CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. MICHAL BOBEK

présentées le 6 août 2020 ( 1 )

Affaire C‑195/20 PPU

XC

Procédure pénale

en présence de

Generalbundesanwalt beim Bundesgerichtshof

[demande de décision préjudicielle formée par le Bundesgerichtshof (Cour fédérale de justice, Allemagne)]

« Renvoi préjudiciel – Coopération judiciaire en matière pénale – Décision-cadre 2002/584/JAI – Mandat d’arrêt européen et procédures de remise entre États membres – Article 27, paragraphes 2 et 3 – Règle de la spécialité – Portée – Poursuite de la personne recherchée pour des infractions autres que celles ayant motivé sa remise – Succession de deux mandats d’arrêt européens émis pour des infractions différentes par le même État membre – Effets juridiques attachés au départ volontaire du territoire de l’État membre d’émission du premier mandat d’arrêt européen et au retour contraint sur le territoire de celui-ci sur la base d’un second mandat d’arrêt européen »

I. Introduction

1.

En vertu de l’article 27 de la décision-cadre 2002/584/JAI ( 2 ), qui énonce la règle dite « de la spécialité », une personne qui a été remise ne peut être poursuivie, condamnée ou privée de liberté pour une infraction commise avant sa remise autre que celle qui a motivé sa remise.

2.

En l’espèce, l’accusé a été remis une première fois aux autorités allemandes par les autorités portugaises en exécution d’un mandat d’arrêt européen. Après avoir purgé sa peine, il a volontairement quitté le territoire de l’Allemagne. Il a ensuite fait l’objet d’un second mandat d’arrêt européen par lequel les autorités italiennes l’ont remis aux autorités allemandes. Les autorités italiennes ont consenti à renoncer à la règle de la spécialité aux fins des poursuites pour les faits en cause au principal. L’accusé allègue qu’un tel consentement devait émaner des autorités portugaises en tant qu’autorités d’exécution du premier mandat d’arrêt européen.

3.

Dans la présente affaire, la Cour est ainsi essentiellement appelée à se prononcer sur les modalités d’application de la règle de la spécialité dans le contexte spécifique de la sortie volontaire de la personne visée par un premier mandat d’arrêt européen du territoire de l’État membre d’émission de ce mandat, suivie du retour forcé de cette personne sur la base d’un second mandat d’arrêt européen : doit-on considérer qu’une telle personne continue, malgré cette sortie volontaire, à bénéficier de la protection conférée par la règle de la spécialité au titre du premier mandat d’arrêt européen ? Ou bien doit-on plutôt considérer que, en raison de la sortie volontaire du territoire de l’État d’émission du premier mandat, la règle de la spécialité ne peut, le cas échéant, être appréciée qu’au seul titre du second mandat d’arrêt européen, le consentement à l’extension des poursuites étant alors du seul ressort des autorités d’exécution de ce second mandat ?

II. Le cadre juridique

A.   Le droit de l’Union

4.

En vertu de l’article 1er, paragraphe 1, de la décision-cadre 2002/584 :

« Le mandat d’arrêt européen est une décision judiciaire émise par un État membre en vue de l’arrestation et de la remise par un autre État membre d’une personne recherchée pour l’exercice de poursuites pénales ou pour l’exécution d’une peine ou d’une mesure de sûreté privatives de liberté. »

5.

Il résulte de l’article 8, paragraphe 1, de cette décision-cadre que le mandat d’arrêt européen doit contenir un certain nombre d’informations, notamment « la nature et la qualification légale de l’infraction » et « la description des circonstances de la commission de l’infraction ».

6.

En vertu de l’article 13, paragraphe 1, de ladite décision-cadre :

« Si la personne arrêtée indique qu’elle consent à sa remise, ce consentement et, le cas échéant, la renonciation expresse au bénéfice de la “règle de la spécialité”, visée à l’article 27, paragraphe 2, sont donnés devant l’autorité judiciaire d’exécution, conformément au droit interne de l’État membre d’exécution. »

7.

L’article 27 de la même décision-cadre relève du chapitre 3 de celle-ci intitulé « Effets de la remise ». Il porte sur la poursuite éventuelle (de l’intéressé) pour d’autres infractions et est libellé comme suit :

« 1.   Chaque État membre peut notifier au secrétariat général du Conseil que, dans ses relations avec d’autres États membres qui ont procédé à la même notification, le consentement est réputé avoir été donné pour qu’une personne soit poursuivie, condamnée ou détenue en vue de l’exécution d’une peine ou d’une mesure de sûreté privatives de liberté, pour une infraction commise avant sa remise, autre que celle qui a motivé sa remise, sauf si, dans un cas particulier, l’autorité judiciaire d’exécution en dispose autrement dans sa décision statuant sur la remise.

2.   Sauf dans les cas visés aux paragraphes 1 et 3, une personne qui a été remise ne peut être poursuivie, condamnée ou privée de liberté pour une infraction commise avant sa remise autre que celle qui a motivé sa remise.

3.   Le paragraphe 2 ne s’applique pas dans les cas suivants :

a)

lorsque, ayant eu la possibilité de le faire, la personne n’a pas quitté le territoire de l’État membre auquel elle a été remise dans les quarante-cinq jours suivant son élargissement définitif, ou qu’elle y est retournée après l’avoir quitté;

b)

l’infraction n’est pas punie d’une peine ou mesure de sûreté privatives de liberté;

c)

la procédure pénale ne donne pas lieu à l’application d’une mesure restreignant la liberté individuelle de la personne;

d)

lorsque la personne est passible d’une peine ou une mesure non privatives de liberté, notamment une peine pécuniaire ou une mesure qui en tient lieu, même si cette peine ou mesure est susceptible de restreindre sa liberté individuelle;

e)

lorsque la personne a accepté d’être remise, le cas échéant en même temps qu’elle a renoncé à la règle de la spécialité, conformément à l’article 13;

f)

lorsque la personne a expressément renoncé, après sa remise, à bénéficier de la règle de la spécialité pour des faits spécifiques antérieurs à sa remise. La renonciation est faite devant les autorités judiciaires compétentes de l’État membre d’émission et est consignée conformément au droit interne de cet État. Elle est rédigée de manière à faire apparaître que la personne concernée l’a faite volontairement et en étant pleinement consciente des conséquences qui en résultent. La personne a le droit, à cette fin, de se faire assister d’un conseil;

g)

lorsque l’autorité judiciaire d’exécution qui a remis la personne donne son consentement conformément au paragraphe 4.

4.   La demande de consentement est présentée à l’autorité judiciaire d’exécution, accompagnée des informations mentionnées à l’article 8, paragraphe 1, ainsi que d’une traduction comme indiqué à l’article 8, paragraphe 2. Le consentement est donné lorsque l’infraction pour laquelle il est demandé entraîne elle-même l’obligation de remise aux termes de la présente décision-cadre. Le consentement est refusé pour les raisons mentionnées à l’article 3 et, sinon, il ne peut l’être que pour les raisons mentionnées à l’article 4. La décision est prise au plus tard trente jours après réception de la demande.

Pour les cas mentionnés à l’article 5, l’État membre d’émission doit fournir les garanties qui y sont prévues. »

B.   Le droit allemand

8.

