5.9.2019   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 301/69


RECOMMANDATION DU CONSEIL

du 9 juillet 2019

concernant le programme national de réforme de l’Italie pour 2019 et portant avis du Conseil sur le programme de stabilité de l’Italie pour 2019

(2019/C 301/12)

LE CONSEIL DE L’UNION EUROPÉENNE,

vu le traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, et notamment son article 121, paragraphe 2, et son article 148, paragraphe 4,

vu le règlement (CE) no 1466/97 du Conseil du 7 juillet 1997 relatif au renforcement de la surveillance des positions budgétaires ainsi que de la surveillance et de la coordination des politiques économiques (1), et notamment son article 5, paragraphe 2,

vu le règlement (UE) no 1176/2011 du Parlement européen et du Conseil du 16 novembre 2011 sur la prévention et la correction des déséquilibres macroéconomiques (2), et notamment son article 6, paragraphe 1,

vu la recommandation de la Commission européenne,

vu les résolutions du Parlement européen,

vu les conclusions du Conseil européen,

vu l’avis du Comité de l’emploi,

vu l’avis du Comité économique et financier,

vu l’avis du comité de la protection sociale,

vu l’avis du Comité de politique économique,

considérant ce qui suit:

(1)

Le 21 novembre 2018, la Commission a adopté l’examen annuel de la croissance, qui marque le lancement du semestre européen 2019 pour la coordination des politiques économiques. Elle a dûment tenu compte du socle européen des droits sociaux, proclamé par le Parlement européen, le Conseil et la Commission le 17 novembre 2017. Les priorités de l’examen annuel de la croissance ont été approuvées par le Conseil européen le 21 mars 2019. Le 21 novembre 2018, la Commission a également adopté, sur la base du règlement (UE) no 1176/2011, le rapport sur le mécanisme d’alerte, dans lequel l’Italie était mentionnée parmi les États membres qui feraient l’objet d’un bilan approfondi. Le même jour, la Commission a, en outre, adopté une recommandation de recommandation du Conseil concernant la politique économique de la zone euro, qui a été approuvée par le Conseil européen le 21 mars 2019. Le 9 avril 2019, le Conseil a adopté la recommandation concernant la politique économique de la zone euro (3) (ci-après dénommée «recommandation 2019 pour la zone euro»), qui contient cinq recommandations pour la zone euro (ci-après dénommées «recommandations pour la zone euro»).

(2)

En tant qu’État membre dont la monnaie est l’euro, et compte tenu des liens étroits entre les économies de l’Union économique et monétaire, l’Italie devrait veiller à mettre en œuvre intégralement et en temps utile la recommandation 2019 pour la zone euro, telle qu’elle ressort des recommandations figurant aux points 1 à 5 ci-dessous. En particulier, les mesures ayant trait à l’administration publique, à la justice et à la concurrence contribueront à la mise en œuvre de la première recommandation pour la zone euro en ce qui concerne les marchés de produits résilients et la qualité des institutions; le fait de mettre l’accent sur la politique économique relative aux investissements dans les domaines indiqués et d’utiliser les recettes exceptionnelles pour réduire la dette publique contribuera à la mise en œuvre de la deuxième recommandation pour la zone euro en ce qui concerne le soutien des investissements et la reconstitution des réserves; les mesures visant à améliorer l’employabilité et à déplacer la charge fiscale pesant sur les facteurs de production contribueront à la mise en œuvre de la troisième recommandation pour la zone euro en ce qui concerne le fonctionnement du marché du travail, et les mesures visant à améliorer les bilans des banques contribueront à la mise en œuvre de la quatrième recommandation pour la zone euro en ce qui concerne la réduction des prêts non performants.

(3)

Le rapport 2019 pour l’Italie a été publié le 27 février 2019. Il évaluait les progrès accomplis par l’Italie dans la mise en œuvre des recommandations par pays adoptées par le Conseil le 13 juillet 2018 (4), les suites données aux recommandations par pays adoptées les années précédentes, ainsi que les progrès accomplis par l’Italie en vue d’atteindre les objectifs nationaux qu’elle s’est fixés dans le cadre de la stratégie Europe 2020. Ce rapport comprenait aussi un bilan approfondi effectué en application de l’article 5 du règlement (UE) no 1176/2011, dont les résultats ont également été publiés le 27 février 2019. L’analyse de la Commission l’a amenée à conclure que l’Italie connaissait des déséquilibres macroéconomiques excessifs. En particulier, le niveau élevé de la dette publique et l’atonie persistante de la productivité entraînent des risques dont l’incidence dépasse les frontières nationales. Il est particulièrement nécessaire de prendre des mesures pour réduire le risque de retombées négatives sur l’économie italienne et l’Union économique et monétaire, compte tenu de la taille et de l’influence de l’économie du pays au-delà de ses frontières.

(4)

Le 19 avril 2019, l’Italie a présenté son programme national de réforme pour 2019 et son programme de stabilité pour 2019. Afin de tenir compte de l’interdépendance des deux programmes, la Commission les a évalués simultanément. Le programme national de réforme de l’Italie pour 2019 ne répond que partiellement aux problèmes structurels soulevés dans les recommandations par pays de 2018 et il manque souvent de précisions concernant les quelques engagements nouveaux qu’il contient et le calendrier de mise en œuvre de ceux-ci. Toutefois, sa stratégie en matière de réforme s’appuie sur d’importantes réformes déjà annoncées dans différents domaines, ce qui démontre une continuité générale avec les programmes nationaux de réforme précédents.

(5)

Les recommandations par pays pertinentes ont été prises en compte dans la programmation des Fonds structurels et d’investissement européens («Fonds ESI») pour la période 2014-2020. Comme le prévoit l’article 23 du règlement (UE) no 1303/2013 du Parlement européen et du Conseil (5), lorsque cela s’avère nécessaire pour soutenir la mise en œuvre de recommandations pertinentes du Conseil, la Commission peut demander à un État membre de revoir son accord de partenariat et les programmes concernés et de proposer des modifications à leur sujet. La Commission a fourni des précisions sur la manière dont elle utiliserait cette disposition dans les lignes directrices relatives à l’application des mesures établissant un lien entre l’efficacité des Fonds ESI et une bonne gouvernance économique.

