COMMISSION EUROPÉENNE
Bruxelles, le 9.12.2021
COM(2021) 778 final
COMMUNICATION DE LA COMMISSION AU PARLEMENT EUROPÉEN, AU CONSEIL, AU COMITÉ ÉCONOMIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN ET AU COMITÉ DES RÉGIONS
Construire une économie au service des personnes: plan d’action pour l’économie sociale
{SWD(2021) 373 final}
1.Introduction
Chaque jour, quelque 2,8 millions d’entités de l’économie sociale en Europe offrent des solutions concrètes et innovantes en réponse aux grands défis actuels. Elles créent et préservent des emplois de qualité, contribuent à l’inclusion de groupes défavorisés dans la société et sur le marché du travail ainsi qu’à l’égalité des chances pour tous, stimulent un développement économique et industriel durable, promeuvent la participation active des citoyens à nos sociétés, jouent un rôle important dans les systèmes de protection sociale européens et redynamisent les zones rurales et dépeuplées d’Europe
.
Au cours de la pandémie de COVID-19, de nombreuses entités de l’économie sociale se sont retrouvées en première ligne face à la crise. Elles ont produit des masques, soutenu l’éducation numérique en ligne, assisté des personnes dans le besoin et apporté une aide de proximité dans les communautés locales.
Certaines parties de l’économie sociale contribuent aux transitions écologique et numérique en fournissant des biens et des services durables et en réduisant la fracture numérique. Leurs modèles participatifs de gouvernance, qui tiennent compte des besoins des citoyens, des travailleurs et d’autres parties prenantes, contribuent à garantir l’équité des transitions.
Par ailleurs, l’économie sociale contribue à la diversité des formes d’entreprise en Europe, favorisant ainsi un choix plus large pour les consommateurs et une meilleure qualité des produits et des services. Elle apporte une contribution importante au PIB dans les pays où elle est la plus développée, par exemple 10 % en France. C’est pour cette raison qu’elle a été incluse au cœur de l’écosystème «Économie sociale et de proximité», l’un des 14 écosystèmes industriels recensés dans la mise à jour de la stratégie industrielle de l’UE.
L’économie sociale peut faciliter la mise en œuvre des principes du socle européen des droits sociaux et contribuer à l’obtention de résultats tangibles dans le cadre de son plan d’action de 2021 et des grands objectifs pour 2030, notamment en augmentant le taux d’emploi et réduisant le nombre de personnes menacées de pauvreté et d’exclusion sociale. L’économie sociale emploie quelque 13,6 millions de personnes; le taux d’emploi salarié s’inscrit dans une fourchette de 0,6 % à 9,9 % selon les États membres. Ces écarts montrent que le niveau de développement de l’économie sociale est inégal au sein de l’UE mais aussi qu’il existe dans un certain nombre de régions et d’États membres un important potentiel économique et de création d’emplois dans l’économie sociale, qu’il serait possible d’exploiter si des mesures adéquates étaient mises en place.
L’économie sociale complète les mesures prises par les États membres pour fournir des services sociaux de qualité et d’un bon rapport coût/efficacité. Elle soutient aussi les efforts visant à intégrer les jeunes et les groupes défavorisés [notamment les personnes handicapées, les personnes âgées, les chômeurs de longue durée, les personnes issues de l’immigration, d’une minorité raciale ou ethnique minoritaire (en particulier les Roms), les parents isolés] dans le marché du travail et dans la société dans son ensemble. Par exemple, l’économie sociale aide les personnes handicapées à accéder à l’emploi sur le marché du travail ouvert et propose des services essentiels au soutien de leur autonomie. Elle contribue par ailleurs à améliorer l’égalité entre les femmes et les hommes. D’une part, de nombreuses femmes ont accès au marché du travail grâce aux emplois créés par l’économie sociale et, d’autre part, les services sociaux et de soins fournis par l’économie sociale permettent aux femmes d’accéder au marché du travail au sens large.
De même, l’économie sociale facilite la mise en œuvre des objectifs de développement durable (ODD) à l’échelle de l’Union et au niveau mondial. En effet, elle contribue activement, dans le monde entier, à la réduction de la pauvreté, à la transition vers des villes et des communautés durables, à la consommation et à la production responsables ainsi qu’à la finance durable. À ce titre, les organisations collaboratives et sans but lucratif constituent un pilier essentiel de la résilience sociale et économique de l’Europe.
L’économie sociale a le potentiel de remodeler l’économie de l’après-COVID grâce à des modèles économiques inclusifs et durables conduisant à une transformation écologique, économique et sociale plus équitable.
La facilité pour la reprise et la résilience offre aux États membres d’importantes possibilités pour mettre en œuvre des réformes et des investissements par un entreprenariat social et inclusif. En outre, certains États membres ont fait de l’économie sociale et de l’entrepreneuriat inclusif une priorité dans leur plan national de relance et de résilience. La Commission suivra et soutiendra les États membres dans la mise en œuvre de leur plan respectif.
L’économie sociale a un rôle essentiel à jouer dans la transition vers des espaces et des modes de vie plus beaux, plus durables et plus inclusifs, tels que promus par le nouveau Bauhaus européen, en offrant de nouvelles approches et solutions transdisciplinaires adaptées aux besoins et aux aspirations des communautés locales.
Et pourtant, une partie de ce potentiel est encore sous-exploitée. L’économie sociale est encore trop mal connue. De nombreux consommateurs veulent acheter de manière plus responsable, pour ce qui est de l’origine des biens et des services qu’ils souhaitent acquérir, mais ils ne savent pas toujours comment s’y prendre. Les entités de l’économie sociale ont parfois des difficultés à accéder à des «capitaux patients» visant des investissements à long terme. Les autorités publiques ne font pas pleinement usage des possibilités facilitant l’accès des entreprises sociales aux marchés publics ou au financement, ni de la souplesse offerte par les actuelles règles de l’UE en matière d’aides d’État. Parce qu’elles ne sont pas suffisamment comprises et reconnues, les entités de l’économie sociale peinent à se développer et à intensifier leurs activités, ce qui les empêche de produire des effets économiques et sociaux encore plus importants. Elles ont besoin d’un soutien accru et de meilleure qualité pour croître et prospérer.
Afin d’optimiser le potentiel de l’économie sociale dans le marché unique, il faudrait s’employer davantage à reproduire les exemples de réussite dans tous les États membres et, dans la mesure du possible, à aider les entreprises sociales à passer de l’échelon local à l’échelle européenne, notamment grâce aux outils numériques.
Le plan d’action vise à dynamiser l’innovation sociale, à soutenir le développement de l’économie sociale et à renforcer son pouvoir de transformation sociale et économique. Il propose une série d’actions pour la période 2021-2030. S’appuyant sur l’initiative pour l’entrepreneuriat social (IES) et sur l’initiative en faveur des start-up et des scale-up, il a été élaboré dans le cadre d’un processus ouvert et inclusif, sur une période de deux ans.
2.Définir l’économie sociale
L’économie sociale englobe toute une série d’entités ayant des modèles d’entreprise et d’organisation différents. Ces entités opèrent dans un large éventail de secteurs économiques: l’agriculture, la sylviculture et la pêche, la construction, la réutilisation et la réparation, la gestion des déchets, le commerce de gros et de détail, l’énergie et le climat, l’information et la communication, les activités financières et d’assurance, immobilières, spécialisées, scientifiques et techniques, l’éducation, la santé humaine et l’action sociale, les arts, la culture et les médias.
Dans le contexte du présent plan d’action et des initiatives connexes de l’UE, l’économie sociale recouvre les entités ayant en commun les principes et caractéristiques essentiels suivants: la primauté des personnes ainsi que des objectifs sociaux et/ou environnementaux sur le profit; le réinvestissement de la plupart des profits et excédents dans des activités dans l’intérêt des membres ou utilisateurs («intérêt collectif») ou de la société au sens large («intérêt général») ainsi que la gouvernance démocratique et/ou participative.
Traditionnellement, la notion d’«économie sociale» inclut quatre grands types d’entités fournissant des biens et des services à leurs membres ou à la société en général: les coopératives, les mutuelles, les associations (y compris les associations caritatives) et les fondations. Il s’agit d’entités privées, indépendantes des pouvoirs publics et dotées de formes juridiques spécifiques.
De manière générale, les entreprises sociales sont considérées aujourd’hui comme faisant partie de l’économie sociale. Elles fournissent des biens et des services pour le marché, ont un fonctionnement de type entrepreneurial et souvent innovant et leur activité commerciale est motivée par des objectifs sociaux et/ou environnementaux. Elles réinvestissent le gros de leurs bénéfices pour réaliser leur objectif sociétal. Leur mode d’organisation et leur système de propriété suivent également des principes démocratiques ou participatifs, ou mettent l’accent sur le progrès social. Elles revêtent diverses formes juridiques selon le contexte national.
