ARRÊT DE LA COUR (troisième chambre)

24 mars 2011 (*)

«Manquement d’État – Directive 85/337/CEE – Évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l’environnement – Critères de sélection – Détermination de seuils – Dimension du projet»

Dans l’affaire C‑435/09,

ayant pour objet un recours en manquement au titre de l’article 226 CE, introduit le 4 novembre 2009,

Commission européenne, représentée par MM. M. van Beek et J.‑B. Laignelot ainsi que par Mme C. ten Dam, en qualité d’agents, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie requérante,

contre

Royaume de Belgique, représenté par M. T. Materne, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

LA COUR (troisième chambre),

composée de M. K. Lenaerts, président de chambre, MM. E. Juhász, G. Arestis (rapporteur), J. Malenovský et T. von Danwitz, juges,

avocat général: M. N. Jääskinen,

greffier: M. A. Calot Escobar,

vu la procédure écrite,

vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,

rend le présent

Arrêt

1        Par sa requête, la Commission des Communautés européennes demande à la Cour de constater que, en n’adoptant pas les mesures nécessaires à l’exécution correcte ou complète, en ce qui concerne la Région flamande, de l’article 4, paragraphes 2 et 3, lu en combinaison avec les annexes II et III de la directive 85/337/CEE du Conseil, du 27 juin 1985, concernant l’évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l’environnement (JO L 175, p. 40), telle que modifiée par la directive 2003/35/CE du Parlement européen et du Conseil, du 26 mai 2003 (JO L 156, p. 17, ci-après la «directive 85/337»), en ce qui concerne la Région wallonne, de l’article 4, paragraphe 1, lu en combinaison avec l’annexe I, points 8, sous a), et 18, sous a), de cette directive et de l’article 7, paragraphe 1, sous b), de celle-ci, et, en ce qui concerne la Région de Bruxelles-Capitale, de l’article 4, paragraphes 2 et 3, lu en combinaison avec les annexes II et III ainsi que de l’annexe III en tant que telle de ladite directive, le Royaume de Belgique a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de cette dernière.

 Le cadre juridique

 Le droit de l’Union

2        L’article 2 de la directive 85/337 prévoit:

«1.      Les États membres prennent les dispositions nécessaires pour que, avant l’octroi de l’autorisation, les projets susceptibles d’avoir des incidences notables sur l’environnement, notamment en raison de leur nature, de leurs dimensions ou de leur localisation, soient soumis à une procédure de demande d’autorisation et à une évaluation en ce qui concerne leurs incidences. Ces projets sont définis à l’article 4.

[…]

3.      Sans préjudice de l’article 7, les États membres peuvent, dans des cas exceptionnels, exempter en totalité ou en partie, un projet spécifique des dispositions prévues par la présente directive.

[…]»

3        L’article 3 de ladite directive dispose que l’évaluation des incidences sur l’environnement prend en compte les effets directs et indirects d’un projet sur l’homme, la faune, la flore, le sol, l’eau, l’air, le climat, le paysage, les biens matériels et le patrimoine culturel ainsi que l’interaction de tous ces facteurs.

4        L’article 4, paragraphes 1 à 3, de la même directive est libellé comme suit:

«1.      Sous réserve de l’article 2 paragraphe 3, les projets énumérés à l’annexe I sont soumis à une évaluation, conformément aux articles 5 à 10.

2.      Sous réserve de l’article 2 paragraphe 3, les États membres déterminent, pour les projets énumérés à l’annexe II:

a)      sur la base d’un examen cas par cas, ou

b)      sur la base des seuils ou critères fixés par l’État membre,

si le projet doit être soumis à une évaluation conformément aux articles 5 à 10.

Les États membres peuvent décider d’appliquer les deux procédures visées aux points a) et b).

3.      Pour l’examen cas par cas ou la fixation des seuils ou critères fixés en application du paragraphe 2, il est tenu compte des critères de sélection pertinents fixés à l’annexe III.»

5        Les articles 5 à 10 de la directive 85/337 énoncent, notamment, les conditions à respecter pour effectuer une évaluation des incidences sur l’environnement, en particulier les informations à fournir par le demandeur et la communication de celles-ci au public.

6        L’article 5, paragraphe 3, quatrième tiret, de la directive 85/337 prévoit que les informations à fournir par le maître d’ouvrage comportent au minimum une esquisse des principales solutions de substitution qui ont été examinées par celui‑ci et une indication des principales raisons de son choix, eu égard aux effets sur l’environnement.

7        L’article 7, paragraphe 1, de ladite directive est rédigé comme suit:

«1.      Lorsqu’un État membre constate qu’un projet est susceptible d’avoir des incidences notables sur l’environnement d’un autre État membre ou lorsqu’un État membre susceptible d’être affecté notablement le demande, l’État membre sur le territoire duquel il est envisagé de réaliser le projet transmet à l’État membre affecté, le plus rapidement possible, et au plus tard au moment où il informe son propre public, notamment:

a)      une description du projet, accompagnée de toute information disponible quant à ses incidences transfrontalières éventuelles;

b)      des informations quant à la nature de la décision susceptible d’être prise,

[…]»

8        La directive 85/337 comporte quatre annexes. Son annexe I est consacrée aux projets visés à l’article 4, paragraphe 1, de cette directive. Le point 8, sous a), de cette annexe I cite les voies navigables et les ports de navigation intérieure permettant l’accès de bateaux de plus de 1 350 tonnes. Le point 18, sous a), de ladite annexe, quant à lui, vise les installations industrielles destinées à la fabrication de pâte à papier à partir du bois ou d’autres matières fibreuses. L’annexe II de la même directive répertorie les projets visés au paragraphe 2 de cet article 4. L’annexe III de la directive 85/337 énumère les critères de sélection visés au paragraphe 3 dudit article. Cette annexe III comporte trois points distincts visant respectivement les caractéristiques des projets ainsi que la localisation et les caractéristiques de l’impact potentiel de ceux-ci.

9        En particulier, l’annexe III de la directive 85/337 prévoit, premièrement, que les caractéristiques des projets doivent être considérées, notamment, par rapport à la dimension du projet, au cumul avec d’autres projets, à l’utilisation des ressources naturelles, à la production de déchets, à la pollution et aux nuisances, ainsi qu’au risque d’accidents, eu égard notamment aux substances ou aux technologies mises en œuvre. Cette annexe III prévoit, deuxièmement, que la sensibilité environnementale des zones géographiques susceptibles d’être affectées par le projet doit être considérée en prenant notamment en compte l’occupation des sols existants, la richesse relative, la qualité et la capacité de régénération des ressources naturelles de la zone concernée par le projet ainsi que la capacité de charge de l’environnement naturel. Ladite annexe III précise, troisièmement, que les incidences notables qu’un projet pourrait avoir doivent être considérées, notamment, par rapport à l’étendue, à la nature transfrontière, à l’ampleur et à la complexité de l’impact ainsi que par rapport à la probabilité, à la durée, à la fréquence et à la réversibilité de celui-ci.

 La réglementation nationale

 La réglementation de la Région flamande

10      La Région flamande a transposé la directive 85/337, d’une part, par le décret du 5 avril 1995, contenant des dispositions générales concernant la politique de l’environnement, tel que modifié par le décret du 18 décembre 2002 complétant ce premier décret par un titre relatif à l’évaluation des incidences sur l’environnement et la sécurité (Belgisch Staatsblad, 13 février 2003, p. 7261, ci‑après le «décret flamand») et, d’autre part, par l’arrêté du gouvernement flamand du 10 décembre 2004 établissant les catégories de projets soumises à l’évaluation des incidences sur l’environnement (Belgisch Staatsblad, 17 février 2005, p. 5556, ci-après l’«arrêté flamand»).

11      Sous le chapitre III du titre IV du décret flamand, relatif à l’évaluation des incidences sur l’environnement concernant des projets, l’article 4.3.2 prévoit:

«§ 1. Sur la base des critères définis dans l’annexe II jointe au présent décret, le Gouvernement flamand désigne les catégories de projets qui sont soumises au type d’évaluation des incidences sur l’environnement visé dans le présent chapitre.

