25.10.2018   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 387/27


Avis du Comité européen des régions sur les propositions de réforme de l’Union économique et monétaire (décembre 2017)

(2018/C 387/06)

Rapporteur:

Christophe ROUILLON (FR/PSE), maire de Coulaines

Textes de référence:

Proposition de directive du Conseil établissant des dispositions en vue du renforcement de la responsabilité budgétaire et de l’orientation budgétaire à moyen terme dans les États membres

COM(2017) 824 final

Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil européen, au Conseil et à la Banque centrale européenne — Un ministre européen de l’économie et des finances

COM(2017) 823 final

Proposition de règlement du Conseil concernant la création du Fonds monétaire européen

COM(2017) 827 final

Pour information:

Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil européen, au Conseil et à la Banque centrale européenne: De nouvelles étapes en vue de l’achèvement de l’Union économique et monétaire européenne: feuille de route

COM(2017) 821 final

I.   RECOMMANDATIONS D’AMENDEMENT

Proposition de directive du Conseil établissant des dispositions en vue du renforcement de la responsabilité budgétaire et de l’orientation budgétaire à moyen terme dans les États membres

[COM(2017) 824 final]

Amendement 1

Considérant 7

Texte proposé par la Commission

Amendement du CdR

Plusieurs États membres ayant hérité un niveau d’endettement public élevé de la crise économique et financière , un cadre de règles budgétaires chiffrées propres à chaque État membre et visant à renforcer la conduite d’une politique budgétaire responsable par chacun tout en promouvant efficacement le respect des obligations budgétaires découlant du TFUE est indispensable pour garantir la convergence de la dette publique vers des niveaux prudents. Un tel cadre devrait reposer notamment sur la fixation d’un objectif à moyen terme en termes de solde structurel, contraignant pour les autorités budgétaires nationales comme pour leurs décisions annuelles. Des objectifs à moyen terme pour la position budgétaire permettent la prise en compte des différents ratios de la dette publique au PIB et des risques en matière de viabilité pour les États membres, et d’ancrer ainsi l’évolution de la dette vers la valeur de référence fixée à l’article 1er du protocole no 12 sur la procédure concernant les déficits excessifs annexé au traité sur l’Union européenne et au TFUE.

Plusieurs États membres étant confrontés à la fois à un niveau d’endettement public élevé et à un sous-investissement public , un cadre de règles budgétaires chiffrées propres à chaque État membre et visant à renforcer la conduite d’une politique budgétaire responsable par chacun tout en promouvant efficacement le respect des obligations budgétaires découlant du TFUE est indispensable pour garantir la convergence de la dette publique vers des niveaux prudents. Un tel cadre devrait reposer notamment sur la fixation , au terme d’une procédure transparente et démocratique au niveau national, d’un objectif à moyen terme en termes de solde structurel, contraignant pour les autorités budgétaires nationales comme pour leurs décisions annuelles. Des objectifs à moyen terme pour la position budgétaire permettent la prise en compte des différents ratios de la dette publique au PIB et des risques en matière de viabilité pour les États membres et de tenir compte de la mise en œuvre au niveau de l’État membre de réformes structurelles à valeur ajoutée européenne, correspondant à des compétences partagées ou d’appui européennes, et susceptibles d’avoir une incidence socioéconomique importante , et d’ancrer ainsi l’évolution de la dette vers la valeur de référence fixée à l’article 1er du protocole no 12 sur la procédure concernant les déficits excessifs annexé au traité sur l’Union européenne et au TFUE.

Exposé des motifs

Ressort du texte.

Amendement 2

Considérant 8

Texte proposé par la Commission

Amendement du CdR

Pour pouvoir réaliser et tenir leur objectif à moyen terme en termes structurels, il convient que les États membres définissent une trajectoire d’ajustement cohérente, fondée sur des variables contrôlées par les autorités budgétaires. Une planification budgétaire nationale reposant sur une trajectoire de dépenses publiques corrigée de l’incidence des mesures discrétionnaires en matière de recettes favorise l’efficacité, la transparence et l’obligation de rendre des comptes lors du suivi de l’évolution de la situation budgétaire. Afin de lier étroitement les plans aux résultats budgétaires globaux à moyen terme et de garantir une plus grande appropriation nationale de la politique budgétaire , une trajectoire de croissance à moyen terme des dépenses publiques , déduction faite des mesures discrétionnaires en matière de recettes, devrait être définie pour toute la durée de la législature, telle qu’établie par l’ordre juridique constitutionnel de chaque État membre. Cette trajectoire devrait être fixée dès l’entrée en fonction d’un nouveau gouvernement et être suivie par les budgets annuels afin de permettre une convergence résolue vers la réalisation de l’objectif à moyen terme.

