16.7.2021   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 286/95


Avis du Comité économique et social européen sur la proposition modifiée de règlement du Parlement européen et du Conseil concernant l’évaluation des technologies de la santé et modifiant la directive 2011/24/UΕ

[COM(2018) 51 final — 2018/18 (COD)]

(2021/C 286/17)

Rapporteur:

Dimitris DIMITRIADIS

Consultation

Conseil de l’Union européenne, 24.3.2021

Base juridique

Article 168, paragraphe 4, et article 114 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne

Compétence

Section «Marché unique, production et consommation»

Adoption en session plénière

27.4.2021

Session plénière no

560

Résultat du vote

(pour/contre/abstentions)

227/0/5

1.   Conclusions et recommandations

1.1.

Le Comité économique et social européen (CESE) se félicite de la démarche de la présidence portugaise du Conseil de l’Union européenne, qui a obtenu de la part des États membres un mandat (1) pour entamer des négociations avec le Parlement européen sur une proposition législative concernant l’évaluation des technologies de la santé (ETS) dans l’intérêt des patients.

1.2.

Le CESE reconnaît que des processus fondés sur des données probantes, tels que l’ETS — qui est un moteur essentiel de la croissance économique et sociale et de l’innovation dans l’Union —, peuvent porter à la fois sur les aspects cliniques et non cliniques d’une technologie de la santé, et que cet objectif peut être atteint grâce à une coopération entre les États membres à l’échelon de l’Union, en vue d’assurer une protection élevée de la santé des patients et le bon fonctionnement d’un marché unique inclusif.

1.3.

Le CESE souligne que le règlement sur l’évaluation des technologies de la santé, une fois adopté, constituera une avancée majeure dans le domaine des soins de santé et ouvrira la voie à une union européenne de la santé forte, qui améliorera et préservera la santé de tous les citoyens.

1.4.

Le CESE fait observer que le mandat fait référence à la santé en tant que marché, alors qu’il s’agit d’un bien commun qui doit être abordé sous l’angle de l’intérêt général.

1.5.

Le CESE reconnaît que l’ETS pourrait jouer un rôle déterminant dans la fourniture de soins de santé équitables et durables.

1.6.

Le CESE juge appropriée la décision de la Commission de recourir à la procédure législative du règlement plutôt qu’à d’autres formes juridiques, car elle est propre à garantir une coopération plus directe et plus intense au niveau des États membres (2) et entre eux, dans une perspective européenne.

1.7.

Le CESE est convaincu que le vieillissement de la population européenne devrait s’accentuer dans les années à venir. En outre, la prévalence des maladies chroniques et des pandémies, ainsi que l’apparition de nouvelles technologies complexes, augmenteront la nécessité d’investir dans les systèmes de soins de santé, tandis que les États membres sont soumis à des contraintes budgétaires de plus en plus importantes.

1.8.

Le CESE serait favorable au recours à des incitants fiscaux dans certains États membres, ainsi qu’à une éventuelle révision à la hausse du seuil «de minimis» en matière d’aides d’État.

1.9.

Le CESE estime que les États membres devraient soutenir et financer des idées de nouvelles technologies de la santé et toute initiative pertinente proposées par des start-up.

1.10.

Le CESE approuve le renforcement de la coordination en matière d’ETS grâce à la soumission d’un seul dossier, ainsi que le calendrier de mise en œuvre progressif, mais relève l’absence de dispositions particulières pour les PME.

1.11.

Le CESE est préoccupé par le calendrier de mise en œuvre, et en particulier par le délai supplémentaire de mise en application de trois ans, qui pourrait selon lui être raccourci dans l’intérêt des patients et du rapport coût-efficacité.

1.12.

Le CESE recommande que le règlement fasse référence à des mesures de prévention susceptibles d’avoir une incidence majeure sur les patients, par exemple des orientations à l’intention des hôpitaux pour le contrôle, la prévention et la réduction des infections nosocomiales, et suggère que son champ d’application soit étendu ou complété par des dispositions en ce sens, au titre des besoins médicaux non satisfaits.

