CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. MANUEL CAMPOS SÁNCHEZ-BORDONA

présentées le 25 mai 2023 ( 1 )

Affaire C‑86/22

Papier Mettler Italia Srl

contre

Ministero della Transizione Ecologica (già Ministero dell’Ambiente e della Tutela del Territorio e del Mare),

Ministero dello Sviluppo Economico

en présence de

Associazione Italiana delle Bioplastiche e dei Materiali Biodegradabili e Compostabili – Assobioplastiche

[demande de décision préjudicielle formée par le Tribunale amministrativo regionale per il Lazio (tribunal administratif régional pour le Latium, Italie)]

« Renvoi préjudiciel – Directive 98/34/CE – Obligation des États membres de notifier les projets de règles techniques à la Commission – Effets du défaut de notification d’une règle technique – Directive 94/62/CE – Harmonisation des législations – Environnement – Emballages et déchets d’emballages – Sacs en plastique légers – Réglementation nationale prévoyant des règles techniques plus restrictives que celles prévues par la réglementation de l’Union – Article 114, paragraphes 5 et 6, TFUE – Effet direct de la directive 94/62 – Responsabilité pour le préjudice causé par un État membre à un particulier »

1.

Le succès commercial des sacs en plastique légers est dû à leur poids négligeable et à leur résistance à la dégradation. Leur prolifération, dès lors qu’ils ne sont utilisés qu’une fois ou à quelques reprises et qu’ils sont facilement mis au rebut, crée un grave problème de pollution ( 2 ). Beaucoup de ces sacs échappent aux chaînes de gestion des déchets et finissent par s’accumuler dans la nature, en particulier sous forme de déchets marins ( 3 ).

2.

La présente demande de décision préjudicielle amène la Cour à examiner la compatibilité avec le droit de l’Union d’une réglementation italienne qui a interdit l’utilisation sur le territoire italien de sacs en plastique légers présentant certaines caractéristiques, alors que la directive 94/62/CE ( 4 ) a autorisé leur commercialisation dans tous les États membres.

I. Le cadre juridique

A.   Le droit de l’Union

1. La directive 94/62

3.

Aux termes de l’article 1er de la directive 94/62 (« Objet ») :

« 1.   La présente directive a pour objet d’harmoniser les mesures nationales concernant la gestion des emballages et des déchets d’emballages afin, d’une part, de prévenir et de réduire leur incidence sur l’environnement des États membres et des pays tiers et d’assurer ainsi un niveau élevé de protection de l’environnement et, d’autre part, de garantir le fonctionnement du marché intérieur et de prévenir l’apparition d’entraves aux échanges et de distorsions et restrictions de concurrence dans la Communauté.

[...] »

4.

L’article 2 de cette directive (« Champ d’application ») dispose :

« 1.   La présente directive s’applique à tous les emballages mis sur le marché dans la Communauté et à tous les déchets d’emballages, qu’ils soient utilisés ou mis au rebut par les industries, les commerces, les bureaux, les ateliers, les services, les ménages ou à tout autre niveau, quels que soient les matériaux dont ils sont constitués.

[...] »

5.

L’article 3 (« Définitions ») ( 5 ) prévoit que, aux fins de la directive 94/62, on entend par :

« [...]

1 ter)

“sacs en plastique”, les sacs, avec ou sans poignées, composés de plastique, qui sont fournis aux consommateurs dans les points de vente de marchandises ou de produits ;

1 quater)

“sacs en plastique légers”, les sacs en plastique d’une épaisseur inférieure à 50 microns ;

[...] »

6.

Conformément à l’article 4, paragraphe 1 bis, (« Prévention ») ( 6 ) de la directive 94/62 :

« Les États membres prennent des mesures visant à réduire durablement la consommation de sacs en plastique légers sur leur territoire.

Ces mesures peuvent comprendre le recours à des objectifs nationaux de réduction, le maintien ou la mise en place d’instruments économiques, ainsi que des restrictions à la commercialisation par dérogation à l’article 18, à condition que ces restrictions aient un caractère proportionné et non discriminatoire.

[...] »

7.

En vertu de l’article 9 (« Exigences essentielles ») de la directive 94/62 :

« 1.   Les États membres veillent à ce que, trois ans après l’entrée en vigueur de la présente directive, un emballage ne puisse être mis sur le marché que s’il répond à toutes les exigences essentielles définies par la présente directive, y compris à l’annexe II.

[...] »

8.

L’article 16 (« Notification ») de cette directive dispose :

« 1.   Sans préjudice de la directive 83/189/CEE [du Conseil, du 28 mars 1983, prévoyant une procédure d’information dans le domaine des normes et réglementations techniques (JO 1983, L 109, p. 8)], les États membres notifient à la Commission, avant leur adoption, les projets des mesures qu’ils prévoient d’adopter dans le cadre de la présente directive, à l’exception des mesures de nature fiscale, mais y compris les spécifications techniques liées à des mesures fiscales qui favorisent le respect de ces spécifications techniques, afin qu’elle puisse les examiner à la lumière des dispositions existantes en appliquant dans chaque cas la procédure prévue par ladite directive.

2.   Si la mesure envisagée concerne également une question d’ordre technique au sens de la directive [83/189], l’État membre concerné peut préciser que la notification effectuée au titre de la présente directive vaut également au titre de la directive [83/189]. »

9.

En vertu de l’article 18 (« Liberté de mise sur le marché ») de la directive 94/62 :

« Les États membres ne peuvent faire obstacle à la mise sur le marché, sur leur territoire, d’emballages conformes à la présente directive. »

10.

L’annexe II de la directive 94/62 fixe les « [e]xigences essentielles portant sur la composition et le caractère réutilisable et valorisable (notamment recyclable) des emballages ».

2. La directive 98/34/CE

11.

L’article 1er de la directive 98/34/CE ( 7 ) dispose :

« Au sens de la présente directive, on entend par :

[...]

12)

“projet de règle technique” : le texte d’une spécification technique, ou d’une autre exigence ou d’une règle relative aux services, y compris de dispositions administratives, qui est élaboré dans le but de l’établir ou de la faire finalement établir comme une règle technique et qui se trouve à un stade de préparation où il est encore possible d’y apporter des amendements substantiels.

[...] »

12.

Conformément à l’article 8 de la directive 98/34 :

« 1.   Sous réserve de l’article 10, les États membres communiquent immédiatement à la Commission tout projet de règle technique, sauf s’il s’agit d’une simple transposition intégrale d’une norme internationale ou européenne, auquel cas une simple information quant à la norme concernée suffit. Ils adressent également à la Commission une notification concernant les raisons pour lesquelles l’établissement d’une telle règle technique est nécessaire, à moins que ces raisons ne ressortent déjà du projet.

[...]

5.   Lorsqu’un projet de règle technique fait partie d’une mesure dont la communication à l’état de projet est prévue par d’autres actes communautaires, les États membres peuvent effectuer la communication prévue au paragraphe 1 au titre de cet autre acte, sous réserve d’indiquer formellement qu’elle vaut aussi au titre de la présente directive.

L’absence de réaction de la Commission, dans le cadre de la présente directive, sur un projet de règle technique ne préjuge pas la décision qui pourrait être prise dans le cadre d’autres actes communautaires. »

B.   Le droit italien. Le décret ministériel du 18 mars 2013

13.

L’article 1er du Decreto ministeriale del 18 marzo 2013 (décret ministériel du 18 mars 2013) ( 8 ) définit les sacs pour l’enlèvement des marchandises comme des « sacs mis à disposition des consommateurs dans le point de vente, à titre onéreux ou gratuit, pour l’enlèvement des produits alimentaires et non alimentaires ».

14.

L’article 2 de ce décret prévoit :

« 1.   La commercialisation des sacs pour l’enlèvement des marchandises relevant de l’une des catégories indiquées ci-après est autorisée :

a)

sacs à usage unique biodégradables et compostables conformes à la norme harmonisée UNI EN 13432:2002 ( 9 ) ;

b)

sacs réutilisables en polymères autres que ceux visés au point a) ayant une poignée externe de la taille utile du sac :

b.1)

sacs d’une épaisseur supérieure à 200 microns et contenant au moins 30 % de plastique recyclé, s’ils sont destinés à un usage alimentaire,

b.2)

sacs d’une épaisseur supérieure à 100 microns et contenant au moins 10 % de plastique recyclé, s’ils ne sont pas destinés à un usage alimentaire ;

c)

sacs réutilisables en polymères autres que ceux visés au point a) ayant une poignée interne de la taille utile du sac :

c.1)

sacs d’une épaisseur supérieure à 100 microns et contenant au moins 30 % de plastique recyclé, s’ils sont destinés à un usage alimentaire,

c.2)

sacs d’une épaisseur supérieure à 60 microns et contenant au moins 10 % de plastique recyclé, s’ils ne sont pas destinés à un usage alimentaire.