[…]

§ 2.      Sur la base des critères définis dans l’annexe II jointe au présent décret, le Gouvernement flamand désigne les catégories de projets autres que celles visées au § 1er pour lesquelles il convient d’établir ou non un rapport d’incidence sur l’environnement conformément au présent chapitre, en vertu d’une décision, prise au cas par cas, par l’administration.

[…]

§ 4.      Sur la base des critères définis à l’annexe II, le Gouvernement flamand définit les critères de sélection sur la base desquels l’administration décide au cas par cas s’il convient ou non d’établir un rapport d’incidence sur l’environnement conformément au présent chapitre pour les projets visés aux §§ 2 et 3. Ces critères de sélection doivent permettre d’évaluer si d’importantes incidences écologiques peuvent être liées à un projet déterminé, voire à une modification de ce projet.

[…]»

12      Le contenu de l’annexe II du décret flamand, concernant les critères de sélection visés à l’article 4.3.2, paragraphes 1 à 4, et à l’article 4.3.3, paragraphe 2, de ce décret, correspond à celui de l’annexe III de la directive 85/337.

13      L’annexe II de l’arrêté flamand contient les catégories de projets pour lesquels est exigé un rapport d’évaluation des incidences sur l’environnement, conformément à l’article 4.3.2, paragraphes 2 et 3, du décret flamand, mais qui sont susceptibles de donner lieu à une dispense. Cette annexe énonce:

«[…]

3.      Industrie de l’énergie

a)      Installations industrielles destinées à la production d’énergie électrique, de vapeur et d’eau chaude, à l’exception des centrales d’énergie nucléaire, d’une puissance calorifique de 100 à 300 MW.

[…]

4.      Production et travail des métaux

a)      Installations destinées à la production de fonte ou d’acier (fusion primaire ou secondaire), y compris les équipements pour coulée continue, d’une capacité de production de 100 000 tonnes par an ou plus.

[…]

g)      Chantiers navals d’une superficie de 5 ha ou plus.

[…]

i)      Installations pour la fabrication de matériel ferroviaire d’une superficie de 1 ha ou plus ou pour sa réparation d’une superficie de 5 ha ou plus.

[…]

5.      Industrie minérale

[…]

c)      Installations destinées à la production d’amiante et à la fabrication de produits à base d’amiante:

–        produits à base de ciment d’amiante d’une production de 10 000 à 20 000 tonnes de produits finaux par an,

–        garnitures de frein d’une production de 25 à 50 tonnes de produits finaux par an,

–        autres valorisations d’amiante d’une production de 100 à 200 tonnes par an.

[…]

10.      Projets d’infrastructure

[…]

e)

–        Construction de routes à 4 bandes ou plus d’une longueur de 1 à 10 km.

–        Construction de routes à 2 bandes ou plus d’une longueur de 10 km ou plus.

–        Construction de routes revêtues qui sont situées dans une zone spécialement protégée sur une longueur ininterrompue de 1 km ou plus.

[…]

j)      Construction d’infrastructure pour tramways, métros aériens et souterrains, lignes suspendues et lignes analogues de type particulier servant exclusivement ou principalement au transport des personnes, d’une longueur de 1 km ou plus.

[…]»

 La réglementation de la Région wallonne

14      La directive 85/337 a été transposée dans l’ordre juridique de la Région wallonne, notamment, par le code wallon de l’environnement (Moniteur belge du 9 juillet 2004, p. 54654, ci-après le «code wallon»), par le décret du 11 mars 1999 relatif au permis d’environnement (Moniteur belge du 8 juin 1999, p. 21176), le décret du 11 septembre 1985 organisant l’évaluation des incidences sur l’environnement dans la Région wallonne, tel que modifié par le décret du 11 mars 1999 relatif au permis d’environnement, et par l’arrêté du gouvernement wallon du 4 juillet 2002 arrêtant la liste des projets soumis à une étude d’incidences et des installations et activités classées (Moniteur belge du 21 septembre 2002, p. 42502, ci-après l’«arrêté wallon»).

15      L’annexe I de l’arrêté wallon contient une liste de projets, d’installations et d’activités soumis à une étude d’incidences. Les rubriques 21.1 et 61.20.01 de cette annexe I sont libellées comme suit:

«21.1          Fabrication de pâtes à papier, de papier et de carton

21.11          Fabrication de pâtes à papier

21.11.01 Installation industrielle destinée à la fabrication de pâtes à papier, à partir du bois ou d’autres matières fibreuses ou non fibreuses lorsque la capacité installée de production est

21.11.01.01 inférieure à 500 T/an: pas d’étude d’incidences

21.11.01.02 supérieure ou égale à 500 T/an: étude d’incidences obligatoire.

[…]

61.20          Transports fluviaux

61.20.01 Construction de ports et d’installations portuaires capables d’accueillir 25 bateaux, y compris les ports de pêche: étude d’incidences obligatoire.»

16      L’article R. 41-9 du code wallon, lequel remplace l’article R. 83 de ce code depuis le mois de mars de l’année 2008, dispose que, lorsqu’un projet situé en Région wallonne est susceptible d’avoir des incidences notables sur l’environnement d’une autre Région, d’un autre État membre de l’Union européenne ou d’un État partie à la convention sur l’évaluation de l’impact sur l’environnement dans un contexte transfrontière, adoptée à Espoo (Finlande) le 25 février 1991, l’instance wallonne chargée d’examiner le caractère complet et recevable de la demande transmet ce projet aux autorités concernées de la Région ou de l’État susceptibles d’être affectés, en indiquant l’autorité compétente et le délai dans lequel sa décision doit être prise, ainsi que les modalités d’organisation de l’enquête publique afférente à l’instruction de la demande de permis et, notamment, la durée de l’enquête, la date probable de début de celle-ci et l’autorité chargée de recevoir les observations du public. Cette disposition précise, en outre, que, en même temps que cette instance transmet le dossier, elle informe le gouvernement wallon et l’autorité compétente de cette transmission.

17      L’article D. 66, paragraphe 2, du code wallon prévoit que le gouvernement wallon arrête la liste des projets qui, en raison de leur nature, de leurs dimensions ou de leur localisation, sont soumis à une étude d’incidences sur l’environnement, compte tenu des critères de sélection énumérés à l’annexe III de la directive 85/337.

18      L’article D. 68, paragraphe 1, du code wallon dispose:

«Lorsqu’une demande de permis relative à un projet ne figurant pas dans la liste visée à l’article D. 66, § 2, alinéa 1er, n’est pas accompagnée d’une étude d’incidences, l’autorité chargée d’apprécier le caractère complet ou recevable du dossier de la demande examine, au vu notamment de la notice et en tenant compte des critères de sélection pertinents visés à l’article D. 66, § 2, si le projet est susceptible d’avoir des incidences notables sur l’environnement.»

 La réglementation de la Région de Bruxelles-Capitale

19      La directive 85/337 a été transposée dans l’ordre juridique de la Région de Bruxelles-Capitale par le code bruxellois de l’aménagement du territoire (ci-après le «code bruxellois»), par l’ordonnance du 5 juin 1997 relative aux permis d’environnement, par l’ordonnance du 22 avril 1999 fixant la liste des installations de classe IA visée à l’article 4 de l’ordonnance du 5 juin 1997, et par l’arrêté du gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale du 4 mars 1999 fixant la liste des installations de classes IB, II et III en exécution de l’article 4 de l’ordonnance du 5 juin 1997 (ci-après l’«arrêté bruxellois»).

20      L’article 142, paragraphe 1, du code bruxellois prévoit que les projets mentionnés à l’annexe B de ce code sont soumis à un rapport d’incidences.

