Affaire C-104/06

Commission des Communautés européennes

contre

Royaume de Suède

«Manquement d'État — Législation fiscale — Report d'imposition des plus-values résultant de la cession de la résidence d'habitation — Articles 18 CE, 39 CE et 43 CE — Articles 28 et 31 de l'accord instituant l'Espace économique européen»

Arrêt de la Cour (huitième chambre) du 18 janvier 2007 

Sommaire de l'arrêt

Libre circulation des personnes — Travailleurs — Liberté d'établissement — Citoyenneté de l'Union européenne — Législation fiscale

(Art. 18 CE, 39 CE et 43 CE; accord EEE, art. 28 et 31)

Manque aux obligations qui lui incombent en vertu des articles 18 CE, 39 CE et 43 CE ainsi que 28 et 31 de l'accord sur l'Espace économique européen (EEE) un État membre adoptant et maintenant en vigueur des dispositions fiscales qui subordonnent le bénéfice du report d'imposition de la plus-value issue de la cession d'un immeuble résidentiel privé ou d'un droit d'habitation portant sur un immeuble coopératif privé à la condition que la résidence nouvellement acquise se trouve également sur le territoire national.

En effet, le contribuable qui décide de procéder à la vente d'un immeuble à usage d'habitation qu'il possède dans cet État membre en vue de transférer son domicile sur le territoire d'un autre État membre et d'y acquérir un nouvel immeuble affecté à son logement, dans le cadre de l'exercice du droit, pour tout citoyen de l'Union, de circuler et de séjourner librement sur le territoire des États membres, qui trouve une expression spécifique dans les articles 43 CE en ce qui concerne la liberté d'établissement et 39 CE en ce qui concerne la libre circulation des travailleurs, mais également des droits conférés par les articles 28, relatif à la libre circulation des travailleurs, et 31, relatif à la liberté d'établissement, de l'accord EEE, est soumis à un traitement fiscal désavantageux par rapport à celui dont bénéficie une personne qui maintient sa résidence dans l'État membre concerné.

La nécessité de préserver la cohérence d'un régime fiscal ne peut pas justifier cette différence de traitement dans la mesure où, pour qu'un argument fondé sur une telle justification puisse prospérer, il faut que soit établie l'existence d'un lien direct entre l'avantage fiscal concerné et la compensation de cet avantage par un prélèvement fiscal déterminé.

Les dispositions du traité et de l'accord EEE relatives à la libre circulation des personnes s'opposant à une telle réglementation, il n'est pas nécessaire d'examiner séparément ladite réglementation à la lumière des articles 56, paragraphe 1, CE et 40 de l'accord EEE concernant la libre circulation des capitaux.

(cf. points 15, 22, 26, 35, 37 et disp.)




ARRÊT DE LA COUR (huitième chambre)

18 janvier 2007 (*)

«Manquement d’État – Législation fiscale – Report d’imposition des plus-values résultant de la cession de la résidence d’habitation – Articles 18 CE, 39 CE et 43 CE – Articles 28 et 31 de l’accord instituant l’Espace économique européen»

Dans l’affaire C-104/06,

ayant pour objet un recours en manquement au titre de l’article 226 CE, introduit le 22 février 2006,

Commission des Communautés européennes, représentée par Mme L. Ström van Lier et M. R. Lyal, en qualité d’agents, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie requérante,

contre

Royaume de Suède, représenté par M. A. Kruse, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

LA COUR (huitième chambre),

composée de M. E. Juhász, président de chambre, MM. G. Arestis (rapporteur) et J. Malenovský, juges,

avocat général: M. Y. Bot,

greffier: M. R. Grass,

vu la procédure écrite,

vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,

rend le présent

Arrêt

1       Par sa requête, la Commission des Communautés européennes demande à la Cour de constater que, en ayant adopté et en maintenant en vigueur une législation fiscale en vertu de laquelle le report d’impôt, pour les plus-values réalisées lors de la cession d’une résidence habitée par son propriétaire lorsque celui-ci acquiert une nouvelle résidence, n’est accordé que si la résidence cédée et la résidence nouvellement acquise se trouvent toutes les deux sur le territoire suédois, le Royaume de Suède a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu des articles 18 CE, 39 CE, 43 CE et 56, paragraphe 1, CE ainsi que 28, 31 et 40 de l’accord sur l’Espace économique européen, du 2 mai 1992 (JO 1994, L 1, p. 3, ci-après l’«accord EEE»).

