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Rapport explicatif sur le protocole à la convention relative à la protection des intérêts financiers des Communautés européennes (Texte approuvé par le Conseil du 19 décembre 1997)

Journal officiel n° C 011 du 15/01/1998 p. 0005 - 0012


RAPPORT EXPLICATIF sur le protocole à la convention relative à la protection des intérêts financiers des Communautés européennes (Texte approuvé par le Conseil du 19 décembre 1997) (98/C 11/02)

I. INTRODUCTION

Divers travaux et études entrepris au sein des États membres et des institutions des Communautés européennes (1) ont mis en évidence que la législation des États membres contenait un dispositif utilisable pour lutter contre la fraude et la corruption active et passive impliquant des fonctionnaires nationaux.

Bien que ces dispositions présentent des caractéristiques spécifiques selon les États membres, elles ont toutes des paramètres communs qui permettent de parvenir à une définition commune.

Par ailleurs, il a été constaté que les législations pénales des États membres ne couvrent que très imparfaitement le phénomène de la corruption pris dans sa dimension internationale, c'est-à-dire en ce qu'il implique des fonctionnaires communautaires ou des fonctionnaires des autres États membres, et en ce qu'il affecte effectivement ou potentiellement les intérêts financiers des Communautés européennes.

L'existence de ces paramètres communs aux droits nationaux a révélé la nécessité d'une démarche visant à promouvoir au niveau de l'Union européenne une réponse appropriée et à assurer une plus grande convergence dans la manière dont le droit pénal des différents États membres appréhende des actes de corruption ayant des ramifications internationales.

C'est à l'initiative de la présidence espagnole que le protocole sur la corruption de fonctionnaires a été proposé comme instrument complémentaire visant à compléter la convention (2) établie le 26 juillet 1995 et à renforcer la protection des intérêts financiers des Communautés. II constitue en particulier une réponse au point 7 h) de la résolution du Conseil du 6 décembre 1994 relative à la protection juridique des intérêts financiers des Communautés (3), selon lequel «les États membres devraient prendre des mesures efficaces pour sanctionner la corruption impliquant des fonctionnaires des Communautés européennes et concernant les intérêts financiers des Communautés».

II. COMMENTAIRE DES ARTICLES

Article premier

Cette disposition introductive définit ce qu'il faut entendre par «fonctionnaire» et «convention» aux fins du protocole, chaque fois que ces concepts y apparaissent.

1.1. L'expression «fonctionnaire» désigne indistinctement différentes catégories de personnes - fonctionnaires communautaires, fonctionnaires nationaux et fonctionnaires d'un autre État membre - en vue d'une application large et homogène des dispositions matérielles du protocole dans le cadre de la lutte contre la corruption.

Le texte définit ces catégories de personnes par rapport à leurs spécificités statutaires respectives.

1.2. Le paragraphe 1, point b), qui s'inspire de la formulation retenue dans le projet de traité de 1976, vise les «fonctionnaires communautaires» c'est-à-dire non seulement les fonctionnaires titulaires Stricto sensu, auxquels s'applique le statut des fonctionnaires des Communautés européennes, mais aussi les différentes catégories d'agents engagés par contrat au sens du régime applicable aux autres agents des Communautés européennes. Ce concept englobe les experts nationaux mis à la disposition des Communautés européennes pour y exercer des fonctions équivalentes à celles qu'exercent les fonctionnaires et autres agents des Communautés européennes.

Les membres des institutions communautaires - la Commission, le Parlement européen, la Cour de justice des Communautés européennes et la Cour des comptes européenne - ne sont pas compris dans cette définition (observations relatives à l'article 4, paragraphe 2).

1.3. La dernière phrase du point b) classe dans la catégorie «fonctionnaire communautaire» le personnel des organismes de droit communautaire. Actuellement, il s'agit des organismes suivants:

- l'Agence européenne de coopération (4)

- la Banque européenne d'investissement (5)

- le Centre européen pour le développement de la formation professionnelle (6)

- la Fondation européenne pour l'amélioration des conditions de vie et de travail (7)

- l'Institut universitaire européen de Florence (8)

- le Fonds européen d'investissement (9)

- l'Agence européenne pour l'environnement (10)

- la Fondation européenne pour la formation (11)

- l'Observatoire européen des drogues et des toxicomanies (12)

- l'Agence européenne pour l'évaluation des médicaments (13)

- l'Agence européenne pour la sécurité et la santé au travail (14)

- l'Office de l'harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (15)

- l'Institut monétaire européen (16)

- l'Office communautaire des variétés végétales (17)

- le Centre de traduction des organes de l'Union (18)

- l'Observatoire européen des phénomènes racistes et xénophobes (19).

