CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. ATHANASIOS RANTOS

présentées le 11 novembre 2021 ( 1 )

Affaire C‑485/20

XXXX

contre

HR Rail SA

[demande de décision préjudicielle formée par le Conseil d’État (Belgique)]

« Renvoi préjudiciel – Politique sociale – Directive 2000/78/CE – Égalité de traitement en matière d’emploi et de travail – Interdiction de toute discrimination fondée sur un handicap – Personne accomplissant un stage dans le cadre de son recrutement – Travailleur définitivement inapte à occuper le poste de travail auquel il a été affecté – Article 5 – Aménagements raisonnables – Obligation de l’employeur de réaffecter ce travailleur à un autre poste de travail pour lequel il est compétent, capable et disponible – Charge disproportionnée »

I. Introduction

1.

Un travailleur, XXXX (ci-après le « requérant »), recruté par la société HR Rail SA, devient, pendant son stage, définitivement inapte à occuper le poste auquel il a été affecté en raison de la survenance d’un handicap. Il fait alors l’objet d’un licenciement pour inaptitude. Le requérant conteste cette décision en soutenant qu’il a été victime d’une discrimination fondée sur le handicap.

2.

Dans une telle situation, son employeur, plutôt que de le licencier, avait-il l’obligation, en application de la directive 2000/78/CE ( 2 ) et afin d’éviter toute discrimination en raison du handicap, d’affecter le requérant à un autre poste de travail pour lequel il était compétent, capable et disponible ? Telle est, en substance, la question posée par le Conseil d’État (Belgique).

3.

Cette question amènera la Cour à examiner, notamment, l’application de cette directive aux personnes accomplissant un stage dans le cadre de leur recrutement et la portée de la notion d’« aménagements raisonnables », au sens de l’article 5 de ladite directive, lue à la lumière de la convention des Nations unies relative aux droits des personnes handicapées, conclue à New York le 13 décembre 2006 ( 3 ) et entrée en vigueur le 3 mai 2008 (ci-après la « convention de l’ONU »), et de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci-après la « Charte »).

II. Le cadre juridique

A.   Le droit international

4.

L’article 1er de la convention de l’ONU, intitulé « Objet », stipule :

« La présente convention a pour objet de promouvoir, protéger et assurer la pleine et égale jouissance de tous les droits de l’homme et de toutes les libertés fondamentales par les personnes handicapées et de promouvoir le respect de leur dignité intrinsèque.

Par personnes handicapées on entend des personnes qui présentent des incapacités physiques, mentales, intellectuelles ou sensorielles durables dont l’interaction avec diverses barrières peut faire obstacle à leur pleine et effective participation à la société sur la base de l’égalité avec les autres. »

5.

L’article 2 de cette convention, intitulé « Définitions », énonce, à ses troisième et quatrième alinéas :

« Aux fins de la présente convention :

[...]

on entend par “discrimination fondée sur le handicap” toute distinction, exclusion ou restriction fondée sur le handicap qui a pour objet ou pour effet de compromettre ou réduire à néant la reconnaissance, la jouissance ou l’exercice, sur la base de l’égalité avec les autres, de tous les droits de l’homme et de toutes les libertés fondamentales dans les domaines politique, économique, social, culturel, civil ou autres. La discrimination fondée sur le handicap comprend toutes les formes de discrimination, y compris le refus d’aménagement raisonnable ;

on entend par “aménagement raisonnable” les modifications et ajustements nécessaires et appropriés n’imposant pas de charge disproportionnée ou indue apportés, en fonction des besoins dans une situation donnée, pour assurer aux personnes handicapées la jouissance ou l’exercice, sur la base de l’égalité avec les autres, de tous les droits de l’homme et de toutes les libertés fondamentales. »

6.

L’article 5 de ladite convention, intitulé « Égalité et non-discrimination », prévoit, à son paragraphe 3 :

« Afin de promouvoir l’égalité et d’éliminer la discrimination, les États Parties prennent toutes les mesures appropriées pour faire en sorte que des aménagements raisonnables soient apportés. »

7.

L’article 27 de la même convention, intitulé « Travail et emploi », est libellé comme suit, à son paragraphe 1 :

« Les États Parties reconnaissent aux personnes handicapées, sur la base de l’égalité avec les autres, le droit au travail, notamment à la possibilité de gagner leur vie en accomplissant un travail librement choisi ou accepté sur un marché du travail et dans un milieu de travail ouverts, favorisant l’inclusion et accessibles aux personnes handicapées. Ils garantissent et favorisent l’exercice du droit au travail, y compris pour ceux qui ont acquis un handicap en cours d’emploi, en prenant des mesures appropriées, y compris des mesures législatives, pour notamment :

a)

interdire la discrimination fondée sur le handicap dans tout ce qui a trait à l’emploi sous toutes ses formes, notamment les conditions de recrutement, d’embauche et d’emploi, le maintien dans l’emploi, l’avancement et les conditions de sécurité et d’hygiène au travail ;

[...]

h)

favoriser l’emploi de personnes handicapées dans le secteur privé en mettant en œuvre des politiques et mesures appropriées, y compris le cas échéant des programmes d’action positive, des incitations et d’autres mesures ;

i)

faire en sorte que des aménagements raisonnables soient apportés aux lieux de travail en faveur des personnes handicapées ;

[...] »

8.

La convention de l’ONU a été approuvée au nom de la Communauté européenne par la décision 2010/48/CE ( 4 ).

B.   Le droit de l’Union

9.

Aux termes des considérants 16, 17, 20 et 21 de la directive 2000/78 :

(16)

La mise en place de mesures destinées à tenir compte des besoins des personnes handicapées au travail remplit un rôle majeur dans la lutte contre la discrimination fondée sur un handicap.

(17)

La présente directive n’exige pas qu’une personne qui n’est pas compétente, ni capable ni disponible pour remplir les fonctions essentielles du poste concerné ou pour suivre une formation donnée soit recrutée, promue ou reste employée ou qu’une formation lui soit dispensée, sans préjudice de l’obligation de prévoir des aménagements raisonnables pour les personnes handicapées.

[...]

(20)

Il convient de prévoir des mesures appropriées, c’est-à-dire des mesures efficaces et pratiques destinées à aménager le poste de travail en fonction du handicap, par exemple en procédant à un aménagement des locaux ou à une adaptation des équipements, des rythmes de travail, de la répartition des tâches ou de l’offre de moyens de formation ou d’encadrement.

(21)

Afin de déterminer si les mesures en question donnent lieu à une charge disproportionnée, il convient de tenir compte notamment des coûts financiers et autres qu’elles impliquent, de la taille et des ressources financières de l’organisation ou de l’entreprise et de la possibilité d’obtenir des fonds publics ou toute autre aide. »

10.

L’article 1er de cette directive, intitulé « Objet », énonce :

« La présente directive a pour objet d’établir un cadre général pour lutter contre la discrimination fondée sur la religion ou les convictions, l[e] handicap, l’âge ou l’orientation sexuelle, en ce qui concerne l’emploi et le travail, en vue de mettre en œuvre, dans les États membres, le principe de l’égalité de traitement. »

11.

L’article 2 de ladite directive, intitulé « Concept de discrimination », prévoit, à son paragraphe 1 :

« Aux fins de la présente directive, on entend par “principe de l’égalité de traitement” l’absence de toute discrimination directe ou indirecte, fondée sur un des motifs visés à l’article 1er. »

12.