 Le cadre juridique

 L’accord EEE

2       L’article 28 de l’accord EEE dispose:

«1.      La libre circulation des travailleurs est assurée entre les États membres de la CE [Communauté européenne] et les États de l’AELE [Association européenne de libre-échange].

2.      Elle implique l’abolition de toute discrimination, fondée sur la nationalité, entre les travailleurs des États membres de la CE et des États de l’AELE, en ce qui concerne l’emploi, la rémunération et les autres conditions de travail.

3.      Elle comporte le droit, sous réserve des limitations justifiées par des raisons d’ordre public, de sécurité publique ou de santé publique:

a)      de répondre à des emplois effectivement offerts;

b)      de se déplacer à cet effet librement sur le territoire des États membres de la CE et des États de l’AELE;

c)      de séjourner dans un des États membres de la CE ou des États de l’AELE, afin d’y exercer un emploi conformément aux dispositions législatives, réglementaires et administratives régissant l’emploi des travailleurs nationaux;

d)      de demeurer sur le territoire d’un État membre de la CE ou d’un État de l’AELE après y avoir occupé un emploi.

4.       Les dispositions du présent article ne sont pas applicables aux emplois dans l’administration publique.

5.       Les dispositions particulières applicables à la libre circulation des travailleurs figurent à l’annexe V.»

3       L’article 31 de l’accord EEE est libellé comme suit:

«1.      Dans le cadre du présent accord, les restrictions à la liberté d’établissement des ressortissants d’un État membre de la CE ou d’un État de l’AELE sur le territoire d’un autre de ces États sont interdites. La présente disposition s’étend également à la création d’agences, de succursales ou de filiales par les ressortissants d’un État membre de la CE ou d’un État de l’AELE, établis sur le territoire de l’un de ces États.

La liberté d’établissement comporte l’accès aux activités non salariées et leur exercice ainsi que la constitution et la gestion d’entreprises, notamment de sociétés au sens de l’article 34 deuxième alinéa, dans les conditions définies par la législation du pays d’établissement pour ses propres ressortissants, sous réserve des dispositions du chapitre 4.

2.      Les dispositions particulières applicables au droit d’établissement figurent aux annexes VIII à XI.»

 La réglementation nationale

4       Le chapitre 47 de la loi relative à l’impôt sur le revenu (1999:1229) [inkomstskattelagen (1999:1229), ci-après l’«IL»], intitulé «Report d’imposition», contient des dispositions relatives au report d’imposition lors de la cession d’un immeuble résidentiel privé ou d’un droit d’habitation portant sur un immeuble coopératif privé ainsi qu’au traitement de ce report en cas de cession ultérieure.

5       L’article 2 du chapitre 47 de l’IL, qui concerne les conditions du report d’imposition, dispose:

«Un contribuable peut bénéficier d’un report d’imposition s’il:

1)      déclare une plus-value lors de la cession d’une résidence d’origine,

2)      a acquis ou compte acquérir une résidence de remplacement, et

3)      habite ou compte habiter dans la résidence de remplacement».

6       En vertu de l’article 3, premier alinéa, du chapitre 47 de l’IL, la résidence d’origine s’entend de la résidence privée située en Suède constituant, lors de sa cession, la résidence permanente du contribuable.

7       L’article 5 du chapitre 47 de l’IL, tel que modifié par la loi 2003:1206 (lagen om ändring i inkomstskattelagen 1999:1229), figure dans la partie de ce même chapitre, intitulée «Résidence de remplacement», et prévoit ce qui suit:

«La résidence de remplacement s’entend de l’actif situé en Suède et qui, lors de son acquisition, est constitué:

1)      d’une maison avec terrain formant une unité résidentielle,

2)      d’une maison sur le fonds d’autrui,

3)      d’une maison aménagée pour une ou deux familles avec son terrain dans une unité agricole,

4)      d’un fonds sur lequel se construit une maison telle que visée au point 1 ou 3, ou

5)      d’un logement dans une société de logements privés.»

