52008DC0768

Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, Comité économique et social européen et au Comité des régions - Énergie éolienne en mer: réaliser les objectifs de politique énergétique à l’horizon 2020 et au-delà /* COM/2008/0768 final */


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Bruxelles, le 13.11.2008

COM(2008) 768 final

COMMUNICATION DE LA COMMISSION AU PARLEMENT EUROPÉEN, AU CONSEIL, AU COMITÉ ÉCONOMIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN ET AU COMITÉ DES RÉGIONS

Énergie éolienne en mer: réaliser les objectifs de politique énergétique à l’horizon 2020 et au-delà

COMMUNICATION DE LA COMMISSION

Énergie éolienne en mer: réaliser les objectifs de politique énergétique à l’horizon 2020 et au-delà

1. L’ÉNERGIE ÉOLIENNE EN MER: UN OCÉAN DE POSSIBILITÉS INEXPLOITÉES

L’énergie éolienne jouera un rôle essentiel dans la réalisation des objectifs de la nouvelle politique de l’énergie pour l’Europe. Aujourd’hui, l’électricité d’origine éolienne ne représente une part tangible de la production totale d’électricité que dans une poignée d’États membres, mais son importance va croissant: plus de 40 % des nouvelles capacités de production d’électricité ajoutées au réseau européen en 2007 étaient fondées sur l'énergie éolienne, faisant de celle-ci la technologie de production à la croissance la plus rapide, à l'exception du gaz naturel[1]. Selon le scénario envisagé par la deuxième analyse stratégique de la politique énergétique[2], l’énergie éolienne fournira plus d’un tiers de la production totale d’électricité issue de sources d’énergie renouvelables d’ici à 2020, et près de 40 % d’ici à 2030, ce qui représente un investissement cumulé d’au moins 200 à 300 milliards d’euros (soit environ un quart du total des investissements dans les installations de production d’énergie) d’ici à 2030.

Dans sa communication de 2007 intitulée «Une politique de l'énergie pour l'Europe»[3], la Commission affirmait qu’il faudrait développer le recours aux mers et aux océans pour réaliser les objectifs énergétiques de l’UE, compte tenu de leur potentiel pour la production d’énergie et la diversification des voies et modes de transport de l’énergie. L ’ énergie éolienne terrestre restera prédominante dans un premier temps, mais les installations en mer seront de plus en plus importantes . Comparé à l’éolien terrestre, l’éolien en mer est plus complexe et plus coûteux[4] à installer et à entretenir, mais dispose d'un certain nombre d'avantages cruciaux. Le vent est habituellement plus fort et plus stable en mer qu’à terre, ce qui permet une production par unité installée nettement supérieure. En mer, les éoliennes peuvent être plus grandes qu'à terre, où se présentent des difficultés pour transporter de très grands composants par la route de leur lieu de fabrication à leur site d’installation. Par ailleurs, les parcs éoliens en mer risquent moins de susciter l’inquiétude du voisinage et des autres parties intéressées, sauf s’ils perturbent des activités maritimes concurrentes ou s’ils ont des incidences négatives sur d’importants éléments de l’environnement marin. En fait, les parcs éoliens en mer peuvent présenter un avantage pour la protection des écosystèmes marins et peuvent être porteurs de synergies avec d’autres utilisations nouvelles de la mer, notamment l'aquaculture au large des côtes, qui peuvent profiter des substructures des parcs éoliens.

Les ressources éoliennes des mers d ’ Europe représentent une source d ’ énergie abondante et locale d ’ énergie, propre et renouvelable . L ’ éolien en mer , qui produit de l’électricité sans combustible fossile et crée des emplois et de la croissance dans un secteur dominé au niveau mondial par les entreprises européennes, peut contribuer notablement à la réalisation des trois objectifs clés de la nouvelle politique de l ’ énergie , à savoir réduire les émissions de gaz à effet de serre, assurer la sécurité d'approvisionnement et améliorer la compétitivité de l'UE.

Du point de vue de la disponibilité physique, les ressources éoliennes pourraient couvrir, en théorie, l'ensemble de la demande en électricité de l'Europe. Cependant, en pratique, le caractère variable du vent et d’autres obstacles et contraintes techniques, mais aussi politiques ou économiques, déterminent à quelle vitesse et dans quelle mesure ce potentiel important est mis à profit. Aujourd’hui, les possibilités de l’énergie éolienne en mer sont fortement sous-exploitées: même si l’on ne tient pas compte des éventuelles installations en eau profonde, sur fondations flottantes, le potentiel exploitable d ’ ici 2020 est probablement 30 à 40 fois supérieur à la capacité installée actuellement[5] et, à l ’ horizon 2030, cette capacité pourrait atteindre 150 GW[6], ou quelque 575 TWh . Il est nécessaire de prendre des initiatives pour tirer parti de ces possibilités.

