6.3.2018   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 86/10


P8_TA(2016)0247

Nouvelle alliance pour la sécurité alimentaire et la nutrition

Résolution du Parlement européen du 7 juin 2016 sur la nouvelle alliance pour la sécurité alimentaire et la nutrition (2015/2277(INI))

(2018/C 086/02)

Le Parlement européen,

vu le document final adopté par l'Assemblée générale des Nations unies le 25 septembre 2015 intitulé «Transformer notre monde: le programme de développement durable à l'horizon 2030», et en particulier l'objectif de développement durable no 2 qui y est défini, à savoir éliminer la faim, assurer la sécurité alimentaire, améliorer la nutrition et promouvoir l’agriculture durable (1),

vu l'accord de la Paris adopté par les parties à la convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques le 12 décembre 2015 (2),

vu le programme détaillé de développement de l'agriculture africaine (PDDAA) adopté par l'Union africaine (UA) en 2002 (3),

vu le sommet des chefs d'État de l'Union africaine qui s'est tenu à Maputo en 2003, au cours duquel les gouvernements de l'UA sont convenus de consacrer plus de 10 % de leurs budgets nationaux au secteur agricole (4),

vu le sommet des chefs d'État et de gouvernement de l'Union africaine qui s'est tenu en juillet 2012, au cours duquel 2014 a été déclarée «Année de l'agriculture et de la sécurité alimentaire en Afrique» (5) pour marquer le dixième anniversaire du PDDAA,

vu la déclaration de Malabo sur la croissance et la transformation accélérées de l'agriculture en Afrique pour une prospérité partagée et de meilleures conditions de vie, adoptée le 27 juin 2014 lors du sommet des chefs d'État de l'UA, dans laquelle les gouvernements de l'UA se sont de nouveau engagés à allouer au moins 10 % de leurs dépenses publiques à l'agriculture (6),

vu l'initiative de l'Aquila en matière de sécurité alimentaire adoptée par le G8 en 2009 (7),

vu le cadre et les lignes directrices sur les politiques foncières en Afrique adoptés par la conférence conjointe des ministres en charge de l’agriculture, des affaires foncières et de l’élevage, qui s'est tenue en avril 2009 à Addis Abeba (Éthiopie) (8), ainsi que la déclaration sur les problèmes et enjeux fonciers en Afrique (9) adoptée par les chefs d'État de l'UA lors du sommet de Sirte, en juillet 2009, dans laquelle ils demandent que lesdits cadre et lignes directrices soient appliqués d'urgence,

vu les principes directeurs relatifs aux investissements fonciers à grande échelle en Afrique, adoptés par la conférence conjointe des ministres de l'agriculture, du développement rural, de la pêche et de l'aquaculture, réunis à Addis Abeba les 1er et 2 mai 2014 (10),

vu la déclaration d'organisations de la société civile africaine intitulée «Modernising African agriculture — Who benefits?» (11) (À qui profite la modernisation de l'agriculture africaine?), publiée en mai 2013,

vu la déclaration de Djimini du Comité ouest-africain des semences paysannes (12) adoptée le 13 mars 2014,

vu les directives volontaires de la FAO à l'appui de la concrétisation progressive du droit à une alimentation adéquate dans le contexte de la sécurité alimentaire nationale (13), adoptées en 2004,

vu le rapport de l’Évaluation internationale des sciences et technologies agricoles au service du développement (EISTAD) intitulé «Agriculture at a crossroads» (14) (L'agriculture à la croisée des chemins), adopté en 2009,

vu le pacte international relatif aux droits civils et politiques de 1966 (15),

vu la convention des Nations unies sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes, de 1979 (16),

vu la charte africaine des droits de l'homme et des peuples de 1987 (17),

vu la déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones adoptée en 2007 (18),

vu les principes de base et directives des Nations unies concernant les expulsions et les déplacements liés au développement, adoptés en 2007 (19),

vu les principes directeurs relatifs aux entreprises et aux droits de l'homme, adoptés par le Conseil des droits de l'homme des Nations unies en 2011 (20), ainsi que les principes directeurs de l'OCDE à l'intention des entreprises multinationales, mis à jour en 2011 (21),

vu le partenariat de Busan pour une coopération efficace au service du développement conclu en 2011 (22),

vu les directives volontaires pour une gouvernance responsable des régimes fonciers applicables aux terres, aux pêches et aux forêts (23),

vu la convention internationale de 1991 pour la protection des obtentions végétales (convention UPOV) (24),

vu le traité international de 2001 sur les ressources phytogénétiques pour l'alimentation et l'agriculture (25),

vu la convention de 1992 sur la diversité biologique ainsi que le protocole de Carthagène de 2000 sur la prévention des risques biotechnologiques et le protocole de Nagoya de 2010 sur l'accès aux ressources génétiques et le partage juste et équitable des avantages découlant de leur utilisation relatif à la convention sur la diversité biologique (26),

vu la loi-modèle africaine sur la sécurité en biotechnologie (27),

vu la résolution sur la régulation du foncier dans une perspective de souveraineté alimentaire adoptée par l'Assemblée parlementaire de la Francophonie le 12 juillet 2012 (28),

vu la résolution de l'Assemblée parlementaire paritaire ACP-UE sur les répercussions sociales et environnementales du pastoralisme dans les pays ACP, adoptée le 27 novembre 2013 (29) à Addis-Abeba,

vu la communication de la Commission au Conseil et au Parlement européen du 31 mars 2010 intitulée «Un cadre stratégique de l’UE pour aider les pays en développement à relever les défis liés à la sécurité alimentaire» (30) ainsi que les conclusions du Conseil y afférentes, adoptées le 10 mai 2010 (31),

vu les conclusions du Conseil du 28 mai 2013 sur la sécurité alimentaire et nutritionnelle (32),

vu le plan d'action sur la nutrition de la Commission adopté en juillet 2014 (33),

vu sa résolution du 27 septembre 2011 sur un cadre stratégique de l’UE pour aider les pays en développement à relever les défis liés à la sécurité alimentaire (34),

vu sa résolution du 11 décembre 2013 sur l'approche de l'UE sur la résilience et la réduction des risques de catastrophes dans les pays en développement: tirer les leçons des crises de sécurité alimentaire (35),

vu sa résolution du 13 mars 2014 sur le rôle joué par les droits de propriété, le régime de la propriété et la création de richesses pour éradiquer la pauvreté et favoriser le développement durable dans les pays en développement (36),

vu sa résolution du jeudi 12 mars 2015 sur la Tanzanie, notamment la question de l'accaparement des terres (37),

vu la déclaration de la convergence globale des luttes pour la terre et l'eau, formulée au Forum social mondial à Tunis, en mars 2015 (38),