L’article 3 de la même directive, intitulé « Champ d’application », dispose, à son paragraphe 1 :

« Dans les limites des compétences conférées à la Communauté, la présente directive s’applique à toutes les personnes, tant pour le secteur public que pour le secteur privé, y compris les organismes publics, en ce qui concerne :

a)

les conditions d’accès à l’emploi, aux activités non salariées ou au travail, y compris les critères de sélection et les conditions de recrutement, quelle que soit la branche d’activité et à tous les niveaux de la hiérarchie professionnelle, y compris en matière de promotion ;

b)

l’accès à tous les types et à tous les niveaux d’orientation professionnelle, de formation professionnelle, de perfectionnement et de formation de reconversion, y compris l’acquisition d’une expérience pratique ;

c)

les conditions d’emploi et de travail, y compris les conditions de licenciement et de rémunération ;

[...] »

13.

L’article 5 de la directive 2000/78, intitulé « Aménagements raisonnables pour les personnes handicapées », énonce :

« Afin de garantir le respect du principe de l’égalité de traitement à l’égard des personnes handicapées, des aménagements raisonnables sont prévus. Cela signifie que l’employeur prend les mesures appropriées, en fonction des besoins dans une situation concrète, pour permettre à une personne handicapée d’accéder à un emploi, de l’exercer ou d’y progresser, ou pour qu’une formation lui soit dispensée, sauf si ces mesures imposent à l’employeur une charge disproportionnée. Cette charge n’est pas disproportionnée lorsqu’elle est compensée de façon suffisante par des mesures existant dans le cadre de la politique menée dans l’État membre concerné en faveur des personnes handicapées. »

14.

Aux termes de l’article 7 de cette directive, intitulé « Action positive et mesures spécifiques » :

« 1.   Pour assurer la pleine égalité dans la vie professionnelle, le principe de l’égalité de traitement n’empêche pas un État membre de maintenir ou d’adopter des mesures spécifiques destinées à prévenir ou à compenser des désavantages liés à l’un des motifs visés à l’article 1er.

2.   En ce qui concerne les personnes handicapées, le principe d’égalité de traitement ne fait pas obstacle au droit des États membres de maintenir ou d’adopter des dispositions concernant la protection de la santé et de la sécurité sur le lieu de travail ni aux mesures visant à créer ou à maintenir des dispositions ou des facilités en vue de sauvegarder ou d’encourager leur insertion dans le monde du travail. »

C.   Le droit belge

15.

L’article 3 de la loi tendant à lutter contre certaines formes de discrimination, du 10 mai 2007 ( 5 ), dans sa version applicable au litige au principal (ci-après la « loi du 10 mai 2007 »), énonce :

« La présente loi a pour objectif de créer, dans les matières visées à l’article 5, un cadre général pour lutter contre la discrimination fondée sur l’âge, l’orientation sexuelle, l’état civil, la naissance, la fortune, la conviction religieuse ou philosophique, la conviction politique, la conviction syndicale, la langue, l’état de santé actuel ou futur, un handicap, une caractéristique physique ou génétique ou l’origine sociale. »

16.

L’article 4 de cette loi prévoit :

« Pour l’application de la présente loi, il y a lieu d’entendre par :

[...]

critères protégés : l’âge, l’orientation sexuelle, l’état civil, la naissance, la fortune, la conviction religieuse ou philosophique, la conviction politique, la conviction syndicale, la langue, l’état de santé actuel ou futur, un handicap, une caractéristique physique ou génétique, l’origine sociale ;

[...]

12°

aménagements raisonnables : mesures appropriées, prises en fonction des besoins dans une situation concrète, pour permettre à une personne handicapée d’accéder, de participer et [de] progresser dans les domaines pour lesquels cette loi est d’application, sauf si ces mesures imposent à l’égard de la personne qui doit les adopter une charge disproportionnée. Cette charge n’est pas disproportionnée lorsqu’elle est compensée de façon suffisante par des mesures existant dans le cadre de la politique publique menée concernant les personnes handicapées. »

17.

L’article 14 de ladite loi est libellé comme suit :

« Dans les matières qui relèvent du champ d’application de la présente loi, toute forme de discrimination est interdite. Au sens du présent titre, la discrimination s’entend de :

[...]

un refus de mettre en place des aménagements raisonnables en faveur d’une personne handicapée. »

III. Le litige au principal, la question préjudicielle et la procédure devant la Cour

18.

Le requérant a été recruté par HR Rail ( 6 ) en qualité d’agent de maintenance spécialisé dans l’entretien des voies ferrées. Le 21 novembre 2016, il a commencé son stage au sein de la société Infrabel.

19.

Au mois de décembre 2017, il s’est vu diagnostiquer un problème cardiaque nécessitant la pose d’un stimulateur cardiaque, dispositif sensible aux champs électromagnétiques émis, notamment, par les voies ferrées. Le 12 juin 2018, le requérant a été reconnu comme handicapé par le Service public fédéral Sécurité sociale (Belgique).

20.

Le 28 juin 2018, il a été examiné au Centre régional de la médecine de l’administration (Belgique), examen qui a conduit HR Rail à le déclarer définitivement inapte à l’exercice des fonctions pour lesquelles il avait été recruté. Il a été précisé au requérant que, dans l’attente de la décision de licenciement à intervenir à son égard, il pouvait occuper un poste adapté à son état de santé, répondant aux exigences suivantes : « activité moyenne, absence d’exposition aux champs magnétiques, non en altitude ou exposé à des vibrations ». À la suite de cette décision, le requérant a été affecté au poste de magasinier au sein d’Infrabel. Le 1er juillet 2018, il a introduit un recours contre ladite décision auprès de la commission d’appel de la médecine de l’administration (Belgique).

21.

Par lettre du 19 juillet 2018, HR Rail a informé le requérant qu’il bénéficierait d’un « accompagnement personnalisé afin de trouver avec [lui] un nouvel emploi » et qu’il serait prochainement convoqué à cet effet à un entretien. Par lettre du 29 août 2018, le requérant a été informé que la date de cet entretien était fixée au 18 septembre 2018.

22.

Le 3 septembre 2018, la commission d’appel de la médecine de l’administration a confirmé la décision d’inaptitude médicale prise à l’égard du requérant.

23.

Par lettre du 26 septembre 2018, le conseiller en chef – chef de service concerné de HR Rail –, a informé le requérant de son licenciement à la date du 30 septembre 2018, avec interdiction de recrutement pour une durée de cinq ans au grade dans lequel il avait été recruté.

24.

Le 26 octobre 2018, le directeur général de HR Rail a indiqué au requérant que les statuts de la société et le règlement général pour l’attribution des emplois de celle-ci prévoient qu’« il est mis fin au stage du membre du personnel qui est déclaré totalement et définitivement inapte lorsqu’il n’est plus en état d’exercer les attributions liées à son grade » et que, par conséquent, « la lettre qui [lui] [a] été transmise relative à l’accompagnement personnalisé pour le personnel inapte pour raisons médicales [est] sans objet ».

25.

Le 26 novembre 2018, le requérant a introduit un recours devant le Conseil d’État, la juridiction de renvoi, tendant à l’annulation de la décision du conseiller en chef – chef de service concerné –, de le licencier à la date du 30 septembre 2018.

26.