(6)

L’Italie relève actuellement du volet préventif du pacte de stabilité et de croissance et est soumise aux dispositions de la règle en matière de dette. Dans son programme de stabilité pour 2019, le gouvernement s’attend à ce que le déficit nominal passe de 2,1 % du produit intérieur brut (PIB) en 2018 à 2,4 % en 2019, avant de diminuer progressivement pour atteindre 2,1 % en 2020 et 1,5 % d’ici à 2022. Ces projections reposent sur l’hypothèse d’une augmentation de la TVA (1,3 % du PIB en 2020 et 1,5 % du PIB à partir de 2021) adoptée par voie législative en tant que «clause de sauvegarde» afin d’atteindre les objectifs budgétaires à partir de 2020. Sur la base du solde structurel recalculé (6), l’objectif budgétaire à moyen terme – qui a été revu, passant d’un solde budgétaire structurel à l’équilibre en 2019 à un excédent structurel de 0,5 % du PIB à partir de 2020 – ne devrait pas être atteint au cours de la période de programmation. Après avoir augmenté en 2018 (et avoir atteint 132,2 % du PIB, contre 131,4 % en 2017), le ratio de la dette publique au PIB devrait, selon le programme de stabilité pour 2019, augmenter de 0,4 point de pourcentage du PIB pour atteindre 132,6 % en 2019, avant de retomber à 128,9 % d’ici à 2022. Ces projections reposent sur l’hypothèse de recettes attendues des privatisations représentant 1 % du PIB en 2019 et 0,3 % du PIB en 2020. Le scénario macroéconomique sous-tendant ces projections budgétaires est plausible. Ces dernières années, toutefois, les augmentations de TVA adoptées par voie législative en tant que «clauses de sauvegarde» ont été systématiquement abrogées sans être remplacées par des mesures de financement adéquates, et les objectifs visés en matière de privatisation n’ont pas été atteints. S’appuyant sur l’hypothèse de politiques inchangées, les prévisions du printemps 2019 de la Commission tablent sur une croissance du PIB nominal plus faible et sur un déficit public pour 2020 plus élevé que ce qui était prévu dans le programme de stabilité pour 2019. De fait, les prévisions de la Commission ne tiennent pas compte de l’augmentation de la TVA adoptée par voie législative en tant que «clause de sauvegarde» en 2020.

(7)

Le 5 juin 2019, la Commission a publié un rapport élaboré en application de l’article 126, paragraphe 3, du traité, l’Italie n’ayant pas respecté les dispositions de la règle en matière de dette en 2018. Ce rapport concluait, à l’issue d’une évaluation de tous les facteurs pertinents, que le critère relatif à la dette, tel que défini dans le traité et dans le règlement (CE) no 1467/97, devait être considéré comme n’étant pas respecté et, partant, qu’une procédure pour déficit excessif fondée sur la dette était justifiée.

(8)

Conformément à la demande formulée dans le projet révisé de plan budgétaire pour 2019, le programme de stabilité pour 2019 confirme que l’effondrement du pont Morandi à Gênes et les conditions climatiques exceptionnellement défavorables de 2018 ont eu une incidence budgétaire considérable et fournit des éléments de preuve suffisants de l’étendue et de la nature de ces coûts budgétaires supplémentaires. En particulier, le programme de stabilité pour 2019 indique que le budget 2019 comprend des dépenses exceptionnelles, égales à 0,2 % environ du PIB, qui ont trait à un programme extraordinaire d’entretien du réseau routier et à un plan de prévention visant à limiter le risque hydrogéologique. En raison du lien direct avec l’effondrement du pont Morandi à Gênes et avec les conditions climatiques défavorables de 2018, le traitement spécifique des dépenses liées au programme extraordinaire d’entretien des routes et à la prévention des risques hydrogéologiques pourrait être envisagé en application de la «clause relative aux circonstances inhabituelles». Selon la Commission, les dépenses supplémentaires éligibles en 2019 s’élèvent à 0,18 % du PIB pour ces mesures. Les dispositions de l’article 5, paragraphe 1, et de l’article 6, paragraphe 3, du règlement (CE) no 1466/97 permettent la prise en charge de ces dépenses supplémentaires, étant donné que l’effondrement du pont Morandi à Gênes et les conditions climatiques exceptionnellement défavorables de 2018 sont considérés comme des circonstances inhabituelles, que leur incidence sur les finances publiques italiennes est considérable et que la viabilité de celles-ci ne serait pas compromise si l’on autorisait un écart temporaire par rapport à la trajectoire d’ajustement devant conduire à la réalisation de l’objectif budgétaire à moyen terme. Une évaluation finale, y compris des montants éligibles, aura lieu au printemps 2020 sur la base des données observées pour 2019 qui auront été fournies par les autorités italiennes.

(9)

Le 13 juillet 2018, le Conseil a recommandé à l’Italie de veiller à ce que le taux de croissance nominal des dépenses publiques primaires nettes (7) ne dépasse pas 0,1 % en 2019, ce qui correspond à un ajustement structurel annuel de 0,6 % du PIB. D’après les prévisions du printemps 2019 de la Commission, il existe un risque d’écart important par rapport à la trajectoire d’ajustement recommandée devant conduire à la réalisation de l’objectif budgétaire à moyen terme en 2019. Cette conclusion resterait inchangée même si l’incidence budgétaire du programme extraordinaire d’entretien du réseau routier adopté à la suite de l’effondrement du pont Morandi à Gênes et d’un plan de prévention visant à limiter les risques hydrogéologiques à la suite de conditions climatiques exceptionnellement défavorables était exemptée des exigences du volet préventif du pacte de stabilité et de croissance en 2019.

(10)

En 2020, dans la perspective d’un ratio de la dette publique italienne supérieur à 60 % du PIB et d’un écart de production prévu de – 0,1 %, les dépenses publiques primaires nettes devraient diminuer de 0,1 % en valeur nominale, ce qui correspond à l’ajustement structurel de 0,6 % du PIB découlant de la matrice d’exigences dans le cadre du pacte de stabilité et de croissance. Sur la base des prévisions du printemps 2019 de la Commission, dans l’hypothèse de politiques inchangées, il existe un risque d’écart substantiel par rapport à cette exigence en 2020. Selon les prévisions, l’Italie ne devrait pas respecter, à première vue, les dispositions de la règle en matière de dette en 2019 et 2020. En outre, le taux élevé de la dette publique italienne (environ 132 % du PIB) signifie que des ressources importantes sont affectées au service de la dette, au détriment de postes davantage porteurs de croissance, notamment l’éducation, l’innovation et les infrastructures. De manière générale, le Conseil estime que les mesures nécessaires devraient être prises dès 2019 pour se conformer aux dispositions du pacte de stabilité et de croissance. Il importerait de consacrer toute rentrée exceptionnelle à la poursuite de la réduction du taux de la dette publique.

