CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. MANUEL CAMPOS SÁNCHEZ-BORDONA

présentées le 18 septembre 2019 ( 1 )

Affaire C‑678/18

Procureur-Generaal bij de Hoge Raad der Nederlanden

[demande de décision préjudicielle formée par le Hoge Raad der Nederlanden (Cour suprême des Pays‑Bas)]

« Renvoi préjudiciel – Recevabilité – Article 267 TFUE – Notion “de litige” – Pourvoi en cassation dans l’intérêt de la loi – Intangibilité de la situation tranchée par le jugement attaqué – Dessins et modèles – Mesures provisoires et conservatoires – Compétence des tribunaux de première instance nationaux pour connaître des actions en référé – Compétence exclusive des tribunaux des dessins ou modèles communautaires »

1. 

Le règlement (CE) no 6/2002 ( 2 ) prévoit que les États membres désignent sur leurs territoires un ou plusieurs « tribunaux des dessins ou modèles communautaires » ayant une compétence exclusive pour connaître de certaines actions relatives à la contrefaçon et à la nullité des dessins ou modèles communautaires (article 81).

2. 

Le Royaume des Pays‑Bas, dans le cadre de la mise en œuvre de cette prescription, a attribué cette compétence exclusive au rechtbank Den Haag (tribunal de La Haye, Pays‑Bas), dont l’un des juges s’est également vu conférer la compétence pour adopter des mesures provisoires et conservatoires.

3. 

Le Hoge Raad der Nederlanden (Cour suprême des Pays‑Bas) doute néanmoins que cette dernière règle (en vertu de laquelle le juge du tribunal spécialisé des dessins ou modèles communautaires siégeant à La Haye est seul compétent pour adopter des mesures provisoires et conservatoires dans les litiges portant sur l’article 81 du règlement no 6/2002) soit conforme à d’autres dispositions de ce règlement.

4. 

Cette interrogation du juge de renvoi découle de la controverse née aux Pays‑Bas, où un certain nombre de juridictions de première instance et d’appel, qui n’ont pas la qualité de tribunaux des dessins ou modèles communautaires, se sont déclarées compétentes pour connaître de demandes de mesures provisoires et conservatoires dans le cadre de procédures relatives à des actions en contrefaçon ou en nullité desdits dessins ou modèles.

I. Le cadre juridique

A.   Le droit de l’Union : le règlement no 6/2002

5.

Le titre IX porte sur la « Compétence et [la] procédure pour les actions en justice relatives aux dessins et modèles communautaires ».

6.

La section 2 de ce titre, qui comprend les articles 80 à 92, traite des « Litiges en matière de contrefaçon et de nullité des dessins ou modèles communautaires ».

7.

Aux termes de l’article 80 (« Tribunaux des dessins ou modèles communautaires ») du règlement no 6/2002 :

« 1.   Les États membres désignent sur leurs territoires un nombre aussi limité que possible de juridictions nationales de première et deuxième instance (tribunaux des dessins ou modèles communautaires), chargées de remplir les fonctions qui leur sont attribuées par le présent règlement.

[…] »

8.

L’article 81 (« Compétence en matière de contrefaçon et de nullité ») de ce règlement dispose :

« Les tribunaux des dessins ou modèles communautaires ont compétence exclusive :

a)

pour les actions en contrefaçon et – si la législation nationale les admet – en menace de contrefaçon d’un dessin ou modèle communautaire ;

b)

pour les actions en constatation de non‑contrefaçon, si la législation nationale les admet ;

c)

pour les actions en nullité d’un dessin ou modèle communautaire non enregistré ;

d)

pour les demandes reconventionnelles en nullité d’un dessin ou modèle communautaire présentées dans le cadre des actions visées au point a). »

9.

L’article 90 (« Mesures provisoires et conservatoires ») dudit règlement se lit comme suit :

« 1.   Les mesures provisoires et conservatoires prévues par la loi d’un État membre à propos des dessins ou modèles nationaux peuvent être demandées, à propos d’un dessin ou modèle communautaire, aux autorités judiciaires, y compris les tribunaux des dessins ou modèles communautaires de cet État, même si en vertu du présent règlement une juridiction des dessins ou modèles communautaires d’un autre État membre est compétente pour connaître du fond.

2.   Dans les procédures concernant des mesures provisoires et conservatoires, l’exception de nullité d’un dessin ou modèle communautaire soulevée par le défendeur autrement que par la voie d’une demande reconventionnelle est recevable. L’article 85, paragraphe 2, s’applique mutatis mutandis.

3.   Un tribunal des dessins ou modèles communautaires dont la compétence est fondée sur l’article 82, paragraphes 1, 2, 3 ou 4, est compétent pour ordonner des mesures provisoires ou conservatoires qui, sous réserve de toute procédure requise aux fins de la reconnaissance et de l’exécution conformément au titre III de la convention d’exécution, sont applicables sur le territoire de tout État membre. Cette compétence n’appartient à aucune autre juridiction. »

10.

