14.3.2014   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

L 74/65


RECOMMANDATION DE LA COMMISSION

du 12 mars 2014

relative à une nouvelle approche en matière de défaillances et d’insolvabilité des entreprises

(Texte présentant de l'intérêt pour l'EEE)

(2014/135/UE)

LA COMMISSION EUROPÉENNE,

vu le traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, et notamment son article 292,

considérant ce qui suit:

(1)

L’objectif de la présente recommandation est d’assurer aux entreprises viables en difficulté financière, où qu’elles se trouvent dans l’Union, un accès aux cadres nationaux en matière d’insolvabilité leur permettant de se restructurer à un stade précoce afin de prévenir leur insolvabilité et d’optimiser ainsi leur valeur totale pour les créanciers, les travailleurs, les propriétaires et l’économie dans son ensemble. La recommandation vise également à offrir une seconde chance, dans l’ensemble de l’Union, aux entrepreneurs honnêtes ayant connu la faillite.

(2)

Les règles en matière d’insolvabilité sont très différentes d’un État membre à l’autre du point de vue de l’éventail des procédures ouvertes aux débiteurs aux prises avec des difficultés financières et souhaitant restructurer leur entreprise. Dans certains États membres, l’éventail limité des procédures prévues ne permet aux entreprises de se restructurer qu’à un stade relativement tardif dans le cadre de procédures d’insolvabilité formelles. Dans d’autres, cette restructuration peut être réalisée à un stade plus précoce, moyennant toutefois des procédures moins efficaces qu’elles pourraient l’être ou comportant divers degrés de formalisme, notamment en matière de recours aux procédures extrajudiciaires.

(3)

Quant aux règles nationales qui offrent aux entrepreneurs une seconde chance en leur permettant notamment de se libérer des dettes qu’ils ont contractées dans le cadre de leurs activités professionnelles, elles varient tant en ce qui concerne la durée du délai de réhabilitation que les conditions d’octroi de cette réhabilitation.

(4)

En plus de rendre plus coûteuse et plus incertaine l’évaluation des risques liés à l’investissement dans un autre État membre, les écarts entre les cadres nationaux de restructuration et entre les règles nationales qui accordent aux entrepreneurs honnêtes une seconde chance créent des conditions hétérogènes pour l’accès au crédit et entraînent des taux de recouvrement différenciés pour les créanciers. Ils compliquent la conception et l’adoption de plans de restructuration cohérents pour les groupes transfrontières. D’une manière plus générale, ces écarts sont de nature à dissuader les entreprises de s’établir dans différents États membres.

(5)

Le règlement (CE) no 1346/2000 du Conseil (1) ne concerne que des questions de compétence judiciaire, de reconnaissance et d’exécution, de législation applicable et de coopération dans les procédures d’insolvabilité transfrontières. La proposition de la Commission relative à la modification dudit règlement (2) devrait étendre la portée du règlement aux procédures préventives qui encouragent le sauvetage d’un débiteur économiquement viable et accordent une seconde chance aux chefs d’entreprise. La modification proposée n’aborde néanmoins pas les disparités qui existent entre ces procédures prévues par les législations nationales.

(6)

Le 15 novembre 2011, le Parlement européen a adopté une résolution (3) concernant les procédures d’insolvabilité. Elle contenait des recommandations visant à harmoniser certains aspects spécifiques du droit national en matière d’insolvabilité, y compris les conditions d’établissement des plans de restructuration, leurs effets et leur contenu.

(7)

Dans sa communication sur l’Acte pour le marché unique II (4) du 3 octobre 2012, la Commission s’est engagée à moderniser les règles en matière d’insolvabilité de l’Union afin de faciliter la survie des entreprises et d’offrir une seconde chance aux entrepreneurs, en tant que mesure clé. La Commission a annoncé qu’elle explorerait à cette fin les moyens permettant d’améliorer l’efficacité des législations nationales en matière d’insolvabilité, de façon à créer des conditions de concurrence équitables pour les entreprises, les entrepreneurs et les particuliers au sein du marché intérieur.

(8)

La communication de la Commission relative à une nouvelle approche européenne en matière de défaillances et d’insolvabilité des entreprises (5) du 12 décembre 2012 isole les domaines où les différences entre législations nationales sur l’insolvabilité peuvent entraver la mise en œuvre d’un marché intérieur efficace. La Commission souligne qu’en améliorant la confiance des entreprises, des entrepreneurs et des particuliers à l’égard des systèmes des autres États membres, la création de conditions équitables dans ces domaines favoriserait l’accès au crédit et encouragerait les investissements.