1.13.

Le CESE souligne que la participation de la société civile (notamment des organisations de l’économie sociale et des associations de patients) est essentielle pour concrétiser la promesse de santé et de soins numériques, dont fait partie l’ETS.

2.   Contexte

2.1.

La proposition de règlement intervient après plus de vingt années de coopération volontaire dans le domaine de l’évaluation des technologies de la santé. À la suite de l’adoption de la directive sur les soins de santé transfrontaliers (directive 2011/24/UE) (3), un réseau en matière d’ETS, composé de divers instances et organismes d’ETS nationaux, a été établi en 2013 sur la base du volontariat, afin d’orienter la stratégie et la politique en matière de coopération scientifique et technique à l’échelon de l’Union.

2.2.

Ces travaux ont été complétés par trois actions communes successives (4) sur l’ETS et ont permis à la Commission et aux États membres de créer une base de connaissances solide sur les informations et méthodologies concernant l’évaluation des technologies de la santé.

2.3.

Le CESE reconnaît que les systèmes de santé et le processus d’ETS sont ancrés dans les traditions et cultures nationales. Toutefois, en tant que citoyens européens, nous sommes intimement convaincus que seule une collaboration efficace au niveau européen nous permettra de relever les défis à venir en matière de santé et d’exploiter les possibilités futures dans le domaine des soins de santé.

2.4.

Il convient de promouvoir le principe de l’«analyse prospective» afin de permettre l’identification précoce, au niveau national et européen, des technologies de la santé émergentes susceptibles d’avoir la plus forte incidence sur les patients, la santé publique et les systèmes de soins de santé. Cette analyse prospective pourrait aider le groupe de coordination à programmer ses travaux.

3.   Problèmes ou lacunes examinés par la proposition en vue de leur résolution

3.1.

Le CESE approuve le constat, ressorti d’une large consultation, selon lequel l’accès au marché des technologies innovantes est à ce jour entravé ou faussé en raison des différences entre les procédures ou méthodes administratives appliquées au niveau national ou régional et des exigences qui existent dans l’ensemble de l’Union en matière d’ETS, imposées par les différentes législations et pratiques nationales. C’est la raison qui a conduit la Commission à avancer une proposition de règlement, en tant qu’il s’agit de l’approche législative la plus adaptée (5).

3.2.

Le CESE convient également que la situation qui prévaut actuellement contribue au déficit de prévisibilité pour les entreprises et à des surcoûts pour l’industrie et les PME, donne lieu à des retards dans l’accès aux nouvelles technologies et produit des effets négatifs sur l’innovation. Comme exemple de l’actuelle situation de non-harmonisation, on peut mentionner le document publié par l’«Institut pour la compétitivité» I-Com (6) qui, à la page 49, fait référence au Bureau européen des unions de consommateurs (BEUC) et relève que «certains organismes d’ETS mettent les évaluations à la disposition du public, directement ou à la demande, alors que d’autres les considèrent comme confidentielles. En outre, les uns acceptent les études d’observation visant à évaluer la valeur d’un médicament, tandis que les autres les rejettent». Comme l’ont montré plusieurs décennies de coopération en matière d’ETS dans l’Union, ces problèmes n’ont pas été résolus de manière satisfaisante par l’approche strictement volontaire qui a été suivie pour les travaux communs menés jusqu’à présent.

3.3.