La présente communication traite spécialement des actions nécessaires au déploiement à grande échelle de l’éolien en mer, mais les enjeux et les initiatives présentés concernent souvent aussi d'autres ressources en énergie renouvelables en mer de l'UE, telles que les énergies marémotrice, houlomotrice et thermique ou encore l’énergie des courants marins. Ces ressources en énergie, bien que moins exploitées que l'énergie éolienne, sont également en phase de croissance et pourront contribuer à la réalisation des objectifs de la politique énergétique de l'Europe.

Dans ce contexte, les possibilités de synergies entre la politique énergétique européenne et la nouvelle politique maritime intégrée de l'UE[7] sont vastes et se développeront probablement encore. Les principes fondamentaux de ces deux politiques sont en effet identiques: elles visent l’intégration du développement économique et de la protection de l’environnement. En les coordonnant, il sera possible de mieux étudier la valeur géopolitique des océans et mers d'Europe du point de vue de la sécurité énergétique, de la compétitivité et de la durabilité[8].

2. UN MARCHÉ ÉMERGENT, DE NOMBREUX DÉFIS

2.1. Des améliorations du cadre global sont en cours

Comme toutes les autres technologies basées sur les sources d ’ énergie renouvelables, l ’ éolien en mer exige des conditions cadres claires, stables et favorables pour développer son potentiel face aux sources d’énergie traditionnelles. À l'échelle de l'UE, les principaux instruments réglementaires influant sur ces conditions sont à ce jour les règles communes pour le marché intérieur de l'électricité[9], la directive sur l’électricité produite à partir de sources d'énergie renouvelables[10], le système communautaire d’échange de quotas d’émission[11] et les lignes directrices de la Communauté concernant les aides d'État à la protection de l'environnement[12].

Le cadre existant est étoffé dans le troisième paquet «marché intérieur de l ’ énergie» d’octobre 2007[13] et dans le paquet «énergie et climat» présenté en janvier 2008[14]. L ’ adoption et la mise en œuvre en temps utile de ces deux trains de mesures constitueront la principale contribution de l'UE à la promotion de l'éolien en mer et des sources d’énergie renouvelables en général. Les améliorations proposées sont notamment des objectifs contraignants, des instruments destinés à renforcer la coopération régionale entre les régulateurs de l’énergie et entre les gestionnaires de réseaux, ainsi que des exigences plus lourdes imposées aux États membres afin qu’ils rationalisent leurs procédures de planification et d’autorisation, qu’ils permettent l’accès au réseau et qu’ils réduisent les obstacles administratifs.

Cependant, certains obstacles concernent spécialement les projets dans le domaine de l'éolien en mer, ou les touchent particulièrement . À la suite d’une consultation publique des parties intéressées menée cette année[15], la Commission a déterminé quatre domaines qui nécessitent une attention particulière.

2.2. Un secteur confronté à des enjeux sectoriels et technologiques majeurs

Par rapport à l’énergie éolienne terrestre, l’énergie éolienne en mer demeure une technologie relativement chère et peu développée. Parmi les premiers projets dans ce domaine, certains étaient essentiellement des applications en mer de technologies utilisées sur les sites terrestres, qui étaient moyennement adaptées à cet usage et ont connu des problèmes techniques inattendus, par exemple au point de vue de la fiabilité des composants d’éolienne tels que les multiplicateurs et les transformateurs. Ces difficultés ont rendu les investisseurs plus prudents et le financement des projets plus difficile , entraînant une hausse des coûts en raison des primes de risque exigées par les investisseurs. De même, l’expérience acquise à ce jour montre l’importance d’une baisse des coûts d’installation, d’exploitation et d’entretien, qui sont beaucoup plus élevés dans l’environnement marin, celui-ci étant plus rude et moins accessible que les sites terrestres.

La structure actuelle du secteur complique encore la situation. Aujourd'hui, très peu de fabricants d’éoliennes disposent d’une vaste et longue expérience en matière de machines installées en mer, ce qui réduit le degré de concurrence et d’innovation, accroissant encore la différence de coût avec l’éolien terrestre. En outre, il existe des goulets d ’ étranglement à différents points de la chaîne d ’ approvisionnement : la disponibilité limitée des composants d’éoliennes, des navires d’installation, des installations portuaires adéquates et des équipements et infrastructures similaires, ainsi que le manque de personnel disposant de l’ensemble des qualifications nécessaires, constituent un obstacle majeur.

Les technologies actuelles de construction des fondations ne sont utilisables qu’en eaux relativement peu profondes (habituellement moins de 30 mètres de fond). L’introduction à grande échelle de l’éolien en mer serait grandement facilitée si des technologies permettant un déploiement en eaux profondes étaient disponibles, mais la rentabilité des solutions de ce type doit encore être démontrée dans des applications concrètes.

