ARRÊT DE LA COUR (première chambre)
25 mars 2021 ( *1 )
« Renvoi préjudiciel – Directive 2006/112/CE – Taxe sur la valeur ajoutée (TVA) – Exonérations – Article 135, paragraphe 1, sous a) – Opérations d’assurance et prestations de services afférentes à ces opérations, effectuées par les courtiers et les intermédiaires d’assurance – Prestation fournie pour un assureur, composée de différents services – Qualification de prestation unique »
Dans l’affaire C‑907/19,
ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Bundesfinanzhof (Cour fédérale des finances, Allemagne), par décision du 5 septembre 2019, parvenue à la Cour le 11 décembre 2019, dans la procédure
Q-GmbH
contre
Finanzamt Z,
LA COUR (première chambre),
composée de M. J.–C. Bonichot (rapporteur), président de chambre, M. L. Bay Larsen, Mme C. Toader, MM. M. Safjan et N. Jääskinen, juges,
avocat général : M. M. Szpunar,
greffier : M. A. Calot Escobar,
vu la procédure écrite,
considérant les observations présentées :
– |
pour Q-GmbH, par Mes T. Küffner et M. Rust, Rechtsanwälte, |
– |
pour le gouvernement allemand, par M. J. Möller et Mme S. Eisenberg, en qualité d’agents, |
– |
pour la Commission européenne, par Mme A. Armenia et M. L. Mantl, en qualité d’agents, |
vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,
rend le présent
Arrêt
1 |
La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 135, paragraphe 1, sous a), de la directive 2006/112/CE du Conseil, du 28 novembre 2006, relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée (JO 2006, L 347, p. 1). |
2 |
Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant Q-GmbH au Finanzamt Z (bureau des impôts Z, Allemagne) au sujet de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) devant être acquittée pour les prestations fournies par Q à un assureur, comprenant l’octroi d’une licence pour l’utilisation d’un produit d’assurance, le placement de ce produit pour le compte de l’assureur et l’exécution des contrats d’assurance conclus. |
Le cadre juridique
Le droit de l’Union
3 |
Aux termes de l’article 1er, paragraphe 2, deuxième alinéa, de la directive 2006/112 : « À chaque opération, la TVA, calculée sur le prix du bien ou du service au taux applicable à ce bien ou à ce service, est exigible déduction faite du montant de la taxe qui a grevé directement le coût des divers éléments constitutifs du prix. » |
4 |
Figurant au chapitre 3 du titre IX de cette directive, intitulé « Exonérations en faveur d’autres activités », l’article 135 de celle-ci, dispose, à son paragraphe 1 : « Les États membres exonèrent les opérations suivantes :
[...] » |
Le droit allemand
5 |
En vertu de l’article 4, point 11, de l’Umsatzsteuergesetz (loi relative à la taxe sur le chiffre d’affaires, ci-après l’« UStG »), du 21 février 2005 (BGBl. 2005 I, p. 386), les opérations effectuées au titre des activités de représentant d’un établissement d’épargne logement, d’un agent d’assurance ou d’un courtier en assurances sont exonérées. |
Le litige au principal et la question préjudicielle
6 |
Q développe, commercialise et place des produits d’assurance. Dans le cadre de ses activités, cette société a conclu un contrat avec un assureur, à savoir F-Versicherungs-AG (ci-après « F »). |
7 |
Conformément à ce contrat, Q devait fournir trois types de services. En premier lieu, elle mettait un produit d’assurance conçu pour la couverture des risques spéciaux à la disposition de F, moyennant une licence d’utilisation non exclusive. En deuxième lieu, Q plaçait pour cet assureur des contrats d’assurance, tout en adaptant les polices en cas de besoin et en évaluant les risques. Ces contrats ont été conclus entre l’assureur et les preneurs d’assurance. En troisième et dernier lieu, Q assurait, notamment, la gestion de ces contrats et le règlement des sinistres. |
8 |
Ces services faisaient l’objet d’une rémunération versée par F à Q, prenant la forme d’une commission de courtage. |
9 |
Le 27 août 2012, Q a soumis sa déclaration de taxe sur le chiffre d’affaires pour l’exercice 2011 aux autorités fiscales allemandes. Dans cette déclaration, elle a demandé à être exonérée de la TVA pour l’ensemble de ses prestations, en vertu de l’article 4, point 11, de l’UStG. |
10 |
Dans son avis d’imposition du 4 novembre 2014, le bureau des impôts Z n’a pas fait droit à la demande de Q. Il a constaté l’existence de plusieurs prestations distinctes, parmi lesquelles seule l’activité d’intermédiation en assurance était exonérée au titre de l’article 4, point 11, de l’UstG. |