Certains acteurs, pays et organisations internationales utilisent également des expressions comme «entreprises de l’économie sociale», «entreprises sociales et solidaires» ou encore «tiers-secteur» pour désigner les entités de l’économie sociale. Les entreprises sociales d’insertion par le travail sont un type d’entreprise sociale existant dans toute l’Europe. Elles sont spécialisées dans l’offre de possibilités d’emploi pour les personnes défavorisées.
La plupart des actions proposées dans ce plan d’action concernent l’ensemble des entités de l’économie sociale même si certaines peuvent être spécifiques à l’une ou l’autre catégorie.
3.Créer un cadre propice à l’essor de l’économie sociale
3.1.Élaboration de cadres stratégiques et juridiques
Les faits montrent l’importance d’un «environnement propice» pour que l’économie sociale puisse prospérer. Comme l’ont confirmé des chercheurs et des parties prenantes, les cadres stratégiques et juridiques constituent un élément essentiel de cet environnement mais leur adaptation aux besoins de l’économie sociale n’est pas une tâche facile.
La nature transsectorielle de l’économie sociale et le fait qu’elle recouvre différents types d’entités constituent des défis importants pour les autorités publiques et rendent délicate l’élaboration d’une approche efficace. Les administrations publiques ont rarement des points d’entrée uniques et clairs. Les entités de l’économie sociale ont souvent des difficultés à choisir une forme juridique parmi différentes options qui ne sont pas entièrement adaptées à leurs besoins.
Pour élaborer des cadres cohérents pour l’économie sociale, il faut tenir compte de sa nature et de ses besoins spécifiques à l’égard de diverses politiques horizontales et sectorielles et de dispositions concernant notamment la fiscalité, les marchés publics, la concurrence, la politique social et le marché du travail, l’éducation, l’amélioration des compétences et la formation, les soins de santé et les soins à la personne, le soutien aux petites et moyennes entreprises (PME), l’économie circulaire, etc.
Par exemple, la fiscalité est un volet important pour l’économie sociale, mais peu de pays disposent d’un cadre fiscal spécifique et cohérent pour les entreprises sociales. Beaucoup prévoient des mesures d’incitation comme des exonérations de l’impôt sur les bénéfices non distribués, des exonérations de la TVA ou des taux de TVA réduits, des coûts d’assurance sociale réduits ou couverts par des subventions ou encore des réductions d’impôts pour les donateurs privés et institutionnels. Or, l’accès à ces incitations peut être complexe et les différentes mesures ne bénéficient pas toujours d’une coordination appropriée.
Les politiques publiques sectorielles sont également déterminantes pour les entités de l’économie sociale car celles-ci sont des partenaires importants, pour les autorités publiques, dans la fourniture de services sociaux, de santé et de soins. Compte tenu du vieillissement de la population, l’économie des soins à la personne se développe, offrant des possibilités d’emploi. Toutefois, les travailleurs dans ces secteurs (majoritairement des femmes) sont confrontés à de nombreuses difficultés liées aux bas salaires et aux conditions de travail précaires. La nouvelle stratégie européenne en matière de soins annoncée pour 2022 permettra notamment de dynamiser l’économie des soins en mettant en avant la forte valeur ajoutée de l’économie sociale dans ce secteur, et contribuer aussi à améliorer les conditions de travail.
Lorsqu’elles élaborent des cadres stratégiques et juridiques appropriés, les autorités publiques doivent tenir compte de la diversité des formes juridiques couvertes par l’économie sociale. Bien que les coopératives, les mutuelles, les fondations, les associations et les entreprises sociales aient beaucoup de points communs, elles ont aussi des objectifs et des modes de fonctionnement différents et se heurtent à des obstacles qui leur sont spécifiques.
Au sein de l’économie sociale, les coopératives représentent une forme bien établie de modèle d’entreprise dans ce secteur. Elles sont dirigées par des producteurs, des utilisateurs ou des travailleurs et fonctionnent selon la règle «un membre, une voix». Elles se sont montrées polyvalentes, avec une grande capacité d’adaptation au fil du temps et entre les secteurs, et offrant des solutions innovantes aux défis sociétaux. Néanmoins, les coopératives rapportent qu’en raison de leur structure de propriété, il leur est plus difficile de bénéficier d’investissements en fonds propres. La disponibilité de services de soutien financier et non financier spécifiques peut jouer un rôle crucial lorsqu’une coopérative est créée dans le cadre d’un rachat d’entreprise par les salariés, en vue de préserver l’emploi et de poursuivre une activité économique viable.
Les mutuelles signalent que les règles existantes ne tiennent pas suffisamment compte de leur caractère non lucratif. Par conséquent, la Commission sensibilisera les autorités nationales aux spécificités du modèle mutualiste et aux possibilités de réduire la charge administrative.
Les fondations et les associations de l’économie sociale expliquent qu’elles éprouvent des difficultés à tirer pleinement parti du marché unique. Par exemple, les associations sont confrontées à des contraintes dans l’exercice de leurs activités transfrontières. Cette question est abordée dans le projet de rapport du Parlement européen contenant des recommandations à la Commission sur un statut pour les associations et les organisations sans but lucratif européennes transfrontalières, qui devrait être adopté prochainement. Afin de mieux comprendre les problèmes rencontrés par les associations, la Commission lancera une étude comprenant une analyse comparative des régimes juridiques et du paysage des associations dans l’UE.
De même, les fondations font état de problèmes concernant le traitement fiscal des dons transfrontières en faveur d’organismes d’utilité publique établis dans d’autres États membres
. Conformément au principe du traité relatif à la libre circulation des capitaux et à la non-discrimination ainsi qu’aux arrêts pertinents de la Cour de justice de l’Union européenne
, les donateurs doivent réaliser une analyse de comparabilité au cas par cas
pour bénéficier de règles fiscales favorables pour leurs dons transfrontières. Toutefois, dans la pratique, les procédures appliquées par les États membres augmentent les coûts de mise en conformité et les coûts administratifs, générant ainsi de l’incertitude, tant pour les entités philanthropiques que pour les donateurs. La Commission européenne peut ouvrir des procédures d’infraction dans les cas où des obstacles à des activités transfrontières résultent de la non-transposition, de la violation ou d’une mise en œuvre erronée du droit de l’Union.
Depuis 2011, plusieurs États membres ont mis en place des cadres juridiques et des stratégies ciblés en ce qui concerne les entreprises sociales et/ou l’économie sociale. En plus de contribuer à leur reconnaissance, cela a donné lieu, dans certains cas, à d’autres évolutions positives comme la création d’unités ministérielles spécifiques ou un dialogue renforcé entre les parties prenantes et les autorités publiques. Dans certains pays, des labels ou des systèmes de certification ont été mis au point; ils peuvent bénéficier aux entités de l’économie sociale en leur facilitant l’accès à des mesures et à des traitements spécifiques. Les exemples de réussite en matière de réforme pourraient servir d’inspiration à d’autres États membres.
La Commission a mis au point un certain nombre d’outils et de ressources afin de soutenir les États membres et l’apprentissage mutuel entre les décideurs politiques. En collaboration avec l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), elle prépare des lignes directrices sur les cadres juridiques appropriés pour les entreprises sociales, qui seront publiées en 2022. Elle a aussi diffusé récemment un guide et un recueil de bonnes pratiques concernant les marchés publics socialement responsables. Tous ces documents et expériences peuvent aider les États membres à améliorer leurs cadres nationaux et régionaux. Les États membres ont également la possibilité d’obtenir une expertise sur mesure au moyen de l’instrument d’appui technique («Technical Support Instrument»).
La Commission encouragera l’apprentissage mutuel et fournira des orientations et un soutien aux États membres:
–en organisant, à partir de 2022, des webinaires et des ateliers destinés aux fonctionnaires, fondés sur des exercices de recensement ainsi que sur la collecte et l’échange de bonnes pratiques dans un large éventail de domaines: aides d’État, fiscalité, investissement social, transferts d’entreprises aux salariés, labels et systèmes de certification, mesure de l’impact social;
–en publiant des orientations sur les cadres fiscaux pertinents pour les entités de l’économie sociale, sur la base des analyses disponibles et de contributions d’autorités des États membres et d’acteurs de l’économie sociale;
–en publiant des orientations clarifiant les règles existantes sur le traitement fiscal des dons transfrontières d’utilité publique, qui présentent un intérêt pour les fondations et les associations, et sur la mise en application du principe de non-discrimination avec les États membres;
–en lançant une étude sur les labels/systèmes de certification nationaux de l’économie sociale, qui recense les labels et systèmes de certification en place dans les États membres, ainsi que les bonnes pratiques et les caractéristiques et critères communs. Cette étude établira aussi une approche commune et des orientations pour les États membres et examinera la possibilité d’une reconnaissance mutuelle volontaire.
