31.8.2017   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 288/56


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil portant modification de la directive 2004/37/CE concernant la protection des travailleurs contre les risques liés à l’exposition à des agents cancérigènes ou mutagènes au travail»

[COM(2017) 11 final — 2017/0004 (COD)]

(2017/C 288/07)

Rapporteur:

Marjolijn BULK

Consultation

Parlement européen, 19 janvier 2017

Conseil, 16 février 2017

Base juridique

Article 304 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne

 

 

Décision de l’assemblée plénière

24 janvier 2017

 

 

Compétence

Section spécialisée «Emploi, affaires sociales et citoyenneté»

Adoption en section spécialisée

3 mai 2017

Adoption en session plénière

31 mai 2017

Session plénière no

526

Résultat du vote

(pour/contre/abstentions)

149/0/3

1.   Conclusions et recommandations

1.1.

Le Comité économique et social européen (CESE) se félicite de l’ouverture du processus de révision de la directive sur les agents cancérigènes et est disposé à contribuer à cet important débat.

1.2.

Le CESE invite instamment la Commission à évaluer l’impact d’une éventuelle extension du champ d’application de la directive sur les agents cancérigènes et mutagènes (ci-après la «directive CM») aux substances qui sont toxiques pour la reproduction.

1.3.

Le Comité recommande vivement que la révision de la directive CM et les amendements prévus pour 2018 accordent une plus grande attention à l’exposition des femmes aux agents cancérigènes sur le lieu de travail.

1.4.

Le CESE estime qu’il est important, qu’en concertation avec les partenaires sociaux, les États membres et d’autres parties prenantes, la Commission réalise des avancées dans le sens d’une méthodologie commune pour l’adoption de valeurs limites d’exposition professionnelle (VLEP) contraignantes dans la directive CM.

1.5.

Les VLEP contraignantes doivent être définies sur la base de preuves scientifiques et statistiques, en tenant compte de différents facteurs tels que la faisabilité et la possibilité de mesurer les niveaux d’exposition. Les Pays-Bas et l’Allemagne ont adopté une approche fondée sur les risques, laquelle aide à la définition des VLEP contraignantes en prenant en compte le niveau de risque comme facteur déterminant d’un compromis social.

1.6.

Le CESE considère qu’il est nécessaire de mettre en place des programmes visant à proposer, dans le cadre des systèmes nationaux de sécurité sociale ou de santé publique, une surveillance médicale tout au long de la vie à toutes les personnes qui ont été exposées à des agents cancérigènes sur le lieu de travail.

1.7.

Le CESE fait valoir que, dans le but d’améliorer la protection des travailleurs contre l’exposition à des agents cancérigènes, à des agents mutagènes et à des substances reprotoxiques sur le lieu de travail, les États membres devraient veiller à ce que les services d’inspection du travail disposent de ressources financières et humaines suffisantes pour s’acquitter de leurs tâches.

1.8.

Le CESE soutient la position commune des partenaires sociaux européens et recommande l’adoption d’une VELP contraignante pour le formaldéhyde.

1.9.

Le CESE recommande que lors de l’élaboration d’une définition juridique des gaz d’échappement des moteurs diesel, la Commission prenne en compte les observations du Comité scientifique en matière de limites d’exposition professionnelle à des agents chimiques (CSLEP) dans ce domaine.

2.   Contexte de la proposition

2.1.

Le cancer est la principale cause de mortalité liée aux conditions de travail. En 2013, on estimait à 1 314 000 le nombre de décès liés au cancer dans l’Union européenne. Plus de 100 000 décès dans l’Union européenne (UE) étaient dus à des cancers d’origine professionnelle, ceux-ci représentent la première cause de mortalité liée au travail dans l’Union. Quelque 20 000 000 de travailleurs de l’UE sont exposés à des agents cancérigènes au travail. Une étude publiée en 2015 par l’Institut néerlandais pour la santé publique et l’environnement (1) estime le coût annuel de ces cancers professionnels à 334 milliards d’EUR.

