CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. JEAN RICHARD DE LA TOUR

présentées le 13 janvier 2022 ( 1 )

Affaire C‑569/20

IR

Procédure pénale

en présence de

Spetsializirana prokuratura

[demande de décision préjudicielle formée par le Spetsializiran nakazatelen sad (tribunal pénal spécialisé, Bulgarie)]

« Renvoi préjudiciel – Coopération judiciaire en matière pénale – Directive (UE) 2016/343 – Droit d’assister à son procès – Articles 8 et 9 – Exigences en cas de condamnation par défaut – Droit à un nouveau procès – Fuite de la personne poursuivie – Réglementation nationale excluant la réouverture de la procédure pénale lorsque la personne condamnée par défaut a pris la fuite après avoir pris connaissance des accusations portées à son encontre pendant la phase d’instruction de la procédure »

I. Introduction

1.

Un individu qui a été condamné à l’issue d’un procès auquel il n’a pas comparu en personne en raison de sa fuite peut-il bénéficier du droit à un nouveau procès, conformément à l’article 8, paragraphe 4, seconde phrase, et à l’article 9 de la directive (UE) 2016/343 du Parlement européen et du Conseil, du 9 mars 2016, portant renforcement de certains aspects de la présomption d’innocence et du droit d’assister à son procès dans le cadre des procédures pénales ( 2 ) ?

2.

Tel est, en substance, l’objet des questions préjudicielles que pose le Spetsializiran nakazatelen sad (tribunal pénal spécialisé, Bulgarie).

3.

Cette demande a été présentée dans le cadre d’une procédure pénale dans laquelle il a été décidé de juger IR en son absence. Bien que cet individu ait été informé des accusations portées à son encontre pendant la phase d’instruction préliminaire, celui-ci a pris la fuite, de sorte qu’il n’a été informé ni de l’acte d’accusation définitif, ni de la date et du lieu de son procès, ni des conséquences d’un défaut de comparution.

4.

La juridiction de renvoi s’interroge, par conséquent, sur la portée des exigences que requiert le législateur de l’Union dans le cadre de la directive 2016/343 afin de garantir les droits de la défense de ce dernier. En particulier, elle cherche à déterminer s’il sera possible d’exécuter la décision rendue à l’issue du procès tenu en son absence en application de l’article 8, paragraphes 2 et 3, de cette directive ou, au contraire, s’il sera nécessaire de prévoir une nouvelle procédure de jugement, conformément à l’article 8, paragraphe 4, seconde phrase, et à l’article 9 de ladite directive.

5.

Dans les présentes conclusions, j’expliquerai que, si l’information de la personne poursuivie quant à la tenue de son procès constitue une exigence essentielle que pose la directive 2016/343 aux fins du respect des droits de la défense, le législateur de l’Union permet toutefois aux États membres d’examiner la mesure dans laquelle cette exigence a été satisfaite in concreto. Il invite ces derniers à accorder une attention particulière aux comportements adoptés tant par les autorités nationales compétentes pour communiquer cette information que par cette personne pour recevoir celle-ci.

6.

Dans ce contexte, j’exposerai les raisons pour lesquelles l’article 8, paragraphes 2 et 3, de la directive 2016/343, qui permet aux États membres d’exécuter une décision rendue à l’issue d’un procès auquel la personne poursuivie n’a pas comparu, recouvre une situation dans laquelle le juge national constate, en ayant égard à l’ensemble des circonstances concrètes caractérisant la situation en cause, que, malgré la diligence et les efforts dont ont fait preuve les autorités nationales compétentes pour informer la personne poursuivie de la tenue de son procès et des conséquences d’un défaut de comparution, celle-ci a manqué, de manière délibérée et intentionnelle, aux obligations mises à sa charge pour recevoir ces informations dans le but de se soustraire à l’action de la justice. Je préciserai que, dans l’hypothèse où le juge national procède à ces constatations, l’article 8, paragraphe 4, seconde phrase, et l’article 9 de la directive 2016/343 ne s’opposent pas à une réglementation nationale en vertu de laquelle il n’est pas fait droit à une nouvelle procédure de jugement lorsque la personne poursuivie a pris la fuite après avoir été informée des accusations pesant à son encontre pendant la phase d’instruction préliminaire, mais avant qu’elle soit informée de l’acte d’accusation définitif.

II. Le cadre juridique

A.   La directive 2016/343

7.

La directive 2016/343 établit, conformément à son article 1er, des règles minimales communes concernant, d’une part, certains aspects de la présomption d’innocence et, d’autre part, le droit d’assister à son procès.

8.

Ses considérants 37 et 38 énoncent :

« (37)

Un procès pouvant donner lieu à une décision statuant sur la culpabilité ou l’innocence devrait [...] pouvoir avoir lieu en l’absence du suspect ou de la personne poursuivie lorsque cette personne a été informée de la tenue du procès et a donné mandat à un avocat qui a été désigné par cette personne ou par l’État pour la représenter au procès et qui a représenté le suspect ou la personne poursuivie.

(38)

Lorsqu’il s’agit de déterminer si la manière dont l’information est fournie est suffisante pour garantir que l’intéressé a connaissance du procès, une attention particulière devrait, le cas échéant, être également accordée, d’une part, à la diligence dont ont fait preuve les autorités publiques pour informer la personne concernée et, d’autre part, à la diligence dont a fait preuve la personne concernée pour recevoir l’information qui lui est adressée. »

9.

L’article 8 de cette directive, intitulé « Droit d’assister à son procès », prévoit, à ses paragraphes 1 à 4 :

« 1.   Les États membres veillent à ce que les suspects et les personnes poursuivies aient le droit d’assister à leur procès.

2.   Les États membres peuvent prévoir qu’un procès pouvant donner lieu à une décision statuant sur la culpabilité ou l’innocence du suspect ou de la personne poursuivie peut se tenir en son absence, pour autant que :

a)

le suspect ou la personne poursuivie ait été informé, en temps utile, de la tenue du procès et des conséquences d’un défaut de comparution ; ou

b)

le suspect ou la personne poursuivie, ayant été informé de la tenue du procès, soit représenté par un avocat mandaté, qui a été désigné soit par le suspect ou la personne poursuivie, soit par l’État.

3.   Une décision prise conformément au paragraphe 2 peut être exécutée à l’encontre du suspect ou de la personne poursuivie concerné.

4.   Lorsque les États membres prévoient la possibilité que des procès se tiennent en l’absence du suspect ou de la personne poursuivie, mais qu’il n’est pas possible de respecter les conditions fixées au paragraphe 2 du présent article parce que le suspect ou la personne poursuivie ne peut être localisé en dépit des efforts raisonnables consentis à cet effet, les États membres peuvent prévoir qu’une décision peut néanmoins être prise et exécutée. Dans de tels cas, les États membres veillent à ce que les suspects ou les personnes poursuivies, lorsqu’ils sont informés de la décision, en particulier au moment de leur arrestation, soient également informés de la possibilité de contester cette décision et de leur droit à un nouveau procès ou à une autre voie de droit, conformément à l’article 9. »

10.