Tout en mettant en œuvre ces actions, la Commission proposera en 2023, une recommandation du Conseil sur le développement des conditions-cadres de l’économie sociale visant à définir une approche globale de l’économie sociale et à faciliter son développement homogène dans les États membres et les régions de l’UE. Par cette recommandation, la Commission:
–invitera les décideurs politiques à mieux adapter les cadres politiques et juridiques aux besoins des entités de l’économie sociale;
–formulera des recommandations concernant des politiques spécifiques telles que la politique de l’emploi, les aides d’État, les marchés publics, la recherche, la fiscalité, l’éducation, les compétences et la formation, les soins et les services sociaux, la fourniture d’un soutien financier et non financier adapté à toutes les étapes du cycle de vie des entreprises et les statistiques;
–mettra en lumière la façon dont les structures institutionnelles et la participation des parties prenantes peuvent faciliter le travail des entités de l’économie sociale.
3.2.Économie sociale et aides d’État
Le soutien financier public joue un rôle important pour le démarrage et le développement des acteurs de l’économie sociale. Le contrôle des aides d’État a pour objectif de préserver l’équilibre entre le soutien apporté et une concurrence loyale. Les acteurs de l’économie sociale sont confrontés à plusieurs défis mais se voient aussi offrir un certain nombre de possibilités.
L’un des problèmes est que bien souvent, les autorités publiques et les bénéficiaires ne tirent pas le meilleur parti des possibilités existantes en matière d’aides d’État. Les parties prenantes indiquent que les autorités publiques limitent souvent inutilement le montant de l’aide qu’elles accordent aux entreprises sociales au seuil de minimis général (200 000 EUR sur une période de 3 ans) et n’envisagent pas d’autres possibilités qui seraient conformes aux règles en matière d’aides d’État, comme les aides à finalité régionale, les aides au financement des risques ou les aides à l’embauche de travailleurs défavorisés (pour lesquelles le montant maximal d’aide est généralement plus élevé).
En outre, les règles de l’UE en vigueur en matière de services d’intérêt économique général (SIEG) offrent des possibilités considérables en matière d’aides d’État. Les entités ne peuvent bénéficier de cette souplesse que si elles ont été investies d’une mission spécifique (c’est-à-dire les SIEG). Toutefois, les autorités publiques n’exploitent pas toujours pleinement cette possibilité, par exemple en ce qui concerne les activités des entreprises sociales axées sur l’offre d’emplois aux personnes vulnérables. La Commission facilitera donc l’accès aux orientations pertinentes sur les aides d’État et abordera ce thème dans les webinaires et les ateliers qu’elle organisera (voir section 3.1).
Un deuxième problème rapporté par les acteurs de l’économie sociale est que le montant des aides d’État dont ils disposent n’est pas toujours adéquat, en particulier en ce qui concerne les aides à l’accès au financement et les subventions à l’embauche de travailleurs défavorisés, régies par le règlement général d’exemption par catégorie («RGEC»). On peut en effet constater que les entreprises sociales ont généralement plus de difficultés à accéder au financement que les entreprises traditionnelles (voir section 4.2).
Lors de la révision du RGEC qui aura lieu compte tenu de son expiration à la fin de 2023, la Commission examinera si les données disponibles justifient un assouplissement des règles sur les aides à l’accès des entreprises sociales au financement et sur les aides à l’embauche de travailleurs défavorisés ou gravement défavorisés.
La Commission invite les États membres à recourir davantage à leur marge d’appréciation dans la définition d’un SIEG, afin de permettre, lorsque cela est approprié, la couverture d’activités remplissant certaines conditions exercées par les entreprises sociales. En outre, les États membres devraient investir davantage dans la formation et le renforcement des capacités de leurs administrations afin d’améliorer leur niveau de connaissance des règles en matière d’aides d’État.
3.3.Faciliter l’accès aux marchés: des marchés publics socialement responsables
Pour que l’économie sociale puisse se développer, il est essentiel qu’elle fournisse des biens et des services à la fois aux autorités publiques et aux entreprises traditionnelles et qu’elle coopère avec elles. Cela génère des revenus et permet aux entités de l’économie sociale de devenir financièrement autosuffisantes. Représentant 14 % du PIB européen, les marchés publics sont largement reconnus comme un outil politique essentiel pour soutenir le développement de l’économie sociale et des entreprises sociales
.
La révision de 2014 des règles de l’UE en matière de marchés publics a donné aux autorités publiques, à tous les niveaux, de nombreuses occasions d’utiliser les marchés publics pour atteindre divers objectifs stratégiques, notamment la promotion de la protection de l’environnement et la poursuite d’objectifs sociaux. Par exemple, les règles mentionnent spécifiquement les aspects sociaux comme faisant partie des facteurs pouvant être inclus dans les critères d’attribution sur la base de l’«offre économiquement la plus avantageuse». Depuis lors, la Commission a lancé plusieurs initiatives pour attirer l’attention sur la valeur ajoutée des marchés publics écologiques et socialement responsables, fournir des orientations et diffuser les bonnes pratiques. Par exemple, la Commission a récemment publié une version révisée du guide «Acheter social» qui contient des conseils pratiques et des exemples.
Ces dernières années, un certain nombre de collectivités locales et régionales et de villes ont pris conscience de la capacité des marchés publics stratégiques à répondre aux défis et aux besoins de la société et à susciter des changements systémiques. Toutefois, la plupart des marchés publics sont toujours attribués uniquement sur la base du critère du prix et les marchés publics socialement responsables sont encore beaucoup moins connus et moins développés que les marchés publics écologiques. La Commission s’attachera à mettre en évidence les avantages concrets et les moyens d’utiliser les procédures de passation de marchés publics et les procédures de concessions pour atteindre les objectifs de la politique sociale et du marché du travail, améliorer les conditions de travail et fournir des services sociaux de qualité.
En parallèle, il importe de renforcer la capacité des entités de l’économie sociale à soumissionner pour les marchés publics et de faciliter l’accès des acteurs de l’économie sociale aux marchés privés. Les interactions avec les entreprises traditionnelles aident les entités de l’économie sociale à se développer et à prospérer, et cette coopération s’est accrue. Toutefois, les entités de l’économie sociale pourraient être intégrées de manière plus systématique dans les chaînes de valeur des entreprises traditionnelles et il pourrait y avoir davantage de partenariats entre les deux catégories d’entités pour la soumission d’offres conjointes dans le cadre des marchés publics. L’un des moyens pour atteindre cet objectif serait de piloter de nouveaux projets dans le cadre du programme du marché unique.
La Commission:
–renforcera ses efforts de sensibilisation, favorisera l’échange de bonnes pratiques et formera les responsables des marchés publics et les entités de l’économie sociale sur la manière d’utiliser les procédures de passation de marchés publics et d’attribution de concessions pour atteindre les objectifs de politique sociale. À cette fin, des ateliers seront organisés dans les États membres;
–lancera, en 2022, dans le cadre du programme du marché unique, une nouvelle initiative visant à soutenir la création de partenariats locaux et régionaux entre les entités de l’économie sociale et les entreprises traditionnelles, propices à un marché interentreprises conforme au principe «acheter social»;
–intensifiera, dans la mesure du possible, le recours aux clauses sociales dans les procédures d’appel d’offres de la Commission.
En outre, la Commission publiera un rapport visant à renforcer le recours aux marchés publics socialement responsables dans les États membres.
La Commission appelle les États membres et les autres autorités publiques compétentes à encourager et à suivre l’introduction de marchés publics socialement responsables sur leur territoire, en coopération avec les acteurs de l’économie sociale.
3.4.Promouvoir l’économie sociale aux niveaux régional et local
Les modèles d’entreprise de l’économie sociale apportent une valeur ajoutée aux économies et sociétés locales en contribuant à les rendre inclusives, résilientes et durables. Les entreprises de l’économie locale sont profondément enracinées dans le tissu local et ont pour objectif principal de servir la communauté dans laquelle elles sont établies, par exemple en maintenant les activités économiques et les revenus au niveau local. Elles contribuent ainsi à stimuler le développement économique local dans des secteurs présentant un intérêt particulier pour les régions, comme dans les zones rurales, en relation avec l’agriculture et la production de denrées alimentaires biologiques ou dans l’économie bleue. Elles favorisent les chaînes de valeur courtes facilitant la production et la consommation locales et soutiennent l’action pour le climat et l’économie circulaire. Elles contribuent également à la fourniture de services sociaux, qui sont souvent limités dans les zones rurales ou plus reculées.
