52010DC0250




[pic] | COMMISSION EUROPÉENNE |

Bruxelles, le 12.5.2010

COM(2010) 250 final

COMMUNICATION DE LA COMMISSION AU PARLEMENT EUROPÉEN, AU CONSEIL EUROPÉEN, AU CONSEIL, À LA BANQUE CENTRALE EUROPÉENNE, AU COMITÉ ÉCONOMIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN ET AU COMITÉ DES RÉGIONS

Renforcer la coordination des politiques économiques

COMMUNICATION DE LA COMMISSION AU PARLEMENT EUROPÉEN, AU CONSEIL EUROPÉEN, AU CONSEIL, À LA BANQUE CENTRALE EUROPÉENNE, AU COMITÉ ÉCONOMIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN ET AU COMITÉ DES RÉGIONS

Renforcer la coordination des politiques économiques

«La gouvernance de la zone euro et la coordination des politiques économiques doivent être améliorées. Pour cela, il y a lieu d'approfondir et d'étendre la surveillance économique afin de guider la politique budgétaire tout au long du cycle et à long terme, tout en corrigeant les divergences observées sur le plan de la croissance, de l'inflation et de la compétitivité.» (Communication de la Commission «UEM@10: Bilan de l’Union économique et monétaire dix ans après sa création», 7 mai 2008, IP/08/716)

I. Introduction

La crise économique mondiale a mis à l'épreuve les mécanismes actuels de coordination des politiques économiques dans l'Union européenne et a fait apparaître des faiblesses. Le fonctionnement de l'Union économique et monétaire a été soumis à des tensions particulièrement fortes parce que ses règles et ses principes sous-jacents n'ont pas été respectés par le passé. Les procédures de surveillance en vigueur se sont avérées insuffisantes. La présente communication propose que des mesures soient prises à court terme sur le fondement du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE) afin de remédier à cette situation.

La récente crise économique est sans précédent pour notre génération. Les progrès en matière de croissance économique et de création d'emplois d'une décennie entière ont été réduits à néant et la crise a mis au jour des faiblesses fondamentales de notre économie. Les déséquilibres budgétaires et les autres déséquilibres macroéconomiques qui se sont accumulés avant le retournement de conjoncture ont rendu l'économie de l'Union vulnérable à la crise financière et à la récession mondiales. Nos finances publiques ont été fortement touchées, avec des déficits moyens de 7 % du PIB et des niveaux de dette supérieurs à 80 % du PIB, soit bien plus que les valeurs de référence de 3 % et de 60 % fixées par le traité.

Un niveau élevé de dette publique n'est pas viable indéfiniment. La mise en œuvre de la stratégie Europe 2020 approuvée par le Conseil européen en mars doit être basée sur une stratégie de sortie crédible. L'Union va faire face à de grands défis au cours des années à venir: elle devra assainir ses finances publiques et, dans le même temps, soutenir la croissance, qui doit atteindre un niveau suffisant. Le pacte de stabilité et de croissance est un cadre adapté pour sortir de la crise dans de bonnes conditions. Mais pour soutenir le potentiel de croissance économique de l'Union et assurer la viabilité de nos modèles sociaux, l'assainissement des finances publiques nécessite de fixer des priorités et de faire des choix difficiles. Une coordination au niveau de l’Union sera essentielle à cette fin et pour prévenir les répercussions négatives d’un pays à l’autre.

La récente crise financière et les pressions sur la stabilité financière en Europe ont fait apparaître mieux que jamais l'interdépendance des économies de l'Union, notamment dans la zone euro. L'appartenance à l'Union, avec son marché intérieur de 500 millions de personnes et sa monnaie commune à seize États, a aidé les pays de l'UE. Les instruments et les méthodes de coordination existants ont permis à l'Union d'agir en commun en faveur de la reprise, et de surmonter des difficultés auxquelles aucun État membre n'aurait pu s'attaquer seul. Toutefois, ces expériences récentes ont aussi révélé les failles et les faiblesses du système actuel, qui ont rendu manifeste la nécessité d'une coordination politique plus approfondie et qui soit menée plus en amont, de mécanismes préventifs et correctifs supplémentaires et d'un système de résolution des crises pour les États de la zone euro.

