CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. JÁN MAZÁK

présentées le 20 octobre 2009 ( 1 )

Affaire C-310/08

London Borough of Harrow

contre

Nimco Hassan Ibrahim et Secretary of State for the Home Department

«Libre circulation de personnes — Droit de séjour d’un ressortissant d’un État tiers, qui est le conjoint d’un ressortissant d’un État membre, et de leurs enfants, eux-mêmes ressortissants d’un État membre — Cessation de l’activité salariée du ressortissant d’un État membre suivie de son départ de l’État membre d’accueil — Inscription des enfants dans un établissement scolaire — Absence de moyens de subsistance — Règlement (CEE) no 1612/68 — Article 12 — Directive 2004/38/CE»

1. 

Dans la présente affaire, la Court of Appeal (England and Wales) (Civil Division) (Royaume-Uni) a renvoyé à la Cour trois questions préjudicielles au titre de l’article 234 CE relatives à l’interprétation de l’article 12 du règlement (CEE) no 1612/68 du Conseil, du 15 octobre 1968, relatif à la libre circulation des travailleurs à l’intérieur de la Communauté ( 2 ), et de la directive 2004/38/CE du Parlement européen et du Conseil, du , relative au droit des citoyens de l’Union et des membres de leurs familles de circuler et de séjourner librement sur le territoire des États membres, modifiant le règlement (CEE) no 1612/68 et abrogeant les directives 64/221/CEE, 68/360/CEE, 72/194/CEE, 73/148/CEE, 75/34/CEE, 75/35/CEE, 90/364/CEE, 90/365/CEE et 93/96/CEE ( 3 ).

2. 

Les questions ont été soulevées dans le cadre d’une procédure opposant Mme Nimco Hassan Ibrahim, une ressortissante d’un pays tiers mariée à un ressortissant danois qui travaillait antérieurement au Royaume-Uni et a des enfants d’âge scolaire qui sont des ressortissants danois, et la municipalité de Harrow, à Londres (London Borough of Harrow, ci-après la «municipalité»), concernant le droit de Mme Ibrahim de bénéficier d’une aide au logement au Royaume-Uni. Mme Ibrahim et ses enfants ne sont pas économiquement indépendants et dépendent de l’assistance sociale au Royaume-Uni. Le Secretary of State for the Home Department (ci-après le «Secretary of State») est un intervenant dans la procédure en cause. Selon la législation britannique, Mme Ibrahim n’a pas droit à une aide au logement si elle ne dispose pas d’un droit de séjour dans cet État membre conformément au droit communautaire. La Court of Appeal demande des précisions, notamment, sur la question de savoir si Mme Ibrahim et ses enfants bénéficient d’un droit de séjour au titre de la directive 2004/38 ou de l’article 12 du règlement no 1612/68 et, le cas échéant, s’ils doivent disposer de ressources suffisantes pour ne pas devenir une charge pour le système d’assistance sociale du Royaume-Uni durant leur période de séjour envisagée ainsi que d’une couverture d’assurance maladie complète dans cet État membre.

I — Cadre juridique

A — Législation communautaire

3.

L’article 10 du règlement no 1612/68, avant son abrogation par la directive 2004/38, disposait:

«1.   Ont le droit de s’installer avec le travailleur ressortissant d’un État membre employé sur le territoire d’un autre État membre, quelle que soit leur nationalité:

a)

son conjoint et leurs descendants de moins de vingt et un ans ou à charge;

b)

les ascendants de ce travailleur et de son conjoint qui sont à sa charge.

2.   Les États membres favorisent l’admission de tout membre de la famille qui ne bénéficie pas des dispositions du paragraphe 1 s’il se trouve à la charge ou vit, dans le pays de provenance, sous le toit du travailleur visé ci-dessus.

3.   Pour l’application des paragraphes 1 et 2, le travailleur doit disposer d’un logement pour sa famille, considéré comme normal pour les travailleurs nationaux dans la région où il est employé, sans que cette disposition puisse entraîner de discriminations entre les travailleurs nationaux et les travailleurs en provenance d’autres États membres.»

4.

L’article 12 du règlement no 1612/68 dispose:

«Les enfants d’un ressortissant d’un État membre qui est ou a été employé sur le territoire d’un autre État membre sont admis aux cours d’enseignement général, d’apprentissage et de formation professionnelle dans les mêmes conditions que les ressortissants de cet État, si ces enfants résident sur son territoire.

Les États membres encouragent les initiatives permettant à ces enfants de suivre les cours précités dans les meilleures conditions.»

5.

L’article 12, paragraphe 3, de la directive 2004/38, intitulé «Maintien du droit de séjour des membres de la famille en cas de décès ou départ du citoyen de l’Union», dispose:

«Le départ du citoyen de l’Union ou son décès n’entraîne pas la perte du droit de séjour de ses enfants ou du parent qui a effectivement la garde des enfants, quelle que soit leur nationalité, pour autant que ceux-ci résident dans l’État membre d’accueil et soient inscrits dans un établissement scolaire pour y suivre un enseignement, jusqu’à la fin de leurs études.»

6.

L’article 14, paragraphe 2, de la directive 2004/38 dispose:

«Les citoyens de l’Union et les membres de leur famille ont un droit de séjour tel que prévu aux articles 7, 12 et 13 tant qu’ils répondent aux conditions énoncées dans ces articles.»

B — Législation nationale

7.

Selon l’article 6, paragraphe 1, des Immigration (European Economic Area) Regulations 2006 (règlement de 2006 relatif à l’immigration en provenance de l’Espace économique européen, ci-après le «règlement de 2006»), l’expression «personne ayant qualité» pour séjourner au Royaume-Uni s’entend de tout ressortissant de l’EEE établi au Royaume-Uni en tant que demandeur d’emploi, travailleur salarié, travailleur indépendant, personne subvenant à ses besoins ou étudiant. Conformément à l’article 19, paragraphe 3, sous a), du règlement de 2006, une personne qui a été admise au Royaume-Uni ou a acquis le droit d’y séjourner en vertu dudit règlement peut être expulsée du Royaume-Uni si elle ne dispose pas d’un droit de séjour ou cesse d’en bénéficier au titre de celui-ci.

8.

