ARRÊT DE LA COUR (première chambre)

25 février 2021 ( *1 )

« Pourvoi – Recours en indemnisation – Responsabilité non contractuelle de l’Union européenne – Comportements prétendument illégaux de la Commission européenne et de l’Office européen de lutte antifraude (OLAF) – Cessation des fonctions d’un membre de la Commission –Règles procédurales régissant l’enquête de l’OLAF – Ouverture d’une enquête – Droit d’être entendu – Comité de surveillance de l’OLAF – Présomption d’innocence – Appréciation du préjudice allégué »

Dans l’affaire C‑615/19 P,

ayant pour objet un pourvoi au titre de l’article 56 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, introduit le 16 août 2019,

John Dalli, demeurant à St. Julian’s (Malte), représenté par Mes L. Levi et S. Rodrigues, avocats,

partie requérante,

l’autre partie à la procédure étant :

Commission européenne, représentée par MM. J.-P. Keppenne et J. Baquero Cruz, en qualité d’agents,

partie défenderesse en première instance,

LA COUR (première chambre),

composée de M. J.‑C. Bonichot, président de chambre, M. L. Bay Larsen (rapporteur), Mme C. Toader, MM. M. Safjan et N. Jääskinen, juges,

avocat général : M. M. Szpunar,

greffier : M. A. Calot Escobar,

vu la procédure écrite,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 22 septembre 2020,

rend le présent

Arrêt

1

Par son pourvoi, M. John Dalli demande l’annulation de l’arrêt du Tribunal de l’Union européenne du 6 juin 2019, Dalli/Commission (T‑399/17, ci-après l’« arrêt attaqué », non publié, EU:T:2019:384), par lequel celui-ci a rejeté son recours tendant à obtenir réparation du préjudice qu’il aurait subi en raison de comportements prétendument illégaux de la Commission européenne et de l’Office européen de lutte antifraude (OLAF), liés à la cessation de ses fonctions en tant que membre de la Commission le 16 octobre 2012.

Le cadre juridique

Le règlement (CE) no 1073/1999

2

L’article 1er, paragraphe 3, du règlement (CE) no 1073/1999 du Parlement européen et du Conseil, du 25 mai 1999, relatif aux enquêtes effectuées par l’Office européen de lutte antifraude (OLAF) (JO 1999, L 136, p. 1), disposait :

« À l’intérieur des institutions, organes et organismes institués par les traités ou sur la base de ceux-ci (ci-après dénommés “institutions, organes et organismes”), l’Office effectue les enquêtes administratives destinées à :

lutter contre la fraude, la corruption et contre toute autre activité illégale portant atteinte aux intérêts financiers de la Communauté européenne,

y rechercher à cet effet les faits graves, liés à l’exercice d’activités professionnelles, pouvant constituer un manquement aux obligations des fonctionnaires et agents des Communautés, susceptible de poursuites disciplinaires et le cas échéant, pénales, ou un manquement aux obligations analogues des membres des institutions et organes, des dirigeants des organismes ou des membres du personnel des institutions, organes et organismes non soumis au statut. »

3

L’article 2 de ce règlement précisait :

« Au sens du présent règlement, on entend par “enquêtes administratives” (ci‑après dénommées “enquêtes”) tous les contrôles, vérifications et actions entrepris par des agents de l’Office dans l’exercice de leurs fonctions, conformément aux articles 3 et 4, en vue d’atteindre les objectifs définis à l’article 1er et d’établir, le cas échéant, le caractère irrégulier des activités contrôlées. Ces enquêtes n’affectent pas la compétence des États membres en matière de poursuites pénales. »

4

Les articles 3 et 4 dudit règlement énonçaient les règles applicables aux enquêtes, respectivement, externes et internes de l’OLAF.

5

L’article 6 du même règlement précisait que le directeur de l’Office dirigeait l’exécution des enquêtes.

6

L’article 9, paragraphe 1, du règlement no 1073/1999 était libellé comme suit :

« À l’issue d’une enquête effectuée par l’Office, celui-ci établit sous l’autorité du directeur un rapport qui comporte notamment les faits constatés, le cas échéant le préjudice financier et les conclusions de l’enquête, y compris les recommandations du directeur de l’Office sur les suites qu’il convient de donner. »

7

L’article 11, paragraphes 1 et 6 à 8, de ce règlement prévoyait :

« 1.   Le comité de surveillance, par le contrôle régulier qu’il exerce sur l’exécution de la fonction d’enquête, conforte l’indépendance de l’Office.

À la demande du directeur ou de sa propre initiative, le comité de surveillance donne des avis au directeur concernant les activités de l’Office, sans interférer toutefois dans le déroulement des enquêtes en cours.

[...]

6.   Le comité de surveillance désigne son président. Il adopte son règlement intérieur. [...]

7.   Le directeur transmet au comité de surveillance, chaque année, le programme des activités de l’Office [...] Le directeur informe le comité des cas nécessitant la transmission d’informations aux autorités judiciaires d’un État membre.

8.   Le comité de surveillance arrête au moins un rapport d’activités par an, qu’il adresse aux institutions. Le comité peut présenter des rapports au Parlement européen, au Conseil, à la Commission et à la Cour des comptes sur les résultats et les suites des enquêtes effectuées par l’Office. »

La décision 1999/396/CE, CECA, Euratom

8

L’article 4 de la décision 1999/396/CE, CECA, Euratom de la Commission, du 2 juin 1999, relative aux conditions et modalités des enquêtes internes en matière de lutte contre la fraude, la corruption et toute activité illégale préjudiciable aux intérêts des Communautés (JO 1999, L 149, p. 57), dispose, à son premier alinéa :

« Dans le cas où apparaît la possibilité d’une implication personnelle d’un membre, d’un fonctionnaire ou d’un agent de la Commission, l’intéressé doit en être informé rapidement lorsque cela ne risque pas de nuire à l’enquête. En tout état de cause, des conclusions visant nominativement un membre, un fonctionnaire ou un agent de la Commission ne peuvent être tirées à l’issue de l’enquête sans que l’intéressé ait été mis à même de s’exprimer sur tous les faits qui le concernent. »

Le règlement intérieur du comité de surveillance de l’OLAF

9

L’article 13 du règlement intérieur du comité de surveillance de l’OLAF (JO 2011, L 308, p. 114), énonce, à son paragraphe 5 :

« Les cas dans lesquels il y a lieu de transmettre des informations aux autorités judiciaires d’un État membre sont examinés sur la base des informations fournies par le directeur général de l’OLAF et conformément au règlement (CE) no 1073/1999. Le suivi sera également effectué sur cette base.

En particulier, avant l’envoi des informations, le comité de surveillance demande l’accès aux enquêtes concernées afin de s’assurer que les garanties procédurales et les droits fondamentaux ont bien été respectés. Une fois que le secrétariat a obtenu l’accès aux documents dans un délai qui lui permette de remplir cette fonction, les rapporteurs désignés pour examiner les dossiers préparent leur présentation destinée à la séance plénière du comité. [...]

Le comité désigne des rapporteurs pour examiner ces enquêtes et, le cas échéant, émettre un avis. »

Le règlement (UE, Euratom) no 883/2013

10

Le règlement (UE, Euratom) no 883/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 11 septembre 2013, relatif aux enquêtes effectuées par l’Office européen de lutte antifraude (OLAF) et abrogeant le règlement (CE) no 1073/1999 du Parlement européen et du Conseil et le règlement (Euratom) no 1074/1999 du Conseil (JO 2013, L 248, p. 1), abroge et remplace le règlement no 1073/1999.

11

L’article 7, paragraphe 4, du règlement no 883/2013 est ainsi rédigé :

« Lorsqu’une enquête combine des éléments externes et internes, les articles 3 et 4 s’appliquent respectivement. »

Les instructions de l’OLAF à son personnel et sur les procédures d’enquête

12

L’article 5 des instructions de l’OLAF à son personnel sur les procédures d’enquête, dans leur version applicable à l’époque des faits (ci-après les « instructions de l’OLAF »), disposait :

« 1.   Le cas échéant, l’unité “Enquête – Sélection et révision” peut contacter la source et l’institution, l’organe ou l’organisme de l’Union concerné afin d’obtenir des éclaircissements et des documents complémentaires concernant les informations initiales. Elle peut également consulter les bases de données et les autres sources à la disposition de l’OLAF. Lorsqu’il s’avère nécessaire de recueillir des informations supplémentaires aux fins de la procédure de sélection, l’unité “Enquête – Sélection et révision” peut utiliser, entre autres, les moyens suivants :

a)

recueillir des documents et des informations ;

b)

recueillir des informations dans le cadre des réunions opérationnelles ;

c)

recueillir la déposition de toute personne en mesure de fournir des informations pertinentes ;

d)

mener des missions d’information dans les États membres.

2.   Lorsque la source est un dénonciateur, l’unité “Enquête – Sélection et révision” l’informe, dans les 60 jours, du délai nécessaire à la prise de mesures appropriées.

3.   L’avis relatif à l’ouverture d’une enquête ou d’un dossier de coordination est basé sur le fait que les informations relèvent ou non de la compétence de l’OLAF, qu’elles suffisent ou non à justifier l’ouverture d’une enquête ou d’un dossier de coordination et qu’elles relèvent ou non des priorités de la politique en matière d’enquête fixées par le directeur général.

4.   Les règlements, décisions et accords interinstitutionnels pertinents de l’Union ainsi que les autres instruments juridiques relatifs à la protection des intérêts financiers de l’Union et des autres intérêts de l’Union sont pris en considération pour déterminer si l’OLAF est compétent. La fiabilité de la source et la crédibilité des allégations sont prises en considération pour déterminer si les informations suffisent pour ouvrir une enquête ou un dossier de coordination. En outre, toutes les informations recueillies lors de la procédure de sélection sont prises en compte pour justifier l’ouverture d’une enquête ou d’un dossier de coordination. Les priorités de la politique en matière d’enquête établissent les critères devant être appliqués en vue de déterminer si une information relève ou non d’une priorité d’enquête reconnue.

5.   L’unité “Enquête – Sélection et révision” communique au directeur général un avis sur l’ouverture ou le rejet d’un cas dans les deux mois suivant l’enregistrement d’une information reçue. »

13

L’article 11, paragraphe 6, des instructions de l’OLAF précisait :

« Les membres de l’unité d’enquête réalisent les activités d’enquête suivantes après présentation d’un acte écrit émanant du directeur général et attestant de leur identité, de leur qualité et de l’activité d’enquête qu’ils sont autorisés et mandatés d’accomplir :

a)

l’audition des personnes concernées ;

b)

l’inspection de locaux ;

c)

les contrôles sur place ;

d)

les expertises technico-légales ;

e)

les contrôles et les inspections soumis à des règles sectorielles. »

14

L’article 12, paragraphe 3, des instructions de l’OLAF énonçait :

« Lorsque l’unité d’enquête envisage de mener une activité d’enquête qui ne relève pas du champ d’application de l’enquête ou du dossier de coordination, elle présente une demande à l’unité “Enquête – Sélection et révision” afin d’étendre ce champ. L’unité “Enquête – Sélection et révision” contrôle la proposition d’extension du champ d’application et soumet au directeur général un avis, sur la base duquel ce dernier prend une décision. »

Les antécédents du litige

15

Par la décision 2010/80/UE du Conseil européen, du 9 février 2010, portant nomination de la Commission européenne (JO 2010, L 38, p. 7), M. Dalli a été nommé membre de la Commission pour la période allant du 10 février 2010 au 31 octobre 2014. Il s’est vu attribuer, par le président de la Commission, le portefeuille de la santé et de la protection des consommateurs.

16

Le 25 mai 2012, à la suite de la réception par la Commission, le 21 mai 2012, d’une plainte de la société Swedish Match (ci-après le « plaignant »), comportant des allégations concernant le comportement de M. Dalli, l’OLAF a ouvert une enquête (ci-après l’« enquête de l’OLAF »).

17

Les 16 juillet et 17 septembre 2012, M. Dalli a été entendu par l’OLAF.

18

Le 15 octobre 2012, le rapport de l’OLAF a été transmis au secrétaire général de la Commission, à l’attention du président de cette institution. Ce rapport était accompagné d’une lettre signée par le directeur général de l’OLAF (ci-après le « directeur de l’OLAF »), résumant les principales conclusions de l’enquête.

19

Le 16 octobre 2012, M. Dalli a rencontré le président de la Commission. Ce dernier a ensuite, le même jour, informé le Premier ministre de la République de Malte ainsi que les présidents du Parlement européen et du Conseil de l’Union européenne de la démission de M. Dalli. La Commission a également publié un communiqué de presse faisant état de cette démission.

