer sur un principe fondamental du GACS, à savoir qu'il doit exister une certaine souplesse quant à la sélection et à l'étendue des engagements en matière de libéralisation. Certains pays en développement ont aussi réagi contre cette proposition.

5.9

Le CESE est favorable à l'établissement de liens entre d'une part, un accès élargi par la voie du mode 4 et d'autre part, l'élimination des restrictions à la propriété des entreprises de services par des étrangers en vertu du mode 3 (par exemple, pour une présence commerciale) — cette démarche de compromis est susceptible de persuader plusieurs pays en développement de s'engager dans les négociations sur les services.

6.   Facilitation des échanges

6.1

La facilitation des échanges, seul élément «survivant» des «questions de Singapour», est très importante pour la croissance économique de n'importe quelle pays, mais plus particulièrement, pour celles des pays pauvres et des pays les moins avancés qui pourraient réduire les niveaux de pauvreté par une plus grande participation au commerce international. La modernisation et la simplification des exportations/importations, des paiements internationaux, des transports, de la logistique et des régimes douaniers, ainsi qu'un renforcement de l'utilisation des technologies de l'information et une amélioration de l'accès aux circuits de distribution sont de nature à réduire considérablement les coûts de transfert des marchandises des producteurs aux consommateurs, à augmenter les flux d'échanges commerciaux internationaux, et à apporter de nouveaux investissements aux pays en développement. Le CESE s'est à plusieurs reprises déclaré favorable au traitement de ces questions par des réglementations convenues dans un cadre multilatéral.

6.2

La modernisation des procédures et des infrastructures en matière douanière et en matière de transports peut être très coûteuse pour les pays pauvres, et c'est pourquoi il faut que les pays développés apportent une assistance technique et des aides à la création de capacité. Il faut toutefois que les pays bénéficiaires prennent les mesures préventives nécessaires pour faire en sorte que les ressources dont il s'agit soient utilisées de manière transparente et efficace. S'il est vrai que les PMA sont généralement dispensés des obligations liées à la facilitation échanges, le CESE note néanmoins qu'une modernisation plus rapide des procédures commerciales servirait mieux leurs intérêts que le fait de prendre lentement et progressivement des engagements.

6.3

Au cours des semaines précédant la réunion ministérielle, plus de 30 propositions émanant des différents États membres de l'OMC et concernant des mesures de facilitation des échanges et d'assistance technique indispensable seront évaluées par le groupe de négociation sur la facilitation dès échanges. Le CESE espère que les pays en développement bénéficieront à terme de dispositions relatives à la facilitation dès échanges et de l'ampleur des engagements sera fonction de leur capacité à tenir ces engagements.

7.   Agenda (programme) de développement — traitement spécial et différencié

7.1

Il est bien évident que les effets favorables au développement devraient provenir principalement d'un meilleur accès aux biens industriels et aux services, ainsi qu'aux marchés agricoles, de régimes douaniers plus simples, de normes plus claires en matière de SPS, de réglementations plus fortes de l'OMC, etc. Pour citer un exemple, la Banque mondiale estime que des résultats réalisables issus des négociations de Doha pourraient augmenter les revenus mondiaux de 100 milliards d'USD par an, somme dont une grande partie irait vers les pays pauvres et les pays en développement.

7.2

Le CESE invite la CE à veiller à ce que dans les négociations préalables à la réunion ministérielle de Hong-Kong, et également par la suite, l'on accorde une grande importance aux aspects ci-après:

progrès réels dans la mise en oeuvre des propositions qui concernent le renforcement du traitement spécial et différencié pour les pays en développement les plus faibles et pour les PMA, avec une exemption pour les PMA de l'obligation d'ouverture de leurs marchés et la possibilité pour ces pays de continuer à protéger les produits essentiels pour leur sécurité alimentaire et leur développement rural par des droits de douane élevés,

une plus grande clarification des situations des pays en développement et des catégories de pays en développement, en distinguant mieux ceux qui connaissent des retards persistants et ceux qui bénéficient déjà d'une économie émergente,

un appui efficace, sous forme de financements et de projets, à l'assistance technique et à la création de capacité administrative pour les pays en développement les moins avancés,

prise en considération sérieuse du problème de l'érosion, pour les pays pauvres, des préférences tarifaires, y compris les compensations financières potentielles,

mise en oeuvre des décisions d'éliminer les subventions qui perturbent le commerce de produits de base essentiels, tels que le coton et le sucre,

mise en oeuvre de la décision du 30 août 2003 relative au paragraphe 6 de la déclaration de Doha sur l'accord TRIPS et la santé publique, en vue de trouver une solution aux difficultés des États membres de l'OMC qui n'ont pas de capacité de production pharmaceutique, de manière à permettre une utilisation efficace de la disposition de l'accord TRIPS qui autorise le recours aux licences obligatoires dans les cas d'urgence nationale et pour combattre des épidémies majeures.

7.3

D'autres pays industrialisés devraient également offrir un accès hors quota et hors tarifs aux marchés pour les marchandises des pays les moins avancés, comme l'UE l'a fait avec le programme «Tout sauf des armes» (EBA). Jusqu'ici, les États-Unis, le Japon, le Canada n'ont pas réagi à cette initiative, malgré les promesses faites lors de la conférence du millénaire, en 2001.

7.4

Il faut compléter l'ouverture des marchés aux produits des pays les plus pauvres par les ressources financières énormes destinées à l'assistance à la création de capacité et au développement des infrastructures, pour aider ces pays à produire et à acheminer les marchandises jusqu'au marchés mondiaux. Le CESE accueille avec une grande satisfaction l'engagement pris par l'UE au sommet du G8, à Gleneagles, d'augmenter le niveau de son aide au développement commercial pour l'amener à un milliard d'euros par an. Les États-Unis, ainsi que des institutions financières internationales comme la Banque mondiale et le FMI, devraient suivre l'exemple européen et affecter davantage de ressources aux besoins qui existent en termes de développement de capacité commerciale.

8.   Règles antidumping

8.1

Le nombre d'affaires «antidumping» augmente dans des proportions considérables depuis l'Uruguay Round dans de nombreux pays en développement et pays émergents. Et, comme les tarifs douaniers connaissent de fortes réductions, les règles antidumping sont de plus en plus utilisées à des fins protectionnistes, comme l'illustrent certaines affaires antidumping aux États-Unis et ailleurs. On abuse souvent de biais méthodologiques et des pratiques d'enquête antidumping (par exemple, l'estimation des préjudices) pour empêcher des entreprises étrangères d'accéder à des marchés. Cela sert généralement les intérêts d'un petit nombre d'entreprises aux dépens de l'intérêt public au sens large.

8.2

Le CESE est favorable à la révision des dispositions de l'accord antidumping de l'OMC convenu de restreindre l'utilisation des mesures antidumping pour des raisons protectionnistes et politiques. Quelques-unes des mesures proposées, telles que l'interdiction des plaintes de chaîne, «la règle du droit de douane le moins élevé», le test de l'intérêt public, la limitation des périodes d'enquête et la durée des mesures antidumping, rendraient plus difficile l'utilisation des règles antidumping à des fins de protectionnisme.

8.3

Le CESE partage l'évaluation critique de la Commission concernant les progrès réalisés dans les négociations sur les règles antidumping. Dans le peu de temps qui reste avant la conférence ministérielle de Hong-Kong, il conviendrait de parvenir au moins à un accord général sur ces questions, accord par lequel les ministres accepteraient de lancer des négociations fondées sur des textes juridiques.