Conformément à la loi sur le logement de 1996 (Housing Act 1996) et au règlement de 2006 relatif (au droit) à l’attribution de logements et aux sans-abri [Allocation of Housing and Homelessness (Eligibility) Regulations 2006], Mme Ibrahim n’a pas droit à une aide au logement si elle ne dispose pas d’un droit de séjour dans cet État membre conformément au droit communautaire.

II — Le litige au principal et les questions préjudicielles

9.

Mme Ibrahim est une ressortissante d’un pays tiers. Elle est mariée à un citoyen danois, dont elle est cependant séparée, ci-après désigné «M. Y». M. Y est arrivé au Royaume-Uni en 2002 et y a travaillé d’octobre 2002 à mai 2003. De juin 2003 à mars 2004, il a sollicité une allocation pour inaptitude au travail, dont il a cessé de bénéficier lorsqu’il a été déclaré apte au travail à l’issue de cette période. M. Y a quitté peu après le Royaume-Uni, où il est ensuite retourné en décembre 2006. Entre le moment où il a cessé de travailler et celui où il a quitté le Royaume-Uni, M. Y a cessé d’être une «personne ayant qualité [pour y séjourner]» au sens de l’article 6 du règlement de 2006. À son retour au Royaume-Uni en décembre 2006, M. Y n’a pas retrouvé son statut de «personne ayant qualité [pour séjourner au Royaume-Uni]» bénéficiant d’un droit de séjour conformément au droit du Royaume-Uni.

10.

Mme Ibrahim est arrivée au Royaume-Uni avec l’autorisation des services de l’immigration en février 2003 afin de rejoindre son époux. Ils ont quatre enfants, qui sont tous de nationalité danoise. En octobre 2007, ils avaient entre un et neuf ans. Les trois aînés sont arrivés au Royaume-Uni avec leur mère en février 2003. Le quatrième enfant est né au Royaume-Uni. Les deux aînés sont allés à l’école publique peu après leur arrivée au Royaume-Uni et sont toujours dans ce système scolaire.

11.

Après que son époux eut quitté le Royaume-Uni en 2004, Mme Ibrahim s’est séparée de lui. Elle n’était pas et n’est toujours pas économiquement autonome. Elle ne travaille pas et dépend entièrement de prestations sous conditions de ressources pour couvrir les dépenses liées à ses besoins courants et ses frais de logement. Elle ne dispose pas d’une assurance maladie complète et dépend du United Kingdom National Health Service (NHS — service de santé étatique).

12.

En janvier 2007, Mme Ibrahim a introduit une demande d’aide au logement auprès de la municipalité pour elle-même et ses enfants. Par décision du 1er février 2007, la municipalité a considéré que Mme Ibrahim n’avait pas droit à une aide au logement du fait que ni elle ni son mari n’étaient titulaires, au sens du droit communautaire, d’un droit de séjour au Royaume-Uni. Après avoir examiné sa situation juridique, l’agent chargé de l’examen des recours en matière de logement de la municipalité a confirmé, par lettre du , la décision de la municipalité du , pour les mêmes motifs. À la date de l’examen de ce recours administratif, M. Y n’exerçait aucun emploi et dépendait des aides publiques.

13.

Mme Ibrahim a formé un recours contre la décision de la municipalité devant la Clerkenwell and Shoreditch County Court, qui a fait droit à celui-ci le 18 octobre 2007. La County Court a déclaré, notamment, que les deux enfants aînés de Mme Ibrahim fréquentant l’école disposaient d’un droit de séjour en vertu de l’article 12 du règlement no 1612/68 afin d’achever leurs études et que Mme Ibrahim bénéficiait donc d’un droit de séjour dérivé en tant que personne qui a effectivement la garde des enfants. Cette juridiction a également considéré que leur droit de séjour au Royaume-Uni était indépendant de toute question d’autonomie économique.

14.

La municipalité a fait appel du jugement de la County Court devant la juridiction de renvoi. Elle considère que la directive 2004/38 est la seule source des conditions régissant les droits de séjour des citoyens de l’Union européenne et des membres de leur famille. Selon la juridiction de renvoi, la municipalité soutient qu’il est constant que Mme Ibrahim et ses enfants ne bénéficiaient pas de droits de séjour au Royaume-Uni en vertu, notamment, de l’article 12, paragraphe 3, de la directive 2004/38 du fait que M. Y avait cessé de travailler au Royaume-Uni avant de quitter cet État membre en 2004. La directive 2004/38 n’a pas laissé intacts l’article 12 du règlement no 1612/68 et l’arrêt Baumbast et R ( 4 ) qui se fonde sur cet article. Selon la municipalité, l’article 12 du règlement no 1612/68 était à l’origine d’un droit des enfants du travailleur d’accéder à l’enseignement dans l’État membre d’accueil, mais, à la suite de l’abrogation de l’article 10 du règlement no 1612/68, qui était à l’origine des droits de séjour en vertu du règlement, le droit d’accès à l’enseignement contenu dans son article 12 est désormais soumis aux conditions modifiées établies par la directive 2004/38. En tout état de cause, tout maintien d’un droit de séjour de la famille, après le départ du citoyen de l’Union européenne de l’État membre d’accueil, doit lui-même reposer sur son autonomie économique. Les principes d’autonomie économique et de proportionnalité sont des principes essentiels du droit communautaire, permettant l’équilibre des besoins du citoyen et de ceux de l’État. La condition d’autonomie économique n’est pas exigée d’un travailleur migrant et de sa famille, mais elle est une condition de toute autre catégorie de droit de séjour, ainsi que l’établit notamment l’article 7 de la directive 2004/38. Dans l’arrêt Baumbast et R, la famille Baumbast était économiquement autonome et, bien que la Cour ne se soit pas expressément appuyée sur cet élément dans le raisonnement exposé dans ses réponses aux deux premières questions, qui se distinguaient de la troisième question, il s’agissait néanmoins des circonstances de l’affaire et il serait par nature erroné d’en déduire un principe plus large qui permettrait de valider la prétention de Mme Ibrahim, étant donné son absence d’autonomie économique.

15.

