ORDONNANCE DE LA COUR (chambre d’admission des pourvois)

20 octobre 2022 (*)

« Pourvoi – Marque de l’Union européenne – Admission des pourvois – Article 170 ter du règlement de procédure de la Cour – Demande ne démontrant pas l’importance d’une question pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union – Non-admission du pourvoi »

Dans l’affaire C‑446/22 P,

ayant pour objet un pourvoi au titre de l’article 56 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, introduit le 5 juillet 2022,

Fidelity National Information Services, Inc., établie à Jacksonville, Florida (États-Unis), représentée par Me P. Wilhelm, avocat,

partie requérante,

l’autre partie à la procédure étant :

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO),

partie défenderesse en première instance,

LA COUR (chambre d’admission des pourvois)

composée de M. L. Bay Larsen, vice‑président de la Cour, MM. N. Jääskinen et M. Safjan (rapporteur), juges,

greffier : M. A. Calot Escobar,

vu la proposition du juge rapporteur et l’avocat général, M.  P. Pikamäe, entendu,

rend la présente

Ordonnance

1        Par son pourvoi, Fidelity National Information Services, Inc., demande l’annulation de l’arrêt du Tribunal de l’Union européenne du 4 mai 2022, Fidelity National Information Services/EUIPO – IFIS (FIS) (T‑237/21, non publié, ci-après, l’« arrêt attaqué », EU:T:2022:267), par lequel celui-ci a rejeté son recours tendant à l’annulation de la décision de la première chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), du 26 février 2021 (affaire R 1460/2020-1), relative à une procédure d’opposition entre Banca IFIS et Fidelity National Information Services.

 Sur la demande d’admission du pourvoi

2        En vertu de l’article 58 bis, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, l’examen des pourvois formés contre les décisions du Tribunal portant sur une décision d’une chambre de recours indépendante de l’EUIPO est subordonnée à leur admission préalable par la Cour.

3        Conformément à l’article 58 bis, troisième alinéa, de ce statut, le pourvoi est admis, en tout ou en partie, selon les modalités précisées dans le règlement de procédure de la Cour, lorsqu’il soulève une question importante pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union.

4        Aux termes de l’article 170 bis, paragraphe 1, du règlement de procédure, dans les situations visées à l’article 58 bis, premier alinéa, dudit statut, la partie requérante annexe à sa requête une demande d’admission du pourvoi dans laquelle elle expose la question importante que soulève le pourvoi pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union et qui contient tous les éléments nécessaires pour permettre à la Cour de statuer sur cette demande.

5        Conformément à l’article 170 ter, paragraphes 1 et 3, dudit règlement, la Cour statue sur la demande d’admission du pourvoi dans les meilleurs délais par voie d’ordonnance motivée.

6        À l’appui de sa demande d’admission du pourvoi, la requérante fait valoir que son pourvoi soulève des questions importantes pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union. À cet égard, elle avance quatre moyens, tirés d’une violation de l’article 8, paragraphe 1, du règlement (CE) no 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque de l’Union européenne (JO 2009, L 78, p. 1).

7        Par son premier moyen, la requérante soutient que le Tribunal a défini le consommateur moyen d’une façon contraire au droit de l’Union, et notamment aux règles en matière de marchés publics, en ce qu’il n’a pas pris en compte des habitudes d’achat spécifiques relatives aux produits et services liés aux marques en cause.

8        Par son deuxième moyen, la requérante reproche au Tribunal d’avoir commis une erreur de droit dans la détermination du public pertinent. En effet, en affirmant, au point 19 de l’arrêt attaqué, que le public pertinent pour l’appréciation du risque de confusion est constitué des utilisateurs susceptibles d’utiliser tant les produits ou les services visés par la marque antérieure que ceux visés par la marque demandée, le Tribunal aurait méconnu sa propre jurisprudence, issue notamment de l’arrêt du 14 juillet 2005, Reckitt Benckiser (España)/OHMI – Aladin (ALADIN) (T‑126/03, EU:T:2005:288, point 81), selon laquelle les produits visés par la demande d’enregistrement doivent être considérés comme s’adressant uniquement aux membres du personnel des institutions financières responsables de l’achat du logiciel spécialisé.

9        Par son troisième moyen, la requérante estime que le Tribunal a apprécié le caractère complémentaire des produits ou des services en cause d’une manière contraire à sa propre jurisprudence, en ce qu’il a considéré que les produits et les services en cause sont complémentaires. En particulier, le Tribunal aurait méconnu sa jurisprudence, issue notamment de l’arrêt du 22 janvier 2009, Commercy/OHMI – easyGroup IP Licensing (easyHotel) T‑316/07, EU:T:2009:14, points 54 à 57, selon laquelle les produits adressés à des publics différents ne peuvent pas présenter un tel caractère complémentaire.

10      Par son quatrième et dernier moyen, la requérante allègue que le Tribunal a procédé à une appréciation globale erronée du risque de confusion du fait de l’effet cumulé des erreurs de droit exposées aux points 7 à 9 de la présente ordonnance, portant notamment sur la détermination du public pertinent ainsi que sur la comparaison des produits et services en cause.

11      À titre liminaire, il convient de relever que c’est au requérant qu’il incombe de démontrer que les questions soulevées par son pourvoi sont importantes pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union (voir, en ce sens, ordonnance du 10 décembre 2021, EUIPO/The KaiKai Company Jaeger Wichmann, C‑382/21 P, EU:C:2021:1050, point 20 et jurisprudence citée).

