COMMISSION EUROPÉENNE
Bruxelles, le 26.2.2021
COM(2021) 90 final
RAPPORT DE LA COMMISSION AU PARLEMENT EUROPÉEN ET AU CONSEIL
sur l’application de la directive (UE) 2015/2302 du Parlement européen et du Conseil relative aux voyages à forfait et aux prestations de voyage liées
1.La directive
La directive (UE) 2015/2302 relative aux voyages à forfait et aux prestations de voyage liées (ci-après la «directive sur les voyages à forfait» ou la «directive») a été adoptée le 25 novembre 2015. Elle a remplacé la directive 90/314/CEE du Conseil, du 13 juin 1990, concernant les voyages, vacances et circuits à forfait. Elle s’appuie sur les principaux éléments de la directive de 1990, dont les obligations d’information, les dispositions relatives aux modifications de contrat et aux responsabilités, et la protection des consommateurs en cas d’insolvabilité de l’organisateur. La nouvelle directive élargit considérablement le niveau de protection des consommateurs en tenant compte des nouveaux modèles de réservation en ligne pour les combinaisons de services de voyage.
À la suite de son rapport sur les dispositions de la directive applicables aux réservations en ligne effectuées à différents points de vente, publié en juin 2019 (rapport sur les «réservations en ligne liées»), la Commission soumet au Parlement européen et au Conseil le présent rapport général sur l’application de la directive conformément à l’article 26, deuxième alinéa, de cette dernière.
Le groupe d’experts des parties prenantes chargé de soutenir l’application de la directive
, de même que les autorités nationales, ont été consultés aux fins de l’élaboration du présent rapport.
1.1. Principaux éléments de la directive
Conformément à la directive, l’organisateur d’un forfait est responsable de l’exécution de l’ensemble des services compris dans le forfait, indépendamment du fait que ces services doivent être exécutés par lui-même ou par d’autres prestataires de services. En remplaçant la directive de 1990, la directive sur les voyages à forfait a étendu la notion de «forfait» — fondée au départ sur le modèle des vacances à forfait organisées à l’avance — aux vacances personnalisées ou sur mesure que des professionnels, parmi lesquels les voyagistes traditionnels, les agences de voyages en ligne ou hors ligne, les compagnies aériennes et les hôtels, constituent à partir des différents services de voyage choisis par le voyageur. Tous ces professionnels peuvent être des «organisateurs» aux fins de la directive.
Les principaux éléments de la directive sont les suivants:
·une définition élargie du «forfait», englobant les vacances prêtes à l’emploi proposées par un voyagiste, ainsi que la sélection personnalisée d’éléments d’un voyage ou d’un séjour de vacances effectuée par le voyageur à un seul point de vente en ligne ou hors ligne;
·l’introduction du concept de prestation de voyage liée (PVL) qui, par rapport à un forfait, constitue une combinaison plus souple de deux services de voyage ou plus pour un même voyage ou un même séjour de vacances. Contrairement à l’organisateur d’un forfait, les professionnels qui facilitent une PVL ne sont responsables que de l’exécution des services de voyage qu’ils effectuent eux-mêmes. Une combinaison de services de voyage peut être qualifiée de PVL dès lors qu’un professionnel facilite:
-l’achat de différents services grâce à des procédures de réservation distinctes au cours d’une seule visite à un agent de voyages ou sur un site web; ou
-d’une manière ciblée, l’achat d’un service de voyage supplémentaire auprès d’un autre prestataire dans les 24 heures suivant la réception par un voyageur de la confirmation de la réservation du premier service de voyage (par exemple en fournissant, dans la confirmation de réservation, un lien vers un autre prestataire de services);
·des obligations d’information renforcées: les entreprises doivent indiquer aux voyageurs qu’il leur est proposé un forfait ou une prestation de voyage liée et les informer de leurs droits essentiels, au moyen de formulaires d’information standard. Elles doivent fournir des informations sur les caractéristiques du forfait, son prix et tout coût supplémentaire;
·les entreprises qui vendent des vacances à forfait doivent fournir une garantie couvrant, en cas de faillite des organisateurs, les remboursements et le rapatriement des voyageurs. Dans une mesure limitée, cette garantie s’applique également aux PVL. Les professionnels qui facilitent une PVL doivent fournir une garantie de remboursement pour les paiements qu’ils reçoivent du voyageur dans le cas où le service de voyage concerné n’est pas fourni en raison de leur insolvabilité. Cette garantie couvre également le rapatriement lorsque le professionnel qui facilite une PVL est responsable du transport des passagers, par exemple s’il s’agit d’une compagnie aérienne. La directive établit le principe de reconnaissance mutuelle de la protection contre l’insolvabilité fournie par les organisateurs ou les professionnels facilitant une PVL conformément au droit de leur État membre d’établissement;
·des règles strictes en matière de responsabilité: hormis certaines exceptions, l’organisateur d’un forfait est responsable en cas de problème, quel que soit le prestataire des services de voyage;
·des droits d’annulation plus étendus: les voyageurs peuvent annuler leurs vacances à forfait, quel que soit le motif, moyennant le paiement de frais de résiliation raisonnables. Ils peuvent annuler leurs vacances sans frais, notamment en cas de «circonstances exceptionnelles et inévitables» sur le lieu de destination qui affectent l’exécution du forfait (guerre, catastrophe naturelle ou apparition d’une maladie grave, par exemple) ou si le prix du forfait est augmenté de plus de 8 % par rapport au prix initial;
·l’aide aux voyageurs: lorsque les voyageurs ne peuvent rentrer de leurs vacances à forfait en raison de «circonstances exceptionnelles et inévitables», ils bénéficient d’un hébergement pendant une durée maximale de trois nuitées, à moins que des durées plus longues ne soient prévues par la législation de l’Union relative aux droits des passagers. En règle générale, les organisateurs sont tenus d’apporter une aide aux voyageurs en difficulté, en particulier en les informant sur les services de santé et l’assistance consulaire.
1.2. Données concernant le marché
En 2017, les forfaits ont représenté environ 9 % des voyages touristiques effectués par les résidents de l’Union des Vingt-sept et environ 21 % du total des dépenses consacrées au tourisme. En moyenne, chaque touriste de l’UE a dépensé quelque 762 EUR pour un voyage à forfait dans l’Union des Vingt-sept (volume total des dépenses: environ 58 milliards d’EUR) et 1 756 EUR pour un voyage à forfait dans le reste du monde (volume total des dépenses: environ 36 milliards d’EUR). Le principal pays de destination en Europe était de loin l’Espagne (volume total des dépenses: environ 15 milliards d’EUR).
Selon une enquête de suivi du marché consacrée aux vacances et aux circuits à forfait, en 2020, la majorité des consommateurs de l’Union des Vingt-sept (81 %) avaient confiance dans les prestataires de services de vacances et de circuits à forfait. Ce chiffre varie dans une certaine mesure d’un État membre à l’autre, se situant dans une fourchette comprise entre 90 % (en Croatie et au Portugal) et 60 % (en Pologne). Selon une grande majorité (91 %) de consommateurs, les achats effectués sur le marché se sont avérés une expérience positive, avec peu de différences notables entre les pays ou les sous-groupes sociodémographiques.
Les consommateurs qui ont effectué leur achat auprès d’une agence de voyages ont généralement payé un seul prix total pour les différents services (82 %). En revanche, 25 % des personnes qui ont acheté des services en ligne l’ont fait sur un seul site mais ont payé séparément pour chaque service, tandis que 19 % ont acheté ces services sur un site web et ont ensuite cliqué sur un lien figurant sur ce site pour acquérir un autre service auprès d’un autre prestataire.
11 % des consommateurs ont rencontré des problèmes avec les services achetés, ou avec des opérateurs, qui leur ont fourni des motifs légitimes de plainte. Dans ce groupe, 40 % ont subi des pertes financières et 79 % ont dû faire face à des incidences non financières (perte de temps, colère, frustration, stress ou anxiété, par exemple). Parmi les consommateurs qui ont rencontré des problèmes, la majorité (62 %) a introduit une plainte. Un peu plus de la moitié (54 %) se sont déclarés satisfaits de l’issue de la plainte, contre 42 % d’insatisfaits.