Selon la juridiction de renvoi, Mme Ibrahim prétend être en droit de rester au Royaume-Uni en vertu de l’article 12 du règlement no 1612/68 lu en combinaison avec l’arrêt rendu par la Cour dans l’affaire Baumbast et R. Il a été convenu que l’article 12, paragraphe 3, de la directive 2004/38 ne protégeait pas Mme Ibrahim en raison du fait qu’une lacune y a été constatée s’agissant de la situation particulière de M. Y, lequel avait cessé d’être un travailleur bénéficiant d’un droit de séjour au Royaume-Uni avant son départ (et n’avait pas obtenu un nouveau droit de séjour à son retour). Mme Ibrahim considère cependant que, conformément aux arrêts de la Cour Echternach et Moritz ( 5 ) et Baumbast et R ( 6 ), un droit de séjour implicite est déduit de l’article 12 du règlement no 1612/68. Il n’est donc pas pertinent que les articles 10 et 11 du règlement no 1612/68 aient été abrogés par la directive 2004/38 étant donné que l’article 12 du règlement no 1612/68 n’a pas fait l’objet d’une abrogation spécifique. C’est notamment le cas si les droits des enfants de Mme Ibrahim à un enseignement au Royaume-Uni se sont déjà constitués, en dépit du fait que M. Y ait cessé de travailler au Royaume-Uni au printemps 2004, même avant la promulgation, le 29 avril 2004, de la directive 2004/38. Il n’existe pas d’exigence d’autonomie économique dans le cas d’un citoyen de l’Union qui travaille dans un État membre d’accueil. En outre, une telle exigence ne figure pas dans les réponses de la Cour aux deux premières questions de l’arrêt Baumbast et R. Ce point a été souligné par le fait que la Cour n’a pas jugé nécessaire de répondre aux autres parties de la troisième question (voir arrêt Baumbast et R, point 95).

16.

La juridiction de renvoi considère que la situation factuelle dans ce recours est très différente des quatre affaires ayant fait l’objet des arrêts Echternach et Moritz et Baumbast et R. Dans le premier arrêt, les enfants étudiants étaient eux-mêmes des adultes. Ils avaient essentiellement vécu dans les pays d’accueil. Dans le deuxième arrêt, la famille Baumbast continuait à séjourner à son domicile au Royaume-Uni et était considérée autonome économiquement. Dans le cas de R, le travailleur migrant travaillait toujours au Royaume-Uni et conservait donc intégralement son droit de séjour, l’unique question étant le fait qu’il avait divorcé. La juridiction de renvoi n’est pas sûre qu’il existe, conformément à l’arrêt Baumbast et R, un droit de séjour implicite au titre du seul article 12 du règlement no 1612/68 plutôt qu’à celui d’une combinaison des articles 10 et 12 dudit règlement. En raison de l’abrogation de l’article 10 du règlement no 1612/68 et de son remplacement par l’article 7 de la directive 2004/38, il n’est pas évident pour la juridiction de renvoi que l’intégralité de la justification de l’arrêt Baumbast et R subsiste et on peut soutenir que sa justification actuelle doive prendre sa source dans une lecture combinée de l’article 12 du règlement no 1612/68 et de la directive 2004/38. De plus, la juridiction de renvoi considère que la Cour a répondu aux deux premières questions de l’affaire Baumbast et R sans se référer au principe d’autonomie économique. Toutefois, les réponses ont été données dans un contexte où la famille Baumbast était économiquement autonome. L’article 12, paragraphe 3, de la directive 2004/38 ne semble pas expressément fondé sur la condition de l’autonomie économique, même si ce principe est expressément mentionné à l’article 12, paragraphe 2, qui traite du décès. Il existe cependant un principe général d’autonomie économique en dehors du cas du travailleur.

17.

Dans ces circonstances, la Court of Appeal a posé, par ordonnance du 21 avril 2008, les questions préjudicielles suivantes à la Cour:

«Dans des circonstances où i) l’épouse non ressortissante d’un pays communautaire et ses enfants ressortissants européens ont accompagné un ressortissant communautaire qui s’est installé au Royaume-Uni, ii) le ressortissant communautaire était au Royaume-Uni en qualité de travailleur, iii) le ressortissant communautaire a ensuite cessé son activité salariée puis a quitté le Royaume-Uni, iv) le ressortissant communautaire, son épouse non ressortissante de la Communauté européenne et les enfants ne sont pas économiquement indépendants et dépendent de l’assistance sociale au Royaume-Uni, v) les enfants ont entamé leurs études primaires au Royaume-Uni peu après leur arrivée, alors que le ressortissant européen était un travailleur:

1)

L’épouse et les enfants ne bénéficient-ils d’un droit de séjour au Royaume-Uni que s’ils satisfont aux conditions établies dans la directive 2004/38 […]?

ou

2)

i)

bénéficient-ils d’un droit de séjour tiré de l’article 12 [du règlement no 1612/68], tel qu’interprété par la Cour de justice, sans devoir satisfaire aux conditions définies par la directive 2004/38 […]; et

ii)

dans cette hypothèse, doivent-ils disposer de ressources suffisantes pour ne pas devenir une charge pour le système d’assistance sociale de l’État membre d’accueil durant leur période de séjour supposée ainsi que d’une couverture d’assurance maladie complète dans cet État membre?

3)

Si la réponse à la première question est affirmative, la solution change-t-elle lorsque, comme dans le cas d’espèce, les enfants ont commencé leurs études primaires et que le travailleur ressortissant communautaire a cessé de travailler avant la date à laquelle la directive 2004/38 […] devait être mise en œuvre dans les États membres?»

III — Procédure devant la Cour

18.

Des mémoires ont été produits par Mme Ibrahim, le Royaume-Uni, l’Irlande, la République italienne, la Commission et l’Autorité de surveillance AELE. Une audience a eu lieu le 2 septembre 2009, à laquelle la municipalité, Mme Ibrahim, le Royaume-Uni, le royaume du Danemark, l’Irlande, la Commission et l’Autorité de surveillance AELE ont présenté des observations.

IV — Appréciation juridique

19.

La procédure devant la juridiction de renvoi concerne le droit de Mme Ibrahim à obtenir une aide au logement en vertu des dispositions prévues par la législation nationale. Du fait que, conformément à la législation nationale, cette aide est conditionnée, notamment, par le droit de séjour de Mme Ibrahim au Royaume-Uni, les questions posées à la Cour se focalisent sur le point de savoir si elle et ses enfants disposent d’un droit de séjour dans cet État membre selon le droit communautaire et, dans l’affirmative, à quelles conditions ( 7 ).

