23.11.2006   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

L 324/11


DÉCISION DE L’AUTORITÉ DE SURVEILLANCE DE L’AELE

N o 55/05/COL

du 11 mars 2005

de clore la procédure formelle d'examen prévue à l’article 1er, paragraphe 2, de la première partie du protocole 3 de l’accord surveillance et Cour de justice concernant la vente de 1 744 appartements de location à Oslo (Norvège)

L'AUTORITÉ DE SURVEILLANCE DE L'AELE

VU l'accord sur l'Espace économique européen (1), et notamment ses articles 61 à 63, et notamment son protocole 26,

VU l'accord entre les États de l'AELE relatif à l'institution d'une Autorité de surveillance et d'une Cour de justice (2), et notamment son article 24, ainsi que l'article 1er de la première partie de son protocole 3,

VU les lignes directrices de l’Autorité (3) relatives à l’application et à l’interprétation des articles 61 et 62 de l’accord EEE, et notamment son chapitre 18B,

APRÈS AVOIR MIS les intéressés en demeure de présenter leurs observations, conformément aux dispositions précitées (4), et vu ces observations,

CONSIDÉRANT CE QUI SUIT:

I.   LES FAITS

1.   Contexte

En mars 2001, la municipalité d’Oslo a décidé de vendre avant la fin du mois de mai 2001 un portefeuille de 1 744 appartements qu'elle donnait en location. Ces appartements étaient loués principalement à des membres du personnel des hôpitaux municipaux. La décision de vendre a été prise après que le gouvernement norvégien a présenté des plans pour la mise en œuvre d’une réforme hospitalière prévoyant notamment que la propriété des hôpitaux de comté devait être cédée à l’État (5).

Par lettre du 18 mai 2001 (doc. No 01-3792-D), l’Autorité a demandé aux autorités norvégiennes de lui transmettre toutes les informations utiles concernant la vente des appartements afin qu'elle puisse évaluer la conformité de la vente à l’article 61 de l’accord EEE et du chapitre 18B, Éléments d’aide d'État dans les ventes de terrains et de bâtiments par les pouvoirs publics, des lignes directrices de l’Autorité concernant les aides d’État.

Le 30 mai 2001, le conseil municipal d’Oslo («Bystyret») a décidé de vendre les appartements, et le 31 mai 2001, la municipalité a signé un contrat avec Fredensborg Boligutleie ANS (ci-après dénommé Fredensborg) pour la vente des appartements. Le prix de vente s’élevait à 715 millions NOK (environ 89 millions d'euros (6)).

Par lettre du 31 mai 2001 (doc. No 01-4004-D), l’Autorité a rappelé aux autorités norvégiennes la «clause de statu quo» de l’article 1er, paragraphe 3, de la première partie du protocole 3 de l’accord Surveillance et Cour de justice et les mesures provisoires du chapitre 6, Informations spécifiques concernant les aides illégales pour des raisons de procédure, des lignes directrices relatives aux aides d’État.

Par lettre du 26 juin 2001 de la mission de la Norvège auprès de l’Union européenne, faisant suivre une lettre du 15 juin 2001 du ministère du commerce et de l’industrie contenant 17 annexes de la municipalité d’Oslo, reçue et enregistrée par l’Autorité le 26 juin 2001 (doc. No 01-5730-A), les autorités norvégiennes ont remis les documents qu’elles considéraient, en accord avec la municipalité d’Oslo, comme contenant les informations disponibles les plus pertinentes afin d’évaluer la conformité de la vente à l’article 61 de l’accord EEE.

Dans les documents de la municipalité d’Oslo (7), la municipalité avance tout d’abord que la vente répond aux conditions fixées par les lignes directrices de l’Autorité concernant les aides d’État (8). Elle soutient qu’une évaluation par un expert indépendant a été réalisée conformément au chapitre 18B.2.2 des lignes directrices relatives aux aides d’État et que la différence de 3,4 % entre le prix de vente et la valeur estimée correspond aux conditions du marché comme le prévoit le chapitre 18B.2.2(b) des lignes directrices relatives aux aides d’État (9).

Deuxièmement, la municipalité fait remarquer que la procédure de vente doit être considérée au regard du manque de temps. Le gouvernement, qui met en œuvre une réforme hospitalière, est à l’origine de cette contrainte temporelle imposée à la municipalité. Selon cette dernière, le nombre de soumissionnaires aurait été moins important que souhaité, et les acheteurs auraient proposé des offres plus basses que celles qu’ils auraient soumises s’ils avaient disposé de plus de temps (10). La municipalité soutient cependant qu’elle a mené la vente dans le cadre d’une procédure d’offre, de la même façon qu’un vendeur privé l’aurait fait.

Par lettre du 20 juillet 2001 adressée aux autorités norvégiennes (doc. No 01-5673-D), l’Autorité a fait savoir qu’elle émettait des doutes quant au respect de la procédure prévue au chapitre 18B.2.2 des lignes directrices relatives aux aides d’État. Elle a en outre exprimé des doutes sur le point de savoir si les estimations de la valeur du marché des appartements avaient été réalisées avant les négociations précédant la vente, si les estimations avaient été réalisées sur la base d’indicateurs du marché et de critères d’évaluation communément acceptés et si un prix de vente inférieur à 3,4 % à l’estimation était conforme aux lignes directrices relatives aux aides d’État. L’Autorité a invité les autorités norvégiennes à faire part de leurs observations à cet égard, observations dont elle tiendrait compte avant de prendre une décision quant à l’ouverture d’une procédure formelle d'examen.

Le ministère du commerce et de l’industrie a fait part de ses observations par télécopie du 27 juillet 2001, reçue et enregistrée par l’Autorité à cette même date (doc. No 01-6026-A). Le ministère a indiqué qu’il ne contestait pas les propos de l’Autorité qui émettait des doutes quant à la conformité de la vente à l’article 61 de l’accord EEE et que d’autres enquêtes «seront réalisées avec pour objectif de veiller à ce que les obligations de la Norvège en vertu de l’article 61 de l’accord EEE soient respectées». Le ministère a informé l’Autorité que le 25 juillet 2001, le préfet d’Oslo et d’Akershus avait décidé que la municipalité d’Oslo ne pouvait pas légalement transférer le droit de propriété avant qu'il ait pris sa décision finale. Une nouvelle évaluation, par un expert, de la valeur des bâtiments serait également réalisée.

Par lettre du 31 juillet 2001 (doc. No 03-829-A), l’Autorité a déclaré qu’elle attendait une notification formelle de la vente conformément à ses lignes directrices relatives aux aides d’État.

2.   La notification

2.1.   Introduction

Par lettre de la mission de la Norvège auprès de l’Union européenne du 10 février 2003 (doc. No 03-829-A), faisant suivre une lettre du ministère du commerce et de l’industrie du 7 février 2003 et une lettre non datée de la municipalité d’Oslo (contenant 31 annexes), toutes reçues et enregistrées par l’Autorité le 11 février 2003, les autorités norvégiennes ont notifié, en vertu de l’article 1er, paragraphe 3, de la première partie du protocole 3 de l’accord Surveillance et Cour de justice, la décision de la municipalité d’Oslo de vendre les appartements. La lettre du 7 février 2003 du ministère du commerce et de l’industrie et la lettre de la municipalité d’Oslo (sans annexes) ont également été envoyées par télécopies, reçues et enregistrées par l’Autorité le 7 février 2003 (doc. No 03-768-A).

La lettre de la municipalité d’Oslo contenait notamment une description des appartements, des informations sur le processus de vente, les descriptions des différentes estimations de la valeur ainsi qu’une évaluation du possible impact transfrontalier.

En ce qui concerne les appartements, la municipalité a formulé certaines observations. Premièrement, en raison de la taille du portefeuille, peu d’acteurs sur le marché étaient des acheteurs potentiels. Cela avait une incidence sur la possibilité de réaliser la vente et également sur les conditions de toute transaction. Deuxièmement, le prix dépendait du moment où les loyers actuels pouvaient être augmentés et de la rapidité de cette augmentation, ce qui était très incertain. Troisièmement, l'insécurité des contrats existants et le manque de familiarisation avec la législation norvégienne en matière de location rendaient un investissement moins attrayant pour les entreprises qui n’étaient pas déjà établies sur le marché norvégien de la location. Quatrièmement, l'âge, la qualité et la situation des appartements étaient très variables, ce qui avait une incidence sur les coûts de rénovation.

En ce qui concerne la procédure de vente (voir point 2.2 ci-dessous), la municipalité a déclaré: «Il n’est pas contesté que les conditions de forme des lignes directrices relatives aux aides d’État n’ont pas été totalement respectées dans le cas présent».

La municipalité a conclu: «La vente a été réalisée dans le cadre d’une procédure d’offre ouverte et inconditionnelle ayant fait l’objet d’une publicité suffisante, bien que la période de mise en vente des appartements ait été plus courte que la période prévue dans les lignes directrices relatives aux aides d’État. Il n’y a cependant aucune raison de penser que la vente a été réalisée selon des modalités qui n'étaient pas de nature à permettre d'atteindre la valeur du marché pour les appartements vendus, ou qui étaient de nature à exclure les investisseurs étrangers. Même si l’Autorité était d’avis que la vente comprend un élément d’aide, nous estimons qu'il y a lieu de conclure que la transaction ne relève pas de l’article 61, paragraphe 1, de l’accord EEE, les échanges au sein de l’EEE n’étant pas affectés.»

