DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (troisième chambre élargie)

17 février 2017 ( 1 )

«Responsabilité non contractuelle — Précision de la requête — Prescription — Recevabilité — Article 47 de la charte des droits fondamentaux — Délai raisonnable de jugement — Préjudice matériel — Intérêts sur le montant de l’amende non acquittée — Frais de garantie bancaire — Lien de causalité»

Dans l’affaire T‑40/15,

Plásticos Españoles, SA (ASPLA), établie à Torrelavega (Espagne),

Armando Álvarez, SA, établie à Madrid (Espagne),

représentées initialement par Mes M. Troncoso Ferrer, C. Ruixó Claramunt et S. Moya Izquierdo, puis par Mes Troncoso Ferrer et Moya Izquierdo, avocats,

parties requérantes,

contre

Union européenne, représentée par la Cour de justice de l’Union européenne, représentée initialement par M. A. Placco, puis par MM. J. Inghelram, Á. Almendros Manzano et P. Giusta, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

soutenue par

Commission européenne, représentée par M. P. van Nuffel, Mme F. Castilla Contreras et M. C. Urraca Caviedes, en qualité d’agents,

partie intervenante,

ayant pour objet une demande fondée sur l’article 268 TFUE et tendant à obtenir réparation du préjudice que les requérantes auraient prétendument subi en raison de la durée de la procédure, devant le Tribunal, dans le cadre des affaires ayant donné lieu aux arrêts du 16 novembre 2011, ASPLA/Commission (T‑76/06, non publié, EU:T:2011:672), et du 16 novembre 2011, Álvarez/Commission (T‑78/06, non publié, EU:T:2011:673),

LE TRIBUNAL (troisième chambre élargie),

composé de M. S. Papasavvas, président, Mme I. Labucka, MM. E. Bieliūnas (rapporteur), V. Kreuschitz et I. S. Forrester, juges,

greffier : M. J. Palacio González, administrateur principal,

vu la phase écrite de la procédure et à la suite de l’audience du 24 novembre 2016,

rend le présent

Arrêt

Antécédents du litige

1

Par requêtes déposées au greffe du Tribunal le 24 février 2006, les requérantes, Plásticos Españoles, SA (ASPLA), d’une part, et Armando Álvarez, SA, d’autre part, ont introduit, chacune, un recours contre la décision C(2005) 4634 de la Commission, du 30 novembre 2005, relative à une procédure d’application de l’article [101 TFUE] (affaire COMP/F/38.354 – Sacs industriels) (ci‑après la « décision C(2005) 4634 »). Dans leurs requêtes, elles concluaient, en substance, à ce que le Tribunal annulât cette décision en ce qu’elle les concernait ou, à titre subsidiaire, réduisît le montant de l’amende qui leur avait été infligée.

2

Par arrêts du 16 novembre 2011, ASPLA/Commission (T‑76/06, non publié, EU:T:2011:672), et du 16 novembre 2011, Álvarez/Commission (T‑78/06, non publié, EU:T:2011:673), le Tribunal a rejeté ces recours.

3

Par requêtes déposées le 24 janvier 2012, les requérantes ont formé des pourvois contre les arrêts du 16 novembre 2011, ASPLA/Commission (T‑76/06, non publié, EU:T:2011:672), et du 16 novembre 2011, Álvarez/Commission (T‑78/06, non publié, EU:T:2011:673).

4

Par arrêts du 22 mai 2014, ASPLA/Commission (C‑35/12 P, EU:C:2014:348), et du 22 mai 2014, Armando Álvarez/Commission (C‑36/12 P, EU:C:2014:349), la Cour a rejeté ces pourvois.

Procédure et conclusions des parties

5

Par requête déposée au greffe du Tribunal le 27 janvier 2015, les requérantes ont introduit le présent recours contre l’Union européenne, représentée par la Cour de justice de l’Union européenne ou par la Commission européenne.

6

Par actes séparés, déposés au greffe du Tribunal, respectivement, le 9 et le 21 avril 2015, la Cour de justice de l’Union européenne et la Commission ont, chacune, soulevé une exception d’irrecevabilité au titre de l’article 114, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal du 2 mai 1991.

7

Par ordonnance du 27 avril 2015, le président de la troisième chambre a, à la demande de la Commission, suspendu la procédure dans la présente affaire jusqu’à la décision de la Cour mettant fin à l’instance dans l’affaire C‑71/15 P, Cour de justice/Kendrion.

8

Par ordonnance du 18 décembre 2015, Cour de justice/Kendrion (C‑71/15 P, non publiée, EU:C:2015:857), l’affaire a été radiée du registre de la Cour.

9

À la suite de la reprise de la procédure dans la présente affaire, le Tribunal a, le 17 février 2016, renvoyé celle-ci devant la troisième chambre élargie.

10

Par ordonnance du 4 mars 2016, ASPLA et Armando Álvarez/Union européenne (T‑40/15, non publiée, EU:T:2016:133), la Commission a été radiée de la présente affaire en tant que représentante de l’Union, à la suite du désistement partiel des requérantes.

11

Le 11 mars 2016, la Commission a, par acte déposé au greffe du Tribunal, demandé à intervenir au soutien des conclusions de la Cour de justice de l’Union européenne.

12

Le 14 mars 2016, la Cour de justice de l’Union européenne a déposé un mémoire en défense.

13

Le 4 avril 2016, le Tribunal a décidé qu’un deuxième échange de mémoires n’était pas nécessaire. Par ailleurs, dans le cadre des mesures d’organisation de la procédure prévues à l’article 89 du règlement de procédure du Tribunal, il a invité la Cour de justice de l’Union européenne à indiquer si elle avait demandé et obtenu l’autorisation des requérantes et de la Commission pour pouvoir produire certains documents qui figuraient dans les annexes du mémoire en défense et qui étaient afférents à l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 16 novembre 2011, ASPLA/Commission (T‑76/06, non publié, EU:T:2011:672) (ci-après l’« affaire T‑76/06 »), et à l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 16 novembre 2011, Álvarez/Commission (T‑78/06, non publié, EU:T:2011:673) (ci-après l’« affaire T‑78/06 »).

14

Le 19 avril 2016, la Cour de justice de l’Union européenne a répondu à la question mentionnée au point 13 ci-dessus. Elle a conclu à ce qu’il plût au Tribunal de considérer, à titre principal, qu’elle ne devait pas demander et obtenir l’autorisation des requérantes et de la Commission pour pouvoir produire les documents afférents aux affaires T‑76/06 et T‑78/06 et, à titre subsidiaire, que cette autorisation avait été donnée implicitement par les requérantes et par la Commission. À titre très subsidiaire, la Cour de justice de l’Union européenne a demandé que sa réponse fût traitée comme une demande de mesure d’organisation de la procédure visant à ce que le Tribunal ordonnât la production, dans le cadre du présent recours, des documents constituant le dossier d’instance des affaires T‑76/06 et T‑78/06 et, en particulier, des documents annexés au mémoire en défense.

15

Le 25 avril 2016, le président de la troisième chambre élargie du Tribunal a décidé, premièrement, de retirer du dossier les documents qui figuraient dans les annexes du mémoire en défense déposé dans la présente affaire et qui étaient afférents aux affaires T‑76/06 et T‑78/06. Cette décision était motivée par le fait, d’une part, que la Cour de justice de l’Union européenne n’avait ni demandé ni obtenu l’autorisation des parties dans les affaires T‑76/06 et T‑78/06 pour pouvoir produire lesdits documents et, d’autre part, qu’elle n’avait pas demandé l’accès au dossier desdites affaires en application de l’article 38, paragraphe 2, du règlement de procédure. Deuxièmement, le président de la troisième chambre élargie du Tribunal a décidé, en application de l’article 88, paragraphe 3, du règlement de procédure, d’inviter les requérantes à prendre position sur la demande de mesure d’organisation de la procédure qui avait été formulée à titre très subsidiaire par la Cour de justice de l’Union européenne dans sa réponse du 19 avril 2016 mentionnée au point 14 ci‑dessus.

16

Par ordonnance du 28 avril 2016, ASPLA et Armando Álvarez/Union européenne (T‑40/15, non publiée), le président de la troisième chambre élargie du Tribunal a fait droit à la demande d’intervention déposée par la Commission au soutien des conclusions de la Cour de justice de l’Union européenne et précisé que les droits de la Commission seraient ceux prévus à l’article 116, paragraphe 6, du règlement de procédure du 2 mai 1991.

17

Le 2 mai 2016, le Tribunal a autorisé les requérantes à déposer une réplique à la suite de la présentation d’une demande dûment motivée par celles-ci.

18

Le 10 mai 2016, les requérantes ont pris position sur la demande de mesure d’organisation de la procédure mentionnée au point 15 ci-dessus. À cet égard, elles ont souligné qu’elles ne s’opposaient pas à ce que le Tribunal, s’il le jugeait opportun, adoptât ladite mesure d’organisation de la procédure.

19

Le 31 mai 2016, le Tribunal a constaté que la mise en état et le règlement de la présente affaire nécessitaient, eu égard à son objet, la mise à sa disposition du dossier des affaires T‑76/06 et T‑78/06. Ainsi, dans le cadre des mesures d’organisation de la procédure prévues à l’article 89 du règlement de procédure, le Tribunal a décidé de verser au dossier de la présente affaire les dossiers des affaires T‑76/06 et T‑78/06.

20

Le 13 juin 2016, les requérantes ont déposé une réplique.

21

Le 17 juin 2016, la Cour de justice de l’Union européenne a demandé la signification du dossier des affaires T‑76/06 et T‑78/06.

22

Le 25 juillet 2016, la Cour de justice de l’Union européenne a déposé une duplique.

23

Le 23 septembre 2016, le Tribunal a adressé une question aux requérantes et invité celles-ci à produire certains documents. Les requérantes ont déféré à ces demandes par lettre du 10 octobre 2016.

