ARRÊT DE LA COUR (cinquième chambre)

23 novembre 2023 ( *1 )

« Renvoi préjudiciel – Agriculture – Organisation commune des marchés – Étiquetage et présentation dans le secteur vitivinicole – Appellations d’origine et indications géographiques – Règlement délégué (UE) 2019/33 – Article 54, paragraphe 1, second alinéa – Indication de l’exploitation viticole effectuant la vinification – Location de vignobles et de l’installation de pressurage auprès d’une autre exploitation viticole – Vinification entièrement effectuée dans l’exploitation viticole éponyme »

Dans l’affaire C‑354/22,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Bundesverwaltungsgericht (Cour administrative fédérale, Allemagne), par décision du 10 mars 2022, parvenue à la Cour le 1er juin 2022, dans la procédure

Weingut A

contre

Land Rheinland-Pfalz,

LA COUR (cinquième chambre),

composée de M. E. Regan, président de chambre, MM. Z. Csehi, M. Ilešič (rapporteur), I. Jarukaitis et D. Gratsias, juges,

avocat général : M. M. Campos Sánchez-Bordona,

greffier : M. I. Illéssy, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 3 mai 2023,

considérant les observations présentées :

pour Weingut A, par Me H. Eichele, Rechtsanwalt,

pour le Land Rheinland-Pfalz, par M. S. Reuter, Fachreferent, et Mme E. Wagner, Regierungsrätin,

pour la Commission européenne, par MM. B. Hofstötter et B. Rechena, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 6 juillet 2023,

rend le présent

Arrêt

1

La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 54, paragraphe 1, second alinéa, du règlement délégué (UE) 2019/33 de la Commission, du 17 octobre 2018, complétant le règlement (UE) no 1308/2013 du Parlement européen et du Conseil en ce qui concerne les demandes de protection des appellations d’origine, des indications géographiques et des mentions traditionnelles dans le secteur vitivinicole, la procédure d’opposition, les restrictions d’utilisation, les modifications du cahier des charges, l’annulation de la protection, l’étiquetage et la présentation (JO 2019, L 9, p. 2), tel que modifié par le règlement délégué (UE) 2021/1375 de la Commission, du 11 juin 2021 (JO 2021, L 297, p. 16) (ci-après le « règlement délégué 2019/33 »).

2

Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant Weingut A au Land Rheinland-Pfalz (Land de Rhénanie-Palatinat, Allemagne) (ci-après le « Land ») au sujet de l’utilisation des mentions « Weingut » (domaine viticole) et « Gutsabfüllung » (mise en bouteille au domaine) dans la présentation des vins dont le pressurage des raisins, provenant de vignobles loués, est effectué dans une installation louée auprès d’une autre exploitation viticole.

Le cadre juridique

Le droit de l’Union

Le règlement no 1308/2013

3

Le règlement (UE) no 1308/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 17 décembre 2013, portant organisation commune des marchés des produits agricoles et abrogeant les règlements (CEE) no 922/72, (CEE) no 234/79, (CE) no 1037/2001 et (CE) no 1234/2007 du Conseil (JO 2013, L 347, p. 671), tel que modifié par le règlement (UE) 2021/2117 du Parlement européen et du Conseil, du 2 décembre 2021 (JO 2021, L 435, p. 262) (ci-après le « règlement no 1308/2013), contient un article 3, intitulé « Définitions », dont le paragraphe 3 est libellé comme suit :

« Les définitions figurant dans [...] le [règlement (UE) no 1307/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 17 décembre 2013, établissant les règles relatives aux paiements directs en faveur des agriculteurs au titre des régimes de soutien relevant de la politique agricole commune et abrogeant le règlement (CE) no 637/2008 du Conseil et le règlement (CE) no 73/2009 du Conseil (JO 2013, L 347, p. 608)] [...] s’appliquent aux fins du présent règlement, sauf dispositions contraires du présent règlement. »

4

L’article 122 du règlement no 1308/2013, intitulé « Pouvoirs délégués », dispose, à son paragraphe 1 :

« Afin de tenir compte des spécificités du secteur vitivinicole, la Commission [européenne] est habilitée à adopter des actes délégués en conformité avec l’article 227 en ce qui concerne les règles et les restrictions portant sur :

a)

la présentation et l’utilisation d’indications d’étiquetage autres que celles prévues dans la présente section ;

[...]

c)

les indications facultatives pour :

[...]

iii)

les termes faisant référence à une exploitation et les conditions de leur utilisation ;

[...] »

Le règlement no 1307/2013

5

L’article 4 du règlement no 1307/2013, intitulé « Définitions et dispositions connexes », prévoit, à son paragraphe 1 :

« Aux fins du présent règlement, on entend par :

[...]

b)

“exploitation”, l’ensemble des unités utilisées aux fins d’activités agricoles et gérées par un agriculteur qui sont situées sur le territoire d’un même État membre ;

[...] »

Le règlement délégué 2019/33

6

Les considérants 34 et 48 du règlement délégué 2019/33 énoncent :

« (34)

Les articles 117 à 121 du [règlement no 1308/2013] énoncent les règles générales applicables à l’étiquetage et à la présentation des produits de la vigne. Ledit règlement harmonise également les règles régissant l’utilisation des mentions autres que celles prévues expressément par la législation de l’Union, pour autant que ces mentions ne soient pas de nature à induire en erreur. Aux fins du bon fonctionnement du marché intérieur, il convient de définir des règles de l’Union en ce qui concerne l’utilisation des indications d’étiquetage obligatoires applicables aux produits de la vigne. Par ailleurs, afin de ne pas induire les consommateurs en erreur, il y a lieu d’arrêter également les dispositions relatives à l’utilisation des indications d’étiquetage facultatives.