(11)

Le système fiscal de l’Italie continue de peser lourdement sur les facteurs de production, au détriment de la croissance économique. La charge fiscale élevée qui grève le travail et le capital décourage l’emploi et l’investissement. Le budget 2019 prévoit une diminution d’impôts pour les travailleurs indépendants et les petites entreprises. Cependant, il alourdit aussi temporairement la charge fiscale pesant sur les entreprises au niveau agrégé, en particulier les établissements financiers. Des bases d’imposition moins préjudiciables à la croissance, comme la propriété et la consommation, sont sous-utilisées, ce qui laisse de la marge pour un transfert neutre sur le plan budgétaire de la charge fiscale pesant sur le travail et sur le capital. La taxe foncière récurrente sur la résidence principale a été abrogée en 2015, y compris pour les ménages les plus aisés. En outre, les valeurs foncières et immobilières (ou valeurs «cadastrales»), qui servent de base au calcul de l’impôt foncier, sont largement dépassées et une réforme visant à les aligner sur les valeurs actuelles du marché se fait toujours attendre. Le nombre et le volume de dépenses fiscales, notamment dans le cas des taux de TVA réduits, sont importants, et leur rationalisation a été systématiquement reportée ces dernières années. Il est également possible d’alléger la charge qui pèse sur les entreprises et les ménages qui respectent leurs obligations fiscales en réduisant la complexité du code des impôts et en relevant le niveau général de respect des obligations fiscales. En particulier, l’écart de TVA (soit la différence entre les recettes de TVA théoriques et les recettes effectivement perçues) figure parmi les plus élevés de l’Union. Cela tient notamment au taux élevé de fraude fiscale, lié en particulier à l’absence de facturation. L’obligation de transmettre par voie électronique les reçus de toutes les transactions commerciales avec des consommateurs finals constitue une avancée positive devant permettre de combler cet écart. Toutefois, les seuils légaux applicables aux paiements en espèces ont été relevés ces dernières années, ce qui pourrait décourager le recours au paiement électronique. Encourager les paiements électroniques pourrait au contraire inciter davantage les opérateurs à émettre des factures et donc, améliorer le respect des obligations fiscales.

(12)

Les dépenses consacrées par l’Italie aux pensions, qui représentaient quelque 15 % du PIB en 2017, comptent parmi les plus élevées de l’Union européenne et devraient encore augmenter à moyen terme du fait de l’accroissement du rapport de dépendance économique des personnes âgées. Le budget 2019 et le décret-loi mettant en œuvre le nouveau régime de retraite anticipée en janvier 2019 inversent divers éléments de réformes antérieures du système de retraites, conduisant à une détérioration de la viabilité des finances publiques à moyen terme. Ces nouvelles dispositions feront encore grimper les dépenses en matière de retraites à moyen terme. Entre 2019 et 2021, le nouveau régime de retraite anticipée («quota 100») permettra aux travailleurs de prendre leur retraite à l’âge de 62 ans à condition d’avoir cotisé durant 38 ans. En outre, la portée des dispositions existantes en matière de retraite anticipée a été étendue, notamment par la suspension, jusqu’en 2026, de l’indexation sur l’espérance de vie de la cotisation minimale requise, qui avait été introduite lors de précédentes réformes des régimes de retraite. Le budget 2019 prévoit pour ces dispositions un montant égal à 0,2 % du PIB en 2019 et à 0,5 % du PIB en 2020 et 2021, mais des coûts supplémentaires sont aussi escomptés au cours des prochaines années. La part élevée des pensions dans les dépenses publiques entraîne des restrictions pour d’autres dépenses sociales et postes de dépenses de nature à stimuler la croissance, comme l’éducation et l’investissement, et limite les marges pour réduire la charge fiscale totale de la dette publique, élevées. Par ailleurs, l’extension de la possibilité de retraite anticipée pourrait avoir une incidence négative sur l’offre de main-d’œuvre, alors que l’Italie est déjà à la traîne par rapport à la moyenne de l’Union pour ce qui est de la participation à l’emploi de ses travailleurs plus âgés (55 à 64 ans), ce qui bride la croissance potentielle et entraîne une détérioration de la viabilité de la dette publique. Afin de limiter l’augmentation des dépenses liées aux retraites, les réformes des retraites précédemment adoptées en vue de contenir les passifs implicites résultant du vieillissement démographique devraient être pleinement mises en œuvre. En outre, des économies pourraient être réalisées en agissant au niveau des droits à pension élevés qui ne sont pas compensés par les cotisations, tout en respectant les principes d’équité et de proportionnalité.

(13)

Malgré le ralentissement de l’économie, la croissance de l’emploi s’est poursuivie en 2018, quoiqu’à un rythme légèrement moins soutenu que l’année précédente. Le nombre de personnes actives a atteint les 23,2 millions à la fin de l’année, soit un niveau supérieur aux niveaux enregistrés avant la crise. Le taux d’emploi (des 20-64 ans) a augmenté pour s’établir à de 63 % l’année dernière, mais il reste nettement inférieur à la moyenne de l’Union (73,2 %). En outre, les disparités régionales sont substantielles et le marché du travail reste segmenté, la part des contrats temporaires ayant encore augmenté en 2018. Le taux de chômage est tombé à 10,6 %. Le chômage de longue durée et le chômage des jeunes restent élevés, pesant sur la croissance potentielle et la cohésion sociale. L’inactivité est très répandue chez les femmes, les personnes peu qualifiées et les jeunes. En outre, la proportion de jeunes (âgés de 15 à 24 ans) ne travaillant pas et ne suivant pas d’études ou de formation est passée à 19,2 % en 2018 et est la plus élevée de l’Union. Le temps partiel involontaire est également très fréquent, ce qui souligne une sous-utilisation persistante de la main d’œuvre.

(14)