Actuellement, l ’ éolien en mer est en concurrence d ’ une part avec l ’ éolien terrestre pour les capacités de production d ’ éoliennes, d ’ autre part avec l ’ industrie de la prospection pétrolière et gazière pour les équipements adaptés et l ’ expertise relative au milieu marin . Pris entre deux feux, les pionniers de l’éolien en mer se battent pour passer du statut de marché de niche à celui d'industrie à part entière, car, tant que cette technologie est en phase de maturation, les investisseurs hésitent beaucoup à réaliser de lourds investissements dans la recherche et développement et dans les augmentations nécessaires de la capacité de la chaîne d’approvisionnement.

2.3. Absence de planification stratégique intégrée et de coordination transfrontalière

Les États membres , bien qu'expérimentés en matière d'aménagement du territoire sur la terre ferme, n ’ ont généralement que peu d ’ expérience dans l ’ aménagement intégré de l'espace en milieu marin, et ne disposent parfois pas de structures administratives ni de réglementations adéquates . L'absence de procédures permettant d’examiner simultanément la distribution spatiale des ressources éoliennes, les contraintes imposées par d’autres activités ou intérêts maritimes et les aspects relatifs au réseau électrique tend à accroître l’incertitude et le risque de report ou d’abandon des projets en mer. Cet obstacle vaut également pour les autres ressources océaniques renouvelables, telles que les énergies marémotrice et houlomotrice.

En outre, l ’ absence de points d ’ accès aux réseaux électriques en mer engendre des incertitudes , synonymes de risques supplémentaires pour les projets, quant à la possibilité de connexion au réseau ou au coût de celle-ci .

En revanche, les projets en mer peuvent représenter une occasion de créer des lignes qui connectent les nouvelles capacités de production tout en créant une capacité de transport entre différentes régions du marché intérieur de l'électricité ou en l’accroissant. Cependant, ces synergies potentielles entre les projets en mer et les interconnexions transfrontalières ne sont pas exploitées actuellement[16] . Cela s’explique notamment par la complexité supplémentaire engendrée par la coopération transfrontalière, en raison des différents régimes de planification et de réglementation. Cependant, sans coordination transfrontalière, les investissements dans le réseau risquent de ne pas être optimaux, car ils seront envisagés du point de vue d’un projet isolé et non d’un point de vue systémique. Les projets en mer qui dépendent de nouvelles connexions transfrontalières sont donc plus vulnérables aux incertitudes qui découlent des différences de réglementation, notamment en matière de régimes de soutien et de recouvrement des coûts d’investissement dans le réseau.

Une meilleure coopération transfrontalière est nécessaire non seulement pour favoriser la planification et le développement du réseau, mais aussi pour améliorer le fonctionnement et la gestion du système. Le développement de l’éolien en mer pourrait avoir des conséquences à prendre en considération dans les stratégies de gestion de la congestion et dans les plans destinés à équilibrer la production et la demande, ainsi que dans l’amélioration des mécanismes qui régissent les échanges transfrontaliers et les marchés du courant d’ajustement.

2.4. Le partage insuffisant des connaissances et des informations fait obstacle à l’application harmonieuse de la législation communautaire en matière d’environnement

La production d'électricité en mer est relativement récente, voire non existante, dans la plupart des États membres, c’est pourquoi l'expérience en matière d'application de la législation environnementale communautaire, notamment les directives «Oiseaux»[17], «Habitats»[18] et «Évaluation des incidences sur l’environnement»[19], dans le contexte de ces projets demeure relativement limitée. En pratique, cela signifie que les promoteurs de projets en mer sont confrontés à des incertitudes supplémentaires, qui peuvent se traduire par une augmentation des retards et des coûts.

Un élément qui contrecarre inutilement les projets en mer est le retard pris par les États membres dans la désignation de zones protégées au titre des directives «Habitats» et «Oiseaux» en milieu marin . En l'absence de ces désignations, il est impossible de déterminer avec certitude si un site donné convient à l'installation d'un parc éolien. Sans les données nécessaires sur les écosystèmes marins et sur l'emplacement des habitats et espèces sensibles ou protégés, les analyses d'impact et les procédures d’autorisation peuvent être plus longues et plus conflictuelles.

Un autre élément important est la connaissance d’informations à jour relatives aux incidences des parcs éoliens sur les espèces et les habitats naturels. Ces informations doivent être produites et partagées de façon plus systématique afin de faciliter les évaluations des incidences sur l’environnement. Bien qu’il existe un corpus de littérature scientifique important et en croissance rapide sur le sujet, la plupart des publications sont récentes et inconnues de nombreuses autorités et parties intéressées à l’échelon local, régional et national. Vu cette situation, les promoteurs risquent de se voir imposer des exigences excessives et coûteuses concernant l ’ évaluation et le suivi des incidences sur l ’ environnement , qui auraient pu être évitées si les connaissances les plus récentes avaient été prises en considération.