2.2.

La législation relative à la protection des travailleurs traite des cancers d’origine professionnelle dans un certain nombre de directives. Les obligations générales de la directive-cadre (2) de 1989 couvrent tous les risques et définissent les mesures générales qui doivent être mises en œuvre sur le lieu de travail. La directive sur les agents chimiques (3) s’applique à tous les produits chimiques dangereux. La directive sur l’amiante (4) prend en compte certains besoins spécifiques pour la prévention des maladies liées à l’amiante. L’acte législatif spécifique le plus important est la directive sur les agents cancérigènes adoptée en 1990.

2.3.

La directive CM fixe les prescriptions minimales générales. Les employeurs doivent déterminer et évaluer les risques et éviter une exposition en présence de risques. Le recours à un autre procédé ou agent chimique, non dangereux ou moins dangereux, est requis lorsqu’il est techniquement possible. Si tel n’est pas le cas, les agents cancérigènes chimiques doivent, également dans la mesure des possibilités techniques, être fabriqués et utilisés en système clos pour éviter l’exposition. Lorsque la technique ne le permet pas, des mesures doivent être prises pour limiter autant que possible l’exposition des travailleurs.

2.4.

Outre ces prescriptions minimales générales, la directive CM dispose clairement que la fixation de valeurs limites d’exposition professionnelle (VLEP) concernant l’exposition à certains agents cancérigènes ou mutagènes fait partie intégrante du dispositif de protection des travailleurs. Des VLEP contraignantes précises pour certains agents chimiques sont présentées à l’annexe III de la directive CM. Actuellement, cette annexe n’a fixé des VLEP contraignantes que pour l’exposition à trois substances ou processus. Ces valeurs ne couvrent qu’un faible pourcentage des travailleurs exposés à des substances cancérigènes, mutagènes ou reprotoxiques.

2.5.

En 2016, la Commission européenne a annoncé que la directive CM serait révisée en trois phases. Elle a adopté une première proposition au mois de mai 2016, qui est actuellement examinée par le Parlement européen et le Conseil des ministres. Une deuxième proposition a été adoptée en janvier 2017 et une troisième est prévue pour 2018.

2.6.

La révision de la directive CM est un processus continu. La première proposition a révisé les deux VLEP contraignantes existantes et en a adopté onze nouvelles. Dans son rapport Ulvskog (5), le Parlement européen soutient le processus de révision de la directive CM et demande, entre autres, d’élargir son champ d’application aux substances reprotoxiques, d’introduire des valeurs limites d’exposition professionnelle plus strictes pour six substances et de fixer une valeur limite transitoire afin de donner aux employeurs un délai supplémentaire pour la mise en œuvre. Le Parlement européen insiste aussi sur le fait que les révisions de 2017 et de 2018 de l’annexe III de la directive 2004/37/CE devraient inclure, sans toutefois s’y limiter, des substances, des mélanges et des procédés tels que les gaz d’échappement des moteurs diesel, le formaldéhyde, le cadmium et ses composés, le béryllium et ses composés, les composés de nickel, l’arsenic et ses composés ainsi que l’acrylonitrile. Une très grande majorité des groupes politiques ont soutenu le compromis proposé par le Parlement européen.

2.7.

Le principal objectif de la deuxième proposition est d’adopter cinq nouvelles VLEP contraignantes. Bien que les mélanges complexes d’HAP (hydrocarbures aromatiques polycycliques) et les huiles de moteur usagées figurent dans l’annexe qui définit le champ d’application de la directive, aucune valeur limite n’a été fixée pour ces deux substances cancérigènes. S’appuyant sur sa propre analyse, la Commission a décidé qu’aucune action ne devait être prise à ce stade pour cinq substances cancérigènes (6).

3.   Observations générales

3.1.

