17.5.2017   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 154/4


COMMUNICATION DE LA COMMISSION

DOCUMENT D’ORIENTATION

Régime de l’Union européenne réglementant le commerce intra-UE et la réexportation d’ivoire

(2017/C 154/06)

Les présentes orientations ont pour objectif de fournir une interprétation du règlement (CE) no 338/97 du Conseil (1) recommandant que les États membres i) suspendent les (ré)exportations d’objets en ivoire brut et ii) assurent une interprétation stricte des dispositions du droit de l’Union autorisant le commerce intra-UE d’ivoire et la (ré)exportation de l’ivoire travaillé.

1.   Contexte et justification

i)   Le cadre juridique européen et international régissant le commerce de l’ivoire

L’éléphant d’Afrique Loxodonta africana et l’éléphant d’Asie Elephas maximus sont tous deux inscrits dans les annexes de la convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d’extinction (CITES), qui rassemble 183 parties, dont l’Union européenne et l’ensemble de ses États membres. Dans le cadre du régime CITES en vigueur, le commerce international d’ivoire (2) est interdit, avec des dérogations strictement limitées (notamment pour les objets acquis avant l’entrée en vigueur des dispositions de la CITES pour l’ivoire). La convention CITES ne réglemente pas le commerce national de l’ivoire.

La convention CITES est mise en œuvre dans l’Union européenne par le biais du règlement (CE) no 338/97 et des règlements connexes de la Commission (les règlements de l’Union européenne relatifs au commerce d’espèces sauvages). Dans le cas de l’ivoire d’éléphant (comme pour les autres espèces reprises à l’annexe A du règlement (CE) no 338/97), l’Union européenne a également adopté des mesures plus strictes que les dispositions de la CITES.

Le commerce d’ivoire est donc strictement réglementé dans l’Union européenne par le biais des règlements de l’Union européenne relatifs au commerce d’espèces sauvages et les échanges d’ivoire à but commercial de, vers ou au sein de l’Union européenne ne sont généralement pas autorisés.

Le commerce intra-UE et la réexportation d’ivoire à des fins commerciales ne sont autorisés que dans les conditions suivantes:

le commerce intra-UE est autorisé pour les articles en ivoire importés dans l’Union européenne avant que l’espèce d’éléphant ne soit inscrite à l’annexe I de la CITES (18 janvier 1990 pour l’éléphant d’Afrique et 1er juillet 1975 pour l’éléphant d’Asie) (3). Le commerce intra-UE n’est autorisé qu’à condition qu’un certificat ait été délivré à cet effet par l’État membre de l’Union européenne compétent, sauf dans le cas des «spécimens travaillés» (voir la définition ci-dessous) acquis avant le 3 mars 1947, qui peuvent être échangés dans l’Union européenne sans certificat,

la réexportation depuis l’Union européenne est autorisée pour les spécimens d’ivoire acquis avant la date à laquelle la CITES leur est devenue applicable, à savoir le 26 février 1976 pour les éléphants d’Afrique et le 1er juillet 1975 pour les éléphants d’Asie (4).

ii)   Contexte international: augmentation du braconnage d’éléphants et du trafic d’ivoire du fait d’une demande croissante provenant d’Asie

Ces dernières années, le braconnage d’éléphants a atteint des niveaux très élevés. Entre 20 000 et 30 000 éléphants d’Afrique auraient été tués chaque année depuis 2011 (5). Cette tendance a entraîné une diminution généralisée des populations d’éléphants d’Afrique, mettant en péril le rétablissement de l’espèce observé entre 1990 et la moitié des années 2000.

Parallèlement à cette augmentation considérable du niveau de braconnage des éléphants d’Afrique, le commerce illicite de l’ivoire s’est intensifié, poussé par la croissance continue de la demande d’ivoire sur les marchés asiatiques. D’après le Système d’information sur le commerce des éléphants (ETIS) (6), entre 2010 et 2015, environ 39 tonnes d’ivoire brut ont été saisies chaque année, et les saisies d’ivoire travaillé ont connu une augmentation constante au fil des ans, pour une moyenne d’environ 5,6 tonnes par année (7). Les flux de ces vastes cargaisons d’ivoire montrent que les réseaux transnationaux de criminalité organisée s’impliquent de plus en plus dans le commerce illégal d’ivoire.

En réponse à cette intensification du braconnage d’éléphants et du trafic d’ivoire, la communauté internationale a pris de nombreux engagements, via des résolutions de l’Assemblée générale des Nations unies et de l’Assemblée des Nations unies pour l’environnement, ainsi que lors de plusieurs conférences de haut niveau.

Plusieurs nouvelles mesures ont été adoptées lors de la 17e Conférence des Parties à la convention CITES (CoP 17 de la CITES) qui s’est tenue en octobre 2016, dans le but de renforcer l’application des règles visant à lutter contre le braconnage d’éléphants et le trafic d’ivoire, de réduire la demande d’ivoire illégal et de renforcer les contrôles de la légalité de l’ivoire présent sur les marchés nationaux.

La résolution 10.10 (Rev. CoP 17) de la CITES sur le commerce de spécimens d’éléphants enjoint les parties de mettre en place des mesures législatives, réglementaires, d’exécution, etc., exhaustives au niveau interne en ce qui concerne les marchés nationaux de commerce d’ivoire. Elle recommande également que «toutes les Parties et les non-Parties sous la juridiction desquelles existe un marché intérieur légal d’ivoire contribuant au braconnage ou au commerce illégal, prennent toutes les mesures nécessaires, législatives, réglementaires et de lutte contre la fraude pour fermer, de toute urgence, ce marché intérieur au commerce de l’ivoire brut et travaillé» et reconnaît qu’il «pourrait être utile d’adopter des dérogations restreintes à la fermeture des marchés pour certains articles; mais que ces dérogations ne devraient pas contribuer au braconnage ou au commerce illégal».

iii)   Augmentation du niveau de commerce légal d’ivoire de l’Union européenne vers l’Asie

Les réexportations commerciales d’ivoire brut et travaillé depuis l’Union européenne, réalisées conformément au règlement (CE) no 338/97 (ci-après «les réexportations légales») ont considérablement augmenté ces dernières années, avec une tendance à la hausse particulièrement marquée pour les réexportations d’ivoire vers l’Asie de l’Est (voir encadré 1).