vu sa résolution du 30 avril 2015 sur l'exposition universelle de 2015 à Milan: nourrir la planète, énergie pour la vie (39),

vu la demande de la société civile africaine d'inclure la souveraineté alimentaire et le droit à l'alimentation à l'ordre du jour du G7 présidé par l'Allemagne en juin 2015 (40),

vu la «charte de Milan» (41), présenté lors de l'Expo 2015 consacrée au thème «Nourrir la planète, énergie pour la vie» et signée par plus d'un million de chefs d'État ou de gouvernement et de simples citoyens, qui invite chaque citoyen, association, entreprise ou institution nationale et internationale à prendre ses responsabilités pour permettre aux générations à venir de jouir de leur droit à l'alimentation et qui contient des engagements contraignants en vue de garantir ce droit dans le monde entier,

vu le Comité de la sécurité alimentaire mondiale des Nations unies, l'enceinte adéquate pour la conclusion d'un accord sur la marche à suivre au niveau international et au sein de laquelle toutes les parties concernées ont voix au chapitre,

vu le pacte de politique alimentaire urbaine de Milan du 15 octobre 2015 (42), présenté par la municipalité de Milan et signé par 113 villes dans le monde, qui a été remis au Secrétaire général des Nations unies, Ban Ki Moon, et qui illustre le rôle clé joué par les villes dans l'élaboration des politiques en matière d'alimentation,

vu sa résolution du 21 janvier 2016 sur la situation en Éthiopie (43),

vu l'audition publique sur la Nouvelle alliance pour la sécurité alimentaire et la nutrition organisée par sa commission du développement le 1er décembre 2015 (44),

vu l'étude intitulée «New Alliance for Food Security and Nutrition in Africa» commandée au professeur Olivier de Schutter par sa commission du développement et publiée par sa direction générale des politiques externes en novembre 2015 (45),

vu l'article 52 de son règlement,

vu le rapport de la commission du développement et l'avis de la commission de l'agriculture et du développement rural (A8-0169/2016),

A.

considérant que la Nouvelle alliance pour la sécurité alimentaire et la nutrition en Afrique (NASAN) vise à améliorer la sécurité alimentaire et la nutrition en aidant 50 millions de personnes en Afrique subsaharienne à sortir de la pauvreté d'ici 2020; que les pays participants ont négocié des cadres de coopération qui établissent les engagements visant à favoriser l'investissement privé dans le secteur de l'agriculture en Afrique;

B.

considérant que l'investissement dans l'agriculture familiale a été négligé en Afrique au cours des trente dernières années, tandis que la dépendance envers les importations de denrées alimentaires des pays à faibles revenus a augmenté de façon significative, les rendant vulnérables aux variations de prix sur les marchés internationaux;

C.

considérant que les partenariats public-privé de grande envergure risquent de mettre en situation de position dominante de grandes sociétés dans le secteur agricole africain et d'en évincer les entreprises locales;

D.

considérant que les investissements privés dans le cadre de la NASAN ont bénéficié à plus de 8,2 millions de petits exploitants et permis de créer plus de 21 000 emplois, dont plus de la moitié pour des femmes;

E.

considérant que la crise alimentaire de 2008 a débouché sur la prise de conscience généralisée de la nécessité de soutenir la production alimentaire des petits exploitants à destination du marché intérieur;

F.

considérant que les programmes d'ajustement structurel mis en œuvre au début des années 1980 ont contribué au développement d'une agriculture axée sur l'exportation accordant la priorité à l'augmentation de la production des cultures de rente pour le marché mondial; que ce choix a favorisé des formes de production à grande échelle, à forte intensité capitalistique et hautement mécanisée, au détriment de l'agriculture familiale;

G.

considérant que les marchés internationaux vont devenir plus instables à l'avenir; qu'il convient que les pays concernés veillent à ne pas entretenir une dépendance excessive à l'égard des importations et privilégient l'investissement dans la production alimentaire intérieure en vue de renforcer leur capacité de résilience;

H.

considérant que les exploitations agricoles familiales et les petites exploitations doivent être au cœur de la NASAN;

I.

considérant que la sécurité alimentaire dans les pays en voie de développement dépend largement de l'utilisation durable des ressources naturelles;

J.

considérant que les «pôles de croissance» visent à attirer des investisseurs internationaux en mettant des terres à la disposition de grandes entreprises privées; que cette stratégie ne doit pas être mise en œuvre au détriment des exploitations familiales;

K.

considérant que les accords relatifs à la NASAN ne comprennent aucun indicateur concret concernant la faim et la malnutrition;

L.

considérant que les exploitations agricoles familiales et les petits exploitants ont démontré leur capacité à fournir des produits diversifiés et à augmenter durablement leur production à l'aide de pratiques agroécologiques;

M.

considérant que les monocultures accroissent la dépendance aux engrais et aux pesticides chimiques, entraînent une grave dégradation des sols et contribuent au changement climatique;

N.

considérant que 14 % au moins des émissions annuelles totales de gaz à effet de serre sont imputables à l'agriculture, du fait, principalement, de l'utilisation d'engrais azotés;

O.

considérant qu'il existe différentes formes de régimes fonciers (coutumier, public et privé) mais qu'en matière de droits fonciers, la NASAN s'appuie presque exclusivement sur l'établissement de titres fonciers;

P.

considérant qu'en 2050, 70 % de la population mondiale vivra dans des grandes villes et qu'il sera plus nécessaire que jamais auparavant d'adopter une perspective à la fois mondiale et locale en matière de nutrition;

Q.

considérant que l'établissement de titres fonciers ne constitue pas l'unique garantie contre l'expropriation et le déplacement;

R.

considérant que l'égalité des sexes est une dimension très importante de l'investissement dans l'agriculture en Afrique; que les femmes en milieu rural font depuis longtemps l'objet de discriminations au regard de l'accès aux moyens de production, notamment à la terre, aux crédits, aux intrants et aux services;

S.

considérant que jusqu'à une époque récente, l'agriculture a bénéficié d'une aide axée sur des cultures d'exportation exploitées par des hommes, les femmes étant principalement chargées de produire les aliments nécessaires à la subsistance de la famille;

T.

considérant que la FAO estime qu'environ 75 % de la diversité phytogénétique a disparu dans le monde; que l'érosion génétique à grande échelle augmente notre vulnérabilité au changement climatique ainsi qu'à l'apparition de nouveaux nuisibles et de nouvelles maladies;

U.

considérant que le contrôle, la propriété et l'accessibilité économique des semences sont essentiels au regard de la résilience des cultivateurs pauvres en matière de sécurité alimentaire;

V.

considérant qu'il convient de protéger le droit des agriculteurs de multiplier, d'utiliser, d'échanger et de vendre leurs semences;

W.