La section 3 du titre IX (articles 93 et 94) du même règlement porte sur les « Autres litiges relatifs aux dessins et modèles communautaires ».

11.

L’article 93 (« Dispositions complémentaires concernant la compétence des tribunaux nationaux autres que les tribunaux des dessins ou modèles communautaires ») du règlement no 6/2002 énonce :

« 1.   Dans l’État membre dont les tribunaux sont compétents conformément à l’article 79, paragraphes 1 ou 4, les actions en matière de dessins ou modèles communautaires autres que celles visées à l’article 81 sont portées devant les tribunaux qui auraient compétence territoriale et d’attribution s’il s’agissait d’actions relatives aux enregistrements nationaux de dessins ou modèles dans l’État concerné.

[…] »

B.   Le droit néerlandais

1. La loi sur l’organisation judiciaire

12.

Conformément à l’article 78 de la Wet op de rechterlijke organisatie (loi sur l’organisation judiciaire) :

« 1.   Le Hoge Raad [(Cour suprême)] connaît des pourvois en cassation formés contre les délibérations, arrêts, jugements et décisions des cours d’appel et des tribunaux, formés soit par une partie, soit par le procureur-generaal [ci‑après le “procureur général”] près le Hoge Raad ”dans l’intérêt de la loi”.

[…]

7.   Le pourvoi en cassation ”dans l’intérêt de la loi” ne peut pas être formé si les parties disposent d’une voie de recours ordinaire et ne porte pas préjudice aux droits acquis par les parties. »

13.

L’article 111, paragraphe 2, initio et sous c), attribue au procureur général la compétence pour former un pourvoi en cassation dans l’intérêt de la loi.

2. La loi du 4 novembre 2004

14.

L’article 3 de la loi du 4 novembre 2004 ( 3 ) dispose :

« Toutes les actions visées à l’article 81 du règlement relèvent, en premier degré de juridiction, de la compétence exclusive du rechtbank Den Haag (tribunal de La Haye) et, en référé, de la compétence exclusive du juge des référés de ce tribunal. »

II. Les faits du litige et la question préjudicielle

15.

Spin Master est une entreprise canadienne de fabrication de jouets. Elle commercialise, sous la marque « Bunchems », un jeu de petites boules colorées qui s’accrochent les unes aux autres, ce qui permet de construire toutes sortes de formes et de figures. Le 16 janvier 2015, elle a fait enregistrer à son nom, sous le numéro 002614669‑0002, un modèle communautaire pour ce jeu.

16.

High5 commercialise, sous le nom de « Linkeez », un jeu de petites boules colorées s’accrochant les unes aux autres et qui permettent de construire toutes sortes de formes et de figures.

17.

Spin Master a saisi le juge des référés du rechtbank Amsterdam (tribunal d’Amsterdam, Pays‑Bas) en vue de faire adopter des mesures provisoires et conservatoires pour contrefaçon du modèle communautaire enregistré. Elle demandait, en particulier, l’interdiction de commercialiser les produits de High5 sur le territoire néerlandais.

18.

Dans cette procédure, High5 a soutenu, in limine litis, que le rechtbank Den Haag (tribunal de La Haye) avait compétence exclusive pour connaître du litige, de sorte que le tribunal d’Amsterdam était incompétent.

19.

Le 12 janvier 2017, le juge des référés du rechtbank Amsterdam (tribunal d’Amsterdam) a rejeté l’exception d’incompétence en se fondant sur l’article 90, paragraphe 1, du règlement no 6/2002 et a ordonné une série de mesures provisoires et conservatoires ( 4 ). Dans sa décision, il a déclaré que le délai pour introduire la demande sur le fond, comme en dispose l’article 1019i du code de procédure civile, était de six mois à compter de la date de cette décision.

20.

Le procureur général, après avoir indiqué que, dans la pratique judiciaire néerlandaise, il existe des divergences sur le point de savoir si les juges des référés des rechtbanken (tribunaux) autres que le rechtbank Den Haag (tribunal de La Haye) sont compétents pour adopter des mesures provisoires et conservatoires dans ces litiges, a formé un pourvoi en cassation « dans l’intérêt de la loi » contre la décision du juge des référés d’Amsterdam.

21.

Le moyen de cassation fait valoir que :

selon la loi néerlandaise, le seul juge compétent pour adopter des mesures provisoires et conservatoires en matière de contrefaçon de dessins ou modèles communautaires est celui du rechtbank Den Haag (tribunal de La Haye) ;

l’article 90, paragraphe 2, du règlement no 6/2002 n’est pas applicable aux litiges visés à l’article 81, comme il ressortirait de la genèse et de l’« économie » dudit règlement.

22.

