3.5.2011   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 132/53


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 2000/25/CE en ce qui concerne l'application des phases d'émissions aux tracteurs à voie étroite»

COM(2011) 1 final — 2011/0002 (COD)

2011/C 132/09

Rapporteur général: M. BURNS

Le Conseil, en date du 2 février 2011, et le Parlement européen, en date du 20 janvier 2011, ont décidé, conformément à l'article, 114 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la

«Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 2000/25/CE en ce qui concerne l'application des phases d'émissions aux tracteurs à voie étroite»

COM(2011) 1 final — 2011/0002 (COD)

Le 18 janvier 2011, le Bureau du Comité a chargé la section spécialisée «Marché unique, production et consommation» de préparer les travaux du Comité en la matière.

Compte tenu de l'urgence des travaux, le Comité économique et social européen a décidé au cours de sa 470e session plénière des 15 et 16 mars 2011 (séance du 16 mars 2011) de nommer M. BURNS rapporteur général, et a adopté le présent avis par 147 voix pour et 7 abstentions.

1.   Résumé et recommandations

1.1

Le Comité économique et social européen (CESE) est fermement convaincu qu'il est indispensable de réduire les émissions nocives de monoxyde de carbone, d'oxydes d'azote, d'hydrocarbures et de particules émanant des moteurs installés sur les tracteurs agricoles et forestiers afin de contribuer à la réalisation des objectifs de l'UE en termes de qualité de l'air.

1.2

Le CESE estime qu'une législation ayant pour objectif d'être favorable à la santé de l'homme et à l'environnement doit s'appuyer sur de solides évaluations techniques, économiques et sociales.

1.3

Le CESE est d'avis que les études indépendantes et les données recueillies par la Commission prouvent la nécessité d'accorder davantage de temps au développement de systèmes de post-traitement adéquats et à leur installation sur les tracteurs spécialisés conformément aux exigences concernant la production de cultures de qualité, qui s'appliquent en priorité aux vignes.

1.4

Le CESE soutient la proposition de la Commission de retarder de trois ans, pour les tracteurs de type T2, C2 et T4.1, les dates prévues à l'article 4 de la directive 2000/25/CE pour la réception par type et la première mise en circulation des phases IIIB et IV.

1.5

Le CESE estime en outre que les enquêtes qui ont précédé l'élaboration de la proposition ne montrent pas avec une certitude suffisante que ces tracteurs sont effectivement en mesure de se conformer à la phase IV.

1.6

Le CESE recommande que la Commission européenne mène, durant une période suffisamment longue (le Comité recommande que le délai soit fixé à la fin de l'année 2014), une enquête supplémentaire sur la faisabilité de l'étape IV une fois que la technologie aura atteint un degré de développement suffisant et propose, si besoin, de nouvelles modifications aux exigences ou aux délais relatifs à la phase IV pour les tracteurs à voie étroite.

1.7

Le CESE suggère que toute future évolution de la législation régissant les émissions d'échappement des engins mobiles non routiers (EMNR) et des tracteurs fasse l'objet d'une évaluation d'impact détaillée et conjointe, et que la législation ne soit pas étendue à d'autres types d'équipement sans un examen adéquat et une possibilité de révision.

1.8

Étant donné que toutes les évolutions de la législation sur les émissions d'échappement d'engins mobiles non routiers de la directive 97/68/CE sont automatiquement transposées à la directive sur les tracteurs équivalente (2000/25/CE), le CESE recommande que la Commission européenne tienne compte des spécificités des tracteurs en général et de celles des tracteurs à voie étroite en particulier, au titre de toute évaluation d'impact, même s'ils ne relèvent pas du champ d'application de la directive 97/68/CE.

2.   Introduction

2.1

La directive 2000/25/CE s'applique aux véhicules équipés de moteur à allumage par compression entre 18 et 560 kW, utilisés dans l'agriculture et la sylviculture. Elle définit des limites d'émissions de monoxyde de carbone, d'oxydes d'azote, d'hydrocarbures et de particules. La directive prévoit des limites de plus en plus strictes au fur et à mesure des différents stades, avec des dates de mise en conformité pour les niveaux maximums d'émission de gaz d'échappement et de particules. Les prochaines phases seront la IIIB (qui a commencé au 1er janvier 2011) et la IV (qui débutera le 1er janvier 2014).

2.2

Les limites d'émissions d'échappement des tracteurs agricoles et forestiers ont été modifiées en 2005. Les dispositions applicables aux engins mobiles non routiers (directive 97/68/CE modifiée par la directive 2004/26/CE) avaient alors été transposées aux tracteurs agricoles sans qu'aucune évaluation d'impact spécifique portant sur la faisabilité technique de ces exigences n'ait été menée. D'autre part, l'article 4, paragraphe 8 de la directive prévoyait qu'une étude de faisabilité devait être réalisée avant que les phases IIIB et IV ne deviennent obligatoires.