Des mesures d'urgence ont été prises pour répondre à la crise dans l'immédiat, dont le point d'orgue a été le Conseil Ecofin extraordinaire du 9 mai, qui a décidé, sur la base d'une proposition de la Commission, d'établir un mécanisme européen de stabilisation et convenu d'un engagement fort en faveur d'un assainissement budgétaire accéléré lorsque la situation l'exige. Il faut tirer les leçons de ces événements pour l'avenir et prendre des mesures pour renforcer le système européen de gouvernance économique. Dans la présente communication, la Commission propose une approche basée sur trois piliers afin de renforcer la coordination des politiques économiques. La plupart des propositions concernent l'ensemble de l'Union, mais sur la base de l'article 136 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, des exigences plus strictes pourraient s'appliquer à la zone euro.

La communication insiste sur l'intérêt d'utiliser pleinement tous les instruments de surveillance prévus par le traité. Ces instruments doivent être modifiés et complétés lorsque c'est nécessaire. La communication demande que le respect du pacte de stabilité et de croissance soit mieux assuré et que la surveillance porte également sur les déséquilibres macroéconomiques. À cette fin, elle propose la mise en place d'un «semestre européen» pour la coordination des politiques économiques afin que les États membres mettent en œuvre une coordination en amont au niveau européen lors de la préparation de leurs programmes nationaux de stabilité et de convergence, y compris leurs budgets et leurs programmes nationaux de réforme. Enfin, elle énonce les principes sur lesquels devrait être basé un cadre solide de gestion des crises pour les États de la zone euro.

Ces idées sont ambitieuses et nécessaires. Elles sont présentées par la Commission afin de recueillir l'avis des États membres, du Parlement européen et des parties intéressées. La Commission présentera dans les mois à venir des propositions législatives afin de les mettre en œuvre.

II. LA CRISE FINANCIÈRE MONDIALE A MIS AU JOUR ET AMPLIFIÉ LES DÉFIS AUXQUELS FAIT FACE L'ÉCONOMIE EUROPÉENNE

La dette publique n'a pas été suffisamment réduite au cours des dix dernières années. L'assainissement budgétaire a été insuffisant, surtout en période de conjoncture économique favorable. Dans certains États membres, les recettes ont été provisoirement amplifiées par des activités génératrices de fortes recettes fiscales entraînées par un essor du logement, de la construction et des services financiers, essor qui ne pouvait durer. La correction brutale de ces déséquilibres macrofinanciers, suite à la crise, a provoqué l'effondrement des recettes fiscales dans les États membres concernés, faisant apparaître des positions budgétaires sous-jacentes beaucoup moins favorables que prévu. Les budgets publics, dans l'Union européenne, sont passés d'une position proche de l'équilibre (-0,8 % du PIB dans l'UE et -0,6 % dans la zone euro) en 2007 à un déficit attendu de près de 7 % du PIB en 2010. La dette publique continue, quant à elle, à augmenter. Selon les dernières prévisions des services de la Commission, la dette publique atteindra 84 % du PIB en 2011 (88% dans la zone euro), réduisant à néant les résultats de vingt ans d'assainissement. D'importants passifs potentiels liés à des sauvetages financiers, qui représentent 25 points de pourcentage du PIB supplémentaires dans l'UE, sont une source d'inquiétude supplémentaire qui vient s'ajouter au traditionnel défi budgétaire qu'est le vieillissement de la population.

D'autres déséquilibres macroéconomiques et financiers ont spécifiquement aggravé la vulnérabilité de l'économie de la zone euro. Des écarts de compétitivité persistants et des déséquilibres macroéconomiques à l'intérieur de la zone euro font peser des menaces sur le fonctionnement de l'Union économique et monétaire. Au cours des années qui ont précédé la crise, la faiblesse du coût du financement a bien souvent entraîné une mauvaise affectation des ressources, lesquelles ont été dirigées vers des usages peu productifs, ce qui, dans certains États membres, a débouché sur des niveaux de consommation excessifs, des bulles dans le secteur immobilier et l'accumulation de dettes internes et externes. L'écart de compétitivité a atteint un maximum historique juste avant la crise. Alors que la situation était équilibrée en 1999, les excédents des comptes courants dans la zone euro ont augmenté constamment pour atteindre 7,7 % du PIB en 2007, tandis que les déficits cumulés passaient de 3,5 % du PIB en 1999 à 9,7 % en 2007[1]. La crise économique et financière a rééquilibré, jusqu'à un certain point, les comptes courants. Mais ce rééquilibrage n'est que partiellement structurel. Il est indispensable de réorienter en profondeur les politiques afin de réaliser les ajustements nécessaires en ce qui concerne les coûts et les salaires, les réformes structurelles et la réallocation de la main-d'œuvre et des capitaux.