Pour pouvoir réaliser et tenir leur objectif à moyen terme en termes structurels, il convient que les États membres définissent une trajectoire d’ajustement cohérente, fondée sur des variables contrôlées par les autorités budgétaires. Une planification budgétaire nationale reposant sur une trajectoire de dépenses publiques corrigée de l’incidence des mesures discrétionnaires en matière de recettes favorise l’efficacité, la transparence et l’obligation de rendre des comptes lors du suivi de l’évolution de la situation budgétaire. Afin de lier étroitement les plans aux résultats budgétaires globaux à moyen terme et dans le respect des prérogatives des États membres en matière de fiscalité et des dispositions des articles 110 à 113 TFUE , une trajectoire de croissance à moyen terme des dépenses publiques devrait être définie pour toute la durée de la législature, telle qu’établie par l’ordre juridique constitutionnel de chaque État membre , au terme d’une procédure transparente et démocratique associant les collectivités territoriales et les partenaires économiques et sociaux selon les principes du partenariat et de la gouvernance à multiniveaux et permettant de ce fait une plus grande appropriation nationale de la politique budgétaire . Cette trajectoire devrait être suivie par les budgets annuels afin de permettre une convergence séquencée vers la réalisation de l’objectif à moyen terme.

Exposé des motifs

«Une trajectoire de croissance à moyen terme des dépenses publiques» ne permet pas en soi «de garantir une plus grande appropriation nationale de la politique budgétaire».

La trajectoire ne peut être fixée à la fois pour la législature et à l’entrée en fonction de gouvernements.

Amendement 3

Considérant 9

Texte proposé par la Commission

Amendement du CdR

Parce qu’elle aura des effets positifs, la mise en œuvre de réformes structurelles majeures favorisant la viabilité à long terme pourrait justifier une modification de la trajectoire d’ajustement requise pour atteindre l’objectif à moyen terme, à condition qu’ elle ait des effets budgétaires positifs démontrables, confirmés par l’évaluation effectuée conformément aux exigences procédurales du pacte de stabilité et de croissance. Afin de faciliter la stabilisation économique, il devrait être possible, dans des circonstances exceptionnelles — grave récession économique au sein de la zone euro ou de l’Union dans son ensemble, ou événements inhabituels échappant au contrôle de l’État membre concerné et ayant une incidence budgétaire importante —, de s’écarter temporairement de l’objectif à moyen terme ou de la trajectoire d’ajustement devant conduire à la réalisation de celui-ci, pour autant qu’un tel écart ne compromette pas la viabilité budgétaire à moyen terme.

La mise en œuvre de réformes structurelles majeures de valeur ajoutée européenne et liées à des compétences de l’UE ou la réalisation d’investissements publics favorisant la viabilité à long terme pourraient justifier une modification de la trajectoire d’ajustement requise pour atteindre l’objectif à moyen terme, à condition qu’ elles aient des effets budgétaires positifs démontrables, confirmés par l’évaluation effectuée conformément aux exigences procédurales du pacte de stabilité et de croissance. Afin de faciliter la stabilisation économique, il devrait être possible, dans des circonstances exceptionnelles — grave récession économique dans un ou plusieurs États membres, au sein de la zone euro ou de l’Union dans son ensemble, ou événements inhabituels échappant au contrôle de l’État membre concerné et ayant une incidence budgétaire importante —, de s’écarter temporairement de l’objectif à moyen terme ou de la trajectoire d’ajustement devant conduire à la réalisation de celui-ci, pour autant qu’un tel écart ne compromette pas la viabilité budgétaire à moyen terme.

Exposé des motifs

Certains investissements publics entraînant des effets budgétaires positifs, directs et vérifiables à long terme sur la croissance et la viabilité des finances publiques sont jugés équivalents à des réformes structurelles majeures dans le cadre du Pacte de stabilité et de croissance (PSC). La «clause d’investissement» du PSC doit également être prise en compte dans la formulation des règles budgétaires nationales.