2.2.   La procédure de vente

La procédure de vente a été décrite dans la notification reçue par l’Autorité le 11 février 2003, notamment dans ses annexes 1 et 10. L’Autorité comprend que le processus de vente s’est déroulé de la manière suivante:

Le 16 mars 2001, l’agence immobilière indépendante Akershus Eiendom AS (ci-après dénommée Akershus) a été chargée de vendre les appartements en bloc pour le compte de la municipalité d’Oslo.

Akershus a lancé la vente le 2 avril 2001, avec une estimation de la valeur réalisée par Catella Eiendoms-Consult AS (ci-après dénommée Catella), qui a estimé la valeur à 1 143 millions de NOK (voir point 2.3 ci-dessous pour une description de l’estimation). Les six sociétés suivantes ont été contactées directement par Akershus:

OBOS

Selvaag Eiendom AS

Olav Thon Gruppen AS

KLP Eiendom AS

Gjensidige Nor Næringseiendom AS

Eiendomsspar AS.

Neuf autres sociétés, qui sont les suivantes, ont contacté Akershus de leur propre initiative:

Sunndal Collier & Co ASA

Haugen & Damsund AS

Catella Eiendoms-Consult AS

Optimo AS

Investra ASA

Les occupants, représentés par Ole Løken, avocat

Fredensborg eiendomsselskap AS

DTZ Real Consult Eiendomsmegling AS

Studentsamskipnaden i Oslo.

Le 19 avril 2001, un communiqué de presse a rendu publique une offre pour la vente des appartements.

Le 23 avril 2001, un prospectus se rapportant aux appartements a été distribué aux 15 sociétés susmentionnées.

Le 26 avril 2001, OPAK AS (ci-après dénommé OPAK) a remis une estimation concluant que la valeur du marché s’élevait à 795 millions NOK, laquelle a également été distribuée (voir point 2.3 ci-dessous pour une description de l’estimation).

Il a été demandé aux investisseurs de remettre leurs offres au plus tard le 2 mai 2001, et l’appel d’offres a été clôturé le 3 mai 2001. Cinq sociétés ont soumis les offres suivantes au premier tour le 2 mai 2001:

Les occupants, représentés par Ole Løken, avocat:

300 millions NOK

EiendomssparAS:

500 millions NOK

Olav Thon Gruppen AS:

505 millions NOK

Haugen & Damsund AS:

690 millions NOK

Sunndal Collier & Co ASA:

725 millions NOK

Le 3 mai 2001, les cinq sociétés avaient la possibilité de modifier ou d’augmenter leurs offres après avoir été informées de l’offre la plus élevée soumise le 2 mai 2001. Les nouvelles offres suivantes ont été reçues:

Les occupants, représentés par Ole Løken, avocat:

690 millions NOK

Sunndal Collier & Co ASA:

735 millions NOK

La municipalité d’Oslo a choisi d’accepter l’offre de Sunndal Collier & Co ASA et le 8 mai 2001, Sundal Collier & Co ASA, Fredensborg étant son successeur, a signé le contrat.

Après que l’offre avait été acceptée, il a été découvert que deux bâtiments (Internat A og B) liés à l’un des hôpitaux (Ullevål Sykehus) étaient utilisés par Oslo og Akerhus høgskolenes studentsamskipnad (OAS) sans qu’aucun loyer ne soit payé en contrepartie (d’après un contrat que la municipalité n’a pas signé, mais auquel Ullevål Sykehus et OAS ont adhéré, selon lequel OAS notamment s’acquitterait uniquement des charges d’exploitation). Par conséquent, le contrat entre la municipalité et Fredensborg a été modifié sur de nombreux points. Par lettre du 11 mai 2001, la municipalité a demandé à OPAK de tenir compte ces éléments dans leur estimation de la valeur.

Le 14 mai 2001, OPAK a soumis une estimation corrigée, qui s'élevait à 740 millions NOK (voir point 2.3 ci-dessous).

En signant le contrat le 31 mai 2001, la municipalité d’Oslo a vendu les 1 744 appartements en bloc au prix de 715 millions NOK à Fredensborg.

2.3.   Les estimations de valeur soumises dans le cadre de la notification

La notification contenait trois estimations: de Catella (annexe 16 de la notification), une d’OPAK (annexe 18 de la notification) et une de FIGA/Nortakst (annexe 21 de la notification).

—   L’estimation de Catella.

La municipalité d’Oslo a fait appel aux services de Catella le 14 mars 2003 avec pour mission d’estimer la valeur du marché des appartements en tant que portefeuille (tous les appartements vendus en une seule fois au même acheteur). Le rapport a été initialement réalisé afin d’établir un bilan d’ouverture concernant les hôpitaux. L’estimation devait être rendue pour le 30 mars 2001. Catella a déclaré que l’évaluation n'était pas conforme aux règles de l’association norvégienne des experts («Norges Takseringsforbund») et qu’elle avait été menée de manière superficielle (11). Catella a conclu que la valeur du marché s’élevait à 1 143 millions de NOK.

La municipalité d’Oslo a mentionné le fait qu’Akershus estimait que la valeur calculée par Catella ne reflétait pas la valeur du marché. Akershus a en effet estimé que les loyers stipulés étaient trop élevés et les coûts initiaux estimés trop bas. En outre, selon la municipalité d’Oslo, l’estimation réalisée par Catella présentait plusieurs autres erreurs, à savoir:

Le rapport incluait des biens immobiliers non compris dans la vente (Trondheimsveien 235, valeur estimée 61 millions NOK),

L’estimation se basait sur l’hypothèse qu’un loyer maximum pouvait être obtenu dès le premier jour,

L’impact de la clause «en l’état» du contrat de vente n’avait pas été évalué. Une clause «en l’état» implique que l’acheteur assume tous les risques quant aux particularités des appartements achetés, et qu’il doit s’en remettre à ses propres inspections.

Une deuxième société, OPAK, a donc été sollicitée pour réaliser une nouvelle estimation.

—   L’estimation d’OPAK.

OPAK a été engagée par la municipalité d’Oslo pour estimer les appartements en tant que portefeuille. La (première) estimation date du 26 avril 2001 et conclut que la valeur du marché s’élève à 795 millions NOK.

La valeur de vente estimée a été calculée comme suit:

Revenu locatif annuel net en termes de valeur actuelle nette

= 835 millions NOK

– Coût des travaux d’amélioration des appartements

= 150 millions NOK

+ Valeur actuelle nette du «potentiel de hausse» (12) (vente après 10 ans)

= 110 millions NOK

= Valeur de vente

795 millions NOK

La municipalité d’Oslo a demandé à OPAK d’ajuster son estimation pour tenir compte d'une correction de la valeur de certains baux en raison de circonstances factuelles qui n’avaient pas été prises en compte dans l’évaluation originale. Ces corrections factuelles ont amené OPAK à ramener la valeur des actifs à 740 millions NOK. Les ajustements ont été présentés à la municipalité d’Oslo le 14 mai 2001.

—   L’estimation de FIGA et Nortakst DA.

Par lettre du 12 juillet 2001 du ministère du commerce et de l’industrie à la municipalité d’Oslo (13), le ministère a demandé à la municipalité d’entreprendre une nouvelle estimation de valeur. Le ministère a également déclaré que l’estimation de valeur d’OPAK ne remplissait pas les conditions des lignes directrices relatives aux aides d’État (14). Les deux cabinets d'experts FIGA et Nortakst DA, qui forment un comité (15) (ci-après FIGA/Nortakst), ont été engagés par la municipalité pour réaliser une nouvelle estimation. Le ministère du commerce et de l’industrie a donné son accord pour le mandat de l’estimation. FIGA/Nortakst a soumis son rapport le 26 avril 2002, concluant que la valeur du marché des appartements s’élevait à 1 055 millions NOK.

FIGA/Nortakst a utilisé trois méthodes différentes pour estimer la valeur du portefeuille au 30 mai 2001: valeur technique, méthode des flux de trésorerie et méthode de capitalisation nette. Les résultats des calculs basés sur ces trois méthodes sont les suivants:

Valeur technique:

1 448 millions NOK

Méthode des flux de trésorerie:

1 055 millions NOK

Méthode de capitalisation nette:

1 005 millions NOK

FIGA/Nortakst a conclu que la méthode des flux de trésorerie traduisait le mieux ce qu’un investisseur potentiel serait prêt à payer pour le portefeuille. Il a donc été conclu que la valeur du marché des appartements s’élevait à 1 055 millions NOK.

Dans la lettre de la municipalité d’Oslo jointe à la lettre du 7 février 2003 du ministère du commerce et de l’industrie, la municipalité a contesté cette évaluation et a conclu que l’estimation d’OPAK était la plus représentative de la valeur du marché.

2.4.   Demande d’informations complémentaires

Par lettre du 9 avril 2003 (doc. No 03-2133-D), l’Autorité a demandé des informations complémentaires. Dans cette lettre, la direction de la concurrence et des aides d’État a également exprimé des doutes quant à la compatibilité de la vente avec les dispositions sur les aides d’État de l’accord EEE.