Dans ce contexte, le Hoge Raad der Nederlanden (Cour suprême des Pays‑Bas) pose la question préjudicielle suivante à la Cour :

« L’article 90, paragraphe 1, du [règlement no 6/2002] doit‑il être interprété en ce sens qu’il attribue de manière impérative, à toutes les juridictions d’un État membre qui y sont mentionnées, la compétence d’ordonner des mesures provisoires ou conservatoires, ou laisse‑t‑il les États membres – totalement ou partiellement – libres d’attribuer la compétence d’ordonner de telles mesures exclusivement aux juridictions désignées en tant que tribunaux (de première et deuxième instance) des dessins ou modèles communautaires conformément à l’article 80, paragraphe 1, dudit règlement ? »

III. La procédure devant la Cour

23.

La décision de renvoi a été enregistrée au greffe de la Cour le 5 novembre 2018.

24.

Le procureur général, le gouvernement néerlandais et la Commission européenne ont déposé des observations écrites. Il n’a pas été jugé nécessaire de tenir une audience.

IV. Appréciation

25.

La question préjudicielle vise à déterminer si la compétence exclusive des tribunaux (spécialisés) des dessins ou modèles communautaires pour connaître de certaines actions en contrefaçon et en nullité, prévues aux articles 80 et 81 du règlement no 6/2002, s’étend ou non aux mesures provisoires et conservatoires visées à l’article 90 de ce même règlement.

26.

Le doute naît du fait que, en dépit de cette exclusivité, l’article 90 semble ouvrir la voie à la possibilité de demander à d’autres juridictions nationales (et, partant, pas uniquement aux tribunaux spécialisés) d’adopter des mesures provisoires et conservatoires en matière de dessins ou modèles communautaires.

27.

Avant d’apporter une réponse sur le fond à cette interrogation, il convient de déterminer si, comme le laisse entendre la juridiction nationale dans la décision de renvoi, nous sommes en présence d’un litige qui satisfait aux exigences de l’article 267 TFUE.

A.   Sur la recevabilité de la question préjudicielle

28.

La question préjudicielle en interprétation a été soulevée dans le cadre d’un pourvoi en cassation « dans l’intérêt de la loi », que le procureur général peut former contre les décisions des tribunaux de première instance et d’appel qui ne sont plus susceptibles de recours ordinaire.

29.

Ce type de pourvoi en cassation sert l’application uniforme du droit. Il s’impose lorsque la question litigieuse est soulevée dans un grand nombre d’affaires et lorsque, en l’absence d’une décision du Hoge Raad (Cour suprême), la pratique judiciaire offre des solutions divergentes.

30.

Il s’agit d’un mécanisme procédural qui porte à son plus haut degré la fonction « nomophylactique » traditionnelle du pourvoi en cassation (à savoir la protection de la loi, au sens objectif, plutôt que celle des intérêts subjectifs des parties). À cette fonction s’ajoute, « dans l’intérêt de la loi », la finalité visant à l’élaboration d’une doctrine jurisprudentielle pour l’avenir, mais sans conséquences concrètes pour le litige sous‑jacent, dont l’issue restera inchangée. Si le pourvoi était accueilli, le jugement attaqué devrait être annulé, sans toutefois que la situation juridique des parties, définitivement établie en première instance, s’en trouve affectée.

31.

Le Hoge Raad (Cour suprême) est, de toute évidence, une juridiction dont les décisions ne sont pas susceptibles d’un recours ultérieur, au sens de l’article 267 TFUE. Il est donc tenu, en cas de doute sur l’interprétation d’une règle du droit de l’Union, de poser une question préjudicielle à la Cour.

32.

On pourrait penser que, tout en reconnaissant de manière générale la fonction juridictionnelle du juge de renvoi, il faille rejeter la question préjudicielle posée, étant donné que, dans le cadre d’un pourvoi en cassation dans l’intérêt de la loi, il n’y a pas de véritable litige entre les parties.

33.

Je ne crois pas, toutefois, qu’une telle objection puisse prospérer. L’exigence selon laquelle la question préjudicielle doit être posée dans le cadre d’une procédure contradictoire a été écartée depuis longtemps par la Cour ( 5 ). Comme l’a déclaré l’avocat général Ruiz‑Jarabo Colomer, la saisine à titre préjudiciel est également possible « en l’absence de controverse. Ce qui importe est que l’organe qui demande l’assistance de la Cour exerce une fonction juridictionnelle et estime qu’une interprétation du droit communautaire lui est nécessaire pour rendre sa décision, le fait que la procédure au cours de laquelle le renvoi est effectué ne soit pas contradictoire étant sans pertinence» ( 6 ).

34.

Si, comme en l’espèce, il y a eu un litige antérieur entre des parties et que la décision rendue en première instance a été portée, au moyen d’un appel ou d’un pourvoi en cassation, devant une juridiction supérieure, « le tribunal [qui statue] doit en principe être considéré comme une juridiction au sens de l’article [267 TFUE], habilitée à poser une question préjudicielle à la Cour» ( 7 ).