En Grèce, la combinaison exceptionnelle de politiques budgétaires accommodantes, de réactions inadaptées face à la croissance des déséquilibres, de faiblesses structurelles et de déclarations statistiques erronées a entraîné une crise sans précédent de la dette souveraine. Des révélations subites ont fait apparaître que la situation sous-jacente des finances publiques était en partie due à des inexactitudes dans les déclarations statistiques passées, mais fondamentalement, elle résulte de politiques budgétaires inappropriées. Si les faiblesses du cadre de surveillance économique en vigueur sont en partie responsables de cette situation, cette dernière n'en démontre pas moins à quel point il est vital de veiller à ce que les règles soient respectées dans les faits. Confrontés à une crise exceptionnelle de la dette souveraine face à laquelle la zone euro était à court d'instruments, les États membres ont convenu d'un ensemble de mesures destinées à préserver la stabilité financière européenne[2]. La présente communication vise à renforcer de manière déterminée notre mécanisme de surveillance afin qu'aucun État membre n'en arrive plus jamais à se trouver dans une telle situation. Mais la crise souligne aussi la nécessité de disposer d'outils appropriés pour gérer les situations qui menacent la stabilité financière de la zone euro.

III. RENFORCER LA COORDINATION DES POLITIQUES ÉCONOMIQUES

III.1. Assurer un meilleur respect du pacte de stabilité et de croissance et une coordination budgétaire plus approfondie

Les règles et les principes du pacte de stabilité et de croissance gardent toute leur pertinence. Mais en dépit du pacte, les États membres n'ont pas constitué de réserves suffisantes en période de conjoncture favorable. Le renforcement de l'aspect préventif de la surveillance budgétaire doit faire partie intégrante de la coordination rapprochée des politiques budgétaires. En outre, les règles doivent être mieux respectées et la viabilité des finances publiques doit bénéficier d'une attention accrue.

L'élaboration et l'évaluation des programmes de stabilité et de convergence sont l'élément central du volet préventif du pacte. Son incidence et son efficacité doivent être fortement renforcées en donnant plus de poids à l'aspect amont du processus et en le rendant plus contraignant. L'introduction d'un «semestre européen» (voir section III.3) prendrait en charge l'aspect amont. L'aspect contraignant pourrait par exemple être réalisé en prévoyant la possibilité d'imposer des dépôts portant intérêt en cas de politiques budgétaires inadéquates, lorsqu'un État membre ne progresserait pas assez vite en direction de ses objectifs budgétaires à moyen terme en période de conjoncture économique favorable. Il faudrait pour cela modifier le droit dérivé.

Les cadres budgétaires nationaux doivent mieux tenir compte des priorités de la surveillance budgétaire de l'Union. Les États membres devraient être encouragés à intégrer l'objectif de finances publiques saines, consacré par le traité, dans leur droit national. Le cadre budgétaire national est l'ensemble des éléments qui forment la base de la gouvernance budgétaire nationale, autrement dit la configuration institutionnelle propre à un pays donné qui détermine l'élaboration des politiques budgétaires nationales. Pour mettre en œuvre de manière concrète la complémentarité entre les cadres budgétaires de l'Union et des États membres, l'obligation prévue par le protocole no 12 du TFUE, selon lequel les États doivent disposer de procédures budgétaires leur permettant de remplir les obligations qui leur incombent en matière de discipline budgétaire en vertu des traités, pourrait être précisée au moyen d'instruments juridiquement contraignants. De tels instruments pourraient par exemple exiger que les cadres nationaux prévoient des procédures de budgétisation pluriannuelle afin d'assurer le respect des objectifs budgétaires à moyen terme.

La procédure concernant les déficits excessifs (PDE) est l'élément central du volet correctif du pacte de stabilité et de croissance. Mais l'aspect correctif de la PDE entre en jeu trop tard pour offrir aux États membres les incitations appropriées afin qu'ils remédient aux déséquilibres budgétaires naissants. Le fonctionnement de la PDE pourrait être amélioré en accélérant les procédures, notamment pour les États membres qui enfreignent le pacte de manière répétée. Il faudrait pour cela modifier le droit dérivé.

La dette publique et la viabilité des finances publiques doivent faire l'objet d'une attention accrue. Les événements récents ont mis en lumière, non seulement la vulnérabilité des États membres sur lesquels pèse une dette publique très importante, mais aussi le risque de répercussions transfrontalières négatives que présente une telle situation. Une dette élevée compromet les perspectives de croissance à moyen et à long terme et prive les pouvoirs publics de la possibilité de mettre en œuvre des politiques contracycliques lorsqu'elles sont les plus nécessaires. C'est d'autant plus vrai dans un contexte de menaces croissantes sur la viabilité des finances publiques, notamment celles qui découlent des récents plans de sauvetage des banques ainsi que du vieillissement de la population.