Les inégalités de revenus sont importantes et le risque de pauvreté est élevé, avec d’importantes disparités régionales et territoriales. En 2017, 28,9 % de la population risquait de tomber dans la pauvreté ou l’exclusion sociale, soit un taux supérieur à celui constaté avant la crise et nettement plus élevé que la moyenne de l’Union en 2017 (22,4 %). Les enfants, en particulier ceux qui sont issus de la migration, sont particulièrement touchés. La pauvreté des travailleurs est élevée et progresse, en particulier au sein de la main-d’œuvre temporaire et parmi les travailleurs issus de l’immigration. Les travailleurs indépendants, qui représentent 20,8 % de la main-d’œuvre (contre 13,7 % en moyenne dans l’Union), sont généralement moins protégés contre les risques sociaux que les salariés. L’accès à des logements de qualité et abordables pose également problème et l’offre de services sociaux reste trop peu développée et fragmentée. L’incidence des transferts sociaux sur la diminution de la pauvreté et des inégalités est l’une des plus faibles de l’Union. Le programme de lutte contre la pauvreté mis en place en 2018 a cédé la place à un nouveau programme majeur («revenu de citoyenneté»), qui reste fondé sur une démarche d’inclusion active, sous réserve du respect de certaines conditions. La charge administrative considérable qui pèse sur les services de l’emploi et les services sociaux constitue un défi pour la mise en œuvre de la réforme. Son incidence réelle dépendra de l’efficacité des politiques pour ce qui est du retour à l’emploi ou de la formation, de la mesure dans laquelle des services sociaux personnalisés sont fournis, ainsi que des contrôles exercés. En particulier, la capacité effective d’atteindre les personnes qui en ont le plus besoin déterminera l’impact en termes de réduction de la pauvreté et de l’exclusion sociale. Les résultats du système de santé sont globalement bons, bien que les dépenses soient inférieures à la moyenne de l’Union. Néanmoins, la prestation de soins de santé varie fortement selon les régions, ce qui a des répercussions en termes d’accès, d’équité et d’efficience, et elle pourrait être améliorée grâce à une meilleure gestion et au suivi de la fourniture de niveaux de services standard. Une place accrue doit être accordée aux soins à domicile et de proximité et aux soins à long terme pour venir en aide aux personnes souffrant d’un handicap et aux personnes appartenant à d’autres groupes défavorisés.

(15)

Le travail non déclaré est répandu en Italie, en particulier dans les régions du Sud. Selon les estimations de l’Institut national de statistique, l’économie non observée représentait quelque 210 milliards d’euros (12,4 % du PIB) en 2016. Près de 37,2 % de celle-ci sont imputables au travail non déclaré. Cela affecte en particulier les groupes vulnérables, tels que les migrants, les femmes et les mineurs. La nouvelle Agence de l’Inspection du travail, opérationnelle depuis 2017, a accordé une attention particulière au phénomène du «caporalato» dans le secteur agricole, qui se caractérise par une forte incidence de l’irrégularité et par un risque d’exploitation par le travail, en particulier pour les migrants en situation irrégulière. Un suivi attentif des mesures adoptées récemment et l’adoption d’autres mesures sont nécessaires pour combattre et prévenir le travail non déclaré et l’exploitation par le travail et pour garantir des conditions de travail équitables et sûres. Enfin, il est important de veiller à ce que la mise en œuvre du revenu de citoyenneté développe au maximum les incitations en faveur du travail régulier et la conversion du travail non déclaré en emplois réguliers, à la fois par un suivi étroit et par des incitations positives.

(16)

L’amélioration des services publics de l’emploi grâce à une offre accrue de ressources et à des services de meilleure qualité est cruciale aux fins de la mise en œuvre de la réforme ayant trait au nouveau régime de revenu de citoyenneté. Dans le contexte de ce nouveau régime de revenu de citoyenneté en faveur des personnes à faibles revenus et des chômeurs, des politiques actives et efficaces sur le marché du travail sont importantes si l’on veut réduire les frictions sur le marché du travail et inciter les personnes à chercher un emploi. À cet égard, il est indispensable que les services de l’emploi disposent d’un personnel suffisant et qualifié. Une aide effective à la recherche d’emploi, visant à améliorer la formation et le renforcement des compétences, est cruciale pour assurer une mobilité accrue de la main-d’œuvre et fournir aux travailleurs les compétences adéquates qui leur permettront de faire face aux défis futurs du marché du travail et d’évoluer dans un environnement de travail difficile et concurrentiel. Des mesures ont été prises récemment afin d’améliorer l’efficacité des politiques actives du marché du travail, telles que la définition d’indicateurs de suivi et de normes minimales, l’adoption d’une stratégie en faveur des chômeurs de longue durée et la mise au point d’un outil de profilage qualitatif. Néanmoins, l’efficience globale des services publics de l’emploi et leur capacité à trouver des emplois aux personnes restent faibles, les résultats variant largement entre les régions et l’intégration avec la politique sociale et la politique dans le domaine de l’éducation étant limitée. La coopération avec les employeurs est également faible.

(17)

L’écart enregistré en Italie entre les hommes et les femmes en matière d’emploi demeure l’un des plus élevés de l’Union, et le taux d’emploi des femmes, quoiqu’en légère hausse, est nettement inférieur à la moyenne de l’Union (53,1 %, contre 67,4 % en 2018). Les investissements en faveur des services d’accueil et de la participation des femmes au marché de l’emploi demeurent insuffisants, à l’instar des mesures visant à promouvoir l’égalité des chances et des stratégies adéquates favorisant l’équilibre entre vie professionnelle et vie privée. Toutefois, il manque toujours une stratégie globale visant à encourager la participation des femmes au marché du travail. Alors que le congé de paternité obligatoire a été légèrement allongé, de 4 à 5 jours, le système de congé parental reste inadéquat. Conjugué au niveau insuffisant des services de garde d’enfants et de soins de longue durée, cela tend à empêcher les femmes ayant des enfants ou des membres de la famille nécessitant des soins de travailler. En 2017, 28,6 % seulement des enfants de moins de trois ans se trouvaient dans des structures d’accueil formelles, soit nettement moins que la moyenne de l’Union. Les investissements en faveur des structures d’accueil ou en matière de soins de santé et de soins de longue durée devraient tenir compte des importantes disparités régionales pour ce qui est de la disponibilité des services. En outre, la charge fiscale élevée pesant sur les seconds pourvoyeurs de revenus réduit l’incitation financière des femmes à travailler. L’augmentation du taux de participation des femmes au marché du travail, et des taux de participation en général, pourrait favoriser la croissance économique en améliorant l’offre de main d’œuvre, réduire la pauvreté et atténuer les risques sociaux et financiers liés au vieillissement démographique.

(18)

La réforme, envisagée initialement, du cadre de négociation collective visait à rendre les salaires et les traitements bruts plus conformes aux conditions économiques sur le plan régional et au niveau des entreprises. En mars 2018, la Confindustria a signé un accord-cadre avec les trois grandes organisations syndicales italiennes (Cgil, Cisl et Uil) en vue d’étendre la négociation collective de second niveau. En outre, l’accord accroît la sécurité juridique en fixant des règles plus claires en matière de représentation des partenaires sociaux dans les négociations et établit un meilleur algorithme aux fins de la détermination des salaires minimums. Le premier accord d’application concernant la représentativité, la santé et la sécurité au travail a été signé fin 2018 par l’organisation patronale et les trois principales organisations syndicales.