35.

Le fait que la situation individuelle des parties au litige demeure inchangée, quel que soit le sens de l’arrêt rendu dans l’intérêt de la loi, ne permet pas de contredire cette affirmation. Au contraire, l’effet erga omnes de ce type d’arrêts leur confère une qualité qui, précisément parce qu’elle transcende le cas d’espèce, justifie amplement que le Hoge Raad (Cour suprême) puisse s’adresser à la Cour pour que sa réponse, dans le cadre de l’interprétation du droit de l’Union, ait une portée plus large, garantissant ainsi l’application uniforme du règlement no 6/2002 par toutes les juridictions néerlandaises.

36.

Pour résumer, j’estime que rien ne fait obstacle à l’admission de la question préjudicielle.

B.   Sur le fond

37.

Le règlement no 6/2002 a opté pour un modèle de spécialisation judiciaire : dans chaque État membre est désigné un nombre aussi limité que possible de juridictions nationales (dénommées « tribunaux des dessins ou modèles communautaires ») chargées d’adopter les décisions en matière de nullité et de contrefaçon des dessins ou modèles communautaires.

38.

Cette règle, consacrée aux articles 80 et 81 dudit règlement, implique que, sans qu’il y ait débat sur ce point, la résolution des litiges en cause sur le fond relève de la compétence exclusive des tribunaux des dessins ou modèles communautaires susmentionnés, en leur qualité d’experts en ce domaine.

39.

Toutefois, l’article 90, paragraphe 1, du règlement précité semble obéir à une autre logique, plus soucieuse du principe d’efficacité que du principe de spécialisation juridictionnelle, en ce qui concerne les mesures provisoires et conservatoires ( 8 ). Ces mesures « peuvent être demandées, à propos d’un dessin ou modèle communautaire, aux autorités judiciaires, y compris les tribunaux des dessins ou modèles communautaires ».

40.

Ainsi, à première vue, l’exclusivité mentionnée à l’article 81 disparaît à l’article 90, permettant ainsi à d’autres juridictions nationales, et pas seulement à la juridiction spécialisée, d’agir, mais uniquement pour adopter des mesures provisoires et conservatoires. S’agissant de ces dernières, les exigences tenant à la célérité, inhérente au principe d’efficacité, et la plus grande proximité territoriale des différents juges compétents justifieraient une solution décentralisée, plutôt que concentrée auprès d’une seule juridiction ( 9 ).

41.

Le libellé de l’article 90, paragraphe 1, du règlement no 6/2002 milite en faveur de cette interprétation : toute juridiction d’un État membre (il s’agit ici des juridictions qui, dans cet État, tranchent les litiges en matière de dessins ou modèles) peut prononcer ce type de mesures. L’expression « y compris les tribunaux des dessins ou modèles communautaires » confirme qu’il ne doit pas nécessairement s’agir d’une juridiction spécialisée : ceux‑ci se situent donc sur un pied d’égalité avec les autres en matière de compétences lorsqu’il est question de mesures provisoires et conservatoires ( 10 ).

42.

Tant le procureur général ( 11 ) que le gouvernement néerlandais font valoir, toutefois, que l’article 90 du règlement no 6/2002 ne modifie pas la portée de l’article 81 et ne déroge pas à ses dispositions. À leur sens, l’article 81 fonde la compétence des tribunaux spécialisés en matière de dessins ou modèles communautaires à tout stade de la procédure en nullité ou en contrefaçon, y compris à celui des mesures conservatoires. L’article 90 s’appliquerait à des types d’actions autres que celles énumérées à l’article 81.

43.

La Commission défend la solution opposée. L’article 90, paragraphe 1, du règlement no 6/2002 permet de considérer que la compétence pour adopter des mesures conservatoires en matière de dessins ou modèles communautaires appartient aux juridictions des États membres, « y compris les tribunaux des dessins ou modèles communautaires ». En d’autres termes, il offre le choix entre les tribunaux (spécialisés) des dessins ou modèles communautaires et d’autres juridictions non spécialisées (mais dotées d’une compétence générale pour trancher les litiges en matière de dessins ou modèles). Je suis d’avis que cette thèse est celle qui s’accorde le mieux avec l’interprétation de la disposition en cause.

44.

À l’appui de sa position, le procureur général cite le protocole sur le règlement des litiges en matière de contrefaçon et de validité des brevets communautaires ( 12 ). Pour le procureur général, l’article 90 du règlement no 6/2002 suivrait le modèle de l’article 36 dudit protocole, dont l’objectif était de permettre l’adoption de mesures conservatoires en matière de brevets nationaux et communautaires. L’article 36 ne visait pas à créer une exception aux règles de compétence interne du protocole, mais à celles relatives à la compétence internationale ( 13 ).

45.

