ARRÊT DE LA COUR (sixième chambre)

11 avril 2019 ( *1 )

« Renvoi préjudiciel – Coopération judiciaire en matière civile – Règlement (UE) no 1215/2012 – Détermination de la juridiction compétente pour connaître d’une demande d’indemnisation pour un vol retardé – Article 7, point 5 – Exploitation d’une succursale – Article 26 – Prorogation tacite – Nécessité pour le défendeur de comparaître »

Dans l’affaire C‑464/18,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Juzgado de lo Mercantil no 1 de Gerona (tribunal de commerce no 1 de Gérone, Espagne), par décision du 9 juillet 2018, parvenue à la Cour le 17 juillet 2018, dans la procédure

ZX

contre

Ryanair DAC,

LA COUR (sixième chambre),

composée de Mme C. Toader (rapporteure), présidente de chambre, MM. A. Rosas et M. Safjan, juges,

avocat général : M. H. Saugmandsgaard Øe,

greffier : M. A. Calot Escobar,

vu la procédure écrite,

considérant les observations présentées :

pour le gouvernement espagnol, par M. L. Aguilera Ruiz, en qualité d’agent,

pour la Commission européenne, par Mmes M. Heller et S. Pardo Quintillán, en qualité d’agents,

vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,

rend le présent

Arrêt

1

La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 7, point 5, et de l’article 26 du règlement (UE) no 1215/2012 du Parlement européen et du Conseil, du 12 décembre 2012, concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale (JO 2012, L 351, p. 1).

2

Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant ZX, un passager, à la compagnie aérienne Ryanair DAC au sujet d’un recours indemnitaire introduit par ZX à la suite d’un vol retardé.

Le cadre juridique

Le droit de l’Union

3

L’article 4, paragraphe 1, du règlement no 1215/2012 prévoit :

« Sous réserve du présent règlement, les personnes domiciliées sur le territoire d’un État membre sont attraites, quelle que soit leur nationalité, devant les juridictions de cet État membre. »

4

L’article 7 de ce règlement énonce :

« Une personne domiciliée sur le territoire d’un État membre peut être attraite dans un autre État membre :

1)

a)

en matière contractuelle, devant la juridiction du lieu d’exécution de l’obligation qui sert de base à la demande ;

b)

aux fins de l’application de la présente disposition, et sauf convention contraire, le lieu d’exécution de l’obligation qui sert de base à la demande est :

pour la vente de marchandises, le lieu d’un État membre où, en vertu du contrat, les marchandises ont été ou auraient dû être livrées,

pour la fourniture de services, le lieu d’un État membre où, en vertu du contrat, les services ont été ou auraient dû être fournis ;

c)

le point a) s’applique si le point b) ne s’applique pas ;

[...]

5)

s’il s’agit d’une contestation relative à l’exploitation d’une succursale, d’une agence ou de tout autre établissement, devant la juridiction du lieu de leur situation ;

[...] »

5

La section 4, du chapitre II, du règlement no 1215/2012, qui est intitulée « Compétence en matière de contrats conclus par les consommateurs », contient l’article 17 qui dispose :

« 1.   En matière de contrat conclu par une personne, le consommateur, pour un usage pouvant être considéré comme étranger à son activité professionnelle, la compétence est déterminée par la présente section, sans préjudice de l’article 6 et de l’article 7, point 5) :

a)

lorsqu’il s’agit d’une vente à tempérament d’objets mobiliers corporels ;

b)

lorsqu’il s’agit d’un prêt à tempérament ou d’une autre opération de crédit liés au financement d’une vente de tels objets ; ou

c)

lorsque, dans tous les autres cas, le contrat a été conclu avec une personne qui exerce des activités commerciales ou professionnelles dans l’État membre sur le territoire duquel le consommateur a son domicile ou qui, par tout moyen, dirige ces activités vers cet État membre ou vers plusieurs États, dont cet État membre, et que le contrat entre dans le cadre de ces activités.

2.   Lorsque le cocontractant du consommateur n’est pas domicilié sur le territoire d’un État membre mais possède une succursale, une agence ou tout autre établissement dans un État membre, il est considéré pour les contestations relatives à leur exploitation comme ayant son domicile sur le territoire de cet État membre.