L’article 9 de ladite directive, intitulé « Droit à un nouveau procès », dispose :

« Les États membres veillent à ce que les suspects ou les personnes poursuivies, lorsqu’ils n’ont pas assisté à leur procès et que les conditions prévues à l’article 8, paragraphe 2, n’étaient pas réunies, aient droit à un nouveau procès ou à une autre voie de droit, permettant une nouvelle appréciation du fond de l’affaire, y compris l’examen de nouveaux éléments de preuve, et pouvant aboutir à une infirmation de la décision initiale. À cet égard, les États membres veillent à ce que lesdits suspects et personnes poursuivies aient le droit d’être présents, de participer effectivement, conformément aux procédures prévues par le droit national, et d’exercer les droits de la défense. »

B.   Le droit bulgare

11.

L’article 55, paragraphe 1, du Nakazatelno-protsesualen kodeks (code de procédure pénale, ci-après le « NPK ») énonce :

« La personne poursuivie jouit des droits suivants : [...] participer à la procédure pénale [...] »

12.

L’article 94, paragraphes 1 et 3, du NPK dispose :

« (1)   La participation d’un représentant au procès pénal est obligatoire lorsque :

[...]

8.

l’affaire est examinée en l’absence de la personne poursuivie ;

[...]

(3)   Lorsque l’intervention d’un représentant est obligatoire, l’autorité compétente désigne un avocat en tant que représentant. »

13.

L’article 247b, paragraphe 1, du NPK est libellé comme suit :

« Une copie de l’acte d’accusation est remise à la personne poursuivie sur ordre du juge rapporteur. La signification de l’acte d’accusation informe la personne poursuivie de la date fixée pour l’audience préliminaire et des questions visées à l’article 248, paragraphe 1, de son droit de comparaître avec un avocat de son choix et de la possibilité d’avoir un avocat commis d’office dans les cas visés à l’article 94, paragraphe 1, et de ce que l’affaire peut être examinée et jugée en son absence, conformément à l’article 269. »

14.

L’article 269 du NPK prévoit :

« (1)   La présence de la personne poursuivie au procès est obligatoire lorsque celle-ci est accusée d’une infraction pénale grave.

[...]

(3)   Lorsque cela n’empêche pas de découvrir la vérité objective, l’affaire peut être examinée en l’absence de la personne poursuivie si :

1.

celle-ci ne se trouve pas à l’adresse qu’elle a indiquée ou en a changé sans en informer l’autorité compétente ;

2.

son lieu de résidence en Bulgarie n’est pas connu et n’a pas été établi à la suite d’une recherche approfondie ;

[...]

4.

[celle-ci] se situe en dehors du territoire bulgare, et

a)

son lieu de résidence est inconnu ;

[...] »

15.

L’article 423, paragraphes 1 à 3, du NPK dispose :

« (1)   Dans un délai de six mois à compter de la prise de connaissance de la condamnation pénale définitive ou de sa transmission effective à la République de Bulgarie par un autre pays, la personne condamnée par défaut peut demander la réouverture du dossier pénal en invoquant son absence lors de la procédure pénale. La demande est accueillie, sauf, d’une part, dans le cas où la personne condamnée a pris la fuite après la communication des chefs d’accusation dans le cadre de la procédure préliminaire, avec pour effet que la procédure au titre de l’article 247b, paragraphe 1, ne peut être exécutée, ou, d’autre part, après que ladite procédure a été exécutée, la personne condamnée n’a pas comparu à l’audience sans raison valable.

(2)   La demande ne suspend pas l’exécution de la condamnation pénale, sauf si la juridiction en dispose autrement.

(3)   Il est mis fin à la procédure de réouverture du dossier pénal si la personne condamnée par défaut ne se présente pas à l’audience sans raison valable. »

16.

L’article 425 du NPK énonce, à son paragraphe 1, point 1 :

« Lorsqu’elle juge que la demande de réouverture est fondée, la juridiction peut :

1.   annuler la condamnation [...] et renvoyer l’affaire pour un nouvel examen en indiquant à quelle étape doit commencer le nouvel examen de l’affaire. »

III. Le litige au principal et les questions préjudicielles

17.

La Spetsializirana prokuratura (parquet spécialisé, Bulgarie) a engagé des poursuites pénales à l’encontre d’IR, en raison de sa participation présumée à un groupe criminel organisé ayant pour but de commettre des infractions fiscales, passibles de peines privatives de liberté.

18.

L’acte d’accusation a été notifié personnellement à IR. À l’issue de cette notification, IR a indiqué l’adresse à laquelle il pourrait être contacté. Cependant, il n’a pas été trouvé à celle-ci lors du déclenchement de la phase juridictionnelle de la procédure pénale ni à l’occasion des tentatives du Spetsializiran nakazatelen sad (tribunal pénal spécialisé) de le convoquer à l’audience. Par ailleurs, l’avocat qu’il avait mandaté a renoncé à le défendre. La juridiction de renvoi a désigné un avocat d’office qui n’est, cependant, pas entré en contact avec IR.

19.

L’acte d’accusation ayant été entaché d’une irrégularité, cet acte a été déclaré nul et la procédure judiciaire ouverte à son encontre a été clôturée en conséquence ( 3 ).

20.

Par la suite, un nouvel acte d’accusation a été dressé et la procédure a été rouverte. Toutefois, à cette occasion également, IR a été recherché, y compris par l’intermédiaire des membres de sa famille, de ses anciens employeurs et des opérateurs de téléphonie mobile, mais n’a pas pu être localisé. Il semble ainsi que, dans le cadre de la nouvelle procédure judiciaire, en raison de la fuite d’IR, les autorités nationales compétentes n’ont pas pu procéder à la notification du nouvel acte d’accusation adopté à son encontre, malgré les démarches qu’elles ont entreprises à cet effet.

21.

La juridiction de renvoi estime que l’affaire doit être jugée en l’absence d’IR, ce qui aurait été débattu lors de la première audience de l’affaire. Elle expose toutefois que, dans l’hypothèse où IR ferait l’objet d’une condamnation par défaut, elle devra indiquer dans sa décision les garanties procédurales dont celui-ci dispose à la suite du procès et, en particulier, les voies de recours à sa disposition, et ce de façon à garantir le respect de la directive 2016/343.

22.

Or, pour ce qui concerne tant la régularité du procès par défaut que les voies de recours, il existerait une équivoque quant aux garanties procédurales dont l’intéressé doit bénéficier dans une situation telle que celle en cause, où il a, après avoir eu communication du premier acte d’accusation et avant le déclenchement de la phase juridictionnelle de la procédure pénale, pris la fuite. La juridiction de renvoi indique, par ailleurs, qu’il ne peut être exclu qu’IR soit trouvé et arrêté sur le territoire d’un autre État membre et remis aux autorités bulgares en vertu d’un mandat d’arrêt européen. Les questions sur la portée de la directive 2016/343 devraient donc être examinées en tenant compte de l’article 4 bis de la décision-cadre 2002/584/JAI du Conseil, du 13 juin 2002, relative au mandat d’arrêt européen et aux procédures de remise entre États membres ( 4 ), telle que modifiée par la décision‑cadre 2009/299/JAI du Conseil, du 26 février 2009 ( 5 ).

23.

Dans ces conditions, le Spetsializiran nakazatelen sad (tribunal pénal spécialisé) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :

« 1)

L’article 8, paragraphe 2, sous b), lu conjointement avec les considérants 36 à 39, de la directive [2016/343] et l’article 4 bis, paragraphe 1, sous b), lu conjointement avec les considérants 7 à 10, de la décision-cadre [2002/584], doivent-ils être interprétés comme couvrant le cas dans lequel la personne poursuivie a été informée de l’accusation portée contre elle, dans sa version initiale, et, par suite de sa fuite, ne peut objectivement pas être informée du procès et est représentée par un avocat commis d’office, avec lequel elle n’entretient aucun contact ?

