92001E3399

QUESTION ÉCRITE E-3399/01 posée par Nelly Maes (Verts/ALE) à la Commission. Exploitation du brevet couvrant le gène du cancer du sein.

Journal officiel n° 172 E du 18/07/2002 p. 0052 - 0053


QUESTION ÉCRITE E-3399/01

posée par Nelly Maes (Verts/ALE) à la Commission

(21 décembre 2001)

Objet: Exploitation du brevet couvrant le gène du cancer du sein

Voici quelque sept ans, Miread, entreprise américaine, a identifié le code génétique d'un gène du cancer du sein, obtenant ainsi le droit de breveter le gène découvert. Si les centres génétiques belges ne contestent pas ce droit, ils s'élèvent contre le fait que cette entreprise prétend exploiter sans vergogne le brevet en question. Elle entend faire respecter strictement son monopole. Chacun, sauf elle, devrait renoncer à effectuer des tests en rapport avec le gène du cancer du sein. Ainsi, cette entreprise serait la seule à pouvoir dépister, chez la femme, la présence de gènes modifiés du cancer du sein, et ce contre, bien entendu, une rémunération confortable. Aussi le service aux patients régresserait-il considérablement, un test ADN faisant partie intégrante de tout diagnostic clinique. Pour le Parlement européen, une méthode diagnostique ne saurait être brevetée. Par ailleurs, l'entreprise utilise un test informatisé qui, selon un porte-parole de l'Institut Curie français, ne permet de découvrir que de 10 à 20 % des anomalies des gènes.

La Commission n'estime-t-elle pas que la liberté de la recherche doit être garantie? Ne pense-t-elle pas que l'objectif de la recherche médicale doit toujours être l'intérêt général, qui ne peut en tant que tel être subordonné à des considérations commerciales?

Dans le cas contraire, juge-t-elle acceptable les coûts élevés qu'implique l'utilisation d'informations couvertes par un brevet, coûts qui font obstacle à la recherche dans le domaine diagnostique et thérapeutique?

N'estime-t-elle pas qu'un système d'exploitation monopolistique du gène va ainsi se mettre en place?

Dans ce cas, quelles mesures compte-t-elle prendre pour s'opposer à ce précédent?

Réponse donnée par M. Bolkestein au nom de la Commission

(27 mars 2002)

L'Honorable Parlementaire attire l'attention de la Commission sur un brevet délivré par l'Office européen des brevets portant sur un test de dépistage précoce du cancer du sein chez la femme.

À titre liminaire, il convient d'observer que suite aux recours formés par des tiers contre ce brevet, il appartiendra aux chambres d'opposition de l'Organisation européenne des brevets de se prononcer sur la validité du brevet délivré et sur la portée à lui conférer.

La Commission souhaiterait insister sur le fait que la directive 98/44 n'entend pas remettre en cause le principe général d'exemption de la recherche existant dans la législation des États membres de la Communauté européenne. Compte tenu des informations dont dispose la Commission et selon ce principe, les actes accomplis dans un cadre privé et à des fins non commerciales, ainsi que les actes accomplis à titre expérimental qui porte sur l'objet de l'invention brevetée ne sont pas constitutifs d'actes de contrefaçon La directive 98/44 relative à la protection juridique des inventions biotechnologiques(1) n'a pas dérogé à ce principe et rappelle que la directive n'a pas pour objet d'organiser un contrôle de

la recherche et de l'utilisation ou la commercialisation de ses résultats, les législations nationales, communautaires ou internationales en la matière restant d'application. De même, le projet de règlement sur le brevet communautaire(2) reprend le concept de la liberté de la recherche.

En tout état de cause, si les résultats des recherches sont commercialisés et que lesdits résultats utilisent une technique déjà brevetée, une licence de dépendance devra être obtenue auprès du titulaire du brevet. En cas de refus de celui-ci d'accorder une licence à des conditions raisonnables, une licence obligatoire pourrait être délivrée selon les dispositions nationales applicables dans les législations des États membres.

En outre, il semble opportun de rappeler qu'il existe dans la plupart des législations nationales des États membres de la Communauté européenne le principe de l'exception d'usage antérieur qui permet à toute personne qui avant le dépôt du brevet(3) utilisait déjà l'invention dans la Communauté européenne ou faisait des préparatifs effectifs et sérieux de poursuivre ladite utilisation ou d'utiliser l'invention comme envisagée dans les préparatifs. Une fois encore, le projet de règlement sur le brevet communautaire reprend sans ambages ce principe.

Enfin, la Commission entend étudier la question de l'étendue du champ de protection d'inventions portant sur des séquences géniques de manière approfondie et communiquera ses observations au Conseil et au Parlement dans le cadre des rapports prévus par la directive 98/44.

(1) JO L 213 du 30.7.1998, p. 13.

(2) COM(2000) 412 final.

(3) Ou lorsqu'une priorité est revendiquée, avant la date de priorité de la demande sur la base de laquelle le brevet est délivré.