21      Les rubriques 20 à 26 de cette annexe B sont libellées comme suit:

«20)      aménagement d’une propriété plantée de plus de 5 000 m²;

21)      construction d’un immeuble de bureaux dont la superficie de planchers se situe entre 5 000 et 20 000 m² hors sol;

22)      complexe hôtelier de plus de 100 chambres;

23)      création de plus de 1 000 m² de locaux destinés aux activités productives, de commerces ou de dépôts dans les zones principalement affectées à l’habitation;

24)      création d’équipements sportifs, culturels, de loisirs, scolaires et sociaux dans lesquels plus de 200 m² sont accessibles aux utilisations de ces équipements;

25)      parc de stationnement à l’air libre pour véhicules à moteur en dehors de la voie publique comptant de 50 à 200 emplacements pour véhicules automobiles;

26)      garages, emplacements couverts où sont garés des véhicules à moteur, parcs de stationnement couverts, salles d’exposition, etc. comptant de 25 à 200 véhicules automobiles ou remorques».

22      L’article 4 de l’ordonnance du 5 juin 1997 relative aux permis d’environnement, dans sa version applicable au présent litige, prévoit, sous l’intitulé «Classes d’installations», que les installations sont réparties en cinq classes en fonction de la nature et de l’importance des dangers et des nuisances qu’elles sont susceptibles de causer, à savoir les classes I.A, I.B, I.C, II et III.

23      L’article 7 de cette ordonnance exige que les actes qui y sont cités soient soumis à un permis d’environnement lorsqu’ils concernent des installations de classes I.A, I.B et II ainsi qu’à une déclaration préalable lorsqu’ils concernent des installations de classe I.C ou III.

24      L’article 11 de ladite ordonnance dispose, sous l’intitulé «Unité technique et géographique d’exploitation», que, lorsque plusieurs installations constituent une unité technique et géographique d’exploitation, celles-ci doivent faire l’objet d’une déclaration unique ou d’une demande unique de certificat ou de permis d’environnement. Cette disposition précise en outre que, si ces installations relèvent de classes différentes, la demande est introduite et instruite selon les règles applicables à l’installation de la classe la plus stricte.

25      L’arrêté bruxellois fixe, en annexe, la liste des installations visées à l’article 4 de l’ordonnance du 5 juin 1997. Cette liste comporte plus de 160 rubriques qui mentionnent, pour chacune des installations qui y sont énumérées, la classe à laquelle l’installation appartient. À titre d’exemple, la rubrique 68 indique que les garages et les emplacements couverts où sont garés des véhicules à moteur comptant de 10 à 24 véhicules automobiles ou remorques relèvent de la classe II, tandis que ceux comptant de 25 à 200 véhicules automobiles ou remorques font partie de la classe I.B.

 La procédure précontentieuse

26      Après avoir examiné la compatibilité des mesures nationales de transposition de la directive 85/337 avec les exigences de celles-ci, la Commission a reproché aux autorités compétentes belges de ne pas avoir transposé complètement et/ou correctement certaines dispositions de cette directive. Pour ce motif, elle a engagé une procédure en manquement sur le fondement de l’article 226 CE et adressé au Royaume de Belgique une lettre de mise en demeure le 4 juillet 2006, à laquelle chacune des autorités compétentes a répondu.

27      Après avoir examiné la réponse du Royaume de Belgique au regard des compétences qu’il exerce en tant qu’autorité fédérale, la Commission a décidé de ne pas poursuivre la procédure en ce qui concerne cette dernière. La Commission a néanmoins maintenu sa position en ce qui concerne la Région flamande, la Région wallonne ainsi que la Région de Bruxelles-Capitale et émis, par lettre du 17 octobre 2008, un avis motivé dans lequel elle reprochait aux autorités de ces trois Régions de ne pas avoir pris toutes les mesures nécessaires pour transposer complètement les dispositions de la directive 85/337. En conséquence, le Royaume de Belgique a été invité à se conformer à cet avis dans un délai de deux mois à compter de la notification de celui-ci.

28      N’étant pas satisfaite des réponses fournies audit avis motivé par les trois Régions susmentionnées et estimant, dès lors, que le Royaume de Belgique n’avait pas mis fin au manquement reproché, la Commission a décidé d’introduire le présent recours.

 Sur le recours

 Sur le grief relatif à la réglementation de la Région flamande

 Argumentation des parties

29      La Commission soutient que, en ce qui concerne la Région flamande, l’article 4, paragraphes 2 et 3, de la directive 85/337, lu en combinaison avec les annexes II et III de cette dernière, n’a pas été correctement transposé, en raison du fait que les critères énoncés à cette annexe III ne sont pas tous pris en considération pour la fixation des seuils permettant de déterminer si les projets énumérés à ladite annexe II doivent ou non être soumis à une évaluation des incidences sur l’environnement.

30      Si la Commission admet que l’article 4.3.2, paragraphes 2 et 4, du décret flamand et l’annexe II de ce dernier semblent respecter l’obligation de prise en compte des critères énoncés à l’annexe III de la directive 85/337, elle estime néanmoins que l’arrêté flamand présente des lacunes montrant que, lors de l’établissement des catégories de projets visées à cet article 4.3.2, paragraphe 2, les critères pertinents énumérés à l’annexe II dudit décret, dont le contenu correspond à celui de l’annexe III de cette directive, ne sont pas tous appliqués. Selon la Commission, pour la grande majorité des catégories citées à l’annexe II de l’arrêté flamand, les seuils retenus ne tiennent compte que du critère relatif à la «dimension du projet», sans prendre en considération les autres critères mentionnés à ladite annexe III. À titre d’exemple, elle mentionne les projets relevant des catégories 3, sous a), 4, sous a), et 5, sous c), de cette annexe II de l’arrêté flamand.

31      La Commission soutient que cette méthode va à l’encontre du système mis en œuvre à l’article 4, paragraphes 2 et 3, de la directive 85/337 et aux annexes II et III de celle-ci, ainsi qu’à l’article 2, paragraphe 1, de cette directive, disposant que les États membres doivent prendre les dispositions nécessaires pour que, avant l’octroi de l’autorisation, les projets susceptibles d’avoir des incidences notables sur l’environnement soient soumis à une évaluation en ce qui concerne leurs incidences sur l’environnement.

32      La Commission fait ainsi valoir que la scission des projets permettrait de contourner facilement l’obligation de réaliser une évaluation des incidences sur l’environnement. Par ailleurs, une telle approche ne permettrait pas de prendre en compte d’autres caractéristiques potentiellement pertinentes d’un projet comme, par exemple, l’utilisation de ressources naturelles, la production de déchets, la pollution et les nuisances ainsi que le risque d’accidents, eu égard notamment aux substances ou aux technologies mises en œuvre. Il ne serait pas davantage tenu compte de la localisation du projet ou de son impact potentiel sur l’environnement.

33      La Commission réfute l’argument invoqué par le Royaume de Belgique selon lequel le niveau des seuils fixé dans la réglementation flamande serait si bas qu’il constitue un critère «pertinent et global» permettant de supposer qu’un projet qui ne dépasse pas le seuil fixé ne serait pas susceptible d’avoir des incidences notables sur l’environnement. Au soutien de son argumentation, la Commission invoque une série d’exemples visant un certain nombre de catégories contenues dans l’annexe II de l’arrêté flamand et, à cet égard, elle précise qu’il n’est pas nécessaire, pour démontrer que la transposition d’une directive est insuffisante ou inadéquate, qu’elle établisse les effets réels de la réglementation nationale transposant celle-ci.

34      Ainsi, prenant, notamment, l’exemple de la catégorie de projets figurant au point 4, sous i), de l’annexe II de l’arrêté flamand, la Commission observe que seules les installations pour la fabrication de matériel ferroviaire d’une superficie de 1 hectare ou plus ou de 5 hectares ou plus s’agissant de la réparation de ce matériel doivent être soumises à une évaluation des incidences sur l’environnement, à moins qu’une demande de dispense ne soit présentée. La Commission souligne, à cet effet, que des caractéristiques autres que la seule dimension du projet peuvent jouer un rôle déterminant dans la question de savoir si un projet est susceptible d’avoir des incidences notables sur l’environnement, à savoir le cumul d’un projet avec d’autres projets, la production de déchets ou la pollution et les nuisances sonores possibles ou encore le risque d’accidents. Enfin, le seuil appliqué ne prouverait pas que la localisation des projets et les caractéristiques de l’impact potentiel de ceux-ci sont également prises en compte.