Le critère de la dette de la procédure concernant les déficits excessifs doit être mis en œuvre de manière effective. La PDE devrait accorder une considération accrue à l'interaction entre dette et déficit afin de mieux inciter à mener des politiques prudentes. Les États membres dont le ratio de la dette dépasse 60 % du PIB devraient faire l'objet d'une procédure au titre de la PDE si leur dette, au cours de la période précédente, n'a pas suffisamment diminué par rapport à une valeur de référence donnée. Plus spécifiquement, la Commission et le Conseil devraient déterminer si le déficit budgétaire permet une réduction substantielle et continue de la dette publique. Le risque budgétaire que font peser les passifs explicites et implicites devrait notamment être pris en considération. Réciproquement, il ne devrait être mis fin à la PDE pour les États membres dont la dette dépasse le seuil de 60 % du PIB qu'à la suite d'une évaluation de l'évolution prévue de la dette et des risques. Une telle approche est pleinement compatible avec l'article 126 du TFUE; elle nécessiterait quelques changements du droit dérivé.

Afin d'assurer un meilleur respect des règles du pacte de stabilité et de croissance, une attention accrue doit être accordée à l'utilisation du budget de l'Union . À l'heure actuelle, la suspension des engagements du fonds de cohésion, dont ne peuvent bénéficier que certains des États membres, n'est envisagée qu'à un stade tardif de la PDE (article 126, paragraphe 8, du TFUE).

La possibilité de recourir d'une manière élargie et en temps opportun aux dépenses budgétaires de l'Union en vue de favoriser le respect du pacte devrait être envisagée lors des prises de décision sur le prochain cadre financier. L'objectif devrait être de mettre en place des incitations justes, opportunes et effectives qui visent à assurer le respect des règles du pacte de stabilité et de croissance. La conditionnalité pourrait être renforcée, les États membres étant invités à réorienter les financements vers des activités susceptibles d'améliorer la qualité de leurs finances publiques une fois que l'existence d'un déficit excessif est constatée (conformément à l'article 126, paragraphe 6, du TFUE).

La politique de cohésion devrait avoir un rôle mieux défini en ce qui concerne l'appui qu'elle apporte aux États membres en vue de remédier aux faiblesses structurelles et aux défis de compétitivité. Le 5e rapport sur la cohésion, qui sera bientôt publié, présentera des propositions à cet égard, notamment en ce qui concerne le renforcement des capacités institutionnelles et l'efficience des administrations publiques.

Dans le cadre financier actuel, il conviendrait d'appliquer avec plus de rigueur et dans un meilleur respect des règles la clause de suspension pour les engagements du fonds de cohésion en cas d'infractions répétées au pacte.

Améliorer le fonctionnement des mécanismes existants dans le cadre du pacte de stabilité et de croissance

- Accroître l'efficacité des évaluations des programmes de stabilité et de convergence par une meilleure coordination en amont

- Des cadres budgétaires nationaux devant mieux tenir compte des priorités de la surveillance budgétaire de l'Union

Remédier aux niveaux élevés de dette publique et préserver la viabilité budgétaire à long terme

- Donner une importance accrue au critère de la dette selon le traité

- Mieux tenir compte de l'interaction entre dette et déficit

Améliorer les incitations et les sanctions afin d'assurer le respect des règles du pacte de stabilité et de croissance

- Dépôts portant intérêt en cas de politiques budgétaires inadéquates

- Une utilisation plus rigoureuse et conditionnelle des dépenses de l'Union afin d'assurer le respect des règles du pacte de stabilité et de croissance

- Des réactions plus rapides en cas d'infractions répétées au pacte et une application plus stricte du règlement sur le fonds de cohésion

III.2. Vers une surveillance élargie de l'évolution macroéconomique et de la compétitivité au sein de la zone euro

La vaste stratégie Europe 2020 de l'Union pour la croissance et l'emploi accorde une importance particulière aux déséquilibres financiers et structurels. Elle définit une stratégie ambitieuse et complète visant à aboutir dans l'Union à une croissance économique intelligente, durable et inclusive. Dans le contexte de la crise, elle met un accent nouveau sur les réponses à apporter aux faiblesses européennes en matière de surveillance macrofinancière et aux défis structurels. Tenant compte de l'importance des interactions économiques et financières au sein de la zone euro et de leur incidence sur la monnaie unique, Europe 2020 appelle à la mise en place d'un cadre politique spécifique dans la zone euro permettant de lutter contre les grands déséquilibres macroéconomiques[3]. En conséquence, en mars 2010, le Conseil européen a demandé à la Commission de présenter d'ici juin 2010 des propositions en vue de renforcer la coordination au sein de la zone euro qui fassent usage des nouveaux instruments de coordination économique qu'offre l'article 136 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne.

