ISSN 1725-2431

Journal officiel

de l'Union européenne

C 294

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Édition de langue française

Communications et informations

48e année
25 novembre 2005


Numéro d'information

Sommaire

page

 

II   Actes préparatoires

 

Comité économique et social européen

 

419ème session plénière des 13 et 14 juillet 2005

2005/C 294/1

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 77/91/CEE du Conseil en ce qui concerne la constitution de la société anonyme ainsi que le maintien et les modifications de son capital[COM(2004) 730 final — 2004/0256 (COD)]

1

2005/C 294/2

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 78/660/CEE du Conseil concernant les comptes annuels de certaines formes de sociétés et la directive 83/349/CEE du Conseil concernant les comptes consolidés[COM(2004) 725 final - 2004/0250 (COD)]

4

2005/C 294/3

Avis du Comité économique et social européen sur Les perspectives de la recherche dans le domaine du charbon et de l'acier

7

2005/C 294/4

Avis du Comité économique et social européen sur la Communication de la Commission — L'Agenda social[COM(2005) 33 final]

14

2005/C 294/5

Avis du Comité économique et social européen sur la Communication de la Commission — Un partenariat renforcé pour les régions ultrapériphériques[COM(2004) 343 final]

21

2005/C 294/6

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil concernant l'accès au marché des services portuaires[COM(2004) 654 final — 2004/0240 (COD)]

25

2005/C 294/7

Avis du Comité économique et social européen sur le thème Quelle contribution la société civile peut-elle apporter aux relations entre l'UE et la Russie?

33

2005/C 294/8

Avis du Comité économique et social européen sur le thème REACH — Législation sur les produits chimiques

38

2005/C 294/9

Avis du Comité économique et social européen sur le thème Portée et effets de la délocalisation d'entreprises

45

2005/C 294/0

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de directive du Conseil modifiant, en ce qui concerne la durée d'application du minimum du taux normal, la directive 77/388/CEE relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée[COM(2005) 136 final — 2005/0051 (CNS)]

54

FR

 


II Actes préparatoires

Comité économique et social européen

419ème session plénière des 13 et 14 juillet 2005

25.11.2005   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 294/1


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 77/91/CEE du Conseil en ce qui concerne la constitution de la société anonyme ainsi que le maintien et les modifications de son capital»

[COM(2004) 730 final — 2004/0256 (COD)]

(2005/C 294/01)

Le 13 janvier 2005, le Conseil a décidé, conformément à l'article 44, paragraphe 1, du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la proposition susmentionnée.

La section spécialisée «Marché unique, production et consommation», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a élaboré son avis le 23 juin 2005 (rapporteur: M. BURANI).

Lors de sa 419ème session plénière (séance des 13 et 14 juillet 2005), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis à l'unanimité.

Préambule

1.   Avant-propos

1.1

Dans le cadre du processus de simplification de la législation sur le marché intérieur (SLIM), la Commission a publié en septembre 1999 un rapport établi par un groupe de travail sur le droit des sociétés, portant essentiellement sur la simplification des première et deuxième directives. Dans le rapport intitulé «Un cadre réglementaire moderne pour le droit européen des sociétés», publié en novembre 2002, le groupe de haut niveau d'experts en droit des sociétés a relevé que la plupart des propositions SLIM méritaient d'être transposées dans la pratique par le biais d'une directive.

1.2

La proposition de directive à l'examen vise à simplifier certains aspects de la deuxième directive, qui énonce actuellement les exigences suivantes:

les actions ne peuvent pas être émises pour un montant inférieur à leur valeur nominale ou, en l'absence de valeur nominale, à leur pair comptable. Cette interdiction s'applique à toutes les émissions d'actions sans exception, pas seulement à l'émission initiale lors de la constitution de la société. Cela ne signifie pas que les émissions suivantes ne peuvent pas être réalisées avec une valeur nominale ou un pair comptable inférieur à celui de l'émission précédente: il suffit que le prix d'émission des nouvelles actions se conforme à l'obligation susmentionnée;

l'émission d'actions sans contrepartie en numéraire est soumise à l'obligation d'une évaluation par un ou plusieurs experts indépendants;

la réorganisation des droits attachés à la participation au capital de la société, à supposer qu'elle soit possible, est en principe soumise à une autorisation préalablement accordée par les statuts, l'acte constitutif et/ou l'assemblée générale;

l'acquisition par la société de ses propres actions est en principe soumise à l'autorisation de l'assemblée générale, accordée seulement pour une certaine période et une fraction donnée du capital de la société;

l'aide financière accordée par la société en vue de l'acquisition de ses propres actions par un tiers n'est possible que dans des cas très précis, et seulement pour une fraction donnée du capital de la société;

l'exclusion des droits préférentiels de souscription aux augmentations de capital par apport en numéraire est soumise à l'approbation de l'assemblée générale et doit faire l'objet d'un rapport écrit des organes d'administration ou de direction de la société;

dans les cas de réduction du capital, il revient aux États membres de préciser les conditions dans lesquelles les créanciers peuvent exercer leur droit d'obtenir des sûretés adéquates.

2.   Contenu de la proposition de directive

2.1

La proposition de directive repose sur l'idée qu'une simplification de la deuxième directive contribuerait de manière significative à promouvoir l'efficience et la compétitivité des entreprises sans pour autant réduire la protection dont jouissent leurs actionnaires et créanciers.

2.2

Dans cet esprit, les différents articles de la proposition de directive visent, directement ou indirectement, à:

donner la possibilité aux sociétés d'attirer des apports autres qu'en numéraire sans obligation d'expertise — sauf bien entendu en cas d'opposition,

faire en sorte que les sociétés puissent acquérir leurs propres actions dans la limite de leurs réserves distribuables,

permettre aux sociétés d'accorder une aide financière à un tiers en vue de l'acquisition de leurs actions, dans la limite de leurs réserves distribuables,

prévoir des dispositions autorisant les sociétés à augmenter leur capital, sous certaines conditions, sans devoir remplir les obligations d'information liées à la limitation ou à la suppression des droits préférentiels,

permettre aux créanciers d'engager des procédures judiciaires ou administratives lorsqu'ils estiment que l'exercice de leurs droits est compromis,

faire en sorte que les actionnaires d'une société cotée en bourse, détenteurs d'une majorité importante (90 %), puissent acquérir le reste de la participation.

2.3

Afin de prévenir les abus de marché, les États membres devraient prendre en considération, aux fins de l'application de la directive, les dispositions des directives 2003/6/CE et 2004/72/CE en ce qui concerne les pratiques de marché admises, ainsi que diverses dispositions visant à garantir la transparence de la gestion et la responsabilité des organes de direction.

3.   Observations générales

3.1

Le Comité approuve les objectifs de la proposition de directive ainsi que, d'une manière générale, les modalités prévues par la Commission pour leur réalisation. Il convient par ailleurs d'opérer une distinction entre une simplification véritable, qui préserve le sens et la portée des dispositions préexistantes, et une simplification modificative qui, en supprimant certaines dispositions à l'origine conçues comme des garanties pour les tiers, pour le marché ou pour les sociétés elles-mêmes, peut altérer — dans une plus ou moins large mesure — l'approche des précédentes directives quant aux garanties offertes.

3.2

Une simplification modificative ne doit pas nécessairement être rejetée et peut même se révéler utile si elle a le mérite d'adapter les dispositions à la réalité du marché et de la vie des entreprises. Mais en l'adoptant la Commission ne peut pas outrepasser les limites du mandat qui est le sien, qui consiste à simplifier et non pas à modifier la réglementation en vigueur. En d'autres termes, toute modification est acceptable si l'on peut démontrer qu'elle contribue à simplifier la gouvernance de l'entreprise en améliorant la compétitivité et en diminuant les coûts supportés par les sociétés mais est inacceptable si elle implique une diminution des droits des tiers, en particulier des actionnaires minoritaires ou des créanciers. Le CESE attire l'attention du Parlement et du Conseil sur ce point, qui est d'une importance essentielle si l'on ne veut pas donner au citoyen l'impression que l'on entend se servir d'un processus de simplification pour introduire des modifications substantielles sans le moindre rapport avec la simplification. C'est dans cet esprit que le CESE souhaite apporter sa contribution, en limitant ses commentaires aux seuls aspects dignes d'attention, étant entendu que les autres aspects reçoivent son approbation.

4.   Observations particulières

4.1

L'article 10 bis paragraphe 1 dispose que les États membres peuvent décider de ne pas appliquer les dispositions en matière de garanties de l'article 10, paragraphes 1, 2 et 3 de la directive 77/91/CE, lorsqu'un nouvel apport au capital s'effectue autrement qu'en numéraire, soit en pratique, si l'apport est constitué de titres cotés. Dans ce cas, la certification d'un expert peut être remplacée par une évaluation sur la base de leur prix moyen pondéré durant les trois derniers mois.

4.1.1

Le Comité est d'accord avec cette approche, mais il fait observer que le calcul réalisé sur la base du prix moyen pondéré des trois derniers mois repose sur des valeurs antérieures sans tenir compte des tendances futures, qui peuvent être aussi bien à la hausse qu'à la baisse. Cette disposition devrait être retenue en l'assortissant d'une restriction selon laquelle le prix moyen pondéré doit être considéré comme un maximum, les organes de décision ayant la faculté de pratiquer une évaluation différente et motivée.

4.1.2

Les facilités prévues au paragraphe 1 devraient être introduites dans l'ensemble de l'UE. En laissant leur application au pouvoir discrétionnaire des États membres, l'effet de dérégulation recherché risque de ne pas être obtenu dans certains États membres.

4.2

L'article 10 bis paragraphe 2 prévoit que les dispositions en matière de garanties visées au paragraphe 4.1 ne soient pas applicables dans le cas également où un nouvel apport en capital est constitué de valeurs autres que des titres cotés en bourse (titres non cotés, valeurs mobilières, etc.). Dans ce cas, l'évaluation doit par ailleurs avoir été effectuée auparavant par un expert indépendant qui doit être une personne ayant une formation et une expérience suffisantes.

4.2.1

Le Comité estime qu'il y a lieu de supprimer le point (a), qui concerne l'expert, l'expression «une formation et une expérience suffisantes» étant trop vague. Aux fins de la directive, il suffit qu'il s'agisse d'un expert indépendant agréé par les autorités compétentes.

4.2.1.1

Au point 2(b), qui concerne la période de référence pour l'évaluation de l'apport, le délai de trois mois prévu devrait être porté à six mois au moins.

4.2.2

La seconde observation concerne le point (c), qui prévoit que l'expert réalise son évaluation «conformément aux principes et normes d'évaluation généralement reconnus dans l'État membre»: le CESE propose que soient explicitement mentionnées les dispositions comptables reconnues par la législation ou par la réglementation officielle.

4.2.3

Le paragraphe 3 prévoit la possibilité de ne pas appliquer les dispositions relatives à l'évaluation lorsque l'apport autre qu'en numéraire est constitué d'actifs dont la valeur est tirée des comptes de l'exercice précédent. L'expression «pour chaque actif» nécessite une clarification. Il est en effet difficile de déterminer s'il s'agit ou non des valeurs au bilan.

4.3

L'article 10 ter paragraphe 2 stipule que «chaque État membre désigne une autorité administrative ou judiciaire indépendante chargée de vérifier la légalité des apports autres qu'en numéraire». Le CESE fait observer — mais il s'agit là d'une question purement formelle — qu'une autorité judiciaire est toujours indépendante et suggère de modifier légèrement le texte en conséquence. En revanche, il apparaît plus important de souligner que le texte de la directive mentionne à plusieurs reprises cette autorité, en faisant état à chaque fois de fonctions différentes, mais sans parvenir à définir précisément son rôle et l'ensemble de ses fonctions.

4.3.1

Comme on le sait, il existe dans chaque État membre des autorités administratives ou judiciaires, exerçant des fonctions notariales, d'autorisation, de contrôle; le moment semble venu de clarifier la situation, au moins au sein de chaque État membre, et de définir une autorité compétente unique («guichet unique» sur la lignée de la directive sur les services) en matière de réglementation et de contrôle des sociétés: il s'agirait d'une avancée décisive non seulement en termes de simplification, mais aussi et surtout de réalisation du marché intérieur.

4.4

L'article 19 paragraphe 1 prévoit que dans les pays permettant à leurs sociétés d'acquérir leurs propres actions, l'autorisation d'acquérir est accordée par l'assemblée générale pour une durée maximale de cinq ans. Le CESE observe qu'une durée de cinq ans est beaucoup trop longue: la situation du marché et de l'entreprise peut changer radicalement et amener les organes décisionnels à revenir sur leur choix. Il n'est pas conforme à la pratique des entreprises d'accorder des mandats d'acquisition valables cinq ans: mieux vaudrait — par prudence et afin de réserver à l'assemblée des actionnaires une marge discrétionnaire — réduire cette durée à deux ans, moyennant la possibilité de renouvellements annuels ou bisannuels.

4.4.1

A l'article 23, paragraphe 1, deuxième alinéa, la mention «à l'initiative» (de l'organe d'administration ou de direction) devrait être supprimée. Ce concept est beaucoup trop vague et ne peut être entendu qu'à titre d'exemple. Le délai de cinq ans prévu pour l'analyse du cash-flow est jugé trop long et devrait être ramené à deux ans.

4.5

L'article 23 bis énonce le droit des actionnaires de contester l'approbation par l'assemblée générale d'une opération d'apport autre qu'en numéraire, en demandant à l'autorité judiciaire ou administrative compétente de statuer sur la légalité de cette approbation. Le CESE note que les délibérations d'une assemblée des actionnaires ont valeur légale et qu'une autorité disposant de compétences exclusivement administratives peut difficilement en décider l'annulation ou la révision. Il s'avère dès lors d'autant plus nécessaire de définir le rôle des organes compétents (cf. paragraphe 4.3 ci-dessus) et de créer un «guichet unique» exerçant également des fonctions judiciaires (tribunal administratif).

4.6

À l'article 29 est inséré un paragraphe exemptant les organes d'administration ou de direction autorisés de l'obligation de soumettre un rapport écrit sur la limitation ou la suppression du droit préférentiel en cas d'augmentation du capital. Le CESE ne comprend pas la raison d'être de cette disposition, qui semble aller à l'encontre des principes de transparence, sans pour autant simplifier les procédures dans une mesure significative; il est à noter par ailleurs que les actionnaires «peuvent inviter l'organe de direction ou d'administration à indiquer les raisons de limiter ou de supprimer le droit préférentiel.» La directive ne prévoit pas non plus le cas où les organes concernés refuseraient de fournir les informations demandées ni celui où les actionnaires seraient en désaccord avec la communication qu'ils auraient reçue. Le principe général qui doit prévaloir devrait en tout état de cause être conforme aux principes généraux du droit des sociétés: l'assemblée est souveraine en ce qui concerne les pouvoirs délégués aux organes de la société et elle a toujours et en toutes circonstances le droit d'être informée sur les opérations réalisées et de recevoir un compte-rendu concernant chaque poste budgétaire, aussi bien pour ce qui est des recettes que des dépenses. Le CESE propose de supprimer ce paragraphe.

4.7

L'article 39 bis n'introduit pas une simplification à proprement parler, mais vise à codifier — dans l'esprit de l'article 15 de la directive «OPA» — une disposition qui n'existe que dans certains pays: un «actionnaire majoritaire» — expression désignant un actionnaire détenant un pourcentage égal ou supérieur à 90 % d'une société cotée — peut obliger les actionnaires minoritaires à lui céder les actions en leur possession «pour un juste prix». Les États membres peuvent porter ce seuil jusqu'à un maximum de 95 %. Le préambule de la proposition de directive parle d'«actionnaire majoritaire» même lorsqu'il y a une pluralité d'actionnaires, tandis que le libellé de l'article laisse supposer un seul et unique actionnaire: il convient de dissiper ce doute dans le texte final.

4.7.1

Une disposition de ce genre a été codifiée — comme indiqué ci-dessus — dans la directive «OPA», mais le cas est différent: les garanties de transparence liée à une OPA et les conditions présidant à sa réalisation font ici défaut. Alors qu'il est clairement dans l'intérêt de l'actionnaire majoritaire de contrôler la société à 100 % — surtout en présence d'une minorité obstructionniste ou récalcitrante — en ce qui concerne l'actionnaire minoritaire, la question peut se prêter, suivant les circonstances et les situations individuelles, à des évaluations différentes et opposées. Un actionnaire n'ayant aucune influence sur la gestion de la société pourrait envisager favorablement la possibilité de céder son portefeuille d'actions à des conditions intéressantes, en tout cas plus intéressantes que celles dont il pourrait bénéficier en vendant ses titres en bourse. En revanche, si un titre offre un bon rendement ou présente des perspectives de croissance, un investisseur/actionnaire pourrait souhaiter en conserver la propriété et l'on ne voit pas pourquoi il devrait être contraint de s'en séparer. En définitive, alors que d'une part une minorité d'actionnaires de 10 % n'est généralement pas en mesure d'entraver la gouvernance de l'entreprise, d'autre part il convient de reconnaître la pleine liberté de choix à laquelle tout actionnaire est en droit de prétendre. L'on ne saurait par ailleurs exclure les cas exceptionnels où la gouvernance de l'entreprise exige le contrôle de la totalité des actions: une telle disposition ne serait justifiée que dans de tels cas, et avec l'autorisation des autorités de contrôle.

4.8

L'article 39 ter — inspiré par l'article 16 de la directive «OPA» — est le symétrique du précédent: les actionnaires minoritaires peuvent, individuellement ou conjointement, obliger l'actionnaire majoritaire à racheter leurs actions, toujours «pour un juste prix». Les considérations formulées au paragraphe précédent s'appliquent mutatis mutandis. Là encore, l'autorisation de l'obligation de vente par les autorités compétentes ne devrait être prévue que dans les cas de nécessité avérée, à l'exclusion en tout état de cause de celle de se libérer de participations financières en prévision d'une évolution défavorable de la société.

4.8.1

Dans les deux cas cités ci-dessus, les conclusions du Comité sont uniquement inspirées par un souci d'équité et de respect des principes généraux du droit: la liberté de choix des actionnaires doit être pleinement préservée et ne peut être restreinte en raison de considérations étrangères à leurs intérêts, sauf en cas de nécessités avérées d'une autre nature.

Bruxelles, le 13 juillet 2005.

La Présidente

du Comité économique et social européen

Anne-Marie SIGMUND


25.11.2005   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 294/4


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 78/660/CEE du Conseil concernant les comptes annuels de certaines formes de sociétés et la directive 83/349/CEE du Conseil concernant les comptes consolidés»

[COM(2004) 725 final - 2004/0250 (COD)]

(2005/C 294/02)

Le 3 février 2005, le Conseil a décidé, conformément à l'article 44, paragraphe premier, du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la proposition susmentionnée.

La section spécialisée «Marché unique, production et consommation», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 23 juin 2005 (rapporteur: M. BYRNE).

Lors de sa 419ème session plénière des 13 et 14 juillet 2005 (séance du 13 juillet 2005), le Comité économique et social européen a adopté l'avis à l'unanimité.

1.   Résumé

1.1

La proposition de modifier les directives comptables découle du plan d'action adopté par la Commission le 21 mai 2003 visant à moderniser le droit des sociétés et à renforcer le gouvernement d'entreprise dans l'Union européenne.

1.2

Les propositions visent à renforcer encore la confiance dans les états financiers et les rapports annuels publiés par les sociétés européennes en vue de fournir aux actionnaires et aux autres acteurs concernés (notamment les salariés et les fournisseurs) une information fiable, complète et facilement accessible.

1.3

Le CESE fait part de ses commentaires concernant certains points de détail dans le présent document. Cependant, il est généralement favorable à l'objectif mentionné ci-dessus et juge la démarche nécessaire à la protection de l'ensemble des acteurs concernés.

2.   Détails de la proposition de la Commission

2.1

La proposition demande que les directives comptables (78/660/CEE et 83/349/CEE) soient modifiées en vue:

a)

D'établir la responsabilité collective des membres des organes d'administration: l'établissement des états financiers relève de la responsabilité de l'ensemble des membres des organes d'administration, de gestion et de surveillance.

b)

D'accroître la transparence des transactions avec des parties liées: c'est-à-dire les transactions des sociétés avec leurs dirigeants, les parents de ceux-ci ou d'autres parties liées qui ne s'effectuent pas aux conditions normales du marché.

c)

D'accroître la transparence des opérations hors bilan par le biais d'une mise à jour des obligations actuellement prévues dans les directives comptables en vue de couvrir par exemple les structures spécifiques (special purpose vehicles — SPV).

d)

D'introduire une déclaration sur le gouvernement d'entreprise afin que chaque société fournisse dans une section particulière de son rapport de gestion des informations concernant ses pratiques via une «déclaration sur le gouvernement d'entreprise».

2.2

La Commission souligne que son approche est fondée sur des principes; elle vise à garantir la proportionnalité et à accroître la flexibilité.

2.3

La Commission reconnaît que la proposition ne relève pas de la compétence exclusive de la Communauté mais insiste sur le fait qu'établir des états financiers comparables dans toute l'UE est indispensable au renforcement de la confiance du public envers l'information financière.

3.   Observations générales

3.1

Le CESE reconnaît qu'il est impératif, au vu des scandales récents en Europe et ailleurs, de renforcer la confiance du public envers les états financiers des sociétés européennes. Le Comité souscrit par conséquent pleinement à l'initiative à l'examen.

3.2

Le CESE approuve l'approche fondée sur des principes, convenant que des règles spécifiques peuvent potentiellement être contournées ou perdre de leur actualité.

3.3

Compte tenu de la nécessité de stimuler les entreprises et de promouvoir l'emploi au sein de l'Union, il importe que les exigences d'établissement de l'information financière ne soient pas excessives. Trop strictes, de telles exigences pourraient en effet avoir pour conséquence négative de détourner l'attention des éléments qui comptent réellement. Pour cette raison, le Comité accueille favorablement l'introduction du critère de «l'importance relative» dans la proposition. Il se demande par ailleurs si ce critère ne devrait pas devenir un élément fondamental des directives comptables.

3.4

Le CESE attire également l'attention sur la nécessité de veiller à ce que les exigences en matière d'établissement de l'information financière auxquelles doivent satisfaire les PME non cotées ne deviennent pas excessivement lourdes pour ces entreprises, qui constituent un moteur de la croissance européenne. Le Comité est conscient qu'il est loisible aux États membres de permettre aux petites et moyennes entreprises de ne se soumettre qu'à une obligation de déclaration partielle. Le CESE suggère qu'il conviendrait d'entreprendre une révision fondamentale des seuils pour les petites et moyennes entreprises en accordant une attention particulière à la réduction des charges qui pèsent sur les plus petites entités (1).

3.5

Le Comité est conscient que l'International Accounting Standards Board (IASB, organisme international de normalisation comptable) élabore actuellement un projet visant à constituer un ensemble de normes s'appliquant spécifiquement aux PME. Le CESE est favorable à cette démarche.

4.   Observations spécifiques

4.1   Responsabilité des membres des organes d'administration

4.1.1

Le CESE soutient la proposition établissant la responsabilité collective des membres des organes d'administration dans l'élaboration du rapport et des comptes annuels, un concept déjà généralement accepté à travers l'UE. Cependant, là où existe une structure à deux niveaux, il importe que la responsabilité soit placée sur chaque organe d'administration, de gestion ou de surveillance, compte tenu de leurs fonctions respectives et proportionnellement aux compétences que leur attribue le droit national.

4.1.2

Le Comité suggère que les membres des organes d'administration soient tenus de bonne foi de fournir à leur auditeur toute information considérée comme pertinente pour l'élaboration du rapport financier et des comptes annuels, sans que cela fasse l'objet d'une demande spécifique.

4.2   Transactions avec des parties liées

4.2.1

Le CESE se félicite de l'objectif proposé par la Commission d'accroître la transparence des transactions avec des parties liées pour les sociétés non cotées dans le souci de rétablir la crédibilité des états financiers des sociétés auprès du public. Les transactions avec les parties liées présentent souvent un intérêt particulier pour les entreprises privées, notamment pour les PME.

4.2.2

Le texte de l'article 1 modifiant l'article 43 7 (ter) de la quatrième directive demande que soient révélés «la nature, l'objectif commercial et le montant» des transactions effectuées avec des parties liées et qui n'ont pas été conclues «aux conditions normales du marché». Cette obligation de publicité va au-delà des prescriptions de IAS 24, en particulier en ce qui concerne la publication de «l'objectif commercial» de ce type de transactions.

4.2.3

Le CESE se demande si cela n'est pas susceptible d'entraîner des coûts supplémentaires importants pour de nombreuses sociétés non cotées et de contrebalancer ainsi les effets bénéfiques pour les utilisateurs de leurs états financiers.

4.3   Opérations hors bilan et PME

4.3.1

La Commission propose d'améliorer les obligations de publicité en prescrivant expressément que les «opérations» hors bilan, y compris les SPV, doivent être décrites dans l'annexe aux états financiers. Le Comité est favorable à cette exigence mais se dit préoccupé par l'absence de définition du terme «opération», qui rend ce concept plutôt vague. Pour cette raison, il estime nécessaire d'apporter clarification et guidance en la matière, éventuellement au moyen d'exemples pertinents.

4.3.2

Pour limiter l'impact sur les PME, le CESE recommande de permettre aux États membres de circonscrire l'information soumise à l'obligation de publicité à ce qui est strictement nécessaire pour apprécier la situation financière d'une société.

4.4   Déclaration sur le gouvernement d'entreprise

4.4.1

Le CESE se félicite de l'obligation faite aux sociétés cotées de révéler toutes les informations concernant les structures de gouvernement d'entreprise qui revêtent une importance essentielle pour les investisseurs. Introduire cette déclaration dans le rapport annuel revient à exiger des auditeurs qu'ils se prononcent sur la concordance ou l'absence de concordance entre la déclaration et les comptes annuels pour le même exercice, à l'instar de ce qui prévaut déjà pour le rapport annuel même en vertu de l'article 51, paragraphe premier de la quatrième directive.

4.4.2

Un problème risque toutefois de se poser du fait que certains États membres ont déjà dépassé les exigences des quatrième et septième directives en prévoyant que les rapports annuels -devant inclure à l'avenir la déclaration sur le gouvernement d'entreprise — soient soumis à un audit complet. Le CESE n'est pas persuadé que tous les éléments repris dans une déclaration sur le gouvernement d'entreprise se prêtent à un audit complet. Ce problème pourrait être résolu en demandant aux sociétés cotées de publier la déclaration sur le gouvernement d'entreprise «en même temps que les comptes annuels et le rapport de gestion». Elle devrait toutefois toujours faire l'objet d'une vérification de concordance, comme souligné dans le paragraphe 4.4.1. ci-dessus.

4.4.3

Le CESE estime que la portée de l'article 46a, paragraphe 3 n'est pas suffisamment délimitée. Il suggère la formulation suivante: «une description des principales caractéristiques des systèmes internes de contrôle et de gestion des risques en relation avec le processus d'établissement de l'information financière».

4.5   Questions diverses

4.5.1

La terminologie — utilisée en anglais dans l'article 2 qui modifie la septième directive («of direct relevance and assistance») — est différente de celle utilisée dans la modification proposée à la quatrième directive («material and of assistance»). Il semble qu'il n'y ait aucune raison qui justifie cette incohérence manifeste. Le CESE suggère que la formulation incluant le terme «material», qui est important, soit utilisée dans les deux cas.

4.5.2

Les termes «pas effectuées aux conditions normales du marché» sont utilisés dans l'article premier modifiant l'article 43.7 (ter) de la quatrième directive. La formulation est similaire pour la modification de l'article 34.7 (ter) de la septième directive. Dans l'exposé des motifs, la formule «pas effectuées aux conditions normales du marché» est précisée par les termes «conditions de concurrence normale». Cette dernière formulation étant la formulation comptable généralement reconnue, elle semble peut-être plus appropriée pour figurer dans les directives modifiées.

Bruxelles, le 13 juillet 2005.

La Présidente

du Comité économique et social européen

Anne-Marie SIGMUND


(1)  Les articles 11 et 27 de la quatrième directive fixent les critères de taille pour que les entreprises soient considérées de taille petite ou moyenne aux fins de la directive. Ces critères sont les suivants:

 

article 11

(petites entreprises)

article 27

(moyennes entreprises)

Total du bilan annuel

Eur 3 650 000

Eur 14 600 000

Chiffre d'affaires net

Eur 7 300 000

Eur 29 200 000

Nombre moyen d'employés au cours de l'exercice

50

250


25.11.2005   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 294/7


Avis du Comité économique et social européen sur «Les perspectives de la recherche dans le domaine du charbon et de l'acier»

(2005/C 294/03)

Le Comité économique et social européen a décidé, le 1er juillet 2004, conformément à l'article 29, paragraphe 2, de son règlement intérieur, d'élaborer un avis sur le thème suivant: «Les perspectives de la recherche dans le domaine du charbon et de l'acier».

La commission consultative des mutations industrielles, chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 13 juin 2005 (M. LAGERHOLM, rapporteur; M. GIBELLIERI, corapporteur).

Lors de sa 419ème session plénière des 13 et 14 juillet 2005 (séance du 13 juillet 2005), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 57 voix pour, 0 voix contre et 3 abstentions.

1.   Introduction

1.1   Perspectives offertes par le Fonds de Recherche Charbon-Acier

1.1.1

La recherche collaborative CECA a pris fin avec l'expiration du Traité, le 23 juillet 2002. Cependant, le capital excédentaire apporté par les industries du charbon et de l'acier pendant la période d'exercice du Traité permet aujourd'hui de pérenniser ce type de recherche collective. En effet, la décision de transférer ce capital aux communautés et de l'affecter à la recherche a été prise par le Traité de Nice. Ce capital représente environ 1,6 milliard € (valeur estimée du capital connue à la libération des obligations de la CECA). Le Fonds de Recherche Charbon-Acier (Research Fund for Coal and Steel, dit RFCS) a été créé en février 2003. La base juridique a été établie par l'annexe au traité de Nice relative à l'expiration de la CECA et par les décisions du Conseil du 1er février 2003 (2003/76/CE, 2003/77/CE, 2003/78/CE) et publiée dans le Journal officiel du 5 février 2003.

1.1.2

Des lignes directrices à la fois techniques et financières fixent les conditions de fonctionnement du programme.

1.1.3

Après trois années de fonctionnement du nouveau système mis en place, l'objet du présent document est de signaler quelques différences apparues dans le fonctionnement du Fonds, et, surtout, de tenter de dégager des perspectives d'avenir.

1.1.4

Tout d'abord, à quelques points près sur lesquels nous allons revenir, l'esprit de la Recherche collaborative CECA a été préservé, notamment grâce à la grande efficacité du financement de la recherche par la CECA (efficacité dont la preuve n'est plus à faire), ce dont il faut se féliciter.

1.2   Aspects financiers: une diminution temporaire et sensible des subventions

1.2.1

Le RFCS est géré par la DG Recherche, unité Charbon-Acier. Sur le plan budgétaire, ce sont les intérêts du capital mentionné plus haut qui sont utilisés pour financer la recherche, dans le cadre d'un placement à long terme. Le budget annuel disponible dépend donc de la rentabilité des placements. Une clé de répartition détermine les parts de l'acier et du charbon, soit respectivement 72,8 et 27,2 %. En pratique, sur les 2 dernières années d'exercice, cela a constitué un budget de 43 millions EUR environ (43,68 en 2003; 43,68 en 2004 et 41,20 millions EUR pour 2005) pour la recherche acier. Cette aide financière s'applique à environ 50 projets par an. En ce qui concerne le charbon, le niveau de financement alloué par le budget RFCS au cours des trois dernières années a été de l'ordre de 16,13 millions EUR en 2003, 15,27 millions EUR en 2004 et 16,13 millions EUR en 2005.

1.2.2

Une diminution sensible du montant total des aides est à noter, puisque celles-ci représentaient environ 55 à 56 millions EUR pour l'acier et environ 28 à 31 millions EUR pour le charbon à la fin des années 90, et encore au début des années 2000. On notera aussi que l'aide moyenne disponible par participant va être sensiblement réduite encore dans les proches années à venir, compte tenu de l'élargissement, et donc du nombre de participants au programme. En effet, les nouveaux États membres apporteront leur contribution, comme cela avait été le cas précédemment, mais progressivement et seulement entre 2006 et 2009. Leurs apports au capital se feront par tranches successives (au total 169 millions EUR) mais un plein effet ne se fera sentir qu'en 2011.

1.2.3

La rentabilité de la recherche acier de la CECA a déjà été établie (retour de 13 unités, pour chaque unité investie). La conduite d'une recherche industrielle, centrée sur les besoins de cœur de métier de l'acier, en partenariat avec les parties prenantes, c'est-à-dire les industriels et, en tant que de besoin, d'autres partenaires comme les équipementiers ou les grands clients a fait les preuves d'une grande efficacité. Le besoin de ce type de recherche reste impérieux aujourd'hui pour maintenir la compétitivité de l'acier européen au niveau où il se trouve actuellement, c'est-à-dire parmi les meilleurs au monde. Les projets pilotes et de démonstration qui ont constitué l'originalité des programmes CECA sont en très nette régression depuis quelques années: ils doivent rester l'outil privilégié et le vecteur préféré de transfert rapide des avancées technologiques aux unités opérationnelles (usines).