20

Par requête déposée au greffe du Tribunal le 24 décembre 2012, M. Dalli a introduit un recours tendant à l’annulation de la « décision verbale du 16 octobre 2012 de cessation [de ses] fonctions [...] avec effet immédiat, prise par le président de la Commission » et à la réparation du préjudice subi pour un montant de 1 euro symbolique au titre du préjudice moral et, à titre provisoire, de 1913396 euros au titre du préjudice matériel.

21

Cette requête a été rejetée par l’arrêt du Tribunal du 12 mai 2015, Dalli/Commission (T‑562/12, EU:T:2015:270).

22

S’agissant, d’une part, des conclusions aux fins d’annulation, le Tribunal a estimé que M. Dalli avait présenté verbalement sa démission, sans que celle-ci ait fait l’objet d’une demande du président de la Commission, au sens de l’article 17, paragraphe 6, TUE. Dès lors que l’existence de cette demande, qui constituait l’acte attaqué par le requérant, n’avait pas été établie, le Tribunal a estimé que la demande en annulation devait être rejetée comme étant irrecevable.

23

En ce qui concerne, d’autre part, les conclusions indemnitaires, le Tribunal a estimé que, dès lors qu’il avait relevé que l’existence d’une telle demande n’était pas avérée, aucune illégalité de ce chef ne saurait être constatée à ce titre à l’égard de cette institution. Quant au vice du consentement allégué, à titre subsidiaire, dans le cadre des conclusions aux fins d’annulation, le Tribunal a relevé qu’il n’avait pas été démontré. Il en a déduit que les allégations de M. Dalli quant à un comportement fautif de la Commission ou de son président n’avaient pas été établies et a, partant, rejeté les conclusions indemnitaires comme étant non fondées.

24

Le 21 juin 2015, M. Dalli a introduit un pourvoi contre cet arrêt. Ce pourvoi a été rejeté par l’ordonnance du 14 avril 2016, Dalli/Commission (C‑394/15 P, non publiée, EU:C:2016:262).

Le recours devant le Tribunal et l’arrêt attaqué

25

Par requête déposée au greffe du Tribunal le 28 juin 2017, M. Dalli a introduit un recours tendant à la condamnation de la Commission à lui verser une indemnité d’un montant estimé, à titre provisoire, à 1000000 euros en réparation du préjudice, notamment moral, qu’il aurait subi en raison de comportements prétendument illégaux de la Commission et de l’OLAF, liés à la cessation de ses fonctions en tant que membre de la Commission le 16 octobre 2012.

26

À l’appui de son recours, M. Dalli a fait valoir sept griefs relatifs à l’illégalité du comportement de l’OLAF, tirés, premièrement, de l’illégalité de la décision d’ouverture de l’enquête, deuxièmement, de vices dans la caractérisation de l’enquête et dans l’extension de celle-ci, troisièmement, d’une violation des principes en matière d’administration de la preuve et de la dénaturation ainsi que de la falsification d’éléments de preuve, quatrièmement d’une violation des droits de la défense, de l’article 4 de la décision 1999/396 et de l’article 18 des instructions de l’OLAF, cinquièmement, d’une violation de l’article 11, paragraphe 7, du règlement no 1073/1999 et de l’article 13, paragraphe 5, du règlement intérieur du comité de surveillance de l’OLAF, sixièmement, d’une violation du principe de la présomption d’innocence, de l’article 8 du règlement no 1073/1999, de l’article 339 TFUE et du droit à la protection des données à caractère personnel et, septièmement, d’une violation de l’article 4 de ce règlement, de l’article 4 de la décision 1999/396 et du protocole d’accord concernant un code de conduite pour assurer en temps utile un échange d’informations entre l’OLAF et la Commission au sujet des enquêtes internes de l’OLAF au sein de la Commission. En outre, M. Dalli a présenté deux griefs relatifs à l’illégalité du comportement de la Commission.

27

Par acte séparé déposé au greffe du Tribunal le 13 septembre 2017, la Commission a soulevé une exception d’irrecevabilité.

28

Par l’arrêt attaqué, le Tribunal, après avoir écarté cette exception d’irrecevabilité, a rejeté l’ensemble des griefs soulevés par M. Dalli contre l’OLAF et la Commission.

29

En outre, le Tribunal a constaté, à titre surabondant, que M. Dalli n’avait établi ni l’existence d’un lien de causalité suffisamment direct entre les comportements reprochés et le dommage allégué, ni l’existence de ce dernier.

30

En conséquence, le Tribunal a rejeté, dans son intégralité, le recours introduit par M. Dalli.

Les conclusions des parties

31

Par son pourvoi, M. Dalli demande à la Cour :

d’annuler l’arrêt attaqué ;

d’ordonner la réparation du préjudice, notamment moral, qu’il aurait subi et qui pourrait être estimé, à titre provisoire, à 1000000 euros, et

de condamner la Commission aux dépens des deux instances.

32

La Commission demande à la Cour :

de rejeter le pourvoi et

de condamner M. Dalli aux dépens exposés devant la Cour et devant le Tribunal.

Sur le pourvoi

33

M. Dalli invoque sept moyens. Les premier à sixième moyens se rapportent au rejet des six premiers griefs présentés en première instance au sujet du comportement de l’OLAF. Le septième moyen se rapporte aux constatations du Tribunal relatives à la réalité du dommage allégué et à l’existence d’un lien de causalité entre le comportement de cette institution et le préjudice invoqué.

34

À titre liminaire, la Commission précise que, si elle n’a pas jugé utile, pour des raisons d’économie de procédure, d’introduire un pourvoi incident, elle estime néanmoins que le recours de première instance aurait dû être rejeté comme étant irrecevable et que la Cour pourrait examiner d’office l’erreur commise sur ce point par le Tribunal.

35

À cet égard, dans la présente affaire, la Cour estime approprié de se prononcer d’emblée sur le fond de l’affaire (voir, par analogie, arrêts du 23 octobre 2007, Pologne/Conseil, C‑273/04, EU:C:2007:622, point 33, et du 7 mars 2013, Suisse/Commission, C‑547/10 P, EU:C:2013:139, point 47).

36

Par ailleurs, la Commission fait valoir que l’ensemble des moyens présentés par M. Dalli sont inopérants.

Sur le caractère inopérant de l’ensemble des moyens

Argumentation des parties

37

La Commission relève que l’engagement de la responsabilité non contractuelle de l’Union est subordonné à la réunion de trois conditions, à savoir l’illégalité du comportement reproché à l’institution de l’Union, la réalité du dommage et l’existence d’un lien de causalité entre ce comportement et ce dommage. Lorsque l’une de ces conditions fait défaut, la demande d’indemnisation devrait être rejetée sans qu’il soit nécessaire d’examiner les deux autres.

38

Or, les premier à sixième moyens invoqués à l’appui du pourvoi se rapporteraient au comportement reproché à l’OLAF, alors que le septième moyen concernerait uniquement l’existence d’un préjudice moral. La Commission considère que M. Dalli ne présente ainsi aucun moyen relatif à la condition portant sur l’existence d’un lien de causalité entre le comportement de l’OLAF et le préjudice allégué. Selon elle, M. Dalli ne peut prétendre que le septième moyen porte également sur ce lien de causalité, dès lors que, dans son pourvoi, il renvoie spécifiquement, dans l’argumentation développée au soutien de ce moyen, au point 225 de l’arrêt attaqué, lequel ne porterait que sur le préjudice, et qu’il ne contesterait pas les motifs relatifs à l’absence de lien de causalité figurant au point 224 de l’arrêt attaqué.

39

Il s’ensuivrait que les moyens présentés par M. Dalli ne remettent pas en cause le motif par lequel le Tribunal a constaté que le lien de causalité entre le comportement de l’OLAF et le préjudice allégué par M. Dalli n’était pas établi. Étant donné que ce motif suffirait à justifier le dispositif de l’arrêt attaqué, ces moyens seraient inopérants et il y aurait lieu de rejeter, pour ce motif, le pourvoi dans son ensemble.

40

M. Dalli conclut au rejet de cette argumentation.

Appréciation de la Cour

41

Il ressort d’une jurisprudence constante de la Cour que l’engagement de la responsabilité non contractuelle de l’Union, au sens de l’article 340, deuxième alinéa, TFUE, est subordonné à la réunion d’un ensemble de conditions, à savoir l’illégalité du comportement reproché à l’institution de l’Union, la réalité du dommage et l’existence d’un lien de causalité entre le comportement de cette institution et le préjudice invoqué (arrêt du 5 septembre 2019, Union européenne/Guardian Europe et Guardian Europe/Union européenne, C‑447/17 P et C‑479/17 P, EU:C:2019:672, point 147 ainsi que jurisprudence citée).

42

Ainsi que la Cour l’a jugé, dès lors que l’une de ces conditions n’est pas remplie, le recours doit être rejeté dans son ensemble sans qu’il soit nécessaire d’examiner les autres conditions de la responsabilité non contractuelle de l’Union (arrêt du 5 septembre 2019, Union européenne/Guardian Europe et Guardian Europe/Union européenne, C‑447/17 P et C‑479/17 P, EU:C:2019:672, point 148 ainsi que jurisprudence citée).

43

En l’espèce, il est constant que les moyens présentés par M. Dalli se rapportent aux conditions relatives à l’illégalité du comportement reproché à l’OLAF et à la réalité du dommage invoqué par M. Dalli. En revanche, les parties s’opposent quant à la question de savoir si le septième moyen invoqué à l’appui du pourvoi se rapporte également, pour partie, à la condition tenant à l’existence d’un lien de causalité entre ce comportement et ce dommage.

44

À cet égard, en premier lieu, la Commission ne saurait déduire du fait que M. Dalli n’a mentionné que le point 225 de l’arrêt attaqué dans l’argumentation développée au soutien du septième moyen que, par ce moyen, il ne remet pas en cause les constatations du Tribunal relative à l’existence d’un lien de causalité entre le comportement de l’OLAF et le préjudice invoqué.

45

En effet, d’une part, il convient de constater que le Tribunal n’a pas, au point 224 de l’arrêt attaqué, procédé à un examen complet de cette condition. Le Tribunal s’est borné, à ce point, à constater que M. Dalli n’avait apporté aucun élément permettant d’établir l’existence du préjudice moral allégué et à écarter l’existence d’un lien entre la fin des fonctions de celui-ci au sein de la Commission et le préjudice invoqué. En revanche, il n’a pas constaté, de manière générale, que M. Dalli n’avait pas établi l’existence d’un lien entre le comportement de l’OLAF et ce préjudice.

46

D’autre part, le Tribunal a considéré, au point 225 de l’arrêt attaqué, que le requérant n’avait pas démontré que « le comportement incriminé était, de par sa gravité, de nature à lui causer un [...] dommage ». Le Tribunal a ainsi considéré que M. Dalli n’avait prouvé ni la réalité du dommage ni l’existence d’un lien de causalité entre ce comportement et le dommage.

47

La conclusion selon laquelle le requérant n’avait pas établi l’existence d’un lien de causalité suffisamment direct entre les comportements reprochés et le dommage allégué ne figure d’ailleurs qu’au point 226 de l’arrêt attaqué.

48

En second lieu, par son septième moyen, M. Dalli fait notamment valoir que le Tribunal a commis une erreur de droit en ne tenant pas compte de la jurisprudence des juridictions de l’Union, dont il découlerait que, lorsqu’une personne est associée publiquement à une faute ou que des appréciations blessantes à son égard sont largement diffusées, elle subit, en raison de l’atteinte à sa réputation, un préjudice moral.

49

Par ce moyen, M. Dalli soutient donc qu’il suffit de caractériser l’existence de tels comportements de la part des institutions pour établir tant l’existence d’un dommage que celle d’un lien de causalité entre ces comportements et ce dommage.

50

Dans ces conditions, il y a lieu de considérer que, par le septième moyen, M. Dalli remet en cause la constatation du Tribunal selon laquelle le lien de causalité entre le comportement de l’OLAF et le préjudice allégué par le requérant n’a pas été établi. Partant, l’argument de la Commission tiré du caractère inopérant de l’ensemble des moyens présentés par M. Dalli à l’appui de son pourvoi doit être écarté.