24

Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions orales posées par le Tribunal lors de l’audience du 24 novembre 2016.

25

Par lettre déposée au greffe du Tribunal le 6 décembre 2016, le représentant des requérantes a informé ce dernier qu’il avait commis une erreur dans le cadre de l’une de ses réponses à une question orale, laquelle avait été actée dans le procès-verbal de l’audience.

26

Par ordonnance du 16 décembre 2016, la phase orale de la procédure a été rouverte. Le 19 décembre 2016, la lettre de la requérante mentionnée au point 25 ci-dessus a été versée au dossier.

27

Le 21 décembre 2016, la Cour de justice de l’Union européenne a déposé ses observations sur la lettre mentionnée au point 25 ci-dessus.

28

Le 9 janvier 2017, la phase orale de la procédure a été close.

29

Les requérantes concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

condamner la Cour de justice de l’Union européenne à réparer le préjudice qui leur a été causé en raison de la violation de l’article 47, deuxième alinéa, de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne par le paiement d’une indemnité de 3495038,66 euros, montant auquel devront s’ajouter les intérêts compensatoires et de retard au taux appliqué par la Banque centrale européenne (BCE) à ses opérations principales de refinancement, majoré de deux points, à compter de la date de dépôt du recours ;

condamner la Cour de justice de l’Union européenne aux dépens.

30

La Cour de justice de l’Union européenne, soutenue par la Commission, conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

à titre principal, déclarer le recours irrecevable ou, à défaut, le déclarer partiellement irrecevable en ce qui concerne les préjudices qui se seraient matérialisés avant le 27 janvier 2010 ;

à titre subsidiaire, rejeter la demande d’indemnisation du préjudice matériel allégué comme non fondée ;

condamner les requérantes aux dépens.

En droit

Sur la recevabilité

31

La Cour de justice de l’Union européenne soulève deux fins de non-recevoir, tirées, la première, du manque de clarté et de précision de la requête et, la seconde, de la prescription de la demande d’indemnisation du préjudice matériel allégué.

Sur la fin de non-recevoir soulevée à titre principal et tirée du manque de clarté et de précision de la requête

32

La Cour de justice de l’Union européenne soutient que le recours doit être déclaré irrecevable dans son ensemble, au motif que la requête manque de clarté et de précision en ce qui concerne le préjudice individuellement subi par ASPLA et par Armando Álvarez.

33

À cet égard, il convient de rappeler que, en vertu de l’article 21, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, lu conjointement avec l’article 53, premier alinéa, dudit statut, et de l’article 44, paragraphe 1, sous c), du règlement de procédure du 2 mai 1991, toute requête doit contenir l’indication de l’objet du litige et l’exposé sommaire des moyens invoqués. Cette indication doit être suffisamment claire et précise pour permettre à la partie défenderesse de préparer sa défense et au Tribunal de statuer sur le recours, le cas échéant, sans autres informations à l’appui. Afin de garantir la sécurité juridique et une bonne administration de la justice, il faut, pour qu’un recours soit recevable, que les éléments essentiels de fait et de droit sur lesquels se fonde celui-ci ressortent, à tout le moins sommairement, mais d’une façon cohérente et compréhensible, du texte de la requête elle-même. Plus particulièrement, pour satisfaire à ces exigences, une requête tendant à la réparation de dommages prétendument causés par une institution de l’Union doit contenir les éléments qui permettent d’identifier le comportement que le requérant reproche à l’institution, les raisons pour lesquelles il estime qu’un lien de causalité existe entre le comportement et le préjudice qu’il prétend avoir subi ainsi que le caractère et l’étendue de ce préjudice (voir arrêt du 7 octobre 2015, Accorinti e.a./BCE, T‑79/13, EU:T:2015:756, point 53 et jurisprudence citée).

34

En l’espèce, en premier lieu, il est vrai que, ainsi que le fait observer la Cour de justice de l’Union européenne, les conclusions de la requête contiennent une demande d’indemnisation d’un préjudice évalué d’une manière globale.

35

Toutefois, il ressort de la présentation de la requête et des documents qui accompagnent celle-ci que le recours a été introduit à la fois par ASPLA et par Armando Álvarez. Par ailleurs, les conclusions formulées dans la requête, lues à la lumière du contenu de cette dernière, visent à la réparation du préjudice matériel qui aurait été subi par les requérantes en raison d’une prétendue violation des exigences liées au respect du délai de jugement raisonnable (ci-après le « délai raisonnable de jugement ») dans les affaires T‑76/06 et T‑78/06, qui concernaient, respectivement, ASPLA et Armando Álvarez.

36

Par ailleurs, s’agissant de l’identification du préjudice subi par chacune des requérantes, il importe de souligner que cette question requiert un examen des preuves produites par celles-ci et relève donc de l’appréciation du bien-fondé du présent recours. En tout état de cause, il ressort du dossier que les requérantes ont fourni les éléments nécessaires à l’identification du préjudice subi par chacune d’entre elles.

37

En second lieu, il est vrai que, d’une part, les requérantes soutiennent que la durée de la procédure dans les affaires T‑76/06 et T‑78/06 a dépassé, respectivement, de 24 mois et de 28 mois le délai raisonnable de jugement, au motif que la date de l’audience leur aurait été communiquée le 14 janvier 2011 dans chacune de ces affaires et non deux ans après le dépôt de la duplique par la Commission, à savoir, respectivement, le 12 février 2009 et le 6 octobre 2008.

38

D’autre part, les requérantes font valoir que la moyenne du dépassement du délai raisonnable de jugement dans les affaires T‑76/06 et T‑78/06 est de 25,5 mois et elles évaluent leur préjudice sur la base d’un simple calcul au prorata fondé sur l’ensemble des sommes qu’elles auraient payées au cours de la procédure dans les affaires T‑76/06 et T‑78/06 ainsi que dans les affaires ayant donné lieu aux arrêts du 22 mai 2014, ASPLA/Commission (C‑35/12 P, EU:C:2014:348), et du 22 mai 2014, Armando Álvarez/Commission (C‑36/12 P, EU:C:2014:349).

39

Toutefois, il convient de relever que, dans son mémoire en défense, la Cour de justice de l’Union européenne soulève une exception d’irrecevabilité tirée de la prescription. Par ailleurs, elle conteste l’existence de la violation du délai raisonnable de jugement allégué ainsi que l’ampleur d’une telle violation. En outre, elle conteste l’existence du préjudice allégué ainsi que son étendue. De plus, elle fait valoir que l’existence d’un lien de causalité fait défaut. Enfin, lors de l’audience, la Cour de justice de l’Union européenne a été en mesure de prendre position sur la réponse des requérantes à une question écrite posée par le Tribunal, dans laquelle ces dernières ont indiqué la date à laquelle elles avaient commencé à subir un préjudice dans chacune des affaires T‑76/06 et T‑78/06.

40

Il s’ensuit que les requérantes ont fourni les éléments nécessaires à l’identification du préjudice subi par chacune d’entre elles et que la Cour de justice de l’Union européenne a été en mesure de présenter ses arguments en défense, y compris lors de l’audience de plaidoiries. Par ailleurs, ces éléments mettent le Tribunal en mesure de statuer.

41

La première fin de non-recevoir doit donc être rejetée.

Sur la fin de non-recevoir soulevée à titre subsidiaire et tirée de la prescription de la demande d’indemnisation du préjudice matériel allégué

42

La Cour de justice de l’Union européenne fait valoir que le recours est irrecevable en ce qu’il vise à obtenir la réparation d’un préjudice subi plus de cinq ans avant l’introduction du présent recours, c’est-à-dire antérieurement au 27 janvier 2010.

43

À cet égard, il y a lieu de rappeler que l’article 46 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, applicable à la procédure devant le Tribunal en vertu de l’article 53, premier alinéa, du même statut, prévoit ce qui suit :

« Les actions contre l’Union en matière de responsabilité non contractuelle se prescrivent par cinq ans à compter de la survenance du fait qui y donne lieu. La prescription est interrompue soit par la requête formée devant la Cour de justice, soit par la demande préalable que la victime peut adresser à l’institution compétente de l’Union […] »

44

Il ressort de la jurisprudence que la prescription a pour fonction de concilier la protection des droits de la personne lésée et le principe de sécurité juridique. La durée du délai de prescription a été déterminée en tenant compte notamment du temps nécessaire à la partie prétendument lésée pour rassembler des informations appropriées en vue d’un recours éventuel et pour vérifier les faits susceptibles d’être invoqués au soutien de ce recours (arrêt du 8 novembre 2012, Evropaïki Dynamiki/Commission, C‑469/11 P, EU:C:2012:705, point 33 ; voir également, en ce sens, ordonnance du 18 juillet 2002, Autosalone Ispra dei Fratelli Rossi/Commission, C‑136/01 P, EU:C:2002:458, point 28).

45

Selon une jurisprudence constante, le délai de prescription commence à courir dès lors que les conditions auxquelles se trouve subordonnée l’obligation de réparation sont réunies (voir arrêt du 8 novembre 2012, Evropaïki Dynamiki/Commission, C‑469/11 P, EU:C:2012:705, point 34 et jurisprudence citée).

46

Certes, il convient d’interpréter l’article 46 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne en ce sens que la prescription ne saurait être opposée à la victime d’un dommage qui n’aurait pu prendre connaissance du fait générateur de ce dommage qu’à une date tardive et n’aurait pu disposer ainsi d’un délai raisonnable pour présenter sa requête ou sa demande avant l’expiration du délai de prescription. Toutefois, les conditions auxquelles se trouve subordonnée l’obligation de réparation des dommages visés à l’article 340, deuxième alinéa, TFUE et, ainsi, les règles de prescription régissant les actions tendant à la réparation desdits dommages ne sauraient être fondées sur des critères autres que strictement objectifs (voir arrêt du 8 novembre 2012, Evropaïki Dynamiki/Commission, C‑469/11 P, EU:C:2012:705, points 35 et 36 et jurisprudence citée).