1.2.4

La recherche européenne dans le charbon, financée par la CECA, a été particulièrement efficace. Des évaluations (1) relèvent des facteurs moyens de bénéfices compris entre 7 et 25. Par ailleurs, la RDT a souvent des retombées avantageuses pour d'autres industries, comme par exemple l'arpentage, la construction de tunnels et les méthodes de test des matériaux.

1.3   Le suivi et la gestion des programmes

1.3.1

Des changements majeurs sont intervenus en ce qui concerne le processus de sélection pour l'approbation des projets annuels. D'une part, la Commission est assistée par un comité charbon acier (COSCO) où siègent des représentants des États membres, ainsi que par des groupes de conseil acier (SAGs) et des groupes de conseil charbon (CAGs) composés de représentants de ces deux secteurs et d'autres acteurs concernés. D'autre part, les évaluations sont faites par des experts indépendants. Sur le plan matériel, la Commission a assuré le bon déroulement de ces évaluations depuis la mise en place du système, dans des conditions améliorées chaque année.

1.3.2

La qualité des projets retenus, et donc du programme RFCS, dépend de la qualité des expertises. Puisqu'il s'agit de l'évaluation de programmes de recherche industrielle, les compétences d'experts bien au fait des besoins et des priorités industrielles, des recherches passées, de leurs résultats, mais aussi des aptitudes des partenaires impliqués sont indispensables. Les experts des Groupes techniques, par exemple, remplissent de telles conditions, mais il reste, pour la Commission et les groupes sidérurgiques, à optimiser les conditions pratiques de participation de tels experts.

1.3.3

Pour l'acier, neuf groupes techniques remplacent désormais les 17 comités exécutifs précédents, en ce qui concerne le suivi des projets et les transferts d'informations technologiques, réduisant substantiellement le nombre d'experts participants. Cette évolution sera en partie compensée par l'implication accrue d'experts venant des dix nouveaux États membres. Le système de tutorat mis en place (affectation du suivi d'un ou d'un nombre limité de projets à un expert) semble efficace pour le suivi plus direct des projets et il en facilite la discussion et la rigueur. Une évaluation à mi-parcours des nouveaux projets RFCS va être effectuée au printemps 2005 et apportera plus d'informations à cet égard.

1.3.4

Concernant le charbon, 3 groupes techniques (TG) ont commencé à remplacer les 5 comités exécutifs travaillant au titre du programme de recherche sur le charbon de la CECA. Leurs centres d'intérêts sont respectivement, les technologies minières (TG1), les technologies de conversion (TG2) et les technologies du charbon propre (TG3).

1.3.5

Le niveau d'implication des sociétés et des institutions situées dans les dix pays adhérents lors des propositions de la CECA de l'an 2000 était presque inexistant, alors qu'au moment de l'appel d'offre de 2004, les propositions concernant l'acier et le charbon se montent respectivement à 4,2 % et 14,16 %. Le nombre total de représentants des dix nouveaux États membres faisant partie des différents comités et groupes techniques consultatifs est de 25 (11 COSCO, 5 SAG, 4 CAG, 3 groupe technique acier et 2 groupe technique charbon).

2.   L'acier

2.1   Situation générale du secteur de l'acier

En 2004 l'économie mondiale soutenue a permis de stimuler l'économie européenne de façon significative, mais la demande intérieure n'est pas suffisamment remontée. Les perspectives pour 2005 dépendent en grande partie de la performance réalisée par l'économie mondiale étant donné que la zone euro dépend fortement des demandes finales générées ailleurs.

La clé de la poursuite de la croissance de l'économie mondiale et en conséquence, du marché de l'acier pour l'année à venir est à chercher en Chine et dans d'autres pays asiatiques. La Chine semble être entrée dans une phase de ralentissement contrôlé et sa croissance devient plus durable.

2.1.1

La modération dans la croissance économique mondiale prévue pour cette année cumulée au lent développement de la reprise en Europe continentale fait estimer que la croissance réelle de la consommation se développera à un rythme plus lent qu'en 2004. Cependant, étant donné que les niveaux des stocks de certains produits sont trop élevés dans certains pays, on peut également s'attendre à une modération de la croissance apparente de la consommation.

2.2   Perspectives de la recherche dans le secteur de l'acier

2.2.1   Les résultats des premiers appels d'offres de l'après-CECA: un taux de succès des propositions dans le programme RFCS en forte diminution

À l'aide d'un nouveau contrat type, 49 contrats ont été signés en 2003 et 51 en 2004, et près de 50 devraient l'être encore en 2005. Cependant le taux de succès a fortement diminué car le nombre de propositions soumises n'a pas diminué en rapport au montant des aides disponibles, bien au contraire. Par exemple, 116 propositions ont été soumises en 2002, 143 en 2003 et 173 en 2004. Le taux de succès des projets est de l'ordre de 30 % actuellement, alors qu'il était de 50-55 % au début des années 2000. Cette récente tendance est observée alors que les nouveaux États membres participent encore relativement peu au programme RFCS.

2.2.2   La plate-forme technologique acier: le cadre approprié pour une vision à long terme de la recherche sur l'acier

L'industrie de l'acier doit faire face à de nombreux défis sur des plans divers tels que, notamment, le besoin de compétitivité inscrit dans la globalisation, la forte croissance de nouveaux grands producteurs (aujourd'hui la Chine), les réglementations environnementales qui concernent à la fois les procédés et les produits, les exigences des clients et des actionnaires, la santé et la sécurité au travail et la formation.

L'ambition de l'industrie de l'acier consiste à maintenir et même renforcer un leadership mondial qui serait à la fois durable et compétitif.

Pour réussir cette ambition, un groupe de personnalités a lancé une action de recherche et développement déterminée et structurée à long terme, dans le cadre de la plate-forme technologique acier qui a été inaugurée le 12 mars 2004.

La CCMI est l'un des partenaires de la plate-forme et se trouve représentée dans son Comité de pilotage.

2.2.2.1

Six groupes de travail comprenant plus de 100 personnes et correspondant aux 4 piliers du développement durable ont été mis en place: le profit, les partenaires (comprenant également les secteurs de l'automobile et de la construction), la planète et les personnes ainsi que l'énergie. Ces groupes de travail ont imaginé trois programmes industriels de recherche et développement, vastes et complémentaires, et aux impacts sociaux étendus. Chacun de ces programmes comprend plusieurs thèmes et domaines de recherche liés à la recherche et au développement.

2.2.2.2

Trois programmes industriels aux impacts sociaux étendus sont proposés:

«Des technologies sûres, propres, rentables et faisant moins appel aux capitaux,

Utilisation raisonnable des ressources énergétiques et gestion des résidus,

Solutions intéressantes pour les utilisateurs finaux».

2.2.2.3

Concernant le premier grand programme, une grande flexibilité est nécessaire dans toute la chaîne de production de l'industrie de l'acier, de façon à pouvoir gérer le grand nombre de produits supplémentaires qui devront être fournis à bas coût. Des lignes beaucoup plus compactes ayant des temps de réponse très courts ainsi qu'une marge de capacité plus vaste seraient bénéfiques au secteur de l'acier. D'un autre côté, là où les technologies traditionnelles sont assez matures et robustes pour garantir une performance stable, une technologie de production intelligente devrait contribuer au développement de processus encore plus flexibles. De nouveaux concepts de production, tels des processus de fabrication intelligents et une organisation de la production efficace doivent être conçus et développés, se basant sur des technologies de pointe pour l'organisation afin d'assurer l'évolution de nouveaux processus, produits et services.

2.2.2.4

Trois thèmes principaux ont été identifiés dans le premier grand programme:

De nouvelles voies intégrées pour un traitement «sans oxydes» et utilisant l'énergie de façon rentable,

Une chaîne de production flexible et multifonctionnelle,

Une production intelligente.

2.2.2.5

Le deuxième grand programme se concentre également sur trois principaux thèmes de recherche et développement:

Le défi représenté par les gaz à effet de serre,

L'efficacité de l'énergie et les économies de ressources,

Le développement de produits «verts», prenant en compte l'impact social des matériaux.

2.2.2.6

Le troisième grand programme relève le défi de répondre aux attentes des consommateurs relatives à une grande variété de matériaux performants de plus en plus sophistiqués pour, essentiellement, deux marchés: le secteur de l'automobile et celui de la construction. Un troisième secteur (le secteur énergétique) est envisagé cette année.

2.2.2.7

En fin de compte, ces trois programmes ont pour objectif de jouer un rôle majeur dans le renforcement de la compétitivité, la croissance économique et l'impact qu'elles ont sur l'emploi en Europe. Les thèmes et domaines de recherche et développement correspondants qui ont été identifiés dans ces programmes apportent une grande contribution à l'approche de développement durable. La protection de l'environnement (émissions de gaz à effet de serre, notamment les émissions de CO2) et l'augmentation de l'efficacité énergétique constituent deux questions transversales dans le cadre des programmes de RDT proposés. La sécurité et la sûreté représentent le troisième objectif crucial à prendre en compte, non seulement dans les industries concernées mais aussi dans la vie quotidienne des consommateurs dans leur utilisation de l'acier (voitures, immeubles, production d'énergie, transports, etc.) en développant de nouvelles solutions intelligentes et plus sûres.

2.2.2.8

Un autre thème transversal majeur, qui implique des aspects liés aux ressources humaines, a également été pris en considération (attirer et sécuriser des personnes qualifiées pour aider à atteindre les objectifs du secteur de l'acier). Notamment:

Un vaste réseau européen (Top Industrial Managers for Europe, (TIME), 47 universités dans les 25 États membres), impliqué dans des activités d'éducation, de formation, de communication et de propagation a été identifié parmi les acteurs de la plate-forme technologique européenne de l'acier. Ce réseau devrait jouer un rôle crucial pour les deux questions suivantes: analyser comment le système éducatif pourrait remplir les futures exigences en matière de qualification des personnes dans le domaine de l'industrie sidérurgique européenne et conseiller des approches efficaces pour remédier aux manques anticipés.

Les ressources humaines, qui détiennent les compétences clés d'une société, représentent un capital qui devrait être optimisé de façon dynamique. Une étude des démarches effectuées par les producteurs européens d'acier en termes de gestion de la mutation et de progression vers une «organisation des connaissances» menant à des échanges de bonnes pratiques, devrait contribuer de façon significative à un tel processus d'optimisation.

2.2.2.9

La vision du futur décrite dans l'agenda stratégique pour la recherche adopté par le Comité de pilotage de la plate-forme le 15 décembre 2004 donne un aperçu des perspectives pour la recherche dans le domaine de l'acier pour les années à venir.

2.2.2.10

Une deuxième version de l'agenda stratégique pour la recherche définira des priorités et fera des propositions quant au placement des thèmes et des domaines de recherche dans les divers programmes européens: RFCS, PCRD (Programme-cadre, PC), Eureka, des programmes nationaux et régionaux, etc. Ainsi, il comprendra les sujets principaux sur lesquelles le RFCS doit poursuivre ses recherches.

2.2.2.11

La nature des thèmes de recherche décrits dans l'agenda stratégique pour la recherche, combinée avec les compétences des partenaires nécessaires, devrait guider le choix d'un programme européen approprié. Par exemple, le RFCS pour la recherche spécifique à l'acier et le PCRD pour la recherche impliquant des partenaires issus de plus d'un secteur industriel (par exemple, les fournisseurs et les fabricants de composants lorsqu'il s'agit du développement de nouvelles technologies, les consommateurs et les utilisateurs — pour les secteurs de l'automobile et de la construction par exemple — lorsqu'il est question de développer de nouvelles solutions pour l'acier, etc.). Des conseils similaires devraient exister dans le cadre d'une action technologique conjointe pour des grands programmes à long terme, nécessitant d'importants investissements et centrés sur des thèmes européens choisis conjointement.

2.2.2.12

Pour être pleinement efficace, l'approche suggérée ci-dessus nécessite évidemment que les différents programmes soient coordonnés. Ainsi, l'agenda stratégique pour la recherche de la plate-forme doit être un document de choix concernant la prochaine révision des lignes directrices pour l'acier. De plus, la coordination des programmes devrait veiller à ce que tous les projets aient les mêmes opportunités, quelque soit le programme européen dont ils dépendent.

2.2.2.13

Le septième programme-cadre à venir et d'autres programmes européens (Eurêka, etc.), des programmes nationaux et même régionaux, devraient offrir la possibilité de mettre en oeuvre l'agenda stratégique pour la recherche. Toutefois, les initiatives technologiques conjointes, à l'aide de prêts de la banque européenne d'investissement, permettront au cours des prochaines années le développement de technologies de pointe émergentes ainsi que leur mise en place à grande échelle sur un plan industriel.

2.2.2.14

De plus la sélection consensuelle des thèmes prioritaires pour le programme pour l'acier dans l'agenda stratégique pour la recherche de la plate-forme devrait permettre de constituer une réserve de sujets prioritaires (nécessitant des fonds et des ressources techniques conséquents) à soumettre en réponse aux appels d'offres annuels pour la recherche dans le domaine de l'acier du RFCS. Cette solution permettrait également d'éviter de fragmenter les subsides, de réduire les coûts administratifs en réduisant le nombre de propositions et, tout particulièrement, d'être plus efficace en concentrant les ressources sur des sujets vitaux pour la compétitivité de l'industrie de l'acier.

2.2.2.15

L'un des projets, (ULCOS, Ultra Low CO2 Steel Making) faisant partie du deuxième programme de la plate-forme acier, a pour objectif de réduire de façon considérable les émissions de CO2 dans la fabrication de l'acier. Ce projet a les caractéristiques suivantes:

c'est un problème qui concerne l'Europe entière et qui est intégré dans le 7ème programme-cadre,

les objectifs industriels sont clairement identifiés et ont une importance pour la compétitivité à long terme du secteur de l'acier,

c'est un consortium qui a déjà été constitué avec les acteurs principaux de l'industrie européenne de l'acier. Leurs engagements figurent dans un accord de consortium.

Étant donné les caractéristiques de ce projet, les industries ont informé la Commission en février 2005 de l'intérêt que la plate-forme portait à la mise en place d'une initiative technologique commune. Toutefois, dans la proposition de la Commission au Parlement européen et au Conseil du 6 avril 2005, l'ESTEP n'a pas été choisi pour faire partie d'une initiative technologique commune.

2.2.2.16

Enfin, une mise à jour régulière des programmes devrait permettre de les garder en adéquation totale avec les besoins industriels.

3.   Le charbon

3.1   Situation générale dans le secteur du charbon

3.1.1

L'Europe est le troisième consommateur de charbon au monde. En termes de fourniture d'énergie à l'Union européenne, le charbon est l'un des piliers centraux soutenant l'éventail équilibré de sources d'énergie et son rôle s'est nettement agrandi avec l'élargissement de l'UE. Il est un combustible essentiel dans la fabrication du fer et de l'acier, alors que dans le secteur de l'électricité, avec sa part de 32 % du marché, il reste un combustible de choix en raison de la sûreté de son approvisionnement ainsi que de sa compétitivité.

3.1.2

L'extraction du charbon est un secteur industriel fortement développé en Europe. Comparé aux gisements d'autres continents, les conditions géologiques en Europe sont très exigeantes en ce qui concerne le charbon. Cependant, le défi représenté par l'exploitation de ces gisements plus profonds a permis à l'Europe d'occuper une position dominante dans la technologie minière. Aujourd'hui, la technologie minière européenne occupe plus de la moitié du marché mondial, qui est encore en pleine expansion, en partie grâce aux fonds de la RDT de la CECA (2).

3.1.3

L'engagement de maintenir la position dominante de l'Europe nécessite des fonds de recherche appropriés, ce qui favorisera non seulement l'emploi dans ce secteur mais aussi la balance des paiements de la Communauté et aura des effets de multiplication associés. Ceci s'applique aussi bien à l'extraction qu'à l'utilisation de charbon propre, puisque les progrès technologiques doivent se concentrer sur tous les aspects critiques de la chaîne du charbon.

3.2   Perspectives de la recherche dans le secteur du charbon

3.2.1

Ce secteur a une excellente infrastructure pour la recherche et la coopération fonctionne très bien au niveau européen. Depuis des années, elle implique des partenaires provenant des anciens pays candidats (qui sont maintenant des États membres) dans des projets de recherche conjoints. Le NESMI (Network on European Sustainable Mineral Industries — Réseau des industries minières durables européennes) mis en place par le cinquième programme-cadre et comprenant environ 100 acteurs de l'industrie et de la science minières européennes, existe depuis 2002. L'une des réussites du NESMI est la plate-forme européenne de technologie pour les ressources minières durables (European technology platform for sustainable mineral resources-ETPSMR), annoncée lors de la conférence NESMI du 15 mars 2005, et qui doit être lancée en septembre 2005.

3.2.2

Les objectifs stratégiques pour la RDT dans le secteur du charbon sont les suivants:

Assurer la fourniture d'énergie future pour l'Europe

Développer des technologies de production innovantes et durables

Améliorer l'efficacité de l'utilisation du charbon afin de réduire les émissions

Utilisation durable des ressources énergétiques

Créer une valeur ajoutée européenne à travers une avance technologique basée sur la recherche et le développement.

3.3   La RDT dans la technologie minière

3.3.1

La RDT doit donner la priorité à la productivité et à la réduction des coûts à toutes les étapes du processus de production:

Une exploitation à bas coût tout en évitant les temps d'arrêt opérationnels nécessite une connaissance optimale du gisement, acquise grâce à une exploitation antérieure. De nouvelles méthodes d'exploration souterraine devraient de ce fait être développées en adoptant une approche multidisciplinaire. Si l'on veut réussir à réduire davantage les coûts dans les domaines de la planification, du développement et du contrôle opérationnel, il est nécessaire de continuer le développement de systèmes de surveillance modernes, notamment la technologie satellitaire.

3.3.2

Le développement des gisements de manière sécurisée et avec un bon rapport coût-rendement nécessite des systèmes de production intelligents et flexibles, comme les nouvelles méthodes de creusement des galeries et les méthodes d'abattage à l'aide de robots, de systèmes automatisés avancés et d'intelligence artificielle. Les notions clés ici sont l'automatisation, l'amélioration des contrôles des processus et les systèmes pour le fonctionnement et la maintenance.

3.3.3

Les objectifs en termes de développement de l'automatisation concernent des capteurs et des actionneurs intelligents et autonomes, des réseaux de capteurs sans fil, de nouvelles procédures de mesures physiques, des systèmes de localisation et de navigation et des systèmes intelligents de traitement de l'image.

3.3.4

Les techniques de calcul de pression de terrain améliorées et hautement rationalisées sont une question prioritaire si l'on veut assurer un soutien plus économique et plus sûr de l'exploitation minière, tout particulièrement à grande profondeur. Une assistance spécifique pour la planification qui est très intéressante dans ce domaine est le développement de la modélisation mécanique de la roche.

3.3.5

L'une des questions nécessaire dans toutes les phases du processus de production est celle des avancées en matière de technologie de l'information, notamment des techniques de sondage, de contrôle et d'analyse. Ceci implique plus précisément la communication, tout particulièrement la communication souterraine, notamment les terminaux TI nécessaires. La réalité virtuelle, développée avec succès par un projet RFCS conjoint, pourrait améliorer davantage la technologie des stations de contrôle des mines. Une meilleure gestion des processus, assistée par ordinateur, permettra d'améliorer aussi bien le rendement que la sûreté sur le lieu de travail.

3.3.6

Le montage et le démontage sont des obstacles à de futurs progrès dans la productivité dus aux conditions spatiales confinées et aux dimensions et aux poids sans cesses grandissants. L'un des objectifs principaux est donc de réduire les temps consacrés au montage et au démontage en utilisant de nouvelles techniques de montage/démontage et de réduire les composants à un petit nombre de composants standard compacts. Une fois de plus, la technologie IT moderne peut être utilisée comme mesure de soutien. Quelque chose de similaire s'applique au transport souterrain de marchandises. Les principaux objectifs dans ce cas sont l'automatisation des transports en utilisant des systèmes modernes de capteurs et une manipulation optimisée des matériaux.

3.3.7

Les coûts des actions liées à l'environnement et la question de l'acceptation par le public des exploitations minières dans des régions densément peuplées font de la protection de l'environnement (en tant qu'elle vise à éliminer ou à réduire divers effets dommageables que peuvent avoir les mines ou les cokeries sur l'environnement) un vaste sujet de recherche. Tout progrès méthodologique réalisé dans ces domaines aura un énorme potentiel pour l'exportation et un énorme impact sur d'autres industries, mais surtout c'est un besoin fondamental pour la société dans son ensemble. Ceci concerne les mines encore en activité ainsi que les mesures de fermeture et l'utilisation post-fermeture.

3.3.8

On peut citer le besoin de procédures plus précises de prévision des augmentations récurrentes du niveau de l'eau dans les mines et des émissions de gaz après la fermeture de l'usine comme étant deux exemples de besoins en matière de recherche et développement. De plus, les progrès techniques généraux réalisés dans d'autres secteurs industriels devraient également être utilisés dans la mesure du possible et leur modification pour être adaptés à l'extraction du charbon devrait être soutenue. Les mots clés ici sont la nanotechnologie, la bionique, les capteurs provenant de la technologie aérospatiale et la robotique.

3.4   La RDT dans l'utilisation du charbon propre

3.4.1

Les principaux objectifs représentent deux étapes pour l'utilisation du charbon propre:

Un rendement amélioré pour réduire les émissions et permettre une utilisation durable des ressources, et

La capture et le stockage du CO2.

3.4.2

Pour l'utilisation du charbon propre, l'option la plus fréquemment utilisée actuellement consiste à accroître le rendement puisque cela permet de réduire les émissions et aide à atteindre l'objectif de la conservation des ressources. Cette stratégie est favorisée parce qu'il va se créer un besoin anticipé de remplacement et de nouvelle construction d'usines d'une capacité de plus de 200 W (EU15) en Europe pour la période allant de 2010 à 2020. Pour les usines fonctionnant aux combustibles fossiles, il est prévu un pourcentage d'environ 60 %, le charbon contribuant à lui seul à hauteur de 23 %. Ceci présente une bonne occasion d'utiliser des technologies permettant un rendement maximal.

3.4.3

Grâce aux technologies des usines à vapeur réalisables aujourd'hui, il est possible d'atteindre 45 % à 47 % de rendement en utilisant de la houille. On peut s'attendre à atteindre plus de 50 %, essentiellement grâce à une augmentation toujours plus accrue dans les paramètres des processus de pression et de température (pour atteindre plus de 700oC). Le développement et les essais de nouveaux matériaux résistant à de hautes températures jouent ici un rôle clé. Comparé aux technologies actuellement installées en Allemagne, ceci permettrait de réduire les émissions de CO2 d'environ 30 %.

3.4.4

Il est donc possible de contribuer de façon significative à la réduction des émissions de CO2 tout en conservant les ressources à court terme, essentiellement en développant ces processus pour les usines à vapeur traditionnelles. Ceci devrait donc être l'une des priorités de la recherche future.

3.4.5

En plus des processus plus développés des usines traditionnelles, les processus combinés peuvent également présenter une alternative à moyen et à long terme. Les principales variantes possibles ici sont le processus utilisant la gazéification intégrée du charbon (IGCC) et le chauffage pressurisé au charbon pulvérisé. Ces deux processus permettraient d'atteindre un rendement largement supérieur à 50 %. La recherche en cours dans ce domaine doit être intensifiée.

3.4.6

De plus, il existe un besoin de recherche dans le développement d'usines à émission zéro, à condition qu'il existe un désir politique pour cela. Toutefois, l'installation des équipements nécessaires à la séparation du dioxyde de carbone produit une perte de 6 à 14 points de pourcentage dans le rendement de l'usine, ce qui non seulement augmente le coût du produit fini mais va à l'encontre de l'objectif de conservation des ressources. Des conceptions d'usines optimisées, avec des rendements maximaux, forment les technologies de base avec pour objectif à long terme, tout particulièrement, une usine à émission de CO2 zéro.

3.4.7

L'usine à émission zéro est une visée à long terme. La protection climatique préventive nécessite un développement opportun des processus pour la séparation rationnelle d'un point de vue technique et économique, des gaz marqueurs adéquats en ce qui concerne l'environnement, dans les émissions des usines avec l'objectif d'empêcher le relâchement de CO2 dans l'atmosphère.

3.4.8

Aujourd'hui, il semblerait que le développement de technologies de séparation du CO2 (la première partie du processus) soit plus simple à réaliser que le stockage fiable et à long terme du dioxyde de carbone après séparation (deuxième partie du processus), parce que l'on en sait encore très peu concernant le comportement sur le long terme de grandes quantités de CO2 lorsqu'elles sont enfermées dans de grandes chambres de stockage. Actuellement, le débat tourne principalement autour de la séquestration dans des gisements épuisés de pétrole et de gaz ou dans des aquifères salins profonds. Une telle entreprise demandera un investissement logistique non négligeable.

3.4.9

Selon les expertises actuelles, il n'existe pas d'obstacle technique insurmontable pour un tel développement, bien que le concept présente des risques économiques et écologiques considérables. La principale tâche à laquelle devront s'atteler les industries et les gouvernements sera la minimisation de ces risques.

4.   Conclusions et recommandations

Après une période de transition qui aura duré trois ans, le programme de recherche RFCS a prouvé son efficacité, notamment puisqu'il a substantiellement intégré un réseau d'experts venant des précédents programmes de recherche de la CECA. Le CESE recommande le maintien, dans un futur proche, des mêmes organes consultatifs (COSCO, SAG et CAG, groupes techniques) pour la gestion du programme et de la même procédure d'évaluation. Le CESE demande à la Commission de se pencher sur la question d'une plus grande participation des experts au sein des groupes techniques.

4.1

Pour des raisons administratives, le programme de recherche du RFCS inclut le charbon et l'acier, cependant, chaque secteur possède ses caractéristiques et ses besoins propres, et devrait être géré de façon a accélérer la réalisation d'objectifs techniques et scientifiques dans le but d'améliorer leur compétitivité. Le CESE soutient la création de plate-formes technologiques européennes, dans le cadre desquelles les secteurs de l'acier et du charbon peuvent tous les deux trouver un environnement approprié pour développer et coordonner leurs politiques et leurs activités de recherche et développement en utilisant toutes les ressources européennes disponibles.

4.2

Le CESE se prononce fermement en faveur d'une intégration rapide et substantielle d'entreprises, de centres de recherche et d'universités des nouveaux États membres dans le nouveau programme de recherche du RFCS et dans les activités liées aux plate-formes technologiques européennes pertinentes pour les secteurs de l'acier et du charbon.

4.3   Acier

Dans les années à venir, le CESE prévoit un besoin crucial de recherche collaborative dans l'industrie de l'acier, afin de maintenir et peut-être même renforcer sa position actuelle de leader mondial, qui se doit d'être durable et compétitive. L'utilisation de l'acier est essentielle si l'on veut répondre aux besoins futurs de la société, ainsi que pour la création de nouvelles opportunités de marché. A l'avenir, l'industrie sidérurgique devra répondre tout particulièrement aux besoins de produits plus respectueux de l'environnement et en termes de nouvelles solutions pour l'acier.

4.3.1

Le CESE a identifié les questions essentielles suivantes:

La protection de l'environnement (tout particulièrement la réduction des émissions de CO2) et l'augmentation de l'efficacité énergétique sont deux questions transversales et cruciales pour les programmes de recherche et développement. Il est nécessaire de développer de nouveaux processus plus intégrés et plus flexibles que les processus existants.

La sécurité et la sûreté représentent également un objectif important, non seulement dans les industries pertinentes mais également dans la vie de tous les jours des consommateurs en tant qu'utilisateurs de l'acier (voitures, immeubles, production et transport d'énergie etc.) en développant des solutions nouvelles, plus intelligentes et plus sûres. L'un des objectifs reste la réduction du poids dans le développement des nouveaux produits en acier. Cependant, l'impact social des matériaux contribuerait de façon importante aux objectifs à long terme du secteur (renforcer la position concurrentielle des produits de l'acier et la durabilité des processus de production de l'acier).

Un autre objectif très important pour le secteur de l'acier est d'attirer des personnes qualifiées et de faire en sorte qu'elles conservent leur emploi.

L'identification consensuelle de thèmes spécifiques prioritaires pour la plate-forme technologique pour l'acier constitue une réserve de questions prioritaires à mettre en oeuvre avec les différents instruments européens existants dans la RDT (RFCS, 7ème programme-cadre, programmes nationaux et même régionaux...). Toutefois, les différents programmes doivent être coordonnés.

Le soutien des autorités européennes afin que la plate-forme de l'acier puisse être adoptée comme plate-forme prioritaire qui pourra bénéficier d'une initiative technologique commune.

4.4   Charbon

Le CESE accueille favorablement les nouvelles Priorités européennes pour l'énergie, qui mettent l'accent sur l'importance que prennent les technologies de charbon propre pour la protection du climat et de l'environnement ainsi que pour la sécurité de la fourniture d'énergie dans l'Union, et annoncent l'engagement de l'Union envers les technologies de charbon propre comme étant une priorité clé pour la recherche au sein du 7ème programme-cadre.

Le programme devrait donc avoir pour objectif d'améliorer le rendement de façon à réduire les émissions, de rendre l'utilisation des ressources plus durable et de s'attarder sur les mesures de séquestration et de stockage du CO2. Puisque la plate-forme européenne de technologie minière, à orientation plus vaste, fournira des stratégies et des instruments pour une recherche minière sectorielle, le caractère complémentaire du programme RFCS devrait être retenu et le programme devrait s'orienter davantage vers la RDT spécifique à l'extraction du charbon.

Bruxelles, le 13 juillet 2005.

La Présidente

du Comité économique et social européen

Anne-Marie SIGMUND


(1)  Réalisée en 1995 par Geoffrey WALTON PRACTICE et Smith VINCENT, et en 1996 par le Comité de recherche sur le charbon de la DG XVII.

(2)  Le Conseil mondial de l'énergie a prévu une croissance rapide du volume total des investissements pour la construction et l'équipement des mines, se montant à 43 000 milliards d'Euros pour les 25 prochaines années.


25.11.2005   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 294/14


Avis du Comité économique et social européen sur la «Communication de la Commission — L'Agenda social»

[COM(2005) 33 final]

(2005/C 294/04)

Le 9 février 2005, la Commission européenne a décidé, en vertu de l'article 262 du traité instituant la Communauté européenne, de saisir le Comité économique et social européen d'une demande d'avis sur la «Communication de la Commission — L'Agenda social».

La section spécialisée «Emploi, affaires sociales, citoyenneté», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 21 juin 2005 (rapporteuse: Mme ENGELEN-KEFER).

Le Comité, lors de sa 419ème session plénière des 13 et 14 juillet 2005 (séance du 13 juillet 2005), a adopté l'avis suivant avec 60 voix pour, 1 voix contre et 3 abstentions.

1.   Introduction

1.1

Le nouvel Agenda social pour la période 2006-2010 suscite des attentes particulières. À l'heure où la stratégie de Lisbonne est soumise à un bilan à mi-parcours, il s'agit de souligner davantage l'importance primordiale que revêt la politique sociale pour la réalisation des objectifs de Lisbonne. Il convient de répondre à l'ambition de la stratégie de Lisbonne, qui consiste à conjuguer l'amélioration de la compétitivité et l'augmentation de la croissance économique avec une amélioration quantitative et qualitative de l'emploi et un renforcement de la cohésion sociale. Pour ce faire, on a besoin d'une politique européenne qui poursuive tous ces objectifs en leur donnant la même priorité et qui assure l'équilibre de la stratégie de Lisbonne. Il convient que la politique économique, la politique de l'emploi et la politique sociale, ainsi que la politique de l'environnement entretiennent un rapport équilibré, de façon à ce que le modèle social européen puisse être garanti de manière durable.

1.2

Lors de son sommet des 22 et 23 mars 2005 sur la relance de la stratégie de Lisbonne, le Conseil européen a constaté qu'il convient de soutenir en priorité la croissance et l'emploi et il a souligné le rôle essentiel qui revient à cet égard à la politique macroéconomique (1). Ces priorités apparaissent absolument nécessaires du fait de la persistance d'une conjoncture défavorable et d'un taux de chômage élevé. Lorsqu'il déclare que «pour atteindre ces objectifs, l'Union doit davantage mobiliser tous les moyens nationaux et communautaires appropriés (…) dans les trois dimensions économique, sociale et environnementale de la stratégie pour mieux en exploiter les synergies dans un contexte général de développement durable» (2), le Conseil part d'une approche dans le cadre de laquelle les politiques économique, sociale et de l'emploi se renforcent mutuellement. Selon le CESE, viser en priorité la croissance et l'emploi ne conduit cependant pas automatiquement à une amélioration de la situation sociale, même si le développement de la croissance est une condition essentielle de la lutte contre le chômage et de l'amélioration de la situation sociale. Il faut plutôt considérer la politique sociale comme un facteur productif qui agit à son tour positivement sur la croissance et l'emploi. L'Agenda social contribue «à la réalisation des objectifs de la stratégie de Lisbonne en renforçant le modèle social européen fondé sur la recherche du plein emploi et une plus grande cohésion sociale» (3).

