CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. GERARD HOGAN

présentées le 3 juin 2021 ( 1 )

Affaire C‑126/20

ExxonMobil Production Deutschland GmbH

contre

République fédérale d’Allemagne, représentée par l’Umweltbundesamt (Agence fédérale de l’environnement)

[demande de décision préjudicielle formée par le Verwaltungsgericht Berlin (tribunal administratif de Berlin, Allemagne)]

« Renvoi préjudiciel – Système d’échange de quotas d’émission de gaz à effet de serre – Régime transitoire concernant l’allocation harmonisée de quotas d’émission à titre gratuit – Décision 2011/278/UE de la Commission – Article 3, sous h) – Sous-installation avec émissions de procédé – Récupération du soufre – “Procédé Claus” – Émissions de dioxyde de carbone (CO2) contenu dans le gaz naturel – Portée de la notion de “sous-installation avec émissions de procédé” – Utilisation de matières premières contenant du carbone – Hiérarchie entre les différentes catégories de sous-installations – Demande d’allocation non adjugée à l’expiration d’une période d’échange – Transfert vers la prochaine période d’échange »

I. Introduction

1.

La présente demande de décision préjudicielle introduite par le Verwaltungsgericht Berlin (tribunal administratif de Berlin, Allemagne) porte principalement sur la portée de ce qui est qualifié de « sous-installation avec émissions de procédé » conformément à l’article 3, sous h), v), de la décision 2011/278/UE de la Commission ( 2 ). Il s’agit là de l’une des catégories pour lesquelles une installation pourrait se voir allouer des quotas d’émission à titre gratuit aux fins de la directive 2003/87/CE ( 3 ), qui établit un système de quotas d’émission de gaz à effet de serre pour les entreprises opérant dans l’Union.

2.

Si cette question est, certes, hautement technique – plus précisément celle de savoir si l’émission de dioxyde de carbone (CO2) qui est naturellement libéré dans le cadre d’un processus industriel appelé « procédé Claus » doit se voir octroyer des quotas d’émission à titre gratuit –, elle n’en est pas moins dotée d’une importance économique considérable. Cette importance est illustrée par le fait que la demande d’ExxonMobil Production Deutschland GmbH (ci-après « ExxonMobil ») s’élève à environ 3,5 millions de certificats d’une valeur de marché d’environ 78,5 millions d’euros pour la période allant de l’année 2013 à l’année 2019 ( 4 ). Avant d’examiner les faits et les questions juridiques qui se posent, il convient, toutefois, d’exposer d’abord les dispositions juridiques pertinentes.

II. Le cadre juridique

A.   Le droit de l’Union

1. La directive 2003/87

3.

La directive 2003/87 définit son champ d’application à l’article 2, paragraphe 1, aux termes duquel :

« La présente directive s’applique aux émissions résultant des activités indiquées à l’annexe I et aux gaz à effet de serre énumérés à l’annexe II. »

4.

Les définitions pertinentes figurent à l’article 3 de cette directive :

« [...]

b)

[on entend par] “émissions”, le rejet dans l’atmosphère de gaz à effet de serre, à partir de sources situées dans une installation [...] ;

[...]

e)

[on entend par] “installation”, une unité technique fixe où se déroulent une ou plusieurs des activités indiquées à l’annexe I ainsi que toute autre activité s’y rapportant directement qui est liée techniquement aux activités exercées sur le site et qui est susceptible d’avoir des incidences sur les émissions et la pollution ;

[...] »

5.

Le chapitre III de la directive 2003/87 est consacré aux règles relatives aux installations fixes. Son article 10 énonce le principe selon lequel, à partir de l’année 2013, les États membres mettent aux enchères l’intégralité des quotas qui ne sont pas délivrés à titre gratuit conformément aux articles 10 bis et 10 quater de cette directive.

6.

L’article 10 bis est intitulé « Règles communautaires transitoires concernant la délivrance de quotas à titre gratuit ». Le paragraphe 1, premier alinéa, de cet article prévoit que la Commission européenne adopte des mesures d’exécution pleinement harmonisées à l’échelle de l’Union relatives à l’allocation des quotas à titre gratuit.

7.

Alors que l’article 10 bis, paragraphe 11, de la directive 2003/87 prévoit que la quantité de quotas alloués gratuitement diminue chaque année en vue de parvenir à la suppression des quotas gratuits en 2027, le paragraphe 12 de cette disposition précise que les secteurs ou sous-secteurs qui sont exposés à un risque important de fuite de carbone ne sont pas soumis à une telle diminution.

8.

L’article 10 bis, paragraphes 13 à 18, de la directive 2003/87 prévoyait des règles relatives à la manière de déterminer les secteurs ou sous-secteurs considérés comme étant exposés à un risque important de fuite de carbone.

9.

L’article 12 de la directive 2003/87, intitulé « Transfert, restitution et annulation de quotas », prévoit à son paragraphe 3 :

« Les États membres s’assurent que, le 30 avril de chaque année au plus tard, tout exploitant d’une installation restitue un nombre de quotas [...] correspondant aux émissions totales de cette installation au cours de l’année civile écoulée [...] et que ces quotas soient ensuite annulés ».

10.

L’article 13 de cette directive, relatif à la validité des quotas, dispose :

« 1.   Les quotas délivrés à compter du 1er janvier 2013 sont valables pour les émissions produites au cours de périodes de huit ans commençant le 1er janvier 2013.

2.   Quatre mois après le début de chaque période visée au paragraphe 1, l’autorité compétente annule les quotas qui ne sont plus valables et qui n’ont pas été restitués et annulés conformément à l’article 12.

[...] »

11.

Le libellé de l’article 13 a été modifié à la suite de l’adoption de la directive (UE) 2018/410 ( 5 ). Cet article prévoit désormais ce qui suit :

« Les quotas délivrés à partir du 1er janvier 2013 sont valables pour une durée indéterminée. Les quotas délivrés à partir du 1er janvier 2021 comportent une mention indiquant au cours de quelle période de dix ans à compter du 1er janvier 2021 ils ont été délivrés, et ils sont valables pour les émissions produites dès la première année de cette période. »

2. La décision 2011/278

12.

Le considérant 12 de la décision 2011/278 prévoit ce qui suit :

« Dans les cas où il n’a pas été possible de calculer un référentiel de produit, mais où des émissions de gaz à effet de serre pouvant donner lieu à l’allocation de quotas d’émission à titre gratuit sont générées, il convient que ces quotas soient alloués sur la base d’options de repli génériques. Une hiérarchie de trois options de repli a été établie afin d’optimiser les réductions des émissions de gaz à effet de serre et les économies d’énergie pour certaines parties au moins des procédés de production concernés. Le référentiel de chaleur est utilisé pour les procédés consommant de la chaleur dans lesquels la chaleur mesurable est transportée au moyen d’un vecteur thermique. Le référentiel de combustibles est utilisé en cas de consommation de chaleur non mesurable. Les valeurs des référentiels de chaleur et de combustibles ont été calculées sur la base des principes de transparence et de simplicité en utilisant le rendement de référence d’un combustible largement disponible qui peut être considéré comme une solution de deuxième choix en termes d’efficacité sur le plan des émissions de gaz à effet de serre, compte tenu des techniques écoénergétiques. Pour les émissions de procédé, il convient que les quotas d’émission soient alloués sur la base des émissions historiques [...] »

13.

L’article 3, sous h), iv) et v), de la décision 2011/278 définit les sous‑installations avec émissions de procédé comme suit :

« h)

[on entend par] “sous-installation avec émissions de procédé” : les émissions des gaz à effet de serre énumérés à l’annexe I de la [directive 2003/87], autres que le dioxyde de carbone, qui sont produites hors des limites du système d’un référentiel de produit figurant à l’annexe I, ou les émissions de dioxyde de carbone qui sont produites hors des limites du système d’un référentiel de produit figurant à l’annexe I, du fait de l’une quelconque des activités suivantes, et les émissions liées à la combustion de carbone incomplètement oxydé résultant des activités suivantes aux fins de la production de chaleur mesurable, de chaleur non mesurable ou d’électricité, pour autant que soient déduites les émissions qu’aurait dégagées la combustion d’une quantité de gaz naturel équivalente au contenu énergétique techniquement utilisable du carbone incomplètement oxydé qui fait l’objet d’une combustion :

[...]

iv)

les synthèses chimiques dans lesquelles la matière carbonée participe à la réaction, lorsque l’objectif principal est autre que la production de chaleur ;

v)

l’utilisation d’additifs ou de matières premières contenant du carbone, lorsque l’objectif principal est autre que la production de chaleur ;

[...] »

14.

L’article 6 de la décision 2011/278 décrit le système des sous-installations. Les parties pertinentes dans le présent contexte prévoient :

« 1.   Aux fins de la présente décision, les États membres divisent chaque installation remplissant les conditions d’allocation de quotas d’émission à titre gratuit conformément à l’article 10 bis de la [directive 2003/87] en une ou plusieurs des sous-installations suivantes, en fonction des besoins :

a)

une sous-installation avec référentiel de produit ;

b)

une sous-installation avec référentiel de chaleur ;

c)

une sous-installation avec référentiel de combustibles ;

d)

une sous-installation avec émissions de procédé.

Les sous-installations correspondent, dans la mesure du possible, aux parties physiques de l’installation.

Pour les sous-installations avec référentiel de chaleur, les sous-installations avec référentiel de combustibles et les sous-installations avec émissions de procédé, les États membres déterminent clairement [...] si le procédé concerné est utilisé ou non pour un secteur ou sous-secteur considéré comme exposé à un risque important de fuite de carbone conformément à la décision 2010/2/UE [de la Commission, du 24 décembre 2009, établissant, conformément à la directive 2003/87/CE du Parlement européen et du Conseil, la liste des secteurs et sous‑secteurs considérés comme exposés à un risque important de fuite de carbone (JO 2010, L 1, p. 10)].

[...]

2.   La somme des intrants, des extrants et des émissions de chaque sous‑installation ne dépasse pas les intrants, les extrants et les émissions totales de l’installation. »

15.

L’article 7, paragraphe 7, et l’article 8, paragraphe 5, de la décision 2011/278 prévoient que les États membres veillent à l’absence de double comptage et de chevauchement entre les sous-installations.

3. Le règlement no 601/2012

16.

Ainsi que cela est prévu à l’article 14, paragraphe 1, de la directive 2003/87, le règlement (UE) no 601/2012 de la Commission, du 21 juin 2012, relatif à la surveillance et à la déclaration des émissions de gaz à effet de serre au titre de la directive [2003/87] ( 6 ) prévoit de telles règles.

17.

L’article 3 du règlement no 601/2012 contient certaines définitions qui font défaut soit dans la directive 2003/87, soit dans la décision 2011/278, par exemple :

« 30.   [on entend par] “émissions de procédé”, les émissions de gaz à effet de serre autres que les émissions de combustion résultant de réactions intentionnelles et non intentionnelles entre les substances ou de leur transformation, telles que la réduction chimique ou électrolytique des minerais métalliques, la décomposition thermique des substances et la fabrication de substances destinées à être utilisées en tant que produits ou matières de base ;

[...]

40.   [on entend par] “CO2 intrinsèque”[,] le CO2 qui entre dans la composition d’un combustible ;

[...] »

18.

L’article 2 du règlement no 601/2012 dispose :

« Le présent règlement s’applique à la surveillance et à la déclaration des émissions de gaz à effet de serre liées aux activités visées à l’annexe I de la directive [2003/87] [...] »

19.

L’article 48 du règlement no 601/2012, qui concerne le CO2 intrinsèque, dispose ce qui suit :

« 1.   Le CO2 intrinsèque qui est transféré dans une installation, y compris celui contenu dans le gaz naturel ou dans les effluents gazeux comme le gaz de haut fourneau ou le gaz de cokerie, est comptabilisé dans le facteur d’émission défini pour ce combustible.

[...]

Toutefois, lorsque le CO2 intrinsèque est émis ou transféré à partir de l’installation vers des entités qui ne relèvent pas de la directive [2003/87], il est comptabilisé dans les émissions de l’installation d’origine.

[...] »

4. La décision 2015/1814

20.