11 |
Q a introduit un recours contre cet avis d’imposition devant la juridiction de première instance compétente en matière fiscale, puis, a contesté la décision rendue par celle-ci devant le Bundesfinanzhof (Cour fédérale des finances, Allemagne). Cette dernière juridiction considère que, en application des critères dégagés par la jurisprudence de la Cour, notamment dans l’arrêt du 18 janvier 2018, Stadion Amsterdam (C‑463/16, EU:C:2018:22), les services concernés devraient, en principe, être qualifiés de prestation unique. |
12 |
Le régime fiscal d’une prestation unique serait déterminé en fonction de son élément principal, à savoir, en l’occurrence, selon la juridiction de renvoi, l’octroi de licences pour l’utilisation d’un produit d’assurance. Les autres éléments, que sont l’intermédiation en assurance et les prestations en vue de l’exécution des contrats d’assurance, y compris le règlement des sinistres, ne seraient que des prestations accessoires. En effet, les activités d’intermédiation en assurance exercées par Q seraient liées à la fourniture de son produit d’assurance à l’assureur. C’est pour le compte de celui-ci que cette société aurait placé ce produit auprès des preneurs d’assurance. En outre, la rémunération de Q aurait également été due lorsque d’autres intermédiaires procédaient au placement de son produit d’assurance pour le compte de l’assureur. |
13 |
En outre, ainsi qu’il découlerait de la jurisprudence de la Cour, l’exonération prévue à l’article 135, paragraphe 1, sous a), de la directive 2006/112 ne s’appliquerait pas à une activité consistant en l’octroi de licences pour l’utilisation d’un produit d’assurance. |
14 |
En effet, dans l’hypothèse où un assureur externalise des services de fourniture des produits d’assurance pour les confier à un tiers, ces services ne relèveraient pas de l’exonération, ce qui ressortirait de l’arrêt du 3 mars 2005, Arthur Andersen (C‑472/03, EU:C:2005:135). En outre, au vu de l’arrêt du 17 mars 2016, Aspiro (C‑40/15, EU:C:2016:172), le règlement des sinistres par un entrepreneur pour le compte d’un assureur ne saurait être qualifié de prestation effectuée par un intermédiaire d’assurance, dès lors que le lien avec les aspects essentiels de l’activité d’intermédiaire d’assurance, à savoir la recherche de clients et la mise en relation de ceux–ci avec l’assureur, ferait défaut. |
15 |
Or, selon le Bundesfinanzhof (Cour fédérale des finances), il n’est pas exclu que l’arrêt du 17 mars 2016, Aspiro (C‑40/15, EU:C:2016:172), puisse être interprété différemment, de telle sorte qu’une prestation unique devrait également être exonérée lorsque seule une prestation accessoire satisfait aux exigences fixées à l’article 135, paragraphe 1, sous a), de la directive 2006/112. Dans l’affaire au principal, il serait constant que Q exerçait, de manière accessoire, une activité d’intermédiation en assurance qui, en tant que telle, devrait être exonérée en vertu de cette disposition. |
16 |
Partant, afin de résoudre le litige dont la juridiction de renvoi est saisie, il conviendrait de déterminer la portée exacte de l’arrêt du 17 mars 2016, Aspiro (C‑40/15, EU:C:2016:172), afin de déterminer si la prestation unique fournie par Q doit être exonérée de la TVA. |
17 |
Dans ces conditions, le Bundesfinanzhof (Cour fédérale des finances) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour la question préjudicielle suivante : « Est-on en présence d’un service afférent aux opérations d’assurance et de réassurance, fourni en exonération d’impôt par les courtiers et intermédiaires d’assurance, au sens de l’article 135, paragraphe 1, sous a), de la directive [2006/112], lorsqu’un assujetti qui exerce une activité d’intermédiaire pour une société d’assurances fournit de plus à cette dernière le produit d’assurance placé ? » |
Sur la question préjudicielle
18 |
Par sa question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 135, paragraphe 1, sous a), de la directive 2006/112 doit être interprété en ce sens que l’exonération de la TVA qu’il prévoit s’applique aux prestations effectuées par un assujetti, qui comprennent la fourniture d’un produit d’assurance à une société d’assurances et, à titre accessoire, le placement de ce produit pour le compte de cette société ainsi que la gestion des contrats d’assurance conclus, dans la mesure où ces prestations doivent être qualifiées de prestation unique au regard de la TVA. |
19 |