[...]

(48)

La mention de l’exploitation qui gère le vignoble dont sont issus les produits de la vigne et au sein de laquelle s’effectue tout le processus de vinification peut constituer une valeur ajoutée pour les producteurs et l’indication d’une qualité supérieure pour les consommateurs. Il devrait donc être permis aux producteurs d’indiquer le nom de l’exploitation sur l’étiquette d’un produit de la vigne bénéficiant d’une appellation d’origine protégée ou d’une indication géographique protégée. »

7

Aux termes de l’article 1er de ce règlement délégué, intitulé « Objet » :

« Le présent règlement établit des dispositions complétant le [règlement no 1308/2013] pour ce qui est des appellations d’origine protégées, des indications géographiques protégées et des mentions traditionnelles ainsi que de l’étiquetage et de la présentation dans le secteur vitivinicole en ce qui concerne :

[...]

f)

l’étiquetage et la présentation. »

8

Les dispositions du chapitre IV dudit règlement délégué régissent l’étiquetage et la présentation des produits de la vigne, les sections 1 et 2 de ce chapitre énumérant respectivement les indications obligatoires (articles 40 à 48) et les indications facultatives (articles 49 à 55).

9

L’article 54 du même règlement délégué, intitulé « Indication de l’exploitation », dispose, à son paragraphe 1 :

« Les mentions se référant à une exploitation figurant à l’annexe VI, autres que l’indication du nom de l’embouteilleur, du producteur ou du vendeur, sont réservées aux produits de la vigne bénéficiant d’une appellation d’origine protégée ou d’une indication géographique protégée.

Ces mentions ne sont utilisées que si le produit de la vigne est élaboré exclusivement à partir de raisins récoltés dans les vignobles cultivés par cette exploitation et si la vinification est entièrement effectuée dans cette exploitation. »

10

L’annexe VI du règlement délégué 2019/33 comporte une liste des mentions visées à l’article 54, paragraphe 1, de celui-ci, pour chaque État membre. En ce qui concerne la République fédérale d’Allemagne, cette annexe énumère les mentions suivantes : « Burg, Domäne, Kloster, Schloss, Stift, Weinbau, Weingärtner, Weingut, Winzer ».

Le droit allemand

11

L’article 38 de la Weinverordnung (décret relatif au vin), du 21 avril 2009 (BGBl. I, p. 827), dispose :

« (1)   Une indication de l’exploitation est admise pour les vins “[Federweißer, Landwein (vins de pays), Qualitätswein (vins de qualité), Prädikatswein (vins de qualité supérieure), Sekt b.A. (vins mousseux), Qualitätsperlwein b.A. (vins pétillants de qualité) ou Qualitätslikörwein b.A. (vins de liqueur de qualité)]” uniquement conformément à l’article 54, paragraphe 1, du règlement délégué 2019/33, lu en combinaison avec son annexe VI.

[...]

(4)   La notion de “produit et mis en bouteille” peut être utilisée seulement :

1.

par une exploitation viticole dans laquelle les raisins utilisés pour ce vin ont été récoltés et vinifiés ;

[...]

3.

par une exploitation située dans la région déterminée indiquée ou à proximité immédiate de cette région, à laquelle les exploitations viticoles qui ont récolté les raisins mis en œuvre sont liées dans le cadre d’un groupement d’exploitations viticoles et qui a vinifié ces raisins.

(5)   Les termes “mis en bouteille au domaine” ne peuvent être utilisés, lorsque les conditions visées au paragraphe 4, première phrase, point 1, sont remplies, que si :

1.

l’entreprise viticole tient une comptabilité fiscale,

2.

la personne responsable de la vinification peut justifier d’une formation œnologique complète, et

3.

les vignobles, sur lesquels les raisins utilisés pour l’élaboration du vin en question ont été récoltés, sont exploités par l’entreprise viticole concernée au moins depuis le 1er janvier de l’année de récolte. »

Le litige au principal et les questions préjudicielles

12

Weingut A, la requérante au principal, est propriétaire d’une exploitation viticole située à Zell (Allemagne), dans la région de la Moselle. Elle produit du vin à partir de raisins provenant non seulement de ses propres vignobles, mais également d’autres vignobles qu’elle loue.

13

L’un de ces vignobles loués, d’une superficie de 2,15 hectares, se situe à environ 70 kilomètres (km) de Zell, dans une exploitation viticole appartenant au viticulteur B.