Une réserve de stabilité du marché a été créée par la décision (UE) 2015/1814 ( 7 ) afin de faire face aux déséquilibres structurels entre l’offre et la demande. L’article 1er, paragraphes 2, 3 et 5, de la décision 2015/1814 détermine les quotas qui sont mis dans cette réserve de marché. Il dispose :

« 2.   La quantité de 900 millions de quotas déduits des volumes à mettre aux enchères pendant la période 2014‑2016, fixée dans le règlement (UE) no 176/2014 [de la Commission, du 25 février 2014, modifiant le règlement (UE) no 1031/2010 afin, notamment, de déterminer les volumes de quotas d’émission de gaz à effet de serre à mettre aux enchères pour la période 2013‑2020 (JO 2014, L 56, p. 11)] conformément à l’article 10, paragraphe 4, de la directive [2003/87], n’est pas ajoutée aux volumes devant être mis aux enchères en 2019 et en 2020, mais elle est, au lieu de cela, placée dans la réserve.

3.   Les quotas non alloués à des installations conformément [aux dispositions relatives à la réserve pour les nouveaux entrants] et les quotas non alloués à des installations en raison de l’application de [dispositions relatives à la cessation d’activités] sont placés dans la réserve en 2020. [...]

[...]

5.   Chaque année, un certain nombre de quotas égal à 12 % du nombre total de quotas en circulation [...] est déduit du volume de quotas devant être mis aux enchères par les États membres au titre de l’article 10, paragraphe 2, de la [directive 2003/87] et est placé dans la réserve sur une période de douze mois à compter du 1er septembre de l’année en question, à moins que le nombre de quotas à placer dans la réserve ne soit inférieur à 100 millions [...] »

B.   Le droit allemand

1.   Treibhausgas-Emissionshandelsgesetz (TEHG)

21.

Le libellé de l’article 7, paragraphe 2, du Treibhausgas‑Emissionshandelsgesetz (loi relative aux échanges de droits d’émission de gaz à effet de serre), du 21 juillet 2011 (ci-après le « TEHG ») ( 8 ), dans sa version valable en 2011, correspondait au libellé de l’article 13 de la directive 2003/87 ( 9 ).

22.

L’article 9, paragraphe 1, du TEHG dispose :

« (1)   Les exploitants d’installations reçoivent une allocation à titre gratuit de droits d’émission conformément aux principes énoncés à l’article 10 bis [...] de la directive [2003/87] [...] et à ceux énoncés dans la décision [2011/278] [...] »

23.

L’annexe I, partie 2, du TEHG, intitulée « Activités », énumère, à son point 1, parmi les installations dont les émissions relèvent du champ d’application de cette loi, les « [u]nités de combustion destinées à brûler des combustibles dont la puissance calorifique totale de combustion est égale ou supérieure à 20 [mégawatts (MW)], dans une installation [...] ».

2.   Zuteilungsverordnung über Treibhausgas-Emissionsberechtigungen 2020

24.

L’article 2, point 29, sous b), ee), de la Zuteilungsverordnung über Treibhausgas-Emissionsberechtigungen 2020 ( 10 ) (règlement relatif à l’allocation des quotas d’émission de gaz à effet de serre pour la période d’échange des années 2013 à 2020), du 26 septembre 2011 (ci-après la « ZuV 2020 »), contient une définition d’une « sous-installation avec émissions de procédé » correspondant à celle figurant à l’article 3, sous h), v), de la décision 2011/78.

25.

L’article 3 de la ZuV 2020, intitulé « Constitution des éléments d’allocation », prévoit à son paragraphe 1 :

« Dans la demande d’allocation à titre gratuit de droits d’émission pour une installation, tous les intrants, extrants et émissions correspondantes de la période de référence fixée conformément à l’article 8, paragraphe 1, doivent être affectés aux éléments d’allocation suivants [...] :

1.

un ou plusieurs éléments d’allocation relatifs à la valeur d’émission par produit, conformément à [un élément d’allocation de produit] ;

2.

un élément d’allocation relatif à la valeur d’émission de chaleur [...], pour autant que les éléments d’allocation du point 1 ne sont pas applicables ;

3.

un élément d’allocation relatif à la valeur d’émission du combustible [...], pour autant que les éléments d’allocation des points 1 et 2 ne sont pas applicables, et

4.

un élément d’allocation avec émissions de procédé, conformément à l’article 2, point 29, pour autant que les éléments d’allocation des points 1, 2 et 3 ne sont pas applicables. »

III. Le litige au principal, la procédure devant la Cour et les questions préjudicielles

26.

ExxonMobil exploite une installation de traitement de gaz naturel en vue de la récupération du soufre à Großenkneten (Allemagne) (ci-après l’« installation »). Étant donné que cette activité implique la combustion de combustibles générant une puissance calorifique totale de combustion supérieure à 20 MW, l’installation relève du champ d’application du TEHG ( 11 ), qui transpose en droit national la directive 2003/87 ( 12 ).

27.

Cette installation est constituée, notamment, d’un dispositif de récupération du soufre (comprenant des dispositifs Claus, un surchauffeur de vapeur, un dispositif de chaudière à vapeur et un dispositif de moteurs à gaz), de dispositifs de désulfuration (nettoyage) et de déshydratation du gaz naturel, de dispositifs d’épuration des gaz résiduaires, ainsi que de dispositifs de torchage d’urgence. Les dispositifs Claus sont la source principale des émissions de CO2.

28.

L’installation sert à traiter le gaz naturel, extrait de réserves naturelles et composé d’une forte concentration de sulfure d’hydrogène (H2S), de vapeur d’eau (H2O), de méthane (CH4) et de CO2. En raison de sa forte teneur en sulfure d’hydrogène, le gaz naturel est également appelé « gaz acide ». Le CO2, tout comme les autres composants, est naturellement présent dans le gaz brut contenu dans le sous-sol. Sa teneur peut varier en fonction du site de forage et du gisement, mais il est, selon ExxonMobil ( 13 ), présent dans tous les gisements de gaz naturel européens. Afin que le gaz corresponde au niveau de qualité prescrit par le gestionnaire de réseau, le CO2 et d’autres composants naturels doivent être en partie retirés du gaz naturel avant qu’il ne soit injecté dans le réseau de transport.

29.

Avant de poursuivre, il convient de décrire brièvement le procédé Claus qui est au cœur de la présente procédure. Il s’agit d’un processus de désulfuration de gaz en plusieurs étapes, nommé d’après son inventeur allemand et qui constitue la méthode standard dans l’industrie depuis l’octroi d’un brevet du Royaume-Uni à cet effet en 1883. À la suite de l’application de ce processus chimique, le soufre est récupéré à partir du sulfure d’hydrogène présent dans le gaz naturel brut. Toutefois, il est important de noter que le CO2 est libéré en tant que produit dérivé naturel du processus chimique sans être lui-même impliqué dans la série de réactions chimiques qui produisent elles-mêmes le soufre.

30.

Dans l’usine de traitement du gaz naturel de Großenkneten, le gaz acide est nettoyé par absorption chimique avec un solvant (procédé sulfinol). Le solvant est régénéré et le H2S libéré est converti en soufre pur sous forme liquide dans les dispositifs Claus. Le CO2 prélevé du gaz acide, qui est intrinsèquement présent dans celui-ci, est ensuite libéré dans l’atmosphère au moyen d’une cheminée. Le CO2 ne participe pas à la réaction chimique de Claus qui conduit à la récupération du soufre élémentaire ( 14 ). La chaleur produite lors de l’étape thermique est captée dans une chaudière à récupération et utilisée dans l’installation.

31.

ExxonMobil a demandé l’allocation à titre gratuit de quotas d’émission pour l’installation. Cette demande était fondée sur des répartitions différentes des divers référentiels. Par décision du 17 février 2014, la Deutsche Emissionshandelsstelle (service d’échange de quotas d’émission, Allemagne, ci‑après la « DEHSt ») a alloué à ExxonMobil 4216048 quotas d’émission à titre gratuit pour la période d’échange allant de l’année 2013 à l’année 2020. Cette allocation reposait, en partie, sur l’application du référentiel de chaleur ( 15 ) et, en partie, sur l’application du référentiel de combustibles, le risque de fuite de carbone étant pris en compte. La DEHSt a toutefois refusé d’allouer à ExxonMobil les quotas d’émission à titre gratuit que celle-ci avait demandés au titre des émissions de procédé. Il a justifié ce refus par le fait que les émissions de CO2 ne résultaient pas du procédé Claus, mais que, au lieu de cela, le CO2 était déjà contenu dans la matière première utilisée pour le procédé. C’est ce refus spécifique qui est à l’origine de la présente procédure.

32.

Les réclamations introduites par ExxonMobil contre cette décision ont été rejetées par la décision de la DEHSt du 7 octobre 2019 ( 16 ). Dans cette décision, la DEHSt a réitéré qu’une allocation appliquant le référentiel de procédé en vertu de la seconde alternative de l’article 2, point 29, sous b), ee), de la ZuV 2020 ne pouvait pas être accordée parce que le CO2 n’est qu’un gaz associé qui a été libéré en tant que produit dérivé accessoire du procédé plutôt qu’un gaz participant à la réaction chimique de Claus elle-même. Il en a donc résulté que le CO2 émis dans l’atmosphère au moyen d’une cheminée à l’issue du procédé Claus ne pouvait pas bénéficier d’une allocation de certificats d’émission à titre gratuit.

33.

ExxonMobil a fait valoir sa demande en introduisant un recours le 8 novembre 2019 devant le Verwaltungsgericht Berlin (tribunal administratif de Berlin), la juridiction de renvoi en l’espèce.

34.

Les parties requérantes dans l’affaire C‑682/17 et dans la présente affaire sont identiques. Toutefois, l’installation en cause dans la présente affaire n’est pas un producteur d’électricité au sens de l’article 3, sous u), de la directive 2003/87 ( 17 ). En outre, selon la juridiction de renvoi, l’électricité produite par ExxonMobil dans son usine de Großenkneten est produite au moyen d’une cogénération à haut rendement et ne serait donc pas exclue, de manière générale, de l’allocation à titre gratuit de quotas d’émission (article 10 bis, paragraphe 4, de la directive 2003/87). Tel n’ayant pas été le cas de l’installation en cause dans l’affaire C‑682/17, la Cour avait décidé, déjà pour cette raison, qu’ExxonMobil n’avait pas droit à l’allocation de quotas à titre gratuit pour cette installation. De tels constats ont rendu superflue la réponse aux questions suivantes. La troisième question préjudicielle, sous a) et b), et la quatrième question préjudicielle dans l’affaire C‑682/17 ont maintenant été posées une nouvelle fois par la juridiction de renvoi dans les première à quatrième questions préjudicielles de la présente affaire.

35.

Dans ces conditions, le Verwaltungsgericht Berlin (tribunal administratif de Berlin) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :

« 1)

Le CO2 libéré du mélange gazeux dans l’atmosphère, dans le contexte du traitement du gaz naturel (se présentant sous forme de gaz acide) au cours du “procédé Claus” impliquant une séparation du CO2 naturellement présent dans le gaz naturel, constitue-t-il des émissions qui résultent, au sens de l’article 3, sous h), première phrase, de la [décision 2011/278], du procédé visé à l’article 3, sous h), v)[, de cette décision] ?

2)

Des émissions peuvent-elles “résulter”, au sens de l’article 3, sous h), première phrase, de la [décision 2011/278], d’un procédé au cours duquel le CO2 naturellement présent dans la ressource naturelle est libéré dans l’atmosphère, sans que ce procédé crée par ailleurs de CO2 supplémentaire ? Ou bien cette disposition exige-t-elle nécessairement que le CO2 libéré dans l’atmosphère naisse pour la première fois du fait de ce procédé ?

3)

Y a-t-il “utilisation” de matières premières contenant du carbone au sens de l’article 3, sous h), v), de la [décision 2011/278], lorsque, au cours du “procédé Claus”, le gaz naturel dans son état originel est utilisé pour la production de soufre et que, dans ce contexte, le CO2 naturellement présent dans le gaz naturel est libéré dans l’atmosphère sans qu’il participe à la réaction chimique du procédé ? Ou bien le terme “utilisation” implique-t-il nécessairement que le carbone participe, voire soit nécessaire, à la réaction chimique qui a lieu ?

4)

Si les [première à troisième questions] font l’objet d’une réponse affirmative :

Lorsqu’une installation soumise à l’obligation d’échanges de quotas d’émission de gaz à effet de serre satisfait aussi bien aux conditions matérielles pour constituer une sous-installation avec référentiel de chaleur qu’aux conditions matérielles pour constituer une sous-installation avec émissions de procédé, quel sera le référentiel retenu pour l’allocation de quotas d’émission à titre gratuit ? Le droit à une allocation de quotas au titre du référentiel de chaleur l’emporte-t-il sur le droit à une allocation au titre des émissions de procédé ? Ou bien le droit à une allocation de quotas au titre des émissions de procédé l’emporte-t-il, du fait du principe de spécialité, sur le droit à une allocation au titre du référentiel de chaleur et au titre du référentiel de combustibles ?