Le champ d’application de la directive CM se limite actuellement aux agents cancérigènes et mutagènes; il y a lieu d’envisager une éventuelle extension aux substances qui sont toxiques pour la reproduction. Selon l’Agence européenne pour la sécurité et la santé au travail (EU-OSHA), «les effets de l’exposition professionnelle sur le système reproducteur des hommes et des femmes peuvent se manifester sous différentes formes: modifications des taux d’hormones sexuelles, baisse de la libido et problèmes d’impuissance, troubles menstruels, ménopause prématurée, ménarche tardive, dysfonctionnement ovarien, perte de qualité du sperme, et fertilité masculine et féminine plus faible. L’exposition à des agents toxiques peut causer des dommages cellulaires directs aux spermatozoïdes et aux ovules en formation. L’exposition de la mère durant sa grossesse peut perturber le développement du fœtus […]. L’exposition à des agents toxiques peut induire un grand nombre d’effets de grande ampleur, par exemple, la mort fœtale, un retard de croissance intra-utérin, une naissance prématurée, des malformations congénitales, un décès postnatal, des troubles du développement cognitif, des modifications de la sensibilité du système immunitaire, ou un cancer infantile. L’exposition de la mère aux produits chimiques sur le lieu de travail peut également contaminer son lait maternel. Certains produits chimiques à activité hormonale, appelés perturbateurs endocriniens, peuvent altérer les fonctions du système endocrinien et causer, par conséquent, des effets néfastes pour la reproduction, notamment réduire la qualité du sperme et endommager les tissus reproducteurs chez les hommes, et provoquer certains problèmes médicaux d’ordre gynécologique chez les femmes».

3.1.1.

Dans le règlement REACH et dans plusieurs dispositions législatives spécifiques (concernant les produits cosmétiques, les biocides et les pesticides), les agents cancérigènes, mutagènes et les substances reprotoxiques sont considérés comme un seul groupe général de «substances extrêmement préoccupantes». Ils partagent certaines caractéristiques communes, notamment une très forte incidence sur la santé, la difficulté de perception des risques (puisque les conséquences de l’exposition n’apparaissent souvent qu’après une longue période de latence), la difficulté de la gestion des risques et les problèmes liés aux «effets cocktail», en cas d’exposition à deux ou plusieurs substances ou procédés. Une telle approche a été adoptée dans la législation nationale de plusieurs États membres avec le soutien de partenaires sociaux au niveau national. Le CESE invite instamment la Commission à évaluer l’impact d’une éventuelle extension du champ d’application de la directive sur les agents cancérigènes et mutagènes aux substances qui sont toxiques pour la reproduction.

3.2.

La stratégie de l’Union européenne contre les cancers liés au travail devrait accorder une plus grande attention aux femmes.

3.2.1.

Les régimes d’exposition et les schémas de localisation des cancers peuvent varier selon qu’ils se rapportent aux hommes ou aux femmes. Le cancer du sein, par exemple, est très rare chez les hommes, tandis que c’est le cancer le plus fréquent chez les femmes. Une série d’expositions professionnelles peuvent contribuer à l’apparition du cancer du sein.

3.2.2.

Le Comité demande instamment à la Commission de prendre en compte plus systématiquement l’exposition professionnelle des femmes aux agents cancérigènes lors de la révision de la directive et des amendements prévus pour 2018. De nombreux types d’activités dans lesquelles les femmes sont fortement présentes (santé, nettoyage, coiffure, etc.) comportent des expositions à des substances cancérigènes dont il est fait abstraction. Il est nécessaire de définir des critères pour l’identification et la classification des perturbateurs endocriniens qui contribuent à l’apparition de certains cancers. La prévention devrait être renforcée en ce qui concerne l’utilisation des produits cytostatiques (à savoir les agents chimiothérapiques) dans les professions de la santé. Bien que les radiations ionisantes ne relèvent pas du champ d’application du présent avis, le CESE insiste fermement sur la nécessité de renforcer d’autres directives, et en particulier de la directive 2013/59/Euratom.