2.   En outre, la commercialisation de sacs pour l’enlèvement des marchandises en papier, en tissus de fibres naturelles, en fibres de polyamide et en matériaux autres que les polymères est autorisée.

[...] »

15.

En vertu de l’article 6 du décret de 2013 :

« Le présent décret fait l’objet d’une procédure de communication conformément à la directive [98/34] du Parlement européen et du Conseil et entre en vigueur à la date à laquelle cette procédure connaît une issue favorable. »

II. Les faits, le litige et les questions préjudicielles

16.

La société Papier Mettler Italia Srl (ci-après « Papier Mettler ») opère dans le secteur de la distribution d’emballages et de contenants. Son activité se concentre en particulier sur la fabrication d’emballages en polyéthylène, dont les sacs en plastique.

17.

Papier Mettler, qui estime avoir subi un préjudice du fait du décret de 2013, a demandé à la juridiction de renvoi son annulation et la réparation du préjudice subi ou à subir en conséquence de ce décret ( 10 ).

18.

À l’appui de sa demande, Papier Mettler a fait valoir les arguments suivants :

Le décret de 2013 interdit la commercialisation de sacs en plastique autorisés par la directive 94/62. Plus précisément, l’article 2 de ce décret enfreint les directives 94/62 et 98/34 en ce qu’il exige que les sacs en plastique soient conformes à certaines exigences techniques.

D’un point de vue procédural, et dès lors que la directive 94/62 est une directive d’harmonisation, les règles techniques établies par l’autorité nationale doivent être notifiées à la Commission avant leur adoption (article 114, paragraphes 5 et 6, TFUE).

L’article 16 de la directive 94/62 impose aux États membres de notifier préalablement à la Commission les projets de mesures qu’ils prévoient d’adopter, afin que celle-ci puisse les examiner à la lumière des dispositions existantes.

L’article 8 de la directive 98/34 exige également que « tout projet de règle technique » soit communiqué à la Commission avant son adoption, avec « les raisons pour lesquelles l’établissement d’une telle règle technique est nécessaire ».

Le décret de 2013 aurait donc dû être préalablement notifié à la Commission, ce que la République italienne n’a pas fait.

D’un point de vue matériel, le décret de 2013 est contraire à la directive 94/62, en ce qu’il interdit la commercialisation de sacs qui répondent à l’un des critères de valorisation énoncés au point 3 de l’annexe II de cette directive ( 11 ).

19.

L’administration défenderesse a contesté les demandes de Papier Mettler et a fait valoir les arguments suivants :

Le décret de 2013 a été dûment notifié à la Commission le 12 mars 2013. Son entrée en vigueur était subordonnée à l’issue favorable de la procédure prévue par la directive 98/34. Cette procédure s’est achevée le 13 septembre 2013.

Les règles techniques du décret de 2013 sont nécessaires pour répondre, en Italie, au problème de la pollution lors de la collecte sélective des déchets organiques et pour encourager l’utilisation de sacs en plastique biodégradables et compostables ( 12 ).

En identifiant certains types de sacs qui pouvaient être commercialisés ( 13 ), le décret de 2013 a introduit une interdiction sélective qui se limite aux sacs en plastique d’une épaisseur inférieure à une mesure donnée, qui ne garantissent pas une possibilité significative de réemploi et sont destinés à devenir rapidement des déchets plastiques.

20.

Dans ce contexte, le Tribunale amministrativo regionale per il Lazio (tribunal administratif régional pour le Latium, Italie) a posé à la Cour les questions préjudicielles suivantes :

« 1)

L’article 114, paragraphes 5 et 6, TFUE, l’article 16, paragraphe 1, de la directive [94/62] et l’article 8 de la directive [98/34] s’opposent-ils à l’application d’une disposition nationale telle que celle prévue par le décret interministériel attaqué, qui interdit la commercialisation de sacs à usage unique fabriqués à partir de matériaux non biodégradables mais respectant les autres exigences fixées par la directive [94/62], lorsque cette disposition nationale contenant des règles techniques plus restrictives que le droit de l’Union n’a pas été notifiée préalablement par l’État membre à la Commission européenne, mais n’a été communiquée qu’après son adoption et avant la publication de la mesure ?

2)

Les articles 1er et 2, l’article 9, paragraphe 1, et l’article 18 de la directive [94/62], complétés par les dispositions des [points] 1, 2 et 3 de l’annexe II de cette directive, doivent-ils être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à l’adoption d’une réglementation nationale interdisant la commercialisation de sacs à emporter à usage unique fabriqués à partir de matériaux non biodégradables mais en respectant les autres exigences prévues par la directive [94/62], ou bien les normes techniques supplémentaires prévues par la législation nationale peuvent-elles être justifiées par l’objectif d’assurer un niveau plus élevé de protection de l’environnement, compte tenu, le cas échéant, de la nature particulière des problèmes de collecte des déchets dans l’État membre et de la nécessité pour cet État de mettre également en œuvre les obligations communautaires en la matière ?

3)

Les articles 1er et 2, l’article 9, paragraphe 1, et l’article 18 de la directive [94/62], complétés par les dispositions des [points] 1, 2 et 3 de l’annexe II de cette directive, doivent-ils être interprétés en ce sens qu’ils constituent une règle claire et précise qui interdit toute entrave à la commercialisation des sacs conformes aux exigences prévues par ladite directive et qui oblige tous les organes de l’État, y compris les autorités publiques, à laisser inappliquée toute législation nationale qui serait contraire à cette règle ?

4)

Enfin, l’adoption d’une législation nationale interdisant la commercialisation de sacs à poignées jetables qui ne sont pas biodégradables mais qui ont été fabriqués conformément aux exigences prévues par la directive [94/62], lorsqu’elle n’est pas justifiée par l’objectif d’assurer un niveau plus élevé de protection de l’environnement, par la nature particulière des problèmes de collecte des déchets dans l’État membre et par la nécessité pour l’État lui‑même de mettre également en œuvre les obligations communautaires prévues à cet égard, peut-elle constituer une violation grave et manifeste de l’article 18 de la directive [94/62] ? »

III. La procédure devant la Cour

21.

La demande de décision préjudicielle a été enregistrée au greffe de la Cour le 9 février 2022.

22.

Des observations écrites ont été présentées par Papier Mettler, l’Associazione Italiana delle Bioplastiche e dei Materiali Biodegradabili e Compostabili (ci-après « Assobioplastiche »), le gouvernement italien et la Commission européenne. Toutes ces parties sont intervenues lors de l’audience qui a eu lieu le 22 mars 2023.

IV. Appréciation

A.   Observations liminaires

23.

En premier lieu, il convient de préciser le type de sacs en plastique auquel la juridiction de renvoi fait référence. Bien que la décision de renvoi utilise une terminologie qui n’est pas toujours uniforme, il semble qu’elle se réfère en tout état de cause aux sacs en plastique légers à usage unique ( 14 ) jetables, fabriqués à partir de matériaux non biodégradables et non compostables, mais qui répondent aux autres exigences prévues par la directive 94/62.

24.

En second lieu, il convient de préciser les règles du droit de l’Union pertinentes pour répondre aux questions posées :

Bien que la juridiction de renvoi se réfère aux articles 1er et 2 de la directive 94/62, l’interprétation de ces dispositions (respectivement relatives à l’objet et au champ d’application de cette directive) n’est en réalité pas indispensable, puisqu’aucun doute n’est exprimé quant au statut d’emballage des sacs en plastique ( 15 ).

En revanche, les articles 9, paragraphe 1, et 18 de la directive 94/62 peuvent bel et bien être déterminants pour la résolution du litige.

B.   Recevabilité du renvoi préjudiciel

25.

Assobioplastiche et le gouvernement italien considèrent que le renvoi préjudiciel est irrecevable, car le décret de 2013 ne serait jamais entré en vigueur ou aurait été abrogé.

26.