47

Par ailleurs, selon une jurisprudence constante, l’appréciation subjective de la réalité du dommage par la victime de ce dommage ne saurait être prise en considération dans la détermination du point de départ du délai de prescription de l’action en responsabilité non contractuelle de l’Union (voir arrêt du 8 novembre 2012, Evropaïki Dynamiki/Commission, C‑469/11 P, EU:C:2012:705, point 37 et jurisprudence citée ; arrêt du 28 février 2013, Inalca et Cremonini/Commission, C‑460/09 P, EU:C:2013:111, point 70).

48

En l’espèce, il importe de souligner que « le fait qui donne lieu » à la présente « action contre l’Union » est une irrégularité de procédure qui prend la forme d’une prétendue méconnaissance du délai raisonnable de jugement par une juridiction de l’Union. La fixation du point de départ du délai de prescription de cinq ans prévu à l’article 46 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne doit donc tenir compte de cette circonstance. En particulier, le délai de prescription ne peut commencer à courir à une date à laquelle le fait générateur se poursuit et le point de départ de ce délai doit être fixé à une date à laquelle le fait générateur s’est entièrement concrétisé.

49

Ainsi, dans le cas spécifique d’un recours en indemnité visant à la réparation d’un préjudice prétendument subi en raison d’une éventuelle méconnaissance du délai raisonnable de jugement, le point de départ du délai de prescription de cinq ans visé à l’article 46 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne doit, lorsqu’une décision a mis fin au délai de jugement litigieux, être fixé à la date à laquelle cette décision a été adoptée. En effet, une telle date constitue une date certaine, fixée sur la base de critères objectifs. Elle garantit le respect du principe de sécurité juridique et permet la protection des droits des requérantes.

50

Dans la présente affaire, les requérantes demandent la réparation du préjudice qu’elles auraient prétendument subi en raison du délai de jugement dans les affaires T‑76/06 et T‑78/06. Ces affaires ont été clôturées par arrêts du 16 novembre 2011, ASPLA/Commission (T‑76/06, non publié, EU:T:2011:672), et du 16 novembre 2011, Álvarez/Commission (T‑78/06, non publié, EU:T:2011:673). Le délai de prescription a donc commencé à courir à partir du 16 novembre 2011.

51

Par ailleurs, les requérantes ont introduit leur recours dans la présente affaire et ont ainsi interrompu le délai de prescription le 27 janvier 2015, c’est-à-dire avant l’expiration du délai de cinq ans prévu à l’article 46 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne. Le présent recours n’est donc pas prescrit.

52

Compte tenu de ce qui précède, la seconde fin de non-recevoir doit être rejetée.

Sur le fond

53

En vertu de l’article 340, deuxième alinéa, TFUE, en matière de responsabilité non contractuelle, l’Union doit réparer, conformément aux principes généraux communs aux droits des États membres, les dommages causés par ses institutions ou par ses agents dans l’exercice de leurs fonctions.

54

Selon une jurisprudence constante, il ressort de l’article 340, deuxième alinéa, TFUE que l’engagement de la responsabilité extracontractuelle de l’Union et la mise en œuvre du droit à la réparation du préjudice subi dépendent de la réunion d’un ensemble de conditions, à savoir l’illégalité du comportement reproché aux institutions, la réalité du dommage et l’existence d’un lien de causalité entre ce comportement et le préjudice invoqué (arrêts du 29 septembre 1982, Oleifici Mediterranei/CEE, 26/81, EU:C:1982:318, point 16, et du 9 septembre 2008, FIAMM e.a./Conseil et Commission, C‑120/06 P et C‑121/06 P, EU:C:2008:476, point 106).

55

Dès lors que l’une de ces conditions n’est pas remplie, le recours doit être rejeté dans son ensemble sans qu’il soit nécessaire d’examiner les autres conditions de la responsabilité non contractuelle de l’Union (arrêt du 14 octobre 1999, Atlanta/Communauté européenne, C‑104/97 P, EU:C:1999:498, point 65 ; voir également, en ce sens, arrêt du 15 septembre 1994, KYDEP/Conseil et Commission, C‑146/91, EU:C:1994:329, point 81). En outre, le juge de l’Union n’est pas tenu d’examiner ces conditions dans un ordre déterminé (arrêt du 18 mars 2010, Trubowest Handel et Makarov/Conseil et Commission, C‑419/08 P, EU:C:2010:147, point 42 ; voir également, en ce sens, arrêt du 9 septembre 1999, Lucaccioni/Commission, C‑257/98 P, EU:C:1999:402, point 13).

56

En l’espèce, premièrement, les requérantes soutiennent que la durée de la procédure dans les affaires T‑76/06 et T‑78/06 a violé le délai raisonnable de jugement. Deuxièmement, elles font valoir que cette violation leur a causé un préjudice matériel qui doit être réparé.

Sur la prétendue violation du délai raisonnable de jugement dans les affaires T‑76/06 et T‑78/06

57

Les requérantes font valoir que la durée de la procédure dans les affaires T‑76/06 et T‑78/06 a méconnu le délai raisonnable de jugement, ce qui serait constitutif d’une violation suffisamment caractérisée d’une règle de droit de l’Union ayant pour objet de conférer des droits aux particuliers. En particulier, elles soutiennent que cette violation est démontrée par les arrêts du 26 novembre 2013, Kendrion/Commission (C‑50/12 P, EU:C:2013:771), et du 26 novembre 2013, Groupe Gascogne/Commission (C‑58/12 P, EU:C:2013:770). Elles ajoutent que les affaires T‑76/06 et T‑78/06, d’une part, et les affaires ayant donné lieu aux arrêts du 16 novembre 2011, Kendrion/Commission (T‑54/06, non publié, EU:T:2011:667), du 16 novembre 2011, Groupe Gascogne/Commission (T‑72/06, non publié, EU:T:2011:671), et du 16 novembre 2011, Sachsa Verpackung/Commission (T‑79/06, non publié, EU:T:2011:674), d’autre part, avaient le même objet (la même décision de la Commission), étaient caractérisées par des faits et une cause comparables (la même entente) et laissaient apparaître des circonstances procédurales identiques ou très similaires.

58

Elles font valoir que la phase orale de la procédure dans les affaires T‑76/06 et T‑78/06 aurait dû être ouverte deux ans après le dépôt de la duplique par la Commission, soit, respectivement, le 12 février 2009 et le 6 octobre 2008. Or, la date de l’audience leur aurait été communiquée le 14 janvier 2011. Elles en déduisent que les procédures dans les affaires T‑76/06 et T‑78/06 ont dépassé, respectivement, de 24 mois et de 28 mois le délai raisonnable de jugement.

59

La Cour de justice de l’Union européenne conteste ces allégations. En effet, premièrement, le Tribunal serait seul compétent pour connaître du présent recours et il ne serait pas possible de transposer aux affaires T‑76/06 et T‑78/06 les conclusions qui ont été tirées par la Cour dans les arrêts du 26 novembre 2013, Kendrion/Commission (C‑50/12 P, EU:C:2013:771), et du 26 novembre 2013, Gascogne/Commission (C‑58/12 P, EU:C:2013:770). Deuxièmement, la durée qui s’est écoulée entre la fin de la phase écrite de la procédure et l’ouverture de la phase orale de la procédure dans les affaires T‑76/06 et T‑78/06 dépasserait, respectivement, de 17 mois et de 21 mois seulement la durée moyenne de cette étape de la procédure observée, devant le Tribunal, entre 2007 et 2010 dans les affaires qui concernaient l’application du droit de la concurrence. Par ailleurs, la durée totale de la procédure dans les affaires T‑76/06 et T‑78/06 aurait dépassé de 15 mois seulement la durée moyenne des procédures constatée, devant le Tribunal, entre 2006 et 2015 dans les affaires qui concernaient l’application du droit de la concurrence. Troisièmement, les affaires T‑76/06 et T‑78/06 devraient être qualifiées de complexes. Quatrièmement, il conviendrait de tenir compte du fait que la Cour de justice de l’Union européenne opère dans un environnement multilingue sans équivalent en Europe, voire dans le monde. Par ailleurs, les quinze affaires relatives à des recours introduits contre la décision C(2005) 4634 auraient fait usage de six langues différentes. Cinquièmement, il conviendrait de tenir compte de la durée limitée du mandat des juges et de la maladie de longue durée de l’un des membres de la chambre à laquelle les deux affaires en cause avaient été attribuées. Sixièmement, le comportement des requérantes ne serait pas totalement étranger à l’accumulation d’un retard dans les affaires T‑76/06 et T‑78/06.

60

À cet égard, il convient de souligner que l’article 47, deuxième alinéa, de la charte des droits fondamentaux dispose notamment que « [t]oute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable par un tribunal indépendant et impartial, établi préalablement par la loi ».

61

Un tel droit, dont l’existence avait été affirmée avant l’entrée en vigueur de la charte des droits fondamentaux en tant que principe général de droit de l’Union, a été jugé applicable dans le cadre d’un recours juridictionnel contre une décision de la Commission (voir arrêt du 16 juillet 2009, Der Grüne Punkt – Duales System Deutschland/Commission, C‑385/07 P, EU:C:2009:456, point 178 et jurisprudence citée).

62

En l’espèce, il y a lieu de constater que, dans les affaires T‑76/06 et T‑78/06, la procédure a débuté le 24 février 2006 avec le dépôt, au greffe du Tribunal, d’une requête par chacune des requérantes et s’est achevée avec le prononcé des arrêts du 16 novembre 2011, ASPLA/Commission (T‑76/06, non publié, EU:T:2011:672), et du 16 novembre 2011, Álvarez/Commission (T‑78/06, non publié, EU:T:2011:673). Ainsi, la durée de la procédure dans chacune de ces affaires a été approximativement de 5 ans et 9 mois.

