Bruxelles, le 23.4.2018

SWD(2018) 117 final

DOCUMENT DE TRAVAIL DES SERVICES DE LA COMMISSION

RÉSUMÉ DE L'ANALYSE D'IMPACT

accompagnant le document:

Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil relative à la protection des personnes dénonçant les infractions au droit de l'Union

{COM(2018) 218 final}
{SEC(2018) 198 final}
{SWD(2018) 116 final}


Résumé de l’analyse d’impact

Analyse d’impact sur une proposition de directive du Parlement européen et du Conseil établissant des normes minimales communes pour la protection des personnes signalant des violations dans des domaines spécifiques du droit de l’Union

A. Nécessité d’une action

Pourquoi? Quel est le problème abordé?

L’absence de protection efficace des lanceurs d’alerte au sein de l’UE entrave l’application effective du droit de l’UE. Alors que les mécanismes de surveillance et les organes de contrôle communautaires et nationaux sont renforcés par une action spécifique de l’UE (c’est-à-dire la création d’agences de l’UE, le soutien aux systèmes judiciaires nationaux, etc.), la détection, l’instruction et la poursuite efficaces des violations du droit de l’UE restent un défi. Dans certains domaines, les infractions au droit de l’UE susceptibles de porter atteinte à l’intérêt public sont difficiles à démasquer, car les preuves sont difficiles à collecter. Dans ces cas, les signalements des lanceurs d’alerte ayant un accès privilégié à de tels éléments de preuve peuvent avoir une importance capitale. Par conséquent, veiller à ce que les lanceurs d’alerte se sentent libres de signaler les infractions en toute sécurité peut alimenter les mesures de contrôle de l’application du droit et améliorer leur efficacité. Au cours des dernières années, le législateur européen a reconnu la nécessité de protéger les lanceurs d’alerte en tant que partie intégrante du système de contrôle de l’application du droit de l’UE et a introduit certains éléments de protection et des canaux de signalement dans quelques actes spécifiques de l’Union. Cependant, la protection est encore très limitée et sectorielle et ne couvre pas tous les domaines clés dans lesquels une protection insuffisante des lanceurs d’alerte entraîne un sous-signalement des infractions au droit de l’UE susceptibles de porter gravement atteinte à l’intérêt public. De même, la plupart des États membres n’offrent qu’une protection fragmentaire et le niveau de protection varie d’un État membre à l’autre. L’absence d’une protection suffisante et cohérente au niveau de l’UE et au niveau national entraîne le sous-signalement par les lanceurs d’alerte, qui se traduit à son tour par des «occasions manquées» dans la détection et la prévention des infractions au droit de l’UE et affaiblit l’efficacité de son application.

Quels objectifs cette initiative devrait-elle atteindre?

L’objectif général est de remédier au sous-signalement des infractions au droit de l’UE, car il porte gravement atteinte à l’intérêt public dans les domaines où une forte protection des lanceurs d’alerte peut contribuer de manière significative à dénoncer, prévenir et décourager de tels dommages.

Les objectifs spécifiques visent à: i) renforcer la protection des lanceurs d’alerte et éviter les représailles à leur encontre; ii) assurer la clarté et la sécurité juridiques; et iii) soutenir les initiatives de sensibilisation et la lutte contre les facteurs socioculturels conduisant au sous-signalement des infractions.

Quelle est la valeur ajoutée de l’action au niveau de l’UE (subsidiarité)?