3.   La présente section ne s’applique pas aux contrats de transport autres que ceux qui, pour un prix forfaitaire, combinent voyage et hébergement. »

6

Dans ce même chapitre, figure la section 7 intitulée « Prorogation de compétence ». Celle-ci contient, notamment, l’article 26, paragraphe 1, qui est libellé comme suit :

« Outre les cas où sa compétence résulte d’autres dispositions du présent règlement, la juridiction d’un État membre devant laquelle le défendeur comparaît est compétente. Cette règle n’est pas applicable si la comparution a pour objet de contester la compétence ou s’il existe une autre juridiction exclusivement compétente en vertu de l’article 24. »

7

L’article 28, paragraphe 1, dudit règlement dispose :

« Lorsque le défendeur domicilié sur le territoire d’un État membre est attrait devant une juridiction d’un autre État membre et ne comparaît pas, la juridiction se déclare d’office incompétente, sauf si sa compétence découle des dispositions du présent règlement. »

8

L’article 7, paragraphe 1, sous a), du règlement (CE) no 261/2004 du Parlement européen et du Conseil, du 11 février 2004, établissant des règles communes en matière d’indemnisation et d’assistance des passagers en cas de refus d’embarquement et d’annulation ou de retard important d’un vol, et abrogeant le règlement (CEE) no 295/91 (JO 2004, L 46, p. 1), énonce que, en cas de refus d’embarquement et d’annulation ou de retard important d’un vol, les passagers reçoivent, pour tous les vols de 1500 kilomètres ou moins, une indemnisation dont le montant est fixé à 250 euros.

Le droit espagnol

9

Selon l’article 86 ter, paragraphe 2, sous b), de la Ley Orgánica 6/1985 del Poder Judicial (loi organique 6/1985 relative au pouvoir judiciaire), du 1er juillet 1985, les demandes formées au titre de la réglementation nationale ou internationale en matière de transports relèvent, en premier degré ou en degré unique de juridiction, des tribunaux de commerce qui, dans l’ordre des juridictions civiles, sont des juridictions spécialisées dans certaines matières civiles et commerciales.

10

La juridiction de renvoi indique que la Ley 1/2000 de Enjuiciamiento Civil (loi 1/2000 portant code de procédure civile), du 7 janvier 2000 (BOE no 7, du 8 janvier 2000, p. 575, ci-après le « code de procédure civile »), organise les actions, notamment, en fonction du montant de la demande, de sorte que celles-ci sont soumises à la procédure ordinaire ou à la procédure sommaire.

11

Conformément à l’article 250, paragraphe 2, de ce code, si la valeur de la demande ne dépasse pas 6000 euros, elle doit être traitée selon les règles de la procédure sommaire.

12

En application de l’article 56 dudit code, la partie requérante est réputée faire élection tacite de for par le fait de se pourvoir devant les juridictions d’une circonscription donnée pour introduire la demande, alors que la partie défenderesse est réputée faire de même par le fait de poser tout autre acte qu’un déclinatoire de compétence après avoir comparu. La partie défenderesse est également réputée faire élection tacite de for lorsque, après avoir été dûment citée à comparaître, elle n’a pas comparu ou a comparu alors qu’elle est forclose de la possibilité de soulever un déclinatoire de compétence.

13

Aux termes de l’article 54, paragraphe 1, du code de procédure civile, « la prorogation de compétence expresse ou tacite n’est pas valable dans les affaires soumises à la procédure sommaire ».

14

Conformément aux dispositions de l’article 404 de ce code, lues en combinaison avec l’article 58 dudit code, lorsque le greffier responsable de l’organisation formelle et matérielle du procès constate, au stade de l’admission de la demande, l’éventuelle absence de compétence internationale de la juridiction saisie, il en informe le juge afin qu’il se prononce sur la recevabilité ou l’irrecevabilité de la demande après avoir entendu les parties comparantes et le Ministerio Fiscal (ministère public, Espagne).

15

L’article 36, paragraphe 2, point 3, du même code dispose :

« Les juridictions civiles espagnoles s’abstiennent de connaître des affaires qui leur sont soumises [...] lorsque le défendeur, dûment convoqué, ne comparaît pas dans les cas où la compétence internationale des juridictions espagnoles peut uniquement résulter d’une élection tacite de for par les parties. »

Le litige au principal et les questions préjudicielles

16

ZX a acheté en ligne un billet d’avion pour un vol opéré par Ryanair entre Porto (Portugal) et Barcelone (Espagne).

17

Par son action introduite, devant la juridiction de renvoi, sur le fondement de l’article 7 du règlement no 261/2004, la partie requérante au principal a demandé l’allocation d’une indemnité s’élevant à 250 euros, en réparation du retard du vol en cause au principal.