1.3

«Le modèle social européen est fondé sur une économie performante, un niveau élevé de protection sociale, l'éducation et le dialogue social» (4). Ce modèle repose sur les valeurs fondamentales de la démocratie, de la liberté et de la justice sociale communes à tous les États membres. L'adhésion à l'économie sociale de marché et à ces valeurs fondamentales est inscrite pour la première fois pour l'ensemble de l'Union dans la future Constitution, en particulier dans la Charte des droits fondamentaux. Tous les États membres de l'Union présentent, dans des configurations différentes, des caractéristiques communes d'État social qui constituent dans leur ensemble le modèle social européen. Parmi ces caractéristiques communes figurent:

des systèmes de sécurité sociale durables, basés sur le principe de solidarité, qui couvrent les risques majeurs de la vie;

des conditions de travail régies par la loi ou par des conventions en vue de protéger les travailleurs et de promouvoir l'emploi;

des droits de participation et d'implication assurés aux travailleurs et à leurs représentants;

des systèmes de relations industrielles et de dialogue social autonome entre les partenaires sociaux;

des services d'intérêt général.

La mission de la politique sociale européenne est de préserver et de continuer à développer ce modèle social européen au moyen d'instruments efficaces au niveau européen. Le rôle particulier qui incombe à la politique sociale réside dans la stratégie européenne pour l'emploi et dans les mesures de coordination concernant l'intégration sociale et la réforme des systèmes de sécurité sociale ainsi que l'égalisation dans le progrès des conditions de travail et de vie grâce à des normes sociales minimales.

1.4

Pour atteindre les objectifs de Lisbonne, il convient de renforcer au niveau européen la politique sociale en tant que domaine d'action autonome, et cela au moyen d'une politique active:

de prévention du chômage et de réinsertion des catégories de personnes particulièrement défavorisées,

de lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale, en prenant particulièrement en compte les nouveaux risques de pauvreté, par exemple le cas des «travailleurs pauvres»,

de lutte contre les discriminations en tous genres et d'instauration de l'égalité des chances pour les femmes,

d'approfondissement des échanges d'expériences sur les stratégies de réforme de la sécurité sociale, afin de concilier le maintien de sa fonction sociale avec la garantie à long terme de ses bases de financement,

de mise en œuvre de normes sociales minimales pour protéger les travailleurs et garantir leurs droits de participation et d'implication ainsi que ceux des représentants des divers intérêts au sein de l'entreprise.

Le CESE soutient expressément la nouvelle procédure adoptée par la Commission européenne, en vertu de laquelle il convient d'examiner toute proposition législative sous l'angle de ses retombées en termes de croissance et d'emploi et de vérifier sa compatibilité avec la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne.

1.5

Le groupe de haut niveau chargé d'élaborer un rapport, présenté en mai 2004, sur l'avenir de la politique sociale dans l'Europe élargie a contribué de manière significative à la préparation du nouvel Agenda social. Selon le CESE, les résultats et les propositions de ce groupe devraient être davantage pris en considération dans ce nouvel Agenda social (5).

2.   Présentation générale de la proposition de la Commission

2.1

Dans sa communication, la Commission souligne tout d'abord qu'elle souscrit à la modernisation et au développement du modèle social européen ainsi qu'à la promotion de la cohésion sociale en tant que partie intégrante de la stratégie de Lisbonne. L'Agenda social fixe les priorités qui doivent orienter les actions de l'Union européenne. Leur mise en œuvre doit se fonder sur les principes suivants:

créer une interaction positive des politiques économique, sociale et de l'emploi,

promouvoir la qualité de l'emploi, de la politique sociale et des relations industrielles, afin d'améliorer le «capital humain et social»,

moderniser les systèmes de sécurité sociale en les adaptant aux demandes de la société actuelle sur la base du principe de solidarité et en renforçant leur rôle de facteur productif,

prendre en compte les coûts de «l'absence de politique sociale» (6).

2.2

Partant de ces principes, une approche stratégique est proposée, qui s'appuie sur deux éléments:

accroître la confiance des citoyens dans le changement social grâce à une approche intergénérationnelle, à des partenariats pour le changement et à l'exploitation des opportunités offertes par la mondialisation,

fixer des priorités sur la base des objectifs stratégiques 2005-2009 de la Commission européenne dans les domaines d'action: promotion de l'emploi et gestion des changements structurels, société solidaire et égalité des chances.

3.   Accroître la confiance — Conditions de succès

3.1

Trois actions concrètes sont annoncées en ce qui concerne l'accroissement de la confiance dans le changement social:

un livre vert sur les mutations démographiques et une contribution à l'initiative européenne en faveur de la jeunesse,

un partenariat pour le changement par l'organisation d'un forum annuel consacré à l'évaluation de l'Agenda social,

l'intégration du modèle social européen dans les relations internationales du travail et promotion du travail décent au niveau mondial.

3.2

Le Comité considère lui aussi nécessaire de faire en sorte que les citoyens aient plus confiance dans l'unification européenne et le développement social. On ne peut toutefois y parvenir que si la politique européenne conduit à une réelle amélioration de la situation sociale des individus. Le CESE considère également qu'une analyse approfondie des conséquences sociales des mutations démographiques est nécessaire et se félicite de la présentation du livre vert annoncé (7), qui permettra une large discussion au niveau européen. Dans l'esprit d'une approche intergénérationnelle, il convient d'apporter une attention particulière aux répercussions des mutations démographiques sur la jeune génération. La proposition ne fait cependant pas clairement apparaître la manière dont la Commission voit sa contribution à l'initiative européenne en faveur de la jeunesse et le rôle qu'elle s'assigne dans ce contexte. Les gouvernements allemand, espagnol, français et suédois ont récemment présenté au Conseil européen un document commun concernant un pacte européen pour la jeunesse. Il comprend des propositions d'actions dans les domaines de l'emploi et de l'intégration sociale, de l'éducation et de la formation, de la mobilité et des échanges de jeunes et a été adopté lors du Conseil de printemps (8).

La proposition de la Commission fait aussi expressément référence au projet de livre vert sur les mutations démographiques. Le CESE regrette que la Commission européenne n'évoque pas plus précisément dans sa communication cette proposition des gouvernements (9).

3.3

Le CESE estime en principe utile d'organiser un forum annuel pour évaluer la mise en oeuvre de l'Agenda social. Selon lui, un tel forum devrait traiter des perspectives du modèle social européen, impliquer tous les groupes sociaux concernés et être organisé de manière à permettre un débat entre les participants.

3.4

Le CESE soutient totalement le projet de la Commission d'intégrer activement les avantages du modèle social européen dans les relations internationales du travail et de promouvoir le travail décent dans le monde entier conformément aux normes de l'OIT. L'Union ne peut à cet égard être crédible qu'à condition de sauvegarder et de continuer à développer, y compris dans un contexte économique modifié, le modèle social européen et de s'engager de manière convaincante en faveur de la recherche parallèle du progrès économique et du progrès social. Elle devrait également se référer expressément à la Charte sociale européenne révisée ainsi qu'à la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne.

4.   Emploi et qualité du travail, gestion des changements structurels

4.1   La stratégie européenne pour l'emploi

4.1.1

S'agissant de la stratégie européenne pour l'emploi, la Commission européenne annonce une nouvelle orientation pour 2005 qui s'inspire des priorités du rapport de 2003 du groupe de haut niveau sur l'emploi présidé par M. Kok sur l'emploi: promouvoir la capacité d'adaptation, assurer une meilleure intégration sur le marché du travail, investir davantage dans les ressources humaines, contrôler plus efficacement la mise en œuvre. Ces priorités doivent être mises en œuvre en tenant compte des grandes orientations de politique économique. Le CESE attire l'attention sur le fait que le groupe de haut niveau qui travaille sur l'avenir de la politique sociale communautaire a soumis des propositions concrètes concernant les priorités à fixer dans le cadre des nouvelles lignes directrices pour l'emploi. D'après ces propositions, ces lignes directrices devraient se concentrer sur une intégration plus précoce et de meilleure qualité des jeunes dans le marché du travail et sur la création de passerelles entre formation et vie professionnelle, ainsi que sur l'intégration des femmes et des travailleurs âgés. Selon la proposition du groupe d'experts, une autre priorité doit consister à promouvoir la qualité du travail par des mesures d'organisation du travail, de protection de la santé et de la sécurité au travail, ce qui permettrait en même temps de faciliter l'intégration des travailleurs âgés. Dans le domaine de l'éducation et de la formation tout au long de la vie, le groupe propose également plusieurs mesures qui doivent être intégrées aux lignes directrices pour l'emploi. Une plus large part doit également y être faite aux mesures qui permettent de soutenir et de gérer les conséquences sociales des mutations structurelles, en particulier dans les nouveaux États membres. Les lignes directrices intégrées pour la croissance et l'emploi présentées entre-temps ne reprennent que partiellement ces propositions (10).

Le CESE estime nécessaire que la nouvelle orientation des lignes directrices pour l'emploi mette davantage l'accent sur la qualité de l'emploi et d'éviter en la matière la pauvreté au travail.

4.1.2

Le rôle que joue le Fonds social européen (FSE) dans le soutien à la stratégie européenne pour l'emploi n'est abordé que sous l'aspect de l'amélioration des mécanismes de contrôle de la mise en œuvre de la stratégie et pour annoncer une stratégie de communication. Le CESE regrette que la Commission européenne ne mentionne même pas la fonction du FSE en tant qu'important instrument de promotion des ressources humaines et des mesures de formation initiale et continue liées au marché de l'emploi. Selon le CESE, le rôle important que joue le FSE en faveur de l'éducation et la formation tout au long de la vie n'est pas suffisamment mis en évidence. La compétence et la qualification représentent pourtant un avantage concurrentiel essentiel de l'Union (11).

4.1.3

Le CESE estime en principe positifs les passages de l'Agenda social concernant l'accompagnement des restructurations économiques, manifestement inspirés par le groupe d'experts sur l'avenir de la politique sociale. Il est cependant très surprenant que la Commission européenne n'aborde pas les conséquences sociales des restructurations d'entreprises. Il s'agit pourtant justement de trouver des solutions permettant de gérer les conséquences sociales, de manière à permettre un juste équilibre entre les intérêts économiques et les intérêts des salariés. La Commission européenne fait principalement des propositions relatives aux procédures et aux instruments, comme par exemple la création d'un forum de haut niveau réunissant tous les acteurs et les personnes impliquées et ayant pour fonction d'accompagner les restructurations d'entreprises. Elle ne donne cependant pas d'informations plus précises sur la composition de ce forum ni sur ses objectifs et ses contenus. De la même manière, elle n'attire que très peu l'attention sur l'importance des droits des travailleurs et de la législation sociale européenne dans la gestion des conséquences sociales des mutations structurelles. Le CESE considère cependant que les directives concernant la protection contre les licenciements collectifs et les transferts d'entreprises ainsi que l'information et la consultation des travailleurs, de même que la directive sur le comité d'entreprise européen, représentent d'importants instruments pour gérer les conséquences sociales des restructurations avec la participation des travailleurs et de leurs représentations.

4.1.4

Le CESE se félicite de l'ouverture de la deuxième phase de consultation des partenaires sociaux européens sur la question des restructurations et sur la révision de la directive relative aux comités d'entreprises européens. Il estime cependant que ces deux thèmes devraient être traités séparément. Les comités d'entreprise européens jouent certes un rôle important lors des restructurations. Mais indépendamment de cela, l'amélioration de la directive relative aux comités d'entreprise accuse un retard depuis longtemps. Le CESE s'est déjà penché sur cette question pour constater que «ce nouvel instrument (…) a contribué très fortement au développement de la dimension européenne des relations sociales» (12).

4.1.5

Le CESE soutient également le projet visant à aboutir à une plus forte synergie entre les mesures politiques et les instruments financiers de mise en œuvre, en particulier le FSE. Cependant, il est difficile de dire ce que la Commission européenne veut dire par là, et ce qu'elle entend par une corrélation plus forte entre la stratégie européenne pour l'emploi et l'évolution des cadres juridiques et des accords passés entre les partenaires sociaux.

4.2   Une nouvelle dynamique pour les relations industrielles

4.2.1

La Commission européenne souhaite insuffler une nouvelle dynamique à l'évolution des relations industrielles en développant la législation sociale, en renforçant le dialogue social et en encourageant la responsabilité sociale des entreprises. Dans ce contexte, la Commission européenne a l'intention de présenter un livre vert sur l'évolution du droit du travail dans lequel seront analysés les nouveaux modèles d'organisation du travail, le rôle du droit du travail dans la création d'un environnement plus sûr et dans l'adaptation aux dernières évolutions. Selon la Commission européenne, le débat autour de ce livre vert pourrait conduire à une modernisation et à une simplification du droit actuellement en vigueur. Le CESE estime que l'élaboration de ce livre vert est utile, mais qu'il est prématuré d'anticiper, ne serait-ce que d'une manière indicative, les conclusions possibles d'un tel débat. Par principe, le CESE estime que la révision du droit du travail — à laquelle il convient d'associer les partenaires sociaux — doit être guidée par la mission prescrite par le traité, à savoir assurer des règles sociales minimales qui conduisent à l'égalisation dans le progrès des conditions de vie et de travail (cf. article 136 du traité instituant la Communauté européenne).

4.2.2

La Commission européenne annonce ensuite qu'elle proposera en 2005 une initiative concernant la protection des données à caractère personnel des travailleurs, une mise à jour des directives «transferts d'entreprises» et «licenciements collectifs» et une codification de plusieurs dispositions relatives à l'information et à la consultation des travailleurs. Le CESE attire l'attention sur le fait qu'il est temps de concrétiser ces initiatives. Les révisions des directives devraient avoir pour objectifs, conformément au traité, «la promotion de l'emploi, l'amélioration des conditions de vie et de travail, permettant leur égalisation dans le progrès» (art. 136 du traité instituant la Communauté européenne).

En ce qui concerne la codification des dispositions relatives à l'information et à la consultation des travailleurs, le CESE estime que le niveau des droits de participation prévu par la directive sur la société européenne devrait constituer à cet égard la référence.

4.2.3

Le CESE approuve les propositions de la Commission européenne dans le domaine de la santé et de la sécurité au travail, en particulier la mise en avant, dans les initiatives annoncées, d'une approche fondée sur la prévention. La communication relative à la nouvelle stratégie de la sécurité et de santé au travail pour la période 2007-2012 devrait surtout analyser les nouveaux risques pour la santé, inclure la protection de groupes de travailleurs qui n'ont pas été pris en compte jusque-là et s'interroger sur la manière d'améliorer et de soutenir la mise en œuvre des dispositions en vigueur en matière de protection de la sécurité et de la santé, en particulier dans les nouveaux États membres.

4.2.4

Le CESE se félicite également que la Commission européenne projette de continuer à promouvoir le dialogue social aussi bien au niveau interprofessionnel que sectoriel, et soutient en particulier le projet d'accorder davantage de soutien logistique et technique aux partenaires sociaux. Selon le CESE, il s'agit d'un projet particulièrement nécessaire dans les nouveaux États membres, car les structures du dialogue social y sont bien moins développées et encore en cours de réalisation. Le dialogue social bilatéral entre les partenaires sociaux européens est un élément fondamental du modèle social européen. La spécificité du dialogue social tient à la légitimité et à la représentativité de ces partenaires ainsi qu'à leur capacité à conclure des accords contraignants au niveau européen, comme l'ont relevé les partenaires sociaux dans leur contribution commune au Sommet de Laeken (13). L'importance du dialogue avec la société civile, qui s'exprime notamment à travers la consultation du CESE en sa qualité de forum de la société civile organisée, est tout aussi grande (14). Le soutien de la Commission européenne est précisément nécessaire à cet égard dans les nouveaux États membres, en ce qui concerne tant le dialogue civil que le développement de relations industrielles stables entre les partenaires sociaux.

4.2.5

La Commission européenne envisage de présenter d'autres initiatives dans le domaine de la responsabilité sociale des entreprises dans le but de promouvoir le développement des principes correspondants. Le CESE estime que les nombreux exemples positifs de codes de conduite et d'autres mesures prises volontairement par les entreprises en termes de responsabilité sociale, présentés lors du dernier forum plurilatéral européen sur la responsabilité des entreprises, constituent une bonne base en la matière. Ces mesures devraient également inclure des initiatives dans le domaine de l'éducation et de la formation tout au long de la vie. Le CESE soutient de ce fait les efforts consentis par la Commission européenne pour déployer des initiatives qui favorisent le développement et la transparence des principes de la responsabilité sociale des entreprises au niveau européen.

4.3   Marché européen du travail

4.3.1

La Commission européenne prévoit plusieurs initiatives pour lever les entraves à la mobilité transfrontalière et promouvoir l'établissement d'un véritable marché européen du travail. L'une de ces initiatives consiste en une proposition de directive sur la transférabilité des droits acquis dans les régimes professionnels de retraite. Le CESE considère qu'il est nécessaire de soumettre rapidement cette proposition étant donné qu'en raison de divergences quant à la portée d'une telle réglementation, des négociations n'ont pas pu s'ouvrir entre partenaires sociaux.

4.3.2

Une autre proposition de la Commission européenne concerne la mise en place d'un cadre optionnel pour la négociation collective transnationale, soit au niveau de l'entreprise, soit à l'échelle des secteurs. Selon la Commission européenne, un tel cadre pourrait permettre de régler au niveau transnational les questions se rapportant à l'organisation du travail, à l'emploi, aux conditions de travail et à la formation, dans l'esprit d'un partenariat pour le changement. Le terme «optionnel» signifie que le choix d'utiliser ou non un tel cadre juridique est laissé aux partenaires sociaux.

Comme la pratique des comités d'entreprise européens le montre, les partenaires sociaux ont, dans de nombreux cas, non seulement utilisé leur droit à l'information et à la consultation mais ont également conclu sur une base volontaire des accords relatifs à certains des thèmes évoqués. Des exemples d'accords de ce type sont également attestés dans le dialogue social à l'échelle des secteurs.

Le CESE soutient l'objectif exprimé dans cette initiative qui vise à promouvoir le dialogue social au niveau de l'entreprise et à l'échelle des secteurs et à prendre davantage en compte qu'auparavant les activités transnationales des entreprises et la portée transnationale de leurs accords volontaires. Il recommande à la Commission européenne d'examiner le plus tôt possible avec les partenaires sociaux européens cette proposition de législation-cadre et de recueillir et prendre en considération leur avis sur la question.

4.3.3

Comme la Commission européenne l'indique, la libre circulation des personnes est l'une des libertés fondamentales en Europe. Aussi le CESE est-il lui aussi d'avis que les instruments existants, comme le réseau EURES et la coordination des systèmes de sécurité sociale des travailleurs migrants, doivent être constamment améliorés. Le CESE estime donc opportune la proposition de créer en 2005 un groupe de haut niveau pour évaluer l'impact de l'élargissement de l'UE sur la mobilité et le fonctionnement des périodes transitoires et de présenter un rapport à ce sujet en 2006. Le CESE attire l'attention sur le fait que les partenaires sociaux et les organisations non gouvernementales disposent d'une grande expérience dans ce domaine. Il demande dès lors à la Commission européenne d'inclure des représentants des partenaires sociaux et des organisations non gouvernementales dans la composition du groupe d'experts.

5.   Une société plus solidaire: l'égalité des chances pour tous

5.1

Dans ce deuxième axe prioritaire, la Commission européenne traite de l'approfondissement des échanges d'expérience concernant la réforme des systèmes de sécurité sociale, les politiques de lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale et de non-discrimination, ainsi que le rôle des services sociaux d'intérêt général.

5.2

La Commission européenne reprend sa proposition de rationaliser et de simplifier la coordination dans les domaines de l'inclusion sociale, des retraites et de la santé. Le CESE a déjà consacré un avis à ce sujet (15). Selon lui, l'utilisation de la méthode ouverte de coordination doit prendre en compte les particularités de chacun des domaines. Le CESE est en particulier d'avis que l'utilisation déjà très avancée de la méthode ouverte de coordination dans le domaine de l'inclusion sociale doit être poursuivie par le biais de plans d'action nationaux et de rapports bisannuels. Selon le CESE, cela est particulièrement nécessaire du fait qu'en dépit des efforts communs, l'ampleur de la pauvreté n'a pas pu être infléchie de manière significative. La pauvreté touche environ 15 % de l'ensemble de la population de l'Union et dans certains pays, le pourcentage dépasse 20 %. L'une des raisons majeures en est le taux de chômage élevé, les familles nombreuses et les familles monoparentales étant à cet égard les plus affectées (16). Même l'emploi ne protège pas contre la pauvreté, comme le montre le nombre croissant de «travailleurs pauvres» (17). C'est pourquoi des efforts accrus sont nécessaires pour lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale.

5.3

La Commission européenne souhaite poursuivre dans ce contexte le débat sur les dispositifs nationaux de revenu minimum et organiser une consultation à ce sujet en 2005. Le CESE se demande où ce débat a eu lieu et qui y a participé. Selon lui, il revient aux États membres d'accorder en cas de besoin une assistance sociale aux citoyens sous la forme d'un revenu minimum permettant de mener une vie décente. Les déclarations de la Commission européenne ne font pas clairement apparaître la raison pour laquelle ce débat sur les revenus minimums nationaux doit être mené au niveau européen. Le CESE souhaite également soulever la question de savoir s'il ne serait pas plus judicieux, en raison de l'urgence des problèmes, d'organiser l'année européenne de lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale avant 2010.

5.4

Le CESE appuie les politiques menées par la Commission européenne en matière d'égalité de traitement des hommes et des femmes et de lutte contre la discrimination en général. La Commission annonce pour 2005 une nouvelle communication dans laquelle elle souhaite expliquer son approche politique et examiner des initiatives visant à compléter le cadre juridique existant.

Le CESE attire l'attention sur le fait que dans de nombreux États membres, les directives relatives à la non-discrimination viennent seulement d'être transposées dans le droit national ou sont en cours de transposition. Il considère donc qu'il serait opportun de présenter un rapport sur l'état de la transposition de ces directives et de proposer sur cette base d'autres mesures politiques.

Le CESE soutient les mesures annoncées dans le domaine de l'égalité entre les hommes et les femmes, en particulier la création d'un institut européen pour l'égalité entre hommes et femmes et la révision du plan d'action sur l'égalité des chances pour les personnes handicapées.

5.5

La Commission européenne a également l'intention de présenter en 2005 une communication sur l'importance des services sociaux. Le CESE se félicite de ce projet, surtout parce qu'il escompte que cette communication aura en retour un effet sur le débat animé relatif à la directive sur les services dans le marché intérieur et contribuera à apporter des clarifications. Dans son livre blanc sur les services d'intérêt général, la Commission européenne a déjà mis en avant les particularités des services sociaux, qui résident en particulier dans leur mission d'intérêt public et leur caractère personnel. Les services sociaux, qu'ils soient dispensés par un organisme privé ou public, se différencient fondamentalement des autres services fournis au sein du marché intérieur du fait qu'ils reposent sur le principe de solidarité, qu'ils ciblent les besoins des particuliers et qu'ils contribuent à la cohésion sociale d'une société en assurant le droit fondamental à la protection sociale. Le CESE est donc d'avis que les services sociaux, notamment les services de santé, doivent fondamentalement être traités d'une manière autre que les services purement marchands.

5.6

Le CESE regrette que la Commission européenne n'évoque pas l'importance que revêtent les services sociaux d'utilité publique pour l'emploi et la cohésion sociale. Le CESE a déjà étudié la question dans son avis relatif à l'examen à mi-parcours de l'Agenda social, dans lequel il pose les affirmations suivantes: «La contribution des services sociaux d'utilité publique, en ce qui concerne l'emploi et l'impact social, est de plus en plus reconnue et mise en valeur, ce qui donne lieu à d'excellents résultats en matière de promotion et de protection des droits des personnes défavorisées pour répondre aux besoins éducatifs, d'aide sociale, d'assistance sanitaire, de soutien aux politiques d'inclusion et de réduction des inégalités sociales. Les organisations sans but lucratif contribuent à reconnaître et à expliciter la demande sociale provenant surtout des couches les plus défavorisées de la population, investissent pour réparer les tissus sociaux endommagés nécessitant une régénération de liens positifs, mobilisent la solidarité civile et la participation sociale, qui sont des conditions préalables essentielles pour encourager la démocratie, y compris dans les zones les plus défavorisées». (18)

6.   Conclusions

6.1

Le CESE se félicite de la communication de la Commission européenne sur l'Agenda social et considère qu'elle contribue à mettre en évidence l'importance de la politique sociale pour la réalisation des objectifs de Lisbonne. Il considère toutefois qu'en dépit de son approche stratégique, la communication n'est pas entièrement à la hauteur des attentes particulières liées à l'évaluation à mi-parcours de la stratégie de Lisbonne. Tandis que dans l'Agenda social précédent, la Commission européenne s'est laissée guider par le rôle de la politique sociale en tant que facteur productif, ce n'est plus expressément le cas dans la nouvelle proposition. Le CESE estime au contraire que la politique sociale ne peut être subordonnée à la politique économique mais revêt la même importance qu'elle. Encourager la cohésion sociale et l'établissement d'un État-providence actif compte tout autant parmi les objectifs de la stratégie de Lisbonne tels qu'ils ont été adoptés lors du sommet européen de mars 2000 que l'augmentation de la compétitivité et d'une croissance économique durable. Un haut niveau de protection sociale compte parmi les éléments centraux du modèle social européen et contribue de manière décisive à la cohésion sociale.

6.2

L'idée souvent défendue selon laquelle des dépenses sociales élevées vont à l'encontre des objectifs de politique économique est contredite par des données empiriques de différents pays européens. Le groupe d'experts «Avenir de la politique sociale» a attiré l'attention sur cet aspect dans son rapport. Selon une étude de 2004 du Centre d'études des politiques européennes, la Suède, le Danemark, l'Autriche, le Luxembourg et les Pays-Bas affichent des performances économiques relativement élevées tout en présentant un haut niveau de protection sociale. Les pays qui s'en sortent le mieux en termes de compétitivité dans le classement international établi par le Forum économique mondial consentent dans le même temps des investissements élevés dans la politique sociale et les systèmes de sécurité sociale et présentent par ailleurs des taux d'emploi élevés et de faibles niveaux de pauvreté après les transferts sociaux (19).

6.3

Le CESE déplore le fait que le nouvel Agenda social contienne moins de mesures concrètes que les agendas précédents. Cela rend une évaluation difficile puisque l'orientation politique des propositions n'est pas toujours identifiable. La remarque vaut en particulier pour la législation sociale, pour laquelle la Commission européenne se limite à une révision des directives en vigueur et ne soumet pratiquement pas de nouvelles propositions. Le CESE espère en conséquence que le cadre stratégique proposé sera assorti de mesures concrètes. Il considère que le nouvel Agenda social devrait être lié à un programme d'action pour les cinq prochaines années. Les droits sociaux fondamentaux de la Constitution européenne à venir devraient servir d'orientation dans ce contexte. Sur cette base, le programme d'action pour la politique sociale devrait contenir aussi bien des propositions de révision des directives en vigueur que de nouvelles propositions de directives, ainsi que les débats et les mesures de coordination prévus pour poursuivre le développement de la politique sociale. Selon le CESE, il importe justement, dans le cadre de l'évaluation à mi-parcours de la stratégie de Lisbonne, de rendre visible la politique sociale européenne ainsi que son rôle productif pour la promotion de la croissance et l'emploi.

6.4

Le CESE souhaite également évoquer dans ce contexte la question du financement de la politique sociale: bien que la Commission ait indiqué dès la présentation des perspectives financières que la structure et la dotation du futur budget communautaire doivent refléter et promouvoir la stratégie de Lisbonne, il est à craindre que sa proposition reste en deçà de cette ambition.

6.5

S'il est vrai que la sous-rubrique correspondante des perspectives financières intitulée «La compétitivité pour la croissance et l'emploi» (20) montre une augmentation des budgets correspondants, cette augmentation concerne toutefois principalement des mesures ayant trait à la compétitivité et à l'esprit d'entreprise. Une comparaison avec les dépenses actuelles en matière sociale et dans le secteur de l'emploi montre qu'aucune réelle augmentation n'est par contre prévue en ce qui concerne la future politique sociale. La Commission propose en substance un budget inchangé dans ce secteur.

6.6

Le CESE a déjà clairement indiqué, notamment dans le cadre de son avis sur le programme-cadre Progress (21), qu'il ne comprend pas cet objectif de «neutralité budgétaire» dans le domaine de l'emploi et de la politique sociale, surtout à la lumière du décevant bilan à mi-parcours de la stratégie de Lisbonne. Le CESE demande en conséquence que les ressources prévues pour la politique sociale soient majorées de manière analogue aux autres mesures indiquées dans le cadre du titre consacré à la croissance et à l'emploi.

Bruxelles, le 13 juillet 2005.

La Présidente

du Comité économique et social européen

Anne-Marie SIGMUND


(1)  «De solides conditions macroéconomiques sont essentielles pour étayer les efforts en faveur de la croissance et de l'emploi». (Conclusions de la Présidence, page 2).

(2)  Ibid., page 2.

(3)  Conclusions de la Présidence, page 9.

(4)  Conseil européen, Conclusions de la Présidence – Barcelone, 15 et 16 mars 2002.

(5)  Rapport du Groupe de haut niveau sur l'avenir de la politique sociale dans une Union européenne élargie, mai 2004.

(6)  COM(2005) 33 final du 9 février 2005, p. 2.

(7)  COM(2005) 94 final du 16 mars 2005.

(8)  Conseil européen, Conclusions de la Présidence – Bruxelles, 22 et 23 mars 2005.

(9)  Avis du CESE sur la «Proposition de décision du Parlement européen et du Conseil établissant le programme “Jeunesse en action” pour la période 2007-2013» (CESE 253/2005 du 10 mars 2005 – rapporteur: M. RODRÍGUEZ GARCÍA-CARO).

(10)  COM(2005) 141 final du 12 avril 2005.

(11)  Avis du CESE sur la «Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil sur le Fonds social européen» (CESE 250/2005 du 9 mars 2005 – rapporteuse: Mme ENGELEN-KEFER).

(12)  Avis du CESE sur «L'application concrète de la directive sur les Comités d'entreprise européens (94/45/CE) ainsi que sur les aspects qui éventuellement nécessiteraient une révision» (JO C 10 du 14 janvier 2004 – rapporteur: M. PIETTE).

(13)  CES/UNICE/CEEP, contribution commune du 7 décembre 2001.

(14)  Avis du CESE sur le thème «Gouvernance européenne — un Livre blanc» (JO C 125 du 27 mai 2002, p. 61 - rapporteuse: Mme ENGELEN-KEFER, corapporteuse: Mme PARI).

(15)  Avis du CESE sur la «Communication de la Commission, au Conseil, au Parlement européen, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — Renforcement de la dimension sociale de la stratégie de Lisbonne: Rationalisation de la coordination ouverte dans le domaine de la protection sociale» (JO C 32 du 5 février 2004 - rapporteur: M. BEIRNAERT).

(16)  Rapport conjoint sur l'inclusion sociale 2004, mai 2004.

(17)  Rapport du Groupe de haut niveau sur l'avenir de la politique sociale dans une Union européenne élargie, mai 2004.

(18)  Avis du CESE sur la «Communication de la Commission au Conseil, au Parlement européen, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — Révision à mi-parcours de l'agenda pour la politique sociale» (JO C 80 du 30 mars 2004 (paragraphes 3.3.6 et 3.3.7) (rapporteur: M. JAHIER).

(19)  Rapport du Groupe de haut niveau sur l'avenir de la politique sociale dans une Union européenne élargie, mai 2004, p. 61.

(20)  COM(2004) 101 final/2, du 26 février 2004.

(21)  Avis du CESE sur la «Proposition de décision du Parlement européen et du Conseil établissant un programme communautaire pour l'emploi et la solidarité sociale - Progress», COM(2004) 488 final, du 6 avril 2005, CESE 386/2005.


25.11.2005   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 294/21


Avis du Comité économique et social européen sur la «Communication de la Commission — Un partenariat renforcé pour les régions ultrapériphériques»

[COM(2004) 343 final]

(2005/C 294/05)

Le 27 mai 2004, la Commission européenne, conformément à l'article 262 du traité instituant la Communauté européenne, a décidé de consulter le Comité économique et social européen sur la «Communication de la CommissionUn partenariat renforcé pour les régions ultrapériphériques».

La section spécialisée «Union économique et monétaire, cohésion économique et sociale», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a élaboré son avis le 22 juin 2005 (rapporteuse: Mme LÓPEZ ALMENDÁRIZ).

