Bruxelles, le 9.12.2021

COM(2021) 777 final

COMMUNICATION DE LA COMMISSION AU PARLEMENT EUROPÉEN ET AU CONSEIL

Une Europe plus inclusive et plus protectrice: extension de la liste des infractions de l'UE aux discours de haine et aux crimes de haine


«La haine est toujours de la haine –— et personne ne devrait s’en accommoder»

Ursula von der Leyen, présidente de la Commission européenne 
Discours sur l’état de l’Union, septembre 2020

1.Introduction

Dans son discours sur l’état de l’Union 2020 1 , la présidente de la Commission européenne, Ursula Von der Leyen, soulignait que les progrès en matière de lutte contre le racisme et la haine étaient fragiles, que l’heure du changement avait sonné et qu’il était temps à présent de construire une Union qui condamne le racisme, mais aussi qui agit. Elle annonçait que la Commission proposerait «d’étendre la liste des infractions prévues par la législation de l’UE à toutes les formes de crimes de haine et de discours de haine — qu’ils se fondent sur la race, la religion, le genre ou la sexualité». 

La lutte contre les discours et crimes de haine s’inscrit dans l’action menée par la Commission en vue de promouvoir les valeurs fondamentales de l’UE et de faire respecter la charte des droits fondamentaux de l’UE (ci-après la «Charte»). Toutes les formes et manifestations de haine et d’intolérance sont incompatibles avec les valeurs sur lesquelles l’UE est fondée, à savoir le respect de la dignité humaine, la liberté, la démocratie, l’égalité, l’État de droit et le respect des droits de l’homme, y compris les droits des personnes appartenant à des minorités. Ces valeurs, consacrées à l’article 2 du traité sur l’Union européenne (ci-après le «TUE»), sont communes aux États membres dans une société caractérisée par le pluralisme, la non‑discrimination, la tolérance, la justice, la solidarité et l’égalité entre les femmes et les hommes.

En effet, toute forme de discrimination — qu’elle soit fondée sur le sexe, la race ou l’origine ethnique, la religion ou les convictions, un handicap, l’âge ou l’orientation sexuelle, ainsi que l’énonce l’article 19 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (ci-après le «TFUE») — est interdite. Par ailleurs, la liberté d’expression est l’un des piliers d’une société démocratique et pluraliste et doit être fortement protégée. En outre, ainsi que le mentionne l’article 67 du TFUE, l’Union constitue un espace de liberté, de sécurité et de justice dans le respect des droits fondamentaux. Elle doit assurer un niveau élevé de sécurité, grâce à des mesures visant à prévenir et à combattre la criminalité, le racisme et la xénophobie.

Les discours et crimes de haine touchent non seulement les victimes et leur communauté, en leur causant des souffrances et en limitant leurs droits fondamentaux et leurs libertés, mais également la société dans son ensemble. La haine sape les fondements mêmes de notre société. Elle affaiblit la compréhension mutuelle et le respect de la diversité sur lesquels reposent des sociétés pluralistes et démocratiques.

Les discours et crimes de haine ont fortement augmenté au cours des dernières décennies 2 . La haine se banalise 3 et cible des personnes ou des groupes de personnes qui partagent ou sont perçues comme partageant «une caractéristique commune», telle que la race, l’origine ethnique, la langue, la religion, la nationalité, l’âge, le sexe, l’orientation sexuelle, l’identité de genre, l’expression de genre, les caractéristiques sexuelles ou toute autre caractéristique fondamentale, ou une combinaison de ces caractéristiques. Ces caractéristiques sont généralement apparentes et, de ce fait, constituent les cibles privilégiées des auteurs; elles concernent un composant de l’identité personnelle qui est immuable ou fondateur de la personne, tout en étant un élément marqueur d’un groupe identitaire 4 .

L’usage accru de l’internet et des médias sociaux a également contribué à l’augmentation des discours de haine en ligne au fil des années. L’effet désinhibant des outils en ligne facilite la diffusion rapide de ces discours dans le monde numérique, car l’anonymat présumé sur l’internet et le sentiment d’impunité réduisent l’inhibition qui empêcherait normalement de commettre de telles infractions. Dans le même temps, les émotions et les vulnérabilités sont de plus en plus souvent exploitées, notamment à des fins politiques dans le débat public, pour faire circuler des propos et des attaques racistes et xénophobes, fréquemment amplifiés par les médias sociaux 5 . On voit la haine se répandre dans les publics potentiellement vulnérables, en prenant des formes très diverses d’extrémisme violent, qui vont du djihadisme aux extrémismes de droite et de gauche 6 . La société est ainsi devenue polarisée et les discours de haine contre les groupes marginalisés, en particulier, se sont multipliés.

La crise de santé publique causée par la pandémie de COVID-19 a exacerbé les sentiments d’insécurité, d’isolement et de peur, créant ainsi une atmosphère dans laquelle les discours de haine ont prospéré. Divers mouvements idéologiques extrémistes ont profité de la pandémie pour cibler des populations spécifiques (pour des mobiles divers, dont la nationalité, la religion, la race, le sexe, l’orientation sexuelle, la couleur et même l’âge), ce qui a également donné lieu à des crimes de haine 7 .

La Commission entend proposer d’élargir la liste des domaines de criminalité de l’UE, pour y inclure les discours de haine et les crimes de haine. La haine n’a pas sa place dans l’Union. Elle doit être combattue par tous les moyens disponibles, y compris le droit pénal.

2.Contexte de l’initiative

L’article 83, paragraphe 1, du TFUE énonce une liste exhaustive de domaines de criminalité 8 dans lesquels le Parlement européen et le Conseil peuvent établir des règles minimales relatives à la définition des infractions pénales et des sanctions applicables dans tous les États membres de l’UE. Il prévoit en outre que, en fonction des développements de la criminalité, le Conseil peut adopter une décision identifiant d’autres domaines de criminalité particulièrement grave revêtant une dimension transfrontière résultant du caractère ou des incidences de ces infractions ou d’un besoin particulier de les combattre sur des bases communes.

L’adoption d’une telle décision par le Conseil constituerait la première étape de création de la base juridique nécessaire à l’adoption, dans un second temps, d’un cadre juridique commun pour combattre les discours et crimes de haine dans toute l’Union. Cette future législation compléterait la législation de l’UE actuelle, qui impose d’incriminer les discours et crimes de haine fondés sur la race, la couleur, la religion, l’ascendance ou l’origine nationale ou ethnique (voir section 2.2), et elle ajouterait d’autres mobiles spécifiques.

Des travaux préparatoires approfondis ont eu lieu en vue de la présente initiative, dont une étude externe 9 , une vaste consultation réalisée par la Commission, ainsi qu’un grand nombre de rapports et d’études disponibles.

2.1.Contexte institutionnel

La Commission soumet la présente initiative sur le fondement de l’article 17, paragraphe 1, du TUE 10 et conformément à la procédure en deux phases prévue à l’article 83, paragraphe 1, du TFUE.

Dans la première phase, le Conseil adopte à l’unanimité, après approbation du Parlement européen, une décision identifiant les discours et crimes de haine comme un autre domaine de criminalité qui remplit les critères visés à l’article 83, paragraphe 1, du TFUE. Une telle décision étendra la liste des domaines de criminalité énumérés à l’article 83, paragraphe 1, du TFUE, pour y inclure les discours et crimes de haine à titre d’infractions de l’UE. Il existera ainsi une base juridique permettant au Parlement européen et au Conseil d’établir, au moyen de directives, des règles minimales relatives à la définition des infractions et sanctions pénales dans ce domaine de criminalité.

Dans une seconde phase, la Commission peut présenter des propositions de directive établissant des règles minimales relatives à la définition et à la sanction des discours de haine et des crimes de haine, en vue de leur adoption par le Parlement européen et le Conseil selon la procédure législative ordinaire.

La présente initiative porte sur la première phase et est sans préjudice des actions qui pourraient être entreprises au cours d’une seconde phase. Elle ne préjuge pas de la portée et du contenu du droit dérivé à proposer ultérieurement. De même, l’adoption des directives susmentionnées affecte les libertés fondamentales protégées par la Charte, en particulier la liberté d’expression, y compris la liberté de la presse et des médias.

Une fois la décision du Conseil adoptée, la Commission fera usage de son droit d’initiative conformément aux exigences en matière d’amélioration de la législation. La Commission procédera à une analyse d’impact afin d’évaluer minutieusement les différentes possibilités envisageables pour définir les infractions pénales et les sanctions, ainsi que leurs incidences sur les droits fondamentaux, en particulier sur la liberté d’expression et la liberté de la presse et des médias, qui constituent des fondements solides d’une société démocratique 11 . 

Afin de définir avec précision la portée et le contenu des dispositions qui pourraient être proposées, la Commission accordera une attention particulière à l’évolution des discours et crimes de haine, en s’appuyant sur les données et les tendances les plus récentes. Cette évaluation minutieuse de l’évolution et des tendances de la société sera particulièrement pertinente pour déterminer les éléments constitutifs des infractions pénales futures. Il s’agira notamment de définir les formes précises de discours de haine et de crimes de haine à incriminer, en se référant aux caractéristiques protégées des personnes et des groupes ciblés.

Lors de l’élaboration de ce droit dérivé, la Commission consultera les États membres et le Parlement européen, y compris sur les spécificités des cadres législatifs nationaux relatifs au droit pénal et aux droits fondamentaux. La Commission organisera également une large consultation de tous les acteurs concernés, en y associant étroitement le Parlement européen.

2.2.La lutte contre les discours et crimes de haine, priorité de l’UE

Au niveau de l’UE, la décision-cadre 2008/913/JAI du Conseil du 28 novembre 2008 sur la lutte contre certaines formes et manifestations de racisme et de xénophobie au moyen du droit pénal (ci-après la «décision-cadre») 12 est déjà en place pour apporter une réponse commune forte aux discours et crimes de haine à caractère raciste et xénophobe. La décision-cadre vise à faire en sorte que les manifestations graves de racisme et de xénophobie soient passibles de sanctions pénales effectives, proportionnées et dissuasives dans l’ensemble de l’UE. Elle exige des États membres qu’ils érigent en infraction pénale les discours de haine, c’est-à-dire l’incitation publique à la violence ou à la haine fondée sur la race, la couleur, la religion, l’ascendance, l’origine nationale ou ethnique 13 . Elle impose également aux États membres, pour les infractions autres que les discours de haine, de faire en sorte que cette motivation raciste et xénophobe soit considérée comme une circonstance aggravante ou, à défaut, qu’elle puisse être prise en considération par la justice pour la détermination des peines.

La Commission soutient les efforts des États membres en vue de la bonne mise en œuvre de la décision-cadre, par l’intermédiaire du groupe de haut niveau sur la lutte contre le racisme, la xénophobie et d’autres formes d’intolérance 14 , pour développer la formation et le renforcement des capacités au sein des services répressifs, améliorer l’enregistrement des crimes de haine et la collecte de données, et encourager les victimes à dénoncer les crimes de haine. 

La présente initiative s’inscrit dans un ensemble plus large d’actions de l’UE visant à lutter contre les discours de haine illégaux, les idéologies extrémistes violentes et le terrorisme en ligne, notamment le code de conduite de l’UE pour la lutte contre les discours haineux illégaux en ligne 15 , le règlement relatif à la lutte contre la diffusion de contenus à caractère terroriste en ligne 16 et le forum de l’UE sur l’internet 17 .