5)

Si les [première à quatrième] questions font l’objet d’une réponse affirmative :

Des droits à une allocation à titre gratuit de quotas d’émission supplémentaires pour la troisième période d’échange de quotas d’émission peuvent-ils être satisfaits après la fin de cette troisième période au moyen de quotas d’émission de la quatrième période d’échange, lorsque ce n’est qu’après expiration de la troisième période d’échange que l’existence d’un tel droit d’allocation a été constatée par le juge ? Ou bien les droits d’allocation non encore satisfaits s’éteignent-ils lorsque la troisième période d’échange prend fin ? »

36.

ExxonMobil, l’Agence fédérale de l’environnement ( 18 ) – en réponse à des questions écrites de la Cour –, le gouvernement allemand ( 19 ) et la Commission ont déposé des observations écrites devant la Cour et ont été représentés lors de l’audience du 24 février 2021.

IV. Appréciation

37.

Par ses première à troisième questions, la juridiction de renvoi demande en substance si le rejet de CO2 dans l’atmosphère, qui est naturellement présent dans la matière première employée pour la fabrication d’un produit et qui a lieu en dehors des limites du système d’un référentiel de produit, peut être considéré comme étant une « sous-installation avec émissions de procédé » conformément à l’article 3, sous h), v), de la décision 2011/278, lorsque le CO2 en question ne fait pas partie de la réaction chimique par laquelle ce produit est fabriqué. Les trois questions se concentrant sur différents aspects du libellé de l’article 3, sous h), v), de la décision 2011/278, il convient de les traiter ensemble.

A.   Observations liminaires : application du système d’échange de quotas d’émission au processus de récupération du soufre

38.

Ces questions supposent, toutefois, que les émissions de CO2 naturellement présent dans le gaz naturel relèvent effectivement du système d’échange de quotas d’émission. À première vue, il paraît surprenant de devoir traiter cette question, puisque la Cour a déjà constaté dans son arrêt dans l’affaire C‑682/17, qui concernait également un dispositif Claus, « qu’une installation telle que celle en cause au principal relève du champ d’application de la directive 2003/87 et, partant, du système d’échange de quotas d’émission institué par celle-ci, sans qu’il importe que le CO2 résultant de l’activité de cette installation soit naturellement présent ou non dans la matière première traitée par celle-ci » ( 20 ).

39.

Nonobstant ledit arrêt, le gouvernement allemand ainsi que la Commission font valoir que le système d’échange de quotas d’émission ne s’applique qu’aux émissions de gaz à effet de serre provoquées par la combustion – qui ne sont pas en cause en l’espèce – et non pas à celles résultant du CO2 qui est inhérent au gaz naturel et qui est émis en tant que produit dérivé naturel à l’issue du processus de récupération du soufre sans avoir été lui-même impliqué dans le processus de combustion. Ils font valoir que ces deux activités doivent être traitées séparément ( 21 ).

40.

Au vu de ce qui précède, je souhaiterais revenir sur le raisonnement de la Cour dans l’affaire C‑682/17, sans nécessairement réexaminer les mêmes arguments. Cela me semble approprié étant donné que les parties semblent s’accorder sur le fait que les installations en cause dans les deux affaires sont comparables.

41.

Dans son arrêt dans l’affaire C‑682/17, la Cour a tout d’abord examiné les exigences posées à l’article 2, paragraphe 1, de la directive 2003/87. C’est cette disposition qui définit le champ d’application de cette directive et donc, par extension, l’applicabilité du système d’échange de quotas d’émission de gaz à effet de serre. En application de ladite disposition, ladite directive s’applique aux émissions de gaz à effet de serre énumérées à l’annexe II de cette même directive – le CO2 figure parmi les émissions énumérées – si ces émissions sont « relatives aux activités énumérées à l’annexe I ». Parmi ces activités figure la « [c]ombustion de combustibles dans des installations dont la puissance calorifique totale de combustion est supérieure à 20 MW [...] » ( 22 ).

42.

La Cour a ensuite jugé, aux points 47 à 53 de cet arrêt, que, aux termes du libellé de l’article 2, paragraphe 1, et de l’article 3, sous b), de la directive 2003/87 – cette dernière disposition définit le terme « émissions » –, il n’était pas exigé que le gaz à effet de serre soit lui-même émis au cours des activités énumérées à l’annexe I. La Cour a étayé cette thèse en s’appuyant sur l’article 48, paragraphe 1, du règlement no 601/2012 relatif à la surveillance et à la déclaration des émissions au titre de la directive 2003/87. Cette disposition prévoit que le CO2 intrinsèque, tel que défini à l’article 3, point 40, de ce règlement, doit, lorsqu’il est contenu dans le gaz naturel, être comptabilisé dans le facteur d’émission défini pour ce combustible. La Cour a également invoqué la finalité poursuivie par la directive 2003/87, à savoir favoriser la réduction des émissions de gaz à effet de serre dans des conditions économiquement efficaces et performantes ( 23 ).

43.

Ce raisonnement a pour conséquence que les exploitants d’installations appliquant le procédé Claus, telles que celle en cause en l’espèce, doivent restituer un nombre de quotas d’émission qui, aux termes de l’article 12, paragraphe 3, de la directive 2003/87, doit correspondre aux émissions totales de cette installation. Le terme « installation » est défini à l’article 3, sous e), de la directive 2003/87 comme « une unité technique fixe où se déroulent une ou plusieurs des activités indiquées à l’annexe I ainsi que toute autre activité s’y rapportant directement qui est liée techniquement aux activités exercées sur le site et qui est susceptible d’avoir des incidences sur les émissions et la pollution ». Cette définition permet d’inclure une unité séparée si les activités qui y sont exercées se rapportent à l’installation concernée et sont liées techniquement avec cette installation ( 24 ). En revanche, ne relève pas de ce libellé l’argument du gouvernement allemand et de la Commission selon lequel, si une installation exerce plusieurs activités – comme en l’espèce, la combustion de combustibles d’une puissance calorifique supérieure à 20 MW qui est énumérée à l’annexe I ainsi que la récupération du soufre non mentionnée à l’annexe I –, l’activité non visée à l’annexe I ne relève pas du système d’échange de quotas d’émission ( 25 ).

44.

Dans l’arrêt Trinseo Deutschland ( 26 ), qui concernait une affaire dans laquelle l’installation de la requérante ne générait pas elle-même d’émissions énumérées à l’annexe II de la directive 2003/87, alors que son activité était énumérée à l’annexe I de cette directive – et qui portait donc, d’une certaine manière, sur une situation inverse à la présente affaire –, la Commission avait soutenu que les « émissions indirectes » provenant de la production de chaleur devaient être prises en considération aux fins de l’application du système d’échange de quotas d’émission, militant ainsi en faveur d’une interprétation des émissions détachées de l’installation. La Cour a néanmoins respecté le libellé de l’article 3, sous b), de la directive 2003/87 qui lie les émissions à l’installation. En ce qui me concerne, je ne vois aucune raison de m’écarter de ce libellé clair.

45.

Dans la mesure où l’article 6 de la décision 2011/278 divise les installations en sous-installations, il ne s’agit que d’un exercice analytique aux fins de l’application des référentiels. Cette disposition précise clairement que cela n’est fait qu’aux fins de la décision 2011/278. Les termes de la disposition qui précisent que les installations sont divisées en sous-installations précisent également que cette division n’affecte en rien la notion d’« installation » telle que définie à l’article 3, sous e), de la directive 2003/87.

46.

Compte tenu de ces considérations, j’estime que, conformément aux constatations de la Cour dans l’arrêt dans l’affaire C‑682/17, le système d’échange de quotas d’émission s’applique non seulement aux émissions de CO2 résultant du processus de combustion, mais également aux émissions provenant du processus de récupération du soufre se déroulant dans la même installation.

47.

Dans la mesure où la Commission fait valoir que l’inclusion, dans le système, d’activités qui n’ont pas été incluses dans l’annexe I serait contraire à la décision du législateur de l’Union d’inclure dans le système uniquement les activités qui présentent un potentiel particulier de réduction des émissions de gaz à effet de serre ( 27 ), la Cour a déjà relevé, dans son arrêt dans l’affaire C‑682/17, que, « même si le CO2 est présent dans la composition du gaz acide, l’activité de combustion de combustibles exercée par une installation telle que l’installation en cause au principal, aux fins de la désulfuration du gaz naturel et de la récupération du soufre selon le procédé Claus, présente un certain potentiel de réduction des émissions de CO2, dès lors que la teneur du gaz acide en CO2 est susceptible de varier selon les gisements. Contrairement à ce qu’a fait valoir ExxonMobil, il est sans importance, à cet égard, que cette teneur ne soit pas systématiquement prévisible » ( 28 ).

B.   Sur les première à troisième questions préjudicielles : le CO2 libéré dans l’atmosphère dans le contexte du traitement du gaz acide au cours du procédé Claus peut-il être qualifié d’« émissions de procédé » au sens de l’article 3, sous h), v), de la décision 2011/278 ?

48.

Si le gouvernement allemand, représenté par le ministère fédéral de l’Économie et de l’Énergie, et la Commission ne sont pas d’accord avec l’Agence fédérale de l’environnement sur la question de savoir si le CO2 libéré dans l’atmosphère dans le contexte du processus de récupération du soufre relève du système d’échange de quotas d’émission, il est constant entre ces trois parties qu’aucun quota gratuit ne doit être accordé pour ces émissions. Il convient toutefois de rappeler que tout argument du gouvernement allemand et de la Commission en ce sens que ces émissions ne peuvent pas être considérées comme étant des émissions de procédé visées à l’article 3, sous h), v), de la décision 2011/278 s’inscrit dans un contexte où, selon leurs observations, ExxonMobil n’est pas tenue de restituer des quotas au titre de ces émissions.

49.

Les première à troisième questions de la juridiction de renvoi portent sur différents éléments de l’article 3, sous h), v), de la décision 2011/278 qui définit une « sous-installation avec émissions de procédé » ( 29 ). Pour que cette disposition s’applique, les éléments constitutifs suivants doivent être remplis : il doit s’agir, premièrement, d’émissions de CO2 qui, deuxièmement, sont produites en dehors des limites du système d’un référentiel de produit énuméré à l’annexe I et, enfin, troisièmement, qui résultent de « l’utilisation [...] de matières premières contenant du carbone, lorsque l’objectif principal est autre que la production de chaleur ». Il est constant entre les parties que les deux premières conditions sont remplies. L’émission de CO2 (intrinsèque) a lieu en tant que produit dérivé naturel à l’issue du procédé de récupération du soufre, procédé pour lequel il n’existe pas de référentiel de produit ( 30 ). C’est donc la troisième condition qui fait l’objet d’un désaccord.

50.

La juridiction de renvoi examine trois aspects de ce troisième critère : premièrement, l’émission de CO2 qui est intrinsèque peut-elle « résulter » de tout procédé supplémentaire et, deuxièmement, ce CO2 intrinsèque peut-il être considéré comme faisant l’objet d’une « utilisation » au cours d’un procédé s’il ne participe pas à la réaction chimique ? Une troisième question qui est examinée est celle de savoir s’il s’agit de « matières premières contenant du carbone ». Les parties qui plaident en faveur d’une réponse négative à cette troisième question semblent soutenir que la matière première faisant l’objet d’une « utilisation » au cours du procédé est non pas le gaz acide, mais le sulfure d’hydrogène qui ne contient pas de CO2. En revanche, il est constant que l’objectif principal du processus de récupération du soufre n’est pas la production de chaleur.

51.

Selon une jurisprudence constante de la Cour, l’interprétation d’une disposition du droit de l’Union exige que, outre le texte de la disposition pertinente, qui, « selon les principes d’interprétation traditionnels [...] constitue toujours le point de départ et en même temps la limite de toute interprétation » ( 31 ), il soit également tenu compte de son contexte et des objectifs poursuivis par la réglementation dont elle fait partie ( 32 ).

1. Interprétation littérale

52.

En prenant comme point de départ le texte de l’article 3, sous h), v), de la décision 2011/278, les émissions de CO2 doivent résulter de l’utilisation d’additifs ou de matières premières contenant du carbone, lorsque l’objectif principal est autre que la production de chaleur. Étant donné que les émissions de dioxyde de carbone doivent résulter du procédé, et non pas de la production de dioxyde de carbone, il me semble que si le CO2 intrinsèque est émis au terme d’un procédé tel que le procédé Claus, ce processus relève bien du libellé de cette disposition, même si le CO2 n’est pas effectivement utilisé dans le cadre d’une réaction chimique au cours de ce procédé ( 33 ). Une question bien plus difficile est celle de savoir si ces émissions de CO2 peuvent être considérées comme résultant de l’utilisation d’additifs ou de matières premières contenant du carbone.