18

Il ressort de la décision de renvoi que la partie requérante au principal n’est pas domiciliée ou ne réside pas en Espagne, que la société défenderesse au principal a son siège social en Irlande, et que celle-ci dispose d’une succursale à Gérone (Espagne).

19

Conformément à l’article 58 du code de procédure civile, le greffier de la juridiction de renvoi a invité les parties au principal ainsi que le ministère public à présenter leurs observations sur l’éventuelle compétence internationale de cette juridiction.

20

Seul le ministère public a présenté ses observations. Celui-ci a fait valoir que, tant que le litige au principal ne relevait pas d’une des hypothèses de compétence exclusive et dès lors que la partie défenderesse au principal ne s’opposait pas à ce que la juridiction de renvoi ait à connaître du litige au principal, cette juridiction devait admettre sa compétence pour connaître de ce litige dans la mesure où elle pourrait être compétente sur le fondement de la prorogation tacite de compétence.

21

Compte tenu de la circonstance que la défenderesse au principal dispose d’une succursale dans la ville de Gérone, la juridiction de renvoi se demande si elle pourrait également être investie d’une compétence internationale pour connaître du litige au principal au titre de la compétence spéciale des juridictions du lieu du siège d’une succursale.

22

La juridiction de renvoi estime que, en vue de se prononcer sur son dessaisissement éventuel par une décision définitive mettant un terme au procès ou sur la recevabilité de la demande de la partie requérante au principal et rendre un jugement au fond, il lui est nécessaire de connaître l’interprétation de l’article 26 du règlement no 1215/2012, relatif à la prorogation tacite de compétence, ainsi que celle de l’article 7, point 5, de ce règlement, relatif à la compétence alternative des juridictions du lieu du siège de la succursale dans les litiges relatifs à l’exploitation de ladite succursale.

23

Dans ces conditions, le Juzgado de lo Mercantil no 1 de Gerona (tribunal de commerce no 1 de Gérone, Espagne) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :

« 1)

La prorogation tacite de compétence prévue et réglementée par l’article 26 du [règlement no 1215/2012] exige-t-elle, dans tous ses aspects, une interprétation autonome et commune à tous les États membres, qui ne saurait dès lors être conditionnée par les limitations établies par les règles de compétence judiciaire internes des États membres ?

2)

La prorogation tacite de compétence prévue et réglementée par l’article 26 du [règlement no 1215/2012] est-elle une règle de compétence judiciaire internationale « pure », qui désigne exclusivement les juridictions d’un État membre, mais laisse au droit de la procédure de cet État membre le soin de préciser la juridiction territorialement compétente, ou s’agit‑il au contraire d’une règle portant à la fois sur la compétence judiciaire internationale et sur la compétence territoriale ?

3)

Eu égard aux circonstances de l’espèce, un litige relatif à un vol opéré par une compagnie domiciliée dans un autre État membre, dont le lieu de départ ou la destination se trouve dans un État membre dans lequel ladite compagnie a une succursale qui lui fournit des services auxiliaires et dont les billets n’ont pas été achetés par l’intermédiaire de ladite succursale, constitue-t‑il un litige relatif à l’exploitation d’une succursale, d’une agence ou de tout autre établissement établissant le critère de rattachement prévu par la règle de compétence visée à l’article 7, point 5, du [règlement no 1215/2012] ? »

Sur les questions préjudicielles

24

À titre liminaire, il convient de relever que le règlement no 261/2004 ne contient pas de règles relatives à la compétence internationale des juridictions des États membres, de sorte que la question de la compétence internationale d’une juridiction d’un État membre doit être examinée au regard du règlement no 1215/2012 (voir, en ce sens, arrêt du 9 juillet 2009, Rehder, C‑204/08, EU:C:2009:439, point 28).

25

À cet égard, l’article 26, paragraphe 1, première phrase, du règlement no 1215/2012 permet d’établir la compétence d’une juridiction, lorsque, « [o]utre les cas où sa compétence résulte d’autres dispositions du présent règlement, la juridiction d’un État membre devant laquelle le défendeur comparaît est compétente. »

26

Pour ce motif, il convient d’examiner, d’abord, si la juridiction de renvoi n’est pas compétente en vertu d’autres dispositions de ce règlement.