Par lettre de la mission de la Norvège auprès de l’Union européenne du 5 juin 2003, faisant suivre deux lettres du 14 mai 2003 du ministère du commerce et de l’industrie et de la municipalité d’Oslo respectivement, reçue et enregistrée par l’Autorité le 10 juin 2003 (doc. No 03-3630-A), les autorités norvégiennes ont communiqué des informations complémentaires. Ces mêmes documents ont été envoyés par fax le 14 mai 2003 du ministère du commerce et de l’industrie, reçu et enregistré par l’Autorité à cette même date (doc. No 03-3127-A).

Le ministère du commerce et de l’industrie n’a pas exposé sa position dans sa lettre du 14 mai 2003, mais a simplement fait suivre la lettre de la municipalité d’Oslo.

Dans la lettre du 14 mai 2003 de la municipalité d’Oslo, la municipalité a mentionné la procédure d’offre inconditionnelle (cf. chapitre 18B.2.1 des lignes directrices relatives aux aides d’État) et a déclaré que: «La municipalité n’affirmera pas que la procédure suivie lorsque les appartements ont été vendus était totalement conforme aux conditions prévues dans les lignes directrices. La vente des appartements n’a pas été rendue publique comme le prévoit la clause 18B.2.1(a) des lignes directrices». Cependant, la municipalité a estimé que la vente avait été réalisée de façon à atteindre l’objectif qui sous-tend la disposition.

En ce qui concerne le chapitre 18B.2.2 des lignes directrices relatives aux aides d’État, vente effectuée sans procédure d’offre inconditionnelle (évaluation par un expert indépendant), la municipalité a maintenu que la vente avait été réalisée conformément à cette disposition. En outre, la municipalité a estimé que l’évaluation réalisée par OPAK (l’estimation de valeur utilisée par la municipalité) avait été obtenue «avant les négociations de vente» et selon «des indicateurs du marché et des critères d’évaluation communément acceptés».

Enfin, «la municipalité ne peut pas, sur la base des arguments présentés par l’Autorité, considérer que le manque de temps dû à la réforme hospitalière ne doit pas être pris en considération pour apprécier si le prix obtenu des appartements se situe en dessous de la valeur du marché».

3.   La décision d’ouvrir la procédure formelle d’examen

Le 11 juillet 2003, l’Autorité a décidé d’ouvrir la procédure formelle d’examen prévue à l’article 1er, paragraphe 2, de la première partie du protocole 3 de l’accord Surveillance et Cour de justice (ci-après «la procédure formelle d’examen») concernant la vente de 1 744 appartements de location à Oslo (16). Dans la décision d’ouverture, l’Autorité décrit la notification, le contexte et la correspondance avec les autorités norvégiennes.

En ce qui concerne les raisons d’ouverture d’une procédure formelle d’examen, l’Autorité a exprimé des doutes sur plusieurs points quant à la conformité de la vente à l’article 61, paragraphe 1, de l’accord EEE. Premièrement, l’Autorité a mentionné la procédure de vente et la vente n’ayant pas été rendue publique conformément aux lignes directrices relatives aux aides d’État, elle a exprimé des doutes quant au respect par la municipalité d’Oslo des objectifs qui sous-tendent les dispositions du chapitre 18B.2.1 des lignes directrices relatives aux aides d’État (vente dans le cadre d’une procédure d’offre inconditionnelle).

Deuxièmement, en ce qui concerne les estimations (Chapitre 18B.2.2 des lignes directrices relatives aux aides d’État), l’Autorité a exprimé des doutes quant au fait que l’évaluation d’OPAK (l’évaluation utilisée par la municipalité) ait été réalisée avant les négociations de vente, qu'elle ait été menée sur la base d'indicateurs du marché et de critères d’évaluation communément acceptés et compte tenu de la contrainte de temps, qu’un effort raisonnable ait été fourni pour vendre les appartements à la valeur du marché. En outre, le prix de vente convenu (et notifié) s’élevait à 715 millions NOK, alors que le résultat d’une nouvelle estimation, demandée par le ministère du commerce et de l’industrie, s’élevait à 1 055 millions NOK (FIGA/Nortakst). Compte tenu de l’importante différence entre les deux évaluations, l’Autorité a exprimé des doutes quant au fait que le prix de vente convenu (715 millions NOK) ait été représentatif de la valeur du marché.

Troisièmement, l’Autorité a mentionné le fait que la municipalité a soutenu que même si l'on concluait que le prix obtenu était inférieur à la valeur du marché, la vente ne relevait pas de l’article 61, paragraphe 1, de l’accord EEE car le marché sur lequel Fredensborg opérait ne contenait pas d’éléments d’échanges transfrontaliers. L’Autorité a jugé que le marché de l’immobilier à Oslo ne se limitait pas aux entreprises locales et que Fredensborg se trouvait réellement, ou potentiellement, en concurrence avec des entreprises semblables en Norvège et dans d’autres États de l’EEE.

Quatrièmement, l’Autorité a exprimé des doutes quant au fait qu’un prix de vente inférieur à la valeur du marché puisse se justifier sur la base du principe de l’investisseur privé dans une économie de marché, c'est-à-dire que la municipalité se soit comportée comme tout autre investisseur privé, compte tenu de la contrainte de temps et de la réforme hospitalière instaurée par le gouvernement.

4.   Observations des autorités norvégiennes concernant la décision d’ouverture

Par lettre du 12 septembre 2003 de la mission de Norvège auprès de l’Union européenne, faisant suivre deux lettres du 11 septembre 2003 du ministère du commerce et de l’industrie et de la municipalité d’Oslo, respectivement, toutes reçues et enregistrées par l’Autorité le 15 septembre 2003 (doc. No 03-6307 A), les autorités norvégiennes ont fait part de leurs observations concernant la décision d’ouverture. Les mêmes lettres ont été envoyées par fax le 11 septembre 2003 du ministère du commerce et de l’industrie, reçus et enregistrés par l’Autorité à cette même date (doc. No 03-6201 A).

La lettre du ministère du commerce et de l’industrie du 11 septembre 2003 n’expose pas de position en la matière, mais se contente de mentionner la lettre de la municipalité d’Oslo.

La municipalité d’Oslo a fait référence à ses arguments précédents et a maintenu, premièrement, que les objectifs qui sous-tendent les dispositions du chapitre 18B.2.1, Vente dans le cadre d’une procédure d’offre inconditionnelle, des lignes directrices relatives aux aides d’État, ont été atteints en dépit du fait que la vente n’a pas été rendue publique conformément aux lignes directrices. La municipalité a soutenu que tous les acheteurs potentiels établis en Norvège avaient été informés de la vente à venir et que l’investissement dans le marché norvégien de la location de logements suscitait peu d’intérêt parmi les investisseurs qui n’étaient pas déjà établis en Norvège.

Deuxièmement, la municipalité a estimé que l’estimation réalisée par OPAK était conforme aux règles d'application du chapitre 18B.2.2, Vente effectuée sans passer par une procédure d’offre inconditionnelle, des lignes directrices relatives aux aides d’État. Ce qui implique notamment que la municipalité considère que l’estimation réalisée par OPAK a été menée «afin de déterminer la valeur du marché sur la base d’indicateurs de marché et de critères d’évaluation communément acceptés» et que l’estimation a été réalisée «avant les négociations de vente». La municipalité a également indiqué que la différence entre le prix de vente (715 millions NOK) et l’estimation d’OPAK (740 millions NOK) était conforme au chapitre 18B.2.2(b), «Marge», des lignes directrices relatives aux aides d’État (17).

Troisièmement, la municipalité a estimé qu’il y avait des raisons d’être très sceptique quant à la nouvelle évaluation de FIGA/Nortakst, qui a conclu que la valeur s’élevait à 1 055 millions NOK. La municipalité a déclaré que FIGA/Nortakst avait basé son évaluation sur une augmentation annuelle de 4 % du prix des biens immobiliers au cours des 10 prochaines années, alors que les prix ont chuté de 5,2 % entre le 2e trimestre 2002 et le 2e trimestre 2003. La municipalité a jugé que l’évaluation de FIGA/Nortakst n'était pas fiable.

Quatrièmement, la municipalité constate que «l’Autorité n'a pas défini le marché en cause des appartements de location et elle ne voit pas comment l’Autorité peut conclure que Fredensborg Boligutleie ANS se trouve réellement ou potentiellement en concurrence avec des entreprises semblables en Norvège ou dans d’autres États de l’EEE».

5.   Observations de tiers

La décision d’ouvrir la procédure formelle d'examen a été publiée le 4 décembre 2003. L’Autorité a reçu des observations d'un seul tiers. Par lettre du 19 décembre 2003, reçue et enregistrée par l’Autorité le 5 janvier 2004 (doc. No 03-8980-A), Fredensborg (l’acheteur) a fait part de ses observations. Fredensborg a fait référence à une lettre précédente envoyée le 18 février 2003, reçue et enregistrée par l’Autorité le 20 février 2003 (doc. No 03-1040-A), dans laquelle deux nouvelles évaluations étaient soumises. Ces évaluations étaient:

—   Le rapport de BER, Bygg og eiendomsrevisjon AS.