Je ne pense pas que cette référence au régime de règlement des litiges en matière de brevet communautaire (qui ne s’est pas concrétisé par la suite dans le mécanisme permanent) puisse être utile, dans un sens ou dans un autre, à l’interprétation de l’article 90 du règlement no 6/2002 sur les dessins ou modèles. Il est vrai que le législateur néerlandais a manifesté son inclination à concentrer toutes les compétences relatives à la protection du brevet communautaire auprès d’une seule juridiction, affirmant suivre les dispositions du protocole, mais une telle décision ne dissipe pas les doutes sur la portée de l’article 90 lu en combinaison avec l’article 81 du règlement no 6/2002.

46.

L’argument relatif à l’« économie » du règlement no 6/2002, invoqué par le procureur général et le gouvernement néerlandais, a plus de poids. De leur point de vue, l’article 90 constituerait la règle générale en matière de mesures provisoires et conservatoires, disposition qui devrait être complétée en fonction du type de litiges dans lequel elles sont demandées :

lorsqu’il s’agit d’actions « en matière de contrefaçon et de nullité des dessins ou modèles communautaires » (article 81), seuls les tribunaux spécialisés peuvent adopter les mesures provisoires et conservatoires pertinentes, car ils ont compétence exclusive pour statuer dans ces procédures ;

pour ce qui est des actions autres que celles de l’article 81, le libellé de l’article 90, paragraphe 1, acquiert tout son sens en déclarant que toute juridiction d’un État membre, y compris les juridictions spécialisées, peut adopter des mesures provisoires et conservatoires. Cela expliquerait mieux ce texte « problématique » ou « énigmatique» ( 14 ).

47.

Toutefois, je ne partage pas cette thèse. Celle‑ci est mise à mal par la structure du titre IX du règlement no 6/2002, consacré à la « Compétence et [à la] procédure pour les actions en justice relatives aux dessins et modèles communautaires », et qui est divisé en trois sections :

la section 1 énonce ce que l’on pourrait qualifier de toile de fond pour la détermination de la juridiction étatique compétente pour connaître d’un litige. Les règles auxquelles elle fait référence sont celles de la convention de Bruxelles ( 15 ), qui s’appliquent sauf disposition contraire du règlement no 6/2002 ;

la section 2 reprend les exceptions à l’application du règlement Bruxelles I bis. Elle édicte des règles de compétence internationale (article 82) et détermine les juridictions compétentes pour connaître des litiges relatifs aux dessins ou modèles communautaires ainsi que des actions dont elles sont saisies (articles 80 et 81) ( 16 ). L’article 90 (« Mesures provisoires et conservatoires ») figure dans cette section ;

la section 3, intitulée « Autres litiges relatifs aux dessins et modèles communautaires », renvoie à l’article 79, paragraphes 1 et 4, pour la détermination de la juridiction nationale compétente ( 17 ) et attribue la compétence interne à l’égard des actions autres que celles visées à l’article 81, en la conférant concrètement aux tribunaux qui auraient compétence territoriale et d’attribution vis‑à‑vis d’actions relatives à un dessin ou modèle national dans l’État concerné (article 93).

48.

L’interprétation systématique du titre IX du règlement no 6/2002 confirme que le législateur a souhaité traiter les actions en contrefaçon et en nullité de dessins ou modèles communautaires différemment des autres actions. Les premières sont régies par la section 2, qui contient l’article 90. On peut donc difficilement admettre que ce dernier article ait un objet différent de celui qui caractérise l’ensemble de règles (section 2) dans lequel il s’insère. En d’autres termes, l’article 90 s’applique également aux mesures provisoires et conservatoires demandées dans le cadre des procédures en contrefaçon et en nullité de dessins ou modèles communautaires.

49.

Le gouvernement néerlandais soutient, à titre d’argument supplémentaire, que, par sa position dans la section 2, l’article 90 est éloigné des articles 80 et 81 du règlement no 6/2002 et que le fait qu’il soit séparé de ces derniers par les articles 82 à 89, lesquels portent sur un autre type de questions, créerait une certaine déconnexion entre eux.

50.

Cet argument ne peut, à mon sens, être accepté. Le libellé des articles 82 à 89 du règlement no 6/2002 abonde de renvois aux actions prévues à l’article 81, ce qui démontre qu’ils obéissent à une même logique, laquelle justifie leur inclusion dans la section 2 du titre IX. La même logique explique pourquoi l’article 90 se trouve dans cette même section, ce qui renforce l’idée que les mesures conservatoires visées correspondent aux procédures prévues à l’article 81, et non à celles de l’article 93, situé dans la section 3.

51.

Les critères d’interprétation littérale et systématique offrent donc une solution différente de celle proposée par le procureur général et le gouvernement néerlandais. La logique du double système des tribunaux spécialisés/autres tribunaux compétents, au sein de chaque État membre, si l’on associe celle‑ci aux différentes fonctions des mesures provisoires et conservatoires, d’une part, et de la décision judiciaire qui tranche le fond du litige, d’autre part, conduit à la même solution.