La directive «Services de médias audiovisuels» 18 impose aux États membres de veiller à ce que les plateformes de partage de vidéos prennent des mesures efficaces non seulement contre la diffusion de contenus enfreignant la décision-cadre, mais aussi contre les discours haineux fondés sur l’un des motifs visés à l’article 21 de la Charte. En outre, la proposition de la Commission relative à une législation sur les services numériques 19 prévoit une réforme globale visant à garantir la sécurité des utilisateurs en ligne, en imposant l’obligation de lutter contre les contenus illicites et de gérer les risques systémiques. De plus, l’actualisation, en 2022, de la stratégie européenne pour un Internet mieux adapté aux enfants 20 visera à protéger les enfants contre les menaces en ligne, notamment le cyberharcèlement et les discours de haine.

La présente initiative appuiera le plan d’action de l’UE contre le racisme 2020-2025 21 et la stratégie de lutte contre l’antisémitisme et de soutien à la vie juive dans l’UE 22 . Elle viendra aussi compléter des initiatives récentes destinées à promouvoir l’égalité et le respect de la diversité, telles que la stratégie en faveur de l’égalité de traitement à l’égard des personnes LGBTIQ pour la période 2020-2025 23 . Ces initiatives récentes ont mis en évidence la nécessité d’une réponse pénale ferme au niveau de l’UE aux discours et crimes de haine fondés sur d’autres motifs que le racisme et la xénophobie, en particulier ceux liés au sexe, à l’orientation sexuelle, à l’âge et au handicap 24 .

La stratégie en faveur de l’égalité entre les hommes et les femmes 2020-2025 25 définit des mesures de lutte contre la violence fondée sur le genre à l’égard des femmes et des filles, dont la nécessité d’ériger en infractions au niveau de l’UE certaines formes spécifiques de violence à caractère sexiste. La présente initiative complétera la future proposition de directive visant à prévenir et à combattre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique. Alors que les discours et crimes de haine se caractérisent par une haine sous-jacente à l’égard d’un groupe de personnes, notamment par de forts préjugés sexistes et une haine des femmes, la future directive incriminera, dans les limites de la compétence de l’UE, certaines formes spécifiques de violence qui ne nécessitent pas d’élément de haine et, en particulier, de haine à l’égard d’un individu faisant partie d’un groupe de personnes. Par conséquent, la présente initiative visant à étendre la liste des infractions de l’UE crée une base juridique supplémentaire pour lutter contre ces formes particulières de violence grave à l’égard des femmes et des filles, que l’on peut également définir comme des discours ou crimes de haine misogynes comportant un motif à caractère sexiste objectivement identifiable.

La présente initiative complétera également la stratégie en faveur des droits des personnes handicapées 2021-2030 26 , la stratégie relative aux droits des victimes 2020-2025 27 et la directive sur les droits des victimes 28 . Elle sera en outre alignée sur les conclusions du Conseil de mars 2021 sur l’intégration du vieillissement dans les politiques publiques 29 , qui rappellent que la discrimination fondée sur l’âge est un phénomène fréquent, tandis que la violence à l’encontre des personnes âgées est un problème émergent.

En septembre 2021, le Parlement européen a lui aussi adopté une résolution législative, par laquelle il a invité la Commission à présenter une proposition législative en vue de faire de la violence fondée sur le genre un nouveau domaine de criminalité relevant de l’article 83, paragraphe 1, du TFUE 30 . La présente initiative ainsi que la prochaine proposition législative visant à lutter contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique ont pour objectif de répondre à la demande du Parlement européen.

3.La nécessité d’étendre la liste des infractions de l’UE aux discours de haine et crimes de haine

En vertu de l’article 83, paragraphe 1, du TFUE, le Conseil peut, en fonction des développements de la criminalité, identifier d’autres domaines de criminalité, à condition que ceux-ci remplissent certains critères. Le nouveau domaine doit notamment concerner une forme de criminalité particulièrement grave, qui revêt une dimension transfrontière résultant du caractère ou des incidences des infractions ou d’un besoin particulier de les combattre sur des bases communes.

Les paragraphes suivants présentent l’analyse faite par la Commission des discours et crimes de haine à la lumière des critères fixés par l’article 83, paragraphe 1, du TFUE.

3.1.Les discours et crimes de haine en tant que domaine de criminalité

Les discours et crimes de haine sont un domaine de criminalité bien établi au niveau international 31 .

Dans sa recommandation de 1997 32 , le Conseil de l’Europe avait déjà considéré le discours de haine comme une incitation à la haine visant des personnes ou des groupes définis par certaines caractéristiques protégées 33 . En 2015, la recommandation de la Commission européenne contre le racisme et l’intolérance («ECRI») du Conseil de l’Europe avait défini le discours de haine comme suit: «le fait de prôner, de promouvoir ou d’encourager sous quelque forme que ce soit, le dénigrement, la haine ou la diffamation d’une personne ou d’un groupe de personnes ainsi que le harcèlement, l’injure, les stéréotypes négatifs, la stigmatisation ou la menace envers une personne ou un groupe de personnes et la justification de tous les types précédents d’expression au motif de la “race”, de la couleur, de l’origine familiale, nationale ou ethnique, de l’âge, du handicap, de la langue, de la religion ou des convictions, du sexe, du genre, de l’identité de genre, de l’orientation sexuelle, d’autres caractéristiques personnelles ou de statut» 34 . L’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe («OSCE») entend par crimes de haine «des infractions pénales motivées par des préjugés à l’égard d’un certain groupe au sein de la société» 35 .

Si le droit de l’Union ne prévoit pas de définition juridique du discours de haine et du crime de haine en tant que tels, la décision-cadre établit des définitions pénales des formes les plus graves de racisme et de xénophobie. Le discours de haine y est défini comme une incitation publique à la violence ou à la haine visant un groupe de personnes ou un membre d’un tel groupe partageant une caractéristique protégée 36 . Le crime de haine au sens de la décision-cadre 37 est une infraction pénale 38 (infraction de base) autre que le discours de haine, commise avec une motivation raciste ou xénophobe (mobile discriminatoire).

Tant pour les discours de haine que pour les crimes de haine, c’est le mobile discriminatoire qui pousse l’auteur de l’infraction à passer à l’acte. Les personnes visées sont choisies pour leur lien, attachement, adhésion, soutien ou appartenance, réels ou perçus, à une communauté ou un groupe partageant une caractéristique protégée 39 . Il s’agit d’actes «identitaires» ou «à message», car le message transmis — à savoir, que les victimes visées n’appartiennent pas à cette société — s’adresse non seulement à la victime, mais aussi à l’ensemble de sa communauté ou de son groupe 40 . La motivation de l’auteur est donc l’élément clé qui permet de distinguer ces infractions des autres et d’établir leur plus grande gravité, compte tenu des répercussions particulières qu’elles ont sur la victime en tant qu’individu, sur les communautés et sur la société en général 41 .

L’élément de haine est une caractéristique intrinsèque des discours et crimes de haine. La haine pousse à dévaloriser et menacer la dignité humaine d’une personne ou d’un groupe. Elle nie leur égalité en tant que membres de la société 42 , y compris leur droit de participer à la vie politique et sociale, qui fait partie des principes fondamentaux sur lesquels l’UE est fondée. Il est essentiel de comprendre le rôle de la haine à l’égard des personnes qui présentent des caractéristiques protégées, pour que ces infractions soient reconnues, poursuivies et sanctionnées au sein de nos systèmes de justice pénale.

Eu égard à leur caractéristique commune, à savoir la haine visant des personnes ou des groupes qui partagent des caractéristiques protégées (ou sont perçus comme tels), les discours et crimes de haine peuvent être considérés comme un «domaine de criminalité» au sens de l’article 83, paragraphe 1, du TFUE.

À l’instar d’autres infractions de l’UE qui ont une caractéristique commune, telles que la criminalité organisée ou le terrorisme, la haine à l’égard des personnes présentant des caractéristiques protégées est le point commun entre les actes relevant d’un groupe d’infractions plus large. L’incrimination des discours de haine et des crimes de haine a pour objectif fondamental et commun de combattre cette haine, qui réunit ces deux catégories d’infractions au sein d’un même «domaine de criminalité». L’ajout des discours et crimes de haine comme nouveau domaine de criminalité permettrait à la Commission de proposer, dans une seconde phase, des dispositions de droit dérivé qui porteraient spécifiquement sur les évolutions et problèmes sociétaux dans ce domaine, au fur et à mesure de leur apparition et de leur évolution future.

3.2.Les discours et crimes de haine en tant que domaine de criminalité particulièrement grave

Les discours et crimes de haine sont des infractions particulièrement graves en raison de leurs effets néfastes sur les personnes et sur la société tout entière, qui sapent les fondements de l’UE.

3.2.1.Les incidences sur les valeurs communes

Les discours et crimes de haine sont contraires aux valeurs communes de l’UE et aux droits fondamentaux, tels qu’ils sont consacrés aux articles 2 et 6 du TUE, ainsi que dans la Charte.

La gravité particulière de ces comportements, compte tenu de leurs incidences sur les valeurs et les droits fondamentaux, a été reconnue à maintes reprises par la Cour européenne des droits de l’homme (ci-après la «CEDH») dans sa jurisprudence. La CEDH a jugé que, lorsque des actes constituant des infractions graves sont dirigés contre l’intégrité physique ou mentale d’une personne, seuls des mécanismes de droit pénal efficaces peuvent assurer une protection adéquate et constituer un facteur de dissuasion. Elle a considéré en particulier que des mesures pénales sont nécessaires en ce qui concerne les agressions verbales et menaces physiques directes motivées par des attitudes discriminatoires 43 .

Reconnaissant que la tolérance et le respect de l’égale dignité de tous les êtres humains constituent le fondement d’une société démocratique et pluraliste, la CEDH a estimé qu’il pouvait être nécessaire, dans les «sociétés démocratiques, de sanctionner voire de prévenir toutes les formes d’expression qui propagent, incitent à, promeuvent ou justifient la haine fondée sur l’intolérance» 44 . Elle a ajouté que des sanctions pénales pouvaient aussi être invoquées, comme mesure de dernier recours, contre les personnes responsables des manifestations de haine les plus graves, incitant les autres à la violence. C’est pourquoi la CEDH reconnaît, dans sa jurisprudence constante, que le droit à la liberté d’expression n’empêche pas les réponses pénales à certaines formes de discours de haine 45 .

3.2.2.Effets néfastes sur les victimes et sur leurs communautés

Le préjudice que les discours et crimes de haine causent aux victimes, aux communautés ainsi qu’à la société tout entière témoigne de la gravité particulière de ces comportements.

Les discours et crimes de haine portent atteinte au droit fondamental des victimes à la dignité et à l’égalité. Ils ont des conséquences graves et souvent durables sur la santé physique et mentale et sur le bien-être des victimes.