Il ressort de la jurisprudence de la Cour que lorsqu’une opération est constituée d’un faisceau d’éléments et d’actes, il y a lieu de prendre en considération toutes les circonstances dans lesquelles se déroule l’opération en question, afin de déterminer si cette opération donne lieu, aux fins de la TVA, à deux ou à plusieurs prestations distinctes ou à une prestation unique (arrêt du 18 janvier 2018, Stadion Amsterdam, C‑463/16, EU:C:2018:22, point 21 et jurisprudence citée). |
20 |
Si chaque opération doit normalement être considérée, aux fins de la TVA, comme distincte et indépendante, ainsi qu’il découle de l’article 1er, paragraphe 2, deuxième alinéa, de la directive 2006/112, l’opération constituée d’une seule prestation sur le plan économique ne doit pas être artificiellement décomposée pour ne pas altérer la fonctionnalité du système de la TVA. C’est pourquoi il existe une prestation unique lorsque deux ou plusieurs éléments ou actes fournis par l’assujetti au client sont si étroitement liés qu’ils forment, objectivement, une seule prestation économique indissociable, dont la décomposition revêtirait un caractère artificiel [arrêt du 2 juillet 2020, Blackrock Investment Management (UK), C‑231/19, EU:C:2020:513, point 23 et jurisprudence citée]. |
21 |
Tel est, notamment, le cas lorsqu’un ou plusieurs éléments doivent être considérés comme constituant la prestation principale, alors que, à l’inverse, d’autres éléments doivent être regardés comme une ou des prestations accessoires partageant le sort fiscal de la prestation principale. En particulier, une prestation doit être considérée comme accessoire à une prestation principale lorsqu’elle constitue pour la clientèle non pas une fin en soi, mais le moyen de bénéficier dans les meilleures conditions du service principal du prestataire (arrêt du 2 décembre 2010, Everything Everywhere, C‑276/09, EU:C:2010:730, points 24 et 25 ainsi que jurisprudence citée). |
22 |
En l’occurrence, il ressort de la décision de renvoi que c’est la licence d’utilisation du produit d’assurance en question qui permet à un assureur d’offrir ce produit à des clients potentiels. Il lui est loisible, à cette fin, d’avoir recours aux services d’intermédiation fournis par Q, mais il n’y est nullement tenu. Il semble donc que les services d’intermédiation fournis par cette société ne soient pas indispensables pour la distribution dudit produit d’assurance aux futurs assurés, mais qu’ils constituent plutôt une activité distincte et indépendante, ce qu’il appartient à la juridiction de renvoi de vérifier. |
23 |
En outre, les informations figurant dans la décision de renvoi ne permettent pas de déterminer si les services d’intermédiation assurés par Q se distinguent des mêmes services fournis par d’autres intermédiaires. En particulier, sous réserve des vérifications qui incombent à la juridiction de renvoi, il n’apparaît pas que l’intermédiation dont se charge Q permette à un assureur de mieux utiliser la licence octroyée par cette société ou qu’elle seule puisse garantir, par ses services d’intermédiation, que cet assureur bénéficie de cette licence dans les meilleures conditions. |
24 |
Dans ces conditions, l’octroi d’une licence d’utilisation du produit d’assurance en question à un assureur, d’une part, et les services d’intermédiation fournis par Q, d’autre part, ne paraissent pas devoir être qualifiés de prestation unique aux fins de la TVA. |
25 |
Par ailleurs, c’est eu égard aux mêmes considérations que celles qui ressortent des points 22 et 23 du présent arrêt qu’il appartient à la juridiction de renvoi de vérifier si les services de gestion des contrats d’assurance également fournis par Q ainsi que l’octroi d’une licence d’utilisation du produit d’assurance en question forment une prestation unique. |
26 |
Il n’appartient toutefois pas à la Cour, saisie dans le cadre de l’article 267 TFUE, de qualifier les faits en cause au principal, une telle qualification relevant de la seule compétence du juge national. Le rôle de la Cour se limite à fournir à ce dernier une interprétation du droit de l’Union utile pour la décision qu’il lui revient de prendre dans le litige dont il est saisi [arrêt du 2 juillet 2020, Blackrock Investment Management (UK), C‑231/19, EU:C:2020:513, point 25 et jurisprudence citée]. |
27 |
Partant, dès lors qu’il ne saurait être totalement exclu que, après avoir effectué les vérifications évoquées aux points 22 à 25 du présent arrêt, la juridiction de renvoi parvienne à la conclusion que les différents services fournis par Q forment une prestation unique, il convient d’examiner si une telle prestation peut relever de l’exonération de la TVA prévue à l’article 135, paragraphe 1, sous a), de la directive 2006/112. |
