COMMISSION EUROPÉENNE
Bruxelles, le 30.9.2020
SWD(2020) 319 final
DOCUMENT DE TRAVAIL DES SERVICES DE LA COMMISSION
Rapport 2020 sur l’état de droit
Chapitre consacré à la situation de l’état de droit en Autriche
accompagnant le document:
COMMUNICATION DE LA COMMISSION AU PARLEMENT EUROPÉEN, AU CONSEIL, AU COMITÉ ÉCONOMIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN ET AU COMITÉ DES RÉGIONS
Rapport 2020 sur l’état de droit
La situation de l’état de droit dans l’Union européenne
{COM(2020) 580 final} - {SWD(2020) 300 final} - {SWD(2020) 301 final} - {SWD(2020) 302 final} - {SWD(2020) 303 final} - {SWD(2020) 304 final} - {SWD(2020) 305 final} - {SWD(2020) 306 final} - {SWD(2020) 307 final} - {SWD(2020) 308 final} - {SWD(2020) 309 final} - {SWD(2020) 310 final} - {SWD(2020) 311 final} - {SWD(2020) 312 final} - {SWD(2020) 313 final} - {SWD(2020) 314 final} - {SWD(2020) 315 final} - {SWD(2020) 316 final} - {SWD(2020) 317 final} - {SWD(2020) 318 final} - {SWD(2020) 320 final} - {SWD(2020) 321 final} - {SWD(2020) 322 final} - {SWD(2020) 323 final} - {SWD(2020) 324 final} - {SWD(2020) 325 final} - {SWD(2020) 326 final}
Résumé
Le degré d’indépendance du système de justice autrichien est perçu comme étant élevé. Dans le même temps, des préoccupations ont été exprimées en ce qui concerne les procédures de nomination des présidents des tribunaux administratifs ainsi que le droit du ministre de la justice de donner des instructions aux procureurs dans des affaires particulières. Le gouvernement a annoncé une réflexion générale sur les questions liées au recrutement des magistrats, y compris dans les juridictions administratives, ainsi que sur les obligations de notification qui incombent aux procureurs, ce qui pourrait contribuer à répondre à ces préoccupations. Des efforts visant à améliorer davantage le haut niveau de numérisation du système de justice sont en cours et les ressources de ce dernier ont été renforcées. Ces efforts pourraient permettre de résoudre certains problèmes d’efficience auxquels les juridictions administratives se heurtent.
Globalement, le cadre juridique et institutionnel nécessaire pour prévenir et poursuivre les actes de corruption est en place en Autriche. À la suite d’importantes affaires liées au financement des partis politiques qui ont débouché sur des enquêtes visant des hauts fonctionnaires publics, l’Autriche a mené et continue de mener de profondes réformes législatives dans le domaine de la lutte contre la corruption. Toutefois, des problèmes subsistent en ce qui concerne le cadre d’intégrité pour les membres du Parlement. S’il existe un cadre juridique en matière de lobbying, son champ d’application est limité, de même que les informations figurant dans le registre des groupes d’intérêt qui sont accessibles au public. Le service central du ministère public chargé de la lutte contre la criminalité économique et la corruption joue un rôle essentiel dans la lutte contre la corruption, mais il fait face à des difficultés en raison de ses larges obligations de notification et de ses moyens limités.
Le cadre juridique relatif au pluralisme des médias est fondé sur un ensemble de garanties constitutionnelles et législatives. Les fondements du système de médias démocratiques sont solides et les autorités des médias opèrent de manière indépendante. Toutefois, le fait que l’Autriche ne dispose pas d’un cadre global et exécutoire garantissant le droit d’accès à l’information constitue un risque pour le pluralisme des médias, et le gouvernement réfléchit actuellement à une réforme devant améliorer la situation. Certaines préoccupations ont été exprimées en ce qui concerne les garanties réglementaires visant à protéger l’indépendance éditoriale des médias. La propriété des médias est soumise à des règles de transparence strictes, bien que les participations des propriétaires de médias dans d’autres sociétés ne soient pas toujours entièrement couvertes. L’Autriche attribue des niveaux relativement élevés de publicité d’État aux entreprises de médias, et des inquiétudes ont été exprimées quant à l’influence politique potentielle exercée sur cette attribution, en l’absence de règles relatives à une distribution équitable de cette publicité.
Le processus d’adoption des lois comprend généralement une consultation des parties prenantes et du grand public, bien qu’il n’existe pas de cadre juridique spécifique à cet égard et que parfois les consultations n’ont pas lieu, ou sont assorties de délais trop courts. La Cour constitutionnelle et le collège des médiateurs jouent un rôle important dans l’équilibre des pouvoirs, comme cela a été démontré dans le contexte de la pandémie de COVID-19. Outre le collège des médiateurs, qui opère en tant qu’institution nationale des droits de l’homme, d’autres autorités indépendantes, telles que le médiateur pour l’égalité de traitement, le médiateur pour les personnes handicapées et le médiateur pour les enfants et les jeunes, veillent au respect des droits fondamentaux dans leurs domaines respectifs. Le gouvernement a annoncé des mesures visant à renforcer le soutien à la société civile et s’est engagé à favoriser un dialogue actif et des contacts respectueux avec les organisations de la société civile.
I.Système de justice
Le système de justice autrichien comporte deux branches distinctes. Les juridictions de droit commun se composent de 115 tribunaux cantonaux, de 20 tribunaux régionaux, de quatre tribunaux régionaux supérieurs et de la Cour suprême. Depuis 2014, l’Autriche dispose également d’un système distinct de juridictions administratives, qui compte onze tribunaux administratifs de première instance (neuf tribunaux administratifs régionaux, un tribunal administratif fédéral et le tribunal des finances) et la Cour administrative suprême
. L’Autriche dispose d’une Cour constitutionnelle. Les magistrats sont nommés par l’exécutif sur la base de propositions non contraignantes émanant de groupes d’experts constitués de juges
ou d’assemblées plénières d’une juridiction, qui dressent une liste de classement de trois candidats pour chaque poste
. Le ministère public est une autorité judiciaire, placée hiérarchiquement sous la supervision du ministre de la justice, qui peut donner à la fois des instructions générales et des instructions dans des affaires particulières
. Les avocats sont inscrits à l’un des neuf barreaux locaux, qui sont des corporations de droit public et des entités autonomes organisées sous l’égide du Conseil fédéral des barreaux
.