35      La Commission relève également, à titre d’exemple, que, en ce qui concerne la catégorie de projets figurant au point 10, sous e), de l’annexe II de l’arrêté flamand, seule la construction de routes à 2 voies ou plus d’une longueur de 10 kilomètres doit faire l’objet d’une évaluation des incidences sur l’environnement. À cet égard, la Commission fait notamment valoir que la longueur d’une route n’est pas nécessairement en rapport avec l’intensité de son utilisation et n’est pas en soi un critère déterminant pour évaluer les incidences potentielles sur l’environnement.

36      La Commission ajoute que la possibilité dont disposent les États membres de fixer des seuils, en tenant compte de critères de sélection pertinents, n’est pas fictive et que la réglementation flamande en fait, d’ailleurs, un usage approprié pour certaines catégories de projets énoncées à l’annexe II de l’arrêté flamand.

37      Quant à l’existence de procédures autres que l’exigence d’une évaluation des incidences sur l’environnement, à savoir les procédures d’obtention d’un permis d’urbanisme et d’une autorisation écologique, qui garantissent, selon le Royaume de Belgique, l’évaluation des incidences sur l’environnement pour toutes les catégories de projets énumérées à l’annexe II de l’arrêté flamand, la Commission constate que cet État membre ne démontre pas, d’une part, que tous les projets cités dans cette annexe sont couverts par ces procédures ni, d’autre part, que ces dernières respectent les exigences des articles 3 et 5 à 10 de la directive 85/337, notamment celle prévue à l’article 5, paragraphe 3, quatrième tiret, de celle-ci. À cet égard, la Commission relève qu’il ne peut être déduit de la réglementation de la Région flamande relative à une procédure d’obtention d’un permis d’urbanisme ou d’une autorisation écologique que le demandeur serait tenu de fournir une esquisse des principales solutions de substitution à sa demande, conformément à cette dernière disposition.

38      Le Royaume de Belgique fait tout d’abord valoir, dans son mémoire en défense, que la Commission manque à son obligation de preuve, car elle n’a pas démontré que chacun des projets repris à l’annexe II de l’arrêté flamand repose sur une évaluation manifestement déraisonnable.

39      Ensuite, ledit État membre soutient que le critère de la dimension des projets envisagés n’est pas le seul critère à avoir été pris en compte pour la détermination des seuils prévus à l’annexe II dudit arrêté, mais que la nature et la localisation de ces projets ont également été prises en considération. Par ailleurs, la réglementation flamande fixerait des seuils à un niveau particulièrement bas, ce qui laisserait présumer qu’aucun projet inférieur au seuil déterminé et situé dans une zone vulnérable ou à proximité de celle-ci ne peut avoir des incidences notables sur l’environnement.

40      Ledit État membre estime, en outre, que l’article 4, paragraphe 2, sous b), de la directive 85/337 permet de tenir compte indirectement, lors de la fixation des seuils, de la nature et de la localisation des projets, sans qu’il soit nécessaire de mentionner expressément ces critères lors de chaque demande.

41      À cet égard, le Royaume de Belgique rappelle, d’une part, que les États membres ont le choix de fixer des seuils ou des critères et que ces seuils ont, en raison même de leur nature, un caractère quantitatif, alors que les critères ont, quant à eux, un caractère tant quantitatif que qualitatif. D’autre part, cet État membre précise que le paragraphe 3 dudit article 4 fait obligation à ces États de «tenir compte», lors de l’examen au cas par cas ou de la fixation des seuils ou des critères en application du paragraphe 2 du même article, des critères de sélection pertinents fixés à l’annexe III de ladite directive. Il conviendrait donc d’inférer de ces dispositions que, si les critères de sélection doivent être pris en considération lors de la fixation des seuils, ils ne déterminent pas ceux-ci de manière impérative.

42      Le Royaume de Belgique explique d’ailleurs que la possibilité offerte aux États membres d’appliquer des seuils se transformerait en une pure fiction si la détermination de ces derniers était liée à une description précise des activités, des matériaux et des produits utilisés ainsi que des émissions, etc.

43      Il soutient que les États membres disposent d’une marge d’appréciation dans le cadre de laquelle ils doivent évaluer les caractéristiques des projets réalisés sur leur territoire dans leur généralité et il estime que la réglementation flamande ne peut pas être considérée comme «manifestement injustifiable», car elle ne soustrait nullement tous les projets d’une catégorie à l’évaluation des incidences sur l’environnement et ne fixe pas non plus des seuils si élevés que la majorité des projets compris dans l’annexe II de la directive 85/337 serait exclue du champ d’application de cette évaluation.

44      Selon le Royaume de Belgique, la possibilité de scinder les projets, au sein de la même catégorie ou entre plusieurs catégories de projets, dans le but de contourner l’obligation de réaliser une évaluation des incidences sur l’environnement, doit être écartée, car l’obligation de réaliser cette évaluation repose, conformément à la directive 85/337, sur le concepteur du projet.

45      Enfin, ledit État membre invoque l’existence de procédures alternatives et soutient que les projets repris dans l’annexe II de l’arrêté flamand ne pourraient pas être réalisés de manière valide sans obtenir une autorisation écologique et/ou un permis d’urbanisme.

46      À cet égard, il précise que ces procédures répondent aux exigences prévues aux articles 5 à 10 de la directive 85/337. D’une part, les seuils fixés dans le cadre de l’autorisation écologique seraient très bas et viseraient uniquement à exempter les installations générant des effets insignifiants sur l’environnement. D’autre part, le permis d’urbanisme serait soumis à un examen au regard du bon aménagement du territoire dans le cadre duquel est également effectué un examen des effets sur l’environnement.

47      En conséquence, le Royaume de Belgique considère que la directive 85/337 est mise en œuvre dans la Région flamande avec la spécificité, la précision et la clarté requises par l’exigence de sécurité juridique.

 Appréciation de la Cour

48      Par son grief relatif à la réglementation de la Région flamande, la Commission invoque une absence de transposition correcte et complète de l’article 4, paragraphes 2 et 3, de la directive 85/337, lu en combinaison avec les annexes II et III de celle-ci, en tant que l’arrêté flamand prévoit, en ce qui concerne les catégories de projets visées à l’annexe II de ce dernier, que l’autorité compétente doit décider au cas par cas si une évaluation des incidences sur l’environnement doit être effectuée, mais uniquement pour les projets dépassant certains seuils. À cet égard, elle constate que, dans ladite réglementation, ces seuils ont été fixés compte tenu non pas de l’ensemble des critères mentionnés à l’annexe III de cette directive, mais eu égard au seul critère relatif à la dimension du projet.

49      Or, les États membres doivent donner à la directive 85/337 une exécution qui corresponde pleinement aux exigences qu’elle pose compte tenu de son objectif essentiel, qui est, ainsi que cela résulte de son article 2, paragraphe 1, que, avant l’octroi d’une autorisation, les projets susceptibles d’avoir des incidences notables sur l’environnement, notamment en raison de leur nature, de leurs dimensions ou de leur localisation, soient soumis à une évaluation en ce qui concerne leurs incidences (arrêts du 19 septembre 2000, Linster, C‑287/98, Rec. p. I‑6917, point 52, et du 23 novembre 2006, Commission/Italie, C‑486/04, Rec. p. I‑11025, point 36).

50      En effet, un projet de dimension même réduite peut avoir des incidences notables sur l’environnement et il ressort d’une jurisprudence constante que les dispositions de la législation de l’État membre qui prévoient l’évaluation de l’impact environnemental de certains types de projets doivent aussi respecter les exigences énoncées à l’article 3 de la directive 85/337 et prendre en compte l’effet du projet sur l’homme, la faune et la flore, le sol, l’eau, l’air ou le patrimoine culturel (voir arrêts du 13 juin 2002, Commission/Espagne, C‑474/99, Rec. p. I‑5293, point 32, et du 15 octobre 2009, Commission/Pays-Bas, C‑255/08, point 30).