Assobioplastiche s’oppose également à la recevabilité du renvoi au motif que la juridiction de renvoi n’aurait pas tenu compte de l’article 4, paragraphe 1 bis, de la directive 94/62.

27.

Je considère qu’aucune de ces exceptions ne justifie le rejet a limine de la demande de décision préjudicielle. La juridiction de renvoi identifie, sous sa propre responsabilité, le cadre juridique national qui régit le litige dans lequel s’inscrivent les demandes de décision préjudicielle. Ces dernières, comme on le sait, bénéficient d’une présomption de pertinence ( 16 ).

28.

Lors de l’audience, les parties ont longuement débattu de l’entrée en vigueur et de l’application du décret de 2013, sans qu’il soit possible de déduire de leurs interventions une solution claire à cet égard. Celles‑ci se sont accordées pour constater que la situation réglementaire créée était confuse : l’une des parties l’a qualifiée de chaotique, une autre d’inexplicable, et une autre encore de désordre normatif.

29.

Selon la Commission, le décret de 2013 est entré en vigueur et a été appliqué en Italie depuis sa publication officielle jusqu’à son abrogation formelle en 2017 ( 17 ). L’article 6 de ce décret a en toute hypothèse pu retarder son application jusqu’au 13 septembre 2013, date à laquelle la période de statu quo prévue à l’article 9 de la directive 98/34 a pris fin. Dès lors qu’il a été officiellement publié le 27 mars 2013, le décret de 2013 a cessé d’être un projet de règle technique pour devenir une règle en vigueur, de sorte que la Commission n’a pas émis d’avis sur sa compatibilité avec le droit de l’Union.

30.

Le gouvernement italien et Assobioplastiche estiment que le décret de 2013 n’est jamais entré en vigueur, car la procédure de notification à la Commission n’a pas connu d’issue favorable et la condition suspensive prévue à son article 6 a pris effet. Ledit décret a été formellement abrogé des années plus tard afin qu’il soit « expulsé » du droit italien, mais il ne s’agissait en réalité pas de l’abrogation d’un texte en vigueur.

31.

Papier Mettler a expliqué que le régime de sanctions prévu par le décret‑loi 2/2012 ( 18 ) est devenu opérationnel avec l’adoption du décret de 2013 et a été appliqué indépendamment de l’entrée en vigueur ou non de ce dernier. Si elle n’a pas été elle-même sanctionnée, c’est parce qu’elle a cessé de vendre les sacs en plastique interdits en Italie par le décret de 2013, avec le manque à gagner qui en découle et qu’elle réclame.

32.

En tout état de cause, il appartiendra à la juridiction de renvoi, seule compétente pour interpréter le droit interne, de démêler l’imbroglio sur l’entrée en vigueur et les effets du décret de 2013. La Cour ne peut intervenir dans un débat qu’il appartient à la juridiction de renvoi de trancher.

33.

La demande de décision préjudicielle serait inexplicable si la juridiction de renvoi devait considérer que le décret de 2013 (en cause dans le recours introduit devant elle par Papier Mettler) n’a jamais été en vigueur et n’a jamais produit d’effets juridiques. Il lui suffirait de constater ce fait pour trancher sans plus attendre le litige initial. Si la juridiction de renvoi ne l’a pas fait et a déféré une demande de décision préjudicielle, c’est parce qu’elle semble implicitement être d’un avis contraire.

34.

Quoi qu’il en soit, je ne considère pas que le litige devant la juridiction de renvoi et le renvoi préjudiciel lui-même puissent être qualifiés de fictifs. Je considère donc que le renvoi est recevable, sous réserve que la juridiction nationale ait le dernier mot sur l’entrée en vigueur et l’interprétation du décret de 2013.

35.

En ce qui concerne la seconde exception d’irrecevabilité, je me limiterai à dire que l’article 4, paragraphe 1 bis, de la directive 94/62 n’est pas applicable ratione temporis aux faits en cause. Ceux-ci ont eu lieu en 2013 et cet article a été introduit dans la directive 94/62 en 2015 (par la directive 2015/720).

C.   La première question préjudicielle

36.

La juridiction de renvoi souhaite savoir si une règle nationale ayant le contenu susmentionné ( 19 ), notifiée par l’État membre à la Commission postérieurement à son adoption, mais quelques jours avant sa publication officielle ( 20 ), est compatible avec l’article 16, paragraphe 1, de la directive 94/62 et avec l’article 8 de la directive 98/34.

1. L’application de la directive 98/34

37.

Ni la juridiction de renvoi, ni les parties au litige ne doutent de la qualité de règle technique (au sens de la directive 98/34) des dispositions contenues dans le décret de 2013. Les problèmes posés par cette condition, fréquemment soulevés devant la Cour ( 21 ), ne se posent pas dans la présente affaire, dont la prémisse incontestée est que cette réglementation constitue une règle technique.

38.

Comme je l’expliquerai plus loin, l’État italien était tenu de notifier cette règle technique (le décret de 2013) à la Commission au stade du projet, c’est‑à‑dire avant son adoption ( 22 ).

39.

L’article 8, paragraphe 1, de la directive 98/34 impose aux États membres de communiquer immédiatement à la Commission tout projet de règle technique. Ils sont également tenus d’indiquer, dans la notification, « les raisons pour lesquelles l’établissement d’une telle règle technique est nécessaire, à moins que ces raisons ne ressortent déjà du projet ». S’il s’agit d’une simple transposition intégrale d’une norme internationale ou européenne, une simple information quant à la norme concernée suffira.

40.

Le non‑respect de cette obligation rend la règle technique en question inopposable aux particuliers, que ce soit dans le cadre d’une procédure pénale ou d’un litige entre particuliers dans d’autres types de procédures ( 23 ).

41.

La directive 98/34 confère à la Commission un pouvoir de contrôle sur les projets de règles techniques qui lui sont notifiés par les États membres ( 24 ). Comme la Cour l’a jugé dans l’arrêt CIA Security International, des conséquences directement liées au défaut de notification sont prévues précisément afin de protéger ces pouvoirs : l’obligation établie par l’article 8 de la directive 98/34 a un effet direct et les règles techniques nationales non notifiées sont inopposables aux particuliers.

42.

La même conséquence a été dégagée dans d’autres procédures d’information et de contrôle semblables à celle analysée en l’espèce, telles que celle prévue par la directive 2000/31/CE ( 25 ) dans le domaine des services de la société de l’information, sur laquelle porte l’arrêt Airbnb Ireland ( 26 ).

43.

Dans cet arrêt, la Cour a confirmé les conséquences découlant d’une obligation prévue par une directive conférant à la Commission des pouvoirs de cette nature avec un caractère suffisamment clair, précis et inconditionnel : une telle obligation a un effet direct et, partant, peut être invoquée par les particuliers devant les juridictions nationales ( 27 ).

44.

Selon la décision de renvoi, le décret de 2013 a été notifié à la Commission le 12 mars 2013 ( 28 ), adopté six jours plus tard, et publié officiellement le 27 mars 2013.

45.

Une notification à la Commission effectuée dans ces conditions manque cependant à l’obligation imposée par l’article 8, paragraphe 1, de la directive 98/34, dès lors que :

L’élaboration du projet de règle technique était à un stade tellement avancé lors de sa communication à la Commission qu’il n’était plus possible d’y apporter des amendements substantiels (en fait, plus aucun amendement).

La notification immédiate à la Commission doit porter sur un « projet » de règle technique et non sur sa version finale ( 29 ).

Avec une telle chronologie, la République italienne n’a pas pu tenir compte des observations du Royaume de Suède ni des avis circonstanciés du Royaume des Pays-Bas et du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord concernant le projet de règle technique, car le décret de 2013 a été adopté avant que ceux-ci ne soient émis.

46.

La procédure prescrite par la directive 98/34 a par conséquent été contournée. L’adoption du projet de règle technique dans un délai de six jours à compter de la notification à la Commission a enfreint l’obligation de statu quo prévue à l’article 9, paragraphe 1, de la directive 98/34 : l’État membre ne pouvait adopter le projet notifié pendant un délai minimal de trois mois à compter de la réception de la notification par la Commission.

47.

Le gouvernement italien avance deux raisons pour justifier son action et nier toute violation de la directive 98/34 :

La notification du projet de décret de 2013 reproduit une notification précédemment effectuée en 2011.

