32001D0605

2001/605/CE: Décision de la Commission du 26 juillet 2000 concernant le régime d'aides appliqué par l'Espagne en vue de l'acquisition de véhicules utilitaires dans le cadre de la convention de collaboration conclue le 26 février 1997 entre le ministère de l'industrie et de l'énergie et l'Instituto de Crédito Oficial (Texte présentant de l'intérêt pour l'EEE) [notifiée sous le numéro C(2000) 2465]

Journal officiel n° L 212 du 07/08/2001 p. 0034 - 0041


Décision de la Commission

du 26 juillet 2000

concernant le régime d'aides appliqué par l'Espagne en vue de l'acquisition de véhicules utilitaires dans le cadre de la convention de collaboration conclue le 26 février 1997 entre le ministère de l'industrie et de l'énergie et l'Instituto de Crédito Oficial

[notifiée sous le numéro C(2000) 2465]

(Le texte en langue espagnole est le seul faisant foi.)

(Texte présentant de l'intérêt pour l'EEE)

(2001/605/CE)

LA COMMISSION DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES,

vu le traité instituant la Communauté européenne, et notamment son article 88, paragraphe 2, premier alinéa,

vu l'accord sur l'Espace économique européen, et notamment son article 62, paragraphe 1, point a),

après avoir enjoint les intéressés de présenter leurs observations, conformément aux articles précités(1),

considérant ce qui suit:

I. PROCÉDURE

(1) Par lettre du 26 février 1997, enregistrée le 12 mars 1997 au secrétariat général, l'Espagne a notifié à la Commission la convention de collaboration (ci-après dénommée la "convention") conclue le 26 février 1997 entre le ministère de l'industrie et de l'énergie et l'Instituto de Crédito Oficial (ci-après dénommé "ICO"). Cette notification concernait une ligne de crédit spécial pour l'acquisition de véhicules utilitaires, enregistrée sous le numéro N 171/97.

(2) Cependant, la convention a été notifiée le jour même de son entrée en vigueur, et alors qu'elle prenait effet de manière rétroactive à partir du 1er janvier 1997. Par conséquent, la Commission n'a pu qu'examiner une mesure déjà entrée en vigueur. Ce régime a donc été considéré comme un régime d'aides non notifié, et il a été à nouveau enregistré sous le numéro NN 115/98.

(3) Une demande d'informations complémentaires a été envoyée aux autorités espagnoles le 3 avril 1997. Par lettres des 30 avril, 3 juin, 3 juillet, 10 septembre et, enfin, 9 octobre 1997, ces dernières ont demandé à la Commission un délai supplémentaire pour envoyer les informations requises. Après expiration du dernier délai, fixé au 10 novembre 1997, les autorités espagnoles n'ont transmis aucune autre communication concernant les points examinés. La Commission a donc dû procéder à une appréciation préliminaire de la compatibilité de la convention avec le marché commun, à partir des informations dont elle disposait.

(4) Par lettre du 20 novembre 1997, la Commission a informé l'Espagne de sa décision d'ouvrir à l'égard de cette aide la procédure prévue à l'article 88, paragraphe 2, du traité.

(5) La décision de la Commission d'ouvrir cette procédure a été publiée au Journal officiel des Communautés européennes(2). La Commission a invité les parties intéressées à présenter leurs observations sur l'aide en cause.

(6) Par lettre du 22 février 1999, le gouvernement espagnol a présenté ses commentaires à la Commission, ainsi que des précisions sur l'ouverture de la procédure formelle d'examen. La Commission n'a toutefois reçu aucune observation des parties intéressées.

II. DESCRIPTION DÉTAILLÉE DU RÉGIME D'AIDES

(7) La convention conclue le 26 février 1997 entre le ministère de l'industrie et de l'énergie espagnol et l'ICO établit un régime d'aides à l'acquisition de véhicules utilitaires. Ce régime a pour but d'inciter les personnes travaillant pour leur propre compte et les petites et moyennes entreprises (PME) à remplacer leurs véhicules utilitaires les plus anciens par des véhicules neufs. Ainsi, et au vu du précédent régime d'aides espagnol connu sous le nom de "Plan Renove Industrial", on peut considérer que le régime examiné a pour objectif principal de promouvoir le renouvellement du parc de véhicules utilitaires en Espagne.

