21.6.2012   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 181/179


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif à la mise en place et l'exploitation des systèmes européens de radionavigation par satellite»

COM(2011) 814 final — 2011-392-COD

2012/C 181/32

Rapporteur: M. McDONOGH

Le 15 décembre 2011, le Parlement européen et le 20 janvier 2012, le Conseil de l'Union européenne ont décidé, conformément à l'article 172 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la

«Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif à la mise en place et l'exploitation des systèmes européens de radionavigation par satellite»

COM(2011) 814 final — 2011/-392 (COD).

La section spécialisée «Transports, énergie, infrastructure, société de l'information», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 13 mars 2012.

Lors de sa 479e session plénière des 28 et 29 mars 2012 (séance du 28 mars 2012), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 167 voix pour et 4 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1   Le Comité accueille favorablement la proposition de la Commission concernant un règlement du Parlement européen et du Conseil relatif à la mise en place et l'exploitation des systèmes européens de radionavigation par satellite. Le succès des programmes GNSS européens (Global Navigation Satellite Systems - systèmes mondiaux de radionavigation par satellite) est une condition essentielle de la prospérité et de la sécurité futures de l'Union européenne. Nous soutenons la proposition de la Commission visant à remplacer le règlement (CE) no 683/2008 par un nouveau règlement prévoyant les modalités de financement et de gouvernance des programmes Galileo et EGNOS.

1.2   Le Comité soutient fermement l'objectif du programme Galileo qui est de créer le premier système mondial de radionavigation par satellite (GNSS) placé sous contrôle civil et entièrement indépendant des autres systèmes existants, afin de fournir des services GNSS ininterrompus et d'offrir ainsi un avantage stratégique à l'Europe. La radionavigation par satellite est déjà un service d'utilité publique essentiel pour les transports, l'industrie et les citoyens européens, et il est inacceptable que nous soyons actuellement aussi dépendants du GPS américain et du GLONASS russe pour la localisation, la navigation et la synchronisation. Les services GNSS européens doivent être fournis sur la base d'une infrastructure européenne dont la fiabilité ne dépend pas des priorités des autorités militaires américaines, russes ou chinoises.

1.3   Étant donné que 6 à 7 % du PIB de l'UE-27, soit 800 milliards d'euros, dépendent déjà du système de GPS américain (selon le résumé de l'analyse d'impact concernant le système européen de radionavigation par satellite, accompagnant la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil sur la poursuite de la mise en œuvre des programmes européens de navigation par satellite (2014-2020) - SEC(2011) 1447 final, du 30.11.2011), le Comité se félicite que le règlement mette l'accent sur l'interopérabilité entre les systèmes Galileo et GPS. Le CESE estime toutefois que, parallèlement aux efforts d'interopérabilité, l'Europe devrait mener une politique agressive visant à remplacer le GPS par les technologies Galileo et EGNOS, qui deviendraient ainsi les technologies de base pour le GNSS en Europe.

1.4   Le CESE recommande que le potentiel d'innovation du GNSS européen soit fortement mis en valeur dans le programme de recherche et d'innovation de l'UE, Horizon 2020 (programme d'investissement dans la recherche et l'innovation de l'UE pour la période 2014-2020, doté d'un budget de 80 milliards d'euros). Les systèmes de navigation par satellite seront d'une valeur considérable pour l'innovation technologique et peuvent générer d'importants bénéfices macroéconomiques pour l'Union.

1.5   Il est essentiel de parvenir à mettre en œuvre et à gérer avec succès les programmes GNSS européens Galileo et EGNOS, afin de concrétiser l'objectif d'une croissance intelligente, durable et inclusive décrite dans la stratégie Europe 2020 (EUROPE 2020 – Une stratégie pour une croissance intelligente, durable et inclusive – COM(2010) 2020). Le Comité prend note que, selon l'analyse coûts-bénéfices de la Commission (analyse d'impact accompagnant la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil sur la poursuite de la mise en œuvre des programmes européens de navigation par satellite (2014-2020) - SEC(2011) 1446 final), les programmes GNSS proposés généreront 68,63 milliards d'euros de bénéfices nets pour l'Union pendant le cycle de vie 2014-2034 du système (soit 116,88 milliards d'euros à prix constants en appliquant le taux d'actualisation standard de 4 % par an, conformément aux lignes directrices de l'UE concernant l'analyse d'impact).