Indépendance
Le degré d’indépendance du système judiciaire est constamment perçu comme étant très élevé. L’indépendance des tribunaux et des juges est perçue comme étant «plutôt satisfaisante» ou «très satisfaisante» par 86 % du grand public, un pourcentage qui n’a cessé d’augmenter depuis 2016. Dans les entreprises aussi, le degré d’indépendance est perçu comme étant élevé, 73 % des entreprises jugeant le degré d’indépendance «plutôt satisfaisant» ou «très satisfaisant», quoique ce pourcentage était encore plus élevé au cours des années précédentes
.
Les procédures de nomination des présidents des tribunaux administratifs font l’objet de débats. Certaines parties prenantes et le Conseil de l’Europe ont exprimé à plusieurs reprises des préoccupations en ce qui concerne la nomination des présidents des tribunaux administratifs
. Bien qu’il n’existe pas, à ce stade, de plans de réforme concrets, le gouvernement réfléchit actuellement à l’harmonisation des normes de recrutement pour les juridictions de droit commun et les tribunaux administratifs
. Dans le cadre du régime actuel, les présidents des tribunaux administratifs et les vice-présidents des tribunaux administratifs (qui statuent également) ne doivent pas nécessairement être choisis parmi les juges administratifs nommés, bien qu’ils doivent satisfaire aux règles constitutionnelles générales régissant l’accès à la fonction de juge administratif
. Leur nomination est réglementée par les lois régissant les différentes juridictions administratives fédérales et régionales. Si la loi sur le tribunal administratif fédéral prévoit la participation d’une commission indépendante constituée de membres de l’exécutif et du pouvoir judiciaire
, il n’en va pas de même pour tous les tribunaux administratifs régionaux. Malgré certaines différences régionales, ces nominations restent généralement du ressort de l’exécutif
. En 2019, le Conseil de l’Europe a attiré l’attention sur l’absence de participation du pouvoir judiciaire au processus de nomination des présidents des tribunaux administratifs
. Le Conseil consultatif de juges du Conseil de l’Europe a adopté un avis
sur la nomination et le statut du président du tribunal administratif régional de Vienne, dans lequel il faisait part de ses préoccupations concernant le respect des recommandations
du Conseil de l’Europe eu égard à la différence entre le processus de nomination du président et du vice-président et le processus de nomination des autres juges
. Ces préoccupations ont été relayées par des parties prenantes européennes
et nationales
, qui ont demandé que les groupes d’experts soient associés à toutes les nominations de magistrats et que leurs avis soient rendus contraignants
. Le GRECO a adressé à l’Autriche plusieurs recommandations concernant le système des tribunaux administratifs; il l'a notamment invitée à renforcer le rôle des groupes d’experts dans les nominations et à harmoniser les normes applicables au recrutement des magistrats des juridictions de droit commun et des tribunaux administratifs
. Bien que le programme du gouvernement pour la période 2020-2024 annonce une volonté générale d’harmoniser les normes de recrutement à cet égard, aucun projet concret n’a été annoncé à ce stade
.
Le droit du ministre de la justice de donner des instructions aux procureurs dans des affaires particulières est en cours d’examen. En 2019, plusieurs parties prenantes
ont renouvelé leurs appels au renforcement de l’indépendance du ministère public. Dans le système autrichien, les services supérieurs du ministère public
et le ministre de la justice peuvent donner des instructions dans des affaires particulières, y compris des instructions de classement sans suite. Les instructions du ministre de la justice doivent être motivées, formulées par écrit et jointes au dossier. Le gouvernement doit également faire rapport chaque année au Parlement sur toutes les instructions données dans des affaires particulières, une fois que les dossiers concernés ont été clôturés
. Selon le dernier rapport, 69 instructions ont été données entre 2011 et 2018
. En outre, au sein de la structure organisationnelle du bureau du procureur général, un conseil consultatif indépendant des directives du ministre (conseil des directives, Weisungsrat) émet un avis non contraignant sur toutes les instructions avant que celles-ci ne soient données
, et cet avis est suivi dans la pratique
. S'agissant du risque de perception d’une possible influence politique par l'opinion publique, des parties prenantes nationales ont souligné la nécessité d’une indépendance accrue du ministère public et d'une direction indépendante du service chargé des instructions
. En outre, des parties prenantes signalent que les obligations de notification peuvent prendre beaucoup de temps, être disproportionnées par rapport aux tâches essentielles du ministère public et entraîner des retards dans les enquêtes. Si les risques pour l’autonomie du ministère public semblent atténués par les garanties en place
, le pouvoir de donner des instructions est néanmoins utilisé dans la pratique. En 2019, une étude sur la situation du système de justice
menée par le ministre de la justice de l’époque comportait quelques propositions visant à clarifier le système des instructions, et le programme du gouvernement pour la période 2020-2024 indique une volonté de réduire les obligations en matière de notification qui sont «évitables».
Qualité
Les ressources de l'appareil judiciaire ont été renforcées. Le budget 2020 pour le système judiciaire comprend dix postes supplémentaires pour les juges, 40 pour les procureurs et 100 pour le personnel des services judiciaires, ce qui a été salué par les parties prenantes. Cette augmentation fait suite à une étude publiée en 2019 par le ministre de la justice de l’époque, qui a attiré l’attention sur un certain nombre de préoccupations concernant les ressources humaines de l'appareil judiciaire, notamment au sujet des réductions considérables de postes administratifs au sein des tribunaux et du ministère public, ainsi que sur les problèmes rencontrés pour pourvoir de manière adéquate les postes d'auxiliaires de justice («Rechtspfleger»). Cette étude a également souligné les difficultés éprouvées par le ministère public et la Cour fédérale administrative pour faire face à l’augmentation des tâches en matière, respectivement, de sécurité intérieure et d’asile
. La création de postes supplémentaires dans tous les domaines concernés a été recommandée dans le rapport de cette étude. Ces préoccupations ont été relayées par certaines parties prenantes, qui ont demandé la création d’au moins 40 postes supplémentaires de juges et de procureurs et la fin des coupes dans les effectifs administratifs des tribunaux, en qualifiant de particulièrement inquiétante la situation au sein du tribunal des finances et de la Cour fédérale administrative
.
Un projet de grande envergure visant à améliorer davantage la numérisation du système judiciaire est en cours. La numérisation du système de justice est déjà avancée, en particulier en ce qui concerne la possibilité, largement disponible, de soumettre un dossier et des citations en justice en ligne, quoique les moyens électroniques destinés aux étapes ultérieures des procédures en ligne restent limités. Des systèmes de gestion des dossiers et des systèmes de statistiques judiciaires sont mis en œuvre pour toutes les juridictions
. Dans le cadre d’un projet intitulé «Justice 3.0», le gouvernement a mis en place un système de gestion électronique des dossiers dans toutes les juridictions. Ce système n’a été introduit que dans un nombre limité de tribunaux en 2020, mais son déploiement se poursuit progressivement. Le gouvernement entend mettre en œuvre un système de gestion entièrement électronique des dossiers dans toutes les juridictions d’ici à 2022. Il a également annoncé des mesures supplémentaires en faveur de l’utilisation d’outils numériques dans les tribunaux, notamment le recours à l’intelligence artificielle, par exemple, pour la publication des décisions de justice dans un format anonymisé
.