3.3.

Les parties prenantes s’accordent largement sur le rôle et l’importance des VLEP contraignantes. Ces valeurs sont capitales car elles réduisent les risques, même lorsqu’il n’existe pas de niveau d’exposition sans danger. Elles doivent être fixées à un niveau approprié, en prenant en compte les preuves scientifiques et la faisabilité.

3.3.1.

Il n’existe toutefois pas de méthode uniforme pour établir les VLEP contraignantes dans l’UE. Actuellement, la Commission procède «au cas par cas». La transparence et la cohérence pourraient être largement améliorées. Certaines VLEP contraignantes sont adéquates, tandis que d’autres n’assurent pas une protection suffisante. Le CESE considère que, lorsqu’il s’agit de la santé et de vies humaines, les ambitions doivent être à la hauteur du défi.

3.3.2.

Il faut tenir compte également du fait que les États membres ont des approches différentes. Certains d’entre eux ont défini des VLEP contraignantes pour plus d’une centaine d’agents cancérigènes, mutagènes ou reprotoxiques, d’autres pour moins de dix. Le niveau de ces valeurs peut varier d’un pays à l’autre. Ces différences créent des difficultés pour les entreprises qui opèrent dans différents pays aux normes différentes, et peuvent, dans certains cas, conduire à une concurrence déloyale.

3.3.3.

Le CESE estime qu’il importe dès lors que la Commission définisse, dans la directive CM, une méthodologie pour l’adoption des VLEP contraignantes. Un tel processus devrait inclure une vaste consultation des partenaires sociaux, des États membres et des autres parties prenantes, y compris les organisations non gouvernementales. Les expériences nationales contribuent à définir les bonnes pratiques. Pour le CESE, deux éléments doivent être particulièrement pris en compte:

3.3.3.1.

en premier lieu, les VLEP contraignantes doivent être cohérentes, afin d’éviter une situation dans laquelle les travailleurs exposés à certaines substances soient beaucoup plus susceptibles de développer un cancer que des travailleurs exposés à d’autres substances. En Allemagne et aux Pays-Bas, les partenaires sociaux sont favorables à une approche fondée sur les risques. Celle-ci aide à la définition des VLEP contraignantes en prenant en compte le niveau de risque comme facteur déterminant d’un compromis social;

3.3.3.2.

en second lieu, les VLEP contraignantes doivent être définies sur la base de preuves scientifiques. Elles doivent tenir compte de différents facteurs, tels que la faisabilité et la possibilité de mesurer les niveaux d’exposition. Afin d’aider les employeurs à hiérarchiser leurs mesures de prévention, elles devraient se référer explicitement au niveau de risque associé au niveau d’exposition.

3.4.

Dans la plupart des cas, il existe une longue période de latence entre l’exposition et l’apparition du cancer. Le CESE estime dès lors qu’il est nécessaire de protéger les travailleurs exposés ou ceux qui risquent de l’être en fournissant à tous les travailleurs exposés une surveillance médicale tout au long de leur vie, dans le cadre des régimes de sécurité sociale ou des systèmes nationaux de santé.

3.5.

Le CESE recommande de déployer davantage d’efforts dans le domaine des études scientifiques et statistiques. Les cancers d’origine professionnelle peuvent également être causés par le stress et des facteurs d’organisation du travail, notamment le travail posté. Il convient d’accorder une attention et un financement accrus à la recherche des conséquences et des synergies potentielles découlant d’une exposition combinée à différents facteurs tels que par exemple les agents chimiques et biologiques ou physiques, ou les produits chimiques et l’organisation du travail.

3.6.