2)

En cas de réponse négative :

Une disposition nationale (l’article 423, paragraphes 1 et 5, du [NPK]), ne prévoyant pas de voie de recours contre des actes d’enquête effectués par défaut et contre une condamnation par défaut si la personne poursuivie, après avoir été informée de la version initiale de l’accusation, s’est enfuie et, pour cette raison, n’a pas pu être informée de la date et du lieu du procès et des conséquences d’un défaut de comparution, est-elle conforme à l’article 9, lu conjointement avec l’article 8, paragraphe 4, seconde phrase, de la directive [2016/343] et à l’article 4 bis, paragraphe 3, lu conjointement avec l’article 4 bis, paragraphe 1, sous d), de la décision-cadre [2002/584] ?

3)

En cas de réponse négative :

L’article 9 de la directive [2016/343], lu conjointement avec l’article 47 de la [c]harte [des droits fondamentaux de l’Union européenne], a-t-il un effet direct ? »

24.

Seule la Commission européenne a déposé des observations écrites et a répondu aux questions pour réponse écrite posées par la Cour.

IV. Analyse

A.   Sur la recevabilité

25.

L’examen du renvoi préjudiciel nécessite de formuler une observation liminaire relative à la recevabilité des première et deuxième questions préjudicielles.

26.

Ces deux questions se composent chacune de deux branches. La première branche concerne l’interprétation des dispositions pertinentes de la directive 2016/343, alors que la seconde branche vise celle des dispositions de la décision-cadre 2002/584. Or, à l’instar de la Commission, je considère que l’interprétation des dispositions de cette décision-cadre, et, en particulier, de son article 4 bis, n’est pas pertinente pour la solution du litige au principal. En effet, à la lumière du cadre factuel défini dans la demande de décision préjudicielle, je constate que le litige pendant devant la juridiction de renvoi et dans lequel celle-ci est appelée à rendre une décision ne concerne, ni à titre principal ni à titre incident, la question de la validité ou de l’exécution d’un mandat d’arrêt européen. L’interprétation que sollicite le Spetsializiran nakazatelen sad (tribunal pénal spécialisé) des dispositions énoncées à l’article 4 bis de ladite décision-cadre relève en réalité d’un problème de nature hypothétique, cette juridiction relevant qu’il ne peut être exclu qu’IR soit trouvé et arrêté sur le territoire d’un autre État membre et remis aux autorités bulgares en vertu d’un mandat d’arrêt européen.

27.

Dans ces circonstances, je propose, conformément à la jurisprudence de la Cour, de déclarer les première et deuxième questions préjudicielles irrecevables pour autant qu’elles portent sur l’interprétation de la décision-cadre 2002/584 ( 6 ).

B.   Sur le fond

28.

Le présent renvoi préjudiciel invite, en substance, la Cour à déterminer la mesure dans laquelle une personne condamnée à l’issue d’un procès auquel elle n’a pas comparu peut bénéficier, en application de l’article 9 de la directive 2016/343, d’une nouvelle procédure de jugement lorsque cette personne, ayant eu notification d’un acte d’accusation par la suite annulé, a pris la fuite, de sorte qu’elle n’a été informée ni de l’acte d’accusation définitif, ni de la tenue de son procès, ni des conséquences du défaut de comparution, d’une part, et est représentée par un avocat désigné par l’État, avec qui elle n’entretient aucun contact, d’autre part.

29.

La juridiction de renvoi adresse ses questions à la Cour, compte tenu des dispositions prévues à l’article 423, paragraphe 1, du NPK. En effet, cet article énonce le principe selon lequel il est fait droit à la demande de réouverture de la procédure pénale lorsque celle-ci est formulée par une personne condamnée par défaut dans un délai de six mois après qu’elle a eu connaissance de la décision de condamnation ( 7 ). Ledit article prévoit toutefois des exceptions à ce principe ( 8 ). Ainsi, la demande de réouverture de la procédure pénale peut être rejetée lorsque la personne condamnée a pris la fuite après la communication des chefs d’accusation pendant l’instruction, mais avant que lui soit notifié l’acte d’accusation définitif. Il en découle, selon le juge de renvoi, qu’il n’est pas fait droit à un nouveau procès dans la situation où la personne poursuivie n’a donc été informée ni de la tenue de l’audience préliminaire, ni de la possibilité de se faire représenter par un avocat, ni des conséquences du défaut de comparution.

30.

Dans la mesure où aucune disposition de la directive 2016/343 ne fournit d’indication claire quant au régime juridique applicable à une personne en fuite et quant aux droits reconnus à cette dernière à l’issue d’un procès auquel elle n’a pas comparu, la juridiction de renvoi invite donc la Cour à déterminer si une telle réglementation est conforme à cette directive.

31.

À cette fin, elle demande à la Cour de préciser si une personne se trouvant dans la situation d’IR doit être considérée comme relevant du régime juridique prévu à l’article 8, paragraphes 2 et 3, de la directive 2016/343, en vertu duquel il est possible d’exécuter la décision rendue à l’issue d’un procès auquel cette personne n’a pas comparu (première question), ou plutôt de celui visé à l’article 8, paragraphe 4, et à l’article 9 de cette directive, en vertu duquel cette personne devrait bénéficier d’une nouvelle procédure de jugement (deuxième question).

32.

Dans la mesure où ces deux ensembles de règles s’articulent, je propose à la Cour d’examiner conjointement les première et deuxième questions préjudicielles.

33.

Je débuterai mon analyse par un examen des termes des articles 8 et 9 de la directive 2016/343, avant de concentrer celui-ci, d’une part, sur les objectifs que le législateur de l’Union entend poursuivre dans le cadre de cette directive et, d’autre part, sur la jurisprudence que la Cour européenne des droits de l’homme a dégagée quant au respect de l’article 6, paragraphe 1, de la convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ( 9 ).

1. Analyse textuelle de l’article 8, paragraphes 2 et 4, ainsi que de l’article 9 de la directive 2016/343

34.

Après avoir affirmé le principe selon lequel les personnes poursuivies ont le droit d’assister à leur procès, le législateur de l’Union autorise les États membres à prévoir des procédures permettant de juger les personnes en leur absence. Ainsi, en application de l’article 8, paragraphes 2 et 3, de la directive 2016/343, les États membres peuvent prévoir de tenir un procès en l’absence de la personne poursuivie et d’exécuter la décision adoptée à l’issue de celui-ci. Ces dispositions reposent sur le postulat selon lequel cette personne a été informée de la date et du lieu de son procès, de sorte qu’elle est réputée avoir renoncé volontairement et de manière non équivoque à être présente à celui-ci.

35.

En effet, ainsi que je vais le démontrer, il ressort des articles 8 et 9 de cette directive que les personnes condamnées lors d’un procès au cours duquel elles n’ont pas comparu se divisent en deux catégories. D’une part, celle des personnes dont on a la certitude qu’elles ont eu ou auraient pu avoir connaissance de la date et du lieu de leur procès et, d’autre part, celle des autres. Les personnes faisant partie de la seconde catégorie ont droit à un nouveau procès, alors que les personnes faisant partie de la première catégorie ne bénéficient pas d’une telle mesure. Aux fins de refuser l’organisation d’un nouveau procès, le législateur de l’Union énonce deux conditions ( 10 ).