(8) A cet effet, l'ICO ouvrira une ligne de crédit de 35 milliards de pesetas espagnoles (210 millions d'euros) dans le but de financer des prêts à l'achat de véhicules neufs. Le ministère de l'industrie et de l'énergie, quant à lui, compensera la différence entre le taux d'intérêt appliqué par l'ICO à ces prêts et le taux normalement appliqué aux transactions financières, à concurrence de 4,5 points. Le montant total de cette intervention de l'État devrait s'élever à 3 milliards de pesetas (18 millions d'euros). En vertu de la convention, le régime d'aides sera appliqué dans le cadre de contrats de médiation passés entre l'ICO et des organismes financiers publics et privés. Ces derniers accorderont à leur tour des prêts aux bénéficiaires du régime, à partir des ressources fournies par l'ICO. La convention autorise également l'ICO à passer des contrats avec d'autres organismes financiers pour l'octroi de crédits aux conditions susmentionnées, mais ces organismes ne bénéficient alors que de la compensation correspondant à la différence entre les taux d'intérêt appliqués. Par lettre du 22 janvier 1999, les autorités espagnoles ont précisé que l'expression "autres organismes financiers" faisait référence aux constructeurs automobiles, avec lesquels des accords de financement pourraient être passés.

(9) Les conditions liées au remboursement du principal, au règlement des intérêts et aux garanties de chaque prêt seront négociées entre les emprunteurs et l'organisme financier concerné. Cela étant, conformément à la convention, les prêts peuvent être accordés pour quatre ans sans période de franchise de remboursement, et représenter jusqu'à 70 % du coût éligible. Ainsi, la subvention de l'État représenterait pour chaque prêt un maximum de 85000 pesetas espagnoles (511 euros) par million de pesetas prêté (6010 euros).

(10) Les bénéficiaires du régime d'aides sont les personnes physiques assujetties à l'impôt sur les activités économiques, ainsi que les entreprises répondant à la définition communautaire de PME, qui acquièrent un véhicule utilitaire neuf ou qui le louent dans l'intention de l'acheter. Par ailleurs, les éventuels bénéficiaires doivent présenter un document délivré par la direction générale du trafic certifiant qu'un autre véhicule utilitaire, immatriculé au moins dix ans (sept s'il s'agit d'un tracteur routier) avant la date de la demande de subvention, a été définitivement retiré de la circulation afin d'être envoyé à la casse. En outre, le véhicule destiné à la casse doit avoir une capacité de charge égale ou supérieure à celle du véhicule acheté.

(11) À cet effet, la convention distingue six catégories de véhicules: A) Tracteurs routiers et camions de plus de 30 tonnes; B) Camions pesant entre 12 et 30 tonnes; C) Camions pesant entre 3,5 et 12 tonnes; D) Modèles dérivés des véhicules de tourisme, fourgonnettes et camions pesant jusqu'à 3,5 tonnes; E) Autobus et autocars; F) Remorques et semi-remorques. Les correspondances entre le véhicule acheté et le véhicule retiré de la circulation sont les suivantes:

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Cas connexes

(12) Dans sa décision 98/693/CE du 1er juillet 1998 concernant le régime espagnol d'aide à l'acquisition de véhicules utilitaires - Plan Renove Industrial (août 1994-décembre 1996)(3), la Commission a examiné un régime d'aides identique en substance au régime qui fait l'objet du présent examen. Dans cette décision, la Commission est arrivée à la conclusion, entre autres, que les aides accordées à des personnes physiques ou à des PME qui se consacrent à des activités autres que des activités de transport à l'échelle exclusivement locale ou régionale, en vue de l'acquisition de véhicules utilitaires de la catégorie D, ne constituaient pas des aides d'État aux fins de l'application de l'article 87, paragraphe 1, du traité, alors que toutes les autres aides accordées conformément à ce régime étaient considérées comme illégales et incompatibles avec le marché commun.