Cette disposition concerne le personnel d'organismes chargés au sens large d'appliquer la législation communautaire déjà adoptée ou à adopter en vertu des traités des Communautés européennes et dont les activités sont telles que la corruption de ce personnel est susceptible d'avoir un effet négatif sur la protection des intérêts financiers des Communautés.

1.4. Le paragraphe 1, point c), définit le «fonctionnaire national» comme un «fonctionnaire» ou un «officier public» tel qu'il est défini dans le droit national de chaque État membre aux fins du droit pénal interne. C'est donc l'acception pénale qui est privilégiée. Lorsqu'un fonctionnaire national de l'État poursuivant est impliqué, c'est la définition nationale qui est d'application. Lorsqu'un fonctionnaire d'un autre État membre est impliqué, cela signifie que la définition dans le droit de cet État membre n'est pas décisive quand la personne concernée n'aurait pas eu la qualité de fonctionnaire en vertu de la loi de l'État membre poursuivant. Ce principe découle du deuxième alinéa du point c) selon lequel un État membre peut décider que les infractions en matière de corruption impliquant des fonctionnaires nationaux d'un autre État membre ne visent que les fonctionnaires dont le statut est compatible avec celui des fonctionnaires nationaux conformément au droit national de l'État membre poursuivant.

Le renvoi qui est ainsi fait au droit de l'État membre dont le fonctionnaire en question est ressortissant signifie qu'il est dûment tenu compte des spécificités nationales en matière de statut des personnes exerçant des fonctions publiques.

L'article 4, paragraphes 2 et 3, montre que la notion de «fonctionnaire national» n'inclut pas automatiquement les membres du Parlement, les ministres, les membres des plus hautes juridictions ni les membres d'une Cour des comptes des États membres. Cependant, cette disposition n'exclut pas la possibilité pour tout État membre d'étendre sa définition de «fonctionnaire national» à une ou plusieurs de ces catégories de personnes.

1.5. L'article 1er, paragraphe 2, définit le terme «convention» aux fins du protocole comme la convention relative à la protection des intérêts financiers des Communautés européennes, établie à Bruxelles le 26 juillet 1995 et publiée au Journal officiel des Communautés européennes C 316 du 27 novembre 1995.

L'article 4, paragraphe 1, l'article 7 et l'article 9, paragraphe 3, comportent un renvoi aux dispositions pertinentes de cette convention.

Article 2

L'article 2 définit les éléments de l'infraction de corruption passive portant effectivement ou potentiellement atteinte aux intérêts financiers des Communautés européennes. Cette définition établit un lien entre le protocole et la convention qu'il complète.

La formule «susceptible de porter atteinte» est destinée à couvrir les cas de corruption qui n'ont pas atteint l'objectif recherché quant à l'effet sur les intérêts financiers des Communautés.

2.1. Le paragraphe 1 énumère une série d'éléments constitutifs de corruption pour un fonctionnaire, parmi lesquels doit nécessairement figurer l'intention délibérée.

2.2. Les éléments matériels de la corruption sont notamment le fait de solliciter, accepter et recevoir, «directement ou par interposition de tiers» certaines choses.

Doivent être considérées comme visées:

- l'initiative unilatérale du fonctionnaire qui sollicite pour lui-même un avantage en faisant savoir à une autre personne, de façon directe ou détournée, qu'elle doit «payer» pour obtenir qu'il accomplisse ou s'abstienne d'accomplir un certain acte; il importe peu que cette sollicitation soit suivie d'effet, l'infraction étant matériellement consommée du seul fait de la sollicitation,

- l'acceptation ou la réception par le corrompu de certaines choses en exécution d'un accord de volontés entre lui-même et le corrupteur, l'infraction étant matériellement consommée dès l'échange des consentements, même si ultérieurement le fonctionnaire renonce à exécuter l'accord ou restitue la chose reçue.