L’initiative permettra de remédier à la fragmentation actuelle des systèmes nationaux d’ETS (procédures et méthodologies divergentes qui nuisent à l’accès au marché), en gardant à l’esprit que la fiabilité de tout nouveau mécanisme doit être éprouvée à l’aune des principes de l’indépendance et de la liberté d’expression des parties prenantes, sur la base de critères scientifiques, éthiques et impartiaux, et que les objectifs pourront être atteints de manière appropriée grâce à une coopération renforcée dans le domaine de l’ETS, qui sera menée au niveau de l’Union au départ de ces principes. Tout en renforçant la coopération à d’autres niveaux qui sont indispensables pour l’ETS (par exemple, dans les États membres qui font face à des difficultés car ils ne disposent pas de registres des patients), il conviendra de déployer des plans nationaux d’action pour toutes les pathologies, de façon à accélérer les travaux des ministères de la santé concernés en tenant compte des meilleures pratiques en vigueur dans d’autres États membres. Cette approche intègre également des valeurs et des priorités sociales dans la prise d’une décision scientifique.

3.4.

Le CESE souligne qu’il est nécessaire de soutenir l’innovation technologique dans le secteur de la santé, y compris dans le cadre des activités de soins à l’échelon local et hors cadre hospitalier. Le vieillissement de la population (7), la progression des maladies chroniques et la perte d’autonomie imposent une spécialisation ainsi qu’une utilisation plus efficace des technologies et des méthodes d’intervention en matière de soins à domicile. Aussi conviendra-t-il d’encourager des programmes spécifiques d’ETS, qui viseront à améliorer cette prise en charge et ces prestations à domicile, non seulement par le recours aux nouvelles technologies et à la télémédecine, mais également grâce à une augmentation générale de la qualité des services professionnels de soins.

4.   Quels sont les résultats escomptés de cette proposition spécifique?

4.1.

L’objectif affiché du règlement de l’Union sur l’ETS est, entre autres, de veiller à ce que le mécanisme relatif aux évaluations cliniques ne soit activé qu’une seule fois au niveau de l’Union afin de promouvoir la disponibilité de technologies innovantes de la santé pour les patients en Europe et de mieux utiliser les ressources disponibles, tout en améliorant la prévisibilité des affaires.

4.2.

Le CESE juge appropriée la décision de la Commission de recourir à la procédure législative du règlement plutôt qu’à d’autres formes juridiques, car elle est propre à garantir une coopération plus directe et plus intense au niveau des États membres et entre eux, dans une perspective européenne.

4.3.

La proposition de règlement vise à assurer que les méthodes et procédures applicables aux ETS seront davantage prévisibles dans l’ensemble de l’Union et que les évaluations cliniques communes ne seront pas répétées inutilement au niveau national, ce afin d’éviter les chevauchements et les divergences. La solution privilégiée est considérée comme étant celle qui permet d’atteindre les objectifs de la manière la plus efficace et la plus efficiente tout en respectant les principes de subsidiarité et de proportionnalité. C’est elle qui contribue le mieux à la réalisation des objectifs du marché intérieur.

4.4.

Le CESE convient que la proposition dote les États membres d’un cadre durable qui leur donne la possibilité de mettre en commun leur expertise et de renforcer le processus de décision fondé sur des données probantes, et qui appuie leurs efforts de pérennisation de leurs systèmes de santé nationaux. La solution privilégiée présente également un bon rapport coût-efficacité, car les coûts sont largement compensés par les économies réalisées par les États membres, l’industrie et les PME grâce à la mise en commun des ressources, à la suppression des répétitions inutiles de travaux et à l’amélioration de la prévisibilité des affaires. La proposition contient des dispositions relatives à l’utilisation d’outils d’ETS communs, prévoit une mise en œuvre progressive de la portée des évaluations cliniques, en commençant par les médicaments anticancéreux, les médicaments orphelins et les médicaments de thérapie innovante, et définit les quatre piliers des travaux communs des États membres au niveau de l’Union, à savoir les évaluations cliniques communes, les consultations scientifiques communes, l’identification des technologies de la santé émergentes et la coopération volontaire.

4.5.

