7.4.2006   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

L 99/21


DÉCISION DE LA COMMISSION

du 8 février 2006

Aide d’État C 22/2004 (ex N 648/2001) relative aux déductions fiscales pour les pêcheurs professionnels (Suède)

[notifiée sous le numéro C(2006) 265]

(Le texte en langue suédoise est le seul faisant foi.)

(Texte présentant de l'intérêt pour l'EEE)

(2006/269/CE)

LA COMMISSION DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES,

vu le traité instituant la Communauté européenne, et notamment son article 88, paragraphe 2, premier alinéa,

vu le règlement (CE) no 659/1999 du Conseil du 22 mars 1999 portant modalités d’application de l’article 93 du traité CE (1), et notamment son article 14,

ayant invité les parties intéressées à présenter leurs observations en application de l’article 88, paragraphe 2, premier alinéa, du traité CE,

considérant ce qui suit:

(1)

Le 4 septembre 2001, les autorités suédoises ont notifié à la Commission un projet de loi modifiant la loi relative à l’impôt sur le revenu (1999:1229). La Commission a demandé des compléments d’information par lettres du 10 décembre 2001, du 25 avril 2002, du 23 juillet 2002, du 4 octobre 2002, du 11 mars 2003, du 24 juillet 2003 et du 3 février 2004, auxquelles les autorités suédoises ont répondu respectivement par lettres du 26 février 2002, du 7 juin 2002, du 29 juillet 2002, du 19 décembre 2002, du 19 mai 2003, du 19 décembre 2003 et du 8 mars 2004.

(2)

Par lettre du 16 juin 2004, la Commission a informé la Suède de sa décision d’ouvrir la procédure formelle d’examen prévue à l’article 88, paragraphe 2, du traité CE.

(3)

La décision de la Commission d’ouvrir la procédure formelle d’examen a été publiée au Journal officiel de l’Union européenne du 20 octobre 2004 (2). La Commission a invité les parties intéressées à lui présenter leurs observations sur l’affaire en question. Les autorités suédoises ont répondu par lettre du 9 novembre 2004. La Commission n’a pas reçu d’autres observations.

(4)

Le projet de loi notifié, qui est une proposition de modification de la loi relative à l’impôt sur le revenu (1999:1229), vise à dédommager tous les pêcheurs détenteurs d’une licence des coûts générés par l’activité de pêche. Le système actuel d’avantages fiscaux s’en trouvera modifié.

(5)

En 2002, l’administration fiscale suédoise a publié un nouvel avis général au sujet des déductions fiscales accordées aux pêcheurs professionnels, lequel est toujours en vigueur et consiste, en principe, dans l’application au secteur de la pêche du système général d’imposition s’appliquant également à tous les autres secteurs. Les avantages fiscaux dont bénéficient les pêcheurs depuis 2002 ne sont par conséquent pas considérés comme des aides.

(6)

En vertu de l’avis de 2002, il est nécessaire, pour qu’un pêcheur puisse bénéficier de déductions fiscales, que sa sortie de pêche l’ait obligé à passer la nuit hors de chez lui, cette nuit passée hors de chez soi étant une condition générale au titre du système général d’imposition. Cet avis prévoit également que les pêcheurs puissent bénéficier des mêmes déductions fiscales générales pour hausse du coût de la vie que les autres travailleurs indépendants et à raison des mêmes montants. Les autorités suédoises font observer que 99 % des pêcheurs professionnels en Suède sont indépendants et constituent donc des entreprises unipersonnelles.

(7)

Dans le système actuel, les pêcheurs et les autres travailleurs indépendants sont soumis aux mêmes règles en ce qui concerne les frais d’hébergement. Une déduction fiscale fixe est normalement accordée pour chaque nuit passée hors de chez soi. Les pêcheurs et les autres travailleurs ne doivent donc pas fournir de preuves spécifiques de leurs frais réels pour pouvoir bénéficier de la déduction fiscale fixe de 95 couronnes suédoises (SEK) par jour.

(8)

Les travailleurs indépendants des autres secteurs doivent fournir des explications satisfaisantes concernant l’augmentation de leurs dépenses, notamment des informations sur les dates, la finalité et la destination du déplacement professionnel ainsi que la durée des voyages aller et retour.