Le CESE fait valoir que renforcer le contrôle de la mise en œuvre et de l’application de la directive CM est l’une des principales tâches à mener à bien en matière de protection des travailleurs contre l’exposition à des agents cancérigènes, à des agents mutagènes et à des substances reprotoxiques sur le lieu de travail. Les États membres devraient veiller à ce que les services d’inspection du travail disposent de ressources financières et humaines suffisantes pour mener à bien leurs tâches et aider les entreprises, et en particulier les PME, à se conformer à ces nouvelles dispositions. Ils devraient renforcer leur coopération avec l’Agence européenne pour la sécurité et la santé au travail, laquelle a développé différents outils susceptibles d’améliorer la qualité de la prévention sur le lieu de travail. L’un de ceux-ci est l’outil interactif d’évaluation des risques en ligne (OiRA), une plateforme web qui permet la création d’outils d’évaluation des risques pour les différents secteurs, dans toutes les langues, de manière aisée et standardisée.

4.   Observations spécifiques

4.1.

La deuxième proposition de directive CM introduit des VLEP contraignantes pour cinq nouvelles substances cancérigènes.

4.1.1.

L’épichlorohydrine (ECH) est un agent cancérigène sans valeur seuil. Le nombre de travailleurs exposés dans l’UE s’élève à 43 813. La Commission propose une VLEP contraignante de 1,9 mg/m3. Quinze États membres devront introduire (7) ou actualiser (8) leur VLEP pour la réduire à 1,9 mg/m3. Il est estimé qu’environ 69 % des travailleurs exposés travaillent dans ces quinze États membres et bénéficieraient, par conséquent, d’une meilleure protection juridique suite à l’introduction de cette VLEP contraignante. Le CESE estime que la valeur proposée contribuerait à réduire la charge que représente le cancer lié au travail.

4.1.2.

Le dibromure d’éthylène (EDB) est un agent cancérigène génotoxique sans valeur seuil. L’on estime que moins de 8 000 travailleurs de l’Union européenne sont susceptibles d’être exposés au 1,2-dibromoéthane. La Commission propose une VLEP contraignante de 0,8 mg/m3 (0,1 ppm). Vingt États membres devront introduire (11) ou actualiser (9) leur VLEP pour la réduire à 0,8 mg/m3. Il est estimé qu’environ 81 % des travailleurs exposés travaillent dans ces vingt États membres et bénéficieraient, par conséquent, d’une meilleure protection juridique suite à l’introduction de cette VLEP contraignante. Les coûts supplémentaires pour les entreprises (notamment les micro- et petites entreprises) devraient être très faibles. Le CESE estime que la valeur proposée contribuerait à réduire la charge que représente le cancer lié au travail.

4.1.3.

Le dichlorure d’éthylène (EDC) est classé comme un agent cancérigène de catégorie 1B, selon le règlement CLP. Moins de 3 000 travailleurs sont potentiellement exposés en Europe (7). La Commission propose une VLEP contraignante de 8,2 mg/m3 (2 ppm). Vingt-trois États membres devront introduire (5) ou actualiser (18) leur VLEP pour la réduire à 2 ppm. L’on prévoit ainsi qu’une grande proportion des travailleurs exposés pourrait retirer des avantages d’une meilleure protection juridique. Le CESE estime que la valeur proposée contribuerait à réduire la charge que représente le cancer lié au travail.

4.1.4.

La 4,4’-méthylènedianiline (MDA) est un agent cancérigène génotoxique. Il est estimé qu’environ 70 à 140 personnes sont exposées à de l’air ambiant contenant de la MDA dans l’industrie chimique. Le nombre de personnes concernées par la pénétration cutanée est considérablement plus élevé et devrait se situer dans une fourchette comprise entre 390 000 et 3,9 millions de travailleurs (8). La Commission propose une VLEP contraignante de 0,08 mg/m3. Vingt-trois États membres devront introduire (12) ou actualiser (11) leur VLEP pour la réduire à 0,08 mg/m3. Le CESE estime que la valeur proposée contribuerait à réduire la charge que représente le cancer lié au travail.

4.1.5.