2.5. Faire face aux goulets d'étranglement et aux problèmes d’équilibrage du courant dans les réseaux électriques terrestres

Pour différentes raisons, la production d ’ électricité en mer tendra à être moins dispersée géographiquement que celle issue de l'éolien terrestre et de nombreuses autres technologies fondées sur les sources d’énergie renouvelables.

En effet, premièrement, la nécessité d’établir des raccordements spéciaux au réseau à partir de points situés au large rend les économies d’échelle particulièrement importantes pour la compétitivité des projets en mer (surtout dans le cas des réglementations où les coûts de raccordement sont payés par le promoteur et non via la tarification). Ce seul élément explique que les projets en mer seront probablement plus vastes que les projets terrestres.

Deuxièmement, toute l’énergie produite en mer l’est dans des zones où la demande est inexistante (à l’exception peut-être de la consommation de plates-formes pétrolières et gazières), c'est pourquoi tous les points de rachat de la production sont concentrés sur le littoral.

Dans l’hypothèse d’un développement à grande échelle de l’énergie éolienne en mer, la capacité du système existant à équilibrer production et demande d ’ électricité et à transmettre l ’ électricité vers les centres de consommation, souvent situés à l'intérieur des terres, sera donc fortement sollicitée . Dans certains États membres, notamment l’Allemagne, des goulets d’étranglement existent déjà ou devraient apparaître en cas d'augmentation importante de la capacité éolienne en mer du Nord; la nécessité de renforcer la capacité d'interconnexion a été démontrée par exemple dans l'étude allemande Dena I[20].

3. LA VOIE À SUIVRE

3.1. Investir dans la compétitivité future du secteur européen de l'énergie éolienne

Afin de sortir l’éolien en mer de l’ombre de ses plus proches concurrents (l’éolien terrestre et la prospection pétrolière et gazière en mer) pour attirer les investissements, il faudra, au cours des prochaines décennies, prendre des mesures particulières pour développer les technologies pertinentes et les infrastructures de la chaîne d’approvisionnement. Le plan stratégique européen pour les technologies énergétiques (plan SET) [21], présenté en 2007 et approuvé par le Conseil européen en mars 2008, constitue, avec le septième programme-cadre de recherche, de développement technologique et de démonstration (7 e PC) [22] et le programme «Énergie intelligente» [23], le cadre global de l’UE dans lequel ces défis devraient être relevés. En outre, les fonds de la politique de cohésion communautaire soutiendront des investissements de plus de 787 millions d'euros dans l'énergie éolienne, y compris éventuellement des projets en mer, pour la période 2007-2013. Étant donné que les fonds de la politique de cohésion peuvent aussi soutenir des investissements en faveur de l'énergie durable, et singulièrement l'énergie éolienne, au titre d'autres lignes budgétaires, notamment «Recherche et développement» (dotation totale de 63,6 milliards d'euros), la contribution réelle de la politique de cohésion à l'énergie éolienne atteindra probablement un montant beaucoup plus élevé.

Le plan SET indique que doubler la production des plus grandes éoliennes, les éoliennes en mer constituant la solution de référence, est un des principaux défis à relever pour atteindre les objectifs de 2020; il inclut en outre une proposition d ’ initiative industrielle européenne pour l'énergie éolienne . L’objectif de celle-ci est d’encourager le développement du marché et de réduire les coûts de l'énergie éolienne; toutefois, étant donné que l'éolien terrestre figure déjà parmi les technologies les plus compétitives, la Commission est convaincue que l ’ éolien en mer devrait figurer parmi les priorités majeures de l ’ initiative . S’il peut être tentant pour l'industrie de consacrer tous ses efforts à récolter les bénéfices du marché éolien terrestre, actuellement en plein essor, investir dans l’éolien en mer sera crucial pour maintenir la position dominante de l’UE en matière de technologies et permettra de préparer le terrain pour de nouveaux marchés d'exportation. Des retombées positives importantes se feront aussi sentir sur d'autres marchés connexes, tels que les câbles à courant continu et haute tension (HVDC), technologie moderne pour laquelle l’industrie européenne présente un potentiel unique[24].

Pour ces raisons, la Commission a accordé plus d'attention à l'éolien en mer dans le contexte du 7 e PC, à partir du programme de travail Énergie de 2009 . L’agenda stratégique de recherche[25] de la plate-forme technologique de l’énergie éolienne (TP Wind)[26], publié en juillet 2008, inclut des propositions de domaines de recherche prioritaires en matière d'éolien en mer, ce qui constitue une contribution bienvenue en vue de la définition des priorités et de la coordination des futures actions de recherche communautaires et nationales. Dans ce contexte, les États membres sont également encouragés à utiliser davantage les possibilités offertes par les fonds de la politique de cohésion dans le domaine de la recherche et du développement.