Cette juridiction relève que la loi du 10 mai 2007, qui assure la transposition de la directive 2000/78 en droit belge, interdit les discriminations directes et indirectes fondées, notamment, sur l’état de santé actuel et futur ainsi que sur le handicap.

27.

En l’occurrence, selon ladite juridiction, il n’est ni contestable ni contesté que la cause de la décision d’inaptitude du requérant doit être qualifiée de « handicap », au sens de la loi du 10 mai 2007. En effet, le requérant, en raison de son affection qui a nécessité la pose d’un stimulateur cardiaque, ne remplirait plus une exigence professionnelle essentielle et déterminante de sa fonction d’agent de maintenance spécialisé, laquelle implique d’être soumis aux champs électromagnétiques émis par les voies ferrées. La juridiction de renvoi en déduit que la décision de licenciement prise à son égard ne pourrait être constitutive d’une discrimination prohibée par cette loi que s’il est démontré que HR Rail a refusé la mise en place d’aménagements raisonnables qui seraient exigés.

28.

À cet égard, le requérant fait valoir qu’il aurait pu être réaffecté à un autre poste, notamment celui de magasinier auquel il avait été temporairement affecté dans l’attente de son licenciement, et qu’une telle réaffectation constituait un aménagement raisonnable que son employeur était tenu de prévoir en vertu de la loi du 10 mai 2007. De son côté, HR Rail soutient qu’il n’était pas possible de prévoir des aménagements raisonnables pour que le requérant puisse continuer à exercer sa fonction d’agent de maintenance spécialisé.

29.

La juridiction de renvoi indique que la question de savoir si, par « aménagements raisonnables », au sens de la loi du 10 mai 2007, il convient d’envisager la possibilité d’attribuer un autre poste de travail à la personne qui, en raison de la survenance d’un handicap, n’est plus à même d’occuper le poste auquel elle était affectée n’est pas appréciée de manière uniforme par la jurisprudence nationale.

30.

Par ailleurs, les considérants 17, 20 et 21 de la directive 2000/78 ne permettraient pas de déterminer avec certitude si l’obligation de prévoir des aménagements raisonnables pour les personnes handicapées emporte celle d’affecter la personne concernée à un autre poste de travail dans l’entreprise.

31.

C’est dans ces conditions que le Conseil d’État a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour la question préjudicielle suivante :

« L’article 5 de la directive [2000/78] doit-il être interprété en ce sens qu’un employeur a l’obligation, à l’égard d’une personne qui, en raison de son handicap, n’est plus capable de remplir les fonctions essentielles du poste auquel elle était affectée, de l’affecter à un autre poste pour lequel elle dispose des compétences, des capacités et des disponibilités requises lorsqu’une telle mesure n’impose pas à l’employeur une charge disproportionnée ? »

32.

Des observations écrites ont été déposées par le requérant, HR Rail, les gouvernements belge, grec et portugais, ainsi que par la Commission européenne.

IV. Analyse

33.

Par sa question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 5 de la directive 2000/78 doit être interprété en ce sens que, lorsqu’un travailleur, y compris celui accomplissant un stage dans le cadre de son recrutement, devient définitivement inapte, en raison de la survenance d’un handicap, à occuper le poste de travail auquel il a été affecté, son employeur est tenu, au titre des « aménagements raisonnables » prévus à cet article, de le réaffecter à un autre poste de travail lorsqu’il dispose de la compétence, de la capacité et de la disponibilité requises, et lorsqu’une telle mesure n’impose pas à cet employeur une charge disproportionnée.

34.

À titre liminaire, il convient de rappeler qu’il ressort tant de l’intitulé et du préambule que du contenu et de la finalité de la directive 2000/78 que celle-ci tend à établir un cadre général pour assurer à toute personne l’égalité de traitement « en matière d’emploi et de travail », en lui offrant une protection efficace contre les discriminations fondées sur l’un des motifs visés à son article 1er, au nombre desquels figure le handicap ( 7 ). Ainsi, cette directive a pour objet, en ce qui concerne l’emploi et le travail, de lutter contre toutes les formes de discrimination fondées sur le handicap ( 8 ).

35.

Il importe, dans un premier temps, de vérifier si une personne telle que le requérant entre dans le champ d’application de la directive 2000/78 (A) et, dans un second temps, de déterminer la portée de la notion d’« aménagements raisonnables », au sens de l’article 5 de cette directive, en ce qui concerne la réaffectation d’une personne handicapée à un autre poste de travail au sein de l’entreprise (B).

A.   Sur le champ d’application de la directive 2000/78

36.

Je relève, tout d’abord, qu’il ressort de la décision de renvoi que le requérant a été recruté par HR Rail, une société anonyme de droit public, avec la conséquence qu’il est un travailleur du secteur public. Il a fait l’objet d’un licenciement en raison du fait qu’il est devenu définitivement inapte à occuper le poste de travail pour lequel il a été recruté.

37.

Il y a lieu de constater que, au regard de ces éléments, le requérant entre dans le champ d’application de la directive 2000/78. En effet, il découle de l’article 3, paragraphe 1, sous c), de cette directive que celle-ci s’applique, dans le cadre des compétences dévolues à l’Union européenne, « à toutes les personnes, tant pour le secteur public que pour le secteur privé, y compris les organismes publics », en ce qui concerne, notamment, « les conditions d’emploi et de travail, y compris les conditions de licenciement et de rémunération » ( 9 ).

38.

Ensuite, la juridiction de renvoi indique que le requérant est atteint d’un « handicap », au sens de la loi du 10 mai 2007. À cet égard, le fait que le requérant soit reconnu comme étant une personne handicapée, au sens du droit national, ne préjuge pas qu’il soit atteint d’un « handicap », au sens de la directive 2000/78 ( 10 ), qui constitue une notion autonome du droit de l’Union devant être interprétée de manière uniforme sur le territoire de cette dernière.

39.

S’agissant de cette directive, il convient de rappeler que l’Union a approuvé la convention de l’ONU par la décision 2010/48. Par conséquent, les dispositions de cette convention font partie intégrante, à partir de l’entrée en vigueur de cette décision, de l’ordre juridique de l’Union. Par ailleurs, il ressort de l’appendice à l’annexe II de ladite décision que, concernant l’autonomie et l’inclusion sociale, le travail et l’emploi, la directive 2000/78 figure parmi les actes de l’Union ayant trait aux questions régies par ladite convention. Il s’ensuit que la convention de l’ONU peut être invoquée aux fins d’interpréter cette directive, laquelle doit faire l’objet, dans la mesure du possible, d’une interprétation conforme à cette convention ( 11 ).

40.

C’est la raison pour laquelle, à la suite de l’approbation par l’Union de la convention de l’ONU, la Cour a considéré que la notion de « handicap », au sens de la directive 2000/78, doit être entendue comme visant une limitation de la capacité, résultant notamment d’atteintes physiques, mentales ou psychiques durables, dont l’interaction avec diverses barrières peut faire obstacle à la pleine et effective participation de la personne concernée à la vie professionnelle sur la base de l’égalité avec les autres travailleurs ( 12 ).

41.