Lors de sa 419ème session plénière des 13 et 14 juillet 2005 (séance du 13 juillet 2005), le Comité économique et social européen a adopté l'avis suivant par 62 voix pour, 1 voix contre et 8 abstentions.

1.   Introduction

1.1

En réponse à l'invitation adressée par le Conseil européen de Séville, de juin 2002, de présenter une approche globale et cohérente des particularités de la situation des régions ultrapériphériques et des moyens d'y répondre, la Commission européenne a, le 26 mai 2004, adopté une communication intitulée «Un partenariat renforcé pour les régions ultrapériphériques» (1).

1.2

Cette invitation du Conseil européen, intervenue à la veille de l'élargissement de l'UE et dans le contexte de la mondialisation, a représenté une initiative décisive pour la définition d'une stratégie globale de développement des régions ultrapériphériques (RUP), fondée sur l'approfondissement de la mise en oeuvre de l'article 299, paragraphe 2, du traité.

1.3

Le 29 mai 2002, peu avant le Conseil européen de Séville, le Comité économique et social a approuvé l'avis d'initiative sur le thème «Stratégie d'avenir pour les régions ultrapériphériques de l'Union européenne» (2), qui proposait la mise en oeuvre d'une stratégie globale pour l'ultrapériphérie, comportant une définition de principes et d'objectifs, un inventaire des moyens disponibles et un calendrier de mesures à adopter.

1.4

Dans le but de relancer une politique globale et cohérente en faveur des régions ultrapériphériques, les gouvernements régionaux et les États membres concernés ont, en juin 2003, présenté des mémorandums, qui insistent tous sur l'importance de la spécificité des régions ultrapériphériques par rapport aux autres régions européennes.

1.5

Le Traité pour une constitution européenne réaffirme, dans ses articles III-424 et IV-440.2, la reconnaissance juridique spécifique des régions ultrapériphériques. Il complète également les objectifs de cohésion économique et sociale par un nouvel objectif de cohésion territoriale

2.   Contenu essentiel du document de la Commission

2.1

La Commission européenne propose un partenariat renforcé avec les régions ultrapériphériques de l'Union. La nouvelle stratégie s'inscrit dans le cadre de la réforme de la politique européenne de cohésion pour la période 2007-2013. La communication comporte trois axes prioritaires:

Compétitivité: améliorer la compétitivité des RUP par la création et le développement d'un milieu économique favorable à l'implantation des entreprises.

Accessibilité: renforcer les efforts de cohésion au bénéfice des régions ultrapériphériques pour réduire les difficultés liées à l'éloignement, telles que la fragmentation en archipel ou l'enclavement dans des régions peu accessibles. En effet, la réduction de ces handicaps et des surcoûts de production des régions ultrapériphériques constitue l'une des principales priorités de l'action de l'Union à l'égard de ces régions.

Insertion régionale: les régions ultrapériphériques et les États tiers voisins évoluent dans un environnement régional commun, et donc propice au développement des échanges de biens et de services entre eux. C'est pourquoi il convient de favoriser l'insertion des RUP dans leur proche environnement géographique.

2.2

Dans ce cadre, la Commission apporte deux réponses spécifiques visant à permettre aux régions ultrapériphériques de prendre leur plein essor:

Le programme spécifique de compensation des handicaps: ce programme serait financé par le FEDER pour la période 2007-2013. Il serait consacré à la réduction des handicaps spécifiques qui affectent l'économie des régions ultrapériphériques et qui sont énumérés dans le cadre de l'article 299 § 2 du Traité CE: éloignement, insularité, faible superficie, relief et climat difficiles et dépendance économique vis-à-vis d'un petit nombre de produits.

Le plan d'action pour le grand voisinage: l'objectif poursuivi est d'élargir l'espace naturel d'influence socio–économique (y compris pour le traitement des questions migratoires des populations) et culturel des régions ultrapériphériques. Il s'agit de réduire les barrières qui limitent les possibilités d'échanges avec le milieu géographique de ces régions, très éloignées du continent européen mais très proches des marchés géographiques des Caraïbes, d'Amérique et d'Afrique. Le plan d'action pour le grand voisinage intègre des mesures non seulement en matière commerciale et douanière, mais aussi dans le domaine de la coopération transnationale et transfrontalière.

3.   Observations générales

3.1

Le Comité se félicite de ce que les articles III-424 et IV-440.2 du Traité pour une constitution européenne réaffirment la reconnaissance juridique spécifique des RUP au niveau législatif le plus élevé, en soulignant leur caractère singulier et en fournissant les moyens législatifs et réglementaires nécessaires pour que ces dispositions soient utilisées comme des instruments horizontaux de modulation des politiques communes dans ces régions.

3.2

Le Comité se réjouit de la capacité de réponse de l'Union aux besoins régionaux spécifiques, en particulier de la reconnaissance de la spécificité des RUP au sein de l'Union et de leur différence par rapport à d'autres territoires présentant des handicaps géographiques ou démographiques.

3.3

Le Comité se félicite de ce que la Commission européenne ait accueilli favorablement sa recommandation, formulée dans l'avis «Stratégie d'avenir pour les régions ultrapériphériques de l'Union européenne», de renforcer le Groupe interservices pour les RUP, en le dotant de moyens humains supplémentaires, à travers la création d'une unité spécifique au sein de la DG REGIO et il espère que la fonction de coordination entre les services ne sera pas entravée.

3.4

Le Comité prend acte avec satisfaction de la reconnaissance dans la communication de la Commission du fait que le statut spécifique des régions ultrapériphériques trouve son fondement dans les principes d'égalité et de proportionnalité. Cela permet de traiter de manière différenciée la situation spécifique de celles-ci pour que les citoyens européens qui y résident aient les mêmes chances que ceux des autres régions.

3.5

Le Comité se réjouit que la Commission ait reconnu que les handicaps permanents et combinés des régions ultrapériphériques entraînent des surcoûts d'approvisionnement en énergie en général et, principalement, en produits agricoles destinés à la consommation locale, liés aux difficultés suivantes, parmi lesquelles:

la taille réduite des marchés,

l'isolement par rapport aux marchés principaux,

le manque d'économies d'échelle dans la production et la nécessité pour les entreprises de disposer de stocks importants,

la durée réduite d'amortissement des biens, ce qui impose de satisfaire à des normes de sécurité plus strictes pour les équipements ou de remplacer ceux-ci plus fréquemment (difficultés liées au climat et aux reliefs difficiles),

les problèmes du surdimensionnement des instruments de production liés à l'organisation technologique de la production et de la distribution,

le déficit de main-d'œuvre qualifiée lié à l'exiguïté du marché du travail et à la difficulté d'accéder au marché du travail du continent européen,

les surcoûts de l'approvisionnement en énergie et en produits agricoles destinés à la consommation locale,

le déficit d'accès aux connexions à haut débit et aux réseaux de télécommunications ainsi que les surcoûts des services de communication électronique,

la difficulté d'organiser la promotion de la production locale en dehors de la région,

les obstacles liés au respect des normes environnementales

la double insularité, en raison de la fragmentation territoriale de certaines des RUP qui sont elles mêmes composées de plusieurs îles.

3.6

Le Comité partage avec la Commission le souci d'inscrire les régions ultrapériphériques dans la Stratégie de Lisbonne et de Göteborg en vue de renforcer l'emploi, les réformes économiques et la cohésion sociale, et il propose en conséquence d'en exploiter le potentiel dans le domaine de la société de la connaissance.

3.7

Le Comité estime que le dynamisme du secteur touristique apporte une valeur ajoutée importante de nature à contribuer au renforcement de la compétitivité des économies dans les régions ultrapériphériques. Toutefois, il ne faut pas favoriser une croissance démesurée de ce secteur qui entraînerait un déséquilibre et qui aurait une incidence négative sur la durabilité environnementale de ces régions.

4.   Observations particulières sur la communication de la Commission

4.1

Le Comité se félicite que la communication de la Commission reprenne une série de recommandations qu'il a formulées dans son avis d'initiative (3), mais déplore que d'autres n'aient pas été prises en considération.

4.2

Le Comité entend souligner que la position commune des RUP et des États membres concernés sur l'intégration de ces régions dans la future politique de cohésion proposait l'éligibilité automatique à l'ancien objectif 1 — actuel objectif «convergence» — comme étant le meilleur moyen de s'occuper de la situation spécifique des RUP, leur garantissant ainsi un traitement uniforme et les ressources financières nécessaires pour faire face à leurs contraintes permanentes.

4.3

Le Comité prend note du fait que la Commission a choisi une proposition alternative, combinant l'application du cadre général de la politique de cohésion aux RUP et la création de deux instruments spécifiques: un programme de compensation des contraintes spécifiques des RUP et un plan d'action pour le grand voisinage.

4.4

Le Comité constate l'absence de référence explicite à la portée juridique du nouvel article III-424 (4) du Traité pour une constitution européenne.

4.5

Le Comité regrette que la stratégie de la Commission pour l'ultrapériphérie confère à la politique de cohésion un rôle central et quasi exclusif, dans la mesure où il en résulte une absence presque totale de prévisions dans les autres domaines sectoriels.

4.6

Le Comité espère que les avancées réalisées en ce qui concerne la caractérisation de ces régions et le constat d'inadéquation de certaines politiques sectorielles, se traduiront en une stratégie horizontale pour l'ultrapériphérie, qui tienne compte de l'existence d'une réalité spécifique et différente au sein de l'Union.

4.7

Le Comité estime, par conséquent, que le peu d'attention accordée au rôle des autres politiques communautaires ne permet pas de parler stricto sensu d'une véritable stratégie globale et cohérente en faveur des régions ultrapériphériques, telle que demandée par le Conseil européen de Séville.

4.8

Le Comité déplore cette absence de contenu, tout particulièrement dans le chapitre consacré à l'agriculture: nombre de questions posées par les RUP demeurent sans réponse et exigent que des solutions soient recherchées sans délai.

4.9

De même, le Comité regrette l'absence de dispositions en matière de politique d'immigration visant à résoudre les graves problèmes auxquels certaines RUP sont confrontées en permanence et il demande de prendre en considération la spécificité des RUP dans la future politique de l'immigration.

4.10

Le Comité émet des réserves quant à l'opportunité et à la pertinence d'appliquer aux RUP les critères généraux d'éligibilité de la politique de cohésion, et considère que les RUP souffrent d'un déficit d'infrastructures de base et ne bénéficient pas des conditions de compétitivité nécessaires à la réalisation des objectifs des stratégies de Lisbonne et de Göteborg.

4.11

Le Comité note que la stratégie proposée par la Commission pour l'ultrapériphérie se fonde quasi exclusivement sur deux instruments spécifiques, à savoir le programme de compensation des contraintes permanentes et le plan d'action pour le «grand voisinage» (5).

4.12

Le Comité se félicite que dans le cadre du nouvel objectif 3 du FEDER («coopération territoriale européenne»), les RUP soient éligibles tant à la coopération transnationale qu'à la coopération transfrontalière, car il considère cette inclusion comme essentielle pour pouvoir intégrer ces régions dans leurs cadres géographiques respectifs.

5.   Recommandations

5.1

Le Comité estime que la Commission européenne doit développer une stratégie globale pour l'ultrapériphérie en la dotant des moyens nécessaires à sa mise en oeuvre et en se conformant aux engagements exprimés dans son rapport de mars 2000 et formulés dans les conclusions du Conseil de Séville de juin 2002; à cet égard, il convient de préciser que le présent article 299, paragraphe 2, du traité, futur article III-424 de la Constitution, représente la base juridique unique et commune pour toutes les mesures applicables aux régions ultrapériphériques, que celles-ci supposent des dérogations au traité ou impliquent des modifications ou des adaptations du droit dérivé.

5.2

En conséquence, le Comité juge utile et opportun de formuler une série de recommandations invitant la Commission européenne à:

5.2.1

Envisager de ne pas appliquer à toutes les régions ultrapériphériques les critères généraux d'éligibilité de la politique de cohésion comme la solution la plus appropriée pour leur permettre de faire face à leurs contraintes permanentes, ainsi que pour préserver un traitement uniforme.

5.2.2

Doter les deux instruments spécifiques qu'elle propose de ressources économiques suffisantes pour répondre aux besoins et problèmes de l'ensemble des RUP.

5.2.3

Ne pas ménager ses efforts ni ses ressources pour donner un contenu au plan d'action pour le «grand voisinage», grâce à une coordination efficace et cohérente avec la politique de développement de l'UE et, en particulier, avec les dispositions de l'Accord de Cotonou, les programmes MEDA ( Sud de la Méditerranée et Moyen-Orient ) et ALA (Amérique latine et Asie), ainsi que d'autres programmes et actions communautaires appelés à être lancés à l'avenir avec diverses régions du monde.

5.2.4

Préserver les intérêts de l'ensemble du secteur bananier communautaire avant le changement de régime qui se profile dans le cadre de l'OCM de la banane, en améliorant l'équilibre actuel du marché afin qu'il concilie l'accès des producteurs des pays moins avancés aux marchés communautaire et mondial avec le maintien des revenus des producteurs communautaires et de l'emploi, grâce à la fixation d'un tarif douanier approprié suffisamment élevé pour garantir l'avenir de la banane communautaire.

5.2.5

Tenir compte du résultat final des négociations de l'OMC concernant la mise en place du tarif douanier unique afin de proposer, le cas échéant, les mesures adéquates visant à garantir l'emploi et les revenus des producteurs communautaires dans le secteur des bananes. Une amélioration des mécanismes du système d'aide interne pourrait figurer au nombre de ces mesures.

5.2.6

Prendre en considération, dans le cadre de la modification des programmes POSEI agricoles, le potentiel de ces instruments, qui n'a pas été pleinement exploité, principalement en raison du caractère récent de certaines mesures. Il conviendra dès lors de se conformer aux plafonds établis et de doter ces programmes de moyens économiques suffisants pour atteindre les objectifs fixés.

5.2.7

Tenir compte des besoins spécifiques des RUP dans le contexte de la politique de développement rural, à savoir l'élimination des dispositions qui limitent ou entravent l'accès aux aides structurelles, la compensation des agriculteurs et des éleveurs pour les surcoûts, la fixation de niveaux d'intensité des aides compatibles avec les besoins de ces régions et l'extension de la couverture communautaire à des mesures d'accompagnement, notamment dans les domaines suivants: systèmes spécifiques de production — promotion d'une mécanisation adaptée — régimes d'assurances agricoles, promotion de la création d'associations et programmes de lutte contre des organismes nocifs.

5.2.8

Adopter de nouvelles mesures favorisant la compétitivité des productions agricoles, telles que la tomate et d'autres fruits, plantes et fleurs, qui doivent concurrencer sur les mêmes marchés des productions similaires provenant d'autres pays bénéficiant d'accords d'association avec l'UE, tels que le Maroc, ou de régimes préférentiels autonomes, tels que les pays ACP.

5.2.9

Prendre les mesures requises afin de respecter, tant dans le cadre du futur Fonds de développement rural que du futur Fonds européen pour la pêche, la dotation de fonds et l'intensité des aides actuelles pour l'ensemble des RUP.

5.2.10

Renforcer le rôle du Fonds social européen dans les RUP afin de promouvoir en particulier la baisse du taux de chômage, qui est particulièrement élevé dans la plupart de ces régions, ainsi que l'égalité des chances de leurs citoyens par rapport aux autres citoyens de l'Union.

5.2.11

Soutenir la création de conseils économiques et sociaux ou, le cas échéant, le renforcement des conseils existants afin de mieux connaître l'opinion des partenaires économiques et sociaux et des organisations de la société civile en général.

5.2.12

Réviser ses propositions relatives aux aides d'État compte tenu des dispositions du projet de traité constitutionnel, ainsi que poursuivre et intensifier le traitement particulier des RUP en ce qui concerne les aides d'État dans les secteurs de l'agriculture et de la pêche et dans le secteur du transport de marchandises.

5.2.13

Instaurer des mesures appropriées en vue de parvenir à une intégration effective des RUP dans tous les instruments de la politique commune des transports ayant des répercussions sur le développement de ces régions et prendre en considération la spécificité de ces régions dans la réglementation communautaire relative aux services publics en permettant de garantir des niveaux de qualité et des prix correspondant aux besoins des populations.

5.2.14

Compléter et améliorer le régime de concurrence dans le domaine des transports maritime et aérien en ce qui concerne les RUP et plus particulièrement dans les régions souffrant d'un problème de «double insularité».

5.2.15

Donner un contenu réel aux mentions spécifiques relatives aux RUP figurant dans la proposition de la Commission relative au VIIème programme-cadre de recherche et développement technologique, de manière à faciliter la participation des RUP aux actions communautaires de R&D, notamment dans les domaines suivants: climatologie, vulcanologie, océanographie, biodiversité et risques naturels.

5.2.16

Reconnaître la situation particulière des RUP dans le processus de libéralisation du marché intérieur du gaz et de l'électricité afin de ne pas pénaliser les consommateurs de ces régions en ce qui concerne la régularité de l'approvisionnement, la qualité des services et les prix, ce qui implique de faire preuve à leur égard de souplesse dans l'établissement des obligations de service public et en matière d'aides d'État.

5.2.17

Adopter sans délai des mesures garantissant aux RUP un développement durable, en particulier pour ce qui est de la protection de la biodiversité, du réseau Natura 2000 et de la gestion des déchets.

5.2.18

Faire preuve d'imagination au moment de mettre en place des mécanismes et des procédures spécifiques pour les RUP afin d'éviter qu'elles ne restent en marge des bienfaits du grand marché intérieur, en promouvant par exemple l'utilisation d'énergies renouvelables et l'accès aux réseaux à large bande.

5.2.19

Garantir la continuité des régimes fiscaux différenciés des RUP, en tant qu'instruments essentiels pour le développement économique de ces régions.

5.2.20

Envisager la participation active des régions ultrapériphériques aux négociations des accords de partenariat économique (APE) avec les pays ACP en favorisant la mise en place d'un mécanisme de dialogue fluide et permanent entre les autorités régionales et /ou les autorités nationales et les organismes régionaux, avec lesquels l'UE négocie les APE, et ce afin de garantir une efficacité, une complémentarité et une cohérence accrues de ces accords.

Bruxelles, le 13 juillet 2005.

La Présidente

du Comité économique et social européen

Anne-Marie SIGMUND


(1)  COM(2004) 343 final.

(2)  JO C 221 du 17.9.2002, p. 10, rapporteuse: Mme LÓPEZ ALMENDÁRIZ.

(3)  JO C 221 du 17.9.2002.

(4)  Article III-424: «Compte tenu de la situation économique et sociale structurelle de la Guadeloupe, de la Guyane française, de la Martinique, de la Réunion, des Açores, de Madère et des îles Canaries, qui est aggravée par leur éloignement, l'insularité, leur faible superficie, le relief et le climat difficiles, leur dépendance économique vis-à-vis d'un petit nombre de produits, facteurs dont la permanence et la combinaison nuisent gravement à leur développement, le Conseil, sur proposition de la Commission, adopte des lois, lois-cadres, règlements et décisions européens visant, en particulier, à fixer les conditions d'application de la Constitution à ces régions, y compris les politiques communes. Il statue après consultation du Parlement européen.

Les actes visés au premier alinéa portent notamment sur les politiques douanières et commerciales, la politique fiscale, les zones franches, les politiques dans les domaines de l'agriculture et de la pêche, les conditions d'approvisionnement en matières premières et en biens de consommation de première nécessité, les aides d'État, et les conditions d'accès aux fonds à finalité structurelle et aux programmes horizontaux de l'Union.

Le Conseil adopte les actes visés au premier alinéa en tenant compte des caractéristiques et contraintes particulières des régions ultrapériphériques, sans nuire à l'intégrité et à la cohérence de l'ordre juridique de l'Union, y compris le marché intérieur et les politiques communes».

(5)  Voir note de bas de page no 1.


25.11.2005   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 294/25


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil concernant l'accès au marché des services portuaires»

[COM(2004) 654 final — 2004/0240 (COD)]

(2005/C 294/06)

Le 2 décembre 2004, le Conseil de l'Union européenne a décidé, conformément aux dispositions de l'article 80, paragraphe 2, du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la proposition susmentionnée.

La section spécialisée «Transports, énergie, infrastructures, société de l'information», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a élaboré son avis le 19 mai 2005 (rapporteur: M. RETUREAU).

Lors de sa 419ème session plénière des 13 et 14 juillet 2005 (séance du 13 juillet), le Comité économique et social européen a adopté l'avis suivant par 91 votes pour, 49 contre et 17 abstentions.

1.   Introduction

1.1

Après le Livre vert relatif aux ports et infrastructures maritimes en 1997, la Commission rappelait dans son premier projet de directive sur «l'accès au marché des services portuaires» de 2001, et alors que le livre blanc sur la politique commune des transports était encore en préparation, que les thèmes clés du «paquet portuaire» étaient les suivants:

intégration des transports maritimes dans le RTE-T,

réglementation de l'accès aux services portuaires,

financement public des ports maritimes et infrastructures portuaires.

1.2

Les thèmes du «paquet portuaire» étaient d'ailleurs largement développés en introduction au premier projet de directive (1) sur le second thème clé de l'accès au marché, qui a finalement été rejeté par le Parlement en 3ème lecture.

1.3

La Commission, usant de sa prérogative de seule institution disposant du pouvoir d'initiative, revient sur le même thème, avec sa nouvelle proposition de directive (2) concernant l'accès au marché des services portuaires, car elle considère comme son droit et son devoir de légiférer en ce domaine, en application du TCE.

1.4

Elle affirme in limine que la philosophie, les principes et les objectifs définis en 2001 dans sa communication initiale restent inchangés, mais que certains des amendements proposés avaient été pris en considération parce qu'ils enrichissaient la proposition de départ.

1.5

Il convient de rappeler quelques uns des principaux écueils sur lesquels la proposition initiale avait buté avant d'examiner la nature et la portée des modifications apportées dans la nouvelle proposition de directive:

le besoin même d'une telle directive a été mis en doute;

il a été reproché, d'ailleurs dès le livre vert de 1997 en ce qui concerne le Comité (3), mais une fois encore à propos la proposition de directive de 2001, l'absence de prise en considération effective de la dimension sociale dans le secteur portuaire;

les exigences de sécurité, de protection de l'environnement, ainsi que la notion de service public (art. 86 TCE) n'auraient pas non plus été suffisamment prises en compte;

le pilotage devrait être exclu du champ d'application (le rapporteur du Parlement avait proposé d'exclure aussi la manutention, sans être suivi par une majorité de la commission parlementaire sur ce point);

l'auto assistance dans son principe ou sa portée, et la manutention notamment dans l'exigence mécanique de deux fournisseurs au moins par port ont soulevé nombre de critiques, et même provoqué une grève européenne des dockers;

la durée des autorisations a fait l'objet de débats prolongés, de même que l'indemnisation de précédents fournisseurs par les nouveaux entrants: il s'agissait de ne pas freiner les investissements, même en fin d'autorisation, et de sauvegarder les intérêts économiques des fournisseurs de services;

l'ouverture au plus grand nombre possible de fournisseurs, critiquée pour des conditions d'efficacité économique et de rentabilité des investissements, en fonction de la dimension réelle du marché et d'autres considérations, comme le respect de la stratégie de développement ou de la spécialisation des ports.

2.   La nouvelle proposition de directive de la Commission

2.1

La proposition actuelle comporte un exposé des motifs très argumenté et de nombreux considérants. La Commission affirme reprendre le projet initial de 2001, tout en prenant en considération sa propre proposition modifiée de 2002, et la position commune du Conseil ainsi que les textes issus de la procédure de conciliation après la deuxième lecture au Parlement.

2.2

Les motifs invoqués à l'appui d'une initiative européenne sont, pour l'essentiel:

les quatre libertés fondamentales du Traité,

les demandes du Conseil,

les besoins croissants en matière de transports (Livre blanc de 2001) et la nécessité de transférer une partie importante de cette croissance vers le maritime,

le besoin de l'achèvement du marché intérieur et la nécessité d'une concurrence transparente au sein des ports et entre les ports, fondée sur des règles harmonisées,

la création d'emplois et le respect des droits sociaux des travailleurs.

2.3

Mais la philosophie, les principes initiaux ainsi qu'un nombre important de points demeurent inchangés par rapport au projet initial de 2001.

2.4

En particulier, les changements ne concernent pas:

le champ d'application,

les critères d'octroi des autorisations,

le pilotage, considéré comme un service commercial,

la transparence des comptes du gestionnaire du port ou du système portuaire (question qui à la différence des précédentes n'était pas contestée et qui fait déjà l'objet d'une directive sur la transparence financière et des orientations sur les aides d'État).

2.5

Les principaux éléments nouveaux introduits par la Commission concernent:

l'auto-assistance pour les opérations liées à la marchandise et aux passagers, avec du personnel à terre et aussi, dans certaines conditions, avec du personnel de bord,

les autorisations deviennent obligatoire pour les fournisseurs de service et pour l'auto-assistance; les fournisseurs en place devront obtenir des autorisations nouvelles dans un «délai raisonnable», afin de se conformer aux règles de la directive, tout en considérant les attentes légitimes des fournisseurs déjà sur le marché, au maximum un an après la date limite de transposition de la directive,

le principe général est celui de l'accès du plus grand nombre possible de fournisseurs au marché des services portuaires largement définis, et la limitation de leur nombre l'exception (art. 9),

la durée de validité des autorisations est finalement modifiée en fonction des investissements à consentir par les fournisseurs et des règles relatives à la dépréciation des biens meubles et immeubles,

la question de la concurrence entre les ports est traitée par l'application de la directive sur la transparence (art. 16) et par celle des orientations relatives aux aides d'État (art. 17).

3.   Observations préliminaires

3.1

Un certain nombre de ports maritimes appartiennent et/ou sont gérés par des autorités publiques (communes et autres collectivités territoriales, établissements publics, etc.). Les gestionnaires sont alors soumis en totalité ou en partie à des règles de comptabilité publique et tiennent des comptabilités analytiques. Les pratiques et les comptes des divers ports maritimes devraient être soumis aux autorités nationales de la concurrence et le cas échéant aux cours des comptes régionales ou nationales, et les rapports de ces organes de contrôle devraient être adressés à la DG Concurrence de la Commission.

3.2

Ces dernières années, dans la plupart des nouveaux pays ainsi que dans les anciens pays membres, une évolution vers la privatisation des ports maritimes s'est manifestée. Beaucoup de ports sont devenus des sociétés anonymes.

3.3

Les ports les plus importants d'Europe sont ouverts vers la mer du Nord et la Manche; les tonnages de marchandises et les nombres de conteneurs traités sont très divers selon la position géographique des ports des différentes mers européennes. Dans le champ d'application du projet de directive, cela va de 1,5 millions à des dizaines, voire des centaines de millions de tonnes, et pour les conteneurs le volume va jusqu'à plusieurs millions par an (Rotterdam, Anvers, par exemple). Le Comité considère que l'application de règles uniformes à des ports maritimes très différents en taille, activités, nature de la propriété et de la gestion, risque de ne pas répondre aux réalités et aux besoins effectifs des ports considérés. La concurrence entre ports est effective depuis longtemps. Des considérations de subsidiarité et de proportionnalité devraient être prises en compte.

3.4

Nombre de ports fournissent eux-mêmes un certain nombre d'infrastructures et de services essentiels au trafic maritime, et ne considèrent pas que leur compétence doive se limiter à l'administration de l'espace maritime et terrestre du port, à leur entretien et à celui des quais. L'offre de certains services peut répondre à des exigences d'intérêt général ou encore à la recherche d'un équilibre financier global pour l'autorité portuaire, voire d'un profit distribuable aux actionnaires des ports privés. L'interdiction des «subventions croisées» affaiblirait les capacités d'investissements portuaires.

3.5

Le Comité regrette que les évolutions importantes survenues depuis le Livre vert et le premier paquet portuaire ne soient pas prises en considération et demande à la Commission de réviser son projet en fonction d'une étude d'impact objective qui prenne en compte les réalités actuelles des ports européens et leur indéniable compétitivité internationale; le Comité prend note du fait que la Commission a annoncé, lors de l'audition organisée par le Comité le 31 janvier 2005, qu'une telle étude serait publiée vers fin juin 2005. En l'absence d'un comité du dialogue social compétent, le Comité estime que les partenaires sociaux devraient également être consultés. Des modifications profondes au projet devraient découler du respect des procédures normales en matière de meilleure législation (participation et consultations, études d'impact notamment); le second projet a en effet suivi de très près le premier, sans travaux préparatoires suffisants.

3.6

Un port constitue une plate-forme logistique complexe, reliée à un hinterland de profondeur géographique et économique variable, régional national voire international, à des voies navigables intérieures, voies de communication ferroviaires et routières, pipelines et voies de cabotage, et il doit élaborer des stratégies liées au développement du secteur géographique qu'il irrigue économiquement, à son bassin d'emploi, aux besoins économiques qui s'y manifestent et à leurs évolutions. Il convient, aux yeux du Comité, de favoriser l'intermodalité en faveur du transport maritime, en particulier du cabotage, mais le dispositif du projet de directive, dans sa forme actuelle ne traite pas directement de cette nécessité impérative.

3.7

Le rôle des ports commerciaux, spécialisés ou généralistes, publics ou privés, ne se limite pas à fournir le soubassement matériel (voies d'accès, bassins, quais et espaces terrestres) d'une plate-forme multimodale. Leur rôle d'organisation, de répartition des espaces, de prévision en matière de développement d'infrastructures doit aussi être rétribué sur le plan économique, et ils doivent suppléer aux défaillances éventuelles des opérateurs privés en certains domaines pour que la plate-forme reste fonctionnelle.

3.8

Leurs projets de développement, leur spécialisation, doivent être respectés. Au-delà de l'espace disponible et de contraintes matérielles d'accès, le nombre de fournisseurs de services devrait aussi pouvoir être limité pour des raisons d'efficacité économique et de rentabilité pour les fournisseurs de services, de sécurité des opérations, d'organisation du port, de garanties environnementales et sociales, de préservation des emplois. Cela relève essentiellement de la subsidiarité. En outre, une concurrence exacerbée peut conduire à une dispersion des moyens et des compétences préjudiciables aux intérêts des usagers du port.

3.9

Le Comité reconnaît que le nouveau projet de la Commission laisse une plus grande flexibilité aux autorités portuaires dans la fixation de limites au nombre d'opérateurs par catégorie de service, selon la nature du port et les conditions locales.

3.10

Les concessions et les licences accordées par l'autorité compétente aux fournisseurs de services ou les accords commerciaux passés par l'autorité compétente avec des fournisseurs de service doivent être conclu pour une période dont la durée soit en relation avec la nature et l'importance des investissements que les fournisseurs doivent réaliser pour accomplir les clauses des concessions, licences ou contrats, permettant ainsi une durée suffisante d'amortissements et la rentabilisation des capitaux investis (par exemple 10 ans s'il n'y a pas d'investissements significatifs, 15 ans en cas d'investissements significatifs en actifs mobiliers et en formation, et en cas d'investissements significatifs en actifs immobiliers et mobiliers 45 ans).

3.11

Les droits et conditions d'activité des opérateurs portuaires qui ont conclu des contrats de location de terrains portuaires ou des autorisations pour fournir des services portuaires ne devraient pas être bouleversés par l'entrée en vigueur de la directive, car cela conduirait à annuler des engagements contractuels de la part des autorités portuaires, et serait de nature à engager la responsabilité de l'État.

3.12

Le Comité note que les changements concernant la manutention et le pilotage ne répondent pas aux attentes déjà exprimées par le Comité, plusieurs États et le Parlement (4).

3.13

Le nombre d'emplois dans les services portuaires n'est pas lié, comme l'écrit la Commission, au nombre de fournisseurs, mais au trafic effectif du port et/ou à la diversification des services. La multiplication des fournisseurs ne multipliera pas les emplois. Seules l'augmentation du trafic et l'apparition de services non traditionnels seraient créatrices d'emplois nouveaux.

3.14

Les dispositions relatives à la manutention et à l'auto-manutention, prévues pour les autoroutes de la mer et le cabotage dans le marché intérieur, remettraient fondamentalement en cause les conventions collectives dans la plupart des pays, qui pourraient parfois être considérées comme contraires au droit communautaire de la concurrence dans le cadre du projet de directive, tout en étant valides en droit social et du travail aux plans national et international. La Cour de justice reconnaît que le respect des conventions collectives peut limiter l'application du droit de la concurrence. Au niveau international, de nombreux états membres ont ratifié les conventions maritimes de l'OIT sur la manutention portuaire (5) et les conditions de travail et la sécurité des équipages. Le Comité remarque que les dispositions prévues par la Commission ne prennent pas en considération ces dispositions négociées dans un cadre tripartite.