Comme le montre l’agenda stratégique de recherche, des questions se posent quant à l'adéquation du soutien actuellement apporté à la recherche dans le domaine de l'énergie éolienne, y compris en mer, étant donné la nouvelle orientation ambitieuse donnée à la politique énergétique de l'Europe ; la Commission examinera d'ailleurs ce problème en détail dans le contexte de sa communication sur le financement des technologies à faible intensité carbonique, annoncée dans le plan SET. Dans ce même cadre, les possibilités de combiner des ressources du secteur public, de l'industrie et d'autres entités privées au sein de l ’ initiative industrielle seront examinées afin de garantir une attention suffisante aux aspects liés à l'éolien en mer.

Pour ce qui est des travailleurs qualifiés, des navires d’installation et des autres ressources spécialisées, l’éolien en mer est aujourd’hui en concurrence inégale avec la production de pétrole et de gaz. Cependant, au fil du temps, les points communs entre les sources d'énergie renouvelables en mer et l'industrie pétrolière et gazière peuvent devenir un avantage si les zones côtières tirent parti des possibilités de passer aux nouvelles énergies de manière organisée et progressive . De nombreuses régions d'Europe prennent déjà conscience du potentiel d’emplois, de croissance et de revitalisation économique que représente le redéploiement des compétences et des ressources provenant des secteurs en déclin de la pêche, de la construction navale et des ports, ainsi que d’autres secteurs potentiellement intéressants. Les prix élevés du pétrole encourageront probablement les investissements dans la production de pétrole et de gaz en Europe pendant un certain temps encore, mais la production a atteint son pic et il est temps de commencer à préparer la transition et à mobiliser les nouvelles compétences nécessaires. Les programmes de l’UE tels qu’«Énergie intelligente – Europe» et les programmes relevant de la politique de cohésion sont déjà utilisés pour financer des projets qui prennent les devants en matière d’adaptation aux sources d’énergie renouvelables et qui soutiennent le développement de l’éolien en mer[27].

3.2. Adopter une stratégie mieux définie et mieux coordonnée en matière de projets en mer

Comme expliqué ci-dessus, il sera important d’agir de façon plus réfléchie et plus coordonnée pour exploiter les ressources éoliennes de l'Europe au meilleur coût; une série d'instruments de planification et d'enceintes communautaires ou régionales pourraient jouer un rôle dans ce sens.

Sur le plan des sources d ’ énergie renouvelables , la Commission a proposé que la nouvelle directive sur l'énergie produite à partir de sources renouvelables renferme l'obligation, pour les États membres, d’établir des plans d’action nationaux[28]. Ceux-ci permettront aux États membres de fixer un cadre cohérent définissant la contribution des diverses sources d’énergie renouvelables et des différentes technologies qui y sont liées. Il serait opportun que les États qui disposent de ressources en énergie en mer précisent quelle contribution ils en attendent par rapport à leur objectif pour 2020.

Sur le plan de l'environnement marin , la mise en œuvre de la directive-cadre «stratégie pour le milieu marin» [29], récemment adoptée, sera une occasion pour les États membres de prendre en considération les parcs éoliens en mer dans leur évaluation globale des pressions et impacts qui s’exercent sur le milieu marin, et d'estimer si ces parcs sont susceptibles d’avoir une incidence sur la réalisation des objectifs de «bon état écologique» prévus par cette directive. Dans ce contexte, les conventions sur la mer régionale (OSPAR, HELCOM, MAP, BSC, etc.) peuvent aussi contribuer à une meilleure coordination; un travail considérable a d’ailleurs déjà été accompli, notamment en ce qui concerne les évaluations des incidences sur l’environnement[30].

Sur le plan du réseau électrique , la coopération régionale au sein du nouveau Réseau européen des gestionnaires de réseau de transport d'électricité (REGRT) proposé dans le «troisième paquet»[31], ainsi que les plans de développement du réseau et d’investissements qui y sont liés, constitueront de nouveaux outils de coordination majeurs. Les gestionnaires de réseau de transport européens soutiennent l’idée de créer des projets de réseaux régionaux spéciaux pour l'énergie éolienne en mer. La nouvelle Agence de coopération des régulateurs de l'énergie et les initiatives régionales existantes joueront également un rôle important de coordination en matière réglementaire, en garantissant la mise en place de mécanismes de marché améliorés (notamment pour le courant d’ajustement et les échanges transfrontaliers) et de conditions plus harmonisées, flexibles et favorables qui encourageront les investissements dans les réseaux en mer transnationaux. En outre, les coordinateurs européens nommés au titre des orientations relatives aux RTE-E[32] (y compris le coordinateur de l’énergie éolienne en mer pour l'Europe du Nord) ont été spécialement chargés de promouvoir la dimension européenne de certains projets en facilitant le dialogue transfrontalier, et d'aider à coordonner les procédures nationales de consultation des parties intéressées.