Le protocole ne fait pas de distinction entre les moyens directs et indirects par lesquels est réalisée la corruption. La circonstance de l'éventuelle intervention d'un tiers, élément qui étend le champ d'application de la corruption passive à l'action indirecte du fonctionnaire, commande que soit identifiable le caractère délictueux du comportement de ce dernier, que le tiers impliqué ait été ou non de bonne foi.

2.3. Il y a également infraction lorsque le fonctionnaire sollicite par exemple un présent ou un autre avantage non pour lui-même, mais pour un tiers, tel qu'un conjoint ou un concubin, un ami proche, un parti politique ou une autre organisation.

2.4. Le «corps» de l'infraction de corruption est constitué par des offres, promesses ou avantages de quelque nature que ce soit au profit du fonctionnaire ou de toute autre personne.

L'expression «avantages de quelque nature que ce soit» est une notion intentionnellement large englobant non seulement les objets matériels (argent liquide, objets précieux, marchandises diverses, services rendus) mais également tout ce qui peut représenter un intérêt indirect, tels que le règlement des dettes du corrompu, la réalisation de travaux sur un immeuble lui appartenant, sans que cette énumération soit exhaustive. La notion d'avantage, sollicité, reçu ou promis, couvre toutes les sortes d'avantages matériels ou intellectuels.

Aux fins du protocole, le moment où s'opère la remise ou la fourniture de la chose constitutive de la corruption est indifférent. En retenant expressément l'acceptation de promesses, l'article 2, paragraphe 1, permet de ne pas exclure les paiements différés, dès lors qu'ils trouvent leur origine dans le pacte délictueux conclu entre le corrompu et le corrupteur.

2.5. Il est essentiel que la sollicitation ou l'acceptation soient antérieures à l'acte ou à l'abstention proposé(e) ou agréé(e) par le fonctionnaire.

La rédaction du texte est dépourvue d'équivoque: «le fait . . . pour un fonctionnaire de solliciter ou de recevoir des avantages . . . ou d'en accepter la promesse . . . pour accomplir ou ne pas accomplir . . .».

La formulation indique bien que doivent se succéder dans cet ordre la sollicitation ou l'acceptation, puis l'accomplissement ou le non-accomplissement de l'acte par le fonctionnaire.

Une récompense reçue postérieurement à l'acte sans avoir été préalablement sollicitée ou acceptée n'entraîne donc aucune responsabilité pénale en vertu du protocole. En outre, cet article ne s'applique pas aux gratifications qui ne se rattachent à aucun acte ultérieur accompli dans l'exercice de ses fonctions par le fonctionnaire.

2.6. Les devoirs ou les fonctions du fonctionnaire sont la cible des pratiques auxquelles s'applique le protocole.

Est visé par le protocole le fait pour le titulaire de la charge ou de la fonction d'accomplir ou de s'abstenir d'accomplir un acte relevant des compétences qu'il détient en vertu d'une loi ou d'un règlement (devoir de la fonction), dans la mesure où cet acte est accompli par le fonctionnaire en violation de ses devoirs officiels. De plus, ce comportement doit porter atteinte ou être susceptible de porter atteinte aux intérêts financiers des Communautés.

Le droit de certains États membres couvre le cas où un fonctionnaire, manquant à son devoir d'impartialité, reçoit un avantage pour accomplir un acte conforme à sa fonction (par exemple pour accorder un traitement préférentiel en accélérant ou en suspendant la gestion d'un dossier). Ce cas est couvert par le présent article.

2.7. L'article 2, paragraphe 2, prescrit aux États membres de prendre les mesures de droit pénal nécessaires pour assurer que les comportements visés au paragraphe 1 sont érigés en infractions pénales.

Il appartient donc aux États membres de vérifier si leur droit pénal en vigueur couvre bien toutes les catégories pertinentes de personnes et la totalité des comportements et, à défaut, d'adopter des mesures prévoyant une ou plusieurs infractions pénales correspondant à ceux-ci. Les États membres peuvent à cet égard choisir, soit de prévoir une seule infraction de caractère général, soit de prévoir plusieurs infractions spécifiques.

