21.3.2017   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 88/39


Avis du Comité européen des régions — Plan d’action sur la TVA — Vers un espace TVA unique dans l’Union

(2017/C 088/08)

Rapporteur:

Dainis Turlais (LV/ADLE), membre du conseil de la ville de Riga

Texte de référence:

Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil et au Comité économique et social européen concernant un plan d’action sur la TVA — Vers un espace TVA unique dans l’Union — L’heure des choix

[COM(2016) 148 final]

RECOMMANDATIONS POLITIQUES

LE COMITÉ EUROPÉEN DES RÉGIONS

Introduction

1.

se félicite du plan d’action, initiative de la Commission indiquant la voie à suivre pour proposer d’ici 2017 la mise en place d’un espace unique de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) dans l’Union (l’«espace TVA unique dans l’Union»);

2.

reconnaît que le système de la TVA est un élément essentiel du marché unique, qui devrait être réformé pour le rendre plus simple, plus juste, plus efficace et moins vulnérable à la fraude afin d’améliorer les conditions de concurrence entre les entreprises, de réduire la discrimination entre les consommateurs et d’optimiser la collecte des recettes;

3.

prend note de l’importance que revêt pour les collectivités territoriales un espace TVA unique dans l’Union, dans la mesure où, dans un certain nombre d’États membres, ces collectivités sont compétentes pour la perception de cette taxe et où la redistribution des recettes de la TVA occupe une place centrale dans la mise en œuvre des mécanismes de péréquation financière au profit des collectivités territoriales; toutefois, les systèmes des États membres de redistribution des recettes de TVA au niveau national ne relèvent pas de la compétence de l’Union européenne;

4.

rappelle que la TVA est également une source importante de revenus pour les ressources propres de l’Union européenne, car elle représentait en 2014 17,6 milliards d’EUR, soit 12,3 % des recettes totales de l’Union européenne;

5.

soutient également la Commission dans son objectif de lutter contre la fraude. Les volumes massifs de la fraude illustrent les lacunes du système actuel et entraînent chaque année des pertes de recettes considérables pour les États membres; les pertes pour l’Union européenne sont estimées à 170 milliards d’EUR par an. Ce phénomène a des répercussions négatives sur les budgets du secteur public, y compris ceux des collectivités locales et régionales dans certains États membres, et sur ses capacités de fournir des services de qualité; à cet égard invite instamment les États membres à collecter et à diffuser les statistiques relatives à la fraude à la TVA transfrontière;

6.

indique que la fragmentation et la complexité du système de TVA entraînent des coûts importants de conformité pour les entreprises concernées par le commerce transfrontière. Ces coûts sont exagérément élevés pour les petites et moyennes entreprises (PME), qui forment la base de l’économie et de l’emploi au niveau régional; note que le plan d’action sur la TVA doit également mener à une simplification pour les entreprises légitimes qui effectuent des transactions commerciales transfrontières. Le système de TVA ne doit pas entraver indûment le commerce transfrontière;

7.

attire l’attention sur le fait que les disparités des régimes de TVA et des taux fixés affectent particulièrement les régions frontalières et les activités des PME dans ces régions. Il convient dès lors d’évaluer l’impact territorial des propositions qui permettent une plus grande souplesse dans la fixation des taux de TVA;

8.

note que la directive TVA prévoit des dispositions relatives aux taux de TVA visant à protéger le marché unique et à prévenir les distorsions de concurrence; estime que ces principes sont essentiels, et qu’il convient d’examiner attentivement toutes les propositions visant à laisser aux États membres une plus grande marge de manœuvre dans la fixation des taux afin de vérifier quelle pourrait être leur incidence sur le marché intérieur et la concurrence;

9.

soutient les réformes du système de TVA qui sont susceptibles de favoriser à l’avenir les fondements de la croissance, de la compétitivité et de l’emploi, à savoir l’essor de l’économie numérique et mobile, de nouveaux modèles économiques et des entreprises de services; se félicite, dans ce contexte, de la proposition de la Commission d’étendre à la fourniture de biens le guichet unique de la TVA pour les services électroniques, à partir d’un projet pilote visant à améliorer la coopération entre les administrations fiscales et la publication d’un guide pour la coopération entre les autorités fiscales et les entreprises dans le commerce électronique;

10.

estime que l’efficacité des États membres dans le domaine de l’administration fiscale est très variable. La coopération et la confiance entre les administrations fiscales sont insuffisantes; estime que les banques doivent pleinement coopérer avec les autorités fiscales dans les cas où une fraude à la TVA est suspectée, dans les limites fixées par la législation applicable en matière de protection des données;

11.

recommande d’examiner les bonnes pratiques des États membres consistant à allouer une partie des recettes de la TVA aux collectivités locales et régionales ou bien à leur attribuer la compétence pour la perception de cette taxe;