Encadré 1

Niveaux des réexportations légales d’ivoire depuis l’Union européenne — Faits et chiffres

Les défenses d’éléphant sont les spécimens qui représentent la plus forte proportion de réexportations d’articles en ivoire brut depuis l’Union européenne. Alors que le nombre de défenses réexportées chaque année à partir de l’Union européenne n’avait jamais dépassé 100 unités entre 2006 et 2012 (à l’exception de 2008, où il a atteint 111 articles), ce chiffre a considérablement augmenté en 2013 (plus de 300 articles) et de manière plus prononcée en 2014 et en 2015 (plus de 600 articles chaque année). La quasi-totalité des défenses d’éléphant réexportées en 2014 et 2015 depuis l’Union européenne étaient destinées à la Chine ou à la RAS de Hong Kong.

En plus du commerce d’ivoire, les États membres de l’Union européenne ont également fait état d’échanges d’ivoire brut sous la forme de pièces d’ivoire au cours de la décennie écoulée. On semble distinguer une baisse générale des réexportations de pièces d’ivoire déclarées par poids, mais une augmentation générale des réexportations déclarées par nombre de spécimens (avec des fluctuations importantes d’une année à l’autre), ce qui laisse entendre que le commerce de ce bien est resté relativement constant au cours des dix années écoulées. Les quantités réelles de pièces d’ivoire sont néanmoins très difficiles à quantifier, étant donné que la taille des pièces peut varier énormément.

Le nombre de pièces d’ivoire travaillé réexportées depuis l’Union européenne a augmenté au cours des dernières années, les informations présentées par les États membres faisant état d’une hausse prononcée depuis 2012. Les plus fortes quantités ont été signalées en 2015 en ce qui concerne le commerce de spécimens individuels (10 000 articles en ivoire réexportés en 2015). Il convient néanmoins de noter que les États membres déclarent ces échanges dans différentes unités. Outre les articles individuels, des échanges ont également été déclarés en poids (kg). Les réexportations d’ivoire déclarées au poids par les États membres ont considérablement fluctué, atteignant leur niveau record en 2012 (environ 600 kg, en plus de 7 000 articles individuels) et environ 200 kg en 2015.

Les réexportations d’articles en ivoire travaillé englobent de nombreux types d’objets différents (dont des antiquités, des instruments de musique ou d’autres types de sculptures). Les principaux marchés de destination de ces articles sont la Chine et la RAS de Hong Kong, mais des niveaux de commerce plus modestes avec d’autres pays ont également été signalés, notamment les États-Unis, la Suisse, le Japon et la Fédération de Russie).

Les données utilisées pour évaluer les niveaux de commerce proviennent des registres de réexportation soumis par les États membres de l’Union européenne dans le cadre de leurs rapports annuels CITES, conformément à l’article 15, paragraphe 4, du règlement (CE) no 338/97.

iv)   Initiatives de lutte contre le trafic d’espèces sauvages menées par l’Union européenne en ce qui concerne le commerce d’ivoire intra-UE et les exportations d’ivoire

La communication relative à un plan d’action de l’Union européenne contre le trafic d’espèces sauvages (8) invite l’Union européenne et ses États membres à mettre en œuvre une stratégie globale contre le trafic d’espèces sauvages. Cette communication indique notamment (sous l’action 2 «Limiter davantage le commerce de l’ivoire au sein de l’Union européenne et au départ de celle-ci») que la Commission européenne devrait formuler des lignes directrices «afin de garantir une interprétation uniforme des règles de l’Union européenne, l’objectif poursuivi étant de suspendre l’exportation d’ivoire brut antérieur à la convention et de faire en sorte que seuls les objets en ivoire anciens et obtenus légalement soient commercialisés dans l’Union européenne» d’ici la fin 2016.

Dans ses conclusions de juin 2016 au sujet de cette communication, le Conseil de l’Union européenne a engagé «les États membres à ne pas délivrer de documents d’exportation ou de réexportation pour l’ivoire brut provenant d’éléphants antérieur à la convention, sur la base des lignes directrices de l’Union européenne, et à envisager des mesures complémentaires pour mettre un terme au commerce d’ivoire provenant d’éléphants».

Les présentes orientations ont été élaborées en réponse à ces appels.

La demande croissante d’ivoire émanant d’Asie est l’un des plus importants facteurs expliquant les niveaux élevés actuels de braconnage d’éléphants et de trafic d’ivoire. Par le biais des présentes orientations, l’Union européenne contribuera à réduire cette demande et à appuyer les efforts entrepris par les grands marchés de destination des produits dérivés d’espèces sauvages, comme la Chine, qui a adopté en 2016 des mesures spécifiques visant à limiter les importations d’articles en ivoire sur son territoire et a annoncé qu’elle supprimerait son marché national de l’ivoire d’ici à la fin 2017. Ces orientations ont également pour but de veiller à ce que l’ivoire d’origine illégale ne soit pas échangé dans l’Union européenne ou à partir du territoire de celle-ci et à ce que le commerce légal d’ivoire ne puisse pas servir d’écran à celui de l’ivoire illégal.

Les présentes orientations abordent dans un premier temps les réexportations d’ivoire depuis l’Union européenne (section 3), puis le commerce intra-UE d’ivoire (section 4).

2.   Statut du présent document

Le présent document d’orientation a été discuté et élaboré en coopération avec les représentants des États membres rassemblés au sein du «groupe d’experts des organes de gestion de la CITES».

Cette note a pour but d’aider les citoyens, les entreprises et les autorités nationales à appliquer le règlement (CE) no 338/97 ainsi que ses dispositions d’application. Le présent document d’orientation n’a pas pour vocation de remplacer, compléter ou modifier les dispositions du règlement du Conseil et de ses dispositions d’application. Il n’est pas non plus destiné à être examiné isolément, mais doit être lu conjointement avec ces instruments législatifs. La Cour de justice de l’Union européenne est seule compétente pour donner une interprétation du droit de l’Union faisant autorité.

Le document sera publié en ligne par la Commission et peut être publié par les États membres.