Sur le premier moyen, relatif à la décision d’ouvrir l’enquête

Sur la première branche du premier moyen

– Argumentation des parties

51

Par la première branche du premier moyen, M. Dalli fait valoir que le Tribunal a commis une erreur de droit en jugeant, aux points 56 à 58 de l’arrêt attaqué, que ni l’article 1er, paragraphe 3, du règlement no 1073/1999 ni l’article 5 des instructions de l’OLAF ne constituent des règles de droit de l’Union conférant des droits aux particuliers.

52

La première de ces dispositions instituerait de manière claire et précise une obligation pour l’OLAF de n’ouvrir une enquête qu’en présence de « soupçons suffisamment sérieux » et de « faits graves ». La Cour aurait confirmé, dans les arrêts du 10 juillet 2003, Commission/BCE (C‑11/00, EU:C:2003:395), et du 10 juillet 2003, Commission/BEI (C‑15/00, EU:C:2003:396), l’existence d’une telle obligation, laquelle protégerait les personnes susceptibles d’être visées par une enquête de l’OLAF.

53

Quant à la seconde desdites dispositions, elle subordonnerait l’ouverture d’une enquête de l’OLAF à une série de conditions claires et précises. Dès lors qu’elle produit ainsi des effets sur les tiers, sa qualité de règle de nature générale ou interne n’exclurait pas qu’elle puisse conférer des droits aux particuliers.

54

La Commission conclut au rejet de la première branche du premier moyen comme étant non fondée ou, en tout état de cause, inopérante.

– Appréciation de la Cour

55

Il y a lieu de rappeler que, parmi les conditions requises pour l’engagement de la responsabilité non contractuelle de l’Union en vertu de l’article 340, deuxième alinéa, TFUE, figure l’exigence d’une violation suffisamment caractérisée d’une règle de droit ayant pour objet de conférer des droits aux particuliers (arrêt du 30 mai 2017, Safa Nicu Sepahan/Conseil, C‑45/15 P, EU:C:2017:402, point 29 et jurisprudence citée).

56

À cet égard, il convient de relever, en premier lieu, que le Tribunal a jugé, au point 56 de l’arrêt attaqué, que l’article 1er, paragraphe 3, du règlement no 1073/1999 ne saurait être considéré comme une telle règle de droit, dès lors qu’il se limite à énoncer les objectifs et les fonctions de l’OLAF dans le cadre d’enquêtes administratives.

57

L’argument avancé par M. Dalli selon lequel cette appréciation serait entachée d’une erreur de droit, au motif qu’elle omet de prendre en compte le fait que cette disposition subordonne l’ouverture d’une enquête de l’OLAF à la réunion de deux conditions, à savoir l’existence de « soupçons suffisamment sérieux » et celle de « faits graves », ne saurait prospérer.

58

En effet, d’une part, ladite disposition précise que les enquêtes administratives de l’OLAF sont « destinées » à « rechercher [...] les faits graves » susceptibles de poursuites. Une enquête de l’OLAF ayant ainsi, aux termes de la même disposition, pour objet de rechercher des faits graves, l’existence de tels faits ne saurait être considérée comme une condition préalable à laquelle l’ouverture d’une telle enquête serait subordonnée.

59

D’autre part, s’il ressort effectivement de la jurisprudence de la Cour qu’une enquête de l’OLAF ne peut être ouverte que lorsqu’il existe des soupçons suffisamment sérieux relatifs à des faits de fraude ou de corruption ou à d’autres activités illégales susceptibles de porter atteinte aux intérêts financiers de l’Union (voir, en ce sens, arrêts du 10 juillet 2003, Commission/BCE, C‑11/00, EU:C:2003:395, point 141, et du 10 juillet 2003, Commission/BEI, C‑15/00, EU:C:2003:396, point 164), cette condition ne résulte pas, ainsi que l’a relevé M. l’avocat général au point 50 de ses conclusions, de l’article 1er, paragraphe 3, du règlement no 1073/1999, lequel ne se réfère d’ailleurs pas à la notion de « soupçons suffisamment sérieux ».

60

En second lieu, le Tribunal a jugé, au point 57 de l’arrêt attaqué, que l’article 5 des instructions de l’OLAF ne constitue pas une règle de droit ayant pour objet de conférer des droits aux particuliers, en se fondant sur la qualification de « règles internes » de ces instructions ainsi que sur la circonstance que cet article décrit la procédure de sélection mise en place au sein de l’OLAF en vue d’assurer que ses enquêtes soient menées de manière logique et cohérente.

61

Il s’ensuit que l’appréciation portée par le Tribunal à ce point n’est pas uniquement fondée sur la qualification de « règle interne » dudit article, mais repose également sur le contenu de celui-ci.

62

Or, il ressort des termes mêmes de l’article 5 des instructions de l’OLAF que celui-ci a pour objet de définir les conditions d’émission d’un avis destiné au directeur de l’OLAF dans le cadre d’une procédure de sélection et énumère des éléments qui doivent être pris en compte dans cette procédure, sans fixer des conditions préalables à l’ouverture par l’OLAF d’une enquête.

63

Dans ces conditions, M. Dalli ne saurait valablement prétendre que le Tribunal a commis une erreur de droit en jugeant que cet article ne constitue pas une règle de droit ayant pour objet de conférer des droits aux particuliers.

64

Par conséquent, il y a lieu de rejeter la première branche du premier moyen comme étant non fondée.

Sur la seconde branche du premier moyen

– Argumentation des parties

65

Par la seconde branche du premier moyen, M. Dalli soutient que le Tribunal a jugé à tort que le devoir de diligence n’avait pas été violé.

66

En premier lieu, au point 68 de l’arrêt attaqué, le Tribunal aurait dénaturé les faits en ne précisant pas que le « délai très court » ou le « court délai » entre la transmission des informations contenues dans la plainte et la décision d’ouverture de l’enquête correspondait non pas à un jour, mais à quelques heures.

67

En deuxième lieu, contrairement à ce qui ressort de ce point 68, il ne pourrait être déduit de l’avis de l’unité « Enquête – Sélection et révision » que cette unité a effectué des recherches sur le plaignant et sur deux autres personnes mises en cause, dans la mesure où le comité de surveillance de l’OLAF (ci-après le « comité de surveillance ») aurait indiqué qu’il n’a trouvé aucun élément attestant de l’existence de vérifications par l’OLAF, autre que ceux portant sur l’existence des personnes et des sociétés dont les noms figuraient dans la plainte. L’OLAF n’aurait donc pas procédé à l’examen minutieux qu’il lui appartenait d’effectuer.

68

En troisième lieu, l’arrêt attaqué serait insuffisamment motivé, en ce qu’il n’exposerait pas les raisons pour lesquelles l’avis exprimé par le comité de surveillance n’a pas été pris en compte.

69

En quatrième lieu, le Tribunal aurait commis une erreur de droit en jugeant que l’OLAF avait procédé à un examen suffisant des allégations énoncées dans la plainte visant M. Dalli avant de décider d’ouvrir une enquête à ce sujet.

70

Le Tribunal n’aurait ainsi pas exposé de manière suffisante les éléments factuels évoqués par M. Dalli et la raison pour laquelle ils ne pouvaient pas être appréciés avant l’ouverture de l’enquête, alors que des vérifications auraient notamment pu être menées quant à la position adoptée par le plaignant dans les dossiers dont était saisi M. Dalli et quant aux relations de ce plaignant avec la Commission.

71

En outre, l’appréciation portée par le Tribunal au point 73 de l’arrêt attaqué, selon laquelle l’OLAF pouvait ouvrir une enquête en se fondant sur des informations énoncées dans une plainte lorsque celles-ci sont précises et circonstanciées, sans procéder aux vérifications nécessaires pour apprécier la crédibilité de ces allégations, serait erronée. De même, le Tribunal aurait dû juger, au point 74 de cet arrêt, que l’OLAF était tenu de s’assurer de l’absence de conflit d’intérêts, quand bien même un tel conflit ne résultait pas manifestement des informations reçues.

72

La Commission conclut au rejet de la seconde branche du premier moyen comme étant, pour partie, irrecevable et, pour partie, non fondée.

– Appréciation de la Cour

73

Premièrement, s’agissant de l’allégation de M. Dalli selon laquelle le Tribunal aurait, au point 68 de l’arrêt attaqué, dénaturé des éléments de fait, il convient de rappeler que, ainsi qu’il résulte de l’article 256, paragraphe 1, second alinéa, TFUE et de l’article 58, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, le pourvoi est limité aux questions de droit. Le Tribunal est, dès lors, seul compétent pour constater et apprécier les faits pertinents ainsi que pour apprécier les éléments de preuve. L’appréciation de ces faits et de ces éléments de preuve ne constitue donc pas, sous réserve du cas de leur dénaturation, une question de droit soumise, comme telle, au contrôle de la Cour dans le cadre d’un pourvoi (arrêt du 28 mai 2020, Asociación de fabricantes de morcilla de Burgos/Commission, C‑309/19 P, EU:C:2020:401, point 10 et jurisprudence citée).

74

Au point 68 de l’arrêt attaqué, le Tribunal n’a pas mentionné de manière précise la durée du délai écoulé entre la réception d’informations de la Commission et l’ouverture de l’enquête de l’OLAF.

75

Cependant, dès lors que les règles applicables ne fixent aucun délai impératif à cet égard, il ne saurait être reproché au Tribunal de n’avoir pas indiqué la durée précise qui s’est écoulée entre ces deux événements.

76

Quant aux expressions « délai très court » et « court délai » employées par le Tribunal à ce point, celles-ci ne sont aucunement incompatibles avec le délai de quelques heures dont fait état M. Dalli. Partant, il y a lieu de constater, sans qu’il soit nécessaire de se prononcer sur la durée du délai en cause, que l’usage de ces expressions ne saurait constituer une dénaturation des éléments de fait.

77

Deuxièmement, par ses allégations selon lesquelles le Tribunal a déduit à tort de l’avis de l’unité « Enquête – Sélection et révision » que l’OLAF avait procédé à des recherches sur le plaignant et sur deux des personnes mises en cause, M. Dalli remet en cause des appréciations de fait effectuées par le Tribunal au point 68 de l’arrêt attaqué.

78

Dès lors que ces allégations ne font état d’aucune dénaturation des éléments de fait ayant conduit à ces appréciations, elles doivent, conformément à la jurisprudence de la Cour rappelée au point 73 du présent arrêt, être rejetées comme étant irrecevables. En tout état de cause, pour autant que lesdites allégations devraient être comprises comme dénonçant une dénaturation de l’avis adopté par le comité de surveillance, il y a lieu de relever que les extraits de cet avis cité dans le pourvoi ne contredisent pas les constats opérés par le Tribunal à ce point 68.

79

Troisièmement, en ce qui concerne le prétendu défaut de motivation de l’arrêt attaqué, il importe de rappeler que, en vertu d’une jurisprudence constante de la Cour, l’obligation de motivation n’impose pas au Tribunal de fournir un exposé qui suivrait, de manière exhaustive et un par un, tous les raisonnements articulés par les parties au litige, la motivation du Tribunal pouvant ainsi être implicite à condition qu’elle permette aux intéressés de connaître les raisons pour lesquelles le Tribunal n’a pas fait droit à leurs arguments et à la Cour de disposer des éléments suffisants pour exercer son contrôle (arrêt du 25 juin 2020, CSUE/KF, C‑14/19 P, EU:C:2020:492, point 96 et jurisprudence citée).

80

En l’espèce, le Tribunal a fait état, au point 68 de l’arrêt attaqué, des éléments l’ayant amené à considérer que l’OLAF avait procédé à des recherches sur le plaignant et sur deux des personnes mises en cause. En outre, il a exposé, aux points 69 à 74 de cet arrêt, les motifs l’ayant conduit à juger que l’OLAF n’était pas tenu de procéder à des vérifications supplémentaires avant d’ouvrir son enquête.

81

Cette motivation est suffisante pour permettre à M. Dalli de comprendre les raisons pour lesquelles son argumentation a été écartée et à la Cour d’exercer son contrôle, sans qu’il soit nécessaire que le Tribunal prenne spécifiquement position sur l’avis adopté par le comité de surveillance.

82

Quatrièmement, s’agissant de l’erreur de droit relative à l’examen par l’OLAF des informations transmises qu’aurait commise le Tribunal, il convient de rappeler que, ainsi qu’il ressort du point 59 du présent arrêt, une enquête de l’OLAF ne peut être ouverte que lorsqu’il existe des soupçons suffisamment sérieux relatifs à des faits de fraude ou de corruption ou à d’autres activités illégales susceptibles de porter atteinte aux intérêts financiers de l’Union.