27

Bien que le règlement no 1215/2012 prévoie des règles de compétence spéciale, figurant notamment à la section 2, du chapitre II, de ce règlement, la partie requérante au principal n’a pas introduit, devant la juridiction de renvoi, sa demande indemnitaire relative à un vol opéré entre Porto et Barcelone sur le fondement de la règle de compétence spéciale fondée sur le lieu d’exécution de l’obligation qui sert de base à la demande, contenue à l’article 7, point 1, sous b), de ce règlement, telle qu’interprétée par la Cour (arrêt du 9 juillet 2009, Rehder, C‑204/08, EU:C:2009:439, point 43), au motif que cette juridiction se situerait dans le ressort du lieu de départ ou du lieu d’arrivée du vol concerné.

28

De même, bien que les dispositions de la section 4 du chapitre II du règlement no 1215/2012, relative à la « Compétence en matière de contrats conclus par les consommateurs », établissent également une règle de compétence spéciale en faveur des consommateurs, et un passager aérien étant susceptible d’être considéré comme un consommateur, il convient de relever que l’article 17, paragraphe 3, de ce règlement énonce que cette section « ne s’applique pas aux contrats de transport autres que ceux qui, pour un prix forfaitaire, combinent voyage et hébergement ».

29

Dans ces conditions, il résulte sans ambiguïté du libellé de ladite disposition que, dans des circonstances telles que celles en cause au principal, un passager aérien, qui a acheté non pas un voyage à forfait, mais un simple billet d’avion pour un vol, ne saurait se prévaloir des règles de compétence spéciale relatives aux contrats conclus par les consommateurs contenues dans le règlement no 1215/2012.

30

Il importe encore d’ajouter que, si le règlement no 1215/2012 énonce, à son article 4, le principe général du for du défendeur, la juridiction de renvoi précise que la défenderesse au principal a son siège social dans un autre État membre que le Royaume d’Espagne, à savoir l’Irlande, de sorte que cette disposition ne saurait servir de fondement à la compétence de cette juridiction.

31

Il s’ensuit qu’il convient d’examiner, en premier lieu, la troisième question posée par la juridiction de renvoi, relative à l’interprétation de l’article 7, point 5, du règlement no 1215/2012, afin de déterminer si sa compétence ne pourrait pas découler de ladite disposition.

Sur la troisième question

32

Par sa troisième question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 7, point 5, du règlement no 1215/2012 doit être interprété en ce sens qu’une juridiction d’un État membre est compétente pour connaître d’un litige relatif à un recours indemnitaire formé en vertu de l’article 7 du règlement no 261/2004 et dirigé contre une compagnie aérienne, établie sur le territoire d’un autre État membre, au motif que cette compagnie dispose, dans le ressort de la juridiction saisie, d’une succursale.

33

Selon la jurisprudence constante de la Cour, deux critères permettent de déterminer si une action judiciaire relative à l’exploitation d’une succursale est rattachée à un État membre. D’une part, la notion de « succursale » suppose l’existence d’un centre d’opérations qui se manifeste d’une façon durable vers l’extérieur, comme le prolongement d’une maison mère. Ce centre doit être pourvu d’une direction et être matériellement équipé de façon à pouvoir négocier avec des tiers qui sont ainsi dispensés de s’adresser directement à la maison mère. D’autre part, le litige doit concerner soit des actes relatifs à l’exploitation d’une succursale, soit des engagements pris par celle-ci au nom de la maison mère, lorsque ces derniers doivent être exécutés dans l’État où cette succursale est située (voir, en ce sens, arrêts du 19 juillet 2012, Mahamdia, C‑154/11, EU:C:2012:491, point 48 et jurisprudence citée, ainsi que du 5 juillet 2018, flyLAL-Lithuanian Airlines, C‑27/17, EU:C:2018:533, point 59 et jurisprudence citée).

34

En ce qui concerne, notamment, le second critère dégagé par la jurisprudence, il ressort de la décision de renvoi que le billet d’avion en cause au principal a été acheté en ligne. Ainsi, aucun élément dans cette décision n’indique que le contrat de transport conclu entre le requérant au principal et la compagnie aérienne l’a été par l’intermédiaire de cette succursale. Par ailleurs, selon les informations dont dispose la Cour, les services fournis par la succursale de Ryanair à Gérone semblent avoir trait à des questions fiscales.