36.

La première condition, visée à l’article 8, paragraphe 2, sous a), de la directive 2016/343, est relative à l’information de la personne poursuivie. Celle-ci doit avoir été informée, en temps utile, de la tenue de son procès et des conséquences d’un défaut de comparution. En d’autres termes, cette personne doit avoir eu connaissance du fait qu’une décision sur la culpabilité ou sur l’innocence pourra être rendue contre elle si elle ne se présente pas au procès.

37.

La seconde condition, visée à l’article 8, paragraphe 2, sous b), de cette directive, est relative à la représentation de la personne poursuivie par un avocat. Elle vise le cas dans lequel cette personne, ayant été informée de la tenue du procès, a délibérément choisi d’être représentée par un conseil juridique au lieu de comparaître en personne au procès ( 11 ). Cela est, en principe, de nature à démontrer qu’elle a renoncé à assister à son procès, tout en garantissant son droit à se défendre. La Cour européenne des droits de l’homme considère que le droit de tout accusé à être effectivement défendu par un avocat, au besoin commis d’office, figure parmi les éléments fondamentaux du procès équitable. Un accusé n’en perd pas le bénéfice du seul fait de son absence aux débats. Il est donc d’une importance cruciale pour l’équité du système pénal que l’absence de l’accusé à son procès ne soit pas sanctionnée en dérogeant au droit à l’assistance d’un défenseur et qu’il soit adéquatement défendu tant en première instance qu’en appel ( 12 ).

38.

Je constate, en premier lieu, que, pour que chacune de ces conditions soit remplie, il est nécessaire que la personne poursuivie ait été informée de la tenue de son procès. Le respect de cette obligation est donc essentiel aux fins de l’exécution d’une décision de condamnation adoptée à l’issue d’un procès auquel cette personne n’a pas comparu.

39.

Je constate, en second lieu, que le manquement à cette obligation d’information entraîne l’application des règles énoncées à l’article 8, paragraphe 4, et à l’article 9 de la directive 2016/343, puisque les autorités nationales compétentes sont alors tenues de veiller à ce que la personne poursuivie bénéficie d’une nouvelle procédure de jugement. Ainsi qu’en témoignent les termes de ces articles ( 13 ), les dispositions visées à l’article 8, paragraphes 2 et 3, ainsi que celles énoncées à l’article 8, paragraphe 4, et à l’article 9 de cette directive s’articulent de façon à former un ensemble cohérent, l’information de cette personne constituant « le point de bascule » dans l’un ou l’autre régime.

40.

La portée du droit à un nouveau procès est donc définie à l’article 9 de ladite directive.

41.

S’agissant de la forme de la nouvelle procédure de jugement, le législateur de l’Union laisse aux États membres le soin de déterminer le système de voies de recours et de procédures permettant d’assurer le respect des droits de la défense des personnes condamnées par défaut. Cela est parfaitement cohérent au regard de la nature minimale des règles établies par la directive 2016/343 ( 14 ), celle-ci ne constituant pas un instrument complet et exhaustif qui aurait pour objet de fixer toutes les conditions d’adoption d’une décision judiciaire ( 15 ). Le choix de ces modalités relève de l’autonomie procédurale des États membres et est effectué en fonction des particularités du système juridique de ces derniers.

42.

S’agissant de la portée de cette nouvelle procédure de jugement, le législateur de l’Union met, en revanche, à la charge des États membres des obligations précises et sans équivoque. En effet, il exige de ces derniers qu’ils établissent une procédure permettant une nouvelle appréciation du fond de l’affaire, y compris un examen des nouveaux éléments de preuve, et permettant, en outre, d’aboutir à une infirmation de la décision initiale. Il impose, ensuite, aux États membres de s’assurer que la personne poursuivie bénéficiera, dans le cadre de cette nouvelle voie de droit, du droit d’être présente et de participer effectivement à l’instance qui en découle, conformément aux procédures prévues par le droit national, et qu’elle pourra exercer les droits de la défense.

43.

Le législateur de l’Union intègre ici les exigences essentielles de la nouvelle procédure de jugement dégagées par la Cour européenne des droits de l’homme que j’expose aux points 66 et 67 des présentes conclusions ( 16 ).

44.

À l’issue de cet examen des termes de la directive 2016/343, je constate qu’une situation dans laquelle la personne poursuivie n’a été informée ni de la tenue de son procès ni des conséquences d’un défaut de comparution ne relève donc pas, a priori, des dispositions énoncées à l’article 8, paragraphe 2, de cette directive, mais de celles énoncées à l’article 8, paragraphe 4, de celle-ci.

45.

Il persiste cependant une « zone grise » qui concerne la situation des personnes qui n’ont pas été informées de la tenue de leur procès pour un motif qui leur est imputable. La question à laquelle il convient de répondre à présent est, notamment, celle de savoir si cette interprétation est applicable dans une situation dans laquelle la personne poursuivie n’a pu être informée ni de la tenue de son procès ni des conséquences du défaut de comparution, en raison de sa fuite.

46.

En d’autres termes, le législateur de l’Union a-t-il entendu faire du respect de l’obligation d’information une exigence absolue, indépendante du comportement adopté par la personne poursuivie et, en particulier, des raisons pour lesquelles celle-ci n’a pas pu être localisée, malgré les efforts déployés par les autorités nationales compétentes ? Le législateur de l’Union exige-t-il des États membres qu’ils prévoient une nouvelle procédure de jugement toutes les fois que la personne poursuivie est en fuite ?

47.

Pour les raisons que je vais à présent exposer, je n’en suis pas convaincu.

48.

En premier lieu, il ressort du considérant 36 de la directive 2016/343 que l’obligation incombant aux autorités nationales compétentes d’informer la personne poursuivie de la tenue du procès implique qu’elle soit citée en personne ou qu’elle soit informée officiellement et en temps utile, par d’autres moyens, de la date et du lieu fixés pour le procès, de manière à lui permettre d’avoir connaissance de ce dernier. Le législateur de l’Union intègre ici aussi la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme, selon laquelle un accusé ne peut être considéré comme ayant renoncé implicitement, par son comportement, au droit de prendre part à son procès que s’il a été démontré qu’il pouvait raisonnablement prévoir les conséquences de son comportement à cet égard ( 17 ). Les juridictions nationales doivent donc faire preuve de la diligence requise en faisant citer l’accusé en bonne et due forme ( 18 ), ce qui implique qu’il soit informé de la tenue d’une audience de manière non seulement à ce qu’il ait connaissance de la date, de l’heure et du lieu de l’audience, mais aussi à ce qu’il dispose de suffisamment de temps pour préparer sa défense et se rendre au prétoire ( 19 ).

49.

Il découle toutefois du considérant 38 de la directive 2016/343 que la manière dont l’information est fournie, et, en particulier, son caractère suffisant, peut faire l’objet d’un contrôle. En effet, le législateur de l’Union relève que, « [l]orsqu’il s’agit de déterminer si la manière dont l’information est fournie est suffisante pour garantir que l’intéressé a connaissance du procès, une attention particulière devrait, le cas échéant, être également accordée, d’une part, à la diligence dont ont fait preuve les autorités publiques pour informer la personne concernée et, d’autre part, à la diligence dont a fait preuve la personne concernée pour recevoir l’information qui lui est adressée ».

