31.7.2012   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 229/72


Avis du Comité économique et social européen sur le «Livre vert relatif au droit au regroupement familial des ressortissants de pays tiers résidant dans l'Union européenne (directive 2003/86/CE)»

COM(2011) 735 final

2012/C 229/14

Rapporteur: M. PÎRVULESCU

Le 15 novembre 2011, la Commission a décidé, conformément à l'article 304 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur le

«Livre vert relatif au droit au regroupement familial des ressortissants de pays tiers résidant dans l'Union européenne (directive 2003/86/CE)»

COM(2011) 735 final.

La section spécialisée «Emploi, affaires sociales, citoyenneté», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 18 avril 2012.

Lors de sa 481e session plénière des 23 et 24 mai 2012 (séance du 23 mai 2012), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 131 voix pour, 5 voix contre et 8 abstentions.

1.   Introduction

1.1   Tant le programme de Stockholm que le pacte européen sur l’immigration et l’asile ont vu dans le regroupement familial une question appelant un développement des politiques de l’Union, surtout en ce qui concerne les mesures d’intégration. En 2003 ont été approuvées des règles européennes communes en matière d'immigration, qui régissent les conditions d'exercice du droit au regroupement familial des ressortissants de pays tiers dans l'Union européenne.

1.2   La directive définit les conditions d'admission et de séjour pour les membres de la famille ressortissants de pays tiers qui rejoignent un ressortissant de pays tiers qui réside déjà légalement dans un État membre. Cette directive ne s'applique pas aux citoyens de l'Union européenne.

1.3   Dans son premier rapport sur l'application de la directive [COM(2008) 610 final], la Commission a relevé les défauts de la directive et les problèmes que pose son application au niveau national.

1.4   La Commission a estimé qu'il était nécessaire de lancer un débat public sur le regroupement familial, en mettant en exergue certaines questions liées à l'application de la directive. Tel est l'objectif du livre vert à l'examen. Toutes les parties intéressées ont été invitées à répondre à différentes questions concernant la manière de renforcer l'efficacité des règles sur le regroupement familial à l'échelle de l'Union européenne.

1.5   En fonction des résultats de cette consultation, la Commission décidera si un suivi politique concret est nécessaire (par exemple une modification de la directive, des lignes directrices interprétatives ou le statu quo).

2.   Observations générales

2.1   Le Comité économique et social européen juge positive l'initiative de la Commission européenne d'organiser une vaste consultation publique sur la directive relative au regroupement familial. En sa qualité de représentant de la société civile organisée, le CESE proposera son aide pour l'organisation de ces consultations et émettra un avis fondé sur l'expérience qu'il a engrangée.

2.2   Le Comité économique et social européen constate avec inquiétude que, dans le contexte politique, économique et social actuel, les débats sur les questions touchant à l'immigration sont très sensibles. La crise financière et économique a délité les liens de solidarité entre les individus et a entraîné une radicalisation du discours et de l'action politiques. Il convient de souligner que les perspectives démographiques et économiques européennes rendent nécessaire une ouverture vers les citoyens des pays tiers désireux de vivre dans l'UE. La société européenne doit rester ouverte, même s'il existe des fluctuations sur le marché du travail. Bien que nécessaire, le débat sur le regroupement familial, dans le cadre de la politique de l'immigration, est de nature à remettre en question les règles et pratiques existantes, lesquelles constituent pour beaucoup d'entre elles des étapes importantes pour la réalisation des objectifs de cette politique.

2.3   Le Comité économique et social européen est favorable à ce débat; qui plus est, il se mobilisera pour faire en sorte que la voix de la société civile organisée soit un facteur constructif pour avancer dans ce domaine. Quels que soient les défis d'ordre politique ou économique auxquels la société européenne est confrontée, il convient de préserver et de renforcer les fondements de la construction européenne, et en particulier le respect des droits fondamentaux.