2.Transposition
Les États membres devaient transposer la directive sur les voyages à forfait au plus tard le 1er janvier 2018. Entre février 2016 et mai 2017, la Commission a organisé cinq ateliers afin d’aider les États membres dans la transposition de la directive.
2.1. Respect du délai de transposition
En mars 2018, la Commission a engagé, à l’encontre de 14 États membres, des procédures d’infraction pour non-communication des mesures nationales de transposition. Deux États membres n’ont transposé la directive qu’après que la Commission a émis un avis motivé conformément à l’article 258 du TFUE. En mars 2019, tous les États membres avaient notifié à la Commission la transposition complète de la directive.
2.2. Évaluation de la conformité des mesures de transposition
Une étude d’évaluation de la conformité des mesures nationales de transposition, réalisée par un contractant externe, a été achevée début 2021. Selon cette étude, il pourrait y avoir, à des degrés divers, des problèmes potentiels de non-conformité dans tous les États membres, par exemple en ce qui concerne les définitions, les obligations d’information précontractuelle, les droits des voyageurs en matière de résiliation et les frais y afférents, les conséquences de l’inexécution ou de la mauvaise exécution du contrat, les obligations des professionnels facilitant des PVL, la responsabilité en cas d’erreurs de réservation, et le caractère impératif de la directive. Les problèmes recensés ne font pas apparaître une tendance générale, si ce n’est que la transposition correcte des dispositions relatives à la protection contre l’insolvabilité, notamment son efficacité, pourrait ne pas être pleinement garantie dans de nombreux États membres. La Commission analysera les conclusions de l’étude et, s’il y a lieu, envisagera d’engager un dialogue avec les États membres et/ou d’entamer des procédures d’infraction.
3.Application et exécution
Les États membres étaient tenus d’appliquer la réglementation nationale transposant la directive à partir du 1er juillet 2018.
3.1. Sensibilisation
La Commission a publié un communiqué de presse afin d’attirer l’attention sur l’entrée en application de la nouvelle réglementation, a fourni des informations à l’intention des voyageurs et des entreprises sur son site web YOUR EUROPE, et a inclus les voyages à forfait dans sa campagne de communication #yourEUright, lancée en 2019 et traitant de différents droits essentiels dont bénéficient les consommateurs. Néanmoins, les représentants des consommateurs estiment que de nombreux consommateurs ne sont pas suffisamment informés de leurs droits, notamment lorsqu’ils souhaitent résilier un contrat de voyage à forfait.
3.2. Principales difficultés liées à l’application de la directive
Au cours de la phase de transposition et des premières années d’application, ce sont surtout la définition élargie du «forfait», le nouveau concept de PVL, la délimitation entre ces deux concepts ainsi que les formulaires d’information standard qui ont suscité des interrogations de la part des parties prenantes et des autorités. En outre, des difficultés sont apparues en ce qui concerne la protection contre l’insolvabilité, notamment dans le cadre de la faillite de Thomas Cook (voir chapitre 4) et de la pandémie de COVID-19 (voir chapitre 5).
3.2.1.Portée étendue de la définition du forfait
Toute combinaison d’au moins deux types différents de services de voyage pour un même voyage ou séjour de vacances effectuée par un seul professionnel, y compris à la demande du voyageur, constitue un forfait si tous les services sont inclus dans un contrat unique ou si d’autres critères sont remplis, par exemple un prix tout compris ou un prix total. Les exclusions du champ d’application de la directive sont très limitées. Des incertitudes sont ainsi apparues pendant et après la transposition de la directive quant à la question de savoir si la directive s’applique aux prestataires de services d’hébergement touristique qui incluent dans leur offre le libre accès à des activités de loisirs locales ou à des services de transport (par exemple, des «cartes touristiques»).
Exemples: 1. Un exploitant agricole qui, sur son site web, fait la promotion de vacances d’équitation comprenant l’hébergement et des cours d’équitation pour un prix total constitue, au titre de la directive, un organisateur de forfait.
2. Un agent de voyages qui conseille son client sur les différentes possibilités de safari et qui, en fonction du choix du client, réserve un vol, un hébergement dans différents logements et une visite guidée, pour lesquels le voyageur accepte de payer une fois qu’il a sélectionné tous les éléments, constitue l’organisateur de ce forfait et est responsable de l’exécution des différents services de voyage inclus.
Les représentants de petites entreprises du secteur du tourisme et des loisirs (par exemple, le tourisme rural, les clubs sportifs) estiment que les petites ou les très petites entreprises ne devraient pas être soumises aux dispositions de la directive, en particulier lorsqu’aucun transport n’est proposé. Les organisations de consommateurs ainsi que les organisations du secteur des voyages estiment en revanche que des exclusions supplémentaires ne seraient pas une solution appropriée.
3.2.2.Prestations de voyage liées (PVL)
Le concept de prestation de voyage liée a été introduit afin de tenir compte des évolutions du marché, à savoir des situations dans lesquelles des professionnels (principalement en ligne mais aussi hors ligne) aident les voyageurs à conclure des contrats séparés avec des prestataires de services de voyage individuels pour un même voyage et dans un court laps de temps. Ce concept englobe deux scénarios dans lesquels un professionnel facilite la réservation de services de voyage fournis par d’autres prestataires et étend l’application de certaines dispositions de la directive à ces modèles commerciaux.
Exemples: 1. Un agent de voyages réserve un vol pour le compte d’un client et le voyageur paie pour le vol. Ensuite, toujours au cours de la même visite à l’agence de voyages, l’agent de voyages réserve un hébergement dans un hôtel pour le même voyage, hébergement qui n’avait pas été sélectionné et pour lequel la disponibilité de l’hôtel n’avait pas été vérifiée avant la réservation du vol, et demande un paiement ou un acompte pour l’hôtel. Étant donné que chaque service de voyage a été sélectionné et payé séparément, l’agence de voyages a facilité une PVL.
2. Dans le courriel de confirmation d’une réservation de vol, la compagnie aérienne fournit un lien vers un site web de réservation d’hôtel proposant au voyageur la possibilité de réserver un hôtel sur le lieu de destination. Si le voyageur clique sur le lien et, dans les 24 heures suivant la réception de la confirmation de réservation de vol, réserve une chambre pour son voyage, la compagnie aérienne a facilité une PVL d’une «manière ciblée».
Bien que les considérants 12 et 13 de la directive fournissent quelques orientations sur le concept de PVL, c’est sans doute son application qui a soulevé le plus grand nombre de questions. Les représentants des consommateurs et des entreprises estiment que la définition de la PVL est trop complexe et difficile à appliquer dans la pratique.
Ce que l’on entend effectivement par «facilitation» et «facilitation d’une manière ciblée» n’est pas toujours clair. Le considérant 12 précise que le placement de liens par lesquels les voyageurs sont simplement informés, d’une manière générale, d’autres services de voyage ne devrait pas être considéré comme facilitant une PVL. Par conséquent, une promotion active, reposant sur un lien commercial impliquant une rémunération entre le professionnel qui facilite l’achat d’un service de voyage supplémentaire et l’autre professionnel, sera généralement requise (voir le considérant 13).
Une des difficultés découlant de l’application du concept de PVL est liée au fait que, dans le second exemple présenté ci-dessus, l’obligation de protection contre l’insolvabilité dépend, le cas échéant, d’un événement futur et incertain, c’est-à-dire du fait que le voyageur réserve ou non un service de voyage supplémentaire fourni par un autre professionnel dans les 24 heures suivant la première réservation. Si tel est le cas, le prestataire du premier service de voyage qui reçoit des paiements anticipés de la part du voyageur doit fournir pour ces paiements une protection contre l’insolvabilité. Bien que l’article 19, paragraphe 4, de la directive impose au second professionnel d’informer le professionnel facilitant la PVL de la conclusion d’un contrat avec le voyageur, le premier professionnel ne dispose pas nécessairement de toutes les informations permettant de déterminer dans quels cas une PVL a été constituée. Il est signalé que les prestataires de services de voyage supplémentaires ne s’acquittent pas toujours de leurs obligations d’information, par exemple en raison de l’absence de moyens techniques permettant un échange sécurisé des données ou de la crainte de violer le règlement général sur la protection des données. Une telle incertitude pourrait entraîner des difficultés au moment d’assurer la protection requise contre l’insolvabilité.
