RAPPORT DE LA COMMISSION AU CONSEIL ET AU PARLEMENT EUROPÉEN sur les progrès réalisés par l'Albanie dans les domaines de la lutte contre la corruption et la criminalité organisée et de la réforme judiciaire /* COM/2014/0331 final */
RAPPORT DE LA COMMISSION AU CONSEIL ET AU
PARLEMENT EUROPÉEN sur les progrès réalisés par l'Albanie dans
les domaines de la lutte contre la corruption et la criminalité organisée et de
la réforme judiciaire 1.
Introduction Le présent
rapport répond aux conclusions du Conseil du 17 décembre 2013 dont voici
un extrait: «Sur la base
d'un rapport que présentera la Commission, le Conseil examinera la poursuite de
la mise en œuvre des stratégies de lutte contre la corruption et de réforme
judiciaire, ainsi que des textes législatifs adoptés récemment en la matière,
et le maintien de la tendance à mener des enquêtes et des poursuites
proactives, y compris en matière de criminalité organisée. Compte tenu
de ce rapport, et partant du principe que l'Albanie continuera sur la lancée
des progrès encourageants qu'elle a accomplis jusqu'à présent, le Conseil est
impatient d'adopter une décision sur l'octroi à celle-ci du statut de pays
candidat en juin 2014, sous réserve d'approbation par le Conseil européen.» Conformément à
la demande du Conseil, le présent rapport est principalement axé sur la lutte
contre la corruption et la criminalité organisée et la réforme judiciaire et
souligne certaines évolutions essentielles supplémentaires dans des domaines
qui sont importants pour l’intégration de l'Albanie à l’UE. Il couvre la
période écoulée depuis la publication du dernier rapport de suivi[1], et
s’appuie sur les informations recueillies et analysées par la Commission,
notamment les données fournies par le pays et les informations provenant des
évaluations par les pairs et issues des contacts réguliers avec les États
membres et les organisations internationales. Au cours de la
période couverte par le rapport, le gouvernement albanais a pris des mesures
concrètes et démontré une volonté politique sans faille en ce qui concerne la
réforme liée à l’UE, dans de nombreux domaines. En novembre, le gouvernement et
l’opposition ont uni leurs forces pour adopter une résolution sur l’intégration
à l’UE. Depuis lors, les deux parties ont continué à soutenir l’intégration à
l'UE, bien que le consensus vers lequel elles convergeaient ait été entravé par
un climat conflictuel de plus en plus marqué, l’opposition s'étant notamment
abstenue lors de votes importants dans certaines commissions parlementaires. En novembre, le
dialogue à haut niveau sur les priorités essentielles a été lancé afin
d’apporter un soutien au processus d’intégration de l’Albanie à l’UE en mettant
l'accent sur les principales priorités en matière de réforme. Lors d’une
deuxième réunion du dialogue à haut niveau au début du mois de mars, l’Albanie
a présenté une feuille de route décrivant les efforts à moyen terme qu'elle
avait réalisés pour mettre en œuvre les priorités essentielles à l’ouverture
des négociations d’adhésion. À l'occasion de cette réunion, tant le
gouvernement que l’opposition ont fait preuve d'un engagement constructif en ce
qui concerne la réforme liée à l’UE. 2.
Évolutions récentes La nouvelle loi
sur la fonction publique (LFP) est applicable depuis le 26 février 2014
et son droit dérivé a été adopté à temps pour permettre son entrée en vigueur
le 1er avril. Il s'agit là d'un grand pas en avant sur la voie d'un
renforcement du professionnalisme et de la méritocratie et dans la lutte contre
la politisation, l’inefficacité et la corruption qui règnent dans toute une
série d'organes du secteur public. Il est primordial d'en contrôler la
mise en œuvre. Depuis octobre, les questions de licenciements et
de déclassements de personnel, dus principalement à des mesures disciplinaires
et à des restructurations dans les institutions publiques, ont généré des
tensions politiques. Dans ce contexte, le gouvernement a gelé tout nouveau
recrutement de mars à juillet, de façon à permettre à la nouvelle LFP de
devenir pleinement opérationnelle, tentant ainsi de garantir la mise en place
d'un processus de recrutement solide et transparent. Il est essentiel de
respecter en tous points la législation applicable et les décisions de justice. Le Parlement a
pris des mesures pour renforcer sa mission de contrôle sur les institutions
indépendantes. Toutefois, des controverses sont apparues au sujet de
l'instauration, des procédures de nomination et du fonctionnement d’un certain
nombre d’institutions et d'autorités indépendantes, qui rendent compte au
parlement. Il est essentiel que la législation applicable soit pleinement mise
en œuvre et que le professionnalisme de ces institutions soit renforcé La
procédure d’élection des dirigeants et des conseils d’administration de ces institutions,
à la majorité simple au Parlement, demeure un sujet de préoccupation, étant
donné qu'elle risque de porter atteinte à l'indépendance de ces dernières.