Selon l’article 83h du Gesetz über die internationale Rechtshilfe in Strafsachen (loi relative à la coopération judiciaire internationale en matière pénale), qui a transposé la décision-cadre 2002/584 :

« 1)   Les personnes remises par un État membre sur la base d’un mandat d’arrêt européen ne peuvent pas :

1.

être poursuivies, condamnées ou privées de liberté pour une infraction commise avant sa remise autre que celle qui a motivé leur remise, ou ;

2.

être remises, transférées ou expulsées vers un État tiers.

2)   Le paragraphe 1 ne s’applique pas dans les cas suivants :

1.

lorsque, ayant eu la possibilité de le faire, la personne n’a pas quitté le territoire de l’État membre auquel elle a été remise dans les quarante-cinq jours suivant son élargissement définitif, ou qu’elle y est retournée après l’avoir quitté ;

2.

l’infraction n’est pas punie d’une peine ou mesure de sûreté privatives de liberté ;

3.

la procédure pénale ne donne pas lieu à l’application d’une mesure de sûreté privatives de liberté ;

4.

lorsque la personne est passible d’une peine ou une mesure non privatives de liberté, même si cette peine ou mesure est susceptible de restreindre sa liberté individuelle ;

5.

lorsque l’État membre d’exécution ou la personne remise a renoncé au principe de spécialité.

3)   La renonciation effectuée après la remise de la personne est faite devant un juge ou un procureur et est consignée. La déclaration de renonciation est irrévocable. La personne remise doit en être informée. »

III. Les faits, la procédure et la question préjudicielle

9.

L’accusé a été tour à tour poursuivi en Allemagne dans trois dossiers portant sur des infractions différentes : un trafic de stupéfiants (les faits A), un abus sexuel sur mineur commis au Portugal (les faits B), puis un viol aggravé et une extorsion, également commis au Portugal (les faits C).

10.

Tout d’abord, l’accusé a été poursuivi pour trafic de stupéfiants en quantité non négligeable (les faits A). Le 6 octobre 2011, il a été condamné pour ces faits par l’Amtsgericht Niebüll (tribunal de district de Niebüll, Allemagne) à une peine d’emprisonnement globale d’un an et neuf mois. L’exécution de cette peine a été suspendue sous conditions.

11.

Ensuite, en 2016, une procédure pénale a été ouverte en Allemagne contre l’accusé pour abus sexuel sur mineur commis au Portugal (les faits B). Le 23 août 2016, la Staatsanwaltschaft Hannover (parquet de Hanovre, Allemagne) a émis un mandat d’arrêt européen pour ce motif (ci-après le « premier mandat d’arrêt européen »). Le Tribunal da Relação de Évora (Cour d’appel d’Évora, Portugal) a autorisé la remise de l’accusé aux autorités judiciaires allemandes pour ladite infraction. L’accusé n’a pas renoncé à cette occasion à la règle de la spécialité. Le 22 juin 2017, l’accusé a été remis à la République fédérale d’Allemagne par les autorités portugaises. Il a ensuite entièrement accompli dans ce pays la peine d’emprisonnement d’un an et trois mois à laquelle il avait été condamné pour abus sexuel sur mineur. Au mois d’août 2018, il a été placé en suivi socio-judiciaire (Führungsaufsicht) pour 5 ans. Durant cette période, il devait se présenter une fois par mois chez son agent de probation.

12.

Pendant l’exécution de la peine relative à l’abus sexuel sur mineur (les faits B), la suspension sous conditions de l’exécution de la peine prononcée en 2011 par l’Amtsgericht Niebüll (tribunal de district de Niebüll) au titre du trafic de stupéfiants (les faits A) a été révoquée. Le 22 août 2018, la Staatsanwaltschaft Flensburg (parquet de Flensburg, Allemagne) a demandé au Tribunal da Relação de Évora (Cour d’appel d’Évora) de renoncer à l’application de la règle de la spécialité et de consentir à l’exécution de la peine prononcée par l’Amtsgericht Niebüll (tribunal de district de Niebüll).

13.

Le 31 août 2018, faute de réponse du Tribunal da Relação de Évora (Cour d’appel d’Évora), l’accusé a été remis en liberté. Le 18 septembre, il s’est alors rendu aux Pays‑Bas, puis en Italie. Le 19 septembre, un mandat d’arrêt européen a été émis à l’encontre de l’accusé par la Staatsanwaltschaft Flensburg (parquet de Flensburg) aux fins de l’exécution du jugement de l’Amtsgericht Niebüll (tribunal de district de Niebüll) pour les faits A (ci-après le « second mandat d’arrêt européen »).

14.

Le 27 septembre 2018, l’accusé a été arrêté en Italie. Le 10 octobre 2018, les autorités italiennes ont consenti à la remise de celui-ci. Le 18 octobre, l’accusé a été remis aux autorités allemandes.

15.

Enfin, le 5 novembre 2018, un mandat d’arrêt national (Untersuchungshaftbefehl) a été délivré par l’Amtsgericht Braunschweig (tribunal de district de Braunschweig, Allemagne) aux fins de l’instruction d’une troisième affaire impliquant l’accusé (les faits C) et dont les faits remontent au 2 septembre 2005, à savoir le viol et l’extorsion d’une ressortissante américaine de 72 ans au Portugal, à Praia da Luz. C’est cette dernière affaire qui a donné lieu à la présente demande de décision préjudicielle.

16.

Le 12 décembre 2018, la Staatsanwaltschaft Braunschweig (parquet de Braunschweig, Allemagne) a demandé à l’autorité d’exécution italienne de consentir également à ce que l’accusé soit poursuivi pour les faits de viol et d’extorsion en cause au principal (les faits C). La Corte d’appello di Milano (cour d’appel de Milan, Italie) a consenti à cette demande le 22 mars 2019.

17.

L’accusé a été placé en détention provisoire en Allemagne du 23 juillet 2019 au 11 février 2020 au titre du mandat d’arrêt national visé au point 15 des présentes conclusions. Pendant cette période, par jugement du 16 décembre 2019, le Landgericht Braunschweig (tribunal régional de Braunschweig, Allemagne) a condamné l’accusé pour les faits de viol aggravé et d’extorsion commis au Portugal en 2005 (les faits C). Il a prononcé à l’encontre de celui-ci une peine d’emprisonnement globale de 7 ans qui tient compte du jugement de 2011 de l’Amtsgericht Niebüll (tribunal de district de Niebüll). La totalité de la durée de la détention provisoire passée en Italie par l’accusé a été imputée sur la peine globale. De plus, le 21 janvier 2020, l’autorité d’exécution portugaise a consenti à l’exécution de la peine d’emprisonnement globale prononcée par l’Amtsgericht Niebüll (tribunal de district de Niebüll) pour les faits A.

18.

L’accusé est en détention depuis le 12 février 2020 au titre de l’exécution de la peine prononcée en 2011 par l’Amtsgericht Niebüll (tribunal de district de Niebüll) pour les faits A. Il a formé un pourvoi en révision devant le Bundesgerichtshof (Cour fédérale de justice, Allemagne), la juridiction de renvoi, contre le jugement du Landgericht Braunschweig (tribunal régional de Braunschweig). Il conteste en particulier la validité de la procédure ayant conduit au prononcé de ce jugement au regard de la règle de la spécialité prévue à l’article 27 de la décision-cadre 2002/584. Dans la mesure où les autorités portugaises n’ont pas consenti aux poursuites pour les faits de viol et d’extorsion commis au Portugal (les faits C), les autorités allemandes n’auraient pas été en droit de poursuivre l’accusé et les actes de procédure, tels que le mandat d’arrêt national émis par l’Amtsgericht Braunschweig (tribunal de district de Braunchweig) le 5 novembre 2018, seraient donc illégaux.