L’entrée en vigueur du décret de 2013 est, selon son article 6, subordonnée à l’issue favorable de la procédure de notification. Comme la Commission n’a pas émis d’avis, cette procédure n’a pas connu d’issue favorable ( 30 ), de sorte que ce décret n’est jamais entré en vigueur. C’est pour cette raison que l’Italie n’a pas communiqué à la Commission le texte définitif de cette règle technique ( 31 ).

48.

Aucune de ces deux justifications ne me convainc.

49.

En ce qui concerne la notification de 2011 ( 32 ), le projet de règle technique communiqué à l’époque à la Commission était le (futur) décret-loi 2/2012, qui prolongeait l’interdiction de commercialisation des sacs en plastique jetables non conformes à la norme harmonisée UNI EN 13432:2002. Son article 2, paragraphe 1, prévoyait l’élaboration d’un décret ministériel ultérieur pour déterminer la portée de l’interdiction de commercialisation des sacs en plastique non biodégradables et non compostables. En outre, ce projet prévoyait les sanctions en cas de manquement à cette future réglementation.

50.

Par conséquent, comme la Commission l’a fait valoir lors de l’audience, la notification de 2013 ne saurait être considérée comme une simple réitération de la notification de 2011. La notification de 2013 contient de nouvelles restrictions sur les sacs en plastique, qui devaient impérativement être notifiées à la Commission en vertu de la directive 98/34.

51.

En ce qui concerne la clause suspensive (article 6), le procédé de l’État italien consistant à l’insérer dans le texte du décret de 2013 est incompatible avec la directive 98/34.

52.

En effet, la publication officielle du décret de 2013 peut, à elle seule, avoir une incidence sur la libre circulation des marchandises, en ce qu’elle affecte les types de sacs en plastique qui peuvent être commercialisés en Italie. Subordonner l’entrée en vigueur d’un décret à l’issue favorable de la procédure de notification de la directive 98/34 est une technique législative qui ne respecte pas la sécurité juridique, car les particuliers ne savent pas à quel moment se produira l’issue (favorable ou défavorable) en fonction de laquelle ils devront adapter leur comportement.

53.

Cette technique législative empêche également, comme en l’espèce, de prendre dûment en compte les observations et les avis circonstanciés de la Commission et des autres États membres sur la compatibilité du projet de règle technique avec les règles du droit de l’Union. L’objectif poursuivi par la directive 98/34, à savoir la prévention des entraves techniques aux échanges avant qu’elles ne commencent à avoir des effets restrictifs, serait ainsi contrarié.

54.

En définitive, je considère que l’adoption du décret de 2013 a enfreint, pour des raisons formelles, l’article 8, paragraphe 1, et l’article 9, paragraphe 1, de la directive 98/34.

2. L’application de la directive 94/62

55.

Conformément à l’article 16, paragraphe 1, de la directive 94/62, les États membres sont tenus de notifier à la Commission, avant leur adoption, les projets de mesures qu’ils prévoient d’adopter dans le cadre de cette directive (en ce qui concerne les emballages et les déchets d’emballages).

56.

Cet article indique à son paragraphe 2 que, si la mesure envisagée concerne une question d’ordre technique, l’État membre peut préciser que sa notification vaut également au titre de la directive 83/189 (ultérieurement remplacée par la directive 98/34).

57.

L’État italien a communiqué le décret de 2013 à la Commission en application de l’article 16 de la directive 94/62. À la différence de l’article 9 de la directive 98/34, cette disposition ne prévoit pas que l’État membre doive attendre les observations de la Commission et des autres États membres pendant une certaine période avant d’adopter le projet de règle nationale. Par conséquent, je ne considère pas que la République italienne ait enfreint cet article, même si, comme je l’ai déjà indiqué, le décret de 2013 a été officiellement publié six jours après la notification à la Commission.

58.

La procédure de l’article 16 de la directive 94/62 est une procédure de simple information, alors que la procédure corrélative de la directive 98/34 est une procédure d’information et de contrôle des réglementations nationales. Il s’agit donc de procédures différentes, qui ont également des effets différents.

59.

Ni le libellé, ni la finalité de l’article 16 de la directive 94/62 ne permettent de considérer que le non‑respect de l’obligation de notification préalable qu’il instaure produit les mêmes effets que le manquement à la directive 98/34.

60.

L’article 16 de la directive 94/62 concerne les relations entre les États membres et la Commission et ne crée donc aucun droit en faveur des particuliers susceptible d’être violé si un État membre ne remplit pas l’obligation qu’il prévoit. Cette disposition ne peut donc être invoquée devant les juridictions nationales pour obtenir l’annulation de règles non notifiées ou leur non‑application aux particuliers ( 33 ).

61.

À mon avis, l’article 16 de la directive 94/62 prévoit une procédure de simple information semblable à celles analysées par la Cour dans ses arrêts Enichem Base et Bulk Oil ( 34 ).

62.

Dans ce type de procédure, il me semble logique, contrairement à ce que la Commission a soutenu lors de l’audience, de rejeter l’inopposabilité aux particuliers des dispositions nationales lorsqu’elles ont été adoptées sans respecter une obligation de notification préalable imposée par une règle de l’Union qui ne prévoit pas de conséquences juridiques directement liées au non‑respect de cette obligation.

63.

La procédure de simple information de l’article 16 de la directive 94/62 n’est pas, je le répète, comparable à la procédure de la directive 98/34 ou d’autres dispositions qui suivent le modèle de cette dernière, comme c’était le cas de l’obligation prévue à l’article 3, paragraphe 4, point b), second tiret, de la directive 2000/31, à laquelle j’ai précédemment fait référence ( 35 ).

64.

Les références croisées contenues dans l’article 16, paragraphe 2, de la directive 94/62 et dans l’article 8, paragraphe 5, de la directive 98/34 ne changent rien à ce qui a été dit jusqu’à présent. Ces dispositions se limitent à indiquer que la communication d’un projet national peut valoir pour deux procédures d’information prévues par des « actes communautaires » différents. Cette manière de procéder évite qu’un même projet soit communiqué à de multiples reprises à la Commission. Cette règle ne modifie cependant pas la nature différente des deux procédures.

65.

Je me dois également de préciser que, comme la Commission l’a spécifié lors de l’audience, la notification d’un projet de règle technique au titre de l’article 8 de la directive 98/34 n’est pas valable aux fins de l’application de l’article 114, paragraphe 5, TFUE. Pour se prévaloir de cette disposition du traité FUE, l’État membre notifiant doit démontrer que la disposition nationale qu’il va adopter répond à la nécessité d’un niveau plus élevé de protection de l’environnement (y compris le milieu de travail) en raison de spécificités qui lui sont propres, basées sur des preuves scientifiques nouvelles et qui surgissent après l’adoption de la mesure d’harmonisation.

66.

La notification en vue d’appliquer la directive 98/34 n’exige pas une justification aussi exhaustive. En outre, la notification effectuée au titre de cette directive entraîne une simple suspension de l’entrée en vigueur du projet de règle pendant un certain temps, dans l’attente de l’éventuelle réaction de la Commission et des autres États membres.

67.

À l’inverse, la notification au titre de l’article 114, paragraphe 5, TFUE, vise à obtenir l’approbation par la Commission de la règle nationale plus protectrice, après avoir vérifié qu’elle n’implique pas un moyen arbitraire de discrimination ni une restriction déguisée des échanges entre les États membres et qu’elle ne constitue pas une entrave au fonctionnement du marché intérieur.

D.   La deuxième question préjudicielle

68.

La juridiction de renvoi cherche à savoir, en substance, si une réglementation nationale interdisant la commercialisation de sacs jetables (à usage unique) fabriqués à partir de matériaux non biodégradables, mais en respectant les autres exigences prévues par la directive 94/62,

est contraire à l’article 18 de la directive 94/62, lu en combinaison avec l’article 9 et l’annexe II de celle-ci ;

peut être justifiée par l’objectif d’assurer un niveau plus élevé de protection de l’environnement.

1. Incompatibilité des règles nationales avec l’article 18 de la directive 94/62

69.

En vertu de l’article 18 de la directive 94/62, « [l]es États membres ne peuvent faire obstacle à la mise sur le marché, sur leur territoire, d’emballages conformes à la présente directive ».

70.

Conformément à l’article 9 de la directive 94/62, « un emballage ne [peut] être mis sur le marché que s’il répond à toutes les exigences essentielles définies par la présente directive, y compris à l’annexe II ». Cette annexe réglemente à son tour les « [e]xigences essentielles portant sur la composition et le caractère réutilisable et valorisable (notamment recyclable) des emballages » ( 36 ).