Contrairement à ce qui se passe dans le cas de la législation relative à la
Haute Inspection pour la déclaration du patrimoine et des conflits d'intérêts
(HIDPCI), les nouveaux projets législatifs bénéficieraient de l'analyse
d'experts internationaux. Le gouvernement albanais a demandé une évaluation par
les pairs pour évaluer les performances, la structure et les capacités des
institutions indépendantes en vue de renforcer leur fonctionnement et leur
indépendance. Le gouvernement
continue de réclamer une réforme économique et une gouvernance
économique renforcée, afin de relancer la croissance et d'améliorer la
compétitivité. Un conseil économique national, présidé par le Premier ministre
et bénéficiant de la participation du monde des entreprises, a été créé pour
fournir des orientations en matière de réformes économiques et assurer leur
cohérence. La stabilité macroéconomique continue de s'appuyer sur une politique
monétaire saine et l'inflation reste peu élevée. Le nécessaire assainissement
budgétaire sera facilité par le contrat de prêt conclu avec le Fonds monétaire
international (FMI). Celui-ci permettra l’apurement sur une période de trois
ans des gros arriérés de paiement qui se sont accumulés et encouragera le
lancement de réformes substantielles liées à la gestion des finances publiques,
à la fiscalité, au système de retraite et à l’énergie. Les réformes ont déjà
débouché sur une hausse des recettes issues de la perception de l'impôt et des
droits de douane, tandis que les enquêtes sur l'évasion en matière de taxe sur
la valeur ajoutée (TVA) et les mécanismes de fraude ont été intensifiées. Le
programme économique et budgétaire pour la période 2014-2016 définit un cadre
destiné à soutenir la croissance et la stabilité macroéconomique et recense les
réformes structurelles nécessaires dans certains domaines clés, notamment pour
renforcer l’État de droit, améliorer le climat des entreprises et des
investissements et s’attaquer aux problèmes du marché du travail. En ce qui
concerne la crise en Ukraine et l'alignement sur la PESC,
l’Albanie s’est alignée sur l'ensemble des déclarations et positions de l'UE. 3.
Mesures de lutte contre la corruption Depuis octobre,
les autorités albanaises ont encore renforcé le cadre juridique et
institutionnel de la lutte contre la corruption. En novembre, un
coordinateur national de lutte contre la corruption a été nommé; il coordonne
les activités des organismes étatiques et des institutions indépendantes, aux
niveaux tant central que local. Pour faciliter ce processus, un réseau de
points de contact de lutte contre la corruption a été mis en place dans l'ensemble
des ministères compétents et des institutions indépendantes. Le mandat des
points de contact prévoit que ceux-ci fassent rapport au coordinateur national,
fournissent des orientations aux fonctionnaires compétents et assurent le suivi
de la mise en œuvre de la stratégie de lutte contre la corruption dans les
institutions et ministères concernés. En avril, le coordinateur national de
lutte contre la corruption a mis un point final à la stratégie nationale de
lutte contre la corruption, qui a fait l’objet d’une large consultation auprès
de la société civile et du secteur privé et doit encore être adoptée. Cette
stratégie doit à présent être suivie de plans d’action globaux. À la suite des
modifications du code de procédure pénale (CPP) adoptées en mars, les
compétences pour les délits de corruption commis par des hauts fonctionnaires
ont été transférées, à l'exception des délits d'abus d'autorité, au Bureau du
procureur et au tribunal chargés de statuer sur les infractions pénales graves.