9.   Questions sociales

9.1

Il vaut la peine d'observer que le paragraphe 8 de la déclaration ministérielle de Doha est ainsi libellé: «Nous réitérons la déclaration que nous avons faite à la Conférence ministérielle de Singapour concernant les normes fondamentales du travail internationalement reconnues. Nous prenons note des travaux en cours à l'Organisation Internationale du Travail (OIT) sur la dimension sociale de la mondialisation.»

9.2

Le CESE considère qu'il est important d'intégrer dans le système commercial international les normes fondamentales du travail de l'OIT. Même si ces sujets restent en dehors du champ d'application des négociations de l'agenda de Doha, le Comité soutient les initiatives de l'OIT dans ce domaine et se déclare favorable à ce que l'on accorde à l'OIT le statut d'observateur permanent à l'OMC. Il sera difficile d'amener l'opinion à reconnaître la légitimité d'un système de commerce mondial où les travailleurs perdent leurs emplois à cause d'entreprises où les gens travaillent dans les conditions inhumaines et où il n'existe aucun droit syndical d'aucune sorte. C'est pourquoi il conviendrait d'intégrer les huit conventions fondamentales de l'OIT au système commercial multilatéral de l'OMC. Il peut être nécessaire de prévoir des mesures d'accompagnement destinées à protéger les droits sociaux en ce qui concerne l'accord AGCS qui règle la libre circulation temporaire des services fournis par des personnes physiques (mode 4).

9.3

Le CESE accueille favorablement les recommandations de la CE sur la mise en oeuvre du rapport de la Commission mondiale de l'OIT sur la dimension sociale de la mondialisation. Le CESE approuve la stratégie de la CE qui consiste à faire entrer les normes fondamentales du travail dans le système de commerce international et dans le système des investissements en intégrant ces normes dans des accords commerciaux bilatéraux et régionaux. Le CESE est également favorable à l'insertion d'un chapitre social dans les négociations en cours entre l'UE et le Mercosur.

9.4

Le CESE souligne que la CE devrait s'en tenir à sa politique consistant à mettre la vie un forum permanent institutionnalisé qui rassemblera l'OMC, l'OIT, la CNUCED, la Banque mondiale, le FMI, et d'autres acteurs internationaux en vue de favoriser une cohérence internationale des politiques.

10.   La perspective environnementale

10.1

Dans l'ancien accord GATT, le mot d'«environnement» n'était même pas prononcé. Bien que le domaine de compétence de l'OMC soit le commerce, la prise en considération de l'environnement fait maintenant partie des objectifs du traité de l'OMC. La déclaration de Doha a donné mandat d'examiner les aspects relatifs au commerce et à l'environnement dans le but d'obtenir que soient mises en évidence d'éventuelles contradictions entre les règles liées au commerce qui sont inscrites dans les conventions internationales sur l'environnement et la réglementation de l'OMC.

10.2

Le CESE estime que la commission du commerce et de l'environnement devrait poursuivre les négociations sur la question des rapports entre les règles de l'OMC et les accords environnementaux multilatéraux (AEM), malgré le caractère décourageant des progrès accomplis jusqu'ici. Le CESE demande également que l'on donne aux secrétariats des AEM et du PNUE le statut d'observateurs à l'OMC.

10.3

Le CESE estime qu'il conviendrait d'éliminer le plus rapidement possible les entraves aux échanges de biens (par exemple, les produits concernant l'hygiène, la gestion des eaux usées, ainsi que l'énergie renouvelable) et de service à caractère environnemental. Le CESE espère qu'une liste de biens et de services environnementaux sera arrêtée en temps utile pour la conférence ministérielle de Hong-Kong.

11.   L'OMC et société civile

11.1

Le CESE invite les différents acteurs de la société civile (entrepreneurs, organisations socioprofessionnelles, partenaires sociaux, ONG) à prendre des mesures pour:

participer à des campagnes d'information sur les questions soulevées par l'agenda de Doha,

organiser des réunions internationales, à un niveau intersectoriel ou à l'intérieur des secteurs d'une activité,

contribuer par leurs évaluations, leurs propositions et leur participation, au succès du développement durable à l'échelle mondiale.

11.2

Parallèlement à l'ouverture d'un dialogue institutionnalisé entre l'OMC et la société civile, il convient de toute urgence d'engager une réflexion sur la manière d'associer la société civile organisée et les autres partenaires sociaux (au sens des catégories 1 et 2 de l'ONU qui règlent la participation des organisations non gouvernementales et des partenaires sociaux) au mécanisme de règlement des différends.

11.3

Le Comité participera à ces initiatives. Avant la conférence ministérielle de Hong-Kong, le CESE organisera une conférence, comme en 2004, pour examiner des propositions visant à améliorer la démocratie participative en associant la société civile organisée aux activités de l'OMC.

11.4

Le CESE prévoit de renforcer le dialogue sur le commerce international avec les représentants d'autres conseils économiques et sociaux à la fois des États membres de l'UE et des pays tiers, par exemple des pays ACP, des pays les moins avancés et des ensembles commerciaux régionaux des Amériques (tels que MERCOSUR, la Communauté andine), ainsi qu'en Asie (ANASE, ASACR) et en Afrique (CEDEAO et CDAA) et avec d'autres pays en développement.

11.5

L'avis de 2003 concernant une OMC à visage humain contient également des propositions précises visant à promouvoir une plus grande participation des pays en développement et de la société civile aux activités de l'OMC. L'avis du CESE propose de donner à l'OMC une dimension parlementaire, d'instituer officiellement un dialogue entre l'OMC et les parties concernées de la société civile organisée, de fournir une aide permanente aux pays les moins avancés en transférant des ressources et de la compétence technique, et d'instituer un dialogue officiel entre l'OMC et d'autres organisations internationales (ONU, Banque mondiale, FMI, l'OCDE, OIT, etc.).

11.6

Le CESE estime qu'avant que n'entre en vigueur un nouvel accord commercial, il y a lieu de procéder à des évaluations précises d'impact en ce qui concerne la sécurité alimentaire, l'emploi, les normes sociales et l'égalité entre hommes et femmes, en particulier pour les pays en développement. À cet égard, le CESE accueille favorablement les différentes «Études d'impact de durabilité» (SIA) dont la Commission a pris l'initiative et qui donnent d'ores et déjà des indications sur ce qu'il y a lieu de faire pour que le cycle de négociations commerciales aboutisse aux résultats véritablement souhaités. Le CESE désire également que les acteurs de la société civile soient consultés à propos de la mise en oeuvre de ces études.

Bruxelles, le 27 octobre 2005.

La Présidente

du Comité économique et social européen

Anne-Marie SIGMUND


(1)  Avis du Comité économique et social sur la «Préparation de la 4e Conférence ministérielle de l'OMC: position du CES», M. Bruno VEVER, rapporteur, Mme Maria CANDELAS SÁNCHEZ, corapporteuse (JO C 36, 8/02/2002, p.99).

(2)  Avis du Comité économique et social européen sur la «Préparation de la cinquième conférence ministérielle de l'OMC», M. Bruno VEVER, rapporteur (JO C 234, 30/09/2003, p. 95).

(3)  «La dimension sociale de la mondialisation – comment la politique de l'UE contribue à en étendre les avantages à tous», M.Thomas ETTY et Mme Renate HORNUNG-DRAUS, rapporteurs (JO C 234, 30/09/2005, p. 41).