1.6   Si le CESE soutient les objectifs stratégiques du GNSS européen et la proposition de règlement pour la mise en place et l'exploitation de ces systèmes, il tient néanmoins à exprimer ses préoccupations quant à la manière dont l'Europe a géré les programmes à ce jour, compte tenu des retards considérables, de l'escalade des coûts et des pertes de bénéfices qui en ont résulté. Le Comité espère que la proposition de règlement permettra de fournir l'appui politique ainsi que le cadre et les structures de gestion nécessaires pour mettre en œuvre le GNSS européen, tel qu'il est envisagé, et en retirer les bénéfices attendus.

1.7   Le Comité relève que 19,5 % des bénéfices financiers résultant du programme de GNSS européen seront issus de la croissance du marché en aval des applications européennes du GNSS (analyse d'impact accompagnant la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil sur la poursuite de la mise en œuvre des programmes européens de navigation par satellite (2014-2020) - SEC(2011) 1446 final). À cet égard, le Comité attire l'attention de la Commission sur son avis du 16 février 2011 portant sur le «Plan d'action relatif aux applications basées sur le système mondial de radionavigation par satellite (GNSS) (1)». Le Comité demande plus particulièrement que l'agence du GNSS européen élabore un plan d'exploitation détaillé afin d'accroître ce marché essentiel.

1.8   Le Comité estime qu'il est urgent d'appliquer aux systèmes européens de radionavigation par satellite une stratégie de marketing offensive et un leadership commercial affirmé, soutenus par des investissements appropriés dans les programmes de commercialisation. Le développement commercial d'EGNOS et de GALILEO est une condition cruciale de leur succès à long terme; il est indispensable de faire connaître au marché la valeur du GNSS, et de promouvoir son utilisation. Trop peu a été fait à ce jour pour relever ce défi essentiel et complexe.

1.9   Le CESE se félicite que la Commission insiste sur la nécessité d'une saine gestion financière des programmes, dont le coût a été évalué à 7,89 milliards d'euros à prix courants pour le prochain cadre financier 2014-2020. Pour le Comité, il est satisfaisant que le règlement précise que la Commission européenne doit gérer les fonds alloués aux programmes et superviser la mise en œuvre de l'ensemble des activités relevant de ces derniers, y compris celles qui sont déléguées tant à l'Agence du GNSS européen qu'à l'Agence spatiale européenne. De même, il accueille favorablement les plans de la Commission visant à mettre en place un mécanisme de gestion des risques et des outils de gestion afin de minimiser la probabilité de dépassement des coûts liés aux programmes.

1.10   Néanmoins, le CESE prend note également de l'avertissement de la Commission, qui précise que les investissements dans les technologies de navigation par satellite présentent un degré élevé d'incertitude et des risques qui rendent complexe la tâche de prévoir avec exactitude les coûts des programmes. Dès lors, sans préjudice des conventions de délégation (conformément au règlement (CE, Euratom) no 1605/2002, notamment son article 54), le Comité recommande que la Commission organise chaque mois des réunions de gestion tant avec l'Agence du GNSS européen qu'avec l'Agence spatiale européenne, afin de suivre les avancées des programmes et de traiter sans délai tout problème éventuel. Par ailleurs, ces deux agences devraient faire parvenir à la Commission européenne, chaque trimestre au minimum, des rapports de gestion et des comptes détaillés.

1.11   Le Comité invite la Commission à se référer aux avis qu'il a précédemment élaborés au sujet de Galileo, d'EGNOS et de la stratégie Europe 2020 (2).

2.   Contexte

2.1   Les technologies relatives aux systèmes mondiaux de navigation par satellite (GNSS), capables de fournir des mesures de position, de vitesse et de temps précises et extrêmement fiables, sont fondamentales pour réaliser des gains d'efficacité dans de nombreux secteurs de l'économie et domaines de la vie quotidienne des citoyens.

2.2   En attendant que Galileo devienne opérationnel, l'Europe doit utiliser les services de navigation par satellite du GPS américain ou du GLONASS russe pour la localisation, la navigation et la synchronisation. On estime que la dépendance de l'Europe vis-à-vis du système GPS représente 6 à 7 % du PIB de l'UE-27, soit 800 milliards d'euros (SEC(2011) 1447 final, du 30.11.2011). Pour autant, les opérateurs militaires de ces systèmes ne peuvent aucunement garantir le maintien d'un service ininterrompu.