83

Il découle de cette condition que la seule transmission d’une plainte à l’OLAF ne peut justifier l’ouverture d’une enquête que si l’OLAF a procédé à une première appréciation des allégations que comporte cette plainte.

84

Toutefois, ainsi que cela ressort du point 58 du présent arrêt, l’OLAF n’est pas tenu de procéder à des vérifications destinées à évaluer de manière complète le bien-fondé de ces allégations avant l’ouverture d’une enquête, dès lors qu’il résulte de l’article 2 du règlement no 1073/1999 que cette enquête a précisément pour objet d’établir, le cas échéant, le caractère irrégulier des activités contrôlées. En application des articles 3 et 4 de ce règlement, l’OLAF ne dispose d’ailleurs des moyens d’investigation lui permettant de mener à bien ce contrôle qu’après l’ouverture de l’enquête.

85

Par conséquent, le Tribunal n’a pas commis d’erreur de droit en jugeant, aux points 70 et 71 de l’arrêt attaqué, qu’il n’incombait pas à l’OLAF, avant l’ouverture d’une enquête, de procéder à une évaluation approfondie des informations reçues, mais qu’il devait, en revanche, examiner avec soin et impartialité l’ensemble des éléments en cause, et en particulier la fiabilité de la source ainsi que la crédibilité des allégations, afin de déterminer si ces informations étaient suffisantes pour justifier l’ouverture de cette enquête.

86

Le Tribunal a pu à juste titre estimer, au point 73 de l’arrêt attaqué, que le caractère précis et circonstancié des informations reçues par l’OLAF était de nature à démontrer de manière suffisante, prima facie, la crédibilité de ces informations. De même, le Tribunal a considéré à bon droit, au point 74 de cet arrêt, que l’OLAF n’avait pas à mener des recherches destinées à vérifier la fiabilité de la source desdites informations en l’absence d’éléments du dossier faisant ressortir de manière manifeste l’existence d’une manipulation ou d’un conflit d’intérêts.

87

Il en résulte que le Tribunal n’a pas commis d’erreur de droit en estimant, au point 72 de l’arrêt attaqué, que l’OLAF n’avait pas à prendre position, avant l’ouverture de l’enquête, sur les éléments évoqués par M. Dalli dans sa requête de première instance, relatifs à la position adoptée par le plaignant dans les dossiers dont était saisi M. Dalli et aux relations supposées de ce plaignant avec la Commission.

88

Par conséquent, il y a lieu d’écarter la seconde branche du premier moyen comme étant, pour partie, irrecevable et, pour partie, non fondée. Il s’ensuit qu’il convient de rejeter le premier moyen dans son ensemble.

Sur le deuxième moyen, relatif à l’extension de l’enquête

Sur la première branche du deuxième moyen

– Argumentation des parties

89

Par la première branche du deuxième moyen, M. Dalli soutient que le Tribunal a commis une erreur de droit en jugeant, aux points 84 à 89 de l’arrêt attaqué, en méconnaissance du règlement no 1073/1999, qu’une enquête interne de l’OLAF pouvait être étendue pour inclure des éléments relevant d’une enquête externe de cet organisme. Il fait valoir que, si le législateur de l’Union a expressément prévu à l’article 7, paragraphe 4, du règlement no 883/2013, qui a abrogé le règlement no 1073/1999, la possibilité de combiner en une seule enquête les aspects d’une enquête externe et d’une enquête interne, une telle possibilité ne serait pas permise par le règlement no 1073/1999, qui aurait imposé, dans un tel cas, l’ouverture de deux enquêtes distinctes.

90

La Commission conclut au rejet de la première branche du deuxième moyen comme étant non fondée ou, en tout état de cause, inopérante.

– Appréciation de la Cour

91

Le règlement no 1073/1999 opère une distinction entre les enquêtes externes, effectuées sur place dans les États membres et dans les pays tiers, et les enquêtes internes, effectuées à l’intérieur des institutions, des organes et des organismes de l’Union. Ces deux types d’enquêtes sont régies, respectivement, par les articles 3 et 4 de ce règlement.

92

Aux fins de statuer sur l’argument de M. Dalli tiré de l’extension irrégulière du champ de l’enquête de l’OLAF, le Tribunal a constaté, au point 84 de l’arrêt attaqué, que le règlement no 1073/1999 ne contenait aucune disposition relative à « la possibilité d’étendre la portée d’une enquête interne à celle d’une enquête externe et inversement ». Il a ajouté, au point 86 de cet arrêt, qu’il serait contraire aux objectifs assignés à l’OLAF ainsi qu’à l’indépendance de celui-ci de ne pas conférer au directeur de l’OLAF le pouvoir de procéder à une telle extension. Il a également souligné, au point 87 dudit arrêt, que la possibilité de cette extension était explicitement prévue à l’article 12, paragraphe 3, des instructions de l’OLAF.

93

À cet égard, il convient, tout d’abord, de relever que les motifs du Tribunal relatifs à l’analyse du libellé des dispositions du règlement no 1073/1999 ne sont entachés d’aucune erreur.

94

Il importe ensuite de constater que l’interprétation de ces dispositions à la lumière des objectifs assignés à l’OLAF, retenue par le Tribunal, est de nature à favoriser l’efficacité de l’action de l’OLAF, dès lors qu’elle lui permet de réaliser, dans le cadre d’une même procédure, des activités d’enquête tant à l’intérieur des institutions, des organes et des organismes de l’Union qu’à l’extérieur de ceux-ci, en vue de rassembler tous les éléments de preuve permettant d’apprécier la régularité de comportements soumis au contrôle de l’OLAF.

95

Enfin, il ne saurait être considéré que le cumul d’activités relevant d’une enquête externe et d’une enquête interne au sein d’une même procédure soit de nature à priver les personnes intéressées de garanties procédurales ou, plus largement, de faire obstacle à l’application à chacune de ces activités des règles encadrant l’action de l’OLAF.

96

Par conséquent, il ne résulte pas du fait que le législateur de l’Union a explicitement prévu, à l’article 7, paragraphe 4, du règlement no 883/2013, qu’une enquête de l’OLAF peut combiner des éléments externes et internes qu’une telle possibilité ait été exclue par le règlement no 1073/1999. Au contraire, au vu des considérations qui figurent aux points précédents du présent arrêt, il y a lieu de constater que cet article 7, paragraphe 4, expose, avec une plus grande clarté, les principes déjà applicables sous l’empire du règlement no 1073/1999 et que le Tribunal n’a pas commis d’erreur de droit en jugeant que « les extensions de la portée d’une enquête [n’étaient] pas, en soi, illégales ».

97

Il s’ensuit qu’il convient de rejeter la première branche du deuxième moyen comme étant non fondée.

Sur la seconde branche du deuxième moyen

– Argumentation des parties

98

Par la seconde branche du deuxième moyen, M. Dalli fait valoir que le Tribunal a dénaturé la requête de première instance en relevant, au point 80 de l’arrêt attaqué, qu’il n’avait pas identifié avec précision dans cette requête une règle conférant des droits aux particuliers qui aurait, en l’espèce, été violée par l’OLAF. Il ressortirait en effet clairement des termes des points 92 à 96 de celle-ci qu’il s’agissait des articles 3 et 4 du règlement no 1073/1999.

99

La Commission conclut au rejet de la seconde branche du deuxième moyen comme étant non fondée.

– Appréciation de la Cour

100

Il ressort de l’examen de la première branche du présent moyen, effectué aux points 91 à 97 du présent arrêt, que le Tribunal a estimé à juste titre, aux points 84 à 89 de l’arrêt attaqué, que, en application du règlement no 1073/1999, l’OLAF pouvait légalement étendre la portée d’une enquête interne pour y inclure des éléments relevant d’une enquête externe.

101

En outre, M. Dalli n’a contesté ni l’examen de la procédure suivie par l’OLAF aux fins des extensions de son enquête, effectuée aux points 91 et 92 de l’arrêt attaqué, ni la conclusion à laquelle le Tribunal est parvenu au point 93 de l’arrêt attaqué, selon laquelle M. Dalli n’avait pas démontré que les extensions de l’enquête de l’OLAF étaient irrégulières.

102

Par conséquent, à supposer même que le Tribunal ait, comme le soutient M. Dalli, dénaturé la requête de première instance en jugeant, au point 80 de l’arrêt attaqué, que celle-ci n’identifiait pas avec précision une règle conférant des droits aux particuliers qui aurait été violée par l’OLAF, cette erreur ne serait pas de nature à remettre en cause le rejet du deuxième grief présenté par M. Dalli en première instance, tiré de vices dans la caractérisation de l’enquête et dans l’extension de celle-ci.

103

Or, il ressort d’une jurisprudence constante de la Cour que les griefs dirigés contre des motifs surabondants d’une décision du Tribunal ne sauraient entraîner l’annulation de cette décision et sont donc inopérants (arrêt du 18 juin 2020, Dovgan/EUIPO, C‑142/19 P, non publié, EU:C:2020:487, point 92 et jurisprudence citée).

104

Partant, il convient d’écarter la seconde branche du deuxième moyen comme étant inopérante et de rejeter ce moyen dans son ensemble.

Sur le troisième moyen, relatif à la collecte des éléments de preuve

Sur la première branche du troisième moyen

– Argumentation des parties

105

Par la première branche du troisième moyen, M. Dalli fait valoir que le Tribunal a commis des erreurs de droit lors de l’examen du troisième grief présenté en première instance relatif à la collecte des éléments de preuve par l’OLAF.

106

En premier lieu, le Tribunal aurait commis une erreur de droit en jugeant, au point 103 de l’arrêt attaqué, que le directeur de l’OLAF pouvait participer directement à l’enquête, alors que, d’une part, l’article 6, paragraphe 1, du règlement no 1073/1999 prévoirait uniquement qu’il lui appartient de diriger les enquêtes et que, d’autre part, cette participation directe porterait atteinte à son impartialité objective, en violation de l’article 41 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci-après la « Charte »).

107

En deuxième lieu, le Tribunal aurait considéré à tort, au point 105 de l’arrêt attaqué, que la participation de représentants d’une autorité nationale à l’enquête ne portait pas atteinte à l’impartialité objective de l’OLAF, alors que l’un de ces représentants était également membre du comité de surveillance. Le fait que cette participation ait été acceptée par la personne visée par l’activité d’enquête en cause et qu’il ne soit pas établi que ladite participation ait eu une conséquence sur le déroulement de l’enquête ne suffirait pas à garantir l’impartialité de l’OLAF.

108

En troisième lieu, le Tribunal aurait commis, au point 119 de l’arrêt attaqué, une erreur de droit, en jugeant que l’ingérence dans la vie privée constituée par la collecte, le stockage et l’utilisation d’une conversation téléphonique pourrait être justifiée par l’absence de contestation de la part des autorités maltaises et par le principe de coopération loyale.

109

En quatrième lieu, le Tribunal aurait considéré à tort, au point 124 de l’arrêt attaqué, qu’il n’y avait pas lieu de se prononcer sur le caractère illégal ou non de l’enregistrement d’une conversation téléphonique au motif que M. Dalli n’avait pas participé à cette conversation.

110

La Commission conclut au rejet de la première branche du troisième moyen comme étant non fondée et, en tout état de cause, pour partie inopérante.

– Appréciation de la Cour

111

Premièrement, en ce qui concerne l’erreur de droit qu’aurait commise le Tribunal lorsqu’il s’est prononcé sur la participation du directeur de l’OLAF à l’enquête, il convient de rappeler que l’article 41, paragraphe 1, de la Charte énonce notamment que toute personne a le droit de voir ses affaires traitées impartialement par les institutions, les organes et les organismes de l’Union.

112

Il s’ensuit qu’il incombe à ces institutions, à ces organes et à ces organismes de se conformer à l’exigence d’impartialité, dans ses deux composantes que sont, d’une part, l’impartialité subjective, en vertu de laquelle aucun membre de l’institution concernée ne doit manifester de parti pris ou de préjugé personnel, et, d’autre part, l’impartialité objective, conformément à laquelle cette institution doit offrir des garanties suffisantes pour exclure tout doute légitime quant à un éventuel préjugé (voir, en ce sens, arrêts du 20 décembre 2017, Espagne/Conseil, C‑521/15, EU:C:2017:982, point 91, ainsi que du 27 mars 2019, August Wolff et Remedia/Commission, C‑680/16 P, EU:C:2019:257, point 27).

113

Le rôle du directeur de l’OLAF dans la conduite d’une enquête est défini à l’article 6, paragraphe 1, du règlement no 1073/1999, qui prévoit, comme l’a relevé le Tribunal au point 103 de l’arrêt attaqué, que le directeur de l’OLAF dirige l’exécution des enquêtes.