Les victimes des discours et crimes de haine sont visées à cause de leurs caractéristiques immuables et non modifiables, ou d’une caractéristique qui est au cœur de leur identité 46 . Elles se sentent alors dévalorisées, indésirables, dénigrées et méprisées dans la société, en raison de leur identité. Outre les effets néfastes sur la santé physique, le degré d’atteinte psychique (par exemple, le sentiment de violation et d’humiliation) causée par des actes de haine est souvent plus important que le dommage physique résultant de la violence elle-même 47 . Les victimes de crimes de haine peuvent présenter des symptômes de traumatisme grave tels que la dépression, la suspicion à l’égard d’autrui, l’autoculpabilité et un profond sentiment de solitude. Ce sont ces ressentis qui distinguent les crimes de haine des autres types de crimes. En outre, de nombreuses victimes de crimes de haine culpabilisent et souffrent d’un manque de confiance 48 .

De manière plus générale, les victimes de crimes de haine doivent également vivre avec la crainte que l’on s’en prenne de nouveau à elles, et les groupes plus vulnérables, tels que les personnes âgées, les enfants et les personnes souffrant d’un handicap physique ou mental, risquent davantage d’être les cibles de discours de haine lorsqu’ils recourent à la communication en ligne dans leur vie quotidienne. Les victimes de discours de haine sont en outre exposées à l’exclusion politique et sociale, ce qui les dissuade de recourir aux soins médicaux et à d’autres services essentiels 49 . De plus, les victimes qui dénoncent des faits de haine risquent souvent de subir une victimisation secondaire 50 , ce qui peut leur causer encore plus de tort. Lorsque les victimes sont des enfants, les discours de haine peuvent nuire gravement à leur développement personnel à long terme.

Les crimes motivés par la haine envoient un message de rejet et de dévalorisation de tout un groupe ou toute une communauté, et les personnes qui en font partie ont peur et se sentent menacées 51 . Il importe de souligner le potentiel d’émulation que les discours et crimes de haine ont parmi les partisans de l’auteur de l’infraction, ce qui augmente encore la peur et l’intimidation. Ils reproduisent ainsi les discours et crimes de haine ciblant d’autres personnes perçues comme partageant des caractéristiques protégées similaires ou comme étant liées à la victime 52 .

3.2.3.Effets néfastes sur la société tout entière

Les discours et crimes de haine ont aussi une forte dimension sociétale. Ils constituent une menace pour les valeurs démocratiques, la stabilité sociale et la paix 53 et accentuent les divisions sociales, érodent la cohésion sociale et déclenchent des représailles, aboutissant à un engrenage de violence 54 . Le climat de conflit, de peur, de polarisation et de radicalisation consécutif aux actes motivés par la haine a également été confirmé par les participants à la consultation ciblée de la Commission

Les discours et crimes de haine ont des effets néfastes sur les droits fondamentaux, en particulier sur la dignité humaine, l’égalité et la liberté d’expression. Leur effet dissuasif sur la liberté d’expression peut avoir pour conséquence que les utilisateurs des médias sociaux s’abstiennent de participer à des débats publics à cause des contenus haineux qu’ils y voient 55 . La haine empoisonne également le dialogue politique et affecte la volonté des citoyens de s’engager dans la vie politique et d’exercer des fonctions officielles qui ont un rayonnement public, comme les députés, les maires et les responsables politiques 56 . En ce qui concerne les femmes dans la vie publique, une enquête menée auprès de 123 femmes parlementaires européennes indiquait que 46,9 % des personnes interrogées avaient déclaré avoir reçu des menaces de mort, de viol ou de passage à tabac et 58,2 % avaient été la cible d’attaques sexistes en ligne sur les réseaux sociaux 57 . 

Les journalistes sont fréquemment victimes 58 de discours de haine sur les réseaux sociaux et peuvent dès lors hésiter à participer à un débat public ou à aborder certains sujets 59 . Si les discours et menaces haineux sont dirigés contre tous les journalistes, les statistiques montrent que les femmes journalistes font l’objet de davantage de menaces que leurs homologues masculins, notamment sous la forme de harcèlement en ligne, de menaces de viol et de meurtre, ainsi que d’incitation à la haine fondée sur le sexe 60 . Ces attaques résultent parfois de campagnes orchestrées visant à discréditer ou à réduire au silence les femmes journalistes.

Les discours de haine peuvent causer non seulement des conflits, mais aussi des crimes de haine 61 . Des études montrent qu’il existe une «pyramide de la haine» 62 ou une «escalade du mal», qui commence par des actes basés sur des préjugés (harcèlement, moqueries, déshumanisation, etc.) et des discriminations (par exemple économiques, politiques), puis évolue vers une violence motivée par des préjugés, telle que le meurtre, le viol, l’agression, le terrorisme, l’extrémisme violent, jusqu’au génocide 63 . Des recherches indiquent un lien entre des tweets ciblés et discriminatoires publiés dans une ville et le nombre élevé de crimes de haine dans cette ville 64 . Les Nations unies soulignent que «l’incitation à la violence envers des communautés ou des personnes en raison de leur identité peut ouvrir la voie à des atrocités criminelles [...] et en est à la fois un signe avant-coureur et un indicateur de risque» 65 . 

Des recherches montrent aussi que les discours de haine sur les médias sociaux entraînent davantage de crimes contre les minorités dans le monde réel 66 . Les discours de haine en ligne ont provoqué une hausse de la violence à l’égard des réfugiés et des immigrés, des minorités ethniques et religieuses, et des personnes LGBTIQ 67 . Être exposé aux discours de haine ou visé par ces derniers peut également contribuer au processus de radicalisation et à l’extrémisme violent. Ceux-ci peuvent se manifester en ligne et hors ligne par des discours et de la propagande, mais également donner lieu à des attaques extrémistes violentes ou des attentats terroristes. Les conséquences peuvent être désastreuses et fatales pour la société 68 .

Rappelant que l’internet avait apporté une nouvelle dimension à l’expression de discours de haine sexistes, le Conseil de l’Europe a souligné que les discours de haine «peuvent dégénérer en ou inciter à des agissements ouvertement offensants et menaçants, y compris des abus ou de la violence sexuels, [...] ou des actes potentiellement mortels [...ou l’]automutilation» 69 . L’émergence de groupes et de communautés en ligne tels que Manosphere 70 et Incel 71 , qui offrent d’autres forums internationaux pour promouvoir et propager la misogynie et l’hostilité envers les femmes, est particulièrement préoccupante à cet égard 72 .

3.2.4.Ampleur des discours et crimes de haine

Une personne LGBTIQ sur dix (11 %) interrogée dans le cadre d’une enquête réalisée par l’Agence des droits fondamentaux de l’Union européenne (FRA) indique avoir été agressée physiquement ou sexuellement parce qu’elle était LGBTIQ (le taux de répondants transgenres et intersexués ayant subi des agressions physiques ou sexuelles était plus élevé sur cette période: 17 % et 22 %, respectivement), et 51 % des 15-17 ans disent avoir été victimes de harcèlement scolaire 73 .

Les discours et crimes de haine à l’égard des personnes d’origine asiatique, en particulier les Chinois, ou perçues comme telles ont augmenté au cours de la pandémie de COVID-19 74 , prenant notamment la forme d’agressions et de passages à tabac à caractère raciste, de harcèlement violent, de menaces et d’injures racistes 75 . Une enquête réalisée par la FRA montre que les taux de discrimination, de harcèlement et de violence motivés par la haine sont plus élevés à l’égard des répondants roms et des répondants d’origine subsaharienne ou nord-africaine 76 . 

Selon une enquête sur l’antisémitisme menée par la FRA en 2018, 40 % des Juifs dans l’UE craignent d’être agressés physiquement 77 . Les conclusions d’une enquête de l’UE sur les minorités et la discrimination 78 , menée par la FRA en 2017, indiquent que 27 % des musulmans ont été victimes d’incidents de harcèlement motivé par la haine au cours des 12 mois précédents, et que ce pourcentage est plus élevé (31 %) chez les femmes musulmanes portant le foulard en public.

Les femmes, et en particulier les jeunes femmes, sont la cible de discours de haine fondés sur le genre, en ligne ou hors ligne 79 . Selon une enquête mondiale datant de 2020, 52 % des jeunes femmes et jeunes filles ont subi des violences en ligne, y compris des menaces 80 .

À cela s’ajoute le cas des personnes qui cumulent deux ou plusieurs caractéristiques protégées, telles que les femmes de couleur, qui ont 84 % plus de risques que les femmes blanches de faire l’objet de tweets violents ou «problématiques» 81 .

Les Nations unies ont fait part de leur inquiétude au sujet des discours de haine visant les personnes âgées, qui «sont proférés publiquement et dans les médias sociaux, comme autant de marques d’un ressentiment entre générations» 82 . Les personnes handicapées sont plus exposées que d’autres aux crimes violents, dont les crimes de haine, ou aux discours de haine 83 . Les réponses à la consultation de la Commission ont montré que, dans certains pays, 21 % des crimes de haine signalés aux autorités visent des personnes handicapées 84 . En général, les victimes sont ciblées simplement parce qu’elles ont un handicap, sont perçues comme en ayant un ou sont associées à une personne handicapée 85 . En outre, l’Organisation mondiale de la santé estime que la maltraitance des personnes âgées va probablement s’aggraver, en raison du vieillissement de la population 86 .

Ces chiffres ne représentent que la partie émergée de l’iceberg, en raison du sous-signalement et du sous-enregistrement des incidents 87 et des méthodes de collecte des données ne permettant pas les comparaisons 88 . Par exemple, des sources 89 indiquent que 88 % des agressions physiques motivées par la haine commises à l’égard des Roms n’ont pas été dénoncées, et que 79 % des Juifs victimes de harcèlement antisémite n’ont pas signalé les incidents les plus graves à la police ni à une autre organisation. En outre, seul un cinquième (21 %) des cas de violence physique ou sexuelle à l’encontre de personnes LGBTIQ a été signalé 90 . L’âge fait partie des facteurs qui, lorsqu’ils ne sont pas reconnus comme des motifs incitant aux discours et crimes de haine et que les infractions connexes ne sont pas sanctionnées, sont à l’origine du nombre inférieur de signalements et d’un manque d’informations sur l’ampleur des discours et crimes de haine à l’égard des personnes âgées 91 . En particulier, la plateforme AGE 92 déplore cette «réalité cachée malgré des niveaux de prévalence inquiétants dans toute l’Europe» et souligne que les victimes âgées sont d’autant plus invisibles et mal protégées qu’il y a un manque de sensibilisation au fait que l’âge peut susciter des crimes de haine.

3.2.5.La réponse pénale dans les États membres

Face à la gravité des incidences décrites ci-dessus, les États membres ont décidé d’incriminer certaines formes de discours de haine et de crimes de haine. L’incrimination de ces comportements est porteuse d’un message de réprobation sociale particulière. Elle met en lumière la gravité et la dangerosité spécifiques de ces comportements, qui ont un effet particulièrement destructeur sur les droits fondamentaux.