53.

Là encore, je n’ai guère de doutes quant à la notion de « matière première ». Selon le Cambridge Dictionary ( 34 ), la « matière première » est « toute matière, telle que l’huile, le coton ou le sucre dans son état naturel, avant qu’elle ne soit transformée en vue d’une utilisation ». Certes, il est vrai que seul le sulfure d’hydrogène est effectivement transformé au cours du procédé Claus, alors que le CO2 contenu dans le gaz acide ne fait que traverser le dispositif Claus sans participer au procédé. Si l’on examine seulement le sens de ce mot, selon moi, les termes « matières premières » ne me semblent pas limités aux parties d’une matière qui font l’objet d’une transformation active. Il peut être correct d’affirmer, comme le fait l’Agence fédérale de l’environnement, que si le CO2 était séparé du gaz acide avant qu’il ne soit traité dans le dispositif Claus, le CO2 ne serait pas une matière première, car il ne fait pas l’objet d’un traitement supplémentaire, alors que tel serait le cas du gaz restant ( 35 ). Si, toutefois, cette étape préalable n’a pas lieu, cela ne signifie pas qu’une matière contenant du CO2 qui arrive dans une installation pour y être traitée n’est pas une matière première, juste parce qu’une partie seulement de cette matière y est traitée.

54.

La question du lien de causalité, à savoir s’il peut être considéré que les émissions de CO2 résultent de l’utilisation de cette matière première, est toutefois moins claire. Ici, une interprétation littérale indique plutôt que ces émissions ne relèvent pas du libellé de l’article 3, sous h), v), de la décision 2011/278. De nouveau, une consultation du Cambridge Dictionary ( 36 ) indique que la définition que l’on y trouve et qui décrit le mieux l’utilisation du mot en l’espèce est « le fait d’utiliser quelque chose, ou la période de temps au cours de laquelle une chose est utilisée », le verbe « utiliser » signifiant « mettre une chose, telle qu’un outil, une compétence ou un bâtiment, au service d’une fin précise » ( 37 ). Selon moi, cette mise au service d’une fin précise implique que quelque chose est fait avec cette partie de la matière première – à savoir le contenu carbone auquel il est spécifiquement fait référence.

55.

Il est constant entre les parties que le CO2 ne participe pas à la réaction chimique dans le cadre du processus Claus. Néanmoins, ExxonMobil fait valoir qu’elle soumet le CO2 intrinsèque à une certaine utilisation. Selon ExxonMobil, le CO2 joue un rôle technique dans le cadre du procédé Claus en tant que gaz incombustible ayant une fonction de régulation de la température pour le contrôle techniquement nécessaire de la température de combustion lors du procédé Claus pour la production de soufre. L’Agence fédérale de l’environnement ne semble pas contester ce point. Toutefois, ainsi que cela a été relevé par le représentant de celle-ci lors de l’audience, il ne s’agit pas d’un rôle nécessaire, car il existe d’autres moyens de parvenir au même résultat ( 38 ). Ce qui précède soulève, à son tour, la question supplémentaire de savoir si une certaine utilisation du CO2 suffit pour que le procédé puisse être qualifié de « sous-installation avec émissions de procédé », ou s’il faut que son utilisation soit nécessaire au procédé ( 39 ).

56.

Il a également été soutenu que, puisque l’article 3, sous h), iv), de la décision 2011/278 vise spécifiquement les « synthèses chimiques dans lesquelles la matière carbonée participe à la réaction », alors que l’article 3, sous h), v), de cette décision ne le fait pas, une telle participation à une réaction chimique ne saurait être exigée par cette dernière disposition.

57.

Si l’on s’arrête à ce stade, et bien que je considère que, en ce qui concerne le terme déterminant « utilisation », tel qu’il figure à l’article 3, sous h), v), de la décision 2011/278, le libellé plaide en faveur d’une interprétation selon laquelle le CO2 doit jouer un rôle actif et nécessaire au cours du procédé, il peut se révéler opportun, conformément à une jurisprudence constante, d’avoir égard à l’économie générale de la directive 2003/87 et de la décision 2011/278 ainsi qu’aux objectifs poursuivis par celles-ci afin d’aider dans le processus d’interprétation ( 40 ).

2. Interprétation contextuelle et téléologique

58.

Il ressort d’une jurisprudence constante de la Cour que la directive 2003/87 et, partant, la décision 2011/278 qui met en œuvre cette directive visent à établir un système d’échange de quotas d’émission de gaz à effet de serre, lequel tend à la réduction de ces émissions dans l’atmosphère à un niveau empêchant toute perturbation anthropique dangereuse du climat et dont l’objectif final est la protection de l’environnement ( 41 ). Ce système repose sur une logique économique qui incite les participants à émettre une quantité de gaz à effet de serre inférieure aux quotas qui leur ont été initialement alloués, afin d’en céder le surplus à d’autres participants ( 42 ). Afin d’atteindre cet objectif, l’article 10 bis de la directive 2003/87 prévoit, pour les installations relevant de certains secteurs d’activités, l’allocation de quotas d’émission à titre gratuit, dont la quantité, conformément au paragraphe 11 de cette disposition, est réduite graduellement au cours de la période 2013‑2020, afin de parvenir à la suppression totale de ces quotas gratuits pour l’année 2027 ( 43 ).

59.

Cela signifie que les règles d’allocation harmonisée de quotas d’émission à titre gratuit au titre de l’article 10 bis de la directive 2003/87 pour lesquelles la décision 2011/278 détermine les règles ont un caractère exceptionnel (et, d’ailleurs, temporaire). En outre, l’article 3, sous c), d) et h), de la décision 2011/278 ( 44 ) définit les « référentiels de repli », qui n’entrent en jeu que si les « émissions correspondantes [...] ne sont pas couvert[e]s par une sous-installation avec référentiel de produit » ( 45 )/« sont produites hors des limites du système d’un référentiel de produit » ( 46 ). La Cour a déjà jugé dans son arrêt INEOS qu’il s’ensuivait que l’article 3, sous h), iv), de la décision 2011/278 ne saurait faire l’objet d’une interprétation large ( 47 ). Il doit en aller de même pour toutes les activités énumérées à l’article 3, sous h), de la décision 2011/278.

60.

Par conséquent, je ne saurais souscrire au point de vue selon lequel le fait que l’article 3, sous h), iv), de la décision 2011/278 mentionne spécifiquement la participation d’une matière carbonée dans les synthèses chimiques, alors que l’article 3, sous h), v), de cette décision ne le fait pas, signifie que le terme « utilisation » contenu dans cette dernière disposition doit faire l’objet d’une interprétation qui est si large qu’il ne serait plus couvert par le terme « utilisation », simplement pour le distinguer des cas visés par la première disposition. Le terme « utilisation » est en réalité plus large et pourrait englober une « utilisation » qui ne consiste pas en une réaction chimique. Le terme « utilisation » implique toutefois que la matière première contenant du carbone doit être nécessaire à l’objectif principal qui est poursuivi (qui n’est pas la production de chaleur) ( 48 ).

61.

La définition des « émissions de procédé » figurant à l’article 3, point 30, du règlement no 601/2012 est susceptible de confirmer cette interprétation plus stricte. Selon cette définition, on entend par « émissions de procédé »« les émissions de gaz à effet de serre autres que les émissions de combustion résultant de réactions intentionnelles et non intentionnelles entre les substances ou de leur transformation [...] ». Or, force est de constater que le CO2 contenu dans le gaz acide ne résulte pas d’une réaction intentionnelle ou non intentionnelle entre les substances ou de leur transformation.

62.

Le règlement no 601/2012 porte sur la surveillance et la déclaration des émissions de gaz à effet de serre. L’article 14 de la directive 2003/87 prévoyait l’adoption par la Commission d’un règlement à cet effet. Le règlement no 601/2012 ne traite donc pas, et encore moins ne définit, les cas dans lesquels des quotas d’émission seront alloués à titre gratuit. Pour cette même raison, le fait que l’article 48 du règlement no 601/2012 contient une disposition précisant à quelle installation le CO2 intrinsèque doit être attribué aux fins de la surveillance et de la déclaration des émissions de gaz à effet de serre ne fournit aucune indication réelle sur le point de savoir si des quotas d’émissions de procédé peuvent être accordés gratuitement au titre de telles émissions intrinsèques.

63.

Ainsi que l’a déjà relevé l’avocat général Saugmandsgaard Øe dans ses conclusions dans l’affaire ExxonMobil Production Deutschland (C‑682/17, EU:C:2019:167), la notion d’« émissions de procédé » figurant à l’article 3, point 30, du règlement no 601/2012 et la notion de « sous-installation avec émissions de procédé » figurant à l’article 3, sous h), de la décision 2011/278 ne se chevauchent que partiellement parce que les « émissions de procédé » sont, dans une large mesure, couvertes par les référentiels de produits prévus à l’annexe I de cette décision ( 49 ).

64.

Je serais également réticent à l’idée de tirer des conclusions du fait que l’article 48, paragraphe 1, du règlement no 601/2012 contient une disposition prévoyant que « [l]e CO2 intrinsèque qui est transféré dans une installation, y compris celui contenu dans le gaz naturel [...], est comptabilisé dans le facteur d’émission défini pour ce combustible ». Si l’on considère que le gaz naturel est un combustible ( 50 ), comme la Cour semble le suggérer dans son arrêt dans l’affaire C‑682/17 ( 51 ), il n’en demeure pas moins que l’article 48, paragraphe 1, du règlement no 601/2012 ne contient qu’une règle ayant trait à la méthode de surveillance. Il ne fournit aucune indication réelle quant au point de savoir si les éventuelles allocations de quotas d’émissions de procédé peuvent être accordées gratuitement pour de telles émissions intrinsèques.

65.

S’agissant de la finalité de l’article 3, sous h), v), de la décision 2011/278 et des sous-installations avec émissions de procédé en général, les parties divergent sur cette question. ExxonMobil est, quant à elle, d’avis que, puisque le risque de fuite de carbone pour l’industrie de la récupération du soufre est reconnu, il doit donc y avoir une allocation de quotas d’émission à titre gratuit pour les émissions de CO2 intrinsèque. Compte tenu de ce « résultat nécessaire », l’article 3, sous h), v), de la décision 2011/278 doit, de l’avis d’ExxonMobil, être applicable puisqu’il est évident qu’aucune des autres options ne s’applique. L’Agence fédérale de l’environnement soutient, en revanche, que les sous-installations avec émissions de procédé peuvent uniquement être reconnues pour des émissions résultant de l’une des catégories d’activités énumérées à l’annexe I de la directive 2003/87. Dès lors que, dans la présente affaire, seule la combustion de combustibles relève de cette catégorie, il s’ensuit que seules les émissions qui en résultent peuvent être prises en compte au titre des quotas gratuits lorsqu’il n’existe pas de référentiel de produit comme dans la présente affaire. Cela signifierait que la finalité de l’article 3, sous h), de la décision 2011/278 se limite à prévoir des quotas d’émission à titre gratuit si les émissions de CO2 résultent d’une activité (supplémentaire) énumérée à l’annexe I de la directive 2003/87 – autre que la combustion de combustibles – pour laquelle il n’existe pas de référentiel de produit.

a) Le rôle joué par le « risque important de fuite de carbone » dans le système d’échange de quotas

66.

Comme indiqué au considérant 24 de la directive 2009/29, la fuite de carbone décrit une situation dans laquelle « les autres pays développés et les autres gros émetteurs de gaz à effet de serre ne participeraient pas à [un accord international ambitieux sur le changement climatique] [...], ce qui pourrait causer une augmentation des émissions de gaz à effet de serre dans les pays tiers dans lesquels l’industrie en question ne serait pas soumise à des restrictions comparables en matière d’émissions de carbone [...] Ce phénomène pourrait compromettre l’intégrité environnementale et l’efficacité des actions communautaires » ( 52 ). Afin d’éviter que cela se produise, la directive 2003/87 prévoit des mesures spécifiques. Premièrement, aux termes de l’article 10 bis, paragraphe 12, de cette directive, les quotas gratuits délivrés annuellement – conformément à l’article 10 bis, paragraphe 1, de ladite directive – seront maintenus au niveau de 100 % pour la troisième période d’échange ( 53 ). Il n’en va pas de même pour les installations des secteurs et des sous-secteurs qui ne sont pas exposés à un risque significatif de fuite de carbone pour lesquelles l’allocation initiale pour l’année 2013 doit être limitée à 80 % de la quantité attribuée conformément à l’article 10 bis, paragraphe 11, de la même directive. Dans ces secteurs, la quantité de quotas gratuits diminuera chaque année en quantités égales, pour atteindre 30 % de quotas gratuits à partir de l’année 2020, conformément à l’article 10 bis, paragraphe 11, de la directive 2003/87 ( 54 ).