14

Les deux viticulteurs ont conclu un contrat en vertu duquel le viticulteur B cultive les vignes louées par la requérante au principal selon ses instructions et, en outre, donne en location à cette dernière chaque année, à titre exclusif, une installation de pressurage pour une période de 24 heures à compter de la vendange. Pendant cette période, l’installation de pressurage est exclusivement disponible pour la transformation des raisins provenant des vignobles loués.

15

En vertu de ce contrat de location, le pressurage est effectué dans l’exploitation du viticulteur B selon les pratiques œnologiques de la requérante au principal. Le vin ainsi obtenu est versé dans des cuves transportées vers l’exploitation de la requérante au principal par le personnel qui est à son service.

16

Le Land a considéré que, dans ces conditions, la requérante au principal ne pouvait pas utiliser les indications « Weingut » et « Gutsabfüllung » pour le vin vinifié dans les locaux de l’exploitation du viticulteur B, compte tenu de l’absence d’autonomie de l’établissement stable et du fait que la requérante au principal n’emploie pas son propre personnel aux fins de l’opération de pressurage.

17

La requérante au principal a saisi le Verwaltungsgericht Trier (tribunal administratif de Trèves, Allemagne) d’un recours tendant à constater qu’elle était autorisée à utiliser ces deux indications. Cette juridiction a, par jugement du 16 mai 2019, accueilli ce recours, principalement au motif que la direction effective, la surveillance permanente et la responsabilité exclusive de la vinification incombaient à la requérante au principal.

18

Le Land a interjeté appel de ce jugement devant l’Oberverwaltungsgericht Rheinland-Pfalz (tribunal administratif supérieur de Rhénanie-Palatinat, Allemagne) qui a, par arrêt du 12 août 2020, réformé ledit jugement et rejeté le recours de la requérante au principal.

19

La juridiction d’appel a considéré, notamment, que, en vertu de l’article 54, paragraphe 1, du règlement délégué 2019/33, lu en combinaison avec l’annexe VI de celui-ci, les indications « Weingut » et « Gutsabfüllung » ne peuvent être utilisées que si le produit de la vigne est obtenu exclusivement à partir de raisins provenant des vignobles de l’exploitation qui donne son nom à l’appellation viticole (ci‑après l’« exploitation viticole éponyme ») et si la vinification est entièrement effectuée dans cette dernière exploitation. En effet, la vinification devrait avoir lieu dans une exploitation qui constitue un seul et même ensemble opérationnel avec un établissement stable durablement affecté au propriétaire de l’exploitation viticole éponyme et dans lequel travaille du personnel soumis à son droit de direction. Une séparation des étapes de la vinification, comme le pressurage, serait en contradiction avec l’idée maîtresse selon laquelle « tout doit rester entre les mêmes mains ».

20

Selon cette juridiction, les conditions du contrat de location en cause ne garantissent pas que toutes les phases de la production du vin se déroulent sous la direction et la responsabilité de la même personne physique ou morale, dès lors que le pressurage pourrait avoir lieu aussi bien en présence de la requérante au principal que de l’exploitant qui donne l’installation de pressurage en location, ce dernier endossant alors la responsabilité de l’opération.

21

La requérante au principal a formé un recours en Revision devant le Bundesverwaltungsgericht (Cour administrative fédérale, Allemagne), qui est la juridiction de renvoi.

22

Cette dernière nourrit des doutes quant au point de savoir si la vinification peut être considérée comme ayant été « entièrement » effectuée dans l’exploitation viticole éponyme, au sens de l’article 54, paragraphe 1, second alinéa, du règlement délégué 2019/33, lorsque cette exploitation fait presser les raisins dans une installation de pressurage louée pour une durée de 24 heures auprès d’une autre exploitation viticole.

23

Elle fait observer, tout d’abord, que le règlement délégué 2019/33 ne comporte pas de définition de la notion d’« exploitation », au sens de l’article 54, paragraphe 1, second alinéa, de celui-ci.

24

S’agissant des terres agricoles, la Cour aurait déjà précisé, dans ses arrêts du 14 octobre 2010, Landkreis Bad Dürkheim (C‑61/09, EU:C:2010:606), et du 2 juillet 2015, Wree (C‑422/13, EU:C:2015:438), que le critère déterminant pour établir si une unité de production prise en location peut être considérée comme étant rattachée à l’exploitation de l’agriculteur et gérée par ce dernier serait notamment de savoir si cet exploitant dispose d’une indépendance suffisante dans l’exercice de son activité.

25

Selon la juridiction de renvoi, en l’absence de toute indication contraire, il y a lieu de supposer que ces critères s’appliquent également dans une situation, telle que celle en cause dans l’affaire dont elle est saisie. Or, dans le domaine de la réglementation viticole, lesdits critères devraient être interprétés de manière stricte.

26

L’exigence d’un rattachement étroit entre les établissements stables et l’exploitation viticole éponyme serait, en premier lieu, corroborée par le libellé de l’article 54, paragraphe 1, second alinéa, du règlement délégué 2019/33. En effet, celui-ci présupposerait non seulement que la vinification ait lieu dans l’exploitation du titulaire, mais en outre que la production de vin soit « entièrement » effectuée dans cette exploitation. Cela traduirait l’exigence d’un lien particulièrement étroit entre l’établissement stable et l’exploitation viticole éponyme.