Il sera examiné par la Commission en consultation avec le «groupe d’experts des organes de gestion de la CITES», au second semestre 2019. Toutefois, la Commission et les États membres accorderont une attention particulière aux préoccupations relatives au commerce national d’ivoire, ainsi qu’aux réexportations d’ivoire travaillé depuis l’Union européenne, dans le but d’envisager la nécessité ou non d’apporter des modifications aux présentes orientations sur ces points avant le second semestre 2019.

3.   Orientations relatives à l’interprétation des règles de l’Union européenne relatives à la réexportation d’ivoire

i)   Orientations relatives à la réexportation d’ivoire brut

Les règles régissant la réexportation des spécimens d’ivoire brut (9) acquis avant la date à laquelle la CITES leur est devenue applicable sont établies à l’article 5 du règlement (CE) no 338/97.

Au titre de l’article 5, paragraphe 2, point d), du règlement (CE) no 338/97, lors de l’évaluation des demandes de réexportation d’ivoire brut, les organes de gestion doivent s’être «assuré[s], après consultation de l’autorité scientifique compétente, qu’aucun facteur lié à la conservation de l’espèce ne s’oppose à la délivrance du permis d’exportation».

Ces dispositions doivent être interprétées à la lumière des circonstances décrites à la section 1 ainsi qu’au regard des caractéristiques propres au commerce international d’ivoire brut. L’ivoire brut représente la plus forte proportion d’ivoire entrant dans le commerce illégal international dans le monde entier, comme le prouvent les données soumises par les parties à la CITES à l’ETIS, qui montrent que les saisies d’ivoire brut illégal représentent la grande majorité de l’ivoire saisi dans le monde entier. L’ivoire brut consiste essentiellement en défenses, qui sont difficiles de différencier les unes des autres. Les risques que la réexportation légale d’ivoire brut soit utilisée comme écran pour le commerce illégal d’ivoire brut illégal sont plus grands que pour l’ivoire travaillé, malgré le fait que les défenses légales ne puissent être échangées que si elles sont marquées.

Suspendre la réexportation d’ivoire brut depuis l’Union européenne garantira que les défenses d’origine légale ne soient pas mélangées à l’ivoire illégal et aidera les pays de destination à mettre en œuvre leurs actions visant à réduire la demande d’ivoire, ce qui représente une étape importante dans la lutte contre le commerce illégal d’ivoire et l’intensification actuelle du braconnage d’éléphants.

La Commission recommande que, dans les circonstances actuelles, à la lumière du principe de précaution et à moins que des preuves scientifiques concluantes démontrent le contraire, les États membres tiennent compte de l’existence de facteurs graves liés à la conservation des espèces d’éléphant qui s’opposent à la délivrance de permis d’exportation et de réexportation.

Par conséquent, conformément au règlement (CE) no 338/97, la Commission recommande aux États membres de suspendre, de manière temporaire et à partir du 1er juillet 2017, la délivrance de certificats de réexportation pour l’ivoire brut, sauf dans des cas exceptionnels, lorsque l’organe de gestion de l’État membre concerné s’est assuré que l’article:

1.

fait partie d’un véritable échange de biens culturels entre des institutions de renom (par exemple, des musées);

2.

est un héritage transporté dans le cadre d’un déménagement familial;

3.

est déplacé à des fins scientifiques, éducatives ou d’application de la loi.

Dans ce genre de cas exceptionnels, il est recommandé aux organes de gestion de suivre les orientations du présent document relatives à l’obtention de preuves adéquates de l’origine légale des spécimens (annexe I du présent document), au marquage (annexe II) et, le cas échéant, à la coordination avec les autres États membres et les pays tiers [sous-section iii)].

ii)   Orientations relatives à la réexportation d’ivoire travaillé

Contrairement à l’ivoire brut, l’«ivoire travaillé» couvre de nombreux types de spécimens différents. Ceux-ci incluent les articles qui se trouvent depuis des décennies dans le commerce légal (par exemple des instruments de musique ou des antiquités) et il est difficile de savoir si une suspension totale des réexportations d’articles de ce genre aurait une incidence concrète sur le commerce illégal international d’ivoire. Compte tenu de l’augmentation, ces dernières années, du nombre de réexportations d’ivoire travaillé depuis l’Union européenne, il est néanmoins nécessaire de renforcer le contrôle de l’application des règles actuelles.

Dans tous les cas, il est impératif que les États membres de l’Union européenne exercent un niveau élevé de contrôle sur les demandes de réexportation d’ivoire travaillé, afin de s’assurer de ne délivrer les documents pertinents que lorsque les conditions établies par le droit de l’Union, garantissant que l’ivoire est d’origine légale, sont réunies. Afin d’éviter que des articles d’ivoire ne répondant pas aux garanties requises ne soient exportés, il est recommandé que les conditions de délivrance de ces certificats de réexportation fassent l’objet d’une interprétation stricte.

Afin d’évaluer les conditions dans lesquelles ce commerce peut être autorisé, il est recommandé aux États membres de l’Union européenne d’appliquer les orientations relatives aux «preuves démontrant une acquisition légale» incluses à l’annexe I du présent document et aux «marquage, enregistrement et autres exigences relatives à la délivrance de certificats» incluses à l’annexe II.

Il importe particulièrement que le demandeur d’un certificat de réexportation prouve que les spécimens ont été acquis avant la date à laquelle la CITES est devenue applicable aux articles concernés. Si le demandeur n’est pas en mesure de fournir des éléments probants, il convient alors de ne pas délivrer de certificat.

En cas de délivrance, le certificat devra décrire avec suffisamment de détails l’article concerné de sorte qu’il puisse uniquement être utilisé pour le spécimen en question. Par ailleurs, et lorsque la législation l’autorise, les États membres peuvent envisager la collecte, la vérification et l’enregistrement de l’identité du demandeur et, si possible, de l’acheteur (par exemple en conservant une copie de leurs documents d’identification).

iii)   Coordination au sein des États membres de l’Union européenne et entre eux, ainsi qu’avec les pays tiers

Lorsque des organes de gestion de la CITES locaux/régionaux sont responsables de la délivrance des documents CITES, il est recommandé aux États membres de veiller à ce que les autorités régionales rendent compte à l’organe de gestion CITES central de toutes les demandes de certificats de réexportation/de certificats intra-UE qui ont été soumises. Cela permettra d’assurer une vérification efficacement coordonnée de l’acquisition légale tout en garantissant la cohérence de l’évaluation des demandes. Il pourrait être utile, dans ce cadre, de créer des bases de données nationales pour enregistrer les informations pertinentes.