3.15

Le Comité est attaché à une concurrence accrue sur le marché des services ainsi qu' à la qualité, la sécurité et la continuité de la manutention portuaire. Il estime toutefois que le fait d'autoriser l'auto-assistance pour les services de manutention portuaire créerait des conditions de concurrence inégales entre les entreprises de manutention portuaire existantes et les sociétés pratiquant l'auto-assistance. Les entreprises de manutention portuaire ont renforcé leur position dans les ports grâce à une privatisation ou un appel d'offres et ont investi dans des superstructures et des infrastructures. En revanche, les sociétés pratiquant l'auto-assistance pourraient, sans procédure d'adjudication ni obligation d'investissement, accéder au marché des services portuaires et profiter gratuitement des installations créées par d'autres et, à l'inverse des entreprises de manutention portuaire, exercer leurs activités sans la moindre restriction de temps. Les ports sont un lieu où les risques d'accidents sont élevés, de sorte qu'il est nécessaire de respecter et de contrôler strictement les exigences de sécurité sur le lieu de travail. En autorisant l'auto-assistance, il est probable que le nombre d'accidents augmente. En dépit de l'affirmation d'une portée sociale du projet de directive, ces dispositions constitueraient de fait un rejet des attentes des dockers qui craignent la perte d'emplois reconnus, qualifiés, et rémunérés à un taux négocié, pour être remplacés par des emplois précaires, des contrats individualisés et une perte de garanties sociales et salariales dans le cadre d'une concurrence forcée entre manutentionnaires. L'auto-manutention conduirait à un accroissement des tâches des personnels de bord et à des risques d'accidents, alors que les équipages sont souvent réduits au minimum. Cela constituerait aussi des responsabilités et obligations supplémentaires pour les capitaines.

3.16

Le Comité considère que le pilotage n'est pas simplement assimilable à un service commercial; il s'agit de l'application de compétences techniques complexes, de connaissances locales parfois évolutives, mises en oeuvre pour assurer la sécurité du transport et celle des populations environnantes et de l'environnement, en fonction des produits transportés. Il s'agit donc d'un service d'intérêt général qui n'est pas essentiellement de nature commerciale, même s'il est souvent concédé à des entreprises privées sous contrôle de l'autorité portuaire, et il devrait à ce titre être exclu du champ d'application. Cela n'empêche pas les ports, comme c'est déjà le cas, de délivrer des autorisations de pilotage aux capitaines dont l'expérience et les connaissances locales leur permettent de piloter eux-même sans assistance leur navire jusqu'au quai. Mais il faut tenir compte du fait que de nombreux navires transportent des substances dangereuses pour la sécurité des autres navires, des installations, des personnes travaillant sur le port et des populations environnantes.

3.17

Le Comité note que les ports sont aussi le lieu d'exercice de compétences souveraines de l'État du port, qui ne doivent pas être affectées par la directive; certaines fonctions (contribution à la lutte contre le terrorisme, la criminalité organisée et l'immigration clandestine, qui obligent souvent à des dépenses et investissements laissés à la charge du port) peuvent être déléguées à l'autorité portuaire.

3.18

Les dispositions nouvelles en matière d'autorisation sont des mesures d'évidence et de bon sens, bien que la fixation des cahiers des charges doive tenir compte des conditions et particularités locales; l'application aux ports maritimes des principes de transparence et de séparation des comptes n'est pas contestable; le Comité ne peut que reconnaître la nécessité de leur respect en application de la directive «transparence».

3.19

Des exigences concrètes devraient être définies dans la directive à l'intention des fournisseurs de services portuaires afin qu'ils sachent ce qu'il y a lieu de faire pour que les autorisations soient prorogées après huit, douze ou trente ans.

3.20

Finalement, il apparaît que l'objectif essentiel de la proposition consiste à abaisser les coûts des services portuaires, mais le Comité considère que le respect des normes de sécurité, d'environnement, les droits sociaux sont également des critères importants du fonctionnement efficace des plates-formes portuaires dans l'intérêt de l'économie des transports et de leur sûreté et régularité.

3.21

L'extrême diversité des situations, des règles et pratiques nationales ou locales, des obligations des gestionnaires et des autorités publiques, font que les règles à mettre en oeuvre doivent tenir pleinement compte de ces particularités propres à chaque port. Au fil du temps, chaque port s'adapte et fonctionne dans les conditions qui lui sont le plus favorables dans son contexte territorial; tenter d'unifier les conditions d'activité pourrait avoir un impact négatif sur les activités des ports et leur bon fonctionnement.

3.22

La subsidiarité dans la législation préconisée et la cohérence locale des politiques de développement portuaire semblent au Comité préférables aux dispositions uniformes préconisées dans le projet de directive. Il existe des différences considérables selon la taille et la nature des ports. Une concurrence excessive entre fournisseurs de services dans un port déterminé pourrait conduire à des surinvestissements et à des gâchis ainsi qu'à des reculs sociaux.

3.23

Conformément aux principes de subsidiarité et de proportionnalité, les instances anti-trust nationales et les institutions d'audit pourraient être compétentes pour intervenir si l'autorité portuaire concentrait, sans justification économique ou sans nécessité de service public, les services portuaires sous son contrôle; ou ne respectait pas les principes de transparence ou les règles comptables; l'intervention communautaire sur le terrain de la concurrence ou des aides d'état pourraient mieux se concentrer sur les exceptions, par exemple si les autorités nationales de concurrence et les cours des comptes régionales ou nationales n'exerçaient pas leur contrôle de manière satisfaisante au regard du droit communautaire en vigueur.

3.24

En ce qui concerne les aides d'état, la question du report de certains coûts sur les contribuables locaux ou nationaux de certains aménagements d'accès et d'opérations est posée par la jurisprudence actuelle de la Commission en matière d'aides d'état (dragage, création de chenaux et bassins).

3.25

La collectivité ne peut être mise à contribution que pour l'intérêt général, pas pour abaisser les coûts pour les seuls usagers (nationaux et internationaux), en premier lieu pour les plus importants, des ports maritimes; la détermination de l'intérêt général relève du champ de la démocratie et non de celui du marché.

4.   Conclusions

4.1

Une directive cadre beaucoup moins détaillée et laissant un espace suffisant à la subsidiarité semble préférable à la rédaction actuelle du projet de directive; une mention de l'applicabilité des législations pertinentes en matière de transparence ou de marchés publics devrait suffire, plutôt que d'entrer dans les détails d'application aux services portuaires; un cadre communautaire ne devrait pas entamer la prérogative que détient le gestionnaire du port de sauvegarder l'intérêt général placé sous son autorité.

4.1.1

Une telle directive cadre ne devrait affecter en rien les droits et obligations des États membres en ce qui concerne leur législation en matière sociale et de travail, de santé publique et d'environnement, de sécurité, et d'ordre public, ou de service d'intérêt général, et ne devrait pas affecter les conventions collectives conclues dans le respect du droit national applicable; elle devrait aussi prendre en considération les engagements internationaux des États membres, comme les conventions maritimes de l'OIT.

4.1.2

Le Comité ne peut enfin que regretter le défaut d'évaluation d'impact du projet de directive, en contradiction avec l'engagement de mieux légiférer affirmé par la Commission depuis le livre blanc sur la gouvernance; tout projet de législation relevant de la co-décision devrait comporter une telle évaluation, ainsi qu'une information sur les consultations menées notamment avec les partenaires sociaux.

Bruxelles, le 13 juillet 2005.

La Présidente

du Comité économique et social européen

Anne-Marie SIGMUND


(1)  COM(2001) 35 final.

(2)  COM(2004) 654 final du 13 octobre 2004.

(3)  Avis du CESE sur le «Livre vert de la Commission relatif aux ports et aux infrastructures maritimes», JO C 407 du 28.12.1998. p. 92.

(4)  Avis du CESE sur la «Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil concernant l'accès au marché des services portuaires», JO C 48 du 21.2.2002 p. 122.

(5)  En particulier, la Convention 137, ratifiée par un grand nombre de pays membres maritimes de l'UE. Elle prévoit un registre unique pour l'enregistrement des dockers d'un port et la priorité pour ceux-ci dans l'accès au travail portuaire.


ANNEXE

à l'avis du Comité économique et social européen

Les amendements suivants, qui ont recueilli au moins un quart des suffrages exprimés, ont été rejetés lors de la discussion.

Paragraphe 1.5, deuxième ligne:

Modifier comme suit:

«Il convient de rappeler quelques uns des principaux écueils sur lesquels la proposition initiale avait buté, du point de vue du Comité économique et social européen, avant d'examiner la nature et la portée des modifications apportées dans la nouvelle proposition de directive:».

Exposé des motifs

Il convient d'apporter cette précision pour clarifier le texte. Les paragraphes précédents, dans lesquels il est question du Conseil et du Parlement, permettent difficilement de déduire de qui l'on parle.

Résultat du vote

Voix pour: 42

Voix contre: 63

Abstentions: 3

Paragraphe 3.1, troisième phrase:

Modifier comme suit:

«Sans préjudice des compétences propres de la Commission européenne, Lles pratiques et les comptes des divers ports maritimes devraient être soumis …».

Exposé des motifs

La procédure proposée doit tenir compte des compétences existantes de la Commission.

Résultat du vote

Voix pour: 54

Voix contre: 71

Abstentions: 5

Paragraphe 3.1

Déplacer le paragraphe entier, l'insérer entre les paragraphes 3.17 et 3.18 et renuméroter dès lors tous les points du paragraphe 3 en conséquence.

Exposé des motifs

L'observation contenue dans ce paragraphe est trop technique pour débuter le texte. Il cadre mieux avec les paragraphes indiqués, qui portent sur les questions financières.

Résultat du vote

Voix pour: 50

Voix contre: 74

Abstentions: 10

Paragraphe 3.4

Biffer la dernière phrase de ce paragraphe:

«Nombre de ports fournissent eux-mêmes un certain nombre d'infrastructures et de services essentiels au trafic maritime, et ne considèrent pas que leur compétence doive se limiter à l'administration de l'espace maritime et terrestre du port, à leur entretien et à celui des quais. L'offre de certains services peut répondre à des exigences d'intérêt général ou encore à la recherche d'un équilibre financier global pour l'autorité portuaire, voire d'un profit distribuable aux actionnaires des ports privés. L'interdiction des» subventions croisées «affaiblirait les capacités d'investissements portuaires».

Exposé des motifs

Les subventions croisées sont inadmissibles si l'on veut que les ports se livrent une concurrence loyale. Elles biaisent en effet les prix de revient minimum à imputer, provoquant ainsi un manque de transparence.

Résultat du vote

Voix pour: 61

Voix contre: 80

Abstentions: 6

Supprimer la dernière phrase du paragraphe 3.6

«Un port constitue une plate-forme logistique complexe, reliée à un hinterland de profondeur géographique et économique variable, régional national voire international, à des voies de communication terrestres, et il doit élaborer des stratégies liées au développement du secteur géographique qu'il irrigue économiquement, à son bassin d'emploi, aux besoins économiques qui s'y manifestent et à leurs évolutions. Il convient, aux yeux du Comité, de favoriser l'intermodalité en faveur du transport maritime, en particulier du cabotage, mais le dispositif du projet de directive, dans sa forme actuelle ne traite pas directement de cette nécessité impérative.»

Exposé des motifs

L'essentiel du hinterland n'est pas accessible par les voies maritimes. Il n'est donc pas judicieux de parler d'une préférence, et encore moins d'une nécessité impérative. Un même plaidoyer pourrait plutôt être fait en faveur de la navigation intérieure. D'ailleurs, la promotion du cabotage est déjà évoquée dans le programme «Autoroutes de la mer».

Résultat du vote

Voix pour: 59

Voix contre: 83

Abstentions: 9

Supprimer le paragraphe 3.17

«Le Comité note que les ports sont aussi le lieu d'exercice de compétences souveraines de l'État du port, qui ne doivent pas être affectées par la directive; certaines fonctions (contribution à la lutte contre le terrorisme, la criminalité organisée et l'immigration clandestine, qui obligent souvent à des dépenses et investissements laissés à la charge du port) peuvent être déléguées à l'autorité portuaire.»

Exposé des motifs

La proposition de la Commission exprime déjà cette idée. Ce paragraphe laisse toutefois également entendre qu'en cas de délégation sans compensation par l'État, le port ne doit pas répercuter ces frais sur les clients, ce qui crée à nouveau une situation de concurrence déloyale par rapport aux autres ports.

Résultat du vote

Voix pour: 55

Voix contre: 84

Abstentions: 13

Paragraphes 3.23 et 3.24: supprimer

«3.23

En ce qui concerne les aides d'état, la question du report de certains coûts sur les contribuables locaux ou nationaux de certains aménagements d'accès et d'opérations est posée par la jurisprudence actuelle de la Commission en matière d'aides d'état (dragage, création de chenaux et bassins).

3.24

La collectivité ne peut être mise à contribution que pour l'intérêt général, pas pour abaisser les coûts pour les seuls usagers (nationaux et internationaux), en premier lieu pour les plus importants, des ports maritimes; la détermination de l'intérêt général relève du champ de la démocratie et non de celui du marché».

Exposé des motifs

Les frais engagés par les autorités portuaires dans le cadre d'aménagements apportés à leur port doivent être imputés à l'utilisateur de ces infrastructures ou à leurs propres actionnaires. La formulation actuelle de ces paragraphes donne à penser que l'intérêt général laisse toute latitude pour qu'il n'en soit pas ainsi.

Résultat du vote

Voix pour: 55

Voix contre: 82

Abstentions: 17

Paragraphe 3.25

Ajouter un paragraphe 3.25, libellé comme suit:

«En vue de pouvoir déterminer dès le début de leur planification si les futurs investissements portuaires sont compatibles avec le droit européen, le Comité invite la Commission européenne à mettre immédiatement sur la table, indépendamment de celle qui est à l'examen, toutes les propositions évoquées lors de l'audition du 31 janvier concernant la question des financements nationaux dans les ports et de la détermination de ceux qui sont compatibles avec le marché intérieur».

Exposé des motifs

Voir le début du texte même de l'amendement.

Résultat du vote

Voix pour: 59

Voix contre: 85

Abstentions: 14

Paragraphe 4.1

Modifier comme suit:

«Bien qu'il soit partisan de la libéralisation des services portuaires liés aux transports, comme de tous les autres services en rapport avec ces derniers, le Comité estime qu'une Une directive cadre beaucoup moins détaillée et laissant un espace suffisant à la subsidiarité semble préférable à la rédaction actuelle du projet de directive; une mention de l'applicabilité des législations pertinentes en matière de transparence ou de marchés publics devrait suffire, plutôt que d'entrer dans les détails d'application aux services portuaires; un cadre communautaire ne devrait pas entamer la prérogative que détient le gestionnaire du port de sauvegarder l'intérêt général placé sous son autorité, sans qu'elle puisse cependant porter atteinte à une concurrence loyale et à la transparence.».

Exposé des motifs

Ce point n'avait pas donné lieu à des divergences au sein du groupe d'étude et l'amendement proposé indique bien dans quel cadre d'ensemble doivent se lire nos remarques et conclusions. On ne peut se servir de l'intérêt général comme d'un moyen d'avoir carte blanche afin de paralyser complètement la mise en œuvre de ces deux principes fondamentaux de l'UE que sont l'égalité en matière de concurrence et la transparence.

Résultat du vote

Voix pour: 61

Voix contre: 86

Abstentions: 12


25.11.2005   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 294/33


Avis du Comité économique et social européen sur le thème «Quelle contribution la société civile peut-elle apporter aux relations entre l'UE et la Russie?»

(2005/C 294/07)

Le 1er juillet 2004, le Comité économique et social européen a, conformément à l'article 29 de son règlement intérieur, décidé d'élaborer un avis d'initiative sur le thème: «Quelle contribution la société civile peut-elle apporter aux relations entre l'UE et la Russie?».

La section spécialisée «Relations extérieures», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 20 mai 2005 (rapporteur: M. Filip HAMRO-DROTZ).

Lors de sa 419ème session plénière des 13 et 14 juillet 2005 (séance du 13 juillet 2005), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 109 voix pour, 2 voix contre et 6 abstentions.

1.   Arguments en faveur de l'élaboration du présent avis

1.1

La Fédération de Russie, qui joue un rôle important au plan international, constitue un partenaire stratégique de l'Union européenne. L'élargissement de l'UE accentue encore davantage l'importance de la coopération de voisinage entre la Russie et l'Union et la construction des meilleures relations possibles dans le cadre du développement des valeurs européennes communes de démocratie, et de respect des droits de l'homme et du citoyen est fondamentale pour chacune des deux parties.

1.2

Le développement de la société et l'amélioration des conditions de vie, l'édification de l'État de droit, l'instauration d'un environnement plus prévisible et des conditions favorables au fonctionnement des entreprises, ainsi que la mise en place d'une économie de marché requièrent une action déterminée. Malgré les déclarations des dirigeants de la Fédération de Russie qui affichent un soutien de façade à la réalisation de ces objectifs, la progression vers leur concrétisation et les réalités de la vie quotidienne sont éloignées des attentes de la société, tant russe qu'internationale. L'attitude des dirigeants russes actuels vis-à-vis des acteurs économiques, par exemple, ne confirme pas, aux yeux du CESE, les déclarations d'intention des autorités concernant la promotion de la démocratie et le renforcement de la société civile. La tournure que prend actuellement l'évolution de la Russie suscite des inquiétudes, et ce pas uniquement parmi ses citoyens. Cet État tourne le dos systématiquement à la démocratie dont il se réclame, le gouvernement contrôle les médias, l'armée russe, en dépit de ses engagements internationaux, stationne en Moldavie et en Géorgie, le système judiciaire est inféodé au politique. La construction d'une société civile organisée est donc extrêmement difficile dans ces conditions.

1.3

L'intégration accrue de l'Union européenne — marché intérieur, monnaie unique et coopération renforcée dans un nombre croissant de domaines politiques — constitue un objectif fondamental historique à l'égard duquel tous les États membres se sont engagés, quelles que soient les déconvenues récentes dans ce domaine. L'intégration interne de l'Union européenne ne peut toutefois causer une séparation entre l'UE, la Russie et le reste de l'Europe, qui n'a pas connu un développement similaire, dans la mesure où cette situation pourrait entraîner la scission en deux du continent européen.

1.4

La déclaration sur la construction de l'unité européenne prononcée le 9 mai 1950 par Robert Schuman, ministre français des affaires étrangères, part du principe que l'intégration européenne doit reposer sur la volonté de contribuer de manière égale à la réalisation d'objectifs fixés de commun accord, sur l'adoption de valeurs communes ainsi que sur la conciliation et la vision des citoyens à propos d'un avenir commun. Robert Schuman a également relevé que l'Europe ne pourrait pas se construire d'un coup mais qu'elle se ferait par des réalisations concrètes et, surtout, en créant une solidarité de fait. Le message transmis dans cette déclaration revêt un caractère particulièrement intéressant dans le contexte des relations entre l'UE et la Russie et des efforts visant à renforcer leur coopération.

2.   La contribution de la société civile aux relations entre l'UE et la Russie

2.1

Le renforcement des relations entre la Russie et l'UE nécessite également un solide appui de la part de la société civile organisée de l'Union européenne. Les efforts consentis par celle-ci ont pour objectif d'améliorer la coopération entre l'UE et la Russie, ainsi que de soutenir l'édification des structures de la société civile organisée et de la démocratie en Russie.

2.2

L'expérience des nouveaux États membres de l'UE, qui ont, en dix ans, accompli avec succès le processus de transition postcommuniste, revêt une grande importance et ces pays peuvent fournir une valeur ajoutée dans la coopération entre l'UE et la Russie. Les acteurs de la société civile de ces États, et notamment les ONG, peuvent jouer un rôle important en matière de démocratisation et de protection des droits de l'homme et des citoyens en Russie.

2.3

Depuis plusieurs années, l'Union des industries de la Communauté européenne (UNICE) présente des recommandations et des avis concernant le développement des relations économiques et des chefs d'entreprises de l'UE et de Russie débattent régulièrement de ces questions dans le cadre des Tables rondes des industriels de la Russie et de l'UE. La Confédération européenne des syndicats (CES) défend également sa position à cet égard dans le cadre de différentes rencontres au sommet et en collaboration avec la Fédération des syndicats indépendants de Russie (FNPR), elle a envoyé en 2004 une lettre au Président de la Commission européenne et au Président russe, dans laquelle elle proposait que l'on confère aux confédérations syndicales de l'UE et de Russie le même rôle qu'à la table ronde susmentionnée. D'autres acteurs de la société civile ont pris l'initiative de présenter leur point de vue sur le développement des relations entre l'UE et la Russie dans leurs secteurs respectifs. La société est encore peu organisée en Russie, les organisations non gouvernementales s'y développent lentement et leur rôle est encore limité.

2.4

Ces dernières années, le CESE a pour sa part élaboré plusieurs avis portant sur les relations entre l'UE et la Russie, dans lesquels il s'est notamment penché sur le fonctionnement de la société civile russe. Les principaux d'entre eux sont énumérés dans la note de bas de page no 1. Les recommandations et constatations qui y sont formulées ont été prises en considération dans le présent avis, sans qu'il y soit fait spécifiquement référence (1). Ces travaux ont amené le CESE à établir des contacts directs avec nombre d'acteurs de premier plan de la société civile russe.

3.   Recommandations

3.1   L'UE doit se doter d'une politique plus cohérente vis-à-vis de la Russie et la mettre en œuvre de façon pragmatique

3.1.1

Le développement d'une coopération cohérente entre l'UE et la Russie a été entravé du fait que les États membres de l'Union tendent à promouvoir leurs intérêts sur une base bilatérale avec la Russie, y compris dans des domaines dont la gestion relève de l'UE. Bien entendu, il ne faut aucunement limiter la possibilité pour les différents États membres de développer avec la Russie des relations bilatérales constructives et transparentes dans les domaines qui ne ressortissent pas de la compétence de l'UE. Cette activité bilatérale, régionale et sectorielle revêt, au contraire, une grande importance et chaque État membre de l'UE doit assumer sa part de responsabilité en la matière.

3.1.2

Une coopération efficace entre l'UE et la Russie n'est possible que si les sociétés civiles de l'UE adoptent des positions plus volontaristes de mutualisation des pratiques d'auto-organisation et d'aide à la renaissance des réseaux de solidarité à l'égard de la société civile russe. L'Union européenne peut mettre au service de la société civile russe, et donc de la Russie, ce qui fait sa richesse, c'est-à-dire sa diversité, la pluralité de ses formes d'organisation sociétale, ou encore la forme de dissémination démocratique, sociale et culturelle que procurent cette diversité et cette pluralité. Tous les États membres doivent concentrer leur action sur la promotion des objectifs communs, a fortiori depuis l'élargissement de l'UE. En outre, il est évident qu'une approche directe permet d'engranger de meilleurs résultats sur le plan du développement de la coopération entre l'UE et la Russie. De même, l'UE devrait accroître son assistance technique à la Russie en vue d'en faire un pays stable, démocratique et prospère. Il y a lieu de procéder à un réexamen de la structure des programmes d'assistance technique existants. Le meilleur moyen d'atteindre pareil but, c'est de progresser lentement mais sûrement.

3.2   Les feuilles de route doivent apporter une stimulation à l'élaboration d'un accord dynamique entre l'UE et la Russie

3.2.1

L'UE et la Russie sont engagées dans un processus d'élargissement et de renforcement de leurs relations sur la base de feuilles de route relatives aux quatre espaces communs, à savoir: 1) l'espace économique, 2) l'espace de liberté, de sécurité et de justice, 3) l'espace de coopération dans le domaine de la sécurité extérieure, 4) l'espace pour la recherche, l'éducation et la culture. Les feuilles de route exposent quelque 400 mesures à prendre dans les années à venir. Le CESE, qui se félicite d'une telle initiative, souligne que l'UE devrait renforcer ses efforts afin de nouer de larges relations politiques, économiques et sociales avec la Russie dans un esprit d'ouverture.

3.2.2

Certains aspects des feuilles de route concernent la société civile, par exemple les secteurs prioritaires pour le dialogue sur la réglementation et les questions économiques, les dispositions visant à faciliter la concurrence, les investissements et le commerce, la coopération interrégionale et transfrontalière, l'environnement, la promotion des liens interpersonnels, la libre circulation des personnes, les jeunes, la coopération dans le domaine de la protection civile, la recherche et l'éducation ou encore l'intégration progressive des réseaux de transport.

3.2.3

Le CESE presse l'UE et la Russie de mettre en oeuvre les feuilles de route sans attendre. Leur contenu doit être mis à jour en permanence afin que leur application soit aussi facile que possible, et leur mise en oeuvre devrait faire l'objet d'un examen annuel par les deux parties. De même, la Russie et l'Union européenne devraient l'une et l'autre désigner les organes responsables de la concrétisation de ces feuilles de route. Le CESE, pour sa part, est disposé à contribuer activement à ce processus, dans le cadre du suivi du présent avis, pour les sphères relevant de la société civile. Il a l'intention, à cet égard, de formuler des propositions portant tant sur le contenu que sur la mise en oeuvre des feuilles de route et d'intensifier ses contacts directs avec les principaux acteurs de la société civile russe (voir paragraphes 3.4.3. et 3.5.5).

3.2.4

L'accord de partenariat et de coopération conclu entre l'UE et la Russie lors du premier semestre 1994, d'une durée initiale de dix ans, expirera en 2007 si les parties le souhaitent. Les feuilles de route relatives aux quatre espaces communs doivent servir de fondement à un nouvel accord entre l'UE et la Russie, moderne et basé sur le partenariat stratégique. Il convient d'encourager la Russie à éliminer les obstacles persistants au commerce des biens et des services et à garantir un cadre réglementaire efficace pour les investissements afin que l'UE et la Russie puissent élaborer un accord de libre échange fondé sur le statut d'économie de marché de la Russie et sur l'adhésion de ce pays à l'OMC.

3.2.5

L'UE et la Russie devraient également travailler de concert à remodeler dans le même ordre d'idées la coopération régionale, le dossier de la dimension septentrionale (notamment la coopération en mer Baltique et la coopération arctique), ainsi que la coopération en mer Noire. Le CESE note avec satisfaction que cet aspect a également été pris en considération dans les feuilles de route et encourage la prise de nouvelles mesures visant à développer la coopération régionale dans le cadre des relations UE-Russie.

3.3   Le rôle de la société civile doit être mis en valeur dans les feuilles de route relatives à la coopération UE-Russie

3.3.1

Le renforcement durable des liens entre l'UE et la Russie restera limité tant que les actions des parties prenantes ne seront pas guidées par des valeurs communes, dont la responsabilité individuelle, le respect de l'État de droit, de l'individu et de la propriété, les droits de l'homme (par exemple la liberté des médias, l'organisation d'élections libres, le pluralisme politique, l'égalité des chances et les droits des minorités), la transparence, l'intégrité, la dignité humaine, l'égalité et la liberté d'expression, les droits syndicaux et les droits fondamentaux des travailleurs, des relations sociales saines et une protection sociale suffisante. Si ces principes ne sont pas inscrits durablement dans les fondements mêmes de la vie socio-économique et politique de la Russie, aucune plate-forme ne pourra être dégagée pour des collaborations ou des accords.

3.3.2

De l'avis du CESE, les objectifs d'ensemble des feuilles de route sont pertinents. Il note avec satisfaction que pour trois d'entre elles (les espaces communs pour la sécurité extérieure, pour la liberté, la sécurité et la justice et pour la recherche et l'éducation, y compris les aspects culturels), il est souligné que les valeurs communes constituent un socle essentiel.

3.3.3

Le renforcement de la coopération entre l'UE et la Russie dépendra de la façon dont ces questions seront résolues en Russie. Le CESE recommande que cette question soit mise en vedette dans la concrétisation des nouvelles feuilles de route. Il est fermement convaincu de la nécessité de les compléter par d'autres actions concrètes en vue de parvenir à des valeurs communes, fondamentales pour développer une société civile qui fonctionne bien.

3.3.4

La Russie doit mettre en place un environnement dans lequel les partenaires sociaux et aux autres acteurs de la société civile organisée puissent agir en toute indépendance et participer avec assurance aux décisions d'ordre social et économique les concernant. Le dialogue et un fonctionnement en réseau, sous le signe de l'ouverture, sont indispensables à cet effet et ils requièrent à leur tour des médias indépendants. Le respect effectif des principaux accords internationaux, notamment des normes de l'OIT, est également indispensable.

3.3.5

Le bon fonctionnement de la société civile russe exige que ses acteurs économiques et sociaux jouissent d'une bonne représentativité, qu'ils soient indépendants et qu'ils disposent de la capacité d'engager tant avec les autorités qu'avec les autres acteurs sociaux un dialogue constructif et transparent qui soit fondé sur les compétences.

3.3.6

Le CESE se félicite que dans le cadre du deuxième espace commun, l'UE et la Russie aient lancé, au printemps 2005, une série de consultations conjointes sur les droits de l'homme et sur les droits fondamentaux afférents, par exemple ceux des minorités. Il y aurait lieu d'aborder également dans ce cadre la question de la résolution des problèmes d'autodétermination au niveau national et local, ainsi que de la renonciation à toute utilisation de méthodes conflictuelles (Tchétchénie) qui mettent la population de Russie en danger et constituent une menace pour les citoyens de l'UE.

3.3.7

Au fil du temps, l'UE a démontré qu'elle pouvait, grâce au dialogue, amener des pays tiers à d'importants changements. Cette capacité doit également être mise à profit dans le cas de la Russie. À cet égard, le Conseil de l'Europe et l'OSCE ont bien évidemment un rôle crucial à jouer. Le CESE note avec satisfaction que dans les feuilles de route, l'UE et la Russie sont convenues de renforcer leur coopération dans le cadre de ces institutions.

3.3.8

Le développement des relations entre l'UE et la Russie nécessite un soutien financier adéquat de la part de la première. Il y a lieu d'utiliser davantage les ressources du programme Tacis et d'autres instruments dans le but de développer la société civile, l'éducation et l'indépendance des médias; de même, il faudrait tenir compte de cet aspect dans l'instrument européen de voisinage et de partenariat (IEVP). Le CESE suggère que la Commission présente une proposition concernant la façon dont la société civile russe pourrait tirer davantage profit des instruments communautaires concernés.

3.4   Les acteurs de la société civile doivent recevoir un rôle approprié dans la mise en oeuvre des feuilles de route relatives à la coopération UE-Russie

3.4.1

L'UE a souligné que le développement des relations avec la Russie nécessite des solutions et des formules qui soient durables sur le plan qualitatif. À cette fin, il y a lieu de prendre en compte les points de vue des différents groupes d'intérêt de la société civile, d'où l'importance de développer celle-ci en Russie.

3.4.2

Le CESE propose que l'on renforce le rôle des acteurs crédibles de la société civile dans les procédures de coopération entre l'UE et la Russie en créant un comité consultatif sur la base de l'article 93 de l'accord de partenariat et de coopération. Cette opération permettrait d'exploiter au maximum leur savoir-faire et leur expérience en la matière. Des dispositifs de ce genre se sont révélés profitables, notamment pour ce qui est des relations entre l'UE et les pays méditerranéens, l'Inde, l'Amérique latine et les États d'Afrique, des Caraïbes et du Pacifique (ACP). Le CESE pense qu'il existe en Russie de nombreux acteurs disposant des capacités requises.

3.4.3

Le CESE entend jouer un rôle important dans le processus de recherche de la bonne voie pour associer la société civile à la coopération UE-Russie. L'intention qu'il a affichée de renforcer ses contacts avec les principaux acteurs de la société civile russe, telle que mentionnée aux paragraphes 3.2.3. et 3.5.5, devrait se traduire dans un avenir prévisible par la création d'un forum consultatif dans le contexte de la coopération officielle entre l'UE et la Russie.

3.5   La coopération entre la société civile dans l'UE et en Russie russe doit être renforcée

3.5.1

Au fil des années, certains groupes d'intérêt, notamment les confédérations syndicales, les associations de consommateurs, les fédérations d'employeurs, les organisations agricoles et d'autres groupements de la société civile ont noué des liens avec leurs homologues russes, que ce soit au niveau de l'UE ou à l'échelle bilatérale. De même, les organisations russes participent souvent à la coopération internationale dans leurs secteurs respectifs. L'objectif consiste ici à favoriser parmi les citoyens les contacts directs, la mise en réseau, les interactions et l'échange d'expériences et d'informations. La coopération des sociétés civiles devrait compter parmi ses principaux objectifs l'émergence de relations de confiance entre l'UE et la Russie.

3.5.2

Il convient toutefois de diversifier et de développer plus avant ces relations, dans la mesure où de nombreux acteurs de la société civile russe n'ont pas de contacts suffisants entre eux et avec des organisations correspondantes d'autres pays. Le CESE encourage tous les acteurs de la société civile organisée à renforcer et à élargir leur coopération avec leurs homologues russes dans leur domaine propre. L'UE devrait pour sa part lancer des initiatives pour faciliter cette coopération.

3.5.3

Les États membres de l'UE devraient accentuer leurs efforts en vue d'associer les organisations de la société civile à la création d'initiatives communes, à la promotion de programmes éducatifs et de dispositifs d'échange dans ce cadre, ainsi qu'à l'établissement de projets économiques conjoints. Les gouvernements des États membres devraient également diffuser davantage d'informations sur l'existence de ces projets et former les acteurs de la société civile à les élaborer.