La corruption active et passive des juges, des procureurs, des fonctionnaires
de justice, des hauts fonctionnaires et des élus locaux relève désormais de la
compétence du tribunal chargé des infractions pénales graves, de sorte que la
corruption à haut niveau se retrouve davantage sous le feu des projecteurs. La
définition des «hauts fonctionnaires» et des «élus locaux» doit encore être
introduite dans la législation. Depuis mars, la
saisie ou la confiscation d'avoirs illicites provenant de délits de corruption
est juridiquement possible. Une nouvelle loi
sur l’accès à l’information a été rédigée en mai, introduisant des sanctions
administratives ainsi que des procédures d’examen des plaintes déposées auprès
de la Commission pour le droit à l’information et à la protection des données à
caractère personnel. Les lois sur la
déclaration de patrimoine et les conflits d’intérêts, qui ont été modifiées en
avril 2014, suivent actuellement la procédure d'adoption formelle. La loi sur
les conflits d’intérêts telle que révisée étend l’interdiction d’engager des
relations contractuelles avec des organismes publics aux juges et procureurs de
première instance et d’appel. De plus, la communication de fausses informations
devient une infraction pénale, ce
qui témoigne de la détermination manifestée pour résoudre les conflits
d’intérêt. Conformément à la loi
sur la déclaration de patrimoine, les agents de la fonction publique doivent
désormais déposer dans une banque les avoirs supérieurs à 1,5 million
d'ALL (environ 10 700 EUR). En ce qui concerne
la coopération entre les agences répressives, à la fois dans la
lutte contre la corruption et contre la criminalité organisée, le procureur
général, le ministère de l'intérieur et le service national du renseignement
ont signé, en décembre, un protocole d'accord en vue de l'établissement d'une
plateforme commune destinée à encourager la réalisation proactive d’enquêtes.
Dans l'ensemble, la coopération entre les agences répressives doit être
renforcée, y compris au moyen d'un système d'échange d'informations sécurisé
dans le but de rendre les enquêtes plus efficaces. En avril, le
nombre de procureurs chargés de la lutte contre la corruption dans les parquets
régionaux a été revu à la hausse, passant de 22 à 33. En ce qui
concerne les résultats obtenus, le nombre de cas de corruption
transmis au parquet par la police nationale a augmenté de 16 % au cours de
la période comprise entre octobre 2013 et mars 2014 par rapport à la même
période de l’année précédente. Les condamnations prononcées par les tribunaux
de première instance ont diminué de 8 % au cours de la même période, alors
que les condamnations prononcées par les cours d’appel ont augmenté de
81 %. Cinq enquêtes pour corruption au sein du système judiciaire sont en
cours, et une condamnation en la matière a été prononcée au niveau de la cour
d'appel. Concernant les fonctionnaires de haut-rang et les fonctionnaires élus
localement, cinq affaires impliquant 25 prévenus sont pendantes devant les
juridictions, et deux affaires sont toujours à l’examen pour abus d'autorité et
autres griefs connexes. Dans l’ensemble, le nombre d’enquêtes et de
condamnations reste peu élevé, surtout en ce qui concerne les affaires de
corruption à haut niveau. Bon nombre d’enquêtes sur les délits de corruption ne
débouchent pas sur des condamnations définitives, ce qui souligne la nécessité
de renforcer l’indépendance, l’efficacité et l'obligation de rendre compte du
pouvoir judiciaire, ainsi que de renforcer la capacité de la police et du
parquet. Pour remédier
aux lacunes constatées au niveau de l’efficacité des enquêtes et
la coopération entre les différentes agences, des réunions mensuelles présidées
par le procureur général et le directeur général de la police ont été mises en
place au mois de mai. Un certain nombre d'obstacles subsistent, comme les
dispositions relatives aux interceptions et à la surveillance, aux délais des
enquêtes, à l'admissibilité des preuves devant une juridiction et, d'une
manière générale, les enquêtes ont encore un caractère réactif. Les capacités
d'enquête des agences répressives doivent être renforcées, y compris en ce qui
concerne la lutte contre la criminalité financière et économique. L'actuel
cadre juridique doit inclure des dispositions juridiques permettant à la police
nationale d’obtenir, à des fins d'investigation, des informations des
institutions publiques et des organismes privés fournissant des services
publics, et permettant l'adoption de sanctions dissuasives à l'encontre des
contrevenants. L'Albanie est également encouragée à inclure au nombre des
délits celui d'enrichissement illicite, ce qui constituerait un signal positif.
Des efforts supplémentaires sont nécessaires en ce qui concerne les mécanismes
de sanctions en cas de non-respect des protocoles d’accord interinstitutionnels.