 La procédure précontentieuse

8       Considérant que les dispositions du chapitre 47 de l’IL et, notamment, celles des articles 2 à 5 de ce chapitre, qui subordonnent le report d’imposition des plus-values issues de la cession d’un immeuble résidentiel privé ou d’un droit d’habitation portant sur un immeuble coopératif privé à la condition que l’acquisition de la nouvelle résidence, dite «résidence de remplacement», se situe sur le territoire suédois, violent les obligations qui incombent au Royaume de Suède en vertu des articles 18 CE, 39 CE, 43 CE et 56, paragraphe 1, CE ainsi que 28, 31 et 40 de l’accord EEE, la Commission a, par lettre du 1er avril 2004, mis cet État membre en demeure de fournir ses observations à cet égard.

9       Les autorités suédoises ont, en substance, reconnu que le régime du report d’imposition, tel qu’il résulte notamment de l’application des dispositions combinées des articles 2 à 5 du chapitre 47 de l’IL, constitue un obstacle à la libre circulation des personnes et des capitaux. Toutefois, elles ont considéré que les dispositions en cause sont motivées par des raisons impérieuses d’intérêt général et, plus précisément, par la nécessité d’assurer la cohérence du système fiscal national.

10     N’étant pas convaincue par l’argumentation invoquée par les autorités suédoises, la Commission a émis, le 5 juillet 2005, un avis motivé dans lequel, d’une part, elle a réitéré son grief tiré de ce que les dispositions litigieuses du chapitre 47 de l’IL portent atteinte à la libre circulation des personnes ainsi qu’à celle des capitaux et, d’autre part, elle a invité le Royaume de Suède à prendre les mesures nécessaires pour se conformer à cet avis dans un délai de deux mois à compter de sa notification.

11     Les autorités suédoises ayant, dans leur réponse audit avis motivé, maintenu en substance leur position selon laquelle les dispositions en cause du chapitre 47 de l’IL étaient motivées par la nécessité d’assurer la cohérence du système fiscal national, la Commission a décidé d’introduire le présent recours.

 Sur le recours

12     À titre liminaire, il y a lieu de rappeler que, en vertu d’une jurisprudence constante de la Cour, si la fiscalité directe relève de la compétence des États membres, ces derniers doivent toutefois l’exercer dans le respect du droit communautaire (voir arrêts du 4 mars 2004, Commission/France, C‑334/02, Rec. p. I‑2229, point 21, ainsi que du 13 décembre 2005, Marks & Spencer, C‑446/03, Rec. p. I‑10837, point 29).

13     Il convient d’examiner si, comme le fait valoir la Commission, les dispositions du chapitre 47 de l’IL et, notamment, les dispositions combinées des articles 2 à 5 de ce chapitre, constituent des restrictions aux libertés de circulation des personnes et des capitaux consacrées aux articles 18 CE, 39 CE, 43 CE et 56, paragraphe 1, CE ainsi que 28, 31 et 40 de l’accord EEE.

 Sur la libre circulation des personnes

14     Dans le cadre de ce grief, la Commission fait valoir, en premier lieu, que le Royaume de Suède a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu des articles 18 CE, 39 CE et 43 CE.

15     L’article 18 CE, qui énonce de manière générale le droit, pour tout citoyen de l’Union, de circuler et de séjourner librement sur le territoire des États membres, trouve une expression spécifique dans les articles 43 CE en ce qui concerne la liberté d’établissement et 39 CE en ce qui concerne la libre circulation des travailleurs (arrêt du 26 octobre 2006, Commission/Portugal, C‑345/05, non encore publié au Recueil, point 13).

16     Il convient, par conséquent, d’examiner, d’une part, si les articles 39 CE et 43 CE s’opposent à une réglementation nationale, telle que celle constituée par les dispositions litigieuses du chapitre 47 de l’IL.

17     L’ensemble des dispositions du traité CE relatives à la libre circulation des personnes visent à faciliter, pour les ressortissants communautaires, l’exercice d’activités professionnelles de toute nature sur l’ensemble du territoire de la Communauté et s’opposent aux mesures qui pourraient défavoriser ces ressortissants lorsqu’ils souhaitent exercer une activité économique sur le territoire d’un autre État membre (voir arrêt du 15 septembre 2005, Commission/Danemark, C‑464/02, Rec. p. I‑7929, point 34 et jurisprudence citée).