(9)

Le 9 janvier 2013, la Commission a adopté le plan d’action Entrepreneuriat 2020 (6), pour lequel les États membres sont notamment invités à limiter, si possible, à trois ans tout au plus d’ici à 2013, la durée des procédures de réhabilitation et de concordat pour les faillis honnêtes, et à fournir aux entreprises des services de soutien à la restructuration précoce ainsi que des conseils pour éviter la faillite, et aider les PME à se restructurer et à redémarrer.

(10)

Plusieurs États membres passent actuellement en revue leurs dispositions nationales en matière d’insolvabilité dans le but d’améliorer le cadre de sauvetage des entreprises et le mécanisme d’octroi d’une seconde chance aux chefs d’entreprise. Par conséquent, il est opportun d’encourager la cohérence de ces initiatives nationales, comme celle de toute initiative nationale future, afin de renforcer le fonctionnement du marché intérieur.

(11)

Il faut encourager la cohérence entre les cadres nationaux d’insolvabilité car cette cohérence permet de réduire les divergences et les pertes d’efficacité qui compromettent la restructuration précoce d’entreprises en difficulté et l’accès à une seconde chance pour les entrepreneurs honnêtes, en même temps qu’elle diminue le coût de la restructuration tant pour les débiteurs que pour les créanciers. En étant plus cohérentes et plus efficaces, les règles nationales en matière d’insolvabilité permettraient d’optimiser les rendements des différents créanciers et investisseurs et encourageraient les investissements transfrontières. Cette cohérence accrue faciliterait également la restructuration des groupes de sociétés, quel que soit le lieu de l’Union où sont établis les membres du groupe.

(12)

En outre, une levée des obstacles à une restructuration efficace des entreprises viables en difficulté financière contribue à préserver des emplois tout en étant bénéfique à l’économie générale. En effet, la création d’activités non salariées dans les États membres serait stimulée par un meilleur accès des entrepreneurs à cette seconde chance. Par ailleurs, des cadres d’insolvabilité plus efficaces amélioreraient l’évaluation des risques liés aux décisions de prêt et d’emprunt et faciliteraient, en minimisant les coûts économiques et sociaux inhérents aux procédures de désendettement, l’ajustement des entreprises surendettées.

(13)

Une approche plus cohérente à l’échelle de l’Union serait bénéfique pour les petites et moyennes entreprises qui ne disposent pas des ressources nécessaires pour assumer les coûts élevés d’une restructuration et profiter des procédures de restructuration plus efficaces de certains États membres.

(14)

Les autorités fiscales ont aussi intérêt à la mise en place d’un cadre efficace de restructuration des entreprises viables. Dans leur mise en œuvre de la présente recommandation, les États membres devraient être à même de prendre les mesures appropriées pour assurer la collecte et le recouvrement des recettes fiscales en respectant les principes généraux d’équité fiscale ainsi que pour sanctionner efficacement les fraudes, l’évasion ou les abus.

(15)

Il convient d’exclure du champ d’application de la présente recommandation les entreprises d’assurance, les établissements de crédit, les entreprises d’investissement et les organismes de placement collectif, les contreparties centrales, les dépositaires centraux de valeurs mobilières et les autres établissements financiers soumis à des cadres de sauvetage et de résolution spécifiques dans lesquels les autorités nationales de surveillance disposent de vastes pouvoirs d’intervention. Les États membres sont invités à étudier la possibilité d’appliquer la présente recommandation au surendettement et à la faillite des consommateurs, même s’ils n’entrent pas dans son champ d’application, car certains des principes qui y sont énoncés peuvent également présenter un intérêt pour eux.

(16)

Un cadre de restructuration devrait permettre aux débiteurs de prendre en charge leurs difficultés financières à un stade précoce, lorsque leur insolvabilité peut encore être évitée et la poursuite de leur activité assurée. Toutefois, pour éviter tout risque potentiel d’abus de la procédure, les difficultés financières du débiteur doivent être de nature à entraîner son insolvabilité, et le plan de restructuration doit être capable de prévenir l’insolvabilité du débiteur et d’assurer la viabilité de l’entreprise.