Depuis la transposition de la décision-cadre en droit national, les discours de haine fondés sur la race, la couleur, la religion, l’ascendance ou l’origine nationale ou ethnique sont incriminés dans tous les États membres 93 . Les États membres ont aussi incriminé explicitement les discours de haine fondés sur d’autres caractéristiques protégées: les discours de haine fondés sur l’orientation sexuelle sont incriminés dans 20 États membres 94 , et ceux fondés sur le sexe ou le genre le sont dans 17 États membres 95 . En outre, les discours de haine fondés sur le handicap sont incriminés dans 14 États membres 96 et ceux fondés sur l’âge dans 6 États membres 97 . De surcroît, 8 États membres 98 ont incriminé (en lieu et place ou en complément) les discours de haine sans définir les caractéristiques protégées des groupes, laissant ouvert le débat autour de l’incrimination des discours de haine afin de protéger tout groupe minoritaire ou toute partie de la population 99 .

Les crimes de haine sont eux aussi largement incriminés dans les États membres, soit en tant qu’infraction autonome pour des crimes spécifiques, soit en tant que circonstance aggravante générale pour tous les crimes commis avec une motivation discriminatoire. Parallèlement à l’incrimination des crimes de haine fondés sur la race, la couleur, la religion, l’ascendance ou l’origine nationale ou ethnique du fait de la transposition de la décision-cadre en droit national, les crimes de haine fondés sur l’orientation sexuelle sont incriminés dans 19 États membres 100 et ceux fondés sur le sexe ou le genre dans 17 États membres 101 . En outre, les crimes de haine fondés sur le handicap sont incriminés dans 13 États membres 102 et ceux fondés sur l’âge dans 10 États membres 103 . De surcroît, 15 États membres 104 autorisent les juridictions nationales à tenir compte de la motivation de l’auteur — et ce, quel que soit le crime commis — lorsqu’elles déterminent la sanction pénale, soit en lieu et place, soit en complément d’une infraction autonome en matière de crimes de haine. Certains États membres ont par ailleurs choisi de ne pas définir les caractéristiques protégées, afin de pouvoir réprimer les crimes de haine fondés sur toute forme d’intolérance.

3.3.La dimension transfrontière des discours et crimes de haine

La dimension transfrontière des discours et crimes de haine est attestée par la nature et l’incidence de ces phénomènes ainsi que par l’existence d’un besoin particulier de les combattre sur des bases communes.

Cela est évident pour les discours de haine tenus en ligne. Étant donné la nature transfrontière de l’internet, les discours de haine en ligne se propagent rapidement et sont accessibles à tout le monde en tout lieu. Les groupes prêchant la haine peuvent ainsi plus facilement élargir leur public à des pays connaissant des situations politiques ou sociales similaires 105 . La plupart des acteurs qui ont répondu à la consultation ciblée de la Commission ont également fait état de cette dimension transfrontière et en ont même donné des exemples concrets 106 . Par exemple, les discours de haine fondés sur des caractéristiques sexuelles se multiplient, et les personnes intersexuées en particulier sont de plus en plus fréquemment la cible de discours de haine proférés par des groupes qui agissent au niveau transfrontière 107 . L’omniprésence des discours de haine fondés sur le genre a également été soulignée par le Conseil de l’Europe 108 , qui appelle à prendre des mesures plus énergiques pour combattre le sexisme.

Toutefois, les messages de haine exprimés hors ligne (par exemple dans la presse écrite, les émissions télévisées, les allocutions politiques ou les événements sportifs) ont une dimension transfrontière attestée par leur incidence, étant donné qu’ils sont facilement reproduits et largement diffusés par-delà les frontières. Plus de 80 % des personnes ayant répondu à la consultation ciblée estiment que les discours de haine hors ligne ont un effet d’entraînement au-delà des frontières 109 . Elles soulignent que les messages de haine sont élaborés et diffusés par des réseaux qui comptent des membres dans plusieurs pays, et que les idéologies sous-tendant ces messages ont un rayonnement international et constituent donc des phénomènes transfrontières 110 .

La dimension transfrontière des crimes de haine est directement liée à celle des discours de haine. La haine traverse les frontières nationales et engendre une spirale de violence. Tout comme les discours de haine, les idéologies qui sous-tendent les crimes de haine peuvent prendre une ampleur internationale et circuler rapidement en ligne. Les crimes de haine peuvent être commis par des réseaux comptant des membres dans plusieurs pays (appartenant ou non à l’UE), qui inspirent, organisent ou perpètrent des agressions physiques. Le Counter Extremism Project 111 , le Soufan Center 112 et l’Anti-Defamation League 113 fournissent des exemples d’activités transnationales menées par différents groupes qui exercent une influence et sont pris pour modèle par-delà les frontières. Les crimes de haine peuvent également créer un climat de peur ou des conflits sociaux qui risquent de se propager d’un État membre à l’autre 114 . Les discours de haine et les crimes de haine peuvent en outre aboutir à la radicalisation et à la naissance de groupes extrémistes violents, qui traversent les frontières et suivent une même idéologie.

Le même phénomène peut avoir pour conséquence la reproduction de crimes de haine dans d’autres pays ou leur perpétration selon le même procédé que dans le pays où ils ont eu lieu pour la première fois. Cela peut également arriver lorsque certains crimes de haine défraient la chronique, ce qui incite d’autres personnes à commettre des crimes similaires («effet copycat»). Outre la perpétration effective des crimes de haine, les conséquences psychologiques sur les individus et la société peuvent facilement se répercuter au-delà des frontières, en créant un climat de peur et des conflits sociaux. Des crimes et événements qui se sont produits en différents lieux du monde ont eu des conséquences dans plusieurs pays, comme le montre notamment le mouvement Black Lives Matter. La plupart des personnes consultées par la Commission ont constaté que les crimes de haine avaient un effet d’entraînement transfrontière 115 .

Ce processus est mondial et a une incidence, quelle que soit son origine géographique. L’UE peut servir de modèle au monde entier, et les idées et initiatives lancées ailleurs peuvent contribuer à une action plus efficace en Europe.

Ces circonstances montrent qu’il est particulièrement nécessaire de combattre les discours de haine et les crimes de haine sur des bases communes. 

Et s’il est particulièrement nécessaire de traiter ces phénomènes sur des bases communes, c’est parce que les discours et crimes de haine ont des effets graves sur les valeurs fondamentales de l’Union consacrées à l’article 2 du TUE. Pour préserver nos valeurs communes, nous devons agir de concert.

Les discours de haine et les crimes de haine portent atteinte non seulement aux individus qui en sont victimes, mais aussi à des groupes ou communautés de personnes vivant dans différents pays. Si quelques États membres n’incriminent pas les discours de haine et les crimes de haine, les efforts déployés pour combattre efficacement ces phénomènes et atténuer leurs effets d’entraînement pourraient demeurer vains. De surcroît, en l’absence d’une ligne de conduite commune en matière d’incrimination, la protection des victimes de tels actes dans l’ensemble de l’UE est insuffisante et inégale, car seules les personnes reconnues comme victimes de la criminalité ont accès aux voies de recours et aux mesures de soutien prévues par le droit de l’Union. En outre, une approche fragmentée peut apparaître ambivalente aux yeux du public, en laissant penser que de tels actes ne sont pas pris au sérieux et peuvent être perpétrés en toute impunité 116 , qu’ils sont considérés comme «normaux» ou même que, dans certains pays, l’État légitime ou tolère de tels comportements 117 .

Enfin, la nécessité de combattre les discours et crimes de haine sur des bases communes découle des tentatives faites individuellement par les États membres d’incriminer les différentes formes de crimes de haine et de discours de haine. Il en a résulté une fragmentation et des conditions inéquitables pour les personnes qui peuvent être victimes de discours de haine et de crimes de haine.

3.4.Évolution de la criminalité

Selon les Nations unies, ces dernières années, on a assisté à une montée inquiétante des discours de haine et de l’incitation à la haine, sur internet et en dehors 118 . En effet, depuis 2007, année où la Commission a proposé de rendre punissables les actes racistes et xénophobes dans tous les États membres, les discours et crimes de haine n’ont cessé de se multiplier 119 . Cette augmentation est liée à l’évolution de l’environnement social, économique et technologique. La plupart (plus de 60 %) des personnes ayant répondu à la consultation ciblée de la Commission ont aussi constaté qu’il y avait eu davantage de discours de haine et de crimes de haine entre 2018 et 2020 qu’au cours de la période précédente (entre 2015 et 2017). Parmi les facteurs expliquant ce phénomène figurent l’augmentation des flux migratoires, les crises économiques et sociales (y compris la pandémie de COVID-19) et l’accès plus facile à l’information en ligne, y compris l’utilisation des réseaux sociaux, entraînant un partage rapide des contenus 120 .

L’internet offre un espace où les discours de haine en ligne prospèrent et sont partagés plus facilement. Leurs auteurs sont désinhibés par un sentiment d’anonymat et d’impunité sur l’internet, qui les pousse à commettre ces infractions et accroît le risque qu’ils récidivent.

La montée en puissance des individus et groupes extrémistes violents dans toute l’Europe est l’un des facteurs qui ont favorisé la polarisation et la radicalisation au sein de la société, ce qui a accru l’incidence des discours de haine à l’égard des groupes marginalisés et des femmes. Le Parlement européen l’a constaté en 2019 dans une résolution sur «la montée des violences néofascistes en Europe» et a demandé aux États membres de condamner et sanctionner «[...] les crimes de haine, les discours de haine et la désignation de boucs-émissaires par des personnalités politiques et des agents publics [...], car ils normalisent et renforcent directement la haine et la violence dans la société» 121 .

L’ECRI a souligné la progression du discours de haine ultranationaliste, xénophobe, raciste et homo/transphobe dans les diverses campagnes électorales menées en 2019, précisant qu’il est de plus en plus présent, et souvent donne même le ton, sur les réseaux sociaux 122 . Selon l’ECRI, les remarques injurieuses et offensantes visant les membres de groupes minoritaires sont désormais plus facilement acceptables qu’autrefois. Le Conseil de l’Europe s’est d’ailleurs alarmé du fait que l’Europe «est confrontée à une terrible réalité: les actes de violence inspirés par l’antisémitisme, la haine à l’égard des musulmans et les autres formes de haine raciale se multiplient à un rythme alarmant» 123 .

La pandémie de COVID-19 a créé un climat dans lequel les discours de haine ont prospéré, générant «une avalanche de haine et de xénophobie» 124 . Europol 125 souligne que les attitudes se sont durcies et que les actes d’intimidation — y compris les appels à commettre des actes violents — sont davantage tolérés depuis la pandémie de COVID-19 et les crises économique et sociale qui en ont résulté. Dans son rapport annuel pour 2020, l’ECRI faisait état de l’exposition accrue de certains groupes, accusés d’être les principaux vecteurs de propagation du virus, aux discours de haine et à la violence motivée par la haine 126 . Ces groupes comprennent notamment les Roms et les migrants, dont l’accès aux soins de santé et aux mesures de soutien public est devenu encore plus difficile 127 , ainsi que les personnes d’origine asiatique ou perçues comme telles 128 . On note aussi une multiplication des théories du complot qui ciblent certains groupes et engendrent des discours et crimes de haine 129 . Des recherches révèlent, par exemple, que par rapport aux deux premiers mois de 2020 (avant la pandémie), le nombre de messages antisémites publiés sur les comptes ou chaînes français et allemands analysés a été multiplié respectivement par sept et par plus de treize pendant la même période en 2021 (en pleine pandémie) 130 .