(19)

Il est crucial d’investir dans l’éducation et les compétences pour promouvoir une croissance intelligente, inclusive et durable. La tendance à une faible productivité qui caractérise l’Italie est influencée par les lacunes du système d’éducation et de formation et par le niveau limité de la demande de compétences élevées. L’amélioration qualitative du système d’éducation et de formation constitue un défi majeur. Le taux de décrochage scolaire (c’est-à-dire de sortie précoce du système éducatif) reste nettement supérieur à la moyenne de l’Union (soit 14,5 %, contre 10,6 % en 2018) et on note d’importantes disparités régionales et territoriales en ce qui concerne les résultats scolaires. Bien que la part du financement allouée à l’enseignement primaire et secondaire soit largement conforme à la moyenne de l’Union, des efforts supplémentaires tendant à attirer, à recruter de façon effective et à motiver les enseignants pourraient contribuer à améliorer les résultats en matière d’apprentissage. Le système de recrutement repose trop sur les connaissances plutôt que sur les compétences, tandis que le volet «formation» est limité. En outre, les salaires des enseignants italiens restent peu élevés par rapport aux normes internationales et aux travailleurs titulaires d’un diplôme de l’enseignement supérieur. Ils augmentent plus lentement que celui de leurs homologues de l’étranger et les perspectives de carrière sont plus limitées, sur la base d’un profil de carrière unique. En outre, les promotions reposent exclusivement sur l’ancienneté plutôt que sur les mérites. Cela rend la profession d’enseignant très peu attrayante pour les personnes hautement qualifiées et suscite le découragement parmi le personnel enseignant, ce qui a des répercussions négatives sur les résultats scolaires des étudiants. Le système d’apprentissage a connu un regain d’intérêt ces dernières années, mais l’adoption de certaines mesures y a mis un coup d’arrêt. Les résultats des étudiants et adultes italiens pour ce qui est des compétences clés et du savoir-faire de base comptent parmi les plus mauvais de l’Union. La participation des adultes à l’apprentissage est très limitée et est en recul, dans un contexte où l’écart en matière d’emploi entre les personnes hautement qualifiées et celles qui le sont peu compte parmi les plus importants de l’Union. Le renforcement des compétences est particulièrement important dans le domaine numérique. Jusqu’ici, des progrès limités ont été enregistrés en ce qui concerne le développement des compétences et des infrastructures numériques. L’investissement dans le capital humain est une condition préalable pour renforcer l’investissement public et privé, et les mesures actuelles visant à encourager l’acquisition de compétences numériques et l’apprentissage des adultes manquent d’une vision globale. Les niveaux de compétences numériques de base et de pointe sont inférieurs à la moyenne de l’Union – seules 44 % des personnes âgées de 16 à 74 ans possèdent des compétences numériques de base (contre 57 % dans l’Union).

(20)

L’investissement limité dans les compétences ralentit le passage de l’Italie à une économie fondée sur la connaissance, freine la croissance de la productivité et limite les possibilités d’amélioration de la compétitivité hors prix et de la croissance du PIB. Les écarts constatés en matière d’éducation contribuent également à expliquer la productivité plus faible des microentreprises et des petites entreprises italiennes par rapport à des pays comparables. L’enseignement supérieur souffre d’un manque de ressources financières et humaines et la portée de l’enseignement supérieur à vocation professionnelle est limitée en dépit de taux d’employabilité élevés. La proportion de diplômés universitaires reste faible (soit 27,9 % de la population âgée de 30 à 34 ans en 2018) et va de pair avec une disponibilité relativement faible de diplômés de l’enseignement supérieur, en particulier dans les domaines scientifiques et techniques. Des investissements ciblés dans les compétences constituent une condition préalable pour encourager les investissements tant publics que privés, en particulier dans les immobilisations incorporelles. Il est nécessaire d’encourager les études dans les domaines se rapportant à des secteurs à forte intensité de connaissances et de renforcer des compétences spécifiques, dans les domaines numérique et financier notamment.

(21)

L’adoption, par les entreprises plus petites, de stratégies visant à accroître la productivité, telles que l’innovation en matière de produit, de procédé et d’organisation, reste limitée, en particulier en Italie du Sud. L’investissement immatériel est nettement inférieur à la moyenne de l’Union depuis le début des années 2000. Les dépenses des entreprises en matière de recherche et de développement sont presque inférieures de moitié à la moyenne de la zone euro. Les aides publiques en faveur de ces dépenses restent limitées, même si ce soutien s’améliore grâce au rôle accru des incitations fiscales. Les dépenses publiques consacrées à la recherche et au développement sont également inférieures à la moyenne de la zone euro. Le faible niveau d’innovation pourrait également ralentir la transition vers une économie verte. L’amélioration des résultats de l’Italie en termes d’innovation requiert des investissements immatériels supplémentaires, ainsi qu’une place plus importante réservée au transfert technologique, en tenant compte des faiblesses régionales et de la taille des entreprises. Certaines mesures ont été récemment annoncées dans le cadre du budget, visant à promouvoir les technologies innovantes. Les aides publiques en faveur des activités de recherche et de développement des entreprises peuvent être améliorées en combinant de façon équilibrée des mesures directes et des mesures indirectes et en procédant à une appréciation approfondie des incitations fiscales temporaires existantes, afin de conférer un caractère permanent aux mesures les plus efficientes. Les mesures visant à promouvoir la connaissance (telles que les grappes technologiques) et la coopération entre les entreprises aident les entreprises plus petites, en particulier, à remédier à ces difficultés et à augmenter leur faible productivité.

(22)