(17)

Pour permettre un gain d’efficacité et minimiser les délais et les coûts, les cadres de restructuration préventifs devraient comporter des procédures souples limitant les formalités judiciaires aux situations dans lesquelles elles sont nécessaires et proportionnées afin de préserver les intérêts des créanciers et des autres parties intéressées susceptibles d’être affectées. Á titre d’exemple, afin d’éviter des coûts inutiles et de refléter le caractère précoce de la procédure, il conviendrait en principe de laisser aux débiteurs le contrôle de leurs actifs et de ne pas rendre obligatoire la nomination d’un médiateur ou d’un superviseur, mais de la prévoir cas par cas.

(18)

Un débiteur devrait être en mesure de saisir une juridiction en vue d’obtenir un moratoire sur les procédures individuelles d’exécution et la suspension des procédures d’insolvabilité à son encontre demandées par les créanciers, lorsque ces actions peuvent affecter de manière négative les négociations et compromettre les possibilités de restructuration de l’entreprise du débiteur. Toutefois, afin d’assurer un juste équilibre entre les droits du débiteur et ceux des créanciers et compte tenu de l’expérience des réformes récentes dans les États membres, le moratoire devrait être initialement accordé pour une période n’excédant pas quatre mois.

(19)

Le plan de restructuration doit être validé par une juridiction compétente, afin d’assurer la mise en balance de la diminution des droits des créanciers et des avantages de la restructuration et de garantir l’accès des créanciers à un recours effectif, dans le plein respect de la liberté d’entreprise et du droit à la propriété qui sont consacrés dans la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne. La juridiction saisie doit dès lors rejeter tout plan qui serait susceptible d’entraîner une diminution des droits des créanciers dissidents en deçà du niveau qu’ils auraient pu raisonnablement escompter si l’entreprise du débiteur n’était pas restructurée.

(20)

Alors qu’il semble être démontré que les entrepreneurs faillis ont plus de chance de réussir la seconde fois, les effets de la faillite, et plus particulièrement la stigmatisation sociale, les conséquences juridiques et la persistance du défaut de paiement, sont autant de facteurs dissuasifs pour ceux qui souhaitent créer une entreprise ou bénéficier d’une seconde chance. D’où la nécessité de prendre des mesures propres à réduire les effets négatifs des faillites sur les entrepreneurs, en prévoyant des dispositions pour un apurement complet des dettes à l’expiration d’un délai déterminé.

A ADOPTÉ LA PRÉSENTE RECOMMANDATION:

I.   FINALITÉ ET OBJET

1.

La présente recommandation a pour objet d’encourager les États membres à mettre en place un cadre permettant de restructurer efficacement les entreprises viables confrontées à des difficultés financières et de donner une seconde chance aux entrepreneurs honnêtes, en promouvant de la sorte l’esprit d’entreprise, l’investissement et l’emploi et en contribuant à réduire les obstacles au bon fonctionnement du marché intérieur.

2.

En réduisant ces obstacles, la recommandation vise en particulier:

a)

à abaisser les coûts de l’évaluation des risques liés à l’investissement dans un autre État membre,

b)

à accroître les taux de recouvrement pour les créanciers, et

c)

à éliminer les difficultés rencontrées lors de la restructuration transfrontière de groupes multinationaux.

3.

La présente recommandation prévoit des normes minimales sur:

a)

les cadres de restructuration préventifs; ainsi que

b)

l’apurement des dettes des entrepreneurs faillis.

4.

Lors de la mise en œuvre de la présente recommandation, les États membres devraient être à même de prendre des mesures appropriées et efficaces pour assurer le recouvrement de l’impôt, notamment en cas de fraude, d’évasion ou d’abus.

II.   DÉFINITIONS

5.

Aux fins de la présente recommandation, on entend par:

a)   «débiteur»: toute personne physique ou morale en difficulté financière lorsqu’il existe un risque d’insolvabilité;

b)   «restructuration»: une modification de la composition, des conditions, ou de la structure de l’actif et du passif des débiteurs, ou une combinaison de ces éléments, aux fins de permettre la poursuite, en totalité ou en partie, de l’activité des débiteurs;

c)   «moratoire sur les mesures d’exécution individuelles»: un sursis à l’exécution du droit d’un créancier de réaliser une créance à l’encontre d’un débiteur;

d)   «juridiction»: tout organe ayant compétence dans des matières liées aux procédures préventives auquel les États membres ont confié un rôle juridictionnel et dont les décisions peuvent faire l’objet d’un recours ou d’un contrôle par une autorité judiciaire.