27

En deuxième lieu, la genèse de la réglementation en cause permettrait de confirmer une telle interprétation stricte. Selon la juridiction de renvoi, l’évolution de la réglementation de l’Union en matière de présentation et d’utilisation des indications d’étiquetage pour les produits du secteur vitivinicole en vigueur depuis l’année 2009 a entraîné une restriction en vertu de laquelle la vinification devrait être effectuée « entièrement » dans l’exploitation viticole éponyme.

28

En troisième lieu, le sens et la finalité de la réglementation en cause seraient de protéger l’identification des exploitations viticoles qui exploitent elles-mêmes les vignobles et assurent la vinification de bout en bout, en vue de rencontrer l’attente des consommateurs de se voir proposer un vin de qualité supérieure.

29

Toutefois, il ne serait pas certain, sur le fondement de critères issus des arrêts du 18 octobre 1988, Erzeugergemeinschaft Goldenes Rheinhessen (311/87, EU:C:1988:483), et du 29 juin 1994, Baux (C‑403/92, EU:C:1994:269), qu’une installation de pressurage louée pour une durée de 24 heures puisse être rattachée à l’activité de l’exploitation viticole éponyme. En effet, à supposer que la location de vignes situées à une distance considérable de l’établissement principal de l’exploitation viticole éponyme soit sans incidence sur l’indication, il apparaît logique que la location d’un pressoir pour effectuer le pressurage sur place et éviter le transport des raisins ne le soit pas non plus. L’utilisation commune d’installations d’exploitation serait courante dans la production de vin et judicieuse du point de vue de la gestion d’entreprise.

30

Cependant, dans la mesure où l’installation de pressurage louée pour 24 heures par l’exploitation viticole éponyme peut être rattachée à cette dernière, il conviendrait de clarifier les exigences auxquelles l’opération de pressurage doit répondre en termes de personnel. À cet égard, se poserait, notamment, la question de savoir si la présence de la requérante au principal ou de ses collaborateurs est obligatoire pendant l’opération de pressurage.

31

Selon la juridiction de renvoi, les exigences découlant de la jurisprudence de la Cour, qui font référence à une direction effective et à un contrôle permanent, plaident en faveur d’une présence obligatoire des collaborateurs de la requérante au principal et contre le caractère suffisant d’un simple droit de donner des instructions. S’agissant de l’embouteillage, la Cour aurait considéré, dans l’arrêt du 18 octobre 1988, Erzeugergemeinschaft Goldenes Rheinhessen (311/87, EU:C:1988:483), qu’il était nécessaire que la mise en bouteille soit effectuée par le producteur lui-même. Le recours aux services d’une autre exploitation viticole devrait ainsi être évité compte tenu de l’exigence d’une vinification complète au sein de l’exploitation viticole éponyme elle-même.

32

Dans l’hypothèse où le pressurage pourrait également être effectué par des collaborateurs de l’exploitation viticole qui donne en location l’installation de pressurage, se poserait également la question de savoir si ces collaborateurs peuvent être autorisés à intervenir de leur propre initiative dans cette opération en cas de problèmes survenant de manière inopinée. Dans de tels cas d’urgence, les décisions que le personnel de l’exploitation viticole bailleresse devrait prendre de manière autonome, sans en référer préalablement à l’exploitation viticole éponyme, auraient pour conséquence que cette dernière n’assumerait plus en ce cas la direction effective et le contrôle permanent de l’opération.

33

Enfin, à supposer que la prise en charge de la responsabilité par voie d’instruction est en principe suffisante, demeurerait la question de savoir s’il doit en aller autrement lorsque l’exploitation viticole qui donne l’installation de pressurage en location et effectue le pressurage a un intérêt propre dans la manière dont cette opération est effectuée. En l’occurrence, le contrat conclu entre la requérante au principal et le viticulteur B prévoirait un supplément de prix lié au rendement et à la qualité du vin produit, lequel pourrait conduire à un intérêt propre de l’exploitant dans la manière de réaliser le pressurage et à un risque économique propre.

34

Dans ces conditions, le Bundesverwaltungsgericht (Cour administrative fédérale) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :

« 1)

La vinification peut-elle avoir été entièrement effectuée dans l’[exploitation viticole éponyme], au sens de l’article 54, paragraphe 1, second alinéa, du [règlement délégué 2019/33], si le pressurage des raisins a lieu dans une installation de pressurage louée pour 24 heures à une autre exploitation viticole et qui, pendant cette période, est à la disposition exclusive de l’exploitation viticole éponyme ?

2)

Dans l’affirmative, est-il nécessaire que le pressurage des raisins soit effectué par des collaborateurs de l’exploitation viticole éponyme ou, en tout cas, qu’elle soit supervisée sur place, ou bien le pressurage peut-il également être effectué par des collaborateurs de l’exploitation viticole qui loue l’installation de pressurage des raisins, selon les instructions de l’exploitation viticole éponyme ?