71.

Selon la Cour, « [le] marquage et [...] l’identification des emballages et des exigences concernant la composition et le caractère réutilisable ou valorisable de ces derniers » (articles 8 à 11 et annexe II de la directive 94/62) ont été entièrement harmonisés ( 37 ).

72.

Ce constat entraîne les conséquences suivantes :

Lorsqu’une norme de l’Union opère une harmonisation complète, elle garantit que le produit fabriqué conformément aux exigences harmonisées bénéficie de la libre circulation sur l’ensemble du territoire de l’Union. Les États membres perdent la possibilité d’imposer des exigences supplémentaires fondées sur la protection de motifs d’intérêt général ( 38 ).

Lorsqu’elles harmonisent de manière exhaustive, les autorités de l’Union procèdent à la mise en balance nécessaire de l’objectif de libre circulation du produit et de la protection des intérêts généraux, de sorte que cette mise en balance ne peut être répétée par les autorités nationales.

Lorsqu’un domaine a fait l’objet d’une harmonisation exhaustive au niveau de l’Union, toute mesure nationale y relative doit être appréciée au regard des dispositions de cette mesure d’harmonisation et non pas de celles du droit primaire ( 39 ).

73.

Sur cette base, l’article 18 de la directive 94/62, lu en combinaison avec l’article 9 et l’annexe II de celle-ci, s’oppose, pour des raisons matérielles ou substantielles, à l’adoption d’une réglementation nationale telle que celle en cause en l’espèce.

74.

Le décret de 2013 interdit la commercialisation de sacs non conformes à une norme technique (UNI EN 13432:2002), même s’ils respectent les autres exigences de valorisation prévues au point 3 de l’annexe II de la directive 94/62, à moins qu’ils ne respectent d’autres spécifications techniques d’épaisseur et de forme qui ne sont pas davantage couvertes par cette directive.

75.

Bien qu’il vise à assurer une protection efficace de l’environnement et une collecte plus efficace des déchets, le décret de 2013 penche ainsi en faveur des méthodes de compostage et du caractère biodégradable (qu’il privilégie), par rapport aux méthodes de recyclage des matériaux et de valorisation énergétique que la directive 94/62 autorise.

76.

Le point 3 de l’annexe II de la directive 94/62 se réfère indifféremment à ces quatre méthodes de valorisation des emballages. Une règle nationale ne peut donc contredire le choix du législateur de l’Union, alors que ce dernier a pleinement harmonisé la matière sans laisser aux États membres une quelconque possibilité de privilégier ou de bannir certaines méthodes de valorisation des emballages plutôt que d’autres.

2. Sur la justification tirée de la protection de l’environnement

77.

Les articles 8 à 11 et l’annexe II de la directive 94/62 procèdent, je le répète, à une harmonisation exhaustive en ce qui concerne le marquage et l’identification des emballages, les exigences relatives à leur composition, et leur caractère réutilisable ou valorisable. Il s’ensuit que la seule possibilité pour la République italienne d’adopter des règles plus restrictives est celle prévue à l’article 114, paragraphes 5 et 6, TFUE ( 40 ).

78.

Ces dispositions du traité FUE confèrent aux États membres la possibilité d’introduire de nouvelles dispositions nationales basées sur des preuves scientifiques nouvelles relatives, notamment, à la protection de l’environnement, en raison d’un problème spécifique qui leur est propre et surgit après l’adoption de la mesure d’harmonisation.

79.

Cette possibilité est toutefois subordonnée à la notification préalable de la mesure nationale et à son approbation par la Commission, dans un délai de six mois à compter de la notification ( 41 ). Comme il n’est pas établi que le gouvernement italien a respecté ces exigences, l’exception prévue à l’article 114, paragraphes 5 et 6, TFUE n’est pas applicable en l’espèce.

3. Incidence de l’article 4, paragraphe 1, de la directive 94/62

80.

Le gouvernement italien et Assobioplastiche soutiennent que le décret de 2013 aurait été confirmé par l’introduction, par la directive 2015/720, du nouvel article 4, paragraphe 1 bis, de la directive 94/62.

81.

Leur raisonnement ne saurait être suivi, dès lors que :

La directive 2015/720, dont le délai de transposition a expiré le 27 novembre 2016 (article 2), n’est pas applicable ratione temporis au litige, qui est né à la suite de l’adoption du décret de 2013.

En tout état de cause, si la directive 2015/720 admet des dérogations nationales à la libre commercialisation des emballages compatibles avec la directive 94/62, elle le fait pour les sacs en plastique légers (moins de 50 microns d’épaisseur). Le décret de 2013 contenait au contraire une interdiction plus large, s’appliquant aux sacs en plastique d’une épaisseur supérieure à 60 microns.

82.

En résumé, l’article 18 de la directive 94/62, lu en combinaison avec l’article 9, paragraphe 1, et l’annexe II de celle-ci, s’oppose à une réglementation nationale qui interdit la commercialisation de sacs jetables (à usage unique) fabriqués à partir de matériaux non biodégradables mais en respectant les autres exigences prévues par la directive 94/62, à condition que l’État membre n’ait pas notifié cette réglementation à la Commission et n’ait pas reçu son approbation, conformément à l’article 114, paragraphes 5 et 6, TFUE.

E.   La troisième question préjudicielle

83.

La juridiction de renvoi souhaite savoir si l’article 18 de la directive 94/62, lu en combinaison avec l’article 9, paragraphe 1, et l’annexe II de celle-ci, a un effet direct et si les organes d’un État membre sont tenus de ne pas appliquer une législation nationale qui lui est contraire.

84.

Selon une jurisprudence constante sur l’effet direct des directives ( 42 ) :

« [D]ans tous les cas où les dispositions d’une directive apparaissent, du point de vue de leur contenu, inconditionnelles et suffisamment précises, les particuliers sont fondés à les invoquer devant les juridictions nationales à l’encontre de l’État, soit lorsque celui-ci s’est abstenu de transposer dans les délais la directive en droit national, soit lorsqu’il en a fait une transposition incorrecte. »

« [U]ne disposition du droit de l’Union est, d’une part, inconditionnelle lorsqu’elle énonce une obligation qui n’est assortie d’aucune condition ni subordonnée, dans son exécution ou dans ses effets, à l’intervention d’aucun acte soit des institutions de l’Union soit des États membres et, d’autre part, suffisamment précise pour être invoquée par un justiciable et appliquée par le juge lorsqu’elle énonce une obligation dans des termes non équivoques. »

« [M]ême si une directive laisse aux États membres une certaine marge d’appréciation lorsqu’ils adoptent les modalités de sa mise en œuvre, une disposition de cette directive peut être considérée comme ayant un caractère inconditionnel et précis dès lors qu’elle met à la charge des États membres, dans des termes non équivoques, une obligation de résultat précise et qui n’est assortie d’aucune condition quant à l’application de la règle qu’elle énonce. »

85.

L’article 18 de la directive 94/62, lu en combinaison avec l’article 9, paragraphe 1, de celle-ci et avec son annexe II, constitue une règle claire, précise et inconditionnelle du droit de l’Union, qui a un effet direct et peut être invoquée par les particuliers devant les juridictions nationales à l’encontre des autorités de l’État italien.

86.

À cet égard, il suffit de confirmer que l’article 18 de la directive 94/62 interdit aux États membres, strictement et sans exception, d’empêcher la commercialisation, sur leur territoire, d’emballages conformes aux exigences fixées par la directive elle-même.

87.

L’article 9, paragraphe 1, de la directive 94/62 fait référence à ces exigences (articles 8 à 11 et annexe II) relatives au marquage et à l’identification des emballages, ainsi qu’à leur composition et à leur caractère réutilisable ou valorisable, en prescrivant que seuls les emballages qui y sont conformes peuvent être commercialisés.

88.

Concrètement, l’annexe II fixe les exigences portant sur la fabrication et la composition des emballages (point 1), celles relatives à leur caractère réutilisable (point 2), et celles qui concernent leur valorisation (point 3). Comme je l’ai déjà analysé, elle prévoit quatre critères alternatifs de valorisation des emballages (recyclage de matériaux, valorisation énergétique, compostage ou biodégradabilité).

89.

