ORDONNANCE DE LA COUR (huitième chambre)

1er mars 2022 (*) 

« Renvoi préjudiciel – Article 99 du règlement de procédure de la Cour – Politique commune de la pêche – Règlement (CE) no 1224/2009 – Régime de contrôle afin d’assurer le respect des règles de la politique commune de la pêche – Article 89 – Mesures visant à assurer le respect des règles – Article 90 – Sanctions pénales – Principe de proportionnalité – Interprétation de l’arrêt du 11 février 2021, K. M. (Sanctions infligées au capitaine de navire) (C‑77/20, EU:C:2021:112) »

Dans l’affaire C‑493/21,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par la Court of Appeal (cour d’appel, Irlande), par décision du 27 juillet 2021, parvenue à la Cour le 11 août 2021, dans la procédure pénale engagée contre

K. M.

en présence de :

Director of Public Prosecutions,

LA COUR (huitième chambre),

composée de MM. N. Jääskinen, président de chambre, M. Safjan (rapporteur) et N. Piçarra, juges,

avocat général : Mme L. Medina,

greffier : M. A. Calot Escobar,

vu la décision prise, l’avocate générale entendue, de statuer par voie d’ordonnance motivée, conformément à l’article 99 du règlement de procédure de la Cour,

rend la présente

Ordonnance

1        La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation du principe de proportionnalité consacré à l’article 49, paragraphe 3, de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci-après la « Charte ») ainsi que des articles 89 et 90 du règlement (CE) no 1224/2009 du Conseil, du 20 novembre 2009, instituant un régime communautaire de contrôle afin d’assurer le respect des règles de la politique commune de la pêche, modifiant les règlements (CE) no 847/96, (CE) no 2371/2002, (CE) no 811/2004, (CE) no 768/2005, (CE) no 2115/2005, (CE) no 2166/2005, (CE) no 388/2006, (CE) no 509/2007, (CE) no 676/2007, (CE) no 1098/2007, (CE) no 1300/2008, (CE) no 1342/2008 et abrogeant les règlements (CEE) no 2847/93, (CE) no 1627/94 et (CE) no 1966/2006 (JO 2009, L 343, p. 1).

2        Cette demande a été présentée dans le cadre d’une procédure pénale engagée contre K. M., le capitaine d’un navire de pêche, pour la détention à bord d’un appareil permettant la classification automatique par taille des harengs, des maquereaux et des chinchards sans y être installé ou implanté de manière à garantir une congélation immédiate et à empêcher le rejet en mer d’organismes marins.

 Le cadre juridique

3        Aux termes de l’article 89, paragraphes 1 à 3, du règlement no 1224/2009, intitulé « Mesures visant à assurer le respect des règles » :

« 1.      Les États membres veillent à ce que des mesures appropriées, y compris, conformément à leur législation nationale, l’ouverture d’une procédure administrative ou pénale, soient prises de manière systématique contre les personnes physiques ou morales soupçonnées d’avoir commis une infraction aux règles de la politique commune de la pêche.

2.      Le niveau global des sanctions et des sanctions accessoires est calculé, conformément aux dispositions pertinentes de la législation nationale, de telle manière que les contrevenants soient effectivement privés des avantages économiques découlant des infractions qu’ils ont commises sans préjudice du droit légitime à exercer une profession. Ces sanctions permettent également de produire des effets proportionnés à la gravité des infractions, de façon à décourager efficacement toute personne de commettre des infractions de même nature.

3.      Les États membres peuvent instaurer un système dans lequel l’amende est proportionnelle au chiffre d’affaires de la personne morale ou à l’avantage financier obtenu ou rendu envisageable du fait de la commission de l’infraction. »

4        L’article 90 de ce règlement, intitulé « Sanctions en cas d’infractions graves », dispose :

« 1.      Outre les activités visées à l’article 42 du règlement (CE) no 1005/2008 [du Conseil, du 29 septembre 2008, établissant un système communautaire destiné à prévenir, à décourager et à éradiquer la pêche illicite, non déclarée et non réglementée, modifiant les règlements (CEE) no 2847/93, (CE) no 1936/2001 et (CE) no 601/2004 et abrogeant les règlements (CE) no 1093/94 et (CE) no 1447/1999 (JO 2008, L 286, p. 1)], les activités ci-après sont également considérées comme des infractions graves [...] :

[...]

c)      le fait de ne pas débarquer toutes les espèces soumises à quota capturées au cours d’une opération de pêche, sauf si ce débarquement s’avère contraire aux obligations prévues par les règles de la politique commune de la pêche, dans des pêcheries ou des zones de pêche où ces règles s’appliquent.