considérant que la réduction des écarts en matière de nutrition en Afrique tient une place centrale dans le programme pour le développement durable; que la malnutrition résulte de l'interaction de nombreux facteurs liés, entre autres, aux soins de santé, à l'éducation, à l'assainissement et l'hygiène, à l'accès aux ressources ainsi qu'à l'émancipation des femmes;

X.

considérant que les engagements pris par les pays au titre du cadre de coopération en vue de la réforme de la réglementation du secteur des semences visent à renforcer les droits d'obtention végétale aux dépens des semences paysannes, encore largement utilisées par les cultivateurs les plus pauvres;

L'investissement dans le secteur agricole en Afrique et la réalisation des ODD

1.

relève que plusieurs cadres de coopération sont axés sur la mise en place de zones économiques spéciales qui visent à maximiser les investissements en s'appuyant sur des projets d'infrastructure routière ou énergétique, l'impôt, les douanes ou encore les régimes fonciers; insiste sur la nécessité d'améliorer l'accès à l'eau et de mettre l'accent sur cet objectif, de développer l'éducation en matière de nutrition et de partager de pratiques exemplaires;

2.

constate que les stratégies d'investissement dans l'agriculture tendent à favoriser les acquisitions foncières à grande échelle et se concentrent sur une agriculture tournée vers l'exportation, généralement sans lien avec l'économie locale; relève que le développement de l'irrigation extensive dans les zones géographiques d'investissement relevant de la NASAN peut réduire la quantité d'eau disponible pour d'autres utilisateurs, tels que les petits agriculteurs ou éleveurs; souligne que dans ces circonstances, la capacité des PPP de grande envergure à contribuer à la réduction de la pauvreté et à la sécurité alimentaire doit faire l'objet d'un examen critique et être améliorée; précise qu'il convient que les stratégies d'investissement dans l'agriculture tiennent compte de l'économie locale, notamment des petits exploitants et des exploitation familiales, et qu'elles en favorisent le développement; rappelle que les directives de la FAO concernant le régime foncier recommandent de garantir l'accès à la terre pour permettre aux familles de produire les aliments destinés à leur consommation et pour augmenter les revenus des ménages; préconise que les investissements fonciers de grande envergure réalisés en Afrique tiennent compte de ces recommandations, de sorte à garantir que les petits exploitants et les communautés locales ont accès à la terre, à favoriser l'investissement dans les PME locales ainsi qu'à garantir que les PPP contribuent à la sécurité alimentaire et à la réduction de la pauvreté et des inégalités;

3.

dénonce le fait que toutes les parties prenantes n'aient pas été associées aux décisions afférentes aux cadres de coopération, lesquelles n'ont pas tenu compte des communautés rurales, des travailleurs agricoles, des petits agriculteurs, des pêcheurs et des peuples indigènes, dont le droit de participation a été ignoré;

4.

déplore que les organisations de la société civile africaine n'aient pas été consultées dans le contexte de la mise en place de la NASAN; souligne que l'association de groupes victimes de l'insécurité alimentaire aux mesures qui les concernent devrait être la pierre angulaire de toute stratégie pour la sécurité alimentaire;

5.

rappelle que la NASAN s'est engagée à promouvoir une croissance axée sur l'intégration et fondée sur l'agriculture, favorisant une exploitation agricole à petite échelle et contribuant à réduire la pauvreté, la faim et la sous-nutrition; précise, à cet égard, que la NASAN doit limiter autant que possible le recours aux engrais chimiques et aux pesticides, compte tenu de leurs répercussions sanitaires et environnementales sur les communautés locales telles que la perte de biodiversité et l'érosion des sols;

6.

critique l'hypothèse selon laquelle l'investissement des entreprises dans l'agriculture favoriserait automatiquement la sécurité alimentaire et la nutrition et réduirait la pauvreté;

7.

prend acte du rapport du G20 de 2011, qui insiste sur le fait que les investissements réalisés à des fins fiscales pourraient être provisoires; rappelle que de nombreuses études sur la motivation des investisseurs ont montré l'incidence neutre ou négative des incitations fiscales spéciales sur leurs décisions d'investissement (46);

8.

relève que les incitations fiscales, notamment les exemptions de l'impôt sur les sociétés dans des zones économiques spéciales, privent les États africains de recettes fiscales qui auraient pu être une source vitale d'investissements publics dans l'agriculture, en particulier en faveur de programmes de sécurité alimentaire et de nutrition (47);

9.

invite les gouvernements et les bailleurs de fonds à suspendre ou à revoir tous les projets, mesures et dispositifs de conseil qui encouragent et favorisent directement l'accaparement des terres en appuyant des projets et des investissements particulièrement préjudiciables ou qui contribuent indirectement à accroître la pression sur les terres et les ressources naturelles et sont susceptibles de donner lieu à des violations graves des droits de l'homme; préconise au contraire de favoriser les mesures qui privilégient et protègent les petits producteurs alimentaires, notamment les femmes, et qui favorisent une utilisation durable des sols;

10.

met en garde contre le risque qu'il y aurait à reproduire en Afrique le modèle asiatique de «révolution verte» des années 60 en ignorant ses répercussions sociales et environnementales; rappelle que l'action en faveur d'une agriculture durable compte au rang des objectifs de développement durable à l'horizon 2030;

11.

est préoccupé par le fait qu'au Malawi, la NASAN favorise le développement de la production de tabac au lieu de soutenir d'autres moyens de subsistance, conformément aux obligations relevant de la convention-cadre de l'Organisation mondiale de la santé pour la lutte antitabac (CCLAT) de 2005 et aux engagements pris dans le cadre du programme de développement durable à l'horizon 2030;

12.

presse les États membres de l'Union de faire de la NASAN un véritable instrument du développement durable ainsi qu'un dispositif d'appui aux exploitations agricoles familiales et aux économies locales en Afrique subsaharienne, eu égard au fait que 80 % environ de la production alimentaire mondiale et plus de 60 % des emplois dans cette région sont imputables aux exploitations familiales et aux petites exploitations;

13.

est préoccupé par le fait que les cadres de coopération ne se réfèrent que sélectivement aux normes internationales qui définissent l'investissement responsable dans l'agriculture, et qu'ils ne mentionnent ni les directives volontaires de 2004 de la FAO à l'appui de la concrétisation progressive du droit à une alimentation adéquate dans le contexte de la sécurité alimentaire nationale, ni les obligations des investisseurs privés au regard du respect des droits de l'homme;

14.

invite l'Union européenne et ses États membres, qui, ensemble, sont le premier bailleur de fonds au niveau mondial en matière d'aide au développement:

à garantir que les investisseurs implantés dans l'Union respectent, et incitent les autres partenaires de l'alliance à respecter les droits des communautés locales et les besoins des petites exploitations agricoles, en adoptant une démarche fondée sur les droits de l'homme dans les cadres de coopération, notamment en établissant des garanties au regard des droits environnementaux, sociaux, fonciers, du droit du travail et des droits de l'homme, ainsi que des normes de transparence des plus strictes concernant les plans d'investissements;

à garantir que les investisseurs implantés dans l'Union européenne appliquent une politique de responsabilité sociale dans le contexte de l'élaboration de contrats de travail et n'exploitent pas leur avantage économique au détriment des travailleurs des communautés locales;

à soutenir et à défendre les entreprises et les parties prenantes africaines locales, en tant qu'elles sont les principaux acteurs et bénéficiaires des initiatives de la NASAN;

à appliquer la récente décision de l'OMC de supprimer les subventions à l'exportation de produits agricoles, qui provoquent des distorsions sur les marchés locaux et détruisent des moyens de subsistance dans les pays en développement;

à supprimer les barrières tarifaires qui découragent les pays africains d'apporter une valeur ajoutée aux produits bruts à l'échelon local;

15.

invite les pays participants:

à garantir que les réformes financières, fiscales ou administratives ne dispensent pas les investisseurs d'apporter une juste contribution à l'assiette fiscale des pays participants, ni ne donnent aux investisseurs un avantage injuste sur les petits exploitants;

à veiller à ce que les pouvoirs publics conservent le droit de protéger leurs marchés agricoles et alimentaires à l'aide de régimes douaniers et fiscaux appropriés, qui revêtent une importance particulière dans la lutte contre la spéculation financière et la fraude fiscale;

à adopter des politiques qui favorisent un commerce responsable et à s'engager à supprimer les barrières tarifaires qui découragent le commerce régional;

Gouvernance, propriété et responsabilité

16.

rappelle l'engagement pris par les parties à la NASAN de tenir compte des directives volontaires à l'appui de la concrétisation progressive du droit à une alimentation adéquate dans le contexte de la sécurité alimentaire nationale de la FAO; demande aux parties à la NASAN de s'engager à appliquer les normes internationales en matière d'investissement responsable dans l'agriculture et de respecter les principes directeurs relatifs aux entreprises et aux droits de l'homme ainsi que les principes directeurs de l'OCDE à l'intention des entreprises multinationales;

17.

souligne que la NASAN doit renforcer la bonne gouvernance des ressources naturelles, notamment en garantissant l'accès des populations à leurs propres ressources et en protégeant leurs droits dans le cadre des contrats relatifs aux transactions sur des ressources naturelles;

18.

invite l'Union européenne à collaborer avec les Nations unies pour que tous les États s'engagent, de manière contraignante, à adopter la charte de Milan et les engagements qui y figurent;

19.

rappelle l'importance de la régulation hydrologique et de la lutte contre le changement climatique pour l'agriculture durable; demande à tous les partenaires de la NASAN de mettre l'accent sur l'amélioration de l'accès à l'eau et aux techniques d'irrigation ainsi que de renforcer la protection de l'environnement et la conservation des sols;

20.

invite l'Union à unir ses efforts à ceux des Nations unies en vue de l'adoption et de la diffusion du pacte de politique alimentaire urbaine de Milan;

21.

invite les pays participants à s'engager à appliquer les normes internationales qui régissent l'investissement suivant une démarche fondée sur les droits de l'homme, notamment le cadre et les lignes directrices sur les politiques foncières en Afrique de l'Union africaine ainsi que ses principes directeurs relatifs aux investissements fonciers à grande échelle en Afrique;

22.

demande que les lettres d'intention accompagnant les cadres de coopération soient publiées dans leur intégralité; souligne que des structures institutionnelles et juridiques solides sont nécessaires pour garantir un partage équitable des risques et des bénéfices; estime que la participation active de la société civile au sein de la NASAN est d'une importance cruciale dans la perspective d'une amélioration de la transparence et de la réalisation des objectifs de l'alliance; rappelle que le dialogue et la consultation avec l'ensemble des groupes de la société civile doivent être encouragés;

23.

regrette que le seul indicateur commun aux dix cadres de coopération relevant de la NASAN soit l'indice de la Banque mondiale sur la réglementation des affaires («Doing Business»);

24.

souligne que les entreprises privées qui participent à des initiatives multilatérales pour le développement devraient rendre compte de leurs actions; demande aux parties à la NASAN, à cet effet, d'établir un rapport annuel sur les actions menées dans le cadre de l'alliance, rapport qui devra être rendu public et accessible aux populations et communautés locales, ainsi que de mettre en place un mécanisme indépendant de responsabilisation assorti de moyens de recours pour les populations et les communautés locales; insiste également sur le fait que les investissements réalisés dans le cadre de la Nouvelle alliance qui ont des répercussions sur des droits fonciers doivent faire l'objet d'une analyse préalable de cette incidence et doivent être conformes aux directives volontaires de la FAO pour une gouvernance responsable des régimes fonciers applicables aux terres, aux pêches et aux forêts dans le contexte de la sécurité alimentaire nationale;

25.

constate que les multinationales qui agissent dans le cadre de la NASAN favorisent l'agriculture contractuelle à grande échelle, au risque de marginaliser les petits producteurs; invite les dix États africains participant à la NASAN à garantir que l'agriculture contractuelle bénéficie à la fois aux acheteurs et aux fournisseurs locaux; estime qu'il est essentiel, à cet effet, de renforcer les organisations d'agriculteurs, par exemple, de sorte à leur donner plus de poids dans les négociations;

26.

souligne que 90 % des emplois dans les pays partenaires sont déjà imputables au secteur privé, dont la participation recèle un potentiel indéniable, les entreprises privées étant dans une position idéale pour former un socle viable en vue de la mobilisation des ressources à l'échelon national, socle qui constitue le fondement de tout programme d'aide; insiste sur l'importance que revêt un cadre réglementaire transparent qui établisse clairement les droits et obligations de tous les acteurs, y compris des agriculteurs pauvres et des groupes vulnérables, un tel cadre étant indispensable à la protection effective de ces droits;

27.

préconise de revoir les cadres de coopération de sorte à obvier efficacement aux risques que présentent l'agriculture contractuelle et les systèmes de plantations satellites pour les petits producteurs en garantissant des clauses contractuelles équitables, notamment en matière de fixation des prix, de respect des droits des femmes, de soutien d'une agriculture durable, ainsi que des mécanismes adaptés de résolution des différends;

Accès à la terre et sécurité foncière

28.

met en garde contre une focalisation exclusive sur l'établissement de titres fonciers, qui est souvent synonyme d'insécurité pour les petits producteurs et les populations autochtones, notamment les femmes, dont les droits fonciers sont insuffisamment reconnus et qui sont à la merci de transactions foncières injustes, d'expropriations forcées ou de conditions d'indemnisation léonines;