Le régime des frais de justice fera l’objet d’une évaluation. Des parties prenantes nationales
ont demandé à plusieurs reprises une révision complète du système des frais de justice, en soulignant que ces frais ont une incidence considérable sur l’accès à la justice et que, en l’absence de plafonnement, ceux-ci peuvent être disproportionnellement élevés. Dans le cadre du régime actuel, les frais de justice dans les procédures civiles sont régis par la loi sur les frais de justice et dépendent principalement de la valeur de l’objet du litige, sans plafond dans de nombreux cas. Si les frais de justice dans les affaires portant sur de petits montants peuvent être relativement peu élevés à moyens
, ils augmentent proportionnellement au montant en cause. Des études du Conseil de l’Europe montrent que les recettes provenant des frais de justice par habitant sont particulièrement élevées
. Le programme du gouvernement pour la période 2020-2024 annonce la volonté de procéder à une évaluation de l'ensemble du système des frais de justice
.
Efficience
La charge de travail du système de justice est gérée de manière efficiente, mais des difficultés se présentent dans les affaires administratives. Le système de justice est efficace en ce qui concerne les litiges civils et commerciaux, le délai moyen estimé pour les résoudre étant court, avec un taux de variation du stock d’affaires pendantes constant d’environ 100 % (100,8 % en 2018) et un nombre peu élevé d’affaires pendantes. Le système des tribunaux administratifs a récemment rencontré des difficultés, qui se sont traduites par des délais de résolution plus longs et un taux de variation du stock d’affaires pendantes de 89,7 % en 2018 (ce taux représentant toutefois une amélioration par rapport au taux de 79,5 % enregistré en 2017)
. Selon les autorités et les parties prenantes, cette situation est liée en particulier à un nombre élevé d’affaires nouvelles en matière d'asile. Le tribunal administratif fédéral éprouve des difficultés particulières, ainsi qu’il ressort également de l’étude menée en 2019 du ministère de la justice. La plupart des activités des tribunaux ayant été temporairement suspendues du 16 mars au 13 avril 2020 en raison de la pandémie de COVID-19, des mesures spécifiques ont été adoptées afin de proroger les délais de procédure, ce qui pourrait entraîner une augmentation des arriérés dans le système de justice
.
II.Cadre de lutte contre la corruption
Une stratégie nationale de lutte contre la corruption a été adoptée en 2018 et elle est accompagnée d’un plan d’action adopté en 2019. En Autriche, différentes autorités sont compétentes pour prévenir, détecter et combattre la corruption. L’Office fédéral de lutte contre la corruption (Bundesamt für Korruptionsprävention und -bekämpfung – BAK) est chargé de la prévention de la corruption et de la lutte contre celle-ci, y compris en ce qui concerne la coopération internationale en la matière. Les poursuites en matière de corruption relèvent de la compétence du service central du ministère public chargé de la lutte contre la criminalité économique et la corruption (Zentrale Staatsanwaltschaft zur Verfolgung von Wirtschaftsstrafsachen und Korruption – WKStA). D’autres autorités compétentes en matière de lutte contre la corruption sont le ministère de la justice, le ministère de l’intérieur et la Cour des comptes. La prévention de la corruption est réglementée dans les grandes lignes pour les fonctionnaires, qui sont soumis aux règles figurant dans la loi sur l’emploi des fonctionnaires de 1979 et dans la loi sur les agents publics contractuels. Une protection des lanceurs d’alerte est en place depuis 2013.
Dans l’édition 2019 de l’indice de perception de la corruption de Transparency International, l’Autriche obtient une note de 77/100 et se classe au 6e rang dans l’Union européenne et au 12e rang au niveau mondial
. Parmi les personnes autrichiennes interrogées, 58 % estiment que la corruption est répandue dans le pays (moyenne de l’UE: 71 %)
, tandis que 22 % d’entre elles considèrent que la corruption affecte leur vie quotidienne (moyenne de l’UE: 26 %). En ce qui concerne les entreprises, 57 % d’entre elles estiment que la corruption est répandue (moyenne de l’UE: 63 %)
et 29 % d’entre elles considèrent que la corruption pose problème dans le cadre de leurs activités (moyenne de l’UE: 37 %). Enfin, 53 % des particuliers estiment qu’il y a suffisamment de poursuites couronnées de succès dans le pays pour décourager les pratiques de corruption et 34 % des entreprises considèrent que les personnes et entreprises poursuivies pour corruption de haut fonctionnaire sont sanctionnées de manière appropriée (moyenne de l’UE: 31 %).
Le cadre législatif pénal de lutte contre la corruption est globalement en place. Le cadre juridique comprend les dispositions applicables du code pénal et du code de procédure pénale ainsi que des actes législatifs spécifiques tels que la loi fédérale portant création et organisation de l’Office fédéral de lutte contre la corruption, la loi fédérale sur la responsabilité des entités en cas d’infractions pénales et la loi fédérale relative à l’extradition et à l’entraide judiciaire en matière pénale.
Les politiques de lutte contre la corruption sont définies au niveau fédéral. La stratégie nationale de lutte contre la corruption, qui a été adoptée en 2018, est intégrée dans tous les secteurs publics. L’objectif principal de cette stratégie consiste à garantir et à renforcer l’intégrité et la transparence de l’administration, du monde politique et des entreprises. Le plan d’action pour la mise en œuvre de la stratégie a été adopté en 2019.
La responsabilité de la lutte contre la corruption est partagée entre plusieurs autorités dotées de compétences spécifiques. L’Office fédéral de lutte contre la corruption (Bundesamt für Korruptionsprävention und -bekämpfung – BAK) a été créé en 2010 et ses attributions ont été étendues pour la dernière fois en 2019. Il est compétent pour les questions de sécurité et de police judiciaire relatives à certaines infractions pénales liées à la corruption, y compris en ce qui concerne l’utilisation abusive de fonds au détriment des intérêts financiers de l’Union européenne et le blanchiment de capitaux
. L’un des objectifs du BAK est la coopération avec le service central du ministère public chargé de la lutte contre la criminalité économique et la corruption.