La Haute
inspection pour la déclaration du patrimoine et des conflits d'intérêts
(HIDPCI) a pris des mesures pour améliorer son bilan au cours du premier
trimestre de 2014. En ce qui concerne les cas d'avoirs dissimulés, elle a
transmis au parquet des dossiers concernant trois juges, un procureur, un
ambassadeur et deux inspecteurs. D'une manière générale, tant l'HIDPCI que les
organismes de contrôle interne devraient exercer leur mandat d'une manière plus
proactive, en se concentrant sur les cas d’enrichissement inexplicables grâce à
une meilleure évaluation des risques et en procédant à des contrôles croisés
entre leurs propres données et les déclarations de patrimoine et de conflit
d’intérêts disponibles. À cet égard, il est essentiel de mettre les déclarations
de patrimoine à la disposition des organes d’investigation et des instances
chargées de faire respecter la loi. La publication des déclarations de
patrimoine, telle que prévue dans la feuille de route sur les priorités
essentielles, permettrait d’accroître l'obligation de rendre compte et de
renforcer les mesures prises pour mettre au jour les cas d’enrichissement
inexplicables. Dans
l’ensemble, la volonté politique d’agir de manière
décisive dans la prévention et la lutte contre la corruption a été sans faille. Les réformes structurelles qui ont été
instaurées témoignent d'une approche globale associant un grand nombre
d'institutions. Le vaste processus de consultation concernant les grandes
lignes de la stratégie de lutte contre la corruption montre que le gouvernement
désire inclure un large éventail de parties prenantes. La coopération entre les
agences a été lancée pour renforcer le caractère proactif des enquêtes et la
réalisation systématique d'analyses des risques et pour permettre de surmonter
les obstacles en vue d'améliorer l'efficacité des enquêtes. Si elle veut
franchir un cap décisif sur la voie de l' intégration à l'Union, l'Albanie
devrait veiller en premier lieu à faire respecter la législation en ce qui
concerne les déclarations de patrimoine et de conflit d'intérêts, à être plus
proactive dans ses enquêtes et à introduire de nouvelles mesures visant à
accroître l'efficacité de ces dernières, afin de rester sur la lancée de ses
efforts initiaux et d'obtenir des résultats probants en matière d'enquêtes, de
poursuites et de condamnations définitives dans les affaires de corruption. La
profonde réforme judiciaire prévue sera également essentielle dans la lutte
contre la corruption. 4.
Lutte contre la criminalité organisée Depuis octobre,
plusieurs changements organisationnels ont été apportés au sein de la police
nationale et du parquet, tandis que des lois essentielles sont préparées pour
adoption, couvrant les domaines de l'organisation et de la formation
policières, ainsi que du contrôle des armes à feu. Un concours général de
recrutement pour la police nationale a été lancé en mars. Malgré une situation
budgétaire difficile, les fonds alloués aux salaires de la police ont été
augmentés de 10 % en 2014. Trente-neuf officiers de police ont été
licenciés pour motifs disciplinaires depuis le mois de septembre. En ce qui
concerne le terrorisme financé par la criminalité organisée, une nouvelle unité
antiterrorisme a été créée au sein de la police nationale. La police a
organisé avec succès des opérations dans les domaines de la lutte contre le
trafic de stupéfiants, de la traite des êtres humains, du blanchiment d'argent
et de la saisie d'explosifs sur le territoire national et a participé à des
opérations similaires à l’étranger. Dans le domaine de la coopération
policière et judiciaire internationale, le quatrième protocole
additionnel à la convention européenne d’extradition a été ratifié en janvier.
Au total, 25 commissions rogatoires des États membres de l’UE se sont rendues
en Albanie entre octobre 2013 et fin avril 2014. Au cours de la même période,
34 personnes ont été extradées vers l’Albanie en provenance des États
membres de l’UE, tandis que les autorités albanaises ont extradé 49 personnes
vers les États membres de l’UE. Un protocole opérationnel a été signé entre la
police nationale et le département de la sécurité publique du ministère italien
de l’intérieur. L’Albanie coopère avec l’Italie et la Grèce afin de mettre en
place un centre de coopération policière commun pour contrôler les activités
transfrontières illicites à Sarandë. Des réunions sont régulièrement organisées
avec les agents de liaison des pays partenaires pour échanger des informations
sur les enquêtes relatives aux avoirs d’origine criminelle. Un accord de coopération
opérationnelle avec Europol, signé en décembre dernier, a été ratifié par
l’Albanie le 20 mars. L'échange d'informations est facilité par un officier de
liaison albanais détaché auprès d'Europol. Pendant la période couverte par le
rapport, l'Albanie a pris part à une opération policière internationale,
soutenue par Europol, dont l'objectif était de détecter les véhicules volés et
faisant l'objet de trafics. Cette opération a débouché sur 24 arrestations. Les
autorités devraient utiliser plus activement tous les outils que leur offre la
coopération internationale et multiplier les équipes communes d'investigation.