L’action de l’UE visant à introduire la protection des lanceurs d’alerte est nécessaire dans les domaines où i) il est nécessaire de renforcer l’application de la loi, ii) le sous-signalement des infractions par les lanceurs d’alerte est un facteur clé affectant le contrôle de l’application de la loi et iii) les infractions au droit de l’UE peuvent nuire gravement à l’intérêt public. Sur la base de ces critères, la protection des lanceurs d’alerte est nécessaire pour renforcer l’application des règles en matière de: i) passation de marchés publics; ii) services financiers, prévention du blanchiment de capitaux et du financement du terrorisme; iii) sécurité des produits; iv) sécurité des transports; v) protection de l’environnement; vi) sûreté nucléaire; vii) sécurité des denrées alimentaires et des aliments pour animaux, santé et bien-être des animaux; viii) santé publique; ix) protection des consommateurs; x) protection de la vie privée et des données à caractère personnel, la sécurité des réseaux et des systèmes d’information. Elle vise également les infractions aux règles de l’Union en matière de concurrence, les atteintes aux intérêts financiers de l’UE et, compte tenu de leur incidence négative sur le bon fonctionnement du marché intérieur, à l’évasion fiscale des entreprises. Une protection insuffisante aux lanceurs d’alerte dans un État membre peut non seulement avoir des effets négatifs sur le fonctionnement des politiques de l’UE dans cet État membre, mais également entraîner des répercussions sur d’autres États membres et sur l’UE dans son ensemble. La protection inégale des lanceurs d’alerte à travers l’UE sape l’égalité des conditions nécessaires au bon fonctionnement du marché unique et à la création un environnement concurrentiel sain pour les entreprises. Notamment, les actes de corruption et de fraude dans les marchés publics qui ne sont pas détectés augmentent les coûts d’exploitation, faussent la concurrence et réduisent l’attrait de l’investissement. Des dispositifs de planification fiscale agressive non détectés, mis en place par des entreprises qui parviennent à éviter de payer leur juste part d’impôts, faussent les règles du jeu et entraînent une perte de recettes fiscales pour les États membres et pour l’UE dans son ensemble (par exemple, LuxLeaks). Les autres retombées sont les risques transfrontières résultant d’actes faussant la concurrence, de produits ou de denrées alimentaires et les aliments pour animaux dangereux mis sur le marché unique, de la pollution de l’environnement ou des risques pour la sûreté nucléaire, la santé publique, la santé et le bien-être des animaux, la protection des consommateurs, la protection de la confidentialité de la vie privée et des données à caractère personnel, la sécurité des réseaux et des systèmes d’information et la sécurité des transports dans un autre État membre qui se répercutent sur d’autres États membres, ainsi que les lacunes dans la protection des lanceurs d’alerte en situation transfrontière, qui risquent d’être laissés pour compte. Seule une action de l’UE peut remédier au déséquilibre du niveau de protection et garantir un niveau de protection élevé et cohérent dans toute l’UE en établissant des normes d’harmonisation minimales. De plus, seule une action de l’UE peut aligner les règles existantes sur la protection des lanceurs d’alerte dans les actes sectoriels spécifiques de l’Union.

B. Solutions

Quelles sont les options législatives et non législatives envisagées? Y a-t-il une option privilégiée? Pourquoi? 

·Option 1: maintien du statu quo.

·Option 2: une recommandation de la Commission fournissant des orientations aux États membres sur les éléments clés de la protection des lanceurs d’alerte, complétée par des mesures d’accompagnement destinées à soutenir les autorités nationales.

·Option 3: une directive introduisant une protection des lanceurs d’alerte dans le domaine des intérêts financiers de l’Union, complétée par une communication établissant un cadre politique au niveau de l’UE, y compris des mesures de soutien aux autorités nationales.

·Option 4: une directive introduisant une protection des lanceurs d’alerte dans certains domaines du droit de l’UE.

·Option 4, sous-option 1: une directive comme visée sous l’option politique 4, complétée par une communication définissant un cadre politique au niveau de l’UE, y compris des mesures d’accompagnement destinées à soutenir les autorités nationales. Il s’agit de l’option privilégiée.

Qui soutient quelle option?

Seules quelques-unes des parties prenantes consultées (autorités nationales) considèrent qu’une option non réglementaire répondrait pleinement à la définition du problème et à ses causes. Parmi les associations professionnelles, la moitié des personnes interrogées lors de la consultation publique de la Commission sont en faveur de normes minimales contraignantes européennes, tandis que les autres seraient satisfaites des normes nationales ou du statu quo. L’écrasante majorité des participants, ainsi que la société civile, les syndicats et le Parlement européen (résolution d’octobre 2017) considèrent qu’un cadre législatif général de l’UE sur la protection des lanceurs d’alerte serait l’option privilégiée.