Le service central du ministère public chargé de la lutte contre la criminalité économique et la corruption est la principale autorité compétente en matière de lutte contre la corruption. Le service du ministère public chargé de la lutte contre la criminalité économique et la corruption (Zentrale Staatsanwaltschaft zur Verfolgung von Wirtschaftsstrafsachen und Korruption – WKStA) a un mandat spécifique qui couvre la criminalité financière, la criminalité économique et la corruption. À la suite de récents scandales politiques retentissants
, le WKStA a intensifié ses enquêtes sur la corruption politique à haut niveau, les allégations de mauvaise administration d’entreprises publiques et le financement illégal des partis politiques. L’Office fédéral de lutte contre la corruption mène des enquêtes de police et aide le WKStA à enquêter sur les infractions pénales liées à la corruption. À l’instar d’autres services judiciaires, le WKStA rencontre également des difficultés en ce qui concerne ses ressources
. Les procureurs du WKStA doivent faire rapport aux services supérieurs du ministère public dans un délai de trois jours ouvrables avant d’engager certaines étapes procédurales, une obligation renforcée qui a été introduite en 2019. Ces obligations de notification peuvent, selon certaines parties prenantes
, représenter une lourde charge et entraîner des retards dans les enquêtes, notamment eu égard au pouvoir d'instruction du procureur principal et du ministre de la justice (voir section I).
Des réformes des règles relatives au financement des partis politiques, y compris en ce qui concerne le rôle de la Cour des comptes, sont en cours. La Cour des comptes exerce des compétences en matière d’audit et est chargée de contrôler le financement des partis. En 2018, un service chargé de la lutte contre la corruption, de la conformité et de la gestion des risques a été créé au sein de la Cour des comptes et il assume depuis lors une initiative de lutte contre la corruption sur plusieurs fronts, une attention particulière étant accordée à la prévention de la corruption. Depuis 2015, la Cour des comptes contrôle les cadres de lutte contre la corruption à différents niveaux, par exemple au niveau des ministères ou des municipalités, conformément aux «lignes directrices pour l’audit des systèmes de prévention de la corruption». En outre, elle cherche à sensibiliser aux questions de corruption et à organiser des formations à l'intention des fonctionnaires. Le rôle de la Cour des comptes a été légèrement renforcé en 2019
. Toutefois, ce rôle est encore limité à la vérification comptable des rapports financiers des partis politiques en tant que tels et la Cour des comptes ne dispose pas d’autres pouvoirs d’enquête. Cette limitation des pouvoirs de la Cour des comptes a été critiquée par des parties prenantes
. La Cour des comptes fait également l’objet de recommandations de longue date du GRECO, qui ne sont encore que partiellement mises en œuvre
. En septembre 2019, des propositions législatives ont été soumises en vue d’instituer des infractions pénales pour présentation de faux rapports annuels des partis et pour financement illégal des partis, propositions qui doivent être débattues
. Le programme du gouvernement pour la période 2020-2024 présente plusieurs engagements en faveur d'un renforcement du rôle de la Cour des comptes, y compris en ce qui concerne le financement des partis politiques
.
Des lacunes subsistent en ce qui concerne le cadre garantissant l’intégrité des membres du Parlement. Seuls certains aspects de la déclaration de patrimoine et de la question des emplois secondaires sont réglementés pour les membres du Parlementaires. Si la déclaration des revenus privés est régie par la loi fédérale sur la transparence et les incompatibilités (Unvereinbarkeits- und Transparenz-Gesetz)
, il n’existe aucune obligation de déclaration du patrimoine, des intérêts, des dettes et des passifs
. Il n’existe pas davantage d'obligation de déclarer les conflits d’intérêts ponctuels susceptibles d’éclater dans le cadre d’un dossier examiné par le parlement. Il n’est pas interdit aux membres du Parlement d’exercer un emploi secondaire ou de siéger dans des conseils d’administration ou de direction. La réglementation des déclarations des revenus et des activités secondaires, l’acceptation de cadeaux et d’autres avantages et les mesures à prendre en cas d’infraction à ces règles ont fait l’objet de plusieurs recommandations du GRECO
.
Plusieurs mesures visant à prévenir la corruption parmi les fonctionnaires et les personnes exerçant de hautes fonctions de l’exécutif sont en place. Le cadre de prévention de la corruption dans le secteur public intègre des règles régissant la prévention des conflits d’intérêts pour les plus hautes instances exécutives
, comme le prévoit la loi fédérale sur la transparence et les incompatibilités
. Ces dispositions incluent des règles relatives à la déclaration bisannuelle de patrimoine et d'intérêts financiers, les emplois secondaires (qui doivent être expressément autorisés) et l’occupation de postes au sein de conseils d’administration ou de direction. La Cour des comptes a également procédé à une évaluation des risques liés aux emplois secondaires des fonctionnaires et a constaté que l’évaluation de la licéité d’un emploi secondaire relevait principalement de la responsabilité des membres du personnel eux-mêmes, et qu’un manque de clarté dans la définition des responsabilités (les critères selon lesquels l’emploi secondaire est jugé compatible ou non avec le poste occupé par le fonctionnaire) pourrait conduire à un conflit d’intérêts. Selon la Cour des comptes, une obligation générale d’obtenir à l’avance l'approbation requise au lieu d’uniquement déclarer à l’avance un emploi secondaire serait plus efficace qu’une obligation d’infliger des sanctions disciplinaires a posteriori. La Cour a donc recommandé à la Chancellerie fédérale d’élaborer une proposition législative qui subordonnerait l’exercice de certains emplois secondaires à l’obtention de l’approbation de l’autorité compétente. La Chancellerie fédérale a estimé qu’il existait suffisamment de formations et d'actions de sensibilisation des fonctionnaires sur cette question
. Par ailleurs, la prévention de la corruption est réglementée dans les grandes lignes pour les fonctionnaires, qui sont soumis aux règles figurant dans la loi sur l’emploi de 1979 des fonctionnaires et dans la loi sur les agents publics contractuels. Ces dispositions légales sont complétées par un code de conduite général pour les agents de la fonction publique et, le cas échéant, par des règles de conduite, qui peuvent être adoptées par des services spécifiques [par exemple, les orientations en matière de conformité (Compliance-Leitlinien) du ministère fédéral de la justice adoptées en 2019]
. En règle générale, les fonctionnaires sont soumis à certaines obligations et règles supplémentaires, tels que la prestation de serment, des obligations de déclaration, le traitement respectueux des autres, les règles concernant les conflits d’intérêts, les règles relatives aux emplois secondaires, l’interdiction d’accepter des cadeaux ainsi que les règles relatives à la cessation de fonctions publiques et l’obligation de secret professionnel. Les manquements à ces obligations et autres devoirs et réglementations entraînent des sanctions disciplinaires, ou des sanctions relevant du droit pénal.