20.

Selon moi, il convient de traiter simultanément les trois questions soulevées par la juridiction de renvoi. Celle-ci a déclaré qu’elle doutait que l’article 12 du règlement no 1612/68 et l’arrêt de la Cour dans l’affaire Baumbast et R ( 8 ), compte tenu de la directive 2004/38, confèrent aux enfants ( 9 ) d’un travailleur ayant cessé de travailler un droit de séjour dans l’État membre d’accueil afin d’y poursuivre des études commencées assez récemment, et ce en dépit de l’absence d’autonomie économique et de la brièveté du séjour du travailleur, en cette qualité, dans l’État membre d’accueil.

21.

Il ressort des documents communiqués à la Cour que M. Y a travaillé au Royaume-Uni d’octobre 2002 à mai 2003 et y a sollicité une allocation pour inaptitude au travail de juin 2003 à mars 2004. Il apparaîtrait donc que M. Y ait bénéficié du statut de travailleur conformément à l’article 39 CE. En dépit de la durée relativement courte de la période au cours de laquelle M. Y a travaillé au Royaume-Uni, son statut de travailleur communautaire au cours de la période considérée n’a pas été remis en cause par la juridiction de renvoi. En outre, étant donné qu’il semblerait que M. Y ait mené une activité réelle et effective au Royaume-Uni, quoique durant une période relativement limitée, rien n’indique dans le dossier soumis à la Cour, sous réserve de vérification par la juridiction de renvoi, que lui ou son conjoint aient tenté de se prévaloir abusivement ou frauduleusement des normes communautaires ( 10 ).

22.

Il ressort du dossier présenté à la Cour que, durant la période où M. Y était un travailleur, Mme Ibrahim et trois de leurs enfants se sont installés avec M. Y au Royaume-Uni. Deux des enfants ont commencé à suivre l’enseignement public après leur arrivée et le fréquentent toujours. Compte tenu des circonstances soulignées par la juridiction de renvoi, je considère que les enfants d’un citoyen de l’Union qui se sont installés dans un État membre d’accueil alors que leur parent avait le statut de travailleur communautaire bénéficient manifestement d’un droit de poursuivre leurs études au Royaume-Uni en vertu de l’article 12 du règlement no 1612/68 et que celui-ci serait en fait dénié s’ils perdaient leur droit de séjour dans cet État membre en raison du fait que leur père a cessé par la suite d’être un travailleur communautaire. Selon moi, la perte d’un tel droit n’est pas étayée par la législation communautaire ni par la jurisprudence de la Cour. Afin de veiller à l’effet utile ou au caractère effectif du droit d’accéder à un enseignement et d’en bénéficier dans l’État membre d’accueil, les enfants en cause ont un droit de séjour directement dérivé de l’article 12 du règlement no 1612/68.

23.

La Cour a dit pour droit dans l’arrêt Baumbast et R qu’afin que des conditions optimales d’intégration de la famille du travailleur communautaire dans le milieu de l’État membre d’accueil puissent exister, il est indispensable que l’enfant du travailleur communautaire ait la possibilité d’entreprendre sa scolarité et ses études dans l’État membre d’accueil, comme le prévoit explicitement l’article 12 du règlement no 1612/68, en vue de les terminer avec succès. La Cour a relevé que, eu égard aux circonstances particulières de l’affaire Baumbast, empêcher l’enfant d’un citoyen de l’Union, lequel n’était plus lors de la période concernée, d’après les faits établis de ladite affaire, un travailleur ( 11 ) au sens du droit communautaire, de continuer sa scolarité dans l’État membre d’accueil en lui refusant une autorisation de séjour pourrait être de nature à dissuader ledit citoyen d’exercer les droits de libre circulation prévus à l’article 39 CE et créerait donc une entrave à l’exercice effectif de la liberté ainsi garantie par le traité CE ( 12 ).

24.

Je considère qu’il ressort donc clairement de l’arrêt Baumbast et R que les enfants de M. Baumbast disposent d’un droit de séjour au Royaume-Uni dérivé uniquement de l’article 12 du règlement no 1612/68 lui-même afin d’y poursuivre des cours d’enseignement général, ce droit ayant été acquis du fait de leur installation au Royaume-Uni dans le cadre de l’exercice par M. Baumbast de ses droits de séjour en tant que travailleur migrant. Le droit de séjour des enfants de M. Baumbast afin de poursuivre leur scolarité a été maintenu indépendamment du fait que M. Baumbast n’était plus un travailleur communautaire.

25.

Il n’existe aucun élément du texte de l’arrêt Baumbast et R qui tendrait à indiquer que la Cour aurait fondé le maintien du droit de séjour des enfants de M. Baumbast sur une lecture combinée de l’article 10 (à présent abrogé par la directive 2004/38) et de l’article 12 du règlement no 1612/68.

26.

Même si la Cour s’est effectivement référée, aux points 58 à 62 de l’arrêt Baumbast et R, à ces deux dispositions du règlement no 1612/68, il apparaît que cette référence a été faite dans le contexte des circonstances spécifiques à l’affaire R. Les enfants de R étaient des membres de la famille d’un travailleur communautaire mais ils n’habitaient pas de manière permanente avec ce travailleur. La Cour a constaté que les membres de la famille d’un travailleur ressortissant d’un État membre employé sur le territoire d’un autre État membre jouissent d’un droit de séjour et d’un droit de poursuivre leur scolarité en vertu des articles 10 et 12 du règlement no 1612/68 ( 13 ). La Cour a toutefois indiqué ensuite que l’article 10 dudit règlement, en prévoyant que le membre de la famille du travailleur migrant a le droit de s’installer avec le travailleur, n’exige pas que le membre de la famille concerné habite en permanence avec lui ( 14 ).

27.

À cet égard, je soulignerais que le premier point du dispositif de l’arrêt rendu dans l’affaire Baumbast et R, portant sur le droit de séjour des enfants de M. Baumbast et de ceux de R, est uniquement fondé sur l’article 12 du règlement no 1612/68.

28.