Lorsqu’un certificat intra-UE délivré par un État membre de l’Union européenne est présenté comme preuve d’acquisition légale aux fins d’une demande de certificat de réexportation, l’État membre ayant délivré le certificat pour le commerce intra-UE doit être consulté au sujet de sa validité. Cette exigence doit s’appliquer à l’ensemble des demandes relatives à l’ivoire, mais surtout lorsqu’il s’agit d’articles bruts.

Par ailleurs, des restrictions/contrôles supplémentaires peuvent être nécessaires en cas de réexportation vers certains pays/territoires ayant introduit des mesures nationales plus strictes concernant le commerce de l’ivoire, notamment la Chine continentale, la RAS de Hong Kong et les États-Unis d’Amérique (USA). Avant de délivrer un certificat de réexportation pour de l’ivoire, l’État membre concerné doit en informer les autorités CITES du pays de destination afin que celui-ci puisse s’assurer que l’importation de ce spécimen est bien conforme à la réglementation en vigueur.

4.   Orientations relatives à l’application du droit de l’Union au commerce intra-UE d’ivoire

Il est recommandé aux États membres de l’Union européenne de suivre les orientations présentées ci-après, basées sur les bonnes pratiques actuelles des États membres, pour l’évaluation des demandes de certificats pour le commerce intra-UE d’ivoire et l’interprétation des dispositions du droit de l’Union relatives au commerce intra-UE de «spécimens travaillés» en ivoire.

Depuis la décision prise par la CITES en 1989 d’interdire le commerce international de l’ivoire, la demande d’ivoire en Europe a considérablement diminué. Les États membres de l’Union européenne n’ont pas été mentionnés, dans le cadre de la CITES, comme étant des marchés de destination importants pour l’ivoire d’origine illégale. La plupart des échanges commerciaux intra-UE concernent des antiquités en ivoire. Toutefois, des cas de commerce illégal d’articles en ivoire ont été relevés sur le territoire de l’Union européenne. En outre, les États membres n’emploient pas tous la même approche pour traiter les demandes de certificats autorisant l’utilisation commerciale de spécimens en ivoire dans l’Union européenne ou en ce qui concerne le commerce intra-UE de «spécimens travaillés» en ivoire. L’Union européenne a le devoir de veiller à ce que l’utilisation commerciale de l’ivoire sur son territoire soit strictement contrôlée et réglementée, conformément à la résolution 10.10 (Rev. CoP 17) de la CITES et au règlement (CE) no 338/97. Dès lors, une vigilance accrue et des contrôles renforcés du commerce intra-UE d’articles en ivoire sont nécessaires, tant dans le cadre des demandes d’autorisation de commerce intra-UE d’ivoire que pour déterminer la légalité des échanges commerciaux intra-UE de «spécimens travaillés».

Dans ce contexte et compte tenu des différents régimes applicables à chacun de ces cas, il est recommandé aux États membres de suivre les orientations spécifiques ci-dessous pour chacun des cas suivants:

le commerce intra-UE d’articles en ivoire [point i) ci-dessous],

les cas spécifiques de commerce intra-UE de «spécimens travaillés» [point ii)) ci-dessous].

i)   Orientations relatives au commerce intra-UE d’articles en ivoire

Le commerce intra-UE de spécimens inscrits à l’annexe A est généralement interdit en vertu de l’article 8, paragraphe 1, du règlement (CE) no 338/97. L’article 8, paragraphe 3, autorise les États membres à déroger à cette interdiction si certaines conditions [répertoriées aux points a) à h) de ce paragraphe] sont remplies. Toutefois, l’utilisation du terme «peut» à l’article 8, paragraphe 3, indique clairement que les États membres ne sont pas tenus de délivrer un certificat pour le commerce intra-UE lorsque ces conditions sont remplies (sauf lorsque le droit de l’Union l’exige, comme dans le cadre de l’application du principe de proportionnalité). L’organe de gestion doit utiliser ses pouvoirs discrétionnaires de manière appropriée au moment de décider de délivrer ou non un certificat.

En conséquence, il ne saurait être considéré que l’article 8, paragraphe 3, confère un droit à un certificat pour le commerce intra-UE à tout demandeur, même lorsque l’une des conditions mentionnées aux points a) à h) est remplie. En outre, l’article 8, paragraphe 3, est soumis au principe de précaution et, comme cela a été indiqué plus haut, la charge de la preuve pour démontrer la légitimité et la conformité d’une opération avec les objectifs du règlement (CE) no 338/97 incombe dès lors au demandeur.

Lorsqu’un État membre reçoit une demande d’utilisation commerciale d’ivoire dans l’Union au titre de l’article 8, paragraphe 3, il est en droit, en vertu du droit de l’Union, de refuser la délivrance d’un certificat, même lorsque l’une des conditions mentionnées aux points a) à h) est remplie, à condition que le refus soit compatible avec le principe de proportionnalité (en d’autres termes, le refus est justifié afin de protéger des espèces de faune et de flore sauvages ou de garantir leur conservation, et le refus n’excède pas ce qui est nécessaire pour atteindre cet objectif). La Commission et le groupe d’experts des organes de gestion de la CITES sont d’avis que tel est le cas lorsque la légitimité et la conformité d’une opération avec les objectifs du règlement (CE) no 338/97 n’ont pas été démontrées de façon concluante par le demandeur.

Il revient aux États membres d’éviter de délivrer des certificats qui pourraient faciliter des activités illégales et il convient, par conséquent, que ceux-ci traitent ces demandes de commerce intra-UE de manière à réduire le risque au minimum dans la mesure du possible. Il est recommandé aux États membres de garantir un contrôle rigoureux lors du traitement des demandes de certificats intra-UE et d’interpréter de manière stricte les conditions de délivrance de ces certificats, en particulier pour l’ivoire brut.

À cette fin, il est recommandé aux États membres de l’Union européenne d’appliquer les orientations relatives aux «preuves démontrant une acquisition légale» incluses à l’annexe I du présent document et aux «marquage, enregistrement et autres exigences relatives à la délivrance de certificats» incluses à l’annexe II.