3)

Si le pressurage peut également être effectué par des collaborateurs de l’exploitation viticole qui loue l’installation de pressurage, ceux-ci peuvent-ils, en cas de problèmes survenant de manière inopinée, être habilités à intervenir dans le pressurage sur la base d’une décision autonome ?

4)

Le fait que l’exploitation viticole qui loue l’installation de pressurage des raisins et effectue le pressurage ait un intérêt propre dans la manière dont le pressurage est effectué s’oppose‑t‑il à ce que la vinification soit affectée à l’exploitation viticole éponyme parce que la convention d’exploitation des vignobles également conclue avec cette entreprise prévoit un supplément, lié au rendement et à la qualité par hectolitre de vins dits Kabinettwein, Spätlesewein (Vendanges Tardives) et Auslesewein, à la redevance fondée sur la surface et due en contrepartie de l’exploitation ? »

Sur les questions préjudicielles

Sur la première question

35

Par sa première question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 54, paragraphe 1, second alinéa, du règlement délégué 2019/33 doit être interprété en ce sens que le fait que le pressurage des raisins provenant de vignobles loués ait lieu dans une installation mise à la disposition exclusive de l’exploitation viticole éponyme pour une brève période au titre d’un contrat de location avec une autre exploitation viticole, exclut que la vinification soit considérée comme ayant été entièrement effectuée dans l’exploitation viticole éponyme, au sens de cette disposition.

36

À cet égard, il y a lieu de rappeler d’emblée que, aux termes de l’article 54, paragraphe 1, du règlement délégué 2019/33, les mentions se référant à une exploitation figurant à l’annexe VI de celui-ci, autres que l’indication du nom de l’embouteilleur, du producteur ou du vendeur, sont réservées aux produits de la vigne bénéficiant d’une appellation d’origine protégée ou d’une indication géographique protégée et ne sont utilisées que si le produit de la vigne est élaboré exclusivement à partir de raisins récoltés dans les vignobles cultivés par cette exploitation et si la vinification est entièrement effectuée dans cette exploitation.

37

S’il s’ensuit que l’article 54, paragraphe 1, premier alinéa, du règlement délégué 2019/33 réserve les mentions en cause aux produits de la vigne bénéficiant d’une appellation d’origine protégée ou d’une indication géographique protégée, en l’occurrence, cette exigence ne suscite pas d’interrogations de la part de la juridiction de renvoi. Il convient donc de répondre à la première question en partant de l’hypothèse que les vignobles loués en l’occurrence, situés à environ 70 km de l’établissement principal de l’exploitation viticole éponyme, sont couverts par la même appellation d’origine protégée ou indication géographique protégée que cet établissement, ce qu’il appartient à la juridiction de renvoi de vérifier.

38

Il en va de même s’agissant de la condition selon laquelle les mentions en cause ne peuvent être utilisées que si le produit de la vigne est élaboré exclusivement à partir de raisins récoltés dans les vignobles cultivés par cette exploitation, la juridiction de renvoi ayant relevé que, en l’occurrence, les vignobles loués sont cultivés selon les prescriptions de la requérante au principal et n’ayant pas posé de questions à cet égard.

39

Les interrogations de la juridiction de renvoi portent ainsi sur les conditions dans lesquelles il peut être considéré que la vinification est entièrement effectuée dans l’exploitation viticole éponyme, et, en particulier, s’agissant de la première question, sur le point de savoir si le fait que l’installation de pressurage des raisins est louée par cette exploitation pour une durée de 24 heures seulement exclut que l’opération de pressurage et, par voie de conséquence, la vinification elle-même, soient considérées comme étant entièrement effectuées dans ladite exploitation.

40

À cet égard, il y a lieu de constater que la notion d’« exploitation », qui figure à l’article 54, paragraphe 1, du règlement délégué 2019/33, n’est pas définie dans ce règlement ni, de manière indirecte, par renvoi aux droits nationaux des États membres. Ainsi, cette notion doit être considérée comme étant une notion autonome du droit de l’Union, qui doit être interprétée de manière uniforme sur le territoire de cette dernière, en tenant compte non seulement des termes de cette disposition, mais également du contexte dans lequel elle s’inscrit et des objectifs poursuivis par la réglementation dont elle fait partie (voir, en ce sens, arrêt du 11 mai 2023, Bezirkshauptmannschaft Lilienfeld, C‑155/22, EU:C:2023:394, point 63 et jurisprudence citée).

41

En premier lieu, en ce qui concerne les autres termes de l’article 54, paragraphe 1, second alinéa, du règlement délégué 2019/33, cette disposition exige, aux fins de l’utilisation des mentions y visées, notamment, que la vinification soit effectuée « entièrement » dans l’exploitation viticole éponyme.

42

À cet égard, il convient de rappeler que ladite disposition distingue plusieurs étapes de production, parmi lesquelles la récolte des raisins et leur vinification, dont fait partie le pressurage des raisins. Or, ainsi que l’a fait valoir la Commission dans ses observations écrites, dans la mesure où un établissement stable relève de la notion d’« exploitation », le terme « entièrement » précise simplement qu’aucune étape de transformation lors du processus de vinification ne doit être réalisée en dehors de cette exploitation, sans, pour autant, que la définition de l’exploitation prévue à l’article 4, paragraphe 1, point b), du règlement no 1307/2013 se trouve limitée par l’emploi de ce terme.