Je relèverais également, ainsi que la Cour l’a dit pour droit dans l’arrêt Lubor Gaal ( 15 ), que l’article 12 du règlement no 1612/68 ne contient aucune référence aux articles 10 et 11 dudit règlement. Dans cette affaire, la juridiction nationale visait à établir si la notion d’«enfant» au sens de l’article 12 du règlement no 1612/68 se limite, comme c’est le cas dans les articles 10, paragraphe 1, et 11 du même règlement (dorénavant abrogé), aux enfants de moins de 21 ans ou à charge. La Cour a considéré que soumettre l’application de l’article 12 à une limite d’âge ou au statut d’enfant à charge irait à l’encontre de la lettre et de l’esprit de cette disposition ( 16 ).

29.

Par conséquent, pour pouvoir bénéficier des droits accordés en vertu de l’article 12 du règlement no 1612/68, les enfants d’un travailleur ou d’un ancien travailleur doivent s’installer dans l’État membre d’accueil pendant que leur parent exerce son droit de séjour en qualité de travailleur migrant dans cet État membre ( 17 ). Dans ce cas, et à condition que les autres conditions définies à l’article 12 du règlement no 1612/68 soient remplies, le fondement juridique sur lequel l’enfant concerné s’est installé dans l’État membre d’accueil ( 18 ) et la question de savoir si celui-ci continue de s’appliquer ne sont plus pertinents ( 19 ).

30.

Il convient, à mon sens, de rejeter l’affirmation selon laquelle la directive 2004/38 est, depuis son entrée en vigueur, la seule source des droits de séjour des citoyens de l’Union et des membres de leur famille sur le territoire des États membres.

31.

Lorsqu’il a adopté la directive 2004/38, le législateur communautaire n’a pas abrogé l’article 12 du règlement no 1612/68, bien que les articles 10 et 11 dudit règlement aient été expressément abrogés avec effet à compter du 30 avril 2006 ( 20 ). Il semblerait donc que le législateur communautaire ait eu manifestement l’intention de maintenir les droits d’accéder et de suivre un enseignement dont disposent les enfants des travailleurs ou des anciens travailleurs, établis par l’article 12 du règlement no 1612/68 tel qu’interprété par la jurisprudence de la Cour.

32.

En tout état de cause, il n’existe selon moi aucune incompatibilité ou conflit inhérents entre les droits de séjour accordés au titre de l’article 12 du règlement no 1612/68, tel qu’interprétés par la jurisprudence de la Cour, et ceux conférés en vertu de la directive 2004/38 qui pourraient à présent imposer à la Cour de réinterpréter l’article 12 du règlement no 1612/68 d’une manière plus restrictive. En adoptant, notamment, l’article 12, paragraphe 3, de la directive 2004/38 ( 21 ), le législateur communautaire n’a pas limité ni modifié le champ d’application de l’article 12 du règlement no 1612/68, qui traite de manière spécifique des enfants de travailleurs ou d’anciens travailleurs, mais a renforcé ( 22 ) le droit des enfants d’autres citoyens de l’Union de poursuivre leur scolarité dans l’État membre d’accueil ( 23 ) dans certaines circonstances.

33.

En ce qui concerne la durée de la scolarité au Royaume-Uni des enfants de Mme Ibrahim, je ne considère pas, compte tenu des circonstances du cas d’espèce, que celle-ci constitue un facteur pertinent pour apprécier leur droit de poursuivre leur scolarité et leur droit corrélatif de séjour dans ce pays. Aucune condition relative à des durées minimales d’inscription n’est imposée par l’article 12 du règlement no 1612/68. En outre, il serait à mon sens incompatible avec la jurisprudence constante de la Cour de supposer de telles conditions, puisque celle-ci, dans des arrêts tels que Lubor Gaal ( 24 ), Baumbast et R ( 25 ), Di Leo ( 26 ) et Echternach et Moritz ( 27 ), a interprété l’article 12 du règlement no 1612/68 d’une manière plutôt large qu’étroite. En outre, la Cour a réaffirmé dans l’arrêt Eind ( 28 ) sa jurisprudence constante selon laquelle la réglementation communautaire de droit dérivé en matière de déplacement et de séjour ne saurait être interprétée de façon restrictive. Selon moi, si les enfants d’un citoyen de l’Union qui est un ancien travailleur communautaire étaient effectivement empêchés de poursuivre leur scolarité dans l’État membre d’accueil sur le fondement du fait qu’ils n’y avaient pas fréquenté l’école pour une certaine durée minimale ( 29 ), cet élément serait susceptible de dissuader ce citoyen d’exercer les droits à la libre circulation définis à l’article 39 CE et créerait par conséquent un obstacle à l’exercice effectif de cette liberté. Pour emprunter les termes employés par la Cour au point 54 de l’arrêt Baumbast et R ( 30 ), je considère que l’imposition de telles conditions n’irait pas seulement à l’encontre de la lettre, mais également à l’encontre de l’esprit de l’article 12 du règlement no 1612/68 et, de fait, de l’article 39 CE.

34.

Du fait que les enfants de Mme Ibrahim ( 31 ) ont le droit de séjourner dans l’État membre d’accueil afin d’y suivre des cours d’enseignement général conformément à l’article 12 du règlement no 1612/68, compte tenu de l’arrêt Baumbast et R ( 32 ), il convient d’interpréter cette disposition comme habilitant le parent qui est la personne qui a effectivement la garde de ces enfants, quelle que soit sa nationalité, à séjourner avec eux afin de faciliter l’exercice de ce droit ( 33 ).

35.

Les parents, qui sont les personnes qui ont effectivement la garde des enfants bénéficiaires de droits en vertu de l’article 12 du règlement no 1612/68, sont en fait dans une situation assez précaire étant donné qu’ils ne tirent directement aucun droit de séjour de la disposition en cause. Ces personnes tirent néanmoins, en ce qu’elles ont effectivement la garde des enfants en cause, des droits de séjour manifestes mais indirects de l’article 12 du règlement no 1612/68, tel qu’interprété par la jurisprudence de la Cour, en vue d’assurer le plein effet des droits conférés à leurs enfants au titre du même article de ce règlement ( 34 ).

36.