Comme annoncé dans la vision à long terme pour les zones rurales de l’UE, la Commission entreprendra une série d’actions qui permettront aux entrepreneurs et aux petites entreprises de s’installer dans les zones rurales et aideront ces régions à s’adapter à l’évolution de l’environnement économique, leur permettront d’adopter des pratiques commerciales innovantes, de coopérer et de former des clusters, et qui contribueront au développement de nouveaux secteurs de l’économie. Une attention particulière sera portée aux circuits d’approvisionnement courts dans le secteur de la production agroalimentaire, qui relient directement les producteurs aux consommateurs, ainsi qu’à des actions visant à développer l’emploi et les possibilités d’apprentissage pour les jeunes et le développement durable de la bioéconomie.
De nombreuses autorités régionales et locales européennes ont les pouvoirs requis pour élaborer des stratégies et des instruments visant à soutenir le développement des écosystèmes locaux et régionaux de l’économie sociale. Il serait possible de mieux exploiter ce potentiel.
L’échange et la coopération entre les autorités régionales et locales constituent un moyen efficace de renforcer l’apprentissage mutuel dans le domaine de l’économie sociale. Cela vaut en particulier pour la coopération transfrontière. Un soutien est disponible au titre du Fonds social européen plus (FSE +), du Fonds européen de développement régional (FEDER) et du Fonds pour une transition juste afin d’aider les collectivités locales et régionales à renforcer leur coopération avec les acteurs de l’économie sociale, notamment dans le cadre de stratégies de spécialisation intelligente. La plateforme pour une transition juste constitue une plateforme d’échange active pour toutes les parties prenantes dans les régions particulièrement touchées par la transition climatique, y compris les acteurs de l’économie sociale. En outre, la Commission soutient l’apprentissage par les pairs, la coopération et le renforcement de l’esprit communautaire entre les régions et les collectivités locales. Par exemple, l’initiative des régions européennes de l’économie sociale et les missions de l’économie sociale ont renforcé la visibilité de l’économie sociale au niveau local et soutenu financièrement l’organisation de sessions d’apprentissage mutuel avec les autorités locales et les acteurs de l’économie sociale. Ces travaux s’appuient également sur des initiatives locales telles que la Convention des maires de l’UE.
La Commission poursuivra le développement de ces initiatives en faveur de la coopération transnationale en mettant l’accent sur une transition écologique et numérique juste (voir section 4.3). Elle encouragera également le recours au programme Interreg Europe et au partenariat de spécialisation intelligente pour l’économie sociale afin de favoriser les échanges transfrontières et interrégionaux.
La Commission:
–aidera les États membres et les parties prenantes à stimuler l’économie sociale et l’innovation sociale dans les zones rurales dans le cadre du futur réseau de l’UE pour la politique agricole commune et intégrera davantage les pôles d’innovation sociale et écologique dans la politique européenne des clusters industriels afin de fournir des orientations, de soutenir la recherche et de développer de nouvelles capacités, d’échanger de bonnes pratiques et d’établir des réseaux transfrontières;
–élargira le réseau européen des régions de l’économie sociale afin de renforcer les nouveaux partenariats régionaux et locaux, en particulier pour stimuler les transitions écologique et numérique dans les territoires;
–renforcera la mise en réseau des entreprises rurales via le réseau Entreprise Europe, ainsi que par des appels à la coopération interrégionale dans le cadre des missions européennes en faveur de l’économie sociale. La vision à long terme pour les zones rurales mettra l’accent sur l’entrepreneuriat et l’économie sociale dans les zones rurales.
La Commission appelle les États membres à mettre en place des points de contact locaux pour l’économie sociale, qui seront appelés à jouer le rôle d’ambassadeurs de l’économie sociale, à fournir un soutien entre pairs, à faciliter l’accès aux financements européens et nationaux et à assurer la liaison avec les autorités de gestion des fonds européens.
3.5.Promouvoir l’économie sociale au niveau international
Le changement climatique et la dégradation de l’environnement, les changements démographiques ainsi que les inégalités économiques et sociales constituent des défis à l’échelle mondiale. L’UE et les pays tiers partagent des objectifs communs, ancrés dans le programme de développement durable à l’horizon 2030. L’économie sociale peut contribuer à la réalisation de ces objectifs tant à l’intérieur qu’à l’extérieur de l’UE. Par conséquent, les actions annoncées dans les autres sections du plan d’action peuvent aussi servir d’inspiration pour le soutien de l’économie sociale dans les pays tiers.
Le degré de développement de l’économie sociale est très variable d’un pays à l’autre. Certains pays tiers bénéficient d’une longue tradition dans certains domaines de l’économie sociale, d’autres ont des écosystèmes d’innovation sociale ou d’entreprises sociales florissants mais dans un grand nombre d’entre eux, les modèles d’économie sociale commencent seulement à voir le jour. Le partage d’expériences et de bonnes pratiques peut être profitable aux parties prenantes et contribuer à accélérer les réformes.
Au cours des dix dernières années, la politique de coopération internationale de l’UE a soutenu le développement de l’économie sociale. Par exemple, le partenariat de l’UE avec l’Alliance coopérative internationale a amélioré la visibilité des coopératives et la recherche dans ce domaine dans le monde entier, et a facilité le renforcement des capacités ainsi que la mise en réseau. La Commission a également financé plusieurs programmes régionaux de renforcement des capacités à l’appui de l’économie sociale et des écosystèmes d’entrepreneuriat social.
Il est également possible de renforcer le dialogue et la collaboration dans le domaine de l’économie sociale avec les principaux partenaires internationaux, tels que l’OCDE, la task force des Nations unies sur l’économie sociale et solidaire et l’Organisation internationale du travail. Cela contribuera à accroître la visibilité de l’économie sociale au-delà des frontières de l’UE mais aussi à partager des orientations stratégiques et outils élaborés par la Commission européenne, notamment en coopération avec l’OCDE. La Commission s’appuiera sur ces initiatives et continuera à promouvoir l’économie sociale sur la scène internationale.
En particulier, la Commission:
–renforcera la place de l’économie sociale et de l’entrepreneuriat social dans les programmes relevant de l’instrument d’aide de préadhésion et des instruments de voisinage, de coopération au développement et de coopération internationale, par exemple en dialoguant avec les délégations de l’UE et les autorités publiques dans les pays tiers, afin de faciliter l’élaboration de mesures spécifiques en faveur de l’économie sociale;
–améliorera l’accès au financement pour les entrepreneurs sociaux des Balkans occidentaux, du partenariat oriental et du voisinage méridional, en lançant des actions visant à stimuler les initiatives de terrain et à aider les intermédiaires à développer des produits financiers adaptés aux besoins des entités de l’économie sociale.
La Commission encourage les autorités publiques des pays tiers à utiliser les orientations stratégiques et les outils en matière d’économie sociale fournis en accès libre par la Commission européenne en coopération avec l’OCDE et l’OIT.
4.Ouvrir des perspectives de développement pour les entités de l’économie sociale
4.1.Soutenir les entreprises et renforcer les capacités
La plupart des entités de l’économie sociale ont une forte dimension entrepreneuriale et apportent une contribution considérable à la croissance durable et à l’emploi. Elles échangent sur le marché et génèrent des recettes à partir de la vente de biens et de services. Si bon nombre d’entre elles tiennent à rester petites et locales, certaines pourraient souhaiter étendre leurs activités dans d’autres marchés à l’intérieur et à l’extérieur de l’UE. Une aide ciblée au développement pourrait donc leur être utile pour élargir leurs activités et se développer. Toutefois, les régimes d’aide existants ne tiennent pas toujours compte des caractéristiques particulières de leur modèle d’entreprise pour ce qui est de la gouvernance, de l’affectation des bénéfices, des conditions de travail et de l’impact sociétal. En outre, comme dans d’autres secteurs de l’économie, les travailleurs, y compris ceux issus de groupes vulnérables, ont d’importants besoins en matière de renforcement des compétences et de reconversion. Dans le contexte du vieillissement de la main-d’œuvre et de l’augmentation de la fuite des cerveaux, le transfert de connaissances intergénérationnelles et l’entrepreneuriat des seniors peuvent jouer un rôle important.