L’emploi après mandat des membres du gouvernement et des parlementaires n’est pas réglementé. Des propositions législatives visant à instaurer un temps de carence de 18 mois ont été présentées en 2019. Conformément à ces propositions, toute personne ayant travaillé pour un parti gouvernemental ou au sein d'un tel parti au cours des cinq dernières années ne pourrait être nommée à une fonction au sein d'un conseil d’administration ou de direction dans une entreprise publique qu’au terme de cette période transitoire
. Le programme du gouvernement pour la période 2020-2024 prévoit d’instaurer une période transitoire avant toute nomination d'un membre du gouvernement à la Cour constitutionnelle
.
Il existe un registre des groupes d’intérêt, mais seules des informations limitées sont accessibles au public. Le registre des groupes d’intérêt a été créé en 2013
. Toutefois, les informations concernant des activités concrètes de lobbying (en particulier les contrats de lobbying) ne sont accessibles, en vertu de la loi, qu’aux décideurs qui ont fait l’objet de pressions, et non au public
. Seules les sociétés de lobbying spécialisées, les représentants internes, les organes autonomes et les groupes d’intérêts («Interessenverbände») doivent s’enregistrer, les contacts uniques ne doivent pas être signalés
. La loi sur la transparence et les incompatibilités et la loi sur la transparence des activités de lobbying et de la représentation d’intérêts contiennent des dispositions en matière de lobbying destinées aux élus et aux personnes qui exercent de hautes fonctions de l’exécutif. L’article 1er, paragraphe 3, de la loi sur la transparence des activités de lobbying et de la représentation d’intérêts dispose qu’elle ne s’applique pas aux partis politiques. Le GRECO a émis une recommandation relative aux membres du Parlement et à leurs contacts avec des tiers en 2016, étant donné que les contacts des membres du Parlement avec des tiers qui pourraient tenter d’influer sur leurs décisions ne sont soumis à aucune restriction ni interdiction. Actuellement, les seules règles en vigueur concernent les situations dans lesquelles des membres du Parlement exercent eux-mêmes des activités de lobbying
.
Un cadre de protection des lanceurs d’alerte est en place. Un outil destiné aux lanceurs d’alerte, géré par le service central du ministère public chargé de la criminalité économique et de la corruption (WKStA), a été adopté en 2013. Au cours des quatre premières années de fonctionnement de l'outil (du 20 mars 2013 au 31 mars 2017), le WKStA a reçu près de 5 000 signalements valables de situations suspectes et d’infractions pénales potentielles. Il en a résulté des inculpations dans 29 cas
.
III.Pluralisme des médias
La liberté d’expression et le devoir qui incombe aux pouvoirs publics de donner accès à l’information sont consacrés par la Constitution. Le droit dérivé garantit expressément le droit des journalistes de protéger la confidentialité de leurs sources
et réglemente l’obligation de divulguer des informations au public
. Les autorités de régulation des services de médias audiovisuels, à savoir l’Autorité autrichienne chargée des communications (KommAustria) et l’Autorité autrichienne de régulation de la radiodiffusion et des télécommunications (RTR), ont été instituées en 2001 conformément à la loi portant création de la KommAustria
.
Les autorités de régulation des médias fonctionnent de manière indépendante. Les autorités de régulation des services de médias audiovisuels, à savoir l’Autorité autrichienne chargée des communications (KommAustria) et l’Autorité autrichienne de régulation de la radiodiffusion et des télécommunications (RTR), sont totalement indépendantes du gouvernement. KommAustria est responsable de la délivrance des licences aux chaînes de télévision et stations de radio privées, de la gestion des fréquences de radiodiffusion, de la surveillance juridique des radiodiffuseurs privés, ainsi que de la préparation et du lancement de la radiodiffusion numérique. KommAustria est en outre chargée de gérer la loi sur les subventions au journalisme (1984), et de contrôler le respect du cadre légal en matière de radiodiffusion qui couvre à la fois les émissions de radiodiffusion de la Société autrichienne de radiodiffusion(ORF) et des radiodiffuseurs privés
. En vertu de la loi fédérale portant création de l’Autorité autrichienne chargée des communications, ses membres sont indépendants et ne sont liés par aucune instruction dans l’exercice de leurs fonctions
. Les décisions de KommAustria peuvent être attaquées devant les juridictions administratives. En ce qui concerne les ressources (telles que les dépenses liées aux salaires, à la location des bureaux et au matériel de KommAustria ainsi qu’à l’appui à la division des médias de la RTR), le budget annuel de KommAustria s’élevait à 4,146 millions d’euros en 2018, ce qui est jugé adéquat
. L’indicateur relatif à l’indépendance et à l’efficacité de l’autorité des médias est considéré comme étant à très faible risque dans le rapport 2020 du Media Pluralism Monitor (MPM) (instrument de surveillance du pluralisme des médias)
.
Le Conseil autrichien de la presse (Österreichischer Presserat)
agit en tant qu’autorité d’autorégulation de la presse. Il s’efforce de garantir la qualité éditoriale et la liberté de la presse. Le Conseil de la presse a élaboré un code de conduite pour la presse autrichienne (principes du travail journalistique), qui contient des règles pour un journalisme responsable et de qualité et fournit une ligne de conduite déontologique pour les professionnels des médias. L’une des principales tâches du Conseil de la presse est de mettre en évidence les griefs touchant la presse et d’y remédier. Le Conseil de la presse est parrainé par les plus grandes associations de journalistes et d’éditeurs. Le MPM 2020 indique que, jusqu’à présent, les organisations telles que le Conseil de la presse «ont accordé trop peu d’attention au statut et à l’indépendance des journalistes indépendants et au nombre croissant d’acteurs périphériques du journalisme (tels que les journalistes citoyens, les blogueurs, les militants des médias sociaux, etc.)»
.
La propriété des médias est soumise à des règles de transparence, mais les informations ne sont pas toujours intégralement disponibles dans la pratique. Le droit autrichien contient certaines dispositions relatives à l'obligation de divulgation de l’identité des propriétaires dans le secteur des médias d’information
. Le propriétaire d’un média doit être identifié nommément ou au moyen de la raison sociale de son entreprise; il convient aussi d'indiquer l’objet de la société, l’adresse de résidence ou le siège social (succursale), les noms des organes exécutifs et des agents du propriétaire du média qui sont autorisés à représenter l’entreprise ainsi que, le cas échéant, des membres du conseil de surveillance. En outre, les taux de participation en ce qui concerne la propriété et la détention d’actions, de parts et de droits de vote doivent être déclarés pour toutes les personnes détenant une participation directe ou indirecte dans la propriété du média. En cas de participation directe ou indirecte dans une fondation, l'obligation de divulgation s'applique aussi au fondateur et aux bénéficiaires concernés
. Il ressort du MPM 2020 que la disposition juridique applicable ne permet pas de savoir si le propriétaire d’un média a des participations dans d’autres sociétés si ces dernières ne sont pas exclusivement détenues par lui
.