2.4   Le CESE apprécie le fait que la Commission européenne soit ouverte à la société civile et au monde universitaire, qui se sont montrés à plusieurs reprises critiques sur le contenu et l'application de la directive. Il souligne à cet égard le rôle positif joué par le Forum européen sur l'intégration, qui facilite le dialogue structuré entre les institutions européennes et différents acteurs engagés dans la question de la migration et de l'intégration.

2.5   De l'avis du Comité, il est nécessaire que le débat consacré à la directive et à son impact soit orienté sur les modalités pratiques de la mise en œuvre et que l'on définisse, lors d'une phase ultérieure, en consultant à nouveau les acteurs intéressés, le mode d'intervention adopté ainsi que ses instruments.

2.6   Le débat sur la directive doit avoir lieu en tenant compte des nombreux traités et conventions internationales protégeant la vie privée ainsi que la famille et ses membres, en particulier les enfants. Le droit au respect de la vie privée et familiale constitue un droit fondamental et doit être considéré comme tel, quelle que soit la nationalité de la personne concernée. Il est consacré, directement ou indirectement, par différents documents: la Déclaration universelle des droits de l'homme (articles 12, 16 et 25), la Convention relative aux droits de l'enfant, la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales (article 7), la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne (articles 8, 9, 24 et 25) et la Charte sociale européenne (article 16).

2.7   Le Comité considère qu'il est nécessaire et opportun de procéder à un débat sur la directive, compte tenu de l'accumulation de données empiriques concernant le regroupement familial, mais aussi pour que la directive reste en phase avec les moyens technologiques qui peuvent être utilisés dans le courant des procédures d'octroi des titres de séjour (par exemple, les tests ADN). Il convient par ailleurs de prendre en considération la jurisprudence de la Cour européenne de justice.

2.8   Même s'il existe de nombreuses données pertinentes sur la migration, le Comité constate que pour des sujets très sensibles tels que les fraudes ou les mariages forcés, il n'existe pas de données suffisantes pour guider la conception des politiques. Aussi recommande-t-il de poursuivre les efforts de collecte des données, notamment qualitatives, dans des domaines aussi sensibles et significatifs.

3.   Observations particulières

3.1   Champ d'application. Qui peut être regroupant aux fins de la directive?

Question 1

Ces critères (une perspective fondée d'obtenir un droit de séjour permanent au moment de la demande, comme le prévoit l'article 3, et une période d'attente jusqu'à ce que le regroupement puisse réellement avoir lieu, comme le prévoit l'article 8) conviennent-ils et constituent-ils les meilleures conditions à remplir pour être regroupant?

3.1.1   Le Comité considère que ce critère de «perspective fondée» est par trop nébuleux sur le plan juridique et peut déboucher sur une interprétation restrictive. Par conséquent, il recommande de conserver la condition de détenir un titre de séjour valable d'une durée supérieure ou égale à un an, mais de supprimer l'autre condition, relative aux perspectives fondées.

3.1.2   De la même manière, la période d'attente minimale est susceptible de poser un problème. Le droit à la vie familiale et le droit à la vie privée sont des droits fondamentaux. Le CESE estime que la concrétisation de ce droit doit permettre au regroupant, au sens de la directive, de pouvoir entamer des procédures de regroupement familial dès le moment de l'obtention du titre de séjour, et que le critère de durée minimale du séjour légal doit être éliminé.

3.1.3   Le Comité comprend que l'on opère une distinction entre les immigrants hautement qualifiés et moins qualifiés, sur le plan du statut et de la protection dont ils bénéficient. Il attire toutefois l'attention sur le fait que l'économie européenne a besoin en une égale mesure de ces deux catégories, et qu'aucune différence ne peut être faite en matière de droits, qu'il s'agisse de la protection de la vie privée ou de la vie familiale, sur la base des qualifications.

3.2   Membres de la famille admissibles. Dispositions obligatoires – la famille nucléaire

Question 2

Est-il légitime d'avoir un âge minimal du conjoint différent de l'âge de la majorité dans un État membre?