Les modèles d’entreprise de l’économie sociale peuvent avoir une influence et des retombées sur les entreprises traditionnelles. Un nombre croissant d’entreprises traditionnelles se rapprochent des objectifs de l’économie sociale. Par exemple, les «entreprises d’utilité publique» et les «entreprises à impact social» intègrent des ambitions durables dans leurs missions, tandis que d’autres entreprises adoptent des mesures ad hoc pour améliorer la transparence et coopérer plus activement avec les communautés. Cette approche et l’intégration progressive de critères environnementaux, sociaux et de gouvernance d’entreprise (ESG) dans la gouvernance des entreprises traditionnelles et dans les politiques d’investissement des institutions financières et des fonds d’investissement créent de nouvelles possibilités de coopération et d’enrichissement mutuel et donnent accès à de nouveaux marchés. La Commission renforcera également les interactions entre les entités de l’économie sociale et les entreprises traditionnelles en promouvant les meilleures pratiques, notamment dans le domaine de l’intrapreneuriat social
.
Compte tenu de la nature transversale de l’économie sociale, les systèmes axés sur l’innovation, la propension à investir, l’internationalisation des entreprises, le développement rural et l’économie circulaire sont pertinents pour ces entités, même s’ils s’adressent souvent aux PME de manière générale. Toutefois, les informations pertinentes tendent à être éparpillées et difficiles à exploiter. Même lorsqu’il existe des initiatives spécifiques, les acteurs de l’économie sociale ne sont souvent pas suffisamment informés ou les jugent trop complexes. Les réseaux représentatifs et les réseaux d’entrepreneuriat peuvent être utiles, mais ce type de réseau n’existe pas dans tous les pays.
Le document de travail des services de la Commission accompagnant le plan d’action donne un aperçu des programmes et financements de l’UE pertinents pour la période 2021-2027. Les financements de l’UE, tels que les fonds de la politique européenne de cohésion, sont mis en œuvre aux niveaux national et régional. D’autres sources de financement sont disponibles aux niveaux national, régional et local, ainsi qu’auprès d’acteurs privés. Il peut s’avérer difficile de s’orienter dans cet environnement, en particulier pour les petites entités.
Par conséquent, la Commission:
–facilitera, dans le cadre du pacte pour les compétences, la mise en place d’un partenariat en matière de compétences pour l’écosystème industriel «Économie sociale et de proximité», dans le contexte de la stratégie en matière de compétences et de la stratégie industrielle européenne actualisée. À partir de 2022, des plateformes dédiées à la mise en réseau, à la connaissance, à l’orientation et aux ressources seront mises en place pour soutenir les signataires du pacte dans leurs efforts visant à offrir des possibilités de reconversion et de perfectionnement professionnels aux personnes en âge de travailler;
–stimulera l’expansion et l’internationalisation de l’économie sociale en mobilisant des réseaux de soutien aux entreprises et des plateformes de partenariat au niveau européen telles que le réseau Entreprise Europe
et la plateforme européenne de collaboration des clusters
;
–lancera un nouveau portail européen unique de l’économie sociale, en 2023, afin de fournir un point d’entrée clair aux acteurs de l’économie sociale, aux autres acteurs concernés et aux personnes qui cherchent à obtenir des informations sur les stratégies, initiatives et financements pertinents de l’UE. Le portail simplifiera l’accès au soutien existant et renforcera la sensibilisation aux actions de l’UE dans ce domaine. Il facilitera aussi l’accès aux initiatives pertinentes de renforcement des capacités et fournira des orientations spécifiques sur les possibilités de financement de l’UE (formations, ateliers, webinaires, guides pratiques et outils).
Des orientations sur les possibilités de financement de l’UE seront également fournies moyennant la plateforme de conseil InvestEU, le réseau Entreprise Europe et le service d’assistance sur les services sociaux de l’UE. Pour les autorités de gestion des fonds de la politique de cohésion, des orientations sont disponibles sur la plateforme Fi- compass, qui fournit des conseils sur les instruments financiers mis en œuvre dans le cadre du système de gestion partagée.
Afin d’élargir les capacités, la Commission soutiendra le développement de réseaux représentatifs de l’économie sociale, en particulier dans les États membres de l’UE où les entreprises sociales et les écosystèmes de l’économie sociale ne sont pas pleinement développés.
La Commission invite les États membres à encourager les pépinières d’entreprises traditionnelles à étendre leur soutien aux entités de l’économie sociale, afin d’améliorer les possibilités de soutien à la propension à investir des entreprises. Le projet pilote «Better Incubation» lancé par la Commission européenne peut servir d’inspiration.
Renforcer l’attractivité de l’esprit d’entreprise
L’entrepreneuriat social et l’économie sociale peuvent être particulièrement attrayants pour les jeunes, les personnes handicapées, les personnes issues de l’immigration, les femmes et les autres entrepreneurs sous-représentés. Il est intéressant de noter que la prévalence des femmes entrepreneurs est plus élevée dans l’entrepreneuriat social que dans l’entrepreneuriat traditionnel, où les femmes ne représentent que 30 %. La sensibilisation à ces modèles d’entreprise alternatifs pourrait renforcer l’attractivité de l’entreprenariat de manière plus générale et contribuer à l’intégration sur le marché du travail. Étant donné que les jeunes générations manifestent un vif intérêt pour le développement durable, l’économie sociale peut les attirer. Ces dernières années, la formation à l’entrepreneuriat est devenue plus courante dans les systèmes éducatifs. Toutefois, les modèles d’entreprise de l’économie sociale, y compris les formes coopératives, sont encore loin d’être une composante standard de tous les programmes d’enseignement à l’entrepreneuriat et des formations au commerce.
La Commission:
–lancera une nouvelle Youth Entrepreneurship Policy Academy, en 2022, dans le cadre du FSE +. L’académie encouragera l’entrepreneuriat des jeunes, y compris chez les femmes et les entrepreneurs sociaux, en collaboration avec les décideurs politiques nationaux et les réseaux d’entrepreneuriat des jeunes;
–favorisera l’apprentissage mutuel entre les entrepreneurs de l’économie sociale en promouvant davantage le programme Erasmus pour jeunes entrepreneurs auprès des acteurs de l’économie sociale.
La Commission étudiera les moyens de favoriser les synergies entre les différents programmes de financement de l’UE afin de recenser les projets couronnés de succès susceptibles d’être étendus aux entreprises sociales.
La Commission appelle les établissements d’enseignement supérieur à utiliser pleinement les instruments européens tels que les universités européennes pour stimuler l’économie sociale et l’entrepreneuriat social.
4.2.Améliorer l’accès au financement
Selon les estimations, au moins 2,5 milliards d’euros ont été mobilisés sur le budget de l’Union en faveur de l’économie sociale pendant la période de programmation 2014-2020. Globalement, la Commission aspire à augmenter ce niveau d’aide pour la période 2021-2027. Les investissements mobilisés devraient être plus nombreux grâce à une hausse de l’effet multiplicateur attendu d’InvestEU et au soutien renforcé à l’impact social et à l’innovation sociale. D’autres programmes de l’UE offriront un soutien spécifique ou indirect à l’économie sociale, comme par exemple le volet «Emploi et innovation sociale» du Fonds social européen plus, Horizon Europe, le programme du marché unique, Erasmus+, le corps européen de solidarité, les programmes «Europe créative» et LIFE. Au niveau national, des fonds européens seront disponibles notamment par l'intermédiaire des fonds de la politique de cohésion et de la facilité pour la reprise et la résilience.
Grâce au soutien ciblé apporté au niveau national et de l’UE, notamment dans le cadre du programme européen pour l’emploi et l’innovation sociale (EaSI), les intermédiaires et les investisseurs sont plus nombreux à s’intéresser aux entités de l’économie sociale, notamment aux entreprises sociales, et à leur accorder des aides remboursables au développement et au financement pour répondre à leurs besoins. Les banques éthiques ont joué un rôle important à cet égard. En outre, le label «fonds d'entrepreneuriat social européen» (EuSEF) a permis aux investisseurs d’identifier facilement les fonds qui investissent dans des entreprises sociales. Depuis la crise financière de 2008, le secteur de la microfinance connaît également une forte croissance dans l’UE et les pays voisins. De nombreuses institutions de microfinance font partie de l’économie sociale et poursuivent, à ce titre, une mission sociale spécifique pour venir en aide à des personnes issues de groupes vulnérables, pour qui l’accès au système bancaire traditionnel pour créer des entreprises, et donc des emplois pour elles-mêmes et d’autres, est difficile. Globalement, l’utilisation de produits financiers tels que les garanties s’est révélée être un moyen efficace pour mobiliser des financements privés en faveur d’entreprises sociales auprès d’investisseurs tant traditionnels que philanthropiques.