III.   CADRE DE RESTRUCTURATION PRÉVENTIF

A.   Disponibilité d’un cadre de restructuration préventif

6.

Les débiteurs devraient avoir accès à un cadre leur permettant de restructurer leur activité dans le but de prévenir une insolvabilité. Ce cadre devrait contenir les éléments suivants:

a)

le débiteur devrait être en mesure de se restructurer à un stade précoce, dès l’apparition du risque d’insolvabilité;

b)

le débiteur devrait garder la maîtrise de la gestion courante de son activité;

c)

le débiteur devrait être en mesure de demander un moratoire temporaire sur les mesures d’exécution individuelles;

d)

un plan de restructuration adopté à la majorité fixée par la loi doit être contraignant pour l’ensemble des créanciers, pour autant qu’il soit validé par une juridiction compétente;

e)

le nouveau financement requis pour la mise en œuvre d’un plan de restructuration ne devrait pas être déclaré nul, annulable ou inapplicable en tant qu’acte préjudiciable à l’ensemble des créanciers.

7.

La procédure de restructuration ne devrait pas se révéler longue et coûteuse et devrait être assouplie afin de permettre le recours à un plus grand nombre de mesures extrajudiciaires. L’intervention des juridictions compétentes devrait être limitée aux situations où elle est nécessaire et proportionnée pour protéger les droits des créanciers et des autres parties concernées par le plan de restructuration.

B.   Faciliter les négociations sur les plans de restructuration

Désignation d’un médiateur ou d’un superviseur

8.

Les débiteurs devraient être en mesure de lancer un processus de restructuration de leurs activités sans devoir passer par une procédure judiciaire formelle.

9.

Au lieu d’être obligatoire, la désignation d’un médiateur ou d’un superviseur par la juridiction compétente ne devrait intervenir que cas par cas, lorsque ladite juridiction estime qu’une telle désignation est nécessaire:

a)

dans le cas d’un médiateur, afin d’aider le débiteur et les créanciers à assurer le bon déroulement des négociations entourant un plan de restructuration;

b)

dans le cas d’un superviseur, afin de superviser l’activité du débiteur et des créanciers et de prendre les mesures nécessaires de sauvegarde des intérêts légitimes d’un ou de plusieurs créanciers ou d’une autre partie intéressée.

Moratoire sur les mesures d’exécution individuelles et suspension des procédures d’insolvabilité

10.

Le débiteur doit disposer du droit de saisir une juridiction d’une demande de sursis à l’exécution d’une mesure d’exécution individuelle (ci-après «moratoire») requise par les créanciers, y compris par les créanciers garantis et les créanciers privilégiés, lorsque cette mesure serait de nature à gêner les perspectives d’un plan de restructuration. Le moratoire ne devrait pas intervenir dans le cadre de l’exécution de contrats en cours.

11.

Dans les États membres qui subordonnent l’octroi du moratoire à certaines conditions, les débiteurs devraient pouvoir obtenir un moratoire dans tous les cas lorsque:

a)

les créanciers représentant un montant significatif des créances susceptibles d’être affectées par le plan de restructuration soutiennent les négociations sur l’adoption d’un plan de restructuration; et quand

b)

un plan de restructuration est raisonnablement susceptible d’être mis en œuvre et de prévenir l’insolvabilité du débiteur.

12.

Lorsque les législations des États membres le prévoient, l’obligation pour le débiteur de déposer une déclaration d’insolvabilité, ainsi que les demandes introduites par les créanciers en vue d’obtenir une procédure d’insolvabilité à l’encontre du débiteur, devraient également être suspendues pour la durée du moratoire.

13.

La durée du moratoire doit respecter un juste équilibre entre les intérêts du débiteur et des créanciers, et en particulier des créanciers privilégiés. Elle devrait donc être fonction de la complexité de la restructuration envisagée et ne devrait pas dépasser quatre mois. Les États membres peuvent prévoir un renouvellement de cette période en cas de progrès avérés dans les négociations en cours sur un plan de restructuration. La durée totale du moratoire ne devrait pas dépasser douze mois.

14.

Lorsque le moratoire n’est plus nécessaire pour faciliter l’adoption d’un plan de restructuration, il devrait être levé.

C.   Plans de restructuration

Contenu des plans de restructuration

15.