Article 3

Cet article définit les éléments de l'infraction de corruption active d'un fonctionnaire qui porte effectivement ou potentiellement atteinte aux intérêts financiers des Communautés.

Il constitue le corollaire de l'infraction définie à l'article 2, considérée du point de vue du corrupteur: il est destiné en particulier à garantir que l'administration publique fonctionne correctement et à protéger les fonctionnaires contre d'éventuelles manoeuvres dont ils pourraient être la cible, étant entendu que, dans la plupart des États membres, la corruption passive et la corruption active constituent des infractions distinctes et autonomes, susceptibles de faire l'objet de poursuites distinctes et autonomes.

L'article 3, paragraphe 1, identifie un ensemble de comportements répréhensibles du corrupteur, constitutifs de la corruption active d'un fonctionnaire.

3.1. Le «fait intentionnel, pour quiconque, de promettre ou de donner . . . un avantage . . . » vise la personne du corrupteur, en quelque qualité qu'il agisse (représentant du secteur privé, du secteur public, ou autre): le corrupteur peut être indifféremment un simple particulier agissant pour son propre compte ou pour le compte d'une société ou une personne exerçant une fonction publique.

L'acte constitutif de la corruption doit être commis intentionnellement, c'est-à-dire procéder d'une volonté délibérée de faire accomplir des actes contraires aux devoirs attachés au service public.

Il conviendra de déterminer conformément au droit national si l'infraction est constituée lorsque le corrupteur, agissant délibérément, se trompe sur les pouvoirs dont il croit investi le fonctionnaire.

3.2. L'acte du corrupteur consiste à promettre ou à donner, directement ou par interposition de tiers, un avantage (matériel ou intellectuel), de quelque nature que ce soit, que l'offre soit suivie d'effet ou non et que l'avantage se concrétise ou non.

La manoeuvre corruptrice peut être unilatérale ou bilatérale, porter sur une chose matérielle ou immatérielle: la notion d'avantage doit être entendue dans son acception la plus large, sous réserve des points 2.4 et 2.5 visés ci-dessus.

Le texte de l'article ne fait pas de distinction entre les moyens, directs ou indirects, par lesquels la manoeuvre corruptrice est accomplie. Il comprend les manoeuvres corruptrices adressées au fonctionnaire, tant directement que par interposition de tiers.

3.3. La corruption active s'adresse à une personne qui, par définition, a nécessairement la qualité de fonctionnaire, que l'avantage profite au fonctionnaire lui-même ou à une autre personne.

3.4. Le but recherché par la corruption active est le même que celui visé par la corruption passive, (point 2.6).

3.5. L'article 3, paragraphe 2, est rédigé dans les mêmes termes que l'article 2, paragraphe 2, (point 2.7.).

Article 4

Cet article étoffe le dispositif antifraude et anticorruption en ce qu'il demande une adaptation du droit pénal des États membres relatif à la conduite incriminée chez les fonctionnaires nationaux de sorte à y inclure le même type de conduite de la part de fonctionnaires des Communautés, lorsque celle-ci affecte effectivement ou potentiellement les recettes et les dépenses de la Communauté.

4.1. Le paragraphe 1 concerne les infractions qui, dans chaque État membre, sont liées aux comportements frauduleux portant atteinte aux finances communautaires, tels qu'ils sont définis à l'article 1er de la convention et qui sont commises par des fonctionnaires nationaux dans l'exercice de leurs fonctions.

À l'égard de ces infractions, le droit pénal de tous les États membres doit appliquer le principe d'assimilation en matière de sanctions de la même manière qu'à l'égard des infractions visées aux articles 2 et 3, afin que tout comportement constitutif d'une infraction lorsqu'il est le fait d'une catégorie de fonctionnaires (les fonctionnaires nationaux), constitue également une infraction lorsqu'il est le fait de fonctionnaires d'une autre catégorie (fonctionnaires communautaires).

En vertu de ce principe, les États membres sont aussi invités à prendre les mesures pour étendre l'application de leurs incriminations en matière de fraude aux comportements de même nature imputables aux fonctionnaires communautaires dans l'exercice de leurs fonctions. L'extension concerne, non les comportements eux-mêmes, mais les personnes susceptibles de les commettre.