BER, Bygg og eiendomsrevisjon AS (ci-après BER), représentée par M. Arnt K. Svendsen, a été invitée par Fredensborg à estimer la valeur du portefeuille et à formuler des observations concernant les estimations de Catella, OPAK et FIGA. Le rapport de BER a été remis le 13 janvier 2003.

BER a basé son estimation sur trois scénarios différents:

Retour sur investissement sur la base des revenus locatifs:

630 millions NOK

Retour sur investissement sur la base de la location pendant 10 ans, par la suite ventes individuelles sur une période de 3 ans:

796,5 millions NOK

Comme susmentionné, mais vente de tous les appartements séparément la 11e année:

851,5 millions NOK

Moyenne:

759,3 millions NOK

BER a conclu que la valeur du marché se situait entre 700 et 800 millions de NOK.

BER a également évalué les trois estimations précédentes réalisées par Catella, OPAK et FIGA. L’estimation de Catella était, selon BER, une valeur théorique basée sur l’hypothèse que les appartements étaient loués au prix du marché dès le premier jour. L’estimation d’OPAK n’a pas tenu compte du fait que les loyers étaient moitié du prix normal du marché au moment de l’offre, d’après BER. En outre, la perte future due aux contrats actuels au-dessous du prix du marché n’a pas été prise en considération dans les calculs. Les pertes de loyers pendant la période de rénovation n’ont pas été calculées elles non plus. Aucune estimation des plus-values ou des risques n’a été incluse dans les évaluations. Selon BER, l’estimation de FIGA/Nortakst était également une évaluation théorique de la valeur «en exploitation». Aucune estimation des plus-values ou des risques n’a été réalisée. Cela ne reflète pas la façon dont les offreurs se comportent normalement sur ce type de marché. La qualité technique des appartements, les pertes de revenus locatifs pendant la période de rénovation, etc. n’avaient pas été calculés.

—   Le rapport de Agdestein Takst & Eiendomsrådgivning AS.

Agdestein Takst & Eiendomsrådgivning AS (ci-après Agdestein), représentée par M. Pål Agdestein, a été invitée, en novembre 2002, par Fredensborg à analyser et formuler des observations sur les trois évaluations susmentionnées et à donner son avis sur la valeur du marché du portefeuille. M. Agdestein travaillait auparavant pour Catella, et était responsable du rapport soumis par ce cabinet. Agdestein a soumis son rapport à Fredensborg le 17 février 2003.

Agdestein a présenté des observations détaillées sur les trois rapports précédents et a trouvé plusieurs hypothèses qui selon lui devraient être corrigées. Sur la base de nouvelles hypothèses «corrigées», Agdestein a conclu que la valeur ajustée du rapport Catella s’élavait à 744 millions NOK, celle du rapport d’OPAK à 560 millions NOK et celle du rapport de FIGA/Nortakst à 560 millions NOK (ou à 760 millions NOK si la valeur de la division restait à 200 millions NOK) (18).

Agdestein a conclu que la valeur du marché du portefeuille (en mai 2001) se situait entre 670 millions NOK et 800 millions NOK.

Le prix payé par Fredensborg se situant vers le milieu de toutes les estimations, Fredensborg a considéré que cela confortait la position selon laquelle Fredensborg avait payé le prix du marché. Fredensborg pensait qu’il était important «de souligner la différence entre la “valeur” maximale théorique en cas de bonne mise en oeuvre et de bonne réalisation d’un projet immobilier et ce qu'un investisseur est disposé à investir dans un projet spécifique qui comporte un risque élevé». Fredensborg a jugé que ce risque n’avait pas été évalué dans les estimations de FIGA/Nortakst ou de Catella.

6.   Réponses des autorités norvégiennes aux observations des tiers

Par lettre du 5 mars 2004 (réf. No 258313), l’Autorité a soumis les observations de Fredensborg aux autorités norvégiennes, et les a invitées à répondre dans un délai d’un mois.

Par lettre du 23 mars 2004 de la mission de Norvège auprès de l’Union européenne, faisant suivre une lettre datée du 22 mars 2004 du ministère du commerce et de l’industrie, toutes deux reçues et enregistrées le 24 mars 2004 (réf. No 260564), les autorités norvégiennes ont demandé à «l’Autorité d’accepter que les observations norvégiennes soient soumises le 10 mai 2004.» Les autorités norvégiennes ont fait allusion à une conciliation en instance entre le ministère de la santé et la municipalité d’Oslo concernant la propriété des appartements. La lettre du 22 mars 2004 du ministère du commerce et de l’industrie a également été envoyée par fax le 22 mars 2004, reçu et enregistré à la même date (réf. No 260191).

Par lettre du 25 mars 2004, l’Autorité a accepté de prolonger le délai jusqu’au 10 mai 2004 (réf. No 260732).

Par télécopie du 23 avril 2004 du ministère du commerce et de l’industrie, reçue et enregistrée à la même date (réf. No 279122), le ministère a remis un exemplaire de l’accord («Protokoll») entre la municipalité d’Oslo et l’État norvégien concernant la propriété des appartements dépendant des hôpitaux.

Par lettre du 13 mai 2004 de la mission de Norvège auprès de l’Union européenne, faisant suivre une lettre du 10 mai 2004 du ministère du commerce et de l’industrie, toutes deux reçues et enregistrées le 15 mai 2004 (réf. No 281488), les autorités norvégiennes ont déclaré qu’elles «n’ont pas d'observations à présenter sur les observations des tiers reçues par l’Autorité». La lettre du 10 mai 2004 du ministère du commerce et de l’industrie a également été envoyée par fax le 10 mai 2004, reçu et enregistré le 11 mai 2004 (réf. No 281014).

7.   Rapport d’expertise de Eirik Holm AS

En 2004, l’Autorité a chargé Eirik Holm AS (ci-après Holm) d'un rapport sur la valeur du marché des 1 744 appartements vendus par la municipalité d’Oslo. Le contrat faisait référence au fait que l’Autorité, au cours de la procédure, avait reçu 5 estimations/rapports, mais que les conclusions de ces rapports divergeaient tellement les unes par rapport aux autres que l’Autorité avait toujours des doutes sur le point de savoir si le prix de vente de 715 millions NOK était représentatif de la valeur du marché. L’Autorité voulait donc savoir si les précédentes évaluations/estimations étaient basées sur des principes communément acceptés pour l’évaluation des biens immeubles et dans quelle mesure les hypothèses et les marges d'appréciation utilisées pour les calculs étaient raisonnables. L’Autorité voulait également savoir si les modalités de la procédure de vente avaient influencé le prix de vente.

Holm est un ingénieur agréé indépendant, fort d’une grande expérience du marché immobilier à Oslo. Pour exécuter le contrat, Holm a fait appel aux services de l’ingénieur agréé Trygve Fossen et de l’ingénieur Sven P. Meyer, deux experts possédant une longue expérience. En outre, Me Johan Hveding, du cabinet juridique Grette DA, a apporté son aide relativement aux questions concernant les contrats de location.

Le rapport de Holm daté du 24 février 2005 a été reçu et enregistré par l’Autorité le 1er mars 2005 (réf. No 311859).

7.1.   Les précédentes estimations/rapports

L’étude de Holm portant sur les cinq évaluations/rapports précédents a notamment révélé certaines différences concernant les méthodes de calcul, les estimations des niveaux des loyers selon le marché, les besoins/coûts de rénovation et les plus-values potentielles de la division. Holm a également trouvé des erreurs factuelles directes, des omissions d’informations et d'une manière générale des inspections/états des lieux superficiels des biens immobiliers. Après la correction des erreurs factuelles évidentes, de gros écarts séparaient toujours les évaluations, attribués aux différences d'appréciation. Holm a indiqué que ce n’était pas exceptionnel lorsqu'il existe plus d’une estimation. Il a ajouté que l’on pouvait s’attendre à ce que les différences soient plus prononcées dans le cas présent en raison du caractère unique du portefeuille mis en vente, sans précédent en Norvège. Holm est parvenu à la conclusion suivante: «Il en résulte que l’application utile des évaluations dans le contexte dans lequel leur application est envisagée est limitée». Ses conclusions concernant les différentes évaluations par rapport à ses propres conclusions et hypothèses sont les suivantes:

—   L’estimation de Catella

Catella a mené une inspection superficielle qui doit être vue comme une mise à jour d'une évaluation antérieure (1999-2000). Une inspection de l'extérieur a été réalisée, avec un échantillonnage aléatoire de certains espaces intérieurs. Selon Holm, une inspection/évaluation approfondie aurait dû être réalisée afin de fournir une meilleure base à l’évaluation. Holm a conclu que le résultat de l’évaluation était beaucoup trop élevé, notamment en raison du fait que: le niveau estimé du marché de la location, selon lui, était trop élevé d'environ 10 %; Catella n’a pas tenu compte des contrats de location actuels et du fait que les loyers réels se situeraient bien au-dessous des loyers du marché pendant un certain nombre d’années; Catella a fait montre de bien trop d’optimisme concernant le nombre d’appartements loués en permanence (il y aurait toujours des appartements inoccupés en raison de changements de locataires, etc.); les coûts de rénovation initiaux n’étaient pas assez élevés (environ 60 millions NOK). Holm a également mentionné un bien immobilier compris dans le portefeuille puis retiré de celui-ci ainsi que le fait que Catella n’a pas tenu compte des restrictions de la clause «en l’état» du contrat, qui réduisent la valeur.