50.

J’en déduis que les États membres peuvent alors procéder à un examen au cas par cas de la manière et des circonstances dans lesquelles l’information a été communiquée à la personne poursuivie. L’emploi des expressions « le cas échéant » et « également » tend, selon moi, à démontrer que les États membres peuvent prendre en considération des facteurs autres que ceux ayant trait à la nature, à la forme ou au contenu de l’acte par lequel l’information a été communiquée. En exigeant de ces derniers qu’ils accordent une « attention particulière » à la diligence dont ont fait preuve tant les autorités nationales que la personne poursuivie pour, respectivement, communiquer ou recevoir l’information, le législateur de l’Union met l’accent, d’après moi, sur les comportements adoptés par chacune des parties à la procédure pénale.

51.

C’est dans le cadre de cet examen que les États membres peuvent, à mon sens, tenir compte de la fuite de la personne poursuivie. Cette notion, bien qu’elle soit visée au considérant 39 de la directive 2016/343, n’est pas définie dans le cadre de celle-ci. Il découle néanmoins du sens commun que la « fuite » traduit, avant tout, un comportement et, en particulier, celui par lequel une personne se dérobe, se sauve ou tente de se soustraire à ce qui est pénible, pesant ou dangereux ( 20 ).

52.

Je pense qu’il est donc nécessaire de distinguer deux cas de figure dans le chef des personnes en fuite.

53.

Le premier cas de figure est celui dans lequel, malgré toute la diligence et tous les efforts déployés par les autorités nationales pour informer la personne poursuivie de la date et du lieu de son procès ainsi que des conséquences du défaut de comparution, celle-ci n’a pas eu communication de ces informations parce qu’elle a manqué, de manière délibérée et intentionnelle, aux obligations mises à sa charge pour être informée de la tenue de son procès, et ce dans l’intention de se soustraire à l’action de la justice. Dans ce cas de figure, où les autorités nationales auraient entrepris l’ensemble des démarches qu’impose l’information de la personne poursuivie et où celle-ci, par son comportement, s’opposerait à la communication de ces informations, je pense que les États membres devraient être en mesure de procéder à l’exécution de la décision de condamnation conformément aux termes de l’article 8, paragraphe 3, de la directive 2016/343 et de refuser d’organiser un nouveau procès.

54.

Le second cas de figure est celui dans lequel la personne poursuivie n’a pas été informée de la date et du lieu de son procès pour des raisons qui sont en revanche très différentes, indépendantes de sa volonté ou liées à l’existence de motifs légitimes, tels que sa marginalisation ou bien encore sa vulnérabilité. Dans ce cas de figure, où le manquement à l’obligation d’information ne résulterait pas de la violation délibérée et intentionnelle par la personne poursuivie des obligations mises à sa charge, les États membres devraient garantir que cette personne bénéficiera du droit à un nouveau procès, conformément aux principes énoncés à l’article 8, paragraphe 4, seconde phrase, et à l’article 9, de la directive 2016/343.

55.

La distinction que je propose d’opérer dans le chef des personnes en fuite exige que le juge national procède à un examen complet de toutes les circonstances de l’affaire.

56.

Il doit ainsi vérifier que les autorités nationales ont fait preuve d’une diligence suffisante dans leurs efforts d’informer la personne poursuivie, d’assurer sa présence devant la juridiction de jugement et de la localiser, tout en tenant compte, dans ce contexte, de la nature et de la portée des obligations qui ont été mises à la charge de cette personne pour recevoir les informations relatives à la tenue de son procès. Le cas échéant, le juge national doit être en mesure de démontrer sans équivoque, sur la base de faits précis et objectifs propres à l’affaire, que ladite personne était informée de la nature ainsi que de la cause des accusations portées à son encontre et qu’elle a, de manière délibérée et intentionnelle, manqué aux obligations qui lui incombaient afin de pouvoir être informée de la tenue de son procès, par exemple, en communiquant une adresse erronée ou en ne faisant pas connaître, malgré des instructions en ce sens, son changement d’adresse.

57.

L’interprétation que je suggère des termes de l’article 8, paragraphe 2, de la directive 2016/343 n’est pas de nature, selon moi, à porter atteinte aux objectifs poursuivis par le législateur de l’Union ( 21 ).

2. Analyse téléologique de la directive 2016/343

58.

Je rappelle que la directive 2016/343 a pour but d’énoncer des règles minimales communes concernant le droit d’assister à son procès afin de renforcer la reconnaissance et la confiance mutuelles des États membres dans leurs systèmes respectifs de justice pénale ( 22 ). Je rappelle également, conformément à la jurisprudence de la Cour, que cette directive ne constitue pas un instrument complet et exhaustif qui aurait pour objet de fixer toutes les conditions d’adoption d’une décision judiciaire ( 23 ). Ainsi, si le législateur de l’Union exige des États membres qu’ils prévoient une nouvelle procédure de jugement dans le but de garantir le respect des droits de la défense des personnes condamnées par défaut, il ne saurait, afin d’atteindre les objectifs poursuivis par ladite directive, en résulter nécessairement un droit en faveur de ces dernières de bénéficier d’un nouveau procès dans toutes les hypothèses.

59.

Comme l’a jugé la Cour dans l’ordonnance du 14 janvier 2021, UC et TD (Vices de forme de l’acte d’accusation) ( 24 ), il appartient ainsi au juge national d’« assurer un juste équilibre entre, d’une part, le respect des droits de la défense et, d’autre part, la nécessité de garantir l’effectivité des poursuites ainsi que celle de veiller à ce que la procédure se déroule dans un délai raisonnable » ( 25 ). Or, une conception aussi stricte du droit à un procès équitable, qui exigerait de façon systématique la possibilité d’ouvrir une nouvelle procédure de jugement, même dans l’hypothèse où les autorités nationales compétentes se trouveraient de facto dans l’impossibilité d’informer la personne poursuivie de la tenue de son procès en raison de sa fuite, parce qu’elle manque, de manière délibérée et intentionnelle, aux obligations mises à sa charge pour recevoir cette information, risquerait d’alimenter les abus de droit et de procédure de certains prévenus qui espèrent pouvoir plaider le dépassement du délai raisonnable ou la prescription de l’action publique, avec pour conséquence des retards dans l’administration de la justice, le découragement des victimes, qui doivent parfois subir le coût moral et financier de plusieurs audiences, voire un déni de justice.

60.

Les règles posées à l’article 8, paragraphes 2 à 4, et à l’article 9 de la directive 2016/343 doivent donc permettre de garantir un juste équilibre entre, d’une part, l’effectivité des poursuites et une bonne administration de la justice, en permettant aux États membres d’exécuter une décision à l’encontre de la personne qui a, en violation flagrante des obligations qui lui incombent, mis les autorités nationales compétentes dans l’impossibilité de l’informer de la tenue de son procès, de façon à se soustraire à l’action de la justice, ainsi que, d’autre part, le droit à une nouvelle procédure de jugement, laquelle doit être destinée à garantir les droits de la défense de celui qui n’a ni entendu renoncer à comparaître et à se défendre ni eu l’intention de se dérober à la justice.

61.