La pandémie a également mis en relief les tensions intergénérationnelles et a provoqué, sur les réseaux sociaux, une résurgence de messages hostiles, ayant le caractère de discours de haine, à l’encontre des personnes âgées. Ces dernières, qui sont une catégorie de population vulnérable, ont été davantage la cible d’injures pendant la pandémie et eu plus de risques d’être victimes de discours de haine et de crimes de haine 131 .

Les personnes s’identifiant comme LGBTIQ sont confrontées à une augmentation de la violence depuis le début de la pandémie 132 . «L’orientation sexuelle ou l’identité de genre» arrivait en troisième position (18,35 %) dans la liste des mobiles de crimes de haine recensés dans le rapport sur les crimes de haine pour 2019 du Bureau des institutions démocratiques et des droits de l’homme (BIDDH), ce qui représentait une augmentation par rapport à 2018 (14,61 %) 133 . Les discours de haine fondés sur le genre gagnent aussi du terrain en Europe, tant en ligne que hors ligne, et dans toutes les formes d’interaction sociale (par exemple à l’école, au travail ou dans les espaces publics). Toutes les formes de cyberviolence fondée sur le genre à l’égard des femmes, dont les discours de haine misogynes, étaient en hausse avant l’apparition de la COVID-19, aboutissant ainsi à une normalisation de la violence à l’égard des femmes. Dans un rapport 134 sur le harcèlement en ligne subi par les femmes ministres, le Centre d’excellence en communications stratégiques de l’OTAN constatait que les sujets suscitant les messages en ligne les plus injurieux étaient la pandémie de COVID-19, l’immigration, les relations avec l’UE et le social-libéralisme.

Les évolutions législatives récentes montrent qu’il y a eu, ces dernières années, une augmentation progressive de l’incrimination fondée sur des motifs autres que ceux prévus par la décision-cadre. Pour l’heure, onze États membres 135 ont présenté des propositions législatives ou ouvert des procédures visant à incriminer davantage les discours de haine et/ou les crimes de haine. Neuf d’entre eux 136 ont proposé d’ajouter certains mobiles à leur législation sur les discours de haine et/ou les crimes de haine.

4.Valeur ajoutée de l’extension de la liste des infractions prévues par la législation de l’UE

4.1.Un remède efficace à l’échelon de l’UE

Sur la base de l’évaluation ci-dessus, la Commission estime que la présente initiative est le remède le plus efficace que peut apporter l’UE aux problèmes recensés. Plus précisément, seule une initiative commune à l’échelon de l’UE peut protéger efficacement les valeurs communes consacrées à l’article 2 du TUE, qui sont compromises par toutes les formes de discours et crimes de haine, quels que soient les personnes et les groupes visés.

En œuvrant de concert, on peut relever de manière efficace et cohérente les défis que représentent la nature transfrontière, l’ampleur et la tendance à la hausse de ces deux phénomènes. Étant donné que les États membres ont des approches pénales divergentes, fragmentées et peu efficaces à l’échelon de l’UE, la présente initiative traite le problème transfrontière de manière exhaustive.

Seule une approche commune à l’échelon de l’UE en matière d’incrimination des discours et crimes de haine peut assurer une protection cohérente aux victimes de tels actes dans toute l’UE. Cette approche comprend l’accès de ces dernières aux mesures de protection spéciales accordées aux victimes les plus vulnérables de la criminalité par la directive sur les droits des victimes. Compte tenu de la dimension transfrontière des discours et crimes de haine et de la nécessité de leur apporter une solution pénale, la coopération entre les autorités judiciaires sera déterminante. Une réponse pénale commune peut contribuer à renforcer la confiance mutuelle et la coopération judiciaire, qui sont les principes essentiels d’un espace européen de liberté, de sécurité et de justice respectueux des droits fondamentaux.

4.2.Absence de solutions autres que l’extension de la liste des infractions prévues par la législation de l’UE

Bien qu’il puisse y avoir des chevauchements avec certains domaines de criminalité énumérés à l’article 83, paragraphe 1, du TFUE 137 , il n’a pas été possible jusqu’à présent d’adopter à l’échelon de l’UE des règles minimales relatives à la définition des infractions et sanctions pénales applicables aux discours et crimes de haine en tant que tels.

En particulier, le chevauchement partiel entre la «criminalité informatique» et les crimes et discours de haine ne permettrait pas l’adoption de règles pénales minimales applicables à toutes les formes de discours de haine, quel que soit le moyen par lequel ceux-ci sont véhiculés. Il pourrait permettre l’adoption de règles minimales applicables aux discours de haine partagés sur l’internet, mais pas aux discours de haine tenus et transmis par d’autres moyens, par exemple via la communication ou la distribution publiques de tracts ou d’images, lors de rassemblements publics (tels que des manifestations sportives), dans des émissions télévisées ou dans le cadre d’allocutions politiques. Il y aurait donc, d’une part, un cadre pénal unique et harmonisé à l’échelon de l’UE pour les discours de haine exprimés par des moyens numériques et, d’autre part, une approche divergente et fragmentée au sein de l’UE à l’égard des discours de haine véhiculés autrement. Le même clivage injustifié s’opérerait entre l’incrimination des discours de haine et celle des crimes de haine, puisque les crimes de haine ne seraient pas couverts par la base juridique relative à la «criminalité informatique». Une incrimination aussi morcelée ne saurait apporter un remède efficace et absolu à ces phénomènes étroitement liés.

Dans des circonstances particulières, certains crimes de haine pourraient être considérés comme relevant du «terrorisme» et constituer des infractions terroristes, à savoir lorsque l’on pourrait établir l’existence d’une intention terroriste, consistant par exemple à gravement intimider une population 138 . Malgré ces chevauchements potentiels, le «terrorisme» et la définition des infractions terroristes ne vaudront pas pour tous les cas de crimes de haine, et l’on ne peut donc pas incriminer en bloc les discours et crimes de haine sur ce fondement.

Dans ce contexte, il semble que l’on ne puisse apporter à ces phénomènes un remède pénal efficace et complet à l’échelon de l’UE que si les discours et crimes de haine sont érigés en un domaine de criminalité nouveau, distinct et à part entière.

C’est pourquoi la présente initiative de la Commission peut être réputée conforme au principe de subsidiarité, qui semble inhérent au respect des critères énoncés à l’article 83, paragraphe 1, du TFUE. En outre, la présente initiative est proportionnée à l’objectif poursuivi. En particulier, elle n’entraîne pas en soi de charges financières ou administratives pour l’UE, les gouvernements nationaux, les autorités régionales ou locales, les opérateurs économiques ni les citoyens.

5.Conclusion

Le besoin urgent de combattre les discours et crimes de haine dans toute l’UE appelle un engagement et des efforts conjoints.

Par la présente communication, la Commission invite le Conseil, avec l’approbation du Parlement européen, à donner suite à la présente initiative et à décider d’ajouter les discours et crimes de haine dans la liste des infractions prévues par la législation de l’UE. À cet effet, la présente communication est accompagnée d’une initiative de la Commission proposant l’adoption d’une décision du Conseil, conformément à l’article 83, paragraphe 1, du TFUE.

Une fois la décision du Conseil adoptée, la Commission sera habilitée à présenter des propositions législatives visant à incriminer les discours et crimes de haine à l’échelon de l’UE. Tout en accordant une attention particulière aux cadres législatifs nationaux, et en étroite coopération avec les États membres et le Parlement européen, la Commission proposera une solution ferme aux problèmes posés aujourd’hui et demain par les discours et crimes de haine dans l’UE. 

(1)

  Discours sur l’état de l’Union 2020 , Lettre d’intention , Bruxelles, 16 septembre 2020.

(2)

Voir, par exemple, les rapports annuels 2019 et 2020 de l’ECRI sur les sites: https://rm.coe.int/rapport-annuel-ecri-2019/16809ca6d4 et https://rm.coe.int/rapport-annuel-sur-les-activites-de-l-ecri-en-2020/1680a1cd5a ; étude commandée par le département thématique des droits des citoyens et des affaires constitutionnelles du Parlement européen (en anglais) « Hate speech and hate crime in the EU and the evaluation of online content regulation approaches », juillet 2020.

(3)

Voir l’ avant-propos de la stratégie et du plan d’action des Nations unies pour la lutte contre les discours de haine, par le secrétaire général des Nations unies António Guterres, mai 2019.

(4)

OSCE BIDDH, « Les lois sur les crimes de haine - Guide pratique»

(5)

Voir les conclusions de la consultation organisée par l’International Dialogue Centre et le European Council for Religious Leaders/Religions for Peace Europe, 20 avril 2021; Article 19, « Responding to “hate speech”: Comparative overview of six EU countries », 2018.

(6)

  The Europol European Union Terrorism Situation and Trend Report 2021

(7)

Note d’orientation de l’Organisation des Nations unies sur les moyens de lutter contre les discours haineux liés à la COVID-19 , 11 mai 2020.

(8)

Cette liste mentionne les domaines de criminalité suivants: le terrorisme, la traite des êtres humains et l’exploitation sexuelle des femmes et des enfants, le trafic illicite de drogues, le trafic illicite d’armes, le blanchiment d’argent, la corruption, la contrefaçon de moyens de paiement, la criminalité informatique et la criminalité organisée.

(9)

  Étude à l’appui d’une initiative de la Commission visant à étendre la liste des infractions de l’UE, mentionnée à l’article 83, paragraphe 1, du TFUE, aux discours de haine et crimes de haine (ci-après l’«étude d’appui»). L’étude d’appui recensait de manière détaillée les cadres juridiques existant dans tous les États pour combattre les discours et crimes de haine. En outre, elle analysait et résumait les informations, les données et les avis recueillis dans le cadre de la consultation lancée par la Commission.

(10)

Aux termes de l’article 17, paragraphe 1, du TUE: «[l]a Commission promeut l’intérêt général de l’Union et prend les initiatives appropriées à cette fin».

(11)

Voir l’article 52 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne . 

(12)

JO L 328 du 6.12.2008, p. 55.

(13)

Article 1er de la décision-cadre.

(14)

  https://ec.europa.eu/newsroom/just/items/51025

(15)

https://ec.europa.eu/info/policies/justice-and-fundamental-rights/combatting-discrimination/racism-and-xenophobia/eu-code-conduct-countering-illegal-hate-speech-online_fr

(16)

JO L 172 du 17.5.2021, p. 79.

(17)

Le forum de l’UE sur l’internet est une initiative lancée par la Commission en vue d’une collaboration, à titre volontaire, avec le secteur des technologies et d’autres acteurs concernés, pour lutter contre les contenus extrémistes violents en ligne.

(18)

Directive (UE) 2018/1808 du Parlement européen et du Conseil du 14 novembre 2018 modifiant la directive 2010/13/UE visant à la coordination de certaines dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres relatives à la fourniture de services de médias audiovisuels (JO L 303 du 28.11.2018, p. 69).

(19)

Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif à un marché intérieur des services numériques (Législation sur les services numériques) et modifiant la directive 2000/31/CE, COM(2020) 825 final , 15 décembre 2020.

(20)

  COM(2012) 196 final .

(21)

Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions, «Une Union de l’égalité: plan d’action de l’UE contre le racisme 2020-2025», COM(2020) 565 final , 18 septembre 2020.