S’agissant de la mise en place d’un cadre de règles budgétaires au niveau national, il est nécessaire de prendre en compte d’éventuelles situations exceptionnelles qui affecteraient un ou plusieurs États membres sans toutefois mener à une récession pour l’ensemble de la zone euro ou de l’Union.

Amendement 4

Considérant 17

Texte proposé par la Commission

Amendement du CdR

En vertu de l’article 13 du TSCG, les politiques budgétaires et d’autres questions régies par le traité sont examinées à l’occasion de réunions interparlementaires tenues entre le Parlement européen et les parlements nationaux des parties contractantes conformément au titre II du protocole no 1 sur le rôle des parlements nationaux dans l’Union européenne, annexé aux traités. La présente directive devrait s’appliquer sans préjudice de cette pratique, étant donné que ce dialogue contribue au renforcement de la responsabilité démocratique dans le cadre de la gouvernance économique de l’Union.

En vertu de l’article 13 du TSCG, les politiques budgétaires et d’autres questions régies par le traité sont examinées à l’occasion de réunions interparlementaires tenues entre le Parlement européen et les parlements nationaux des parties contractantes conformément au titre II du protocole no 1 sur le rôle des parlements nationaux dans l’Union européenne, annexé aux traités. Le Comité européen des régions et le Comité économique et social européen sont associés à ces réunions. La présente directive réaffirme cette pratique, étant donné que ce dialogue contribue au renforcement de la responsabilité démocratique dans le cadre de la gouvernance économique de l’Union.

Exposé des motifs

La pratique des réunions interparlementaires contribue au renforcement de la responsabilité démocratique dans le cadre de la gouvernance économique de l’Union et doit donc être réaffirmée. De plus, la participation effective du CdR à ces réunions devrait être reconnue.

Amendement 5

Article 2, point a)

Texte proposé par la Commission

Amendement du CdR

Article 2

Définitions

Article 2

Définitions

(…)

(…)

En outre, on entend également par:

(a)

«circonstances exceptionnelles»: un événement inhabituel, échappant au contrôle des États membres concernés et ayant un effet majeur sur la position financière des administrations publiques, ou une période de récession économique grave pour la zone euro ou l’Union dans son ensemble;

En outre, on entend également par:

(a)

«circonstances exceptionnelles»: un événement inhabituel, échappant au contrôle des États membres concernés et ayant un effet majeur sur la position financière des administrations publiques, ou une période de récession économique grave pour un ou plusieurs États membres, la zone euro ou l’Union dans son ensemble;

Exposé des motifs

Voir amendement au considérant 9.

Amendement 6

Article 3, paragraphe 2, alinéa (a)

Texte proposé par la Commission

Amendement du CdR

Article 3

Responsabilité budgétaire et orientation budgétaire à moyen terme

Article 3

Responsabilité budgétaire et orientation budgétaire à moyen terme

(…)

(…)

(a)

les budgets annuels garantissent la conformité avec l’objectif à moyen terme mentionné au point a) du paragraphe 1 ou la convergence vers cet objectif, en particulier en garantissant le respect de la trajectoire des dépenses publiques mentionnée au point b) de ce même paragraphe. Lorsqu’ils définissent la trajectoire d’ajustement vers l’objectif à moyen terme et qu’ils respectent les règles de procédure du cadre de l’Union, les États membres peuvent tenir compte de la mise en œuvre de réformes structurelles majeures qui ont des effets budgétaires positifs directs à long terme, notamment parce qu’elles augmentent la croissance durable potentielle, et donc une incidence vérifiable sur la viabilité à long terme des finances publiques;

(a)

les budgets annuels garantissent la conformité avec l’objectif à moyen terme mentionné au point a) du paragraphe 1 ou la convergence vers cet objectif, en particulier en garantissant le respect de la trajectoire des dépenses publiques mentionnée au point b) de ce même paragraphe. Lorsqu’ils définissent la trajectoire d’ajustement vers l’objectif à moyen terme et qu’ils respectent les règles de procédure du cadre de l’Union, les États membres peuvent tenir compte: de la mise en œuvre de réformes structurelles majeures à valeur ajoutée européenne, correspondant à des compétences partagées ou d’appui européennes et susceptibles d’avoir une incidence socioéconomique importante, de la réalisation d’investissements publics ou du cofinancement du Fonds européens structurels et d’investissement ou du Fonds européen d’investissements stratégiques qui ont des effets budgétaires positifs directs à long terme, notamment parce qu’ils augmentent la croissance durable potentielle, et donc une incidence vérifiable sur la viabilité à long terme des finances publiques;