III. COMMENTAIRES DE L'ESPAGNE

(13) Après la décision de la Commission d'ouvrir la procédure définie à l'article 88, paragraphe 2, du traité, le gouvernement espagnol a transmis à la Commission, par lettre du 22 janvier 1999, ses commentaires et les précisions demandées, qui sont résumés ci-dessous.

(14) La convention a été notifiée avant son entrée en vigueur. Bien qu'il y soit stipulé que les crédits accordés à partir du 1er janvier 1997 peuvent être couverts, cette possibilité est exclusivement liée au fonctionnement du budget officiel du ministère de l'industrie et de l'énergie, qui doit correspondre à un exercice budgétaire complet. Aucun crédit n'a été accordé, pas plus qu'il n'aurait pu l'être, avant la signature de la convention, puisque le mécanisme financier du régime se base sur la convention elle-même.

(15) Le seul objectif de la convention est de promouvoir le renouvellement du parc de véhicules utilitaires, quels que soient l'acquéreur du véhicule acheté ou l'utilisation qui en est faite. La convention impose toutefois une condition restrictive essentielle: le véhicule destiné à la casse doit avoir une capacité de charge supérieure ou égale à celle du véhicule acheté. Par conséquent, la convention peut être considérée comme un plan d'aide financière au renouvellement du parc de véhicules utilitaires, qui ne s'accompagne pas d'un accroissement de capacité.

(16) En outre, contrairement à ce qu'affirme la Commission, il ne faut pas considérer que les bénéficiaires seront, dans la pratique, les entreprises se livrant à des activités de transport à titre professionnel, car cela impliquerait que seules certaines entreprises seraient favorisées. Les dispositions de la convention s'étendent à tous les citoyens de l'Union européenne qui retirent un véhicule de la circulation. La convention fixe comme condition l'envoi à la casse d'un véhicule immatriculé en Espagne, mais ce véhicule ne doit pas forcément appartenir à l'acheteur du véhicule neuf. Par conséquent, le régime n'est pas discriminatoire, puisqu'il s'applique de manière égale à tous ses bénéficiaires potentiels. En conclusion, le gouvernement espagnol affirme que le régime prévu par la convention ne s'adresse pas à certaines entreprises en particulier, mais qu'il établit des mesures générales destinées aux personnes physiques et aux PME de tous les secteurs.

(17) L'Espagne soutient, par ailleurs, que le régime d'aides ne fausse pas la concurrence, pas plus qu'il n'affecte de manière sensible les échanges commerciaux entre États membres. Environ 40 % des véhicules remplacés au titre du régime d'aides appartiennent à la catégorie des véhicules utilitaires les plus légers (jusqu'à 3,5 tonnes). Cette catégorie de véhicules a des répercussions économiques quasiment nulles du point de vue du transport.

(18) Le gouvernement espagnol réfute l'opinion selon laquelle seule l'acquisition de véhicules de la catégorie D par des personnes ou des entités exerçant des activités autres que le transport à l'échelle locale ou régionale aura de faibles incidences économiques, tandis que l'acquisition de véhicules appartenant à toutes les autres catégories aura des répercussions notables sur la concurrence. Quitte à établir une distinction, il faut le faire entre les véhicules légers et tous les autres véhicules. Conformément à la réglementation en vigueur en matière d'autorisations, toutes les autorisations de transport accordées à des véhicules légers (véhicules dont le poids maximal autorisé en charge est inférieur à 6 tonnes ou, pour les véhicules dépassant ce chiffre, dont la capacité de charge est inférieure ou égale à 3,5 tonnes) s'appliquent à l'échelon national. Par conséquent, le caractère insignifiant attribué par la Commission aux activités menées pour compte propre au moyen de véhicules de la catégorie D et à l'échelon local doit également concerner, pour le moins, tous les véhicules légers recevant des autorisations nationales. Ces véhicules légers comprennent la totalité de la catégorie D et une partie de la catégorie C. En outre, les véhicules remplacés dans le cadre de la convention représentent moins de 2 % du parc de véhicules espagnol, et quelque 0,03 % du parc de véhicules utilitaires des douze États membres. Par conséquent, les achats subventionnés dans le cadre du régime ont une répercussion insignifiante sur la concurrence.