Les déséquilibres macroéconomiques importants et durables creusés par des États de la zone euro sont susceptibles de nuire à la cohésion de la zone euro et au bon fonctionnement de l'UEM. Pour prévenir des déséquilibres trop graves dans la zone euro, il est donc important d'approfondir l'analyse et d'étendre la surveillance économique au-delà de sa dimension budgétaire pour la faire porter sur d'autres déséquilibres macroéconomiques, notamment l'évolution de la compétitivité et les défis structurels sous-jacents. Il est proposé de transformer le système d'«examen par les pairs» des déséquilibres macroéconomiques, lequel, à l'heure actuelle, est réalisé par l'Eurogroupe, en un cadre structuré de surveillance des États de la zone euro, en mettant en œuvre l'article 136 du TFUE. Ce cadre se traduirait par une surveillance rapprochée, une coordination plus étroite des politiques et un suivi renforcé par rapport à ce que prévoit Europe 2020 pour tous les États membres de l'UE. Comme pour le cadre budgétaire de l'UE, qui s'applique lui aussi à tous les États membres de l'UE, des règles plus strictes s'appliqueraient aux États de la zone euro.

L'un des éléments de cette surveillance sera un «tableau de bord» avertissant de la nécessité d'agir. Un tableau de bord tenant compte des évolutions tant extérieures qu'intérieures serait défini et ferait l'objet d'un suivi régulier. Il comprendrait une série d'indicateurs pertinents qui indiqueraient notamment l'évolution des comptes courants, les positions nettes des actifs étrangers, la productivité, le coût unitaire de la main-d'œuvre, l'emploi et le taux de change effectif réel ainsi que la dette publique et les prix du crédit et des actifs du secteur privé. Il paraît particulièrement important de déceler, aussitôt que possible, les augmentations trop prononcées des prix des actifs et la croissance excessive du crédit pour éviter de coûteuses corrections a posteriori des déséquilibres budgétaires et extérieurs. Cette analyse servirait de base pour la formulation de recommandations afin que les États membres concernés prennent des mesures préventives ou correctives.

En ce qui concerne la zone euro, la Commission analysera également d'une manière globale les évolutions et les perspectives en matière de déséquilibres macroéconomiques. La Commission s'intéressera à la zone euro dans son ensemble et pays par pays afin d'évaluer les risques liés à toutes les formes possibles de déséquilibres macroéconomiques susceptibles de nuire au bon fonctionnement de la zone euro. Si cela s'avérait nécessaire, la Commission effectuerait une analyse plus poussée du risque lié aux déséquilibres naissants. Cette analyse servirait de base à des orientations relatives aux politiques à mener. Le Conseil, où ne voteraient que les États de la zone euro, inviterait le ou les États membres concernés à prendre les mesures nécessaires pour remédier à la situation. Si l'État membre ne prenait pas, dans les délais prévus, les mesures visant à corriger les déséquilibres excessifs, le Conseil pourrait renforcer la surveillance de l'État membre concerné, en vue de garantir le bon fonctionnement de l'UEM, et décider, sur proposition de la Commission, de lui adresser des recommandations précises en matière de politique économique. Si nécessaire, la Commission ferait usage de la possibilité de transmettre directement des alertes rapides aux États membres de la zone euro. En outre, des recommandations pourraient le cas échéant être adressées à l'ensemble de la zone euro.