51      Par ailleurs, l’article 4, paragraphe 2, premier alinéa, de la directive 85/337 prévoit que, pour les projets énumérés à l’annexe II de cette dernière, les États membres déterminent, sur la base soit d’un examen au cas par cas, soit des seuils ou des critères fixés par l’État membre concerné, si ces projets doivent être soumis à une évaluation de leurs incidences sur l’environnement conformément aux articles 5 à 10 de cette directive. Selon le second alinéa du même paragraphe 2, les États membres peuvent aussi décider d’appliquer les deux procédures prévues au premier alinéa de celui-ci.

52      Il résulte également d’une jurisprudence constante que, lorsque les États membres ont décidé de recourir à la fixation de seuils et/ou de critères, la marge d’appréciation qui leur est ainsi conférée trouve ses limites dans l’obligation, énoncée à l’article 2, paragraphe 1, de la directive 85/337, de soumettre, avant l’octroi d’une autorisation, à une étude d’incidences les projets susceptibles d’avoir des incidences notables sur l’environnement, notamment en raison de leur nature, de leurs dimensions ou de leur localisation (arrêts du 20 novembre 2008, Commission/Irlande, C‑66/06, point 61 et jurisprudence citée, ainsi que Commission/Pays-Bas, précité, point 32).

53      Il convient aussi de souligner que, en application de l’article 4, paragraphe 3, de la directive 85/337, les États membres ont l’obligation de tenir compte, pour la fixation desdits seuils ou critères, des critères de sélection pertinents énoncés à l’annexe III de celle-ci (arrêts précités Commission/Irlande, point 62, et Commission/Pays-Bas, point 33).

54      Parmi ces derniers critères, ladite annexe distingue, en premier lieu, les caractéristiques des projets, qui doivent être considérées notamment par rapport à la dimension du projet, au cumul avec d’autres projets, à l’utilisation des ressources naturelles, à la production de déchets, à la pollution et aux nuisances ainsi qu’au risque d’accidents, en deuxième lieu, la localisation des projets, de sorte que soit prise en considération la sensibilité environnementale des zones géographiques susceptibles d’être affectées par ceux-ci en prenant en compte, en particulier, l’occupation des sols existants et la capacité de charge de l’environnement naturel, ainsi que, en troisième lieu, les caractéristiques de l’impact potentiel, notamment au regard de la zone géographique et de l’importance de la population affectée.

55      Il s’ensuit qu’un État membre qui, sur le fondement de l’article 4, paragraphe 2, de la directive 85/337, fixerait des seuils et/ou des critères en ne tenant compte que des dimensions des projets, sans prendre en considération les critères rappelés au point précédent, outrepasserait la marge d’appréciation dont il dispose en vertu des articles 2, paragraphe 1, et 4, paragraphe 2, de cette directive (arrêts précités Commission/Irlande, point 64, et Commission/Pays-Bas, point 35).

56      Aussi, afin de déterminer si le grief de la Commission relatif à la réglementation de la Région flamande est fondé, convient-il d’examiner si les obligations résultant des articles 2, paragraphe 1, et 4, paragraphes 2 et 3, de la directive 85/337, telles qu’elles sont précisées aux points 52 à 54 du présent arrêt, sont respectées.

57      Il appartient, dès lors, à la Commission d’apporter la preuve que la réglementation de la Région flamande transposant l’article 4, paragraphes 2 et 3, de la directive 85/337 ne permet pas de garantir que, pour déterminer si un projet doit être soumis à une évaluation de ses incidences sur l’environnement, il est tenu compte des critères de sélection énoncés à l’annexe III de cette directive.

58      À cette fin, la Commission a établi, ainsi qu’il a été exposé au point 30 du présent arrêt, que des catégories de projets visées à l’annexe II de l’arrêté flamand, telles que celles relevant des points 3, sous a), 4, sous a), et 5, sous c), de celui-ci, pour lesquelles la dimension du projet est l’unique critère retenu, sont au nombre de celles qui sont énumérées à l’annexe II de la directive 85/337. Or, pour de telles catégories de projets, les États membres ont l’obligation de respecter l’article 4, paragraphes 2 et 3, de cette directive, lu en combinaison avec les annexes II et III de celle-ci.

59      À cet égard, contrairement à ce que soutient le Royaume de Belgique en ce qui concerne l’insuffisance des preuves apportées par la Commission, il convient de souligner que, dans la mesure où le présent grief vise la manière dont la directive 85/337 est transposée dans l’ordre juridique de la Région flamande et non le résultat concret de l’application de la réglementation de transposition, il n’est pas nécessaire, pour démontrer que la transposition de cette directive est insuffisante ou inadéquate, d’établir les effets réels de la réglementation de la Région flamande transposant cette directive. En effet, ce sont les dispositions elles-mêmes de cette réglementation qui comportent le caractère insuffisant ou défectueux de la transposition (voir, en ce sens, arrêts du 21 septembre 1999, Commission/Irlande, C‑392/96, Rec. p. I‑5901, points 59 et 60, ainsi que du 20 novembre 2008, Commission/Irlande, précité, point 59).

60      Il s’ensuit que, dans la mesure où la réglementation de la Région flamande fixe des seuils et des critères de sélection qui ne tiennent compte que de la dimension du projet en cause, le Royaume de Belgique ne satisfait pas aux exigences énoncées à l’article 4, paragraphes 2 et 3, de ladite directive, lu en combinaison avec les annexes II et III de celle-ci. Par suite, cet État membre a outrepassé les limites de la marge d’appréciation dont il dispose pour fixer lesdits seuils et critères.

61      Cette conclusion ne saurait être infirmée par l’argumentation du Royaume de Belgique selon laquelle la réglementation flamande fixerait des seuils à un niveau particulièrement bas qui laisserait présumer qu’aucun projet inférieur au seuil déterminé et situé dans une zone vulnérable ou à proximité de celle-ci ne peut avoir des incidences notables sur l’environnement. En effet, ainsi qu’il ressort du point 50 du présent arrêt, un projet de dimension même réduite peut avoir des incidences notables sur l’environnement, notamment en raison de sa nature ou de sa localisation, ce point ayant été suffisamment établi par la Commission, sans avoir été sérieusement contredit par ledit État membre, en ce qui concerne une série de catégories de projets visées à l’annexe II de l’arrêté flamand, telles que les catégories relevant des points 4, sous i), et 10, sous e), de celle-ci, ainsi que cela a été exposé aux points 34 et 35 du présent arrêt.

62      En outre, en ce qui concerne l’argumentation du Royaume de Belgique selon laquelle l’existence de procédures alternatives, telles que les procédures d’obtention d’un permis d’urbanisme et/ou d’une autorisation écologique, garantirait l’évaluation des incidences sur l’environnement pour tous les projets relevant des catégories visées à l’annexe II de l’arrêté flamand, il y a lieu de relever que la Cour a jugé que, dans le cas d’un projet nécessitant une évaluation conformément à la directive 85/337, l’article 2, paragraphes 1 et 2, de cette dernière doit être interprété en ce sens qu’il autorise un État membre à utiliser une procédure d’évaluation autre que celle mise en place par cette directive, lorsque cette procédure alternative est incorporée à une procédure nationale existante ou à établir au sens de l’article 2, paragraphe 2, de ladite directive. Toutefois, une telle procédure alternative doit respecter les exigences des articles 3 et 5 à 10 de cette même directive (arrêt du 16 septembre 1999, WWF e.a., C‑435/97, Rec. p. I‑5613, point 54).

63      Or, force est de constater que le Royaume de Belgique, auquel incombe la charge de la preuve à cet égard, n’a pas suffisamment démontré que les procédures alternatives qu’il invoque à l’appui de ladite argumentation sont conformes aux exigences des articles 3 et 5 à 10 de la directive 85/337. En particulier, il y a lieu d’observer qu’il n’a aucunement établi que ces procédures satisfont aux exigences de l’article 5, paragraphe 3, quatrième tiret, de cette directive ni, à tout le moins, contesté de manière circonstanciée l’objection soulevée à cet égard par la Commission selon laquelle il ne saurait être déduit de la réglementation de la Région flamande relative à la procédure d’obtention d’un permis d’urbanisme ou d’une autorisation écologique que le demandeur est tenu de joindre une esquisse des principales solutions de substitution à sa demande, conformément à cette dernière disposition de ladite directive.