(9)

Bien qu’ils ne soient pas tenus de fournir ces justifications, les pêcheurs ne peuvent bénéficier d’une déduction fiscale que si les sorties de pêche les contraignent à passer la nuit hors de chez eux. Afin de permettre aux autorités fiscales de calculer le montant de la déduction générale auquel il a droit, le pêcheur doit fournir des informations sur les dates des sorties de pêche et sur leur durée. Les autorités suédoises ont choisi ce critère afin d’éviter de compliquer le système fiscal et son application, les sorties de pêche constituant par nature l’activité professionnelle du pêcheur.

(10)

S’ils considèrent que la hausse du coût de la vie est supérieure au montant forfaitaire de 95 couronnes suédoises (SEK) par jour, les pêcheurs comme les autres travailleurs indépendants peuvent choisir l’option consistant à prouver que cette hausse dépasse la déduction fixe en présentant un rapport sur l’ensemble des déplacements et des voyages professionnels effectués pendant l’année d’imposition. Une fois choisie, cette option s’applique à toute l’année; il n’est donc pas possible, au cours d’une même année d’imposition, d’appliquer un montant forfaitaire pour certains voyages et les frais réels pour d’autres.

(11)

Le nouveau régime notifié à la Commission n’impose plus qu’une nuit soit passée hors de chez soi pour bénéficier de la déduction fiscale pour hausse du coût de la vie. Ce régime, qui s’applique uniquement aux pêcheurs, place donc sur un pied d’égalité, sur le plan fiscal, ceux qui ne passent pas la nuit hors de chez eux et ceux qui le font.

(12)

Le régime notifié a pour objectif de neutraliser les conditions de concurrence entre pêcheurs suédois, danois et norvégiens et de compenser le déséquilibre entre les pêcheurs qui peuvent bénéficier de cette déduction fiscale et ceux qui ne peuvent en bénéficier.

(13)

En outre, la charge administrative tant pour les pêcheurs que pour les autorités fiscales s’en trouvera réduite car les déductions fixées en fonction d’un pourcentage du revenu sont considérées comme plus faciles à gérer et à vérifier que celles fixées en fonction du nombre de jours de pêche.

(14)

Le nouveau régime aura pour effet de permettre aux pêcheurs des zones côtières et lacustres de bénéficier du système de déductions fiscales, ce qui n’est pas le cas à l’heure actuelle. Le nouveau régime profitera donc à ces pêcheurs qu’ils aient ou non passé la nuit hors de chez eux (et éventuellement supporté des frais), la détention d’une licence de pêche professionnelle étant la seule condition pour bénéficier du dédommagement.

(15)

Comme c’est le cas avec le régime actuel applicable à tous les secteurs, les pêcheurs qui optent pour le régime notifié ne pourront plus bénéficier d’autres déductions fiscales pour hausse du coût de la vie.

(16)

La réduction de la charge fiscale de chaque pêcheur, s’élevant à 95 couronnes suédoises (SEK) par jour en application du régime actuel, s’en trouvera modifiée. Elle sera calculée en pourcentage du revenu et ne pourra excéder 40 000 couronnes suédoises (SEK) (4 444 EUR) par an. En outre, la déduction ne pourra dépasser 20 % du revenu annuel. Cela signifie, par exemple, que la déduction s’élèvera à 20 000 couronnes suédoises (SEK) (2 222 EUR) pour un revenu annuel de 100 000 couronnes suédoises (SEK) (11 111 EUR) et que la déduction maximale ne sera accordée que si le revenu annuel atteint 200 000 couronnes suédoises (SEK) (22 222 EUR) au minimum.

(17)

Par lettre du 4 octobre 2002, la Commission a demandé aux autorités suédoises si elles étaient en mesure de fournir une estimation du nombre de pêcheurs professionnels qui, sur les 2 000 pêcheurs susceptibles de bénéficier des dispositions du projet de loi, pourraient bénéficier de la déduction maximale de 40 000 couronnes suédoises (SEK), c’est-à-dire ceux dont le revenu annuel s’élève à 200 000 couronnes suédoises (SEK) au minimum.