Un élément clé introduit par l’article 8, paragraphe 3, point a), [relatif aux spécimens «[…] acquis ou introduits dans la Communauté avant l’entrée en vigueur, pour les spécimens concernés, des dispositions relatives aux espèces inscrites à l’annexe I de la convention, à l’annexe C1 du règlement (CEE) no 3626/82 du Conseil (2) ou à l’annexe A du règlement (CE) no 338/97»], est le fait qu’il incombe au demandeur d’un certificat intra-UE de démontrer que les spécimens ont été acquis ou introduits dans l’Union européenne avant le 18 janvier 1990 pour les éléphants d’Afrique et avant le 1er juillet 1975 pour les éléphants d’Asie. Si le demandeur n’est pas en mesure de fournir des éléments probants, il convient alors de ne pas délivrer de certificat.

En cas de délivrance, le certificat devra décrire avec suffisamment de détails l’article concerné de sorte qu’il puisse uniquement être utilisé pour le spécimen en question - ce qui est particulièrement important pour l’ivoire brut, moins susceptible d’être identifié par ses caractéristiques. Par ailleurs et lorsque la législation (10) l’autorise, les États membres peuvent envisager la collecte, la vérification et l’enregistrement de l’identité du demandeur et de l’acheteur (par exemple en conservant une copie de leurs documents d’identification). Une condition spécifique au commerce d’ivoire brut intra-UE obligeant le vendeur à informer les autorités de l’identité de l’acheteur pourrait également être imposée.

Lorsque des demandes relatives à un commerce intra-UE sont soumises pour de l’ivoire en vertu de l’article 8, paragraphe 3, point c), il est rappelé aux États membres qu’étant donné que l’importation d’ivoire (comme effets personnels, notamment comme trophées de chasse) n’est possible qu’à des fins non commerciales, il est impossible que leurs propriétaires se voient délivrer un certificat à des fins de commerce au sein de l’Union européenne en vertu de l’article 8, paragraphe 3, point c).

ii)   Orientations spécifiques relatives au commerce intra-UE de «spécimens travaillés» en ivoire

Le règlement de l’Union européenne contient des dispositions spécifiques régissant le commerce intra-UE de «spécimens travaillés acquis plus de cinquante ans auparavant», au sens de l’article 2, point w), du règlement (CE) no 338/97, qui les définit comme des «spécimens dont l’état brut naturel a été largement modifié pour en faire des bijoux, des objets décoratifs, artistiques ou utilitaires, ou des instruments de musique, plus de cinquante ans avant l’entrée en vigueur du règlement», c’est-à-dire avant le 3 mars 1947, «et dont l’organe de gestion de l’État membre concerné a pu s’assurer qu’ils ont été acquis dans de telles conditions». De tels spécimens ne sont considérés comme spécimens travaillés que s’ils appartiennent clairement à l’une des catégories susmentionnées et peuvent être utilisés sans être sculptés, ouvragés ou transformés davantage». Les «spécimens travaillés» au sens des règlements de l’Union européenne relatifs au commerce d’espèces sauvages sont également souvent appelés «antiquités». Il importe toutefois de noter que les antiquités acquises avant 1947, mais dont l’état naturel n’a pas été considérablement modifié ne constituent pas des «spécimens travaillés» au sens du règlement (CE) no 338/97.

L’utilisation commerciale de «spécimens travaillés» dans l’Union européenne est réglementée au titre de l’article 8, paragraphe 3, point b), du règlement (CE) no 338/97 et de l’article 62, paragraphe 3, du règlement (CE) no 865/2006 de la Commission. Lorsqu’un article remplit les conditions requises à l’article 2, point w), du règlement du Conseil pour pouvoir être considéré comme un spécimen travaillé, aucun certificat n’est requis pour son utilisation commerciale au sein de l’Union européenne.

Afin de garantir une interprétation commune de la définition de «spécimen travaillé» dans les différents États membres de l’Union européenne, la Commission européenne a élaboré, en coopération avec les États membres de l’Union européenne, des orientations internes à ce sujet (11). Ces orientations, qui ne sont pas spécifiques à l’ivoire, abordent des aspects tels que la preuve acceptable d’acquisition de l’article antérieure au 3 mars 1947; des exemples d’articles relevant de la définition «dont l’état brut naturel a été largement modifié» et des catégories de «bijoux», «objets décoratifs», etc.; ainsi que la restauration et le «retravail» des spécimens.

De manière générale, il est recommandé aux États membres d’interpréter strictement la définition de spécimens travaillés, en suivant les étapes suivantes:

le propriétaire d’un spécimen qui souhaite vendre celui-ci doit tout d’abord démontrer que le spécimen a été acquis «plus de cinquante ans avant l’entrée en vigueur du règlement (CE) no 338/97», soit avant le 3 mars 1947,

deuxièmement, le fait qu’une défense d’ivoire soit simplement montée sur une plaque, un écusson ou tout autre type de support, sans aucune modification de son état brut naturel, ne devrait pas être suffisant pour considérer le produit comme un «spécimen travaillé», au sens de l’article 2, point w), du règlement (CE) no 338/97,

troisièmement, il conviendrait également d’examiner rigoureusement et minutieusement l’exigence énoncée à l’article 2, point w), selon laquelle l’objet de la modification doit être «la production de bijoux, d’objets décoratifs, artistiques ou utilitaires ou d’instruments de musique», car il semble que, dans certains cas récents, la nature artistique de la modification (par exemple sculpture importante, gravure, insertion ou fixation d’objets artistiques ou utilitaires, etc.) n’était pas claire, auquel cas les conditions établies à l’article 2, point w), n’étaient pas remplies,

le document d’orientation élaboré par la Commission européenne au sujet des «spécimens travaillés» devrait être consulté pour plus d’informations sur l’interprétation de ce terme.

En outre, si les certificats intra-UE ne sont pas obligatoires pour le commerce de «spécimens travaillés» au sein de l’Union européenne, il est recommandé que les États membres surveillent leur marché national des antiquités en ivoire, notamment en effectuant des contrôles réguliers visant à déterminer si les commerçants possèdent des preuves de l’âge et/ou de l’origine des antiquités en ivoire proposées à la vente, et qu’ils envisagent d’obliger les commerçants à déclarer l’âge et l’origine des antiquités en ivoire qu’ils mettent en vente, tant sur leurs sites web que dans leurs boutiques/magasins physiques.