Dans le cadre de l’interprétation de la directive 2000/78, la Cour a ainsi adopté, comme la convention de l’ONU, la notion sociale du handicap, qui est fondée sur une approche contextuelle, en fonction de l’interaction existant entre l’incapacité de la personne et la réaction de la société ou l’organisation de cette dernière pour répondre aux besoins d’une personne souffrant d’une incapacité, plutôt que la notion médicale du handicap, qui attache une importance particulière à la personne elle-même et à l’incapacité de celle-ci, rendant difficile pour elle de s’adapter ou de s’intégrer dans l’environnement sociétal qui l’entoure ( 13 ).

42.

En l’occurrence, il résulte de la décision de renvoi que le requérant a été recruté en qualité d’agent de maintenance spécialisé dans l’entretien des voies ferrées. Postérieurement à son recrutement, il a été sujet à un problème de santé nécessitant la pose d’un stimulateur cardiaque, dispositif sensible aux champs électromagnétiques émis, notamment, par les voies ferrées. Il est, par conséquent, devenu définitivement inapte à remplir les fonctions essentielles du poste concerné.

43.

Sous réserve de vérification par la juridiction de renvoi, je considère que, compte tenu de ces éléments, le requérant a subi une limitation durable de sa capacité, résultant d’atteintes physiques, dont l’interaction avec diverses barrières peut faire obstacle à sa pleine et effective participation à la vie professionnelle sur la base de l’égalité avec les autres travailleurs et qu’il doit être qualifié de « personne handicapée », au sens de la directive 2000/78.

44.

Enfin, il ressort de la décision de renvoi que, à la date de son licenciement, le requérant accomplissait un stage dans le cadre de son recrutement. Il convient de vérifier si, en cette qualité de stagiaire, il entre dans le champ d’application de la directive 2000/78.

45.

À cet égard, je relève que, au regard de son libellé, cette directive ne concerne pas uniquement les personnes définitivement recrutées. En effet, aux termes de l’article 3, paragraphe 1, sous a) et b), de ladite directive, celle-ci s’applique aux conditions d’accès à l’emploi, aux activités non salariées ou au travail, ainsi qu’à l’accès à tous les types et à tous les niveaux d’orientation professionnelle, de formation professionnelle, de perfectionnement et de formation de reconversion. Or, en l’occurrence, la situation du requérant, en sa qualité de stagiaire, concerne la question de son accès à l’emploi et au travail.

46.

J’ajoute que, d’un point de vue téléologique, une personne accomplissant un stage dans le cadre de son recrutement est, par définition, dans une situation plus vulnérable qu’une personne qui dispose d’un travail stable. Pour un tel stagiaire, il est plus difficile de trouver un autre emploi en cas de survenance d’un handicap le rendant inapte à occuper l’emploi pour lequel il a été recruté, d’autant plus s’il est au début de sa carrière professionnelle. Dans ces conditions, il me semble justifié d’assurer la protection d’un tel stagiaire contre les discriminations.

47.

Partant, je suis d’avis qu’une personne accomplissant un stage dans le cadre de son recrutement entre dans le champ d’application de la directive 2000/78, en l’occurrence en ce qui concerne les dispositions relatives au handicap.

48.

Cette interprétation est corroborée par la jurisprudence de la Cour. En effet, comme cette dernière l’a déjà relevé, la notion de « travailleur », au sens de la directive 2000/78, est la même qu’au sens de l’article 45 TFUE ( 14 ). S’agissant de la qualification de « travailleur », au sens de cet article, il ressort d’une jurisprudence constante de la Cour que cette notion revêt une portée autonome et ne doit pas être interprétée de manière restrictive ( 15 ). Ainsi, la notion de « travailleur » en droit de l’Union s’étend aux personnes accomplissant un stage préparatoire ou des périodes d’apprentissage dans une profession, lesquelles peuvent être considérées comme constituant une préparation pratique liée à l’exercice même de la profession en cause, dès lors que lesdites périodes sont effectuées dans les conditions d’une activité salariée réelle et effective, en faveur et sous la direction d’un employeur ( 16 ).

49.

En l’occurrence, il n’est pas contesté que le requérant, dans le cadre de son stage, effectuait une activité salariée réelle et effective, en faveur et sous la direction d’un employeur, et qu’il devait ainsi être qualifié de « travailleur », au sens de la directive 2000/78.

50.

Par ailleurs, il y lieu de relever que le champ d’application de la convention de l’ONU est entendu largement. En effet, l’article 27, paragraphe 1, sous a), de cette convention stipule que les États Parties garantissent et favorisent l’exercice du droit au travail, y compris pour ceux qui ont acquis un handicap en cours d’emploi, en prenant des mesures appropriées, y compris des mesures législatives, pour notamment interdire la discrimination fondée sur le handicap dans tout ce qui a trait à l’emploi sous toutes ses formes, notamment les conditions de recrutement, d’embauche et d’emploi, le maintien dans l’emploi, l’avancement et les conditions de sécurité et d’hygiène au travail. Or, ainsi que cela a été énoncé au point 39 des présentes conclusions, la directive 2000/78 doit faire l’objet, dans la mesure du possible, d’une interprétation conforme à la convention de l’ONU.

51.

Par conséquent, outre le fait que le requérant a fait l’objet d’un licenciement, au sens de l’article 3, paragraphe 1, sous c), de cette directive, il relève également, à mon sens, en sa qualité de personne accomplissant un stage dans le cadre de son recrutement, de l’article 3, paragraphe 1, sous a), de ladite directive.

52.

Partant, je suis d’avis qu’une personne telle que le requérant entre dans le champ d’application de la directive 2000/78.

B.   Sur la portée de la notion d’« aménagements raisonnables », au sens de l’article 5 de la directive 2000/78

53.

La juridiction de renvoi s’interroge sur le point de savoir si la notion d’« aménagements raisonnables », au sens de l’article 5 de la directive 2000/78, comprend l’obligation, à l’égard d’une personne qui est devenue définitivement inapte à occuper son poste de travail en raison de la survenance d’un handicap, de la réaffecter à un autre poste au sein de l’entreprise.

54.

Aux termes de l’article 5 de cette directive, « [a]fin de garantir le respect du principe de l’égalité de traitement à l’égard des personnes handicapées, des aménagements raisonnables sont prévus. Cela signifie que l’employeur prend les mesures appropriées, en fonction des besoins dans une situation concrète, pour permettre à une personne handicapée d’accéder à un emploi, de l’exercer ou d’y progresser, ou pour qu’une formation lui soit dispensée, sauf si ces mesures imposent à l’employeur une charge disproportionnée. Cette charge n’est pas disproportionnée lorsqu’elle est compensée de façon suffisante par des mesures existant dans le cadre de la politique menée dans l’État membre concerné en faveur des personnes handicapées ».

55.

À titre liminaire, je relève que, selon l’article 2, troisième alinéa, de la convention de l’ONU, la discrimination fondée sur le handicap comprend toutes les formes de discrimination, y compris le refus d’aménagement raisonnable. Par conséquent, à supposer que HR Rail aurait dû réaffecter le requérant à un autre poste de travail, celui-ci aurait été victime d’une discrimination fondée sur le handicap, au sens de cette convention et de la directive 2000/78, lorsqu’il a été licencié pour inaptitude à l’exercice des fonctions pour lesquelles il avait été recruté ( 17 ).

56.

Ainsi que l’ont relevé l’avocate générale Kokott ( 18 ) et l’avocat général Wahl ( 19 ), la raison d’être de l’exigence d’aménagements raisonnables est de parvenir à un juste équilibre entre les besoins des personnes souffrant d’un handicap et ceux de l’employeur.