C. Incidences de l’option privilégiée

Quels sont les avantages de l’option privilégiée (ou, à défaut, des options principales)? 

L’option privilégiée apportera des avantages économiques, sociétaux et environnementaux. Elle soutiendra les autorités nationales dans leurs efforts pour détecter et décourager la fraude et la corruption affectant le budget de l’UE (le risque actuel de perte de recettes est estimé entre 179 000 000 000 EUR et 256 000 000 000 EUR par an). Dans le domaine des marchés publics, le bénéfice d’une protection efficace des lanceurs d’alerte dans l’UE est estimé entre 5 800 000 000 EUR et 9 600 000 000 EUR par an. L’option privilégiée aidera également à lutter contre l’évasion fiscale. Le transfert de bénéfices représente une perte de recettes fiscales pour les États membres et l’UE qui se situe selon les estimations entre 50 000 000 000 EUR à 70 000 000 000 EUR.

De même, les effets généraux sur la société devraient être bénéfiques pour les personnes et les entreprises. L’introduction d’une forte protection des lanceurs d’alerte améliorera les conditions de travail de 40 % de la main-d’œuvre de l’UE qui ne bénéficieraient autrement d’aucune protection (environ 60 millions de travailleurs). Elle renforcera l’intégrité et la transparence des secteurs privé et public en contribuant à une concurrence loyale et à des conditions de concurrence équitables dans le marché unique. Bien que les avantages ne puissent pas être quantifiés, les données montrent que les lanceurs d’alerte permettraient d’éviter la négligence et les fautes professionnelles ayant de graves incidences, entre autres, sur la protection de l’environnement, la sécurité des produits, des aliments et des transports, la protection des consommateurs et la santé publique.

Quels sont les coûts de l’option privilégiée (ou, à défaut, des options principales)? 

Les coûts de mise en œuvre (c’est-à-dire le coût de la mise en conformité avec l’obligation d’établir des canaux de signalement internes et les coûts associés) sont résumés comme suit:

·coût de mise en œuvre pour le secteur public: 204 900 000 EUR en coûts ponctuels et 319 900 000 EUR en coûts opérationnels annuels.

·Pour le secteur privé (moyennes et grandes entreprises), le coût total estimé s’élève à 542 900 000 EUR en coûts ponctuels plus 1 016 700 000 EUR en coûts annuels.

·Le coût total pour les secteurs public et privé s’élève à 1 312 400 000 EUR.

Quelle sera l’incidence sur les entreprises, les PME et les microentreprises?

L’option privilégiée ne visera que les moyennes et grandes entreprises et n’engendrera pas de coûts significatifs: c’est-à-dire que les coûts approximatifs de mise en œuvre (ponctuels) sont estimés à 1 374 EUR et les coûts opérationnels annuels moyens sont estimés à 1 054,6 EUR (ceci inclut les coûts de formation annuelle pour les employés, qui peuvent ne pas être nécessaires). L’option privilégiée dispensera les petites et microentreprises de l’obligation de mettre en place des canaux de signalement internes (sauf dans le domaine des services financiers ou des services vulnérables au blanchiment de capitaux ou au financement du terrorisme et si les États membres le demandent à la suite d’une évaluation des risques sur la base de la nature des activités des entités et du niveau de risque qui en découle).

Y aura-t-il une incidence notable sur les budgets nationaux et les administrations nationales? 

L’augmentation des coûts attendue pour les dépenses liées à la mise en œuvre des exigences légales pour l’option privilégiée s’élèverait à 34 000 000 EUR (environ 15 000 000 EUR de plus que dans le scénario de référence).

Y aura-t-il d’autres incidences importantes? 

L’option promouvra les droits fondamentaux, en particulier la liberté d’expression et les conditions de travail équitables, rehaussera les exigences en matière de signalement et découragera les violations des droits fondamentaux dans la mise en œuvre du droit de l’UE.

D. Suivi

Quand la politique sera-t-elle réexaminée?

La Commission présentera au Parlement européen et au Conseil un rapport sur la mise en œuvre et un rapport d’évaluation, respectivement, deux et six ans (au plus tard) après l’expiration du délai de transposition.