Des mesures préventives et correctives peuvent se révéler nécessaires dans de nombreux domaines afin d'agir de manière effective sur les déséquilibres macroéconomiques et leurs causes structurelles sous-jacentes. Contrairement à leur effet sur les déficits excessifs, les politiques économiques tendent à n'avoir qu'une incidence indirecte et tardive sur l'évolution des déséquilibres extérieurs. Par conséquent, selon les difficultés particulières rencontrées par une économie donnée, les recommandations en matière de politiques à mener pourraient couvrir tant les recettes que les dépenses publiques (dans le contexte du pacte de stabilité et de croissance), la crise ayant montré que l'évolution de la composition des recettes publiques est également un indicateur important de déséquilibres potentiels à venir. Dans ce contexte, les recommandations pourraient porter sur le fonctionnement des marchés du travail, des produits et des services, conformément aux grandes orientations de politique économique et en matière d'emploi. Elles devraient également couvrir des aspects macroprudentiels afin de prévenir ou d'infléchir une croissance excessive du crédit ou des prix des actifs, conformément aux analyses du futur comité européen du risque systémique.

Renforcer et élargir la surveillance des évolutions macroéconomiques dans la zone euro Sur la base d'Europe 2020, élaborer un cadre pour une surveillance macroéconomique renforcée et élargie des États de la zone euro, sous la forme d'un règlement adopté en vertu de l'article 136 du TFUE Mettre en place un tableau de bord d'indicateurs fixant des seuils d'alerte pour les déséquilibres graves Formuler des recommandations spécifiques aux pays Recourir à des actes officiels du Conseil par un Conseil votant dans une configuration «zone euro» |

- III.3. Une coordination intégrée des politiques économiques pour l'UE: un «semestre européen»

En vue de parvenir à une surveillance plus intégrée des politiques économiques, il a été proposé, dans le cadre de l'initiative Europe 2020, de synchroniser l'évaluation des politiques budgétaires et structurelles des États membres de l'UE. Il devrait être tenu compte de la surveillance macroéconomique élargie y compris lors de la formulation des recommandations de politique budgétaire au titre du pacte de stabilité et de croissance. En particulier, si des déséquilibres macroéconomiques importants apparaissent, il peut être nécessaire de fixer des objectifs budgétaires plus ambitieux. De même, lors de son analyse du risque de déséquilibres graves et de la détermination des politiques à mener en conséquence, la Commission prendrait en considération les informations pertinentes fournies par le comité européen du risque systémique. Les alertes et les recommandations du comité européen du risque systémique adressées à un ou plusieurs États membres seraient considérées comme des questions d'intérêt commun, les États exerçant une pression appropriée entre pairs pour que des mesures correctives soient prises. L'intégration du cycle de surveillance dans le cadre du semestre européen devrait créer des synergies et promouvoir la cohésion des différents domaines de la surveillance économique.

La prévention est préférable à la correction. À l'heure actuelle, le cycle de surveillance économique consiste pour l'essentiel en une évaluation a posteriori de la conformité des politiques économiques aux règles du pacte de stabilité et de croissance et aux grandes orientations de politique économique. Une surveillance budgétaire et économique en amont, qui fait défaut pour le moment, permettrait de formuler de véritables orientations qui tiennent compte de la dimension européenne et qui se traduiraient par des décisions politiques nationales. Le fait de formuler plus tôt des recommandations pays par pays aurait une incidence positive sur tous les aspects de la surveillance, qu'ils soient budgétaires, macrofinanciers ou structurels.

Un système d'examen en amont des budgets nationaux par les pairs permettrait de déceler les incohérences et les déséquilibres naissants. Pour garantir la fiabilité et la précision des données, il faudrait au préalable renforcer le mandat d'Eurostat afin de lui permettre de réaliser l'audit des statistiques nationales, conformément aux propositions récentes de la Commission. Il est important que cette proposition soit rapidement mise en œuvre car la qualité de l'information sur les finances publiques en serait améliorée. En s'attaquant plus tôt aux déséquilibres budgétaires en voie d'aggravation, il serait plus facile d'y remédier et d'éviter qu'ils ne mettent en péril la stabilité macroéconomique et la viabilité des finances publiques. Les programmes de stabilité et de convergence devraient être présentés au cours du premier semestre plutôt que vers la fin de l'année comme il est d'usage aujourd'hui. Respectant pleinement les prérogatives des parlements nationaux, l'examen par les pairs en amont fournirait des orientations pour la préparation des budgets nationaux de l'année suivante.

Pour la zone euro, une évaluation horizontale de l'orientation budgétaire devrait être effectuée sur la base des programmes nationaux de stabilité et des prévisions de la Commission. L'orientation budgétaire agrégée devrait faire l'objet d'une attention particulière en cas de tensions économiques dans la zone euro, dès lors que de grandes mesures de politique budgétaire arrêtées par les États membres sont susceptibles d'avoir des répercussions importantes à l'extérieur du pays. Si les plans budgétaires pour l'année suivante étaient manifestement inadéquats, une révision de ces plans pourrait être recommandée. L'Eurogroupe jouerait un rôle crucial dans ce nouveau système de coordination renforcée et, le cas échéant, prendrait des décisions formelles conformément aux dispositions du traité de Lisbonne.