Malgré cette évolution positive, une analyse des marchés du financement des entreprises sociales a révélé une inadéquation persistante entre la demande et l’offre de financement remboursable pour les entreprises sociales en Europe, qu’il s’agisse de l’accès aux financements par l’emprunt ou sur fonds propres. Le déficit de financement annuel dans toute l’UE a été estimé à près de 1 milliard d’euros dans le domaine du financement des entreprises sociales et à 12,9 milliards d’euros dans le domaine du microfinancement. Les écarts sont considérables d’un pays à l’autre et au sein d’un même pays. De manière générale, il existe encore une marge importante d’amélioration en ce qui concerne l’offre de financement sur mesure aux différents stades du cycle de vie d’une entreprise (amorçage, démarrage, expansion).
Par conséquent, la Commission:
–lancera, en 2022, de nouveaux produits financiers dans le cadre du programme InvestEU visant à mobiliser des financements privés ciblés sur les besoins des entreprises sociales à différents stades de développement. Ces produits comprendront notamment des garanties permettant l’accès au crédit pour les entreprises sociales et les microentreprises, des investissements en fonds propres ou quasi-fonds propres dans des entreprises sociales et des entreprises à impact ainsi que des investissements en capital dans des intermédiaires financiers. La plateforme de conseil InvestEU apportera un soutien aux intermédiaires financiers.
Les fondations font partie de l’économie sociale et jouent, elles aussi, un rôle important dans l’octroi de subventions en faveur de l’économie sociale, de l’innovation sociale et d’autres objectifs stratégiques de l’UE. Les investissements liés à des missions, notamment dans des organisations de l’économie sociale, suscitent un intérêt croissant auprès des acteurs philanthropiques. Pour exploiter ce potentiel, la Commission se penche actuellement sur le lancement de mécanismes de co-investissement spécifiques avec des fondations et des organisations philanthropiques dans des domaines de mission ciblés, dans le but d’affecter des capitaux supplémentaires à la durabilité, à l’inclusion, à l’innovation sociale, au logement et au sans-abrisme, au pluralisme des médias, et de développer des écosystèmes à impact social. Dans son plan d’action pour les médias et l’audiovisuel, la Commission a déjà annoncé le lancement d’une initiative pilote de financement sur fonds propres dans le cadre du programme InvestEU afin de soutenir le secteur des médias d’information.
En fonction de l’intérêt du marché, la plateforme de conseil InvestEU pourrait soutenir la mise en place de plateformes d’investissement transfrontières qui regrouperaient les partenaires intéressés par des investissements dans l’économie sociale.
En complément de l’action clé susmentionnée, la Commission:
–en coopération avec les partenaires chargés de la mise en œuvre d’InvestEU, veillera à ce que les intermédiaires financiers d’InvestEU procurant des financements à des entreprises sociales soient faciles à identifier par les bénéficiaires potentiels, notamment par l’intermédiaire du portail InvestEU et du portail de l’économie sociale;
–complètera les instruments financiers par des subventions pour la création de marchés du financement des entreprises sociales en Europe, en soutenant la mise en place de nouveaux instruments financiers et de nouveaux programmes de préparation à l’investissement;
–complètera les instruments d’investissement sur fonds propres par des subventions visant à réduire les coûts de transaction pour les investissements en capital-risque dans des entreprises sociales;
–soutiendra les réseaux de l’UE actifs dans les domaines de la microfinance et du financement des entreprises sociales dans le but de mieux faire connaître les fonds européens et de mieux les signaler, d’accroître la capacité des organisations membres et de diffuser des résultats de la recherche et des données.
Outre la mise au point de nouveaux instruments, les États membres sont susceptibles d’introduire des mesures systémiques pour renforcer les financements disponibles. Parmi les initiatives existantes figure la possibilité pour les salariés de contribuer à des fonds de pension et des régimes d’épargne à vocation sociale.
Par ailleurs, une meilleure compréhension et une meilleure utilisation des méthodes de mesure de l’impact social permettront à l’économie sociale de communiquer sur son impact et d’accéder plus facilement aux financements à impact. Les méthodologies sont nombreuses mais, selon les entités de l’économie sociale, la diversité des outils et ressources disponibles peut avoir un effet décourageant du fait de la difficulté à s’y retrouver, notamment pour les plus petites entités ou les moins expérimentées. Les méthodes choisies pour mesurer l’impact social devraient être bien pensées, proportionnées et adaptées à la diversité des acteurs, à leur taille et leur stade de développement.
La Commission:
–soutiendra le développement de la mesure et de la gestion de l’impact social en recensant et passant en revue les pratiques existantes et en lançant des formations pour les acteurs de l’économie sociale, afin de les aider à mieux comprendre ces pratiques et à les adopter plus facilement. En outre, la Commission s’associera aux parties prenantes pour élaborer des méthodes standard simples d’évaluation de l’impact social pour les acteurs de l’économie sociale dans l’UE en 2023.
Le projet de rapport de la plateforme sur la finance durable indique que, face à une pandémie et à des questions sociales restées sans réponse à propos d’une transition durable, il importe de recenser les activités et entités économiques qui contribuent à faire progresser les objectifs sociaux. La plateforme montre que l’adoption d’orientations communes sur une taxinomie sociale pourrait accroître la transparence des investissements et empêcher le «blanchiment social». Conformément au règlement sur la taxinomie et comme indiqué dans le plan d’action sur le socle européen des droits sociaux, la Commission rédigera un rapport sur l’éventuelle extension de la taxinomie de l’UE pour la finance durable aux objectifs sociaux.
4.3.Maximiser la contribution de l’économie sociale aux transitions écologique et numérique
L’Union européenne aspire à devenir le premier continent neutre pour le climat à l’horizon 2050, tout en ne laissant personne de côté. Cet objectif et la nécessité d’enrayer la perte de biodiversité, de réduire la pollution et d’améliorer l’utilisation durable des ressources naturelles sont au cœur du pacte vert pour l’Europe. La Commission a proposé une série de mesures législatives pour réduire les émissions de gaz à effet de serre d’au moins 55 % d’ici à 2030 par rapport aux niveaux de 1990. En outre, dans le cadre du pacte vert pour l’Europe, la Commission a lancé le pacte européen pour le climat
à l’appui des engagements climatiques des citoyens et des organisations, qui apportera également des avantages directs à l’économie sociale.
De plus, la transition numérique européenne a pour objet de donner aux citoyens et aux entreprises les moyens d’embrasser un avenir numérique axé sur l’humain, durable et plus prospère. Plus particulièrement, l’un des objectifs du plan d’action sur le socle européen des droits sociaux est de faire en sorte qu’au moins 80 % des personnes âgées de 16 à 74 ans disposent de compétences numériques élémentaires.
L’économie sociale contribue à la transition écologique en concevant des pratiques, des biens et des services durables pour le développement industriel, par exemple dans les domaines de l’économie circulaire, de l’agriculture biologique, des énergies renouvelables, du logement et de la mobilité. Ce faisant, elle accroît également l’acceptabilité des changements de comportement qui contribuent à l’atténuation du changement climatique. Parmi ces solutions, beaucoup sont inclusives et s’adressent aux personnes qui sont le plus touchées par la transition écologique ou qui ont le plus de difficultés à s’y adapter, par exemple par la formation et la reconversion des travailleurs, en offrant des possibilités d’emploi dans des domaines qui tiennent compte de l’environnement et en développant des produits et des services qui répondent aux besoins des communautés locales. Cette contribution est cruciale car les entreprises commerciales accordent peu d’attention aux questions de l’adaptation.
Les entités de l’économie sociale cherchant à produire des impacts à la fois sociaux et environnementaux indiquent qu'elles ont besoin d'un soutien pour recenser et adopter des pratiques plus écologiques, renforcer les capacités et les connaissances, notamment concernant les possibilités de financement des objectifs environnementaux.