Existe-il d'autres moyens de prévenir les mariages forcés dans le contexte du regroupement familial et, dans l'affirmative, lesquels?

Disposez-vous de preuves évidentes du problème des mariages forcés? Dans l'affirmative, quelle est l'ampleur du phénomène (statistiques) et est-il lié aux dispositions sur le regroupement familial (âge minimal différent de celui de la majorité)?

3.2.1   Le Comité estime que la réglementation concernant l'âge minimal du conjoint constitue un instrument qui est à la fois inefficace pour combattre les mariages forcés et de nature à contrevenir au droit fondamental à la vie familiale. Une possibilité en la matière serait de procéder, après un regroupement familial sur le territoire d'un État membre, à une évaluation de la nature du mariage, au moyen d'enquêtes et/ou d'entretiens. Afin d'augmenter les chances de déceler les mariages forcés, lesquels touchent de façon quasi exclusive les femmes, le CESE recommande de concevoir un système d'incitations pour les personnes reconnaissant qu'elles ont été forcées de se marier. Une solution possible, mais en aucun cas exclusive, serait d'octroyer un titre de séjour d'une durée minimale d'un an aux personnes concernées. Le Comité ne dispose pas de preuves manifestes concernant les mariages forcés et recommande que la Commission européenne et d'autres agences spécialisées s'associent pour obtenir des données pertinentes.

Question 3

Pensez-vous qu'il est judicieux de conserver des clauses de statu quo auxquelles les États membres n'ont pas recours, telles que celle sur les enfants âgés de plus de 15 ans?

3.2.2   Le Comité estime qu'il n'est pas nécessaire de conserver les deux clauses visées. La première clause, relative à des conditions d'intégration pour les enfants de plus de 12 ans, n'a été utilisée que par un seul État membre. De plus, il existe un risque que les conditions d'intégration nécessaires soient fixées de manière non uniforme et arbitraire, ce qui peut avoir un impact sur les droits des personnes se trouvant en situation vulnérable - par exemple les mineurs. La deuxième clause, qui concerne les mineurs de plus de 15 ans, est elle aussi susceptible de poser un problème. Aucun État membre n'a eu recours à cette restriction. Le fait d'exiger d'un mineur de justifier d'autres motifs que le regroupement familial pose un problème d'ordre éthique, si l'on considère que le regroupement se fait en vertu d'un droit établi par toutes les conventions internationales sur la protection de l'enfance.

3.3   Disposition facultative - autres membres de la famille

Question 4

Les dispositions relatives aux membres de la famille admissibles conviennent-elles et sont-elles assez vastes pour tenir compte des définitions de la famille autres que celle de la famille nucléaire?

3.3.1   Ces dispositions sont insuffisantes, car il n'existe pas de définition unique de la famille, applicable tant dans les pays tiers que dans les États membres de l'UE. Toutefois, si l'UE ne dispose pas de base juridique pour définir la famille, elle a des instruments pour prévenir la discrimination. Les règles relatives au regroupement familial devraient être suffisamment souples pour recouvrir les différents types de structures familiales reconnus au niveau national (y compris les unions entre personnes de même sexe, les familles monoparentales, les partenariats civils, etc.) et pour prendre en compte d'autres liens de parenté.

3.3.2   Dans la mesure où plus de la moitié des États membres ont utilisé la disposition facultative et ont inclus les parents du regroupant et/ou de son conjoint parmi les membres de la famille admissibles au regroupement, le CESE considère qu'il est utile de conserver cette clause facultative. Les États membres qui le souhaitent ont ainsi la possibilité d'inclure d'autres personnes dans le regroupement familial. Par exemple, il est possible d'inclure les beaux-parents, qui peuvent assumer un rôle bénéfique pour la formation affective et intellectuelle des petits enfants.

3.4   Conditions requises pour l'exercice du droit au regroupement familial - Mesures d'intégration

Question 5

Ces mesures servent-elles efficacement le but de l'intégration? Comment peut-on l'évaluer dans la pratique?