—   L’estimation d’OPAK

OPAK a inspecté la majeure partie des bâtiments de l’extérieur, mais n’a inspecté que dix appartements/studios à l'intérieur. Selon Holm, cela ne suffit pas pour évaluer correctement les justes coûts de rénovation et d’entretien. Selon Holm, tous les biens auraient dû faire l’objet d’une inspection, et une inspection plus approfondie des espaces intérieurs aurait dû être réalisée pour fournir une meilleure base d'évaluation. Holm a notamment conclu que les loyers du marché avaient été sous-estimés. À l’inverse, OPAK n’a pas tenu compte des délais à respecter pour porter les loyers au niveau du marché. L’évaluation des plus-values potentielles de la division était basée sur la vente d'un nombre trop faible d'appartements, la valeur ajoutée étant de ce fait trop basse, et les coûts de rénovation initiaux étaient trop bas d’environ 30 millions NOK. Holm conclut que ces éléments ont influencé l’évaluation d'une manière à la fois négative et positive et qu’il était donc difficile d’estimer l’effet net.

—   L’évaluation de FIGA/Nortakst

Holm a rappelé qu’il avait été déclaré que FIGA/Nortakst avait réalisé des inspections/états des lieux d’un nombre suffisant d’appartements pour s’acquitter de sa mission. Cependant, aucune information n’a été fournie en ce qui concerne la mesure et l’étendue des inspections/états des lieux. Holm soutient notamment que les estimations des plus-values potentielles de la division étaient considérablement surestimées, la méthode de calcul de la valeur de la division étant inacceptable, entre autres, parce qu’elle était basée sur la valeur technique et l’hypothèse d’une forte augmentation de la valeur vénale. Holm déclare qu’il trouve «ces calculs dépourvus de toute pertinence pour la valeur de la vente et le potentiel de division.» Il indique également que les revenus locatifs des deux bâtiments ont été erronément intégrés jusqu’en 2008; des loyers du marché qui étaient un peu trop élevés ont été utilisés dans les calculs sans tenir compte des coûts de rénovation nécessaires. (L’estimation de ces coûts par Holm est bien plus élevée que celle de FIGA/Nortakst); il était totalement irréaliste de baser les calculs sur la vente de tous les logements (appartements) en une seule année; et aucune réduction de valeur n'a été prévue pour tenir compte de la clause «en l’état». La somme de ces facteurs indique que la valeur du marché stipulée était bien trop élevée.

—   BER

BER n’a pas examiné ni dressé d’état des lieux des biens immobiliers, mais établit ses conclusions d’après les évaluations et les estimations déjà présentées par Catella, OPAK et FIGA/Nortakst et applique sa propre expertise. Les conclusions de Holm concernant le rapport de BER sont les suivantes: les charges d’exploitation du propriétaire étaient trop élevées; BER n’a pas procédé à ses propres inspections/états des lieux des biens immobiliers, ce qui peut avoir un effet à la fois sur l’estimation des coûts de rénovation et sur le calcul du loyer du marché; BER a utilisé des chiffres erronés pour les revenus locatifs actuels (56 millions NOK au lieu de 42,5 millions NOK par an); le temps prévu pour augmenter les loyers actuels jusqu’au niveau du marché est insuffisant. La somme de ces divergences aboutit à une estimation trop élevée, due à la surestimation des revenus locatifs.

—   Agdestein

M. Agdestein, qui était précédemment au service de Catella et responsable des évaluations/estimations à cette époque, a selon Holm dressé un rapport exhaustif sur les évaluations/estimations fournies par Catella, OPAK et FIGA/Nortakst. Dans ses observations sur les différentes évaluations/estimations, Agdestein a fourni une estimation des corrections qui devraient, selon lui, être apportées afin de parvenir à un résultat plus juste que celui des évaluations/estimations soumises. Ces corrections reflétaient non seulement les erreurs factuelles dues à la non-disponibilité d’informations au moment de l’évaluation, la prise en considération insuffisante de la situation actuelle, des erreurs et des fautes directes etc., mais aussi des divergences plus ou moins importantes par rapport aux propres estimations d’Agdestein. Holm a considéré cela comme étant un mélange de corrections objectives et concrètes et de stipulations et d’estimations plus subjectives.

7.2.   Évaluation de Holm de la valeur du marché du portefeuille

L’évaluation de Holm a été réalisée d’après tous les documents soumis à l’Autorité par les autorités norvégiennes. L’aperçu sous forme de tableaux des biens immobiliers réalisé par la municipalité, qui fait partie du prospectus de vente et du contrat de vente, a constitué la principale source des données concernant les biens immobiliers. En outre, Holm a reçu des informations concernant les contrats de location des bâtiments liés à deux des hôpitaux (Ullevål et Aker), notamment en ce qui concerne le nombre de contrats à durée indéterminée.

Pour pouvoir déterminer la condition technique des bâtiments et le besoin de rénovation aussi précisément que possible, des inspections/états des lieux extérieurs et intérieurs ont été réalisés dans tous les bâtiments en compagnie du personnel hospitalier. Environ 70 appartements de tous types et dans des états différents ont été inspectés. En outre, des statistiques de location et des statistiques de vente ont été obtenues pour 2001, lesquelles ont constitué la base de l’estimation des loyers sur le marché et du calcul du potentiel de division. Tous les calculs, évaluations et estimations ont, dans la mesure du possible, été basés sur le 1er trimestre de 2001 sans tenir compte d’évolutions ultérieures du prix et du marché.

Holm a estimé le portefeuille à 752 772 286 de NOK. Le résultat a été obtenu de la manière suivante (tous les montants sont calculés aux valeurs de 2001):

Valeur créée par les revenus locatifs de mi-2001 à mi-2011:

465 882 460 NOK

+ valeur nette de la division et des revenus locatifs en 2001:

470 676 826 NOK

– Déductions pour les privilèges et limites contractuelles:

30 000 000 NOK

– Déductions pour les rénovations initiales au cours de la période 2001-2005:

153 787 000 NOK

= Valeur totale du portefeuille:

752 772 286 NOK

Les calculs de Holm se basent notamment sur le fait que, la municipalité ayant la priorité pour louer, le portefeuille doit être considéré comme un objet de location pendant toute la période de dix ans, à compter de 2001, tandis que le portefeuille sera vendu (division) sur une période de trois ans après 2011.

La valeur créée par les revenus locatifs de mi-2001 à mi-2011 est la valeur capitalisée des revenus nets réels estimés par an jusqu’en 2011. Ces revenus doivent normalement augmenter d'année par année pour atteindre les loyers du marché pour toutes les locations en 2011. L’augmentation est due à l'effet combiné d’une augmentation du pourcentage d’appartements loués à 95 % (défini comme entièrement loué), d’une augmentation du loyer du marché en 2005 pour les contrats à durée déterminée, d’une augmentation du niveau moyen des loyers en 2006, et des loyers du marché en 2011 pour les contrats à durée indéterminée. La non-location pour rénovation des logements a été prévue.

La valeur nette de la division et des revenus locatifs en 2001 se compose de trois éléments: a) valeur des ventes/division en 2011. Cette valeur apparaît dans les années 2011-2014 et est ramenée à 2001, b) valeur capitalisée du flux de revenus locatifs ultérieurs de la partie non divisée, ramenée à 2001 et c) déductions pour les coûts de rénovation/amélioration nécessaires pour obtenir le niveau requis pour la division, effectuées dans les années 2011-2013 et ramenées à 2001.

Les déductions pour les privilèges et restrictions contractuelles concernent le paragraphe 8 — la clause «en l’état» — du contrat entre la municipalité d’Oslo et Fredensborg. Holm a jugé que cela représentait un risque pour l’acheteur. Cela s’applique notamment relativement aux informations que l’on trouve dans le système municipal concernant les biens immobiliers, mais qui n’ont pas été portées à la connaissance de l’acheteur, comme les contrats de location, les revenus locatifs et les caractéristiques de la zone, ainsi que la condition technique des bâtiments. Holm a estimé raisonnable de considérer que la clause «en l’état» a une certaine influence financière. Compte tenu de la taille du portefeuille, Holm a fixé la déduction de valeur à 30 millions NOK, c’est-à-dire aux alentours de 4 % de la valeur estimée du portefeuille.

Les déductions pour les coûts initiaux de rénovation pendant la période 2001-2005 correspondaient aux travaux nécessaires pour pouvoir louer les logements aux loyers du marché. Les coûts sont intervenus dans les années 2001-2005 et ont été rapportés aux valeurs de 2001.

Holm a également réalisé une «analyse de sensibilité» pour voir comment les différentes hypothèses influenceraient le prix. L’analyse révèle notamment que si le prix estimé par m2 des appartements vendus dix ans après l’acquisition était de 24 000 NOK, et non de 26 000 NOK comme estimé pour calculer la valeur, cet «ajustement» à lui seul aboutirait à une valeur de portefeuille de 720 millions NOK au lieu de 753 millions NOK. Une réduction supplémentaire de 2 % par exemple des revenus locatifs donnerait une valeur inférieure au prix de vente obtenu. Holm parvient donc à la conclusion que le prix de vente obtenu de 715 millions NOK est tellement proche de son estimation qu’au vu des marges d’incertitude, on peut estimer qu’il représente le «prix correct», à savoir le prix du marché.