(18)

Par lettre du 19 décembre 2002, les autorités suédoises ont répondu qu’elles ne disposaient pas de statistiques sur le revenu des pêcheurs professionnels tiré des seules activités de pêche et qu’elles ne pouvaient donc répondre à cette question précise.

(19)

Selon les données figurant dans les notifications, l’application du régime notifié entraînerait, pour le Trésor public suédois, une perte annuelle de 34 400 000 couronnes suédoises (SEK) (3 822 222 EUR), dont 18 200 000 couronnes suédoises (SEK) (2 022 222 EUR) de contributions nationales sociales non perçues et une réduction de 16 200 000 couronnes suédoises (SEK) (1 800 000 EUR) des recettes fiscales pour chaque région concernée.

(20)

La Suède compte quelque 3 000 pêcheurs professionnels détenteurs d’une licence, dont 2 000 environ sont actuellement en activité. Au moment de l’ouverture de la procédure formelle d’examen, les autorités suédoises ne disposaient pas de données indiquant combien de pêcheurs, sur les 2 000 pêcheurs en activité détenteurs d’une licence, effectuaient des sorties de pêche les obligeant à passer la nuit hors de chez eux. Il n’a donc pas été possible d’estimer combien étaient aujourd’hui en mesure de bénéficier des avantages fiscaux actuellement accordés aux pêcheurs.

(21)

La Commission a considéré que le système actuel de déductions fiscales s’appliquait de la même manière à tous les secteurs de l’économie et qu’il ne s’agissait donc pas d’un avantage sélectif au bénéfice du secteur de la pêche mais d’une mesure à caractère général. Elle a également estimé que le système, en accordant aux pêcheurs une déduction fiscale sans la subordonner à une absence d’une nuit du domicile, offrirait au secteur de la pêche un avantage sélectif non accessible aux autres secteurs. Cet avantage était apparemment octroyé sans que soit imposée aucune obligation aux bénéficiaires. Il apparaissait donc que ces mesures étaient destinées à améliorer la situation des entreprises et à accroître leur trésorerie et qu’elles avaient pour effet d’améliorer les revenus des bénéficiaires; elles constituaient donc des aides au fonctionnement incompatibles avec le marché commun.

(22)

Selon les autorités suédoises, la mesure a été proposée pour compenser le déséquilibre entre les pêcheurs qui peuvent bénéficier du système actuel de déductions fiscales (c’est-à-dire ceux qui passent la nuit hors de chez eux) et ceux qui ne peuvent en bénéficier (pêcheurs des zones côtières et lacustres) et afin d’aligner le régime fiscal applicable sur celui des pays voisins.

(23)

D’après les estimations des autorités suédoises, 1 500 des 2 000 pêcheurs actuellement en activité détenteurs d’une licence effectuent des sorties de pêche les obligeant à passer la nuit hors de chez eux; il y a donc 500 pêcheurs qui ne bénéficient pas de déductions fiscales à l’heure actuelle et qui bénéficieront du régime proposé.

(24)

Dans le cadre du système actuel, les pêcheurs peuvent déduire un montant fixe pour les repas, les petites dépenses et l’hébergement. Les autorités suédoises, comme il a été indiqué ci-dessus, font valoir que beaucoup de pêcheurs professionnels en Suède effectuent de longues sorties de pêche; dans le système actuel, cela entraîne, pour les autorités fiscales, une multiplication des dossiers relatifs aux déductions pour hausse du coût de la vie liée aux sorties de pêche.

(25)

Les autorités suédoises soutiennent que le régime doit être autorisé au motif qu’il place sur un pied d’égalité, sur le plan fiscal, les pêcheurs professionnels qui passent la nuit hors de chez eux et ceux qui ne le font pas; les deux groupes supportant des coûts similaires, il est logique qu’ils soient traités de la même façon sur le plan fiscal.

(26)

Les autorités suédoises font également valoir que la spécificité des besoins des pêcheurs professionnels justifie cette disposition fiscale particulière; en outre, les pêcheurs opérant en général à petite échelle, la simplification des déductions facilitera les formalités administratives tant pour les autorités fiscales que pour les pêcheurs. Selon les autorités suédoises, la réglementation proposée est donc nécessaire à l’efficacité du système fiscal suédois et justifiée par la nature ou la structure de ce système.