Quelles sont les mesures d'intégration les plus efficaces à cet égard?

Selon vous, ces mesures devraient-elles être davantage définies à l'échelle de l'Union européenne?

Recommanderiez-vous des mesures préalables à l'admission?

Dans l'affirmative, comment mettre en place des garanties afin de s'assurer qu'elles ne créent pas de facto des obstacles excessifs au regroupement familial (tels que des frais ou des exigences disproportionnés) et qu'elles tiennent compte des caractéristiques individuelles telles que l'âge, l'analphabétisme, le handicap et le niveau d'éducation?

3.4.1   Le Comité considère que les mesures d'intégration sont les bienvenues à condition qu'elles soient conçues ou appliquées non pas pour faire obstacle au regroupement familial, mais en faveur des regroupants et des membres de la famille dans laquelle ils vivent. Le CESE considère que les mesures d'intégration doivent être prises sur le territoire du pays d'accueil, membre de l'UE, et non sur le territoire du pays tiers.

3.4.2   L'Agenda pour l'intégration des ressortissants de pays tiers propose une «boîte à outils» (Integration Toolbox) qui peut être utilisée. Le CESE estime nécessaire, dans le cadre de cette palette d'outils, de mettre l'accent sur l'apprentissage linguistique, ainsi que sur l'enseignement de type formel et non formel. Le CESE a rappelé à de nombreuses reprises que l'éducation est une dimension clé de l'intégration. L'utilisation de ces outils doit être adaptée aux spécificités démographiques et socioéconomiques des membres de la famille. Il est recommandé de faire participer les enfants mineurs aux programmes d'enseignement formels et non formels, et de faire participer les adultes et les personnes âgées aux programmes d'apprentissage des langues et de qualification professionnelle, ainsi qu'à ceux d'intégration électronique («e-inclusion»). Ces mesures pourraient aider les membres de la famille à apporter une contribution à l'économie et la société du pays d'accueil, ainsi qu'à celles des pays d'origine.

3.4.3   Le CESE estime qu'il conviendrait d'éviter les mesures préalables à l'admission. Les membres de la famille regroupée sur le territoire de l'UE peuvent, idéalement, avoir des connaissances linguistiques et des bases culturelles ou éducatives propres à faciliter leur intégration, mais cela ne doit pas devenir une condition du regroupement, si celui-ci n'est pas encore opéré. Outre le problème des obstacles excessifs (par exemple, les frais), il est possible que les États membres de l'UE et les pays tiers ne disposent pas de l'infrastructure institutionnelle suffisante pour assumer ces mesures préalables. Le fait d'organiser les mesures d'intégration sur le territoire de l'État membre d'accueil peut assurer aux membres de la famille un niveau plus élevé de protection, un soutien plus important de la part des regroupants et une chance supérieure d'intégration. Il est possible que les ONG aient un rôle important dans l'intégration, mais le rôle principal doit rester aux mains des autorités publiques, qui disposent de la responsabilité juridique et des ressources nécessaires pour assurer l'intégration.

3.5   Période d'attente en ce qui concerne la capacité d'accueil

Question 6

Compte tenu de son application, est-il nécessaire et justifié de conserver dans la directive une telle dérogation prévoyant une période d'attente de trois ans à compter de la date de dépôt de la demande?

3.5.1   Dans la mesure où un seul État membre a eu recours à cette dérogation, le CESE estime qu'il n'est pas justifié de la conserver. De plus, la décision d'octroyer un titre de séjour doit prendre en considération les circonstances individuelles, et non la capacité d'accueil. La capacité d'accueil est variable et résulte d'une politique qui est susceptible de changer si nécessaire.

3.6   Entrée et séjour des membres de la famille

Question 7

Faudrait-il instaurer des dispositions particulières régissant la situation dans laquelle le titre de séjour du regroupant n'est plus valable que pendant moins d'un an mais est sur le point d'être renouvelé?