114

Bien que l’exercice effectif de cette fonction ne soit pas spécifiquement encadré par ce règlement, il résulte de la nature des activités de l’OLAF que cet exercice implique nécessairement que le directeur de l’OLAF dispose de la faculté d’adresser des instructions aux agents de l’unité responsable de l’enquête en vue d’orienter leur travail d’enquête, y compris en ordonnant, le cas échéant, la réalisation de certaines activités d’enquête.

115

Il ressort d’ailleurs de l’article 11, paragraphe 6, des instructions de l’OLAF que certaines activités d’enquête énumérées à cette disposition ne peuvent être réalisées qu’après présentation d’un acte écrit émanant du directeur de l’OLAF attestant, notamment, de l’activité d’enquête que les agents de l’OLAF sont autorisés à accomplir. Tel est, en particulier, le cas pour l’audition de personnes concernées ou de témoins ainsi que pour l’inspection des locaux et les contrôles sur place.

116

Le directeur de l’OLAF est donc appelé à jouer un rôle actif dans la conduite des enquêtes, ainsi que cela ressort également de l’article 9, paragraphe 1, du règlement no 1073/1999, qui prévoit que le rapport d’enquête est établi sous son autorité.

117

Or, M. Dalli n’a pas démontré que la participation directe du directeur de l’OLAF à certaines activités d’enquête, laquelle peut être rattachée aux dispositions lui attribuant ce rôle actif, serait de nature à porter atteinte à l’impartialité objective de celui-ci. En outre, il n’a pas contesté la validité de ces dispositions.

118

Dans ces conditions, il ne saurait être considéré que M. Dalli a établi que l’appréciation du Tribunal, figurant au point 103 de l’arrêt attaqué, selon laquelle une telle participation directe ne porte pas atteinte à l’impartialité de l’enquête, est entachée d’une erreur de droit.

119

S’agissant, deuxièmement, de la participation à une audition de M. Z. d’un représentant d’une autorité nationale également membre du comité de surveillance, il importe de relever que l’article 11, paragraphe 1, du règlement no 1073/1999 prévoit que ce comité, par le contrôle régulier qu’il exerce sur l’exécution de la fonction d’enquête, conforte l’indépendance de l’OLAF. Dans le cadre de cette fonction, il peut, notamment, donner des avis au directeur de l’OLAF concernant les activités de l’OLAF.

120

Il ressort ainsi de cette disposition que les membres dudit comité sont appelés à exercer une fonction de contrôle des enquêtes menées par l’OLAF.

121

Au regard du rôle imparti au comité de surveillance, le fait que l’un de ses membres ait directement pris part à la réalisation d’une activité d’enquête de l’OLAF est certes de nature à faire naître un doute légitime quant à l’existence d’un éventuel préjugé, positif ou négatif, de sa part, dans l’exercice de ses fonctions de contrôle au sein de ce comité sur les conditions de réalisation de l’activité d’enquête en cause.

122

Néanmoins, si l’impartialité objective d’un membre du comité de surveillance pourrait ainsi être mise en cause à l’occasion de l’exercice des fonctions de contrôle qu’il exerce en cette qualité, la circonstance que cette personne puisse être appelée ultérieurement à exercer un tel contrôle ne saurait, en revanche, faire naître un doute légitime quant à son impartialité lors de sa participation à une activité d’enquête.

123

Partant, bien que le défaut d’impartialité objective soulevé par M. Dalli pourrait, le cas échéant, être invoqué à l’égard de l’avis rendu par le comité de surveillance quant à l’enquête de l’OLAF, il n’est pas susceptible de remettre en cause le respect du principe d’impartialité dans le cadre de cette enquête et, en particulier, au cours de l’audition à laquelle un membre de ce comité a participé.

124

Or, l’argumentation de M. Dalli sur laquelle porte le point 105 de l’arrêt attaqué visait à contester la légalité de la collecte des éléments de preuve par l’OLAF et non celle de l’avis du comité de surveillance. Partant, l’argument tiré d’une erreur de droit commise à ce point doit être rejeté comme étant non fondé.

125

Troisièmement, l’argument dirigé contre le point 119 de l’arrêt attaqué doit être écarté comme étant inopérant en application de la jurisprudence de la Cour rappelée au point 103 du présent arrêt, en tant qu’il vise des motifs retenus par le Tribunal à titre surabondant.

126

En effet, le requérant estime que le Tribunal ne pouvait écarter son argumentation visant à établir que la collecte, par les autorités maltaises, de relevés téléphoniques constituait une ingérence dans la vie privée en se fondant sur l’absence de mise en garde de l’OLAF par les autorités maltaises ainsi que sur l’obligation de ces autorités de collaborer avec l’OLAF sous réserve de la conformité de leur concours avec la législation nationale. Toutefois, il ne remet pas en cause le constat du Tribunal selon lequel M. Dalli n’avait pas démontré que l’OLAF pouvait être tenu pour responsable des modalités de la collecte des informations en cause par les autorités maltaises.

127

Quatrièmement, en ce qui concerne l’erreur qu’aurait commise le Tribunal en considérant, au point 124 de l’arrêt attaqué, que le droit de M. Dalli au respect de la vie privée et à la confidentialité des communications n’avait pas été méconnu au motif qu’il n’avait pas participé à la conversation téléphonique du 3 juillet 2012 qui avait été enregistrée, il convient de rappeler qu’il ressort de la jurisprudence constante de la Cour citée au point 55 du présent arrêt que la responsabilité non contractuelle de l’Union peut être engagée du fait non pas de toute violation suffisamment caractérisée d’une règle de droit de l’Union, mais uniquement de la violation suffisamment caractérisée d’une règle ayant pour objet de conférer des droits aux particuliers.

128

Cette restriction a pour objet, sans préjudice des règles applicables en ce qui concerne l’appréciation de la légalité d’un acte de l’Union, de limiter l’engagement de cette responsabilité aux seules situations dans lesquelles le comportement illicite des institutions, des organes et des organismes de l’Union a causé un dommage à un particulier en portant atteinte à ses intérêts spécifiquement protégés par le droit de l’Union.

129

La fonction de cette restriction serait donc méconnue s’il était admis que la responsabilité non contractuelle de l’Union pouvait être engagée en vue d’indemniser un dommage causé à un particulier par la violation d’une règle de droit ne créant aucun droit à son profit, mais ayant pour objet de conférer des droits à un tiers.

130

Il s’ensuit que le Tribunal n’a pas commis d’erreur de droit en jugeant, au point 124 de l’arrêt attaqué, que la responsabilité de l’Union ne pouvait pas être engagée à l’égard de M. Dalli au titre de la violation éventuelle du droit au respect de la vie privée et à la confidentialité des communications de tiers dont la conversation avait été écoutée et enregistrée.

131

Par conséquent, il y a lieu de rejeter la première branche du troisième moyen comme étant, pour partie, inopérante et, pour partie, non fondée.

Sur la seconde branche du troisième moyen

– Argumentation des parties

132

Par la seconde branche du troisième moyen, M. Dalli soutient que le Tribunal a commis des erreurs dans l’appréciation des éléments de preuve.

133

En premier lieu, il résulterait des termes mêmes des propos tenus par d’anciens employés de M. Dalli lors de leur entretien avec des parlementaires européens que des agents de l’OLAF leur ont demandé de maintenir leur version des faits, contrairement à ce qu’aurait jugé le Tribunal au point 108 de l’arrêt attaqué.

134

En deuxième lieu, le Tribunal aurait dénaturé des éléments de preuve en jugeant, au point 110 de cet arrêt, qu’il n’existait qu’une « légère différence » entre deux versions de la transcription d’un même passage d’une conversation téléphonique, alors que l’une de ces versions se référerait au fait qu’un certain prix est réclamé par M. Dalli quand l’autre renverrait à une demande émanant d’un tiers.

135

En troisième lieu, le Tribunal n’aurait pas pu valablement écarter, au point 111 dudit arrêt, la pertinence d’articles de presse dont le contenu n’aurait pas été contesté par la Commission, alors que ceux-ci constitueraient, en tant que tels, des preuves relatives aux conditions dans lesquelles s’est déroulée l’audition de Mme K. Le fait que Mme K a signé un procès-verbal qui ne remet pas en cause les conditions de son audition ne serait pas déterminant, dès lors qu’il ressortirait expressément de ces articles de presse qu’elle a dû signer ce procès‑verbal sans pouvoir le relire.

136

En quatrième lieu, le Tribunal aurait omis de tenir compte des éléments de preuve produits par M. Dalli au sujet de l’enregistrement d’une conversation téléphonique du 3 juillet 2012 par l’OLAF. Il se serait également contredit en affirmant, au point 125 de l’arrêt attaqué, qu’aucun élément ne permettait de considérer que cette conversation visait à mettre en cause le requérant, alors qu’il avait constaté, au point 122 de cet arrêt, que cette conversation avait été organisée pour apporter des éléments de preuve supplémentaires en vue de confirmer ou de démentir la réalité des faits.

137

En cinquième lieu, le Tribunal aurait omis à tort, au point 126 de l’arrêt attaqué, de prendre en compte l’avis 2/2012 du comité de surveillance, alors que cet avis constituerait un élément de preuve.

138

La Commission conclut au rejet de la seconde branche du troisième moyen comme étant, pour partie, irrecevable, pour partie, inopérante et, pour partie, non fondée.

– Appréciation de la Cour

139

À titre liminaire, dès lors que M. Dalli fait valoir que le Tribunal a dénaturé des éléments de preuve en procédant à une lecture erronée de certains documents, il importe de relever que, si une dénaturation des éléments de preuve peut consister dans une interprétation d’un document contraire au contenu de celui-ci, il ne suffit pas, en vue d’établir une telle dénaturation, de démontrer que ce document pouvait faire l’objet d’une interprétation différente de celle retenue par le Tribunal. Il est nécessaire, à cette fin, d’établir que le Tribunal a manifestement outrepassé les limites d’une appréciation raisonnable de ce document, notamment en faisant une lecture de celui-ci contraire à son libellé (voir, en ce sens, arrêts du 10 février 2011, Activision Blizzard Germany/Commission, C‑260/09 P, EU:C:2011:62, point 54 ; du 7 avril 2016, Akhras/Conseil, C‑193/15 P, EU:C:2016:219, point 72, ainsi que du 30 janvier 2020, České dráhy/Commission, C‑538/18 P et C‑539/18 P, non publié, EU:C:2020:53, point 60).

140

Premièrement, au point 108 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a, notamment, estimé qu’il ressortait, en substance, de la transcription de l’entretien entre d’anciens employés de M. Dalli et des parlementaires européens que des agents de l’OLAF avaient recommandé à M. G. d’être prudent dans la manière dont il communiquerait des informations, afin de ne pas déranger l’enquête en cours à Malte, sans pour autant lui demander de s’en tenir à sa version initiale. Le Tribunal a, en particulier, souligné que M. G. avait nié, en réponse à une question, que ces agents de l’OLAF lui aient demandé de conserver cette version.

141

Si les propos de M. G. reportés dans cette transcription présentent certaines ambiguïtés quant aux recommandations exprimées par lesdits agents de l’OLAF, il n’en demeure pas moins que le Tribunal a fait état de manière exacte, à ce point 108, de la réponse que M. G. a apportée à une question portant directement sur le point de savoir si les agents de l’OLAF l’avaient incité à faire une fausse déclaration. En outre, il ressort de ladite transcription que M. G. a également indiqué que les mêmes agents de l’OLAF l’avaient incité à la prudence, sans jamais lui demander explicitement de ne pas mentionner certains faits.

142

Dans ces conditions, M. Dalli n’a pas établi que le Tribunal a, audit point 108, dénaturé la transcription litigieuse en outrepassant manifestement les limites d’une appréciation raisonnable de ce document.

143

Deuxièmement, au point 110 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a fait état d’une différence entre les deux versions de la transcription d’un même passage d’une conversation téléphonique du 29 mars 2012. Il a estimé qu’il s’agissait d’une différence mineure sans influence sur les conclusions de l’OLAF et qu’il pouvait être implicitement déduit de ces deux versions qu’elles faisaient toutes deux référence à une somme demandée par M. Dalli.

144

À cet égard, il apparaît que le Tribunal a reporté de manière exacte les termes utilisés dans chacune des versions produites par M. Dalli. En outre, si l’interprétation proposée par M. Dalli de la version fournie par les autorités maltaises, selon laquelle celle-ci pouvait être comprise comme mentionnant une somme réclamée par M. Z. et non par M. Dalli, est envisageable, elle ne s’impose pas avec une évidence suffisante pour considérer que le Tribunal aurait manifestement dépassé les limites d’une appréciation raisonnable de cette version.