12.

demande d’inclure dans les consultations sur toute modification du système de TVA des représentants des collectivités locales et régionales, au niveau national, et du Comité européen des régions, au niveau européen, compte tenu des répercussions directes de ces décisions sur le bien-être de la population, sur la compétitivité des entreprises et sur les revenus des pouvoirs publics;

Espace TVA unique dans l’Union

13.

lors de l’examen du principe selon lequel les paiements de TVA pour les opérations transfrontières sont soumis aux mêmes exigences que ceux des opérations nationales, invite à prendre notamment en compte son impact sur les PME, lorsque différents taux de TVA sont maintenus dans le même temps;

14.

partage le point de vue selon lequel le nouveau système doit se fonder sur le principe de destination et prévoir que, pour les ventes à un client établi dans un autre État membre de l’Union européenne, la TVA doit être perçue conformément à la législation du pays fournisseur et au taux appliqué dans le pays de destination, et que les recettes de TVA de l’État de perception doivent être transférées à l’administration compétente de l’État de la consommation;

15.

se félicite de l’intention de veiller à ce que les entreprises effectuant les opérations commerciales à l’intérieur du marché unique soient en mesure de régler toutes les questions liées à la TVA auprès de l’administration compétente de leur pays d’origine et qu’elles ne soient pas tenues de s’inscrire au registre de la TVA, de fournir des déclarations et de payer des redevances dans tous les États membres de l’Union européenne dans lesquels elles mènent des transactions commerciales. Ces simplifications ne doivent pas porter atteinte aux recettes de la TVA ni influer sur la souveraineté fiscale des États membres;

16.

estime que le plan de la Commission est ambitieux et qu’il faudra du temps pour l’appliquer; soutient dès lors le principe d’une mise en œuvre progressive;

17.

demande instamment à la Commission et aux États membres d’adopter des mesures afin d’accroître l’efficacité de la fiscalité et de lutter contre la fraude afin de réduire le montant de la TVA non perçue par les États membres. Elles peuvent contribuer considérablement aux efforts visant à instaurer la confiance vis-à-vis des administrations fiscales et une coopération efficace, laquelle est nécessaire au bon fonctionnement du nouveau système. Le Comité insiste sur le fait que l’introduction de nouveaux rapports et outils d’audit ne peut imposer une charge excessive aux entreprises, notamment aux PME;

18.

invite les États membres à prendre des décisions concrètes concernant la réglementation relative à la TVA dans l’Union européenne, notamment pour éliminer les différences observées à ce jour entre les États membres en lien avec les dérogations à la directive TVA destinées à des États membres spécifiques, et encourager leur application par tout État membre;

19.

fait remarquer que la Commission, lorsqu’elle formule des propositions visant à accroître l’efficacité de l’administration fiscale, doit respecter les compétences administratives nationales et/ou régionales;

20.

encourage une utilisation plus efficace des outils informatiques en exploitant toutes les données électroniques disponibles pour lutter contre la fraude, tout en veillant à la protection des données;

21.

au vu des systèmes de paiements inversés et scindés de la TVA (1) mis en place dans plusieurs pays, insiste sur la nécessité de renforcer la confiance de la population quant au fait que la TVA payée arrive bien dans les budgets nationaux, régionaux ou locaux, les citoyens étant parmi les principaux payeurs réels de TVA; recommande d’examiner la possibilité d’introduire un système de paiement électronique volontaire, qui transférerait la TVA des achats des citoyens vers le budget de l’administration compétente, et le montant de l’achat hors TVA, comme à ce jour, sur le compte du vendeur;

Taux de TVA

22.

insiste sur le fait qu’il n’y a pas suffisamment de preuves d’une distorsion de la concurrence liée à la non-imposition de la TVA à certains types d’activités d’organismes du secteur public et de coopérations intercommunales ou à des activités considérées comme étant d’intérêt public; le non-assujettissement d’entités publiques à la TVA relève de critères objectifs et harmonisés au niveau européen et non pas de la discrétion des États membres;

23.

demande que dans l’analyse d’impact de la Commission, dont la publication est prévue en 2017, il soit tenu compte des intérêts des collectivités locales et régionales; à cet égard, en consultation avec celles-ci, il conviendrait de clarifier les notions de «distorsions de concurrence (d’une certaine importance)»;

24.

considère qu’il est urgent que tous les États membres puissent appliquer toutes les dérogations établies dans le passé par n’importe quel État membre;

25.

appelle à réduire le taux de TVA sur les bâtiments scolaires à 6 %;

26.