63

Or, il ressort d’un examen détaillé du dossier respectif des affaires T‑76/06 et T‑78/06 que la durée de la procédure dans chacune d’entre elles ne peut être justifiée par aucune des circonstances propres auxdites affaires.

64

En premier lieu, il importe de relever que les affaires T‑76/06 et T‑78/06 concernaient des litiges afférents à l’existence d’une infraction aux règles de concurrence et que, selon la jurisprudence, l’exigence fondamentale de sécurité juridique dont doivent bénéficier les opérateurs économiques ainsi que l’objectif d’assurer que la concurrence n’est pas faussée dans le marché intérieur présentent un intérêt considérable non seulement pour la partie requérante elle-même et pour ses concurrents, mais également pour les tiers, en raison du grand nombre de personnes concernées et des intérêts financiers en jeu (arrêt du 16 juillet 2009, Der Grüne Punkt – Duales System Deutschland/Commission, C‑385/07 P, EU:C:2009:456, point 186).

65

En deuxième lieu, il convient de constater que, dans l’affaire T‑76/06, une durée d’environ 3 ans et 10 mois, soit 46 mois, s’est écoulée entre, d’une part, la fin de la phase écrite de la procédure, marquée par le dépôt, le 16 février 2007, de la duplique de la Commission, et, d’autre part, l’ouverture de la phase orale de la procédure, le 23 novembre 2010. Par ailleurs, dans l’affaire T‑78/06, une durée d’environ 4 ans et 2 mois, soit 50 mois, s’est écoulée entre la fin de la phase écrite de la procédure, le 9 octobre 2006, et l’ouverture de la phase orale de la procédure, le 23 novembre 2010.

66

Au cours de cette période, il est procédé, notamment, à la synthèse des arguments des parties, à la mise en état des affaires, à une analyse en fait et en droit des litiges et à la préparation de la phase orale de la procédure. Ainsi, la durée de cette période dépend, en particulier, de la complexité du litige ainsi que du comportement des parties et de la survenance d’incidents procéduraux.

67

S’agissant de la complexité du litige, d’abord, il y a lieu de rappeler que les affaires T‑76/06 et T‑78/06 concernaient des recours introduits contre une décision de la Commission relative à une procédure d’application de l’article 101 TFUE.

68

Or, ainsi que cela ressort du dossier des affaires T‑76/06 et T‑78/06, les recours qui concernent l’application du droit de la concurrence par la Commission présentent un degré de complexité supérieur à d’autres types d’affaires, compte tenu, notamment, de la longueur de la décision attaquée, du volume du dossier et de la nécessité d’effectuer une appréciation détaillée de faits nombreux et complexes, souvent étendus dans le temps et dans l’espace.

69

Ainsi, une durée de 15 mois entre la fin de la phase écrite de la procédure et l’ouverture de la phase orale de la procédure constitue en principe une durée appropriée pour traiter les affaires qui concernent l’application du droit de la concurrence, telles que les affaires T‑76/06 et T‑78/06.

70

Ensuite, il est nécessaire de tenir compte de la circonstance que plusieurs recours avaient été introduits contre la décision C(2005) 4634.

71

En effet, des recours introduits contre une même décision adoptée par la Commission en application du droit de la concurrence de l’Union nécessitent, en principe, un traitement parallèle, y compris lorsque ces recours ne sont pas joints. Ce traitement parallèle est notamment justifié par la connexité desdits recours ainsi que par la nécessité d’assurer une cohérence dans l’analyse de ceux-ci et dans la réponse qu’il convient de leur apporter.

72

Ainsi, le traitement parallèle d’affaires connexes peut justifier un allongement, d’une durée d’un mois par affaire connexe supplémentaire, de la période comprise entre la fin de la phase écrite de la procédure et l’ouverture de la phase orale de celle-ci.

73

En l’espèce, quinze recours avaient été introduits contre la décision C(2005) 4634. Cependant, d’une part, une partie requérante s’était désistée de son recours contre cette décision (ordonnance du 6 juillet 2006, Cofira-Sac/Commission, T‑43/06, non publiée, EU:T:2006:192). D’autre part, deux recours introduits contre la décision C(2005) 4634 avaient donné lieu au prononcé des arrêts du 13 septembre 2010, Trioplast Wittenheim/Commission (T‑26/06, non publié, EU:T:2010:387), et du 13 septembre 2010, Trioplast Industrier/Commission (T‑40/06, EU:T:2010:388).

74

Dans ces conditions, le traitement des douze autres affaires relatives à des recours introduits contre la décision C(2005) 4634 a justifié un allongement de la procédure de 11 mois dans l’affaire T‑76/06 et dans l’affaire T‑78/06.

75

Par conséquent, une durée de 26 mois (15 mois plus 11 mois) entre la fin de la phase écrite de la procédure et l’ouverture de la phase orale de la procédure était, en principe, appropriée pour traiter chacune des affaires T‑76/06 et T‑78/06.

76

S’agissant du comportement des parties et de la survenance d’incidents procéduraux dans les affaires T‑76/06 et T‑78/06, la durée qui s’est écoulée entre la fin de la phase écrite de la procédure et l’ouverture de la phase orale de la procédure dans chacune de ces affaires n’a aucunement été influencée par un tel comportement ou par la survenance de tels incidents.

77

Enfin, il convient de tenir compte de la circonstance que, dans la décision C(2005) 4634, la Commission avait infligé une amende aux requérantes conjointement et solidairement, au motif qu’Armando Álvarez détenait 98,6 % du capital d’ASPLA et que la première de ces sociétés était donc présumée avoir exercé une influence déterminante sur la seconde. C’est ainsi que, dans le cadre de son recours introduit dans l’affaire T‑78/06, Armando Álvarez a demandé l’annulation de la décision C(2005) 4634 en ce que cette dernière lui avait imputé la responsabilité de l’infraction constatée dans ladite décision.

78

Il s’ensuit que les affaires T‑76/06 et T‑78/06 présentaient un lien de connexité extrêmement étroit et que ce lien de connexité justifiait que l’affaire T‑78/06 fût traitée avec l’affaire T‑76/06 et au même rythme que cette dernière. Bien que la phase écrite de la procédure dans l’affaire T‑78/06 ait été clôturée quatre mois plus tôt que la phase écrite de la procédure dans l’affaire T‑76/06, la phase orale de la procédure dans l’affaire T‑78/06 ne pouvait donc être ouverte à une date antérieure à la date d’ouverture de la phase orale de la procédure dans l’affaire T‑76/06.

79

D’ailleurs, ainsi que cela ressort du dossier des affaires T‑76/06 et T‑78/06, la chambre qui était chargée de ces affaires s’est montrée, le 23 novembre 2010, favorable à la jonction desdites affaires aux fins de la phase orale de la procédure, sans préjudice des observations des parties dans chacune de ces affaires. Dans leurs observations sur une éventuelle jonction des affaires T‑76/06 et T‑78/06, les requérantes ont, chacune, expliqué qu’elles ne voyaient aucun obstacle à une telle jonction si le Tribunal devait considérer que cela pouvait contribuer à l’efficacité de la procédure. Cependant, la Commission s’est opposée à une telle jonction, qui n’a finalement pas été ordonnée.

80

Dès lors, le lien de connexité extrêmement étroit entre l’affaire T‑76/06 et l’affaire T‑78/06 a justifié un allongement, d’une durée de quatre mois supplémentaires, de la période comprise entre la fin de la phase écrite de la procédure et l’ouverture de la phase orale de la procédure dans l’affaire T‑78/06.

81

Par conséquent, au regard des circonstances particulières qui caractérisent les affaires T‑76/06 et T‑78/06, la durée de 46 mois qui s’est écoulée entre la fin de la phase écrite de la procédure et l’ouverture de la phase orale de la procédure dans l’affaire T‑76/06 ainsi que la durée de 50 mois qui s’est écoulée entre la fin de la phase écrite de la procédure et l’ouverture de la phase orale de la procédure dans l’affaire T‑78/06 laissent apparaître une période d’inactivité injustifiée de 20 mois dans chacune de ces deux affaires.

82

En troisième lieu, l’examen du dossier respectif des affaires T‑76/06 et T‑78/06 n’a révélé aucune circonstance permettant de conclure à l’existence d’une période d’inactivité injustifiée, d’une part, entre la date du dépôt des requêtes et la date du dépôt des dupliques et, d’autre part, entre l’ouverture de la phase orale de la procédure et le prononcé des arrêts du 16 novembre 2011, ASPLA/Commission (T‑76/06, non publié, EU:T:2011:672), et du 16 novembre 2011, Álvarez/Commission (T‑78/06, non publié, EU:T:2011:673).

83

Il s’ensuit que la procédure qui a été suivie dans les affaires T‑76/06 et T‑78/06 et qui s’est achevée avec le prononcé des arrêts du 16 novembre 2011, ASPLA/Commission (T‑76/06, non publié, EU:T:2011:672), et du 16 novembre 2011, Álvarez/Commission (T‑78/06, non publié, EU:T:2011:673), a violé l’article 47, deuxième alinéa, de la charte des droits fondamentaux en ce qu’elle a dépassé de 20 mois le délai raisonnable de jugement, ce qui constitue une violation suffisamment caractérisée d’une règle de droit de l’Union ayant pour objet de conférer des droits aux particuliers.

Sur le préjudice matériel allégué et le supposé lien de causalité

84

Selon une jurisprudence constante, le dommage dont il est demandé réparation dans le cadre d’une action en responsabilité non contractuelle de l’Union doit être réel et certain, ce qu’il appartient à la partie requérante de prouver (voir arrêt du 9 novembre 2006, Agraz e.a./Commission, C‑243/05 P,EU:C:2006:708, point 27 et jurisprudence citée). Il incombe à cette dernière d’apporter des preuves concluantes tant de l’existence que de l’étendue du préjudice qu’elle invoque (voir arrêt du 16 septembre 1997, Blackspur DIY e.a./Conseil et Commission, C‑362/95 P, EU:C:1997:401, point 31 et jurisprudence citée).