Holm a également étudié la procédure de vente et la façon dont sa réalisation a influencé le prix de vente. Holm a notamment jugé que les directives de l’Autorité n’avaient pas été strictement respectées, et il remet notamment en question la courte période de mise en œuvre et l’exposition limitée au marché. Cependant, Holm a notamment conclu que: Tout bien considéré, nous pensons que le vendeur a eu un nombre suffisant de parties intéressées pour qu'il y ait vraiment concurrence entre celles-ci pour obtenir un prix «correct et équitable». Il n’existe cependant pas de vérités absolues en la matière. Une vente réalisée deux mois avant ou après aurait pu donner un résultat totalement différent. L’intérêt personnel de l’acheteur pour l'objet et la volonté de l'acquérir est le facteur ultime de décision en ce qui concerne le prix, mais comme on le sait, la motivation peut varier.

Il convient de noter qu’un prix plus élevé aurait vraisemblablement pu être obtenu en vendant les biens immobiliers en tant qu’unités individuelles. Dans ce cas de figure, le vendeur aurait été contraint de rythmer la distribution des biens immobiliers en fonction de ce que le marché aurait pu absorber comme blocs résidentiels, et aurait de ce fait eu une perspective totalement différente en ce qui concerne les revenus. Nous considérons ce cas de figure comme purement théorique, et de ce fait, nous n’avons pas approfondi cette possibilité.

Pour conclure, nous dirions que le vendeur a selon toute probabilité obtenu le prix de vente dans le cadre d'un véritable appel d’offres sur le marché norvégien, c’est-à-dire proche de ce que l’on peut appeler un prix équitable et correct. Par définition, il n’existe pas de prix de marché définissable pour un portefeuille de ce type puisqu’il n’existe aucun précédent préalable auquel se référer. Le prix obtenu doit par conséquent être considéré comme le prix du marché à tous égards.

8.   Dernière correspondance avec les autorités norvégiennes

Par lettre du 22 décembre 2004 (réf. No 303758), l’Autorité a demandé des informations complémentaires aux autorités norvégiennes concernant la procédure de conciliation entre l’État et la municipalité d’Oslo, la position des autorités norvégiennes quant à savoir si la vente comportait une aide d’État ou non et des informations plus détaillées concernant la procédure de vente. L’Autorité a également informé les autorités norvégiennes qu’elle avait engagé un expert indépendant, Eirik Holm AS, pour évaluer notamment les précédentes estimations. L’Autorité a également demandé aux autorités norvégiennes d’accepter la prolongation du délai pour prendre une décision définitive jusqu’à fin février 2005.

Par lettre de la mission de Norvège auprès de l’Union européenne du 13 janvier 2005, faisant suivre deux lettres du 10 janvier 2005 du ministère de la modernisation et du ministère de la santé et des affaires sociales, respectivement, reçues et enregistrées par l’Autorité le 14 janvier 2005 (réf. No 305352), les autorités norvégiennes ont soumis des informations complémentaires. Elles ont accepté la prolongation du délai jusqu’à fin février 2005 pour que l’Autorité puisse prendre une décision définitive. Les lettres du ministère de la modernisation et du ministère de la santé et des affaires sociales ont également été envoyées par fax le 10 janvier 2005 (réf. No 304852).

Par lettre du 25 février 2005 adressée aux autorités norvégiennes (réf. No 311394), l’Autorité a demandé une prolongation du délai de prise de décision définitive jusqu’au 11 mars 2005.

Par télécopie du 7 mars 2005 du ministère de la modernisation (réf. No 312289), les autorités norvégiennes ont accepté la prolongation du délai jusqu’au 11 mars 2005 pour que l’Autorité puisse prendre une décision définitive.

II.   APPRÉCIATION

1.   Introduction

Comme susmentionné, les autorités norvégiennes ont notifié à l’Autorité la vente de 1 744 appartements de location de la municipalité d’Oslo à Fredensborg au prix de 715 millions NOK (environ 89 millions d'euros). L’Autorité a décidé d’ouvrir la procédure formelle d’examen en ce qui concerne la vente et a appelé les parties intéressées à faire part de leurs observations.

Se référant au chapitre 18B des lignes directrices relatives aux aides d’État, l’Autorité a émis des doutes quant au fait que la vente se soit déroulée d'une manière telle que l'on puisse exclure automatiquement toute aide d’État. En outre, les valeurs estimées des biens immobiliers divergeaient de façon assez importante et faisaient douter que les prix de vente convenus aient reflété les prix du marché.

2.   La procédure de vente

Le chapitre 18B, Éléments d’aide dans les ventes de terrains et de bâtiments par les pouvoirs publics, des lignes directrices relatives aux aides d’État, décrit deux procédures de vente qui indiquent aux États de l’AELE la marche à suivre pour les ventes de terrains et de bâtiments de façon à exclure automatiquement toute aide d’État. Les deux procédures sont décrites, respectivement, au chapitre 18B.2.1 (procédure d’offre inconditionnelle) et au chapitre18B.2.2 (évaluation par un expert indépendant).

2.1.   Procédure d’offre inconditionnelle

Dans le chapitre 18B.2.1(1) des lignes directrices, il est précisé que «Une vente de terrains et de bâtiments au plus offrant ou à l’unique offrant, dans le cadre d’une procédure d’offre ouverte et inconditionnelle ayant fait l’objet d’une publicité suffisante, qui s’apparente à une vente aux enchères, s’effectue, par définition, à la valeur du marché et, partant, ne recèle pas d’aide d’État. Le fait qu’une évaluation différente du terrain et du bâtiment ait été effectuée préalablement à la procédure d’offre, par exemple à des fins comptables ou pour fournir un projet d’offre minimale initiale, n’entre pas en ligne de compte».

«On considère qu'une offre a fait l'objet d'une “publicité suffisante” lorsqu'elle a paru à plusieurs reprises pendant suffisamment longtemps (au moins deux mois) dans la presse nationale, les revues immobilières ou d'autres publications appropriées et qu'elle a été annoncée par des agents immobiliers s'adressant à un large éventail d'acquéreurs potentiels, de telle sorte que tous ces acheteurs potentiels ont ainsi pu être informés. Les projets de vente de terrains et de bâtiments qui, en raison de leur valeur élevée ou d'autres caractéristiques, sont susceptibles d'intéresser des investisseurs opérant à l'échelon européen ou international, devraient être annoncés dans des publications ayant une diffusion régulière au niveau international. Ces offres devraient également être diffusées par des agents qui sont en contact avec une clientèle européenne ou internationale.»

La procédure de vente des appartements n’était pas conforme aux dispositions susmentionnées concernant la procédure d’offre inconditionnelle. L’offre n’a pas fait l’objet «d’une publicité parue à plusieurs reprises pendant suffisamment longtemps (au moins deux mois)». En outre, il ne peut être exclu qu’une vente de cette importance aurait pu attirer des investisseurs opérant à une échelle européenne ou internationale. Aucune annonce n’a été passée dans des publications ayant une diffusion régulière au niveau international et aucune offre n’a été diffusée par des agents qui sont en contact avec une clientèle européenne ou internationale.

La municipalité d’Oslo a elle-même déclaré (lettre du 14 mai 2003) que: «La municipalité n’affirmera pas que la procédure suivie lorsque les appartements ont été vendus était totalement conforme aux conditions prévues dans les lignes directrices. La vente des appartements n’a pas été rendue publique comme le prévoit la clause 18B.2.1(a) des lignes directrices», et dans une lettre précédente (voir point I.1 et note de bas de page 10 ci-dessus; voir également déclarations similaires de la municipalité au point 2.1 susmentionné), que la contrainte de temps imposée pendant la procédure d’offre aurait pu résulter en un nombre d’offres moins important que souhaité et que les soumissionnaires n’auraient pas soumis des offres aussi basses s’ils avaient disposé de plus de temps.

Au vu des ces différents facteurs, l’Autorité conclut que le processus de vente n’a pas été réalisé conformément aux principes prévus au chapitre 18B.2.1 des lignes directrices relatives aux aides d’État.

2.2.   Vente effectuée sans passer une procédure d’offre inconditionnelle (évaluation par un expert indépendant)

En ce qui concerne les ventes effectuées sans passer une procédure d’offre inconditionnelle, le chapitre 18B2.2, des lignes directrices relatives aux aides d’État prévoit que «une évaluation devrait être effectuée par un ou plusieurs expert(s) indépendant(s) chargé(s) d'évaluer les actifs, préalablement aux négociations précédant la vente, pour fixer la valeur marchande sur la base d'indicateurs du marché et de critères d'évaluation communément acceptés. Le prix du marché ainsi fixé représente le prix d'achat minimal qui peut être accepté sans que l'on puisse parler d'aide d'État».

et également:

«Par “valeur du marché”, on entend le prix auquel les terrains et les bâtiments pourraient être vendus, à la date de l'évaluation, sous seing privé entre un vendeur consentant et un acheteur non lié, étant entendu que le bien a fait l'objet d'une offre publique sur le marché, que les conditions de celui-ci permettent une vente régulière et que le délai disponible pour la négociation de la vente est normal compte tenu de la nature du bien».(souligné par nous).