2.3   Bien que le programme Galileo ait été principalement développé pour répondre à un besoin d'indépendance en matière de radionavigation par satellite planétaire, l'interopérabilité avec les systèmes de navigation par satellite existants et futurs, en particulier le GPS américain, constitue une valeur ajoutée importante.

2.4   Le programme GALILEO a été mis en chantier dans le but d'établir un système global européen indépendant de navigation par satellite (GNSS).

2.5   EGNOS est un système de renforcement satellitaire régional pour l'Europe, qui améliore les signaux en provenance des systèmes existants de navigation par satellite, tels que le GPS.

2.6   Galileo, le programme européen de navigation par satellite, a été lancé en 2001. À l'origine, le projet reposait sur un partenariat public-privé avec l'entreprise commune Galileo constituant une plateforme commune de gestion et de financement. En 2006, l'entreprise commune a été remplacée par l'Agence du GNSS européen (connue précédemment sous l'appellation «autorité de surveillance du GNSS européen») chargée de gérer les aspects des programmes GNSS européens liés à l'intérêt public. L'Agence spatiale européenne était responsable de la gestion technique et de la mise en œuvre des programmes GNSS.

2.7   Adopté en 2008, le règlement GNSS (3) faisait de l'UE la seule organisation politique chargée de diriger et de financer en totalité la politique européenne de GNSS. Le règlement GNSS fixait le financement par l'UE des programmes Galileo and EGNOS pour la période 2007-2013. Le budget de 3,4 milliards d'euros était ventilé entre la fin de la phase de développement de Galileo, la phase de déploiement de Galileo et l'exploitation d'EGNOS.

2.8   La proposition de la Commission relative au prochain cadre financier pluriannuel pour le budget de l'UE 2014-2020 (COM(2011) 500 final du 29.6.2011 - Un budget pour la stratégie Europe 2020) prévoit que les programmes GNSS soient entièrement financés sur le budget de l'UE, à concurrence de 7 milliards d'euros en prix constants de 2011.

2.9   Les avancées dans la mise en œuvre des programmes européens de navigation par satellite sont entravées par deux problèmes essentiels:

1)

en raison des surcoûts et des retards dans la mise en œuvre du système, le GNSS devant être établi dans le cadre du programme Galileo ne sera pas entièrement opérationnel en 2013 comme prévu;

2)

le règlement GNSS de 2008 ne prévoyant pas le cadre de financement et de gouvernance des programmes Galileo et EGNOS pour la période post-2013, il est nécessaire d'établir une nouvelle base juridique pour que les systèmes puissent être opérationnels, entretenus et gérés à long terme.

2.10   La proposition de la Commission aborde ces problèmes en créant un nouveau règlement visant à remplacer le règlement (CE) no 683/2008, prévoyant ainsi la structure de financement et de gouvernance en vue de la mise en œuvre et de l'exploitation réussies des programmes Galileo et EGNOS.

2.11   En ce qui concerne l'infrastructure, l'analyse coûts-bénéfices jointe à la proposition montre que la solution optimale consiste à déployer la constellation de 30 satellites prévue à l'origine, en simplifiant néanmoins l'infrastructure terrestre. Cette solution permettrait au GNSS de fournir l'ensemble des services prévus et des bénéfices initialement envisagés, à la seule différence que l'intégralité du «service de sauvegarde de la vie» (safety of life) ne serait disponible qu'en interopérabilité avec le GPS américain (le service «Safety-of-life» d'EGNOS permet aux aéronefs d'effectuer des approches précises et accroît ainsi la sûreté de la navigation aérienne. Il contribue également à réduire les retards, les détournements et les annulations de vols. Par ailleurs, il permet aux aéroports d'augmenter leurs capacités et de réduire les coûts d'exploitation. Enfin, il contribue à la réduction des émissions de CO2 dans le secteur aérien).

2.12   Pour ce qui est du cadre de gouvernance, la meilleure solution consiste à ajouter à l'actuel mandat de l'Agence du GNSS européen, recouvrant les questions de sécurité et les aspects commerciaux, les tâches de gestion de programme de la phase d'exploitation. La Commission européenne conservera la responsabilité de la gestion des fonds alloués aux programmes, et supervisera la mise en œuvre de l'ensemble des activités relevant de ces derniers, notamment celles qui sont déléguées tant à l'Agence du GNSS européen qu'à l'Agence spatiale européenne.