57.

Il ressort du considérant 20 de la directive 2000/78, relatif aux aménagements raisonnables, qu’« il convient de prévoir des mesures appropriées, c’est-à-dire des mesures efficaces et pratiques destinées à aménager le poste de travail en fonction du handicap, par exemple en procédant à un aménagement des locaux ou à une adaptation des équipements, des rythmes de travail, de la répartition des tâches ou de l’offre de moyens de formation ou d’encadrement ».

58.

Certes, comme le souligne HR Rail dans ses observations écrites, ce considérant mentionne « le poste de travail ». Elle en déduit que les aménagements raisonnables sont limités à l’emploi assigné et ne pourraient servir à conférer au travailleur handicapé un autre poste de travail.

59.

Cependant, selon moi, l’article 5 de la directive 2000/78, lu à la lumière des considérants 17 et 20 de celle-ci, doit être compris en ce sens que, en priorité et dans la mesure du possible, l’employeur doit aménager le poste de travail qu’occupait le travailleur avant la survenance de son handicap. L’objectif est, en effet, dans une approche fondée sur la notion sociale du handicap, d’adapter l’environnement de travail de la personne handicapée afin de lui permettre une pleine et effective participation à la vie professionnelle sur la base de l’égalité avec les autres travailleurs. Cette adaptation suppose que, lorsque c’est possible, des mesures pratiques soient mises en œuvre par l’employeur afin que la personne handicapée conserve son emploi.

60.

Dans l’arrêt du 11 avril 2013, HK Danmark (C‑335/11 et C‑337/11, ci-après l’« arrêt HK Danmark , EU:C:2013:222), la Cour a jugé que le considérant 20 de la directive 2000/78 procède à une énumération non exhaustive des mesures appropriées, ces dernières pouvant être d’ordres physique, organisationnel et/ou éducatif ( 20 ).

61.

S’agissant de l’affaire au principal, ainsi que l’indique la juridiction de renvoi, compte tenu de la nature du handicap du requérant, aucune mesure d’ordres physique, organisationnel et/ou éducatif ne peut être adoptée pour qu’il puisse conserver son poste d’agent de maintenance spécialisé dans l’entretien des voies ferrées. En effet, la pose d’un stimulateur cardiaque, dispositif sensible aux champs électromagnétiques émis par les voies ferrées, rend impossible le maintien du requérant dans son poste de travail. L’aménagement des locaux ou une adaptation des équipements, des rythmes de travail, de la répartition des tâches ou de l’offre de moyens de formation ou d’encadrement ne peuvent donc constituer des mesures appropriées, au sens de l’article 5 de la directive 2000/78, dans la situation concrète du requérant.

62.

Néanmoins, le handicap de celui-ci n’est pas de nature à l’exclure de toute vie professionnelle. La question est alors de savoir si, dans une telle situation, l’employeur a l’obligation, dans la mesure du possible, de réaffecter un tel travailleur handicapé à un autre poste de travail au sein de l’entreprise. À ma connaissance, la Cour ne s’est pas encore prononcée sur cette question, qui présente une importance pratique considérable ( 21 ).

63.

Je suis d’avis qu’une réponse affirmative doit être apportée à cette question. En effet, l’article 5 de la directive 2000/78 énonce uniquement que des aménagements raisonnables sont prévus pour permettre à une personne handicapée d’accéder à un emploi, de l’exercer ou d’y progresser, ou pour qu’une formation lui soit dispensée. Par conséquent, cet article ne limite pas les mesures adoptées au seul poste occupé par le travail handicapé. Au contraire, l’accès à un emploi et la dispense d’une formation laissent ouverte la possibilité d’une affectation à un autre poste de travail. En outre, ainsi que l’énonce le considérant 16 de cette directive, la mise en place de mesures destinées à tenir compte des besoins des personnes handicapées au travail remplit un rôle majeur dans la lutte contre la discrimination fondée sur un handicap.

64.

En ce sens, dans l’arrêt HK Danmark, la Cour a relevé que, conformément à l’article 2, quatrième alinéa, de la convention de l’ONU, les « aménagements raisonnables » sont « les modifications et ajustements nécessaires et appropriés n’imposant pas de charge disproportionnée ou indue apportés, en fonction des besoins dans une situation donnée, pour assurer aux personnes handicapées la jouissance ou l’exercice, sur la base de l’égalité avec les autres, de tous les droits de l’homme et de toutes les libertés fondamentales ». La Cour en a déduit que cette disposition préconise une définition large de la notion d’« aménagement raisonnable » ( 22 ). Ainsi, s’agissant de la directive 2000/78, cette notion doit être entendue comme visant l’élimination des diverses barrières qui entravent la pleine et effective participation des personnes handicapées à la vie professionnelle sur la base de l’égalité avec les autres travailleurs ( 23 ).

65.

Dès lors, dans cet arrêt, la Cour a jugé que la réduction du temps de travail, même si elle ne relevait pas de la notion de « rythmes de travail », pouvait être considérée comme une mesure d’aménagement visée à l’article 5 de cette directive dans des cas où la réduction du temps de travail permet au travailleur de pouvoir continuer à exercer son emploi, conformément à l’objectif visé par cet article ( 24 ). La Cour a donc consacré comme aménagement raisonnable une mesure qui n’était pas explicitement visée au considérant 20 de ladite directive ( 25 ).

66.

Par ailleurs, l’article 27, paragraphe 1, sous a), de la convention de l’ONU, déjà cité, énonce que les États Parties garantissent et favorisent l’exercice du droit au travail, en prenant des mesures appropriées, y compris des mesures législatives, pour interdire la discrimination fondée sur le handicap dans tout ce qui a trait à l’emploi sous toutes ses formes, notamment le maintien dans l’emploi.

67.

De plus, outre l’article 21 de la Charte, qui prévoit l’interdiction de toute discrimination fondée sur le handicap ( 26 ), l’article 26 de celle-ci énonce que l’Union reconnaît et respecte le droit des personnes handicapées à bénéficier de mesures visant à assurer leur autonomie, leur intégration sociale et professionnelle, et leur participation à la vie de la communauté ( 27 ).

68.

Il résulte de ce qui précède que, dans toute la mesure du possible, il convient de maintenir les personnes atteintes d’un handicap dans une situation d’emploi, plutôt que de procéder à leur licenciement pour inaptitude, lequel ne doit intervenir qu’en dernier recours ( 28 ). De façon plus générale, il me paraît important de souligner que la société ne peut pas progresser si elle laisse de côté les personnes handicapées, notamment en ce qui concerne l’emploi et le travail. En ce sens, les aménagements raisonnables constituent une mesure préventive pour maintenir l’emploi des personnes handicapées ( 29 ).

69.

Dans ces conditions, je considère qu’il découle du libellé de la directive 2000/78, lu à la lumière de la convention de l’ONU et de la Charte, ainsi que de la jurisprudence de la Cour, que, lorsqu’un travailleur devient définitivement inapte à occuper son poste en raison de la survenance d’un handicap, sa réaffectation à un autre poste de travail est susceptible de constituer une mesure appropriée dans le cadre des aménagements raisonnables, au sens de l’article 5 de cette directive ( 30 ).

70.

De son côté, le comité des droits des personnes handicapées, institué dans le cadre de la convention de l’ONU ( 31 ), retient lui aussi une interprétation large de la notion d’« aménagements raisonnables », au sens de l’article 5 de cette convention, qui inclut la réaffectation de la personne handicapée à un autre poste de travail.