85

Toujours selon une jurisprudence constante, la condition relative au lien de causalité posée à l’article 340, deuxième alinéa, TFUE porte sur l’existence d’un lien de cause à effet suffisamment direct entre le comportement des institutions et le dommage (arrêts du 18 mars 2010, Trubowest Handel et Makarov/Conseil et Commission, C‑419/08 P, EU:C:2010:147, point 53, et du 14 décembre 2005, Beamglow/Parlement e.a., T‑383/00, EU:T:2005:453, point 193 ; voir également, en ce sens, arrêt du 4 octobre 1979, Dumortier e.a./Conseil, 64/76, 113/76, 167/78, 239/78, 27/79, 28/79 et 45/79, EU:C:1979:223, point 21). Il appartient à la partie requérante d’apporter la preuve de l’existence d’un lien de causalité entre le comportement reproché et le préjudice invoqué (voir arrêt du 30 septembre 1998, Coldiretti e.a./Conseil et Commission, T‑149/96, EU:T:1998:228, point 101 et jurisprudence citée).

86

En l’espèce, premièrement, les requérantes font valoir, dans la requête, qu’elle ont subi un préjudice matériel qui consisterait en une perte subie, d’une part, en raison du paiement, pendant la durée excessive moyenne de 25,5 mois de la procédure, d’intérêts sur le montant de l’amende qui leur avait été infligée par la décision C(2005) 4634 (ci-après les « intérêts sur le montant de l’amende ») et, d’autre part, en raison du paiement, pendant cette même durée excessive, des frais des garanties bancaires qu’elles avaient constituées afin de ne pas acquitter immédiatement le montant de l’amende (ci-après les « frais de garantie bancaire »). Ce préjudice devrait être évalué en faisant un simple calcul au prorata fondé sur les frais de garantie bancaire payés entre le 20 février 2006 et le 1er août 2014 ainsi que sur les intérêts sur le montant de l’amende payés entre le 15 mars 2006 et le 22 juillet 2014.

87

Deuxièmement, les requérantes soutiennent que le lien de causalité entre le préjudice allégué et la prétendue méconnaissance du délai raisonnable de jugement est évident. En effet, si le délai raisonnable de jugement n’avait pas été méconnu dans les affaires T‑76/06 et T‑78/06, les requérantes n’auraient pas dû payer, pendant 25,5 mois, des intérêts sur le montant de l’amende et des frais de garantie bancaire.

88

La Cour de justice de l’Union européenne conteste, en premier lieu, les allégations des requérantes afférentes au préjudice matériel qu’elles auraient subi.

89

À titre principal, elle fait valoir que les intérêts sur le montant de l’amende et les frais de garantie bancaire ne peuvent pas être qualifiés de préjudice. En effet, d’une part, les intérêts sur le montant de l’amende constitueraient la compensation du fait que la Commission n’a pas pu disposer d’une somme dont elle était en droit de disposer et les requérantes bénéficieraient d’un enrichissement sans cause si elles se voyaient accorder une indemnisation pour un montant équivalent à ces intérêts. D’autre part, les frais de garantie bancaire seraient une charge librement acceptée par les requérantes en contrepartie de la possibilité qui leur a été offerte de ne pas acquitter immédiatement le montant de l’amende. Ainsi, dans la mesure où cette charge comportait l’obtention d’un avantage, rien ne permettrait de considérer qu’il s’agit d’un préjudice au sens strict.

90

À titre subsidiaire, la Cour de justice de l’Union européenne soutient que la méthode utilisée par les requérantes pour calculer leur prétendu préjudice matériel n’est pas correcte et ne permet pas de le chiffrer. D’une part, un calcul proportionnel, tel que celui effectué par les requérantes, ne permettrait pas de calculer la part des coûts qui sont imputables à la période qui correspondrait à un retard injustifié. D’autre part, les éléments utilisés par les requérantes pour chiffrer leur préjudice ne seraient pas de nature à leur permettre de calculer le préjudice hypothétique résultant du prétendu retard pris par la procédure dans les affaires T‑76/06 et T‑78/06. En effet, il conviendrait, pour évaluer l’existence d’un hypothétique préjudice qu’elles auraient subi en raison du retard injustifié pris par la procédure, de comparer les coûts qu’elles ont effectivement dû supporter pour payer l’amende et les frais hypothétiques qu’elles auraient dû supporter si la procédure n’avait pas pris de retard et si elles avaient payé l’amende plus tôt. Or, il serait fort possible que, dans certaines circonstances, il soit plus avantageux pour une entreprise de différer le paiement de l’amende, même si ce paiement différé comporte pour elle l’obligation de payer des intérêts supplémentaires à un taux fixe comme le taux de 3,56 % fixé par la Commission. Dans la duplique, la Cour de justice de l’Union européenne ajoute que le paiement différé procure, par définition, un avantage et que ledit avantage existe en l’espèce.

91

En second lieu, la Cour de justice de l’Union européenne soutient qu’il n’existe pas de lien de causalité suffisamment direct entre, d’une part, le prétendu préjudice matériel afférent au paiement de frais de garantie bancaire et au paiement d’intérêts sur le montant de l’amende et, d’autre part, la violation alléguée du délai raisonnable de jugement. En effet, ce préjudice matériel découlerait du propre choix des requérantes de ne pas exécuter leur obligation de payer l’amende dans le délai imparti par la décision C(2005) 4634, bien que cette décision constituât un titre exécutoire. Le choix des requérantes aurait existé au moment où les requérantes ont décidé de constituer une garantie bancaire ainsi que pendant toute la période au cours de laquelle elles ont maintenu ladite garantie.

– Observations liminaires

92

Il convient de souligner que l’article 2 de la décision C(2005) 4634 prévoyait que les amendes infligées par cette décision devaient être payées dans un délai de trois mois à compter de sa signification. En application de l’article 86 du règlement (CE, Euratom) no 2342/2002 de la Commission, du 23 décembre 2002, établissant les modalités d’exécution du règlement (CE, Euratom) no 1605/2002 du Conseil portant règlement financier applicable au budget général des Communautés européennes (JO 2002, L 357, p. 1), l’article 2 de cette décision précisait que, à l’expiration de ce délai de trois mois, des intérêts seraient automatiquement dus au taux d’intérêt appliqué par la BCE à ses opérations principales de refinancement le premier jour du mois au cours duquel ladite décision était adoptée, majoré de trois points et demi de pourcentage, soit un taux de 5,56 %.

93

Conformément à l’article 299, premier alinéa, TFUE, la décision C(2005) 4634 formait titre exécutoire, dès lors qu’elle comportait, en son article 2, une obligation pécuniaire à la charge des requérantes. Par ailleurs, l’introduction d’un recours en annulation contre cette décision, en application de l’article 263 TFUE, n’a pas remis en cause le caractère exécutoire de ladite décision, dans la mesure où, aux termes de l’article 278 TFUE, les recours formés devant la Cour de justice de l’Union européenne n’ont pas d’effet suspensif.

94

Lorsque la Commission a signifié sa décision C(2005) 4634 aux requérantes, elle leur a signalé que, si elles engageaient une procédure devant le Tribunal ou devant la Cour, aucune mesure de recouvrement ne serait prise tant que l’affaire serait pendante, pour autant que deux conditions soient respectées avant la date d’expiration du délai de paiement. En application de l’article 86, paragraphe 5, du règlement no 2342/2002, ces deux conditions étaient les suivantes : premièrement, la créance de la Commission devait produire des intérêts à partir de la date d’expiration du délai de paiement au taux de 3,56 %, deuxièmement, une garantie bancaire acceptable pour la Commission, couvrant à la fois la dette et les intérêts ou majorations de la dette, devait être fournie avant la date limite de paiement.

95

Dans leurs écritures déposées dans la présente affaire, les requérantes expliquent qu’elles ont décidé de ne pas acquitter immédiatement le montant de l’amende qui leur avait été infligée et de constituer une garantie bancaire, conformément à la faculté qui leur avait été offerte par la Commission et moyennant le paiement d’intérêts au taux de 3,56 %.

96

C’est à la lumière de ces observations qu’il convient d’examiner le préjudice matériel allégué et le supposé lien de causalité entre ce préjudice et la violation du délai raisonnable de jugement dans les affaires T‑76/06 et T‑78/06.

– Sur le paiement d’intérêts sur le montant de l’amende

97

En premier lieu, il ressort des documents produits par les requérantes et des explications fournies oralement par le représentant de celles-ci, dont il a été pris acte dans le procès-verbal de l’audience, que c’est Armando Álvarez qui, le 22 juillet 2014, a payé le montant total des intérêts sur le montant de l’amende qui sont arrivés à échéance au cours de la procédure dans les affaires T‑76/06 et T‑78/06.

98

Il s’ensuit qu’ASPLA n’a manifestement pas subi un préjudice personnel qui consisterait dans le paiement d’intérêts sur le montant de l’amende au cours de la période qui correspond au dépassement du délai raisonnable de jugement dans les affaires T‑76/06 et T‑78/06.

99

En second lieu, en ce qui concerne le préjudice qui aurait été prétendument subi par Armando Álvarez, il importe de constater que, en raison de l’application combinée de l’article 299, premier alinéa, TFUE et de l’article 278 TFUE, mentionnés au point 93 ci-dessus, le montant de l’amende infligée par la décision C(2005) 4634 était dû à la Commission malgré l’introduction d’un recours en annulation contre ladite décision. Ainsi, les intérêts sur le montant de l’amende, dont le taux était de 3,56 %, doivent être qualifiés d’intérêts de retard.