Exposé des motifs

Certains investissements publics entraînant des effets budgétaires positifs, directs et vérifiables à long terme sur la croissance et la viabilité des finances publiques sont jugés équivalents à des réformes structurelles majeures dans le cadre du Pacte de stabilité et de croissance. La «clause d’investissement» du PSC doit également être prise en compte dans la formulation des règles budgétaires nationales.

Amendement 7

Article 3, paragraphe 4

Texte proposé par la Commission

Amendement du CdR

Article 3

Responsabilité budgétaire et orientation budgétaire à moyen terme

4.     Les États membres désignent des organismes indépendants chargés de surveiller le respect des dispositions prévues aux paragraphes 1 et 2. Les organismes indépendants fournissent des évaluations publiques pour vérifier:

(a)

l’adéquation entre l’objectif à moyen terme mentionné au point a) du paragraphe 1 et la trajectoire des dépenses publiques mentionnée au point b) du paragraphe 1. Cette évaluation tient compte en particulier de la plausibilité des prévisions macroéconomiques sous-jacentes, du degré de précision des dépenses et des recettes publiques prévues et des effets budgétaires positifs directs potentiels à long terme des réformes structurelles majeures;

(b)

le respect de l’objectif à moyen terme et de la trajectoire des dépenses publiques, y compris l’existence d’un risque sérieux de survenance d’un écart important par rapport à l’objectif à moyen terme ou à la trajectoire d’ajustement vers cet objectif;

(c)

la survenance ou la cessation de toute circonstance exceptionnelle mentionnée au paragraphe 3.

 

Exposé des motifs

Tous les États membres disposent déjà d’institutions publiques à même d’évaluer en toute indépendance les dépenses et les recettes publiques. Il n’y a pas lieu de créer des instances supplémentaires, dont la légitimité apparaît vague, au risque de remettre en cause l’appropriation nationale de la politique budgétaire.

Amendement 8

Ajouter un nouvel article après l’article 5

Texte proposé par la Commission

Amendement du CdR

 

Nouvel article

Conférences interparlementaires

Comme le prévoit le titre II du protocole (no l) sur le rôle des parlements nationaux dans l’Union européenne, annexé aux traités de l’Union européenne, le Parlement européen et les parlements nationaux des États membres définissent ensemble l’organisation et la promotion d’une conférence réunissant les représentants des commissions concernées du Parlement européen et des parlements nationaux afin de débattre des politiques budgétaires et de la gouvernance économique de l’Union. Les organes consultatifs de l’Union — le Comité européen des régions et le Comité économique et social européen — sont associés à ces conférences.

Exposé des motifs

Voir amendement 4 au considérant 17.

II.   RECOMMANDATIONS POLITIQUES

LE COMITÉ EUROPÉEN DES RÉGIONS

1.

se félicite de la volonté de la Commission de réformer et d’approfondir l’Union économique et monétaire (UEM) dès que possible, pendant que l’économie européenne est en phase de convalescence relative, en veillant à soutenir la convergence entre les États membres de la zone euro et ceux qui n’en font pas partie. En effet, depuis 2008, la crise a mis en évidence les faiblesses du cadre institutionnel de la zone euro, et les mesures prises ne sont pas suffisantes pour assurer sa stabilité et sa prospérité face à de potentiels nouveaux chocs économiques et financiers; souligne que le déficit de convergence et de cohésion au sein de l’Union et les fragilités économiques et bancaires ont un impact particulier pour les collectivités territoriales, notamment au regard de l’augmentation des dépenses sociales due à la crise et de la restriction de leur capacité d’investissement et de préservation d’un niveau de qualité satisfaisant des services publics (1);

2.

soutient le principe de l’introduction d’une capacité budgétaire destinée à augmenter la résilience de la zone euro et à préparer la convergence avec les futurs membres de la zone. Cette capacité doit cependant être financée à partir de ressources propres distinctes de celles prévues pour le financement du budget de l’Union européenne pour éviter un empiètement de cette capacité sur les programmes de l’UE accessibles aux UE-27. En outre, cette capacité devrait être comptabilisée à l’extérieur du plafond de ressources du budget de l’UE;