71.

En effet, dans des constatations adoptées au titre de l’article 5 du protocole facultatif se rapportant à la convention de l’ONU, concernant la communication no 34/2015, du 29 avril 2019 ( 32 ), ce comité a considéré que les règles qui ont privé la personne handicapée concernée d’une affectation à des fonctions de substitution ne permettaient pas de garantir les droits que cette personne tient de la convention de l’ONU, en particulier la possibilité de faire évaluer son handicap particulier dans la perspective d’un renforcement de son aptitude à exécuter des fonctions de substitution ou d’autres fonctions complémentaires ( 33 ).

72.

Certes, l’Union n’a pas approuvé le protocole facultatif se rapportant à la convention de l’ONU et le comité des droits des personnes handicapées n’est pas une instance juridictionnelle. Néanmoins, il me paraît intéressant de constater que ce comité retient la même interprétation que celle que je préconise, en vue de protéger les personnes handicapées au travail ( 34 ).

73.

Dans l’hypothèse où aucune mesure d’aménagement raisonnable ne permet à la personne handicapée de conserver le poste de travail auquel elle a été affectée, il découle du libellé de la directive 2000/78 que la réaffectation de ce travailleur à un autre poste suppose que deux conditions cumulatives soient remplies.

74.

À cet égard, d’une part, aux termes du considérant 17 de cette directive, celle-ci n’exige pas qu’une personne qui n’est pas compétente, ni capable ni disponible pour remplir les fonctions essentielles du poste concerné ou pour suivre une formation donnée soit recrutée, promue ou reste employée ou qu’une formation lui soit dispensée, sans préjudice de l’obligation de prévoir des aménagements raisonnables pour les personnes handicapées. Je déduis de ce considérant, lu de façon extensive, que l’obligation de réaffecter un travailleur handicapé à un autre poste de travail au sein de l’entreprise suppose qu’il soit compétent, capable et disponible pour remplir les fonctions essentielles de ce nouveau poste. Au-delà dudit considérant, il s’agit d’une règle dictée par le bon sens.

75.

En l’occurrence, il ressort de la décision de renvoi que le requérant avait été réaffecté à un poste de magasinier avant son licenciement intervenu le 30 septembre 2018. Par ailleurs, ainsi que l’indique la juridiction de renvoi, le requérant a fait valoir devant elle qu’il disposait d’une longue expérience professionnelle en tant que magasinier. Partant, il appartient à cette juridiction de vérifier que le requérant était compétent, capable et disponible pour occuper le poste dans lequel il a été réaffecté. Eu égard au libellé de la question préjudicielle, ladite juridiction apparaît considérer que tel est le cas dans l’affaire au principal.

76.

D’autre part, ainsi que l’énonce l’article 5 de la directive 2000/78, les mesures d’aménagements raisonnables ne doivent pas imposer à l’employeur une charge disproportionnée. Le considérant 21 de cette directive précise que, afin de déterminer si les mesures en question donnent lieu à une charge disproportionnée, il convient de tenir compte, notamment, des coûts financiers et autres qu’elles impliquent, de la taille et des ressources financières de l’organisation ou de l’entreprise et de la possibilité d’obtenir des fonds publics ou toute autre aide.

77.

L’obligation imposée à l’article 5 de la directive 2000/78 de prendre, le cas échéant, les mesures appropriées vise l’ensemble des employeurs ( 35 ). Néanmoins, la possibilité d’affecter une personne handicapée à un autre poste de travail vise, à mon sens, la situation dans laquelle il existe au moins un poste vacant que le travailleur concerné est susceptible d’occuper, pour ne pas imposer une charge disproportionnée à l’employeur ( 36 ). En effet, ainsi que l’a souligné la Commission dans ses observations écrites, la réaffectation d’un travailleur handicapé ne doit pas aboutir à priver un autre travailleur de son emploi ou forcer ce dernier à échanger son poste de travail. Cette réaffectation apparaît dès lors facilitée dans une entreprise de grande taille, pour laquelle le nombre de postes disponibles est, en principe, plus étendu. De même, la réaffectation d’un travailleur à un autre poste sera plus facile à mettre en œuvre selon sa plus ou moins grande polyvalence dans les postes de travail de l’entreprise.

78.

Là encore, il appartient à la juridiction de renvoi de déterminer si la réaffectation du requérant à un autre poste de travail constituait une charge disproportionnée, au sens de l’article 5 de la directive 2000/78, lu à la lumière du considérant 21 de celle-ci, pour son employeur. Eu égard au libellé de sa question préjudicielle, cette juridiction semble retenir l’absence d’une telle charge disproportionnée dans l’affaire au principal. À cet égard, je relève que HR Rail a d’elle-même, dans un premier temps, réaffecté le requérant au poste de magasinier au sein de l’entreprise, sans soutenir que cette nouvelle affectation a représenté pour elle une charge disproportionnée.

79.

Dans ses observations écrites, HR Rail fait valoir qu’un licenciement fondé sur le constat qu’un travailleur ne répond plus à une exigence professionnelle essentielle et déterminante, au sens de l’article 4, paragraphe 1, de la directive 2000/78 ( 37 ), n’est pas discriminatoire pour autant que l’employeur ait envisagé, au préalable, l’adoption d’aménagements raisonnables pour ce qui concerne le poste de travail occupé. Or, ces aménagements ne pourraient être mis en œuvre pour le poste concerné.

80.

Cependant, comme je l’ai indiqué, l’article 5 de cette directive implique que les aménagements raisonnables peuvent comprendre la réaffectation de la personne handicapée à un autre poste de travail au sein de l’entreprise. Dès lors, le seul fait que le requérant soit définitivement inapte à occuper le poste de travail auquel il a été affecté ne signifie pas que son employeur dispose du droit de le licencier en ce qu’il ne répond plus à une exigence professionnelle essentielle et déterminante relative à ce poste ( 38 ).

81.

HR Rail soutient également qu’il convient de distinguer les « aménagements raisonnables », au sens de l’article 5 de la directive 2000/78, de l’« action positive », au sens de l’article 7 de cette directive. Interpréter la notion d’« aménagements raisonnables » comme incluant l’obligation pour l’employeur de chercher un autre poste de travail au sein de l’entreprise remettrait en cause cette distinction dans la mesure où cet employeur devrait fournir un autre emploi à un travailleur qui ne remplit pas les fonctions essentielles du poste concerné, en dehors du cadre spécifique de l’« action positive ». Or, d’une part, le travailleur handicapé qui ne remplit pas les fonctions essentielles du poste auquel il a été affecté bénéficierait d’un autre poste alors que les autres travailleurs qui ne pourraient plus accomplir ces fonctions seraient quant à eux licenciés. D’autre part, le travailleur handicapé se verrait attribuer en priorité un poste vacant pour lequel il n’aurait pas été mis en concurrence avec d’autres candidats potentiellement intéressés alors qu’il n’est pas nécessairement le plus compétent pour l’exercer, plus particulièrement s’il est encore en stage.

82.