(19) Les autorités espagnoles estiment que la règle communautaire de minimis(4) s'applique de manière évidente à la convention, ce qui signifie que l'article 87, paragraphe 1, du traité, n'est pas d'application en l'espèce. Les mesures de la convention ne s'adressent pas spécifiquement aux entreprises qui se consacrent à des activités de transport à titre professionnel, pour leur compte propre ou pour le compte d'autrui, mais aux personnes physiques et aux PME de tous les secteurs. En outre, comme le reconnaît la Commission, le montant maximal de l'aide s'élève à 85000 pesetas espagnoles par million prêté.

(20) Enfin, selon l'Espagne, les aides en question pourraient bénéficier de la dérogation prévue à l'article 87, paragraphe 3, point c), du traité, puisque les mesures définies par la convention facilitent le développement des activités de circulation menées au moyen de véhicules utilitaires, sans altérer les conditions des échanges dans une mesure contraire à l'intérêt commun. Ces mesures stimulent les investissements dans des véhicules utilitaires neufs, en vue de restructurer et de moderniser le parc de véhicules sans en augmenter la capacité. Pour cette raison, et étant donné qu'un véhicule neuf est techniquement supérieur à un véhicule plus ancien en termes d'émissions et de sécurité, ces mesures amélioreront la sécurité routière et contribueront à la protection de l'environnement.

IV. APPRÉCIATION DE L'AIDE

Article 87, paragraphe 1, du traité

(21) Conformément à l'article 87, paragraphe 1, du traité, sont incompatibles avec le marché commun, dans la mesure où elles affectent les échanges commerciaux entre États membres, les aides accordées par les États ou au moyen de ressources d'État, sous quelque forme que ce soit, qui faussent ou menacent de fausser la concurrence en favorisant certaines entreprises ou certaines productions.

(22) Dans le cas examiné, la Commission estime que les aides à l'acquisition de véhicules utilitaires prévues par la convention sont accordées au moyen de ressources d'État, puisque les subventions proviennent du budget du ministère de l'industrie et de l'énergie espagnol.

(23) Le gouvernement espagnol affirme que le régime d'aides n'entre pas dans le champ d'application de l'article 87, paragraphe 1, du traité, puisqu'il s'agit d'une mesure générale et non destinée à certaines entreprises. Ce point de vue ne peut toutefois être accepté. On peut admettre que le régime d'aides examiné s'applique, en théorie, indépendamment du secteur d'activité des bénéficiaires potentiels et qu'il s'applique de manière égale à toutes les entreprises ou à toutes les personnes physiques susceptibles d'en bénéficier. Cependant, il est évident que le régime ne concerne que l'acquisition de certains véhicules utilitaires définis dans la convention, c'est-à-dire les tracteurs routiers, les camions ayant un poids maximal autorisé en charge supérieur à 3,5 tonnes, les modèles dérivés des véhicules de tourisme, les fourgonnettes et les camions dont le poids autorisé est inférieur à 3,5 tonnes, les autobus, les autocars, les remorques et les semi-remorques. Compte tenu de la nature des véhicules susceptibles d'être subventionnés au titre de la convention, la Commission estime que l'on peut raisonnablement supposer que les bénéficiaires potentiels seront, de fait, des personnes physiques et morales qui se consacrent à des activités de transport pour leur compte propre ou pour le compte d'autrui. Dans tous les cas, ce régime d'aides ne bénéficiera qu'à des entreprises ou à des travailleurs disposant déjà de l'un des véhicules précités.

(24) En outre, les aides en question prennent la forme d'une aide à l'acquisition de véhicules utilitaires, ce qui implique qu'elle bénéficiera aux acheteurs de ce type de véhicules à travers une réduction de leur coût. La mesure prévue concerne les personnes physiques et les PME, et elle entraîne une réduction des coûts normaux liés à leur activité commerciale; ce faisant, elle leur accorde un avantage par rapport à leurs concurrents. C'est pourquoi les aides octroyées renforcent la position financière des entreprises bénéficiaires en leur accordant de plus grandes possibilités d'action et un avantage concurrentiel par rapport aux grandes entreprises, qui ne peuvent pas bénéficier du régime d'aides en question. Par conséquent, la Commission estime que, dans la pratique, le régime d'aides examiné ne profitera qu'à certaines entreprises.