3.6.1   Les titres de séjour des regroupants et des membres de leur famille doivent avoir la même période de validité. Avant l'expiration de l'ensemble des titres de séjour et afin d'éviter des décalages temporels entre eux, il pourrait être envisagé de déposer une demande commune pour les membres de la famille.

3.7   Questions relatives à l'asile - Exclusion de la protection subsidiaire

Question 8

Le regroupement familial de ressortissants de pays tiers bénéficiaires de la protection subsidiaire devrait-il être soumis aux dispositions de la directive relative au regroupement familial?

Les bénéficiaires de la protection subsidiaire devraient-ils bénéficier des dispositions plus favorables de la directive relative au regroupement familial, qui dispense les réfugiés de certaines obligations (logement, assurance maladie, ressources stables et régulières)?

3.7.1   Le Comité estime que les bénéficiaires de la protection subsidiaire devraient bénéficier des dispositions plus favorables de la directive relative au regroupement familial, et par conséquent rentrer dans le champ d'application de la directive. Les bénéficiaires de la protection subsidiaire viennent de pays et de régions du monde reconnus dangereux pour leur sécurité et leur bien-être. Cela rend d'autant plus nécessaire d'avancer vers une uniformisation des deux statuts.

3.8   Autres questions relatives à l'asile

Question 9

Les États membres devraient-ils continuer d'avoir la possibilité de restreindre l'application des dispositions plus favorables de la directive aux réfugiés dont les liens familiaux sont antérieurs à leur entrée sur le territoire d'un État membre?

Le regroupement familial devrait-il être assuré pour d'autres catégories de membres de la famille qui dépendent des réfugiés, et si oui, dans quelle mesure?

Faut-il continuer à exiger des réfugiés qu'ils prouvent qu'ils remplissent les conditions concernant le logement, l'assurance maladie et les ressources si la demande de regroupement familial n'est pas introduite dans un délai de trois mois suivant l'octroi du statut de réfugié?

3.8.1   Le Comité estime que la définition de la famille ne doit pas comprendre de critère de durée. Certaines personnes fondent leur famille dans l'État membre d'accueil, et non dans le pays tiers d'origine. La famille doit pouvoir être regroupée indépendamment du moment et du lieu où elle a été fondée. Le regroupement familial devrait être étendu de sorte à prendre en compte des catégories de personnes plus diverses, notamment s'agissant des enfants ayant atteint l'âge de 18 ans ou des frères et sœurs, en prenant en considération les facteurs de risque liés au pays d'origine ainsi que les facteurs culturels. Deuxièmement, il faut supprimer le délai limité pour l'introduction de la demande de regroupement familial, ou étendre ce délai pour permettre aux regroupants potentiels de contacter les membres de leur famille qui peuvent se trouver dans des régions éloignées, et de préparer l'ensemble des documents nécessaires à leur demande. On peut envisager de fixer un délai en fonction de la date d'expiration du titre de séjour temporaire (par exemple, 6 mois).

3.9   Fraude, abus et problèmes de procédure - Entretiens et enquêtes

Question 10

Disposez-vous de preuves évidentes de problèmes de fraude? Quelle est l'ampleur du phénomène (statistiques)? Pensez-vous que des dispositions régissant les entretiens et les enquêtes, y compris les tests ADN, peuvent contribuer de manière significative à résoudre ces problèmes?

Serait-il, selon vous, utile de régir plus spécifiquement ces entretiens et enquêtes à l'échelle de l'Union européenne? Dans ce cas, quel type de règles envisageriez-vous?

3.9.1   Le CESE ne dispose pas de preuves manifestes concernant les problèmes de fraude. Il considère que les entretiens et enquêtes sont légitimes aussi longtemps qu'ils ne rendent pas inopérant le droit au regroupement familial.