(27)

Enfin, en ce qui concerne les aspects budgétaires, les autorités suédoises affirment que le calcul de la perte subie par le Trésor public suédois est incorrect et que l’effet de la mesure doit être considéré comme marginal. Elles soutiennent que le manque à gagner dû au régime actuel s’élève à 41 100 000 couronnes suédoises (SEK) (4 566 667 EUR) et que dans l’hypothèse où tous les pêcheurs professionnels recourraient au niveau régime notifié, ce manque à gagner ne s’élèverait qu’à 34 300 000 couronnes suédoises (SEK) (3 811 111 EUR). En outre, le nouveau régime étant désavantageux pour certains des pêcheurs qui bénéficient des règles actuelles, elles estiment qu’environ 500 pêcheurs n’opteront pas pour le nouveau régime et continueront à utiliser le système actuel.

(28)

Sur cette base, les autorités suédoises ont calculé que l’impact sur les finances publiques en 2005 se chiffrerait à 49 700 000 couronnes suédoises (SEK) (5 522 222 EUR), dont 41 100 000 couronnes suédoises (SEK) (4 566 667 EUR) de déductions en application du régime actuel et 8 600 000 couronnes suédoises (SEK) (955 556 EUR) de déductions en application du régime proposé.

A.   Existence d’une aide d’État

(29)

Pour qu’il y ait aide d’État, il faut en premier lieu que la mesure procure à ses bénéficiaires un avantage allégeant les charges qui normalement grèvent leur budget. Un tel avantage peut être accordé en réduisant la charge fiscale sous différentes formes et notamment par une réduction de l’assiette imposable; tel est le cas du présent régime notifié.

(30)

En deuxième lieu, l’avantage doit être octroyé par l’État ou au moyen de ressources d’État. Une perte de recettes fiscales équivaut à la consommation de ressources d’État sous la forme de dépenses fiscales. Tel est également le cas du présent régime notifié.

(31)

En troisième lieu, la mesure doit affecter les échanges entre États membres, et fausser ou menacer de fausser la concurrence. Toute forme d’aide, en privilégiant un secteur particulier, fausse ou menace de fausser la concurrence. Les échanges entre États membres sont affectés lorsque le secteur concerné exerce une activité économique qui fait l’objet d’échanges entre les États membres, ce qui est le cas du secteur de la pêche.

(32)

Le fait qu’une mesure rapproche les charges d’un secteur de celles de ses concurrents dans les autres États membres est sans incidence sur le fait qu’il s’agit d’une aide (3).

(33)

Enfin, la mesure doit être spécifique ou sélective en ce qu’elle favorise certaines entreprises ou certaines productions. Le caractère sélectif d’une mesure peut cependant être justifié par la nature ou l’économie du système. Il appartient toutefois à l’État membre de fournir cette justification.

(34)

Il convient tout d’abord de préciser que le système actuel de déductions fiscales est appliqué de la même manière à tous les secteurs de l’économie. Il ne s’agit donc pas d’un avantage sélectif pour le secteur de la pêche, ni par conséquent d’une aide d’État, mais d’une mesure à caractère général.

(35)

Le régime notifié, en accordant une déduction fiscale aux pêcheurs sans la subordonner à une absence d’une nuit du domicile, offrirait au secteur de la pêche un avantage sélectif non accessible aux autres secteurs; ce régime constitue donc une aide d’État.

B.   Compatibilité avec le marché commun

(36)

La mesure notifiée constituant une aide d’État, il est nécessaire de déterminer si une telle aide est compatible avec le marché commun au titre des exceptions prévues à l’article 87, paragraphes 2 et 3.

(37)

Aucune des exceptions prévues à l’article 87, paragraphe 2, du traité CE, ne peut s’appliquer en l’espèce car les objectifs de la réforme du système fiscal ne correspondent pas à ceux visés par ces dispositions.