3.

regrette par ailleurs que la proposition de la Commission présentée le 31 mai 2018 ventile cette capacité sur des mesures en faveur de réformes structurelles pas nécessairement liées à la convergence dans la zone euro et sur un mécanisme européen de stabilisation des investissements sous forme de prêts d’un montant relativement modeste de 30 milliards d’EUR maximum et ne prévoit que 2,16 milliards d’EUR pour le mécanisme de soutien à la convergence à proprement parler;

4.

marque son accord sur le cofinancement européen possible de réformes structurelles au niveau national lorsque ces réformes interviennent dans des domaines de compétence de l’Union, conformément au principe de subsidiarité, portant sur des mesures ayant une valeur ajoutée européenne et ayant un impact économique positif significatif. La proposition de règlement présentée le 31 mai 2018 et qui établit le programme d’appui aux réformes doté d’un budget global de 25 milliards d’EUR fera l’objet d’un avis distinct du CdR;

5.

estime cependant que ces nouveaux instruments financiers ne peuvent être financés au détriment de la politique de cohésion (2) (3);

6.

réitère son appel en faveur d’une meilleure coordination des politiques économiques, mais aussi sociales, dans le cadre du Semestre européen et demande que les collectivités locales et régionales y soient davantage associées au moyen d’un «code de conduite» (4);

7.

souligne que les règles et procédures actuelles de contrôle européen des budgets nationaux au sein de l’Union ne sont pas à même de prévenir efficacement les déséquilibres et les vulnérabilités et manquent de légitimité démocratique;

8.

prend note de la proposition de la Commission européenne concernant les titres adossés à des obligations souveraines (sovereign bond-backed securities, ou SBBS) qui vise à renforcer l’intégration et la diversification au sein du secteur financier européen. Le CdR reconnaît qu’a priori les SBBS n’impliqueraient pas de mutualisation des risques et des pertes entre les États membres de la zone euro et que de tels titres participeraient à desserrer le lien entre banques et emprunteurs souverains et à privilégier moins les obligations souveraines. Néanmoins le CdR réitère ses interrogations sur la question de savoir comment le «reconditionnement» des obligations souveraines en produits titrisés réduirait le risque plutôt que de le redistribuer aux acteurs financiers non-réglementés (5);

9.

insiste sur l’urgence de compléter l’union bancaire et regrette que le Conseil Européen ait reporté l’adoption de la feuille de route pour sa finalisation au mois de juin 2018; soutient pour sa part une démarche parallèle de réduction du volume de créances douteuses et de prêts non performants détenus par les banques tout en introduisant graduellement un système européen d’assurance des dépôts;

Proposition de directive du Conseil établissant des dispositions en vue du renforcement de la responsabilité budgétaire et de l’orientation budgétaire à moyen terme dans les États membres

10.

prend acte de la proposition de la Commission visant à intégrer le contenu du traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance (TSCG) dans le cadre juridique européen, intégration qui était prévue dans l’article 16 du TSCG lui-même; s’interroge néanmoins sur la pertinence juridique, politique et démocratique de recourir à une proposition de directive [(reposant sur l’article 126, paragraphe 14, du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE)] qui ne prévoit que la seule consultation du Parlement européen et qui n’apporte pas de ce fait les garanties d’une prise de décision transparente et démocratique, pourtant nécessaire au regard des enjeux de la mesure;

11.

souligne cependant que le TSCG prévoit cette intégration «sur la base d’une évaluation de l’expérience acquise lors de sa mise en œuvre», évaluation qui ne semble pas avoir été réalisée de façon exhaustive et publiée par la Commission. Une telle évaluation aurait dû mettre en lumière la situation préoccupante de l’investissement public au sein de l’UE. Selon Eurostat, le total des investissements publics dans l’Union est passé de 3,4 % du PIB en 2008 à 2,7 % en 2016. Dans le même temps, l’investissement des autorités locales a connu une baisse encore en passant de de 1,5 % du PIB en 2008 à 1,1 % en 2016, avec des situations bien plus graves dans certains États (6); regrette dès lors de constater que les investissements publics sont souvent les plus touchés par les politiques d’assainissement budgétaire, y compris au niveau des collectivités locales et régionales, alors que celles-ci sont responsables de plus de la moitié de l’investissement public dans l’UE, et que leurs investissements ont un impact direct sur les économies locales ainsi que sur la vie quotidienne des citoyens européens; s’inquiète également, dans ce contexte, de la centralisation croissante de l’investissement public, la part des investissements réalisés par les collectivités ayant nettement chuté par rapport à son niveau des années 1990, qui était de 60 % (7); En outre, l’évaluation aurait dû mettre en évidence l’impact de la crise et des politiques d’assainissement sur les dépenses sociales et sur les services de l’État-providence dans de nombreux pays et régions;