(25) La libéralisation du secteur du transport routier(5) a ouvert à la concurrence intracommunautaire tant le transport international que le cabotage. Par conséquent, les bénéficiaires des aides - que le transport constitue leur activité principale ou non, peuvent entrer en concurrence avec des entreprises de transport d'autres États membres. On peut donc raisonnablement penser que l'octroi de subventions pour l'acquisition de véhicules utilitaires au titre de la convention affecte les échanges entre États membres et fausse ou menace de fausser la concurrence entre les transporteurs établis en Espagne et ceux qui exercent leurs activités en Espagne tout en étant établis dans d'autres États membres(6). En tout état de cause, ce régime d'aides fausse ou menace de fausser la concurrence parce que les bénéficiaires des subventions se trouvent dans une position privilégiée par rapport aux personnes qui ne peuvent bénéficier des aides.

(26) De même, l'Espagne affirme que la règle de minimis s'applique au régime en question et que ce régime ne serait donc pas couvert par l'article 87, paragraphe 1, du traité. Cette affirmation se base sur l'argument selon lequel le régime n'est pas destiné aux entreprises se consacrant à des activités de transport, mais aux personnes physiques et aux PME de tous les secteurs.

(27) En vertu de la règle de minimis, la Commission estime que l'octroi par les États membres de certaines subventions ne risque pas de fausser la concurrence et les échanges commerciaux entre États membres de manière sensible, compte tenu de leur faible montant, et que ces aides ne sont donc pas couvertes par l'article 87, paragraphe 1, du traité. Toutefois, la règle de minimis exclut expressément le secteur des transports de son champ d'application en raison du fait que, dans ce secteur caractérisé par la présence d'un nombre élevé de petites entreprises(7), des sommes relativement faibles peuvent avoir des répercussions sur la concurrence et les échanges commerciaux entre États membres.

(28) Comme elle le précise au considérant 23, la Commission estime que le régime s'adresse, de fait, aux entreprises qui se consacrent à des activités de transport pour leur compte propre ou pour le compte d'autrui. Par conséquent, elle ne peut pas accepter l'argument du gouvernement espagnol selon lequel la norme de minimis s'applique à ce régime.

(29) Cependant, comme la Commission l'affirme dans sa décision 98/693/CE(8), on peut supposer que, lorsque le bénéficiaire de l'aide mène son activité dans des secteurs autres que celui du transport et à l'échelle exclusivement locale ou régionale, et lorsque la subvention ne porte que sur l'acquisition de petits véhicules utilitaires (catégorie D), utilisés habituellement pour des trajets très courts, cette aide n'affecte pas les échanges entre États membres. On estime donc que ce type d'activités commerciales n'a de répercussions que sur les marchés locaux respectifs des entreprises. En outre, l'incidence de ces services en compte propre sur le marché des transports est insignifiante, car le fait de confier à une entreprise de transports la prestation des services en question ne serait pas viable d'un point de vue économique.

(30) À ce propos, le gouvernement espagnol affirme que les véhicules de la catégorie C (véhicules dont le poids maximal autorisé en charge est inférieur à 6 tonnes ou, pour les véhicules dépassant ce chiffre, dont la capacité de charge est inférieure ou égale à 3,5 tonnes), doivent eux aussi être exclus du champ d'application de l'article 87 du traité puisque ces véhicules reçoivent des autorisations de portée nationale.

(31) Le fait que certains véhicules utilitaires reçoivent une autorisation valable uniquement à l'échelon national n'exclut pas le risque de distorsion de la concurrence. En outre, étant donné la libéralisation de l'accès au cabotage, les opérateurs espagnols dont les activités concernent exclusivement la prestation de services à l'échelon national devront peut-être entrer en concurrence également avec des transporteurs non résidents menant des activités de cabotage en Espagne; par conséquent, ces aides peuvent affecter les échanges entre États membres. Compte tenu de ces circonstances, la Commission estime qu'il est raisonnable de penser que ces effets de distorsion sont inexistants uniquement dans le cas d'opérations de transport normalement effectuées pour compte propre et à l'échelle locale ou régionale par des véhicules de la catégorie D. La Commission n'a donc aucune raison de remettre en cause les conclusions formulées dans sa décision 98/693/CE.