Concernant les tests ADN, le CESE les désapprouve. Bien qu'il s'agisse d'un moyen scientifiquement valable de prouver les liens biologiques entre personnes, il ne prend pas en compte l'ensemble des relations émotionnelles, sociales et culturelles qui peuvent se créer entre les membres d'une même famille, sans qu'il y ait nécessairement de lien biologique. En cas d'adoption, les tests ADN sont inappropriés. De plus, les tests ADN peuvent révéler des situations familiales fort délicates (adoptions passées sous silence, infidélités). Ainsi, les tests ADN sont manifestement contraires au droit à la vie privée et sont susceptibles de faire naître des drames personnels dont une autorité publique ne saurait se rendre responsable. Le CESE estime par conséquent nécessaire de mettre en place des règles régissant les enquêtes et entretiens, embrassant tout l'éventail d'instruments existants, tant juridiques que technologiques. À cette fin, il pourrait être judicieux de faire participer l'Agence des droits fondamentaux. Le Comité se dit prêt à collaborer avec les institutions européennes ainsi qu'avec les autres institutions et organisations en vue de définir de telles règles. Il attire également l'attention sur le principe de proportionnalité. Le regroupement familial ne peut être traité comme un élément de droit pénal.

3.10   Mariages de complaisance

Question 11

Disposez-vous de preuves évidentes de problèmes de mariages de complaisance? Disposez-vous de statistiques sur de tels mariages (s'ils sont décelés)?

Sont-ils liés aux dispositions de la directive?

Les dispositions de la directive concernant les contrôles pourraient-elles être mises en œuvre de façon plus efficace et, dans l'affirmative, comment?

3.10.1   Le CESE ne dispose pas de preuves manifestes concernant les mariages de complaisance. Les futures réglementations sur les contrôles, les vérifications et les entretiens peuvent contribuer à limiter ce phénomène. Le CESE souligne que ces règles devront être définies en collaboration avec l'Agence européenne des droits fondamentaux de l'Union européenne, afin de garantir qu'elles ne contreviendront pas au respect des droits fondamentaux des personnes concernées.

3.11   Frais

Question 12

Conviendrait-il de régir les frais administratifs à verser lors de la procédure?

Dans l'affirmative, devrait-ce être sous la forme de garanties ou faudrait-il donner des indications plus précises?

3.11.1   Le CESE estime injustifié que les frais à verser ne soient pas uniformes. Il est par conséquent nécessaire de fixer un plafond pour ces frais, afin de ne pas porter atteinte à la substance de la directive. Le CESE estime que l'on pourrait envisager soit d'imposer un plafond unique et de faible montant, soit de déterminer l'ensemble des frais en fonction du revenu par habitant – ou d'un autre indicateur - du pays tiers La demande de regroupement étant une procédure individuelle, il pourrait être envisagé, plus profitablement, de fixer un plafond en fonction des revenus de chaque requérant (par exemple, un pourcentage du revenu annuel moyen). Quant aux mineurs, ils doivent payer des frais réduits, ou être exonérés de frais.

3.12   Durée de la procédure - délai pour la décision administrative

Question 13

Le délai administratif pour l'examen de la demande fixé par la directive est-il justifié?

3.12.1   Le CESE estime qu'il convient de modifier la directive afin d'harmoniser les pratiques et les rendre communes au niveau des États membres. Il recommande donc de réduire le délai de 9 à 6 mois.

3.13   Dispositions horizontales

Question 14

Comment faciliter et garantir l'application de ces dispositions horizontales dans la pratique?

3.13.1   Le CESE estime que le moyen le plus adapté d'appliquer les dispositions horizontales, s'agissant tant de l'intérêt supérieur de l'enfant mineur que de l'obligation qui est faite d'examiner chaque demande au cas par cas, moyen qui permettra aussi de résoudre d'autres aspects problématiques du regroupement familial, est de fixer des règles spécifiques et uniformes régissant tous les types d'examens, de contrôles et d'enquêtes possibles. Ces règles devront être proportionnées et respecter les droits humains fondamentaux.

Bruxelles, le 23 mai 2012.

Le président du Comité économique et social européen

Staffan NILSSON