43

S’agissant, en deuxième lieu, du contexte dans lequel l’article 54, paragraphe 1, du règlement délégué 2019/33 s’inscrit, ce dernier a été adopté par la Commission en vertu de l’habilitation que lui confèrent les articles 122 et 227 du règlement no 1308/2013. Conformément à l’article 122, paragraphe 1, sous c), iii), du règlement no 1308/2013, les actes délégués peuvent notamment porter sur les règles relatives aux indications facultatives pour « les termes faisant référence à une exploitation et les conditions de leur utilisation ».

44

Or, si le règlement no 1308/2013 ne précise pas non plus la notion d’« exploitation », il renvoie, à son article 3, paragraphe 3, aux définitions figurant, entre autres, dans le règlement no 1307/2013. Ainsi, il convient de prendre en considération la définition figurant à l’article 4, paragraphe 1, sous b), de ce dernier règlement, selon laquelle l’« exploitation » constitue « l’ensemble des unités utilisées aux fins d’activités agricoles et gérées par un agriculteur qui sont situées sur le territoire d’un même État membre ».

45

En ce qui concerne l’espace géographique dans lequel les différentes unités de production doivent se situer pour être considérées comme faisant partie de l’exploitation, la Cour a considéré qu’un producteur est libre de choisir le lieu de production dès lors que celui-ci est situé sur le territoire d’un État membre. Il doit toutefois gérer l’ensemble des unités de production, sans qu’il soit nécessaire que l’exploitant soit propriétaire des installations qu’il utilise pour sa production (voir, en ce sens, arrêt du 8 mai 2003, Agrargenossenschaft Alkersleben, C‑268/01, EU:C:2003:263, points 30 et 33 ainsi que jurisprudence citée).

46

Quant à l’exigence selon laquelle une unité de production doit être gérée par l’agriculteur lui-même, la Cour a précisé que la notion de « gestion » n’implique pas l’existence, au profit de celui-ci, d’un pouvoir de disposition illimité sur la superficie concernée dans le cadre de l’utilisation de celle-ci à des fins agricoles. En revanche, l’agriculteur doit disposer, à l’égard de cette superficie, d’une autonomie suffisante aux fins de l’exercice de son activité agricole (arrêt du 7 avril 2022, Avio Lucos, C‑176/20, EU:C:2022:274, point 56 et jurisprudence citée).

47

Ainsi que M. l’avocat général l’a relevé au point 51 de ses conclusions, il se déduit, par analogie, des considérations exposées aux points 44 à 46 du présent arrêt que la notion d’« exploitation », au sens de l’article 54, paragraphe 1, du règlement délégué 2019/33, n’est pas limitée aux seules terres dont le viticulteur est propriétaire ou situées à proximité de celles-ci, mais peut s’étendre à des vignobles loués et, le cas échéant, situés à un autre endroit que celui où ce viticulteur possède ses propres vignobles, sans préjudice des autres conditions énoncées à cette disposition, et, notamment, celles visées aux points 37 et 38 du présent arrêt.

48

En troisième lieu, une telle interprétation est également confortée par l’objectif poursuivi par les dispositions du règlement délégué 2019/33 qui encadrent l’utilisation des indications d’étiquetage facultatives.

49

À cet égard, l’article 54, paragraphe 1, second alinéa, du règlement délégué 2019/33 doit être lu à la lumière du considérant 48 de celui-ci, aux termes duquel la mention, sur l’étiquette d’un produit de la vigne, de l’exploitation qui gère le vignoble dont sont issus les produits de la vigne et au sein de laquelle s’effectue tout le processus de vinification poursuit l’objectif consistant à fournir une information aux consommateurs quant à l’assurance d’une qualité supérieure découlant de cette mention. Cet objectif ne peut être atteint que s’il est garanti que ces consommateurs ne sont pas induits en erreur quant à l’identité de l’exploitation responsable du processus de vinification. Une telle conclusion découle, par ailleurs, du considérant 34 de ce règlement, qui indique qu’il convient d’arrêter des dispositions relatives à l’utilisation des indications d’étiquetage facultatives afin de ne pas induire les consommateurs en erreur.

50

Dans le même ordre d’idées, la Cour a déjà jugé que les indications facultatives, telles que l’indication de l’exploitation, visent à garantir aux consommateurs, qui achètent du vin portant certaines dénominations, que les principales étapes du processus d’élaboration du vin, à savoir celles qui vont de la récolte à la vinification, ont eu lieu sous la direction effective, le contrôle étroit et permanent ainsi que la responsabilité exclusive d’un exploitant auquel peut être attribuée la qualité du produit (voir, en ce sens, arrêt du 29 juin 1994, Baux, C‑403/92, EU:C:1994:269, point 15).