100

Par ailleurs, il convient de relever que, au cours de la procédure dans les affaires T‑76/06 et T‑78/06, Armando Álvarez n’a pas acquitté le montant de l’amende, ni les intérêts de retard. Ainsi, au cours de la procédure dans lesdites affaires, Armando Álvarez a eu la jouissance de la somme qui correspondait au montant de cette amende majorée des intérêts de retard.

101

Or, les requérantes n’apportent pas d’éléments permettant de démontrer que, au cours de la période qui correspond au dépassement du délai raisonnable de jugement dans les affaires T‑76/06 et T‑78/06, le montant des intérêts de retard, ultérieurement payés à la Commission par Armando Álvarez, a été supérieur à l’avantage dont cette société a pu bénéficier en raison de la jouissance de la somme, égale au montant de l’amende majorée des intérêts de retard. En d’autres termes, les requérantes ne démontrent pas que les intérêts sur le montant de l’amende qui ont couru au cours de la période qui correspond au dépassement du délai raisonnable de jugement étaient supérieurs à l’avantage qu’Armando Álvarez a pu retirer de l’absence de paiement de l’amende majorée des intérêts qui étaient échus à la date à laquelle la violation du délai raisonnable de jugement est intervenue et des intérêts qui sont arrivés à échéance pendant que cette violation se poursuivait.

102

Il s’ensuit que les requérantes ne démontrent pas que, au cours de la période qui correspond au dépassement du délai raisonnable de jugement dans les affaires T‑76/06 et T‑78/06, Armando Álvarez a subi une perte réelle et certaine en raison du paiement d’intérêts de retard sur le montant de l’amende infligée par la décision C(2005) 4634.

103

La demande de réparation du prétendu préjudice consistant dans le paiement, par les requérantes, d’intérêts sur le montant de l’amende supplémentaires doit donc être rejetée, sans qu’il soit besoin d’apprécier l’existence alléguée d’un lien de causalité.

– Sur le paiement de frais de garantie bancaire

104

En premier lieu, s’agissant du préjudice, il ressort du dossier, d’une part, qu’ASPLA a constitué une garantie bancaire pour un montant de 10731000 euros majoré d’intérêts et, d’autre part, qu’Armando Álvarez a constitué plusieurs garanties bancaires auprès de quatre banques différentes pour un montant total de 31269000 euros majoré d’intérêts. En outre, les éléments du dossier attestent que chacune des requérantes a payé, sous la forme de commissions trimestrielles, des frais de garantie bancaire au cours de la procédure dans les affaires T‑76/06 et T‑78/06.

105

Ainsi, au regard des éléments du dossier, il y a lieu de considérer que chacune des requérantes démontre qu’elle a personnellement enduré un préjudice réel et certain consistant dans une perte subie en raison du paiement de frais de garantie bancaire au cours de la période qui correspond au dépassement du délai raisonnable de jugement dans les affaires T‑76/06 et T‑78/06.

106

En deuxième lieu, s’agissant du lien de causalité, il convient de relever, d’une part, que, si la procédure dans les affaires T‑76/06 et T‑78/06 n’avait pas dépassé le délai raisonnable de jugement, les requérantes n’auraient pas dû s’acquitter de frais de garantie bancaire au cours de la période qui correspond à ce dépassement.

107

Ainsi, il existe un lien de cause à effet entre la violation du délai raisonnable de jugement dans les affaires T‑76/06 et T‑78/06 et la survenance du préjudice qui a été enduré par les requérantes et qui consiste dans une perte subie en raison du paiement, par chacune d’entre elles, de frais de garantie bancaire au cours de la période qui correspond au dépassement de ce délai raisonnable de jugement.

108

D’autre part, il y a lieu de souligner que, certes, le comportement reproché doit être la cause déterminante du préjudice (ordonnance du 31 mars 2011, Mauerhofer/Commission, C‑433/10 P, non publiée, EU:C:2011:204, point 127, et arrêt du 10 mai 2006, Galileo International Technology e.a./Commission, T‑279/03, EU:T:2006:121, point 130 ; voir également, en ce sens, arrêt du 18 mars 2010, Trubowest Handel et Makarov/Conseil et Commission, C‑419/08 P, EU:C:2010:147, point 61). En d’autres termes, même dans le cas d’une éventuelle contribution des institutions au préjudice dont l’indemnisation est demandée, ladite contribution pourrait être trop éloignée en raison d’une responsabilité incombant à d’autres personnes, le cas échéant à la partie requérante (arrêt du 18 mars 2010, Trubowest Handel et Makarov/Conseil et Commission, C‑419/08 P, EU:C:2010:147, point 59, et ordonnance du 31 mars 2011, Mauerhofer/Commission, C‑433/10 P, non publiée, EU:C:2011:204, point 132).

109

Par ailleurs, il a déjà été jugé qu’un préjudice allégué, consistant en des frais de garantie bancaire encourus par une société sanctionnée par une décision de la Commission ultérieurement annulée par le Tribunal, ne résultait pas directement de l’illégalité de cette décision, au motif que ce préjudice résultait du propre choix de cette société de constituer une garantie bancaire afin de ne pas exécuter l’obligation de payer l’amende dans le délai imparti par la décision litigieuse [voir, en ce sens, arrêt du 21 avril 2005, Holcim (Deutschland)/Commission, T‑28/03, EU:T:2005:139, point 123, et ordonnance du 12 décembre 2007, Atlantic Container Line e.a./Commission, T‑113/04, non publiée, EU:T:2007:377, point 38].

110

Toutefois, en l’espèce, il convient de souligner que, premièrement, en février 2006, c’est-à-dire au moment où les requérantes ont introduit leur recours et au moment où elles ont constitué, respectivement, une ou plusieurs garanties bancaires, la violation du délai raisonnable de jugement était imprévisible. En outre, les requérantes pouvaient légitimement s’attendre à ce que leur recours respectif soit traité dans un délai raisonnable.

111

Deuxièmement, le dépassement du délai raisonnable de jugement dans les affaires T‑76/06 et T‑78/06 est intervenu postérieurement au choix initial des requérantes de constituer des garanties bancaires.

112

Ainsi, les faits de la présente affaire diffèrent d’une manière substantielle de ceux qui ont été constatés dans l’arrêt du 21 avril 2005, Holcim (Deutschland)/Commission (T‑28/03, EU:T:2005:139), et dans l’ordonnance du 12 décembre 2007, Atlantic Container Line e.a./Commission (T‑113/04, non publiée, EU:T:2007:377), mentionnés au point 109 ci-dessus. Le lien entre le dépassement du délai raisonnable de jugement dans les affaires T‑76/06 et T‑78/06 et le paiement de frais de garantie bancaire au cours de la période qui correspond à ce dépassement ne peut donc, contrairement à ce que prétend la Cour de justice de l’Union européenne, avoir été rompu par le choix initial des requérantes de ne pas payer immédiatement l’amende infligée par la décision C(2005) 4634 et de constituer une garantie bancaire.

113

Il s’ensuit qu’il existe un lien de causalité suffisamment direct entre la violation du délai raisonnable de jugement dans les affaires T‑76/06 et T‑78/06 et la perte subie par les requérantes en raison du paiement de frais de garantie bancaire au cours de la période qui correspond au dépassement dudit délai.

114

En troisième lieu, d’abord, il importe de rappeler que les requérantes invoquent une violation du délai raisonnable de jugement uniquement dans les affaires T‑76/06 et T‑78/06. Elles n’invoquent donc pas une violation du délai raisonnable de jugement en raison de la durée totale de la procédure, d’une part, dans l’affaire T‑76/06, avec l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 22 mai 2014, ASPLA/Commission (C‑35/12 P, EU:C:2014:348), et, d’autre part, dans l’affaire T‑78/06, avec l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 22 mai 2014, Armando Álvarez/Commission (C‑36/12 P, EU:C:2014:349).

115

Ainsi, en l’espèce, il a été uniquement constaté que la procédure dans les affaires T‑76/06 et T‑78/06 avait violé le délai raisonnable de jugement (voir le point 83 ci-dessus).

116

Ensuite, la violation du délai raisonnable de jugement dans les affaires T‑76/06 et T‑78/06 a pris fin avec le prononcé des arrêts du 16 novembre 2011, ASPLA/Commission (T‑76/06, non publié, EU:T:2011:672), et du 16 novembre 2011, Álvarez/Commission (T‑78/06, non publié, EU:T:2011:673).

117

Ainsi, à partir du 16 novembre 2011, les requérantes étaient en mesure d’apprécier, d’une part, l’existence d’une violation du délai raisonnable de jugement dans les affaires T‑76/06 et T‑78/06 et, d’autre part, le préjudice qu’elles avaient enduré en raison du paiement de frais de garantie bancaire au cours de la période correspondant au dépassement dudit délai.

118

Enfin, la décision C(2005) 4634, qui a infligé une amende aux requérantes, est devenue définitive uniquement le 22 mai 2014 et la faculté offerte par la Commission de constituer une garantie bancaire a pris fin à cette date en raison du choix des requérantes de former un pourvoi contre les arrêts du 16 novembre 2011, ASPLA/Commission (T‑76/06, non publié, EU:T:2011:672), et du 16 novembre 2011, Álvarez/Commission (T‑78/06, non publié, EU:T:2011:673).

119

Il s’ensuit que le paiement de frais de garantie bancaire après le prononcé des arrêts du 16 novembre 2011, ASPLA/Commission (T‑76/06, non publié, EU:T:2011:672), et du 16 novembre 2011, Álvarez/Commission (T‑78/06, non publié, EU:T:2011:673), qui ont mis fin à la violation du délai raisonnable de jugement dans les affaires T‑76/06 et T‑78/06, ne présente pas un lien de causalité suffisamment direct avec cette violation, dans la mesure où le paiement de tels frais découle du choix personnel et autonome des requérantes, postérieur à ladite violation, de ne pas payer l’amende, de ne pas demander le sursis à l’exécution de la décision C(2005) 4634 et de former un pourvoi contre les arrêts susmentionnés.