(4)  COM(2004) 383 final.

(5)  «Accord général sur le commerce des services (AGCS) – Négociations Mode 4 (mouvement des personnes physiques)», Susanna FLORIO, rapporteur.


3.2.2006   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 28/97


Avis du Comité économique et social européen sur la «Communication de la Commission au Conseil, au Parlement européen, au Comité économique et social européen et au Comité des régions: dialogue entre les sociétés civiles de l'Union européenne et des pays candidats»

[COM(2005) 290 final]

(2006/C 28/22)

Le 29 juin 2005, la Commission européenne a décidé, conformément à l'article 262 du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la proposition susmentionnée.

La section spécialisée «Relations extérieures», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 10 octobre 2005 (rapporteur: M. PEZZINI).

Lors de sa 421e session plénière des 26 et 27 octobre 2005 (séance du 27 octobre 2005), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 99 voix pour, 5 voix contre et 9 abstentions.

1.   Contenu essentiel de la communication

1.1

L'expérience que l'on peut tirer des élargissements réalisés jusqu'à présent nous enseigne que les citoyens ont été mal préparés et informés sur ce qui a été accompli en vue de favoriser ce processus. Dans la perspective des futurs engagements européens, il y a lieu de développer le dialogue avec la société civile, c'est-à-dire avec ce qu'il est convenu d'appeler le troisième pilier (1).

1.2

Le développement du dialogue entre les sociétés civiles doit poursuivre les objectifs suivants:

renforcer les contacts et les échanges d'expériences entre tous les secteurs de la société civile, entre les États membres et les pays candidats,

approfondir, dans l'Union européenne, la connaissance et la compréhension des pays candidats, surtout de leur culture et de leur histoire, afin que les opportunités et les défis des futurs élargissements soient clairs,

approfondir, au sein des pays candidats, la connaissance et la compréhension de l'Union européenne, notamment des valeurs qui représentent ses fondements, de son fonctionnement et de ses politiques,

les définitions que l'on a données de la société civile sont différentes. La Commission opte pour la définition la plus large et cite, à ce propos, le CESE: «l'ensemble de toutes les structures organisationnelles dont les membres servent l'intérêt général par le biais d'un processus démocratique, basé sur le discours et le consensus, et jouent également le rôle de médiateurs entre les pouvoirs publics et les citoyens» (2).

1.3

La Commission trace un cadre stratégique qui prévoit le renforcement des actions en cours, parmi lesquelles est citée l'expérience du Comité économique et social européen mûrie au cours de dix années, et de nouvelles actions qui développent et approfondissent le processus en cours.

1.3.1

Parmi les actions devant être développées en Croatie et en Turquie, les programmes suivants sont cités: Socrates, Léonardo, Jeunesse; les actions Jean Monnet, Marie Curie, Culture et médias. Le lancement d'un programme destiné aux ONG et aux autres organismes de la société civile est prévu.

1.3.2

En ce qui concerne les actions futures, tout en soulignant que la société civile sera chargée de l'élaboration de nouveaux programmes, grâce à son expérience, la communication présente un large éventail de propositions et suggère de réaliser:

un partenariat à long-terme entre les ONG, les partenaires sociaux et les organisations professionnelles, qui pourra s'appuyer sur des financements communautaires,

des liens étroits entre les organisations de la défense des droits de la femme,

la création d'un conseil des entreprises UE-Turquie,

de nouveaux jumelages entre les communautés locales,

des échanges de jeunes, d'universitaires et de professionnels,

des échanges culturels,

une participation plus importante aux programmes communautaires dans le domaine de la culture et des médias,

une meilleure formation linguistique,

la promotion des débats publics, notamment en ligne,

des échanges d'expériences et des actions de sensibilisation de journalistes,

un dialogue avec les églises et les religions.

1.3.3

Les visas, lorsqu'ils sont prévus, devront également être simplifiés et délivrés dans de brefs délais.

1.4

Afin de réaliser les mesures programmées dans le cadre du dialogue social, un investissement de 40 millions d'euros environ est prévu. Ce montant semble plutôt insuffisant au CESE.

2.   Observations

2.1

Le titre du document de la Commission laisse supposer un dialogue avec tous les pays candidats, mais en fait, la communication concerne presque exclusivement la Turquie, à l'exception d'une brève allusion à la Croatie.

2.2

D'après le CESE, il aurait été utile de développer le thème de la communication pour la Croatie, la Serbie et les Balkans occidentaux (3) également.

2.3

La Turquie occupe une place importante sur la rive méridionale de la Méditerranée, elle relève donc également de la politique euro-méditerranéenne. Il serait utile que la Commission clarifie les caractéristiques et les particularités de cette double fonction.

2.4

Depuis les années quatre-vingt dix, les travailleurs et les entrepreneurs des pays candidats ont été associés aux organismes européens de représentation (Confédération européenne des syndicats (CES); Union des confédérations de l'industrie et des employeurs d'Europe (UNICE), Union européenne de l'artisanat et des petites et moyennes entreprises (UEAPME), Eurochambre) et ont participé à diverses phases du dialogue social; la Turquie, notamment, s'est illustrée par son engagement et sa présence. Le CESE est d'avis qu'il serait utile de mener une réflexion sur les retombées de cet engagement et de ces expériences sur les syndicats et les entrepreneurs actifs en Turquie.

2.5

Le dialogue social, conçu comme un dialogue visant à préparer les négociations d'adhésion, joue un rôle considérable pour l'acquis et les stratégies communautaires et ne peut faire l'objet d'improvisation. Selon le CESE, la Commission devrait lui consacrer une attention particulière, afin que tous les organismes de représentation soient impliqués de manière continue.

2.5.1

De nombreuses fondations et organisations culturelles sont présentes en Turquie, dans lesquelles la participation des jeunes est importante. D'après le CESE, ces associations culturelles pourraient constituer une excellente opportunité pour approfondir les problématiques communes et mettre en évidence les instruments les plus aptes à exercer une influence sur le développement de la société.

2.5.2

Il conviendrait également de promouvoir et soutenir les jumelages entre collectivités locales, universités et centres de formation dans la mesure où ils ont le mérite de permettre une diffusion des expériences et d'inciter les acteurs de la société civile à évaluer les différentes modalités par le biais desquelles sont abordés et résolus les problèmes culturels, sociaux et économiques.

2.6

Afin d'obtenir des résultats concrets, il serait opportun de stimuler, par le biais d'instruments appropriés, la participation de représentants des pays candidats aux travaux de la DG Affaires sociales et des organismes de représentation qui oeuvrent au sein de la communauté.

2.7

Il convient également de favoriser et soutenir la collaboration entre les différentes Églises, notamment entre les Églises chrétiennes et islamiques.

2.8

De manière analogue, il conviendrait d'approfondir, par tous les moyens, le dialogue sur les différentes formes de culture.

2.9

En ce qui concerne le programme sur les ONG qui sera publié prochainement par la Commission, le CESE souhaite qu'il puisse apporter des propositions concrètes et utiles en vue d'un échange constructif d'expériences.

3.   L'action du CESE

3.1

Depuis 1995, le Comité économique et social européen a fondé, en contact étroit avec la Commission, une série de Comités consultatifs mixtes (CCM) avec tous les États de l'élargissement.