51

De même, s’agissant, en particulier, de l’utilisation du terme « mis en bouteille par le producteur », qui indique l’identité entre le producteur et la personne ou l’entreprise procédant à la mise en bouteille, la Cour a précisé qu’il est nécessaire que cette dernière opération ait été effectuée par le producteur lui-même, soit dans sa propre exploitation viticole, soit, lorsque le producteur ne dispose pas d’une installation d’embouteillage, dans des conditions donnant des garanties substantiellement identiques. De telles garanties existent, notamment, lorsque la vinification est effectuée sous la direction effective, le contrôle étroit et permanent ainsi que la responsabilité exclusive du producteur. Ces exigences servent à atteindre l’objectif de protection et d’information correcte du consommateur (voir, en ce sens, arrêt du 18 octobre 1988, Erzeugergemeinschaft Goldenes Rheinhessen, 311/87, EU:C:1988:483, points 14 à 16).

52

Il convient encore de relever, à l’instar, en substance, de M. l’avocat général au point 65 de ses conclusions, qu’une fois admis que, aux fins de l’utilisation des mentions visées à l’article 54, paragraphe 1, du règlement délégué 2019/33, il n’est pas nécessaire que les travaux de culture et de récolte des raisins, essentiels au résultat final, soient effectués sur les terres appartenant au viticulteur ou sur des terres situées à proximité de celles-ci, le même raisonnement vaut pour le pressurage des raisins. En revanche, tout comme pour lesdits travaux, il importe de s’assurer que le propriétaire de ladite exploitation assume également la direction effective, le contrôle étroit et permanent ainsi que la responsabilité de cette opération.

53

Il s’ensuit que le pressurage des raisins peut être considéré comme effectué dans l’exploitation viticole éponyme, alors qu’il a lieu dans un pressoir pris en location auprès d’une autre exploitation pour une durée de 24 heures seulement, pour autant que ce pressoir soit mis à la disposition exclusive du propriétaire de cette première exploitation pour la durée nécessaire pour mener à bien l’opération de pressurage, ce qu’il convient en dernier ressort à la juridiction de renvoi de vérifier.

54

Eu égard aux considérations qui précèdent, il y a lieu de répondre à la première question que l’article 54, paragraphe 1, second alinéa, du règlement délégué 2019/33 doit être interprété en ce sens que le fait que le pressurage des raisins provenant de vignobles loués ait lieu dans une installation que l’exploitation viticole éponyme loue pour une brève période auprès d’une autre exploitation viticole n’exclut pas que la vinification soit considérée comme ayant été entièrement effectuée dans l’exploitation viticole éponyme, au sens de cette disposition, pour autant que cette installation soit mise à la disposition exclusive de l’exploitation viticole éponyme pour la durée nécessaire à l’opération de pressurage et que cette dernière exploitation assume la direction effective, le contrôle étroit et permanent ainsi que la responsabilité de cette opération.

Sur les deuxième à quatrième questions

55

Par ses deuxième à quatrième questions, qu’il convient d’examiner ensemble, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 54, paragraphe 1, second alinéa, du règlement délégué 2019/33 doit être interprété en ce sens que, pour que la vinification puisse être considérée comme ayant été entièrement effectuée dans l’exploitation viticole éponyme, au sens de cette disposition, le pressurage de raisins doit être effectué par les collaborateurs de cette exploitation eux-mêmes ou bien s’il peut être effectué par des collaborateurs de l’exploitation viticole qui donne l’installation de pressurage en location, ces derniers collaborateurs étant habilités à intervenir en cas de problèmes survenant de manière inopinée dans le pressurage. Cette juridiction s’interroge encore sur l’incidence du fait que l’exploitation viticole qui donne l’installation de pressurage en location a un intérêt propre à la manière dont le pressurage est effectué, notamment en raison d’une clause contractuelle portant sur un supplément de prix lié au rendement et à la qualité par hectolitre de vin.

56

Il convient de préciser, tout d’abord, qu’aucune prescription ne ressort du libellé de l’article 54, paragraphe 1, second alinéa, du règlement délégué 2019/33 s’agissant du lien entre l’exploitation viticole éponyme et le personnel qui procède au pressurage des raisins.

57

Or, il convient de constater que l’objectif poursuivi par cette disposition, tel qu’il ressort des points 49 à 51 du présent arrêt, consistant à fournir une information aux consommateurs quant à l’assurance d’une qualité supérieure découlant de la mention concernée, ne peut être atteint que si ces consommateurs ne sont pas induits en erreur quant à l’identité des personnes responsables du processus de vinification.

58

Par conséquent, si de telles considérations n’excluent pas le fait même de confier certaines activités liées à la vinification à des collaborateurs de l’exploitation viticole qui donne l’installation de pressurage en location, il n’en reste pas moins que ces activités doivent être effectuées sous la direction effective, le contrôle étroit et permanent ainsi que la responsabilité exclusive de l’exploitation viticole éponyme (voir, par analogie, arrêt du 18 octobre 1988, Erzeugergemeinschaft Goldenes Rheinhessen, 311/87, EU:C:1988:483, point 15).