120

Il résulte de l’ensemble de ce qui précède qu’il existe un lien de causalité suffisamment direct entre, d’une part, la violation du délai raisonnable de jugement dans les affaires T‑76/06 et T‑78/06 et, d’autre part, le préjudice qui a été subi par les requérantes avant le prononcé des arrêts du 16 novembre 2011, ASPLA/Commission (T‑76/06, non publié, EU:T:2011:672), et du 16 novembre 2011, Álvarez/Commission (T‑78/06, non publié, EU:T:2011:673), et qui consiste dans le paiement de frais de garantie bancaire au cours de la période qui correspond au dépassement de ce délai raisonnable.

– Sur l’évaluation du préjudice matériel subi

121

En premier lieu, il importe de rappeler que la durée de la procédure dans les affaires T‑76/06 et T‑78/06 a dépassé de 20 mois le délai raisonnable de jugement dans chacune de ces affaires (voir le point 83 ci-dessus).

122

En deuxième lieu, il a été constaté, aux points 116 à 120 ci-dessus, que la violation du délai raisonnable de jugement dans les affaires T‑76/06 et T‑78/06 avait pris fin le 16 novembre 2011 et qu’il existait un lien de causalité suffisamment direct entre, d’une part, la violation du délai raisonnable de jugement dans les affaires T‑76/06 et T‑78/06 et, d’autre part, le préjudice qui avait été subi par les requérantes « avant » le prononcé des arrêts du 16 novembre 2011, ASPLA/Commission (T‑76/06, non publié, EU:T:2011:672), et du 16 novembre 2011, Álvarez/Commission (T‑78/06, non publié, EU:T:2011:673).

123

Ainsi, le dépassement du délai raisonnable de jugement dans les affaires T‑76/06 et T‑78/06 est intervenu 20 mois avant le prononcé des arrêts du 16 novembre 2011, ASPLA/Commission (T‑76/06, non publié, EU:T:2011:672), et du 16 novembre 2011, Álvarez/Commission (T‑78/06, non publié, EU:T:2011:673), soit le 16 mars 2010, et c’est à partir de cette date que les requérantes ont subi un préjudice matériel.

124

En réponse à une question écrite posée par le Tribunal, les requérantes ont, par lettre du 10 octobre 2016, expliqué qu’elles avaient commencé à subir un préjudice deux ans après le dépôt de la duplique de la Commission, c’est-à-dire le 6 octobre 2008 dans l’affaire T‑78/06 et le 12 février 2009 dans l’affaire T‑76/06.

125

Par ailleurs, bien qu’elles n’aient pas été interrogées à cet égard par le Tribunal, les requérantes ont ajouté, dans leur réponse du 10 octobre 2016, que leur préjudice avait pris fin avec la communication de la date de l’audience dans les affaires T‑76/06 et T‑78/06.

126

Enfin, il ressort du dossier respectif des affaires T‑76/06 et T‑78/06 que la date de l’audience dans chacune de ces affaires a été communiquée aux requérantes le 14 janvier 2011.

127

Or, il découle des règles régissant la procédure devant les juridictions de l’Union, notamment de l’article 21 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne et de l’article 44, paragraphe 1, du règlement de procédure du 2 mai 1991, que le litige est en principe déterminé et circonscrit par les parties et que le juge de l’Union ne peut statuer ultra petita (arrêts du 10 décembre 2013, Commission/Irlande e.a., C‑272/12 P, EU:C:2013:812, point 27, et du 3 juillet 2014, Electrabel/Commission, C‑84/13 P, non publié, EU:C:2014:2040, point 49).

128

Ainsi, le Tribunal ne peut s’écarter de la demande des requérantes et décider d’office de réparer un préjudice subi par celles-ci postérieurement au 14 janvier 2011, c’est‑à‑dire au cours d’une période chronologiquement différente de celle au cours de laquelle elles prétendent avoir subi un préjudice.

129

Dès lors, en l’espèce, le préjudice qui peut être réparé correspond aux frais de garantie bancaire payés par les requérantes entre le 16 mars 2010 et le 14 janvier 2011.

130

En troisième lieu, il ressort des pièces produites par les requérantes que ces dernières ont payé des frais de garantie bancaire sur une base trimestrielle.

131

Les éléments du dossier attestent que, au cours de la période comprise entre le 16 mars 2010 et le 14 janvier 2011, ASPLA a payé les frais de garantie bancaire trimestriels suivants :

Trimestres

Montant trimestriel

Mois

Frais (euros)

20.2.2010-19.5.2010

12 259,43

2

8 172,95

20.5.2010-19.8.2010

12 259,43

3

12 259,43

20.8.2010-19.11.2010

12 259,43

3

12 259,43

20.11.2010-19.2.2011

12 259,43

3

12 259,43

 

 

Total

44 951,24

132

Ainsi, les frais de garantie bancaire payés par ASPLA, au cours de la période comprise entre le 16 mars 2010 et le 14 janvier 2011, se sont élevés à 44951,24 euros.

133

Par ailleurs, les éléments du dossier attestent que, au cours de la période comprise entre le 16 mars 2010 et le 14 janvier 2011, Armando Álvarez a payé les frais de garantie bancaire trimestriels suivants :

 

Trimestres

Montant trimestriel

Mois

Frais (euros)

 

21.2.2010-20.5.2010

6 109,09

2

4 072,73

Banque A

21.5.2010-20.8.2010

6 156,34

3

6 156,34

 

21.8.2010-28.11.2010

6 203,59

3

6 203,59

 

29.11.2010-20.2.2011

6 290,57

3

6 290,57

 

 

 

 

22 723,23

 

 

 

 

 

 

22.2.2010-21.5.2010

6 000,00

2

4 000,00

Banque B

22.5.2010-21.8.2010

6 000,00

3

6 000,00

 

22.8.2010-21.11.2010

6 000,00

3

6 000,00

 

22.11.2010-21.2.2011

6 000,00

3

6 000,00

 

 

 

 

22 000,00

 

 

 

 

 

 

22.2.2010-21.5.2010

5 839,91

2

3 893,27

Banque C

21.5.2010-23.8.2010

5 839,91

3

5 839,91

 

23.8.2010-22.11.2010

5 839,91

3

5 839,91

 

22.11.2010-21.2.2011

5 839,91

3

5 839,91

 

 

 

 

21 413,00

 

 

 

 

 

 

16.2.2010-15.5.2010

12 075,34

2

8 050,23

Banque D

16.5.2010-15.8.2010

12 180,34

3

12 180,34

 

16.8.2010-15.11.2010

12 285,34

3

12 285,34

 

16.11.2010-15.2.2011

12 390,34

3

12 390,34

 

 

 

 

44 906,25

 

 

 

 

 

 

 

 

Total

111 042,48

134

Ainsi, les frais de garantie bancaire payés par Armando Álvarez, au cours de la période comprise entre le 16 mars 2010 et le 14 janvier 2011, se sont élevés à 111042,48 euros.

135

Compte tenu de ce qui précède, il y a lieu d’accorder une indemnité d’un montant de 44951,24 euros à ASPLA et une indemnité d’un montant de 111042,48 euros à Armando Álvarez à titre de réparation du préjudice matériel que leur a causé la violation du délai raisonnable de jugement dans les affaires, respectivement, T‑76/06 et T‑78/06 et qui consiste dans le paiement de frais de garantie bancaire additionnels.

– Sur les intérêts

136

Ainsi que cela ressort de leur premier chef de conclusions, les requérantes demandent au Tribunal d’assortir le montant de la réparation, qu’il est susceptible de leur allouer, d’intérêts compensatoires et de retard au taux appliqué par la BCE à ses opérations principales de refinancement, majoré de deux points de pourcentage, à compter de la date de dépôt du recours.

137

À cet égard, il convient de distinguer les intérêts compensatoires et les intérêts moratoires (arrêt du 27 janvier 2000, Mulder e.a./Conseil et Commission, C‑104/89 et C‑37/90, EU:C:2000:38, point 55).

138

En premier lieu, en ce qui concerne les intérêts compensatoires, il convient de rappeler que les conséquences défavorables résultant du laps de temps qui s’est écoulé entre la survenance du fait dommageable et l’évaluation de l’indemnité ne sauraient être ignorées, dans la mesure où il y a lieu de tenir compte de l’érosion monétaire (voir, en ce sens, arrêts du 3 février 1994, Grifoni/Commission, C‑308/87, EU:C:1994:38, point 40, et du 13 juillet 2005, Camar/Conseil et Commission, T‑260/97, EU:T:2005:283, point 138). Les intérêts compensatoires visent à compenser l’écoulement du temps jusqu’à l’évaluation juridictionnelle du montant du préjudice, indépendamment de tout retard imputable au débiteur (arrêt du 12 février 2015, Commission/IPK International, C‑336/13 P, EU:C:2015:83, point 37).

139

Le terme de la période ouvrant droit à cette réévaluation monétaire doit, en principe, coïncider avec la date du prononcé de l’arrêt constatant l’obligation de réparer le préjudice subi par la partie requérante (voir, en ce sens, arrêts du 19 mai 1992, Mulder e.a./Conseil et Commission, C‑104/89 et C‑37/90, EU:C:1992:217, point 35 ; du 13 juillet 2005, Camar/Conseil et Commission, T‑260/97, EU:T:2005:283, points 142 et 143, et du 26 novembre 2008, Agraz e.a./Commission, T‑285/03, non publié, EU:T:2008:526, points 54 et 55).

140

En l’espèce, s’agissant de l’indemnité due à chacune des requérantes à titre de réparation du préjudice matériel qu’elles ont respectivement subi, il ressort de la jurisprudence citée au point 138 ci-dessus que les requérantes seraient en droit de demander que cette indemnité fût assortie d’intérêts compensatoires à compter du 16 mars 2010.