L’économie sociale joue également un rôle important au service d’une transition numérique équitable et inclusive. Les acteurs de l’économie sociale travaillant par exemple sur des projets «Tech4Good» déploient des technologies numériques (comme la technologie des registres distribués, les mégadonnées, l’intelligence artificielle, les technologies d’assistance) afin de produire un impact écologique et social
. Au sein de l’économie sociale, de nouveaux modèles d’entreprises numériques voient le jour, par exemple dans l’économie collaborative et l’économie des plateformes. Les coopératives de plateformes sont un exemple d’entreprises à gouvernance participative qui utilisent des plateformes numériques pour faciliter l’engagement des citoyens et la vente de biens et services produits à l’échelon local dans le but d’améliorer les conditions de travail de leurs membres. Plus généralement, les technologies numériques peuvent servir de levier en facilitant la reproduction d’initiatives fructueuses de l’économie sociale et leur application à plus grande échelle dans tous les États membres et dans le marché unique. Par ailleurs, les technologies numériques peuvent contribuer à améliorer les processus de travail dans les entités de l’économie sociale. Le traitement, la gestion et la collecte des données ne sont pas encore des pratiques répandues au sein des entités de l’économie sociale. Dans le même temps, des entreprises sociales pionnières dans le domaine du numérique préparent le terrain des transitions numériques en rendant les technologies adaptables, abordables et accessibles, par exemple au moyen de communs numériques et de technologies à source ouverte.
Il est de première importance, pour leur reprise après la crise de la COVID et leur résilience à long terme, de faire en sorte que les modèles d’entreprise de l’économie sociale deviennent des vecteurs de la transition écologique et de répondre à leurs besoins en matière d’appropriation numérique, de solutions technologiques inclusives et d’accès aux données.
La Commission:
–lancera un parcours de transition pour l’écosystème industriel «Économie sociale et de proximité» afin de poursuivre les travaux avec les pouvoirs publics et les parties prenantes visant à renforcer l’écosystème de l’économie sociale et à le rendre plus résilient dans le cadre des transitions écologique et numérique. Le parcours de transition contribuera également à la mise en œuvre du plan d’action dans ce domaine;
–soutiendra la coopération transnationale pour renforcer la capacité de l’économie sociale à adopter et développer des pratiques, des produits et des services plus écologiques ainsi qu’à améliorer ses capacités numériques;
–lancera une action sur le financement innovant dans le laboratoire du nouveau Bauhaus européen visant à mettre au point un projet pilote pour mobiliser les contributions philanthropiques;
–élaborera un code de conduite sur l’utilisation et la gestion des données dans l’économie sociale, en coopération avec les parties prenantes, en vue d’encourager l’utilisation des données et des technologies.
En outre, la Commission veillera à ce que les structures pertinentes de soutien aux entreprises au niveau européen partagent leur expérience sur la manière d’apporter des aides sur mesure aux entités de l’économie sociale. Parmi ces structures figureront l’accélérateur de transformation numérique dans le cadre du programme sur les pôles européens d’innovation numérique et le réseau Entreprise Europe.
Étant donné le fort ancrage local de l’économie sociale, les pouvoirs publics, la société civile, les acteurs de l’économie sociale et les entreprises traditionnelles ont la possibilité de concevoir des projets écologiques locaux et de mettre en commun des ressources pour l’investissement et l’innovation au niveau local et régional afin de garantir une transition juste avec des retombées positives à l’échelon local.
La Commission:
–travaillera en collaboration avec des villes pour développer des projets écologiques locaux ou des actions en faveur de la citoyenneté verte, en renforçant la participation des acteurs et des communautés de l’économie sociale à la Convention des maires de l’UE, à l’initiative urbaine européenne, à l’initiative «Défi pour les villes intelligentes» et à l’initiative d’économie circulaire pour les villes et les régions, à la plateforme pour une transition juste, au nouveau Bauhaus européen et au pacte européen pour le climat.
L’économie sociale apporte une contribution particulièrement remarquable au développement d’une économie circulaire, en ce qu’elle ouvre la voie à des activités et des modèles économiques qui préservent la valeur des produits et des matériaux le plus longtemps possible, réduisent les déchets, offrent aux citoyens des possibilités d’économies et créent des emplois locaux, notamment dans les activités de réparation, de réutilisation, de partage et de recyclage. Ce potentiel peut être davantage exploité en sensibilisant aux perspectives d’un recours accru à ces pratiques et en renforçant les partenariats avec les entreprises traditionnelles tout au long des chaînes de valeur et les partenariats public-privé associant les pouvoirs publics, les instituts de recherche, l’industrie et les entités de l’économie sociale.
La Commission:
–livrera des orientations sur la manière d’encourager l’adhésion et les partenariats en faveur de l’économie circulaire entre les entreprises sociales et d’autres acteurs, y compris les entreprises traditionnelles, et sensibilisera à l’économie sociale dans le cadre de la plateforme des acteurs européens de l’économie circulaire, du réseau Entreprise Europe et d’autres réseaux.
Les partenaires de l’économie sociale jouent un rôle essentiel dans la mise à disposition de logements sociaux, de coopératives d’habitation et dans les stratégies de développement urbain. Dans ce contexte, ils se heurtent à un déficit d’investissement annuel de 57 milliards d’euros, ce qui a des répercussions négatives pour l’accès au logement et le verdissement du parc de logements de l’UE. Grâce à l’initiative en faveur du logement abordable, la Commission renforcera la capacité de rénovation dans les logements sociaux et abordables en mobilisant des partenariats intersectoriels pour piloter 100 districts de rénovation et en promouvant des habitats abordables, accessibles, agréables à vivre et de qualité.
La Commission invite les États membres et les régions de l’UE à prendre en compte l’économie sociale dans l’élaboration de leurs stratégies dans le cadre des transitions écologique et numérique et à faire un meilleur usage des financements existants pour permettre ces transitions dans l’économie sociale.
4.4.Promouvoir l’innovation sociale
L’innovation sociale offre de nouveaux modes de production de biens, d’organisation et de prestation de services, ainsi que de nouvelles formes de participation civique répondant à des besoins sociaux ou à des défis sociétaux concrets. Elle modifie les relations sociales et peut offrir de nouvelles approches stratégiques susceptibles d’entraîner des changements systémiques. C’est parce qu’elles ont un mode de gouvernance ascendant et qu’elles sont proches des communautés, des citoyens et des problèmes rencontrés que les entités de l’économie sociale ont la capacité de trouver des solutions innovantes.
Ces dernières années, la Commission a lancé diverses initiatives visant à promouvoir l’innovation sociale (par exemple, dans le cadre d’Horizon 2020, y compris le concours européen de l’innovation sociale, le programme EaSI ou le FSE). Le soutien apporté aux contrats à impact social est également un moyen d’expérimenter l’innovation sociale et le financement social
. La Commission poursuivra ces initiatives et créera une communauté européenne d’innovateurs sociaux pour encourager l’apprentissage par les pairs et les projets d’entreprises communs, en s’appuyant sur le réseau des lauréats du concours européen de l’innovation sociale.
Cependant, le déploiement des innovations sociales reste un défi, notamment lorsqu’il s’agit de les faire adopter par les décideurs politiques, de trouver des partenaires dans d’autres territoires, nationaux ou étrangers, et d’adapter les solutions développées ailleurs aux conditions locales. Il en résulte des occasions manquées de produire un impact systémique et d’exploiter le plein potentiel de l’investissement initial (comprenant souvent des financements publics). La Commission soutient la création de centres nationaux de compétences pour l’innovation sociale afin de stimuler les capacités d’innovation, notamment des acteurs de l’économie sociale et des nouveaux entrepreneurs sociaux
. Il est également encore possible de renforcer la collaboration entre les acteurs du secteur public, les acteurs philanthropiques et les acteurs de l’investissement socialement responsable, de mieux catalyser les ressources disponibles et de favoriser l’adoption et la reproduction de l’innovation sociale.
La Commission:
–stimulera l’innovation sociale grâce à une nouvelle approche en matière de coopération transnationale dans le cadre du FSE+. Un nouveau Centre européen des compétences pour l’innovation sociale sera créé en 2022. Il organisera l’apprentissage mutuel et le renforcement des capacités des autorités compétentes et des structures de soutien. En outre, un nouveau régime de subventions facilitant le transfert et/ou le déploiement de l’innovation sociale sera mis en place;
–proposera, en 2022, la création d’un Fonds européen de catalyseurs sociaux dans le cadre d’Horizon Europe associant des citoyens, des universitaires, des entrepreneurs, des philanthropes, des investisseurs à impact social et des administrateurs publics, dans le but de soutenir la reproduction et le déploiement d’innovations sociales couronnées de succès et de faire ainsi progresser les objectifs des cinq missions de l’UE.
En outre, la Commission accordera des subventions au titre d’Horizon Europe pour sensibiliser et faciliter l’accès des entrepreneurs sociaux aux ressources d’écosystèmes d’innovation paneuropéens, nationaux, régionaux et locaux.
5.Améliorer la reconnaissance de l’économie sociale et de son potentiel
Il est primordial d’accroître la visibilité de l’économie sociale, notamment par la collecte de données et de statistiques appropriées, afin qu’elle soit reconnue et puisse se développer, comme en témoignent les pays où elle est le plus avancée.