Le semestre européen inclurait l'ensemble du cycle de surveillance des politiques budgétaires et structurelles. Il commencerait tôt dans l'année avec un examen horizontal lors duquel le Conseil européen, sur la base de données analytiques fournies par la Commission, identifierait les principaux défis économiques auxquels l'Union et la zone euro sont confrontées et fournirait des orientations stratégiques quant aux politiques à mener. Les États membres tiendraient compte des conclusions de cet examen horizontal lors de l'élaboration de leurs programmes de stabilité et de convergence et de leurs programmes nationaux de réformes. Les programmes de stabilité et de convergence et les programmes nationaux de réformes seraient publiés simultanément, ce qui permettrait de prendre en compte dans la stratégie et les objectifs budgétaires l'incidence des réformes sur la croissance et le budget. Les États membres seraient en outre invités à faire participer leurs parlements nationaux à ce processus, dans le plein respect des règles et des procédures nationales, avant que les programmes de stabilité et de convergence et les programmes nationaux de réformes ne soient présentés aux fins de la surveillance multilatérale au niveau de l'Union. Le Conseil, sur la base de l'évaluation de la Commission, ferait ensuite connaître son évaluation et ses orientations à une période de l'année où les décisions budgétaires importantes sont encore en cours d'élaboration au niveau national. Dans ce contexte, une participation appropriée du Parlement européen devrait être prévue.

Un «semestre européen» pour une meilleure intégration en amont de la coordination des politiques budgétaires

- Faire coïncider la présentation et l'examen des programmes de stabilité et de convergence et des programmes nationaux de réformes afin d'évaluer la situation économique globale et d'améliorer la synchronisation avec les cycles budgétaires nationaux

- Permettre au Conseil européen et au Conseil de fournir, sur la base de l'évaluation de la Commission, des avis effectifs et en temps utile quant aux politiques à mener

(Une surveillance intégrée plus efficace qui permet d'exploiter pleinement l'examen par les pairs

III.4. Vers un cadre solide de gestion des crises pour les États de la zone euro

L'analyse de la crise grecque fait apparaître la nécessité d'un cadre solide de gestion des crises pour les États de la zone euro.

En effet, les difficultés financières d'un seul État membre peuvent menacer la stabilité macrofinancière de la zone euro dans son ensemble. La crise a montré qu'un cadre solide de gestion des crises devait obligatoirement compléter les instruments de surveillance, de prévention et d'ajustement dont il a été question plus haut. Le mécanisme de soutien des balances des paiements de l'Union a fourni une aide cruciale à des États membres hors de la zone euro lorsqu'ils ont été confrontés à des difficultés financières. Les incertitudes liées à la disponibilité et aux modalités d'un soutien financier à la Grèce ont aggravé la contagion vers d'autres États membres et mis en péril la stabilité financière globale de la zone euro.

Un ensemble clair et convaincant de procédures en matière de soutien financier aux États membres de la zone euro rencontrant des difficultés financières graves est nécessaire pour préserver la stabilité financière de la zone euro à moyen et à long terme.

Un cadre pour un soutien financier conditionnel bien conçu devrait renforcer la stabilité financière de la zone euro tout en évitant de créer un aléa moral. Ce mécanisme de résolution des crises pour la zone euro doit être fondé sur une conditionnalité stricte et des taux d'intérêt qui incitent à revenir à un financement par les marchés tout en garantissant l'efficacité du soutien financier. Lorsque la prévention des crises échoue, au vu de besoins objectifs et manifestes de financement, le soutien financier serait activé en dernier recours pour préserver la stabilité financière dans la zone euro dans son ensemble. Il serait soumis au respect d'un programme détaillé et exigeant en matière de politiques à mener qui garantirait que la période de soutien est utilisée pour mettre en œuvre les ajustements nécessaires (tant budgétaires que structurels) afin d'assurer la solvabilité à long terme et un retour aussi rapide que possible au financement par les marchés.

Le soutien financier devrait prendre la forme de prêts. Le prêt aux États membres de la zone euro, par opposition à la prise en charge de leurs engagements, ne contrevient pas à l'article 125 du TFUE. Le programme en matière de politiques à mener et les conditions politiques seraient fixés en vertu de l'article 136 du TFUE. L'expérience de l'UE en matière de soutien des balances des paiements pour les pays de l'UE ne faisant pas partie de la zone euro a montré qu'un cadre unique, dans lequel l'UE émet de la dette pour financer des prêts d'urgence, représente une bonne combinaison entre efficacité relative de la gestion et supervision politique du Conseil.