(32) Par conséquent, la Commission estime que les aides octroyées au titre de la convention pour l'acquisition de véhicules utilitaires par des personnes travaillant pour leur propre compte et par des PME, à l'exception de l'aide concernant l'acquisition de véhicules utilitaires de la catégorie D par des personnes exerçant des activités de services pour compte propre uniquement à l'échelle locale ou régionale, constituent des aides au sens de l'article 87, paragraphe 1, du traité. Ces aides sont, en principe, incompatibles avec le marché commun, à moins d'entrer dans le champ d'application de certaines dérogations établies par le traité ou par le droit dérivé.

Article 87, paragraphe 3, point c), du traité

(33) Conformément à l'article 87, paragraphe 3, point c), du traité, peuvent être considérées comme compatibles avec le marché commun les aides destinées à faciliter le développement de certaines activités ou le développement économique de certaines régions, pour autant qu'elles n'altèrent pas les conditions des échanges d'une manière contraire à l'intérêt commun. La jurisprudence prévoit, entre autres, que l'aide ne doit être octroyée que lorsqu'elle est nécessaire pour atteindre des objectifs que les forces du marché ne peuvent permettre d'atteindre à elles seules [arrêt de la Cour du 17 septembre 1980 rendu dans l'affaire 730/79, Philip Morris Holland BV contre Commission des Communautés européennes(9)]. Par ailleurs, en vertu de l'article 6, et en lien avec l'article 3, point g), du traité, la politique de la Commission en matière de concurrence, y compris en ce qui concerne les aides d'État, doit tenir compte des exigences de la protection de l'environnement, en particulier afin de promouvoir le développement durable. Par conséquent, les politiques de la concurrence et de l'environnement ne s'opposent pas, mais doivent au contraire se compléter pour parvenir à un niveau élevé de protection de l'environnement.

(34) Les autorités espagnoles affirment que le régime en question permet de stimuler les investissements dans des véhicules utilitaires neufs, en vue de restructurer et de moderniser le parc de véhicules sans en augmenter la capacité. Pour cette raison, et partant du principe qu'un véhicule neuf est techniquement supérieur à un véhicule plus ancien en tenures d'émissions et de sécurité, l'Espagne considère que les mesures prévues amélioreront la sécurité routière et contribueront à la protection de l'environnement. En conséquence, le régime d'aides en question pourrait bénéficier de la dérogation prévue à l'article 87, paragraphe 3, lettre c), du traité.

(35) La Commission reconnaît que les incitations financières peuvent contribuer au retrait du marché de véhicules utilitaires ayant un bas rendement technique en termes de sécurité ou de protection de l'environnement. Cependant, bien que le remplacement de vieux véhicules par des véhicules neufs puisse, dans une certaine mesure, présenter des avantages du point de vue de l'environnement et de la sécurité, il convient de rappeler que, afin de bénéficier de la dérogation prévue à l'article 87, paragraphe 3, point c), du traité pour des raisons liées à l'environnement et à la sécurité, l'aide à l'acquisition de véhicules doit strictement se limiter aux coûts d'investissement supplémentaires nécessaires pour atteindre des normes supérieures à celles qu'impose la loi ou pour satisfaire aux nouvelles normes obligatoires en matière d'environnement(10).

(36) Or, dans le cas présent, la convention ne prévoit pas de dispositions garantissant que des niveaux plus élevés seront atteints en termes de respect de l'environnement et de sécurité. Au contraire, le régime d'aides établi par la convention prévoit une subvention proportionnelle au prix du nouveau véhicule. Ce système vise donc simplement à favoriser le remplacement des véhicules utilitaires les plus anciens, sans tenir compte des objectifs liés à l'environnement et à la sécurité.