12.

s’inquiète de ce fait de l’absence de mention de l’investissement public dans la proposition de la Commission, d’autant plus que la nécessaire souplesse liée aux investissements a été reconnue par le passé, notamment dans la Communication de la Commission de janvier 2015 sur ce sujet (8), et que certains investissements publics ont des effets à long terme positifs et vérifiables sur la croissance, et donc sur la viabilité des finances publiques; rappelle également, dans ce contexte, que l’article 126, paragraphe 3, du TFUE prévoit que le rapport élaboré préalablement au lancement d’une procédure de déficit excessif «examine également si le déficit public excède les dépenses publiques d’investissement et tient compte de tous les autres facteurs pertinents»;

13.

rappelle en outre que le CdR s’était interrogé sur la sécurité juridique fournie par une communication interprétative de la Commission et avait estimé qu’il serait nécessaire de tenir compte du degré de sous-investissement au niveau national ou régional pour produire un effet réel sur la capacité des collectivités à investir (9); se voit conforté dans cette analyse à la lecture de la communication du 23 mai 2018 relative au réexamen de la flexibilité dans le cadre du pacte de stabilité et de croissance (10) dans la mesure où seulement quatre États membres ont demandé à faire usage de la clause des réformes structurelles et/ou de la clause d’investissement depuis 2015 alors que près de la moitié des États membres auraient rempli les conditions pour faire usage de la clause des réformes structurelles. En effet, la condition selon laquelle un État membre doit traverser une période de difficultés économiques pour bénéficier de la clause d’investissement en a considérablement limité l’usage. L’obligation de respecter la marge de sécurité par rapport au plafond de déficit de 3 % pendant trois ans a également représenté une contrainte pour certains États membres. De l’aveu même de la Commission, «l’incidence (de la communication interprétative) sur le volume des investissements publics est difficile à évaluer avec précision». Dès lors, un élargissement du périmètre de la communication paraît nécessaire pour produire des effets sur le niveau d’investissements;

14.

réitère une nouvelle fois sa demande de ne pas prendre en considération les dépenses publiques supportées par les États membres et les collectivités territoriales au titre du cofinancement des Fonds structurels et d’investissement, des réseaux transeuropéens et du Mécanisme pour l’interconnexion en Europe parmi les dépenses structurelles, publiques ou assimilées définies dans le Pacte de stabilité et de croissance, sans autre condition, et ce étant donné que ces investissements sont par définition des investissements de qualité et de nature européenne;

15.

fait valoir qu’en vertu du protocole no 12 du TFUE, les États membres sont responsables des déficits du gouvernement général, qui en comprend l’ensemble des échelons. Dans le même temps, les règles budgétaires de l’UE ont cependant des effets très disparates sur les collectivités locales et régionales en Europe. Leurs incidences dépendent a) de la manière dont les États membres ont transposé en droit national les règles budgétaires de l’UE; b) du degré de décentralisation budgétaire au sein d’un État membre; c) de l’importance des compétences des collectivités locales et régionales et d) de la situation financière desdites collectivités, qui peut très fortement varier même au sein des États membres;

16.

invite de nouveau la Commission à publier un livre blanc établissant une typologie, à l’échelon de l’UE, de la qualité des investissements publics dans les comptes de dépense publique en fonction de leurs effets sur le long terme (11);

17.

estime que la directive concernant la mise en place d’un cadre de règles budgétaires au niveau national devrait prendre en compte d’éventuelles situations exceptionnelles qui affecteraient un ou plusieurs États membres, sans toutefois mener à une récession pour l’ensemble de la zone euro ou de l’Union;

18.