La méthode par laquelle cette extension est opérée est laissée à l'appréciation de chaque État membre.

4.2. Lors du Conseil du 23 novembre 1995, les États membres et la Commission ont estimé, d'un commun accord, que, aux fins du protocole, les ministres des États membres et les membres de la Commission devraient faire l'objet d'un traitement similaire.

Le paragraphe 2 reflète ce point de vue pour ce qui concerne les infractions de fraude portant effectivement ou potentiellement atteinte aux intérêts financiers de la Communauté et les infractions de corruption active et passive telles qu'elles sont définies dans le protocole. Ce texte concerne au niveau national les ministres, les membres du parlement, les membres des plus hautes juridictions et les membres de la Cour des comptes et, au niveau des institutions communautaires, leurs homologues agissant dans l'exercice de leurs fonctions (membres de la Commission, membres du Parlement européen, membres de la Cour de justice des Communautés européennes et membres de la Cour des comptes européenne).

Il s'ensuit que, en ce qui concerne la sanction des infractions de fraude et de corruption, les membres de la Commission seront assimilés aux ministres nationaux, les membres du Parlement européen aux parlementaires nationaux, les membres de la Cour de justice aux membres des plus hautes juridictions nationales, les membres de la Cour des comptes européenne à leurs homologues nationaux. Du fait de cette assimilation, les dispositions nationales, dans la mesure où elles visent les infractions de cette nature commises par des membres des parlements nationaux, les ministres nationaux, etc., doivent s'appliquer aussi aux membres susmentionnés des institutions des Communautés européennes.

Pour les États membres dans lesquels il n'existe pas de Cour des comptes à proprement parler, les organes considérés comme homologues seront les suivants:

- le National Audit Office au Royaume-Uni,

- l'Office of the Comptroller and Auditor General en Irlande,

- Rigsrevisionen au Danemark,

- Riksrevisions verket en Suède,

- Valtiontalouden Tarkastusvirasto/Statens revisionskerk en Finlande.

4.3. Le paragraphe 3 réserve la possibilité de déroger au principe d'assimilation énoncé au paragraphe 2 pour les États membres où la responsabilité pénale des ministres du gouvernement est régie par des lois spéciales applicables à des situations nationales spécifiques. Ces dispositions ne doivent toutefois pas faire obstacle à la responsabilité pénale pour des infractions au droit pénal national commises par des membres de la Commission ou à leur encontre.

Cette possibilité est particulièrement utile au Danemark, où les règles de droit pénal régissant la responsabilité des ministres s'appliquent dans des situations particulières (par exemple en cas de responsabilité pénale du ministre pour une faute commise par ses subordonnés) dans lesquelles d'autres personnes assumant de hautes fonctions ne seraient pas responsables pénalement.

4.4. En vertu du paragraphe 4, les paragraphes précédents sur l'assimilation concernant les faits punissables s'entendent «sans préjudice des dispositions applicables dans chaque État membre en ce qui concerne la procédure pénale et la détermination des juridictions compétentes.»

Aux fins des divers paragraphes combinés de l'article 4, il est clair que le protocole ne saurait affecter ou remettre en cause les règles internes de procédure pénale ou les dispositions déterminant les juridictions compétentes pour se prononcer sur les infractions en cause. Cela n'exclut pas pour autant que l'article prenne pleinement effet en droit interne.

Pour ce qui concerne, en particulier, les personnes visées au paragraphe 2, à l'égard desquelles le principe d'assimilation suppose de manière générale et sans exception, l'égalité de traitement au regard du droit pénal, il convient de noter ce qui suit. Lorsqu'une loi spéciale d'un État membre attribue à une juridiction déterminée la compétence pour juger les ministres du gouvernement, les membres du Parlement, les membres des plus hautes juridictions nationales et les membres de la Cour des comptes accusés d'avoir commis une infraction, cette juridiction pourra également être compétente dans des cas similaires concernant les membres de la Commission, les membres du Parlement européen, les membres de la Cour de justice des Communautés européennes et les membres de la Cour des comptes européenne, sans préjudice toutefois des règles de compétence nationales.

4.5. Le paragraphe 5 précise que le protocole ne porte pas atteinte aux dispositions relatives à la levée de l'immunité concernant le personnel des institutions communautaires.