(37) Le fait que la subvention ne soit accordée qu'à condition que le véhicule acheté ait une capacité de charge inférieure ou égale à celle de l'ancien véhicule laisse supposer que le régime d'aides ne donnera pas lieu à une augmentation de la capacité totale du parc. Cependant, il convient de rappeler que, sur un marché tel que celui du transport routier, caractérisé par la surcapacité, l'aide à l'acquisition de tonnage est, en principe, contraire à l'intérêt commun, même si son seul objectif est le remplacement du tonnage existant.

(38) D'autre part, les aides destinées à décharger certaines entreprises des coûts qu'elles devraient normalement supporter dans le cadre de leur gestion courante ou de leurs activités normales sont considérées comme contraires à l'intérêt commun et, par conséquent, n'entrent pas dans le champ d'application de l'article 87, paragraphe 3, point c), du traité(11). Comme le précise le considérant 24, la Commission estime que les aides prévues par le régime examiné favorisent les personnes physiques et les PME en réduisant les coûts normalement liés à leur activité.

(39) Compte tenu de tout ce qui précède, la Commission estime que la dérogation prévue à l'article 87, paragraphe 3, point c), du traité ne peut s'appliquer dans le cas présent. En outre, les autorités espagnoles n'ont pas utilisé cet argument, pas plus qu'elles n'ont montré que les aides en question pouvaient bénéficier d'une des dérogations prévues par le traité ou par le droit dérivé.

(40) Par conséquent, la Commission considère que les aides à l'acquisition de véhicules utilitaires accordées à certaines personnes physiques et à certaines PME, à l'exception du financement destiné à l'acquisition de véhicules utilitaires de la catégorie D par des personnes exerçant des activités de services pour compte propre uniquement à l'échelle locale ou régionale (ce financement ne constituant pas une aide au sens de l'article 87), ne sont pas compatibles avec le marché commun, en vertu de l'article 87, paragraphe 1, du traité.

Article 88, paragraphe 3, du traité

(41) Conformément à l'article 88, paragraphe 3, du traité, la Commission doit être informée, en temps utile pour pouvoir présenter ses observations, des projets visant à octroyer ou modifier des aides. Cet article dispose également que l'État membre intéressé ne peut mettre à exécution les mesures projetées avant que la procédure prévue à l'article 88, paragraphe 2, ait abouti à une décision finale.

(42) Le régime d'aides examiné a été porté à la connaissance de la Commission le jour même de son entrée en vigueur, c'est-à-dire le 26 février 1997. Par conséquent, la Commission n'a pas disposé du temps suffisant pour examiner cette mesure. Il convient, en outre, de signaler que les autorités espagnoles ont enfreint les dispositions de l'article 88, paragraphe 3, du traité en appliquant le régime sans attendre la décision de la Commission.

V. CONCLUSIONS

(43) La Commission conclut de ce qui précède que l'Espagne a agi de manière illégale en mettant à exécution le régime d'aides en cause, en infraction avec les dispositions de l'article 88, paragraphe 3, du traité. La Commission rappelle que toute aide considérée comme incompatible avec le marché commun et accordée conformément au régime examiné doit être récupérée, conformément à l'article 14 du règlement (CE) n° 659/1999 du Conseil du 22 mars 1999 portant modalités d'application de l'article 93 du traité CE(12),

A ARRÊTÉ LA PRÉSENTE DÉCISION:

Article premier

L'aide financière accordée au titre de la convention de collaboration du 26 février 1997 à des personnes physiques assujetties à l'impôt sur les activités économiques ou à des petites et moyennes entreprises exerçant leurs activités dans des secteurs autres que celui du transport, à l'échelle exclusivement locale ou régionale, en vue de l'acquisition de véhicules utilitaires de la catégorie D, conformément à la convention, ne constitue pas une aide au sens de l'article 87, paragraphe 1, du traité.

Article 2

Toutes les autres aides financières accordées au titre de la convention de collaboration du 26 février 1997 à des personnes physiques assujetties à l'impôt sur les activités économiques ou à des petites et moyennes entreprises sont incompatibles avec le marché commun.

Article 3

L'Espagne confirme à la Commission qu'aucune aide n'a été accordée dans le cadre du régime en question après sa date d'expiration, fixée au 31 décembre 1997, et que la mesure d'aide a cessé d'être appliquée.