La juridiction de renvoi a cependant soulevé la question de savoir si le droit de séjour de Mme Ibrahim et de ses enfants au Royaume-Uni est soumis à la condition qu’ils disposent de ressources suffisantes afin de ne pas devenir une charge pour le système d’assistance sociale de l’État membre d’accueil pendant la période de séjour envisagée et d’une assurance maladie complète dans l’État membre d’accueil.

37.

À mon sens, aucun élément étayant l’imposition d’une condition d’autonomie économique ou la possession d’une assurance maladie dans les circonstances de la procédure devant la juridiction de renvoi ne figure dans la législation communautaire ou la jurisprudence de la Cour.

38.

Le droit de séjourner sur le territoire des États membres est directement conféré à chaque citoyen de l’Union par l’article 18, paragraphe 1, CE.

39.

Ce droit peut cependant faire l’objet des limitations et des conditions prévues par le traité et par les dispositions prises pour son application ( 35 ). À cet égard, le législateur communautaire a expressément imposé à certains citoyens de l’Union et aux membres de leur famille, dans certaines circonstances, l’obligation qu’ils disposent d’une assurance maladie couvrant l’ensemble des risques dans l’État membre d’accueil et de ressources suffisantes afin de ne pas devenir une charge pour le système d’assistance sociale de l’État membre d’accueil au cours de leur période de séjour ( 36 ).

40.

Je relèverais cependant, à titre d’exemple, qu’aucune condition de la sorte n’est imposée aux citoyens de l’Union qui sont des travailleurs salariés ou des travailleurs indépendants dans l’État membre d’accueil ou aux membres de leur famille qui les accompagnent ou les rejoignent ( 37 ).

41.

Du fait que le législateur communautaire a explicitement choisi, dans des cas spécifiques, de limiter le droit de séjour de certains citoyens de l’Union et des membres de leur famille en imposant une condition d’autonomie économique et de possession d’une assurance maladie, je considère que l’absence de ces conditions ou obligations à l’égard d’autres citoyens de l’Union et des membres de leur famille illustre un choix clair de la part du législateur communautaire de ne pas les imposer ( 38 ). Je considère par conséquent que le droit de séjour des citoyens de l’Union et des membres de leur famille n’est pas soumis à des conditions ou à des limitations liées à l’autonomie économique et à la possession d’une assurance maladie complète, sauf si elles sont explicitement imposées par le législateur communautaire.

42.

De plus, même s’il est possible de considérer qu’une distinction a été largement opérée au titre du droit communautaire entre les citoyens de l’Union qui sont des travailleurs salariés ou des travailleurs indépendants et les membres de leur famille et ceux qui sont «économiquement non actifs» en ce qui concerne les droits de séjour et la question de l’autonomie économique et de la possession d’une assurance maladie ( 39 ), il est utile de souligner que la distinction en cause n’est ni absolue ( 40 ) ni permanente ( 41 ).

43.

L’article 12 du règlement no 1612/68, qui est demeuré inchangé en dépit de l’adoption de la directive 2004/38, n’impose manifestement pas à ses bénéficiaires de condition d’autonomie économique ou d’exigences relatives à l’assurance maladie.

44.

En réalité, la Cour a déclaré dans l’arrêt Echternach et Moritz que le statut d’enfant d’un travailleur communautaire, au sens du règlement no 1612/68, entraîne la reconnaissance de la nécessité de bénéficier des aides étatiques aux études en vue d’une intégration de ces enfants dans la vie sociale du pays d’accueil. Cette exigence s’impose d’autant plus dans des cas où les bénéficiaires des dispositions communautaires en question sont des étudiants qui sont arrivés dans le pays d’accueil avant même l’âge de la scolarité ( 42 ).

45.

Ainsi, loin d’imposer certaines conditions financières aux bénéficiaires des droits conférés au titre de l’article 12 du règlement no 1612/68, la Cour a dit pour droit dans l’arrêt Echternach et Moritz que les aides accordées pour couvrir les frais d’enseignement et d’entretien de l’étudiant sont à considérer comme des avantages sociaux auxquels les enfants des travailleurs (et des anciens travailleurs) communautaires ont droit dans les mêmes conditions que celles dans lesquelles ces mêmes avantages sont accordés aux ressortissants nationaux ( 43 ).

46.

En outre, aucune condition d’autonomie économique ou de possession d’une assurance maladie complète ne peut être déduite de l’arrêt Baumbast et R.

47.

La Cour n’a pas imposé de telles conditions si l’on considère ses conclusions au premier point du dispositif de l’arrêt, suivant lesquelles les enfants d’un ancien travailleur communautaire sont en droit de séjourner dans l’État membre d’accueil afin d’y poursuivre des cours d’enseignement général, conformément à l’article 12 du règlement no 1612/68 ou, au deuxième point du dispositif, suivant lesquelles le parent qui a effectivement la garde de ces enfants, quelle que soit sa nationalité, peut séjourner avec eux de manière à faciliter l’exercice dudit droit ( 44 ). En ce qui concerne la question du droit de séjour des enfants Baumbast et de la personne qui a effectivement leur garde, la Cour n’a attaché, à mon sens, aucune importance au fait que la famille Baumbast est apparue, par coïncidence, disposer de ressources et d’une assurance maladie.

48.

La question de l’autonomie économique et de l’assurance maladie n’apparaît dans cette affaire qu’à propos du droit de séjour de M. Baumbast ( 45 ) et se focalise sur le point de savoir si un citoyen de l’Union européenne qui ne bénéficie plus d’un droit de séjour en tant que travailleur migrant dans l’État membre d’accueil peut, en qualité de citoyen de l’Union européenne, y bénéficier d’un droit de séjour par application directe de l’article 18, paragraphe 1, CE ( 46 ).

V — Conclusion

49.

Compte tenu des observations qui précèdent, je propose que la Cour réponde comme suit aux questions posées à titre préjudiciel par la Court of Appeal (England and Wales) (Civil Division) (Royaume-Uni):

Les enfants d’un citoyen de l’Union européenne qui se sont installés dans un État membre alors que leur parent exerce ses droits de séjour en tant que travailleur migrant dans cet État membre ont le droit d’y séjourner afin d’y suivre des cours d’enseignement général, conformément à l’article 12 du règlement (CEE) no 1612/68 du Conseil, du 15 octobre 1968, relatif à la libre circulation des travailleurs à l’intérieur de la Communauté.