67.

L’article 10 bis, paragraphe 6, de cette directive prévoit également que « [l]es États membres peuvent [...] prendre des mesures financières en faveur des secteurs ou des sous-secteurs considérés comme [étant] exposés à un risque significatif de fuite de carbone en raison des coûts liés aux émissions de gaz à effet de serre répercutés sur les prix de l’électricité, afin de compenser ces coûts et dès lors que ces mesures financières sont conformes aux règles en matière d’aides d’État en vigueur et à venir dans ce domaine ».

68.

Il résulte clairement de ce qui précède que, comme l’a déjà relevé l’avocat général Wahl dans l’affaire ArcelorMittal Atlantique et Lorraine, « la directive ne dit pas que les secteurs considérés comme [étant] exposés à un risque significatif de fuite de carbone devraient en toutes circonstances se voir allouer des quotas à titre gratuit correspondant à l’intégralité de leurs émissions de gaz à effet de serre » ( 55 ). Au contraire, en ce qui concerne l’allocation de quotas d’émission à titre gratuit, il est obligatoire que des quantités de quotas gratuits soient allouées conformément aux règles adoptées en vertu de l’article 10 bis, paragraphe 1, de la directive 2003/87. Ces règles déterminent la quantité provisoire de quotas. Ce n’est qu’à ce moment-là que l’article 10 bis, paragraphe 12, de la directive 2003/87 peut être appliqué, en ne réduisant pas le nombre de quotas atteint. Rien dans ces dispositions ne prévoit la prise en compte du « risque significatif de fuite de carbone » lorsqu’il s’agit de décider si les quotas d’émission peuvent être alloués gratuitement ( 56 ).

69.

Il résulte de tout ce qui précède qu’il serait contraire au libellé ainsi qu’à l’économie de la directive 2003/87 d’interpréter largement la condition de causalité prévue à l’article 3, sous h), v), de la décision 2011/278 du seul fait que le procédé en cause est considéré comme étant exposé à un risque significatif de fuite de carbone.

b) Finalité poursuivie par la « sous-installation avec émissions de procédé »

70.

ExxonMobil soutient que l’objectif poursuivi par le législateur de l’Union au moyen des sous-installations avec émissions de procédé, au sens de l’article 3, sous h), de la décision 2011/278, est de créer une sous-installation pour des procédés donnant lieu à des émissions inévitables de CO2, mais pour lesquels aucun référentiel de produit n’a été déterminé. Cette thèse ne saurait toutefois être clairement déduite de la décision 2011/278. Il est simplement indiqué, au considérant 12 de la décision 2011/278, que « [d]ans les cas où il n’a pas été possible de calculer un référentiel de produit, mais où des émissions de gaz à effet de serre pouvant donner lieu à l’allocation de quotas d’émission à titre gratuit sont générées, il convient que ces quotas soient alloués sur la base d’options de repli génériques [...] Pour les émissions de procédé, il convient que les quotas d’émission soient alloués sur la base des émissions historiques » ( 57 ).

71.

L’article 10 bis, paragraphe 1, quatrième alinéa, de la directive 2003/87 dispose que, « [p]our chaque secteur et sous-secteur, en principe, le référentiel est calculé pour les produits et non pour les intrants, de manière à maximiser la réduction des émissions de gaz à effet de serre et les gains d’efficacité énergétique tout au long du processus de production du secteur ou du sous-secteur concerné » ( 58 ). Cette disposition signifie que les émissions de procédé seront généralement incluses dans un référentiel de produit. Il n’a, toutefois, pas toujours été possible de calculer un référentiel de produit. L’une des raisons réside dans le fait que de nombreuses installations sont incluses dans le système d’échange de quotas d’émission seulement parce qu’elles exploitent des unités de combustion de combustibles dans des installations dont la puissance calorifique totale de combustion est supérieure à 20 MW. Cette définition large inclut des installations dans divers secteurs qui ne relèvent par ailleurs pas du système d’échange de quotas d’émission. Comme expliqué dans l’étude commandée par la Commission « Methodology for the free allocation of emission allowances in the EU ETS post 2012 » (Méthodologie pour l’allocation de quotas d’émission à titre gratuit dans le système d’échange de quotas d’émission de l’Union après 2012), les installations dont la puissance calorifique totale de combustion est inférieure à 20 MW ou qui reçoivent de la chaleur provenant d’installations appartenant à un autre propriétaire ne sont pas couvertes. Le fait qu’une partie significative des unités de production produisant le produit n’ait pas été incluse dans le système d’échange de quotas d’émission a rendu difficile le calcul d’un référentiel de produit ( 59 ). C’est dans ces conditions que ce que l’on pourrait appeler les « options de repli » ont été développées, en ayant à l’esprit ce type d’affaires.

72.

Tout ce qui précède signifie qu’il n’y a pas de lien immédiat entre le caractère inévitable des émissions et les options de repli. L’article 10 bis, paragraphe 3, de la directive 2003/87, qui n’exclut spécifiquement que les producteurs d’électricité de l’allocation de quotas à titre gratuit (avec quelques exceptions), ne permet pas non plus de corroborer une approche aussi large. Il aurait été aisé de prévoir que la méthode d’antériorité s’applique à toutes les émissions soumises au système d’échange de quotas d’émission, à l’exception de celles couvertes par un référentiel de procédé, un référentiel de chaleur ou un référentiel de combustibles. Au lieu de cela, une définition spécifique a été retenue pour les sous-installations avec émissions de procédé. En outre, ainsi que l’a souligné la représentante de l’Agence fédérale de l’environnement lors de l’audience, même si un référentiel de produit existe, toutes les émissions qui sont des produits dérivés inévitables de procédés chimiques ne sont pas nécessairement couvertes par ce référentiel de produit ( 60 ).

73.

Il apparaît donc que la directive 2003/87 n’a pas pour finalité de prévoir l’allocation de quotas d’émission à titre gratuit pour toute émission qui est un produit dérivé inévitable de l’utilisation d’un procédé chimique industriel tel que le procédé Claus ( 61 ).

74.

Compte tenu de l’analyse téléologique qui précède, je suis amené à conclure que le CO2 libéré du mélange gazeux dans l’atmosphère, dans le contexte du traitement du gaz naturel (se présentant sous forme de gaz acide) au cours du « procédé Claus » impliquant une séparation du CO2 naturellement présent dans le gaz naturel, ne « résulte » pas du procédé visé à l’article 3, sous h), v), de la décision 2011/278, car le gaz acide, qui est une matière première contenant du carbone, ne fait pas l’objet d’une « utilisation », au sens de cette disposition, même si, sous l’angle d’une simple interprétation littérale du texte, il est vrai que ce texte est en lui-même ambigu.

C.   Sur la quatrième question préjudicielle : existe-t-il une hiérarchie entre les différents référentiels de repli ?

75.

Par sa quatrième question préjudicielle, la juridiction de renvoi souhaite savoir quel référentiel doit être appliqué lorsqu’une installation satisfait aux critères d’une sous-installation avec référentiel de chaleur ainsi que les critères d’une sous-installation avec émissions de procédé.

76.

À titre liminaire, il convient de rappeler que, dans le cadre de la procédure de coopération entre les juridictions nationales et la Cour instituée à l’article 267 TFUE, il appartient à celle-ci de donner au juge national une réponse utile qui lui permette de trancher le litige dont il est saisi. Dans cette optique, il incombe, le cas échéant, à la Cour de reformuler les questions qui lui sont soumises ( 62 ).

77.

La juridiction de renvoi indique que, sous réserve de la réponse apportée aux première à troisième questions préjudicielles, il semble possible, en l’espèce, que les émissions résultant du procédé « Claus » puissent répondre aussi bien à la définition du « référentiel de chaleur » qu’à la définition des « émissions de procédé ». Je suggère, par conséquent, qu’il serait judicieux que toute réponse aborde la question de savoir quel référentiel doit être appliqué si les émissions devaient (contrairement à mon opinion) effectivement remplir les critères d’une sous-installation avec référentiel de chaleur ainsi que ceux d’une sous-installation avec émissions de procédé ( 63 ). Cette question englobe celle plus large de savoir s’il existe une hiérarchie entre les différents référentiels de repli dans le cas où une installation remplit les critères de plusieurs d’entre eux.

78.

En l’occurrence, la juridiction de renvoi suggère que sa quatrième question ne se pose qu’en cas de réponse affirmative aux première à troisième questions préjudicielles. Comme je propose de répondre par la négative à ces questions – ce qui signifie que l’installation d’ExxonMobil n’est pas éligible à l’allocation de quotas à titre gratuit en ce qui concerne le référentiel des émissions de procédé –, une réponse à la quatrième question préjudicielle n’est pas strictement nécessaire. J’examinerai toutefois cette question dans l’éventualité où la Cour répondrait différemment aux première à troisième questions préjudicielles.

79.

En ce qui concerne cette question, la réglementation allemande de transposition contenue à l’article 3, paragraphe 1, de la ZuV 2020 diffère quelque peu du texte de l’article 6 de la décision 2011/278. La première de ces dispositions établit clairement une hiérarchie entre les référentiels. Les demandeurs de droits d’émission doivent affecter les intrants, les extrants et les émissions correspondantes à une seule des sous-installations. Cette disposition prévoit que les intrants, les extrants et les émissions correspondantes ne peuvent être attribués à une sous-installation avec référentiel de chaleur que dans la mesure où ces intrants, extrants et émissions correspondantes ne sont pas déjà couverts par une sous-installation avec référentiel de produit. Une affectation d’intrants, d’extrants et d’émissions correspondantes à une sous-installation avec référentiel de combustibles ne peut avoir lieu que s’ils ne sont pas déjà couverts par une sous‑installation avec référentiel de chaleur ou de produit. Enfin, les intrants, les extrants et les émissions correspondantes ne peuvent être attribués à une sous‑installation avec émissions de procédé que s’ils ne sont couverts par aucune des autres sous-installations avec référentiel ( 64 ).

80.

La décision 2011/278 est un peu moins claire en ce qui concerne la relation de réciprocité entre les référentiels de repli, bien que les définitions des sous‑installations de chaleur, de combustibles et avec émissions de procédé prévoient, respectivement à l’article 3, sous c), d) et h), qu’elles ne s’appliquent qu’aux intrants, aux extrants et aux émissions correspondantes qui ne sont pas couverts par ailleurs par une sous-installation avec référentiel de produit. Toutefois, si l’on examine de plus près les conditions relatives à la sous-installation avec référentiel de chaleur et à la sous-installation avec référentiel de combustibles, la première concerne « les intrants, les extrants et les émissions correspondantes [...] qui sont liés à la production de chaleur mesurable ou à l’importation de chaleur mesurable en provenance d’une installation ou d’une autre entité couverte par le système de l’Union, ou aux deux à la fois » ( 65 ), avec certaines autres conditions y afférentes. En revanche, les sous-installations avec référentiel de combustibles concernent les intrants, les extrants et les émissions correspondantes liés à la production de chaleur non mesurable sous certaines conditions supplémentaires.

81.

La Cour est également parvenue à cette conclusion dans son arrêt Borealis e.a., où elle a jugé que les définitions des différentes sous-installations avec référentiel étaient mutuellement exclusives ( 66 ). S’agissant des sous-installations avec émissions de procédé, elle a considéré qu’il en était ainsi parce que « seule la génération de certains types d’émissions spécifiques mentionnées à l’article 3, sous h), i) à vi), de la [décision 2011/278] permet[tait] de procéder à cette qualification » ( 67 ). La Cour a en outre constaté, en se fondant sur le considérant 12 de cette décision, que, dans les cas où il n’avait pas été possible de calculer un référentiel de produit, mais où des émissions de gaz à effet de serre pouvant donner lieu à l’allocation de quotas à titre gratuit étaient néanmoins générées, une hiérarchie de trois options de repli avait été établie ( 68 ).

82.

Il s’ensuit, dès lors, que la question posée par la juridiction de renvoi a, en réalité, déjà été tranchée par la Cour dans l’arrêt Borealis e.a ( 69 ).

83.

Les arguments d’ExxonMobil en ce sens qu’il n’existe pas de hiérarchie entre les options de repli ou, à titre subsidiaire, que les sous-installations avec émissions de procédé devraient avoir la primauté parce qu’il s’agit de l’option la plus spéciale ne sont pas convaincants. Voici pourquoi.