3.2

Un CCM a été institué également avec les États ACP (Afrique, Caraïbes et Pacifique) et il représente actuellement un point de référence de la Commission pour l'application de l'Accord de Cotonou et pour la gestion des Accords de partenariat économique (APE).

3.3

Le CESE dispose également d'un Comité de suivi «Amérique latine» qui a pour fonction de promouvoir le développement des organisations socioéconomiques dans les pays d'Amérique latine, de favoriser la participation de ces organisations aux processus d'intégration régionale en cours (Amérique centrale, Communauté andine, Mercosur) et d'assurer le suivi des accords d'association en vigueur ou en cours de négociation.

3.4

Au cours de la deuxième moitié des années quatre-vingt dix, le Comité de suivi Euromed a été créé au sein du CESE, afin d'aider la Commission dans la mise en oeuvre de la politique sociale et économique orientée vers la rive sud de la Méditerranée.

3.4.1

La Table ronde «UE-Inde» et l'Agenda transatlantique ont permis à l'Union européenne d'accroître la visibilité de son organisation sociale et culturelle pour le reste du monde.

3.5

En 2004, le groupe de contact «Balkans occidentaux» a été créé, ayant pour mission de promouvoir la coopération entre le CESE et les organisations de la société civile des Balkans occidentaux, y compris les Conseils économiques et sociaux nationaux (4), afin d'aider la société civile des Balkans occidentaux à renforcer son intégration avec l'Union européenne et, à terme, à y adhérer.

3.5.1

Le CESE s'est penché sur la thématique de l'Europe du Sud-Est par l'élaboration de:

un rapport d'information sur les relations entre l'Union européenne et certains pays du Sud-Est de l'Europe (5),

un avis d'initiative sur le «Développement des ressources humaines dans les Balkans occidentaux» (6),

un avis d'initiative sur la «Promotion de la participation des organisations de la société civile dans le Sud-Est de l'Europe (SEE) — Expériences passées et défis à venir» (7),

un avis exploratoire sur «Le rôle de la société civile dans le cadre de la nouvelle stratégie européenne pour les Balkans occidentaux» (8),

«La candidature de la Croatie à l'adhésion à l'UE» (9).

3.5.2

Le Comité a adopté également des avis d'initiative sur la Bulgarie, la Roumanie et la Croatie.

3.5.3

Le CESE a déjà présenté deux évaluations partielles sur la politique européenne de voisinage (10), actuellement le CESE est en train d'élaborer un avis exploratoire sur ce même thème (11).

3.6

Le CCM UE-Turquie, contrairement aux autres Comités qui prévoyaient la participation de six ou de neuf membres du CESE (deux ou trois par groupe), a vu le jour avec, dès l'origine, dix-huit membres du CESE et dix-huit du côté turc. Ce nombre double de membres s'expliquait par l'étendue du pays et par la complexité des problèmes qui pouvaient surgir et par le fait qu'il s'agissait du premier État de religion islamique qui demandait à devenir membre de la famille européenne.

3.6.1

Le comité consultatif mixte UE/Turquie est un organe paritaire qui réunit des représentants des sociétés civiles organisées de l'UE et de la Turquie. Ses membres proviennent de différentes organisations de la société civile: les chambres de commerce, les secteurs de l'industrie et de l'artisanat, le secteur du commerce, les associations d'employeurs, les syndicats de travailleurs, les coopératives, les organisations agricoles, les associations de consommateurs, les ONG, les représentants du secteur tertiaire, etc.

3.6.2

Les réunions du CCM UE-Turquie (12) ont eu lieu alternativement à Bruxelles et dans des localités de la Turquie; lors de chaque réunion, des thèmes d'intérêt social et économique ont été abordés et débattus. Le CCM a tenu sa 19ème réunion à Istanbul les 7 et 8 juillet 2005 (13).

3.6.3

Parmi les thèmes les plus intéressants qui, dans le cadre des rencontres, ont fait l'objet d'une réflexion et d'un débat, rappelons:

les relations entre la Turquie et l'UE dans le domaine de l'énergie (1996),

la coopération entre l'UE et la Turquie en matière de petites et moyennes entreprises et de formation professionnelle (1996),

les produits agricoles dans le cadre de l'union douanière CE-Turquie (1997),

l'impact social de l'union douanière (1998),

le rôle de la femme pour le développement et dans les phases décisionnelles (1999),

les migrations (2000),

la recherche et le développement (2000),

la libéralisation des services (2000),

le dialogue social et les droits économiques et sociaux en Turquie (2001),

l'impact de la crise économique en Turquie (2002),

les disparités régionales en Turquie (2002),

l'évolution de l'agriculture en Turquie (2002),

les progrès réalisés par la Turquie sur la voie de l'adhésion à l'UE (2003),

l'intégration des personnes handicapées dans la vie sociale (2004),

les microentreprises et les processus de normalisation (2004),

le développement des relations UE-Turquie, l'implication de la société civile dans le processus de négociation pour l'adhésion (2005).

3.7

Comme nous pouvons le remarquer, de nombreux thèmes de l'acquis communautaire ont eu un écho et une résonance dans les rencontres avec la société civile turque. Il convient de souligner la présence au cours de ces rencontres, surtout celles qui ont eu lieu en Turquie (14), de nombreux représentants des organisations les plus représentatives de la société turque.

3.8

Outre les membres du CCM, de nombreux représentants des différentes organisations turques étaient présents, notamment aux réunions qui se sont tenues en Turquie; ils ont apporté une contribution significative à une connaissance réciproque.

3.9

Parmi les initiatives lancées par le CCM, il convient de souligner la volonté de créer, en Turquie également, un Comité économique et social, à l'instar du Comité économique et social européen et de ses homologues présents dans de nombreux États européens (15).

3.10

La communication de la Commission témoigne du rôle actif du CESE, au cours des dix dernières années, dans l'établissement de relations avec la Turquie (16). La Commission formule le souhait que le Comité des régions puisse jouer un rôle similaire avec les régions turques.

4.   La mise en œuvre du troisième pilier et la démocratie de proximité

4.1

Parmi les tendances qui sont apparues au cours des dernières années, en plus de l'affirmation de la subsidiarité, la culture de la proximité a acquis de l'importance; cette dernière prend l'aspect d'une attitude culturelle, par laquelle le citoyen exprime son souhait de se sentir acteur dans des décisions qui intéressent la sphère sociale.

4.2

Parallèlement au développement de la démocratie de proximité, deux phénomènes importants se produisent:

les nouveaux rôles des parlements nationaux;

l'affirmation du principe de subsidiarité.

4.3

Le Parlement est souvent perçu comme un organe trop lent, aux décisions trop dispersées. Par conséquent, un effort s'impose afin de définir une nouvelle composition et un nouveau rôle du Parlement (17).

4.3.1

La culture de la subsidiarité s'est diffusée surtout grâce à l'impulsion donnée par l'Union européenne et se fonde sur le principe d'après lequel les décisions doivent être prises à des niveaux différents. Tout l'art consiste à identifier le niveau le plus approprié. Il est inutile de faire à Bruxelles ce qui peut être réalisé avec une meilleure efficacité au niveau national ou local et inversement.

4.4

Grâce aux nouvelles technologies, la connaissance se diffuse à une vitesse et avec une ampleur qui étaient auparavant impensables. De nombreux citoyens, jadis exclus des sources d'information, sont aujourd'hui mieux préparés, plus avertis, et sentent qu'ils peuvent contribuer, par leur opinion, aux décisions (18).