La levée de l'immunité reste donc une condition préalable de l'exercice de la compétence. Le protocole constate l'obligation pour chacune des institutions concernées d'appliquer, dans le respect des procédures existantes et des voies de recours prévues en droit communautaire, les dispositions régissant leurs privilèges et immunités (20).

Article 5

5.1. L'article 5, paragraphe 1, invite les États membres à faire en sorte que les faits de corruption active et passive définis aux articles 2 et 3 soient toujours passibles de sanctions pénales, c'est-à-dire jugés par des juridictions pénales.

Sont également passibles de sanctions pénales la complicité et l'instigation d'infractions, ces concepts devant être interprétés conformément à la définition qui en est donnée dans le droit pénal de chaque État membre.

Étant donné que le comportement consistant à faire des promesses, que celles-ci soient ou non effectivement tenues ou accomplies, est constitutif de l'infraction de corruption active ou passive, il n'a pas été jugé nécessaire d'imposer l'incrimination de la tentative de corruption active ou passive. Cependant, les États membres qui le souhaitent peuvent aussi sanctionner la tentative d'infraction.

Ainsi qu'il résulte d'un arrêt de la Cour de justice des Communautés européennes, les sanctions doivent être effectives, proportionnées et dissuasives. Dans l'affaire 68/88 (arrêt du 21 septembre 1989, Recueil 1989, p. 2965), la Cour s'est exprimée dans les termes suivants: (les États membres) «doivent notamment veiller à ce que les violations du droit communautaire soient sanctionnées dans des conditions, de fond et de procédure, qui soient analogues à celles applicables aux violations du droit national d'une nature et d'une importance similaires et qui, en tout état de cause, confèrent à la sanction un caractère effectif, proportionné et dissuasif».

Pour se conformer à cette décision, les États membres disposent d'une certaine marge d'appréciation pour déterminer la nature et la sévérité des sanctions qui peuvent être prévues; celles-ci ne doivent pas toujours impliquer nécessairement la privation de liberté. Des peines pécuniaires pourraient être infligées en plus ou à la place de peines de prison.

5.2. Le protocole impose cependant aux États membres l'obligation de prévoir, dans les cas les plus graves, des peines privatives de liberté pouvant entraîner l'extradition. Il appartiendra aux États membres de définir, en fonction de leurs traditions juridiques respectives, les critères ou éléments factuels déterminant la gravité d'une infraction.

5.3. Le paragraphe 2 aborde les rapports entre droit pénal et règles disciplinaires en cas d'éventuel concours de qualifications pour un même fait de corruption; le principe de l'indépendance des systèmes disciplinaires nationaux ou européen est privilégié, puisque le déroulement des poursuites pénales s'entend «sans préjudice de l'exercice des pouvoirs disciplinaires par les autorités compétentes à l'encontre des fonctionnaires nationaux ou des fonctionnaires communautaires».

Tenant compte de certaines traditions juridiques nationales, le texte accorde en outre aux autorités nationales compétentes la possibilité de mettre en oeuvre les principes de leur propre législation qui permettent de prendre en compte, dans la détermination de la sanction pénale à infliger, des sanctions disciplinaires déjà prononcées à l'encontre de la même personne au titre de la même infraction. Il s'agit là d'une disposition particulière qui ne s'imposera pas aux États membres qui ne reconnaissent pas ou ne mettent pas en oeuvre les sanctions disciplinaires.

Article 6

6.1. Cet article fixe un certain nombre de critères en vertu desquels les autorités nationales répressives et judiciaires sont compétentes pour poursuivre et juger les infractions visées dans le protocole, c'est-à-dire les infractions de corruption active et passive ainsi que les infractions instituées à l'article 4.