Enfin, il est à noter que la réexportation de «spécimens travaillés» depuis l’Union européenne requiert la délivrance d’un certificat de réexportation, conformément à l’article 5, paragraphe 6, point i), du règlement (CE) no 338/97. Il est recommandé aux États membres de se servir des orientations de la section 3, point ii)) pour évaluer les demandes de certificats de réexportation portant sur ces articles.


(1)  Règlement (CE) no 338/97 du Conseil du 9 décembre 1996 relatif à la protection des espèces de faune et de flore sauvages par le contrôle de leur commerce (JO L 61 du 3.3.1997, p. 1).

(2)  Le présent document d’orientation ne fait référence qu’à l’ivoire provenant d’éléphants.

(3)  Conformément à l’article 8, paragraphe 3, point a), du règlement (CE) no 338/97.

(4)  Voir l’article 5, paragraphe 6, point ii), du règlement (CE) no 338/97. La convention CITES s’applique depuis le 26 février 1976 aux éléphants d’Afrique, depuis l’inscription de l’espèce sur la liste figurant à l’annexe III par le Ghana; les éléphants d’Asie sont inscrits à l’annexe I de la CITES depuis le 1er juillet 1975.

(5)  Nellemann, C., Henriksen, R., Raxter, P., Ash, N., Mrema, E. (éds). (2014). The Environmental Crime Crisis – Threats to Sustainable Development from Illegal Exploitation and Trade in Wildlife and Forest Resources. A UNEP Rapid Response Assessment. Programme des Nations unies pour l’environnement/GRID-Arendal, Nairobi et Arendal.

(6)  Le Système d’information sur le commerce des éléphants (ETIS) a été créé par la résolution Conf.10.10 (Rev. CoP17) de la CITES sur le commerce de spécimens d’éléphants dans le but, notamment, de «mesurer et d’enregistrer les niveaux et tendances actuels de l’abattage illégal d’éléphants et du commerce illégal de l’ivoire et d’autres spécimens d’éléphants […] ainsi que les changements dans ces niveaux et tendances». Avant chaque conférence des parties à la CITES, l’ETIS élabore un rapport complet sur les saisies d’ivoire dans le monde entier. Les derniers rapports, élaborés en 2016 pour la CoP 17 de la CITES, sont disponibles aux adresses suivantes:

https://cites.org/sites/default/files/eng/cop/17/WorkingDocs/E-CoP17-57-06-R1.pdf

https://cites.org/sites/default/files/eng/cop/17/WorkingDocs/E-CoP17-57-06-R1-Add.pdf

(7)  Pour la moitié des documents de l’ETIS, les parties à la CITES n’ont pas mentionné le poids de l’ivoire saisi.

(8)  http://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/PDF/?uri=CELEX:52016DC0087&from=FR

(9)  Il est recommandé aux États membres de l’Union européenne d’utiliser la définition d’«ivoire brut» incluse dans la résolution Conf.10.10 (Rev. CoP17) de la CITES, selon laquelle

«a)

l’expression «ivoire brut» couvre toutes les défenses entières d’éléphants, polies ou non et sous n’importe quelle forme, et tout ivoire d’éléphant en pièces découpées, polies ou non et dont la forme originale a été modifiée de quelque façon que ce soit, sauf «l’ivoire travaillé»; et

b)

l’expression «ivoire travaillé» est interprétée comme signifiant l’ivoire sculpté, formé ou transformé, soit entièrement, soit partiellement, mais ne comprend pas les défenses entières sous quelque forme que ce soit, sauf si la totalité de la surface a été sculptée».

(10)  En particulier la législation relative à la protection des données à caractère personnel.

(11)  Voir C(2017) 3108


ANNEXE I

Preuves d’acquisition légale

Considérations générales

Tant pour les certificats de réexportation que pour les certificats intra-UE, il incombe au demandeur de prouver à la satisfaction de l’autorité CITES de l’État membre de l’Union européenne concerné que les conditions de délivrance des documents sont réunies et, en particulier, que les spécimens en ivoire ont été légalement acquis (1).

Étant donné que les demandes de certificats de réexportation/intra-UE peuvent varier considérablement (au niveau des circonstances d’acquisition initiale de l’ivoire, de la quantité à réexporter/vendre et de l’origine/de l’âge déclaré des spécimens), les États membres devront en général évaluer au cas par cas les preuves produites par les demandeurs.

Si, de toute évidence, l’acquisition légale doit être démontrée dans tous les cas, les États membres doivent envisager d’adopter une approche fondée sur l’analyse des risques au moment d’évaluer les demandes de réexportation/de commerce intra-UE d’ivoire. Les transactions peuvent donner lieu à différents niveaux de contrôle en fonction de la quantité d’ivoire à réexporter/vendre; du type d’ivoire (p.ex. antiquité, travaillé ou brut); des circonstances dans lesquelles l’ivoire a initialement été acquis (p.ex. dans le cadre d’une transaction commerciale ou en cadeau/héritage); et de la date à laquelle l’acquisition initiale a eu lieu. Les États membres devront exercer leur jugement au moment de déterminer, en fonction de la nature de la transaction, le type/la quantité de preuves nécessaires pour appuyer la demande.

Les États membres devront soumettre les transactions du commerce intra-UE d’ivoire brut à un niveau de contrôle plus élevé, par exemple, en cas de demandes portant sur une ou plusieurs défenses non travaillées ou sur des pièces d’ivoire non travaillées plus volumineuses, en particulier lorsque la demande concerne plusieurs défenses entières/articles entiers. Les États membres peuvent également envisager d’instaurer des contrôles renforcés des demandes de certificats intra-UE pour l’ivoire brut ayant été acquis plus récemment ou dans le cadre d’une transaction commerciale (et non pas en sous forme de cadeau ou d’héritage).