Le CESE, tout en étant favorable à un calendrier détaillé de mise en œuvre, estime que l’intelligence artificielle, de plus en plus présente et associée à la transformation numérique, a modifié le paysage de la santé et des soins et permis de proposer des stratégies de traitement rapides. Le CESE est dès lors préoccupé par le calendrier de mise en œuvre qui a été défini, et en particulier par le délai supplémentaire de mise en application de trois ans visé à l’article 5, paragraphe 2, point b) (8), qui pourrait selon lui être raccourci dans l’intérêt des patients et du rapport coût-efficacité.

4.6.

Une approche centrée sur le patient est la seule manière de garantir des soins de santé adéquats et pertinents. Par conséquent, le rôle des patients, des soignants, de l’économie sociale et des organisations de patients devrait être pris en compte dans le réseau de parties intéressées proposé ainsi que dans le cadre du groupe de coordination et de toute évaluation clinique. Le CESE soutient l’appel lancé par le Forum européen des patients (FPE) en faveur d’une participation obligatoire et effective de la communauté des patients afin de veiller à ce que les ETS soient menées dans l’intérêt des patients (9).

5.   Quelles options législatives et non législatives ont-elles été envisagées? Une option a-t-elle été privilégiée?

5.1.

Le CESE estime que la proposition de règlement est conforme aux objectifs généraux de l’Union, dont ceux du bon fonctionnement du marché intérieur, de la pérennisation des systèmes de santé et de la mise en œuvre d’un programme ambitieux en matière de recherche et d’innovation.

5.1.1.

Non seulement la proposition est cohérente par rapport à ces objectifs stratégiques de l’Union, mais elle est aussi compatible avec les traités européens existants et la législation de l’Union applicable aux médicaments, aux dispositifs médicaux de diagnostic in vitro et aux autres dispositifs médicaux (10). Ainsi, bien que la procédure réglementaire et le processus d’ETS restent bien séparés, vu qu’ils poursuivent des objectifs différents, il sera possible de créer, grâce au partage mutuel d’informations et à une meilleure synchronisation des procédures, des synergies entre les évaluations cliniques communes proposées et l’autorisation centralisée de mise sur le marché des médicaments (11).

5.2.

La proposition se fonde sur les articles 114 et 116 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE).

5.2.1.

Ces articles permettent l’adoption de mesures relatives au rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres, à condition qu’elles soient nécessaires à l’établissement ou au fonctionnement du marché intérieur et assurent simultanément un niveau élevé de protection de la santé publique.

5.2.2.

La proposition doit également être conforme à l’article 168, paragraphe 7, du TFUE, en vertu duquel l’Union respecte les responsabilités des États membres en ce qui concerne la définition de leurs politiques de santé ainsi que l’organisation et la fourniture de services de santé et de soins médicaux.

5.2.3.

S’il est très clair que les États membres de l’Union continueront à être responsables, d’une part, de l’évaluation des aspects non cliniques, c’est-à-dire, par exemple, économiques, sociaux et éthiques, des technologies de la santé et, d’autre part, de la prise de décisions concernant leur tarification et leur remboursement, le CESE suggère d’examiner, notamment en lui consacrant une étude séparée, la possibilité d’instaurer une politique tarifaire commune au sein de l’Union, dans un but de transparence et d’accessibilité pour toute la population, en ce qui concerne les médicaments, les dispositifs médicaux et les dispositifs de diagnostic in vitro en général, tout particulièrement lorsqu’ils ont fait l’objet d’une ETS, l’objectif étant d’améliorer leur accessibilité pour les citoyens européens et d’éviter les exportations ou importations parallèles qui seraient uniquement motivées par les prix pratiqués. Cette démarche contribuerait ainsi à soutenir le travail des commissions nationales compétentes concernant les registres ou les observatoires des prix maximaux acceptables qui existent dans certains pays, en particulier pour les dispositifs médicaux.

5.3.