19.

Selon la juridiction de renvoi, le point de savoir si le mandat d’arrêt national délivré aux fins de l’instruction peut être maintenu ou doit au contraire être annulé dépend de la question de savoir si les autorités allemandes étaient en droit de poursuivre l’accusé pour les allégations de viol aggravé et d’extorsion commis au Portugal en 2005 (les faits C).

20.

Dans ces circonstances, le Bundesgerichtshof (Cour fédérale de justice) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour la question préjudicielle suivante :

« L’article 27, paragraphes 2 et 3, de la décision-cadre [2002/584] doit-il être interprété en ce sens que le principe de spécialité ne s’oppose pas à une mesure restrictive de liberté prise en raison d’un acte commis avant la remise, autre que celui qui constitue le motif de cette remise, lorsque la personne a quitté volontairement le territoire de l’État membre d’émission après la remise, que, plus tard, cette personne a encore une fois été remise sur le territoire de l’État membre d’émission, par un autre État membre, sur la base d’un nouveau mandat d’arrêt européen, et que le second État membre d’exécution a donné son accord pour que la personne soit poursuivie et condamnée pour cet autre acte et que la peine soit exécutée ? ».

IV. Sur la procédure d’urgence devant la Cour

21.

La juridiction de renvoi a demandé que le présent renvoi préjudiciel soit soumis à la procédure d’urgence prévue à l’article 107 du règlement de procédure de la Cour. À l’appui de cette demande, elle a fait valoir que la question préjudicielle posée porte sur l’interprétation d’une décision-cadre relevant du titre V de la troisième partie du traité FUE. Elle a aussi indiqué que, à la date de la demande de décision préjudicielle, l’accusé se trouvait en détention aux fins de l’exécution de la peine prononcée par l’Amtsgericht Niebüll (tribunal de district, Niebüll) pour trafic de stupéfiants (les faits A). Même si l’accusé devait être libéré de manière anticipée, il resterait néanmoins en détention sur la base du mandat d’arrêt national émis par l’Amtsgericht Braunschweig (tribunal de district de Braunschweig) aux fins de l’instruction des faits de viol et d’extorsion commis au Portugal (les faits C). Or, la légalité de cette détention est elle-même conditionnée par la validité de la procédure qui a conduit au jugement du Landgericht Braunschweig (tribunal régional de Braunschweig), en cause au principal, pour les faits C. En cas d’invalidité de celle-ci, l’accusé devrait être libéré.

22.

La quatrième chambre de la Cour a décidé, le 25 mai 2020, de faire droit à cette demande.

23.

Des observations écrites ont été déposées par l’accusé, le Generalbundesanwalt beim Bundesgerichtshof (procureur général près le Bundesgerichtshof, ci-après le « procureur général »), le gouvernement allemand et la Commission européenne. Ils ont tous, ainsi que l’Irlande, présenté des observations orales lors de l’audience qui s’est tenue le 16 juillet 2020.

V. Analyse

24.

Les présentes conclusions sont structurées de la manière suivante. Je commencerai par analyser la règle de la spécialité à la lumière du libellé, du contexte et de la finalité de l’article 27 de la décision-cadre 2002/584. Je m’attacherai en particulier à déterminer les effets que produit la sortie volontaire de la personne concernée du territoire de l’État membre d’émission d’un mandat d’arrêt européen sur l’application de la règle de la spécialité et, plus largement, sur la procédure de remise (A). J’expliquerai, ensuite, ce que requiert la règle de la spécialité dans l’hypothèse où la personne concernée a été remise une nouvelle fois, à l’occasion d’un second mandat d’arrêt européen, à l’État membre d’émission dans des circonstances telles que celles en cause au principal (B).

A.   La règle de la spécialité et les effets attachés à la sortie volontaire du territoire de l’État membre d’émission

25.

En l’espèce, sur la base d’un premier mandat d’arrêt européen émis par l’Allemagne et exécuté par le Portugal, l’accusé a été remis sur le territoire allemand où il a purgé la peine prononcée pour les faits visés par ce mandat d’arrêt (abus sexuel sur mineur, les faits B). À sa sortie de prison, il a été placé sous suivi socio-judiciaire mais ne s’est pas vu interdire de quitter le territoire allemand. L’accusé a volontairement quitté l’Allemagne pour se rendre d’abord aux Pays‑Bas puis en Italie. Sur la base d’un second mandat d’arrêt européen émis par les autorités allemandes, il a été à nouveau remis à celles-ci par les autorités italiennes aux fins de purger la peine à laquelle il avait été antérieurement condamné pour trafic de stupéfiants (les faits A). Lesdites autorités ont également accepté ultérieurement de renoncer à la règle de la spécialité en permettant la poursuite de l’accusé en Allemagne pour les faits de viol aggravé et d’extorsion commis au Portugal avant sa première remise (les faits C). Pour ces faits, l’accusé fait actuellement l’objet d’une mesure privative de liberté (Untersuchungshaft) en lien avec le jugement qu’il conteste.

26.

Par son unique question préjudicielle, la juridiction de renvoi cherche à savoir, en substance, quelles sont les conséquences juridiques attachées, d’une part, à la sortie volontaire du territoire de l’État membre d’émission d’une personne qui a été remise à cet État sur la base d’un premier mandat d’arrêt européen et, d’autre part, au retour forcé de cette personne sur la base d’un second mandat d’arrêt européen.

27.

Je commencerai par le premier point : quels sont les effets de la sortie volontaire du territoire de l’État d’émission d’une personne qui a été remise à cet État sur la règle de la spécialité ?

28.

Selon l’accusé et l’Irlande, une telle circonstance n’a pas d’incidence sur l’application de la règle de la spécialité. L’accusé n’a pas renoncé à cette règle en quittant volontairement le territoire allemand. La règle de la spécialité reste applicable dès lors que, d’une part, l’accusé faisait encore l’objet d’un suivi socio-judiciaire au titre des faits B lorsqu’il a quitté le territoire allemand et que, d’autre part, il n’est pas retourné de manière volontaire sur le territoire allemand. La première remise produit donc toujours ses effets.

29.

Pour leur part, le procureur général, le gouvernement allemand, la Commission ainsi que la juridiction de renvoi partagent l’avis selon lequel le départ volontaire de l’accusé du territoire de l’État membre d’émission met fin à la première procédure de remise, provoquant ainsi l’extinction de la règle de la spécialité. Les intérêts protégés par la règle de la spécialité ne seraient plus affectés lorsque la personne quitte volontairement l’État membre auquel elle a été initialement remise. La personne qui quitte volontairement l’État membre d’émission ne pourrait plus invoquer la protection conférée par la règle de la spécialité, y compris en cas de retour dans la mesure où le nouveau séjour dans l’État membre d’émission n’est alors plus dû à la remise effectuée auparavant.

30.