Il importe de noter que le type de preuve de l’origine légale dépendra du mode d’acquisition. Par exemple:

si l’article en ivoire a été importé par le demandeur lui-même avant l’entrée en vigueur de la convention, le demandeur peut être tenu de prouver qu’il vivait ou travaillait dans le pays d’exportation. D’anciennes photographies, des contrats, des extraits d’acte de naissance, des extraits du registre de la population ou une déclaration du demandeur lui-même ou de membres de sa famille peuvent être acceptés comme preuves que le demandeur a vécues à l’étranger. Le demandeur devra également prouver que l’article en ivoire a été légalement acquis/importé dans l’Union européenne (voir la section Types de preuves ci-dessous),

si l’article en ivoire a été acheté dans l’Union européenne, le demandeur doit prouver qu’il a été légalement acquis ou qu’il répond aux exigences relatives à un spécimen travaillé d’avant-1947 (voir la section Types de preuves ci-dessous).

Types de preuves

Il convient, de manière générale, de privilégier les preuves suivantes à l’appui des demandes de certificats de réexportation et de certificats intra-UE:

le permis d’importation CITES original délivré au demandeur et approuvé par les autorités douanières, ou les documents d’importation (p.ex. douaniers) originaux. Le ou les documents doivent être comparés, si possible, aux informations figurant dans les bases de données pertinentes, par exemple les bases de données nationales des douanes ou les bases de données des permis CITES délivrés,

le certificat pour le commerce intra-UE. Dans ce cas, l’État membre de l’Union européenne de délivrance doit être consulté afin de vérifier la validité du certificat en question. Lorsque les informations figurant sur le certificat intra-UE ne sont pas claires, ou en cas de doute/préoccupation quant à la validité du certificat/de la légalité de l’ivoire, il convient de demander des informations complémentaires au demandeur et/ou à l’autorité de délivrance. Des preuves supplémentaires peuvent être demandées si, par exemple, le certificat n’inclut pas de marques d’identification (p.ex. des photographies, des informations descriptives ou des informations sur le poids/la longueur des défenses) ou s’il est particulièrement ancien. Les États membres peuvent demander tout type de preuve apportant des informations supplémentaires sur l’article et son origine qui ne figureraient pas déjà sur le certificat intra-UE. Un reçu ou un acte de transfert peuvent également être demandés, surtout si le certificat porte sur une transaction spécifique, afin de prouver que le propriétaire actuel a acquis le spécimen directement auprès du titulaire du certificat,

les résultats d’une datation au radiocarbone/d’une analyse isotopique afin de déterminer l’âge (ainsi que l’origine) du spécimen (2), en tenant compte du fait que la détermination de l’âge ne suffit pas à elle seule pour prouver l’acquisition légale,

un avis d’expert, sous la forme d’une détermination de l’âge par un expert reconnu et indépendant, par exemple un individu affilié à une université/un institut de recherche, un consultant près d’un tribunal/approuvé par un processus judiciaire, ou un expert approuvé/reconnu (3). Les avis d’experts peuvent être considérés comme des preuves satisfaisantes tant pour l’ivoire travaillé que pour l’ivoire non travaillé (p.ex. lorsqu’une analyse médico-légale ne peut être utilisée). Pour les antiquités en ivoire travaillé, la détermination de l’âge peut être effectuée sur la base du style et des techniques de sculpture.

Lorsque les preuves décrites ci-dessus ne sont pas disponibles, les demandeurs doivent être tenus de présenter une combinaison d’autres formes de preuve afin de démontrer l’acquisition légale de l’ivoire (voir les autres formes de preuve ci-dessous). Les États membres doivent inviter le demandeur à leur fournir le plus possible de types de preuves différents à l’appui de leur demande. Comme indiqué ci-dessus à la section Considérations générales, la quantité et le type de preuves constituant une preuve satisfaisante d’acquisition dépendront de la nature de la demande et du risque associé. Lorsque des quantités commerciales d’ivoire brut font l’objet d’une demande de certificat intra-UE, les États membres doivent envisager de n’accepter que les preuves indiquées aux trois premiers points ci-dessus.

Les autres formes de preuves pouvant constituer une preuve satisfaisante d’acquisition légale sont notamment les suivantes (il est préférable d’en produire une combinaison):

le permis d’exportation CITES original délivré par le pays d’exportation, ou le document d’exportation original (délivré p.ex. par les autorités douanières). Le ou les documents seront comparés, si possible, aux informations figurant dans les bases de données pertinentes,

pour les «spécimens travaillés» contenant de l’ivoire, un document émanant d’un expert approuvé/reconnu,

un reçu ou une facture, un acte de donation ou des documents de succession, par exemple un testament,

d’anciennes photographies de l’article en ivoire (datées, où figure une personne identifiable ou prises sur le lieu d’origine), un ancien permis de chasse (ou d’autres documents relatifs à une chasse), des documents d’assurance, des lettres ou d’anciens documents publics (tels que des articles de journaux ou d’autres rapports/publications originaux prouvant l’origine des spécimens),

d’autres preuves secondaires appuyant l’explication de l’acquisition légale, telles qu’une preuve du travail de la personne ayant acquis le spécimen (par exemple en Afrique) ou une copie de timbres de passeport,

une déposition/déclaration de témoin ou une déclaration signée par le propriétaire. Les États membres peuvent envisager d’inviter le demandeur à fournir une déclaration à l’appui du certificat délivré, indiquant qu’il est conscient des conséquences d’une fausse déclaration. Les dépositions/déclarations de témoins doivent tout de même être appuyées par d’autres preuves, telles que des photographies ou des reçus/factures,

pour les spécimens travaillés ou les instruments de musique fabriqués dans l’Union européenne, la confirmation, par le fabricant ou un expert, que l’instrument a été fabriqué sur le territoire d’un État membre de l’Union européenne avant la date de la liste pertinente de la CITES.

Lorsque, compte tenu des preuves apportées par le demandeur à l’appui de sa demande de certificat de réexportation/de certificat intra-UE, il subsiste des doutes quant à l’acquisition légale de l’ivoire concerné, les États membres doivent envisager de faire appel à un expert indépendant ou de demander une analyse médico-légale afin de vérifier l’âge du spécimen; le coût de cet expert ou de cette analyse sera pris en charge par le demandeur.


(1)  Voir, pour les certificats de réexportation, l’article 5, paragraphes 3 et 6, du règlement (CE) no 338/97 et, pour les certificats pour le commerce intra-UE, l’article 8, paragraphe 3, du règlement (CE) no 338/97, en liaison avec l’article 59 du règlement (CE) no 865/2006.