Même si le terme «technologies de la santé» s’entend au sens large et s’applique aux médicaments, aux dispositifs médicaux et aux dispositifs médicaux de diagnostic in vitro ou aux interventions médicales et chirurgicales ainsi qu’aux mesures prises dans le domaine des soins de santé pour la prévention, le diagnostic ou le traitement des maladies, les évaluations cliniques communes sont limitées aux médicaments soumis à la procédure centralisée d’autorisation de mise sur le marché, aux nouvelles substances actives et aux produits existants dont l’autorisation de mise sur le marché est étendue à une nouvelle indication thérapeutique, et à certaines classes de dispositifs médicaux et de dispositifs médicaux de diagnostic in vitro pour lesquelles les groupes d’experts concernés établis conformément aux règlements (UE) 2017/745 (12) et (UE) 2017/746 (13) ont rendu leurs avis ou points de vue, et qui ont été sélectionnées par le groupe de coordination créé par le règlement proposé.

5.4.

Pour prévenir les maladies dégénératives, mais aussi pour réduire les hospitalisations abusives de personnes âgées et dépendantes, il convient de lancer des mesures qui augmentent la qualité des soins et de l’assistance et améliorent en conséquence la sécurité des patients et leur bien-être.

5.4.1.

Le CESE estime qu’il convient d’agir et de prendre des mesures pour aider les hôpitaux à contrôler, à prévenir et à réduire les infections nosocomiales, et que le champ d’application du règlement devrait être complété par des dispositions en ce sens, qui peuvent s’avérer très utiles dans les cas de pandémies telles que celle que nous connaissons actuellement. Cet exemple concret porte sur les quelque 37 000 personnes (14) qui, chaque année en Europe, meurent d’une infection nosocomiale. Il est urgent d’améliorer la sécurité des patients et la qualité des services de santé en insistant sur la prévention des infections nosocomiales et en faisant un usage rationnel des antibiotiques.

6.   Quel est le coût de l’option privilégiée?

6.1.

Le CESE estime que la solution privilégiée présente un bon rapport coût-efficacité, car les dépenses qu’elle requiert sont largement compensées par les économies réalisées par les États membres et l’industrie (15) grâce à la mise en commun des ressources, la suppression des répétitions inutiles de travaux et l’amélioration de la prévisibilité des affaires.

6.2.

Le CESE approuve l’idée d’octroyer un financement pour les travaux communs et la coopération volontaire entre les États membres en matière d’ETS dans des domaines tels que l’élaboration et le déploiement de programmes de vaccination, afin de garantir la disponibilité de ressources suffisantes (16) pour les travaux communs prévus dans la proposition de règlement et pour le cadre de soutien destiné à ces activités.

6.3.

Dans un souci de rentabilité et de gain de temps, le CESE suggère que le groupe de coordination composé de représentants des États membres puisse examiner entre une et trois questions, en travaillant en parallèle: une en rapport avec les médicaments anticancéreux, les médicaments orphelins et les médicaments combinés de thérapie innovante, une autre concernant tous les autres médicaments et la dernière relevant des dispositifs médicaux de diagnostic in vitro et des autres dispositifs médicaux. Les décisions prises par de tels organismes scientifiques devraient faire l’objet d’un vote à la majorité simple.

6.4.

Au total, les dépenses de soins de santé dans l’Union, publiques et privées, s’élèvent à environ 1 300 milliards d’EUR par an (17), dont 220 milliards pour les produits pharmaceutiques (18) et 100 milliards pour les dispositifs médicaux (19). En moyenne, elles représentent donc quelque 10 % du PIB de l’Union (20).

6.5.

Le CESE estime que le vieillissement accru de la population, ainsi que la plus grande prévalence des maladies chroniques et des pandémies, augmentent la nécessité d’investir dans les systèmes de santé et de soins de santé, tandis que les États membres sont, dans le même temps, soumis à des contraintes budgétaires de plus en plus importantes.

6.6.

Le CESE considère en outre que ces évolutions exigeront des États membres qu’ils renforcent encore davantage l’efficacité et l’efficience des budgets de la santé en mettant l’accent sur les technologies efficaces de la santé tout en préservant les incitations à l’innovation (21).