3.5.4

Il importe de trouver les moyens de nouer des contacts avec toutes les régions de Russie, entre autres avec la région de Kaliningrad. À cet égard, les recommandations formulées par le Comité des régions (2) pour renforcer la coopération régionale entre l'UE et la Russie sont tout à fait pertinentes. Le CESE les soutient et recommande que le Conseil de partenariat permanent accorde une plus grande priorité à cette question dans son ordre du jour.

3.5.5

Le CESE utilisera sa position pour contribuer au développement des relations entre les sociétés civiles organisées de l'UE et de la Russie. Un premier pas en ce sens consisterait à convenir avec les partenaires sociaux russes de contacts réguliers et d'ateliers communs centrés sur des thèmes spécifiques (par exemple, les réformes économiques et l'emploi, la réforme des systèmes de sécurité sociale, le développement du dialogue social en Russie ou la participation des acteurs de la société civile à la coopération entre l'UE et la Russie). L'objectif serait d'instaurer une coopération de plus en plus régulière et de plus en plus étroite entre les deux parties. Cette collaboration devrait, avec le temps, évoluer vers la création d'un forum consultatif qui sous-tendrait le mécanisme de coopération entre l'UE et la Russie (voir aussi les paragraphes 3.2.3., 3.4.2. et 3.4.3).

3.6   La coopération entre la Russie et ses voisins ainsi qu'entre les acteurs sociaux de ces pays doit être encouragée

3.6.1

Dans le même temps que l'UE intensifie ses relations avec les pays voisins européens de l'Est, il est essentiel que la Russie et ses voisins renforcent leurs rapports mutuels, notamment dans le cas de la Russie avec l'Ukraine, mais aussi avec la Moldavie et la Biélorussie. Une consolidation des liens et un accroissement des interactions sont nécessaires sur les plans politique, économique et social, dans le but d'améliorer la coopération en Europe. Le CESE préconise que l'UE soutienne une telle évolution dans le cadre de la politique de voisinage et de partenariat.

3.6.2

Dans ce contexte, le CESE recommande en outre que l'on soutienne les contacts transfrontaliers entre les acteurs des sociétés civiles de ces pays. Le CESE a pour sa part pris des mesures en faveur du développement d'un tel dialogue et fera régulièrement rapport sur ce sujet à la Commission.

3.7   La circulation transfrontalière entre l'UE et la Russie doit être encouragée

3.7.1

Le développement de la circulation transfrontalière exige de bonnes liaisons en matière de transport et la possibilité de voyager facilement. Le CESE soutient les efforts visant à développer et à intégrer ces connexions, lesquelles exigent des investissements d'amélioration des infrastructures et de la logistique aussi bien dans l'UE qu'en Russie. Les grands organes internationaux de financement, en particulier la BEI et la BERD, doivent être davantage associés à ces activités.

3.7.2

Le CESE note avec satisfaction que les feuilles de route placent à l'avant-plan l'objectif de facilitation des contacts interpersonnels et des déplacements entre l'UE et la Russie, que ce soit par le biais de l'intégration des réseaux de transport (formalités aux frontières, de l'allégement des conditions posées pour la traversée des frontières ou l'obtention de visas ou encore des principes de réadmission. Les accords relatifs aux frontières devraient fluidifier la mobilité transfrontalière.

3.7.3

Lente et onéreuse, la procédure actuellement en vigueur en matière de visas freine, voire bloque le tourisme et le renforcement de l'interaction transfrontalière entre les acteurs de la société civile, y compris les jeunes et les étudiants. Il y a lieu de simplifier les procédures de demande de visas et de permis de travail. Cet allégement contribuerait à encourager la circulation et les contacts transfrontaliers. Il importe dès lors que les négociations en cours entre l'UE et la Russie pour simplifier la procédure d'obtention des visas aboutissent le plus rapidement possible à une issue satisfaisante pour les deux parties.

Bruxelles, le 13 juillet 2005.

La Présidente

du Comité économique et social

Anne-Marie SIGMUND


(1)  «Les relations entre l'Union européenne, la Russie, l'Ukraine et la Biélorussie», 1995.

«TACIS – Assistance technique à la Communauté des États indépendants et à la Mongolie», 1998.

«Les relations entre l'Union européenne et les États riverains de la mer Baltique», 1998. «

La dimension septentrionale et les relations avec la Russie», 1999.

«La dimension septentrionale: Plan d'action pour la dimension septentrionale dans les politiques extérieure et transfrontière de l'Union européenne 2000-2003», 2001.

«Partenariat stratégique UE/Russie: les prochaines étapes?», 2002.

«L'Europe élargie – voisinage: un nouveau cadre pour les relations avec nos voisins de l'Est et du Sud», 2003.

(2)  CdR 105/2004.


ANNEXE

à l'avis du Comité économique et social européen

A.

L'amendement suivant, qui a recueilli au moins un quart des suffrages exprimés, a été rejeté lors de la session plénière.

Paragraphe 1.3

Biffer.

Exposé des motifs

Le paragraphe 1.1 de l'avis affirme que la Fédération de Russie constitue un partenaire stratégique de l'Union européenne; cette assertion suffit à épuiser le contenu du paragraphe 1.3.

Résultat du vote

Voix pour: 33

Voix contre: 64

Abstentions: 8


25.11.2005   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 294/38


Avis du Comité économique et social européen sur le thème «REACH — Législation sur les produits chimiques»

(2005/C 294/08)

Le 14 décembre 2004, le Bureau du Comité a décidé, conformément aux modalités d'application de l'article 29 de son règlement intérieur, d'élaborer un avis sur le thème suivant: «REACH — Législation sur les produits chimiques».

La section spécialisée «Agriculture, développement rural, environnement», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a élaboré son avis le 16 juin 2005 (rapporteur: M. BRAGHIN).

Lors de sa 419ème session plénière des 13 et 14 juillet 2005 (séance du 13 juillet 2005), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 52 voix pour, 2 voix contre et 2 abstentions.

1.   Avant-propos

1.1

La publication de la proposition de règlement concernant l'enregistrement, l'évaluation et l'autorisation des substances chimiques ainsi que les restrictions applicables à ces substances et instituant une agence européenne (1) a donné lieu à un vaste débat auquel ont pris part les institutions européennes, les autorités nationales, l'industrie chimique et non chimique, les organisations syndicales ainsi que de nombreuses ONG.

1.2

Un grand nombre d'aspects figurant dans le précédent avis du Comité (2) ont suscité des réactions intéressantes lors de ce débat, plus particulièrement les trois exigences suivantes:

la réalisation d'une série d'études supplémentaires afin d'évaluer les conséquences de la mise en œuvre de la proposition dans certains secteurs industriels, la portée et les conséquences du retrait éventuel du marché de substances critiques, la constitution de partenariats stratégiques pour expérimenter des projets-pilotes de mise en œuvre et l'impact sur les nouveaux États membres;

la nécessité de simplifier les exigences imposées aux entreprises et de réduire les coûts afin d'éviter une diminution de la compétitivité ou la délocalisation des entreprises, sans pour autant porter atteinte à l'objectif prioritaire que constitue la protection de la santé et de l'environnement;

l'opportunité de renforcer et de mieux articuler le rôle de l'Agence en veillant à assurer une représentation adéquate de tous les acteurs concernés.

1.3

Deux études réalisées dans le cadre du protocole d'accord entre la Commission européenne et l'industrie (UNICE-CEFIC) ont permis de mieux comprendre les problèmes de certains secteurs industriels. Ces études d'impact supplémentaires ont montré que si certaines craintes exprimées initialement étaient excessives, il subsiste toutefois des préoccupations qui justifient que des efforts ultérieurs soient consentis pour rendre le système plus efficace et plus cohérent.

1.3.1

Parmi les principales conclusions de l'étude réalisée par le cabinet de consultants KPMG sous la forme d'une étude de cas (Business Impact Case Study (3)), signalons les aspects suivants:

Les indications tendant à prouver que les substances d'un volume plus important risquent de disparaître en raison des obligations d'enregistrement imposées par REACH sont faibles. Les substances d'un volume moins important, inférieur à 100 tonnes, risquent davantage de devenir moins rentables ou de ne plus être rentables en raison des obligations imposées par REACH. Sur les 152 substances qui ont été évaluées en détail, l'on a constaté que 10 seulement risquaient de disparaître du marché en raison d'une diminution ou d'une disparition de la rentabilité;

les indications tendant à prouver que les utilisateurs situés en aval seront confrontés à une disparition des substances qui présentent pour eux la plus grande importance technique sont faibles. Ces substances seront enregistrées, parfois malgré les risques encourus au plan commercial;

les coûts ponctuels d'enregistrement à assumer par les fournisseurs de produits chimiques peuvent être significatifs dans certains cas et pourraient donner lieu à une rationalisation de l'éventail des produits. Cet effet concernerait principalement les substances considérées par les fournisseurs de produits chimiques comme n'ayant pas, au plan technique, une importance critique pour leurs clients;

si des substances devaient disparaître du marché dans une mesure non négligeable, l'ampleur et les coûts de reformulation, ainsi que les coûts de «re-engineering» pourraient être significatifs (notamment en raison de la nécessité de procéder à des études, essais et validations auprès des utilisateurs);

les coûts supportés seront dans la plupart des cas absorbés ou transférés mais cela pourrait être plus difficile pour les PME;

il n'existe pas de certitude quant à ce que sera l'impact de REACH sur le processus d'innovation. Pour les cas qui sont examinés dans l'étude, rien n'indique que les ressources de recherche-développement (R&D) seront automatiquement réaffectées à cause de REACH, et l'on ne prévoit pas non plus d'augmentations des investissements de R&D;

les entreprises ont reconnu que REACH comporte certains avantages commerciaux, et notamment: une meilleure information concernant les propriétés des substances et les composants dangereux que comportent des préparations, une meilleure gestion des risques et une rationalisation de l'éventail de substances;

des préoccupations se sont manifestées à propos de problèmes particuliers de faisabilité et de confidentialité. Des formulateurs et des utilisateurs situés en aval ont déclaré s'inquiéter du fait que les producteurs de produits chimiques puissent éventuellement ne pas vouloir inclure certains usages dans leur dossier d'enregistrement;

les utilisateurs de substances inorganiques (en particulier des matières premières) ont besoin d'éclaircissements supplémentaires sur les dispositions d'enregistrement prévues par le système REACH.

1.3.2

L'étude sur les nouveaux États membres (4) constate que la connaissance du système REACH est encore limitée et relève certains points critiques:

une augmentation substantielle des coûts n'a été constatée que dans un petit nombre de cas;

les coûts directs qui doivent être supportés dans des cas spécifiques pourraient être élevés par rapport au chiffre d'affaires ou en termes d'érosion des marges de profit;

peu de substances ont été identifiées comme vulnérables, dans la mesure où leurs marges de profit sont déjà limitées;

les entreprises qui dépendent des marchés des pays de l'Est non membres de l'UE seront les plus touchées.

1.4

Les conclusions de ces études et le débat en cours ont mis en évidence certains aspects jugés critiques par les acteurs économiques concernés, sur lesquels le Comité souhaite apporter une contribution complémentaire, en liaison étroite avec les travaux menés actuellement au niveau du Conseil et du Parlement européen.

2.   Les critères et les délais d'enregistrement

2.1

La proposition de règlement à l'examen supprime la distinction artificielle qui existe actuellement entre les «substances existantes», c'est-à-dire toutes les substances chimiques déclarées comme se trouvant sur le marché en septembre 1981, et les «nouvelles substances», c'est-à-dire celles qui ont été mises sur le marché depuis cette date. Elle prévoit l'obligation d'enregistrement des substances, telles quelles ou contenues dans des préparations (article 5), fabriquées ou importées en quantités égales ou supérieures à une tonne par an (article 5, paragraphe 1, deuxième alinéa). Par ailleurs, l'article 19, paragraphe 1, pose le principe selon lequel seules les substances enregistrées peuvent être fabriquées ou importées dans la Communauté.

2.2

La proposition à l'examen établit un «régime transitoire» pour les substances actuellement fabriquées ou mises sur le marché intérieur (30 000 environ), à savoir leur introduction progressive dans le système d'enregistrement en fonction des quantités produites ou importées par chaque entreprises (article 21). Le régime transitoire comporte une période de 3 ans pour l'enregistrement des substances fabriquées ou importées en quantités atteignant 1000 tonnes ou plus par an ainsi que pour les substances actuellement classées comme CMR (5), catégories 1 et 2. Il comporte une période de 6 ans pour les substances fabriquées ou importées en quantités atteignant 100 tonnes ou plus par an et une période de 11 ans pour les substances fabriquées ou importées en quantités égales ou supérieures à 1 tonne par an.

2.3

Différents arguments ont été avancés pour mettre en question cette approche basée sur les quantités, le principal étant qu'elle ne permet pas de répartir l'enregistrement dans le temps, en fonction des risques réels liés à chaque substance. L'établissement de priorités sur la base du facteur de risque se justifierait davantage sur le plan scientifique et économique. Toutefois, pour définir les substances prioritaires, il faudrait engager un processus itératif permettant d'identifier les dangers intrinsèques (hazard) et les risques liés à l'exposition (exposure) afin de procéder à une évaluation et à une gestion des risques adéquate (risk management).

2.4

Le CESE estime par conséquent que, même s'il est approximatif (comme il l'a déjà relevé dans un précédent avis (6)), le critère des volumes n'en est pas moins le plus pratique pour atteindre les objectifs fixés et remplacer le système actuel, que toutes les parties s'accordent à juger peu efficace. En effet, le système proposé tient également compte des substances qui suscitent d'importantes préoccupations, telles que les substances CMR de catégories 1 et 2. L'approche de la Commission, qui se fonde sur les volumes (indice approximatif d'exposition potentielle) sans négliger la dangerosité intrinsèque, semble transparente, plus simple à appliquer et mieux à même de garantir un degré de sécurité juridique suffisant aux acteurs concernés.

3.   La simplification de la réglementation

3.1

De l'avis du CESE, la structure du règlement proposé est complexe et difficile à comprendre, ce qui explique, du moins en partie, la perplexité, sinon les craintes de nombreux opérateurs, en particulier dans les secteurs industriels qui ne produisent pas de substances chimiques au sens propre, ainsi que des importateurs, des PME et des utilisateurs en aval, qui ne disposent parfois ni des connaissances ni des structures techniques nécessaires pour décrire, lorsqu'ils y sont invités, les utilisations particulières et la gestion des risques y relatifs. Le grand nombre d'annexes techniques constitue lui aussi un obstacle à la bonne compréhension et application du système REACH.

3.2

Aussi le CESE souhaite-t-il que, sur la base des avis et amendements recueillis en première lecture, la Commission s'efforce d'améliorer la lisibilité du règlement et examine la possibilité de restructurer le texte en réorganisant certains chapitres et articles en différents points. En premier lieu, il conviendrait d'élaborer des définitions plus précises afin de clarifier le champ d'application et les exceptions de catégorie, ainsi que les obligations et délais d'enregistrement liés aux volumes.

3.3

Une fois que les obligations incombant aux producteurs et aux importateurs eu égard au volume de leur production auront été clarifiées, certains aspects plus complexes tels que les mécanismes de partage des données, les responsabilités et modalités d'information tout au long de la chaîne d'approvisionnement ainsi que les obligations et responsabilités des utilisateurs en aval seront plus compréhensibles.

3.4

Par ailleurs, le Comité propose que les annexes qui, par nature, ne font pas partie des dispositions juridiques (par exemple l'annexe X) soient expressément mentionnées et constituent dès lors une référence opérationnelle, mais soient élaborées conjointement par les autorités et les experts des secteurs concernés, sur le modèle des MTD et des documents BREF (7) prévus par la directive relative à la prévention et à la réduction intégrées de la pollution (PRIP). Plus cette quantité impressionnante d'informations techniques sera simplifiée et clarifiée, plus l'évaluation des obligations et des coûts d'exécution à charge des entreprises sera précise. Cette distinction permettra en outre une adaptation plus rapide au progrès technique et scientifique, sans contraintes excessives en matière de procédures.

3.5

Le CESE apprécie les efforts consentis par la Commission pour élaborer des lignes d'orientations opérationnelles dans le cadre des REACH Implementation Projects (RIP). Il considère qu'il s'agit d'instruments essentiels pour que la proposition puisse être appliquée, en ce qu'ils permettent aux opérateurs et aux autorités concernées de se familiariser avec le fonctionnement du système et de comprendre pleinement ses mécanismes.

3.6

Le CESE invite également la Commission à tout mettre en œuvre afin d'impliquer les associations industrielles, syndicales et de catégorie et d'établir ainsi, au niveau communautaire, une coopération efficace entre les autorités, les entreprises et les organisations professionnelles et syndicales, ce qui permettrait de garantir une mise en œuvre efficace du système. Dans cet esprit, le CESE demande que soient développées des structures d'appui tels que les help desk nationaux, à l'étude auprès de la Commission.

4.   L'enregistrement préalable

4.1

L'article 26 sur l'obligation d'enregistrement préalable des substances prévoit que chaque déclarant potentiel d'une substance soumise au système d'enregistrement REACH doit transmettre à l'Agence l'ensemble des informations prévues au plus tard dix-huit mois avant l'expiration du délai de trois ans qui s'applique aux quantités supérieures à 1 000 tonnes et du délai de six ans qui s'applique aux quantités supérieures à 1 tonne. Les fabricants et importateurs de quantités inférieures à 1 tonne ou les utilisateurs en aval peuvent choisir de contribuer volontairement au partage des données.

4.2

La série d'informations visées à l'article 26, paragraphe 1, constitue une base adéquate pour favoriser le partage des informations relatives aux différentes substances et donc d'éventuels accords sur la présentation conjointe des données et des essais à effectuer (qui permettra de réduire les coûts). Toutefois, le CESE considère que ces informations ne sont pas suffisantes pour évaluer le danger potentiel d'une substance et, partant, établir de nouveaux critères de priorité aux fins de l'enregistrement. Pour parvenir à ce résultat, il convient d'exiger un ensemble de données plus complexe, ce qui implique non seulement des délais plus longs mais aussi des coûts et une surcharge administrative qui pourraient être excessifs pour les petits producteurs et les importateurs, mais aussi pour l'Agence, qui devrait en assurer la gestion.

4.3

Le CESE considère que parmi les différentes propositions à l'examen, il convient de privilégier celles qui préservent les objectifs fondamentaux et les délais actuellement prévus (pour éviter toute incertitude et confusion chez les acteurs concernés) et qui permettent de réduire l'impact financier du système pour les opérateurs les plus vulnérables identifiés par les études de cas réalisées.

5.   Recommandations pour un système REACH efficace et gérable

Si l'on veut que le mécanisme d'enregistrement fonctionne de manière efficace, il convient de fournir aux acteurs concernés des précisions sur les éléments suivants:

1.

les substances concernées par le système proposé;

2.

le champ d'application et, plus particulièrement, les critères et les catégories d'exemption prévues (actuellement mentionnées dans divers articles du règlement);

3.

les obligations que comporte l'échange d'informations entre les producteurs, les importateurs et les utilisateurs en aval (industriels et professionnels) d'une même substance;

4.

les mécanismes, incitants et primes dans le cadre de la création de consortiums aux fins de l'enregistrement d'une substance.

5.1

Définition des substances. Les études de cas réalisées ont confirmé qu'il existe une marge d'incertitude importante quant aux substances (en particulier inorganiques) concernées par le système REACH.

Le CESE se réjouit du fait qu'un RIP (REACH Implementation project) spécifique soit en cours d'élaboration, qui précisera, pour les autorités et les entreprises, les substances effectivement visées par le système REACH.

5.2

Champ d'application. Il serait utile d'élaborer à l'intention des acteurs concernés un tableau synoptique comportant un inventaire précis des catégories exemptées, en particulier celles qui relèvent d'une autre législation communautaire en vigueur à même de garantir la réalisation des objectifs de protection de la santé et de l'environnement sur lesquels se fonde le système REACH. Le CESE partage l'opinion selon laquelle il est nécessaire d'éviter les chevauchements et doubles obligations, et espère que des informations précises en la matière dissiperont tous les doutes qui pourraient encore subsister.

5.3

Flux d'informations. Le système REACH ne peut être efficace que s'il existe un échange d'informations approprié entre opérateurs en amont et en aval. À défaut de cet échange d'informations vers le haut et vers le bas, y compris entre secteurs manufacturiers différents, il est impossible de prendre les mesures qui s'imposent en matière de gestion des risques et de protection des travailleurs, des consommateurs et de l'environnement. Le CESE appuie l'approche selon laquelle il incombe au producteur ou à l'importateur d'évaluer les scénarios d'exposition et les risques relatifs aux «utilisations identifiées», chaque fois que nécessaire, en toute bonne foi et avec la «diligence du bon père de famille», concepts clairs et consolidés dans le droit et la jurisprudence.

5.3.1

Le CES souligne que les données recueillies par l'Agence sur les substances enregistrées et ensuite également sur celles qui ont fait l'objet d'une évaluation, débarrassées de toute information confidentielle ou d'intérêt commercial, doivent être mises à la disposition des opérateurs économiques en général (actuellement il est prévu qu'elles ne soient transmises qu'aux producteurs, importateurs et utilisateurs d'une substance spécifique et limitées à cette substance), ainsi que des représentants des travailleurs et des catégories professionnelles auxquels elles peuvent être utiles dans l'exécution de leurs tâches (services médicaux, de sécurité, de protection, etc.).

5.4

Partage des données. Pour les substances qui font l'objet d'un régime transitoire, la proposition prévoit la participation à un forum d'échange d'informations de tous les producteurs et importateurs d'une substance spécifique qui ont procédé à l'enregistrement préalable. Le CESE approuve cette approche et l'objectif qui la sous-tend, c'est-à-dire réduire au minimum les doubles emplois en matière d'expérimentation et d'essais non réalisés sur des animaux.

5.5

Le CESE insiste sur la nécessité d'éviter la duplication de tous les essais, pas seulement ceux effectués sur les animaux. Il serait opportun de prendre des mesures visant à développer des modèles d'évaluation et de screening de type QSAR (quantitative structureactivity relationship), des essais et des solutions autres que l'expérimentation animale, en examinant les procédures susceptibles d'accélérer la validation et, si possible, l'utilisation des essais, avant même que ceux-ci ne soient définitivement et formellement approuvés par les organes compétents.

5.6

Coût/efficacité. L'objectif de la réduction des coûts supportés par les entreprises devrait être expressément pris en compte lors de la mise en œuvre du système pour que celle-ci s'insère avec cohérence dans la stratégie de Lisbonne et du développement durable, que le CESE a toujours appuyée. Le défi essentiel du système REACH consiste à poursuivre en parallèle les objectifs de compétitivité et de protection de la santé et de l'environnement. Il convient plus particulièrement de veiller à faire en sorte que la répartition des coûts d'enregistrement n'entraîne pas une charge excessive pour certains segments de la chaîne d'approvisionnement ou d'autres secteurs industriels soumis à une concurrence particulièrement âpre ou structurellement plus faibles.

5.7

Il ressort des calculs effectués que 60 % des coûts directs de l'enregistrement sont liés à la réalisation des essais requis. Aussi le CESE juge-t-il très importants les mécanismes destinés à favoriser des accords entre entreprises, sur une base volontaire, en vue du partage des résultats et de la réalisation conjointe d'essais. Un élément tout aussi important à ses yeux est un système équitable et harmonisé en vertu duquel tous les acteurs concernés qui utilisent des données déjà récoltées ou récoltées conjointement participent aux frais.

5.8

Le CESE propose par conséquent que l'on modifie certaines indications relatives aux coûts, qu'il juge insuffisantes ou inéquitables. Il préconise plus particulièrement les mesures suivantes:

la réduction de la redevance d'enregistrement: alors qu'elle est modeste pour les petites quantités, cette redevance devient considérable pour les volumes plus élevés. Il convient de prévoir une réduction plus importante que ce que prévoit actuellement l'article 10, paragraphe 2 (un tiers), lorsqu'un même ensemble de données est présenté par plusieurs entreprises qui forment un consortium;

la répartition des coûts liés à l'expérimentation animale entre les consortiums (prévue à l'article 28, paragraphe 1, deuxième alinéa et à l'article 50, paragraphe 1): pour que la répartition des coûts entre les acteurs qui participent au Forum à part égale soit équitable, il faut tenir compte du volume de leur production respective. Le CESE propose comme critères plus équitables des paramètres de répartition basés sur le chiffre d'affaires lié à une substance spécifique ou du volume des ventes des trois dernières années;

le montant de 50 % du coût des expérimentations animales effectuées par les déclarants précédents, prévu par l'article 25, paragraphes 5 et 6, semble encore plus injuste, étant donné que ce coût peut être insurmontable pour un déclarant tardif qui souhaite entrer dans ce segment du marché.

6.   Observations relatives aux propositions à l'examen au niveau du Conseil

6.1

Parmi les propositions à l'examen, le système OSOR (une substance, un enregistrement), proposé par le Royaume-Uni et la Hongrie a fait l'objet d'un vaste débat au Conseil et a fait un certain nombre d'adeptes. Si l'on peut souscrire à ce principe, dans la mesure où il permettrait de réduire sensiblement les essais et d'éviter la duplication de nombreuses études, des doutes subsistent toutefois quant à ses possibilités d'application concrète.

6.1.1

Le CESE relève un certain nombre de faiblesses ou de problèmes non résolus dans cette approche:

la protection de la confidentialité (qui ne peut guère être garantie, à moins de s'en remettre à des tiers opérant pour le compte d'un groupe d'entreprises), eu égard à l'obligation de partager les données (c'est cet élément qui constitue une obligation contraignante, non la formation de consortiums);

la complexité inévitable du système si l'on veut couvrir l'ensemble des opérateurs qui manipulent une substance déterminée, ne fût-ce que parce qu'il regrouperait des opérateurs de tous les États membres de l'UE, ce qui poserait des problèmes linguistiques évidents;

le grand nombre d'entreprises impliquées dans de multiples SIEF (Substance Information Exchange Forum), même si cette difficulté est atténuée par les dispositions qui prévoient trois phases d'enregistrement préalable en fonction des volumes;

le long délai qui sera probablement nécessaire aux experts désignés pour s'accorder sur les données qui devront être transmises parmi les différents paquets de données essentielles partagés, compte tenu notamment du fait que l'inclusion d'un essai plutôt que d'un autre peut avoir des conséquences économiques importantes pour l'entreprise en raison du mécanisme de participation aux frais;

la présentation conjointe du dossier (ou en tout cas la référence à un dossier commun), qui pourrait déresponsabiliser les différents acteurs concernés.

6.1.2

En outre, le système OSOR ne prévoit ni ne donne aucune certitude concernant la possibilité de partager des données en matière d'évaluation de l'exposition, de caractérisation et de gestion des risques, lorsqu'elle est exigée, dans la mesure où il s'agit d'aspects sur lesquels il est difficile, voire impossible, de s'accorder compte tenu de la multiplicité d'acteurs concernés qui présentent chacun des caractéristiques différentes.. Il serait dès lors nécessaire de procéder dans certains cas à des enregistrements séparés, ce qui est en contradiction avec le principe qui sous-tend le concept OSOR.

6.2

La proposition présentée récemment par Malte et la Slovénie concernant les substances dont la quantité varie entre 1 et 10 tonnes poursuit des objectifs de simplification et de réduction des coûts utiles en particulier pour les entreprises actives dans ces secteurs, qui sont souvent des PME. Elle ne touche pas aux aspects essentiels de la proposition de Règlement comme les intervalles quantitatifs et les délais, et propose des modalités opérationnelles simples et souples.

6.2.1

Les principaux éléments de cette proposition sont les suivants:

simplification des obligations en matière d'enregistrement, principalement sur la base des informations disponibles concernant la substance et son utilisation, à savoir un éventail simple d'informations de base mais nécessaires, y compris les informations physico-chimiques

identification de mécanismes simples pour décrire l'exposition:

principales catégories d'utilisateurs (industriels/ professionnels/ consommateurs)

principales modalités d'exposition

type d'exposition (accidentelle/rare, occasionnelle, continue/fréquente)

identification de critères permettant d'établir des priorités (définis par l'Agence) qui s'appliquent automatiquement lorsque deux ou plusieurs conditions précisées dans l'annexe ad hoc sont remplies

révision périodique (tous les cinq ans) et souple, qui tient compte de l'expérience acquise avec les précédentes applications.

6.2.2

Le CESE juge positif que la proposition ne prévoit pas de délais basés sur les quantités différents de ceux figurant dans la proposition à l'examen ni de compléter les informations disponibles et/ou celles relatives aux essais prévus à l'article 5 à moins que ce ne soit opportun compte tenu de la sélection opérées par l'Agence. Il convient en effet de souligner que pour vérifier les critères d'établissement de priorités, l'Agence procède à un contrôle qui peut l'amener à demander des informations supplémentaires et des essais visant à approfondir un aspect spécifique ou, si de sérieuses préoccupations surgissent quant aux risques liés à la substance, à engager la procédure d'évaluation.

6.3

La proposition de la Suède sur les substances contenues dans les préparations mérite une attention particulière, ne fût-ce que parce que l'application pratique de l'article 6 fait l'objet d'une préoccupation générale. Cette proposition met en lumière une série d'aspects importants, par exemple:

la définition de la notion de «préparation» est trop générale pour qu'il soit possible d'effectuer une distinction entre les différents types de préparations;

les quantités de substances dangereuses rejetées, même non intentionnellement, peuvent être très importantes et le rejet peut varier sensiblement en fonction de l'élaboration des préparations, de leur utilisation ou lorsqu'elles deviennent des déchets;

l'identification des substances rejetées qui «peuvent avoir des effets nocifs sur la santé humaine ou l'environnement» (article 6.2) pose problème en l'absence d'une évaluation spécifique du risque;

la présence de substances CMR, PBT ou VPVB (énumérées à l'annexe XIII) n'est pas nécessairement signalée par les autorités et ne fait pas l'objet d'un enregistrement;

les producteurs européens de préparations qui se conforment au système REACH tout au long de la chaîne de production sont désavantagés par rapport à leurs concurrents directs non-UE qui ne participent au système que pour les substances dangereuses rejetées par les préparations;

les informations relatives aux composants des substances dangereuses contenues dans les préparations revêtent une importance considérable dans le cadre du processus d'achat et de marketing des préparations, y compris les informations fournies aux consommateurs; la proposition de règlement ne prévoit toutefois pas cette extension.

6.3.1

Pour garantir une approche qui permette de réaliser les objectifs de protection de la santé et de l'environnement sans augmenter de manière excessive la charge administrative et financière, le CESE approuve certaines mesures proposées en la matière, notamment:

l'obligation de fournir des informations en aval tout au long de la chaîne de production aux utilisateurs professionnels et aux utilisateurs/consommateurs de préparations;

l'enregistrement des substances à caractère très préoccupant, quelles que soient les quantités contenues dans les préparations, ainsi que des substances dangereuses présentes en quantités supérieures à 1 tonne, qui ont été ajoutées intentionnellement et sont identifiables en tant que telles dans ces préparations;

l'obligation, pour l'Agence, de mettre à disposition des informations structurées sur l'utilisation des substances contenues dans les préparations et sur le droit de demander des informations supplémentaires aux producteurs/importateurs de préparations concernant des substances non enregistrées ou qui relèvent de l'article 54 lettre f);

le «droit de savoir» quelles substances chimiques dangereuses sont contenues dans une préparation, y compris pour les utilisateurs professionnels;

l'élaboration d'une «liste indicative» des substances dangereuses susceptibles d'être rejetées non intentionnellement, qui recense les types de préparations qui font l'objet d'une surveillance.

Le CESE appuie également la proposition présentée par les acteurs concernés du secteur, qui consiste à avancer la mise en œuvre de l'article 6 pour autant qu'il soit démontré qu'il peut être appliqué dans la pratique, au moyen d'une série d'étapes et d'accords volontaires.

6.4

Le CESE confirme qu'il est nécessaire de renforcer le rôle de l'Agence, comme il l'a indiqué dans son précédent avis, (8) et approuve dès lors la proposition de la France en la matière (Shape the Agency for Evaluation — SAFE), qui attribue plus particulièrement à l'Agence la responsabilité des trois types d'évaluation (essais proposés, dossiers présentés et substances) prévus par la proposition de Règlement ainsi que la responsabilité directe du plan glissant des substances à évaluer en priorité.

7.   L'impact sur la chaîne d'approvisionnement

7.1

Le Comité considère qu'il convient d'approfondir l'analyse de la chaîne d'approvisionnement et, partant, de son impact sur les différents segments. Compte tenu du caractère horizontal de l'utilisation des substances chimiques couvertes par le règlement, une même entreprise peut être à la fois productrice et utilisatrice en aval, c'est-à-dire qu'elle peut jouer plusieurs des rôles prévus par le système REACH concernant les producteurs/importateurs et les utilisateurs en aval.

7.1.1

Des substances et préparation chimiques auxiliaires sont utilisées dans tous les processus de production. L'enregistrement des substances incombe au fournisseur direct, ou est transféré en amont de la chaîne d'approvisionnement, à moins que l'utilisateur en aval n'utilise la substance pour un emploi autre que celui prévu, qui n'a pas été déclaré au préalable au fournisseur.