2.      Les États membres veillent à ce que les personnes physiques ayant commis une infraction grave ou les personnes morales reconnues responsables d’une telle infraction fassent l’objet de sanctions administratives effectives, proportionnées et dissuasives conformément aux diverses sanctions et mesures prévues au chapitre IX du règlement [...] no 1005/2008.

3.      Sans préjudice de l’article 44, paragraphe 2, du règlement [...] no 1005/2008, les États membres imposent une sanction qui soit réellement dissuasive et, le cas échéant, calculée en fonction de la valeur des produits de la pêche obtenus dans le cadre de la commission d’une infraction grave.

4.      Lorsqu’ils fixent la sanction, les États membres tiennent également compte de la valeur du préjudice causé aux ressources halieutiques et au milieu marin concernés.

5.      Les États membres peuvent également, ou en lieu et place, avoir recours à des sanctions pénales effectives, proportionnées et dissuasives.

6.      Les sanctions prévues au présent chapitre peuvent être assorties d’autres sanctions ou mesures, en particulier celles qui sont décrites à l’article 45 du règlement [...] no 1005/2008. »

 Le litige au principal et les questions préjudicielles

5        L’affaire au principal s’inscrit dans le même cadre juridique et factuel que celui de l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 11 février 2021, K. M. (Sanctions infligées au capitaine de navire) (C‑77/20, EU:C:2021:112).

6        Dans cet arrêt, la Cour a dit pour droit que les articles 89 et 90 du règlement no 1224/2009, lus à la lumière du principe de proportionnalité consacré à l’article 49, paragraphe 3, de la Charte, doivent être interprétés en ce sens que, sous réserve des vérifications qu’il appartient à la juridiction de renvoi d’effectuer, ils ne s’opposent pas à une disposition nationale qui, pour sanctionner une violation de l’article 32 du règlement (CE) no 850/98 du Conseil, du 30 mars 1998, visant à la conservation des ressources de pêche par le biais de mesures techniques de protection des juvéniles d’organismes marins (JO 1998, L 125, p. 1), tel que modifié par le règlement (UE) no 227/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 13 mars 2013 (JO 2013, L 78, p 1) (ci-après le « règlement no 850/98 »), prévoit non seulement l’imposition d’une amende, mais également la saisie obligatoire des captures et des engins de pêche interdits ou non conformes trouvés à bord du navire concerné.

7        Éprouvant des doutes sur la portée de l’arrêt du 11 février 2021, K. M. (Sanctions infligées au capitaine de navire) (C‑77/20, EU:C:2021:112), la Court of Appeal (cour d’appel, Irlande), la juridiction de renvoi, a introduit la présente demande de décision préjudicielle en sollicitant des précisions sur la compatibilité du droit national en cause au principal avec le règlement no 1224/2009, lu à la lumière du principe de proportionnalité consacré à l’article 49, paragraphe 3, de la Charte, ainsi que sur la question de savoir si la juridiction nationale appelée à se prononcer sur les sanctions doit disposer d’un pouvoir d’appréciation afin d’être en mesure de moduler, le cas échéant, ces sanctions conformément aux exigences figurant aux articles 89 et 90 de ce règlement. À cette fin, elle a ajouté deux questions supplémentaires à la seule question qu’elle avait posée dans sa décision de renvoi ayant donné lieu à cet arrêt.

8        Dans ces conditions, la Court of Appeal (cour d’appel) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :

« 1)      Dans le cadre de la mise en œuvre de la politique commune de la pêche et des dispositions de l’article 32 du règlement [...] no 850/98 et dans le contexte de poursuites pénales engagées pour en exécuter les dispositions, si une disposition de droit national prévoit, en cas de déclaration de culpabilité après mise en accusation, non seulement une amende, mais aussi la saisie obligatoire de tous les poissons et de tous les engins de pêche trouvés à bord du navire sur [lequel] porte l’infraction, cette disposition est-elle compatible avec le règlement [...] no 1224/2009, et en particulier ses articles 89 et 90, ainsi qu’avec le principe de proportionnalité découlant des traités [...] et de l’article 49, paragraphe 3, de la [Charte] ?

2)      Les termes de l’article 89 et/ou de l’article 90 du règlement [no 1224/2009], ainsi que les exigences de proportionnalité prévues par la Charte et le droit de l’Union européenne, imposent-ils au tribunal qui détermine la peine de disposer d’un pouvoir d’appréciation pour ajuster, moduler ou atténuer l’étendue de la décision de saisie des captures et des engins, compte tenu notamment des circonstances visées aux articles 89 et 90 du règlement [no 1224/2009] ?