59

Pour que cette exigence soit satisfaite, il est nécessaire, s’agissant de l’opération de pressurage des raisins, que l’exploitation viticole éponyme surveille et contrôle de manière étroite et permanente que cette opération s’effectue conformément à ses propres prescriptions, sans qu’elle puisse se contenter, à cette fin, de renvoyer à d’éventuelles instructions données par l’exploitation viticole qui donne en location l’installation de pressurage.

60

Ensuite, cela implique que, en cas de survenance, au cours de cette opération, de problèmes imprévus nécessitant l’adoption de décisions immédiates, ces dernières soient prises par le propriétaire de l’exploitation viticole éponyme lui-même ou par les membres de son personnel. En effet, dans de tels cas d’urgence, les décisions nécessaires ne sauraient être déléguées à des tiers, dès lors qu’une telle délégation ne permettrait pas d’assurer le gage de qualité découlant du fait que la vinification est entièrement effectuée dans l’exploitation viticole éponyme et, partant, sous la direction effective de cette dernière.

61

Enfin, il convient d’ajouter qu’un éventuel intérêt propre de l’exploitation qui donne l’installation de pressurage en location à l’exploitation viticole éponyme, tel qu’un supplément de prix lié au rendement et à la qualité par hectolitre de vin, n’a pas d’incidence sur le point de savoir si la vinification est effectuée entièrement au sein de cette dernière exploitation, au sens de l’article 54, paragraphe 1, second alinéa, du règlement délégué 2019/33, dans la mesure où un tel intérêt n’est pas susceptible de compromettre la garantie que la vinification est effectuée sous la direction effective, le contrôle étroit et permanent et la responsabilité exclusive de l’exploitation viticole éponyme.

62

Eu égard aux considérations qui précèdent, il y a lieu de répondre aux deuxième à quatrième questions que l’article 54, paragraphe 1, second alinéa, du règlement délégué 2019/33 doit être interprété en ce sens qu’une vinification est entièrement effectuée dans l’exploitation viticole éponyme, au sens de cette disposition, même si l’opération de pressurage a été réalisé par des collaborateurs de l’exploitation viticole qui a donné l’installation de pressurage en location à l’exploitation viticole éponyme, pour autant que le propriétaire de cette dernière exploitation assume la direction effective, le contrôle étroit et permanent ainsi que la responsabilité de cette opération. Le fait que l’exploitation viticole qui donne l’installation de pressurage en location ait un intérêt propre à la manière dont le pressurage est effectué, notamment en raison d’une clause contractuelle portant sur un supplément de prix lié au rendement et à la qualité par hectolitre de vin, n’a pas d’incidence sur le point de savoir si la vinification peut être considérée comme ayant été effectuée dans l’exploitation viticole éponyme.

Sur les dépens

63

La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

 

Par ces motifs, la Cour (cinquième chambre) dit pour droit :

 

1)

L’article 54, paragraphe 1, second alinéa, du règlement délégué (UE) 2019/33 de la Commission, du 17 octobre 2018, complétant le règlement (UE) no 1308/2013 du Parlement européen et du Conseil en ce qui concerne les demandes de protection des appellations d’origine, des indications géographiques et des mentions traditionnelles dans le secteur vitivinicole, la procédure d’opposition, les restrictions d’utilisation, les modifications du cahier des charges, l’annulation de la protection, l’étiquetage et la présentation, tel que modifié par le règlement délégué (UE) 2021/1375 de la Commission, du 11 juin 2021,

doit être interprété en ce sens que :

le fait que le pressurage des raisins provenant de vignobles loués ait lieu dans une installation que l’exploitation viticole éponyme loue pour une brève période auprès d’une autre exploitation viticole n’exclut pas que la vinification soit considérée comme ayant été entièrement effectuée dans l’exploitation viticole éponyme, au sens de cette disposition, pour autant que cette installation soit mise à la disposition exclusive de l’exploitation viticole éponyme pour la durée nécessaire à l’opération de pressurage et que cette dernière exploitation assume la direction effective, le contrôle étroit et permanent ainsi que la responsabilité de cette opération.

 

2)

L’article 54, paragraphe 1, second alinéa, du règlement délégué 2019/33, tel que modifié par le règlement délégué 2021/1375,

doit être interprété en ce sens que :

une vinification est entièrement effectuée dans l’exploitation viticole éponyme, au sens de cette disposition, même si l’opération de pressurage a été réalisé par des collaborateurs de l’exploitation viticole qui a donné l’installation de pressurage en location à l’exploitation viticole éponyme, pour autant que le propriétaire de cette dernière exploitation assume la direction effective, le contrôle étroit et permanent ainsi que la responsabilité de cette opération. Le fait que l’exploitation viticole qui donne l’installation de pressurage en location ait un intérêt propre à la manière dont le pressurage est effectué, notamment en raison d’une clause contractuelle portant sur un supplément de prix lié au rendement et à la qualité par hectolitre de vin, n’a pas d’incidence sur le point de savoir si la vinification peut être considérée comme ayant été effectuée dans l’exploitation viticole éponyme.

 

Signatures


( *1 ) Langue de procédure : l’allemand.