28 |
À cet égard, il convient de rappeler que, dès lors que les prestations accessoires partagent le traitement de la principale en matière de TVA, dans l’hypothèse où cette prestation principale relèverait de l’article 135, paragraphe 1, sous a), de la directive 2006/112, l’opération devrait dans sa totalité être exonérée de la TVA en application de cette disposition (voir, en ce sens, arrêt du 8 décembre 2016, Stock ’94, C‑208/15, EU:C:2016:936, point 25). |
29 |
En l’occurrence, la juridiction de renvoi considère que l’octroi de licences pour l’utilisation d’un produit d’assurance constitue la prestation principale fournie par Q. Partant, il convient d’examiner si cette prestation remplit les critères prévus à l’article 135, paragraphe 1, sous a), de la directive 2006/112 pour être exonérée de la TVA. |
30 |
Il y a lieu, à cet égard, de rappeler que les termes employés pour désigner les exonérations visées au paragraphe 1 de l’article 135 de cette directive sont d’interprétation stricte, étant donné qu’elles constituent des dérogations au principe général selon lequel la TVA est perçue sur chaque prestation de services effectuée à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel [arrêt du 8 octobre 2020, United Biscuits (Pensions Trustees) et United Biscuits Pension Investments, C‑235/19, EU:C:2020:801, point 29]. |
31 |
Aux termes de l’article 135, paragraphe 1, sous a), de la directive 2006/112, les États membres exonèrent, d’une part, « les opérations d’assurance et de réassurance » et, d’autre part, « les prestations de services afférentes à ces opérations effectuées par les courtiers et les intermédiaires d’assurance ». |
32 |
S’agissant, en premier lieu, des opérations d’assurance, celles-ci se caractérisent, de façon généralement admise, par le fait que l’assureur se charge, moyennant le paiement préalable d’une prime, de procurer à l’assuré, en cas de réalisation du risque couvert, la prestation convenue lors de la conclusion du contrat. Elles impliquent par nature l’existence d’une relation contractuelle entre le prestataire du service d’assurance et la personne dont les risques sont couverts par l’assurance, à savoir l’assuré (arrêt du 17 mars 2016, Aspiro, C‑40/15, EU:C:2016:172, points 22 et 23). |
33 |
Ainsi, force est de constater que la prestation fournie par Q, consistant dans l’octroi d’une licence pour l’utilisation d’un produit d’assurance ne saurait être qualifiée d’opération d’assurance, dès lors que le concédant n’est lié contractuellement qu’à l’assureur qui exploite, conformément au contrat de licence, le produit en question. Selon la juridiction de renvoi, Q ne se charge pas non plus de la couverture des risques assurés sur le fondement de ce produit. |
34 |
En ce qui concerne, en second lieu, les « prestations de services afférentes à [des] opérations [d’assurance] effectuées par les courtiers et les intermédiaires d’assurance », ainsi qu’il ressort des termes mêmes de l’article 135, paragraphe 1, sous a), de la directive 2006/112, leur exonération est soumise au respect de deux conditions cumulatives. En effet, ces prestations doivent être « afférentes » à des opérations d’assurance et être « effectuées par les courtiers et les intermédiaires d’assurance ». |
35 |
S’agissant de la première de ces conditions, la Cour a jugé que le terme « afférentes » est suffisamment large pour couvrir différentes prestations concourant à la réalisation d’opérations d’assurance et, notamment, le règlement de sinistres, lequel constitue l’une des parties essentielles de ces opérations (arrêt du 17 mars 2016, Aspiro, C‑40/15, EU:C:2016:172, point 33). Il n’est dès lors pas exclu que l’octroi d’une licence permettant à un assureur d’utiliser un produit d’assurance conçu par un tiers et de conclure, sur ce fondement, des contrats d’assurance puisse constituer une prestation afférente à une opération d’assurance. |
36 |
Quant à la seconde desdites conditions, afin de déterminer si les prestations pour lesquelles l’exonération au titre de l’article 135, paragraphe 1, sous a), de la directive 2006/112 est demandée sont effectuées par un courtier ou un intermédiaire d’assurance, il convient non pas de se fonder sur la qualité formelle du prestataire, mais d’examiner le contenu même de ces prestations (voir, en ce sens, arrêt du 17 mars 2016, Aspiro, C‑40/15, EU:C:2016:172, points 35 et 36). |