Il conviendrait de renforcer les capacités en vue d'utiliser les techniques
d’enquête spéciales en ce qui concerne le cadre juridique et procédural. S'agissant de la
lutte contre la traite des êtres humains, le bureau du
coordinateur national de la lutte contre la traite des êtres humains (ONATC) a
donné un nouveau souffle au mécanisme national d'orientation, et entraîné une
hausse des activités de prévention et de sensibilisation, et il travaille
actuellement à la finalisation de la nouvelle stratégie nationale et du plan
d'action pour la période 2014-2016. En 2014, l'ONATC s'est vu octroyer son
propre budget pour la première fois. Trois unités mobiles ont été mises en
place à Tirana, Vlora et Elbasan, ce qui s'est traduit par une augmentation du
nombre d’identification des victimes et des victimes potentielles. Les réunions
de la police régionale avec le bureau du procureur chargé de statuer sur les
infractions pénales graves se tiennent sur une base mensuelle. Axant notamment
son action sur la lutte contre le travail forcé et la traite des êtres humains
à l'intérieur du pays, l’inspection du travail a commencé à procéder à des
inspections dans les boîtes de nuit, en coopération avec la police de Tirana.
Une ligne téléphonique spéciale d’assistance aux victimes de la traite des
êtres humains est devenue opérationnelle au mois de mars et depuis novembre
2013 ces dernières peuvent obtenir une aide juridique en bénéficiant d'une
réduction de 30 % des honoraires d’avocat. Il convient d'appliquer avec un
soin particulier les dernières modifications du code pénal en matière de traite
des êtres humains et de renforcer les structures responsables de leur mise en
œuvre, de même que les enquêtes sur les affaires de traite des êtres humains à
l'intérieur du pays. Le nombre de condamnations pour traite des êtres humains
est resté faible. Il convient de renforcer les capacités d'évaluation des
menaces et des risques pour identifier les victimes de traite des êtres humains
dans le but de s'attaquer à ce phénomène de manière proactive. En ce qui
concerne la lutte contre le blanchiment d’argent, au cours de la
période comprise entre octobre 2013 et la mi-avril 2014, par rapport à la même
période de l’an dernier, on a constaté une légère augmentation des infractions
en la matière transmises au parquet par la police, le nombre d’auteurs de ces
infractions restant presque égal par ailleurs. Néanmoins, le nombre de
condamnations pour des faits de blanchiment d'argent est resté faible. Entre octobre
2013 et la fin du mois de mars, la police nationale a transmis au bureau du
procureur chargé de statuer sur les infractions pénales graves 45 dossiers en
vue de l'ouverture d'enquêtes sur des avoirs d’origine criminelle, ce qui
représente une légère augmentation par rapport à la même période de l’année
précédente. Les enquêtes financières doivent être menées de façon systématique
et les capacités de les mener efficacement doivent être renforcées, ce qui
devrait déboucher sur la confiscation d'une plus grande quantité d'avoirs
d'origine criminelle. Dans le domaine
de la criminalité économique, une vaste opération policière a été
menée entre octobre et décembre 2013 dans des établissements de jeux illégaux;
dans le cadre de cette opération, 720 infractions pénales en la matière
ont fait l'objet d'enquêtes, et de grandes quantités de jeux de hasard ont été
saisies, pour une valeur totale de 8,5 millions d’EUR. Il
convient de procéder systématiquement à la saisie et à la confiscation des
avoirs. La capacité du
Centre opérationnel maritime interinstitutionnel à contrôler les aspects
opérationnels de la lutte contre la criminalité organisée s’est améliorée grâce
à la mise à niveau de 7 radars côtiers, couvrant l’ensemble des eaux
territoriales nationales. Le Total information Management system
(système global de gestion des informations), une base de données en ligne pour
l’échange d’informations des autorités répressives, est pleinement
opérationnel. Des formations conjointes en matière de compétences
opérationnelles ont été dispensées aux membres du personnel du Centre
opérationnel maritime interinstitutionnel. Il y a lieu d'accorder une attention
particulière à l’analyse des risques concernant l'expiration du moratoire sur
les hors-bord. Pour ce qui est
de la lutte contre le trafic de drogue, le plan national contre
la production de stupéfiants est en cours de mise en œuvre. Entre octobre 2013
et fin mars 2014, les saisies de stupéfiants se sont poursuivies: par rapport à
la même période de l’année précédente, les saisies de marijuana et de cocaïne
ont augmenté (de 13,6 t à 18,8 t et de 1,7 kg à 14,5 kg,
respectivement), tandis que celles d’héroïne diminuaient (25,6 kg contre 44,8 kg).