2.3

En Europe, les tracteurs spécialisés ont été développés au cours des quarante dernières années afin d'assurer l'exploitation automatisée de terrains spécifiques et pour tenir compte des configurations particulières de certains types de culture telles que les vignes, les vergers ou autres, et ce principalement en Europe centrale et méridionale. Ces exigences opérationnelles sont propres aux cultures européennes et ces tracteurs spécialisés ne sont développés que pour ce marché. Les tracteurs agricoles et forestiers utilisés pour ce type de culture sont classés par la directive cadre sur les tracteurs (2003/37/CE) en trois catégories - T2, C2 et T4.1 et portent l'appellation générique de tracteurs à voie étroite.

2.4

Parallèlement au développement des tracteurs, les cultures spécialisées ont été restructurées (1) pour optimiser le rendement et la qualité des récoltes. Cette restructuration s'est appuyée sur la présence des tracteurs à voie étroite; par conséquent, à l'heure actuelle, il existe une totale interdépendance entre les tracteurs et certaines cultures de l'UE dont la qualité et le rendement sont parmi les meilleurs.

2.5

Les exigences strictes des phases IIIB et IV préconisent d'équiper les moteurs de systèmes de post-traitement des gaz d’échappement qui sont d'une taille imposante par rapport à celle du moteur-même et dont l'installation est très sévèrement encadrée par les exigences relatives au fonctionnement. Les moteurs utilisés dans ces tracteurs sont les mêmes que ceux que l'on emploie pour d'autres types de tracteurs; la principale différence réside dans l'espace disponible pour le compartiment moteur et dans le fait que l'ensemble de l'espace autour du compartiment moteur soit limité.

2.6

Les fabricants de tracteurs ne peuvent pas installer des moteurs comprenant les systèmes de post-traitement des gaz tout en continuant à respecter les exigences opérationnelles en termes de taille et de manœuvrabilité, qui constituent les principales spécificités de conception de ces machines.

2.7

Ces conclusions ont été confirmées par diverses études menées à la demande de la Commission, qui suggèrent soit que ces tracteurs soient totalement exemptés des phases IIIB et IV, ou bien que l'application de ces exigences soit retardée d'au moins cinq ans.

2.8

Il se vend environ 26 000 de ces tracteurs par an, ce qui représente près de 16 % du nouveau marché des tracteurs dans l'UE. Il faut agir, sinon aucun tracteur moderne conforme à la phase IIIA ne pourra plus être commercialisé. Cela mettrait un terme à l'amélioration environnementale qu'ils apportent; cela exposerait en outre quelque 80 000 personnes qui travaillent dans l'agriculture à des risques accrus pour leur sécurité, les tracteurs plus anciens n'étant pas équipés de tous les dispositifs de sécurité qui existent aujourd'hui. Enfin, 3 000 emplois, tous situés dans l'UE, pourraient disparaître de l'industrie de fabrication des tracteurs ainsi qu'au niveau de la chaîne d'approvisionnement qui lui fournit les composants.

3.   La proposition portant modification de la directive

3.1

La proposition à l'examen prévoit de modifier la directive 2000/25/CE pour retarder de trois ans l'application de l'ensemble des exigences relevant des phases IIIB et IV pour les tracteurs appartenant aux catégories T2, C2 et T4.1.

4.   Observations générales

4.1

Le CESE soutient l'approche de la Commission conformément au sixième programme d'action pour l'environnement (COM(2001) 31 final) (2) et confirme la nécessité de parvenir à améliorer la qualité de l'air en réduisant les émissions d'échappement à la source, mais aussi de s'inspirer de connaissances scientifiques et d'évaluations économiques solides et fiables, tout en s'appuyant sur des données et des informations à jour pour définir ces réductions.

4.2

Le CESE soutient la proposition de la Commission qui applique ces principes aux phases IIIB et IV.

4.3

D'autre part, le CESE estime qu'il demeure incertain que les tracteurs à voie étroite pourront effectivement être équipés de moteurs de la phase IV tout en respectant les mêmes exigences opérationnelles. En fait, la Commission considère qu'il est important de suivre les avancées techniques dans l'industrie au fil du temps afin de mesurer les progrès accomplis vers la mise en conformité avec les seuils des phases IIIB et IV.

4.4

Le CESE recommande qu'au titre du processus de suivi proposé par la Commission, un rapport soit élaboré avant que la phase IV ne devienne obligatoire, afin de prouver la possibilité d'appliquer la phase IV aux tracteurs à voie étroite et de proposer d'éventuelles modifications de la directive.

4.5

Le CESE est convaincu que l'extension des phases IIIB et IV applicables aux engins mobiles non routiers aux tracteurs agricoles et forestiers en général, et aux tracteurs spécialisés en particulier, par la modification apportée en 2005 à la directive 2000/25/CE n'a fait l'objet d'aucune évaluation d'impact et que cette omission rend nécessaire la modification ultérieure proposée ici.

Bruxelles, le 16 mars 2011.

Le président du Comité économique et social européen

Staffan NILSSON


(1)  Notamment grâce à une importante aide économique européenne consentie dans le cadre de la politique agricole commune de l'UE.

(2)  JO C 154 E, 29.5.2001, p. 218.