Il convient d’interpréter l’article 12 du règlement no 1612/68, dans les circonstances de la présente affaire, comme habilitant le parent qui est la personne qui a effectivement la garde des enfants concernés, quelle que soit leur nationalité, de séjourner avec eux afin de faciliter l’exercice de ce droit. Le fait que le parent qui est un citoyen de l’Union ait cessé d’être un travailleur migrant dans l’État membre d’accueil et ait par la suite quitté cet État membre, celui que les enfants et la personne qui a effectivement leur garde ne soient pas économiquement autonomes et dépendent de l’assistance sociale dans l’État membre d’accueil ou la durée de la période pendant laquelle les enfants ont été inscrits aux cours d’enseignement général dans l’État membre d’accueil ne constituent pas des éléments pertinents à cet égard.


( 1 ) Langue originale: l’anglais.

( 2 ) JO L 257, p. 2.

( 3 ) JO L 158, p. 77.

( 4 ) Arrêt de la Cour du 17 septembre 2002, C-413/99, Rec. p. I-7091.

( 5 ) Arrêt de la Cour du 15 mars 1989, Echternach e.a./Minister van Onderwijs en Wetenschappen (389/87 et 390/87, Rec. p. 723).

( 6 ) Précité à la note 4.

( 7 ) Le 21 avril 2008, date de l’ordonnance de renvoi, il semblerait que la juridiction de renvoi ait considéré que Mme Ibrahim ne disposait pas d’un droit de séjour au Royaume-Uni mis à part, éventuellement, sur le fondement du droit communautaire. Au cours de l’audience du , l’avocat de la municipalité et du Royaume-Uni a indiqué que la situation juridique de Mme Ibrahim était susceptible d’avoir changé entre-temps, étant donné que son mari a recommencé à travailler au Royaume-Uni. Du fait que la juridiction de renvoi n’a pas modifié ni retiré son ordonnance de renvoi, il est selon moi nécessaire d’examiner cette affaire conformément aux faits tels qu’ils sont présentés dans cette ordonnance.

( 8 ) Précité à la note 4.

( 9 ) Et à la personne qui a effectivement leur garde.

( 10 ) Arrêts de la Cour du 9 mars 1999, Centros, C-212/97, Rec. p. I-1459, points 24 et 25, et du , Nadin et Nadin-Lux, C-151/04 et C-152/04, Rec. p. I-11203, points 45 à 48.

( 11 ) En outre, la Cour a souligné au point 54 de l’arrêt Baumbast et R, précité à la note 4, que l’article 12 du règlement no 1612/68 prévoit un droit d’accès aux cours d’enseignement pour «les enfants d’un ressortissant d’un État membre ‘qui est ou a été employé’ sur le territoire d’un autre État membre» (c’est nous qui soulignons). Voir également arrêt Echternach et Moritz, précité à la note 5, point 21. Le père de M. Moritz n’était plus un travailleur dans l’État membre d’accueil du fait qu’il était revenu dans l’État membre d’origine. Voir également arrêt du 27 septembre 1988, Commission/Belgique, 42/87, Rec. p. 5445, où la Cour a déclaré que le droit à l’égalité de traitement est maintenu en faveur des enfants d’un travailleur migrant décédé. Voir article 12, paragraphe 3, de la directive 2004/38.

( 12 ) Arrêt précité à la note 4, points 50 à 52.

( 13 ) Arrêt Baumbast et R (précité à la note 4, point 58).

( 14 ) Point 62.

( 15 ) Arrêt du 4 mai 1995, Landesamt für Ausbildungsförderung Nordrhein-Westfalen/Gaal, C-7/94, Rec. p. I-1031, point 23.

( 16 ) Voir point 25.

( 17 ) Voir arrêts de la Cour du 21 juin 1988, Brown/Secretary of State for Scotland, 197/86, Rec. p. 3205, point 30, et Lubor Gaal, précité à la note 15, point 27.

( 18 ) Comme par exemple à l’article 10 (à présent abrogé) du règlement no 1612/68.

( 19 ) Dans les conclusions qu’elle a présentées dans l’affaire Laurin Effing (arrêt de la Cour du 20 janvier 2005, C-302/02, Rec. p. I-553), l’avocat général Kokott a considéré que, «[é]tant donné que l’article 12 du règlement no 1612/68 avantage également les enfants de l’ancien travailleur migrant, il importe peu que le travailleur migrant, au moment de la mise en œuvre de cette disposition par l’enfant, se trouve encore dans l’État d’accueil ou soit encore travailleur. De même, les conditions de l’article 10 ne doivent pas continuer à être remplies. Cette disposition définit le groupe de personnes qui peut vivre auprès du travailleur dans l’État d’accueil en tant que membres de sa famille. Elle exige notamment que les personnes concernées soient à la charge du travailleur. Les droits découlant de l’article 12 du règlement no 1612/68 dépendent toutefois uniquement de la circonstance qu’une telle situation a existé une fois dans le passé. Ils ne dépendent pas de la situation présente. Par conséquent, il suffit que l’enfant ait vécu avec ses parents ou avec un de ses parents dans un État membre à l’époque où au moins un de ses parents y résidait en qualité de travailleur» (c’est nous qui soulignons). Voir point 58, les citations internes ont été exclues.

( 20 ) Article 38 de la directive 2004/38.

( 21 ) Qui prévoit expressément le maintien, en cas de décès ou de départ du citoyen de l’Union, du droit de séjour des enfants ou du parent qui a effectivement la garde des enfants, quelle que soit leur nationalité, pour autant que ceux-ci résident dans l’État membre d’accueil et soient inscrits dans un établissement scolaire pour y suivre un enseignement, jusqu’à la fin de leurs études. Il est utile de relever qu’il semble ressortir de l’ordonnance de renvoi que l’article 12, paragraphe 3, de la directive 2004/38 ne s’applique pas aux circonstances spécifiques de l’affaire Ibrahim.

( 22 ) Au moyen du maintien de leur droit de séjour dans l’État membre d’accueil.