12      En outre, ainsi qu’il ressort de l’article 58 bis, troisième alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, lu en combinaison avec l’article 170 bis, paragraphe 1, et l’article 170 ter, paragraphe 4, du règlement de procédure, la demande d’admission du pourvoi doit contenir tous les éléments nécessaires pour permettre à la Cour de statuer sur l’admission du pourvoi et de déterminer, en cas d’admission partielle de ce dernier, les moyens ou les branches du pourvoi sur lesquels le mémoire en réponse doit porter. En effet, étant donné que le mécanisme d’admission préalable des pourvois visé à l’article 58 bis de ce statut tend à limiter le contrôle de la Cour aux questions revêtant une importance pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union, seuls les moyens soulevant de telles questions et établis par le requérant doivent être examinés par la Cour dans le cadre du pourvoi (voir, en ce sens, ordonnances du 10 décembre 2021, EUIPO/The KaiKai Company Jaeger Wichmann, C‑382/21 P, EU:C:2021:1050, point 21, et du 7 juin 2022, Magic Box Int. Toys/EUIPO, C‑194/22 P, non publiée, EU:C:2022:463, point 14).

13      Ainsi, une demande d’admission du pourvoi doit, en tout état de cause, énoncer de façon claire et précise les moyens sur lesquels le pourvoi est fondé, identifier avec la même précision et la même clarté la question de droit soulevée par chaque moyen, préciser si cette question est importante pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union et exposer de manière spécifique les raisons pour lesquelles ladite question est importante au regard du critère invoqué. En ce qui concerne, en particulier, les moyens du pourvoi, la demande d’admission du pourvoi doit préciser la disposition du droit de l’Union ou la jurisprudence qui aurait été méconnue par l’arrêt ou l’ordonnance sous pourvoi, exposer de manière succincte en quoi consiste l’erreur de droit prétendument commise par le Tribunal et indiquer dans quelle mesure cette erreur a exercé une influence sur le résultat de l’arrêt ou de l’ordonnance sous pourvoi. Lorsque l’erreur de droit invoqué résulte de la méconnaissance de la jurisprudence, la demande d’admission du pourvoi doit exposer, de façon succincte mais claire et précise, premièrement, où se situe la contradiction alléguée, en identifiant tant les points de l’arrêt ou de l’ordonnance sous pourvoi que le requérant met en cause que ceux de la décision de la Cour ou du Tribunal qui auraient été méconnus, et, deuxièmement, les raisons concrètes pour lesquelles une telle contradiction soulève une question importante pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union (ordonnance du 10 décembre 2021, EUIPO/The KaiKai Company Jaeger Wichmann, C‑382/21 P, EU:C:2021:1050, point 22 et jurisprudence citée).

14      En effet, une demande d’admission du pourvoi ne contenant pas les éléments énoncés au point précédent de la présente ordonnance ne saurait être, d’emblée, susceptible de démontrer que le pourvoi soulève une question importante pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union justifiant son admission (ordonnance du 6 juillet 2022, Calrose Rice/EUIPO, C‑253/22 P, non publiée, EU:C:2022:546, point 14 et jurisprudence citée).

15      En l’occurrence, s’agissant, en premier lieu, de l’argumentation exposée aux points 7 et 10 de la présente ordonnance, relative à la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009, et, notamment, aux erreurs de droit prétendument commises par le Tribunal lors de la définition du consommateur moyen et du risque de confusion, force est de constater que la requérante n’explique pas à suffisance ni, en tout état de cause, ne démontre en quoi de telles erreurs de droit, à les supposer établies, soulèveraient des questions importantes pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union qui justifieraient l’admission du pourvoi (voir, en ce sens, ordonnance du 17 juin 2022, Lück/EUIPO, C‑145/22 P, non publiée, EU:C:2022:487, point 17).

16      En second lieu, en ce qui concerne l’argumentation de la requérante évoquée aux points 8 et 9 de la présente ordonnance, tirée d’une méconnaissance, par le Tribunal, de sa propre jurisprudence, il importe de relever qu’une telle argumentation n’est pas, en soi, suffisante pour établir, conformément à la charge de la preuve qui pèse sur l’auteur d’une demande d’admission d’un pourvoi, que ce pourvoi soulève une question importante pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union. En effet, le demandeur doit respecter, à cette fin, l’ensemble des exigences énoncées au point 14 de la présente ordonnance. Or, en l’occurrence, la requérante ne fournit aucune indication sur la similitude des situations visées dans la jurisprudence qui aurait été méconnue permettant d’établir la réalité de la contradiction invoquée (ordonnance du 22 février 2022, Sony Interactive Entertainment Europe/EUIPO, C‑679/21 P, non publiée, EU:C:2022:109, point 17 et jurisprudence citée).

17      Dans ces conditions, il convient de constater que la demande présentée par la requérante n’est pas de nature à établir que le pourvoi soulève une question importante pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union.

18      Eu égard aux considérations qui précèdent, il y a lieu de ne pas admettre le pourvoi.

 Sur les dépens

19      Aux termes de l’article 137 du règlement de procédure, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 184, paragraphe 1, de ce règlement, il est statué sur les dépens dans l’ordonnance qui met fin à l’instance.

20      La présente ordonnance étant adoptée avant que le pourvoi n’ait été signifié à l’autre partie à la procédure et, par conséquent, avant que celle-ci n’ait pu exposer des dépens, il convient de décider que la requérante supportera ses propres dépens.

Par ces motifs, la Cour (chambre d’admission des pourvois) ordonne :

1)      Le pourvoi n’est pas admis.

2)      Fidelity National Information Services, Inc., supporte ses propres dépens.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.