Le trichloroéthylène (TCE) est classé comme agent cancérigène du groupe 2A par le Centre international de recherche sur le cancer (ci-après «le CIRC») et comme agent cancérigène de catégorie 1B dans l’UE en vertu du règlement CLP. Il est estimé qu’environ 74 000 travailleurs dans l’Union européenne sont potentiellement exposés au TCE. La Commission propose de combiner une VLEP contraignante de 54,7 mg/m3 (10 ppm) et une limite d’exposition de courte durée de 164,1 mg/m3 (30 ppm). Parmi les vingt-deux États membres qui disposent déjà d’une VLEP contraignante nationale pour le TCE, seize ont également adopté une limite d’exposition de courte durée. Dix-sept États membres devront introduire (6) ou actualiser (11) leur VLEP contraignante pour la réduire à 54,7 mg/m3 (10 ppm). Il est estimé que près de 74 % des travailleurs exposés travaillent dans ces dix-sept États membres et bénéficieraient, par conséquent, d’une meilleure protection juridique grâce à l’introduction de cette VLEP. Le CESE constate qu’une VLEP contraignante plus basse pour le trichloréthylène a été mise en application dans un certain nombre d’États membres et qu’elle est soutenue par les organisations patronales et les syndicats. Au niveau de l’UE, une VLEP contraignante plus stricte devrait être envisagée afin de réduire la charge que représente le cancer lié au travail.

4.2.

Bien que les mélanges complexes d’hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP) et les huiles de moteur usagées figurent dans l’annexe qui définit le champ d’application de la directive, aucune valeur limite n’a été fixée pour ces deux agents cancérigènes.

4.2.1.

Les mélanges complexes d’hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP), avec le benzo[a]pyrène comme indicateur. Les HAP forment une vaste catégorie de composés organiques. Le CESE estime que la mesure proposée contribuerait à réduire la charge que représente le cancer lié au travail.

4.2.2.

Huiles minérales telles que les huiles de moteur usagées. L’exposition aux huiles minérales telles que les huiles de moteur usagées peut provoquer le cancer de la peau. Le nombre de travailleurs exposés est estimé à 1 million, employés principalement dans le domaine de l’entretien et de la réparation des véhicules à moteur. Le CESE estime que la mesure proposée contribuerait à réduire la charge que représente le cancer lié au travail.

5.   Autres substances ou procédés à ajouter

5.1.

Formaldéhyde. La Commission n’a pas proposé de VLEP contraignante pour le formaldéhyde. En 2009, le CIRC a conclu qu’il y avait suffisamment d’éléments de preuve établissant un lien de cause à effet entre le formaldéhyde et la leucémie myéloïde chez l’homme. Les informations disponibles sur le formaldéhyde sont suffisantes pour déterminer une VLEP axée sur la santé, une moyenne pondérée dans le temps (MPT) pour une durée de huit heures et une limite d’exposition de courte durée. Sur la base des données disponibles, le CSLEP a établi une valeur limite d’exposition professionnelle de 0,3 ppm (MPT — 8 heures) et une limite d’exposition de courte durée de 0,6 ppm. À la suite de cela, le Comité consultatif pour la sécurité et la santé sur le lieu du travail a également décidé de recommander cette valeur limite à la Commission. En 2016, les partenaires sociaux européens ont demandé à la Commission d’inclure les valeurs basées sur la santé proposées par le CSLEP comme VLEP contraignantes pour cette substance chimique (9). Le CESE souscrit à cette position commune et estime qu’une VLEP contraignante doit être adoptée.

5.2.

Les gaz d’échappement des moteurs diesel. En 2012, le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC) a classé toutes les émissions de gaz d’échappement des moteurs diesel dans la catégorie 1 des agents cancérigènes (agents cancérigènes reconnus pour l’homme). Selon la Commission, plus de trois millions de personnes dans l’Union européenne sont exposées à des émissions de gaz d’échappement de moteurs diesel sur leur lieu de travail. Le nombre total de travailleurs exposés à ces gaz pendant au moins une partie de leur carrière professionnelle s’élevait à douze millions en 2010, et pourrait atteindre vingt millions d’ici 2060. L’analyse d’impact de la Commission indique que l’absence de législation interdisant l’exposition aux gaz d’échappement des moteurs diesel au travail provoquera 230 000 décès dans l’UE entre 2010 et 2069.