Enfin, le chapitre 18B.2.2. prévoit que: «Si, après que des efforts raisonnables ont été accomplis pour vendre le terrain et le bâtiment à la valeur du marché, il apparaît clairement que le prix fixé par l'expert ne peut être obtenu, un écart pouvant aller jusqu'à 5 % par rapport à ce prix peut être jugé conforme aux conditions du marché».

La municipalité d’Oslo semble soutenir que la vente s’est déroulée conformément aux dispositions susmentionnées.

L’Autorité conteste cette position, pour les raisons suivantes: premièrement, aucune des évaluations par un expert, réalisées avant la vente finale (en l’occurrence les rapports de Catella et d’OPAK), ne s’est basée sur des indicateurs du marché et des critères d’évaluation communément acceptés ou n’a été réalisée suffisamment de temps avant les négociations de vente (concernant ces points, voir le point 3.1 ci-dessous). Deuxièmement, aucune des valeurs du marché établies dans les rapports de Catella et d’OPAK n’a été prise comme le prix d’achat minimal pour la vente finale. Troisièmement, les autorités norvégiennes n’ont pas justifié qu’elles avaient accompli des efforts raisonnables pour vendre les appartements aux valeurs déterminées dans ces rapports, ce qui aurait justifié une réduction du prix de vente de 5 %.

Par conséquent, la vente n’a pas été réalisée conformément aux dispositions du chapitre 18B.2.2. des lignes directrices relatives aux aides d’État.

2.3.   Procédure lorsque l’aide ne peut pas être automatiquement exclue

La conclusion est donc que ni la procédure d’offre inconditionnelle ni la procédure basée sur une évaluation par un expert indépendant n’ont été respectées. Par conséquent, l’existence d’une aide d’État ne peut être exclue. Cependant, nul ne peut tirer la conclusion inverse selon laquelle il y a nécessairement aide d’État lorsque les procédures prescrites n’ont pas été suivies. Il se pourrait quand même que le prix de vente reflète la véritable valeur du marché.

Les lignes directrices prévoient que lorsque les procédures prescrites ne sont pas suivies, l’État concerné est tenu de notifier la vente à l’Autorité afin que celle-ci établisse l’existence éventuelle d'une aide d’État. Les autorités norvégiennes ont notifié la vente. Il appartient à l’Autorité de conclure si la vente des 1 744 appartements dépendant des hôpitaux à Oslo comportait une aide d’État. En d’autres termes, l’Autorité doit évaluer si le prix de vente de 715 millions NOK reflète ou non la valeur du marché des biens immobiliers.

3.   Article 61, paragraphe 1, de l’accord EEE

Pour qu’une mesure puisse être considérée comme une aide d’État au sens de l’accord EEE, elle doit remplir les conditions de l’article 61, paragraphe 1, de l’accord qui dispose que:

«Sauf dérogation prévue par le présent accord, sont incompatibles avec le fonctionnement du présent accord, dans la mesure où elles affectent les échanges entre les parties contractantes, les aides accordées par les États membres de la CE ou par les États de l’AELE ou accordées au moyen de ressources d’État, sous quelque forme que ce soit, qui faussent ou qui menacent de fausser la concurrence en favorisant certaines entreprises ou certaines productions.»

Cela implique que les conditions suivantes doivent être remplies cumulativement:

1)

l’aide est accordée par «Les États membres de la CE, les États de l’AELE ou accordée au moyen de ressources d’État, sous quelque forme que ce soit»;

2)

l’aide «fausse ou menace de fausser la concurrence»;

3)

l’aide «favorise certaines entreprises ou certaines productions» (c’est-à-dire que la mesure confère un avantage à un bénéficiaire spécifique); et

4)

l’aide «affecte les échanges entre les parties contractantes».

La première condition susmentionnée concerne toutes les aides financées par des ressources publiques, notamment les aides accordées par des organismes locaux ou régionaux. La notion de ressources d’État est très large et comprend notamment l’assistance financière accordée par les pouvoirs locaux et régionaux (19). Il apparaît donc clairement que toute aide de la municipalité d’Oslo relèverait de la notion «Ressources d’État». Une vente par la municipalité de terrains et de bâtiments publics au-dessous de la valeur du marché, dans l'hypothèse où les trois autres conditions de l’article 61, paragraphe 1, sont également remplies, implique qu’une aide d’État serait accordée à l’acheteur.

Dans le cas présent, toute aide accordée à Fredensborg favoriserait cette entreprise et serait donc spécifique. En outre, pour être classée comme aide d’État, la vente des appartements doit avoir conféré un avantage à Fredensborg. La vente comporterait un avantage et de ce fait impliquerait une aide d’État si les appartements étaient vendus au-dessous de la valeur du marché. Dans le cas où la vente à Fredensborg aurait été effectuée au-dessous de la valeur du marché, il serait également nécessaire de démontrer que la concurrence a été faussée et que les échanges entre les parties contractantes ont été affectés.

3.1.   Le prix de vente final reflète-t-il la valeur du marché?

Il existe plusieurs estimations concernant la valeur du marché des appartements, qui aboutissent à des résultats différents. Le prix le plus bas est 670 millions NOK et le plus haut s’élève à 1 143 millions NOK. Au vu des ces résultats divergents, l’Autorité juge nécessaire d’examiner ces évaluations en détail, afin de déterminer laquelle de ces évaluations est la plus représentative de la valeur du marché des appartements.

La première évaluation de Catella, remise le 30 mars 2001, est parvenue à une valeur de 1 143 millions NOK. Selon la municipalité, cette évaluation a inclus des biens immobiliers qui n’étaient pas concernés par la vente, ce qui a contribué à augmenter la valeur finale. En ce qui concerne l’évaluation de Catella, l’Autorité fait également observer que l’inspection des biens immobiliers semble avoir été plutôt superficielle relativement à une évaluation précédente, ce qui, entre autres, peut avoir mené à une sous-estimation des coûts de rénovation. En outre, les obligations contractuelles qui limitent la possibilité d’augmenter les loyers n’ont pas été suffisamment prises en considération avec pour conséquence une sous-estimation des revenus locatifs. Catella elle-même a déclaré que l’évaluation n'était pas conforme aux critères d’évaluation déterminés. Selon l’agent de vente, Akershus Eiendom, ainsi que la municipalité d’Oslo, la valeur estimée ne pouvait pas être considérée comme reflétant la valeur du marché. L’Autorité partage cet avis. En outre, l’impact de la clause «en l’état» n’a pas été évalué dans l’étude de Catella. Au vu de ces erreurs, l’Autorité conclut que l’évaluation de Catella ne peut être utilisée comme une base suffisamment valable pour déterminer la valeur du marché.

La seconde évaluation d’OPAK remise le 26 avril 2001 a estimé la valeur à 795 millions NOK. Il est important de noter que même si OPAK a inspecté la majorité des bâtiments extérieurement, tous les bâtiments n’ont pas été inspectés. En outre, OPAK a seulement examiné 10 appartements sur 1 744. En ce qui concerne l’évaluation d’OPAK, il a déjà été mentionné ci-dessus qu’une inspection inappropriée des biens immobiliers (tous les bâtiments n’ont pas été inspectés, et seulement 10 appartements sur 1 744), ne peut représenter une base correcte pour une estimation de la valeur. Cette base est insuffisante pour estimer les chiffres corrects de rénovation et d’entretien. En outre, certaines limites contractuelles concernant des obligations n’ont pas été suffisamment prises en considération. Si certains de ces éléments peuvent s’équilibrer mutuellement, l’Autorité ne peut néanmoins conclure que l’évaluation d’OPAK se base sur des hypothèses suffisamment exactes. Enfin, l’évaluation révisée d’OPAK a été achevée alors que le contrat avait déjà été signé.

En ce qui concerne l’évaluation de FIGA/Nortakst, il semble que l’inspection des biens immobiliers ait été appropriée, bien que cela n’apparaisse pas clairement à la lecture du rapport. L’estimation du bénéfice par une division ultérieure des appartements semble être largement surestimée pour plusieurs raisons. Les prix de vente se basent sur des valeurs dites techniques (coût des nouveaux bâtiments avec déductions pour l’âge et l’utilisation) et non sur les loyers du marché. Il n’est pas raisonnable de supposer que les prix des appartements rénovés seront aussi élevés que ceux qui se basent sur les calculs de la valeur technique. En outre, les valeurs techniques sont gonflées dans le sens où elles sont supposées augmenter plus vite que les estimations raisonnables de l’inflation. Aucune réduction n’a été réalisée pour tenir compte de la clause «en l’état» du contrat. De plus, certains loyers actuels sont surestimés par rapport à ce que prévoient les contrats de location actuels. Les coûts de rénovation semblent être nettement sous-estimés et il est également assez peu réaliste de s’attendre à ce que tous les appartements soient vendus en une seule année. Au vu des ces éléments, l’Autorité se demande dans quelle mesure l’évaluation de FIGA/Nortakst reflète la valeur du marché.

Selon l’Autorité, BER, tout comme certains des autres experts, n’a pas suffisamment tenu compte du temps nécessaire à l’ajustement des loyers aux loyers du marché et a surestimé le loyer pour 2001. Ce facteur peut cependant être en partie contrebalancé par une estimation relativement élevée des charges d’exploitation des propriétaires. BER n’a réalisé aucune inspection des biens immobiliers. Par conséquent, ce rapport soulève également des doutes quant au fait que la valeur du marché à laquelle il aboutit soit suffisamment fiable.