52.

La spécialisation des tribunaux des dessins ou modèles communautaires contribue sans aucun doute à l’unité de la jurisprudence et à l’application uniforme des règles régissant, sur le fond, les actions en contrefaçon et en nullité. Cette conception du rôle de l’examen au fond imprègne le système du règlement no 6/2002 : ainsi, lorsque son article 80 concentre auprès d’un nombre limité de tribunaux la compétence à l’égard des actions de l’article 81, l’objectif est de contribuer « à une interprétation uniforme des conditions de validité des dessins ou modèles communautaires » (considérant 28).

53.

Cet objectif ne s’impose pas nécessairement, toutefois, dans le cas des mesures provisoires et conservatoires, dont l’octroi est, par définition, limité dans le temps et ne préjuge pas (ne doit pas préjuger) l’issue finale du litige.

54.

Sans nier l’importance pratique que la décision conservatoire peut avoir dans certains cas, elle est subordonnée à la poursuite de la procédure au principal ( 18 ) et ne doit pas empiéter sur ce qui est propre à cette dernière. Le règlement no 6/2002 réserve expressément l’examen des questions complexes qui touchent au fond de l’affaire (telles que la contrefaçon ou la nullité du dessin ou modèle) aux tribunaux spécialisés.

55.

Tel est le cas, par exemple, de la demande reconventionnelle que le défendeur doit formuler en vertu de l’article 85, paragraphe 1, s’il souhaite contester la validité du dessin ou modèle communautaire dont le demandeur est titulaire, lorsque ce dernier a introduit une action au titre de l’article 81 du règlement no 6/2002. En revanche, au stade procédural des mesures provisoires ou conservatoires, il suffit au défendeur de soulever une simple exception de nullité (article 90, paragraphe 2, du règlement no 6/2002) ( 19 ).

56.

Il ressort de ce traitement différencié que, pour le législateur de l’Union, la décision conservatoire, en raison même de son caractère provisoire, et dans l’attente de la décision sur le fond, a un effet limité. Non pas que le juge des référés ne puisse pas, dans son appréciation du fumus boni iuris ou du reste des moyens invoqués, tenir compte de l’allégation du défendeur (formulée par voie d’exception) concernant la validité du dessin ou modèle du demandeur, mais, comme cette décision n’est pas définitive, elle n’appelle pas de demande reconventionnelle ni l’intervention du tribunal spécialisé qui, en définitive, devra se prononcer à cet égard.

57.

Il convient également de garder à l’esprit que, si les tribunaux des dessins ou modèles communautaires ont indéniablement cette expertise en la matière, les autres juges nationaux l’ont également.

58.

En effet, le système de protection des dessins ou modèles est fondé sur la coexistence de ceux qui ont une dimension communautaire et de ceux qui n’ont qu’une portée nationale, ce qui se traduit par l’attribution corrélative de compétences judiciaires.

59.

La protection des dessins ou modèles nationaux relève de la compétence des juges nationaux (non spécialisés, au sens du règlement no 6/2002) désignés par les règles de chacun des États membres, ce qui suffit à leur conférer une indéniable proximité avec la matière. Dans ces litiges, ils peuvent adopter les mêmes mesures conservatoires que celles qui s’appliquent, le cas échéant, aux litiges en matière de dessins ou modèles communautaires ( 20 ).

60.

En outre, ces juges nationaux (non spécialisés) sont également compétents pour statuer sur certains litiges concernant les dessins ou modèles communautaires, conformément à l’article 93 du règlement no 6/2002. Ils peuvent aussi adopter des mesures provisoires et conservatoires dans de tels litiges.

61.

Par conséquent, les juges exclus de la compétence prévue à l’article 81 du règlement no 6/2002 interviennent dans un domaine qui leur est familier, sans préjudice du fait qu’ils ne sont pas compétents pour statuer sur le fond d’un litige concernant la contrefaçon ou la nullité d’un dessin ou modèle communautaire.

62.

Il ne me semble donc pas que l’argument d’une (plus grande) spécialisation des tribunaux des dessins ou modèles communautaires justifie une restriction de la compétence des autres tribunaux nationaux en matière de mesures provisoires et conservatoires.

63.

Le gouvernement néerlandais interprète l’article 90, paragraphe 1, du règlement no 6/2002 comme laissant aux États membres la liberté de choisir comment organiser la procédure conservatoire, sous réserve que le tribunal des dessins ou modèles communautaires soit nécessairement compétent.

64.

Il fait valoir à cet égard que l’autonomie procédurale des États membres ne s’efface que lorsqu’il existe des règles expresses en vertu desquelles une autorité judiciaire particulière doit être investie de compétences spécifiques (comme le font les articles 80 et 81 du règlement no 6/2002). Par conséquent, rien n’empêcherait un État de décider que la compétence exclusive pour les actions en contrefaçon ou en nullité, y compris durant la phase conservatoire, relève des tribunaux spécialisés des dessins ou modèles communautaires.