Des inquiétudes ont également été exprimées quant au fait que, à l’exception de la protection contre l’insolvabilité et de certaines obligations d’information précontractuelle, la directive ne prévoit pas la responsabilité des professionnels facilitant une PVL quant à l’exécution des services concernés. Les représentants des consommateurs craignent que les prestataires de services de voyage se présentent de manière trompeuse comme des professionnels facilitant une PVL plutôt que comme des organisateurs afin de contourner les règles plus strictes en matière de responsabilité applicables aux forfaits, de sorte que les consommateurs bénéficieraient d’un niveau de protection moindre.
3.2.3.Délimitation entre forfait et prestation de voyagé liée
Il est parfois difficile de distinguer certains forfaits de certaines PVL. Un agent de voyages qui réserve un vol et un hôtel pour le compte de son client et émet une seule facture pour les deux services vend un forfait. Si ces mêmes services n’ont pas été choisis conjointement, l’agent de voyages qui les réserve l’un après l’autre et qui ne facture pas un prix total facilite une PVL.
En ce qui concerne les «réservations en ligne liées», il peut être très difficile pour les consommateurs et les autorités de contrôle de prouver qu’un forfait ou une PVL a été conclu ou que ni l’un ni l’autre n’a été conclu, comme expliqué dans le rapport de 2019 sur les «réservations en ligne liées». Un prestataire de services de voyage qui, après avoir effectué une réservation, transfère le nom du voyageur, ses coordonnées de paiement et son adresse électronique à un autre professionnel auprès duquel un second service est réservé dans les 24 heures suivant la confirmation de la première réservation, constitue l’organisateur d’un forfait et est donc responsable de l’exécution des deux services. Si l’un de ces éléments de données n’est pas transféré, le premier professionnel facilite une PVL et n’est responsable que de l’exécution de son propre service, à condition que la seconde réservation ait lieu dans un délai de 24 heures. Si elle se produit plus tard, les dispositions de la directive ne sont pas du tout applicables. Il est signalé que, dans la pratique, il est difficile de démontrer quelles données ont été transférées entre professionnels ou à quel moment la réservation du second service de voyage a été effectuée.
3.2.4.Obligations d’information
Conformément aux articles 5 et 19 de la directive, les organisateurs, les détaillants et les professionnels qui facilitent une PVL sont tenus de fournir aux voyageurs des informations spécifiques avant la conclusion du contrat. Dans l’ensemble, les obligations d’information précontractuelle sur le forfait spécifique en question ne semblent pas poser de problèmes majeurs. En outre, la directive prévoit trois formulaires d’information standard différents pour les contrats de voyage à forfait et cinq formulaires différents pour les PVL, à fournir aux voyageurs.
Le 26 novembre 2019, les services de la Commission ont organisé un atelier consacré à l’application de la directive dans le secteur des compagnies aériennes, afin également de donner suite au rapport de la Commission sur les «réservations en ligne liées». Selon les représentants des compagnies aériennes, les formulaires d’information standard sont trop complexes, techniques et difficiles à lire, en particulier sur les appareils mobiles. Il a notamment été déclaré qu’en ce qui concerne les formulaires standard à utiliser pour les PVL, les informations pourraient être considérées comme confuses et dissuasives, étant donné que les voyageurs sont d’abord informés du fait qu’ils ne bénéficient pas des droits applicables aux forfaits.
Toutefois, l’objectif de cette obligation d’information était précisément d’attirer l’attention des consommateurs sur le niveau de protection différent offert par les forfaits par rapport aux PVL et de leur permettre ainsi de choisir en connaissance de cause entre les deux modèles. Les organisations de consommateurs déclarent que la transparence devrait être encore renforcée par la communication aux voyageurs qui réservent un service de voyage indépendant d’informations sur le niveau de protection correspondant, qui, dans le cas des services de transport, est garanti par les règlements de l’UE relatifs aux droits des passagers.
Les représentants des entreprises de voyages proposent, compte tenu notamment de la pandémie de COVID-19, d’améliorer l’information et la protection des consommateurs pour tous les services de voyage, y compris les services indépendants. Ils déclarent que cela pourrait donner plus de liberté aux opérateurs et aux consommateurs au moment de choisir une combinaison de services de voyage (un forfait avec protection complète ou une combinaison de services de voyage de type PVL assortie de responsabilités clairement définies quant à la bonne exécution des services pour chacun des prestataires de services).
3.3. Exécution
L’article 24 de la directive fait obligation aux États membres de veiller à ce qu’il existe des moyens adéquats et efficaces permettant de faire respecter la directive. L’exécution est organisée différemment dans les États membres, en fonction de leurs traditions juridiques respectives. Étant donné qu’une grande partie des dispositions de la directive concernent la relation contractuelle entre organisateur et voyageur, les voyageurs peuvent faire appliquer ces dispositions par des actions privées devant les tribunaux ou des organismes de règlement extrajudiciaire des litiges. La directive entre dans le champ d’application de la nouvelle directive relative aux actions représentatives que les États membres devront transposer au plus tard à la fin 2022. Avec l’application de cette directive, des entités qualifiées pourront intenter des actions collectives tant pour mettre fin aux violations des droits des voyageurs que pour obtenir réparation. En outre, selon l’étude d’évaluation de la conformité (voir le point 2.2 ci-dessus), dans la majorité des États membres, au moins certaines exigences de la directive sur les voyages à forfait font l’objet de sanctions administratives ou pénales. La mise en œuvre par la sphère publique est particulièrement importante lorsqu’il s’agit de vérifier le respect des obligations d’information et des obligations en matière de protection contre l’insolvabilité.
La directive entre dans le champ d’application du règlement (UE) 2017/2394 sur la coopération entre les autorités nationales chargées de veiller à l’application de la législation en matière de protection des consommateurs (règlement CPC). Dans le cadre des échanges au sein du réseau CPC, plusieurs autorités ont rendu compte de la prise de mesures coercitives au niveau national. Des mesures contre les violations transfrontières des dispositions de la directive qui ont porté atteinte, portent atteinte ou sont susceptibles de porter atteinte aux intérêts collectifs des consommateurs peuvent également être mises en œuvre par la sphère publique dans le cadre du mécanisme de coopération établi en vertu du règlement CPC.
Règlement extrajudiciaire des litiges (REL) et règlement en ligne des litiges (RLL)
La directive 2013/11/UE relative au règlement extrajudiciaire des litiges de consommation (directive relative au RELC) et le règlement (UE) nº 524/2013 relatif au règlement en ligne des litiges de consommation (règlement relatif au RLLC) ont instauré un cadre législatif horizontal qui s’applique également à la directive sur les voyages à forfait. En matière de REL, les environnements nationaux sont variés. Dans plusieurs États membres, les organes de REL chargés des «services de transport» s’occupent également des litiges liés aux voyages à forfait, tandis que dans d’autres États membres, ce secteur relève des organes de REL résiduels compétents pour les litiges de consommation. Les consommateurs qui achètent des biens ou des services en ligne peuvent recourir à la plateforme européenne de règlement en ligne des litiges (RLL), mais les données disponibles montrent que, sur cette plateforme, le nombre de plaintes relatives aux voyages à forfait reste faible.
La Commission ne dispose pas de chiffres précis sur le niveau de participation des organisateurs aux procédures de REL. Les organisations de consommateurs ainsi que certains organismes nationaux de REL signalent toutefois que la participation volontaire au REL dans le secteur des voyages à forfait est généralement très faible.
L’organisme de REL français «Médiation Tourisme et Voyage» (MTV) couvre essentiellement l’ensemble du secteur des voyages et des transports. En 2019, il a reçu 8 667 demandes (environ 21 % d’entre elles concernant des voyages à forfait classiques); pour 5 449 d’entre elles, des solutions amiables ont été proposées, avec un taux d’acceptation de 93,5 %. Les principaux sujets des litiges liés aux voyages à forfait concernaient l’exécution du contrat, les annulations ou modifications de contrat, et la qualité du service.