4.4.1

À ces exigences, qui sont l'expression d'une société qui connaît une expansion culturelle, grâce également aux expériences partagées avec les autres États européens, de meilleures réponses peuvent être apportées par une démocratie fondée sur les principes de la proximité.

4.4.2

Le processus d'élargissement, qui s'est conclu depuis peu et les futurs élargissements à la Turquie et la Croatie, imposent un partage commun de ces modèles culturels et sociaux.

4.5

Ces modèles visent à incorporer les différentes dimensions (économiques, industrielles, syndicales, professionnelles,…) dans le même système d'organisation du consensus.

4.5.1

Intégrer les différentes cultures. Les nombreuses catégories professionnelles ont souvent des façons différentes d'aborder les problèmes. Bien que de nombreuses exigences apparaissent aujourd'hui similaires, grâce à l'évolution culturelle, les outils et les parcours nécessaires pour satisfaire des besoins et des aspirations toujours plus sophistiqués sont encore différents. En fonction des modèles utilisés, la synthèse des positions se fait lors des sommets, par la médiation politique.

4.5.2

Mais ce processus génère une insatisfaction et une désaffection croissantes vis-à-vis de la classe politique et des associations sectorielles. Un effort important et différent est exigé afin de mieux assimiler, à partir des niveaux les plus bas, les différentes perceptions des problèmes. Il ne s'agit pas de créer une homogénéisation culturelle mais de repérer, ensemble, les tendances évolutives qui peuvent recueillir le consensus le plus large.

4.5.3

Au sein du même système. Le processus d'intégration peut être mis en oeuvre — c'est déjà le cas — de différentes manières. Il doit néanmoins s'organiser sur la base de systèmes et de méthodes. Les systèmes qui ont rencontré le plus de succès, au niveau des organismes européens et des États membres, ont permis d'organiser la société civile en trois groupes (19) au sein desquels sont représentés les employeurs; les représentants des salariés; ceux qui exercent une activité dans des professions libérales, dans les ONG, dans les comités pour l'égalité des chances, auprès des organismes de défense des consommateurs et dans les groupes sociaux de base.

4.6

Aux différents niveaux. Une organisation de ce type a pour tâche d'aborder des questions précises, souvent complexes, au niveau régional, national ou européen. C'est pourquoi le traité de Rome de 1957, lorsqu'il a donné naissance à l'Union, a également prévu de manière opportune, parmi les différents organes, le Comité économique et social européen.

4.6.1

L'identification des niveaux les plus adaptés, dans lesquels organiser la recherche de solutions partagées, est un élément du progrès culturel et d'un parcours menant à une démocratie de proximité.

4.7

La méthode du dialogue actif parmi et avec la société civile organisée. Le dialogue continu parmi et avec la société civile organisée apparaît et se développe au sein d'une démocratie mûre, dans laquelle la connaissance et l'information sont propagées parmi les citoyens et permettent d'aborder les questions, même les plus complexes, loin de conditionnements idéologiques et des limites posées par l'ignorance.

4.7.1

La continuité du dialogue. La continuité du dialogue constitue un élément important, qui permet de surmonter les limites inhérentes aux éléments conjoncturels. Un échange continu et organisé, notamment sur le plan méthodologique, peut donner des résultats inespérés, surtout sur les questions les plus complexes.

4.8

L'interaction  (20) comme méthode pour parvenir à des solutions rapides et partagées. L'interaction constitue la conséquence normale d'un travail commun, conduit avec persévérance et méthode. Grâce à cette approche commune, les résultats sont appelés à acquérir de la valeur et à durer dans le temps. Au cours des phases d'élaboration des avis, de nombreuses positions, au départ très éloignées, sont destinées à se rapprocher et à être partagées.

4.9

Ces procédés sont d'habitude appliqués dans les parlements, mais ils n'impliquent pas, à la base, la société civile organisée. Parvenir à étendre ces modèles aux niveaux régionaux de manière organisée, suivie et méthodique, signifie entrer dans le flux d'une démocratie plus aboutie, évoluant en direction d'une démocratie de proximité.

5.   Les négociations d'adhésion et la société civile

5.1

Il est bien connu que les critères de Copenhague, lorsqu'ils ont établi les principes à suivre pour les processus d'élargissement, ont fait obligation aux nouveaux États d'intégrer en totalité l'acquis communautaire dans leurs politiques et leurs pratiques. C'est également pour cette raison que le CESE accueille favorablement et partage entièrement la communication de la Commission, adoptée le 29 juin, sur le dialogue entre les sociétés civiles de l'UE et de la Turquie.

5.2

D'après le Comité, il convient de mettre de côté les clichés et de présenter l'UE et la Turquie telles qu'elles sont à l'heure actuelle et d'identifier les parcours les plus adéquats pour parvenir à une meilleure connaissance réciproque et à une mise en oeuvre plus efficace de la démocratie de proximité.

5.3

Le Comité se réjouit qu'un nouveau projet de loi sur la réforme du Conseil économique et social turc ait été élaboré en association avec quelques représentants de la société civile organisée, parmi lesquels divers membres du Comité consultatif mixte.

5.3.1

D'une part, ce projet de loi confère un rôle plus déterminant et une meilleure représentativité aux responsables de la société civile organisée dans le cadre du Conseil et, de l'autre, il limite l'intervention du gouvernement.

5.4

Le CESE souhaite que cette législation soit adoptée et mise en application dès que possible, et réitère avec force le principe selon lequel le nouveau Conseil économique et social turc doit être en mesure d'agir en pleine autonomie et disposer des ressources financières et humaines nécessaires.

5.5

Il est très important que les principes de transparence, de participation et de responsabilité soient appliqués dans les rapports entre l'UE et la Turquie.

5.6

Compte tenu des spécificités des relations entre l'UE et la Turquie et de l'expérience des États qui ont récemment adhéré à l'Union, le Comité a proposé par le biais des travaux du CCM diverses mesures visant à associer la société civile organisée aux négociations d'adhésion.

5.6.1

Afin que les organisations de la société civile puissent prendre part aux consultations d'adhésion, il y a lieu de renforcer leurs capacités. Pour atteindre cet objectif, elles auront besoin d'aide et de financements.

5.6.2

C'est avant tout au gouvernement turc et, à titre complémentaire, aux institutions de l'UE et aux organisations de la société civile des États membres actuels de l'Union qu'il incombe de fournir ce soutien.

5.7

Le resserrement des liens avec les organisations européennes et la participation à des projets transnationaux européens constitueront des instruments utiles pour le renforcement du potentiel des organisations turques.

5.7.1

Les membres du CCM peuvent également apporter une contribution précieuse en la matière et leurs organisations respectives sont invitées à instaurer des mécanismes de dialogue de la société civile. Ces projets viseront à une meilleure connaissance mutuelle et à l'instauration d'une collaboration, notamment par l'échange de bonnes pratiques.

5.8

Les représentants des organisations turques pourraient participer de manière continue aux activités des groupes d'étude, qui sont organisées au niveau européen pour la mise en œuvre des politiques européennes, comme c'est le cas, par exemple, pour le Processus de Luxembourg.

5.9

D'après les observations établies par le CCM, les procédures de délivrance des visas dans les États membres représentent un obstacle au développement des relations à l'intérieur de la société civile. Le CESE demande par conséquent aux gouvernements d'alléger ces procédures afin de:

renforcer le dialogue entre les représentants de la société civile;

intensifier la coopération intersyndicale;

faciliter les rencontres entre entrepreneurs et hommes d'affaires;

assouplir les relations commerciales et économiques,

mettre en place une plate-forme des ONG.