(22)

Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions, «Stratégie européenne de lutte contre l’antisémitisme et de soutien à la vie juive (2021-2030)», COM(2021) 615 final , 5 octobre 2021.

(23)

Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions, «Une Union de l’égalité: stratégie en faveur de l’égalité de traitement à l’égard des personnes LGBTIQ pour la période 2020-2025’, du 12 novembre 2020, COM(2020) 698 final. Cette stratégie a mis en lumière la nécessité d’incriminer les discours et crimes de haine visant des personnes LGBTIQ — lesbiennes, gays, bisexuelles, trans, non-binaires, intersexuées et queer.

(24)

Ces caractéristiques protégées font partie des motifs mentionnés dans l’article 19, paragraphe 1, du TFUE, qui porte sur les mesures visant à combattre les discriminations fondées «sur le sexe, la race ou l’origine ethnique, la religion ou les convictions, un handicap, l’âge ou l’orientation sexuelle».

(25)

Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions, «Une Union de l’égalité: stratégie en faveur de l’égalité entre les hommes et les femmes 2020-2025», du 5 mars 2020, COM(2020) 152 final .

(26)

Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions, «Union de l’égalité: Stratégie en faveur des droits des personnes handicapées 2021-2030», du 3 mars 2021, COM(2021) 101 final . 

(27)

Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions, «Stratégie de l’UE relative aux droits des victimes (2020-2025)», COM(2020) 258 final , 24 juin 2020.

(28)

JO L 315 du 14.11.2012, p. 57.

(29)

  6976/21, SOC 142, 12 mars 2021 .

(30)

Résolution «article 225 TFUE» du Parlement européen du 16 septembre 2021 contenant des recommandations à la Commission sur l’identification de la violence fondée sur le genre comme un nouveau domaine de criminalité énuméré à l’article 83, paragraphe 1, du traité FUE [2021/2035(INL)].

(31)

 Par exemple, la Commission européenne contre le racisme et l’intolérance («ECRI») du Conseil de l’Europe a publié la recommandation de politique générale nº 15 sur la lutte contre le discours de haine en décembre 2015, tandis que les Nations unies ont adopté une stratégie et un plan d’action en mai 2019; article 20 du pacte international relatif aux droits civils et politiques, et l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe («OSCE»), Bureau des institutions démocratiques et des droits de l’homme («BIDDH»), Conseil ministériel, a adopté la décision nº 9/09, «Lutte contre les crimes de haine», MC(17) Journal nº 2, point 8 de l’ordre du jour, 2 décembre 2009.

(32)

Conseil de l’Europe, Recommandation nº R (97) 20 du Comité des Ministres aux États membres sur les «discours de haine».

(33)

La recommandation mentionne dans son champ d’application que le terme «discours de haine» doit être compris comme «couvrant toutes formes d’expression qui propagent, incitent à, promeuvent ou justifient la haine raciale, la xénophobie, l’antisémitisme ou d’autres formes de haine fondées sur l’intolérance, y compris l’intolérance qui s’exprime sous forme de nationalisme agressif et d’ethnocentrisme, de discrimination et d’hostilité à l’encontre des minorités, des immigrés et des personnes issues de l’immigration».

(34)

ECRI, Recommandation de politique générale nº 15 sur la lutte contre le discours de haine, p. 3.

(35)

Il s’agit là de la définition opérationnelle utilisée par l’OSCE dans ses rapports sur les crimes de haine racistes et xénophobes (2021), les crimes de haine fondés sur le genre (2021), les crimes de haine antisémites (2019) et les crimes de haine contre les musulmans (2018), définition fondée sur la décision nº 9/09 sur la lutte contre les crimes de haine du Conseil ministériel de l’OSCE du 2 décembre 2009, adoptée à l’unanimité par les États membres de l’OSCE, y compris l’ensemble des États membres de l’UE. Le concept à l’origine de cette définition et ses implications pratiques sont expliqués plus en détail dans le document intitulé « Les lois sur les crimes de haine – Guide pratique » (2009) publié par le BIDDH de l’OSCE, p. 16.

(36)

L’article 1er, paragraphe 1, point a), de la décision-cadre impose aux États membres de punir «l’incitation publique à la violence ou à la haine visant un groupe de personnes ou un membre d’un tel groupe, défini par référence à la race, la couleur, la religion, l’ascendance, l’origine nationale ou ethnique».

(37)

Voir l’article 4: «Pour les infractions autres que celles visées aux articles 1er et 2, les États membres prennent les mesures nécessaires pour faire en sorte que la motivation raciste et xénophobe soit considérée comme une circonstance aggravante ou, à défaut, que cette motivation puisse être prise en considération par la justice pour la détermination des peines

(38)

Telle que les infractions portant atteinte à la vie, l’intégrité physique ou la propriété d’une personne.

(39)

Voir l’étude d’appui, section 2.4.2.

(40)

OSCE BIDDH, « Les lois sur les crimes de haine - Guide pratique ».

(41)

Voir la note explicative sur l’application pratique de la décision-cadre 2008/913/JAI du Conseil sur la lutte contre certaines formes et manifestations de racisme et de xénophobie au moyen du droit pénal.

(42)

OSCE BIDDH, « Les lois sur les crimes de haine - Guide pratique ».

(43)

CEDH, arrêt du 14.12.2020, Beizaras et Levickas c. Lituanie, point 111 et jurisprudence citée.

(44)

CEDH, arrêt du 6.7.2006, Erbakan c. Turquie, point 56.

(45)

CEDH, décision du 24.6.2003, Garaudy c. France, point 1; décision du 13.11.2003, Gündüz c. Turquie, point 37; décision du 16.11.2004, Norwood c. Royaume-Uni; arrêt du 10.7.2008, Soulas et autres c. France, point 47; arrêt du 9.2.2012, Vejdeland et autres c. Suède, point 59.

(46)

Département thématique des droits des citoyens et des affaires constitutionnelles, direction générale des politiques internes, Parlement européen, « Hate speech and hate crime in the EU and the evaluation of offline content regulation approaches » (juillet 2020), p. 23.

(47)

Agence des droits fondamentaux de l’Union européenne («FRA»), « Making hate crime visible in the European Union: acknowledging victims’ rights » (2012), p. 20. Layla Okhai, ‘ How hate crime impacts mental health’ (Diverse Minds, 2018).

(48)

Voir l’étude d’appui, sections 4.2.3, 4.3.3 et 5.2.3.

(49)

Note d’orientation des Nations unies sur les moyens de lutter contre les discours haineux liés à la COVID-19, 11 mai 2020.

(50)

Victimisation qui n’est pas la conséquence directe de l’acte criminel, mais de la façon dont la victime est traitée par la police et par le système judiciaire pénal. Voir l’étude d’appui, sections 4.2.3, 4.3.3 et 5.2.3.

(51)

OSCE BIDDH, « Understanding the Needs of Hate Crime Victims » (2020), p. 13. Par exemple, un grand nombre de personnes lesbiennes, gays et bisexuelles évitent certains lieux par crainte d’être agressées, menacées ou harcelées. De même, 37 à 41% des personnes transgenres ou intersexuées interrogées ont déclaré éviter «souvent» ou «toujours» certains lieux pour la même raison. FRA (2020), EU-LGBTI II: A long way to go for LGBTI equality , p. 47.

(52)

Voir FRA, « Making hate crime visible in the European Union: acknowledging victims’ rights » (2012), p. 19.

(53)

Voir la stratégie et le plan d’action des Nations unies sur les discours de haine , mai 2019; Commission européenne contre le racisme et l’intolérance (Conseil de l’Europe).

(54)

Voir l’étude commandée par le département thématique des droits des citoyens et des affaires constitutionnelles du Parlement européen (en anglais) « Hate speech and hate crime in the EU and the evaluation of online content regulation approaches », juillet 2020. OSCE, BIDDH, « Les lois sur les crimes de haine - Guide pratique », 2009. 

(55)

  Une étude réalisée en Norvège indique qu’un utilisateur sur cinq (19 %) des médias sociaux s’abstient de participer à des débats publics à cause des contenus haineux qu’il y trouve. Ce pourcentage augmente à 36 % parmi les utilisateurs appartenant à des groupes minoritaires.

(56)

Étude commandée par le département thématique des droits des citoyens et des affaires constitutionnelles du Parlement européen (en anglais) « Hate speech and hate crime in the EU and the evaluation of online content regulation approaches », juillet 2020.

(57)

  https://www.ipu.org/resources/publications/issue-briefs/2018-10/sexism-harassment-and-violence-against-women-in-parliaments-in-europe ; voir également https://www.amnesty.org/en/latest/news/2018/03/online-violence-against-women-chapter-2/#topanchor

(58)

Voir la recommandation de la Commission concernant la protection, la sécurité et le renforcement des moyens d’action des journalistes et autres professionnels des médias dans l’Union européenne, C(2021) 6650 final , 16.9.2021.

(59)

  L’Eurobaromètre 452 de 2016 montrait que trois quarts des journalistes avaient été visés par des discours de haine sur les médias sociaux, raison pour laquelle la moitié d’entre eux hésitaient à participer au débat public.

(60)

Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’homme, Statement by the Special Rapporteur on violence against women, its causes and consequences.

(61)

Conseil de l’Europe, Commission européenne contre le racisme et l’intolérance .

(62)

Voir Anti-defamation league , 2018.

(63)

Voir le rapport de recherche publié dans le cadre du projet SELMA (Social and Emotional Learning for Mutual Awareness) par European Schoolnet, p. 33.

(64)

Voir l’étude d’appui, section 4.2.3.

(65)

Nations unies, Le plan d’action des responsables et acteurs religieux pour prévenir l’incitation à la violence pouvant mener à des atrocités criminelles, juillet 2017.

(66)

Par exemple, une étude réalisée dans le cadre du projet HateLab de l’université de Cardiff a montré que, lorsque le nombre de «tweets haineux» publiés à partir d’un même lieu avait augmenté, le nombre de crimes qualifiés à caractère racial et religieux, ce qui incluait violence, harcèlement et dégradations, avait fait de même.

(67)

 Résolution du Parlement européen du 25 octobre 2018 sur la montée des violences néofascistes en Europe [ 2018/2869(RSP) ].

(68)

Voir également « Hate Speech and Radicalisation Online », the OCCI Research Report, Johannes Baldauf, Julia Ebner et Jakob Guhl (Eds.), 2019.

(69)

  Recommandation CM/Rec(2019)1 du Comité des Ministres aux États membres sur la prévention et la lutte contre le sexisme, 27 mars 2019, p. 9.

(70)

Forum en ligne opposé au féminisme, où des hommes discutent du genre, de l’égalité et de la masculinité avec une perspective pro-masculine, note de bas de page 59, Centre for Digital Youth Care, « The Angry Internet: A threat to gender equality, democracy & wellbeing » (2020).

(71)

Mouvement/communauté qui a acquis une notoriété surtout ces dernières années; «the INvoluntary CElibate men blame their misfortune on women, sexually greedy men and society», Centre for Digital Youth Care, « The Angry Internet: A threat to gender equality, democracy & wellbeing» (2020).

(72)

 Centre for Digital Youth Care, « The Angry Internet: A threat to gender equality, democracy & wellbeing» (2020).

(73)

FRA, EU LGBTI Survey II (2020).