64      Par ailleurs, ainsi que le reconnaît le Royaume de Belgique, nonobstant le fait que les seuils fixés dans le cadre de l’autorisation écologique sont très bas et visent uniquement à exempter les installations générant des effets insignifiants sur l’environnement, il ne saurait être exclu que certains projets relevant des catégories visées à l’annexe II de cette directive soient susceptibles d’être exemptés de toute autorisation préalable, ce qui fait obstacle en principe à ce que, en ce qui les concerne, la procédure de demande d’autorisation et d’évaluation de leurs incidences sur l’environnement instaurée par l’article 2, paragraphe 1, de la directive 85/337 soit toujours respectée.

65      En tout état de cause, le Royaume de Belgique n’a pas établi à suffisance de droit que les procédures alternatives qu’il invoque s’appliquent à tous les projets relevant des catégories de l’annexe II de ladite directive, de sorte que la conclusion énoncée au point 60 du présent arrêt ne saurait être remise en cause.

66      Dans ces conditions, il y a lieu de considérer comme fondé le grief de la Commission relatif à la réglementation de la Région flamande.

67      En conséquence, il convient de constater que, en raison du fait que n’ont pas été adoptées les mesures nécessaires à l’exécution correcte ou complète, en ce qui concerne la réglementation de la Région flamande, de l’article 4, paragraphes 2 et 3, de la directive 85/337, lu en combinaison avec les annexes II et III de celle-ci, le Royaume de Belgique a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de cette directive.

 Sur les griefs relatifs à la réglementation de la Région wallonne 

 Argumentation des parties

68      La Commission soutient que, en ce qui concerne la Région wallonne, l’article 4, paragraphe 1, de la directive 85/337, lu en combinaison avec l’annexe I, points 8, sous a), et 18, sous a), de cette directive, ainsi que l’article 7, paragraphe 1, sous b), de celle-ci n’ont pas été correctement et complètement transposés.

69      En premier lieu, s’agissant de l’absence de transposition correcte de l’article 4, paragraphe 1, de la directive 85/337, lu en combinaison avec l’annexe I, points 8, sous a), et 18, sous a), de cette directive, dans la réglementation de la Région wallonne, la Commission rappelle que les projets visés à l’annexe I de ladite directive doivent, sous réserve de l’article 2, paragraphe 3, de cette dernière, être soumis à une évaluation des incidences sur l’environnement et que les États membres ne disposent d’aucune marge d’appréciation, contrairement à ce qui est prévu pour les projets visés à l’annexe II de la même directive, pour lesquels les États membres sont habilités à déterminer, sur la base d’un examen au cas par cas, si le projet doit être soumis à une évaluation des incidences sur l’environnement.

70      D’une part, la Commission constate que la Région wallonne n’a pas correctement transposé le point 8, sous a), de l’annexe I de la directive 85/337 visant les voies navigables et les ports de navigation intérieure, dès lors que l’annexe I de l’arrêté wallon applique, sous la rubrique 61.20.01, un seuil exprimé en nombre de bateaux, en l’occurrence 25 bateaux, et non pas en tonnes, comme le fait ce point 8 en mentionnant les bateaux de plus de 1 350 tonnes.

71      D’autre part, la Commission relève que la Région wallonne n’a pas correctement transposé le point 18, sous a), de l’annexe I de la directive 85/337 en ce que l’annexe I de l’arrêté wallon mentionne, sous la rubrique 21.1 relative aux installations industrielles destinées à la fabrication de pâtes à papier, de papier et de carton, un seuil de 500 tonnes par an, au-dessous duquel une étude d’incidences n’est pas obligatoire, tandis que ledit point 18 ne prévoit aucun seuil.

72      À cet égard, la Commission souligne que toute production industrielle de pâte à papier, quel que soit le procédé de production, peut avoir des incidences notables sur l’environnement, notamment en raison des émissions atmosphériques, des rejets dans l’eau et de la consommation d’énergie.

73      À titre subsidiaire, la Commission fait observer que, même si une marge d’appréciation était laissée aux États membres pour définir le terme «industriel» au moyen d’un seuil de production, un seuil de 500 tonnes par an est trop élevé. Quand bien même le seuil de production serait un élément valable pour donner un contenu au terme «industriel», la Commission estime que d’autres éléments déterminent également le caractère industriel ou non industriel d’une installation, tels que, notamment, la nature commerciale ou non du projet.

74      En second lieu, la Commission considère que l’article 7, paragraphe 1, sous b), de la directive 85/337 n’a pas été correctement transposé dans la réglementation de la Région wallonne, dans la mesure où l’article R. 41-9 du code wallon, lequel s’est substitué à l’article R. 83, paragraphe 1, de ce code, ne prévoit pas de communiquer d’informations quant à la nature de la décision susceptible d’être prise, ce qui aurait pour conséquence que l’autorité nationale compétente ne saurait pas exactement quelles obligations elle est tenue de respecter dans une situation telle que celle décrite au paragraphe 1 de cet article 7.

75      Le Royaume de Belgique fait valoir, en ce qui concerne l’article 4, paragraphe 1, de la directive 85/337, lu en combinaison avec l’annexe I, point 8, sous a), de cette directive, que la Région wallonne ne conteste pas le caractère incomplet de sa réglementation et qu’une procédure de modification de l’arrêté wallon a été engagée afin de répondre au grief de la Commission.

76      En revanche, cet État membre estime que la Région wallonne a correctement transposé ledit article 4, paragraphe 1, lu en combinaison avec le point 18, sous a), de cette même annexe, en fixant un seuil exprimé en tonnes, en l’occurrence 500 tonnes par an, au-dessous duquel une évaluation des incidences sur l’environnement n’est pas obligatoire.

77      À cet égard, le Royaume de Belgique prétend que la restriction du champ d’application de l’article 4 de la directive 85/337 aux seules installations industrielles, comme l’indique le point 18 de l’annexe I de celle-ci, implique que, au-dessous d’un certain seuil, une installation n’est pas une installation industrielle, de sorte que l’évaluation des incidences d’une telle installation sur l’environnement n’est pas obligatoire.

78      Par ailleurs, ledit État membre soutient que la Commission ne démontre pas en quoi une production inférieure à 500 tonnes par an correspond à celle d’une installation industrielle. Cette institution n’indiquerait pas à partir de quel niveau de production ou de quel autre paramètre technique facile à vérifier les installations de production de pâte à papier doivent être considérées comme étant des installations industrielles et, donc, être soumises à une étude d’incidences obligatoire.

79      Le Royaume de Belgique ajoute que la réglementation de la Région wallonne a un champ d’application plus large que celui de la directive 85/337. En effet, l’article D. 68 du code wallon prévoit que les projets qui ne sont pas soumis automatiquement à une étude d’incidences font l’objet d’un examen cas par cas afin de déterminer si, en application des critères repris dans l’annexe III de cette directive, le projet concerné est susceptible d’avoir des incidences notables sur l’environnement.

80      Enfin, en ce qui concerne le grief relatif à l’article 7, paragraphe 1, sous b), de la directive 85/337, ledit État membre considère que la Région wallonne n’était pas tenue de transposer cette disposition, parce que celle-ci impose une obligation de coopération entre un État membre et un autre État membre et qu’une transposition de cette obligation ne créerait pas de droits pour les particuliers.

 Appréciation de la Cour

81      Par ses griefs relatifs à la réglementation de la Région wallonne, la Commission invoque une absence de transposition correcte et complète dans cette réglementation, premièrement, de l’article 4, paragraphe 1, de la directive 85/337, lu en combinaison avec l’annexe I, points 8, sous a), et 18, sous a), de cette directive et, deuxièmement, de l’article 7, paragraphe 1, sous b), de ladite directive.

82      En premier lieu, en ce qui concerne, d’une part, le grief tiré de l’absence de transposition correcte, dans la réglementation de la Région wallonne, de l’article 4, paragraphe 1, de la directive 85/337, lu en combinaison avec le point 8, sous a), de l’annexe I de cette directive, relatif aux voies navigables et aux ports de navigation intérieure, la Commission soutient que l’annexe I de l’arrêté wallon applique, sous la rubrique 61.20.01, un seuil exprimé en nombre de bateaux, en l’occurrence 25 bateaux, et non en tonnes, comme le fait ce point 8 en mentionnant les bateaux de plus de 1 350 tonnes.