( 23 ) Cette interprétation est corroborée selon moi par le libellé du troisième considérant du préambule de la directive 2004/38. Quoique ce considérant vise la nécessité de codifier et de revoir les instruments communautaires existants qui visent séparément les travailleurs salariés, les non-salariés, les étudiants et autres personnes sans emploi, il ressort clairement de celui-ci que la finalité de cette directive était manifestement de simplifier et de renforcer, plutôt que de réduire, les droits de libre circulation et de séjour des citoyens de l’Union. Dans le même esprit, la Cour a récemment souligné dans l’affaire Metock e.a. (arrêt de la Cour du 25 juillet 2008, C-127/08, Rec. p. I-6241) que les citoyens de l’Union ne sauraient tirer moins de droits de la directive 2004/38 que des actes de droit dérivé qu’elle modifie ou abroge (voir point 59).

( 24 ) Précité à la note 15.

( 25 ) Précité à la note 4.

( 26 ) Arrêt du 13 novembre 1990, C-308/89, Rec. p. I-4185.

( 27 ) Précité à la note 5.

( 28 ) Arrêt du 11 décembre 2007, C-291/05, Rec. p. I-10719, point 43.

( 29 ) Qui reste encore à établir.

( 30 ) Précité à la note 4.

( 31 ) Qui se sont installés au Royaume-Uni alors que leur père exerçait ses droits de séjour en qualité de travailleur migrant dans cet État membre.

( 32 ) Voir point 75 (arrêt précité à la note 4).

( 33 ) Le parent qui est la personne qui a effectivement la garde de l’enfant doit donc être en mesure de séjourner avec lui dans l’État membre d’accueil, ce qui constitue un corollaire nécessaire des droits que l’enfant tire de l’article 12 du règlement no 1612/68. Voir, par analogie, arrêt de la Cour du 19 octobre 2004, Zhu et Chen, C-200/02, Rec. p. I-9925, point 45.

( 34 ) L’octroi d’un tel droit de séjour à la personne qui a effectivement la garde des enfants est justifié par la nécessité de garantir le respect du droit fondamental à la vie familiale. Voir article 8 de la convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.

( 35 ) Voir à cet égard arrêt Eind, précité à la note 28, point 28.

( 36 ) Voir, notamment, articles 7, paragraphe 1, sous b), c) et d), et 7, paragraphe 2, de la directive 2004/38. Voir directives, à présent abrogées, 90/364/CEE du Conseil, du 28 juin 1990, relative au droit de séjour (JO L 180, p. 26), 90/365/CEE du Conseil, du , relative au droit de séjour des travailleurs salariés et non salariés ayant cessé leur activité professionnelle (JO L 180, p. 28), et directive, à présent annulée, 90/366/CEE du Conseil, du , relative au droit de séjour des étudiants (JO L 180, p. 30). Voir également arrêt Zhu et Chen, précité à la note 33, où la Cour a considéré que l’article 18 CE et la directive 90/364 confèrent au ressortissant mineur d’un État membre qui est couvert par une assurance-maladie appropriée et qui est à la charge d’un parent, lui-même ressortissant d’un État tiers, dont les ressources suffisent pour que le premier ne devienne pas une charge pour les finances publiques de l’État membre d’accueil, un droit de séjour à durée indéterminée sur le territoire de ce dernier État. Dans ces circonstances, ces mêmes dispositions permettent au parent qui a effectivement la garde de ce ressortissant mineur de séjourner avec celui-ci dans l’État membre d’accueil.

( 37 ) Voir, à titre d’exemple, article 7, paragraphe 1, sous a) et d), et article 7, paragraphe 2, de la directive 2004/38. Voir en particulier article 14, paragraphe 4, de la directive 2004/38. Préalablement à l’adoption de la directive 2004/38, voir, par exemple, article 4 de la directive 68/360/CEE du Conseil, du 15 octobre 1968, relative à la suppression des restrictions au déplacement et au séjour des travailleurs des États membres et de leur famille à l’intérieur de la Communauté (JO L 257, p. 13), qui prévoyait que les États membres reconnaissent le droit de séjour sur leur territoire aux travailleurs et aux membres de leur famille. Ladite directive a été abrogée par la directive 2004/38.

( 38 ) Comparer, par exemple, l’article 12, paragraphe 2, avec l’article 12, paragraphe 3, de la directive 2004/38.

( 39 ) Voir arrêt Eind, précité à la note 28, points 28 à 30.

( 40 ) Voir, par exemple, article 14, paragraphe 3, de la directive 2004/38.

( 41 ) Voir article 16 de la directive 2004/38, qui dispose, notamment, que les citoyens de l’Union ayant acquis le droit de séjour permanent ne sont pas soumis aux conditions prévues au chapitre III de ladite directive.

( 42 ) Voir point 35 (arrêt précité à la note 5).

( 43 ) Idem, point 36. Dans son arrêt Di Leo/Land Berlin (précité à la note 26), la Cour a dit pour droit que l’article 12 du règlement no 1612/68 n’est pas limité aux formations qui se déroulent à l’intérieur de l’État membre d’accueil. Par conséquent, les enfants visés par cette disposition doivent être assimilés aux nationaux en matière d’aide à la formation, non seulement lorsque la formation a lieu dans l’État d’accueil, mais également lorsque celle-ci est dispensée dans un État dont ils sont ressortissants. Voir également arrêts de la Cour du 3 juillet 1974, Casagrande/Landeshauptstadt München, 9/74, Rec. p. 773, et du , Alaimo/Préfet du Rhône, 68/74, Rec. p. 109.

( 44 ) Aucune référence à ces facteurs ne figure aux points 47 à 63 ou 68 à 75 de l’arrêt. Ces points contiennent l’argumentation de la Cour sur les première et deuxième questions.

( 45 ) Et non du droit de séjour au Royaume-Uni de ses enfants et de son conjoint.

( 46 ) La Cour a énoncé en ce qui concerne M. Baumbast que l’exercice du droit de séjour des citoyens de l’Union peut être subordonné aux intérêts légitimes des États membres. Il ressort par conséquent de l’article 18, paragraphe 1, CE et, en particulier, de l’article 1er de la directive 90/364 que les bénéficiaires du droit de séjour ne doivent pas devenir une charge «déraisonnable» pour les finances publiques de l’État membre d’accueil. Voir points 86 à 90 (arrêt précité à la note 4).