145

Troisièmement, il ressort du point 111 de l’arrêt attaqué que le Tribunal a décidé de ne pas accorder un poids décisif aux articles de presse maltais produits par M. Dalli aux fins de contester les conditions dans lesquelles la première audition de Mme K. s’était déroulée.

146

Cependant, il ressort du même point que le Tribunal s’est également fondé, à titre subsidiaire, sur la circonstance qu’il ne ressortait pas du procès-verbal de la seconde audition de Mme K. que celle-ci avait mis en cause, à cette occasion, les conditions dans lesquelles s’était tenue sa première audition, alors qu’elle avait apporté des compléments, des modifications et des clarifications à cette première audition.

147

Ce dernier motif, que M. Dalli n’a aucunement contesté dans le cadre du présent pourvoi, suffit à justifier l’appréciation du Tribunal selon laquelle il n’était pas établi que les pratiques des agents de l’OLAF lors de la première audition auraient été contraires aux principes applicables en matière d’administration de la preuve.

148

Dans ces conditions, il y a lieu de considérer que l’argumentation de M. Dalli dirigée contre le point 111 de l’arrêt attaqué doit être considérée comme inopérante en application de la jurisprudence de la Cour rappelée au point 103 du présent arrêt, en tant qu’elle vise des motifs surabondants de cet arrêt.

149

Quatrièmement, si M. Dalli conteste divers éléments de la motivation du Tribunal relatifs à l’enregistrement d’une conversation téléphonique du 3 juillet 2012, il importe de relever qu’un tel enregistrement ne pouvait conduire à l’engagement de la responsabilité non contractuelle de l’Union que s’il avait été réalisé en violation d’une règle de droit de l’Union ayant pour objet de conférer des droits aux particuliers.

150

Or, il ressort des points 127 à 130 du présent arrêt que le Tribunal a jugé à bon droit, au point 124 de l’arrêt attaqué, que les règles invoquées à cet égard par M. Dalli n’avaient pas pour objet de lui conférer des droits et que ce constat suffisait à écarter l’engagement de la responsabilité non contractuelle de l’Union du fait de la réalisation de cet enregistrement.

151

Dès lors, l’éventuelle prise en compte d’éléments de preuve supplémentaires à propos dudit enregistrement ou l’établissement du fait que le même enregistrement visait à mettre en cause M. Dalli n’étant pas de nature à remettre en cause cette appréciation, les arguments présentés à cet égard dans le cadre du présent pourvoi doivent être rejetés comme étant inopérants.

152

Cinquièmement, au point 126 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a jugé qu’il appartenait à M. Dalli d’établir que les allégations contenues dans l’avis 2/2012 du comité de surveillance étaient avérées, mais qu’il n’incombait pas à la Commission de prendre position sur ces allégations.

153

Le Tribunal, en statuant ainsi, s’est fondé sur les règles répartissant la charge de la preuve dans le cadre d’un recours visant à engager la responsabilité non contractuelle de l’Union, mais n’a pas dénié, de manière générale, toute valeur probante à cet avis.

154

Il s’ensuit que l’argument de M. Dalli selon lequel le Tribunal a omis à tort, au point 126 de l’arrêt attaqué, de prendre en compte ledit avis repose sur une lecture erronée de ce point et doit donc être écarté comme étant non fondé.

155

Au regard de ce qui précède, la seconde branche du troisième moyen doit être écartée comme étant, pour partie, inopérante et, pour partie, non fondée. Partant, le troisième moyen doit être rejeté dans son ensemble.

Sur le quatrième moyen, relatif au respect de l’article 4 de la décision 1999/396

Sur la première branche du quatrième moyen

– Argumentation des parties

156

Par la première branche du quatrième moyen, M. Dalli soutient, en premier lieu, qu’il découle de l’article 4 de la décision 1999/396 et de l’arrêt du Tribunal du 8 juillet 2008, Franchet et Byk/Commission (T‑48/05, EU:T:2008:257), que l’OLAF est tenu d’entendre les personnes faisant l’objet d’une enquête sur tous les faits les concernant. Partant, le Tribunal aurait dû déterminer si M. Dalli devait être entendu sur une note transcrivant l’audition de M. G. du 19 septembre 2012 (ci-après la « note relative à l’audition de M. G. »), en se fondant sur les faits rapportés dans cette note et non en employant, comme il l’aurait fait au point 143 de l’arrêt attaqué, d’autres critères tenant à la nature de cette note, à l’existence d’autres preuves ou encore au fait que ladite note ne figure que dans les annexes du rapport de l’OLAF.

157

En deuxième lieu, le Tribunal aurait retenu des motifs contradictoires en affirmant, au point 143 de l’arrêt attaqué, qu’il ne saurait être inféré de la présence d’un élément de preuve dans les annexes d’un rapport de l’OLAF que cet élément a été utilisé par l’OLAF pour prouver certaines allégations, alors qu’il aurait constaté, au point 109 de cet arrêt, que les pièces sur lesquelles un tel rapport s’appuie n’ont vocation à figurer, le cas échéant, qu’en annexe de celui-ci.

158

En troisième lieu, le Tribunal aurait commis une erreur de droit en jugeant, au point 144 de l’arrêt attaqué, que la personne concernée ne disposait pas du droit d’être entendue sur les conclusions du rapport final de l’OLAF. La question déterminante serait, en effet, de savoir si cette personne a été entendue sur tous les faits qui fondent ces conclusions.

159

La Commission conclut au rejet de la première branche du quatrième moyen comme étant non fondée.

– Appréciation de la Cour

160

Premièrement, s’agissant de l’erreur de droit qu’aurait commise le Tribunal au point 143 de l’arrêt attaqué, il convient de relever que, à ce point, le Tribunal a rejeté l’argument présenté par M. Dalli selon lequel l’OLAF avait violé l’article 4 de la décision 1999/396 en ne lui permettant pas de s’exprimer sur la note relative à l’audition de M. G.

161

Aux fins de statuer ainsi, le Tribunal a, tout d’abord, jugé que l’OLAF était tenu de demander à la personne en cause de présenter ses observations sur les faits qui la concernent, mais non de lui offrir la possibilité de prendre position sur chaque témoignage recueilli. Il a, ensuite, souligné que la note relative à l’audition de M. G. avait été utilisée dans le rapport de l’OLAF à diverses fins, sans pour autant que l’OLAF ne tire de conclusion au sujet du requérant sur la base de cette seule note. Enfin, le Tribunal a relevé qu’il ne saurait être inféré de la seule circonstance que ladite note figure dans les annexes de ce rapport que celle-ci a été utilisée comme une preuve des allégations retenues contre M. Dalli.

162

À cet égard, il importe de souligner que l’article 4 de de la décision 1999/396, qui régit les conditions et les modalités des enquêtes internes, prévoit, ainsi que l’a souligné le Tribunal au point 130 de l’arrêt attaqué, que des conclusions visant nominativement un membre de la Commission ne peuvent être tirées à l’issue d’une enquête sans que « l’intéressé ait été mis à même de s’exprimer sur tous les faits qui le concernent ».

163

Il ressort du libellé même de cet article que l’OLAF est tenu de permettre à l’« intéressé » de s’exprimer non pas sur chaque élément de preuve recueilli au cours de l’enquête qui pourrait être utilisé en vue de tirer des conclusions le concernant, mais uniquement sur les faits le concernant qui ressortent de ces éléments de preuve.

164

Il en résulte que l’OLAF aurait été tenu d’entendre M. Dalli sur les faits rapportés dans la note relative à l’audition de M. G. si ces faits étaient considérés comme le concernant. Dès lors, en se fondant sur l’usage limité qu’a fait l’OLAF de cette note dans le rapport d’enquête afin de rejeter l’argument présenté en première instance par M. Dalli au sujet d’une prétendue violation de l’article 4 de la décision 1999/396, le Tribunal a commis une erreur de droit.

165

Cela étant, même si les motifs d’un arrêt du Tribunal révèlent une violation du droit de l’Union, mais que son dispositif apparaît fondé pour d’autres motifs de droit, le pourvoi doit être rejeté (voir, en ce sens, arrêt du 4 juin 2020, Terna/Commission, C‑812/18 P, non publié, EU:C:2020:437, point 55 et jurisprudence citée).

166

Tel est le cas en l’occurrence.

167

En effet, il ressort de la note relative à l’audition de M. G. que celui-ci a, au cours de son audition, évoqué une rencontre intervenue le 10 février 2012 entre M. Dalli et M. Z. ainsi que des échanges entre M. Z., Mme K. et M. G. relatifs à la possibilité que M. Dalli adopte certaines positions en échange du versement d’une forte somme d’argent.

168

Or, il résulte des transcriptions des auditions de M. Dalli des 16 juillet et 17 septembre 2012 que M. Dalli a été mis à même de s’exprimer sur l’existence de cette rencontre et sur les échanges qui auraient eu lieu à l’occasion de celle-ci ainsi que sur la proposition de M. Z. qui a constitué le principal objet des échanges mentionnés dans la note relative à l’audition de M. G.

169

En outre, M. Dalli n’a pas fait état de faits nouveaux qui auraient été évoqués pour la première fois dans cette note et sur lesquels il n’aurait donc pas été en mesure de se prononcer lors de ses auditions par l’OLAF.

170

Partant, l’argument présenté en première instance selon lequel il n’aurait pas été entendu, en violation de l’article 4 de la décision 1999/396, sur les faits exposés dans la note relative à l’audition de M. G. doit être écarté comme étant non fondé. Il s’ensuit que l’argument présenté à l’appui du présent pourvoi tiré d’une erreur de droit commise par le Tribunal au point 143 de l’arrêt attaqué est inopérant.

171

S’agissant, deuxièmement, de la prétendue contradiction de motifs entre le point 109 et le point 143 de l’arrêt attaqué, il convient de relever que le Tribunal a jugé, au point 109 de cet arrêt, aux fins de rejeter l’argument tiré de l’absence de reproduction de certains éléments de preuve dans le rapport de l’OLAF, que les pièces sur lesquelles un tel rapport s’appuie n’ont pas à être reproduites intégralement dans celui-ci et ont vocation à figurer, le cas échéant, en annexe de ce rapport.

172

Au point 143 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a estimé que la seule circonstance que la note relative à l’audition de M. G. figure dans les annexes du rapport de l’OLAF ne permet pas d’établir que celle-ci a été utilisée comme une preuve des allégations retenues contre M. Dalli.

173

Aucune contradiction ne saurait être constatée entre les motifs figurant au point 109 de cet arrêt et ceux figurant au point 143 de celui-ci. En effet, il ne résulte pas de ce point 109 que les annexes d’un rapport de l’OLAF ne peuvent comporter que des éléments de preuve qui ont été retenus contre les personnes mises en cause ou, a fortiori, contre l’une d’entre elles lorsque ce rapport comporte, comme c’est le cas en l’espèce, des conclusions relatives aux agissements de plusieurs personnes.

174

Troisièmement, en ce qui concerne l’erreur de droit qu’aurait commise le Tribunal au point 144 de l’arrêt attaqué, il y a lieu de relever que, à ce point, le Tribunal a notamment constaté que M. Dalli n’avait pas indiqué les faits fondant la conclusion en cause qu’il entendait nier ou expliciter.

175

Il s’ensuit que, à ce point, le Tribunal n’a pas jugé que l’OLAF n’était pas tenu d’entendre M. Dalli sur les faits fondant une de ses conclusions mais qu’il a, au contraire, implicitement admis qu’une telle obligation pèse sur l’OLAF, tout en précisant qu’il incombait à M. Dalli, aux fins de démontrer la violation du droit de l’Union dont il se prévalait, d’indiquer les faits sur lesquels il n’aurait pas été entendu par l’OLAF.

176

L’argument de M. Dalli relatif à l’erreur de droit dont serait entaché le point 144 de l’arrêt attaqué doit donc être écarté comme étant non fondé, en tant qu’il repose sur une lecture erronée de cet arrêt.

177

Par conséquent, la première branche du quatrième moyen doit être rejetée comme étant, pour partie, inopérante et, pour partie, non fondée.