Je ne partage pas cette interprétation. À cet égard, je relève que la Cour a précisé la notion d’« action positive » en relevant que l’article 7, paragraphe 2, de la directive 2000/78 permet d’instaurer une distinction fondée sur le handicap, à condition que cette dernière fasse partie de dispositions relatives à la protection de la santé et de la sécurité sur le lieu de travail, ou de mesures visant à créer ou à maintenir des dispositions ou des facilités en vue de sauvegarder ou d’encourager l’insertion des personnes handicapées dans le monde du travail ( 39 ). Cette disposition a pour but d’autoriser des mesures spécifiques qui visent effectivement à éliminer ou à réduire les inégalités de fait affectant les personnes handicapées, pouvant exister dans leur vie sociale et, en particulier, dans leur vie professionnelle, ainsi qu’à parvenir à une égalité substantielle, et non formelle, en réduisant ces inégalités ( 40 ).

83.

Par conséquent, l’article 7, paragraphe 2, de la directive 2000/78 porte sur des mesures concernant les personnes handicapées, prises en tant que groupe ( 41 ), et non sur la situation concrète d’un travailleur atteint d’un handicap spécifique, qui relève de l’article 5 de cette directive ( 42 ). Or, en l’occurrence, c’est cette dernière situation qui fait l’objet de l’affaire au principal.

84.

Par ailleurs, le législateur de l’Union a fait le choix d’accorder une protection spécifique aux personnes handicapées, au titre de la directive 2000/78 ( 43 ), notamment sous la forme des aménagements raisonnables, dont, par définition, ne peuvent bénéficier les personnes non handicapées. Ces aménagements, qui constituent la traduction juridique de la notion sociale du handicap, sont le moyen de réaliser l’égalité substantielle dans une situation concrète et individualisée de discrimination ( 44 ). Ils constituent donc non pas une dérogation au principe d’égalité, mais une garantie de son effectivité ( 45 ).

85.

Eu égard à tout ce qui précède, je suis d’avis que les « aménagements raisonnables », au sens de l’article 5 de la directive 2000/78, lu à la lumière de la convention de l’ONU et de la Charte, comprennent l’obligation de réaffecter le travailleur concerné à un autre poste de travail au sein de l’entreprise lorsque les conditions prévues par cette directive sont réunies.

V. Conclusion

86.

Au vu des considérations qui précèdent, je propose à la Cour de répondre à la question préjudicielle posée par le Conseil d’État (Belgique) de la manière suivante :

L’article 5 de la directive 2000/78/CE du Conseil, du 27 novembre 2000, portant création d’un cadre général en faveur de l’égalité de traitement en matière d’emploi et de travail, doit être interprété en ce sens que, lorsqu’un travailleur, y compris celui accomplissant un stage dans le cadre de son recrutement, devient définitivement inapte, en raison de la survenance d’un handicap, à occuper le poste de travail auquel il a été affecté au sein de l’entreprise, son employeur est tenu, au titre des « aménagements raisonnables » prévus à cet article, de le réaffecter à un autre poste de travail lorsqu’il dispose de la compétence, de la capacité et de la disponibilité requises, et lorsqu’une telle mesure n’impose pas à cet employeur une charge disproportionnée.


( 1 ) Langue originale : le français.

( 2 ) Directive du Conseil du 27 novembre 2000 portant création d’un cadre général en faveur de l’égalité de traitement en matière d’emploi et de travail (JO 2000, L 303, p. 16).

( 3 ) Recueil des traités des Nations unies, vol. 2515, p. 3.

( 4 ) Décision du Conseil du 26 novembre 2009 concernant la conclusion, par la Communauté européenne, de la convention des Nations unies relative aux droits des personnes handicapées (JO 2010, L 23, p. 35).

( 5 ) Moniteur belge du 30 mai 2007, p. 29016.

( 6 ) Ainsi que l’indique la décision de renvoi, HR Rail a pour objet la sélection et le recrutement du personnel statutaire et non statutaire nécessaire à la réalisation des missions de la société Infrabel SA et de la Société nationale des chemins de fer belges (SNCB).

( 7 ) Arrêt du 15 juillet 2021, Tartu Vangla (C‑795/19, EU:C:2021:606, point 26 et jurisprudence citée).

( 8 ) Arrêt du 26 janvier 2021, Szpital Kliniczny im. dra J. Babińskiego Samodzielny Publiczny Zakład Opieki Zdrowotnej w Krakowie (C‑16/19, EU:C:2021:64, point 34).

( 9 ) Voir, en ce sens, arrêt du 2 avril 2020, Comune di Gesturi (C‑670/18, EU:C:2020:272, point 21 et jurisprudence citée).

( 10 ) Voir, en ce sens, arrêt du 18 janvier 2018, Ruiz Conejero (C‑270/16, EU:C:2018:17, point 32).

( 11 ) Arrêt du 11 septembre 2019, Nobel Plastiques Ibérica (C‑397/18, EU:C:2019:703, points 39 et 40 ainsi que jurisprudence citée).

( 12 ) Arrêt du 11 septembre 2019, Nobel Plastiques Ibérica (C‑397/18, EU:C:2019:703, point 41 et jurisprudence citée).

( 13 ) Voir, à cet égard, conclusions de l’avocat général Wahl dans l’affaire Z. (C‑363/12, EU:C:2013:604, points 83 à 85).

( 14 ) Voir arrêt du 19 juillet 2017, Abercrombie & Fitch Italia (C‑143/16, EU:C:2017:566, points 18 et 19).

( 15 ) Voir arrêt du 19 juillet 2017, Abercrombie & Fitch Italia (C‑143/16, EU:C:2017:566, point 19 et jurisprudence citée).

( 16 ) Arrêt du 9 juillet 2015, Balkaya (C‑229/14, EU:C:2015:455, point 50 et jurisprudence citée).

( 17 ) Certains auteurs soulignent que, contrairement à la convention de l’ONU, la directive 2000/78 ne prévoit pas le refus d’aménagement raisonnable comme une forme de discrimination. Voir, notamment, Waddington, L., « Equal to the Task ? Re‑Examining EU Equality Law in the Light of the United Nations Convention on the Rights of Persons with Disabilities », European Yearbook of Disability Law, vol. 4, sous la direction de Quinn, G., Waddington, L., et Flynn, E., Intersentia, Cambridge, 2013, p. 169 à 200, en particulier p. 190. Cependant, cette directive devant faire l’objet, dans la mesure du possible, d’une interprétation conforme à la convention de l’ONU, je suis d’avis que ladite directive doit être comprise en ce sens qu’elle prohibe la discrimination constituée par un refus d’aménagement raisonnable. Ainsi, dans l’arrêt du 11 septembre 2019, Nobel Plastiques Ibérica (C‑397/18, EU:C:2019:703, point 72), la Cour s’est référée explicitement à la disposition de la convention de l’ONU relative au refus d’aménagement raisonnable.

( 18 ) Conclusions de l’avocate générale Kokott dans les affaires jointes HK Danmark (C‑335/11 et C‑337/11, EU:C:2012:775, point 59).

( 19 ) Conclusions de l’avocat général Wahl dans l’affaire Z. (C‑363/12, EU:C:2013:604, point 105).

( 20 ) Arrêt HK Danmark, point 49.