29.

souligne qu'il est nécessaire que de petits exploitants agricoles occupent des positions de premier plan pour permettre à leurs organisations indépendantes de les soutenir au regard du contrôle de leurs terres, ressources naturelles et programmes;

30.

est préoccupé par le fait que les investisseurs et les élites locales participant aux transactions foncières décrivent souvent les zones ciblées comme étant «inoccupées», «en friche» ou «sous-exploitées», alors qu'en Afrique, peu de terres sont réellement en friche si l'on tient compte, par exemple, de l'implantation des activités pastorales;

31.

souligne que 1,2 milliard de personnes ne disposent pas d'un accès permanent à la terre ou occupent des terres que, en l'absence de tout titre juridique, elles ne peuvent revendiquer officiellement, qu'aucun relevé ne permet de délimiter et qui, en l'absence des moyens juridiques et financiers requis, elles ne peuvent convertir en capital;

32.

se félicite de la prise en compte, dans tous les cadres de coopération, des directives volontaires de 2012 pour une gouvernance responsable des régimes fonciers applicables aux terres, aux pêches et aux forêts; réclame la mise en œuvre effective de ces directives et l'évaluation systématique du respect de ces directives ainsi que des objectifs de développement durable lors de la révision de ces cadres de coopération;

33.

insiste pour que la NASAN mette l'accent sur la lutte contre l'accaparement des terres, qui constitue une violation des droits de l'homme en ce qu'il prive les communautés locales de terres dont elles dépendent pour produire des aliments et nourrir leurs familles; rappelle que dans plusieurs pays en développement, l'accaparement des terres a privé des populations de leur travail et de leurs moyens de subsistance, les contraignant à quitter leur foyer;

34.

invite les pays participants:

à garantir la mise en place de mécanismes participatifs et inclusifs axés sur les droits, les besoins et les intérêts des détenteurs légitimes des droits fonciers, en particulier des petits agriculteurs et des petites exploitations familiales; à veiller, en particulier, à obtenir le consentement libre et éclairé de toute communauté vivant sur les terres devant faire l'objet d'un transfert de propriété ou de contrôle;

à adopter, à l'échelon national, des mesures contraignantes contre l'accaparement des terres, la corruption basée sur le transfert foncier et l'utilisation des terres à des fins d'investissements spéculatifs;

à contrôler les régimes d'établissement de titres fonciers et de certification pour vérifier qu'ils sont transparents et qu'ils ne concentrent pas la propriété foncière ni ne dépossèdent les communautés des ressources dont elles dépendent;

à veiller à ce que l'aide financière ne serve pas à soutenir des projets permettant aux entreprises de déplacer des communautés locales;

à reconnaître tous les droits fonciers légitimes et à garantir une sécurité juridique à l'égard de ces droits, y compris des droits informels, indigènes et coutumiers; à promouvoir l'adoption de nouvelles lois ou l'application effective des lois existantes en vue d'instaurer des garanties au regard des transactions foncières de grande envergure, telles que le plafonnement des transactions foncières autorisées, et à réglementer les modalités d'approbation par les parlements nationaux des transactions dont le volume excède une certaine limite, comme le préconisent les directives volontaires de 2012 pour une gouvernance responsable des régimes fonciers applicables aux terres, aux pêches et aux forêts;

à garantir l'obtention du consentement préalable, libre et éclairé de toutes les communautés touchées par l'accaparement de terres ainsi que l'organisation de consultations visant à assurer la participation, sur un pied d'égalité, de tous les groupes des communautés locales, notamment des plus vulnérables et des plus marginalisés;

35.

rappelle également que les droits des utilisateurs qui découlent d'un régime foncier coutumier devraient être reconnus et protégés par un système juridique conforme aux dispositions et décisions de la Commission africaine des droits de l'homme et des peuples;

36.

estime que la NASAN devrait faire l'objet d'une analyse d'impact préalable au regard des droits fonciers et être subordonnée au consentement préalable, libre et éclairé des populations locales concernées;

37.

plaide en faveur d'un mécanisme de suivi efficace et innovant au sein du Comité de la sécurité alimentaire mondiale; invite l'Union à adopter une démarche volontariste, en consultation avec les organisations de la société civile, au regard des activités de suivi inscrites au programme de la 43e session du Comité de la sécurité alimentaire mondiale, prévue en octobre 2016, afin de garantir que l'application et le respect des directives portant sur le régime foncier feront l'objet d'une évaluation détaillée et rigoureuse;

38.

invite les pouvoirs publics des États concernés à s'assurer que les entreprises évaluent soigneusement les répercussions de leurs activités sur les droits de l'homme (obligation de vigilance) en réalisant et en publiant des analyses préalables indépendantes de l'incidence de leur action sur les droits de l'homme et les droits sociaux et environnementaux, ainsi qu'à veiller à l'amélioration des procédures de plainte mises en œuvre à l'échelon national en matière de droits de l'homme et à garantir l'accès à des procédures indépendantes, transparentes, fiables et susceptibles de recours;

39.

invite les parties à la NASAN à mettre en place des moyens de recours indépendants pour les communautés dépossédées de leurs terres par des projets d'investissement de grande envergure;

40.

rappelle que la lutte contre la malnutrition exige d'établir un lien étroit entre les secteurs de l'agriculture, de l'alimentation et de la santé publique;

Sécurité alimentaire, nutrition et agriculture familiale durable

41.

rappelle la nécessité de faire tous les efforts possibles pour améliorer la nutrition et la sécurité alimentaire et lutter contre la faim, comme le préconise l'ODD no 2; estime qu'il convient de soutenir davantage le renforcement des moyens d'action des coopératives agricoles, qui jouent un rôle essentiel dans le développement de l'agriculture et de la sécurité alimentaire;

42.

constate qu'une sécurité alimentaire fondée sur des sols vivants et sains et des écosystèmes agricoles productifs capables de s'adapter aux changements climatiques contribuent à une plus grande stabilité et une émigration plus faible;

43.

souligne qu'une alimentation équilibrée et de qualité est essentielle, et affirme que la nutrition devrait constituer l'élément central de la (re)construction des systèmes alimentaires;

44.

demande, dès lors, que des moyens soient mis en œuvre afin de remplacer la dépendance excessive vis-à-vis des denrées alimentaires importées par une production alimentaire résiliente à l'échelon national, en privilégiant les cultures locales qui répondent aux besoins nutritionnels de la population; relève l'importance croissante que revêt une telle démarche au regard de l'instabilité croissante du climat et des marchés;

45.

rappelle que le statut nutritionnel ne peut se résumer au seul apport énergétique;

46.

souligne la nécessité de mettre en place des stratégies visant à minimiser le gaspillage alimentaire tout au long de la chaîne alimentaire;