L’Autriche attribue des niveaux élevés de publicité d’État aux entreprises de médias. L’attribution des publicités d’État est régie par la loi constitutionnelle fédérale sur la coopération avec les médias et sur le financement des médias, ainsi que par la loi sur la transparence dans le domaine de la coopération avec les médias et la loi sur le financement. Le nom du bénéficiaire des subventions et le montant de celles-ci doivent être divulgués et la Cour des comptes consigne ces informations. Selon le MPM 2020, l’indicateur relatif à la régulation par l’État des ressources et du soutien au secteur des médias révèle un risque moyen pour le pluralisme des médias. Les règles relatives à la distribution des subventions directes et indirectes sont transparentes. Toutefois, selon le MPM 2020, la presse à sensation à grand tirage semble bénéficier de manière disproportionnée du financement. Par ailleurs, des parties prenantes ont fait part de préoccupations quant à l’influence politique potentielle exercée sur l’attribution des publicités d’État
. Cette question a fait l’objet de rapports d’enquête de la part de journalistes
. La loi de 2012 sur la transparence des médias garantit que le gouvernement, les organismes publics et les entreprises d'État divulguent leurs relations avec les médias (comme la publicité et d’autres types de soutien); toutefois, il n’existe pas de règles garantissant la répartition équitable de la publicité d’État entre les médias. Si, en 2018, les subventions de l’État en faveur des médias se sont élevées à 40 millions d’euros, près de 170 millions d’euros ont été consacrés à la publicité d’État
.
Le gouvernement réfléchit actuellement à une réforme devant améliorer l’accès à l’information. Si une obligation de donner accès à l’information est consacrée par la Constitution et prévue en droit fédéral
et dans les législations provinciales, il n’existe pas en Autriche de droit général d’accès aux documents des pouvoirs publics et le devoir de confidentialité prévu par la Constitution et par la loi sur l’emploi des fonctionnaires de 1979 limite l’accès aux informations dans la pratique
. Des parties prenantes ont fait état de préoccupations en ce qui concerne ce système et les longs délais accordés aux organismes publics pour répondre officiellement aux demandes (délai de six mois, avec une réponse non officielle après huit semaines)
. S’agissant du droit au secret des autorités publiques, l’importance particulière du droit des médias d’accéder à l’information en tant qu’«observateurs critiques de la vie publique» est étayée par la jurisprudence de la Cour administrative suprême
. Le gouvernement a annoncé son intention d’introduire un nouveau droit à l’information, exécutoire en justice, à la fois par une modification de la Constitution et par l’adoption d’une loi sur la liberté d’accès à l’information
.
Il n’existe pas de cadre spécifique pour la protection des journalistes. D’après les autorités, il n’existe aucune disposition juridique spécifique relative à la sécurité des journalistes et les journalistes sont protégés comme n'importe quel autre citoyen par le code pénal. L’emprisonnement fait partie des sanctions prévues en cas de diffamation
. Si aucune attaque menaçant la sécurité physique des journalistes n’est à déplorer, les propos offensants et menaçants, visant en particulier les femmes journalistes et les journalistes travaillant à la Société autrichienne de radiodiffusion (ORF), sont en augmentation
. En 2019 et en 2020, la plateforme du Conseil de l’Europe pour renforcer la protection du journalisme et la sécurité des journalistes a publié trois alertes concernant l’Autriche, dont l’une a depuis trouvé une issue favorable
.
Des parties prenantes se sont dites préoccupées par les garanties en matière d’indépendance éditoriale
. La «protection de la confidentialité éditoriale» (Redaktionsgeheimnis) est prévue à l’article 31 de la loi sur les médias
. En vertu de cette disposition, les journalistes ont le droit de refuser de témoigner dans le cadre d’une procédure pénale concernant des informations obtenues dans l’exercice de leur profession. En outre, l’indépendance des journalistes du service public de radiodiffusion, l’ORF, est garantie par la loi fédérale sur la Société autrichienne de radiodiffusion
et plusieurs décisions soulignent les voies de recours effectives qui permettent de protéger l’indépendance des journalistes de l’ORF
. Néanmoins, le MPM 2020 a signalé un risque élevé en ce qui concerne les garanties réglementaires protégeant l’indépendance éditoriale. Si les chaînes de télévision et les stations de radio sont tenues de disposer de statuts éditoriaux, aucune garantie réglementaire visant à empêcher l’influence politique sur la nomination et le licenciement des rédacteurs en chef dans les médias d’information n’est prévue. Les deux plus grands journaux («Kronen Zeitung» et «Heute») n’ont instauré aucune mesure d’autorégulation et ne sont pas membres du Conseil autrichien de la presse
.
IV.Autres questions institutionnelles en rapport avec l’équilibre des pouvoirs
L’Autriche est un État fédéral doté d’un régime parlementaire national bicaméral, composé du Conseil national («Nationalrat») et du Conseil fédéral («Bundesrat»). Les propositions législatives peuvent être présentées par le gouvernement, par les membres des deux chambres du Parlement ou par initiative populaire
. La Cour constitutionnelle effectue un contrôle de constitutionnalité ex post des lois, ce qui est possible à la fois dans des cas concrets
et dans le cadre de l’examen abstrait d’une loi, à la suite de recours introduits par le gouvernement fédéral ou par un gouvernement régional, ou encore par des tiers de membres de l’une ou l’autre des deux chambres parlementaires. Plusieurs autorités de médiation différentes veillent au respect des droits fondamentaux.
Le processus d’adoption des lois comprend généralement une consultation des parties prenantes, mais il n’existe pas de cadre formel pour ces consultations. L’Autriche a mis en place un système avancé d’analyse d’impact de la réglementation, à la fois pour l’évaluation ex-ante et pour l’évaluation ex-post de la législation
. Les propositions législatives présentées par le gouvernement sont, en règle générale, soumises à une consultation publique publiée sur le site web du parlement, à laquelle plusieurs parties prenantes de premier plan sont explicitement invitées à contribuer. Le Conseil national a adopté une résolution visant à rendre le processus de consultation plus accessible au grand public
. Toutefois, il n’existe aucun cadre juridique spécifique qui oblige à mener des consultations et des parties prenantes indiquent que les délais de consultation sont souvent inférieurs aux six semaines recommandées par le gouvernement, ou que le processus de consultation est parfois totalement éludé
. Le GRECO a recommandé à l’Autriche d’adopter des règles claires relatives aux consultations sur les propositions législatives émanant du Parlement et du gouvernement, en les assortissant de délais adaptés
.