6.2. Le paragraphe 1 invite chaque État membre à établir sa compétence dans les quatre cas suivants:

a) lorsque l'infraction est commise, en tout ou en partie, sur son territoire, en ce sens que c'est sur son territoire que l'acte de corruption est réalisé, l'avantage accordé ou le pacte délictueux conclu, quelles que soient la qualité et la nationalité du corrupteur ou du fonctionnaire impliqué (principe de territorialité);

b) lorsque l'auteur de l'infraction est un ressortissant ou un fonctionnaire de l'État membre concerné (principe de la personnalité active): le critère tiré de la qualité de l'auteur de l'infraction permet de déterminer la compétence indépendamment de la lex loci delicti. Il appartient alors aux État membres d'engager des poursuites pour des infractions commises à l'étranger, y compris dans les pays tiers; cette faculté est particulièrement importante pour les États membres qui n'extradent pas leurs propres ressortissants;

c) lorsque l'infraction est commise à l'encontre d'un ressortissant de l'État membre, qu'il soit fonctionnaire ou membre d'une institution communautaire (principe de la personnalité passive). Cette disposition présente un intérêt particulier dans les cas de corruption active commise à l'étranger par des personnes qui ne sont pas des ressortissants de l'État membre concerné;

d) lorsque l'auteur de l'infraction est un fonctionnaire communautaire au service d'une institution communautaire ayant son siège dans l'État membre concerné. Le critère du siège est utile dans des situations exceptionnelles non régies par d'autres règles de compétence, notamment le cas où une infraction est commise hors du territoire de la Communauté par un fonctionnaire communautaire qui n'est pas ressortissant d'un État membre (21).

6.3. Le paragraphe 2 autorise tout État membre qui le souhaite à ne pas accepter ou à accepter sous réserves les règles énoncées au paragraphe 1, points b), c) et d) en faisant une déclaration en ce sens lors de la notification prévue à l'article 9, paragraphe 2, du protocole.

L'article 11, paragraphe 1, prévoit, comme on le verra, que les points b), c) et d) de l'article 6, paragraphe 1, constituent les seules dispositions du protocole à l'égard desquelles des réserves sont admises.

Article 7

7.1. L'article 7 renvoie à certaines dispositions spécifiques de la convention en posant le principe de leur application à la corruption active et passive au sens du protocole ainsi qu'aux infractions instituées à l'article 4.

Les dispositions pertinentes de la convention peuvent être résumées comme suit:

- L'article 3 pose le principe de la responsabilité pénale des chefs d'entreprise.

- L'article 5, paragraphes 1, 2 et 4, traite de l'extradition et de l'application du principe aut dedere, aut judicare.

- L'article 6 pose le principe d'une étroite coopération entre les États membres en cas de fraude affectant les intérêts financiers des Communautés.

Ces principes s'appliquent tous les trois sans restriction aux comportements visés par le protocole.

- L'article 7 pose le principe ne bis in idem, qui s'applique aussi aux questions visées par le protocole. Il est à noter que l'exécution d'un jugement comprend les cas où il est sursis à l'exécution.

- L'article 9 permet aux États membres d'adopter des dispositions de droit interne plus strictes que celles de la convention. De même, le protocole constitue lui aussi un ensemble de normes minimales.

- L'article 10 instaure entre autres un système d'information entre les États membres et la Commission, ce qui vaut également pour les questions visées par le protocole.

Le rapport explicatif de la convention comporte des précisions sur le contenu de ces règles.

Article 8

Cet article délimite la compétence attribuée à la Cour de justice des Communautés européennes pour statuer sur les différends qui opposeront les États membres entre eux et les États membres à la Commission concernant l'interprétation ou l'application du protocole (22).

On se référera au rapport explicatif de la convention pour tout commentaire détaillé. En effet, cet article du protocole reprend l'article 8 de la convention afin d'assurer l'homogénéité des deux instruments.

L'article 8, paragraphe 2, précise les cas dans lesquels la Cour de justice est compétente pour les litiges opposant les États membres à la Commission.

À noter que la Cour de justice est spécialement compétente pour l'interprétation de la notion de fonctionnaire communautaire définie à l'article 1er.

Article 9

Cet article concerne l'entrée en vigueur du protocole, qui ne peut être antérieure à celle de la convention.

Article 10

Cet article concerne l'adhésion de nouveaux États membres de l'Union au protocole.

Article 11

Cet article précise que seules sont admises les réserves relatives à l'article 6, paragraphe 1, points b), c) et d). L'auteur de la réserve peut la retirer à tout moment en adressant une notification au secrétariat général du Conseil.