35

Il s’ensuit qu’il n’existe pas d’éléments permettant d’établir l’implication de la succursale dans la relation juridique entre Ryanair et la partie requérante au principal, de sorte que la juridiction de renvoi ne saurait être compétente pour connaître du litige en cause au principal en vertu de l’article 7, point 5, du règlement no 1215/2012 (voir, par analogie, arrêt du 5 juillet 2018, flyLAL-Lithuanian Airlines, C‑27/17, EU:C:2018:533, point 63).

36

Eu égard aux considérations qui précèdent, l’article 7, point 5, du règlement no 1215/2012 doit être interprété en ce sens qu’une juridiction d’un État membre n’est pas compétente pour connaître d’un litige relatif à un recours indemnitaire formé en vertu de l’article 7 du règlement no 261/2004 et dirigé contre une compagnie aérienne, établie sur le territoire d’un autre État membre, au motif que cette compagnie dispose, dans le ressort de la juridiction saisie, d’une succursale, sans que celle-ci ait pris part à la relation juridique entre la compagnie et le passager concerné.

Sur les deux premières questions

37

Par ses première et deuxième questions, qu’il convient d’examiner ensemble, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 26, paragraphe 1, du règlement no 1215/2012 doit être interprété en ce sens qu’il est susceptible de justifier la compétence internationale de la juridiction saisie en vertu d’une élection tacite de for, au motif que le défendeur ne s’oppose pas à la compétence de cette juridiction.

38

L’article 26, paragraphe 1, première phrase, du règlement no 1215/2012 prévoit une règle de compétence fondée sur la comparution du défendeur pour tous les litiges pour lesquels la compétence du juge saisi ne résulte pas d’autres dispositions de ce règlement. Cette disposition implique, y compris dans les cas où le juge a été saisi en méconnaissance des dispositions de ce règlement, que la comparution du défendeur puisse être considérée comme une acceptation tacite de la compétence du juge saisi et donc comme une prorogation de compétence de celui-ci (arrêts du 20 mai 2010, ČPP Vienna Insurance Group, C‑111/09, EU:C:2010:290, point 21, ainsi que du 27 février 2014, Cartier parfums-lunettes et Axa Corporate Solutions assurances, C‑1/13, EU:C:2014:109, point 34).

39

En l’occurrence, il résulte des explications de la juridiction de renvoi que, à la suite de l’invitation du greffe de cette juridiction à déposer des observations sur l’éventuelle compétence internationale de ladite juridiction pour connaître de la demande en cause au principal, la partie défenderesse au principal n’a pas soumis d’observations écrites.

40

Une absence d’observations ne pouvant pas constituer une comparution au sens de l’article 26 du règlement no 1215/2012 et, ainsi, être considérée comme une acceptation tacite, par le défendeur, de la compétence de la juridiction saisie, il ne saurait être fait application, dans des circonstances telles que celles en cause au principal, d’une telle disposition relative à la prorogation tacite de compétence.

41

Partant, il convient de répondre aux première et deuxième questions que l’article 26, paragraphe 1, du règlement no 1215/2012 doit être interprété en ce sens qu’il ne s’applique pas dans un cas, tel que celui en cause au principal, où le défendeur n’a pas soumis d’observations ou n’a pas comparu.

Sur les dépens

42

La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement

 

Par ces motifs, la Cour (sixième chambre) dit pour droit :

 

1)

L’article 7, point 5, du règlement (UE) no 1215/2012 du Parlement européen et du Conseil, du 12 décembre 2012, concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale, doit être interprété en ce sens qu’une juridiction d’un État membre n’est pas compétente pour connaître d’un litige relatif à un recours indemnitaire formé en vertu de l’article 7 du règlement (CE) no 261/2004 du Parlement européen et du Conseil, du 11 février 2004, établissant des règles communes en matière d’indemnisation et d’assistance des passagers en cas de refus d’embarquement et d’annulation ou de retard important d’un vol, et abrogeant le règlement (CEE) no 295/91, et dirigé contre une compagnie aérienne, établie sur le territoire d’un autre État membre, au motif que cette compagnie dispose, dans le ressort de la juridiction saisie, d’une succursale, sans que celle-ci ait pris part à la relation juridique entre la compagnie et le passager concerné.

 

2)

L’article 26, paragraphe 1, du règlement no 1215/2012 doit être interprété en ce sens qu’il ne s’applique pas dans un cas, tel que celui en cause au principal, où le défendeur n’a pas soumis d’observations ou n’a pas comparu.

 

Signatures


( *1 ) Langue de procédure : l’espagnol.