Sur la seconde branche du quatrième moyen

– Argumentation des parties

178

Par la seconde branche du quatrième moyen, M. Dalli fait valoir que le Tribunal a dénaturé la note relative à l’audition de M. G. en considérant, au point 143 de l’arrêt attaqué, que celle-ci n’exposait pas des faits impliquant le requérant, alors qu’il ressortirait clairement de celle-ci que tel serait le cas. Cette erreur aurait été réitérée au point 145 de cet arrêt, dans lequel le Tribunal affirmerait que le requérant a été en mesure de s’exprimer sur les faits le concernant.

179

La Commission conclut au rejet de la seconde branche du quatrième moyen comme étant non fondée.

– Appréciation de la Cour

180

Au point 143 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a indiqué que la note relative à l’audition de M. G. n’a été évoquée dans le rapport de l’OLAF « que pour présenter les auditions de témoins qui se sont déroulées [...], pour relater un fait ne concernant pas [M. Dalli] et confirmant ce que le témoin avait déjà indiqué lors d’une première audition [...] et pour relater la compréhension subjective, par le témoin, d’offres faites par M. Z. notamment au plaignant ». Il en a déduit qu’il ne ressortait pas de ce rapport « que l’OLAF aurait tiré une quelconque conclusion à l’égard de [M. Dalli] sur la base de cette seule note ».

181

Cependant, ainsi qu’il ressort du point 164 du présent arrêt, ces divers constats du Tribunal se rapportent tous à l’usage par l’OLAF de la note relative à l’audition de M. G. dans son rapport. En outre, il ne ressort d’aucun autre élément du point 143 de l’arrêt attaqué que le Tribunal aurait jugé, comme le soutient M. Dalli, que ladite note ne comportait pas de faits le concernant.

182

Dans ces conditions, il ne saurait être considéré que la constatation par le Tribunal, au point 145 de l’arrêt attaqué, selon laquelle M. Dalli a été mis à même de s’exprimer sur les faits qui le concernent, est, même pour partie, fondée sur une appréciation portée par le Tribunal selon laquelle la note relative à l’audition de M. G. ne comporterait pas de tels faits.

183

Par ailleurs, ainsi qu’il ressort des points 167 à 170 du présent arrêt, même si cette note n’avait pas été portée à sa connaissance, le requérant avait toutefois eu l’opportunité de prendre position sur les faits auxquels celle-ci se réfère.

184

Dès lors, la seconde branche du quatrième moyen repose sur une lecture erronée de l’arrêt attaqué et doit, pour ce motif, être rejetée comme étant non fondée. Par conséquent, il convient de rejeter le quatrième moyen dans son ensemble.

Sur le cinquième moyen, relatif à la saisine du comité de surveillance

Argumentation des parties

185

Par son cinquième moyen, M. Dalli fait valoir que le Tribunal a commis plusieurs erreurs lorsqu’il a rejeté le cinquième grief présenté en première instance, relatif à l’intervention du comité de surveillance.

186

En premier lieu, conformément à l’arrangement de travail conclu entre le comité de surveillance et l’OLAF (ci-après l’« arrangement de travail »), un délai de cinq jours devrait être respecté entre la saisine de ce comité et la transmission d’informations aux autorités judiciaires nationales. Même si, dans des circonstances exceptionnelles, ce délai pouvait être inférieur à cinq jours, un accord avec le comité de surveillance devrait toujours être recherché par l’OLAF avant cette transmission. En outre, le Tribunal aurait considéré, à tort, que l’OLAF devait se voir reconnaître une marge d’appréciation à cet égard, alors qu’une telle approche priverait d’effectivité le contrôle dont est investi ce comité par l’article 11, paragraphe 7, du règlement no 1073/1999. Le caractère sensible de la présente affaire impliquerait, contrairement à ce qu’aurait jugé le Tribunal, un strict respect des garanties procédurales applicables.

187

En deuxième lieu, le Tribunal aurait dénaturé le dossier en affirmant, au point 160 de l’arrêt attaqué, que le président du comité de surveillance a accepté la transmission du rapport de l’OLAF aux autorités judiciaires maltaises avant l’expiration d’un délai de cinq jours. En effet, l’existence de cet accord, dont la réalité aurait été contestée par M. Dalli lors de l’audience devant le Tribunal, ne ressortirait d’aucune pièce du dossier. En outre, plusieurs pièces du dossier comprendraient des indications en sens contraire.

188

En troisième lieu, le Tribunal aurait méconnu l’article 11, paragraphe 7, du règlement no 1073/1999, tel qu’interprété par sa propre jurisprudence, en jugeant, au point 161 de l’arrêt attaqué, que l’OLAF pouvait transmettre son rapport aux autorités judiciaires nationales avant que le comité de surveillance n’ait achevé l’examen de celui-ci. Le contrôle opéré par ce comité ne constituerait pas une ingérence prohibée dans le déroulement de l’enquête et serait indispensable pour protéger effectivement les droits des personnes concernées.

189

En l’espèce, cette obligation n’aurait pas été respectée, l’OLAF ayant, d’une part, le 18 octobre 2012, accordé au comité de surveillance l’accès au dossier et, d’autre part, le 19 octobre 2012, transmis ce dossier aux autorités maltaises, alors que ce comité aurait averti l’OLAF qu’un délai d’examen plus long aurait été nécessaire. La circonstance que ce comité ne pourrait faire obstacle à la transmission du rapport de l’OLAF ne serait, en outre, pas suffisante pour justifier qu’il soit privé de toute possibilité effective d’opérer son contrôle.

190

La Commission soutient que le cinquième moyen n’est pas fondé.

Appréciation de la Cour

191

Il y a lieu, à titre liminaire, de préciser la fonction du comité de surveillance, au sujet de laquelle M. Dalli et la Commission s’opposent.

192

L’article 11, paragraphe 1, du règlement no 1073/1999 définit, de manière générale, cette fonction en précisant que le comité de surveillance conforte l’indépendance de l’OLAF par le contrôle régulier qu’il exerce sur l’exécution de sa fonction d’enquête.

193

À cette fin, le comité de surveillance est tenu, en vertu de l’article 11, paragraphe 8, de ce règlement, d’adopter au moins un rapport d’activités par an. En outre, il peut également, en application de l’article 11, paragraphes 1 et 8, dudit règlement, donner des avis au directeur de l’OLAF concernant les activités de l’OLAF ainsi que présenter des rapports au Parlement européen, au Conseil, à la Commission et à la Cour des comptes sur les résultats et les suites des enquêtes de l’OLAF.

194

S’il n’est pas exclu qu’un avis rendu par le comité de surveillance porte sur un cas particulier, il n’en demeure pas moins que le législateur de l’Union a exigé qu’un tel avis ne puisse pas avoir pour objet d’influencer les choix devant être opérés par l’OLAF dans une affaire donnée, dès lors que, comme l’a rappelé à juste titre le Tribunal au point 162 de l’arrêt attaqué, l’article 11, paragraphe 1, du même règlement prévoit que les avis du comité de surveillance sont rendus sans interférer avec le déroulement des enquêtes en cours.

195

Il résulte de ces éléments que, comme l’a relevé M. l’avocat général au point 103 de ses conclusions, le comité de surveillance a pour fonction d’exercer un contrôle systémique des activités de l’OLAF. S’il est ainsi appelé à vérifier que ces activités sont exercées selon des modalités respectant les droits, notamment procéduraux, des personnes concernées, il n’incombe pas au comité de surveillance d’opérer, à cette fin, un contrôle a priori des actes de l’OLAF.

196

Cette conception des fonctions du comité de surveillance est corroborée, en ce qui concerne plus spécifiquement la transmission d’informations aux autorités judiciaires d’un État membre, par l’absence de pouvoir conféré à ce comité, lorsqu’il est informé de la nécessité d’une telle transmission en application de l’article 11, paragraphe 7, du règlement no 1073/1999, de s’opposer à cette transmission, dont a fait état le Tribunal au point 162 de l’arrêt attaqué.

197

La circonstance que certaines dispositions du règlement intérieur du comité de surveillance de l’OLAF puissent éventuellement être interprétées, ainsi que le fait valoir M. Dalli, comme visant à conférer une fonction plus étendue au comité de surveillance n’est, en tout état de cause, pas de nature à remettre en cause les considérations qui précèdent, dès lors que ce règlement intérieur, adopté sur le fondement de l’article 11, paragraphe 6, du règlement no 1073/1999, ne peut modifier les dispositions de ce règlement.

198

Dans ce contexte, s’agissant, premièrement, de l’argument selon lequel l’OLAF était tenu d’attendre l’achèvement de la mission du comité de surveillance avant de transmettre son rapport aux autorités judiciaires nationales, il importe de souligner qu’une telle obligation ne ressort pas des dispositions du règlement no 1073/1999.

199

En outre, cette obligation serait de nature à retarder la prise en compte des conclusions par les autorités judiciaires nationales sans apparaître nécessaire pour permettre au comité de surveillance de remplir sa fonction spécifique, dès lors qu’il lui incombe non pas de s’opposer à une transmission d’informations aux autorités judiciaires nationales, mais seulement d’opérer un contrôle systémique des pratiques de l’OLAF en la matière.

200

Dès lors, c’est sans commettre d’erreur de droit que le Tribunal a jugé, au point 162 de l’arrêt attaqué, que la transmission du rapport aux autorités judiciaires maltaises avant que le comité de surveillance ne se soit prononcé à ce sujet ne constituait pas une violation d’une règle de droit de l’Union.

201

Deuxièmement, en ce qui concerne le délai écoulé entre la saisine du comité de surveillance et la transmission du rapport aux autorités maltaises, le Tribunal a constaté à juste titre, au point 153 de l’arrêt attaqué, que l’article 11, paragraphe 7, du règlement no 1073/1999 prévoit l’obligation d’informer le comité des cas nécessitant une transmission d’informations aux autorités judiciaires nationales sans fixer le délai dont devrait disposer le comité pour opérer un contrôle avant cette transmission.

202

Si l’arrangement de travail prévoit certes que les documents devant être remis au comité de surveillance dans ce cadre doivent « en règle générale » lui être communiqués cinq jours ouvrables avant la transmission d’informations aux autorités judiciaires nationales, il ressort des termes mêmes de cet arrangement, ainsi que l’a relevé le Tribunal à ce point, que ce délai est indicatif et que l’OLAF peut, dès lors, s’en écarter.

203

Étant donné que, au regard de la fonction spécifique du comité de surveillance, il n’est, en tout état de cause, pas nécessaire que celui-ci se prononce avant cette transmission, l’OLAF doit se voir reconnaître une large marge d’appréciation pour déterminer la date à laquelle il transmet ces informations aux autorités judiciaires nationales. Il peut, dès lors, décider de procéder à une telle transmission avant l’expiration du délai visé dans l’arrangement de travail sans que le président du comité de surveillance donne préalablement son accord à cet égard.

204

Dans ces conditions, il ne saurait être considéré que le Tribunal a commis une erreur de qualification juridique des faits en jugeant que, eu égard à l’importance et au caractère sensible de l’enquête ainsi qu’au fait que M. Dalli avait déjà démissionné de ses fonctions de commissaire, l’OLAF pouvait, sans outrepasser manifestement la marge d’appréciation dont il dispose, estimer opportun de transmettre son rapport aux autorités maltaises dès le 19 octobre 2012, alors que le comité de surveillance n’avait eu accès au dossier complet que la veille.

205

Troisièmement, l’allégation de M. Dalli relative à une dénaturation du dossier au motif que, contrairement à ce que relève le Tribunal au point 160 de l’arrêt attaqué, le président du comité de surveillance n’aurait pas accepté la transmission du rapport de l’OLAF aux autorités judiciaires maltaises avant l’expiration d’un délai de cinq jours doit être écartée comme étant inopérante, dans la mesure où il découle du point 203 du présent arrêt que, à supposer même que le Tribunal ait considéré à tort que le président du comité de surveillance avait approuvé la nécessité d’une transmission rapide du rapport aux autorités maltaises, cette erreur ne serait pas de nature à remettre en cause l’appréciation figurant au point 164 de l’arrêt attaqué selon laquelle cette transmission avait pu être opérée par l’OLAF sans méconnaître les règles applicables de droit de l’Union.

206

Par conséquent, le cinquième moyen doit être rejeté comme étant, pour partie, inopérant et, pour partie, non fondé.

Sur le sixième moyen, relatif à la présomption d’innocence

Sur la seconde branche du sixième moyen

– Argumentation des parties

207

Par la seconde branche du sixième moyen, qu’il convient d’examiner en premier lieu, M. Dalli fait valoir que les motifs du Tribunal relatifs à l’appréciation des déclarations du directeur de l’OLAF lors d’une conférence de presse sont contradictoires, en tant que le Tribunal a constaté, au point 176 de l’arrêt attaqué, d’une part, que le directeur de l’OLAF avait affirmé que M. Dalli n’avait pas réagi aux agissements en cause dont il avait connaissance et, d’autre part, que les déclarations du directeur de l’OLAF ne reflétaient pas la culpabilité du requérant.