5.10

Il y a lieu d'accélérer la constitution du Conseil économique et social turc, doté des prérogatives d'autonomie énoncées ci-dessus, car il représente un instrument efficace de dialogue permanent entre le gouvernement et la société civile organisée, en y associant l'ensemble des partenaires sociaux.

5.10.1

Cet organisme, qui permet une meilleure mise en œuvre de la démocratie de proximité, doit répondre aux aspirations légitimes de l'ensemble de la société civile organisée et refléter ses exigences et potentialités, dans le cadre de l'intégration dans la vie de l'Union européenne.

5.10.2

Afin d'avoir une assise très large, il convient que le Conseil économique et social turc ait une structure régionale et intervienne dans les consultations sur tous les chapitres qui concernent l'acquis communautaire. La consultation sur les chapitres de la négociation devra s'effectuer de manière continue et en temps utile.

5.11

Accroître tant en Turquie qu'au sein de l'UE la connaissance et la compréhension de ses propres modèles et traditions culturelles est primordial pour garantir le succès escompté des négociations. Il faut en particulier veiller à ce que la perception qu'a l'opinion publique européenne de la Turquie et inversement, concorde avec la réalité.

5.11.1

Le moyen le plus efficace d'atteindre cet objectif réside dans le fait de donner la possibilité aux organisations de la société civile tant de l'UE que de la Turquie, de concevoir des compagnes d'information adéquates.

5.12

Le CESE, également au travers de l'action continue et étendue du CCM, se considère depuis toujours tenu de:

stimuler l'implication de la société civile organisée dans le processus de négociation pour chacun des chapitres examinés;

procéder à un examen détaillé des conséquences socio-économiques de l'adoption de l'acquis communautaire par la Turquie;

ainsi que de renforcer et consolider le dialogue et la coopération entre les représentants de la société civile organisée dans les États membres de l'UE et en Turquie.

5.12.1

Au travers de cette action, le CESE et le CCM peuvent profiter de l'expérience des membres originaires des nouveaux États membres et, par conséquent, de la façon dont ils ont résolu les problèmes survenus au cours du processus de négociation.

5.12.2

L'objectif visé est de valoriser l'ensemble des forces organisées, actives sur le territoire, par le biais d'un processus de démocratie de proximité, que la classe politique ne serait jamais en mesure de réaliser à elle seule.

5.13

Les rencontres et l'échange d'expériences ont été intenses et fréquents avec la Turquie notamment, compte tenu de l'étendue du pays et de la complexité des problèmes. Mais cela est encore insuffisant.

5.14

Il est primordial d'inscrire au budget davantage de fonds, il y a lieu de renforcer l'engagement, de multiplier les rencontres et l'échange d'expériences et de mieux identifier les catégories sociales et professionnelles devant être impliquées.

6.   Conclusions

6.1

Le CESE estime qu'il serait opportun de mettre sur pied, en accord avec le Conseil économique et social turc, et avec sa contribution active, une structure permanente, constituée de représentants de la société civile, ayant pour tâche de suivre les négociations d'adhésion (21), afin que ces dernières aboutissent à une application effective et intégrale de l'acquis communautaire.

6.1.1

Étant donné l'étendue du territoire et la pluralité des cultures, cette structure doit avoir la possibilité d'intervenir tant au niveau national que régional.

6.2

Il est très important que l'échange entre les cultures et la valeur de l'acquis ne profitent pas exclusivement à Istanbul, Ankara et aux principales villes de Turquie, mais que les provinces et les zones rurales puissent en bénéficier.

6.3

Les aspirations, les craintes, les attentes des populations trouvent un écho et une réponse concrète dans les organismes de la société civile. Il convient d'attribuer à ces derniers un rôle fondamental dans la programmation et la réalisation de la campagne d'information relative à l'adhésion de la Turquie à l'UE.

6.3.1

D'après le CESE, il est également très important d'établir une plate-forme commune de communication (22), c'est-à-dire un Forum, au sein duquel les associations et les ONG auraient la possibilité de mettre en évidence, concrètement et sur le terrain, les problèmes principaux et trouver des solutions communes.

6.4

Le processus de préadhésion s'accompagne de programmes de soutien et d'une assistance financière. Souvent, seules quelques personnes — les spécialistes concernés -, connaissent les procédures, les délais et les opportunités financières. Il y a lieu d'élaborer un matériel d'information clair, afin qu'il soit diffusé parmi l'ensemble des organisations et qu'il fasse l'objet de projets et de propositions.

6.4.1

Les procédures à suivre pour obtenir les financements doivent également, dans la limite du possible, être simplifiées et expliquées de manière appropriée aux organismes qui représentent la société.

6.5

La délégation de la Commission en Turquie, grâce notamment au soutien et à l'expérience du CCM, du CESE et du Comité des régions, a la possibilité d'apporter une contribution significative à l'établissement d'un dialogue concret et structuré entre les représentants des différents secteurs de la société civile, y compris les acteurs du dialogue social, en Turquie et entre la Turquie et l'UE (23). Il est très important de donner aux partenaires sociaux de la Turquie et de l'UE, grâce aux moyens dégagés pour le renforcement de la société civile, la possibilité d'élaborer des projets conjoints de formation dans les nombreux domaines prévus par les 31 chapitres de l'acquis communautaire.

6.6

Le CESE estime qu'il est important de renforcer dès que possible le développement des capacités des organisations turques, en leur offrant la possibilité d'accroître la connaissance qu'elles ont de leurs homologues en Europe, notamment de leurs fonctions et de leur rôle de représentation dans une démocratie de proximité.

6.6.1

Parallèlement, dans le contexte de l'adoption de l'acquis, l'élaboration d'une législation sur les associations gagne en importance, dont le contenu et l'esprit devraient être conformes à celles qui existent déjà au niveau européen.

6.7

Le gouvernement turc, conformément aux dispositions prévues par l'acquis communautaire, devrait améliorer la législation sur les organisations et supprimer les obstacles qui limitent le développement des ONG.

6.8

En ce qui concerne la dimension de genre, la Comité invite la Commission à veiller à ce que les femmes soient suffisamment impliquées dans toutes les actions de coopération et soient opportunément représentées au sein des organismes de dialogue et dans les actions programmées.

6.9

Le CESE estime qu'il convient de soutenir les divers organismes turcs, afin qu'ils puissent devenir, dans leurs secteurs respectifs et à bref délai, membres des organisations européennes et internationales.

6.10

La participation de la Turquie aux programmes d'éducation et de formation doit être encouragée par tous les moyens, y compris au moyen de nouveaux programmes créés à dessein, qui s'ajoutent à ceux qui existent déjà.

6.10.1

Les expériences de stages universitaires proposés par le programme Erasmus, pourraient constituer, si le programme était opportunément développé, une excellente occasion pour de nombreux étudiants de nations différentes d'apprendre à se connaître et à s'apprécier mutuellement.

6.11

Le Comité est convaincu que de nombreuses formalités exigées par les ministères turcs, lorsque des entrepreneurs ou des acteurs économiques turcs souhaitent organiser des activités dans des pays européens, pourraient être réduites ou éliminées.

6.12

Les liens existant entre les représentants d'organismes similaires de la Turquie et de l'UE doivent être promus, encouragés et stimulés car ils permettent de faciliter et d'accélérer l'homogénéisation des expériences et des cultures.