Informations communiquées par les Centres européens des consommateurs (CEC)
En 2019, le réseau des Centres européens des consommateurs (CEC) a traité 2 399 requêtes et 261 plaintes liées à la directive. En 2020, en raison de la pandémie de COVID-19, ces nombres ont augmenté de 368 % (11 226 requêtes) et de 250 % (914 plaintes). En outre, la proportion de dossiers liés à la directive parmi l’ensemble des dossiers examinés par les CEC a sensiblement augmenté, passant de 2 % en 2019 à 7 % en 2020
. Le délai moyen de traitement des dossiers est resté identique tandis que le taux de résultats positifs ou neutres
à la suite de l’intervention des CEC auprès d’un professionnel est passé de 61 % en 2019 à 70 % en 2020
. En 2019, le principal objet des requêtes et des plaintes (39 %) était la non-conformité de l’exécution, les actes trompeurs ou les omissions. En 2020, l’objet principal (62 %) était l’annulation et l’inexécution. En 2020, les CEC ont publié une brochure sur l’interprétation de la directive
et partagé des FAQ sur leurs sites web nationaux et sur leurs réseaux sociaux afin d’aider les consommateurs à la suite de l’envolée des plaintes dans le secteur des voyages, y compris en rapport avec les forfaits.
4.Protection contre l’insolvabilité
Conformément à l’article 17 de la directive, les organisateurs sont tenus de fournir une garantie pour le remboursement de tous les paiements effectués par les voyageurs dans la mesure où les services de voyage concernés ne sont pas exécutés en raison de l’insolvabilité des organisateurs. Cette garantie doit également couvrir le rapatriement des voyageurs si leur transport est inclus dans le forfait. Même si les États membres conservent une marge d’appréciation quant à la manière dont la protection contre l’insolvabilité doit être organisée, ils doivent veiller à ce que la protection soit effective et conforme aux exigences énoncées à l’article 17 de la directive. La directive de 2015 a globalement donné lieu à une amélioration significative des systèmes nationaux de protection contre l’insolvabilité par rapport à la directive de 1990. Dans 21 États membres, la protection contre l’insolvabilité est organisée par le secteur lui-même, soit par l’intermédiaire de fonds de garantie privés, de compagnies d’assurances ou d’une combinaison des deux, soit par d’autres formes d’accords privés, telles que des garanties bancaires. Deux États membres (la Finlande et le Portugal) ont mis en place un fonds de garantie constitué en tant qu’entité publique. Quatre États membres (le Danemark, Malte, la Pologne et la Tchéquie) ainsi que le Royaume-Uni disposent d’un système mixte, en ce sens qu’une forme de garantie privée est complétée par un fonds de garantie administré par les pouvoirs publics (double niveau) ou que les fonds de garantie sont gérés par des organismes publics-privés.
4.1. Fonctionnement des régimes de protection contre l’insolvabilité — la faillite de Thomas Cook
La faillite, en septembre 2019, du voyagiste britannique Thomas Cook Group plc, l’un des principaux groupes de voyages d’agrément au monde, avec des ventes de 9,6 milliards de GBP et quelque 19 millions de clients au cours de l’année précédant sa faillite, a bouleversé l’ensemble du secteur du tourisme. Thomas Cook était présent dans toute l’UE par l’intermédiaire de différentes filiales et marques établies dans plusieurs États membres, et employait plus de 21 000 personnes. La faillite a eu des conséquences pour quelque 600 000 vacanciers, lesquels ont dû être soit rapatriés, soit remboursés des sommes qu’ils avaient avancées. Des voyageurs ont été concernés dans presque tous les pays de l’UE.
Dans la mesure où ils avaient acheté un voyage à forfait, les voyageurs étaient couverts par les régimes nationaux de protection contre l’insolvabilité applicables.
L’autorité britannique de l’aviation civile (CAA) a organisé le plus grand rapatriement en temps de paix, pour plus de 140 000 voyageurs. Rien qu’au Royaume-Uni, l’autorité compétente a procédé au règlement de quelque 340 000 créances, pour une valeur de près de 350 millions de GBP couverte par le régime de protection ATOL (licence des organisateurs de voyages aériens)
géré par les pouvoirs publics.
À la suite de la faillite des filiales allemandes de Thomas Cook, 140 000 voyageurs environ sont restés bloqués à l’étranger et ont été rapatriés avec l’aide de l’organisme qui fournissait la protection contre l’insolvabilité, Zurich Versicherungen. Toutefois, la protection contre l’insolvabilité était insuffisante pour permettre le remboursement intégral des voyageurs qui n’avaient pas encore rejoint leur lieu de destination (estimé à 287,4 millions d’EUR), compte tenu du plafond applicable à la responsabilité des compagnies d’assurances couvrant ce risque. Le gouvernement fédéral s’est engagé à indemniser tous les voyageurs concernés et à verser la différence entre les prépaiements qu’ils avaient effectués et les montants remboursés par la compagnie d’assurances couvrant les sociétés insolvables de Thomas Cook. Selon les informations fournies par les autorités allemandes, au début du mois de février 2021, 105 306 voyageurs avaient procédé à l’enregistrement d’une demande en ce sens et jusqu’à 10 000 enregistrements étaient encore susceptibles d’être effectués.
En France, plus de 53 000 voyageurs étaient concernés et les coûts pour le fonds de garantie de voyage APST, qui couvrait les filiales françaises de Thomas Cook, sont estimés dans une fourchette de 40 à 50 millions d’EUR. Au total, 10 500 voyageurs ont été rapatriés et plus de 30 000 clients ont pu passer leurs vacances avec d’autres voyagistes. Le remboursement de plus de 11 500 voyageurs ne pourra commencer qu’une fois la procédure d’insolvabilité achevée et tous les dossiers de remboursement admissibles complétés.
Thomas Cook a continué à bénéficier d’une protection contre l’insolvabilité dans chacun des États membres où ses différentes filiales étaient établies et n’a pas eu recours au mécanisme de reconnaissance mutuelle prévu par la directive. Par conséquent, les coûts de rapatriement et de remboursement des voyageurs concernés dans l’ensemble de l’UE ont été répartis entre les différents fournisseurs de protection contre l’insolvabilité au sein des États membres et n’ont pas été supportés par un fonds de garantie «voyage» unique ou par une compagnie d’assurances unique.
4.2. Évaluation
4.2.1.Rapatriement des voyageurs et remboursement des paiements
Dans l’ensemble, et compte tenu de l’ampleur de la faillite de Thomas Cook, les systèmes de protection contre l’insolvabilité semblent avoir bien fonctionné, même s’ils ont été mis à rude épreuve. Les voyageurs concernés qui étaient déjà sur leur lieu de destination ont été rapatriés ou ont pu achever leurs vacances comme prévu. Selon les informations dont dispose la Commission, les voyageurs qui n’avaient pas encore entamé leur forfait ont reçu ou devraient recevoir un remboursement de leurs prépaiements. Toutefois, dans certains États membres, les voyageurs ont dû attendre longtemps pour recevoir un remboursement ou n’ont pas encore été remboursés intégralement plus d’un an après la faillite de Thomas Cook, même si l’article 17, paragraphe 5, de la directive exige que le remboursement soit effectué sans retard excessif après que le voyageur en a fait la demande.
4.2.2.Assurabilité des risques
Certaines parties prenantes du secteur représentées au sein du groupe d’experts des parties prenantes chargé de soutenir l’application de la directive, de même que certaines autorités, craignent qu’il soit de plus en plus difficile de trouver des fournisseurs de protection contre l’insolvabilité appropriés, qui soient disposés à couvrir les risques liés à la faillite d’un grand organisateur, en particulier en haute saison, et qui soient en mesure de le faire. Relativement peu de fonds de garantie pour les voyages et de compagnies d’assurances fournissent une protection contre l’insolvabilité. Il a été rapporté que les banques ne fournissaient plus de garanties aux organisateurs et qu’en outre, certaines des compagnies d’assurances, déjà relativement peu nombreuses, offrant une protection contre l’insolvabilité se retiraient du marché (par exemple, en Autriche et en Belgique). Il est donc important de trouver un système solide qui protège efficacement les voyageurs contre le risque d’insolvabilité. Les idées avancées pour remédier à diverses difficultés comprennent le recours à plusieurs fournisseurs de garantie pour un même organisateur ou la création d’un fonds de garantie paneuropéen constituant une sorte de réassurance pour les garants de premier rang.