Depuis 2011, la Commission contribue à accroître la visibilité de l’économie sociale, des entreprises sociales et de l’innovation sociale dans toute l’UE par diverses actions, notamment en ce qui concerne le financement ou la recherche. Dans les États membres également, les pouvoirs publics et les parties prenantes ont adopté des initiatives intéressantes pour améliorer la visibilité et la compréhension de l’économie sociale, comprenant notamment des labels et des mécanismes de certification spécifiques ou des campagnes de communication à grande échelle.
Il est prouvé que le grand public, notamment les jeunes et les personnes défavorisées, les partenaires sociaux, les parties prenantes et les bailleurs de fonds, n’ont pas encore suffisamment conscience de l’impact positif de l’économie sociale. Comme cette situation nuit à l’élaboration de politiques de soutien pertinentes et au développement de débouchés, le renforcement de la visibilité de l’économie sociale doit rester une priorité. La Commission utilisera le présent plan d’action pour nouer le dialogue avec les parties prenantes concernées à tous les niveaux afin de maintenir une dynamique.
La Commission:
–mènera des activités de communication régulières dans le cadre d’une stratégie de communication à long terme mettant l’accent sur le rôle et les spécificités de l’économie sociale, également en coopération avec les acteurs de l’économie sociale.
La Commission encourage également l’organisation de sommets réguliers sur l’économie sociale organisés par les États membres et d’autres acteurs.
Il est en outre essentiel de disposer de données et de statistiques pertinentes pour que les modèles d’entreprise de l’économie sociale soient mieux compris et pour garantir des politiques fondées sur des données probantes. Cependant, les données existantes sur l’économie sociale sont souvent rares, incomplètes et difficilement comparables. À titre d’exemple, seuls quelques États membres ont adapté leurs systèmes comptables nationaux pour collecter des données supplémentaires («comptes satellites») sur l’économie sociale, malgré le soutien financier disponible au titre du budget de l’Union. Il en résulte un manque de statistiques sur la taille, la main-d’œuvre, l’évolution et les défis de l’économie sociale. À l’échelle de l’UE, quelques exercices de collecte de données comparatifs, mais non exhaustifs, ont fourni des estimations mais devraient être actualisés. Il manque également des données sur la taille et l’ampleur potentielles des dons philanthropiques et sur la possibilité de mobiliser ce type d’investissements privés pour promouvoir l’économie sociale et d’autres objectifs stratégiques de l’UE. La Commission continuera donc à soutenir des politiques fondées sur des données probantes en recensant, collectant et analysant des informations quantitatives et qualitatives sur l’économie sociale dans tous les États membres. Cela contribuera également au suivi de l’écosystème industriel «Économie sociale et de proximité».
La Commission:
–lancera une nouvelle étude visant à recueillir des informations quantitatives et qualitatives sur l’économie sociale dans tous les États membres de l’UE;
–lancera une étude spécifique sur les dons philanthropiques dans l’UE.
Enfin, l’intérêt des universitaires pour l’économie sociale s’est accru, mais le dialogue et l’enrichissement mutuel des idées avec le monde politique pourraient être améliorés. La Commission s’emploiera à faciliter de tels échanges.
6.Voie à suivre
Ces dix dernières années, la Commission a pris des mesures importantes pour favoriser le développement de l’économie sociale et des entreprises sociales dans le cadre de l’économie sociale de marché européenne. Les réalisations passées doivent être consolidées et améliorées de sorte que l’UE puisse répondre aux besoins et exploiter les possibilités découlant des défis démographiques et des transitions écologique et numérique, tout en construisant une économie juste, inclusive et résiliente à même de répondre à long terme aux conséquences de la crise de la COVID-19.
Le présent plan d’action fournit un cadre européen jusqu’en 2030, dans lequel le développement de l’économie sociale continuera d’être soutenu. Il présente une série d’actions à mettre en place en liaison avec celles du plan d’action sur le socle européen des droits sociaux et avec la réalisation de ses objectifs en matière d’emploi et de réduction de la pauvreté.
La Commission mettra en évidence le potentiel de l’économie sociale en matière de création d’emplois et de promotion de la cohésion sociale dans le cadre du processus du Semestre européen et de la mise en œuvre par les États membres des lignes directrices pour l’emploi.
Le plan d’action a été élaboré en coopération avec les acteurs de l’économie sociale et sa mise en œuvre nécessitera également de leur part un engagement et une coopération à tous les niveaux, européen, national, régional et local de même qu’international.
La réussite de la mise en œuvre dépendra également de la coordination des efforts avec les États membres. La Commission encourage les États membres à mettre à jour leurs stratégies et mesures en matière d’économie sociale — ou à adopter de telles stratégies et mesures — en coopération avec les acteurs de l’économie sociale. À cette fin, elle les invite à désigner, dans leurs institutions, des coordinateurs de l’économie sociale qui seront chargés d’encadrer leurs stratégies, de garantir la cohérence dans l’élaboration des politiques entre les services gouvernementaux et de faciliter l’accès aux financements européens et nationaux et les relations avec les autorités responsables de la gestion des fonds structurels.
La Commission assistera les États membres dans la définition de leurs stratégies et mesures en faveur de l’économie sociale et soutiendra les travaux des coordinateurs de l’économie sociale en vue de la mise en œuvre et du suivi du présent plan d’action.
La Commission travaillera également en partenariat étroit avec d’autres institutions et organes de l’UE, à savoir le Parlement européen, le Comité des régions et le Comité économique et social européen ainsi que le groupe Banque européenne d’investissement.
La Commission invite les acteurs de l’économie sociale, les institutions et organes de l’UE à approuver le présent plan d’action et à contribuer activement à sa mise en œuvre en y associant directement les acteurs de l’économie sociale. Elle travaillera avec son groupe d’experts sur l’économie sociale et les entreprises sociales, qui sera renouvelé à la fin du mandat actuel.
La Commission fera le point sur la mise en œuvre du plan d’action en 2025 et publiera un rapport indiquant les progrès accomplis et les évolutions.
Actions clés de la Commission et calendrier de leur mise en œuvre
Proposition de recommandation du Conseil relative au développement des conditions-cadres de l’économie sociale (voir le point 3.1)
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2023
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Organisation de webinaires et d’ateliers à l’intention des fonctionnaires portant sur divers domaines d’action pertinents pour l’économie sociale (voir le point 3.1)
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2022, 2023
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Lancement d’une nouvelle initiative dans le cadre du programme pour le marché unique visant à soutenir la création de partenariats locaux et régionaux entre les entités de l’économie sociale et les entreprises traditionnelles, propices à un marché interentreprises conforme au principe «acheter social» (voir le point 3.3)
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2022
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Amélioration de l’accès au financement pour les entrepreneurs sociaux des Balkans occidentaux, du partenariat oriental et du voisinage méridional, en lançant des actions visant à encourager les initiatives de terrain et à aider les intermédiaires à développer des produits financiers adaptés aux besoins des entités de l’économie sociale (voir le point 3.5)
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2023
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Lancement d’un nouveau portail européen unique de l’économie sociale qui fournira un point d’entrée clair aux acteurs de l’économie sociale, à d’autres acteurs concernés et aux personnes qui cherchent des informations sur les financements, les politiques et les initiatives pertinents de l’UE (voir le point 4.1)
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2023
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Lancement d’une nouvelle «Youth Entrepreneurship Policy Academy» qui encouragera l’entrepreneuriat des jeunes, y compris chez les femmes et les entrepreneurs sociaux, en collaboration avec les décideurs politiques nationaux et les réseaux d’entrepreneuriat des jeunes (voir le point 4.1)
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2022
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Lancement de nouveaux produits financiers dans le cadre du programme InvestEU visant à mobiliser des financements privés, ciblés sur les besoins des entreprises sociales à différents stades de développement (voir le point 4.2)
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2022
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Soutien du développement de la mesure et de la gestion de l’impact social afin d’aider les acteurs de l’économie sociale dans l’UE (voir le point 4.2)
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2023
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Création d'un parcours de transition pour l’écosystème industriel «Économie sociale et de proximité» afin de poursuivre les travaux avec les pouvoirs publics et les parties prenantes sur la mise en œuvre du plan d’action dans ce domaine (voir le point 4.3)
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2022
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Stimulation de l’innovation sociale grâce à une nouvelle approche de la coopération transnationale dans le cadre du FSE+ et à la création d’un nouveau «Centre européen de compétences pour l’innovation sociale» (voir le point 4.4)
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2022
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