(38)

Les exceptions prévues à l’article 87, paragraphe 3, points a), b) et d), du traité CE, ne s’appliquent pas non plus car l’aide n’est pas affectée à une région dans laquelle le niveau de vie est anormalement bas ou dans laquelle sévit un grave sous-emploi. Elle n’est pas non plus destinée à promouvoir la réalisation d’un projet important d’intérêt européen commun ni à remédier à une perturbation grave de l’économie suédoise, ni encore à promouvoir la culture ou la conservation du patrimoine.

(39)

Il est également nécessaire d’étudier la mesure à la lumière des lignes directrices pour l’examen des aides d’État dans le secteur de la pêche et de l’aquaculture (4). En vertu du point 1.2 de ces lignes directrices, les aides nationales qui sont octroyées sans imposer d’obligation aux bénéficiaires, et sont destinées à améliorer la situation des entreprises et à accroître leur trésorerie et dont l’effet est d’améliorer les revenus du bénéficiaire sont, en tant qu’aides au fonctionnement, incompatibles avec le marché commun.

(40)

Aux fins d’établir la compatibilité avec le marché commun, la Cour de justice a conclu que la Commission était liée par les lignes directrices et communications qu’elle publie dans le domaine du contrôle des aides d’État dans la mesure où elles ne s’écartent pas des règles du traité et qu’elles sont acceptées par les États membres (5). En outre, conformément à l’article 253 CE, la Commission est tenue de motiver ses décisions, notamment celles portant refus de déclarer une aide compatible avec le marché commun en vertu de l’article 92, paragraphe 3, point c), du Traité (6). La Suède ayant présenté de nouveaux arguments, la Commission, conformément aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 10 du traité CE, examinera ces arguments dans son appréciation de la compatibilité du régime.

(41)

Les autorités suédoises indiquent que le régime a été proposé pour compenser le déséquilibre entre les pêcheurs qui peuvent bénéficier du système actuel de déductions fiscales (c’est-à-dire ceux qui passent la nuit hors de chez eux) et ceux qui ne peuvent en bénéficier (pêcheurs des zones côtières et lacustres). Le régime placera sur un pied d’égalité, sur le plan fiscal, les pêcheurs qui passent la nuit hors de chez eux et ceux qui ne le font pas. Pour les autres secteurs, les règles actuelles relatives aux déductions fiscales pour hausse du coût de la vie demeurent inchangées.

(42)

Les autorités suédoises estiment que les pêcheurs qui ne passent pas la nuit hors de chez eux lors de leurs sorties de pêche ne supportent pas, d’une manière générale, de coûts moins élevés que ceux qui effectuent des sorties de pêche plus longues entraînant une absence d’une nuit du domicile. Les autorités considèrent donc qu’il est logique de réserver le même traitement fiscal à ces deux groupes de pêcheurs.

(43)

Bien qu’il s’agisse là d’un des principaux arguments en faveur du régime notifié, les autorités suédoises n’ont pu fournir qu’une estimation approximative du nombre de pêcheurs qui, sur les 2 000 pêcheurs en activité détenteurs d’une licence, effectuent des sorties de pêche les obligeant à passer la nuit hors de chez eux. De surcroît, et surtout, elles sont incapables de fournir la moindre donnée sur la nature des coûts en question qui permettrait d’effectuer une comparaison entre les coûts supportés par les deux groupes de pêcheurs.

(44)

En l’absence de données montrant que les deux groupes de pêcheurs professionnels, indépendamment du fait que leurs sorties de pêche entraînent ou non une absence d’une nuit du domicile, supportent bel et bien les mêmes coûts, il convient de considérer que le système proposé a un effet négatif sur les conditions commerciales à l’intérieur du secteur suédois de la pêche et qu’il est donc incompatible avec l’article 87, paragraphe 3, point c), du traité CE.

(45)

L’argument selon lequel le nouveau système créerait une situation concurrentielle neutre pour les pêcheurs suédois vis-à-vis de leurs homologues danois et norvégiens est à cet égard dénué de pertinence dans la mesure où le régime en lui-même altère déjà les conditions commerciales à l’intérieur du secteur suédois de la pêche.