réitère sa préoccupation concernant le cadre comptable SEC 2010 d’Eurostat, mis en œuvre depuis septembre 2014, qui n’opère pas de distinction entre dépense et investissement. Dans certains États membres, la transposition de ces normes en droit national se traduit, pour les collectivités territoriales, par une obligation d’appliquer des plafonds d’investissement maximum par année et par habitant. Ces plafonds empêchent en particulier les collectivités territoriales d’apporter le cofinancement nécessaire aux projets relevant des Fonds structurels et d’investissement européens. Ces plafonds bloquent également, dans les collectivités territoriales qui ont des moyens financiers en réserve, le lancement d’importants projets d’investissement qui ne sont pas liés aux FSIE; invite dès lors la Commission européenne à présenter un rapport sur la mise en œuvre du SEC 2010;

19.

fait observer qu’une manière saine d’appliquer les règles du pacte de stabilité et de croissance, sans pour autant ouvrir la voie à des prouesses comptables, serait de modifier les règles relatives à l’amortissement des investissements publics, et ne pas comptabiliser la totalité d’un investissement en tant que coût la première année, mais — comme le font les entreprises privées — répartir les coûts sur toute la durée de vie prévue de l’investissement;

20.

considère que la pratique des réunions interparlementaires, telles que prévues à l’article 13 du TSCG, contribue au renforcement de la responsabilité démocratique dans le cadre de la gouvernance économique de l’Union et doit donc être réaffirmée dans la présente proposition de directive, mais demande que la participation du CdR à ces réunions soit formalisée afin de reconnaître la nécessaire participation des collectivités territoriales à la gouvernance économique;

La proposition de règlement du Conseil concernant la création du Fonds monétaire européen

21.

estime que le Fonds européen de stabilité financière (FESF) et son successeur, le Mécanisme européen de stabilité (MES), ont été des instruments indispensables dans la gestion à court terme de la crise économique et financière; note cependant que les décisions au sein du MES manquent de transparence, que l’unanimité nécessaire reste source potentielle de blocages et que ces instruments se situent hors du cadre juridique européen;

22.

salue par conséquent le fait que la proposition de la Commission intègre le MES dans le droit primaire européen et, sans préjudice des États membres qui ne font pas partie de la zone euro, le rend responsable devant le Parlement européen et le soumet à l’obligation de publier des rapports et comptes annuels, aux règles d’accès aux documents ainsi qu’à l’Office européen antifraude (OLAF) et au Médiateur européen;

23.

soutient par ailleurs la proposition de la Commission qui prévoit que les décisions importantes, concernant notamment l’octroi d’une assistance financière, seraient prises à une majorité pondérée en fonction du capital mis à disposition de 85 % et non plus à l’unanimité, ce qui devrait faciliter la prise de décision;

24.

soutient également l’utilisation du «Fonds monétaire européen» comme filet de sécurité ou «backstop» pour le Fonds de résolution unique (FRU), élément clé de l’Union bancaire, si les ressources de ce dernier sont insuffisantes pour faciliter la résolution ordonnée de grandes banques en difficultés;

25.

suggère cependant un changement du nom du Fonds, dans un but de lisibilité et de clarté vis à vis des citoyens; la politique monétaire est, selon l’article 127 TFUE, définie et mise en œuvre par la Banque centrale européenne et les banques centrales nationales au sein du Système européen de banques centrales (SEBC); le Fonds envisagé par le présent règlement n’y prenant aucunement part, son nom ne devrait pas contenir le terme «monétaire»; estime que l’appellation «Fonds européen de secours» ou de «Fonds européen de stabilisation» serait plus appropriée;

Communication: Un ministre européen de l’économie et des finances

26.

accueille favorablement la communication de la Commission concernant un ministre européen de l’économie et des finances qui serait à la fois vice-président de la Commission et président de l’Eurogroupe et de ce fait porteur d’une double légitimité et incarnerait une meilleure responsabilité démocratique et lisibilité de la gouvernance de l’UEM. Il y a cependant lieu de préciser les modalités d’exercice de cette fonction pour qu’elle n’aboutisse pas à une centralisation accrue de la prise de décision budgétaire;

27.

rappelle son soutien à la fusion des fonctions de président de l’Eurogroupe et de commissaire chargé des affaires économiques et monétaires, dans le but d’incarner l’intérêt général de la zone euro au sein de l’Eurogroupe et de lui permettre d’être responsable devant le Parlement européen, ce qui n’est actuellement pas le cas;