Des investissements sont nécessaires pour améliorer la qualité et la durabilité des infrastructures du pays. Dans le secteur des transports, l’Italie n’a pas atteint les résultats visés par sa stratégie en matière d’investissement dans les infrastructures (Connettere l’Italia). Des avancées très limitées ont été enregistrées pour ce qui est de la mise en œuvre des investissements prévus en faveur de la mobilité ferroviaire, de la mobilité routière et de la mobilité urbaine durable. Cette situation est imputable à des retards administratifs, à un manque d’efficience des dépenses, ainsi qu’à une mise en œuvre incomplète du code des marchés publics, des concessions et des contentieux. Le tableau de bord des transports de l’Union montre que la qualité des infrastructures de l’Italie est inférieure à la moyenne de l’Union. L’état d’entretien est très préoccupant, ainsi que l’a prouvé l’effondrement du pont Morandi à Gênes. Le gouvernement a donné la priorité à l’entretien et à la sécurité grâce à un plan de suivi de l’état de maintenance de toutes les infrastructures, ainsi qu’à la création d’une nouvelle agence chargée de la sécurité des infrastructures ferroviaires et routières. À cet égard, l’Italie s’est vu accorder pour 2019, en vertu des règles budgétaires de l’Union, un montant de 1 milliard d’EUR destiné à un plan d’investissement visant à sécuriser les infrastructures routières similaires au pont Morandi. Investir dans le transport et les infrastructures durables est également un moyen de relever les défis environnementaux. Des investissements verts soutenus sont nécessaires pour atteindre les ambitieux objectifs climatiques et énergétiques de l’Union à l’horizon 2030. Le plan national intégré Énergie et climat constitue une source clé d’orientations aux fins de la détermination des besoins d’investissement en matière de décarbonation et d’énergie. Des investissements sont nécessaires en vue d’améliorer les infrastructures énergétiques, ce qui contribuerait à un système énergétique plus résilient, plus propre, plus sûr et plus souple, tout en améliorant l’intégration des marchés et en réduisant les écarts de prix. Le réseau d’électricité italien n’est pas encore suffisamment équipé pour faire face à des échanges transfrontières accrus et des sources d’énergie renouvelables irrégulières de l’ampleur prévue pour 2030. Des investissements en matière de prévention des risques hydrogéologiques et sismiques doivent être réalisés pour réduire les dépenses relatives à l’aide d’urgence, y compris pour ce qui est des infrastructures. Pour 2019, l’Italie s’est vu accorder une aide de 2,1 milliards d’euros au titre des règles budgétaires de l’Union à des fins de prévention des risques hydrogéologiques majeurs. Enfin, les investissements efficaces sont insuffisants dans les domaines de la gestion des déchets et des infrastructures hydrauliques dans le sud de l’Italie, alors que des risques de pénuries d’eau et de sécheresse subsistent. La fragmentation du secteur, conjuguée au profil de crédible défavorable des petits opérateurs, reste un obstacle à l’investissement. Des investissements, notamment en matière de réaction au changement climatique et en faveur de la durabilité environnementale, de la prévention des risques et de la connectivité des zones rurales, contribueraient également à remédier aux disparités régionales. Dans les zones rurales, le réseau à large bande est également moins développé. En ce qui concerne la couverture en haut débit ultra-rapide (100 Mbps et plus), l’Italie est toujours à la traîne (soit 24 % seulement, contre 60 % en moyenne dans l’Union) et figure en bas de classement (à la 27e place) avec un taux de croissance qui reste très modéré. La couverture et l’adoption du haut débit ultra-rapide affichent des résultats très inférieurs aux moyennes de l’Union.

(23)

La faible capacité du secteur public, en particulier au niveau local, à gérer les financements constitue un obstacle à l’investissement entre secteurs, en raison de procédures complexes, du chevauchement des responsabilités et de la mauvaise gestion de l’emploi dans le secteur public. Des compétences inadéquates dans le secteur public limitent les capacités d’appréciation, de sélection et de gestion des projets d’investissement. Elles compromettent également la mise en œuvre des fonds de l’Union, domaine dans lequel l’Italie est à la traîne par rapport à la moyenne de l’Union. La piètre qualité de la gouvernance en Italie du Sud limite sérieusement la capacité de celle-ci en matière de dépenses et d’élaboration des politiques. L’amélioration de la capacité administrative constitue une condition préalable à la réalisation effective d’investissements publics et à l’utilisation des fonds de l’Union, avec des retombées positives sur les investissements privés et la croissance du PIB. De telles améliorations pourraient conférer une incidence plus grande aux investissements dans le domaine de la large bande, des transports, de la gestion de l’eau et de l’économie circulaire, en particulier en Italie du Sud. Cette dernière est à la traîne, en particulier pour ce qui est des investissements immatériels. L’amélioration des capacités administratives des instances centrales et locales aurait une incidence positive sur la planification, l’évaluation et le suivi des projets d’investissement, ainsi que sur l’identification des obstacles et leur levée.

(24)

L’amélioration de l’efficience de l’administration publique italienne et de sa capacité de répondre aux besoins des entreprises aurait une incidence positive sur l’environnement des entreprises, sur les investissements et sur la capacité des entreprises à exploiter les possibilités d’innovation. En 2015, une loi d’habilitation générale réformant l’administration publique a été adoptée. La réforme portait sur la plupart des sources d’inefficience, telles que la longueur et la complexité des procédures, le manque de transparence, la gestion inefficace de l’emploi dans le secteur public et la gestion inefficiente des entreprises publiques, ainsi que le faible niveau de numérisation. À la fin de l’année 2017, la majeure partie de la réforme avait été exécutée et sa mise en œuvre se poursuit, soutenue par la nouvelle loi «Concretezza». Toutefois, une planification incohérente, des ressources financières limitées et une coordination insuffisante retardent la mise en œuvre des services publics numériques dans des domaines clés tels que les systèmes de paiement en ligne, qui contribueraient à réduire la complexité et à accroître la transparence. L’âge moyen élevé des travailleurs du secteur public et leurs compétences numériques généralement faibles ralentissent encore ce processus. Néanmoins, la combinaison d’objectifs clairs et d’une mise en œuvre efficace conduit à des résultats évidents, comme ce fut le cas pour le développement rapide du marché électronique pour les administrations publiques et la facturation en ligne. La réforme de l’administration publique de 2015 prévoyait aussi un nouveau cadre réformant la gestion des services publics locaux. Toutefois, en novembre 2016, la Cour constitutionnelle italienne a déclaré contraire à la Constitution la procédure suivie pour adopter plusieurs décrets législatifs, y compris celui sur les services publics locaux. Une nouvelle initiative législative est donc nécessaire pour promouvoir l’efficience et la qualité des services publics locaux, notamment en privilégiant les offres concurrentielles par rapport aux solutions internes ou à des subventions directes.

(25)

L’actualisation du document économique et financier 2018 (NADEF 2018) qualifie l’élaboration de projets et l’amélioration de la qualité du cycle de projet d’éléments critiques aux fins de la relance des dépenses d’investissement effectives en Italie. Il mentionne également la constitution d’un fonds de subventions spécifique pour l’élaboration et l’examen de projets d’infrastructures clés. Un autre fonds de subventions était prévu pour l’élaboration de projets plus petits mis en œuvre par des instances locales. Les décrets d’exécution concernant les deux fonds n’ont cependant pas encore été publiés, et le montant alloué à ces fonds pourrait être inférieur à celui indiqué initialement dans le DEF 2018. La loi de finances pour 2019 mentionne la création d’une «Centrale per la progettazione». Cet organe n’est toutefois pas encore opérationnel et sa mise en place semble nécessiter un effort à plus long terme. En termes de fonctionnalité, les modalités d’interaction entre cette Centrale per la progettazione et les municipalités et d’autres instances locales ne sont pas claires.