(46)

Quant à l’argument des autorités suédoises selon lequel nombre de pêcheurs professionnels en Suède effectuent de longues sorties de pêche notamment en raison des dimensions du pays et de l’étendue de ses côtes sur la mer du Nord et surtout sur la mer Baltique, il ne saurait être utilisé pour affirmer que le système compense le déséquilibre entre les marins pêcheurs et les pêcheurs des lacs quant au bénéfice des déductions fiscales. Cet aspect montre au contraire qu’il existe une différence essentielle entre les activités de pêche des deux groupes qui justifierait une différence de traitement sur le plan fiscal.

(47)

Les autorités suédoises affirment enfin que le système de déductions fiscales proposé permettra une meilleure utilisation des ressources administratives; en effet, le montant des déductions ne sera plus calculé en fonction du nombre total de jours de pêche mais en appliquant un forfait annuel établi sur la base du revenu annuel tiré de l’activité de pêche.

(48)

Il est certes probable que le système permette une meilleure utilisation des ressources administratives en fonctionnant sur la base d’un montant forfaitaire annuel plutôt que sur celle d’un montant forfaitaire quotidien. Toutefois, il n’existe actuellement aucune réglementation spécifique pour les pêcheurs professionnels en matière de comptabilité et de tenue de livres et les autorités suédoises n’ont pas été en mesure de fournir de statistiques sur les revenus des pêcheurs professionnels tirés des seules activités de pêche. Attendu que la plupart des pêcheurs tirent leurs revenus de plusieurs activités professionnelles, il convient de considérer que le calcul du montant forfaitaire annuel basé sur le revenu annuel dérivé des activités de pêche n’est pas chose facile. En particulier, étant donné que le nombre de jours de pêche est enregistré conformément aux dispositions de la politique commune de la pêche et qu’il est donc aisément accessible, la Commission ne voit pas l’intérêt de faire évoluer le système vers un calcul basé sur le revenu annuel.

(49)

Dans la lettre datée du 9 novembre 2004, les autorités suédoises laissent par ailleurs entendre que pour quelque 1 500 pêcheurs, il pourrait demeurer plus avantageux de demander la déduction des frais réels, comme il a été indiqué au point 10. Il est donc très probable que le nouveau régime ne sera appliqué qu’aux 500 pêcheurs qui ne peuvent bénéficier de ces déductions dans le cadre du régime actuel. Dès lors, quand bien même il s’avérerait plus efficace dans son application, le nouveau régime aurait pour effet d’alourdir la charge administrative globale par rapport à la situation actuelle où cette déduction n’est pas accordée à ces pêcheurs.

(50)

Compte tenu de ce qui précède, la Commission estime que le régime constitue une aide d’État incompatible avec l’article 87 du traité CE.

(51)

À la lumière de l’appréciation faite à la section V, la Commission estime que le régime d’aide en cause est incompatible avec le marché commun dans la mesure où il offre certaines déductions fiscales aux pêcheurs professionnels pour hausse du coût de la vie indépendamment du fait que leurs activités de pêche les obligent ou non à passer des nuits hors de chez eux.

A ARRÊTÉ LA PRÉSENTE DÉCISION:

Article premier

Le projet de loi modifiant la loi relative à l’impôt sur le revenu (1999:1229), «Déductions fiscales pour les pêcheurs professionnels», proposé par la Suède, est incompatible avec le marché commun.

La Suède ne peut mettre en œuvre le régime d’aide mentionné au premier paragraphe.

Article 2

Le Royaume de Suède est destinataire de la présente décision.

Fait à Bruxelles, le 8 février 2006.

Par la Commission

Joe BORG

Membre de la Commission


(1)  JO L 83 du 27.3.1999, p. 1. Règlement modifié par l’acte d’adhésion de 2003.

(2)  JO C 258 du 20.10.2004, p. 2.

(3)  Affaire 173/73, Italie contre Commission, Recueil 1974, p. 709, point 17.

(4)  JO C 19 du 20.1.2001, p. 7.

(5)  Affaire C 313/90, Comité international de la rayonne et des fibres synthétiques contre Commission, Recueil 1993, p. I-1125.

(6)  Affaire C 482/99, France contre Commission, Recueil 2003, p. I-1487.