5.2.1.

Le principal argument avancé par la Commission pour exclure les gaz d’échappement des moteurs diesel de l’annexe I et de l’annexe III de la directive CM est la difficulté de trouver une définition juridique permettant de faire la distinction entre les nouveaux moteurs et les moteurs plus anciens. De l’avis du CESE, l’objectif de la directive n’est pas de définir des normes techniques pour les moteurs, mais d’établir une définition juridique pour les gaz d’échappement des moteurs diesel en tant que processus cancérigènes, sur la base de preuves scientifiques et de l’évaluation du CIRC. Sur le lieu de travail les travailleurs sont susceptibles d’être exposés à des fumées d’échappement de moteurs diesel de plusieurs moteurs dont les normes d’exposition diffèrent. D’autres facteurs sont également importants pour caractériser l’exposition: les températures de combustion et l’entretien et le nettoyage des moteurs. L’on pourrait définir une VLEP contraignante qui tienne compte de la concentration du carbone élémentaire dans l’air. Le CESE estime qu’il convient de tenir compte des conclusions du CSLEP selon lesquelles «bien que les données toxicologiques soient favorables à l’instauration d’un seuil (éventuellement égal ou inférieur à 0,02 mg DEP/m3, ce qui correspond à 0,015 mg EC/m3), les données épidémiologiques suggèrent qu’il y a déjà un risque significatif de cancer à ce niveau d’exposition et même en-deçà. Dès lors, une limite d’exposition professionnelle protégeant suffisamment les travailleurs ne peut être établie sur la base des données et des analyses actuellement disponibles. Les données toxicologiques et épidémiologiques humaines continuent toutefois à être récoltées et évaluées» (10).

Bruxelles, le 31 mai 2017.

Le président du Comité économique et social européen

Georges DASSIS


(1)  Institut néerlandais pour la santé publique et l’environnement (RIVM) Work related cancer in the European Union. Size, impact and options for further prevention, 2015.

(2)  Directive 89/391/CEE du Conseil du 12 juin 1989 concernant la mise en œuvre de mesures visant à promouvoir l’amélioration de la sécurité et de la santé des travailleurs au travail (JO L 183 du 29.6.1989, p. 1).

(3)  Directive 98/24/CE du Conseil du 7 avril 1998 concernant la protection de la santé et de la sécurité des travailleurs contre les risques liés à des agents chimiques sur le lieu de travail (JO L 131 du 5.5.1998, p. 11).

(4)  Directive 2009/148/CE du Parlement européen et du Conseil du 30 novembre 2009 concernant la protection des travailleurs contre les risques liés à une exposition à l’amiante pendant le travail (JO L 330 du 16.12.2009, p. 28).

(5)  Rapport Ulvskog.

(6)  Le béryllium et ses composés inorganiques, l’hexachlorobenzène (HCB), les gaz d’échappement des moteurs diesel, les fumées et poussières produites lors du traitement du caoutchouc et la 4,4'-méthylènebis(2-chloroaniline) (MOCA).

(7)  Données de 2009.

(8)  Institut de médecine (IOM, rebaptisé HDM en 2016), projet de recherche P937/9 sur la 4,4′-méthylènedianiline, mai 2011.

(9)  L’EPF, le CES, l’ACEA, l’ETRMA, Formacare et l’EPRA, «Demande d’inclusion du formaldéhyde dans l’annexe III de la directive 2004/37/CE sur les agents cancérigènes et mutagènes», 15 juillet 2016.

(10)  Avis du CSLEP no 403, 2016.