L’interprétation que je préconise s’inscrit, enfin, dans la ligne de la jurisprudence que la Cour européenne des droits de l’homme a dégagée quant au respect de l’article 6, paragraphe 1, de la CEDH.

3. Analyse de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme

62.

La Cour a rappelé dans l’arrêt du 13 février 2020, Spetsializirana prokuratura (Audience en l’absence de la personne poursuivie) ( 26 ), les raisons pour lesquelles il convient de tenir compte de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme relative au respect du droit d’assister à son procès dans le cadre de l’interprétation des dispositions énoncées dans la directive 2016/343 ( 27 ). Le législateur de l’Union a, en effet, clairement exposé aux considérants 11, 13, 33, 45, 47 et 48 de cette directive sa volonté de renforcer et de garantir une application effective du droit à un procès équitable dans le cadre des procédures pénales en intégrant, dans le droit de l’Union, la jurisprudence développée par cette Cour quant au respect de l’article 6, paragraphe 1, de la CEDH.

63.

Concernant cet article, la Cour européenne des droits de l’homme juge que la fuite d’une personne est suffisamment caractérisée dès lors que celle-ci sait qu’une procédure pénale est dirigée contre elle, qu’elle connaît la nature ainsi que la cause de l’accusation et qu’elle n’a pas l’intention de prendre part au procès ou entend se soustraire aux poursuites ( 28 ).

64.

Dans ce contexte, cette Cour raisonne en deux temps.

65.

Dans un premier temps, la Cour européenne des droits de l’homme détermine s’il a été établi, sur la base de faits objectifs et pertinents, que la personne poursuivie a renoncé à son droit à comparaître et à se défendre ou qu’elle a eu l’intention de se soustraire à la justice. À cet égard, cette Cour exige des juridictions nationales qu’elles fassent preuve de la diligence requise en notifiant personnellement à la personne poursuivie les accusations qui pèsent sur elle et en la faisant citer en bonne et due forme ( 29 ). En l’absence de réception d’une notification officielle, certains faits et constatations suffisants peuvent, selon ladite Cour, permettre de démontrer, sans équivoque, que la personne poursuivie est informée qu’une procédure pénale est dirigée contre elle, qu’elle connaît la nature ainsi que la cause de l’accusation et qu’elle n’a pas l’intention de prendre part au procès ou entend se soustraire aux poursuites ( 30 ). C’est dans ce contexte qu’elle examine si les autorités nationales compétentes ont fait preuve d’une diligence suffisante dans leurs efforts de localiser la personne poursuivie et de l’informer de la procédure pénale ( 31 ), notamment en procédant à des recherches adéquates ( 32 ). Dans l’arrêt du 11 octobre 2012, Abdelali c. France ( 33 ), la même Cour a ainsi rappelé que la simple absence du requérant de son lieu de résidence habituel ou du domicile de ses parents ne suffisait pas pour considérer que le requérant avait connaissance des poursuites ainsi que du procès à son encontre et qu’il était « en fuite ».

66.

Lorsque ces constatations ne sont pas suffisantes, la Cour européenne des droits de l’homme examine, dans un second temps, la mesure dans laquelle la personne poursuivie a pu bénéficier, avec certitude, de la possibilité de comparaître à un nouveau procès ( 34 ). Selon elle, l’obligation de garantir à l’accusé le droit d’être présent dans la salle d’audience – soit pendant la première procédure à son encontre, soit au cours d’un nouveau procès – est l’un des éléments essentiels de l’article 6 de la CEDH. À défaut, la procédure pénale serait considérée comme étant « manifestement contraire aux dispositions de l’article 6 [de la CEDH] » ou constitutive d’un « flagrant déni de justice » ( 35 ).

67.

La Cour européenne des droits de l’homme exige ainsi que la personne poursuivie ait la possibilité d’obtenir une nouvelle appréciation du bien-fondé des accusations portées contre elle, en fait comme en droit, par un tribunal « doté de la plénitude de juridiction » et siégeant en sa présence ( 36 ), lui offrant toutes les garanties d’un procès équitable offertes par l’article 6 de la CEDH. Elle laisse toutefois aux États contractants « une grande liberté dans le choix des moyens propres à permettre à leurs systèmes judiciaires de répondre aux exigences [de cet article] », pour autant que « les ressources offertes par le droit interne se révèlent effectives si l’accusé n’a ni renoncé à comparaître et à se défendre ni eu l’intention de se soustraire à la justice » ( 37 ).

68.

Les principes ainsi exposés ont été appliqués par la Cour européenne des droits de l’homme dans l’arrêt du 26 janvier 2017, Lena Atanasova c. Bulgarie ( 38 ). Dans l’affaire ayant donné lieu à cet arrêt, cette Cour était saisie de la question de savoir si le Varhoven kasatsionen sad (Cour suprême de cassation) avait violé l’article 6, paragraphe 1, de la CEDH en rejetant, sur le fondement de l’article 423, paragraphe 1, du NPK – visé dans le présent renvoi préjudiciel –, une demande de réouverture de la procédure pénale introduite par la requérante, en fuite, au motif que celle-ci avait essayé de se soustraire à la justice et s’était donc elle-même mise dans l’impossibilité de participer à son procès pénal par son comportement fautif ( 39 ).

69.

La Cour européenne des droits de l’homme a considéré ce rejet comme n’étant pas constitutif d’une telle violation dans la mesure où l’accusée avait sciemment et valablement renoncé, de manière implicite, à son droit de comparaître en personne devant les tribunaux, garanti par l’article 6, paragraphe 1, de la CEDH. Cette Cour a préalablement constaté que la requérante avait été dûment informée de l’existence d’une procédure pénale à son encontre ainsi que des charges retenues contre elle, qu’elle avait reconnu les faits et s’était déclarée prête à donner des explications détaillées ainsi qu’à négocier les termes de sa condamnation. Ladite Cour a également constaté que la citation à comparaître n’avait pas pu lui être remise en raison de son changement de domicile, changement qu’elle avait omis de communiquer aux autorités compétentes. La même Cour a jugé que les autorités nationales avaient, en outre, entrepris les démarches raisonnablement nécessaires afin d’assurer la présence de la personne poursuivie au procès. Dans cette affaire, les autorités avaient, d’abord, cherché à convoquer cette personne à l’adresse que celle-ci avait communiquée avant de la rechercher, ensuite, à ses adresses connues ou dans les établissements pénitentiaires et s’étaient, enfin, également assurées qu’elle n’avait pas quitté le territoire national ( 40 ).

70.

En revanche, telle n’est pas la conclusion à laquelle la Cour européenne des droits de l’homme a abouti dans l’arrêt du 23 mai 2006, Kounov c. Bulgarie ( 41 ). Dans cet arrêt, cette Cour a, en effet, conclu à une violation de l’article 6, paragraphe 1, de la CEDH dans la mesure où le requérant, qui avait été condamné par défaut, s’était vu dénier le droit à la réouverture de la procédure pénale sans que les autorités aient établi qu’il avait renoncé, de manière non équivoque, à son droit à comparaître. Dans ledit arrêt, ladite Cour a constaté que le prévenu avait été entendu sur les faits incriminés, mais n’avait pas été personnellement avisé de sa mise en examen. Elle a considéré que, en l’absence de notification au requérant des charges retenues contre lui, rien, dans les éléments produits devant elle, ne permettait d’établir qu’il était au courant de l’ouverture des poursuites, de son renvoi en jugement ou de la date de son procès. Elle a estimé que, ayant été interrogé sur les faits par les policiers, le requérant pouvait seulement supposer que des poursuites allaient être engagées, mais ne pouvait en aucun cas avoir une connaissance précise des charges qui allaient être retenues ( 42 ).