Les destructions publiques des drogues saisies ont eu lieu en mars, avril et
mai. Au total, des opérations plus nombreuses ont conduit à une augmentation
des poursuites pour trafic de drogue au cours de la même période. Les enquêtes
dans les affaires de stupéfiants doivent être systématiquement accompagnées
d'enquêtes financières parallèles. Il est nécessaire d'intensifier les
contrôles systématiques à la frontière bleue afin de fermer les itinéraires
empruntés pour le trafic de drogue. La coopération internationale avec
l’Italie, la Grèce, l’Allemagne, la Belgique, les États-Unis et le Kosovo[2] a
permis l’arrestation de 51 suspects pour trafic international de drogue,
contre 31 personnes l’année dernière, au cours de la même période. Il convient
d’intensifier la lutte contre les réseaux de trafic de drogue grâce au
renforcement de la coopération internationale et au recours à des techniques
d’enquête spéciales, fondées sur une évaluation de la menace, sans oublier les
enquêtes financières parallèles. Il y a lieu d'intensifier les mesures
concrètes visant à éradiquer les plantations de stupéfiants. Le plan national
contre la production de stupéfiants doit être assorti d'indicateurs de
performance mesurables et mentionner les résultats attendus. Dans
l'ensemble, des changements organisationnels ont
été apportés et des actes législatifs fondamentaux sont préparés, pour
adoption, dans les domaines de l'organisation et de la formation policières et
du contrôle des armes à feu. La coopération policière et judiciaire
internationale s’est intensifiée grâce à la mise en œuvre d’accords
d’extradition. La coopération renforcée des autorités répressives a donné un
nouveau souffle au mécanisme national d'orientation en matière de lutte contre
la traite des êtres humains. Les enquêtes ont permis d'obtenir quelques
résultats positifs en matière de lutte contre le trafic de drogue, la traite
des êtres humains et le blanchiment d'argent. Il convient de redoubler
d'efforts en ce qui concerne la lutte contre la production de stupéfiants. Si
elle veut franchir un cap décisif sur la voie de l'intégration à l'Union,
l'Albanie devrait veiller à améliorer ses résultats en ce qui concerne la lutte
contre la criminalité organisée en renforçant la coopération entre agences et l'efficacité
des enquêtes proactives, en systématisant les enquêtes financières, en
consolidant sa coopération internationale et régionale, y compris avec Europol,
et en redoublant d'efforts dans la lutte contre la criminalité organisée, sous
toutes ses formes. 5.
La réforme du système judiciaire Aux fins de
l'amélioration de l'efficacité du système judiciaire, des mesures
de réforme en la matière ont été annoncées en janvier. L’Albanie a demandé la
coopération de la Commission de Venise et une feuille de route abordant les
cinq grandes priorités, y compris la réforme du système judiciaire, a été
élaborée. Le processus d’élaboration d’une stratégie pour la période 2014-2020
a été lancé. En février, un groupe de travail consultatif sur la réforme du
système judiciaire a été créé au sein du ministère de la justice. En mars,
l’Albanie a demandé à la Commission de Venise d’évaluer deux séries de
modifications apportées aux codes de procédure civile et pénale. L'une des
séries de modifications habilite les juges à infliger des amendes aux avocats
qui sont fréquemment absents lors des auditions judiciaires civiles et pénales,
tandis que la deuxième limite les types de recours susceptibles d’être
introduits devant la Haute Cour. Ces modifications visent à réduire la charge
de travail des tribunaux et à améliorer leur efficacité. Il est prévu que
l’aide de la Commission de Venise s’étende progressivement à un large éventail
de sujets. Conformément aux
dispositions modifiées du code de procédure civile, la plupart des affaires
civiles portées devant la Haute Cour sont examinées par un groupe composé de
trois juges. Des mesures supplémentaires sont nécessaires pour améliorer le
fonctionnement de la Haute Cour, dont l'harmonisation et la publication de la
jurisprudence, l'introduction de modifications dans le code de procédure pénale
pour changer les procédures appliquées au sein de la Haute Cour en ce qui
concerne la composition des groupes de juges chargés de l'examen des affaires
pénales, l'adoption de dispositions visant à diminuer le nombre d'appels,
l'achèvement de la réorganisation interne de la Haute Cour, ainsi que le
pourvoi des trois postes qui y sont encore vacants. La récente
publication, pour la première fois, d’une liste complète des juges, avec
mention de leur rang hiérarchique, constitue un premier pas vers un
renforcement de la transparence du système en ce qui concerne la
nomination, la promotion et le transfert des juges. L’évaluation des juges doit
être poursuivie pour la période 2007-2009 et les années suivantes. Des mesures
supplémentaires sont nécessaires pour garantir que les procédures au sein du
Conseil supérieur de la justice pour la nomination, la promotion et le
transfert des juges se fondent exclusivement sur le mérite et d’autres critères
objectifs. Le système de
gestion des dossiers électronique unifié ICMIS, qui garantit une attribution
aléatoire et transparente des affaires aux juges et joue un rôle essentiel dans
le suivi de l’arriéré des dossiers, n’est pas encore appliqué dans toutes les juridictions.