Le défi consiste à faire en sorte que ces divers processus soient liés, tout en exploitant leurs avantages, ressources et expertise propres . Comme expliqué dans la communication de la Commission sur une politique maritime intégrée pour l’UE[33], la gestion des mers doit tendre à long terme vers un aménagement véritablement intégré de l'espace maritime ; la Commission présentera avant fin 2008 une feuille de route à cet effet. Cette approche pourrait déboucher sur un cadre permettant de concilier les différents intérêts sectoriels et de réaliser un arbitrage entre eux, ainsi que d’établir des conditions d'investissement stables. Pour réaliser des progrès en ce sens en temps utile, des mesures concrètes et un apport d’expérience seront nécessaires, en fonction des besoins réels du secteur et des priorités politiques.

Dans cette perspective, le travail réalisé actuellement par l’Allemagne, la Suède et le Danemark en vue d'un éventuel raccordement commun pour les trois parcs éoliens situés sur le site de Krieger’s Flak en mer Baltique, qui bénéficie d'un fort soutien du coordinateur européen, constituera une précieuse expérience de partage des avantages socioéconomiques offerts par une solution commune combinant nouveaux parcs éoliens et interconnexions. La Commission soutiendra et complétera les efforts du coordinateur européen pour rassembler les différentes actions, autorités et parties intéressées, pour compiler des «bonnes pratiques» tirées de cas particuliers et pour susciter des coopérations similaires ailleurs, notamment en mer du Nord . Elle assurera notamment des contacts étroits avec des projets financés par l'UE qui présentent un intérêt particulier ici, tels que NORSEWIND[34] et WINDSPEED[35].

3.3. Maximaliser les avantages de l'éolien en mer pour l'environnement

L'énergie éolienne présente non seulement des avantages pour l'environnement, car elle est une source propre d'électricité puisqu’elle n'émet pas de gaz à effet de serre et ne pollue pas l'air sur le lieu de production, mais aussi des avantages du point de vue de la sécurité d'approvisionnement; ces avantages sont largement reconnus, et l'écrasante majorité des Européens a une attitude très positive envers l'énergie éolienne[36]. En outre, cette technologie ne consomme pas d’eau, contrairement à la production d’électricité d’origine thermique, et représente une contribution positive, mondiale et à long terme à la préservation de la biodiversité face au changement climatique, ce qui est moins connu, mais tout aussi important.

Cependant, à l’échelon local, les projets sont parfois source de préoccupations parce qu’ils peuvent entraîner des modifications du paysage, générer du bruit ou avoir des incidences sur la biodiversité et les habitats locaux. Si un parc éolien est installé loin de la côte, seul le dernier problème pourrait se poser, mais l'expérience acquise à ce jour montre qu'en fait, c'est rarement le cas: les programmes de surveillance des parcs éoliens en mer ont montré qu'il était tout à fait possible de construire des parcs éoliens, même de grande taille, sans incidences notables sur la biodiversité et les habitats locaux .

Toutefois, des parcs éoliens mal situés peuvent porter préjudice aux espèces et habitats sensibles. Ces problèmes potentiels devraient être décelés à un stade précoce au moyen d ’ évaluations stratégiques et, si nécessaire, résolus par des mesures d'atténuation afin d'éviter ou de réduire autant que possible tout effet négatif notable.

La Commission considère que la législation communautaire existante en matière d ’ évaluation des incidences sur la nature et l ’ environnement constitue un cadre adéquat et assez flexible pour traiter ces questions . Elle reconnaît toutefois que des orientations supplémentaires relatives à l'application de cette législation dans le contexte particulier des parcs éoliens situés au sein ou à proximité de zones naturelles protégées ou sensibles pourraient contribuer à accroître le degré de certitude des promoteurs, des autorités et des autres parties intéressées. En conséquence, les services de la Commission vont intensifier leurs travaux pour définir des orientations concernant la nature et les parcs éoliens, qui devraient être achevées en 2009 au plus tard . Dans ce contexte seront envisagées les options possibles pour réaliser, maintenir à jour et diffuser des présentations sur les découvertes scientifiques en matière d'incidences de l'énergie éolienne sur l'environnement. De plus, la Commission poursuivra ses efforts en vue d’établir un réseau européen d'observation et de données du milieu marin (EMODNET) pour faciliter l’accès à des données pouvant étayer les évaluations des incidences sur l’environnement.