Je suis d’accord avec le procureur général, le gouvernement allemand, la Commission ainsi que la juridiction de renvoi. Selon moi, la règle de la spécialité est intrinsèquement liée à l’exécution d’un mandat d’arrêt européen spécifique dans le cadre duquel elle a été « activée » et peut donc être appréciée. Cette règle n’est applicable, en lien avec ce mandat, que dans la mesure où la personne concernée se trouve, par sa présence sur le territoire de l’État d’émission, sous le contrôle de cet État. Ainsi, dès lors que la personne concernée n’est plus soumise à la juridiction de l’État d’émission de ce mandat en raison d’un départ volontaire du territoire de celui-ci, la règle de la spécialité n’a plus cours.

31.

Une telle interprétation résulte du libellé, du contexte et de la finalité de l’article 27, paragraphe 2, de la décision-cadre 2002/584.

1. Interprétation littérale

32.

Aux termes de l’article 27, paragraphe 2, de la décision-cadre 2002/584, une personne qui a été remise ne peut, en principe, être poursuivie, condamnée ou privée de liberté pour une infraction commise avant sa remise autre que celle qui a motivé sa remise.

33.

Le libellé même de cette disposition ne fournit pas d’indications quant aux effets que le départ volontaire du territoire de l’État d’émission de la personne qui a fait l’objet d’une remise produit sur l’application de la règle de la spécialité. Néanmoins, ce libellé suggère clairement que la règle de la spécialité est étroitement liée à la remise (au singulier) et, par suite, à l’exécution d’un mandat d’arrêt européen spécifique. Le fait que cette règle bénéficie à « une personne qui a été remise » sous-entend en effet que cette personne doit se trouver – ou être sur le point de se trouver – sur le territoire de l’État membre qui a sollicité cette remise en exécution d’un mandat d’arrêt européen ou, du moins, sous le contrôle effectif de cet État.

34.

De même, toujours au niveau textuel, le chapitre 3 de la décision-cadre 2002/584, dont relève l’article 27, est intitulé « Effets de la remise ». Cet intitulé implique lui-aussi que les dispositions de ce chapitre gouvernent les effets produits par une remise spécifique sur la base d’un mandat d’arrêt européen donné.

2. Interprétation contextuelle

35.

S’agissant, en premier lieu, du contexte interne de l’article 27, de la décision-cadre 2002/584, il ressort du paragraphe 3 de celui-ci que la règle de la spécialité n’est pas applicable dans quelques scénarios limitativement énumérés ( 3 ). Il en est d’abord ainsi en cas de consentement à l’extension des poursuites par la personne concernée. Dans ce cas, il doit être considéré que la personne concernée a, par ce consentement, librement accepté de se soumettre à la juridiction de l’État membre d’émission pour d’autres faits alors qu’elle n’y était en aucun cas obligée. Il en est également ainsi lorsque l’autorité d’exécution du mandat d’arrêt européen consent elle-même à l’extension des poursuites ( 4 ). Cette seconde hypothèse, bien connue en droit de l’extradition classique, souligne à la fois la dimension bilatérale et les considérations de souveraineté qui sous-tendent chaque mandat d’arrêt européen : c’est au profit de l’État d’émission que l’État d’exécution renonce à exercer son ius puniendi pour des infractions autres que celles qui ont motivé la remise ( 5 ).

36.

En dépit de leurs différences apparentes, ces deux séries d’exceptions présentent un élément commun décisif : l’acceptation de soumettre des faits antérieurs à la remise, non visés par le mandat d’arrêt européen en question, au ius puniendi de l’État d’émission de ce mandat. En d’autres termes, la renonciation à la règle de la spécialité, qu’elle soit à l’initiative de la personne concernée ou bien de l’État membre d’exécution, a pour effet d’habiliter l’État d’émission à poursuivre et juger, pour des infractions autres que celles qui ont motivé la remise, une personne qui se trouve physiquement sous sa juridiction en vertu d’un mandat d’arrêt européen spécifique. Il s’ensuit que la règle de la spécialité constitue une garantie pour la personne remise aussi longtemps qu’elle demeure sur le territoire de l’État d’émission au titre même des effets de ce mandat d’arrêt, donc sous la contrainte de celui‑ci.

37.

S’agissant, en second lieu, du système que constitue la décision-cadre 2002/584, il ressort de la teneur et de la logique d’autres dispositions que les règles de cette décision-cadre sont applicables dans le cadre d’une seule et même remise. Ainsi, aux termes de l’article 1er, paragraphe 1, de ladite décision-cadre, le but spécifique poursuivi par un mandat d’arrêt européen est « la remise par un autre État membre d’une personne recherchée pour l’exercice de poursuites pénales ou pour l’exécution d’une peine ou d’une mesure de sûreté privatives de liberté ». De même, il ressort de l’article 8, paragraphe 1, et de l’annexe de la même décision-cadre que cette remise vise des infractions elles-mêmes spécifiques puisque tout mandat d’arrêt européen doit préciser la nature et la qualification légale de l’infraction ou des infractions en cause et décrire les circonstances de la commission de celle(s)-ci. C’est donc bien dans le contexte précis d’une remise – donc du fait de se trouver, sous la contrainte, sur le territoire de l’État membre d’émission – qu’un mandat d’arrêt européen autorise cet État à poursuivre la personne concernée pour les infractions qui y sont visées. C’est dans ce même contexte que la personne concernée peut se prévaloir de la règle de la spécialité. Il en résulte logiquement que cette règle ne peut ainsi être appliquée que dans le cadre concret et spécifique d’une seule remise. Elle ne peut l’être de manière transversale, au titre d’une autre remise, après que la personne concernée a quitté le territoire sur lequel elle été initialement remise ( 6 ).

3. Interprétation téléologique

38.

Si l’interprétation littérale et l’interprétation contextuelle soulignent le lien étroit qu’entretient la règle de la spécialité avec la présence de la personne remise sur le territoire de l’État d’émission dans le contexte de l’exécution d’un mandat d’arrêt européen spécifique, les objectifs poursuivis par cette règle ainsi que par l’instrument du mandat d’arrêt européen montrent que ce lien est rompu dans l’hypothèse d’une sortie volontaire de la personne du territoire de l’État membre d’émission. Faute d’emprise coercitive de l’État sur la personne concernée, la règle de la spécialité se trouve elle-même logiquement éteinte ou désactivée au titre de cette remise.

39.

S’agissant des fonctions de la règle de la spécialité énoncée à l’article 27, paragraphe 2, de la décision-cadre 2002/584, la Cour a jugé que cette règle « est liée à la souveraineté de l’État membre d’exécution et confère à la personne recherchée le droit de n’être poursuivie, condamnée ou privée de liberté que pour l’infraction ayant motivé sa remise ( 7 ) ». La règle de la spécialité poursuit ainsi principalement deux objectifs. Premièrement – et de manière traditionnelle en tant qu’elle trouve sa source première dans le droit de l’extradition ( 8 ) – cette règle vise à préserver la souveraineté de l’État d’exécution du mandat d’arrêt européen car, en exécutant ce mandat, celui-ci accepte de limiter (voire de renoncer à) l’exercice de sa propre souveraineté en matière pénale au profit d’un autre État membre. Deuxièmement – et de manière plus originale eu égard à la conception classique de l’extradition – la règle de la spécialité en droit de l’Union vise à garantir les droits de la personne concernée. Celle-ci ne doit pas être inquiétée face à d’éventuelles autres poursuites pour des infractions antérieures à sa remise qui n’ont pas été expressément visées par le mandat d’arrêt européen en question. Sous réserve de renonciation explicite de sa part au bénéfice de la règle de la spécialité, cette personne doit pouvoir compter sur le fait de ne pas être poursuivie pour d’autres infractions pendant toute la durée de sa présence contrainte sur le territoire de l’État membre d’émission.