Agdestein n’a réalisé aucune inspection des biens immobiliers mais a étudié les autres estimations menées par Catella (où il a participé à l’estimation de la valeur), OPAK et FIGA/Nortakst. Dans les observations qu’il formule concernant ces rapports, il a signalé plusieurs insuffisances, comme des fautes directes, mais également des informations qui n’étaient pas disponibles au moment des autres évaluations.

Holm estime la valeur du marché des appartements à environ 753 millions NOK. Holm a inspecté tous les biens immobiliers, de l’extérieur comme de l’intérieur. Environ 70 appartements du portefeuille ont été inspectés en compagnie du personnel hospitalier et des informations ont été recueillies auprès du personnel. Un entretien minimum ayant été réalisé de 2001 jusqu’à l’inspection début janvier 2005, Holm juge que les informations recueillies sont représentatives de la situation de 2001. Des estimations de coûts détaillées ont été réalisées concernant les travaux d’amélioration (fenêtres, balcons, salles de bain, etc.). Les hypothèses concernant l’évolution des loyers et le potentiel économique d’une future division et vente d’une partie du portefeuille semblent raisonnables, notamment pour ce qui est des facteurs contractuels se rapportant aux locations et de l’évolution future du marché de l’immobilier. La méthode de calcul de la valeur actuelle des flux de revenus et de dépenses futurs se base sur des principes bien établis et sur l’utilisation d’un facteur de réduction proche de celui utilisé dans les autres estimations de valeur. L’Autorité ne voit aucune raison de remettre en question la méthodologie appliquée par Holm ni les hypothèses retenues pour déterminer la valeur du marché, gardant à l’esprit qu’il existe toujours des incertitudes liées à de telles hypothèses.

3.2.   Peut-on prouver que le prix de vente final se situait au-dessous de la valeur du marché?

Au vu de ce qui précède, on ne peut conclure qu’une seule estimation représente par définition la valeur du marché qu’un acheteur serait prêt à accepter. Une valeur du marché acceptable, après avoir étudié le marché, se situe plutôt dans une marge raisonnable. Selon l’Autorité, il n’existe pas de réponse évidente quant à la mesure de cette marge, laquelle pourrait être différente selon les cas. Nous devons garder à l’esprit que la transaction présentait certaines particularités en raison de la taille de l’objet de la vente, des obligations contractuelles, de la division et de la vente futures des appartements.

Comme susmentionné, les estimations de valeur, comme dans le cas présent, se basent sur une série de paramètres incertains, comme le montre, notamment, l'analyse de sensibilité à laquelle Holm fait référence et qui illustre comment les différentes hypothèses peuvent influencer le prix de manière considérable.

L’analyse de sensibilité révèle que si le prix estimé par m2 des appartements vendus dix ans après l’acquisition s’élevait à 24 000 NOK, et non à 26 000 NOK comme estimé pour calculer la valeur, cet «ajustement» à lui seul donnerait un portefeuille d’une valeur de 720 millions au lieu de 753 millions. Une réduction de 50 points de base du rendement requis serait du même ordre de grandeur. Une réduction supplémentaire par exemple de 2 % des revenus locatifs donnerait une valeur inférieure à celle du prix de vente obtenu.

Au vu de ces incertitudes, il s’avère impossible d’identifier avec suffisamment de fiabilité un élément d’aide dans la transaction. Le fait que le prix de vente final puisse se situer dans une marge raisonnable est également démontré par la procédure d’offre organisée par la municipalité d’Oslo et dirigée par Akershus. Six sociétés ont été contactées et neuf autres ont contacté Akershus de leur propre initiative. Six offres ont été soumises. Des investisseurs professionnels et des agences immobilières figuraient parmi les soumissionnaires. Les deux offres finales ont été faites à 690 millions NOK et 735 millions NOK. Bien que la procédure d’offre n’ait pas été conforme aux lignes directrices relatives aux aides d’État (voir ci-dessus), elle fournit tout de même certaines indications sur ce que le marché norvégien est prêt à offrir pour un tel bien immobilier. Ce «test de marché» et son résultat montrent dans une certaine mesure la marge raisonnable dans laquelle le prix du marché peut se situer.

Par conséquent, l’Autorité considère que le prix de vente de 715 millions NOK pour le bien en cause se situe dans une marge raisonnable par rapport à la valeur estimée par Holm à 753 millions NOK.

4.   Conclusion

L’Autorité ne peut établir que la vente de 1 744 appartements dépendant d’hôpitaux par la municipalité d’Oslo à Fredensborg contenait une aide d’État au sens de l’article 61, paragraphe 1, de l’accord EEE.

La municipalité d’Oslo a soutenu que même si le prix obtenu se situait au-dessous de la valeur du marché, la vente ne constituerait pas une aide au sens de l’article 61, paragraphe 1, de l’accord EEE étant donné que le marché sur lequel Fredensborg opère ne contient pas d’éléments d’échanges transfrontaliers. Au vu de la conclusion de l’Autorité selon laquelle il ne peut être établi que la valeur du marché n’a pas été obtenue dans la vente concernée, l’Autorité ne voit aucune raison d'examiner les effets sur les échanges et la concurrence.

A ADOPTÉ LA PRÉSENTE DÉCISION:

1)

Les conditions de la vente proposée de 1 744 appartements de location de la municipalité d’Oslo à Fredensborg Boligutleie ANS ne constituent pas une aide d’État au sens de l’article 61, paragraphe 1, de l’accord EEE.

2)

La procédure formelle d'examen est close.

3)

La Norvège est destinataire de la présente décision.

4)

Le texte en langue anglaise de la présente décision est le seul qui fait foi.

Fait à Bruxelles, le 11 mars 2005.

Par l'autorité de surveillance de l'AELE

Hannes HAFSTEIN

Président

Einar M. BULL

Membre du Collège


(1)  Ci-après dénommé «accord EEE».

(2)  Ci-après dénommé accord «surveillance et Cour de justice».

(3)  Règles de procédure et de fond dans le domaine des aides d’État (lignes directrices relatives aux aides d’État), adoptées et publiées par l’Autorité de surveillance de l’AELE le 19 janvier 1994. Publiées au Journal officiel L 231 du 3.9.1994. Les lignes directrices ont modifiées pour la dernière fois le 15 décembre 2004.

(4)  Déc. no 113/03/COL. La décision d’ouvrir la procédure formelle d’examen a été publiée au JO C 294 du 4.12.2003, p. 13, et dans le supplément EEE no 61, à la même date, p. l.

(5)  Ot.prp. nr 66 (2000-2001) Om lov om helseforetak mm. (helseforetaksloven). La proposition de loi a été présentée au parlement le 6 avril 2001.

(6)  NOK/EUR = 7,9952 en mai 2001 selon la Banque centrale norvégienne.

http://www.norges-bank.no/stat/valutakurser/kurs_mn1.html

(7)  Notamment l’annexe 1 à la lettre du ministère du commerce et de l’industrie du 15 juin 2001: lettre du 5 juin 2001 de la municipalité d’Oslo au ministère du commerce et de l’industrie.

(8)  La phrase correspondante est la suivante en norvégien: «Oslo Kommune er av den oppfatning at salget e r innenfor rammen av de krav som stilles i ESAs retningslinjer».

(9)  Des descriptions plus détaillées de la procédure de vente et des estimations de valeur figurent au point 2 ci-dessous.

(10)  La phrase correspondante est la suivante en norvégien: «Dette tidspresset kan ha ført til at kretsen av interesserte ble mindre enn ønskelig, og/eller at kjøperne la inn lavere bud enn de ville gjort i en situasjon med bedre tid».

(11)  La phrase est la suivante en norvégien: «Denne “portøfaljetakst” følger ikke Norges Takseringsforbunds instruks for boligtaksering. Den er gjort på et generelt og relativt overfladisk grunnlag.»

(12)  Vente de 40 000 m2 (division) après 10 ans en termes de valeur actuelle nette.

(13)  La lettre est jointe en tant qu’annexe 20 à la notification du 7 février 2003.

(14)  La phrase correspondante est la suivante en norvégien: «Verdivurderingen foretatt av OPAK kan slik vi ser det ikke sies å tilfredsstille de krav som stilles til takst i ESAs retningslinjer».

(15)  Le mot «takstnemd» est utilisé en norvégien.

(16)  Voir note de bas de page no 4.

(17)  Le chapitre 18B.2.2(b) prévoit notamment que: «Si, après que des efforts raisonnables ont été accomplis pour vendre le terrain et le bâtiment à la valeur du marché, il apparaît clairement que le prix fixé par l'expert ne peut être obtenu, un écart pouvant aller jusqu'à 5 % par rapport à ce prix peut être jugé conforme aux conditions du marché»

(18)  La division signifie que les appartements sont mis en vente au lieu d’être loués.

(19)  Voir par exemple affaire CEJ 78/76, Steinike und Weilig contre Allemagne, recueil 1977, p. 595 ou affaire CEJ 248/84, Allemagne contre Commission, recueil 1987, p. 4013, point 17.