84.

ExxonMobil fait valoir que les sous-installations avec référentiel de chaleur et les sous-installations avec émissions de procédé peuvent coïncider. Selon ExxonMobil, cela ressort clairement de la manière dont le niveau annuel d’activité historique relatif à la chaleur est déterminé en application de l’article 9, paragraphe 3, de la décision 2011/278. L’allocation de quotas d’émission pour une sous-installation avec référentiel de chaleur dépend des émissions résultant de la production de chaleur mesurable. Ces émissions sont déduites de la chaleur produite qui est mesurée en térajoules par an. En revanche, une sous-installation avec émissions de procédé [à tout le moins celle visée à l’article 3, sous h), v), de la décision 2011/278] est caractérisée par le fait que les émissions résultent d’un procédé dont « l’objectif principal est autre que la production de chaleur ». Ainsi, le niveau annuel d’activité historique, conformément à l’article 9, paragraphe 5, de la décision 2011/278, correspond à la quantité d’émissions mesurée en tonnes équivalent CO2. Ces arguments se réfèrent à la question de savoir si une sous‑installation avec référentiel de chaleur et une sous-installation avec émissions de procédé peuvent être présentes dans la même installation, mais au titre d’émissions différentes.

85.

S’il est vrai que deux (ou plusieurs) sous-installations se rapportant à des activités différentes pourraient coïncider dans une seule installation, les mêmes intrants, extrants et émissions ( 70 ) ne sauraient être couverts par plusieurs sous‑installations, car, sinon, le risque de chevauchement et de double comptage interdit par l’article 6, paragraphe 2, de la décision 2011/278 pourrait survenir ( 71 ). En admettant que les critères applicables à différentes sous-installations peuvent être remplis par les mêmes intrants, extrants et émissions, la notion sous-jacente à la décision 2011/278 est la suivante : comme cela est expliqué dans l’étude commandée par la Commission« Methodology for the free allocation of emission allowances in the EU ETS post 2012 » (Méthodologie pour l’allocation de quotas d’émission à titre gratuit dans le système d’échange de quotas d’émission de l’Union après 2012), trois facteurs influencent les émissions spécifiques de CO2. Il s’agit du choix du mélange de combustibles, de l’efficacité de la production de chaleur et de l’efficacité de l’utilisation finale de chaleur. Les référentiels de produits prennent en considération l’ensemble de ces trois facteurs.

86.

Tout ce qui précède est conforme au considérant 1 de la décision 2011/278 qui prévoit que, dans la mesure du possible, des référentiels ex ante doivent être déterminés de façon à garantir que les modalités d’allocation des quotas d’émission à titre gratuit encouragent l’utilisation de techniques efficaces pour réduire les émissions de gaz à effet de serre et améliorer le rendement énergétique. La méthodologie des référentiels pour la production de chaleur utilisée pour les sous-installations avec référentiel de chaleur, la méthodologie des référentiels de combustibles mélangés utilisée pour les sous-installations avec référentiel de combustibles et la méthodologie des référentiels dits « antérieurs » (qui ne prennent en compte que les données historiques et qui sont utilisés pour les émissions de procédé) utilisent chacune un facteur en moins parmi les facteurs mentionnés, la méthode d’antériorité ne prenant, quant à elle, aucun de ces facteurs en compte ( 72 ). Telle est la logique qui sous-tend la hiérarchie entre les différents référentiels de repli. Les méthodologies de référentiels qui incitent à réduire les émissions priment sur la sous-installation avec émissions de procédé, lorsque de telles incitations ne sont pas prévues.

87.

Il serait donc contraire à l’économie de l’article 10 bis de la directive 2003/87 et de la décision 2011/278 de ne pas appliquer la hiérarchie entre les différents référentiels décrite au considérant 12 de cette décision.

88.

Eu égard à ces considérations, j’estime que, lorsque des émissions soumises à l’obligation d’échanges de quotas d’émission de gaz à effet de serre satisfont aussi bien aux conditions matérielles pour constituer une sous-installation avec référentiel de chaleur qu’aux conditions matérielles pour constituer une sous‑installation avec émissions de procédé, le référentiel retenu pour l’allocation de quotas d’émission à titre gratuit est le référentiel de chaleur. Il en est ainsi simplement parce que les allocations de quotas au titre d’une sous-installation avec référentiel de chaleur l’emportent sur les allocations de quotas au titre d’une sous-installation avec émissions de procédé.

D.   Sur la cinquième question préjudicielle : des droits à une allocation à titre gratuit de quotas d’émission pour la troisième période d’échange de quotas d’émission peuvent-ils être satisfaits après la fin de cette période d’échange ?

89.

Par sa cinquième question préjudicielle, la juridiction de renvoi souhaite savoir si des droits à des quotas gratuits pour la troisième période d’échange qui n’ont été constatés par un juge qu’après expiration de cette période d’échange peuvent être satisfaits au moyen de quotas gratuits de la quatrième période d’échange ( 73 ). Encore une fois, cette question n’a été posée par la juridiction de renvoi qu’en cas de réponse affirmative aux première à quatrième questions. Compte tenu de mes réponses à ces questions, ce cas de figure ne se pose pas. Je propose néanmoins d’examiner la question dans l’hypothèse où la Cour déciderait autrement.

90.

Les doutes de la juridiction de renvoi concernant cette question résultent principalement de la jurisprudence du Bundesverwaltungsgericht (Cour administrative fédérale). Cette juridiction avait décidé que les demandes (ouvertes) d’allocations supplémentaires pour la deuxième période d’échange (années 2008 à 2012) avaient expirées au plus tard le 30 avril 2013 (à minuit) ( 74 ).

91.

Il convient toutefois de relever que la situation juridique qui existait à la fin de la deuxième période d’échange était tout à fait différente de celle existant à la fin de la troisième période d’échange. Alors que, aux termes de l’article 13, paragraphe 1, de la directive 2003/87, les quotas délivrés au cours d’une période d’échange n’étaient valables que pour les émissions produites au cours de cette période d’échange, ce texte a été modifié par la directive 2018/410. La première phrase de l’article 13 de la directive 2003/87 se lit désormais comme suit : « Les quotas délivrés à partir du 1er janvier 2013 sont valables pour une durée indéterminée [...] » ( 75 ). C’est possible en raison de la continuité générale des règles entre la troisième et la quatrième période d’échange. Il s’agit en substance de savoir si, et le cas échéant de quelle manière, un éventuel droit à l’allocation de quotas d’émission à titre gratuit peut être satisfait en l’absence d’une disposition spécifique régissant cette question.

92.

La juridiction de renvoi a spécifiquement demandé si, dans un tel cas, le droit à une allocation à titre gratuit de quotas d’émission supplémentaires pour la troisième période d’échange de quotas d’émission peut être satisfait au moyen de quotas d’émission de la quatrième période d’échange. Aux termes de l’article 13, seconde phrase, de la directive 2003/87 (telle que modifiée par la directive 2018/410), les quotas délivrés à compter de l’année 2021 ne sont valables qu’à partir du début de la période de dix ans au cours de laquelle ils ont été délivrés. Par conséquent, un requérant qui s’est vu octroyer un droit à l’allocation de quotas à titre gratuit ne serait pas en mesure de satisfaire aux obligations qui lui incombent au titre de l’article 12, paragraphe 3, de la directive 2003/87 au moyen de quotas de la quatrième période d’échange. Afin de fournir une réponse utile à la juridiction de renvoi, sa question pourrait donc être reformulée de manière appropriée. Par conséquent, la question à laquelle il convient de répondre ne devrait pas se limiter à celle de savoir si un tel droit peut être satisfait avec des quotas de la quatrième période d’échange.

93.

La question de savoir comment il peut être satisfait à un éventuel droit à l’allocation de quotas d’émission à titre gratuit pour la troisième période d’échange comporte deux aspects. Il y a, tout d’abord, le fondement procédural d’une telle modification d’allocation et, ensuite, la question de l’« origine » de ces quotas. En ce qui concerne la première de ces questions, ainsi que l’ont relevé le gouvernement allemand, représenté par le ministère fédéral de l’Économie et de l’Énergie, ainsi que la Commission, tout ajustement constitue une modification du tableau national d’allocation prévu à l’article 52 du règlement (UE) no 389/2013 ( 76 ) qui, selon l’article 88 du règlement délégué (UE) 2019/1122 ( 77 ), continue de s’appliquer jusqu’au 1er janvier 2026 à toutes les opérations requises concernant la période d’échanges pour les années 2013‑2020. Si un juge estime qu’un exploitant a droit à une allocation à titre gratuit supplémentaire de quotas d’émission, l’État membre concerné en informe la Commission [article 52, paragraphe 2, sous d), du règlement no 389/2013] et la Commission donne instruction à l’administrateur central d’apporter les modifications correspondantes au tableau national d’allocation de quotas d’émission dans le journal des transactions de l’Union européenne ( 78 ). L’administrateur central veille par la suite à ce que le registre de l’Union transfère les quotas respectifs du compte Allocation UE, conformément au tableau national d’allocation ajusté, sur le compte de dépôt d’exploitant, conformément à l’article 53, paragraphe 2, du règlement no 389/2013.

94.

Quant au second aspect, à savoir l’origine de ces quotas, si ni la directive 2003/87, ni la décision 2011/278, ni le règlement délégué 2019/331 ne traitent spécifiquement de l’ajustement des quotas à titre gratuit en raison d’une décision d’un juge et bien que l’article 24, paragraphe 2, de la décision 2011/278 ne mentionne pas une augmentation des quotas à la suite de la décision d’un juge, ce dernier article peut être appliqué dans de tels cas par analogie. La différence entre la situation dans laquelle une telle décision d’un juge est prise avant la fin de la période d’échange et la situation dans laquelle elle intervient après cette période réside dans le fait que les quotas respectifs ne peuvent plus être déduits du nombre de quotas à mettre aux enchères par l’État membre concerné au cours de cette période.

95.

S’il est vrai que la réserve de stabilité du marché a pour objectif non pas de fournir des certificats pour des demandes qui n’ont pas été satisfaites à la fin de la troisième période d’échange, mais plutôt de lutter contre les déséquilibres structurels entre l’offre et la demande du système d’échange de quotas d’émission ( 79 ), les quotas provenant de cette source sont aptes à remplir le premier objectif, et cela en raison de la structure et de l’objectif de la réserve de stabilité du marché.

96.

Aux termes de l’article 1er, paragraphes 2, 3 et 5, de la décision 2015/1814, la réserve de stabilité du marché est constituée : i) de 900 millions de quotas devant être mis aux enchères au cours des années 2019 et 2020 conformément à l’annexe IV, troisième colonne, du règlement no 176/2014 ( 80 ), ii) des quotas non alloués aux nouveaux entrants conformément à l’article 10 bis, paragraphe 7, de la directive 2003/87 et aux installations qui ont (partiellement ou totalement) cessé leurs activités ou qui ont considérablement réduit leur capacité [article 10 bis, paragraphes 19 et 20, de la directive 2003/87], et iii) d’un certain nombre de quotas égal à 12 % du nombre total annuel de quotas en circulation ( 81 ) si ce nombre dépasse 100 millions.

97.

Ces règles d’allocation ne sont qu’un moyen de retirer un excédent de quotas du marché et de réintroduire une partie ou la totalité de ces quotas sur le marché si le nombre de quotas en circulation est inférieur à un seuil de 400 millions de quotas en circulation. Si la directive 2003/87 et la décision 2011/278 avaient été correctement appliquées, les quotas qui auraient dû être alloués à l’exploitant d’une installation n’auraient pas constitué un tel excédent et auraient donc pu être retirés de la réserve de stabilité du marché sans affecter le nombre global d’allocations. L’objectif de la réserve de stabilité du marché n’est pas non plus compromis par la déduction d’un nombre limité de quotas de la réserve de stabilité du marché et leur ajout au nombre de quotas en circulation. Puisque les quotas au titre de la troisième période d’échange qui peuvent ainsi être alloués ont une durée indéterminée conformément à l’article 13, première phrase, de la directive 2003/87 ( 82 ), ils peuvent être utilisés par le bénéficiaire soit au titre de la troisième période d’échange, soit au cours des périodes d’échange postérieures à la troisième période.

98.