83      À cet égard, force est de constater que, ainsi qu’il ressort clairement des écritures du Royaume de Belgique, ce dernier ne conteste pas que la réglementation de la Région wallonne n’est pas conforme à l’article 4, paragraphe 1, de la directive 85/337, lu en combinaison avec l’annexe I, point 8, sous a), de cette directive. Cet État membre indique, en outre, qu’une procédure de modification de l’arrêté wallon a été engagée afin de répondre au grief de la Commission. Or, le fait de préciser qu’une nouvelle réglementation est en cours d’adoption afin que cet arrêté assure une transposition correcte desdites dispositions de cette directive corrobore la thèse selon laquelle la réglementation de la Région wallonne en vigueur est incomplète à cet égard (voir, en ce sens, arrêt du 9 décembre 2010, Commission/Espagne, C‑340/09, point 42). En conséquence, il y a lieu de considérer que le grief relatif auxdites dispositions est fondé.

84      D’autre part, en ce qui concerne le grief tiré de l’absence de transposition correcte, dans la réglementation de la Région wallonne, du point 18, sous a), de l’annexe I de ladite directive, relatif aux installations industrielles destinées à la fabrication de pâte à papier à partir de bois ou d’autres matières fibreuses, la Commission soutient que l’annexe I de l’arrêté wallon mentionne, sous la rubrique 21.1 relative aux installations industrielles destinées à la fabrication de pâtes à papier, un seuil de 500 tonnes par an, au-dessous duquel une étude d’incidences n’est pas obligatoire, tandis que ce point 18, sous a), ne prévoit aucun seuil.

85      À cet égard, il convient, d’une part, de relever que l’article 2, paragraphe 1, de la directive 85/337 prévoit que les États membres prennent les dispositions nécessaires pour que, avant l’octroi de l’autorisation, les projets susceptibles d’avoir des incidences notables sur l’environnement soient soumis à une procédure de demande d’autorisation et à une évaluation en ce qui concerne leurs incidences, ces projets étant définis à l’article 4 de la même directive. D’autre part, cet article 4, paragraphe 1, énonce que, sous réserve de l’article 2, paragraphe 3, de celle-ci, les projets énumérés à l’annexe I de cette directive sont soumis à une évaluation des incidences sur l’environnement, conformément aux articles 5 à 10 de celle-ci.

86      Il s’ensuit que, en application des articles 2, paragraphe 1, et 4, paragraphe 1, de la directive 85/337, et hormis les cas exceptionnels visés à l’article 2, paragraphe 3, de celle-ci, les projets qui relèvent de l’annexe I de cette directive doivent, en tant que tels, être soumis, avant d’être autorisés, à une évaluation systématique de leurs incidences sur l’environnement (voir, en ce sens, arrêts du 23 novembre 2006, Commission/Irlande, C‑486/04, Rec. p. I‑11025, point 45, ainsi que du 5 juillet 2007, Commission/Italie, C‑255/05, Rec. p. I‑5767, point 52). Il en résulte que les États membres ne disposent d’aucune marge d’appréciation à cet égard.

87      En l’occurrence, dans la mesure où les projets relatifs aux installations industrielles destinées à la fabrication de pâte à papier à partir de bois ou d’autres matières fibreuses sont expressément mentionnés au point 18, sous a), de l’annexe I de la directive 85/337 et, partant, relèvent manifestement de cette annexe, ces projets doivent être soumis, en tant que tels, à une procédure d’évaluation systématique de leurs incidences sur l’environnement, sans que les États membres puissent les soustraire à cette procédure, notamment en prévoyant un seuil au‑dessous duquel une étude d’incidences ne serait pas obligatoire, et ce alors que ladite annexe ne fixe aucun seuil à cet égard. En effet, il découle de cette mention expresse à ladite disposition que la nature même de l’activité de telles installations justifie l’engagement d’une procédure d’évaluation, et ce quelle que soit leur taille.

88      Or, force est de constater que, en instituant, sous la rubrique 21.1 de l’annexe I de l’arrêté wallon, relative aux installations industrielles destinées à la fabrication de pâtes à papier, un seuil de 500 tonnes par an, au-dessous duquel une étude d’incidences n’est pas obligatoire, alors que l’annexe I de la directive 85/337 n’établit aucun seuil à cet égard, la réglementation de la Région wallonne n’a pas correctement transposé le point 18, sous a), de cette dernière annexe. En conséquence, il y a lieu de considérer que le grief relatif à l’article 4, paragraphe 1, de ladite directive, lu en combinaison avec le point 18, sous a), de l’annexe I de celle-ci, est fondé.

89      En second lieu, en ce qui concerne le grief relatif à l’absence de transposition correcte de l’article 7, paragraphe 1, sous b), de la directive 85/337, la Commission fait valoir que cette disposition n’a pas été correctement transposée dans la réglementation de la Région wallonne, dès lors que l’article R. 41-9 du code wallon, lequel s’est substitué à l’article R. 83, paragraphe 1, de ce code, ne prévoit pas de communiquer des informations quant à la nature de la décision susceptible d’être prise, ce qui aurait pour conséquence que l’autorité nationale compétente ne saurait pas exactement quelles obligations elle est tenue de respecter dans une situation telle que celle décrite au paragraphe 1 de cet article 7.

90      À cet égard, il convient, d’une part, de rappeler que l’article 7, paragraphe 1, sous b), de la directive 85/337 prévoit que, lorsqu’un État membre constate qu’un projet est susceptible d’avoir des incidences notables sur l’environnement d’un autre État membre ou lorsqu’un État membre susceptible d’être affecté notablement le demande, l’État membre sur le territoire duquel il est envisagé de réaliser le projet transmet à l’État membre affecté, le plus rapidement possible, et au plus tard au moment où il informe son propre public, notamment des informations quant à la nature de la décision susceptible d’être prise. Il y a lieu d’observer que cette disposition est libellée en des termes impératifs ne laissant aucune marge d’appréciation aux États membres.

91      Force est de relever, d’autre part, que l’article R. 41-9 du code wallon ne prévoit pas, contrairement à ce qu’exige l’article 7, paragraphe 1, sous b), de la directive 85/337, de communiquer des informations quant à la nature de la décision susceptible d’être prise.

92      Toutefois, à cet égard, le Royaume de Belgique soutient que la Région wallonne n’était pas tenue de transposer l’article 7, paragraphe 1, sous b), de la directive 85/337, au motif que cette disposition crée seulement une obligation de coopération entre les États membres et non des droits pour les particuliers. Or, il ressort des points 49 à 55 de l’arrêt du 2 mai 1996, Commission/Belgique (C‑133/94, Rec. p. I‑2323), que les articles 7 et 9 de cette directive doivent être transposés. De même, il découle des points 61 à 66 de l’arrêt du 16 juillet 2009, Commission/Irlande (C‑427/07, Rec. p. I‑6277), que l’article 7, paragraphe 1, de ladite directive doit faire l’objet d’une transposition complète. Il en résulte que l’argumentation du Royaume de Belgique ne saurait être admise.

93      Il s’ensuit que, dans la mesure où l’article R. 41-9 du code wallon ne prévoit pas d’obligation de communiquer des informations quant à la nature de la décision susceptible d’être prise, la réglementation de la Région wallonne ne saurait être considérée comme ayant correctement transposé l’article 7, paragraphe 1, sous b), de la directive 85/337. En conséquence, il y a lieu de conclure que le grief soulevé par la Commission à cet égard est fondé.

94      Dès lors, il convient de constater que, en raison du fait que n’ont pas été adoptées les mesures nécessaires à l’exécution correcte ou complète, en ce qui concerne la réglementation de la Région wallonne, de l’article 4, paragraphe 1, de la directive 85/337, lu en combinaison avec l’annexe I, points 8, sous a), et 18, sous a), de celle-ci, et de l’article 7, paragraphe 1, sous b), de la même directive, le Royaume de Belgique a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de cette directive. 