La Cour constitutionnelle examine actuellement les mesures liées à la pandémie de COVID-19. Des mesures liées à la pandémie de COVID-19 ont été prises, en particulier dans le cadre de deux lois spécifiques adoptées selon une procédure accélérée, qui accorde au ministre de la santé le pouvoir d’adopter des décrets
. Au mois de juillet 2020, 68 plaintes concernant ces mesures avaient été soumises à la Cour constitutionnelle. En juillet 2020, la Cour constitutionnelle a jugé que la base juridique de l’interdiction d’entrée dans les entreprises, les lieux de travail et d’autres lieux était constitutionnelle, mais elle a constaté que certains décrets imposant une interdiction générale d’entrée dans les lieux publics et autorisant une réouverture partielle limitée à certains magasins étaient illégaux
. Plusieurs autres affaires ont été jugées irrecevables par la Cour constitutionnelle, entre autres au motif que l’accès au contrôle juridictionnel par l’intermédiaire des juridictions administratives est disponible, et plusieurs affaires sont encore pendantes
.
Plusieurs autorités de médiation différentes veillent au respect des droits fondamentaux dans différents domaines. Le Collège des médiateurs opère en tant qu’institution nationale des droits de l’homme et s'est vu accorder en dernier lieu une réaccréditation sous le statut B par l’Alliance mondiale des institutions nationales des droits de l’homme (GANHRI) en 2011. Le sous-comité d’accréditation de la GANHRI a encouragé le Collège des médiateurs à définir un mandat plus large en matière de droits de l’homme et à établir des relations de travail régulières et systématiques avec la société civile. Le sous-comité d’accréditation et, en 2019, le Comité des Nations unies pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes (CEDAW) ont tous deux souligné l’importance d’un processus de sélection clair, transparent et participatif
. Le Collège des médiateurs traite les plaintes des citoyens concernant l’inaction ou les allégations de négligence grave des organes administratifs. Il a également joué un rôle dans le suivi des décisions administratives dans le contexte de la pandémie de COVID-19, après avoir reçu quelque 280 plaintes à partir de mai 2020
. Plusieurs autres autorités indépendantes, telles que le médiateur pour l’égalité de traitement, qui est l’organisme national chargé de l’égalité, le médiateur pour les personnes handicapées et le médiateur pour les enfants et les jeunes, veillent au respect des droits fondamentaux.
Le gouvernement entend renforcer davantage le dialogue avec la société civile. Le programme du gouvernement pour la période 2020-2024 a annoncé plusieurs mesures visant à davantage favoriser la participation de la société civile
. Le gouvernement s’est en particulier engagé en faveur d'un dialogue actif et de contacts respectueux avec les organisations de la société civile. En ce qui concerne le cadre juridique, le statut d’exonération fiscale des dons ne s’applique pas de la même manière à tous les acteurs de la société civile. En particulier, plusieurs ONG actives dans les domaines des droits de l’homme, des droits civils et politiques, de la démocratie, de la transparence ou de l’éducation des adultes n’en bénéficient pas
, et des parties prenantes ont fait part de leur préoccupation à ce sujet
.
Annexe I: Liste des sources par ordre alphabétique*
* La liste des contributions reçues dans le cadre de la consultation préalable à l’élaboration du rapport 2020 sur l’état de droit peut être consultée sur le (site web de la Commission).
Agence des droits fondamentaux, La pandémie de coronavirus dans l’UE – Conséquences en matière de droits fondamentaux – Bulletin 3 (3 juin 2020). Pays: Autriche.
Association des juges et Union des juges et des procureurs, Ressources pour l’état de droit.
Association des procureurs (19 mai 2019), Affaire Eurofighter.
https://staatsanwaelte.at/causa-eurofighter/
.
Association des procureurs, Exigences relatives au ministère public.
https://staatsanwaelte.at/wp-content/uploads/2019/09/Notwendigkeiten-der-Staatsanwaltschaften.pdf
.
Berka, W., Heindl, L., Höhne, T. et Koukal A. (2019). Mediengesetz Praxiskommentar. 4e édition. Vienne: LexisNexis. Bertelsmann Stiftung (2019). Indicateurs de gouvernance durable (SGI) – Autriche. Gütersloh.
https://www.sgi-network.org/2019/Austria
Breitschopf M., «Fünf Jahre “Transparenzpaket” - Eine kritische Bilanz aus zivilgesellschaftlicher Perspektive» (Train de mesures quinquennal sur la transparence). Meine Abgeordneten, Forum Informationsfreiheit, Dossier.
https://www.informationsfreiheit.at/wp-content/uploads/2017/08/Echte-Transparenz-Langfassung-1.9.2017.pdf
.
CEDAW (2019), Observations finales sur le neuvième rapport périodique.
Centre pour le pluralisme et la liberté des médias (2020), Media pluralism monitor, 2020:
https://cmpf.eui.eu/media-pluralism-monitor/mpm-2020
.
Centre pour le pluralisme et la liberté des médias, Decriminalisation of Defamation.
https://cmpf.eui.eu/wp-content/uploads/2019/01/decriminalisation-of-defamation_Infographic.pdf
.
CEPEJ (2018), Systèmes judiciaires européens: Efficacité et qualité de la justice, 2018.
CEPEJ (2020), Study on the functioning of judicial systems in the EU Member States.
CIVICUS, Monitor tracking civic space: Autriche.
https://monitor.civicus.org/country/austria
.
Commission européenne (2020), Tableau de bord de la justice dans l’UE.
Commission européenne, Rapport anticorruption 2014. Annexe consacrée à l’Autriche.
https://ec.europa.eu/home-affairs/sites/homeaffairs/files/what-we-do/policies/organized-crime-and-human-trafficking/corruption/anti-corruption-report/docs/2014_acr_austria_chapter_fr.pdf
.
Conseil consultatif de juges européens, Avis du Bureau du CCJE faisant suite à une demande de la Fédération européenne des juges administratifs (AEAJ) concernant le cadre juridique du poste de président (vice-président) du tribunal administratif de Vienne, Autriche, CCJE-BU(2019)3, 29 mars 2019.
Conseil consultatif de juges européens, Avis nº 19 (2016) sur le rôle des présidents des tribunaux.
Conseil de l’Europe, Plateforme pour renforcer la protection du journalisme et la sécurité des journalistes.
https://www.coe.int/en/web/media-freedom
.
Conseil de l’Europe: Comité des ministres (2000), Recommandation Rec(2000)19 du Comité des ministres sur le rôle du ministère public dans le système de justice pénale.