La planification stratégique, on l’a déjà dit, aide à atteindre un bon équilibre entre les différents intérêts concernés par l'implantation de parcs éoliens en mer. La désignation des sites marins Natura 2000 au titre des directives «Habitats» et «Oiseaux» est donc importante pour garantir une sécurité aux promoteurs . Ces désignations connaissent d’importants retards et la Commission a déjà préparé un guide pour aider les États membres à localiser et à sélectionner les sites marins. La balle est clairement dans le camp des États; la Commission prendra toutes les mesures nécessaires pour faire en sorte que ces sites soient désignés en temps utile et de manière correcte.

3.4. Intégrer la production d’énergie éolienne en mer à grande échelle dans le réseau de l’avenir

Le développement à grande échelle de l’énergie éolienne en mer peut créer des goulets d’étranglement dans le réseau électrique existant, surtout si celui-ci n’est pas adapté aux modifications de l’infrastructure de production. Ce problème fait déjà l’objet de l’attention du coordinateur européen de l'énergie éolienne en mer pour l'Europe du Nord et d'enquêtes techniques poussées dans le contexte de projets comme TradeWind[37] ou l’étude EWIS pour l'intégration réussie de l'énergie éolienne dans les réseaux électriques européens[38].

Il n’est pas possible de formuler une solution définitive à ce problème avant que son ampleur et sa nature exactes n’aient été mieux quantifiées. La solution passera probablement par de nouvelles capacités de transport et par l’utilisation de technologies modernes de «réseau intelligent», qui concernent notamment la gestion intelligente de la demande, le stockage de l’énergie (en renforçant par exemple l’utilisation de l’électricité dans le secteur des transports) et, de manière plus générale, l’intégration des systèmes.

Ce vaste débat s’inscrira toutefois dans un contexte plus large et adapté, constitué par le livre vert sur les réseaux européens d’énergie, adopté parallèlement à la présente communication, par la poursuite des travaux du coordinateur européen et par la coopération renforcée entre les régulateurs de l’énergie et les gestionnaires de réseau de transport, abordée au point 3.2.

4. CONCLUSIONS

L’énergie éolienne en mer est une ressource locale de production d’électricité disposant d’un immense potentiel qui reste largement inexploité. Elle peut et doit contribuer fortement à atteindre les objectifs de politique énergétique de l'UE, au moyen d’un accroissement très important de sa capacité installée, qui devrait être 30 à 40 fois plus élevée qu’aujourd’hui d'ici à 2020, et 100 fois plus élevée d'ici à 2030.

Cependant, il faut du temps pour développer la capacité de la chaîne technologique et industrielle et pour soumettre les projets aux procédures de planification et d’autorisation. Pour réaliser à temps les investissements nécessaires à la réalisation des objectifs de 2020, l'industrie doit pourvoir disposer très rapidement de davantage de certitude et de conditions cadres stables et favorables. L’objectif contraignant de 20 % d’énergies renouvelables et le paquet «énergie et climat» joueront un rôle crucial à cette fin, mais les États membres disposant de ressources éoliennes en mer devront utiliser ce cadre et les plans d’action nationaux proposés pour exposer clairement leurs ambitions en matière d’éolien en mer et pour prendre les mesures nécessaires.

La Commission, pour sa part, appliquera pleinement toutes les initiatives de l'UE existant dans ce domaine, comme mentionné ci-dessus, et prendra des mesures supplémentaires si nécessaire. Plus particulièrement, elle:

- cherchera à faciliter la coopération régionale en matière de planification du réseau électrique et de planification des sites d'implantation de l'éolien en mer entre les États membres, les régulateurs de l’énergie, les gestionnaires de réseau de transport (GRT) et les autres parties intéressées, en utilisant des instruments tels que ceux créés par le «troisième paquet» et la plate-forme de coordination instaurée par le coordinateur européen pour le raccordement des installations de production d’énergie éolienne en mer Baltique et en mer du Nord;

- encouragera les États membres à mettre en œuvre la planification de l'espace maritime , sur la base des principes de la future feuille de route de la Commission sur ce thème, afin de réglementer les utilisations concurrentes et de plus en plus importantes de la mer au moyen de procédures décisionnelles transparentes et de sélectionner les sites de manière optimale;

- encouragera les GRT et les régulateurs de l’énergie à renforcer leur coopération pour mettre rapidement en place des conditions réglementaires plus favorables aux investissements dans les réseaux transnationaux en mer , aux échanges transfrontaliers et au développement de marchés fonctionnels du courant d’ajustement;

- mettra en valeur la recherche liée aux équipements en mer dans le cadre du septième programme-cadre de recherche, de développement technologique et de démonstration (7e PC) et, dans le contexte de l’initiative industrielle européenne pour l'énergie éolienne et de la communication sur le financement des technologies à faible intensité carbonique, annoncées dans le plan SET, envisagera de soutenir davantage le développement et le déploiement sur le marché de l'éolien en mer et des autres énergies produites à partir de sources renouvelables marines, compte tenu des nouveaux objectifs de politique énergétique de l ’ UE ;