Les États membres devraient veiller à ce que les juridictions soient en mesure de valider les plans avec diligence et, en principe, dans le cadre d’une procédure écrite. Ils devraient adopter des dispositions claires et précises régissant le contenu des plans de restructuration. Ces plans devraient contenir une description détaillée des éléments suivants:

a)

une désignation claire et complète des créanciers susceptibles d’être affectés par le plan;

b)

les effets de la restructuration proposée sur les dettes ou les catégories de dettes;

c)

la position des créanciers concernés sur le plan de restructuration;

d)

le cas échéant, les conditions d’un nouveau financement; ainsi que

e)

la capacité du plan à éviter potentiellement l’insolvabilité du débiteur et à assurer la viabilité de l’entreprise.

Adoption des plans de restructuration

16.

Afin d’accroître les perspectives de restructuration, et partant le nombre d’entreprises viables sauvées, les créanciers, garantis ou non, devraient pouvoir adopter un plan de restructuration.

17.

Les créanciers ayant des intérêts divergents devraient être traités en catégories distinctes reflétant ces intérêts. Il conviendrait d’établir une distinction au moins entre les créanciers garantis et non garantis.

18.

Un plan de restructuration devrait être adopté par la majorité sur le montant des créances pour chaque catégorie, conformément au droit national. Lorsqu’il y a plus de deux catégories de créanciers, les États membres devraient pouvoir maintenir ou introduire des dispositions permettant aux juridictions compétentes de valider les plans de restructuration qui sont soutenus par une majorité de ces catégories de créanciers, compte tenu notamment du poids des créances appartenant aux catégories respectives de créanciers.

19.

Les créanciers devraient jouir d’une égalité de traitement, quel que soit le lieu où ils sont établis. Par conséquent, lorsque la législation d’un État membre exige une procédure de vote formelle, les créanciers devraient en principe être autorisés à voter par des moyens de communication à distance, telles que les technologies électroniques sécurisées ou par lettre recommandée.

20.

Afin de rendre plus effective l’adoption des plans de restructuration, les États membres devraient également veiller à réserver la possibilité d’adopter les plans de restructuration à certains créanciers ou à certains types ou certaines catégories de créanciers seulement, pour autant que d’autres créanciers ne soient pas affectés.

Validation judiciaire du plan de restructuration

21.

Afin d’éviter qu’un plan de restructuration ne pénalise indûment les créanciers et dans l’intérêt de la sécurité juridique, tout plan de restructuration qui affecte les intérêts des créanciers dissidents ou qui prévoit la possibilité d’un nouveau financement devrait être validé par une juridiction compétente avant de devenir contraignant.

22.

Les conditions de validation du plan de restructuration devraient être clairement définies dans le droit des États membres et comporter au moins les sauvegardes suivantes:

a)

le plan de restructuration a été adopté dans des conditions qui garantissent la protection des intérêts légitimes des créanciers;

b)

le plan de restructuration a été notifié à tous les créanciers susceptibles d’être affectés;

c)

le plan de restructuration ne permet pas de réduire les droits des créanciers dissidents en deçà du niveau qu’ils auraient pu raisonnablement escompter si l’entreprise du débiteur n’était pas restructurée, si elle avait fait l’objet d’une liquidation ou si elle avait été vendue en tant qu’entreprise en activité, selon les cas;

d)

tout nouveau financement prévu dans le plan de restructuration est nécessaire pour mettre en œuvre le plan et ne porte pas injustement préjudice aux intérêts des créanciers dissidents.

23.

Les États membres devraient faire en sorte que la juridiction compétente puisse rejeter les plans de restructuration dont les chances de prévenir l’insolvabilité du débiteur et de garantir la viabilité de l’activité sont clairement nulles, par exemple en raison de l’absence de nouveau financement pour la poursuite de l’activité.

Droits des créanciers

24.

Tous les créanciers susceptibles d’être affectés par le plan de restructuration doivent être informés de la teneur dudit plan et bénéficier du droit de formuler des objections et de faire appel du plan de restructuration. Néanmoins, dans l’intérêt des créanciers qui soutiennent le plan, cet appel ne devrait pas, en principe, suspendre la mise en œuvre du plan de restructuration.

Effets du plan de restructuration

25.

Les plans de restructuration qui sont adoptés à l’unanimité des créanciers affectés devraient être contraignants pour l’ensemble de ces créanciers.

26.

Les plans de restructuration validés par la juridiction compétente devraient s’imposer à chaque créancier concerné désigné dans le plan.

D.   Protection en vue d’un nouveau financement;

27.