3)      Compte tenu de l’impact potentiel sur les moyens de subsistance d’un capitaine à la suite d’une saisie automatique et obligatoire de toutes les captures et de tous les engins, une disposition de droit national telle que l’article 28, paragraphe 5, sous b), [du Sea Fisheries and Maritime Jurisdiction Act 2006 (loi de 2006 relative à la pêche en mer et à la compétence maritime)], qui ne permet pas à une juridiction nationale d’examiner l’impact sur le droit de subvenir à ses besoins d’une personne déclarée coupable après mise en accusation, d’une infraction à cet article et au règlement (sauf dans le contexte de l’examen de l’amende qui pourrait être appropriée) peut-elle être considérée comme compatible avec les termes du règlement, de la Charte et du droit de l’[Union], eu égard au droit fondamental du capitaine d’exercer sa profession ? »

 Sur les questions préjudicielles

9        En vertu de l’article 99 de son règlement de procédure, la Cour peut, notamment lorsque la réponse à une question posée à titre préjudiciel peut être clairement déduite de la jurisprudence ou lorsque la réponse à une telle question ne laisse place à aucun doute raisonnable, décider, à tout moment, sur proposition du juge rapporteur, l’avocat général entendu, de statuer par voie d’ordonnance motivée.

10      Il convient de faire application de cette disposition dans la présente affaire.

11      Par ses questions, qu’il convient d’examiner ensemble, la juridiction de renvoi demande, en substance, si les articles 89 et 90 du règlement no 1224/2009, lus à la lumière du principe de proportionnalité consacré à l’article 49, paragraphe 3, de la Charte, doivent être interprétés en ce sens que, pour sanctionner une violation de l’article 32 du règlement no 850/98, ils confèrent aux juridictions nationales la compétence d’ajuster, de moduler ou d’atténuer l’étendue de la décision de saisie obligatoire de toutes les captures et de tous les engins de pêche trouvés à bord du navire concerné, par rapport à la gravité de l’infraction commise ou à des circonstances telles que celles visées aux articles 89 et 90 du règlement no 1224/2009, et d’examiner l’impact de la sanction sur le droit d’une personne reconnue coupable de subvenir à ses besoins.

12      À cet égard, il convient de relever que les articles 89 et 90 du règlement no 1224/2009 confient aux États membres le soin de veiller à ce que des mesures appropriées soient prises pour sanctionner les infractions aux règles de la politique commune de la pêche. Sans imposer des sanctions déterminées, ces articles établissent certains critères que les États membres doivent prendre en compte ainsi que le principe selon lequel ces sanctions doivent être effectives, proportionnées et dissuasives [arrêt du 11 février 2021, K. M. (Sanctions infligées au capitaine de navire), C‑77/20, EU:C:2021:112, point 30].

13      Ainsi, dans le respect de ces critères, tels qu’ils ressortent desdits articles 89 et 90, le choix des sanctions est laissé à la discrétion des États membres, ces derniers étant néanmoins tenus d’exercer leur compétence dans le respect du droit de l’Union et de ses principes généraux, et, par conséquent, dans le respect du principe de proportionnalité [voir, en ce sens, arrêt du 11 février 2021, K. M. (Sanctions infligées au capitaine de navire), C‑77/20, EU:C:2021:112, points 35 et 36 ainsi que jurisprudence citée].

14      En particulier, les mesures administratives ou répressives permises par une législation nationale ne doivent pas excéder les limites de ce qui est nécessaire à la réalisation des objectifs légitimement poursuivis par cette législation [arrêt du 11 février 2021, K. M. (Sanctions infligées au capitaine de navire), C‑77/20, EU:C:2021:112, point 37 et jurisprudence citée].

15      En outre, la rigueur des sanctions doit être en adéquation avec la gravité des violations qu’elles répriment, notamment en assurant un effet réellement dissuasif, tout en respectant le principe général de proportionnalité [arrêt du 11 février 2021, K. M. (Sanctions infligées au capitaine de navire), C‑77/20, EU:C:2021:112, point 38 et jurisprudence citée].

16      Compte tenu de ces critères, la Cour a fourni les éléments d’interprétation, aux points 40 à 56 de l’arrêt du 11 février 2021, K. M. (Sanctions infligées au capitaine de navire) (C‑77/20, EU:C:2021:112), afin de permettre à la juridiction nationale de déterminer si, dans l’affaire ayant donné lieu à cet arrêt, au regard de l’infraction commise par K. M., la saisie obligatoire des captures et des engins de pêche interdits ou non conformes, outre l’amende, est proportionnée à la réalisation de l’objectif légitime poursuivi par l’interdiction visant les appareils de classification prévue à l’article 32, paragraphe 1, du règlement no 850/98.