6.7.

Le CESE serait favorable au recours à des incitants fiscaux dans certains États membres, ainsi qu’à une éventuelle révision à la hausse du seuil «de minimis» en matière d’aides d’État. Une des propositions à envisager concerne une éventuelle révision des montants maximaux pour l’application de la réglementation «de minimis» en matière d’aides d’État, où l’on pourrait prévoir de relever le montant actuel de ce plafond, de 200 000 EUR, afin de le porter à 700 000 EUR au moins pour les PME actives dans le domaine de la santé, de l’assistance sociale et des soins, tout en imposant aux entreprises concernées des exigences de qualité supplémentaires, comme d’établir des projets nécessitant la collaboration de plusieurs d’entre elles, de réaliser des investissements dans la recherche et l’innovation ou d’être des sociétés qui réinvestissent en interne la totalité des profits qu’elles réalisent. Ces dispositions pourraient être utiles afin d’encourager les PME et les entreprises de l’économie sociale à investir davantage dans la recherche, l’innovation et le développement de coopérations en réseau (22).

6.8.

Le CESE considère que le financement public revêt une haute importance pour l’ETS, et que l’on pourrait certainement le renforcer en menant des travaux conjoints en coopération et en évitant de dédoubler les efforts. Selon les estimations, chaque ETS réalisée dans un pays coûte environ 30 000 EUR aux organismes nationaux et 100 000 EUR au secteur de la santé (23). En supposant, par exemple, que dix États membres procèdent à une ETS pour la même technologie et que ces travaux soient remplacés par un rapport conjoint, il serait possible d’économiser jusqu’à 70 % de ces sommes, quand bien même l’on prend pour hypothèse que le coût d’une évaluation commune est trois fois plus élevé que celui d’un rapport national unique, du fait de besoins de coordination accrus. Ce sont là autant de moyens qui pourront être soit économisés, soit redéployés vers d’autres activités en rapport avec l’ETS. Cependant, vu le coût très élevé des nouvelles technologies, il est indispensable que l’ETS utilisée par un État membre pour décider du remboursement d’une technologie s’articule avec son arsenal thérapeutique au niveau national. Pour les traitements oncologiques, par exemple, qui excèdent généralement un coût de 100 000 EUR par patient, une évaluation clinique inadaptée aura un coût très supérieur aux montants économisés grâce à l’évaluation commune. Il convient naturellement de signaler que la Coalition européenne des patients atteints du cancer (ECPC) salue la proposition à l’examen et souligne qu’«en évitant la duplication des efforts, les évaluations cliniques communes devenues obligatoires élimineront le risque d’aboutir à des résultats divergents et réduiront ainsi au maximum les retards dans l’accès aux nouvelles thérapies» (24). Par ailleurs, l’Association internationale de la mutualité (AIM), union internationale des acteurs non gouvernementaux prestataires de soins de santé, se félicite de constater que la Commission propose d’établir au niveau de l’Union un régime plus durable de coopération en matière d’ETS (25).

6.9.

Face à des intérêts économiques gigantesques, le secteur des technologies de la santé est exposé aux conflits d’intérêts, et il importe donc au plus haut point que l’ETS soit organisée de manière objective, indépendante, solide et transparente, comme indiqué dans la proposition.

7.   Quelle sera l’incidence sur les PME et les microentreprises?

7.1.