(1) Voir notamment:

- le projet de traité du 10 août 1976 (JO C 222 du 22.9.1976, p. 13),

- résolution du Parlement européen du 11 mars 1994 (JO C 91 du 28.3.1994, p. 334),

- résolution du Conseil du 6 décembre 1994 (JO C 355 du 14.12.1994, p. 2),

- résolution du Parlement européen du 14 décembre 1995.

La présidence espagnole a demandé à la Commission de présenter les résultats de l'analyse comparative effectuée sur cette question. Ces travaux, achevés le 1er décembre 1994, ont mis en évidence l'existence dans chaque ordre juridique national pris isolément de dispositions cohérentes, mais aussi de divergences inévitables et préjudiciables entre les États membres en ce qui concerne la définition tant de la corruption proprement dite que des personnes visées par les mesures de lutte contre la corruption de fonctionnaires.

(2) JO C 316 du 27.11.1995, p. 48.

(3) JO C 355 du 14.12.1994, p. 2.

(4) Règlement (CEE) n° 3245/81 du Conseil (JO L 328 du 16.11.1981, p. 1).

(5) Articles 198 D et 198 E du traité CE.

(6) Règlement (CEE) n° 337/75 du Conseil (JO L 39 du 13.2.1975, p. 1). Règlement modifié par le règlement (CE) n° 354/95 (JO L 41 du 23.2.1995, p. 1).

(7) Règlement (CEE) n° 1365/75 du Conseil (JO L 139 du 30.5.1975, p. 1). Règlement modifié en dernier lieu par le règlement (CEE) n° 1947/93 (JO L 181 du 27.7.1993, p. 13).

(8) Convention portant création d'un Institut universitaire européen (JO C 29 du 9.2.1976, p. 1).

(9) Statuts du Fonds européen d'investissement (JO L 173 du 7.7.1994, p. 1); voir également l'article 30 du protocole sur les statuts de la Banque européenne d'investissement et l'article 239 du traité CE.

(10) Règlement (CEE) n° 1210/90 du Conseil (JO L 120 du 11.5.1990, p. 1).

(11) Règlement (CEE) n° 1360/90 du Conseil (JO L 131 du 23.5.1990, p. 1). Règlement modifié par le règlement (CE) n° 2063/94 (JO L 216 du 20.8.1994, p. 9).

(12) Règlement (CEE) n° 302/93 du Conseil (JO L 36 du 12.2.1993, p. 1). Règlement modifié par le règlement (CE) n° 3294/94 (JO L 341 du 30.12.1994, p. 7).

(13) Règlement (CEE) n° 2309/93 du Conseil (JO L 214 du 24.8.1993, p. 1).

(14) Règlement (CE) n° 2062/94 du Conseil (JO L 216 du 20.8.1994, p. 1).

(15) Règlement (CE) n° 40/94 du Conseil (JO L 11 du 14.1.1994, p. 1). Règlement modifié par le règlement (CE) n° 3288/94 (JO L 349 du 31.12.1994, p. 83).

(16) Article 109 F du traité CE; protocole sur les statuts de l'Institut monétaire européen annexé au traité sur l'Union européenne.

(17) Règlement (CE) n° 2100/94 du Conseil (JO L 227 du 1.9.1994, p. 1). Règlement modifié par le règlement (CE) n° 2506/95 (JO L 258 du 28.10.1995, p. 3).

(18) Règlement (CE) n° 2965/94 du Conseil (JO L 314 du 7.12.1994, p. 1). Règlement modifié par le règlement (CE) n° 2610/95 (JO L 268 du 10.11.1995, p. 1).

(19) Règlement (CE) n° 1035/97 du Conseil (JO L 151 du 10.6.1997, p. 1).

(20) Voir notamment l'article 18 du protocole sur les privilèges et immunités des Communautés européennes.

(21) Bien que les fonctionnaires communautaires aient en principe la nationalité d'un des États membres, il peut y avoir des exceptions à ce principe.

(22) Il est à noter que, par acte du 29 novembre 1996, le Conseil a établi le protocole concernant l'interprétation, à titre préjudiciel, par la Cour de justice des Communautés européennes de la convention relative à la protection des intérêts financiers des Communautés européennes (JO C 151 du 20.5.1997, p. 1). Ce protocole couvre non seulement la convention, mais aussi le protocole examiné.