Article 4

1. L'Espagne adopte toutes les mesures nécessaires pour procéder à la récupération, auprès de leurs bénéficiaires, des aides visées à l'article 2, mises à leur disposition de manière illégale.

2. La récupération s'effectue sans délai et conformément aux procédures prévues par le droit national de l'État membre concerné, pour autant que ces dernières permettent l'exécution immédiate et effective de la présente décision. L'aide à récupérer comprend les intérêts qui courent de la date à laquelle elle a été mise à la disposition des bénéficiaires jusqu'à celle de sa récupération. Les intérêts sont calculés sur la base du taux de référence utilisé pour le calcul de l'équivalent subvention dans le cadre des aides régionales.

Article 5

L'Espagne informe la Commission, dans un délai de deux mois à compter de la notification de la présente décision, des mesures prises pour s'y conformer.

Article 6

Le Royaume d'Espagne est le destinataire de la présente décision.

Fait à Bruxelles, le 26 juillet 2000.

Par la Commission

Loyola De Palacio

Vice-président

(1) JO C 29 du 4.2.1999, p. 14.

(2) Voir note 1 de bas de page.

(3) JO L 329 du 5.12.1998, p. 23.

(4) Communication de la Commission relative aux aides de minimis (JO C 68 du 6.3.1996, p. 9). Voir aussi les directives communautaires relatives aux aides d'État en faveur des petites et moyennes entreprises (JO C 213 du 19.8.1992, p. 2, et JO C 213 du 23.7.1996, p. 4).

(5) Transport de marchandises: règlement (CEE) n° 881/92 du Conseil du 26 mars 1992 concernant l'accès au marché des transports de marchandises par route dans la Communauté exécutés au départ ou à destination du territoire d'un État membre, ou traversant le territoire d'un ou de plusieurs États membres (JO L 95 du 9.4.1992, p. 1) et règlement (CEE) n° 3118/93 du Conseil du 25 octobre 1993 fixant les conditions de l'admission de transporteurs non-résidents aux transports nationaux de marchandises par route dans un État membre (JO L 279 du 12.11.1993, p. 1).Transport de voyageurs: règlement (CEE) n° 684/92 du Conseil du 16 mars 1992 établissant des règles communes pour les transports internationaux de voyageurs effectués par autocars et autobus (JO L 74 du 20.3.1992, p. 1) et règlement (CE) n° 12/98 du Conseil du 11 décembre 1997 fixant les conditions de l'admission des transporteurs non résidents aux transports nationaux de voyageurs par route dans un État membre (JO L 4 du 8.1.1998, p. 10). Il convient de préciser que ce dernier règlement a remplacé le règlement (CEE) n° 2454/92 du Conseil, qui a été annulé par la Cour de justice des Communautés européennes par son arrêt du 1er juin 1994 rendu dans l'affaire C-388/92, Parlement contre Conseil de l'Union européenne (Rec. 1994, p. I-2081). Cependant, les dispositions du règlement (CEE) n° 2454/92 ont continué de s'appliquer jusqu'à l'entrée en vigueur du règlement (CE) n° 12/98.

(6) Les données statistiques disponibles montrent que, entre 1990 et 1995, environ 3 % du cabotage total de la Communauté s'est déroulé en Espagne. Il est donc raisonnable de penser que les transporteurs établis en Espagne entrent, de fait, en concurrence avec les transporteurs non résidents. Voir le rapport sur l'application du règlement n° 3118/93 [COM(98) 0047 final du 4 février 1998).

(7) Les données statistiques confirment la structure fragmentée du marché des transports en Espagne (EU Transport in Figures, Statistical Pocketbook, Commission/Eurostat 1998).

(8) Voir note 3 de bas de page.

(9) Recueil 1980, p. 2671.

(10) Voir les directives communautaires relatives aux aides d'État et destinées à la protection de l'environnement (JO C 72 de 10.3.1994, p. 3).

(11) Décision 98/128/CE de la Commission (JO L 66 du 6.3.1998, p. 18) et arrêt de la Cour du 8 juin 1995 rendu dans l'affaire T-459/93, Siemens SA contre Commission des Communautés européennes, Recueil 1995, p. II-1675.

(12) JO L 83 du 27.3.1999, p. 1.