4.2.3.Divergences entre les systèmes nationaux de protection contre l’insolvabilité
La directive exige que la protection contre l’insolvabilité soit «effective» mais a laissé aux États membres le soin d’organiser cette protection (voir le considérant 39). Les difficultés rencontrées dans certains États membres pour couvrir le rapatriement et les remboursements ont amené les organisations de consommateurs à demander à ce que soit instaurée une plus grande harmonisation des systèmes nationaux de protection contre l’insolvabilité, comprenant l’application de critères minimaux concernant la manière dont les systèmes de protection contre l’insolvabilité devraient être conçus et visant à faire en sorte que les fonds de garantie soient suffisamment financés. Toutefois, par rapport à la directive de 1990, la directive actuelle fournit déjà davantage d’informations sur la protection requise en cas d’insolvabilité et, lors des négociations législatives la concernant, la mesure dans laquelle la directive devait être normative en la matière a été un sujet de controverse. Les représentants du secteur des assurances ont souligné que les rapatriements pouvaient être mieux organisés par le secteur du voyage lui-même (par exemple, par l’intermédiaire d’un fonds de garantie), tandis que l’activité principale des institutions financières était la gestion des paiements.
4.2.4.Préférence en faveur de la continuation des vacances à forfait
Les représentants des fonds de garantie pour les voyages présents au sein du groupe d’experts des parties prenantes chargé de soutenir l’application de la directive, en particulier, ont souligné qu’en cas d’insolvabilité d’un organisateur, la continuation du forfait réservé, plutôt que le rapatriement ou le remboursement, serait la meilleure solution pour les voyageurs et les prestataires de services de voyage. Au considérant 39 de la directive, il est indiqué qu’il devrait être possible de proposer aux voyageurs la continuation du forfait.
4.2.5.Limitation des prépaiements
Le prépaiement est le mode de paiement habituel pour les voyages à forfait. En Allemagne, conformément à la jurisprudence nationale relative aux clauses contractuelles abusives, les prépaiements relatifs à des voyages à forfait sont en principe limités à un acompte de 20 % au moment de la réservation, à moins que l’organisateur ne justifie valablement la nécessité d’un prépaiement plus élevé imposée par les dépenses encourues au moment de la conclusion du contrat; le solde est dû au plus tôt 30 jours avant le début du voyage. Néanmoins, la faillite de Thomas Cook a donné lieu à des demandes de remboursement estimées à 287,4 millions d’EUR en Allemagne, de sorte que le gouvernement a finalement été amené à rembourser les montants qui ne l’avaient pas été (voir le point 4.1 ci-dessus). En Autriche également, des restrictions sont prévues pour les prépaiements relatifs à des voyages à forfait, lesquelles ne s’appliquent toutefois pas lorsqu’une protection illimitée contre l’insolvabilité est disponible.
Afin de limiter l’exposition des voyageurs au risque d’insolvabilité, mais aussi de réduire les risques des fournisseurs de garanties, et donc les coûts correspondants, les organisations de consommateurs et de voyageurs ont proposé de limiter le montant des prépaiements et de demander aux voyageurs de ne payer qu’à la prestation du service. Elles avancent qu’en limitant les prépaiements, le risque à couvrir par les systèmes de protection contre l’insolvabilité pourrait se limiter essentiellement au rapatriement, et les voyageurs seraient mieux protégés en cas d’annulation.
Étant donné que les forfaits comprennent souvent des services prépayés tels que le transport de passagers, la faisabilité, la portée et les contraintes d’une éventuelle limitation des prépaiements dans le secteur des voyages à forfait devraient être évaluées eu égard à l’écosystème touristique dans son ensemble.
Les représentants du secteur des transports et des voyages estiment que la limitation des prépaiements pourrait aggraver leur situation critique en matière de liquidités. Ils soulignent également que le prépaiement est la norme mondiale pour les services de voyage et que les exigences unilatérales de l’UE limitant ce modèle commercial pourraient avoir de lourdes conséquences et porter atteinte à l’égalité des conditions de concurrence par rapport aux concurrents de pays tiers. En outre, les représentants du secteur soulignent que les prix des vacances à forfait peuvent être maintenus à un faible niveau parce que les voyagistes achètent à l’avance de grandes quantités de capacités hôtelières et de transport, financées par les prépaiements des consommateurs.
4.2.6.Protection contre l’insolvabilité en cas de faillite des opérateurs de transport
Dans la résolution qu’il a adoptée à la suite de la faillite de Thomas Cook
, le Parlement européen a reconnu que le rapatriement avait été effectif et n’a émis aucune réserve au sujet de la directive. Dans ce contexte, le Parlement a néanmoins réitéré sa demande visant à étendre la protection contre l’insolvabilité aux billets d’avion vendus séparément, dans le cadre de la révision du règlement (CE) nº 261/2004 relatif aux droits des passagers aériens. L’insolvabilité d’une compagnie aérienne peut avoir des conséquences pour les voyageurs, les voyagistes et les intermédiaires. Par exemple, si un contrat de voyage à forfait comportant un vol est annulé conformément à la directive, l’organisateur peut être tenu de rembourser au voyageur l’intégralité du prix, qu’il soit toujours en possession de l’argent ou non ou qu’il puisse le récupérer auprès de la compagnie aérienne ou non. L’appel d’un certain nombre de parties prenantes représentant les entreprises du secteur des voyages et les consommateurs à l’instauration, par les compagnies aériennes, d’une protection obligatoire contre l’insolvabilité est devenu plus pressant dans le contexte de la crise de la COVID-19. Le rapport de la table ronde de l’aviation sur la relance de l’aviation européenne (novembre 2020) reconnaît que cette crise a montré que les voyageurs craignent de ne pas être protégés en cas d’insolvabilité des compagnies aériennes, et propose que les répercussions de la protection contre l’insolvabilité des compagnies aériennes fassent l’objet d’une analyse plus approfondie.
Dans sa stratégie de mobilité durable et intelligente du 9 décembre 2020, la Commission a déclaré que «[l]’UE doit venir en aide aux passagers lorsque des opérateurs de transport font faillite ou traversent une crise aiguë de liquidité, comme c’est le cas dans le contexte de la pandémie de COVID-19. Les passagers immobilisés doivent être rapatriés et leurs billets doivent être remboursés en cas d’annulation par le transporteur. La Commission examine les options relatives à d’éventuels moyens de protéger les passagers contre de tels événements et les avantages qu’offriraient de tels moyens, et présentera, s’il y a lieu, des propositions législatives».
5.La pandémie de COVID-19
Le 30 janvier 2020, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) a déclaré que l’épidémie mondiale de COVID-19 représentait une urgence de santé publique de portée internationale et, le 11 mars 2020, elle a qualifié celle-ci de pandémie.
La pandémie de COVID-19 a entraîné des restrictions de déplacement sans précédent dans le monde, au point que les voyages en Europe et dans de nombreuses autres régions du monde ont quasiment cessé. Ces mesures ont aujourd’hui de graves répercussions sur l’ensemble de l’écosystème touristique. Les données de l’OMT montrent, pour la période de janvier à octobre 2020, une réduction des résultats du tourisme de 72 % en Europe par rapport à 2019. Outre la perte de recettes, les organisateurs souffrent particulièrement du fait que les demandes de remboursement des voyageurs à la suite d’annulations dépassent largement le niveau des nouvelles réservations. Le Centre commun de recherche de la Commission a estimé, dans un scénario de «deuxième vague», que 11,7 millions d’emplois pourraient être menacés dans l’économie de l’UE en raison de la baisse du nombre d’arrivées de touristes en 2020. Dans le même temps, selon les organisations de consommateurs, en décembre 2020, des milliers de consommateurs n’avaient pas encore reçu de remboursement en espèces pour leurs vacances annulées.