Eu égard à ce qui précède, je propose de conclure que des droits à une allocation à titre gratuit de quotas d’émission supplémentaires pour la troisième période d’échange de quotas d’émission peuvent être satisfaits après la fin de cette troisième période au moyen de quotas d’émission de la troisième période d’échange lorsque ce n’est qu’après expiration de la troisième période d’échange que l’existence d’un tel droit d’allocation a été constatée par le juge. Les quotas pour la troisième période d’échange ne s’éteignent pas lorsque la troisième période d’échange prend fin.

V. Conclusion

99.

Compte tenu de l’ensemble des considérations qui précèdent, je propose à la Cour de répondre aux questions préjudicielles posées par le Verwaltungsgericht Berlin (tribunal administratif de Berlin, Allemagne) de la manière suivante :

1)

Le dioxyde de carbone (CO2) libéré du mélange gazeux dans l’atmosphère, dans le contexte du traitement du gaz naturel (se présentant sous forme de gaz acide) au cours du « procédé Claus » impliquant une séparation du CO2 naturellement présent dans le gaz naturel, mais qui n’est pas lui-même utilisé au cours de la réaction chimique de désulfuration, ne résulte pas du procédé visé à l’article 3, sous h), v), de la décision 2011/278/UE de la Commission, du 27 avril 2011, définissant des règles transitoires pour l’ensemble de l’Union concernant l’allocation harmonisée de quotas d’émission à titre gratuit conformément à l’article 10 bis de la directive 2003/87/CE du Parlement européen et du Conseil, car le gaz acide, qui est une matière première contenant du carbone, ne fait pas l’objet d’une « utilisation » au sens de cette disposition.

2)

Lorsque des émissions soumises à l’obligation d’échanges de quotas d’émission de gaz à effet de serre satisfont aussi bien aux conditions matérielles pour constituer une sous-installation avec référentiel de chaleur qu’aux conditions matérielles pour constituer une sous-installation avec émissions de procédé, le référentiel retenu pour l’allocation de quotas d’émission à titre gratuit est le référentiel de chaleur. Il en est ainsi parce que les allocations de quotas au titre d’une sous-installation avec référentiel de chaleur l’emportent sur les allocations de quotas au titre d’une sous‑installation avec émissions de procédé.

3)

Des droits à une allocation à titre gratuit de quotas d’émission supplémentaires pour la troisième période d’échange peuvent être satisfaits après la fin de cette troisième période au moyen de quotas d’émission de la troisième période d’échange lorsque ce n’est qu’après expiration de la troisième période d’échange que l’existence d’un tel droit d’allocation a été constatée par le juge. Les quotas pour la troisième période d’échange ne s’éteignent pas lorsque la troisième période d’échange prend fin.


( 1 ) Langue originale : l’anglais.

( 2 ) Décision du 27 avril 2011 définissant des règles transitoires pour l’ensemble de l’Union concernant l’allocation harmonisée de quotas d’émission à titre gratuit conformément à l’article 10 bis de la directive 2003/87/CE du Parlement européen et du Conseil (JO 2011, L 130, p. 1).

( 3 ) Directive du Parlement européen et du Conseil du 13 octobre 2003 établissant un système d’échange de quotas d’émission de gaz à effet de serre dans la Communauté et modifiant la directive 96/61/CE du Conseil (JO 2003, L 275, p. 32), telle que modifiée par la directive 2009/29/CE du Parlement européen et du Conseil, du 23 avril 2009, modifiant la directive 2003/87 afin d’améliorer et d’étendre le système communautaire d’échange de quotas d’émission de gaz à effet de serre (JO 2009, L 140, p. 63, ci-après la « directive 2003/87 »).

( 4 ) Chiffres fournis par l’Umweltbundesamt (Agence fédérale de l’environnement, Allemagne) lors de l’audience.

( 5 ) Directive du Parlement européen et du Conseil du 14 mars 2018 modifiant la directive 2003/87 afin de renforcer le rapport coût-efficacité des réductions d’émissions et de favoriser les investissements à faible intensité de carbone, et la décision (UE) 2015/1814 (JO 2018, L 76, p. 3).

( 6 ) JO 2012, L 181, p. 30.

( 7 ) Décision du Parlement européen et du Conseil du 6 octobre 2015 concernant la création et le fonctionnement d’une réserve de stabilité du marché pour le système d’échange de quotas d’émission de gaz à effet de serre de l’Union et modifiant la directive 2003/87 (JO 2015, L 264, p. 1).

( 8 ) Gesetz über den Handel mit Berechtigungen zur Emission von Treibhausgasen (BGBl. 2011 I, p. 1475).

( 9 ) L’article 7, paragraphe 2, du TEHG n’a pas été cité par la juridiction de renvoi. Il a néanmoins été mentionné dans les observations écrites d’ExxonMobil en tant que disposition ayant fondé l’arrêt rendu par le Bundesverwaltungsgericht (Cour administrative fédérale, Allemagne) le 26 avril 2018 (ECLI:DE:BVerwG:2018:260418U7C20.16.0). Le libellé de cette disposition a été modifié par l’article 1er du Gesetz zur Anpassung der Rechtsgrundlagen für die Fortentwicklung des Europäischen Emissionshandels (loi relative à l’adaptation des bases juridiques pour le développement du système européen d’échange de quotas d’émission), du 18 janvier 2019 (BGBl. 2019 I, p. 37), avec effet au 25 janvier 2019.

( 10 ) Verordnung über die Zuteilung von Treibhausgas-Emissionsberechtigungen in der Handelsperiode 2013 bis 2020 (BGBl. 2011 I, p. 1921).

( 11 ) Article 2 lu en combinaison avec l’annexe 1, partie 2, du TEHG.

( 12 ) La disposition pertinente de cette directive est son article 2, paragraphe 1, lu en combinaison avec son annexe I.

( 13 ) Cette affirmation n’a été contestée par aucune des autres parties.

( 14 ) Même si ExxonMobil indique dans sa réponse qu’il accomplit une fonction technique importante dans le dispositif Claus en tant que gaz incombustible ayant une fonction de thermorégulateur pour le contrôle techniquement nécessaire de la température de fonctionnement. L’Umweltbundesamt (Agence fédérale de l’environnement) a cependant contesté cette affirmation.

( 15 ) Pour l’utilisation de la chaleur capturée dans la chaudière à récupération utilisée dans l’installation.

( 16 ) Le délai qui s’est écoulé entre le dépôt de la réclamation d’ExxonMobil le 12 mars 2014 et son rejet par la DEHSt est dû à la suspension de la procédure jusqu’au prononcé de l’arrêt de la Cour dans l’affaire ExxonMobil Production Deutschland (C‑682/17, ci-après l’« affaire C‑682/17 », EU:C:2019:518), qui a eu lieu le 20 juin 2019. Cette affaire concernait une autre installation de traitement de gaz naturel utilisant le procédé Claus, également opérée par ExxonMobil.

( 17 ) Selon la juridiction de renvoi, ce n’est qu’à l’été 2014 qu’ExxonMobil a commencé à produire de l’énergie électrique pour la vendre à des tiers, soit après que la DEHSt avait rendu sa décision.

( 18 ) La République fédérale d’Allemagne est partie à la procédure devant la juridiction de renvoi, car la décision qui est attaquée a été adoptée par la DEHSt qui fait partie de l’Agence fédérale de l’environnement. L’Agence fédérale de l’environnement représente la République fédérale d’Allemagne dans son rôle de partie dans la procédure au principal. Il s’agit de l’agence centrale pour l’environnement de la République fédérale d’Allemagne.

( 19 ) Agissant en qualité d’État membre représenté par le Bundesministerium für Wirtschaft und Energie (ministère fédéral de l’Économie et de l’Énergie).

( 20 ) Point 58 de cet arrêt.

( 21 ) Il est toutefois quelque peu surprenant que, bien qu’ayant soutenu ce point, ils ne semblent pas aborder, dans le cadre de leur argumentation, l’arrêt de la Cour dans l’affaire C‑682/17.

( 22 ) Les exceptions relatives aux installations d’incinération de déchets dangereux ou municipaux ne sont pas en cause en l’espèce.

( 23 ) Voir arrêt du 20 juin 2019, ExxonMobil Production Deutschland (C‑682/17, EU:C:2019:518, points 54 et 56).

( 24 ) Voir arrêt du 9 juin 2016, Elektriciteits Produktiemaatschappij Zuid-Nederland EPZ (C‑158/15, EU:C:2016:422, point 29).

( 25 ) Cet argument se distingue à cet égard des conclusions de l’avocat général Saugmandsgaard Øe dans l’affaire ExxonMobil Production Deutschland (C‑682/17, EU:C:2019:167, point 74).

( 26 ) Arrêt du 28 février 2018, Trinseo Deutschland (C‑577/16, EU:C:2018:127).

( 27 ) Dans son argumentation, la Commission invoque l’arrêt du 17 mai 2018, Evonik Degussa (C‑229/17, EU:C:2018:323, point 42). Dans cet arrêt, la Cour exige toutefois seulement « un certain potentiel de réduction des émissions de gaz à effet de serre », et non pas un potentiel particulier de réduction économiquement efficace des émissions de gaz à effet de serre.

( 28 ) Point 57 de cet arrêt. Voir, également, conclusions de l’avocate générale Kokott dans l’affaire Elektriciteits Produktiemaatschappij Zuid-Nederland EPZ (C‑158/15, EU:C:2016:139, point 39), qui a relevé que, « dans ce mécanisme de marché, il est également prévu de renoncer éventuellement totalement à des activités déterminées si, en raison du coût des émissions inévitables, elles ne sont plus compétitives », un raisonnement qui pourrait s’appliquer à certains gisements dans la présente affaire, si la teneur naturelle du CO2 est particulièrement élevée.

( 29 ) En revanche, la décision 2011/278 ne définit pas les « émissions de procédé » en tant que telles. Je reviendrai sur ce point plus tard dans les présentes conclusions.

( 30 ) Les émissions de CO2 résultant de la combustion font l’objet de quotas au titre du référentiel de chaleur en application de l’article 3, sous c), de la décision 2011/278.

( 31 ) Voir, en ce sens, conclusions de l’avocat général Trstenjak dans l’affaire Agrana Zucker (C‑33/08, EU:C:2009:99, point 37).

( 32 ) Voir, en ce sens, par exemple, arrêt dans l’affaire C‑682/17 (point 71 et jurisprudence citée).

( 33 ) Voir, également, arrêt du 28 février 2018, Trinseo Deutschland (C‑577/16, EU:C:2018:127, points 45 à 48).

( 34 ) Consulté sur Internet.

( 35 ) Cela ne ferait pas obstacle au déroulement du procédé Claus, dès lors que le CO2 ne remplit aucune fonction au sein de ce procédé.

( 36 ) Consulté sur Internet.

( 37 ) D’autres versions linguistiques de l’article 3, sous h), v), de la décision 2011/278, telles que les versions en langue espagnole, allemande, française, italienne, néerlandaise, portugaise et suédoise, ne donnent pas lieu à une appréciation différente.

( 38 ) Le représentant de l’Agence fédérale de l’environnement a souligné que le CO2 pouvait être séparé avant que le gaz ne soit traité au cours du procédé Claus sans que cela influence le résultat et que, d’ailleurs, l’équipement utilisé dans le procédé Claus devrait être ajusté au CO2 spécifique contenu dans le gaz naturel utilisé. ExxonMobil n’a pas contesté cette affirmation. En définitive, il appartient à la juridiction de renvoi de déterminer si le CO2 joue un rôle nécessaire au cours du procédé.

( 39 ) Il appartient à la juridiction nationale de déterminer si cette condition est nécessaire.

( 40 ) Arrêt du 3 décembre 2020, Ingredion Germany (C‑320/19, EU:C:2020:983, point 50 et jurisprudence citée).

( 41 ) Voir, notamment, arrêts du 8 mars 2017, ArcelorMittal Rodange et Schifflange (C‑321/15, EU:C:2017:179, point 24) ; du 18 janvier 2018, INEOS (C‑58/17, EU:C:2018:19, point 22) ; du 28 février 2018, Trinseo Deutschland (C‑577/16, EU:C:2018:127, point 39), ainsi que dans l’affaire C‑682/17 (point 62).

( 42 ) Voir, notamment, arrêts du 8 mars 2017, ArcelorMittal Rodange et Schifflange (C‑321/15, EU:C:2017:179, point 22) ; du 18 janvier 2018, INEOS (C‑58/17, EU:C:2018:19, point 22) ; du 28 février 2018, Trinseo Deutschland (C‑577/16, EU:C:2018:127, point 40), ainsi que dans l’affaire C‑682/17 (point 63).