18     Des dispositions qui empêchent ou dissuadent un ressortissant d’un État membre de quitter son État d’origine pour exercer son droit à la libre circulation constituent, dès lors, des entraves à cette liberté, même si elles s’appliquent indépendamment de la nationalité des travailleurs concernés (arrêts du 13 novembre 2003, Schilling et Fleck-Schilling, C‑209/01, Rec. p. I‑13389, point 25, ainsi que Commission/Danemark, précité, point 35).

19     Il ressort de la jurisprudence de la Cour que, même si, selon leur libellé, les dispositions relatives à la libre circulation des travailleurs visent notamment à assurer le bénéfice du traitement national dans l’État membre d’accueil, elles s’opposent également à ce que l’État d’origine entrave la libre acceptation et l’exercice d’un emploi par l’un de ses ressortissants dans un autre État membre (arrêt 12 décembre 2002, De Groot, C‑385/00, Rec. p. I‑11819, point 79).

20     Il en va de même des dispositions relatives à la liberté d’établissement. En effet, selon ladite jurisprudence, même si, selon leur libellé, ces dispositions visent à assurer le bénéfice du traitement national dans l’État membre d’accueil, elles s’opposent également à ce que l’État d’origine entrave l’établissement dans un autre État membre de l’un de ses ressortissants ou d’une société constituée en conformité avec sa législation (arrêts du 11 mars 2004, De Lasteyrie du Saillant, C‑9/02, Rec. p. I‑2409, point 42, et du 23 février 2006, Keller Holding, C‑471/04, Rec. p. I‑2107, point 30).

21     En l’espèce, même si les dispositions litigieuses du chapitre 47 de l’IL n’interdisent pas à un contribuable soumis à l’impôt sur le revenu en Suède d’exercer un emploi dans un autre État membre ou, de manière générale, d’exercer son droit d’établissement, ces dispositions sont néanmoins de nature à restreindre l’exercice de ces droits en ayant, à tout le moins, un effet dissuasif à l’égard des contribuables qui souhaitent vendre leurs biens immeubles pour s’installer dans un État membre autre que le Royaume de Suède.

22     En effet, il est manifeste que le contribuable qui décide de procéder à la vente d’un immeuble à usage d’habitation qu’il possède en Suède en vue de transférer son domicile sur le territoire d’un autre État membre et d’y acquérir un nouvel immeuble affecté à son logement, dans le cadre de l’exercice des droits conférés par les articles 39 CE et 43 CE, est soumis à un traitement fiscal désavantageux par rapport à celui dont bénéficie une personne qui maintient sa résidence en Suède.

23     Cette différence de traitement concernant le report d’imposition de la plus-value réalisée, qui est susceptible d’avoir des répercussions sur le patrimoine du contribuable désireux de transférer son domicile hors de Suède, est par conséquent de nature à le dissuader de procéder à un tel transfert.

24     Il s’ensuit que, en réservant le bénéfice du report d’imposition de la plus-value issue de la cession d’une résidence privée ou d’un appartement coopératif privé à la condition que la nouvelle résidence se trouve sur le territoire suédois, les dispositions combinées du chapitre 47 de l’IL, et en particulier les articles 2 à 5 dudit chapitre, sont susceptibles d’entraver la libre circulation des travailleurs ainsi que la liberté d’établissement, telles que garanties par les articles 39 CE et 43 CE.

25     Il résulte toutefois d’une jurisprudence bien établie que les mesures nationales susceptibles de gêner ou de rendre moins attrayant l’exercice des libertés fondamentales garanties par le traité peuvent néanmoins être admises à condition qu’elles poursuivent un objectif d’intérêt général, qu’elles soient propres à garantir la réalisation de celui-ci et qu’elles n’aillent pas au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre l’objectif poursuivi (arrêts De Lasteyrie du Saillant, précité, point 49, et du 7 septembre 2006, N, C-470/04, non encore publié au recueil, point 40).

26     En outre, si la Cour a admis que la nécessité de préserver la cohérence d’un régime fiscal peut justifier une restriction à l’exercice des libertés fondamentales garanties par le traité, il faut, toutefois, pour qu’un argument fondé sur une telle justification puisse prospérer, que soit établie l’existence d’un lien direct entre l’avantage fiscal concerné et la compensation de cet avantage par un prélèvement fiscal déterminé (voir, en ce sens, arrêt Keller Holding, précité, point 40 et jurisprudence citée).