5.1. Annulations de voyages dues à la COVID-19
La COVID-19 a déclenché l’application des dispositions de la directive relatives aux «circonstances exceptionnelles et inévitables», définies à l’article 3, point 12, de ladite directive comme étant «une situation échappant au contrôle de la partie qui invoque cette situation et dont les conséquences n’auraient pu être évitées même si toutes les mesures raisonnables avaient été prises». Les risques importants pour la santé humaine, tels que l’apparition d’une maladie grave sur le lieu de destination ou à proximité immédiate de celui-ci, sont généralement considérés comme des circonstances exceptionnelles et inévitables (voir le considérant 31 de la directive).
Conformément à l’article 12 de la directive, le voyageur peut résilier le contrat de voyage à forfait sans devoir payer des frais de résiliation si «des circonstances exceptionnelles et inévitables, survenant au lieu de destination ou à proximité immédiate de celui-ci, ont des conséquences importantes sur l’exécution du forfait ou sur le transport des passagers vers le lieu de destination» (article 12, paragraphe 2, de la directive). L’organisateur d’un forfait peut également résilier le contrat sans frais de résiliation s’il est empêché d’exécuter le contrat en raison de «circonstances exceptionnelles et inévitables» (article 12, paragraphe 3, de la directive). Dans de tels cas, le voyageur a droit au remboursement intégral de tout paiement effectué pour le forfait dans les 14 jours suivant la résiliation du contrat (article 12, paragraphe 4, de la directive).
Le 5 mars 2020, avec une mise à jour le 19 mars 2020, les services de la Commission ont publié sur le site web de cette dernière des orientations informelles sur l’application de la directive sur les voyages à forfait dans le contexte de la COVID-19
, confirmant le droit du voyageur à obtenir un remboursement intégral si, sur la base d’une évaluation au cas par cas, les conditions de l’article 12, paragraphes 2 ou 3, de la directive sont remplies. Dans cette note, les services de la Commission ont également indiqué que, compte tenu de la situation de trésorerie des organisateurs, les voyageurs devraient envisager d’accepter que leur voyage à forfait soit reporté à une date ultérieure, ce qui, compte tenu de l’incertitude actuelle entourant les plans de voyage, pourrait être réalisé par l’émission d’une note de crédit («bon à valoir»). Plusieurs États membres ont demandé à la Commission de suspendre le droit au remboursement dans les 14 jours et/ou de le remplacer par une solution temporaire reposant sur l’utilisation de bons à valoir.
Dans une lettre du 27 mars 2020 adressée à l’ensemble des États membres, le commissaire Reynders a rappelé que le droit au remboursement dont bénéficie le voyageur devait s’appliquer aux annulations liées à la COVID-19. Pour atténuer les problèmes de liquidité des entreprises, il a suggéré que les voyagistes puissent proposer des bons à valoir à la condition que les voyageurs 1) aient le choix d’accepter le bon et 2) aient la possibilité de demander un remboursement intégral si, à terme, ils n’en ont pas fait usage. En outre, le commissaire Reynders a également souligné que des mesures visant à garantir une protection solide contre l’insolvabilité étaient nécessaires afin de renforcer la confiance des voyageurs dans le choix d’un bon à valoir.
5.1.1.Recommandation de la Commission relative aux bons à valoir
Le 13 mai 2020, la Commission a adopté la recommandation (UE) 2020/648 concernant des bons à valoir destinés aux passagers et voyageurs à titre d’alternative au remboursement des voyages à forfait et des services de transport annulés dans le contexte de la pandémie de COVID-19
. Dans cette recommandation, la Commission a rappelé une nouvelle fois le droit au remboursement au titre de la législation applicable de l’UE, à savoir la directive sur les voyages à forfait et les règlements de l’UE relatifs aux droits des passagers. Parallèlement, elle a reconnu la situation intenable, en termes de recettes et de trésorerie, dans laquelle se trouvent les secteurs des transports et des voyages, du fait des nombreuses annulations entraînées par la pandémie de COVID-19. La Commission a donc recommandé des moyens de rendre les bons à valoir plus attrayants, comme alternative à un remboursement en espèces, afin d’accroître leur taux d’acceptation par les passagers et les voyageurs. Elle a également souligné les types de régimes de l’Union disponibles pour soutenir les entreprises des secteurs des voyages et des transports.
Par lettre de la commissaire Vălean et du commissaire Reynders du 14 mai 2020, la Commission a attiré l’attention de tous les États membres sur cette recommandation. La Commission a demandé, entre autres, que la directive sur les voyages à forfait et les règlements de l’UE relatifs aux droits des passagers soient correctement appliqués et que les pratiques contraires à ces règles soient détectées en temps utile et fassent l’objet de sanctions efficaces.
Par sa recommandation, la Commission a clairement indiqué aux États membres et aux parties prenantes qu’elle ne suivrait pas les appels en faveur d’une diminution de la protection des consommateurs. Plusieurs États membres, à la suite de la recommandation de la Commission, ont adopté une législation relative aux bons à valoir acceptés librement dans le domaine des voyages à forfait et/ou des mesures d’aide d’État destinées à soutenir le secteur des voyages directement au titre de l’encadrement temporaire des mesures d’aide d’État visant à soutenir l’économie dans le contexte actuel de la flambée de COVID-19 ou au titre du traité. Les organisations de consommateurs se plaignent toutefois de ce que les pays de l’UE, les compagnies aériennes et les voyagistes ne suivent pas la recommandation de la Commission de manière adéquate.
5.1.2. Règles nationales temporaires dérogeant à la directive
Selon les informations dont dispose la Commission, 15 États membres ont adopté des règles spécifiques autorisant temporairement les organisateurs de forfaits à imposer, pour les voyages annulés, des bons à valoir en lieu et place des remboursements en espèces, ou à reporter le remboursement au-delà de la période de 14 jours, en violation de l’article 12, paragraphe 2, de l’article 12, paragraphe 3, point b), et de l’article 12, paragraphe 4, lus conjointement avec l’article 4 de la directive.
Par conséquent, conformément à la position claire exprimée dans sa recommandation (UE) 2020/648, la Commission a ouvert des procédures d’infraction à l’encontre de 11 États membres. Elle n’a pas ouvert de procédure d’infraction à l’encontre des quatre États membres dans lesquels les dérogations temporaires à la directive avaient expiré ou avaient été modifiées lorsqu’elle a décidé d’engager les procédures d’infraction. Au moment de la rédaction du présent rapport, des procédures d’infraction à l’encontre de quatre États membres étaient toujours en cours.
Dans plusieurs États membres, les mesures nationales non conformes, bien qu’elles ne soient plus en vigueur, ont continué de produire des effets, par exemple parce que les voyageurs ayant reçu des bons à valoir obligatoires sur la base de la législation expirée ou abrogée ont dû attendre au moins jusqu’à la fin de la validité de ces bons avant de pouvoir demander le remboursement des prépaiements qu’ils avaient effectués pour leur voyage à forfait annulé. La Commission a exhorté ces États membres à prendre des mesures pour remédier à la situation créée par l’ancienne législation contraire à la directive et pour veiller à ce que les consommateurs qui préfèrent un remboursement en espèces à un bon à valoir bénéficient effectivement d’un remboursement conformément à la directive.
5.1.3.Mesures nationales d’aide d’État
Outre les régimes d’aides d’État généraux accessibles également aux opérateurs du secteur du tourisme, plusieurs États membres ont adopté des mesures d’aide d’État spécifiques afin de soutenir les organisateurs de voyages à forfait et, en particulier, de mettre en place des régimes de garantie pour les bons à valoir de manière à assurer, en cas d’insolvabilité de l’organisateur, le remboursement des voyageurs, ainsi que l’a préconisé la Commission dans sa recommandation (UE) 2020/648. La Commission a autorisé ces mesures conformément à l’encadrement temporaire des mesures d’aide d’État
ou en vertu du traité.