Ainsi, le système n'est pas opérationnel au tribunal d'arrondissement de
Tirana, au tribunal chargé de statuer sur les infractions pénales graves, à la
Cour d’appel pour les infractions pénales graves et dans les tribunaux
administratifs nouvellement créés. Les décisions de
justice devraient être mises à la disposition de tous les praticiens du droit
et du grand public. Elles devraient également être publiées dans une base de
données interrogeable, accompagnées de leur motivation respective et dans un
délai raisonnable, ainsi que dans le respect des recommandations du commissaire
à la protection des données. Les
modifications apportées au code de procédure pénale en ce qui concerne les
délits de corruption par de hauts fonctionnaires (voir le point 3. Mesures de
lutte contre la corruption) introduisent les procédures régissant la levée de
leur immunité. Dans le cas des juges ordinaires, l’autorisation du Conseil
supérieur de la justice, à la demande d’un procureur, est requise pour les
fouilles corporelles et les perquisitions de domiciles, ainsi que pour toute
forme de privation de liberté. Pour les juges des Hautes Cours et des Cours
constitutionnelles, il appartient au Procureur général de demander à la Haute
Cour d'autoriser la levée de l’immunité. À la différence des juges et des
procureurs ordinaires, les membres de Haute Cour et de la Cour
constitutionnelle restent sous la compétence de la Haute Cour pour ce qui est
des infractions liées à la corruption. Le Conseil
supérieur de la justice a transmis au procureur général les informations
relatives à six cas de suspicion de corruption au sein de l'appareil
judiciaire. Depuis octobre
2013, le ministère de la justice a engagé des procédures disciplinaires à
l’encontre de 19 juges, qui ont été transmises au Conseil supérieur de la
justice pour examen. À ce jour, ledit Conseil a traité cinq de ces dossiers,
démettant un juge de ses fonctions, mutant un juge dans une juridiction d’un
rang inférieur pour une période de deux ans, et émettant un avertissement de
licenciement à l’encontre de trois juges. Dans une affaire distincte, le
Conseil supérieur de la justice a suspendu un juge de l'exercice de ses
fonctions, en décembre 2013, dans l’attente d’un jugement final. Des procédures
ont été ouvertes par le ministère de la justice à l’encontre de deux
procureurs. Il y a lieu de renforcer le régime disciplinaire, de revoir le rôle
du ministère de la justice dans la procédure disciplinaire ainsi qu'au sein du
Conseil supérieur de la justice, de mettre efficacement en œuvre de nouvelles
règles en matière d’immunité des magistrats, et de dresser un bilan des
sanctions prises. Du point de vue
de l’efficacité, les six tribunaux administratifs, la Cour
d’appel administrative et le collège administratif de la Haute Cour ont été mis
en place à partir de novembre 2013. La nomination de juges auprès de ces
juridictions, qui traitent, entre autres, les affaires transférées par d’autres
juridictions, a été effectuée sur la base d'un examen. Il reste neuf postes à
pourvoir dans les cinq tribunaux administratifs à l'extérieur de Tirana, et le
nombre d'assistants de justice et de locaux mis à disposition n'est pas encore
suffisant; il convient de remédier à ces lacunes. À la suite de la
décision de mars 2014 de la Cour constitutionnelle déclarant
inconstitutionnelle la loi d'avril 2013 sur l'administration judiciaire, il
convient de combler ce vide juridique et d'adopter des dispositions visant à
réglementer le travail des cours et tribunaux et de leur personnel. Conformément
à cette décision de justice, une majorité qualifiée, par opposition à une
majorité simple, aurait été nécessaire pour permettre au parlement d'approuver
la loi en 2013. En ce qui
concerne l’accès à la justice, il y aurait lieu de mettre en
œuvre des dispositions modifiant la loi de 2008 sur l’aide juridique, en ce qui
concerne l’exonération des frais de justice pour certaines catégories de
citoyens et la mise en place de services d’aide juridique locaux («cliniques
juridiques»). Dans
l’ensemble, l’Albanie a démontré son engagement en
faveur de la réforme judiciaire, notamment en collaborant avec la Commission de
Venise pour améliorer l’indépendance, le professionnalisme du système et
l'obligation de rendre compte. Des efforts ont été faits pour réduire l’arriéré
judiciaire et la charge de travail en général, et pour améliorer la
transparence au sein du système judiciaire. Des mesures ont été prises pour
encourager la responsabilisation des juges et des procureurs grâce à l’adoption
de procédures régissant la levée de leur immunité. Un certain nombre de
sanctions ont été adoptées à la suite de procédures disciplinaires. Si elle
veut franchir un cap décisif sur la voie de l'intégration à l'Union, l'Albanie
doit poursuivre la réforme judiciaire de manière rigoureuse, par un engagement
permanent aux côtés de la Commission de Venise, l’adoption de dispositions
complémentaires significatives visant à renforcer sensiblement l'indépendance
et l'obligation de rendre compte - conformément à la feuille de route pour la
réforme du système judiciaire - ainsi que la mise en œuvre appropriée des
mesures adoptées. 6.