7.2

Pour tenter d'identifier les caractéristiques des différents cas de figure et les difficultés qui se posent, il est utile d'identifier les six acteurs-clés suivants qui jouent des rôles différents tout au long de la chaîne d'approvisionnement:

les producteurs et importateurs de substances chimiques primaires,

les grandes entreprises manufacturières non chimiques,

les PME qui produisent des substances chimiques soumises à enregistrement,

les préparateurs,

les PME manufacturières non chimiques,

les importateurs de substances chimiques ou de préparations.

7.3

Les producteurs et importateurs de substances chimiques de base (par exemple l'éthylène et le butadiène) sont relativement peu nombreux et traitent des quantités importantes. Ils sont dès lors concernés par les premiers délais d'enregistrement, mais les coûts de ce dernier n'ont toutefois qu'une faible incidence sur leur chiffre d'affaires.

7.4

Les grandes entreprises non chimiques (notamment les entreprises sidérurgiques, les manufactures de papier, les cimenteries) sont à la fois utilisatrices en aval, compte tenu des multiples substances et préparations auxiliaires utilisées dans leurs processus de fabrication, et productrices/importatrices, en vertu de la définition actuelle de la notion de substance. À moins qu'une définition plus précise, du reste souhaitable, ne soit donnée des substances existantes ces entreprises sont dans leur majorité concernées par la procédure d'enregistrement pour laquelle le premier délai s'applique.

7.5

Pendant la rédaction de ce document, de nouvelles informations ont été obtenues concernant les PME qui produisent des substances ou des composés chimiques soumis à l'obligation d'enregistrement. Toutefois, les données disponibles ne permettent pas de se faire une idée complète et détaillée de la situation. Il est certain qu'un nombre substantiel (de l'ordre de quelques milliers) de PME seront soumises à l'obligation d'enregistrement, mais l'on ignore pour combien de substances et pour quel volume et, partant, moyennant quelles obligations et quels délais d'enregistrement. Les dernières études d'impact révèlent que les coûts d'enregistrement pourraient avoir un impact considérable sur la compétitivité de ces entreprises ou sur le maintien de certaines substances sur le marché. Le CESE demande que cet aspect soit contrôlé avec toute la vigilance nécessaire, notamment en raison de l'importance de ses conséquences négatives prévisibles en aval.

7.6

Les préparateurs de substances, à savoir les formulateurs qui utilisent plusieurs substances pour une seule préparation, doivent enregistrer les substances qui n'ont pas été achetées sur le marché européen. Les études réalisées ont confirmé que ceux-ci sont également les plus attentifs en ce qui concerne la communication de données et d'informations susceptibles de révéler des secrets de fabrication. En particulier, le fait de signaler le code de chaque substance qui entre dans une préparation permettrait de remonter à la formule, compromettant ainsi son caractère concurrentiel. Le CESE propose dès lors que cette exigence ne concerne que les substances classées comme dangereuses.

7.6.1

Il est donc possible que les formulateurs seront les principaux acteurs concernés par l'article 34, paragraphe 4, en vertu duquel un utilisateur en aval doit également élaborer un rapport sur la sécurité chimique (Chemical Safety Report) conformément à l'annexe XI pour toute utilisation en dehors des conditions décrites dans un scénario d'exposition qui lui a été communiqué dans une fiche de données de sécurité (Safety Data Sheet) par le fournisseur des matières premières contenues dans la préparation. Les formulateurs devront également satisfaire à l'obligation (déjà prévue par la législation en vigueur) d'élaborer des fiches de données de sécurité pour les préparations qu'ils commercialisent lorsque celles-ci sont classées comme dangereuses au sens de la directive 99/45/CEE.

7.7

Les PME manufacturières non chimiques sont en substance des utilisatrices en aval. Cette utilisation concerne vraisemblablement moins souvent des substances (dont le coût d'enregistrement incombe au producteur/importateur) que des préparations. Ces PME auront à leur disposition la fiche de données de sécurité ou, s'il est demandé, le rapport sur la sécurité chimique, ce qui permettra de mieux contrôler l'utilisation des substances et d'améliorer l'efficacité de la mise en œuvre de mesures de gestion des risques. Pour cette catégorie d'entreprises, le coût économique sera essentiellement un coût indirect et elles devront faire face à une charge administrative et bureaucratique nouvelle.

7.8

Comme indiqué au paragraphe 3.6, le CESE espère que les associations industrielles, syndicales et de catégorie opérant au niveau territorial pourront participer activement au suivi et à la simplification des processus de mise en œuvre, et qu'elles joueront un rôle d'information certainement utile pour favoriser le respect des dispositions du règlement et la participation des opérateurs aux consortiums dans des cas spécifiques.

8.   Sécurité et santé

8.1

Les études d'impact réalisées jusqu'à présent se sont essentiellement concentrées sur les coûts et la faisabilité du système REACH. Les études quantitatives relatives aux effets positifs en termes de santé et de sécurité sur le lieu de travail et aux avantages pour la santé et l'environnement sont quant à elles moins détaillées, voire inexistantes. De nombreux opérateurs ont reproché au système REACH son coût excessif et exigé que des modifications substantielles y soit apportées. Par ailleurs, certains secteurs industriels ainsi que de grandes chaînes commerciales ont donné une appréciation positive de la proposition de règlement, en dépit des coûts et de la charge administrative qu'elle implique.

8.2

Le CESE s'est déjà exprimé, dans son précédent avis, sur la valeur ajoutée que représentent la qualité et la sécurité des processus de production et des produits, et propose que l'on approfondisse davantage ces aspects, notamment en relation avec le «Plan d'action sur l'environnement et la santé» (9). Le CESE se réjouit que des études spécifiques aient été programmées en la matière, par exemple l'étude d'impact du système REACH sur la santé professionnelle (maladies respiratoires et de la peau) lancée par le Trade Union Technical Bureau for Health and Safety.

8.3

Si la directive sur la sécurité des travailleurs contient déjà des dispositions sur la définition des scénarios d'exposition et la gestion sûre des substances utilisées, son application concrète n'est toutefois pas toujours satisfaisante. Parce qu'il augmente les informations disponibles, le système REACH constitue indubitablement une avancée concernant l'amélioration de la sécurité et de la santé des travailleurs dans tous les secteurs de production. Des fiches de données de sécurité et des rapports sur la sécurité chimique plus approfondis et détaillés constitueront certainement des outils utiles à cette fin, d'autant que ces documents seront disponibles pour un plus grand nombre de substances et diffusés plus largement parmi les acteurs économiques.

8.4

Un autre aspect, qui a été négligé et mérite plus d'attention, concerne les besoins en formation et qualification des différents acteurs de la chaîne d'approvisionnement (opérateurs et travailleurs) ainsi que les retombées en termes de transparence et d'information des consommateurs. Le CESE souhaite qu'une politique active soit menée dans ce domaine, au travers de programmes de formation des travailleurs et de mécanismes permettant la mise à disposition d'informations utiles non confidentielles. La mise en œuvre du système REACH permettra certainement de répondre à ces attentes, mais il serait cependant opportun d'élaborer des actions spécifiques en la matière afin d'assurer une efficacité maximale.

9.   Innovation

9.1

L'un des objectifs du système REACH est de stimuler l'innovation. Si le CESE se félicite de la mise sur un pied d'égalité des nouvelles substances, en particulier grâce à l'exemption de l'obligation d'enregistrement des substances destinées à des activités de recherches pour une période de cinq ans (renouvelable) et à l'augmentation des quantités prévues aux fins de la notification, il demande toutefois que des mesures et instruments supplémentaires soient étudiés et mis en œuvre. À cet égard, il propose plus particulièrement que la recherche chimique soit expressément prise en compte par le septième programme-cadre, dont il a engagé l'examen, et que l'on étudie des mécanismes spécifiques d'incitation à l'innovation et au transfert de technologies afin d'encourager le développement de substances présentant des risques potentiels mineurs.

9.2

Il ressort des deux études de cas réalisées récemment que la réaffectation et la réduction des ressources destinées à la recherche et au développement ne seront pas dramatiques mais qu'elles auront bien lieu, un accroissement des investissements dans la recherche n'étant pas prévu. Cette situation, assortie d'une augmentation des coûts, pourrait déboucher sur une diminution de la capacité d'innovation et donc de la compétitivité. Étant donné que cela pourrait avoir des conséquences particulièrement lourdes pour les PME, les États membres devront eux-aussi contribuer à la recherche dans ce type d'entreprises, en tirant avantage de la nouvelle réglementation sur les aides d'État en faveur des PME. Par ailleurs, le fait que les entreprises interrogées n'aient pas saisi les occasions envisagées donne à penser qu'il convient d'engager une campagne d'informations sur les avantages que le système REACH peut présenter et compenser ainsi du moins en partie les coûts inévitables.

9.3

L'impact de REACH sur le système de production créera vraisemblablement de nouvelles opportunités pour les entreprises les plus souples, efficaces et attentives aux développements du marché, qui auront la possibilité de gagner de nouvelles parts de marché et de proposer des solutions de remplacement pour les substances les plus critiques. Il ne faut pas oublier que l'expérience engrangée créera un avantage concurrentiel lorsque d'autres régions du monde devront s'adapter à des normes de production plus respectueuses de la santé humaine et de l'environnement. Il convient également de prendre en compte les retombées du système REACH sur la recherche combinées à l'impératif de développer de nouvelles connaissances (de la chimie analytique au développement de logiciels d'application en passant par la modélisation par ordinateur, la toxicologie, les nouvelles approches en matière d'essais, les méthodes d'échantillonnage et de mesure).

9.4

Ces processus devront toutefois être pris en compte par les législateurs et les décideurs politiques afin que toutes les politiques communautaires soient, comme le prescrit la stratégie de Lisbonne, cohérentes avec les objectifs de compétitivité, d'innovation et de protection efficace de l'environnement et en facilitent la réalisation. Le Comité souhaite qu'un dialogue approfondi et constant entre les autorités compétentes et les acteurs concernés facilite la mise au point de politiques et d'outils efficaces qui viendront consolider les leviers du marché en vue d'un développement innovant de l'industrie chimique, attentif à la protection de la santé et de l'environnement.

Bruxelles, le 13 juillet 2005.

La Présidente

du Comité économique et social européen

Anne-Marie SIGMUND


(1)  Document COM(2003) 644 final, du 29 octobre 2003.

(2)  JO C112 du 30.4.2004.

(3)  KPMG, Business Impact Case Study REACH, présentée le 28 avril 2005.

(4)  CCR-IEPT, Contribution à l'analyse d'impact de REACH dans les nouveaux États membres de l'Union, présentée le 28 avril 2005.

(5)  Substances cancérogènes, mutagènes ou toxiques pour la reproduction.

(6)  JO C 112 du 30.4.2004, paragraphe 3.3.2.

(7)  Il s'agit des meilleures techniques disponibles (MTD) et des documents de référence MTD (BREF), qui sont les documents du Bureau européen de Séville compétent pour l'application de la directive 96/61/CEE sur la prévention et la réduction intégrées de la pollution (Integrated Pollution Prevention and Control, IPPC), élaborés conjointement par des experts communautaires et des acteurs concernés.

(8)  JO C 112 du 30.4.2004, paragraphe 3.2.

(9)  JO C 157 du 28.6.2005.


25.11.2005   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 294/45


Avis du Comité économique et social européen sur le thème «Portée et effets de la délocalisation d'entreprises»

(2005/C 294/09)

Le Comité économique et social européen a décidé, le 29 janvier 2004, conformément à l'article 29, paragraphe 2, de son règlement intérieur, d'élaborer un avis sur le thème suivant: «Portée et effets de la délocalisation d'entreprises».

La Commission consultative des mutations industrielles, chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 13 juin 2005 (rapporteur: M. RODRIGUEZ GARCIA-CARO; corapporteur: M. NUSSER).

Lors de sa 419ème session plénière des 13 et 14 juillet 2005 (séance du 14 juillet 2005), le Comité économique et social européen a adopté l'avis suivant par 128 voix pour, 15 voix contre et 6 abstentions.

1.   Introduction

1.1

Nous vivons dans un monde où la globalisation ne cesse de s'accroître, un processus qui accélère le processus de dilution des frontières, caractérisé par un commerce internationalisé et par un développement technologique au rythme vertigineux (1). L'accroissement de la propriété institutionnelle (2), l'augmentation des investissements croisés transfrontaliers, la délocalisation des tâches, les changements rapides en matière de propriété et une plus grande utilisation des technologies de l'information et des communications font que l'identité géographique s'atténue et, par conséquent, que la compétitivité revêt une dimension globale. Dans un tel contexte, la compétitivité apparaît comme l'objectif global de l'appareil économique, l'interaction entre celui-ci et les sphères sociale, environnementale et politique au niveau institutionnel déterminant le processus de développement durable.

1.2

L'Union européenne apparaît aujourd'hui comme un noyau d'intégration important dans le contexte de la globalisation, avec un marché unique, une union économique et monétaire et des progrès sensibles en matière de politique extérieure et de sécurité commune, ainsi que sur les questions relatives à la justice et aux affaires intérieures.

1.3

Une société doit être compétitive dans son ensemble c'est-à-dire qu'elle doit être capable à tout moment d'anticiper l'environnement dans lequel elle s'inscrit, de s'y adapter et de l'influencer (3). Ainsi, dans sa communication du 11 décembre 2002 intitulée «La politique industrielle dans une Europe élargie», la Commission définit la compétitivité comme «la capacité d'une économie à assurer de façon durable à sa population un taux d'emploi élevé et un niveau de vie élevé et en progression  (4)». Par ailleurs, l'importance de la compétitivité globale est soulignée dans les rapports sur la compétitivité européenne publiés régulièrement par la Commission européenne depuis 1994 (5).

1.4

Dans le cas de l'entreprise, la compétitivité réside dans sa capacité à satisfaire, de manière durable, les besoins de ses clients, de manière plus efficace que ses concurrents, en leur offrant les biens et les services les plus intéressants du point de vue du prix ainsi que d'autres facteurs (6). La compétitivité organisationnelle peut être définie comme la capacité d'une organisation à produire des biens et des services de qualité, reconnus en tant que tels et acceptés sur le marché global (7), tout en répondant à la règle des trois «E»: efficience, efficacité et effectivité. Efficience de la gestion des ressources, efficacité dans la réalisation des objectifs et effectivité éprouvée de la capacité à agir sur l'environnement.

1.5

Le facteur humain est un élément fondamental de la compétitivité des entreprises. En ce sens, il importe de le motiver et de lui offrir des possibilités de formation et de promotion de même que sa contribution dans le cadre d'un dialogue social est importante.

1.6

Aujourd'hui, les entreprises sont soumises à un environnement en évolution permanente. Des marchés de plus en plus ouverts, des infrastructures et des moyens de communication et de transport développés, des technologies et des applications technologiques faisant l'objet d'un processus constant d'innovation et une concurrence qui ne cesse de croître constituent le cadre dans lequel les entreprises ont à développer leurs activités au quotidien.

1.7

Le 1er mai 2004 a marqué un tournant dans l'histoire de l'Union européenne avec l'adhésion de dix nouveaux États membres. Comme cela a été dit dans l'avis du Comité sur l'élargissement (8), «L'élargissement du marché intérieur apportera de nombreux avantages sur le plan économique et renforcera la compétitivité de l'Europe dans l'économie mondiale, si l'on réussit à exploiter le potentiel disponible». Il convient cependant de noter que les structures économiques de ces pays n'ont pas encore atteint les normes de l'UE à 15. Selon le rapport 2003 sur la compétitivité européenne, les 10 PECO (9) disposent d'un avantage dans les industries à haute intensité de main-d'œuvre, de ressources et d'énergie mais souffrent de désavantages comparatifs pour ce qui est des secteurs qui ont besoin, principalement, de beaucoup de capital ou de technologie. Les 10 PECO possèdent donc des avantages compétitifs pour les biens primaires (en amont) et les biens de consommation (en aval), alors qu'ils affichent des handicaps pour les biens intermédiaires et les biens de capital.

1.8

Un marché intérieur de près de 445 millions d'habitants, où les entreprises opèrent au sein d'un cadre unique, capable de garantir des conditions macro-économiques stables dans un environnement marqué par la paix, la stabilité et la sécurité, constitue le premier avantage de l'élargissement du 1er mai 2004. Dans ce sens, s'il est vrai qu'après l'élargissement la population de l'UE a augmenté de 20 % et le PIB de 5 %, le coût horaire de la main-d'œuvre et la productivité ont baissé en moyenne dans l'ensemble de l'Europe des 25.

1.9

L'élargissement de l'Union ne devrait cependant pas être perçu comme une menace en soi pour les «anciens» membres de l'UE. Les élargissements antérieurs de l'Union ont induit une amélioration du PIB et du niveau de vie des nouveaux États membres, comme en témoigne l'exemple de l'Irlande (10), de l'Espagne (11) ou du Portugal (12), qui ont vu leur PIB augmenter à la suite de leur adhésion. En outre, il ne faut pas oublier que depuis le 1er mai 2004, l'avenir de l'UE est désormais lié à celui de ses 25 États membres.

1.10

Par ailleurs, l'élargissement permet aux entreprises européennes de profiter des avantages offerts par les nouveaux partenaires de l'UE non seulement en termes de coût ou d'éducation mais également en termes de proximité géographique et de similitudes culturelles et linguistiques par rapport à d'autres zones de localisation possibles.

1.11

Le phénomène de délocalisation constitue un véritable défi pour la société européenne et peut d'un point de vue théorique être envisagé dans une double perspective: d'une part, la délocalisation d'entreprises vers d'autres États membres, à la recherche de conditions plus favorables, et d'autre part, la délocalisation vers des pays qui ne sont pas membres de l'UE, comme ceux du sud-est asiatique (13) ou ceux qui ont des économies émergentes (14), parmi lesquels la Chine a une importance particulière. Dans ce second cas, ce phénomène est partiellement motivé par des conditions favorables de production et surtout par la possibilité de pénétrer de nouveaux marchés très importants présentant un énorme potentiel de croissance.

1.12

Le phénomène de la délocalisation pourrait entraîner, outre la perte directe d'emplois, d'autres problèmes, notamment une augmentation des charges sociales pour les États concernés, une aggravation de l'exclusion sociale et une croissance plus faible de l'économie dans son ensemble, notamment en raison d'une diminution globale de la demande. En outre, il convient de noter que, dans le meilleur des cas, la délocalisation de la production industrielle peut contribuer au renforcement des droits sociaux dans les pays où a lieu l'investissement, et implique nécessairement le transfert du savoir-faire. Par conséquent, la délocalisation peut avoir un effet important de nivellement des avantages comparatifs respectifs, décrits au paragraphe 1.7 ci-dessus, et d'accroissement ultérieur de la compétitivité des entreprises délocalisées.

1.13

Malgré les effets évoqués précédemment, la Commission européenne elle-même reconnaît, dans sa communication intitulée «Restructuration et emploi», du 31 mars 2005 (15) que les restructurations ne doivent pas être synonyme de reculs sociaux et de perte de substance économique. Elle y note en outre que les opérations de restructuration sont fréquemment indispensables à la survie et au développement des entreprises, mais qu'il est nécessaire d'accompagner ces évolutions de telle manière que leurs effets sur l'emploi et les conditions de travail soient aussi transitoires et limités que possible.

1.14

À l'heure actuelle, les investissements dans d'autres pays ne sont plus l'affaire des seules grandes entreprises. Les petites et moyennes entreprises, et en particulier de celles présentant une forte valeur technologique ajoutée, sont déjà elles aussi en train de s'implanter dans d'autres pays ou d'externaliser une partie de leur activité.

1.15

La création de processus technologiques plus avancés dans les pays à coûts élevés est, d'une part, l'un des facteurs qui freinent le processus de délocalisation des entreprises, entraînant la création de nouveaux secteurs d'activité et augmentant les qualifications du personnel et le savoir-faire des entreprises. Par ailleurs, les économies émergentes et les pays du sud-est asiatique présentent des marchés dotés d'un fort potentiel qui bénéficient, entre autres, de régimes fiscaux et de prix de l'énergie entre autres, qui sont souvent plus intéressants que dans l'UE. De plus les coûts de main-d'œuvre sont bien moins élevés que dans l'UE, entre autres raisons parce que les droits sociaux sont moins développés, voire dans certains cas inexistants au regard des normes fondamentales de l'Organisation internationale du Travail (OIT), et le coût de la vie est moins élevé. Cela permet aux entreprises délocalisées dans ces pays de présenter sur le marché mondial des produits moins chers. De même, ces pays favorisent les investissements étrangers, en ayant parfois recours à des zones franches dans lesquelles le droit du travail et les conditions sociales sont pires que dans d'autres parties du pays, parce qu'ils sont conscients que de telles mesures constitueront une source importante de revenus pour leur économie. Pour cette raison, les entreprises qui envisagent de déplacer la partie de leur activité qui génère une moindre valeur ajoutée vers ces zones sont de plus en plus nombreuses, cette délocalisation entraînant souvent la création d'emploi peu qualifié et mal rémunérés.

1.16

Le décollage économique des pays à économies émergentes et des pays du sud-est asiatique se mesure à l'aune de la multiplication des investissements étrangers directs (IED) dans ces zones et à l'intensification simultanée des échanges commerciaux entre l'UE et ces régions. Même si les chiffres montrent que l'Europe est parvenue à conserver une part importante de l'IED entrant, les flux globaux ont été réorientés et se dirigent de plus en plus vers l'Asie.

1.17

Les chiffres confirment donc le nouveau cap que prend actuellement le commerce extérieur de l'Union européenne, dès lors que même si les États-Unis restent de loin le principal partenaire commercial, l'on peut constater qu'ils ont tendance à perdre de leur importance par rapport à d'autres pays tels que la Chine (16).

1.18

Avant de poursuivre, il convient de tenter de définir les concepts de délocalisation et de désindustrialisation.

Délocalisation: phénomène correspondant à la cessation, partielle ou totale, d'une activité suivie de sa réouverture à l'étranger à travers un investissement direct. Dans l'Union européenne, on pourrait distinguer deux types de délocalisations:

a)

interne: transfert, total ou partiel, de l'activité vers d'autres États membres;

b)

externe: transfert, total ou partiel, de l'activité vers des pays qui ne sont pas membres de l'Union européenne.

Désindustrialisation: A propos de ce processus, il convient d'opérer une distinction entre:

a)

désindustrialisation absolue: entraînant baisse de l'emploi, de la production, de la rentabilité, du stock de capital de l'industrie ainsi que des exportations de biens industriels avec apparition de déficits commerciaux pour ceux-ci;

b)

désindustrialisation relative: baisse de la part de l'industrie dans l'économie, qui reflète un changement structurel dans la relation entre les résultats de l'industrie et le secteur des services (17).

Outre les délocalisations interne et externe, il nous faut également mentionner un phénomène qui a été mis en lumière par l'actualité récente dans quelques sites de production: la délocalisation inversée. Celle-ci se produit lorsque l'employeur pousse ses employés à accepter une détérioration de leurs conditions de travail sous peine de délocalisation. Ce phénomène est particulièrement pernicieux parce qu'il repose sur une mise en concurrence des travailleurs et en raison de l'effet «tâche d'huile» qu'il peut créer.

2.   Tenants et aboutissants

2.1

Pour tempérer les effets négatifs de la délocalisation, il faut bien évidemment adopter des mesures à caractère économique et social qui favorisent la création de richesse, de bien-être et d'emploi. En ce sens, il y a lieu d'accorder une attention particulière aux petites et moyennes entreprises en raison de leur importance en termes de contribution à l'emploi dans l'UE ainsi qu'aux entreprises d'économie sociale — petites, moyennes et grandes entreprises — en raison de leur tendance ininterrompue à créer de l'emploi et, qui plus est, vu leurs statuts, des emplois en principe plus difficiles à délocaliser. Dans ce contexte, le Comité soutient la Commission européenne et plus particulièrement sa proposition de décision visant à établir un programme cadre pour l'innovation et la compétitivité (PIC) (18), dans laquelle elle propose de créer trois sous-programmes destinés à fournir un cadre commun pour stimuler la productivité, la capacité d'innovation et la croissance durable. Le premier de ces sous-programmes, intitulé «Programme pour l'innovation et l'esprit d'entreprise», vise à soutenir, améliorer et encourager notamment l'accès au financement pour le lancement et le développement des petites et moyennes entreprises ainsi que l'innovation sectorielle, les clusters (systèmes productifs locaux) et les actions relatives à l'esprit d'entreprise et à la création d'un environnement favorable à la coopération des PME. Afin de stimuler la création de clusters au niveau régional, il est fondamental que les multinationales décident de ne pas délocaliser leurs activités, ce qui contribuerait au développement des PME dans leur zone d'influence.

2.2

Il faut également tenir compte des risques indirects en termes de salaires et de conditions de travail que peut comporter la délocalisation. Les partenaires sociaux devraient, à travers les processus de négociation collective et la création et l'utilisation optimisée des comités d'entreprise européens partout où ils sont de droit, minimiser ces risques et assurer l'avenir de l'entreprise et des conditions de travail de qualité.

2.3

L'UE-15 a toujours connu des disparités régionales en termes de revenus, d'emploi et de productivité, lesquelles reflètent des différences de niveau d'endettement, d'avantages fiscaux et d'attitude à l'égard de l'innovation. Après l'élargissement du 1er mai 2004, cette diversité régionale s'est considérablement accrue (19).

2.4

Au niveau régional, les conséquences de la délocalisation des entreprises peuvent être dramatiques, en particulier lorsque les régions se sont spécialisées dans un secteur particulier d'activités. C'est pourquoi une délocalisation en masse d'entreprises d'un secteur particulier peut avoir un impact fort et, entre autres, faire chuter le taux d'emploi, diminuer sensiblement la demande, réduire la croissance économique et accroître l'exclusion sociale. Afin d'éviter cela, la Commission européenne, dans son troisième rapport sur la cohésion (20), souligne l'importance de concentrer ses efforts sur la cohésion en tant que facteur d'accroissement de l'efficacité économique et de la compétitivité de l'économie européenne, ce qui suppose une mobilisation de toutes les ressources et de toutes les régions (21).

2.5

Il est essentiel de faire un effort en faveur de la qualification de la main-d'œuvre, de l'augmentation de l'investissement dans l'innovation et du développement d'incitations en vue de promouvoir l'esprit d'entreprise à l'intérieur de l'Union européenne.

2.6

Selon les données de l'Observatoire européen du changement (Dublin), certains secteurs se trouveront plus affectés que d'autres par la délocalisation (22). La position des entreprises face à la délocalisation dépend également de leur degré d'indépendance, en fonction de leur structure et de leur technologie. Les catégories les plus faibles seront celles des entreprises filiales de multinationales dont le siège est à l'étranger et celles des entreprises qui ne sont pas propriétaires de la technologie de leurs produits ou de leurs procédés.

2.7

Les résultats insuffisants de l'Europe en termes de recherche et d'innovation sont préoccupants, vu que les délocalisations ne semblent plus limitées aux secteurs nécessitant une main-d'œuvre importante. On observe de plus en plus de délocalisations dans des secteurs intermédiaires, voire dans certains secteurs de haute technologie, où des tendances existent à la délocalisation d'activités telles que la recherche et les services, la Chine et l'Inde étant les principaux bénéficiaires de ces développements/transferts.

2.8

De même, certaines entreprises relocalisent la production dans le pays d'origine parce que l'UE offre de bonnes conditions pour la production de biens et de services sophistiqués. Même si la délocalisation de la production vers les pays à bas salaires se poursuit, il convient d'œuvrer au maintien et à la création de conditions favorables à la production favorables à la production de biens et de services sophistiqués, afin d'attirer une production à haute valeur ajoutée.

2.9

Les États-Unis constituent la première économie mondiale et le principal partenaire commercial de l'UE. Durant les années quatre-vingt-dix, une série de mutations ont débouché sur l'émergence de la «nouvelle économie» dans différents pays, et plus particulièrement aux États-Unis. Le développement rapide des technologies de l'information et de la communication (TIC) ainsi que leur application au sein des entreprises ont entraîné dans ces pays une augmentation du taux de croissance du PIB et une forte baisse du taux de chômage. Ainsi, la révolution qui a touché le monde des télécommunications a donc eu des effets sur la société et l'économie dans son ensemble.

2.10

Même s'il est très important de favoriser la recherche afin de ralentir le processus des délocalisations, qui constitue déjà pour certaines régions d'Europe une question préoccupante, c'est l'application des résultats de la recherche qui est la question décisive. En effet, c'est la mise en œuvre des résultats de la recherche scientifique et technologique qui génère un véritable développement économique et une croissance tangible. En d'autres termes, le facteur clé n'est pas la technologie elle-même, mais l'usage qu'on en fait, c'est-à-dire l'innovation.

2.11

Il faut toutefois se rendre compte que l'innovation n'empêchera pas à elle seule la délocalisation d'activités industrielles traditionnelles qui sont transférées ailleurs parce qu'elles ne sont pas compétitives. En revanche, l'innovation contribue certainement à faciliter la substitution des activités délocalisées par des produits, des processus ou des services alternatifs dans les zones concernées.

2.12

Une économie fondée sur l'intégration du progrès technologique dans les procédés de production fournit une vaste gamme de nouveaux produits et procédés à valeur ajoutée élevée, tant en termes de production que de consommation. Dans ce contexte, les pays qui ont rejoint l'UE le 1er mai 2004 doivent être considérés comme une source d'opportunités. En effet, avec l'aide d'une politique industrielle adéquate, les entreprises européennes pourront concevoir une nouvelle stratégie à l'échelle continentale et tirer tout le parti possible des opportunités offertes par cet élargissement.

2.13

Une entreprise se délocalise lorsqu'elle déplace la totalité ou une partie de ses activités d'un lieu vers un autre. Tout comme les personnes, les entreprises abandonnent leur lieu d'origine dans un seul but: l'amélioration. Dans des zones économiques extrêmement développées dont les marchés sont partiellement saturés, le potentiel de croissance des économies nationales sur leur propre marché atteint progressivement ses limites naturelles. Par conséquent, des secteurs entiers de l'industrie doivent rechercher de futurs débouchés dans d'autres zones économiques. En outre, à l'heure de la globalisation, les entreprises se trouvent confrontées à une concurrence acharnée tant au niveau national qu'au niveau international. En ce sens, la compétitivité des entreprises ne dépend pas uniquement de la qualité de leurs produits ou services et de leurs fournisseurs, mais également des prix, des mouvements des devises et de la possibilité de pouvoir compter sur des marchés mondiaux ouverts et compétitifs dont les règles seraient respectées par tous.

2.14

Le choix du lieu d'implantation est une question stratégique pour les entreprises, qui les contraint à tenir compte de nombreux éléments de nature très variée. Les entreprises prennent leur décision en se basant, entre autres facteurs, sur un niveau d'instruction élevé et adapté aux besoins, une bonne qualité des services publics, des coûts modérés, la stabilité politique, l'existence d'institutions qui suscitent un minimum de confiance, la proximité de nouveaux marchés et de ressources productives et une fiscalité raisonnable. La position des entreprises face à la délocalisation dépend également des coûts des infrastructures et des coûts de transaction ainsi que de leur degré d'indépendance, en fonction de leur structure et de leur technologie et de l'efficacité de l'administration publique. Le coût de la main-d'œuvre n'est donc pas le seul facteur à intervenir dans les décisions pour ou contre une délocalisation, et doit par ailleurs être pondéré en fonction de la productivité, dans la mesure où le rapport productivité/coût est capital en matière de compétitivité.

2.15

Les coûts relatifs à l'activité dépendent fortement des conditions nationales ou régionales. Le pays d'accueil des investissements doit disposer d'un niveau minimum en termes d'infrastructures, de niveau d'éducation au sein de la population et de sécurité. La prise de risque par les entreprises se fonde sur le modèle suivant: d'abord la stabilité, ensuite la confiance et puis l'investissement. Les événements générateurs d'instabilité ou pour le moins d'incertitude quant à l'avenir pour les investisseurs jouent un rôle indiscutable. Les responsables politiques doivent être pleinement conscients de l'importance d'attirer des investissements qui créent de l'emploi de qualité, facilitent le développement technologique et renforcent la croissance économique. Par ailleurs, l'on devrait, dans le cadre des décisions relatives à l'aide au développement, tenir davantage compte de l'amélioration des droits civils et sociaux dans les pays destinataires de celle-ci. Les entreprises doivent contribuer à cet objectif en appliquant les principes de la responsabilité sociale (23).

2.16

Les partenaires sociaux ont une responsabilité particulière dans la création de règles stables sur le marché du travail. Les conventions collectives permettent de garantir des conditions de concurrence égales pour toutes les entreprises, ce qui conduit à une croissance élevée et offre une sécurité et des possibilités de développement tant aux salariés qu'aux entreprises.