27     Néanmoins, en l’espèce, non seulement le Royaume de Suède n’avance devant la Cour aucun argument concret visant à établir que les dispositions litigieuses de l’IL sont justifiées par la nécessité d’assurer la cohérence du régime fiscal en matière de report d’imposition des plus-values, mais, en outre dans son mémoire en défense, il reconnaît l’existence du manquement reproché. À cet égard, il fait valoir que, afin de se conformer aux obligations résultant du droit communautaire, il a mis à l’étude une réforme des règles complexes relatives au report d’imposition.

28     Il convient de relever que, selon la jurisprudence, l’existence d’un manquement doit être appréciée en fonction de la situation de l’État membre telle qu’elle se présentait au terme du délai fixé dans l’avis motivé et que les changements intervenus par la suite ne sauraient être pris en compte par la Cour (voir, notamment, arrêt du 16 octobre 2003, Commission/Irlande, C-388/02, Rec. p. I-12173, point 6).

29     Dans ces conditions, il y a lieu de constater que les dispositions litigieuses du chapitre 47 de l’IL sont contraires aux articles 39 CE et 43 CE.

30     S’agissant, d’autre part, de personnes non-économiquement actives, cette même conclusion s’impose par identité de motifs en ce qui concerne le grief relatif à l’article 18 CE.

31     La Commission fait valoir, en second lieu, que le Royaume de Suède a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu des articles 28 et 31 de l’accord EEE, relatifs respectivement à la liberté de circulation des travailleurs et à la liberté d’établissement.

32     Il convient de relever, en l’espèce, que les règles interdisant les restrictions à la liberté de circulation et à la liberté d’établissement énoncées aux articles 28 et 31 de l’accord EEE sont en substance identiques à celles établies par les articles 39 CE et 43 CE.

33     Dès lors, il y a lieu de constater que, à la lumière de la conclusion qui figure au point 29 du présent arrêt, les dispositions litigieuses du chapitre 47 de l’IL sont également contraires aux articles 28 et 31 de cet accord.

34     Dans ces conditions, le recours de la Commission doit être considéré comme fondé pour ce qui concerne le grief relatif à la violation des règles relatives à la liberté de circulation des personnes énoncées dans l’accord EEE.

35     Par conséquent, il convient de constater que, en ayant adopté et en maintenant en vigueur des dispositions fiscales, telles que celles du chapitre 47 de l’IL, qui subordonnent le bénéfice du report d’imposition de la plus-value issue de la cession d’un immeuble résidentiel privé ou d’un droit d’habitation portant sur un immeuble coopératif privé à la condition que la résidence nouvellement acquise se trouve également sur le territoire suédois, le Royaume de Suède a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu des articles 18 CE, 39 CE et 43 CE ainsi que 28 et 31 de l’accord EEE.

 Sur la libre circulation des capitaux

36     La Commission demande en outre à la Cour de constater que le Royaume de Suède a manqué à ses obligations découlant des articles 56, paragraphe 1, CE et 40 de l’accord EEE.

37     Les dispositions du traité et de l’accord EEE relatives à la libre circulation des personnes s’opposant à la réglementation litigieuse, il n’est pas nécessaire d’examiner séparément ladite réglementation à la lumière des articles 56, paragraphe 1, CE et 40 de l’accord EEE concernant la libre circulation des capitaux (arrêt Commission/Portugal, précité, point 45).

 Sur les dépens

38     En vertu de l’article 69, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La Commission ayant conclu à la condamnation du Royaume de Suède et ce dernier ayant succombé en ses moyens, il y a lieu de le condamner aux dépens.

Par ces motifs, la Cour (huitième chambre) déclare et arrête:

1)      En ayant adopté et en maintenant en vigueur des dispositions fiscales, telles que celles du chapitre 47 de la loi relative à l’impôt sur le revenu (1999:1229) [inkomstskattelagen (1999:1229)], qui subordonnent le bénéfice du report d’imposition de la plus-value issue de la cession d’un immeuble résidentiel privé ou d’un droit d’habitation portant sur un immeuble coopératif privé à la condition que la résidence nouvellement acquise se trouve également sur le territoire suédois, le Royaume de Suède a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu des articles 18 CE, 39 CE et 43 CE ainsi que 28 et 31 de l’accord sur l’Espace économique européen.

2)      Le Royaume de Suède est condamné aux dépens.

Signatures


* Langue de procédure: le suédois.