40.

De manière déterminante pour la présente espèce, il résulte de ces deux objectifs que la règle de la spécialité a pour effet de limiter la compétence pénale de l’État d’émission et d’éviter que celui‑ci n’empiète sur les compétences de l’État d’exécution et n’outrepasse ses prérogatives à l’égard de la personne concernée. L’État membre d’émission pourrait en effet être tenté, pour différentes raisons, de poursuivre la personne pour des faits (par hypothèse antérieurs) non visés dans le mandat d’arrêt européen ( 9 ).

41.

Ces objectifs de la règle de la spécialité doivent être eux-mêmes appréciés au regard de la finalité poursuivie par les mandats d’arrêt européens. Ceux-ci visent en effet à placer la personne concernée sous la potestas de l’État membre d’émission du mandat, pour les infractions y mentionnées, en l’attrayant sur le territoire de ce même État par la contrainte ( 10 ). Dans la mesure où la règle de la spécialité protège la personne concernée contre d’éventuelles velléités de la part de l’État membre d’émission d’élargir indûment sa compétence en matière pénale, cette règle apparaît indissociablement liée à l’exécution d’un mandat d’arrêt européen spécifique dont la portée est bien définie.

42.

Par suite, la règle de la spécialité n’est applicable que dans le cadre de la remise, au titre des effets de celle-ci, aussi longtemps que la personne se trouve, sous la contrainte, sur le territoire de l’État d’émission. Une sortie volontaire de ce territoire rompt le lien entre cet État et la personne objet de la remise. Cette action de la personne concernée a pour effet de la soustraire à la potestas de cet État. Dès lors, l’intéressé n’est plus, par hypothèse, protégé par la règle de la spécialité applicable dans le cadre de la remise initiale.

43.

En bref, dans la mesure où la personne concernée a librement quitté le territoire de l’État membre d’émission, les compteurs sont remis à zéro. Cela vaut pour l’ensemble de la procédure spécifique de remise au titre d’un mandat d’arrêt européen donné, et non pour la seule règle de la spécialité. En effet, l’objectif de la remise est d’attraire la personne concernée sur le territoire de l’État membre d’émission afin qu’elle soit jugée et/ou purge sa peine dans cet État. Une fois que cet objectif a été atteint, le « cycle » de la remise est terminé. Par suite, en tant qu’elle est applicable dans le cadre de ce cycle, la règle de la spécialité est logiquement devenue elle-même caduque.

B.   Les effets d’un retour contraint sur le territoire de l’État membre d’émission

44.

Dans le cadre de la présente affaire, il n’est pas contesté que l’accusé a quitté volontairement le territoire allemand après avoir purgé la peine qui lui avait été imposée pour les faits B (abus sexuel sur mineur) visés par le mandat d’arrêt européen qui avait donné lieu à sa première remise par les autorités portugaises. Ce faisant, la règle de la spécialité applicable à ce cycle est éteinte au titre de ce mandat.

45.

Néanmoins, la présente affaire ne porte pas seulement sur les effets de la sortie volontaire du territoire de l’État d’émission d’une personne qui a été remise à cet État sur la règle de la spécialité. Elle présente une seconde spécificité d’ordre factuel qui semble fondamentalement à l’origine des doutes de la juridiction de renvoi : la personne concernée est retournée sur le territoire de l’État membre d’émission en exécution d’un second mandat d’arrêt européen. Aussi, la juridiction de renvoi s’interroge sur les conséquences attachées au fait que l’accusé a, postérieurement à son départ, été l’objet de ce second mandat d’arrêt européen qui a lui-même donné lieu au retour contraint de l’accusé sur le territoire allemand, cette fois-ci à partir du territoire italien.

46.

Ce fait est-il de nature, pour ainsi dire, à « réactiver » la règle de la spécialité au titre du premier mandat d’arrêt européen ? Dans une telle hypothèse de « réactivation », il incomberait aux autorités d’émission allemandes d’obtenir le consentement du premier État membre d’exécution (la République portugaise) aux fins de l’extension des poursuites aux faits C en cause au principal (viol aggravé et extorsion), faute pour ceux-ci d’avoir été visés par le second mandat d’arrêt européen. C’est la position défendue par l’accusé et l’Irlande pour lesquels la règle de la spécialité continue à produire ses effets à l’égard de la République portugaise.

47.

En revanche, dans le cas contraire, le consentement des autorités d’exécution du second mandat d’arrêt européen (les autorités italiennes) suffirait à de telles fins. C’est la position défendue par le procureur général, le gouvernement allemand, la Commission ainsi que la juridiction de renvoi.

48.

Pour arriver à ces conclusions opposées, l’ensemble des participants à la procédure se sont largement appuyés sur l’article 27, paragraphe 3, sous a), de la décision-cadre 2002/584, aux termes duquel la règle de la spécialité ne trouve plus application « lorsque, ayant eu la possibilité de le faire, la personne n’a pas quitté le territoire de l’État membre auquel elle a été remise dans les quarante-cinq jours suivant son élargissement définitif, ou qu’elle y est retournée après l’avoir quitté ». D’un côté, l’accusé et l’Irlande voient dans cette disposition le maintien au bénéfice de celui-ci de la protection conférée par la règle de la spécialité au titre du premier mandat d’arrêt européen dans la mesure où cette disposition exigerait le retour volontaire. D’un autre côté, le procureur général, la Commission et la juridiction de renvoi semblent s’accorder pour considérer que cette exception à la règle de la spécialité est également applicable aux retours contraints. Si le gouvernement allemand n’exclut pas une telle interprétation, il doute néanmoins que l’examen de l’article 27, paragraphe 3, sous a), de la décision-cadre 2002/584 soit nécessaire en l’espèce.

49.

Selon moi, l’invocation de cet article 27, paragraphe 3, sous a), n’est pas pertinente dans cette affaire. Il n’est ni nécessaire, ni même possible, dans des circonstances telles que celles en cause au principal, de se fonder sur ledit article 27, paragraphe 3, sous a), pour aboutir à la conclusion selon laquelle la règle de la spécialité n’est plus applicable au titre du premier mandat d’arrêt européen.

50.

En premier lieu et à titre principal, ainsi qu’il ressort de la section précédente des présentes conclusions, il n’est pas nécessaire, dans les circonstances de l’espèce, de justifier l’inapplicabilité de la règle de la spécialité au regard du premier mandat d’arrêt européen sur la base de l’article 27, paragraphe 3, sous a), de la décision-cadre 2002/584 dans la mesure où cette inapplicabilité résulte simplement de l’extinction de la première procédure de remise inhérente à la sortie volontaire de la personne concernée du territoire de l’État membre d’émission. Cette sortie a en effet rompu le lien territorial qui permet à la personne concernée de se prévaloir utilement de la protection conférée par la règle de la spécialité tout au long de la période de présence contrainte de celle-ci sur ce territoire. L’inapplicabilité de la règle de la spécialité au titre du premier mandat d’arrêt européen ne résulte ainsi pas de l’une des exceptions prévues à l’article 27, paragraphe 3, de la décision-cadre 2002/584 mais du fait que le litige s’inscrit désormais dans le cadre d’un nouveau cycle, au titre du second mandat d’arrêt européen ( 11 ).