17      Il convient de relever que, dans ce contexte, la Cour a pris en compte, notamment aux points 44, 45, 51 et 52 de l’arrêt du 11 février 2021, K. M. (Sanctions infligées au capitaine de navire) (C‑77/20, EU:C:2021:112), le caractère obligatoire de la saisie des captures et des engins de pêche interdits ou non conformes pour certaines infractions établies prévue par la réglementation nationale en cause au principal ainsi que la circonstance que les juridictions nationales, en conséquence, ne pouvaient pas influencer l’étendue de la saisie.

18      À la suite de cet examen, la Cour a dit pour droit, comme cela a été rappelé au point 6 de la présente ordonnance, que les articles 89 et 90 du règlement no 1224/2009, lus à la lumière du principe de proportionnalité consacré à l’article 49, paragraphe 3, de la Charte, doivent être interprétés en ce sens que, sous réserve des vérifications qu’il appartient à la juridiction de renvoi d’effectuer, ils ne s’opposent pas à une disposition nationale qui, pour sanctionner une violation de l’article 32 du règlement no 850/98, prévoit non seulement l’imposition d’une amende, mais également la saisie obligatoire des captures et des engins de pêche interdits ou non conformes trouvés à bord du navire concerné.

19      Dans la présente affaire, la juridiction de renvoi précise que la législation nationale applicable prévoit non pas seulement la saisie obligatoire des seuls engins de pêche interdits ou non conformes et des captures obtenues grâce à l’utilisation de ces engins, mais également celle de toutes les captures et de tous les engins de pêche trouvés à bord du navire, sans qu’un lien de causalité soit exigé, en vertu de cette législation, entre le comportement infractionnel et l’objet de la décision de confiscation et de saisie.

20      Par ailleurs, la juridiction de renvoi relève que, en l’occurrence, la juridiction nationale qui a prononcé la peine n’a pas constaté que l’infraction constituait une « infraction grave », au sens du règlement no 1005/2008, et précise que, dans ce contexte, la poursuite d’une infraction suivant mise en accusation, avec jury, n’est pas nécessairement le reflet de la gravité de l’infraction. Cette juridiction indique, en outre, que la saisie obligatoire de l’ensemble des captures et des engins de pêche trouvés à bord du navire concerné s’applique indépendamment de la gravité de l’infraction aux dispositions de ce règlement.

21      À cet égard, il convient de constater qu’il appartient à cette juridiction, en application des critères d’appréciation fournis par la Cour, aux points 40 à 56 de l’arrêt du 11 février 2021, K. M. (Sanctions infligées au capitaine de navire) (C‑77/20, EU:C:2021:112), d’apprécier si, par rapport à l’infraction commise par K. M., la saisie obligatoire de l’ensemble des captures et des engins trouvés à bord du navire, outre l’amende, est proportionnée à la réalisation de l’objectif légitime poursuivi par l’interdiction visant les appareils de classification prévue à l’article 32, paragraphe 1, du règlement no 850/98.

22      Par ailleurs, il importe de rappeler que, ainsi que cela ressort des points 54 et 55 de l’arrêt du 11 février 2021, K. M. (Sanctions infligées au capitaine de navire) (C‑77/20, EU:C:2021:112), il incombe à ladite juridiction d’apprécier les éventuelles répercussions de la sanction sur le contrevenant quant à son droit légitime à exercer une profession conformément à l’article 89, paragraphe 2, du règlement no 1224/2009. Dans le cadre de cette appréciation, cette même juridiction doit également prendre en considération l’impact de la sanction sur le droit du contrevenant de subvenir à ses besoins.

23      Ce n’est qu’à la suite de cette appréciation que la juridiction de renvoi serait amenée, le cas échéant, à examiner la nécessité d’ajuster, de moduler ou d’atténuer l’étendue de la décision de saisie des captures et des engins de pêche.