souligne que la liste actuelle des taux réduits de TVA est particulièrement opaque et ne répond pas à une logique bien définie; regrette dès lors que la Commission n’ait pas fait un inventaire exhaustif et transparent des taux réduits accordés; estime qu’il convient de revoir la liste des taux réduits de TVA, en prenant en compte les évolutions technologiques, économiques et autres et les distorsions générées par des taux de TVA différents pour des biens et des services similaires. Cette révision devrait, dans la mesure du possible, mener à une harmonisation afin d’éviter une distorsion de concurrence au sein du marché unique pour les PME;

27.

estime par ailleurs que des entités qui accomplissent des activités d’intérêt général peuvent avoir un plus grand intérêt économique à déduire la TVA ex-post plutôt que d’être non assujetties ex-ante;

28.

considère que l’option 1 (prolongation et réexamen régulier de la liste des biens et services pouvant faire l’objet de taux réduits) est susceptible de comporter des risques moins importants que l’option 2 (suppression de la liste des biens et services pouvant faire l’objet de taux réduits);

29.

estime que le fait de donner aux États membres une plus grande marge de manœuvre dans la fixation des taux mènera inévitablement à une plus grand diversité de ceux-ci, ce qui pourrait fausser le marché unique et imposer des charges aux entreprises, en particulier aux PME; indique que la Commission devrait procéder à une évaluation complète afin d’étudier les incidences de ses propositions sur la concurrence et les charges administratives des entreprises ainsi que sur leur impact territorial, en particulier dans les régions frontalières;

30.

note que la communication mentionne également d’autres coûts et lacunes liés au transfert des compétences aux États membres en matière de réduction des taux, notamment le risque lié à la diminution des recettes et à la complexité de la TVA ainsi qu’à l’augmentation des coûts et de l’insécurité juridique pour les entreprises; estime que ce risque doit faire l’objet d’une évaluation approfondie;

31.

soutient dans la continuité de son avis sur les déchets alimentaires (juin 2016) la proposition que les détaillants à grande échelle soient autorisés à déduire la TVA sur le don de nourriture invendue;

Commerce électronique

32.

indique que des règles compliquées de TVA qui varient selon les pays constituent l’un des principaux obstacles au commerce électronique; reconnaît que le système de la TVA doit être simplifié et qu’il convient de réduire les coûts de mise en conformité pour les PME, notamment en s’attaquant aux facteurs qui sont moins favorables aux entreprises basées dans l’Union européenne qu’aux fournisseurs de pays tiers;

33.

est favorable à une extension du mécanisme de guichet unique, qui englobe le commerce des biens, et à l’introduction de seuils de TVA — ou à leur augmentation — pour les jeunes entreprises et les microentreprises;

34.

accueille favorablement la proposition de supprimer l’exonération de TVA pour les importations de petits envois provenant de fournisseurs de pays tiers et d’introduire des contrôles sous forme d’un audit unique des entreprises transfrontières, dans la mesure où les PME européennes pâtissent actuellement d’un désavantage concurrentiel par rapport à celles des pays tiers;

Paquet TVA en faveur des PME

35.

indique que le développement économique des collectivités locales et régionales repose sur les PME et que les coûts que ces dernières supportent pour assurer le respect des règles relatives à la TVA sont proportionnellement plus élevés que pour les grandes entreprises, les PME se voient donc obligées d’opérer dans des conditions de concurrence désavantageuses;

36.

attire l’attention sur le fait que dans plusieurs États des mesures visant à simplifier l’enregistrement des nouvelles entreprises et se fondant apparemment sur l’amélioration de l’environnement des entreprises ont été adoptées; or elles encouragent souvent la création d’entreprises permettant de mettre en place des systèmes de fraude de type «carrousel»;

37.

signale que les institutions nationales concernées (notamment les administrations fiscales) devraient assumer la responsabilité du contrôle des activités des entreprises qui opèrent dans la légalité; cette responsabilité ne devrait pas être déléguée à des contreparties ou à d’autres entreprises, comme l’a indiqué à plusieurs reprises la Cour de justice de l’Union européenne dans ses arrêts concernant la TVA;

38.

préconise que dans le paquet concernant les PME qu’elle proposera en 2017 la Commission prévoie des mesures de simplification pertinentes.

Bruxelles, le 12 octobre 2016.

Le président du Comité européen des régions

Markku MARKKULA


(1)  Par exemple, la Commission a approuvé la demande de l’Italie relative à la création d’un système de paiement scindé de la TVA pour les administrations publiques qui sont assujetties à la TVA. Lorsque les administrations publiques s’acquittent d’une facture concernant des biens ou des services, une partie de la TVA est versée directement au Trésor public. Ce système est en vigueur du 1er janvier 2015 au 31 décembre 2017, date à laquelle il est prévu de le remplacer entièrement par une facturation électronique au sein de l’administration publique. Selon certaines estimations, l’Italie a perdu chaque année 900 millions d’EUR dans le cadre des paiements de TVA des administrations publiques.