71.

Je constate que la Cour européenne des droits de l’homme cherche donc également à garantir un équilibre entre le respect des droits de la défense de la personne qui n’a pas comparu à son procès et la nécessité de garantir l’effectivité des poursuites pénales dans les situations dans lesquelles celle-ci a manifesté, sans équivoque, sa volonté de s’y soustraire.

72.

Au regard de l’ensemble de ces considérations, je propose à la Cour de dire pour droit que l’article 8, paragraphes 2 et 3, de la directive 2016/343 recouvre une situation dans laquelle le juge national constate, en ayant égard à l’ensemble des circonstances concrètes caractérisant la situation en cause, que, malgré la diligence et les efforts dont ont fait preuve les autorités nationales compétentes pour informer la personne poursuivie de la tenue de son procès et des conséquences d’un défaut de comparution, celle-ci a manqué, de manière délibérée et intentionnelle, aux obligations mises à sa charge pour recevoir ces informations dans le but de se soustraire à l’action de la justice.

73.

Dans le cadre de cet examen, il appartient au juge national de déterminer la nature ainsi que la portée des obligations incombant à la personne poursuivie aux fins d’être tenue informée et, le cas échéant, de démontrer, sans équivoque, sur la base de faits précis et objectifs, que celle-ci connaissait la nature ainsi que la cause des accusations portées à son encontre et qu’elle a délibérément et intentionnellement pris la fuite.

74.

L’article 8, paragraphe 4, seconde phrase, et l’article 9 de la directive 2016/343 doivent être interprétés en ce sens qu’ils ne s’opposent pas à une réglementation nationale en vertu de laquelle il n’est pas fait droit à une nouvelle procédure de jugement lorsque la personne poursuivie a pris la fuite après avoir été informée des accusations pesant à son encontre pendant la phase d’instruction préliminaire, mais avant qu’elle soit informée de l’acte d’accusation définitif, à condition que le juge national procède aux constatations susvisées.

75.

Compte tenu de la réponse que je propose d’apporter aux première et deuxième questions préjudicielles, examinées conjointement, il ne me semble pas nécessaire de répondre à la troisième question préjudicielle.

V. Conclusion

76.

Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, je propose à la Cour de répondre aux questions préjudicielles posées par le Spetsializiran nakazatelen sad (tribunal pénal spécialisé, Bulgarie) de la manière suivante :

1)

L’article 8, paragraphes 2 et 3, de la directive (UE) 2016/343 du Parlement européen et du Conseil, du 9 mars 2016, portant renforcement de certains aspects de la présomption d’innocence et du droit d’assister à son procès dans le cadre des procédures pénales, doit être interprété en ce sens qu’il recouvre une situation dans laquelle le juge national constate, en ayant égard à l’ensemble des circonstances concrètes caractérisant la situation en cause, que, malgré la diligence et les efforts dont ont fait preuve les autorités nationales compétentes pour informer la personne poursuivie de la tenue de son procès et des conséquences d’un défaut de comparution, celle-ci a manqué, de manière délibérée et intentionnelle, aux obligations mises à sa charge pour recevoir ces informations dans le but de se soustraire à l’action de la justice.

2)

Dans le cadre de cet examen, il appartient au juge national de déterminer la nature ainsi que la portée des obligations incombant à la personne poursuivie aux fins d’être tenue informée et, le cas échéant, de démontrer, sans équivoque, sur la base de faits précis et objectifs, que celle-ci connaissait la nature ainsi que la cause des accusations portées à son encontre et qu’elle a délibérément et intentionnellement pris la fuite.

3)

L’article 8, paragraphe 4, seconde phrase, et l’article 9 de la directive 2016/343 doivent être interprétés en ce sens qu’ils ne s’opposent pas à une réglementation nationale en vertu de laquelle il n’est pas fait droit à une nouvelle procédure de jugement lorsque la personne poursuivie a pris la fuite après avoir été informée des accusations pesant à son encontre pendant la phase d’instruction préliminaire, mais avant qu’elle soit informée de l’acte d’accusation définitif, à condition que le juge national procède aux constatations susvisées.


( 1 ) Langue originale : le français.

( 2 ) JO 2016, L 65, p. 1.

( 3 ) Conformément à la jurisprudence du Varhoven kasatsionen sad (Cour suprême de cassation, Bulgarie), l’acte vicié doit être remplacé par un nouvel acte, étant précisé que le juge ne peut pas remédier lui-même aux violations des formes substantielles commises par le procureur, mais doit, à cette fin, renvoyer l’affaire à ce dernier.

( 4 ) JO 2002, L 190, p. 1.

( 5 ) JO 2009, L 81, p. 24, ci-après la « décision-cadre 2002/584 ».

( 6 ) Voir, notamment, arrêts du 29 janvier 2013, Radu (C‑396/11, EU:C:2013:39, point 22 et jurisprudence citée), ainsi que du 28 octobre 2021, Komisia za protivodeystvie na koruptsiyata i za otnemane na nezakonno pridobitoto imushtestvo (C‑319/19, EU:C:2021:883, point 24 et jurisprudence citée).

( 7 ) En application de l’article 425, paragraphe 1, point 1, du NPK, la réouverture de la procédure pénale peut aboutir à l’annulation de la décision de condamnation et au renvoi de l’affaire afin que celle-ci puisse être réexaminée au fond à l’étape à laquelle la juridiction indique que le nouvel examen de l’affaire doit commencer.

( 8 ) La demande peut être rejetée dans deux types de situations. La présente demande de décision préjudicielle s’inscrit dans le premier cas de figure. Le second cas de figure est celui dans lequel la personne condamnée s’est vu signifier l’acte d’accusation définitif et, sans raison valable, n’a pas comparu à l’audience.

( 9 ) Signée à Rome le 4 novembre 1950, ci-après la « CEDH ».

( 10 ) Voir, également, considérant 35 de ladite directive.

( 11 ) Voir, également, considérant 37 de la directive 2016/343.

( 12 ) Voir, à cet égard, arrêts de la Cour EDH du 13 février 2001, Krombach c. France (CE:ECHR:2001:0213JUD002973196, § 89), et du 1er mars 2006, Sejdovic c. Italie (CE:ECHR:2006:0301JUD005658100, § 91).

( 13 ) Les dispositions relatives au droit à une nouvelle procédure de jugement ne sont applicables que dans la mesure où « il n’est pas possible de respecter les conditions fixées [à l’article 8,] paragraphe 2[,] parce que le suspect ou la personne poursuivie ne peut être localisé en dépit des efforts raisonnables consentis à cet effet » (article 8, paragraphe 4) ou « que les conditions prévues à l’article 8, paragraphe 2, [ne sont] pas réunies » (article 9).

( 14 ) Voir article 1er, ainsi que considérants 2 à 4 et 9 de cette directive.

( 15 ) Voir arrêt du 19 septembre 2018, Milev (C‑310/18 PPU, EU:C:2018:732, points 45 à 47).