Jusqu’à la modification de la directive 94/62 par la directive 2015/720, le bénéfice de la libre commercialisation des emballages fabriqués conformément à la directive 94/62 était inconditionnel. Ce n’est que depuis l’entrée en vigueur de la directive 2015/720 que les États membres ont été autorisés à introduire des mesures plus restrictives pour la commercialisation des sacs en plastique légers.

90.

Dès lors que l’article 18 de la directive 94/62, lu en combinaison avec l’article 9, paragraphe 1, et l’annexe II de celle-ci, a un effet direct, la juridiction nationale doit laisser inappliquée toute règle nationale qui lui est contraire dans le cadre du litige ( 43 ).

F.   La quatrième question préjudicielle

91.

La procédure initiale ayant pour objet la réparation de « tous les dommages subis et à subir [...] du fait du comportement illégal de l’administration [italienne] », la juridiction de renvoi souhaite savoir si « une législation nationale interdisant la commercialisation de sacs à poignées jetables qui ne sont pas biodégradables mais qui ont été fabriqués conformément aux exigences prévues par la directive 94/62 » constitue une violation grave et manifeste de l’article 18 de cette directive.

92.

Pour engager la responsabilité d’un État pour les dommages causés aux particuliers du fait des violations du droit de l’Union qui lui sont imputables, il faut :

Que la règle de droit de l’Union violée ait pour objet de conférer des droits à ces particuliers.

Que la violation de cette règle soit suffisamment caractérisée.

Un lien de causalité direct entre cette violation et le dommage subi par ces particuliers ( 44 ).

93.

Ces trois conditions sont nécessaires et suffisantes pour engendrer au profit des particuliers un droit à réparation. Cependant, rien ne s’oppose à ce que la responsabilité de l’État puisse être engagée dans des conditions moins restrictives sur le fondement du droit national ( 45 ).

94.

Il appartient en principe aux juridictions nationales de déterminer, conformément aux orientations fournies par la Cour, si ces trois conditions sont remplies ( 46 ). S’agissant de ces éléments, la juridiction de renvoi s’interroge uniquement sur l’existence d’une violation suffisamment caractérisée du droit de l’Union. Il ne semble donc pas y avoir de doute quant aux deux autres.

95.

La Cour peut fournir à la juridiction de renvoi des orientations afin qu’elle détermine elle-même si, en l’espèce, il y a eu ou non une violation suffisamment caractérisée à la lumière de tous les éléments du litige. Les éléments pertinents aux fins de son appréciation sont notamment les suivants :

le degré de clarté et de précision de la règle violée ;

l’étendue de la marge d’appréciation que la règle enfreinte laisse aux autorités ;

le caractère intentionnel ou involontaire du manquement commis ou du préjudice causé ;

le caractère excusable ou inexcusable d’une éventuelle erreur de droit, et

la circonstance que les attitudes prises par une institution de l’Union ont pu contribuer à l’omission, l’adoption ou au maintien de mesures ou de pratiques nationales contraires au droit de l’Union ( 47 ).

96.

S’agissant des conditions de clarté et de précision, toutes deux sont réunies dans l’article 18 de la directive 94/62, lu en combinaison avec l’article 9, paragraphe 1, et l’annexe II de celle-ci. Il s’agit de dispositions non équivoques qui imposent aux États membres une obligation négative (à savoir, ne pas empêcher la commercialisation des emballages qui respectent les caractéristiques fixées par cette directive, qui opère une harmonisation complète).

97.

Il ne fait aucun doute que l’État italien a intentionnellement permis la seule commercialisation des sacs en plastique visés par le décret de 2013, tout en interdisant la commercialisation d’autres sacs qui était admissible en vertu de la directive 94/62. Cette mesure avait certes pour objectif de réduire la pollution, mais le législateur italien était conscient du fait qu’il pouvait enfreindre la directive 94/62 en instaurant cette règle ( 48 ).

98.

L’article 18 de la directive 94/62, lu en combinaison avec l’article 9, paragraphe 1, et l’annexe II de celle-ci, ne laissait aucune marge d’appréciation aux autorités nationales pour interdire, sur leur territoire, les emballages conformes aux normes harmonisées. Le gouvernement italien aurait pu adopter des règles plus restrictives et plus protectrices de l’environnement au moyen de la procédure prévue à l’article 114, paragraphes 5 et 6, TFUE, mais, comme je l’ai déjà expliqué, il n’apparaît pas qu’il ait eu recours à ces dispositions.

99.

Comme je l’ai également déjà indiqué, les États membres n’ont disposé d’aucune marge d’appréciation pour adopter des mesures nationales plus restrictives sur la commercialisation des sacs en plastique légers à usage unique jusqu’à l’adoption de la directive 2015/720, qui a introduit dans la directive 94/62 le nouvel article 4, paragraphe 1 bis.

100.

Cette modification législative pourrait cependant avoir une certaine incidence ( 49 ) si la juridiction de renvoi devait considérer que l’État italien (par une erreur dont cette juridiction devra apprécier le caractère excusable) a voulu anticiper la proposition législative de la Commission présentée le 4 novembre 2013 ( 50 ), qui a débouché sur la directive 2015/720.

101.

Cette proposition, en tant que telle, est cependant postérieure à la publication du décret de 2013. Il sera donc difficile de soutenir que, en l’espèce, une institution de l’Union a contribué à l’adoption de la mesure nationale.

102.

En résumé, l’interdiction de la commercialisation des sacs en plastique légers à usage unique, non biodégradables et non compostables, ainsi que de ceux qui ne répondent pas à certaines conditions d’épaisseur, alors que ces sacs sont conformes aux exigences de la directive 94/62, pourrait constituer une violation grave et manifeste de l’article 18 de la directive 94/62, ce qu’il appartient à la juridiction de renvoi de vérifier.

V. Conclusion

103.

Eu égard aux considérations qui précèdent, je propose à la Cour de répondre aux questions posées par le Tribunale amministrativo regionale per il Lazio (tribunal administratif régional pour le Latium, Italie) dans les termes suivants :

1)

Une réglementation nationale qui interdit la commercialisation de sacs à usage unique (jetables) fabriqués à partir de matériaux non biodégradables, qui a été notifiée par l’État membre à la Commission européenne après son adoption, mais quelques jours avant sa publication officielle :

viole l’article 8, paragraphe 1, et l’article 9, paragraphe 1, de la directive 98/34/CE du Parlement européen et du Conseil, du 22 juin 1998, prévoyant une procédure d’information dans le domaine des normes et réglementations techniques, telle que modifiée par la directive 98/48/CE du Parlement européen et du Conseil, du 20 juillet 1998, et n’est pas opposable aux particuliers ;

ne viole pas la procédure de simple information prévue à l’article 16, paragraphe 1, de la directive 94/62/CE du Parlement européen et du Conseil, du 20 décembre 1994, relative aux emballages et aux déchets d’emballages, si les sacs concernés respectent les autres exigences établies par cette directive.

2)

L’article 18 de la directive 94/62, lu en combinaison avec l’article 9, paragraphe 1, et l’annexe II de celle-ci, s’oppose à une réglementation nationale qui interdit la commercialisation de sacs en plastique légers à usage unique (jetables) fabriqués à partir de matériaux non biodégradables, mais respectant les autres exigences fixées par la directive 94/62, à condition que l’État membre n’ait pas notifié cette réglementation à la Commission et n’ait pas reçu son approbation dans le cadre de la procédure prévue à l’article 114, paragraphes 5 et 6, TFUE.

3)

L’article 18 de la directive 94/62, lu en combinaison avec l’article 9, paragraphe 1, et l’annexe II de celle-ci, a un effet direct et tous les organes des États membres, y compris leurs juridictions, sont tenus de laisser inappliquée, dans tout litige dont ils sont saisis, toute réglementation nationale qui serait contraire à cette règle.

4)

L’interdiction de commercialiser des sacs en plastique légers à usage unique, non biodégradables et non compostables, ainsi que des sacs en plastique légers à usage unique qui ne répondent pas à certaines conditions d’épaisseur, alors que de tels sacs sont conformes aux exigences prévues par la directive 94/62, est susceptible de constituer une violation grave et manifeste de l’article 18 de cette directive, lu en combinaison avec l’article 9, paragraphe 1, et l’annexe II de celle-ci, ce qu’il appartient à la juridiction nationale de vérifier.


( 1 ) Langue originale : l’espagnol.