Conseil de l’Europe: Comité des ministres (2010), Recommandation Rec(2010)12 du Comité des ministres sur les juges: indépendance, efficience et responsabilités.
Conseil national, Rapport de la commission AB 1622 d. B., XXV, 2017. GP.
Cour administrative suprême autrichienne, arrêt du 29 mai 2018, Ra 2017/03/0083.
Cour constitutionnelle; La Cour constitutionnelle se réunira de nouveau à la mi-juillet.
https://www.vfgh.gv.at/medien/Juli_Beratungen.de.php
.
Cour constitutionnelle; La loi COVID-19 est constitutionnelle, plusieurs décrets ne le sont pas.
https://www.vfgh.gv.at/medien/Covid_Entschaedigungen_Betretungsverbot.de.php
.
Cour des comptes, Bericht des Rechnungshofes. Korruptionspräventionssysteme in ausgewählten Bundesministerien (BKA, BMB, BMI, BMLFUW), 2017/8 section 13.1.
https://www.parlament.gv.at/PAKT/VHG/XXVI/III/III_00015/imfname_673740.pdf
.
Cour des comptes, Ce qu’il faut faire – 10 thèmes pour le nouveau gouvernement.
https://www.rechnungshof.gv.at/rh/home/home_1/home_6/Wasjetztgetanwerdenmuss.pdf
.
Die Presse, L’obligation de déclaration pour les enquêteurs chargés de dossiers de corruption: «une contradiction flagrante».
https://www.diepresse.com/5611005/berichtspflicht-der-korruptionsermittler-eklatanter-widerspruch
.
Fédération des juges administratifs, Priorités pour le pouvoir judiciaire administratif pour 2022.
Fédération européenne des juges administratifs (2020), Contribution de la Fédération européenne des juges administratifs au rapport 2020 sur l’état de droit, 2020.
Forum Informationsfreiheit (2020), Contribution du Forum Informationsfreiheit au rapport 2020 sur l’état de droit.
Gouvernement autrichien (2020), Contribution de l’Autriche au rapport 2020 sur l’état de droit.
Gouvernement autrichien (2020), Out of a Sense of Responsibility for Austria. Programme du gouvernement pour la période 2020-2024.
GRECO (2016), Troisième cycle d’évaluation – Deuxième rapport de conformité sur l’Autriche, «Incriminations (STE 173 et 191, PDC 2)» et «Transparence du financement des partis politiques».
GRECO (2019), Cinquième cycle d’évaluation – Rapport d’évaluation sur la Belgique, «Prévention de la corruption et promotion de l’intégrité au sein des gouvernements centraux (hautes fonctions de l’exécutif) et des services répressifs».
GRECO (2019), Quatrième cycle d’évaluation – Rapport de conformité sur l’Autriche, «Prévention de la corruption des parlementaires, des juges et des procureurs».
Index on Censorship. Demonising the Media: Threats to Journalists in Europe.
https://www.indexoncensorship.org/wp-content/uploads/2018/11/index-report-2018-web-v3.pdf
.
Interessenvertretung gemeinnütziger Vereine (IGO), Indice de la société civile 2019.
KommAustria,
https://www.rtr.at/en/rtr/OrganeKommAustria
.
Ministère de la justice (2018), Weisungsbericht 2018.
https://www.justiz.gv.at/file/2c94848b651953620165f6f978cb0d79.de.0/weisungsbericht_2018_endfassung.pdf
.
Ministère de la justice, Avis importants concernant le registre des groupes d’intérêt.
https://lobbyreg.justiz.gv.at/edikte/ex/edparm3.nsf/a5c123accf39f319c1256a4f0033b507/8b3679261eb9d105c1257adb005bed16/$FILE/Information%20(english).pdf
.
Ministère de la justice, Mesures pour un système de justice moderne et de qualité.
https://www.justiz.gv.at/file/2c94848b6d50e800016e6a285abf00ed.de.0/wahrnehmungsbericht_hbm%20jabloner.pdf
.
OCDE, Analyse d’impact de la réglementation et surveillance réglementaire en Autriche, 2020.
https://www.oecd.org/gov/regulatory-policy/RIA-in-Austria-web.pdf
.
Parlement autrichien, «12165/AB XXV.GP – Anfragebeantwortung».
https://www.parlament.gv.at/PAKT/VHG/XXV/AB/AB_12165/imfname_638955.pdf
, 2 juin 2017.
Parlement autrichien, Neu im Verfassungsausschuss.
https://www.parlament.gv.at/PAKT/PR/JAHR_2019/PK0964/index.shtml
.
Parlement autrichien, Postenschacher stoppen ]1000/A(E)].
https://www.parlament.gv.at/PAKT/VHG/XXVI/A/A_01000/index.shtml#tab-ParlamentarischesVerfahren
.
Reporters sans frontières, Autriche.
https://rsf.org/fr/autriche
.
Transparency International Autriche, PRESSEINFO: Indice de perception de la corruption (IPC) 2019 (23 janvier 2020),
https://www.ti-austria.at/2020/01/23/ti-ac-presseinfo-cpi-2019/
.
Visite virtuelle en Autriche dans le cadre du rapport 2020 sur l’état de droit.
Annexe II: Visite en Autriche
Les services de la Commission ont tenu des réunions virtuelles en juin 2020 avec:
·Association autrichienne des juges
·Bureau du procureur principal de Vienne
·Chancellerie fédérale
·Conseil autrichien de la presse
·Cour administrative suprême
·Cour des comptes
·Cour suprême
·Fédération autrichienne des juges administratifs
·Forum Informationsfreiheit
·KommAustria (autorité de régulation des médias)
·Ministère fédéral de l’intérieur
·Ministère fédéral de la justice
·Ministère fédéral des Affaires européennes et internationales
·Office fédéral pour la lutte contre la corruption et la prévention de ce phénomène (BKA)
·Service central du ministère public chargé de la lutte contre la criminalité économique et la corruption
·Transparency International Autriche
·Weisungsrat
* La Commission a également rencontré les organisations suivantes dans le cadre d’un certain nombre de réunions horizontales:
·Amnesty international
·Centre européen pour la liberté de la presse et des médias
·Civil Liberties Union for Europe
·Commission internationale de juristes
·Conférence des Églises européennes
·EuroCommerce
·European Center for Not-for-Profit Law
·Fédération internationale pour les droits humains
·Forum civique européen
·Free Press Unlimited
·Front Line Defenders
·ILGA-Europe
·International Press Institute
·Open Society Justice Initiative/Open Society European Policy Institute
·Plateforme d’apprentissage tout au long de la vie
·Reporters sans frontières
·Société civile Europe
·Transparency International UE