(74)

Conseil de l’Europe, ECRI, Rapport annuel sur les activités de l’ECRI , mars 2021; Human Rights Watch , «Le Covid-19 attise le racisme anti-asiatique et la xénophobie dans le monde entier», 2020.

(75)

  Human Rights Watch , «Le Covid-19 attise le racisme anti-asiatique et la xénophobie dans le monde entier», 2020.

(76)

FRA, « EU-MIDIS II: Second European Union Minorities and Discrimination Survey » (2017).

(77)

FRA, « Experiences and perceptions of antisemitism - Second survey on discrimination and hate crime against Jews in the EU », 10 décembre 2018.

(78)

FRA, Deuxième enquête de l’Union européenne sur les minorités et la discrimination, 21 septembre 2017.

(79)

Conseil de l’Europe, « Combattre le discours de haine sexiste ».

(80)

Voir l’ enquête menée par la World Wide Web Foundation et l’Association mondiale des guides et des éclaireuses sur la plateforme U-report de l’UNICEF, février 2020.

(81)

 Amnesty International, « Troll Patrol Findings: Using Crowdsourcing, Data Science & Machine Learning to Measure Violence and Abuse against Women on Twitter », 2018.

(82)

Nations unies, note de synthèse: « L’impact de la COVID-19 sur les personnes âgées », mai 2020.

(83)

FRA, « Equal protection for all victims of hate crime. The case of people with disabilities », mars 2015.

(84)

Voir l’étude d’appui, annexe VII.

(85)

FRA, « Equal protection for all victims of hate crime. The case of people with disabilities », mars 2015, p. 2.

(86)

 Organisation mondiale de la santé, « Maltraitance des personnes âgées », 2021.

(87)

Voir aussi l’ affirmation du BIDDH de l’OSCE selon laquelle l’absence de recensement des crimes de haine signifie que les victimes et leurs besoins restent trop souvent dans l’ombre, 16 novembre 2020.

(88)

Selon l’étude d’appui, il ressort de la consultation des parties intéressées que la plupart de celles-ci jugent que les cas de discours et crimes de haine sont insuffisamment dénoncés dans leur État membre.

(89)

Voir enquêtes de la FRA intitulées « Roms et gens du voyage dans six pays », 2020, et « Experiences and perceptions of antisemitism - Second survey on discrimination and hate crime against Jews in the EU », 2018.

(90)

FRA, EU-LGBTI II, « A long way to go for LGBTI equality », p. 38 et 46.

(91)

Voir l’étude d’appui, section 4.2.3.

(92)

AGE Platform Europe est un réseau européen d’organisations à but non lucratif rassemblant des personnes de plus de 50 ans; voir la réponse d’AGE Platform Europe à la consultation de la Commission.

(93)

Tels sont les motifs énoncés dans la décision-cadre précitée; voir également l’étude d’appui, sections 4.2.1 et 4.3.1. Toutefois, la transposition n’a pas toujours été correcte ou complète, ce qui a amené la Commission à engager des procédures d’infraction contre certains États membres.

(94)

BE, DK, EE, IE, EL, ES, FR, HR, CY, LT, LU, HU, MT, NL, AT, PT, SI, SK, FI et SE.

(95)

Parmi eux, 14 États membres (BE, EE, ES, FR, HR, CY, LV, LT, LU, MT, NL, AT, PT et SI) mentionnent expressément le motif lié au sexe/genre, 10 États membres (EL, ES, FR, HR, CY, LU, HU, MT, PT et SE) mentionnent (en lieu et place ou en complément) le motif lié à l’identité de genre et 2 États membres (BE et EL) mentionnent le motif lié aux caractéristiques sexuelles.

(96)

BE, EL, ES, FR, HR, LV, LT, LU, HU, NL, AT, PT, SI et FI.

(97)

BE, ES, LV, LT, LU et AT.

(98)

CZ, DE, HR, LV, HU, RO, SI et FI.

(99)

Par exemple, le droit allemand incrimine les discours de haine contre les groupes partageant des caractéristiques spécifiques telles que la race ou la religion, mais également «contre des parties de la population».

(100)

BE, DK, EL, ES, FR, HR, CY, LT, LU, HU, MT, NL, AT, PT, RO, SI, SK, FI et SE. Il importe de noter que certains États membres n’incriminent que des infractions spécifiques liées à l’orientation sexuelle.

(101)

Parmi eux, 13 États membres (BE, ES, FR, CY, LT, LU, MT, AT, PT, RO, SI, SK et FI) mentionnent expressément le motif lié au sexe/genre, 11 États membres (BE, EL, ES, FR, HR, CY, LU, HU, MT, PT et SE) mentionnent (en lieu et place ou en complément) le motif lié à l’identité de genre et 4 États membres (BE, EL, FR et MT) mentionnent le motif lié aux caractéristiques sexuelles.

(102)

BE, EL, ES, FR, HR, LT, LU, HU, MT, NL, AT, RO et FI.

(103)

BE, ES, FR, HR, LT, LU, MT, AT, RO et FI.

(104)

BG, CZ, DK, DE, EE, HR, LV, HU, AT, PL, PT, RO, SI, FI et SE.

(105)

Voir l’étude d’appui, section 4.3.4; Anti-Defamation League, « Soldiers of Odin USA: The Extreme European Anti-Refugee Group Comes to America’ , 2016; les Soldiers of Odin sont un groupe idéologique controversé, hostile aux immigrants, aux musulmans et aux réfugiés, qui a vu le jour en Finlande et s’est propagé jusqu’aux États-Unis.

(106)

Parmi les exemples concrets de discours de haine traversant les frontières, on peut citer la campagne #DefendEurope, menée par le mouvement intellectuel français d’extrême droite «Nouvelle Droite», qui illustre l’ampleur de la coopération et de la mobilisation transidéologiques et transfrontières de l’extrême droite dans le monde, et plus précisément au Royaume-Uni, en Autriche, en France, en Allemagne, en Suède, aux Pays-Bas, en Norvège, en Italie et aux États-Unis; voir l’étude d’appui, section 4.3.4.

(107)

Voir l’étude d’appui, section 4.2.4.

(108)

  Recommandation CM/Rec(2019)1 du Comité des Ministres aux États membres sur la prévention et la lutte contre le sexisme, 27 mars 2019.

(109)

Voir l’étude d’appui, annexe VI.

(110)

Voir l’étude d’appui, section 4.2.4; voir aussi l’annexe VII de l’étude d’appui, qui donne plusieurs exemples de l’incidence transfrontière des discours de haine hors ligne, tels que le fonctionnement de l’organisation grecque d’extrême droite «Aube dorée», et établit des comparaisons avec la diffusion hors ligne et l’effet d’entraînement des théories du complot dans les États membres, telles que la théorie du «grand remplacement», par des événements hors ligne, des rassemblements et des «opérations publicitaires».

(111)

Counter Extremism Project, « Violent Right-Wing Extremism and Terrorism – Transnational Connectivity, Definitions, Incidents, Structures and Countermeasures », 2020, p. 12, 79 et 145.

(112)

The Soufan Center, « White Supremacy Extremism: The Transnational Rise of the Violent White Supremacist Movement », 2019, p. 11.

(113)

Anti-Defamation League, « Hate Beyond Borders: The Internationalisation of White Supremacy ». 

(114)

Voir l’étude d’appui, section 5.2.4.

(115)

Voir l’étude d’appui, sections 4.2.3, 4.3.4, 5.2.3, 5.2.4 et 5.2.5.

(116)

Voir la note de bas de page nº 5, Conseil de l’Europe, Commission européenne contre le racisme et l’intolérance, recommandation de politique générale nº 15de l’ECRI sur la lutte contre le discours de haine , 8 décembre 2015.

(117)

Arrêt de la CEDH du 17.1.2017, Király et Dömötör c. Hongrie.

(118)

Nations unies, Le plan d’action
des responsables et acteurs religieux pour prévenir l’incitation à la violence pouvant mener à des atrocités criminelles, juillet 2017.

(119)

« Discours et crimes de haine dans l’Union européenne - Évaluation des stratégies pour la réglementation des contenus en ligne », Parlement européen, Département thématique des droits des citoyens et des affaires constitutionnelles, juillet 2020.

(120)

Voir l’étude d’appui, sections 4.2.1, 4.3.1 et 4.3.2.

(121)

Parlement européen, résolution du Parlement européen du 25 octobre 2018 sur la montée des violences néofascistes en Europe (2018/2869(RSP)), P8_TA(2018)0428, Strasbourg, 2018.

(122)

  Rapport annuel 2019 de l’ECRI

(123)

  Déclaration de Marija Pejčinović Burić, secrétaire générale du Conseil de l’Europe, 27 février 2020.

(124)

  Appel mondial du secrétaire général des Nations unies António Guterres pour combattre et contrer les discours de haine liés à la COVID-19, lancé à New York le 8 mai 2020.

(125)

  The Europol European Union Terrorism Situation and Trend Report 2021 , p. 28.

(126)

Voir aussi European Voice against Racism , https://rm.coe.int/rapport-annuel-sur-les-activites-de-l-ecri-en-2020/1680a1cd5a ; voir aussi: Réunion exceptionnelle du Bureau de l’ECRI et échanges de vue avec le Directeur de la FRA et avec le Représentant spécial de l’EU pour les droits de l’homme – Actualités de la Commission européenne contre le racisme et l’intolérance (ECRI) (coe.int)

(127)

  https://fra.europa.eu/en/publication/2020/covid19-rights-impact-september-1 ; https://fra.europa.eu/en/publication/2020/covid19-rights-impact-november-1

(128)

ECRI, Rapport annuel sur les activités de l’ECRI , mars 2021.

(129)

Tony Blair Institute for Global Change, « From the Fringes to the Forefront: How far-right movements across the globe have reacted to Covid-19 » (juillet 2020); voir aussi les conclusions de la consultation organisée par l’International Dialogue Centre et le European Council for Religious Leaders/Religions for Peace Europe, 20 avril 2021.

(130)

Voir l’étude préparée par pour la Commission européenne par l’Institute for Strategic Dialogue, « The Rise of Antisemitism Online During the Pandemic , A study of French and German content», avril 2021.

(131)

Voir la réponse d’AGE Platform Europe à la consultation de la Commission, la déclaration du secrétaire général des Nations Unies António Guterres et l’étude d’appui, section 4.2.1.

(132)

Voir le document « Covid-19: une analyse des aspects relatifs à l’anti-discrimination, à la diversité et à l’inclusion dans les États membres du Conseil de l’Europe » du comité directeur du Conseil de l’Europe sur l’anti-discrimination, la diversité et l’inclusion (2020), p. 19. Voir aussi le rapport 2019 de la FRA sur la pandémie et son incidence sur les droits fondamentaux , le rapport de la FRA intitulé « La pandémie de coronavirus et les droits fondamentaux: rétrospective de l’année 2020 » (2021) et le rapport 2020 de l’ECRI .

(133)

BIDDH, Hate Crime Report , 2019; voir les articles de presse indiquant qu’en Espagne, les crimes de haine contre la communauté LGBTIQ ont augmenté de 43 % au cours du premier semestre de 2021.