Les conditions en matière de politiques à mener doivent viser en premier lieu à remédier aux déséquilibres sous-jacents dans l'État membre concerné afin de garantir le bon fonctionnement de l'UEM. Ces conditions impliqueraient en principe une combinaison d'éléments, tels qu'un assainissement budgétaire et un renforcement de la gouvernance budgétaire, y compris en matière fiscale, une stabilisation du secteur financier, dès lors que des tensions dans ce secteur sont la cause du problème en matière de finances publiques, et des interventions politiques plus larges pour rétablir la stabilité macroéconomique et la viabilité extérieure. Au-delà de la dimension budgétaire, les déséquilibres macroéconomiques devraient être traités en priorité, notamment les évolutions en matière de compétitivité et les défis structurels sous-jacents. Cela impliquera une surveillance rapprochée, une coordination plus étroite des politiques et un suivi renforcé afin de garantir que les réformes structurelles nécessaires sont rapidement mises en œuvre.

Le 9 mai, le Conseil Ecofin a décidé, sur la base d'une proposition de la Commission, de mettre en place un mécanisme européen provisoire de stabilisation afin de répondre rapidement à la crise. Cette décision s'est inscrite dans un ensemble plus large de mesures dont font notamment partie des engagements forts en faveur d'un assainissement budgétaire, lorsqu'ils sont requis, et une participation du FMI via ses mécanismes habituels, conformément aux récents programmes européens.

Ce mécanisme a été créé en réponse aux circonstances exceptionnelles actuelles; il prévoit la possibilité d'un soutien financier d'un montant pouvant atteindre 500 milliards d'EUR. L'assistance financière est soumise au respect de conditions strictes, dans le contexte d'un soutien conjoint UE/FMI, et se fera selon des modalités et des conditions analogues à celles du FMI. Deux sources complémentaires financeront ce mécanisme. La première, fondée sur un règlement du Conseil sur la base de l'article 122, paragraphe 2, du TFUE, permet de mobiliser jusqu'à 60 milliards d'EUR. En outre, les pays de la zone euro sont prêts, via un accord intergouvernemental, à compléter ces ressources par l'intermédiaire d'une entité ad hoc. Cette entité emprunterait jusqu'à hauteur de 440 milliards d'EUR en recourant aux garanties financières des États membres participants.

Un tel mécanisme présenterait, fondamentalement, toutes les caractéristiques d'un mécanisme solide et permanent de résolution des crises. Par conséquent, la Commission estime qu'il est maintenant prioritaire de rendre ce mécanisme pleinement opérationnel. Sur la base de l'expérience acquise en la matière, la Commission prévoit de proposer à moyen ou à long terme un mécanisme permanent de résolution des crises.

IV. PROCHAINES ÉTAPES

La Commission va élaborer les propositions de réforme présentées dans la présente communication, conformément aux compétences que lui confère le traité. Elle estime qu'il est important de progresser rapidement en ce qui concerne l'agenda de réformes proposé par la présente communication: la situation économique nécessite d'agir rapidement afin de mettre en œuvre les mesures proposées et d'améliorer la gouvernance économique de l'UE et de la zone euro. Le premier semestre européen devrait commencer au début de 2011.

La Commission est prête à soumettre rapidement des propositions législatives , notamment des modifications des règlements sous-jacents au pacte de stabilité et de croissance, afin de favoriser la prévention et la correction des déséquilibres macroéconomiques dans la zone euro et afin de mettre en place un cadre plus durable pour la gestion des crises.

[1] Les excédents des comptes courants mentionnés ici sont ceux, combinés, de l'Allemagne, du Luxembourg, des Pays-Bas, de l'Autriche et de la Finlande. Les déficits des comptes courants sont ceux, combinés, de l'Irlande, de la Grèce, de l'Espagne, de Chypre et du Portugal.

[2] Conclusions du Conseil Ecofin du 9 mai 2010.

[3] La Commission a déjà plaidé à plusieurs reprises en faveur d'une coordination économique élargie et approfondie dans la zone euro, notamment dans sa déclaration annuelle sur la zone euro de 2009 et dans sa communication «UEM@10 – bilan de l’Union économique et monétaire dix ans après sa création» de 2008.