Conclusion L'Albanie a
poursuivi la mise en œuvre et la consolidation de ses mesures de réforme en vue
de son intégration à l'Union, notamment des mesures relatives à son statut de
pays candidat. Elle a fait preuve d'une détermination politique sans faille à
agir de manière radicale pour prévenir et lutter contre la corruption, et les
réformes structurelles témoignent d'une approche globale associant un grand
nombre d'institutions. Des réformes législatives importantes ont été menées
dans le domaine de la lutte contre la criminalité organisée et les enquêtes ont
donné des résultats positifs en matière de lutte contre le trafic de drogue et
dans d’autres domaines de la grande criminalité et de la criminalité organisée.
L’Albanie a démontré son engagement en faveur de la réforme judiciaire,
notamment en collaborant avec la Commission de Venise pour améliorer
l’indépendance, le professionnalisme du système et l'obligation de rendre
compte. Eu égard aux
conclusions du présent rapport, la Commission confirme sa recommandation en
faveur de l'octroi par le Conseil du statut de pays candidat à l'Albanie. Il est important
que le pays poursuive son processus de réforme systématique, car les résultats
durables qu'il produira seront déterminants pour la poursuite de son
intégration à l’UE. Le présent rapport relève déjà un certain nombre de défis
majeurs que l'Albanie doit absolument relever pour continuer d'avancer résolument
sur la voie de son intégration à l'UE. Dans le domaine
de la lutte contre la corruption, si elle veut franchir un cap décisif sur la
voie de l'intégration à l'Union, l'Albanie devrait veiller en premier lieu à
faire respecter la législation en ce qui concerne les déclarations de
patrimoine et de conflit d'intérêts, à être plus proactive dans ses enquêtes et
à introduire de nouvelles mesures visant à accroître l'efficacité de ces
dernières, afin de rester sur la lancée de ses efforts initiaux et d'obtenir
des résultats probants en matière d'enquêtes, de poursuites et de condamnations
définitives dans les affaires de corruption. La profonde réforme judiciaire
prévue sera également décisive dans la lutte contre la corruption. En matière de
lutte contre la criminalité organisée, si elle veut franchir un cap décisif sur
la voie de l'intégration à l'Union, l'Albanie devrait veiller à améliorer ses
résultats en ce qui concerne la lutte contre la criminalité organisée en
renforçant la coopération entre agences et l'efficacité des enquêtes
proactives, en systématisant les enquêtes financières, en consolidant sa
coopération internationale et régionale, y compris avec Europol, et en
redoublant d'efforts dans la lutte contre la criminalité organisée, sous toutes
ses formes. Pour ce qui est
de la réforme du système judiciaire, si elle veut franchir un cap décisif sur
la voie de l'intégration à l'Union, l'Albanie doit poursuivre sa réforme
judiciaire de manière rigoureuse, par un engagement permanent aux côtés de la
Commission de Venise, l’adoption de dispositions complémentaires significatives
visant à renforcer sensiblement l'indépendance et l'obligation de rendre compte
- conformément à la feuille de route pour la réforme du système judiciaire -
ainsi que la mise en œuvre appropriée des mesures adoptées. De plus, il est
essentiel que le processus de réforme s’accompagne d’un dialogue politique
renouvelé et renforcé entre le gouvernement et l’opposition. Pour assurer la
viabilité des réformes, il est essentiel que le travail au sein du parlement
soit constructif et fondé sur le compromis, et
l'instauration d’un Conseil national pour l’intégration à l’UE, rassemblant
toutes les parties prenantes, est capitale pour l'obtention d'un consensus dans
l’ensemble de la société albanaise. Les défis
majeurs relevés dans le présent rapport seront développés plus avant dans le
rapport de suivi de la Commission d'octobre 2014. [1]Le dernier «paquet
élargissement» de la Commission, incluant le rapport de suivi concernant
l'Albanie, a été publié le 16 octobre 2013. [2] Cette
désignation est sans préjudice des positions sur le statut et est conforme à la
résolution 1244/99 du Conseil de sécurité des Nations unies ainsi qu'à l'avis
de la CIJ sur la déclaration d'indépendance du Kosovo.