47.

insiste sur la nécessité de protéger la biodiversité agricole; invite les États membres de l'Union à investir dans les pratiques agricoles agroécologiques dans les pays en développement, conformément aux conclusions de l'Évaluation internationale des connaissances, des sciences et des technologies agricoles pour le développement, aux recommandations du rapporteur spécial des Nations unies sur le droit à l'alimentation et aux objectifs de développement durable;

48.

soutient l'élaboration de politiques favorisant une agriculture familiale durable et encourage les pouvoirs publics à instaurer un environnement propice au développement de ce type d'agriculture (mesures d'incitation, législation adaptée, planification participative d'un dialogue sur l'action à mener, investissements);

49.

invite les gouvernements africains:

à investir dans des systèmes agroalimentaires locaux pour stimuler l'économie rurale, à garantir des emplois décents, un système de sécurité sociale juste et des droits en matière de travail, à renforcer les dispositifs de contrôle démocratique au regard de l'accès aux ressources, y compris les semences paysannes, ainsi qu'à associer concrètement les petits producteurs aux processus d'élaboration des politiques et de mise en œuvre de ces dernières; à encourager la mise en place d'industries locales de transformation dans le secteur agricole ainsi que l'amélioration des techniques de stockage des aliments, et à renforcer le lien entre l'agriculture et le commerce afin de développer des marchés locaux, régionaux et nationaux qui profitent aux exploitations familiales et fournissent des aliments de qualité, économiquement accessibles, aux consommateurs;

à éviter une dépendance excessive des systèmes de production alimentaire à l'égard des combustibles fossiles afin de limiter l'instabilité des prix et d'atténuer les effets du changement climatique;

à mettre en place des chaînes d'approvisionnement alimentaire courtes à l'échelle locale et régionale, plus efficaces dans la lutte contre la faim et la pauvreté en milieu rural, ainsi que des infrastructures de stockage et de communication adaptées à cette fin;

à permettre aux agriculteurs africains d'accéder à des solutions technologiques peu coûteuses et à faible utilisation d'intrants afin de répondre aux problématiques agronomiques propres à l'Afrique;

à encourager une grande variété de cultures alimentaires locales et, dans la mesure du possible, saisonnières, de préférence des variétés et des espèces indigènes ou adaptées aux conditions locales, notamment des fruits, des légumes et des fruits à coque, afin d'améliorer la nutrition grâce à un accès durable à un régime varié, sain et abordable, adéquat du point de vue de la qualité, de la quantité et de la diversité, plutôt que du seul point de vue de l'apport calorique, et conforme aux valeurs culturelles;

à s'engager en faveur de la mise en œuvre intégrale du Code international de commercialisation des substituts du lait maternel, et des résolutions adoptées par l'Assemblée mondiale de la santé (AMS) sur l'alimentation des nourrissons et des jeunes enfants;

à établir, à promouvoir et à soutenir les organisations de producteurs, telles que les coopératives, qui renforcent le pouvoir de négociation des petits agriculteurs et, ainsi, instaurent les conditions requises pour garantir que les marchés les rémunèrent mieux, et qui permettent le partage de connaissances et de bonnes pratiques entre ces agriculteurs;

50.

souligne que la NASAN doit conduire à la mise en place d'une structure agricole adaptée aux régions dans le secteur primaire et celui de la transformation;

51.

invite les gouvernements africains à favoriser le développement de la solidarité intergénérationnelle et à reconnaître le rôle essentiel qu'elle joue dans la lutte contre la pauvreté;

52.

souligne l'importance de promouvoir des programmes d'éducation à la nutrition dans les écoles et les communautés locales;

53.

souligne le fait que le droit à l'eau va de pair avec le droit à l'alimentation et que la résolution de l'ONU de 2010 n'a pas encore abouti à une action décisive pour définir le droit à l'eau en tant que droit fondamental; demande à l'Union d'examiner la proposition du «Comitato italiano Contratto Mondiale sull'acqua» (CICMA, Comité italien pour un contrat mondial de l'eau) en faveur d'un protocole facultatif au pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels;

54.

reconnaît le rôle vital que revêt l'accès à une eau potable saine et les effets que l'agriculture peut avoir à cet égard;

55.

reconnaît l'importance de l'accès à l'eau pour les besoins de l'agriculture, ainsi que les risques liés à une dépendance excessive aux précieuses ressources en eau pour l'irrigation et, dans ce contexte, insiste sur la nécessité de réduire le gaspillage lié aux pratiques d'irrigation et souligne le rôle que peuvent jouer les techniques agronomiques de conservation de l'eau pour empêcher l'évapotranspiration, retenir l'eau dans un sol vivant et sain et éviter que les sources d'eau potable ne soient polluées;

56.

relève qu'une gestion durable des sols peut permettre de produire jusqu'à 58 % de denrées alimentaires en plus à l'échelle mondiale (48);

57.

prend acte des synergies qui existent entre les démarches axées sur les sols et celles fondées sur les arbres ainsi que de l'importance de l'adaptation des agro-écosystèmes aux changements climatiques; constate en particulier la demande importante en bois de chauffage; relève notamment les utilisations multiples d'arbres fixateurs d'azote;

58.

reconnaît les besoins spécifiques de l'agriculture tropicale et semi-aride, en particulier des cultures qui ont besoin d'ombre et d'une protection du sol, estime que les monocultures extractives sont obsolètes et constate qu'elles sont, de plus en plus, supprimées progressivement dans les pays donateurs de la NASAN;

59.

préconise de ne pas privilégier de manière excessive la production de matières premières agricoles non alimentaires, en particulier de matières premières destinées à la fabrication de biocarburants, au détriment de denrées alimentaires dans le cadre des initiatives financées par la NASAN, étant donné que la production de ces matières premières peut avoir des effets préjudiciables sur la sécurité alimentaire et la souveraineté alimentaire des pays participants;

60.

indique que les techniques agronomiques, qui stimulent les processus naturels comme la formation de la terre végétale, la régulation de l'eau et des nuisibles ou le cycle des nutriments en circuit fermé, peuvent garantir une productivité et une fertilité sur le long terme à un coût peu élevé pour les agriculteurs et les administrations;

61.

note que les produits agrochimiques peuvent être utilisés de manière à la fois excessive et inappropriée dans les pays en développement tels que ceux qui participent à la NASAN;

62.

indique que ce problème est aggravé par l'analphabétisme et l'absence de formations appropriées, et peut donner lieu à des niveaux extrêmement élevés de résidus de pesticides dans les fruits et les légumes frais, ainsi qu'à des empoisonnements et à d'autres effets sur la santé humaine pour les agriculteurs et leurs familles;

Réforme réglementaire du secteur des semences

63.