( 2 ) Voir résolution UNEP/EA.5/Res.14 adoptée par l’Assemblée des Nations unies pour l’environnement le 2 mars 2022 : Mettre fin à la pollution plastique : vers un instrument international juridiquement contraignant.

( 3 ) Sur ce phénomène dans l’Union, voir communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions : Une stratégie européenne sur les matières plastiques dans une économie circulaire [COM(2018) 28 final, du 16 janvier 2018].

( 4 ) Directive du Parlement européen et du Conseil du 20 décembre 1994 relative aux emballages et aux déchets d’emballages (JO 1994, L 365, p. 10).

( 5 ) Tel que modifié par la directive (UE) 2015/720 du Parlement européen et du Conseil, du 29 avril 2015 (JO 2015, L 115, p. 11).

( 6 ) Tel que modifié par la directive 2015/720.

( 7 ) Directive du Parlement européen et du Conseil, du 22 juin 1998, prévoyant une procédure d’information dans le domaine des normes et réglementations techniques (JO 1998, L 204, p. 37), telle que modifiée par la directive 98/48/CE du Parlement européen et du Conseil, du 20 juillet 1998 (JO 1998, L 217, p. 18) (ci-après la « directive 98/34 »). Cette directive est remplacée depuis le 6 octobre 2015 par la directive (UE) 2015/1535 du Parlement européen et du Conseil, du 9 septembre 2015, prévoyant une procédure d’information dans le domaine des réglementations techniques et des règles relatives aux services de la société de l’information (JO 2015, L 241, p. 1).

( 8 ) Decreto ministeriale del 18 marzo 2013 – Individuazione delle caratteristiche tecniche dei sacchi per l’asporto delle merci, del Ministero dell’Ambiente e della Tutela del Territorio e del Mare e del Ministero dello Sviluppo Economico (décret ministériel du 18 mars 2013 du ministère de l’Environnement et de la Protection du territoire et de la mer et du ministère du Développement économique, identifiant les caractéristiques techniques des sacs pour l’enlèvement des marchandises, ci‑après le « décret de 2013 ») (GURI no 73, du 27 mars 2013).

( 9 ) Norme UNI EN 13432:2002, du 1er mars 2002, Imballaggi – Requisiti per imballaggi recuperabili mediante compostaggio e biodegradazione – Schema di prova e criteri di valutazione per l’accettazione finale degli imballaggi (Emballages – Exigences relatives aux emballages valorisables par compostage et biodégradation – Programme d’essai et critères d’évaluation de l’acceptation finale des emballages). Cette norme est disponible moyennant paiement sur la page web de l’UNI Ente Italiano di Normazione (organisme italien de normalisation).

( 10 ) Lors de l’audience, Papier Mettler a identifié ce préjudice comme étant le manque à gagner résultant de l’impossibilité de vendre en Italie des sacs conçus conformément aux critères établis par la directive 94/62, qu’elle commercialisait légalement dans d’autres États membres.

( 11 ) Le décret de 2013 interdirait la commercialisation de sacs non conformes à la norme UNI EN 13432:2002 ou qui ne répondent pas à d’autres spécifications techniques relatives à l’épaisseur et à la forme. Ces spécifications ne sont pas prévues par la directive 94/62 et la République italienne empêche par conséquent la commercialisation de sacs conformes aux exigences énoncées au point 3 de l’annexe II de cette directive.

( 12 ) Le gouvernement italien fait valoir que les consommateurs ont l’habitude d’utiliser des sacs en plastique à usage unique pour la collecte des déchets organiques.

( 13 ) À savoir : a) les sacs biodégradables et compostables à usage unique, conformes à la norme harmonisée UNI EN 13432:2002 ; b) les sacs en plastique traditionnels d’une certaine épaisseur, et donc réutilisables, et c) les sacs réutilisables pour l’enlèvement de marchandises en papier, en tissus de fibres naturelles, en fibres de polyamide et en matériaux autres que les polymères.

( 14 ) Peut-être conviendrait-il de les qualifier plus précisément de sacs jetables, et pas nécessairement à usage unique, puisque le consommateur peut les utiliser à plusieurs reprises s’il le souhaite et que le sac résiste.

( 15 ) Arrêts du 29 avril 2004, Plato Plastik Robert Frank (C‑341/01, EU:C:2004:254), et du 10 novembre 2016, Eco-Emballages e.a. (affaires jointesC‑313/15 et C‑530/15, EU:C:2016:859).

( 16 ) Arrêts du 13 novembre 2018, Levola Hengelo (C‑310/17, EU:C:2018:899, point 28), et du 6 octobre 2022, Contship Italia (affaires jointesC‑433/21 et C‑434/21, EU:C:2022:760, point 24).

( 17 ) Selon Assobioplastiche (point 4 de ses observations), le décret de 2013 n’est plus en vigueur depuis le 13 août 2017, date à laquelle il a été remplacé par la réglementation italienne de transposition de la directive 2015/720, à savoir, le decreto-legge n. 91 – Disposizioni urgenti per la crescita economica nel Mezzogiorno (décret-loi no 91, portant dispositions urgentes pour le développement économique du Mezzogiorno), du 20 juin 2017 (GURI no 141, du 20 juin 2017, p. 1), converti, avec des modifications, en la legge n. 123 (loi no 123), du 3 août 2017 (GURI no 188, du 12 août 2017, p. 1).

( 18 ) Decreto-legge n. 2 – Misure straordinarie e urgenti in materia ambientale (décret-loi no 2, portant mesures extraordinaires et urgentes en matière environnementale), du 25 janvier 2012 (GURI no 20, du 25 janvier 2012, p. 1, ci-après le « décret-loi 2/2012 »), converti, avec des modifications, en la legge n. 28 (loi no 28), du 24 mars 2012 (GURI no 71, du 24 mars 2012, p. 1).

( 19 ) En d’autres termes, une règle qui interdit la commercialisation de sacs (jetables) à usage unique fabriqués à partir de matériaux non biodégradables, mais qui répondent aux autres exigences prévues par la directive 94/62.

( 20 ) La première question préjudicielle se concentre par conséquent sur les aspects de procédure. Je me prononcerai sur la compatibilité matérielle du décret de 2013 avec l’article 114, paragraphes 5 et 6, TFUE, dans le cadre de l’analyse de la deuxième question préjudicielle.

( 21 ) Voir, à titre d’exemple, arrêt du 24 novembre 2022, Belplant (C‑658/21, EU:C:2022:925).

( 22 ) Voir ci-dessus la définition du « projet de règle technique » établie à l’article 1er, point 12, de la directive 98/34.

( 23 ) Arrêts du 30 avril 1996, CIA Security International (C‑194/94, ci-après l’« arrêt CIA Security International », EU:C:1996:172, points 49 et 50) ; du 4 février 2016, Ince (C‑336/14, EU:C:2016:72, point 84) ; du 27 octobre 2016, James Elliott Construction (C‑613/14, EU:C:2016:821, point 64) ; et du 3 décembre 2020, Star Taxi App (C‑62/19, EU:C:2020:980, point 57).

( 24 ) La notification ouvre un délai de trois, quatre ou six mois pendant lequel le projet notifié ne peut être définitivement adopté, afin de permettre à la Commission et aux autres États membres de présenter à l’État notifiant des observations ou des avis circonstanciés sur la compatibilité du projet avec le droit de l’Union. Ce délai est porté à douze mois si la Commission décide de proposer une règle d’harmonisation en la matière.

( 25 ) Directive du Parlement européen et du Conseil du 8 juin 2000 relative à certains aspects juridiques des services de la société de l’information, et notamment du commerce électronique, dans le marché intérieur (« directive sur le commerce électronique ») (JO 2000, L 178, p. 1). L’article 3, paragraphe 4, sous b), second tiret, de cette directive prescrit une obligation précise pour les États membres de notifier préalablement à la Commission, ainsi qu’à l’État membre sur le territoire duquel le prestataire du service visé est établi, leur intention de prendre une mesure restreignant la libre circulation de ce service.

( 26 ) Arrêt du 19 décembre 2019, Airbnb Ireland (C‑390/18, ci-après l’« arrêt Airbnb Ireland », EU:C:2019:1112, points 88 à 97).

( 27 ) La procédure de notification et de contrôle permet à la Commission d’éviter l’adoption ou, à tout le moins, le maintien d’entraves aux échanges contraires au traité FUE, notamment en proposant des modifications à apporter aux mesures nationales (arrêt Airbnb Ireland, points 90 à 92).