6.13

En substance, tous les efforts devraient viser à permettre au plus grand nombre de citoyens européens de connaître la Turquie et au peuple turc de connaître l'Europe.

Bruxelles, le 27 octobre 2005.

La Présidente

du Comité économique et social européen

Anne-Marie SIGMUND


(1)  Le premier pilier porte sur la réforme politique; le deuxième concerne les négociations d'adhésion et le troisième, le dialogue entre les sociétés civiles.

(2)  Les partenaires sociaux (syndicats et organisations patronales); les organisations qui représentent les acteurs économiques et sociaux au sens large (par exemple, les associations des consommateurs); les ONG, les associations de terrain (par exemple les associations familiales et les organismes de jeunesse); les communautés religieuses et les médias, les chambres de commerce.

(3)  Par Balkans occidentaux on entend habituellement le territoire de l'ex-Yougoslavie (à l'exception de la Slovénie) et de l'Albanie, c'est-à-dire la Croatie, la Bosnie-Herzégovine, la Serbie, le Monténégro (Kosovo inclus), l'ex-République yougoslave de Macédoine et l'Albanie.

(4)  La Croatie et le Monténégro ont créé des Conseils économiques et sociaux.

(5)  Rapport d'information CESE 1025/1998 fin - Rapporteur: M. Sklavounos.

(6)  Avis du CESE Rapporteur: M. Sklavounos. JO C 193 du 10.7.2001, p.99.

(7)  Avis du CESE Rapporteur: M. Wilkinson. JO C 208 du 03.09.2003, p.82.

(8)  Avis du CESE Rapporteur: M. Confalonieri. JO C 80 du 30.03.2004, p.158.

(9)  Avis du CESE Rapporteur: M. Strasser. JO C 112 du 30.04.2004, p.68.

(10)  L'une d'entre elles se rapporte à la zone de l'Europe centrale et orientale. Avis du CESE, JO C 80 du 30.03.2004, p.148 (rapporteuse: Mme Karin Alleweldt) l'autre concerne le bassin méditerranéen Rapport d'information CESE 520/2005 fin (rapporteuse: Mme Giacomina Cassina).

(11)  Rapporteuse: Mme Giacomina Cassina (REX/204).

(12)  À ce jour, dix-neuf réunions ont eu lieu.

(13)  La première réunion a eu lieu à Bruxelles le 16 novembre 1995, en présence de M. Ozulker, Ambassadeur de la Turquie auprès de l'UE.

(14)  Neuf rencontres ont eu lieu en Turquie: trois à Istanbul; deux à Ankara; les autres ayant eu lieu à Gaziantep, Trabzond, Izmir et Erzurum.

(15)  Les États suivants ont un Comité économique et social: Autriche, Belgique, Espagne, Finlande, France, Grèce, Hongrie, Italie, Luxembourg, Malte, Pologne, Portugal, Slovénie, Bulgarie, Roumanie (Source: CESE).

(16)  COM(2005)290 du 29.06.2005 paragraphe 2.2.2 .

(17)  À l'occasion d'une rencontre avec le CESE en 1999, Jacques Delors a fait une intervention intéressante.

(18)  Le concept de démocratie de proximité élargit et concrétise la notion de participation, dans la mesure où il structure et organise le consensus par le biais d'instruments et d'organismes (tels que le CESE, les CES nationaux et régionaux) qui contribuent à résoudre les problèmes et à trouver des solutions aux grandes mutations sociales et économiques. Un exemple symbolique de ce phénomène est fourni par le processus de libéralisation du marché des services, de l'énergie et du gaz dans les différents États de l'UE, particulièrement en ce qui concerne les services d'intérêt général.

(19)  Cette répartition a été adoptée avec de légères différences par les conseils économiques et sociaux institués dans les pays européens. Ils sont au nombre de quinze.

(20)  L'interaction conduit à des domaines mentaux mutuels et isomorphes: mutuels, car ils s'impliquent réciproquement; isomorphes, car ils tendent à trouver des analogies et des points communs dans le raisonnement (From, Alberoni et autres…).

(21)  Il s'agit de constituer un partenariat horizontal et vertical avec les représentants de la société civile (horizontal) et des institutions (vertical), en suivant la pratique utilisée dans les régions NUTS II de l'Ob. 1. La consultation et l'information des partenaires évoqués ci-dessus, a permis d'améliorer de manière significative la solution aux problèmes des régions en retard de développement. Cf. les documents de la DG Regio sur les POR et sur les DOCUP régionaux.

(22)  Une structure de dialogue.

(23)  Il existe déjà un dialogue généralisé. Les organisations syndicales et patronales et les représentants des microentreprises entretiennent déjà de fréquents contacts sur les thèmes de la représentation syndicale, de l'emploi, des questions de crédit, de la formation professionnelle et de la commercialisation et internationalisation des produits. Les rencontres ont lieu soit à Bruxelles (UNICE, UEAPME, CES, …) soit en Turquie, mais ces relations gagneraient à être mieux structurées. S'agissant de la question du textile, le thème de la zone paneuro-méditerranéenne a été abordé avec la médiation de la DG Entreprises, cette zone étant envisagée comme une alternative à la Chine pour la fabrication de produits de qualité.


3.2.2006   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 28/104


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 2000/14/CE concernant le rapprochement des législations des États membres relatives aux émissions sonores dans l'environnement des matériels destinés à être utilisés à l'extérieur des bâtiments»

[COM(2005) 370 final — 2005/0149 (COD)]

(2006/C 28/23)

Le 16 septembre 2005, le Conseil a décidé, conformément à l'article 95 du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la proposition susmentionnée.

Le 27 septembre 2005, le Bureau du Comité a chargé la section spécialisée «Agriculture, développement rural, environnement» de préparer les travaux du Comité en la matière.

Compte tenu de l'urgence des travaux, le Comité économique et social européen a décidé au cours de sa 421ème session plénière des 26 et 27 octobre 2005 (séance du 27 octobre 2005), de nommer M. PEZZINI rapporteur général et a adopté le présent avis par 81 voix pour, 1 voix contre et 3 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1

Le Comité économique et social européen (CESE) accueille favorablement la proposition de la Commission visant à modifier la directive 2000/14/CE («directive sur le bruit») (1).

1.2

Le CESE profite de cette occasion pour souligner que ce sont précisément les matériels énumérés dans la directive 2000/14/CE qui constituent les principales sources de bruit dans le secteur du bâtiment et dans celui des activités forestières et de jardinage, et que les informations techniques et les garanties fournies par les constructeurs de ces matériels sont fondamentales pour la bonne gestion du bruit par les employeurs.

1.3

Le CESE relève en outre l'importance que pourra avoir, pour la limitation des émissions sonores dans l'environnement, la mise en oeuvre à part entière de la directive 2000/14/CE, lorsque les maîtres d'ouvrage publics et privés insèreront dans les cahiers des charges les exigences relatives à l'utilisation de matériels à faible niveau d'émissions sonores.

1.4

Enfin, le CESE rappelle l'existence de normes harmonisées pour la mesure des émissions sonores. La directive sur le bruit (2000/14/CE) est fondée sur les principes et les concepts de la nouvelle approche en matière d'harmonisation technique et de normalisation énoncés dans la résolution du Conseil du 7 mai 1985 (2) et dans la décision 93/465/CEE du Conseil du 22 juillet 1993 (3).