51.

En second lieu et à titre subsidiaire, l’article 27, paragraphe 3, sous a), de la décision-cadre 2002/584 est en tout état de cause inapplicable dans l’hypothèse d’un retour contraint. En effet, de même que cette disposition vise seulement un départ volontaire de la personne concernée, son application nécessite également, le cas échéant, un retour volontaire sur le territoire de l’État membre d’émission. Cette disposition témoigne en effet, ainsi que la Cour l’a jugé dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt West ( 12 ), du consentement implicite de la personne concernée à être soumise à la juridiction de l’État membre d’émission, celui-là même qui l’a poursuivie et, le cas échéant, condamnée pour les infractions visées dans le mandat d’arrêt européen. Ce consentement implicite est manifeste lorsque la personne décide librement de rester sur le territoire plutôt que de s’en éloigner (en toute légalité) et de regagner l’État de sa nationalité, de sa résidence ou tout autre État de son choix.

52.

Certes, le libellé dudit article 27, paragraphe 3, sous a), ne mentionne pas expressément le caractère volontaire d’un retour éventuel de la personne concernée sur le territoire de l’État d’émission. Toutefois, à l’instar de l’accusé et de l’Irlande, je suis d’avis que l’expression « y est retournée après l’avoir quitté » suggère un retour volontaire et non contraint ( 13 ), mais aussi que cette interprétation est la seule qui soit logique eu égard au système et à la finalité de cette disposition ( 14 ). En effet, dans la mesure où la règle de la spécialité ne protège la personne concernée que pour autant que celle-ci se trouve, de manière contrainte, sur le territoire de l’État membre d’émission, elle n’a logiquement plus cours dès lors que cette personne est, si je puis m’exprimer ainsi, libre de ses mouvements, tant pour rester dans cet État que pour le quitter ou bien y retourner. Toute autre interprétation serait synonyme d’impunité puisqu’il suffirait à la personne concernée de revenir sous la contrainte sur le territoire de l’État membre d’émission pour ne pas, le cas échéant, être inquiétée d’éventuelles poursuites pour des infractions antérieures qu’aucun ne soupçonnait au moment de la remise. Une telle approche n’a guère de sens.

53.

Si l’accusé et l’Irlande ont donc raison de considérer que l’application de l’exception tirée de l’article 27, paragraphe 3, sous a), de la décision-cadre 2002/584 est subordonnée à un retour volontaire, ils ont en revanche tort de penser que, malgré son départ volontaire, son retour forcé aurait réactivé la règle de la spécialité au titre de la première remise.

54.

En troisième lieu, l’invocation – superflue – de l’article 27, paragraphe 3, sous a), de cette décision-cadre apparaît liée aux faits de l’espèce, alors même que ces faits sont sources d’une certaine confusion puisqu’ils mènent à une fausse piste. En effet, on ne saurait donner trop d’importance à la circonstance, purement conjoncturelle, selon laquelle la personne concernée est retournée, en exécution du second mandat d’arrêt européen, sur le territoire de l’État membre d’émission du premier mandat d’arrêt européen (l’Allemagne). Surtout, il serait illogique d’en tirer la conséquence selon laquelle la règle de la spécialité a, ce faisant, été réactivée au titre de ce premier mandat.

55.

L’exemple suivant montre clairement que la règle de la spécialité ne peut pas être réactivée au titre du premier mandat d’arrêt européen dans l’hypothèse où la personne concernée a fait l’objet d’un nouveau mandat d’arrêt européen après avoir quitté volontairement le territoire de l’État membre d’émission du premier mandat. Imaginons, toujours dans les circonstances d’une sortie volontaire du territoire de l’État d’émission du premier mandat, que l’État d’émission du second mandat soit la République tchèque plutôt que la République fédérale d’Allemagne. Dans cette hypothèse, on ne peut guère concevoir que les autorités d’émission tchèques dussent solliciter les autorités portugaises aux fins d’obtenir leur consentement à l’extension des poursuites pour des faits qui n’auraient pas été visés par le mandat d’arrêt européen émis par la République tchèque à destination de l’Italie et qui seraient antérieurs à la remise de la personne par les autorités italiennes aux autorités tchèques. Dans cette hypothèse, il apparaît clairement que les seuls interlocuteurs sont les autorités tchèques et italiennes. Quand bien mêmes les faits en question se seraient produits au Portugal, que la première remise ait été effectuée par les autorités portugaises (aux autorités allemandes), dès lors que la personne concernée a librement quitté l’Allemagne pour l’Italie (et qu’elle n’a pas fait l’objet d’une demande de remise par les autorités portugaises), seule l’autorité (d’exécution) italienne est compétente pour autoriser les autorités (d’émission) tchèques à étendre le champ des poursuites conformément à l’article 27, paragraphe 3, sous g), de la décision-cadre 2002/584. Une telle interprétation est logique et renvoie directement aux fonctions mêmes de la règle de spécialité, à sa dimension bilatérale et aux considérations de souveraineté sous-jacentes décrites dans les présentes conclusions ( 15 ) : éviter que l’État d’émission (du mandat d’arrêt spécifique par lequel la personne concernée est soumise à la potestas de celui-ci) n’empiète sur la souveraineté de l’État membre d’exécution (dudit mandat spécifique) ( 16 ).

56.

En quatrième et dernier lieu, eu égard à l’objectif d’accélération et de simplification de la coopération judiciaire entre les États membres que poursuit la décision-cadre 2002/584 ( 17 ), la Cour a jugé que les articles 27 et 28 de cette décision-cadre, dès lors qu’ils édictent des règles dérogatoires par rapport au principe de reconnaissance mutuelle énoncé à l’article 1er, paragraphe 2, de ladite décision-cadre, ne sauraient être interprétés d’une manière qui aboutirait à neutraliser l’objectif poursuivi par la même décision-cadre ( 18 ). Ainsi, l’extension des poursuites ne peut être rendue plus difficile en imposant à l’autorité d’émission du second mandat d’arrêt européen d’obtenir le consentement de l’autorité d’exécution du premier mandat.

57.

Certes, dans le cas d’espèce, la difficulté apparaît surmontable dans la mesure où la République fédérale d’Allemagne a émis les deux mandats d’arrêt européens. Il en serait cependant autrement si les États d’émission étaient différents. Plus encore, les conséquences illogiques de l’approche défendue par l’accusé et l’Irlande apparaissent clairement dans cette hypothèse. Prenons le cas d’une personne au casier judiciaire fourni. Le « dernier » État membre qui s’est vu remettre la personne devrait, des années plus tard, solliciter le consentement de tous les États membres auxquels cette personne a été précédemment remise (pas seulement un mais potentiellement trois, quatre, cinq voire plus). Compte tenu de la difficulté d’une telle entreprise, il est à parier que la personne bénéficierait d’une véritable impunité pour toutes les infractions antérieures qui n’auraient pas été détectées au moment de l’émission du premier mandat d’arrêt européen.