65.

Ce point de vue se fonde sur une interprétation de l’article 90, paragraphe 1, du règlement no 6/2002 en tant que simple disposition d’habilitation : les États membres « peuvent » choisir d’attribuer la compétence pour adopter des mesures provisoires et conservatoires à certaines juridictions ou à d’autres (avec la limite déjà mentionnée que ces juridictions doivent comprendre, en tout état de cause, les tribunaux des dessins ou modèles communautaires).

66.

Je suis toutefois d’avis que l’emploi du terme « peuvent » dans cette disposition a un autre sens, plus conforme à l’objet de la règle. La faculté de choisir concerne non pas les États membres, mais les parties à la procédure. C’est précisément pour des raisons qui touchent à la défense des intérêts de ces dernières et à la proximité des juridictions qui doivent leur apporter une réponse urgente ( 21 ), quoique purement provisoire et conservatoire, qu’elles sont autorisées à s’adresser soit aux tribunaux spécialisés, soit aux tribunaux ordinaires.

67.

La disposition en cause doit donc être interprétée du point de vue des titulaires du droit inhérent aux dessins ou modèles communautaires, qui recherchent leur protection juridictionnelle. Il s’agit en définitive de favoriser l’ouverture d’une voie procédurale offrant une protection conservatoire plus généreuse et faisant prévaloir l’efficacité ( 22 ), tandis que, sur le fond, c’est la spécialisation qui prime pour statuer sur les actions en contrefaçon ou en nullité.

68.

On pourrait penser que, en pareil cas, l’inclusion des tribunaux des dessins ou modèles communautaires serait superflue, mais il n’en est rien. L’élément clé figure à l’article 90, paragraphe 3, en vertu duquel :

si l’intéressé choisit de demander une mesure provisoire et conservatoire au tribunal des dessins ou modèles communautaires, les mesures que ce dernier adopte sont applicables sur le territoire de tout État membre ;

si l’intéressé choisit d’adresser cette demande à des tribunaux nationaux autres que les tribunaux spécialisés, les effets des mesures conservatoires adoptées par ceux‑ci sont circonscrits à l’État membre concerné.

69.

La dernière phrase de l’article 90, paragraphe 3, du règlement no 6/2002 confirme précisément ce qui a été dit jusqu’à présent. Il ne serait pas nécessaire de prévoir que « [c]ette compétence [pour étendre les effets des mesures provisoires et conservatoires au territoire de tout État membre] n’appartient à aucune autre juridiction [que les tribunaux des dessins ou modèles communautaires] » si les autres juridictions n’avaient pas elles‑mêmes compétence pour adopter des mesures conservatoires dans le cadre des actions en nullité et en contrefaçon de dessins ou modèles communautaires.

70.

Pour résumer, l’adoption d’une mesure conservatoire par les juridictions nationales (au sens déjà exposé) donne accès à la protection juridictionnelle inhérente à ce type de procédures, qui se caractérise par l’urgence, sans qu’il soit possible à ce stade de la procédure, j’insiste, d’épuiser l’examen au fond du litige, ce qui relève de la seule compétence des tribunaux des dessins ou modèles communautaires.

V. Conclusion

71.

Eu égard à ce qui précède, je propose à la Cour de répondre au Hoge Raad der Nederlanden (Cour suprême des Pays‑Bas) de la manière suivante :

L’article 90, paragraphe 1, du règlement (CE) no 6/2002 du Conseil, du 12 décembre 2001, sur les dessins ou modèles communautaires, doit être interprété en ce sens que les juridictions nationales compétentes en matière de dessins ou modèles nationaux ont la faculté d’adopter des mesures provisoires et conservatoires dans le cadre des procédures en contrefaçon ou en nullité des dessins ou modèles communautaires, dans lesquelles la décision sur le fond incombe exclusivement aux tribunaux désignés conformément à l’article 80, paragraphe 1, dudit règlement.


( 1 ) Langue originale : l’espagnol.

( 2 ) Règlement du Conseil du 12 décembre 2001 sur les dessins ou modèles communautaires (JO 2002, L 3, p. 1).

( 3 ) Wet van 4 november 2004 tot uitvoering van de verordening van de Raad van de Europese Unie betreffende Gemeenschapsmodellen houdende aanwijzing van de rechtbank voor het Gemeenschapsmodel (Uitvoeringswet EG‑verordening betreffende Gemeenschapsmodellen) (loi du 4 novembre 2004 portant exécution du règlement du Conseil de l’Union européenne sur les dessins ou modèles communautaires et désignant le tribunal compétent pour connaître des litiges en matière de dessins ou modèles communautaires [loi portant exécution du règlement (CE) sur les dessins ou modèles communautaires]) (Stb. 2004, no 573, ci‑après la « loi du 4 novembre 2004 »).