2.   Exposé des motifs

2.1

La proposition à l'examen prévoit une modification de la directive 2000/14/CE du Parlement européen et du Conseil du 8 mai 2000 concernant le rapprochement des législations des États membres relatives aux émissions sonores dans l'environnement des matériels destinés à être utilisés à l'extérieur des bâtiments («directive sur le bruit»).

2.2

Depuis le 3 janvier 2002, les cinquante-sept types de matériels rentrant dans le champ d'application de la directive sur le bruit doivent satisfaire aux exigences de celle-ci avant d'être mis sur le marché ou mis en service dans la Communauté européenne.

2.3

La directive instaure des niveaux admissibles de puissance acoustique maximaux et un marquage obligatoire des émissions sonores pour vingt-deux types de matériels, les trente-cinq types de matériels restants n'étant soumis qu'à ce marquage obligatoire.

2.3.1

Pour les vingt-deux types de matériels faisant l'objet de niveaux admissibles de puissance acoustique, deux phases d'application étaient prévues. La première est entrée en vigueur le 3 janvier 2002 («phase I»); la seconde devrait débuter le 3 janvier 2006 («phase II»).

2.3.2

Pour un certain nombre de types de matériels, le groupe de travail «GT7» (4) nommé par la Commission a reconnu qu'il serait techniquement impossible de respecter les niveaux de puissance acoustique mesurés à appliquer dans la phase II.

2.3.3

C'est pourquoi la Commission propose de considérer comme purement indicatifs les niveaux admissibles de puissance acoustique applicables aux matériels précités lors de la phase II. Les chiffres définitifs dépendront de la modification de la directive sur le bruit à la suite du rapport visé à l'article 20.

2.4

En l'absence de modification, les chiffres de la phase I resteraient applicables durant la phase II.

3.   Observations générales

3.1

Tout en se prononçant positivement sur la proposition de modification de la directive 2000/14/CE, le Comité juge utile de souligner deux aspects importants:

3.2

Le premier aspect concerne le maintien et la confirmation des orientations définies dans la directive 2000/14/CE, dans la mesure où la proposition de modification à l'examen devrait compléter différentes mesures communautaires relatives au bruit émis par les principales sources (en particulier: véhicules et infrastructures routiers et ferroviaires; aéronefs; matériels extérieurs et industriels; engins mobiles) et fournir une base pour l'élaboration de mesures additionnelles à court, moyen et long terme.

3.2.1

La directive rejoint en effet les dispositions relatives aux émissions sonores de certaines catégories de machines:

la directive 70/157/CEE du Conseil, du 6 février 1970, concernant le rapprochement des législations des États membres relatives au niveau sonore admissible et au dispositif d'échappement des véhicules à moteur;

la directive 77/311/CEE du Conseil, du 29 mars 1977, concernant le rapprochement des législations des États membres relatives au niveau sonore aux oreilles des conducteurs de tracteurs agricoles ou forestiers à roues;

la directive 80/51/CEE du Conseil, du 20 décembre 1979, relative à la limitation des émissions sonores des aéronefs subsoniques et les directives complémentaires;

la directive 92/61/CEE du Conseil, du 30 juin 1992, relative à la réception des véhicules à moteur à deux ou trois roues;

la directive 2000/14/CE du Parlement européen et du Conseil du 8 mai 2000 concernant le rapprochement des législations des États membres relatives aux émissions sonores dans l'environnement des matériels destinés à être utilisés à l'extérieur des bâtiments.

3.2.2

Avant la mise en place d'une politique environnementale consolidée, les interventions en matière de protection contre la pollution sonore visaient surtout, outre le respect de l'environnement, l'application des principes de la libre concurrence et de la libre circulation des marchandises (5).

3.2.3

Dans la proposition à l'examen, les exigences en matière de protection de l'environnement et de sauvegarde du libre échange apparaissent convenablement équilibrées.

3.3

Le second aspect concerne la cohérence de la proposition avec les programmes, les actions et les objectifs adoptés par l'UE pour la protection de l'environnement et de la santé/protection contre le bruit.

3.3.1

Un niveau élevé de protection de la santé et de l'environnement doit être assuré dans le cadre de la politique communautaire. L'un des objectifs à poursuivre dans ce contexte est la protection contre le bruit.

3.3.2

Dans le Livre vert sur la politique future de lutte contre le bruit, la Commission définit le bruit comme lors des principaux problèmes environnementaux en Europe.

3.4

La proposition de la Commission s'inscrit directement dans le cadre des mesures adoptées en application des programmes d'action ainsi que dans la stratégie européenne en matière d'environnement et de santé évoquée dans les conclusions du Conseil de l'Union européenne du 27 octobre 2003.

3.4.1

Il convient de rappeler à ce propos qu'avec la directive 2002/49, la Communauté a pris des mesures pour lutter contre le bruit. Cette directive constitue un acte fondamental qui réglemente et spécifie les critères permettant de déterminer le seuil de bruit ambiant acceptable.

3.5

Les institutions communautaires ont défini des méthodes d'évaluation communes et introduit la notion de valeur limite. Il appartient aux États d'arrêter des valeurs pour les différentes zones urbaines et d'assurer la coordination avec la législation nationale.

3.5.1

Il s'est avéré indispensable d'adopter des critères de mesure communs, faute de quoi les résultats relatifs au seuil de bruit admissible auraient risqué de varier d'un État à l'autre et d'empêcher par exemple le transit de certains véhicules et aéronefs et de restreindre l'utilisation de certains moyens de transport sur le territoire national.

3.6

La directive 2002/49 a pour objectif premier la lutte contre le bruit. Elle vise en priorité l'élimination des effets nuisibles sur l'être humain de l'exposition au bruit dans l'environnement.

3.6.1

En ce qui concerne l'exposition à un bruit élevé dans le cadre de la vie professionnelle, laquelle peut causer des dommages irréversibles à l'ouïe et même être à l'origine d'accidents du travail, les directives arrêtant des prescriptions minimales de santé et de sécurité sont bien connues:

Directive 89/391/CEE du Conseil, du 12 juin 1989, concernant la mise en oeuvre de mesures visant à promouvoir l'amélioration de la sécurité et de la santé des travailleurs au travail

Directive 2003/10/CE du Parlement européen et du Conseil du 6 février 2003 concernant les prescriptions minimales de sécurité et de santé relatives à l'exposition des travailleurs aux risques dus aux agents physiques (bruit)

Directive 89/655/CEE du Conseil, du 30 novembre 1989, concernant les prescriptions minimales de sécurité et de santé pour l'utilisation par les travailleurs au travail d'équipements de protection individuelle. Ces directives prévoient, pour toutes les tâches générant du bruit, que l'employeur planifie l'activité de manière à réduire dans toute la mesure du possible l'exposition, notamment en utilisant des machines à faible niveau sonore, en effectuant des contrôles à la source et en associant les travailleurs aux mesures adoptées.

Bruxelles, le 27 octobre 2005.

La Présidente

du Comité économique et social européen

Anne-Marie SIGMUND


(1)  JO L 162 du 3.7.2000, p. 1.

(2)  JO C 136 du 4.6.1985, p. 1.

(3)  JO L 220 du 30.8.1993, p. 23.

(4)  Groupe de travail sur les matériels destinés à être utilisés à l'extérieur des bâtiments (groupe d'experts institué par les services de la Commission)

(5)  Cf. l'arrêt de la Cour de justice du 12 mars 2002, affaires C-27/00 et C-122/00