208

En outre, le Tribunal aurait omis un certain nombre d’éléments de preuve en ne tenant pas compte d’une série d’allégations négatives formulées par le directeur de l’OLAF lors de sa conférence de presse.

209

La Commission estime que la seconde branche du sixième moyen n’est pas fondée.

– Appréciation de la Cour

210

Au point 176 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a, d’une part, relevé que les constatations factuelles énoncées par le directeur de l’OLAF portaient notamment sur « la connaissance [que M. Dalli] aurait eu des agissements en cause et de l’absence de réaction de sa part à cet égard ». Il a, d’autre part, estimé qu’« il ne saurait être considéré que ces constatations sont évoquées d’une manière visant à refléter une culpabilité du requérant ou à inciter le public à croire en sa culpabilité ».

211

Le Tribunal a ainsi décrit à ce point les éléments de fait dont le directeur de l’OLAF a fait état lors de la conférence de presse du 17 octobre 2012, avant de porter une appréciation sur la manière dont le directeur de l’OLAF a présenté ces éléments. À ce même point 176, le Tribunal a d’ailleurs développé cette seconde idée en décrivant les précautions employées par le directeur de l’OLAF aux fins d’éviter que ses propos ne puissent être interprétés comme une déclaration de culpabilité de M. Dalli.

212

Par conséquent, l’allégation selon laquelle ce point de l’arrêt attaqué serait entaché d’une contradiction de motifs doit être écartée comme étant non fondée.

213

Quant à l’argument tiré d’une omission de certains éléments de preuve, il convient de relever que, par celui-ci, M. Dalli soutient que le Tribunal a non pas ignoré des éléments de preuve, mais dénaturé l’un de ces éléments effectivement apprécié par le Tribunal, à savoir la transcription de la conférence de presse du directeur de l’OLAF du 17 octobre 2012. La seconde branche du sixième moyen est d’ailleurs présentée sous le titre « Dénaturation des éléments de preuve ».

214

À cet égard, il résulte certes de cette transcription que le directeur de l’OLAF a, au cours de cette conférence de presse, présenté de façon critique le comportement de M. Dalli en tant que membre de la Commission et a laissé entendre que celui-ci pouvait être lié à certaines activités frauduleuses.

215

Toutefois, il ne ressort pas de ladite transcription que le directeur de l’OLAF a clairement affirmé que M. Dalli avait commis des infractions pénales.

216

Dans ces conditions, si la transcription de la conférence de presse en cause peut légitimement être interprétée de différentes façons, il ne saurait être considéré que le Tribunal a dénaturé cette transcription en outrepassant manifestement les limites d’une appréciation raisonnable de ce document.

217

Par conséquent, il y a lieu de rejeter la seconde branche du sixième moyen comme étant non fondée.

Sur la première branche du sixième moyen

– Argumentation des parties

218

Par la première branche du sixième moyen, M. Dalli soutient que le Tribunal a commis des erreurs de droit quant à la portée du principe de la présomption d’innocence.

219

En premier lieu, le Tribunal se serait mépris quant aux critères permettant d’assurer un équilibre entre ce principe et la liberté d’expression en se référant, au point 175 de l’arrêt attaqué, au droit de l’OLAF d’informer le public le plus précisément possible alors qu’un tel droit n’aurait pas été consacré par la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme (ci-après la « Cour EDH »).

220

En deuxième lieu, le Tribunal aurait jugé à tort que la circonstance que certains éléments exprimés lors de la conférence de presse organisée par l’OLAF figuraient déjà dans des communiqués de presse publiés antérieurement par M. Dalli ou par la Commission était de nature à justifier certaines atteintes à la présomption d’innocence ou au principe de confidentialité découlant de l’article 339 TFUE. En outre, le Tribunal n’aurait pu estimer, au point 177 de l’arrêt attaqué, que le communiqué de presse publié par M. Dalli portait sur les conclusions de l’OLAF, dès lors que ce communiqué était antérieur à la publication du rapport de l’OLAF.

221

En troisième lieu, le Tribunal aurait également commis une erreur de droit en reconnaissant une pertinence, au point 179 de l’arrêt attaqué, au fait que le communiqué de presse publié par l’OLAF ultérieurement aurait eu pour objet de corriger des informations incorrectes diffusées par les médias.

222

La Commission conclut au rejet de la première branche du sixième moyen comme étant, pour partie, irrecevable et, pour partie, non fondée.

– Appréciation de la Cour

223

S’agissant, premièrement, des critères énoncés par le Tribunal en vue d’assurer un équilibre entre la présomption d’innocence et la liberté d’expression, il convient de rappeler que la présomption d’innocence est consacrée à l’article 48 de la Charte, qui correspond à l’article 6, paragraphes 2 et 3, de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, signée à Rome le 4 novembre 1950 (ci-après la « CEDH »), ainsi qu’il ressort des explications relatives à la Charte. Il s’ensuit que, conformément à l’article 52, paragraphe 3, de la Charte, il convient de prendre en considération l’article 6, paragraphes 2 et 3, de la CEDH aux fins de l’interprétation de l’article 48 de la Charte, en tant que seuil de protection minimale [arrêt du 5 septembre 2019, AH e.a. (Présomption d’innocence), C‑377/18, EU:C:2019:670, point 41 ainsi que jurisprudence citée].

224

Ainsi que l’a relevé, en substance, le Tribunal au point 173 de l’arrêt attaqué, il découle de la jurisprudence de la Cour EDH, d’une part, que la présomption d’innocence est méconnue si une décision judiciaire ou une déclaration officielle concernant un prévenu reflète le sentiment qu’il est coupable, alors que sa culpabilité n’a pas été préalablement établie dans le respect de la loi, et, d’autre part, que, si les autorités peuvent renseigner le public sur les enquêtes pénales en cours, elles doivent le faire avec toute la discrétion et toute la réserve que commande le respect de la présomption d’innocence (voir, en ce sens, Cour EDH, 22 mai 2014, Ilgar Mammadov c. Azerbaïdjan, CE:ECHR:2014:0522JUD001517213, § 125 et 126).

225

À cet égard, il y a certes lieu de constater que, comme l’a fait valoir M. Dalli, cette jurisprudence n’a pas reconnu aux autorités publiques la faculté d’informer le public, le plus précisément possible, des actions mises en œuvre dans un contexte d’éventuels dysfonctionnements ou de fraudes.

226

Cependant, au point 175 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a jugé non pas que l’OLAF bénéficiait de cette faculté, mais que, dans la recherche d’un juste équilibre entre les intérêts en présence, il convenait de tenir compte du fait que l’OLAF avait un intérêt à assurer une telle information du public.

227

En outre, à ce point 175, lors de son appréciation des propos tenus par le directeur de l’OLAF lors de la conférence de presse du 17 octobre 2012, le Tribunal a également précisé que ceux-ci étaient mesurés et que le directeur de l’OLAF avait fait preuve de la réserve nécessaire. Le Tribunal a ainsi fait application des critères découlant de la jurisprudence de la Cour EDH mentionnée au point 224 du présent arrêt.

228

Par conséquent, le Tribunal n’a pas commis d’erreur de droit au point 175 de l’arrêt attaqué quant aux critères devant être appliqués en vue d’examiner si l’OLAF avait porté atteinte au principe de la présomption d’innocence.

229

Deuxièmement, les autres arguments présentés par M. Dalli à l’appui de la première branche du sixième moyen doivent être écartés comme étant inopérants, en application de la jurisprudence de la Cour mentionnée au point 103 du présent arrêt, en tant qu’ils visent des motifs retenus par le Tribunal à titre surabondant.

230

En effet, il résulte de ce qui précède, d’une part, que le rejet du grief présenté en première instance tiré d’une violation de la présomption d’innocence est notamment fondé sur le motif selon lequel le directeur de l’OLAF a fait preuve de la réserve nécessaire dans la présentation des conclusions de l’OLAF et, d’autre part, que les éléments énoncés au point 176 de l’arrêt attaqué, qui fondent ce motif, ne sont pas valablement contestés par M. Dalli.

231

Partant, dès lors que ledit motif est suffisant pour établir, conformément à la jurisprudence mentionnée aux points 223 et 224 du présent arrêt, que les déclarations du directeur de l’OLAF n’avaient pas méconnu l’article 48 de la Charte, les motifs supplémentaires retenus par le Tribunal aux points 175 et 177 de l’arrêt attaqué, tenant en substance à ce que certains éléments d’information avaient déjà été diffusés par la Commission ou par M. Dalli, ne sont pas nécessaires pour justifier l’appréciation portée par le Tribunal au point 178 de l’arrêt attaqué.

232

Troisièmement, l’argument selon lequel le Tribunal aurait commis une erreur de droit au point 179 de l’arrêt attaqué doit également être rejeté comme étant inopérant.

233

Il ressort ainsi du point 180 de l’arrêt attaqué que le Tribunal a considéré, au regard du contenu du communiqué de presse du 19 octobre 2012, que, par ce communiqué, l’OLAF avait légitimement informé le public avec toute la discrétion et toute la réserve requise.

234

Ce motif étant suffisant pour établir, conformément à la jurisprudence mentionnée aux points 223 et 224 du présent arrêt, que l’OLAF avait respecté la présomption d’innocence en émettant ledit communiqué, et ne faisant l’objet d’aucune contestation dans le présent pourvoi, il y a lieu de considérer les autres arguments avancés par le Tribunal à ce sujet comme étant surabondants.

235

Par conséquent, la première branche du sixième moyen doit être écartée comme étant, pour partie, inopérante et, pour partie, non fondée. Il s’ensuit que le sixième moyen doit être rejeté dans son ensemble.

Sur le septième moyen, relatif à l’appréciation du préjudice moral

Argumentation des parties

236

Par le septième moyen, M. Dalli fait valoir que le Tribunal a, au point 225 de l’arrêt attaqué, commis une erreur de droit et dénaturé la requête en première instance en considérant qu’il n’avait pas établi que le comportement de la Commission ou de l’OLAF incriminé était, par sa gravité, de nature à lui causer un dommage.

237

La Commission conclut au rejet du septième moyen comme étant inopérant ou, à titre subsidiaire, non fondé.

Appréciation de la Cour

238

Il ressort explicitement du point 218 de l’arrêt attaqué que le préjudice allégué et le lien de causalité ont été examinés à titre surabondant par le Tribunal, celui-ci ayant estimé, au point 217 de cet arrêt, que M. Dalli n’avait pas démontré l’existence d’un comportement illégal de l’OLAF ou de la Commission.

239

Dès lors que les premier à sixième moyens du présent pourvoi ont été rejetés, il y a lieu de considérer que le constat opéré par le Tribunal au point 217 dudit arrêt n’est pas utilement contesté par M. Dalli.

240

En outre, il résulte de la jurisprudence de la Cour mentionnée au point 42 du présent arrêt que, lorsqu’il n’est pas établi qu’un comportement illégal peut être reproché à une institution de l’Union, le recours en réparation doit être rejeté dans son ensemble sans qu’il soit nécessaire d’examiner la réalité du dommage ou l’existence d’un lien de causalité entre le comportement de cette institution et le préjudice invoqué.

241

Il s’ensuit que le septième moyen doit être rejeté comme étant inopérant, en application de la jurisprudence de la Cour mentionnée au point 103 du présent arrêt, en tant qu’il vise des motifs retenus par le Tribunal à titre surabondant.

242

Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, le pourvoi doit être rejeté dans son ensemble.

Sur les dépens

243

En vertu de l’article 184, paragraphe 2, du règlement de procédure de la Cour, lorsque le pourvoi n’est pas fondé, la Cour statue sur les dépens.

244

Aux termes de l’article 138, paragraphe 1, de ce règlement, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 184, paragraphe 1, de celui‑ci, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

245

La Commission ayant conclu à la condamnation de M. Dalli et celui‑ci ayant succombé en ses moyens, il y a lieu de le condamner à supporter, outre ses propres dépens, ceux exposés par la Commission.

 

Par ces motifs, la Cour (première chambre) déclare et arrête :

 

1)

Le pourvoi est rejeté.

 

2)

M. John Dalli est condamné à supporter, outre ses propres dépens, ceux exposés par la Commission européenne.

 

Signatures


( *1 ) Langue de procédure : l’anglais.