58.

Il résulte de ce qui précède que, dans les circonstances de l’affaire au principal, la règle de la spécialité n’impose pas d’obtenir de l’État d’exécution du premier mandat d’arrêt européen le consentement à l’extension des poursuites dans le cadre du second mandat d’arrêt européen. La règle de la spécialité est ainsi sans conséquences au titre du premier mandat d’arrêt européen et le retour de la personne concernée sur le territoire de l’État d’émission de ce mandat n’est pas de nature à réactiver cette règle.

59.

Pour autant, la règle de la spécialité reste pleinement invocable, cependant au titre du second mandat d’arrêt européen. C’est au regard de celui-ci qu’elle doit donc être appréciée dans la mesure où la personne concernée est désormais sous l’emprise de l’État membre d’émission de ce second mandat. Que cet État soit le même que celui du premier mandat d’arrêt européen est dépourvu de pertinence. Seul compte, aux fins de l’application de la règle de la spécialité, le fait que la personne concernée soit soumise au ius puniendi de cet État au titre du second mandat d’arrêt européen.

60.

Ainsi que le gouvernement allemand l’a souligné, dans la présente affaire, l’exception pertinente à la règle de la spécialité est donc l’article 27, paragraphe 3, sous g), de la décision-cadre 2002/584 au regard du second mandat d’arrêt européen : la règle de la spécialité ne s’applique pas « lorsque l’autorité judiciaire d’exécution qui a remis la personne donne son consentement conformément au paragraphe 4 ». En l’espèce, dans la mesure où les faits en cause au principal (les faits C) font l’objet de poursuites au titre d’une extension du champ du second mandat d’arrêt européen, la renonciation à la règle de la spécialité exige donc le consentement des autorités d’exécution du second mandat d’arrêt européen (les autorités italiennes en l’espèce) pour permettre aux autorités d’émission de ce mandat (les autorités allemandes) d’effectuer légalement de telles poursuites ( 19 ).

61.

Il s’ensuit qu’il convient de répondre à la question posée par la juridiction de renvoi que la règle de la spécialité ne s’oppose pas à une mesure restrictive de liberté prise en raison de faits antérieurs à la première remise, autres que ceux qui ont constitué le motif de cette remise, lorsque la personne visée par un premier mandat d’arrêt européen a quitté volontairement le territoire de l’État membre d’émission, pour autant que, au titre du second mandat d’arrêt européen émis postérieurement à ce départ, les autorités d’exécution de ce second mandat ont donné leur accord aux fins de l’extension des poursuites aux faits ayant donné lieu à la mesure restrictive de liberté en cause au principal.

62.

Je terminerai par deux observations.

63.

Premièrement, dans l’arrêt West, la Cour a certes jugé que la remise ultérieure d’une personne en application de l’article 28, paragraphe 2, de la décision-cadre 2002/584 était subordonnée en principe à l’accord de l’État membre d’exécution du mandat d’arrêt européen par lequel la personne concernée a été remise ( 20 ). Or, il ne saurait être déduit de cet arrêt que le consentement de l’autorité d’exécution du premier mandat d’arrêt européen soit nécessaire en plus de celui de l’autorité d’exécution du second mandat. En effet, à la différence de la présente affaire, l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt West portait sur la sortie forcée du territoire de l’État d’émission d’une personne qui, parce qu’elle était visée par plusieurs mandats d’arrêt européens, avait été successivement remise à plusieurs États membres. Dans cette chaîne (transitive) de mandats d’arrêts européens, un même État membre était successivement État d’émission et État d’exécution.

64.

En l’espèce, une telle chaîne est absente. La République italienne ne s’est pas vue remettre l’accusé par la République fédérale d’Allemagne. Dès lors, les autorités italiennes ne détiennent pas des autorités allemandes (ni a fortiori des autorités portugaises) leur pouvoir d’exécution du second mandat d’arrêt européen. On est seulement en présence d’une succession de deux mandats d’arrêt européens, le premier étant nettement distinct du second en raison de la sortie volontaire de l’accusé du territoire allemand.

65.

La situation aurait été analogue à l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt West ( 21 ) si et seulement si la seconde remise avait été décidée par les autorités d’émission du premier mandat (les autorités allemandes) au profit d’un autre État membre, sans que la personne concernée ait, entretemps, librement et volontairement quitté le territoire allemand. Or, en l’espèce, cela n’a pas été le cas.

66.

Deuxièmement, l’accusé a avancé qu’il ne pouvait avoir perdu le bénéfice de la règle de la spécialité dans la mesure où il était toujours soumis à un suivi socio-judiciaire lui imposant de rendre visite une fois par mois à son agent de probation. En effet, il n’aurait par conséquent pas encore fait l’objet d’un élargissement définitif au sens de l’article 27, paragraphe 3, sous a), de la décision-cadre 2002/584.

67.

Cet argument est inopérant en l’espèce dans la mesure où ledit article 27, paragraphe 3, sous a), n’est pas applicable aux faits de l’espèce. Il importe donc peu de savoir si la personne qui reste soumise à un suivi socio-judiciaire a été élargie définitivement au sens de cette disposition. La personne qui quitte volontairement l’État membre d’émission n’a en effet pas besoin de la protection conférée par la règle de la spécialité puisqu’elle n’est, par hypothèse, plus sous le contrôle de l’État d’émission du premier mandat d’arrêt européen ( 22 ).

68.

La question des effets du suivi socio-judiciaire se serait seulement posée dans le scénario, bien différent, dans lequel l’accusé, « ayant eu la possibilité de le faire, [n’aurait] pas quitté le territoire [de l’Allemagne] dans les quarante-cinq jours suivant son élargissement définitif ( 23 ) ». Dans une telle hypothèse, à défaut du consentement des autorités portugaises, il serait possible de débattre du point de savoir si l’accusé pourrait encore se prévaloir, du fait de la mesure de probation à laquelle il reste soumis, de la protection conférée par la règle de la spécialité au titre du premier mandat d’arrêt européen en vertu de l’article 27, paragraphe 3, sous a), de la décision-cadre 2002/584. Il incomberait alors à la Cour de se prononcer sur la notion d’« élargissement définitif ». Or, une telle discussion, dont l’audience a montré à quel point elle pouvait être passionnante, n’est pas nécessaire eu égard aux circonstances de l’espèce, l’accusé ayant volontairement quitté l’Allemagne à l’issue de l’exécution de sa peine pour les faits B (abus sexuel sur mineur). Je m’abstiendrai donc de lancer cette discussion dans le cadre de la présente affaire.

VI. Conclusion

69.

Je propose à la Cour de répondre comme suit à la question préjudicielle posée par le Bundesgerichtshof (Cour fédérale de justice, Allemagne) :

La règle de la spécialité, visée à l’article 27, paragraphe 2, de la décision-cadre 2002/584/JAI du Conseil, du 13 juin 2002, relative au mandat d’arrêt européen et aux procédures de remise entre États membres, telle que modifiée par la décision-cadre 2009/299/JAI du Conseil, du 26 février 2009, ne s’oppose pas à une mesure restrictive de liberté prise en raison de faits antérieurs à la première remise, autres que ceux qui ont constitué le motif de cette remise, lorsque la personne visée par un premier mandat d’arrêt européen a quitté volontairement le territoire de l’État membre d’émission, pour autant que, au titre du second mandat d’arrêt européen émis postérieurement à ce départ, les autorités d’exécution de ce second mandat ont donné leur accord aux fins de l’extension des poursuites aux faits ayant donné lieu à la mesure restrictive de liberté en cause au principal.