Le CESE estime que la proposition devrait bénéficier aux PME, ainsi qu’aux entreprises de l’économie sociale qui sont actives dans le secteur, étant donné que le rapport final d’évaluation clinique reposera sur un dossier complet et actualisé, ce qui diminuera les contraintes administratives et les coûts de mise en conformité liés à la nécessité d’introduire plusieurs dossiers pour satisfaire aux différentes exigences nationales en matière d’ETS. La participation des PME s’en trouvera accrue, et le CESE regrette dès lors l’absence de dispositions particulières pour ces dernières. En particulier, les évaluations cliniques et consultations scientifiques communes prévues par la proposition devraient augmenter la prévisibilité des affaires pour le secteur. Il s’agit d’une évolution particulièrement significative pour les PME et les entreprises sociales, qui ont généralement un portefeuille de produits moins fourni et des ressources et capacités spécialisées plus limitées dans le domaine de l’ETS (26). Il convient de noter que la proposition ne prévoit pas de redevances pour les évaluations cliniques et consultations scientifiques communes, un facteur qui revêt également une grande importance du point de vue de l’emploi, dans le contexte de la lutte contre le chômage. L’amélioration de la prévisibilité des affaires, qui résultera des actions communes menées en matière d’ETS à travers l’Union, devrait avoir un effet positif sur la compétitivité du secteur des technologies de la santé de l’Union.

7.2.

Une réelle incitation socio-économique pour les PME pourrait être de les encourager à prendre part, au-delà de 2020, à des programmes européens de financement du développement au titre des cadres de référence stratégiques nationaux (CRSN). Les CRSN pour la période 2014-2020 comportaient des dispositions spécifiques en matière de recherche et de développement visant à lutter contre la pauvreté et le chômage.

7.2.1.

Le CESE estime qu’il conviendrait non seulement de maintenir ces programmes, mais aussi de les étendre dans le cadre plus large des principes de la proposition de règlement et d’en faire un outil pour stimuler la recherche et le développement, ainsi que l’esprit d’innovation.

Bruxelles, le 27 avril 2021.

La présidente du Comité économique et social européen

Christa SCHWENG


(1)  Proposition modifiée de règlement du Parlement européen et du Conseil concernant l’évaluation des technologies de la santé et modifiant la directive 2011/24/UE.

(2)  https://www.eesc.europa.eu/fr/our-work/opinions-information-reports/opinions/evaluation-des-technologies-de-la-sante

(3)  Directive 2011/24/UE du Parlement européen et du Conseil du 9 mars 2011 relative à l’application des droits des patients en matière de soins de santé transfrontaliers (JO L 88 du 4.4.2011, p. 45).

(4)  EUnetHTA Joint Action 1, en 2010-2012, EUnetHTA Joint Action 2, en 2012-2015, et EUnetHTA Joint Action 3, pour la période 2016-2019. Voir: http://www.eunethta.eu/

(5)  https://www.eesc.europa.eu/fr/our-work/opinions-information-reports/opinions/evaluation-des-technologies-de-la-sante

(6)  http://www.astrid-online.it/static/upload/7787/7787e169a7f0afc63221153a6636c63f.pdf

(7)  http://ec.europa.eu/economy_finance/publications/european_economy/2015/pdf/ee3_en.pdf

(8)  Voir note de bas de page no 1.

(9)  Exposé de position du groupe de travail des réseaux européens de défense des patients atteints de cancer (Workgroup of European Cancer Patient Advocacy Networks — WECAN) sur la poursuite de l’intégration européenne de l’ETS, https://wecanadvocate.eu/wecan-position-further-eu-integration-of-hta/

(10)  Il s’agit, entre autres, de la directive 2001/83/CE, du règlement (CE) no 726/2004, du règlement (UE) no 536/2014, du règlement (UE) 2017/745 et du règlement (UE) 2017/746.

(11)  Il convient de noter que la nécessité d’améliorer les synergies a également été reconnue par les États membres dans le document de réflexion sur le réseau d’ETS intitulé Synergies between regulatory and HTA issues on pharmaceuticals, ainsi que par l’EUnetHTA et l’EMA (Agence européenne des médicaments) dans leur rapport commun sur la mise en œuvre du plan de travail triennal EMA-EUnetHTA couvrant la période 2012-2015.

(12)  JO L 117 du 5.5.2017, p. 1.