rappelle qu'en Afrique, 90 % des moyens de subsistance des agriculteurs reposent sur leur droit de produire, d'échanger et de vendre librement des semences, et que la diversité de celles-ci est vitale pour améliorer la résilience de l'agriculture au changement climatique; souligne que la demande des entreprises de renforcer les droits d'obtention végétale conformément à la convention UPOV de 1991 ne doit pas conduire à l'interdiction de ces pratiques informelles;

64.

prend note des dangers liés à une déréglementation du secteur des semences dans les pays participants, qui pourrait conduire à une dépendance excessive des petits agriculteurs à des semences et des produits phytopharmaceutiques fabriqués par des sociétés étrangères;

65.

rappelle que les dispositions de l'accord sur les ADPIC, qui préconise une certaine forme de protection des variétés végétales, n'obligent pas les pays en développement à adopter le régime de la convention UPOV; souligne cependant qu'elles permettent aux pays d'élaborer des systèmes sui generis mieux adaptés aux caractéristiques de leur production agricole et aux systèmes traditionnels de semences paysannes, et que les pays les moins avancés membres de l'OMC sont exemptés du respect des dispositions concernées de l'accord sur les ADPIC; souligne que ces systèmes sui generis doivent venir en appui des objectifs et des obligations de la convention sur la diversité biologique, du protocole de Nagoya et du traité international sur les ressources phytogénétiques pour l'alimentation et l'agriculture, et non les contrecarrer;

66.

déplore que dans le contexte africain, des entreprises demandent une harmonisation des lois sur les semences fondée sur les principes de distinction, d'homogénéité et de stabilité (DHS) par l'intermédiaire d'institutions régionales, qui est vouée à entraver la mise en place et le développement de systèmes de semences paysannes au niveau national et régional, étant donné que les semences produites et conservées dans le cadre de tels systèmes ne répondent généralement pas aux critères DHS;

67.

demande instamment aux États membres du G7 de soutenir les systèmes de semences gérés par les agriculteurs par l'intermédiaire de banques de semences communautaires;

68.

rappelle que si les variétés de semences commerciales peuvent améliorer les rendements à court terme, les variétés traditionnelles et les variétés rustiques utilisées par les agriculteurs ainsi que les savoir-faire qui y sont associés sont les plus indiqués en vue de l'adaptation à des environnements agroécologiques particuliers et au changement climatique; précise en outre que l'accroissement des rendements est lié à l'utilisation d'intrants (engrais, pesticides, semences hybrides) qui risquent d'entraîner les agriculteurs dans un cercle vicieux de l'endettement;

69.

constate avec inquiétude que l'introduction et la diffusion de semences certifiées en Afrique accroissent la dépendance ainsi que le risque d'endettement des petits exploitants et diminuent la diversité des semences;

70.

plaide en faveur du soutien de dispositifs locaux visant à garantir un accès régulier et durable à un régime alimentaire diversifié et nutritif, suivant les principes de propriété et de subsidiarité;

71.

exhorte la Commission à tout mettre en œuvre pour que les engagements de l'Union au regard des droits des agriculteurs en vertu du traité international sur les ressources phytogénétiques pour l'alimentation et l'agriculture soient pris en compte dans tous les dispositifs d'assistance technique et de soutien financier à l'appui de l'élaboration d'une politique en matière de semences; demande à l'Union de soutenir les régimes de droits de la propriété intellectuelle qui favorisent la production de variétés de semences adaptées à l'échelle locale et de semences paysannes;

72.

prie instamment les membres du G8 de ne pas soutenir les cultures d'OGM en Afrique;

73.

rappelle que la loi-modèle africaine sur la sécurité en biotechnologie établit un niveau de référence élevé en la matière; estime que toute assistance apportée par des bailleurs de fonds internationaux pour le développement de la sécurité en biotechnologie à l'échelon national et régional devrait, en conséquence, s'inscrire dans ce cadre;

74.

demande instamment aux pays africains de ne pas appliquer, à l'échelon national ou régional, de dispositifs de biosécurité reposant sur des normes moins strictes que celles préconisées par le protocole de Carthagène sur la prévention des risques biotechnologiques;

75.

invite les pays participants à donner aux agriculteurs la possibilité d'éviter la dépendance vis-à-vis des intrants et à soutenir les systèmes de semences paysannes afin de préserver et d'améliorer la biodiversité agricole grâce à des banques de semences locales relevant du domaine public, à l'échange et au développement constant de variétés de semences locales et, plus particulièrement, à la mise en œuvre flexible des catalogues de semences dans l'optique de ne pas en exclure les variétés paysannes et de garantir le préservation des produits traditionnels;

76.

invite les pays participants à protéger et à promouvoir l'accès des petits agriculteurs, des groupes marginalisés et des communautés rurales aux semences et aux intrants agricoles ainsi que l'échange de ces derniers; demande de respecter les accords internationaux sur la non-brevetabilité des processus vitaux et biologiques, en particulier des souches et des espèces autochtones;

77.

souligne le risque de marginalisation accrue des femmes au regard des processus décisionnels dans le contexte du développement de certaines cultures commerciales; fait observer que les formations agricoles ciblent souvent les hommes et tendent à marginaliser les femmes qui, par conséquent, se sentent exclues de la gestion des terres et des cultures dont elles s'occupaient traditionnellement;

Égalité des sexes

78.

déplore que les cadres de coopération omettent, dans une large mesure, de définir des engagements concrets pour la prise en compte des questions d'égalité des sexes dans l'élaboration des budgets, et de suivre les progrès accomplis en s'appuyant sur des données ventilées; souligne la nécessité de passer d'engagements abstraits et généraux à des engagements concrets et précis dans le cadre d'un plan d'action national visant à renforcer la position des femmes en tant que titulaires de droits;

79.

exhorte les gouvernements à éliminer toute discrimination à l'égard des femmes au regard de l'accès à la terre ainsi qu'aux dispositifs et services de microcrédit, et à veiller à la participation effective des femmes à la conception et à la mise en œuvre des politiques en matière de recherche et développement dans le domaine agricole;

Financement des investissements dans l'agriculture en Afrique

80.

souligne qu'il convient de garantir la transparence de tous les financements accordés à des entreprises privées ainsi que leur publication;

81.

demande à tous les bailleurs de fonds de veiller à ce que l'aide publique au développement soient conforme aux principes d'efficacité de l'aide, de mettre l'accent sur les résultats au regard de l'éradication de la pauvreté ainsi que de promouvoir des partenariats ouverts, la transparence et la responsabilisation;

82.

appelle les bailleurs de fonds à soutenir le développement de l'agriculture principalement par l'intermédiaire de fonds de développement nationaux qui octroient des subventions et des prêts aux petits exploitants agricoles et aux exploitations familiales;