2.17

D'autres éléments jouent également un rôle prépondérant. D'une part, la nature et la portée des produits et des services nécessitent dans de nombreux cas que les biens soient produits et les services fournis dans les marchés cibles ou près de ceux-ci. D'autre part, il est souvent nécessaire pour les entreprises, en particulier les entreprises de fourniture, de suivre leurs clients là où ceux-ci décident de s'implanter. Enfin, dans de nombreux cas, il n'est pas possible de conquérir de nouveaux marchés sans que les produits et services fournis par les entreprises concernées n'incluent un certain degré de valeur ajoutée d'origine locale.

2.18

Enfin, il ne faut pas oublier que dans la mesure où les consommateurs attachent une grande importance aux prix, et où la demande des consommateurs influence également l'offre, les distributeurs sont l'objet d'une pression considérable pour que les prix soient baissés. Déterminés à offrir des prix bas au consommateur, les grands distributeurs exercent une pression sur leurs fournisseurs pour que ceux-ci baissent les prix. Dans un tel contexte, il est normal que les fournisseurs, surtout les plus petits, ne disposent pas des ressources financières nécessaires pour satisfaire les exigences de la grande distribution (24).

2.19

Compte tenu des différentiels existant entre, d'une part, les économies des États membres de UE et, d'autre part, entre celle de l'UE dans son ensemble et celles des pays asiatiques certains facteurs favorisent la délocalisation d'entreprises:

approvisionnements moins chers;

avantages fiscaux;

accès à de nouveaux marchés;

technologie;

coût de la main-d'œuvre moins élevé.

2.20

Les déplacements d'entreprises, surtout en dehors de l'UE, pourraient entraîner plusieurs difficultés telles que:

Perte de compétitivité: les entreprises qui resteront dans l'UE seraient contraintes de faire face à des coûts plus élevés que leurs concurrents. Cela se traduira probablement par une perte de part de marché dans le commerce mondial et par conséquent, deviendra un facteur très négatif pour la réalisation des objectifs de Lisbonne (croissance économique durable avec des emplois plus nombreux et de meilleure qualité ainsi qu'une cohésion sociale accrue, sans oublier le respect de l'environnement.

Moindre génération de savoir-faire: Les entreprises européennes, forcées de faire concurrence à d'autres dont les coûts sont moins élevés, pourraient éventuellement être contraintes d'investir de moins en moins dans la recherche; Cela déboucherait sur une perte de capacité d'innovation, un facteur pourtant fondamental pour garder sa place sur le marché actuel;

Pertes d'emplois et détérioration des perspectives sur le marché de l'emploi pour une partie sans cesse grandissante des actifs dans les régions et secteurs concernés: cela accroîtra l'exclusion sociale, et l'État devra consacrer davantage de ressources aux dépenses accrues de prestations sociales qui en découleront; les catégories de travailleurs les plus pénalisées seront celles des entreprises filiales de multinationales où le siège est à l'étranger et celles des entreprises qui ne sont pas propriétaires de la technologie de leurs produits ou de leurs procédés.

Croissance ralentie de l'économie: provoquée, en partie, par la contraction de la demande intérieure, conséquence de l'impact sur la population de la modération salariale, de la perte d'emplois et de la dégradation des opportunités sur le marché du travail.

3.   Conclusions

3.1

En réponse aux préoccupations exprimées par le Conseil européen (25) et consciente de l'inquiétude que suscite le risque de désindustrialisation et la façon dont nous pouvons anticiper et affronter les mutations structurelles que subit l'industrie européenne, la Commission européenne a adopté, le 20 avril 2004, la communication intitulée «Accompagner les mutations structurelles: Une politique industrielle pour une Europe élargie  (26) » dans laquelle elle ébauche les grandes lignes d'une politique industrielle pour une Union européenne élargie. Le Comité traite spécifiquement de cette communication dans un avis distinct dans lequel il accueille avec satisfaction (27) l'initiative mentionnée de la Commission.

3.2

Dans ce document, la Commission européenne signale que, malgré l'augmentation de la production dans la majorité des secteurs et l'absence de preuves d'un processus généralisé de désindustrialisation, l'Europe passe par une phase de restructuration qui implique un transfert des ressources et des emplois vers des activités à fort contenu en connaissance. À cet égard, la Commission signale que tous les États membres ont vu baisser le nombre d'emplois dans le secteur industriel entre 1955 et 1998.

3.3

Par ailleurs, la Commission signale que l'élargissement offre aux industries de multiples possibilités et, dans certains cas, peut contribuer à maintenir au sein de l'UE une production qui aurait été délocalisée en Asie. Afin d'anticiper les changements et de garantir la poursuite des politiques nécessaires pour y faire face, la Commission demande que soient prises en considération, dans le cadre des nouvelles perspectives financières jusqu'en 2013, les actions suivantes:

i

L'amélioration de l'environnement réglementaire des entreprises au niveau national et communautaire, ce qui ne signifie pas nécessairement une diminution du nombre de réglementations, mais plutôt des réglementations claires appliquées de manière uniforme dans l'ensemble de l'UE.

ii

Une mobilisation accrue au niveau politique de l'ensemble de l'UE afin d'encourager la compétitivité, en particulier dans des domaines tels que la recherche, la formation, les règles de concurrence et les aides régionales.

iii

La prise de décisions dans des secteurs précis afin d'élaborer des réponses politiques qui satisfassent les besoins spécifiques, montent dans la chaîne de valeur, anticipent les mutations structurelles et les accompagnent.

3.4

Il ne fait aucun doute que l'industrie joue un rôle prépondérant dans l'économie. Dès lors, un secteur industriel en bonne santé et dynamique peut relancer l'économie dans son ensemble, tandis qu'une industrie peu compétitive et une production industrielle stagnante peuvent être à l'origine d'une anémie généralisée de l'activité économique. Celle-ci juge en effet fondamental de mettre en œuvre une politique industrielle (28) favorable à la création et à la croissance d'entreprises qui, au sein de l'Union, investissent massivement dans l'innovation et le développement plutôt que de renforcer leur compétitivité en baissant leurs coûts. Ce n'est qu'en tirant parti des avantages qu'offre l'Europe (qualité des infrastructures de la société de l'information, investissement considérable dans la recherche et les nouvelles technologies et mise en œuvre appropriée des applications dans le monde des entreprises, amélioration de l'éducation et de la formation continue des travailleurs et dialogue social) et de tous les avantages liés au Marché intérieur que l'on parviendra à maintenir et à renforcer la compétitivité de l'industrie européenne. Il sera de la sorte possible de soutenir la croissance économique, le plein-emploi et le développement durable.

3.5

Pour accroître et soutenir la compétitivité des entreprises de l'UE, le Comité appelle au renforcement de la protection des droits de propriété intellectuelle et à leur application dans les pays tiers.

3.6

Il est nécessaire de promouvoir un modèle de production tenant compte de facteurs autres que le prix des biens produits. Il y a lieu de souligner que la compétitivité ne se mesure pas uniquement en termes de coûts ou d'avantages fiscaux mais également en termes de capital humain, dans la mesure où les personnes apportent une contribution fondamentale à la capacité compétitive des entreprises. Les activités de recherche et de développement des nouvelles technologies permettant de réduire les coûts de production et d'améliorer la capacité de production s'avèrent certes fondamentales, mais il ne faut toutefois pas oublier que la véritable valeur ajoutée de ces progrès réside précisément dans leur application. Par conséquent, il est primordial d'une part de disposer des connaissances nécessaires pour une mise en œuvre appropriée des processus afin de développer le vaste potentiel d'amélioration qu'ils offrent, et d'autre part d'encourager les entreprises à rechercher de nouvelles applications pour les technologies existantes, c'est-à-dire de renforcer l'esprit d'innovation. Il est évident que tant les chefs d'entreprise que les travailleurs ont un rôle capital à jouer à ce niveau. Par conséquent, il ne s'agit pas d'autre chose que d'encourager les entreprises européennes à considérer le capital humain comme le fondement principal de leur valeur ajoutée et de leurs avantages compétitifs. Il importe par conséquent de prendre à la fois des mesures de formation continue des travailleurs et de relance des investissements dans l'innovation et la recherche, autre aspect pour lequel les partenaires sociaux européens ont un rôle majeur à jouer à travers leur programme de travail commun (29).

3.7

Toutefois, certaines mesures ne sont pertinentes que dans le cas de délocalisation à l'intérieur de l'UE.

3.7.1

L'élargissement de l'Union et l'extension du marché intérieur qui en résultera interdisent d'envisager toute restriction en matière de délocalisation d'entreprises d'Europe occidentale vers l'Europe centrale et orientale. Cela étant, il y a lieu de réfléchir à l'introduction dans les critères d'éligibilité de l'Union européenne de mécanismes garantissant que seules peuvent bénéficier d'un soutien les entreprises qui lancent une nouvelle activité ou un nouveau créneau commercial et non celles qui se limitent à déplacer des productions ou des services existants au sein de l'Union. Il convient dès lors d'encourager toute tentative susceptible de combler le plus rapidement possible l'énorme fossé existant entre l'Est et l'Ouest en ce qui concerne les conditions de production en général et les coûts de production en particulier.

3.7.2

La conclusion la plus importante à tirer est qu'il doit y avoir un processus continu d'amélioration de la compétitivité en Europe. Ce processus, qui est en accord avec la stratégie de Lisbonne, doit être conduit par les entreprises (développement de produits meilleurs, création de modèles d'entrepreunariat novateurs, processus de production plus efficaces, etc.) et facilité par une législation plus adaptée au niveau européen et national.

3.7.3

Il conviendrait de renforcer les aides à l'investissement dans le capital humain et les autres infrastructures. L'Union européenne a besoin d'une base industrielle forte, innovante et à la pointe de la technologie. Pour atteindre cet objectif, il est nécessaire de connaître de manière approfondie la situation actuelle dans tous les secteurs économiques, tant au niveau régional que national, de façon à tirer un profit maximum des avantages spécifiques offerts au niveau local.

3.7.3.1

Si l'on veut contribuer au maintien des entreprises sur les lieux d'implantation d'origine, les mesures d'incitation régionales doivent augmenter en matière de formation. Il faudrait également promouvoir d'autres initiatives comme les échanges avec les universités dans le domaine de la recherche ou de la participation des autorités locales au développement de clusters régionaux destinés au soutien des entreprises (30).

3.7.3.2

Le Comité soutient la proposition de la Commission de faire passer de 5 à 7 ans la période durant laquelle une entreprise ayant bénéficié d'aides financières doit maintenir l'investissement pour lequel les aides ont été sollicitées (31). Cela favoriserait l'enracinement des entreprises qui par ailleurs, se verraient dans l'obligation de restituer l'ensemble des aides perçues au cas où elles ne rempliraient pas cette condition.

3.7.4

Compte tenu de l'importance et de l'intérêt de cette question, Le Comité suivra de près l'évolution des délocalisations en Europe (32).

4.   Recommandations

4.1

Comme le signale la Commission européenne dans sa Communication sur les lignes directrices intégrées pour la croissance et l'emploi (2006-2008) (33), l'UE d'une part doit saisir les occasions que lui offre l'ouverture de marchés en forte croissance, notamment en Chine et en Inde, et d'autre part, elle dispose d'un potentiel important pour renforcer ses avantages concurrentiels, et il est essentiel qu'elle agisse avec détermination pour l'exploiter.

4.2

Le Comité estime que pour stimuler le potentiel de croissance et être à même d'affronter les futurs défis, il est crucial de construire une société de la connaissance, fondée sur des politiques en matière de ressources humaines, d'éducation, de recherche et d'innovation. Par ailleurs, le Comité considère que la croissance durable exige également une dynamique démographique accrue, une meilleure intégration sociale et la pleine exploitation du potentiel que représente la jeunesse européenne, comme l'a reconnu le Conseil européen des 22 et 23 mars 2005 en adoptant le Pacte européen pour la jeunesse.

4.3

Le Comité juge nécessaire le renforcement de la convergence et des synergies entre les différentes politiques, actions et objectifs internes de l'UE. Cela exige notamment une coordination efficace au sein de la Commission, qui doit également approfondir le dialogue qu'elle mène avec le Parlement européen et le Conseil.

4.4

Le Comité recommande à la Commission d'adopter une approche non seulement horizontale mais également sectorielle pour la politique industrielle de l'UE, dans la mesure où les recommandations des Groupes de haut niveau pour les secteurs pharmaceutique, du textile et de l'habillement, de la construction navale et de la production automobile ont déjà montré que chacun de ces secteurs rencontre des problèmes spécifiques qui nécessitent une solution particulière et une approche individuelle et qui ne peuvent donc être réglés par une approche horizontale.

4.5

Pour éviter dans la mesure du possible les effets négatifs du phénomène des délocalisations en Europe, il convient de souligner notamment les aspects suivants:

4.5.1

Éducation, formation et qualifications. Le capital humain revêt déjà une très grande importance pour la compétitivité industrielle, et cette importance ira probablement en augmentant (ce dont témoigne le fait que le manque de main-d'œuvre qualifiée représente la principale limitation au développement des PME). Ces prochaines années, il deviendra manifeste que la disponibilité de main-d'œuvre qualifiée constitue un facteur critique pour la compétitivité internationale à long terme de l'industrie européenne, et dès lors, on attribuera une grande valeur à la formation et à l'immigration dans le cadre de la législation et de la politique commune de l'Union. La politique industrielle européenne doit placer l'éducation, la formation et les qualifications au centre de sa stratégie, en prêtant une attention particulière à la formation continue des travailleurs.

Le capital humain et le savoir-faire sont des avantages compétitifs

4.5.2

Recherche et innovation. Il s'agit de facteurs clés de la compétitivité de l'industrie européenne. L'Europe s'emploie à parvenir à l'objectif consistant à consacrer 3 % de son PIB à la recherche et redouble ses efforts pour développer la recherche publique et privée. Dans ce contexte, la création d'un espace européen de recherche est capitale pour doter l'UE des bases nécessaires pour le progrès scientifique et technologique.

Par ailleurs, il est important que la recherche se traduise en avancées en termes d'innovation industrielle et que les investissements privés en faveur des biens d'équipement permettant concrètement le progrès technologique soient multipliés.

L'innovation scientifique et technologique sont d'importants facteurs de différenciation

4.5.3

Politique de concurrence. Même si les interactions entre la politique industrielle et la politique de concurrence sont de plus en plus nombreuses, elles n'en restent pas moins par trop isolées. Il est nécessaire de les mettre en plus étroite relation. L'application judicieuse des règles de concurrence, en lien direct avec les objectifs de la politique industrielle, contribuera grandement à la croissance et à l'emploi à long terme.

Il faut accroître le contrôle des marchés et que les nouvelles directives ainsi que les modifications apportées aux directives existantes prévoient des conditions de nature à garantir leur application uniforme dans les états membres.

Il est nécessaire d'établir un lien étroit entre politique de concurrence et politique industrielle

4.5.4

Sensibilisation. Étant donné le rôle joué par le mode de consommation actuel dont le prix est un élément crucial, il conviendrait de sensibiliser les consommateurs sur les répercussions de ce comportement. Les entreprises peuvent contribuer à la prise de conscience collective à travers les labels sociaux, de qualité, etc. (34) On pourrait également imaginer qu'elles renseignent de manière plus précise les consommateurs sur l'origine de leurs produits.

Il conviendrait de sensibiliser les consommateurs sur les répercussions de ce comportement

4.5.5

Secteurs clés. Il faut se doter d'une politique industrielle plus active, en particulier d'un point de vue sectoriel, et contribuant à la collaboration entre acteurs publics et privés. Dans ce sens, le Comité estime qu'il faudrait tenir compte notamment des analyses quantitatives et qualitatives menées par l'Observatoire européen du changement (Dublin) afin de consolider les bases du débat public sur les délocalisations.

Il est primordial d'accroître la coopération public/privé dans les secteurs clés pour accélérer le développement.

4.5.6

Réponses aux chocs imprévus. Pour tous les secteurs et conformément à la communication sur les restructurations et l'emploi (35), il convient de se doter d'«instruments financiers communautaires révisés pour une meilleure anticipation et gestion des restructurations», dont les budgets correspondants seraient adaptés en conséquence en prenant en considération l'impact social. Aussi, il est souhaitable que les pouvoirs publics interviennent «en cas de choc imprévus ou dont l'impact régional ou sectoriel serait fort». C'est pourquoi le CESE soutient la constitution d'une «réserve pour imprévus» au sein des Fonds structurels.

L'Union doit se doter d'instruments financiers suffisamment souples pour faire face à des chocs imprévus

4.5.7

Infrastructures. Il s'avère nécessaire d'améliorer les réseaux de transport, de télécommunications et d'énergie, tant aux niveaux national et intracommunautaire qu'avec les pays voisins,. Les infrastructures constituent un élément central de la compétitivité, c'est pourquoi il y a lieu de les mettre à la disposition des entreprises à des coûts compétitifs. Le bon fonctionnement des services publics est attractif et nécessaire au développement des entreprises, particulièrement des PME.

Faciliter les activités des entreprises, par l'investissement en infrastructures, les encourage à rester en Europe.

4.5.8

Stimuler l'esprit d'entreprise et faciliter les activités des entreprises. Pour garantir l'avenir de l'industrie européenne, il est primordial de garantir un environnement favorable à la création et au développement de l'activité des entreprises, en accordant une attention particulière aux petites et moyennes entreprises. Il convient d'améliorer l'accès au financement dans les phases initiales et intermédiaires de la trajectoire des entreprises et d'alléger, dans la mesure du possible, les procédures établies pour la création et la gestion des entreprises. De même, il convient d'œuvrer afin de changer les mentalités et d'encourager la prise de risque inhérente à l'entreprise.

Par ailleurs, il importe de prendre en considération la contribution des travailleurs à la réalisation des objectifs de l'entreprise.

Il est impératif de promouvoir la création d'entreprises pour garantir la croissance.

4.5.9

Politiques sociales. Le meilleur moyen d'affronter les préoccupations légitimes concernant les répercussions négatives de la délocalisation des entreprises consiste à concevoir et à appliquer avec discernement des politiques sociales prônant une attitude positive face au changement, permettant aux travailleurs d'adapter et d'améliorer leurs compétences et favorisant la création d'emplois.

Il est impératif de concevoir et d'appliquer des politiques sociales permettant de minimiser les éventuels effets négatifs de la délocalisation des entreprises.

4.5.10

Dialogue social. A l'échelle des entreprises, des secteurs d'activité et au niveau interprofessionnel, la politique industrielle européenne doit être définie et mise en oeuvre avec la contribution des partenaires sociaux, dont les connaissances en tant que premiers acteurs concernés sont fondamentales. Cela requiert que les entreprises fassent clairement connaître leurs intentions suffisamment tôt pour permettre aux autres acteurs concernés d'agir de façon adéquate.

Les partenaires sociaux européens devraient aborder cette question dans le cadre des restructurations et dans le contexte du nouvel agenda de dialogue social européen, également au niveau sectoriel. Dans le cadre du dialogue social, les conventions collectives sont un facteur important pour créer des conditions de concurrence équitables pour les entreprises.

Garantir un équilibre constructif et créateur entre les intérêts des acteurs concernés est un exercice permanent et continu

4.5.11

Compétitivité et règles du jeu international. Bien que les délocalisations soient un phénomène lié aux changements structurels, il est inacceptable que les changements soient motivés, même partiellement, par une politique de l'UE trop souple dans la négociation et l'interprétation ultérieure des règles internationales essentielles. Il convient de prendre en considération la dimension sociale de la mondialisation et de créer une interaction constructive entre les politiques de l'UE afin d'encourager la coopération entre l'OMC et l'OIT. En conséquence, l'UE doit agir au sein de ces organismes internationaux dans l'objectif de voir respecter ces normes et, à défaut, de faire appliquer les mécanismes existants avec la plus grande efficacité.

Il est nécessaire de se doter de marchés globaux ouverts et compétitifs dont les normes seraient respectées par tous.

4.6

L'objectif doit être d'encourager de nouveaux investissements en Europe, d'y maintenir les investissements actuels et de poursuivre les investissements européens actuels à l'étranger.

Bruxelles, le 14 juillet 2005.

La Présidente

du Comité économique et social européen

Anne-Marie SIGMUND


(1)  Le numéro spécial publié en septembre 2004 (no 2.859) du magazine français «Problèmes économiques», est consacré aux délocalisations. On y trouve un article dans lequel il est affirmé que le terme «globalisation» est un anglicisme utilisé pour décrire le phénomène de «mondialisation». Il s'agit du passage d'une économie internationale, où les nations autonomes du point de vue politique organisent leur espace économique national et participent à des échanges économiques plus ou moins importants, à une économie globale qui dépasse les réglementations nationales.

(2)  L'on entend par «propriété institutionnelle» celle qui est liée aux investissements réalisés par des instances disposant d'un volume important de ressources propres ou de réserves. Les investissements réalisés par des fonds d'investissements, des banques, des compagnies d'assurances ou des fonds de pension en sont un exemple.

(3)  Voir avis du CESE du 19 mars 1997 intitulé «L'emploi, la compétitivité et la mondialisation de l'économie»; JO C 158 du 26.5.1997.

(4)  COM(2002) 714 final. Voir avis du CESE du 17 juillet 2003 sur ce thème (rapporteur: M. SIMPSON; JO C 234 du 30.9.2003.

(5)  Voir le septième de ces rapports publié en 2003 (SEC(2003) 1299).

(6)  Voir avis du CESE cité dans la note en bas de page no2.

(7)  John M. IVANCEVICH, «Management: Quality and Competitiveness» (1996).

(8)  Voir avis du CESE, du 12 décembre 2002, sur l'élargissement; JO C 85 du 8.4.2003 (rapporteuse: Mme BELABED) (Groupe II – Autriche).

(9)  On entend par PECO les 10 pays suivants d'Europe centrale et orientale: République tchèque, Estonie, Hongrie, Lettonie, Lituanie, Pologne, Slovaquie et Slovénie, ainsi que Bulgarie et Roumanie.

(10)  Le PIB est passé de 63,3 % de la moyenne communautaire (UE15) en 1970 à 123,4 % de la moyenne communautaire en 2004. Source: Annexe statistique de l'économie européenne – Printemps 2005 (ECFIN/REP/50886/2005).

(11)  Le PIB est passé de 71,9 % de la moyenne communautaire en 1986 à 89,7 % de la moyenne communautaire en 2004. Source: Annexe statistique de l'économie européenne – Printemps 2005 (ECFIN/REP/50886/2005).

(12)  Le PIB est passé de 55,8 % de la moyenne communautaire en 1986 à 67,4 % de la moyenne communautaire en 2004. Source: Annexe statistique de l'économie européenne – Printemps 2005 (ECFIN/REP/50886/2005).

(13)  Brunei DARUSSALAM, Birmanie/Myanmar, Cambodge, Indonésie, Laos, Philippines, Singapour, Thaïlande, Vietnam, Timor oriental (source: Commission européenne).

(14)  L'on entend par «économie émergente» toute économie avec un revenu par habitant moyen ou faible, qui se caractérise par le fait qu'elle connaît un processus de transition d'une économie fermée vers une économie de marché, ce qui implique de mener à bien une série de réformes structurelles à caractère économique, et par le fait qu'elle reçoit beaucoup d'investissements étrangers (Antoine W. AGTMAEL; Banque mondiale, 1981) exemples d'économies émergentes: Chine, Inde, Brésil et Mexique

(15)  COM (2005) 120 final.

(16)  S'agissant du commerce extérieur de l'UE, les données publiés par Eurostat le 22 février 2005, correspondant à la période janvier novembre 2004, indiquent, pour la période étudiée, une augmentation notable des importations provenant de Chine (21 %), de Russie, de Turquie et de Corée du sud (18 % pour chacun de ces pays) tandis que la seule diminution constatée concerne les importations des États Unis (-14 %). Pour ce qui est des exportations de l'UE, les augmentations constatées concernent celles à destination de la Turquie (30 %), de la Russie (22 %), de la Chine (17 %) et de Taïwan (16 %). Ainsi, l'on peut voir comment, au cours de la période étudiée, le commerce de l'UE à 25 s'est caractérisé par une augmentation du déficit commercial avec la Chine, la Russie et la Norvège et de l'excédent avec les États Unis, la Suisse et la Turquie.

(17)  À cet égard, v. l'étude «L'importance d'une industrie compétitive pour le développement du secteur des services», Brême, décembre 2003.

Les messages clés de cette étude sont les suivants:

une baisse de la part du secteur manufacturier dans le PIB ne signifie pas une baisse de son importance;

les liens entre le secteur manufacturier et celui des services s'intensifient;

les services liés aux entreprises, qui connaissent une croissance dynamique, dépendent fortement de la demande du secteur industriel;

l'industrie est un fournisseur essentiel de technologies liées aux innovations en matière de produits et processus dans le secteur des services.

(18)  COM(2005) 121 final du 6 avril 2005, «Proposition de décision du Parlement européen et du Conseil établissant un programme-cadre pour l'innovation et la compétitivité (2007/2013)».

(19)  Selon les données d'Eurostat du 7 avril 2005, le PIB par habitant de l'Union européenne (UE-25) se situait en 2002 entre 32 % de la moyenne de l'UE-25 (région de Lubelskie, Pologne) et 31,5 % (région du centre de Londres, Royaume-Uni). Des 37 régions dont le PIB par habitant était supérieur à 125 % de la moyenne européenne, 7 se trouvaient au Royaume-Uni et en Italie, 6 en Allemagne, 4 au Pays Bas, 3 en Autriche, 2 en Belgique et en Finlande et enfin, 1 en République tchèque, en Espagne, en France, en Irlande, en Suède et au Luxembourg. Parmi les nouveaux États membres, la seule région dont le PIB par habitant dépassait 125 % de la moyenne communautaire était Prague en République tchèque (153 %). Par ailleurs, des 64 régions dont le PIB par habitant était inférieur à 75 % de la moyenne communautaire, 16 se trouvaient en Pologne, 7 en République tchèque, 6 en Hongrie et en Allemagne, 5 en Grèce, 4 en France, en Italie et au Portugal, 3 en Slovaquie et en Espagne, et en fin, 1 en Belgique, au Royaume-Uni, en Estonie, en Lettonie, en Lituanie et à Malte.

(20)  COM(2004) 107, 18 février 2004. V. avis CESE y afférent (ECO/129).

(21)  Le Comité vient d'élaborer un avis d'initiative sur le thème «Mutations industrielles et cohésion économique, sociale et territoriale»; JO C 302 du 7.12.2004, rapporteur: M. LEIRIÃO (GROUPE III-ORTUGAL), corapporteur: M. CUÉ (catégorie 2 de la CCMI-Belgique.

(22)  Selon l'Observatoire européen du changement (www.emcc.eurofound.eu.int), les secteurs les plus touchés par les délocalisations depuis 2000 sont ceux de la métallurgie, des télécommunications, de l'automobile, de l'électricité, du textile, de l'alimentation et de l'industrie chimique.

(23)  Le Comité économique et social européen, dans son avis sur «la responsabilité sociale des entreprises» (Livre vert) reconnaît que «le volontariat est un principe essentiel de la responsabilité sociale des entreprises»; JO C 125 du 27.5.2002. Rapporteuse: Mme HORNUNG-DRAUS (Groupe I - Allemagne). Corraporteuse: Mme ENGELEN-KEFER (Groupe II – Allemagne) et Mme HOFFELT (Groupe III – Belgique).

(24)  Voir avis «La grande distribution – tendances et conséquences pour les agriculteurs et les consommateurs», rapporteur: M. ALLEN (groupe III – Irlande).

(25)  Conseil européen tenu en octobre 2003 sous la présidence italienne.

(26)  COM(2004) 274 final, 20 avril 2004.

(27)  JO C 157 du 28.6.2005 (rapporteur: M. VAN IERSEL (Groupe I Pays-Bas), corapporteur: M. LEGELIUS (Catégorie I de la CCMI Suède).

(28)  La nécessité d'une politique industrielle active a été reconnue par le Conseil européen lors du sommet de printemps 2005, tenu à Bruxelles, les 22 et 23 mars 2005.

(29)  Voir la Déclaration commune portant sur la révision à mi-parcours de la stratégie de Lisbonne, présentée lors du Sommet social tripartie du 22 mars 2005.

(30)  Le programme-cadre pour l'innovation et la compétitivité [COM(2005) 121 final du 6 avril 2005], mentionné ci-dessus (paragraphe 2.1), prévoit des actions dans ce sens.

(31)  Voir les propositions de la Commission européenne pour les Fonds structurels.

(32)  À cet effet, il faudrait notamment tenir compte des analyses quantitatives et qualitatives effectuées par l'Observatoire européen du changement (Dublin).

(33)  COM(2005) 141 final du 12 avril 2005.

(34)  Voir avis du CESE Instruments de mesure et d'information sur la responsabilité sociale des entreprises dans une économie globalisée; rapporteuse: Mme PICHENOT) adopté le 8 juin 2005.

(35)  COM(2005) 120 final.


25.11.2005   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 294/54


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de directive du Conseil modifiant, en ce qui concerne la durée d'application du minimum du taux normal, la directive 77/388/CEE relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée»

[COM(2005) 136 final — 2005/0051 (CNS)]

(2005/C 294/10)

Le 27 avril 2005, le Conseil a, conformément à l'article 262 du traité instituant la Communauté européenne, décidé de consulter le Comité économique et social européen sur la proposition susmentionnée.

La section spécialisée «Union économique et monétaire, cohésion économique et sociale», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 22 juin 2005 (rapporteur: M. BURANI).

Lors de sa 419ème session plénière des 13 et 14 juillet 2005 (séance du 14 juillet 2005), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 91 voix pour, aucune voix contre et 2 abstentions.

1.   Introduction

1.1

L'article 12, paragraphe 3, point a), 2ème alinéa, de la directive 77/388/CEE prévoit que, sur proposition de la Commission, après consultation du Parlement européen et du Conseil économique et social, le Conseil statue, à l'unanimité, sur le niveau du taux normal de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA). En janvier 1993, la Commission a présenté des propositions visant à mettre en place un régime d'harmonisation fiscale définitif que le Conseil n'a toutefois pas été en mesure d'adopter, l'unanimité requise n'ayant pas été atteinte.

1.2

En revanche, un accord a été adopté sur un rapprochement des taux, avec la directive 92/77/CEE qui a instauré un taux minimum de 15 %. La date d'échéance de cette décision, initialement fixée au 31 décembre 1996, a été prorogée à trois reprises, le dernier délai proposé étant le 31 décembre 2005.

2.   La proposition de la Commission

2.1

La directive en vigueur arrivant à échéance prochainement, la Commission a présenté une proposition qui la proroge jusqu'au 31 décembre 2010. Les dispositions en vigueur restent toutefois d'application: le taux normal ne peut être inférieur à 15 % et la base d'imposition est la même pour les livraisons de biens et les prestations de services.

3.   Observations du Comité

3.1

Compte tenu des politiques fiscales menées actuellement par les États membres, plus particulièrement en ce qui concerne la TVA, le Comité ne peut que se féliciter de l'initiative de la Commission, qui s'imposait sur le plan pratique.

3.2

Le Comité saisit l'occasion qui lui est offerte pour formuler quelques observations supplémentaires, dont il espère qu'elles retiendront l'attention des États membres.

3.3

L'absence de volonté commune des États membres en matière fiscale, et plus particulièrement en ce qui concerne la TVA, est loin d'être un fait nouveau: cette situation dure depuis la création de l'Union européenne, et les élargissements qui se sont succédé depuis les six États fondateurs jusqu'aux vingt-cinq membres actuels n'ont fait qu'accentuer le désaccord. Au cours de ces années, il n'a même pas été possible d'accepter les propositions de la Commission qui prévoyaient au moins une fourchette entre le taux maximum et le taux minimum, comprise entre 15 et 25 % (même si cette fourchette existe dans la pratique). Il n'a pas non plus été possible de parvenir à un accord sur l'application uniforme du principe de paiement de la TVA dans le pays d'origine et l'on n'a jamais examiné sérieusement la question de la suppression des nombreuses exemptions et dérogations accordées à tous les pays, pour des raisons chaque fois différentes et assorties de délais qui, même s'ils sont définis, ne sont pratiquement jamais respectés.

3.4

Dans le contexte ainsi tracé, parler d'un «régime provisoire» de la TVA pour désigner un système en place depuis des décennies dans l'attente d'un «régime définitif» on ne peut plus problématique constitue une mystification que le CESE n'est plus disposé à accepter. En vertu de la transparence à l'égard du citoyen évoquée et invoquée à maintes reprises, le Conseil devrait déclarer qu'il continuera de poursuivre l'objectif stratégique de l'harmonisation fiscale en matière de TVA, étant entendu qu'il n'est toutefois pas réaliste de croire que cet objectif pourra être atteint à court ou à moyen terme. L'on évitera ainsi de gaspiller de l'énergie et des ressources en tentant vainement d'obtenir l'unanimité sur des orientations qui revêtent une importance fondamentale pour la politique fiscale et sociale des différents États membres, et que chacun d'eux entend dès lors maintenir sans faire de concessions.

Bruxelles, le 14 juillet 2005.

La Présidente

du Comité économique et social européen

Anne-Marie SIGMUND