(13)  JO L 117 du 5.5.2017, p. 176.

(14)  http://www.cleoresearch.org/en/

(15)  Voir https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/?uri=CELEX:52018SC0041: les économies liées aux évaluations cliniques communes pourraient s’élever à 2,67 millions d’EUR par an.

(16)  Voir https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/?uri=CELEX:52018SC0041: le coût total de l’option privilégiée a été estimé à environ 16 millions d’EUR.

(17)  Données Eurostat tirées du document de travail des services de la Commission intitulé Pharmaceutical Industry: A Strategic Sector for the European Economy (L’industrie pharmaceutique: un secteur stratégique pour l’économie européenne), direction générale du marché intérieur, de l’industrie, de l’entrepreneuriat et des PME (GROW), 2014. Eurostat, dépenses des prestataires de soins de santé, pour tous les États membres, données datant de 2012 ou les plus récentes à être disponibles. Pour l’Irlande, l’Italie, Malte et le Royaume-Uni, ces chiffres sont complétés par les données sur la santé de l’OMS (au taux de change annuel de la BCE).

(18)  Données Eurostat tirées du document de travail des services de la Commission intitulé «Pharmaceutical Industry: A Strategic Sector for the European Economy» (L’industrie pharmaceutique: un secteur stratégique pour l’économie européenne), direction générale du marché intérieur, de l’industrie, de l’entrepreneuriat et des PME (GROW), 2014.

(19)  Communication sur «Des dispositifs médicaux et des dispositifs médicaux de diagnostic in vitro sûrs, efficaces et innovants dans l’intérêt des patients, des consommateurs et des professionnels de la santé», COM(2012) 540 final. Estimation réalisée par la Banque mondiale, EDMA, Espicom et Eucomed.

(20)  Commission européenne. Fiche thématique du semestre européen: Santé et systèmes de santé, 2015. Direction générale des affaires économiques et financières (ECFIN), COST-containment policies in public pharmaceutical spending in the EU (Politiques de maîtrise des coûts des dépenses pharmaceutiques publiques dans l’UE), 2012. Voir aussi http://ec.europa.eu/smart-regulation/roadmaps/docs/2016_sante_144_health_technology_assessments_en.pdf

(21)  Direction générale des affaires économiques et financières (ECFIN), Cost-containment policies in public pharmaceutical spending in the EU (Politiques de maîtrise des coûts des dépenses pharmaceutiques publiques dans l’UE), 2012.

(22)  Actuellement, le règlement (UE) no 1407/2013 fixe un plafond de 200 000 EUR sur trois ans pour les aides d’États dont l’octroi peut être autorisé au bénéfice des entreprises, y compris sous la forme d’allègements fiscaux. Pour faire face à la crise économique, l’Union a relevé provisoirement ce plafond à 500 000 EUR en 2008, dans le cadre de son action de «plan de relance». Il conviendrait de reconnaître que la demande croissante de services de santé, en particulier pour ce qui est des personnes dépendantes, constituera l’un des principaux postes de dépenses pour les systèmes de soins de santé des États membres et que, par conséquent, il serait judicieux de prévoir un régime spécifique pour l’octroi d’incitants et d’aides en la matière, en particulier pour les entreprises qui sont actives dans la fourniture de prestations d’aide sociale au niveau local.

(23)  Direction générale des affaires économiques et financières (DG ECFIN), The 2015 Ageing report (Rapport 2015 sur le vieillissement), 2015. OCDE, Pharmaceutical expenditure and policies: past trends and future challenges (Dépenses et politiques pharmaceutiques: tendances passées et défis à venir), 2015.

(24)  http://www.europarl.europa.eu/RegData/etudes/BRIE/2018/614772/EPRS_BRI(2018)614772_EN.pdf

(25)  https://www.aim-mutual.org/wp-content/uploads/2018/02/AIM-on-HTA.pdf

(26)  https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/?uri=celex:52018SC0041