83.

presse les bailleurs de fonds d'apporter leur appui pour que les agriculteurs bénéficient d'une éducation et de formations ainsi que de conseils techniques;

84.

invite les bailleurs de fonds à appuyer la constitution d'organisations d'agriculteurs à visée professionnelle et économique, ainsi qu'à favoriser la mise en place de coopératives agricoles capables de mettre à la disposition des agriculteurs des moyens de production à un coût abordable et de les aider à transformer et à commercialiser leurs produits de telle sorte que la rentabilité de leur production soit garantie;

85.

estime que les financements apportés à la NASAN par les membres du G8 vont à l'encontre de l'objectif de soutien des entreprises locales, qui ne peuvent concurrencer des multinationales qui bénéficient déjà d'une position dominante et, souvent, de conditions commerciales, tarifaires et fiscales préférentielles;

86.

rappelle que l'aide au développement a pour objectif la réduction et, à terme, l'éradication de la pauvreté; est convaincu que l'aide publique au développement devrait se concentrer sur l'aide directe à l'agriculture à petite échelle;

87.

insiste sur la nécessité de redynamiser l'investissement public dans l'agriculture africaine tout en favorisant l'investissement privé, et d'accorder la priorité à l'investissement dans l'agroécologie afin d'améliorer durablement la sécurité alimentaire, de réduire la pauvreté et la faim et, dans le même temps, de préserver la biodiversité ainsi que de respecter les connaissances autochtones et l'innovation locale;

88.

demande instamment aux États membres du G7 de garantir aux pays africains le droit de protéger leur secteur agricole par des régimes tarifaires et fiscaux qui favorisent l'exploitation agricole familiale et les petits exploitants;

89.

demande à l'Union de remédier à toutes les lacunes de la NASAN décrites ci-dessus, d'œuvrer au renforcement de la transparence et de la gouvernance, ainsi que de garantir que les mesures prise dans le cadre de l'alliance sont compatibles avec les objectifs en matière de développement;

o

o o

90.

charge son président de transmettre la présente résolution au Conseil, à la Commission et aux parties à la NASAN


(1)  Résolution A/RES/70/1 de l’Assemblée générale des Nations unies.

(2)  Nation unies, FCCC/CP/2015/L.9/Rev.1.

(3)  http://www.nepad.org/system/files/caadp.pdf

(4)  Assembly/AU/Decl.7(II).

(5)  Assembly/AU/Decl.449(XIX).

(6)  Assembly/AU/Decl.1(XXIII).

(7)  http://www.ifad.org/events/g8/statement.pdf

(8)  http://www.uneca.org/fr/publications/cadre-et-lignes-directrices-sur-les-politiques-fonci%C3%A8res-en-afrique-0

(9)  Assembly/AU/Decl.1(XIII) Rev.1.

(10)  http://www.uneca.org/fr/publications/principes-directeurs-relatifs-aux-investissements-fonciers-%C3%A0-grande-%C3%A9chelle-en-afrique

(11)  http://acbio.org.za/modernising-african-agriculture-who-benefits-civil-society-statement-on-the-g8-agra-and-the-african-unions-caadp/

(12)  https://www.grain.org/fr/bulletin_board/entries/4913-declaration-de-djimini-2014

(13)  http://www.fao.org/docrep/009/y7937f/y7937f00.htm

(14)  http://www.unep.org/dewa/Assessments/Ecosystems/IAASTD/tabid/105853/Defa

(15)  https://treaties.un.org/pages/ViewDetails.aspx?src=IND&mtdsg_no=IV-4&chapter=4&lang=fr&clang=_fr

(16)  http://www.un.org/womenwatch/daw/cedaw/

(17)  http://www.achpr.org/fr/instruments/achpr/

(18)  http://www.un.org/esa/socdev/unpfii/documents/DRIPS_fr.pdf

(19)  http://www.ohchr.org/fr/Issues/Housing/Pages/ForcedEvictions.aspx

(20)  https://www.unglobalcompact.org/library/2

(21)  http://www.oecd.org/fr/gouvernementdentreprise/mne/principesdirecteursdelocdealintentiondesentreprisesmultinationales.htm

(22)  http://www.oecd.org/fr/developpement/efficacite/partenariatdebusanpourunecooperationefficaceauservicedudeveloppment.htm

(23)  http://www.fao.org/nr/tenure/voluntary-guidelines/fr/

(24)  http://www.upov.int/upovlex/fr/conventions/1991/act1991.html

(25)  http://www.planttreaty.org/

(26)  https://www.cbd.int/

(27)  http://hrst.au.int/en/biosafety/modellaw

(28)  http://apf.francophonie.org/IMG/pdf/2012_07_session_58_Resolution_Regulation_du_foncier.pdf

(29)  JO C 64 du 4.3.2014, p. 31.

(30)  COM(2010)0127.

(31)  http://www.consilium.europa.eu/uedocs/cms_data/docs/pressdata/EN/foraff/114357.pdf

(32)  http://www.consilium.europa.eu/uedocs/cms_Data/docs/pressdata/EN/foraff/137318.pdf

(33)  SWD(2014)0234.

(34)  JO C 56 E du 26.2.2013, p. 75.

(35)  Textes adoptés de cette date, P7_TA(2013)0578.

(36)  Textes adoptés de cette date, P7_TA(2014)0250.

(37)  Textes adoptés de cette date, P8_TA(2015)0073.

(38)  http://www.fian.org/fileadmin/media/media_publications2015/Dakar_to_Tunis_Declaration_FR_finalfinal.pdf

(39)  Textes adoptés de cette date, P8_TA(2015)0184.

(40)  http://afsafrica.org/wp-content/uploads/2015/05/AFSA-Demands-to-the-Germany-G7-Presidency-Agenda.pdf

(41)  http://carta.milano.it/wp-content/uploads/2015/04/French_version_Milan_Charter.pdf

(42)  http://www.foodpolicymilano.org/wp-content/uploads/2015/10/Milan-Urban-Food-Policy-Pact-_FR.pdf

(43)  Textes adoptés de cette date, P8_TA(2016)0023.

(44)  http://www.europarl.europa.eu/committees/fr/deve/events.html?id=20151201CHE00041

(45)  http://www.europarl.europa.eu/RegData/etudes/STUD/2015/535010/EXPO_STU(2015)535010_EN.pdf

(46)  Mwachinga, E. (Global Tax Simplification Team, Groupe de la Banque mondiale), «Results of investor motivation survey conducted in the EAC», présentation donnée à Lusaka le 12 février 2013.

(47)  «Supporting the development of more effective tax systems» — rapport du FMI, de l'OCDE et de la Banque mondiale au groupe de travail du G20, 2011.

(48)  FAO, Partenariat mondial sur les sols.