Le Danemark a décidé d’octroyer un prêt de 200 millions d’EUR en faveur du fonds de garantie «voyages» pour les annulations de voyages dues à la pandémie de coronavirus. L’Allemagne a adopté un régime de garantie de 840 millions d’EUR destiné à couvrir les bons à valoir acceptés librement par les voyageurs en lieu et place des remboursements en espèces. Grâce à ce régime, l’Allemagne visait à faire des bons à valoir une alternative attrayante au remboursement en espèces. La Pologne a adopté des mesures destinées à soutenir les voyagistes ainsi que d’autres entreprises actives dans les secteurs du tourisme et de la culture. Dans le cadre de ce régime, l’État polonais rembourse les voyageurs concernés par des annulations dues à la COVID-19 pour le compte des voyagistes, lesquels devront ensuite rembourser ces prêts. L’Italie a adopté des mesures visant à octroyer des subventions directes aux voyagistes et aux agents de voyages afin de compenser les pertes subies. Les Pays-Bas ont décidé d’octroyer un prêt de 165 millions d’EUR afin de soutenir les cinq fonds de garantie néerlandais qui fournissent des régimes de garantie aux organisateurs de voyages à forfait
. L’objectif de cette aide d’État est de fournir des liquidités aux fonds afin de garantir une couverture suffisante de l’ensemble des paiements à effectuer en faveur des voyageurs en cas d’insolvabilité des voyagistes, y compris le remboursement des «bons à valoir Corona». La Bulgarie a adopté un régime d’aides d’environ 26 millions d’EUR en faveur des voyagistes et des agents de voyages afin de compenser les pertes liées aux remboursements à effectuer aux voyageurs dont les forfaits ont été annulés en raison de la COVID-19. Chypre a adopté une aide pour un montant estimé de 86,6 millions d’EUR sous la forme de garanties pour les notes de crédit émises en faveur des consommateurs et des organisateurs de voyages à forfait afin que ces bons à valoir acceptés librement soient garantis en cas d’éventuelle insolvabilité de l’émetteur. La Suède a adopté une aide sous la forme de prêts aux agences de voyages et aux voyagistes afin de les aider à s’acquitter de leurs obligations légales de remboursement. L’Autriche a adopté une aide sous la forme de garanties d’État destinées à couvrir, pendant une période limitée, le risque d’insolvabilité des organisateurs de voyages à forfait et des professionnels facilitant des prestations de voyage liées, compte tenu du retrait des banques et des assureurs de l’assurance des voyages à forfait et des difficultés rencontrées par les organisateurs de voyages à forfait et les professionnels facilitant des prestations de voyage liées pour trouver des garanties financièrement abordables sur le marché.
5.2. Défis
5.2.1.Respect du droit des voyageurs au remboursement
Selon les informations disponibles, dans toute l’UE, plusieurs milliers de voyageurs dont les voyages ont dû être annulés en raison de la COVID-19 n’ont pas été remboursés dans le délai de 14 jours prévu à l’article 12, paragraphe 4, de la directive; le remboursement leur a été refusé, un bon à valoir leur a été imposé contre leur volonté, ils n’ont pas pu contacter l’organisateur, ils ont obtenu un remboursement très tardif ou partiel, ou ils ont été autrement empêchés de faire valoir leur droit. L’augmentation du nombre de requêtes et de plaintes reçues par les organes de REL, les CEC et les organisations de consommateurs a également suscité des inquiétudes quant au respect des droits des voyageurs en vertu de la directive.
5.2.2.Difficultés des entreprises
Comme décrit au point 5.1., la pandémie de COVID-19 a déclenché l’application du concept de «circonstances exceptionnelles et inévitables» tel que défini à l’article 3, point 12, de la directive. Conformément au considérant 31, il peut s’agir, par exemple, «d’une guerre, d’autres problèmes de sécurité graves, tels que le terrorisme, de risques graves pour la santé humaine, comme l’apparition d’une maladie grave sur le lieu de destination, ou de catastrophes naturelles telles que des inondations, des tremblements de terre ou des conditions météorologiques rendant impossible un déplacement en toute sécurité». Ces événements sont généralement, mais pas nécessairement, limités à une destination spécifique ou à une partie donnée du monde.
Les organisateurs sont souvent en mesure de faire face à de tels événements en changeant la destination, en reportant la date du voyage ou en accordant au voyageur un remboursement financé de manière croisée par les recettes provenant des réservations vers d’autres destinations, pour autant que ces événements ne concernent qu’une destination particulière. Dans le cas d’une pandémie entraînant à l’échelle de la planète un quasi-arrêt des voyages sur une période plus longue, comme dans le cas de la COVID-19, les montants à rembourser sont considérablement plus élevés que les recettes provenant des nouvelles réservations. En outre, les organisateurs ont souvent des coûts fixes qui épuisent les ressources financières des entreprises. En fin de compte, il n’est peut-être pas dans l’intérêt des voyageurs qu’un organisateur fasse faillite et que les voyageurs soient contraints de faire valoir leurs créances sur la masse de l’insolvabilité.
La recommandation de la Commission relative aux bons à valoir (voir le point 5.1.1 ci-dessus) visait également à résoudre les problèmes de liquidité des organisateurs engendrés par les annulations en masse découlant de la COVID-19. Ces problèmes de liquidité sont aggravés par le fait que les organisateurs doivent rembourser l’intégralité du forfait au voyageur alors qu’ils ne récupèrent pas toujours à temps, auprès des prestataires de services, le montant des services prépayés qui font partie du forfait. Si les prestataires de services font faillite entre-temps, les organisateurs peuvent ne pas être remboursés du tout. Il peut en résulter un partage inéquitable de la charge entre les opérateurs appartenant à l’écosystème du voyage.
Certains organisateurs de forfaits et intermédiaires ont rapporté qu’au cours de la crise de la COVID-19, les compagnies aériennes ont mis un terme au mécanisme de remboursement automatique des organisateurs et autres agents de voyages par l’intermédiaire des systèmes mondiaux de distribution («systèmes informatisés de réservation»), tandis que les organisateurs étaient tenus de rembourser les voyageurs.
Cette inégalité de relation entre les entreprises est encore aggravée par les différences entre les régimes juridiques auxquels sont soumis les organisateurs, d’une part, et les prestataires de services de transport, d’autre part. Contrairement à ce que prévoit la directive, les passagers qui annulent eux-mêmes un vol ou un autre service de transport n’ont pas droit au remboursement en vertu des règlements de l’UE relatifs aux droits des passagers, même en cas de circonstances exceptionnelles. Dans un tel cas, les conséquences juridiques et, en particulier, le droit du passager au remboursement sont déterminés par les conditions du contrat conclu entre le passager et l’opérateur de transport et par la législation applicable des États membres. Par exemple, si un voyageur a réservé un forfait comportant un vol et a annulé le contrat de voyage à forfait conformément aux dispositions de la directive, l’organisateur est dans l’obligation de rembourser le voyageur mais n’a pas le droit, en vertu de la législation de l’UE, de demander un remboursement à la compagnie aérienne si le vol a bien eu lieu. L’organisateur devrait plutôt faire valoir un éventuel droit au remboursement en vertu de la législation applicable de l’État membre concerné.
Certains organisateurs de voyages à forfait ont proposé de modifier l’article 22 de la directive et d’ajouter une obligation de remboursement pour les prestataires de services de voyage qui ne sont pas fournis en raison de la résiliation du contrat de voyage à forfait lorsque l’organisateur est tenu de rembourser le voyageur. Le secteur aérien, en revanche, a exprimé de vives inquiétudes quant au fait de réglementer, dans la directive, les relations commerciales souvent complexes entre les organisateurs et les prestataires de services de voyage.
5.2.3.Avertissements ou conseils officiels concernant les voyages
Il est communément admis qu’un avertissement officiel concernant les voyages, émis par les autorités nationales, est un indicateur important qu’un contrat de voyage à forfait est susceptible d’être annulé en raison de circonstances exceptionnelles et inévitables ayant des conséquences sur l’exécution du voyage. Toutefois, la directive elle-même est muette en ce qui concerne la valeur juridique des avertissements ou conseils aux voyageurs émis par les pouvoirs publics étant donné qu’au moment de son adoption, certains États membres étaient fermement opposés à l’inclusion dans la directive de toute référence aux conseils officiels concernant les voyages.