- mettra l’accent, dans les futurs appels au titre du programme «Énergie intelligente – Europe» , sur des actions destinées à supprimer les principaux obstacles non technologiques à l’utilisation de l’énergie éolienne en mer;

- achèvera la mise au point d'orientations relatives à l'application de la législation communautaire en matière de conservation de la nature dans le contexte précis des parcs éoliens , et prendra toutes les mesures nécessaires pour garantir que les États membres désignent les zones marines protégées au titre des directives «Oiseaux» et «Habitats» en temps utile, afin d’améliorer la sécurité de planification pour les promoteurs de projets et de contribuer à la réalisation des objectifs communautaires dans le domaine de la biodiversité;

- considérera l'intégration à grande échelle de l'éolien en mer dans les réseaux électriques comme l ’ un des points clés du suivi du livre vert sur les réseaux européens d'énergie , en tenant compte des études en cours et des travaux des GRT européens.

[1] Source: Pure Power , European Wind Energy Association (EWEA).

[2] COM(2008) 738.

[3] COM(2007) 1.

[4] Voir la comparaison des coûts des différentes technologies dans le document SEC(2008) xxx.

[5] Sur les 56,5 GW installés dans l’UE à la fin de 2007, seul 1,1 GW provenait d'installations en mer (Source: EWEA).

[6] La modélisation réalisée dans le contexte de la deuxième analyse stratégique de la politique énergétique indique que ce chiffre serait de 31 GW d’ici 2020. Les estimations «basse», «moyenne» et «haute» de l’EWEA, publiées en mars, sont respectivement de 20, 35 et 40 GW d’ici 2020, et de 40, 120 et 150 GW d’ici 2030. L’Agence européenne pour l'environnement devrait publier une estimation indépendante des ressources fin 2008.

[7] COM(2007) 575 du 10.10.2007.

[8] Voir le document de travail des services de la Commission intitulé Energy policy and maritime policy: ensuring a better fit , SEC(2007) 1283 du 10.10.2007.

[9] JO L 176 du 15.7.2003.

[10] JO L 283 du 27.10.2001.

[11] JO L 275 du 25.10.2003, p. 32.

[12] JO C 82 du 1.4.2008, p. 1.

[13] http://ec.europa.eu/energy/electricity/package_2007/index_en.htm

[14] http://ec.europa.eu/energy/climate_actions/index_en.htm

[15] Un résumé des résultats de la consultation est disponible à l’adresse:http://ec.europa.eu/energy/res/consultation/offshore_wind_energy_en.htm.

[16] La nature de ces synergies possibles est illustrée clairement dans un rapport récent des consultants de l'entreprise 3E: voir http://www.greenpeace.org/eu-unit/press-centre/reports/A-North-Sea-electricity-grid-(r)evolution.

[17] JO L 103 du 25.4.1979.

[18] JO L 206 du 22.7.1992.

[19] JO L 175 du 5.7.1985.

[20] www.offshore-wind.de/page/index.php?id=2605&L=1

[21] COM(2007) 723 du 22.11.2007.

[22] JO L 412 du 30.12.2006, p. 1.

[23] JO L 310 du 9.11.2006, p. 15.

[24] Voir par exemple l’initiative «Electra»: http://ec.europa.eu/enterprise/electr_equipment/electra.htm.

[25] www.windplatform.eu/92.0.html

[26] www.windplatform.eu

[27] Par exemple www.power-cluster.net, www.offshore-power.net et www.windskill.eu.

[28] COM(2008) 19 du 23.1.2008.

[29] JO L 164 du 25.6.2008, p. 19.

[30] Voir www.ospar.org et www.environmentalexchange.info.

[31] COM(2007) 528.

[32] JO L 262 du 22.9.2006.

[33] COM(2007) 575 du 10.10.2007.

[34] NORSEWIND est un nouveau projet financé au titre du 7e PC, dont le but est de dresser une carte des ressources éoliennes en mer Baltique, en mer d'Irlande et en mer du Nord en utilisant à la fois des mâts météorologiques classiques, des instruments de télédétection au sol et des données satellitaires.

[35] WINDSPEED, soutenu par le programme «Énergie intelligente – Europe», a pour but d'établir une feuille de route pour le déploiement de l’éolien en mer dans le centre et le sud de la mer du Nord, en prenant en considération toutes les interactions entre le milieu aérien et le milieu marin.

[36] Eurobaromètre spécial, janvier 2007. http://ec.europa.eu/public_opinion/archives/ebs/ebs_262_en.pdf

[37] www.trade-wind.eu

[38] www.wind-integration.eu