Les nouveaux financements, y compris les nouveaux prêts, la vente de certains actifs par le débiteur et la conversion de dettes en capital, convenus dans le plan de restructuration ne devraient pas être déclarés nuls, annulables ou inapplicables en tant qu’actes préjudiciables à l’ensemble des créanciers.

28.

Les créanciers qui apportent de nouveaux financements à l’appui d’un plan de restructuration validé par une juridiction devraient être exemptés des responsabilités civiles et pénales en lien avec la procédure de restructuration en cause.

29.

Des exceptions aux règles de protection des nouveaux financements devraient être prévues en cas de fraude établie ultérieurement en ce qui concerne le nouveau financement.

IV.   UNE SECONDE CHANCE POUR LES ENTREPRENEURS

Délais de réhabilitation

30.

Il conviendrait de limiter les effets négatifs des faillites sur les entrepreneurs afin de leur donner une seconde chance. Les entrepreneurs devraient être pleinement libérés de leurs dettes qui ont fait l’objet d’une mise en faillite après au plus tard trois ans à compter:

a)

de la date à laquelle la juridiction compétente a statué sur la demande d’ouverture de la procédure de faillite, dans le cas d’une procédure qui se termine par la liquidation des actifs du débiteur;

b)

de la date à laquelle la mise en œuvre du plan de remboursement a commencé, dans le cas d’une procédure qui comprend un plan de remboursement.

31.

À l’expiration du délai de réhabilitation, les entrepreneurs devraient être libérés de leurs dettes sans qu’une saisine de la juridiction compétente soit en principe nécessaire.

32.

Une pleine réhabilitation après un court laps de temps n’est pas appropriée en toutes circonstances. Les États membres devraient dès lors pouvoir maintenir ou adopter des dispositions plus strictes qui sont nécessaires pour:

a)

décourager les entrepreneurs ayant agi de manière malhonnête ou de mauvaise foi, que ce soit avant ou après l’ouverture de la procédure de faillite;

b)

décourager les entrepreneurs qui n’adhèrent pas à un plan de remboursement ou à toute autre obligation légale visant à préserver les intérêts des créanciers; ou

c)

préserver les moyens de subsistance de l’entrepreneur et de sa famille en permettant à l’entrepreneur de conserver certains actifs.

33.

Les États membres peuvent exclure de la règle de l’apurement des catégories spécifiques de créances, telles que celles issues d’une responsabilité délictueuse.

V.   SURVEILLANCE ET ÉTABLISSEMENT DE RAPPORTS

34.

Les États membres sont invités à mettre en œuvre les principes énoncés dans la présente recommandation pour le 14 mars 2015.

35.

Les États membres sont invités à recueillir des statistiques annuelles fiables sur le nombre de procédures de restructuration préventives ouvertes, sur la durée des procédures, ainsi que des informations sur la taille des débiteurs concernés et sur l’issue des procédures ouvertes; ils devraient communiquer cette information à la Commission annuellement et pour la première fois le 14 mars 2015.

36.

La Commission évaluera la mise en œuvre de la présente recommandation dans les États membres pour le 14 septembre 2015. Dans ce contexte, la Commission évaluera son incidence sur le sauvetage des entreprises en difficulté financière et sur l’octroi d’une seconde chance aux entrepreneurs honnêtes, son interaction avec d’autres procédures d’insolvabilité dans d’autres matières telles que les délais de réhabilitation pour les personnes physiques n’exerçant pas une activité commerciale, industrielle, artisanale ou professionnelle, et son impact sur le fonctionnement du marché intérieur ainsi que sur les petites et moyennes entreprises et la compétitivité de l’économie de l’Union. La Commission devrait déterminer également s’il convient de proposer des mesures supplémentaires en vue de consolider l’approche horizontale décrite dans la recommandation.

Fait à Bruxelles, le 12 mars 2014.

Par la Commission

Viviane REDING

Vice-président


(1)  Règlement (CE) no 1346/2000 du Conseil du 29 mai 2000 relatif aux procédures d’insolvabilité (JO L 160 du 30.6.2000, p. 1).

(2)  COM(2012) 744 final.

(3)  Résolution du Parlement européen du 15 novembre 2011 contenant des recommandations à la Commission sur les procédures d’insolvabilité dans le cadre du droit européen des sociétés, P 7_TA (2011) 0484.

(4)  COM(2012) 573 final.

(5)  COM(2012) 742 final.

(6)  COM(2012) 795 final.