24      Il convient également de relever dans ce contexte que, ainsi qu’il a été rappelé au point 11 des recommandations de la Cour à l’attention des juridictions nationales, relatives à l’introduction de procédures préjudicielles (JO 2019, C 380, p. 1), si, pour rendre sa décision, la Cour prend nécessairement en compte le cadre juridique et factuel du litige au principal, tel qu’il a été défini par la juridiction de renvoi dans sa demande de décision préjudicielle, elle n’applique pas, elle-même, le droit de l’Union à ce litige. Lorsqu’elle se prononce sur l’interprétation ou la validité du droit de l’Union, la Cour s’efforce de donner une réponse utile pour la solution du litige au principal, mais c’est à la juridiction de renvoi qu’il appartient d’en tirer les conséquences concrètes. Pour ces raisons, l’interprétation fournie par la Cour est normalement exprimée in abstracto (arrêt du 25 octobre 2018, Roche Lietuva, C‑413/17, EU:C:2018:865, point 43).

25      En outre, il y a lieu de rappeler que le principe de primauté du droit de l’Union consacre la prééminence du droit de l’Union sur le droit des États membres. Ce principe impose dès lors à toutes les instances des États membres de donner leur plein effet aux différentes normes de l’Union, le droit des États membres ne pouvant affecter l’effet reconnu à ces différentes normes sur le territoire desdits États (arrêt du 18 mai 2021, Asociaţia « Forumul Judecătorilor din România » e.a., C‑83/19, C‑127/19, C‑195/19, C‑291/19, C‑355/19 et C‑397/19, EU:C:2021:393 point 244).

26      En l’occurrence, il appartient à la juridiction de renvoi, eu égard aux éléments d’interprétation exposés ci-dessus, d’apprécier concrètement la conformité de la réglementation nationale en cause au principal avec les articles 89 et 90 du règlement no 1224/2009, lus à la lumière du principe de proportionnalité consacré à l’article 49, paragraphe 3, de la Charte (voir, par analogie, arrêt du 25 octobre 2018, Roche Lietuva, C‑413/17, EU:C:2018:865, point 44).

27      Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il convient de répondre aux questions préjudicielles que les articles 89 et 90 du règlement no 1224/2009, lus à la lumière du principe de proportionnalité consacré à l’article 49, paragraphe 3, de la Charte, doivent être interprétés en ce sens qu’il appartient aux juridictions nationales d’apprécier, en application des critères d’appréciation fournis par la Cour dans l’arrêt du 11 février 2021, K. M. (Sanctions infligées au capitaine de navire) (C‑77/20, EU:C:2021:112), si, par rapport à l’infraction commise, y compris la gravité de celle-ci, la saisie obligatoire de l’ensemble des captures et des engins de pêche trouvés à bord du navire concerné est proportionnée à la réalisation de l’objectif légitime poursuivi par l’interdiction visant les appareils de classification prévue à l’article 32, paragraphe 1, du règlement no 850/98, et d’examiner, le cas échéant, la nécessité d’ajuster, de moduler ou d’atténuer l’étendue de la décision de saisie des captures et des engins de pêche.

 Sur les dépens

28      La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens.

Par ces motifs, la Cour (huitième chambre) dit pour droit :

Les articles 89 et 90 du règlement (CE) no 1224/2009 du Conseil, du 20 novembre 2009, instituant un régime communautaire de contrôle afin d’assurer le respect des règles de la politique commune de la pêche, modifiant les règlements (CE) no 847/96, (CE) no 2371/2002, (CE) no 811/2004, (CE) no 768/2005, (CE) no 2115/2005, (CE) no 2166/2005, (CE) no 388/2006, (CE) no 509/2007, (CE) no 676/2007, (CE) no 1098/2007, (CE) no 1300/2008, (CE) no 1342/2008 et abrogeant les règlements (CEE) no 2847/93, (CE) no 1627/94 et (CE) no 1966/2006, lus à la lumière du principe de proportionnalité consacré à l’article 49, paragraphe 3, de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, doivent être interprétés en ce sens qu’il appartient aux juridictions nationales d’apprécier, en application des critères d’appréciation fournis par la Cour dans l’arrêt du 11 février 2021, K. M. (Sanctions infligées au capitaine de navire) (C77/20, EU:C:2021:112), si, par rapport à l’infraction commise, y compris la gravité de celle-ci, la saisie obligatoire de l’ensemble des captures et des engins de pêche trouvés à bord du navire concerné est proportionnée à la réalisation de l’objectif légitime poursuivi par l’interdiction visant les appareils de classification prévue à l’article 32, paragraphe 1, du règlement (CE) no 850/98 du Conseil, du 30 mars 1998, visant à la conservation des ressources de pêche par le biais de mesures techniques de protection des juvéniles d’organismes marins, tel que modifié par le règlement (UE) no 227/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 13 mars 2013, et d’examiner, le cas échéant, la nécessité d’ajuster, de moduler ou d’atténuer l’étendue de la décision de saisie des captures et des engins de pêche.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.