(26)

L’amélioration de l’environnement des entreprises favoriserait l’esprit d’entreprise et de meilleures conditions-cadres de concurrence permettraient une allocation plus efficiente des ressources ainsi que des gains de productivité. La loi annuelle sur la concurrence de 2015, adoptée en août 2017, doit être dûment mise en œuvre. En outre, des obstacles importants à la concurrence subsistent dans certains secteurs, tels que les services aux entreprises et le commerce de détail. L’amélioration de la qualité du cadre réglementaire garantirait des conditions de concurrence équitables tant aux plateformes innovantes qu’aux opérateurs traditionnels, libérant le plein potentiel de l’économie collaborative et contribuant à une concurrence plus équitable dans tous les secteurs. L’amélioration des procédures de mise en concurrence pour la passation des marchés publics de services et l’attribution des concessions de services pour l’accès aux biens publics aurait une incidence positive sur la qualité des services. Le manque de stabilité en matière de réglementation du système des marchés publics pourrait compromettre quelques-uns des principaux bénéfices tirés des réformes antérieures et contribuer à retarder des investissements. La surveillance du marché des produits est répartie entre diverses organisations, se caractérise par de nombreux chevauchements et est dépourvue de systèmes permettant une coordination efficiente. Cela réduit l’efficacité des contrôles en empêchant la concurrence déloyale des entreprises qui ne se conforment pas aux règles.

(27)

L’efficacité limitée du système de justice civile italien demeure une source de préoccupation. En 2017, la durée des litiges civils et commerciaux était toujours parmi les plus longues de l’Union, quel que soit le degré de juridiction. Alors que la durée des procédures s’est accrue en première instance par rapport à 2016, les réformes antérieures commencent à influer positivement sur celle des procédures devant les instances supérieures, même si des progrès doivent encore être accomplis pour limiter les recours abusifs aux procès et garantir un fonctionnement plus efficient des tribunaux. Au niveau de la Cour suprême de cassation, le nombre élevé d’affaires nouvelles («entrantes»), conjugué à un taux plus faible d’affaires classées dans le domaine de la fiscalité, nuit à l’efficience de la Cour et suscite des inquiétudes quant au système de justice fiscale en première et deuxième instances. Globalement, la mise en œuvre adéquate de règles procédurales plus simples pourrait contribuer à accélérer de façon décisive les procès civils. À cet égard, une réforme visant à simplifier la procédure civile a été annoncée, mais n’a pas encore été présentée au Parlement. D’autres problèmes sont signalés, comme l’utilisation toujours limitée et incohérente du filtre d’irrecevabilité pour les recours en deuxième instance, les nombreux postes toujours vacants au niveau administratif et les différences subsistant entre les juridictions en termes d’efficacité de la gestion des affaires.

(28)

L’Italie a récemment progressé dans l’amélioration de son cadre anticorruption, avec entre autres une meilleure protection des lanceurs d’alertes, un rôle accru dévolu à l’autorité nationale de lutte contre la corruption pour ce qui est de la mise en œuvre de ce cadre, ainsi qu’une nouvelle loi anticorruption en janvier 2019. Cette dernière vise à améliorer la détection et la répression de la corruption par des sanctions plus strictes, des techniques d’enquête plus efficaces et un mécanisme de clémence pour les personnes dénonçant la corruption. Cette loi supprime également les délais de prescription après une condamnation en première instance, mais à partir de 2020 seulement. Il s’agit d’une mesure positive, conforme aux normes internationales, qui était attendue de longue date. Toutefois, la répression de la corruption demeure inefficace en Italie, principalement parce que la longueur des procédures pénales reste excessive en l’absence d’une réforme, indispensable, des procédures pénales, y compris du système de recours, pour prévenir les procédures abusives. En outre, des écarts subsistent en ce qui concerne le cadre des poursuites de délits spécifiques, comme le détournement de fonds publics.

(29)

Les banques italiennes ont continué de bien progresser en ce qui concerne le redressement de leurs bilans, en dépit d’un regain de pression sur le marché. Toutefois, en raison de leur exposition élevée aux obligations souveraines, la volatilité du marché a eu des répercussions négatives pour leur situation sur le plan des fonds propres, exerçant une pression sur les coûts de financement et compliquant leur accès au financement de gros non garanti. La diminution constante des encours accumulés de prêts non performants et des prêts dont le remboursement est jugé improbable reste garantie, en particulier pour les banques de petite taille et les banques de deuxième rang, afin de continuer à renforcer la stabilité financière et de renforcer l’offre de crédit à l’économie réelle. Le fait de permettre aux banques, en particulier celles de plus petite taille, de progresser dans la réalisation de leurs exigences de financement réglementaires accroîtrait également la résilience du système face aux chocs externes. Il importe aussi de remédier à la faiblesse structurelle de la rentabilité des banques en améliorant l’efficience et l’optimisation du modèle économique. La mise en œuvre en temps utile des décrets relatifs à la réforme des procédures d’insolvabilité contribuerait à accélérer les procédures de saisie et de recouvrement de garanties, toujours lentes, et améliorerait encore la résilience du secteur bancaire. Les dédommagements éventuels accordés par l’État aux actionnaires et aux détenteurs privés de dettes subordonnées de banques ayant fait l’objet par le passé de procédures de liquidation administrative devraient viser strictement à remédier aux conséquences des ventes abusives sur le plan social. La gouvernance du système bancaire devrait encore être améliorée en achevant rapidement la réforme des grandes banques coopératives, entreprise en 2015 après que la clarté juridique a été établie.

(30)

Le crédit bancaire demeure la principale source de financement des entreprises. Les entreprises plus petites et innovantes ont toutefois toujours beaucoup de mal à accéder au crédit, en particulier dans le sud de l’Italie. Le marché des capitaux est peu développé par rapport aux autres États membres, en raison notamment de facteurs limitant la demande, comme le niveau peu élevé d’éducation financière, la peur d’une perte de contrôle et des procédures administratives lourdes. Plusieurs mesures ont été introduites ces dernières années afin d’améliorer l’accès à la finance. Ces mesures mettent généralement l’accent sur le canal du crédit bancaire, même si des mesures axées sur le marché, telles que les mini-obligations, le marché des investissements alternatifs, le capital-risque et des aides publiques directes ont également contribué à permettre aux entreprises plus petites et innovantes d’avoir accès au financement. La suppression, dans le budget 2019, de la déduction fiscale accordée pour le capital à risque pourrait rendre les entreprises moins enclines à recourir au financement sur fonds propres. Pour encourager efficacement l’accès au financement non bancaire, il convient de tenir compte des besoins des entreprises plus petites et innovantes, ainsi que de la capacité des investisseurs à évaluer les projets d’investissement. La diversification des sources de financement protégerait plus efficacement les investissements des entreprises des chocs au sein du secteur bancaire, tout en encourageant l’innovation et la croissance.