(134)

  https://stratcomcoe.org/news/nato-stratcom-coe-research-female-finnish-ministers-received-a-disproportionate-number-of-abusive-messages/17

(135)

DK, DE, IE, ES, IT, CY, NL, PL, RO, FI. Voir l’étude d’appui, section 3.7. Notons en particulier que la réforme proposée en Italie n’a pas été adoptée.

(136)

DK, DE, ES, FR, IT, CY, NL, PL, FI.

(137)

Il existe également des chevauchements entre différents domaines de criminalité de l’UE, tels que la «criminalité organisée» et le «trafic illicite de drogues» ou l’«exploitation sexuelle des femmes», qui sont néanmoins reconnus comme des domaines de criminalité distincts.

(138)

Directive (UE) 2017/541 du Parlement européen et du Conseil du 15 mars 2017 relative à la lutte contre le terrorisme et remplaçant la décision-cadre 2002/475/JAI du Conseil et modifiant la décision 2005/671/JAI du Conseil (JO L 88 du 31.3.2017, p. 6). 


Bruxelles, le 9.12.2021

COM(2021) 777 final

ANNEXE

de la

COMMUNICATION DE LA COMMISSION
AU PARLEMENT EUROPÉEN ET AU CONSEIL

Une Europe plus inclusive et plus protectrice: extension de la liste des infractions pénales de l’UE aux discours de haine et aux crimes de haine


ANNEXE

DÉCISION DU CONSEIL

concernant l’ajout des discours de haine et des crimes de haine aux domaines de criminalité visés à l’article 83, paragraphe 1, du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne

LE CONSEIL DE L’UNION EUROPÉENNE,

vu le traité sur l’Union européenne, et notamment son article 17, paragraphe 1,

vu le traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, et notamment son article 83, paragraphe 1, troisième alinéa,

vu l’approbation du Parlement européen 1 ,

considérant ce qui suit:

(1)Toutes les formes et manifestations de haine et d’intolérance, y compris les discours de haine et les crimes de haine, sont incompatibles avec les valeurs de l’Union que sont la dignité humaine, la liberté, la démocratie, l’égalité, l’État de droit et le respect des droits de l’homme, y compris les droits des personnes appartenant à des minorités consacrés à l’article 2 du traité sur l’Union européenne (ci-après le «TUE»). Ces valeurs sont communes aux États membres dans une société caractérisée par le pluralisme, la non-discrimination, la tolérance, la justice, la solidarité et l’égalité entre les femmes et les hommes.

(2)L’Union constitue un espace de liberté, de sécurité et de justice dans le respect des droits fondamentaux et des différents systèmes et traditions juridiques des États membres. Elle a pour objectif d’assurer un niveau élevé de sécurité, grâce à des mesures qui visent notamment à prévenir et à combattre la criminalité, le racisme et la xénophobie.

(3)En vertu de l’article 83, paragraphe 1, du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (ci-après le «TFUE»), le Parlement européen et le Conseil peuvent établir des règles minimales relatives à la définition des infractions pénales et des sanctions dans des domaines de criminalité particulièrement grave revêtant une dimension transfrontière résultant du caractère ou des incidences de ces infractions ou d’un besoin particulier de les combattre sur des bases communes. Ces domaines de criminalité sont énumérés dans ledit article.

(4)En l’état, cette liste de domaines de criminalité ne permet pas d’établir des règles minimales concernant la définition et la répression des discours et crimes de haine.

(5)La décision-cadre 2008/913/JAI du Conseil 2 prévoit des sanctions pénales effectives, proportionnées et dissuasives, applicables dans toute l’Union, pour les discours et crimes de haine à caractère raciste et xénophobe. Elle exige des États membres qu’ils érigent en infraction pénale les discours de haine, à savoir l’incitation publique à la violence ou à la haine fondée sur la race, la couleur, la religion, l’ascendance ou l’origine nationale ou ethnique. La même exigence s’applique pour toutes les infractions, autres que les discours de haine, commises avec une motivation raciste ou xénophobe.

(6)La nécessité de lutter efficacement contre les discours et crimes de haine fondés sur des motifs autres que ceux qui sont couverts par la décision-cadre 2008/913/JAI, et en particulier sur le sexe, l’orientation sexuelle, l’âge et le handicap, a été mise en lumière dans les stratégies pour une Union de l’égalité, à savoir la stratégie en faveur de l’égalité entre les hommes et les femmes 2020-2025 3 , la stratégie en faveur de l’égalité de traitement à l’égard des personnes LGBTIQ pour la période 2020-2025 4 et la stratégie en faveur des droits des personnes handicapées 2021-2030 5 . 

(7)L’UE et tous ses États membres sont parties à la convention des Nations unies relative aux droits des personnes handicapées. L’article 16 de cette convention, qui concerne le droit de ne pas être soumis à l’exploitation, à la violence et à la maltraitance, dispose que les parties sont censées prendre toutes mesures législatives, administratives, sociales, éducatives et autres mesures appropriées pour protéger les personnes handicapées. Il convient de protéger les personnes handicapées à leur domicile comme à l’extérieur, contre toutes formes d’exploitation, de violence et de maltraitance. Il convient que les parties prennent également toutes mesures appropriées pour prévenir toutes les formes d’exploitation, de violence et de maltraitance. L’article 17, relatif à la protection de l’intégrité de la personne, dispose que toutes les personnes handicapées ont droit au respect de leur intégrité physique et mentale sur la base de l’égalité avec les autres.

(8)Comme cela est également reconnu à l’échelon international 6 , les discours et crimes de haine ont la particularité d’être motivés par des préjugés, qui poussent leurs auteurs à s’attaquer à des personnes ou des groupes qui présentent les mêmes caractéristiques protégées, ou sont perçus comme tels. La haine est inhérente aux deux phénomènes et constitue le mobile commun de toutes les infractions connexes.

(9)Les discours et crimes de haine portent atteinte aux valeurs et droits fondamentaux sur lesquels repose l’Union, en particulier la dignité humaine et l’égalité. En outre, ils portent atteinte non seulement aux personnes qui en sont victimes, mais aussi aux communautés et à la société tout entière, notamment parce qu’ils brident la liberté d’expression. Ils compromettent le pluralisme et la tolérance en créant une polarisation et en nuisant au débat public et à la vie démocratique.

(10)La liberté d’expression et d’information est consacrée à l’article 11 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne et constitue l’un des fondements essentiels d’une société démocratique. Pour protéger les droits et les libertés d’autrui et répondre véritablement aux objectifs d’intérêt général reconnus par l’Union, il est nécessaire d’ériger les discours de haine en infraction. Il convient que toute législation de l’Union qui impose aux États membres d’incriminer les discours de haine et qui porte ainsi atteinte au droit à la liberté d’expression soit proportionnée et respecte l’essence de ce droit.

(11)Les discours de haine peuvent causer non seulement des conflits, mais aussi des crimes de haine. Tous deux se propagent au-delà des frontières nationales. Il est facile de reproduire des discours de haine et de les diffuser largement en ligne par l’internet, notamment dans les médias sociaux, et hors ligne, dans des émissions télévisées, des événements publics, la presse écrite et des allocutions politiques. Les crimes de haine peuvent être commis ou facilités par des réseaux comptant des membres dans plusieurs pays, qui inspirent, organisent ou perpètrent des agressions physiques. Plus généralement, les crimes de haine ont un effet d’entraînement dans tous les États membres, ce qui contribue à créer un climat de peur et risque de générer des conflits sociaux.

(12)Les discours et crimes de haine sont très courants dans toute l’Union, et ils se sont multipliés ces dernières années. En particulier, la pandémie de COVID-19 a exacerbé les sentiments d’insécurité, d’isolement et de peur. Dans ce climat, les discours de haine ont prospéré et ont aussi ciblé des populations déjà marginalisées, ce qui a également donné lieu à des crimes de haine.

(13)Les discours et crimes de haine portent atteinte aux fondements mêmes d’une société démocratique et pluraliste et aux valeurs communes consacrées à l’article 2 du TUE. Le caractère particulièrement grave de ces comportements, de par leur incidence sur les valeurs et droits fondamentaux, ainsi que leur nature transfrontière appellent une action conjointe à l’échelon de l’Union. L’Union doit mettre au point une solution pénale commune pour traiter efficacement les problèmes que posent les discours et crimes de haine. Cette solution garantirait également une protection cohérente des victimes de crimes de haine ainsi que l’accès aux mesures de protection spéciales accordées aux victimes les plus vulnérables de la criminalité. Une approche commune devrait également renforcer la coopération judiciaire entre les États membres, qui est indispensable en raison de la dimension transfrontière de ces phénomènes.

(14)Les discours et crimes de haine remplissent donc les critères énoncés à l’article 83, paragraphe 1, du TFUE et peuvent constituer un nouveau «domaine de criminalité», qui s’ajoutera à ceux déjà énumérés dans cette disposition.

(15)Il convient donc tout d’abord d’étendre la liste des domaines de criminalité énumérés à l’article 83, paragraphe 1, du TFUE, de manière à permettre ensuite l’adoption des dispositions de droit dérivé qui établiront les règles minimales relatives à la définition et à la sanction des discours et crimes de haine.

(16)La présente décision ne devrait pas avoir d’incidence sur les actions qui pourront être entreprises par la suite. En particulier, elle ne préjuge pas de la portée et du contenu du droit dérivé à proposer ultérieurement.

(17)Il convient d’élaborer la proposition de la Commission concernant ce droit dérivé conformément aux exigences en matière d’amélioration de la réglementation, notamment en l’accompagnant d’une analyse d’impact et d’une vaste consultation. En particulier, il convient que la Commission consulte les États membres lors de l’élaboration de ce droit dérivé, notamment sur les spécificités des cadres législatifs nationaux relatifs au droit pénal et aux droits fondamentaux,

A ADOPTÉ LA PRÉSENTE DÉCISION:

Article premier

Les discours de haine et crimes de haine constituent un domaine de criminalité au sens de l’article 83, paragraphe 1, du TFUE.

Article 2

La présente décision entre en vigueur le vingtième jour suivant celui de sa publication au Journal officiel de l’Union européenne.

Fait à Bruxelles, le

   Par le Conseil

   Le président

(1)

JO C […] du […], p. […].

(2)

Décision-cadre 2008/913/JAI du Conseil du 28 novembre 2008 sur la lutte contre certaines formes et manifestations de racisme et de xénophobie au moyen du droit pénal (JO L 328 du 6.12.2008, p. 55).

(3)

 Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions, «Une Union de l’égalité: stratégie en faveur de l’égalité entre les hommes et les femmes 2020-2025», 5.3.2020, COM(2020) 152 .

(4)

 Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions, «Union de l’égalité: stratégie en faveur de l’égalité de traitement à l’égard des personnes LGBTIQ pour la période 2020-2025», 12.11.2020, COM(2020) 698 .

(5)

 Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions, «Union de l’égalité: Stratégie en faveur des droits des personnes handicapées 2021-2030», 3.3.2021,  COM(2021) 101 .

(6)

Voir par exemple la recommandation nº R (97) 20 du Comité des ministres du Conseil de l’Europe aux États membres sur le «discours de haine» et la décision nº 9/09 du Conseil ministériel de l’OSCE du 2 décembre 2009, intitulée «Lutte contre les crimes de haine».