141

Cependant, par leur premier chef de conclusions, les requérantes demandent, ainsi qu’elles l’ont souligné par lettre du 6 décembre 2016, d’assortir le montant de la réparation à laquelle elles peuvent prétendre d’intérêts compensatoires « à compter de la date du dépôt du recours » dans la présente affaire, c’est-à-dire à compter du 27 janvier 2015.

142

Dès lors, les intérêts compensatoires, qui doivent assortir l’indemnité due à chacune des requérantes à titre de réparation du préjudice matériel qu’elles ont respectivement subi, courent à partir du 27 janvier 2015, conformément à la demande formulée par les requérantes.

143

Par ailleurs, les requérantes, qui invoquent une perte subie, ne fournissent aucune preuve permettant de démontrer que les frais de garantie bancaire payés par ASPLA entre le 16 mars 2010 et le 14 janvier 2011 ainsi que les frais de garantie bancaire payés par Armando Álvarez entre le 16 mars 2010 et le 14 janvier 2011 auraient pu produire des intérêts dont le taux serait celui appliqué par la BCE à ses opérations principales de refinancement, majoré de deux points de pourcentage (voir, en ce sens, arrêts du 27 janvier 2000, Mulder e.a./Conseil et Commission, C‑104/89 et C‑37/90, EU:C:2000:38, point 219, et du 26 novembre 2008, Agraz e.a./Commission, T‑285/03, non publié, EU:T:2008:526, point 49).

144

Ainsi, les requérantes ne peuvent prétendre à l’application d’intérêts compensatoires calculés sur la base du taux appliqué par la BCE à ses opérations principales de refinancement, majoré de deux points de pourcentage.

145

En revanche, l’érosion monétaire liée à l’écoulement du temps est reflétée par le taux d’inflation annuel constaté, pour la période concernée, par Eurostat (office statistique de l’Union européenne) dans l’État membre où les requérantes sont établies (voir, en ce sens, arrêts du 27 janvier 2000, Mulder e.a./Conseil et Commission, C‑104/89 et C‑37/90, EU:C:2000:38, points 220 et 221, du 13 juillet 2005, Camar/Conseil et Commission, T‑260/97, EU:T:2005:283, point 139, et du 26 novembre 2008, Agraz e.a./Commission, T‑285/03, non publié, EU:T:2008:526, point 50).

146

Par conséquent, le taux des intérêts compensatoires qui doivent assortir l’indemnité due à chacune des requérantes à titre de réparation du préjudice matériel qu’elles ont respectivement subi correspond au taux d’inflation annuel constaté par Eurostat dans l’État membre où ces sociétés sont établies. Ces intérêts compensatoires s’appliqueront, dans la limite de la demande des requérantes, à la période comprise entre le 27 janvier 2015 et la date du prononcé du présent arrêt en ce qui concerne chacune des requérantes.

147

En second lieu, s’agissant des intérêts moratoires, il ressort de la jurisprudence que l’obligation de payer de tels intérêts naît, en principe, à partir de l’arrêt qui constate l’obligation de réparer le préjudice (voir, en ce sens, arrêt du 26 juin 1990, Sofrimport/Commission, C‑152/88, EU:C:1990:259, point 32 et jurisprudence citée).

148

Pour la fixation du taux des intérêts moratoires, il est approprié de tenir compte de l’article 83, paragraphe 2, sous b), et de l’article 111, paragraphe 4, sous a), du règlement délégué (UE) no 1268/2012 de la Commission, du 29 octobre 2012, relatif aux règles d’application du règlement (UE, Euratom) no 966/2012 du Parlement européen et du Conseil relatif aux règles financières applicables au budget général de l’Union (JO 2012, L 362, p. 1). En application de ces dispositions, le taux d’intérêt pour les créances non remboursées dans les délais est le taux appliqué par la BCE à ses opérations principales de refinancement tel que publié au Journal officiel de l’Union européenne, série C, en vigueur le premier jour de calendrier du mois de la date limite, majoré de trois points et demi de pourcentage.

149

En l’espèce, il y a lieu de considérer que les indemnités visées au point 135 ci-dessus, y compris les intérêts compensatoires qui assortissent l’indemnité due à titre de réparation du préjudice matériel subi par chacune des requérantes, doivent être majorées d’intérêts moratoires, à compter du prononcé du présent arrêt et jusqu’à complet paiement.

150

Par ailleurs, le taux de cette majoration doit être fixé dans la limite de la demande des requérantes (voir, en ce sens, arrêts du 19 mai 1992, Mulder e.a./Conseil et Commission, C‑104/89 et C‑37/90, EU:C:1992:217, point 35, et du 8 mai 2007, Citymo/Commission, T‑271/04, EU:T:2007:128, point 184).

151

Le taux des intérêts moratoires sera donc celui fixé par la BCE pour ses opérations principales de refinancement, majoré de deux points de pourcentage, ainsi que le demandent les requérantes.

– Conclusion sur le montant des indemnités et sur les intérêts

152

Compte tenu de l’ensemble de ce qui précède, le présent recours doit être accueilli partiellement en ce qu’il tend à la réparation du préjudice matériel subi par les requérantes en raison de la violation du délai raisonnable de jugement dans les affaires T‑76/06 et T‑78/06.

153

L’indemnité due à ASPLA à titre de réparation du préjudice matériel qu’elle a subi en raison du paiement de frais de garantie bancaire additionnels s’élève à 44951,24 euros, majorés d’intérêts compensatoires, à compter du 27 janvier 2015 et jusqu’au prononcé du présent arrêt, au taux d’inflation annuel constaté par Eurostat dans l’État membre où cette société est établie.

154

L’indemnité due à Armando Álvarez à titre de réparation du préjudice matériel qu’elle a subi en raison du paiement de frais de garantie bancaire additionnels s’élève à 111042,48 euros, majorés d’intérêts compensatoires, à compter du 27 janvier 2015 et jusqu’au prononcé du présent arrêt, au taux d’inflation annuel constaté par Eurostat dans l’État membre où cette société est établie.

155

Le montant des indemnités visées aux points 153 et 154 ci-dessus, y compris les intérêts compensatoires qui assortissent l’indemnité due à chacune des requérantes à titre de réparation du préjudice matériel qu’elles ont respectivement subi, sera majoré d’intérêts moratoires dans les conditions visées aux points 149 et 151 ci-dessus.

156

Le recours est rejeté pour le surplus.

Sur les dépens

157

En vertu de l’article 134, paragraphe 3, du règlement de procédure, chaque partie supporte ses propres dépens si les parties succombent respectivement sur un ou plusieurs chefs. Toutefois, si cela apparaît justifié au vu des circonstances de l’espèce, le Tribunal peut décider que, outre ses propres dépens, une partie supporte une fraction des dépens de l’autre partie.

158

En l’espèce, les requérantes ont obtenu satisfaction en partie en ce qui concerne leurs chefs de conclusions sur le fond. Cependant, elles ont largement succombé en leur demande d’indemnité. Dans ces conditions et eu égard à l’ensemble des circonstances de la cause, il y a lieu de décider que chacune des parties supportera ses propres dépens.

159

Selon l’article 138, paragraphe 1, du règlement de procédure, les États membres et les institutions qui sont intervenus au litige supportent leurs propres dépens. Il convient de décider que la Commission supportera ses propres dépens.

 

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (troisième chambre élargie)

déclare et arrête :

 

1)

L’Union européenne, représentée par la Cour de justice de l’Union européenne, est condamnée à payer une indemnité de 44951,24 euros à Plásticos Españoles, SA (ASPLA) et une indemnité de 111042,48 euros à Armando Álvarez, SA au titre du préjudice matériel subi par chacune de ces sociétés en raison de la violation du délai raisonnable de jugement dans les affaires ayant donné lieu aux arrêts du 16 novembre 2011, ASPLA/Commission (T‑76/06, non publié, EU:T:2011:672), et du 16 novembre 2011, Álvarez/Commission (T‑78/06, non publié, EU:T:2011:673). Chacune de ces indemnités sera réévaluée par des intérêts compensatoires, à compter du 27 janvier 2015 et jusqu’au prononcé du présent arrêt, au taux d’inflation annuel constaté, pour la période concernée, par Eurostat (office statistique de l’Union européenne) dans l’État membre où ces sociétés sont établies.

 

2)

Chacune des indemnités visées au point 1) ci-dessus sera majorée d’intérêts moratoires, à compter du prononcé du présent arrêt et jusqu’à complet paiement, au taux fixé par la Banque centrale européenne (BCE) pour ses opérations principales de refinancement, majoré de deux points de pourcentage.

 

3)

Le recours est rejeté pour le surplus.

 

4)

ASPLA et Armando Álvarez, d’une part, et l’Union, représentée par la Cour de justice de l’Union européenne, d’autre part, supporteront leurs propres dépens.

 

5)

La Commission européenne supportera ses propres dépens.

 

Papasavvas

Labucka

Bieliūnas

Kreuschitz

Forrester

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 17 février 2017.

Signatures

Table des matières

 

Antécédents du litige

 

Procédure et conclusions des parties

 

En droit

 

Sur la recevabilité

 

Sur la fin de non-recevoir soulevée à titre principal et tirée du manque de clarté et de précision de la requête

 

Sur la fin de non-recevoir soulevée à titre subsidiaire et tirée de la prescription de la demande d’indemnisation du préjudice matériel allégué

 

Sur le fond

 

Sur la prétendue violation du délai raisonnable de jugement dans les affaires T‑76/06 et T‑78/06

 

Sur le préjudice matériel allégué et le supposé lien de causalité

 

– Observations liminaires

 

– Sur le paiement d’intérêts sur le montant de l’amende

 

– Sur le paiement de frais de garantie bancaire

 

– Sur l’évaluation du préjudice matériel subi

 

– Sur les intérêts

 

– Conclusion sur le montant des indemnités et sur les intérêts

 

Sur les dépens


( 1 ) Langue de procédure : l’espagnol.