( 21 ) HR Rail se réfère à l’arrêt du 11 septembre 2019, Nobel Plastiques Ibérica (C‑397/18, EU:C:2019:703), qui, selon elle, confirmerait l’interprétation selon laquelle les aménagements raisonnables doivent se limiter au poste de travail occupé. Cependant, dans cet arrêt, la Cour a uniquement relevé qu’il appartenait à la juridiction nationale de vérifier si les adaptations effectuées ont été suffisantes pour être considérées comme étant des aménagements raisonnables. La Cour n’a donc pas statué sur la portée de la notion d’« aménagements raisonnables », au sens de l’article 5 de la directive 2000/78 (voir points 68 et 69 de cet arrêt). Par ailleurs, le point 65 dudit arrêt reprend les considérants 20 et 21 de cette directive tels qu’ils sont libellés.

( 22 ) Arrêt HK Danmark, point 53.

( 23 ) Arrêt HK Danmark, point 54.

( 24 ) Arrêt HK Danmark, point 56.

( 25 ) Voir, également, conclusions de l’avocate générale Kokott dans les affaires jointes HK Danmark (C‑335/11 et C‑337/11, EU:C:2012:775, points 54 à 58).

( 26 ) La directive 2000/78 concrétise, dans le domaine qu’elle couvre, le principe général de non-discrimination consacré à l’article 21 de la Charte. Voir arrêt du 15 juillet 2021, WABE (C‑804/18 et C‑341/19, EU:C:2021:594, point 62 et jurisprudence citée).

( 27 ) Voir arrêt du 22 mai 2014, Glatzel (C‑356/12, EU:C:2014:350, point 78), selon lequel l’article 26 de la Charte commande que l’Union respecte et reconnaisse le droit des personnes handicapées à bénéficier de mesures d’intégration.

( 28 ) Voir, en ce sens, arrêt du 11 septembre 2019, Nobel Plastiques Ibérica (C‑397/18, EU:C:2019:703, point 73). Cette interprétation ressort également du considérant 17 de la directive 2000/78.

( 29 ) Voir Gutiérrez Colomidas, D., « Can Reasonable Accommodation Safeguard the Employment of People with Disabilities? », European Yearbook on Human Rights, Intersentia, Cambridge, 2019, p. 63 à 89, en particulier p. 83.

( 30 ) La Commission souligne, dans ses observations écrites, que, dans certaines situations, une réaffectation du travailleur handicapé à un autre poste de travail pourrait impliquer pour l’employeur une charge financière moins lourde ou moins difficile à mettre en œuvre sur le plan organisationnel qu’un autre aménagement raisonnable, tel qu’un allègement du rythme de travail ou l’adaptation des équipements nécessaires à l’accomplissement des tâches requises pour le poste de travail concerné. Dans la présente affaire, il ne m’apparaît pas nécessaire d’examiner cette question dans la mesure où, en l’occurrence, aucun aménagement raisonnable ne permettait au requérant de conserver le poste de travail auquel il a été affecté.

( 31 ) Aux termes de l’article 1er, paragraphe 1, du protocole facultatif se rapportant à la convention de l’ONU, tout État Partie à ce protocole reconnaît que le comité des droits des personnes handicapées a compétence pour recevoir et examiner les communications présentées par des particuliers ou groupes de particuliers, ou au nom de particuliers ou groupes de particuliers relevant de sa juridiction qui prétendent être victimes d’une violation par cet État Partie des dispositions de la convention de l’ONU.

( 32 ) Voir CRDP/C/21/D/34/2015, consultable par le lien Internet suivant : https://tbinternet.ohchr.org/_layouts/15/treatybodyexternal/Download.aspx?symbolno=CRPD%2FC%2F21%2FD%2F34%2F2015&Lang=en.

( 33 ) Cette affaire concernait une personne de nationalité espagnole qui a eu un accident de la route lui causant un handicap moteur permanent. Étant en situation d’incapacité permanente d’exercer sa profession de policier, elle a été contrainte de prendre sa retraite et a été licenciée des forces de police locales. Cette personne a demandé au conseil municipal de Barcelone (Espagne) une affectation à un poste de travail adapté à son handicap, demande qui a été rejetée. À la suite de la procédure judiciaire en Espagne et devant la Cour européenne des droits de l’homme, elle a présenté une communication devant le comité des droits des personnes handicapées.

( 34 ) Voir, également, constatations du comité des droits des personnes handicapées concernant la communication no 37/2016, du 29 septembre 2020. CRPD/C/23/D/37/2016, consultable par le lien Internet suivant : https://tbinternet.ohchr.org/_layouts/15/treatybodyexternal/Download.aspx?symbolno=CRPD%2fC%2f23%2fD%2f37%2f2016&Lang=fr.

( 35 ) Arrêt du 4 juillet 2013, Commission/Italie (C‑312/11, non publié, EU:C:2013:446, point 61).

( 36 ) Le considérant 21 de la directive 2000/78 emploie le terme « notamment », ce qui implique que d’autres éléments que ceux mentionnés pourraient constituer une charge disproportionnée pour l’employeur.

( 37 ) Aux termes de cette disposition, « [n]onobstant l’article 2, paragraphes 1 et 2, les États membres peuvent prévoir qu’une différence de traitement fondée sur une caractéristique liée à l’un des motifs visés à l’article 1er ne constitue pas une discrimination lorsque, en raison de la nature d’une activité professionnelle ou des conditions de son exercice, la caractéristique en cause constitue une exigence professionnelle essentielle et déterminante, pour autant que l’objectif soit légitime et que l’exigence soit proportionnée ».

( 38 ) Voir, en ce sens, Hendrickx, F., « Disability and Reintegration in Work : Interplay between EU Non-discrimination Law and Labour Law », Reasonable Accommodation in the Modern Workplace, Potential and Limits of the Integrative Logics of Labour Law, Bulletin of comparative labour relations no 93, 2016, p. 61 à 72, en particulier p. 62.

( 39 ) Arrêt du 9 mars 2017, Milkova (C‑406/15, EU:C:2017:198, point 46).

( 40 ) Arrêt du 9 mars 2017, Milkova (C‑406/15, EU:C:2017:198, point 47).

( 41 ) Dans le même sens, l’article 27, paragraphe 1, sous h), de la convention de l’ONU énonce que les États Parties garantissent et favorisent l’exercice du droit au travail en prenant des mesures appropriées pour, notamment, favoriser l’emploi de personnes handicapées dans le secteur privé en mettant en œuvre des politiques et des mesures appropriées, y compris le cas échéant des programmes d’action positive, des incitations et d’autres mesures.

( 42 ) Voir, en ce sens, Dubout, E., « Article 7. Action positive et mesures spécifiques », Directive 2000/78 portant création d’un cadre général en faveur de l’égalité de traitement en matière d’emploi et de travail, Commentaire article par article, Larcier, Bruxelles, 1re éd., 2020, en particulier no 48, p. 207, selon lequel « il conviendrait d’envisager les mesures d’aménagements raisonnables comme étant de nature individualisée, là où les actions positives, comme les accès préférentiels, s’articulent dans une logique plus collective ».

( 43 ) Voir, à cet égard, arrêt du 18 décembre 2014, FOA (C‑354/13, EU:C:2014:2463, point 36 et jurisprudence citée), selon lequel il n’y a pas lieu d’étendre le champ d’application de la directive 2000/78 par analogie au-delà des discriminations fondées sur les motifs énumérés de manière exhaustive à l’article 1er de celle-ci.

( 44 ) Voir Joly, L., L’emploi des personnes handicapées entre discrimination et égalité, Dalloz, Paris, 2015, en particulier no 327, p. 239.

( 45 ) Voir Joly, L., op. cit., no 316, p. 232.