( 1 ) Langue originale : le français.

( 2 ) Décision-cadre 2002/584/JAI du Conseil, du 13 juin 2002, relative au mandat d’arrêt européen et aux procédures de remise entre États membres (JO 2002, L 190, p. 1), telle que modifiée par la décision-cadre 2009/299/JAI du Conseil, du 26 février 2009 (JO 2009, L 81, p. 24) (ci-après la « décision-cadre 2002/584 »).

( 3 ) Voir, sur les différentes catégories d’exceptions à la règle de la spécialité, arrêt du 1er décembre 2008, Leymann et Pustovarov (C‑388/08 PPU, EU:C:2008:669, points 67 à 73).

( 4 ) Article 27, paragraphe 3, sous g), de la décision-cadre 2002/584. Voir également, dans une logique qui repose également sur le consentement de principe des États à renoncer à une portion de leur souveraineté en matière pénale, article 27, paragraphe 1, de cette décision-cadre qui prévoit une exception plus générale par laquelle chaque État membre peut décider que le consentement à l’extension des poursuites est réputé avoir été donné sans intervention de la part de l’autorité d’exécution ou de la personne concernée. Ainsi que l’a indiqué la Commission, cette exception n’est pas en jeu dans la présente affaire, faute de notification en ce sens par les États membres concernés.

( 5 ) Sur la notion d’« infraction autre » que celle qui a motivé la remise, au sens de l’article 27, paragraphe 2, de la décision-cadre 2002/584, voir arrêts du 1er décembre 2008, Leymann et Pustovarov (C‑388/08 PPU, EU:C:2008:669, point 57), ainsi que du 6 décembre 2018, IK (Exécution d’une peine complémentaire) (C‑551/18 PPU, EU:C:2018:991, points 58 à 61).

( 6 ) Je réserverai cependant la situation, différente, visée non pas par l’article 27 mais par l’article 28 de la décision-cadre 2002/584 (remises ultérieures), tel qu’interprété notamment par l’arrêt du 28 juin 2012, West (C‑192/12 PPU, EU:C:2012:404, point 80). Voir, à ce sujet, points 62 à 64 des présentes conclusions.

( 7 ) Arrêts du 1er décembre 2008, Leymann et Pustovarov (C‑388/08 PPU, EU:C:2008:669, point 44), ainsi que du 19 septembre 2018, RO (C‑327/18 PPU, EU:C:2018:733, point 53).

( 8 ) Sur cette règle et ses différentes fonctions en droit international classique, voir, notamment, Morvillo, C.J., « Individual Rights and the Doctrine of Speciality: The Deteriorations of the United States v. Rauscher », Fordham International Law Journal, 1990, vol. 14, p. 987 ; Bouloc, B., « Le principe de la spécialité en droit pénal international », Mélanges dédiés à Dominique Holleaux, Litec, Paris, 1990, p. 7, ainsi que Zaïri, A., Le principe de la spécialité de l’extradition au regard des droits de l’homme, LGDJ, Paris, 1992. Voir également, dans le contexte propre au mandat d’arrêt européen, Lagodny, O., Rosbaud, C., « Speciality rule », dans Keijzer, N., van Sliedregt, E. (éds), The European Arrest Warrant in Practice, T.M.C. Asser, The Hague, 2009, p. 265.

( 9 ) On concédera volontiers qu’une telle approche témoigne plus de la défiance mutuelle que d’un degré de confiance élevé entre les États membres sur lequel est censée reposer la décision-cadre 2002/584 (voir considérant 10).

( 10 ) Un mandat d’arrêt européen reste un instrument de contrainte en dépit du consentement éventuel de la personne concernée à la remise.

( 11 ) Voir points 42 et 43 des présentes conclusions.

( 12 ) Arrêt du 28 juin 2012 (C‑192/12 PPU, EU:C:2012:404, point 78) dans lequel la Cour a interprété la disposition-miroir contenue à l’article 28, paragraphe 2, sous a), de la décision-cadre 2002/584 relativement aux remises ultérieures.

( 13 ) Outre la version en langue française, les autres versions linguistiques indiquent clairement la nature volontaire du retour de la personne concernée, notamment les versions en langues anglaise « has returned to that territory after leaving it » et non pas « has been returned » ; allemande « nach Verlassen dieses Gebiets dorthin zurückgekehrt ist » ; italienne « ha fatto ritorno dopo averlo lasciato » ; espagnole « haya vuelto a dicho territorio después de haber salido del mismo », ou tchèque « vrátila-li se na území tohoto státu poté, co ho opustila ». Ces différentes versions linguistiques impliquent une décision active de retour de la part de la personne concernée.

( 14 ) Voir points 39 à 42 des présentes conclusions.

( 15 ) Voir points 35 et 39 des présentes conclusions.

( 16 ) Un scénario encore plus absurde serait celui dans lequel la République portugaise aurait émis le second mandat d’arrêt européen afin de « récupérer » l’intéressé pour qu’il soit jugé au Portugal pour les faits C. Les autorités d’émission portugaises du second mandat d’arrêt européen devraient-elles alors solliciter les autorités d’exécution portugaises du premier mandat d’arrêt européen afin d’obtenir le droit d’étendre le champ des poursuites ?

( 17 ) Voir, notamment, arrêts du 1er décembre 2008, Leymann et Pustovarov (C‑388/08 PPU, EU:C:2008:669, point 42) ; du 28 juin 2012, West (C‑192/12 PPU, EU:C:2012:404, point 56), ainsi que du 6 décembre 2018, IK (Exécution d’une peine complémentaire) (C‑551/18 PPU, EU:C:2018:991, point 38).

( 18 ) Arrêt du 28 juin 2012, West (C‑192/12 PPU, EU:C:2012:404, point 77).

( 19 ) Sous réserve qu’aucune autre des exceptions prévues à l’article 27, paragraphe 3, de la décision-cadre 2002/584 n’ait été utilement invoquée.

( 20 ) Arrêt du 28 juin 2012, West (C‑192/12 PPU, EU:C:2012:404, point 80).

( 21 ) Arrêt du 28 juin 2012 (C‑192/12 PPU, EU:C:2012:404).

( 22 ) Il n’a pas été fait état, dans la présente affaire, de la transmission de la décision de probation par les autorités allemandes aux autorités d’un autre État membre aux fins de la reconnaissance et de la surveillance de cette décision. On ne s’attardera donc pas sur l’éventuelle incidence, le cas échéant, de la décision-cadre 2008/947/JAI du Conseil, du 27 novembre 2008, concernant l’application du principe de reconnaissance mutuelle aux jugements et aux décisions de probation aux fins de la surveillance des mesures de probation et des peines de substitution (JO 2008, L 337, p. 102).

( 23 ) Article 27, paragraphe 3, sous a) de la décision-cadre 2002/584.