(31)

La programmation des fonds de l’Union pour la période 2021-2027 pourrait contribuer à combler certaines des lacunes relevées dans les recommandations, en particulier dans les domaines visés à l’annexe D du rapport 2019 concernant l’Italie. Cela permettrait à l’Italie d’utiliser ces fonds au mieux dans les secteurs recensés, en tenant compte des disparités régionales. Le renforcement des capacités administratives du pays qui auront à gérer ces fonds est un facteur important de réussite de cet investissement.

(32)

Dans le cadre du semestre européen 2019, la Commission a procédé à une analyse complète de la politique économique de l’Italie, qu’elle a publiée dans son rapport 2019 sur ce pays. Elle a également évalué le programme de stabilité pour 2019, le programme national de réforme pour 2019, ainsi que les suites données aux recommandations adressées à l’Italie les années précédentes. La Commission a tenu compte non seulement de leur bien-fondé dans l’optique d’une politique budgétaire et socio-économique viable en Italie, mais aussi de leur conformité avec les règles et les orientations de l’Union, eu égard à la nécessité de renforcer la gouvernance économique globale de l’Union par la contribution de cette dernière aux futures décisions nationales.

(33)

Eu égard à cette évaluation, le Conseil a examiné le programme de stabilité pour 2019, et son avis (8) est pris en compte en particulier dans la recommandation figurant au point 1 ci-dessous;

(34)

À la lumière du bilan approfondi réalisé par la Commission et de la présente évaluation, le Conseil a examiné le programme national de réforme pour 2019 et le programme de stabilité pour 2019. Les recommandations figurant aux points 1 à 5 ci-dessous reflètent ses recommandations formulées en vertu de l’article 6 du règlement (UE) no 1176/2011. Elles contribuent également à la mise en œuvre des quatre premières recommandations pour la zone euro. Les politiques budgétaires visées dans la recommandation figurant au point 1 contribuent notamment à remédier aux déséquilibres liés à une dette publique élevée,

RECOMMANDE que l’Italie s’attache, en 2019 et 2020, à:

1.   

garantir une réduction nominale des dépenses publiques primaires nettes de 0,1 % en 2020, ce qui correspond à un ajustement structurel annuel de 0,6 % du PIB; utiliser les recettes exceptionnelles pour accélérer la réduction du taux de la dette publique; à alléger la fiscalité du travail, notamment en réduisant les dépenses fiscales et en réformant les valeurs cadastrales dépassées; lutter contre la fraude fiscale, consistant en particulier en la non-facturation, notamment en renforçant l’utilisation obligatoire des paiements électroniques grâce, entre autres, à un abaissement des seuils légaux pour les paiements en espèces; mettre en œuvre pleinement les précédentes réformes du système de retraites afin de réduire la part des pensions dans les dépenses publiques et de dégager des marges pour d’autres dépenses sociales et dépenses favorisant la croissance;

2.   

redoubler d’efforts pour lutter contre le travail non déclaré; garantir une intégration effective des politiques actives du marché du travail et de la politique sociale et atteindre en particulier les jeunes et les groupes vulnérables; encourager la participation des femmes au marché du travail au moyen d’une stratégie globale, notamment par l’accès à des services de garde d’enfants et de soins de longue durée de qualité; améliorer les résultats en matière d’éducation, également par des investissements adéquats et ciblés, et encourager le renforcement des compétences, notamment des compétences numériques;

3.   

axer la politique économique liée aux investissements sur la recherche et l’innovation et sur la qualité des infrastructures, en tenant compte des disparités régionales; améliorer l’efficacité de l’administration publique, y compris en investissant dans les compétences des travailleurs du secteur public, en accélérant la numérisation et en accroissant l’efficience et la qualité des services publics à l’échelle locale; remédier aux restrictions de concurrence, notamment dans le secteur du détail et dans le domaine des services aux entreprises, également par l’élaboration d’une nouvelle loi annuelle sur la concurrence;

4.   

réduire la durée des procès civils, quel que soit le degré de juridiction, en appliquant et en simplifiant les règles procédurales, notamment celles examinées par le législateur et en mettant particulièrement l’accent sur les régimes d’insolvabilité; améliorer l’efficacité de la lutte contre la corruption en réformant les règles procédurales afin de diminuer la durée des procès pénaux;

5.   

mettre l’accent sur la restructuration du bilan, en particulier pour les banques de petite taille et de taille moyenne, en améliorant l’efficience et la qualité des actifs, en poursuivant la réduction des prêts non performants et en diversifiant le financement; améliorer le financement non bancaire pour les entreprises plus petites et innovantes.

Fait à Bruxelles, le 9 juillet 2019.

Par le Conseil

Le président

M. LINTILÄ


(1)  JO L 209 du 2.8.1997, p. 1.

(2)  JO L 306 du 23.11.2011, p. 25.

(3)  JO C 136 du 12.4.2019, p. 1.

(4)  JO C 136 du 12.4.2019, p. 48.

(5)  Règlement (UE) no 1303/2013 du Parlement européen et du Conseil du 17 décembre 2013 portant dispositions communes relatives au Fonds européen de développement régional, au Fonds social européen, au Fonds de cohésion, au Fonds européen agricole pour le développement rural et au Fonds européen pour les affaires maritimes et la pêche, portant dispositions générales applicables au Fonds européen de développement régional, au Fonds social européen, au Fonds de cohésion et au Fonds européen pour les affaires maritimes et la pêche, et abrogeant le règlement (CE) no 1083/2006 du Conseil (JO L 347 du 20.12.2013, p. 320).

(6)  Solde corrigé des variations conjoncturelles, déduction faite des mesures ponctuelles et temporaires, recalculé par la Commission au moyen de la méthode commune.

(7)  Les dépenses publiques primaires nettes sont constituées des dépenses publiques totales diminuées des dépenses d’intérêt, des dépenses liées aux programmes de l’Union qui sont intégralement couvertes par des recettes provenant de fonds de l’Union et des modifications non discrétionnaires intervenant dans les dépenses liées aux indemnités de chômage. La formation brute de capital fixe financée au niveau national est lissée sur quatre ans. Les mesures discrétionnaires en matière de recettes ou les augmentations de recettes découlant de mesures législatives sont prises en compte. Les mesures exceptionnelles, sur le front tant des recettes que des dépenses, sont déduites.

(8)  Conformément à l’article 5, paragraphe 2, du règlement (CE) no 1466/97.