( 43 ) Arrêt du 18 janvier 2018, INEOS (C‑58/17, EU:C:2018:19, point 25 et jurisprudence citée). Cet objectif a par la suite été reporté à l’année 2030 pour les secteurs considérés comme étant exposés à un risque faible ou comme étant non exposés à un risque de fuite de carbone, à l’exception du chauffage urbain (bien que soumis à un réexamen) et abandonné pour ce qui est des secteurs et des sous-secteurs considérés comme étant à un niveau de risque de fuite de carbone élevé (voir considérant 10, second alinéa, de la directive 2018/410). L’article 10 bis, paragraphe 11, a donc été supprimé de la directive 2003/87 par l’article 1er, point 14, sous k), de la directive 2018/410. Cette suppression ne modifie toutefois pas les objectifs de la directive telle qu’elle existait avant cette modification. Même après cette période, les règles relatives à l’allocation de quotas à titre gratuit doivent être considérées comme étant exceptionnelles. Aux termes du considérant 5 de la directive 2018/410, « l’allocation de quotas à titre gratuit n’expirerait pas et [...] les mesures existantes continueraient à s’appliquer au-delà de [l’année] 2020, aux fins de prévenir le risque de fuite de carbone lié à la politique en matière de changement climatique, [uniquement] tant qu’aucun effort comparable ne sera entrepris par d’autres grandes économies ».

( 44 ) J’examinerai le point de savoir s’il existe également un ordre (décroissant) entre ces trois « référentiels de repli » dans le cadre de l’examen de la quatrième question préjudicielle.

( 45 ) Voir article 3, sous c) et d), de la décision 2011/278.

( 46 ) Voir article 3, sous h), de la décision 2011/278.

( 47 ) Arrêt du 18 janvier 2018, INEOS (C‑58/17, EU:C:2018:19, point 36). Dans cet arrêt, la Cour a même désigné les émissions de procédé comme « l’ultime option dite “de repli” ».

( 48 ) En l’espèce, aucune des parties ne semble contester le fait que l’objectif principal du processus de récupération du soufre n’est pas la production de chaleur.

( 49 ) Voir note en bas de page 42 des conclusions de l’avocat général Saugmandsgaard Øe dans l’affaire ExxonMobil Production Deutschland (C‑682/17, EU:C:2019:167).

( 50 ) L’article 3, point 40, du règlement no 601/2012 définit le « CO2 intrinsèque » comme le CO2 qui entre dans la composition d’un combustible.

( 51 ) Voir point 54 de cet arrêt.

( 52 ) Les conditions selon lesquelles un secteur ou sous-secteur est considéré comme étant exposé à un risque important de fuite de carbone sont définies à l’article 10 bis, paragraphes 14 à 17, de la directive 2003/87. La liste des secteurs ou des sous-secteurs qui sont exposés à un risque important de fuite de carbone au sens de l’article 10 bis, paragraphe 13, de la directive 2003/87 figure dans la décision 2010/2. L’« [e]xtraction de pétrole brut et de gaz naturel » est énumérée au point 1.4 de l’annexe de cette décision.

( 53 ) Voir, en ce sens, arrêt dans l’affaire C‑682/17 (point 94). Voir, également, note en bas de page 44 des présentes conclusions.

( 54 ) Voir, en ce sens, arrêt du 26 octobre 2016, Yara Suomi e.a. (C‑506/14, EU:C:2016:799, point 47).

( 55 ) Conclusions de l’avocat général Wahl dans l’affaire ArcelorMittal Atlantique et Lorraine (C‑80/16, EU:C:2017:192, point 47).

( 56 ) Voir, également, par analogie, arrêt du 26 octobre 2016, Yara Suomi e.a. (C‑506/14, EU:C:2016:799, point 54), où les parties requérantes ont contesté l’application du facteur de correction uniforme transsectoriel qui peut être appliqué afin de limiter la quantité annuelle maximale de quotas, au sens de l’article 10 bis, paragraphe 5, de la directive 2003/87, à toutes les quantités provisoires de quotas, sans exempter les installations des secteurs ou sous-secteurs qui sont exposés à un risque significatif de fuite de carbone.

( 57 ) Mise en italique par mes soins.

( 58 ) Mise en italique par mes soins.

( 59 ) Ecofys, Fraunhofer Institute for Systems and Innovation Research (Institut Fraunhofer de recherche sur les systèmes et l’innovation), Öko-Institut, novembre 2009 (une étude commandée par la Commission), p. ii et 25.

( 60 ) Comme l’a relevé cette représentante, un référentiel de produit spécifique existe conformément à l’annexe II de la décision 2011/278 pour la « récupération du soufre » dans les raffineries. Les référentiels de produits dans le secteur de la raffinerie sont généralement fondés sur l’approche « tonne pondérée CO2 » qui ne tient pas non plus compte du CO2 intrinsèque. En ce qui concerne cette approche, voir considérant 24 de la décision 2011/278.

( 61 ) Bien que, comme je l’ai relevé, il existe déjà des doutes sur le point de savoir si les émissions en cause dans la présente affaire doivent être considérées comme étant inévitables. Voir point 47 des présentes conclusions.

( 62 ) Arrêt du 7 novembre 2019, K.H.K. (Saisie conservatoire des comptes bancaires) (C‑555/18, EU:C:2019:937, point 28 et jurisprudence citée).

( 63 ) Cela laisse de côté la question de savoir si c’est possible, la Cour ayant déjà jugé dans son arrêt du 8 septembre 2016, Borealis e.a. (C‑180/15, EU:C:2016:647, points 62 à 69), que ces définitions étaient mutuellement exclusives.

( 64 ) La même approche a désormais été adoptée à l’article 10, paragraphe 2, du règlement délégué (UE) 2019/331 de la Commission, du 19 décembre 2018, définissant des règles transitoires pour l’ensemble de l’Union concernant l’allocation harmonisée de quotas d’émission à titre gratuit conformément à l’article 10 bis de la [directive 2003/87] (JO 2019, L 59, p. 8).

( 65 ) Mise en italique par mes soins.

( 66 ) Arrêts du 8 septembre 2016, Borealis e.a. (C‑180/15, EU:C:2016:647, points 62 à 65) ; du 18 janvier 2018, INEOS (C‑58/17, EU:C:2018:19, point 29), et du 3 décembre 2020, Ingredion Germany (C‑320/19, EU:C:2020:983, point 68).

( 67 ) Arrêt du 8 septembre 2016, Borealis e.a. (C‑180/15, EU:C:2016:647, point 66).

( 68 ) Arrêt du 8 septembre 2016, Borealis e.a. (C‑180/15, EU:C:2016:647, point 67).

( 69 ) Arrêt du 8 septembre 2016, Borealis e.a. (C‑180/15, EU:C:2016:647).

( 70 ) J’emploie les termes désormais utilisés à l’article 10 du règlement délégué 2019/331 qui est plus clair en ce qu’il ne se réfère pas seulement aux émissions, mais plutôt aux « intrants, [...] extrants et [...] émissions de l’installation » qui sont attribués à une ou plusieurs sous‑installations. Cette référence est bien plus adaptée aux différentes sous-installations.

( 71 ) En application de l’article 7, paragraphe 7, et de l’article 8, paragraphe 5, de la décision 2011/278, les États membres sont tenus de s’assurer que cela ne se produit pas. Voir, également, arrêt du 8 septembre 2016, Borealis e.a. (C‑180/15, EU:C:2016:647, point 69).

( 72 ) Ecofys, Fraunhofer Institute for Systems and Innovation Research (Institut Fraunhofer de recherche sur les systèmes et l’innovation), Öko-Institut, « Methodology for the free allocation of emission allowances in the EU ETS post 2012 : Report on the project approach and general issues » (Méthodologie pour l’allocation de quotas d’émission à titre gratuit dans le système d’échange de quotas d’émission de l’Union après 2012 : rapport sur l’approche du projet et questions générales »), novembre 2009 (une étude commandée par la Commission), p. 38 et 39.

( 73 ) ExxonMobil a informé la Cour qu’elle avait fait une demande de mesures provisoires au moyen d’une requête déposée devant la juridiction de renvoi le 16 juillet 2020. Elle avait demandé à cette juridiction d’enjoindre à la DEHSt d’assurer qu’un nombre équivalent au nombre de quotas d’émission dont l’allocation était demandée dans la procédure qui sous-tend la présente demande de décision préjudicielle soit comptabilisé sur son compte de dépôt d’exploitant, au plus tard le 31 décembre 2020, afin de garantir ses droits à une allocation. En réponse à cette demande, mais avant la décision de la juridiction de renvoi sur cette question, la DEHSt avait demandé à la Commission de transférer ce nombre de quotas d’émission soit sur le compte national de dépôt de quotas de la République fédérale d’Allemagne, soit sur le compte de dépôt d’exploitant d’ExxonMobil. La Commission a rejeté cette demande par une lettre adressée à la DEHSt le 8 décembre 2020. La juridiction de renvoi a rendu une ordonnance octroyant des mesures provisoires le 15 décembre 2020 (VG 10 L 216/2020) par laquelle elle a enjoint à la DEHSt de déclarer que, si les quotas d’émission pour la période 2013‑2020 devaient expirer, elle traiterait ExxonMobil comme si cela n’avait pas eu lieu. Cette ordonnance a été annulée par l’Oberverwaltungsgericht Berlin-Brandenburg (tribunal administratif supérieur de Berlin‑Brandebourg, Allemagne) le 23 décembre 2020 et la demande d’ExxonMobil a été définitivement rejetée (ECLI:DE:OVGBEBB:2020:0323.OVG11S12.20.00). Une demande de mesures provisoires déposée devant le Bundesverfassungsgericht (Cour constitutionnelle fédérale, Allemagne) n’a pas abouti (ECLI:DE:BVerfG:2020:qk20201229.1bvq016120). ExxonMobil avait, le 17 décembre 2020, introduit en parallèle un recours en annulation en application de l’article 263 TFUE contre la décision de la Commission du 8 décembre 2020 adressée à la DEHSt. Elle avait également demandé des mesures provisoires au titre de l’article 279 TFUE. Cette demande a été rejetée par ordonnance du président du Tribunal de l’Union européenne du 31 décembre 2020, ExxonMobil Production Deutschland/Commission (T‑731/20 R, non publiée, EU:T:2020:654), notamment parce qu’il a été considéré qu’il était improbable que des droits à une allocation de quotas d’émission à titre gratuit non satisfaits s’éteindraient à la fin de la troisième période d’échange (voir point 17 de cette ordonnance).

( 74 ) Arrêt du Bundesverwaltungsgericht (Cour administrative fédérale) du 26 avril 2018 (ECLI:DE:BVerwG:2018:260418U7C20.16.0).

( 75 ) Aux termes de l’article 27 du règlement délégué 2019/331, la décision 2011/278 continue cependant de s’appliquer aux allocations concernant la période antérieure au 1er janvier 2021, au-delà de l’abrogation de cette décision.

( 76 ) Règlement de la Commission du 2 mai 2013 établissant un registre de l’Union conformément à la [directive 2003/87] et aux décisions no 280/2004/CE et no 406/2009/CE du Parlement européen et du Conseil et abrogeant les règlements (UE) no 920/2010 et (UE) no 1193/2011 de la Commission (JO 2013, L 122, p. 1).

( 77 ) Règlement délégué de la Commission du 12 mars 2019 complétant la directive 2003/87 en ce qui concerne le fonctionnement du registre de l’Union (JO 2019, L 177, p. 3).

( 78 ) La Commission vérifie, conformément à l’article 52, paragraphe 2, second alinéa, du règlement no 389/2013, que ces modifications sont conformes principalement à la directive 2003/87 et à la décision 2011/278 et rejette ces modifications si tel n’est pas le cas.

( 79 ) Voir, en ce sens, considérant 4 de la décision 2015/1814.

( 80 ) Dans le cadre d’une mesure à court terme pour pallier le surplus de quotas sur le marché, ces quotas avaient initialement été « reportés » en réduisant les volumes en 2014 et en 2016, avec l’intention de les mettre aux enchères en 2019 et en 2020.

( 81 ) Aux termes de l’article 1er, paragraphe 4, de la décision 2015/1814, il s’agit du nombre cumulé de quotas délivrés au cours de la période écoulée depuis le 1er janvier 2008 et des autorisations à utiliser des crédits internationaux employées par les installations relevant du SEQE de l’Union pour les émissions produites jusqu’au 31 décembre de l’année donnée, moins les tonnes cumulées d’émissions vérifiées des installations relevant du système d’échange de quotas d’émission de l’Union entre le 1er janvier 2008 et le 31 décembre de cette même année donnée, les éventuels quotas annulés et le nombre de quotas dans la réserve.

( 82 ) Tel que modifié par la directive 2018/410.