( 4 ) Il a notamment interdit à High5, sous peine d’astreintes, de vendre les boules de jeu et leurs accessoires et lui a ordonné d’en demander la restitution auprès des acheteurs professionnels et de rembourser à ces derniers le prix et les frais de transport des produits. High5 devait, en outre, communiquer à Spin Master une liste de ses fournisseurs et de ses acheteurs, comprenant le détail des produits livrés.

( 5 ) Arrêts du 14 décembre 1971, Politi (43/71, EU:C:1971:122) ; du 21 février 1974, Birra Dreher (162/73, EU:C:1974:17) ; du 18 juin 1998, Corsica Ferries France (C‑266/96, EU:C:1998:306), et du 25 juin 2009, Roda Golf & Beach Resort (C‑14/08, EU:C:2009:395, point 33).

( 6 ) Conclusions présentées dans l’affaire De Coster (C‑17/00, EU:C:2001:366, point 30).

( 7 ) Arrêt du 16 décembre 2008, Cartesio (C‑210/06, EU:C:2008:723, points 57 à 59).

( 8 ) Le règlement no 6/2002 n’harmonise pas la typologie de ces mesures : chaque État membre applique les mesures prévues par sa législation.

( 9 ) Comme il a été indiqué précédemment, le règlement no 6/2002 admet l’existence dans chaque État membre non pas d’un, mais de plusieurs (un nombre « aussi limité que possible ») tribunaux spécialisés en matière de dessins ou modèles communautaires. Le Royaume des Pays‑Bas a opté pour une juridiction unique.

( 10 ) La question de l’efficacité de ces mesures, selon le tribunal qui les adopte, est différente. Je reviendrai sur cette distinction plus tard.

( 11 ) Ses observations reproduisent celles formulées dans le pourvoi en cassation dans l’intérêt de la loi formé devant le Hoge Raad (Cour suprême).

( 12 ) JO 1989, L 401, p. 34.

( 13 ) Le protocole traite de la compétence internationale à son article 14 et de la compétence nationale à son article 15.

( 14 ) Observations du procureur général, point 3.23.

( 15 ) JO 1998, C 27, p. 1. La version consolidée a été publiée au JO 2009, L 147, p. 5. Toutefois, la référence à cette convention doit être comprise comme renvoyant au règlement (UE) no 1215/2012 du Parlement européen et du Conseil, du 12 décembre 2012, concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale (JO 2012, L 351, p. 1) (ci‑après le « règlement Bruxelles I bis »).

( 16 ) Elle régit, en outre, certaines particularités relatives à la portée et aux effets de l’exercice des actions en contrefaçon ou en nullité et contient, entre autres, des dispositions sur le droit applicable, la connexité et la compétence de second degré de juridiction (articles 82 à 89, 91 et 92).

( 17 ) À défaut de juridiction compétente en vertu des dispositions de l’article 79, paragraphes 1 et 4, elle désigne les tribunaux de l’État membre sur le territoire duquel l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) a son siège.

( 18 ) C’est pourquoi le juge des référés d’Amsterdam, par décision du 12 janvier 2017, a fixé un délai pour introduire la demande sur le fond.

( 19 ) La version de langue espagnole de ce paragraphe utilise de façon inappropriée l’expression « demanda de nulidad » alors qu’il s’agit en réalité d’une véritable exception et non d’une demande au sens procédural. C’est ce que confirment les autres versions linguistiques que j’ai consultées : exception de nullité dans la version française ; plea dans la version anglaise ; eccezioni di nullità dans la version italienne ; excepção de nulidade dans la version portugaise ; Einwand der Nichtigkeit dans la version allemande.

( 20 ) Comme je l’ai déjà indiqué à la note 8, le règlement no 6/2002 ne contient pas de dispositions spécifiques sur la typologie de ces mesures, dont le régime est celui prévu par la législation de chaque État membre en matière de dessins ou modèles nationaux.

( 21 ) Telle est l’interprétation de la Commission, qui souligne que le justiciable doit disposer d’une juridiction géographiquement proche de lui, à laquelle il peut demander une protection urgente, ce qui signifie que la spécialisation passe au second plan. Elle cite à titre d’exemples la nécessité de préserver les éléments de preuve qui risquent d’être détruits ou la diffusion de produits de contrefaçon à partir d’un point de distribution unique tel qu’un port ou une usine.

( 22 ) Dans le domaine de la propriété intellectuelle, la protection conservatoire joue un rôle fondamental pour que, dans le respect des droits de la défense de l’autre partie, le titulaire du droit dispose d’une protection proportionnée dans l’attente d’une décision sur le fond [considérant 22 de la directive 2004/48/CE du Parlement européen et du Conseil, du 29 avril 2004, relative au respect des droits de propriété intellectuelle (JO 2004, L 157, p. 45 ; rectificatif publié au JO 2004, L 195, p. 16)].