( 28 ) Notification 2013/152/I, du 12 mars 2013, Projet de décret interministériel concernant la définition des caractéristiques techniques des sacs pour l’enlèvement de marchandises, prévu à l’article 2 du décret-loi no 2/2012, converti en loi no 28/2012, disponible sur la page web suivante : https://ec.europa.eu/growth/tools-databases/tris/fr/search/?trisaction=search.detail&year=2013&num=152.

( 29 ) Arrêt du 8 septembre 2005, Commission/Portugal (C‑500/03, non publié, EU:C:2005:515, point 39).

( 30 ) Le gouvernement italien se réfère à la lettre qu’il a adressée à la Commission le 23 juin 2015.

( 31 ) Selon le gouvernement italien, cette circonstance a provoqué l’adoption du decreto-legge n. 91 (décret-loi no 91/2014), du 24 juin 2014 (GURI no 144, du 24 juin 2014, p. 1), converti, avec des modifications, en la legge n. 116, recante disposizioni urgenti per il settore agricolo, la tutela ambientale e l’efficientamento energetico dell’edilizia scolastica e universitaria, il rilancio e lo sviluppo delle imprese, il contenimento dei costi gravanti sulle tariffe elettriche, nonche’ per la definizione immediata di adempimenti derivanti dalla normativa europea (loi no 116, portant dispositions urgentes pour le secteur agricole, la protection de l’environnement et l’efficacité énergétique des bâtiments scolaires et universitaires, la relance et le développement des entreprises, l’encadrement des coûts imposés aux tarifs de l’électricité, ainsi que pour la définition immédiate des obligations découlant de la réglementation européenne), du 11 août 2014 (supplément ordinaire au GURI no 192, du 20 août 2014), dont l’article 11, paragraphe 2 bis, a supprimé toute référence au décret ministériel dans l’article 2, paragraphe 4, du décret-loi 2/2012, afin de rendre directement applicables les sanctions qui y sont prévues.

( 32 ) Notification 2011/174/I du 5 avril 2011, Projet de loi concernant l’interdiction de commercialisation de sacs non biodégradables pour l’enlèvement de marchandises, disponible sur la page web suivante : https://ec.europa.eu/growth/tools-databases/tris/fr/search/?trisaction=search.detail&year=2011&num=174.

( 33 ) Par analogie, et en ce qui concerne l’article 3, paragraphe 2, de la directive 75/442/CEE du Conseil, du 15 juillet 1975, relative aux déchets (JO 1975, L 194, p. 39), voir arrêt du 13 juillet 1989, Enichem Base e.a. (380/87, ci-après l’« arrêt Enichem Base », EU:C:1989:318, points 22 à 24).

( 34 ) Arrêt du 18 février 1986, Bulk Oil (Zug) (174/84, EU:C:1986:60, point 62).

( 35 ) Arrêt Airbnb Ireland, point 94 : cette obligation « constitue non pas une simple exigence d’information comparable à celle en cause dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt [Enichem Base], mais une exigence procédurale de nature substantielle justifiant l’inopposabilité aux particuliers des mesures non notifiées restreignant la libre circulation des services de la société de l’information ». L’absence « d’obligation de standstill à la charge de l’État membre ayant l’intention d’adopter une mesure restreignant la libre prestation d’un service de la société de l’information » ne s’oppose pas à cette conclusion (arrêt Airbnb Ireland, point 93).

( 36 ) Concrètement, le point 1 de l’annexe II fixe diverses exigences portant sur la fabrication et la composition de l’emballage, son point 2 énonce les exigences relatives à son caractère réutilisable, et son point 3 établit les exigences en ce qui concerne son caractère valorisable. S’agissant de ce dernier point, l’annexe II fixe quatre critères alternatifs de valorisation, qui peut être garantie par recyclage de matériaux, par valorisation énergétique, par compostage ou par le caractère biodégradable de l’emballage. Le recours à n’importe laquelle de ces technologies de valorisation garantit en tout état de cause que les emballages peuvent être commercialisés sur le marché intérieur de l’Union.

( 37 ) Arrêts du 14 décembre 2004, Radlberger Getränkegesellschaft et S. Spitz (C‑309/02, EU:C:2004:799, point 56), et du 14 décembre 2004, Commission/Allemagne (C‑463/01, EU:C:2004:797, point 44). À l’inverse, « l’organisation des systèmes nationaux destinés à favoriser la réutilisation des emballages ne fait [...] pas l’objet d’une harmonisation complète ».

( 38 ) Arrêts du 5 mai 1993, Commission/France (C‑246/91, EU:C:1993:174, point 7), du 8 mai 2003, ATRAL (C‑14/02, EU:C:2003:265, point 44), et du 12 avril 2018, Fédération des entreprises de la beauté (C‑13/17, EU:C:2018:246, point 23).

( 39 ) Arrêts du 24 février 2022, Viva Telecom Bulgaria (C‑257/20, EU:C:2022:125, point 45), et du 19 janvier 2023, CIHEF e.a. (C‑147/21, EU:C:2023:31, point 26).

( 40 ) Voir, par analogie, arrêt du 7 mars 2013, Lapin ELY-keskus, liikenne ja infrastruktuuri (C‑358/11, EU:C:2013:142, point 37).

( 41 ) La Commission doit vérifier si la mesure nationale est ou non un moyen de discrimination arbitraire ou une restriction déguisée dans le commerce entre États membres et si elle constitue ou non une entrave au fonctionnement du marché intérieur.

( 42 ) Arrêts du 6 novembre 2018, Max-Planck-Gesellschaft zur Förderung der Wissenschaften (C‑684/16, EU:C:2018:874, point 63), du 14 janvier 2021, RTS infra et Aannemingsbedrijf Norré-Behaegel (C‑387/19, EU:C:2021:13, points 46 et 47), et du 8 mars 2022, Bezirkshauptmannschaft Hartberg-Fürstenfeld (Effet direct) (C‑205/20, EU:C:2022:168, points 17 à 19).

( 43 ) Arrêts du 24 juin 2019, Popławski (C‑573/17, EU:C:2019:530, point 68), et du 18 janvier 2022, Thelen Technopark Berlin (C‑261/20, EU:C:2022:33, point 20).

( 44 ) Arrêts du 28 juin 2022, Commission/Espagne (Violation du droit de l’Union par le législateur) (C‑278/20, EU:C:2022:503, point 31), et du 22 décembre 2022, Ministre de la Transition écologique et Premier ministre (Responsabilité de l’État pour la pollution de l’air) (C‑61/21, EU:C:2022:1015, point 44).

( 45 ) Arrêts du 5 mars 1996, Brasserie du pêcheur et Factortame (affaires jointesC‑46/93 et C‑48/93, EU:C:1996:79, point 66), et du 28 juin 2022, Commission/Espagne (Violation du droit de l’Union par le législateur) (C‑278/20, EU:C:2022:503, point 32).

( 46 ) Arrêts du 19 juin 2014, Specht e.a. (affaires jointesC‑501/12 à C‑506/12, C‑540/12 et C‑541/12, EU:C:2014:2005, point 100), et du 4 octobre 2018, Kantarev (C‑571/16, EU:C:2018:807, point 95).

( 47 ) Arrêts du 5 mars 1996, Brasserie du pêcheur et Factortame (affaires jointesC‑46/93 et C‑48/93, EU:C:1996:79, point 56), et du 29 juillet 2019, Hochtief Solutions Magyarországi Fióktelepe (C‑620/17, EU:C:2019:630, point 42).

( 48 ) C’est pour cette raison qu’il a subordonné l’entrée en vigueur du décret de 2013 à une issue favorable à la procédure prévue par la directive 98/34.

( 49 ) En tout état de cause, l’élément temporel pourrait avoir une incidence sur le calcul de l’indemnité à charge de l’État italien, en fonction de la durée des effets négatifs de la violation pour les opérateurs économiques : la violation suffisamment caractérisée a cessé à compter de l’entrée en vigueur de la directive 2015/720, à tout le moins en ce qui concerne l’interdiction de commercialiser des sacs en plastique à usage unique d’une épaisseur inférieure à 50 microns.

( 50 ) Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 94/62/CE relative aux emballages et aux déchets d’emballages pour réduire la consommation de sacs en plastique légers à poignées, COM(2013) 761 final, du 4 novembre 2013.