28.

relève que, en cas d’élection du ministre européen de l’économie et des finances, les bases juridiques combinées de l’article 2 du protocole 14 sur l’Eurogroupe et de l’article 17 du TUE seraient applicables;

29.

estime cependant que cette mesure doit être accompagnée d’une réforme en profondeur de l’Eurogroupe lui-même, dont le statut doit être davantage formalisé et qui doit, par exemple, publier des procès-verbaux détaillés, de sorte que les décisions majeures prises lors de ces réunions le soient de façon transparente;

30.

rappelle, de plus, sa conviction concernant le fait que le problème de déficit démocratique dont souffre l’UEM ne pourra être résolu qu’à la condition que les citoyens européens soient convaincus que le principe de progrès social y est également défendu, et que l’emploi, la progression des salaires et les normes sociales ne sont pas considérés comme secondaires par rapport aux préoccupations macroéconomiques et budgétaires;

31.

estime que l’approfondissement de l’UEM et la coordination des politiques budgétaires, principalement par la mise en œuvre de l’union bancaire, de l’union des marchés des capitaux et du FME, revêtent une importance considérable. Dans le même temps, il convient d’être attentif à la situation politique et à l’opinion publique.

Bruxelles, le 5 juillet 2018.

Le président du Comité européen des régions

Karl-Heinz LAMBERTZ


(1)  Avis du CdR: Document de réflexion sur l’approfondissement de l’Union économique et monétaire à l’horizon 2025. Adopté le 30 novembre 2017. Rapporteur: Christophe Rouillon (FR/PSE): http://webapi.cor.europa.eu/documentsanonymous/cor-2017-03197-00-01-ac-tra-fr.docx

(2)  Résolution du CdR: Modification du règlement portant dispositions communes relatives aux Fonds ESI pour soutenir les réformes structurelles. Adoptée le 1er février 2018: http://webapi.cor.europa.eu/documentsanonymous/cor-2017-06173-00-00-res-tra-fr.docx

(3)  Avis du CdR relatif à la modification du programme d’appui à la réforme structurelle (PARS) et à de nouveaux instruments budgétaires pour la zone euro. Rapporteure: Olga Zrihen (BE/PSE). Adopté le 22 mars 2018. http://webapi.cor.europa.eu/documentsanonymous/cor-2018-00502-00-00-ac-tra-fr.docx

(4)  Avis du CdR: Améliorer la gouvernance du Semestre européen — Un code de conduite pour y associer les collectivités locales et régionales. Rapporteur: Rob Jonkman (NL/ECR). Adopté le 11 mai 2017. JO C 306 du 15.9.2017, p. 24.

(5)  Voir point 22 de l’avis du CdR du 30.11.2017 sur le «Document de réflexion sur l’approfondissement de l’UEM à l’horizon 2025».

(6)  Formation brute de capital fixe des administrations publiques, Eurostat Code: tec00022. (données provisoires pour 2016): http://ec.europa.eu/eurostat/tgm/refreshTableAction.do?tab=table&plugin=1&pcode=tec00022&language=fr.

(7)  «Ma région, mon Europe, notre futur. Septième rapport sur la cohésion économique, sociale et territoriale», Commission européenne, Septembre 2017, p. 168. http://ec.europa.eu/regional_policy/en/information/cohesion-report/

(8)  Commission européenne, communication: «Utiliser au mieux la flexibilité offerte par les règles existantes du Pacte de stabilité et de croissance». 13 janvier 2015. Réf.: COM(2015) 12 final: http://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/HTML/?uri=CELEX:52015DC0012&from=FR.

(9)  Avis du CdR «Utiliser au mieux la flexibilité offerte par les règles existantes du Pacte de stabilité et de croissance». Adopté le 9 juillet 2015. Rapporteure: Olga Zrihen (BE/PSE) JO C 313, 22.9.2015, p. 22.

(10)  COM(2018) 335 final.

(11)  Avis du CdR «Promouvoir la qualité des dépenses publiques dans les domaines faisant l’objet de mesures de l’UE». Adopté le 3 décembre 2014. Rapporteure: Catiuscia Marini (IT/PSE) JO C 19 du 21.1.2015, p. 4.