3.   Observations générales

3.1   Les programmes EGNOS et Galileo exigent un leadership affirmé et le soutien total et sans équivoque de l'UE pour permettre de réparer le préjudice, en matière de confiance des marchés, causé par l'effondrement de l'entreprise commune Galileo en partenariat public-privé. La dotation budgétaire pour la période 2014-2020 et la proposition de règlement soumise par la Commission sont un bon début; il sera néanmoins nécessaire, dès à présent, de faire preuve d'une gestion saine et d'apporter aux programmes un soutien politique cohérent afin de renforcer la confiance des marchés.

3.2   L'Europe doit accélérer le rythme du déploiement et du développement commercial du GNSS, à plus forte raison si l'on considère le coût du retard accusé par Galileo et la concurrence toujours plus forte des États-Unis, de la Russie et de la Chine. La Chine s'emploie à convertir son système de navigation par satellite à usage militaire Beidou en système mondial, le dénommé COMPASS, dans le but d'offrir des services concurrentiels à usage civil dans le monde entier, d'ici 2020, y compris en Europe. GALILEO et EGNOS doivent devenir, le plus rapidement possible, la norme GNSS en Europe.

3.3   Les systèmes européens de navigation par satellite devraient représenter un volet important du programme de recherche et d'innovation Horizon 2020. La création de nouveaux produits et services reposant sur le GNSS européen permettra non seulement de stimuler une croissance intelligente, mais soutiendra également le développement durable en contribuant à accroître l'efficacité énergétique et en réduisant l'impact environnemental du développement économique.

3.4   Tout en respectant les lois de la concurrence mondiale, il serait peut-être souhaitable de déterminer des mesures européennes susceptibles de favoriser le choix des technologies Galileo par rapport à des technologies moins performantes, notamment pour les applications qui exigent une confiance dans la continuité du service ou des niveaux élevés de précision et d'intégrité, ou bien encore qui comportent des contraintes de sécurité.

3.5   Étant donné l'importance des jeux de composants des récepteurs dans une stratégie de pénétration du marché et de développement d'applications, il est d'une importance critique de développer des jeux de composants de récepteurs à bas prix ayant la double fonction GPS + Galileo (un jeu de composants [en anglais, chipset ou chip set] est un groupe de circuits intégrés [ou puces] conçus pour fonctionner ensemble. Ils sont généralement commercialisés comme un seul et même produit. Un jeu de composants est habituellement conçu pour fonctionner avec une famille spécifique de microprocesseurs. Le jeu de composants contrôle les communications entre le processeur et les appareils périphériques, c'est pourquoi il joue un rôle fondamental dans la définition des performances du système). Il conviendrait d'orienter tout spécialement les dépenses de R&D vers cet objectif.

3.6   Il faut prévoir une stratégie permettant de cerner les effets de courbe d'apprentissage de la production de masse, qui revêt une importance critique pour la fabrication à faible coût de jeux de composants pour les récepteurs, de sorte que les jeux de composants ayant la double fonction GPS/Galileo puissent concurrencer au niveau des coûts les jeux de composants ne recevant que les signaux GPS.

3.7   Afin d'assurer la croissance du marché en aval des applications et produits européens du GNSS, l'agence du GNSS européen doit disposer d'une stratégie agressive de développement commercial, menée par une équipe hautement qualifiée.

3.8   Il y aurait lieu de développer pour EGNOS/Galileo une stratégie de marque à l'échelle mondiale, permettant d'harmoniser les objectifs, de mettre en exergue la valeur de la marque, de simplifier les communications sur le marché et de clarifier les priorités en matière de commercialisation.

3.9   Les technologies et services Galileo mis sur le marché doivent toujours répondre aux normes de qualité les plus élevées. Un contrôle rigoureux de la qualité doit être maintenu en ce qui concerne le développement technologique et l'application au niveau de l'utilisateur final.

3.10   Malheureusement, certains produits EGNOS de la première heure n'ont pas présenté la qualité technique nécessaire pour répondre aux exigences des clients. Dans le cadre d'une stratégie de marque, il importe de développer un label de qualité pour toutes les technologies EGNOS/Galileo approuvées, afin de protéger la réputation de la marque contre toute atteinte.

Bruxelles, le 28 mars 2012.

Le président du Comité économique et social européen

Staffan NILSSON


(1)  JO C 107 du 6.4.11, p. 44.

(2)  JO C 221 du 8.9.2005, p. 28; JO C 317 du 23.12.2009, pp. 103–104 et JO C 107 du 6.4.2011, pp. 44-48.

(3)  JO L 196 du 24.8.2008, p. 1.