37 |
Dans le cadre de cet examen, il convient de vérifier si deux critères sont remplis. En premier lieu, le prestataire doit être en relation avec l’assureur et avec l’assuré, cette relation pouvant être uniquement indirecte si le prestataire est un sous-traitant du courtier ou de l’intermédiaire. En second lieu, son activité doit recouvrir des aspects essentiels de la fonction d’intermédiaire d’assurance, tels que la recherche de prospects et la mise en relation de ceux-ci avec l’assureur, en vue de la conclusion de contrats d’assurance (voir, en ce sens, arrêt du 17 mars 2016, Aspiro, C‑40/15, EU:C:2016:172, points 37 et 39). |
38 |
S’agissant de l’octroi de licences pour l’utilisation d’un produit d’assurance par Q, il y a lieu de constater, sous réserve des vérifications qui incombent à la juridiction de renvoi, que ni l’un ni l’autre de ces critères ne sont remplis. |
39 |
En effet, dès lors qu’il convient d’examiner le contenu de cette prestation spécifique afin de déterminer si elle relève de l’article 135, paragraphe 1, sous a), de la directive 2006/112, la circonstance que Q fournisse également des services d’intermédiation n’est pas pertinente. |
40 |
Ainsi qu’il a été relevé au point 22 du présent arrêt, il ressort de la décision de renvoi que la licence d’utilisation du produit d’assurance en question permet à un assureur d’offrir ce produit à des clients potentiels en vue de la conclusion de contrats d’assurance. En revanche, il n’apparaît pas que, au stade de l’octroi d’une telle licence, le concours de futurs clients potentiels soit requis. Ce n’est que lorsque l’assureur décide d’avoir recours à des services d’intermédiation et choisit, dans ce cadre, les services offerts par Q que cette dernière peut entrer en contact avec les assurés. |
41 |
Pour ces mêmes motifs, l’octroi de licences pour l’utilisation d’un produit d’assurance n’est pas une activité qui recouvre des aspects essentiels de la fonction d’intermédiaire d’assurance. À supposer que le produit en question ait été conçu spécifiquement pour un cercle restreint des personnes en fonction de leurs besoins spécifiques, il incombe toutefois à l’assureur d’entreprendre les démarches nécessaires afin d’aborder celles-ci aux fins du placement de ce produit, notamment en ayant recours à un intermédiaire d’assurance. |
42 |
Il s’ensuit que l’activité exercée par Q, consistant dans l’octroi de licences pour l’utilisation d’un produit d’assurance, ne saurait être qualifiée de prestation effectuée par les courtiers et les intermédiaires d’assurance, au sens de l’article 135, paragraphe 1, sous a), de la directive 2006/112. |
43 |
Partant, si les services fournis par Q formaient une prestation unique, celle-ci ne saurait être exonérée de la TVA en application de cette disposition, dès lors que la prestation principale ne relève pas de du champ d’application de celle-ci. |
44 |
Au vu de l’ensemble des considérations qui précèdent, il convient de répondre à la question posée que l’article 135, paragraphe 1, sous a), de la directive 2006/112 doit être interprété en ce sens que l’exonération de la TVA qu’il prévoit ne s’applique pas aux prestations effectuées par un assujetti, qui comprennent la fourniture d’un produit d’assurance à une société d’assurances et, à titre accessoire, le placement de ce produit pour le compte de cette société ainsi que la gestion des contrats d’assurance conclus, dans le cas où la juridiction de renvoi qualifierait ces prestations de prestation unique au regard de la TVA. |
Sur les dépens
45 |
La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement. |
Par ces motifs, la Cour (première chambre) dit pour droit : |
L’article 135, paragraphe 1, sous a), de la directive 2006/112/CE du Conseil, du 28 novembre 2006, relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée, doit être interprété en ce sens que l’exonération de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) qu’il prévoit ne s’applique pas aux prestations effectuées par un assujetti, qui comprennent la fourniture d’un produit d’assurance à une société d’assurances et, à titre accessoire, le placement de ce produit pour le compte de cette société ainsi que la gestion des contrats d’assurance conclus, dans le cas où la juridiction de renvoi qualifierait ces prestations de prestation unique au regard de la TVA. |
Signatures |
( *1 ) Langue de procédure : l’allemand.