(2)  Les lignes directrices de l’ONUDC sur les méthodes et les procédures d’échantillonnage et d’analyse en laboratoire de l’ivoire fournissent un aperçu des possibilités de tests en laboratoire, ainsi que des orientations sur le prélèvement d’échantillons à des fins de tests, incluant une liste de l’équipement et du matériel nécessaires à l’échantillonnage de l’ivoire [voir ONUDC (2014), Guidelines on Methods and Procedures for Ivory Sampling and Laboratory Analysis. Organisation des Nations unies, New York, en particulier la section 14.2.2 Isotopes (pp. 30 et suivantes et p. 46); disponible (en anglais) à l’adresse https://www.unodc.org/documents/Wildlife/Guidelines_Ivory.pdf].

Voir également le site web www.ivoryid.org

(3)  Si un avis d’expert est sollicité auprès d’un commissaire-priseur, des conflits d’intérêts potentiels peuvent survenir; il y a lieu de tenir dûment compte de ce fait.


ANNEXE II

Marquage, enregistrement et autres exigences relatives à la délivrance de certificats

En droit de l’Union, le marquage permanent des produits en ivoire n’est pas obligatoire avant la délivrance d’un certificat intra-UE, mais certains États membres le font déjà. En outre, certains États membres de l’Union européenne ne délivrent des permis d’importation et des certificats de réexportation pour certains produits en ivoire qu’à condition que ceux-ci soient marqués [voir l’article 64, paragraphe 1, point d), et l’article 65, paragraphe 1, du règlement (CE) no 865/2006]; par ailleurs, la résolution 10.10 (Rev. CoP 17) de la CITES encourage également le marquage des «défenses entières de toute taille et […] morceaux coupés d’ivoire qui ont à la fois une longueur de 20 cm ou davantage et un poids d’un kilogramme ou davantage».

Dans ce contexte, il est recommandé aux États membres d’envisager le marquage permanent: i) des défenses entières de toute taille et ii) des morceaux coupés d’ivoire qui ont à la fois une longueur de 20 cm ou davantage et un poids d’un kilogramme ou davantage. Le marquage permet de relier un certificat aux articles en ivoire concernés et améliore la traçabilité au sein du système.

Il est recommandé d’effectuer ce marquage conformément à la résolution 10.10 (Rev. CoP 17) de la CITES: «les défenses entières de toute taille et les morceaux coupés d’ivoire qui ont à la fois une longueur de 20 cm ou davantage et un poids d’un kilogramme ou davantage soient marqués à l’aide de poinçons, à l’encre indélébile ou par un autre moyen de marquage permanent, en utilisant la formule suivante: pays d’origine selon le code ISO de deux lettres, deux derniers chiffres de l’année/numéro sériel pour l’année en question/poids en kilogramme (par exemple: KE 00/127/14). Il est clair que différentes parties ont des systèmes de marquage différents et peuvent avoir différentes pratiques d’inscription du numéro sériel et de l’année (qui peut être l’année d’enregistrement ou de recouvrement, par exemple), mais tous les systèmes doivent aboutir à une formule unique pour chaque pièce d’ivoire marquée. Cette formule devrait être appliquée à la «marque de la lèvre», dans le cas des défenses entières, et son emplacement mis en évidence par une touche de couleur».

La résolution précise que le marquage doit indiquer le pays d’origine; si ce pays n’est pas connu au moment où l’État membre de l’Union européenne procède au marquage, le code ISO indiqué doit être celui du pays de marquage. Les États membres peuvent juger approprié de prévoir que le détenteur/propriétaire de l’ivoire doit prendre en charge les coûts du marquage permanent.

Une fois que l’article a été marqué de manière permanente, le code doit être inclus dans une base de données électronique afin de faciliter les futures vérifications, ainsi que le numéro du certificat et toutes les informations utiles telles que la longueur, le poids et le statut antérieur à la convention. Si possible, les informations seront enregistrées au niveau national. Si elles sont enregistrées au niveau régional/local, il convient de prévoir un mécanisme de partage des informations avec l’autorité CITES centrale (nationale) ou de supervision par celle-ci. Après le marquage, il est également conseillé de prendre des photographies des articles et de conserver ensemble les documents et les photographies.

Les États membres ont fait état de problèmes pour vérifier la validité des certificats intra-UE, ce qui rend difficile la confirmation de l’identité du spécimen concerné (pour les défenses brutes). Afin de résoudre ces problèmes, il est conseillé aux États membres:

d’exiger des photographies des spécimens en ivoire (en particulier les défenses brutes entières) et, lorsque les systèmes nationaux le permettent, de faire en sorte que les photographies soient ajoutées/annexées au certificat intra-UE concerné. Les photographies devront être numérisées et conservées avec les documents relatifs au certificat délivré. Les caractéristiques pouvant être documentées (et susceptibles de faciliter l’identification) sont notamment les colorations, les fissures ou autres dommages typiques; la courbure de la défense; et la base (p.ex. tranchée nettement ou arrachée). Des photographies de la défense entière et de la base pourraient être utiles. Si la défense présente une gravure, une photographie montrant les détails et la position de celle-ci sur la défense doit également être incluse. Les photographies de l’ivoire pour lequel un certificat a été délivré sont particulièrement importantes lorsque l’ivoire n’a pas été marqué,

d’inclure sur le certificat des informations sur la manière dont le poids et la longueur de l’article en ivoire ont été mesurés, ainsi que sur la circonférence de la base. En ce qui concerne le poids, les informations utiles sont notamment le moment où l’article a été pesé (au moment de la délivrance du certificat? Des informations plus anciennes sur le poids ont-elles été utilisées?) ainsi que la prise en compte, au moment de la pesée, des éventuels éléments attachés à la défense (par exemple un objet recouvrant la base ou une attache permettant de fixer la défense à un mur) qui pourraient avoir été retirés lors des pesées suivantes. Concernant la longueur, il est notamment utile d’indiquer si la longueur spécifiée est la longueur extérieure ou intérieure et si elle a été mesurée de la pointe à la base (ou d’une autre manière),

d’enregistrer à la fois le nombre d’articles concernés et la quantité en poids (kg) (la dimension des articles pouvant varier considérablement).