( 16 ) La Cour européenne des droits de l’homme considère également que la CEDH laisse aux États contractants une grande liberté dans le choix des moyens propres à permettre à leurs systèmes judiciaires de répondre aux exigences de l’article 6 de cette convention, à condition toutefois que les ressources offertes par le droit interne se révèlent effectives si l’accusé n’a ni renoncé à comparaître et à se défendre ni eu l’intention de se soustraire à la justice. Voir, pour une illustration, Cour EDH, 14 juin 2001, Medenica c. Suisse (CE:ECHR:2001:0614JUD002049192, § 55).

( 17 ) Voir, notamment, arrêts de la Cour EDH du 1er mars 2006, Sejdovic c. Italie (CE:ECHR:2006:0301JUD005658100, § 87 et 89) ; du 24 avril 2012, Haralampiev c. Bulgarie (CE:ECHR:2012:0424JUD002964803, § 33), et du 22 mai 2012, Idalov c. Russie (CE:ECHR:2012:0522JUD000582603, § 173).

( 18 ) Voir, pour une illustration, arrêts de la Cour EDH du 12 février 1985, Colozza c. Italie (CE:ECHR:1985:0212JUD000902480, § 32), et du 12 juin 2018, M.T.B. c. Turquie (CE:ECHR:2018:0612JUD004708106, § 49 à 53).

( 19 ) Voir, pour une illustration, arrêt de la Cour EDH du 28 août 2018, Vyacheslav Korchagin c. Russie (CE:ECHR:2018:0828JUD001230716, § 65).

( 20 ) Voir dictionnaire de l’Académie française et dictionnaire Larousse.

( 21 ) Voir arrêt du 13 février 2020, Spetsializirana prokuratura (Audience en l’absence de la personne poursuivie) (C‑688/18, EU:C:2020:94, point 29 et jurisprudence citée).

( 22 ) Voir article 1er, ainsi que considérants 2 à 4, 9 et 10 de la directive 2016/343.

( 23 ) Voir, en ce sens, arrêt du 19 septembre 2018, Milev (C‑310/18 PPU, EU:C:2018:732, points 45 à 47).

( 24 ) C‑769/19, non publiée, EU:C:2021:28.

( 25 ) Point 45 et jurisprudence citée de cette ordonnance.

( 26 ) C‑688/18, EU:C:2020:94.

( 27 ) Voir points 34 et 35 de cet arrêt.

( 28 ) Voir arrêt de la Cour EDH du 1er mars 2006, Sejdovic c. Italie (CE:ECHR:2006:0301JUD005658100, § 98 à 101).

( 29 ) Voir note en bas de page 18 des présentes conclusions. Selon la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme, une telle renonciation ne peut être déduite ni d’une connaissance vague et non officielle [voir, notamment, Cour EDH, 23 mai 2006, Kounov c. Italie (CE:ECHR:2006:0523JUD002437902, § 47)], ni d’une simple présomption, ni de la simple qualité de personne en fuite [voir Cour EDH, 12 février 1985, Colozza c. Italie (CE:ECHR:1985:0212JUD000902480, § 28)].

( 30 ) Voir arrêts de la Cour EDH du 1er mars 2006, Sejdovic c. Italie (CE:ECHR:2006:0301JUD005658100, § 98 à 101) ; du 23 mai 2006, Kounov c. Bulgarie (CE:ECHR:2006:0523JUD002437902, § 48) ; du 26 janvier 2017, Lena Atanasova c. Bulgarie (CE:ECHR:2017:0126JUD005200907, § 52), ainsi que du 2 février 2017, Ait Abbou c. France (CE:ECHR:2017:0202JUD004492113, § 62 à 65).

( 31 ) Dans l’arrêt du 12 février 1985, Colozza c. Italie (CE:ECHR:1985:0212JUD000902480, § 28), la Cour européenne des droits de l’homme relève que la situation observée « se concilie mal avec la diligence que les États contractants doivent déployer pour assurer la jouissance effective des droits garantis par l’article 6 [de la CEDH] ». Dans l’arrêt du 12 juin 2018, M.T.B. c. Turquie (CE:ECHR:2018:0612JUD004708106, § 51 à 54), cette Cour a jugé que le juge du fond n’avait pas fait preuve de toute la diligence requise dans ses efforts pour localiser le requérant en se limitant à procéder à la notification de la décision conformément aux dispositions de droit interne. Selon ladite Cour, cette notification ne suffit pas, à elle seule, à décharger l’État des obligations qui lui incombent en vertu de l’article 6 de la CEDH.

( 32 ) Voir arrêt de la Cour EDH du 12 février 1985, Colozza c. Italie (CE:ECHR:1985:0212JUD000902480, § 28).

( 33 ) CE:ECHR:2012:1011JUD004335307, § 54.

( 34 ) Voir arrêts de la Cour EDH du 12 février 1985, Colozza c. Italie (CE:ECHR:1985:0212JUD000902480, § 29), et du 1er mars 2006, Sejdovic c. Italie (CE:ECHR:2006:0301JUD005658100, § 101 in fine).

( 35 ) Voir arrêts de la Cour EDH du 1er mars 2006, Sejdovic c. Italie (CE:ECHR:2006:0301JUD005658100, § 84), et du 12 juin 2018, M.T.B. c. Turquie (CE:ECHR:2018:0612JUD004708106, § 61).

( 36 ) Voir arrêt de la Cour EDH du 12 février 1985, Colozza c. Italie (CE:ECHR:1985:0212JUD000902480, § 31 et 32).

( 37 ) Voir arrêt de la Cour EDH du 14 juin 2001, Medenica c. Suisse (CE:ECHR:2001:0614JUD002049192, § 55). Voir, également, arrêts de la Cour EDH du 12 février 1985, Colozza c. Italie (CE:ECHR:1985:0212JUD000902480, § 30), et du 1er mars 2006, Sejdovic c. Italie (CE:ECHR:2006:0301JUD005658100, § 82).

( 38 ) CE:ECHR:2017:0126JUD005200907.

( 39 ) Voir § 27 et 28 de cet arrêt.

( 40 ) Voir § 52 et 53 dudit arrêt.

( 41 ) CE:ECHR:2006:0523JUD002437902, § 32, 49, 53 et 54. Voir, également, arrêt de principe du 1er mars 2006, Sejdovic c. Italie (CE:ECHR:2006:0301JUD005658100, § 100), dans lequel la Cour européenne des droits de l’homme a jugé que de telles circonstances n’étaient pas établies en l’absence d’éléments objectifs autres que celui tiré de l’absence de l’accusé de son lieu de résidence habituel, les autorités nationales partant du présupposé que le requérant était impliqué dans le crime dont il était accusé ou responsable de ce crime. Cette Cour a retenu la même approche dans son arrêt du 28 septembre 2006, Hu c. Italie (CE:ECHR:2006:0928JUD000594104, § 53 à 56).

( 42 ) Dans l’arrêt du 1er mars 2006, Sejdovic c. Italie (CE:ECHR:2006:0301JUD005658100, § 85), la Cour européenne des droits de l’homme a toutefois jugé que la réouverture du délai d’appel contre la condamnation par contumace, avec la faculté, pour la personne poursuivie, d’être présente à l’audience de deuxième instance et de demander la production de nouvelles preuves, s’analysait en la possibilité d’une nouvelle décision sur le bien‑fondé de l’accusation en fait comme en droit, ce qui permettait de conclure que, dans son ensemble, la procédure avait été équitable.