L’émission de conseils concernant les voyages relève de la compétence des États membres, lesquels échangent des informations sur les conseils qu’ils émettent par l’intermédiaire du site Consular OnLine (CoOL). Au cours de la pandémie de COVID-19, les États membres ont émis des conseils concernant les voyages à destination non seulement de pays tiers mais aussi d’autres États membres, dans le but généralement de décourager tout déplacement non essentiel. Au début, les avertissements ou les conseils sur les voyages émis au niveau national ne l’ont pas été d’une manière coordonnée, ce qui a engendré des incertitudes pour les entreprises de voyage et les consommateurs quant à leurs droits et obligations, en particulier dans des contextes transfrontières.
Le 13 octobre 2020, le Conseil a adopté une recommandation relative à une approche coordonnée de la restriction de la libre circulation au sein de l’UE en réaction à la pandémie de COVID-19. Bien qu’ils n’aient pas abordé directement la question des conseils relatifs aux voyages, les États membres ont convenu d’une carte commune sur le niveau de risque lié à la COVID-19 dans l’UE, publiée par le Centre européen de prévention et de contrôle des maladies. En outre, les États membres se sont engagés à informer le public de manière claire et en temps utile, notamment par l’intermédiaire de la plateforme Re-open EU. Compte tenu de l’évolution de la situation épidémiologique, le Conseil a modifié la recommandation le 1er février 2021.
5.2.4.Bons à valoir
Contrairement aux règlements relatifs aux droits des passagers, la directive ne prévoit pas expressément la possibilité d’effectuer des remboursements sous la forme de bons à valoir. Dans sa recommandation (UE) 2020/648, la Commission a reconnu que les organisateurs pouvaient proposer des bons à valoir comme alternative au remboursement en espèces, sous réserve de l’acceptation volontaire du voyageur, en cas d’annulation (voir le point 5.1.1 ci-dessus).
L’Allemagne, la Hongrie, la Lettonie et Chypre ont adopté des règles nationales visant à instaurer un cadre juridique applicable aux bons à valoir proposés aux voyageurs et pouvant être acceptés librement par ces derniers dans le secteur du voyage à forfait qui soit dans la lignée de la recommandation de la Commission, en particulier en ce qui concerne la protection contre l’insolvabilité de l’émetteur. L’Italie et la Grèce ont suivi certaines parties de la recommandation lorsqu’elles ont modifié leur législation après l’ouverture d’une procédure d’infraction. L’Espagne a modifié sa législation afin d’empêcher l’ouverture d’une telle procédure. L’Irlande a introduit des notes de crédit de remboursement garanties par l’État, pouvant être proposées aux clients des voyagistes et des agents de voyages opérant en Irlande comme alternative au remboursement en espèces, pour autant que le client y consente.
La Commission a clairement indiqué que le droit des voyageurs au remboursement, tel que prévu par la directive, devait être respecté et a estimé que les bons à valoir ne constituaient une solution admissible que si leur acceptation était facultative pour le voyageur.
5.2.5.Protection contre l’insolvabilité
La question s’est posée de savoir si les demandes de remboursement en suspens des voyageurs étaient couvertes par les systèmes de protection contre l’insolvabilité fournis conformément aux dispositions de la directive. L’article 17, paragraphe 1, de la directive exige des organisateurs qu’ils fournissent une garantie pour le remboursement de tous les paiements effectués par le voyageur «dans la mesure où les services concernés ne sont pas exécutés en raison de l’insolvabilité des organisateurs». Dans sa recommandation (UE) 2020/648, la Commission a estimé qu’en cas d’insolvabilité des organisateurs, le risque existe que de nombreux voyageurs ne bénéficient d’aucun remboursement, étant donné que leurs créances à l’égard des organisateurs ne sont pas protégées.
Néanmoins, les représentants des fonds de garantie pour les voyages ont attiré l’attention sur le fait que certains fournisseurs de protection contre l’insolvabilité pourraient faire l’objet d’une pression supplémentaire importante dans les mois à venir, s’ils devaient intervenir pour rembourser les bons à valoir émis par un grand nombre d’organisateurs en situation de faillite. C’est particulièrement le cas dans les États membres qui ont contraint les fournisseurs de protection contre l’insolvabilité existants à couvrir les bons à valoir sans qu’aucune mesure de soutien n’ait été mise en œuvre. Il est légitime de se demander si les remboursements peuvent être limités, à la lumière du considérant 40 de la directive selon lequel une protection efficace contre l’insolvabilité ne devrait pas avoir à tenir compte de «risques extrêmement ténus».
Dans le cadre de l’élaboration du présent rapport, des organisations de consommateurs ainsi que certains États membres ont proposé que la directive soit modifiée afin de garantir que les demandes de remboursement des consommateurs soient également protégées dans les situations où le contrat de voyage à forfait a été résilié pour des motifs non liés à l’insolvabilité de l’organisateur, par exemple en raison de circonstances exceptionnelles et inévitables.
5.2.6.Assurance
Les risques liés aux pandémies sont souvent exclus des polices d’assurance, en particulier de l’assurance «annulation voyage». Cela limite la possibilité pour les voyageurs de s’assurer contre d’éventuelles pertes dues à l’annulation d’un voyage en raison d’une pandémie.
Certaines parties prenantes du secteur du voyage ont proposé que les organisateurs soient autorisés à inclure dans leurs forfaits une assurance voyage personnelle appropriée, moyennant une option d’acceptation ou de refus («opt-in/out»). Au sein du groupe d’experts des parties prenantes chargé de soutenir l’application de la directive, les organisations de consommateurs ont toutefois souligné que toute assurance souscrite par les voyageurs eux-mêmes ne devrait en aucun cas limiter leurs droits existants au remboursement ni la protection offerte au titre de la protection obligatoire contre l’insolvabilité.
6.Prochaines étapes
Les problèmes décrits dans le présent rapport, notamment aux points 3.2, 4 et 5, ainsi que leurs conséquences pratiques nécessitent une analyse plus poussée. Il convient en particulier d’évaluer plus avant l’incidence globale de la crise de la COVID-19 sur le secteur et sur le niveau de protection des consommateurs.
Comme annoncé dans son nouvel agenda du consommateur, sur la base des conclusions du présent rapport, la Commission procédera d’ici 2022 à une «analyse plus approfondie de la question de savoir si le cadre réglementaire actuel régissant les voyages à forfait, notamment en ce qui concerne la protection contre l’insolvabilité, est toujours pleinement à même d’assurer à tout moment une protection solide et complète des consommateurs, compte tenu, également, des changements intervenus dans le domaine des droits des passagers». L’analyse approfondie à venir, prévue pour 2022, n’aura pas pour objectif de réduire la protection des consommateurs. Au contraire, la Commission évaluera la manière d’assurer le niveau élevé de protection des consommateurs prévu par la directive et de veiller au respect effectif des droits des consommateurs en tous temps et examinera comment un partage plus équitable de la charge entre les opérateurs économiques tout au long de la chaîne de valeur pourrait contribuer à la réalisation de cet objectif.
Cette action menée au titre de l’agenda du consommateur tiendra compte des actions en la matière annoncées dans la stratégie de mobilité durable et intelligente. Ces actions comprennent 1) le réexamen du cadre réglementaire relatif aux droits des passagers, notamment pour garantir sa résilience face à des perturbations importantes des déplacements, y compris les possibilités de billets multimodaux et 2) l’évaluation des possibilités et la proposition, le cas échéant, d’un système de protection financière adéquat pour protéger les passagers contre le risque de crise de liquidité ou d’insolvabilité concernant le remboursement des billets et, le cas échéant, le rapatriement des passagers, d’ici 2022.
À cette fin, la Commission appréciera si les différences entre la directive et les règlements relatifs aux droits des passagers en ce qui concerne la protection contre l’insolvabilité et les droits d’annulation sont justifiées ou si les règles devraient être davantage harmonisées et si des règles spécifiques pour des situations telles que la pandémie de COVID-19 devraient être proposées, dans le but d’améliorer la protection des consommateurs.