 Sur les griefs relatifs à la réglementation de la Région de Bruxelles-Capitale

 Argumentation des parties

95      La Commission soutient que, en ce qui concerne la Région de Bruxelles-Capitale, l’article 4, paragraphes 2 et 3, de la directive 85/337, lu en combinaison avec les annexes II et III de cette dernière, ainsi que cette annexe III en tant que telle n’ont pas été correctement transposés.

96      En premier lieu, en ce qui concerne le grief relatif à l’article 4, paragraphes 2 et 3, de la directive 85/337, lu en combinaison avec les annexes II et III de cette dernière, la Commission estime que, à l’instar de la réglementation de la Région flamande, celle de la Région de Bruxelles-Capitale ne tient pas compte, s’agissant de la transposition de l’article 4, paragraphe 3, de cette directive, des critères de sélection pertinents visés à ladite annexe III. Cette lacune se retrouverait dans la réglementation de la Région de Bruxelles-Capitale concernant tant le permis d’urbanisme ou le permis de lotir que le permis d’environnement.

97      La Commission considère que, pour les catégories 20 à 26 figurant à l’annexe B du code bruxellois, le critère de la «dimension du projet», prévu à l’annexe III de ladite directive, est presque le seul à être pris en compte pour fixer le seuil visant à déterminer si le projet doit être soumis à l’établissement d’un rapport d’incidences, conformément à l’article 142 de ce code.

98      La Commission souligne également que la réglementation de la Région de Bruxelles-Capitale relative au permis ou au certificat d’environnement fixe, elle aussi, des seuils ne portant que sur la dimension des projets. À titre d’exemple, la Commission déduit de la rubrique 68 figurant à l’annexe de l’arrêté bruxellois qu’un projet concernant plusieurs petits garages destinés à accueillir chacun moins de dix voitures ne devrait pas faire l’objet d’un rapport ou d’une étude d’incidences, alors que l’effet cumulé d’un tel projet pourrait avoir des incidences notables sur l’environnement, celles-ci étant d’autant plus grandes que de telles constructions se feraient dans un environnement fortement urbanisé.

99      En ce qui concerne l’article 11 de l’ordonnance du 5 juin 1997, la Commission fait valoir que cette disposition ne garantit pas qu’il soit toujours tenu compte des effets cumulés de plusieurs installations, dans la mesure où elle ne s’applique que s’il existe une interconnexion technique suffisante entre les différentes composantes de l’unité d’exploitation.

100    Par ailleurs, la Commission constate que le Royaume de Belgique n’a pas non plus démontré, en ce qui concerne la Région de Bruxelles-Capitale, que les méthodes d’évaluation alternatives invoquées remplacent l’évaluation des incidences sur l’environnement visée à l’article 2, paragraphe 1, de la directive 85/337.

101    En second lieu, en ce qui concerne le grief relatif au non-respect de l’annexe III de la directive 85/337 en tant que telle, la Commission relève que cette dernière n’a pas été transposée dans la réglementation de la Région de Bruxelles-Capitale et que le Royaume de Belgique n’est pas en mesure, s’agissant de cette Région, de prouver que les critères énoncés dans cette annexe ont été pris en compte dans cette réglementation, au moment d’arrêter la liste des installations des classes I.A, I.B, II et III, ainsi que lors de l’évaluation au cas par cas.

102    Le Royaume de Belgique soutient que la Région de Bruxelles-Capitale est en train d’adopter des mesures afin de compléter la transposition incorrecte de la directive 85/337, en intégrant clairement le principe selon lequel les critères dont il doit être tenu compte lors de la fixation de seuils comprennent la totalité des critères mentionnés à l’annexe III de cette directive.

 Appréciation de la Cour

103    Par ses griefs relatifs à la réglementation de la Région de Bruxelles-Capitale, la Commission invoque une absence de transposition correcte dans cette réglementation, premièrement, de l’article 4, paragraphes 2 et 3, de la directive 85/337, lu en combinaison avec les annexes II et III de cette dernière, ainsi que, deuxièmement, de cette annexe III en tant que telle.

104    À cet égard, ainsi que cela résulte des écritures de la Commission résumées aux points 95 à 101 du présent arrêt, il y a lieu de relever que la Commission a établi le bien-fondé de ces griefs à suffisance de droit, sans que ceux-ci aient été réfutés par le Royaume de Belgique.

105    En outre, force est de constater que, ainsi qu’il ressort clairement des écritures du Royaume de Belgique, ce dernier ne conteste pas que la réglementation de la Région de Bruxelles-Capitale n’est pas conforme à l’article 4, paragraphes 2 et 3, de la directive 85/337, lu en combinaison avec les annexes II et III de cette dernière, non plus qu’à cette annexe III en tant que telle. Cet État membre indique, par ailleurs, qu’une procédure de modification de cette réglementation a été engagée afin de répondre aux griefs de la Commission. Or, le fait de prétendre qu’une nouvelle réglementation est en cours d’adoption afin que la réglementation de la Région de Bruxelles-Capitale assure une transposition correcte de toutes ces dispositions corrobore la thèse selon laquelle cette réglementation est incomplète à cet égard (voir, en ce sens, arrêt du 9 décembre 2010, Commission/Espagne, précité, point 42).

106    Dans ces conditions, il convient de constater que, en raison du fait que n’ont pas été adoptées les mesures nécessaires à l’exécution correcte ou complète, en ce qui concerne la réglementation de la Région de Bruxelles-Capitale, de l’article 4, paragraphes 2 et 3, de la directive 85/337, lu en combinaison avec les annexes II et III de cette dernière, ainsi que de cette annexe III en tant que telle, le Royaume de Belgique a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de cette directive.

107    En conséquence, il convient de constater que, en raison du fait que n’ont pas été adoptées les mesures nécessaires à l’exécution correcte ou complète:

–        en ce qui concerne la réglementation de la Région flamande, de l’article 4, paragraphes 2 et 3, de la directive 85/337, lu en combinaison avec les annexes II et III de cette directive;

–        en ce qui concerne la réglementation de la Région wallonne, du paragraphe 1 du même article 4, lu en combinaison avec l’annexe I, points 8, sous a), et 18, sous a), de la directive 85/337, et de l’article 7, paragraphe 1, sous b), de celle-ci, et,

–        en ce qui concerne la réglementation de la Région de Bruxelles-Capitale, des paragraphes 2 et 3 dudit article 4, lu en combinaison avec les annexes II et III de la directive 85/337, et de cette annexe III en tant que telle,

le Royaume de Belgique a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de ladite directive.

 Sur les dépens

108    En vertu de l’article 69, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La Commission ayant conclu à la condamnation du Royaume de Belgique et celui-ci ayant succombé en ses moyens, il y a lieu de le condamner aux dépens.

Par ces motifs, la Cour (troisième chambre) déclare et arrête:

1)      En raison du fait que n’ont pas été adoptées les mesures nécessaires à l’exécution correcte ou complète:

–        en ce qui concerne la réglementation de la Région flamande, de l’article 4, paragraphes 2 et 3, de la directive 85/337/CEE du Conseil, du 27 juin 1985, concernant l’évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l’environnement, telle que modifiée par la directive 2003/35/CE du Parlement européen et du Conseil, du 26 mai 2003, lu en combinaison avec les annexes II et III de cette directive;

–        en ce qui concerne la réglementation de la Région wallonne, du paragraphe 1 du même article 4, lu en combinaison avec l’annexe I, points 8, sous a), et 18, sous a), de la directive 85/337, telle que modifiée par la directive 2003/35, et de l’article 7, paragraphe 1, sous b), de cette directive, et,

–        en ce qui concerne la réglementation de la Région de Bruxelles-Capitale, des paragraphes 2 et 3 dudit article 4, lu en combinaison avec les annexes II et III de la directive 85/337, telle que modifiée par la directive 2003/35, et de cette annexe III en tant que telle,

le Royaume de Belgique a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de ladite directive.

2)      Le Royaume de Belgique est condamné aux dépens.

Signatures


* Langue de procédure: le néerlandais.